Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi, 17 décembre 2004

  2   Jugement en appel

  3   [Audience publique]

  4   --- L'audience est ouverte à 12 heures 49.

  5    [L'appelant est introduit dans le prétoire]

  6   [L'appelant Cerkez n'est pas présent dans le prétoire]

  7   M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je salue toutes les personnes

  8   présentes. Je vais demander à Madame la Greffière d'appeler l'affaire.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Mesdames et Messieurs les

 10   Juges. Affaire IT 95-14/2-A, le Procureur contre Dario Kordic et Mario

 11   Cerkez.

 12   M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Je vais demander

 13   aux parties de se présenter.

 14   Commençons par l'Accusation.

 15   M. FARRELL : [interprétation] Bonjour, Mesdames et Messieurs les Juges.

 16   Norman Farrell, Mme Helen Brady, Mme Marie-Ursula Kind et Mme Jarvis. Notre

 17   commis aux audiences s'appelle Lourdes Galicia. Vous avez aussi les

 18   premiers substituts de la première instance,

 19   M. Nice et M. Ken Scott. Merci, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie.

 21   Je vais demander à la Défense de M. Kordic tout d'abord de se

 22   présenter.

 23   M. NAUMOVSKI : [interprétation] Je vous remercie, Mesdames et Messieurs les

 24   Juges. Mon confrère américain Steven Sayers, mon autre confrère américain,

 25   John Smith, et moi-même Mitko Naumovski.


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  1   M. KOVACIC : [interprétation] Bonjour, Mesdames et Messieurs les Juges. Je

  2   m'appelle Bozidar Kovacic. Je suis avocat de Croatie, et je suis en

  3   compagnie de mon confrère Goran Mikulicic.

  4   M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je constate que votre client a

  5   renoncé à son droit à être présent pendant le prononcé -- la lecture de

  6   l'arrêt.

  7   M. KOVACIC : [interprétation] C'est exact.

  8   M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vais enfin me tourner vers M.

  9   Kordic pour lui demander s'il est en mesure de suivre le débat dans une

 10   langue qu'il comprend ?

 11   L'APPELANT KORDIC : [interprétation] Merci de me poser la question,

 12   Monsieur le Président. Bon après-midi. Oui, je suis en mesure de suivre le

 13   débat dans une langue que je comprends.

 14   M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Avant de lire l'arrêt ou le résumé de l'arrêt, je tiens à remercier toutes

 16   celles et tous ceux qui nous ont aidé à la préparation de l'arrêt, à la

 17   traduction et aussi à l'impression de cet arrêt.

 18   La Chambre d'appel du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie

 19   est réunie aujourd'hui afin de prononcer l'arrêt dans l'affaire le

 20   Procureur contre Dario Kordic et Mario Cerkez.

 21   Le résumé qui va suivre se fonde sur les ultimes délibérations de la

 22   Chambre d'appel, qui ont eu lieu le 2 décembre 2004. Le texte de ce résumé

 23   sera disponible en anglais, en français et en B/C/S à l'issue de l'audience

 24   afin que l'accusé notamment, en prenne connaissance dans une langue qu'il

 25   comprend. L'arrêt sera également mis à la disposition des parties à l'issue


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  1   de cette audience. Il faut souligner que seul fait autorité le texte de

  2   l'arrêt en anglais dans lequel sont exposées les conclusions de la Chambre

  3   d'appel.

  4   Les événements en cause dans l'arrêt, se sont déroulés pendant le conflit

  5   opposant le conseil de défense croate ou HVO, à l'armée des Musulmans de

  6   Bosnie, ABiH, en Bosnie centrale, de 1992 à 1993, notamment dans la vallée

  7   de la Lasva.

  8   Cette région située au cœur de la Bosnie centrale, regroupe les

  9   municipalités de Vitez, Novi Travnik et Busovaca. La municipalité de

 10   Kiseljak se situe au sud de la vallée de la Lasva. L'importance de cette

 11   région d'un point de vue militaire, tient à sa situation géographique au

 12   centre de la Bosnie-Herzégovine et au nombre d'usines d'armement qui y

 13   étaient implantées. Cette une région montagneuse dont les vallées sont

 14   parcourues par d'importants axes routiers reliant l'Herzégovine à la Bosnie

 15   orientale, et Sarajevo au nord du pays. Dans la région entre Novi Travnik

 16   et Kiseljak, deux villes distantes d'une trentaine de kilomètres et reliées

 17   par une route, c'est là que ce sont déroulés les faits de l'espèce. Le

 18   village d'Ahmici, dont il a été incontestablement reconnu qu'il fut le

 19   théâtre, à la mi-avril 1993, du plus grave des massacres commis en

 20   l'espèce, se situe le long de cette route.

 21   J'en viens à présent aux accusés. Dario Kordic est né le 14 décembre 1960 à

 22   Busovaca en Bosnie-Herzégovine. Il est marié et père de trois enfants. Cet

 23   ancien journaliste a occupé un emploi rémunéré à l'entrepris Varostalna à

 24   Busovaca à partir de 1985. En 1991, Dario Korkic a pris la tête de l'Union

 25   démocratique croate de Bosnie-Herzégovine dans la municipalité de Busovaca.


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  1   Dans la même année, il est devenu vice-président de la communauté croate de

  2   Herceg-Bosna après la création de celle-ci, le 18 novembre 1991. Lorsque la

  3   communauté croate de Herceg-Bosna est devenue la République croate de

  4   Herceg-Bosna, en août 1993, Dario Korkic a conservé son poste de vice-

  5   président.

  6   Mario Cerkez est né le 27 mars 1959 à Vitez en Bosnie-Herzégovine. Il est

  7   marié et père, lui aussi, de trois enfants. Avant l'éclatement du conflit

  8   armé dans la vallée de la Lasva, il était employé à l'usine Slobodan

  9   Princip Zeljo près de Vitez. Mario Cerkez a été l'un des membres fondateurs

 10   du HVO à Vitez. Il a d'abord été chef d'état-major adjoint de Vitez, puis

 11   commandant de la Brigade de Vitez. Après le regroupement des Brigades de

 12   Vitez et de Novi Travnik, il est devenu commandant adjoint de cette

 13   brigade. Enfin, en mars 1993, Mario Cerkez est devenu commandant de la

 14   Brigade Viteska.

 15    La Chambre de première instance a déclaré Dario Kordic coupable d'avoir

 16   planifié et incité à commettre et ordonner, notamment les crimes suivants :

 17   persécutions, attaques illicites contre des civils et des biens de

 18   caractère civil, assassinats, actes inhumains, emprisonnement, destruction

 19   sans motif que ne justifie pas les exigences militaires, pillage et

 20   destruction ou endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion ou

 21   à l'enseignement. Ces crimes ont été commis dans les municipalités de

 22   Travnik, Vitez, Busovaca et Kiseljak. La Chambre de première instance a

 23   conclu que Dario Kordic avait joué un rôle déterminant, notamment en

 24   ordonnant l'attaque contre Ahmici en avril 1993, durant laquelle plus d'une

 25   centaine de civils musulmans de Bosnie ont été massacrés. La Chambre de


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  1   première instance a condamné Dario Kordic à 25 années d'emprisonnement.

  2   Pour les crimes commis à Vitez, Stari Vitez et Veceriska, Mario Cerkez a

  3   été déclaré coupable de persécutions sur la base de l'Article 7(1) du

  4   statut, de l'Article 7(3) du statut et d'attaques illicites contre des

  5   civils et des biens de caractère civil, d'assassinats, d'actes inhumains,

  6   d'emprisonnement, de prise de civils en otage, de destruction sans motif

  7   que ne justifient pas les exigences militaires, de pillage et de

  8   destruction ou endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion ou

  9   l'enseignement sur la base à la fois de l'Article 7(1) et de l'Article

 10   7(3). Il a été condamné par la Chambre de première instance à 15 années

 11   d'emprisonnement. Elle l'a, en revanche, acquitté des chefs d'accusation

 12   retenus contre lui pour les crimes qu'il aurait commis à Ahmici.

 13   Dario Kordic et Mario Cerkez ont fait appel de toutes les déclarations de

 14   culpabilité prononcées à leur encontre. Dario Kordic avance principalement

 15   les arguments suivants : il a été privé du bénéfice de l'égalité des

 16   hommes, et n'a pas bénéficié d'un procès équitable. Il dit aussi que la

 17   Chambre de première instance a commis une erreur en se fiant à des

 18   témoignages de seconde main qui n'avaient pas été corroborés, qu'elle a

 19   commis une erreur en concluant que le conflit entre les Musulmans et les

 20   Croates en Bosnie centrale, s'inscrivaient dans le cadre d'une campagne de

 21   persécution unilatérale menée par les Croates de Bosnie. Il a dit qu'il

 22   n'était pas responsable des événements survenus à Ahmici et ailleurs, et

 23   qu'il n'y avait pas de conflit armé avant la mi-avril 1993. Enfin, que la

 24   peine qui lui a été infligée était excessive.

 25   Quant à Mario Cerkez il avance principalement les arguments suivant : il


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  1   n'y avait pas de conflit armé international, à l'époque,  des faits. La

  2   Chambre de première instance a commis une erreur dit-il, en le déclarant

  3   coupable sur la base de l'Article 7(3) du statut. Il dit n'avoir pas

  4   bénéficié d'un procès équitable, et que la Chambre de première instance

  5   s'est trompée dans l'application du droit pertinent, car ses constatations

  6   étaient erronées. Il affirme également que la peine qui lui a été infligée

  7   était excessive.

  8   Enfin, l'Accusation pour sa part, fait appel de l'acquittement de Mario

  9   Cerkez pour sa participation aux crimes commis à Ahmici et des peines

 10   infligées à Kordic et Cerkez au motif que ces peines n'étaient pas assez

 11   sévères.

 12   Durant la procédure en appel, plusieurs moyens ont été retirés, compte

 13   tenu, notamment de l'évolution de la jurisprudence du Tribunal

 14   international depuis février 2001. S'agissant de certains lieux mentionnés

 15   dans l'acte d'accusation, le Procureur a reconnu que la Chambre de première

 16   instance n'avait pas fait, dans le jugement, toutes les constatations

 17   nécessaires.

 18   Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse pour formuler les observations plus

 19   générales. Le fait est que le Tribunal international n'a pu, dans le passé,

 20   et ne pourra à l'avenir, juger ensemble toutes les personnes présumées

 21   responsables des crimes commis dans la vallée de la Lasva. Les Chambres du

 22   Tribunal international ne peuvent juger que les personnes contre lesquelles

 23   un acte d'accusation a été établi et confirmé, et qui se trouve à La Haye.

 24   Si l'on considère les choses d'un point de vue objectif, la capacité du

 25   Tribunal international à juger actuellement et à l'avenir des personnes


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  1   présumées responsables d'infractions graves, peut tenir à plusieurs

  2   raisons, et notamment en premier lieu, à l'insuffisance des éléments de

  3   preuve à charge, et/ou au manque de coopération d'un état avec le Tribunal

  4   international, que ce soit dans le passé ou encore aujourd'hui. En

  5   conséquence, chaque Chambre ne peut analyser minutieusement la question de

  6   la responsabilité pénale individuelle des crimes commis dans la vallée de

  7   la Lasva, que pour chaque accusé traduit devant elle.

  8   Il est à souligné que chaque Chambre du Tribunal international se

  9   prononce sur la base des seuls éléments de preuve dont elle dispose. Ces

 10   éléments de preuve, et partant de la décision de la Chambre, peuvent varier

 11   d'une affaire à l'autre, car il revient aux parties principalement de

 12   rapporter la preuve comme c'est la règle dans un système essentiellement

 13   accusatoire. Sur la base des éléments de preuve dont elle dispose, la

 14   Chambre d'appel détermine soigneusement dans un premier temps si les crimes

 15   ont ou n'ont pas été prouvés. Ce n'est qu'ensuite qu'elle décide, là encore

 16   sur la base des éléments de preuve dont elle dispose, si l'accusé peut être

 17   ou non tenu individuellement pénalement responsable de ces crimes. Par

 18   égard pour les victimes et leurs familles, il faut, en outre, souligner que

 19   lorsqu'une Chambre décide d'acquitter un accusé, cela ne se signifie pas

 20   nécessairement qu'un crime n'a pas été commis, mais que vu les éléments de

 21   preuve dont elle dispose, la Chambre ne peut tenir l'accusé

 22   individuellement responsable de ces crimes.

 23   Je reviens à présent au résumé de l'arrêt, et rappellerai brièvement

 24   les principes juridiques régissant la procédure en appel.

 25   S'agissant des erreurs de fait d'après la jurisprudence du Tribunal


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  1   international, c'est d'abord à la Chambre de première instance qu'il

  2   appartient d'examiner les éléments de preuve présentés au procès, de les

  3   apprécier, et de décider du poids à leur accorder. Par conséquent, la

  4   Chambre d'appel doit toujours accorder quelque crédit aux constations de la

  5   Chambre de première instance. S'il s'avère toutefois qu'aucun Juge de fait

  6   n'aurait pu raisonnablement accepter les éléments de preuve sur lesquels

  7   s'est fondée la Chambre de première instance, ou que l'appréciation de ces

  8   éléments de preuve est totalement erronée, c'est seulement à ce moment-là

  9   que la Chambre d'appel doit intervenir.

 10   Lorsqu'elle examine les erreurs de fait alléguées par la Défense, la

 11   Chambre d'appel n'intervient que si aucun Juge de fait n'aurait pu

 12   raisonnablement conclure à culpabilité de l'accusé au-delà de tout doute

 13   raisonnable. Lorsqu'elle examine les erreurs de fait alléguées par

 14   l'Accusation, la Chambre d'appel détermine si aucun Juge de fait n'aurait

 15   pu raisonnablement prononcer un acquittement.

 16   Lorsqu'une partie soutient qu'une Chambre de première instance a

 17   commis une erreur de droit, la Chambre d'appel ne peut infirmer ou réformer

 18   la décision rendue par la Chambre de première instance que s'il s'agit

 19   d'une erreur qui invalide la décision.

 20   Je vais, à présent, examiner brièvement les principes juridiques

 21   applicables aux modes de participation prêtés aux accusés en l'espèce. La

 22   Chambre de première instance a déclaré Dario Kordic coupable sur la base de

 23   l'Article 7(1) du statut pour avoir planifié, incité à commettre et ordonné

 24   des crimes. L'élément moral retenu pour ces trois modes de participation

 25   est établi lorsque l'auteur a agi avec l'intention directe de planifier,


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  1   d'inciter à commettre, ou d'ordonner un crime.

  2   Un autre type d'élément moral est établi lorsqu'une personne ordonne un

  3   acte ou une omission en ayant conscience de la réelle probabilité qu'un

  4   crime soit commis au cours de l'exécution de cet ordre, donc cette personne

  5   possède la mens rea requise pour être tenue responsable du crime en regard

  6   de l'Article 7(1) du statut pour avoir ordonné l'acte ou l'omission en

  7   question. Le fait d'ordonner avec une telle conscience doit être considéré

  8   comme l'acceptation dudit crime. La Chambre d'appel estime que cela vaut

  9   également pour le fait de planifier, ou d'inciter à commettre un crime.

 10   Je préciserais à ce propos que la Chambre d'appel a tiré, dans

 11   l'arrêt, des conclusions sur plusieurs autres points de droit, comme celui

 12   de l'exigence des résultats pour une attaque illicite dirigée contre des

 13   civils et des biens de caractère civil, ou celui du cumul des déclarations

 14   de culpabilité. Ces points de droit ne seront toutefois pas abordés dans le

 15   présent résumé.

 16   J'en viens maintenant au premier moyen d'appel soulevé par Dario

 17   Kordic, et au troisième moyen soulevé par Mario Cerkez concernant la

 18   violation présumée de leur droit à un procès équitable inscrit à l'Article

 19   21 du statut.

 20   Dario Kordic soutient que l'Accusation a fréquemment et largement

 21   varié dans son argumentation et que les accusés ont été, de ce fait,

 22   injustement lésés dans la mesure où ils n'ont pas été informés dans les

 23   plus brefs délais de la nature et des motifs des accusations portées contre

 24   eux, comme l'exige l'Article 21(4)(A) du statut. L'Accusation les aurait

 25   ainsi obligés à se défendre contre des accusations sans cesse remaniées.


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  1   La Chambre d'appel conclut que les chefs 1 et 2 mettant en cause

  2   respectivement Kordic et Cerkez pour persécutions, que ce sont là des chefs

  3   trop généraux pour donner une idée précise de la portée temporelle et

  4   géographique des accusations, et qu'ils pouvaient, à eux seuls,

  5   sérieusement gêner les accusés dans la préparation de leur défense.

  6   Pourtant, la Chambre estime que les chefs 1 et 2 doivent être considérés

  7   comme des chefs d'accusation qui coiffent les

  8   chefs 3 à 44 lesquels fournissent, aux accusés, des précisons

  9   supplémentaires sur les accusations portées contre eux. Compte tenu de ces

 10   précisions, la Chambre d'appel est convaincue que les accusés étaient

 11   informés des accusations portées contre eux, et qu'ils étaient en mesure de

 12   se défendre devant la Chambre de première instance contre celles portées

 13   dans le cadre des chefs 1 et 2.

 14   A ce propos, la Chambre d'appel relève que, s'agissant de l'expulsion

 15   et du "départ forcé" des civils musulmans de Bosnie, c'est mentionné dans

 16   plusieurs parties du jugement, mais que la Chambre n'y est pas revenue dans

 17   la partie consacrée à la responsabilité des accusés. La Chambre d'appel

 18   pense que la raison en est, que l'acte d'accusation n'informait pas

 19   clairement les accusés qu'ils devaient répondre à des accusations

 20   d'expulsion et/ou de transfert forcé. L'acte d'accusation ainsi vicié n'a

 21   pas été purgé pendant le procès en première instance.

 22   Les accusés affirment qu'en ce qui concerne divers éléments de

 23   preuve, l'Accusation a manqué, de différentes manières, aux obligations que

 24   lui imposaient l'Article 68 du règlement pendant la mise en état de

 25   l'affaire, lors du procès et après celui-ci. La Chambre d'appel fait


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  1   observer que l'Accusation s'est longuement expliquée sur la présentation

  2   des éléments de preuve au procès, et estime qu'elle s'est acquittée de

  3   bonne foi de son obligation d'aider la Chambre de première instance étant

  4   donné la complexité de l'espèce et les difficultés qu'elle a rencontrées

  5   pour obtenir de nombreux éléments de preuve qui ne lui ont pas été

  6   immédiatement accessibles. Kordic et Cerkez n'ont pas pu établir que la

  7   Chambre de première instance avait commis une erreur en permettant une

  8   telle violation présumée de l'Article 68. Leurs arguments sont finalement

  9   rejetés.

 10   Kordic et Cerkez soutiennent tous deux que c'est à tort que la

 11   Chambre de première instance a conclu à l'existence d'un conflit armé

 12   international pendant la période visée par l'acte d'accusation, et les a

 13   déclarés coupables d'infraction grave aux conventions de Genève de 1949

 14   sanctionnées par l'Article 2 du statut. En outre, Kordic affirme qu'il n'y

 15   avait pas de conflit armé avant le 15 avril 1993, ce qui exclut toute

 16   déclaration de culpabilité fondée sur

 17   l'Article  3 et l'Article 5 du statut.

 18   Contrairement à ce que soutienne Kordic et Cerkez, la Chambre d'appel

 19   estime que la Chambre de première instance a, à bon droit, appliqué le

 20   critère du contrôle global en vertu duquel un conflit armé devient

 21   international lorsqu'un état étranger exerce un contrôle global sur les

 22   forces armées de l'un des belligérants. En outre, la Chambre de première

 23   instance a, à juste titre, pris en compte la situation prévalant dans

 24   d'autres régions de la Bosnie-Herzégovine concernées par le conflit armé de

 25   Bosnie centrale pour se prononcer sur le caractère international du conflit


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  1   armé. Dès lors qu'un conflit devient international, les conventions de

  2   Genève s'appliquent à l'ensemble du territoire des belligérants.

  3   La Chambre d'appel estime que, sur la base des éléments de preuve

  4   présentés, un Juge de fait aurait pu raisonnablement conclure que la

  5   Croatie exerçait un contrôle global sur le HVO durant la période visée. De

  6   même la Chambre de première instance a fondé sa conclusion sur la preuve

  7   fiable que la Croatie a dirigé la planification, la coordination et

  8   l'organisation du HVO et qu'il existait un conflit armé entre la Croatie et

  9   la Bosnie-Herzégovine.

 10   J'en  viens à présent aux crimes pour lesquels Kordic et Cerkez ont

 11   été reconnus coupables par la Chambre de première instance.

 12   La Chambre d'appel considère cependant que la Chambre de première

 13   instance n'a, dans la plupart des cas, pas fait de constatations

 14   spécifiques et explicites pour chaque élément constitutif des crimes, mais

 15   a expressément conclu que ces crimes étaient établis. La Chambre d'appel

 16   estime qu'en concluant explicitement que les crimes étaient établis, la

 17   Chambre de première instance a jugé implicitement que toutes les

 18   constatations nécessaires avaient été faites concernant les éléments

 19   constitutifs de conseil de ces crimes. La Chambre d'appel considère qu'une

 20   telle approche est en deçà des exigences du statut du Tribunal

 21   international. Cependant, cela n'entraîne pas le rejet automatique des

 22   accusations. La Chambre d'appel souscrit à l'argument de l'Accusation,

 23   selon lequel dans ce cas précis, il lui faut déterminer si le dossier de la

 24   Défense permet de conclure ainsi que l'a fait la Chambre de première

 25   instance que les crimes ont été établis. La Chambre d'appel a donc dû


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  1   examiner les crimes lieu par lieu et élément par élément afin de déterminer

  2   si un Juge de fait aurait pu raisonnablement parvenir à la même conclusion

  3   que la Chambre de première instance à la lumière des faits. Je n'examinerai

  4   pas maintenant chacun de ces crimes en détail. Pour les besoins de ce

  5   résumé, il suffit de souligner qu'un certain nombre de crimes n'ont pas été

  6   établis et que les conclusions auxquelles la Chambre de première instance

  7   est parvenue à leur sujet ont dû être annulées. En revanche, le dispositif

  8   indiquera expressément lieu par lieu chacun des crimes pour lesquels les

  9   accusés sont finalement reconnus coupables.

 10   Avant de passer aux moyens d'appel portant sur la responsabilité pénale

 11   individuelle de Kordic et de Cerkez, j'aimerais faire observer que la

 12   Chambre d'appel a accordé une attention toute particulière à l'analyse de

 13   la Chambre de première instance  concernant les ordres et les plans qui

 14   étaient légaux et ceux qui entraînaient la perpétration de crimes. Dans ce

 15   contexte, il était important de tenir compte des diverses réunions

 16   auxquelles Kordic et Cerkez ont participé, réunions avec différents groupes

 17   de personnes qui se sont tenues le 15 avril 1993 à l'hôtel Vitez, puisque

 18   cela implique, de la part des accusés, une connaissance et une conscience

 19   différente des crimes qui ont été commis par la suite.

 20   Kordic soutient, dans son troisième moyen d'appel, que la Chambre de

 21   première instance a commis une erreur en concluant que les Croates de

 22   Bosnie avaient participé à une campagne de persécution en Bosnie centrale

 23   et en le déclarant coupable de ce fait.

 24   S'agissant en particulier du massacre d'Ahmici, la Chambre d'appel estime

 25   qu'un Juge de fait aurait pu raisonnablement conclure qu'il y avait eu une


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  1   réunion des dirigeants politiques croates de Bosnie le 15 avril 1993 à

  2   l'hôtel Vitez et que Kordic y était présent. Il était aussi raisonnable de

  3   conclure qu'à cette réunion, la décision avait été prise de lancer une

  4   attaque contre les Musulmans. Se fondant sur l'ensemble des preuves

  5   directes et indiciaires un Juge de fait aurait pu raisonnablement conclure

  6   que pour Kordic cette attaque contre Ahmici et d'autres villages de la

  7   vallée de la Lasva avait pour but de nettoyer ethniquement la région pour

  8   des régions stratégiques. La Chambre d'appel juge également qu'il était

  9   raisonnable de conclure que Kordic, en tant que responsable politique

 10   régional, avait planifié et incité à commettre les crimes survenus le 16

 11   avril 1993 à Ahmici et dans les hameaux avoisinants, Santici, Pirici et

 12   Nadioci.

 13   Etant donné que la Chambre de première instance a eu raison de conclure

 14   qu'un ordre avait été donné de tuer tous les hommes musulmans en âge de

 15   porter les armes, d'expulser les civils et d'incendier leurs maisons, et

 16   que cet ordre avait été approuvé à la réunion des dirigeants politiques, la

 17   Chambre d'appel considère qu'un Juge de fait aurait pu raisonnablement

 18   conclure que la participation de Kordic à la campagne de persécution ne

 19   s'est pas limitée à certaines régions de la vallée de la Lasva, en

 20   particulier celle d'Ahmici mais qu'elle s'est étendue plus généralement aux

 21   crimes ultérieurs, notamment ceux qui ont été commis dans la municipalité

 22   de Kiseljak en avril et en juin 1993.

 23   En ce qui concerne le crime d'emprisonnement illégal de civils à Kaonik, à

 24   l'école primaire de Dubravica, au bâtiment du SDK, au cinéma de Vitez, au

 25   village de Rotilj, à la caserne de Kiseljak et à la municipalité de


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  1   Kiseljak, la Chambre d'appel estime que la Chambre de première instance a

  2   eu raison de conclure que Kordic était responsable pour avoir ordonné la

  3   création de ces centres de détention et l'incarcération elle-même.

  4   Kordic soutient que la Chambre de première instance a commis une erreur de

  5   fait entraînant une erreur judiciaire en concluant qu'il était animé de

  6   l'intention requise pour tous les crimes de persécutions dont il a été

  7   accusé.

  8   La Chambre d'appel approuve les conclusions de la Chambre de première

  9   instance selon lesquelles Kordic savait que des attaques généralisées et

 10   systématiques étaient lancées contre la population civile et que ces actes

 11   s'inscrivaient dans le cadre de ces attaques.   

 12   J'en viens maintenant à l'intention spécifique d'exercer une discrimination

 13   pour des raisons politiques, raciales ou religieuses. Je voudrais, d'abord,

 14   souligner qu'en règle générale, seuls des faits objectifs et le

 15   comportement global d'un accusé pris dans son ensemble permettent de

 16   conclure à l'existence d'une telle intention spécifique. Ce n'est qu'en de

 17   rares occasions qu'il sera possible d'établir une telle intention sur la

 18   base de documents ou de communications interceptées qui en font état.

 19   En l'espèce, les indices sont clairs. Lors d'une réunion le

 20   27 décembre 1991 à Zagreb, Kordic a dit que les Croates de la région de

 21   Travnik étaient prêts à s'intégrer à l'Etat de Croatie. Je cite : "A

 22   n'importe quel prix…tout autre solution qu'une délimitation claire des

 23   frontières d'un territoire croate en Herceg-Bosna serait une trahison."

 24   En outre, lors d'un rassemblement, en janvier 1992, à Busovaca, on a vu

 25   Kordic s'adresser à une foule en liesse agitant des drapeaux à laquelle il


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  1   a déclaré que ce rassemblement prouvait que les Croates de Busovaca

  2   appartenaient à la nation croate unie et que la communauté croate de

  3   Herceg-Bosna, et notamment Busovaca était et je cite à nouveau : "Une terre

  4   croate et qu'elle le resterait."

  5   La Chambre d'appel se fondant notamment sur les éléments de preuve

  6   susmentionnés concernant les activités et l'orientation politique de Kordic

  7   sur ses fermes prises de position nationalistes et ethniques et sur son

  8   souhait de voir un Etat croate souverain créé coûte que coûte sur le

  9   territoire de la Bosnie-Herzégovine, la Chambre, disais-je, estime que

 10   Kordic était animé de l'intention discriminatoire spécifique requise pour

 11   le crime de persécutions.

 12   Sur la base de ce qui précède, la Chambre d'appel confirme la déclaration

 13   de culpabilité prononcée contre Kordic pour le chiffre 1, persécutions, un

 14   crime contre l'humanité.

 15   Pour ce qui est du quatrième moyen d'appel de Kordic concernant se

 16   responsabilité pénale, la Chambre d'appel considère qu'aucun Juge de fait

 17   n'aurait pu raisonnablement parvenir à la conclusion de la Chambre de

 18   première instance selon laquelle Kordic avait l'intention de commettre les

 19   crimes liés à l'attaque contre Novi Travnik dès octobre 1992. Par

 20   conséquent, la Chambre annule la conclusion de la Chambre de première

 21   instance selon laquelle Kordic s'est rendu coupable de destruction sans

 22   motif que ne justifie pas les exigences militaires et de pillage à Novi

 23   Travnik en octobre 1992.

 24   Cependant, en ce qui concerne les crimes commis à Busovaca en janvier 1993,

 25   la Chambre d'appel estime qu'un Juge de fait aurait pu raisonnablement


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  1   conclure que de nombreux civils ont été pris pour cible et tués dans cette

  2   ville et que des meurtres constitutifs de crimes contre l'humanité ainsi

  3   que des attaques illicites contre des biens de caractère civils y ont été

  4   commis en janvier 1993. La Chambre d'appel se réfère également aux

  5   conclusions tirées par la Chambre de première instance concernant le rôle

  6   que Kordic a joué dans la campagne de persécution, notamment son rôle dans

  7   la prise de contrôle de municipalités par le HVO, y compris Busovaca, et le

  8   rôle qu'il a joué dans les événements qui ont entraîné le conflit et à la

  9   veille du conflit.

 10   L'attaque contre Busovaca était dirigée contre des civils musulmans et des

 11   biens de caractère civil. Elle visait la population civile. Des civils

 12   musulmans ont été tués, expulsés et leurs biens ont été détruits. La

 13   Chambre de première instance a conclu que Kordic, en tant que dirigeant

 14   politique ayant une influence militaire importante, a participé à ces

 15   crimes, en les planifiant et en les ordonnant. La Chambre d'appel juge que

 16   la conclusion de la Chambre de première instance, selon laquelle Kordic

 17   était animé de l'intention requise pour ces crimes, est raisonnable.

 18   En ce qui concerne les crimes commis entre avril et juin 1993, dans

 19   la vallée de Lasva, la Chambre d'appel considère qu'à la suite de réunions

 20   de dirigeants politiques, à laquelle Kordic a assisté le 15 avril 1993, il

 21   y a eu un plan global d'expulsion des civils musulmans et de destruction de

 22   maisons appartenant à des civils. Kordic a participé, en tant que haut

 23   dirigeant politique régional, à la planification de l'opération militaire

 24   et de l'attaque contre Ahmici, visant à nettoyer ces régions en chassant

 25   les Musulmans.


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  1   La Chambre d'appel considère que ce plan global concernait

  2   l'ensemble de la vallée de Lasva et qu'il était explicitement question de

  3   tuer les hommes en âge de porter les armes, d'expulser les civils, et de

  4   détruire les maisons. Kordic était animé de l'intention directe requise

  5   pour ces crimes. Il a approuvé le plan global, en sachant que ces crimes

  6   seraient commis, en ayant conscience de la probabilité que d'autres crimes

  7   tels que le pillage et la détention illégale de civils seraient commis au

  8   cours de l'exécution de ce plan global. La planification avec une telle

  9   conscience doit être considérée comme l'acceptation de ces crimes.

 10   En conclusion, la Chambre d'appel souligne que certains moyens

 11   d'appels de Kordic ont été accueillis, mais seulement pour certains lieux

 12   et jamais pour un chef tout entier.

 13   La Chambre d'appel va maintenant examiner les moyens d'appels de

 14   l'Accusation. Il est à noter d'emblée que l'Accusation a retirée son

 15   premier moyen d'appel concernant le droit applicable aux persécutions étant

 16   donné que la question juridique sous-jacente avait déjà été tranchée dans

 17   l'intervalle par la Chambre d'appel.

 18   Les deuxième et troisième moyens d'appel de l'Accusation portent sur

 19   l'acquittement de Cerkez, prononcé par la Chambre de première instance pour

 20   les crimes commis à Ahmici.

 21   L'Accusation soutien que la Chambre de première instance a commis une

 22   erreur tant de droits que de faits en application l'Article 7(1) du statut

 23   aux faits de l'espèce et en tenant pas compte de tous les éléments de

 24   preuves pertinents versés au dossier.

 25   La Chambre de première instance a conclu que la Brigade de Viteska


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  1   avait participé aux opérations menées à Vitez, Veceriska et Ahmici le 16

  2   avril 1993, mais que dans le cas d' Ahmici, elle n'y avait participé que

  3   tard dans la journée et n'avait pas pris part à l'assaut initial.

  4   L'Accusation affirme que les constatations qu'a faite la Chambre de

  5   première instance aurait dû l'amener à déclarer Mario Cerkez pénalement

  6   responsable sur la base de l'Article 7(1) du statut, pour avoir, avec la

  7   Brigade à Viteska; participé à la planification militaire de l'attaque

  8   contre Ahmici; grandement aidé les unités de la police militaire

  9   participant à l'attaque en fournissant des moyens de transport et en

 10   empêchant la FORPRONU d'entrer dans le secteur d'Ahmici; et détenu des

 11   Musulmans à Ahmici se rendant ainsi coupable de persécution.

 12   La Chambre d'appel va se pencher tout d'abord sur l'argument de

 13   l'Accusation selon lequel la conclusion de la Chambre de première instance

 14   indiquant que l'attaque d'Ahmici s'inscrivait dans le cadre d'un plan ou

 15   dessin commun conçu et exécuté par les dirigeants croates de Bosnie en vue

 16   de procéder au nettoyage ethnique de la vallée de Lasva pour en chasser les

 17   Musulmans, auraient dû l'amener à conclure que Mario Cerkez était

 18   pénalement responsable des crimes commis à Ahmici.

 19   Comme il a été dit plus haut à l'égard de Dario Kordic, la Chambre de

 20   première instance a jugé que les crimes commis à Ahmici s'inscrivaient dans

 21   le cadre de cette campagne de persécution. Cependant, et il en va autrement

 22   en ce qui concerne Dario Kordic, la Chambre d'appel estime enfin que les

 23   constatations et les éléments de preuve ne suffisent pas pour établir que

 24   Mario Cerkez est responsable de la campagne de persécution dans le cadre de

 25   laquelle des crimes ont été commis à Ahmici. Par conséquent, l'argument de


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  1   l'Accusation, selon lequel Mario Cerkez aurait dû être déclaré pénalement

  2   responsable de ces crimes pour avoir participé à la campagne de

  3   persécution, ne tient pas.

  4   La Chambre d'appel a aussi examiné si, correctement analysées, les

  5   constations de la Chambre de première instance établissent la

  6   responsabilité pénale de Mario Cerkez pour les crimes commis à Ahmici,

  7   indépendamment de sa participation présumée à une campagne de persécution.

  8   L'Accusation fait valoir en particulier que la Brigade de Viteska a

  9   reçu l'ordre de barrer la route venant de Vitez afin d'empêcher la FORPRONU

 10   d'entrer dans le secteur d'Ahmici.

 11   Cependant, la Chambre d'appel note que la Chambre de première

 12   instance n'a pas indiqué clairement, et les preuves contenues dans le

 13   dossier de première instance sont insuffisantes, si le barrage routier

 14   était justifié d'un point de vue militaire ou s'il avait été dressé en

 15   prévision des crimes qui devaient être commis à Ahmici ou pour les couvrir.

 16   En outre, les éléments de preuve présentés ne suffisent pas pour montrer de

 17   manière concluante que Mario Cerkez était au courant de l'objectif criminel

 18   présumé du barrage routier. L'argument de Mario Cerkez, selon lequel la

 19   Brigade de Viteska avait pour cette tâche de contrer une éventuelle attaque

 20   de l'ABiH depuis le secteur de Kruscica et Vraniska et tout aussi

 21   vraisemblable. Il semble que la Chambre de première instance a correctement

 22   appliqué le principe selon lequel le doute profite à l'accusé. La Chambre

 23   d'appel ne peut donc relever aucune erreur de fait sur ce point. Par

 24   conséquent, la Chambre de première instance a eu raison de conclure que ni

 25   Mario Cerkez, ni la Brigade de Viteska n'ont participé aux crimes commis à


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  1   Ahmici.

  2   Dans son troisième moyen d'appel, l'Accusation soutient que faute

  3   d'avoir, je cite, "accepté les preuves d'une présence active des membres de

  4   la Brigade de Viteska durant l'attaque contre Ahmici", la Chambre de

  5   première instance a commis une erreur en concluant que Mario Cerkez n'était

  6   pas pénalement responsable sur la base de l'Article 7(1) et ou de l'Article

  7   7(3) du statut.

  8   La Chambre d'appel a examiné, sans résultat concluant, les

  9   déclarations de témoins et les documents auxquels l'Accusation se référait

 10   pour prouver la présence de membres de la Brigade de Viteska durant

 11   l'attaque initiale contre Ahmici. La Chambre d'appel conclut qu'un Juge de

 12   fait aurait pu raisonnablement conclure que les éléments de preuves

 13   n'établissaient pas que des soldats de la Brigade de Viteska, placés sous

 14   les ordres de Mario Cerkez, avaient pris part aux crimes commis à Ahmici le

 15   16 avril 1993. Par conséquent, le deuxième et le troisième moyens d'appel

 16   de l'Accusation son rejetés.

 17   S'agissant des deuxième et quatrième moyens d'appel de Mario Cerkez,

 18   qui concerne sa responsabilité pénale. La Chambre d'appel constate que la

 19   Chambre de première instance a mis l'accent non seulement sur les

 20   déductions qui peuvent être faites de la participation de Mario Cerkez aux

 21   attaques contre Donja Veceriska et Stari Vitez, mais aussi sur sa

 22   participation à la deuxième réunion qui s'est tenue à l'hôtel Vitez le 15

 23   avril 1993. Bien que Mario Cerkez l'ait contestée, la Chambre d'appel

 24   estime qu'un Juge de fait aurait pu raisonnablement conclure à sa présence,

 25   à cette deuxième réunion.


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  1   Cependant, la Chambre de première instance n'a tiré aucune conclusion

  2   concernant l'objet des débats de cette deuxième réunion. Il a été dit que

  3   les Musulmans étaient censés attaquer le lendemain matin et l'on peut

  4   raisonnablement conclure que les Musulmans en question étaient des forces

  5   musulmanes et que le HVO devait les attaquer en premier. Par conséquent, la

  6   Chambre d'appel estime qu'un Juge de fait aurait pu raisonnablement

  7   conclure que la présence de Mario Cerkez à la deuxième réunion le 15 avril

  8   1993 n'établissait aucune intention de sa part de commettre un quelconque

  9   crime.

 10   S'agissant de la responsabilité de Mario Cerkez, pour les crimes liés à la

 11   détention, la Chambre d'appel conclut qu'aucun Juge de fait n'aurait pu

 12   raisonnablement conclure qu'il était pénalement responsable de

 13   l'emprisonnement et de la détention illégale de civils musulmans de Bosnie

 14   au centre vétérinaire de Vitez et au club d'échecs. Cependant, la Chambre

 15   d'appel estime que la Chambre de première instance a raisonnablement conclu

 16   que Mario Cerkez était pénalement responsable de l'emprisonnement et de la

 17   détention illégale de civils musulmans de Bosnie dans le cinéma de Vitez et

 18   le bâtiment du SDK à Vitez avant qu'il n'ordonne leur libération à la fin

 19   d'avril 1993.

 20   En outre, la Chambre d'appel estime que la Chambre de première

 21   instance a raisonnablement conclu que cette détention illégale était

 22   constitutive de persécution. Les civils détenus dans le bâtiment du SDK et

 23   le cinéma de Vitez étaient uniquement des Musulmans de Bosnie. Mario Cerkez

 24   savait que les détenus étaient Musulmans et que c'est pour cette raison

 25   même qu'ils étaient détenus. Il est évident qu'un groupe ethnique précis


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  1   est victime de discrimination lorsque tous les détenus appartiennent à ce

  2   groupe, alors que les gardiens appartiennent à un autre. En commettant

  3   pareils actes, en connaissance de cause, Mario Cerkez a manifesté

  4   l'intention d'exercer des discriminations systématiques à leur encontre.

  5   Toutes les autres déclarations de culpabilité prononcées par la Chambre de

  6   première instance contre Mario Cerkez sont annulées. Les motifs en sont

  7   exposés dans l'arrêt.

  8   J'en reviens à présent à la peine.

  9   Chacune des parties a interjeté appel de la peine prononcée à

 10   l'encontre de chaque accusé. Dario Kordic fait valoir que la Chambre de

 11   première instance a commis une erreur en ne prenant pas en considération

 12   des circonstances atténuantes importantes et soutient qu'il ne devrait pas

 13   être condamné à plus de quatre ans d'emprisonnement. Cependant, la Chambre

 14   d'appel est d'avis que la Chambre de première instance n'a pas outrepassé

 15   son pouvoir d'appréciation lorsqu'elle a fixé la peine de Dario Kordic. De

 16   même, la Chambre d'appel considère que l'Accusation n'a pas montré que la

 17   Chambre de première instance avait commis une erreur dans l'exercice de son

 18   pouvoir d'appréciation lorsqu'elle a fixé la peine. Par conséquent, le

 19   sixième moyen d'appel soulevé par Dario Kordic et le quatrième moyen

 20   d'appel soulevé par l'Accusation sont rejetés.

 21   S'agissant de la peine à infliger à Mario Cerkez, la Chambre d'appel

 22   a jugé qu'il était coupable sur la base de l'Article 7(1) du statut de chef

 23   2, persécution, un crime contre l'humanité; 29, emprisonnement, un crime

 24   contre l'humanité; et 30, détention illégale de civils, une infraction

 25   grave aux conventions de Genève. La Chambre d'appel a largement infirmé les


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  1   conclusions de la Chambre de première instance et a accueilli plusieurs

  2   moyens d'appel soulevés par Mario Cerkez annulant la majorité des

  3   déclarations de culpabilité prononcée à son encontre, ce qui l'amène à

  4   prononcer une nouvelle peine.

  5   A l'issue de ces ultimes délibérations le 2 décembre 2004, la Chambre

  6   d'appel est parvenue à la conclusion que la peine de Mario Cerkez devait

  7   être, après révision, d'une durée inférieure au temps qu'il avait déjà

  8   passé au quartier pénitentiaire des Nations Unies. Par conséquent, la

  9   Chambre d'appel avait l'obligation d'ordonner sa libération immédiate.

 10   Aucune raison de fond ne justifiant son maintien en détention. Point

 11   n'était besoin de se demander si sa libération pouvait se faire uniquement

 12   sur la base d'un jugement définitif. Le statut et le Règlement du Tribunal

 13   ne faisant ni l'un, ni l'autre une telle condition. Sa mise en liberté

 14   n'est ni une mise en liberté provisoire, ni une libération anticipée, mais

 15   une libération définitive. L'ordonnance de mise en liberté ayant

 16   impérativement dû être rendue avec effet immédiat, elle n'est pas motivée.

 17   Ces motifs sont exposés dans l'arrêt et en partie résumés plus haut.

 18   Pour fixer la peine, la Chambre d'appel a pris en compte les

 19   finalités de la peine, en particulier celles de prévention générale. Cette

 20   finalité importante vise à rassurer la société sur le fait que le respect

 21   du système juridique est garanti et a dissuadé celle-ci d'enfreindre ce

 22   système. La Chambre d'appel a aussi tenu compte de la grille générale des

 23   peines d'emprisonnement appliquée par les tribunaux de l'ex-Yougoslavie.

 24   La Chambre d'appel a aussi pris en considération les circonstances

 25   aggravantes suivantes : les fonctions de l'accusé qui était un commandant


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  1   du HVO de rang intermédiaire, le fait que parmi les victimes se trouvaient

  2   des jeunes, des personnes âgées, et des femmes, particulièrement

  3   vulnérables en temps de guerre.

  4   La Chambre d'appel a aussi pris en considération les circonstances

  5   atténuantes suivantes, à savoir, la reddition volontaire de l'accusé au

  6   Tribunal international, son casier judiciaire vierge, sa situation

  7   personnelle et familiale, et le fait que sa responsabilité pénale est

  8   engagée pour des actes commis durant une période relativement courte, à

  9   savoir, une quinzaine de jours.

 10   Je vais maintenant vous donner lecture du dispositif de l'arrêt dans

 11   son intégralité.

 12   Monsieur Kordic, veuillez vous lever.

 13   Par ces motifs, la Chambre d'appel, en application de l'Article 25 du

 14   statut et de l'Article 117 du Règlement, vu les écritures respectives des

 15   parties et leurs exposés aux audiences des 17, 18 et 19 mai 2004, siégeant

 16   en audience publique, s'agissant des moyens d'appel soulevés par

 17   l'Accusation, note que le premier moyen d'appel est sans objet, motif pris

 18   de ce qu'il a été retiré, rejette pour le surplus l'appel de l'Accusation.

 19   S'agissant des moyens d'appel soulevés par Dario Kordic, la Chambre

 20   d'appel rejette les premiers, deuxième, cinquième, et sixième moyens

 21   d'appel, accueille le moyen d'appel soulevé par Dario Kordic concernant sa

 22   responsabilité pour les crimes commis à Novi Travnik en octobre 1992, et

 23   annule les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la

 24   base de l'Article 7(1) du statut pour les chefs 38 et 39, accueille

 25   partiellement le moyen d'appel concernant sa responsabilité pour les crimes


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  1   commis à Busovaca en janvier 1993; annule les déclarations de culpabilité

  2   prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) du statut pour les

  3   chefs 10 et 12; et confirme les déclarations de culpabilité prononcées à

  4   son encontre sur la base de l'Article 7(1) du statut pour le chef 1,

  5   persécutions, un crime contre l'humanité; 3, attaque illicite de civils,

  6   une violation des lois ou coutumes de la guerre; 4, attaque illicite contre

  7   des biens de caractères civils, une violation des lois ou coutumes de la

  8   guerre; 7, assassinat, un crime contre l'humanité; 8, homicide

  9   intentionnel, une infraction grave aux conventions de Genève de 1949; 38,

 10   destruction sans motif que ne justifie pas les exigences militaires, une

 11   violation des lois ou coutumes de la guerre; et 39, pillage de biens

 12   publics ou privés, une violation des lois ou coutumes de la guerre.

 13   Accueille le moyen d'appel concernant sa responsabilité pour les crimes

 14   commis à Vitez et à Stari Vitez en avril 1993, et annule les déclarations

 15   de culpabilité prononcée à son encontre sur la base de l'Article 7(1) du

 16   statut pour les chefs 3, 4, 7, 8, 10, 12, 38, 39 et 43, concernant Stari

 17   Vitez.

 18   Accueille le moyen d'appel concernant sa responsabilité pour les

 19   crimes commis au centre vétérinaire et au club d'échecs de Vitez, et annule

 20   les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la base de

 21   l'Article 7(1) du statut pour les chefs 21 et 22.

 22   Accueille partiellement le moyen d'appel concernant sa responsabilité

 23   pour les crimes commis à Veceriska et Donja Veceriska en avril 1993, annule

 24   les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la base de

 25   l'Article 7(1) du statut pour les chefs 3, 7, 8, 10, 12, et 39; et confirme


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  1   les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la base de

  2   l'Article 7(1) du statut pour les chefs 1, persécutions, un crime contre

  3   l'humanité; 4, attaque illicite contre des biens de caractère civil, une

  4   violation des lois ou coutumes de la guerre; et 38, destruction sans motif

  5   que ne justifient pas les exigences militaires, une violation des lois ou

  6   coutumes de la guerre.

  7   Rejette le moyen d'appel concernant sa responsabilité pour les crimes

  8   commis à Ahmici en avril 1993, et confirme les déclarations de culpabilité

  9   prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) du statut pour les

 10   chefs 1, persécutions, un crime contre l'humanité; 3, attaque illicite de

 11   civils, une violation des lois ou coutumes de la guerre; 4, attaque

 12   illicite contre des biens de caractère civil, une violation des lois ou

 13   coutumes de la guerre; 7, assassinat, un crime contre l'humanité; 8,

 14   homicide intentionnel, une infraction grave aux conventions de Genève de

 15   1949; 10, actes inhumains, un crime contre l'humanité; 12, traitement

 16   inhumain, une infraction grave aux conventions de Genève de 1949; 38,

 17   destruction sans motif que ne justifient pas les exigences militaires, une

 18   violation des lois ou coutumes de la guerre; 39, pillage de biens publics

 19   ou privés, une violation des lois ou coutumes de la guerre; et 43,

 20   destruction ou endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion ou

 21   à l'enseignement, une violation des lois ou coutumes de la guerre.

 22   Accueille partiellement le moyen d'appel concernant sa responsabilité pour

 23   les crimes commis à Nadioci et Pirici en

 24   avril 1993. Annule les déclarations de culpabilité prononcées à son

 25   encontre sur la base de l'Article 7(1) du statut pour les chefs 4, 10, 12


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  1   et 38, et confirme les déclarations de culpabilité prononcées à son

  2   encontre sur la base de l'Article 7(1) du statut pour les chefs 1,

  3   persécutions, un crime contre l'humanité; 3, attaque illicite de civils,

  4   une violation des lois ou coutumes de la guerre; 7, assassinat, un crime

  5   contre l'humanité; et 8, homicide intentionnel, une infraction grave aux

  6   conventions de Genève de 1949.

  7   Accueille partiellement le moyen d'appel concernant sa responsabilité pour

  8   les crimes commis à Santici en avril 1993. Annule les déclarations de

  9   culpabilité prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) du

 10   statut, pour les chefs 10 et 12, et confirme les déclarations de

 11   culpabilité prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) du

 12   statut pour les chefs 1, persécutions, un crime contre l'humanité; 3,

 13   attaque illicite de civils, une violation des lois ou coutumes de la

 14   guerre; 4, attaque illicite contre des biens de caractère civil, une

 15   violation des lois ou coutumes de la guerre; 7, assassinat, un crime contre

 16   l'humanité; 8, homicide intentionnel, une infraction grave aux conventions

 17   de Genève de 1949; et 38, destruction sans motif que ne justifient pas les

 18   exigences militaires, une violation des lois ou coutumes de la guerre.

 19   Accueille partiellement le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant

 20   sa responsabilité pour les crimes commis à Rotilj, d'avril à septembre

 21   1993. Annule les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur

 22   la base de l'Article 7(1) du statut, pour les chefs 4 et 38, et confirme

 23   les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la base de

 24   l'Article 7(1) du statut, pour les chefs 1, persécutions, un crime contre

 25   l'humanité; 3, attaque illicite contre des civils, une violation des lois


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  1   ou coutumes de la guerre; 7, meurtre, un crime contre l'humanité; 8,

  2   homicide intentionnel, une infraction grave aux conventions de Genève de

  3   1949; 10, acte inhumain, un crime contre l'humanité; 12, traitement

  4   inhumain, une infraction grave aux conventions de Genève de 1949; et 39,

  5   pillage de biens publics ou privés, une violation des lois ou coutumes de

  6   la guerre; 21, emprisonnement, un crime contre l'humanité; 22, détention

  7   illégale de civils, une infraction grave aux conventions de Genève de 1949.

  8   Accueille partiellement le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant

  9   sa responsabilité pour les crimes commis à Han Ploca-Grahovci en juin 1993,

 10   annule les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la

 11   base de l'Article 7(1) du statut pour les chefs 10 et 12, et confirme les

 12   déclarations de culpabilité prononcées à son encontre, sur la base de

 13   l'Article 7(1) du statut pour les chefs 1, persécutions, un crime contre

 14   l'humanité; 7, meurtre, un crime contre l'humanité; 8, homicide

 15   intentionnel, une infraction grave aux conventions de Genève de 1949; 38,

 16   destruction sans motif non justifiée par des nécessités militaires, une

 17   violation des lois ou coutumes de la guerre; 39, pillage de biens publics

 18   ou privés, une violation des lois ou coutumes de la guerre; et 43,

 19   destruction ou endommagement délibéré d'édifices consacrés à la religion ou

 20   à l'enseignement, une violation des lois ou coutumes de la guerre.

 21   La Chambre d'appel rejette le moyen d'appel soulevé par l'appelant

 22   concernant sa responsabilité pour les crimes commis à Tulica en juin 1993,

 23   et confirme les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur

 24   la base de l'Article 7(1) du statut pour le chefs 1, persécutions, un crime

 25   contre l'humanité; 7, meurtre, un crime contre l'humanité; 8, homicide


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  1   intentionnel, une infraction grave aux conventions de Genève de 1949; 10,

  2   actes inhumains, un crime contre l'humanité; 12, traitement inhumain, une

  3   infraction grave aux conventions de Genève de 1949; 38, destruction sans

  4   motif que ne justifient pas les exigences militaires, une violation des

  5   lois ou coutumes de la guerre; et 39, pillage de biens publics ou privés,

  6   une violation des lois ou coutumes de la guerre.

  7   Accueille partiellement le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant

  8   sa responsabilité pour les crimes commis dans la ville de Kiseljak en avril

  9   1993, et annule les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre

 10   sur la base de l'Article 7(1) du statut pour les chefs 38, destruction sans

 11   motif que ne justifient pas les exigences militaires, une violation des

 12   lois ou coutumes de la guerre; et 39, pillage des biens publics ou privés,

 13   une violation des lois ou coutumes de la guerre.

 14   Rejette le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant sa

 15   responsabilité pour les crimes commis dans la municipalité de Kiseljak en

 16   juin 1993, à la caserne de Kiseljak d'avril à juin 1993, à Kaonik de

 17   janvier à mai 1993, au cinéma de Vitez en avril 1993, au bâtiment du SDK en

 18   avril 1993 et à l'école primaire de Dubravica en avril 1993, et confirme

 19   les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la base de

 20   l'Article 7(1) du statut pour les chefs 1, persécutions, un crime contre

 21   l'humanité; 21, emprisonnement, un crime contre l'humanité; et 22,

 22   détention illégale de civils, une infraction grave aux conventions de

 23   Genève de 1949.

 24   Accueille partiellement le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant

 25   sa responsabilité pour les crimes commis à Svinjarevo en avril 1993, annule


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  1   les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la base de

  2   l'Article 7(1) du statut pour le chef 38, et confirme les déclarations de

  3   culpabilité prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) du

  4   statut pour les chefs 1, persécutions, un crime contre l'humanité; et 38,

  5   destruction sans motif que ne justifient pas les exigences militaires, une

  6   violation des lois ou coutumes de la guerre.

  7   Rejette le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant sa

  8   responsabilité pour les crimes commis à Gomoinica en avril 1993, et

  9   confirme les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur la

 10   base de l'Article 7(1) du statut pour les chefs 1, persécutions, un crime

 11   contre l'humanité; 38, destruction sans motif que ne justifient pas les

 12   exigences militaires, une violation des lois aux coutumes de la guerre; et

 13   39, pillage des biens publics ou privés une violation des lois aux coutumes

 14   de la guerre.

 15   Rejette le moyen d'appel sous le fait par l'appelant concernant sa

 16   responsabilité pour les crimes commis à Ocehnici, Behrici, Gromiljak, Polje

 17   Visnjica, Visnjica et Gacice en avril 1993, et confirme les déclarations de

 18   culpabilité prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) du

 19   statut pour les chefs 1, persécutions, un crime contre l'humanité; et 38,

 20   destruction sans motif que ne justifient pas les exigences militaires, une

 21   violation des lois aux coutumes de la guerre.

 22   Accueille le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant sa

 23   responsabilité pour les crimes commis à Merdani en janvier 1993, et annule

 24   la déclaration de culpabilité prononcée à son encontre sur la base de

 25   l'Article 7(1) du statut pour le chef 38.


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  1   Accueille le moyen d'appel soulevé par l'appelant concernant sa

  2   responsabilité pour les crimes commis à Loncari en avril 1993, et annule la

  3   déclaration de culpabilité prononcée à son encontre sur la base de

  4   l'Article 7(1) du statut pour le chef 39; et annule toutes les autres

  5   déclarations de culpabilité prononcées à son encontre pour le chef 1.

  6   La Chambre d'appel confirme la peine de 25 années d'emprisonnement,

  7   le temps passé en détention préventive pour les besoins du procès étant à

  8   déduire de la durée totale de la peine aux termes de l'Article 101(C) du

  9   règlement, et ordonne en application de l'Article 103(C) et l'Article 107

 10   du règlement, que Dario Kordic reste sous la garde du Tribunal

 11   international jusqu'à ce que soient arrêtées les dispositions nécessaires

 12   pour son transfert vers l'état dans lequel il purgera sa peine.

 13   S'agissant des moyens d'appel soulevés par Mario Cerkez, la Chambre

 14   d'appel rejette le premier, troisième, et cinquième moyens d'appel soulevés

 15   par Mario Cerkez. Accueille le moyen d'appel soulevé par Mario Cerkez

 16   concernant sa responsabilité pour les crimes commis à Veceriska, Donja

 17   Veceriska et Stari Vitez en avril 1993, et annule les déclarations de

 18   culpabilité prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) et

 19   l'Article 7(3) du statut, pour les chefs 5, 6, 14, 15, 17, 19, 41, 42 et

 20   44.

 21   Accueille partiellement le moyen d'appel concernant sa responsabilité

 22   pour les crimes commis à Vitez en avril 1993, et annule les déclarations de

 23   culpabilité prononcées à son encontre sur la base de l'Article 7(1) et

 24   l'Article 7(3) du statut pour les chefs 5, 6, 14, 15, 17, 19, 33, 35, 41,

 25   42 et 44.


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  1   Accueille le moyen d'appel concernant sa responsabilité pour les

  2   crimes commis au club d'échecs et au centre vétérinaire de Vitez, et annule

  3   les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur les bases de

  4   l'Article 7(1) et l'Article 7(3) du statut pour les chefs 29, 30 et 31.

  5   Accueille partiellement le moyen d'appel concernant sa responsabilité

  6   pour les crimes commis dans le cinéma de Vitez et le bâtiment du SDK, et

  7   annule la déclaration de culpabilité prononcée à son encontre sur la base

  8   de l'Article 7(1) et l'Article 7(3) du statut pour le chef 31.

  9   Accueille partiellement le moyen d'appel concernant sa responsabilité

 10   pour les crimes commis dans le cinéma de Vitez et le bâtiment du SDK en

 11   avril 1993. Annule les déclarations de culpabilité prononcées à son

 12   encontre sur la base de l'Article 7(3) du statut pour les chefs 29 et 30,

 13   et confirme les déclarations de culpabilité prononcées à son encontre sur

 14   la base de l'Article 7(1) du statut pour les chefs 2, persécutions, un

 15   crime contre l'humanité; 29, emprisonnement, un crime contre l'humanité; et

 16   30, détention illégale de civils, une infraction grave au convention de

 17   Genève dès 1949.

 18   Annule toutes les autres déclarations de culpabilité prononcées pour

 19   le chef 2 et toutes les déclarations de culpabilité prononcées sur la base

 20   de l'Article 7(3) du statut.

 21   La Chambre d'appel fixe une nouvelle peine de 6 ans d'emprisonnement,

 22   le temps passé en détention préventive étant en déduire de la durée totale

 23   de la peine aux termes de l'Article 101(C) du règlement.

 24   Enfin, aux termes de l'Article 118 du règlement que l'arrêt est

 25   exécutoire immédiatement.


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  1   Monsieur Kordic, veuillez vous asseoir.

  2   Je demanderais à Mme l'Huissière de bien vouloir remettre un

  3   exemplaire de l'arrêt aux parties et aux Juges de la Chambre d'appel. Il

  4   s'agit du résumé du jugement. Je demande à ce qu'un exemplaire en B/C/S

  5   soit remis aux deux équipes de la Défense et à M. Dario Kordic.

  6   --- L'audience du Jugement en appel est ajournée à

  7   14 heures 2.

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