Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 7 juin 2004

  2   [Audience à huis clos] [Passage rendu public par décision de la Chambre]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez annoncer

  6   l'affaire, je vous prie.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Affaire IT-00-39-T, le Procureur contre

  8   Momcilo Krajisnik.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Madame la Greffière.

 10   Bonjour, tout le monde. Avant de poursuivre, j'aimerais formuler quelques

 11   observations. Je m'adresse d'abord à la Défense. Lorsque j'ai dit quelques

 12   mots de la façon dont le contre-interrogatoire était mené vendredi dernier,

 13   j'ajouterai aujourd'hui parce que je me rends compte que j'aurais dû le

 14   faire en l'absence du témoin. Je m'en suis rendu compte pendant le

 15   "weekend". C'est la raison pour laquelle aujourd'hui, je vous dis que je

 16   regrette de l'avoir fait en présence du témoin. C'est le premier point.

 17   Deuxième point, lorsque nous avons accordé trois heures à la Défense

 18   vendredi dernier, il est possible que certains aient compris que cette

 19   décision était liée à des problèmes quant aux possibilités de siéger mardi.

 20   Ce n'est pas le cas. S'il s'avérait pour telle ou telle raison que nous

 21   ayons besoin de davantage de temps, nous le retrouverons. Ce n'est en aucun

 22   cas le calendrier prévu pour la journée de mardi qui détermine si un temps

 23   supplémentaire sera ou non accordé. Ce n'est pas non plus une incitation ou

 24   une invitation à demander un temps supplémentaire, mais je souhaitais

 25   simplement que les choses soient tout à fait claires. Ce ne sont pas des

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  1   considérations pratiques qui interviendront pour limiter la possibilité de

  2   la Défense d'interroger, éventuellement, plus longtemps. Ce sont seulement

  3   des considérations d'équité qui interviendront.

  4   Ma troisième observation est la suivante : nous avons reçu deux requêtes.

  5   La première est une requête en appel. Nous sommes en train de l'examiner.

  6   L'autre est une requête confidentielle sur les mesures de protection, et

  7   c'est la quatrième de ce genre.

  8   Je suppose que la Défense a également reçu cette requête. J'en parle plus

  9   précisément pour appeler l'attention de la Défense spécifiquement sur cette

 10   requête, car il faut pas mal de temps pour préparer une vidéoconférence si

 11   la Défense tient à s'exprimer au sujet de cette requête.

 12   La quatrième, si les mesures de protection ne se limitent aux mesures

 13   courantes, mais impliquent également l'organisation d'une vidéoconférence à

 14   huis clos, j'aimerais que la Défense nous fasse savoir ses commentaires à

 15   ce sujet.

 16   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, d'abord, nous

 17   apprécions votre premier commentaire au sujet de la présente du témoin de

 18   vendredi dernier lorsque vous vous êtes exprimé. Nous comprenons très bien

 19   ce qui s'est passé.

 20   Deuxièmement, j'aimerais vous présenter mes excuses au cas où j'aurais

 21   peut-être fait transparaître une légère irritation vendredi après-midi, je

 22   vous prie de m'en excuser, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Je

 23   m'excuse d'avoir trahi mes sentiments, et je me rends bien compte que cette

 24   irritation n'était en aucun cas justifiée par les propos prononcés par

 25   vous.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous acceptons vos excuses.

  2   M. STEWART : [interprétation] M. le Président l'a confirmé. En fait, mes

  3   pensées sont toujours concentrées sur l'affaire, et nous ne pensions pas au

  4   calendrier prévu pour mardi comme orientant de quelque façon que ce soit

  5   nos travaux. S'agissant des requêtes, Monsieur le Président, Messieurs les

  6   Juges, vous avez reçu notre requête en appel.

  7   En ce qui concerne la deuxième question, nous allons aujourd'hui présenter

  8   une réponse officielle. Mais il peut être utile, Monsieur le Président, que

  9   je fasse d'emblée savoir que nous ne lèverons aucune objection à la

 10   vidéoconférence pour l'audition de la déposition de ce témoin. Cela semble

 11   tout à fait raisonnable sur le principe. Je dis bien sur le principe, la

 12   Défense est tout à fait favorable d'une vidéoconférence dans de tel cas car

 13   c'est, à notre avis, la meilleure façon de procéder bien souvent. Vous

 14   constaterez, de façon générale, nous sommes favorables aux vidéoconférences

 15   dans ce genre de cas précis. Il y a, bien sûr, des cas où ces

 16   vidéoconférences ne sont pas justifiées.

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  2   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, certainement.

  3   J'aimerais simplement ajouter quelques mots que je pourrais d'ailleurs dire

  4   en présence de Me Mueller, mais pas en présence du témoin. Monsieur le

  5   Président, nous l'avons dit clairement au début du contre-interrogatoire de

  6   M. Babic, nous le répétons aujourd'hui, nous n'avons pas disposé de

  7   suffisamment de temps pour préparer ce contre-interrogatoire, et nous

  8   n'avons pas changé de position sur ce point. Le résultat est le suivant,

  9   Monsieur le Président : comme je l'ai fait vendredi, enfin, je dirai les

 10   choses de la façon suivante. Je n'ai aucune objection à ce que l'on

 11   poursuive le contre-interrogatoire de M. Babic du mieux possible. Je

 12   m'efforcerai d'explorer un certain nombre de sujets avec lui de la façon la

 13   plus efficace qui soit compte tenu des circonstances.

 14   Il y a deux choses que j'aimerais souligner. D'abord, je suis censé

 15   respecter mes obligations au titre de l'Article 90(H), qui s'applique à

 16   certains aspects des thèses de la Défense sur lesquels ce témoin pourrait

 17   s'avérer utile ou, en tout cas, sa déposition. Encore une fois, je répète

 18   que je remplirai du mieux possible les obligations qui sont les miennes.

 19   Mais il peut être utile que j'indique d'emblée que compte tenu des

 20   circonstances, il y a certains aspects de l'affaire que je ne pourrai peut-

 21   être pas couvrir avec le témoin alors qu'il aurait été utile que je le

 22   fasse.

 23   Deuxièmement, et ce point découle du premier. Je voudrais parler de la

 24   possibilité réelle que la Défense décide en temps utile de demander une

 25   nouvelle convocation de M. Babic à la barre. Il ne sert à rien de parler de

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  1   cela dans l'abstrait pour le moment, puisque nous ne savons pas ce qu'il en

  2   sera réellement. En temps utile, j'annonce que, si des raisons valables le

  3   justifient, il est possible que la Défense demande à ce que M. Babic soit

  4   réentendu. Je dis cela en rapport précis avec ce témoin, car normalement,

  5   c'est une éventualité qui ne surgit que rarement. Eu égard à M. Babic, il

  6   existe une réelle possibilité que la chose devienne nécessaire. J'ai abordé

  7   ces deux questions très rapidement. D'abord, Monsieur le Président, la

  8   position de la Défense que vous connaissez bien, eu égard à la préparation

  9   d'un contre-interrogatoire de façon générale, qui, bien sûr, a un rapport

 10   direct avec le contexte, la connaissance générale de l'affaire, des

 11   circonstances qui entourent M. Babic et son témoignage ainsi que l'ensemble

 12   de la situation en Croatie. Vous savez bien que compte tenu du grand nombre

 13   d'éléments liés à la déposition de M. Babic, les pressions de temps ont été

 14   très importantes sur  la Défense. Je suis sûr que vous vous rendez bien

 15   compte qu, la semaine dernière, nous avons subi ces pressions de plein

 16   fouet, et que c'est seulement dans des circonstances tout à fait

 17   exceptionnelles que nous parlons de la possibilité de rappeler un témoin à

 18   la barre.

 19   Si nous nous penchons sur les détails de la situation, très franchement,

 20   nous ne pouvons que reconnaître que cette possibilité existe. Nous avons

 21   essayé de réfléchir aux autres solutions possibles. Nous avons tenu compte,

 22   bien sûr, des débats de vendredi, suite à tout cela, nous ne pouvons dire

 23   ce matin dans ce prétoire, que ce que nous sommes en train de dire, à

 24   savoir que nous sommes prêts à poursuivre le contre-interrogatoire de M.

 25   Babic, mais que nous partons du principe, c'est un des critères que nous

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  1   appliquons, que pour explorer un certain nombre de questions qui sont de

  2   grandes importance, il est possible de le faire aujourd'hui avec M. Babic

  3   dans les conditions actuelles, mais que pour toutes sortes d'autres

  4   domaines du contre-interrogatoire qui pourraient s'avérer importants, il

  5   nous faudra sans doute davantage de temps à une autre occasion.

  6   Monsieur le Président, je ne suis pas en train de dire que je ne

  7   m'exprimerai que 20 minutes et pas davantage. Bien entendu, nous couvrirons

  8   pas mal de sujets aujourd'hui. Nous nous proposons au départ, de respecter

  9   la limite de temps qui a été décidée par la Chambre, sans exclure la

 10   possibilité, et c'est cette possibilité que je rediscute ici, qu'une

 11   demande de temps supplémentaire soit faite, et qu'il soit demandé au témoin

 12   de revenir pour préciser ou expliciter un certain nombre d'éléments de sa

 13   déposition.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si la demande de rappeler M. Babic

 15   à la barre est présentée, je dis cela au nom de la Chambre de façon

 16   générale, la Chambre serait surprise que dans des conditions normales une

 17   telle demande soit présentée. J'ajouterai que la Chambre serait moins

 18   surprise compte tenu des circonstances que cette demande soit présentée eu

 19   égard à ce témoin particulier, et nous examinerons attentivement cette

 20   demande le cas échéant.

 21   M. STEWART : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président, c'est une

 22   réponse tout à fait équitable si je peux le dire avec le respect que je

 23   vous dois. Je pense que la Défense et la Chambre se comprennent très bien

 24   sur cette question.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'ai le sentiment que M. Krajisnik

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  1   avait quelque chose à dire à la Chambre. Mon impression est-elle exacte ?

  2   Est-elle juste ?

  3   M. STEWART : [interprétation] Oui, apparemment, Monsieur le Président.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je remercie la

  5   Chambre de me donner l'autorisation de dire rapidement quelques mots. Ce

  6   que je souhaiterais dire, aujourd'hui, est une requête. Lorsque vous

  7   trouverez la possibilité de le faire, j'apprécierais que vous me donniez la

  8   parole pour quelques instants pour que je parle de la façon dont ce procès

  9   a été préparé. En effet, je m'inquiète beaucoup de l'évolution de ce

 10   procès. Je comprends que l'audience doit commencer dans le plus bref délai,

 11   mais je vous demanderais, lorsque vous le jugerez utile, de m'accorder

 12   quelques instants pour m'exprimer. Merci.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous quelque chose à dire qui vient

 14   en sus de ce qu'a déjà dit votre conseil, ou souhaitez-vous mettre l'accent

 15   sur tel ou tel aspect du propos de votre conseil ? Parce que les

 16   préoccupations ont été exprimées. Je pense que vous l'avez compris. Enfin,

 17   je vous donnerai la possibilité de vous exprimer, mais je préfère si vous

 18   voulez bien, que nous commencions par la poursuite du contre-interrogatoire

 19   de M. Babic. Nous trouverons le plus rapidement possible le moment pour

 20   vous donner la possibilité de parler aux Juges de la Chambre.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne suis pas en désaccord avec mon conseil de

 22   la Défense, mais j'aurais simplement quelques points à ajouter. Je vous

 23   remercie.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. L'occasion vous en sera

 25   donnée très rapidement.

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  1   Me Mueller, peut-il entrer dans le prétoire ?

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Maître Mueller.

  3   M. MUELLER : [interprétation] Bonjour.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre situation physique dans ce

  5   prétoire ne change en aucun cas votre position. J'attendrai  à présent que

  6   l'on fasse entrer M. Babic. Peut-être pourrait-il être utile de veiller à

  7   ce que personne ne se casse la jambe en se prenant les pieds dans le fil

  8   électrique qui est branché à partir du bureau de la Défense ?

  9   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, je disais cela avec

 11   beaucoup de précaution parce que j'ai déjà vu des accidents de ce genre se

 12   produire. Même les Ferraris peuvent avoir un accident.

 13   Monsieur Babic, veuillez vous asseoir. Je tiens à vous dire que vous êtes

 14   toujours tenu par la déclaration solennelle que vous avez prononcée au

 15   début de votre déposition et je vous rappelle l'attention toute

 16   particulière que je porte à ces questions que j'ai exprimées vis-à-vis de

 17   ces questions au moment du début du contre-interrogatoire.

 18   LE TÉMOIN : MILAN BABIC [Reprise]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, mon autre ordinateur

 21   est de marque Dell.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maître Stewart, veuillez procéder.

 23   Contre-interrogatoire par M. Stewart : [Suite]

 24   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q. [interprétation] Lors des débats de vendredi, M. Babic, nous avons parlé

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  1   d'une série de réunions et vous avez bien, n'est-ce pas, déjà répondu à un

  2   bon nombre de questions dans le cadre de la procédure qui vous a été

  3   intentée devant ce Tribunal, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  J'aimerais vous rappeler, en particulier, les réponses fournies par

  6   vous à des questions qui vous étaient posées le 11 janvier 2002.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, était-ce un lapsus de

  8   votre part lorsque vous avez dit 1992 ?

  9   M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'était,

 10   effectivement, un lapsus. Merci de me le faire remarquer. Je voulais parler

 11   de 2002.

 12   Q.  Monsieur Babic, c'était bien à un moment où vous étiez suspect, n'est-

 13   ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  On vous a posé une question et c'est à la page 60 du compte rendu,

 16   j'espère de tout le monde, de cet entretien qui a eu lieu le 11 janvier

 17   2002. L'on vous a posé des questions concernant les réunions au sujet

 18   desquelles vous avez déjà déposé devant cette Chambre, réunions avec M.

 19   Karadzic. Si vous vous souvenez, vous avez dit qu'il y avait deux réunions

 20   en juillet 1991, le même jour. D'abord, vous avez rencontré M. Milosevic,

 21   ensuite, M. Karadzic. Ensuite, vous êtes allé à Celinac où vous avez eu une

 22   réunion à laquelle M. Milosevic n'a pas assisté; est-ce exact ?

 23   R.  J'ai eu une réunion avec Milosevic et Karadzic à Belgrade et, le même

 24   jour, j'ai eu une réunion avec Karadzic à Celinac; c'est ce dont vous

 25   parlez ?

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  1   Q.  C'est exact. M. Milosevic n'a pas assisté à la deuxième de ces réunions

  2   contrairement à M. Karadzic, n'est-ce pas ?

  3   R.  Si vous parlez de Celinac, non, effectivement.

  4   Q.  Oui. Ensuite, vous avez décrit -- ou plutôt dans votre déclaration,

  5   vous dites : "D'habitude je demandais que l'on apporte du café." Cela ce

  6   n'était pas lors d'une réunion avec Milosevic, mais Milosevic a insisté que

  7   l'on boive du whiskey et il nous a offert le cigare. Il avait des boites de

  8   cigares. Je ne fumais pas, je n'en ai pas pris, mais Karadzic a pris un

  9   cigare qu'il a allumé et il a mis le cigare dans sa poche. Il nous a dit

 10   que là il s'agissait de scènes pittoresques dont vous vous souvenez et vous

 11   avez d'ailleurs fait un commentaire au sujet de votre mémoire visuelle qui

 12   est bonne.

 13   Ensuite, vous avez dit : nous avons repris notre réunion à Celinac. Cela

 14   c'était près de Banja Luka, le même soir, et, en ce qui concerne cette

 15   réunion, vous l'avez décrite et vous dites que c'étaient surtout les gens

 16   de la région de Banja Luka qui y ont assisté.

 17   S'agissant de cet incident que vous avez décrit au sujet du

 18   Dr Karadzic, qui a utilisé un cigare de manière plutôt théâtrale pour

 19   représenter M. Izetbegovic, et son attitude envers M. Izetbegovic, est-ce

 20   que vous essayez de dire que cela s'est passé à la réunion de Celinac et

 21   non pas à la réunion qui a eu lieu avant ?

 22   R.  Il a pris un cigare de Milosevic qu'il a mis dans sa poche et, ensuite,

 23   il l'a utilisé, ce cigare, afin de faire semblant d'être Izetbegovic à

 24   Celinac.

 25   Q.  Cela s'est passé à Celinac et non pas au cours de la réunion qui a eu

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  1   lieu avant, n'est-ce pas ?

  2   R.  La dernière fois que j'ai déposé ici, j'ai expliqué comment il a joué

  3   sa petite scène de théâtre à Celinac et j'ai également décrit la

  4   conversation qu'il y a eu à Belgrade.

  5   Q.  Mais simplement veuillez nous confirmer, Monsieur Babic, que ce dont

  6   j'ai parlé, ce petit coup de théâtre de M. Karadzic a eu lieu à Celinac et

  7   non pas avant à Belgrade ?

  8   R.  A Celinac, il était très théâtral alors qu'à Belgrade, il était assez

  9   poli vis-à-vis de Milosevic. Il ne faisait qu'expliquer les choses, mais sa

 10   gestuelle ne ressemblait pas à ce qui s'est passé par la suite à Celinac.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, je trouve que la réponse

 12   est quelque peu ambiguë lorsque le témoin a répondu à votre question,

 13   lorsque vous avez dit : M. Milosevic n'a pas assisté à la deuxième de ces

 14   réunions, mais M. Karadzic y a assisté et la réponse était : "Si vous

 15   parlez de Celinac, la réponse est non," ce qui n'est pas clair. C'est la

 16   question de savoir si le "non" portait sur l'absence de M. Milosevic à

 17   Celinac ou sur le caractère erroné de votre déclaration.

 18   Ai-je bien compris qu'au cours de la réunion qui a eu lieu dans la matinée,

 19   à la fois M. Milosevic et M. Karadzic y ont assisté, et en ce qui concerne

 20   la deuxième réunion, M. Karadzic y a assisté, mais M. Milosevic n'y a pas

 21   assisté; est-ce exact ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Veuillez poursuivre.

 24   M. STEWART : [interprétation]

 25   Q.  Vous avez bien sûr eu plusieurs entretiens de ce genre et un autre

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  1   entretien, où vous avez été interrogé en tant que suspect, a eu lieu le 15

  2   janvier 2002. Juste quelques jours après la réunion dont on a parlé, et

  3   nous avons une référence à cela à la page 12. La question vous a été posée

  4   par une personne dont les initiales commencent par AC, la question était :

  5   "L'on identifie que cette réunion a eu lieu à -- et il y a une série de --"

  6   Mais nous sommes convaincus que sur la base du reste du compte rendu, nous

  7   pouvons absolument être sûrs qu'il s'agissait de Celinac.

  8   Vous avez dit : "Et bien, Karadzic, je pense que Karadzic a proposé ces

  9   initiatives concernant les deux Krajina. C'est l'impression que j'ai eue,

 10   mais je ne me souviens pas tout à fait des termes employés. Mais j'étais

 11   simplement là, je me tenais en tant qu'un figurant lors de cette réunion

 12   puisqu'il s'agissait de la réunion des gens de la région de Banja Luka. Ici

 13   il a montré," -- et si visiblement qu'il s'agit du Dr Karadzic -- "il a

 14   montré qu'il dominait la situation et que l'on lui devait du respect."

 15   Ensuite, M. Mueller, qui a assisté à cela, a fait un commentaire expliquant

 16   que vous avez déjà fait des déclarations au sujet de cette réunion.

 17   C'est, à ce moment-là, que ceci a été dit. En fait, le conseil de la

 18   Défense dans cette affaire contre vous a dit cela, mais il a été dit

 19   également que deux questions n'ont pas été abordées en ce qui concerne son

 20   opposition à l'unification de la Krajina. A un moment donné, vous avez dit

 21   qu'il n'était pas clair quelles étaient les régions que Karadzic souhaitait

 22   unifier. Ensuite, vous avez dit : "Je ne sais pas." Le conseil, qui était

 23   présent à l'entretien a dit : "Est-ce qu'il n'a pas précisé cela de quelque

 24   manière que ce soit ?" Vous avez dit : "Et bien, je ne sais pas dans quel

 25   sens, mais il a indiqué qu'il s'agirait des régions serbes. C'est la

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  1   manière dont j'ai compris les choses, mais je ne sais pas tout à fait ce

  2   qu'il pensait ou ce qu'il souhaitait impliquer."

  3   Ensuite, on vous a demandé : "Est-ce qu'il a dit ce qui allait se passer

  4   dans ces régions qui sont mixtes, où les Musulmans et les Croates

  5   représentaient la majorité ou la moitié de la population ?" Vous avez dit :

  6   "Non, je n'ai pas entendu cela."

  7   Ensuite, on vous a demandé : "Est-ce qu'il a mentionné pourquoi il

  8   préférait ces unifications des territoires des Serbes de Bosnie ?" Vous

  9   avez dit : "Et bien, j'ai certaines hypothèses politiques à ce sujet, mais

 10   je ne sais pas tout à fait quelle était sa position."

 11   Ensuite, on vous a demandé : "Qu'est-ce qu'il a dit ?" Voilà c'est ce que

 12   vous avez dit : "Mais il était un dirigeant politique." Ensuite, vous avez

 13   poursuivi : "Je ne sais pas ce qu'il a dit exactement. D'après la manière

 14   dont je comprenais les choses, il ne souhaitait pas être séparé de ses

 15   zones d'intérêt politique. C'est ce que je pensais."

 16   L'impression que vous avez créé par le biais de vos réponses, s'agissant de

 17   cette réunion, M. Babic, était que vous ne compreniez pas, tout à fait

 18   clairement, ce que disait M. Karadzic au sujet de ses projets, n'est-ce

 19   pas ? Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 20   R.  A ce moment-là, je n'ai pas fourni une information complète au sujet de

 21   ce que je savais à ce propos, et à la fin de l'entretien, j'ai ajouté que

 22   j'avais d'autres choses à dire, également j'avais des choses à ajouter.

 23   Q.  Peut-on passer à la réunion que vous avez décrite et qui a lieu au

 24   palais de la Fédération à Belgrade. Vous avez dit que cette réunion a eu

 25   lieu le 23 octobre 1991. Le 30 novembre 2001, vous avez été interrogé, et

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  1   nous avons deux transcriptions au sujet de cette date. Tout d'abord, en ce

  2   qui concerne la réunion qui a eu lieu dans la matinée à 9 heures 49, et

  3   nous avons une longue transcription. Apparemment, vous avez eu une pause,

  4   un déjeuner, également une pause afin de changer des cassettes.

  5   Ensuite, vous avez repris votre réunion à 15 heures 03. A la page 2, de

  6   cette transcription, on vous a posé une question concernant la réunion au

  7   palais de la Fédération, la réunion que l'on vient de mentionner. Encore

  8   une fois, Mme Hildegard Uertz-Retzlaff vous a posé des questions au sujet

  9   de cela. C'est à la page 3, en bas de la page, je cite : "En ce qui

 10   concerne cette réunion, qui a lieu dans la présidence et à laquelle

 11   d'autres personnes ont assisté, y compris les Serbes de Bosnie comme

 12   Karadzic, quel était l'objectif de toutes ces personnes autour de la table,

 13   s'agissant de l'Yougoslavie et des territoires ?"

 14   Vous avez dit : "Ces personnes soutenaient l'option de l'Yougoslavie

 15   fédérale. La délégation du Monténégro était présente, mais je ne pense pas

 16   que M. Bulatovic y ait assisté. Je ne suis pas sûr, il est possible de

 17   vérifier cela. Je pense que c'était le président de l'assemblée

 18   monténégrine, et d'autres personnes. Je pense, si mes souvenirs sont bons,

 19   que Momir Bulatovic, à un moment donné, a accepté ces documents de La Haye,

 20   et que Milosevic est resté isolé. Ensuite, à un moment-là, je ne sais pas

 21   quand, est-ce que qu'il s'agissait de l'assemblée, que Bulatovic s'est

 22   retiré." Ensuite, vous avez dit quelque chose qui n'était pas audible. En

 23   ce qui concerne cette réunion, je souhaite ajouter : "Je ne me souviens pas

 24   que certaines personnes se sont prononcées de manière explicite au sujet de

 25   cela. Techniquement parlant, ce qui se passait, c'est que Branko Kostic

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  1   faisait des calculs, il comptait."

  2   Il a dit : "On peut dire 50 % ou 52 % et, ensuite, vous avez dit : "Qu'il

  3   s'agissait de 52 % de la population de l'Yougoslavie."

  4   Ensuite, on vous a posé la question suivante : "Et parmi les Serbes de

  5   Bosnie, qui a assisté à cela ? Vous avez mentionné Karadzic. Qui

  6   d'autres ?" Vous avez dit : "Je ne me souviens pas. Je ne me souviens pas.

  7   Vous savez vraiment, je ne me souviens pas. Je n'y prêtais pas tellement

  8   attention, parce que j'ai été préoccupé par ce problème que j'ai eu avec

  9   Milosevic et par la réunion de Paris. Vous voyez toutes ces personnes, je

 10   me souviens, c'était plutôt du décor, une toile de fond dont il avait

 11   besoin pour faire ses déclarations devant les médias."

 12   Ensuite, Mme Uertz-Retzlaff vous a demandé des choses au sujet de certaines

 13   personnes; en particulier, elle a dit, par exemple : "Martic, est-ce qu'il

 14   a assisté, lui, Milan Martic ? Vous avez répondu : "Je ne pense pas. Je ne

 15   crois pas parce que, sinon, je crois que je m'en souviendrais," et cetera.

 16   Est-ce que vous êtes d'accord pour dire, Monsieur Babic, que, tout d'abord,

 17   il est tout à fait clair sur la base de cet échange que vos souvenirs au

 18   sujet de la question de savoir qui a assisté à cette réunion et qui n'y a

 19   pas assisté, ne sont pas du tout fiables et certains ?

 20   R.  Je ne suis pas tout à fait sûr. Je n'ai pas une mémoire visuelle de

 21   l'ensemble de la réunion, mais ce qui me reste c'est une impression. En ce

 22   qui concerne mes souvenirs issus de ma mémoire visuelle, j'ai dit très

 23   exactement les personnes dont je me souviens avez exactitude.

 24   Q.  Vous avez dit également quelles sont les personnes dont vous ne vous

 25   souveniez pas, n'est-ce pas ?

Page 3538

  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  Il est évident, on n'aura pas besoin de nous lancer dans un débat pour

  3   dire que parmi les personnes dont vous ne vous souveniez pas, était M.

  4   Krajisnik, parce que vous ne l'avez pas mentionné concrètement en tant

  5   qu'une personne ayant assisté à cette réunion. Il faisait certainement

  6   partie de cette catégorie de personnes dont vous ne vous souveniez pas,

  7   n'est-ce pas ?

  8   R.  Visuellement, je ne me souviens pas concrètement parlant, mais j'ai

  9   l'impression qu'il était parmi ces quatre personnes de la Bosnie-

 10   Herzégovine avec M. Vucurevic. Cela c'est l'impression qui me reste. Je ne

 11   vois pas l'image dans mon esprit. Je ne peux pas le décrire. C'est

 12   l'impression que j'ai.

 13   Q.  Monsieur Babic, de toute façon, nous allons procéder à des

 14   vérifications pour vérifier si M. Krajisnik a assisté à cette réunion ou

 15   pas. Vendredi, je vous ai dit déjà, qu'à notre avis, il n'y était pas. Je

 16   souhaite ajouter également que nous sommes en train de procéder à des

 17   vérifications pour clarifier cela et pour rendre les choses tout à fait

 18   claires et certaines. Ce que j'essaie de vous dire est la chose suivante :

 19   si M. Krajisnik y a assisté, dans ce cas-là, cette description que vous

 20   avez faite des autres personnes qui ne représentaient que du décor, une

 21   toile de fond de cette réunion, nous permettrait de conclure sans ambiguïté

 22   qu'il n'a joué aucun rôle signifiant au cours de cette réunion, n'est-ce

 23   pas ? Vous êtes d'accord avec cela.

 24   R.  J'ai dit quelque chose au sujet du fait que Branko Kostic présidait la

 25   réunion. Dans ce sens, je suis d'accord avec vous. J'ai dit que le groupe

Page 3539

  1   de personnes de Bosnie-Herzégovine représentait les Serbes de Bosnie-

  2   Herzégovine, et c'était leur rôle. La raison de leur présence à cette

  3   réunion était de représenter les Serbes tout comme je représentais les

  4   Serbes de la SAO Krajina. Dans ce sens, notre présence à cette réunion

  5   était importante. Techniquement parlant, le rôle principal était celui de

  6   Branko Kostic.

  7   Q.  Vous avez nuancé votre réponse maintenant, Monsieur Babic. Je vais vous

  8   poser une nouvelle question. Mis à part la présence de M. Krajisnik à cette

  9   réunion s'il s'avère qu'il y a été présent, vous ne pouvez pas dire qu'il a

 10   joué un quelconque rôle important au cours de cette réunion; est-ce exact ?

 11   R.  Je dirais qu'il a joué un rôle de représentant, mais il n'a pas joué un

 12   rôle actif. La première fois que nous avons parlé de cela, j'ai dit devant

 13   cette Chambre de quelle manière M. Kostic a procédé au calcul s'agissant

 14   des territoires, des populations yougoslaves qui optaient pour

 15   l'Yougoslavie. C'est ainsi qu'il est arrivé à ce résultat de 52 % de

 16   population qui favorisait l'option yougoslave. C'est ainsi qu'il a calculé

 17   les choses. Quant à la question de savoir ce que représentait Krajisnik et

 18   les autres de la Bosnie-Herzégovine, c'était communo [phon]. Le président

 19   du Monténégro représentait la population serbe du Monténégro, les autres

 20   représentaient leurs propres régions. Le tout a permis à faire ce calcul

 21   qui a aboutit à ce résultat de 52 % de la population qui optait pour

 22   l'Yougoslavie.

 23   M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, nous

 24   avons les dossiers qui ne sont pas vraiment dans l'ordre. Nous avons besoin

 25   de déployer pas mal d'efforts afin de nous retrouver dans ces dossiers.

Page 3540

  1   Q.  Monsieur Babic, il n'y a pas eu d'interaction entre

  2   M. Karadzic et M. Krajisnik dont vous vous souvenez au cours de cette

  3   réunion, n'est-ce pas ?

  4   R.  Vous parlez de ce qu'il disait au cours de la réunion ?

  5   Q.  Non, non. Monsieur Babic, je veux dire très exactement ce que je viens

  6   de dire. Il n'y a pas eu d'interaction entre le

  7   Dr Karadzic et M. Krajisnik dont vous vous souvenez s'agissant de cette

  8   réunion, n'est-ce pas ?

  9   R.  J'avais l'impression qu'ils étaient assis ensemble, à droite par

 10   rapport à Kostic qui présidait la réunion et par rapport aux autres membres

 11   de la présidence de l'Yougoslavie.

 12   Q.  Monsieur Babic, vous dites cela simplement, seulement, parce

 13   qu'évidemment, si M. Krajisnik a assisté à la réunion, logiquement il

 14   aurait été assis à côté du Dr Karadzic, n'est-ce pas ?

 15   R.  J'avais l'impression que les Serbes de la Bosnie-Herzégovine étaient

 16   assis ensemble à gauche par rapport à Kostic qui présidait la réunion. Je

 17   ne me souviens pas avec plus de détails que cela; c'est ce que j'ai déjà

 18   dit.

 19   Q.  Je suggère, Monsieur Babic, que c'est tellement normal et tellement

 20   évident qu'il aurait été tout à fait extraordinaire si les Serbes de Bosnie

 21   qui ont assisté à la réunion n'étaient pas assis ensemble dans un petit

 22   groupe autour de cette table, n'est-ce pas ?

 23   Cela aurait été bizarre.

 24   R.  Je pense. Je ne peux pas faire de commentaires à ce sujet.

 25   Q.  Comme nous l'avons dit, le 15 janvier 2002 vous avez accordé un

Page 3541

  1   entretien. Vous avez eu un entretien. A la page 26 de la séance, qui a

  2   commencé à 17 heures 04 -- de la réunion qui a commencé à 17 heures 04, on

  3   vous a posé des questions concernant une réunion qui a eu lieu à Belgrade

  4   le 31 janvier et les 1 et 2 février 1992. Vous avez dit, tout d'abord, la

  5   question était la suivante : "Est-ce que parfois en 1992, vous avez

  6   rencontré M. Karadzic ?" Vous avez répondu : "Oui." Question : "Est-ce que

  7   vous pouvez nous dire à combien de reprises ?" Vous avez répondu : "Deux."

  8   Question : "Est-ce que vous pouvez décrire ces réunions ?" Votre réponse :

  9   "Oui. La première réunion a eu lieu lors d'une session de la présidence de

 10   l'Yougoslavie le 31 janvier, les 1 et 2 février."

 11   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je ne fais que lire la

 12   transcription. Excusez-moi si cela paraît peu cohérent, mais je suis en

 13   train que de lire cela : "Les deux ont assisté à la réunion autour d'une

 14   table ronde au sein du palais de la fédération. Il a été assis en

 15   diagonale. A l'autre bout de la table, il y avait Biljana Plavsic. Je pense

 16   que Krajisnik a assisté également, peut-être aussi Koljevic. Je ne suis pas

 17   sûr. La réunion a été présidée par Branko Kostic et Jovic, quel était son

 18   prénom ? Il appartenait à la présidence, oui, Borisav Jovic, et d'autres

 19   personnes."

 20   Vous faites référence au Dr Karadzic, qui était assis en diagonale par

 21   rapport à vous, avec Biljana Plavsic. Vous dites que vous pensez que

 22   Krajisnik a assisté à cette réunion, n'est-ce pas ? Est-ce que vous seriez

 23   d'accord avec cela ? Il devient tout à fait clair que vous n'étiez pas du

 24   tout sûr au sujet de la présence de

 25   M. Krajisnik, alors que vous étiez sûr s'agissant du Dr Karadzic et de

Page 3542

  1   Biljana Plavsic.

  2   R.  A ce moment-là, je commençais à me souvenir de la situation. Je vais

  3   vous décrire l'entretien car je ne connaissais pas les questions en avance.

  4   Il s'agissait des événements qui ont eu lieu il y a longtemps. J'avais

  5   besoin d'un peu de temps pour me souvenir des choses. A ce moment-là, je

  6   commençais à me souvenir des choses au début de ma réponse. Je me souviens.

  7   Maintenant, je me souviens que les quatre étaient présents. Certainement,

  8   il y avait Karadzic, Koljevic, Plavsic et Krajisnik.

  9   M. STEWART : [interprétation]

 10   Q.  Votre mémoire s'est améliorée depuis votre entretien qui a eu lieu le

 11   15 janvier 2002, en ce qui concerne cette question; est-ce exact ?

 12   R.  Depuis le moment où j'ai commencé à réfléchir à ces événements et à ces

 13   scènes. Car je n'ai pas seulement réfléchi à cela pendant l'entretien, mais

 14   au cours de ces jours-là et de ces mois-là, je revenais en arrière pour

 15   penser de ces événements et pour me rappeler les choses. Beaucoup de choses

 16   se sont passées.

 17   Q.  Etes-vous en train de dire que maintenant vous vous souvenez des choses

 18   au sujet de la participation active de

 19   M. Krajisnik au cours de cette réunion ?

 20   R.  Oui, il a souvent pris la parole. Il répétait les paroles des autres

 21   intervenants, notamment, du Dr Karadzic et Branko Kostic et Borisav Jovic.

 22   Il était d'accord avec leur position. Je sais qu'en ce qui concerne ces

 23   quatre dirigeants des Serbes de Bosnie, après la première pause, Biljana

 24   Plavsic est sortie, et les trois autres y sont restés. Il s'agissait d'une

 25   session qui a duré trois jours.

Page 3543

  1   Q.  Je souhaite que l'on se rappelle maintenant de ce que vous avez dit au

  2   cours de cet entretien du 15 janvier. Cela figure à la page 31. On vous a

  3   posé la question suivante : "Qu'a dit

  4   Mme Plavsic ?" Votre réponse : "Au cours de la première discussion qui a eu

  5   lieu à 10 heures du matin, le 31 janvier, tout le monde pouvait présenter

  6   ses opinions. C'était avant la première pause. Son opinion était différente

  7   par rapport à toutes les autres. Elle était la seule dont l'opinion était

  8   différente puisqu'elle se demandait comment se faisait-il que la Croatie ne

  9   procédait au désarmement, mais seulement les nôtres. J'avais l'impression

 10   qu'elle n'était pas prête pour la réunion, qu'elle n'avait pas été

 11   informée. Elle disait ce qu'elle pensait. Après la première pause, elle n'y

 12   était plus." Question de Mme Uertz-Retzlaff : "Est-ce que vous vous

 13   souvenez de quoi que ce soit au sujet de Krajisnik ? Est-ce qu'il a dit

 14   quelque chose ?" Votre réponse : "Non. Je ne me souviens pas concrètement

 15   parlant, mais ils ont tous parlé de la même manière, Karadzic, Radovan, et

 16   cetera. Ils se moquaient de nous sans cesse. Tout le monde était d'accord,

 17   sauf la SAO Krajina."

 18   A ce moment-là, M. Babic, vous ne vous souveniez pas du tout de M.

 19   Krajisnik qui aurait pris la parole, sauf de manière tout à fait générale

 20   pour dire qu'il n'y a pas eu de désaccord, sauf pour ce qui est de Mme

 21   Plavsic; est-ce exact ?

 22   R.  Oui, c'est exact. C'est ce que j'ai dit il y a quelques minutes déjà.

 23   Je ne peux pas vous citer les propos exacts qui ont été dits, mais la même

 24   position était réitérée par M. Karadzic et

 25   M. Krajisnik, ainsi que les autres. C'est ce dont j'ai parlé il y a

Page 3544

  1   quelques minutes. Je ne peux pas citer les propos exacts, mais je peux vous

  2   dire quelle était leur position.

  3   Q.  Comment pourriez-vous résumer la position qu'ils partageaient ? Je veux

  4   dire la position qui était partagée par tout le monde à l'exception de Mme

  5   Plavsic. Comment décririez-vous cette position ?

  6   R.  Il y avait deux questions qui se posaient : il y avait la position

  7   elle-même et la manière dont cette position était imposée aux autres. La

  8   première devait être adoptée sans modification en ce qui concerne les plans

  9   de sécurité pour la Krajina, le plan Vance tel qu'il avait été convenu par

 10   Milosevic, Tudjman et Kadijevic à Genève, le 21 novembre 1991. Il

 11   s'agissait là du cœur de la question. Leur position était que ce plan

 12   devait être imposé à la région autonome serbe de Krajina, ou plutôt à moi,

 13   puisque je représentais une région autonome serbe de Krajina à l'époque.

 14   Voilà de quoi il s'agissait. Il s'agissait d'opposer cette position à nous

 15   autres par le biais d'un processus de torture physique et psychologique qui

 16   a duré pendant trois jours. Voilà ce qui s'est passé en substance au cours

 17   de cette session. C'est la raison principale pour laquelle Momcilo

 18   Krajisnik a participé, lui aussi, à cette session afin que cette position

 19   puisse m'être imposée par le biais de torture psychologique et physique qui

 20   m'a été infligée. J'étais censé adopter ce plan indépendamment de ce que

 21   les autres allaient faire. Voilà là la substance de la position de M.

 22   Krajisnik. Tout le monde était d'accord avec cela à l'exception de Mme

 23   Plavsic. Bien entendu, j'exclus ici les positions exprimées par le

 24   gouvernement de la région autonome serbe de Krajina et les représentants

 25   des municipalités de Krajina qui m'accompagnaient.

Page 3545

  1   Q.  Il s'agissait là d'une position complexe. En résumé, cette position

  2   consistait à dire que vous, c'est-à-dire, les dirigeants de la région

  3   autonome serbe de Krajina, étiez en mesure de perturber, voire de détruire,

  4   de rendre impossible la mise en œuvre du plan Vance, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non, ce n'est pas exact. Tout d'abord, nous n'étions pas et,

  6   personnellement, je n'ai pas participé à la mise en œuvre, à l'adoption de

  7   ce plan. Ce plan était convenu par Milosevic, Tudjman et Kadijevic sans la

  8   participation de la Krajina. Il portait sur la Krajina également.

  9   Deuxièmement, en tant que président de la Krajina, j'ai demandé instamment

 10   la modification du statut de la région autonome serbe de Krajina. Lorsque

 11   ce plan a été adopté, il a, ensuite, été adopté par l'assemblée. Slobodan

 12   Milosevic, Radovan Karadzic et Milan Martic ont accéléré la mise en œuvre

 13   du plan, qui avait été imposé par eux à la Krajina.

 14   Q.  Monsieur Babic, comme vous nous avez dit dans votre réponse, le premier

 15   problème qui se posait à vous était le fait que l'accord avait été conclu

 16   sans votre participation. Si bien que vous sentiez d'une certaine manière

 17   que cela avait été fait sans que vos intérêts soient pris en considération,

 18   sans que vous soyez consulté. C'est ainsi que vous ressentiez les choses,

 19   n'est-ce pas ?

 20   R.  Il s'agit là de votre opinion. Ce n'est pas exact. Ce n'est

 21   certainement pas exact. Je ne suis pas d'accord avec la manière dont vous

 22   avez présenté les choses. Ce plan ne fournissait pas de garanties

 23   suffisantes pour la sécurité des habitants de la Krajina.  C'est cela que

 24   nous avons parlé. Il s'agissait d'un accord en matière de sécurité. Au

 25   cours des débats ou plutôt pour être plus précis, lors de la polémique

Page 3546

  1   publique, qui a eu lieu au moment du rejet de ce plan, lorsque nous avons

  2   rejeté ce plan, le plan a été modifié. Le secrétaire général des Nations

  3   Unies a proposé certaines modifications concernant ce plan, à savoir que le

  4   système juridique croate et la législation croate ne seraient pas

  5   applicables dans les régions protégées par les Nations Unies, notamment, en

  6   Krajina. Cela a été couronné de succès. Nous avons obtenu ce que nous

  7   voulions suite à cette discussion, mais c'est la seule chose que nous avons

  8   obtenue. Mais ceci a été adopté par le conseil de Sécurité. Nous avions des

  9   propositions eu égard aux modifications que nous voulions, et l'une de nos

 10   propositions a été ainsi adoptée. Toutefois, Slobodan Milosevic n'a

 11   autorisé aucun débat au sujet d'éventuelles modifications de ce plan et

 12   c'était là l'objectif de la réunion qui a eu lieu à Belgrade. Il s'agissait

 13   de n'autoriser aucune discussion, aucun débat au sujet de ce plan, mais

 14   d'imposer ce plan à la Krajina comme il en avait convenu avec Tudjman.

 15   Q.  Monsieur Babic, vous n'avez pas répondu à ma question, et ce n'est pas

 16   la première fois. Je vous ai demandé si le problème essentiel qui se posait

 17   à vous, était que vous aviez l'impression que l'accord avait été conclu

 18   sans que vos intérêts soient pris en considération sans que vous soyez

 19   consulté. Donc si on laisse de côté la question du fondement même de cette

 20   proposition et de ce plan, c'est ainsi que vous ressentiez les choses,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  J'ai déjà répondu à votre question. Ce n'est pas exact. La deuxième

 23   fois que je vous dis que ce n'est pas vrai. Ce n'était pas là mon problème

 24   principal. Le problème principal supposément était qu'un problème de

 25   sécurité se posait eu égard à la population de la Krajina.

Page 3547

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, l'un n'empêche pas

  2   l'autre. L'un n'empêche pas l'autre, qu'il s'agisse de votre problème

  3   principal ou d'un problème secondaire. La question portait sur le fait de

  4   savoir si vous aviez l'impression que cet accord avait été conclu sans que

  5   vous soyez consulté de manière suffisante et sans prendre en considération

  6   les intérêts du peuple que vous représentiez, n'est-ce pas ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai dit qu'il s'agissait d'un fait

  8   accompli.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'il s'agisse d'un fait accompli ou

 10   non, que vous l'ayez dit auparavant ou non, voilà la question qui a été

 11   posée. D'après la réponse que vous avez fournie, je pense que vous répondez

 12   par l'affirmative.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cela étant, je voulais répondre au

 14   conseil de la Défense. Je voulais lui dire qu'il ne s'agissait pas du

 15   problème principal qui se posait à moi. Il s'agit d'un problème qui

 16   existait déjà au moment où nous avions commencé à discuter de ce plan.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En tout cas, il s'agit d'un problème

 18   important pour vous, n'est-ce pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être s'agit-il de la substance de tout

 20   cela. Le fait est que le plan qui concernait la population de Krajina a été

 21   élaboré sans que la population de Krajina ou sans que ses représentants

 22   soient consultés. Ce plan a été élaboré par les personnes qui menaient la

 23   guerre, c'est-à-dire, Milosevic et Tudjman. Il était question d'essayer de

 24   parvenir à un accord, et d'obtenir le consentement des personnes

 25   intéressées.

Page 3548

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pouvez poursuivre.

  2   M. STEWART : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Babic, est-il exact que les deux points qui vous paraissaient

  4   contestables eu égard au plan  Vance, les deux points principaux qui vous

  5   posaient problème, était premièrement, que vous aviez l'impression qu'il

  6   s'agissait là d'une première étape en vue de la création d'une Croatie

  7   indépendante dont les frontières n'incluraient votre Krajina, n'est-ce pas

  8   ? Cela vous inquiétait et c'est l'une des raisons principales pour

  9   lesquelles vous étiez opposé au plan Vance, n'est-ce pas ?

 10   R.  Tout d'abord, il ne s'agissait pas d'un arrangement politique pour la

 11   Krajina et cela n'avait rien à voir avec une solution politique. Il

 12   s'agissait d'une certaine manière d'une solution politique sans que l'on

 13   cherche à clarifier le statut de la Krajina. Il ne s'agissait pas d'un plan

 14   de nature politique, mais d'un arrangement en matière de sécurité. Une

 15   solution politique n'était pas le problème principal à l'époque. Il fallait

 16   trouver un arrangement en matière de sécurité. De là, des problèmes qui se

 17   posaient et que sans accord digne de cela, une solution politique était

 18   impossible. Mais il s'agissait là d'un autre problème.

 19   Q.  Monsieur Babic, le fait est, n'est-ce pas, qu'il s'agisse ou non d'un

 20   arrangement en matière de sécurité, ce plan Vance, en ce qui vous

 21   concernait, ce plan supposait clairement que la situation politique ne

 22   volait pas d'une manière qui vous arrangeait, car cela présentait un risque

 23   accru pour que les frontières de la Croatie finissent par inclure votre

 24   Krajina, n'est-ce pas ?

 25   R.  A l'époque, il ne s'agissait pas du problème principal. J'étais tout à

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  1   fait clair. J'ai essayé simplement de faire en sorte que la Krajina soit

  2   protégée de deux manières. Tout d'abord, en modifiant le plan Vance et en

  3   assurant la présence des forces de la JNA, et l'autre possibilité

  4   consistait à ce que les troupes des Nations Unies soient présentes, à ce

  5   que nous bénéficierons de la protection des Nations Unies. Voilà quelle

  6   était ma position à l'époque, et ce, pour des raisons de sécurité.

  7   Q.  Monsieur Babic, l'autre problème majeur qui se posait pour lequel vous

  8   avez soulevé des objections, est le fait que le plan Vance envisageait le

  9   retrait des forces de la JNA de Krajina, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui. C'est exact.

 11   Q.  Je suis certain que vous aviez d'autres objections à soulever eu égard

 12   au plan Vance, mais ces objections étaient-elles aussi importantes que

 13   celles dont nous venons de parler ?

 14   R.  L'objection principale que j'ai soulevée portait sur la manière dont

 15   les Nations Unies protégeraient le territoire ou la population plutôt de la

 16   région autonome serbe de Krajina, et la manière dont il permettrait le

 17   retour des réfugiés, la création d'une police multiethnique, et ainsi de

 18   suite. Notre position était qu'ils devaient être positionnés sur la ligne

 19   de séparation entre les deux parties belligérantes, le long des lignes

 20   reflétant le modèle cypriote, là où se trouvaient, ce qu'on appelait, "les

 21   lignes vertes". Telle était la proposition. Voilà comment nous pensions que

 22   la JNA pourrait demeurer sur ce territoire en tant que force armée et la

 23   manière dont toutes les unités se plaçaient sous son commandement

 24   pourraient rester, y compris la Défense territoriale. Le plan envisagé,

 25   toutefois, et la démilitarisation totale, c'est-à-dire que la JNA et la

Page 3550

  1   Défense territoriale devaient être démilitarisées ou désarmées, mais il

  2   était possible qu'une police régionale, une police locale soit créée.

  3   L'autre objection portait sur le fait que le plan concernait uniquement le

  4   premier semestre et devait être, ensuite, prolongé pour une année. Nous

  5   pensions que cela était insuffisant et compte tenu des changements qui se

  6   déroulaient au sein de la communauté internationale et en ex-Yougoslavie.

  7   Nous avons évalué et examiné nos propositions, de manière à pouvoir

  8   accepter la démilitarisation de la Krajina en présence de forces de

  9   protection des Nations Unies. Mais nous voulions que les Etats-Unis

 10   imposent une sorte de protectorat en Krajina et essaient de trouver une

 11   solution politique pour la région. C'est la position définitive que j'ai

 12   adoptée, qu'ont adopté les dirigeants de Krajina. En février, le conseil de

 13   Sécurité a décidé de la mise en œuvre du plan. Nous l'avons adopté sous la

 14   manière dont il était présenté par le conseil de Sécurité. Nous n'avons pas

 15   soulevé d'objections supplémentaires.

 16   Q.  Monsieur Babic, j'essaie de résumer votre position. Est-ce que l'on

 17   pourrait résumer votre position, en disant que vous étiez en désaccord

 18   profond avec les dirigeants de Belgrade, les dirigeants serbes de Bosnie,

 19   s'agissant de savoir si le plan Vance pouvait être efficace et,

 20   deuxièmement, sur le fait de savoir s'il prenait suffisamment en

 21   considération vos intérêts et les intérêts de votre Krajina ? Est-ce que

 22   nous pouvons être d'accord sur cela ?

 23   R.  Tout à fait, je n'étais pas d'accord avec la position qu'ils avaient

 24   présentée selon laquelle le plan devait être adopté sous la forme qui avait

 25   été convenue par Milosevic et Tudjman. Milosevic et Tudjman ne voulaient

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  1   même pas parler des problèmes de sécurité, des problèmes qui se posaient à

  2   nous et à notre protection.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, on vous a demandé si

  4   vous étiez d'accord pour dire que vous aviez des problèmes avec les

  5   dirigeants de Belgrade et les dirigeants de Bosnie pour les raisons qui ont

  6   été mentionnées par M. Stewart et, au lieu de répondre simplement, vous

  7   commencez à expliquer les raisons pour lesquelles vous n'étiez pas

  8   d'accord. La question ne portait pas sur cela.

  9   Me Stewart n'a pas beaucoup de temps. Il y a des contraintes de temps qui

 10   se posent à lui. Je vous inviterais à écouter plus attentivement à ses

 11   questions et à y répondre. Si Me Stewart souhaite obtenir d'autres

 12   informations de votre part, il vous le demandera.

 13   Veuillez poursuivre, Maître Stewart.

 14   M. STEWART : [interprétation]

 15   Q.  Oui, Monsieur Babic.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, les

 17   questions qui ont été posées par l'avocat comprennent son propre point de

 18   vue et c'est la raison pour laquelle je ne peux pas répondre par un simple

 19   oui ou non. Il me faut fournir une réponse plus détaillée.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas toujours nécessaire. Il

 21   n'est pas nécessaire que le témoin soit en désaccord avec la position

 22   exprimée par le conseil de la Défense.

 23   Veuillez poursuivre, Maître Stewart.

 24   M. STEWART : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Babic, puis-je dire, conformément à ce qui a été exprimé par

Page 3552

  1   le président de cette Chambre, que vous pouvez, je peux vous suggérer de

  2   commencer votre réponse par oui ou non. Si la Chambre de première instance

  3   a le sentiment, dans un souci d'équité à votre égard, vous devez être

  4   autorisé à fournir une réponse détaillée, je suis sûr que vous en serez

  5   informé par la Chambre.

  6   Monsieur Babic, conviendrez-vous avec moi que quelque soient les désaccords

  7   qui aient eu lieu entre vous et les dirigeants de Belgrade et les

  8   dirigeants serbes de Bosnie peut-être d'autres personnes concernant le plan

  9   Vance, rien n'indiquait que les dirigeants de Belgrade et les dirigeants

 10   serbes de Bosnie souhaitaient soutenir le plan Vance pour des motifs autres

 11   que le souhait de parvenir à une solution pacifique à la guerre en Croatie,

 12   n'est-ce pas ?

 13   R.  Je pense qu'ils étaient animés par d'autres motifs.

 14   Q.  Je comprends votre réponse. Si je vous comprends bien, vous pensez que

 15   leurs motifs étaient autres que le simple souhait de parvenir à une

 16   solution pacifique à la guerre en Croatie. Est-ce que je vous ai bien

 17   compris ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Excusez-moi. Je pense m'être exprimé correctement, n'est-ce pas ?

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, lorsqu'il y a une double

 21   négation, cela peut toujours créer une confusion.

 22   Si j'ai bien compris votre réponse, Monsieur Babic, ils avaient en tête des

 23   motifs autres que le simple fait de parvenir à une solution pacifique.

 24   M. STEWART : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après moi, oui.

Page 3553

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  2   M. STEWART : [interprétation]

  3   Q.  Très bien, nous allons procéder pas à pas. M. Milosevic, d'après vous,

  4   avait d'autres objectifs en tête, des motifs cachés, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. Il souhaitait partager la Bosnie avec Franjo Tudjman.

  6   Q.  Partager la Bosnie ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  D'après vous, par quels motifs étaient animés les Serbes de Bosnie ?

  9   R.  Je ne comprends pas votre question.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais essayer de clarifier la

 11   question. La première question posée par le conseil de la Défense portait

 12   sur le fait de savoir si chacun s'efforçait de trouver une solution

 13   pacifique au conflit croate ou si les parties intéressées avaient d'autres

 14   objectifs en tête. Vous venez de nous expliquer que les dirigeants de

 15   Belgrade avaient d'autres motifs, des motifs autres que le simple fait de

 16   parvenir à une solution pacifique. La question est la suivante : qu'avaient

 17   en tête les dirigeants serbes de Bosnie ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils partageaient l'objectif commun avec

 19   Slobodan Milosevic. Cet objectif n'était pas de parvenir à la paix en

 20   Croatie. Car deux ou trois mois plus tard, ils ont procédé de nouveau à la

 21   militarisation de la Krajina.

 22   M. STEWART : [interprétation]

 23   Q.  Ma question portait précisément sur les Serbes de Bosnie. Est-ce que

 24   vous déclarez qu'ils partageaient les objectifs de M. Milosevic concernant

 25   la division de Bosnie avec M. Tudjman ?

Page 3554

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Quelle est la partie de la Bosnie que M. Tudjman devait obtenir pour la

  3   Croatie en conformité avec les objectifs dégageant de l'agenda de Bosnie.

  4   R.  Pour autant que je le sache, la région de Bihac, c'est la région en

  5   Herzégovine, la Bosnie centrale, et je pense qu'à l'époque, toutes ces

  6   régions n'avaient pas été très bien définies par Milosevic et Tudjman.

  7   Q.  Est-ce que vous avez exprimé ce point de vue lors de la réunion qui

  8   s'est tenue à Belgrade pendant trois jours, à la fin du mois de janvier et

  9   au début du mois de février 1992 ?

 10   R.  Les débats ne portaient pas là-dessus, je vous répondrais par la

 11   négative.

 12   Q.  Monsieur Babic, les débats portaient sur le fait de savoir si vous

 13   accepteriez et soutiendriez le plan Vance, n'est-ce pas ?

 14   R.  Le plan Vance a été débattu, mais j'ai demandé s'il serait possible

 15   d'envisager une modification de ce plan. En ce qui concerne les dirigeants

 16   de Belgrade et les dirigeant de Bosnie, ils ont demandé à ce que plan nous

 17   soit imposé. C'est sur cela qu'a porté la réunion qui a duré trois jours.

 18   M. STEWART : [interprétation] Peut-être serait-il bon de faire une pause à

 19   ce stade.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, nous reprendrons nos travaux

 21   à 11 heures moins cinq.

 22   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

 23   --- L'audience est reprise à 10 heures 57.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, je rendrai la

 25   décision orale de la Chambre au sujet de la quatrième requête. On demande

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  1   des mesures de protection par voie de déposition par vidéoconférence,

  2   quatrième requête à laquelle il est fait droit.

  3   A présent, j'indique que ce que je viens de dire était destiné à informer

  4   les parties, puisque la décision doit être prononcée en audience publique,

  5   mais je le ferai plus tard. J'ai simplement voulu que les parties soient au

  6   courant.

  7   Madame l'Huissière, pourriez-vous faire entrer M. Babic dans le prétoire ?

  8   M. STEWART : [interprétation] Pendant que le témoin entre, Monsieur le

  9   Président, je me demande si vous souhaiteriez une réponse écrite de la part

 10   de la Défense au sujet de cette décision. Nous sommes entièrement à votre

 11   disposition.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Je pense que la chose est consignée

 13   au compte rendu d'audience. Lorsque nous en parlerons en audience publique,

 14   j'évoquerai d'abord la requête, et je donnerai, éventuellement, la parole à

 15   la Défense pour une réponse orale. Il faut que nous soyons en audience

 16   publique pour ce faire.

 17   M. STEWART : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'exprimerai en audience publique.

 19   M. STEWART : [interprétation] Je crois qu'il est possible de se passer

 20   d'écritures. C'est une bonne chose.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 22   M. STEWART : [interprétation] Merci.

 23   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Monsieur Babic.

 25   Avant de reprendre le contre-interrogatoire, je vous demanderai de prêter

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  1   la plus grande attention aux questions qui vous sont posées. Vous n'êtes

  2   pas ici pour justifier une quelconque position politique adoptée à l'époque

  3   par vous-même ou par d'autres; vous êtes simplement ici pour répondre aux

  4   questions.

  5   Veuillez procéder, Maître Stewart.

  6   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur Babic, j'aimerais maintenant vous interroger au sujet de la

  8   rencontre dont vous dites qu'elle a eu lieu à Bosanski Novi à la fin de

  9   l'été ou au cours de l'automne 1992. Voici ma première question, Monsieur

 10   Babic, à ce sujet. Je pense qu'il est possible que vous fassiez une erreur

 11   relativement importante d'ailleurs au sujet de la date de cette réunion.

 12   R.  Non.

 13   Q.  Si je vous disais qu'il n'y a pas eu de réunion à Bosanski Novi à la

 14   fin de l'été ou au cours de l'automne 1992, mais qu'une réunion

 15   correspondant en gros à votre description, je dis bien, en gros, que s'est,

 16   effectivement, tenue le 24 avril 1993. Que diriez-vous en réponse à cela ?

 17   R.  Je me souviens de la réunion de Bosanski Novi qui s'est tenue avant la

 18   réunion conjointe de l'assemblée de la Républika Srpska et la Krajina serbe

 19   à Prijedor à la fin octobre. Il me semble que cette réunion a eu lieu après

 20   l'enterrement de Jovan Raskovic, c'est-à-dire, au moment où après le mois

 21   de mars 1992, je suis entré pour la première fois sur le territoire de la

 22   Bosnie. Je me souviens de cette réunion qui s'est tenue à la veille de la

 23   réunion de l'assemblée de Prijedor. Cette réunion de l'assemblée de

 24   Prijedor s'est tenue en octobre 1992. Cela s'est passé également la

 25   première fois que j'avais mis les pieds en Bosnie après les conflits. C'est

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  1   selon ces points de référence que j'ai déterminé la période à laquelle la

  2   réunion a eu lieu.

  3   Q.  Vous avez été interrogé, le 16 janvier 1992, n'est-ce pas ? Ceci figure

  4   en page 7, du compte rendu de la première séance, si c'était bien la

  5   première séance. En tout cas, M. Corin vous interroge. C'est l'un des

  6   enquêteurs. J'aimerais, si vous le voulez bien, vous poser quelques

  7   questions au sujet de ces séances conjointes de l'assemblée à Bosanski Novi

  8   et Prijedor. On vous demande : "Est-ce que vous vous rappelez la date de la

  9   réunion de Bosanski Novi ?" Vous répondez : "Non, mais ce que je pense,

 10   c'est qu'elle a eu lieu avant la réunion de Prijedor."

 11   Monsieur Babic, effectivement, vous dites que vous pensez qu'elle a eu lieu

 12   avant la réunion de Prijedor, mais, apparemment, vous n'étiez certain de

 13   rien à ce sujet même à l'époque, n'est-ce

 14   pas ? Est-ce que vous en convenez ?

 15   R.  Je suis sûr que cette réunion a eu lieu avant la réunion de Prijedor

 16   qui a eu lieu à la fin du mois d'octobre. Cela, j'en suis sûr.

 17   Q.  Dans la suite des questions, dans le même compte rendu, à la même page,

 18   M. Corin vous demande : "Vous rappelez-vous s'il y a eu un sujet important

 19   abordé au cours de cette réunion ?" Vous

 20   répondez : "Je ne me souviens pas qu'il y ait eu un sujet particulier." On

 21   vous demande : "Vous souvenez-vous pour quelle raison cette réunion des

 22   deux assemblées s'est tenue conjointement ?" Vous répondez : "Est-ce que

 23   vous parlez de Bosanski Novi ?" M. Corin répond : "Oui." Vous répondez :

 24   "Je ne me souviens pas des motifs pour lesquels cette réunion a été

 25   convoquée. Ce dont je me souviens, c'est que j'étais la personne la plus

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  1   isolée de cette réunion. J'étais assis à l'arrière de la pièce, seul."

  2   Est-ce que ceci correspond aux souvenirs que vous avez aujourd'hui ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  En page 10, du même compte rendu, Mme Uertz-Retzlaff vous demande :

  5   "Dans ces conditions, je vous demande qui était à l'origine de cette

  6   réunion conjointe. Vous souvenez-vous si c'étaient les Serbes de Bosnie ou

  7   les Serbes de Croatie ?" Vous dites : "Je ne sais pas qui était à

  8   l'initiative de la réunion. Officiellement, elle a été convoquée par le

  9   président de l'assemblée." Vous poursuivez, en disant : "Il y avait une

 10   autre personne, rappelez-moi de qui il s'agit -- Krajisnik, Krajisnik."

 11   Vous dites : "On nous demande si quelqu'un représentait la Serbie au niveau

 12   fédéral."

 13   A en juger par vos réponses, Monsieur Babic, il ne semblait pas que vous

 14   ayez considéré M. Krajisnik comme la personnalité centrale de cette réunion

 15   puisque, apparemment, vous aviez même du mal à vous rappeler son nom,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Quelle est votre question ? Excusez-moi.

 18   Q.  Conviendriez-vous qu'apparemment, vous aviez du mal à vous rappeler le

 19   nom de M. Krajisnik à ce moment de l'interrogatoire ?

 20   R.  Peut-être que cela était le cas à ce moment précis, mais il est

 21   impossible que je ne me souvienne pas du nom de M. Krajisnik. Peut-être

 22   qu'à cet instant précis, j'ai du mal à trouver les mots, mais il est

 23   impossible que je ne me souvienne pas du nom de

 24   M. Krajisnik. Peut-être qu'à ce moment-là, j'avais du mal à trouver mes

 25   mots. Que puis-je vous dire à ce moment de l'interrogatoire ? Bien sûr, je

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  1   me rappelle toujours qui est M. Krajisnik.

  2   Q.  Avançons. Même compte rendu, la question suivante est la suivante : "Y

  3   avait-il quelqu'un qui représentait le niveau fédéral ou la Serbie ?" Vous

  4   répondez : "Je ne m'en souviens pas." Après quoi, on vous demande : "Si des

  5   militaires  -- " Apparemment, la question est inachevée. Vous répondez :

  6   "Peut-être de Serbie. Ce quelqu'un était Seselj. Vous ajoutez : "Je ne suis

  7   pas sûr." Ensuite, on vous interroge au sujet des représentants de la JNA.

  8   D'abord, vous avez bien dit, n'est-ce pas, que vous n'étiez pas sûr de la

  9   présence de Seselj à cette réunion. C'est bien cela ?

 10   R.  J'étais sûr de la présence de Seselj. Ma réponse portait sans doute sur

 11   les autres parties de la question. Je suppose que je répondais à ce qui

 12   m'était demandé au sujet de la JNA et de la Serbie. S'agissant de Seselj,

 13   je suis sûr de sa présence. D'ailleurs, c'est le souvenir le plus net que

 14   j'ai de cette réunion.

 15   Q.  Même compte rendu  page 11, Mme Uertz-Retzlaff, vous dit : "Vous ne

 16   vous souvenez pas du sujet, mais de quoi y a-t-il été question au cours des

 17   discussions ?" Vous dites : "Je ne me souviens pas qu'il y ait eu un sujet

 18   particulier. Si je me souviens bien, cette réunion de l'assemblée, cette

 19   réunion conjointe n'avait pas un sujet particulier ou quelque sujet

 20   particulier à l'ordre du jour." Est-ce que ceci correspond au souvenir que

 21   vous avez aujourd'hui ou peut-être à l'absence de souvenir que vous avez

 22   aujourd'hui ?

 23   R.  Je ne me souviens des détails. D'ailleurs, à l'époque je ne m'en

 24   souvenais pas non plus en dehors de l'aspect général de la discussion. Je

 25   ne sais pas si vous savez, si vous avez rappelé que je suis arrivé en

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  1   retard à cette réunion, et que je ne connaissais pas bien les conditions

  2   dans lesquelles cette réunion avait été préparée.

  3   Q.  Page 12, du même compte rendu, on vous interroge au sujet de Prijedor.

  4   Vous dites à la page 13 : "J'ai serré la main de Karadzic." Il est question

  5   à cet endroit de la réunion de Prijedor. "Celle de Krajisnik, je ne me

  6   souviens pas qui étaient les autres participants." En page 14, du compte

  7   rendu, vous dites que cette réunion était présidée conjointement par

  8   Paspalj et Krajisnik. Vous souvenez-vous de cela ?

  9   R.  Oui, je me souviens très bien du fait que cette réunion était

 10   conjointe, à savoir que c'était une réunion de l'assemblée de la Républika

 11   Srpska. A l'ordre du jour, il y avait un point à aborder conjointement avec

 12   les représentants de l'assemblée de la République serbe de Krajina. C'est

 13   seulement pour discuter d'un point que les représentants des deux

 14   assemblées ont été présents.

 15   Q.  Lorsque vous dites que vous pensez que la réunion a été présidée

 16   conjointement Paspalj et Krajisnik, ce que vous dites aujourd'hui, c'est

 17   que cette réponse ne concernait qu'une partie de la réunion, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, c'est d'ailleurs ce qui s'est passé. La réunion n'a été conjointe

 19   que pendant une partie de la séance de l'assemblée de la Republika Srpska.

 20   Je me souviens très bien que nous, représentants de l'assemblée de la

 21   République serbe de la Krajina, dans le cadre de l'ordre du jour qui

 22   prévoyait de discuter de la déclaration d'unification, en tout cas, de la

 23   déclaration relative au désir d'unification, je me souviens que nous avons

 24   été invités à participer à la réunion à ce moment-là. que cette partie de

 25   la réunion a été conjointe sous la présidence Momcilo Krajisnik et de

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  1   Paspalj. J'ai assisté à cette partie de la réunion. Après quoi, une fois

  2   que ce point à l'ordre du jour a été discuté, nous sommes partis. Il y a eu

  3   une pause, et après la pause nous ne sommes pas revenus à cette séance de

  4   l'assemblée.

  5   Q.  S'agissant de cette partie de la réunion qui a été présidée

  6   conjointement par deux présidents de séance, conviendriez-vous qu'entre les

  7   deux hommes, c'était M. Krajisnik qui présidait concrètement la réunion ?

  8   R.  Oui, d'une certaine façon c'était lui l'hôte de la réunion.

  9   Q.  S'agissant de cette réunion précise, il était tout à fait manifeste que

 10   M. Krajisnik était dirigeant de la réunion, puisqu'il la présidait, que

 11   c'était à lui qu'allait le respect et la déférence dus au président de la

 12   réunion, n'est-ce pas ?

 13   R.  Il était président de l'assemblée de la Republika Srpska comme on

 14   l'appelait à l'époque, et Paspalj était président de l'assemblée de la

 15   République serbe de Krajina. Ils présidaient ensemble cette réunion

 16   conjointe.

 17   Q.  Vous dites que dans votre déclaration écrite, je ne crois pas qu'il

 18   soit nécessaire de vous la distribuer, car nous ne parlerons que d'une

 19   toute petite partie de cette déclaration écrite, paragraphe 8, vous l'avez

 20   confirmé dans une partie de votre déposition orale. Vous dites : "Qu'au

 21   cours des années suivantes entre 1993 et 1995, vous avez eu la possibilité

 22   de rencontrer et de parler avec M. M. Krajisnik à plusieurs reprises." Je

 23   crois que vous n'avez parlé que d'une seule rencontre avec lui précisément.

 24   Je vous demande à combien de reprises vous dites aujourd'hui avoir

 25   rencontré M. Krajisnik entre 1993 et 1994 ?

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  1   R.  Je me souviens d'une rencontre en 1993, et je ne me souviens d'aucune

  2   rencontre en 1994.

  3   Q.  Soyons clair, en 1993, cette rencontre a eu lieu où et quand ?

  4   R.  A Knin, au cours de l'été, au mois de juin.

  5   Q.  Dans votre déclaration écrite, la phrase suivante se lit comme suit, je

  6   cite : "Au cours des années suivantes de 1993 à 1995, j'ai eu l'occasion de

  7   rencontrer et de parler avec M. Krajisnik à plusieurs reprises, ce qui m'a

  8   mieux fait comprendre les choses. J'ai compris que Krajisnik était le bras

  9   droit de Karadzic. Je l'ai considéré comme formant finalement une équipe.

 10   Je crois que c'est ainsi qu'ils étaient perçus en Republika Srpska et à

 11   l'extérieur de la Republika Srpska." Monsieur Babic, nous avons entendu ce

 12   que vous avez dit de la visite à Knin qui n'est sans doute pas contesté.

 13   Dans votre déposition, vous dites que vous étiez assis à côté de

 14   M. Krajisnik au dîner de Pale en 1995 également. Conviendriez-vous que ceci

 15   ne semble pas permettre de consolider la compréhension que vous aviez du

 16   rôle de Krajisnik, n'est-ce pas ?

 17   R.  Cela m'a suffit pour comprendre ce que j'ai vu et ce que j'ai entendu

 18   de la bouche de tierces personnes.

 19   Q.  Monsieur Babic, ce que je vous dis, c'est que votre déclaration écrite

 20   et votre déposition orale exagèrent ce que vous saviez de M. Krajisnik et

 21   ce que vous dites avoir vu et observer à son sujet. Après réflexion,

 22   pensez-vous que peut-être mon propos est justifié ?

 23   R.  Il n'est pas exact que c'est une exagération. C'est ainsi que je le

 24   considérais.

 25   Q.  Dans votre déclaration écrite, vous dites que Karadzic et Krajisnik

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  1   semblaient agir sur un pied d'égalité. Monsieur Babic, conviendriez-vous

  2   que votre description de toutes ces réunions et de toutes ces

  3   manifestations de l'époque permettent de penser, très clairement, qu'ils

  4   n'étaient pas sur un pied d'égalité, mais que M. Karadzic était le chef,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  D'abord, je dirais qu'ils étaient toujours ensemble. Je n'entrerai pas

  7   dans les détails de toutes mes rencontres avec M. Krajisnik, mais chaque

  8   fois il était avec M. Karadzic. Ils étaient toujours ensemble, toujours

  9   d'accord, toujours en train d'exposer les mêmes points de vue. Quant à ce

 10   que des tierces personnes m'ont dit, il y en a même qui m'ont dit que, sur

 11   certains sujets, Krajisnik était plus fort que M. Karadzic en Républika

 12   Srpska. J'ai même entendu cela de la bouche de certaines personnes.

 13   Karadzic était peut-être une personnalité plus charismatique, plus

 14   théâtrale, mais, pour moi, ces deux hommes sont égaux et très proches l'un

 15   de l'autre. Ils formaient un duo et, à mon avis, s'ils n'étaient pas

 16   exactement sur la même ligne, ils se suivaient de très près. En tout cas,

 17   c'est ce que je dirais sur la base de ce que je sais.

 18   Q.  Pouvons-nous considérer, Monsieur Babic, s'agissant de ce que vous avez

 19   pu constater des interactions entre M. Krajisnik et le Dr Karadzic, que ce

 20   que vous avez pu dire aux Juges de la Chambre de première instance jusqu'à

 21   présent, quant à ce que vous avez vu et entendu de leur part, pouvons-nous

 22   considérer que ceci constitue tout ce que vous savez à leur sujet ?

 23   R.  Je n'ai pas dit tout ce que je savais. J'ai rencontré M. Krajisnik à

 24   plusieurs reprises en 1995 lors de séances relativement longues, et nous

 25   avons longuement discuté l'un avec l'autre. J'ai également entendu des

Page 3564

  1   propos venant d'autres personnes telles qu'Aleksa Buha, ministre des

  2   Affaires étrangères de la Républika Srpska en 1994. J'ai entendu des choses

  3   assez importantes qui m'ont été dites au sujet de M. Krajisnik. Je dis cela

  4   pour indiquer que je n'ai pas dit tout ce que je savais, à la Chambre,

  5   jusqu'à présent.

  6   Q.  Pour que tout soit clair, à votre avis, avons-nous bien parlé de tout

  7   ce que vous savez de M. Krajisnik de première main, tout ce qui constitue

  8   votre connaissance personnelle de cet homme ?

  9   R.  Pas tout ce que je sais. J'ai appris toutes sortes de choses à son

 10   sujet en mai 1995, dont nous n'en avons pas parlé ici. Ce sont des

 11   connaissances de première main, bien sûr, directes.

 12   Q.  Monsieur Babic, j'aimerais que les choses soient absolument claires. Je

 13   ne vous demande pas, en ce moment, de nous dire ce que des tierces

 14   personnes auraient pu vous dire à son sujet, n'est-ce pas ? Il est possible

 15   que vous ou moi sachions un certain nombre de choses au sujet du président

 16   des Etats-Unis, mais, comme je ne l'ai moi-même, en tout cas, jamais

 17   rencontré, je ne parle pas de cela. Je vous interroge au sujet de ce que

 18   vous savez, personnellement, de contacts que vous auriez pus avoir avec M.

 19   Krajisnik.

 20   Est-ce que vous êtes en train de dire qu'il y a quelque chose d'important

 21   qui entre dans cette définition et que vous n'aviez pas dit aux Juges de la

 22   Chambre, au sujet des deux ou trois années qui font l'objet de votre

 23   déposition ici ?

 24   R.  Je pourrais compléter ce que j'ai pu dire. Ce que je savais de lui a

 25   été renforcé, comme je l'ai déjà dit, grâce aux rencontres que j'ai eues

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  1   avec lui en 1995. J'ai parlé de la rencontre de Pale. Par exemple, le 17

  2   mai, à Bijeljina, le 20 mai, à Banja Luka, le 31 mai, à Bijeljina une

  3   nouvelle fois. Des rencontres très rapprochées au cours desquelles j'ai eu

  4   l'occasion de discuter avec M. Krajisnik et de mieux comprendre sa position

  5   vis-à-vis la Républika Srpska et plus précisément vis-à-vis de Radovan

  6   Karadzic. C'est cela qui m'a permis de conclure, de façon plus certaine,

  7   que ces deux hommes constituaient une équipe, qu'ils avaient pratiquement

  8   la même puissance. Ils ont peut-être une personnalité un peu différente ou,

  9   même si je ne suis pas apte à en juger, en tout cas, je dirais qu'ils

 10   avaient un rapport très proche. Krajisnik était très proche de Karadzic. Je

 11   peux m'en convaincre. Ils avaient à peu près la même puissance, même si --

 12   et j'utiliserais des termes tout à fait polis pour en parler -- même si, en

 13   fait, ils pouvaient se présenter de façon un peu différente sur le plan

 14   personnel, il y en avait un qui était charismatique, extraverti, théâtral,

 15   alors que Krajisnik était un homme de décision, plus calme et plus

 16   tranquille, qui agissait davantage comme un homme d'affaires.

 17   Q.  Mais la discussion, dont vous avez parlé aux Juges de la Chambre, au

 18   cours de laquelle vous avez parlé avec M. Krajisnik lorsque vous étiez

 19   assis à côté de lui, au dîner à Pale en 1995, est-ce la seule fois où vous

 20   avez eu une discussion entre quatre yeux, en tête-à-tête, en privé,

 21   autrement dit, avec M. Krajisnik ?

 22   R.  J'ai parlé avec M. Krajisnik, entre quatre yeux, avec quelques paires

 23   d'yeux supplémentaires, le 17 mai 1995, à Bijeljina, et, le 25 mai 1995, à

 24   Banja Luka, et, le 31 mai 1995 à nouveau, à Bijeljina. Lors de ces

 25   rencontres, ainsi que lors de la rencontre de Pale, je crois m'être fait

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  1   une idée tout à fait complète de M. Krajisnik et de ce qu'il pensait de ces

  2   rapports avec la Républika Srpska, une idée tout à fait claire. J'ai répond

  3   oui, n'est-ce pas, à la question que vous m'avez posée. Après le mois de

  4   janvier 1995, j'ai eu d'autres occasions de me trouver aux côtés de M.

  5   Krajisnik.

  6   Q.  Monsieur Babic, que les choses soient claires, vous avez utilisé

  7   l'expression, en tête-à-tête ?

  8   R.  Non, cela, cela c'est vous qui l'avez dit. J'ai dit entre quatre yeux

  9   avec quelques paires des yeux supplémentaires.

 10   Q.  D'accord, je n'avais pas fait le total de tous ces yeux, Monsieur

 11   Babic. En dehors de ce dîner de Pale, vous est-il arrivé, à quelque moment

 12   que ce soit, au cours de votre vie, d'avoir une conversation avec M.

 13   Krajisnik qui aille au-delà d'un échange de bonjour, ce qui ne constitue

 14   pas vraiment une conversation ? Je vous demande s'il vous est arrivé, à

 15   quelque moment que ce soit, d'avoir une vraie conversation avec M.

 16   Krajisnik, conversation à laquelle les seules personnes présentes, les

 17   seules personnes susceptibles d'entendre ce qui se disait étaient vous-même

 18   et M. Krajisnik ?

 19   R.  Seul avec lui, non. D'ailleurs, à Pale non plus, nous n'étions pas

 20   seuls, lui et moi. Il y avait d'autres personnes assises à cette table. Il

 21   me semble que je ne me suis jamais trouvé seul à seul avec Krajisnik. Il y

 22   avait toujours quelqu'un autour de nous.

 23   Q.  Mais, à ce dîner de Pale, la situation était un peu différente, n'est-

 24   ce pas, dans la mesure où, et je pense que vous en conviendrez, vous étiez

 25   assis à côté de lui, même s'il y avait d'autres personnes présentes, et que

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  1   cela vous a permis d'avoir avec lui une conversation tout de même assez

  2   privée avec lui, n'est-ce pas ?

  3   R.  C'est cela. Dans quelle mesure les autres personnes présentes ont

  4   entendu ce que nous nous disions, je ne saurais le dire. En tout cas, ce

  5   n'était pas une conversation secrète.

  6   Q. Vous avez parlé quelque peu, dans votre déposition, de ce sujet.

  7   Ensuite, vous avez parlé également de ce qui s'est passé, le 19 février

  8   2002. Nous trouvons mention de cela à la page 8 du compte rendu que j'ai

  9   évoqué tout à l'heure. C'est Mme Uertz-Retzlaff qui vous interroge, mais

 10   enfin sa question n'a pas beaucoup d'importance. Je peux commencer votre

 11   réponse que l'on trouve au bas de cette page de ce compte rendu d'audience,

 12   je cite : "Donc, à mon avis, la base de tout cela, c'est que Stanisic et

 13   Milosevic souhaitaient la division de la Krajina, par rapport à la région

 14   de Knin et de la Slovanie, de la Slovanie orientale, et que ceci m'a

 15   renforcé dans ma conviction. En janvier 1995, j'ai entendu Momcilo

 16   Krajisnik dire quelque chose d'assez idiot, à savoir que, si nous obtenions

 17   6 % de plus du territoire de la Bosnie-Herzégovine, cela signifiait 6 %

 18   ajouté à 49 %, et j'ai trouvé que cette conclusion était terriblement

 19   erronée."

 20   Pour replacer les choses dans leur contexte, Monsieur Babic, le pourcentage

 21   cité ici est bien le pourcentage qui avait été cité au cours des

 22   négociations internationales par le groupe de contact, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Plus, au loin au cours de l'interrogatoire, parce que cet

 25   interrogatoire a duré plusieurs jours, on vous interroge, le 22 février

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  1   2002. Excusez-moi un instant. En page 4, du compte rendu, vous dites : "En

  2   ce qui concerne cette affaire, elle a été abordée en rapport avec le plan

  3   établi par le groupe de contact. C'est à ce moment-là que j'ai entendu

  4   Biljana Plavsic dire ce que deviendrait la Krajina de Bosnie, la Républika

  5   Srpska, qui aurait une sortie sur la mer dans la zone des falaises de

  6   Konavle." "Les falaises se trouvent au sud de Dubrovnik en direction du

  7   Monténégro. On vous demande quant a-t-elle dit cela ? Quand avez-vous

  8   entendu cela ? Vous répondez : "En 1995, lorsque le plan du groupe de

  9   contact a été débattu, mais ce n'était pas la réalité du plan du groupe de

 10   contact. C'était leur idée qui se tenait à Pale." Mais où a-t-elle dit cela

 11   et étiez-vous présent ?" Réponse de votre part : "Elle l'a dit en public, à

 12   un certains moments au cours de congés de l'été.

 13   Je cite quelques lignes du compte rendu d'audience, Mme Hildegard Uertz-

 14   Retzlaff vous pose la question suivante, je cite : "L'objectif,

 15   connaissiez-vous l'objectif poursuivi par rapport à Sarajevo ? Est-ce que

 16   vous l'avez appris ?" Vous répondez : "Je ne sais pas, mais il parlait

 17   toujours de la Sarajevo serbe. Il parlait de Sarajevo, en tout cas, d'une

 18   partie de Sarajevo qui serait serbe, ou d'une partie de Sarajevo où il

 19   construirait une nouvelle Sarajevo ou quelque chose de ce genre. C'est ce

 20   que j'ai entendu au cours de l'hiver 1995 de leurs bouches lorsqu'ils ont

 21   parlé de la façon dont ils construiraient une nouvelle Sarajevo."

 22   Question : "Lorsque vous dites 'ils', de qui parlez-vous ? Avec qui

 23   parliez-vous ?" Vous répondez : "Je pense que c'était principalement

 24   Krajisnik qui s'exprimait sur ce sujet."

 25   On vous demande : "En public ou dans des conversations avec vous." Vous

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  1   répondez : "Et bien, nous participions à des manifestations mondaines.

  2   C'était un dîner. Je l'ai entendu dire une chose ou deux dont il était très

  3   convaincu, et dont il a essayé de me convaincre. Je n'ai pas compris de

  4   quoi il parlait, et il a dit : 'Nous n'avons pas besoin de Sarajevo.

  5   Belgrade nous suffit.' Je n'ai pas très bien compris. Il parlait d'une part

  6   de la nouvelle Sarajevo et, ensuite, disait de ne pas avoir besoin de

  7   Sarajevo, et que Belgrade leur suffisait."

  8   On vous demande, ensuite : "Qui a dit cela ?" Vous répondez : "Krajisnik --

  9   Momcilo Krajisnik." On vous demande : "Où cette conversation a-t-elle eu

 10   lieu ?" Vous répondez : "A Pale, dans un hôtel au début de 1995."

 11   Monsieur Babic, je vous demande, si vous pouvez confirmer ce que vous avez

 12   dit lors de cet interrogatoire aujourd'hui, au cours de ce dîner,

 13   apparemment, vous ne compreniez pas du tout ce que M. Krajisnik vous

 14   disait.

 15   R.  Je comprenais très bien. J'avais eu des renseignements antérieurs de la

 16   part de M. Krajisnik que j'avais reçu de Buha le 20 novembre 1994, c'est-à-

 17   dire, un mois un mois et demi avant cette rencontre. Donc je connaissais

 18   très bien le comportement et les opinions de M. Krajisnik au sujet de la

 19   division du territoire et des déplacements des populations que cette

 20   division entraînerait. Mais là, il jouait un petit jeu, je ne voudrais pas

 21   être vulgaire, mais il essayait de tourner autour du pot, et de présenter

 22   ses avis de façon différente en faisant semblant de certaines choses que

 23   j'avais du mal à comprendre. Bien sûr, je savais qu'il était question de

 24   Sarajevo. Il avait dit que les Serbes avaient Belgrade et qu'ils n'avaient

 25   pas besoin de Sarajevo, mais je sais que, plus tard, les Serbes de Bosnie

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  1   ont accusé Milosevic d'avoir vendu, bradé Sarajevo. Voilà à peu près de

  2   quoi il était question dans ces phrases contournées.

  3   Q.  Mais, si vous compreniez assez clairement ce que M. Krajisnik vous

  4   disait au cours de ce dîner, pourquoi est-ce qu'en répondant aux questions

  5   qui vous étaient posées au cours de cet interrogatoire, vous avez dit de ne

  6   pas très bien comprendre ?

  7   R.  Je n'ai pas tout dit au cours de cet entretien. C'est ce que j'ai déjà

  8   dit. Je l'ai dit aux enquêteurs.

  9   Leurs questions étaient posées ainsi. Ils sautaient d'un sujet à l'autre,

 10   peut-être que je n'ai pas toujours eu l'occasion de leur donner l'ensemble,

 11   l'image. Avec la permission de la Chambre, je souhaite ajouter quelques

 12   mots pour clarifier ce qu'il en était de cette réunion et pour ajouter plus

 13   d'éléments concernant ce que disait Krajisnik.

 14   Q.  Vous pourriez peut-être, je ne --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Peut-être --

 16   M. STEWART : [interprétation] Il revient à la Chambre de se prononcer.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisque le témoin nous propose d'ajouter

 18   quelque chose au sujet de ce que disait Krajisnik. C'est important et il ne

 19   s'agit pas là d'une opinion ou de ses propres conclusions.

 20   Allez-y, Monsieur Babic.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, je vais vous dire quelque chose

 22   au sujet de ce que je savais à propos de M. Krajisnik. Le 20 novembre 1994,

 23   à M. Aleksa Buha, qui était à l'époque le ministre des affaires Extérieures

 24   de la Républika Srspka, il a dit quelque chose concernant une réunion entre

 25   Krajisnik et Karadzic avec le représentant du gouvernement croate portant

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  1   sur le partage de la Bosnie-Herzégovine et le déplacement de la population.

  2   Après cela, c'était ma réunion à Pale. Je savais très exactement ce dont

  3   parlait Krajisnik.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, la question était de

  5   savoir si vous pouviez dire quelque chose de plus au sujet de ce que disait

  6   M. Krajisnik lors de cette réunion. Je vous ai donné la permission de

  7   parler de cela concrètement. Veuillez poursuivre.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous dire ce que j'ai déjà entamé

  9   avant au cours de ma déposition devant cette Chambre.

 10   M. Krajisnik et moi, nous avons parlé des sujets différents, des événements

 11   en Bosnie, de leurs pourparlers et cetera. Ensuite, je vais répéter ce que

 12   j'ai déjà dit. Il a fait son discours sur Sarajevo. Il disait que les

 13   groupes ethniques avaient toujours été divisés, chacun vivait dans sa

 14   partie de la ville, qu'ils avaient maintenu leur Sarajevo serbe, mais qu'il

 15   était prêt à renoncer à cette partie serbe de Sarajevo car les Serbes

 16   devaient avoir une seule capitale, à savoir, Belgrade. C'était son

 17   introduction à l'élément principal de son intervention d'après la manière

 18   dont je comprenais les choses. Il voulait dire que, lui, qui était de

 19   Sarajevo, s'il ne regrettait pas relançait au Sarajevo serbe, je devais

 20   être prêt à renoncer à la Krajina serbe car, dans le contexte des

 21   pourparlers avec le groupe de contact, il a dit que les Américains étaient

 22   prêts à leur donner 6 % de territoire de plus contre la Krajina. Ce sont

 23   les détails de cette conversation.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que vous avez déjà dit

 25   cela. Poursuivez, Maître Stewart.

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  1   M. STEWART : [interprétation]

  2   Q.  Vous parlez d'une contradiction. Vous en avez parlé dans votre

  3   entretien. Il s'agit, n'est-ce pas, d'une contradiction entre l'idée de

  4   renoncer totalement à Sarajevo tout en essayant de construire une nouvelle

  5   Sarajevo; est-ce exact ?

  6   R.  Oui. Pas seulement cela, mais ce que j'ai appris par la suite, à savoir

  7   qu'ils accusaient Milosevic d'avoir bradé Sarajevo alors qu'avant les

  8   accords de Dayton, cela veut dire un an avant, j'ai entendu de la bouche de

  9   Krajisnik qu'ils étaient prêts à renoncer à Sarajevo. Ce sont les deux

 10   contradictions que j'ai relevées. Je parlais surtout de cela, de cette

 11   accusation contre Milosevic pour avoir bradé Sarajevo à Dayton.

 12   Q.  Oui. Monsieur Babic, voici ce que je pense de la position de Krajisnik

 13   : à l'époque -- il y avait environ 180 000 Serbes vivant à Sarajevo à

 14   l'époque. Est-ce que c'est conforme à vos connaissances ?

 15   R.  Je ne peux pas parler des chiffres, mais je sais qu'il y avait un grand

 16   pourcentage de Serbes qui vivaient à Sarajevo. Je sais qu'aucun groupe

 17   ethnique n'était majoritaire à Sarajevo. Il y avait un grand pourcentage de

 18   Serbes à Sarajevo, oui. 

 19   Q.  Très bien. Il dit également qu'en 1995, M. Krajisnik n'allait

 20   certainement pas sérieusement prendre en considération la possibilité de

 21   renoncer vraiment à cette population de Sarajevo contre un pourcentage de 6

 22   % de la Bosnie-Herzégovine. C'est ce que dit M. Krajisnik. Est-ce que vous

 23   considérez que ceci est conforme à la réalité, ou est-ce que vous contestez

 24   cela, Monsieur Babic ?

 25   R.  Je maintiens ce que j'ai dit déjà au sujet de l'attitude de Krajisnik

Page 3573

  1   qui l'a exprimé en janvier 1995. Ceci va à l'encontre de ce que vous venez

  2   de dire. Il n'est pas vrai de dire qu'il souhaitait recevoir 6 % de

  3   territoire de plus contre Sarajevo, mais contre la SAO Krajina qui faisait

  4   partie, à l'époque, de la Krajina serbe et contre la Slavonie occidentale.

  5   C'est de cela qu'il s'agissait. C'était l'échange qu'il proposait, 6 % du

  6   territoire de Bosnie-Herzégovine contre la SAO Krajina et la Slavonie

  7   occidentale. Sarajevo venait en plus de tout cela.

  8   Q.  Pour que les choses soient claires, vous dites qu'il a dit les deux. Il

  9   considérait qu'il fallait renoncer à la fois à la Krajina et à Sarajevo. Je

 10   pense que c'est tout à fait clair que c'est ce que vous avez dit. Monsieur

 11   Babic, il n'y a aucune raison pour laquelle M. Krajisnik, même si c'est ce

 12   qu'il pensait à l'époque, et nous considérons que ce n'est pas vrai, il n'y

 13   a aucune raison pour laquelle M. Krajisnik aurait partagé cela avec vous,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Mais si, puisqu'il souhaitait dire justement ce que vous venez de dire.

 16   Il y avait 180 000 Serbes à Sarajevo. C'était sa ville natale qui comptait

 17   pour beaucoup pour lui. Il voulait dire que c'était un vrai sacrifice

 18   personnel, qu'il était prêt à faire ce sacrifice, mais que, moi aussi, je

 19   devais sacrifier quelque chose en renonçant à ma SAO Krajina. C'était le

 20   contexte dans lequel il a dit cela. Il était tout à fait clair ce qu'il

 21   souhaitait dire.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, je souhaite poser une

 23   question afin de mieux comprendre la déposition de ce témoin.

 24   Monsieur Babic, lorsque vous dites : "renoncer à Sarajevo", comment avez-

 25   vous compris cela, à l'époque ? Renoncer à une partie contrôlée par les

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  1   Serbes, à l'époque, c'était une partie de Sarajevo, ou renoncer à tous les

  2   souhaits visant à faire de Sarajevo la capitale des Serbes ? Comment avez-

  3   vous compris cela ? Qu'est-ce qu'il voulait dire, à votre avis, lorsqu'il a

  4   dit, "renoncer à Sarajevo" ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est justement ce que vous venez de dire,

  6   renoncer à la partie de Sarajevo qu'ils contrôlaient, à l'époque.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de cette clarification.

  8   Poursuivez, Maître Stewart.

  9   M. STEWART : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que peut-être c'est vous qui avez fait cette suggestion à M.

 11   Krajisnik plutôt que lui ?

 12   R.  Non, Dieu me garde.

 13   Q.  Je vais vous poser une question, un autre sujet. Vers la fin de l'année

 14   1991, là je parle vraiment de la fin 1991 et début 1992, est-ce qu'à votre

 15   avis, vous œuvriez pour la paix ? Est-ce que vous considériez que c'était

 16   le cas à l'époque ? Est-ce que c'est ce que vous considérez aujourd'hui ?

 17   R.  J'ai dit ce que j'étais à l'époque. A l'époque, j'étais un égoïste

 18   ethnique serbe. Je ne souhaitais pas la guerre. Dans ce sens j'oeuvrais

 19   pour la paix. En même temps, j'étais préoccupé pour le sort des Serbes de

 20   la SAO Krajina.

 21   Q.  Est-ce qu'il est exact de dire que vos préoccupations allaient de pair

 22   avec la volonté d'entamer des opérations militaires nécessaires dans votre

 23   Krajina ?

 24   R.  Si vous parlez de la fin 1991 et début 1992, à ce moment-là, il n'y

 25   avait pratiquement plus d'opération militaire à Krajina. En ce qui concerne

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  1   les opérations militaires qui ont eu lieu avant, j'en ai parlé beaucoup

  2   lors du procès contre Milosevic et devant cette Chambre également.

  3   D'ailleurs, certaines choses à ce sujet ont été également présentées dans

  4   mon procès.

  5   Q.  En particulier, est-ce que vous vous souvenez avoir donné un ordre

  6   militaire le 26 décembre 1991 visant à élever le niveau d'aptitude au

  7   combat de vos forces en vue d'une action contre Zagreb ?

  8   R.  Je me souviens de cela. Ce document s'est présenté et, si mes souvenirs

  9   sont bons, je pense que j'ai fourni une explication. C'est un document qui

 10   m'a été imposé. C'était un coup monté. Il fallait que je le signe pour me

 11   compromettre sur le plan politique. Il n'y avait pas de déplacement de

 12   canons ou d'autre équipement.

 13   M. STEWART : [interprétation] Je vais vous montrer ce document. Nous en

 14   avons des exemplaires. Il n'est pas nécessaire de soumettre au témoin le

 15   document en anglais, puisque j'ai également l'original.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle sera la cote ?

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D16.

 18   M. STEWART : [interprétation] J'ai une traduction anglaise, Monsieur Babic.

 19   Il s'agit d'un document très bref. Puisque le document n'est pas complet,

 20   puisqu'il existe plusieurs points d'interrogation et certaines parties qui

 21   manquent dans la version en anglais, peut-être le plus facile serait que

 22   vous lisiez le texte pour qu'on l'ait en interprétation en anglais.

 23   L'INTERPRÈTE : La cabine française ne possède pas le document.

 24    M. STEWART : [interprétation] Oui, il s'agit d'un document bref. On me dit

 25   que les interprètes ont le document. La cabine française possède le

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  1   document.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'un document tout à fait

  3   bref. Maître Stewart, je suppose que nous allons nous limiter au contenu,

  4   ou est-ce que vous souhaitez lire tout ce qui a été dit au sujet de cela,

  5   l'entête, et cetera ?

  6   M. STEWART : [interprétation] Il n'est pas nécessaire de lire l'entête, à

  7   moins que la Chambre le souhaite, mais le document --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il vous plaît, commencez la lecture

  9   avec les mots -- (ces mots disant en B/C/S).

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] "Au commandement de la 3e Zone opérationnelle.

 11   Un, procéder au déplacement de la batterie VP, de 130 millimètres dans la

 12   région vaste de S. Madjeri, S. Gradac, Gosh Sredicko, en état d'aptitude à

 13   agir contre la cible (Zagreb). X égale 74800. Y égale 76000. Z égale 180.

 14   Aptitude à agir le 27/12 à midi. Consommation des munitions 0,5 b/k.

 15   Informez-moi de l'état du niveau d'aptitude à 11 heures. Le commandant des

 16   forces armées de la Republika Srpska, le Dr Milan Babic."

 17   M. STEWART : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Babic, cela ne fait aucun doute, n'est-ce pas, que vous avez

 19   signé ce document; est-ce exact ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous étiez, à l'époque, le commandant des forces armées de la

 22   République de la Krajina serbe, n'est-ce pas ?

 23   R.  D'après la constitution, oui. J'étais le président de la République.

 24   Q.  Ce document a été signé soit le 26 septembre [comme interprété] ou

 25   presque, n'est-ce pas ?

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  1   R.  La date qui figure est celle du 26 décembre 1991.

  2   Q.  Il n'y a pas de raison de douter de l'exactitude de cette date, n'est-

  3   ce pas ?

  4   R.  Oui, à l'époque, j'étais le président de la République.

  5   Le 19 décembre, je suis devenu président de la République.

  6   Q.  Avez-vous compris ce que vous étiez en train de signer ? C'est exact ?

  7   R.  Je ne me souviens pas bien.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question n'est pas de savoir si vous

  9   vous en souvenez, mais la question est de savoir si vous avez compris ce

 10   que vous avez signé, à savoir si vous lisez ce genre de document, est-ce

 11   que vous comprenez son contenu ? Bien sûr, si aujourd'hui vous vous

 12   souvenez très exactement de ce que vous avez compris à l'époque où vous

 13   l'avez signé, c'est peut-être un détail supplémentaire.

 14   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous

 15   pouvons poser des questions phase par phase.

 16   Q.  Vous n'avez pas de problèmes de compréhension à l'égard de ce document,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Vous n'auriez pas eu de difficulté de compréhension s'agissant de ce

 20   document en décembre 1991, si vous l'avez vu à l'époque ?

 21   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, je ne me souviens pas maintenant de son

 22   contenu, mais je suppose que oui. Cela dit, mes souvenirs ne sont pas

 23   clairs, mais je peux répondre par oui. Cela dit, je ne me souviens pas de

 24   cet événement.

 25   Q.  Est-ce que vous vous souvenez, ou est-ce que vous pouvez nous dire qui

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  1   vous aurait proposé à signer ce document ?

  2   R.  Je pense que ceci faisait partie d'une liasse de documents émanant de

  3   l'état-major. Je pense que c'est le colonel Maksic qui me l'a apporté pour

  4   que je le signe.

  5   Q.  Pour être tout à fait clair au sujet de ce que vous dites, est-ce que

  6   vous essayez de suggérer de manière implicite que cet ordre vous a été

  7   soumis sans que vous n'ayez pu vraiment et clairement comprendre ce que

  8   vous étiez en train d'autoriser ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Je veux vous poser une question à un sujet, Monsieur Babic, au sujet de

 11   quelque chose que vous avez dit à propos de Kijevo. Jeudi de la semaine

 12   dernière, c'est-à-dire, le 3 juin, à la page 35, du compte rendu d'audience

 13   non corrigé, vous avez parlé à la ligne 6 d'un ultimatum imposé aux

 14   citoyens, aux habitants de Kijevo, qu'ils devaient partir, je vous cite :

 15   "Avant le barrage d'artillerie, les force de partir"; est-ce exact ?

 16   C'était la question. Vous avez dit : "Oui. Au début, c'est Martic qui a

 17   imposé cet ultimatum quelques jours avant l'attaque de l'artillerie de la

 18   JNA. Personnellement, je me suis opposé à cela, mais j'étais le président

 19   de la municipalité et le premier ministre du gouvernement. Cependant,

 20   malgré mes protestations, au bout de dix jours à peu près, l'attaque de la

 21   JNA a commencé. Après cela, j'ai reçu une information que la police, les

 22   hommes de Martic et la Défense territoriale locale ont participé à cette

 23   attaque."

 24   Tout d'abord, penchons-nous sur cet ultimatum ?

 25   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je suis en train de

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  1   présenter deux documents, à savoir, un exemplaire de la version en B/C/S

  2   sur un seul papier et la traduction en anglais.

  3   Q.  Est-ce que vous souhaitez vous rafraîchir la mémoire, Monsieur Babic,

  4   en lisant la version en B/C/S.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, est-ce que la cote

  6   de l'original sera D17 et de la traduction D17.1 ?

  7   M. STEWART : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Babic, est-ce que vous avez eu l'occasion de lire ce

  9   document ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  On vous a posé cette question le 13 janvier 2002, lorsque vous avez été

 12   interrogé. Ceci figure à la page 15 de la première transcription de

 13   l'entretien de ce jour. En fait, cela commence à la page 14, ligne 20 : "En

 14   ce qui concerne Kijevo, par la suite, j'ai entendu dire qu'à la fois

 15   l'armée et la police de la Krajina avaient des informations qu'un poste de

 16   police allait être établi à Kijevo par le ministère de l'Intérieur de la

 17   Croatie." Cela, c'était en avril 1991. J'ajoute simplement l'année. "Donc

 18   la JNA était déjà déployée autour de Kijevo, et je suppose que Martic

 19   savait cela puisqu'il était en contact avec les renseignements militaires.

 20   Je ne pense pas qu'ils ne l'avaient pas informé de cela et je ne pense pas

 21   qu'ils ont empêché, de quelque manière que ce soit, l'administration -- la

 22   direction de la police de Sibenik dans leurs efforts visant à constituer un

 23   poste de police à Kijevo, et ce poste de police existait depuis plusieurs

 24   mois. Au bout de quelques mois, Martic a imposé un ultimatum disant qu'ils

 25   devaient se retirer de Kijevo. C'était un ultimatum qui a été rendu de

Page 3580

  1   manière publique. Je ne me souviens pas très exactement ce qui a été publié

  2   -- quel était le contenu de cet ultimatum, mais je pense que cet ultimatum

  3   portait sur tout le monde à Kijevo. D'après la manière dont je vois les

  4   choses, il a menacé l'ensemble de la population de Kijevo. J'ai constaté

  5   qu'il s'agissait là, non pas seulement d'une action coordonnée entre la

  6   police et les autres, d'après la manière je comprenais les choses, mais je

  7   considérais que ceci risquerait de provoquer un conflit interne au sein de

  8   la Krajina. A ce moment-là, j'ai fait une déclaration publique disant que

  9   les forces armées de la Krajina, malgré cet ultimatum de Martic à

 10   l'encontre du poste de police de Kijevo, les forces armées de Krajina ne

 11   devaient pas violer le cessez-le-feu puisqu'un accord avait déjà été passé

 12   entre les organes fédéraux et les organes croates, donc cet accord était ce

 13   qui était le plus important à l'époque. Il s'agissait là d'une forme dans

 14   laquelle j'exprimais mon opposition."

 15   Après, d'autres choses ont été dites et vous continuez : "Donc je risquais

 16   de faire l'objet des attaques contre ma personne. Je risquais cela auprès

 17   du public et auprès des personnes qui portaient des armes en Krajina. Ils

 18   allaient s'opposer à moi. Mais, malgré cela, j'ai fait cette déclaration

 19   publique puisque je pensais qu'il y avait moins de risque si quelqu'un

 20   s'attaquait contre moi plutôt que de provoquer un vrai conflit."

 21   Ensuite, Mme Retzlaff vous a demande : "Pourquoi n'avez-vous pas donné un

 22   ordre à Martic puisque vous étiez le président ? Pourquoi n'avez-vous pas

 23   fait cela ?" Vous avez dit : "Et bien, cela ne marchait pas comme cela.

 24   Cela ne fonctionnait pas cela. C'était cela le problème. Je ne pouvais pas

 25   lui donner des ordres. J'étais le président du gouvernement. Le premier

Page 3581

  1   ministre et, lui, en tant que ministre, était responsable devant moi, mais

  2   cela, c'était sur le plan formel et juridique. Mais je n'avais pas

  3   suffisamment de pouvoir. C'est lui qui l'avait. J'avais seulement le

  4   pouvoir sur le papier. Lui, il contrôlait les forces armées, la police

  5   armée, la police spéciale. Il avait le monopole du pouvoir."

  6   On vous a posé la question suivante : "D'accord, je comprends, mais est-ce

  7   que vous avez essayé ?" Votre réponse : "J'ai essayé, par le biais de

  8   certains manœuvres politiques, de le limiter."

  9   Question : "Est-ce que vous avez directement essayé d'empêcher Martic dans

 10   cela ?" Vous dites : "Je en l'ai pas dit parce qu'à l'époque, je ne le

 11   pouvais pas."

 12   Ensuite, l'entretien se poursuit : "J'ai été conscient que cela ne relevait

 13   pas de lui seulement."

 14   Question : "Mais si vous n'avez jamais essayé de le faire, comment vous

 15   savez qu'il n'aurait pas obéi ?" "Et bien, il s'agissait" -- vous dites

 16   dans votre réponse -- "d'une communication publique." Cela, c'était plus

 17   puissant. Ici, je me suis adressé au public -- à l'opinion publique pour

 18   recevoir de l'aide, et je me disais que cela risquait de l'influencer.

 19   C'est ainsi que l'on a eu cet échange. Mais nous n'avons jamais parlé de

 20   cela entre nous. Physiquement, il était ailleurs."

 21   Mme Uertz-Retzlaff : "Est-ce que -- vous dites que vous n'aviez pas de

 22   pouvoir. Est-ce que vous avez essayé d'empêcher Martic par le biais de

 23   Milosevic, qui était le chef, en ce qui concerne le conflit à Kijevo ?"

 24   Vous dites : "Non. Je n'ai pas parlé à qui que ce soit."

 25   Mme Uertz-Retzlaff : "Mais pourquoi ?" Vous dites : "J'ai supposé qu'il

Page 3582

  1   n'allait pas risquer cela. Je me suis dit qu'il n'allait pas risquer un

  2   conflit en Krajina puisque notre position politique était de ne pas entrer

  3   dans un conflit."

  4   Mme Uertz-Retzlaff : "Lorsque vous dites 'il', vous parlez de qui ? Vous :

  5   "Martic ou la police ?"

  6   Monsieur Babic, deux fois, au cours des 10 -- 15 dernières minutes, vous

  7   avez dit qu'apparemment, vous avez protesté publiquement concernant

  8   certaines actions; est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

  9   R.  Est-ce que vous parlez de la déclaration que j'ai faite  aux enquêteurs

 10   à Belgrade ?

 11   Q.  Soyons très concrets. Par exemple, vous dites, dans votre déclaration,

 12   que Martic était ailleurs physiquement. Est-ce que quelqu'un vous a suggéré

 13   cela ? Est-ce que vous avez essayé de dire que c'est pour cela que vous

 14   n'avez même pas essayé de l'empêcher, que vous ne lui avez pas donné

 15   d'ordre allant dans ce sens ?

 16   R.  Non, pas cela. J'ai mentionné déjà la raison. C'est lui qui détenait

 17   vraiment le pouvoir. Mon pouvoir était seulement sur le papier. J'avais

 18   l'opinion publique, mais le vrai pouvoir et la vraie structure qui le

 19   protégeait, c'était Stanisic et Milosevic, et cela c'était tout. Eux, ils

 20   le contrôlaient pratiquement.

 21   Q.  Monsieur Babic, je souhaiterais vous présenter un autre document. Vous

 22   n'avez plus besoin du document que vous avez sous les yeux.

 23   M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit là de deux

 24   documents -- deux séries de documents. Tout d'abord, il y a une lettre

 25   ouverte rédigée par M. Milosevic et adressée à Monsieur Babic. Il s'agit

Page 3583

  1   juste d'une lettre ouverte, elle est datée du 8 janvier 1992.

  2   Le deuxième document est une réponse à la lettre ouverte du président de la

  3   République de Serbie, Slobodan Milosevic. Il s'agit d'une réponse de M.

  4   Babic.

  5   Je souhaiterais tirer un point au clair, Monsieur le Président, si vous le

  6   voulez bien.

  7   Monsieur le Président, il s'agit là des traductions qui nous ont été

  8   communiquées par l'Accusation.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dois-je comprendre que la lettre, datée

 10   du 8 janvier, est présentée en deux versions : la première est la version

 11   originale; la deuxième est une publication. En effet --

 12   M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il a été fait

 13   mention en détails de cela dans la presse écrite.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'agit-il du même texte ?

 15   M. STEWART : [interprétation] Oui, mais à toutes fins utiles, je pense

 16   qu'il s'agit de la même chose.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 18   M. STEWART : [interprétation] M. Babic peut se référer aux versions

 19   originales en B/C/S de ces deux documents.

 20   Q.  Monsieur Babic, est-ce que --

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je d'abord demander à Mme la

 22   Greffière de bien vouloir nous donner les cotes de ce document ?

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction D18.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit de la lettre du

 25   8 janvier, rédigée par Slobodan Milosevic.

Page 3584

  1   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La réponse à la lettre ouverte portera

  2   la cote D19.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière. Je souhaite

  4   souligner que, dans les deux cas, nous semblons disposer de l'original et

  5   de la version publiée de cette même lettre.

  6   Veuillez poursuivre, Maître Stewart.

  7   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Q.  Je ne peux pas aller très vite, je dois tenir compte des interprètes,

  9   Monsieur Babic. La lettre ouverte de M. Milosevic, qui vous a été adressée,

 10   se lit comme suite, je cite : "Je pense qu'il est de mon obligation et de

 11   ma responsabilité d'exprimer mon désaccord avec votre position selon

 12   laquelle vous ne voulez pas que les forces de maintien de la paix des

 13   Nations Unies protégent le territoire de la Krajina conformément au plan

 14   Cyrus Vance. Le fait de rejeter la protection des forces de maintien de la

 15   paix des Nations Unies met en danger les intérêts vitaux du peuple serbe

 16   car cela signifie que vous refusez, ainsi de mettre fin immédiatement à la

 17   perte de vies humaines et à abandonner le chemin de la paix dans la

 18   recherche d'une solution à la crise. Le seul objectif de la présence des

 19   Nations Unies est de maintenir la paix.

 20   "Je sais que vous avez été informé en détails à la présidence yougoslave du

 21   plan Cyrus Vance qui précise que la présence des forces de maintien de la

 22   paix des Nations Unies n'empêche pas une solution politique et que leur

 23   objectif est d'empêcher toute formation militaire ou groupes armées

 24   d'entrer sur les territoires protégés par les Nations Unies. Vous avez

 25   également été informé que la seule formation armée sur ces territoires

Page 3585

  1   outre les forces de maintien de la paix seraient la police locale qui

  2   garantirait complètement la paix et la sécurité de tous les citoyens.

  3   "Je considère que votre attitude négative est tout à fait irresponsable.

  4   Vous devriez savoir que la population a fait des sacrifices afin

  5   d'échapper, de se protéger du génocide et ait fin des sacrifices afin de

  6   protéger leur liberté et leur sécurité mais ils ne devraient pas faire de

  7   sacrifices en raison de la vanité de leurs hommes politiques. Si les

  8   combats étaient menés dans un objectif juste et honorable, la liberté et la

  9   sécurité de la population en Krajina et leur protection à l'encontre du

 10   génocide qui les menace cela ne pourrait pas -- on ne peut pas être contre

 11   une mesure décisive visant à atteindre ce but."

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, avez-vous l'intention de

 13   lire l'intégralité de ce texte ?

 14   M. STEWART : [interprétation] Je ne souhaite pas particulièrement le faire,

 15   mais, d'un autre côté, je souhaiterais être équitable à l'égard du témoin.

 16   Mais je m'en remets à la Chambre. Je souhaite simplement être équitable

 17   vis-à-vis du témoin avant d'entendre sa réponse à ce sujet.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais, si l'on suppose que le

 19   contre-interrogatoire ne sera pas conclu avant la prochaine pause, je

 20   souhaiterais inviter le témoin à lire ou à relire ce document car il l'a

 21   peut-être déjà lu auparavant et peut-être pourriez-vous nous dire

 22   brièvement sur quoi porte cette correspondance ? Ensuite, pourriez-vous

 23   poser des questions au témoin après la pause sur cette question ?

 24   M. STEWART : [interprétation] Il ne me reste pas beaucoup de texte à lire.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais, si vous lisez l'intégralité

Page 3586

  1   de ces deux lettres, cela nous prendra beaucoup de temps, notamment, si

  2   vous lisez aussi lentement que vous l'avez fait ici jusqu'à présent, ce qui

  3   est très apprécié d'ailleurs. La deuxième pause pourrait être prise plus

  4   tôt ou plus tard que prévu. Nous pouvons même la prendre maintenant.

  5   Ensuite, nous pourrions demander au témoin de profiter de cette pause pour

  6   lire le document. Vous poserez quelques questions au sujet de cette

  7   correspondance, ensuite, afin de savoir si M. Milosevic critique M. Babic

  8   sur sa position au sujet du plan Cyrus Vance et, ensuite, vous pourrez

  9   poser vos questions.

 10   M. STEWART : [interprétation] Très bien. Mais il ne me reste pas beaucoup

 11   de documents à lire, mais il serait, sans doute, pratique de procéder

 12   ainsi.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 14   M. STEWART : [interprétation] Il s'agit d'une possibilité.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Très bien. Nous allons prendre une

 16   autre pause et nous reprendrons à 1 heure moins 25. Il nous restera,

 17   ensuite, 70 minutes d'audience. Nous allons faire une pause de 20 minutes

 18   et nous reprendrons à une heure moins 25.

 19   --- L'audience est suspendue à 12 heures 13.

 20   --- L'audience est reprise à 12 heures 39.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, veuillez faire

 22   entrer Me Mueller par une porte pendant que M. Babic rentrera dans le

 23   prétoire par l'autre.

 24   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Monsieur Babic.

Page 3587

  1   Maître Stewart, vous pouvez procéder.

  2   M. STEWART : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Babic, vous avez eu la possibilité pendant la pause je

  4   suppose, de lire ces deux lettres, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  J'aimerais vous demander une confirmation. La lettre que M. Milosevic

  7   vous a envoyée, était une lettre ouverte, n'est-ce pas ? Je vous demande si

  8   votre réponse, que vous lui avez adressée, était également une lettre

  9   ouverte et susceptible d'être publiée ?

 10   R.  La lettre de Milosevic a été diffusée le 8 à la télévision et le 9 dans

 11   les journaux, et elle m'est parvenue sous pli scellé deux ou trois jours

 12   plus tard avant que je ne réponde. J'en ai eu connaissance par la voix

 13   publique et par la voix privée.

 14   Q.  Oui. Monsieur Babic, quand je vous pose une question --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, je vous demanderais

 16   d'écouter attentivement les questions qui vous sont posées. La question

 17   consistait à vous demander si la réponse que vous avez envoyée, vous aviez

 18   l'intention qu'elle soit publiée, et vous avez répondu au sujet de la

 19   lettre de M. Milosevic, que vous l'avez reçue après sa publication. Mais la

 20   question qu'on vous posait, en fait, consistait à vous demander si vous

 21   aviez l'intention que votre réponse soit publiée.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bien sûr.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Maître Stewart.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi.

 25   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci, Monsieur

Page 3588

  1   Babic.

  2   Q.  Monsieur Babic, un aspect particulier sur lequel j'aimerais que nous

  3   passions rapidement de façon à éviter toute répétition. Voyez ce qui figure

  4   au quatrième paragraphe de votre lettre dans lequel vous faites valoir

  5   votre objection au fait que le système constitutionnel et juridique de la

  6   Croatie s'est appliqué à la République Serbe de Krajina. Plus loin dans ce

  7   même paragraphe, quelques lignes plus bas, vous dites également être opposé

  8   au délai prévu de six mois. Au milieu de la deuxième page, au milieu du

  9   paragraphe court qui se trouve à cet endroit, vous dites : "Que compte tenu

 10   du fait qu'après le départ des forces des Nations Unies, toute action de la

 11   part de l'armée yougoslave, si elle se déroulait dans ces conditions,

 12   serait considérée comme agression." Bien sûr, là il est question d'une

 13   période où la JNA se serait déjà retirée.

 14   Conviendrez-vous avec moi que ces quelques passages, qui figurent dans la

 15   lettre, englobent finalement les points principaux de désaccord que vous

 16   aviez au sujet du plan, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Au bas de la première page, vous présentez votre proposition, qui est

 19   une autre solution, impliquant le recours aux Casques bleus, à déployer sur

 20   la ligne de tirs, et vous dites : "Que les agresseurs néo-nazi croates, et

 21   vous parlez des agresseurs néo-nazi croates et des forces armées assurant

 22   la défense pour la République serbe de Krajina."

 23   Est-ce que vous considériez qu'il était utile de vous exprimer ainsi dans

 24   une lettre envisagée pour publication ? Est-ce que vous considériez utile

 25   de parler de l'agresseur néo-nazi croate ?

Page 3589

  1   R.  Oui. A l'époque, c'était la terminologie en vigueur qui rendait compte

  2   de l'état d'esprit qui prévalait à l'époque, d'un état psychique. On

  3   retrouve cela dans le vocabulaire utilisé.

  4   Q.  De même au dernier paragraphe de votre lettre, vous parlez de "la

  5   racine du mal que les Oustachi croates nous ont infligée." Est-ce que vous

  6   ferez la même observation au sujet de l'emploi de ces termes ? Parlerez-

  7   vous du vocabulaire qui avait cours à l'époque et qui rendait compte de vos

  8   sentiments de l'époque ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  N'est-il pas exact que ce langage incendiaire avait pour but de

 11   satisfaire votre peuple, à savoir, les habitants de la Krajina, que vous

 12   dirigiez.

 13   R.  Non, ce n'est pas cela l'important. C'était, en fait, l'expression de

 14   mon sentiment personnel, de ma façon de percevoir la situation. Je suis

 15   d'accord avec vous si vous dites que ce vocabulaire a eu l'effet négatif

 16   évoqué par vous.

 17   Q.  Premier paragraphe complet que l'on trouve en page 2, nous lisons ce

 18   qui suit : "S'agissant de la durée de la mission de la maintien de la paix

 19   qui ne devrait durer que six mois, nous ne sommes pas prêts à désarmer,

 20   nous ne sommes pas prêts à laisser notre destin dans les mains incertaines

 21   de tiers." Est-il permis de résumer ce propos comme signifiant : nous

 22   poursuivrons les combats ?

 23   R.  Non. Nous ne sommes pas d'accord. Nous continuerons à nous battre.

 24   Peut-être. Enfin, je vais relire ce passage tout de même pour voir

 25   exactement ce qui est écrit.

Page 3590

  1   Q.  Vous n'êtes pas d'accord. D'accord. En bas de la première page de votre

  2   lettre, on trouve votre proposition qui est une autre proposition dont je

  3   viens de parler. Il est question de déployer les Casques bleus sur la ligne

  4   de confrontation, et cetera. A cette époque, n'est-ce pas, Monsieur Babic,

  5   cette proposition était absolument irréaliste et il n'y avait absolument

  6   pas la moindre chance, concrètement, qu'elle soit acceptée par les parties

  7   opposantes ?

  8   R.  Je ne suis pas d'accord. C'était une première proposition que Borisav

  9   Jovic avait évoquée d'ailleurs, après avoir demandé aux Nations Unies de

 10   s'engager. C'était la première version dont j'ai eu connaissance y compris

 11   avant la signature de la deuxième version du texte par Milosevic et

 12   Kadijevic. Le 27 janvier, Marek Goulding, sous-secrétaire chargé des

 13   questions du maintien de la paix était à Belgrade. M. Goulding, ce

 14   secrétaire chargé des opérations de paix, a ouvert la possibilité que l'on

 15   discute de diverses solutions. Excusez-moi, vous parliez de la lettre et je

 16   suis en train de parler d'une réunion. Excusez-moi. Je suis passé à des

 17   événements ultérieurs dans mes pensées.

 18   Je vais répondre à votre question. La possibilité que ce déploiement

 19   particulier des forces de paix se réalise existait, car on demandait

 20   l'accord de la Krajina par rapport au plan. Autrement dit, à ce moment-là,

 21   on nous a demandé ce que nous pensions, et j'ai considéré que cette autre

 22   proposition avait une possibilité de réalisation. Ensuite, est arrivé ce

 23   que j'avais dit tout à l'heure c'est-à-dire que ce sous-secrétaire, chargé

 24   des opérations de paix, Marek Goulding, est arrivé, et il a été question de

 25   cela au cours de la réunion. Il y a la réunion de la présidence, et cetera.

Page 3591

  1   Q.  Monsieur Babic, la réalité c'est qu'il n'y avait pas la moindre chance

  2   que M. Tudjman appose sa signature sur votre proposition de rechange,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  A ce moment-là, il était clair que Milosevic ne souhaitait  pas changer

  5   les bases de son accord avec Tudjman. En tout cas, c'est ce que j'ai

  6   compris. Tudjman disait également que le gouvernement croate allait

  7   immédiatement imposer son contrôle sur les municipalités serbes de Krajina,

  8   et cetera. Notre réaction, d'ailleurs, c'est écrit dans cette lettre, entre

  9   autres choses, a consisté à dire que nous n'acceptions la loi croate sur

 10   notre territoire. Après quoi, il y a eu envoi d'une proposition au

 11   secrétaire général du conseil de Sécurité, et le conseil de Sécurité s'est

 12   réuni et a décidé que la loi croate ne s'appliquerait pas aux territoires

 13   de la Krajina. Voilà, c'était le contexte dans lequel tout cela se passait.

 14   Q.  Vous avez encore une fois choisi de ne pas répondre à ma question,

 15   Monsieur Babic. Mais je n'insisterai pas.

 16   R.  Excusez-moi. Veuillez répéter. Non, je vous en prie, répétez votre

 17   question. Je n'ai aucune intention de ne pas répondre à votre question.

 18   Peut-être me prêtez-vous cette intention.

 19   Q.  Monsieur Babic, n'argumentons pas. Je vais vous reposer la question.

 20   Ecoutez-la attentivement, je vous prie. Je vous ai dit: Qu'il n'y avait

 21   pas, n'est-ce pas, la moindre chance que M. Tudjman appose sa signature à

 22   votre proposition, qui était une proposition de rechange ?

 23   R.  Ce projet de modification a été soumis par le conseil de Sécurité, donc

 24   il a accepté cela. Autrement dit, il existait, y compris la possibilité que

 25   M. Tudjman change d'avis et, d'ailleurs, il a changé d'avis.

Page 3592

  1   Q.  Il a accepté votre proposition ?

  2   R.  Correction. Il a accepté un amendement au plan, un addendum au plan,

  3   qui avait pour objet l'application des lois croates sur les territoires de

  4   la Krajina.

  5   Q.  Le déploiement des Casques bleus sur la ligne de confrontation, dont

  6   vous avez parlé dans votre lettre, il n'y avait aucune chance que M.

  7   Tudjman accepte cela; est-ce exact ?

  8   R.  Moi, je considérais qu'une chance qu'il l'accepte existait. C'est la

  9   raison pour laquelle nous en avons parlé. C'était un modèle qui avait été

 10   appliqué à Chypre.

 11   Q.  J'aimerais, dans ces conditions, que vous examiniez à nouveau la lettre

 12   que vous avez déjà examinée il y a quelques instants, la lettre du 19

 13   décembre 1991, écrite par M. Krajisnik. C'est une pièce à conviction qui a

 14   été versée au dossier dans le cadre de la déposition de M. Treanor. Il

 15   s'agit de la pièce 65, qui fait partie du classeur numéro 6, page 67, des

 16   documents versés au dossier par le truchement de M. Treanor.  Le témoin a

 17   eu ce document sous les yeux au cours de l'interrogatoire principal.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous en avez encore un

 19   exemplaire, Maître Stewart, parce que nous ne gardons pas tous les

 20   documents de ces classeurs. Il y en a 18.

 21   M. STEWART : [interprétation] Non, non, bien sûr. Je comprends, Monsieur le

 22   Président, mais c'est un document --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends également. Mais, en

 24   tout état de cause, peut-on placer ce document sur le rétroprojecteur ?

 25   M. STEWART : [interprétation] Oui, c'est possible, Monsieur le Président.

Page 3593

  1   Je crois qu'il s'agit de l'intercalaire 67. Je dirais simplement, Monsieur

  2   le Président, que le responsable des photocopies a fait un travail héroïque

  3   de reproduction documentaire. Notre problème permanent d'ailleurs, c'est

  4   que nous avons découvert à notre arrivée ici ce matin que la photocopieuse,

  5   qui se trouve dans la salle des conseils de la Défense, ne fonctionnait

  6   pas.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document sera placé sur le

  8   rétroprojecteur, Maître Stewart. Y a-t-il un exemplaire pour le

  9   rétroprojecteur ? Monsieur Babic, c'est une lettre datant du 19 décembre

 10   1991, dans laquelle M. Krajisnik, président de l'assemblée du peuple serbe

 11   de Bosnie-Herzégovine, répond à l'invitation qui lui est adressée

 12   d'assister à cette commémoration historique de la proclamation de la région

 13   autonome serbe de Krajina. Malheureusement, il dit ne pas être en mesure

 14   d'assister à cette cérémonie.

 15   Maître Stewart, veuillez procéder.

 16   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Q.  Monsieur Babic, c'est bien, n'est-ce pas, une lettre telle que les

 18   représentants politiques ont l'habitude de s'adresser, suite à un succès

 19   aux élections ou à la création d'une institution ou dans le dans le cadre

 20   de rendez-vous particulier, c'est bien le genre de lettre que l'on s'envoie

 21   couramment entre représentants politiques occasions, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Conviendrez-vous également que le fait de s'exprimer par écrit dans ces

 24   termes très fleuris et très enthousiastes est une caractéristique assez

 25   serbe, n'est-ce pas, même si ce n'est pas uniquement une caractéristique

Page 3594

  1   serbe ?

  2   R.  Je ne sais pas si le langage est fleuri. En tout cas, il exprimait

  3   l'opinion politique de M. Krajisnik, à l'époque, qui était également celle

  4   de d'autres personnes. Je ne vois rien de particulièrement fleuri dans ce

  5   langage.

  6   Q.  Bien.

  7   R.  Ou démonstratif.

  8   Q.  Monsieur Babic, comprenez bien ce que j'ai déjà dit tout à l'heure,

  9   n'avait en aucun cas l'intention de blesser qui que ce soit.

 10   Le simple fait que vous ne voyez rien de particulièrement fleuri dans le

 11   langage utilisé dans cette lettre, n'est-il pas le signe que c'était la

 12   façon tout à fait normale et courante de s'exprimer lors d'une cérémonie

 13   entre Serbes dans une lettre, dans un document écrit ?

 14   R.  Il n'y a pas eu une multitude de telles occasions. C'était une occasion

 15   très particulière, à savoir, la création de la Krajina serbe. Cette lettre

 16   est une lettre politique destinée à entériner un moment politique

 17   particulier.

 18   Q.  La façon dont vous avez parlé de cela dans votre déclaration écrite de

 19   même d'ailleurs que dans votre déposition orale, Monsieur Babic, ne montre-

 20   t-elle pas de la façon la plus claire qui soit, que vous aviez un point de

 21   vue assez négatif sur le contenu de cette lettre, que vous considériez

 22   qu'il n'était pas très opportun pour M. Krajisnik d'avoir écrit cette

 23   lettre, n'est-ce pas ?

 24   R.  Je ne vois pas très bien ce que vous voulez dire. Je crois que cette

 25   lettre était tout à fait adaptée à la situation et correspondait très bien

Page 3595

  1   à ce que représentait M. Krajisnik à l'époque. Je ne vois pas très bien ce

  2   que vous sous-entendez dans votre question.

  3   Q.  Monsieur Babic, êtes-vous en train de dire que vous ne considérez pas

  4   que cette lettre soit inadaptée dans son contenu ou dans les mots qui sont

  5   utilisés à l'occasion qui fait l'objet de cette lettre ?

  6   R.  Elle correspond tout à fait à l'événement aussi bien dans son ton que

  7   compte tenu des positions politiques qui étaient défendues par l'auteur de

  8   cette lettre à l'époque. Il est tout à fait clair que dans cette lettre,

  9   c'est un point de vue politique correspondant aux circonstances de l'époque

 10   qui est exprimé. J'espère avoir bien répondu à votre question.

 11   Q.  Monsieur Babic, je souhaiterais vous poser quelques questions au sujet

 12   de conversations interceptées. On vous a posé des questions au sujet d'une

 13   conversation interceptée particulière concernant une conversation qui

 14   aurait eu lieu en juin 1991. Il y a été fait référence le mercredi 2 juin,

 15   page 82 du compte rendu d'audience. Il s'agit d'une conversation entre M.

 16   Karadzic et

 17   M. Kertes [phon]. Vous l'aviez entendue, et vous avez été en mesure

 18   apparemment d'identifier les intervenants. Vous avez déclaré que les

 19   références faites à la farine et au sel, aux supermarchés, ainsi de suite,

 20   cela correspondait à une conversation chiffrée concernant la livraison

 21   d'armes. Monsieur Babic, qu'est-ce qui vous permet de nous parler de la

 22   signification de cette conversation interceptée ?

 23   R.  Je connais le contexte, les circonstances, les événements, les

 24   intervenants, la terminologie, les personnes intéressées, le moment où

 25   cette conversation a eu lieu.

Page 3596

  1   Q.  Il y a beaucoup d'autres conversations interceptées que nous n'avons

  2   pas examiné en détail, mais qui sont inscrites dans le cadre de votre

  3   déposition. En ce qui concerne les autres conversations interceptées, vous

  4   dires que vous connaissez les participants et ainsi de suite. Etes-vous

  5   d'accord avec moi pour dire que dans la plupart des cas, ce que vous avez

  6   déclaré aux Juges de cette Chambre de première instance peut-être déduit à

  7   la simple lecture du texte de ces conversations ?

  8   R.  Je puis vous dire que ces textes confirment ce que j'ai dit.

  9   Q.  Est-ce que cela concerne toutes les conversations interceptées ? Avez-

 10   vous des informations précises concernant cette conversation interceptée

 11   qui vous permet de mieux comprendre sa signification ?

 12   R.  Je vous ai déjà fait mes commentaires au sujet des autres conversations

 13   que j'ai entendues au sujet des personnes dont je reconnais la voix, au

 14   sujet du contenu de leurs propos. Je pense vous avoir donné mon point de

 15   vue sur chacune de ces conversations. Est-ce de cela que vous vouliez

 16   parler ?

 17   Q.  J'essaie d'éviter d'examiner l'intégralité de ces conversations.

 18   Penchons-nous sur la conversation interceptée qui a été enregistrée comme

 19   se déroulant entre M. Karadzic et M. Krajisnik. J'essaie de trouver une

 20   date. Apparemment, il n'y a pas de date. Vous avez dit, Monsieur Babic, que

 21   cette conversation que j'ai évoquée plus tôt, avait eu lieu le 15 ou le 16

 22   mai 1991. Cela figure à l'intercalaire numéro 1 relatif aux conversations

 23   interceptées qu'on vous a demandé d'examiner.

 24   M. STEWART : [interprétation] Peut-être pourrait-on en fournir un

 25   exemplaire au témoin. Je ne suis pas certain de l'endroit où se trouve ce

Page 3597

  1   document.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous être un peu plus précis,

  3   Maître Stewart quant à l'endroit où ce document pourrait se trouver ?

  4   M. STEWART : [interprétation] Il s'agit d'une annexe à la déclaration de

  5   témoin. Peut-être M. Tieger pourra-t-il nous aider ?

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, pourriez-vous nous

  7   aider, je vous prie ? Nous avons des commentaires concernant les

  8   conversations téléphoniques.

  9   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 10   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois. Pourrait-on placer cela

 12   sur le rétroprojecteur et faire un gros plan. Il s'agit de la première

 13   entrée sur cette page.

 14   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, ces documents n'ont pas

 16   encore été distribués, mais ils le seront plus tard. Nous avons une cote

 17   concernant ces copies.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pourrait-on faire un gros plan sur

 19   la première entrée vers la droite de façon à voir les commentaires.

 20   M. STEWART : [interprétation] C'est de cela que je voulais parler. Je pense

 21   que la date de cette conversation est le 15 ou le

 22   16 mai. La référence à la séance de la présidence y est faite. Ma question

 23   portait sur la transcription elle-même et l'endroit où elle se trouve.

 24   M. TIEGER : [interprétation] J'ai dit que les croquis de ces transcription

 25   sont disponibles. Nous pouvons les retrouver maintenant si vous le

Page 3598

  1   souhaitez.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] N'y a-t-il pas de copies disponibles à

  3   ce stade ? Est-ce que cela figure également dans le classeur concernant M.

  4   Treanor ?

  5   M. TIEGER : [interprétation] En substance, soit nous pouvons demander le

  6   versement au dossier de ces documents, soit nous pouvons faire référence à

  7   la position d'origine, c'est-à-dire que ces documents n'ont pas été cotés

  8   individuellement, mais faisaient partie de la liasse, et a été communiquée

  9   avant que nous n'en demandions le versement au dossier.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, ces documents se trouvent là

 11   afin de pouvoir aider Me Stewart dans ses questions. Madame l'Huissière,

 12   pourriez-vous nous rendre ces documents de façon à ce que nous les

 13   retrouvions ?

 14   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 15    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons donner au témoin une copie

 16   en B/C/S, et nous placerons la traduction en anglais sur le

 17   rétroprojecteur. Il s'agit d'un document qui n'a pas encore été versé au

 18   dossier. Nous allons l'utiliser à ce stade soit comme document qui sera

 19   marqué aux fins d'identification, soit versé au dossier à un stade

 20   ultérieur.

 21   M. TIEGER : [interprétation] J'espère que cela est tout à fait clair. Comme

 22   je l'ai dit, toutes les conversations interceptées accompagnent les

 23   déclarations pertinentes.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous n'avons pas encore donné de

 25   cote à ces documents, mais ces documents ont été marqués aux fins

Page 3599

  1   d'identification. Il s'agit du numéro 1 sur la liste figurant à la page 7

  2   en tant qu'annexe de la déclaration du témoin.

  3   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons déjà donner une cote à ce

  5   classeur. Nous ne nous prononçons pas à ce stade quant à son versement au

  6   dossier.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le classeur de conversations

  8   interceptées accompagnant la déclaration P154 recevra la cote P154A. Ce

  9   classeur comporte 33 intercalaires. Le CD-ROM sur lequel figure ces

 10   conversations interceptées, recevra la cote P154B.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons placer cela sur

 12   le rétroprojecteur.

 13   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Q.  Monsieur Babic, le résumé, plutôt les commentaires que vous avez faits

 15   au sujet de cette conversation interceptée sont les suivants : Tout

 16   d'abord, vous pensez que cette conversation a eu lieu le 15 ou le 16 mai

 17   1991, en partie vu la mention faite à la session de la présidence au cours

 18   de laquelle M. Mesic n'a pas été élu. Vous parlez du contexte historique

 19   dans lequel s'est déroulé cette conversation, et c'est ceci qui vous permet

 20   de dater ce document, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Vous mentionnez le nom de la personne qui s'est noyée, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Il est question d'une personne qui s'est noyée, et vous pensez savoir

 25   de qui il s'agit.

Page 3600

  1   R.  Oui. Il s'agissait de Vukasin Soskocanin. Il se serait noyé, j'insiste,

  2   il se serait noyé. Toutefois, j'ai entendu d'autres informations à ce

  3   sujet.

  4   Q.  Il s'agit des rumeurs dont vous parlez, n'est-ce pas ? Vous parlez des

  5   rumeurs selon lesquelles il aurait été assassiné par ses propres hommes ou

  6   par les services de Sûreté de l'état ?

  7   R.  Il est décédé. Il se serait noyé dans le Danube. Une autre personne qui

  8   était en rapport avec lui et d'autres de Borovo Selo m'ont dit que c'était

  9   la sûreté de l'état qui l'avait tué. Toutefois, je n'ai pas entendu parler

 10   de cela en tant que rumeur, mais en tant qu'information tout à fait

 11   sérieuse. A l'époque, il s'agissait d'information tout à fait fiable. Ces

 12   informations, je les ai obtenues au moment des événements.

 13   Q.  Merci, Monsieur Babic.

 14   M. STEWART : [interprétation] Je souhaiterais à présent vous montrer un

 15   autre document qui émane d'un livre. Nous disposons d'un certain nombre de

 16   copies. Aux fins du compte rendu d'audience, je vais vous dire quel est le

 17   contenu de ce livre. Il s'agit d'un livre rédigé par Adam LeBor, en un seul

 18   mot L-e-b-o-r. Adam LeBor est l'auteur de ce livre. Apparemment, il est

 19   anglais. Il a travaillé pour la presse indépendante à l'époque. Il s'agit

 20   d'un article ou d'un livre intitulé "Milosevic, une biographie", livre

 21   publié en Grande-Bretagne en 2002. Conformément à la pratique adoptée

 22   habituellement, nous avons fait une photocopie de la page précédente et de

 23   la page suivante, ainsi que de la page sur laquelle figure le passage que

 24   je souhaite présenter à M. Babic. Ce document est rédigé en anglais par M.

 25   LeBor.

Page 3601

  1   Le passage qui m'intéresse se trouve au milieu de la page 228. Il est

  2   question du mois de mai 1995 ou de l'été 1995. M. Babic connaît peut-être

  3   suffisamment l'anglais pour être en mesure de repérer ce paragraphe, mais

  4   cela ne nous aidera pas beaucoup car, apparemment, il ne lit pas très bien

  5   l'anglais.

  6   Q.  Le passage en question se lit comme suit, je cite : "Vu la capture du

  7   secteur ouest, la communauté internationale a proposé un plan connu sous le

  8   nom ZFOR considérant que les événements qui se dérouleraient après l'été

  9   1995, considérant ces événements, le plan ZFOR offrait des avantages

 10   inconcevables aux rebelles serbes y compris l'autodétermination, le droit à

 11   avoir leur propre drapeau, leur propre police, leur propre parlement et

 12   leur propre président."

 13   Les Serbes dont il est question ici sont les Serbes de Krajina dont vous

 14   étiez représentant, Monsieur Babic. "Milosevic a soutenu ce plan ainsi que

 15   Tudjman malgré certaines réserves dans une décision tout à fait stupide.

 16   Les dirigeants serbes de Krajina, Milan Martic et Milan Babic, ont rejeté

 17   d'emblée le plan ZFOR. A la place, ils ont envoyé des troupes pour

 18   participer à l'attaque menée par les Serbes de Bosnie contre la ville de

 19   Bihac sous contrôle du gouvernement bosniaque. Bihac a été coupée. Les

 20   Serbes ont fait le siège de la ville qui avait été déclarée zone de

 21   sécurité des Nations Unies comme Srebrenica. Lorsque Srebrenica est tombée

 22   au mois de juillet, les dirigeants militaires serbes de Bosnie ou leur

 23   dirigeant principal, le général Ratko Mladic a lancé une attaque contre

 24   Bihac."

 25   N'est-il pas correct de dire, Monsieur Babic, que cela a constitué un

Page 3602

  1   désordre militaire pour les Serbes, n'est-ce pas ?

  2   R.  Ce que vous venez de citer n'est pas exact. C'était tragique en effet.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, personne ne vous a

  4   demandé de confirmer qu'il s'agissait d'une déclaration stupide ou non. Il

  5   s'agit d'une question tout à fait différente. La seule question qui vous a

  6   été posée est la question de savoir si le résultat militaire était un

  7   désastre ? Est-ce que vous pourriez répondre à cette question, je vous

  8   prie ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président, mais

 10   toutes sortes de choses ont été dites ici, toutes sortes de propos ont été

 11   cités et qui sont tout à fait erronés. La question elle-même ne me paraît

 12   pas très claire.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question en elle-même me paraît assez

 14   claire. Vous avez peut-être oublié ce qui concerne le reste mais pourriez-

 15   vous nous dire si le résultat militaire

 16   [imperceptible] était un désastre, oui ou non ?

 17   Est-ce que cela concerne Bihac ou quelque chose d'autres ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas la question ?

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est question de l'attaque contre

 20   Bihac.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était un désastre, une défaite

 22   militaire.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 24   Veuillez poursuivre Maître Stewart.

 25   M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

Page 3603

  1   Q.  Monsieur Babic, conviendrez-vous que votre rejet du plan, connu sous le

  2   nom ZFOR s'est avéré également être une erreur grave ?

  3   R.  Est-ce que vous voulez parler de moi personnellement ou d'autres

  4   personnes ? Est-ce qu'il s'agit d'un "vous" au singulier ou d'un "vous" au

  5   pluriel ? Personnellement j'ai accepté ce plan, d'autres ne l'ont pas fait.

  6   Votre question portait sur le fait de savoir si le rejet du plan avait

  7   contribué à cela ? Mais le rejet par qui au juste ?

  8   Q.  Très bien, Monsieur Babic. Nous allons nous efforcer de clarifier les

  9   choses. Lorsque dans ce livre, il est fait référence à une décision tout à

 10   fait stupide et au fait que les dirigeants serbes de Krajina, Milan Martic

 11   et Milan Babic ont rejeté d'emblée le plan ZFOR, est-ce que vous dites que

 12   le livre se trompe, que personnellement vous n'avez pas rejeté cette

 13   proposition connue sous le nom de plan ZFOR ?

 14   R.  C'est exact. Personnellement, j'ai accepté ce plan.

 15   Q.  Nous avons encore un problème de traduction car il y a une double

 16   négation. On peut lire dans le compte rendu d'audience : "Ce n'est pas que

 17   je ne l'ai pas rejeté. Je l'ai accepté." Ce que vous nous dites, c'est que

 18   vous l'avez accepté et que le livre se trompe, n'est-ce pas ?

 19   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète, ce n'est pas uniquement qu'il n'a pas

 20   rejeté le plan, il l'a accepté. C'est ce qu'il a souligné dans sa réponse.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Babic, il est tout à fait clair

 22   que vous avez accepté le plan ZFOR. Veuillez poursuivre.

 23   M. STEWART : [interprétation] Je ne souhaite pas ergoter avec les

 24   interprètes à ce sujet, Monsieur le Président, et j'accepte tout à fait ce

 25   qu'ils disent.

Page 3604

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela a été confirmé à trois reprises.

  2   Veuillez poursuivre.

  3   M. STEWART : [interprétation] Très bien. J'ai éclairci ce point et j'en ai

  4   terminé avec mon contre-interrogatoire.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Stewart.

  6   Monsieur Tieger, est-il nécessaire de poser des questions supplémentaires

  7   au témoin ?

  8   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  9   Nouvel interrogatoire par M. Tieger :

 10   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, il y a deux questions

 11   assez brèves que je souhaiterais soulever. L'une de ces questions prendra

 12   peut-être un peu plus de temps que l'autre. C'est par cela que je vais

 13   commencer.

 14   Q.  Monsieur Babic, puis-je attirer votre attention sur le document

 15   militaire daté du 26 décembre 1991, dont nous avons parlé un peu plus tôt.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Il y a eu quelques discussions au sujet de ce document lors de vos

 18   auditions précédentes. Je fais référence, notamment, à la cassette numéro

 19   10 et de l'enregistrement en date du 14 janvier 2002, page 56. Au milieu de

 20   la page, vous dites que vous souhaitez expliquer cet ordre. Vous dites que

 21   le 26 décembre 1991, vous étiez président de la République de la Krajina

 22   serbe et qu'en cette qualité, en tant que commandant des forces armées de

 23   la République de la Krajina serbe, vous fournissez des explications au

 24   sujet de ce document, y compris au sujet du cachet qui se trouve en haut à

 25   gauche où il est fait mention de région autonome serbe de Krajina, de

Page 3605

  1   l'état-major de la Défense territoriale. Cela signifie que ce document a

  2   été rédigé par le quartier général de la Défense territoriale de la Krajina

  3   serbe.

  4   Ensuite, vous poursuivez en disant que vous ne vous souvenez pas de la

  5   période exacte, du moment exact où les zones opérationnelles ont été mises

  6   en place. Je poursuis, il est dit, je cite : "Le colonel Radoslav Maksic,

  7   qui était le commandant de l'état-major central de la Défense territoriale,

  8   m'a apporté un document. Il s'agissait d'un ordre ou d'une directive. Je ne

  9   sais pas de quel type de documents il s'agissait. Mais il s'agissait en

 10   quelque sorte, d'un ordre relatif au mouvement, au déploiement de certaines

 11   unités d'artillerie qui disposaient d'une portée suffisante pour atteindre

 12   Zagreb. Il a dit que je devais signer ce document, que je devais considérer

 13   comme un ordre adressé à mon encontre. Je me souviens avoir signé un

 14   document. D'après mes souvenirs, ce document correspond à ces activités.

 15   J'ai pensé aux circonstances dans lesquelles ces événements se sont

 16   déroulés. A l'époque, il y avait des débats concernant le plan Vance, eu

 17   égard, notamment, au déploiement des forces de maintien de la paix dans la

 18   région de la Krajina. Aujourd'hui encore, je me demande, pourquoi, je n'ai

 19   pas participé aux activités relatives aux opérations des unités, document

 20   que j'ai signé pour lequel j'ai donné mon autorisation. Cela pouvait

 21   signifier des provocations, eu égard aux activités qui étaient décrites

 22   dans le plan Vance. Aujourd'hui, je me rends compte que c'était stupide.

 23   Néanmoins, j'ai signé ces documents pour Maksic. Toutefois, je n'ai pas osé

 24   de ne pas être d'accord et je ne voulais pas que quelqu'un, qui appartenait

 25   au cercle proche de Milosevic, ne devienne l'un de mes ennemis. Il

Page 3606

  1   s'agissait de relations personnelles, et non pas d'une question de débats

  2   publics. J'ai signé ce document pour Maksic, car je ne voulais pas imposer

  3   quoi que ce soit. Voilà les souvenirs dont je dispose au sujet de ce qui

  4   s'est passé à l'époque.

  5   Ma conclusion aujourd'hui est assez différente de ma conclusion à laquelle

  6   j'étais parvenu à l'époque. Aujourd'hui, je n'aurais sans doute pas réagi

  7   de la même manière et j'ai mieux compris les choses après. Notamment depuis

  8   mars 1992, j'ai changé mon point de vue au sujet de ces événements."

  9   Monsieur Babic, est-ce que ce passage vous aide à raviver vos souvenirs ou

 10   à mieux comprendre ce document et le rôle qui a été le vôtre à cet égard ?

 11   R.  Je crois toujours aujourd'hui que le but de tout cela était de me

 12   compromettre en tant que négociateur.

 13   Q.  Monsieur Babic, ma deuxième question est directement liée à la réunion

 14   qui s'est tenue à Bosanski Novi vers la fin de l'été 1992. Me Stewart dit

 15   qu'il a été fait référence, dans une audition précédente, à une séance de

 16   l'assemblée conjointe des assemblées de la Republika Srpska et de RSK. Je

 17   note que dans votre déclaration, vous faites référence à une réunion, à

 18   laquelle vous êtes arrivé en retard, et qui portait sur un événement qui se

 19   serait déroulé à Bosanski Novi à la fin de l'été 1992. Est-ce que vous

 20   pourriez nous dire s'il s'agissait d'une séance de l'assemblée conjointe ou

 21   d'un autre type de réunion ?

 22   R.  Il s'agissait en quelque sorte d'une réunion comme je l'ai dit.

 23   Quelqu'un m'a informé qu'il s'agissait d'une session de l'assemblée

 24   conjointe. Mais cela n'y ressemblait pas. Il s'agissait plutôt d'une

 25   réunion assez importante.

Page 3607

  1   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, si vous voulez bien m'accorder

  2   quelques instants.

  3   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  4   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, c'est tout ce

  5   que je souhaitais demander.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger. Puisqu'aucun

  7   élément nouveau n'a été introduit à moins --

  8   M. STEWART : [interprétation] Non, nous sommes d'accord, Monsieur le

  9   Président.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge El Mahdi a une ou deux questions

 12   pour vous.

 13   Questions de la Cour :

 14   M. LE JUGE EL MAHDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   [En français] Monsieur le Témoin, je voudrais m'assurer que je vous ai bien

 16   suivi dans votre témoignage. Je vous ai entendu dire aujourd'hui, je vous

 17   cite : "Parlant de M. Branko Kostic, vous avez dit, et je vous cite en

 18   anglais : "Technically speaking he was the leading --

 19   [Interprétation] "techniquement parlant, il jouait le rôle de dirigeant ou

 20   ce rôle lui appartenait."

 21   [En français] Concernant M. Krajisnik, vous avez dit, je vous cite : 

 22   [Interprétation] "Il a joué un rôle représentatif et je ne me souviens pas

 23   qu'il a joué un rôle actif."

 24   [En français] J'aurais aimé que vous m'expliquiez qu'est-ce que vous

 25   entendez par ces deux réflexions sur les deux personnages ? Est-ce que vous

Page 3608

  1   voulez dire que M. Krajisnik, dans un certain domaine, n'avait qu'un rôle

  2   représentatif sans pour autant jouer un rôle actif ou qu'est-ce que vous

  3   voulez dire exactement ?

  4   R.  Monsieur le Juge, concrètement parlant, je parlais de cette réunion qui

  5   a eu lieu au palais de la Fédération le 23 octobre 1991, et techniquement

  6   parlant, la réunion a été présidée par Branko Kostic. Je pense que j'ai

  7   déjà dit au cours de ma déposition que Slobodan Milosevic était derrière

  8   tout, et en ce qui concerne la participation de Momcilo Krajisnik, c'est ce

  9   que j'ai dit. Il représentait les Serbes de Bosnie. C'est pour cela que

 10   j'ai dit qu'il avait un rôle représentatif. Mais lorsque j'ai dit qu'il n'a

 11   pas joué un rôle actif, je voulais dire que je ne me souvenais pas du tout

 12   qu'il ait pris la parole pendant la réunion. C'est cela que je voulais

 13   dire.

 14   M. LE JUGE EL MAHDI : Merci beaucoup, Monsieur le Témoin. Ma seconde

 15   question, peut-être, elle est beaucoup plus simple. Si je comprends bien,

 16   vous étiez le président du parti SDS, à partir de 1992, dans la Krajina. Je

 17   veux dire. C'est après la mort de M. Raskovic, n'est-ce pas, et durant le

 18   restant de l'année 1992, vous étiez le président du parti SDS de la

 19   Krajina ?

 20   R.  Excusez-moi, je vais clarifier quelque chose. Jusqu'au 29 novembre

 21   1992, j'étais membre du Parti démocrate serbe, présidé par Jovan Raskovic.

 22   Ces partis avaient un conseil régional pour la Krajina et j'étais membre de

 23   ce conseil régional et j'étais le président du conseil municipal de ce

 24   parti pour Knin. Après la mort de Jovan Raskovic, le 29 novembre 1992, un

 25   groupe, membres du SDS, qui avait été présidé par Jovan Raskovic, un groupe

Page 3609

  1   de Krajina a créé le parti démocrate serbe de la Krajina, un parti

  2   indépendant dont je suis devenu président.

  3   M. LE JUGE EL MAHDI : C'est le même parti que le Parti SDS qui était en

  4   Bosnie-Herzégovine où c'était un autre parti ?

  5   R.  Pour un autre parti. Ce n'était pas le même que le SDS.

  6   M. LE JUGE EL MAHDI : C'est-à-dire, uniquement, c'est question du nom, mais

  7   cela n'a pas de rapport entre les deux partis, si je comprends bien.

  8   R.  C'est vrai. Il s'agissait de deux partis séparés. Même leurs noms

  9   n'étaient pas identiques, leurs noms différaient. Le parti en Bosnie-

 10   Herzégovine s'appelait le Parti démocrate serbe de Bosnie-Herzégovine, qui

 11   est devenu par la suite, Parti démocrate serbe des terres serbes. Le parti

 12   présidé par Jovan Raskovic s'appelait Parti démocrate serbe. Le parti que

 13   j'ai présidé, à la constitution duquel j'ai participé, s'appelait Parti

 14   démocrate serbe de la Krajina.

 15   M. LE JUGE EL MAHDI : Est-ce que vous avez eu des relations entre, si je

 16   comprends bien, votre parti, SDS, et le parti SDS qui existait en Bosnie-

 17   Herzégovine ? Est-ce que vous coordonniez, par exemple, vos actions ?

 18   R.  Non. Parfois, il y a eu des efforts visant à faire en sorte que notre

 19   parti, le parti du SDS de Krajina, fasse partie du SDS de Bosnie-

 20   Herzégovine, mais nous avons refusé cela. Notre parti et le parti de

 21   Karadzic en Krajina étaient deux partis opposés l'un à l'autre. Si vous

 22   voulez, le parti de Karadzic était en opposition par rapport au mien en

 23   Krajina.

 24   M. LE JUGE EL MAHDI : Ma dernière question. Il m'a semblé que vos relations

 25   étaient plutôt dirigées vers Belgrade plutôt que vers la République serbe

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  1   de la Bosnie-Herzégovine; est-ce que c'est bien le cas ?

  2   R.  Oui.

  3   M. LE JUGE EL MAHDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai quelques questions pour vous.

  5   J'espère que les interprètes sont prêts à rester dix à 15 minutes de plus,

  6   ce qui nous permettrait de pouvoir conclure plutôt que de devoir poursuivre

  7   nos travaux la semaine prochaine.

  8   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, je souhaite vous poser une

 10   question plutôt générale. Les questions vraiment délicates, est-ce qu'elles

 11   n'étaient jamais consignées au papier ? Lorsque je parle "des questions

 12   délicates", je souhaite parler des arrière-pensées. Vous avez parlé des

 13   réunions auxquelles vous avez été invités pas par écrit, mais par

 14   téléphone. Vous avez discuté des questions délicates. Est-ce que vous

 15   pouvez nous dire dans quelle mesure ce genre de questions délicates,

 16   également les moyens qui devaient être employés afin d'atteindre des

 17   objectifs politiques ? Ici, je ne parle pas forcément de vos objectifs

 18   politiques personnels, mais en général. Est-ce que cela existait d'habitude

 19   en papier ou pas ?

 20   R.  Je ne sais pas que cela existait en papier.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous n'avez jamais vu sur le

 22   papier des questions que vous considériez délicates ?

 23   R.  Non.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous aviez l'impression que

 25   la raison en était la confidentialité ? Est-ce que c'était pour cela que ce

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  1   genre de questions n'existait pas en papier ? Vous faites signe de tête,

  2   Monsieur Babic, mais ceci n'apparaît pas au compte rendu d'audience.

  3   R.  Oui, oui.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une autre question. Vous nous avez parlé

  5   de l'emploi de la langue ékavienne. Pourquoi est-ce que quelqu'un

  6   utiliserait la langue ékavienne pour souligner cela en tant que facteur

  7   unificateur des Serbes si cette même langue était employée par les Croates,

  8   ou c'est l'alternative à ma question, est-ce que c'était exactement la

  9   raison pour laquelle vous avez considéré qu'il était stupide de souligner

 10   ce genre de chose ?

 11   R.  La question est un peu longue.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'en excuse.

 13   R.  Je vais commencer par la première partie.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous propose soit de nous expliquer

 15   comment il était possible d'utiliser cela en tant que facteur unificateur,

 16   ou si c'était justement cela que vous trouviez stupide.

 17   R.  En ce qui concerne le facteur unificateur, c'était quelque chose qui

 18   était imposé aux Serbes de Bosnie-Herzégovine et de Croatie. On imposait

 19   les normes de la langue qui étaient en vigueur en Serbie même si j'ai déjà

 20   expliqué qu'il s'agissait de la même langue. Cette variante existait en

 21   Serbie. Dans ce sens, il s'agissait d'unification afin de s'ajuster aux

 22   normes linguistiques en vigueur en Serbie. Excusez-moi, quelle était votre

 23   deuxième question ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que dans votre déposition, vous

 25   avez dit que cette langue était également utilisée par les Croates. Si

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  1   quelqu'un souhaite souligner un facteur unificateur parmi certaines

  2   personnes, il faudrait plutôt utiliser quelque chose qui est employé

  3   exclusivement par un groupe et non pas aussi par les autres.

  4   R.  Si, si. La variante ékavienne était employée exclusivement par les

  5   Serbes. Les Croates et les Musulmans n'utilisaient pas la variante

  6   ékavienne.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Malheureusement, ici, je n'ai pas le

  8   compte rendu d'audience. Peut-être que j'ai mal compris votre propos ou

  9   peut-être cela a été mal consigné au compte rendu d'audience. De toute

 10   façon, les choses sont claires en ce qui me concerne maintenant.

 11   Une autre chose. Vous nous avez parlé des documents que vous avez remis aux

 12   enquêteurs. Vous avez fait une distinction entre deux séries de documents;

 13   les documents que vous avez trouvés dans les archives et d'autres que vous

 14   aviez, apparemment, chez vous et vous n'avez pas besoin d'aller aux

 15   archives pour les trouver. Est-ce exact ?

 16   R.  Les deux séries de documents émanent des archives, mais c'est moi qui

 17   les avais. Là, je parle des deux classes de documents.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais certains de ces documents, vous les

 19   aviez déjà. Car ma question, dans ce cas-là, est de savoir pourquoi avez-

 20   vous pris ces documents avec vous.

 21   R.  J'avais certains documents émanant des archives à Knin, qui portaient

 22   sur le côté constitutionnel et juridique de la Krajina. C'était un grand

 23   nombre de documents. Je les ai pris à cause du fait que la collaboratrice

 24   d'Yasushi Akashi, qui était à l'époque le représentant de la FORPRONU pour

 25   l'Yougoslavie, Yelena Guskova, m'a demandé d'apporter ce genre de document.

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  1   Elle était intéressée par cela du point de vue historique puisqu'elle est

  2   historienne. J'avais préparé cela pour elle, et j'ai pris ces documents.

  3   C'est ainsi qu'ils sont restés chez moi.

  4   Les autres documents étaient au bureau du gouvernement de la République

  5   serbe de Krajina à Belgrade. Ce bureau a cessé d'exister en 1996. Là, il

  6   s'agit de l'autre type de document que je possédais.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci explique la raison pour laquelle

  8   vous aviez les autres documents en votre possession, les documents qui

  9   n'étaient pas issus directement des archives de Belgrade. Merci, Monsieur

 10   Babic.

 11   Vous avez dit, à un moment donné, au cours de votre déposition, que vous

 12   pouviez ajouter d'autres éléments en ce qui concerne l'impression de ce que

 13   Karadzic pensait réellement au cours de la réunion à Celinac. Est-ce que

 14   vous pourriez nous dire maintenant ce que vous souhaitiez ajouter par

 15   rapport à ce que vous avez déjà dit à ce sujet ?

 16   R.  Je peux peut-être clarifier ce que cela voulait dire. Cela voulait dire

 17   qu'il allait créer un territoire unifié en Bosnie-Herzégovine, un

 18   territoire serbe unifié en Bosnie-Herzégovine, en expulsant les Musulmans.

 19   Il faisait référence à cela.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'était votre impression. Ce que

 21   vous ajoutez, c'est que le moyen par lequel il allait atteindre cela était

 22   l'expulsion de Musulmans.

 23   R.  Tout à fait.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous dire un

 25   peu plus au sujet de la question de savoir sur quoi vous avez fondé cette

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  1   impression.

  2   R.  Je la fonde sur le fait qu'à l'époque, il y avait la communauté des

  3   municipalités, des municipalités des régions serbes qui ont été créées par

  4   les dirigeants du Parti démocrate serbe. Ces zones étaient séparées. Il

  5   n'était pas possible de les relier en appliquant le principe majoritaire.

  6   C'est d'ailleurs pour cela que Karadzic s'opposait à ce concept selon

  7   lequel il fallait que l'on procède au vote majoritaire en Krajina, car le

  8   principe majoritaire allait miner ses tentatives d'unifier les territoires

  9   dans lesquels les Serbes étaient minoritaires.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup de ces réponses.

 11   Est-ce que les parties souhaitent poser d'autres questions qui découlent

 12   des questions des Juges ?

 13   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense.

 15   M. STEWART : [interprétation] La Défense non plus.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr, je m'adressais aux deux

 17   parties.

 18   Dans ce cas-là, Monsieur Babic, votre déposition est terminée. D'habitude,

 19   je dis aux témoins au revoir, et cetera. Dans le cas présent, je ne peux

 20   pas exclure la possibilité que l'on vous propose de venir de nouveau. Je ne

 21   m'attends pas à cela, mais je ne peux pas exclure cela. Je peux dire

 22   simplement merci d'être venu. Je ne sais pas si je dois dire, enfin, ce

 23   n'est pas vraiment que je souhaite dire. On se verra peut-être, je ne sais

 24   pas quand et je ne sais pas où, mais je souhaite simplement éviter de créer

 25   une mauvaise impression que c'était la dernière fois que vous alliez

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  1   comparaître devant cette Chambre qui traite de l'affaire Krajisnik. De

  2   toute façon, merci d'avoir répondu aux questions des deux parties et des

  3   Juges de la Chambre. Maintenant, vous pouvez sortir.

  4   M. STEWART : [interprétation] En ce qui concerne le document émanant du

  5   livre, je pense que j'ai oublié de demander à Mme Philpott de nous dire

  6   quelle est la cote.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, il s'agit de la cote D20.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous avons besoin de la

  9   présence du témoin pour vos commentaires, Monsieur Tieger ?

 10   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, je demanderais à ce que

 12   l'on escorte M. Babic en dehors du prétoire.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mueller, vous pouvez vous

 15   disposer, vous aussi.

 16   [Le témoin se retire]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En ce qui concerne ce que les parties

 18   souhaitent ajouter, est-ce que nous devons rester à huis clos, mis à part

 19   la question de savoir s'il fallait être à huis clos dès le départ, Maître

 20   Stewart ? Monsieur Tieger.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Il m'est difficile de savoir si la Chambre

 22   souhaite que l'on procède à huis clos ou pas. Puisqu'il est question de la

 23   procédure, je souhaite proposer le versement au dossier --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. En fait, une autre Chambre de

 25   première instance devrait occuper ces locaux bientôt. Je suggère aux

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  1   parties de traiter de toutes les questions techniques lors de notre

  2   prochaine audience. Je pense que ce sera lundi suivant.

  3   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je propose que l'on traite de toutes ces

  5   questions techniques, y compris les cotes, et cetera lundi suivant pour que

  6   nous puissions bien nous préparer. Y a-t-il autre chose ? Dans ce cas-là,

  7   nous allons repasser brièvement en audience publique.

  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes en audience publique de

 10   nouveau. Je vais répéter ce qui a été dit en huis clos avant la journée

 11   d'aujourd'hui, c'est-à-dire, qu'une décision orale a été rendue par la

 12   Chambre ce matin concernant une requête confidentielle, la Défense ne s'y

 13   est pas opposée, portant sur un huis clos et une vidéoconférence. La

 14   Chambre a accordé cette requête. C'était la quatrième requête. Je suppose

 15   que seul le contenu de la requête était confidentiel et non pas son

 16   existence, Monsieur Tieger. Sinon, je vais devoir demander que l'on expurge

 17   le compte rendu d'audience.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Tout à fait, je pense que vous avez bien

 19   compris.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Il n'est pas nécessaire de

 21   procéder à des corrections. Dans ce cas-là, je propose aux parties de se

 22   mettre en contact avec, non pas le Juriste de la Chambre, mais avec M. De

 23   Hemptinne, pour voir, compte tenu du fait que nous aurons une pause de

 24   quelques jours si la Chambre a reçu des suggestions de la part des parties

 25   concernant la manière de procéder, notamment, à partir du 24 juin. Si vous

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  1   trouvez une occasion, vous pourriez simplement échanger des points de vue

  2   pour faire face à la proposition de la Chambre et pour voir si nous

  3   devrions passer plus de temps en recueillant les dépositions dans le

  4   prétoire ou si les parties devraient communiquer plus afin d'éviter les

  5   présentations d'éléments de preuve dans ce prétoire, qui ne sont pas

  6   vraiment nécessaires. Peut-être vous pourriez essayer de faire cela cet

  7   après-midi. J'ai déjà proposé cela vendredi dernier, mais je me dis que

  8   peut-être aujourd'hui c'est encore mieux.

  9   Est-ce que les parties souhaitent soulever autre chose ?

 10   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 11   M. STEWART : [interprétation] J'ai quelque chose qui va durer 15 secondes.

 12   Vous savez, Monsieur le Président, qu'en ce qui concerne la réunion de cet

 13   après-midi, il n'est pas prévu que l'on parle de l'étendue et de l'ampleur

 14   de la présentation des moyens de preuve de la Défense. Si vous voulez, je

 15   vais m'exprimer de manière plus claire.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 17   M. STEWART : [interprétation] Vous n'avez pas mentionné le temps qu'il faut

 18   pour préparer la Défense. Vous savez que c'est une question qui est très

 19   important pour la Défense dans le cadre de ce genre de discussions.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Dans ce cas-là, nous pourrons

 21   dire que vous pouvez avoir un échange des points de vue concernant

 22   l'utilisation du temps, mais également concernant, bien sûr, la préparation

 23   de la Défense.

 24   Nous allons maintenant lever la séance et nous remercions les techniciens

 25   et les interprètes de leur aide, et nous nous excusons auprès de l'autre

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  1   Chambre de première instance pour avoir volé 13 minutes de leur temps. Nous

  2   allons nous retrouver ici dans la salle d'audience II, le lundi 14 juin, à

  3   9 heures.

  4   --- L'audience est levée à 13 heures 57 et reprendra le lundi 14 juin 2004,

  5   à 9 heures 00.

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