Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 22 avril 2004

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

5 [Difficultés techniques]

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- que j'entends le français que je

7 reçois en général la traduction anglaise. Il me semble que cette difficulté

8 technique a été résolue. Je souhaite reprendre. Je vais vous demander,

9 Madame la Greffière, de citer l'affaire, s'il vous plaît.

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de l'affaire IT-00-39-T,

11 l'Accusation contre Momcilo Krajisnik.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

13 Maître Loukas, vous étiez debout. Mais avant de vous donner la parole, je

14 souhaite passer à huis clos partiel pendant un bref laps de temps.

15 [Audience à huis clos partiel]

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20 [Audience publique]

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Eu égard à

22 l'ordre de comparution du témoin suivant Monsieur le Président, comme vous

23 le savez je suis au milieu de mon contre-interrogatoire de M. Hasanovic, et

24 j'ai cru comprendre que le témoin suivant est KRAJ 461, on ne savait pas

25 s'il allait solliciter des mesures de protection.

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1 La situation est comme suit, j'ai reçu quelques éléments de preuve

2 complémentaires à propos de ce témoin après l'audience d'hier, et quelques

3 éléments complémentaires le jour précédent également à propos de ce témoin.

4 Il s'agit là d'un extrait du compte rendu d'audience d'un témoignage

5 précédent.

6 Cela m'a été donné par M. Harmon. J'ai remarqué hier en relisant ces

7 documents que je n'avais reçu le contre-interrogatoire, et je n'ai qu'un

8 jour d'extrait du compte rendu d'audience et je n'ai pas eu le témoignage

9 du lendemain.

10 M. Harmon m'a fourni l'extrait du compte rendu d'audience complémentaire ce

11 matin, je n'ai pas vraiment eu le temps de relire ceci. Je ne pense pas que

12 le contre-interrogatoire de ce témoin dure très longtemps, mais je souhaite

13 pouvoir relire cet extrait du compte rendu avant de le contre-interroger.

14 Pour ce qui est de l'ordre de comparution de témoin, des témoins suivants

15 je comprends que ce témoin-là, le 039 sollicite des mesures de protection,

16 lorsque nous aurons terminé l'interrogatoire principal du premier témoin et

17 si l'on peut terminer l'interrogatoire principal du deuxième témoin, et si

18 vous voulez bien lorsque ceci sera terminé, si vous voulez bien me donner

19 l'occasion de relire cet extrait du compte rendu d'audience, s'il vous

20 plaît.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur Tieger avez-vous des

22 objections à soulever eu égard à la proposition de Maître Loukas ?

23 M. TIEGER : [interprétation] Juste un point de clarification rapide à

24 propos du compte rendu d'audience, et je n'ai pas l'intention de montrer du

25 doigt différents éléments, mais je souhaite préciser les choses. Il ne

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1 s'agit pas d'éléments de preuve complémentaires, il s'agit d'éléments qui

2 ont été communiqués à l'origine au mois d'avril de l'an 2003. Je souhaite

3 noter, qu'ils sont également disponibles sur Internet.

4 Néanmoins c'est exact c'est ainsi que j'ai compris les choses, les éléments

5 qui ont été communiqués à nouveau sont des éléments qui n'intègrent pas

6 l'extrait auquel a fait référence Me Loukas ce matin, que nous lui avons

7 remis ce matin.

8 Pour répondre à la question de la Chambre, je comprends que le deuxième

9 témoin que l'on m'a demandé, c'est pour le deuxième témoin que l'on m'a

10 demandé de relire les éléments de son témoignage. Un témoignage précédent

11 et ce témoin aurait été disponible conformément à la liste initiale que

12 nous avions eue.

13 Il aurait pu être entendu cet après-midi, il sera prêt et étant donné ce

14 nouveau projet, je ne sais pas s'il pourra être entendu après les questions

15 supplémentaires posées au témoin qui ont été prévues dans ce nouveau

16 calendrier. Peut-être que nous avons besoin d'un intervalle à cet égard. Un

17 laps de temps nécessaire.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pourriez-vous prendre toutes les

19 mesures nécessaires qui favoriseraient votre interrogatoire principal. Je

20 comprends fort bien que nous avions prévu d'entendre le témoin cet après-

21 midi, mais si vous pouvez faire en sorte qu'il puisse se rendre disponible

22 le plus rapidement possible.

23 Mme LOUKAS : [interprétation] Juste une bonne clarification par rapport aux

24 propos de M. Tieger. Il a expliqué que cet extrait du compte rendu

25 d'audience était disponible sur Internet, mais il se trouve que certaines

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1 parties expurgées n'étaient pas disponibles sur Internet.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Écoutez je pense que ce genre de

3 question se pose de façon assez régulière, je souhaite maintenant

4 poursuivre. Nous avons un programme très chargé et ceci ne nous permet

5 d'aller dans ce sens. Nous aimerions pouvoir terminer ce témoin

6 aujourd'hui.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, la Chambre est tout à fait

9 disposée à entendre ce genre de questions, et nous sommes disposés à faire

10 les réajustements nécessaires lorsque nous reviendrons d'une semaine

11 d'interruption. Cela ne signifie pas pour autant que cela ne nous intéresse

12 pas mais ce n'était pas le bon moment.

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Juste un deuxième point que je souhaite

14 porter à votre attention, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

16 Mme LOUKAS : [interprétation] Par rapport à ce que M. Tieger vient de dire,

17 je souhaite indiquer que cela n'était pas le cas pour le témoin en

18 question, le deuxième témoin nous allions l'entendre cet après midi, même

19 si le programme ou l'ordre de comparution des témoins était changé.

20 Parce que j'aurais besoin d'une heure ou d'une heure et quart pour un

21 contre-interrogatoire --

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai simplement demandé à M. Tieger

23 d'être là, le plus rapidement possible et s'il ne peut pas venir à ce

24 moment-là, nous verrons à qui incombe la faute. Si cela peut être d'une

25 utilité quelconque pour les Juges de la Chambre. Je comprends fort bien que

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1 vous n'êtes pas d'accord, avec l'heure de comparution du témoin.

2 Je crois que nous pouvons poursuivre maintenant et reprendre le contre-

3 interrogatoire de M. Hasanovic.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Bien sûr.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier je vous prie de bien

6 vouloir faire entrer le témoin dans le prétoire.

7 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Hasanovic. Est-ce que

9 vous m'entendez dans une langue que vous comprenez ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Puis-je vous rappeler

12 que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous avez

13 faite au début de votre témoignage. Me Loukas va maintenant poursuivre son

14 contre-interrogatoire.

15 Maître Loukas, je vous en prie.

16 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

17 LE TÉMOIN : RESID HASANOVIC [Reprise]

18 [Le témoin répond par l'interprète]

19 Contre-interrogatoire par Mme Loukas : [Suite]

20 Q. [interprétation] Monsieur Hasanovic, vous vous souviendrez que lorsque

21 nous avons levé l'audience hier, je vous avais posé une question sur votre

22 prise de conscience sur certains éléments contextuels. Vous souvenez-vous

23 de cela ?

24 R. Oui.

25 Q. Monsieur Hasanovic, saviez-vous que vers le 9 mai 1992, que des Serbes

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1 de Srebrenica avaient quitté cet endroit pour venir à Bratunac ? J'entends

2 par là des Serbes civils, ainsi que, la même journée, des Musulmans de

3 Bratunac ont quitté la ville pour se rendre à Srebrenica. Savez-vous qu'il

4 y avait un tel mouvement de la population ?

5 R. Je n'entends pas très bien avec mes casques.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous entendez mieux

7 maintenant, Monsieur Hasanovic ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, j'entends beaucoup mieux.

9 Mme LOUKAS : [interprétation]

10 Q. Je suppose, Monsieur Hasanovic, que vous n'avez pas entendu la dernière

11 question à cause de cette difficulté technique ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Monsieur Hasanovic, vous vous souviendrez qu'avant de lever l'audience

14 hier, je vous avais posé un certain nombre de questions sur des éléments

15 contextuels eu égard à Bratunac. Vous souvenez-vous de cela ?

16 R. Oui.

17 Q. Je souhaite simplement vous poser la question suivante : saviez-vous

18 que vers le 9 mai 1992 que des civils serbes de Srebrenica avaient quitté

19 la ville pour se rendre à Bratunac, et que ce même jour, des Musulmans de

20 Bratunac avaient quitté la ville pour se rendre à Srebrenica ? Saviez-vous

21 qu'il y avait de tels mouvements de population ?

22 R. Non. Je ne savais pas cela. Je ne savais qu'il y avait de tels

23 déplacements dans ces deux sens.

24 Q. Saviez-vous que Naser Oric avait été nommé commandant des forces

25 musulmanes dans cette région ?

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1 R. Non.

2 Q. Monsieur Hasanovic, avant votre témoignage devant cette Chambre, vous

3 avez eu une séance de récolement le 18 avril en présence de l'Accusation,

4 et avant de venir témoigner devant la Chambre hier, vous avez eu une séance

5 de récolement avec les membres de l'Accusation. Au cours de cette séance,

6 vous avez précisé à la Chambre que cela avait duré, pourriez-vous rappeler

7 à la Chambre combien du temps cette séance de récolement a duré ?

8 R. Oui. Cette séance a duré une journée entière; plusieurs heures le

9 premier jour, et une heure le lendemain.

10 Q. Vous parlez de votre séance de préparation avec l'Accusation avant de

11 venir faire votre déposition hier; c'est cela que vous voulez dire ?

12 R. Oui.

13 Q. Combien du temps ceci a-t-elle durée ?

14 R. Cela a duré cinq à six heures en tout.

15 Q. Un des points que vous avez indiqué lors de cette séance de récolement

16 est le point suivant, et j'aimerais confirmer ceci avec vous. Je vais vous

17 lire ceci lentement pour faciliter le travail des interprètes et vous

18 faciliter les tâches également, Monsieur Hasanovic.

19 M. MARGETTS : [interprétation] Nous avons un exemplaire en B/C/S des notes

20 prises pendant la séance de récolement si cela peut aider le témoin.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, je ne sais pas si vous

22 souhaitez utiliser ceci ?

23 Mme LOUKAS : [interprétation] Je n'avais l'intention d'aborder ou de parler

24 de toutes ces notes prises pendant la séance de récolement. Cela serait

25 très long.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si cela existe en B/C/S, si le témoin a

2 besoin de regarder ces notes, je crois qu'il serait tout à fait logique

3 qu'on mette ceci à sa disposition.

4 Poursuivez, je vous prie.

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.

6 Pourrions-nous, s'il vous plaît, remettre au témoin une version en B/C/S ?

7 Q. Monsieur Hasanovic, je pense que vous avez reçu les notes de la séance

8 de préparation ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Si vous examinez maintenant le paragraphe 3 de ce document, des notes

11 de la séance de préparation de cinq pages, vous allez voir que vous y dites

12 : "Par la suite, lors de notre détention dans l'école Vuk Karadzic, les

13 Serbes ont dit qu'ils se battaient contre ces paramilitaires, mais qu'ils

14 n'avaient pas de succès. D'autres pensaient que tout allait se mettre en

15 place une fois les militaires partis de la région. Les serbes ont dit que

16 tout allait dans l'ordre dès que les autorités serbes allaient expulser ces

17 gens qui étaient payés ils ne savaient par qui, et qui ont reçu des ordres

18 de venir, encore une fois, ils ne savaient de là part de qui." Est-ce que

19 vous voyez cela ?

20 R. Oui.

21 Q. C'était une question dont vous avez traité lors de votre séance de

22 préparation avec le bureau du Procureur. Bien sûr, ce que vous dites là est

23 exact, Monsieur Hasanovic ?

24 R. Oui.

25 Q. Je souhaitais simplement que l'on confirme cela puisque ceci n'a pas

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1 été clarifié lors de votre interrogatoire principal.

2 Une autre fois, ce qui m'intéresse, Monsieur Hasanovic, et le point suivant

3 : dans votre déclaration du 7 avril 2000, à la page 5

4 --

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Encore une fois peut-être nous pourrions

6 permettre à M. Hasanovic de recevoir un exemplaire en B/C/S avant que je

7 pose ma question.

8 Q. Il se trouve devant vous maintenant, Monsieur Hasanovic. Veuillez

9 examiner le paragraphe 24. Est-ce que vous l'avez devant vous, Monsieur

10 Hasanovic ?

11 R. Oui.

12 Q. Vous allez constater que vous y dites : "Le jour après le partage au

13 sein du département du poste de Police, les Serbes portaient leur propre

14 uniforme serbe avec des insignes de l'état serbe." Est-ce que vous voyez

15 cela ?

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce que vous pourriez me décrire cet uniforme ?

18 R. Oui. Lorsque la police s'est divisée, les Serbes ont gardé les mêmes

19 uniformes, mais les nouveaux qui sont entrés, qui étaient de nombreux

20 simples citoyens sont devenus policiers, et ils portaient les mêmes

21 uniformes, mais avec ces uniformes ils portaient des insignes de la police

22 serbe.

23 Q. Quelle était la taille de ces insignes ?

24 R. Il s'agissait surtout des insignes ou des emblèmes que l'on portait,

25 soit sur la manche ou sur la poche.

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1 Q. Je vais reposer ma question. Quelle était la taille ?

2 R. Je ne peux pas estimer avec exactitude, mais disons trois centimètres

3 sur deux.

4 Q. A quoi ressemble cela ?

5 R. Je pense que ceci représentait le drapeau serbe, ou plutôt de la région

6 de la Krajina serbe.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je intervenir. Est-ce que vous

8 pourriez montrer avec vos doigts quelle était la taille à votre avis pour

9 nous permettre d'avoir une meilleure impression ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est à peu près large comme cela et haut

11 comme cela.

12 Mme LOUKAS : [interprétation]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, d'après ce qu'indique le témoin,

14 c'est beaucoup plus grand que trois centimètres sur deux. La Chambre prend

15 note du fait que c'était plutôt sept centimètres sur dix, et non pas deux

16 sur trois. Est-ce que j'avais du mal à comprendre comment les insignes

17 pouvaient être aussi petit.

18 Veuillez poursuivre.

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci.

20 Q. Où se trouvaient ces insignes ?

21 R. Ces insignes se trouvaient sur la manche de l'uniforme.

22 Q. Où exactement ?

23 R. Je pense que c'était du côté gauche de l'uniforme.

24 Q. Quelle en était la couleur ?

25 R. Cet insigne était bleu et blanc, il y avait une troisième couleur dont

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1 je ne me souviens plus. Je pense qu'ils portaient l'insigne de la région de

2 la Krajina serbe, autour de Birac, ce qui désignait la région serbe qu'ils

3 avaient proclamé dans cette région.

4 Q. Monsieur Hasanovic, nous allons passer à un autre sujet. A la page 6,

5 paragraphe 31, vous voyez ce paragraphe, Monsieur Hasanovic ?

6 R. Oui. Je vois le paragraphe 31, mais il figure à la page 4.

7 Q. En B/C/S, cela doit être à la page 4 ?

8 R. Oui.

9 Q. Dans le paragraphe 31, vous dites : "L'unité de la Défense territoriale

10 n'a jamais eu d'armes. Mon frère et les autres ont essayé d'en obtenir,

11 mais nous n'y avons pas réussi. Nous avons réussi à obtenir quelques fusils

12 de chasse des familles, mais jamais de vraies armes."

13 Est-ce que vous voyez ce paragraphe ?

14 R. Oui.

15 Q. Auprès de qui votre frère et les autres ont-il essayé d'obtenir des

16 armes ?

17 R. Nous avons essayé de créer une équipe qui en cas d'attaque à notre

18 encontre pouvait nous descendre. Cependant --

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hasanovic, je vais vous

20 interrompre. Veuillez écoutez attentivement la question qui était de savoir

21 : auprès de qui vous avez essayé d'obtenir les armes. La question ne

22 portait pas sur les objectifs de cela, mais sur la question de savoir

23 auprès de qui vous avez essayé de les obtenir. Veuillez écouter

24 attentivement et veuillez répondre à la question.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Nous avons essayé cela auprès des

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1 autorités municipales musulmanes à Bratunac.

2 Mme LOUKAS : [interprétation]

3 Q. Les autorités musulmanes de Bratunac auprès de quelles vous avez essayé

4 d'obtenir ces armes étaient constituées de qui ?

5 R. Il s'agissait des représentants du parti SDA avec le président de la

6 municipalité.

7 Q. Qui était cette personne, Monsieur Hasanovic ?

8 R. Le président de la municipalité était Nijaz Durakovic. Le président du

9 parti SDA était Dzevad Gusic.

10 Q. Dans quel but avez-vous essayé d'obtenir ces armes ?

11 R. Je ne comprends pas cette question ?

12 Q. Vous avez essayé d'obtenir les armes, pourquoi ?

13 R. Personnellement, j'essayais de les obtenir compte tenu de l'ambiance et

14 de tout ce qui se passait autour de nous. Nous avons considéré qu'il serait

15 utile de les avoir en cas d'une attaque contre nous pour que nous puissions

16 nous défendre.

17 Q. Quand avez-vous essayé d'obtenir les armes ?

18 R. Lorsque le conflit a éclaté en Croatie.

19 Q. Ceci s'est passé autour de quelle date, Monsieur Hasanovic ?

20 R. Je ne peux pas vous donner une date exacte, mais disons que c'était au

21 début du mois d'avril.

22 Q. Lorsque vous dites que le conflit en Croatie a éclaté ou s'est

23 intensifié, bien sûr, le conflit a commencé en Croatie en 1991. De quoi

24 parlez-vous lorsque vous parlez de cette intensification ?

25 R. Je parle du fait qu'on ne voyait pas quand le conflit allait se

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1 terminer. On ne voyait plus la fin du conflit.

2 Q. La population au sein de votre communauté craignait que le conflit qui

3 se déroulait près de chez vous en Croatie ne se réponde pas jusqu'à

4 l'endroit où vous étiez vous-même ?

5 R. Oui.

6 Q. Combien de personnes dans votre région, dans la région de Suha, avaient

7 des armes ?

8 R. Je ne connais pas le nombre exact. Il y avait des fusils de chasse. Je

9 ne connais pas les détails précis, car même si les gens avaient des armes,

10 ils n'allaient pas le dire publiquement. Ils n'osaient pas les montrer.

11 Q. De toute façon, compte tenu de vos fonctions, de votre position au sein

12 du SDA, vous saviez que les Musulmans avaient des armes ?

13 R. En ce qui concerne ma position au sein du SDA, elle était très faible,

14 car je travaillais toujours dans la première relève. Je n'ai jamais assisté

15 à des sessions du parti. Je savais qu'un certain nombre de personnes ont

16 reçu des armes, en tant que réservistes. Ils ont reçu cela de la part du

17 poste de Police de Bratunac. Ces armes avaient été distribuées à la fois

18 aux Serbes et aux Musulmans et ces personnes les tenaient chez elles.

19 Q. A quel moment cette distribution a-t-elle eu lieu, Monsieur Hasanovic ?

20 R. Je pense que ceci s'est passé en avril.

21 Q. Comme vous l'avez dit, ceci a été distribué à la fois aux Serbes et aux

22 Musulmans ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce que vous vous souvenez approximativement du nombre exact des

25 armes distribuées ?

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1 R. Non.

2 Q. Monsieur Hasanovic, revenons maintenant à votre déposition d'hier. Vous

3 avez décrit les événements du 10 mai. Je pense que vous avez dit que vous

4 aviez dit à votre femme que vous deviez tenir un profil bas. Ensuite, vous

5 vous êtes caché dans la forêt. Est-ce que vous vous souvenez de cela,

6 Monsieur Hasanovic ?

7 R. Oui.

8 Q. Ensuite, vous avez décrit que vous avez rejoint votre famille un peu

9 plus tard. Vous avez retrouvé votre femme et vos enfants et avec eux, vous

10 avez commencé à marcher vers la ville. Est-ce que vous vous souvenez de

11 cette partie de votre déposition ?

12 R. Oui.

13 Q. Le Procureur vous a demandé : Est-ce que vous pouvez décrire les

14 soldats qui marchaient avec les gens ? Vous avez dit que les soldats

15 portaient, pour la plupart, les uniformes de l'armée yougoslave. Est-ce que

16 vous vous souvenez de cela ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous avez dit que, "pour la plupart, il s'agissait des voisins de

19 Bratunac."

20 R. Oui.

21 Q. A quoi ressemblaient les uniformes, Monsieur Hasanovic ?

22 R. Il s'agissait d'un uniforme militaire, un uniforme d'été. Je suppose

23 qu'il s'agissait de l'uniforme qui existait à Bratunac dans le département

24 militaire de Bratunac. Je suppose qu'il s'agissait des uniformes de réserve

25 qui étaient gardés là.

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1 Q. Monsieur Hasanovic, je suppose qu'à un moment donné, vous avez fait

2 votre service militaire ?

3 R. Oui.

4 Q. En fait, lorsque vous faites votre service militaire, une fois ce

5 service terminé et une fois qu'ils aient enregistré que vous l'avez

6 terminé, vous commencez à avoir le statut de réserviste. Est-ce exact ?

7 R. Non. D'après les règles militaires, tous ceux qui ont fait leur service

8 militaire faisaient partie des forces de réserve en cas de guerre.

9 Cependant, je n'ai jamais été convoqué et je n'ai jamais participé à aucun

10 exercice militaire.

11 Q. Oui, effectivement. D'après le règlement militaire, tous ceux qui ont

12 fait leur service militaire font partie des forces de réserve. Vous êtes

13 d'accord avec cette affirmation ?

14 R. Oui.

15 Q. Lorsque quelqu'un faisait partie des forces de réserve, à l'époque, la

16 personne avait un uniforme et des bottes. Etes-vous d'accord avec cela,

17 Monsieur Hasanovic ?

18 R. Oui.

19 Q. En ce qui concerne votre déposition d'hier, à un moment donné, vous

20 avez dit que, lorsque vous vous êtes approché du stade, vous avez vu une

21 voiture. Vous l'avez reconnue, cette voiture, et vous avez vu deux soldats

22 qui sortaient de la voiture dont l'un était Krke. Est-ce que vous vous

23 souvenez de cette partie de votre déposition ?

24 R. Oui.

25 Q. Comment était-il vêtu ?

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1 R. Krke portait un uniforme noir et les deux autres soldats portaient des

2 uniformes militaires.

3 Q. Lorsque vous dites "uniforme militaire", est-ce que vous pourriez

4 décrire ce que vous voulez dire par là ?

5 R. Je parle de l'uniforme militaire des réservistes de l'armée ou

6 l'uniforme de l'ancienne armée populaire yougoslave.

7 Q. En ce qui concerne, encore une fois, ce que vous avez dit hier au sujet

8 de Branko Jovanovic, l'homme qui vous a blessé personnellement, est-ce que

9 vous vous souvenez de votre déposition au sujet de cet homme ?

10 R. Oui.

11 Q. Vous avez dit qu'il portait un uniforme militaire. Est-ce que vous

12 pourriez nous le décrire ?

13 R. Oui. Il s'agissait du même uniforme que celui que j'ai déjà décrit.

14 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, avec votre permission, je

15 souhaite clarifier ce point.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y, Monsieur Hasanovic.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense, personnellement, que cet uniforme

18 appartenait à tous les citoyens de l'ex-Yougoslavie et à l'armée jusqu'au

19 moment où la République de Bosnie-Herzégovine a organisé le référendum

20 portant sur l'indépendance et la sécession de l'Yougoslavie. Ceci a été

21 effectué. Personnellement, j'ai assisté à ces référendums et les citoyens

22 de la Bosnie-Herzégovine ont opté, majoritairement, pour l'indépendance du

23 pays, ce qui a été réalisé.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous interrompre. Est-ce que

25 j'ai bien compris si je dis qu'il s'agissait là des uniformes que tout le

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1 monde avait jusqu'au moment du référendum lors duquel les gens ont opté

2 pour l'indépendance ? Ai-je bien compris vos propos ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je pense que cet uniforme nous

4 appartenait et que tous les citoyens le reconnaissaient en tant que

5 l'uniforme de leur armée jusqu'au moment où la Bosnie-Herzégovine s'est

6 séparée de l'Yougoslavie.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Madame Loukas.

8 Mme LOUKAS : [interprétation]

9 Q. Monsieur Hasanovic, en ce qui concerne ces uniformes, je vous ai déjà

10 posé des questions concernant les réservistes. Bien sûr, tous ceux qui

11 faisaient partie des forces de réserve avaient un uniforme. Est-ce exact ?

12 R. Oui. Ils avaient tous un uniforme. Cela dit, ces uniformes étaient

13 gardés dans un entrepôt militaire dans la municipalité de Bratunac.

14 Q. Monsieur Hasanovic, il était souvent permis aux gens de garder leurs

15 uniformes chez eux.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, il ne s'agit pas d'une

17 question, il s'agit d'une affirmation de votre part.

18 Mme LOUKAS : [interprétation] Pardon ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites : "M. Hasanovic, la situation

20 est --" Il ne s'agit pas là d'une question.

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Il s'agit d'une affirmation et j'invite le

22 témoin à exprimer son accord.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

24 Madame Loukas vous a demandé, si souvent les gens pouvaient garder leurs

25 uniformes chez eux.

Page 2467

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'était le cas, mais c'était la

2 période pendant laquelle souvent on était appelé à assister à des exercices

3 militaires de sept à quinze jours. D'après mes connaissances, par la suite

4 les uniformes étaient remis à l'entrepôt.

5 Mme LOUKAS : [interprétation]

6 Q. Monsieur Hasanovic, en ce qui concerne cela, je pense que vous avez dit

7 que vous n'avez pas de connaissance directe de la situation liée aux

8 réservistes, puisque vous avez dit que vous n'en faisiez pas partie. Est-ce

9 exact ?

10 R. Oui.

11 Q. Pour autant que vous le sachiez, peut-être qu'effectivement les gens

12 pouvaient garder leurs uniformes, les gens qui faisaient partie des forces

13 de réserve pouvaient garder leurs uniformes chez eux.

14 R. Je ne sais rien au sujet de cela.

15 Q. En ce qui concerne la question que je vous ai posée portant sur

16 Jovanovic : Comment était-il vêtu ?

17 R. Il portait un uniforme vert olive, un uniforme militaire. Je pense que

18 je l'ai déjà décrit plusieurs fois, c'était l'uniforme qui appartenait le

19 plus probablement aux forces de réserve de la municipalité de Bratunac.

20 Q. Oui. Monsieur Hasanovic, vous avez dit également dans votre déposition,

21 que vous êtes allé à l'école Vuk Karadzic, et vous avez dit que trois

22 soldats torturaient et tuaient les gens, alors que d'autres gardes étaient

23 dans le couloir ou devant l'entrée du bâtiment de l'école. On vous a posé

24 la question suivante : "Est-ce qu'il s'agissait des mêmes soldats que ceux

25 que vous avez décrits préalablement, à savoir, des soldats locaux ?"

Page 2468

1 Ceci figure à la page 21 du compte rendu d'hier.

2 Vous avez répondu : "Ceux qui étaient à l'entrée et devant l'entrée

3 étaient les soldats de la ville de Bratunac, et de la république

4 limitrophe, alors que ceux qui étaient à l'école étaient des soldats qui se

5 sont identifiés en tant que les hommes d'Arkan. Ils nous ont dit qu'ils

6 recevaient de l'argent pour faire ce qu'ils ont fait. Ils nous ont dit

7 également qu'ils allaient gagner plus s'ils tuaient plus de gens."

8 Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

9 R. Oui.

10 Q. Ces soldats, qui étaient à l'entrée et devant l'entrée, comment

11 étaient-ils vêtus ?

12 R. Ils portaient des uniformes militaires que nous avons décrits en tant

13 qu'uniformes des forces de réserve, et ils portaient des fusils même

14 parfois des fusils semi automatiques.

15 Q. Les personnes qui se sont identifiés en tant qu'hommes d'Arkan, comment

16 étaient-ils vêtus ?

17 R. Ils avaient surtout des pistolets et je n'ai pas vu de fusils chez eux.

18 Q. Quelle était leur tenue vestimentaire, Monsieur Hasanovic ?

19 R. Un soldat, que j'ai décrit comme étant le soldat numéro 1, le soldat

20 qui a commis les meurtres, portait en fait une combinaison olive, couleur

21 olive. Il n'avait pas de couvre-chef et il avait une boucle d'oreille à

22 l'oreille. L'autre soldat que j'ai déjà décrit portait un uniforme d'été,

23 cela je l'ai dit en maintes reprises.

24 Q. Merci, Monsieur Hasanovic. A la suite de votre déposition d'hier, vous

25 nous avez indiqué que vous avez été amené dans des camions à Pale. Vous

Page 2469

1 souvenez-vous de cela ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous nous avez dit que vous aviez été accompagné des soldats de la

4 Republika Srpska, qui étaient habillés ou qui portaient des uniformes

5 militaires. Vous souvenez-vous avoir indiqué cela ?

6 R. Oui.

7 Q. Pouvez-vous me fournir une description de cet uniforme ?

8 R. Je pense que nous en avons déjà beaucoup parlé de cet uniforme. Il

9 s'agissait d'uniformes couleur olive, et il y avait également des uniformes

10 de camouflage.

11 Q. C'est tout ?

12 R. Oui.

13 Q. Monsieur Hasanovic, lorsque vous avez commencé à présenter votre

14 déposition hier, le Président vous a demandé de prononcer une déclaration

15 solennelle, vous en souvenez-vous ?

16 R. Oui.

17 Q. Vous vous souvenez certainement que cette déclaration solennelle

18 consistait à dire que vous diriez la vérité, toute la vérité et rien que la

19 vérité ?

20 R. Oui.

21 Q. Monsieur Hasanovic, vous êtes conscient du fait que ce Tribunal a été

22 établi pour entendre toute la vérité, et non pas une vérité qui

23 conviendrait à l'une ou l'autre partie ?

24 R. Oui.

25 Q. Vous savez que ce Tribunal prend très au sérieux la déclaration

Page 2470

1 solennelle ?

2 R. Oui.

3 Q. Lorsque je vous ai posé mes questions hier : "Il avait été question

4 d'une autre personne que vous avez mentionnée, par exemple, Hasib

5 Hasanovic." Je vous ai demandé : Comment il était mort ? Vous m'avez

6 répondu : "J'ai entendu dire que Hasib Hasanovic, qui était le principal de

7 l'établissement secondaire, avait été tué. J'ai entendu dire qu'il avait

8 été tué, toutefois je n'en ai pas été témoin moi-même. Lors de la deuxième

9 déposition, que j'ai fournie au bureau du Procureur, je ne l'ai pas

10 mentionné parce que je n'avais pas obtenu de plus amples renseignements à

11 son sujet, je n'étais pas véritablement sûr s'il avait été tué ou non."

12 Ensuite, je vous ai demandé de nous dire qui vous avait dit qu'il avait été

13 tué. "Ce sont des personnes qui se trouvaient avec moi dans le camp, qui

14 avaient été échangées soit à Visoko, soit à l'hôpital de Zenica. Ils m'ont

15 dit qu'ils avaient entendu dire que le principal de l'établissement, Hasib,

16 avait été tué."

17 Je vous ai demandé : "Monsieur Hasanovic, est-ce que vous connaissiez M.

18 Hasib Hasanovic ?" Vous m'avez dit : "Je le connaissais mais je n'avais pas

19 de contacts avec lui, je savais qu'il était principal d'établissement

20 d'enseignement, j'en avais entendu parler." Ensuite, je vous ai demandé :

21 "Bien sûr, je pense que vous vous rendez compte que Monsieur Hasanovic,

22 dont vous avez entendu parler, à travers d'autres personnes, aurait pu

23 faire l'objet d'erreur. Vous comprenez cela ?" Vous m'avez dit : "Oui, je

24 le comprends tout à fait." J'ai dit : "Parce qu'apparemment Monsieur --

25 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande au conseil de la Défense de ralentir.

Page 2471

1 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, je m'excuse auprès des interprètes,

2 Monsieur le Président. Je pense effectivement que je vais un peu trop

3 rapidement.

4 Q. "Parce qu'apparemment M. Hasib Hasanovic est vivant, se porte bien,

5 réside et travaille à Tuzla. Il est inspecteur de l'éducation." C'était ma

6 question. Votre réponse a

7 été : "Oui, j'en ai entendu parler. J'en ai entendu parler après que j'ai

8 fourni ma déposition au bureau du Procureur."

9 Vous vous souvenez de ces questions et de ces réponses hier, Monsieur

10 Hasanovic ?

11 R. Oui.

12 Q. Monsieur Hasanovic, vous n'avez pas indiqué à la Chambre que M.

13 Hasanovic était toujours vivant et, par conséquent, que M. Hasanovic

14 n'était pas mort jusqu'au moment où vous vous êtes rendu compte que je

15 savais qu'il était vivant. C'est exact, n'est-ce pas ?

16 R. Oui. Je ne l'ai pas dit, et de toute façon, personne ne m'a posé la

17 question. Dans la déposition que j'ai fournie aux enquêteurs en Allemagne,

18 je n'avais pas mentionné Hasib, et je n'étais pas absolument sûr et certain

19 qu'il était mort. Je pensais qu'il n'était pas véritablement nécessaire

20 d'en parler.

21 Q. Monsieur Hasanovic, lorsque je vous ai posé la question suivante :

22 Comment est-il mort ? Vous auriez pu dire : En fait, il n'est pas mort. Je

23 l'ai appris par la suite. Je l'ai appris après avoir fourni ma deuxième

24 déposition.

25 Mais ce n'est pas ce que vous avez fait, Monsieur Hasanovic ?

Page 2472

1 R. Je ne me souviens pas avoir dû répondre à cette question et je ne me

2 souviens pas de ces réponses.

3 Q. Vous ne vous souvenez pas hier que je vous ai posé la question :

4 "Comment est-il décédé ?"

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais donner au témoin lecture du

6 compte rendu d'audience.

7 Monsieur Hasanovic, hier Me Loukas vous a posé la question suivante :

8 "Cette autre personne, par exemple, une autre personne que vous avez

9 mentionnée, quelque Hasib Hasanovic." Vous avez répondu : "Oui." Ensuite,

10 Me Loukas vous a demandé : "Comment est-il décédé ?" Votre réponse a été

11 comme suit : "J'ai entendu dire que Hasib Hasanovic, qui était principal ou

12 directeur d'école, a été tué. J'ai entendu dire qu'il avait été tué.

13 Toutefois, je n'en ai pas moi-même été témoin. Lors de la deuxième

14 déclaration que j'ai fournie au bureau du Procureur, je ne l'ai pas

15 mentionné parce que je n'avais pas obtenu de plus amples renseignements à

16 son sujet. Je n'étais pas véritablement sûr et certain qu'il avait été tué

17 ou non."

18 Voilà pour ce qui est de votre témoignage et de la partie adéquate de ce

19 témoignage.

20 Maître Loukas, poursuivez, je vous en prie.

21 Mme LOUKAS : [interprétation]

22 Q. Monsieur Hasanovic, vous avez entendu le président de la Chambre de

23 première instance vous donner lecture de l'extrait de votre déposition

24 présentée hier. Vous n'avez pas dit à la Chambre de première instance qu'il

25 n'était mort. Vous ne leur avez pas dit que vous aviez entendu dire qu'il

Page 2473

1 n'était pas mort ?

2 R. J'ai dit exactement ce que le président de la Chambre de première

3 instance vient de lire.

4 Q. Bien sûr, lorsque je vous ai posé la question suivante : "Maintenant,

5 bien sûr, Monsieur Hasanovic, vous vous rendez compte maintenant que les

6 informations que vous détenez d'autres personnes, que vous avez entendu de

7 la part d'autres personnes peuvent être erronées. Vous comprenez cela ?"

8 Votre réponse a été : "Oui. Je le comprends tout à fait." Vous ne m'avez

9 pas dit, non plus, à ce moment-là : Oui, je m'en rends compte parce qu'en

10 2000, on m'a indiqué qu'il n'était pas mort. Vous ne vous êtes pas donné la

11 peine de le mentionner cela, n'est-ce pas ?

12 R. Je pensais que lors de ma première déposition et lors de ma deuxième

13 déposition qui est plus importante, je n'avais pas mentionné Hasib

14 Hasanovic. De toute façon, je n'aurais pas dû en parler.

15 Q. Bien sûr, vous avez été en contact avec l'Accusation lorsque vous avez

16 obtenu ces renseignements supplémentaires entre l'an 2000 et maintenant.

17 Vous ne vous êtes pas donné la peine de leur en parler pendant cette

18 période ?

19 R. Pour ce qui est de l'Accusation, je leur ai parlé très brièvement et

20 toutes ces discussions ont eu lieu au cours des deux derniers mois. Nous

21 avons essentiellement parlé des conditions de mon voyage, ici, et de mon

22 séjour ici.

23 Q. Très bien. Qu'en est-il de la séance de récolement que vous avez eu

24 pendant cette semaine. Vous en avez parlé aujourd'hui. Vous nous avez dit

25 que cela avait duré quelque quatre à cinq heures. Vous souvenez-vous de

Page 2474

1 cette séance de récolement qui a eu lieu cette semaine ?

2 R. Oui.

3 Q. Cela a donné lieu à cinq pages de notes de récolement supplémentaires

4 qui ont été préparées ? Vous vous souvenez-vous de cette séance de

5 récolement ?

6 R. Oui.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, je pense que ce que vous

8 essayez d'indiquer a tout à fait été compris par la Chambre de première

9 instance.

10 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Au quel cas, je

11 n'ai plus qu'une à deux questions à poser.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, je vous prie.

13 Mme LOUKAS : [interprétation]

14 Q. Vous n'en avez pas dit à l'Accusation pendant la séance de récolement;

15 je comprends maintenant. Lorsque vous vous êtes trouvé dans le prétoire et

16 lorsque je vous ai posé cette question hier, je vous ai posé une question à

17 propos du paragraphe 1 de votre déclaration du mois de mars 2000, j'ai dit

18 : "Vous avez indiqué dans la déclaration que vous avez fournie aux

19 enquêteurs de l'Accusation du Tribunal que vous souhaitiez préciser

20 certains éléments, et cela, au moment où vous avez fourni la déposition.

21 Vous avez fait référence à des hommes qui étaient morts et vous vous étiez

22 rendu compte, par la suite, qu'ils étaient vivants." Vous vous souvenez de

23 cette partie de votre déposition ?

24 Ensuite vous nous avez donné une très, très longue réponse. Ensuite, vous

25 avez dit : "Oui, et je pourrais tout à fait préciser cela." Vous avez

Page 2475

1 décrit deux hommes. A la fin de cette réponse, vous avez dit :

2 "Fondamentalement, je parle de deux hommes serbes à propos desquels j'avais

3 fait une erreur."

4 Vous souvenez-vous de cette question et de cette réponse, Monsieur

5 Hasanovic ?

6 R. Oui.

7 Q. Le fait est, Monsieur Hasanovic, que vous avez également fait une

8 erreur à propos d'un homme musulman et vous ne vous êtes pas donné la peine

9 de le mentionner à ce moment-là.

10 R. Oui. Je n'en ai pas parlé parce que je me concentrais sur les éléments

11 qui se trouvent dans la déclaration que j'avais fournie aux enquêteurs du

12 Tribunal, ici, à La Haye.

13 Q. Monsieur Hasanovic, vous vous concentriez peut-être sur des éléments

14 qui pourraient peut-être être utiles à la cause musulmane plutôt qu'à la

15 cause serbe. C'est peut-être à cela que vous pensiez, Monsieur Hasanovic ?

16 R. Non. Je ne pensais pas porter des accusations contre l'un des camps. Je

17 pensais que je ferais de mon mieux pour essayer de me souvenir de tout ce

18 que j'ai vu et vécu pour essayer d'assister dans la mesure de possible

19 cette Chambre de première instance.

20 Q. J'aimerais vous poser une autre question, Monsieur Hasanovic. Hier, je

21 vous avais posé une question. Je vous avais dit : "Parce qu'apparemment M.

22 Hasanovic est bel et bien vivant, et il se trouve à Tuzla, et est

23 inspecteur de l'éducation"; et vous m'avez

24 dit : "Oui, j'en ai entendu parlé. J'en ai entendu parlé par la suite,

25 après avoir présenté ma déclaration au bureau du Procureur lorsque je me

Page 2476

1 suis rendu en Bosnie. J'ai entendu dire qu'Hasib était vivant, et cela

2 s'est passé en juillet ou en août de l'an 2000 avant que je n'aille aux

3 Etats-Unis."

4 Ensuite le président de la Chambre de première instance vous a posé une

5 question. Il vous a demandé : "Est-ce que je pourrais vérifier quelque

6 chose. Est-ce qu'il s'agit de l'une des deux personnes à propos desquelles

7 vous venez de nous dire que vous aviez entendu dire par la suite qu'ils

8 étaient vivant, ou est-ce qu'il s'agit d'une troisième personne ?" Vous

9 avez répondu comme suit : "Il s'agit d'une troisième personne. D'ailleurs

10 entre-temps, j'ai obtenu des renseignements à son sujet entre la première

11 déposition que j'ai fournie aux autorités de la Bosnie et la deuxième

12 déposition que j'ai fournie aux enquêteurs du Tribunal. Il s'agit de la

13 troisième personne dont j'ai entendu parlé. C'est pour cela que je n'en

14 avais pas parlé auparavant."

15 Est-ce que vous voyez, ou est-ce que vous vous souvenez d'avoir fourni

16 cette réponse ?

17 R. Je me souviens de la réponse, mais je ne me souviens pas exactement

18 avoir dit que j'avais entendu parlé de cette personne entre ou pendant

19 l'intervalle entre les deux dépositions. Je me souviens avoir dit que j'en

20 avais entendu parlé après avoir fourni ces deux dépositions lorsque je me

21 trouvais en visite en Bosnie.

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Très bien. Il s'agit de la page 73 du compte

23 rendu d'audience, Monsieur le Président.

24 Q. En réponse à ma question, vous avez dit que vous en avez entendu parlé

25 après avoir fourni votre déposition à l'Accusation, mais lorsque le

Page 2477

1 président de la Chambre de première instance vous a posé une question, vous

2 lui avez dit que vous en aviez entendu parlé pendant la période du temps

3 comprise entre vos deux dépositions. Monsieur Hasanovic, qu'en est-il

4 véritablement ?

5 R. Je ne me souviens pas avoir dit que j'en avais entendu parlé pendant

6 l'intervalle du temps entre les deux dépositions. Il est tout à fait

7 probable que je ne m'attendais pas du tout à devoir répondre à des

8 questions qui ne se trouvent pas dans la déclaration que j'ai fournie au

9 Tribunal.

10 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, il serait peut-être

11 utile que l'on donne à M. Hasanovic l'ensemble de sa question, parce que je

12 pense que Me Loukas a cité une partie de sa réponse seulement. Il a fourni

13 de plus amples précisions, car il semblerait qu'il ait dit qu'il s'était

14 rendu compte qu'il avait obtenu des renseignements entre les deux

15 dépositions, ensuite, immédiatement, il a dit : "-- après avoir donné ces

16 deux déclarations." Peut-être que si vous lui présentiez l'ensemble du

17 texte, il pourrait peut-être apporter une précision à ce sujet.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Loukas. Il est évident qu'à

19 votre première question, avant que nous étions au courant de l'existence

20 d'une troisième personne, il a donné des informations détaillées à propos

21 de ce qu'il avait appris. Ensuite, je lui ai posé une question. Je lui ai

22 dit : "Est-ce qu'il s'agit de l'une des deux personnes dont vous avez

23 parlé, et à propos desquelles vous nous avez indiqué que vous avez entendu

24 dire par la suite qu'ils étaient vivants." Le témoin a indiqué à ce moment-

25 là qu'il s'agissait d'une troisième personne. Il a dit : "Entre-temps, j'ai

Page 2478

1 eu des renseignements à son sujet entre la première déposition que j'ai

2 donnée aux autorités de la Bosnie et la deuxième déclaration que j'ai

3 fournie aux enquêteurs du Tribunal." Ensuite la phrase s'arrête. Il

4 semblerait que c'est une phrase qui n'a pas été terminée. Il a, ensuite,

5 ajouté : "C'est la troisième personne dont j'avais entendu parlé, c'est

6 pour cela que je n'en ai pas parlé auparavant."

7 Il est évident qu'il y a visiblement un décalage dans sa réponse. Si vous

8 avez souhaité attirer votre attention sur ce fait, vous y avez réussi.

9 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui merci, Monsieur le Président. C'est

10 justement le texte de la réponse que j'ai lue. Je ne comprends pas très

11 bien ce qu'indiquait M. Margetts.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous avez dit qu'il y avait une

13 partie qui faisait défaut ?

14 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

15 permettez, je vais vous donner lecture du texte. Je ne pense pas que nous

16 avons les mêmes références pour ce qui est du texte, mais je vais quand

17 même vous donnez lecture de ce texte. Le témoin a dit : "Je ne pense pas

18 avoir fait une erreur. J'ai entendu parler de deux de ces trois personnes

19 entre les deux dépositions que j'ai faites, et j'ai obtenu des

20 renseignements sur une autre personne après avoir fourni ces dépositions.

21 Puisque cela s'est passé après que j'ai eu mes entretiens avec les

22 enquêteurs, je n'en ai plus parlé jusqu'à présent."

23 Il avait fait état de trois personnes; deux Serbes et la troisième personne

24 n'est M. Hasanovic.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais cela ne fait pas partie de sa

Page 2479

1 première réponse, et j'ai cru comprendre que Me Loukas souhaitait

2 essentiellement se concentrer sur la réponse apportée à ma question. .

3 C'est clair maintenant.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il me serait

5 extrêmement utile d'obtenir la référence précise du texte auquel faisait

6 allusion M. Margetts.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, dans mon compte rendu

8 d'audience, il s'agit de la page 74, ligne 17. Il a

9 dit : "Je ne dirais pas toutefois que j'ai commis une erreur."

10 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est exact.

11 Q. Monsieur Hasanovic, vous m'avez entendu vous donner lecture de la

12 réponse que vous m'avez apportée dans un premier temps. Vous m'avez entendu

13 lire la réponse que vous avez fournie au Président de la Chambre de

14 première instance. Vous avez entendu l'Accusation vous lire l'autre

15 réponse. Pour ce qui est de ma question, vous nous dites que cela s'est

16 fait en juillet, août 2000. Pour ce qui est de la question posée par le

17 Président de la Chambre de première instance, vous nous dites que cela

18 s'est fait entre la première et la deuxième déposition. Pour ce qui est

19 d'une autre question que je vous ai posée, lorsque je vous avais dit :

20 "Lorsque vous avez fait état de cette correction dans votre déposition à

21 propos de personnes qui étaient censées être mortes et qui n'étaient plus

22 mortes, vous avez fait allusion à deux personnes pour lesquelles vous avez

23 commis cette erreur. En fait, il y a une troisième personne à propos de

24 laquelle vous avez également commis une erreur, mais vous n'en avez parlé

25 aujourd'hui, n'est-ce pas, Monsieur Hasanovic ?" La réponse est la réponse

Page 2480

1 qui nous a été lue par M. Margetts. Vous avez dit : "Je ne dirais pas que

2 j'ai commis une erreur. J'ai entendu parlé de deux de ces trois personnes

3 entre les deux dépositions que j'ai fournies, et j'ai obtenu des

4 renseignements à propos de l'autre personne après avoir fourni ces

5 dépositions."

6 Vous dites au Président de la Chambre de première instance que cela s'est

7 fait entre les deux dépositions, alors que vous me dites à moi que cela

8 s'est fait après que vous avez fourni ces deux dépositions. Quelle est la

9 réponse ?

10 R. Personnellement, je ne peux pas véritablement reprendre l'ordre

11 chronologique exact. Mais ce que j'entendais, c'est que j'ai entendu des

12 informations qui étaient tout à fait fiables, des informations qui avaient

13 été vérifiées qui portaient sur deux personnes qui étaient toujours en vie.

14 Ensuite, j'ai entendu parler d'une troisième personne après avoir fourni

15 mes deux dépositions. Je vous ai dit que je n'étais absolument pas disposé

16 à parler de cette troisième personne tant que je n'avais pas, moi-même,

17 vérifié ces faits.

18 Q. A qui avez-vous dit cela ?

19 R. Je l'ai dit ici. Je l'ai dit dans le cadre de ma déposition, dans le

20 cadre de ce procès.

21 Q. Monsieur Hasanovic, le fait est que vous n'avez pas indiqué à la

22 Chambre l'ensemble de la vérité telle que cela avait été stipulé par votre

23 déclaration solennelle. C'est bien ainsi que les choses se sont passées ?

24 R. Je pense que j'ai parlé de la vérité, que j'ai indiqué la vérité en

25 essayant de me souvenir de l'ordre chronologique des choses. Si vous m'avez

Page 2481

1 posé une question à propos de cette troisième personne pendant votre

2 contre-interrogatoire, ma réponse aurait pu induire en erreur, ensuite,

3 vous m'avez posé une question à propos de ces deux personnes. Le fait est

4 que je n'étais absolument pas disposé à parler de Hasib parce que je

5 n'étais pas sûr, s'il était mort ou vivant.

6 Q. Monsieur Hasanovic, lorsque vous êtes arrivé ici, dans ce prétoire,

7 vous saviez qu'il était vivant.

8 R. Oui. Je savais qu'il était vivant mais je n'y avais jamais

9 véritablement réfléchi.

10 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

11 questions à poser.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Souhaitez-vous poser des questions

13 supplémentaires, Monsieur Margetts ?

14 M. MARGETTS : [interprétation] Une toute petite chose, Monsieur le

15 Président. J'aimerais que l'on donne à M. Hasanovic un exemplaire de ses

16 notes de récolement.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 Nouvel interrogatoire par M. Margetts :

19 Q. [interprétation] Monsieur Hasanovic, lors du contre-interrogatoire de

20 Me Loukas, on vous a posé des questions à propos des armes détenues par les

21 membres du MUP. J'aimerais que vous preniez le paragraphe 2 des notes de

22 récolement que vous avez maintenant.

23 Notamment, j'aimerais que vous preniez la deuxième phrase du paragraphe 2,

24 que je vais vous lire d'ailleurs : "Alors qu'il demandait à la division de

25 protéger les Serbes, il semblerait qu'après deux à trois jours, que cela

Page 2482

1 n'était pas leur objectif parce qu'ils ont désarmé les membres musulmans du

2 MUP et les ont renvoyés chez eux." Est-ce bien exact ? Est-ce que, après la

3 division, est-ce que les Serbes ont véritablement désarmé les membres

4 musulmans du MUP ?

5 R. Oui. C'est exact. C'est ce qu'ils ont fait.

6 M. MARGETTS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'en ai

7 terminé.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Juge El Mahdi a une ou deux

10 questions à vous poser, Monsieur Hasanovic.

11 Questions de la Cour :

12 M. LE JUGE EL MAHDI : Je voudrais, s'il vous plaît, vous poser deux petites

13 questions. La première concerne ce que vous avez dit au moment où vous

14 étiez à la salle de sports. Vous avez dit qu'un commandant était venu. Il a

15 ordonné que de l'eau et de la nourriture vous soit présentées. Est-ce que

16 vous vous rappelez quel est ce commandant et il appartient à quelle unité ?

17 R. Je ne sais pas exactement de qui il s'agissait. C'était un officier qui

18 portait un uniforme militaire. C'est quelqu'un que je n'avais pas vu à

19 Bratunac jusqu'à ce moment-là.

20 M. LE JUGE EL MAHDI : C'était l'uniforme de l'armée ex-yougoslave ?

21 R. Oui.

22 M. LE JUGE EL MAHDI : Vous avez eu l'impression que les gardes

23 n'obéissaient pas à des ordres mais chacun se faisait à ses désirs ?

24 R. A partir du moment où il a pénétré dans la salle de sports, il a

25 commencé à crier. Il leur a demandé : Que faites-vous à ces personnes ? Il

Page 2483

1 les a chassés et ils l'ont obéi. Mais, en fait, il ne s'agissait pas de

2 gardes, il s'agissait des trois hommes qui ont commis les meurtres, les

3 assassinats.

4 M. LE JUGE EL MAHDI : On peut déduire que ces gardes n'obéissaient pas aux

5 ordres mais agissaient en quelque sorte contre les ordres ?

6 R. Je pense que ceux qui ont commis les meurtres étaient les gardes et en

7 présence -- plutôt, en l'absence de l'armée, ils ont commis ces crimes.

8 Lorsque l'armée s'en est rendue compte, elle a essayé d'intervenir.

9 M. LE JUGE EL MAHDI : Si j'ai bien compris, que c'est à l'insu de l'armée

10 et dès que l'armée a pris connaissance, l'armée a quand même fait régner

11 l'ordre ?

12 R. Oui.

13 M. LE JUGE EL MAHDI : Vous avez bien reçu de l'eau, de la nourriture

14 convenable ?

15 R. Oui, mais est-ce que je pourrais fournir une petite explication,

16 Monsieur le Juge ?

17 M. LE JUGE EL MAHDI : Oui, si vous le pouvez brièvement.

18 R. Certes, nous étions très heureux de voir cet officier parce que nous

19 pensions, qu'il allait nous sauver, qu'il allait sauver les survivants.

20 Toutefois lorsqu'il est parti, ceux qui avaient tué sont revenus et la

21 situation a continué à être la même jusque très tard dans la soirée du

22 troisième jour.

23 Ensuite, les soldats sont revenus et nous ont dit que nous ne subirions

24 plus de sévices et que c'était la fin de nos souffrances.

25 M. LE JUGE EL MAHDI : Une autre clarification, s'il vous plaît. Vous avez

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1 dit au paragraphe 24 de votre déclaration, je vous cite en anglais : "The

2 day after the police department split," m'affirmez --une date déterminante,

3 vous voulez dire que vous ne vous rappelez pas de la date exacte.

4 R. Pourriez-vous être un peu plus spécifique --

5 M. LE JUGE EL MAHDI : Paragraphe 24, de votre déclaration.

6 R. Est-ce que vous parliez de la journée où on nous a mis dans des camions

7 pour nous emmener à Pale ?

8 M. LE JUGE EL MAHDI : Je vous cite en anglais le tout,

9 je cite : "Le lendemain de la scission, la police Serbes portaient leur

10 propre uniforme serbe."

11 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, M. Hasanovic a la

12 version B/C/S de ces notes de récolement. Il n'a pas un exemplaire de sa

13 déclaration.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous pourriez lui

15 fournir un exemplaire de sa déposition.

16 Monsieur Hasanovic, visiblement il y a une petite confusion qui a régné à

17 propos du document que vous aviez.

18 R. Oui, la date exacte est quelque chose dont je n'arrive pas à me

19 souvenir. Mais je crois qu'il s'agissait du 11 avril, mais je ne peux pas

20 le dire avec certitude.

21 M. LE JUGE EL MAHDI : Est-ce que vous êtes sûr que le lendemain où vous

22 dites le lendemain dans un sens large qui veut dire "following."

23 R. Oui, nous parlons de la séquence des événements, et c'est difficile de

24 les mettre dans l'ordre tout ceci s'est enchaîné très rapidement, et les

25 choses ont évoluées très rapidement. Je crois qu'il devait s'agir d'un ou

Page 2485

1 deux jours après la scission au sein du service de police, mais pas

2 davantage.

3 M. LE JUGE EL MAHDI : Merci, Monsieur le Président,

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hasanovic, j'ai également

5 quelques questions à vous poser.

6 Vous nous avez dit qu'à l'entrée de la salle de sport il y avait des

7 soldats de la région, alors que, dans le bâtiment de l'école, il y avait

8 des hommes d'Arkan.

9 R. Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'ils étaient en contact les uns

11 avec les autres, et si oui de quelle manière ? Ou est-ce qu'ils agissaient

12 de façon complément indépendante ?

13 R. Je ne peux pas vous dire, s'ils étaient en contact les uns avec les

14 autres, et quel système de communication ils pouvaient bien utiliser. Les

15 gardes qui se trouvaient devant la porte après leur départ ou lorsque

16 quelqu'un se trouvait au niveau de la porte, devant la porte ils nous

17 disaient qu'ils ne pouvaient rien faire, qu'ils ne pouvaient pas nous

18 aider, qu'ils ne pouvaient rien faire en somme.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui semble indiquer que c'était les

20 hommes d'Arkan qui avaient pris le contrôle, et que les gardes qui se

21 trouvaient devant la porte ne pouvaient pas influer sur ce qui se passait à

22 l'intérieur. C'est exact ?

23 R. Monsieur le Président, je ne sais pas ce qu'il y avait entre eux. Après

24 leur départ les gens devant la porte étaient beaucoup plus aimables envers

25 eux, et ont fait preuve d'une compréhension beaucoup plus grande à notre

Page 2486

1 égard, après leur départ.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie pour votre réponse.

3 Pour finir je souhaite savoir quand pour la première fois vous avez entendu

4 parler, je ne sais pas s'il s'agit d'une rumeur ou de quelqu'un qui vous a

5 rapporté cela, de Hasib Hasanovic. Du fait qu'il était toujours en vie. Je

6 ne vous demande pas si vous tenez cela d'une source fidèle, ou non mais je

7 vous demande simplement de me dire quand vous avez pour la première fois

8 entendu parler de Hasib Hasanovic ? Le fait qu'il était en vie ?

9 R. La première fois que j'ai entendu cela c'est lorsque je me suis rendu

10 en Bosnie au mois de juillet de l'an 2000, j'ai entendu cela de la bouche

11 d'un ami à Tuzla.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un ami de Tuzla, vous étiez à Tuzla

13 vous-même, ou est-ce qu'il vous a téléphoné de Tuzla ?

14 R. Non j'étais à Tuzla et au cours au fil des conversations j'ai appris

15 que Hasib était en vie. Je ne savais pas néanmoins où il se trouvait.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] À ce moment-là vous ne saviez pas qu'il

17 était à Tuzla, est-ce exact ?

18 R. Non.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cet ami qui vous a rapporté cela lui

20 même venait-il de Tuzla ou de Bratunac ?

21 R. C'était des gens de Bratunac mais ils avaient habité à Tuzla pendant un

22 certain temps.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Pourquoi et à quelle occasion

24 vous ont-ils relaté cela ? Vous ont-ils dit que Hasib Hasanovic était

25 toujours en vie, était-ce au cours d'une conversation vous parliez d'école,

Page 2487

1 vous parliez de personnes qui avaient été portées disparues, quelle était

2 la toile de fond de vos conversations à ce moment-là ?

3 R. Nous parlions de tout et nous parlions de personnes qui avaient été

4 détenues, nous avons échangé beaucoup d'information sur les camps dans

5 lequel ils avaient été détenus. Hasib Hasanovic son nom a été cité au cours

6 d'une de ces conversations. Quelqu'un a dit qu'il était en vie et qu'il se

7 trouvait quelque part, qu'il était en bonne santé.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'habitude on insiste sur le fait que

9 quelqu'un est en vie, surtout lorsqu'on a pensé qu'il était mort. Avez-vous

10 précisé à ce moment-là, quelque chose à propos de son décès ? Avez-vous

11 vous-même parlé du fait que vous pensiez qu'il était mort ?

12 R. Je pense j'ai parlé à ce moment-là, de la déclaration que j'ai faite au

13 TPY. C'est dans ce contexte là que j'ai dit que je ne savais rien à propos

14 du sort de Hasib. A ma question mon ami a répondu que Hasib était en vie et

15 que les éléments d'information que je détenais n'étaient pas exacts. Etant

16 donné que ce n'était pas vrai et que le directeur de l'école Hasib

17 Hasanovic avait été tué.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie pour votre réponse.

19 Les questions posées par les Juges de la Chambre nécessitent-elles des

20 questions supplémentaires de la part de la Défense ?

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Non, je vous remercie, Monsieur le Président.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'Accusation précise qu'elle n'a pas de

23 question non plus.

24 Monsieur Hasanovic, ceci termine votre témoignage. Je vous remercie d'avoir

25 répondu à toutes les questions, ce sont des questions nombreuses posées par

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1 les deux parties par les Juges de la Chambre. Je vous souhaite un bon

2 retour. Monsieur l'Huissier je vous demande de bien vouloir accompagner le

3 témoin, s'il vous plaît.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de lever l'audience je souhaite

6 attirer l'attention des deux parties sur le fait que M. Hasanovic a reconnu

7 son nom sur une liste qui comportait 401 personnes, qu'il avait une version

8 en B/C/S sous les yeux, une version manuscrite.

9 Là où son nom est inscrit comme étant Hasanovic, alors que, dans la version

10 anglaise, son nom semble être Hasanovics ce qui pourrait prêter à

11 confusion. Que j'ai essayé de comparer ceci et de voir comment on écrit un

12 e, comment on écrit un "a" -- pardon, ou comment on écrit un "u", il me

13 semble qu'il y a une erreur ici qui a été faite. Qui a été commise dans le

14 compte rendu d'audience en anglais.

15 [Le témoin se retire]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons suspendre l'audience, et

17 reprendre à 11 heures 10. Je que l'Accusation va appeler le témoin suivant.

18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 45.

19 --- L'audience est reprise à 11 heures 13.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de demander à l'Accusation

21 d'appeler le témoin suivant, Madame la Greffière, je souhaite parcourir la

22 liste des pièces qui ont été versées au cours du témoignage de M. Hasanovic

23 en premier lieu.

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P72, la

25 déclaration du témoin M. Hasanovic, datée du 7 avril 2000, en anglais;

Page 2489

1 P72.1 pour la version en B/C/S.

2 P73, carte de la ville de Bratunac, annotée par le témoin au préalable.

3 P74, un CD-ROM comportant une vidéo où sont représentées des personnes dans

4 ce qui a été appelé la salle de sports.

5 P74A, retranscription de P74 en B/C/S; P74A.1, traduction anglaise.

6 P75, deux arrêts sur image de P74.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a deux autres points que la Chambre

8 souhaite aborder. Deux points qu'elle souhaite aborder sur la base de cette

9 vidéo en B/C/S, quelle a été la réponse de M. Hasanovic à la question que

10 je lui avais posée à propos de la deuxième ou de la troisième personne, de

11 façon à ce que nous puissions nous assurer que tout en évaluant le

12 témoignage de M. Hasanovic, nous soyons certain de ce qu'il a dit et

13 répondu à cette question. Nous avons après avoir vérifié cela, nous en

14 tiendrons informer les parties de façon à ce que vous puissiez comprendre

15 ce que nous avons conclu à propos de cet extrait de la vidéo.

16 Ensuite un autre point, j'ai une question pour vous, Maître Loukas, bien

17 évidemment, vous n'êtes pas obligée de répondre. Vous avez posé au témoin

18 une question à propos d'un incident qui s'est produit à Kravica ou des

19 Serbes ont été tués. S'agit-il d'élément qui figure dans la déclaration

20 préliminaire ou est-ce quelque chose qui n'a pas été porté à notre

21 connaissance, parce que le témoin a répondu qu'il a été au courant d'un

22 incident qui s'était produit à Kravica où deux Musulmans ont été tués. Ceci

23 nous semble être quelque chose que nous connaissons puisque nous avons

24 entendu parler de deux Musulmans qui ont été tués à Kravica.

25 Mais il me semble que vous aviez autre chose à l'esprit. Si c'est quelque

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1 chose qui n'a pas été portée à notre connaissance, vous pouvez le laisser

2 comme tel, et nous allons entendre par la suite quels sont les éléments que

3 la Défense avancera par la suite, mais en ce qui me concerne, c'est quelque

4 chose qui ne me disait rien. Si vous dites que vous voulez le laisser tel

5 quel, à ce moment-là, c'est très bien, mais s'il y a une certaine

6 confusion, je crois que vous pourriez peut-être nous aider.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Il n'y a aucune confusion, Monsieur le

8 Président. C'est quelque chose que nous aborderons lorsque nous

9 présenterons les éléments de la Défense.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

11 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, simplement pour être

12 tout à fait certain, nous avons demandé à ce que ces pièces puissent être

13 versées au dossier.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, bien sûr. Nous devons encore

15 rendre une décision à cet égard. Je crois qu'il n'y a pas eu d'objection

16 soulevée à cet égard. Le versement de ces pièces au dossier est accepté.

17 M. MARGETTS : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

18 permettez. Je vais devoir m'éclipser. Je vais passer la parole à M. Harmon.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, je vous en prie, Monsieur

20 Margetts. Sentez-vous libre de quitter le prétoire.

21 Monsieur l'Huissier, est-ce que vous pouvez faire entrer le témoin suivant

22 dans le prétoire, je vous prie.

23 Mme LOUKAS : [interprétation] Avant de se faire, Monsieur le Président,

24 pardonnez-moi.

25 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

Page 2491

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons vérifié pour voir s'il y

2 avait des mesures de protection pour le témoin suivant. Il n'y en a pas.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Pour ce qui est de la question précédente que

4 vous avez posée, Monsieur le Président. J'avais vérifier le compte rendu

5 d'audience, mais ce qui s'est passé est comme suit, Je lui ai posé une

6 question à propos d'un incident qui portait sur des Serbes à l'encontre des

7 Musulmans à un endroit particulier. Il a répondu : Non, je sais que

8 l'incident que je connais est un incident au cours duquel deux Musulmans

9 ont été tués, mais dans ma question, je n'ai pas parlé précisément de deux

10 Serbes qui ont été tués.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vérifier tout de suite, voir si

12 je me suis trompé. Si je me suis trompé, je vous prie de me pardonner,

13 n'est-ce pas ?

14 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'en occuperais un peu plus tard.

16 Mme LOUKAS : [interprétation] Désolé, Monsieur le Président.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Alic. Monsieur Alic,

18 avant de faire votre déposition devant cette Chambre, les règles de

19 procédure et de preuve acquièrent que vous fassiez une déclaration

20 solennelle en vertu de quoi vous allez dire la vérité, et rien que la

21 vérité. Le texte de cette déclaration solennelle vous est remis par

22 l'Huissier, je vous demande maintenant de bien vouloir faire cette

23 déclaration.

24 LE TÉMOIN : MIDHO ALIC [Assermenté]

25 [Le témoin répond par l'interprète]

Page 2492

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

2 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Alic, je vous en prie asseyez-

4 vous. Vous allez d'abord être interrogé par l'Accusation.

5 Monsieur Harmon, vous avez la parole

6 M. HARMON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, bonjour,

7 Messieurs les Juges, bonjour, le conseil de la Défense.

8 Interrogatoire principal par M. Harmon :

9 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Alic.

10 R. Bonjour, Monsieur.

11 Q. Je vais vous poser des questions sur vous, et je vous demande de bien

12 vouloir vérifier ces éléments. Je vais d'abord vous donner les éléments

13 d'informations en question. Vous êtes né le 7 février 1955, vous êtes

14 Bosnien, et vous êtes marié, vous avez quatre enfants, et vous êtes né dans

15 le village --

16 R. Oui.

17 Q. Ne me répondez pas, Monsieur Alic, avant que je ne vous aie donné tous

18 les éléments, et après quoi, je vous demanderais une vérification pour tous

19 ces éléments.

20 Vous êtes né dans le village de Blagaj Japra dans la municipalité de

21 Bosanski Novi, où vous avez vécu jusqu'en 1992, date à laquelle vous êtes

22 devenu un réfugié. Vos études, vous êtes allé à l'école primaire, ensuite,

23 vous avez passé un examen, vous souhaitiez devenir un commercial. Vous

24 aviez à Blagaj Japra, vous et votre femme, vous aviez un petit magasin, une

25 petite épicerie. Est-ce exact ?

Page 2493

1 R. Tout à fait exact.

2 Q. Vous avez fait votre service militaire au sein de la JNA pendant 15

3 mois, de 1973 à 1974. Vous avez perdu la vue au niveau d'un œil lors de

4 l'incident que vous allez décrire devant cette Chambre. Est-ce exact ?

5 R. Oui.

6 Q. Monsieur Alic, j'aimerais vous montrer ma première pièce.

7 M. HARMON : [interprétation] C'est une déclaration de M. Alic qui a été

8 remise le 12 mars de l'an 2000. Nous avons une déclaration en anglais, et

9 en B/C/S.

10 Q. Monsieur Alic, on va vous remettre votre déclaration en B/C/S sous les

11 yeux. Les paragraphes sont numérotés et la déclaration anglaise sera

12 distribuée aux parties présentes.

13 Pendant la distribution de cette déclaration, Monsieur Alic, je vous

14 demande de bien vouloir regarder la déclaration en B/C/S, et je vous

15 demande de bien vouloir simplement relire cette déclaration.

16 R. Je ne comprends pas votre question. Vous voulez que je regarde la page

17 de couverture simplement.

18 Q. Monsieur Alic --

19 M. HARMON : [interprétation] Puis-je tout d'abord demander un numéro de

20 cote.

21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P76, et P76.1 pour la traduction.

22 M. HARMON : [interprétation]

23 Q. Monsieur Alic, vous avez devant vous la pièce portant la cote P76.1. Il

24 s'agit d'une déclaration que vous avez faite au bureau du Procureur le 12

25 mars de l'an 2000. Je vous demande de relire rapidement, de parcourir cette

Page 2494

1 déclaration, et confirmer qu'il s'agit bien de la déclaration que vous avez

2 faite au bureau du Procureur, et que vous avez signée. Vous n'avez pas

3 besoin de relire toute la déclaration. Vous pouvez simplement la parcourir.

4 Je veux simplement que vous me confirmez qu'il s'agit bien là, de votre

5 propre déclaration.

6 M. HARMON : [interprétation] Pendant que M. Alic parcoure sa déclaration,

7 est-ce que vous pouviez me dire quand nous allons avoir la prochaine pause,

8 s'il vous plaît ?

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que nous ferons notre pause

10 vers une heure moins quart.

11 M. HARMON : [interprétation]

12 Q. Monsieur Alic, avez-vous pu parcourir cette déclaration qui porte la

13 cote P76.1 ?

14 R. Oui. J'ai parcouru cette déclaration. Il s'agit bien de ma déclaration

15 qui a été signée par moi-même à la dernière page.

16 Q. Hormis quelques corrections mineures qui seront apportées au cours de

17 cet interrogatoire principal, est-ce que ceci est une description exacte

18 des événements qui se sont produits ?

19 R. Oui.

20 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je vais maintenant, en

21 vertu de l'Article 89(F), présenter cette déclaration. Mais je souhaite, en

22 premier lieu, résumer les éléments de la déclaration écrite avant

23 d'éclaircir un certain nombre de points.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

25 M. HARMON : [interprétation] Je souhaite résumer cette déclaration.

Page 2495

1 M. Alic est un Bosniaque qui est né dans le village de Blagaj Japra ou se

2 trouve la vallée de la Japra et la municipalité de Novi Travnik, le village

3 --

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Bosanski Novi.

5 M. HARMON : [interprétation] Pardonnez-moi, Bosanski Novi. Ce village

6 comporte 500 maisons environ avec 2 500 habitants à l'époque où M. Alic y

7 vivait.

8 Il habitait dans ce village jusqu'au 9 juin, où lui-même et sa famille,

9 ainsi que les autres habitants de ce village et des réfugiés musulmans, qui

10 avaient été déplacés d'autres villages musulmans et qui habitaient dans ce

11 village, ont tous été chassés par la force de la Blagaj Japra.

12 La déclaration parle, en partie, de certains éléments contextuels avant

13 l'éclatement du conflit et décrit, en partie, un événement qui s'est

14 produit au mois de mars 1992 lorsqu'un voisin de M. Alic, qui était un

15 policier musulman de la ville Bosanski Novi, a été démis de ses fonctions

16 parce qu'il a refusé de porter un uniforme comportant un insigne serbe.

17 Au cours de toute cette période avant l'éclatement du conflit, il y avait

18 un conflit en Croatie. Il s'agissait d'une municipalité adjacente à celle

19 de Novi Travnik. Les musulmans --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, Bosanski Novi, vous

21 voulez dire ?

22 M. HARMON : [interprétation] Oui, absolument.

23 Les Musulmans de Blagaj Japra ont refusé de prendre part à cette guerre en

24 Croatie. On a constaté que la conséquence directe de cela a été une

25 détérioration des relations.

Page 2496

1 D'après M. Alic, les Musulmans ont été perçus comme étant les ennemis des

2 Serbes, de plus, des champs nationalistes serbes étaient diffusés à la

3 radio et les Serbes ont commencé à raconter ce qui allait arriver aux

4 Musulmans. Différentes provocations de ce type de la part des Serbes ont

5 semé la crainte et la terreur au sein de la communauté musulmane.

6 Le 9 mai 1992, les Serbes ont annoncé à la radio de Bosanski Novi, un

7 ultimatum, ont lancé un ultimatum en vertu de quoi tous les Musulmans

8 étaient contraints de rendre leurs armes. En vertu de cet ultimatum, on

9 demandait à ce que tous les Musulmans remettent leurs armes le lendemain.

10 Il s'agissait là du 10 mai.

11 Le président du STA de Blagaj Japra, Izet Mehmedagic a rassemblé un certain

12 nombre d'armes, en petite quantité, il s'agissait de fusils de chasse et de

13 pistolets des habitants de ce village et les a déposés dans le bâtiment de

14 la municipalité de Bosanski Novi.

15 Les autorités ont refusé ces armes et M. Mehmedagic est rentré au village

16 en possession de ces mêmes armes. Ce soir-là, un véhicule de police a été

17 attaqué. M. Alic n'a pas vu cette attaque de ses propres yeux et n'a pas

18 vu, non plus, qui a attaqué le véhicule. Ceci est quelque peu contesté, de

19 savoir qui a commis cela. Mais la même nuit, la ville de Blagaj Japra a été

20 attaquée par des obus de mortiers. Treize obus ont atterri sur ce village.

21 Le lendemain, le 11 mai 1992, le père et le cousin de ce témoin se sont

22 rendus dans un village serbe voisin, Radomirovac et ont demandé aux Serbes

23 de ce village pourquoi Blagaj Japra avait été attaqué ainsi. Les Serbes

24 leur ont répondu que le village avait été pilonné parce que les Musulmans

25 n'avaient pas remis leurs armes.

Page 2497

1 Un peu plus tard, c'est le même jour, Blagaj Japra a été pilonné à nouveau.

2 Cette fois-ci, le pilonnage était beaucoup plus intense, 300 obus de

3 mortiers ont atterri sur le village et aux alentours.

4 A ce moment-là, M. Alic et sa famille se sont réfugiés dans la cave de leur

5 propre maison. A un moment donné, ce jour-là, un Musulman dont on a donne

6 l'identité dans la déclaration, est passé devant la maison du témoin à bord

7 de son tracteur. Il a dit à M. Alic et à sa famille de se rendre dans le

8 village voisin serbe de Maslovare. Une caravane de camions et de tracteurs

9 a été ainsi formée et de voitures, il y avait une centaine de Musulmans, de

10 résidants, qui ont formé cette caravane, cette colonne et se sont dirigés

11 vers Maslovare.

12 En route vers Maslovare, ils ont rencontré, en fait, ils ont heurté un

13 barrage routier et les Musulmans de cette caravane ont été désarmés. Ils

14 ont dû remettre leurs fusils de chasse et ont eu le droit de poursuivre

15 leur route. Ils sont arrivés à destination. Certains ont passé la nuit à la

16 belle étoile et d'autres, dans des hangars.

17 Le lendemain matin, des membres de l'armée sont arrivés et à l'endroit où

18 se trouvait le témoin, les habitants du village ont demandé à pouvoir

19 rentrer à Blagaj Japra. Un petit groupe de Musulmans a pu rentrer dans ce

20 village.

21 A leur retour, ils ont rapporté que les Serbes avaient planté des drapeaux

22 serbes partout dans le village, par la suite, le témoin et d'autres

23 habitants du village ont pu retourner à Blagaj Japra. Le témoin a constaté

24 que dans le village voisin de Blagaj Rijeka, alors qu'il rentrait à Blagaj

25 Japra, ce village était non loin de son propre village, que la mosquée de

Page 2498

1 Blagaj Rijeka avait été complètement détruite et la mosquée de son village

2 avait été endommagée. Le minaret avait été touché.

3 Après être rentré dans son propre village, le témoin est resté à Blagaj

4 Japra pendant une quinzaine de jours. Au cours de cette période, d'autres

5 villages dans la vallée de la Japra ont été pilonnés. Une maison de

6 vacances appartenant à un Serbe près du village de Maslovare a été

7 attaquée. Une maison musulmane a été complètement détruite. Son village a

8 été attaqué par des engins semi-automatiques.

9 A la suite du pilonnage du village musulman voisin, les habitants de ce

10 village ont été sommés par les membres de la Défense territoriale serbe de

11 se rendre à Blagaj Japra, chose qu'ils ont faite. Ils ont rapporté que les

12 maisons avaient été brûlées.

13 Le nombre de personnes arrivant dans ce petit village s'est accru de façon

14 importante puisqu'il y avait un afflux de gens arrivant à Blagaj Japra

15 puisque ces gens déplacés affluaient vers ce village.

16 Par la suite, des négociations entre les représentants des communautés

17 musulmanes, le village de Blagaj Japra et d'autres villages qui avaient été

18 déplacés et les Serbes, a eu lieu dans le bâtiment municipal de Bosanski

19 Novi. Ces négociations ont duré environ 17 jours. D'après la déclaration de

20 ce témoin, les Serbes souhaitaient que les Musulmans quittent la

21 municipalité.

22 L'événement suivant d'importance dans la déclaration est le suivant le 8

23 juin 1992. Les deux soldats serbes ont informé les occupants de Blagaj

24 Japra, autrement dit les personnes qui avaient été déplacées et qui

25 s'étaient installées à Blagaj Japra leur a annoncé qu'ils devaient quitter

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1 le village le lendemain matin.

2 Le lendemain matin, des soldats serbes sont venus dans la maison de M. Alic

3 et on a dit à tous les occupants de la maison qu'ils devaient quitter la

4 maison. Ils ont obéi à cet ordre. Le témoin ainsi que d'autres personnes

5 ont été emmenées dans l'école et détenues à cet endroit-là sous la menace

6 des armes, et par la suite on les a autorités à partir et ils étaient dans

7 la rue. M. Alic, après être parti de son village, a vu que toutes les

8 maisons brûlaient ainsi que les hangars.

9 Alors que le témoin et sa famille traversaient le village, des soldats

10 serbes étaient en train d'assassiner son frère et un autre homme qu'il n'a

11 pas pu identifier. Ces deux assassinats se sont produits en présence du

12 témoin. Plus tard, M. Alic a remarqué que des soldats serbes avaient tué

13 encore trois autres hommes musulmans. Un peu plus tard, le témoin et

14 d'autres Musulmans, alors qu'ils traversaient le village, ont été attaqués

15 et on leur a enlevé tous les biens personnels qu'ils portaient sur eux.

16 M. Alic et d'autres personnes ont dû se rendre à l'usine de Japra. On leur

17 a ordonné de s'y rendre. Il s'agit d'une usine qui se trouve près de la

18 voie ferrée. A cet endroit-là, on a informé le témoin que des Serbes

19 allaient l'emmener ainsi que d'autres Musulmans à Zenica et les échanger

20 contre des Serbes de ce village et ces personnes qui avaient été déplacées

21 et qui étaient à Zenica seraient transférées à Blagaj Japra.

22 A l'usine, M. Alic a remarqué que les soldats ont tiré sur et ont tué un

23 autre homme musulman. A l'usine de Japra, lui ainsi que d'autres personnes

24 qui avaient été déplacées - et le chiffre qui figure ici, ceci pourra peut-

25 être corriger, mais il s'agit de plusieurs milliers - et d'autres

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1 Musulmans, des hommes, des femmes et des enfants ont dû monter dans des

2 charrettes qui se trouvaient à proximité de la voie ferrée près de l'usine

3 et transporter en dehors de la municipalité.

4 Le train s'est arrêté au village voisin de Stanari, qui se trouve près de

5 Doboj, et là l'armée et la police ont séparé les hommes des femmes, et mis

6 les hommes et les femmes sur des trains différents. Des corrections

7 pourront être apportées par la suite à l'égard de ce que je viens de dire.

8 Le train, dans lequel se trouvait le témoin ainsi que d'autres hommes,

9 s'est arrêté à Omarska et à Keraterm pour retourner, ensuite, à Bosanski

10 Novi. A Bosanski Novi, il y avait environ 750 hommes qui sont restés à bord

11 de ces trains pendant deux jours environ. Au cours de ces deux journées, on

12 ne le leur a donné aucun vivre. Il n'y avait pas d'eau, il n'y avait pas de

13 toilettes. Par la suite, le train est reparti en direction de Mlakve. Il

14 est arrivé le 11 juin. Mlakve fait partie du faubourg de Bosanski Novi. Là

15 le témoin, avec en présence 750 hommes, a été emmené au stade de football

16 où il a été détenu. Dans le lieu de détention au stade de football, la

17 nourriture était insuffisante. Le témoin a décrit qu'ils avaient un kilo de

18 pain par semaine, et de la soupe par semaine pendant dix minutes par jour.

19 Il n'y avait pas de couvertures. Le témoin a dû dormir à même le sol et

20 c'est à même le sol du stade sur le calage. Il n'y avait pas de savon, pas

21 d'eau chaude, et il y avait deux toilettes pour 750 hommes.

22 Au cours de sa détention au stade de Mlakve, M. Alic a été frappé à l'œil

23 par une crosse de fusil. C'était un soldat serbe qui l'a frappé en vertu de

24 quoi il est resté aveugle de l'œil droit. Il n'a pas reçu de traitement

25 médical, qu'il était détenu.

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1 Il est arrivé au camp, il pesait 75 kilos, lorsqu'il a été relâché, il

2 pesait 55. Au cours de sa détention dans le camp, dans le stade de Mlakve,

3 on ne lui jamais dit pourquoi il avait été arrêté ou pourquoi il avait été

4 emmené dans ce camp.

5 Avant de quitter le camp, on lui a dit que s'il souhaitait partir, il

6 devait signer un document précisant qu'il quittait la municipalité de

7 Bosanski Novi de son plein gré, et devait, par conséquent, renoncer à son

8 bien. Après avoir signé un tel document, il a été relâché le 27 juillet

9 1992. On l'a mis dans un bus, il a été emmené en Croatie où il a pu

10 rejoindre sa famille. Il a quitté ce pays et est parti se réfugier dans un

11 pays tiers.

12 Le témoignage porte sur différents éléments de l'acte d'accusation dans le

13 résumé 65 ter. De plus, Monsieur le Président, plus particulièrement son

14 témoignage porte sur le paragraphe 3.1 dans l'annexe A; dans l'annexe C,

15 5.1, 5.2, et 5.3; et dans l'annexe D, 3.6 et 3.9.

16 J'en ai terminé, Monsieur le Président, avec le résumé de sa déclaration.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Harmon.

18 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite maintenant

19 peut-être parler plus en détail. Je souhaite clarifier un certain nombre de

20 points.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comme nous l'avons indiqué hier, nous

22 souhaitons recevoir le résumé de ses déclarations avant l'audience elle

23 même de façon à ce que nous puissions nous préparer correctement; ce qui ne

24 s'applique pas aujourd'hui, mais à l'avenir.

25 M. HARMON : [interprétation] Puis-je avoir la pièce suivante, s'il vous

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1 plaît, et si on peut montrer ceci sur le rétroprojecteur. Je souhaite au

2 moins qu'un document papier soit remis au témoin. Puisque le plus clair du

3 témoignage de M. Alic porte sur la municipalité de Bosanski Novi, je

4 souhaite simplement indiquer où se trouve cette municipalité en Bosnie.

5 Q. Monsieur Alic, pourriez-vous confirmer pour les besoins de la Chambre,

6 s'il vous plaît, et regardez cette pièce suivante. On voit clairement ici

7 l'emplacement de Bosanski Novi, en Bosnie-Herzégovine.

8 R. Oui, c'est ici dans l'angle à la frontière avec la Croatie, et c'est en

9 rouge.

10 M. HARMON : [interprétation] Puis-je avoir un numéro de cote, s'il vous

11 plaît, pour ce document.

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la cote P77.

13 M. HARMON : [interprétation] Merci.

14 Q. Monsieur Alic, puisque la plupart de votre témoignage porte sur la

15 vallée de la Japra, Monsieur Alic, je souhaite vous montrer une autre

16 carte, une pièce, s'il vous plaît, que je souhaite distribuer. Je souhaite

17 que l'on donne une version papier au témoin, s'il vous plaît.

18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P78.

19 M. HARMON : [interprétation] Merci.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Krajisnik.

22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux recevoir les mêmes

23 documents, moi-même, s'il vous plaît. Je souhaite les examiner.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avons-nous un exemplaire

25 supplémentaire ? Sinon, la Chambre -- non --

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1 Je vois qu'il y a un exemplaire supplémentaire. Veuillez remettre cela à M.

2 Krajisnik.

3 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez. Oui, Madame Loukas.

5 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est vraiment très utile, car nous avons

6 seulement un exemplaire en noir et blanc, et effectivement il est plus

7 facile de suivre sur un exemplaire en couleur, tel que celui qui a été

8 remis à M. Krajisnik.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vois que vous avez reçu une

10 copie en couleur, Madame Loukas.

11 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, Monsieur Harmon, veuillez

13 poursuivre.

14 M. HARMON : [interprétation] Merci.

15 Q. Monsieur Alic, est-ce que vous pouvez confirmer ce que je vais dire.

16 Est-ce que vous m'avez aidé dans la préparation de ce document en

17 identifiant les villages de la vallée Japra qui sont essentiellement des

18 villages musulmans, tels que Blagaj Rijeka, Blagaj Japra, Suhaca, Hodzici,

19 et Gornji Agici, qui sont tous marqués en vert. Est-ce exact ?

20 R. Oui.

21 Q. M'avez-vous également dit quels étaient les villages de la vallée de

22 Japra dont la population était mixte, à la fois serbe et musulmane. Est-ce

23 qu'il s'agit là de Maslovare, Crna Rijeka, Donji Agici, et est-ce qu'ils

24 sont marqués en rose ?

25 R. Oui.

Page 2504

1 Q. Les villages qui ne sont pas marqués du tout, comme Radomirovac, Krslje

2 et Josava, se sont les villages serbes, n'est-ce pas ?

3 R. Oui, oui. Tout cela ce sont des villages serbes, Ruzicka [phon].

4 Q. Merci beaucoup. Monsieur Alic, veuillez examiner la déclaration qui est

5 devant vous. Il s'agit de la pièce à conviction de l'Accusation 76.1. Vous

6 l'avez devant vous ? Je vais attirer votre attention sur un certain nombre

7 de paragraphes et je vais demander quelques clarifications de votre part.

8 Est-ce que vous pouvez examiner au paragraphe 3 de la déclaration en B/C/S.

9 Là, il s'agit d'un paragraphe qui porte sur un voisin qui était policier et

10 qui vous a dit que la police avait reçu de nouveaux uniformes serbes avec

11 des insignes serbes.

12 Voici ma question : Qui était cette personne ?

13 R. C'était Mirso Brkic.

14 Q. C'était votre voisin à Blagaj Japra ?

15 R. Oui.

16 Q. Est-ce qu'il a été d'accord pour porter le nouvel uniforme serbe ?

17 R. Non. Il a refusé cela tout comme les autres.

18 Q. M. Brkic était un Musulman; est-ce exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce qu'il a été relevé de ses fonctions au sein de la police et est-

21 ce que par la suite il a été expulsé de la municipalité ?

22 R. Oui. Tous les Musulmans bosniaques qui ont travaillé à la police ont

23 été licenciés, et lui aussi.

24 Q. Je souhaite maintenant que vous vous penchiez sur le paragraphe 12.

25 Dans ce paragraphe, Monsieur Alic, il est question des camions qui

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1 traversaient votre village un jour sur deux, et qui portaient des

2 munitions. Vous avez dit : "Nous ne pouvions que deviner les choses. Je

3 n'ai pas vu le moment où les Serbes ont distribué les armes entre eux."

4 Est-ce que vous n'avez jamais vu des hélicoptères qui ont atterri dans la

5 vallée de Japra ?

6 R. Oui. Je les ai vus, par exemple, dans les villages de Radomirovac,

7 Krslje, et d'autres villages serbes dont je ne me souviens plus les noms.

8 Q. Avez-vous pu voir le contenu de ces hélicoptères ou ce qu'ils faisaient

9 dans ces villages serbes ?

10 R. Je n'ai pas pu voir cela. Ils atterrissaient, ils restaient environ une

11 demi-heure, une heure et, ensuite, ils repartaient. Il s'agissait des

12 hélicoptères militaires. Je suppose qu'ils transportaient des armes ou des

13 munitions ou des équipements militaires.

14 Q. Est-ce que lorsque vous avez vu ces hélicoptères qui atterrissaient

15 dans des parties serbes, comme vous l'avez dit, est-ce que ceci s'est

16 produit avant les coups de feu, avant l'attaque contre village ou après ?

17 R. Cela s'est passé avant l'attaque contre le village.

18 Q. Monsieur Alic, est-ce qu'à un moment donné, vous, vous êtes trouvé dans

19 le village de Maslovare, et est-ce que vous avez vu de vos propres yeux les

20 munitions dans des caisses ?

21 R. Pendant que l'on était détenu dans les étables de Rajko Hodzic --

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous

23 sommes dans une situation où l'on soumet cette déclaration. Le témoin est

24 parmi nous, et je pense que le Procureur ne devrait pas poser des questions

25 tendancieuses s'agissant d'une question de ce genre. Je pense que ceci

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1 n'est pas approprié.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon.

3 M. HARMON : [interprétation] Je retire le question.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, avant de continuer :

5 vous n'arrêtez pas de nous parler du village de Maslorave, alors que, dans

6 le compte rendu d'audience, il s'agit du village Maslovare, alors que votre

7 prononciation est erronée. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'il

8 s'agit là du village de Maslovare ?

9 M. HARMON : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

11 M. HARMON : [interprétation]

12 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de voir des armes ou des munitions à

13 un moment donné avant les coups de feu contre votre village ?

14 R. Non, pas avant l'attaque contre le village. Je n'ai rien vu avant.

15 Q. Je vais essayer de reformuler ma question. Est-ce que vous avez eu

16 l'occasion --

17 Mme LOUKAS : [interprétation] Je fais objection de nouveau, s'il vous

18 plaît.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

20 Mme LOUKAS : [interprétation] Voici la situation : la déclaration est

21 versée au dossier, le témoin est devant nous, il a la déclaration devant

22 ses yeux, et --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous préférez qu'il n'ait pas la

24 déclaration sous les yeux ?

25 Mme LOUKAS : [interprétation] Tout à fait.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Alic, est-ce que vous pourriez

2 mettre de côté votre déclaration puisque maintenant, vous êtes en train de

3 subir l'interrogatoire principal ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas de problème. Je ne vais pas m'y

5 référer.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, s'il vous plaît.

7 M. HARMON : [interprétation]

8 Q. Encore une fois, Monsieur Alic, est-ce qu'à un moment donné, vous vous

9 êtes retrouvé dans le village serbe de Maslovare ?

10 R. Vous voulez dire avant l'attaque ou après ?

11 Q. Avant l'attaque.

12 R. Oui. Je suis allé à Suhaca et partout. Je me déplaçais normalement.

13 Q. Pendant que vous étiez dans des villages serbes, n'importe lequel des

14 villages serbes, est-ce que vous avez eu l'occasion de voir dans un

15 quelconque village serbe des armes ou des munitions ?

16 Mme LOUKAS : [interprétation] En ce qui concerne cette question, la

17 question relative aux munitions a déjà été posée et la réponse a été

18 donnée.

19 M. HARMON : [interprétation] Je pense que ceci a prêté à la confusion. Avec

20 votre permission, je souhaite reposer ma question. Je souhaite lui

21 rafraîchir la mémoire.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, je pense que si nous

23 permettons de poser la question, la question qui a déjà été répondue, nous

24 allons épargner beaucoup du temps. Je vais permettre cela à ce stade.

25 M. HARMON : [interprétation]

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1 Q. Est-ce que vous vous souvenez, Monsieur Alic ?

2 R. Veuillez me la répéter. Je n'ai pas tout à fait compris.

3 Q. Lorsque vous étiez dans le village de Maslovare, est-ce que vous avez

4 eu l'occasion de voir des munitions ou des armes ?

5 R. Pas avant la guerre, pas avant l'attaque contre mon village, pas avant,

6 seulement après.

7 Q. D'accord, dites-nous ce que vous avez vu après.

8 R. Lorsque l'on revenait de chez Rajko Hodzic, le lendemain, on est passé

9 à côté de l'épicerie de Mica Karlica et Mica Karlica m'a arrêté,

10 personnellement, et il m'a dit : Tu n'as pas remis ton pistolet. Avant la

11 fin de la journée, tu dois le ramener ici, avec ton permis.

12 Il m'a proposé de boire une bière avec lui. Je n'ai pas pu refuser parce

13 qu'il avait déjà bu plusieurs verres. Il m'a apporté une bière. J'ai pris

14 une bière, moi aussi. Je lui ai demandé d'utiliser les toilettes de son

15 magasin parce que je savais qu'il en avait et il m'a dit de sortir parce

16 qu'il avait des latrines à l'extérieur.

17 Lorsque je suis sorti, il n'y avait pas vraiment de latrines. Il y avait

18 une espèce de cabane recouverte de carton ou du papier et lorsque je me

19 suis baissé, j'ai pu voir à travers les planches qui s'y trouvaient. J'ai

20 regardé à travers les planches et j'ai pu voir des caisses militaires, des

21 caisses avec des équipements militaires. Je n'étais pas sûr s'il s'agissait

22 des armes ou des munitions mais j'ai vu qu'il y avait beaucoup d'équipement

23 militaire dans ces caisses.

24 Q. Merci beaucoup. Poursuivant, je souhaite maintenant attirer votre

25 attention sur le paragraphe 13. Dans la première partie de ce paragraphe,

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1 vous dites, paragraphe 13, vous dites : "Le 9 mai 1992, c'était un samedi,

2 les Serbes ont annoncé à la radio Bosanski Novi que tous les Bosniaques

3 devaient remettre leurs armes."

4 J'ai deux questions. Tout d'abord, est-ce que vous avez entendu cela à la

5 radio personnellement, cet ultimatum ?

6 R. Oui. Nous l'avons entendu personnellement. D'ailleurs, Ranko Gvozden

7 est venu de Maslovare, si mes souvenirs sont bons. Il y avait aussi une

8 autre personne avec lui. Je ne me souviens pas de son nom. Mais je sais que

9 lui, il est venu personnellement dans le village et il a dit qu'il fallait

10 absolument que l'on obéisse à cet ordre et que nous devions remettre nos

11 armes.

12 Q. Est-ce que cet ultimatum portait seulement sur les Musulmans ou est-ce

13 qu'il portait également sur les Serbes et les Croates ?

14 R. Non, seulement les Musulmans parce qu'à Blagaj Japra, seul les

15 Musulmans y vivaient. Il n'y avait pas de Serbes, ni de Croates dans ce

16 village.

17 Q. Je parle de l'ultimatum annoncé à la radio, est-ce qu'il s'appliquait

18 seulement aux Musulmans ?

19 R. Oui, pareil. C'était le même message que le message que nous avons reçu

20 de la part de Ranko Gvozden. La même chose était annoncée à la radio.

21 Q. Très bien. Nous allons clarifier un autre point lié au paragraphe 13.

22 Vous décrivez que le lendemain, une réunion a eu lieu à l'école et là, je

23 cite votre déclaration : "Nous avons recueilli quelques armes mais pas

24 trop."

25 Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre combien d'armes vous

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1 avez recueillies et quels étaient les types de ces armes ?

2 R. Il s'agissait surtout des pistolets, des fusils de chasse. Il y avait

3 des gens qui avaient des permis pour ce genre d'armement. Il y avait peut-

4 être 15 à 20 fusils et une douzaine de pistolets. Il n'y avait pas d'autres

5 armes.

6 Q. Je souhaite maintenant attirer l'attention sur le paragraphe 16. Je

7 vais vous lire la partie de ce paragraphe qui m'intéresse, je cite : "Cette

8 nuit, vers 23 heures 30, notre village a été pilonné. Treize obus de

9 mortiers sont tombés sur le village."

10 Est-ce que ceci s'est passé, cette attaque, M. Alic, est-ce qu'elle s'est

11 passée le même jour où les armes qui ont été recueillies ont été rejetées

12 par les autorités de Bosanski Novi ?

13 R. Oui. Cela s'est passé le même jour. Nous avons remis ces armes et ils

14 les ont rejetées. Ils nous les ont rendues en disant, ce n'est pas cela que

15 l'on cherche. Tout le monde a pris son arme et est rentré chez lui.

16 Cependant, autour de 10 heures, 11 heures, la patrouille de la police, une

17 patrouille de la police, a été attaquée prétendument entre Bosanski Novi et

18 Blagaj Japra.

19 Cependant, il ne s'agissait pas là d'une attaque organisée par des

20 Musulmans. Ceci était organisé par des Serbes eux mêmes qui avaient jeté

21 une grenade à main et qui ont ouvert le feu provenant d'armes automatiques

22 contre cette patrouille et ils prétendaient qu'il s'agissait là, d'une

23 attaque. Au bout de 20 minutes, le pilonnage a commencé contre Svorno

24 [phon] et Blagaj Japra. Je pense que le tout avait été préparé en avance

25 parce qu'ils n'auraient pas pu organiser leur artillerie dans l'espace de

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1 20 minutes pour commencer à nous pilonner ainsi.

2 Q. Je vais maintenant nous concentrer ou me concentrer sur --

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Je souhaite simplement clarifier un point,

4 s'il vous plaît. Un point lié à la transcription.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y, Madame Loukas.

6 Mme LOUKAS : [interprétation] Mon assistante me dit que dans la traduction

7 en anglais, il est dit que les autorités ont dit : "Il ne s'agit pas là du

8 niveau d'armes auquel on s'attendait et dont on a besoin." Apparemment,

9 c'était ce qui a été dit dans la traduction en anglais. Cependant, si j'ai

10 bien compris, ce n'était pas très exactement ce qui a été dit en B/C/S.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons demander au témoin.

12 Quelle était la réponse par rapport aux armes que vous avez remises ?

13 Qu'est-ce qu'ils ont vraiment dit ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Izet Mehmedagic nous a rendu, nous a ramené

15 les armes et ils n'ont fait que rire. Ils ont dit : Ce n'est pas cela que

16 l'on demande. On vous demande de nous apporter des armes lourdes et non pas

17 seulement des fusils de chasse et des pistolets. Nous voulons d'autres

18 armes.

19 Nous n'avions pas d'autres armes. Nous avions seulement ces armes-là pour

20 lesquelles nous avions des permis. Mais ces gens-là ont simplement ri et

21 ont dit : Ceci ne suffit pas. Reprenez-les.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'entends le commentaire des interprètes

23 de la cabine anglaise. Je vous dis à l'intention des interprètes qu'à

24 chaque fois que vous avez des difficultés, veuillez demander au témoin de

25 répéter la réponse pour clarifier les choses. Je suppose que vous avez

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1 réagi par rapport à l'affirmation qu'il s'agissait du niveau et non pas du

2 type des armes.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, tout à fait. Je pense que

4 l'interprétation n'était pas appropriée.

5 M. HARMON : [interprétation]

6 Q. Dans la réponse, dans une partie de votre réponse, vous avez décrit

7 l'attaque contre le véhicule de la police militaire ou une patrouille de la

8 police. D'après votre réponse et votre description, ceci a été affirmé par

9 vous, non pas seulement sur la base de vos observations personnelles mais

10 sur la base également de ce que d'autres personnes vous ont dit, est-ce

11 exact ?

12 R. Oui, c'est exact.

13 Q. Parlons maintenant de cette première attaque contre votre village qui

14 s'est passée plus tard cette nuit-là. Pour autant que vous le sachiez, est-

15 ce que qui que ce soit de votre village a riposté contre les endroits où se

16 passait le pilonnage.

17 Est-ce qu'il s'agissait là, autrement dit d'une situation de combat ?

18 Mme LOUKAS : [interprétation] Encore une fois il n'est pas approprié de

19 poser des questions tendancieuses. Je pense que la première partie de la

20 question était appropriée, mais à mon avis il ne faut pas exprimer des

21 opinions hypothétiques.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je pense qu'il s'agit là plus d'une

23 conclusion que d'autre chose.

24 Est-ce que vous pourriez répondre à la question de savoir si qui que ce

25 soit ripostait à cette attaque ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Personne n'a tiré après que nous avons remis

2 nos armes nous n'avions plus personne, personne n'a tiré une seule balle

3 contre eux.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

5 M. HARMON : [interprétation]

6 Q. Je vais vous parler maintenant du paragraphe 17, qui comporte sur le

7 matin, au lendemain de l'attaque contre votre village. Vous y dites : "Le

8 lendemain matin Jasim Alic et Camil Dzemal Alic et d'autres voisins sont

9 allés au village de Radomirovac, et on leur a demandé pourquoi ce pilonnage

10 avait eu lieu."

11 Est-ce que vous pouvez nous dire quel était votre rapport avec Jasim Alic

12 et Camil Alic ?

13 R. Jasim Alic était mon père, et Camil Alic est un cousin.

14 Q. Très bien. Nous allons passer au paragraphe 18 maintenant qui décrit

15 l'attaque contre votre village, lorsque, approximativement, 300 obus ont

16 été lancés. Est-ce que vous pouvez approximativement nous dire combien de

17 temps a duré ce pilonnage de votre village ?

18 R. L'attaque a commencé vers 10 heures, mon père et Camil Alic n'étaient

19 pas encore rentrés chez eux, et ils ont commencé déjà à pilonner. Cela a

20 commencé vers 10 heures, 11 heures du matin et cela a duré jusqu'à environ

21 3 heures, 4 heures de l'après-midi. Jusqu'à ce que nous ne quittions le

22 village.

23 Q. Est-ce que vous et les membres de votre famille, vous vous êtes

24 réfugiés dans votre cave, encore une fois ?

25 R. Oui bien sûr. Tout au long du pilonnage nous étions dans notre cave.

Page 2514

1 Q. Pour autant que vous le sachiez est-ce que qui que ce soit de votre

2 village ripostait à cette attaque ?

3 R. Non personne n'a riposté. Nous n'étions pas en mesure de riposter à une

4 puissance aussi importante, nous n'y songions même pas.

5 Q. Très bien. Je vais attirer votre attention sur une autre partie du

6 paragraphe 18 afin de solliciter une clarification de votre part. Vous

7 décrivez dans ce paragraphe, ensuite, l'arrivée de Hamdija Selmic et

8 l'occasion où un convoi s'est constitué, un convoi constitué d'environ 1

9 000 personnes qui quittaient votre village. Voici ma question, tout d'abord

10 ces 1 000 personnes est-ce qu'ils venaient seulement de votre village, ou

11 aussi des villages avoisinants ?

12 R. Non. Seulement de notre village de Blagaj Japra.

13 Q. D'où venaient-ils de quels autres villages ?

14 R. Ils ne venaient pas d'autres villages à l'époque on était encore dans

15 nos maisons, chez nous. Ils venaient seulement de Blagaj Japra.

16 Q. Est-ce qu'il y avait qui que ce soit de Blagaj Rijeka ?

17 R. Ceux qui étaient de Blagaj Rijeka avaient fui le village de Dervisi, un

18 autre village qui surplombait le notre, c'était un village serbe.

19 Q. Le paragraphe 21, Monsieur Alic. Je vais d'abord vous donner le

20 contexte. Vous avez dit que vous avez passé une nuit dans la maison de

21 Rajko Hodzic, que vous y a passé une nuit à l'extérieur et certaines

22 personnes ont dormi dans des étables, et vous dites : "Le lendemain matin

23 environ 10 petits camions militaires sont arrivés."

24 Est-ce que vous souhaitez apporter une correction en ce qui concerne le

25 nombre de ces véhicules et leur type ?

Page 2515

1 R. Il ne s'agissait de camions, il s'agissait de 4X4 et il y avait environ

2 quatre à cinq.

3 Q. Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre comment étaient

4 vêtues les personnes dans ces 4x4 ?

5 R. Ils portaient des uniformes de camouflage, des uniformes militaires de

6 camouflage.

7 Q. Nous allons maintenant nous pencher sur le paragraphe 22. Je souhaite

8 que vous nous fournissiez un peu plus de détails au sujet de ce paragraphe.

9 Vous avez dit dans votre déclaration je cite : "Il a été permis à un groupe

10 d'hommes d'aller dans notre village de Blagaj Japra et ils sont rentrés ils

11 vous ont informé et ils ont informé les autres du fait que les Serbes

12 avaient fait monter leur drapeau dans notre village."

13 Est-ce que vous avez appris quoique ce soit d'autre concernant ces drapeaux

14 ?

15 R. Oui. Ils nous ont dit que nous pouvions rentrer chez nous, qu'ils

16 avaient monté leur drapeau et si qui que ce soit essayait de retirer les

17 drapeaux que ces gens-là, allaient être tués.

18 Q. Lorsque vous dites "ils," de qui parlez-vous ?

19 R. De ces soldats de ces voisins qui étaient partis au village.

20 Q. Le paragraphe suivant je cite vous dites : "Lorsque nous étions sur le

21 chemin de nos maisons nous avons pu voir que les maisons de notre village

22 étaient en feu, j'ai vu que la mosquée de Blagaj Rijeka brûlait, la mosquée

23 de Blagaj Japra avait été touchée par un obus mais le minerais était

24 toujours existant. Ces deux villages se trouvaient l'un à coté de l'autre,

25 seule une rivière les partageait."

Page 2516

1 Ma première question est de savoir combien de maisons brûlaient

2 dans ces deux villages ?

3 R. Approximativement trois à quatre maisons et la mosquée.

4 Q. La mosquée à Blagaj Rijeka de quoi était-elle construite ?

5 R. C'était une mosquée en bois, et à cause de cela à la fois la mosquée et

6 le minerai ont brûlé, et compte tenu du fait que la mosquée de Blagaj Japra

7 était de béton elle a résisté elle n'a pas été détruite.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous dire

9 exactement ce qui était construit en béton, puisque les interprètes n'ont

10 pas entendu un mot.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Le minerai a été de béton.

12 M. HARMON : [interprétation] Je peux préciser très rapidement Monsieur le

13 Président.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, poursuivez.

15 M. HARMON : [interprétation]

16 Q. Vous avez décrit une mosquée en bois qui se trouvait à Blagaj Rijeka,

17 est-ce qu'il y avait également une mosquée à Blagaj Japra ?

18 R. Oui, il y avait une mosquée c'est justement de cela que je parlais,

19 lorsque je disais elle a été touchée mais que son minerais n'a pas été

20 détruit. Elle fut touchée, mais le minerai est bien resté debout.

21 Q. Lorsque vous parliez d'un minaret ou plutôt d'une mosquée en béton. Il

22 s'agissait de la mosquée de Blagaj Japra; c'est bien exact ?

23 R. Oui.

24 M. HARMON : [interprétation] Je pense que nous avons précisé, Monsieur le

25 Président.

Page 2517

1 Q. Est-ce que je pourrais avoir la pièce à conviction suivante.

2 Qu'est-il advenu de la mosquée à Blagaj Japra après les dégâts ?

3 R. Voilà où se trouvait la mosquée. Pendant que j'étais au camp à Mlakve,

4 on pouvait voir qu'elle avait été complètement détruite. Je ne sais pas qui

5 l'a détruit et quand est-ce que cela s'est passé. De toute façon, cela

6 s'est passé pendant ma détention. La mosquée a été complètement rasée et

7 réduite en cendre. On ne pouvait plus voir que ses fondations et rien

8 d'autre.

9 M. HARMON : [interprétation] Vous voyez que le témoin a fait référence à

10 une pièce à conviction qui n'avait pas encore de cote que je lui ai donnée.

11 Nous aimerions pouvoir avoir une cote.

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P79.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, il y a une date qui a

14 été apposée. Est-ce que vous pourriez, par l'entremise du témoin ou en

15 informant la Chambre de première instance, nous fournir des explications à

16 propos du sens de cette date ?

17 M. HARMON : [interprétation] Je le ferais avec plaisir, Monsieur le

18 Président, mais je ne peux pas vous fournir d'explication tout de suite.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Est-ce que vous pourriez

20 également faire en sorte d'attendre pour que nous voyions cela sur nos

21 écrans. Est-ce que nous pourrions attendre parce qu'en règle générale je ne

22 passe pas sur une autre chaîne. Est-ce que nous pourrions attendre jusqu'à

23 ce que les nouvelles pièces à conviction soient présentées. Poursuivez.

24 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. A titre

25 d'information, je vous dirais qu'il s'agit de la pièce à conviction

Page 2518

1 afférente à l'annexe D3.6.

2 Q. Monsieur Alic, c'est ce qui reste de la mosquée de Blagaj Japra ? Est-

3 ce bien exact ?

4 R. Oui. C'est ce qui reste effectivement, juste le béton.

5 Q. Nous allons passer au paragraphe 25. Je vais vous donner lecture. Il

6 est très bref d'ailleurs : "Les jours suivants, d'autres villages musulmans

7 ont également été pilonnés. Nous pouvions l'entendre."

8 J'aimerais maintenant obtenir de plus amples renseignements à propos de

9 cela, Monsieur Alic. J'aimerais savoir si à ce moment-là vous étiez en

10 contact avec des villageois qui se trouvaient dans d'autres villages

11 musulmans ?

12 R. Oui. Ma mère est née à Suhaca. J'avais d'autres membres de ma famille

13 qui se trouvaient à Vozici [phon]. Je leur avais parlé par téléphone. Ils

14 m'avaient dit que Suhaca avait été attaqué. Ils nous avaient dit également

15 que Lozici [phon], Agici, avaient été attaqués. Ils nous ont dit que dans

16 un premier temps, ils attaqueraient ces villages, qu'ils confisqueraient

17 les armes. Ils ont fait la même chose dans ces villages. Ils ont fait

18 exactement ce qu'ils avaient fait à Blagaj Japra auparavant.

19 Q. A votre connaissance, Monsieur Alic, les villageois musulmans qui se

20 trouvaient dans les villages que vous avez identifiés, avaient-ils des

21 mosquées dans ces villages ?

22 R. Oui. Il y avait une mosquée à Suhaca, à Vozici, à Donji Agici, et à

23 Gornji Agici. En fait, elles ont toutes été détruites à l'instar de la

24 mosquée de Blagaj Japra.

25 Q. J'aimerais maintenant vous demander de porter votre attention sur le

Page 2519

1 paragraphe 26 dont je vais vous donner lecture. Il s'agit à nouveau d'un

2 paragraphe très bref. Je cite : "Après qu'ils en aient terminé avec les

3 villages avoisinants, et j'entends après qu'ils ont terminé le pilonnage,

4 ils ont forcé ces habitants à se rendre à Blagaj Japra."

5 Combien de personnes environ sont venues de ces villages à Blagaj Japra ?

6 R. Environ 10 000.

7 Q. Dans votre déposition, vous poursuivez : "Nous leur avons demandé ce

8 qui s'était produit, et ils nous ont dit que leurs maisons avaient été

9 incendiées et que les Serbes de la Défense territoriale serbe leur avaient

10 dit de se rendre à Blagaj Japra."

11 Il s'agit du paragraphe 26. Ces personnes qui avaient été déplacées des

12 autres villages musulmans, combien du temps sont-elles restées à Blagaj

13 Japra ?

14 R. Entre 15 à 17 jours.

15 Q. Vous avez eu la possibilité de leur parler des événements qui s'étaient

16 produits dans leurs villages ?

17 R. Oui. Les deux frères de ma mère sont séjournés chez nous. Il y avait

18 également des membres de ma famille de Vozici. Ils nous ont raconté ce qui

19 leur était arrivé. Il faut savoir que ce qui leur arrivait était exactement

20 la même chose qui nous était arrivée.

21 Q. Dans le paragraphe suivant, vous décrivez des négociations avec les

22 Serbes de la municipalité de Bosanski Novi. Dans un premier temps, vous

23 n'avez participé personnellement à ces négociations ?

24 R. Non, je n'y ai pas participé.

25 Q. Qui étaient les négociateurs ?

Page 2520

1 R. Il s'agit plutôt de Izet Mehmedagic et Sifet Bajraktarevic.

2 Sifet Bajraktarevic était le président du SDA à Suhaca, et Izet Mehmedagic

3 était le président du SDA à Blagaj Japra.

4 Q. Est-ce qu'ils vous ont informé du déroulement des négociations ?

5 R. Oui. Ils souhaitaient que les gens puissent regagner leur foyer; bien

6 que cela ne soit pas autorisé. Il s'agit de toute évidence de nettoyage

7 ethnique. C'est aussi simple que cela puisqu'ils ne souhaitaient pas

8 autoriser les personnes à rentrer chez elles pendant les négociations.

9 Q. Que disaient-ils ? Qui vous l'a relaté ?

10 R. Izet et Sifet nous ont raconté ce qu'ils leur avaient été dits. En

11 d'autres termes, que nous n'aurions pas le droit de rentrer chez nous.

12 Q. J'aimerais maintenant passer au paragraphe 28, et plus précisément la

13 deuxième phrase de ce paragraphe qui dit, et je cite : "Le 8 juin 1992,

14 vers 17 heures 00, Ranko Gvozden et Mico Dolic nous ont dit que nous

15 devions tous être prêts à 7 heures 00 le lendemain étant donné que nous

16 devions quitter le village."

17 Est-ce que vous pourriez me dire, Monsieur Alic, qui était Ranko Gvozden et

18 Mico Dolic ?

19 R. C'étaient des personnes originaires du village de Maslovare.

20 Q. Ils étaient Serbes, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, ils étaient Serbes. Ce n'étaient pas des officiers. Ils portaient

22 tout simplement des uniformes militaires.

23 Q. Nous allons maintenant passer au paragraphe 29. Dans ce paragraphe,

24 vous décrivez comment des soldats serbes sont arrivés chez vous ce matin-

25 là. Ils cherchaient votre frère et d'autres personnes, et "ils nous ont dit

Page 2521

1 de quitter la maison."

2 Quelle était la tenue vestimentaire de ces personnes ?

3 R. Certaines portaient des cagoules, d'autres n'en portaient pas.

4 Certaines portaient des uniformes militaires, alors que d'autres portaient

5 des uniformes de camouflage.

6 Q. Un peu plus loin dans le paragraphe, Monsieur Alic, vous nous dites que

7 vous avez vu un blindé entouré de soldats serbes, des réservistes. Est-ce

8 que cela vous a semblé que l'expulsion des villageois de votre village

9 avait été organisée ou est-ce que vous avez eu l'impression que cela

10 s'était passé de façon un peu au hasard, de façon fortuite, et que cela

11 avait été exécutée par des organisations paramilitaires ?

12 R. Non, non. C'était organisé. Tout avait été organisé, car dans un

13 premier temps, tous les habitants de la vallée de la Japra ont été emmenés

14 à Blagaj Japra, ensuite, ceux qui se trouvaient à Blagaj Japra ont dû

15 poursuivre leur avancée.

16 Q. Au même paragraphe, au paragraphe 29, vous nous dites que vous avez été

17 emmené dans l'école primaire et que vous avez, ensuite, été libéré de

18 l'école primaire et que lorsque vous vous êtes retrouvé dans la rue, et je

19 cite : "A ce moment-là, nous sommes sortis et nous avons vu que les maisons

20 et les granges étaient en train de brûler."

21 Est-ce que vous pouvez nous dire combien de maisons et combien de granges

22 brûlaient ?

23 R. Il y en avait beaucoup. Tout ce qui se trouvait jusqu'à l'école était

24 en feu. Voilà ce qu'ils avaient atteint. Il ne s'agit pas seulement de

25 maisons, mais de granges, d'étables, de bottes de foin. Tout brûlait.

Page 2522

1 Q. A cette occasion, lorsqu'on vous a fait sortir de votre maison et

2 pendant que vous vous trouviez dans l'école, ensuite, lorsque vous êtes

3 ressortis dans la rue, avez-vous entendu des détonations ou des coups de

4 feu ?

5 R. Oui. Il y avait des tirs tous azimuts; depuis le haute de la colline,

6 dans toutes les directions. C'étaient, en fait, les Serbes qui nous

7 tiraient dessus. Peut-être qu'ils ne nous visaient pas particulièrement.

8 Ils le faisaient pour nous intimider. Ils ne nous tiraient pas dessus.

9 Q. J'aimerais attirer votre attention sur le paragraphe 36, puisque dans

10 ce paragraphe, vous nous dites que les soldats vous ont donné l'ordre de

11 vous rendre dans le complexe de Japra.

12 M. HARMON : [interprétation] J'aimerais vous montrer la pièce à conviction

13 suivante. J'aimerais vous montrer une photographie.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que la Greffière d'audience

15 pourrait nous donner une cote ?

16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction P80.

17 M. HARMON : [interprétation] Merci.

18 Q. Monsieur Alic, reconnaissez-vous cette photographie P80 ?

19 R. Il s'agit de la zone que l'on appelle Japra.

20 Q. Est-ce que c'est l'endroit où vous-même et des milliers d'autres

21 Musulmans qui avaient été expulsés du village se sont retrouvés avant

22 d'être transportés par train à l'extérieur de la municipalité ?

23 R. Oui, nous nous sommes tous rassemblés dans l'enceinte de la société

24 Japra.

25 Q. A partir de cet endroit, vous avez été mis dans des trains, est-ce bien

Page 2523

1 exact ?

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Je pense que cela faisait partie de la

5 question précédente. Il s'agit d'une répétition. Bien entendu, nous avons

6 tous le droit de nous répéter dans un prétoire mais je ne vois pas

7 l'objectif de cette question. De toute façon, il s'agit d'une question

8 directrice.

9 M. HARMON : [interprétation] Dans un premier temps, Monsieur le Président,

10 il m'appartient de déterminer de l'objectif d'une question. Il faut savoir

11 qu'il y a certaines questions directrices qui aboutissent à d'autres

12 questions supplémentaires. C'était une question préliminaire qui me permet

13 d'aborder un autre domaine.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, pour ce qui est de la

15 répétition, le témoin a déjà répondu à la moitié de la question. Je pense

16 que vous n'avez aucune raison de soulever une objection contre la deuxième

17 partie de la question. Je vous accorde le fait qu'il s'agit d'une question

18 directrice.

19 Par ailleurs, nous avons, bien entendu, une déclaration assez détaillée. Je

20 ne pense pas que cela puisse indiquer au témoin une réponse éventuelle.

21 Pour ce qui est de la question directrice, je suis d'accord avec vous dans

22 une certaine mesure, mais compte tenu des circonstances actuelles, je ne

23 pense pas que nous devions accepter cette objection.

24 Je vous en prie, poursuivez, Monsieur Harmon.

25 M. HARMON : [interprétation] Cette photographie, Monsieur le Président,

Page 2524

1 Messieurs les Juges, est une photographie relative à l'annexe C, 5.1 de

2 l'annexe.

3 Q. Monsieur Alic, est-ce qu'il y avait une voie ferrée près de ce bâtiment

4 qui se trouve sur cette pièce à conviction P80 de l'Accusation ?

5 R. Oui. Sur la gauche, bien que vous ne puissiez pas le voir sur la photo.

6 Il y avait effectivement des voies ferrées. Il y avait également une route

7 qui allait vers Prijedor. Il s'agissait, en fait, de l'axe routier

8 principal Prijedor-Bosanski Novi.

9 Q. Très bien. Au paragraphe 39 de votre déclaration, vous dites, et je

10 cite : "Ensuite, les Serbes nous ont dit qu'ils nous emmèneraient à Zenica

11 et qu'ils nous échangeraient avec la population serbe de ce village, et que

12 ces personnes viendraient dans notre village."

13 Qui vous a dit cela ?

14 R. Mico Dolic me l'a dit. Il portait un uniforme militaire. Il buvait du

15 café. Je lui ai demandé : Mico, où est-ce qu'on nous emmène ? Il m'a dit :

16 Vous irez à Zenica à l'endroit où les Serbes ont été déplacés et ces Serbes

17 vont venir dans votre village. C'est Mico Dolic qui me l'a dit.

18 Q. Est-ce que cette même personne vous avait également transmis le message

19 selon lequel vous deviez quitter votre village plus tôt pendant la même

20 journée ?

21 R. Oui. Ranko Gvozden et Mico Dolic étaient ensemble.

22 Q. A partir de cet endroit, et je fais référence au paragraphe 40, où il

23 est dit, je cite : "Vers 18 ou 19 heures 00, ils nous ont fait tous montés

24 à bord de wagons à bestiaux qui se trouvaient à l'extérieur de la société."

25 A qui faites-vous allusion lorsque vous dites "ils" ?

Page 2525

1 R. Des Serbes, des voisins.

2 Q. Ces voisins serbes qui vous ont fait montés dans ces wagons, comment

3 est-ce qu'ils étaient habillés ?

4 R. Ils portaient des uniformes militaires de camouflages.

5 Q. J'aimerais maintenant vous montrer la prochaine pièce à conviction.

6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce P81.

7 M. HARMON : [interprétation]

8 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que l'on peut voir dans la pièce

9 P81 ?

10 R. Vous pouvez voir un train assez semblable à celui qui nous a

11 transporté. C'étaient des compartiments ouverts -- il y avait des

12 compartiments ouverts et des compartiments fermes. Les hommes ont été

13 transportés dans les compartiments ouverts et les femmes et les enfants

14 dans les compartiments fermés.

15 Q. A peu près combien de personnes ont dû monter à bord de ces wagons à

16 bestiaux que vous nous avez décrits.

17 R. Environ une centaine, cela dépendait des différents wagons j'ai pas

18 véritablement compté les gens. Mais tous les compartiments tous les wagons

19 étaient pleins.

20 Q. J'aimerais maintenant attirer votre attention sur le paragraphe 41, car

21 dans votre déclaration vous nous dites et

22 je cite : "Je dirais qu'il y avait environ quelques 20 000 personnes."

23 Il y a une minute de cela vous m'avez répondu qu'il y avait environ 100

24 personnes. La question que j'aimerais vous poser est la suivante, Monsieur

25 Alic : Combien de personnes ont été montées, ont été transportées à bord de

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1 ces wagons en tout ?

2 R. Environ 15 000.

3 Q. Je suppose que vous souhaiterez corriger ce qui se trouve au paragraphe

4 41, puisqu'il s'agit d'un chiffre environ approximativement de 15 000 et

5 non pas de 20 000.

6 R. Oui, environ 15 000 c'est exact.

7 Q. Lorsque ces personnes sont montées à bord de ces wagons, est-ce qu'il y

8 avait des vivres ? Est-ce que qu'il y avait de l'eau dans ces wagons ? Est-

9 ce qu'il y avait des couvertures ? Est-ce qu'il y avait des produits de

10 première nécessité. Est-ce qu'il y avait des vêtements pour se protéger ?

11 Est-ce qu'il y avait des installations sanitaires qui ont été fournies qui

12 sont montées à bord ?

13 R. Il n'y avait absolument rien. Ils nous ont fait monter dans ce train,

14 et ils nous ont embarqué comme s'ils embarquaient du bétail.

15 Q. Les personnes qui ont dû monter à bord des wagons, quelle était leur

16 appartenance ethnique ?

17 R. Il s'agissait de Musulmans.

18 Q. Quel était l'âge de ces personnes ?

19 R. Il y avait des enfants, des nourrissons d'une journée, il y avait des

20 enfants de 2, 3 ans. Il y avait des personnes qui avaient 80 ans, il y

21 avait des personnes âgées.

22 Q. Monsieur Alic, auriez-vous pu refuser de monter dans ces wagons ?

23 R. Nous n'avions pas le choix, nous devions monter dans ce train.

24 Q. M. Dolic, qui vous a fourni des informations à propos de l'endroit où

25 vous alliez ? Est-ce qu'il y a eu des informations qui ont été transmises à

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1 ces quelques 15 000 personnes. Est-ce qu'on leur a indiqué où est-ce

2 qu'elles allaient, ce qui leur arriverait quand est-ce qu'elles

3 arriveraient ?

4 R. Il nous a dit qu'on nous emmenait à Zenica pour y rester pour toujours.

5 Que les Serbes viendraient à Blagaj Japra mais ce n'est pas ainsi ou plutôt

6 c'était un cas de nettoyage ethnique parce que nous ne sommes jamais

7 revenus dans l'endroit d'où nous étions originaires.

8 Q. J'aimerais maintenant attirer votre attention sur le paragraphe 42.

9 Mme LOUKAS : [interprétation] A propos de cette dernière question et à

10 propos de la dernière réponse.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] De toute évidence la réponse n'est pas une

13 réponse appropriée à la question.

14 M. HARMON : [interprétation] Je ne suis pas sûr qu'il s'agit d'une

15 objection, je pense qu'il est tout à fait juste que le témoin puisse nous

16 dire que lui même et les 15 000 autres personnes ont été mis dans ces

17 wagons à bestiaux et qu'ils ont été expulsés de façon permanente de leur

18 municipalité, et que je pense que le fait de dire qu'il s'agit d'une

19 opération de nettoyage ethnique est une réponse tout à fait appropriée.

20 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, mais, Monsieur le Président, je pense

21 qu'il appartient à la cour d'en décider.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Loukas, vous pouvez vous

23 attendre de la part de la Chambre de première instance que, si un témoin

24 décrit une situation, et expose des faits et ajoute son point de vue de

25 façon générale, il est évident que la Chambre de première instance ne

Page 2528

1 considèrera pas cela comme quelque chose qu'on doit accepter. Il lui

2 appartiendra de se forger sa propre opinion.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous remercie.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Harmon.

5 M. HARMON : [interprétation]

6 Q. J'aimerais attirer votre attention sur le paragraphe 41, et à propos de

7 ce paragraphe Monsieur Alic pour placer cela dans le contexte, une fois les

8 gens ont été ou sont montés dans les trains, le train a commencé son voyage

9 et je cite : "Nous avons voyagé toute la nuit et le lendemain matin, et le

10 train s'est arrêté dans le village de Stanari qui se trouve près de Doboj.

11 On nous a demandés de sortir."

12 Ensuite, au paragraphe suivant, vous dites : "L'armée et la police

13 militaire sont arrivées, ils ont commencé à nouveau à nous séparer. Ils ont

14 mis dans un train tous les hommes et les femmes ont dû monter dans un autre

15 train."

16 J'aimerais souligner dans un premier temps cela, ils ont mis dans un train

17 tous les hommes, et les femmes dans un autre train. Combien d'hommes ont

18 été séparés et ont été placés dans un train, et combien de personnes ont

19 été séparées et mises dans un autre train ?

20 Je vais reformuler ma question, parce qu'elle n'a pas été très bien

21 formulée. Il y avait environ 15 000 personnes est-ce que tous les hommes

22 ont été séparés des autres personnes qui se trouvaient dans ce train, ou

23 est-ce que certains hommes seulement ont été séparés ?

24 R. Seuls les hommes en âge de porter des armes ont été séparés. Les

25 enfants, les mineurs et les personnes âgées sont restés avec les femmes et

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1 les enfants.

2 Q. Environ combien d'hommes en âge de porter des armes ont été séparés, et

3 placés à bord de ce train -- de ce train différent ?

4 R. Environ 750.

5 Q. Etiez-vous l'un de ces 750 hommes qui ont été séparés et placés dans un

6 train différent ?

7 R. Oui, tout à fait.

8 Q. J'aimerais attirer votre attention, non pas sur le groupe de 750

9 personnes, mais sur l'autre groupe de personnes. Savez-vous quel a été leur

10 sort ?

11 R. Pendant qu'on nous plaçait dans les wagons ils fermaient les portes et

12 nous ne savons pas ce qui est advenu aux autres. Nous ne savons pas ce qui

13 allait nous arriver de toute façon, ils ont fermé la porte, les portes nous

14 ne voyons pas où ils nous amenaient on voyait très très peu à travers les

15 barreaux. Nous ne pouvions que deviner que nous retournions dans la

16 direction de Banja Luka, nous ne savions pas ce qui est arrivé aux femmes

17 et aux enfants.

18 Q. Qu'est-il advenu aux femmes ou plutôt je me reprends. Est-ce que votre

19 femme et vos enfants ont été dans un premier temps séparés, et mis dans un

20 autre train ?

21 R. Oui.

22 Q. Qu'est-il arrivé à votre femme et à vos enfants, et aux autres

23 personnes qui se trouvaient avec eux ?

24 R. A ce moment-là, nous ne savions pas où ils se sont rendus. Nous n'avons

25 reçu aucune information nous ne savons pas où ils ont été emmenés, nous ne

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1 savions pas ce qui leur est arrivé.

2 Q. Est-ce que votre femme vous a relaté par la suite ce qui lui est

3 arrivé, ce qui est arrivé à vos enfants, et ce qui est arrivé aux autres

4 également ?

5 R. Oui, une fois que nous avons été réunis à Karlovac lorsque j'ai été

6 libéré du camp, elle m'a dit qu'ils ont dans un premier temps été emmenés à

7 Doboj puisqu'ils ont été transférés en Croatie, et qu'à partir à Slavonska

8 Pozega et qu'à partir delà ils ont été transférés à Zagreb.

9 Q. Qu'est-il arrivé --

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre mais

11 j'aimerais vous poser une question. Combien de temps souhaitez-vous

12 disposer ? Est-ce que vous pourriez nous fournir une indication comme vous

13 l'avez demandé avant notre première pause, parce qu'il s'agit de quelques

14 minutes, nous pouvons poursuivre, sinon, nous pourrions avoir la pause

15 maintenant.

16 M. HARMON : [interprétation] Je pense que nous pourrions avoir la pause

17 maintenant, parce que je ne prendrais pas trop longtemps après la pause,

18 mais --

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etant donné que vous avez indiqué que

20 votre interrogatoire durait une heure et demie. Il vous reste six minutes

21 pour arriver à une heure et demie.

22 Nous allons avoir la pause jusqu'à 13 heures 5.

23 --- L'audience est suspendue à 12 heures 46.

24 --- L'audience est reprise à 13 heures 08.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, poursuivez, Monsieur

Page 2531

1 Harmon.

2 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, vous m'avez posé une

3 question à propos des chiffres qui apparaissent sur ces photos.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

5 M. HARMON : [interprétation] Les dates. Les dates semblent d'après ce que

6 j'ai compris, il doit s'agir des dates auxquelles l'enquêteur a pris la

7 photo pour le bureau du Procureur, et le nombre entre parenthèse est un

8 nombre que vous verrez, c'est un nombre séquentiel sur les photographies.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est correct, poursuivez.

10 M. HARMON : [interprétation]

11 Q. Monsieur Alic, lorsque nous nous sommes arrêtés avant la pause, vous

12 parliez dans votre témoignage du village de Stanari. Vous dites qu'il y a

13 eu une séparation entre deux groupes, votre groupe qui comportait environ

14 750 hommes environ.

15 Lorsque vous étiez à Stanari vous-même ainsi que les autres personnes qui

16 se trouvaient dans le train, y a-t-il eu des dispositions prises par

17 rapport à l'approvisionnement en eau, en nourritures, en couvertures, et en

18 installations sanitaires approprié ?

19 R. Non. Nous n'avons rien reçu. Lorsque nous devions aller aux toilettes,

20 nous devions simplement nous mettre devant le wagon. C'est tout, et nous

21 n'avions accès à aucune toilette ni rien.

22 Q. Lorsque vous êtes monté à bord du train, rien n'a été mis à votre

23 disposition non plus ?

24 R. Non. Rien du tout, rien n'a été mis à notre disposition, rien du tout.

25 Q. je souhaite maintenant passer au paragraphe 43 de votre déclaration. Au

Page 2532

1 paragraphe 43 de votre déclaration, vous dites, Monsieur Alic, vous avez

2 décrit un peu plus tôt l'odyssée qui a été le vôtre. Votre voyage à

3 Omarska, à Keraterm, et, ensuite, votre retour à Bosanski Novi, et vous

4 êtes arrivés à Bosanski Novi. Vous êtes resté dans les wagons de ce train

5 pendant deux jours, ce qui est décrit au paragraphe 43.

6 La question que je souhaite vous poser est la suivante : Lorsque vous êtes

7 arrivé au stade de Mlakve, vous dites, je vous cites : "Ils nous ont permis

8 de quitter les wagons. Ils nous ont emmenés au stade, ils nous ont mis en

9 rang, et ils ont inscrit nos noms. Ils nous ont donné une boite de sardine,

10 etcetera."

11 Ma question -- la question que je vous pose est la suivante : De qui

12 parlez-vous lorsque vous parlez de "ils" ?

13 R. J'entends les troupes serbes.

14 Q. Lorsque vous êtes arrivés au stade, même pouviez-vous circuler

15 librement à l'intérieur du stade ?

16 R. Non. Nous ne pouvions pas d'où nous étions, dans une partie du stade,

17 et nous ne pouvions pas aller au-delà d'un certain point.

18 Q. Je souhaite maintenant vous montrer la pièce suivante. Il s'agit d'une

19 pièce qui représente le stade de Mlakve. On voit ici certaines annotations.

20 Je vais vous poser des questions à propos de cette pièce, après avoir reçu

21 une cote.

22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la cote P82.

23 M. HARMON : [interprétation]

24 Q. Monsieur Alic, vous ai-je montré un exemplaire d'une photographie hier.

25 M'avez-vous montré à quel endroit des gardes ont pris position, armés, là

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1 où il y avait une sentinelle avec un fusil, mitrailleur, à quel endroit se

2 trouvait les vestiaires ?

3 R. Oui, oui tout à fait.

4 Q. S'agit-il bien d'une photographie du stade de Mlakve, et là où il y a

5 des annotations, est-ce que cela représente bien l'emplacement de ces

6 armes, et ces différentes positions ?

7 R. Oui.

8 Q. A quelle distance de ce stade, Monsieur Alic, se trouvait la Croatie ?

9 R. En fait derrière ce stade, il y a un autre stade. Un stade annexe. Vous

10 connaissez la largeur de ce stade, je crois. Vous pouvez imaginer si vous

11 allez un peu plus loin, vous tombez sur un fleuve et derrière ce fleuve, de

12 l'autre côté se trouve la Croatie.

13 Q. Depuis le stade, vous pouvez voir la Croatie ?

14 R. Oui, oui, tout à fait. D'ici, à droite, à droite dans l'angle de cette

15 photographie, on peut apercevoir des maisons tout au fond.

16 Q. Je souhaite vous montrer une autre pièce maintenant qui portera sans

17 doute la cote P83. Est-ce exact ?

18 Qu'est-ce que vous voyez dans cette pièce de l'Accusation P83 ?

19 R. Ici, on voit le stade où nous avons été détenus. Mais nous n'étions

20 autorisés qu'à occuper une partie, la moitie du stade. Nous n'étions pas

21 autorisé à aller au-delà de la voie de chemin de fer -- en direction du

22 chemin de fer. Nous n'étions pas autorisé à aller plus loin.

23 Q. Lorsque vous dites "stade," Monsieur Alic, est-ce que vous faites

24 allusion ici au terrain de football que l'on voit, ici, au centre de cette

25 photographie ?

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1 R. Oui, tout à fait. C'est cela que j'entends.

2 Q. Pourriez-vous nous décrire un petit peu quelle était votre vie au

3 quotidien lorsque vous étiez au stade de Mlakve. Que faisiez-vous après

4 vous être levé ? Que faisiez-vous tout au long de la journée ? A quel

5 moment receviez-vous de la nourriture ?

6 R. Nous n'avions pas de montre. Nous nous levions le matin. En général, il

7 y avait de la brume parce qu'il y a un fleuve tout près. Quelquefois, ils

8 nous mettaient en rang et nous demandaient de rester là, au soleil.

9 Quelquefois, ils nous demandaient de manger de l'herbe, de faire toute

10 sorte d'autres choses.

11 Q. Pouviez-vous, en toute liberté, quitté le stade ?

12 R. Non, en aucune façon. Les gardes nous encerclaient de tous côtés.

13 Q. Au paragraphe 44, vous décrivez l'incident au cours duquel vous avez

14 perdu la vue de votre œil. Pourriez-vous décrire ceci plus en détail et

15 nous dire comment vous avez été frappé ?

16 R. Je peux décrire cela. Un jour, ils nous ont dit que nous devions

17 rentrer précipitamment. Ils ont commencé à nous pousser avec des crosses de

18 fusils. Quelqu'un m'a frappé dans le dos. Quelqu'un d'autre a touché mon

19 œil. J'ai perdu la vue. Après cela, je n'ai pas pu voir qui c'était.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant la pause, j'ai précisé qu'il vous

21 restait six minutes. Nous sommes maintenant à huit minutes. Je vous demande

22 de bien vouloir terminer le plus rapidement possible, je vous prie.

23 M. HARMON : [interprétation]

24 Q. Eu égard aux soins médicaux qui vous ont été prodigués, y avait-il des

25 soins médicaux au stade de Mlakve ?

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1 R. Non, du tout. Quel genre de soins médicaux entendez-vous ? Il n'y avait

2 même pas de nourriture, encore moins de soins médicaux.

3 M. HARMON : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite attirer votre

4 attention au paragraphe 45, la dernière ligne, le deuxième mot. Nous

5 devions "tirer," non pas "drug" mais "drag." C'est une erreur qui s'est

6 glissée, ici, dans le texte. "Nous devions tirer des rouleaux qui étaient

7 lourds." Je vais poursuivre.

8 Q. Je souhaite, maintenant, vous montrer la pièce suivante. Pendant que

9 l'on prépare cette pièce suivante, je souhaite vous dire de quoi il s'agit

10 ici. Je vous demande de regarder cette pièce. Monsieur Alic, est-ce que

11 vous reconnaissez cette pièce ?

12 R. Oui, oui, tout à fait.

13 Q. Parlez aux Juges, je vous prie, de cette pièce.

14 R. Oui, je peux. Lorsque j'étais dans le camp, ma sœur prenait soin de

15 tous mes papiers, car les Serbes avaient dit que toutes les personnes qui

16 souhaitaient quitter Bosanski Novi seraient relâchées après avoir rempli un

17 certain nombre de papiers. Ma sœur s'en était occupée puisqu'elle pouvait

18 circuler librement. Elle est venue au camp avec ces documents mais malgré

19 cela, après qu'elle ait tout rempli, je n'ai pas pu être relâché. Après,

20 ils nous ont obligés à signer des papiers qu'ils nous ont donnés de façon à

21 pouvoir être libéré. Dans ces documents, nous devions remettre tous nos

22 biens à la Republika Srpska et déclarer que nous quittions Bosanski Novi de

23 notre plein gré.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, pourrions-nous

25 avoir une cote, s'il vous plaît ?

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1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce numéro P84.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

3 M. HARMON : [interprétation]

4 Q. Pourquoi votre sœur est-elle venue vous apporter ce document ? Quel

5 était l'objet de ceci ?

6 R. Tout ceci avait été fait pour que je puisse quitter le camp.

7 Q. Pour finir, vous avez précisé au paragraphe 47 que je vous cite :

8 "Avant de quitter le camp, ils nous ont dit que si nous souhaitions partir,

9 nous devions signer un document, que nous quittions la municipalité de

10 Bosanski Novi de notre plein gré et ils nous ont obligé à nous défaire de

11 nos biens."

12 Encore une fois, de qui s'agit-il, ici, lorsque vous dites "ils" ?

13 R. Des hommes sont arrivés en uniforme. Ils portaient ces documents à la

14 main. Tout avait été rempli à l'avance. Ils ont simplement rempli nos noms

15 dans la case et nous devions signer. On précisait par là que l'on quittait

16 Bosanski Novi et on se rendait en Croatie.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon.

18 M. HARMON : [interprétation] Ecoutez, j'ai encore la dernière pièce.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Vous aviez

20 précisé que vous avez besoin d'une heure et demie. Nous avons déjà dépassé

21 ce temps de sept à huit minutes. La pièce suivante, je vous prie, numéro de

22 cote P85, je suppose, Madame la Greffière.

23 M. HARMON : [interprétation]

24 Q. Monsieur Alic, brièvement, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre,

25 s'il vous plaît, de quoi il s'agit ici ?

Page 2537

1 R. Ici, il s'agit là de mon certificat attestant de mon séjour dans le

2 camp pendant quelques quatre à cinq jours.

3 Q. Je remarque, Monsieur Alic, que la date à laquelle il est fait

4 allusion, ici, dans la pièce, est le 9 juin 1992 et la date va du 9 juin

5 1992 au 23 juillet 1992. Vous êtes arrivé à Bosanski Novi le 9 juillet.

6 Vous êtes arrivé au camp le 11, ce qui signifie que le 9 juillet 1992, vous

7 êtes arrivé au camp, en somme, le 11 juillet 1992, n'est-ce pas ?

8 R. Oui. Mais je tiens également compte des jours que j'ai passé dans les

9 wagons de trains. Je compte à partir du jour où nous avons été chassés de

10 chez nous.

11 Q. Monsieur Alic, je vous remercie beaucoup pour le témoignage que vous

12 avez bien voulu faire aujourd'hui.

13 M. HARMON : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions, Monsieur le

14 Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense, êtes-vous disposé à

16 commencer le contre-interrogatoire de M. Alic ?

17 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, comme j'ai précisé ce

18 matin avant de terminer le contre-interrogatoire du témoin précédent, M.

19 Hasanovic, que j'avais reçu quelques éléments supplémentaires ce matin et

20 que je n'ai pas eu l'occasion de relire cet élément-là.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De toute façon, vous n'allez pas pouvoir

22 terminer le contre-interrogatoire aujourd'hui.

23 Mme LOUKAS : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De toute façon, vous ne pouvez pas

25 terminer le contre-interrogatoire aujourd'hui et le témoin va revenir cet

Page 2538

1 après-midi.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez précisé que le témoin suivant,

4 c'est vous qui procéderiez à l'examen de ce témoin en premier.

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, c'est exact.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous avons des questions d'ordre

7 pratique, ont-ils résolues, Monsieur Harmon ? Nous avons une autre

8 difficulté lorsqu'il s'agit du témoin suivant. Nous devons passer à huis

9 clos partiel et nous allons demander à ce témoin de quitter le prétoire

10 pendant quelques instants.

11 Je vous demande de bien vouloir suivre, Monsieur l'Huissier pendant

12 quelques instants. Il s'agit d'une question de procédure que nous

13 souhaitons évoquer en dehors de votre présence. Il ne s'agit pas de quelque

14 chose qui vous concerne personnellement, Monsieur.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci ne pose aucun problème.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous voulez bien faire sortir

17 le témoin, mais assurez-vous qu'il puisse rentrer rapidement par la suite.

18 [Le témoin se retire]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaite passer à huis clos partiel.

20 [Audience à huis clos partiel]

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5 [Audience publique]

6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Alic, vous allez être contre-

8 interrogé par le conseil de la Défense, mais pas pour l'instant. Nous

9 pensions que ceci aurait lieu aujourd'hui. Vous pouvez disposer maintenant,

10 mais nous aimerions vous revoir dans le prétoire demain. C'est pour des

11 raisons pratiques que nous avons dû changer l'ordre un petit peu. Si cela

12 vous pose des problèmes, nous sommes, tout à fait, désolé pour cela.

13 Monsieur Alic, je dois vous demander de ne parler à personne, ni à votre

14 conseil non plus, ni avec d'autres personnes. Je vous demande, instamment,

15 de ne parler de votre témoignage à personne des éléments de votre

16 témoignage et de ce que vous avez dit jusqu'à présent, et à propos du

17 témoignage que vous devez encore faire d'ici demain, en tout cas.

18 Monsieur l'Huissier, je vous demande de bien vouloir raccompagner, Monsieur

19 Alic.

20 [Le témoin se retire du prétoire]

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois comprendre qu'il n'y a pas de

22 mesures de protection demandées pour le témoin suivant ?

23 M. HARMON : [interprétation] C'est exact.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaite passer à huis clos partiel

25 pour soulever un point précis.

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1 [Audience à huis clos partiel]

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25 [Audience publique]

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis, c'est vous qui allez

2 interroger le témoin suivant ?

3 M. HANNIS : [interprétation] Oui, tout à fait. Il s'agit de M. Hidic.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il nous reste quelques secondes. A

5 propos de la déclaration de M. Alic, j'ai vu mjesna zajednica, je ne sais

6 pas ce que cela signifie. J'ai vu ce terme employé à plusieurs reprises.

7 Cela n'a pas été traduit en anglais. Peut-être que les interprètes peuvent

8 nous aider ici en la matière.

9 L'INTERPRÈTE : Monsieur le Président, cela signifie commune locale.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Hidic. Est-ce que vous

13 m'entendez dans une langue que vous comprenez ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'entends.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de déposer devant ce Tribunal en

16 vertu des Règlements de procédure et de preuve, vous devez lire la

17 déclaration que vous direz la vérité, toute la vérité, et rien que la

18 vérité. Vous aurez le texte de cette déclaration que l'Huissier vous

19 donne. Veuillez la lire.

20 LE TÉMOIN : AHMET HIDIC [Assermenté]

21 [Le témoin répond par l'interprète]

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

23 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Monsieur Hidic, veuillez vous

25 asseoir. Vous serez avec nous ce matin pendant une période très limitée,

Page 2544

1 mais nous allons continuer cet après-midi. Même si maintenant nous n'allons

2 travailler que pendant 10 à 15 minutes. Nous allons poursuivre, par la

3 suite, dans l'après-midi. C'est M. Hannis qui va mener l'interrogatoire

4 principal.

5 Poursuivez.

6 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Interrogatoire principal par M. Hannis :

8 M. HANNIS : [interprétation] Je souhaite que l'on commence en remettant au

9 témoin ses déclarations préalables. Nous avons trois déclarations séparées

10 qu'il a faites auprès du TPIY, et une annexe.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur l'Huissier.

12 M. HANNIS : [interprétation] Dans l'ordre chronologique, la première date

13 du mois de novembre 1999, ensuite, juillet 2000.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les cotes seront ?

15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira des pièces P86 et P86.1; P87

16 et P87.1.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P86 porte sur la déclaration de novembre

18 1999, et P87 sur celle de juillet 2000.

19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P88 portera sur la déclaration du 21

20 mai 2003.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

22 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, normalement, nous avons

23 également un annexe en date du 31 juillet 2001.

24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de P89.

25 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Madame.

Page 2545

1 Q. Monsieur Hidic, avez-vous eu l'occasion de passer en revue ces

2 déclarations au préalable avant votre comparution ici aujourd'hui ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que vous souhaitez apporter des corrections ou ajouter des

5 éléments supplémentaires à ces déclarations au préalable avant d'affirmer

6 devant la Chambre qu'elles sont conformes à la vérité ?

7 R. Non.

8 M. HANNIS : [interprétation] A ce stade, nous souhaitons proposer le

9 versement au dossier de ces trois déclarations et de l'annexe.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ces pièces sont versées au dossier

11 puisqu'il n'y a pas d'objection.

12 M. HANNIS : [interprétation] Merci. Avant de poser des questions au témoin,

13 Monsieur le Président, je souhaite que les Juges prennent note de certaines

14 autres pièces à conviction liées à M. Hidic. Tout d'abord, je vais poser

15 quelques questions à M. Hidic.

16 Q. Monsieur Hidic, mise à part ces déclarations écrites que vous avez

17 fournies au bureau du Procureur, est-ce que vous avez déposé devant ce

18 Tribunal dans une autre affaire en mai de l'année dernière, dans l'affaire

19 Brdjanin ?

20 R. Oui.

21 Q. Hier et aujourd'hui, avez-vous eu l'occasion de relire la transcription

22 de cette déposition avec l'assistante linguistique dans les locaux du

23 bureau du Procureur ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce qu'à ce stade, vous pouvez confirmer devant la Chambre que cette

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1 déposition au préalable est conforme à la vérité ?

2 R. Oui.

3 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, conformément à

4 l'Article 92 bis (D), nous souhaitons maintenant que ces pièces soient

5 également prises en considération dans le cadre de la déposition de M.

6 Hidic dans cette affaire.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

8 M. HANNIS : [interprétation]

9 Q. Si nous avons suffisamment de temps, je souhaite lire le résumé bref de

10 cette déposition. Je suppose qu'il nous reste cinq minutes.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Dans ce cas-là, nous pouvons lire

12 cela. Monsieur Hidic, Monsieur Hannis va vous lire le résumé de votre

13 déclaration. Veuillez l'écouter attentivement et essayer de retenir ces

14 propos pour cet après-midi.

15 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 Messieurs les Juges, ce témoin est un Musulman de Bosnie qui a vécu à

17 Bosanski Petrovac en 1992. Il parle en détail du traitement discriminatoire

18 et illégal des non-Serbes à Bosanski Petrovac au cours de cette année-là.

19 Le témoin fournira des preuves concernant la politique du SDS à Bosanski

20 Petrovac, y compris, le licenciement des Serbes [comme interprété] de leurs

21 emplois, les restrictions de leurs mouvements et les détentions illégales.

22 Il décrit la nature discriminatoire de la campagne de désarmement, qui

23 portait seulement sur la population non-Serbe de Bosanski Petrovac. Après

24 la date butoir pour la remise des armes, toutes les régions bosniaques ont

25 été encerclées et bloquées et les maisons ont été fouillées. Il n'y a pas

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1 eu de résistance armée de la part de la population bosniaque.

2 Le témoin parle aussi de l'état de craintes au sein de la population

3 bosniaque à Bosanski Petrovac au cours de 1992. Il décrit également les

4 centres de détention dans la région, et il donne des descriptions de

5 seconde main qui se fondent sur ce que lui disaient ses cousins. Il parle

6 également de la destruction des biens non-Serbes et des monuments culturels

7 qui s'est produite à Bosanski Petrovac au cours de l'année 1992.

8 Le témoin également parle de nombreux meurtres à Bosanski Petrovac, et du

9 fait que les auteurs de crimes qui étaient connus n'ont pas été punis. Il

10 décrit la manière dont les non-Serbes devaient échanger ou céder leurs

11 biens avant de recevoir la permission de quitter la municipalité. Il parle

12 de l'expulsion en masse de la population bosniaque de Bosanski Petrovac

13 vers la fin du mois de septembre 1992.

14 Vers la fin 1995, le témoin est rentré à Bosanski Petrovac, alors que la

15 VRS avait quitté la région. Il a découvert beaucoup de documents originaux

16 du SDS dans les archives municipales et il a reçu d'autres de la part

17 d'autres employés municipaux. Il a fourni ces originaux au bureau du

18 Procureur et il a identifié et vérifié ces documents dans le cadre de ses

19 déclarations au préalable et dans le cadre de son témoignage.

20 Sa déposition porte sur les paragraphes 7, 19, 20, 21, 22, 23 et 27, et

21 chefs 3, 7 et 8 de l'acte d'accusation consolidé.

22 Monsieur le Président, c'est la fin de mon résumé.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je pense qu'il n'est pas

24 utile de commencer à lui poser des questions. Nous allons, de toute façon,

25 nous en arrêter là d'ici quelques minutes.

Page 2548

1 Madame Loukas.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, après que le témoin

3 sorte, je souhaite simplement corrigé quelque chose pour le compte rendu

4 d'audience.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur Hidic, vous pouvez

6 disposer pour le moment. Normalement, nous donnons les instructions au

7 témoin de ne parler à qui que ce soit de sa déposition, mais vous avez

8 simplement répondu à deux ou trois questions. Nous souhaitons vous revoir à

9 15 heures 30 cet après-midi dans la salle d'audience II.

10 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, nous avions compris

11 que cela commençait à 16 heures 00.

12 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Apparemment, il y a eu un

14 malentendu concernant les horaires de la Conférence de mise en état qui va

15 précéder nos travaux. Nous souhaitons que vous reveniez à 16 heures 00 cet

16 après-midi dans la salle d'audience II.

17 Monsieur l'Huissier, est-ce que vous pourriez faire sortir le témoin.

18 [Le témoin se retire]

19 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, nous pouvons vous

21 entendre en audience publique, je suppose ?

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, absolument.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, d'accord, je me souviens. C'était

24 concernant le compte rendu d'audience, n'est-ce pas ?

25 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, c'est exact. En fait, je souhaite

Page 2549

1 simplement corriger le compte rendu d'audience en ce qui concerne la

2 question de savoir si les documents sont nouveaux ou pas.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] Je sais que M. Harmon maintient que la

5 divulgation faite à l'équipe de la Défense préalable est une divulgation

6 absolue. Monsieur le Président, avec tout le respect que je dois à M.

7 Harmon, je ne suis pas du même avis. Je considère que nous avons toujours

8 des discussions qui n'aboutissent à rien entre le Procureur et la Défense.

9 Il s'agit là d'une absolue perte de temps, et je souhaite que ceci soit

10 consigné au compte rendu d'audience.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est consigné au compte rendu

12 d'audience.

13 Monsieur Harmon, peut-être vous ne m'avez pas entendu ce matin lorsque j'ai

14 dit que nous souhaitons profiter de notre temps de manière aussi efficace

15 que possible afin d'éviter de renvoyer les témoins chez eux. J'ai dit que

16 les parties peuvent traiter de cette question en détail dans une semaine.

17 Si vous souhaitez simplement vous opposer à ce qu'a dit Mme Loukas, vous

18 pourrez le faire; mais je ne souhaite pas que l'on ait une longue

19 discussion à ce sujet en ce moment.

20 M. HANNIS : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président. Nous

21 avons eu cette discussion beaucoup de fois. Nous pouvons la rouvrir demain

22 matin ou à un autre moment, mais je pense que nous avons traité de cela

23 plusieurs fois auparavant,

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Un autre point, s'il vous plaît, très

25 brièvement, en ce qui concerne la question qui a été soulevée par vous,

Page 2550

1 Monsieur le Président. En ce qui concerne l'aspect du contre-interrogatoire

2 concernant le témoin précédent, M. Hasanovic, je souhaite attirer votre

3 attention sur la page 80 du compte rendu d'audience.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui

5 Mme LOUKAS : [interprétation] La question que j'ai posé était, "parlons

6 maintenant des événements de Bratunac avant les événements dont vous avez

7 parlés aujourd'hui, est-ce que vous saviez qu'environ le 3 septembre 1991,

8 il y a eu des coups de feu --"

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les interprètes vous demandent de

10 ralentir. Vous n'avez pas d'écouteurs, vous avez manqué -- veuillez relire

11 ce passage.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Absolument. Nous n'avons pas besoin de passer

13 beaucoup de temps sur ce point. Tout simplement j'ai indiqué lorsque vous

14 m'avez demandé, Monsieur le Président, si je faisais une paraphrase sur la

15 base d'une partie de compte rendu, peut-être que ceci n'a pas été reflété

16 dans le comte rendu d'audience. Je souhaite simplement attirer votre

17 attention sur le fait que ceci figure sur la page 80, et c'est quelque peu

18 différent.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord c'est accepté. Maître Stewart.

20 M. STEWART : [interprétation] Oui, je souhaite soulever un autre point. M.

21 Harmon est venu et nous étions étonnés de voir que

22 M. Harmon a invité la Cour d'aller à huis clos partiel tout à l'heure afin

23 de mentionner la réunion de demain matin, parce que la Chambre a considéré

24 exactement le contraire, à savoir que le public devait être au courant de

25 ce genre de réunion.

Page 2551

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je pense

2 qu'effectivement que puisque nous ne savons pas pourquoi vous avez demandé

3 le huis clos partiel, peut-être vous auriez pu traiter de cela à huis clos

4 partiel, ensuite, nous aurions pu répéter ces propos en audience publique.

5 Monsieur Harmon, cette Chambre a déjà indiqué publiquement que la Chambre a

6 été impliquée dans des réunions entre les parties, et nous ne souhaitons

7 pas cacher cela du public.

8 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi de dire

9 quelque chose. La raison pour laquelle je soulève cela en audience publique

10 c'est parce que j'ai pensé qu'il était devenu évident que M. Harmon ne

11 pouvait pas essayer d'agir ainsi.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ceci est clarifié maintenant.

13 M. STEWART : [interprétation] Est-ce que je peux mentionner un autre

14 point ?

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais il faut que l'on termine.

16 M. STEWART : [interprétation] Oui, je souhaite dire quelque chose

17 concernant la réunion de demain matin, c'est pour cela que je soulève cela.

18 Nous avons préparé un nombre de documents - il n'y a pas beaucoup de

19 documents - mais nous avons déjà eu des discussions avec le Procureur au

20 cours de la semaine. Je propose au Procureur de se pencher sur ces

21 documents. Je pense qu'il ne faudra pas beaucoup de temps, car ceci reflète

22 les discussions que nous avons eues où nous avons presque trouvé un accord.

23 J'espère que le Procureur pourra se pencher sur ce document, et j'espère

24 que d'ici peut-être une heure la Chambre de première instance pourra avoir

25 la version définitive pour pouvoir se préparer pour la réunion de demain

Page 2552

1 matin.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis ici de toute façon jusqu'à 19

3 heures 00 cet après-midi. Si le document est disponible, c'est très bien.

4 Je souhaite également remercier les interprètes pour les délais

5 supplémentaires. Je ne dirais pas qu'ils nous ont accordé les délais que

6 nous avons décidé de nous accorder.

7 Nous allons lever la séance jusqu'à 16 heures 00 cet après-midi dans la

8 salle d'audience II.

9 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 13 heures 52.

10 --- L'audience est reprise à 16 heures 29.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, je pense qu'il

12 n'est pas nécessaire de citer l'affaire, puisque nous poursuivons les

13 débats qui avaient commencé ce matin. Enfin, pour ne pas faire d'erreur,

14 reprenons la procédure du matin.

15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de l'affaire

16 IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je ne savais plus si c'était une

18 pause ou une nouvelle audience.

19 Pour faire la synthèse des renseignements que j'ai reçus, après M. Hidic,

20 nous n'aurons pas d'autres témoins cette semaine, l'autre est annulé ?

21 M. HANNIS : [interprétation] Oui.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, il ne sera pas

23 appelé du tout.

24 M. HANNIS : [interprétation] Effectivement. Je ne sais pas si vous voulez

25 le faire ou la Défense souhaite le faire. C'est une possibilité.

Page 2553

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les parties seraient d'accord si j'ai

2 bien compris, pour que cet après-midi nous ayons l'interrogatoire

3 principal. C'est demain que M. Hidic et l'autre témoin qui est toujours en

4 attente de contre-interrogatoire, seraient contre-interrogés.

5 M. STEWART : [interprétation] Oui, celui-ci aussi.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

7 M. STEWART : [interprétation] Je crois que nous aurons terminer demain. Ce

8 serait très utile.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous ne voulons pas renvoyer chez eux

10 des témoins qui devraient revenir plus tard.

11 M. HANNIS : [interprétation] Si nous terminons tôt demain, s'il reste un

12 peu de temps d'audience, nous pourrions faire la lecture des résumés en

13 application du 92 bis pour ce qui est de Bosanski Novi, Bratunac et Brcko,

14 si vous pensez que c'est là une bonne façon d'utiliser le temps d'audience.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout est en fonction du temps utilisé

16 par la Défense. Est-ce que vous vous opposeriez à cette procédure du 92

17 bis ? C'est sans contre-interrogatoire, je suppose ?

18 M. HANNIS : [interprétation] Oui, puisque nous voulons garantir l'oralité

19 des débats.

20 M. STEWART : [interprétation] Oui, l'Accusation a déjà eu l'obligeance de

21 nous avertir. Cela nous semble marquer au coin et du bons sens, pas

22 d'objection.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Nous aurons peut-être des

24 éléments en application du 92 bis, sans contre-interrogatoire.

25 Poursuivez, Monsieur le Procureur, Monsieur Hannis.

Page 2554

1 Monsieur Hidic, vous venez d'entendre toute une série de discussions

2 d'ordre pratique, sans votre intervention et participation. Maintenant,

3 c'est l'Accusation qui va vous interroger au principal. Aujourd'hui, vous

4 n'aurez pas de contre-interrogatoire. Ceci se déroulera demain.

5 Interrogatoire principal par M. Hannis : [Suite]

6 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

7 Q. Monsieur le Témoin, merci d'être revenu. Vous avez déjà déposé et vous

8 avez une déclaration préalable. Je sais qu'il y a certains éléments déjà

9 versés au dossier. Je voudrais les parcourir rapidement avant de vous poser

10 des questions plus détaillées. Si j'ai bien compris, vous êtes Musulman de

11 Bosnie. Vous êtes un Bosniaque qui avez vécu et travaillé à Bosanski

12 Petrovac, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Avant la guerre, vous avez commencé à travailler avant 1992, début de

15 la guerre en Bosnie. Vous étiez serrurier, ou vous travailliez dans

16 l'aiguisage ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous travailliez pour quelle entreprise ?

19 R. Je travaillais pour l'entreprise qui s'appelait Bosnaplast, qui avait

20 son siège à Bosanski Petrovac.

21 Q. Si j'ai compris votre déposition antérieure, même si vous n'étiez pas

22 membre du SDA en 1992, aujourd'hui, vous êtes président du parti du SDA à

23 Bosanski Petrovac. C'est bien cela ?

24 R. Oui, je l'ai été jusqu'à l'année dernière, à partir de 1999 jusqu'en

25 2003.

Page 2555

1 Q. Pourriez-vous dire aux Juges si je suis en droit de dire que la

2 répartition ethnique de la population de Bosanski Petrovac en 1991, était

3 pratiquement 75 %, 25 % Serbe et Musulman ?

4 R. Si vous voulez que je réponde de façon précise, en vertu du recensement

5 de 1991, le rapport exact était 75 % par rapport à 22,5 % Serbe et Bosnien.

6 Le reste de la population, c'étaient "les autres", comme on les appelait.

7 Ceux-ci incluaient certains Croates.

8 Q. Merci beaucoup. Comment étaient les rapports entre les différentes

9 communautés ethniques à Bosanski Petrovac avant 1992 ?

10 R. Je peux vous dire que, jusqu'à ce moment-là, les rapports avaient été

11 excellents à Bosanski Petrovac. Les gens étaient tolérants, se respectaient

12 les uns les autres.

13 Q. Est-ce que vous avez commencé à constater une évolution dans les

14 rapports interethniques au début de 1992, à Petrovac ?

15 R. Manifestement. Avec les modifications et les changements qui sont

16 intervenus à l'époque, et qui étaient le résultat des élections

17 pluripartites en Bosnie-Herzégovine, la situation a changé en conséquence,

18 à Bosanski Petrovac. Les gens n'avaient plus la tolérance d'antan.

19 Cependant, la situation est restée quand même, disons, satisfaisante,

20 jusqu'au moment où la guerre a éclaté en 1992.

21 Q. Pouvez-vous nous parler des élections pluripartites et de la façon dont

22 elles se sont déroulées à Bosanski Petrovac ?

23 R. Si on ne parle que de Bosanski Petrovac, si on tient compte aussi du

24 cadre plus général, de la Bosnie-Herzégovine et de l'Yougoslavie, il y a eu

25 beaucoup d'activités préélectorales, une campagne électorale très intense

Page 2556

1 dans la municipalité. Nous avons aussi commencé à fonder des partis

2 politiques. Ces forces politiques qui allaient finir par prendre le

3 pouvoir, la succession au niveau du pouvoir par rapport à l'ex-Yougoslavie.

4 On a oeuvré à l'établissement de partis politiques à Bosanski Petrovac

5 aussi. Les Serbes étaient plus nombreux. Ils ont commencé à créer des

6 partis politiques. Ceci a donné lieu à beaucoup d'activités de campagne à

7 Bosanski Petrovac, campagne électorale. A l'époque, la population musulmane

8 de Bosnie a suivi. On peut dire de façon générale qu'il y avait énormément

9 d'activités qui se concentraient sur les élections pluripartites qui

10 devaient se dérouler peu de temps après.

11 Q. Quel fut le résultat de ces élections dans votre municipalité de

12 Bosanski Petrovac ?

13 R. Il y a eu les élections officielles à Bosanski Petrovac. Le résultat de

14 celle-ci à l'échelon local, au niveau de l'assemblée municipale du

15 gouvernement local, fut comme suit : C'était un rapport de 50 à 33. Le SDS

16 était représenté en raison de plus de 60 %. Huit sièges ont été remportés

17 par le parti de l'action démocratique, SDA. Quant au reste, les sièges sont

18 les réformistes, les anciens réformistes qui les ont emporté, un mouvement

19 pour la réforme de l'Yougoslavie, avec un certain nombre de sièges allant

20 aux anciens communistes, aux SDP. Cependant, la plupart des sièges ont été

21 remportés par les représentants du SDS.

22 Q. Du fait de ces élections, comment les différents postes ont-ils été

23 pourvus dans la municipalité ? Qui était chef de la police, par exemple ?

24 Qui était président de la municipalité ou maire ? Pouvez-vous nous le

25 dire ?

Page 2557

1 R. Après que les résultats soient déclarés officiels, lorsqu'il s'est agi

2 de les mettre en œuvre, certains accords ont été conclus entre les partis

3 politiques qui avaient remporté les élections. Le SDS a essayé d'obtenir la

4 plupart des postes, mais je pense que SDS a fini par obtenir la plupart des

5 postes de Bosanski Petrovac.

6 Q. Qui était le président de l'assemblée municipale ? Quelle était son

7 appartenance ethnique ?

8 R. Le président de l'assemblée municipale, s'appelait Rajko Novakovic. Il

9 était Serbe.

10 Q. Qui était le chef de la police locale, quelle était son appartenance

11 ethnique ?

12 R. Le chef de la police, ce poste a fait l'objet de beaucoup de

13 négociations, parce que le parti serbe insistait pour obtenir ce poste. Je

14 pense que c'est Dragan Gacesa qui a fini par obtenir ce poste. Auparavant,

15 cet homme avait travaillé à Bihac. Il est venu de Bihac à Bosanski

16 Petrovac, et il a été nommé au poste de chef de police.

17 Q. Je crois que dans une déposition antérieure, vous dites que ceci a fait

18 l'objet de pas mal de controverses. Est-ce que les Bosniens avaient un

19 candidat à ce poste aussi ?

20 R. Les Musulmans de Bosnie auraient préféré avoir ce poste de chef de la

21 police à Bosanski Petrovac. Ce qui veut dire que ceci a fait l'objet de

22 beaucoup de discussions. A un moment donné, on a même promis aux Bosniens

23 qu'ils obtiendraient ce poste. Ceci ne s'est jamais traduit dans la

24 réalité. Leur candidat n'a pas été nommé au poste de chef de la police,

25 parce que le SDS ne voulait pas leur céder ce poste, ce poste qui était

Page 2558

1 convoité par le SDA.

2 Q. Après les élections, nous sommes à ce moment-là au début 1992. Je pense

3 que vous l'avez dit, vous avez commencé à constater une évolution des

4 rapports interethniques, surtout au niveau des Serbes et des Musulmans de

5 Bosnie à Petrovac. Est-ce exact ?

6 R. Oui. Au fil du temps, au fur et à mesure, au moment où les postes

7 d'administration s'établissaient, il y avait plusieurs affrontements qui

8 éclataient ailleurs en Yougoslavie, à commencer par la Slovénie et,

9 ensuite, en Croatie. Ce qui a fini par aboutir à la cessation de la

10 Slovénie. Manifestement, la situation qui avait été jusqu'alors paisible et

11 marquée par la tolérance à Petrovac, a changé. La situation vraiment s'est

12 exacerbée dans notre municipalité. Les événements au niveau général, ont eu

13 une incidence certaine sur ce qui se passait chez nous au quotidien.

14 Q. Pourriez-vous nous donner quelques exemples de cette incidence ?

15 Comment est-ce que ceci se traduisait dans la vie quotidienne d'un Bosnien

16 moyen à Petrovac ?

17 R. Je peux vous dire ceci. S'agissant de l'application de la mise en œuvre

18 des résultats électoraux, de l'attribution des différents postes entre les

19 partis, on n'a pas respecté l'accord initial. Tous les postes, ce sont les

20 Serbes qui les ont gardés ou obtenus. Le SDS a réussi à conserver tous les

21 postes-clés en Bosanski Petrovac. Je ne sais pas si c'est à cela que vous

22 pensiez, s'agissant de l'établissement des autorités locales et de

23 l'administration à la suite des résultats des élections.

24 Q. Vous aviez dit qu'avant les élections, il y avait un accord entre les

25 partis, s'agissant de la répartition des postes, des fonctions ?

Page 2559

1 R. Oui. Il y avait eu un accord préélectoral entre les partis politiques

2 qui étaient en liste dans les élections.

3 Q. Savez-vous en quoi consistait cet accord, ce qu'il demandait ?

4 R. Franchement, je ne connais pas ce qu'il contenait, ce qui était pensé

5 ou envisagé, la façon dont devait se former le gouvernement exécutif. Je

6 sais, s'agissant du pouvoir législatif, que le président de la municipalité

7 ou de l'assemblée municipale, c'était un Bosnien, un membre du SDA. Il

8 s'agissait de M. Mustafa Ferizovic.

9 Q. Vous nous avez dit que les Serbes avaient conservé la plupart des

10 positions-clés à Petrovac. Vous avez ajouté que la situation avait empiré.

11 Est-ce que des Musulmans se sont trouvés en butte à des restrictions

12 quelconques, début 1992 dans la municipalité ?

13 R. Il y a eu des événements en suite aux résultats électoraux, mais

14 c'était en 1991. Début 1992, la situation est déjà tout à fait différente,

15 et était pratiquement déjà un conflit, une guerre. Il y avait déjà la

16 guerre tout près de la Bosnie-Herzégovine. Je pense ici dans la zone de la

17 Bosanska Krajina, la Krajina de Bosnie, qui était voisine. Je pense aussi

18 aux événements qui se sont produits en Croatie. Il y avait une atmosphère

19 psychose de guerre. Tout ceci a connu une escalade dans la ville même, de

20 façon générale, s'étirait aussi dans la municipalité. Je pense à la

21 population, mais aussi aux personnalités politiques, aux personnes qui

22 occupaient des fonctions du gouvernement.

23 Q. Ce climat de peur, comment il se manifestait dans la ville ? Est-ce

24 qu'il y avait des choses qui se passaient, qui arrivaient, tant de la

25 ville ?

Page 2560

1 R. De façon concrète, dès mi-1991, on a commencé la mobilisation -- ou

2 plutôt, il y a eu l'engagement de volontaires, d'hommes qui sont partis en

3 guerre en Croatie. Parallèlement, les forces de réserve de la police, elles

4 aussi ont été mobilisées. S'agissant de l'économie, ce domaine a connu

5 également beaucoup de modifications au niveau des dirigeants locaux, des

6 directeurs. Les lieux de production rencontraient plus de difficultés. Tout

7 ceci c'est reflété dans la vie au quotidien de la municipalité. La

8 situation générale a eu une incidence certaine sur le quotidien de la

9 municipalité.

10 Q. Je comprends que cette atmosphère a une incidence sur chacun des

11 habitants de la municipalité. Est-ce que ces effets étaient différents

12 selon qu'on était Serbe ou pas ?

13 R. Si vous voulez parler de 1992, je répondrais par l'affirmative.

14 Q. Quels furent ces effets ?

15 R. A l'époque, il y a eu des changements tout à fait marqués,

16 spectaculaires, s'agissant des rapports entre les communautés à Bosanski

17 Petrovac. Beaucoup de Bosniens avaient été mis à pieds. Cela a été surtout

18 vrai après les évènements d'avril. En avril, en mai, et en juin, il y a eu

19 beaucoup de licenciements de Bosniens. Il y avait souvent des tirs, des

20 coups de feux, des actes d'intimidation. Le couvre-feu, à un moment donné,

21 a été imposé par la police. Cela venait à dire au fond que ceci ne

22 s'imposait qu'aux Bosniens, du moins dans la zone de la municipalité. Ce

23 qui veut dire que la liberté de mouvement était déjà restreinte, limitée.

24 Si vous vouliez, par exemple, aller à Sarajevo, et si vous quittiez le

25 territoire de la municipalité, il vous fallait un permis spécial. D'accord,

Page 2561

1 on pouvait aller à Bihac. Si vous vouliez quitter la zone de la

2 municipalité de Bosanski Petrovac, il fallait demander un permis, un

3 laissez-passer spécial.

4 C'est au cours de cette période-là, que mis à part les actes

5 d'intimidation, nous avons assisté aux premiers assassinats; ce qui n'a

6 fait que renforcer le climat de peur qui régnait parmi les Bosniens à

7 Bosanski Petrovac. Ils ne sortaient presque plus, les Bosniens. Ils ne se

8 déplaçaient plus en ville, non plus, même dans les quartiers où ils se

9 trouvaient en majorité. En effet, là aussi, dans ces quartiers-là, ils

10 faisaient l'objet d'actes de provocation ou d'intimidation par divers

11 groupes qui, en passant ouvraient le feu.

12 Q. Est-ce qu'il y a eu, à ce moment-là, un programme au niveau local qui

13 consistait à livrer, à déposer des armes, qui a affecté des Bosniens ?

14 R. Bien sûr. Il y a eu une annonce publique, par laquelle il était exigé

15 que les Bosniens, s'ils avaient des armes personnelles, les livrent, que ce

16 soit des armes pour lesquelles ils avaient une port de permis légal, à

17 titre de chasseur ou pour d'autres raisons. C'était vrai aussi pour les

18 armes illégales ou détenues illicitement, Car on savait que certains

19 avaient de telles armes. La date couperet, c'était 20 ou 30 jours plus tard

20 après cette annonce.

21 Ces armes, il fallait les donner à la police de Bosanski Petrovac. Les

22 médias, surtout la radio de la localité, en a fait l'annonce publique. Il

23 était notoire s'agissant de certains, qu'ils avaient des armes de

24 meilleures qualités. Ces personnes ont reçu la visite de Serbes, d'employés

25 de la police, ou même des membres de l'armée, qui leur ont pris ces armes,

Page 2562

1 surtout quand on savait que c'était des armes de chasse de très bonne

2 qualité, que ces personnes avaient.

3 Q. Est-ce que vous vous souvenez de façon approximative du moment où on a

4 fait cette annonce publique exigeant la reddition d'armes ?

5 R. Je peux vous dire ceci. Le 27 ou le 28, je ne me souviens plus de la

6 date exacte, toute la ville, le centre-ville de Bosanski Petrovac, a été

7 bloquée par l'armée. Il y a eu plusieurs véhicules transporteurs de troupes

8 qui ont participé à l'opération, qui s'est concentrée sur les rues et

9 quartiers où habitaient les Bosniens. L'objectif poursuivi, c'était la

10 recherche d'armes. J'étais personnellement témoin d'une telle opération de

11 fouille dans l'une, deux ou trois maisons de la rue où j'habitais.

12 Malheureusement, ceux qui effectuaient ces fouilles n'ont rien trouvé, sont

13 restés bredouilles, ou qui faisaient des perquisitions. Je ne sais pas

14 s'ils avaient choisi de leur propre chef ces lieux ou s'ils agissaient en

15 application d'ordres donnés, ils sont entrés dans une vingtaine ou peut-

16 être une trentaine de maisons. Je parle du quartier où je vivais.

17 Q. Je vous arrête un instant pour vous poser quelques questions. Vous avez

18 dit 27 ou 28, de quel mois et de quelle année ?

19 R. Je pense que c'était le mois de mai 1992.

20 Q. Au compte rendu d'audience, je vois que vous avez été témoin de ces

21 opérations dans deux ou trois maisons. Vous dites que ceux qui effectuaient

22 ces perquisitions n'ont rien trouvé. Ici, vous avez bien dit,

23 "malheureusement". Pourquoi pensez-vous que ce soit malheureux qu'ils

24 n'aient rien trouvé ? Pourriez-vous nous expliquer le choix de cet

25 adverbe ?

Page 2563

1 R. Je ne sais pas pourquoi j'ai dit cela, ce fait que j'ai utilisé ce

2 terme. Je ne sais franchement pas pourquoi.

3 Q. Est-ce que votre maison a été perquisitionnée au cours de cette action-

4 là ou d'une action analogue ?

5 R. Non.

6 Q. Savez-vous quelles étaient les autorités qui avaient lancé cet appel à

7 la reddition d'armes ? Vous avez dit que cela avait été annoncé à la radio.

8 Est-ce que c'était une instance municipale, est-ce que c'était la police

9 qui l'avait fait ?

10 R. Je pense que c'est l'échelon le plus élevé des autorités municipales

11 qui, à l'époque, avait une fonction d'autorité quasi militaire. C'est sans

12 doute ces autorités qui ont transmis un ordre qui est parvenu au poste de

13 Police de Bosanski Petrovac. C'est de cette façon qu'il y a eu cette action

14 de perquisition, et saisie d'armes dans la communauté musulmane.

15 Q. Votre déclaration préalable et votre déposition antérieure me montrent

16 que vous connaissez le terme de cellule de Crise. Est-ce que vous

17 connaissiez ce terme de cellule de Crise en mai 1992 ? Est-ce qu'une telle

18 cellule existait à Bosanski Petrovac ?

19 R. Bien sûr. Je connais --

20 Q. Connaissez-vous les membres de la cellule de Crise qui fonctionnaient

21 en mai 1992 ?

22 R. Je connais certains de ces membres. A l'époque, je connaissais ces

23 personnes, vu leur fonction officielle. Il y avait des membres du

24 gouvernement civil. Le président de la cellule de Crise, était le président

25 de l'assemblée municipale de Bosanski Petrovac, en l'occurrence, M.

Page 2564

1 Novakovic. Si on prend la hiérarchie, vous aviez le président du conseil

2 exécutif, les secrétaires de l'assemblée municipale. Il y avait les

3 adjoints, on les appelait chefs à l'époque, de différents services. Il y

4 avait le chef du poste de Police, ainsi que des représentants de ce qui

5 était l'armée légitime parce que certains effectifs de la JNA étaient

6 restés à Bosanski Petrovac, et ils assistaient aux réunions de la cellule

7 de Crise, en leur qualité de membres de ces unités militaires. Ils étaient

8 là ainsi que la partie civile des forces armées, à savoir, la Défense

9 territoriale. Je ne sais pas comment on l'appelait à l'époque.

10 Q. De quelle appartenance ethnique étaient les membres de la cellule de

11 Crise ?

12 R. Pour la plupart, les membres de la cellule de Crise étaient tous des

13 Serbes, bien entendu, ils étaient des représentants du SDS.

14 Q. Monsieur Hidic, je souhaite que l'on avance et qu'on passe à un autre

15 sujet. Je voudrais vous montrer quelques documents. Pour vous les montrer,

16 il faut que j'avance un petit peu dans le temps. Vous avez été expulsé de

17 Petrovac. Vous êtes revenu en

18 septembre 1995. Est-ce exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Pour quelle raison êtes-vous revenu à Petrovac à ce moment-là ?

21 R. Le 14 septembre, Bosanski Petrovac était libre. Puisque moi-même,

22 j'avais passé toute la guerre en Bosnie-Herzégovine et ce, en Bosnie

23 centrale, j'étais à Zenica à ce moment-là. Après trois ou quatre jours, par

24 des voies détournées, par la Croatie, Glina, Knin, Bihac, je suis arrivé au

25 terme de ce voyage, à Bosanski Petrovac, parce que Bosanski Petrovac était

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1 une ville libre.

2 Q. Lorsque vous dites que c'était une ville libre, vous voulez dire que

3 l'armée serbe, la VRS, avait quitté la ville ?

4 R. Oui, absolument. Quand j'y suis arrivé, je n'y ai pas vu un seul soldat

5 serbe en Bosanski Petrovac, car le 14, ils sont tous partis. Ils ont quitté

6 Bosanski Petrovac.

7 Q. A ce moment-là, en 1995 et peu de temps après, et plus tard, en 1996,

8 avez-vous pu consulter un certain nombre de documents, d'originaux émanant

9 de la cellule de Crise et d'autres organes municipaux, qui se trouvaient

10 toujours dans les archives et les bâtiments municipaux de Petrovac ?

11 R. Dans un premier temps, je n'ai absolument pas prêté attention aux

12 documents qui s'y trouvaient, qui s'étaient retrouvés ou qui sont restés

13 dans la municipalité de Bosanski Petrovac, dans les bâtiments municipaux,

14 la mairie de Bosanski Petrovac. A l'époque, il a fallu que je retourne cinq

15 jours plus tard à Zenica. J'ai été obligé de revenir à Zenica. Ma tâche

16 était d'organiser le retour des Musulmans de Bosnie à Bosanski Petrovac,

17 ceux qui étaient originaires de là-bas. Il m'a fallu à peu près un mois, un

18 mois et quelque, en Bosnie centrale, pour organiser ce retour, pour inviter

19 tous ces Bosniens à retourner, et pour qu'ils reviennent. Ce n'est

20 uniquement au moment où on est revenu, c'était vers la fin du mois

21 d'octobre, plutôt le mois de novembre, que j'ai remarqué dans le bâtiment,

22 qu'il y avait un grand nombre de documents. C'était dispersé. Ce n'était

23 absolument pas classé, parce que l'armée était passée par ce bâtiment. Il y

24 avait là des documents, des pièces d'archives qui devaient être conservés

25 dans les archives, et qui devaient être ramenés à sa juste place.

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1 Tout simplement, c'est comme cela que je suis tombé sur un certain nombre

2 de documents qui se trouvaient éparpillés, à ce moment-là, partout dans ce

3 bâtiment municipal.

4 Q. Vous avez reçu des documents de la part d'autres employés municipaux.

5 Si je vous ai bien compris, vous avez remis ces documents au bureau du

6 Procureur; c'est bien cela ?

7 R. Oui, c'est exact. J'ai demandé que l'on ne jette pas ces documents,

8 qu'on les garde. Les gens ont compris qu'il fallait les conserver. Tout

9 simplement, ils me les apportaient par la suite. C'est d'une certaine façon

10 que j'ai commencé à les rassembler et à conserver ces documents. Mon

11 intention était de ne rien jeter. Je pensais que chacun de ces documents

12 pouvaient être utiles, pouvait s'avérer utile. C'est de cette manière que

13 j'ai finalement rassemblé un grand nombre de documents. Il s'agissait

14 uniquement de documents qui n'avaient pas disparus. Il y a un instant, vous

15 m'avez demandé précisément ce qui en est de cette période. C'est cette

16 période de l'année 1995, où beaucoup de documents ont disparu.

17 Q. En mai de l'année dernière, vous êtes venu déposer dans l'affaire

18 Brdjanin, et vous avez évoqué un grand nombre de ces documents. Vous les

19 avez identifiés. Il s'agit de documents dont vous avez parlé ici, n'est-ce

20 pas ?

21 R. Oui.

22 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai à peu près 45

23 documents dans un classeur. Je voudrais les présenter au témoin. Je

24 voudrais aussi proposer au versement ces documents. Initialement, je

25 voudrais simplement lui poser des questions au sujet de quatre de ces

Page 2567

1 documents. Est-ce qu'on pourrait distribuer les classeurs, et est-ce que je

2 pourrais poser ces questions au témoin ?

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.

4 M. HANNIS : [interprétation] Pour ce qui est de la Défense et de la

5 Chambre, je tiens à préciser que dans leur ensemble, ces documents ont été

6 présentés à M. Hidic, lorsqu'il est venu déposer dans l'affaire Brdjanin.

7 En application de l'Article 92 bis (D), je tiens à formuler une requête

8 verbale, devant cette Chambre de première instance. Je demanderais que ces

9 documents soient versés au dossier et ce, eu égard à la déposition qui a

10 déjà été faite, puisque ces documents ont été versés dans l'autre affaire.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être devrions-nous attribuer la

12 cote.

13 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce P90 pour le classeur.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le classeur, Madame la Greffière

15 d'audience, puisque, dans le classeur, il y a 45 intercalaires, est-ce que

16 chacun de ces documents --

17 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous avons une seule cote.

19 S'il y a un document, en particulier, auquel vous souhaitez vous référer,

20 vous citerez l'intercalaire.

21 M. HANNIS : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président, c'est comme

22 cela que je l'ai compris moi-même.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

24 M. HANNIS : [interprétation]

25 Q. Monsieur Hidic, vous verrez, à droite, des intercalaires qui portent

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1 des numéros. Le premier document qui m'intéresse et au sujet duquel je

2 souhaite vous poser des questions, se trouve à l'intercalaire 34. Je vous

3 prie d'examiner le numéro qui figure après cet intercalaire. Vous devriez

4 trouver à cet endroit, un document en version anglaise et en version B/C/S.

5 L'INTERPRETE : La cabine française précise que le classeur en question n'a

6 pas été distribué dans la cabine.

7 M. HANNIS : [interprétation]

8 Q. Pourriez-vous nous dire de quel document il s'agit à l'intercalaire 34

9 de ce classeur, en haut, que dit-il ?

10 R. République serbe de Bosnie-Herzégovine, région autonome de Krajina,

11 l'assemblée municipale de Petrovac, cellule de Crise numéro 57-92. Si c'est

12 à cela que vous pensez, ce qui figure dans l'entête.

13 Q. Oui, je vous remercie. Il s'agit bien du document dont je souhaite

14 parler. Il s'agit du procès-verbal de la 35e réunion de la cellule de Crise

15 de Bosanski Petrovac. Je vous prie d'examiner plus loin dans ce texte le

16 point 1, où il est question de "l'ordre du jour." Pourriez-vous, s'il vous

17 plaît, donner lecture de ce document ?

18 R. "Il s'agit de mettre sur pied des mesures afin d'écarter ou d'effacer

19 les conséquences des opérations de guerre." Du moins, c'est ce que je lis

20 ici sous un point.

21 Q. C'est à l'unanimité qu'on a adopté l'ordre du jour paraît-il. Au

22 paragraphe qui suit, on voit : "Le président a fait une brève

23 description..." Pouvez-nous en donner lecture ?

24 R. "Très brièvement, le président a exposé la situation sur le front, il a

25 dit que nos pertes étaient deux morts et 19 blessés. Il a ajouté que pour

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1 ce qui est de la cellule de Crise, on s'attend à ce qu'elle se positionne

2 clairement face aux Musulmans. Le poste militaire 452 exige qu'à leur égard

3 des mesures soient entreprises, des mesures qui empêcheraient leurs

4 opérations ainsi que leurs activités à l'arrière de nos forces."

5 Est-ce que je dois continuer avec la lecture ? "Dragan Gacesa a souligné

6 qu'il y a une liste qui comporte une quarantaine de noms. On estime que ce

7 sont des individus qui se sont organisés en tant qu'un groupe à part, ou

8 qui ont adopté des positions extrémistes, fondamentalistes musulmanes.

9 Trente d'entre eux échappent aux organes de poursuite. On continue à

10 essayer de désarmer les forces paramilitaires musulmanes ainsi que des

11 citoyens. Sur cette liste figure, pour l'essentiel, des individus auprès de

12 qui on a retrouvé des armes pour lesquelles ils n'avaient pas de port

13 d'armes. La solution possible, est qu'un certain nombre de ces individus

14 soient isolés, les individus qui risquent de s'avérer dangereux, qu'on les

15 place dans les locaux du poste de Sécurité publique, ou qu'on les transfère

16 à l'extérieur de Petrovac."

17 Dois-je poursuivre avec la lecture ?

18 Q. Non, je vais vous arrêter ici. Le paragraphe suivant indique, n'est-ce

19 pas, que finalement, la position qui était la position partagée par la

20 majorité, que l'isolement de ces extrémistes et le transfert à l'extérieur

21 de Petrovac serait dangereux. Que le mieux, c'était de les mettre de côté

22 dans un établissement qui serait bien gardé, qui se trouverait en bordure

23 de la ville ?

24 R. C'est cela.

25 Q. Plus loin, on voit un chapitre intitulé "Décision" en anglais. Est-ce

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1 que vous le voyez ?

2 R. Oui, je le vois.

3 Q. Il y est dit que les individus qui possèdent des armes illégales --

4 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me permettez,

5 mentionnons que j'ai une petite difficulté technique, à savoir que je suis

6 enfoncé dans ma chaise, malheureusement que j'ai beaucoup de mal à me

7 relever. Je voudrais dire, j'ai beaucoup de mal à me relever, c'est

8 vraiment une situation tout à fait ridicule pour moi, mais je n'arrive pas

9 à me relever avec ma robe.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

11 M. STEWART : [interprétation] Pour en venir à quelque chose de beaucoup

12 plus pertinent, ma question est de savoir où cela nous mène. Parce que nous

13 venons d'entendre deux ou trois questions, et ce témoin nous lit des

14 passages entiers qui concernent une réunion à laquelle il n'a pas assisté.

15 J'étais en train de voir si ceci allait mener à quelque chose qu'il connaît

16 personnellement, que ce témoin connaît, qui a une relation directe avec

17 lui. En fait, il se contente de nous dire ce qui est contenu dans le

18 procès-verbal de la réunion à laquelle il n'a pas assisté.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'Accusation, je vous donne la parole.

20 M. HANNIS : [interprétation] Je demande un petit peu de patience à mon

21 collègue, qu'il patiente encore une minute ou deux. J'ai d'autres questions

22 que je vais poser à ce témoin qui concernent ce qu'il vient de nous lire.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous prie de patienter, et je donne

24 la parole à l'Accusation.

25 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

Page 2571

1 Q. Monsieur Hidic, il est dit ici qu'une maison sera réservée à cela, elle

2 deviendra un centre de détention. Est-ce que vous savez s'il y a eu des

3 centres de détention qui ont été mis sur pied à Petrovac à ce moment-là, ou

4 à peu près à ce moment-là ?

5 R. Non, pas à ce moment-là. Un mois plus tard, si.

6 Q. Qui était-ce, quel était son nom ?

7 R. C'était Kozila, c'était un chantier. Malheureusement, c'était là que

8 normalement étaient hébergé les ouvriers, que l'on a détenu 50 ou 60

9 Musulmans de Bosanski Petrovac.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Hannis, je

11 voudrais simplement préciser un point. Le témoin pourra m'aider peut-être.

12 Première page de ce document, s'il vous plaît. Vous avez lu un paragraphe

13 où l'on mentionne VP-4452. Pouvez-vous nous relire ceci, s'il vous plaît,

14 et pouvez-vous nous dire quelle est la teneur de cela dans votre propre

15 langue ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, tout simplement. Lorsqu'il est question

17 du "Poste militaire 4 452." C'est l'abréviation pour poste militaire, VP.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie, continuez les

19 lignes suivantes aussi.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] "L'on exige qu'à leur égard, des mesures

21 soient entreprises, qui empêcheraient qu'ils n'agissent à l'arrière de nos

22 forces."

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A présent, l'on nous a parlé de

24 l'empêchement. Avant, page 16, ligne 19 du compte rendu d'audience, l'on a

25 utilisé un autre terme. Je vous en prie, poursuivez.

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1 M. HANNIS : [interprétation]

2 Q. Vous avez dit que cette opération de désarmement qui était en cours à

3 Petrovac précédemment, a bel et bien existé. Est-ce qu'il y avait des

4 Musulmans qui ont été détenus, par la suite, de ce qui se passait avec

5 l'opération de désarmement ?

6 R. Je crois qu'il y a eu des personnes qui ont été interpellées. Je pense

7 aussi qu'il y a eu des arrêtés; c'était au poste de Police, ce n'était pas

8 au camp. C'était au poste de Police pendant que l'on a mis sur pied cette

9 opération de ramasser les armes, réunir les armes.

10 Q. Je vous remercie. Je voudrais à présent passer à un autre document.

11 Monsieur Hidic, c'est à l'intercalaire 33, c'est juste avant le document

12 que vous êtes en train d'examiner. Pourriez-vous nous dire maintenant si la

13 date que vous voyez sur ce document est bien la date du 30 juin ? S'agit-il

14 là du procès-verbal de la 41e Session de la cellule de Crise ?

15 R. Oui.

16 Q. Dans ma traduction anglaise, il y a un passage où il est question du

17 point 1, de l'ordre du jour, où il est question de la situation politique

18 et sécuritaire dans la municipalité de Petrovac.

19 C'est exact ?

20 R. Oui.

21 Q. Le deuxième paragraphe après cela dit : "Il a transmis des requêtes

22 émanant des soldats auxquels il s'est adressé, il a parlé d'une attitude

23 beaucoup plus radicale à l'égard des Musulmans de Petrovac. Lorsqu'on dit

24 "il", apparemment c'est Rajko Novakovic, c'est son nom qui apparaît au

25 paragraphe précédent, n'est-ce pas ?

Page 2573

1 R. Un instant, s'il vous plaît, que je le retrouve. C'est au point 2. Est-

2 ce que c'est bien là que je dois chercher. Oui. Oui. Il s'agit de l'exposé

3 de Rajko Novakovic.

4 Q. Très bien. La troisième phrase après celle que j'ai lue, qui commence

5 par "Les Musulmans de Petrovac qui se comportent comme s'ils avaient été

6 blessés, et cetera." Pourriez-vous nous en donner lecture ? Cette phrase-là

7 et la phrase suivante.

8 R. "Les Musulmans de Petrovac sont comme blessés et une grande peur s'est

9 emparée d'eux. Il faut en arrêter encore un certain nombre et les isoler

10 par précaution. Par la suite, il faut imposer une astreinte au travail pour

11 qu'ils travaillent, car il y aura suffisamment de tâches pendant les

12 vendanges. J'insiste que cette astreinte au travail comporte aussi un

13 certain nombre de scies électriques qui seront mises à la disposition de la

14 brigade."

15 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent encore une fois le texte.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cela serait plus facile si les

17 interprètes avaient reçu une version en B/C/S de ce document.

18 M. HANNIS : [interprétation] Je vous présente mes excuses, Monsieur le

19 Président. Je vais procéder autrement la prochaine fois.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. HANNIS : [interprétation] Même si on a l'impression qu'il y a quelques

22 petites différences, la substance reste la même.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cela reste la même.

24 M. HANNIS : [interprétation]

25 Q. Monsieur Hidic, je vous prie, de vous reporter au chapitre

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1 "Conclusions" et nous lire le point 1. Par la suite, j'ai des questions

2 pour vous.

3 R. "Jusqu'à ce que la prison de Kozila soit mise sur pied, à faire le

4 nécessaire pour que soient interpellés tous les Musulmans en âge de

5 combattre pour lesquels on pense qu'ils constituent une menace pour les

6 Serbes."

7 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent que le témoin lise plus lentement.

8 R. Je répéterai. "Jusqu'à que l'on mette sur pied la prison de Kozila, il

9 convient de constituer un plan afin de d'interpeller, d'arrêter tous les

10 Musulmans en âge de combattre pour lesquels on suppose qu'ils pourraient

11 constituer une menace, de

12 quelque ordre que ce soit, aux Serbes. Obrad Vrzina et Gacesa Drago sont

13 les responsables de s'acquitter de ces tâches." Au point 2.

14 Q. Merci.

15 R. Dragan Gacesa.

16 Q. Je vous remercie. Je vous prie de vous arrêter là, j'ai une question.

17 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je faire une

18 suggestion. C'est une situation qui n'est pas tout à fait satisfaisante.

19 L'on demande au témoin de donner lecture d'un document dans sa propre

20 langue, qui a déjà été traduit et nous l'avons dans ces classeurs en

21 anglais, très vraisemblablement, enfin, je ne juge pas de la qualité de la

22 traduction, mais ils ont été traduits dans des circonstances bien plus

23 propices au travail aujourd'hui des interprètes ici dans le prétoire. Ce

24 qui se passe, c'est lorsque l'on demande au témoin de donner lecture de la

25 version serbe, on en arrive au point que les interprètes sont obligés de

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1 produire ici une traduction dans des circonstances difficiles. Je ne pense

2 pas que ce soit utile, "ceci ne nous aide pas," nous finirons par avoir

3 deux versions de la traduction.

4 Ne serait-il pas mieux que le conseil nous donne lecture de la version

5 anglaise, en identifiant le passage, pour que le témoin puisse le suivre

6 dans sa langue, et par la suite, qu'il pose sa question, quelle que soit la

7 question qu'il a posé après la lecture, car sinon nous nous retrouvons avec

8 un compte rendu d'audience qui comportera une traduction insatisfaisante et

9 faite dans des circonstances difficiles.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous venez d'entendre M.

11 Hannis. Il a dit que la prochaine fois, il s'y prendra autrement, il

12 fournira les documents aux interprètes pour qu'ils puissent avoir une

13 traduction sous la main et pour qu'ils puissent vérifier lorsque le témoin

14 en donne lecture. Compte tenu des circonstances, je dirais que même si

15 peut-être on fait une traduction sur-le-champ, sans avoir le temps de

16 réfléchir et de poser les détails, au moins ce qui est satisfaisant, c'est

17 que nous avons une traduction, même si elle ne l'est pas mot à mot,

18 exactement la même que la traduction écrite que nous avions reçue. Je ne

19 sais pas comment vous pensez procéder pendant le contre-interrogatoire. Si

20 vous voulez vous référer à la traduction écrite, la traduction en B/C/S ne

21 me gêne pas. Demandez à M. Hannis d'en donner lecture en anglais, à mon

22 avis, cela ne serait pas du tout la solution souhaitable.

23 M. STEWART : [interprétation] Oui, je vois que vous avez anticipé ce que

24 j'allais dire, mais je ne vois pas pour le moment où est le problème, si on

25 acceptait cette méthode.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis.

2 M. HANNIS : [interprétation] Je n'ai pas d'objection, Monsieur le

3 Président. Tout simplement ce qui me faisait peur, c'était que j'avais un

4 peu mal à la gorge et cela me pose problème depuis le début de la semaine,

5 mais je n'ai que deux documents qui me restent et je suis tout à fait prêt

6 à les lire.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez, terminons-en, si le témoin lit

8 lentement, du moins, moi, je trouve que la traduction qui est faite ici sur

9 place, me semble tout à fait satisfaisante et à

10 98 %, elle correspond à ce que l'on trouve sur papier.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous aviez des exemplaires

13 supplémentaires ce serait bien.

14 M. HANNIS : [interprétation] J'ai une copie supplémentaire.

15 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons fournir une copie

17 supplémentaire.

18 L'INTERPRÈTE : La cabine signale qu'elle n'a pas d'exemplaire du document.

19 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, continuez Monsieur

21 Hannis.

22 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie.

23 Q. La phrase, que vous venez de lire concernant les Musulmans de Petrovac,

24 disait qu'ils se comportaient comme s'ils avaient été blessés et qu'une

25 grande peur s'était emparée d'eux. Est-ce que cela reflète bien la

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1 situation qui prévalait dans la ville dont vous nous avez parlé auparavant.

2 R. Oui, bien entendu. Comme vous le voyez ici, même les dirigeants, même

3 les autorités de l'époque à Bosanski Petrovac le constatent ici.

4 Q. A ce moment-là, en juin, est-ce qu'il y avait de plus en plus de cas de

5 détentions d'hommes musulmans à Bosanski Petrovac ?

6 R. Je vous l'ai déjà dit, n'est-ce pas, quel était le nombre de détenus ou

7 de prisonniers qui ont été interpellés, qui ont été enfermés à Kozila, au

8 camp de Kozila lorsqu'il a été mis sur pied. Or, ici c'est le mois de juin,

9 et on commence à se préparer pour cette période où il y aura

10 interpellations, emprisonnements et détentions. Il y en avait déjà un

11 certain nombre en prison et dans ces locaux du poste de Police de Bosanski

12 Petrovac, mais là il n'y avait pas suffisant de place pour y détenir tous

13 ceux qui avaient été interpellés. Ils se sont demandés s'il ne fallait pas

14 mettre sur pied un établissement plus grand.

15 Q. Quelle était la capacité de ce centre de détention au poste de Police ?

16 R. Je sais que c'était dans le sous-sol mais croyez-moi je ne m'y suis

17 jamais rendu. Je ne sais pas. Je ne sais pas bien.

18 Q. Je pense que je puis dire qu'heureusement vous n'avez pas eu l'occasion

19 de le voir.

20 A présent, pouvez-vous vous reporter à l'intercalaire 39 dans ce classeur.

21 Pouvez-vous examiner ce document. Je pense que c'est le 3 août 1992 et

22 c'est le procès-verbal de la 45e réunion d'une commission. Je ne sais pas

23 très bien de quelle commission il s'agit mais cela se passe à Petrovac.

24 L'avez-vous retrouvé, Monsieur ?

25 R. Oui, oui, je le vois. Ce sont les conclusions qui figurent après le

Page 2578

1 point 1. Je ne saurais pas vous dire là, sur le moment. En fait, je crois

2 qu'il est question ici de la commission qui avait reçu une tâche, eu égard

3 au recueil d'information pour ce qui est des parts du territoire de la

4 municipalité de Petrovac ou de l'échange des populations comme ils se

5 plaisaient à l'appeler. Je pense que cette commission, elle avait été

6 constituée et que sa tâche effectivement était de recueillir des

7 informations sur les personnes, les Bosniens de Bosanski Petrovac qui

8 souhaitaient partir, partir de Bosanski Petrovac en quittant leurs biens,

9 si je l'ai bien compris.

10 Q. Je vous arrête ici.

11 R. Avec votre permission, cette commission travaillait exclusivement sur

12 les questions liées aux échanges entre Bosanski Petrovac et Bihac, dans les

13 deux sens. C'était cela la tâche de la commission. Ici, je pense qu'il est

14 question des Bosniaques qui devaient se rendre à Bihac pour obtenir la

15 réunification familiale. C'est ce qu'on disait à l'époque. Là, il

16 s'agissait des personnes dont les familles étaient parties pour Bihac avant

17 la guerre déjà.

18 Q. Je vais vous poser quelques questions encore. En haut, vous pouvez voir

19 les personnes qui ont été présentes. Parmi ces noms, nous avons Rajko

20 Novakovic et Gacesa, Dragan Gacesa. Si j'ai bien compris, ce que vous avez

21 dit au préalable, il s'agissait du président de la cellule de Crise et du

22 chef de la police, n'est-ce pas ?

23 R. Oui. Il y avait aussi Bogdan Latinovic. Il était le président du

24 conseil exécutif. Il était le numéro deux, ensuite le président de l'organe

25 municipal exécutif. Dragan Milanovic, c'était un élu à l'assemblée. Milan

Page 2579

1 Vidovic, qui était là compte tenu de ses fonctions du directeur de

2 l'hôpital. Ensuite, Obrad Vrzina, un militaire. Ensuite, il y avait

3 également une autre personne, Drago Korda, qui était le représentant de la

4 Croix rouge.

5 Q. Nous voyons également deux autres noms au-dessus. Est-ce que vous

6 pouvez nous dire qui sont ces personnes-là ?

7 R. Zare Sikman est le secrétaire de l'assemblée municipale de Bosanski

8 Petrovac. L'autre personne, Slobodan Brcin, je pense qu'il y a assisté en

9 tant que juriste, mais je ne suis pas tout à fait sûr dans quelle qualité

10 il a assisté à une telle session de la cellule de Crise. Personnellement,

11 je sais que c'est un juriste et je suppose qu'il a été engagé en tant que

12 juriste au sein de la hiérarchie militaire.

13 Q. Je peux voir qu'au numéro 2 il est dit qu'il fallait se pencher sur la

14 situation de sécurité avec les Musulmans et apparemment, d'après les notes

15 portant sur la discussion, un nombre de Musulmans qui ont assisté, ont posé

16 des questions y compris la question, à savoir si les Musulmans de Petrovac

17 pouvaient recevoir des garanties en ce qui concerne leur sécurité. Est-ce

18 que vous voyez cela ?

19 R. Oui. Je vois qu'il s'agit là d'un groupe de citoyens de Bosanski

20 Petrovac, de citoyens bosniens qui ont demandé d'assister à cette séance de

21 la cellule de Crise et d'exposer leurs opinions et leurs exigences à

22 l'égard des autorités municipales de Bosanski Petrovac. Je pense que la

23 demande concernait la permission de quitter la région. Il s'agissait d'un

24 forum de citoyens appelé le forum des citoyens de Bosanski Petrovac. Ces

25 personnes-là se trouvaient dans l'impossibilité de trouver un accord

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1 quelconque à ce sujet. Ils ont essayé, par le biais de ce forum et par lieu

2 de ces discussions, de trouver une solution à travers ces discussions avec

3 les hauts dirigeants municipaux. Compte tenu du fait que la situation est

4 devenue déjà critique pour la communauté musulmane.

5 Q. Apparemment, cette commission a pris une décision concernant le

6 déplacement des Musulmans. Il fallait que ce soit elle qui décide qui

7 pouvait partir, et la condition, pour le départ était que ces gens-là soit,

8 échangent ou cèdent tous leurs biens à l'état, c'est-à-dire, à la

9 municipalité serbe de Petrovac. Est-ce que vous voyez cela ? Est-ce que

10 c'est conforme à vos connaissances au sujet de ce qui s'est passé à

11 Petrovac ?

12 R. Ce n'est même pas la peine que je regarde. Je sais que, par la suite,

13 les Musulmans de Bosanski Petrovac ont commencé à s'intéresser de près à

14 cela et je sais que dans le cadastre, ils ont dû remplir un certain nombre

15 de formulaires. Ils ont dû payer des taxes relatives aux impôts fonciers

16 pour obtenir un certificat avec lequel ils pouvaient aller à la police pour

17 obtenir l'attestation attestant qu'ils pouvaient quitter Bosanski Petrovac,

18 qu'ils avaient payé toutes leurs redevances, les impôts, l'électricité, et

19 cetera, et cetera. Un grand nombre de citoyens a accepté cela. Il y avait

20 une longue queue dans le couloir de la municipalité, une queue constituée

21 par les personnes qui, suite à cette discussion, sont venues afin de

22 constituer leur dossier auprès de la municipalité de Bosanski Petrovac.

23 Bien sûr, ils y recevaient un certain nombre de certificats qui

24 garantissaient qu'ils cédaient leurs biens à la municipalité de Bosanski

25 Petrovac.

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1 Q. Est-ce qu'ils ont reçu une quelconque récompense ou des remboursements

2 en contrepartie des biens qu'ils cédaient ?

3 R. Si vous m'avez bien compris, au contraire. Ils ont dû payer les impôts,

4 leurs téléphones, l'eau, l'électricité, enfin de pouvoir recevoir le

5 certificat avec lequel il pouvait demander à la police l'attestation leur

6 permettant de quitter Bosanski Petrovac.

7 Q. Si, personnellement, j'avais des biens, une maison, un commerce, de la

8 terre et si je cédais cela à la ville, est-ce que je ne reçois quoi que ce

9 soit en revanche ?

10 R. La règle disait que ces personnes-là laissaient cela, cédaient cela à

11 la municipalité de Bosanski Petrovac de leurs propres grés.

12 Si vous me le permettez, je suis très au courant de cela puisque, moi-même,

13 j'ai dû signer ce papier ainsi. Je pense que je l'ai encore aujourd'hui à

14 quelque part. Il s'agit-là d'un certificat indiquant tous les biens que je

15 possède, tous les membres de ma famille, le fait que je n'ai aucune

16 revendication vis-à-vis de la municipalité. J'ai reçu une attestation à la

17 police qui m'a permis de sortir de Bosanski Petrovac; cependant, ceci n'a

18 jamais été réalisé, jusqu'au moment de l'expulsion du 24 septembre.

19 Q. D'accord. Est-ce que vous êtes parti de votre propre gré ? Est-ce que

20 c'est ainsi que vous qualifierez votre départ ?

21 R. Ceci a été traité ainsi comme s'il s'agissait de quelque chose fait de

22 mon propre gré.

23 Q. Mais apparemment, vous ne considérez pas que vous l'ayez fait de votre

24 propre gré.

25 R. Est-ce qu'il existe un seul homme sur ce monde qui offrirait tous ces

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1 biens à quelqu'un d'autre sans aucun remerciement même, et pourrait être

2 expulsé avec des coups de feux ? Il y en a mêmes qui ont été tués après

3 avoir fait ce cadeau généreux à la municipalité en cédant tous leurs biens,

4 suite à quoi ils ont été expulsés de leurs villes, alors qu'ils avaient le

5 droit d'y rester, et après qu'ils ont cédé tous leurs biens, alors qu'ils

6 avaient le droit de les garder.

7 Q. Combien de personnes sont parties ? Combien de Musulmans ou Bosniens

8 sont partis de Petrovac avant votre départ, c'est-à-dire, en septembre, si

9 vous le savez ?

10 R. Je pense qu'il s'agit d'environ 2 600, 2 700 Bosniens. Avant cela, il y

11 avait un départ vers Bihac, avec peu de personnes, disons 100, 150

12 personnes. La plupart des Bosniens de Bosanski Petrovac ont été expulsés le

13 24 septembre, et je pense qu'il s'agit-là d'un chiffre d'entre 2 500 et 3

14 000 personnes.

15 Q. Sur la totalité de la population musulmane de Bosanski Petrovac avant

16 le début de la guerre, par rapport à ce chiffre, il s'agirait de quel

17 pourcentage ? Si vous le savez ?

18 R. Je pense que très peu de personnes sont parties de Bosanski Petrovac.

19 Par rapport à ce nombre de personnes, je pense que la plupart des gens sont

20 parties vers Bihac. Je pense qu'il s'agissait d'environ 50 personnes.

21 M. HANNIS : [interprétation] Nous avons encore un document, Monsieur le

22 Président. Je pense que nous pouvons terminer d'ici cinq minutes. Je ne

23 sais pas quand vous souhaitez faire une pause.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que nous allons terminé nos

25 travaux au bout de ces cinq minutes. Veuillez poursuivre ?

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1 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

2 Q. S'il vous plaît, Monsieur, examinez encore un document, intercalaire

3 30. C'est un rapport sur les évènements qui se sont déroulés à Bosanski

4 Petrovac en juin 1992 jusqu'au départ.

5 M. HANNIS : [interprétation] J'ai une question pour les interprètes,

6 puisque dans ma traduction anglaise, on parle d'un "Club du pays de

7 Bosanski Petrovac", alors que je pense qu'il vaudrait mieux traduire cela

8 comme le "Club des expatriés de Bosanski Petrovac."

9 L'INTERPRÈTE : Les interprètes confirment, Monsieur Hannis.

10 M. HANNIS : [interprétation] Merci. Monsieur le Président, dans ce cas-là,

11 il faudrait corriger la traduction en anglais, et changer le nom en anglais

12 "Country Club" en "Expatriates Club". Je pense que la Chambre aura

13 l'exemplaire corrigé demain.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Hannis.

15 M. HANNIS : [interprétation]

16 Q. Est-ce que vous voyez ce document ? Est-ce que vous savez de quoi il

17 s'agit ?

18 R. Oui, il s'agit du Club des expatriés, des Bosniens de Bosanski Petrovac

19 qui sont arrivé à Zagreb suite à leur expulsion de Bosanski Petrovac. Ils

20 ont constitué ce club et ils ont essayé de maintenir une espèce de lien

21 avec les gens de la région, de même qu'avec les gens qui vivaient en Europe

22 de l'ouest, puisqu'ils y travaillaient de temps en temps. Il s'agissait

23 surtout d'un club constitué ou établi par des Bosniens expulsés et des

24 originaires de Petrovac qui vivaient déjà à Zagreb, car un certain nombre

25 de Bosniens de Petrovac vivait à Zagreb avant et, en fait, ils continuent à

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1 y vivre.

2 Q. Apparemment ici, on voit la chronologie de ces évènements et,

3 notamment, en ce qui concerne les actes discriminatoires à l'encontre des

4 Musulmans ou des Bosniens à Petrovac entre juin et septembre 1992. Est-ce

5 que vous avez déjà vu ce document ? Est-ce que vous êtes au courant des

6 informations contenues dans ce rapport ? Est-ce que vous savez d'où ils

7 émanent ?

8 R. J'ai vu ces informations pour la première fois seulement après la

9 guerre, trois ans après. Suite à mon retour à Bosanski Petrovac, certaines

10 de ces personnes qui avaient été à Zagreb m'ont montré ce document. A ce

11 moment-là, et aussi sur la base de ce qu'on me disait auparavant les

12 Bosniens expulsés de Bosanski Petrovac, j'ai pu constater qu'il s'agissait-

13 là d'une image tout à fait conforme à ce qui s'est passé dans la réalité en

14 ce qui concerne l'expulsion des Bosniens entre avril et le 24 septembre,

15 date de l'expulsion des Bosniens de Bosanski Petrovac.

16 Dans la presse à l'époque, qui s'agisse de la presse bosniaque ou de la

17 presse à l'extérieur de la Bosnie, il s'agissait-là des présentations des

18 évènements qui sont plutôt identiques, s'agissant des évènements qui se

19 dérouler à Bosanski Petrovac à l'époque.

20 Q. Merci beaucoup, Monsieur Hidic.

21 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, ceci termine mon

22 interrogatoire principal. Je souhaite verser au dossier le classeur et les

23 45 documents contenus dans le classeur, comme je l'ai déjà mentionné.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections ?

25 M. STEWART : [interprétation] Non.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisqu'il n'y a pas d'objections, ces

2 documents sont versés au dossier. Lorsque nous aurons la nouvelle

3 traduction en ce qui concerne la correction portant sur le "Country Club",

4 veuillez attirer de ceux qui préparent la nouvelle traduction que ce terme

5 apparaît non pas seulement en haut du document, mais aussi dans les

6 dernières pages.

7 M. HANNIS : [interprétation] Très bien. Nous allons faire référence à cela.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Stewart.

9 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'allais dire j'ai

10 trois exemplaires des documents pour la réunion de demain matin. Est-ce que

11 vous souhaitez que je les remette maintenant ?

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le dernier message que j'ai reçu juste

13 avant d'entrer dans ce prétoire était que les parties souhaitent plutôt que

14 l'on se réunisse aujourd'hui et, puisque nous n'allons pas siéger jusqu'à

15 19 heures 00, j'ai dit que je serais disponible jusqu'à 19 heures 00. Cela

16 veut dire approximativement une heure. Il revient aux parties de savoir

17 s'ils préfèrent que l'on se réunisse maintenant ou demain matin à 7 heures

18 45.

19 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, lorsque j'ai parlé avec

20 M. Harmon et M. Tieger concernant cette possibilité, ils m'ont dit qu'ils

21 étaient disponibles, si la Cour le préfère. Je ne sais pas s'ils peuvent

22 nous voir maintenant, mais je peux les contacter immédiatement.

23 M. STEWART : [interprétation] Je pense que nous préférions certainement que

24 l'on se réunisse ce soir.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord, dans mon bureau.

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1 M. STEWART : [interprétation] Je dois trouver Mme Loukas. Elle n'est pas

2 loin. Je le sais.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que d'ici dix minutes, vous la

4 trouverez.

5 M. STEWART : [interprétation] Dix à 15 minutes. Dès que l'on peut lui

6 téléphoner, on va la trouver.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Même si aujourd'hui je n'ai

8 pas beaucoup de temps, mais ce sera le cas demain aussi.

9 M. STEWART : [interprétation] D'accord. On comprend. Elle est tout à fait

10 près de ce prétoire, peut-être non pas avant dix minutes, mais elle sera

11 ici très prochainement.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lever la séance, mais nous

13 allons d'abord dire, Monsieur Hidic, que vous ne devez pas parler avec qui

14 que ce soit de votre déposition et que vous allez continuer votre

15 déposition demain matin à 9 heures, dans le prétoire I, si je ne me trompe.

16 Nous allons vous revoir demain et, ensuite, vous allez être soumis au

17 contre-interrogatoire de la Défense et aux questions des Juges. Est-ce que

18 vous avez compris cela ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, nous levons la séance

21 jusqu'à demain matin.

22 M. STEWART : [interprétation] Est-ce que je peux vous remettre cela

23 maintenant, Monsieur le Président, parce que je pense qu'il vaut mieux que

24 vous ayez ces documents dès que possible.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout à fait.

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1 M. STEWART : [interprétation] Nous avons trois exemplaires pour les Juges,

2 pour vos collègues aussi.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Comme vous le savez, la Chambre

4 doit s'impliquer dans une mesure limitée seulement --

5 M. STEWART : [interprétation] Oui, je comprends cela, mais nous avons

6 considéré qu'il était approprié de remettre ces documents à la Chambre.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons lever la séance

8 et reprendre nos travaux demain matin à 9 heures 00.

9 --- L'audience est levée à 17 heures 52 et reprendra le vendredi 23 avril

10 2004, à 9 heures 00.

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