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1 Le lundi 7 juin 2004
2 [Audience à huis clos] [Passage rendu public par décision de la Chambre]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez annoncer
6 l'affaire, je vous prie.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Affaire IT-00-39-T, le Procureur contre
8 Momcilo Krajisnik.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Madame la Greffière.
10 Bonjour, tout le monde. Avant de poursuivre, j'aimerais formuler quelques
11 observations. Je m'adresse d'abord à la Défense. Lorsque j'ai dit quelques
12 mots de la façon dont le contre-interrogatoire était mené vendredi dernier,
13 j'ajouterai aujourd'hui parce que je me rends compte que j'aurais dû le
14 faire en l'absence du témoin. Je m'en suis rendu compte pendant le
15 "weekend". C'est la raison pour laquelle aujourd'hui, je vous dis que je
16 regrette de l'avoir fait en présence du témoin. C'est le premier point.
17 Deuxième point, lorsque nous avons accordé trois heures à la Défense
18 vendredi dernier, il est possible que certains aient compris que cette
19 décision était liée à des problèmes quant aux possibilités de siéger mardi.
20 Ce n'est pas le cas. S'il s'avérait pour telle ou telle raison que nous
21 ayons besoin de davantage de temps, nous le retrouverons. Ce n'est en aucun
22 cas le calendrier prévu pour la journée de mardi qui détermine si un temps
23 supplémentaire sera ou non accordé. Ce n'est pas non plus une incitation ou
24 une invitation à demander un temps supplémentaire, mais je souhaitais
25 simplement que les choses soient tout à fait claires. Ce ne sont pas des
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1 considérations pratiques qui interviendront pour limiter la possibilité de
2 la Défense d'interroger, éventuellement, plus longtemps. Ce sont seulement
3 des considérations d'équité qui interviendront.
4 Ma troisième observation est la suivante : nous avons reçu deux requêtes.
5 La première est une requête en appel. Nous sommes en train de l'examiner.
6 L'autre est une requête confidentielle sur les mesures de protection, et
7 c'est la quatrième de ce genre.
8 Je suppose que la Défense a également reçu cette requête. J'en parle plus
9 précisément pour appeler l'attention de la Défense spécifiquement sur cette
10 requête, car il faut pas mal de temps pour préparer une vidéoconférence si
11 la Défense tient à s'exprimer au sujet de cette requête.
12 La quatrième, si les mesures de protection ne se limitent aux mesures
13 courantes, mais impliquent également l'organisation d'une vidéoconférence à
14 huis clos, j'aimerais que la Défense nous fasse savoir ses commentaires à
15 ce sujet.
16 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, d'abord, nous
17 apprécions votre premier commentaire au sujet de la présente du témoin de
18 vendredi dernier lorsque vous vous êtes exprimé. Nous comprenons très bien
19 ce qui s'est passé.
20 Deuxièmement, j'aimerais vous présenter mes excuses au cas où j'aurais
21 peut-être fait transparaître une légère irritation vendredi après-midi, je
22 vous prie de m'en excuser, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Je
23 m'excuse d'avoir trahi mes sentiments, et je me rends bien compte que cette
24 irritation n'était en aucun cas justifiée par les propos prononcés par
25 vous.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous acceptons vos excuses.
2 M. STEWART : [interprétation] M. le Président l'a confirmé. En fait, mes
3 pensées sont toujours concentrées sur l'affaire, et nous ne pensions pas au
4 calendrier prévu pour mardi comme orientant de quelque façon que ce soit
5 nos travaux. S'agissant des requêtes, Monsieur le Président, Messieurs les
6 Juges, vous avez reçu notre requête en appel.
7 En ce qui concerne la deuxième question, nous allons aujourd'hui présenter
8 une réponse officielle. Mais il peut être utile, Monsieur le Président, que
9 je fasse d'emblée savoir que nous ne lèverons aucune objection à la
10 vidéoconférence pour l'audition de la déposition de ce témoin. Cela semble
11 tout à fait raisonnable sur le principe. Je dis bien sur le principe, la
12 Défense est tout à fait favorable d'une vidéoconférence dans de tel cas car
13 c'est, à notre avis, la meilleure façon de procéder bien souvent. Vous
14 constaterez, de façon générale, nous sommes favorables aux vidéoconférences
15 dans ce genre de cas précis. Il y a, bien sûr, des cas où ces
16 vidéoconférences ne sont pas justifiées.
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2 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, certainement.
3 J'aimerais simplement ajouter quelques mots que je pourrais d'ailleurs dire
4 en présence de Me Mueller, mais pas en présence du témoin. Monsieur le
5 Président, nous l'avons dit clairement au début du contre-interrogatoire de
6 M. Babic, nous le répétons aujourd'hui, nous n'avons pas disposé de
7 suffisamment de temps pour préparer ce contre-interrogatoire, et nous
8 n'avons pas changé de position sur ce point. Le résultat est le suivant,
9 Monsieur le Président : comme je l'ai fait vendredi, enfin, je dirai les
10 choses de la façon suivante. Je n'ai aucune objection à ce que l'on
11 poursuive le contre-interrogatoire de M. Babic du mieux possible. Je
12 m'efforcerai d'explorer un certain nombre de sujets avec lui de la façon la
13 plus efficace qui soit compte tenu des circonstances.
14 Il y a deux choses que j'aimerais souligner. D'abord, je suis censé
15 respecter mes obligations au titre de l'Article 90(H), qui s'applique à
16 certains aspects des thèses de la Défense sur lesquels ce témoin pourrait
17 s'avérer utile ou, en tout cas, sa déposition. Encore une fois, je répète
18 que je remplirai du mieux possible les obligations qui sont les miennes.
19 Mais il peut être utile que j'indique d'emblée que compte tenu des
20 circonstances, il y a certains aspects de l'affaire que je ne pourrai peut-
21 être pas couvrir avec le témoin alors qu'il aurait été utile que je le
22 fasse.
23 Deuxièmement, et ce point découle du premier. Je voudrais parler de la
24 possibilité réelle que la Défense décide en temps utile de demander une
25 nouvelle convocation de M. Babic à la barre. Il ne sert à rien de parler de
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1 cela dans l'abstrait pour le moment, puisque nous ne savons pas ce qu'il en
2 sera réellement. En temps utile, j'annonce que, si des raisons valables le
3 justifient, il est possible que la Défense demande à ce que M. Babic soit
4 réentendu. Je dis cela en rapport précis avec ce témoin, car normalement,
5 c'est une éventualité qui ne surgit que rarement. Eu égard à M. Babic, il
6 existe une réelle possibilité que la chose devienne nécessaire. J'ai abordé
7 ces deux questions très rapidement. D'abord, Monsieur le Président, la
8 position de la Défense que vous connaissez bien, eu égard à la préparation
9 d'un contre-interrogatoire de façon générale, qui, bien sûr, a un rapport
10 direct avec le contexte, la connaissance générale de l'affaire, des
11 circonstances qui entourent M. Babic et son témoignage ainsi que l'ensemble
12 de la situation en Croatie. Vous savez bien que compte tenu du grand nombre
13 d'éléments liés à la déposition de M. Babic, les pressions de temps ont été
14 très importantes sur la Défense. Je suis sûr que vous vous rendez bien
15 compte qu, la semaine dernière, nous avons subi ces pressions de plein
16 fouet, et que c'est seulement dans des circonstances tout à fait
17 exceptionnelles que nous parlons de la possibilité de rappeler un témoin à
18 la barre.
19 Si nous nous penchons sur les détails de la situation, très franchement,
20 nous ne pouvons que reconnaître que cette possibilité existe. Nous avons
21 essayé de réfléchir aux autres solutions possibles. Nous avons tenu compte,
22 bien sûr, des débats de vendredi, suite à tout cela, nous ne pouvons dire
23 ce matin dans ce prétoire, que ce que nous sommes en train de dire, à
24 savoir que nous sommes prêts à poursuivre le contre-interrogatoire de M.
25 Babic, mais que nous partons du principe, c'est un des critères que nous
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1 appliquons, que pour explorer un certain nombre de questions qui sont de
2 grandes importance, il est possible de le faire aujourd'hui avec M. Babic
3 dans les conditions actuelles, mais que pour toutes sortes d'autres
4 domaines du contre-interrogatoire qui pourraient s'avérer importants, il
5 nous faudra sans doute davantage de temps à une autre occasion.
6 Monsieur le Président, je ne suis pas en train de dire que je ne
7 m'exprimerai que 20 minutes et pas davantage. Bien entendu, nous couvrirons
8 pas mal de sujets aujourd'hui. Nous nous proposons au départ, de respecter
9 la limite de temps qui a été décidée par la Chambre, sans exclure la
10 possibilité, et c'est cette possibilité que je rediscute ici, qu'une
11 demande de temps supplémentaire soit faite, et qu'il soit demandé au témoin
12 de revenir pour préciser ou expliciter un certain nombre d'éléments de sa
13 déposition.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si la demande de rappeler M. Babic
15 à la barre est présentée, je dis cela au nom de la Chambre de façon
16 générale, la Chambre serait surprise que dans des conditions normales une
17 telle demande soit présentée. J'ajouterai que la Chambre serait moins
18 surprise compte tenu des circonstances que cette demande soit présentée eu
19 égard à ce témoin particulier, et nous examinerons attentivement cette
20 demande le cas échéant.
21 M. STEWART : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président, c'est une
22 réponse tout à fait équitable si je peux le dire avec le respect que je
23 vous dois. Je pense que la Défense et la Chambre se comprennent très bien
24 sur cette question.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'ai le sentiment que M. Krajisnik
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1 avait quelque chose à dire à la Chambre. Mon impression est-elle exacte ?
2 Est-elle juste ?
3 M. STEWART : [interprétation] Oui, apparemment, Monsieur le Président.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je remercie la
5 Chambre de me donner l'autorisation de dire rapidement quelques mots. Ce
6 que je souhaiterais dire, aujourd'hui, est une requête. Lorsque vous
7 trouverez la possibilité de le faire, j'apprécierais que vous me donniez la
8 parole pour quelques instants pour que je parle de la façon dont ce procès
9 a été préparé. En effet, je m'inquiète beaucoup de l'évolution de ce
10 procès. Je comprends que l'audience doit commencer dans le plus bref délai,
11 mais je vous demanderais, lorsque vous le jugerez utile, de m'accorder
12 quelques instants pour m'exprimer. Merci.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous quelque chose à dire qui vient
14 en sus de ce qu'a déjà dit votre conseil, ou souhaitez-vous mettre l'accent
15 sur tel ou tel aspect du propos de votre conseil ? Parce que les
16 préoccupations ont été exprimées. Je pense que vous l'avez compris. Enfin,
17 je vous donnerai la possibilité de vous exprimer, mais je préfère si vous
18 voulez bien, que nous commencions par la poursuite du contre-interrogatoire
19 de M. Babic. Nous trouverons le plus rapidement possible le moment pour
20 vous donner la possibilité de parler aux Juges de la Chambre.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis pas en désaccord avec mon conseil de
22 la Défense, mais j'aurais simplement quelques points à ajouter. Je vous
23 remercie.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. L'occasion vous en sera
25 donnée très rapidement.
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1 Me Mueller, peut-il entrer dans le prétoire ?
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Maître Mueller.
3 M. MUELLER : [interprétation] Bonjour.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre situation physique dans ce
5 prétoire ne change en aucun cas votre position. J'attendrai à présent que
6 l'on fasse entrer M. Babic. Peut-être pourrait-il être utile de veiller à
7 ce que personne ne se casse la jambe en se prenant les pieds dans le fil
8 électrique qui est branché à partir du bureau de la Défense ?
9 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, je disais cela avec
11 beaucoup de précaution parce que j'ai déjà vu des accidents de ce genre se
12 produire. Même les Ferraris peuvent avoir un accident.
13 Monsieur Babic, veuillez vous asseoir. Je tiens à vous dire que vous êtes
14 toujours tenu par la déclaration solennelle que vous avez prononcée au
15 début de votre déposition et je vous rappelle l'attention toute
16 particulière que je porte à ces questions que j'ai exprimées vis-à-vis de
17 ces questions au moment du début du contre-interrogatoire.
18 LE TÉMOIN : MILAN BABIC [Reprise]
19 [Le témoin répond par l'interprète]
20 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, mon autre ordinateur
21 est de marque Dell.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maître Stewart, veuillez procéder.
23 Contre-interrogatoire par M. Stewart : [Suite]
24 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
25 Q. [interprétation] Lors des débats de vendredi, M. Babic, nous avons parlé
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1 d'une série de réunions et vous avez bien, n'est-ce pas, déjà répondu à un
2 bon nombre de questions dans le cadre de la procédure qui vous a été
3 intentée devant ce Tribunal, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. J'aimerais vous rappeler, en particulier, les réponses fournies par
6 vous à des questions qui vous étaient posées le 11 janvier 2002.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, était-ce un lapsus de
8 votre part lorsque vous avez dit 1992 ?
9 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'était,
10 effectivement, un lapsus. Merci de me le faire remarquer. Je voulais parler
11 de 2002.
12 Q. Monsieur Babic, c'était bien à un moment où vous étiez suspect, n'est-
13 ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. On vous a posé une question et c'est à la page 60 du compte rendu,
16 j'espère de tout le monde, de cet entretien qui a eu lieu le 11 janvier
17 2002. L'on vous a posé des questions concernant les réunions au sujet
18 desquelles vous avez déjà déposé devant cette Chambre, réunions avec M.
19 Karadzic. Si vous vous souvenez, vous avez dit qu'il y avait deux réunions
20 en juillet 1991, le même jour. D'abord, vous avez rencontré M. Milosevic,
21 ensuite, M. Karadzic. Ensuite, vous êtes allé à Celinac où vous avez eu une
22 réunion à laquelle M. Milosevic n'a pas assisté; est-ce exact ?
23 R. J'ai eu une réunion avec Milosevic et Karadzic à Belgrade et, le même
24 jour, j'ai eu une réunion avec Karadzic à Celinac; c'est ce dont vous
25 parlez ?
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1 Q. C'est exact. M. Milosevic n'a pas assisté à la deuxième de ces réunions
2 contrairement à M. Karadzic, n'est-ce pas ?
3 R. Si vous parlez de Celinac, non, effectivement.
4 Q. Oui. Ensuite, vous avez décrit -- ou plutôt dans votre déclaration,
5 vous dites : "D'habitude je demandais que l'on apporte du café." Cela ce
6 n'était pas lors d'une réunion avec Milosevic, mais Milosevic a insisté que
7 l'on boive du whiskey et il nous a offert le cigare. Il avait des boites de
8 cigares. Je ne fumais pas, je n'en ai pas pris, mais Karadzic a pris un
9 cigare qu'il a allumé et il a mis le cigare dans sa poche. Il nous a dit
10 que là il s'agissait de scènes pittoresques dont vous vous souvenez et vous
11 avez d'ailleurs fait un commentaire au sujet de votre mémoire visuelle qui
12 est bonne.
13 Ensuite, vous avez dit : nous avons repris notre réunion à Celinac. Cela
14 c'était près de Banja Luka, le même soir, et, en ce qui concerne cette
15 réunion, vous l'avez décrite et vous dites que c'étaient surtout les gens
16 de la région de Banja Luka qui y ont assisté.
17 S'agissant de cet incident que vous avez décrit au sujet du
18 Dr Karadzic, qui a utilisé un cigare de manière plutôt théâtrale pour
19 représenter M. Izetbegovic, et son attitude envers M. Izetbegovic, est-ce
20 que vous essayez de dire que cela s'est passé à la réunion de Celinac et
21 non pas à la réunion qui a eu lieu avant ?
22 R. Il a pris un cigare de Milosevic qu'il a mis dans sa poche et, ensuite,
23 il l'a utilisé, ce cigare, afin de faire semblant d'être Izetbegovic à
24 Celinac.
25 Q. Cela s'est passé à Celinac et non pas au cours de la réunion qui a eu
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1 lieu avant, n'est-ce pas ?
2 R. La dernière fois que j'ai déposé ici, j'ai expliqué comment il a joué
3 sa petite scène de théâtre à Celinac et j'ai également décrit la
4 conversation qu'il y a eu à Belgrade.
5 Q. Mais simplement veuillez nous confirmer, Monsieur Babic, que ce dont
6 j'ai parlé, ce petit coup de théâtre de M. Karadzic a eu lieu à Celinac et
7 non pas avant à Belgrade ?
8 R. A Celinac, il était très théâtral alors qu'à Belgrade, il était assez
9 poli vis-à-vis de Milosevic. Il ne faisait qu'expliquer les choses, mais sa
10 gestuelle ne ressemblait pas à ce qui s'est passé par la suite à Celinac.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, je trouve que la réponse
12 est quelque peu ambiguë lorsque le témoin a répondu à votre question,
13 lorsque vous avez dit : M. Milosevic n'a pas assisté à la deuxième de ces
14 réunions, mais M. Karadzic y a assisté et la réponse était : "Si vous
15 parlez de Celinac, la réponse est non," ce qui n'est pas clair. C'est la
16 question de savoir si le "non" portait sur l'absence de M. Milosevic à
17 Celinac ou sur le caractère erroné de votre déclaration.
18 Ai-je bien compris qu'au cours de la réunion qui a eu lieu dans la matinée,
19 à la fois M. Milosevic et M. Karadzic y ont assisté, et en ce qui concerne
20 la deuxième réunion, M. Karadzic y a assisté, mais M. Milosevic n'y a pas
21 assisté; est-ce exact ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Veuillez poursuivre.
24 M. STEWART : [interprétation]
25 Q. Vous avez bien sûr eu plusieurs entretiens de ce genre et un autre
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1 entretien, où vous avez été interrogé en tant que suspect, a eu lieu le 15
2 janvier 2002. Juste quelques jours après la réunion dont on a parlé, et
3 nous avons une référence à cela à la page 12. La question vous a été posée
4 par une personne dont les initiales commencent par AC, la question était :
5 "L'on identifie que cette réunion a eu lieu à -- et il y a une série de --"
6 Mais nous sommes convaincus que sur la base du reste du compte rendu, nous
7 pouvons absolument être sûrs qu'il s'agissait de Celinac.
8 Vous avez dit : "Et bien, Karadzic, je pense que Karadzic a proposé ces
9 initiatives concernant les deux Krajina. C'est l'impression que j'ai eue,
10 mais je ne me souviens pas tout à fait des termes employés. Mais j'étais
11 simplement là, je me tenais en tant qu'un figurant lors de cette réunion
12 puisqu'il s'agissait de la réunion des gens de la région de Banja Luka. Ici
13 il a montré," -- et si visiblement qu'il s'agit du Dr Karadzic -- "il a
14 montré qu'il dominait la situation et que l'on lui devait du respect."
15 Ensuite, M. Mueller, qui a assisté à cela, a fait un commentaire expliquant
16 que vous avez déjà fait des déclarations au sujet de cette réunion.
17 C'est, à ce moment-là, que ceci a été dit. En fait, le conseil de la
18 Défense dans cette affaire contre vous a dit cela, mais il a été dit
19 également que deux questions n'ont pas été abordées en ce qui concerne son
20 opposition à l'unification de la Krajina. A un moment donné, vous avez dit
21 qu'il n'était pas clair quelles étaient les régions que Karadzic souhaitait
22 unifier. Ensuite, vous avez dit : "Je ne sais pas." Le conseil, qui était
23 présent à l'entretien a dit : "Est-ce qu'il n'a pas précisé cela de quelque
24 manière que ce soit ?" Vous avez dit : "Et bien, je ne sais pas dans quel
25 sens, mais il a indiqué qu'il s'agirait des régions serbes. C'est la
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1 manière dont j'ai compris les choses, mais je ne sais pas tout à fait ce
2 qu'il pensait ou ce qu'il souhaitait impliquer."
3 Ensuite, on vous a demandé : "Est-ce qu'il a dit ce qui allait se passer
4 dans ces régions qui sont mixtes, où les Musulmans et les Croates
5 représentaient la majorité ou la moitié de la population ?" Vous avez dit :
6 "Non, je n'ai pas entendu cela."
7 Ensuite, on vous a demandé : "Est-ce qu'il a mentionné pourquoi il
8 préférait ces unifications des territoires des Serbes de Bosnie ?" Vous
9 avez dit : "Et bien, j'ai certaines hypothèses politiques à ce sujet, mais
10 je ne sais pas tout à fait quelle était sa position."
11 Ensuite, on vous a demandé : "Qu'est-ce qu'il a dit ?" Voilà c'est ce que
12 vous avez dit : "Mais il était un dirigeant politique." Ensuite, vous avez
13 poursuivi : "Je ne sais pas ce qu'il a dit exactement. D'après la manière
14 dont je comprenais les choses, il ne souhaitait pas être séparé de ses
15 zones d'intérêt politique. C'est ce que je pensais."
16 L'impression que vous avez créé par le biais de vos réponses, s'agissant de
17 cette réunion, M. Babic, était que vous ne compreniez pas, tout à fait
18 clairement, ce que disait M. Karadzic au sujet de ses projets, n'est-ce
19 pas ? Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?
20 R. A ce moment-là, je n'ai pas fourni une information complète au sujet de
21 ce que je savais à ce propos, et à la fin de l'entretien, j'ai ajouté que
22 j'avais d'autres choses à dire, également j'avais des choses à ajouter.
23 Q. Peut-on passer à la réunion que vous avez décrite et qui a lieu au
24 palais de la Fédération à Belgrade. Vous avez dit que cette réunion a eu
25 lieu le 23 octobre 1991. Le 30 novembre 2001, vous avez été interrogé, et
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1 nous avons deux transcriptions au sujet de cette date. Tout d'abord, en ce
2 qui concerne la réunion qui a eu lieu dans la matinée à 9 heures 49, et
3 nous avons une longue transcription. Apparemment, vous avez eu une pause,
4 un déjeuner, également une pause afin de changer des cassettes.
5 Ensuite, vous avez repris votre réunion à 15 heures 03. A la page 2, de
6 cette transcription, on vous a posé une question concernant la réunion au
7 palais de la Fédération, la réunion que l'on vient de mentionner. Encore
8 une fois, Mme Hildegard Uertz-Retzlaff vous a posé des questions au sujet
9 de cela. C'est à la page 3, en bas de la page, je cite : "En ce qui
10 concerne cette réunion, qui a lieu dans la présidence et à laquelle
11 d'autres personnes ont assisté, y compris les Serbes de Bosnie comme
12 Karadzic, quel était l'objectif de toutes ces personnes autour de la table,
13 s'agissant de l'Yougoslavie et des territoires ?"
14 Vous avez dit : "Ces personnes soutenaient l'option de l'Yougoslavie
15 fédérale. La délégation du Monténégro était présente, mais je ne pense pas
16 que M. Bulatovic y ait assisté. Je ne suis pas sûr, il est possible de
17 vérifier cela. Je pense que c'était le président de l'assemblée
18 monténégrine, et d'autres personnes. Je pense, si mes souvenirs sont bons,
19 que Momir Bulatovic, à un moment donné, a accepté ces documents de La Haye,
20 et que Milosevic est resté isolé. Ensuite, à un moment-là, je ne sais pas
21 quand, est-ce que qu'il s'agissait de l'assemblée, que Bulatovic s'est
22 retiré." Ensuite, vous avez dit quelque chose qui n'était pas audible. En
23 ce qui concerne cette réunion, je souhaite ajouter : "Je ne me souviens pas
24 que certaines personnes se sont prononcées de manière explicite au sujet de
25 cela. Techniquement parlant, ce qui se passait, c'est que Branko Kostic
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1 faisait des calculs, il comptait."
2 Il a dit : "On peut dire 50 % ou 52 % et, ensuite, vous avez dit : "Qu'il
3 s'agissait de 52 % de la population de l'Yougoslavie."
4 Ensuite, on vous a posé la question suivante : "Et parmi les Serbes de
5 Bosnie, qui a assisté à cela ? Vous avez mentionné Karadzic. Qui
6 d'autres ?" Vous avez dit : "Je ne me souviens pas. Je ne me souviens pas.
7 Vous savez vraiment, je ne me souviens pas. Je n'y prêtais pas tellement
8 attention, parce que j'ai été préoccupé par ce problème que j'ai eu avec
9 Milosevic et par la réunion de Paris. Vous voyez toutes ces personnes, je
10 me souviens, c'était plutôt du décor, une toile de fond dont il avait
11 besoin pour faire ses déclarations devant les médias."
12 Ensuite, Mme Uertz-Retzlaff vous a demandé des choses au sujet de certaines
13 personnes; en particulier, elle a dit, par exemple : "Martic, est-ce qu'il
14 a assisté, lui, Milan Martic ? Vous avez répondu : "Je ne pense pas. Je ne
15 crois pas parce que, sinon, je crois que je m'en souviendrais," et cetera.
16 Est-ce que vous êtes d'accord pour dire, Monsieur Babic, que, tout d'abord,
17 il est tout à fait clair sur la base de cet échange que vos souvenirs au
18 sujet de la question de savoir qui a assisté à cette réunion et qui n'y a
19 pas assisté, ne sont pas du tout fiables et certains ?
20 R. Je ne suis pas tout à fait sûr. Je n'ai pas une mémoire visuelle de
21 l'ensemble de la réunion, mais ce qui me reste c'est une impression. En ce
22 qui concerne mes souvenirs issus de ma mémoire visuelle, j'ai dit très
23 exactement les personnes dont je me souviens avez exactitude.
24 Q. Vous avez dit également quelles sont les personnes dont vous ne vous
25 souveniez pas, n'est-ce pas ?
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1 R. C'est exact.
2 Q. Il est évident, on n'aura pas besoin de nous lancer dans un débat pour
3 dire que parmi les personnes dont vous ne vous souveniez pas, était M.
4 Krajisnik, parce que vous ne l'avez pas mentionné concrètement en tant
5 qu'une personne ayant assisté à cette réunion. Il faisait certainement
6 partie de cette catégorie de personnes dont vous ne vous souveniez pas,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Visuellement, je ne me souviens pas concrètement parlant, mais j'ai
9 l'impression qu'il était parmi ces quatre personnes de la Bosnie-
10 Herzégovine avec M. Vucurevic. Cela c'est l'impression qui me reste. Je ne
11 vois pas l'image dans mon esprit. Je ne peux pas le décrire. C'est
12 l'impression que j'ai.
13 Q. Monsieur Babic, de toute façon, nous allons procéder à des
14 vérifications pour vérifier si M. Krajisnik a assisté à cette réunion ou
15 pas. Vendredi, je vous ai dit déjà, qu'à notre avis, il n'y était pas. Je
16 souhaite ajouter également que nous sommes en train de procéder à des
17 vérifications pour clarifier cela et pour rendre les choses tout à fait
18 claires et certaines. Ce que j'essaie de vous dire est la chose suivante :
19 si M. Krajisnik y a assisté, dans ce cas-là, cette description que vous
20 avez faite des autres personnes qui ne représentaient que du décor, une
21 toile de fond de cette réunion, nous permettrait de conclure sans ambiguïté
22 qu'il n'a joué aucun rôle signifiant au cours de cette réunion, n'est-ce
23 pas ? Vous êtes d'accord avec cela.
24 R. J'ai dit quelque chose au sujet du fait que Branko Kostic présidait la
25 réunion. Dans ce sens, je suis d'accord avec vous. J'ai dit que le groupe
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1 de personnes de Bosnie-Herzégovine représentait les Serbes de Bosnie-
2 Herzégovine, et c'était leur rôle. La raison de leur présence à cette
3 réunion était de représenter les Serbes tout comme je représentais les
4 Serbes de la SAO Krajina. Dans ce sens, notre présence à cette réunion
5 était importante. Techniquement parlant, le rôle principal était celui de
6 Branko Kostic.
7 Q. Vous avez nuancé votre réponse maintenant, Monsieur Babic. Je vais vous
8 poser une nouvelle question. Mis à part la présence de M. Krajisnik à cette
9 réunion s'il s'avère qu'il y a été présent, vous ne pouvez pas dire qu'il a
10 joué un quelconque rôle important au cours de cette réunion; est-ce exact ?
11 R. Je dirais qu'il a joué un rôle de représentant, mais il n'a pas joué un
12 rôle actif. La première fois que nous avons parlé de cela, j'ai dit devant
13 cette Chambre de quelle manière M. Kostic a procédé au calcul s'agissant
14 des territoires, des populations yougoslaves qui optaient pour
15 l'Yougoslavie. C'est ainsi qu'il est arrivé à ce résultat de 52 % de
16 population qui favorisait l'option yougoslave. C'est ainsi qu'il a calculé
17 les choses. Quant à la question de savoir ce que représentait Krajisnik et
18 les autres de la Bosnie-Herzégovine, c'était communo [phon]. Le président
19 du Monténégro représentait la population serbe du Monténégro, les autres
20 représentaient leurs propres régions. Le tout a permis à faire ce calcul
21 qui a aboutit à ce résultat de 52 % de la population qui optait pour
22 l'Yougoslavie.
23 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, nous
24 avons les dossiers qui ne sont pas vraiment dans l'ordre. Nous avons besoin
25 de déployer pas mal d'efforts afin de nous retrouver dans ces dossiers.
Page 3540
1 Q. Monsieur Babic, il n'y a pas eu d'interaction entre
2 M. Karadzic et M. Krajisnik dont vous vous souvenez au cours de cette
3 réunion, n'est-ce pas ?
4 R. Vous parlez de ce qu'il disait au cours de la réunion ?
5 Q. Non, non. Monsieur Babic, je veux dire très exactement ce que je viens
6 de dire. Il n'y a pas eu d'interaction entre le
7 Dr Karadzic et M. Krajisnik dont vous vous souvenez s'agissant de cette
8 réunion, n'est-ce pas ?
9 R. J'avais l'impression qu'ils étaient assis ensemble, à droite par
10 rapport à Kostic qui présidait la réunion et par rapport aux autres membres
11 de la présidence de l'Yougoslavie.
12 Q. Monsieur Babic, vous dites cela simplement, seulement, parce
13 qu'évidemment, si M. Krajisnik a assisté à la réunion, logiquement il
14 aurait été assis à côté du Dr Karadzic, n'est-ce pas ?
15 R. J'avais l'impression que les Serbes de la Bosnie-Herzégovine étaient
16 assis ensemble à gauche par rapport à Kostic qui présidait la réunion. Je
17 ne me souviens pas avec plus de détails que cela; c'est ce que j'ai déjà
18 dit.
19 Q. Je suggère, Monsieur Babic, que c'est tellement normal et tellement
20 évident qu'il aurait été tout à fait extraordinaire si les Serbes de Bosnie
21 qui ont assisté à la réunion n'étaient pas assis ensemble dans un petit
22 groupe autour de cette table, n'est-ce pas ?
23 Cela aurait été bizarre.
24 R. Je pense. Je ne peux pas faire de commentaires à ce sujet.
25 Q. Comme nous l'avons dit, le 15 janvier 2002 vous avez accordé un
Page 3541
1 entretien. Vous avez eu un entretien. A la page 26 de la séance, qui a
2 commencé à 17 heures 04 -- de la réunion qui a commencé à 17 heures 04, on
3 vous a posé des questions concernant une réunion qui a eu lieu à Belgrade
4 le 31 janvier et les 1 et 2 février 1992. Vous avez dit, tout d'abord, la
5 question était la suivante : "Est-ce que parfois en 1992, vous avez
6 rencontré M. Karadzic ?" Vous avez répondu : "Oui." Question : "Est-ce que
7 vous pouvez nous dire à combien de reprises ?" Vous avez répondu : "Deux."
8 Question : "Est-ce que vous pouvez décrire ces réunions ?" Votre réponse :
9 "Oui. La première réunion a eu lieu lors d'une session de la présidence de
10 l'Yougoslavie le 31 janvier, les 1 et 2 février."
11 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je ne fais que lire la
12 transcription. Excusez-moi si cela paraît peu cohérent, mais je suis en
13 train que de lire cela : "Les deux ont assisté à la réunion autour d'une
14 table ronde au sein du palais de la fédération. Il a été assis en
15 diagonale. A l'autre bout de la table, il y avait Biljana Plavsic. Je pense
16 que Krajisnik a assisté également, peut-être aussi Koljevic. Je ne suis pas
17 sûr. La réunion a été présidée par Branko Kostic et Jovic, quel était son
18 prénom ? Il appartenait à la présidence, oui, Borisav Jovic, et d'autres
19 personnes."
20 Vous faites référence au Dr Karadzic, qui était assis en diagonale par
21 rapport à vous, avec Biljana Plavsic. Vous dites que vous pensez que
22 Krajisnik a assisté à cette réunion, n'est-ce pas ? Est-ce que vous seriez
23 d'accord avec cela ? Il devient tout à fait clair que vous n'étiez pas du
24 tout sûr au sujet de la présence de
25 M. Krajisnik, alors que vous étiez sûr s'agissant du Dr Karadzic et de
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1 Biljana Plavsic.
2 R. A ce moment-là, je commençais à me souvenir de la situation. Je vais
3 vous décrire l'entretien car je ne connaissais pas les questions en avance.
4 Il s'agissait des événements qui ont eu lieu il y a longtemps. J'avais
5 besoin d'un peu de temps pour me souvenir des choses. A ce moment-là, je
6 commençais à me souvenir des choses au début de ma réponse. Je me souviens.
7 Maintenant, je me souviens que les quatre étaient présents. Certainement,
8 il y avait Karadzic, Koljevic, Plavsic et Krajisnik.
9 M. STEWART : [interprétation]
10 Q. Votre mémoire s'est améliorée depuis votre entretien qui a eu lieu le
11 15 janvier 2002, en ce qui concerne cette question; est-ce exact ?
12 R. Depuis le moment où j'ai commencé à réfléchir à ces événements et à ces
13 scènes. Car je n'ai pas seulement réfléchi à cela pendant l'entretien, mais
14 au cours de ces jours-là et de ces mois-là, je revenais en arrière pour
15 penser de ces événements et pour me rappeler les choses. Beaucoup de choses
16 se sont passées.
17 Q. Etes-vous en train de dire que maintenant vous vous souvenez des choses
18 au sujet de la participation active de
19 M. Krajisnik au cours de cette réunion ?
20 R. Oui, il a souvent pris la parole. Il répétait les paroles des autres
21 intervenants, notamment, du Dr Karadzic et Branko Kostic et Borisav Jovic.
22 Il était d'accord avec leur position. Je sais qu'en ce qui concerne ces
23 quatre dirigeants des Serbes de Bosnie, après la première pause, Biljana
24 Plavsic est sortie, et les trois autres y sont restés. Il s'agissait d'une
25 session qui a duré trois jours.
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1 Q. Je souhaite que l'on se rappelle maintenant de ce que vous avez dit au
2 cours de cet entretien du 15 janvier. Cela figure à la page 31. On vous a
3 posé la question suivante : "Qu'a dit
4 Mme Plavsic ?" Votre réponse : "Au cours de la première discussion qui a eu
5 lieu à 10 heures du matin, le 31 janvier, tout le monde pouvait présenter
6 ses opinions. C'était avant la première pause. Son opinion était différente
7 par rapport à toutes les autres. Elle était la seule dont l'opinion était
8 différente puisqu'elle se demandait comment se faisait-il que la Croatie ne
9 procédait au désarmement, mais seulement les nôtres. J'avais l'impression
10 qu'elle n'était pas prête pour la réunion, qu'elle n'avait pas été
11 informée. Elle disait ce qu'elle pensait. Après la première pause, elle n'y
12 était plus." Question de Mme Uertz-Retzlaff : "Est-ce que vous vous
13 souvenez de quoi que ce soit au sujet de Krajisnik ? Est-ce qu'il a dit
14 quelque chose ?" Votre réponse : "Non. Je ne me souviens pas concrètement
15 parlant, mais ils ont tous parlé de la même manière, Karadzic, Radovan, et
16 cetera. Ils se moquaient de nous sans cesse. Tout le monde était d'accord,
17 sauf la SAO Krajina."
18 A ce moment-là, M. Babic, vous ne vous souveniez pas du tout de M.
19 Krajisnik qui aurait pris la parole, sauf de manière tout à fait générale
20 pour dire qu'il n'y a pas eu de désaccord, sauf pour ce qui est de Mme
21 Plavsic; est-ce exact ?
22 R. Oui, c'est exact. C'est ce que j'ai dit il y a quelques minutes déjà.
23 Je ne peux pas vous citer les propos exacts qui ont été dits, mais la même
24 position était réitérée par M. Karadzic et
25 M. Krajisnik, ainsi que les autres. C'est ce dont j'ai parlé il y a
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1 quelques minutes. Je ne peux pas citer les propos exacts, mais je peux vous
2 dire quelle était leur position.
3 Q. Comment pourriez-vous résumer la position qu'ils partageaient ? Je veux
4 dire la position qui était partagée par tout le monde à l'exception de Mme
5 Plavsic. Comment décririez-vous cette position ?
6 R. Il y avait deux questions qui se posaient : il y avait la position
7 elle-même et la manière dont cette position était imposée aux autres. La
8 première devait être adoptée sans modification en ce qui concerne les plans
9 de sécurité pour la Krajina, le plan Vance tel qu'il avait été convenu par
10 Milosevic, Tudjman et Kadijevic à Genève, le 21 novembre 1991. Il
11 s'agissait là du cœur de la question. Leur position était que ce plan
12 devait être imposé à la région autonome serbe de Krajina, ou plutôt à moi,
13 puisque je représentais une région autonome serbe de Krajina à l'époque.
14 Voilà de quoi il s'agissait. Il s'agissait d'opposer cette position à nous
15 autres par le biais d'un processus de torture physique et psychologique qui
16 a duré pendant trois jours. Voilà ce qui s'est passé en substance au cours
17 de cette session. C'est la raison principale pour laquelle Momcilo
18 Krajisnik a participé, lui aussi, à cette session afin que cette position
19 puisse m'être imposée par le biais de torture psychologique et physique qui
20 m'a été infligée. J'étais censé adopter ce plan indépendamment de ce que
21 les autres allaient faire. Voilà là la substance de la position de M.
22 Krajisnik. Tout le monde était d'accord avec cela à l'exception de Mme
23 Plavsic. Bien entendu, j'exclus ici les positions exprimées par le
24 gouvernement de la région autonome serbe de Krajina et les représentants
25 des municipalités de Krajina qui m'accompagnaient.
Page 3545
1 Q. Il s'agissait là d'une position complexe. En résumé, cette position
2 consistait à dire que vous, c'est-à-dire, les dirigeants de la région
3 autonome serbe de Krajina, étiez en mesure de perturber, voire de détruire,
4 de rendre impossible la mise en œuvre du plan Vance, n'est-ce pas ?
5 R. Non, ce n'est pas exact. Tout d'abord, nous n'étions pas et,
6 personnellement, je n'ai pas participé à la mise en œuvre, à l'adoption de
7 ce plan. Ce plan était convenu par Milosevic, Tudjman et Kadijevic sans la
8 participation de la Krajina. Il portait sur la Krajina également.
9 Deuxièmement, en tant que président de la Krajina, j'ai demandé instamment
10 la modification du statut de la région autonome serbe de Krajina. Lorsque
11 ce plan a été adopté, il a, ensuite, été adopté par l'assemblée. Slobodan
12 Milosevic, Radovan Karadzic et Milan Martic ont accéléré la mise en œuvre
13 du plan, qui avait été imposé par eux à la Krajina.
14 Q. Monsieur Babic, comme vous nous avez dit dans votre réponse, le premier
15 problème qui se posait à vous était le fait que l'accord avait été conclu
16 sans votre participation. Si bien que vous sentiez d'une certaine manière
17 que cela avait été fait sans que vos intérêts soient pris en considération,
18 sans que vous soyez consulté. C'est ainsi que vous ressentiez les choses,
19 n'est-ce pas ?
20 R. Il s'agit là de votre opinion. Ce n'est pas exact. Ce n'est
21 certainement pas exact. Je ne suis pas d'accord avec la manière dont vous
22 avez présenté les choses. Ce plan ne fournissait pas de garanties
23 suffisantes pour la sécurité des habitants de la Krajina. C'est cela que
24 nous avons parlé. Il s'agissait d'un accord en matière de sécurité. Au
25 cours des débats ou plutôt pour être plus précis, lors de la polémique
Page 3546
1 publique, qui a eu lieu au moment du rejet de ce plan, lorsque nous avons
2 rejeté ce plan, le plan a été modifié. Le secrétaire général des Nations
3 Unies a proposé certaines modifications concernant ce plan, à savoir que le
4 système juridique croate et la législation croate ne seraient pas
5 applicables dans les régions protégées par les Nations Unies, notamment, en
6 Krajina. Cela a été couronné de succès. Nous avons obtenu ce que nous
7 voulions suite à cette discussion, mais c'est la seule chose que nous avons
8 obtenue. Mais ceci a été adopté par le conseil de Sécurité. Nous avions des
9 propositions eu égard aux modifications que nous voulions, et l'une de nos
10 propositions a été ainsi adoptée. Toutefois, Slobodan Milosevic n'a
11 autorisé aucun débat au sujet d'éventuelles modifications de ce plan et
12 c'était là l'objectif de la réunion qui a eu lieu à Belgrade. Il s'agissait
13 de n'autoriser aucune discussion, aucun débat au sujet de ce plan, mais
14 d'imposer ce plan à la Krajina comme il en avait convenu avec Tudjman.
15 Q. Monsieur Babic, vous n'avez pas répondu à ma question, et ce n'est pas
16 la première fois. Je vous ai demandé si le problème essentiel qui se posait
17 à vous, était que vous aviez l'impression que l'accord avait été conclu
18 sans que vos intérêts soient pris en considération sans que vous soyez
19 consulté. Donc si on laisse de côté la question du fondement même de cette
20 proposition et de ce plan, c'est ainsi que vous ressentiez les choses,
21 n'est-ce pas ?
22 R. J'ai déjà répondu à votre question. Ce n'est pas exact. La deuxième
23 fois que je vous dis que ce n'est pas vrai. Ce n'était pas là mon problème
24 principal. Le problème principal supposément était qu'un problème de
25 sécurité se posait eu égard à la population de la Krajina.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, l'un n'empêche pas
2 l'autre. L'un n'empêche pas l'autre, qu'il s'agisse de votre problème
3 principal ou d'un problème secondaire. La question portait sur le fait de
4 savoir si vous aviez l'impression que cet accord avait été conclu sans que
5 vous soyez consulté de manière suffisante et sans prendre en considération
6 les intérêts du peuple que vous représentiez, n'est-ce pas ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai dit qu'il s'agissait d'un fait
8 accompli.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'il s'agisse d'un fait accompli ou
10 non, que vous l'ayez dit auparavant ou non, voilà la question qui a été
11 posée. D'après la réponse que vous avez fournie, je pense que vous répondez
12 par l'affirmative.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cela étant, je voulais répondre au
14 conseil de la Défense. Je voulais lui dire qu'il ne s'agissait pas du
15 problème principal qui se posait à moi. Il s'agit d'un problème qui
16 existait déjà au moment où nous avions commencé à discuter de ce plan.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En tout cas, il s'agit d'un problème
18 important pour vous, n'est-ce pas ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être s'agit-il de la substance de tout
20 cela. Le fait est que le plan qui concernait la population de Krajina a été
21 élaboré sans que la population de Krajina ou sans que ses représentants
22 soient consultés. Ce plan a été élaboré par les personnes qui menaient la
23 guerre, c'est-à-dire, Milosevic et Tudjman. Il était question d'essayer de
24 parvenir à un accord, et d'obtenir le consentement des personnes
25 intéressées.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pouvez poursuivre.
2 M. STEWART : [interprétation]
3 Q. Monsieur Babic, est-il exact que les deux points qui vous paraissaient
4 contestables eu égard au plan Vance, les deux points principaux qui vous
5 posaient problème, était premièrement, que vous aviez l'impression qu'il
6 s'agissait là d'une première étape en vue de la création d'une Croatie
7 indépendante dont les frontières n'incluraient votre Krajina, n'est-ce pas
8 ? Cela vous inquiétait et c'est l'une des raisons principales pour
9 lesquelles vous étiez opposé au plan Vance, n'est-ce pas ?
10 R. Tout d'abord, il ne s'agissait pas d'un arrangement politique pour la
11 Krajina et cela n'avait rien à voir avec une solution politique. Il
12 s'agissait d'une certaine manière d'une solution politique sans que l'on
13 cherche à clarifier le statut de la Krajina. Il ne s'agissait pas d'un plan
14 de nature politique, mais d'un arrangement en matière de sécurité. Une
15 solution politique n'était pas le problème principal à l'époque. Il fallait
16 trouver un arrangement en matière de sécurité. De là, des problèmes qui se
17 posaient et que sans accord digne de cela, une solution politique était
18 impossible. Mais il s'agissait là d'un autre problème.
19 Q. Monsieur Babic, le fait est, n'est-ce pas, qu'il s'agisse ou non d'un
20 arrangement en matière de sécurité, ce plan Vance, en ce qui vous
21 concernait, ce plan supposait clairement que la situation politique ne
22 volait pas d'une manière qui vous arrangeait, car cela présentait un risque
23 accru pour que les frontières de la Croatie finissent par inclure votre
24 Krajina, n'est-ce pas ?
25 R. A l'époque, il ne s'agissait pas du problème principal. J'étais tout à
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1 fait clair. J'ai essayé simplement de faire en sorte que la Krajina soit
2 protégée de deux manières. Tout d'abord, en modifiant le plan Vance et en
3 assurant la présence des forces de la JNA, et l'autre possibilité
4 consistait à ce que les troupes des Nations Unies soient présentes, à ce
5 que nous bénéficierons de la protection des Nations Unies. Voilà quelle
6 était ma position à l'époque, et ce, pour des raisons de sécurité.
7 Q. Monsieur Babic, l'autre problème majeur qui se posait pour lequel vous
8 avez soulevé des objections, est le fait que le plan Vance envisageait le
9 retrait des forces de la JNA de Krajina, n'est-ce pas ?
10 R. Oui. C'est exact.
11 Q. Je suis certain que vous aviez d'autres objections à soulever eu égard
12 au plan Vance, mais ces objections étaient-elles aussi importantes que
13 celles dont nous venons de parler ?
14 R. L'objection principale que j'ai soulevée portait sur la manière dont
15 les Nations Unies protégeraient le territoire ou la population plutôt de la
16 région autonome serbe de Krajina, et la manière dont il permettrait le
17 retour des réfugiés, la création d'une police multiethnique, et ainsi de
18 suite. Notre position était qu'ils devaient être positionnés sur la ligne
19 de séparation entre les deux parties belligérantes, le long des lignes
20 reflétant le modèle cypriote, là où se trouvaient, ce qu'on appelait, "les
21 lignes vertes". Telle était la proposition. Voilà comment nous pensions que
22 la JNA pourrait demeurer sur ce territoire en tant que force armée et la
23 manière dont toutes les unités se plaçaient sous son commandement
24 pourraient rester, y compris la Défense territoriale. Le plan envisagé,
25 toutefois, et la démilitarisation totale, c'est-à-dire que la JNA et la
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1 Défense territoriale devaient être démilitarisées ou désarmées, mais il
2 était possible qu'une police régionale, une police locale soit créée.
3 L'autre objection portait sur le fait que le plan concernait uniquement le
4 premier semestre et devait être, ensuite, prolongé pour une année. Nous
5 pensions que cela était insuffisant et compte tenu des changements qui se
6 déroulaient au sein de la communauté internationale et en ex-Yougoslavie.
7 Nous avons évalué et examiné nos propositions, de manière à pouvoir
8 accepter la démilitarisation de la Krajina en présence de forces de
9 protection des Nations Unies. Mais nous voulions que les Etats-Unis
10 imposent une sorte de protectorat en Krajina et essaient de trouver une
11 solution politique pour la région. C'est la position définitive que j'ai
12 adoptée, qu'ont adopté les dirigeants de Krajina. En février, le conseil de
13 Sécurité a décidé de la mise en œuvre du plan. Nous l'avons adopté sous la
14 manière dont il était présenté par le conseil de Sécurité. Nous n'avons pas
15 soulevé d'objections supplémentaires.
16 Q. Monsieur Babic, j'essaie de résumer votre position. Est-ce que l'on
17 pourrait résumer votre position, en disant que vous étiez en désaccord
18 profond avec les dirigeants de Belgrade, les dirigeants serbes de Bosnie,
19 s'agissant de savoir si le plan Vance pouvait être efficace et,
20 deuxièmement, sur le fait de savoir s'il prenait suffisamment en
21 considération vos intérêts et les intérêts de votre Krajina ? Est-ce que
22 nous pouvons être d'accord sur cela ?
23 R. Tout à fait, je n'étais pas d'accord avec la position qu'ils avaient
24 présentée selon laquelle le plan devait être adopté sous la forme qui avait
25 été convenue par Milosevic et Tudjman. Milosevic et Tudjman ne voulaient
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1 même pas parler des problèmes de sécurité, des problèmes qui se posaient à
2 nous et à notre protection.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, on vous a demandé si
4 vous étiez d'accord pour dire que vous aviez des problèmes avec les
5 dirigeants de Belgrade et les dirigeants de Bosnie pour les raisons qui ont
6 été mentionnées par M. Stewart et, au lieu de répondre simplement, vous
7 commencez à expliquer les raisons pour lesquelles vous n'étiez pas
8 d'accord. La question ne portait pas sur cela.
9 Me Stewart n'a pas beaucoup de temps. Il y a des contraintes de temps qui
10 se posent à lui. Je vous inviterais à écouter plus attentivement à ses
11 questions et à y répondre. Si Me Stewart souhaite obtenir d'autres
12 informations de votre part, il vous le demandera.
13 Veuillez poursuivre, Maître Stewart.
14 M. STEWART : [interprétation]
15 Q. Oui, Monsieur Babic.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, les
17 questions qui ont été posées par l'avocat comprennent son propre point de
18 vue et c'est la raison pour laquelle je ne peux pas répondre par un simple
19 oui ou non. Il me faut fournir une réponse plus détaillée.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas toujours nécessaire. Il
21 n'est pas nécessaire que le témoin soit en désaccord avec la position
22 exprimée par le conseil de la Défense.
23 Veuillez poursuivre, Maître Stewart.
24 M. STEWART : [interprétation]
25 Q. Monsieur Babic, puis-je dire, conformément à ce qui a été exprimé par
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1 le président de cette Chambre, que vous pouvez, je peux vous suggérer de
2 commencer votre réponse par oui ou non. Si la Chambre de première instance
3 a le sentiment, dans un souci d'équité à votre égard, vous devez être
4 autorisé à fournir une réponse détaillée, je suis sûr que vous en serez
5 informé par la Chambre.
6 Monsieur Babic, conviendrez-vous avec moi que quelque soient les désaccords
7 qui aient eu lieu entre vous et les dirigeants de Belgrade et les
8 dirigeants serbes de Bosnie peut-être d'autres personnes concernant le plan
9 Vance, rien n'indiquait que les dirigeants de Belgrade et les dirigeants
10 serbes de Bosnie souhaitaient soutenir le plan Vance pour des motifs autres
11 que le souhait de parvenir à une solution pacifique à la guerre en Croatie,
12 n'est-ce pas ?
13 R. Je pense qu'ils étaient animés par d'autres motifs.
14 Q. Je comprends votre réponse. Si je vous comprends bien, vous pensez que
15 leurs motifs étaient autres que le simple souhait de parvenir à une
16 solution pacifique à la guerre en Croatie. Est-ce que je vous ai bien
17 compris ?
18 R. Oui.
19 Q. Excusez-moi. Je pense m'être exprimé correctement, n'est-ce pas ?
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, lorsqu'il y a une double
21 négation, cela peut toujours créer une confusion.
22 Si j'ai bien compris votre réponse, Monsieur Babic, ils avaient en tête des
23 motifs autres que le simple fait de parvenir à une solution pacifique.
24 M. STEWART : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après moi, oui.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
2 M. STEWART : [interprétation]
3 Q. Très bien, nous allons procéder pas à pas. M. Milosevic, d'après vous,
4 avait d'autres objectifs en tête, des motifs cachés, n'est-ce pas ?
5 R. Oui. Il souhaitait partager la Bosnie avec Franjo Tudjman.
6 Q. Partager la Bosnie ?
7 R. Oui, c'est exact.
8 Q. D'après vous, par quels motifs étaient animés les Serbes de Bosnie ?
9 R. Je ne comprends pas votre question.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais essayer de clarifier la
11 question. La première question posée par le conseil de la Défense portait
12 sur le fait de savoir si chacun s'efforçait de trouver une solution
13 pacifique au conflit croate ou si les parties intéressées avaient d'autres
14 objectifs en tête. Vous venez de nous expliquer que les dirigeants de
15 Belgrade avaient d'autres motifs, des motifs autres que le simple fait de
16 parvenir à une solution pacifique. La question est la suivante : qu'avaient
17 en tête les dirigeants serbes de Bosnie ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils partageaient l'objectif commun avec
19 Slobodan Milosevic. Cet objectif n'était pas de parvenir à la paix en
20 Croatie. Car deux ou trois mois plus tard, ils ont procédé de nouveau à la
21 militarisation de la Krajina.
22 M. STEWART : [interprétation]
23 Q. Ma question portait précisément sur les Serbes de Bosnie. Est-ce que
24 vous déclarez qu'ils partageaient les objectifs de M. Milosevic concernant
25 la division de Bosnie avec M. Tudjman ?
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1 R. Oui.
2 Q. Quelle est la partie de la Bosnie que M. Tudjman devait obtenir pour la
3 Croatie en conformité avec les objectifs dégageant de l'agenda de Bosnie.
4 R. Pour autant que je le sache, la région de Bihac, c'est la région en
5 Herzégovine, la Bosnie centrale, et je pense qu'à l'époque, toutes ces
6 régions n'avaient pas été très bien définies par Milosevic et Tudjman.
7 Q. Est-ce que vous avez exprimé ce point de vue lors de la réunion qui
8 s'est tenue à Belgrade pendant trois jours, à la fin du mois de janvier et
9 au début du mois de février 1992 ?
10 R. Les débats ne portaient pas là-dessus, je vous répondrais par la
11 négative.
12 Q. Monsieur Babic, les débats portaient sur le fait de savoir si vous
13 accepteriez et soutiendriez le plan Vance, n'est-ce pas ?
14 R. Le plan Vance a été débattu, mais j'ai demandé s'il serait possible
15 d'envisager une modification de ce plan. En ce qui concerne les dirigeants
16 de Belgrade et les dirigeant de Bosnie, ils ont demandé à ce que plan nous
17 soit imposé. C'est sur cela qu'a porté la réunion qui a duré trois jours.
18 M. STEWART : [interprétation] Peut-être serait-il bon de faire une pause à
19 ce stade.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, nous reprendrons nos travaux
21 à 11 heures moins cinq.
22 --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.
23 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, je rendrai la
25 décision orale de la Chambre au sujet de la quatrième requête. On demande
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1 des mesures de protection par voie de déposition par vidéoconférence,
2 quatrième requête à laquelle il est fait droit.
3 A présent, j'indique que ce que je viens de dire était destiné à informer
4 les parties, puisque la décision doit être prononcée en audience publique,
5 mais je le ferai plus tard. J'ai simplement voulu que les parties soient au
6 courant.
7 Madame l'Huissière, pourriez-vous faire entrer M. Babic dans le prétoire ?
8 M. STEWART : [interprétation] Pendant que le témoin entre, Monsieur le
9 Président, je me demande si vous souhaiteriez une réponse écrite de la part
10 de la Défense au sujet de cette décision. Nous sommes entièrement à votre
11 disposition.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Je pense que la chose est consignée
13 au compte rendu d'audience. Lorsque nous en parlerons en audience publique,
14 j'évoquerai d'abord la requête, et je donnerai, éventuellement, la parole à
15 la Défense pour une réponse orale. Il faut que nous soyons en audience
16 publique pour ce faire.
17 M. STEWART : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'exprimerai en audience publique.
19 M. STEWART : [interprétation] Je crois qu'il est possible de se passer
20 d'écritures. C'est une bonne chose.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
22 M. STEWART : [interprétation] Merci.
23 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Monsieur Babic.
25 Avant de reprendre le contre-interrogatoire, je vous demanderai de prêter
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1 la plus grande attention aux questions qui vous sont posées. Vous n'êtes
2 pas ici pour justifier une quelconque position politique adoptée à l'époque
3 par vous-même ou par d'autres; vous êtes simplement ici pour répondre aux
4 questions.
5 Veuillez procéder, Maître Stewart.
6 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Q. Monsieur Babic, j'aimerais maintenant vous interroger au sujet de la
8 rencontre dont vous dites qu'elle a eu lieu à Bosanski Novi à la fin de
9 l'été ou au cours de l'automne 1992. Voici ma première question, Monsieur
10 Babic, à ce sujet. Je pense qu'il est possible que vous fassiez une erreur
11 relativement importante d'ailleurs au sujet de la date de cette réunion.
12 R. Non.
13 Q. Si je vous disais qu'il n'y a pas eu de réunion à Bosanski Novi à la
14 fin de l'été ou au cours de l'automne 1992, mais qu'une réunion
15 correspondant en gros à votre description, je dis bien, en gros, que s'est,
16 effectivement, tenue le 24 avril 1993. Que diriez-vous en réponse à cela ?
17 R. Je me souviens de la réunion de Bosanski Novi qui s'est tenue avant la
18 réunion conjointe de l'assemblée de la Républika Srpska et la Krajina serbe
19 à Prijedor à la fin octobre. Il me semble que cette réunion a eu lieu après
20 l'enterrement de Jovan Raskovic, c'est-à-dire, au moment où après le mois
21 de mars 1992, je suis entré pour la première fois sur le territoire de la
22 Bosnie. Je me souviens de cette réunion qui s'est tenue à la veille de la
23 réunion de l'assemblée de Prijedor. Cette réunion de l'assemblée de
24 Prijedor s'est tenue en octobre 1992. Cela s'est passé également la
25 première fois que j'avais mis les pieds en Bosnie après les conflits. C'est
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1 selon ces points de référence que j'ai déterminé la période à laquelle la
2 réunion a eu lieu.
3 Q. Vous avez été interrogé, le 16 janvier 1992, n'est-ce pas ? Ceci figure
4 en page 7, du compte rendu de la première séance, si c'était bien la
5 première séance. En tout cas, M. Corin vous interroge. C'est l'un des
6 enquêteurs. J'aimerais, si vous le voulez bien, vous poser quelques
7 questions au sujet de ces séances conjointes de l'assemblée à Bosanski Novi
8 et Prijedor. On vous demande : "Est-ce que vous vous rappelez la date de la
9 réunion de Bosanski Novi ?" Vous répondez : "Non, mais ce que je pense,
10 c'est qu'elle a eu lieu avant la réunion de Prijedor."
11 Monsieur Babic, effectivement, vous dites que vous pensez qu'elle a eu lieu
12 avant la réunion de Prijedor, mais, apparemment, vous n'étiez certain de
13 rien à ce sujet même à l'époque, n'est-ce
14 pas ? Est-ce que vous en convenez ?
15 R. Je suis sûr que cette réunion a eu lieu avant la réunion de Prijedor
16 qui a eu lieu à la fin du mois d'octobre. Cela, j'en suis sûr.
17 Q. Dans la suite des questions, dans le même compte rendu, à la même page,
18 M. Corin vous demande : "Vous rappelez-vous s'il y a eu un sujet important
19 abordé au cours de cette réunion ?" Vous
20 répondez : "Je ne me souviens pas qu'il y ait eu un sujet particulier." On
21 vous demande : "Vous souvenez-vous pour quelle raison cette réunion des
22 deux assemblées s'est tenue conjointement ?" Vous répondez : "Est-ce que
23 vous parlez de Bosanski Novi ?" M. Corin répond : "Oui." Vous répondez :
24 "Je ne me souviens pas des motifs pour lesquels cette réunion a été
25 convoquée. Ce dont je me souviens, c'est que j'étais la personne la plus
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1 isolée de cette réunion. J'étais assis à l'arrière de la pièce, seul."
2 Est-ce que ceci correspond aux souvenirs que vous avez aujourd'hui ?
3 R. Oui.
4 Q. En page 10, du même compte rendu, Mme Uertz-Retzlaff vous demande :
5 "Dans ces conditions, je vous demande qui était à l'origine de cette
6 réunion conjointe. Vous souvenez-vous si c'étaient les Serbes de Bosnie ou
7 les Serbes de Croatie ?" Vous dites : "Je ne sais pas qui était à
8 l'initiative de la réunion. Officiellement, elle a été convoquée par le
9 président de l'assemblée." Vous poursuivez, en disant : "Il y avait une
10 autre personne, rappelez-moi de qui il s'agit -- Krajisnik, Krajisnik."
11 Vous dites : "On nous demande si quelqu'un représentait la Serbie au niveau
12 fédéral."
13 A en juger par vos réponses, Monsieur Babic, il ne semblait pas que vous
14 ayez considéré M. Krajisnik comme la personnalité centrale de cette réunion
15 puisque, apparemment, vous aviez même du mal à vous rappeler son nom,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Quelle est votre question ? Excusez-moi.
18 Q. Conviendriez-vous qu'apparemment, vous aviez du mal à vous rappeler le
19 nom de M. Krajisnik à ce moment de l'interrogatoire ?
20 R. Peut-être que cela était le cas à ce moment précis, mais il est
21 impossible que je ne me souvienne pas du nom de M. Krajisnik. Peut-être
22 qu'à cet instant précis, j'ai du mal à trouver les mots, mais il est
23 impossible que je ne me souvienne pas du nom de
24 M. Krajisnik. Peut-être qu'à ce moment-là, j'avais du mal à trouver mes
25 mots. Que puis-je vous dire à ce moment de l'interrogatoire ? Bien sûr, je
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1 me rappelle toujours qui est M. Krajisnik.
2 Q. Avançons. Même compte rendu, la question suivante est la suivante : "Y
3 avait-il quelqu'un qui représentait le niveau fédéral ou la Serbie ?" Vous
4 répondez : "Je ne m'en souviens pas." Après quoi, on vous demande : "Si des
5 militaires -- " Apparemment, la question est inachevée. Vous répondez :
6 "Peut-être de Serbie. Ce quelqu'un était Seselj. Vous ajoutez : "Je ne suis
7 pas sûr." Ensuite, on vous interroge au sujet des représentants de la JNA.
8 D'abord, vous avez bien dit, n'est-ce pas, que vous n'étiez pas sûr de la
9 présence de Seselj à cette réunion. C'est bien cela ?
10 R. J'étais sûr de la présence de Seselj. Ma réponse portait sans doute sur
11 les autres parties de la question. Je suppose que je répondais à ce qui
12 m'était demandé au sujet de la JNA et de la Serbie. S'agissant de Seselj,
13 je suis sûr de sa présence. D'ailleurs, c'est le souvenir le plus net que
14 j'ai de cette réunion.
15 Q. Même compte rendu page 11, Mme Uertz-Retzlaff, vous dit : "Vous ne
16 vous souvenez pas du sujet, mais de quoi y a-t-il été question au cours des
17 discussions ?" Vous dites : "Je ne me souviens pas qu'il y ait eu un sujet
18 particulier. Si je me souviens bien, cette réunion de l'assemblée, cette
19 réunion conjointe n'avait pas un sujet particulier ou quelque sujet
20 particulier à l'ordre du jour." Est-ce que ceci correspond au souvenir que
21 vous avez aujourd'hui ou peut-être à l'absence de souvenir que vous avez
22 aujourd'hui ?
23 R. Je ne me souviens des détails. D'ailleurs, à l'époque je ne m'en
24 souvenais pas non plus en dehors de l'aspect général de la discussion. Je
25 ne sais pas si vous savez, si vous avez rappelé que je suis arrivé en
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1 retard à cette réunion, et que je ne connaissais pas bien les conditions
2 dans lesquelles cette réunion avait été préparée.
3 Q. Page 12, du même compte rendu, on vous interroge au sujet de Prijedor.
4 Vous dites à la page 13 : "J'ai serré la main de Karadzic." Il est question
5 à cet endroit de la réunion de Prijedor. "Celle de Krajisnik, je ne me
6 souviens pas qui étaient les autres participants." En page 14, du compte
7 rendu, vous dites que cette réunion était présidée conjointement par
8 Paspalj et Krajisnik. Vous souvenez-vous de cela ?
9 R. Oui, je me souviens très bien du fait que cette réunion était
10 conjointe, à savoir que c'était une réunion de l'assemblée de la Républika
11 Srpska. A l'ordre du jour, il y avait un point à aborder conjointement avec
12 les représentants de l'assemblée de la République serbe de Krajina. C'est
13 seulement pour discuter d'un point que les représentants des deux
14 assemblées ont été présents.
15 Q. Lorsque vous dites que vous pensez que la réunion a été présidée
16 conjointement Paspalj et Krajisnik, ce que vous dites aujourd'hui, c'est
17 que cette réponse ne concernait qu'une partie de la réunion, n'est-ce pas ?
18 R. Oui, c'est d'ailleurs ce qui s'est passé. La réunion n'a été conjointe
19 que pendant une partie de la séance de l'assemblée de la Republika Srpska.
20 Je me souviens très bien que nous, représentants de l'assemblée de la
21 République serbe de la Krajina, dans le cadre de l'ordre du jour qui
22 prévoyait de discuter de la déclaration d'unification, en tout cas, de la
23 déclaration relative au désir d'unification, je me souviens que nous avons
24 été invités à participer à la réunion à ce moment-là. que cette partie de
25 la réunion a été conjointe sous la présidence Momcilo Krajisnik et de
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1 Paspalj. J'ai assisté à cette partie de la réunion. Après quoi, une fois
2 que ce point à l'ordre du jour a été discuté, nous sommes partis. Il y a eu
3 une pause, et après la pause nous ne sommes pas revenus à cette séance de
4 l'assemblée.
5 Q. S'agissant de cette partie de la réunion qui a été présidée
6 conjointement par deux présidents de séance, conviendriez-vous qu'entre les
7 deux hommes, c'était M. Krajisnik qui présidait concrètement la réunion ?
8 R. Oui, d'une certaine façon c'était lui l'hôte de la réunion.
9 Q. S'agissant de cette réunion précise, il était tout à fait manifeste que
10 M. Krajisnik était dirigeant de la réunion, puisqu'il la présidait, que
11 c'était à lui qu'allait le respect et la déférence dus au président de la
12 réunion, n'est-ce pas ?
13 R. Il était président de l'assemblée de la Republika Srpska comme on
14 l'appelait à l'époque, et Paspalj était président de l'assemblée de la
15 République serbe de Krajina. Ils présidaient ensemble cette réunion
16 conjointe.
17 Q. Vous dites que dans votre déclaration écrite, je ne crois pas qu'il
18 soit nécessaire de vous la distribuer, car nous ne parlerons que d'une
19 toute petite partie de cette déclaration écrite, paragraphe 8, vous l'avez
20 confirmé dans une partie de votre déposition orale. Vous dites : "Qu'au
21 cours des années suivantes entre 1993 et 1995, vous avez eu la possibilité
22 de rencontrer et de parler avec M. M. Krajisnik à plusieurs reprises." Je
23 crois que vous n'avez parlé que d'une seule rencontre avec lui précisément.
24 Je vous demande à combien de reprises vous dites aujourd'hui avoir
25 rencontré M. Krajisnik entre 1993 et 1994 ?
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1 R. Je me souviens d'une rencontre en 1993, et je ne me souviens d'aucune
2 rencontre en 1994.
3 Q. Soyons clair, en 1993, cette rencontre a eu lieu où et quand ?
4 R. A Knin, au cours de l'été, au mois de juin.
5 Q. Dans votre déclaration écrite, la phrase suivante se lit comme suit, je
6 cite : "Au cours des années suivantes de 1993 à 1995, j'ai eu l'occasion de
7 rencontrer et de parler avec M. Krajisnik à plusieurs reprises, ce qui m'a
8 mieux fait comprendre les choses. J'ai compris que Krajisnik était le bras
9 droit de Karadzic. Je l'ai considéré comme formant finalement une équipe.
10 Je crois que c'est ainsi qu'ils étaient perçus en Republika Srpska et à
11 l'extérieur de la Republika Srpska." Monsieur Babic, nous avons entendu ce
12 que vous avez dit de la visite à Knin qui n'est sans doute pas contesté.
13 Dans votre déposition, vous dites que vous étiez assis à côté de
14 M. Krajisnik au dîner de Pale en 1995 également. Conviendriez-vous que ceci
15 ne semble pas permettre de consolider la compréhension que vous aviez du
16 rôle de Krajisnik, n'est-ce pas ?
17 R. Cela m'a suffit pour comprendre ce que j'ai vu et ce que j'ai entendu
18 de la bouche de tierces personnes.
19 Q. Monsieur Babic, ce que je vous dis, c'est que votre déclaration écrite
20 et votre déposition orale exagèrent ce que vous saviez de M. Krajisnik et
21 ce que vous dites avoir vu et observer à son sujet. Après réflexion,
22 pensez-vous que peut-être mon propos est justifié ?
23 R. Il n'est pas exact que c'est une exagération. C'est ainsi que je le
24 considérais.
25 Q. Dans votre déclaration écrite, vous dites que Karadzic et Krajisnik
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1 semblaient agir sur un pied d'égalité. Monsieur Babic, conviendriez-vous
2 que votre description de toutes ces réunions et de toutes ces
3 manifestations de l'époque permettent de penser, très clairement, qu'ils
4 n'étaient pas sur un pied d'égalité, mais que M. Karadzic était le chef,
5 n'est-ce pas ?
6 R. D'abord, je dirais qu'ils étaient toujours ensemble. Je n'entrerai pas
7 dans les détails de toutes mes rencontres avec M. Krajisnik, mais chaque
8 fois il était avec M. Karadzic. Ils étaient toujours ensemble, toujours
9 d'accord, toujours en train d'exposer les mêmes points de vue. Quant à ce
10 que des tierces personnes m'ont dit, il y en a même qui m'ont dit que, sur
11 certains sujets, Krajisnik était plus fort que M. Karadzic en Républika
12 Srpska. J'ai même entendu cela de la bouche de certaines personnes.
13 Karadzic était peut-être une personnalité plus charismatique, plus
14 théâtrale, mais, pour moi, ces deux hommes sont égaux et très proches l'un
15 de l'autre. Ils formaient un duo et, à mon avis, s'ils n'étaient pas
16 exactement sur la même ligne, ils se suivaient de très près. En tout cas,
17 c'est ce que je dirais sur la base de ce que je sais.
18 Q. Pouvons-nous considérer, Monsieur Babic, s'agissant de ce que vous avez
19 pu constater des interactions entre M. Krajisnik et le Dr Karadzic, que ce
20 que vous avez pu dire aux Juges de la Chambre de première instance jusqu'à
21 présent, quant à ce que vous avez vu et entendu de leur part, pouvons-nous
22 considérer que ceci constitue tout ce que vous savez à leur sujet ?
23 R. Je n'ai pas dit tout ce que je savais. J'ai rencontré M. Krajisnik à
24 plusieurs reprises en 1995 lors de séances relativement longues, et nous
25 avons longuement discuté l'un avec l'autre. J'ai également entendu des
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1 propos venant d'autres personnes telles qu'Aleksa Buha, ministre des
2 Affaires étrangères de la Républika Srpska en 1994. J'ai entendu des choses
3 assez importantes qui m'ont été dites au sujet de M. Krajisnik. Je dis cela
4 pour indiquer que je n'ai pas dit tout ce que je savais, à la Chambre,
5 jusqu'à présent.
6 Q. Pour que tout soit clair, à votre avis, avons-nous bien parlé de tout
7 ce que vous savez de M. Krajisnik de première main, tout ce qui constitue
8 votre connaissance personnelle de cet homme ?
9 R. Pas tout ce que je sais. J'ai appris toutes sortes de choses à son
10 sujet en mai 1995, dont nous n'en avons pas parlé ici. Ce sont des
11 connaissances de première main, bien sûr, directes.
12 Q. Monsieur Babic, j'aimerais que les choses soient absolument claires. Je
13 ne vous demande pas, en ce moment, de nous dire ce que des tierces
14 personnes auraient pu vous dire à son sujet, n'est-ce pas ? Il est possible
15 que vous ou moi sachions un certain nombre de choses au sujet du président
16 des Etats-Unis, mais, comme je ne l'ai moi-même, en tout cas, jamais
17 rencontré, je ne parle pas de cela. Je vous interroge au sujet de ce que
18 vous savez, personnellement, de contacts que vous auriez pus avoir avec M.
19 Krajisnik.
20 Est-ce que vous êtes en train de dire qu'il y a quelque chose d'important
21 qui entre dans cette définition et que vous n'aviez pas dit aux Juges de la
22 Chambre, au sujet des deux ou trois années qui font l'objet de votre
23 déposition ici ?
24 R. Je pourrais compléter ce que j'ai pu dire. Ce que je savais de lui a
25 été renforcé, comme je l'ai déjà dit, grâce aux rencontres que j'ai eues
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1 avec lui en 1995. J'ai parlé de la rencontre de Pale. Par exemple, le 17
2 mai, à Bijeljina, le 20 mai, à Banja Luka, le 31 mai, à Bijeljina une
3 nouvelle fois. Des rencontres très rapprochées au cours desquelles j'ai eu
4 l'occasion de discuter avec M. Krajisnik et de mieux comprendre sa position
5 vis-à-vis la Républika Srpska et plus précisément vis-à-vis de Radovan
6 Karadzic. C'est cela qui m'a permis de conclure, de façon plus certaine,
7 que ces deux hommes constituaient une équipe, qu'ils avaient pratiquement
8 la même puissance. Ils ont peut-être une personnalité un peu différente ou,
9 même si je ne suis pas apte à en juger, en tout cas, je dirais qu'ils
10 avaient un rapport très proche. Krajisnik était très proche de Karadzic. Je
11 peux m'en convaincre. Ils avaient à peu près la même puissance, même si --
12 et j'utiliserais des termes tout à fait polis pour en parler -- même si, en
13 fait, ils pouvaient se présenter de façon un peu différente sur le plan
14 personnel, il y en avait un qui était charismatique, extraverti, théâtral,
15 alors que Krajisnik était un homme de décision, plus calme et plus
16 tranquille, qui agissait davantage comme un homme d'affaires.
17 Q. Mais la discussion, dont vous avez parlé aux Juges de la Chambre, au
18 cours de laquelle vous avez parlé avec M. Krajisnik lorsque vous étiez
19 assis à côté de lui, au dîner à Pale en 1995, est-ce la seule fois où vous
20 avez eu une discussion entre quatre yeux, en tête-à-tête, en privé,
21 autrement dit, avec M. Krajisnik ?
22 R. J'ai parlé avec M. Krajisnik, entre quatre yeux, avec quelques paires
23 d'yeux supplémentaires, le 17 mai 1995, à Bijeljina, et, le 25 mai 1995, à
24 Banja Luka, et, le 31 mai 1995 à nouveau, à Bijeljina. Lors de ces
25 rencontres, ainsi que lors de la rencontre de Pale, je crois m'être fait
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1 une idée tout à fait complète de M. Krajisnik et de ce qu'il pensait de ces
2 rapports avec la Républika Srpska, une idée tout à fait claire. J'ai répond
3 oui, n'est-ce pas, à la question que vous m'avez posée. Après le mois de
4 janvier 1995, j'ai eu d'autres occasions de me trouver aux côtés de M.
5 Krajisnik.
6 Q. Monsieur Babic, que les choses soient claires, vous avez utilisé
7 l'expression, en tête-à-tête ?
8 R. Non, cela, cela c'est vous qui l'avez dit. J'ai dit entre quatre yeux
9 avec quelques paires des yeux supplémentaires.
10 Q. D'accord, je n'avais pas fait le total de tous ces yeux, Monsieur
11 Babic. En dehors de ce dîner de Pale, vous est-il arrivé, à quelque moment
12 que ce soit, au cours de votre vie, d'avoir une conversation avec M.
13 Krajisnik qui aille au-delà d'un échange de bonjour, ce qui ne constitue
14 pas vraiment une conversation ? Je vous demande s'il vous est arrivé, à
15 quelque moment que ce soit, d'avoir une vraie conversation avec M.
16 Krajisnik, conversation à laquelle les seules personnes présentes, les
17 seules personnes susceptibles d'entendre ce qui se disait étaient vous-même
18 et M. Krajisnik ?
19 R. Seul avec lui, non. D'ailleurs, à Pale non plus, nous n'étions pas
20 seuls, lui et moi. Il y avait d'autres personnes assises à cette table. Il
21 me semble que je ne me suis jamais trouvé seul à seul avec Krajisnik. Il y
22 avait toujours quelqu'un autour de nous.
23 Q. Mais, à ce dîner de Pale, la situation était un peu différente, n'est-
24 ce pas, dans la mesure où, et je pense que vous en conviendrez, vous étiez
25 assis à côté de lui, même s'il y avait d'autres personnes présentes, et que
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1 cela vous a permis d'avoir avec lui une conversation tout de même assez
2 privée avec lui, n'est-ce pas ?
3 R. C'est cela. Dans quelle mesure les autres personnes présentes ont
4 entendu ce que nous nous disions, je ne saurais le dire. En tout cas, ce
5 n'était pas une conversation secrète.
6 Q. Vous avez parlé quelque peu, dans votre déposition, de ce sujet.
7 Ensuite, vous avez parlé également de ce qui s'est passé, le 19 février
8 2002. Nous trouvons mention de cela à la page 8 du compte rendu que j'ai
9 évoqué tout à l'heure. C'est Mme Uertz-Retzlaff qui vous interroge, mais
10 enfin sa question n'a pas beaucoup d'importance. Je peux commencer votre
11 réponse que l'on trouve au bas de cette page de ce compte rendu d'audience,
12 je cite : "Donc, à mon avis, la base de tout cela, c'est que Stanisic et
13 Milosevic souhaitaient la division de la Krajina, par rapport à la région
14 de Knin et de la Slovanie, de la Slovanie orientale, et que ceci m'a
15 renforcé dans ma conviction. En janvier 1995, j'ai entendu Momcilo
16 Krajisnik dire quelque chose d'assez idiot, à savoir que, si nous obtenions
17 6 % de plus du territoire de la Bosnie-Herzégovine, cela signifiait 6 %
18 ajouté à 49 %, et j'ai trouvé que cette conclusion était terriblement
19 erronée."
20 Pour replacer les choses dans leur contexte, Monsieur Babic, le pourcentage
21 cité ici est bien le pourcentage qui avait été cité au cours des
22 négociations internationales par le groupe de contact, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Plus, au loin au cours de l'interrogatoire, parce que cet
25 interrogatoire a duré plusieurs jours, on vous interroge, le 22 février
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1 2002. Excusez-moi un instant. En page 4, du compte rendu, vous dites : "En
2 ce qui concerne cette affaire, elle a été abordée en rapport avec le plan
3 établi par le groupe de contact. C'est à ce moment-là que j'ai entendu
4 Biljana Plavsic dire ce que deviendrait la Krajina de Bosnie, la Républika
5 Srpska, qui aurait une sortie sur la mer dans la zone des falaises de
6 Konavle." "Les falaises se trouvent au sud de Dubrovnik en direction du
7 Monténégro. On vous demande quant a-t-elle dit cela ? Quand avez-vous
8 entendu cela ? Vous répondez : "En 1995, lorsque le plan du groupe de
9 contact a été débattu, mais ce n'était pas la réalité du plan du groupe de
10 contact. C'était leur idée qui se tenait à Pale." Mais où a-t-elle dit cela
11 et étiez-vous présent ?" Réponse de votre part : "Elle l'a dit en public, à
12 un certains moments au cours de congés de l'été.
13 Je cite quelques lignes du compte rendu d'audience, Mme Hildegard Uertz-
14 Retzlaff vous pose la question suivante, je cite : "L'objectif,
15 connaissiez-vous l'objectif poursuivi par rapport à Sarajevo ? Est-ce que
16 vous l'avez appris ?" Vous répondez : "Je ne sais pas, mais il parlait
17 toujours de la Sarajevo serbe. Il parlait de Sarajevo, en tout cas, d'une
18 partie de Sarajevo qui serait serbe, ou d'une partie de Sarajevo où il
19 construirait une nouvelle Sarajevo ou quelque chose de ce genre. C'est ce
20 que j'ai entendu au cours de l'hiver 1995 de leurs bouches lorsqu'ils ont
21 parlé de la façon dont ils construiraient une nouvelle Sarajevo."
22 Question : "Lorsque vous dites 'ils', de qui parlez-vous ? Avec qui
23 parliez-vous ?" Vous répondez : "Je pense que c'était principalement
24 Krajisnik qui s'exprimait sur ce sujet."
25 On vous demande : "En public ou dans des conversations avec vous." Vous
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1 répondez : "Et bien, nous participions à des manifestations mondaines.
2 C'était un dîner. Je l'ai entendu dire une chose ou deux dont il était très
3 convaincu, et dont il a essayé de me convaincre. Je n'ai pas compris de
4 quoi il parlait, et il a dit : 'Nous n'avons pas besoin de Sarajevo.
5 Belgrade nous suffit.' Je n'ai pas très bien compris. Il parlait d'une part
6 de la nouvelle Sarajevo et, ensuite, disait de ne pas avoir besoin de
7 Sarajevo, et que Belgrade leur suffisait."
8 On vous demande, ensuite : "Qui a dit cela ?" Vous répondez : "Krajisnik --
9 Momcilo Krajisnik." On vous demande : "Où cette conversation a-t-elle eu
10 lieu ?" Vous répondez : "A Pale, dans un hôtel au début de 1995."
11 Monsieur Babic, je vous demande, si vous pouvez confirmer ce que vous avez
12 dit lors de cet interrogatoire aujourd'hui, au cours de ce dîner,
13 apparemment, vous ne compreniez pas du tout ce que M. Krajisnik vous
14 disait.
15 R. Je comprenais très bien. J'avais eu des renseignements antérieurs de la
16 part de M. Krajisnik que j'avais reçu de Buha le 20 novembre 1994, c'est-à-
17 dire, un mois un mois et demi avant cette rencontre. Donc je connaissais
18 très bien le comportement et les opinions de M. Krajisnik au sujet de la
19 division du territoire et des déplacements des populations que cette
20 division entraînerait. Mais là, il jouait un petit jeu, je ne voudrais pas
21 être vulgaire, mais il essayait de tourner autour du pot, et de présenter
22 ses avis de façon différente en faisant semblant de certaines choses que
23 j'avais du mal à comprendre. Bien sûr, je savais qu'il était question de
24 Sarajevo. Il avait dit que les Serbes avaient Belgrade et qu'ils n'avaient
25 pas besoin de Sarajevo, mais je sais que, plus tard, les Serbes de Bosnie
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1 ont accusé Milosevic d'avoir vendu, bradé Sarajevo. Voilà à peu près de
2 quoi il était question dans ces phrases contournées.
3 Q. Mais, si vous compreniez assez clairement ce que M. Krajisnik vous
4 disait au cours de ce dîner, pourquoi est-ce qu'en répondant aux questions
5 qui vous étaient posées au cours de cet interrogatoire, vous avez dit de ne
6 pas très bien comprendre ?
7 R. Je n'ai pas tout dit au cours de cet entretien. C'est ce que j'ai déjà
8 dit. Je l'ai dit aux enquêteurs.
9 Leurs questions étaient posées ainsi. Ils sautaient d'un sujet à l'autre,
10 peut-être que je n'ai pas toujours eu l'occasion de leur donner l'ensemble,
11 l'image. Avec la permission de la Chambre, je souhaite ajouter quelques
12 mots pour clarifier ce qu'il en était de cette réunion et pour ajouter plus
13 d'éléments concernant ce que disait Krajisnik.
14 Q. Vous pourriez peut-être, je ne --
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Peut-être --
16 M. STEWART : [interprétation] Il revient à la Chambre de se prononcer.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisque le témoin nous propose d'ajouter
18 quelque chose au sujet de ce que disait Krajisnik. C'est important et il ne
19 s'agit pas là d'une opinion ou de ses propres conclusions.
20 Allez-y, Monsieur Babic.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, je vais vous dire quelque chose
22 au sujet de ce que je savais à propos de M. Krajisnik. Le 20 novembre 1994,
23 à M. Aleksa Buha, qui était à l'époque le ministre des affaires Extérieures
24 de la Républika Srspka, il a dit quelque chose concernant une réunion entre
25 Krajisnik et Karadzic avec le représentant du gouvernement croate portant
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1 sur le partage de la Bosnie-Herzégovine et le déplacement de la population.
2 Après cela, c'était ma réunion à Pale. Je savais très exactement ce dont
3 parlait Krajisnik.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, la question était de
5 savoir si vous pouviez dire quelque chose de plus au sujet de ce que disait
6 M. Krajisnik lors de cette réunion. Je vous ai donné la permission de
7 parler de cela concrètement. Veuillez poursuivre.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous dire ce que j'ai déjà entamé
9 avant au cours de ma déposition devant cette Chambre.
10 M. Krajisnik et moi, nous avons parlé des sujets différents, des événements
11 en Bosnie, de leurs pourparlers et cetera. Ensuite, je vais répéter ce que
12 j'ai déjà dit. Il a fait son discours sur Sarajevo. Il disait que les
13 groupes ethniques avaient toujours été divisés, chacun vivait dans sa
14 partie de la ville, qu'ils avaient maintenu leur Sarajevo serbe, mais qu'il
15 était prêt à renoncer à cette partie serbe de Sarajevo car les Serbes
16 devaient avoir une seule capitale, à savoir, Belgrade. C'était son
17 introduction à l'élément principal de son intervention d'après la manière
18 dont je comprenais les choses. Il voulait dire que, lui, qui était de
19 Sarajevo, s'il ne regrettait pas relançait au Sarajevo serbe, je devais
20 être prêt à renoncer à la Krajina serbe car, dans le contexte des
21 pourparlers avec le groupe de contact, il a dit que les Américains étaient
22 prêts à leur donner 6 % de territoire de plus contre la Krajina. Ce sont
23 les détails de cette conversation.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que vous avez déjà dit
25 cela. Poursuivez, Maître Stewart.
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1 M. STEWART : [interprétation]
2 Q. Vous parlez d'une contradiction. Vous en avez parlé dans votre
3 entretien. Il s'agit, n'est-ce pas, d'une contradiction entre l'idée de
4 renoncer totalement à Sarajevo tout en essayant de construire une nouvelle
5 Sarajevo; est-ce exact ?
6 R. Oui. Pas seulement cela, mais ce que j'ai appris par la suite, à savoir
7 qu'ils accusaient Milosevic d'avoir bradé Sarajevo alors qu'avant les
8 accords de Dayton, cela veut dire un an avant, j'ai entendu de la bouche de
9 Krajisnik qu'ils étaient prêts à renoncer à Sarajevo. Ce sont les deux
10 contradictions que j'ai relevées. Je parlais surtout de cela, de cette
11 accusation contre Milosevic pour avoir bradé Sarajevo à Dayton.
12 Q. Oui. Monsieur Babic, voici ce que je pense de la position de Krajisnik
13 : à l'époque -- il y avait environ 180 000 Serbes vivant à Sarajevo à
14 l'époque. Est-ce que c'est conforme à vos connaissances ?
15 R. Je ne peux pas parler des chiffres, mais je sais qu'il y avait un grand
16 pourcentage de Serbes qui vivaient à Sarajevo. Je sais qu'aucun groupe
17 ethnique n'était majoritaire à Sarajevo. Il y avait un grand pourcentage de
18 Serbes à Sarajevo, oui.
19 Q. Très bien. Il dit également qu'en 1995, M. Krajisnik n'allait
20 certainement pas sérieusement prendre en considération la possibilité de
21 renoncer vraiment à cette population de Sarajevo contre un pourcentage de 6
22 % de la Bosnie-Herzégovine. C'est ce que dit M. Krajisnik. Est-ce que vous
23 considérez que ceci est conforme à la réalité, ou est-ce que vous contestez
24 cela, Monsieur Babic ?
25 R. Je maintiens ce que j'ai dit déjà au sujet de l'attitude de Krajisnik
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1 qui l'a exprimé en janvier 1995. Ceci va à l'encontre de ce que vous venez
2 de dire. Il n'est pas vrai de dire qu'il souhaitait recevoir 6 % de
3 territoire de plus contre Sarajevo, mais contre la SAO Krajina qui faisait
4 partie, à l'époque, de la Krajina serbe et contre la Slavonie occidentale.
5 C'est de cela qu'il s'agissait. C'était l'échange qu'il proposait, 6 % du
6 territoire de Bosnie-Herzégovine contre la SAO Krajina et la Slavonie
7 occidentale. Sarajevo venait en plus de tout cela.
8 Q. Pour que les choses soient claires, vous dites qu'il a dit les deux. Il
9 considérait qu'il fallait renoncer à la fois à la Krajina et à Sarajevo. Je
10 pense que c'est tout à fait clair que c'est ce que vous avez dit. Monsieur
11 Babic, il n'y a aucune raison pour laquelle M. Krajisnik, même si c'est ce
12 qu'il pensait à l'époque, et nous considérons que ce n'est pas vrai, il n'y
13 a aucune raison pour laquelle M. Krajisnik aurait partagé cela avec vous,
14 n'est-ce pas ?
15 R. Mais si, puisqu'il souhaitait dire justement ce que vous venez de dire.
16 Il y avait 180 000 Serbes à Sarajevo. C'était sa ville natale qui comptait
17 pour beaucoup pour lui. Il voulait dire que c'était un vrai sacrifice
18 personnel, qu'il était prêt à faire ce sacrifice, mais que, moi aussi, je
19 devais sacrifier quelque chose en renonçant à ma SAO Krajina. C'était le
20 contexte dans lequel il a dit cela. Il était tout à fait clair ce qu'il
21 souhaitait dire.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, je souhaite poser une
23 question afin de mieux comprendre la déposition de ce témoin.
24 Monsieur Babic, lorsque vous dites : "renoncer à Sarajevo", comment avez-
25 vous compris cela, à l'époque ? Renoncer à une partie contrôlée par les
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1 Serbes, à l'époque, c'était une partie de Sarajevo, ou renoncer à tous les
2 souhaits visant à faire de Sarajevo la capitale des Serbes ? Comment avez-
3 vous compris cela ? Qu'est-ce qu'il voulait dire, à votre avis, lorsqu'il a
4 dit, "renoncer à Sarajevo" ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est justement ce que vous venez de dire,
6 renoncer à la partie de Sarajevo qu'ils contrôlaient, à l'époque.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de cette clarification.
8 Poursuivez, Maître Stewart.
9 M. STEWART : [interprétation]
10 Q. Est-ce que peut-être c'est vous qui avez fait cette suggestion à M.
11 Krajisnik plutôt que lui ?
12 R. Non, Dieu me garde.
13 Q. Je vais vous poser une question, un autre sujet. Vers la fin de l'année
14 1991, là je parle vraiment de la fin 1991 et début 1992, est-ce qu'à votre
15 avis, vous œuvriez pour la paix ? Est-ce que vous considériez que c'était
16 le cas à l'époque ? Est-ce que c'est ce que vous considérez aujourd'hui ?
17 R. J'ai dit ce que j'étais à l'époque. A l'époque, j'étais un égoïste
18 ethnique serbe. Je ne souhaitais pas la guerre. Dans ce sens j'oeuvrais
19 pour la paix. En même temps, j'étais préoccupé pour le sort des Serbes de
20 la SAO Krajina.
21 Q. Est-ce qu'il est exact de dire que vos préoccupations allaient de pair
22 avec la volonté d'entamer des opérations militaires nécessaires dans votre
23 Krajina ?
24 R. Si vous parlez de la fin 1991 et début 1992, à ce moment-là, il n'y
25 avait pratiquement plus d'opération militaire à Krajina. En ce qui concerne
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1 les opérations militaires qui ont eu lieu avant, j'en ai parlé beaucoup
2 lors du procès contre Milosevic et devant cette Chambre également.
3 D'ailleurs, certaines choses à ce sujet ont été également présentées dans
4 mon procès.
5 Q. En particulier, est-ce que vous vous souvenez avoir donné un ordre
6 militaire le 26 décembre 1991 visant à élever le niveau d'aptitude au
7 combat de vos forces en vue d'une action contre Zagreb ?
8 R. Je me souviens de cela. Ce document s'est présenté et, si mes souvenirs
9 sont bons, je pense que j'ai fourni une explication. C'est un document qui
10 m'a été imposé. C'était un coup monté. Il fallait que je le signe pour me
11 compromettre sur le plan politique. Il n'y avait pas de déplacement de
12 canons ou d'autre équipement.
13 M. STEWART : [interprétation] Je vais vous montrer ce document. Nous en
14 avons des exemplaires. Il n'est pas nécessaire de soumettre au témoin le
15 document en anglais, puisque j'ai également l'original.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle sera la cote ?
17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D16.
18 M. STEWART : [interprétation] J'ai une traduction anglaise, Monsieur Babic.
19 Il s'agit d'un document très bref. Puisque le document n'est pas complet,
20 puisqu'il existe plusieurs points d'interrogation et certaines parties qui
21 manquent dans la version en anglais, peut-être le plus facile serait que
22 vous lisiez le texte pour qu'on l'ait en interprétation en anglais.
23 L'INTERPRÈTE : La cabine française ne possède pas le document.
24 M. STEWART : [interprétation] Oui, il s'agit d'un document bref. On me dit
25 que les interprètes ont le document. La cabine française possède le
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1 document.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'un document tout à fait
3 bref. Maître Stewart, je suppose que nous allons nous limiter au contenu,
4 ou est-ce que vous souhaitez lire tout ce qui a été dit au sujet de cela,
5 l'entête, et cetera ?
6 M. STEWART : [interprétation] Il n'est pas nécessaire de lire l'entête, à
7 moins que la Chambre le souhaite, mais le document --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il vous plaît, commencez la lecture
9 avec les mots -- (ces mots disant en B/C/S).
10 LE TÉMOIN : [interprétation] "Au commandement de la 3e Zone opérationnelle.
11 Un, procéder au déplacement de la batterie VP, de 130 millimètres dans la
12 région vaste de S. Madjeri, S. Gradac, Gosh Sredicko, en état d'aptitude à
13 agir contre la cible (Zagreb). X égale 74800. Y égale 76000. Z égale 180.
14 Aptitude à agir le 27/12 à midi. Consommation des munitions 0,5 b/k.
15 Informez-moi de l'état du niveau d'aptitude à 11 heures. Le commandant des
16 forces armées de la Republika Srpska, le Dr Milan Babic."
17 M. STEWART : [interprétation]
18 Q. Monsieur Babic, cela ne fait aucun doute, n'est-ce pas, que vous avez
19 signé ce document; est-ce exact ?
20 R. Oui.
21 Q. Vous étiez, à l'époque, le commandant des forces armées de la
22 République de la Krajina serbe, n'est-ce pas ?
23 R. D'après la constitution, oui. J'étais le président de la République.
24 Q. Ce document a été signé soit le 26 septembre [comme interprété] ou
25 presque, n'est-ce pas ?
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1 R. La date qui figure est celle du 26 décembre 1991.
2 Q. Il n'y a pas de raison de douter de l'exactitude de cette date, n'est-
3 ce pas ?
4 R. Oui, à l'époque, j'étais le président de la République.
5 Le 19 décembre, je suis devenu président de la République.
6 Q. Avez-vous compris ce que vous étiez en train de signer ? C'est exact ?
7 R. Je ne me souviens pas bien.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question n'est pas de savoir si vous
9 vous en souvenez, mais la question est de savoir si vous avez compris ce
10 que vous avez signé, à savoir si vous lisez ce genre de document, est-ce
11 que vous comprenez son contenu ? Bien sûr, si aujourd'hui vous vous
12 souvenez très exactement de ce que vous avez compris à l'époque où vous
13 l'avez signé, c'est peut-être un détail supplémentaire.
14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous
15 pouvons poser des questions phase par phase.
16 Q. Vous n'avez pas de problèmes de compréhension à l'égard de ce document,
17 n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Vous n'auriez pas eu de difficulté de compréhension s'agissant de ce
20 document en décembre 1991, si vous l'avez vu à l'époque ?
21 R. Comme je vous l'ai déjà dit, je ne me souviens pas maintenant de son
22 contenu, mais je suppose que oui. Cela dit, mes souvenirs ne sont pas
23 clairs, mais je peux répondre par oui. Cela dit, je ne me souviens pas de
24 cet événement.
25 Q. Est-ce que vous vous souvenez, ou est-ce que vous pouvez nous dire qui
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1 vous aurait proposé à signer ce document ?
2 R. Je pense que ceci faisait partie d'une liasse de documents émanant de
3 l'état-major. Je pense que c'est le colonel Maksic qui me l'a apporté pour
4 que je le signe.
5 Q. Pour être tout à fait clair au sujet de ce que vous dites, est-ce que
6 vous essayez de suggérer de manière implicite que cet ordre vous a été
7 soumis sans que vous n'ayez pu vraiment et clairement comprendre ce que
8 vous étiez en train d'autoriser ?
9 R. Oui.
10 Q. Je veux vous poser une question à un sujet, Monsieur Babic, au sujet de
11 quelque chose que vous avez dit à propos de Kijevo. Jeudi de la semaine
12 dernière, c'est-à-dire, le 3 juin, à la page 35, du compte rendu d'audience
13 non corrigé, vous avez parlé à la ligne 6 d'un ultimatum imposé aux
14 citoyens, aux habitants de Kijevo, qu'ils devaient partir, je vous cite :
15 "Avant le barrage d'artillerie, les force de partir"; est-ce exact ?
16 C'était la question. Vous avez dit : "Oui. Au début, c'est Martic qui a
17 imposé cet ultimatum quelques jours avant l'attaque de l'artillerie de la
18 JNA. Personnellement, je me suis opposé à cela, mais j'étais le président
19 de la municipalité et le premier ministre du gouvernement. Cependant,
20 malgré mes protestations, au bout de dix jours à peu près, l'attaque de la
21 JNA a commencé. Après cela, j'ai reçu une information que la police, les
22 hommes de Martic et la Défense territoriale locale ont participé à cette
23 attaque."
24 Tout d'abord, penchons-nous sur cet ultimatum ?
25 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je suis en train de
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1 présenter deux documents, à savoir, un exemplaire de la version en B/C/S
2 sur un seul papier et la traduction en anglais.
3 Q. Est-ce que vous souhaitez vous rafraîchir la mémoire, Monsieur Babic,
4 en lisant la version en B/C/S.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, est-ce que la cote
6 de l'original sera D17 et de la traduction D17.1 ?
7 M. STEWART : [interprétation]
8 Q. Monsieur Babic, est-ce que vous avez eu l'occasion de lire ce
9 document ?
10 R. Oui.
11 Q. On vous a posé cette question le 13 janvier 2002, lorsque vous avez été
12 interrogé. Ceci figure à la page 15 de la première transcription de
13 l'entretien de ce jour. En fait, cela commence à la page 14, ligne 20 : "En
14 ce qui concerne Kijevo, par la suite, j'ai entendu dire qu'à la fois
15 l'armée et la police de la Krajina avaient des informations qu'un poste de
16 police allait être établi à Kijevo par le ministère de l'Intérieur de la
17 Croatie." Cela, c'était en avril 1991. J'ajoute simplement l'année. "Donc
18 la JNA était déjà déployée autour de Kijevo, et je suppose que Martic
19 savait cela puisqu'il était en contact avec les renseignements militaires.
20 Je ne pense pas qu'ils ne l'avaient pas informé de cela et je ne pense pas
21 qu'ils ont empêché, de quelque manière que ce soit, l'administration -- la
22 direction de la police de Sibenik dans leurs efforts visant à constituer un
23 poste de police à Kijevo, et ce poste de police existait depuis plusieurs
24 mois. Au bout de quelques mois, Martic a imposé un ultimatum disant qu'ils
25 devaient se retirer de Kijevo. C'était un ultimatum qui a été rendu de
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1 manière publique. Je ne me souviens pas très exactement ce qui a été publié
2 -- quel était le contenu de cet ultimatum, mais je pense que cet ultimatum
3 portait sur tout le monde à Kijevo. D'après la manière dont je vois les
4 choses, il a menacé l'ensemble de la population de Kijevo. J'ai constaté
5 qu'il s'agissait là, non pas seulement d'une action coordonnée entre la
6 police et les autres, d'après la manière je comprenais les choses, mais je
7 considérais que ceci risquerait de provoquer un conflit interne au sein de
8 la Krajina. A ce moment-là, j'ai fait une déclaration publique disant que
9 les forces armées de la Krajina, malgré cet ultimatum de Martic à
10 l'encontre du poste de police de Kijevo, les forces armées de Krajina ne
11 devaient pas violer le cessez-le-feu puisqu'un accord avait déjà été passé
12 entre les organes fédéraux et les organes croates, donc cet accord était ce
13 qui était le plus important à l'époque. Il s'agissait là d'une forme dans
14 laquelle j'exprimais mon opposition."
15 Après, d'autres choses ont été dites et vous continuez : "Donc je risquais
16 de faire l'objet des attaques contre ma personne. Je risquais cela auprès
17 du public et auprès des personnes qui portaient des armes en Krajina. Ils
18 allaient s'opposer à moi. Mais, malgré cela, j'ai fait cette déclaration
19 publique puisque je pensais qu'il y avait moins de risque si quelqu'un
20 s'attaquait contre moi plutôt que de provoquer un vrai conflit."
21 Ensuite, Mme Retzlaff vous a demande : "Pourquoi n'avez-vous pas donné un
22 ordre à Martic puisque vous étiez le président ? Pourquoi n'avez-vous pas
23 fait cela ?" Vous avez dit : "Et bien, cela ne marchait pas comme cela.
24 Cela ne fonctionnait pas cela. C'était cela le problème. Je ne pouvais pas
25 lui donner des ordres. J'étais le président du gouvernement. Le premier
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1 ministre et, lui, en tant que ministre, était responsable devant moi, mais
2 cela, c'était sur le plan formel et juridique. Mais je n'avais pas
3 suffisamment de pouvoir. C'est lui qui l'avait. J'avais seulement le
4 pouvoir sur le papier. Lui, il contrôlait les forces armées, la police
5 armée, la police spéciale. Il avait le monopole du pouvoir."
6 On vous a posé la question suivante : "D'accord, je comprends, mais est-ce
7 que vous avez essayé ?" Votre réponse : "J'ai essayé, par le biais de
8 certains manœuvres politiques, de le limiter."
9 Question : "Est-ce que vous avez directement essayé d'empêcher Martic dans
10 cela ?" Vous dites : "Je en l'ai pas dit parce qu'à l'époque, je ne le
11 pouvais pas."
12 Ensuite, l'entretien se poursuit : "J'ai été conscient que cela ne relevait
13 pas de lui seulement."
14 Question : "Mais si vous n'avez jamais essayé de le faire, comment vous
15 savez qu'il n'aurait pas obéi ?" "Et bien, il s'agissait" -- vous dites
16 dans votre réponse -- "d'une communication publique." Cela, c'était plus
17 puissant. Ici, je me suis adressé au public -- à l'opinion publique pour
18 recevoir de l'aide, et je me disais que cela risquait de l'influencer.
19 C'est ainsi que l'on a eu cet échange. Mais nous n'avons jamais parlé de
20 cela entre nous. Physiquement, il était ailleurs."
21 Mme Uertz-Retzlaff : "Est-ce que -- vous dites que vous n'aviez pas de
22 pouvoir. Est-ce que vous avez essayé d'empêcher Martic par le biais de
23 Milosevic, qui était le chef, en ce qui concerne le conflit à Kijevo ?"
24 Vous dites : "Non. Je n'ai pas parlé à qui que ce soit."
25 Mme Uertz-Retzlaff : "Mais pourquoi ?" Vous dites : "J'ai supposé qu'il
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1 n'allait pas risquer cela. Je me suis dit qu'il n'allait pas risquer un
2 conflit en Krajina puisque notre position politique était de ne pas entrer
3 dans un conflit."
4 Mme Uertz-Retzlaff : "Lorsque vous dites 'il', vous parlez de qui ? Vous :
5 "Martic ou la police ?"
6 Monsieur Babic, deux fois, au cours des 10 -- 15 dernières minutes, vous
7 avez dit qu'apparemment, vous avez protesté publiquement concernant
8 certaines actions; est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?
9 R. Est-ce que vous parlez de la déclaration que j'ai faite aux enquêteurs
10 à Belgrade ?
11 Q. Soyons très concrets. Par exemple, vous dites, dans votre déclaration,
12 que Martic était ailleurs physiquement. Est-ce que quelqu'un vous a suggéré
13 cela ? Est-ce que vous avez essayé de dire que c'est pour cela que vous
14 n'avez même pas essayé de l'empêcher, que vous ne lui avez pas donné
15 d'ordre allant dans ce sens ?
16 R. Non, pas cela. J'ai mentionné déjà la raison. C'est lui qui détenait
17 vraiment le pouvoir. Mon pouvoir était seulement sur le papier. J'avais
18 l'opinion publique, mais le vrai pouvoir et la vraie structure qui le
19 protégeait, c'était Stanisic et Milosevic, et cela c'était tout. Eux, ils
20 le contrôlaient pratiquement.
21 Q. Monsieur Babic, je souhaiterais vous présenter un autre document. Vous
22 n'avez plus besoin du document que vous avez sous les yeux.
23 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit là de deux
24 documents -- deux séries de documents. Tout d'abord, il y a une lettre
25 ouverte rédigée par M. Milosevic et adressée à Monsieur Babic. Il s'agit
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1 juste d'une lettre ouverte, elle est datée du 8 janvier 1992.
2 Le deuxième document est une réponse à la lettre ouverte du président de la
3 République de Serbie, Slobodan Milosevic. Il s'agit d'une réponse de M.
4 Babic.
5 Je souhaiterais tirer un point au clair, Monsieur le Président, si vous le
6 voulez bien.
7 Monsieur le Président, il s'agit là des traductions qui nous ont été
8 communiquées par l'Accusation.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dois-je comprendre que la lettre, datée
10 du 8 janvier, est présentée en deux versions : la première est la version
11 originale; la deuxième est une publication. En effet --
12 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il a été fait
13 mention en détails de cela dans la presse écrite.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'agit-il du même texte ?
15 M. STEWART : [interprétation] Oui, mais à toutes fins utiles, je pense
16 qu'il s'agit de la même chose.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
18 M. STEWART : [interprétation] M. Babic peut se référer aux versions
19 originales en B/C/S de ces deux documents.
20 Q. Monsieur Babic, est-ce que --
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je d'abord demander à Mme la
22 Greffière de bien vouloir nous donner les cotes de ce document ?
23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction D18.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit de la lettre du
25 8 janvier, rédigée par Slobodan Milosevic.
Page 3584
1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La réponse à la lettre ouverte portera
2 la cote D19.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière. Je souhaite
4 souligner que, dans les deux cas, nous semblons disposer de l'original et
5 de la version publiée de cette même lettre.
6 Veuillez poursuivre, Maître Stewart.
7 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Q. Je ne peux pas aller très vite, je dois tenir compte des interprètes,
9 Monsieur Babic. La lettre ouverte de M. Milosevic, qui vous a été adressée,
10 se lit comme suite, je cite : "Je pense qu'il est de mon obligation et de
11 ma responsabilité d'exprimer mon désaccord avec votre position selon
12 laquelle vous ne voulez pas que les forces de maintien de la paix des
13 Nations Unies protégent le territoire de la Krajina conformément au plan
14 Cyrus Vance. Le fait de rejeter la protection des forces de maintien de la
15 paix des Nations Unies met en danger les intérêts vitaux du peuple serbe
16 car cela signifie que vous refusez, ainsi de mettre fin immédiatement à la
17 perte de vies humaines et à abandonner le chemin de la paix dans la
18 recherche d'une solution à la crise. Le seul objectif de la présence des
19 Nations Unies est de maintenir la paix.
20 "Je sais que vous avez été informé en détails à la présidence yougoslave du
21 plan Cyrus Vance qui précise que la présence des forces de maintien de la
22 paix des Nations Unies n'empêche pas une solution politique et que leur
23 objectif est d'empêcher toute formation militaire ou groupes armées
24 d'entrer sur les territoires protégés par les Nations Unies. Vous avez
25 également été informé que la seule formation armée sur ces territoires
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1 outre les forces de maintien de la paix seraient la police locale qui
2 garantirait complètement la paix et la sécurité de tous les citoyens.
3 "Je considère que votre attitude négative est tout à fait irresponsable.
4 Vous devriez savoir que la population a fait des sacrifices afin
5 d'échapper, de se protéger du génocide et ait fin des sacrifices afin de
6 protéger leur liberté et leur sécurité mais ils ne devraient pas faire de
7 sacrifices en raison de la vanité de leurs hommes politiques. Si les
8 combats étaient menés dans un objectif juste et honorable, la liberté et la
9 sécurité de la population en Krajina et leur protection à l'encontre du
10 génocide qui les menace cela ne pourrait pas -- on ne peut pas être contre
11 une mesure décisive visant à atteindre ce but."
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, avez-vous l'intention de
13 lire l'intégralité de ce texte ?
14 M. STEWART : [interprétation] Je ne souhaite pas particulièrement le faire,
15 mais, d'un autre côté, je souhaiterais être équitable à l'égard du témoin.
16 Mais je m'en remets à la Chambre. Je souhaite simplement être équitable
17 vis-à-vis du témoin avant d'entendre sa réponse à ce sujet.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais, si l'on suppose que le
19 contre-interrogatoire ne sera pas conclu avant la prochaine pause, je
20 souhaiterais inviter le témoin à lire ou à relire ce document car il l'a
21 peut-être déjà lu auparavant et peut-être pourriez-vous nous dire
22 brièvement sur quoi porte cette correspondance ? Ensuite, pourriez-vous
23 poser des questions au témoin après la pause sur cette question ?
24 M. STEWART : [interprétation] Il ne me reste pas beaucoup de texte à lire.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais, si vous lisez l'intégralité
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1 de ces deux lettres, cela nous prendra beaucoup de temps, notamment, si
2 vous lisez aussi lentement que vous l'avez fait ici jusqu'à présent, ce qui
3 est très apprécié d'ailleurs. La deuxième pause pourrait être prise plus
4 tôt ou plus tard que prévu. Nous pouvons même la prendre maintenant.
5 Ensuite, nous pourrions demander au témoin de profiter de cette pause pour
6 lire le document. Vous poserez quelques questions au sujet de cette
7 correspondance, ensuite, afin de savoir si M. Milosevic critique M. Babic
8 sur sa position au sujet du plan Cyrus Vance et, ensuite, vous pourrez
9 poser vos questions.
10 M. STEWART : [interprétation] Très bien. Mais il ne me reste pas beaucoup
11 de documents à lire, mais il serait, sans doute, pratique de procéder
12 ainsi.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
14 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit d'une possibilité.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Très bien. Nous allons prendre une
16 autre pause et nous reprendrons à 1 heure moins 25. Il nous restera,
17 ensuite, 70 minutes d'audience. Nous allons faire une pause de 20 minutes
18 et nous reprendrons à une heure moins 25.
19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 13.
20 --- L'audience est reprise à 12 heures 39.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, veuillez faire
22 entrer Me Mueller par une porte pendant que M. Babic rentrera dans le
23 prétoire par l'autre.
24 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Monsieur Babic.
Page 3587
1 Maître Stewart, vous pouvez procéder.
2 M. STEWART : [interprétation]
3 Q. Monsieur Babic, vous avez eu la possibilité pendant la pause je
4 suppose, de lire ces deux lettres, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. J'aimerais vous demander une confirmation. La lettre que M. Milosevic
7 vous a envoyée, était une lettre ouverte, n'est-ce pas ? Je vous demande si
8 votre réponse, que vous lui avez adressée, était également une lettre
9 ouverte et susceptible d'être publiée ?
10 R. La lettre de Milosevic a été diffusée le 8 à la télévision et le 9 dans
11 les journaux, et elle m'est parvenue sous pli scellé deux ou trois jours
12 plus tard avant que je ne réponde. J'en ai eu connaissance par la voix
13 publique et par la voix privée.
14 Q. Oui. Monsieur Babic, quand je vous pose une question --
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, je vous demanderais
16 d'écouter attentivement les questions qui vous sont posées. La question
17 consistait à vous demander si la réponse que vous avez envoyée, vous aviez
18 l'intention qu'elle soit publiée, et vous avez répondu au sujet de la
19 lettre de M. Milosevic, que vous l'avez reçue après sa publication. Mais la
20 question qu'on vous posait, en fait, consistait à vous demander si vous
21 aviez l'intention que votre réponse soit publiée.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bien sûr.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Maître Stewart.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi.
25 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci, Monsieur
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1 Babic.
2 Q. Monsieur Babic, un aspect particulier sur lequel j'aimerais que nous
3 passions rapidement de façon à éviter toute répétition. Voyez ce qui figure
4 au quatrième paragraphe de votre lettre dans lequel vous faites valoir
5 votre objection au fait que le système constitutionnel et juridique de la
6 Croatie s'est appliqué à la République Serbe de Krajina. Plus loin dans ce
7 même paragraphe, quelques lignes plus bas, vous dites également être opposé
8 au délai prévu de six mois. Au milieu de la deuxième page, au milieu du
9 paragraphe court qui se trouve à cet endroit, vous dites : "Que compte tenu
10 du fait qu'après le départ des forces des Nations Unies, toute action de la
11 part de l'armée yougoslave, si elle se déroulait dans ces conditions,
12 serait considérée comme agression." Bien sûr, là il est question d'une
13 période où la JNA se serait déjà retirée.
14 Conviendrez-vous avec moi que ces quelques passages, qui figurent dans la
15 lettre, englobent finalement les points principaux de désaccord que vous
16 aviez au sujet du plan, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Au bas de la première page, vous présentez votre proposition, qui est
19 une autre solution, impliquant le recours aux Casques bleus, à déployer sur
20 la ligne de tirs, et vous dites : "Que les agresseurs néo-nazi croates, et
21 vous parlez des agresseurs néo-nazi croates et des forces armées assurant
22 la défense pour la République serbe de Krajina."
23 Est-ce que vous considériez qu'il était utile de vous exprimer ainsi dans
24 une lettre envisagée pour publication ? Est-ce que vous considériez utile
25 de parler de l'agresseur néo-nazi croate ?
Page 3589
1 R. Oui. A l'époque, c'était la terminologie en vigueur qui rendait compte
2 de l'état d'esprit qui prévalait à l'époque, d'un état psychique. On
3 retrouve cela dans le vocabulaire utilisé.
4 Q. De même au dernier paragraphe de votre lettre, vous parlez de "la
5 racine du mal que les Oustachi croates nous ont infligée." Est-ce que vous
6 ferez la même observation au sujet de l'emploi de ces termes ? Parlerez-
7 vous du vocabulaire qui avait cours à l'époque et qui rendait compte de vos
8 sentiments de l'époque ?
9 R. Oui.
10 Q. N'est-il pas exact que ce langage incendiaire avait pour but de
11 satisfaire votre peuple, à savoir, les habitants de la Krajina, que vous
12 dirigiez.
13 R. Non, ce n'est pas cela l'important. C'était, en fait, l'expression de
14 mon sentiment personnel, de ma façon de percevoir la situation. Je suis
15 d'accord avec vous si vous dites que ce vocabulaire a eu l'effet négatif
16 évoqué par vous.
17 Q. Premier paragraphe complet que l'on trouve en page 2, nous lisons ce
18 qui suit : "S'agissant de la durée de la mission de la maintien de la paix
19 qui ne devrait durer que six mois, nous ne sommes pas prêts à désarmer,
20 nous ne sommes pas prêts à laisser notre destin dans les mains incertaines
21 de tiers." Est-il permis de résumer ce propos comme signifiant : nous
22 poursuivrons les combats ?
23 R. Non. Nous ne sommes pas d'accord. Nous continuerons à nous battre.
24 Peut-être. Enfin, je vais relire ce passage tout de même pour voir
25 exactement ce qui est écrit.
Page 3590
1 Q. Vous n'êtes pas d'accord. D'accord. En bas de la première page de votre
2 lettre, on trouve votre proposition qui est une autre proposition dont je
3 viens de parler. Il est question de déployer les Casques bleus sur la ligne
4 de confrontation, et cetera. A cette époque, n'est-ce pas, Monsieur Babic,
5 cette proposition était absolument irréaliste et il n'y avait absolument
6 pas la moindre chance, concrètement, qu'elle soit acceptée par les parties
7 opposantes ?
8 R. Je ne suis pas d'accord. C'était une première proposition que Borisav
9 Jovic avait évoquée d'ailleurs, après avoir demandé aux Nations Unies de
10 s'engager. C'était la première version dont j'ai eu connaissance y compris
11 avant la signature de la deuxième version du texte par Milosevic et
12 Kadijevic. Le 27 janvier, Marek Goulding, sous-secrétaire chargé des
13 questions du maintien de la paix était à Belgrade. M. Goulding, ce
14 secrétaire chargé des opérations de paix, a ouvert la possibilité que l'on
15 discute de diverses solutions. Excusez-moi, vous parliez de la lettre et je
16 suis en train de parler d'une réunion. Excusez-moi. Je suis passé à des
17 événements ultérieurs dans mes pensées.
18 Je vais répondre à votre question. La possibilité que ce déploiement
19 particulier des forces de paix se réalise existait, car on demandait
20 l'accord de la Krajina par rapport au plan. Autrement dit, à ce moment-là,
21 on nous a demandé ce que nous pensions, et j'ai considéré que cette autre
22 proposition avait une possibilité de réalisation. Ensuite, est arrivé ce
23 que j'avais dit tout à l'heure c'est-à-dire que ce sous-secrétaire, chargé
24 des opérations de paix, Marek Goulding, est arrivé, et il a été question de
25 cela au cours de la réunion. Il y a la réunion de la présidence, et cetera.
Page 3591
1 Q. Monsieur Babic, la réalité c'est qu'il n'y avait pas la moindre chance
2 que M. Tudjman appose sa signature sur votre proposition de rechange,
3 n'est-ce pas ?
4 R. A ce moment-là, il était clair que Milosevic ne souhaitait pas changer
5 les bases de son accord avec Tudjman. En tout cas, c'est ce que j'ai
6 compris. Tudjman disait également que le gouvernement croate allait
7 immédiatement imposer son contrôle sur les municipalités serbes de Krajina,
8 et cetera. Notre réaction, d'ailleurs, c'est écrit dans cette lettre, entre
9 autres choses, a consisté à dire que nous n'acceptions la loi croate sur
10 notre territoire. Après quoi, il y a eu envoi d'une proposition au
11 secrétaire général du conseil de Sécurité, et le conseil de Sécurité s'est
12 réuni et a décidé que la loi croate ne s'appliquerait pas aux territoires
13 de la Krajina. Voilà, c'était le contexte dans lequel tout cela se passait.
14 Q. Vous avez encore une fois choisi de ne pas répondre à ma question,
15 Monsieur Babic. Mais je n'insisterai pas.
16 R. Excusez-moi. Veuillez répéter. Non, je vous en prie, répétez votre
17 question. Je n'ai aucune intention de ne pas répondre à votre question.
18 Peut-être me prêtez-vous cette intention.
19 Q. Monsieur Babic, n'argumentons pas. Je vais vous reposer la question.
20 Ecoutez-la attentivement, je vous prie. Je vous ai dit: Qu'il n'y avait
21 pas, n'est-ce pas, la moindre chance que M. Tudjman appose sa signature à
22 votre proposition, qui était une proposition de rechange ?
23 R. Ce projet de modification a été soumis par le conseil de Sécurité, donc
24 il a accepté cela. Autrement dit, il existait, y compris la possibilité que
25 M. Tudjman change d'avis et, d'ailleurs, il a changé d'avis.
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1 Q. Il a accepté votre proposition ?
2 R. Correction. Il a accepté un amendement au plan, un addendum au plan,
3 qui avait pour objet l'application des lois croates sur les territoires de
4 la Krajina.
5 Q. Le déploiement des Casques bleus sur la ligne de confrontation, dont
6 vous avez parlé dans votre lettre, il n'y avait aucune chance que M.
7 Tudjman accepte cela; est-ce exact ?
8 R. Moi, je considérais qu'une chance qu'il l'accepte existait. C'est la
9 raison pour laquelle nous en avons parlé. C'était un modèle qui avait été
10 appliqué à Chypre.
11 Q. J'aimerais, dans ces conditions, que vous examiniez à nouveau la lettre
12 que vous avez déjà examinée il y a quelques instants, la lettre du 19
13 décembre 1991, écrite par M. Krajisnik. C'est une pièce à conviction qui a
14 été versée au dossier dans le cadre de la déposition de M. Treanor. Il
15 s'agit de la pièce 65, qui fait partie du classeur numéro 6, page 67, des
16 documents versés au dossier par le truchement de M. Treanor. Le témoin a
17 eu ce document sous les yeux au cours de l'interrogatoire principal.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous en avez encore un
19 exemplaire, Maître Stewart, parce que nous ne gardons pas tous les
20 documents de ces classeurs. Il y en a 18.
21 M. STEWART : [interprétation] Non, non, bien sûr. Je comprends, Monsieur le
22 Président, mais c'est un document --
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends également. Mais, en
24 tout état de cause, peut-on placer ce document sur le rétroprojecteur ?
25 M. STEWART : [interprétation] Oui, c'est possible, Monsieur le Président.
Page 3593
1 Je crois qu'il s'agit de l'intercalaire 67. Je dirais simplement, Monsieur
2 le Président, que le responsable des photocopies a fait un travail héroïque
3 de reproduction documentaire. Notre problème permanent d'ailleurs, c'est
4 que nous avons découvert à notre arrivée ici ce matin que la photocopieuse,
5 qui se trouve dans la salle des conseils de la Défense, ne fonctionnait
6 pas.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document sera placé sur le
8 rétroprojecteur, Maître Stewart. Y a-t-il un exemplaire pour le
9 rétroprojecteur ? Monsieur Babic, c'est une lettre datant du 19 décembre
10 1991, dans laquelle M. Krajisnik, président de l'assemblée du peuple serbe
11 de Bosnie-Herzégovine, répond à l'invitation qui lui est adressée
12 d'assister à cette commémoration historique de la proclamation de la région
13 autonome serbe de Krajina. Malheureusement, il dit ne pas être en mesure
14 d'assister à cette cérémonie.
15 Maître Stewart, veuillez procéder.
16 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Monsieur Babic, c'est bien, n'est-ce pas, une lettre telle que les
18 représentants politiques ont l'habitude de s'adresser, suite à un succès
19 aux élections ou à la création d'une institution ou dans le dans le cadre
20 de rendez-vous particulier, c'est bien le genre de lettre que l'on s'envoie
21 couramment entre représentants politiques occasions, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Conviendrez-vous également que le fait de s'exprimer par écrit dans ces
24 termes très fleuris et très enthousiastes est une caractéristique assez
25 serbe, n'est-ce pas, même si ce n'est pas uniquement une caractéristique
Page 3594
1 serbe ?
2 R. Je ne sais pas si le langage est fleuri. En tout cas, il exprimait
3 l'opinion politique de M. Krajisnik, à l'époque, qui était également celle
4 de d'autres personnes. Je ne vois rien de particulièrement fleuri dans ce
5 langage.
6 Q. Bien.
7 R. Ou démonstratif.
8 Q. Monsieur Babic, comprenez bien ce que j'ai déjà dit tout à l'heure,
9 n'avait en aucun cas l'intention de blesser qui que ce soit.
10 Le simple fait que vous ne voyez rien de particulièrement fleuri dans le
11 langage utilisé dans cette lettre, n'est-il pas le signe que c'était la
12 façon tout à fait normale et courante de s'exprimer lors d'une cérémonie
13 entre Serbes dans une lettre, dans un document écrit ?
14 R. Il n'y a pas eu une multitude de telles occasions. C'était une occasion
15 très particulière, à savoir, la création de la Krajina serbe. Cette lettre
16 est une lettre politique destinée à entériner un moment politique
17 particulier.
18 Q. La façon dont vous avez parlé de cela dans votre déclaration écrite de
19 même d'ailleurs que dans votre déposition orale, Monsieur Babic, ne montre-
20 t-elle pas de la façon la plus claire qui soit, que vous aviez un point de
21 vue assez négatif sur le contenu de cette lettre, que vous considériez
22 qu'il n'était pas très opportun pour M. Krajisnik d'avoir écrit cette
23 lettre, n'est-ce pas ?
24 R. Je ne vois pas très bien ce que vous voulez dire. Je crois que cette
25 lettre était tout à fait adaptée à la situation et correspondait très bien
Page 3595
1 à ce que représentait M. Krajisnik à l'époque. Je ne vois pas très bien ce
2 que vous sous-entendez dans votre question.
3 Q. Monsieur Babic, êtes-vous en train de dire que vous ne considérez pas
4 que cette lettre soit inadaptée dans son contenu ou dans les mots qui sont
5 utilisés à l'occasion qui fait l'objet de cette lettre ?
6 R. Elle correspond tout à fait à l'événement aussi bien dans son ton que
7 compte tenu des positions politiques qui étaient défendues par l'auteur de
8 cette lettre à l'époque. Il est tout à fait clair que dans cette lettre,
9 c'est un point de vue politique correspondant aux circonstances de l'époque
10 qui est exprimé. J'espère avoir bien répondu à votre question.
11 Q. Monsieur Babic, je souhaiterais vous poser quelques questions au sujet
12 de conversations interceptées. On vous a posé des questions au sujet d'une
13 conversation interceptée particulière concernant une conversation qui
14 aurait eu lieu en juin 1991. Il y a été fait référence le mercredi 2 juin,
15 page 82 du compte rendu d'audience. Il s'agit d'une conversation entre M.
16 Karadzic et
17 M. Kertes [phon]. Vous l'aviez entendue, et vous avez été en mesure
18 apparemment d'identifier les intervenants. Vous avez déclaré que les
19 références faites à la farine et au sel, aux supermarchés, ainsi de suite,
20 cela correspondait à une conversation chiffrée concernant la livraison
21 d'armes. Monsieur Babic, qu'est-ce qui vous permet de nous parler de la
22 signification de cette conversation interceptée ?
23 R. Je connais le contexte, les circonstances, les événements, les
24 intervenants, la terminologie, les personnes intéressées, le moment où
25 cette conversation a eu lieu.
Page 3596
1 Q. Il y a beaucoup d'autres conversations interceptées que nous n'avons
2 pas examiné en détail, mais qui sont inscrites dans le cadre de votre
3 déposition. En ce qui concerne les autres conversations interceptées, vous
4 dires que vous connaissez les participants et ainsi de suite. Etes-vous
5 d'accord avec moi pour dire que dans la plupart des cas, ce que vous avez
6 déclaré aux Juges de cette Chambre de première instance peut-être déduit à
7 la simple lecture du texte de ces conversations ?
8 R. Je puis vous dire que ces textes confirment ce que j'ai dit.
9 Q. Est-ce que cela concerne toutes les conversations interceptées ? Avez-
10 vous des informations précises concernant cette conversation interceptée
11 qui vous permet de mieux comprendre sa signification ?
12 R. Je vous ai déjà fait mes commentaires au sujet des autres conversations
13 que j'ai entendues au sujet des personnes dont je reconnais la voix, au
14 sujet du contenu de leurs propos. Je pense vous avoir donné mon point de
15 vue sur chacune de ces conversations. Est-ce de cela que vous vouliez
16 parler ?
17 Q. J'essaie d'éviter d'examiner l'intégralité de ces conversations.
18 Penchons-nous sur la conversation interceptée qui a été enregistrée comme
19 se déroulant entre M. Karadzic et M. Krajisnik. J'essaie de trouver une
20 date. Apparemment, il n'y a pas de date. Vous avez dit, Monsieur Babic, que
21 cette conversation que j'ai évoquée plus tôt, avait eu lieu le 15 ou le 16
22 mai 1991. Cela figure à l'intercalaire numéro 1 relatif aux conversations
23 interceptées qu'on vous a demandé d'examiner.
24 M. STEWART : [interprétation] Peut-être pourrait-on en fournir un
25 exemplaire au témoin. Je ne suis pas certain de l'endroit où se trouve ce
Page 3597
1 document.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous être un peu plus précis,
3 Maître Stewart quant à l'endroit où ce document pourrait se trouver ?
4 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit d'une annexe à la déclaration de
5 témoin. Peut-être M. Tieger pourra-t-il nous aider ?
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, pourriez-vous nous
7 aider, je vous prie ? Nous avons des commentaires concernant les
8 conversations téléphoniques.
9 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
10 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous --
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois. Pourrait-on placer cela
12 sur le rétroprojecteur et faire un gros plan. Il s'agit de la première
13 entrée sur cette page.
14 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, ces documents n'ont pas
16 encore été distribués, mais ils le seront plus tard. Nous avons une cote
17 concernant ces copies.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pourrait-on faire un gros plan sur
19 la première entrée vers la droite de façon à voir les commentaires.
20 M. STEWART : [interprétation] C'est de cela que je voulais parler. Je pense
21 que la date de cette conversation est le 15 ou le
22 16 mai. La référence à la séance de la présidence y est faite. Ma question
23 portait sur la transcription elle-même et l'endroit où elle se trouve.
24 M. TIEGER : [interprétation] J'ai dit que les croquis de ces transcription
25 sont disponibles. Nous pouvons les retrouver maintenant si vous le
Page 3598
1 souhaitez.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] N'y a-t-il pas de copies disponibles à
3 ce stade ? Est-ce que cela figure également dans le classeur concernant M.
4 Treanor ?
5 M. TIEGER : [interprétation] En substance, soit nous pouvons demander le
6 versement au dossier de ces documents, soit nous pouvons faire référence à
7 la position d'origine, c'est-à-dire que ces documents n'ont pas été cotés
8 individuellement, mais faisaient partie de la liasse, et a été communiquée
9 avant que nous n'en demandions le versement au dossier.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, ces documents se trouvent là
11 afin de pouvoir aider Me Stewart dans ses questions. Madame l'Huissière,
12 pourriez-vous nous rendre ces documents de façon à ce que nous les
13 retrouvions ?
14 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons donner au témoin une copie
16 en B/C/S, et nous placerons la traduction en anglais sur le
17 rétroprojecteur. Il s'agit d'un document qui n'a pas encore été versé au
18 dossier. Nous allons l'utiliser à ce stade soit comme document qui sera
19 marqué aux fins d'identification, soit versé au dossier à un stade
20 ultérieur.
21 M. TIEGER : [interprétation] J'espère que cela est tout à fait clair. Comme
22 je l'ai dit, toutes les conversations interceptées accompagnent les
23 déclarations pertinentes.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous n'avons pas encore donné de
25 cote à ces documents, mais ces documents ont été marqués aux fins
Page 3599
1 d'identification. Il s'agit du numéro 1 sur la liste figurant à la page 7
2 en tant qu'annexe de la déclaration du témoin.
3 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons déjà donner une cote à ce
5 classeur. Nous ne nous prononçons pas à ce stade quant à son versement au
6 dossier.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le classeur de conversations
8 interceptées accompagnant la déclaration P154 recevra la cote P154A. Ce
9 classeur comporte 33 intercalaires. Le CD-ROM sur lequel figure ces
10 conversations interceptées, recevra la cote P154B.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons placer cela sur
12 le rétroprojecteur.
13 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
14 Q. Monsieur Babic, le résumé, plutôt les commentaires que vous avez faits
15 au sujet de cette conversation interceptée sont les suivants : Tout
16 d'abord, vous pensez que cette conversation a eu lieu le 15 ou le 16 mai
17 1991, en partie vu la mention faite à la session de la présidence au cours
18 de laquelle M. Mesic n'a pas été élu. Vous parlez du contexte historique
19 dans lequel s'est déroulé cette conversation, et c'est ceci qui vous permet
20 de dater ce document, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Vous mentionnez le nom de la personne qui s'est noyée, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Il est question d'une personne qui s'est noyée, et vous pensez savoir
25 de qui il s'agit.
Page 3600
1 R. Oui. Il s'agissait de Vukasin Soskocanin. Il se serait noyé, j'insiste,
2 il se serait noyé. Toutefois, j'ai entendu d'autres informations à ce
3 sujet.
4 Q. Il s'agit des rumeurs dont vous parlez, n'est-ce pas ? Vous parlez des
5 rumeurs selon lesquelles il aurait été assassiné par ses propres hommes ou
6 par les services de Sûreté de l'état ?
7 R. Il est décédé. Il se serait noyé dans le Danube. Une autre personne qui
8 était en rapport avec lui et d'autres de Borovo Selo m'ont dit que c'était
9 la sûreté de l'état qui l'avait tué. Toutefois, je n'ai pas entendu parler
10 de cela en tant que rumeur, mais en tant qu'information tout à fait
11 sérieuse. A l'époque, il s'agissait d'information tout à fait fiable. Ces
12 informations, je les ai obtenues au moment des événements.
13 Q. Merci, Monsieur Babic.
14 M. STEWART : [interprétation] Je souhaiterais à présent vous montrer un
15 autre document qui émane d'un livre. Nous disposons d'un certain nombre de
16 copies. Aux fins du compte rendu d'audience, je vais vous dire quel est le
17 contenu de ce livre. Il s'agit d'un livre rédigé par Adam LeBor, en un seul
18 mot L-e-b-o-r. Adam LeBor est l'auteur de ce livre. Apparemment, il est
19 anglais. Il a travaillé pour la presse indépendante à l'époque. Il s'agit
20 d'un article ou d'un livre intitulé "Milosevic, une biographie", livre
21 publié en Grande-Bretagne en 2002. Conformément à la pratique adoptée
22 habituellement, nous avons fait une photocopie de la page précédente et de
23 la page suivante, ainsi que de la page sur laquelle figure le passage que
24 je souhaite présenter à M. Babic. Ce document est rédigé en anglais par M.
25 LeBor.
Page 3601
1 Le passage qui m'intéresse se trouve au milieu de la page 228. Il est
2 question du mois de mai 1995 ou de l'été 1995. M. Babic connaît peut-être
3 suffisamment l'anglais pour être en mesure de repérer ce paragraphe, mais
4 cela ne nous aidera pas beaucoup car, apparemment, il ne lit pas très bien
5 l'anglais.
6 Q. Le passage en question se lit comme suit, je cite : "Vu la capture du
7 secteur ouest, la communauté internationale a proposé un plan connu sous le
8 nom ZFOR considérant que les événements qui se dérouleraient après l'été
9 1995, considérant ces événements, le plan ZFOR offrait des avantages
10 inconcevables aux rebelles serbes y compris l'autodétermination, le droit à
11 avoir leur propre drapeau, leur propre police, leur propre parlement et
12 leur propre président."
13 Les Serbes dont il est question ici sont les Serbes de Krajina dont vous
14 étiez représentant, Monsieur Babic. "Milosevic a soutenu ce plan ainsi que
15 Tudjman malgré certaines réserves dans une décision tout à fait stupide.
16 Les dirigeants serbes de Krajina, Milan Martic et Milan Babic, ont rejeté
17 d'emblée le plan ZFOR. A la place, ils ont envoyé des troupes pour
18 participer à l'attaque menée par les Serbes de Bosnie contre la ville de
19 Bihac sous contrôle du gouvernement bosniaque. Bihac a été coupée. Les
20 Serbes ont fait le siège de la ville qui avait été déclarée zone de
21 sécurité des Nations Unies comme Srebrenica. Lorsque Srebrenica est tombée
22 au mois de juillet, les dirigeants militaires serbes de Bosnie ou leur
23 dirigeant principal, le général Ratko Mladic a lancé une attaque contre
24 Bihac."
25 N'est-il pas correct de dire, Monsieur Babic, que cela a constitué un
Page 3602
1 désordre militaire pour les Serbes, n'est-ce pas ?
2 R. Ce que vous venez de citer n'est pas exact. C'était tragique en effet.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, personne ne vous a
4 demandé de confirmer qu'il s'agissait d'une déclaration stupide ou non. Il
5 s'agit d'une question tout à fait différente. La seule question qui vous a
6 été posée est la question de savoir si le résultat militaire était un
7 désastre ? Est-ce que vous pourriez répondre à cette question, je vous
8 prie ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président, mais
10 toutes sortes de choses ont été dites ici, toutes sortes de propos ont été
11 cités et qui sont tout à fait erronés. La question elle-même ne me paraît
12 pas très claire.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question en elle-même me paraît assez
14 claire. Vous avez peut-être oublié ce qui concerne le reste mais pourriez-
15 vous nous dire si le résultat militaire
16 [imperceptible] était un désastre, oui ou non ?
17 Est-ce que cela concerne Bihac ou quelque chose d'autres ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas la question ?
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est question de l'attaque contre
20 Bihac.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était un désastre, une défaite
22 militaire.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
24 Veuillez poursuivre Maître Stewart.
25 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
Page 3603
1 Q. Monsieur Babic, conviendrez-vous que votre rejet du plan, connu sous le
2 nom ZFOR s'est avéré également être une erreur grave ?
3 R. Est-ce que vous voulez parler de moi personnellement ou d'autres
4 personnes ? Est-ce qu'il s'agit d'un "vous" au singulier ou d'un "vous" au
5 pluriel ? Personnellement j'ai accepté ce plan, d'autres ne l'ont pas fait.
6 Votre question portait sur le fait de savoir si le rejet du plan avait
7 contribué à cela ? Mais le rejet par qui au juste ?
8 Q. Très bien, Monsieur Babic. Nous allons nous efforcer de clarifier les
9 choses. Lorsque dans ce livre, il est fait référence à une décision tout à
10 fait stupide et au fait que les dirigeants serbes de Krajina, Milan Martic
11 et Milan Babic ont rejeté d'emblée le plan ZFOR, est-ce que vous dites que
12 le livre se trompe, que personnellement vous n'avez pas rejeté cette
13 proposition connue sous le nom de plan ZFOR ?
14 R. C'est exact. Personnellement, j'ai accepté ce plan.
15 Q. Nous avons encore un problème de traduction car il y a une double
16 négation. On peut lire dans le compte rendu d'audience : "Ce n'est pas que
17 je ne l'ai pas rejeté. Je l'ai accepté." Ce que vous nous dites, c'est que
18 vous l'avez accepté et que le livre se trompe, n'est-ce pas ?
19 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète, ce n'est pas uniquement qu'il n'a pas
20 rejeté le plan, il l'a accepté. C'est ce qu'il a souligné dans sa réponse.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, il est tout à fait clair
22 que vous avez accepté le plan ZFOR. Veuillez poursuivre.
23 M. STEWART : [interprétation] Je ne souhaite pas ergoter avec les
24 interprètes à ce sujet, Monsieur le Président, et j'accepte tout à fait ce
25 qu'ils disent.
Page 3604
1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela a été confirmé à trois reprises.
2 Veuillez poursuivre.
3 M. STEWART : [interprétation] Très bien. J'ai éclairci ce point et j'en ai
4 terminé avec mon contre-interrogatoire.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Stewart.
6 Monsieur Tieger, est-il nécessaire de poser des questions supplémentaires
7 au témoin ?
8 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
9 Nouvel interrogatoire par M. Tieger :
10 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, il y a deux questions
11 assez brèves que je souhaiterais soulever. L'une de ces questions prendra
12 peut-être un peu plus de temps que l'autre. C'est par cela que je vais
13 commencer.
14 Q. Monsieur Babic, puis-je attirer votre attention sur le document
15 militaire daté du 26 décembre 1991, dont nous avons parlé un peu plus tôt.
16 R. Oui.
17 Q. Il y a eu quelques discussions au sujet de ce document lors de vos
18 auditions précédentes. Je fais référence, notamment, à la cassette numéro
19 10 et de l'enregistrement en date du 14 janvier 2002, page 56. Au milieu de
20 la page, vous dites que vous souhaitez expliquer cet ordre. Vous dites que
21 le 26 décembre 1991, vous étiez président de la République de la Krajina
22 serbe et qu'en cette qualité, en tant que commandant des forces armées de
23 la République de la Krajina serbe, vous fournissez des explications au
24 sujet de ce document, y compris au sujet du cachet qui se trouve en haut à
25 gauche où il est fait mention de région autonome serbe de Krajina, de
Page 3605
1 l'état-major de la Défense territoriale. Cela signifie que ce document a
2 été rédigé par le quartier général de la Défense territoriale de la Krajina
3 serbe.
4 Ensuite, vous poursuivez en disant que vous ne vous souvenez pas de la
5 période exacte, du moment exact où les zones opérationnelles ont été mises
6 en place. Je poursuis, il est dit, je cite : "Le colonel Radoslav Maksic,
7 qui était le commandant de l'état-major central de la Défense territoriale,
8 m'a apporté un document. Il s'agissait d'un ordre ou d'une directive. Je ne
9 sais pas de quel type de documents il s'agissait. Mais il s'agissait en
10 quelque sorte, d'un ordre relatif au mouvement, au déploiement de certaines
11 unités d'artillerie qui disposaient d'une portée suffisante pour atteindre
12 Zagreb. Il a dit que je devais signer ce document, que je devais considérer
13 comme un ordre adressé à mon encontre. Je me souviens avoir signé un
14 document. D'après mes souvenirs, ce document correspond à ces activités.
15 J'ai pensé aux circonstances dans lesquelles ces événements se sont
16 déroulés. A l'époque, il y avait des débats concernant le plan Vance, eu
17 égard, notamment, au déploiement des forces de maintien de la paix dans la
18 région de la Krajina. Aujourd'hui encore, je me demande, pourquoi, je n'ai
19 pas participé aux activités relatives aux opérations des unités, document
20 que j'ai signé pour lequel j'ai donné mon autorisation. Cela pouvait
21 signifier des provocations, eu égard aux activités qui étaient décrites
22 dans le plan Vance. Aujourd'hui, je me rends compte que c'était stupide.
23 Néanmoins, j'ai signé ces documents pour Maksic. Toutefois, je n'ai pas osé
24 de ne pas être d'accord et je ne voulais pas que quelqu'un, qui appartenait
25 au cercle proche de Milosevic, ne devienne l'un de mes ennemis. Il
Page 3606
1 s'agissait de relations personnelles, et non pas d'une question de débats
2 publics. J'ai signé ce document pour Maksic, car je ne voulais pas imposer
3 quoi que ce soit. Voilà les souvenirs dont je dispose au sujet de ce qui
4 s'est passé à l'époque.
5 Ma conclusion aujourd'hui est assez différente de ma conclusion à laquelle
6 j'étais parvenu à l'époque. Aujourd'hui, je n'aurais sans doute pas réagi
7 de la même manière et j'ai mieux compris les choses après. Notamment depuis
8 mars 1992, j'ai changé mon point de vue au sujet de ces événements."
9 Monsieur Babic, est-ce que ce passage vous aide à raviver vos souvenirs ou
10 à mieux comprendre ce document et le rôle qui a été le vôtre à cet égard ?
11 R. Je crois toujours aujourd'hui que le but de tout cela était de me
12 compromettre en tant que négociateur.
13 Q. Monsieur Babic, ma deuxième question est directement liée à la réunion
14 qui s'est tenue à Bosanski Novi vers la fin de l'été 1992. Me Stewart dit
15 qu'il a été fait référence, dans une audition précédente, à une séance de
16 l'assemblée conjointe des assemblées de la Republika Srpska et de RSK. Je
17 note que dans votre déclaration, vous faites référence à une réunion, à
18 laquelle vous êtes arrivé en retard, et qui portait sur un événement qui se
19 serait déroulé à Bosanski Novi à la fin de l'été 1992. Est-ce que vous
20 pourriez nous dire s'il s'agissait d'une séance de l'assemblée conjointe ou
21 d'un autre type de réunion ?
22 R. Il s'agissait en quelque sorte d'une réunion comme je l'ai dit.
23 Quelqu'un m'a informé qu'il s'agissait d'une session de l'assemblée
24 conjointe. Mais cela n'y ressemblait pas. Il s'agissait plutôt d'une
25 réunion assez importante.
Page 3607
1 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, si vous voulez bien m'accorder
2 quelques instants.
3 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
4 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, c'est tout ce
5 que je souhaitais demander.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger. Puisqu'aucun
7 élément nouveau n'a été introduit à moins --
8 M. STEWART : [interprétation] Non, nous sommes d'accord, Monsieur le
9 Président.
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge El Mahdi a une ou deux questions
12 pour vous.
13 Questions de la Cour :
14 M. LE JUGE EL MAHDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 [En français] Monsieur le Témoin, je voudrais m'assurer que je vous ai bien
16 suivi dans votre témoignage. Je vous ai entendu dire aujourd'hui, je vous
17 cite : "Parlant de M. Branko Kostic, vous avez dit, et je vous cite en
18 anglais : "Technically speaking he was the leading --
19 [Interprétation] "techniquement parlant, il jouait le rôle de dirigeant ou
20 ce rôle lui appartenait."
21 [En français] Concernant M. Krajisnik, vous avez dit, je vous cite :
22 [Interprétation] "Il a joué un rôle représentatif et je ne me souviens pas
23 qu'il a joué un rôle actif."
24 [En français] J'aurais aimé que vous m'expliquiez qu'est-ce que vous
25 entendez par ces deux réflexions sur les deux personnages ? Est-ce que vous
Page 3608
1 voulez dire que M. Krajisnik, dans un certain domaine, n'avait qu'un rôle
2 représentatif sans pour autant jouer un rôle actif ou qu'est-ce que vous
3 voulez dire exactement ?
4 R. Monsieur le Juge, concrètement parlant, je parlais de cette réunion qui
5 a eu lieu au palais de la Fédération le 23 octobre 1991, et techniquement
6 parlant, la réunion a été présidée par Branko Kostic. Je pense que j'ai
7 déjà dit au cours de ma déposition que Slobodan Milosevic était derrière
8 tout, et en ce qui concerne la participation de Momcilo Krajisnik, c'est ce
9 que j'ai dit. Il représentait les Serbes de Bosnie. C'est pour cela que
10 j'ai dit qu'il avait un rôle représentatif. Mais lorsque j'ai dit qu'il n'a
11 pas joué un rôle actif, je voulais dire que je ne me souvenais pas du tout
12 qu'il ait pris la parole pendant la réunion. C'est cela que je voulais
13 dire.
14 M. LE JUGE EL MAHDI : Merci beaucoup, Monsieur le Témoin. Ma seconde
15 question, peut-être, elle est beaucoup plus simple. Si je comprends bien,
16 vous étiez le président du parti SDS, à partir de 1992, dans la Krajina. Je
17 veux dire. C'est après la mort de M. Raskovic, n'est-ce pas, et durant le
18 restant de l'année 1992, vous étiez le président du parti SDS de la
19 Krajina ?
20 R. Excusez-moi, je vais clarifier quelque chose. Jusqu'au 29 novembre
21 1992, j'étais membre du Parti démocrate serbe, présidé par Jovan Raskovic.
22 Ces partis avaient un conseil régional pour la Krajina et j'étais membre de
23 ce conseil régional et j'étais le président du conseil municipal de ce
24 parti pour Knin. Après la mort de Jovan Raskovic, le 29 novembre 1992, un
25 groupe, membres du SDS, qui avait été présidé par Jovan Raskovic, un groupe
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1 de Krajina a créé le parti démocrate serbe de la Krajina, un parti
2 indépendant dont je suis devenu président.
3 M. LE JUGE EL MAHDI : C'est le même parti que le Parti SDS qui était en
4 Bosnie-Herzégovine où c'était un autre parti ?
5 R. Pour un autre parti. Ce n'était pas le même que le SDS.
6 M. LE JUGE EL MAHDI : C'est-à-dire, uniquement, c'est question du nom, mais
7 cela n'a pas de rapport entre les deux partis, si je comprends bien.
8 R. C'est vrai. Il s'agissait de deux partis séparés. Même leurs noms
9 n'étaient pas identiques, leurs noms différaient. Le parti en Bosnie-
10 Herzégovine s'appelait le Parti démocrate serbe de Bosnie-Herzégovine, qui
11 est devenu par la suite, Parti démocrate serbe des terres serbes. Le parti
12 présidé par Jovan Raskovic s'appelait Parti démocrate serbe. Le parti que
13 j'ai présidé, à la constitution duquel j'ai participé, s'appelait Parti
14 démocrate serbe de la Krajina.
15 M. LE JUGE EL MAHDI : Est-ce que vous avez eu des relations entre, si je
16 comprends bien, votre parti, SDS, et le parti SDS qui existait en Bosnie-
17 Herzégovine ? Est-ce que vous coordonniez, par exemple, vos actions ?
18 R. Non. Parfois, il y a eu des efforts visant à faire en sorte que notre
19 parti, le parti du SDS de Krajina, fasse partie du SDS de Bosnie-
20 Herzégovine, mais nous avons refusé cela. Notre parti et le parti de
21 Karadzic en Krajina étaient deux partis opposés l'un à l'autre. Si vous
22 voulez, le parti de Karadzic était en opposition par rapport au mien en
23 Krajina.
24 M. LE JUGE EL MAHDI : Ma dernière question. Il m'a semblé que vos relations
25 étaient plutôt dirigées vers Belgrade plutôt que vers la République serbe
Page 3610
1 de la Bosnie-Herzégovine; est-ce que c'est bien le cas ?
2 R. Oui.
3 M. LE JUGE EL MAHDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai quelques questions pour vous.
5 J'espère que les interprètes sont prêts à rester dix à 15 minutes de plus,
6 ce qui nous permettrait de pouvoir conclure plutôt que de devoir poursuivre
7 nos travaux la semaine prochaine.
8 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, je souhaite vous poser une
10 question plutôt générale. Les questions vraiment délicates, est-ce qu'elles
11 n'étaient jamais consignées au papier ? Lorsque je parle "des questions
12 délicates", je souhaite parler des arrière-pensées. Vous avez parlé des
13 réunions auxquelles vous avez été invités pas par écrit, mais par
14 téléphone. Vous avez discuté des questions délicates. Est-ce que vous
15 pouvez nous dire dans quelle mesure ce genre de questions délicates,
16 également les moyens qui devaient être employés afin d'atteindre des
17 objectifs politiques ? Ici, je ne parle pas forcément de vos objectifs
18 politiques personnels, mais en général. Est-ce que cela existait d'habitude
19 en papier ou pas ?
20 R. Je ne sais pas que cela existait en papier.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous n'avez jamais vu sur le
22 papier des questions que vous considériez délicates ?
23 R. Non.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous aviez l'impression que
25 la raison en était la confidentialité ? Est-ce que c'était pour cela que ce
Page 3611
1 genre de questions n'existait pas en papier ? Vous faites signe de tête,
2 Monsieur Babic, mais ceci n'apparaît pas au compte rendu d'audience.
3 R. Oui, oui.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une autre question. Vous nous avez parlé
5 de l'emploi de la langue ékavienne. Pourquoi est-ce que quelqu'un
6 utiliserait la langue ékavienne pour souligner cela en tant que facteur
7 unificateur des Serbes si cette même langue était employée par les Croates,
8 ou c'est l'alternative à ma question, est-ce que c'était exactement la
9 raison pour laquelle vous avez considéré qu'il était stupide de souligner
10 ce genre de chose ?
11 R. La question est un peu longue.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'en excuse.
13 R. Je vais commencer par la première partie.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous propose soit de nous expliquer
15 comment il était possible d'utiliser cela en tant que facteur unificateur,
16 ou si c'était justement cela que vous trouviez stupide.
17 R. En ce qui concerne le facteur unificateur, c'était quelque chose qui
18 était imposé aux Serbes de Bosnie-Herzégovine et de Croatie. On imposait
19 les normes de la langue qui étaient en vigueur en Serbie même si j'ai déjà
20 expliqué qu'il s'agissait de la même langue. Cette variante existait en
21 Serbie. Dans ce sens, il s'agissait d'unification afin de s'ajuster aux
22 normes linguistiques en vigueur en Serbie. Excusez-moi, quelle était votre
23 deuxième question ?
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que dans votre déposition, vous
25 avez dit que cette langue était également utilisée par les Croates. Si
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1 quelqu'un souhaite souligner un facteur unificateur parmi certaines
2 personnes, il faudrait plutôt utiliser quelque chose qui est employé
3 exclusivement par un groupe et non pas aussi par les autres.
4 R. Si, si. La variante ékavienne était employée exclusivement par les
5 Serbes. Les Croates et les Musulmans n'utilisaient pas la variante
6 ékavienne.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Malheureusement, ici, je n'ai pas le
8 compte rendu d'audience. Peut-être que j'ai mal compris votre propos ou
9 peut-être cela a été mal consigné au compte rendu d'audience. De toute
10 façon, les choses sont claires en ce qui me concerne maintenant.
11 Une autre chose. Vous nous avez parlé des documents que vous avez remis aux
12 enquêteurs. Vous avez fait une distinction entre deux séries de documents;
13 les documents que vous avez trouvés dans les archives et d'autres que vous
14 aviez, apparemment, chez vous et vous n'avez pas besoin d'aller aux
15 archives pour les trouver. Est-ce exact ?
16 R. Les deux séries de documents émanent des archives, mais c'est moi qui
17 les avais. Là, je parle des deux classes de documents.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais certains de ces documents, vous les
19 aviez déjà. Car ma question, dans ce cas-là, est de savoir pourquoi avez-
20 vous pris ces documents avec vous.
21 R. J'avais certains documents émanant des archives à Knin, qui portaient
22 sur le côté constitutionnel et juridique de la Krajina. C'était un grand
23 nombre de documents. Je les ai pris à cause du fait que la collaboratrice
24 d'Yasushi Akashi, qui était à l'époque le représentant de la FORPRONU pour
25 l'Yougoslavie, Yelena Guskova, m'a demandé d'apporter ce genre de document.
Page 3613
1 Elle était intéressée par cela du point de vue historique puisqu'elle est
2 historienne. J'avais préparé cela pour elle, et j'ai pris ces documents.
3 C'est ainsi qu'ils sont restés chez moi.
4 Les autres documents étaient au bureau du gouvernement de la République
5 serbe de Krajina à Belgrade. Ce bureau a cessé d'exister en 1996. Là, il
6 s'agit de l'autre type de document que je possédais.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci explique la raison pour laquelle
8 vous aviez les autres documents en votre possession, les documents qui
9 n'étaient pas issus directement des archives de Belgrade. Merci, Monsieur
10 Babic.
11 Vous avez dit, à un moment donné, au cours de votre déposition, que vous
12 pouviez ajouter d'autres éléments en ce qui concerne l'impression de ce que
13 Karadzic pensait réellement au cours de la réunion à Celinac. Est-ce que
14 vous pourriez nous dire maintenant ce que vous souhaitiez ajouter par
15 rapport à ce que vous avez déjà dit à ce sujet ?
16 R. Je peux peut-être clarifier ce que cela voulait dire. Cela voulait dire
17 qu'il allait créer un territoire unifié en Bosnie-Herzégovine, un
18 territoire serbe unifié en Bosnie-Herzégovine, en expulsant les Musulmans.
19 Il faisait référence à cela.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'était votre impression. Ce que
21 vous ajoutez, c'est que le moyen par lequel il allait atteindre cela était
22 l'expulsion de Musulmans.
23 R. Tout à fait.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous dire un
25 peu plus au sujet de la question de savoir sur quoi vous avez fondé cette
Page 3614
1 impression.
2 R. Je la fonde sur le fait qu'à l'époque, il y avait la communauté des
3 municipalités, des municipalités des régions serbes qui ont été créées par
4 les dirigeants du Parti démocrate serbe. Ces zones étaient séparées. Il
5 n'était pas possible de les relier en appliquant le principe majoritaire.
6 C'est d'ailleurs pour cela que Karadzic s'opposait à ce concept selon
7 lequel il fallait que l'on procède au vote majoritaire en Krajina, car le
8 principe majoritaire allait miner ses tentatives d'unifier les territoires
9 dans lesquels les Serbes étaient minoritaires.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup de ces réponses.
11 Est-ce que les parties souhaitent poser d'autres questions qui découlent
12 des questions des Juges ?
13 M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense.
15 M. STEWART : [interprétation] La Défense non plus.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr, je m'adressais aux deux
17 parties.
18 Dans ce cas-là, Monsieur Babic, votre déposition est terminée. D'habitude,
19 je dis aux témoins au revoir, et cetera. Dans le cas présent, je ne peux
20 pas exclure la possibilité que l'on vous propose de venir de nouveau. Je ne
21 m'attends pas à cela, mais je ne peux pas exclure cela. Je peux dire
22 simplement merci d'être venu. Je ne sais pas si je dois dire, enfin, ce
23 n'est pas vraiment que je souhaite dire. On se verra peut-être, je ne sais
24 pas quand et je ne sais pas où, mais je souhaite simplement éviter de créer
25 une mauvaise impression que c'était la dernière fois que vous alliez
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1 comparaître devant cette Chambre qui traite de l'affaire Krajisnik. De
2 toute façon, merci d'avoir répondu aux questions des deux parties et des
3 Juges de la Chambre. Maintenant, vous pouvez sortir.
4 M. STEWART : [interprétation] En ce qui concerne le document émanant du
5 livre, je pense que j'ai oublié de demander à Mme Philpott de nous dire
6 quelle est la cote.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, il s'agit de la cote D20.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous avons besoin de la
9 présence du témoin pour vos commentaires, Monsieur Tieger ?
10 M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, je demanderais à ce que
12 l'on escorte M. Babic en dehors du prétoire.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mueller, vous pouvez vous
15 disposer, vous aussi.
16 [Le témoin se retire]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne ce que les parties
18 souhaitent ajouter, est-ce que nous devons rester à huis clos, mis à part
19 la question de savoir s'il fallait être à huis clos dès le départ, Maître
20 Stewart ? Monsieur Tieger.
21 M. TIEGER : [interprétation] Il m'est difficile de savoir si la Chambre
22 souhaite que l'on procède à huis clos ou pas. Puisqu'il est question de la
23 procédure, je souhaite proposer le versement au dossier --
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. En fait, une autre Chambre de
25 première instance devrait occuper ces locaux bientôt. Je suggère aux
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1 parties de traiter de toutes les questions techniques lors de notre
2 prochaine audience. Je pense que ce sera lundi suivant.
3 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je propose que l'on traite de toutes ces
5 questions techniques, y compris les cotes, et cetera lundi suivant pour que
6 nous puissions bien nous préparer. Y a-t-il autre chose ? Dans ce cas-là,
7 nous allons repasser brièvement en audience publique.
8 [Audience publique]
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes en audience publique de
10 nouveau. Je vais répéter ce qui a été dit en huis clos avant la journée
11 d'aujourd'hui, c'est-à-dire, qu'une décision orale a été rendue par la
12 Chambre ce matin concernant une requête confidentielle, la Défense ne s'y
13 est pas opposée, portant sur un huis clos et une vidéoconférence. La
14 Chambre a accordé cette requête. C'était la quatrième requête. Je suppose
15 que seul le contenu de la requête était confidentiel et non pas son
16 existence, Monsieur Tieger. Sinon, je vais devoir demander que l'on expurge
17 le compte rendu d'audience.
18 M. TIEGER : [interprétation] Tout à fait, je pense que vous avez bien
19 compris.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Il n'est pas nécessaire de
21 procéder à des corrections. Dans ce cas-là, je propose aux parties de se
22 mettre en contact avec, non pas le Juriste de la Chambre, mais avec M. De
23 Hemptinne, pour voir, compte tenu du fait que nous aurons une pause de
24 quelques jours si la Chambre a reçu des suggestions de la part des parties
25 concernant la manière de procéder, notamment, à partir du 24 juin. Si vous
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1 trouvez une occasion, vous pourriez simplement échanger des points de vue
2 pour faire face à la proposition de la Chambre et pour voir si nous
3 devrions passer plus de temps en recueillant les dépositions dans le
4 prétoire ou si les parties devraient communiquer plus afin d'éviter les
5 présentations d'éléments de preuve dans ce prétoire, qui ne sont pas
6 vraiment nécessaires. Peut-être vous pourriez essayer de faire cela cet
7 après-midi. J'ai déjà proposé cela vendredi dernier, mais je me dis que
8 peut-être aujourd'hui c'est encore mieux.
9 Est-ce que les parties souhaitent soulever autre chose ?
10 M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
11 M. STEWART : [interprétation] J'ai quelque chose qui va durer 15 secondes.
12 Vous savez, Monsieur le Président, qu'en ce qui concerne la réunion de cet
13 après-midi, il n'est pas prévu que l'on parle de l'étendue et de l'ampleur
14 de la présentation des moyens de preuve de la Défense. Si vous voulez, je
15 vais m'exprimer de manière plus claire.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
17 M. STEWART : [interprétation] Vous n'avez pas mentionné le temps qu'il faut
18 pour préparer la Défense. Vous savez que c'est une question qui est très
19 important pour la Défense dans le cadre de ce genre de discussions.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Dans ce cas-là, nous pourrons
21 dire que vous pouvez avoir un échange des points de vue concernant
22 l'utilisation du temps, mais également concernant, bien sûr, la préparation
23 de la Défense.
24 Nous allons maintenant lever la séance et nous remercions les techniciens
25 et les interprètes de leur aide, et nous nous excusons auprès de l'autre
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1 Chambre de première instance pour avoir volé 13 minutes de leur temps. Nous
2 allons nous retrouver ici dans la salle d'audience II, le lundi 14 juin, à
3 9 heures.
4 --- L'audience est levée à 13 heures 57 et reprendra le lundi 14 juin 2004,
5 à 9 heures 00.
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