Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 4 juin 2004

  2   [Audience à huis clos] [Passage rendu public par décision de la Chambre]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le

  6   prétoire, et bonjour aux personnes qui nous aident et qui se trouvent juste

  7   à l'extérieur de ce prétoire. Madame la Greffière, voulez-vous bien appeler

  8   l'affaire.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de l'affaire numéro IT-00-39-

 10   T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

 12   Avant que nous nous poursuivions le contre-interrogatoire de

 13   M. Babic, la Chambre confirme avoir reçu une lettre qui porte la date du 4

 14   juin 2004. Que nous l'ayons lue en 30 secondes, la Chambre l'examinera lors

 15   de la prochaine pause, et nous verrons si nous pourrons traiter cette

 16   question ou non, parce que je pense que nous devons l'examiner un peu plus.

 17   La Chambre a reçu la requête de la Défense qui consiste à surseoir au

 18   contre-interrogatoire de Milan Babic jusqu'après le prononcé de sa peine.

 19   Il s'agit d'une requête très, très brève, pour ce qui est des arguments

 20   présentés à propos du témoignage de

 21   M. Deronjic. Nous pensons dans un premier temps que la Défense souhaite

 22   obtenir que l'on proroge ou que l'on surseoit au contre-interrogatoire du

 23   témoin de l'Accusation jusqu'au moment où sa peine sera prononcée et la

 24   Défense souhaite présenter des arguments oraux quant à la question. La

 25   Chambre a délibéré dans un premier temps ce matin à propos de deuxième

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  1   élément de la requête, et la Défense se voit octroyer dix minutes pour

  2   pouvoir expliquer cela. La Chambre est consciente du fait que, dans un

  3   premier temps, pour ce qui est de la teneur de la requête relative à M.

  4   Deronjic et aux arguments qui ont été présentés, ainsi que pour ce qui est

  5   de la décision prise à cet égard, la Chambre remarque que la requête ne

  6   présente pas d'éléments différents entre la requête relative à la situation

  7   de M. Deronjic et la situation de M. Babic car la Chambre a remarqué qu'eu

  8   égard à

  9   M. Deronjic, la déposition a été retardée. Ici, elle a été reportée, ici il

 10   ne s'agit que du contre-interrogatoire de M. Babic qui a déjà commencé. Par

 11   conséquent, la Chambre souhaite donner dix minutes à la Défense pour

 12   qu'elle puisse présenter des arguments oraux sur la question, et la Chambre

 13   s'attend à ce que la Défense ne présente pas de nouveaux éléments, mais

 14   explique ce qui fait l'objet de sa requête.

 15   Maître Stewart, vous pouvez poursuivre.

 16   M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 17   Lorsque vous m'avez demandé de ne pas présenter de nouveaux éléments, je

 18   souhaite que vous ne souhaitiez pas que nous répétions tout simplement ce

 19   qui a déjà été dit parce que cela n'aurait pas de valeur.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez utiliser vos dix minutes

 21   comme bon il vous semble.

 22   M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 23   Pour ce qui est des différences, et je ne vais pas les répéter à propos de

 24   M. Deronjic puisque vous avez cette requête. En ce qui concerne les

 25   différences à propos de la situation de M. Babic et de M. Deronjic, dans un

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  1   premier temps, nous nous proposons seulement d'ajourner le contre-

  2   interrogatoire. Les raisons ont été que nous avons déjà eu l'interrogatoire

  3   principal. Il était dire que nous ne pouvons plus ajourner cet

  4   interrogatoire principal. Cela pour ce qui est de M. Babic, il s'agit du

  5   contre-interrogatoire et de l'interrogatoire principal, il y a deux raisons

  6   qui expliquent cela.

  7   La première raison étant une raison extrêmement pratique bien que cette

  8   requête soit très, très brève, il n'agit pas d'ailleurs de la raison

  9   principale. Nous avons véritablement eu beaucoup de chose à faire, mais ce

 10   n'est pas non plus la raison principale. Le fait est, Monsieur le

 11   Président, que cette semaine a été une semaine de mutation importante. Nous

 12   avons essayer de comprendre au vu des éléments d'informations qui ont été

 13   portés à la connaissance de la Défense parce que pour vous le dire très

 14   franchement, Monsieur le Président, nous ne savons plus véritablement ce

 15   qui se passe. Comme nous l'avons indiqué, M. Krajisnik et nous-mêmes avons

 16   été particulièrement intrigués à la suite d'événements qui se sont produits

 17   dans certains cas. Une audience est prévue et, ensuite, on annonce qu'elle

 18   aura lieu un autre jour ou le lendemain, ou parfois le même jour. Nous

 19   pensons donc que cela est une méthode particulièrement inefficace. Nous

 20   avons été particulièrement intriqués et perplexes.

 21   Pour ce qui est, en fait, des arguments présentés à propos de M. Deronjic,

 22   nous ne pensons plus qu'il y ait de bonnes raisons qui militent en faveur

 23   de l'audience de M. Babic avant que ne soit prononcé sa peine. Nous

 24   souhaiterions tout simplement répéter ce que nous avons dit à propos de

 25   l'affaire Deronjic, à moins qu'il n'y ait d'obstacles véritablement d'ordre

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  1   pratique pour ce qui est d'un témoin particulièrement sensible, et il faut

  2   que le témoin soit sensible par rapport à la teneur de l'affaire déposée

  3   dans ce cas, au moment où la peine est sur le point d'être prononcée peut

  4   véritablement être un problème. Le fait est que l'on ne peut pas considérer

  5   ce contre-interrogatoire comme étant aussi important, mais il faut savoir

  6   que l'objectif d'un contre-interrogatoire est qu'un témoin peut nuancer,

  7   préciser, retirer, modifier des éléments parce que, tant que cela n'est pas

  8   terminé, la présentation des moyens de preuve n'est pas terminée. Nous

  9   pensons que cela s'était passé au début de son contre-interrogatoire dans

 10   une certaine mesure.

 11   Au vu des circonstances présentes, il semblerait qu'eu égard à l'annonce

 12   qui a été faite il y a quelques 48 heures, il me semble, Monsieur le

 13   Président, il n'y avait pas véritablement d'obstacle pratique à ce que la

 14   peine de M. Babic soit prononcée rapidement. Il a été annoncé une fois de

 15   plus le 2 juin, il y a deux jours, et cela a été annoncé par un

 16   porte-parole du Tribunal que le prononcé de la peine de M. Babic se ferait

 17   lundi. Cette information a été retirée le même jour. Compte tenu des

 18   observations que vous avez présentées Monsieur le Président, et compte tenu

 19   des observations qui ont également été présentées au début de la semaine à

 20   propos des difficultés d'ordre pratique relatives à ce changement, il me

 21   semble que, dans l'autre affaire, il est évident que je m'adresse à cette

 22   Chambre de première instance, mais il y a également une autre affaire dont

 23   est saisie une autre Chambre de première instance. Il s'agit de vous-même,

 24   mais il semblerait que l'autre Chambre de première instance a été en mesure

 25   sans qu'il n'y ait de problème de prendre position, et il n'y a pas eu de

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  1   difficultés à propos du prononcé de la peine de M. Babic qui va se passer

  2   bientôt.

  3   Nous comprenons tout à fait les problèmes de calendrier. Par exemple, à

  4   partir de mardi, cela nous le comprenons tout à fait. Nous ne souhaiterions

  5   surtout pas poser de problème, et nous comprenons tout à fait qu'il s'agit

  6   de quelque chose de tout à fait raisonnable et naturel. Toutefois, il

  7   semble manifestement qu'il n'y a pas et d'ailleurs il n'y a jamais eu de

  8   problème sérieux pour ce qui est de l'ajournement à propos du prononcé de

  9   la peine de M. Babic.

 10   Je dirais que également que nous avons été un tant soit peu troublés par ce

 11   qui s'est passé au cours de ces deux derniers jours dans ce prétoire.

 12   J'entends par là l'éventualité du refus de M. Babic à déposer. Le Tribunal

 13   a exprimé son opposition assez véhémente ou a exprimé son fait qu'il

 14   n'était pas absolument pas satisfait par l'idée qu'un témoin pourrait

 15   refuser de déposer. La Chambre n'a pas fait de remarque plus tôt lorsqu'il

 16   avait été indiqué que M. Babic pourrait, dans des circonstances légèrement

 17   différentes, tout simplement refuser de poursuivre sa déposition.

 18   D'ailleurs, à deux reprises, nous avons maintenant entendu des suggestions

 19   suivant lesquelles M. Babic pourrait refuser de déposer. La Défense est

 20   préoccupée par cette position de M. Babic, par rapport à la position de M.

 21   Deronjic. En fait, ce que nous aimerions dire c'est qu'il ne semble pas

 22   qu'il y ait de préoccupation exprimée par l'Accusation ou par la Chambre de

 23   première instance, à savoir, si

 24   M. Babic et si la peine de M. Babic est prononcée, il ne reviendrait pas

 25   déposer de son plein gré. Car c'est un fait assez simple et je pense qu'en

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  1   fait que l'Accusation soit préoccupée ou non, et que la Chambre de première

  2   instance soit préoccupée ou non.

  3   Nous pensons en tant que Défense que c'est quelque chose qui devrait être

  4   sujet à soucier ou a préoccupation, car il s'agit d'un facteur extrêmement

  5   pertinent. Le fait qu'il existe cette préoccupation indique les raisons

  6   pour lesquelles il est dangereux pour qu'un témoin termine de présenter sa

  7   déposition. Ces témoins peuvent être rappelés, bien entendu. La Chambre de

  8   première instance a toujours cette latitude, mais visiblement s'il termine

  9   de sa déposition avant de n'avoir son prononcé de peine, il est évident que

 10   cela renforce l'objection qui a été faite à propos de la requête de

 11   Deronjic, qui est réitérée ici, et qui n'en devient d'autant plus

 12   importante.

 13   Nous souhaiterions véritablement connaître la nature de cette

 14   préoccupation. Si on nous dit, ou si la Chambre de première instance et

 15   l'Accusation nous le disent, franchement, nous respecterons cette

 16   franchise. Si on nous dit que cela n'est une préoccupation pour personne,

 17   cela élimine au moins un élément de l'ensemble de cet examen. Cela

 18   n'élimine pas l'élément fondamental qui est important, et il s'agit d'un

 19   témoin important, à savoir que, lorsque la présentation ou la déposition

 20   est terminée, il est évident que la nature de cette déposition est-elle

 21   qu'elle doit être considérée par l'Accusation comme un élément important

 22   dans l'affaire contre M. Krajisnik.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous rappelle, Maître Stewart, qu'il

 24   ne vous reste que plus d'une minute.

 25   M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur le Président, je

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  1   vous avais dit que je m'en tiendrais aux dix minutes qui m'ont été

  2   imparties, et je vous offre ces 45 secondes comme cadeau ce matin.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, souhaitez-vous

  4   répondre ?

  5   M. TIEGER : [interprétation] Simplement, Monsieur le Président, je ferais

  6   remarquer que les arguments présentés par l'Accusation sont elles que les

  7   différents facteurs soulevés par Me Stewart ne permettent pas d'établir

  8   dans la différence entre les circonstances précises de l'affaire Deronjic,

  9   et la requête présentée assez tardivement et le dépôt assez tardif de cette

 10   requête. En fait, il faut savoir quelle est la pratique qui a été suivie

 11   dans l'affaire Deronjic. Il y a une différence à faire entre ces

 12   circonstances et les circonstances qui prévalent maintenant. Nous pensons

 13   qu'il n'y a pas véritablement de différences importantes qui ont été

 14   présentées et nous pensons donc que cette requête n'est pas fondée.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tieger.

 16   La Chambre va se retirer. Nous avons déjà délibéré ce matin à propos de

 17   cette requête, avant d'avoir entendu les parties. Mais il est évident que

 18   vous ne serez surpris, et nous avons en fait spéculé un tant soit peu sur

 19   ce que nous risquions d'entendre. Je ne pense pas qu'il nous faudra

 20   beaucoup de temps pour parvenir à notre décision. Nous allons nous retirer

 21   et je demanderais aux parties de rester dans le prétoire pour pouvoir

 22   commencer aussi rapidement que possible.

 23   --- Une pause est prise à 9 heures 22.

 24   --- La pause est terminée à 9 heures 41.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre va présenter la décision

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  1   orale à propos de la requête déposée par la Défense hier, la requête pour

  2   ce qui est de son premier élément est refusée. Une décision suivra et cette

  3   décision sera fournie par écrit et nous fournirons, également, les raisons

  4   qui expliquent le rejet de la motion. Toutefois, la Chambre souhaiterait

  5   faire quelques observations en la matière.

  6   Premièrement, la Chambre attend que la Chambre de l'affaire Babic donne son

  7   jugement sur la base exclusive des documents fournis à la Chambre dans le

  8   cas de cette affaire. Il faut savoir que les auditions sont terminées.

  9   C'est la première observation.

 10   La deuxième observation porte sur les éléments soulevés par la Défense qui

 11   appelle certaines questions. Ces questions ont été examinées par la Chambre

 12   et la Chambre est, maintenant, en mesure d'établir qu'il n'existe pas de

 13   lien entre ces questions et ces éléments de préoccupation qui aurait pu

 14   causer et aurait pu, également, justifier l'ajournement du contre-

 15   interrogatoire de M. Babic.

 16   Troisièmement, la Chambre a estimé que le dépôt a été fait de façon assez

 17   tardive. Les raisons ont été avancées par la Défense.

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25   Voilà notre décision ainsi que les observations qui sont relatives. La

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  1   décision écrite suivra et nous continuerons la présentation des moyens de

  2   preuve.

  3   Maître Stewart, est-ce que la Défense est prête à commencer le contre-

  4   interrogatoire de M. Babic ?

  5   M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'aimerais,

  6   toutefois, faire quelques observations avant que M. Babic ne comparaisse.

  7   Je remercie la Chambre pour les assurances qui viennent d'être fournies

  8   dans l'exposé de ces motifs. Tout en prenant note de ces assurances,

  9   j'aimerais que les Juges de la Chambre comprennent que le dépôt de la

 10   requête de la Défense n'a été motivé, en aucun cas, par le simple désir de

 11   reporter, pour des raisons pratiques, le contre-interrogatoire de M. Babic.

 12   Nous présenterons les arguments relatifs à ces raisons pratiques par écrit,

 13   un peu plus tard, si nous le jugeons utile mais de façon, tout à fait,

 14   distincte de la requête dont il est question en ce moment. Je veux parler

 15   des questions de manque de temps pour la préparation, et cetera, qui ne

 16   faisaient, en aucun cas, partie de la requête dont nous discutons

 17   aujourd'hui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous dirais, Maître Stewart, que la

 19   Chambre n'a pas besoin de recevoir ces explications.

 20   M. STEWART : [interprétation] Je vous en remercie, Monsieur le Président.

 21   J'apprécie beaucoup.

 22   L'autre question dont j'aimerais parler est une question pratique. En

 23   effet, cela a rapport avec le témoignage de M. Babic mais n'y est pas

 24   directement lié. Après l'échange d'hier et la décision sur la question 92

 25   bis, nous nous sommes souvenus, du côté de la Défense, qu'à un certain

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  1   moment dans sa déclaration écrite, qui est versée au dossier, M. Babic, je

  2   vous en donnerai un simple exemple. Voilà, le dernier paragraphe, le

  3   paragraphe 15. "Je parlais dans ma déposition de l'affaire Milosevic, il

  4   était question de Mladic," dans un paragraphe précédent : "Je parle de la

  5   déposition dans l'affaire Milosevic." Nous comprenons la situation comme

  6   étant la suivante, en dépit du fait qu'il y faisait référence dans sa

  7   déclaration écrite, ces parties, qui n'ont pas été versées au dossier du

  8   compte rendu d'audience de l'affaire Milosevic où on trouve cette phrase de

  9   la déclaration, devraient être prises en compte et traitées comme éléments

 10   présentés oralement suite aux questions posées par M. Tieger et dans le

 11   nombre limité de pages dont le versement est demandé par lui.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre comprend la situation comme

 13   étant la suivante, s'il dit : "J'ai témoigné sur cette question dans

 14   l'affaire Milosevic," puisque les parties du compte rendu d'audience y

 15   afférant ne sont pas versées au dossier, ne constituent pas des éléments de

 16   preuve, par conséquent, l'élément de preuve se limite au sujet abordé dans

 17   son témoignage par le témoin dans l'affaire Milosevic quelque soit la

 18   pertinence des autres éléments. Si vous contestez cela, vous devriez

 19   intervenir pour dire : est-ce que vous avez parlé de cela dans votre

 20   déposition ? Vous devriez soumettre au témoin qu'il n'en a pas parlé dans

 21   cette partie de sa déposition. Après quoi, il pourrait être répondu : je

 22   l'ai fait dans les pages numéros tant et tant du compte rendu d'audience. A

 23   ce moment-là, la demande de dépôt au dossier de ces pages peut être faite.

 24   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, avec le respect que je

 25   dois à la Chambre, ce que vous venez de dire, bien sûr, montre que vous

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  1   avez très bien compris notre position, mais nous souhaitions obtenir

  2   confirmation. Je peux, seulement, vous assurer qu'il y a à peu près zéro

  3   pour cent de chance que je consacre une minute du contre-interrogatoire à

  4   contester ce fait auprès de M. Babic. Nous souhaitions simplement que les

  5   choses soient claires avec vous.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je ne vous ai pas donné

  7   la possibilité de répondre, mais il me semble clair que la Chambre, en tout

  8   cas, en réduisant le nombre de pages déposées de 1 100 à 6 montre que le

  9   reste n'est pas considéré comme pièce à conviction. Seules les parties de

 10   la déclaration au préalable versées au dossier seront pièces à conviction.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Il n'était pas nécessaire pour l'Accusation de

 12   répondre à cela, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 14   M. STEWART : [interprétation] J'aimerais maintenant rallumer, mon micro

 15   pour vous remercier, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. En réponse

 16   aux questions posées par vous, Monsieur le Président, je vous dis que je

 17   suis prêt à entamer le contre-interrogatoire de M. Babic. Ce n'est pas la

 18   seule chose que je voulais dire. J'avais autre chose à dire au préalable.

 19   Je ne suis pas prêt au sens normal du terme, c'est-à-dire, que je ne suis

 20   pas dans un état de préparation satisfaisant. Je ne suis pas, tout à fait,

 21   prêt à interroger le témoin. En fait, l'ensemble de mon équipe, d'un point

 22   de vue professionnel, vous dira la même chose. Nous ne sommes pas dans un

 23   état de préparation suffisant. J'ai dit au Tribunal que je commencerais le

 24   contre-interrogatoire de M. Babic. J'ai dit que nous ferions de notre mieux

 25   sur le plan professionnel pour être prêt à cela. Nous avons rempli notre

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  1   obligation. Nous nous apprêtons à remplir celle qui reste. Nous répondrons

  2   et satisferons à ce qui nous est demandé par vous. Ce qu'il nous reste à

  3   faire, c'est en toute équité de continuer à défendre les intérêts de M.

  4   Krajisnik sans remettre en cause la situation ou revenir sur les éléments

  5   négatifs de cette situation. Il est de mon devoir, sur le plan

  6   professionnel, de dire ce que je viens de dire. Je l'ai fait. Voilà, le

  7   pont est jeté si je puis m'exprimer ainsi, et je pense que les Juges de la

  8   Chambre ne nous en voudront pas une seconde pour ces propos.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet. Qu'il y ait ou non un pont à

 10   jeter, nous allons vous entendre et verrons ce qu'il adviendra. Les

 11   responsables de la sécurité sont invités à faire entrer M. Babic dans le

 12   prétoire.

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Babic. Nous avions

 15   quelques questions de procédure à discuter. Vous avez dû, en raison de

 16   cela, attendre 50 minutes avant d'entrer dans cette salle. Je me permettrai

 17   également, Monsieur Babic, de vous rappeler que vous êtes lié par la

 18   déclaration solennelle prononcée par vous au début de votre déposition.

 19   J'ajouterai que la Chambre, l'Accusation et la Défense, ainsi que vous-même

 20   savez bien ce qu'il en est, à savoir, que vous avez été déclaré coupable

 21   dans l'affaire qui nous intéresse personnellement et que vous êtes toujours

 22   en attente du prononcé de la peine y afférant. La déclaration solennelle

 23   prononcée par vous n'est qu'une base vous permettant de répondre aux

 24   questions qui vous sont posées. Je vous le rappelle plus spécifiquement

 25   avant le début des questions de la Défense. Je souhaitais, simplement, vous

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  1   faire ce rappel pour que vous ne perdiez pas de vue ce qui est attendu de

  2   vous en votre qualité de témoin. J'espère que vous comprenez cela, et que

  3   vous n'aviez, en tout état de cause, aucune intention d'agir autrement.

  4   Vous avez bien compris, Monsieur Babic ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est, tout à

  6   fait, clair.

  7   LE TÉMOIN : MILAN BABIC [Reprise]

  8   [Le témoin répond par l'interprète]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pouvez procéder.

 10   Contre-interrogatoire par M. Stewart :

 11   Q.  [interprétation] Bonjour.

 12   R.  Bonjour.

 13   Q.  Monsieur Babic, je ne vais pas, sans relâche, revenir sur les réponses

 14   que vous avez faites au cours du début de votre déposition ces derniers

 15   jours dans la présente affaire, mais cela m'arrivera, de temps à temps, de

 16   citer certains extraits de votre déposition au principal. Dans l'ensemble,

 17   je dirais qu'il s'agira de passages très brefs. Je ne crois pas que cela

 18   devrait vous poser la moindre difficulté, Monsieur Babic, du point de vue

 19   de la compréhension. J'espère que vous comprendrez bien chaque fois que je

 20   me contente de revenir sur ce que vous avez déjà dit. Si, bien sûr, à

 21   quelque moment que ce soit, vous avez quelque mal à digérer mes citations

 22   ou si vous souhaitez que j'interprète plus avant mon intention, je vous

 23   demanderais de le faire savoir aux Juges de la Chambre, de façon générale

 24   chaque fois qu'une de mes questions vous semblera insuffisamment claire. Je

 25   vous demande de ne pas vous forcer, à tout prix, à y répondre, mais de

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  1   demander précisément que des éclaircissements soient apportés sur le point

  2   qui n'est pas clair à vos yeux. Cela peut arriver, de temps en temps. Dans

  3   ce cas là, je reformulerais, en faisant de mon mieux pour être plus clair.

  4   Monsieur Babic, nous avons déjà évoqué un certain nombre de passages de

  5   votre déclaration écrite qui est versée au dossier et fait partie des

  6   éléments de preuve de la déposition que vous avez faite à divers moment, le

  7   plus récemment d'ailleurs au mois de mars de cette année.

  8   Dans votre déclaration écrite, ainsi d'ailleurs que dans votre déclaration

  9   orale -- en tout cas, page 26, de votre déclaration écrite, je le dis pour

 10   ceux qui nous suivent dans la salle ou ailleurs, pages 26 et 27 -- il a été

 11   question d'erreurs au compte rendu d'audience. Je citerais brièvement ce

 12   passage qui est bref, paragraphe 11 de votre déclaration. Vous dites, je

 13   cite : "La mauvaise utilisation de l'histoire remonte à la Seconde guerre

 14   mondiale, nombre des dirigeants serbes de Bosnie parlaient des Musulmans en

 15   les appelants les Turcs. Cette expression avait cours en Bosnie. C'est un

 16   terme qui va beaucoup plus loin que la volonté d'utiliser un simple terme

 17   péjoratif. C'est un terme qui exprime une hostilité enracinée dans 

 18   l'histoire."

 19   Vous avez dit cela également dans votre déposition orale. Je ne crois pas

 20   d'ailleurs que dans votre déposition orale, vous ayez dit quoi que ce soit

 21   qui ajoute un élément supplémentaire à ce qui figure dans cette déclaration

 22   écrite. Je vous demande d'abord si ce que vous voulez dire ou ce que vous

 23   voulez laisser entendre, c'est qu'un tel terme aurait été utilisé par M.

 24   Krajisnik ?

 25   R.  Je parlais ici de façon générale. Je ne me souviens pas que M.

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  1   Krajisnik ait utilisé ce terme. J'ai dit que de façon générale, un grand

  2   nombre des dirigeants des Serbes de Bosnie avait l'habitude d'utiliser ce

  3   terme.

  4   Q.  Tel que qui ?

  5   R.  Par exemple, le Dr Vukic. Je ne m'en souviens pas là tout un coup. Il y

  6   en a peut-être eu d'autres, mais aujourd'hui, je ne me souviens pas

  7   d'autres. Vous voyez, en ce moment même, le nom qui me vient à l'esprit

  8   c'est le Dr Vukic de Banja Luka qui avait l'habitude très fréquemment

  9   d'utiliser le terme "Turcs" pour parler des Musulmans.

 10   Q.  Dans la présente affaire, nous avons entendu dans certaines dépositions

 11   de témoins parler du fait que c'est un terme que des foules, par exemple,

 12   pouvaient hurler lors d'une réunion publique. Est-ce le genre de situation

 13   que vous avez connu ? Est-ce le genre de situation où il a pu vous arriver

 14   d'entendre hurler ou employer ce mot, le terme de "Turcs" dans un sens

 15   péjoratif ?

 16   R.  J'ai très rarement assisté à des grands rassemblements populaires en

 17   Bosnie. Par conséquent, je ne sais pas ce qui l'on est. Je n'ai été présent

 18   qu'à deux ou trois réunions publiques en Bosnie en 1990. L'une s'est

 19   déroulée à Crni Lug, et l'autre à Grahovo; deux réunions. Je ne me souviens

 20   pas que de tel terme ait été utilisé dans ces deux réunions.

 21   Q.  Auriez-vous connaissance d'une réunion publique, d'une réunion

 22   populaire au cours de laquelle M. Krajisnik aurait utilisé ce terme ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Vous n'avez pas non plus le souvenir d'une rencontre privée au cours de

 25   laquelle M. Krajisnik aurait utilisé ce terme, n'est-ce pas ?

Page 3450

  1   R.  Je ne me souviens pas concrètement d'une telle situation.

  2   Q.  Je vais un peu insister sur ce point, Monsieur Babic, pour bien

  3   expliquer ce que je veux dire. Il est possible que vous ne vous souveniez

  4   pas d'un jour particulier où vous avez mangé de porridge au petit déjeuner,

  5   mais vous pouvez être sûr d'avoir un jour ou l'autre de votre vie manger de

  6   porridge au petit déjeuner. Je vais me permettre d'insister sur cette

  7   question en la reformulant de la façon suivante : êtes-vous en train de

  8   dire qu'il aurait pu vous arriver d'entendre un jour M. Krajisnik utiliser

  9   ce terme ?

 10   R.  Il m'est impossible de me souvenir de M. Krajisnik utilisant ce terme.

 11   Q.  Dans votre déclaration écrite, paragraphe 9, et je ne vais vous ennuyer

 12   en vous demandant de relire ce passage avec le texte sous les yeux. C'est

 13   une phrase très courte dans laquelle vous dites que : "M. Krajisnik était

 14   fortement favorable au remplacement de la version de la langue serbe parlée

 15   à l'ouest par la version de la langue serbe parlée à l'est. Lorsqu'il est

 16   arrivé à Knin en 1993, alors que j'étais maire, il a demandé pour quelle

 17   raison ce changement n'avait pas été effectué. L'objectif consistait

 18   apparemment à séparer les Serbes des autres par tous les moyens y compris

 19   au niveau de la langue. Avec d'autres à Knin, je considérais que ceci était

 20   idiot et que ce n'était pas nécessaire."

 21   Mon assistante, qui sait tout, m'en a dit un peu plus au sujet de ces

 22   problèmes de langue. Je crois avoir compris ce qui suit, à savoir qu'il y a

 23   une version de la langue, qui s'appelle l'ékavien, n'est-ce pas ?

 24   R.  C'est le dialecte ékavien de la langue serbo-croate. Ekavica est le

 25   terme le plus courant que dialecte ékavien.

Page 3451

  1   Q.  Je vous prie de m'excuser, mais est-ce que c'est bien de cela que nous

  2   parlons ? Apparemment, vous avez utilisé l'expression tout à fait précise.

  3   C'est bien à cela que M. Krajisnik était favorable, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  La version de la langue que vous parlez vous-même, quelle était-elle ?

  6   R.  En général, je mélange un peu les deux dialectes parce que je suis né

  7   dans une région ou l'on parle le dialecte ékavien. J'ai suivi les cours à

  8   l'école en ékavien, mais je parle un mélange des deux. Lorsque je parle

  9   avec ma mère, j'ai davantage tendance à utiliser le Ijekavia parce que j'y

 10   suis plus habitué.

 11   Q.  C'est très intéressant. Je suis sûr que la Chambre ne connaît pas tous

 12   détails en tout cas à l'heure actuelle. Je ne vais pas rentrer davantage

 13   dans les détails. J'aimerais vous demander ce qui suit : qu'est-ce que vous

 14   vouliez dire dans ce paragraphe 9 de votre déclaration ? Est-ce que vous

 15   vouliez dire que M. Krajisnik insistait sur ces questions de langue, sur

 16   l'utilisation d'ékavien ?

 17   R.  A mon avis, c'est l'un des aspects des positions défendues par M.

 18   Krajisnik. Un aspect, une dimension de ces positions qui, à mon avis, avait

 19   pour rôle de créer une division, peut-être plus psychologique qu'autre

 20   chose. Le but pour l'essentiel était de distinguer entre les gens qui

 21   utilisent telle ou telle forme de langue. M. Krajisnik voulait que tous les

 22   Serbes parlent la même version de leur langue, d'une part, afin qu'il n'y

 23   ait plus aucun problème de communication. C'est bien une seule et même

 24   langue même s'il existe deux dialectes différents. D'un point de vue

 25   linguistique, cette tendance avait pour but d'unifier la langue. Depuis des

Page 3452

  1   décennies d'ailleurs la question existait parmi les Serbes et parmi les

  2   Croates. A mon avis, M. Krajisnik préconisait une unification linguistique

  3   du serbe, et il souhaitait que l'ékavien soit majoritaire.

  4   En Bosnie, il y avait un autre objectif dans ce que préconisait M.

  5   Krajisnik, qui était celui de séparer ce groupe des autres groupes de la

  6   population, tel que, par exemple, les Croates qui utilisent l'ékavien comme

  7   les Serbes de Bosnie-Herzégovine. Le fait d'introduire le dialecte ékavien

  8   en Bosnie-Herzégovine parmi les Serbes, présentait également cet objet qui

  9   consistait à séparer sur le plan linguistique, ce groupe de la population

 10   des autres groupes présents en Bosnie-Herzégovine. Cette autre dimension,

 11   cet autre aspect est évoqué dans ma déclaration écrite. A mon avis, c'est

 12   un aspect qui n'est pas lié directement au problème de communication, mais

 13   qui est plutôt psychologique et affectif, cet effort pour séparer les

 14   groupes de population d'un point de vue psychologique plutôt qu'autre

 15   chose.

 16   Je crois que ceci est tout à fait ridicule, que ce n'est pas naturel parce

 17   que les Serbes de Bosnie-Herzégovine ont toujours traditionnellement parlé

 18   l'ékavien, et je sais cela parce que pas mal de gens dans la région

 19   considérait que c'était quelque chose qui n'était pas naturel. C'est la

 20   raison d'ailleurs pour laquelle nous avons, à Knin, refusé de changer de

 21   façon de parler. Nous estimions que ce n'était pas naturel de changer de

 22   norme linguistique, alors que notre façon de parler était enracinée depuis

 23   très longtemps à Knin.

 24   Q. Vous avez dit très clairement dans votre déclaration écrite, et ceci est

 25   renforcé parce que vous venez de dire, Monsieur Babic, que vous estimiez la

Page 3453

  1   position et l'attitude de M. Krajisnik comme non conforme au bon sens et

  2   non nécessaire. Ceci apparaît également des propos que vous venez de tenir.

  3   Est-ce que vous pourriez en dire plus sur ce point ? C'est bien ce que vous

  4   voulez dire, n'est-ce pas ? Est-ce que, par hasard, les choses seraient

  5   encore plus graves ? Est-ce que cela irait plus loin que le simple fait de

  6   ne pas être conforme au bon sens, et de ne pas être nécessaire ?

  7   R.  Oui, j'ai dit qu'il y avait deux dimensions à prendre en compte. Un

  8   objectif était d'unifier sur le plan linguistique la façon de parler de

  9   tous les Serbes, ce qui correspond bien à la politique de M. Krajisnik au

 10   sujet de la nécessité d'unifier tous les Serbes. Cela est un élément

 11   d'unification de tous les Serbes.

 12   Le deuxième aspect, la deuxième dimension, qui, à mon avis, est tout à fait

 13   dommageable et inopportune pour les Serbes de Bosnie-Herzégovine, à savoir,

 14   la volonté de séparer et de distinguer les Serbes de Bosnie-Herzégovine des

 15   autres groupes présents en Bosnie-Herzégovine. C'est cet aspect séparatiste

 16   de cette proposition qui, à mon avis, montre bien qu'il existait des

 17   connotations politiques beaucoup plus fortes que celles qui étaient

 18   exprimées dans le premier aspect que j'ai évoqué.

 19   Q.  Je devrais peut-être dire les choses de façon plus claire. Il y a un

 20   peu une difficulté ici. Il est question ici en anglais au compte rendu

 21   d'audience de quelque chose "d'international." Je sais bien que pour les

 22   interprètes il est difficile de trouver le terme approprié pour évoquer la

 23   différence entre les différents groupes qui peuplaient le pays en question,

 24   donc "entre état et nation" ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En écoutant, j'ai entendu une petite

Page 3454

  1   pause en anglais, et ensuite c'est le mot national qui a été utilisé; donc,

  2   entre nation et pas international.

  3   M. STEWART : [interprétation] Oui, c'est exact. Je l'indique pour ceux qui

  4   liront le compte rendu d'audience.

  5   Q. Dans votre déposition orale hier, Monsieur Babic, on trouve référence à

  6   cela aux pages 36 et 37 du compte rendu d'audience -- en tout cas, je crois

  7   que la pagination citée par moi est exacte -- vous parlez de rencontre avec

  8   M. Seselj. Je ne suis pas sûr des numéros de pages que je viens de citer,

  9   mais ce n'est sans doute pas très important, car il ne fait aucun doute que

 10   vous avez, effectivement, parlé de cela. Est-il permis de dire que M.

 11   Seselj -- j'espère ne pas m'être trompé dans la prononciation du terme --

 12   est-il permis de dire que M. Seselj était un dur en politique ?

 13   R.  Est-ce que vous voulez dire que j'ai utilisé ce terme, ou est-ce que

 14   c'est une nouvelle question que vous me posez ?

 15   Q.  Non. C'est une question que je vous pose, Monsieur Babic. Vous n'avez

 16   pas utilisé aucun terme hier que l'on aurait pu traduire en anglais par

 17   "hard-liner". Je ne sais pas comment ce terme d'ailleurs est interprété

 18   dans les autres langues, mais vous comprenez ce que je veux dire, n'est-ce

 19   pas, en utilisant le terme "hard-liner"; un dur sur le plan politique ? 

 20   R.  Non, je ne comprends pas bien. Est-ce que vous pourriez m'expliquer ce

 21   que vous voulez dire par cela. Un tenant de la ligne dure ? C'est à vous

 22   qu'il appartient de vous expliquer.

 23   Q.  Oui, Monsieur Babic, je crois comprendre qu'il faut que je le fasse. Ce

 24   que je veux dire c'est quelqu'un qui adopte les positions qu'il a adopté.

 25   Je parle de M. Seselj. M. Seselj était bien un nationaliste convaincu,

Page 3455

  1   n'est-ce pas ?

  2   R.  Plus que cela ou encore pire que cela.

  3   Q.  Monsieur Babic, le mieux c'est peut-être pour moi de vous demander de

  4   dire comment vous perceviez les positions politiques prises par M. Seselj.

  5   R.  Sa position défendait la création de la Grande Serbe sur un certain

  6   nombre de territoires, indépendamment du fait que sur ces territoires les

  7   Serbes représentaient la majorité ou pas. C'est la façon la plus simple de

  8   dire les choses. C'était ce qu'il résumait sous les termes de

  9   autodétermination du peuple, alors que cela allait contre les principes

 10   même de cette idée. Il s'agissait en fait d'imposer une volonté d'un groupe

 11   de la population sous la forme d'une hégémonie par rapport aux autres

 12   groupes de population. Ce groupe c'était le groupe serbe. A mon avis, il

 13   s'agissait d'un aspect tout à fait extrême de nationalisme. Je ne suis pas

 14   un scientifique politique. Je ne saurais qualifier exactement ce genre de

 15   position, mais c'est de cette façon que je percevais les choses. Quant au

 16   comportement précis qu'il avait sur le plan politique par rapport à moi, je

 17   dirais qu'il était opposé aux positions politiques qui étaient les miennes,

 18   puisque j'étais favorable à l'autodétermination des nations, à commencer

 19   par la nation au niveau municipal, étant donné que c'était la base de l'ex-

 20   Yougoslavie, sur le plan administratif et l'unité la plus petite, unité au

 21   niveau de laquelle cette autodétermination pouvait s'exercer. La

 22   municipalité était définie dans la constitution de la Yougoslavie fédérale

 23   comme telle. Par rapport aux républiques, elle constitue l'unité de base.

 24   Q. M. Tieger vous a tellement interrogé hier. Je crois que c'était aux

 25   pages 36 et 37 parce que la référence de page que j'ai faite était,

Page 3456

  1   effectivement, exacte. M. Tieger vous a interrogé au sujet de M. Seselj. Il

  2   vous a demandé si ce dernier avait défini les frontières de la Grande

  3   Serbie, à savoir, l'état dans lequel devait vivre tous les Serbes. Votre

  4   réponse à cette question était oui. Ensuite, on ne vous a pas demandé de

  5   dire quelles étaient les frontières de la Grande Serbie que M. Seselj avait

  6   définies. Je vous pose cette question complémentaire. Quelles étaient-

  7   elles ?

  8    R.  Il a dit très précisément qu'à l'ouest, la frontière de la Grande

  9   Serbie se situerait dans un axe Karlobag, Ogulin, Karlovac, Virovitica, et

 10   qu'à l'est, ces frontières seraient les frontières existantes de

 11   l'Yougoslavie à l'est. Dans son projet, il y avait annexion d'un grand

 12   nombre de territoires, c'est-à-dire, à peu près les deux tiers ou les trois

 13   quarts de la Croatie, toute la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro et la

 14   Macédoine. Voilà quel était son projet de création de Grande Serbie qu'il

 15   défendait un peu partout en dessinant des cartes. Plusieurs versions de ces

 16   cartes ont, d'ailleurs, été publiées. Il a donné des détails à ce sujet. La

 17   chose est, tout à fait, bien connue du public. Cette idée de Grande Serbie

 18   qu'il préconisait, tout le monde la connaissait.

 19   Q.  Vous nous avez dit quelques mots de son projet. A votre avis, de quelle

 20   façon M. Seselj entendait-il atteindre son objectif ?

 21   R.  Par le recours à la force, en s'emparant de ces lieux.

 22   Q.  Dans la mesure dans laquelle vous vous en souvenez, à quelle époque

 23   est-ce que M. Seselj a commencé à exprimer ses positions ?

 24   R.  Je me souviens à partir du 25 juillet 1990 lorsqu'il est venu à Srb, à

 25   mon avis, il y est venu afin de décrédibiliser le parlement serbe qui

Page 3457

  1   siégeait à Srb, à l'époque. Il est venu avec l'un des premiers numéros de

  2   la publication appelé "Grande Serbie," "Velika Serbia" [phon]. D'après ce

  3   que les gens me disaient, il se déplaçait en ville et une centaine de mille

  4   de personnes est allé au stade où siégeait le parlement serbe, alors que

  5   Seselj et Lysia [phon]. Ils ont traversé la ville dans une colonne et ils

  6   portaient cette publication "Grande Serbie". Il est allé à l'encontre de ce

  7   groupe de gens qui allaient à la session du parlement serbe. Je me souviens

  8   que, dans la presse, on a donné autant de place à cette apparition de

  9   Seselj avec sa publication "Velika Serbia," "La Grande Serbie," qu'à la

 10   session du parlement serbe.

 11   Q.  Cette publication -- cette revue appelée "La Grande Serbie", si mes

 12   souvenirs sont bons, c'est la première fois que l'on mentionne cela au

 13   cours de ce procès. Où a-t-elle été publiée ?

 14   R.  C'est Seselj qui l'éditait, mais je ne sais pas si c'était fait sous

 15   les auspices du mouvement chetnik serbe qui est devenu, par la suite, le

 16   Parti radical serbe. Cela, je ne le sais pas. Je sais que c'est lui qui

 17   était derrière cette publication. Je sais, qu'aujourd'hui, c'est le Parti

 18   radical serbe qui la publie. Seselj est le président de ce parti politique.

 19   Seselj et son parti politique ou son mouvement sont les éditeurs, mais je

 20   ne sais pas où ceci est imprimé.

 21   Q.  Peu importe les détails en ce qui concerne l'impression de cette

 22   publication. M. Seselj est actuellement le président de ce parti politique,

 23   c'est ce que vous venez de dire. Quand est-il devenu le président de ce

 24   parti politique pour la première fois ?

 25   R.  Le Dr Seselj a d'abord créé le mouvement chetnik serbe qui existe

Page 3458

  1   encore aujourd'hui, et il est encore à la tête de ce mouvement chetnik

  2   serbe, il a, d'ailleurs, le grade de "vojvoda chetnik" et c'est l'ancien

  3   "vojvoda chetnik", Momcilo Djuic, qui l'a nommé à cette position de

  4   vojvoda. Je ne sais pas si ce mouvement s'est transformé en Parti radical

  5   serbe ou s'il existait en parallèle. Cela, je ne le sais pas. Je sais que

  6   le parti politique a été, d'abord, constitué. Je sais qu'en Krajina, le

  7   parti politique a fait son apparition au début de l'année 1992. C'est à ce

  8   moment-là que l'on a commencé à constituer des conseils locaux de ce parti

  9   politique. Je suis sûr que cela existait en 1991 également. Peut-être que

 10   cela a été constitué en 1990 ou 1991. Je n'en suis pas sûr.

 11   Après la décomposition du groupe auquel il appartenait avec Mirko Jovic et

 12   Draskovic, je pense que ce mouvement-là s'appelait le mouvement pour le

 13   renouveau serbe ou quelque chose comme cela. De toute façon, ils se sont

 14   séparés les uns des autres. Draskovic a constitué son propre parti

 15   politique, Jovic a fait pareil et Seselj a organisé le mouvement chetnik

 16   serbe qui est devenu, par la suite, le Parti radical serbe ou bien, peut-

 17   être, les deux existaient en parallèle. Cela, je ne suis pas, tout à fait,

 18   sûr.

 19   Q.  Brièvement, s'il vous plaît, est-ce que vous pouvez nous dire qui était

 20   ce Momcilo Djuic que vous avez mentionné ?

 21   R.  Je connais ce nom sur le plan historique, et d'après ce que les gens

 22   disaient. Avant la Deuxième guerre mondiale, à Strmica près de Knin, il

 23   était prêtre orthodoxe. Au début de la Deuxième guerre mondiale, il a

 24   renoncé à sa fonction de prêtre, et il a commencé à faire partie de la

 25   rébellion des Serbes contre l'état croate Oustachi et contre les Nazis. Il

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  1   a fait cela dans les rangs du mouvement de chetnik de Ravna Gora à la tête

  2   duquel était le général Draza Mihajlovic, et lui, il était à la tête d'une

  3   division qu'on appelait division chetnik de Dinara.

  4   En 1944, en décembre, il a quitté Knin avec un grand nombre de membres de

  5   son unité et s'est retiré en Italie. Là-bas, les forces alliées l'ont

  6   transféré avec ses partisans dans des pays occidentaux, surtout la Grande-

  7   Bretagne, le Canada et les Etats-Unis. Lui, il est allé aux Etats-Unis et

  8   là-bas, il a créé une organisation, une association de citoyens. Le

  9   mouvement chetnik serbe, c'était une association non lucrative, et il était

 10   à la tête de cette organisation jusqu'à il y a quelques années, c'est-à-

 11   dire, jusqu'à la date de sa mort. Il a continué à avoir le grade du vojvoda

 12   chetnik. C'était une fonction qu'il avait depuis la Deuxième guerre

 13   mondiale. Dans le cadre du règlement régissant cette organisation, il avait

 14   le droit de nommer d'autres personnes à ce même titre de vojvoda. Il

 15   pouvait nommer de nouveaux vojvodas. C'est ce qu'il a fait pour le Dr

 16   Vojislav Seselj. Il l'a nommé au titre du vojvoda chetnik lorsque celui-ci

 17   a effectué une visite aux Etats-Unis. Je ne sais pas si c'était en 1989 ou

 18   1990.

 19   Q.  Reparlons un peu du Dr Seselj. Est-ce que c'est un homme âgé d'environ

 20   60 ans ?

 21   R.  Le Dr Seselj a quelques années de plus que moi. Je ne pense pas qu'il

 22   soit âgé d'à peu près 60 ans, il a peut-être deux ou trois ans de plus que

 23   moi. Je pense qu'il doit être âgé d'environ 50 ans. Je pense qu'il est né

 24   en 1952, à peu près, ou 1953. A mon avis, il doit avoir à peu près 52 ans

 25   Q.  Merci, Monsieur Babic. Ceci me suffit amplement comme réponse. Lorsque

Page 3460

  1   vous avez appris pour la première fois que le parti radical existait,

  2   lorsque vous avez appris des choses pour la première fois au sujet de Dr

  3   Seselj. Quelle était votre implication politique ? A quel niveau étiez-vous

  4   actif sur le plan politique ?

  5   R.  A l'époque, j'étais membre du Parti démocrate serbe. J'étais le

  6   président du conseil municipal du parti. J'étais le président de la

  7   municipalité de Knin, et le président du conseil national serbe. Je pense,

  8   qu'à l'époque, j'étais également le président du conseil national serbe. En

  9   1990, en fin de l'été, au début de l'autonome à Belgrade je l'ai rencontré.

 10   Effectivement, j'avais entendu parler de lui déjà dès le 25 juillet. Avant

 11   cela, j'ai entendu parler de Vojislav Seselj et de son parti. J'ai entendu

 12   dire qu'il avait fui Sarajevo à cause des poursuites politiques contre lui,

 13   à cause du fait qu'il avait été arrêté par les autorités de la Bosnie-

 14   Herzégovine. Après, il est allé en prison à Zenica pendant longtemps. Par

 15   la suite il a déménagé à Belgrade. Je sais que, pendant un certain moment,

 16   on était tous les deux affectés au même équivalent d'ascétique. Je sais

 17   qu'il était là-bas, qu'il relevait du même bureau que moi. La raison en

 18   était qu'on avait fait la même école secondaire, car c'était avant que

 19   j'aie terminé mes études universitaires. La personne qui était chargée de

 20   mon dossier m'a dit que Seselj cherchait un travail lui aussi parce qu'il

 21   venait de venir à Belgrade, et qu'il était juriste. En ce qui concerne son

 22   parti politique, il a fait son apparition en Krajina vers la fin de l'année

 23   1990. Cela existait en 1991, mais je ne sais pas exactement quand le parti

 24   a été fondé, si c'était en 1990 ou 1991, mais cela je l'ai déjà dit.

 25   Q.  Parlons maintenant de 1991, parce que vous en parlez dans votre

Page 3461

  1   réponse. Est-ce que vous diriez que le parti du Dr Seselj avait moins

  2   d'influence sur la politique dans la partie de Croatie dans laquelle vous

  3   viviez, que votre propre parti politique, à savoir le Parti démocrate

  4   serbe ?

  5   R.  Vous avez dit quelque chose d'erroné, car vous avez dit je crois que

  6   l'influence était moindre par rapport à mon parti politique. Je ne sais

  7   pas, peut-être qu'il s'agit simplement d'une question d'interprétation,

  8   peut-être les interprètes pourraient réinterpréter la question.

  9   Q.  Peut-être il est plus facile si moi je répète ou je reformule ma

 10   question ?

 11   R.  Je trouve que l'interprète a omis de dire quelque chose. Ensuite, il a

 12   ajouté quelque chose, ce qui a créé une sorte de confusion. J'aimerais

 13   réentendre l'ensemble de la question.

 14   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être je pourrais

 15   clarifier cette question pendant la pause. Peut-être le moment est propice

 16   pour procéder à une pause ?

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. L'heure est à faire une pause.

 18   Choisissez le moment qui vous est approprié, et dans ce cas-là si on fait

 19   une pause maintenant, elle durera jusqu'à 10 heures 55.

 20   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 21   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous pouvez faire entrer le témoin

 23   au prétoire de nouveau. Monsieur Stewart, en ce qui concerne votre lettre,

 24   effectivement, nous l'avons prise en considération mais, pour le moment, je

 25   ne peux pas vous informer de l'issue de nos délibérations à ce sujet.

Page 3462

  1   M. STEWART : [interprétation] Merci de me tenir au courant.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Poursuivez, s'il vous plaît. Si mes

  3   souvenirs sont bons, vous alliez répéter une question à M. Babic.

  4   M. STEWART : [interprétation] Oui. Apparemment, il y a eu une erreur dans

  5   l'interprétation de cette question, ce qui est, tout à fait, inhabituel.

  6   Voici la question que je souhaite vous poser M. Babic. 

  7   Q.  Est-ce qu'en 1991 le parti de M. Seselj avait beaucoup moins

  8   d'influence sur le plan politique dans votre partie de la Croatie, par

  9   rapport à votre parti politique ?

 10   R.  En 1991, je pense ou plutôt je suis sûr qu'en 1991 le Parti radical

 11   serbe n'existait pas de manière organisée dans la zone Krajina. En ce qui

 12   concerne la Slavonie orientale, je n'en suis pas sûr. En ce qui concerne

 13   l'influence des partis politiques, c'est ce que j'ai à dire. Je dois dire

 14   quelque chose qui est caractéristique pour le mouvement chetnik serbe et le

 15   Parti radical de Vojislav Seselj. Ce qui caractérise cela, c'est que et le

 16   mouvement et le parti se fondent sur le personnage, la personnalité du

 17   leader, celui qui sait promouvoir et qui représente le parti politique. Il

 18   faudrait parler ici de l'influence du Dr Vojislav Seselj sur le plan

 19   politique, plutôt que de parler de l'influence de son parti.

 20   Q.  Monsieur Babic, je pense que sur la base de ce que vous avez dit, il

 21   découle qu'en 1991 et ceci, à mon avis et d'après la manière dont je

 22   comprends les choses, est conforme à la réponse que vous avez donnée, que

 23   le Parti radical serbe n'existait pas vraiment de manière organisée, mais

 24   le Dr Seselj existait, était actif et était certainement une personnalité

 25   remarquable sur le plan politique dans votre partie de la Croatie ?

Page 3463

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que vous avez considéré que son influence était positive,

  3   négative ou neutre sur le plan politique ?

  4   R.  Comme je l'ai dit, sa première apparition a eu des effets contraires

  5   aux effets souhaités. C'était négatif. En ce qui concerne l'influence sur

  6   le processus politique en Croatie en 1990, il s'agissait là d'une

  7   discrétisation radicale et négative de la politique menée par les leaders

  8   serbes en Croatie, à l'époque. De ce point de vue-là, nous pouvons dire que

  9   ceci s'est reproduit par la suite.

 10   Q.  Je souhaite que l'on s'attarde, maintenant, sur ce que l'on appelait la

 11   plateforme, je crois du Dr Seselj. Vous avez dit que son but de la création

 12   de la Grande Serbie allait être atteint par la violence. Est-ce qu'en 1991

 13   -- parlons par exemple, prenons comme point de repère le milieu de l'année

 14   1991, est-ce que vous en saviez plus au sujet des moyens, par le biais

 15   desquels, conformément à la plateforme du Dr Seselj, il fallait atteindre

 16   cet objectif par la violence ?

 17   R.  Vous parlez de sa plateforme officielle ? Est-ce que vous parlez de

 18   cela dans un sens vaste du terme ou est-ce que vous parlez concrètement

 19   d'une certaine plateforme ? Je peux répondre de manière précise à la

 20   dernière partie de votre question.

 21   Q.  Vous m'avez posé une question pour susciter une clarification, Monsieur

 22   Babic. J'ai employé le mot "plateforme", mais je ne limite pas ma question

 23   à un document formel ou à une déclaration officielle. Pour clarifier, je

 24   vais ajouter que je souhaite vous demander si, en 1991, au milieu de

 25   l'année, vous en saviez un peu plus au sujet des moyens, par le biais

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  1   desquels, le Dr Seselj souhaitait atteindre l'objectif de créer la Grande

  2   Serbie par la violence ?

  3   R.  Je peux dire ce que je sais concrètement, à savoir, vers la mi-1991, si

  4   on considère que le 2 mai fait partie de cette période, à ce moment-là, je

  5   savais que les volontaires de Vojislav Seselj, avec lui, participaient aux

  6   combats à Borovo Selo contre la police croate et que deux des policiers ont

  7   été tués. C'est ce que je sais. A l'époque, avec ses volontaires, il

  8   participait au combat que menaient lesdites structures parallèles, la DB

  9   serbe et les Serbes de Borovo Selo, contre le gouvernement croate. Je suis

 10   au courant de cet événement concret.

 11   Q.  La raison pour laquelle je vous pose cette question, Monsieur Babic,

 12   c'est que vous avez déposé déjà cette semaine, vous avez déposé hier

 13   également, vous avez parlé, dans votre déclaration, du Dr Seselj. Vous avez

 14   parlé de la politique de la création de la Grande Serbie du Dr Seselj, je

 15   pense que c'est ainsi que vous l'avez étiquetée. Vous avez dit à la Chambre

 16   de première instance, ce matin, que le moyen par lequel le Dr Seselj

 17   allait, apparemment, atteindre cet objectif, était la violence. C'est ce

 18   que vous avez dit que vous savez jusqu'à présent. Maintenant, je souhaite

 19   vous demander ce que vous savez d'autre au sujet de la méthode et de la

 20   stratégie du Dr Seselj, sa méthode et sa stratégie conformément à ce qu'il

 21   disait, lui-même, qui vous pousserait à dire que c'est ainsi qu'il

 22   souhaitait atteindre cet objectif ?

 23   R.  Tout d'abord, je n'ai pas parlé du mot "apparemment". En répondant à

 24   votre question, je peux vous dire une chose. Une information émanant de

 25   novembre 1991. Vojislav Seselj, à l'époque, était professeur à Pristina.

Page 3465

  1   Dans les médias, il expliquait que, parmi ses objectifs, étaient de

  2   s'emparer de Slunj et de Vukovar en Croatie dès que possible, que là, il

  3   s'agissait des priorités de l'opération militaire.

  4   Par la suite, je ne suis pas sûr à quel moment cela s'est fait, mais il

  5   disait que l'armée devait aller jusqu'aux frontières, jusqu'aux lignes

  6   Karlovac-Karlobag-Virovitica. Vers la fin 1991, début 1992, lui-même, il

  7   faisait le tour des lignes tenues par ses volontaires, et lui-même, il les

  8   envoyait au conflit contre le gouvernement croate. Il se rendait sur place,

  9   lui-même, pour leur donner son soutien personnel. Il s'agissait là des

 10   activités organisées par le ministère de la Défense serbe. Là, je viens de

 11   fournir quelques détails dont je me souviens personnellement. Je sais qu'au

 12   bout d'un certain moment, la guerre en Bosnie a commencé. Dans les médias,

 13   on pouvait lire qu'il nommait des vojvodas chetnik, des ducs chetnik

 14   personnellement. C'était à Pale ou quelque part par là. Il était impliqué

 15   dans les opérations des unités qui luttaient en Bosnie. Qu'est-ce que je

 16   peux ajouter d'autre sans improviser, en me limitant aux détails concrets ?

 17   C'est à peu près tout.

 18   Je me souviens d'un rassemblement, le 2 mai, près de Plitvice. J'ai entendu

 19   sa conversation avec le général Raseta qui était l'adjoint du chef de la

 20   région militaire de Zagreb. Il était chargé de la zone tampon autour de

 21   l'hôtel Plitvice par rapport à la police serbe. Lors de ce rassemblement,

 22   Seselj a rencontré cet homme, Andrija Raseta, et j'ai entendu cette

 23   conversation entre eux que j'ai trouvé intéressante. Je ne connaissais pas

 24   tout concernant la hiérarchie au sein du mouvement chetnik serbe. J'ai

 25   entendu Seselj personnellement expliquer à Raseta que le rang de vojvoda,

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  1   de duc dans le mouvement chetnik serbe correspondait au rang de colonel au

  2   sein de la JNA.

  3   En 1992, à l'époque, le 2 mai, il se présentait comme le vojvoda chetnik

  4   qui avait le grade correspondant à celui du colonel au sein de la JNA.

  5   Q.  Monsieur Babic, vous avez dit au cours de cette réponse, que "vous ne

  6   souhaitiez pas improviser" et que "c'était tout ce que vous souhaitiez

  7   dire". Est-ce que vous souhaitiez dire, en fait, que c'était tout ce que

  8   vous pouviez dire à ce sujet ? Là, je le dis pour être juste envers vous.

  9   R.  C'est tout ce que je peux dire de manière concrète, sans généraliser

 10   les choses. Si vous souhaitez que je vous dise des détails concrets. Bien

 11   sûr, j'ai dit qu'il oeuvrait pour que l'armée aille jusqu'aux frontières

 12   Karlovac-Karlobag-Virovitica, cela, c'était son attitude publiquement

 13   exprimée. Ce que j'ai dit, ce sont les détails concrets que je sais

 14   personnellement, de première main, et qui le concernent. Lorsque j'ai dit

 15   que je ne souhaitais pas improviser, j'ai souhaité dire que je souhaitais

 16   concrétiser mes connaissances.

 17   Q.  Vous avez indiqué que le Parti radical, au moment de sa création, est

 18   un parti que vous avez décrit comme un parti dirigeant, et qu'il était

 19   beaucoup plus logique de parler de ce que le Dr Seselj avait dit, avait

 20   pensé plutôt que le parti. Je suppose, du moins, qu'il ne s'agissait pas

 21   d'un parti avec un seul homme comme membre. Est-ce que le Dr Seselj avait

 22   des associés qui exerçaient également une certaine influence, et qui

 23   supportaient à sa politique et à son parti de façon officielle ou

 24   officieuse d'ailleurs ?

 25   R. Lorsque j'ai dit qu'il s'agissait d'un parti dirigeant, je pensais à la

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  1   structure du parti. Le chef dirigeant avait une certaine autorité. Lorsque

  2   je parlais d'un parti dirigeant, il faut penser à la façon dont il se

  3   présentait face aux médias, la façon dont il présentait sa politique, et ce

  4   que j'entendais, c'est que le Dr Vojislav Seselj était la personne qui

  5   tenait la main haute dans ce parti. En fait, c'est lui qui assurait la

  6   promotion du parti qui en était sa force motrice. Bien entendu, que la

  7   hiérarchie et l'organisation du parti fonctionnaient également, mais il

  8   faut savoir qu'à l'époque, il y avait une structure, une organisation en

  9   Serbie, et le Dr Vojislav Seselj, aidé par le parti socialiste et ces 

 10   électeurs, avait été élu député au parlement serbe de l'époque en tant que

 11   représentant de ce parti. Toutefois, lorsque nous parlons du territoire de

 12   la Croatie et de la région de la Krajina ainsi que de la Bosnie-Herzégovine

 13   en 1990 et 1991, nous considérions que le

 14   Dr Seselj était le président du parti radical serbe, à savoir, une personne

 15   qui avait énormément d'influence sur les médias, non pas en tant seulement

 16   que représentant de son parti, mais en tant que personne qui avait été un

 17   vojvoda chetnik, qui avait ses formations militaires et ses volontaires en

 18   Croatie et en Bosnie. En ce sens, pendant l'année de 1991, c'est ainsi que

 19   je me réfère à Vojislav Seselj.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, puis-je vous poser une

 21   question. J'ai l'impression que cela n'a pas été véritablement une réponse

 22   à la question que vous avez posée, étant donné que vous avez posé une

 23   question à propos des associés qui avaient une certaine influence, et qui

 24   sont connus. C'était la teneur de votre question. Je pensais que vous

 25   demandiez s'il y avait au niveau de la structure du parti des associés qui

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  1   étaient proches de M. Seselj. Je n'ai aucun problème à ce que vous

  2   interrompiez et que vous demandiez au témoin de répondre à votre question.

  3   Monsieur Babic, je ne suis pas en train de vous dire que je ne suis pas

  4   intéressé par ce que vous ne relatez, mais ce n'est pas la réponse à la

  5   question posée par Me Stewart. Je vous demanderais d'écouter avec beaucoup

  6   de soin les questions qui vous sont posées et de répondre précisément à ces

  7   questions. S'il souhaite de plus amples renseignements, soyez absolument

  8   assurer qu'il vous demandera ces renseignements.

  9   Poursuivez, je vous prie.

 10   M. STEWART : [interprétation] Oui, M. Babic peut effectivement être

 11   rassurer en ce sens. Je vous suis reconnaissant, Monsieur le Président, et

 12   je suis particulièrement circonspect ce matin. Je n'ai pas souhaité

 13   interrompre M. Babic. Je vous remercie, Monsieur le Président, de m'avoir

 14   aidé à ce sujet.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, je vous prie.

 16   M. STEWART : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Babic, oui vous pouvez considérer que je souhaiterais obtenir

 18   une réponse aux questions que je pose. Je vous demandait si vous pouvez

 19   nous donner des noms d'autres personnes qui se trouvaient et qui étaient

 20   bien placées dans l'organisation du

 21   Dr Seselj ?

 22   R.  Je peux vous dire que pour ce qui est des personnes qui faisaient

 23   partie de l'organisation du Dr Vojislav Seselj et de son parti et qui sont

 24   importants pour la Krajina et la Croatie, je connaissais Rade Leskovac, qui

 25   était le président du comité exécutif  du Parti radical pour la Krajina

Page 3469

  1   après que ce parti était établi en 1992 ou 1993. Je ne sais pas exactement

  2   quand. Pour ce qui est de la direction du parti radical, je connaissais le

  3   président adjoint de ce parti. Je l'ai connu pendant plusieurs mandats, et

  4   il a été président, je pense, depuis le début,  mais je n'en suis pas sûr.

  5   Il y avait également Tomislav Nikolic. Todorovic était président du comité

  6   exécutif. J'essaie de me souvenir d'autres noms. Je connais d'autres

  7   personnes, bien entendu, mais pour le moment, je ne peux pas me souvenir de

  8   leurs noms.

  9   Q.  Si jamais ces noms vous revenaient à l'esprit, Monsieur Babic, je vous

 10   serais reconnaissant de bien les transmettre à la Chambre de première

 11   instance.

 12   Ce que j'aimerais dire au nom de M. Krajisnik est qu'il n'a jamais

 13   rencontré le Dr Seselj. Auriez-vous des éléments d'information qui

 14   pourraient contredire ce que j'avance ?

 15   R.  Je suis sûr que M. Krajisnik a eu une réunion avec

 16   M. Seselj à Bosanski Novi, et ce, pendant l'autonome de 1992. Il s'agissait

 17   d'un rassemblement ou d'une assemblée qui était présidé par M. Krajisnik,

 18   et le Dr Seselj a été un des orateurs de cette réunion. Je ne sais pas

 19   s'ils étaient ensemble pendant la pause. Toutefois, M. Seselj a pris la

 20   parole lors de cette réunion. Je ne me souviens pas du moment exact où il

 21   s'est rendu à la tribune pour se faire, mais je me souviens qu'il était

 22   assis au premier rang. Je me souviens de cet événement.

 23   Q.  Je pense que je devrais préciser quelque chose que j'ai dit. Je n'ai

 24   pas dit que M. Krajisnik n'a jamais rencontré de sa vie le Dr Seselj, mais

 25   ce que j'avance c'est qu'en 1991 et 1992 ou avant, il ne l'avait pas

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  1   rencontré. Vous nous avez fourni votre réponse pour ce qui est de 1992. Il

  2   y a manifestement une différence qui a été identifiée. Je vous demanderais,

  3   je vous prie, d'être un peu plus précis et de nous fournir les détails

  4   relatifs à cette réunion qui a eu lieu à Bosanski Novi. Vous nous avez

  5   parlé de l'automne de 1992. Pourriez-vous peut-être préciser un peu plus la

  6   date ?

  7   R. Je pense que cela s'est passé entre le mois d'août et entre la fin du

  8   mois d'octobre où il y a eu une assemblée qui a été convoquée à Prijedor.

  9   Cela s'est passé pendant cette période, mais je ne peux pas vous donner la

 10   date exacte. J'avais reçu des informations suivant lesquelles l'assemblée

 11   de la Républika Srpska et l'assemblée de la Républika Srpska Krajina

 12   étaient convoquées là. Etant donné que j'étais député de l'assemblée de la

 13   Républika Srpska Krajina, je suis allé voir ce qui s'est passé bien que je

 14   n'ai pas reçu d'invitation officielle pour se faire. Je suis allé,

 15   convaincu qu'il s'agissait d'une assemblée conjointe. Lorsque j'ai vu ce

 16   qui s'est passé, je n'en étais plus aussi sûr que cela. Les gens étaient

 17   rassemblés. Il y avait environ 120 personnes dans un hôtel de Bosanski

 18   Novi. M. Krajisnik et d'autres personnes ont présidé cette assemblée. J'ai

 19   vue qu'il y avait des personnes qui étaient venues de la Krajina. Je suis

 20   arrivé en retard, et je suis parti d'ailleurs avant la fin de cette

 21   assemblée. J'ai vu que le Dr Seselj était présent. Il a fait un discours

 22   qui était très classique pour lui à propos de l'unification serbe et

 23   l'unification des territoires serbes. Je ne peux pas vous donner d'autres

 24   détails parce que c'est tout ce dont je me souviens à propos de ce

 25   rassemblement.

Page 3471

  1   Q.  Vous avez dit que cela s'est passé après les obsèques de

  2   M. Raskovic ?

  3   R.  Je le pense, mais je n'en suis pas absolument sûr.

  4   Q.  Vous pensez cela s'est passé après ces obsèques, mais vous n'en êtes

  5   pas sûr ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Alors, qu'au paragraphe 8 de votre déclaration écrite, vous l'indiquez

  8   de façon très ferme, et cela se trouve à la troisième phrase. Vous parlez

  9   de "cette réunion de Bosanski Novi qui s'est tenue après les obsèques de

 10   Raskovic." Vous dites maintenant à la Chambre de première instance, et cela

 11   est évident d'après votre réponse, mais vous ne pouvez l'exprimer de façon

 12   absolument ferme ? R.  C'est ce que j'ai dit parce que je ne me souviens

 13   plus de la date exacte. Personnellement, je peux dire quand même avec une

 14   certaine certitude que cela s'est passé entre les obsèques de Raskovic et

 15   l'assemblée de Prijedor qui a été convoquée à la fin du mois d'octobre. Les

 16   obsèques ont lieu à la fin du mois d'août. L'assemblée s'est tenue à la fin

 17   du mois d'octobre à Prijedor. Il est très, très vraisemblable que cela se

 18   soit passé pendant cette période, entre ces deux événements, mais je ne

 19   peux pas absolument le garantir. C'est pour cela que j'ai dit

 20   "vraisemblablement".

 21   Q.  Je voudrais dire quelque chose de façon très claire, Monsieur Babic. Ce

 22   n'est pas que maintenant vous ne pouvez plus vous souvenir de cette date,

 23   mais c'est que vous nous ne dites plus si vous avez, en quelque sorte,

 24   minimisé la certitude formulée. Est-ce que cela s'est passé avant ou après

 25   les obsèques de M. Raskovic ?

Page 3472

  1   R. Je suis relativement sûr, assez sûr, que cela s'est passé entre les

  2   obsèques de M. Raskovic et l'autre événement. Je le dis avec certitude. Je

  3   pense que cela s'est passé entre ces obsèques et l'autre événement, bien

  4   qu'il puisse que cela se soit passé à un autre moment. De toute façon, cela

  5   s'est passé avant la fin du mois d'octobre 1992.

  6   Q.  Lorsque vous aviez une activité politique, ce qui manifestement fut le

  7   cas en 1992 et en 1991, avez-vous conservé un journal de bord ?

  8   R.  Non, pas un journal de bord, mais j'avais un calepin où je consignais

  9   ce qui se passait pendant les réunions. Je l'ai fait assez fréquemment.

 10   Q.  Vous n'avez pas tenu un journal de bord ou un agenda en quelque sorte

 11   des rendez-vous et des réunions que vous alliez avoir.

 12   R.  Non, en règle générale, je ne le faisais pas. Je me contentais de

 13   prendre note pendant les réunions ou pendant les événements où j'ai

 14   participés. Parfois je le faisais d'ailleurs pendant ces événements.

 15   Q.  Vous aviez une activité politique certes, mais est-ce que vous aviez

 16   une autre activité rémunérée pendant les années 1991 et 1990, outre votre

 17   activité politique ?

 18   R.  J'étais président de la municipalité de Knin à partir du mois de mai

 19   1992 jusqu'au début de 1994. J'étais rémunéré pour cela. C'était le travail

 20   que j'effectuais. A partir de 1994 et en 1995, ce n'est pas pertinent parce

 21   que je pense que votre question portait sur l'année 1992, n'est-ce pas ?

 22   Q.  C'est exact, Monsieur Babic. Vous nous avez dit que vous n'aviez pas

 23   d'agenda. Est-ce que, par contre, une secrétaire ou un assistant personnel

 24   conservait un agenda dans votre bureau ?

 25   R.  Comme je l'ai déjà dit, je prenais note des événements. Je n'avais pas

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  1   véritablement un agenda que je consultais et remplissais tous les jours. Je

  2   me contentais de temps à autre de consigner des notes. Ma secrétaire, bien

  3   entendu, tenait par contre le journal de bord pour ce qui est des appels

  4   téléphoniques, des réunions et cetera, et elle avait ses propres notes.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je me permettre de poser une

  6   question, Monsieur Stewart.

  7   Est-ce que, puisque je ne suis pas anglophone, vous avez posé une question

  8   à propos d'un agenda ou d'un carnet de bord, et vous avez également parlé

  9   d'un cahier où l'on pourrait consigner les rendez-vous à venir. En fait,

 10   moi, c'est ce que j'appellerais un agenda. Est-ce qu'il y a une confusion

 11   qui s'est glissée à propos d'un calepin ou d'un cahier où il a été consigné

 12   ces rendez-vous, et un livre où vous notiez le résultat de vos expériences

 13   ou le résultat de ce que vous aviez l'intention de faire ? Je n'en suis pas

 14   sûr. Je crois comprendre d'après les réponses du témoin qu'il a dit qu'il

 15   prenait des notes de ce dont il faisait l'expérience, et il a dit, "mais je

 16   ne faisais pas de la même façon dans le même cahier que le cahier où

 17   étaient consignés mes rendez-vous."

 18   M. STEWART : [interprétation] Nous avons des pratiques différentes,

 19   Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 21   M. STEWART : [interprétation] Après une centaine d'années ou deux cents ans

 22   plutôt, j'abandonne la bataille consistant à faire en sorte que la version

 23   de la langue anglaise soit adoptée par les Etats-Unis. La différence entre

 24   agenda et cahier de bord, Monsieur le Président, est fondamentalement une

 25   différence entre l'anglais et l'américain. Ce que nous appelons en

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  1   Angleterre "diary" et communément appelé "agenda" par les Américains.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour éviter toute confusion, lorsque le

  3   témoin répond en parlant de l'existence de ces notes qui ont été

  4   consignées, il n'y pas de confusion véritablement. C'est pour cela que

  5   c'est une question qui m'est venue à l'esprit.

  6   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je comprends tout à

  7   fait votre point de vue. J'ai essayé de gérer cette confusion en quelque

  8   sorte de façon expressis verbis d'ailleurs, et  c'est pour cela que j'ai

  9   parlé d'un "agenda" ou d'un "diary" en anglais où étaient consignés les

 10   rendez-vous futurs. J'ai essayé de bien faire la part des choses pour

 11   éviter toute confusion.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais les réponses du témoin ont

 13   relaté ce dont il avait fait l'expérience pendant les réunions, et Monsieur

 14   Babic, vous avez maintenant compris que

 15   Me Stewart vous demande s'il y avait un calepin ou un agenda dans lequel

 16   vous consignez vos rendez-vous à venir, hormis le calepin que vous aviez où

 17   vous consignez des notes. Est-ce que cela est clair maintenant ? Si cela

 18   n'est pas clair, dites-nous-le, je vous prie, pour que la question puisse

 19   être posée à propos de cet "agenda" où vous consignez ces rendez-vous.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est précisément ce que j'ai dit. On m'a

 21   demandé si je conservais un agenda. Dans notre langue, un agenda est

 22   quelque chose où l'on consigne les événements quotidiens, les choses qui

 23   sont passées pendant la journée. J'ai dit que je n'avais pas ce genre

 24   d'agenda. J'ai dit que de temps à autre je prenais des notes après les

 25   événements, ou même pendant les réunions qui avaient lieu. Je ne prenais

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  1   pas de note pour ce qui était des réunions à venir. Si ce n'est

  2   occasionnellement sur mon calendrier, et là j'écrivais de temps en temps à

  3   telle ou telle date je suis censé avoir telle ou telle réunion. Je le

  4   faisais à l'occasion mais pas régulièrement.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant le mot "calendrier" a été

  6   introduit. C'est ce que j'ai sur mon écran d'ordinateur. Si vous vouliez

  7   écrire un rendez-vous, vous le faisiez sur ce calendrier. Je pense que je

  8   ne vais plus intervenir parce que je pense qu'il y a une certaine confusion

  9   qui règne.

 10   M. STEWART : [interprétation] Il se peut que cela soit le cas, Monsieur le

 11   Président. Le calendrier est une phrase ou une expression. Nous l'utilisons

 12   de façon différente. En fait, si quelqu'un consultait le compte rendu

 13   d'audience et pense que nous n'avons pas réglé la question de façon

 14   compétente, je vous dirais que je ne vais pas en perdre le sommeil. J'ai

 15   essayé d'être très précis et très clair dans les questions que j'ai

 16   formulées et je pense que je l'ai été.

 17   Q.  Monsieur Babic, je vous demande maintenant - je sais que vous avez déjà

 18   répondu, mais je pense qu'il va falloir préciser la situation - je vous

 19   demande si vous aviez un calepin ou un cahier où vous consignez vos rendez-

 20   vous futurs. Par exemple, mercredi prochain, le 25 de tel mois, je suis

 21   censé me rendre à telle ou telle réunion, pour ne pas perdre de vue ce que

 22   vous avez à faire, et pour ne pas oublier des choses. Est-ce que vous aviez

 23   ce genre de calepin ou d'agenda en 1991 et 1992 ?

 24   R.  Comme je l'ai déjà dit, de temps à autre j'écrivais cela ou j'entourais

 25   une date sur le calendrier pour le jour où j'étais censé faire quelque

Page 3476

  1   chose. Je le faisais de temps à autre. Je ne le faisais pas régulièrement.

  2   Q.  Monsieur Babic, est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que

  3   d'après ce que vous avez dit clairement, si vous pouvez entourer une date

  4   dans un calendrier comme indiquant une date où vous aviez quelque chose à

  5   faire, l'agenda où vous faisiez ce genre de chose correspond exactement à

  6   ce que je décris. Que vous utilisez trois ou deux mots dans votre langue

  7   pour décrire ce document en quelque sorte, est-ce que cela correspond

  8   exactement à la question que je vous ai posée ?

  9   R.  Oui, j'avais justement ce genre de document. Ce n'était pas d'un seul

 10   et même document. Parfois c'était un tout petit agenda que je portais sur

 11   moi. D'autre fois c'était tout simplement un calepin dans lequel je

 12   consignais les événements. Parfois j'écrivais tout simplement cela sur un

 13   morceau de papier que je tirais dans ma poche. J'avais ces différents types

 14   de notes effectivement.

 15   Q.  Monsieur Babic, est-ce que ces documents que vous venez de décrire, ou

 16   ces cahiers que vous venez de décrire comme vous appartenant existent

 17   toujours aujourd'hui ?

 18   R.  Il y en a très peu.

 19   Q.  Quels sont ceux qui existent encore ?

 20   R.  J'ai quelque chose qui remonte à 1994 et 1995 alors que pour 1990 et

 21   1991, je dois dire que cela est resté dans mon appartement à Knin. Il

 22   existe des documents là-bas. Après l'opération croate intitulée "Storm".

 23   Q.  Vous a-t-on jamais demandé dans le cadre d'un entretien, ici, à ce

 24   Tribunal, vous a-t-on jamais demandé de présenter ce type de documents ?

 25   R.  Oui. Ils me l'ont demandé. En règle générale, ils m'ont demandé si je

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  1   gardais un agenda ou un journal de bord, et je leur ai répondu que parfois,

  2   je prenais des notes. On ne m'a pas demandé de donner ces notes. Ils m'ont

  3   demandé si j'avais des documents qui étaient relatifs à certains

  4   événements. Comme j'avais ces documents, j'ai pu les retrouver. J'avais,

  5   par exemple, des documents pour une raison bien précise que j'ai,

  6   d'ailleurs, expliquée pendant l'enquête.

  7   Q.  Monsieur Babic, pour être très clair, ces documents auxquels vous venez

  8   de faire allusion au cours des deux à trois dernières minutes, est-ce que

  9   certains de ces documents ou l'ensemble de ces documents ont jamais été

 10   transmis, par vous, à un enquêteur dans le cadre d'affaires éventuelles,

 11   ici, à ce Tribunal ?

 12   R.  Non, pas ce genre de documents si ce n'est que cela a été fait pour des

 13   documents officiels. J'avais un certain nombre de documents officiels que

 14   j'ai donnés.

 15   Q.  Qui a accès à votre appartement à Knin ?

 16   R.  J'ai entendu dire qu'un colonel croate réside dans cet appartement

 17   maintenant. Qui avait accès à mon appartement avant qu'il n'y réside, je

 18   n'en sais rien. Je suppose que les autorités croates y ont envoyé d'autres

 19   personnes parce que ce sont ces autorités qui ont autorisé d'autres

 20   personnes à utiliser mon appartement. Je suppose que ce sont les autorités

 21   croates qui l'ont fait.

 22   Q.  Monsieur Babic, alors si d'aucun le savent, moi, je ne le sais pas.

 23   J'aimerais, tout simplement, vous poser une question. Avez-vous été arrêté

 24   ou vous êtes-vous rendu de votre propre gré après que l'acte d'accusation

 25   ait été prononcé, contre vous, par ce Tribunal ?

Page 3478

  1   R.  Je me suis rendu de mon propre gré et de mon plein gré. Cela s'est

  2   passé le 26 novembre de l'année dernière.

  3   Q.  A cette époque, lorsque vous vous êtes rendu de votre gré, est-ce que

  4   les documents dont vous avez parlé depuis les cinq dernières minutes se

  5   trouvaient dans votre appartement à Knin tel que vous nous l'avez décrit ?

  6   R.  Je m'excuse. Vous parlez des notes que je prenais ou d'autres

  7   documents ?

  8   Q.  Je parle de tous les documents, Monsieur Babic.

  9   R.  Je ne sais pas exactement ce qui se trouvait dans mon appartement à

 10   Knin, à l'époque.

 11   Q.  Monsieur Babic, c'est vous qui avez parlé de ces documents. C'est vous

 12   qui avez dit à la Chambre de première instance où ils se trouvent. Je ne le

 13   sais pas, Monsieur Babic. Je me contente de poser des questions. Je n'en

 14   sais rien. Les documents auxquels vous avez fait référence au cours des six

 15   dernières minutes environ, où se trouvaient-ils ? Est-ce qu'ils se

 16   trouvaient dans votre appartement à Knin lorsque vous vous êtes rendu ?

 17   R.  Les documents, que j'ai donnés aux enquêteurs du Tribunal en 1991,

 18   étaient des documents que j'avais avec moi à Belgrade, à l'époque. C'est

 19   justement ce que j'ai transmis aux enquêteurs. Les autres documents sont

 20   les documents qui se trouvaient dans mon appartement en 1995. Je ne sais

 21   pas où ils se trouvent maintenant, et je ne sais pas, non plus, qui a eu

 22   accès à ces documents. En novembre 2003, je ne savais pas où se trouvaient

 23   les documents de mon appartement. Je ne sais pas, d'ailleurs très bien, à

 24   quels documents vous faites référence.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que la confusion ne règne,

Page 3479

  1   j'aimerais poser une ou deux questions à M. Babic.

  2   Monsieur Babic, quand est-ce que vous vous êtes trouvé pour la dernière

  3   fois dans votre appartement à Knin ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 2 août 1995.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, je vous prie, Maître

  6   Stewart.

  7   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse, mais je

  8   voudrais retrouver ce qu'a dit le témoin il y a quelque temps de cela.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a une question qui m'a traversé

 10   l'esprit lorsque le témoin a fait référence à l'opération "Storm". J'ai eu

 11   l'impression que vous posiez des questions en supposant que M. Babic avait

 12   été dans son appartement jusqu'à la fin de l'année dernière, date à

 13   laquelle il s'est rendu de son plein gré. Je n'en suis pas sûr.

 14   M. STEWART : [interprétation] Vous savez, en général, lorsque je ne sais

 15   pas quelque chose, je ne me perds pas en conjecture. Je n'étais pas là, à

 16   l'époque.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est pour cela que j'ai posé la

 18   question au témoin, vous pouvez poursuivre, je vous prie.

 19   M. STEWART : [interprétation] Comme je vous l'ai dit, Monsieur le

 20   Président, je souhaiterais retrouver ce que le témoin a dit il y a quelque

 21   temps de cela.

 22   Q.  Monsieur Babic, voilà ce que vous avez dit, et cela se trouve à la

 23   ligne 38 : 21, voilà la référence, à 11 heures 35, 16 secondes. Je vous ai

 24   posé une question. Je vous ai dit : "Monsieur Babic, est-ce que ces

 25   documents que vous venez de décrire existe toujours aujourd'hui ?" Vous

Page 3480

  1   avez répondu : "Il y en a très peu qui existent." Je vous ai demandé, ce

  2   qui n'est pas, tellement, surprenant : "Quels sont ceux qui existent

  3   encore ?" Ce à quoi vous avez répondu : "J'ai quelque chose qui remonte à

  4   1994 et 1995, alors que pour les années 1990 et 1991, ces documents sont

  5   restés dans mon appartement à Knin, il y avait encore certains documents

  6   après l'opération croate intitulée "Storm."

  7   A partir de ce moment-là, ce n'est pas, véritablement, une grande surprise,

  8   je vous ai posé des questions compte tenu de cette réponse, parce que c'est

  9   vous qui le savez. Soyons clairs, Monsieur Babic. Vous avez dit à la

 10   Chambre qu'il y avait des documents. Je sais que vous ne vous êtes rendu

 11   nulle part.

 12   R.  Je m'excuse, je m'excuse. Peut-être que ce fut un lapsus de ma part.

 13   Comment est-ce que je saurais s'il y a encore des documents dans mon

 14   appartement, des documents qui remontent à 1995. Tout ce que j'ai dit,

 15   c'est que ces documents sont restés dans mon appartement en 1995. J'ai dit

 16   que je ne savais pas qui y avait eu accès. Je ne sais pas ce qu'il est

 17   advenu de ces documents. Il y a un colonel croate qui réside dans mon

 18   appartement. Je ne sais pas ce qui est advenu de mes effets et de mes

 19   documents qui sont restés après le 4 ou le 5 août 1995. Moi, je faisais

 20   allusion aux documents que j'avais avec moi lorsque j'ai dit qu'en 2001,

 21   j'ai donné ces documents aux enquêteurs du Tribunal.

 22   Q.  Monsieur Babic, je pense que vous avez commis un autre lapsus dans

 23   votre réponse parce que lorsque vous dites : "Comment est-ce que je

 24   pourrais savoir s'il y avait encore des documents dans mon appartement

 25   depuis 1995," en fait, je vous ai posé une question bien précise à propos

Page 3481

  1   des documents auxquels vous, vous aviez fait allusion. Je ne sais plus

  2   maintenant si vous avez dit 1990 et 1991 ou 1991 et 1992, mais ce n'est pas

  3   une différence primordiale. Là, je pense que c'est un lapsus de votre part

  4   puisque nous parlions de la période précédente, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non, ce que nous discutons c'est le fait que j'aurais dit que ces

  6   documents sont restés là-bas. Moi, ce que je sais, c'est qu'ils y sont

  7   restés, mais je ne sais ce qu'il advenu de ces documents parce que je ne

  8   sais pas qui est entré dans l'appartement. Je ne sais pas si la police

  9   croate a, éventuellement, visité l'appartement, si elle a saisi ces

 10   documents, si elle les a brûlés, si elle en a fait autre chose. Je ne peux

 11   pas affirmer aujourd'hui que ces documents sont toujours présents dans cet

 12   appartement. Mes livres, mes vêtements, tout ce qui m'appartenait, mes

 13   objets personnels. Je sais qu'il en est resté là-bas. Après l'opération

 14   tempête, l'opération militaire tempête, je ne sais pas ce qu'il a pu

 15   advenir de ces documents, est-ce que quelqu'un est venu, les a saisis, les

 16   a brûlés, ou les a détruits d'une autre façon.

 17   Q.  Monsieur Babic, je crois que je commence à comprendre ce que vous

 18   voulez dire. Il arrive parfois que cela présente quelque difficulté

 19   lorsqu'on passe d'une langue à l'autre. Maintenant, je vois très bien ce

 20   que vous voulez dire.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, j'ai une question à vous

 22   poser. Ce qui m'intéresserait ce serait de savoir si le témoin peut

 23   s'expliquer plus avant au sujet de 1992 et 1993. Est-ce que des documents

 24   ont été établis à ce moment-là ? Parce qu'il a parlé de ces notes, de ces

 25   documents, il a parlé de 1994, de 1995, et ensuite il est passé à 1990 et

Page 3482

  1   1991, mais il n'y a rien été dit de 1993 et 1994. Je ne sais pas d'ailleurs

  2   si c'est pertinent.

  3   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je suis tout à fait

  4   d'accord. Il y a un hiatus dans le temps, à ce moment-là.

  5   Q.  Comme M. le Président l'a souligné à très juste titre, Monsieur Babic,

  6   nous parlons des documents datant de 1990 et 1991, peut-être de 1992

  7   également. Nous avons, également, parlé des documents datant de 1994 et

  8   1995, mais qu'en est-il de la période située entre ces deux séries de

  9   dates, donc 1993 et éventuellement le début de 1994 ?

 10   R.  Comme je l'ai expliqué, pour moi il y avait deux périodes différentes

 11   dans leur nature. J'ai été responsable de la Krajina jusqu'en février 1992,

 12   fin de mes responsabilités. Après quoi, je me suis trouvé, d'un certaine

 13   façon, isolé dans l'opposition. J'étais toujours président de l'assemblée

 14   municipale de Knin mais, en tout cas, c'est une deuxième partie assez

 15   différente de ma vie. En avril 1994, je deviens ministre des Affaires

 16   étrangères.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, je me permets de vous

 18   interrompre. J'aimerais que vous écoutiez, attentivement, la question qui

 19   vous est posée. La question qu'il vous posait concernait le fait de savoir

 20   si des documents, des écrits dont vos seriez l'auteur existent toujours ?

 21   Il n'était pas question de savoir quand vous les avez écrits ou à quel

 22   endroit vous les avez écrits. Ce n'était pas cela la question, la question

 23   consistait à vous demander si certains de ces documents sont restés

 24   derrière vous, et auraient été écrits en 1992, 1993 ?

 25   Monsieur Tieger, vous souhaitiez vous exprimer ?

Page 3483

  1   M. TIEGER : [interprétation] Un mot simplement pour obtenir un

  2   éclaircissement, Monsieur le Président.

  3   Dernière ligne de la dernière réponse du témoin, là où il parle du fait

  4   qu'il est devenu ministre du gouvernement bosniaque en avril 1994. Je crois

  5   que cela exige quelques éclaircissements.

  6   M. STEWART : [interprétation] Littéralement, c'est très certainement vrai,

  7   Monsieur le Président, si cela était vrai, cela permettrait de voir les

  8   choses sous un angle, tout à fait, différent.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est peut-être un lapsus ou une erreur

 10   d'interprétation anglaise. Nous ne le savons pas. Veuillez procéder.

 11    Monsieur Babic, avant de passer à une nouvelle question, Me Stewart va

 12   certainement vous demander un éclaircissement, mais pourriez-vous répondre

 13   à la première question qu'il a posée tout à l'heure ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais ministre des Affaires étrangères du

 15   gouvernement de la Républika Srpska de Krajina. Cela c'est pour corriger le

 16   compte rendu d'audience en anglais. Quant à ce que je disais par ailleurs,

 17   je pense que c'était clair. J'ai dit que dans mes notes privées que j'ai

 18   consignées en 1991 et 1992 ainsi qu'en 1990, elles étaient dans mon

 19   appartement de Knin et qu'elles y sont restées quand je suis parti en août

 20   1995. Certains documents officiels, certains documents des archives dont je

 21   disposais, qui traitaient des événements de 1991 et 1992 en Krajina --

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, je dois vous interrompre

 23   encore une fois. La question et vous reprenez votre réponse déjà fournie

 24   antérieurement, mais la question portait sur 1992 et 1993. Ce n'est pas la

 25   période dont vous avez déjà parlé dans vos réponses antérieures. Veuillez

Page 3484

  1   répondre à la question qui vous est posée maintenant par Me Stewart, je

  2   vous prie ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je possède des notes de 1993, 1994 et

  4   1995.

  5   M. STEWART : [interprétation]

  6   Q.  Pourriez-vous rapidement nous dire dans quelle condition vous avez

  7   quitté votre appartement de Knin, en 1995 ?

  8   R.  J'ai été convoqué par l'ambassadeur américain à Zagreb, M. Galbraith

  9   qui voulait discuter avec moi du plan ZFOR et des propositions de la

 10   communauté internationale pour la Krajina. Il voulait que nous discutions,

 11   également, de l'accord économique qui était prévu de conclure avec la

 12   Croatie, et de l'engagement de l'armée serbe, de l'armée de la République

 13   de Krajina serbe dans la poche de Bihac. Sur la proposition de M.

 14   Galbraith, je suis allé le rencontrer à Zagreb. Deux endroits avaient été

 15   proposés pour cette rencontre, un bateau sur la mer adriatique, ou

 16   l'ambassade américaine de Belgrade. Finalement, nous avons décidé de nous

 17   rencontrer dans les locaux de l'ambassade de Belgrade. Nous nous sommes

 18   rencontrés, mais après je n'ai pas réussi à retourner à Knin parce que,

 19   entre temps, l'offensive croate, l'opération Tempête avait commencé.

 20   Q.  Est-ce que vous êtes parti accompagné de votre famille quand vous avez

 21   quitté cet appartement de Knin, en 1995 ?

 22   R.  J'étais accompagné de mon épouse, de mes deux enfants et de la mère de

 23   mon épouse.

 24   Q.  Lorsque vous êtes allé à Belgrade pour avoir ces entretiens à

 25   l'ambassade américaine avec l'ambassadeur et peut-être d'autres personnes,

Page 3485

  1   votre épouse est restée dans l'appartement de Knin, pour dire les choses

  2   simplement ?

  3   R.  Elle avait emmené sa mère dans un institut oncologique de Belgrade pour

  4   subir des séances de rayons parce que sa mère avait le cancer, elle avait

  5   une tumeur. Elle devait subir, régulièrement, des séances de rayons.

  6   Q.  Oui. Je vais reformuler ma question. Votre épouse ou vos enfants sont-

  7   ils restés dans l'appartement de Knin lorsque vous êtes allé à Belgrade ?

  8   R.  Je suis sorti de l'appartement le dernier. J'ai fermé à clé. Mon épouse

  9   était à l'hôpital avec sa mère et les enfants étaient en vacances chez ma

 10   sœur. J'étais seul quand je suis sorti de l'appartement.  

 11   Q.  Vous pensiez revenir ?

 12   R.  Oui, bien sûr.

 13   Q.  Avez-vous appris quelque chose quant à ce qu'il est advenu de votre

 14   appartement -- enfin, je vais diviser ma question en deux parties.

 15   Premièrement, vous nous avez parlé de l'opération Tempête, quand a commencé

 16   cette opération Tempête ?

 17   R.  Le 4, le 5, le 6, le 7, le 8 août 1995.

 18   Q.  A savoir, combien de temps après votre départ pour Belgrade ?

 19   R.  J'ai dit que j'étais parti le 2, c'était peut-être le 1er août. En tout

 20   cas, cela s'est passé le lendemain de l'accord conclu avec l'ambassadeur

 21   Galbraith, qui consistait à prendre toutes les mesures nécessaires pour

 22   régler la situation de la Krajina. Après cet accord, il y a eu envoi d'une

 23   délégation à Genève qui a également obtenu la conclusion d'un accord sur

 24   ces propositions. Voilà ce que je peux dire des circonstances temporelles.

 25   Je ne sais pas combien de temps tout cela a pris, peut-être trois ou quatre

Page 3486

  1   jours.

  2   Q.  C'était peut-être une bonne chose, c'était peut-être une mauvaise

  3   chose. Je vous demande si en fait ce n'était pas d'une certaine façon, une

  4   certaine bonne affaire que cette offensive commence juste quelques jours

  5   après que vous ayez quitté votre appartement de Knin. J'ajouterais encore

  6   quelques mots à cette question. Aviez-vous prévu un tel bouleversement et

  7   est-ce pour cela que vous-même et votre famille aviez-vous déménagé ?

  8   R.  Non, c'était une coïncidence. Quant à moi, personnellement, je peux

  9   dire quelles étaient les conditions politiques et quelles sont les raisons

 10   politiques pour lesquelles l'offensive de la Croatie a commencé précisément

 11   ce jour-là. Je présidais le gouvernement de Krajina à ce moment-là depuis

 12   sept jours. J'ai accepté la proposition de la communauté internationale au

 13   sujet de la solution à apporter à la situation de Krajina. Notre délégation

 14   à Genève l'a accepté également. Il y a eu des pourparlers. L'OTAN,

 15   finalement, a accepté le fait que l'allégation avancée par le représentant

 16   croate, à savoir que, soi-disant, les Serbes étaient en train de chercher à

 17   gagner du temps, c'était un prétexte pour ne pas accepter d'entamer les

 18   négociations et pour ne pas accepter l'accord, et c'est pour cette raison

 19   que tout d'un coup, brutalement, l'opération Tempête a commencé. Mon

 20   interprétation, en tout cas, c'était que la Croatie, en raison de l'accord

 21   conclu, suite au pourparlers dont je viens de parler, a lancé cette

 22   opération subitement afin d'empêcher que les négociations se poursuivent ou

 23   qu'elles aient lieu d'ailleurs. C'est ma façon d'interpréter ce que la

 24   Croatie essayait de faire dans le cadre de cette opération ou cette

 25   agression qui avait pour but d'occuper la Krajina et d'expulser la

Page 3487

  1   population serbe de Krajina. Cela n'a pas fait l'objet des entretiens dont

  2   j'ai parlés, tout à l'heure, au moment où ils ont eu lieu.

  3   Q.  La situation est la suivante : A l'époque, à savoir, au début du mois

  4   d'août 1995, vous vous attendez à ce qu'en fonction de l'état de santé de

  5   la mère de votre épouse, votre épouse revienne à Knin à la fin des vacances

  6   d'été, puisque je crois que j'ai cru que vous avez dit que vos enfants

  7   étaient chez la sœur de votre épouse ou chez la vôtre. En tout cas, ils

  8   devaient revenir dans l'appartement de Knin et en fonction de vos

  9   obligations politiques et des rencontres et rendez-vous que vous aviez, il

 10   était prévu que vous reveniez également dans l'appartement de Knin, n'est-

 11   ce pas ?

 12   R.  Oui, sauf que vous avez parlé de ma sœur et que ma sœur ne vivait pas à

 13   Knin. Elle vivait à Belgrade.

 14   Q.  Cela n'a pas d'importance. On peut lire le compte rendu d'audience,

 15   Monsieur Babic.

 16   Il y a une chose que vous n'avez pas abordée, est-il exact que pas une

 17   seule fois, absolument jamais, vous n'êtes retourné dans votre appartement

 18   de Knin depuis cette date ? Ceci est-il exact ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Pour autant que vous le sachiez, votre épouse ou un autre membre de

 21   votre famille a-t-il, à quelque moment que ce soit, retourné dans votre

 22   appartement de Knin depuis cette date ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Une autre personne serait-elle retournée à quelque moment que ce soit

 25   dans cet appartement de Knin à votre demande et pour vous représenter ?

Page 3488

  1   R.  Non, hormis le jour où les gens de Knin sont partis. Est-ce que la

  2   voisine qui avait la clé de l'appartement est entrée dans l'appartement ou

  3   pas, cela, je ne saurais pas le dire. Personne n'y est allé à ma demande ou

  4   à la demande d'un des membres de ma famille. Par la suite, nous avons

  5   demandé à des voisins qui habitaient dans notre appartement, est-ce qu'il

  6   pourrait vérifier, et on nous a répondu, on nous a dit que c'était un

  7   colonel de l'armée croate qui habitait dans l'appartement et qu'on ne

  8   pouvait plus y entrer.

  9   Q. La situation est la suivante : Depuis de nombreuses années, vous n'avez

 10   pas pu retourner en Croatie en raison de problèmes de sécurité, n'est-ce

 11   pas ? Je ne veux me monter discourtois à l'égard de personne, mais enfin

 12   c'est comme cela qu'on dire les choses, n'est-ce pas ?

 13   R.  Bien sûr.

 14   Q.  Depuis quand ?

 15   R.  Depuis quand exactement, en fait, je ne sais pas exactement depuis

 16   quand le procureur de Croatie a lancé un acte d'accusation à mon encontre à

 17   Split ou à Sibenik, pour raison d'acte séparatiste par rapport à la

 18   Croatie. Il y a eu un procès au tribunal, comment est-ce que je pourrais

 19   l'appeler autrement, un procès politique intenté à mon encontre pour

 20   accusation de sécession par rapport à la Croatie. Ce procès s'est terminé

 21   sur un verdict qui, ensuite, a été cassé en raison de la loi d'amnistie

 22   votée par le parlement croate. En dépit de cela, moi, je ne me sentais pas

 23   en sécurité. J'ai été blanchi par la loi croate, mais en dépit de cela, je

 24   n'ai pas encore réfléchi à la possibilité de me rendre en Croatie.

 25   Q.  Je vous prie de m'excuser, parce que d'habitude, je préfère ne pas

Page 3489

  1   entrer dans des détails de cette nature. Excusez-moi, M. Babic, mais je

  2   vous demande tout de même à quel moment cet acte d'accusation a été dressé

  3   à votre encontre en Croatie ?

  4   R.  Quand il a été dressé exactement, je ne sais pas. J'ai découvert cela

  5   plus tard par les médias. La date exacte, vraiment, je ne la connais pas.

  6   Je n'ai pas été notifié de l'existence de cet acte d'accusation et je n'ai

  7   assisté à aucune audience, d'aucune nature, en rapport avec cette affaire.

  8   Q.  Quand avez-vous, pour la première fois, entendu parler de l'existence

  9   de cet acte d'accusation ?

 10   R.  Je ne saurais pas vous le dire avec exactitude. Je n'ai pas fait

 11   attention à la date. Je n'étais pas, d'ailleurs, sûr de la réalité des

 12   faits. Je pensais que cela pouvait être une provocation. A Belgrade, après

 13   1995, on m'a fait savoir que c'était exact et on m'a apporté des

 14   renseignements complémentaires à ce sujet, des gens dont les noms

 15   figuraient également sur l'acte d'accusation. Après 1995, j'en ai appris

 16   davantage sur ce sujet. 

 17   Q. Monsieur Babic, vous dites ne pas pouvoir dire aux Juges de la Chambre à

 18   quel moment précis vous avez appris l'existence de cet acte d'accusation,

 19   mais pourriez-vous fournir aux Juges au moins une indication de la période

 20   durant laquelle vous avez appris l'existence de cet acte d'accusation ?

 21   R.  Il me semble que quelqu'un a évoqué la chose devant moi, juste avant

 22   1995, mais je n'en suis pas sûr. Je ne suivais pas de près la presse croate

 23   qui a parlé de cela dont je ne suis vraiment pas sûr. Quelqu'un m'en a

 24   parlé. Il est sûr que c'était avant 1995, mais je ne peux donner aucun

 25   autre détail, car je ne serais pas précis.

Page 3490

  1   Q.  Vous dites avant 1995 c'était avant votre départ de Croatie ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Vous avez tout de même continué à demeurer en Croatie pendant quelque

  4   temps tout en sachant qu'un acte d'accusation avait été dressé à votre

  5   encontre ?

  6   R.  Pour être plus précis, j'habitais en Krajina où, selon notre position

  7   politique, ce territoire se trouvait toujours en Croatie, mais nécessitait

  8   encore certaines solutions pour que son statut à l'intérieur de la Croatie

  9   soit tout à fait déterminé et, ce, par des négociations politiques. A

 10   l'époque, physiquement, je ne me sentais pas sous le contrôle physique des

 11   autorités croates. Je vivais dans une région autre, qui était sous le

 12   contrôle serbe, sous le contrôle de la République serbe de Krajina. Parce

 13   qu'officiellement, nous échappions à la compétence du gouvernement croate.

 14   Q.  Doit-on comprendre, par conséquent, et pour résumer les choses, que

 15   tout en sachant qu'un acte d'accusation - là, je parle du concret - avait

 16   été dressé à votre encontre, vous avez estimé être en sécurité jusqu'au

 17   moment où vous avez finalement quitté Knin, parce qu'ensuite, compte tenu

 18   de l'existence de l'opération Tempête, vous ne vous êtes plus senti en

 19   sécurité en Croatie et vous n'avez plus souhaité y retourner. C'est bien

 20   cela pour résumer ?

 21   R.  Oui, pour dire les choses simplement. Je pensais qu'un procès politique

 22   m'avait été intenté et qu'il fallait encore que la crise politique soit

 23   résolue. Par conséquent, après l'opération Tempête, je n'étais plus en

 24   sécurité si je retournais là-bas. Tous les gens de Krajina avaient été

 25   expulsés, les maisons brûlées, des crimes avaient été commis. Tout cela

Page 3491

  1   était absolument horrible. Très peu de gens auraient eu le courage de

  2   rentrer. Au jour d'aujourd'hui d'ailleurs, il y a pas mal de gens qui n'ont

  3   toujours pas le courage de retourner en Croatie en dépit des efforts qui

  4   ont été faits pour les y inciter.

  5   Q.  Si je parle de l'hypothèse que vous étiez propriétaire de l'appartement

  6   à ce moment-là, je vous demande maintenant si vous en êtes toujours le

  7   propriétaire de cet appartement de Knin ?

  8   R.  Aux termes des lois de l'époque en Croatie et dans toute la

  9   Yougoslavie, j'avais le droit d'utilisation de cet appartement pour une

 10   période indéterminée. Pour répondre à votre question quant au fait de

 11   savoir ce qu'il en est aujourd'hui, je vous répondrai que j'ai toujours le

 12   même droit d'utilisation en vertu des lois de la nouvelle Croatie. Pour

 13   devenir propriétaire, j'aurais dû retourner là-bas et acquérir

 14   l'appartement. Les lois de la République de Croatie n'étaient pas valables

 15   en Krajina, donc je répondrai à votre question en vous disant que nous ne

 16   sommes toujours pas propriétaires de nos appartements, mais que nous avons

 17   le droit d'y habiter temporairement. Nous avons un droit d'usage, mais nous

 18   avons perdu le droit d'acquérir ces appartements parce que nous ne nous

 19   sommes pas faits connaître officiellement dans les délais prévus comme

 20   désireux d'acheter ces appartements. Voilà ce que je pourrais dire pour

 21   être le plus près de la réalité. Le gouvernement croate est en train

 22   d'essayer de faire ce qu'il faut pour que le droit d'usage se transforme en

 23   droit d'acquisition, mais la question n'est toujours pas définitivement

 24   résolue.

 25   Q.  Depuis votre départ en 1995, est-ce que vous avez fait des efforts pour

Page 3492

  1   récupérer ou, en tout cas, continuer à conserver les biens personnels que

  2   vous aviez dans cet appartement lorsque vous l'avez quitté en août 1995 ?

  3   R.  La seule chose que j'ai faite, c'est demander à la voisine, qui pouvait

  4   entrer dans l'appartement, éventuellement, de voir s'il serait possible d'y

  5   entrer. Elle m'a fait savoir qu'un colonel croate - je crois qu'il

  6   s'appelle Jakelic - habite dans cet appartement aujourd'hui. Une fois que

  7   j'ai appris cela, j'ai cessé toute tentative pour récupérer quelque chose

  8   dans l'appartement.

  9   Q.  Depuis quand le colonel croate habite dans cet appartement, si vous le

 10   savez ?

 11   R.  Je ne sais pas quand il a emménagé. Je pense que la voisine est entrée

 12   dans l'appartement un an plus tard, en 1996 ou 1997.

 13   Q.  Je vais reformuler ma question puisque vous vous rappelez qu'on vous a

 14   dit la chose. Je vous demande, quand avez-vous été informé qu'un colonel

 15   croate se trouvait dans votre appartement ?

 16   R.  En 1996 ou 1997.

 17   Q.  Vous dites que vous avez eu l'occasion de rencontrer M. Krajisnik ou de

 18   vous trouvez aux côtés de M. Krajisnik - si je me souviens bien - vous avez

 19   dit à quatre reprises, n'est-ce pas, entre 1991 et 1992 ?

 20   R.  Oui, oui.

 21   Q.  C'est bien cela ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Il est exact, n'est-ce pas  - peut-être serai-je mieux de commencer par

 24   là - que vous n'avez jamais rencontré M. Krajisnik dans quelque cadre que

 25   ce soit en tête-à-tête ?

Page 3493

  1   R.  J'ai dit avoir été présent à quatre reprises en même temps que lui à

  2   des réunions publiques. Chaque fois, il s'agissait de réunions publiques

  3   avec un certain nombre de participants dont M. Krajisnik et moi-même.

  4   Q.  Est-il exact, Monsieur Babic, que la seule fois où vous vous rappelez

  5   avoir parlé en privé avec M. Krajisnik, c'est la fois où, d'après vos

  6   dires, vous avez parlé avec lui lors d'un dîner en 1995, pour autant qu'un

  7   tel entretien, au cours d'un dîner, puisse être qualifié de privé ?

  8   R.  Cela s'est passé à plusieurs reprises. La première fois en 1993;

  9   janvier 1995; et mai 1995; et aussi peut-être à la fin de mai ou au début

 10   de juin 1995, deux fois. J'ai eu cinq fois l'occasion de me trouver en

 11   tête-à-tête avec lui, à moins que ce ne soit dans des groupes de trois à

 12   cinq personnes. Cinq fois en 1993 et 1994, pour autant que je puisse m'en

 13   souvenir. Cinq fois dans cette période je me suis trouvé seul en tête-à-

 14   tête avec M. Krajisnik ou encore dans un groupe de trois à cinq personnes.

 15   M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi un instant, Monsieur le

 16   Président.

 17   [Le Conseil de la Défense se concerte]

 18   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Est-ce que vous dites qu'à un moment donné en 1991 ou 1992, vous avez

 20   assisté à la même réunion que M. Krajisnik, et que lors de cette réunion-

 21   là, il n'avait pas plus de deux ou trois autres personnes avec vous ?

 22   R.  C'est ce que j'ai dit au sujet de mes rencontres avec lui en 1993 et

 23   1994. En ce qui concerne 1991 et 1992, j'ai dit que j'ai vu Krajisnik lors

 24   des quatre réunions auxquelles a assisté M. Krajisnik, moi-même, et un

 25   nombre d'autres personnes.

Page 3494

  1   Q.  J'essaie de parler avec vous le plus vite possible de cela. Je vous

  2   propose que l'on se penche sur ces réunions une par une. S'il vous plaît,

  3   répondez aussi brièvement que possible pour que l'on puisse traiter de

  4   chacune de ces réunions. Répondez, si possible, par oui ou non. Vous dites

  5   que vous avez rencontré M. Krajisnik le 23 octobre 1991 au palais de la

  6   Fédération à Belgrade. Est-ce exact ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Vous dites que vous l'avez rencontré le 30 et/ou le 31 janvier 1992 à

  9   Belgrade. Pour vous rafraîchir la mémoire, c'était lors d'une réunion à

 10   laquelle a assisté M. Mladic parmi d'autres personnes. Est-ce exact ?

 11   R.  C'était une réunion qui a eu lieu pendant trois jours. C'était le 31

 12   janvier, le 1ier et le 2 février 1992.

 13   Q.  Très bien, mais il s'agit de cette réunion-là peu importe les

 14   différences de date. C'était la deuxième réunion. Ensuite, vous dites que

 15   vous avez rencontré M. Krajisnik, que vous avez tous les deux assisté à une

 16   réunion à Bosanski Novi. Nous en avons, déjà, parlé au cours de la séance

 17   de ce matin dans un autre contexte. Il s'agissait d'une réunion qui

 18   concernait, d'une certaine manière, les obsèques de M. Raskovic. Est-ce

 19   exact ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Aviez-vous dit que vous avez rencontré M. Krajisnik, ou que vous avez

 22   assisté tous les deux à une réunion le 30 ou le 31 octobre 1992 à Prijedor.

 23   Est-ce exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Il s'agit là des réunions que vous avez eues en 1991 et 1992. Il s'agit

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  1   là de quatre réunions dont vous avez parlé et concernant lesquelles vous

  2   avez dit que M. Krajisnik a assisté aussi, et il n'y en avait pas eu

  3   d'autres au cours de cette période. Est-ce exact ?

  4   R.  Oui, c'est exact. Je ne me souviens pas d'autres réunions.

  5   Q.  Vous avez dit, lors de votre déposition pour compléter l'image,

  6   qu'après 1992, vous l'avez rencontré un nombre de fois entre 1992 et 1995,

  7   mais que vous ne pouviez pas nous donner le nombre concret de ces réunions,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Je me souviens. Exactement, cinq fois, je me souviens très bien du

 10   temps et des circonstances qui entouraient ces réunions. Je ne me souviens

 11   pas s'il y en eu d'autres. En ce qui concerne cinq réunions, je sais avec

 12   certitude quelles circonstances les entouraient et à quel moment cela s'est

 13   fait.

 14   Q.  Il s'agit des cinq réunions au cours de la période entre 1993 et 1995.

 15   Est-ce exact ?

 16   R.  Oui. Il y en avait une en 1993 et quatre en 1995.

 17   Q.  Vous n'avez pas rencontré M. Krajisnik du tout en 1994 ?

 18   R.  Je ne me souviens pas l'avoir rencontré.

 19   Q.  Est-ce qu'il est exact et c'est, apparemment, conforme à ce que vous

 20   avez déjà dit ce matin, à savoir qu'après 1995 vous n'avez plus revu M.

 21   Krajisnik hormis ici dans ce prétoire. Est-ce exact ?

 22   R.  Effectivement.

 23   M. STEWART : [interprétation] Je pense que le moment est opportun pour

 24   faire une pause. S'il convient à la Chambre. Nous pouvons procéder à une

 25   pause maintenant.

Page 3496

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons le faire, et nous allons

  2   avoir une pause jusqu'à 12 heures 40.

  3   --- L'audience est suspendue à 12 heures 21.

  4   --- L'audience est reprise à 12 heures 43.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Stewart.

  6   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, quand j'essaie d'être efficace,

  8   j'obtiens le contraire souvent.

  9   Effectivement, il faut faire entrer le témoin dans le prétoire.

 10   M. STEWART : [interprétation] Effectivement. On aurait pu procéder de

 11   manière accélérée ainsi, mais cela c'est une autre question.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous proposez une procédure

 13   conforme à la loi civile, à la "civil law".

 14   M. STEWART : [interprétation] Pas de commentaire.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Stewart.

 16   M. STEWART : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Babic, nous nous sommes penchés sur les réunions une par une

 18   que, d'après ce que vous avez dit, vous avez eu avec M. Krajisnik en 1991,

 19   1992. Vous parlez de la première de ces réunions au paragraphe 7 de votre

 20   déclaration écrite. Dans déposition de cette semaine, vous n'avez rien

 21   ajouté, vous dites que vous croyez que vous avez rencontré M. Krajisnik

 22   pour la première fois lors d'une réunion du 23 octobre 1991 au palais de la

 23   Fédération, au cours des discussions concernant le soutien de la

 24   Yougoslavie.

 25   Ma première question, Monsieur Babic, est de savoir si vous êtes absolument

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  1   sûr en ce qui concerne la date du 23 octobre 1991 ? Le 23 octobre, je ne

  2   conteste pas du tout l'année.

  3   R.  Je suis sûr que tout cela s'est passé après le 20 octobre, après une

  4   réunion qui a eu lieu à Banja Luka le 18 octobre. C'est ce qui s'est passé.

  5   Cela s'est passé avant le 25. Je pense, d'ailleurs, que dans mes notes,

  6   j'ai marqué une certaine chronologie des événements et que j'avais noté la

  7   date du 23 octobre.

  8   Q.  De quelles notes parlez-vous dans cette réponse ?

  9   R.  J'avais établi une espèce de chronologie des événements pour me

 10   rafraîchir la mémoire lorsque je me préparais pour l'entretien avec les

 11   représentants du Tribunal sur la base de mes souvenirs et sur la base des

 12   documents dont je disposais.

 13   Q.  Avez-vous remis cette note aux enquêteurs ?

 14   R.  On ne me l'a pas demandé.

 15   Q.  Ma question était de savoir, Monsieur Babic, si vous avez remis ces

 16   notes aux enquêteurs ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Vous avez déjà dit qu'ils ne vous les ont pas demandées. Est-ce que

 19   vous avez proposé cela ?

 20   R.  Non, je le faisais simplement pour mettre de l'ordre dans mes propres

 21   souvenirs. Je le faisais pour moi-même.

 22   Q.  Lorsque les enquêteurs vous ont interrogé, est-ce que vous aviez ces

 23   notes devant vous ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Quel était le but de préparer une note pour vous rafraîchir la mémoire

Page 3498

  1   sans l'avoir pendant la réunion pour laquelle vous l'aviez préparée ?

  2   R.  Justement, avant d'aller à la réunion, je souhaitais mettre de l'ordre

  3   dans mes pensées, dans mes souvenirs parce que beaucoup de temps s'était

  4   écoulé depuis cette période, depuis ces événements. Lors de la première

  5   réunion que j'ai eue avec l'enquêteur Butch Rider [phon], je ne suis pas

  6   sûr de la prononciation, c'était en avril 2001 lorsque j'ai demandé de voir

  7   un représentant du Tribunal, ce monsieur est venu. C'est avec lui que nous

  8   nous sommes mis d'accord sur le temps où il serait possible de faire une

  9   déclaration, et de l'endroit. J'ai demandé de combien de jours ils auraient

 10   besoin, il m'a dit que quelques jours suffiraient, qu'ils souhaitaient

 11   parler des événements portant sur 1990, 1991 et 1992. Il a dit que c'était

 12   la période qu'il les intéressait. Après cela, je me suis assis, j'ai

 13   commencé à réfléchir aux événements qui se sont déroulés au cours de cette

 14   période. Après cela, j'ai écrit ces notes. Après l'enquête, elle a duré

 15   pendant longtemps, j'ai été contacté à quatre reprises dans un espace de

 16   plusieurs mois, et à chaque fois que je les ai vus, cela me ramenait dans

 17   cette période-là. Je complétais mes notes, je complétais ma liste, cela

 18   c'était mes motivations. Les enquêteurs m'ont demandé si j'avais des notes,

 19   ou si j'avais tenu un journal, et j'ai répondu ce que j'ai dit ici

 20   aujourd'hui, mais ils ne m'ont pas demandé de leur fournir des notes

 21   éventuelles que j'avais.

 22   Q.  Monsieur Babic, je dois vous demander encore une fois, vous avez rédigé

 23   une note pour mettre de l'ordre dans vos pensées concernant ces événements.

 24   Vous vous rendez à une réunion avec les enquêteurs représentant ce Tribunal

 25   qui met des gens en accusation pour des crimes graves. Après cela, vous

Page 3499

  1   demandez, à la Chambre de première instance, d'accepter votre affirmation

  2   que vous n'avez même pas pris ces notes-là pour aller à cette réunion. Est-

  3   ce que c'est ce que vous dites ?

  4   R.  C'est une chronologie des événements que j'ai établie pour moi-même. Je

  5   ne savais pas quelles allaient être leurs questions. Est-ce que j'avais

  6   cela dans mon sac, dans mon attaché-case ? Non. Je pense que je l'avais

  7   laissé chez moi. Peut-être que si quelqu'un m'avait parlé de cela, peut-

  8   être, qu'effectivement, je l'aurais pris. Je sais que je ne l'ai pas

  9   utilisé, mais peut-être, qu'effectivement, je l'avais dans mon sac. Je sais

 10   que je ne l'ai pas utilisée pendant la réunion elle-même.

 11   Q.  Est-ce que vous étiez en compagnie d'un avocat ou d'un autre

 12   représentant de ce type lors de cet entretien ?

 13   R.  Oui, l'avocat assistait à toutes ces discussions.

 14   Q.  Sommes-nous en train de parler des entretiens qui ont eu lieu en mars

 15   de cette année, ou bien, est-ce que nous sommes en train de parler d'un

 16   entretien qui a eu lieu bien avant ?

 17   R.  Je parle des entretiens qui ont eu lieu en octobre, novembre et

 18   décembre 2001, en janvier 2001, février 2001, pardon 2002 et avril 2002.

 19   Cela c'est la période pendant laquelle j'ai fait ma première déclaration

 20   aux enquêteurs.

 21   Q.  Vous avez dit, il y a quelques minutes lorsque vous avez parlé de cette

 22   chronologie que vous n'avez pas apportée avec vous, ou bien qui est restée

 23   dans votre sac, que ceci se fondait sur vos souvenirs et les documents dont

 24   vous disposiez. Ma question suivante, Monsieur Babic, est de savoir quels

 25   étaient ces documents ?

Page 3500

  1   R.  C'étaient les documents que j'ai remis au bureau du Procureur. Il

  2   s'agissait des documents émanant des archives et portant sur la région

  3   autonome serbe et la Republika Srpska Krajina. En partie, ces documents se

  4   trouvaient chez moi grâce à des circonstances que j'avais expliquées aux

  5   enquêteurs du bureau du Procureur et en partie, ils étaient dans les

  6   archives du gouvernement RSK à Belgrade, dans leur bureau à Belgrade.

  7   Q.  Pour clarifier les choses, les documents qui étaient dans le bureau du

  8   gouvernement du RSK à Belgrade. Est-ce que vous avez pu les utiliser aussi

  9   afin de préparer votre chronologie ?

 10   R.  Oui, en partie, ce qui est resté chez moi après mai 1996.

 11   Q.  Non, Monsieur Babic, s'il vous plaît. Dans votre réponse précédente,

 12   vous avez dit que : "Quelque part dans le bureau du gouvernement du RSK à

 13   Belgrade." Visiblement vous n'étiez pas en train de parler des documents

 14   que vous possédiez, vous étiez en train de parler des documents qui se

 15   trouvaient ailleurs, à savoir dans le bureau du gouvernement du RSK à

 16   Belgrade. Ma question est de savoir si vous avez pu utiliser ces documents-

 17   là ? Est-ce que vous aviez accès à ces documents-là pour préparer votre

 18   chronologie ?

 19   R.  J'ai dit que j'ai pu utiliser une partie de ces documents appartenant

 20   au bureau du RSK, du gouvernement du RSK à Belgrade qui sont restés en ma

 21   possession, après mai 1996. C'était cela la réponse que je vous ai donnée.

 22   Q.  Monsieur Babic, votre réponse était : "Les documents que j'ai fournis

 23   au bureau du Procureur qui étaient les documents officiels des archives

 24   concernant la région autonome serbe de la Krajina et la République Serbe de

 25   la Krajina, certains de ces documents en ma possession compte tenu des

Page 3501

  1   circonstances que j'ai expliquées aux enquêteurs et d'autres étaient au

  2   bureau du gouvernement du RSK à Belgrade."

  3    Si on analyse cela M. Babic, il y avait deux classes de documents. Il y a

  4   en avait que vous possédiez et puis, vous voyez ?

  5   R. Oui. Je vais faire une correction. C'était les documents qui émanaient

  6   du bureau du gouvernement, donc cela veut dire qu'ils n'étaient pas situés

  7   dans ce bureau, mais ils émanaient de ce bureau. Ils étaient en ma

  8   possession puisque je les avais pris du bureau du gouvernement à Belgrade

  9   en mai 1996, à peu près. Ces deux séries de documents étaient en ma

 10   possession vers la fin de l'année 2001. Sauf leur origine n'est pas

 11   pareille, il y en a qui émanaient des archives de Knin, et d'autres qui

 12   émanaient du bureau du gouvernement à Belgrade.

 13   Q. Monsieur Babic, j'admets que le contre-interrogatoire entraîne plus de

 14   stress que l'interrogatoire principal. Veuillez assister la Chambre et moi-

 15   même qui mène le contre-interrogatoire en essayant de faire très attention

 16   aux questions et à vos réponses.

 17   R.  Oui. Je vais essayer de le faire. Merci.

 18   Q.  Merci, Monsieur Babic.

 19   Pour que les choses soient claires, peut-on conclure alors que les seuls

 20   documents que vous avez utilisés pour préparer cette chronologie étaient

 21   les documents qui, en réalité, étaient en votre possession ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que tous ces documents ont été remis aux enquêteurs du Tribunal,

 24   du bureau du Procureur est-ce qu'ils ont tous été remis aux représentants

 25   de ce Tribunal.

Page 3502

  1   R.  Oui, tous les documents qui concernaient ce sujet. Le sujet de

  2   l'enquête.

  3   Q.  Nous pouvons conclure que ce qui concerne le sujet de l'enquête, c'est

  4   ce que vous avez dit, ces documents là vous les avez tous utilisés dans la

  5   préparation de votre chronologie ?

  6   R.  Oui. D'ailleurs, il s'agit là des documents qui émanaient de

  7   l'assemblée de la Republika Srpska Krajina, du gouvernement de la SAO

  8   Krajina, de l'assemblée de la SAO Krajina. Il y a beaucoup de documents,

  9   des nominations, des décisions. Il s'agit d'un grand nombre de documents.

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez donner une idée à la Chambre de première

 11   instance en ce qui concerne la quantité des documents dont vous parlez ?

 12   Des dizaines de pages ? Des centaines de pages ? Est-ce que vous pourriez

 13   nous donner un indice ?

 14   R.  Je pense qu'il s'agissait d'une centaine.

 15   Q.  Moins de 500 ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Il y a eu une session du gouvernement, une session conjointe du

 18   gouvernement de la région autonome de la Krajina, et du gouvernement de la

 19   Republika Srpska à Banja Luka, en octobre 1991; est-ce que c'est bien

 20   exact ?

 21   R.  Non.

 22   M. STEWART : [interprétation] Pourriez-vous m'accorder un petit moment, je

 23   vous prie.

 24   [Le Conseil de la Défense se concerte]

 25   M. STEWART : [interprétation]

Page 3503

  1   Q. Je pensais que vous aviez dit, mais peut-être que cela n'est pas le cas,

  2   je vais vous reposer la question. Je pensais qu'il y avait une réunion qui

  3   s'est tenue à Banja Luka peu de temps avant la réunion dont vous avez parlé

  4   qui s'est tenue le 23 octobre au palais de la Fédération à Belgrade ?

  5   R.  J'ai parlé d'une réunion qui a eu lieu deux jours plus tôt, donc le 20

  6   octobre 1991.

  7   Q.  Est-ce que ou plutôt je vais formuler cela de façon un peu plus

  8   générale. De quel type de réunion s'agissait-il le 20 octobre ? A qui était

  9   destinée cette réunion ? Quel en était l'objectif ?

 10   R.  Le 23 octobre la réunion a eu lieu à Belgrade au palais de la

 11   Fédération. C'est une réunion qui avait été, officiellement, convoquée par

 12   la présidence de la Yougoslavie d'après les informations que j'avais. C'est

 13   une réunion qui avait été prévue suite à des instructions qui émanaient de

 14   Slobodan Milosevic qui, d'ailleurs, n'a participé qu'au début de la

 15   réunion. Les médias ont dit qu'il n'y avait pas, du tout, participé. Il y a

 16   avait des représentants de la République de Serbie qui y ont participé et

 17   de la République du Monténégro --

 18   Q.  Permettez-moi de vous interrompre. Dans un premier temps, je vous

 19   dirais que cette question n'est pas, du tout, une question offensive. Il

 20   n'y a, absolument, pas de connotation dissimulée dans ce que je vais dire,

 21   mais j'aimerais vous demander si vous êtes, particulièrement, fatigué en ce

 22   moment, Monsieur Babic ?

 23   R.  Non, absolument pas. Vous me parlez de réunions, d'agendas. Ensuite,

 24   vous me parlez de la réunion du 20 à Banja Luka. Vous me parlez de la

 25   réunion du 23 à Belgrade. Je dois constamment passer des événements du 20

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  1   octobre à Banja Luka aux autres et sans aucun avertissement de votre part,

  2   je dois passer de ces événements du

  3   20 octobre à Banja Luka aux événements du 23 à Belgrade. C'est pour cela

  4   que je dois me préparer visuellement et mentalement à répondre. Je ne suis

  5   pas fatigué.

  6   Q.  Très bien, Monsieur Babic.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons nous concentrer sur les

  8   questions et les réponses. Une question vous a été posée Monsieur Babic,

  9   elle portait sur une réunion qui a eu lieu très peu de temps avant la

 10   réunion du 23 octobre. J'aimerais que vous nous indiquiez quel était

 11   l'objectif de la dite réunion et qui a participé à cette réunion ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends la question Monsieur le

 13   Président, je ne l'avais pas comprise, il y a quelques minutes de cela,

 14   parce que je pensais que la question portait sur le 23 octobre. Je vous

 15   présente mes excuses.

 16   Je vous dirais que la réunion du 20 octobre 1991 à Banja Luka a été

 17   convoquée par le Dr Karadzic. En fait, c'est Slobodan Milosevic qui m'a

 18   informé de cette réunion, il m'a dit que je devrais m'y rendre. Je me suis

 19   rendu à Banja Luka. Il y avait des représentants de la direction politique

 20   des Serbes en Bosnie-Herzégovine en Slovanie occidentale. J'y étais. Je ne

 21   sais pas s'il y avait d'autres personnes de la région autonome de la

 22   Krajina. C'était une petite réunion où il y avait environ 20 personnes.

 23   Cette réunion a été convoquée conformément à la conférence de La Haye sur

 24   l'ex-Yougoslavie et l'objectif de la réunion était de faire en sorte que

 25   les représentants des Serbes en Bosnie et en Slovanie occidentale, et les

Page 3505

  1   représentants de la région autonome de la Krajina puissent étayer les

  2   politiques ou la politique de la direction de la Serbie telle que cela

  3   avait été présenté à la conférence de La Haye.

  4   M. STEWART : [interprétation]

  5   Q.  Il y avait ces 20 personnes et, d'après ce que vous nous dites, parmi

  6   ces 20 personnes il y avait le Dr Karadzic, est-ce bien exact ?

  7   R.  Oui. C'est lui qui a convoqué la réunion, qui la présidait, qui s'est

  8   exprimé, qui a fait un discours et qui a, en fait, assuré la promotion de

  9   cette réunion auprès des médias. Il s'agissait plutôt d'un exercice destiné

 10   aux médias plutôt qu'une réunion importante de par la teneur de cette

 11   réunion.

 12   Q.  Il est quand même important, toutefois, de savoir que M. Milosevic a

 13   pris contact avec vous et vous a demandé de participer à cette réunion ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Quelles sont les raisons qui vous ont été données par M. Milosevic pour

 16   que vous participiez à cette réunion ?

 17   R.  Premièrement, je dois vous dire que M. Milosevic a une méthode assez

 18   particulière pour expliquer les choses, et une méthode particulière de

 19   s'exprimer. Je devrais, en fait, en deux ou trois phrases, vous en parler.

 20   Q.  Avec l'autorisation de la Chambre de première instance, Monsieur Babic,

 21   bien sûr, mais en ce qui me concerne, vous avez cette permission.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie. Poursuivez.

 23   R.  Merci, Monsieur le Président.

 24   Je pense que je me trouvais à Belgrade. Je ne m'en souviens pas exactement.

 25   Après l'appel de Milosevic, je me suis rendu assez vite à son bureau après

Page 3506

  1   la réunion. Lorsque je suis arrivé là, M. Milosevic était extrêmement

  2   courroucé. Il était en train de maudire Momir Bulatovic, ou plutôt, sa

  3   mère. Il l'a qualifié de traître. Il l'a menacée avec Branko Kostic, et

  4   cetera. Cela, en fait, c'était après que M. Bulatovic a accepté la

  5   proposition de M. Carrington à la conférence de La Haye, et cela concernait

  6   l'avenir de la Yougoslavie. M. Carrington était le médiateur international.

  7   Cela a été en contradiction avec le point de vue de M. Milosevic à la

  8   conférence. Après cela, il m'a dit que je devais me rendre à Banja Luka,

  9   que

 10   M. Karadzic allait m'expliquer ce qui devait être fait, que nous devions,

 11   en fait, exprimer notre soutien à la Yougoslavie et qu'il y avait même un

 12   avion qui avait été prévu pour mon voyage de Belgrade à Banja Luka, ce qui

 13   fait que je suis arrivé à Banja Luka le même jour, et que j'y ai trouvé

 14   Karadzic. La réunion a eu lieu. Comme je vous l'ai dit, il s'agissait, en

 15   fait, d'une réunion plutôt destinée aux médias afin de promouvoir le point

 16   de vue adopté par Milosevic à la conférence de La Haye.

 17   M. STEWART : [interprétation]

 18   Q.  Il y avait fondamentalement une différence de point de vue. Quelle

 19   était la divergence d'opinion entre M. Milosevic, dans un premier temps, et

 20   M. Bulatovic ?

 21   R.  Dans un premier temps --

 22   Q.  Qui était M. Bulatovic ?

 23   R.  Le président de la République du Monténégro.

 24   Q.  Quelle était la divergence d'opinion qui opposait M. Bulatovic et M.

 25   Milosevic ?

Page 3507

  1   R.  M. Bulatovic, lors de la seconde séance plénière de la conférence de La

  2   Haye, a accepté le document relatif à l'organisation future de la

  3   Yougoslavie, et conformément à ce document, il était prévu ou envisagé que

  4   toutes les républiques qui souhaitaient obtenir l'indépendance se la

  5   verrait octroyée. Il y avait, en fait, trois modèles de liens futurs entre

  6   ces unités. Vous aviez dans un premier temps, la fédération; puis, la

  7   confédération; et troisièmement, la troisième option, qui était

  8   l'indépendance. Cela était la teneur de ce document alors que Milosevic se

  9   ralliait à l'idée suivant laquelle la Yougoslavie devait continuer à

 10   exister. Il préconisait le modèle de la fédération. Cela a été

 11   succinctement sa position, son point de vue. Il faut savoir que Milosevic

 12   était le seul représentant de la Yougoslavie qui a refusé, en fait,

 13   d'accepter cette proposition.

 14   Q.  Est-ce que M. Milosevic vous a indiqué avant la réunion lorsqu'il a

 15   pris contact avec vous, quel était le point de vue de M. Karadzic ?

 16   J'entends pour ce qui est de la divergence entre M. Milosevic et M.

 17   Bulatovic ?

 18   R.  Je ne m'en souviens pas exactement, mais ce n'était un secret pour

 19   personne. Je le savais également. Je savais que Karadzic partageait le

 20   point de vue de Milosevic. C'était un fait tout à fait connu. Je ne sais

 21   pas s'il y a eu une discussion à ce moment-là là-dessus, mais c'était

 22   quelque chose qui était absolument clair.

 23   Q.  Est-ce que vous y êtes allé en tant que représentant principal de la

 24   région autonome des Serbes de Krajina ?

 25   R.  Où ?

Page 3508

  1   Q.  A la réunion de Banja Luka qui a eu lieu le 20 octobre.

  2   R.  J'étais le représentant de la Krajina, le représentant de la région

  3   autonome des Serbes de Krajina. C'était mon rôle et ma fonction officielle.

  4   Q.  Quel était le rôle officiel du Dr Karadzic ?

  5   R.  Officiellement, il était président du Parti démocratique serbe de

  6   Bosnie-Herzégovine. En fait, dans la pratique, il était l'un des principaux

  7   dirigeants politiques des Serbes en Bosnie-Herzégovine.

  8   Q.  Il était, en fait, le représentant de la Republika Srpska, n'est-ce pas

  9   ? Je m'excuse. Il était, de fait, le représentant principal des Serbes de

 10   Bosnie, et donc, le représentant, ou votre homologue, en tant que

 11   représentant principal du gouvernement de la région autonome des Serbes de

 12   Krajina ?

 13   R.  Premièrement, je vous dirais qu'il ne s'agissait pas d'une réunion

 14   officielle à laquelle les personnes venaient en leur capacité officielle.

 15   Il y avait un certain nombre de personnes à cette réunion. Il ne s'agissait

 16   pas seulement de représentants principaux. Pour la Bosnie-Herzégovine, il y

 17   avait, par exemple, le Dr Karadzic. Il y avait également des personnes de

 18   Banja Luka. Il ne s'agissait pas de tous les dirigeants principaux de la

 19   Bosnie-Herzégovine. C'était une petite réunion. Il ne s'agissait pas

 20   seulement des représentants qui se trouvaient à cette réunion en leur

 21   capacité personnelle ou à titre personnel. Je ne peux pas l'interpréter

 22   comme vous le décrivez, à savoir que j'étais le représentant principal de

 23   la région autonome des Serbes de Krajina et que mon homologue de Bosnie

 24   était le Dr Karadzic. Ce n'est pas ainsi que je décrirais cela. Je pensais

 25   à l'époque, et je le pense toujours, je pense qu'il s'agissait d'une

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  1   réunion utilisée afin de promouvoir des points de vues et des opinions. A

  2   cette réunion, sont venues des personnes qui apparaissaient très

  3   fréquemment en public dans les médias. Comme je l'ai dit d'emblée, il

  4   s'agissait d'assurer la promotion dans les médias d'un point de vue

  5   politique.

  6   Q.  Combien de temps a duré cette réunion ?

  7   R.  Elle n'a pas duré très longtemps. Je ne pense pas que cette réunion ait

  8   duré plus d'une heure. Je pense qu'elle a duré assez longtemps pour que les

  9   caméras de télévision puissent filmer ce qui s'est passé et pour que les

 10   différents participants puissent faire des déclarations.

 11   Q.  Est-ce que la presse a été autorisée à la réunion ?

 12   R.  Oui, la télévision de Belgrade. L'équipe de la télévision était

 13   présente. Il y avait également d'autres équipes de télévision, mais je ne

 14   me souviens plus de qui il s'agissait.

 15   Q.  Est-ce que M. Krajisnik était présent à cette réunion ?

 16   R.  Autant que je puisse m'en souvenir, non.

 17   M. STEWART : [interprétation] Pourriez-vous m'accorder un petit moment ?

 18   [Le Conseil de la Défense se concerte]

 19   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Q.  M. Krajisnik était présent à cette réunion, Monsieur Babic, n'est-ce

 21   pas ?

 22   R.  C'est possible. Je vous ai dit que je ne me souvenais pas s'il était

 23   présent ou non.

 24   Q.  Si M. Krajisnik dit qu'il était présent, je suppose que vous ne

 25   réfuterez pas cela.

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  1   R.  Je vous dis ce que je sais.

  2   Q.  Très bien. Je vais reformuler ma question. Si M. Krajisnik indique

  3   qu'il était présent, vous n'avez aucune information qui vous permettrait de

  4   réfuter cela. Est-ce bien exact ?

  5   R.  Je ne suis en train de réfuter rien du tout. Je vous dis ce dont je

  6   suis absolument sûr et ce dont je me souviens. Je ne comprends pas votre

  7   question. Comment est-ce que je pourrais réfuter quoi que ce soit ? Il ne

  8   m'appartient pas de réfuter quoi que ce soit. Je vous dis tout simplement

  9   ce dont je me souviens et ce que je sais.

 10   Q.  Monsieur Babic, par opposition, je dirais que la réunion pour laquelle

 11   vous nous avez dit que M. Krajisnik était présent le 23 octobre 1991 à

 12   Belgrade, au palais de la Fédération, et à propos de cette réunion, M.

 13   Krajisnik avance qu'il n'y était pas présent à cette réunion-là.

 14   R.  Je me souviens que le président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine

 15   était présent en cette capacité, à savoir, cela suivait le départ de

 16   l'assemblée de Bosnie-Herzégovine. Je ne sais pas, en fait, si l'assemblée

 17   du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine avait déjà été créée, mais en ce

 18   sens, il représentait le peuple serbe de la Bosnie-Herzégovine.

 19   Q.  Lorsque vous nous dites que vous vous souvenez que le président de

 20   l'assemblée de Bosnie-Herzégovine était là en cette capacité, ce n'est pas

 21   véritablement une expression codée, Monsieur Babic ? Le président de

 22   l'assemblée de la république serbe de Bosnie-Herzégovine était M.

 23   Krajisnik ?

 24   R.  Je souhaiterais préciser quelque chose que j'ai déjà dit. Je sais que

 25   M. Momcilo Krajisnik était le président de l'assemblée de Bosnie-

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  1   Herzégovine. Au milieu du mois, il faut savoir que les représentants serbes

  2   ont quitté l'assemblée de la Bosnie-Herzégovine et ont établi ou constitué

  3   l'assemblée du peuple serbe de la Bosnie-Herzégovine, mais je ne me

  4   souviens pas ou plus à quelle date cela fut constitué. A cette époque, à

  5   Belgrade, M. Krajisnik était l'un des représentants du peuple serbe de la

  6   Bosnie-Herzégovine. Je m'excuse.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, la question était assez

  8   simple. Est-ce que M. Krajisnik était présent à la réunion qui eu lieu dans

  9   ce palais le 23 octobre ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je m'en souvienne, il était

 11   présent.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Stewart.

 13   M. STEWART : [interprétation] J'ai réussi à convaincre ma propre équipe que

 14   je sais de quoi je parle, Monsieur le Président. Fort de cette assurance,

 15   je vais poursuivre.

 16   Q.  Monsieur Babic, voilà, maintenant je disais que je savais de quoi je

 17   parlais. Il y a eu l'assemblée constituante de la Republika Srpska le 24

 18   octobre 1991. Vous en souvenez-vous ?

 19   R.  Je pense qu'elle était appelée l'assemblée du peuple serbe de la

 20   Bosnie-Herzégovine. Je suis sûr que c'est ainsi qu'elle s'appelait.

 21   Q.  Je pense que vous avez tout à fait raison à ce sujet, Monsieur Babic.

 22   Vous avez tout à fait raison.

 23   Bien que cela ne porte pas, en fait, sur l'essence de la question, mais au

 24   vu de cette correction, et vous semblez avoir un assez bon souvenir de

 25   cela, vous souvenez-vous qu'il y eu l'assemblée constituante du peuple

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  1   serbe de la Bosnie-Herzégovine, le 24 octobre 1991 ?

  2   R.  J'ai dit que cela avait eu lieu approximativement à cette date, mais je

  3   ne me souviens pas de la date exacte. Je pense que cela s'est passé entre

  4   le 13 et le 15 octobre 1991. Les députés de l'assemblée de Bosnie-

  5   Herzégovine ont quitté l'assemblée, et après un laps de temps assez court,

  6   sept à dix jours, l'assemblée du peuple serbe de la Bosnie-Herzégovine a

  7   été constituée. C'est ce que je sais.

  8   Q.  Monsieur Babic, voilà ce que je voudrais avancer : Peut-être que vous

  9   n'êtes plus sûr à propos des dates, mais savez-vous si le 14 ou le 15

 10   octobre, les événements qui ont suscité le départ des députés serbes de

 11   l'assemblée de Bosnie-Herzégovine se sont produits ? Vous avez raison

 12   puisque quelque dix jours plus tard, à savoir, le 24 octobre 1991, il y a

 13   eu la première assemblée du peuple serbe de la Bosnie-Herzégovine. Il

 14   s'agit, en fait, de faits historiques. Est-ce que vous possédez des

 15   éléments d'information qui vous permettent de dire que cela est faux ?

 16   R.  Vous venez de me faire un discours. Je ne réfute absolument pas les

 17   faits historiques. C'est ma réponse. Ce que je sais, c'est qu'il y a eu une

 18   période où les députés serbes de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine ont

 19   quitté la session de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine. Il s'agissait, en

 20   fait, du vote portant sur la déclaration de souveraineté ou d'indépendance

 21   de la Bosnie-Herzégovine. Voilà, quelle fut la cause. Cela s'est passé en

 22   octobre 1991. Quelques jours après cet événement, je ne sais pas si vous

 23   avez mentionné le 24, mais je ne me souviens pas de la date, mais je ne la

 24   réfute pas. Moi, je n'ai pas fourni de dates précises. Quelques jours plus

 25   tard, l'assemblée du peuple serbe de la Bosnie-Herzégovine a été

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  1   constituée. Voilà ce que je sais à propos de cet événement. Vous me

  2   demandez si je réfute des faits historiques, absolument pas.

  3   Q.  Que savez-vous des difficultés d'ordre pratique qui ont existé pour M.

  4   Krajisnik dans le cadre de la préparation pour l'assemblée constituante du

  5   peuple serbe de la Bosnie-Herzégovine, le 24 octobre 1991 ? Que savez-vous

  6   de ces difficultés ? Parce qu'en fait, le 23 octobre 1991, M. Krajisnik

  7   devait être et était, en fait, à Sarajevo puisqu'il se préparait à cet

  8   événement. Est-ce que cela vous rafraîchit la mémoire ? Est-ce que vous

  9   avez des éléments d'information à ce sujet ?

 10   R.  Je ne suis pas au courant d'actions précises, mais je sais que l'on se

 11   préparait à cet événement. Je ne sais pas ce que faisait M. Krajisnik à

 12   Sarajevo, à cette époque-là.

 13   Q.  Nous allons faire abstraction de M. Krajisnik, pour le moment. Vous

 14   souvenez-vous d'autres personnes qui se trouvaient à la réunion qui a eu

 15   lieu au palais de la Fédération de Belgrade, le 23 octobre 1991 ?

 16   R.  Branko Kostic, Borisav Jovic étaient présents, Sejdo Bajramovic, le

 17   quatrième membre de la présidence de la Yougoslavie qui venait de

 18   Vojvodine. J'essaierai de me souvenir de son nom plus tard. Puis, il y

 19   avait le président de l'assemblée de Monténégro qui était là, Slobodan

 20   Milosevic était présent, Radovan Karadzic était présent, Momcilo Krajisnik

 21   était présent, Nikola Koljevic, Biljana Plavsic était présente, Goran

 22   Hadzic également et d'autres personnes également.

 23   Q.  Vous venez de réitérer que M. Krajisnik était présent, Monsieur Babic.

 24   Quel que soit le fait historique, je suppose que vous vous souvenez

 25   précisément et parfaitement de la présence de

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  1   M. Krajisnik à cette réunion du 23 octobre 1991 ?

  2   R.  Cela était également un fait historique.

  3   Q.  Est-ce que la presse était présente à cette réunion ?

  4   R.  Oui. Je suis certain que le caméraman de la télévision était présent.

  5   Je ne sais plus qui d'autre encore. Cette réunion était retransmise dans

  6   les médias. Je me souviens très bien que Slobodan Milosevic n'a pas été

  7   montré sur ces images des médias, mais ce qu'il en a été, par ailleurs, je

  8   ne sais pas. Je me souviens très bien que dans les médias, on n'a pas parlé

  9   de Slobodan Milosevic et qu'on n'a pas montré sa photo alors qu'il était

 10   présent. Quant aux autres détails de la retransmission médiatique, je ne

 11   les connais pas.

 12   Q.  Monsieur Babic, pourquoi appeler l'attention sur le fait que les médias

 13   n'ont pas parlé de la présence de M. Milosevic même s'il était présent ?

 14   Pourquoi est-ce que ce fait, ce renseignement figure dans votre réponse ?

 15   R.  Pour moi, c'était significatif parce que cela m'a laissé une impression

 16   très forte y compris sur le plan personnel. Durant cette réunion, j'ai eu

 17   des entretiens avec M. Milosevic, et j'ai subi des pressions de sa part

 18   pour me convaincre de me rendre à Paris avec d'autres représentants

 19   officiels pour parler de ce qu'avait, déjà, dit la communauté

 20   internationale de ma position par rapport à la position officielle exprimée

 21   à la conférence de La Haye. Pour moi, c'étaient des pressions et en raison

 22   de ces pressions exercées sur moi par M. Milosevic, je me suis enfui de la

 23   réunion, en fait. Je ne suis pas allé à Paris, je me suis enfui de Belgrade

 24   par la suite.

 25   Un peu plus tard, j'ai vu des images de cette réunion où il était dit que

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  1   des représentants de Bosnie, de la région autonome serbe de Krajina,

  2   d'Herzégovine, du Monténégro avaient assisté à la réunion. Je ne me

  3   souviens plus de qui, d'après ces déclarations de presse, était censé avoir

  4   présidé la réunion. Il y a beaucoup de participants, d'ailleurs, qui n'ont

  5   pas été mentionné, mais Milosevic ne l'a pas été, et pour moi c'était le

  6   seul qui était important. J'ai eu le sentiment qu'on souhaitait dissimuler

  7   sa présence à cette réunion bien qu'il ait été à l'initiative de son

  8   organisation de façon à ce qu'on puisse montrer en public que les Serbes de

  9   Bosnie et de Croatie ainsi que les représentants du Monténégro et de Serbie

 10   qui n'ont pas été mentionnés discutaient ensemble des documents de la

 11   conférence de La Haye, et soutenaient la politique de Milosevic sans que

 12   lui-même ait eu à le demander. Voilà quelle était la conclusion qu'il

 13   fallait en tirer. C'était, tout à fait, manifeste, et c'est la raison pour

 14   laquelle tout cela a importé à mes yeux, et c'est la raison pour laquelle

 15   je parle souvent de Milosevic en rapport avec toute cette affaire.

 16   Q.  S'agissant de la Défense tout cela n'est qu'une hypothèse, Monsieur

 17   Babic. Si M. Krajisnik prenant cette hypothèse en compte, si M. Krajisnik

 18   avait assisté à cette réunion, et vous dites qu'il y a assisté, n'est-ce

 19   pas ? Il n'aurait eu ni la possibilité, ni la moindre raison d'y assister

 20   pour des raisons médiatiques, aucun conseillé en communication ne lui

 21   aurait conseillé d'y aller. Vous êtes d'accord avec cela ?

 22   R.  Je ne sais vraiment pas ce que je dois dire en réponse à cette

 23   question. Je suppose qu'il n'aurait pas eu de bonnes raisons d'y aller, je

 24   ne sais pas. Ma réponse c'est que je ne sais pas.

 25   Q.  Si nous parlons de sa capacité à y assister, vous conviendrez n'est-ce

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  1   pas que M. Milosevic semble confirmer ce que vous venez de dire dans votre

  2   déposition ? M. Milosevic, n'est-ce pas, avait la possibilité de manipuler

  3   les médias autant qu'il le voulait ?

  4   R.  Oui, les médias qui dépendaient de lui.

  5   Q.  Quel était l'objet principal de cette réunion convoquée le 23 octobre

  6   1991 à Belgrade ?

  7   R.  On peut le déduire de la conclusion tirée par Branko Kostic président

  8   de la présidence de la RSFY, à l'époque. Il est, tout à fait, facile de

  9   déduire de ce qu'il a dit quel était l'objet principal à l'ordre du jour, à

 10   savoir calculer les pourcentages de population dans les différents

 11   territoires de l'ex-Yougoslavie qui soutenaient l'idée de Yougoslavie,

 12   c'est-à-dire l'idée d'une Fédération, à savoir la ligne politique défendue

 13   par Slobodan Milosevic. A la fin de la réunion, Branko Kostic a effectué ce

 14   calcul sur la base de la représentation serbe, de la présence serbe au

 15   Monténégro et en Bosnie-Herzégovine, ainsi qu'en Croatie. Il a dit que 50 %

 16   de la population yougoslave environ était favorable à l'idée de la

 17   Yougoslavie telle que défendue ou préconisée par Slobodan Milosevic, peut-

 18   être 52 %, en tout cas, aux environs de 50 % et un peu au dessus de 50 %.

 19   C'est ce qu'a annoncé Branko Kostic.

 20   Q.  Vous avez assisté à toute la réunion, n'est-ce pas ? Du début à la

 21   fin ?

 22   R.  Oui, je dirais oui. Il me semble que oui. Je ne peux pas me souvenir

 23   exactement de la façon dont la réunion s'est terminée sur le plan visuel en

 24   tout cas. Après la fin de la réunion, j'ai pris des chemins détournés pour

 25   quitter Belgrade. C'est cela qui a été le plus important pour moi. C'est

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  1   pour cela que je vous dis ne pas me souvenir exactement, sur le plan

  2   visuel, de la façon dont la réunion s'est terminée. Je n'aurais jamais pu

  3   imaginer quitter une réunion avant la fin. Cela dit, pour être précis

  4   aujourd'hui, je ne me souviens pas exactement de comment la réunion s'est

  5   terminée. Je n'ai pas d'images à ce sujet qui me viennent devant les yeux,

  6   mais lorsque Kostic a dit que la réunion était levée, nous sommes partis.

  7   En tout cas, je me souviens très bien de cette conclusion au sujet des

  8   pourcentages qui a été exposée à la fin de la réunion. C'est, d'ailleurs,

  9   en fonction de cela que je crois pouvoir dire que je suis resté jusqu'à la

 10   fin.

 11   Q.  Pourriez-vous décrire le processus, le plus rapidement possible

 12   d'ailleurs, par lequel, au cours de cette réunion, les différents

 13   représentants présents à la réunion ont invoqué l'appui de certaines

 14   populations en citant des pourcentages de ces populations de la

 15   Yougoslavie?

 16   R.  D'abord, on pouvait juger de la composition des délégations en tant que

 17   tel. Il était, tout à fait, remarquable de constater que le président de

 18   l'assemblée serbe, monténégrine et d'autres responsables de Serbie et du

 19   Monténégro représentent l'intégralité des Républiques de Serbie et du

 20   Monténégro. Il était remarquable que les représentants serbes de Bosnie-

 21   Herzégovine représentent tous les Serbes de Bosnie-Herzégovine. Ils étaient

 22   quatre, peut-être y avait-il même d'autres membres encore, peut-être y en

 23   avait-il plus que quatre. Il était remarquable que les représentants de la

 24   SAO de Krajina, de Slavonie occidentale et de Slavonie orientale ainsi que

 25   du Baranja représentent l'intégralité de cette région. Voilà comment le

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  1   pourcentage de 52 % d'habitants favorables à la Yougoslavie a été calculé.

  2   Q.  Est-ce que, personnellement, vous étiez convaincu de l'exactitude de

  3   ces chiffres ou de ces calculs.

  4   R.  Je supposais qu'il était possible que ces pourcentages soient exacts

  5   ou, en tout cas, proches de la réalité, je ne rentrerai pas dans le détail.

  6   Q.  Qui a présidé la réunion ?

  7   R.  A mon avis, c'était Branko Kostic, vice-président de la présidence de

  8   la RSFY. A cette époque là, officiellement, il dirigeait la présidence

  9   Yougoslave, ce qui était convenu d'appeler la présidence tronquée de l'ex-

 10   Yougoslavie qui, à cette époque là, était dirigée par une présidence à

 11   quatre membres. Compte tenu des événements qui s'étaient passés dans les

 12   diverses républiques de l'ex-Yougoslavie, il n'y avait plus que quatre

 13   membres de la présidence qui agissaient. Sur un total de huit, quatre

 14   membres dirigeaient la Yougoslavie. Ce qui leur enlevait en principe le

 15   droit de représenter le pays à la conférence de La Haye. Il y avait Kostic

 16   et puis le quatrième était de Vojvodine qui s'appelait Kostic aussi.

 17   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'en suis vraiment

 18   arrivé au point où si je devais continuer à interroger le témoin,

 19   j'entrerais dans un domaine du contre-interrogatoire pour lequel, très

 20   franchement, je ne me sens pas armé en ce moment.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Combien de temps vous faut-il pour être

 22   armé ?

 23   M. STEWART : [interprétation] C'est impossible aujourd'hui.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est impossible aujourd'hui.

 25   M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble que nous devions suspendre

  2   jusqu'à lundi.

  3   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une nécessité

  4   car vraiment je ne peux rien vous dire d'autre. Je ne peux pas poursuivre

  5   le contre-interrogatoire aujourd'hui dans ces conditions, la réponse qui

  6   s'impose est oui.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous la moindre idée du temps qu'il

  8   vous faudra, lundi.

  9   M. STEWART : [interprétation] Il est probable qu'il me faudra,

 10   pratiquement, la journée complète, Monsieur le Président. En tout cas pas

 11   une heure, parce que comme vous pouvez le constater vous-même il y a encore

 12   toutes les autres réunions à discuter, et d'autres domaines à couvrir

 13   également. Le contre-interrogatoire ne peut pas se terminer en très peu de

 14   temps. Cela ne fait aucun doute.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comme cela a été déjà dit Monsieur

 17   Stewart, la Chambre verra à 16 heures de quelle façon le contre-

 18   interrogatoire s'est déroulé et doit continuer à se dérouler. Nous en

 19   avons, déjà, discuté entre Juges au cours de la dernière pause. La Chambre

 20   vous accorde trois heures supplémentaires lundi, rien de plus.

 21   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je prends note de ce

 22   que vous venez de dire, c'est une décision pré-établie, et je prends note

 23   de ce que vous dites. Je ne peux rien faire d'autre qu'en prendre note.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est une décision et si la

 25   nécessité survient de modifier cette décision, bien entendu, en temps utile

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  1   nous verrons mais, pour le moment, la Chambre n'a pas été impressionnée par

  2   l'efficacité du contre-interrogatoire.

  3   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je commenter ce

  4   que vous venez de dire.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je préfèrerais pas.

  6   Je remarque simplement que vous avez posé quelques questions à trois ou

  7   quatre reprises, la même question au témoin et qu'il aurait, souvent, été

  8   possible de traiter avec le témoin d'une façon plus efficace.

  9   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, le seul commentaire

 10   que je souhaite faire, c'est que je n'accepte aucune restriction sur ce

 11   point, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'êtes pas d'accord avec moi.

 13   M. STEWART : [interprétation] Non, avec le respect que je vous dois, je ne

 14   le suis pas.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, s'il devait vous

 16   surprendre que nous suspendions immédiatement jusqu'à lundi, je demande si

 17   l'une ou l'autre des parties a quelque chose à ajouter.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président, rien que je sache.

 19   M. STEWART : [interprétation] Y a-t-il quelque chose que vous souhaiteriez

 20   soumettre à l'attention des Juges, en cet instant ?

 21   M. STEWART : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 23   Monsieur Babic, cela signifie que nous poursuivrons votre audition lundi.

 24   Madame la Greffière, je vous regarde pour savoir si nous serons dans le

 25   même prétoire, en tout cas ce sera à 9 heures lundi matin.

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  1   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais pas dans ce prétoire, dans la

  3   salle d'audience II, lundi matin.

  4   Je suspends l'audience.

  5   --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le lundi 7 juin 2004,

  6   à 9 heures 00.     

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