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1 (Vendredi, 15 décembre 2000).
2 (Audience publique.)
3 (L'audience est ouverte à 9 heures 38.)
4 (Plaidoirie de Me Smith)
5 M. le Président (interprétation): Maître Smith, si c'est à vous de
6 commencer je vous rappelle que vous-même et votre équipe vous avez jusqu'à
7 la pause qui aura lieu à 11 heures.
8 M. Smith (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Nous avons décidé de
9 réserver cinq minutes à notre duplique et une heure et 15 minutes maintenant.
10 Avec l'autorisation de la Chambre de première instance la défense de
11 Cerkez a accepté de nous accorder 15 minutes de son temps, dans le cadre
12 de notre présentation initiale si nous leur demandions de le faire et si
13 cela vous agrée également.
14 M. le Président (interprétation): Oui.
15 M. Smith (interprétation): Je vais revenir là où j'en étais resté au sujet
16 de la persécution, sur les deux méthodes utilisées pour prouver le chef
17 d'accusation de persécution généralisée. L'approche municipalité par
18 municipalité n'a pas été choisie, et il n'y a pas, de toute façon,
19 d'éléments de preuve en ce qui concerne vingt-deux municipalités.
20 D'autre part, il n'y a pas suffisamment d'éléments de preuve au sujet de
21 la persécution, d'une part et de la participation. Ce qui devrait être le
22 cas pour les autres municipalités et pour Zenica.
23 Donc j'étais en train de parler de la théorie générale de la persécution
24 qui nous a été présentée par l'accusation, et j'avais noté qu'il n'y a pas
25 de participation au niveau les plus élevés du gouvernement des
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1 institutions croates de Bosnie.
2 De ce fait, sur ce seul motif, ce motif la persécution ne peut pas être
3 prouvé. Et j'étais également en train de parler du concept de la
4 persécution pour savoir si cette persécution avait été prouvée. Il y avait
5 trois piliers. Le premier c'est l'annexion, une question politique.
6 Deuxièmement, des institutions mono ethniques discriminatoires, dont il a
7 été démontré que ce n'était pas le cas par le témoignage de membres
8 éminents des institutions que l'accusation a cités elle-même.
9 J'en étais donc arrivé à vous parler du dernier pilier. C'était là où j'en
10 étais arrivé hier soir et c'est là où je vais reprendre mon argumentation.
11 Ce pilier a trait à la nature de la guerre civile en Bosnie centrale et
12 j'ai deux choses à dire à ce sujet.
13 En premier lieu, cette guerre civile n'était pas dans son intégralité une
14 campagne unilatérale de persécution.
15 En deuxième lieu, il y a eu des atrocités ponctuelles des deux côtés
16 pendant cette guerre civile mais ces atrocités ne constituent pas non plus
17 une persécution.
18 Je reviens à mon premier point. C'était donc une guerre civile en Bosnie
19 centrale et c'est exactement ce que nous a dit le lieutenant-colonel
20 Stewart, le général Cordy-Simpson, ainsi que le bulletin de renseignements
21 militaire de l'ECMM n° 1.
22 Les références que j'ai à vous donner sont D 153/1, "Vies brisées", le
23 livre que nous nous connaissons, à la page 318 à 319. La déposition du
24 général au compte rendu d'audience page 10268, lignes 4 à 25. Et le
25 bulletin de renseignements militaires que je viens de mentionner c'est
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1 celui qui porte la code D194/1.
2 Nous avançons que la grande majorité des combats qui ont eu lieu dans le
3 cadre de cette guerre civile faisaient partie d'une campagne militaire qui
4 n'avait rien à voir avec les activités, les atrocités qui ont eu lieu des
5 deux côtés comme Ahmici, Stupni Do, du côté croate et comme un grand
6 nombre d'atrocités commises par les Musulmans envers la communauté Croate
7 comme à Miletici, Dusina, Maljine, Cukla, Bikosi et Uzdol.
8 Deuxième point, Ahmici et Supni Do sont deux cas de figure différente. Et
9 Ahmici et Supni Do ne peuvent pas en soi...
10 M. Robinson (interprétation): Avant que vous ne poursuiviez, vous nous
11 dites que la persécution n'était pas une campagne unilatérale dans son
12 intégralité. Etes-vous en train de nous dire qu'il s'agissait de quelque
13 chose qui a été le fait des deux côtés?
14 M. Smith (interprétation):Je dis qu'il y avait une guerre civile à
15 laquelle participaient les deux côtés. Et comme vous le verrez dans nos
16 mémoires, nous avons avançons qu'aucune des deux factions en présence
17 n'était engagée dans des actes de persécution. Mais s'il y a eu
18 persécution, si les événements qui ont eu lieu dans la vallée étaient
19 suffisamment généralisés, les événements de nature discriminatoire, non
20 pas les combats entre deux groupes ethniques qui avaient des difficultés,
21 qui menaient donc une guerre civile, donc je pense à ces actes de
22 discrimination, si on considère qu'il s'agit d'actes de persécution, et
23 dans notre mémoire nous avançons à ce moment-là, que c'était plutôt les
24 Musulmans de Bosnie qui persécutaient les Croates que le contraire.
25 M. Robinson (interprétation): Je le mentionne car il y a des éléments de
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1 preuve selon lesquels il y avait des actes persécution des deux côtés.
2 Ceci ne soutient pas et ne vient pas à l'appui de votre argumentation, à
3 moins que vous nous disiez que la persécution commise par les Croates
4 était de nature défensive.
5 M. Smith (interprétation): J'avance, Monsieur le Juge, et nous l'avons dit
6 au début que les actions des Croates avait un caractère défensif. Je
7 n'avance pas que les actions des Croates avaient une nature de
8 persécution. Nous disons que leurs actions étaient des actions de type
9 défensif et réactif.
10 Mais je souhaiterais ajouter quelque chose,comme l'a dit Me Sayers, nous
11 n'avançons pas ici un argument de défense de type "Tu quoque".
12 Nous examinons les faits pour déterminer s'il est possible d'identifier
13 des actes de persécution et de discrimination sur la base des faits
14 incriminés de la liste des événements qui recouvre tous les combats et pas
15 seulement les offensives musulmanes.
16 Notre argument est que sur la base de ces faits, on peut constater
17 premièrement qu'aucune des parties n'a persécuté l'autre. Il s'agissait
18 d'une guerre civile mais si il y avait effectivement actes de
19 discrimination suffisamment généralisés pour constituer la persécution, à
20 ce moment-là nous devons arriver à la conclusion, si nous partons dans
21 cette hypothèse, que tout pointe dans l'autre direction.
22 Et moi, j'avance qu'au niveau institutionnel, il n'y avait pas de politique
23 généralisée, planifiée de persécution du côté des institutions croates de
24 Bosnie.
25 M. le Président (interprétation): Mais même si c'est le cas, reconnaissez-
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1 vous qu'il y a eu prise de contrôle comme l'avance l'accusation? Prise de
2 contrôle de leur part dans un grand nombre de municipalités au cours de
3 l'été 1992. Prise de contrôle du fait du HVO. Ceci est avancé en tout cas
4 pour Busovaca, Vitez, Vares et Kiseljak.
5 Et ce que nous dit le Procureur, c'est partout sur la totalité du
6 territoire de la Bosnie centrale, premièrement il y a eu prise de contrôle
7 par le HVO et que ceci ensuite a été suivi par la persécution de la
8 population musulmane de Bosnie dans les municipalités concernées.
9 Quelle est votre réponse à ces allégations?
10 Il y a des éléments de preuve qui indiquent qu'il y a eu prise de
11 contrôle.
12 M. Smith (interprétation): Monsieur le Président, ma réponse c'est qu'à
13 Busovaca, il y a des éléments qui prouvent, qui indiquent qu'un ordre a
14 été délivré pendant une situation de crise et que le comité de crise a été
15 dépassé par un gouvernement du HVO ou remplacé par un gouvernement du HVO
16 au niveau du municipal.
17 Mais lorsque vous écouterez mon collègue, Me Naumoski, et lorsque vous
18 lirez notre mémoire, à ce moment-là vous comprendrez que ce qui a suivi
19 pendant le reste de l'année 1992, tous les efforts faits pour inclure les
20 Musulmans et travailler avec les Musulmans montrent que cet ordre original
21 n'était pas le signe d'une politique de discrimination et qu'il n'y a pas
22 eu de politique de discrimination dans le fonctionnement du gouvernement
23 pendant tout le reste de l'année 1992.
24 En ce qui concerne les autres municipalités, si nous n'avons pas présenté
25 notre argumentation en détail dans notre mémoire, nous pensons qu'il en va
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1 à peu près de même et que rien de différent ne s'est passé dans ces
2 municipalités par rapport à ce qui s'est passé dans les municipalités où
3 les deux communautés se sont séparées et où les Musulmans tenaient la
4 barre et où les Croates ont été exclus. Ces deux camps ne se faisaient pas
5 confiance à l'époque et cette méfiance a été encouragée pour des raisons
6 tactiques et autres par les Serbes de Bosnie.
7 Nous estimons ici que nous avons affaire à une question de nature
8 politique et non pas à une question en rapport avec la responsabilité aux
9 termes du droit de la persécution.
10 M. Robinson (interprétation): Oui, mais si l'on regarde la jurisprudence
11 du Tribunal, on constate une tendance –je ne suis pas forcément d'accord
12 avec cette tendance- qui semble indiquer que l'on peut presque déduire
13 qu'il y a persécution du fait de l'existence d'autres crimes de violations
14 graves, de crimes de guerre. De fait que si vous avez des éléments qui
15 indiquent qu'il y a eu déportations, infractions graves, des éléments qui
16 indiquent qu'il y a eu crimes de guerre, on peut presque en déduire qu'il
17 y a eu persécution sur la base des éléments discriminatoires constitutifs
18 de ces crimes.
19 M. Smith (interprétation): Monsieur le Juge, ce nouveau crime de
20 persécution, qui apparaît dans le cadre du droit international
21 humanitaire, doit être traité avec beaucoup de prudence.
22 Le droit pénal, de manière générale, est un instrument qui est contondant
23 et qui ratisse très large dans beaucoup de… Aux Etats-Unis, nous avons des
24 lois contre la discrimination mais dans beaucoup de pays, ce n'est pas le
25 cas. Et nous estimons qu'il ne faut pas faire une déduction, conclure à la
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1 discrimination uniquement, par exemple, parce qu'il y a eu participation,
2 que ce soit d'un côté ou de l'autre, à une guerre civile.
3 Il se trouve que cette guerre civile oppose des membres de communautés
4 religieuses, ethniques, raciales, etc. différentes ou même politiques.
5 Le terme de "persécution" est un terme qui recouvre un concept extrêmement
6 souple, large, élastique. Ce n'est pas un concept comme celui de
7 "génocide", qui est bien différent et où le seuil de définition du
8 génocide est très élevé. Et nous avançons que ceci est le cas parce qu'ici
9 vous avez...immédiatement, vous parlez de liberté civile, la liberté
10 d'expression, etc., la liberté d'association politique et que ce type de
11 stratégie peut être utilisé par des groupes majoritaires contre des
12 minorités en cas de guerre civile.
13 C'est pourquoi nous estimons qu'il est absolument essentiel de comprendre
14 qu'il peut y avoir abus de ce type d'accusation et qu'il faut être très
15 prudent donc.
16 D'autre part, nous ne sommes pas d'accord avec l'allégation selon laquelle
17 il faut qu'uniquement des crimes qui sont prévus par le Statut constituent
18 la base d'un acte discriminatoire. Nous avons pris connaissance de la
19 jurisprudence du Tribunal et plus on prend en compte les informations au
20 sujet de la nature du conflit armé international, plus on se penche sur le
21 comportement des Etats en ce qui concerne la discrimination. Parce que
22 dans cette affaire, vous avez eu des discriminations. On a prétendu à la
23 discrimination car des gens avaient été renvoyés de leur travail alors que
24 dans notre pays c'est considéré comme un acte de discrimination qui se
25 passe parfois sur le lieu de travail.
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1 Or, ici on tend à affirmer que cela amène un crime de nature
2 internationale.
3 M. le Président (interprétation): Oui, mais il y a des allégations
4 beaucoup plus sérieuses qui vont beaucoup plus loin que cela.
5 M. Smith (interprétation): Je suis tout à fait d'accord.
6 M. Bennouna: Maître Smith, vous dites en fait que, pour vous, la
7 persécution n'interviendrait que dans un conflit de caractère
8 international, si j'ai bien compris? Ai-je bien compris que pour vous la
9 persécution ne devrait intervenir que lorsqu'il y a un conflit de
10 caractère international?
11 M. Smith (interprétation): Sur le plan pénal, dans le cadre du Statut de
12 ce Tribunal, je pense que la compétence du Tribunal est limité aux
13 conflits internationaux, ou plutôt aux conflits armés, et dans certains
14 cas aux conflits armés internationaux.
15 Si je ne l'ai pas fait je vous prie de m'en excuser, mais j'entendais me
16 concentrer sur les conflits armés et les conflits armés internationaux.
17 Ai-je répondu à votre question?
18 M. Bennouna: La persécution dont vous nous parlez en tant que crime rentre
19 bien dans la catégorie de crime contre l'humanité?
20 M. Smith (interprétation): Oui, je vous comprends bien, Monsieur le Juge.
21 M. Bennouna: Pour les crimes contre l'humanité, il suffit que cela
22 intervienne dans un conflit armé, qu'il soit de caractère international ou
23 de caractère non international.
24 M. Smith (interprétation): Tout à fait exact, Monsieur le Juge. Et plus le
25 concept est large, plus on considère qu'il peut s'appliquer de façon
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1 large, bien plus il faut faire preuve de prudence dans la mise en place de
2 la définition de ce concept et dans son implication. En fait, c'est pour
3 l'essentiel ce que je voulais dire.
4 Mais quoi qu'il en soit, en ce qui concerne Ahmici et Stupni Do, nous
5 avançons que ces deux événements sont indépendants l'un de l'autre, qu'ils
6 se sont passés à des périodes de temps très éloignées, sur des endroits
7 très éloignés, que ceci est le fait de soldats de troupes différentes,
8 avec des commandants différents. On ne peut pas considérer que ce sont des
9 éléments constitutifs d'une politique de persécution systématique.
10 Maintenant, je vais passer à l'intention de persécution.
11 Il ne s'agit pas ici, il s'agit du critère qui doit être appliqué pour
12 déterminer l'intention délictueuse. De nombreux témoins sont venus nous
13 répéter que M. Kordic n'avait rien contre les Musulmans et qu'il ne les a
14 pas persécutés. Il en va de même des témoignages qui ont été apportés en
15 ce qui concerne sa personnalité. Nombre de ses collègues musulmans et de
16 ses voisins sont venus nous le dire.
17 En ce qui concerne les discours de M. Kordic en public, on peut constater
18 que ses interventions sont beaucoup moins agressives, beaucoup moins
19 violentes que les discours de certains de ses collègues, dont on pourrait
20 considérer de toute façon qu'ils ont le droit de les prononcer, en vertu
21 du droit à la liberté expression.
22 En ce qui concerne le comportement de M. Kordic, nous avançons qu'il n'a
23 pas fait ce qui lui est reproché au chef 3, A.43 de l'Acte d'accusation.
24 Son comportement avant le référendum relève d'une activité politique et
25 légitime. Sa participation aux activités des institutions croates de
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1 Bosnie ne relève pas d'une pratique discriminatoire. Tout d'abord, parce
2 que ces institutions n'ont pas fait preuve de discrimination et,
3 deuxièmement, parce qu'il n'a pas participé à ces institutions au niveau
4 le plus haut. Troisièmement -et je l'ai déjà dit-, la simple participation
5 à un crime de guerre, dont il se trouve qu'il oppose des groupes
6 religieux, ethniques différents, cette simple participation ne peut pas,
7 en tant que telle, donner lieu à une conclusion d'intention
8 discriminatoire.
9 Enfin, M. Kordic n'a participé aucunement aux principaux actes d'atrocités
10 auxquels cette affaire s'est intéressée.
11 Je vais conclure.
12 La vérité a commencé à surgir en ce qui concerne les événements de la
13 vallée de la Lasva au fil des ans, suite à tous les éléments de preuve qui
14 ont été présentés. Ce qui est arrivé, c'est qu'après avoir examiné tous
15 les documents et entendu tous les témoins, on constate que la réalité,
16 c'est que la Communauté croate de Bosnie en Bosnie centrale a mené une
17 bataille défensive pour défendre ce qui était à elle. Il y a eu des
18 atrocités ponctuelles des deux côtés mais, globalement, plus de 100.000
19 Croates de Bosnie ont été chassés de leurs foyers, dans la plupart du
20 territoire de Bosnie centrale, par des Musulmans, par des offensives
21 musulmanes.
22 Ensuite, ils ont été forcés de se concentrer dans trois ou quatre poches
23 très restreintes, au fond de vallées, vallées dominées par les Musulmans.
24 Les Croates de Bosnie centrale étaient encerclés, ils étaient inférieurs
25 en nombre, dans une proportion de huit pour un. En fait, ce sont les
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1 Croates de Bosnie centrale et non pas les Musulmans qui, dans ce conflit à
2 ces endroits, ne pouvaient aller nulle part.
3 La Communauté croate de Bosnie a résisté, a tout fait pour résister
4 pendant le long hiver de 1993-1994 jusqu'au moment où les Musulmans, en
5 février 1994n ont finalement accepté un cessez-le-feu.
6 Mais, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si effectivement il y a
7 persécution en Bosnie centrale, nous avançons qu'il ne s'agit pas d'une
8 persécution commise par les Croates de Bosnie, qui étaient en minorité
9 contre les Musulmans, mais que c'est plutôt le contraire qui est vrai.
10 Cela, c'est l'histoire, c'est la réalité qui va être inscrite dans les
11 livres d'histoire. Merci.
12 M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Messieurs les
13 Juges, excusez-moi de ce problème technique.
14 Monsieur le Président, Messieurs le Juges, pendant 238 jours, la
15 présentation de toutes sortes de moyens de preuve a eu lieu, 242 témoins
16 sont venus témoigner directement ici, toute une série de déclarations de
17 témoins ont été versées au dossier, déclarations émanant d'autres procès,
18 de même qu'environ trente déclarations sous serment.
19 Lorsqu'on analyse tous ces moyens de preuve à l'égard du rôle et de la
20 fonction de M. Kordic, tout ce que l'on peut conclure est que c'était un
21 homme politique et non pas une personne détenant des compétences
22 militaires exécutives.
23 En analysant ses actions, je pense que les Juges tiendront compte
24 certainement du fait que M. Kordic était un homme politique qui n'était
25 pas à même de prendre des décisions stratégiques importantes à l'égard du
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1 peuple croate en Bosnie-Herzégovine. Il ne faisait même pas partie du
2 cercle des personnes et des hommes politiques qui se trouvaient au sommet
3 du pouvoir au sein de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.
4 Je souhaite rappeler que les témoins DJ, DK, Srecko Vucina, Zoran Buntic,
5 Miro Pelivan qui a donné une déclaration sous serment et d'autres ont
6 témoigné de ceci. Donc, à notre avis, M. Kordic n'exerçait pas les
7 fonctions politiques de plus haut niveau, ni les fonctions
8 administratives, c'est-à-dire les fonctions qui sont d'habitude exercées
9 par les membres du gouvernement puisque, soit dit en passant, une telle
10 fonction celle du vice-président chargé de la région de la Bosnie centrale
11 était exercée par M. Anto Valenta.
12 Je suis convaincu également que les Juges prendront en considération les
13 circonstances qui régnaient à l'époque, pendant que M. Kordic exerçait ses
14 fonctions. Et notamment les circonstances au cours de l'année 1993, dans
15 la vallée de la Lasva, c'est-à-dire la région dans laquelle M. Kordic a
16 travaillé avec sa famille pendant toute cette période.
17 Nous avons également entendu dire qu'il aurait travaillé dans un
18 blockhaus, un endroit caché, etc. Mais il faut souligner que ceci fait
19 partie des connaissances générales, c'est-à-dire que c'est quelqu'un qui
20 exerçait ses fonctions de manière absolument publique, avec un contact
21 constant avec la population. Il n'est pas du tout vrai qu'il avait des
22 plans cachés derrière et qu'il n'était pas possible de comprendre quelles
23 étaient ses intentions.
24 Une habitante de Busovaca nous a dit qu'elle avait rencontré dans la rue
25 M. Kordic, qu'elle lui a demandé de l'aider afin d'organiser le transport
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1 de ses amies enceintes jusqu'à Zenica. C'est un simple exemple qui montre
2 que les gens pouvaient adresser la parole à M. Kordic dans la rue; les
3 gens le savaient et en profitaient.
4 M. Kordic, comme je l'ai déjà dit, travaillait avec la population,
5 partageait leurs problèmes aux moments difficiles de guerre, fêtait les
6 fêtes religieuses. Père Franjo de Vitez est venu déposer ici récemment et
7 il a dit que, pendant tous les moments de 1992, pendant l'offensive
8 violente lancée contre la Bosnie centrale, à minuit, M. Kordic, en
9 risquant sa vie, est venu dans l'église à Vitez puisqu'il a souhaité y
10 être avec les personnes religieuses qui y sont allées afin de fêter cette
11 fête. Ceci est bien démontré par le biais de toute une série de
12 conférences de presse auxquelles il a participé.
13 Lors de toutes ces conférences de presse qui suivaient toutes une même
14 procédure M. Blaskic, en tant que commandant de la zone opérationnelle,
15 parlait du volet militaire, la situation sur les lignes de front etc.
16 Ensuite, M. Kordic s'adressait aux personnes présentes en traitant des
17 problèmes liés à son domaine de compétence, à savoir la situation en
18 matière humanitaire, les attitudes de la Communauté internationale, les
19 propositions de la Communauté internationale qui étaient nombreuses, etc.
20 Je souhaite demander aux Juges de bien vouloir attentivement analyser
21 toute une série des moyens de preuve dont l'authenticité a été remise en
22 cause. Et par là, je souhaiterais parler notamment des documents dans les
23 sources prétendues où les auteurs ne sont pas connus, etc.
24 Puisque nous avons des raisons de croire que les contenus de ces documents
25 par exemple Z1380.4 et Z1406.1, font partie des jeux politiques qui se
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1 poursuivent malheureusement encore aujourd'hui.
2 Je dois dire devant ce Tribunal qu'à l'encontre de M. Kordic depuis
3 plusieurs années déjà n a mené et on continue à mener une campagne intense
4 dans une partie de la presse dans la République de Croatie, pourquoi le
5 dis je?
6 M. le Président (interprétation): Maître Naumovski, vous devez vous
7 limiter aux pièces à conviction, aux moyens de preuve. Vous ne pouvez pas
8 déposer, témoigner vous-même, présenter de nouveaux éléments de preuve.
9 Vous n'êtes pas en position de témoin. Ce que vous pouvez faire, ce sont
10 vos arguments concernant les moyens de preuve qui ont été présentées
11 devant cette Chambre jusqu'à présent.
12 Veuillez tenir compte de cela, s'il vous plaît.
13 M. Naumovski (interprétation): Meric, Monsieur le Président, je vais
14 essayer de suivre vos instructions. C'est justement ce que je souhaite
15 faire.
16 Pourquoi ai-je mentionné ce que j'ai mentionné, puisque certaines thèses
17 mentionnées dans ces articles de presse proviennent des mêmes sources que
18 les documents des services secrets qui font partie du dossier, qui ont été
19 versées au dossier en partie. C'est donc pour cela que je demande qu'un
20 soin particulier soit donné à ces documents dont l'authenticité n'a pas
21 été prouvée.
22 Je veux dire un autre point avant d'aborder Busova. Nous sommes tous
23 préoccupés dans la défense de Kordic, par le fait qu'il existe une réelle
24 conspiration, non pas seulement à l'égard de ce Tribunal mais aussi à
25 l'égard de M. Kordic personnellement dont font partie non pas seulement
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1 certains avocats des autres affaires, mais aussi certains fonctionnaire de
2 la République de Croatie. C'est une raison supplémentaire pour laquelle je
3 demande encore une fois aux Juges de bien vouloir analyser
4 particulièrement attentivement les documents dont l'authenticité n'a pas
5 été prouvée.
6 Maintenant je souhaite aborder la question liée à Busovaca, région dans
7 laquelle pendant toute la période M. Kordic a vécu et travaillé. En ce qui
8 concerne la région de Busova, les Juges ont déjà eu location d'en entende
9 parler, il s'agit d'une région où environ 19 000 habitants vivaient
10 d'après le recensement de 1991.
11 Les Juges de la Chambre on eu l'occasion d'entendre que les Croates et les
12 Musulmans, à savoir leurs deux partis politiques respectifs, le SDA et le
13 HDZ, et là je pense qu'il s'agissait de l'unique municipalité en Bosnie-
14 Herzégovine à l'époque où les deux partis politiques ont décidé d'entrer
15 en coalition avant les élections et à créer les instances de pourvoir de
16 manière conjointe.
17 Suite à la création de ce gouvernement conjoint M. Kordic s'est vu
18 accorder le poste de secrétaire chargé de la défense, il s'agissait d'une
19 fonction civile au sein du gouvernement municipal.
20 Je ne souhaite pas dire trop de choses, faire perdre votre temps en disant
21 trop de choses concernant la situation qui prévalait entre les Croates et
22 les Musulmans en Bosnie-Herzégovine et à Busovaca tout au début. Mais
23 quels que soient les contenus des réunions qui ont eu lieu et qui ont été
24 mentionnées ici hier, nous tenons à dire que M. Kordic avec ses amis et
25 d'autres membres du HDZ à Busovaca menaient une campagne afin que les
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1 Croates rejoignent les Musulmans pour répondre au référendum, chose qui a
2 été faite. Et nous avons versé au dossier un document qui le prouve.
3 Où commence un niveau un peu plus élevé des malentendus entre les Croates
4 et les Musulmans à Busovaca? Cela commence avec l'évacuation des casernes
5 de l'ancienne JNA, de la région, de la municipalité de Busovaca. Il ne
6 fait aucun doute et nous acceptons le fait que les Croates et les
7 Musulmans c'étaient mis d'accord afin de répartir de manière équitable les
8 munitions qui avaient été tenues par la JNA à plusieurs endroits à
9 l'intérieur de la municipalité de Busovaca. Un accord a été conclu plutôt
10 rapidement en ce qui concerne deux casernes. La caserne à Busovaca que
11 devait contrôler le HVO et la caserne de Kacuni appelé Silos que devait
12 contrôler la défense territoriale.
13 Un accord a été conclu afin que toutes les armes qui existaient à la
14 troisième caserne de Kaonik soient réparties de manière équitable entre
15 les deux partis. Nous considérons que ce sont les membres de la défense
16 territoriale qui ont été responsables de la rupture de l'accord concernant
17 la répartition des armes à Kaonik.
18 Pourquoi? Parce que cet accord a été établi sur un plan local, donc à
19 l'intérieur de la municipalité de Busovaca et les deux partis ont nommé
20 deux personnes importantes du parti des Croates. C'était Florijan
21 Glavocevic et du côté des Musulmans c'était M. Hadzimejlic. Ces deux
22 personnes devaient faire en sorte que l'accord soit respecté. Mais Dzemo
23 Merdan qui a déposé ici et d'ailleurs Zoran Maric et Milorad Jovic qui a vu
24 personnellement M.Merdan sur place, en ont parlé. M. Merdan s'est immiscé
25 dans tout cela et à ce moment-là un incident a éclaté au cours duquel deux
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1 Croates et un Musulman ont été blessés.
2 Zoran Maric, Niko Grubecic ont déposé au sujet de cela devant cette
3 Chambre. Mais je pense qu'il est important d'évoquer Abid Hodzic qui a
4 donné une déclaration sous serment. Il s'agit d'une personnalité imminente
5 de confession musulmane venant de Sarajevo, qui a déclaré qu'il est allé à
6 Busovaca personnellement suite aux instructions du ministre de l'Intérieur
7 afin d'établir les faits et voir ce qui s'était passé.
8 En parlant avec le corps musulman, les Musulmans lui avaient dit qu'ils
9 étaient conscients du fait que c'était eux les coupables de cet incident
10 et que c'était eux le camp qui avait rompu l'accord concernant la
11 répartition des armes puisqu'ils considéraient qu'ils avaient plus besoin
12 des armes que les Croates. C'est toute la vérité et c'est à la lumière de
13 cet incident, qui a constitué la rupture de cet accord, qu'il faut
14 examiner la pièce à conviction Z100 et les circonstances dans lesquelles
15 le document a été rédigé. Le document parle de lui-même mais il ne faut
16 pas oublier ce que Zoran Maric a dit en déposant devant ce Tribunal: que
17 ce document a été préparé par l'intégralité des dirigeants croates de
18 Busovaca à l'époque. Ivo Brnada qui était le commandant de l'état-major
19 municipal à l'époque l'a signé et il a été cosigné par Dario Kordic qui
20 était déjà à l'époque un homme politique de haut rang croate dans la
21 région. C'est ce qui a donné encore plus de poids à ce document, comme les
22 témoins l'ont déjà déclaré.
23 Hier, on a décrit toute une série de fonctions qui auraient été exercées
24 par M. Kordic. Je souhaite souligner que ceci n'est vrai qu'en réalité
25 puisque M. Kordic a effectivement signé un certain nombre de documents. Il
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1 a signé ce document-ci avec le titre de vice-Président du HVO, mais il
2 s'agit d'une fonction qui n'existait même pas.
3 Visiblement, cette erreur a eu lieu puisque le HVO avait été constitué un
4 seul mois auparavant. Donc tout simplement, on a fait automatiquement un
5 transfert entre son ancienne fonction de vice-Président de la HZ-HB en
6 indiquant "le vice-Président du HVO".
7 Concernant la pièce à conviction Z111, il s'agit là d'un document que M.
8 Kordic a signé en sa fonction réelle de vice-Président de la communauté
9 croate d'Herceg-Bosna. Le document 100 a été constitué le 5 mai 1992 alors
10 que le document Z111 a été rédigé le 22 mai 1992. Il s'agit là d'une
11 période pendant laquelle les efforts ont été faits afin de dépasser la
12 situation qui avait été créée à cause du comportement des Musulmans.
13 Je souhaite citer encore quelque chose de la déclaration de M. Abid
14 Hodzic, une déclaration sous serment. Monsieur Abid Hodzic a dit que les
15 membres de son propre camp, c'est-à-dire les Musulmans de Busovaca, en
16 parlant de M. Kordic, lui avaient dit qu'il avait empêché qu'un conflit
17 vaste ne se déclare, car si Kordic n'avait pas agi de cette manière-là, le
18 sang aurait coulé dans les rues. Ce sont les propos évoqués par ce témoin.
19 Je souhaite dire encore une fois ce qui a déjà été évoqué par Me Smith.
20 C'est-à-dire: à Busovaca, compte tenu de la situation qui devenait
21 complètement chaotique et presque anarchique, le HVO a pris la
22 responsabilité d'organiser la vie à Busovaca. Mais sur la base du document
23 Z111 signé par Florijan Glavocevic, le Président de l'état-major municipal
24 du HVO, il est clair que le HVO ne se comportait pas de manière
25 discriminatoire vis-à-vis des représentants d'un quelconque peuple,
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1 puisque le HVO a fait appel à tout le monde pour que tout le monde
2 retrouve son poste de travail. On a même proposé aux policiers du poste de
3 police qui ne souhaitaient pas travailler sous le contrôle du HVO -pour
4 ainsi dire- d'avoir recours à l'exemption de l'obligation de travailler au
5 sein de ce poste de police.
6 Donc par le biais de ce document 111, l'ordre et la paix ont été établis à
7 Busovaca. Aucun employé des instances municipales ou autres ne s'est
8 retrouvé sans travail, (expurgé)
9 d'exister. Mais par le biais de l'intervention de M. Florijan Glavocevic,
10 il a trouvé un autre emploi dans la société Vatrostalna. Donc personne ne
11 s'est vu licencier, personne n'a dû prêter serment de loyauté, etc.
12 Dans toute cette série de documents qui ont été versés au dossier, je
13 suppose que l'on aurait pu trouver cet acte de loyauté que des témoins
14 auraient dû signer si ceci existait. Je fais référence ici aux propos
15 tenus par les témoins Zoran Maric, Niko Grubesic, DE, etc.
16 Je souhaite dire également quelque chose à l'égard du Témoin M qui
17 essayait de convaincre les Juges du fait qu'en 1992, il n'exerçait aucune
18 fonction mais qu'il venait au travail de manière formelle seulement. Je
19 souhaite dire que ceci est complètement erroné puisque, par exemple, les
20 documents contenus dans les deux volumes de la pièce à conviction D258/1
21 et 2 le montrent. Ce que je souhaite dire par le biais de ceci, c'est
22 qu'après le mois de mai 1992 et jusqu'à la fin de l'année 1992, le
23 gouvernement civil du HVO se préoccupait du bien-être de toutes les
24 personnes quelle que soit leur origine ethniques.
25 Je souhaite maintenant rapidement me référer au document tel que 240/1,
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1 qui est la décision du gouvernement du HVO à Busovaca selon laquelle les
2 membres de la Défense territoriale et du Hvo avaient un salaire, une solde
3 exactement identique.
4 Puis le document 250/1 est très important puisqu'ici il s'agit du respect
5 exigé par rapport à toutes les personnes vivant à Busovaca. On exige dans
6 ce document explicitement que l'on émette aux citoyens les documents
7 conformes à leur propre souhait. Là, il s'agit de la question de savoir si
8 les documents allaient avoir l'en-tête portant sur la Bosnie-Herzégovine
9 seulement ou sur la Bosnie-Herzégovine et le HVO aussi. Ce document prouve
10 justement qu'il n'y a eu aucune discrimination au cours de l'année 1992.
11 D'ailleurs, en ce qui concerne les diplômes, ils étaient émis de la même
12 manière, conformément au souhait des personnes intéressées. Des écoles à
13 Kacuni et ailleurs étaient créées de manière exactement identique.
14 En ce qui concerne la coopération entre les Croates et les Musulmans,
15 celle-ci s'est poursuivie dans tous les secteurs de la société. Je
16 souhaite attirer votre attention sur les documents D254/1, D255/1 et
17 D256/1. Ici, il est important également de se référer à un autre document,
18 D259/1. A savoir la décision du gouvernement du HVO signée par le
19 Président Zoran Maric en date du 22 décembre 1992, c'est-à-dire un mois et
20 demi avant le début de la guerre concernant l'attribution de l'aide
21 financière aux familles des soldats tués à la fois de la défense
22 territoriale et du HVO.
23 Donc encore une fois aucune discrimination.
24 Nous pouvons nous référer également à la pièce à conviction D268/1. Mais
25 il est impossible de citer tous ces documents de toutes façons.
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1 Un autre détail important. Dans la région de Busovaca, contrairement à
2 certaines autres municipalités, deux instances de pouvoir exécutif n'ont
3 pas été créées. Tout au long de l'année 1992, dans la municipalité de
4 Busovaca, il n'existait qu'une seule instance de pouvoir exécutif à
5 laquelle participait à la fois les représentants musulmans, croates et
6 serbes bien sûr.
7 Mon collègue me rappelle que le temps passe vite; donc je vais accélérer
8 en disant quels sont les problèmes supplémentaires qui ont surgi dans la
9 municipalité de Busovaca, à savoir deux grands flux de réfugiés.
10 Tout d'abord, en octobre 1992, lorsque les réfugiés de Jajce, Vares et
11 Kotor-Varos sont venus, cela a été mentionné par le témoin Nesiha
12 Neslanovic; ensuite, le deuxième flux de réfugiés de Zenica qui ont
13 commencé à venir en janvier 1993 et surtout au mois d'avril 1993; et le
14 troisième flux de réfugiés, les milliers d'habitants de la municipalité de
15 Travnik qui avaient été expulsés par l'armée de Bosnie-Herzégovine, au
16 mois de juin 1993.
17 Ces flux de réfugiés incontrôlés ont provoqué une grande croissance du
18 taux de criminalité. Des membres de la police militaire et d'autres
19 témoins de Busovaca, de la police civile et d'autres témoins de Busovaca
20 en ont parlé. Mais il suffit peut-être de dire que les autorités civiles
21 et militaires aussi, comme M. Grubesic l'a déclaré, faisaient tout afin de
22 contrôler cette situation. Mais compte tenu des combats qui se déroulaient
23 à l'époque, il était impossible de réprimer entièrement toutes ces
24 activités criminelles.
25 Je souhaite maintenant aborder certains incidents concrets qui ont reçu
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1 beaucoup d'attention au cours de cette procédure, à savoir l'événement qui
2 a eu lieu à Kacuni, le 21 janvier 1893.
3 Le Procureur a insisté en ce qui concerne cet événement-là, je suppose,
4 parce qu'au moins de manière indirecte, on a essayé d'établir un lien
5 entre M. Kordic et ce qui s'est passé cette nuit-là à Busovaca.
6 On a commencé à exposer ce point de vue par le biais du Témoin T, mais
7 ici, il s'agit d'une déposition de deuxième main, inacceptable, typique.
8 Il s'agissait en fait de rumeurs, d'ouï-dire, pratiquement de troisième
9 main. Et comme c'est toujours le cas, s'agissant d'ouï-dire, cette
10 personne a impliqué d'autres personnes dans cette histoire, non pas
11 seulement Kordic et Kostroman et aussi Valenta, mais aussi Bozo Rajic, qui
12 n'était pas du tout en Bosnie centrale à l'époque, et aussi Tihomir
13 Blaskic. Mais après, au cours du contre interrogatoire, il a accepté le
14 fait que sa position se basait uniquement sur ses propres conclusions.
15 Donc, inutile d'en dire plus concernant la qualité de cette déclaration.
16 Le deuxième témoin était le Témoin AE qui, contrairement au Témoin T, a
17 été à Kacuni lors de cet incident. Lui, il a déclaré que deux véhicules
18 étaient venus de la direction de Kiseljak. Et il a déclaré également que
19 M. Kordic était dans le deuxième véhicule sur quatre.
20 Le fond de la déclaration du Témoin AE est que le leader du peloton
21 antisabotage, Miralem Delija, de l'armée de Bosnie-Herzégovine, a saisi le
22 pistolet de Josip Grubesic, qui était décrit par ce témoin en tant que
23 leader des Jokeri -alors que cela n'a jamais été déclaré dans le cadre de
24 cette procédure, même pas par le témoin qui a déposé récemment à ce que
25 sujet-là- et que, par la suite, M. Kordic l'avait menacé en lui disant
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1 qu'il allait payer pour cela.
2 Ce témoin est venu déposer rien que pour cela, afin de citer cette menace
3 prétendument proférée par M. Kordic.
4 La défense de M. Kordic, dès le premier jour, n'a cessé de déclarer que M.
5 Kordic n'a jamais été impliqué dans le cadre de cet incident, n'a rien à
6 faire avec cet incident. Mais suite à ce que les témoins de l'accusation
7 avaient déclaré, nous avons dû trouver un témoin oculaire ou des témoins
8 oculaires, nous aussi, afin de les entendre.
9 Ivo Arar est venu déposer ici, Josip Grubesic aussi, Milenko Arapovic, et
10 les déclarations sous serment ont été données par Franjo Kristo et Bogdan
11 Santic. L'essentiel de leurs déclarations se résument au fait que c'est
12 seulement le véhicule de M. Kostroman qui a été arrêté à Kacuni, à
13 l'époque, et que ce véhicule n'allait pas de Kiseljak à Busovaca mais, à
14 l'inverse, de Busovaca vers Kiseljak.
15 Lorsque nous, vers la fin, nous avons considéré que ce point avait été
16 complètement clarifié vis à vis de cette Chambre, le témoin AW est venu
17 déposer dans le cadre de la réplique du Procureur en corroborant les
18 éléments avancés par les témoins de la défense, à savoir que les véhicules
19 venaient de Busovaca vers Kiseljak.
20 Ce qui est encore plus important, c'est qu'il avait entendu dire que c'est
21 seulement M. Kostroman qui avait été arrêté. On ne mentionne donc pas du
22 tout M. Kordic, tout simplement parce qu'il n'y était pas du tout.
23 Les témoins qui se sont exprimés devant vous vous ont dit de quelle façon
24 ils ont eu connaissance de cet incident. Ils sont allés aider M. Kostroman
25 et ceux qui l'accompagnaient sans que M. Kordic en soit informé. Donc il
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1 ne peut pas être même imaginé que M. Kordic, au moment où ces hommes
2 partent pour aller aider M. Kostroman… Il ne fait pas le moindre doute que
3 M. Kordic n'était pas au courant.
4 Mais pourquoi cette histoire est-elle importante? Elle est importante
5 parce qu'elle est devenue un véritable leitmotiv du Procureur s'agissant
6 de démontrer le lien existant entre M. Kordic et ce qui s'est passé ce
7 soir-là à Busovaca. D'ailleurs, j'aurais peut-être dû, lorsque j'ai
8 mentionné les dépositions des témoins de l'accusation, j'aurais dû dire
9 que le deuxième témoin -cela je l'ai gardé en mémoire-, quand on lui a
10 montré un certain nombre d'affirmations du témoin AE, le témoin AW a dit:
11 "Tout cela, c'est le fruit de son imagination."
12 Donc le deuxième témoin de l'accusation a en fait infirmé totalement les
13 affirmations du premier.
14 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, M. Kordic n'avait rien à voir
15 avec ce qui s'est passé à Busovaca le 21 janvier 1993, dans la soirée.
16 D'ailleurs, le témoin Dusko Grubesic en a parlé ici aussi. Le document
17 D3161/1, intercalaire 8, le montre bien. Ces témoins ont aussi parlé des
18 circonstances qui ont entraîné des blessures, ensuite le décès de Miralem
19 Delija. D'ailleurs, ce fait n'est pas contesté, le fait qu'il ait été tué
20 avant cet incident.
21 Donc M. Kordic n'avait rien à voir avec cet incident et ne savait
22 d'ailleurs pas que quelque chose allait se produire cette soir-là. Ce sont
23 ces deux éléments qui sont très importants. Et il est important aussi de
24 mentionner Nosjeta Neslanovic, témoin de l'accusation, qui a dit devant ce
25 Tribunal que M. Kordic d'ailleurs ne pouvait pas savoir tout ce qui se
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1 passait à Busovaca. Peut-être que la vérité est tout simplement contenue
2 dans ces quelques mots.
3 Mais un détail encore, si vous le voulez bien. Le Procureur s'est efforcé
4 de démontrer que, le 20 janvier, une réunion avait été organisée à
5 Fojnica. Cette réunion aurait dû être un motif supplémentaire pour
6 expliquer que les véhicules en question provenaient de Kiseljak. Or le
7 témoin DC a totalement infirmé ce fait. C'était d'ailleurs un témoin très
8 convaincant et très crédible.
9 Je n'ai donc pas besoin de parler très longuement des dépositions de tous
10 ces témoins parce que, si nous pensons aussi à cet incident survenu le 24
11 janvier 1993, donc quelques jours plus tard, le témoin Srecko Kristo,
12 commissaire aux comptes, a dit tout ce qu'il y avait à dire à ce sujet.
13 C'est un survivant de l'incident en question.
14 Alors nous avons atteint le mois de janvier et je vais parler d'un
15 certains nombre de documents. Je ne m'appesantirai pas, faute de temps.
16 Nous estimons que les pièces à conviction, les éléments de preuve qui ont
17 été soumis à cette Chambre montrent qu'à la fin du mois de janvier 1993,
18 l'armée de Bosnie-Herzégovine a attaqué le HVO à Busovaca. Il n'y a pas
19 seulement la déposition de Dusko Grubesic qui a parlé de cela, mais il y a
20 aussi le commandant adjoint de la Brigade Nikola Subic Zrinski et il y a
21 Zoran Maric. Je pense que tout cela est important si l'on compare
22 également à ce qu'a dit le colonel Stewart.
23 Je pense que vous constaterez que tout ce qu'il a affirmé ne peut pas être
24 considéré comme acceptable, car c'est en fait contraire à la réalité et
25 totalement illogique.
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1 Mais ce qu'il est important de faire ici, c'est de bien montrer aux Juge
2 de cette Chambre qui a attaqué qui. Pour ce faire, il faut que mes Juges
3 aient à leur disposition la séquence des événements survenus qui ont
4 abouti à l'attaque en question.
5 Il y a là un élément tout à fait capital qui est le suivant: les civils,
6 les femmes, les vieillards, les enfants ont commencé à quitter la
7 municipalité de Busovaca et, avant tout, la ville de Busovaca, dès le
8 début du mois de janvier 1993. Je vais vous en donner quelques exemples.
9 Les témoins de l'accusation AG et AR ont évoqué ce fait. Le témoin AR a
10 dit avoir évacué sa famille avant ces événements. Le témoin B, qui est
11 parti le 24 janvier et qui est revenu le 20 mars, en a parlé également
12 ainsi qu'un certain nombre d'autres témoins. Il est peut-être tout au fait
13 essentiel de mettre l'accent sur la déposition du témoin DH qui, à son
14 retour chez lui , le 24 janvier 1994, à Zenica, a rencontré un témoin de
15 l'armée de Bosnie-Herzégovine qui s'est étonné et qui lui a dit: "Pourquoi
16 rentrez-vous chez vous?" Manifestement cet homme savait qu'une attaque
17 allait survenir.
18 Monsieur le Président, Messieurs le Juges, je suis pressé par le temps,
19 donc il faut que j'avance assez rapidement. Mais je parlerai simplement de
20 la déposition du témoin de la Chambre n°1 qui a dit qu'après ces incidents
21 du mois de janvier, dans la municipalité de Busovaca 2.200 Croates à peu
22 près ont été chassés de chez eux, dont 1.300 sont allés vers la ville de
23 Busovaca, les autres se dirigeant vers Kiseljak.
24 Lors de ce conflit du mois de janvier, un grand nombre de témoins ont dit
25 avoir rencontré M. Kordic dans le sous-sol du bâtiment de la Poste. La
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1 défense ne conteste pas que M. Kordic allait de temps en temps dans cet
2 endroit où la Brigade Nikola Subic Zrinski était installée; le témoin
3 Grubesic en a parlé en détails. Mais M. Kordic n'avait pas de bureau à cet
4 endroit-là. Ce qu'il faisait, c'était d'aller à la Poste pour s'informer
5 des événements de la journée.
6 Et je rappelle aux Juges de cette Chambre ce qu'a dit M. Dusko Grubesic à
7 ce sujet, à savoir, parce que l'attaque était subite et inattendue,
8 qu'elle a provoqué une totale désorganisation au sein de la Brigade Nikola
9 Subic Zrinski.
10 Monsieur le Président, Messieurs le Juges, je me contenterai de vous
11 rappeler que le premier crime de guerre commis sur le territoire de la
12 Bosnie centrale s'est produit dans le village de Dusina, le 26 janvier
13 1993, que les victimes en étaient des Croates. Mais je n'ai pas besoin de
14 parler longuement de cet événement, car vous en avez entendu parler.
15 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je me vois contraint de
16 m'arrêter quelques instants sur les conséquences, les répercussions du
17 document Z421.4, cet ordre que M. Dario Kordic, lorsqu'il était vice-
18 président de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, a signé, le 30 janvier
19 1993.
20 Le témoin Dusko Kupreskic, je vous le rappelle, a expliqué que ce document
21 qui, en original croate comporte toute une série de sigles militaires, a
22 été élaboré par un homme de la Brigade, au moment où, à la demande du
23 commandant de la Brigade, la Brigade de Busovaca n'a pas reçu les renforts
24 demandés auprès de la zone opérationnelle de Bosnie centrale parce que la
25 zone opérationnelle de Bosnie centrale ne les a pas accordés.
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1 Donc le témoin Dusko Grubesic, le 30 janvier 1993, sur demande de son
2 commandant intervient personnellement auprès de M. Kordic pour tenter
3 d'obtenir une aide sous quelque forme que ce soit parce que l'attaque est
4 très intense et le temps manque pour trouver d'autres solutions. Le témoin
5 a longuement parlé des circonstances, c'est-à-dire des pressions et des
6 tensions qui existaient à ce moment-là.
7 Et M. Kordic a apporté son aide. Sous quelle forme? Eh bien, il a pris le
8 téléphone et a parlé avec le ministre de la défense, Bruno Stojic donc, en
9 lui demandant ce qu'il pouvait faire pour apporter ce son aide. Il a
10 rédigé un ordre mis sur le papier par cet officier de permanence de la
11 Brigade Nikola Subic Zrinski. Tout cela dans le but d'obtenir une aide
12 pour la Brigade car il n'y avait pas d'autre moyen de l'obtenir.
13 Je signale également aux Juges de cette Chambre le document D356/1,
14 intercalaire 16, qui est lié à cet événement. Mais cet ordre n'a jamais
15 été exécuté. Pourquoi? Parce qu'en dépit du fait que ce document ait été
16 déposé à la zone opérationnelle, document D356/1, intercalaire 15, M.
17 Slavko Marin, officier de permanence à la zone opérationnelle a envoyé à
18 la Brigade Nikola Subic Zrinski deux ordres émis par le commandant de la
19 ce zone opérationnelle la nuit précédent, c'est-à-dire la nuit du 29
20 janvier 1993.
21 Deux ordres que personne jusqu'à ce moment-là n'avait obtenus, n'avait
22 tenus entre ses mains, donc que personne ne connaissait. Et lorsqu'il se
23 rend compte que la zone opérationnelle accepte d'apporter son aide,
24 qu'elle répond donc positivement aux demandes qui lui sont arrivées, eh
25 bien, il décide de ne pas expédier l'ordre rédigé à ce moment-là, mis sur
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1 le papier, celui dont je parle jusqu'à présent.
2 C'est de cette façon que M. Kordic, à la demande de la direction de la
3 Brigade, essaie avec l'autorisation du ministre de la défense, d'apporter
4 une aide concrète dans des circonstances concrètes.
5 Mais Monsieur le Président, Messieurs les Juges, s'agissant du document
6 Z437.1 nous tenions à signaler que nous mettons totalement en cause
7 l'authenticité de ce document car il n'est pas signé, il ne porte pas de
8 sceau. Il ne porte pas mention montrant que ce document a été transmis par
9 transmission par paquet. Aucune indication donc qui permette de confirmer
10 sa crédibilité.
11 Il y a un autre document qu'il faut analyser également. Le
12 document Z447.1 que les Juges ont déjà vu hier, il s'agit de ce chef de
13 l'artillerie de la zone opérationnelle de Bosnie centrale. Je suis
14 d'accord avec ce qu'a dit un Juge de cette Chambre hier, mais je n'irai
15 pas dans le détail. Je suis d'accord avec le fait qu'il est possible à la
16 lecture de ce document d'estimer que M. Kordic a donné, à un moment
17 déterminé, des ordres au responsable de l'artillerie mais ce pendant une
18 période très, très courte. C'est-à-dire entre le 26 janvier et peut-être
19 la fin de la première semaine du mois de février 1993. Mais il faut bien
20 examiner les circonstances qui ont permis que cela se passe. A savoir la
21 confusion et le chaos qui régnait à ce moment-là partout dans la
22 municipalité de Busovaca.
23 Deuxième élément important, M. Kordic n'est pas devenu un militaire, il
24 n'est pas devenu commandant, il n'était pas commandant de quelque
25 formation militaire que ce soit, où que ce soit et pas non plus à
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1 Busovaca. Donc ces instructions données à l'artillerie n'ont pas fait de
2 lui un responsable militaire.
3 Troisième élément important, c'est qu'il n'a pas été prouvé au cours du
4 présent procès que ces ordres ont été établis en déterminant des cibles
5 précises, ce qui est également très important. Je pense que si les cibles
6 étaient militaires à l'époque de cette guerre civile en Bosnie centrale,
7 eh bien, il est difficile de parler en présence de ces événements d'un
8 crime de guerre.
9 Le plus important de tout, c'est sans doute de se poser la question de
10 savoir qu'est-ce que cela prouve? Admettons éventuellement que M. Kordic
11 ait émis quelques instructions pendant une dizaine ou une quinzaine de
12 jours destinées au responsable de l'artillerie. Je pense que ce fait parle
13 de lui-même et qu'il n'a rien à voir du point de vue du droit pénal.
14 Par conséquent, M. Kordic n'a pas de responsabilité particulière à cet
15 égard; même s'il est vrai qu'à un moment tout à fait déterminé, pendant
16 une période très précise, cela ait eu lieu. Le Procureur n'est pas parvenu
17 à prouver qu'il existe un rapport de causalité entre ces instructions
18 fournies par M. Kordic au chef de l'artillerie de la zone opérationnelle
19 et les quelconques événéments militaires qui se seraient déroulés dans la
20 vallée de la Lasva avant la conclusion du Traité de cessez-le-feu, c'est-
21 à-dire avant le printemps 1994.
22 Il n'y a donc pas de rapport de causalité entre les actions de M. Kordic
23 en janvier et ce qui s'est passé en septembre 1993 à Grbavica, ou à Vitez
24 au mois d'avril. Il n'y a évidemment pas de rapport de causalité avec ce
25 qui s'est passé à Zenica et qui a été évoqué hier.
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1 Je dois me presser un peu, faute de temps.
2 En conclusion, je dirai que malgré ces quelques éléments isolés, rien n'a
3 permis de prouver que M. Kordic ait eu le moindre rapport avec des actions
4 militaires en dehors de ce qui a été provoqué par la désorganisation et le
5 chaos qui régnait à Busovaca et dans toute la municipalité fin janvier et
6 début février 1993.
7 Je pense, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, que la défense s'est
8 déjà longuement exprimé sur le document Z610.1, à savoir le journal intime
9 du responsable de la zone opérationnelle de l'officier de permanence. Je
10 ne dirai donc rien de plus à ce sujet, je me contenterai de mentionner
11 simplement à nouveau le document Z1356.4 daté du 11 janvier 1994 qui, le
12 moins que l'on puisse dire, est un document issu d'ouï-dires. On ne sait
13 pas qui a établi ce document. Et si l'on pense à la façon logique dont un
14 document est élaboré par l'officier de permanence dans une Brigade, il
15 apparaît manifestement que n'importe qui dans un document de ce genre
16 aurait pu se présenter comme étant M. Kordic. Simplement, il est un peu
17 comique de voir ici une mention faite de l'allumage d'un quelconque
18 appareil ou d'un quelconque appareil d'extinction d'incendie. On ne voit
19 vraiment pas quel est le rapport possible avec M. Kordic. C'est tout à
20 fait risible.
21 Voilà, Monsieur le Président. J'en ai terminé, je rends la parole à Me
22 Sayers.
23 M. Sayers (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
24 j'aimerais mettre un point final à notre exposé en abordant trois points.
25 Le premier point porte sur une question qui a été évoquée hier.
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1 Il s'agit en fait d'une proposition soumise à des témoins militaires. A
2 savoir, n'est-il pas exact que les responsables politiques donnent des
3 ordres aux responsables militaires? Ce sera le premier point que je
4 traiterai.
5 En deuxième point, je traiterai rapidement de l'enquête d'Ahmici, et je
6 demanderai un huis clos partiel pour parler du Témoin AT et de sa
7 déposition.
8 Enfin, en troisième lieu, je parlerai un peu plus en détail de ce qu'a dit
9 M. Smith en parlant de l'instigation, de l'incitation et des crimes de
10 guerre associés à l'intervention de ce principe.
11 Prenons le premier point. Bien entendu, d'une façon générale, il est vrai
12 que les responsables politiques d'un pays, d'une entité -par exemple la
13 communauté croate d'Herceg-Bosna ou la République croate d'Herceg-Bosna-
14 donnent des ordres aux militaires. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute.
15 Mais cela n'est vrai que de façon générale.
16 Il ne fait pas de doute non plus que, dans la présente affaire, vous avez
17 entendu des responsables militaires de haut rang: le Président de la
18 Communauté d'Herceg-Bosna et de la République d'Herceg-Bosna, le
19 commandant suprême des forces armées, un homme à la personnalité très
20 affirmée qui, effectivement, déterminait les limites stratégiques
21 fondamentales. C'était un homme jaloux de ses prérogatives et qui ne les
22 déléguait pas. Tout cela, vous avez pu le constater d'une façon assez
23 claire.
24 Le Procureur, pour sa part, défend la thèse que les soldats, les
25 militaires prennent leurs ordres et leurs instructions auprès des
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1 responsables politiques. La semaine dernière, par exemple, nous avons eu
2 une illustration tout à fait parlante. Nous avons entendu un responsable
3 politique musulman important de Travnik qui a joué ce rôle important
4 pendant toute la guerre. Cette même proposition lui a été soumise: "N'est-
5 il pas exact que les responsables politiques locaux de Travnik donnaient
6 des ordres au 3e Corps d'armée, responsable des opérations militaires dans
7 la région?" Sa réaction a été la suivante: "Tout cela est complètement
8 absurde. Le 3e Corps d'armée avait sa propre chaîne de commandement, sa
9 propre hiérarchie."
10 Et puis la question a ensuite été posée de façon un peu plus générale: "Eh
11 bien, si cela n'était pas vrai pour Travnik, parlons de la Bosnie
12 centrale: qui en Bosnie centrale, était le dirigeant qui transmettait ses
13 ordres au 3e Corps d'armée?". Et le témoin, répondant à cette question
14 plus générale, n'a pas changé d'avis, il a estimé que cette proposition,
15 elle aussi, était absurde. Il a souligné que le 3e Corps d'armée avait sa
16 propre chaîne de commandement et était responsable devant ses instances
17 propres durant toute la guerre.
18 Et si nous confrontons ces faits au droit, nous disons que le précédent
19 juridique le plus important vient du Tribunal du Rwanda.
20 Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Ce Tribunal a analysé
21 effectivement ce principe de culpabilité pénale appliqué à des dirigeants
22 civils impliqués dans un conflit.
23 Prenons, par exemple, la page 269 de notre mémoire, ainsi que la page 270
24 et les pages suivantes. La situation rwandaise est très caractéristique,
25 car il y avait là un conflit armé. Mais l'armée a participé à un conflit
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1 contre le Front patriotique rwandais, sans être vraiment impliquée dans
2 les opérations militaires, ce qui a finalement débouché sur des crimes de
3 guerre. C'est la direction politique, civile, qui menait l'action et qui a
4 perpétré cette campagne de génocide.
5 Si l'on part de ce principe, il y a deux points particulièrement
6 importants.
7 L'observation a été faite que le génocide contre les Tutsis a été
8 concomitant avec le conflit mais, en fait, était très distinct du conflit,
9 ce qui crée une différence avec l'affaire dont nous parlons ici. Mais
10 enfin, il y a tout de même deux exemples intéressants d'application du
11 principe de responsabilité du supérieur hiérarchique à des civils.
12 L'affaire Musema: Musema était dirigeant d'une usine de thé; il avait un
13 grand nombre de salariés sous ses ordres dans cette usine. Il a été
14 considéré comme responsable des crimes commis à l'intérieur de cette
15 usine. Mais une tentative a été faite pour étendre à d'autres, qui
16 n'étaient pas dans l'enceinte de l'usine, le principe de responsabilités
17 associé à Alfred Musema. Le Tribunal a refusé d'aller aussi loin que cela.
18 La Chambre de première instance, qui a jugé l'affaire Musema, a estimé que
19 les éléments de preuve présentés n'étaient pas suffisants pour considérer
20 que c'est lui qui exerçait le pouvoir, de jure et de facto, sur d'autres
21 membres de la population de la préfecture de Kibuye, notamment sur les
22 villageois qui travaillaient sur les plantations.
23 Cela, c'était un principe très important.
24 M. le Président (interprétation): Oui, mais tout cela dépendra des
25 éléments de preuve. La Chambre de première instance aura à décider elle-
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1 même de l'étendue de l'autorité des dirigeants politiques et militaires
2 d'ailleurs. Et donc du nombre de crimes que l'on peut attribuer à
3 l'accusé.
4 M. Sayers (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Tout à fait. C'est
5 une question de réflexion très détaillée.
6 Mais, s'agissant de l'affaire Musema, je pense que des principes de droit
7 importants ont été démontrés dans cette affaire. Il faut que soit prouvé
8 un degré de contrôle très important, pratiquement comparable à celui qu'un
9 commandant militaire exerce sur les forces qui lui sont subordonnées pour
10 que le principe de culpabilité puisse se dégager. A notre avis, avec le
11 respect que nous devons à la Chambre, nous estimons que ces éléments
12 n'existent pas ici.
13 M. Bennouna : Comment définiriez-vous le contrôle "high degree of
14 control"? Comment vous le définiriez, qui est effectivement le test admis
15 aujourd'hui pour la responsabilité du supérieur hiérarchique?
16 M. Sayers (interprétation): Eh bien, si vous le voulez bien, je vais
17 immédiatement répondre à cette question en citant des propos tenus dans
18 l'affaire Kayishema. Clément Kayishema a été jugé responsable en
19 application de l'équivalent de l'Article 7-3 du Statut de notre Tribunal,
20 parce que -et je reprends les propos tenus par les Juges-: "Il a exercé un
21 contrôle clair et incontestable, un contrôle aussi bien de jure que de
22 facto, sur les assaillants présents dans tous les sites des massacres
23 évoqués dans l'Acte d'accusation." (Fin de citation.)
24 Donc c'est le test que nous devrions appliquer: "un contrôle de facto et
25 de jure clair et incontestable sur les personnes qui ont commis ces crimes
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1 de guerre". A notre avis, lorsqu'on compare les faits de l'affaire
2 Kayishema et les faits que nous discutons ici, en application du droit
3 international humanitaire, ce haut degré de contrôle n'est pas prouvé, pas
4 plus qu'un contrôle incontestable.
5 M. Robinson (interprétation): Rappelez-moi ceci, Maître Sayers, est-ce que
6 c'était une Chambre d'appel ou une Chambre de première instance?
7 M. Sayers (interprétation): Une Chambre de première instance.
8 M. Bennouna: Dans ce cas que vous nous citez, effectivement, vous savez
9 très bien que la responsabilité est liée au contrôle effectif de fait et
10 non pas tellement à un titre juridique. Ceci est un principe général du
11 droit. Par conséquent, ici, il s'est trouvé que la personne avait en même
12 temps "de jure et de facto control", mais le simple "de facto control"
13 suffit, comme vous le savez, dans la jurisprudence internationale.
14 Maintenant, le problème ici, c'est le pouvoir… Ce qu'on appelle le
15 contrôle, c'est le pouvoir de prévenir et de punir. C'est une définition
16 qui est un peu en cercle, qui tourne en rond. C'est-à-dire que le contrôle
17 vous donnent le pouvoir de prévenir et de punir, et le fait d'avoir le
18 pouvoir de prévenir et de punir signifie que vous avez le contrôle.
19 Pour l'instant, on en est là.
20 M. Sayers (interprétation): Oui, Monsieur le Juge, tout à fait. Il y a des
21 éléments paradoxaux dans cette affaire, qui finissent par se retrouver au
22 sommet. D'une certaine façon, tout cela est assez étonnant.
23 Mais les choses se résument finalement à ce qui suit: à savoir que c'est
24 le devoir des Juges de procéder à une investigation très méticuleuse, à
25 une analyse très soigneuse et très attentive des faits pour déterminer
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1 s'il y a effectivement contrôle de facto, clair et incontestable. Et
2 également "contrôle de jure" qu'il est nécessaire de prouver également sur
3 les troupes sur le terrain, de la part de ceux qui dirigent les
4 opérations.
5 C'est cela qui constitue le test final dans une affaire de ce genre pour
6 aboutir à une conviction au-delà de tout doute raisonnable.
7 Maintenant j'aimerais quelques instants à huis clos partiel pour discuter
8 du témoin AT.
9 (Huis clos partiel.)
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9 (Audience publique.)
10 M. Sayers (interprétation): Je vais simplement demander que l'on place ce
11 document sur le rétroprojecteur. Il s'agit du seul document qui a été
12 présenté par l'accusation, dans lequel apparemment M. Kordic utilise le
13 terme de "Balija".
14 Si l'on regarde la première page, on constate, dans la version croate, que
15 ceci a été imprimé à partir d'un ordinateur et le terme de "Balija"
16 n'apparaît pas sur cette page. Vous avez ici un texte en interligne
17 simple. Je vais demander à l'huissier de présenter la page où figure la
18 signature. Ici, vous avez donc un texte qui est en double interligne, pas
19 de signature, pas de tampon, rien du tout. Si cela est la meilleure preuve
20 que peut nous apporter l'accusation, eh bien, cela ne suffit pas.
21 Les principes qui sous-tendaient les discours politiques ont été présentés
22 très clairement lors des procès de Nuremberg. Et lorsque Julius Streicher
23 par exemple ou Hans Frank se prononçaient en faveur de l'extermination
24 des Juifs, on les a -à juste titre- rendu responsables d'incitation au
25 crime de persécution et de crime de génocide.
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1 Mais comme nous l'avons dit, à la page 269 de notre mémoire, Frika(?) et
2 Lanmarsat(?) n'ont -quant à eux- absolument pas été rendus coupables
3 d'incitation à la haine, dans le cadre de leurs discours car c'étaient des
4 discours qui avaient un caractère de propagande mais qui n'étaient pas
5 destinés à inciter le peuple allemand à commettre des atrocités.
6 Or, nous, nous connaissons très bien les discours de M. Kordic. Pas ce
7 qu'on a dit au sujet de ses discours, des années après, sur la base des
8 dires de personnes qui se rappelaient très vaguement ce qui avait été dit,
9 mais nous avons le discours du 16 janvier 1992: il n'incite nulle personne
10 à la violence; discours du 1er février: il y a plusieurs traductions qui
11 ont été faites; Z431A), Z431. Ici, une fois de plus, il n'incite personne
12 à la violence. Il dit: "Nous avons un cessez-le-feu, nous allons nous y
13 conformer. Mais ne nous attaquez pas sinon nous allons répondre". Et enfin
14 le discours de mars, où une fois de plus il n'incite personne à la
15 violence. Le témoin qui nous en a parlé, le Témoin AQ, nous dit avoir vu
16 deux discours, l'un à la télévision et l'autre où M. Kordic déclare que
17 les soldats attendaient ses ordres. Donc le témoin ne se souvient pas de
18 grand-chose.
19 En fait, nous avons entendu beaucoup d'éléments de preuve mais nous sommes
20 très loin de nous avoir convaincus. Quand Mark Twain a vu pour la première
21 fois le Rio Grande, il a dit: "Je n'ai jamais compris à quel point l'eau
22 était importante pour une rivière, avant de voir cette rivière-là, ce
23 fleuve-là".
24 En tout cas, ce que je veux dire, c'est qu'ici nous n'avons absolument pas
25 de preuve au-delà de tout doute raisonnable: donc M. Kordic doit être
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1 libéré parce qu'il n'est pas coupable.
2 M. le Président (interprétation): Fort bien.
3 Nous allons maintenant lever l'audience pour vingt minutes.
4 (L'audience, suspendue à 11 heures 14, est reprise à 11 heures 35.)
5 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice?
6 M. Nice (interprétation): Je vous prie, Monsieur le Président, de
7 m'excuser d'interrompre le rythme des réquisitoires et plaidoiries, mais,
8 comme je l'ai expliqué au juriste de la Chambre ainsi qu'à Me Kovacic, il
9 y a eu une erreur dans le dernier paragraphe de notre mémoire relatif à
10 Cerkez.
11 Bien qu'il s'agisse d'une phrase qui a trait à un sujet que personne n'a
12 abordé dans le cadre de nos argumentations orales, il me semble juste de
13 faire cette correction avant de laisser Me Kovacic parler.
14 Comme le sait la Chambre de première instance, en ce qui concerne les deux
15 accusés, l'accusation demande une condamnation à la prison à vie. Mais ce
16 que nous disons ensuite, c'est qu'il pourrait y avoir une recommandation
17 de la part de la Chambre de première instance en ce qui concerne une peine
18 incompressible.
19 Or il y a une erreur au paragraphe 498, à savoir que nous estimons qu'il
20 pourrait faire une distinction entre les deux accusés, d'après nous. Si la
21 Chambre, par exemple, décidait d'appliquer une peine incompressible, à ce
22 moment-là, nous proposerions une peine minimum incompressible inférieure
23 en ce qui concerne Cerkez.
24 M. le Président (interprétation): Avez-vous ceci par écrit, Monsieur Nice?
25 M. Nice (interprétation): Non, mais je peux le faire préparer assez
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1 rapidement. Je voulais le signaler de toute façon.
2 M. le Président (interprétation): Bien. Maître Kovacic?
3 (Plaidoirie de Me Kovacic.)
4 M. Kovacic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
5 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je voudrais vous présenter
6 tout d'abord Mme Nika Pinter. C'est notre assistante juridique; elle a
7 travaillé sur l'affaire Kupreskic, avec beaucoup de réussite, je dois le
8 dire.
9 Il est possible que je ne fasse pas preuve d'une cohérence absolue dans le
10 cadre de la présentation de mon argumentation, mais il y faut savoir mes
11 collègues de l'équipe de la défense de M. Kordic ont mentionné un grand
12 nombre de points de nature générale sur lesquels nous nous accordons nous-
13 mêmes; donc nous joignons à eux en ce qui concerne ces points et nous ne
14 souhaitons pas répéter ce qui a déjà été dit.
15 Tout au long de ce procès, le Procureur, par le biais de la présentation
16 d'un grand volume d'éléments de preuve, a essayé d'évoquer l'atmosphère
17 qui prévalait lorsqu'ont eu lieu les événements dans la vallée de la
18 Lasva, en 1992 et 1993.
19 Et, dans cette ambiance, ils ont essayé, dans le contexte de ce conflit
20 dont -nous l'avons vu- était un conflit qui opposaient des parties plus
21 ou moins égales -si on n'entre pas dans tous les détails-, l'accusation
22 s'efforce de montrer que tous ceux qui étaient membres du HVO, quel que
23 soit leur poste, sont a priori responsable d'une manière ou d'une autre.
24 Je voudrais infirmer cette thèse en présentant une thèse inverse, qui a
25 été l'étoile qui a guidé, qui a inspiré les Nations Unies dans
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1 l'établissement de ce Tribunal. Ceci est tout à fait bien exprimé dans le
2 première rapport annuel du Tribunal, en date du 28 juillet 1994, où il est
3 indiqué -je cite-: "Si la responsabilité pour les crimes perpétrés dans
4 l'ex-Yougoslavie n'est pas attribuée à des individus, à ce moment-là, des
5 groupes religieux et ethniques entiers vont être considérés responsables
6 de ces crimes et vont être désignés comme étant criminels."
7 L'objectif de cette entreprise, c'est d'établir la responsabilité des
8 personnes individuelles. Donc nous estimons que le simple fait
9 d'appartenir à l'un des groupes ayant participé au conflit ne peut, en
10 aucune manière, servir de fondement automatique pour déterminer la
11 culpabilité d'une personne donnée. Mario Cerkez a été mis en accusation
12 parce qu'il se trouvait qu'il était dans une municipalité où un crime a
13 été commis; je parle du crime d'Ahmici, dont il est incontestable qu'il a
14 eu lieu. Nous ne l'avons jamais contesté et ceci a été le cas depuis le
15 tout début du procès. Donc les événements qui ont eu lieu dans la
16 municipalité de Vitez ont fait l'objet de notre attention dans ce procès.
17 Et puis, il s'est passé autre chose: dans cette municipalité, l'unité
18 spéciale des Vitezovi était en fonction. On a beaucoup entendu parler de
19 cette unité, une unité très mobile, très active et d'après plusieurs
20 éléments de preuve qui ont été présentés, cette unité a joué un rôle
21 positif dans le cadre des opérations d'active et de défense, dans le cadre
22 des opérations de défense militaire. Mais il semble aussi que ces
23 participants étaient assez connus et qu'il leur arrivait souvent de se
24 rendre coupables d'actes délictueux divers.
25 Cerkez ressemble physiquement à feu M. Kraljevic. En raison des
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1 difficultés posées par la barrière linguistique, des difficultés de
2 traduction, on a fait la confusion entre ces deux unités pendant les
3 premiers entretiens. C'est pourquoi l'accusé Cerkez s'est retrouvé sous le
4 feu des projecteurs. S'il avait été le commandant d'une brigade dans toute
5 autre municipalité de la Bosnie centrale où a eu lieu la guerre, personne
6 n'aurait jamais mentionné son nom. Ce qui veut dire qu'à la base, ce
7 procès a un rapport direct avec cet environnement que je viens de décrire
8 mais non pas avec ce qu'il a fait affectivement lui. Pendant toute la
9 procédure et de plus en plus, je dois dire, après tous les éléments de
10 preuve qui nous ont été présentés, il est intéressant de constater qu'il y
11 a de moins en moins de faits qui faisaient l'objet de contestation.
12 En fait, on trouve ici deux thèses opposées: celle de la défense et celle
13 de l'accusation. En fait, ceci se résume en une question d'interprétation
14 d'un certain nombre de faits qui ont été établis.
15 Je vais faire référence à la pièce Z653 à ce sujet. Je ne pense pas qu'il
16 soit nécessaire de placer à nouveau cette pièce sur le rétroprojecteur.
17 Il s'agit d'une des pièces qui a été utilisée le plus souvent, aussi bien
18 par le Procureur que par la défense, mais cette pièce a été interprétée de
19 façon différente. Il s'agit d'une évaluation qui émane du SIS, au sein de
20 la Brigade de Vitez. Le témoin Bertovic nous en a parlé et nous avons
21 convenu qu'à priori, on peut en déduire deux conclusions. Bien entendu, il
22 convient de placer ce document dans le contexte des autres documents
23 présentés et de se rappeler quels étaient les événements qui se
24 produisaient à l'époque.
25 Bien entendu, tous les témoins de la défense, d'une manière ou d'une
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1 autre, ont expliqué qu'en fait, il s'agissait là du potentiel de la
2 Brigade à ce moment-là et que, jusqu'à ce moment-là, la Brigade n'a jamais
3 été mobilisée de cette façon.
4 Ceci montre que la Brigade placée sous le commandement de Mario Cerkez à
5 la veille du conflit, que cette brigade n'était pas prête. Et il y a
6 d'autres éléments que je vais également mentionner plus ou moins
7 fréquemment.
8 Je souhaite, à ce stade, vous rappeler un fait qui est en rapport direct
9 avec le procès en tant que tel. Il s'agit du fait que le Procureur a
10 présenté un Acte d'accusation, ensuite l'a modifié, puis, dans le cadre de
11 requêtes préalables au procès et ensuite pendant le procès lui-même, donc
12 le Procureur a promis de présenter un certain nombre de faits et de les
13 prouver devant cette Chambre. La défense estime que cette promesse n'a pas
14 été tenue.
15 En revanche, la défense de Mario Cerkez, dans sa requête préalable au
16 procès, en dépit du nombre limité de documents qui lui avaient été
17 communiqués avant le début du procès, en dépit du fait que l'accusé a reçu
18 des documents qui, pour la plupart, n'avaient aucune pertinence, donc la
19 défense s'en est toujours tenue aux fondements de sa stratégie et n'a
20 jamais changé de position à ce sujet.
21 L'un des points, l'une des questions essentielles en l'espèce, c'est celle
22 des preuves indirectes. Bien entendu, je ne vais pas ici me lancer dans
23 des considérations théoriques. Il convient de se pencher sur le poids
24 qu'il convient d'accorder aux éléments de preuve présentés. Cependant, il
25 est important de souligner le fait qu'après un procès aussi long, après la
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1 présentation d'autant d'éléments de preuve, eh bien, il se trouve que nous
2 n'avons pas d'éléments clairs, d'éléments qui montrent clairement,
3 d'éléments incontestés, puisqu'il y a trop d'éléments de preuve présentés
4 qui sont de nature indirecte.
5 Je souhaiterais vous rappeler des difficultés rencontrées en matière
6 d'identification. En réalité, le Procureur a modifié l'Acte d'accusation
7 et les chefs d'accusation pendant le procès. Je ne vais pas élaborer à ce
8 sujet, mais je souhaiterais mentionner le meurtre de Samir Trako, qui n'a
9 absolument pas été mentionné dans l'Acte d'accusation et qui a eu lieu en
10 mai 1992.
11 Enfin, après la présentation d'un certain nombre d'éléments de preuve, le
12 Procureur nous a informés que Vukadinovic, l'auteur présumé, c'était lui
13 le responsable, donc pas Cerkez. Mais ensuite, l'accusation a ajouté une
14 chose, c'est-à-dire que ce Vukadinovic, si c'était bien lui, était un
15 membre de la police militaire du HVO en 1992, qui a ensuite été
16 transformée en police de la brigade. Si l'on se place du point de vue de
17 la chaîne de commandement, on peut considérer que Cerkez était responsable
18 parce que cet homme était l'un de ses subordonnés. Or, moi, j'estime qu'il
19 n'y a absolument rien qui vienne à l'appui de cette thèse. D'ailleurs, je
20 vais cesser d'en parler.
21 Maintenant, je vais en venir à un sujet souvent évoqué devant la Chambre
22 de première instance: celui du problème des noms et des prénoms communs à
23 plusieurs personnes et à la difficulté d'identifier certaines personnes.
24 Un autre problème que je souhaite évoquer, c'est que pendant ce procès, le
25 Procureur a essayé de prouver que les membres de la Brigade de Vitez ont
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1 participé directement aux crimes d'Ahmici, c'est-à-dire que Mario Cerkez
2 était sans censé être l'auteur des crimes d'Ahmici du fait de la
3 responsabilité du supérieur hiérarchique. Il y a quelques mois, dans le
4 prétoire, le Procureur nous a informés qu'il était possible que la Brigade
5 de Vitez n'ait pas participé aux crimes d'Ahmici, et il estimait donc que
6 mon client, Mario Cerkez, a été complice ou a encouragé la perpétration de
7 ces crimes. Ceci entraîne une modification des charges qui lui sont
8 reprochées.
9 Et puis, il y a quelques semaines, le Procureur a de nouveau affirmé que
10 la Brigade de Vitez avait participé aux événements d'Ahmici. Une fois de
11 plus, la position juridique de M. Cerkez a évolué. Je ne veux pas entrer
12 dans le détail des raisons qui ont incité l'accusation à ainsi modifier sa
13 position. Il y a bien entendu un élément, c'est celui de la déposition du
14 Témoin AT, qui a précédé tout cela. Il fallait donc bien s'adapter à ce
15 qu'il venait de raconter.
16 Autre exemple de modification de l'Acte d'accusation pendant le procès.
17 Non, je vous prie de m'excuser: je ne vais pas traiter de cette question
18 plus avant.
19 En ce qui concerne le crime d'Ahmici, puisque j'en ai parlé, le Procureur
20 essaie d'allier deux thèses complètement opposées. Je dis que c'est
21 absolument impossible. D'une part, l'accusation essaie de convaincre la
22 Chambre de première instance que Cerkez et son unité se trouvaient à
23 Ahmici, mais, dans le même temps -c'est sans doute dû à la crédibilité du
24 Témoin AT, ainsi qu'à d'autres éléments de preuve présentés-, d'un autre
25 côté, l'accusation essaie de confirmer que Mario Cerkez était complice de
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1 ces événements, parce que son unité se trouvait à Ahmici. Or nous estimons
2 qu'il n'y a pas de preuve à l'appui de cette thèse.
3 Et à ce sujet, je voudrais dire la chose suivante: c'est un fait que les
4 membres de la Brigade de Vitez nouvellement mobilisés sont allés à Ahmici,
5 au Baklava, le 18 avril 1993, au plus tôt.
6 Il y a un document qui le prouve: le document D643.1. C'est l'ordre
7 délivré par Blaskic à la Brigade de Vitez. La cote, c'est 343/1. Je le
8 signale pour le compte rendu d'audience.
9 C'est un ordre de M. Blaskic à la Brigade de Vitez et au Département de la
10 Défense demandant la mobilisation immédiate de quarante soldats. Sur la
11 base de cet ordre, la Brigade de Vitez est censée envoyer ces hommes sur
12 la ligne de front qui se trouve au-dessus, littéralement au-dessus
13 d'Ahmici, sur une colline qui se trouve au nord. Il s'agit d'une ligne qui
14 a été établie pour se défendre contre les forces de l'armée de Bosnie-
15 Herzégovine, qui lance une attaque depuis le nord de la vallée de la
16 Lasva.
17 Je vous rappelle qu'Anto Pojavnik, qui a témoigné en l'espèce, un témoin
18 très très crédible, faisait justement partie de cette quarantaine d'hommes
19 qui ont été envoyés sur la ligne de front. Et je dois dire que ce
20 témoignage est tout à fait caractéristique car ce témoin nous a dit qu'il
21 avait été mobilisé après s'être présenté deux fois, le 16, le 17 et, enfin
22 le 18, on lui a dit qu'il était mobilisé. Et on lui a dit d'aller creuser
23 des tranchées sur ce point que j'ai indiqué, au-dessus d'Ahmici.
24 Cependant, quand il est arrivé sur place, il s'est soudain transformé en
25 combattant puisqu'on lui a assigné une place dans une tranchée.
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1 Malheureusement, il ne disposait pas d'arme.
2 Maintenant, je vais revenir à ce témoin. Je dois dire d'emblée d'ailleurs
3 que ce témoin a dit qu'il a tenu dans ses mains le journal qui a été
4 trouvé, journal d'un commandant de l'armée de Bosnie-Herzégovine, qui
5 illustrait très clairement le plan d'attaque de l'armée de Bosnie-
6 Herzégovine. Ce journal a ensuite été récupéré par le SIS des mains de ce
7 témoin; le SIS est donc le service de renseignement. Malheureusement, on
8 n'a pas retrouvé ce journal. Et il y a eu des manipulations, des
9 falsifications de documents, particulièrement ceux qui se trouvaient entre
10 les mains du SIS. Cela est devenu tout à fait évident lorsqu'on a commencé
11 à s'intéresser aux documents de Zagreb.
12 Mais revenons à ce qui nous intéresse en premier lieu, à savoir ce qui
13 s'est passé à Ahmici avant cette journée, soit avant le 18 avril 1993.
14 D'autres éléments de preuve indiquent que la Brigade de Vitez n'était pas
15 ou ne pouvait pas se trouver à Ahmici, le 16 avril au matin. Ceci pour des
16 raisons tout à fait objectives, à savoir qu'il semble que les crimes qui
17 ont été commis à Ahmici l'ont été pendant une période de temps
18 remarquablement limitée, très, très courte et que tout était déjà fini tôt
19 dans la matinée.
20 En ce qui concerne l'absence de la Brigade de Vitez à Ahmici et
21 l'impossibilité de sa présence à Ahmici, ceci est montré dans la pièce
22 D60/2. Il s'agit d'un ordre de Blaskic, délivré à l'attention de la
23 Brigade de Vitez, afin d'ériger un barrage sur les routes allant de
24 Vranjska, Kruscica vers le centre-ville. Cet ordre a été délivré à 1 heure
25 30 du matin. C'est un ordre dont plusieurs témoins nous ont parlé. Cerkez
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1 leur avait dit que c'était l'ordre qu'il avait donné oralement,
2 verbalement et ensuite cet ordre a été confirmé par un ordre écrit.
3 En ce qui concerne ce cas, je souhaiterais mentionner le document D343/1,
4 intercalaire n°7. Il s'agit de la même chose, essentiellement en ce qui
5 concerne sa disposition, sa forme, l'heure. Il s'agit de l'ordre délivré
6 par M. Blaskic à l'intention de Kraljevic, c’est-à-dire aux Vitezovi. Dans
7 cet ordre, il décrit les missions des Vitezovi qui sont de nature
8 défensive et qui se concentrent au centre de la ville.
9 Puis il y a également un autre ordre qui ressemble comme un frère au
10 précédent: c'est l'ordre D343/1, intercalaire n°8. C'est un ordre de
11 Blaskic à l'intention de la police civile. Ici encore, il donne l'ordre
12 d'établir un certains nombre de positions au centre ville, notamment près
13 de Stari Vitez.
14 Le quatrième ordre qui est dans cet ordre d'idée, c'est celui qui porte la
15 cote D343/1, intercalaire n°6, ordre adressé par Blaskic à la police
16 militaire. Le secteur d'Ahmici Nadioci, la route entre Ahmici et
17 Nadioci, c'est le secteur qui est mentionné dans cet ordre. Et ceci
18 également pour le matin du 16 avril.
19 Si l'on examine les quatre ordres ensemble, du point de vue de la défense,
20 il est clair qu'il s'agit d'ordres préventifs. Chacune des unités s'est vu
21 attribuer une tâche, une mission. Sur la base d'autres éléments de preuve,
22 nous pouvons conclure que, sur toutes ces localités, ce que Blaskic avait
23 ordonné a été exactement effectué. C'est-à-dire la défense est la
24 prévention de l'attaque, sauf à Ahmici. Sur la base de toute une série
25 d'autres éléments de preuve, nous pouvons trouver une claire confirmation
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1 du fait que c'est la police militaire qui se trouvait à Ahmici. Il s'agit
2 donc très exactement des mêmes unités qui devaient y être, conformément à
3 l'ordre de M. Blaskic.
4 C'est pour cela que je ne vois aucune raison pour laquelle, si l'on
5 examine l'intégralité de ces ordres, on n'y croit pas. C'est Blaskic qui a
6 donné ces ordres, c'est un fait. Et c'est un fait qui n'a jamais été
7 contesté.
8 Même si les trois autre unités, c’est-à-dire les autres unités par rapport
9 à l'unité de Viteska, en ce qui concerne ces unité-là, nous n'avons pas eu
10 l'occasion de voir où elles se trouvaient pendant cette procédure. En ce
11 qui concerne les autres unités, sur la base des déclarations de plusieurs
12 témoins, il est possible de savoir où elles se trouvaient. Là, il
13 s'agissait surtout de témoins de l'accusation qui déposaient au début.
14 D'autre part, même si, vers la fin de la présentation des moyens de
15 preuve, l'image est devenue claire -et nous considérons que cette image
16 reste claire- en ce qui concerne les positions de la Brigade à la veille
17 du conflit.
18 Mais malgré tout cela, le Procureur s'appuie sur les documents de Zagreb
19 et présente quelques autres document, dont trois sont peut-être
20 importants, afin d'y trouver le fondement pour sa dernière thèse modifiée,
21 en indiquant encore une fois que la Brigade de Vitez aurait été à Ahmici
22 au moment des faits. Il s'agit du document Z67.7, le rapport de Cerkez de
23 10 heures où il dit -je cite-: "Nos forces avancent: Donja Veceriska,
24 Ahmici, Sivrino Selo, Vrhovine." Et, entre autres choses, il déclare:
25 "Nous avons trois morts."
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1 Ensuite, le Procureur a présenté la pièce à conviction Z671.4, le rapport
2 de Cerkez du 16 avril. D'après le numéro de référence, on dirait que cela
3 a été rédigé dans l'après-midi et il est écrit -je cite-: "Donja Veceriska
4 et Ahmici ont été traitées à 70%." Et puis, il est également écrit "que 14
5 personnes ont été arrêtées à Nadioci.
6 Puis, le dernier document de cette série de documents: Z692.3, l'ordre
7 donné par Blaskic à la Brigade de Vitez de s'emparer entièrement des
8 villages de Donja Veceriska, Ahmici, Sivrino Selo et Vrhovine. Cet ordre-
9 là a été émis vers 10 heures du matin.
10 A première vue, il s'agit là des documents sérieux à charge, à l'encontre
11 de mon client. Cependant, la défense conteste le véritable poids des
12 conclusions que l'on peut tirer sur la base de ces documents pour
13 plusieurs raisons.
14 Tout d'abord, les trois documents viennent des dites archives de Zagreb.
15 La défense considère -et continue à affirmer- qu'il s'agit là de documents
16 falsifiés, immiscés délibérément. Nous considérons que les Juges doivent
17 tout particulièrement peser le poids à donner à ces documents-là, surtout
18 étant donné qu'ils vont à l'encontre de l'image d'ensemble qui a été créée
19 auparavant.
20 Pourquoi qui que ce soit aurait eu intérêt à immiscer ce genre de
21 documents? Ces archives de Zagreb, du HVO de Zagreb sont restés pendant
22 six à sept ans sous le contrôle des trois services de renseignement. En ce
23 qui concerne au moins l'un de ces services, il disposait des motivations
24 et des raisons qui les pousseraient à essayer de protéger la police
25 militaire par rapport à la divulgation des documents indiquant que c'est
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1 eux qui ont participé aux événements à Ahmici. Il fallait donc trouver
2 quelqu'un d'autre et placer quelqu'un d'autre à Ahmici.
3 Je souhaite simplement attirer votre attention sur la pièce à conviction
4 Z692.3, l'ordre de Blaskic à la Brigade de Vitez concernant le village...
5 M. Bennouna: Si je comprends bien, vous nous dites que ces documents de
6 Zagreb à charge contre votre client, contre l'accusé M. Cerkez, ne sont
7 pas authentiques et ont été placés là par quelqu'un au cours de cette
8 période de six ou sept ans, pour essayer de disculper la police militaire,
9 pour placer la Brigade de Vitez dans..., pour introduire la Brigade de
10 Vitez dans l'affaire d'Ahmici et disculper la police militaire.
11 Je ne vois pas en quoi cela disculpe la police militaire, le fait de
12 placer ces documents. Parce que c'est cela, en fait, l'alibi ou le motif
13 éventuel ou l'intérêt qu'aurait quelqu'un à placer ces documents là,
14 d'après vous?
15 Mais je ne vois pas en quoi cela disculpe la police militaire.
16 M. Kovacic (interprétation): La personne qui a effectué cela a
17 certainement tenu compte de deux points. D'un côté, à ce moment-là, que la
18 procédure à l'encontre de M. Blaskic était en cours. Donc pendant cette
19 période, au moment où ils ont constaté quelle était la direction de la
20 défense de Blaskic, quelqu'un a pu comprendre que la police militaire a
21 été citée comme la première parmi les auteurs de crimes d'Ahmici.
22 Quelqu'un devait protéger la police militaire, ils devaient se protéger
23 eux-mêmes et la police militaire est la plus proche justement de ces
24 structures du SIS en Bosnie. Ceci est clair d'après les documents que nous
25 avons vus lorsque nous avons discuté de la question de savoir lesquels
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1 devaient être versés au dossier. La plupart de ces documents n'ont pas été
2 admis. La personne qui avait planifié cela a essayé également de manipuler
3 les moyens de preuve et, rétroactivement, ce qui est impossible, changer
4 les événements qui se sont déjà produits dans le passé.
5 Il a fallu trouver quelqu'un d'autre qui aurait pu être à Ahmici. Qui est
6 le premier candidat logique? La brigade municipale.
7 Voici ma position à ce sujet. Je ne sais pas si j'ai bien répondu à votre
8 question.
9 M. le Président (interprétation): Non, pas vraiment, Maître Kovacic.
10 Réfléchissons à votre suggestion. La première question que je soulève
11 devant vous ou un autre conseil au moment de la prise en considération de
12 l'admissibilité de ces documents, et nous avons délivré une ordonnance en
13 ce qui concerne ces documents-là et compte tenu de la manière dont se
14 déroule la procédure, nous avons exclu une certaine partie de ces
15 documents. Mais quels sont ces moyens de preuves sur lesquels vous vous
16 appuyez afin d'exprimer ce genre d'allégation? Il n'y a pas de moyens de
17 preuve.
18 Deuxièmement, si effectivement, en réalité, quelqu'un avait falsifié ces
19 documents-là, afin d'essayer de disculper la police militaire et de faire
20 la Brigade de Vitez porter le blâme, pourquoi dans ce cas-là, se trouve
21 parmi ces document l'ordre de Blaskic que vous avez mentionné? L'ordre de
22 Blaskic se réfère au 4e Bataillon de la police militaire. Si ce que vous
23 dites était vrai, si une telle opération avait eu lieu, ces documents-là
24 auraient été soit retirés, soit modifiés afin de suggérer que c'est la
25 Brigade de Vitez qui avait été déployée mais ces documents restent parmi
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1 la liasse des documents, et d'ailleurs vous y faites référence. Donc, j'ai
2 l'impression que vous essayez de tirer profit des deux approches.
3 M. Kovacic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
4 la pièce à conviction 343/1, intercalaire 6, c'est-à-dire l'ordre de M.
5 Blaskic donné à la police militaire de se déployer sur secteur Ahmici
6 Nadioci, il s'agit là d'un document versé au dossier dans le cadre de
7 notre présentation des moyens de preuve.
8 Bien évidemment, malheureusement, nous ne sommes pas à même de prouver que
9 quelqu'un avait immiscé délibérément un document falsifié parmi les
10 documents émanant de Zagreb mais, si l'on analyse ces deux groupes de
11 documents, donc les documents portant sur la situation qui régnait sur le
12 terrain tel que nous avons pu l'établir à travers l'ensemble de la
13 procédure, d'un côté, et les deux ou trois documents que nous avons reçus
14 plus récemment de Zagreb, de l'autre, nous pouvons voir les
15 contradictions. Il est donc logique de se poser la question: qui avait des
16 raisons d'immiscer cela de manière délibérée?
17 Mais permettez-moi d'ajouter certains autres points. Déjà sur la base de
18 l'aspect physique même de cet ordre de Blaskic, provenant de Zagreb et
19 donnant la mission à la Brigade de Vitez, nous pouvons voir qu'il n'y a
20 aucune similitude avec les autres. Cet ordre a trois lignes au total. Les
21 ordres de M. Blaskic, même normalement lorsqu'ils ont été donnés et
22 rédigés aux moments d'urgence, contiennent au moins une dizaine de lignes.
23 Deuxièmement, les témoins à qui l'on a montré ces ordres. Je parle de
24 l'ordre 692.3: tout d'abord, cela a été montré au témoin Bertovic. Il
25 s'agit d'un témoin tout à fait fiable et il a dit, dès qu'il a vu l'ordre:
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1 "Mais j'aurais dû disposer d'au moins trois bataillons de la taille dont
2 je disposais, mais je ne disposais que d'un seul, donc c'était une
3 situation complètement impossible". Bertovic était un commandant sur le
4 terrain, il connaissait la situation, il a expliqué en détail ses
5 capacités, ses possibilités, les troupes dont il disposait et je pense que
6 ces exemples illustrent bien ce que je souhaite expliquer, c'est-à-dire
7 c'était la première fois qu'il avait vu ce document et il a eu une
8 réaction spontanée.
9 Je souhaite également dire qu'il est difficile de croire que Blaskic
10 n'était pas du tout au courant de la situation sur le terrain. Bien sûr,
11 tout était dans le désordre, etc. Nous avons vu tout un nombre de
12 documents et entendu plusieurs dépositions allant dans ce sens, mais il
13 est difficile de savoir quelle est l'étendue de ses connaissances et de
14 son ignorance. Mais tout simplement, nous ne croyons pas que Blaskic
15 aurait pu donner un tel ordre dans la matinée. C'est tout simplement
16 absurde.
17 Lorsque nous avons cité à la barre le témoin Zuljevic, qui a déposé le 7
18 septembre et nous l'avons cité à la barre, justement à cause de cela, nous
19 lui avons posé la question de savoir pourquoi dans les rapports de cette
20 matinée là, en parlant de la Brigade, dans les rapports émanant de la
21 Brigade, il est indiqué souvent "les nôtres, nos forces, etc." Inutile de
22 dire que la réponse n'est pas très claire puisque s'il s'agit là d'un
23 document émanant de Brigade de Vitez, lorsque l'on lit dans ce document
24 "nous, nos forces, etc.", il serait logique de conclure qu'il s'agit des
25 soldats de la Brigade de Vitez. Mais après, suite à l'analyse approfondie
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1 de ces documents, nous pouvons constater que ceci n'est pas du tout
2 conforme à la réalité du déploiement des soldats de la Brigade à ce
3 moment-là.
4 Donc quelle est la seule explication, compte tenu du chaos qui s'est
5 installé? Visiblement, Blaskic demande de nouvelles informations et il
6 demande à la Brigade de lui servir d'oreille, c'est-à-dire de l'informer
7 de tout ce qu'il se passait et ensuite les officiers opérationnels de
8 Blaskic allaient ensuite apprécier et examiner, analyser ces documents-là.
9 Aux témoins Godron Abradrovko, Josip Zuljevic, on leur a posé la question
10 de savoir si ces documents étaient semblables à ceux auxquels ils étaient
11 habitués; ils ont dit qu'il était difficile pour eux de s'exprimer. Quant
12 au style des documents, ils ont exprimé leur réserve par rapport à la
13 possibilité d'accepter que c'était effectivement les documents
14 authentiques. Bien sûr, nous devons constater six, sept: il est presque
15 impossible à ces personnes de dire: Voilà moi, je suis sûr que c'est un
16 document authentique. Peut-être parfois il existe ce genre de documents
17 mais pour la plupart des documents ceci est entièrement impossible.
18 Le document suivant pour lequel je dis qu'il fait partie de ces trois
19 documents qui ne peuvent absolument confirmer la thèse selon laquelle la
20 Brigade était à Ahmici, prouve le manque de moyens de preuve indiquant que
21 Mario Cerkez aurait émis un quelconque ordre exécutif sur la base de
22 l'ordre de Blaskic. Or ceci aurait été normal, peut-être tout d'abord un
23 ordre verbal et ensuite un ordre par écrit, mais un tel ordre n'existe pas
24 malgré un grand nombre de documents dont on dispose et malgré les dires du
25 témoin Prelec qui a dit qu'à Zagreb, pratiquement l'ensemble de l'archive
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1 concernant la Brigade de Vitez a été découvert. Nous avons effectivement
2 pu trouver un grand nombre des documents émanant de la Brigade de Vitez de
3 l'époque.
4 Ensuite le témoin Jucevic a expliqué de quelle manière il faut interpréter
5 les propos tels que "nos forces, les nôtres, etc". Il explique qu'il faut
6 comprendre cela comme les forces croates ou le peuple croate en général.
7 Ensuite, à l'égard du document Z673.3, nous pouvons voir que l'on fait
8 mention de, je cite: "trois de nos membres morts". Et cette phrase, "trois
9 de nos membres morts" apparaît encore une fois dans le rapport de la
10 Brigade de Vitez du 16 avril, à 17 heures 35 de l'après-midi; donc c'est
11 dans l'après-midi, lorsque la situation s'est calmée un peu. Il s'agit de
12 la pièce à conviction D162/2.
13 Ce serait peut-être mieux de placer cela sur le rétroprojecteur.
14 Dans ce rapport, on mentionne les noms. Voyons tout d'abord l'en-tête: il
15 s'agit donc de 17 heures 35, le 16 avril. Et ici, nous voyons dans ce
16 rapport, dans le rapport envoyé quelques heures plus tôt, il est écrit
17 "trois des nôtres". Donc on dirait les membres de la Brigade de Vitez
18 puisqu'il dit "nos combattants".
19 Je vais vous montrer brièvement l'aspect de la version en langue croate.
20 Je pense qu'il n'est pas prématuré de conclure que, même après avoir
21 rédigé et tapé cela à la machine, on ajoute, parce que de nouvelles
22 informations arrivent. Ici, les personnes tuées sont identifiées et on
23 identifie de qui il s'agit. Alors qu'il a été dit auparavant "nos
24 soldats", on voit ici qu'il y a deux membres de la police régionale. Le
25 nom mentionné au n°5 a été cité par un témoin protégé, donc je ne souhaite
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1 pas citer le nom de ce témoin. Et nous pouvons voir les civils entre les
2 points 6 et 11; ceci a été ajouté à la main. Il est donc clair que ce
3 document confirme que la Brigade, à ce moment-là -au moment où elle est en
4 cours de constitution-, est en train de rédiger un rapport concernant tout
5 ce qui se passe en employant les mots tels que "nos forces", "les nôtres",
6 etc. C'est par la suite que les choses se clarifient un peu plus.
7 Je souhaite également rappeler le contenu de la déposition de Zeljko
8 Sajevic, qui était pratiquement le n°2 de la Brigade et dont la déposition
9 allait dans le même sens. Lorsqu'on lui a montré le document Z751, il
10 s'agissait là d'un autre rapport de la Brigade où il était écrit que
11 Gacice avait été nettoyée à 70%. Et encore une fois, la Brigade a fait un
12 rapport sur les activités à cet endroit. Sajevic nous a donné une
13 explication, tout comme d'autres témoins: Nikola Mlakic, le 21 septembre,
14 en disant: "Qui sont les unités qui étaient à Gacice?"
15 Mais nous avons un document qui le prouve, c'est-à-dire le rapport de
16 Darko Kraljevic, D89/2, et dans ce document, cette unité elle-même
17 mentionne que c'est à Gacice qu'elle a effectué son opération ce jour-là.
18 Tout d'abord, auparavant, M. Sajevic, en tant que témoin, nous a expliqué
19 qu'en disant "nos forces", on pensait à toutes les forces du HVO. Ensuite,
20 nous avons l'exemple du rapport émanant de cette unité qui affirme, elle-
21 même, qu'à ce moment-là, elle a été à Gacice. Il s'agit là d'une unité qui
22 n'était pas placée sous le commandement de l'accusé Cerkez.
23 Pour terminer en ce qui concerne cette partie-là, la position de la
24 défense et la proposition de la défense est de confronter très
25 attentivement, d'un côté, les moyens de preuve indiquant que la Brigade de
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1 Vitez n'était pas à Ahmici au moment des faits et, d'autre part, les trois
2 documents émanant de Zagreb. Suite à une analyse approfondie -et je suis
3 convaincu que les Juges arriveront à la même conclusion que celle que j'ai
4 exprimée dans la thèse au début, à savoir qu'une partie des documents
5 émanant des archives de Zagreb, et j'affirme qu'il s'agit de ces trois
6 document-là, ont été immiscés de manière délibérée afin d'induire les
7 Juges en erreur- je suis sûr que c'est sur la base de cette analyse que
8 les Juges pourront décider du poids à donner à ces documents-là.
9 Ensuite, le Procureur affirme qu'à Ahmici, certaines personnes ont été
10 tuées et blessées pour lesquelles il est possible d'établir qu'il
11 s'agissait de membres de la Brigade.
12 Mais là, il s'agit d'une affirmation qui n'a tout simplement pas été
13 prouvée et qui n'est pas exacte. Nous avons déjà mentionné la pièce à
14 conviction D162/2 où c'est clair… Il est énoncé quelles sont les personnes
15 qui sont mortes le 16 avril. Cela veut dire que ceci englobe également les
16 personnes tuées à Ahmici.
17 Deuxièmement, nous avons fait venir un témoin, Ivica Semren, qui illustre
18 bien une telle affirmation du Procureur. Par exemple, je souhaite dire que
19 le document D130/2 porte sur cette personne et, sur la base de cela, il
20 est possible de conclure qu'il a été blessé à Ahmici en tant que membre de
21 la Brigade, Ivica Semren. Je dois souligner ici qu'il a subi un contre-
22 interrogatoire très intense et agressif mais Ivica Semren nous a expliqué
23 ce qui s'est passé. Il a effectivement été blessé à Ahmici le 16 avril,
24 mais devant sa propre maison.
25 La question qui se pose porte sur les preuves, comme les preuves à l'égard
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1 de cet Ivica Semren et les autres.
2 Où est la preuve portant sur l'endroit où se trouve Ivica Semren et les
3 autres membre de la Brigade, justement dans la matinée du 16 avril? Nous
4 avons déjà présenté un grand nombre de moyens de preuve portant sur le
5 niveau de constitution de la Brigade à ce moment-là, et aussi sur
6 l'organisation des équipes dans le secteur militaire, qui était
7 caractéristiques non pas seulement de la Brigade de Vitez mais aussi
8 concernant la situation dans d'autres municipalités, dans d'autres parties
9 de la Bosnie-Herzégovine, et non pas seulement au sein du HVO.
10 Donc la question cruciale suivante est la suivante: si l'on affirme le
11 fait qu'un soldat a été blessé à un certain endroit, à un certain temps,
12 prouve qu'un crime a été commis par les membres de cette même Brigade et
13 si ceci doit être la base permettant d'établir la responsabilité de
14 commandement, dans ce cas-là, il est nécessaire de prouver que cette
15 personne était à cet endroit-là, à ce moment-là, dans le cadre de ses
16 fonctions au sein de la Brigade et non pas de son propre gré, en privé
17 sans qu'aucun ordre n'ait été délivré allant dans ce sens-là.
18 Ensuite, nous avons entendu beaucoup d'éléments portant sur le caractère
19 identique de plusieurs noms. Et là, il s'agit d'une situation de fait qui
20 règne sur le terrain; il est donc possible d'établir la réelle identité
21 seulement sur la base d'autres coordonnées concernant la personne.
22 Je vais vous donner quelques exemples: nous avons entendu parler d'au
23 moins trois Vlado Santic, d'au moins trois Ivica Miskovic. L'un des
24 derniers témoins, le témoin de moralité, s'appelle Ivica Miskovic mais
25 avant, nous avions déjà eu un autre témoin qui s'appelle Ivica Miskovic.
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1 Et ils n'ont pas seulement les mêmes noms et prénoms, les noms de leurs
2 pères sont les mêmes, ils sont nés la même année, au même endroit.
3 Quel est donc le poids de la preuve indiquant qu'Ivica Miskovic, fils
4 d'untel, né en 1958, a commis un crime à cette date-là et qu'il s'agit là
5 d'un membre de la Brigade de Vitez? Alors que nous ne disposons pas
6 d'information concernant les membres la Brigade de Vitez sauf la liste
7 concernant les équipes constituées au sein de la Brigade de Vitez qui
8 allaient sur la ligne de front contre les Serbes en février 1992, et le
9 témoin Cengic en a parlé. Ce sont là les seules informations fiables.
10 Donc l'important est de savoir si la personne, si on réussit à
11 l'identifier, était effectivement au moment des faits membre des faits de
12 la Brigade.
13 Je souhaite également souligner le fait qu'il n'y a pas d'ordre
14 d'exécution qui aurait été émis par Cerkez afin de donner les instructions
15 à ses troupes de se rendre à Ahmici.
16 Il y a une erreur dans le compte rendu: il s'agissait de février 1993 et
17 non pas février 1992, mais je pense que ceci est clair.
18 Je souhaite maintenant aborder le contexte général, les circonstances
19 générales et je souhaite par ce biais traiter de l'intention délictueuse
20 de la préméditation. Sur la base de cela, nous pouvons tirer des
21 conclusions concernant la manière dont Cerkez pouvait voir les événements
22 à partir de 1992. Afin de simplifier les choses, j'ai essayé d'être le
23 plus bref possible dans cette présentation.
24 Donc si nous considérons cette période, j'ai parlé des fonctions de Mario
25 Cerkez dans cette période, je rappelle aux Juges de cette Chambre que,
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1 dans notre mémoire, nous avons admis l'existence de toutes les fonctions.
2 Je rappelle également aux Juges de cette Chambre que, dans les documents à
3 l'appui de l'Acte d'accusation que le Procureur nous a communiqués avant
4 le procès, ainsi que les documents que nous avons reçus entre-temps, il
5 n'y avait aucun élément de preuve relatif à la majorité des fonctions
6 importantes de Mario Cerkez, en tout cas, aucun élément de preuve portant
7 sur la période où Mario Cerkez exerçait des fonctions importantes.
8 Je vais vous donner quelques exemples. Selon le Procureur, au cours de
9 1992 -je ne vais pas citer en détail tous les éléments de preuve existant
10 en rapport avec cela-, il n'y avait pas de conflit entre les deux groupes
11 ethniques dans la vallée de la Lasva et je pense plus précisément sur le
12 territoire de la municipalité de Vitez. Nous convenons qu'à la fin de
13 cette année, un certain nombre d'incidents ont commencé mais nous
14 affirmons également que les deux populations, à peu près à égalité, ont
15 joué le rôle d'auteurs de ces incidents et de victimes de ces incidents,
16 selon les cas, les deux rôles se répartissant –je le répète- à peu près à
17 égalité.
18 Je vous rappelle à cet égard le témoignage que nous citons dans notre
19 mémoire en conclusion, celui du témoin Mestrovic, qui est tout à fait
20 convaincant sur ce point.
21 Lorsque le démantèlement de la Yougoslavie a commencé en 1992, même à la
22 fin de 1991, lorsque des actes d'agression de la JNA ont commencé, Cerkez
23 se trouvait dans une petite ville de Bosnie centrale où il était un
24 citoyen comme les autres. La Communauté européenne, les Etats-Unis et tous
25 les autres grands pays du monde se sont intéressés de très près, pendant
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1 deux ou trois ans, au problème de la Bosnie, aux événements dans cette
2 région et aux événements de la Yougoslavie dans son ensemble en
3 particulier, mais plus particulièrement aux événements de Bosnie. Nous
4 avons entendu parler d'un grand nombre de plans de paix et des divers
5 points de vue défendus par les militaires, les politiques, etc. Les
6 opinions qui existaient à cette époque étaient très diverses. C'est la
7 raison pour laquelle il était impossible de faire adopter un plan de paix
8 aux parties belligérantes, car chacun avait son propre point de vue sur la
9 question. Donc, les plans ont été élaborés puis modifiés en raison de
10 l'évolution de la réalité.
11 Et la question théorique que je pose est la suivante: comment est-ce qu'un
12 Mario Cerkez, un homme assez peu éduqué, peut, à partir de la petite ville
13 de Vitez dans laquelle il réside, se faire une idée globale de la
14 situation?
15 Je fais référence notamment aux problèmes du conflit international. Si
16 c'était un conflit international qui a eu lieu dans cette région, ce que
17 la défense réfute, récuse, et nous avons déjà présenté notre point de vue
18 à nos collègues de l'autre partie -nous avons déjà parlé de cela, il n'est
19 pas la peine d'y revenir-, donc quelle aurait été l'intention de Cerkez
20 dans ce contexte? Qui pouvait-il rejoindre? Les rangs de qui? L'Etat
21 croate? Le HVO? Comment cet homme pouvait-il prendre sa décision? En se
22 fondant sur quoi? Comment percevait-il les choses? Sur la base de quels
23 événements? Rien n'a été dit à ce sujet.
24 A un niveau moins global, en 1992, il convient de rappeler que Cerkez a
25 rejoint le HVO lorsque l'identité de l'agresseur est devenu clair ainsi
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1 que l'identité de la victime, quand il est devenu clair que l'ex-
2 Yougoslavie, qui fondait son existence sur la fraternité et l'unité, était
3 en train d'utiliser l'appareil de l'armée populaire yougoslave au
4 fonctionnement de laquelle tout le monde contribuait pour attaquer son
5 propre peuple chez lui. N'était-ce pas un bon motif? Est-ce que qui que ce
6 soit aurait dû avoir honte de l'action entreprise par lui en 1992? Tout
7 cela a un rapport direct avec l'intention.
8 Cependant, finalement -et c'est très important car cela implique l'aspect
9 juridique des choses-, sur le plan juridique, Cerkez n'a jamais –et il n'y
10 a pas un élément qui le prouve- occupé de poste particulier à ce moment-
11 là. Il a simplement monté les échelons à l'intérieur des forces armées, ce
12 qui ne constitue pas une organisation en tant que telle. Fondamentalement,
13 c'était plutôt un groupe de volontaires regroupant des hommes qui
14 s'étaient portés volontaires. Cela ne constitue donc pas une preuve
15 suffisante dans la procédure actuelle. Il est devenu le numéro 2 mais des
16 éléments de preuve très nombreux nous montrent qu'en décembre, très peu de
17 ses collègues restaient dans ces forces armées plus d'une ou de trois
18 semaines. Ils étaient membres des forces armées au moment où la création
19 de la Brigade a été annoncée. Au début du mois de décembre, lorsque la
20 Brigade a été créée, Cerkez en est devenu le commandant ou plutôt le
21 commandant adjoint de cette Brigade Stjepan Tomasevic. Là encore, il
22 n'avait pas de poste particulièrement important sur le plan juridique. Ce
23 poste n'avait pas de signification particulière.
24 Donc si quelque chose s'est passé à Novi Travnik entre le moment où Cerkez
25 y est arrivé, à savoir le début du mois de décembre 1992 et le début de
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1 février 1993, quand il est devenu commandant dans les faits de la Brigade
2 Stjepan Tomasevic, Cerkez n'était pas responsable de cela, parce qu'il
3 n'occupait pas poste significatif à ce moment-là. Sur le plan juridique,
4 il n'était pas commandant d'une formation armée dans cette période-là et,
5 de facto, il ne la commandait pas non plus.
6 Le plus important d'ailleurs à cette époque, à Novi Travnik, c'est qu'il y
7 a aucun élément de preuve qui permette de prouver que des actes
8 répréhensifs ont été commis ou que les membres de la Brigade Stjepan
9 Tomasevic ont été impliqués dans de tels incidents. A ce moment-là, la
10 Brigade avait pour seule mission de tenir le front au dessus de Novi
11 Travnik face aux Serbes. Si elle n'avait pas tenu ce front fermement,
12 Ahmici ne serait pas survenu parce que les Serbes ne se seraient pas
13 emparés de tout ce territoire.
14 Mon client est fier de sa participation à tous les combats contre les
15 Serbes, en 1992, et s'agissant de 1992, si le Procureur s'efforce
16 effectivement de dire ce qu'il me semble qu'il s'efforce de dire, je dirai
17 qu'aucune raison ne permet de soutenir les accusations portées pour 1992.
18 Le HVO et mon client, en 1992, ne se préparaient absolument pas à attaquer
19 les Musulmans. Nous n'avons pas vu un seul élément de preuve qui le
20 démontre. Et je ne dirai pas simplement qu'ils ne se préparaient à de tels
21 actes en 1992 mais que, même le 15 avril dans la soirée, à la veille de
22 l'éclatement du conflit, ils ne se préparaient pas à une telle action.
23 Quant aux actes qui ont été retenues contre mon client, aux fins de
24 prouver les allégations de persécutions en 1992, je pense qu'aucun élément
25 de preuve ne permet de les étayer. Je ne vais donc pas abuser de votre
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1 temps en appelant exagérément votre attention sur cela. L'élément de
2 preuve 162 vous permettra de revenir sur cette question. Le fait que Vitez
3 était un endroit très stratégique a été prouvé abondamment, il me semble,
4 au cours de ce procès.
5 Je voudrais simplement vous signaler plus précisément deux rapports: en
6 tout cas, le bulletin d'information militaire D121/1 ainsi que le D122/1,
7 qui ont été les motifs utilisés par l'armée de Bosnie-Herzégovine pour se
8 rendre à Vitez. Bien entendu, nous savons bien tout ce qui s'est passé:
9 l'incident de l'usine d'explosifs sur lequel je ne m'appesantirai pas,
10 ainsi que la position stratégique de Vitez au carrefour des routes menant
11 vers l'est, l'ouest, le nord et le sud. Je n'insisterai donc pas.
12 Je pense que la période pendant laquelle Cerkez occupait tel ou tel poste
13 n'est plus contestable et qu'un grand nombre d'éléments de preuve le
14 prouvent.
15 Mais je n'ai peut-être pas suffisamment parlé de la situation qui
16 prévalait juste avant le conflit. Donc avant le conflit, entre les deux
17 groupes, les deux armées qui existaient dans la vallée de la Lasva, la
18 situation était ce qu'elle était, la Brigade de Vitez a été créée en aide
19 –nous en avons abondamment parlé, je n'y reviendrai pas- mais elle s'est
20 trouvée à un moment déterminé dans les premiers temps de son existence.
21 Ce qui est intéressant, même si l'on admet que cette Brigade a
22 effectivement été créée, c'est qu'il s'agissait donc d'une formation
23 organisée. Nous constatons, au vu de la séquence des événements qui sont
24 survenus, que le but principal de cette Brigade était de se battre contre
25 l'agresseur. Autrement dit, la Brigade a été mise en place pour répondre
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1 aux besoins de la ligne de front qui existait, qui avait été créée sur le
2 plan tactique sur les flancs de la montagne qui domine Travnik, et il
3 fallait que des hommes puissent tenir ce front. C'est la raison de la
4 création de la Brigade sur le territoire de la municipalité.
5 Je parle du témoignage de Zlatko Senkic; je crois que c'était notre
6 premier témoin, qui a expliqué quelle était la composition de la Brigade R
7 à l'époque, Brigade qui existait dans le contexte de l'ancienne armée
8 populaire yougoslave.
9 Toutes les forces qui ont participé à cette guerre tragique de Bosnie ont
10 copié la structure de la JNA car elles n'avaient rien d'autre à leur
11 disposition. Le HVO a repris totalement dans ses structures propres la
12 conception des Brigades R. Ces Brigades R n'étaient pas des formations
13 militaires mobiles, mais de par leur nature même, par leur composition,
14 par leur structure, elles étaient destinées à assurer la défense de
15 certaines positions. Cela faisait partie de la grande conception de
16 l'armée populaire yougoslave qui avait également des forces de réserve,
17 des forces de réserves qui renforçaient les forces régulières de la JNA
18 lorsque le besoin s'en faisait sentir, la JNA étant, elle, l'armée
19 professionnelle mobile et la réserve étant destinée à défendre des
20 positions de façon statique.
21 Donc la Brigade n'était pas organisée pour pouvoir correspondre à la
22 dénomination d'une formation militaire classique en bonne et due forme.
23 Vous avez eu sous les yeux un grand nombre d'éléments de preuve qui vous
24 montrent que, depuis le début du conflit, depuis le 16 avril, les fronts
25 ont été constitués et que jusqu'à l'accord de paix du printemps 1994, à
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1 partir donc du mois d'avril en question, la Brigade s'est contentée
2 d'essayer de tenir les fronts existants. Il n'y a pas la moindre preuve
3 pendant toute la guerre en question qui permette de penser que la Brigade
4 s'est déplacée ici ou là pour faire telle ou telle chose à d'autres
5 endroits que là où elle tenait les fronts.
6 Et je vous indique la pièce à conviction D160/2, intercalaire 3, des
7 documents relatifs à la mobilisation qui montrent que la mobilisation de
8 la Brigade, à la date du 16 avril, n'était pas planifiée.
9 Je vous indique également le document D57/2, le rapport du bureau de la
10 défense relatif à la mobilisation qui montre à quel moment a été décrétée
11 la mobilisation, qui montre qu'il s'agissait d'un processus de longue
12 haleine, qui montre combien de temps a duré cette mobilisation et quelles
13 en ont été les conclusions numériques. Un grand nombre de témoins vous ont
14 parlé de tout cela. Le dernier document dont je viens de parler est le
15 document D57/2; je le dis pour qu'il y ait correction au compte rendu
16 d'audience en anglais.
17 Donc, à la veille du conflit, s'il était vraiment question de planifier
18 une action agressive du HVO pour attaquer la partie adverse dans la vallée
19 de la Lasva, le 16 avril, conformément à ce qu'affirme le Procureur, il
20 aurait été très étonnant de constater que personne ne s'était rendu compte
21 de quelconques préparatifs. Et j'ai un certain nombre d'éléments à ma
22 disposition que je vais vous soumettre pour montrer que de tels
23 préparatifs n'ont pas existé.
24 Nous avons entendu des témoins, nous avons également vu le document 131/2
25 ou plutôt, excusez-moi, D132/2, associé au témoin Perkovic, selon lequel
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1 une équipe de la Brigade de Vitez se trouvait à l'endroit où elle se
2 trouvait habituellement, sur les flancs de la montagne au-dessus de
3 Travnik, sur le front face aux Serbes; alors que la deuxième équipe se
4 préparait déjà à prendre le départ pour se rendre sur cette même ligne de
5 front. Ces hommes étaient au motel de Kruscica, comme ils l'avaient été
6 quelques semaines auparavant. Il s'agissait des forces de la 35e Brigade
7 de montagne de l'armée de Bosnie-Herzégovine et Cerkez se marie le 15
8 avril 1993.
9 Je ne pense pas qu'il aurait pu planifier de se marier précisément ce
10 jour-là parmi tous les jours qui étaient à sa disposition pour satisfaire
11 le désir de son épouse, si quiconque avait eu connaissance que, le
12 lendemain, la guerre aurait éclaté. Cerkez, je vous rappelle les
13 témoignages qui ont parlé de cela, a assisté au premier anniversaire de la
14 création de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Ce jour-là, la veille du
15 conflit, une réunion s'est déroulée entre responsables politiques
16 musulmans et croates; nous en avons entendu parler tout à fait au début du
17 procès. Et il nous a été dit que les résultats de cette réunion ont été
18 très positifs. Le Procureur affirme qu'il s'agissait d'une ruse technique
19 mais c'est son appréciation.
20 Nous avons aussi reçu un très grand nombre d'informations, grâce aux
21 témoignages ainsi qu'à un certain nombre de documents, selon lesquelles,
22 le 15 avril, quelque chose a déjà eu lieu sur le mont Kuber. La Brigade
23 n'avait pas d'information précise à cet égard mais il était tout à fait
24 clair que la Brigade ne se préparait pas à ces événements même s'ils ont
25 eu lieu. C'était la partie adverse qui s'y préparait. La Brigade Stjepan
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1 Tomasevic a été mentionnée par un certain nombre de témoins. Ce n'est pas
2 par hasard si, la veille, le commandant Zivko Totic avait été enlevé à
3 Travnik. Et toujours la veille du conflit, il y a eu tentative pour
4 enlever Darko Kraljevic qui était un dirigeant très important.
5 Nous avons un grand nombre de documents, d'éléments de preuve écrits qui
6 traitent de ce point. Donc tout cela s'explique très bien. Cerkez, dans
7 cette période, n'avait aucune information lui permettant de comprendre que
8 la partie adverse préparait le démarrage d'un affrontement car, dans cette
9 période, les choses ne cessaient d'aller mal puis de se calmer, puis
10 d'aller mal de nouveau, etc. Il y avait succession d'incidents et
11 d'accalmies, et aucun élément de preuve n'indique que Cerkez aurait pu, à
12 la veille même du conflit, connaître l'existence d'un quelconque plan à ce
13 sujet. La première information qu'il a reçue, il l'a eue lors de la
14 réunion bilatérale organisée chez Blaskic. Nous avons entendu des témoins
15 dire qu'il avait été convoqué à cette réunion. Des témoins, membres de la
16 Brigade de Vitez, qui ont participé à la réunion avec Cerkez au
17 commandement de la Brigade, nous ont dit ce que Cerkez leur avait dit. Et
18 puis nous avons vu également l'ordre qui a été établi à l'issue de cette
19 rencontre. Pour l'essentiel, même si la formulation était un peu
20 différente, elle correspond tout de même à ce que Cerkez avait dit à ces
21 hommes ce soir-là.
22 L'ordre contient d'ailleurs un élément que le Procureur essaie de déformer
23 quelque peu. A savoir qu'il est allégué dans la dernière partie de l'ordre
24 que la Brigade Subic Zrinski se trouve sur le flanc droit, que la police
25 civile se trouve sur le flanc gauche, que les forces spéciales sont à
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1 l'avant, etc., etc. Monsieur Sajevic a témoigné à ce sujet, il nous a
2 montré une carte.
3 Mais qu'est-ce qui est important? Il n'y a rien de nouveau pour Cerkez
4 dans cette information parce que la situation correspondant à cette
5 description existe depuis déjà des semaines. Si nous retournons la carte,
6 en mettant le nord vers le haut, eh bien, sur le flanc droit de Cerkez,
7 entre Kruscica et la ville, nous voyons la Brigade en question et, à
8 gauche, Busovaca. Autrement dit, il n'a pas pu avoir d'informations
9 nouvelles au sujet de la présence de la police militaire depuis des mois
10 dans le secteur, sur la base de ce qui a été dit dans ce témoignage.
11 Je ne vais pas m'appesantir, beaucoup de choses ont été dites. Je vous
12 rappelle que la Brigade n'avait pas de caserne, qu'elle fonctionnait par
13 équipes, qu'elle pouvait -comme des témoins l'ont dit-, dans un délai de
14 24 à 48 heures, mobiliser la majorité de ses effectifs potentiels qui
15 pouvaient, selon les documents soumis à cette Chambre, se monter à 250 ou
16 300 hommes.
17 Récemment, nous avons un rapport de la Brigade qui traite des effectifs de
18 la Brigade en date du 2 mars 1993, qui font partie des documents de
19 Zagreb, le document Z569/1. Malheureusement, nous l'avons reçu très tard
20 et nous n'avons pas pu le soumettre à nos témoins. Il vient des archives
21 de Zagreb.
22 Mais s'agissant des lieux comme, par exemple, Kuber et Busovaca, où il a
23 été dit que trente soldats y étaient présents, nous affirmons qu'il est
24 possible d'en trouver des confirmations dans les dépositions de certains
25 témoins, comme Santic par exemple, membre de la garde villageoise, qui a
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1 dit quelques mots au sujet des effectifs de la Brigade. Nous pouvons
2 trouver confirmation qu'il y avait des équipes à ces endroits, c'est-à-
3 dire des groupes de dix hommes et pas trente. Mais en tout cas, si l'on
4 fait le total, on peut arriver à un total de deux cent cinquante ou trois
5 cents hommes globalement, mais cela n'aurait été les effectifs réels que
6 si ces hommes avaient été mobilisés, or ils étaient chez eux à la maison.
7 Ils allaient travailler par équipe et, lorsqu'ils rentraient chez eux, à
8 la fin de leur travail, ils redevenaient des civils.
9 Les tâches de la Brigade, j'en ai déjà parlé au début de mon intervention:
10 cette tâche de la Brigade, elle était toujours la même. Elle consistait à
11 empêcher une attaque éventuelle et Blaskic nous a dit qu'il était permis
12 de s'attendre à une attaque mais le témoin Bertovic a déclaré ensuite que
13 finalement, il n'y avait pas eu d'attaque. Il ne faut pas perdre de vue
14 non plus que l'ordre dont je suis en train de parler n'était pas une
15 appréciation infondée. Nous avons vu un grand nombre d'éléments de preuve
16 qui indiquent qu'à Kruscica, des forces de l'armée de Bosnie-Herzégovine
17 étaient effectivement présentes, des forces de la 35e Brigade de montagne.
18 Nous avons entendu un grand nombre de témoins, nous avons vu un grand
19 nombre de documents, pas seulement des témoins de la défense mais
20 également de l'accusation.
21 Et puis, il y a eu des renforts de l'armée de Bosnie-Herzégovine, très peu
22 de temps avant le conflit, ce qui nous semble indiquer que c'est l'armée
23 de Bosnie-Herzégovine qui préparait un affrontement et donc cela semble
24 indiquer également que les déclarations de Blaskic étaient exactes à cet
25 égard. Nous vous rappelons également la déposition du témoin Ljuban Calic,
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1 qui a dit que, non loin de Kruscica, lui et ses hommes sont tombés par
2 hasard sur deux hommes endormis, membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine,
3 qu'ils les ont faits prisonniers et que ces hommes ont expliqué qu'ils
4 étaient arrivé la veille à Kruscica avec leur unité de l'armée de Bosnie-
5 Herzégovine .
6 Un témoin de l'accusation, qui portait un pseudonyme, a lui aussi confirmé
7 que, très peu de temps avant le conflit, des forces fraîches de l'armée de
8 Bosnie-Herzégovine étaient arrivées dans le secteur. Le témoin Kalco,
9 commandant à Stari Vitez, a confirmé également que la mobilisation avait
10 été décrétée et que la mise en alerte des unités en question avait été
11 déclarée.
12 J'ai déjà mentionné un autre témoin qui a confirmé l'existence de plans.
13 Et puis il y a un autre document qui nous fournit quelques informations au
14 sujet des secteurs tenus par les uns et les autres: c'est le document
15 D87/2, ainsi que les cartes préparées par le témoin Sajevic.
16 Un grand nombre de témoins nous ont parlé de l'homme de permanence de la
17 Bosnie centrale, de ce registre qui se trouvait au commandement, document
18 Z610/1, et pour ma part, j'aimerais souligner quelque chose qui n'a pas
19 été dit par ces témoins. Bien sûr, ce registre est un document favorable à
20 la défense de Cerkez car, à la lecture de ce registre, on s'aperçoit qu'il
21 n'était pas présent à la réunion des commandants, organisée chez Blaskic,
22 le 15 avril 1993. Je parle de cette réunion proprement militaire ou aucun
23 plan n'a été étudié. Il n'était pas présent à cette réunion; apparemment,
24 il a rencontré Blaskic après cette réunion, donc de façon informelle.
25 C'est donc une preuve, ce document, qui est favorable à la défense. Même
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1 nous ne voyons pas exactement quelle est l'importance du fait de savoir si
2 Cerkez a participé à la réunion même ou s'il a simplement rencontré
3 bilatéralement Blaskic par la suite. Mais quoi qu'il en soit, nous pensons
4 tout de même que ce document ne comporte pas de valeur probante importante
5 car, si l'on voit les détails contenus dans un grand nombre de documents
6 qui nous donnent les effectifs, le positionnement de certaines unités, eh
7 bien, on ne trouve pas de contradictions.
8 Je ne peux pas rentrer dans le détail ici, mais en tout cas, aucun témoin
9 n'a confirmé les détails contenus dans ce document. Ce document d'ailleurs
10 était en possession d'un grand nombre de services de renseignements depuis
11 plusieurs années. Beaucoup d'éléments contenus dans ce document ne peuvent
12 pas être interprétés de façon univoque. Il y en a plusieurs, s'agissant
13 notamment de qui a dit quoi à qui, qui peuvent être interprétés de façon
14 multiple.
15 Et puis dernier point, ce que le Procureur affirme au sujet de ce document
16 est très contradictoire. D'une part, le Procureur nous dit qu'il s'agit
17 d'un document de grande valeur et, dans le même souffle, le Procureur nous
18 dit que ce document a été élaboré par son auteur pour masquer les crimes
19 d'Ahmici. Donc soit ce document est authentique, soit il est ne l'est pas;
20 soit il est vrai, soit il n'est pas vrai. Je suis convaincu qu'on ne peut
21 pas en droit pénal accepter des documents ou des témoignages de témoins
22 qui sont considérés comme authentiques ou vrais par certains et non
23 authentiques et pas vrais par d'autres.
24 M. le Président (interprétation): Maître Kovacic, il est 13 heures. Est-ce
25 que le moment vous convient?
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1 M. Kovacic (interprétation): Parfaitement, Monsieur le Président, je
2 voulais justement parler de la suspension, mais j'aurais voulu terminer ce
3 que j'étais en train de dire.
4 M. le Président (interprétation): Terminez, terminez.
5 M. Kovacic (interprétation): Donc je voulais dire que ce document vient de
6 Zagreb et je dirai quelques mots, quelques phrases des persécutions en
7 droit pénal, mais c'est tout ce qu'il me reste avant ma conclusion.
8 M. le Président (interprétation): Et ensuite, c'est Me Mikulicic qui
9 prendra la parole?
10 M. Kovacic (interprétation): Oui, Monsieur le Président.
11 M. le Président (interprétation): Je crois qu'il vous reste à peine plus
12 d'une heure, mais vous n'êtes pas obligé de parler pendant tout ce temps-
13 là.
14 Nous levons donc la séance jusqu'à 14 heures 30.
15 (L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 36.)
16 M. le Président (interprétation):Maître Kovacic, c'est à vous
17 M. Kovacic (interprétation):Monsieur le Président, j'en ai à peu près pour
18 5 minutes quant à moi et ensuite mon confrère Me Mikulicic prendra le
19 relais et parlera pendant le reste du temps qui nous est imparti.
20 Pour finir et conclure, je souhaiterais dire qu'en ce qui concerne la
21 situation de la Brigade à la veille du conflit, il y a encore une question
22 qui se pose, à savoir est-ce que Cerkez aurait pu commandé une telle
23 unité, une unité qui n'était pas organisée? Ceci dans le cas d'une
24 confrontation et avec l'armée de Bosnie-Herzégovine? De jure, il n'y a pas
25 de contestation, nous reconnaissons qu'il était effectivement commandant
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1 de la Brigade, mais en ce qui concerne le commandement de facto d'une
2 brigade qui n'était pas organisée, nous affirmons, nous estimons que ceci
3 n'est pas prouvé, qu'il n'y a pas suffisamment d'éléments de preuve qui
4 permettent de se forger une opinion au delà de tout doute raisonnable. En
5 ce qui concerne la persécution, nous en avons longuement parlé dans notre
6 mémoire en clôture donc je ne vais pas répéter ce que nous avons dit.
7 D'autre part nous joignons également à ce qui a été avancé par nos
8 confrères de la défense de Kordic, mais je souhaiterais attirer votre
9 attention sur deux documents qui ne sont peut-être pas d'une importance
10 capitale mais qui sont quand même très caractéristiques. Le premier, c'est
11 celui qui figure sur le rétroprojecteur D126/2.
12 En ce qui concerne la période pendant laquelle il semble qu'il y ait eu
13 des incidents dans la ville de Vitez, et où on peut parler de persécution
14 pendant cette période, je dois dire que le gouvernement du HVO a fait
15 appel, a engagé Akija Jengic à l'école, donc un emploi pour lequel il
16 remplissait toutes les conditions. Qui auparavant, donc Akija Jengic était
17 commandant de la défense territoriale à Vitez qui était entièrement sous
18 le contrôle des Musulmans, donc voici un document dont nous souhaitions
19 que la Chambre prenne connaissance. En ce qui concerne les allégations
20 faites par un certain nombre de témoins, en particulier au début du
21 procès, allégations selon lesquelles généralement c'étaient les Musulmans
22 qui étaient renvoyés de leur travail, eh bien aucun témoin ne nous a parlé
23 de licenciements de SPS, or c'était le plus gros employeur de la région,
24 et licenciements en raison d'une baisse de la production du fait de la
25 guerre. C'est le document que nous avons déjà versé au dossier document
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1 D93/2 et ce document montre que Cerkez lui aussi était une de ces
2 personnes qui était en congé. Et le témoin S l'a également dit, le témoin
3 Ceko l'a également dit. Enfin un dernier document en ce qui concerne la
4 persécution D92/2. Voici ici la version en anglais. C'est un document qui
5 montre qu'à la veille de la guerre, la famille de Cerkez en 1990 a fait
6 une contribution volontaire aux fins de la construction de la mosquée à
7 Kruscica. Je pense que ce document nous parle très clairement d'intentions
8 délictueuses et il aurait été très difficile dans dans une telle famille
9 d'imaginer un autre type de façon de se conduire. Je voudrais également
10 parler de deux autres témoins pour lesquels je pense qu'il convient de
11 fournir des explications supplémentaires. Le colonel Morsink tout d'abord
12 et je pense qu'il faut donner un certain nombre de détails pour placer sa
13 déposition dans le contexte approprié. Une chose qui m'a vraiment
14 époustouflé et je n'étais pas le seul, c'est que le colonel Morsink au
15 tout début de sa déposition, émet des jugements de valeur au sujet de la
16 position de Mario Cerkez dans la Brigade et ceci s'est passé le 17 avril
17 1993. Pour que les choses soient extrêmement claires dans l'affaire qui
18 nous intéresse, nous avons eu cent quarante journées d'audience et
19 beaucoup de choses on évolué au fil du temps et d'après son propre
20 témoignage Morsink savait de l'ex-Yougoslavie ce qu'il en a appris
21 lorsqu'il s'y était rendu avec ses parents quand il était enfant. Et puis
22 ensuite, il est allé à Zagreb où il a passé deux jours à une réunion pour
23 les observateurs de l'ECMM. Il a participé à un séminaire et nous avons
24 des éléments qui indiquent donc la façon dont les observateurs était
25 préparés à leur mission. Donc quoi qu'il en soit, dès le premier jour de
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1 sa présence, Morsink, apparemment, soit disant savait tout. Or,
2 premièrement il ne connaissait même pas le nom de la Brigade. Il dit que
3 Cerkez était le commandant de la Brigade Stepan Tomacevic, il s'agissait
4 d'une formation qui à l'époque existait au moins depuis sept ou huit
5 semaines. Quand il parle des réfugiés, son rapport sur les réfugies, pièce
6 Z882 et on parle ici notamment de deux familles, deux familles qui ont été
7 expulsées de leur domicile par des criminels si vous me permettez
8 d'utiliser ce terme. Donc, nous avons fait venir Anto Miketa, digne de
9 foi, qui a expliqué que ceci était impossible parce qu'à l'époque il était
10 impossible, pour les réfugiés, de rester à l'école, car l'école était sur
11 la ligne de front. Bien entendu il se peut que le colonel Morsink se soit
12 trompé de localité étant donné la confusion qui régnait, c'est la seule
13 explication que je peux imaginer. Ensuite, il nous a dit, en ce qui
14 concerne l'église catholique de Vitez, le Père Franjic nous en a parlé.
15 l'ECMM est venu à plusieurs reprises dans l'église catholique et selon les
16 informations reçues il y avait environ trois cents détenus dans l'église.
17 Vous en avez entendu parler, je voudrais également attirer votre attention
18 sur les schémas qui ont été utilisés. C'est la pièce Z2535.1, et Z283.3.
19 Il est évident que l'ECMM ne connaissait rien du tout, par exemple dans un
20 de ces documents à Novi Travnik au moment du début du conflit Esad Landzo
21 et nous en avons entendu à plusieurs reprises, il était le commandant de
22 l'unité de l'armée de Bosnie-Herzégovine à Travnik. Or, selon
23 l'organigramme qui était fourni, le schéma fourni par l'ECMM, il était
24 commandant de la défense territoriale à Travnik, or ce n'est pas possible.
25 Quoi qu'il en soit le colonel Morsink quand il est venu pour être contre
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1 interrogé il y a quelques jours, donc nous avons essayé d'expliquer la
2 discordance entre les deux déclarations, à savoir soixante douze détenus
3 ou bien trois cents détenus et il a reconnu que Josic était le
4 représentant du HVO dans la commission chargée des échanges, et qu'il
5 n'était pas membre de la Brigade parce que la commission se situait à un
6 niveau plus élevé et sur cette base nous avons présenté une liste de
7 détenus qui montrait que Dubrevica se trouvait sous le contrôle des
8 Vitezovi et on voit…, nous avons également des listes de l'armée de
9 Bosnie-Herzégovine qui montre des détenus à l'époque de l'armée.
10 En ce qui concerne le témoin Zlotrg, qui présente une image tout à fait
11 partiale de la situation, je voudrais dire, signaler que Cerkez avec un
12 groupe de soldats s'est emparé du café de Cikovica. Nous avons fait venir
13 un témoin qui a expliqué ce qu'il s'était passé dans ce café. C'est Dragan
14 Sliskovic, ce témoin Zlotrg c'était également celui-ci qui était
15 responsable de répandre les rumeurs, en tout cas c'est lui qui a dit qu'il
16 avait entendu des rumeurs au sujet du meurtre à l'hôtel et selon cette
17 rumeur, c'était Cerkez qui était l'auteur. L'accusation ultérieurement a
18 abandonné cette thèse mais il est intéressant de voir qu'il s'agit d'un
19 spécialiste de la police scientifique et que, dans le cadre de son
20 enquête, il s'est appuyé sur la rumeur plutôt que sur les faits.
21 Malheureusement, pendant la guerre, son frère et sa sœur, sa belle-sœur
22 ont été tués. Je pense que c'est la raison pour laquelle il a parlé de ce
23 qu'il savait et aussi de ce qu'il ne savait pas.
24 Je ne veux pas m'appesantir à ce sujet, nous avons traité de cette
25 question au mieux dans notre mémoire en clôture et je vais demander
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1 maintenant à mon confrère de poursuivre notre intervention.
2 (Plaidoirie de Me Mikulicic.)
3 M. Mikulicic (interprétation): Merci, Monsieur le Président, Messieurs les
4 Juges.
5 Le 12 avril 1999, dans ce même prétoire, nous avons entamé la procédure,
6 le procès avec la déclaration liminaire de Me Nice qui a exprimé sa
7 conviction selon laquelle cette procédure n'allait pas être encombrée de
8 documents. Ceci fait suite à la thèse qui existait déjà dans le mémoire
9 préalable au procès du Procureur. A savoir, je vais citer le fait que ces
10 genres de crimes ont été commis peut entraîner comme conséquence le fait
11 qu'il y aura peu de documents à l'appui.
12 Maintenant, à la fin du procès, nous pouvons constater que les estimations
13 du Procureur ont été tout à fait erronées. Effectivement, un nombre énorme
14 de documents et d'autres moyens de preuve ont été utilisés lors de cette
15 procédure. Aucun des procès qui se sont déroulés devant ce Tribunal n'a eu
16 un nombre aussi élevé de documents, d'éléments de preuve et de témoins. Il
17 s'agit de plusieurs centaines de milliers de pages de documents, et de
18 plusieurs heures, des dizaines d'heures de cassette vidéo. Il s'agit donc
19 de la situation objective qui a lésé le plus notre équipe, fortement
20 limitée en personnel de la défense de l'accusé Cerkez. Surtout ces
21 derniers temps, mais aussi tout au long du procès, nous avons ressenti
22 très fortement ce fardeau. Il est clair que la partie qui dispose de plus
23 de personnel et de plus de ressources est dans une situation favorable par
24 rapport à l'autre partie dans la même procédure qui ne peut s'appuyer que
25 sur un nombre extrêmement limité de personnes, que ce soient des avocats
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1 ou des associés.
2 Je ne suis pas en train de dire cela afin de me plaindre des conditions de
3 travail de l'équipe Cerkez mais parce que je considère que ces
4 circonstances-là sont également extrêmement importantes pour pouvoir
5 entièrement comprendre et arriver à une image complète, d'ensemble de tout
6 ce qui s'est déroulé dans l'affaire qui nous concerne et aussi dans le
7 cadre du procès qui s'est déroulé.
8 Il est incontestable que le Bureau du Procureur dispose d'un énorme
9 appareil qui peut envoyer des personnes sur le terrain afin de recueillir
10 un grand nombre de moyens de preuve et qui peut, par la suite, analyser de
11 manière la plus appropriée ces moyens de preuve-là. En ce qui concerne cet
12 appareil-là, il faut reconnaître au Procureur qu'il y a fait recours de
13 manière tout à fait habile tout au long du procès et s'en est servi comme
14 d'une sorte d'instrument au cours de la procédure. Comment? De deux
15 manières. Tout d'abord, il faut constater que les documents étaient
16 divulgués à la défense pratiquement à chaque fois au moment où ceci était
17 le plus convenable pour le Procureur. Par définition, c'était à la veille
18 d'une déposition importante au moment où la défense devait s'y préparer.
19 M. le Président (interprétation): Maître Mikulicic, vous avez dit que vous
20 ne vous plaigniez pas mais c'est justement ce que vous êtes en train de
21 faire. Si le Procureur avait adopté une approche inéquitable, les Juges de
22 la Chambre de première instance l'aurait arrêté. C'est le rôle des Juges
23 de la Chambre. Le procès s'est maintenant terminé et vous devez vous
24 focaliser sur les moyens de preuve et les points juridiques.
25 Je pense que le fait de se plaindre par rapport à la procédure, c'est non
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1 pas seulement inutile mais, à mon avis, à ce stade-là erroné aussi.
2 M. Mikulicic (interprétation): J'accepte votre point de vue, mais avec
3 tout le respect que je vous dois, Monsieur le Président, je dois dire que
4 du point de vue de la défense de M. Cerkez, ces circonstances-là sont
5 également très importantes et il est important de les comprendre. Mais je
6 ne vais plus m'attarder à ce sujet-là.
7 Je souhaite donner une illustration de ce que je viens de dire par le
8 biais d'un exemple. Lorsque Angus Hay, un témoin de l'accusation, a
9 déposé ici, à ce moment-là, la défense a reçu une certaine partie des
10 moyens de preuve qui ont été marqués en tant que partie intégrante des
11 pièces accompagnant la déposition d'Angus Hay. Et la cassette V000V137 a
12 fait partie de ces documents-là, de ces pièces-là. Il était marqué sur la
13 cassette vidéo qu'il s'agissait d'une combinaison des reportages de la BBC
14 à l'égard des événements qui se sont produits en Bosnie.
15 Je vais attirer votre attention sur un point d'actualité préparé par
16 Martin Bell, d'une durée d'environ 50 secondes seulement.
17 A première vue, il s'agit d'un point d'actualité extrêmement important,
18 car il y est dit qu'une patrouille croate en mission au sud de la ville de
19 Vitez est en train de regagner les territoires dont s'étaient emparés les
20 Musulmans. Il y est question du fait que le leader du HVO avait été blessé
21 et que, malgré l'interdiction des vols, une équipe médicale essaie de
22 fournir l'aide par le biais des envois de personnel en hélicoptère. Donc
23 nous avons considéré que ceci était une illustration de l'affirmation du
24 Procureur selon laquelle la République de Croatie envoyait de l'aide par
25 hélicoptère. Mais vous allez voir de quelle situation il s'agissait et
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1 quel était le but du Procureur.
2 Je souhaite que l'on montre maintenant cette cassette vidéo.
3 (Diffusion de la cassette vidéo.)
4 Nous pouvons poursuivre jusqu'à la fin, s'il vous plaît.
5 (Poursuite de la cassette vidéo.)
6 Merci.
7 Donc, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il s'agit ici d'une
8 illustration d'une partie des pièces que nous avons reçues lors de la
9 procédure. Vous pouvez constater vous-mêmes, Monsieur le Président,
10 Messieurs les Juges, qu'il est question ici d'une séquence pour laquelle
11 il est dit que cela a été préparé par Martin Bell alors que ceci montre
12 une séquence où joue l'acteur connu Arnold Schwarzeneger.
13 Il s'agissait donc de quelque chose sans pertinence.
14 Mais je montre cela afin illustrer tout un tas de sujets sur lesquels la
15 défense a dû se pencher. Bien sûr, en dépensant son énergie sur des
16 éléments aussi peu importants que ceux-là, la défense a dû détourner son
17 attention des choses plus importantes.
18 Bien sûr, c'était l'exemple le plus dramatique.
19 M. Le Président (interprétation): Mais quel est votre but, Maître
20 Mikulicic? Souhaitez-vous vous plaindre du fait qu'il s'agissait là d'un
21 procès difficile. Nous avons constaté nous-mêmes plusieurs fois que la
22 quantité de documents que nous avions devant nous; nous a posé problème, à
23 tout le monde. Et pareillement, si les documents n'avaient pas été
24 divulgués à la défense certainement c'est la défense qui aurait été la
25 première à se plaindre. Donc il est difficile de trouver la juste moyenne
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1 entre les intérêts de la justice et du caractère rapide et équitable du
2 procès.
3 Mais pour le moment, encore une fois je vous appelle à consacrer le temps
4 qui vous reste à l'analyse des moyens de preuve et des points juridiques
5 relatifs à votre client.
6 M. Robinson (interprétation): Maître Mikulicic, si vous souhaitez dire que
7 le fait qu'il y a eu une telle quantité de documents, le résultat en était
8 le fait que votre client n'a pas reçu un traitement équitable, il faudra
9 que vous en parliez à un autre endroit devant une autre instance.
10 M. Mikulicic (interprétation): Merci, Monsieur le Président, Messieurs les
11 Juges, pour vos commentaires. Il y a deux raisons pour lesquelles je dis
12 cela. Tout d'abord, j'ai montré cet exemple le plus dramatique pour faire
13 comprendre à quel point il nous a été difficile dans notre tâche
14 d'analyser tous les documents et j'espère que les Juges tiendront compte
15 de cela.
16 Deuxièmement, j'ai dit cela afin d'indiquer qu'à cause de ce déséquilibre,
17 la défense s'est retrouvée dans une situation défavorable qui a provoqué
18 et influencé le procès équitable qui devrait être garanti à la défense et
19 le principe de l'égalité des armes entre les deux partis.
20 Mais je ne vais plus traiter de ce sujet-là.
21 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le conflit armé qui a eu lieu
22 dans la région de Vitez et ses environs fait l'objet de ce procès. Ce
23 conflit armé sans doute a été caractérisé par le Procureur en tant que
24 conflit armé international. Nous contestons une telle caractérisation, une
25 telle qualification. Nous considérons qu'il s'agit sans aucun doute d'un
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1 conflit interne, d'un conflit local entre deux composantes armées de même
2 force armée, à savoir l'armée de Bosnie-Herzégovine.
3 Je souhaite attirer l'attention des Juges sur le fait que plusieurs
4 documents ont été versés au dossier qui corroborent cette thèse-là.
5 J'attire votre attention sur l'accord Petkovic-Kralilovic qui a été conclu
6 en présence du représentant de la Forpronu, le général Morillon est le
7 représentant de l'ECMM, (expurgé). Il s'agit de la pièce à
8 conviction D24/1.
9 Je souhaite également attirer l'attention sur l'accord, sur l'amitié
10 conclue entre le Président de la Croatie M. Tudjam et le Président de la
11 présidence de le Bosnie-Herzégovine, M. Izetbegovic, sous la cote D98/1.
12 Ensuite, je souhaite également attirer votre attention sur la déclaration
13 conjointe faite par les deux Présidents Messieurs Izetbegovic et Tudjman
14 qui a été versée au dossier en tant que pièce à conviction D50/2.
15 Tous ces documents dans leur contenu démontrent entre autres choses que le
16 HVO fait partie intégrante des forces armées de l'armée de Bosnie-
17 Herzégovine. Ces documents-là ont été signés par les Présidents des deux
18 soi-disant parties en conflit.
19 Conformément aux conventions de Genève de 1949, le conflit international,
20 le conflit armé international, exige absolument qu'il y ait existence de
21 conflit armé international entre deux ou plusieurs des parties au conflit
22 concerné.
23 En ce qui concerne la Bosnie centrale, concrètement parlant, quelle a été
24 la cause des problèmes entre les Croates et les Musulmans? Il n'y en avait
25 qu'une. C'était l'agression de l'armée de l'ex-Yougoslavie et de l'armée
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1 de la Republika Srpska à l'encontre de la population de Bosnie-Herzégovine
2 . Le résultat de cette agression a été le nettoyage ethnique et le flux
3 des réfugiés qui ont fui les territoires occupés par la JNA et l'armée de
4 la Republika Srpska et qui sont venus dans des territoires qui n'avaient
5 pas été occupés, en provoquant un déséquilibre démographique dans une
6 structure de la société qui jusqu'alors était différente du point de vue
7 culturel, social et autres.
8 Ceci a également créé les conditions pour faire croître à la fois la
9 criminalité et les nouvelles tensions qui ont commencé à monter entre les
10 deux peuples, à savoir entre les Musulmans et les Croates en Bosnie-
11 Herzégovine.
12 Je souhaite reparler maintenant de la question liée au conflit
13 international. Contrairement à ce qu'affirme le Procureur, la défense
14 maintient que le conflit armé international n'existait pas au moment des
15 faits au moment invoqué dans l'Acte d'accusation. Il est important de se
16 pencher sur l'Article 4-2 de la quatrième Convention de Genève où il est
17 stipulé que les citoyens de l'Etat recouvert par la Convention ne sont pas
18 protégés par la Convention s'ils se trouvent sur le territoire du pays
19 contre lequel la guerre est en train d'être menée, si les rapports normaux
20 diplomatiques continuent à exister entre les deux Etats. Un nombre de
21 documents relatifs à cela ont déjà été versés au dossier.
22 Mais je souhaite également attirer votre attention sur l'Article 2
23 paragraphe 1 de la Convention de Genève de 1949 où il est stipulé que la
24 guerre ne doit pas nécessairement être déclarée, mais ce qui est
25 important, il y est dit également qu'au moins l'une des parties au conflit
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1 international armé doit être consciente du caractère de ce conflit.
2 Dans la pratique, ceci veut dire qu'à moins qu'il y ait des déclarations
3 faites explicitement par un Etat qui indique qu'il considère qu'il se
4 trouve dans une situation de conflit armé international, qu'il faut qu'il
5 existe au moins d'autres signes indiquant cela. Par exemple, les rapports
6 diplomatiques sont coupés, on procède à la saisie de la propriété de la
7 partie opposée, on commence à expulser les citoyens appartenant à l'ethnie
8 citée de l'autre partie au conflit. Rien de tout cela n'a été le cas en ce
9 qui concerne les rapports entre la Croatie et la Bosnie. En ce qui
10 concerne les rapports diplomatiques ils n'ont jamais cessé d'exister et
11 existent encore aujourd'hui.
12 En ce qui concerne les accords commerciaux qui avaient été conclu, ils
13 n'ont pas été rompus et ils ont continué à être respectés. Aucun des camps
14 n'a procédé aux expulsions des ressortissants de l'autre partie. Il n'y a
15 pas eu de confiscation de la propriété des ressortissants de l'autre
16 partie. C'est à cause de tout cela que la défense tire la conclusion
17 qu'aucune des parties au conflit n'était consciente du fait qu'elle se
18 trouvait dans le cadre d'un conflit armé.
19 Pourquoi? Parce que ce conflit armé était de caractère extrêmement limité,
20 extrêmement local.
21 Compte tenu de ces circonstances, maintenant, il est temps de se poser la
22 question de savoir comment a réagi l'Etat de Bosnie-Herzégovine.
23 M. Bennouna: Je m'excuse de vous interrompre un moment très bref. Je crois
24 que la Chambre aurait besoin de votre part de savoir quel est le critère
25 que vous utilisez pour dire qu'un conflit a un caractère international ou
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1 non. Ce que vous nous avez décrit ici, c'est ce qu'on appelle une guerre
2 de type classique entre deux Etats, un conflit de type classique, avec
3 rupture des relations diplomatiques, etc. Très bien, mais il n'y a pas que
4 cela. D'autant plus que les guerres de type classique se font, comme vous
5 savez, de plus en plus rares: ce n'est plus comme dans le temps, d'abord
6 parce que l'agression est devenue un acte illégal, interdit par la charte
7 des Nations Unies, de même que le recours à la force.
8 Il y a donc ce qu'on appelle des conflits internationalisés. Cela par d'un
9 caractère interne et cela s'internationalise. Ce n'est pas de Jure mais de
10 facto. Il faut en revenir à ce critère-là, au critère du conflit de
11 caractère international, critère déposé par la jurisprudence, et nous le
12 dire rapidement pour qu'on puisse vous suivre.
13 M. Mikulicic (interprétation): Monsieur le Juge, bien évidemment, je vais
14 aborder ce sujet-là également, mais je souhaitais rappeler l'attention des
15 Juges sur la situation de fait. Puisque chaque conclusion juridique,
16 chaque opinion juridiquese base sur la réalité, sur la situation de fait,
17 le droit n'est pas une fin en soit, mais se réalise lorsqu'il s'applique
18 sur une situation concrète, sur la vie.
19 M. Bennouna: Je vais vous dire quels sont les deux critères qui sont
20 utilisés par la jurisprudence de ce Tribunal et la jurisprudence de la
21 Chambre d'appel.
22 C'est tout d'abord l'existence d'une intervention directe d'un Etat
23 étranger, de troupes étrangères dans le territoire d'un autre Etat, qui
24 est le sujet de troubles internes. Deuxièmement, c'est le fait qu'une des
25 parties au conflit interne est sous le contrôle global d'un Etat étranger.
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1 Voilà les deux critères que nous avons dans la jurisprudence.
2 Si vous voulez contester l'internationalisation de ce conflit, vous
3 devriez contester l'existence de ces deux critères ou la réalisation de
4 ces deux tests, comme on dit, dans l'actuelle situation où les deux
5 accusés ont été mêlés, dans le conflit qui a opposé l'entité croate, ou
6 les Croates de Bosnie, aux Musulmans de Bosnie.
7 M. Mikulicic (interprétation): Monsieur le Juge, dans notre mémoire, nous
8 avons essayé d'aborder ce sujet-là dans la mesure du possible, compte tenu
9 des circonstances. Lors de ma plaidoirie, j'essaie simplement de rappeler
10 une série de faits en ce qui concerne lesquels je considère que les Juges
11 devraient les prendre en considération, au moment de la prise de la
12 décision, afin de savoir quelle est la qualification juridique qui doit
13 être appliquée le moment venu dans l'affaire présente.
14 Bien sûr, je suis conscient de la décision dans l'affaire Tadic, je suis
15 conscient également du critère du contrôle global qui a été établi, je
16 suis également conscient du fait que ceci, à partir de ce moment-là, a
17 commencé à constituer une sorte de précédent dans le cadre du travail de
18 ce Tribunal. Mais la défense conteste, oppose ce test-là également, non
19 parce que nous considérons que le test en lui-même est erroné; au
20 contraire, il est tout à fait applicable. Mais dans le cadre d'un certain
21 nombre de procès concrets qui seraient tout à fait semblables, de manière
22 intrinsèque, au procès Tadic.
23 Mais, en ce qui concerne l'essentiel du conflit entre les Croates de
24 Bosnie et les Musulmans de Bosnie, qu'il n'existe pas entre ce conflit-là
25 suffisamment de points communs avec le conflit qui a eu lieu entre les
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1 Musulmans de Bosnie et la JNA et les Serbes de Bosnie. Nous considérons
2 que de grandes différences existent entre les deux cas. Nous avons
3 d'ailleurs traité de cela en détail dans notre mémoire. Et nous
4 considérons que le précédent de l'affaire Tadic ne peut pas être projeté
5 pour ainsi dire dans le contexte de ce procès-là.
6 Compte tenu d'une telle décision de la défense, j'invite les Juges de la
7 Chambre de se pencher sur la situation de fait, spécifique, qui est
8 valable dans l'affaire présente avant de décider si les critères établis
9 par le biais du précédent Tadic peuvent être appliqués ou non.
10 Je souhaite attirer l'attention de la Chambre sur la position officielle
11 de la Bosnie-Herzégovine, reflétée par le biais de la lettre du BH aux
12 Nations Unies, M. Muhamed Sacirbey qui, en parlant des conflits en Bosnie
13 centrale, a dit qu'il s'agissait, à son avis, des conflits entre les
14 leaders locaux qui ont été provoqués à cause de la situation difficile en
15 matière de l'aide humanitaire, le manque d'armement, etc.
16 Si un Etat, devant l'assemblée générale des Nations Unies, par le biais de
17 son représentant officiel, articule d'une telle manière sa position sur un
18 conflit armé qui se déroule au cœur de son territoire, je considère que,
19 dans ce cas-là, cet Etat, concrètement l'Etat de Bosnie-Herzégovine, ne
20 considère pas qu'il s'agit d'un conflit armé international.
21 Maintenant je voudrais dire quelques mots au sujet de la détention.
22 Bien entendu, dans notre mémoire en clôture, nous en avons parlé. Je ne
23 souhaite pas répéter ce que nous avons indiqué dans ce mémoire mais je
24 souhaiterais souligner un certain nombre de points importants. L'Acte
25 d'accusation fait la liste des centres de détention Kaonik, le cinéma de
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1 Vitez, la clinique vétérinaire de Vitez, les bureaux du SDK à Vitez, le
2 club d'échecs de Vitez, ainsi que l'école primaire de Dubravica.
3 Ces centres sont indiqués dans l'Acte d'accusation en disant qu'il
4 s'agissait de centres où étaient internés des Musulmans de Bosnie. La
5 défense souhaite dire la chose suivante à ce sujet. Ni la prison de Kaonik
6 ni le centre vétérinaire de Vitez ni le club d'échecs de Vitez, l'immeuble
7 du SDK de Vitez ou l'école primaire de Dubravica, aucun de ces lieux, sur
8 la base des éléments présentés, aucun de ces lieux ne peut être rattaché à
9 notre client, M. Cerkez, commandant de la Brigade de Vitez.
10 Dans le cadre de cette affaire, on a présenté des éléments qui indiquent
11 que, par exemple, la prison de Kaonik était sous la supervision du 4e
12 Bataillon de la police militaire; ils ont également recruté des gardes
13 pour cette prison et, dans le même temps, ils se trouvaient sous la
14 compétence du Tribunal militaire de Travnik.
15 (Pas d'interprétation)
16 M. Bennouna: Excusez-moi Monsieur Mikulicic, j'avais un problème de
17 traduction, en tout cas en français.
18 L'interprète: Je vous prie de m'excuser, je n'avais pas branché le micro.
19 Est-ce que cela va maintenant, Monsieur le Juge.
20 M. Bennouna: Oui, merci.
21 M. Mikulicic (interprétation): Des éléments de preuve existent au sujet de
22 Vitez qui montrent que c'était un endroit où les membres de l'unité
23 spéciale Vitezovi amenaient diverses personnes. La même remarque vaut pour
24 le Bureau du SDK, le club d'échecs et l'école de Dubravica.
25 Quant au bâtiment du cinéma de Vitez, chacun le connaît. Les Juges de
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1 cette Chambre ont eu la possibilité d'entendre des témoins et de voir des
2 documents stipulant ce fait et décrivant ce bâtiment. Il n'est contesté
3 que ce bâtiment était le quartier général de la Brigade de Vitez et que M.
4 Cerkez y avait son bureau au premier étage. Il n'est pas contesté non plus
5 que la station de radio se trouvait dans ce même bâtiment ainsi qu'une
6 cafétéria et le quartier général de plusieurs partis politiques, et même
7 la station de télévision pendant quelque temps.
8 Donc c'était un bâtiment qui abritait divers organismes si nous les
9 appelons ainsi. Il n'est pas possible non plus de nier le fait que le 16
10 avril 1993 la police militaire a commencé à amener des Musulmans de Bosnie
11 dans le bâtiment de l'école, des personnes qui étaient toutes des hommes
12 en âge de combattre.
13 Un grand nombre de témoins ont dit devant cette Chambre de première
14 instance, donc des gens qui étaient dans cette situation, qu'en général
15 ces personnes étaient placées sous la garde de membres de la police
16 militaire. Il ne fait aucun doute non plus que la police militaire a
17 assuré la garde de ces personnes, le niveau de discipline ayant pu être
18 variable ou en tout cas décrit de façon variable par les différents
19 témoins, comme étant dans certains cas dur et dans d'autres cas un peu
20 moins dur.
21 Cependant, le Procureur affirme que la police militaire, ce que l'on a
22 appelé ici la Brigade de la police militaire était sous le contrôle du
23 commandant de la Brigade de Vitez à savoir notre client M. Cerkez. Nous
24 n'admettons pas cette proposition. Nous affirmons que la Brigade de la
25 police militaire à partir de la mi-avril et jusqu'à la fin, c'est-à-dire
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1 jusqu'au mois de juillet de cette même année, n'était pas sous le
2 commandement du commandant de la Brigade de Vitez.
3 Je rappelle que nous avons soumis ici un grand nombre de documents et
4 présenté des témoins qui permettent de tirer la conclusion que je viens de
5 dire et je ne souhaite pas revenir en détail sur la question. Mais
6 j'aimerais tout de même dire quelques mots d'un fondement, de l'éventuel
7 fondement juridique qui permet de s'exprimer ainsi.
8 Il est tout à fait clair que toute personne qui par la force est
9 contrainte de perdre sa liberté, et donc le fait de priver quelqu'un de sa
10 liberté est un acte inopportun, disons. Et très souvent d'ailleurs un acte
11 illégal. Alors est-ce que c'était bien le cas dans la situation dont nous
12 sommes en train de parler. Il appartient bien entendu aux Juges de se
13 prononcer là-dessus. Mais il est de mon devoir de présenter la position de
14 la défense sur ce point, et je vais m'efforcer de le faire.
15 C'est un fait que le 16 avril, un conflit armé a éclaté entre les Croates
16 et les Musulmans de Bosnie à Vitez. C'est un fait également que la ville
17 de Vitez a été pilonnée et attaquée par l'armée de Bosnie-Herzégovine, et
18 que dans le même temps, dans cette ville de Vitez qui a toujours toujours
19 était peuplée par une population mixte, se sont trouvés un grand nombre de
20 jeunes gens en âge de porter les armes. C'est également un fait que ces
21 jeunes gens ont été dans leur grande majorité internés dans les centres
22 dont il vient d'être question.
23 Quel aurait pu être le fondement juridique expliquant un tel internement?
24 Dans cette Chambre de première instance, j'aimerais rappeler deux affaires
25 que je vous suggère de bien vouloir réexaminer en tant que source
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1 intéressante d'enseignement. Par exemple, il s'agit de l'affaire Korematsu
2 de 1943 contre les Etats-Unis et de l'affaire Hirabashi contre les Etats-
3 Unis jugée en 1994.
4 L'affaire Korematsu contre les Etats-Unis a été justifiée par
5 l'internement sur la côte ouest des Etats-Unis des citoyens américains
6 d'origine japonaise en 1942. A ce moment-là, les Etats-Unis étaient en
7 guerre avec le Japon. Mais indépendamment du fait qu'aucune des opérations
8 liées à cette guerre ne s'est déroulée sur les rives de la Californie, le
9 commandant militaire de la côte Ouest des Etats-Unis a tout de même émis
10 un ordre selon lequel les citoyens américains d'origine japonaise devaient
11 être internés dans divers lieux prévus à cette fin à ce moment-là. C'est
12 donc ce qui s'est passé.
13 Mais je tiens à vous rappeler qu'aucune opération militaire, je le répète,
14 ne s'est déroulée ni sur la côte californienne, ni même aux abords de
15 cette côte.
16 Alors que s'est-il passé par la suite? A la fin de la guerre, quand le
17 danger de guerre a disparu, M. Korematsu a porté plainte contre les Etats-
18 Unis. Je ne vais pas rentrer dans les détails. Sa plainte a été rejetée au
19 motif que le fait de fermer les Etats-Unis aux citoyens américains
20 d'origine japonaise n'était pas un acte discriminatoire mais un acte
21 motivé par des considérations de sécurité.
22 Comment cela? Eh bien, la sécurité des Etats-Unis était censée devoir être
23 protégée contre des actes éventuels de cette population d'origine
24 japonaise, actes de sabotage ou d'espionnage ou actes dirigés contre
25 certains bâtiments d'intérêt national, etc. Y compris plus tard le congrès
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1 des Etats-Unis, la Cour suprême des Etats-Unis, ont confirmé cette thèse
2 juridique, cette opinion juridique.
3 Qu'est-ce que tout cela nous permet de comprendre? Quelle est la
4 conclusion que nous pouvons tirer de tout cela? La défense tire de tout
5 cela la conclusion que dans des circonstances déterminées, à savoir, des
6 circonstances de guerre et sans le moindre doute, une des parties au
7 conflit peut dans certaines circonstances de façon temporaire, pendant une
8 période brève et sans violer la légalité, placer en détention un certain
9 nombre de membres de la population en âge de combattre qui pourraient
10 donner lieu à des craintes d'actions d'espionnage ou d'actions
11 subversives.
12 Que s'est-il passé à Vitez? Malheureusement, nous ne sommes pas parvenus à
13 recueillir le moindre élément de preuve. Notamment nous ne sommes parvenus
14 à recueillir aucun ordre écrit dans lequel aurait figuré l'ordre de placer
15 des personnes en détention. Donc sur le plan de jure, la situation à Vitez
16 est restée assez peu claire pour ce Tribunal dans le cadre de ce procès.
17 Mais de facto les choses sont tout à fait claires et ce qui s'est passé à
18 Vitez correspond tout à fait à ce qui vient d'être dit.
19 Il appartient donc à cette Chambre de première instance d'apprécier le
20 caractère légal ou illégal d'un tel comportement.
21 En ce qui nous concerne, du côté de la défense nous affirmons que cet
22 internement de brève durée n'a été motivé que par des considération de
23 sécurité. J'ajouterai d'ailleurs autre chose. Sans nous inspirer du
24 principe "Tu quoque" mais en utilisant ce principe à titre illustratif, je
25 rappellerai que l'on a pu constater une situation identique de l'autre
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1 côté, dans le camp de l'autre partie au conflit, à savoir les Musulmans de
2 Bosnie.
3 Les Croates de Bosnie, dans les zones affectées par les combats ont
4 également été placés en détention et internés de façon temporaire. Nous
5 avons entendu un témoin qui a déclaré avoir demandé aux Croates de
6 s'expliquer sur sa mise en détention et avoir entendu pour seule réponse
7 que cette mise en détention avait été justifiée par des considérations de
8 sécurité.
9 Si nous examinons la région de la Bosnie centrale et que nous la
10 considérons comme le théâtre d'un conflit armé entre deux parties
11 opposées, nous constatons que de facto les événements se sont déroulés un
12 petit peu comme sur les deux faces d'un miroir. Pourquoi? Eh bien parce
13 que il ne s'agissait pas de deux mondes complètement différents. Il
14 s'agissait en un mot d'un seul et même monde, c'est-à-dire de personnes
15 qui ont vécu pendant des années et des dizaines d'années dans les mêmes
16 circonstances politiques et historiques, qui ont partagé un territoire,
17 qui ont coopéré l'une avec l'autre, qui ont noué des amitiés, se sont
18 mariés les uns avec les autres et ont créé toutes sortes de relations tout
19 à fait naturelles les uns avec les autres quelle que soit leur religion ou
20 leur origine ethnique.
21 Donc de facto, ces personnes partagent le même patrimoine historique et
22 ont vécu de façon assez comparable.
23 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, on peut d'ailleurs appliquer
24 un peu la même démarche mentale pour parler d'un autre élément qui a été
25 évoqué au cours de ce procès, à savoir le travail forcé. Je vais à présent
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1 en dire quelques mots même si la défense rejette toute association de
2 notre client à une quelconque contrainte de travail appliqué à des
3 personnes.
4 Je voudrais tout de même, et nous en traitons abondamment dans notre
5 mémoire en clôture, appeler l'attention des Juges de cette Chambre sur un
6 certain nombre de bases qui devraient être prises en compte par les Juges
7 du point de vue de la défense de M. Cerkez.
8 Je parlerai d'abord de l'article de droit commun des Conventions de Genève
9 de 1949, je parlerai également du protocole additionnel 2 de 1997 à ces
10 conventions. Je parlerai de la législation nationale qui régissait
11 l'obligation de travail dans l'ex-Yougoslavie et notamment dans la
12 République de Bosnie-Herzégovine en tant que l'une des républiques
13 constituant cet Etat.
14 Le travail forcé n'est pas interdit par les Conventions de Genève pas plus
15 que par le protocole additionnel.
16 Il est autorisé dans certaines circonstances et quelles sont-elles au
17 cours d'un conflit interne?
18 Alors première circonstance, il faut que les personnes qui se chargent de
19 ce travail obligatoire accomplissent ce travail dans les mêmes conditions
20 que la population locale. Et lorsqu'on parle de population locale, on
21 pense bien sûr avant tout à une population locale n'appartenant pas à la
22 partie opposée au conflit. C'est tout à fait cela que nous avons vu se
23 dérouler dans les circonstances dont nous parlons.
24 Un grand nombre de témoins sont venus s'exprimer ici, des Croates, des
25 Musulmans, des Serbes donc des représentants de toute la population de
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1 Vitez et des environs de Vitez qui ont décrit dans le détail la façon dont
2 ils ont été recrutés pour effectuer ce travail obligatoire, de quelle
3 façon ce travail obligatoire a été accompli et quel en était l'objet.
4 La législation nationale de l'ex Yougoslavie, qui a été reprise comme
5 législation nationale de la Bosnie-Herzégovine après la déclaration de
6 l'indépendance, prévoit qu'en cas de danger imminent de guerre, c'est-à-
7 dire au moment où une guerre éclate, l'armée au sens large du terme peut
8 de façon légitime faire ce qu'il convient de faire pour construire des
9 forteresse, des fortifications militaires, creuser des tranchées etc, et
10 qu'à cette fin elle peut donc recruter un certain nombre de personnes
11 selon ses besoins.
12 M. Halid Genjac a fait partie des témoins en réplique qui ont parlé à la
13 barre de ce prétoire. C'était un membre de la présidence de la République
14 de Bosnie-Herzégovine. Il a remplacé l'ancien Président de la présidence,
15 donc celui qui l'a précédé à ce poste M. Alija Izetbegovic et il est le
16 futur Président de la présidence.
17 Il ne fait aucun doute que c'était donc l'un des personnages de plus haut
18 rang parmi les responsables politiques de la République de Bosnie-
19 Herzégovine et également un témoin tout à fait capital pour parler des
20 événements survenus dans cette période critique.
21 M. Genjac s'est vu soumettre un pièce à conviction, bulletin d'information
22 militaire, qui a été versée au dossier de ce procès sous la cote D354/1 et
23 où on lit que l'armée de Bosnie-Herzégovine a utilisé des Croates de
24 Bosnie pour creuser des tranchées.
25 On a demandé au témoin de commenter ce fait et il l'a fait. Il l'a fait en
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1 disant que bien entendu tout cela était vrai, mais que si des hommes on
2 été utilisés pour creuser des tranchées, ce n'était pas à des fins
3 criminelles ou pour commettre un acte répréhensible selon le droit mais
4 qu'il s'agissait d'hommes en âge de combattre qui avaient été mobilisés
5 pour participer à l'action d'unités armées.
6 Donc les uns étaient versés dans les formations militaires pour participer
7 au combat et les autres étaient envoyés étaient envoyés en certains lieux
8 pour creuser des tranchées. Rien de discriminatoire dans une telle
9 décision. Bien sûr, il convenait avant de diriger ces hommes dans un sens
10 ou dans l'autre d'évaluer leurs aptitudes.
11 Mais en tout cas nous voyons que responsables politiques de l'époque et
12 d'aujourd'hui s'entendent pour interpréter la chose de la même façon.
13 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, indépendamment de la thèse de
14 M. Nice que nous avons entendue hier, la défense aimerait en allant plus
15 loin donc que les éléments prima facie, la défense aimerait mettre
16 l'accent sur trois points importants.
17 Le colonel Bob Stewart a témoigné devant cette Chambre en tant que témoin
18 de l'accusation le 17 janvier de cette année. Il était colonel, commandant
19 du 1e Bataillon du régiment du Cheshire stationné à Vitez du 22 août 1992
20 jusqu'au 11 mai 1993. Dans cette période donc le colonel Stewart était le
21 n° 1 de la Forpronu et il était le n° 1 de la Forpronu sur le terrain.
22 C'est un témoin dont la crédibilité ne fait absolument aucun doute et dans
23 les circonstances, dans des circonstances déterminées, c'est certainement
24 un homme qui s'informe autant qu'il lui est possible de le faire. Il est
25 par ailleurs l'auteur de l'ouvrage intitulé "Broken Lives" des "Vie
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1 brisées" qui décrit l'expérience acquise par lui sur le terrain dans la
2 période qui nous intéresse.
3 J'appelle l'attention des Juges de cette Chambre sur le fait que cet
4 ouvrage comporte au total 327 pages et le nom de Mario Cerkez est
5 mentionné six fois. Dans cet ouvrage il est mentionné dans quinze lignes
6 au total et pas la moindre référence n'est faite aux traits particuliers
7 de sa personnalité ou à la façon précise dont il se comportait sur le plan
8 personnel.
9 Alors qu'elle est la conclusion que l'on peut tirer de ce fait? Eh bien,
10 il est permis d'en tirer la conclusion que le colonel Stewart ne
11 considérait pas M. Cerkez comme une figure publique importante sur le
12 territoire de Vitez Ceci est confirmé également par son témoignage devant
13 ce Tribunal.
14 C'est M. Nice qui a interrogé ce témoin pendant deux heures à peu près et
15 mettre M. Sayers a ensuite procédé au contre-interrogatoire. Me Sayers
16 s'est présenté au colonel Stewart en disant qu'il assurait la défense de
17 M. Kordic et puis il s'est tourné vers nous en disant: "Quant à la défense
18 de M. Cerkez, elle est assurée par Me Kovacic votre serviteur."
19 La réaction du colonel Stewart qui était assis ici sur la chaise des
20 témoins a consisté a prendre un air étonné en disant: "Pourquoi, est-ce
21 que M. Cerkez est ici dans ce prétoire?" Autrement dit, après avoir passé
22 deux heures dans le prétoire, il n'était même pas conscient du fait que M.
23 Cerkez était dans le prétoire.
24 Or, ce qui est jugé ici c'est une série d'évènements qui sont survenus
25 dans la vallée de la Lavsa en Bosnie centrale et à Ahmici avant tout. Donc
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1 ce fait au yeux de la défense est un fait très parlant, très intéressant.
2 J'aurais un autre point à souligner: le 13 octobre de l'année dernière, un
3 autre témoin de l'accusation M. Rebicic a été entendu dans ce prétoire. En
4 quelques mots, je vous rappellerai que M. Rebicic appartenait au 3e Corps
5 d'armée de Bosnie-Herzégovine stationné à Vitez et qu'il en était le
6 responsable n° 1 pour le service de sécurité.
7 Dans une telle fonction, il est tout à fait indispensable d'avoir des
8 informations précises au sujet d'éventuels crimes commis dans la zone de
9 responsabilité et au sujet des auteurs de ces crimes, s'ils ont eu lieu.
10 Et de façon générale au sujet des événements survenus dans la région.
11 Accomplissant les tâches qui étaient les siennes, ce témoin le 2 juin 1993
12 a établi une liste qui rend compte, qui énumère les suspects de crimes de
13 guerre. Lui-même a employé le mot de "génocide", crime de guerre donc
14 commis sur le territoire de Vitez.
15 Dans cette liste, dans ce document des services de sécurité du 3e Corps
16 d'armée de Bosnie-Herzégovine à Zenica et portant la cote Z1009.1, nous
17 voyons la liste de vingt suspects originaires de Vitez.
18 Mario Cerkez ne figure pas dans cette liste. Son nom n'est donc pas
19 mentionné dans ce document. Mais peut-être M. Rebicic a-t-il simplement
20 oublié de mentionner le nom de M. Cerkez.
21 Cela dit, huit jours plus tard, il dresse une nouvelle liste, une autre
22 liste qui est censée venir en complément de la première liste établie par
23 lui. Dans cette nouvelle liste, il mentionne vingt nouveaux noms de
24 suspects.
25 Là encore, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, on ne trouve pas le
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1 nom de M Cerkez.
2 La défense estime que ceci, encore une fois, est un élément très parlant
3 car ce témoin qui était membre du 3e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine
4 et responsable du renseignement au sein de ce Corps d'armée, basé à Vitez,
5 envoie un rapport au secteur chargé du renseignement dans la zone de
6 responsabilité de Vitez, et le nom de M. Cerkez ne figure pas sur cette
7 liste.
8 Troisième élément que la défense considère comme très intéressant. Je
9 parlerai du document qui porte la cote Z1406.1. Je rappellerai aux Juges
10 de cette Chambre que ce document émane du HIS, service de sécurité suprême
11 de la République de Croatie. Il est daté du 21 mars 1994, il a été écrit
12 par le chef des services de sécurité pour être envoyé au Président de la
13 République de Croatie, M. Miroslav Tudjman.
14 Ce document signale, je cite: "Il est permis de dire avec certitude que
15 Mario Cerkez n'a pas participé au massacre du village d'Ahmici et n'a
16 participé à aucun des événements survenus dans ce secteur". Fin de
17 citation.
18 Donc les trois faits que je viens de mentionner sont aux yeux de la
19 défense tout à fait fondamentaux. Ils montrent à eux seuls que M. Mario
20 Cerkez n'était pas un criminel de guerre car il n'en n'avait pas la
21 possibilité. Le colonel Stewart, rappelons-le, ne l'a pas considéré comme
22 un personnage important dans la région et les rapports envoyés au service
23 de sécurité suprême ne le mentionnent pas non plus.
24 Alors, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, M. Mario Cerkez est
25 assis ici devant vous, sur le siège de l'accusé.
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1 Je crois que trois circonstances doivent être rappelées à ce stade de mon
2 intervention. D'abord, que le jour du 16 avril 1993, dans le village
3 d'Ahmici, sur le territoire de Vitez, un crime atroce a été commis contre
4 la population civile. Deuxièmement, que M. Mario Cerkez commandait à
5 l'époque la brigade locale du HVO, qui était tout de même la formation
6 militaire la plus nombreuse existant sur ce territoire, même si sa
7 structuration n'était pas encore achevée. Et troisième point qu'il
8 convient de rappeler, c'est qu'en juillet 1995, le commandant de l'unité
9 spéciale des Vitezovi, Darko Kraljevic, a trouvé la mort.
10 Pour être complet, il faut dire qu'au mois de juillet 1995, la préparation
11 du premier Acte d'accusation dressé pour l'affaire qui nous intéresse ici
12 était en voie d'achèvement puisque ce premier Acte d'accusation est paru
13 le 2 novembre 1995. A en juger par les premières déclarations des témoins
14 potentiels, communiquées à la défense par l'accusation, il ressort que le
15 premier fauteur de troubles sur le territoire de Vitez était à l'époque
16 Darko Kraljevic. Mais une fois que celui-ci a trouvé la mort, l'enquête
17 s'est détournée ou plutôt s'est réorientée vers le commandant de la
18 brigade de Vitez, M. Cerkez.
19 Et ce, en partie en raison d'une espèce de malentendu ou en tout cas d'une
20 fausse interprétation ou de l'impression qu'il y avait une similitude,
21 tout à fait erronée, entre les Vitezovi et les membres de la Viteska,
22 c'est-à-dire les membres de l'unité des Vitezovi, d'une part, et les
23 membres de la Brigade de Vitez, d'autre part.
24 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la défense estime sincèrement
25 que M. Cerkez ne devrait pas se trouver ici aujourd'hui, assis sur la
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1 chaise des accusés et que la pièce à conviction Z1406.1, qui est ce
2 rapport au sujet du massacre d'Ahmici, établie un an et demi avant la
3 parution du premier Acte d'accusation de la présente affaire, n'aurait pas
4 dû être associée de quelque façon que ce soit à cet homme.
5 Monsieur Tudjman, le responsable des services de renseignement croates, a
6 signé ce rapport. Il l'a transporté trois mois sur lui et il a rencontré
7 M. Cerkez.
8 M. le Président (interprétation): Maître Mikulicic, je l'ai déjà dit à Me
9 Naumovski et je vous le répète: ce qu'on attend de vous dans la présente
10 affaire, c'est de parler des éléments de preuve présentés au cours du
11 procès plutôt que de créer des éléments de preuve vous-même.
12 Quelles que soient les raisons qui ont pu motiver le Procureur dans cette
13 affaire, ce qui est la réalité, c'est que nous sommes en train de
14 participer à un procès et que la Chambre de première instance est appelée
15 à se prononcer sur les éléments de preuve qui lui ont été soumis.
16 Peut-être serait-il bon que je vous rappelle qu'il vous reste dix minutes
17 et que vous êtes invité à vous occuper des éléments de preuve.
18 M. Mikulicic (interprétation): Bien sûr, Monsieur le Président, j'accepte
19 vos commentaires.
20 M. Nice (interprétation): Je vous prie de m'excuser, Monsieur le
21 Président, mais j'espère que vous n'avez pas oublié nous avons vingt
22 minutes après Me Mikulicic.
23 M. le Président (interprétation): Rassurez-vous, je ne l'ai pas oublié.
24 M. Mikulicic (interprétation): Je vais terminer. J'ai presque terminé,
25 Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
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1 Voilà ce que je souhaite ajouter pour finir. Ce rapport a été caché de la
2 vue de notre client, de ce Tribunal, de la défense et de toutes les
3 parties ici, alors qu'il s'agit visiblement d'un document à décharge.
4 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, d'après la position de la
5 défense, c'est seulement un jugement qui disculperait notre client, M.
6 Cerkez, qui pourrait le satisfaire puisqu'il est venu, à l'écoute de sa
7 propre conscience et de son propre gré, se rendre devant ce Tribunal.
8 Depuis trois ans, patiemment, il est en détention et il attend le jugement
9 de ce Tribunal. Je vous remercie.
10 M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, il est 15 heures moins 5,
11 mais nous allons devoir faire une pause. De combien de temps avez-vous
12 besoin?
13 M. Nice (interprétation): En fait, je vais avoir besoin de vingt minutes,
14 puisque j'ai bien respecté le temps qui m'était imparti jusqu'à présent,
15 mais je ne pense pas avoir besoin de plus de temps.
16 Je crois que la défense de Kordic a eu droit à cinq minutes également.
17 M. le Président (interprétation): Nous allons faire une pause de cinq
18 minutes maintenant.
19 (L'audience, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures 4.)
20 M. Le Président (interprétation): Monsieur Nice c'est à vous.
21 (Réplique du Procureur.)
22 M. Nice (interprétation): Je vais être aussi succinct que possible.
23 Puisque ceci a été mentionné publiquement, et uniquement pour cette
24 raison, je souhaiterais dire la chose suivante au sujet de ce qu'a dit Me
25 Mikulicic en ce qui concerne les rapports des services secrets qui ont été
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1 communiqués comme cela a été confirmé par Me Kovacic aussi bien à la
2 défense qu'à l'accusation en raison de son contenu. Ce document a été
3 communiqué aux deux parties en même temps et du fait de son contenu
4 l'accusation l'a présenté aux premiers témoins disponibles.
5 Je vous prie de m'excuser.
6 L'accusation l'a pris aux premiers témoins disponibles et avancé que
7 quiconque a essayé de procéder à une rétention d'informations, à
8 l'exception, bien entendu de l'Etat de Croatie. Ceci est totalement
9 inacceptable.
10 Maintenant je souhaiterais aborder un certain nombre de points brièvement.
11 La référence à l'absence ou à la présence de témoins oculaires tels que AO
12 ainsi qu'un autre témoin: se concentrer sur ces faits revient à omettre le
13 fait que si on s'en rapporte au paragraphe 6 du mémoire préalable au
14 procès, on peut déduire un certain nombre de choses du contexte, dont on
15 peut déduire qu'il y a eu participation.
16 C'était notre thèse, c'est notre thèse telle qu'elle se présentait au
17 début et c'est la façon dont notre thèse a continué à se présenter
18 jusqu'au bout, maintenant sans le témoin AO. Et c'était également l'état
19 de la thèse de l'accusation au moment de décision prise suite à la fin de
20 la présentation des éléments à charge. Au paragraphe 32 de cette décision,
21 il est stipulé que sur la base des critères applicables à ce moment-là, la
22 Chambre estime qu'il y a des éléments de preuve substantiels quant au rôle
23 de l'accusé Kordic au niveau du gouvernement, et du contrôle de la HZ-HB
24 et de la HR-HB.
25 Je dis ceci pour la raison suivante: suite aux argumentations qui ont été
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1 présentées, le fait qu'il y ait maintenant des documents supplémentaires,
2 des éléments de preuve supplémentaires, documentaires ou non, dans
3 certains domaines ne modifie pas les critères appliqués dans d'autres
4 domaines. Cela ne signifie pas qu'il faille essayer de trouver d'autres
5 éléments de preuve à l'appui d'autres parties de l'affaire.
6 Je pense que nous avons suffisamment prouvé notre thèse, notre cause et
7 ceci aurait été le cas même sans les documents et les témoins
8 supplémentaires qui ont été disponibles. Ils se sont contentés de
9 renforcer notre thèse.
10 M. Bennouna: Maître Nice que tirez-vous comme conclusion en soi du fait
11 quand vous dites: "that there is a substantial evidence of the role of the
12 accused Kordic in the overall government and control of HZ-HB and HR-HB."
13 Quelle conclusion en tirez-vous?
14 M. Nice (interprétation): Monsieur le Juge, je ne tirerai pas de ce point
15 une conclusion en tant que telle. Mais ce que je faisais, je pense que
16 c'était approprié. Ce je faisais c'était de rappeler à la Chambre que les
17 éléments de preuves sans témoins oculaires ont toujours été suffisants
18 dans le cadre de notre affaire. Je ne vais pas plus loin.
19 Mais ceci souligne le danger qui consiste à estimer que les éléments de
20 preuve présentés par des témoins oculaires doivent inciter à modifier les
21 critères appliqués dans l'ensemble de l'affaire. C'est tout ce que je
22 voulais dire et je ne souhaite pas aller plus loin à ce sujet.
23 Autre chose, quant à savoir s'il faut tirer des conclusions significatives
24 du fait que la totalité de la Bosnie centrale a été mentionnée dans l'Acte
25 d'accusation, ceci on y a répondu de façon tout à fait convaincante dans
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1 une décision qui a été prise par la Chambre d'appel à ce sujet.
2 Ensuite, la qualification par Me Smith de l'acte de persécution avec ces
3 trois piliers ne correspond pas du tout à notre vision de la chose.
4 Page 142, paragraphe 436 de notre mémoire en clôture: "Nous avons ici
5 affaire à un plan de persécution de la population de Bosnie centrale ceci
6 aux fins de remplir ou d'accomplir des ambitions territoriales et
7 politiques de la HZ-HB et ceci en privant une certaine partie de la
8 population de ses droits les plus fondamentaux."
9 En gardant ceci à l'esprit, je voudrais me consacrer rapidement à l'une
10 des interventions de M. le Juge Robinson au cours des argumentations.
11 M. le Juge Robinson a parlé d'une tendance qui consistait à déduire, à
12 conclure qu'il y avait persécution à partir d'un certain nombre de crimes.
13 C'est une tendance que l'on constate au sein du Tribunal.
14 Je dois dire que si effectivement il y a une tendance, elle répond bien
15 entendu, à l'administration de la justice, mais ce qui doit se passer en
16 l'espèce d'après nous c'est qu'il ne faut déduire la persécution à partir
17 d'un crime individuel ou même d'une série de crimes, mais il faut déduire
18 cette persécution d'un système d'événements.
19 C'est pourquoi, eh bien que je sache que cela soit une tâche
20 qu'extrêmement difficile et parfois pénible, c'est pourquoi nous demandons
21 respectueusement à la Chambre, dans le cadre de ces délibérations de se
22 référer parfois à nos annexes. Notamment à l'Annexe 11 ainsi qu'aux autres
23 outils dont dispose la Chambre de première instance. La Chambre pourra
24 ainsi voir dans ces documents que l'on a examiné, étudié un certain nombre
25 périodes de façon chronologique. Si par exemple vous étudiez quelques
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1 pages de l'Anexe 11, vous pourrez voir quels ont été les éléments dans
2 différentes municipalités, les propos de l'accusé.
3 Ceci met en lumière le caractère systématique des événements. Et de cela
4 on doit, on peut, nous l'estimons, déduire qu'il y a eu persécution. Bien
5 entendu il y a eu évolution dans cette persécution entre le début et la
6 fin où on a vu des actes de violence extrêmement atroce.
7 Ensuite dans le cadre des argumentations présentées par la défense de M.
8 Kordic, à trois reprises, je crois, on a fait référence au terme ad hoc.
9 On a parlé d'artillerie ad hoc, on a parlé d'atrocités ad hoc. Tout ceci
10 en parlant d'un dirigeant politique régional qui prenait des actions ad
11 hoc comme c'est le cas pour des dirigeants politiques régionaux.
12 Moi, malheureusement je ne comprends pas très bien ce que cela signifie,
13 l'utilisation ad hoc de l'artillerie ou les massacres ad hoc. Il se peut
14 que la Chambre accepte cette argumentation une fois que l'on biffe le mot
15 ad hoc. Et qu'en effet ici vous aviez des dirigeants politiques régionaux
16 qui se rendaient coupables d'atrocités et qui utilisaient l'artillerie,
17 qui avaient recours à l'artillerie.
18 Même problème ou problème similaire dans les argumentations des accusés,
19 du côté de Cerkez. Puisqu'on nous dit qu'il ignorait ce qui s'était passé
20 à Ahmici et qu'il ignorait également quelle était la composition de sa
21 Brigade. Je pense à Bralo notamment.
22 D'autre part apparemment, il ignorait qu'on faisait appel à son unité pour
23 détenir des prisonniers. Mais prétendre ainsi l'ignorance de ces trois
24 façons ce n'est pas crédible.
25 Maintenant je vais passer à des questions que nous abordons, bien entendu,
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1 dans notre mémoire en clôture. Des questions ont été abordées dans les
2 argumentations orales. Il s'agit notamment du rôle de Kordic en ce qui
3 concerne les affaires militaires. On a parlé de Boban. Boban, bien
4 entendu, est décédé. Il n'y a aucun élément qui a été présenté devant
5 cette Chambre et qui indique que Boban ait délivré des ordres au quotidien
6 et qu'il ait contrôlé des événements qui se sont déroulés dans la vallée.
7 Il n'y a personne d'autre à l'exception de Boban ou entre Boban et Kordic
8 qui nous a été présenté comme étant le détenteur du pouvoir actif dans la
9 région, et auquel un homme politique régional se serait référé pour agir.
10 En fait, la Chambre se souviendra que ce qui s'est passé dans la période
11 qui nous intéresse est reflété dans la pièce 1134, non pas en ce qui
12 concerne l'accusé lui-même mais en ce qui concerne la police militaire. Ce
13 qui s'est passé c'est la chose suivante, on peut le voir dans les
14 documents. Ce que je vais dire concerne la période de janvier à juin 1993,
15 je cite: "Du fait de l'isolation de la zone opérationnelle de Bosnie
16 centrale les contacts entre la police militaire de Mostar et le 4e
17 Bataillon n'ont été possible que par communication radio, ou
18 communications de ce type. Tous les pouvoirs du chef de la police
19 militaire dans la zone opérationnelle de Bosnie centrale ont été
20 transférés à l'adjoint du chef de la zone opérationnelle, Ljubicic. Fin de
21 citation.
22 Nous vous invitons à conclure, Messieurs les Juges, que ce même transfert
23 de pouvoir a été appliqué en ce qui concerne M. Kordic. Vous vous
24 souviendrez du tableau qui montre tous les titres qui ont été ceux de M.
25 Kordic, qui montre qu'il a été vice-Président pendant les périodes qui
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1 nous intéressent. Ceci est surligné en jaune.
2 D'autre part, je peux également vous montrer une lettre en date du 7
3 décembre 1993, lettre de Kordic à Boban. Ceci concerne une période
4 ultérieure. 343/1, intercalaire n° 18, où il dit, je cite: "Nous nous
5 sommes donnés le droit de nous appeler les représentants officiels de la
6 Bosnie du bureau du Président. Et nous vous demandons vos instructions."
7 Fin de citation.
8 Pièce suivante D356/1, intercalaire n° 39 du 15 juillet. On voit que le
9 bureau de la présidence a été déplacé et on voit que le nom de la personne
10 qui figure sur ce document est Dario Kordic. Le premier témoin de la
11 Chambre a peut-être accidentellement confirmé ceci lorsqu'il a déclaré que
12 Kordic était un homme politique en Bosnie centrale qui, d'après le témoin,
13 s'imposait politiquement à ses collègues et qui a fini par devenir
14 l'adjoint au Président de la communauté croate.
15 Le témoin a dit que Kordic se trouvait peut-être au-dessus des autres
16 hommes politiques.
17 Et nous avançons que tout ceci montre qu'il avait des pouvoirs exécutifs
18 et que tous les arguments qui vont dans le sens contraire sont sans
19 valeur.
20 Maintenant, je voudrais passer brièvement à un document du 22 septembre.
21 Il a été avancé, je ne suis pas très sûr de l'argumentation présentée mais
22 en tout cas, on nous a cité un document et nous allons l'examiner ce
23 document cité par Me Smith, document relatif à M. Kordic. Il s'agit du
24 document 141.1, intercalaire 9.
25 Donc, le premier passage relatif à la coopération, les deux
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1 autres passages n'ont pas été lus. On peut y lire notamment: "Le peuple
2 croate ne reconnaît pas les représentants croates dans le gouvernement de
3 Bosnie-Herzégovine." Ensuite on parle du blason, de l'emblème du drapeau,
4 etc. Merci.
5 Donc 22 septembre 1992, il s'agit là d'un des nombreux documents
6 qui sont Orelatifs à Kordic, vice-Président du HVO. Il s'agit, je pense,
7 du document auquel pensait M. le Président, en parlant des diverses
8 municipalités car c'est le document qui indique quels sont les progrès
9 effectués à ce moment-là, en ce qui concerne la prise de contrôle par le
10 HVO.
11 Il vaut donc la peine de relire ce document car ce document
12 montre exactement ce qu'il s'est passé et montre qu'il faut étudier ce
13 qu'il s'est passé dans le contexte et en sachant que l'objectif était de
14 prendre le contrôle de toutes les municipalités qui les intéressaient.
15 Sur le même point, je donnerai la référence plus tard car le
16 temps m'est compté, donc document du 8 avril, 624.1, donc quelques jours
17 seulement avant Ahmici. Cest un document que l'on doit examiner dans le
18 même contexte. Un passage de ce document intéressant, je cite: "Il est
19 nécessaire d'accélérer la mise en place de l'autorité du HVO dans toutes
20 les municipalités et d'informer chaque mois le bureau du HVO à Travnik par
21 écrit, etc., etc."
22 Ensuite, on peut lire: "Les autorités militaires doivent travailler le
23 plus possible au renforcement de l'organisation militaire." Fin de
24 citation. Tout ceci correspond à une méthode, un système que la Chambre
25 connaît bien.
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1 Avant de passer à l'allégation selon laquelle Kordic était personnellement
2 intéressé à la coopération, son absence des accords de cessez-le-feu
3 s'explique sans doute car ce genre d'activité ne l'intéressait pas. Le
4 général de brigade Cordy-Simpson nous a dit lors d'une réunion: "Kordic a
5 fait une demande si peu réaliste qu'il était impossible qu'elle soit
6 acceptée."
7 Mais la Chambre de première instance pourra trouver des éléments à l'appui
8 du fait que la coopération était quelque chose qui ne l'intéressait pas.
9 On peut le trouver dans des paroles qu'il a prononcées lui-même. Je pense
10 à la cassette que nous avons écoutée qui est très intéressante surtout en
11 ce qui concerne la première transcription. Mais il y a d'autres documents
12 qui vont dans ce sens qu'il est difficile de prendre en compte car cela
13 prend beaucoup de temps.
14 En tout cas, il y a un document où quelque chose que l'on peut voir à la
15 page 22, je vais le passer sur le rétroprojecteur et en donner lecture.
16 Donc, ainsi cela concerne le 25 février, c'est un peu plus bas. Vous avez
17 ici une discussion entre Blaskic et Kordic. La partie surlignée en rouge
18 dit la chose suivante. Donc Blaskic parle de l'agression et de
19 l'occupation par l'ennemi. On va voir ce qui se passe plus tard. Kordic
20 répond, je cite: "Comment est-ce qu'on peut avoir un commandement conjoint
21 avec l'ennemi, je ne sais pas ce que cela veut dire cela." Fin de
22 citation.
23 Donc ceci est extrêmement clair et vu le moment où cela se passe et le
24 reste de la conversation, on voit qu'on parle des Musulmans et qu'il
25 n'était absolument pas intéressé à la mise en place d'un commandement
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1 conjoint.
2 C'est pourquoi il était absent des négociations de cessez-le-feu, point
3 sur lequel la défense a tant insisté.
4 M. Bennouna: Quelle est la relation que vous faites entre le "joint
5 command" et le "cess-fire".
6 M. Nice (interprétation): Ceci a un rapport avec l'allégation de la
7 défense selon laquelle Kordic souhaitait entretenir des relations de
8 coopération avec les Musulmans.
9 M. Bennouna: Le commandement conjoint c'est le fait de commander ensemble.
10 Le cessez-le-feu, c'est le fait d'arrêter provisoirement les hostilités.
11 Je ne vois pas pourquoi vous déduisez du refus du commandement conjoint le
12 fait que M. Kordic n'était pas dans toutes les négociations sur le cessez-
13 le-feu.
14 M. Nice (interprétation): Commandement conjoint avec les Musulmans c'est
15 ce dont je parle. Donc ce qu'il montre ici c'est que cela ne l'intéressait
16 absolument pas de travailler de concert avec les Musulmans. La raison pour
17 laquelle j'ai mentionné les cessez-le-feu, c'est pour dire que la raison
18 pour laquelle peut-être il était absent des négociations de cessez-le-feu,
19 c'était la même raison, à savoir que cela ne l'intéressait absolument pas.
20 Il en va de même de ce qu'a dit Cordy-Simpson à ce sujet. Donc voici le
21 thème que je souhaitais aborder et illustrer par mes propos.
22 Chose suivante. Non, je passe à autre chose.
23 Permettez-moi, s'il vous plaît, de passer à huis partiel très rapidement.
24 (Huis clos partiel.)
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17 (Audience publique.)
18 M. Nice (interprétation): Une seule chose au sujet des allégations
19 concernant les documents falsifiés qui ont été faits par Cerkez, il ne
20 faut pas oublier que certains des documents les plus importants portent la
21 signature de Cerkez. Ces documents ont été présentés au premier témoin
22 disponible Badrov qui a reconnu ces documents. Il n'a jamais été avancé
23 que ces signatures étaient des faux et aucun élément n'a indiqué qu'il
24 s'agit là d'autre chose que sa signature, c'est sa signature sur tous ces
25 documents et tous les arguments qui reposent sur la thèse de la
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1 falsification tout ceci est nul et non avenu. En effet, il faudrait avoir
2 recours à un processus extrêmement complexe. Puisque la défense semble
3 avancer que certains documents ont été falsifiées et d'autres non. C'est
4 tout à fait inconcevable et ceci est complètement par le fait que c'est sa
5 signature qui figure sur ces documents et que personne ne l'a contestée.
6 En ce qui concerne Kordic, la façon dont les choses ont été présentées par
7 la défense, c'est que ce n'était pas un militaire, de jure et dès qu'il
8 voit un document de ce type, il le rejette, et dés qu'on les confronte à
9 des éléments de preuve qui vont dans le sens contraire, il rejette cela.
10 Or il n'y a absolument aucune manière de nier le fait que cet homme
11 disposait d'une grande autorité, d'une autorité qui s'exprimait de
12 diverses manières dans le cadre de ce qu'on peut qualifier de campagne, et
13 ceci comportait notamment la persécution ainsi que d'autres crimes
14 extrêmement graves.
15 Je ne veux pas abuser du temps qui m'avait été imparti, je vais m'arrêter
16 mais il ne faudrait pas en conclure que j'ai abordé tous les thèmes que
17 j'aurai pu, qui auraient été dignes d'être abordés dans le cadre d'une
18 réplique.
19 M. Sayers (interprétation): Trois choses à dire de notre côté très
20 brièvement.
21 En ce qui concerne premièrement le commandement conjoint avec l'ennemi,
22 c'est justement ce qu'il s'est produit. C'est le témoignage du témoin de
23 Chambre I, la Chambre s'en souvient sans doute à la perfection. On devait
24 normalement mettre en place un commandement conjoint après les
25 négociations qui ont réuni le Président Izetbegovic et le Président Boban,
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1 mais il s'est trouvé que cela n'a mené à rien, et la pièce des D194/1, le
2 bulletin de renseignements militaire du 9 juin montre que cela n'a pas été
3 possible.
4 Deuxièmement, la raison pour laquelle M. Kordic ne participe aux
5 participations de cessez-le-feu et il n'était pas là, personne ne le
6 conteste, c'est qu'il n'avait pas le type de pouvoirs que lui attribue
7 l'accusation. Il n'y a pas d'autre manière de voir les choses.
8 Troisièmement, l'accusation invite la Chambre de première instance à
9 imaginer sans aucun argument à l'appui de cette supposition le Président
10 Boban devait avoir délégué certains de ses pouvoirs ou de ses prérogatives
11 militaires à M. Kordic, mais aucun élément ne va dans ce sens. Donc il n'y
12 a aucun élément de preuve qui va dans ce sens et on vous demande
13 simplement de faire une déduction qui ne repose sur aucun élément de
14 preuve.
15 Je souhaiterais pour finir la chose suivante. Les fantômes des victimes
16 d'Ahmici hantent toutes les affaires qui ont trait à la vallée de la
17 Lasva, c'est indéniable et ces victimes, on retrouve leurs ombres dans ce
18 Tribunal. Ces victimes sont en droit d'attendre la justice, mais il ne
19 s'agit pas ici de vengeances. Or, il ne convient pas de s'en prendre à un
20 homme innocent pour en faire un bouc émissaire.
21 Sur la base des éléments de preuve présentés dans ce procès, il n'est pas
22 possible de conclure à la culpabilité au-delà de tout doute raisonnable en
23 ce qui concerne chacune des charges présentées dans cet acte d'accusation
24 à la portée extrêmement large. Et vous pourrez vous en convaincre sur la
25 base de l'analyse très attentive que nous avons fait de tous les éléments
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1 de preuve présentés.
2 Le processus de réconciliation ne sera pas renforcé en envoyant des
3 innocents en prison et M. Kordic n'est coupable d'aucun des chefs
4 d'accusation qui lui sont reprochés et il doit être acquitté au titre de
5 tous ces chefs d'accusation.
6 M. Kovacic (interprétation): Nous ne dirons que deux phrases Monsieur le
7 Président, Messieurs les Juges, nous souhaitons tout d'abord, nous excuser
8 auprès de notre éminent collègue de l'accusation en expliquant ce que
9 souhaitait dire Maître Mikulicic, il souhaitait accuser M. Tudjman de la
10 manipulation liée aux documents et non pas l'accusation. Le document était
11 dans la poche de M. Tudjman pendant trois ans et non pas trois mois, comme
12 c'était consigné au compte rendu.
13 Une phrase seulement encore en ce qui concerne ce qui a été dit sur les
14 documents falsifiés. Nous avons vu jusqu'à maintenant plus d'un millier de
15 documents. Chaque fois ils ont été versés au dossier sous forme de copies.
16 Nous venons de systèmes juridiques différents, mais nous savons à quel
17 point il est facile de faire des falsifications lorsqu'il ne s'agit pas
18 des originaux mais des copies. Il suffit de le faire à l'aide d'une
19 photocopieuse, mais le problème se pose seulement au moment où quelqu'un
20 conteste l'authenticité du document et c'est à ce moment-là que la
21 personne qui présente le document doit identifier les sources et permettre
22 l'authentification. C'est là que le problème se pose et c'est la manière
23 de le résoudre. Moi, je peux proposer de présenter une copie si l'autre
24 partie est d'accord. Mais à partir du moment où l'autre partie conteste
25 cela, je dois prouver l'authenticité du document. Il est possible de
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1 parler des problèmes avec les autorités croates ou avec la conspiration
2 etc, mais cela ce n'est pas mon problème. C'est à eux de prouver. Merci.
3 M. le Président (interprétation): Merci. Le procès se termine ainsi et le
4 jugement sera rendu le jour qui sera déterminé par la suite. Vous en serez
5 informé.
6 Monsieur Nice, je souhaite m'adresser à vous, pour dire que la Chambre de
7 première instance souhaite exprimer sa reconnaissance par rapport à toutes
8 les personnes qui ont collaboré avec nous.
9 Nous souhaitons tout d'abord remercier toutes les personnes, les deux
10 parties qui ont collaboré de manière tout à fait efficace avec nous
11 jusqu'à maintenant.
12 Ensuite, nous tenons à remercier tout le monde ici présent, à savoir les
13 membres du greffe, l'huissier et la sécurité pour l'assistance qu'il nous
14 ont fournie au cours de cette procédure qui a duré plus de vingt mois.
15 Nous souhaitons également remercier les sténotypistes du travail qu'elles
16 ont fait en écrivant plus de 28 000 pages de compte rendu d'audience.
17 Et pour finir, nous souhaitons remercier les interprètes que l'on ne voit
18 pas mais que l'on entend beaucoup et qui nous ont énormément aidé dans le
19 déroulement de cette procédure et qui ont interprété pendant les
20 dépositions de plus de 240 témoins.
21 Nous sommes reconnaissants également à tous ceux qui ne sont pas présents
22 ici aujourd'hui mais qui nous ont fourni leur aide à travers cette
23 procédure. Je vous remercie tous.
24 (L'audience est levée à 16 heures 38.)
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