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1 Le lundi, 25 septembre 2000
2 (L'audience est ouverte à 9 heures 40.)
3 (Questions relatives à la procédure – Huis clos partiel.)
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23 (Audience publique.)
24 (Le témoin, M. Franjo Krizanac, est introduit dans le prétoire.)
25 M. le Président (interprétation): Le témoin peut-il donner lecture de la
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1 déclaration solennelle?
2 M. Krizanac (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
3 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
4 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir, Monsieur le
5 témoin.
6 Vous pouvez procéder, Monsieur Naumovski.
7 (Interrogatoire principal de M. Franjo Krizanac par Me Naumovski.)
8 M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
9 Bonjour Monsieur Krizanac. D'abord, à titre préliminaire, je vous prie de
10 procéder comme suit: je crois que vous comprenez bien la langue que
11 j'emprunte, mais je vous prierai de toujours ménager une courte pause que
12 l'on puisse faciliter le travail des traducteurs.
13 Monsieur Krizanac, dites-nous d'abord votre identité: nom, prénom, date et
14 lieu de naissance?
15 M. Krizanac (interprétation): Je suis Franjo Krizanac, fils de Andrija, né
16 13 novembre 1935.
17 M. Naumovski (interprétation): Merci.
18 Nous pouvons tout de suite accuser une faute dans le résumé de votre
19 déposition où l'on vous a rajeuni un petit peu. On a dit que vous êtes né
20 en 1945, donc une erreur de frappe.
21 Réponse: Merci, Monsieur.
22 Question: Le 30 juin 2000, vous avez signé une déposition sous serment
23 devant le Tribunal de Vitez, n'est-ce pas?
24 Réponse: Oui, c'est bien cela.
25 Mme Somers (interprétation): Excusez-nous de vous interrompre, il y a une
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1 certaine confusion. Ici, de notre notre côté, nous avions pensé que ceci
2 était un contre-interrogatoire sur une déclaration sous serment déjà
3 communiquée. Alors, est-ce la procédure qui va être suivie? Est-ce qu'il
4 nous faudra, nous, ramener des témoins en vertu de cette procédure?
5 M. le Président (interprétation): Je crois comprendre que l'on est en
6 train de présenter le témoin. Est-ce bien exact, Maître Naumoski? Vous
7 êtes en train de présenter le témoin et nous avons sa déclaration sous
8 serment.
9 M. Naumoski (interprétation): C'est absolument exact, Monsieur le
10 Président. Je vais terminer peut-être dans quelques minutes. Je veux dire
11 que le témoin ne se propose pas de faire maintenant une répétition de sa
12 déposition; on n'en a guère besoin. Donc, revenons là où nous nous sommes
13 arrêtés. Vous avez signé donc cette déposition faite sous serment, n'est-
14 ce pas?
15 Réponse: Oui.
16 Question: A lire attentivement et avec précision cette déposition, nous
17 avons remarqué quelques erreurs. D'abord celle concernant la date de votre
18 naissance, mais on y a déjà remédié, n'est-ce pas? Nous l'avons rectifiée.
19 Réponse: Oui, c'est bien cela.
20 Question: Mais lorsque vous l'avez étudié encore une fois, vous avez
21 remarqué une erreur dans le point numéro 11 du résumé de la déposition où
22 l'on parle de la présence de 40 à 50 personnes dans l'école élémentaire de
23 Pojske. Dans le texte anglais, c'est à la quatrième ligne, point 11. Dans
24 l'essence même, tout ce qui a été dit sur l'école élémentaire de la
25 localité de Pojske est le fait dont devrait témoigner ce témoin
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1 aujourd'hui. Et il ne s'agit pas de la localité de Ovnak.
2 Outre cette erreur technique, celle que nous vous venons de remarquer et
3 de rectifier, cette déclaration faite sous serment, dans l'essence même,
4 contient-elle tout ce dont vous vous souvenez autant que votre mémoire
5 vous le permet?
6 Réponse: Oui, bien sûr, mais il y a d'autres faits également dont j'ai
7 eu connaissance.
8 Question: Bien sûr, si des questions sont à poser dans le contre-
9 interrogatoire, vous êtes prêt à y répondre?
10 Réponse: Oui, bien sûr.
11 Question: Enfin une dernière question: dans cette déposition, avez-vous
12 parlé de tout ce qui vous a été connu en tant qu'homme qui a ressenti et
13 vécu personnellement tous ces événements?
14 Réponse: C'est très exact. Je suis le témoin oculaire et direct de tous
15 les événements dans cette zone.
16 Question: Merci, Monsieur Krizanac, je n'ai plus de questions. C'est
17 l'accusation qui aura des questions pour vous. Merci, Monsieur le
18 Président.
19 M. le Président (interprétation): Maître Kovacic?
20 M. Kovacic (interprétation): Je n'ai pas de questions, merci.
21 (Contre-interrrogatoire de M. Krizanac par Mme Somers.)
22 Mme Somers (interprétation): Je vais vous demander, Monsieur, si vous êtes
23 toujours membre actif du clergé de l'Eglise catholique. Etes-vous toujours
24 prêtre ou franciscain?
25 Réponse: Je suis prêtre.
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1 Question: Donc, si je m'adresse à vous en disant "Père", êtes-vous
2 d'accord, afin que nous gardions la même attitude et que nous utilisions
3 les mêmes termes pour le dossier d'instance?
4 Réponse: Vous pouvez utiliser mon nom, tout simplement, vous pouvez
5 dire "Père Franjo", vous pouvez utiliser ce que vous voulez.
6 Question: Merci. Etes-vous ici à titre officiel, en tant que
7 représentant de l'Eglise catholique, ou venez-vous en tant que simple
8 individu?
9 Réponse: En individuel, je suis ici pour témoigner.
10 Question: Avez-vous obtenu l'autorisation de l'Eglise catholique, la
11 permission, tout d'abord pour fournir cette déclaration sous serment pour
12 l'accusé Dario Kordic et aussi pour comparaître aujourd'hui à titre de
13 témoin dans ce prétoire?
14 Réponse: Je n'ai eu besoin d'aucune autorisation. En tant que citoyen,
15 d'après la structure de la société qui est la nôtre, je suis tenu de
16 répondre pour tout acte qui serait le mien et d'être responsable de ce que
17 je fais en tant que citoyen.
18 Question: Au moment où cette déclaration sous serment a été recueillie
19 -je pense que ceci s'est passé en juin ou en juillet 2000-, pourriez-vous
20 nous dire qui était le supérieur au niveau provincial à qui vous deviez
21 rendre des comptes en Bosnie?
22 Réponse: A cette époque-là, mon supérieur était le Frère Petar
23 Andelovic. Plus tard, il y aura des changements.
24 Question: Et qui est ce nouveau supérieur?
25 Réponse: Le nouveau est Frère Mijo Dolan.
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1 Question: Et où se situe sa base?
2 Réponse: A Sarajevo.
3 Question: Quelques questions de contexte vous concernant. Avez-vous des
4 parents à Vitez qui répondent au nom de Krizanac?
5 Réponse: Oui.
6 Question: Est-ce que vous pourriez décliner leur identité complète et
7 nous préciser dans quel quartier de Vitez ils habitent?
8 Réponse: Moi-même, je suis né à Vitez, c'est-à-dire dans le village de
9 Dubravica où résident encore tous mes cousins de parenté, mon grand-père,
10 mon père, mes frères et autres cousins.
11 Question: Comment s'appellent vos frères?
12 Réponse: Le frère aîné est Ilija, le cadet Slavko, et mes frères sont
13 décédés tous les deux.
14 Question: Est-ce que vous avez des parents qui soient vivants
15 aujourd'hui encore à Vitez ou qui vivaient à Vitez au cours de la période
16 de la guerre allant de 92 à 94?
17 Réponse: J'ai eu des cousins à Vitez avant cette guerre -c'est là où
18 ils habitaient tout le temps, sur les terres de nos ancêtres-, mes frères
19 -dont j'ai fait mention tout à l'heure-, mais il y en a d'autres à Vitez,
20 à part mes frères, qui ont été tués dans ce tumulte de la guerre, qui ont
21 été d'ailleurs les victimes de l'armée de Bosnie-Herzégovine.
22 Question: C'était la question que j'allais vous poser à vous maintenant:
23 est-ce que des parents à vous de Vitez ont été tués au cours du conflit et
24 est-ce que vous pourriez nous donner leurs noms si c'est le cas? Puis je
25 passerai à un autre sujet.
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1 Réponse: Mon frère Jozo a été tué, Jozo Krizanac, dans le village même
2 où il a vécu. Ses deux fils ont été tués aussi, Tomo et Andrija, et dans
3 le village même, après cette attaque qui a été intitulée comme Réveillon
4 de Noël dans le sang en 93, la veille de Noël, beaucoup de gens de ma
5 parenté ont été tués sur le seuil même de leurs maisons respectives. Ils
6 ont été exécutés par les membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine.
7 Question: Et vous parlez de la veille de Noël de quelle année?
8 Réponse: Je parle de l'année 1993.
9 Question: Est-ce que vous pourriez nous donner le nom des villes dans
10 lesquelles ces parents ont vécu? Je vous remercie de le faire. Donnez-nous
11 la liste de ces noms, de ces villages.
12 Réponse: Tous ceux que j'ai mentionnés ont vécu surtout et
13 exclusivement dans le village qui est le mien, celui de Dubravica, près de
14 Vitez.
15 Question: Est-ce que vous connaissiez personnellement l'accusé Dario
16 Kordic?
17 Réponse: Oui, je le connais.
18 Question: Depuis quand le connaissez-vous? Dans quelles circonstances
19 avez-vous fait sa connaissance?
20 Réponse: Eh bien, j'ai entendu, surtout par les médias, parler de son
21 nom car moi, où j'ai du faire l'office, j'étais dans plusieurs localités.
22 Je l'ai connu au début même de ces changements démocratiques intervenus
23 lors de ces campagnes et tribunes publiques où M. Kordic apparaissait pour
24 prendre la parole. Là, je l'ai connu. J'ai eu quelques rencontres avec
25 lui-même dans ces différentes circonstances.
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1 Question: Vous est-il arrivé de le rencontrer, de le voir à l'une
2 quelconque des cérémonies organisées par le HVO, pour autant bien sûr que
3 vous que vous ayez assisté aux cérémonies de prestation de serment pour
4 les nouvelles troupes?
5 Réponse: Personnellement, je n'ai jamais assisté à des cérémonies de
6 prestation de serment dans l'organisation du HVO. J'ai rencontré ce
7 monsieur dans ses campagnes pré-électorales et électorales, soit dans
8 notre office de notre cure ou bien à Nova Bila et c'est tout.
9 Question: Vous souvenez-vous des moments où vous l'avez rencontré?
10 Pourriez-vous nous donner un mois, une année précisant lorsque vous avez
11 rencontré cet homme?
12 Réponse: Je ne peux pas vous dire avec précision la date ou le mois où
13 nous nous sommes rencontrés, mais peut-être nous sommes-nous rencontrés à
14 quatre ou cinq reprises au maximum. Notre dernière rencontre a eu lieu à
15 Nova Bila notamment en 1993. C'était justement la veille de Noël lorsque
16 Bjeli Put, la Route blanche, organisme d'aide humanitaire, devait se
17 rendre à Nova Bila. Moi, j'étais dans l'office même de notre cure où cette
18 aide a été d'ailleurs présentée. C'est là où j'ai rencontré pour la
19 dernière fois M. Kordic.
20 Question: Lorsque vous l'avez rencontré, est-ce que vous vous souvenez
21 de la façon dont il était habillé? Est-ce qu'il portait des vêtements qui
22 vous auraient frappé pour une raison ou pour une autre?
23 Réponse: Eh bien, c'était dans le cadre de ce rassemblement que je l'ai
24 rencontré. Autant que je me souvienne, il était en tenue civile. Mais il
25 s'agit de détails qui m'échappent déjà et dont je ne me souviens pas très
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1 exactement maintenant.
2 Question: Vous souvenez-vous s'il vous est arrivé, lors d'une de ces
3 rencontres, de le voir en uniforme?
4 Réponse: Sur les écrans de télévision.
5 Question: Est-ce que vous connaissez un certain père Stjepan Neimarovic?
6 Réponse: Oui, je le connais.
7 Question: Est-ce que vous avez travaillé avec lui à Guca Gora pendant un
8 certain temps?
9 Réponse: Nous n'avons pas travaillé ensemble parce qu'en fait, c'est
10 lui qui m'a succédé à cette fonction du gardien de Guca Gora en 1991.
11 C'est après moi qu'il est venu comme supérieur du couvent à Guca Gora et
12 moi, je suis passé à la cure de Brajkovici près de Zenica où j'ai été
13 expulsé par l'armée de Bosnie-Herzégovine en 1993.
14 Question: Avez-vous eu des contacts avec le père Stjepan Neimarevic
15 depuis que l'on vous a demandé de fournir une déclaration sous serment
16 dans le cadre de ce procès? Lui avez-vous parlé, que ce soit par téléphone
17 ou directement? Avez-vous communiqué avec lui?
18 Réponse: Non. Pour ce qui est de frère Stjepan Neimarevic, je ne l'ai
19 pas vu depuis 1994 où pour une première fois; j'étais devenu le
20 provincial, le supérieur du monastère de Guca Gora et de lui-même,
21 d'ailleurs.
22 Question: Connaissez-vous l'archevêque Puljic de Sarajevo?
23 Réponse: Bien sûr que je le connais.
24 Question: Au cours des différents conflits qui se sont produits en
25 Bosnie-Herzégovine, est-ce que vous avez suivi l'attitude qu'avait celui
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1 qui était alors cardinal et qui était devenu par la suite archevêque,
2 Puljic, ce qu'il disait à propos de l'intégrité ou de l'unité de la
3 Bosnie-Herzégovine? Etiez-vous au courant de la position qu'il avait
4 adoptée et qui prônait l'intégrité de la Bosnie-Herzégovine?
5 Réponse: Avant de connaître le cardinal Puljic, je suis un peu plus âgé
6 que lui, j'ai connu ses attitudes et j'ai toujours été en faveur d'une
7 Bosnie-Herzégovine intégrale. C'est ainsi que je me suis moi-même déclaré
8 au référendum du peuple croate.
9 Question: Lorsque l'archevêque Puljic, qui était alors cardinal, avait
10 émis des avis qui ont été portés à l'attention des Juges de la présente
11 Chambre de première instance en ce qui concerne les problèmes occasionnés
12 par l'Herceg-Bosna, il est apparent qu'il n'était pas favorable à ce
13 concept, à cette idée de l'Herceg-Bosna. Etiez-vous favorable à ce concept
14 d'une commune croate d'Herceg-Bosna (inaudible)(?) du territoire? Que
15 pensez-vous à ce propos?
16 Réponse: Premièrement, je n'ai jamais fait de politique
17 professionnellement, pour ainsi dire. Je n'ai jamais été membre d'un
18 quelconque parti. J'ai été tout à fait libre de réfléchir à telle ou telle
19 attitude au sujet de telle ou telle question, par conséquent celle de la
20 Bosnie. J'ai toujours eu mon opinion là-dessus. Je vous l'ai dit tout à
21 l'heure. Je considère que l'Herceg-Bosna –c'est une opinion personnelle-
22 était une tentative de protéger le peuple croate et de protéger et
23 défendre ses droits en Bosnie comme étant un peuple à minorité et qui a
24 été le plus menacé.
25 Du fait que cette conception était présentée ainsi, je me suis mis
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1 d'accord avec. Pour ce qui est de la protection et de la défense des
2 droits croates et des territoires croates, c'est-à-dire de ces villages
3 habités par les Croates, il faut les considérer comme étant leurs terres
4 ancestrales, comme leurs biens.
5 Là, il faut dire que ces gens-là ont été menacés et déjà en 1992 en Bosnie
6 centrale où j'ai fait l'office, j'ai pu rencontrer de nombreux réfugiés,
7 tant des Croates que des Musulmans, encore plus des Musulmans de Bosnie
8 occidentale, de Banja Luka, Jajce, Sanski Most, de même que des réfugiés
9 venant de Bosnie de l'est, de Srebrenica, etc., de Svornikfaca (?) et
10 d'autres régions. Par conséquent, il s'agit vraiment d'une importante
11 influence de Musulmans vers cette région.
12 C'est dans cette région qu'on a ressenti une certaine insécurité. Parce
13 que nous les avons tous accueillis, ces réfugiés. Moi-même, agissant à
14 travers l'œuvre de charité Caritas. Nous les avons aidés, Musulmans et
15 autres, sans distinction aucune. Et c'est ainsi que la chose s'est passée
16 au début: il y avait lieu de parler d'une certaine coopération mais, à
17 mesure que le temps passait, il y avait non seulement des réfugiés, mais
18 apparaissaient des gens qui nous étaient inconnus et qui portaient un
19 uniforme. Surtout en cette année 1992, nous avons remarqué...
20 Question: Excusez-moi de vous interrompre.
21 Pour ce qui est de votre attitude concernant l'Herceg-Bosna, d'après ce
22 que j'ai cru comprendre, c'était pour vous une bonne chose, pour les
23 Croates. Est-ce que l'on peut ainsi résumer votre avis?
24 Réponse: Oui. Dans cette partie-là, dans cette région-là, il s'agit
25 certainement de défendre, de protéger les Croates.
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1 Question: Est-ce que vous avez suivi l'attitude qu'adoptait le cardinal
2 Kuharic qui est par la suite devenu archevêque? Est-ce que vous avez
3 entendu ce qu'il disait à l'époque, à savoir qu'il pensait que la Bosnie
4 devait rester une entité intégrale? Est-ce que vous étiez au courant de
5 son avis?
6 Réponse: Oui, je connais bien cette information. Je me souviens bien de
7 certains des titres de textes, encore que nous ayons été tronqués du point
8 de vue des équipements. Quelquefois, il n'y a pas eu de poste de radio,
9 une autre fois il n'y avait pas de courant. Mais d'une manière générale,
10 je me suis mis d'accord quant aux attitudes de l'archevêque Kuharic.
11 Question: Le cardinal Kuharic s'opposait à une division de la Bosnie,
12 n'est-ce pas? Il s'opposait à ce que les peuples soient séparés?
13 Réponse: Autant que je sache, à en juger d'après ses textes, on
14 pourrait dire ainsi.
15 Question: Et en tant qu'ecclésiastique du clergé catholique, est-ce que
16 vous avez suivi la position ou est-ce que vous êtes au courant de la
17 position officielle adoptée par le Vatican concernant la Bosnie? Est-ce
18 que vous saviez?
19 Réponse: En général, oui! En général.
20 Question: Vous saviez que le Vatican était tout à fait favorable à
21 l'idée d'une Bosnie-Herzégovine intégrale et unique?
22 Réponse: Oui. Cela m'était déjà connu. Je crois que j'ai déjà répondu à
23 cette question en ce qui concerne l'attitude qui serait la mienne.
24 Question: Selon vous, quelle est la date à laquelle le conflit croato-
25 musulman a commencé? Donnez-nous une date, un mois, une année. Pouvez-vous
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1 relier cela à un événement particulier, dans la mesure du possible?
2 Réponse: Pour moi, je dirai que c'est le début d'une tragédie pour les
3 deux peuples. Je l'ai toujours considéré ainsi, j'ai considéré cela comme
4 un grand malentendu.
5 M. le Président (interprétation): Père Krizanac, malheureusement, nous
6 n'avons pas beaucoup de temps.
7 M. Krizanac (interprétation): Oui.
8 M. le Président (interprétation): Nous avons très peu de temps, Monsieur
9 le témoin, car ce procès se poursuit depuis plus d'une année, une année et
10 demie même, et nous avons entendu beaucoup de témoins.
11 Pour pouvoir progresser rapidement, pourriez-vous nous aider en vous
12 concentrant uniquement sur les questions qui vous sont posées? Essayez d'y
13 répondre de la façon la plus concise possible.
14 La question qui vous était posée à l'instant était celle-ci: est-ce que
15 vous pouvez, dans la mesure du possible, nous donner une date à laquelle,
16 selon vous, le conflit a commencé? S'il vous est impossible de le faire,
17 dites-le simplement et nous pourrons passer à autre chose.
18 M. Krizanac (interprétation): Oui, d'accord.
19 Pour ce qui est de la cure de Brajkovici où j'ai fait l'office, c'était
20 une localité isolée à bien des égards. Par conséquent, il m'a été rendu
21 impossible de suivre la situation dans sa totalité. Je n'ai pu connaître
22 que quelques incidents. Un tel incident s'est produit dans le village de
23 Miletici le 24 avril 1993, lorsque furent tués cinq civils, massacrés, que
24 j'ai moi-même d'ailleurs enterrés, dont j'ai organisé la sépulture.
25 De temps en temps, par radio, j'ai suivi certains incidents qui se
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1 propageaient çà et là. Mais pour ce qui est de la date exacte du
2 déclenchement de la guerre, je ne peux pas le dire avec exactitude.
3 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
4 Madame Somers?
5 Mme Somers (interprétation): Vous pourriez peut-être nous aider à mieux
6 comprendre certaines dépositions postérieures à celle de votre confrère,
7 le père Neimarevic? Il a confirmé l'authenticité d'un document qui lui
8 avait été soumis et qui confirmait que l'église, ou plutôt le monastère de
9 Guca Gora, contenait des trésors artistiques, lesquels avaient été
10 enlevés, déménagés du monastère en direction de la Croatie en décembre
11 1992 alors que ceci est de loin antérieur, de beaucoup antérieur aux
12 hostilités dont vous venez de faire état. Alors pourriez-vous nous aider à
13 comprendre comment il se fait qu'à cette date assez tardive, tous ces
14 objets avaient été déplacés. Puisque vous étiez le responsable, le gardien
15 à cette époque, pourriez-vous nous aider là-dessus?
16 M. Krizanac (interprétation): Oui. Mais vous savez, la guerre a commencé
17 avant qu'il y ait le conflit entre les deux ethnies, entre Musulmans et
18 Croates de la région. C'est-à-dire que dans les montagnes de Vlasic, les
19 Serbes ont positionné leur artillerie pour pilonner du haut Travnik et le
20 monastère de Guca Gora, la localité. Par conséquent, les jeunes de Guca
21 Gora étaient les premiers à se mettre en ligne de défense du village et de
22 Guca Gora contre les Serbes, l'armée serbe. C'est non loin, à proximité du
23 monastère même. A ce moment-là, nous avons considéré, dans la mesure du
24 possible, la nécessité de déplacer le trésor du monastère étant donné le
25 danger de guerre imminent et direct.
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1 Par conséquent, étant donné cette menace de la part de l'armée serbe qui
2 aurait pu, évidemment, saccager le monastère... Parce que ce monastère a
3 une longue mémoire, de 1943 par exemple, lorsque par des unités serbes
4 principalement, le monastère a souffert.
5 Question: De Krizanac, les Serbes ont déclaré la guerre face aux non
6 Serbes en avril 1992, n'est-ce pas? Alors comment se fait-il, d'après
7 vous, qu'entre avril et décembre, on ait autorisé que ces objets sacrés
8 demeurent là? Alors comment se fait-il que juste avant la fin de l'année
9 1992, on ait pris la décision de les déplacer?
10 Réponse: Il a fallu certainement trouver les moyens et avoir du temps,
11 dans cette Bosnie assez morcelée, pour passer ou organiser le transfert de
12 ces objets sacrés et surtout, avoir des moyens de transport car ce n'était
13 pas l'affaire d'une journée. C'était impossible. Il a fallu un certain
14 temps pour organiser tout cela.
15 Malheureusement, nous n'avons pas pu sauver et déplacer tous les biens que
16 nous avions comme par exemple notre bibliothèque qui, plus tard, lors des
17 conflits entre Musulmans et Croates a été pratiquement pillée. On l'a
18 emportée tout entière au cours de cette dernière année. Enfin au
19 printemps, en été, une partie de la bibliothèque a été restituée, le reste
20 ne l'étant toujours pas.
21 Question: Père Krizanac, avez-vous eu des contacts avec des membres de
22 la mission de vérification de la Communauté européenne, l'ECMM, au cours
23 du temps que vous avez passé à Guca Gora au cours du conflit?
24 Réponse: Nous avons eu des contacts.
25 Question: Vous souvenez-vous d'un certain vérificateur qui s'appelait
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1 Morsink? Vous souvenez-vous de lui?
2 Réponse: Je ne me souviens pas de son nom, mais j'ai eu plusieurs
3 contacts. D'ailleurs, j'ai rencontré plusieurs personnes de cette
4 organisation.
5 Question: Avez-vous eu de bons rapports avec ces vérificateurs?
6 Réponse: Autant que je sache, oui.
7 Question: Aviez-vous le sentiment que c'étaient des personnes honnêtes,
8 fiables?
9 Réponse: Oui. Quant à moi, j'ai toujours voulu des informations justes,
10 vraies. Autant que cela m'a été possible.
11 Question: Avez-vous pensé qu'eux étaient des hommes honnêtes? Aviez-vous
12 confiance en ces vérificateurs?
13 Réponse: Mais c'est justement pour cette raison que j'ai toujours voulu
14 être à leur pleine disposition pour leur donner des informations parce que
15 je considérais qu'ils auraient pu être de quelque utilité. J'ai eu donc
16 confiance en eux.
17 Question: Je voudrais vous poser une question à propos d'une commission.
18 Il s'agirait de la pièce Z1139.3. C'est un document en anglais, il faudra
19 sans doute le poser sur le rétroprojecteur. C'est un petit point qui
20 m'intéresse seulement dans ce document. Est-ce que vous lisez l'anglais?
21 Est-ce que vous connaissez l'anglais dans une certaine mesure?
22 Réponse: Non, pas trop. Très peu.
23 Question: Ce document a été préparé par un vérificateur et un officier
24 de terrain de la Commission des Droits de l'Homme, le 6 juillet 93. Ceci a
25 été rédigé à Zagreb. On y fait référence, dans le paragraphe qui précède
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1 le dernier, donc à l'avant-dernier paragraphe, à certains témoins d'un
2 meurtre. On parle de Franjo Krizanac. C'est donc vous, n'est-ce pas, à
3 moins bien sûr qu'il n'y ait un autre prêtre ou franciscain?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Et on parle de la mort de Vlado Markovic, des frères
6 Vidosevic. C'est la dernière phrase qui m'intéresse: "Ils -les témoins-
7 ont dit qu'ils étaient en mesure de reconnaître un des soldats musulmans,
8 mais ne tenaient pas à révéler son nom". Pourquoi ne vouliez-vous pas
9 révéler le nom d'un meurtrier?
10 Réponse: Non, je n'ai pas assisté, je n'ai pas été présent à ce
11 meurtre. Plus tard, j'ai vu justement que sur le lieu même où les gens ont
12 été massacrés, Ovnak, nous avons découvert quelqu'un qui était témoin
13 direct du massacre et il a travaillé chez Vlado Markovic en 1992. Lorsque
14 nous avons été expulsés, c'est de Brajkovici, escortés par les membres
15 d'une armée en voiture jusqu'à Ovnak qui se trouve à un kilomètre et demi
16 près de l'église, nous avons reconnu un jeune homme, un Musulman, qui
17 était surnommé Osman.
18 Une fois que nous étions sortis de nos voitures pour emprunter d'autres
19 voitures en direction de Zenica, Frère Pero Karajica est sorti pour lui
20 adresser la parole en lui disant: "Osman". L'autre a été heureux de le
21 voir et il voulait le joindre, mais il a été tout de suite expulsé de là-
22 bas. Mais le lendemain, à Zenica, il était venu dans mon office, à ma
23 cure, à Zenica, pour me dire: "Je vous remercie parce que vous m'avez
24 sauvé la vie". Or, moi, je lui ai répondu sèchement: "Comment? Comment
25 voulez-vous que je vous sauve la vie?" Alors lui, de son côté, il a dit
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1 que l'on avait déjà à Ovnak tué quatre ou cinq personnes que j'ai moi-même
2 enterrées. Il a dit: "Lorsque vous avez mentionné le nom de Osman, donc un
3 nom musulman, on s'est rendu compte que j'étais musulman, ce que je disais
4 toujours, mais on ne m'a jamais cru étant donné que j'étais dans une
5 maison croate, chez Vlado Markovic".
6 Par conséquent, ce témoin direct existe encore toujours. Je crois qu'il
7 habite Zenica, en tout cas la région de Zenica.
8 Question: Avez-vous fourni son identité à l'ECMM et à la Commission des
9 Droits de l'Homme?
10 Réponse: Non. A cette époque-là, je ne savais pas son nom exact. Je
11 pense que c'était son surnom, le surnom de Osman. Plus tard, j'ai entendu
12 dire qu'il s'appelait Probic ou Pobric, mais je crois qu'il n'y a pas de
13 difficulté pour qu'on le trouve à Zenica.
14 Question: Père, au moment où des gens vous posaient des questions, vous
15 n'avez pas fourni ce nom, n'est-ce pas?
16 Réponse: Non, je ne l'ai pas fourni parce que je ne le connaissais pas.
17 Je ne pouvais parler que de son surnom.
18 Question: Est-ce que vous avez essayé de décrire l'endroit où il était
19 susceptible de se trouver même si vous n'aviez pas connaissance de son
20 identité complète?
21 Réponse: Personne ne me l'a jamais demandé, je ne me souviens pas avoir
22 été questionné là-dessus.
23 Question: Est-ce que vous avez offert cette information de votre propre
24 initiative, parce qu'après tout, il s'agissait d'un meurtre?
25 Réponse: Voyez-vous, tous les rapports, toutes les informations de
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1 Zenica quant au massacre allaient par le canal de la Croix-Rouge. Tout
2 cela était évidemment disponible. Nous avons donné toutes les informations
3 que nous avons obtenues, mais je ne me souviens pas avoir vu quelqu'un qui
4 serait venu pour me demander d'identifier cette personne.
5 Question: Est-ce que vous êtes en train de nous dire que la Croix-Rouge
6 aurait dû fournir cette information? Est-ce bien ce que vous êtes en train
7 de nous dire?
8 Réponse: Je ne sais pas qui devrait fournir cette information.
9 Question: Est-ce que vous avez éprouvé une certaine réticence à l'idée
10 d'être prié de venir déposer ici pour défendre Dario Kordic?
11 Réponse: Non, je n'ai pas de préjugés quant à moi. Cela coïncide
12 absolument avec l'idée de la vie qui est la mienne, c'est-à-dire que
13 chacun est censé contribuer à la recherche de la vérité, d'une pleine
14 connaissance des événements. Mais pour ce qui est évidemment d'une
15 attitude que l'on peut avoir à l'égard de tel ou tel particulier,
16 évidemment c'est aux responsables, aux autorités, d'en juger.
17 Question: Monsieur l'huissier pourrait-il présenter au témoin la pièce
18 Z1196.1? Nous avons ici un document en croate dont une seule page a été
19 traduite afin d'apporter confirmation de l'identité du témoin. Je vais
20 vous demander d'examiner le document, Messieurs les Juges, sous cet angle.
21 En effet, nous n'avons pas pu obtenir la traduction complète du document.
22 (Les Juges prennent connaissance du document.)
23 Excusez-nous de la mauvaise qualité de la copie, Monsieur le témoin. Il
24 s'agit d'un document, Père Krizanac, qui porte la date du 8 septembre 93.
25 On voit que ce sont des notes. Je vous demande confirmation de ceci. Dans
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1 la partie appelée "zapisnik" en croate, pour laquelle on a dit "constat"
2 en français, on voit que votre nom figure en deuxième place comme membre
3 d'une commission chargée d'examiner les villages détruits pendant la
4 guerre et de voir s'il y a eu d'autres dégâts provoqués par la guerre.
5 Est-ce bien vous, ce Franjo Krizanac que l'on voit ici?
6 Réponse: Oui, c'est bien moi. Il s'agit bien de mon nom et j'ai
7 travaillé là-dessus de concert avec les personnes mentionnées, s'il s'agit
8 bien de ce "zapisnik-là", de ce compte rendu, alors là on peut voir un peu
9 plus tard.
10 Question: Nous avons un problème de traduction, je vais vous demander
11 d'examiner la deuxième page qui n'existe qu'en croate. Mais là, on voit
12 figurer des noms. Certains de ceux-ci confirment ou portent sur des
13 personnes tuées que l'on a vues dans l'autre document: Markovic, les
14 frères Vidosevic. Pourriez-vous nous expliquer ceci: est-ce que vous
15 faisiez partie de cette commission afin de contribuer à l'évaluation des
16 pertes et des dégâts causés? A quoi devait servir cette commission au
17 départ?
18 Réponse: Eh bien, cette commission a eu pour fins, escortée par la
19 police, de se rendre dans les localités, les villages de cette paroisse
20 qui était la mienne. C'est en cette qualité que j'ai été désigné membre de
21 la commission, parce que je connaissais bien les villages, pour
22 reconnaître éventuellement les personnes tuées et les personnes disparues,
23 pour bien faire état des maisons incendiées, etc. C'est en cette qualité-
24 là que j'ai pris part aux travaux de cette commission.
25 Question: Même si la commission parlait du fait de nommer ou de préciser
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1 les pertes, il y a cette question du fait de nommer les auteurs. Est-ce
2 que, vous, le fait que vous ayez été témoin de ce meurtre vous a quelque
3 peu inquiété? Vous avez pensé qu'il n'était pas heureux que vous
4 fournissiez ce type d'information, mais que vous pouviez parfaitement
5 faire partie de cette commission?
6 M. le Président (interprétation): Je pense qu'il s'agit d'un commentaire.
7 Mme Somers (interprétation): J'aimerais votre avis professionnel, vous qui
8 êtes membre du clergé catholique, quant à l'utilisation de symboles
9 religieux dans des campagnes politiques et militaires, mais surtout au
10 cours de campagnes politiques.
11 M. Krizenac (interprétation): Vous parlez de symboles religieux?
12 Question: Oui, tout à fait. Parlons plus précisément de la pièce
13 Z111.15.2. On va vous montrer ce document et je me demandais si vous
14 pouviez nous parler davantage de l'utilisation de symboles religieux et de
15 ce que vous en pensiez?
16 (Les documents sont distribués par l'huissier aux avocats et aux Juges.)
17 Ce document porte la date du 26 juin 1993. Il s'agit d'une lettre envoyée
18 au commandement de l'armée de Bosnie-Herzégovine. C'est signé de trois
19 personnes, dont le colonel Dario Kordic qui signe en tant que vice-
20 président de la communauté croate d'Herceg-Bosna; le second signataire
21 étant Tihomir Blaskic qui était à ce moment-là colonel, commandant de la
22 zone, et le troisième signataire étant Injac Kostroman, secrétaire général
23 de la communauté croate d'Herceg-Bosna.
24 On fait référence en anglais. Messieurs les Juges, il s'agit de la
25 dernière page, on dit ceci: "Nous aimerions que vous, général Morillon,
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1 soyez notre ambassadeur pour le monde, vous qui êtes un excellent expert
2 de la situation qui prévaut en Bosnie-Herzégovine et du terrible calvaire
3 enduré par le peuple croate".
4 Pourquoi parle-t-on ici du calvaire enduré par le peuple croate? Comment
5 vous, voyez-vous les choses? Que pensez-vous de l'utilisation que l'on
6 fait ici de tels symboles religieux dans une communication faite au
7 général Morillon?
8 Réponse: C'est la première fois que j'ai sous mes yeux ce document. Je
9 ne l'ai jamais vu avant. Mais d'une manière générale, pour parler de
10 vocabulaire, le terme de calvaire, on le connaît bien. Ce chemin de croix
11 de Jésus et tout ce qui est souffrance ont toujours été désignés sous ces
12 termes-là. Pour parler de cette région même de Bosnie centrale se trouve
13 un site, un haut lieu du monde de la religion où l'on fait des processions
14 pour le Vendredi Saint. Il s'agit de localité de Carvarija. On suppose que
15 Carvarija était le lieu où Jésus a été crucifié. Et c'est dans cet ordre
16 d'idée que ce terme de calvaire de passion de Jésus a pu être utilisé pour
17 d'autres humains. D'autres, qui ne sont pas de la même religieux,
18 empruntent souvent cette désignation, cette expression.
19 Mme Somers (interprétation): Je vois que l'on ne parle pas du tout du
20 calvaire du peuple musulman.
21 M. le Président (interprétation): Je pense qu'ici, ce sont un peu des
22 arguties. Ces arguments ne vont pas nous aider sur ce point. Madame
23 Somers, vous savez que nous avons beaucoup de témoins à entendre. Pensez-
24 vous que votre contre-interrogatoire va durer encore longtemps?
25 Mme Somers (interprétation): Je préférerais ne pas passer trop de temps à
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1 l'examen de documents. Je voulais, au lieu de vous présenter un volume
2 trop considérable, scinder tout ceci. Il y a par exemple un transcript
3 précédent dont seulement quelques extraits sont intéressants pour ce
4 témoin. Cela semble impressionnant quand on voit tout ce volume, mais nous
5 n'allons pas l'utiliser dans sa totalité. Je voudrais passer à l'examen de
6 ces documents car ils me semblent importants, mais je ne voulais pas que
7 vous soyez effrayé par la taille de ce document car nous n'allons pas
8 l'examiner dans sa totalité.
9 M. le Président (interprétation): Nous allons voir. Fait-on état de ce
10 témoin?
11 Mme Somers (interprétation): On parle de l'Eglise et de la position
12 adoptée par celle-ci. On parle de choses qui se sont passées, qui
13 concernent Mate Boban. Si vous avez le sentiment qu'il est préférable de
14 soumettre ces documents par le truchement d'un autre témoin, je le ferai,
15 mais je voulais essayer avec celui-ci.
16 M. Bennouna : Il s'agit d'un affidavit que nous avons et qui relate un
17 certain nombre de faits très précis. Je crois quand même que, pour
18 respecter le Règlement de procédure et de preuve, vous devriez vous
19 limiter aux éléments qui sont dans l'interrogatoire principal, dans
20 l'affidavit. C'est tout! La position, les termes généraux tels que le
21 calvaire sont utilisés par tout le monde aujourd'hui, ce n'est pas propre
22 à X ou à Y. Il ne faut pas s'attarder sur ces arguties, effectivement, et
23 je crois que ce n'est pas le moment de faire également toute une série
24 d'éléments sur l'église en général. Ce n'est pas le propos, à mon sens. Je
25 parle en ce qui me concerne.
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1 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Juge. L'une des questions
2 était que c'était une déclaration sous serment concernant le père
3 Neimarevic et cela était ici dans le résumé. Si c'était réellement la
4 position du Père Neimarevic, nous essaierons d'explorer cela. C'est bien
5 pour cette raison-là que j'ai posé la question. Si les Juges souhaitaient
6 qu'on attende, très bien! Cela étant dit, ce sont des documents importants
7 et nous n'avons pas eu accès à ces documents auparavant. Je peux très bien
8 ne pas le faire, mais je voudrais bien pouvoir le faire, par un autre
9 truchement, à un autre moment.
10 M. le Président (interprétation): Je pense que le bon moment pour le faire
11 pourrait être plus tard, peut-être à la fin des témoins relatifs à
12 l'église.
13 Mais cela étant dit, nous avons peu de temps et comme mon collègue le Juge
14 vient de le dire, il faudrait se restreindre à ce qui se trouve dans la
15 déclaration sous serment.
16 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
17 Monsieur, étant donné qu'il y a deux accusés ici, connaissez-vous Mario
18 Cerkez? Répondez par oui ou par non.
19 M. Krizanac (interprétation): Je connais son nom et son prénom, mais j'ai
20 été absent de la région pendant très longtemps et je ne suis pas sûr de
21 pouvoir le reconnaître en le voyant.
22 Question: Parlons maintenant de vos parents appelés Krizanac qui
23 viennent de la municipalité de Vitez. Savez-vous si Andrija Krizanac a été
24 tué lors d'une attaque à Stari Vitez? Est-ce qu'il a été tué en 1993, le
25 18 juillet ou à peu près à cette date-là?
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1 Réponse: Oui. A l'époque je me trouvais à Zenica et j'ai appris sa mort
2 à Vitez. J'ai appris sa mort qui a eu lieu à Vitez et j'ai entendu par la
3 suite que cela s'était passé pendant des combats à Vitez.
4 Question: Donc, ce que vous voulez dire, c'est que c'était pendant les
5 combats qui ont eu lieu dans l'enclave de Stari Vitez? Pourriez-vous le
6 confirmer?
7 Réponse: Je ne sais pas exactement à quel endroit il a été tué.
8 Question: Est-ce que la date du 18 juillet 1993 vous paraît être à peu
9 près la bonne date?
10 Réponse: Je l'ai entendue plus tard, quelque chose comme six mois ou un
11 an plus tard.
12 Question: Savez-vous s'il est né en 1967 ou à peu près à cette date-là?
13 Réponse Cela pourrait bien être le cas, mais je n'en suis pas sûr.
14 Question Savez-vous s'il a été membre de la police militaire?
15 Réponse Je savais qu'il faisait partie de la police, mais je ne sais
16 pas de quelle police il s'agissait.
17 Question: Est-ce que, parmi vos parents, il y avait un dénommé Tomo
18 Krizanac?
19 Réponse: Oui. C'était mon cousin.
20 Question: Est-ce que ce n'était pas lui qui se trouvait à la tête de
21 l’intelligence des renseignements militaires dans la brigade Viteska?
22 Réponse: Je l’ignore, je sais qu'il faisait partie de l'armée.
23 Question: Un instant, s’il vous plaît.
24 (Mme Somers consulte ses collègues.)
25 Mme Somers (interprétation): Père Krizanac, connaissez-vous les rapports
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1 des observateurs européens où l'on dit que l'incident qui s'était produit
2 à Guca Gora a été… et les rapports étaient beaucoup trop exagérés et que
3 cela concerne aussi l'enquête faite par M. Morsink? En fait, dans ce
4 rapport, on trouve que ce qu'affirmait les Croates, on n'a pas pu le
5 corroborer.
6 Réponse: Je ne connais pas ce rapport et je ne sais pas à quel moment
7 il a été fait. Si vous pensez ici au couvent et aux objets religieux, je
8 ne sais pas à quoi vous pensez exactement. Est-ce que cela concerne le
9 village de Guca Gora ou bien les objets religieux?
10 Question: Il y avait des allégations, des dommages ou des pillages de
11 l'église et aussi les allégations d'une tuerie en masse, est-ce que cela
12 n'a pas été exagéré?
13 Réponse: Je ne connais pas le rapport mais je connais les faits, je
14 sais dans quel état se trouvaient ces objets et je connais les crimes qui
15 ont eu lieu dans la région. Je sais dans quel état se trouvait le village.
16 Si vous voulez que je vous donne ces renseignements, je peux vous les
17 donner.
18 Question: Non merci.
19 Ma dernière question, déclaration sous serment, contient beaucoup de
20 descriptions d’incidents relatifs aux atrocités ou atrocités alléguées
21 contre le peuple croate. Comment avez-vous réagi aux incidents d'Ahmici et
22 d'autres villages musulmans qui ont eu lieu entre le 16 et le 20 avril
23 1993?
24 Qu’avez-vous fait, vous, personnellement en réaction à ces atrocités
25 commises?
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1 Réponse: Mes réactions ont été exactement les mêmes qu'envers les
2 atrocités commises contre le peuple croate. J'ai réagi de la même façon
3 quand j'entends parler des atrocités envers le peuple musulman. Je ne sais
4 pas ce que j’ai pu faire là où je me trouvais, j'étais bien disposé à
5 aider tout le monde: j'ai donné de l'aide, j'ai distribué de la
6 nourriture, je me suis réellement mis à la disposition. Tout le monde peut
7 le confirmer, tout le monde à Zenica, les Musulmans aussi qui vivaient là
8 où j'ai vécu moi-même, les endroits tels que Grahovcici, Guca Gora, et
9 aussi à Sarajevo.
10 Question: Vous êtes-vous rendu dans un de ces villages ou à Ahmici pour
11 voir de vos propres yeux?
12 Réponse: Quand j'en ai eu la possibilité en 1994, quand j'ai pris le
13 couvent à Guca Gora, du général Alajic (?), au moment où je suis devenu
14 gardien du couvent, à Guca Gora, j’ai peu aller voir ce qu’il s’était
15 passé à Ahmici ou dans d'autres localités.
16 Pendant cette année, depuis le 8 juin 1993 jusqu'au 11 juillet 1994, j'ai
17 été moi-même personne déplacé à Zenica. Et ce n'était qu'accompagné par la
18 police que j'ai pu me rendre ailleurs, donc juste avec une escorte de
19 police, dans les endroits qui ont été sous contrôle de l'armée de Bosnie-
20 Herzégovine. Je n'ai pas pu aller, par exemple, dans une partie de Zenica
21 et puis à Brajkovici qui est en partie sous la municipalité de Zenica et
22 dans une grande partie sous la municipalité de Travnik. J'ai donc pu aller
23 à Guca Gora et dans la partie ouest de la municipalité de Zenica aussi et
24 j'ai essayé de voir les personnes âgées dont personne ne s'occupait.
25 Question: Est-ce qu'entre le mois d'avril et le mois de juin, vous vous
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1 étiez rendu dans l'un des villages concernés comme Ahmici, Donja
2 Veceriska, Gradjce (?), est-ce que vous avez de quelque façon que ce soit
3 exprimé vos protestations? Répondez par oui ou non, s’il vous plaît.
4 Réponse: Je ne m'y suis pas rendu car je n'ai pas pu le faire à
5 l'époque.
6 Question: Combien de temps avez-vous vécu à Zenica?
7 Réponse: Je l'ai dit, à peu près un an.
8 Question: Avez-vous jamais été expulsé de Zenica, vous-même, en
9 personne?
10 Réponse: Non, je n'ai pas été expulsé de Zenica. Quand j’ai été
11 expulsé, je suis allé à Zenica.
12 Question: Merci.
13 (Questions supplémentaires de M. Krizanac par M. Naumovski.)
14 M. Naumovski (interprétation): Très brièvement, Monsieur le Juge.
15 Monsieur Krizanac, vous avez ici un document Z91.1. Il s’agit de la
16 commission dont vous faisiez partie, ainsi que le chapelain Pero Karajica.
17 Je vois aussi que parmi les membres de la commission, on trouve des
18 représentants de la police civile, donc du MUP de Zenica. Je suppose donc
19 que vous avez été accompagné par eux pour vous rendre dans cette zone?
20 M. Krizanac (interprétation): Nous étions toujours accompagnés par la
21 police lors de nos visites.
22 Question: Est-ce que c'est une commission d'enquête sur les crimes de
23 guerre ou bien c'était tout simplement une commission humanitaire qui
24 devait voir quelle était la situation dans votre paroisse?
25 Réponse: C'était plutôt une commission humanitaire qui devait nous
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1 aider pour comprendre la situation dans notre région. Cela, c'était tout
2 simplement fondé par les organisations humanitaires telles que la Croix-
3 Rouge. Ils ont pris l'avocat Bozo Markovic et il y avait aussi un dénommé
4 Tadic qui, à l’époque, avait un poste à la municipalité, je crois, et mon
5 chapelain, mon assistant Pero. On en faisait partie parfois et parfois
6 c'était moi-même qui me rendais à ces visites.
7 Question: Vous nous avez donc déjà dit de quel type de commission il
8 s'agissait. Mais regardons maintenant les faits, ces statistiques qui sont
9 données ici. Je suppose qu'il s'agit-là des données que vous avez pu
10 collecter à l'époque?
11 Réponse: Oui. Il y a différents rapports de telle nature car on a
12 effectué plusieurs visites et à chaque fois, on composait un rapport. Ici,
13 on a l'un de ces rapports.
14 Question: Mais vous êtes d'accord avec les données qui se trouvent dans
15 ce rapport-ci?
16 Réponse: Oui, absolument.
17 Question: Vous avez répondu tout à l’heure à une question en disant que
18 vous avez voulu protéger et cacher une partie des biens culturels qui se
19 trouvaient Guca Gora. Vous y avez déjà répondu. Ma question serait la
20 suivante: au moment de la chute de Jajce, savez-vous à quel moment cela a
21 eu lieu?
22 Réponse: Je ne pourrais pas vous donner la date exacte, mais je crois
23 que c'était à la fin de l'automne.
24 Question: Oui, c’est exact, à la fin de l’automne 1992.
25 Réponse: A l'époque j'ai rencontré un frère, un religieux, qui allait
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1 de Jajce vers Vitez. Il s'agissait du frère Marko Steko.
2 Question: Si j'ai bien compris, à la fin de l'automne 1992, dans votre
3 voisinage immédiat, la situation militaire était mauvaise pour les Croates
4 et les Musulmans?
5 Réponse: Oui, oui. C'était la culmination en matière militaire dans
6 toute la région.
7 Question: On a pu suggérer que vous êtes venu témoigner en faveur de M.
8 Kordic. Ma question serait: est-ce que vous êtes venu devant ce Tribunal
9 pour défendre M. Kordic ou bien pour nous parler de la vérité que vous
10 connaissez, en tant que témoin oculaire?
11 Réponse: J'ai déjà répondu à la question. En général, je crois que ce
12 que les Juges font ici est un travail noble et juste. Et moi j'ai
13 l’impression que si moi-même je peux donner un modeste obole, il est de
14 mon devoir de le faire, quel que soit le nom ou quelle que soit l’identité
15 de telle ou telle autre personne.
16 Question: J'aurai encore deux questions à vous poser, très brièvement.
17 Quand vous êtes arrivé à Guca Gora, et cela pour la première fois après le
18 conflit du mois de juin 1993, pourriez-vous dire en général quel était
19 l'état du village? Est-ce que les maisons étaient intactes ou détruites?
20 Réponse: Beaucoup de maisons étaient détruites, mais la destruction
21 continuait. Plus tard, en 1994, quand j'ai commencé à m'occuper du
22 couvent, il y a eu beaucoup de maisons détruites mais on avait continué
23 avec la destruction des maisons par la suite aussi.
24 Question: Voici ma dernière question. Vous avez entendu beaucoup de
25 questions. Quelle était votre attitude envers les plus hauts
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1 fonctionnaires de l'église catholique. Est-ce que vous, personnellement,
2 vous étiez pour une Bosnie intégrale où vivent les représentants de tous
3 ces peuples ou étiez-vous contre cette option-là?
4 Réponse: J'ai toujours répondu que j’ai toujours été pour une Bosnie
5 intégrale et toujours contre une Bosnie partagée.
6 M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur Krizanac.
7 Je n’ai plus de questions pour ce témoin.
8 M. le Président (interprétation): Merci, Père Krizanac. Ainsi se termine
9 votre témoignage. Merci d’être venu témoigner. Vous pouvez disposer.
10 M. Krizanac (interprétation): Je vous remercie.
11 M. Naumoski (interprétation): Une question technique. Est-ce que nous
12 aurions une cote pour la déclaration sous serment de M. Krizanac?
13 M. le Président (interprétation): Je ne pense pas que nous ayons besoin
14 d'une cote pour cette déclaration sous serment. Nous le rajouterons
15 simplement à la liste des déclarations sous serment.
16 M. Naumovski (interprétation): Merci.
17 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)
18 (Questions relatives à la procédure.)
19 M. Kovacic (interprétation): Puisque nous parlions déjà des déclarations
20 sous serment, permettez-moi d’informer les Juges que nous avons soumis ce
21 matin trois déclarations sous serment pour nos témoins qui viennent
22 témoigner cette semaine.
23 M. le Président (interprétation): Qui est le prochain témoin?
24 M. Kovacic (interprétation): Le prochain témoin est Branko Markovic et
25 c’est M. Mikulicic qui va l’interroger.
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1 M. le Président (interprétation): Je ne crois pas avoir la liste des
2 témoins pour la semaine. Pourriez-vous nous fournir un exemplaire?
3 M. Kovacic (interprétation): Voici une liste. Malheureusement entre le n°6
4 et le n°7, il faudrait rajouter un autre nom Bono Drmic.
5 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
6 M. Nice (interprétation): Quand aux déclarations sous serment, je ne sais
7 pas si Me Kovacic nous les a données ce matin. Il les a peut-être soumises
8 au secrétariat, mais parfois, il nous faut quelque temps pour les avoir.
9 Quant à la décision de la Chambre d’appel relative aux déclarations sous
10 serment, le temps qui se passe entre le moment où nous recevons les
11 documents et le témoin à qui ce document se réfère, parfois c’est un laps
12 de temps important, et je souhaiterais avoir ces documents si possible ce
13 matin.
14 M. Kovacic (interprétation): Nous allons sans doute le faire.
15 Malheureusement, il y a l’une de ces déclarations qui est encore en train
16 d'être traduite. On l'a promise pour ce matin. Si je puis me permettre, la
17 décision disait qu'il fallait le faire avant que les témoins n'arrivent,
18 mais sans préciser quand.
19 Cela nous permet bien sûr de le faire littéralement cinq minutes avant que
20 le témoin n'arrive, mais bien sûr, je m'efforcerai de le faire le plus tôt
21 possible.
22 M. le Président (interprétation): Très bien.
23 M. Kovacic (interprétation): Permettez-moi, il s'agit de trois paragraphes
24 brefs pour chaque personne.
25 (Le témoin, M. Branko Markovic, est introduit dans le prétoire.)
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1 (Interrogatoire principal de M. Branko Markovic par Me Mikulicic.)
2 M. le Président (interprétation): Le témoin peut-il faire sa déclaration
3 solennelle?
4 M. Markovic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
5 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
6 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir.
7 M. Mikulicic (interprétation): Bonjour Monsieur Markovic.
8 M. Markovic (interprétation): Bonjour monsieur.
9 Question: Au nom de la défense de M. Cerkez, je mènerai cet
10 interrogatoire. Je vous prie bien de tenir compte de me répondre
11 relativement lentement, peut-être d'attendre quelques instants avant de
12 formuler votre réponse pour que cela puisse être interprété.
13 Je vous prie de dire votre prénom, votre nom, l'année et le lieu de votre
14 naissance?
15 Réponse: Je m'appelle Branko Markovic, fils de Nikola. Je suis né le 25
16 mars à Travnik.
17 Question: En quelle année?
18 Réponse: En 1958.
19 Question: Monsieur Markovic, vous être croate et catholique.
20 Réponse: Oui.
21 Question: Vous êtes citoyen de la République de Bosnie-Herzégovine et de
22 la République de Croatie?
23 Réponse: Oui.
24 Question: Etes-vous marié?
25 Réponse: Oui.
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1 Question: Vous avez trois filles?
2 Réponse: Oui.
3 Question: Vous êtes ingénieur en électronique?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Mais vous êtes restaurateur et propriétaire d'une pizzeria à
6 Vitez?
7 Réponse: Oui.
8 Question: Vous avez fait une école secondaire professionnelle en
9 électronique à Sarajevo?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Etes-vous actuellement ou étiez-vous autrefois membre d’un
12 parti politique?
13 Réponse: Non.
14 Question: En 1981, vous avez fait votre service militaire à la JNA et
15 vous n’avez jamais eu aucun grade?
16 Réponse: Non.
17 Question: Avant la guerre vous avez travaillé à Slobodan Princip Seljo
18 jusqu’en 1990?
19 Réponse: Oui.
20 Question: Et par la suite, vous avez ouvert une pizzeria?
21 Réponse: Non.
22 Question: Vous êtes natif de Vitez?
23 Réponse: Oui.
24 Question: Vous y êtes né et vous y avez toujours vécu?
25 Réponse: Oui.
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1 Question: Vous êtes restaurateur. Je suppose que par ce fait même vous
2 connaissez beaucoup de monde?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Je suppose aussi que vous êtes bien connu dans la ville de
5 Vitez?
6 Réponse: Je le suppose moi aussi.
7 Question: Vous vous êtes marié à deux reprises?
8 Réponse: Oui.
9 Question: Vous vous êtes marié pour la deuxième fois en 1992?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Est-ce que vous vous souvenez à quel moment en 1992, vous vous
12 êtes marié?
13 Réponse: Je me suis marié au mois d'octobre 1992.
14 Question: Votre deuxième épouse est musulmane, n'est-ce pas?
15 Réponse: Oui.
16 Question: Amra Tuco?
17 Réponse: Oui, Amra Tuco Markovic.
18 Question: Monsieur Markovic, au mois d'octobre 1992, quand vous vous
19 êtes marié, est-ce qu’à l'époque, il y a déjà eu des petites tensions
20 entre la population croate et musulmane à Vitez? Est-ce que l'on
21 ressentait les tensions à l'époque?
22 Réponse: Entre les Croates et les Musulmans, non. En 1992, je n'ai pas
23 eu cette impression-là.
24 Question: Merci. Vous habitez dans une maison familiale qui appartient
25 aux parents de votre épouse?
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1 Réponse: Oui.
2 Question: Ils sont bosniens?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Avez-vous des problèmes avec votre épouse qui est bosnienne et
5 vos beaux-parents qui sont bosniens?
6 Réponse: Non.
7 Question: Vous ne les avez jamais eus?
8 Réponse: Non.
9 Question: Avez-vous eu des problèmes avec sa famille, ses parents
10 proches ou lointains?
11 Réponse: Non.
12 Question: Monsieur Markovic, n'avez-vous jamais fait une différence
13 quelconque entre les personnes avec lesquelles vous avez été en contact et
14 les gens qui venaient dans votre restaurant?
15 Réponse: Non. Jamais.
16 Question: Vous avez vécu à Vitez, vous y avez un restaurant au moment
17 qui, immédiatement, précédait le conflit entre les Croates et les
18 Musulmans. Est-ce qu’avant que le conflit n’éclate, il y a eu des
19 incidents dans la ville même?
20 Réponse: Oui.
21 Question: D'après vous, et d'après vos souvenirs, est-ce que ces
22 incidents allaient à l'encontre d'une nation particulière ou bien cela
23 allait-il à l'encontre de tous?
24 Réponse: C'était difficile un peu pour tout le monde. Personnellement,
25 je ne me sentais pas en sécurité. Personne ne se sentait en sécurité.
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1 Question: Selon vous, qu'est-ce qui a créé cette sensation d'insécurité?
2 Réponse: Cette insécurité générale à la fin de 1992 a été causée par
3 l’armée qui est venue de l’Herzégovine. Il s’agissait-là de jeunes gens
4 frustrés. Et quand vous y rajoutez l'alcool, on ne pouvait jamais être sûr
5 de ce qui pourrait arriver.
6 Question: Les Juges ici ont déjà entendu beaucoup de dépositions sur les
7 formations militaires. Donc, ne rentrons pas dans le détail. Mais
8 pourriez-vous me confirmer la chose suivante : est-ce bien exact qu'à
9 l'époque, et surtout après la chute de Jajce, de nombreuses personnes sont
10 arrivées de là-bas, de nombreuses personnes en exil en provenance de cette
11 partie-là de la Bosnie?
12 Réponse: Oui.
13 Question: Comment agissaient ces personnes déplacées, surtout les
14 personnes qui ont été déplacées suite aux actions de la JNA et de l'armée
15 serbe?
16 Réponse: Je peux vous raconter un incident. Il y avait plusieurs
17 personnes ivres dans mon restaurant et je devais toujours essayer de
18 savoir qui était la personne la plus critique qui pourrait causer le plus
19 grand incident. Il est très facile de provoquer quelqu'un si vous voulez
20 le faire. Je me suis approché d'un homme qui se trouvait à côté du bar.
21 J'ai essayé d'établir une espèce de communication. Je lui demande d'où il
22 vient, ce qu'il fait. Il me regarde d'une façon pensive et me dit: "Vous
23 savez, un restaurant un peu comme le vôtre, j'ai dû le quitter à Jajce".
24 Après, vous pouvez bien vous demander ce à quoi vous pouvez vous attendre
25 de cette personne-là et d'un groupe de personnes comme cela. Ces personnes
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1 étaient désespérées de tous les points de vue. Une telle dépression... Et
2 si vous y rajoutez de l'alcool, les gens agissaient de la façon suivante:
3 "Si moi, je n'ai plus rien, pourquoi est-ce que toi, tu devrais avoir
4 quelque chose?"
5 M. le Président (interprétation): Monsieur Mikulicic, je vois maintenant
6 qu'il est temps de faire notre pause. Peut-être qu'au moment où nous
7 recommencerons, vous pourriez nous parler du 16 avril. Vu le nombre de
8 témoins que nous avons sur notre liste, il faudrait essayer de terminer au
9 moins un témoin par session.
10 M. Mikulicic (interprétation): Nous allons faire tout notre possible pour
11 cela. Cela étant dit, je crois que c'est un bon moment car je m'apprêtais
12 à aborder la date du 16 avril, notre référence 2.4.
13 M. le Président (interprétation): Voilà, nous allons faire une pause.
14 Monsieur Markovic, pendant cette pause, je vous prie de ne pas parler avec
15 qui que ce soit de votre déposition jusqu'à la fin de votre déposition.
16 Cela se réfère aussi aux représentants du conseil de la défense.
17 Nous allons reprendre à 11 heures 30.
18 (L'audience, levée à 11 heures 02, est reprise à 11 heures 37.)
19 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Mikulicic, vous pouvez...
20 (problème technique: pas de traduction.)
21 M. Mikulicic (interprétation): C'était donc la dernière date où vous avez
22 été ouvert?
23 M. Markovic (interprétation): Oui.
24 Question: Donc, le lendemain, la guerre a éclaté et vous n'avez pas
25 rouvert?
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1 Réponse: C'est bien cela.
2 Question: A quelle date l'avez-vous rouvert?
3 Réponse: Vers la moitié de 1994, en juin ou juillet.
4 Question: Y a-t-il eu des dégâts, des dommages causés?
5 Réponse: Oui.
6 Question: Dus à quoi, ces dommages?
7 Réponse: A des saccages, des pillages. Les deux locaux ont été
8 d'ailleurs pillés, une vidéothèque que j'ai non loin de là et une
9 pizzeria. Les deux locaux étant défoncés, pas mal d'inventaires, de
10 meubles, etc., ont été volés. On a pu sauvegarder quelque chose, mais
11 quand même...
12 Question: En d'autres termes, vous avez été pillé, purement et
13 simplement?
14 Réponse: Oui, c'est bien cela.
15 Question: Monsieur Markovic, je vous prie de bien vouloir rafraîchir
16 votre mémoire quant à cette date du 16 avril. Comment cette journée a-t-
17 elle commencé?
18 Réponse: A 5 heures 30 du matin, ma femme m'a réveillé pour me dire que
19 c'était une véritable guerre qui sévissait dehors. Moi, j'avais tout de
20 suite répondu que je ne comprenais pas très bien pour quelle raison. Alors
21 elle m'a dit que l'on entendait des détonations, que l'on entendait des
22 tirs qui venaient de partout. J'ai ouvert la fenêtre et j'ai bien vu que
23 c'était cela. Alors nous sommes tous descendus vers les pièces en sous-sol
24 et c'est ainsi que, pendant quelques jours, nous y sommes restés, sans
25 trop sortir. Et c'est ainsi que cela a commencé.
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1 Question: Monsieur Markovic, est-ce qu'avant, au cours de l'année 1992,
2 vous étiez déjà descendu dans des abris, pas de cette même maison mais
3 ailleurs, aussi? C'est-à-dire... lorsqu'il y a eu l'attaque de la JNA.
4 Question: Oui, bien sûr, mais pas toujours dans les mêmes circonstances.
5 Question: Et votre femme était enceinte, à cette époque-là?
6 Réponse: Oui.
7 Question: Et pendant combien de temps êtes-vous restés dans les sous-
8 sols de cette maison?
9 Réponse: Peut-être les deux premiers jours.
10 Question: Avez-vous entendu ou vu que des obus seraient tombés non loin
11 de là ou dans les environs, ou des coups de feu tirés?
12 Réponse: La situation générale a été vraiment vilaine.
13 Question: Donc, pendant deux jours, vous êtes restés dans cet abri en
14 sous-sol. Qu'avez-vous fait, plus tard?
15 Réponse: Plus tard, j'ai emmené ma femme dans la maison familiale de
16 mes parents parce dans cette situation, elle ne devait pas être en proie à
17 la névrose. Elle devait être calme, garder son calme, vivre dans la
18 tranquillité dans la mesure du possible, être exclue de tout cela. J'avais
19 demandé à mes parents de s'occuper d'elle et je leur avais demandé qu'elle
20 reste là-bas.
21 Question: Par rapport à la ville de Vitez, Monsieur Markovic, où se
22 situait cette maison où vous habitiez? Et où se trouve la maison de vos
23 parents?
24 Réponse: La maison que nous avons habitée se trouve à Rijecka. Quant à
25 la maison de mes parents, elle se trouve près de Kruscica, à la croisée
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1 des routes, plus près de la ville.
2 Question: Et vous avez considéré que vous étiez beaucoup plus en
3 sécurité en l'emmenant là-bas?
4 Réponse: Oui, bien sûr, pour des raisons de sécurité.
5 Question: Que s'est-il passé avec votre beau-père ce jour-là, c'est-à-
6 dire le père de votre épouse?
7 Réponse: Il a été emmené par des soldats deux ou trois jours plus tard.
8 Il a été emmené, lui et ses deux frères.
9 Question: Où a-t-il été emmené?
10 Réponse: D'abord au bâtiment administratif des forêts, puis après à
11 Dubravica, à l'école élémentaire.
12 Question: Combien de temps a-t-il passé, votre beau-père, dans cette
13 école élémentaire de Dubravica?
14 Réponse: Une dizaine de jours.
15 Question: Et à son retour, lui avez-vous parlé? Vous a-t-il dit quelque
16 chose quant à son séjour à Dubravica?
17 Réponse: Oui, très brièvement.
18 Question: Que vous a-t-il dit quant à l'hébergement, quant au traitement
19 qui lui a été infligé? A-t-il été maltraité? Lui a-t-on fait creuser des
20 tranchées, etc.?
21 Réponse: Non , il n'a pas eu de maltraitance. Aucune. Tout simplement,
22 ils étaient coincés dans ces locaux surpeuplés, ils étaient très nombreux.
23 C'est tout.
24 Question: Il vous a peut-être parlé d'une certaine explication de la
25 situation, c'est-à-dire des raisons pour lesquelles il a été emmené dans
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1 cette école élémentaire de Dubravica?
2 Réponse: Je ne m'en souviens plus.
3 Question: La mère de votre épouse, Mme Ulfeta Tuco, est accoucheuse,
4 sage-femme de profession?
5 Réponse: Oui.
6 Question: Elle a travaillé au centre médical de Vitez depuis 1952?
7 Réponse: Oui, c'est bien cela.
8 Question: Et combien d'enfants a-t-elle pu voir et accueillir, faire
9 venir au monde depuis lors? Approximativement?
10 Réponse: Oh... Pour parler de cette date-là jusqu'à cette date du 16
11 avril, jusqu'en avril 1994, elle disait qu'il s'agissait de 325 bébés.
12 Question: Donc, pendant cette guerre qui sévissait dans Vitez, votre
13 belle-mère, accoucheuse, a toujours continué sa besogne qui est évidemment
14 d'aider à l'accouchement des femmes?
15 Réponse: Oui, c'est bien cela.
16 Question: Où est-ce qu'elle a pu faire cela? Comment? Dans quelles
17 circonstances?
18 Réponse: Pour une première journée, d'ailleurs, depuis que nous étions
19 venus dans cet abri, la police était venue pour lui dire qu'elle devait se
20 rendre à Krizancevo Selo. C'est ce qu'elle a fait, d'ailleurs; elle est
21 allée à Krizancevo Selo sous le feu des combats qui ont eu lieu. Le
22 lendemain, il en était de même, pas bien sûr de cette même partie de la
23 ville. Quelques jours plus tard, elle a pu estimer qu'il était beaucoup
24 plus sûr de voir ces femmes venir ou plutôt se déplacer chez elle, au lieu
25 de la voir, elle, traverser tout ce chemin sous les coups de feu.
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1 Question: Et c'est ainsi que votre maison familiale est devenue une
2 espèce de maternité?
3 Réponse: Oui, une espèce de maternité. C'était très spontané.
4 Question: Et c'est donc dans cette maison-là qu'environ 325 bébés sont
5 venus au monde?
6 Réponse: Oui, sains et saufs, en bonne santé.
7 Question: Est-ce que cette maison-là, en tant que maternité, était
8 uniquement à l'intention des représentants ou représentantes d'une ethnie,
9 ou bien toutes les femmes venaient évidemment pour y accoucher?
10 Réponse: Jamais on n'a demandé quoi que ce soit, ni qui elles étaient
11 ni d'où elles venaient. Tout simplement, à la sortie évidemment, elles
12 devaient dire, décliner leur identité quant au registre des enfants et du
13 reste.
14 Question: Monsieur Markovic, quant aux équipements dont vous avez dû
15 être dotés pour ces accouchements, y a-t-il eu quelque chose?
16 Réponse: Non, aucun équipement.
17 Question: Vous voulez dire aucun équipement pour la stérilisation, pour
18 faire des bandages, de la ouate, des gazes, etc., des choses de ce genre?
19 Réponse: Non, non, non. Pas d'eau, pas d'électricité, aucun équipement.
20 Question: Et comment avez-vous procédé à la stérilisation?
21 Réponse: Eh bien, on l'a faite tout simplement en allumant un feu dans
22 un poêle qui se trouvait non loin de chez nous, en faisant bouillir. C'est
23 tout.
24 Question: Monsieur Markovic, avez-vous eu des contacts avec un certain
25 Grbenar (?) et avec un autre ami à qui vous avez demandé de vous aider
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1 pour vous approvisionner en matériel? Pouvez-vous dire quelque chose là-
2 dessus en deux ou trois mots?
3 Réponse: C'est au moment où Bjeli Put, cette œuvre de charité, la Route
4 blanche, était venue à Nova Bila et j'ai parlé avec le frère Franjo. Je
5 suis allé le voir, lui demander peut-être des équipements, du matériel. Il
6 s'est avéré qu'il n'avait rien. De retour en ville, j'ai rencontré un de
7 mes amis avec qui j'avais travaillé avant la guerre à l'usine SPS. Dans
8 une conversation informelle, comme cela, à bâtons rompus, lorsqu'il
9 m'avait demandé où j'étais etc., je lui ai dit tout simplement que j'avais
10 besoin d'équipements, de tels ou tels équipements et matériels. Alors, il
11 m'a dit: "mais pour quelle raison?" et j'ai répondu: "Parce que dans ma
12 maison se trouve une véritable maternité".
13 Question: Vous lui avez dit tout cela?
14 Réponse: Oui, bien sûr! Comme lui, il avait une organisation
15 humanitaire avec laquelle sa mère était en contact, alors il a dit tout
16 simplement qu'il aurait pu aider et il a promis d'ailleurs de me venir en
17 aide.
18 Question: Y a-t-il eu une aide quelconque? Est-ce qu'il y a eu un
19 résultat, une efficacité quelconque?
20 Réponse: Oui, bien sûr. Cet homme est venu nous voir; on s'est mis à
21 table et c'est à partir de ce moment-là, lorsqu'une femme est venue pour
22 son accouchement, lui aussi il a été… justement, il est resté coi. Il ne
23 pouvait pas croire que, dans une maison pareille, on pouvait organiser une
24 telle maternité. Pendant six mois que cela a fonctionné, disons que c'est
25 cet homme-là qui nous a aidé.
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1 Question: Pour situer cela dans le temps, c'est donc fin 1993 que tout
2 cela a eu lieu?
3 Réponse: Oui, bien sûr. Fin 1993.
4 Question: Monsieur Markovic, est-ce que cette histoire portant sur votre
5 maternité -disons votre maison-, a pu évidemment aboutir à des
6 journalistes, à la presse?
7 Réponse: Oui, d'abord, c'est M. James qui est venu le premier et puis
8 d'autres sont venus du secteur de l'aide humanitaire, pas mal de
9 journalistes, beaucoup de gens: les uns voulant aider, les autres voulant
10 évidemment rapporter là-dessus. Chacun, de son côté, voulait s'occuper de
11 son travail.
12 Question: Pouvez-vous vous rappeler peut-être un organe de presse dont
13 les journalistes auraient pu vous rendre visite?
14 Réponse: Oui, je me souviens du Gardian, du Sunday Time, News, etc. !
15 Il y a d'autres maisons de presse qui étaient représentées.
16 Question: Revenons un peu à ces événements de l'époque. Vous vous êtes
17 trouvé chez vous et des représentants de la police militaire seraient
18 venus vous emmener, vous chercher?
19 Réponse: Oui, ils sont venus dans cette maison-là. Vous savez, de temps
20 en temps, je me rendais à l'autre maison.
21 Question: Qu'ont-ils fait, ces membres de la police militaire?
22 Réponse: C'était peut-être le sixième ou le septième jour, ils m'ont
23 emmené à Krc vers la ligne de défense.
24 Question: Vous avez été muni d'un uniforme, d'une arme?
25 Réponse: J'ai reçu une arme, mais une fois que je suis venu à la
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1 tranchée même. C'est un homme dont je prenais la relève qui m'a rendu
2 cette arme.
3 Question: Vous avez reçu un uniforme?
4 Réponse: Non.
5 Question: D'autres équipements?
6 Réponse: Non.
7 Question: Pendant combien de temps êtes-vous resté à Krc, sur la ligne
8 de défense?
9 Réponse: J'y suis resté pendant cinq jours.
10 Question: On vient de me reprendre de justesse, c'est-à-dire de me dire
11 de la part de l'interprétariat que vous n'avez pas répondu à la question
12 concernant l'uniforme. J'ai dit: "ou d'autres équipements militaires?"
13 Réponse: J'ai bien dit que non.
14 Question: Donc, vous avez passé quelque temps sur cette ligne de front.
15 Que s'est-il passé ensuite?
16 Réponse: Eh bien, il s'est passé que quatre ou cinq jours plus tard, un
17 jeune homme vient et me dit que je devais l'accompagner. Alors je viens à
18 Vitez au troisième bataillon dont le commandant Karlo Grabovac me dit
19 qu'il y a eu des demandes, étant donné la situation de Vitez, de la part
20 de ma belle-mère, de voir muter, ne serait-ce que plus près, mais toujours
21 sur la ligne de front, mais plus près de la maison pour pouvoir me rendre
22 à la maison au moment où je n'étais plus de garde.
23 Question: Donc, c'est votre belle-mère qui a demandé à M. Grabovac de
24 vous muter pour être plus près de la maison, pour être utile le cas
25 échéant?
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1 Réponse: C'est bien cela.
2 Question: Est-ce qu'elle a connu Karlo Grabovac antérieurement?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Donc, il a évidemment exaucé ce vœu.
5 Réponse: Evidemment.
6 Question: Quelles étaient ces fâcheuses circonstances que connaissaient
7 votre famille, votre belle-mère et vos parents?
8 Réponse: Ce qui a été désagréable et fâcheux, c'est que l'on a fouillé
9 la maison. Des gens seraient venus pour fouiller, pour chercher des armes,
10 etc. Pendant que j'étais à la maison, de telles circonstances désagréables
11 n'ont pas été connues parce que je connaissais ces jeunes gens et que je
12 leur ai demandé tout simplement ce qu'ils voulaient avoir.
13 Question: Et plus tard, que s'est-il passé?
14 Réponse: Plus tard, c'est devenu peu sûr. On ne pouvait plus y tenir
15 debout.
16 Question: Y a-t-il eu des vols, des pillages?
17 Réponse: Oui. Une fois, on nous a volé une vache de notre étable, etc.
18 C'était une insécurité générale qui s'était établie.
19 Question: Dans cette situation que vous désignez comme insécurité
20 générale, menaces, pillages, vols, votre belle-mère a décidé une fois de
21 plus d'aller chercher de l'aide.
22 Réponse: Oui.
23 Question: Qui êtes-vous allés voir?
24 Réponse: Eh bien, lorsque cette situation ainsi établie se répétait
25 pour ainsi dire, nous sommes allés chez Mario Cerkez demander de l'aide.
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1 Question: Vous connaissiez déjà Mario Cerkez?
2 Réponse: Oui.
3 Question: Qu'a-t-il fait pour, justement, répondre à votre demande?
4 Réponse: Je suis allé chez Mario pour lui demander de me rendre
5 possible de déplacer dans des conditions de sécurité entière ma famille
6 vers Zenica, c'est-à-dire de les déplacer de Vitez. A ce moment-là, Mario
7 a proposé quelque chose d'autre. Il a dit, disant qu'il en était capable,
8 de pouvoir envoyer quelqu'un qui, 24 heures sur 24, serait là pour monter
9 la garde. Pour ce qui est de cette vache, enfin peu importe la vache, elle
10 n'est pas substantielle, mais on en a fait mention tout simplement, mais
11 il a dit notamment: "Là, si je peux vous aider aussi, on peut peut-être
12 vous offrir une autre vache". Peut-être serait-elle du cheptel de la
13 coopérative agricole ou d'une ferme quelconque, mais qui errait par là.
14 Nous avons dit que non, mais nous l'avons remercié quand même.
15 Question: Donc, Mario Cerkez a envoyé un soldat qui devait être là pour
16 monter la garde?
17 Réponse: Oui, il a été chargé de la sécurité de notre maison.
18 Question: Donc, vous ne revenez plus sur la ligne de défense à Krc. Vous
19 avez été emmené par la police militaire, mais vous avez été muté sur une
20 autre position.
21 Réponse: Oui, j'ai été ensuite affecté plutôt pour monter la garde en
22 patrouille à Kruscica, toujours sur la ligne de front.
23 Question: Après cela, quelle a été votre affectation?
24 Réponse: Après cela, ma nouvelle affectation a été de rester chez moi à
25 la maison.
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1 Question: Pour protéger cette maternité?
2 Réponse: Oui, bien sûr, pour que cela puisse fonctionner dans la mesure
3 du possible.
4 (Les interprètes demandent à M. Mikulicic de bien vouloir ménager une
5 pause après chaque question.)
6 M. Mikulicic (interprétation): J'accepte la critique.
7 Vous avez dit que vous connaissiez déjà M. Cerkez Mario depuis longtemps.
8 Réponse: Oui, je le connais pratiquement depuis longtemps. On a grandi
9 ensemble, on a fréquenté la même école. Nous ne sommes pas de la même
10 génération, de la même tranche d'âge, mais on se fréquentait, on a été
11 copains. Il y a eu pas mal de choses où nous avons eu quelque chose en
12 commun, que ce soit à l'école ou parmi les amis et copains, etc.
13 Question: Avez-vous connu ses parents?
14 Réponse: Oui.
15 Question: Avez-vous jamais entendu quelqu'un de sa famille ou lui-même
16 dire quoi que ce soit en des termes injurieux ou autres ou qu'ils aient pu
17 éprouver une certaine tendance à insulter ou à agresser par exemple qui
18 que ce soit ou faire des incidents du genre?
19 Réponse: Non, absolument pas. Pour autant que je puisse connaître les
20 parents de Mario Cerkez et lui et sa famille, il n'en était pas question.
21 Question: J'imagine que M. Cerkez venait dans votre restaurant souvent?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Y a-t-il eu des incidents à ces occasions-là?
24 Réponse: Non. Absolument pas.
25 M. Mikulicic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Juge.
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1 M. Sayers (interprétation): Nous n'avons pas de question pour M. Markovic.
2 (Contre-interrogatoire de M. Branko Markovic par Me Nice.)
3 M. Nice: Votre pizzeria, monsieur, elle s'appelle Sebastijan?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Depuis quand en êtes-vous propriétaire?
6 Réponse: Depuis 1990.
7 Question: Est-ce que votre clientèle était plus particulièrement
8 politique ou militaire et plus particulièrement d'un groupe que d'un autre
9 jusqu'à sa fermeture?
10 Réponse: Je ne dirais pas cela.
11 Question: Est-ce que vous saviez qu'il y avait un café qui s'appelait
12 Kruscica, dont le propriétaire était un certain Faruk Zukic?
13 Réponse: A Kruscica?
14 Question: Oui, un certain café appelé Kruscica. Vous le connaissez?
15 Monsieur Markovic, vous nous dites qu'il n'y avait pas de tensions, c'est
16 bien ce que vous nous dites dans le cadre de votre déposition, pas de
17 tensions entre Musulmans et Croates en 1992?
18 Réponse: Il y avait des tensions, mais ces tensions étaient, je dirais,
19 en quelque sorte générales, d'ordre général, pas uniquement entre Croates
20 et Musulmans.
21 Question: Je n'ai pas beaucoup de temps mais reconnaissez-vous qu'en
22 1992, les Croates s'emparaient de Vitez par le moyen de l'Herceg-Bosna et
23 du HVO? Est-ce que vous admettez ce que je vous dis?
24 Réponse: Je ne me suis jamais mêlé de politique et je ne les ai pas
25 senties ni vécues, ces choses-là.
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1 Question: Vous êtes marié à une Musulmane, vous avez des beaux-parents
2 musulmans. Vous voulez vraiment dire qu'aucun de vous ne s'est rendu
3 compte que l'on traitait les Musulmans différemment des Croates, à quelque
4 moment que ce soit?
5 Réponse: Quant à ma famille et à moi, nous n'avons pas eu ce sentiment-
6 là.
7 Question: Est-ce qu'il vous est arrivé d'entendre parler du meurtre,
8 commis à l'hôtel Vitez, de Trako?
9 Réponse: J'ai entendu parler de cet assassinat. Mais qui a tué qui?
10 Cela, je ne sais pas.
11 Question: Où avez-vous appris qu'il y avait eu des incidents au cours
12 desquels l'un ou l'autre drapeau a été hissé? Avez-vous appris que cela
13 avait posé des problèmes au cours de l'année 1992?
14 Réponse: Je ne comprends pas de quels incidents il s'agit, de quels
15 drapeaux il s'agit. Pouvez-vous vous faire un petit peu mieux entendre?
16 Question: Est-ce que vous vous souvenez du fait qu'au mois de juin, on
17 s'était emparé du bâtiment de la municipalité? Juste à titre d'exemple.
18 Réponse: Oui.
19 Question: Est-ce que vous vous souvenez qu'à ce moment-là un drapeau,
20 celui de la communauté croate d'Herceg-Bosna, avait été hissé sur ce
21 bâtiment?
22 Réponse: Oui, c'est bien cela.
23 Question: Et les Musulmans n'ont pas aimé cela, n'est-ce pas?
24 Réponse: Probablement, mais je ne le sais pas.
25 Question: Je vois. Mais rien de tout ceci ne presse sur votre
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1 conscience, le fait par exemple qu'ils n'aient pas aimé cela?
2 Réponse: Si j'étais conscient de cela, je n'aurais certainement pas
3 attendu jusqu'à la date du 16 avril à Vitez. Eux non plus, probablement.
4 Question: Est-ce que vous saviez, par exemple, qu'en septembre 1992,
5 vous qui aviez des parents musulmans, le Comité croate de la protection
6 des Musulmans dénonçait publiquement ce qu'on faisait dans votre ville?
7 Réponse: Cela m'est inconnu. Peu importe si j'ai eu des parents du côté
8 musulman. Eux non plus n'en savaient rien.
9 Question: Je vois. Où se trouvait votre restaurant, votre pizzeria, dans
10 la ville?
11 Réponse: Encore aujourd'hui, cette pizzeria est située en pleine ville.
12 Question: A proximité de l'hôtel Vitez?
13 Réponse: Non.
14 Question: Où est-ce? Si vous voulez, on peut vous montrer un plan mais
15 vous pourriez vous contenter de nous en faire la description. A proximité
16 de quel endroit votre restaurant se trouve-t-il?
17 Réponse: Juste au centre ville, en face de la pharmacie.
18 Question: Et vous n'avez pas appris qu'un café dont le propriétaire est
19 un Musulman avait été pris par le HVO qui voulait s'en servir pour lui-
20 même?
21 Réponse: Non.
22 Question: Poursuivons, puisque nous n'avons pas beaucoup de temps, et
23 parlons du 15 avril. Dites-nous ce qui s'est passé au cours de l'après-
24 midi ou de la soirée du 15 avril. Vous qui étiez restaurateur, vous
25 pourriez le savoir.
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1 Question: Il n'y avait rien, absolument rien d'exceptionnel. C'est à 21
2 heure que j'ai tout terminé et à 21 heures 30 je me suis rendu chez moi
3 pour rentrer à la maison, comme tous les autres jours, parce que telles
4 étaient mes obligations.
5 Question: Vous en êtes sûr?
6 Réponse: Oui.
7 Question: Examinons un document de la défense présenté au dossier. Il
8 s'agit d'une compilation importante de documents de la défense et qui
9 porte la cote D307/1. Nous allons pouvoir placer la version anglaise sur
10 le rétroprojecteur et fournir l'original au témoin.
11 Il s'agit d'un document, Monsieur Markovic, qui porte la date du 15 avril.
12 Alors essayez de vous remémorer. Est-ce que ceci vous rafraîchit la
13 mémoire? Est-ce que vous vous souvenez mieux de cette soirée-là?
14 Réponse: Jamais de ma vie je n'ai vu ce document, un document de ce
15 genre et ce document surtout.
16 Question: D'accord, il se peut que ce ne soit pas le cas. Mais c'est
17 surtout le contenu qui devrait avoir une incidence sur vous. En effet, on
18 constate que ce document est signé de la main de Blaskic le 15 avril et
19 apparemment à 18 heures 55.
20 Vous saviez bien sûr qui était Blaskic, n'est-ce pas?
21 Réponse: Oui, bien sûr.
22 Question: Il se peut que vous n'étiez pas à proximité immédiate de
23 l'hôtel Vitez, mais de combien de mètres votre restaurant était-il éloigné
24 de cet hôtel Vitez? De 100 mètres? 50?
25 Réponse: Disons deux kilomètres.
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1 Question: Est-ce que nous pourrions examiner la carte? Monsieur
2 l'Huissier, je vais demander votre aide pour que vous placiez ce plan sur
3 le rétroprojecteur.
4 Réponse: Peut-être moins, pour parler de la distance à vol d'oiseau.
5 Question: Prenez tout le temps qu'il faut. Voici le centre de Vitez.
6 Nous allons nous rapprocher, faire un gros plan. On voit le stade, au-
7 dessus. Vous vous y retrouvez? On voit le stade, l'hôpital et puis
8 l'école. Est-ce que vous pouvez maintenant mieux vous orienter sur cette
9 carte?
10 Réponse: Oui, je ferai de mon mieux.
11 Question: Vous avez, sur l'écran de télévision, une partie de la carte.
12 Est-ce que vous pouvez y voir l'endroit où se trouvait votre pizzeria?
13 Réponse: Cela m'est difficile. Voilà, c'est ici.
14 (Le témoin indique avec le pointeur le centre de Vitez.)
15 Question: Je vais vous demander de déplacer votre tête, Monsieur, parce
16 que sinon on ne voit pas la carte.
17 Réponse: Ecoutez, j'essaie de m'orienter et cela m'est difficile. Mais
18 disons que si le centre médical est ici, si la maison est là, alors mon
19 local, la pizzeria devrait être ici. Est-ce que vous voyez ce que je veux
20 dire? Est-ce que je suis suffisamment clair? Approximativement, c'est là.
21 Question: Je vous remercie. Je voudrais reprendre la carte. Voyez-vous,
22 il y a une échelle qui est indiquée et Vitez, en tout, d'une partie à une
23 autre, fait au maximum un kilomètre de long sur 500 mètres de large. Au
24 maximum, votre restaurant était éloigné du quartier général de Blaskic de
25 quelques centaines de mètres, mais tout au plus. Vous le saviez, n'est-ce
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1 pas?
2 Réponse: Oui. A vol d'oiseau, il s'agit de quelques centaines de
3 mètres. Mais à vol d'oiseau, vraiment.
4 Question: Vous pensez que je vous demandais quelle distance cela faisait
5 en voiture?
6 Réponse: Oui, cela me paraît logique.
7 Question: Vous dites que cela ferait une différence d'un à deux
8 kilomètre, ou est-ce que vous exagérez?
9 Réponse: Mettons un kilomètre, voire 500 mètres. Je ne comprends pas ce
10 que vous voulez dire par là, anticiper sur quoi?
11 Question: Revenons au document précédent sur lequel portait ma question
12 à laquelle vous avez répondu en donnant une certaine distance. Ce document
13 a été délivré deux heures et demie avant la fermeture de votre restaurant,
14 selon vos propres dires, et ce sont des informations pour les organes des
15 autorités civiles de la zone opérationnelle de Bosnie centrale. C'est
16 adressé aux commandants de brigade ainsi qu'à la police militaire.
17 Ce document dit ceci, je cite: "Nous vous informons par la présente que
18 les autorités civiles de la zone opérationnelle de Bosnie centrale ont
19 délivré les ordres suivants: imposition d'un couvre-feu à partir de 21
20 heures, annulation de tous les permis d'entrée ou de sortie de Travnik,
21 cessation des activités de toutes les écoles et de toutes les entreprises
22 à l'exception des entreprises à activité spéciale, et fermeture de tous
23 les restaurants à 20 heures". Et nous voyons que ce document était adressé
24 à diverses instances, y compris le 4ème bataillon de police militaire de
25 Vitez.
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1 Il y avait couvre-feu et vous avez dû fermer boutique à 20 heures. Alors
2 rappelez-vous. Est-ce que vous vous en souvenez, maintenant, Monsieur
3 Markovic?
4 Réponse: Etait-ce 20 heures ou 21 heures? Mais je crois que c'était
5 même avant 21 heures, d'ordinaire, enfin 20 heures 30, 20 heures.
6 Question: Il y avait un couvre-feu, cette nuit-là, n'est-ce pas?
7 Réponse: Oui.
8 Question: Et un ordre avait été donné de fermer les restaurants?
9 Réponse: Personne n'est jamais venu me donner un ordre portant arrêt du
10 travail et fermeture de mon restaurant. Mon restaurant a toujours été
11 fermé normalement par moi-même chaque nuit, chaque soir avant 21 heures.
12 Peut-être y avait-il un ordre de cette sorte-là mais personne n'est venu
13 me donner l'ordre de fermer le restaurant. Nous étions deux ou trois dans
14 le restaurant, c'était vide.
15 Question: Et maintenant, Monsieur Markovic, vous dites qu'il se peut que
16 votre restaurant ait été fermé avant l'heure déterminée dans cet ordre, à
17 savoir 20 heures?
18 Réponse: Certainement pas avant 8 heures du soir. Peut-être 8 heures
19 moins 10... Peut-être 10 minutes avant 21 heures. En tout cas, une chose
20 est sûre: personne n'est venu fermer mon restaurant à cette époque-là, pas
21 plus que je n'ai reçu quoi que ce soit du genre de ce document que l'on
22 vient de me soumettre maintenant, pas plus qu'on ne m'a averti de quoi que
23 ce soit.
24 Réponse: Je fais cette suggestion: vous êtes venu ici pour dire que le
25 15 était un jour ordinaire alors qu'il était manifeste, au vu de ce qui se
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1 passait dans la rue, que les autorités savaient ce qui allait se passer
2 puisqu'il y avait couvre-feu et que les magasins, dont votre restaurant,
3 auraient dû être fermés.
4 Réponse: Pour moi, c'était un jour comme tous les autres. Quant au
5 temps de fermeture et de m'en aller chez moi, je crois que c'était
6 toujours en même temps que d'habitude.
7 Question: Votre beau-père a été arrêté et détenu. Quel est son prénom,
8 s'il vous plaît?
9 Réponse: Oui, il s'appelait Muharem Tuco.
10 Question: La famille Tuco, c'est une grande famille ou une famille assez
11 restreinte?
12 Réponse: Oui, assez grande famille, assez nombreuse.
13 Question: Et les frères de votre beau-père, comment s'appelaient-ils?
14 Réponse: Mahmud, Smail, Edib. Je ne sais plus si j'ai raté quelqu'un.
15 Il me semble qu'il sont tous là.
16 Question: Mahmud, c'est le fils de Muzajra (?)? Est-ce possible?
17 Réponse: Oui. Mahmud Muzajra (?), c'est donc le frère de mon beau-père.
18 Question: C'est le numéro 248 dans la liste de Morsink.
19 Pourquoi votre beau-père a-t-il été arrêté?
20 M. Kovacic (interprétation): (...Hors micro.)
21 M. Nice (interprétation): Je croyais que c'était une objection, c'est
22 pourquoi je m'étais assis.
23 M. le Président (interprétation): Poursuivons.
24 M. Nice (interprétation): Le beau-père, pourquoi a-t-il été arrêté?
25 M. Markovic (interprétation): Il a été arrêté deux ou trois jours après la
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1 date du 16.
2 M. le Président (interprétation): Je voulais vous demander, Monsieur,
3 pourquoi il a été arrêté.
4 M. Markovic (interprétation): Vous devez poser la question à ceux qui
5 l'ont fait.
6 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous le savez? Est-ce que
7 vous savez pourquoi il a été arrêté, Monsieur Markovic?
8 M. Markovic (interprétation): Il nous a été donné comme explication que
9 c'était pour des raisons de sa propre sécurité qu'il a été emmené, tout
10 comme son frère.
11 M. Kovacic (interprétation): Je pense que le moment se prête bien à une
12 intervention de ma part, si vous me le permettez, et je vais peut-être
13 parler croate.
14 (L'orateur poursuit en croate.)
15 Mon vénérable collègue de l'accusation a fait mention d'une donnée de la
16 liste de Morsink. Si on parle d'un document qui a été versé comme
17 déclaration spéciale du témoin portant sur le document Morsink, alors nous
18 considérons que ce document ne fait pas partie intégrante de la liste
19 versée au dossier, par conséquent cette question ne peut pas être posée à
20 ce témoin-là.
21 M. le Président (interprétation): Oui, vous avez tout à fait raison, mais
22 je pense qu'il n'est pas contesté qu'il a été détenu. Inutile de
23 s'attarder là-dessus.
24 M. Nice (interprétation): Je suis sûr que nous pourrons revenir à ceci.
25 M. le Président (interprétation): Je suis sûr que nous allons avoir une
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1 requête relative à cette liste, conformément à ce qu'a dit la Chambre
2 d'appel.
3 M. Nice (interprétation): Oui, mais je pense que des témoins de la défense
4 ont déjà parlé de ceci de façon séparée. Je poursuis néanmoins. Votre
5 beau-père a été arrêté parce qu'il était musulman, n'est-ce pas?
6 Réponse: Il a été emmené prétendument pour des raisons de sa propre
7 sécurité.
8 Question: Vous le dites maintenant aux juges, mais auparavant, on vous a
9 demandé si une raison avait été avancée et vous avez dit qu'aucune raison
10 n'avait été avancée, alors quelle est la vérité dans tout cela?
11 Réponse: Non, la vérité c'est qu'on l'a emmené tout simplement pour sa
12 propre sécurité et je pense en fin de compte que pendant ces dix jours qui
13 ont suivi, il était beaucoup plus sûr là où il était que chez lui où il
14 n'y avait ni moi ni personne d'autre au temps où rien que des choses
15 fâcheuses et très vilaines arrivaient à Vitez. Il y avait au moins une
16 centaine de raisons pour lesquelles certains pourraient survenir et faire
17 quelque chose, et je crois que c'était beaucoup plus intelligent pour lui
18 de passer ces quelques journées là où il a été emmené.
19 Question: Mais est-ce qu'en réalité, d'après ce que vous nous dites, les
20 Musulmans effectivement couraient le risque d'être attaqués, voire tués
21 par les Croates? C'est bien ce que vous nous dites?
22 Réponse: Les gens se voyaient exposés au risque d'être attaqués par des
23 criminels, volés, pillés et tués définitivement parce que si, par exemple,
24 vous n'étiez pas en mesure de prouver que vous ne déteniez pas 10 ou 15
25 000 marks alors qu'on supposait que vous les aviez chez vous ou sur vous,
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1 alors là vous étiez cuit. Or, regardez la situation de mon beau-père. Moi
2 je ne suis pas à la maison, personne d'autre, alors comment le voyez-vous
3 protégé contre des criminels, des gens en proie à la désolation parce que
4 personnes déplacées, réfugiées qui sont à la recherche d'un abri, qui sont
5 expulsées, bannies, qui auraient perdu quelqu'un des leurs et qui peut-
6 être auraient eu l'idée de se venger d'une manière ou d'une autre? Par
7 conséquent, selon ma profonde conviction, il était en difficulté.
8 Question: Je dois vous interrompre, Monsieur. A quel moment de la
9 journée du 16 votre beau-père a-t-il été arrêté?
10 Réponse: Je ne sais pas, je n'étais pas présent lorsqu'il a été emmené.
11 D'ailleurs, il n'a pas été emmené le 16. Peut-être le 17 ou le 18. En tout
12 cas, moi je n'étais pas in situ.
13 Question: Mais votre beau-père avait la parfaite maîtrise de ses
14 facultés, il n'avait pas besoin d'être protégé comme un enfant doit
15 l'être. Il a simplement été arrêté, n'est-ce pas?
16 Réponse: Tout simplement, on lui a demandé de venir se présenter,
17 probablement parce qu'on le respectait comme étant une personne âgée. Il
18 n'a pas été arrêté, on l'a prié tout simplement de venir de concert avec
19 son frère au bâtiment de Sumarija.
20 Question: Je vais arriver directement à la fin de votre déposition, je
21 n'ai plus beaucoup de questions à vous poser. Vous dites être revenu et
22 qu'un garde a été affecté à votre maison. Comment s'appelait-il, celui qui
23 avait reçu l'ordre de faire ce travail de Cerkez?
24 Réponse: Je crois qu'il était Ilija de prénom. Je ne me souviens pas de
25 son nom de famille. Il n'était pas de notre région. Je crois qu'il était
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1 de Dobratici ou de Kotor Varos ou... je ne sais pas.
2 Question: Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur ce que vous
3 dites, des activités de Cerkez vous concernant, mais au cours du printemps
4 ou de l'été 1993, pourquoi est-ce que vous aviez besoin de voir votre
5 maison protégée?
6 Réponse: J'ai expliqué tout à l'heure que la ville était en désordre,
7 la ville était pleine de criminels, de personnes armées, de voyous de tout
8 ordre...
9 Question: Je vous interromps...
10 Réponse: ... Qui pouvaient venir chez vous.
11 Question: J'insiste sur le fait qu'il fallait un garde pour votre maison
12 plutôt que la nécessité de protéger la maison des voisins croates.
13 Réponse: Parce qu'à ce moment-là, les Musulmans étaient minoritaires à
14 Vitez, et c'était logique d'ailleurs.
15 Question: Donc vous avez été ciblé, attaqué, persécuté par des Croates,
16 ou plutôt ils étaient ciblés, attaqués et persécutés par des Croates,
17 n'est-ce pas?
18 Réponse: Pas ma famille ou moi-même.
19 Question: Comment s'appelle votre femme?
20 Réponse: Amra.
21 Question: Vous avez cité son nom précédemment, mais je pense que vous
22 avez donné son nom complet. Quel est son nom complet?
23 Réponse: Amra Markovic de nom marital, c'est mon nom de famille.
24 Monsieur Mikulicic a dit Amra Tuco, c'est-à-dire que c'est son nom de
25 famille de jeune fille.
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1 Question: Est-ce qu'au cours de ce conflit, on l'a connue sous ce nom-
2 là, votre femme?
3 Réponse: Je ne comprends pas la question.
4 Question: Est-ce qu'on la connaissait sous son nom musulman au cours de
5 ces troubles malheureux? Vous avez besoin d'y réfléchir?
6 Réponse: Voyez-vous, elle est donc mariée, Markovic, probablement
7 d'aucuns pourraient interpréter ceci comme cela lui correspondait le
8 mieux, mais enfin, je ne pense pas que ce soit substantiel.
9 Question: Vous connaissez la famille Tuco. Vous avez parlé de la taille
10 de cette famille. Est-ce que votre femme était la seule répondant au nom
11 de Amra Tuco?
12 Réponse: Non.
13 Question: Combien d'autres y en avait-il?
14 Réponse: Il y avait une autre Amra Tuco, c'est une femme qui était
15 mariée à son cousin, au cousin de ma femme. Avant, elle n'était pas Tuco,
16 mais son nom de famille de jeune fille était Patkovic. Et puis après, elle
17 a épousé un de ses cousins, cousins de ma femme.
18 Question: Bien. Je voudrais d'autres noms concernant votre famille. Est-
19 ce que vous connaissez un certain Fehim Tuco, Terudzin Tuco, Refik Tuco et
20 Rabija Tuco?
21 Réponse: Non, non, non. Il s'agit de deux familles qui n'ont aucun lien
22 de parenté. Pour ce qui est de tous ces noms que vous venez de mentionner,
23 il s'agit d'une autre famille qui n'a rien à voir, aucune parenté, enfin
24 proche, de celle-là dont nous parlons.
25 Question: Quoi qu'il en soit, l'autre Amra que vous connaissez, elle
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1 existe. Est-ce que vous connaissez Mirjana ou Fatima?
2 Réponse: Vous voulez dire Tuco?
3 Question: Oui.
4 Réponse: Non.
5 Question: Examinons cependant ce document qui porte la cote 1295.4. Vous
6 dites que puisque vous aviez le bénéfice de cette garde montée par ce
7 soldat devant votre porte, vous êtes resté à Vitez pendant tous les
8 combats.
9 Réponse: Oui.
10 Question: Serait-il exact de dire qu'au mois de novembre 1993, la
11 position minoritaire qui était celle des Musulmans à Vitez s'est traduite
12 par la persécution de ces Musulmans, y compris des membres de votre
13 famille ainsi que de l'autre Amra Tuco? Est-ce exact?
14 Réponse: Je ne pourrai pas vraiment répondre à cette question parce que
15 je n'ai pas suffisamment d'informations; non plus que je n'ai aucun
16 contact avec cette partie de la famille, non plus qu'avec la famille de
17 l'autre Tuco.
18 Question: Certes, mais vous vous trouviez sur les lieux pendant la
19 guerre. Vous comparaissez aujourd'hui pour relater diverses choses,
20 notamment la façon dont on s'est bien occupé de vous en 1993. Veuillez
21 examiner le document. Vous avez l'original et la version en anglais est
22 placée sur le rétroprojecteur. Je ne veux pas laisser entendre que vous
23 avez déjà vu ce document, comprenez-moi bien. Je veux simplement votre
24 aide sur son contenu.
25 Uniquement pour préciser, je dirai que c'est un document du 10 novembre
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1 1993, émanant de la brigade de Vitez. Je ne vais pas vous importuner sur
2 l'origine, même si ceci visait quelqu'un des renseignements et de la
3 sécurité. En haut du passage, voici ce qui est dit, je lis lentement les
4 huit ou dix lignes qui suivent: "D'après des renseignements obtenus ainsi
5 que des données rassemblées au cours d'entretiens avec plusieurs civils de
6 la municipalité de Vitez, il apparaît qu'il y a eu récemment des évictions
7 massives et non contrôlées de Musulmans qui, au cours des premiers jours
8 de la guerre, ont exprimé le souhait de rester dans la municipalité de
9 Vitez à condition qu'ils demeurent des citoyens loyaux de cette zone. Mais
10 ils ont fait l'objet d'évictions non contrôlées à large échelle". Puis on
11 parle de la manière dont ces gens ont perdu leurs biens.
12 En anglais, passons très rapidement à la deuxième page. Vous, dans votre
13 version, vous allez examiner le bas de la première page. Ce document nomme
14 ceux qui ont participé de façon active à l'éviction de ces familles
15 musulmanes. Il y a quatre noms: Anto Zepackic. Vous le connaissez?
16 Réponse: Non.
17 Question: Josip et Zoran Kristc.
18 Réponse: Non plus.
19 Question: Zeljko Martinovic.
20 Réponse: Non.
21 Question: Passons à la troisième page de la version anglaise. Ayez
22 l'obligeance pour vous de passer à la dernière page ou plus exactement au
23 bas de la deuxième page. Là, vous verrez une liste de personnes musulmanes
24 évincées, chassées de leur domicile. Il y a des noms qui ne vous
25 concernent pas, mais est-ce que vous connaissez des Djulabic? Vous
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1 connaissez quelqu'un de la famille Djulabic?
2 Réponse: Non.
3 Question: Passons à la troisième page de votre version. Nous restons sur
4 notre page 3 en anglais. Puis l'on voit une liste où figurent d'autres
5 noms. Il y a d'abord l'autre famille Tuco: Fehim, Ferudzin, Refik et
6 Rabija. Et puis au 7, on voit Amra, Mirjana Tuco ainsi que Fatima Tuco.
7 C'est donc votre famille ici. Est-ce que vous vous souvenez du fait que
8 (...).
9 Réponse: Non. Personne de ces gens-là dont les noms figurent sur la
10 liste n'a à voir avec ma famille la plus proche. Ni Amra ni Mirjana ni
11 Fatima, non plus que Mahmud, (...inaudible), etc. C'est une autre partie
12 de la famille qui définitivement n'est pas située dans la localité qui est
13 la nôtre et qui est tout à fait de l'autre côté de Vitez. Il s'agit de
14 deux familles tout à fait séparées. Cette partie de la famille n'a rien à
15 voir.
16 Question: La question de savoir s'il y a un lien entre ces deux parties
17 ne m'intéresse pas mais vous avez dit aux Juges que vous connaissiez Amra.
18 Réponse: Amra, c'est bien comme cela que s'appelle ma femme, mais ce
19 n'est pas la seule Amra Tuco à Vitez, elle est maintenant Amra Markovic,
20 elle n'est pas la seule Amra Tuco, vous comprenez? Il est une autre Amra.
21 Ce n'est pas ma femme, celle là.
22 Question: Vous vous souvenez que je vous ai posé des questions à propos
23 d'Amra et de l'autre Amra avec beaucoup de soin et vous nous avez dit ce
24 que vous saviez à son propos.
25 Examinez maintenant la dernière partie du document, il s'agira de la page
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1 4 en anglais. Il y a d'autres noms. A partir du numéro 19, on commence à
2 avoir la famille Ugarak, puis 22, 23, 24, 25, nous avons cinq autres
3 membres de la famille: Minka, Medzad, Sultanija et Amir. Vous les
4 connaissez?
5 Réponse: Non. Non, non et non. Je ne connais personne de ces gens-là
6 dont les noms figurent. Non puisque je connaissais Amra Tuco. Ce n'est pas
7 l'Amra Tuco dont je vous ai parlé tout à l'heure, c'est une troisième Amra
8 Tuco dont j'ai parlé tout à l'heure.
9 M. le Président (interprétation): Un instant, un instant, Monsieur
10 Markovic! Calmons-nous.
11 M. Nice (interprétation): Je vous ai demandé combien d'Amra il y avait, et
12 vous avez dit qu'il y avait votre femme qui maintenant porte un autre nom,
13 le vôtre, puis il y a Amra Tuco. Alors comment savez-vous que celle-ci
14 n'est pas celle dont nous parlons? Comment le savez-vous?
15 Réponse: Puisqu'elle est liée à cette famille-là, elle est liée à la
16 famille Tuco qui n'a rien à voir avec nous. Il y a peut-être encore une
17 autre Amra Tuco, une troisième, une quatrième. Je ne vois aucune raison à
18 cela. Là, pour la première fois, je vois qu'en effet il y en a trois, des
19 Amra Tuco. C'est un prénom qui était commun, très usuel et il n'est pas du
20 tout extraordinaire d'en voir plusieurs qui portent le même nom et le même
21 prénom. Et pour la première fois, je vois qu'il y en avait encore une dans
22 cette partie de Vitez, mais mon beau-père ou quelqu'un d'autre de la
23 famille pourrait certainement vous en dire beaucoup plus.
24 M. le Président (interprétation): Vous étiez donc là et vous y viviez et
25 vous saviez qu'il y avait d'autres Musulmans qui portaient ce nom et puis
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1 peut-être d'autres Musulmans en général qui étaient évincés, expulsés en
2 août 1993, vous le saviez. En masse.
3 Réponse: Il n'y a pas eu d'expulsions en masse. Si quelqu'un était
4 parti de Vitez ou pas, c'était sa propre affaire, mais je n'ai pas eu le
5 temps de m'en occuper, je n'y pensais pas, je ne m'occupais pas de ce que
6 faisaient les autres, j'avais tellement de choses à faire. Il fallait que
7 je me préoccupe de beaucoup de choses d'un côté dans ma maison, dans ma
8 famille et à la maternité, et cette partie de la famille ne se trouve pas,
9 d'un point de vue géographique, près de chez nous, mais ils ne sont pas
10 liés non plus à la famille de mon beau-père.
11 Question: Il me reste encore deux questions auxquelles je voudrais
12 toucher. Monsieur Markovic, êtes-vous en train de nous dire que vous étiez
13 tout le temps dans votre maison et que vous étiez tellement préoccupé par
14 ce qui se passait dans votre maison que vous n'avez pas pu vous soucier de
15 ce qui était en train de se passer dans la ville? Est-ce bien cela que
16 vous nous dites?
17 Réponse: Je ne peux pas vous en dire plus, je ne peux pas vous aider en
18 la matière.
19 Question: Vous vous appelez Branko, mais en fait c'est Branislav?
20 Réponse: Non, ce n'est pas Brasnilav. Je m'appelle Branko Markovic,
21 Branislav est quelqu'un d'autre. Vous voyez, c'est la même chose ici, le
22 nom et le prénom qui...
23 Question: Et c'est qui Branislav, alors? Que savez-vous sur lui?
24 Réponse: Je ne sais pas.
25 Question: Et c'est quoi le nom? Branko, est-ce que c'est typiquement un
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1 prénom abrégé de Branislav?
2 Réponse: Non, Branko c'est un prénom, Branislav en est un autre. Brano,
3 c'est encore un troisième prénom.
4 Question: Votre père s'appelait Nikola Markovic. Etait-ce le seul Nikola
5 Markovic à Vitez, s'il vous plaît?
6 Réponse: Je ne sais pas. Cela se peut que ce n'était pas le seul.
7 Question: Est-ce que vous vous êtes jamais trouvé sur une liste de ceux
8 qui travaillaient pour le HVO?
9 Réponse: Non.
10 Question: Il semble que vous n'aviez occupé aucun poste depuis votre
11 retour de la ligne de front et que vous vous occupiez juste dans votre
12 maison. Est-ce bien cela la réalité ou est-ce que vous travailliez en
13 réalité pour le HVO?
14 Réponse: Non, je n'ai pas été employé auprès du HVO et nous avons déjà
15 entendu parler du reste.
16 Question: Votre belle-mère était-elle bien la seule sage-femme
17 travaillant à Vitez à l'époque?
18 Réponse: Oui.
19 Question: Donc malgré le fait qu'elle soit musulmane, il y avait intérêt
20 à la garder là-bas dans l'intérêt de tout le monde et en particulier des
21 Croates?
22 Réponse: C'est bien vous qui arrivez à cette conclusion-là.
23 Question: Si ce que vous nous dites est vrai, donc c'est pour cela que
24 vous venez ici, pour nous présenter une optique positive des événements en
25 1992 et 1993, d'après la position dans laquelle vous étiez.
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1 Réponse: Je ne pense pas que cela corresponde à la vérité.
2 (Questions supplémentaires de Me Mikulicic au témoin Markovic.)
3 M. Mikulicic (interprétation): Monsieur Markovic, on a mentionné le nom de
4 votre épouse. Je sais que pour vous, cela vous paraît peut-être
5 complètement sans importance, votre conversation, mais croyez-moi, il y a
6 des détails qui sont importants pour le Tribunal. Le prénom de votre
7 épouse est bien Amra?
8 Réponse: Oui.
9 Question: Dites-moi, monsieur Markovic, ce prénom caractérise quelle
10 ethnicité?
11 Réponse: Le groupe ethnique musulman.
12 Question: Connaissez-vous ou avez-vous jamais entendu parler d'une femme
13 croate qui porterait le prénom d'Amra?
14 Réponse: Non.
15 Question: Sous la cote 1296.4, il y a un document, Monsieur Markovic,
16 que vous avez devant vos yeux, qui représente le rapport de la Brigade de
17 Vitez, la partie sécurité et renseignements, qui date du 10 novembre 1993
18 et qui concerne l'expulsion des Musulmans de Vitez. Vous nous avez dit que
19 vous n'avez jamais auparavant vu ce document.
20 Réponse: Non.
21 Question: Ma question sera la suivante: pourriez-vous faire des
22 commentaires sur quelques-uns des paragraphes qui figurent ici et est-ce
23 que cela correspond bien avec vos souvenirs? A la première page du
24 document, on dit que c'étaient des individus qui expulsaient les
25 Musulmans, les individus qui mettaient leurs propres intérêts au-dessus
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1 des intérêts de la société et qui, de cette manière-là, ont pu s'emparer
2 de logements, de voitures et d'autres biens. Est-ce bien là une
3 description correcte?
4 Réponse: Je pense bien que oui.
5 Question: Avez-vous des connaissances sur les unités du HVO auxquelles
6 appartenaient les individus qui, de leur propre initiative, faisaient ces
7 expulsions?
8 Réponse: Non.
9 Question: Je m'arrêterai là, mais à la deuxième page du même document,
10 on dit: "Cela indique que certains individus se comportaient de manière
11 inadmissible d'un côté, et de l'autre côté que les intérêts de ces
12 individus représentaient des actes volontaires faits par ces personnes et
13 que ceci est inadmissible". Etes-vous d'accord avec cette affirmation?
14 Réponse: Oui, absolument.
15 Question: Est-ce que cela correspond aux souvenirs que vous avez de la
16 période?
17 Réponse: Oui.
18 Question: Je n'ai plus de questions pour vous, Monsieur Markovic.
19 M. le Président (interprétation): Ainsi s'achève votre déposition devant
20 ce Tribunal, Monsieur Markovic. Je vous remercie d'être venu, vous pouvez
21 maintenant disposer.
22 (Le témoin quitte le prétoire.)
23 M. Kovacic (interprétation): Notre prochain témoin est M. Josip Silic qui,
24 semble-t-il, attend pour venir.
25 (Monsieur Josip Silic est introduit dans le prétoire.)
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1 M. le Président (interprétation): Je prie le témoin de lire la déclaration
2 solennelle.
3 M. Silic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
4 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
5 M. le Président (interprétation): Vous pouvez vous asseoir, Monsieur.
6 (Interrogatoire principal du témoin Josip Silic par Me Kovacic.)
7 M. Kovacic (interprétation): Bonjour, Monsieur Silic.
8 M. Silic (interprétation): Bonjour.
9 Question: Merci d'être venu déposer. Pourriez-vous nous dire votre nom,
10 votre prénom et vos date et lieu de naissance?
11 Réponse: Je m'appelle Josip Silic, je suis né le 17 avril 1945 à Vitez
12 et j'habite rue Kulina Bana à Vitez.
13 Question: Avant la guerre, Monsieur Silic, vous avez aussi vécu et
14 travaillé à Vitez, n'est-ce pas?
15 Réponse: Oui, c'est exact.
16 Question: Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, les différentes
17 fonctions que vous occupiez à ce moment? Quelles sont les plus
18 importantes?
19 Réponse: Après la fin de la guerre, j'ai été officier de liaison auprès
20 de M. Krasimir Zupac et j'étais le premier des ministres dans notre canton
21 pour le développement et le renouveau. Après, j'ai travaillé auprès du
22 président du canton et depuis un an, je suis conseiller du président du
23 Parlement de la Bosnie-Herzégovine et maintenant je suis à la tête de la
24 municipalité de Vitez.
25 Question: Toutes ces fonctions que vous avez mentionnées et que vous
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1 avez occupées depuis la guerre, tout cela, ce sont des fonctions que vous
2 avez eues dans les gouvernements communs des Croates et des Musulmans,
3 n'est-ce pas?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Monsieur Silic, est-il exact qu'au moment où on se
6 répartissait, les Croates et les Musulmans, que le premier critère était
7 qu'aucune fonction ne pouvait être occupée par celles et ceux qui pendant
8 la guerre étaient compromis par rapport à leurs opinions?
9 Réponse: Exactement. La Bosnie est maintenant créée sur une base de
10 parité, donc dans les autorités du canton, on était la moitié d'entre
11 nous, c'était des Croates et l'autre moitié des Musulmans.
12 Question: Je vous remercie. Passons maintenant au sujet propre de votre
13 déposition. Revenons-en aux événements au début de 1992. Pourriez-vous
14 nous confirmer certains arguments que nous avons déjà entendus ici, mais
15 je ne sais pas s'ils ont bien été clarifiés. Quelle était l'évaluation
16 générale chez les hommes politiques en Bosnie-Herzégovine au début de
17 1992? Il s'agissait d'une époque où il y avait déjà eu l'agression tout
18 d'abord envers la Slovénie, par la suite envers la Croatie. Les hommes
19 politiques en Bosnie, quelle était leur opinion sur ce conflit et sur les
20 activités de l'ex-JNA dans les anciennes républiques?
21 Réponse: Je peux vous le dire pour l'endroit, pour la région d'où je
22 viens. Tous les hommes politiques en vue suivaient les événements en
23 Slovénie et en Croatie et ils craignaient que cela n'arrive en Bosnie
24 centrale et en Bosnie-Herzégovine en général, mais ce que je viens de dire
25 relève en particulier des opinions des Croates en Bosnie. Quant aux
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1 Musulmans de Bosnie, leurs hommes politiques, d'après ce que j'ai pu
2 comprendre en regardant la télévision et en écoutant la radio, eh bien les
3 politiciens musulmans pensaient que cela n'arriverait pas en Bosnie-
4 Herzégovine et c'est comme cela qu'ils le voyaient en 1992.
5 Question: Est-ce que vous, personnellement, vous y trouvez une logique?
6 Est-ce ce que vous avez une explication? Pourquoi le SDA croyait-il qu'il
7 n'y aurait pas d'agression sur la Bosnie-Herzégovine?
8 Réponse: Je ne peux pas vous dire pourquoi, mais ils le croyaient
9 sincèrement. Ils le pensaient probablement parce qu'il y avait leurs
10 compatriotes, au Sanjak par exemple, et une partie de leurs hommes
11 politiques se trouvaient toujours à Belgrade. Je pense que c'est pour cela
12 qu'ils croyaient qu'il n'y aurait pas d'agression de la JNA envers la
13 Bosnie-Herzégovine.
14 Question: Monsieur Silic, cette différence que l'on peut noter entre
15 l'opinion des hommes politiques et des intellectuels croates et les hommes
16 politiques et les intellectuels musulmans, eh bien cette différence se
17 reflétait-elle sur leur attitude envers une guerre éventuelle, dans le
18 sens d'une préparation pour la guerre?
19 Réponse: Cela était réellement évident. Les Croates croyaient qu'il y
20 aurait une agression et essayaient de s'y préparer. Ils préparaient la
21 nourriture et même les armements, en essayant de pouvoir réagir dans une
22 telle situation.
23 Question: En 1991, les élections démocratiques ont eu lieu à Vitez?
24 Réponse: Oui.
25 Question: Quels étaient les résultats des élections? Quels partis ont
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1 remporté les élections?
2 Réponse: A Vitez même, ce sont le SDA et le HDZ qui ont remporté les
3 élections, les deux partis nationaux. Je ne faisais pas partie du HDZ,
4 j'étais représentant de la ligue socialiste et je figurais sur la liste de
5 la ligue socialiste. J'ai eu un mandat pour l'assemblée municipale de
6 Vitez. Les élections ont été remportées par les deux partis nationaux, à
7 savoir le SDA et le HDZ.
8 Question: Et le SDP a-t-il remporté quelque voix?
9 Réponse: Il y a eu d'autres élections avec le SDP et les ex-
10 communistes. Il y a eu des Serbes aussi, il y a eu quelques autres partis
11 nationaux aussi qui ont participé aux élections.
12 Question: Cela veut dire que la majorité des voix à l'assemblée étaient
13 partagées entre le SDA et le HDZ?
14 Réponse: Oui, ils participaient ensemble à beaucoup de manifestations
15 préélectorales. Ils partageaient en grande partie leur programme. Donc il
16 y a eu d'autres partis, mais ce sont eux qui ont remporté les élections en
17 1991.
18 Question: Et après les élections, est-ce que ces deux partis ont formé
19 ensemble toutes les instances du pouvoir? Est-ce qu'ils avaient nommé
20 leurs représentants aux postes clés dans la municipalité, avec un accord
21 entre eux?
22 Réponse: Oui, oui, ils ont certainement nommé les fonctionnaires à
23 différents postes au sein des autorités locales.
24 Question: Quel était votre travail, à l'époque?
25 Réponse: J'étais directeur d'une entreprise qui s'occupait des
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1 activités communales et qui s'appelle "Vitkom".
2 Question: Est-ce que vous le faisiez même avant?
3 Réponse: Oui, c'était mon deuxième mandat là-bas. J'ai travaillé un
4 moment dans une autre entreprise, entre-temps, puis je suis revenu au même
5 poste.
6 Question: Il faudrait peut-être expliquer, pour le Tribunal. Il
7 s'agissait là d'une entreprise qui avait une activité communale, comme on
8 l'appelait autrefois. Qu'est-ce que cela veut dire?
9 Réponse: Cela veut dire que cela appartenait à la municipalité. C'est
10 une entreprise qui a des intérêt publics, c'est-à-dire la distribution de
11 l'eau; on s'occupait aussi de tout ce qui était collecte des déchets. Nous
12 avions aussi une partie qui s'occupait du bâtiment et du transport. Comme
13 cela, nous pouvions aussi faire quelques bénéfices parce que nous ne
14 pouvions pas en faire avec la distribution de l'eau.
15 Question: Qui nomme le directeur?
16 Réponse: Etant donné que cette entreprise relevait de la municipalité,
17 c'était la municipalité qui nommait le directeur et qui, une fois le
18 concours pour un poste terminé, donnait son aval pour le choix de la
19 personne.
20 Question: Après ces élections, vous êtes toujours resté directeur de
21 cette entreprise?
22 Réponse: Etant donné que j'avais de nombreuses années d'expérience, que
23 les ouvriers souhaitaient que j'y reste et que j'ai eu aussi un mandat à
24 l'assemblée municipale, les partis nationaux n'ont rien dit et je suis
25 resté au même poste.
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1 Question: Au moment où des problèmes plus importants sont apparus,
2 qu'est-il arrivé quant au fonctionnement des autorités municipales,
3 surtout le parti exécutif?
4 Réponse: D'un jour à l'autre, la situation devenait de plus en plus
5 compliquée. Cela ne pouvait pas fonctionner de la même manière que cela
6 avait été conçu juste après les élections. On avait pensé établir une
7 institution qui pourrait s'occuper de différents aspects de la vie de la
8 municipalité de Vitez, c'est comme cela qu'a été créée la cellule de crise
9 de la municipalité de Vitez avec les représentants de certains partis
10 politiques ainsi que des personnes qui pouvaient aider, par leur
11 professionnalisme. C'est à ce titre-là que j'en suis devenu membre.
12 Question: Au moment où la cellule de crise a été fondée, est-ce qu'à ce
13 moment-là, dans votre opinion, les autorités centrales à Sarajevo
14 fonctionnaient?
15 Réponse: Non. Le pouvoir central à Sarajevo était quasiment inexistant.
16 Je crois qu'à l'époque, les municipalités étaient laissées à elles-mêmes
17 car cette cellule de crises dont j'étais membre souhaitait se lier à
18 d'autres cellules de crise dans les municipalités voisines telles que
19 Travnik, Busovaca et ainsi de suite, mais cela était difficile. On sentait
20 très bien que les instances de l'autorité fonctionnaient mal.
21 Question: Vous pourriez peut-être nous donner quelques exemples? Je vous
22 poserai quelques questions et vous me direz si c'est vrai ou faux. Est-ce
23 que les retraites ont cessé d'être payées?
24 Réponse: Personnellement, je travaillais mais je crois que de toute
25 façon, il y a eu peu d'argent qui arrivait, à l'époque. J'avais mon
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1 salaire surtout parce que nous travaillions pas mal avec la Forpronu déjà
2 présente sur le territoire; cela expliquait une partie de nos bénéfices et
3 comme cela, nous pouvions nous financer. Mais sinon, l'argent n'arrivait
4 presque pas.
5 Question: Vers le milieu de 1992, est-ce que l'on commence déjà à avoir
6 des problèmes d'approvisionnement en électricité?
7 Réponse: Presque tous les jours, il y avait des coupures d'électricité.
8 Il y a probablement eu des diversions aussi sur tout ce qui concernait la
9 transmission de l'électricité, donc les communications étaient mauvaises
10 en général. Vous savez très bien qu'à l'époque, nous n'avions pas de liens
11 de communication, ni envers la Dalmatie ni vers l'Herzégovine, parce que
12 l'armée avait déjà bloqué une certaine route.
13 Question: Est-ce que Sarajevo était déjà encerclée par la JNA?
14 Réponse: Oui. D'après les renseignements que nous pouvions avoir,
15 Sarajevo était déjà sous le blocus.
16 Question: Etant donné vous ne faisiez pas partie des dirigeants de la
17 municipalité -vous ne faisiez partie que de la cellule de crise-, êtes-
18 vous en mesure de savoir si la cellule de crise a été créée selon les lois
19 en vigueur?
20 Réponse: Personnellement, il m'est difficile de le dire. Mais à
21 l'époque, on ne regardait pas les règlements. Cela a été créé pour pouvoir
22 établir des conditions de vie dans la région, donc toutes ces cellules de
23 crise ont joué un rôle important. Au moins, on pourrait le dire pour la
24 municipalité de Vitez. Je ne le dis pas parce que j'en étais membre, mais
25 tous les jours nous travaillions et nous pouvions donner de l'espoir aux
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1 personnes qui vivaient sur le territoire de la municipalité.
2 Question: Dans la cellule de crise, vous nous avez dit que
3 l'appartenance à un parti politique reflétait la population. Est-ce que
4 donc la populations, la situation dans l'assemblée reflétait la population
5 de la municipalité?
6 Réponse: A mon avis, les personnes qui faisaient partie de la cellule
7 de crise étaient des personnes en vue dans la municipalité. C'étaient des
8 gens qui appartenaient aux partis politiques, mais je dois dire que la
9 cellule de crise reflétait bien la structure nationale dans la
10 municipalité, disons moitié moitié. Cela ne veut pas dire que tous ceux
11 qui devaient y être y étaient, mais c'était le but.
12 Question: Est-ce que, dans la cellule de crise, il y avait des
13 représentants des composantes armées, en particulier de la Défense
14 territoriale?
15 Réponse: Oui.
16 Question: Et du HVO?
17 Réponse: Oui.
18 Question: Est-ce que, à l'époque, le Président de la présidence de
19 Bosnie-Herzégovine a déclaré l'existence du danger de guerre imminent?
20 Réponse: Je ne m'en souviens pas, surtout à cause de ce que je viens de
21 dire car dans la municipalité de Vitez, nous manquions souvent de
22 renseignements. Donc je n'ai jamais eu vent d'une telle information.
23 M. Kovacic (interprétation): Quelque part...
24 M. le Président (interprétation): Monsieur Kovacic, il est maintenant 13
25 heures. Vous en êtes à quel paragraphe, maintenant, s'il vous plaît?
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1 M. Kovacic (interprétation): Je voulais juste poser deux ou trois
2 questions sur le point 2.4.
3 M. le Président (interprétation): Est-ce qu'on pourrait le faire
4 rapidement?
5 M. Kovacic (interprétation): Oui.
6 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons maintenant lever
7 la séance.
8 Monsieur Silic, je vous prie de ne pas parler avec qui que ce soit,
9 pendant cette pause, de votre déposition. Cela inclut les représentants du
10 conseil de la défense.
11 Nous allons nous retrouver ici à 14 heures 30.
12 Nous levons donc la séance jusqu'à 14 heures 30.
13 (L'audience, suspendue à 13 heures 02, est reprise à 14 heures 35.)
14 M. le Président (interprétation): Vous pouvez procéder, Maître Kovacic.
15 M. Kovacic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
16 Monsieur Silic, lorsque vous étiez déjà dans cette cellule de crise qui a
17 été convoquée et réunie, pour parler de l'ordre de grandeur et de
18 fréquence, à quel moment cette cellule se réunissait-elle?
19 M. Silic (interprétation): Tous les 10 jours. Et au rythme auquel la
20 situation devenait compliquée pour se transformer en crise, cette cellule
21 pouvait peut-être siéger une ou deux fois par jour. Tout dépendait
22 évidemment de la situation.
23 Question: Est-il vrai que cette cellule de crise avait pour ainsi dire
24 endossé toutes les fonctions de base de l'ancienne municipalité, c'est-à-
25 dire de l'exécutif de la municipalité?
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1 Réponse: Oui. Cette cellule de crise devait donc remplir toutes ces
2 fonctions en attendant l'établissement d'un nouveau pouvoir, parce que
3 d'autres organes ne pouvaient évidemment certainement pas s'en occuper,
4 lorsqu'il a fallu régler tel ou tel problème, prévenir telle ou telle
5 situation et régler des problèmes de tous genres.
6 Question: Vous avez parlé de circonstances dans lesquelles cet organe a
7 été organisé. Pouvez-vous peut-être citer une raison toute particulière
8 pour laquelle vous avez pu être inquiet vous-même et y voir l'une des
9 raisons pour lesquelles on devait organiser l'action de la cellule de
10 crise où vous avez travaillé?
11 Réponse: Personnellement, je voulais faire quelque chose, travailler.
12 Je me rendais à toutes les réunions de la cellule de crise parce que, tout
13 simplement, je voulais sauvegarder la position qui était la mienne et
14 surtout la paix dans la région qui est la nôtre. Définitivement, les
15 tâches qui nous incombaient nous faisaient croire que la cellule marchait
16 bien, qu'il y avait des conclusions utiles compte tenu de la situation qui
17 régnait dans notre région, à cette époque-là.
18 Question: Monsieur Silic, dites-nous si quelquefois on avait traité de
19 la situation ou d'un éventuel danger qui pesait sur l'usine SPS, étant
20 donné la nature de la production de cette usine, c'est-à-dire des
21 matériaux qui s'y trouvaient?
22 Réponse: A ces réunions, la cellule de crise convoquait également des
23 gens qui n'étaient pas membres de cette cellule pour que celle-ci puisse
24 être saisie des fabrications, des productions, des affaires qui étaient
25 les leurs, toujours dans le sens de la sécurité. Ainsi, souvent et très
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1 souvent, on discutait de l'usine Vitezit, laquelle usine, pendant un
2 certain temps, produisait des produits à base de différents acides stockés
3 en quantités énormes. Par exemple, il y avait plus de 100 tonnes d'acide
4 sulfurique. Par conséquent, en cas de bombardement, il y avait une
5 possibilité de voir se produire, dans la vallée de la Lasva, des
6 catastrophes avec des conséquences insoupçonnées. Par conséquent, nous, au
7 sein de cette cellule de crise, nous y avons réfléchi pour prévenir toutes
8 ces catastrophes et permettre aux travailleurs et à tous ceux qui
9 travaillent, évidemment, de gagner leur pain quotidien, et pour éviter les
10 conséquences dont j'ai parlé.
11 Question: Est-ce là un des facteurs qui a, en quelque sorte, conditionné
12 cette façon de travailler dans la cellule de crise?
13 Réponse: En ce temps-là, il n'y avait pas d'autres organes, d'autres
14 autorités qui s'en occupaient peut-être de la manière la meilleure
15 possible.
16 Question: En 1992, ce danger de guerre, cette guerre imminente n'était
17 pas seulement d'ordre abstrait?
18 Réponse: Non, certainement pas.
19 Question: Y a-t-il eu, à la fin, tentative de pilonnage par des raids de
20 l'aviation de la JNA?
21 Réponse: Oui. Personnellement, je me trouvais à Vitez, chez moi, ma
22 maison étant au centre ville. J'ai vu des avions qui se sont attaqués à
23 détruire ces stocks entre autres non seulement d'acides, mais de
24 carburants aussi. D'ailleurs, peut-être que je n'en avais aucune
25 connaissance, mais il y a eu de tels raids et une éventuelle attaque
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1 contre d'autres cibles dans la ville.
2 Question: Je vous remercie. Vous avez parlé de la situation où la
3 cellule de crises s'occupe de plus en plus de questions très différentes
4 et spécifiques. Vous pouvez peut-être nous en donner une illustration?
5 Pour quelle raison devrait-on dire que la cellule s'occupait peut-être des
6 affaires qui n'étaient pas de son domaine, de sa compétence?
7 Réponse: Pour parler de cette cellule de crise, j'ai dit qu'elle était
8 composée de gens qui étaient des gens de bonne réputation, respectables en
9 tant que professionnels, qui voulaient surtout préserver la paix. Entre
10 autres, on se disait que la défense de Vitez devrait être organisée le
11 mieux possible et à plusieurs reprises, on a dit que la Défense
12 territoriale et le quartier général du HVO devaient être unis, fusionnés.
13 Je l'avais demandé moi-même, à un moment donné, à une réunion, donnant
14 proposition portant sur une fusion de ces deux éléments.
15 On se mettait à la recherche de la façon dont il fallait désigner cette
16 autorité nouvelle. D'aucuns disaient que ceci devait être évidemment de la
17 compétence du HVO, d'autres prétendaient que c'était l'armée de Bosnie-
18 Herzégovine qui devait s'en occuper. Or, pour ma part, j'avais proposé de
19 faire quelque chose du milieu, disons. On devait appeler cela le conseil
20 croate de défense. D'autres me demandaient, par exemple, ce que devraient
21 faire, dans le même sens, les gens de Travnik ou de Zenica. C'est comme
22 cela que nous avons abouti à cette conclusion que ceci devrait être,
23 disons, un conseil musulman de défense.
24 Plus tard, comme on entrait déjà dans la seconde moitié de l'année 1992,
25 il y avait de moins en moins de réunions de la cellule de crise.
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1 Question: Excusez-moi. Je dois vous interrompre pour des raisons
2 d'économie de temps. Puisque vous l'avez déjà mentionné alors que je
3 voulais peut-être vous poser une question là-dessus dans le paragraphe
4 4.2... Mais finissons-en avec ce thème-là.
5 Vous avez dit que vous-même, à l'une de ces réunions, avez mis à l'ordre
6 du jour l'organisation d'une entité qui devrait être intitulée "conseil
7 musulman de défense". Cette idée trouvait-elle un sol fertile, ou cette
8 idée était-elle dans l'air ou objet de vos débats?
9 Réponse: Il y avait pas mal de débats. Il y avait d'autres propositions
10 faites, mais cette proposition a été retenue. Personne n'y voyait
11 d'inconvénient, mais cette idée n'a pas été réalisée.
12 Question: Mais pour quelles raisons n'a-t-elle pas été réalisée?
13 Réponse: Je crois que le parti du SDA, certains de ses membres n'ont
14 pas été en faveur de cette idée-là. Par conséquent, cette idée n'a jamais
15 été ensuite objet de nos débats.
16 Question: Monsieur Silic, vous vous souvenez peut-être de l'attitude du
17 HVO, peut-être de celle de Marijan Skopljak?
18 Réponse: Le quartier général du HVO a déjà adopté tout cela. Ils ont
19 déjà préparé des échantillons de ce qui, ultérieurement, sera les insignes
20 de l'armée du HVO. A l'une de ces réunions, évidemment, cette procédure a
21 été retenue et adoptée.
22 Question: Est-ce que, dans ce sens-là, on avait déjà mentionné la
23 désignation d'une première Brigade de Vitez?
24 Réponse: Non. A cette réunion-là, on n'en a pas parlé du tout. On a
25 tout simplement dit qu'on devrait considérer cela comme un conseil croate
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1 de défense.
2 Question: Plus tard, donc, on n'en a pas parlé?
3 Réponse: Non, on n'en a plus parlé du tout.
4 M. Kovacic (interprétation): Monsieur le Président, tout cela était dans
5 le cadre du paragraphe 4.2.
6 Reprenons l'idée et les thèmes de cette cellule de crise. Vous souvenez-
7 vous que plus tard, vers le mois de mai 1992, il y a eu une réunion
8 extraordinaire où référence a été faite au meurtre d'un certain Samir
9 Trako. Est-ce que vous vous en souvenez?
10 Réponse: Oui, je m'en souviens bien. Cette réunion a eu lieu vers les
11 heures du soir. Nous étions tous convoqués à cette réunion, tous les
12 membres de la cellule de crise. La réunion a eu lieu à la mairie. On nous
13 a informé de cet incident où M. Trako a été tué à l'hôtel Vitez. Nous
14 avons été succinctement informés. Des enquêtes, des investigations
15 devaient être faites seulement par des organes compétents.
16 Il a été dit que des situations de ce genre pourraient troubler davantage
17 les esprits du côté des gens des deux nationalités. C'était pénible pour
18 nous tous, mais c'est à cette occasion-là que des affectations ont été
19 déterminées pour Cengic Akija (?) et Mario Cerkez. Eux, ils devraient se
20 mettre à l'œuvre le plus tôt possible et dans les meilleurs délais
21 possibles pour éclairer toutes les circonstances dans lesquelles s'était
22 produit cet assassinat, en concertation avec le MUP, etc..
23 Question: Est-ce que Mario Cerkez était à cette réunion?
24 Réponse: Oui, ils étaient bien à la réunion.
25 Question: Est-ce qu'ils ont fait un rapport là-dessus, sur les
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1 connaissances qu'ils ont eues?
2 Réponse: Oui.
3 Question: Avez-vous entendu dire que les compétences du domaine de la
4 police et un juge d'instruction s'en occupaient également, dans le domaine
5 des compétences qui étaient les leurs?
6 Réponse: Oui, nous en avons été informés. Dans les journées qui ont
7 suivi, nous devions évidemment recevoir pas mal de rapports là-dessus.
8 Question: Très bien, je vous remercie.
9 Pour en finir avec cette partie de votre témoignage portant sur la cellule
10 de crise, Monsieur Silic, à la fin, pouvez-vous dire que vous croyez,
11 étant l'un de ceux qui y ont pris part, que cette institution, cette
12 cellule de crise, même lorsque les gens ont évidemment fini toutes leurs
13 fonctions, a pu contribuer d'une manière ou d'une autre à la préservation
14 de la paix?
15 Réponse: D'après moi, ces gens-là qui ont travaillé dans la cellule de
16 crises ont fait tout ce qu'ils ont pu pour préserver la paix, d'autant
17 plus que la municipalité de Vitez se trouvait dans une situation tout à
18 fait saine et solide par rapport à d'autres municipalités qui ont connu
19 beaucoup plus d'incidents, de troubles. Vitez, en tant que ville, était
20 dans la mesure du possible une ville de paix où les gens pouvaient se
21 rencontrer dans des cafés, bistrots et restaurants. Je crois qu'en cette
22 année 1992, la situation de notre municipalité a été nettement meilleure
23 que celle qui régnait dans d'autres municipalités. Je crois, je veux
24 croire et dire ici que c'est grâce à ce qu'ont fait ces gens-là, membres
25 de la cellule de crise.
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1 Question: Est-il vrai que ces gens-là qui, formellement, étaient membres
2 de la cellule de crise, avaient à leurs côtés des gens de bonne
3 réputation, des citoyens, hommes de la ville, mais également médecins,
4 politiciens, etc.?
5 Réponse: Oui, il y en avait, mais ils venaient à des réunions de la
6 cellule de crise pour traiter de questions autres que celles de logistique
7 ou d'approvisionnement, etc.. Mais disons que du domaine des deux camps,
8 pour ainsi dire, des deux ethnies, Musulmans et Croates, il y a eu
9 beaucoup de gens, intellectuels et citoyens éminents, qui ont grandement
10 contribué à la préservation de la paix.
11 Question: Je vous remercie. Mais le fait est que, en cette date du 16
12 avril, l'événement s'est produit. Est-ce que, dès le début de l'année
13 1993, vous avez pu savoir, est-ce que vous avez pu estimer vous-même
14 qu'une confrontation plus large et généralisée devait avoir lieu?
15 Réponse: A ce moment-là, au temps auquel vous vous référez, la cellule
16 de crise ne fonctionnait plus. Quant à moi, je n'avais plus d'informations
17 que d'aucuns auraient pu avoir. Je dois pouvoir dire ici que je ne croyais
18 pas qu'un conflit allait se produire. Je voulais plutôt croire en la paix
19 parce que ce conflit, définitivement, ne correspondait à personne.
20 Vraiment, je croyais que le conflit ne devait pas avoir lieu.
21 Question: Où étiez-vous, le 15 avril 1993?
22 Réponse: Le 15 avril, au cours des heures matinales, vers 8 heures, je
23 me préparais de concert avec mon chauffeur, Hussein Beso, à partir pour
24 Split où je devais faire quelques achats. Il s'agissait de pièces de
25 rechange pour des voitures et des camions. On voulait également acheter
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1 quelques cadeaux pour ma fille parce que ceci est arrivé avant les jours
2 de Pâques. On n'a pas pu y arriver parce qu'à Novi Travnik, les barrages
3 étaient établis sur la route et on a rebroussé chemin.
4 Question: Vous avez mentionné le nom de Hussein Beso. Il est Musulman?
5 Réponse: Oui, on se fréquente encore. Il vit à Vitez, à Kruscica.
6 Question: Monsieur Silic, ces barrages établis sur la route, ils étaient
7 contrôlés par qui? Par quelle partie?
8 Réponse: Les barrages se trouvaient sous le contrôle de l'armée de
9 Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire des Musulmans.
10 Question: Est-ce qu'il y avait beaucoup de véhicules déjà sur le site
11 même?
12 Réponse: Il y avait une dizaine de véhicules. On nous a dit tout
13 simplement qu'il y avait un incident et que l'on ne pouvait pas passer.
14 C'est comme cela qu'on est retournés. D'autant plus que ma fille devait se
15 présenter à un examen et que moi, j'étais un peu pressé, j'ai voulu tout
16 simplement m'acquitter de ces tâches aussi.
17 M. le Président (interprétation): Pouvons-nous aller de l'avant, s'il vous
18 plaît, pour essayer de résumer et d'abréger?
19 M. Kovacic (interprétation): Une question supplémentaire, s'il vous plaît.
20 Vous étiez directeur d'une firme avant que le conflit n'éclate. Alors,
21 essayons de confirmer le fait que la composition ethnique des employés de
22 votre entreprise correspondait à la situation ethnique de Vitez et des
23 environs.
24 Réponse: Jamais on ne s'est occupé de faire autrement. Pour être
25 employé dans la firme, il fallait se présenter à un concours, mais disons
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1 qu'il y avait moitié moitié de Musulmans et de Croates. Il y avait
2 quelques Serbes et des Roms. Les Roms étaient une main d'œuvre non
3 qualifiée ou semi qualifiée. Par conséquent, elle était employée aussi.
4 Question: Et cela se présentait donc ainsi jusqu'en cette date du 16
5 avril?
6 Réponse: Oui.
7 Question: Dès le début du conflit, à en juger d'après les informations
8 que vous avez pu recevoir, quelle était votre conclusion quant à la
9 raison, la cause de ce conflit armé qui opposait l'armée de Bosnie-
10 Herzégovine et le HVO?
11 Réponse: Je ne pouvais pas faire de conclusion. Je sais seulement que
12 je ne pouvais pas bouger de chez moi. On tirait de partout, la ville était
13 dans un blocus, encerclée. Pendant ces quelques jours, on ne s'est pas
14 retrouvés là où on était, on essayait de se débrouiller. Je me suis rendu
15 compte du fait que c'était un conflit armé. Des obus tombaient, des coups
16 de feu. Si j'ai pu conclure quoi que ce soit, étant donné ces incidents,
17 j'ai pu conclure que c'était l'armée de Bosnie-Herzégovine qui a attaqué
18 Vitez.
19 Question: Cette estimation se base-t-elle sur des faits? Pour quelle
20 raison l'armée de Bosnie-Herzégovine aurait-elle attaqué Vitez? Quelle
21 serait sa finalité?
22 Réponse: Je ne suis pas un militaire. Probablement, je ne peux pas vous
23 en parler dans un éclairage de stratégie quelconque, mais disons qu'ils
24 avaient pour but de couper ces voies de communication qui reliaient Vitez,
25 Busovaca et les autres voies de communication. Etant donné que Travnik
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1 était déjà fermée, restait encore la ligne de communication, la route de
2 Busovaca à Travnik pour essayer surtout de s'assurer la logistique, ce
3 soutien logistique, et se rendre maître du territoire. Je crois que de
4 prime abord, ils étaient intéressés par l'usine qui, certainement, n'était
5 pas sans intérêt pour toute armée.
6 Question: Je vous remercie. L'une des affaires, dans laquelle vous avez
7 été essentiellement engagé, concernait la construction de la route dite
8 "du Salut"?
9 Réponse: Les municipalités de Vitez, Busovaca, Travnik, Novi Travnik et
10 Kiseljak, étant donné qu'elles étaient bloquées en quelque sorte car les
11 routes, les voies de communication étaient bouchées, avaient décidé de
12 construire une nouvelle route, la "Route du Salut", c'est-à-dire vers Novi
13 Travnik en novembre pour aller par Novi Travnik, Gornji Vakuf, vers
14 l'Herzégovine et Split. Je vous ai déjà dit que dans le cadre de mon
15 entreprise, nous avions une unité de génie civil qui, munie d'équipements,
16 de machines de construction, devait évidemment tout faire pour pouvoir
17 mener à bien les travaux de cette nouvelle route. Toutes les municipalités
18 ont associé leurs capitaux pour tout faire avant l'hiver jusqu'en
19 l'automne. Nous avons déjà reçu pas mal de compensations, pour parler
20 capitaux et argent. Nous avons été compensés du fait que nous avons reçu
21 de la farine et de l'huile, mais pas d'argent.
22 Question: Vous avez parlé donc de l'automne et de l'hiver. Vous parlez
23 de l'automne 1992?
24 Réponse: Oui, c'est bien cela.
25 Question: Cette route-là devait vous rendre un débouché plus sûr sur le
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1 sud?
2 Réponse: Cette route devait permettre la vie sauve à toute la
3 population de la vallée de la Lasva. Si jamais l'agression de la JNA se
4 perpétuait, nous pouvions bénéficier d'un approvisionnement en vivres, en
5 médicaments, etc. En fait, c'était –dirais-je- l'artère principale de
6 Bosnie-Herzégovine, de cette partie de la Bosnie-Herzégovine.
7 Question: Il y a peut-être une question que j'ai ratée tout à l'heure.
8 Quant aux employés de cette entreprise, Vitkom, avez-vous à n'importe quel
9 moment donné, été obligé de signer des déclarations d'allégeance pour
10 rester travailler là-bas?
11 Réponse: Non. Mon directeur technique était Ekrem Seraganovic, un
12 Musulman.
13 Question: Non, non, non. Il ne faut pas tomber dans des redondances. Je
14 voulais demander simplement si c'était la municipalité qui vous l'avait
15 demandé?
16 Réponse: Non, jamais de la vie.
17 Question: Avez-vous jamais entendu parler de cela?
18 Réponse: On en a parlé. Il y avait des rumeurs comme quoi cela existait
19 mais moi, en tout cas, je n'étais en rien concerné.
20 Question: Quand on parle de municipalité, est-ce à dire qu'il s'agit
21 tout simplement de décisions portant affectation de tel ou tel emploi ou
22 de tel ou tel travail, ou pour parler de différents certificats?
23 Réponse: Peut-être dans ce sens-là, mais ce n'était certainement pas
24 quelque chose où dans les municipalités les Musulmans devraient être aussi
25 importants.
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1 Question: Après le déclenchement de ce conflit, le 16 avril 1993, peut-
2 on dire jusqu'à quelle date on a pu sortir de la vallée de la Lasva par la
3 route? Pouvez-vous nous le situer dans le temps?
4 Réponse: A partir du 16 avril, on ne pouvait sortir nulle part.
5 Question: Vous voulez dire pour des civils? Vous parlez des civils?
6 Réponse: Non, je parle de tout le monde.
7 Question: Et puis, encore une autre question étant donné que ceci est de
8 votre compétence et que nous avons entendu ici des témoignages s'y
9 rapportant: est-il vrai, Monsieur Silic, que le système de distribution de
10 l'eau a été souvent bloqué et que c'était ainsi peut-être une des façons
11 de faire pression sur la population de la vallée de la Lasva?
12 Réponse: Oui, le système d'approvisionnement en eau a été souvent
13 fermé, arrêté. Pour parler des sources, on parle de Kruscica et c'est
14 Zenica et d'autres villes qui étaient approvisionnées. Il est arrivé que
15 quelquefois, pendant une dizaine ou une vingtaine de jours, le système ait
16 pu être arrêté.
17 Question: Arrêté par qui?
18 Réponse: Par les Musulmans parce qu'eux étaient à la source, au
19 captage.
20 Question: Vous parlez donc du premier point, du système
21 d'approvisionnement?
22 Réponse: Oui, parce qu'à cette époque-là, on peut dire que 250 litres
23 par seconde partaient pour Zenica et environ 100 à 150 litres par seconde
24 partaient pour Vitez. On ne pouvait pas bien sûr spécifier, mais disons
25 qu'il y avait une pression dans les 18 bar.
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1 M. le Président (interprétation): S'il y a d'autres questions à ce propos,
2 laissez-les poser par l'accusation. Mais moi, je ne vois rien qui se
3 rapporte à cela dans votre résumé. Il se peut que j'aie omis quelque
4 chose.
5 M. Kovacic (interprétation): Cela ne se trouvait pas dans le résumé, je
6 m'en suis tout simplement souvenu puisque l'on parlait d'alimentation en
7 eau et que le témoin était spécialiste en la matière. Mais j'ai
8 pratiquement terminé.
9 Oui, je n'ai plus de questions à poser à ce témoin. Je vous remercie,
10 Monsieur le Président.
11 M. Naumovski (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.
12 Nous n'avons pas de question à poser à ce témoin.
13 M. le Président (interprétation): Avez-vous des questions, Monsieur Nice?
14 (Contre-interrogatoire de M. Josip Silic par Me Nice.)
15 M. Nice (interprétation): Très peu. En votre qualité d'homme d'affaires,
16 veuillez examiner ceci. Je ne vais pas demander le versement de ce
17 document au dossier, mais je voudrais que le témoin l'examine.
18 Si vous voyez qui sont les directeurs des entreprises à Vitez au cours de
19 la période qui a mené au mois d'avril 1993, c'est un aperçu exact, n'est-
20 ce pas? Sur les neuf entreprises, huit étaient sous la direction de
21 Croates, de Bosniens. Il n'y avait que Sintevit qui avait à sa tête un
22 Musulman, M. Basic, n'est-ce pas?
23 Réponse: Exact. Vous voulez que je vous réponde?
24 Question: Oui, j'ai votre réponse. Voulez-vous ajouter quelque chose?
25 Réponse: Non, vous n'avez toujours pas ma réponse parce que je voulais
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1 ajouter quelque chose. Vous m'entendez? Vous me comprenez? Je voulais
2 ajouter quelque chose. Etant donné que le HDZ avait gagné les élections et
3 aussi le HDA, la plupart de ces directeurs étaient membres de l'alliance.
4 Ce n'étaient pas des hommes de partis. Ils avaient été désignés à ce poste
5 de façon tout à fait légale. Il y avait eu une concurrence, disons
6 plusieurs personnes en lice. Ils avaient été élus par les conseillers
7 ouvriers. Pour ce qui est de Kruscica, Ivica Franjic était le directeur
8 parce que personne d'autre ne voulait cet emploi. C'était une entreprise
9 qui faisait des pertes, qui travaillait à perte.
10 Question: Peu importe. Avant de reprendre ce document, je vais vous
11 demander ceci. On dit que les personnes qui aidaient et se trouvaient à la
12 direction étaient surtout des Croates, n'est-ce pas?
13 M. le Président (interprétation): Poursuivons.
14 M. Nice (interprétation): Vous connaissiez ce monsieur Ivica Franjic? Vous
15 le connaissez encore, je suppose?
16 Réponse: Oui.
17 Question: Si l'on disait qu'il a tenu les propos suivants: "Sur les neuf
18 entreprises de Vitez, le HVO avait le contrôle complet de huit d'entre
19 elles", est-ce qu'il aurait raison en disant cela?
20 Réponse: Non, ce ne serait pas exact. En effet, Nikola Krizanovic
21 faisait partie de la liste des délégués communistes. Il était à la place
22 n°1 et il ne s'intègre pas du tout dans ce plan dont vous parlez. Il
23 n'était pas du HDZ. Vlado Diskovic, lui aussi, j'en ai déjà parlé. Il y
24 avait aussi Branko Lovric. Toutes ces personnes avaient déjà ces postes
25 avant les élections et ils ont été nommés légalement par les conseils
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1 ouvriers à ces postes. Donc ceci n'a rien à voir avec le fait de savoir si
2 quelqu'un était favorable ou opposé au HDZ.
3 Question: Le temps m’est compté, donc je ne vais pas vous interroger
4 longtemps. Non seulement vous connaissiez Ivica Santic, mais puisque vous
5 faisiez partie de la cellule de crise vous connaissiez sans doute la
6 plupart des personnalités éminentes de l'époque?
7 Réponse: Oui.
8 Question: Vous connaissiez Cerkez?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Et Dario Kordic?
11 Réponse: Non, je ne le connaissais pas aussi bien que je connaissais
12 Cerkez et les autres. En effet, Kordic n'est pas de Vitez. De toute façon,
13 je ne le connaissais pas au moment de la cellule de crise, avant le début
14 du conflit.
15 Question: J'y reviendrai dans un instant, mais je vais vous dire ceci
16 carrément: des témoins sont venus ici pour dire que vous étiez un Croate
17 modéré, comme certains l'ont décrit, vers le milieu de l'année 1992.
18 Reconnaissez-vous qu'on vous considérait de l'extérieur comme étant un
19 modéré parmi les Croates, au moment où vous faisiez partie de cette
20 commission mixte?
21 Réponse: Mais vous savez, il est difficile de parler de soi-même. Les
22 gens me considéraient comme étant un homme honnête, pas un Croate modéré,
23 simplement un homme pacifique qui voulait la paix. C'est pour cela qu'ils
24 me soutenaient, parce que j’œuvrais pour la paix.
25 Question: Fort bien. Peut-on ainsi dire que vers le mois d'avril 1992,
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1 vous, en personne, vous vous étiez opposé à des interventions faites par
2 Anto Valenta par rapport aux objectifs que vous poursuiviez? Vous l'avez
3 dit assez publiquement lors de réunions, n'est-ce pas? Est-ce que c'était
4 bien votre position d'alors?
5 Réponse: Je ne me souviens plus très bien, mais sans doute que tout le
6 monde ne peut pas être pareil, on ne peut pas tous faire la même chose.
7 Certains font mieux les choses que d'autres et effectivement, si des
8 déclarations de ce genre ont été faites à des réunions, je m'y suis
9 opposé.
10 Question: Est-il exact de dire qu'à ces moments-là, au cours de cette
11 première période, vous aviez une attitude assez amicale envers les
12 Musulmans et que, de ce fait, Santic et d'autres vous ont considéré comme
13 pratiquement un traître envers les Croates? Est-ce que votre propre… Les
14 personnes qui se trouvaient du même côté que vous vous traitaient-elles
15 aussi comme quelqu'un venant de l'extérieur?
16 Réponse: Non, non, elles me voulaient, ils voulaient que j'aie ces
17 contacts afin d'enrayer toute possibilité de conflit entre Musulmans et
18 Croates. Ivica Santic l’a fait lui aussi, tout comme moi. Moi, je suis
19 allé dans des villages musulmans tout à fait librement. Je le fais encore
20 aujourd'hui, jusqu'à ce jour encore.
21 Question: Je vous interromps car j'ai peu de temps. Est-il exact de dire
22 qu'au moment où vous avez soulevé la question ou au moment où on a soulevé
23 la question de la dénomination à donner à cette commission mixte, Valenta
24 et d'autres gens de Grude y ont mis fin? Est-ce que vous vous en souvenez?
25 Réponse: Non. Non, non, ce n'était pas Valenta. Moi, je ne connais
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1 personne à Grude mais vous savez que la cellule de crise est restée une
2 œuvre inachevée, même si tout le monde estimait que c'était une bonne
3 idée. Malheureusement, elle n'a vraiment jamais vu le jour.
4 Question: Je peux me tromper, Monsieur, mais est-ce qu'aujourd'hui vous
5 n'avez pas dit que c'était le HVO qui voulait poursuivre cette initiative
6 et que c'était l'autre partie qui s'est opposée à cela, ou est-ce que je
7 me souviens mal de votre déposition?
8 Réponse: Non. Le quartier général du HVO est tout à fait d'accord avec
9 cette idée, à ce point que Skopljak avait préparé des modèles d'insignes
10 que pouvaient porter les membres de cette commission.
11 Question: Eh bien, je vais terminer sur ce point: ce sont les vôtres à
12 Grude qui ont mis fin à cette tentative lorsqu'on a considéré que c'était
13 une entreprise mixte. Est-ce que ce n'est pas la vérité? Rappelez-vous que
14 ceci a d'ailleurs été dit dans ce prétoire par d'autres.
15 Réponse: Je ne sais pas, en ce qui concerne Grude. Moi, je ne connais
16 que la municipalité de Vitez et je vous ai déjà dit ce que je savais.
17 Question: Je voudrais que vous examiniez un document, peut-être deux.
18 Voyons le premier. Il s'agit de la pièce Z88.2. Je vois votre nom qui
19 figure ici. C'est la raison pour laquelle je vais vous poser une question
20 à l'encontre de ce document.
21 En voici l'original pour vous. La version en anglais sera placée sur le
22 rétroprojecteur. Apparemment, il s'agit de conclusions tirées à la suite
23 d'une session extraordinaire de la cellule de crise de Vitez, le 5 avril
24 1992.
25 Point 1, vers le milieu de la page, on trouve un extrait dont je vous
Page 25489
1 donne lecture: "le quartier général de la Défense territoriale et les
2 commandants des batteries anti-aériennes ont reçu pour tâche de disposer
3 immédiatement des canons en position de tir afin d'assurer la défense de
4 la société" et puis là il y a quelque chose d'illisible, c'était peut-être
5 l'usine SPS.
6 Réponse: Oui.
7 Question: Et la mise en oeuvre de ces manœuvres sera déterminée par
8 plusieurs personnes, dont vous. Est-ce que vous vous souvenez de cela?
9 Est-ce que vous avez participé à la mise en place de ces canons en guise
10 de défense de l’entreprise?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Alors, aidez-nous sur ceci: "Stipo Krizenac et la cellule de
13 crise du HDZ doivent apporter des munitions pour les canons. Ici, on parle
14 aussi de quartier général de crise du HDZ. Qu'est-ce que c'était?
15 Réponse: Il n'y avait pas de cellule de crise du HDZ, c'est plutôt de
16 la municipalité. C'est sans doute une erreur typographique. Mais
17 permettez-moi de dire qu'en ce qui concerne ma propre participation,
18 j'étais censé emmener avec mes camions les canons qu'il fallait déployer à
19 un endroit qui était convenu.
20 Question: Certes. Mais voyez, on fait une référence spécifique. Vous
21 dites que c'est peut-être une erreur typographique, mais on parle
22 maintenant du quartier général de crise du HDZ qui s'occupe des munitions
23 pour les canons. Alors est-ce que ceci ne traduit pas tout simplement le
24 fait qu'à ce stade des préparatifs...
25 Réponse: Non.
Page 25490
1 Question: Je n'avais pas encore terminé ma question.
2 M. le Président (interprétation): Laissez M. Nice terminer sa question, ne
3 l'interrompez pas. Je vous en prie, Monsieur Nice.
4 M. Nice (interprétation): Merci. Est-ce que ceci traduit le fait qu'à ce
5 stade des préparatifs, le parti politique et le HVO n'étaient qu'une seule
6 et même chose et que le parti politique s'occupait de choses telles que
7 des munitions, par exemple?
8 Réponse: Non.
9 Question: Merci. Essayons de terminer cet aperçu de la situation et pour
10 vous rendre justice, en toute équité envers vous, après le déclenchement
11 du conflit, est-ce que vous vous êtes retrouvé à un poste au sein de
12 l'usine communale?
13 Réponse: Oui, à partir du 16 avril, j'avais des obligations de travail
14 et en compagnie de personnes, je suis resté d'ailleurs pendant toute la
15 guerre dans cette société du service public.
16 Question: Et plusieurs Bosniens étaient obligés de travailler dans cette
17 usine, il y étaient contraints et forcés, n'est-ce pas?
18 Réponse: Je ne suis pas d'accord.
19 Question: Même des personnes qui avaient travaillé pour rémunération
20 auparavant s'étaient retrouvées dans cette usine où elles étaient
21 désormais obligées de travailler sous la contrainte?
22 Réponse: Pas du tout. Ils ne travaillaient pas du tout sous la
23 contrainte. Ils ne se trouvaient pas dans l'usine des services publics.
24 Pendant la guerre, il n'y avait que sept personnes et moi, il y avait des
25 Roms, les Croates et nous les Serbes.
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1 Question: Très bien, c'est ce que vous dites, mais on a dit… D'autres
2 témoins sont venus dire que la "route du salut" avait surtout pour
3 objectif d'assurer une sécurité de passage pour l'envoi de renforts depuis
4 la Croatie. Etes-vous d'accord avec cette thèse?
5 Réponse: De toutes les contrées de Bosnie-Herzégovine et aussi de
6 Croatie, tout ce dont la Bosnie centrale avait besoin, chaque fois qu'on
7 pouvait l'obtenir, on essayait de l'obtenir.
8 Question: Et les conséquences de ceci, c'est qu'en fait cette route a
9 été bénéfique pour les Croates. Celui qui en a parlé est le témoin DC aux
10 pages 19, 247 à 248. Il a dit que cette route n'était pas particulièrement
11 significative pour les Musulmans, mais qu'elle servait surtout la cause
12 croate.
13 Réponse: Non, non, elle était utilisée par les uns et les autres.
14 Question: Revenons à la nuit du 15 au 16... Excusez-moi, je voulais
15 aborder un autre point auparavant. Une question vous a été posé concernant
16 ce serment d'allégeance, concernant les personnes qui voulaient garder
17 leur emploi en 1992. Lorsqu'on vous a parlé de ces déclarations de loyauté
18 ou d'allégeance, vous avez dit que cela ne se faisait pas dans votre
19 entreprise, mais est-ce que vous auriez entendu dire que cela se passait
20 ailleurs?
21 Réponse: Ce que j'ai entendu dire, c'est qu'il y avait des documents
22 qui désignaient certaines personnes à certains postes et qu'elles
23 obtenaient des points différents pour cela. Mais la plupart des gens sont
24 restés à l'emploi qu'ils avaient auparavant.
25 Question: Ceci me préoccupe parce que ce que vous avez dit en réponse
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1 avant même qu'on parle des certificats, car cette question était
2 postérieure, ce que vous avez dit lorsqu'on vous a posé une question sur
3 les déclarations de loyauté, c'est que vous aviez entendu dire que cela se
4 passait ailleurs dans la municipalité. Alors, je vous demande de bien vous
5 souvenir. Est-ce qu'il n'y a pas eu des rumeurs selon lesquelles il y
6 avait des gens qu’on obligeait à faire des serments d'allégeance afin
7 qu'ils puissent conserver leur emploi?
8 Réponse: La question qui m'a été posée est de savoir si cela s'était
9 fait dans mon entreprise. J'ai répondu par la négative. J'ai dit que
10 personne n'avait signé une telle déclaration dans la municipalité. J'ai
11 entendu dire qu'il y avait des documents qui désignaient telle personne à
12 tel emploi, tout en donnant le descriptif de l'emploi, et les points que
13 cela représentait.
14 Question: Je ne vais pas poursuivre sur ce sujet vu le peu de temps que
15 j’ai, mais vous avez commencé... Vous êtes aujourd'hui conseiller auprès
16 du chef de la municipalité du maire. Qui est-ce?
17 Réponse: Kadisa Cerkez. Je suis aussi conseiller auprès du Président du
18 Parlement de Bosnie-Herzégovine.
19 Question: Est-ce que cette personne, Cerkez, a un quelconque rapport de
20 parenté avec l'accusé Cerkez?
21 Réponse: Eh bien, le nom de famille de cette dame est Cerkez, donc il y
22 a peut-être un lien distant.
23 Question: Le 15, vous êtes revenu du barrage qui se trouvait selon vous
24 à Novi Travnik. Où avez-vous passé la nuit du 15?
25 Réponse: A Vitez. J'étais chez moi. Au début de la soirée, nous, hommes
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1 d'affaires, nous étions invités à une réunion, une réunion tout à fait
2 régulière qui portait sur la protection des usines, des différentes
3 propriétés. C'était un contrôle périodique pour ce qui est de l'entretien
4 des bâtiments.
5 Question: Et où cette réunion a-t-elle eu lieu?
6 Réponse: Au bureau de la poste à Vitez, parce que là l'électricité
7 fonctionnait.
8 Question: Mais avez-vous entendu dire que, cette nuit-là, il y a eu
9 d'autres réunions ailleurs, Monsieur Silic?
10 Réponse: Non, non.
11 Question: Vous connaissiez M. Santic, vous le connaissez encore. Vous
12 étiez un des principaux hommes d'affaires, dans votre communauté?
13 Réponse: Tout à fait.
14 Question: Une question vous a été posée cet après-midi et vous avez
15 répondu de façon raisonnée en expliquant pourquoi c'étaient les Musulmans
16 qui avaient lancé l'attaque. Est-ce que j'ai bien résumé la position que
17 vous aviez adoptée?
18 Réponse: Oui.
19 Question: Est-ce que vous êtes en train de nous dire qu'en dépit de vos
20 contacts, du poste ou de la situation que vous aviez au sein de la
21 communauté, vous ne pouvez tirer que des déductions de ce qui s'est passé
22 le matin du 16 et qu'à l'examen des événements, vous pensez
23 qu'inévitablement c'étaient les Musulmans qui en étaient responsables?
24 Réponse: Le 15, j'ai essayé de me rendre à Spit, mais je suis revenu.
25 Le 16, je n'ai même pas pu sortir de chez moi parce qu'on tirait partout,
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1 les obus pleuvaient. Alors, qu'est-ce que je peux tirer comme conclusion?
2 Question: Beaucoup de témoins sont venus nous dire que votre ville étant
3 si petite, tout le monde devait être au courant de ce qu’il s'est passé ce
4 matin-là. Vous, vous êtes mieux placé que quiconque ou que la plupart des
5 autres. Vous pourriez peut-être nous parler des causes de ce qu’il s'est
6 passé, des combats qui ont eu lieu le 16. Mais manifestement, tout ce que
7 vous pouvez faire, c'est une analyse des événements, de façon neutre.
8 C'est vraiment votre position?
9 Réponse: On en a discuté pendant des journées entières. On s'est
10 demandé s'il allait y avoir un conflit, si un conflit pouvait être évité.
11 Il y avait déjà des conflits dans d'autres municipalités avoisinantes,
12 mais pas à Vitez. On se demandait comment les empêcher. On était encerclés
13 dans cette vallée, on ne pouvait pas la quitter. Alors je vous ai dit que
14 les hypothèses, eh bien c'étaient les seules qu'on pouvait tirer à
15 l'époque.
16 Question: Je vais terminer sur ce point, puis je n'ai qu'une suggestion
17 à vous faire. Cette nuit-là, il y avait des réunions au cours desquelles
18 l'attaque a été planifiée. Etant donné votre poste d'autorité et de
19 supériorité, vous deviez le savoir. Et si vous ne le saviez pas à ce
20 moment-là, vous devez l'avoir appris par la suite. Vous ne nous dites pas
21 la vérité quand vous dites ne pas savoir ce qu’il s'est passé, n'est-ce
22 pas?
23 Réponse: Ce soir-là, le soir du 15, dans la nuit du 15 au 16, je vous
24 l'ai dit, nous avions été invités à une réunion. Nous avons eu pour tâche
25 d'analyser la situation qui prévalait dans chacune de nos entreprises,
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1 pour voir quelles étaient les mesures de sécurité à prendre parce qu'on
2 apprenait que la situation se dégradait. Je suis allé voir les réservoirs,
3 d'autres parties de l'entreprise, puis je suis reparti au bâtiment de la
4 poste où nous nous étions réunis. Puis, vers 3 ou 4 heures, je suis rentré
5 chez moi pour dormir, sans avoir de complément d'information.
6 Je n'aurais pas de raison de vous dire la vérité. J'ai 56 ans, j'ai les
7 cheveux gris, j'ai des enfants et je n'ai besoin de rien de la sorte.
8 Question: Mais Monsieur, bien sûr, si vous étiez à Split, vous n'auriez
9 pas pu aller à la réunion. Alors, est-ce que vous avez reçu une
10 convocation à cette réunion?
11 Réponse: Je faisais quelque chose à la maison. Ils ont appelé chez moi
12 et ils m'ont dit que je devais venir entre 7 heures et demie et 8 heures.
13 Et c'était une réunion régulière.
14 Question: Mais avez-vous appris qu'il y avait eu par la suite une
15 réunion à l'adresse de M. Kordic?
16 Réponse: Non, non, cela je n'en savais rien. Il se peut que d'autres
17 aient été au courant, mais pas moi.
18 Question: Et qui vous a convoqué à cette réunion?
19 Réponse: Ivan Santic.
20 Question: Et à quelle heure vous a-t-il téléphoné pour vous convoquer?
21 Réponse: Je vous l'ai dit il y a quelques instants, il y avait eu un
22 appel téléphonique et on m'avait dit de me rendre au bureau de poste entre
23 7 heures 30 et 8 heures. J'y suis allé.
24 Question: Mais est-ce que M. Ivan Santic se trouvait à votre réunion, ou
25 avait-il une autre réunion ailleurs?
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1 Réponse: Puisque nous nous rassemblions là, je vous l'ai dit, c'étaient
2 des réunions tout à fait régulières qu'on avait au cours des deux semaines
3 précédentes, soit le matin soit le soir. On nous avait dit que la
4 situation se compliquait, qu'il y avait risque de déclenchement d'un
5 conflit. Et il y avait toutes ces tâches que nous avions, de toutes
6 façons, dans nos entreprises. Il fallait examiner toutes ces questions et
7 voir quel était le degré de préparation de nos ouvriers, et il nous
8 fallait attendre jusqu'à nouvel ordre.
9 Question: Est-ce que Santic est allé à une autre réunion, à d'autres
10 réunions?
11 Réponse: Nous occupions quelques pièces dans le bureau de poste et je
12 n'ai plus revu Ivica Santic par la suite. Je ne sais pas s'il est parti,
13 je ne peux pas vous dire s'il est parti ou pas.
14 Question: Vous avez parlé de ces volumes considérables d'acide qui se
15 trouvaient à l'usine SPS, n'est-ce pas? C'était inquiétant?
16 Réponse: Oui.
17 Question: Et il y avait aussi le pétrole qui se trouvait à l'usine SPS,
18 autre sujet de préoccupation?
19 Réponse: Là, je n'en sais rien. Non, il n'y avait pratiquement plus de
20 carburant.
21 Question: Est-ce que Cerkez était membre de la cellule de crise?
22 Réponse: Cerkez venait assister aux réunions s'il était convoqué, mais
23 il n'était pas membre de la cellule de crise. Il se peut qu'il ait été
24 nommé à la cellule de crise par la suite, mais au départ il n'en faisait
25 pas partie.
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1 Question: Et en 1992, à quel titre est-il venu assister à ces réunions
2 de la cellule de crise?
3 Réponse: Je pense qu'il travaillait au quartier général du HVO et c'est
4 à ce titre qu'il est parti. Il n'est venu que ex-officio, et pour
5 certaines réunions.
6 Question: Une dernière question au sujet de cette réunion à laquelle
7 vous avez été convoqué. Repensez-y. Qui était présent à cette réunion?
8 Pouvez-vous nous donner des noms?
9 Réponse: Ivica Santic, Marijan Skopljak, Nikola Krizanovic, Marinko
10 Katava, Branko Lovric, j'étais présent, puis il y avait d'autres
11 directeurs, je ne me souviens plus tout à fait de tous les noms, mais je
12 crois avoir cité la plupart d'entre eux.
13 Question: Donc c'était une réunion civile, c'est-à-dire qu'il n'y avait
14 pas présence de militaires.
15 Réponse: Oui, oui, il n'y avait que des civils.
16 Question: J'en ai terminé.
17 Je vous remercie, Monsieur le Président.
18 (Questions supplémentaires de Me Kovacic.)
19 M. Kovacic (interprétation): Je souhaiterais éclaircir deux points. La
20 liste des directeurs qui vous a été montrée par mon collègue, le
21 Procureur... Premièrement, pouvez-vous vous souvenir s'ils étaient tous
22 des "nouveaux" directeurs, ou certains d'entre eux avaient été directeurs
23 auparavant?
24 Réponse: Ce n'étaient que des anciens directeurs, des gens qui avaient
25 été élus à ces postes-là auparavant.
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1 Question: Autrefois, en Yougoslavie et donc en République de Bosnie-
2 Herzégovine, la loi prévoyait la façon dont on devait élire quelqu'un au
3 poste de directeur dans les entreprises dites sociales?
4 Réponse: C'est exact.
5 Question: Ne rentrons pas dans les détails ici. Mais étant donné que
6 vous étiez directeur, pourriez-vous nous dire si la procédure était
7 toujours très exacte et s'il fallait bien se tenir à cette procédure?
8 Réponse: Oui. La procédure devait être observée.
9 Question: Un deuxième point: en vertu des accords entre le SDA et le
10 HDZ, avait-on besoin de l'accord de ces deux partis pour nommer quelqu'un
11 directeur?
12 Réponse: La municipalité devait donner son accord. Par exemple, pour
13 moi, cela a été fait. Dans notre municipalité, il y avait le SDA et le
14 HDZ; ils avaient donc pu, les deux, nommer ou bien défaire quelqu'un de
15 son poste de directeur.
16 Question: Quant à la préparation de cette route dont on a parlé, ne
17 pensez pas que la question que je vais vous poser est une question
18 stupide. Dites-nous qui, pour vous, les habitants de la municipalité de
19 Vitez, était l'ennemi en 1992?
20 Réponse: L'ennemi, c'étaient les Serbes qui avaient bloqué les villes
21 où nous habitions.
22 Question: Et pour quelle guerre vous prépariez-vous, en 1992?
23 Réponse: La guerre contre les Serbes qui se trouvaient sur Vlasic à
24 Travnik?
25 Question: Excusez-moi, je me rends compte que je vais trop vite.
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1 Cette agression-là, était-ce juste des histoires qu'on racontait, ou bien
2 c'était quelque chose qui se trouvait réellement au seuil de vos portes?
3 Réponse: Non, ce n'étaient pas que des histoires et des rumeurs. En
4 fait, ce qui les intéressait, c'étaient les deux usines, telles que
5 Vitezit, qui travaillaient pour l'industrie militaire.
6 Question: Est-ce qu'on peut montrer le document Z82.2 qui est le rapport
7 de la cellule de crise, et que le témoin a déjà vu?
8 M. le Président (interprétation): Il est temps de faire venir le prochain
9 témoin.
10 M. Kovacic (interprétation): Oui, c'est bien la dernière de mes questions.
11 Pourriez-vous, Monsieur, regarder le tampon qui se trouve à la dernière
12 page? L'exemplaire n'est pas très lisible, mais est-ce bien le tampon du
13 HVO?
14 Réponse: Non, ce n'est pas le tampon du HVO, c'est le tampon de
15 l'ancien secrétariat pour la Défense.
16 Question: C'était donc le tampon officiel de quel organe?
17 Réponse: Le secrétariat pour la Défense.
18 Question: La Défense populaire?
19 Réponse: Oui, de l'ancien système.
20 Question: Et cela faisait donc partie des organes de l'ancien système?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Je n'ai plus d'autres questions.
23 M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur Silic, d'être venu
24 déposer devant ce Tribunal. Votre témoignage s'achève et vous pouvez
25 disposer.
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1 M. Silic (interprétation): Merci, Monsieur le Président, et bon courage.
2 (Le témoin, M. Josip Silic, est reconduit hors du prétoire.)
3 M. Kovacic (interprétation): Notre prochain témoin est M. Jozo Pokrajcic.
4 Nous allons, avec ce témoin, présenter un grand nombre de documents et
5 c'était l'objectif de cette déposition.
6 M. le Président (interprétation): Nous allons donc faire venir ce témoin.
7 Nous n'avons pas beaucoup de temps, mais essayons d'avancer autant que
8 possible.
9 M. Kovacic (interprétation): Oui, j'ai bien compris. C'est Me Mikulicic
10 qui va interroger ce témoin.
11 (Le témoin, M. Jozo Pokrajcic est introduit dans le prétoire.)
12 M. le Président (interprétation): Que le témoin donne lecture de la
13 déclaration solennelle.
14 M. Pokrajcic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
15 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
16 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir, Monsieur.
17 (Interrogatoire principal de M. Jozo Pokrajcic par Me Mikulicic.)
18 M. Mikulicic (interprétation): Bonjour, Monsieur Pokrajcic. Au nom de la
19 défense de M. Mario Cerkez, je vous poserai plusieurs questions quant au
20 contenu de votre déposition.
21 Puis-je donc vous demander de vous souvenir de tous ces événements et je
22 vous prie aussi de répondre à mes questions lentement pour donner le temps
23 aux interprètes d'interpréter vos propos.
24 Pourriez-vous nous dire votre prénom, votre nom, l'année et votre date de
25 naissance?
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1 Réponse: Je m'appelle Jozo Pokrajcic, je suis né à Zenica, dans la
2 municipalité de Tomislavgrad, le 4 septembre 1963.
3 Question: Le village de Zenica, dans la municipalité de Tomislavgrad,
4 c'est bien dans la République de Bosnie-Herzégovine?
5 Réponse: Oui.
6 Question: Vous êtes marié, monsieur Pokrajcic, et vous avez quatre
7 enfants.
8 Réponse: Oui.
9 Question: Monsieur Pokrajcic, vos grands-parents viennent d’où, s'il
10 vous plaît?
11 Réponse: Mes grands-parents viennent de Pokrajcic, qui ne se trouve pas
12 loin de Nova Bila.
13 Question: C'est donc un village dans la Bosnie centrale, entre Vitez et
14 Novi Travnik?
15 Réponse: Oui.
16 Question: Avez-vous encore de nos jours des parents dans cette localité?
17 Réponse: Non.
18 Question: Le service militaire obligatoire, vous l'avez effectué au sein
19 de la JNA. Est-ce là que vous avez acquis des connaissances de base dans
20 l'infanterie?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Vous êtes devenu chef de section?
23 Réponse: Oui.
24 Question: Vous avez fait une école secondaire qui parle de tout ce qui
25 est la circulation?
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1 Réponse: Oui.
2 Question: Vous n'avez pas pu trouver du travail chez vous et donc vous
3 vous êtes rendu en Allemagne où vous avez travaillé pendant 10 ans?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Quand êtes-vous rentré en Croatie après avoir travaillé à
6 l'étranger?
7 Réponse: En 1990.
8 Question: Avant de rentrer en Croatie, vous avez vécu en Croatie ou vous
9 avez vécu en Bosnie-Herzégovine?
10 Réponse: J'ai vécu en Bosnie-Herzégovine.
11 Question: Comment se fait-il que vous êtes allé à l'époque en République
12 de Croatie?
13 Réponse: La moitié de mes parents habitent en Croatie et c'était la
14 raison de m’y installer.
15 Question: En cette année-là, donc en 1990, que se passait-il en
16 République de Croatie?
17 Réponse: Il y a eu l'agression sur tout le territoire de la République
18 de Croatie.
19 Question: A l'époque, vous vous êtes joint au ZNG en République de
20 Croatie?
21 Réponse: Non, le ZNG n'existait pas à l'époque. Il y avait uniquement
22 des unités spéciales à l'époque.
23 Question: En fait, il s'agissait là des unités de la police?
24 Réponse: Oui, les unités du MUP .
25 Question: Et quelque temps plus tard, le ZNG a été créé?
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1 Réponse: Oui, au mois d'octobre 1991.
2 Question: Et cette réalisation-là, le ZNG est plus tard devenu l'armée
3 croate, le HV?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Pour quelles raisons est-ce que vous avez décidé de vous
6 joindre à la résistance contre l'agression sur la Croatie?
7 Réponse: Quelqu'un devait le faire, donc nous tous qui avions des
8 sentiments forts pour la patrie où nous habitions, nous autres qui
9 détestions, qui méprisions la violence, eh bien tout simplement, nous
10 sommes allés nous porter volontaires auprès du MUP.
11 Question: Vous êtes devenu membre de la police spéciale, n'est-ce pas?
12 Réponse: Oui.
13 Question: Est-ce qu'en ce sens-là, vous avez dû passer par une
14 formation?
15 Réponse: Oui.
16 Question: Quelle a été la durée de votre formation?
17 Réponse: La durée a été d'environ trois mois et elle a eu lieu à Pula.
18 Question: Qu'avez-vous fait après cette formation?
19 Réponse: Après la formation, nous sommes rentrés à Zagreb.
20 Question: Avez-vous participé aux combats pour défendre les pays de
21 l'agression de la JNA?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Quels ont été les champs de bataille où vous avez été en
24 République de Croatie?
25 Réponse: En Slavonie orientale, en Slavonie occidentale et sur les
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1 champs de bataille, sur le front du sud, donc dans toute la Croatie.
2 Question: Peu à peu, vous êtes monté en grade dans l'armée croate. En
3 1994, vous avez terminé l'Académie militaire à Zagreb.
4 Réponse: Oui.
5 Question: Et à la fin, vous avez eu le grade de général de brigade?
6 Réponse: Oui, c'est exact.
7 Question: Avez-vous été blessé pendant ces combats?
8 Réponse: Oui.
9 Question: Une fois ou plusieurs?
10 Réponse: Deux fois, j’ai eu des blessures légères, et la troisième
11 fois, j'ai subi des dommages assez graves.
12 Question: Actuellement, vous n'avez aucune fonction militaire, mais vous
13 avez la retraite en tant que handicapé?
14 Réponse: Oui.
15 Question: Et vous vivez avec votre famille à Zagreb?
16 Réponse: Oui.
17 Question: Mais, Monsieur Pokrajcic, une partie de votre famille continue
18 à vivre en Bosnie-Herzégovine?
19 Réponse: Oui, mon frère, mon père, ma belle-mère. La moitié d'entre eux
20 se trouve en Bosnie, la moitié à Zagreb.
21 Question: Dans un certain sens, vous étiez partagé entre votre famille
22 qui habite la Bosnie-Herzégovine et la partie de votre famille qui habite
23 en Croatie?
24 Réponse: Oui.
25 Question: Au moment de l'agression de la JNA et de l'armée des Serbes de
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1 Bosnie en Bosnie-Herzégovine, donc de l'agression de ces deux armées,
2 comment vous sentiez-vous étant donné que votre famille habitait là-bas?
3 Réponse: Je me sentais en position difficile. Dans un premier temps, je
4 n'ai pas pu les aider puisque je me trouvais sur le front à Dubrovnik et,
5 dans un deuxième temps, il était de mon devoir de rester là où se trouvait
6 mon unité. Après la libération, j'ai demandé plusieurs jours de congé, je
7 suis rentré à Zagreb et une occasion est apparue pour que j'aille sur le
8 territoire de mon pays natal.
9 Question: La Bosnie-Herzégovine?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Je suppose, Monsieur Pokrajcic, que vous n'étiez pas la seule
12 personne qui partageait ce destin, à savoir que vous viviez en Croatie,
13 vous aviez de la famille en Bosnie-Herzégovine et voire même plus, vous
14 aviez de la famille donc en Bosnie-Herzégovine et vous étiez membre de
15 l'armée croate.
16 Réponse: Oui, c'est vrai. Dans mon unité, nous étions 450 à peu près
17 qui venions du territoire de la Bosnie-Herzégovine. Je ne sais plus
18 combien d'entre nous sont restés.
19 Question: Quand vous dites "dans des unités spéciales", c'est donc le
20 MUP et l'armée croate?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Avez-vous à l'époque demandé une permission, un permis spécial
23 au ministère de la Défense pour aider votre pays natal?
24 Réponse: Oui.
25 Question: Et vous avez obtenu ce permis?
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1 Réponse: Oui, nous tous qui étions originaires de Bosnie-Herzégovine,
2 nous avons eu un tel permis.
3 Question: Il y a quelque temps, vous nous disiez qu'il y avait un
4 certain nombre de personnes qui étaient animées par le même désir que
5 vous.
6 Réponse: Oui.
7 Question: Et vous vous êtes organisés?
8 Réponse: Oui.
9 Question: A quel moment cela s'est-il passé?
10 Réponse: Ces événements datent de la mi-juin. A la demande de quatre ou
11 cinq de mes combattants, de mes hommes qui avaient fondé le HVO à Kotor
12 Varos, et ils m'ont demandé d'être le commandant de ce bataillon.
13 Question: Vous nous parlez de 1992?
14 Réponse: Oui.
15 Question: Quand vous nous dites que certains de vos hommes avaient fondé
16 le bataillon Kotor Varos, est-ce que vous voulez dire par là qu'ils l'ont
17 fondé à Zagreb ou en Bosnie?
18 Réponse: Les gens qui venaient d'Allemagne, de Suisse, d'Autriche se
19 sont réunis à Zagreb. Ils étaient de Kotor Varos et ils voulaient se
20 rendre tout de suite en Bosnie. Ils sont tout simplement venus, ils m'ont
21 demandé de me mettre à la tête de l'unité. Enfin l'unité… c'étaient des
22 gens qui pratiquement n'avaient rien, enfin pas d'armes et...
23 Question: Nous allons venir à ces événements-là, mais dans le compte
24 rendu page 106, ligne 93, on nous parlait de 1993, au mois de juin. Mais
25 en fait, nous parlons de quelle année, s'il vous plaît?
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1 Réponse: De 1992.
2 Question: Donc, certains des combattants qui venaient de la région vous
3 ont demandé d'organiser un tel bataillon qui serait composé des gens qui
4 venaient de la région et qui s'étaient réunis en provenance de
5 l'Allemagne, de la Suisse et d'autres pays et de la Croatie. Vous nous
6 avez dit que vous aviez reçu un permis de la République de Croatie. Avez-
7 vous eu la possibilité de donner des armes et des uniformes à ces hommes?
8 Réponse: Non, pas en Croatie.
9 Question: Qu'est-ce que vous avez fait avec ces hommes?
10 Réponse: J'ai demandé au ministère de la Défense de la République de
11 Croatie de nous aider, de nous transporter de la gare routière de Zagreb
12 et j'ai demandé à ce qu’ils permettent un transfert de la gare routière de
13 Zagreb en Bosnie. C'est bien ce que j'ai fait.
14 Question: Monsieur Pokrajcic, vous vous êtes corrigé en demandant de qui
15 vous avez demandé les bus.
16 Réponse: Du directeur de la gare routière de Zagreb.
17 Question: Et avec ces hommes qui étaient au nombre de combien?
18 Réponse: Ils étaient entre 350 et 400.
19 Question: Donc, vous êtes allés à Tomislavgrad.
20 Réponse: Oui.
21 Question: Sur le territoire de la République de Bosnie-Herzégovine?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Tous ces hommes qui faisaient partie de l'unité étaient
24 originaires de Bosnie-Herzégovine ou la plupart d'entre eux au moins?
25 Réponse: Ils étaient tous originaires de Bosnie-Herzégovine.
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1 Question: A vrai dire, ils s'étaient portés volontaires pour défendre la
2 Bosnie-Herzégovine contre l'attaque de la JNA?
3 Réponse: Oui.
4 Question: A l'époque, avez-vous eu la possibilité d'entraîner et de
5 fournir un équipement à votre unité?
6 Réponse: Non.
7 Question: Est-ce qu'on a mis à votre disposition des armes et de
8 l'équipement?
9 Réponse: En très petite quantité.
10 Question: Combien de temps avez-vous passé à Tomislavgrad?
11 Réponse: A peu près un mois. Pendant ce temps-là, je me suis occupé de
12 l'entraînement et de l'équipement. J'ai entraîné mes hommes et c'est à ce
13 moment-là que nous sommes partis.
14 Question: Vous nous avez dit que vous êtes partis à ce moment-là. Partis
15 où?
16 Réponse: Cela veut dire que je suis allé avec les unités en Bosnie
17 centrale, plus particulièrement à Dobratici où il y avait une partie du
18 front contre les Serbes de Bosnie et de la JNA. C'était le point le plus
19 critique.
20 Question: C'est dans quelle municipalité que se trouve Dobratici?
21 Réponse: C'est dans la municipalité de Jajce.
22 Question: Donc, vous êtes en train de parler du front de Jajce?
23 Réponse: Oui.
24 Question: Monsieur le Président, il est 15 heures 50.
25 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons lever la séance
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1 maintenant. Vous étiez au paragraphe numéro 8, je crois?
2 M. Mikulicic (interprétation): Non, c'était le paragraphe n°6 et je
3 comptais passer maintenant au paragraphe n°7.
4 M. le Président (interprétation): Monsieur Pokrajcic, nous allons
5 maintenant lever la séance. Nous devons maintenant continuer et parler
6 d'autres choses, cela n'a rien à voir avec votre déposition.
7 Je vous prie, jusqu'à demain, de ne parler à personne au sujet de votre
8 témoignage, ce qui inclut aussi le conseil de la défense. Pourriez-vous
9 venir ici demain matin à 9 heures 30 pour compléter votre déposition?
10 Vous pouvez disposer.
11 (Le témoin, M. Jozo Pokrajcic, est reconduit hors du prétoire.)
12 Nous passons maintenant à huis clos partiel.
13 (Questions relatives à la procédure.)
14 (Huis clos partiel.)
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15 (L'audience est levée à 16 heures 30.)
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