Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 9 novembre 2004

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Greffier, peut-il citer l'affaire,

6 s'il vous plaît.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, il s'agit

8 de l'affaire IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

10 Bonjour, à tout le monde. Maître Stewart, est-ce que vous être prêt à

11 contre-interroger le témoin ? Apparemment oui. Dans ce cas-là, je vais

12 demander à Mme l'Huissière d'introduire le témoin dans le prétoire.

13 M. STEWART : [interprétation] Pendant qu'on le fait, je voudrais dire que

14 nous sommes vraiment contents de tout ce travail qui a été fait concernant

15 le problème de transcript que nous avons évoqué hier. J'ai dit qu'il y

16 avait un problème quant à l'écoute de ces conversations interceptées sans

17 identifier les locuteurs. J'apprécie tout ce travail. J'ai discuté vraiment

18 beaucoup avec

19 Me Harmon à ce sujet.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Harmon.

21 M. HARMON : [interprétation] Tout d'abord, j'ai pensé que c'était M. Hannis

22 qui allait parler de cela. Je peux en parler de toute façon tout de suite,

23 mais j'ai pensé que puisque le témoin est ici --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement. Puisque

25 M. Cengic est là, je pense qu'il conviendrait mieux de commencer par lui,

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1 et nous allons évoquer cette question plus tard. Si nous avons besoin de

2 parler de cela plus tôt, nous allons demander au témoin de quitter le

3 prétoire quelques instants, ensuite, nous allons en parler.

4 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je n'avais pas du tout

5 l'intention d'en parler vraiment à présent. C'était juste pour dire à quel

6 point j'appréciais la collaboration dont nous avons fait preuve hier soir

7 avec le Procureur jusqu'à tard dans la nuit, et j'ai voulu le dire avant

8 que le témoin n'entre dans le prétoire.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je suis bien content de voir

10 que les parties collaborent avec beaucoup de succès.

11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pourrez continuer.

13 LE TÉMOIN : ISMET CENGIC [Reprise]

14 [Le témoin répond par l'interprète]

15 Contre-interrogatoire par M. Stewart:

16 Q. [interprétation] Monsieur Cengic, bonjour. Est-il exact que M. Krajisnik

17 était membre de quelque chose qui pouvait être appelé le comité

18 d'initiative pour le SDS à Novi Grad, et ceci au moins jusqu'au mois de

19 novembre, -- jusqu'aux élections qui ont eu lieu au mois de novembre 1990 ?

20 Est-ce que vous êtes au courant de cela ?

21 R. Chaque parti politique disposait de son propre comité d'initiative. Il

22 y en avait un de son côté. Je n'en suis pas sûr.

23 Q. Monsieur Cengic, est-il exact que M. Krajisnik a participé à deux ou

24 trois réunions qui ont eu lieu après le mois de

25 novembre 1990, après les élections, pour négocier des divisions et de

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1 l'attribution de postes au sein de la municipalité ?

2 R. Oui, je pense qu'il y a eu plusieurs réunions semblables, en tout cas,

3 plus que ce que vous dites.

4 Q. Il y en avait combien ?

5 R. Cinq ou six.

6 Q. Si M. Krajisnik pense qu'il y en a eu deux ou trois, vous ne

7 contesterez pas ceci, n'est-ce pas ?

8 R. Je me souviens qu'il y en eu cinq ou six.

9 Q. Cinq ou six réunions auxquelles M. Krajisnik a participé, ou cinq ou

10 six réunions en tout ?

11 R. Je suis sûr qu'il a participé aux dernières réunions. Je ne suis pas

12 vraiment sûr s'il a participé à la toute première réunion. Je sais qu'il y

13 en a eu quatre ou cinq en tout. La première réunion a eu lieu au moment où

14 je proposais que le pouvoir soit distribué à tous les partis faisant du

15 parlement.

16 Q. Monsieur le Témoin, je n'ai pas vraiment besoin de discuter du contenu

17 de ces réunions. Je vous demande de vous concentrer à la question que je

18 vous ai posée. Voici la question que je vous ai

19 posée : Vous ne pouvez pas affirmer que M. Krajisnik a participé à plus que

20 deux ou trois réunions, n'est-ce pas ?

21 R. Je pense qu'il a participé au moins à quatre de ces réunions. Peut-être

22 n'a-t-il pas assisté à la toute première réunion qui a eu lieu.

23 Q. Est-ce que vous savez qu'il est devenu président du parlement de la

24 Bosnie-Herzégovine à peu près au mois de

25 novembre 1990 ? Est-ce que vous êtes au courant de cela ?

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1 R. Je savais qu'il était élu au parlement, mais l'assemblée constitutive a

2 été tenue après que tous ces accords sont passés, c'est-à-dire qu'au moment

3 où il y avait toutes ces négociations,

4 M. Krajisnik n'était pas encore élu au poste de président de l'assemblée et

5 du parlement.

6 Q. Vous savez que M. Krajisnik a été élu au poste de président de

7 l'assemblée de Bosnie-Herzégovine ?

8 R. Je sais qu'au moment des négociations, il n'a pas été élu à ce poste,

9 mais cela ne s'est fait que plus tard après les négociations.

10 Q. Si je vous dis que M. Krajisnik est devenu le président de l'assemblée

11 de la Bosnie-Herzégovine le 18 novembre 1990, vous me dites que je n'ai pas

12 raison ?

13 R. Je ne peux rien affirmer. Je sais qu'au moment où ces réunions ont eu

14 lieu, je sais qu'à cette époque-là, M. Krajisnik n'était pas encore élu au

15 poste du président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine.

16 Q. Pour que ce soit clair, Monsieur Cengic, vous ne dites pas, n'est-ce

17 pas, que ces réunions qui se sont tenues pour négocier la location de

18 postes n'ont pas terminé avant la fin du mois de

19 novembre 1990 ?

20 R. Ce que j'ai dit en revanche, c'est que toutes ces réunions se sont

21 terminées avant que M. Krajisnik ne soit élu au poste du président du

22 parlement de l'assemblée de la Bosnie-Herzégovine.

23 Q. Ne tournez pas autour du pot, s'il vous plaît, Monsieur le Témoin. Je

24 vous pose une question précise au sujet des dates. Est-ce que vous dites

25 que toutes ces négociations se sont terminées avant le 18 novembre 1990 ?

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1 R. Oui, si c'est bien la date à laquelle M. Momcilo Krajisnik a été élu au

2 poste de président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine.

3 Q. D'après votre meilleur souvenir, est-il possible que ce soit quatre

4 réunions dont vous vous souvenez, se sont déroulées en l'espace de quatre

5 semaines au maximum ?

6 R. Oui, c'est à peu près cela. Il existait des comptes rendus de ces

7 réunions. C'est M. Hadzic qui est mort, qui avait tous ces comptes rendus.

8 Maintenant, ils sont disparus.

9 Q. Puis-je vous rappeler, Monsieur Cengic, que vous êtes ici pour déposer

10 en disant la vérité puisque vous avez fait une déclaration solennelle à cet

11 effet. Si vous vous souvenez de quelque chose, vous nous le dites, s'il

12 vous plaît, et si vous ne vous en souvenez pas, vous pouvez tout simplement

13 le dire aux Juges de la Chambre.

14 Est-ce que vous êtes en train de dire, Monsieur Cengic, qu'en réalité

15 vous ne vous souvenez pas de l'époque où ces réunions ont eu lieu ?

16 R. Je suis sûr qu'elles ont eu lieu avant que M. Krajisnik ne soit élu au

17 poste du président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine. Je ne me souviens

18 pas des dates. Je ne pensais pas que j'allais en avoir besoin un jour.

19 Q. Ces réunions se sont achevées avant qu'il ne soit élu au poste de

20 président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine. Est-ce que c'est bien cela

21 que vous dites ?

22 R. La dernière réunion a eu lieu avant que M. Krajisnik ne soit nommé au

23 poste de président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine.

24 Q. Après les élections qui ont eu lieu au mois de

25 novembre 1990, conviendrez-vous ce qu'affirme M. Krajisnik, à savoir qu'il

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1 n'est pratiquement jamais allé à Novi Grad, et qu'il n'y est allé qu'une

2 seule fois avant la guerre, quand il est allé au QG du SDS, au siège du SDS

3 qui se trouve à peu près à 12 kilomètres de Zabrdje ? Est-ce que vous

4 contestez cela ? C'est le souvenir de

5 M. Krajisnik.

6 R. Pour autant que je le sache, et j'ai été là depuis le mois d'avril, je

7 dirais que ce n'est pas exact. Au contraire, je dirais qu'il était vu très

8 souvent dans le bâtiment de la municipalité, dans les locaux.

9 Q. C'est vous qui l'avez vu ?

10 R. Je vous parle de la documentation des services de Sécurité. Je n'ai

11 jamais dit l'avoir vu moi-même.

12 Q. Hier, vous avez dit par rapport à cela, et ceci à la page 78 du compte

13 rendu d'audience, vous avez dit, je cite, "J'ai l'impression que M.

14 Krajisnik a été très souvent présent dans le bureau du SDS dans le bâtiment

15 municipal." Ensuite, M. Harmon vous a demandé si cela vous a été relaté par

16 d'autres personnes. Vous avez dit : "Il était habituel d'enregistrer chaque

17 personne qui entrait dans le bâtiment municipal ou quitter ce bâtiment, à

18 partir du moment où il ne s'agissait pas d'un employé de la municipalité."

19 Des informations semblables devaient être recueillies par les gardiens ou

20 les personnes qui travaillaient à l'accueil. A présent, vous ne dites pas

21 seulement que l'accueil devait disposer de telles informations -- question

22 mais que vous avez discuté personnellement avec les personnes qui

23 travaillaient là-bas concernant les allées et venues de M. Krajisnik. Est-

24 ce exact, les allées et venues et les visites éventuelles de M. Krajisnik

25 dans ce bâtiment ?

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1 R. Non, je n'ai pas vraiment posé de questions précises concernant M.

2 Krajisnik. Après les heures de travail, les heures de bureau, souvent

3 j'allais les voir pour vérifier ces livres, pour voir qui était entré et

4 sorti de l'immeuble. Je pense que M. Krajisnik était placé sur un pied

5 d'égalité avec tout le monde. J'allais les voir pour demander qui était

6 entré dans l'immeuble et, parfois, parmi ces noms se trouvait le nom de M.

7 Krajisnik. A chaque jour, je pouvais voir ce livre et ce registre.

8 Q. Hier, vous avez dit que vous auriez pu ajouter que vous avez

9 effectivement vu ce registre, le registre d'entrées et de sorties dans ce

10 bâtiment. Vous ne l'avez pas dit.

11 R. Non, on n'a jamais demandé précisément la question.

12 Q. Hier, vous avez dit aux Juges de la Chambre que telle était votre

13 impression, et aujourd'hui, vous dites que vous avez vu de vos propres yeux

14 ce registre.

15 M. HARMON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais la

16 question, qui a été posée à M. Cengic hier, est comme suit, je parle de la

17 page 78 : "Vous a-t-on dit qu'il est venu dans le bâtiment municipal ? Est-

18 ce que d'autres personnes vous ont rapporté cela ?" On ne lui a pas demandé

19 s'il a vu ce registre.

20 M. STEWART : [interprétation] Je ne dirais pas que c'est ici une des

21 interventions des plus fines de Me Harmon. Je vais continuer à poser des

22 questions dans ce sens tant que j'en aurai besoin, je ne pense pas que je

23 vais aller très loin d'ailleurs.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Harmon, Me Stewart a posé une

25 question au témoin concernant une impression qu'il avait. Puisque M.

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1 Stewart n'a pas vraiment fait de référence précise à une question

2 quelconque, vous auriez pu poser votre question lors des questions

3 supplémentaires. Je pense qu'il est plus convenable de ne pas intervenir à

4 présent.

5 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. De toute façon,

6 je pense que je ne veux pas continuer à poser des questions à ce sujet.

7 Q. Monsieur le Témoin, le négociateur principal au nom du SDS lors de ces

8 réunions était Radoslav Unkovic, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, lors des premières réunions, oui.

10 Q. Vous avez dit que tel était le cas pour les premières réunions ?

11 R. Oui. Même je n'étais pas le principal négociateur, lors de ces

12 premières réunions de négociation, au fur et à mesure que notre travail

13 progressait, on nous a investi de confiance et nous avons pris la

14 responsabilité de poursuivre ces négociations. Pour le SDS, c'était M.

15 Krajisnik. Pour le SDA, c'était moi-même.

16 Q. Du point de vue pratique, vous avez continué à négocier au nom du SDA,

17 vous avez pris la place de négociateur principal au nom du SDA, n'est-ce

18 pas ?

19 R. Oui.

20 Q. Vous avez pris la suite de qui, exactement ?

21 R. Lors de la première réunion, c'était M. Mrahorovic qui faisait cela. Il

22 s'agissait de multiplier, de faire des divisions, de bien calculer toutes

23 les places à distribuer. Il fallait être bon en mathématiques, et M.

24 Mrahorovic n'était pas vraiment très habile là-dedans. Peut-être que ma

25 véritable profession m'a aidé, puisque je suis professeur de mathématiques,

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1 à prendre cette fonction. M. Safet Hadzic m'a investi de cette fonction au

2 nom du SDA.

3 Q. A la page 156 du compte rendu d'hier, en répondant à une question posée

4 par Me Harmon, à savoir : "Pourriez-vous nous dire, de façon très brève,

5 quelles sont les positions des différents partis ?"

6 La réponse : "Et bien, la première option de M. Krajisnik consistait

7 à obtenir plus que ce qu'ils ont obtenu par les élections, et évidemment

8 nous n'avons pas pu, tout de suite, nous mettre d'accord."

9 Monsieur Cengic, je pense qu'il n'y avait rien d'inhabituel dans cette

10 option, dans cette position qui était celle de

11 M. Krajisnik. Cela fait partie de l'exercice de négociation, n'est-ce pas ?

12 R. Mais je l'ai dit hier, j'ai dit que je n'ai pas trouvé ceci très

13 étonnant.

14 Q. Ensuite, à la page 15, on vous a demandé : "A la fin, Monsieur Cengic,

15 est-ce que ces négociations que vous avez menées avec la délégation du SDS,

16 est-ce qu'elles ont réussies ?" Vous avez dit : "Oui, en effet. Nous avons

17 réussi à signer un accord et à distribuer les postes à responsabilité parmi

18 les membres des trois partis, à savoir le SDA, le SDS et le HDZ."

19 Donc, ces négociations ont porté leurs fruits, et vous avez réussi à

20 trouver un compromis qui convenait plus ou moins à tout le monde, en

21 aboutissant à un accord signé.

22 R. Oui, c'est ce que j'ai dit hier.

23 Q. M. Krajisnik, pour sa part, a contribué à ce que cet accord soit signé,

24 n'est-ce pas ?

25 R. Evidemment, qu'il était en faveur d'un tel accord; sinon, il ne

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1 l'aurait pas signé.

2 Q. Vous dites avoir proposé, vous dites avoir proposé vous-même

3 personnellement, c'était quelque chose que vous aviez à l'esprit, à savoir

4 que les autres partis qui avaient gagné des voix aux élections, hormis les

5 trois connus le SDA, le SDS et le HDZ, que les autres partis devaient

6 également être représentés. C'est à la page 11 du compte rendu d'hier. Que

7 l'objet -- pardonnez-moi. C'était votre proposition personnelle, n'est-ce

8 pas ? Tout au début ?

9 R. Ceci a eu lieu à la première réunion. Cette première proposition a été

10 rejetée. C'est exact.

11 Q. Cette proposition a-t-elle reçu l'aval de vos collègues du SDA ?

12 R. Cette proposition n'a pas été débattue. Je n'ai consulté personne au

13 préalable, j'ai pris le parti de m'exprimer de façon spontanée.

14 Q. Vous dites que c'était votre propre initiative personnelle, une idée

15 qui vous est venue lors de la réunion. Mais d'après ce que vous avez dit,

16 ceci n'a pas trouvé de -- cette proposition n'a pas trouvé l'accord, ou

17 n'est atterri en terrain fertile, en quelque sorte, n'a pas reçu

18 l'approbation des autres personnes, est-ce exact ?

19 R. Précisément.

20 Q. Vous faites référence également à la page 16 du compte rendu d'hier,

21 vous faites état d'un accord qui vous a été rapporté par M. Krajisnik, un

22 accord qui, vous dites, a été fait par Muhamed Cengic qui était, à ce

23 moment-là, vice-président du SDA, que la municipalité de Novi Grad devrait

24 avoir un poste supplémentaire, ce que justifiait les élections et le

25 résultat des élections, une façon de compenser pour une position obtenue

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1 dans la municipalité de Cajnice. J'espère que j'ai prononcé ce nom

2 correctement.

3 Telle était votre position, n'est-ce pas, Monsieur Cengic, à ce

4 moment-là ?

5 R. Ce que vous avez dit est exact, mais j'ai dit -- c'est ainsi que les

6 choses se sont passées. J'ai dit que c'est quelqu'un du SDS, cela n'avait

7 pas besoin d'être Krajisnik. Je pense que j'ai évoqué le fait que c'était

8 Krajisnik qui était en pourparlers avec M. Muhamed Cengic ou quelqu'un

9 d'autre du SDS. Ils étaient arrivés à ce type d'accord à un niveau élevé, à

10 un niveau plus élevé, autrement dit, ils se sont mis d'accord sur ces

11 échanges.

12 Q. Peut-être, Monsieur Cengic, nous pouvons nous-mêmes parvenir à un

13 accord sur ce point. Ce que vous avez dit dans votre témoignage d'hier à la

14 page 16, vous dites à un moment donné que

15 M. Krajisnik a fait une proposition et qu'il s'était mis d'accord avec

16 Muhamed Cengic, que la municipalité de Novi Grad, devait obtenir un poste

17 supplémentaire. La question que je vous pose, M. Cengic, est la suivante :

18 Il y avait eu un accord entre M. Velibor Ostojic du côté du SDS et Muhamed

19 Cengic du côté du SDA; est-ce que cela vous semble exact ?

20 R. Je pense que c'est exact, oui. En réalité, oui c'est exact.

21 Q. Pour finir, ceci n'a pas abouti, car le SDS, ou les représentants du

22 SDS, au niveau des négociations qui avaient eu lieu à votre niveau dans

23 votre région, n'ont pas réussi à convaincre vos collègues de la validité

24 d'un tel échange de positions,

25 n'est-ce pas ?

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1 R. La raison en était que le lendemain, je suis allé rencontrer M. Muhamed

2 Cengic. Il m'a dit qu'il n'y avait jamais eu un tel accord.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, je vous demande de bien

4 vouloir clarifier un point, s'il vous plaît. Cela n'est pas tout à fait

5 clair. La réponse du témoin disait qu'il y avait une position de plus, une

6 position supplémentaire dans l'échange entre les municipalités. Cela ne

7 m'est pas très clair.

8 M. STEWART : [interprétation] Oui, je vais tenter d'éclaircir ce point.

9 Q. Monsieur Cengic, est-il exact, n'est-ce pas -- je vais mettre de côté

10 pour l'instant votre dernière réponse. Ce qui vous a été rapporté par M.

11 Krajisnik était un accord, à savoir que Novi Grad devait obtenir un poste

12 de plus, ou plutôt que le SDS devrait obtenir un poste de plus à Novi Grad

13 dans ces négociations. Ce qui était, par ailleurs, justifié par les

14 résultats électoraux. Le SDA recevrait également un poste supplémentaire

15 dans la municipalité de Cajnice. C'était pour compenser; l'un compensait

16 l'autre.

17 R. Vous avez raison. Le but de tout ceci était comme suit : comment

18 pouvez-vous comparer une municipalité qui a quelque 100 000 électeurs et

19 une autre localité qui a quelque 5 000 électeurs ? Néanmoins, j'ai demandé

20 à M. Muhamed Cengic, je lui ai demandé s'il avait connaissance d'un tel

21 accord. Il m'a répondu que non. A la réunion suivante, j'ai précisé qu'il

22 n'y aurait pas d'échange de poste.

23 Q. La raison pour laquelle je vous pose la question, c'est que Cajnice

24 n'est jamais été évoqué par quiconque ni par M. Krajisnik, ni par quelqu'un

25 d'autre en rapport avec cet accord.

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1 R. Cajnice ?

2 Q. Autrement dit, ceci n'a jamais été évoqué. Le nom n'a jamais été

3 évoqué, n'a jamais fait partie de quoi que ce soit.

4 R. Cajnice, avait été proposé comme un échange, une forme de compensation

5 par rapport à Novi Grad. Il n'y avait pas eu d'accord à cet effet. Cajnice

6 est une petite localité. Une rue de Novi Grad est même plus grande que

7 l'ensemble de Cajnice.

8 Q. Lorsque nous avons parlé de cette question lors de votre témoignage

9 hier, à la page 16, vous dites avoir vérifié que le quartier général du SDA

10 -- que vous avez vérifié avec le quartier général du SDA, à savoir, si un

11 tel accord sur ce point avait été conclu, à savoir, l'échange des mandats.

12 Je vais citer. La partie suivante est une citation directe : "Mais ils ont

13 dit que la réponse était non, qu'un tel accord n'existait pas."

14 Monsieur Cengic, lorsqu'hier vous avez dit que "la réponse était non, et

15 que vous avez vérifié avec le quartier général du SDA," est-ce que vous

16 êtes en train de dire d'après votre témoignage aujourd'hui, que c'est à M.

17 Muhamed Cengic que vous avez posé la question en réalité ?

18 R. Lorsque j'ai dit "ils," j'entendais Muhamed Cengic. J'entendais par là,

19 la personne qui avait signé un accord avec le SDS. Je me suis rendu au

20 bâtiment municipal. C'est là que j'ai trouvé Muhamed Cengic. Je me suis

21 entretenu avec lui. C'est la réponse qu'il m'a donnée.

22 Q. Autrement dit, la différence entre votre déposition d'aujourd'hui et

23 celle d'hier, c'est que vous évoquez précisément le nom de Muhamed Cengic.

24 Mais --

25 R. Exactement.

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1 Q. -- mais la différence entre le témoignage devant ce Tribunal cette

2 semaine et la déclaration que vous avez signée en 1998, est celle-ci. Dans

3 la déclaration, vous ne mentionnez jamais le fait d'avoir vérifié avec

4 quiconque l'existence de cet accord. En toute équité, je crois qu'il nous

5 faudrait montrer cette déclaration au témoin.

6 M. STEWART : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la version en B/C/S

7 de sa déclaration ? Nous autres, nous avons la déclaration en anglais. Elle

8 est datée du 22 janvier 1998.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas quelque chose que vous avez

10 versé au dossier ?

11 M. STEWART : [interprétation] Non, la déclaration n'a pas été versée au

12 dossier, Monsieur le Président. Je suppose qu'il est aisément trouvable. Il

13 figure sur une liste provisoire --

14 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

15 M. STEWART : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président. M. LE JUGE

16 ORIE : [interprétation] Soit l'Accusation, soit vous-même qui êtes en

17 possession de cette déclaration préalable. Y a-t-il une photocopie ou

18 quelque chose ? En tout cas, vous pouvez vous servir de mon exemplaire si

19 vous le souhaitez.

20 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit d'un passage assez court. Je

21 voulais simplement que le témoin puisse voir cet extrait.M. LE JUGE ORIE :

22 [interprétation] Oui.

23 M. STEWART : [interprétation]

24 Q. Le passage qui nous concerne, Monsieur Cengic, se trouve au paragraphe

25 13 de votre déclaration. Vous dites : "Un jour, je me souviens Krajisnik

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1 avoir dit à Velibor Ostojic qu'il venait de signer un accord avec Muhamed

2 Cengic." Ce qui confirme ce que vous avez dit ce matin, plutôt cet après-

3 midi, autrement dit, "de donner un poste-clé aux organes exécutifs de Novi

4 Grad, au SDS à Novi Grad. En retour, vous donneriez un poste au SDA à

5 Cajnice." Ensuite, vous poursuivez. Ensuite, deux phrases qui sont clés

6 ici, "Je ne pensais pas, cela, je ne l'ai pas cru car Cajnice est une

7 petite ville qui comporte quelque 3 000 habitants. Il eut été plus probable

8 de signer un accord d'échange entre des postes à Novi Grad et Banja Luka.

9 La tactique de Krajisnik n'a rien changé. Ils continuaient à affecter des

10 postes comme je vais le décrire un peu plus tard."

11 Monsieur Cengic, ce que j'avance c'est que c'est assez surprenant, en

12 réalité. Vous avez pris une mesure assez simple qui consistait à vérifier

13 si auprès de M. Muhamed Cengic lui-même, et pourquoi n'en n'avez-vous pas

14 parlé lorsque vous avez fait votre déclaration en 1998. Pourquoi n'en

15 n'avez-vous pas parlé du tout ?

16 R. Lorsque j'ai fait ma déclaration préalable en 1988, je ne pensais pas

17 venir ici aujourd'hui, et je ne pensais pas être obligé de tout dire mot à

18 mot. Il s'agissait, à ce moment-là, d'établir la vérité, et quatre ans

19 étaient passés. Il était difficile de savoir exactement comment les choses

20 s'étaient passées. Je sais simplement que l'accord a échoué. Lorsque je

21 suis allé rencontrer Muhamed Cengic, je ne pensais pas qu'il s'agissait

22 d'un point important. Ce qui m'importait à mes yeux était que l'accord

23 n'avait pas abouti.

24 Q. Monsieur Cengic, l'élément essentiel est celui-ci : dans votre

25 déclaration que vous avez donnée en 1998, les motifs qui vous ont permis de

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1 déduire que l'accord n'avait pas pu aboutir en ces termes-là, plutôt que de

2 dire simplement que vous avez vérifié avec une des parties à l'accord, et

3 ensuite, on vous a dit que cet accord n'avait encore abouti. C'est la

4 question que je vous pose. Il est surprenant pour vous de raisonner ainsi,

5 et de déduire quelque chose. Maintenant, vous dites à la Chambre que vous

6 aviez, en réalité, vérifié avec les personnes qui ont participé. Vous

7 n'aviez aucune raison pour raisonner ainsi, ou en tirer des conclusions.

8 C'est la question que je vous pose.

9 R. Je peux vous dire ce qui suit : Même si Muhamed Cengic avait dit à ce

10 moment-là que c'était un point qui n'allait aboutir, je n'aurais pas agi

11 ainsi, parce qu'étant moi-même responsable de Novi Grad, j'aurais de la

12 sorte critiqué Muhamed Cengic pour avoir parlé des choses aussi

13 importantes. Je suis allé vers lui non pas parce que c'était un dilemme

14 pour moi mais, à savoir, si ceci allait mise en œuvre ou non; ou plutôt,

15 pour vérifier si, oui ou non, ce que disait M. Krajisnik était vrai ou non.

16 Effectivement, il était fort inapproprié de parvenir à un tel accord

17 parce que Muhamed Cengic était la seule personne qui aurait pu se tromper

18 ici dans son estimation. Cela, je ne pouvais pas le permettre au niveau

19 municipal. Je ne pouvais pas non plus me le permettre par rapport à la

20 comparaison que j'ai évoquée un peu plus tôt.

21 Q. Très bien. Poursuivons, Monsieur Cengic. Hier, à la page 17 du compte

22 rendu d'audience, vous avez parlé des négociations qui ont eues lieu dans

23 le bâtiment de la municipalité, et qu'il y avait un mur qui séparait les

24 bureaux du SDA des bureaux du SDS. Vous dites que quelquefois, vous vous

25 rendiez dans votre --

Page 8143

1 R. Oui.

2 Q. -- dans les salles du SDA avec votre délégation, mais le plus souvent,

3 vous restiez dans le hall. Vous attendiez que les membres du SDS

4 reviennent. Ensuite, vous avez dit : "Lorsque nous sommes descendus, j'ai

5 entendu à plusieurs reprises M. Krajisnik, étant donné que les murs

6 n'étaient pas très épais, parler à quelqu'un appelé Radovan ou Raso."

7 Monsieur Cengic, ceci n'est pas tout à fait clair à 100 %. Je souhaite que

8 l'on fasse la clarté là-dessus. Lorsque vous dites que vous descendiez,

9 est-ce que vous entendiez à ce moment-là que vous vous rendiez dans les

10 pièces où se trouvaient les membres du SDS, et que vous vous rendiez dans

11 le hall d'entrée ?

12 R. Le couloir traversait l'ensemble du bâtiment, et les négociations

13 avaient lieu dans la salle 327. Lorsque je dis que nous descendions, nous

14 passions du troisième étage au premier étage, et les bureaux des trois

15 partis étaient les uns à côté des autres; du SDA, le SDS, et le HDZ. Tous

16 les bureaux étaient au premier étage. Autrement dit, au premier étage,

17 j'entendais du troisième étage au premier étage.

18 Q. Autrement dit, lorsque vous dites être descendu, vous vous rendiez dans

19 ces bureaux où il y avait qu'une paroi très mince qui séparait les

20 différents bureaux au premier étage; est-ce exact ?

21 R. Oui.

22 Q. C'est à cette occasion-là qu'où, à plusieurs reprises, vous dites : M.

23 Krajisnik parlait avec quelqu'un qui s'appelait Radovan ou Raso ?

24 R. Oui. Ceci n'était pas inhabituel.

25 Q. Etes-vous en train de dire que vous pouviez en réalité suivre la

Page 8144

1 conversation, ou que vous pouviez simplement entendre quelques phrases par

2 si par là.

3 R. Je n'avais pas l'intention d'écouter aux portes. C'est quelque chose

4 que je n'ai jamais fait. Mais en prenant mon café et une cigarette, je

5 pouvais entendre cette conversation. Il est vrai que nous continuions à

6 parler des sujets dont nous nous entretenions. Je n'ai jamais pensé à ces

7 choses-là. Je n'ai jamais imaginé que l'on allait un jour me poser des

8 questions à ce sujet. Si ces conversations étaient suivies, elles étaient

9 sans doute suivies par les personnes qui en avait la responsabilité.

10 Q. De façon générale, vous et vos collègues, vous continuiez votre

11 conversation alors qu'il y avait des discussions, et je suppose que vous

12 parlez également des conversations téléphoniques dans les pièces d'à côté.

13 R. Oui, les conversations téléphoniques, oui. Etant donné que je ne suis

14 pas entré dans les bureaux, il aurait pu s'agir de conversations en direct.

15 Bien que les bureaux étaient les uns à côté des autres, je ne suis jamais

16 rentré dans leurs bureaux à proprement parler.

17 Q. Monsieur Cengic, si vous n'entendiez pas suffisamment bien, et si vous

18 ne pouviez pas savoir s'il s'agissait véritablement de conversation dans la

19 pièce ou de conversation téléphonique, à mon avis, vous ne deviez pas

20 entendre grand-chose. Vous comprenez ce que je veux dire ? Car il est en

21 général assez aisé de comprendre s'il s'agit d'une conversation au

22 téléphone, ou d'un échange d'une conversation entre deux personnes dans la

23 même pièce. C'est la question que je vous pose. Si vous n'avez pas pu

24 savoir s'il s'agissait d'une conversation téléphonique ou d'une

25 conversation dans la pièce, à mon avis, vous n'aviez pas pu suivre cela de

Page 8145

1 très près.

2 R. Je ne suivais pas les conversations du tout. Lorsque les personnes se

3 saluent, elles ont tendance à parler un peu plus fort, en disant, bonjour,

4 comment ça va ? Ben évidemment, c'était quelque chose auquel je ne prêtais

5 pas attention, et je ne le ferais pas encore au jour d'aujourd'hui.

6 J'entendais ces personnes se saluer, mais je n'entendais pas la suite de

7 leur conversation. Je n'avais pas du tout l'intention d'écouter aux portes.

8 J'entendais simplement quelqu'un saluer quelqu'un d'autre.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cengic, je ne sais pas si vous

10 avez bien compris la question. La question que vous pose Me Stewart est

11 celle-ci : Si vous êtes en mesure d'entendre un nom, alors vous devriez

12 pouvoir entendre la personne, et vous devez savoir s'il s'agit d'une

13 personne qui parle, et qui attend une réponse non pas donner directement,

14 mais au cours d'une conversation téléphonique et, ensuite, une personne

15 continue à parler tout seul.

16 La question que vous pose Me Stewart est celle-ci : Cela doit être bien

17 clair si vous entendez les noms des autres participants dans la

18 conversation, vous devriez au moins pouvoir comprendre si cette personne

19 est seule et attend la réponse, ou s'il y a quelqu'un d'autre qui répond à

20 la question qui a été posée avec cette personne, et répond directement.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'avais pas

22 l'intention d'écouter les conversations des autres. C'est simplement, alors

23 que j'entrais dans mon bureau, j'ai entendu ce nom, et je suis entré dans

24 le bureau. Je n'étais pas en train d'écouter derrière le mur à la

25 conversation. Il est vrai que M. Krajisnik recevait un nombre très

Page 8146

1 important de délégations. Il a pu parler avec un nombre très important de

2 personnes. Je ne sais pas ce qui se passait derrière la porte. Je dis

3 simplement ceci, à plusieurs reprises. J'ai entendu le nom de Radovan ou

4 Raso évoqué dans la conversation, mais je ne peux pas entrer dans le

5 détail. Je souhaite souligner, encore une fois, Monsieur le Président, que

6 je n'ai jamais écouté à la porte, et je ne souhaite pas le faire non plus.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Stewart.

8 M. STEWART : [interprétation]

9 Q. Avez-vous jamais entendu prononcer le nom d'Ostojic ou Velibor, évoquer

10 au cours de ces conversations -- des conversations de M. Krajisnik ?

11 R. Non.

12 Q. [aucune interprétation]

13 R. Ce jour, non. Je n'ai pas entendu cela.

14 Q. Savez-vous pour autant que M. Krajisnik ait consulté quelqu'un d'autre

15 à propos de ces négociations ? La personne qu'il aurait consulté en

16 premier, ou consulté -- la personne qu'il aura surtout consultée aurait dû

17 être M. Ostojic, n'est-ce pas ? Est-ce que vous savez cela ?

18 R. Comment pourrais-je savoir cela ? Je ne -- même si j'étais en bas ou

19 dans les bureaux en bas. Non, je ne sais pas.

20 Q. Merci, Monsieur Cengic, vous avez répondu à la question.

21 La proposition qui avait été faite pour la commune de Zabrdje,

22 commune distincte, donc, je le dis, maintenant de cibler un peu ce thème

23 parce que nous avançons, n'est-ce pas ? N'est-il pas vrai que M. Krajisnik

24 n'a pas pris part à ce projet du tout, et qu'il n'a absolument pas pris

25 part à cela, et que cela n'était pas son idée du tout ?

Page 8147

1 R. Je n'ai jamais dit qu'il avait pris part à ce projet.

2 Q. Donc la question que je vous posais est exacte. Autrement dit, il n'a

3 jamais pris part à ce processus, à ce projet, à cette idée, n'est-ce pas ?

4 C'est exact ?

5 R. Comment voulez-vous que je le sache ? Je sais simplement que Boro

6 Bjelica est venu, et qu'ils allaient mettre en place une commune locale, à

7 savoir si M. Krajisnik était au courant de ce que Boro Bjelica disait, et

8 étant donné que sa maison se trouvait à Zabrdje, étant donné que c'était un

9 homme assez influent, je pense que rien n'aurait pu se passer sans qu'il en

10 ait connaissance. Mais M. Krajisnik n'a jamais assisté à ces réunions en

11 personne pour le dire lui-même.

12 Q. Vous avez décrit, à la page 40 du compte rendu d'audience d'hier, vous

13 avez décrit une réunion que vous aviez convoquée au mois de juillet 1991,

14 dites-vous, pour tenter de trouver une solution à ce problème. On vous a

15 posé la question : "Avez-vous appelé M. Momcilo Krajisnik pour qu'il vous

16 aide en ceci ?" Monsieur Cengic, la position est la suivante, n'est-ce pas

17 ? Une réunion a, effectivement, été organisée par -- entre vous et M.

18 Krajisnik ? Ceci a été établi. La réunion a été convoquée à la demande de

19 M. Krajisnik, plus particulièrement, aux fins de pouvoir traiter la

20 question de la construction légale de sa maison, n'est-ce pas ?

21 R. Non. La réunion avait été convoquée à ma demande, et je les ai invité

22 dans mon bureau. Je leur ai demandé de venir dans mon bureau. Mais avant

23 cela, M. Krajisnik n'était pas au courant du problème du tout, lorsque j'ai

24 commencé à le lui exposer. Je me suis rendu compte du fait qu'il était au

25 courant de cela. Nous n'avons pas abordé cette question pendant très

Page 8148

1 longtemps car M. Krajisnik a tout simplement changé de sujet, et a commencé

2 à traiter d'autres points. Par exemple, la demande faite par Bjelica et le

3 contenu de ce document, étant présent dans le bureau de la municipalité à

4 ce moment-là, il m'a demandé d'appeler une femme, quelqu'un qui était au

5 niveau des permis de construire. Elle faisait très bien son métier. Elle

6 était professionnelle, c'était la femme du chef de police de Novi Grad.

7 Elle est venue en bas, elle est venue dire à M. Krajisnik qu'il

8 devait verser un certain montant pour pouvoir construire sa maison. Il a

9 souri, en disant qu'il s'agissait d'un montant très important. Il a

10 répondu, en disant qu'il ne pourrait pas certainement payer ce montant-là.

11 Encore, moins les autres, comment allaient-ils pouvoir verser une telle

12 somme ?

13 Pour ce qui est de la question de la commune locale, nous ne sommes

14 pas parvenus à une solution. La situation a resté en l'état, hormis le fait

15 qu'à cette occasion-là, j'ai vu que M. Krajisnik était au courant, était

16 autant au courant de cette affaire-là que moi.

17 Q. Nous avons déjà établi, Monsieur Cengic, qu'il y a une

18 distinction très claire entre votre souvenir et ceux de M. Krajisnik sur

19 qui a convoqué cette réunion, et pourquoi, donc nous n'allons pas y

20 revenir.

21 Est-ce que vous seriez d'accord alors sur le fait que toute

22 discussion des autres questions par rapport à la maison de

23 M. Krajisnik avait été très brève et, en fait, incidente par rapport à les

24 discussions qui ont eu lieues entre vous et lui ce jour-là ?

25 R. Je voudrais revenir à cette autre question. Je souhaiterais que

Page 8149

1 les Juges puissent voir une interview donnée par M. Krajisnik pour le Oko

2 Novi Gradska, ou il est dit que j'était venu à Novi Grad à l'invitation de

3 Cengic, est c'est cela -- je confirme ce que j'ai dit, c'est à mon

4 invitation qu'il y est venu, donc je crois que vous avez déjà débattu de ce

5 papier, si vous pouvez y jeter une coupe d'œil.

6 Q. Monsieur Cengic, je suis sûr que M. Harmon pourra présenter les moyens

7 de l'Accusation. Je voudrais simplement qu'on se limite aux questions et

8 aux réponses, la question que je vous pose, et la réponse que vous ferrez,

9 dans le cours de votre déposition.

10 Vous avez dit hier, dans votre témoignage, en déposition à la page 41,

11 concernant cette réunion : "Nous n'avons pas parlé de cette question. Nous

12 n'avons pas tellement parlé." Il s'agissait de la question de Zabrdje.

13 "Nous n'en avons pas parlé tellement."

14 R. Oui.

15 Q. Vous dites aussi qu'il l'avait appuyé d'une certaine manière, il avait

16 appuyé les auteurs de cette proposition. Monsieur Cengic, si vous lui aviez

17 demandé très précisément de venir à une réunion pour discuter de la

18 question, c'est quand même assez bizarre, n'est-ce pas, que vous n'avez

19 même pas parlé de cela de façon suffisante, et que vous puissiez dire que,

20 d'une certaine manière, il avait appuyé les auteurs de la proposition ?

21 R. J'ai conclu que sa position était identique à celle du parti qu'il

22 proposait cette idée. Qu'avait-il donc à conclure ?

23 Q. Qui étaient les auteurs de cette proposition, pour reprendre la formule

24 que vous avez employée ?

25 R. Je n'ai vu que la proposition concernant Bijelica. Je n'ai pas vu la

Page 8150

1 pétition. Je n'ai pas vu non plus les habitants. J'ai vu simplement Boro

2 Bijelica, qui a présenté cette demande par écrit. Il a dit qu'il y avait

3 400 signatures. Je n'ai jamais vu les signatures en question. Et donc --

4 Q. M. Krajisnik ne vous a jamais dit quelque chose pour vous suggérer

5 qu'il fallait faire quelque chose dans un contexte particulier, autre que

6 de suivre les procédures en vigueur. Les procédures prévues par la loi,

7 n'est-ce pas ?

8 R. M. Krajisnik savait s'exprimer de façon très habile. J'ai remarqué un

9 mot qu'il avait prononcé lors de l'interview, il avait employé le mot

10 "violence" au cours de la conversation, et je n'avais jamais pensé que de

11 la violence pourrait être un moyen de parvenir à un objectif quel qu'il

12 soit. Il fallait agir conformément aux lois et à l'ordre public. Il savait

13 d'avance que cette proposition ne répondait pas à toutes les conditions qui

14 étaient posées par la législation.

15 Q. Bien. J'allais vous poser des questions à ce sujet, donc je vais vous

16 les poser maintenant : quand vous avez parlé du fait qu'il avait employé ce

17 mot violence dans l'article du Novi Gradska Oko, dont il a été question,

18 plus particulièrement à la page 43 du compte rendu hier.

19 R. Oui, oui.

20 Q. Nous avons remarqué, Monsieur Cengic, en l'occurrence, il semble qu'il

21 y ait eu une interview, un article qui avait trait à l'interview avec vous

22 sur la même question de cette publication, nous n'avons pas, en fait,

23 l'ensemble de l'histoire. Vous vous souvenez de cela, est-ce qu'il

24 s'agissait de la même question dans un article qui vous concernait ?

25 R. C'était une interview très longue, à la deuxième, ou à la troisième

Page 8151

1 page de ce journal.

2 Q. Je ne sais pas si vous l'avez avec vous, est-ce que je peux supposer

3 que vous l'avez avec vous, Monsieur Cengic ?

4 R. Peut-être, que je l'ai ici.

5 Q. Vous l'avez ici. Mais c'est merveilleux. Où est-il, Monsieur Cengic,

6 alors ?

7 R. Soit ici même, soit à l'hôtel. Mais certainement à La Haye. Je ne sais

8 pas si je l'ai mis dans ma sacoche ce matin, enfin si je l'ai mis, donc ce

9 journal dans ma serviette ce matin, mais j'ai apporté le journal au cas ou.

10 Au cours de la suspension de séance, je vérifierai si je l'ai ici même et

11 il est très probable qu'il est ici au Tribunal.

12 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, Messieurs

13 les Juges, un instant. Si vous voulez m'accorder un instant, s'il vous

14 plaît.

15 [Le conseil de la Défense se concerte]

16 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais

17 c'était simplement une question concernant le compte rendu, et je crois que

18 nous pourrons la régler autrement.

19 Q. Je vous remercie, Monsieur Cengic. Je vous serais reconnaissant, si je

20 peux vous demander cela à travers le Président et les Juges de la Chambre

21 de vérifier si vous aviez cet article au cours de la prochaine suspension

22 de séance.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous ne l'avez pas, Monsieur

24 Cengic, combien de temps vous faudrait-il pour aller à votre hôtel, dans

25 votre chambre pour l'apporter ?

Page 8152

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Bon, je pense 10 à 15 minutes, tout au plus.

2 Si on mettait une voiture à ma disposition, j'aurais besoin de 10 à 15

3 minutes.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Bien, est-ce que vous seriez prêt à

5 renoncer à une partie du temps auquel vous avez droit à une suspension, et

6 de le passer pour aller à votre hôtel, si nécessaire, bien sûr ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Au nom de la vérité, bien sûr. Je suis venu

8 ici pour dire la vérité. J'ai prêté serment de dire la vérité, assurément,

9 certainement.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je vous remercie beaucoup.

11 Pourrais-je vous demander, Monsieur le Greffier, de bien vous mettre en

12 contact avec la section qui s'occupe des Victimes et des Témoins et d'être

13 prêt si M. Cengic nous fait savoir si son article est bien ici, ou s'il

14 faut qu'il aille le chercher à son hôtel, dans sa chambre ? Est-ce que vous

15 pourriez faire les préparatifs en ce sens ?

16 Maître Stewart, est-ce que vous avez fini avec, tout au moins, cette partie

17 de l'article du journal que nous avons, pour le moment, devant nous ?

18 M. STEWART : [interprétation] Non, je n'ai pas fini, Monsieur le Président.

19 J'allais poursuivre --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

21 M. STEWART : [interprétation] Le témoin a évoqué cette question, donc j'ai,

22 un petit peu, précédé les choses pour en traiter.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, veuillez poursuivre.

24 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

25 Q. En ce qui concerne l'article qui relate l'interview avec M. Krajisnik,

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1 pour le moment. Vous avez dit, ou je pense que M. Harmon, dans sa question,

2 a évoqué le dernier paragraphe dans la traduction anglaise, dans lequel M.

3 Krajisnik est cité comme ayant dit quelque chose : "Qu'il faudrait

4 s'assurer que des modifications soient apportées comme le prévoit la

5 constitution et conformément à la décision de la municipalité."

6 Je voudrais être bien au clair, Monsieur Cengic, qu'est-ce que vous êtes en

7 train de dire que M. Krajisnik, d'une manière ou d'une autre, était en

8 train d'attiser des craintes de violence ou des pensées de violence qui, en

9 fait, n'étaient pas encore dans l'air ?

10 R. A mon avis, c'est une seule et même chose. Après tout ce qui s'est

11 passé, je suis maintenant d'un avis différent par rapport à ce je pensais à

12 l'époque. A l'époque, je pensais qu'il n'y aurait pas de violence. En

13 l'occurrence, dans cet article, lorsque je l'ai lu, lorsqu'il a été publié

14 avant la guerre, je n'avais même pas fait attention, prêté attention à ce

15 mot. Je n'avais pas trouvé que c'était frappant d'une façon quelconque.

16 Après toutes les violences qui se sont déchaînées, le mot, à ce moment-là,

17 a pris l'importance qu'il a prise.

18 Q. Oui, mais ce que je suis vraiment en train de vous demander, Monsieur

19 Cengic, c'est ceci, et je pense que j'ai le droit de poser cette question,

20 c'est que si vous allez dire quelque chose de ce genre concernant M.

21 Krajisnik, cela ne devrait pas être par une allusion. Je vous demande de

22 dire bien clairement si vous essayez de dire ou non que M. Krajisnik, d'une

23 façon quelconque, était en train d'essayer d'attiser des pensées ou des

24 sentiments de violence ou des craintes de violence qui n'étaient pas déjà

25 dans l'air au mois de février 1992 ?

Page 8154

1 R. C'était à un moment où les négociations intensives étaient encore en

2 cours. Je n'ai rien dit. J'ai simplement dit que j'avais remarqué qu'il

3 avait employé le mot violence. Je n'ai pas essayé de dire qu'il essayait de

4 favoriser la violence d'une façon quelconque. J'ai simplement dit qu'il

5 avait employé ce mot. Vous pouvez regarder le journal, lui-même.

6 Q. Monsieur Cengic, voici à quoi cela revient : si votre déposition sur ce

7 point est davantage que d'appeler l'attention sur le mot violence dans le

8 texte de cet article, alors avec tout le respect que je vous dois, je

9 n'essaie pas d'être drôle ou insultant, Monsieur Cengic, mais la Chambre de

10 première instance peut lire cet article et se rendre compte par elle-même.

11 Tout le monde peut lire pour soi un article. Je vous invite à dire aux

12 membres de la Chambre de première instance si, dans votre déposition, vous

13 vous proposez de dire quelque chose de plus que le simple fait que nous

14 pouvons lire ceci dans le journal ?

15 R. Je n'ai rien à ajouter, excepté le fait que, plus tard, il y a eu de la

16 violence.

17 Q. Je vais ajouter cette question, Monsieur Cengic, parce que c'est moi

18 qui fais les questions et vous les réponses.

19 C'est bien cela que nous avons convenu. Monsieur Cengic, en février 1992,

20 personne n'aurait pu manquer de savoir qu'il y avait une des possibilités

21 de violence dans l'air en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

22 R. En 1991, ou est-ce que vous parlez de 1991 ou 1992 ? Quelle année ?

23 1992 ?

24 Q. Février 1992.

25 R. 1992. A ce moment-là, l'affaire de la Croatie n'est pas bien loin. La

Page 8155

1 Croatie, ce n'est pas loin. Dubrovnik n'est pas très loin. Vukovar n'est

2 pas très loin de la Bosnie. Tous les jours, aux nouvelles, nous entendions

3 ce qui se passait là-bas. On voyait ce qui s'y passait.

4 Q. Monsieur Cengic, vous avez fait remarquer à juste titre le fait qu'il

5 est évident du point de vue géographique, que la Croatie n'est pas très

6 éloignée. Elle n'était pas très éloignée en 1991. Bien entendu, nous savons

7 qu'il y avait des violences perpétrées dans la Yougoslavie qui remontaient

8 à 1991, n'est-ce pas ? Des violences graves, Monsieur Cengic. Je suggère

9 que nous n'avons pas besoin de nous attarder là-dessus; la réponse est oui,

10 n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Serait-il exact, simplement pour confirmer les choses, alors que M.

13 Krajisnik n'a jamais fait la moindre suggestion vous ayez pu entendre ou

14 que vous ayez entendu parler ou dont vous ayez eu connaissance ou

15 conscience, n'a jamais suggéré avant que la guerre n'éclate, que quoi que

16 ce soit devrait être fait conformément aux procédures et à la loi; c'est

17 bien cela ?

18 R. J'ai vu cette fois-là M. Krajisnik lorsque nous avons eu cet entretien,

19 cette discussion. Lorsque je suis allé au parlement de la République comme

20 hôte, alors on pouvait se voir l'un et l'autre, de la même façon que je

21 vous vois maintenant. Parfois nous pouvions échanger des saluts aussi, on

22 pouvait se saluer. En passant nous pouvions opiner de la tête ou faire un

23 signe de tête. Nous étions de la même municipalité. Il y avait différents

24 niveaux du gouvernement, en l'occurrence. En fait, on ne s'est pas

25 véritablement rencontré; chacun s'occupait de ses propres problèmes au

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1 niveau du gouvernement auquel il se trouvait.

2 Q. Je vais vous demander, Monsieur Cengic, dans votre déclaration, il

3 s'agit toujours de la même déclaration, là encore. C'est un passage

4 relativement bref, que je vais vous citer.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, j'espère que vous allez

6 me permettre, parce que sans cela nous ne pourrions perdre le fil. J'ai une

7 question à poser au témoin à l'instant même.

8 Précédemment, vous avez dit que l'interview avec M. Krajisnik confirmait

9 qu'il était venu vous voir, que même, comme vous l'avez dit, je vous cite :

10 "J'étais venu." Voici les mots conformément à ce que vous dites, qui ont

11 été dit au cours dans l'interview de

12 M. Krajisnik. "J'étais venu à Novi Grad à l'invitation de M. Cengic."

13 Pourriez-vous, s'il vous plaît, ou est-ce qu'on pourrait, s'il vous plaît,

14 présenter au témoin la pièce à conviction P388, et pourriez-vous lui

15 désigner exactement cette partie de l'interview. C'est à la page 2 -- non,

16 pardon, c'est à la dernière page. C'est la deuxième page de la version en

17 B/C/S. Oui, la page suivante, la suivante, oui, celle-ci. Très bien.

18 Monsieur Cengic, pourriez-vous me dire où exactement vous avez lu qu'il est

19 dit que M. Krajisnik vous avait invité à venir, tout au moins que M.

20 Krajisnik dit que c'est lui qui vous a invité à venir à Novi Grad ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la partie où mon nom est mentionné.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pourriez-vous, s'il vous plaît,

23 lire le passage très lentement. Est-ce que c'est la partie où cela commence

24 la phrase "Ismet Cengic... ? Pourriez-vous s'il vous plaît, la lire

25 lentement ?

Page 8157

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. "Ismet Cengic, président de l'assemblée

2 municipale de Novi Grad, a demandé l'aide de Momcilo Krajisnik, président

3 de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, qui est aussi un habitant qui vit à

4 Zabrdje afin de résoudre ce problème."

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je comprends que demander

6 cette aide, vous l'avez compris comme étant "vous avez invité M. Krajisnik

7 à venir à ?" J'essaie simplement de voir très exactement ce qui vous a

8 servi comme base pour faire votre déposition.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

11 Maître Stewart.

12 M. STEWART : [interprétation]

13 Q. Oui, Monsieur Cengic, il est assez artificiel d'exprimer les choses

14 comme étant une question. Si vous voyez sur ce point précis de l'interview

15 les mots employés par le journaliste, ce ne sont pas une citation de M.

16 Krajisnik.

17 R. C'est un article qui est écrit par un journaliste.

18 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

19 Q. Je vous prie, Monsieur Cengic, de revenir à votre déclaration, celle

20 que vous avez faite en 1998, en janvier 1998. Vous décrivez cela au

21 paragraphe 27. C'est un passage assez court. Là encore vous dites, je vous

22 cite : "En ce qui concerne la Défense territoriale, la DT, au début,

23 lorsque j'ai pris mes fonctions de président de la municipalité, le chef de

24 la Défense territoriale était un capitaine Osman Dzamalija. En mai 1991, le

25 SDS a suggéré un candidat pour ce poste. Son rang était inférieur à celui

Page 8158

1 de capitaine. Le commandement de la Défense territoriale de Sarajevo a dû

2 approuver la nomination d'un nouveau chef de la Défense territoriale, et a

3 refusé le candidat du SDS. Ils ont rendu compte, ils ont dit qu'ils étaient

4 tout à fait satisfaits du capitaine, et qu'ils n'avaient pas l'intention de

5 modifier les choses le concernant. Le SDS a commencé à exercer des

6 pressions sur le commandement de la Défense territoriale de Sarajevo pour

7 que leur candidat obtienne la place. Je me rappelle qu'à un moment donné du

8 côté de septembre 1991, j'ai reçu un document du QG de la Défense

9 territoriale de Sarajevo, selon lequel ils étaient prêts à accepter le

10 candidat du SDS. J'ai classé cette lettre dans un de mes dossiers. La

11 guerre en Croatie faisait rage à l'époque, et je souhaitais qu'il conserve

12 sa place. Toutefois, le SDS a appris que j'avais reçu l'autorisation de

13 confirmer la nomination de leur candidat. Ils ont exercé des pressions sur

14 moi pour que je leur montre ce document. A la suite de cela, le candidat du

15 SDS a finalement été nommé."

16 Voilà, c'est le passage tout entier dont je viens de donner lecture. Est-ce

17 que vous êtes d'accord, Monsieur Cengic, que c'était à l'évidence une

18 conduite, un comportement tout à fait inconvenant de votre part d'avoir

19 classé cette lettre comme vous l'avez fait.

20 R. Pas au sens que vous dites. Ce n'est pas le sens que je donnerais.

21 L'assemblée était censée désigner un commandant. Il y avait comme une

22 impasse, un arrêt des travaux de l'assemblée, de façon à empêcher qui que

23 ce soit d'obtenir ce document, de façon à empêcher même que ce document ne

24 soit perdu, l'assemblée était censée se réunir tous les mois. Parfois, nous

25 nous réunissions plusieurs fois par mois. Nous ne pouvions nous mettre

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1 d'accord sur un ordre du jour. C'est la raison pour laquelle j'ai mis le

2 document de côté, de sorte que personne ne puisse le trouver, ou que ce

3 document ne soit pas perdu -- qu'elle ne le perde pas.

4 Q. Bien, Monsieur Cengic, pourrions-nous être bien au clair ? Il y a deux

5 choses tout à fait différentes. Vous avez, d'une part, dit que ce document

6 avait été mis de côté par vous de façon à ce qu'il ne soit pas perdu ?

7 Pourrions-nous bien être au clair tout d'abord sur le point de savoir :

8 dites-vous ou ne dites-vous pas que vous aviez mis ce document en sécurité

9 dans votre bureau pour le conserver de façon à ce qui n'y ait aucun risque

10 qu'il disparaisse, ou qu'il tombe dans d'autres mains qu'il ne fallait

11 pas ? Est-ce que c'est que cela vous dites dans votre déposition ?

12 R. L'assemblée qui a été tenue en février a élu M. Guzina d'après la

13 proposition qui avait été faite. J'avais l'intention de cacher ce document,

14 et je n'aurais pas eu à jamais le montrer.

15 Q. Ceci ne répond pas à ma question du tout, Monsieur Cengic. Je vous

16 demande si vous pouvez confirmer, ou si vous pouvez éliminer une des

17 possibilités que vous avez ouverte, qui est que lorsque vous avez dit que

18 vous avez mis de côté ce document, lorsque vous l'avez caché dans votre

19 bureau, je vous paraphrase, mais ceci, c'était pour le garder en sécurité

20 pour empêcher qu'il ne disparaisse, ou qu'il ne tombe dans des mains qui

21 n'auraient pas dû en prendre connaissance. Est-ce que c'est cela que vous

22 nous dites ?

23 R. C'était pour le garder en sécurité de façon à conserver cette

24 proposition.

25 Q. C'est la question que je vous pose, Monsieur Cengic. Est-ce que c'est

Page 8160

1 cela que vous dites ?

2 R. Je voulais le conserver et il a été conservé en sûreté.

3 Q. Monsieur Cengic, dans votre propre déclaration que vous avez signée en

4 1998, vous avez dit clairement que vous aviez serré cette lettre de façon à

5 la cacher, de façon à ce que d'autres personnes ne la voit pas afin que

6 vous puissiez empêcher un changement, que vous puissiez empêcher que ne

7 change le chef de la Défense territoriale. C'est la raison pour laquelle

8 vous l'avez faite, n'est-ce pas ?

9 R. Le chef de la Défense territoriale, à l'époque, ne représentait pas

10 quoi que ce soit, compte tenu du fait que la Défense territoriale était

11 directement subordonnée à l'armée populaire yougoslave. Ce n'était rien.

12 Cela n'avait pas de sens. Ils n'avaient pas d'armes sauf qu'ils avaient sur

13 le papier leurs membres. Avant cela, la JNA et l'armée population

14 yougoslave avait repris toutes les armes de la Défense territoriale. Le

15 commandement avait été repris de la JNA aussi. Le chef de la Défense

16 territoriale était une personne qui n'était que, nominalement,

17 officiellement commandant d'une Défense territoriale dépourvue d'armes,

18 sans quelque arme que ce soit. Il n'avait même pas d'armes légères

19 d'infanterie.

20 Q. Monsieur Cengic, dans votre déclaration, vous avez dit que : "La guerre

21 en Croatie faisait rage à l'époque, et je voulais que Dzamalija conserve

22 son poste." Donc, quoique vous venez de dire concernant ce poste et M.

23 Dzamalija, à votre avis, ceci était suffisamment important pour que vous

24 vouliez prendre des mesures actives pour empêcher son remplacement; c'est

25 bien cela, n'est-ce

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1 pas ?

2 R. Depuis le mois d'août jusqu'à aujourd'hui, jusqu'au jour en question

3 pas une seule session de l'assemblée municipale n'a été tenue. De sorte

4 qu'il n'y aurait pas pu y avoir de remplacement. Il fallait qu'une décision

5 fût prise de façon à ce qu'un tel remplacement puisse avoir lieu. Plusieurs

6 sessions avaient été prévues au calendrier. Elles se déroulaient pendant

7 une journée entière, et néanmoins, on n'arrivait pas à se mettre d'accord

8 sur l'ordre du jour. Je me rappelle très bien en novembre et en décembre

9 que les inspecteurs européens étaient là, et que le président --

10 Q. Monsieur Cengic, je vous arrête ici. Votre déclaration se lit comme

11 suit : "J'ai caché cette lettre au plus profond de mon bureau. La guerre en

12 Croatie faisait rage à l'époque et je voulais que Dzamilija conserve son

13 poste. Cependant, le SDS a appris cela, a appris que j'avais reçu

14 l'autorisation de confirmer la nomination de leur candidat, et ils ont

15 exercé des pressions sur moi pour que je leur montre ce document. A la

16 suite de cela, le candidat du SDS a finalement été nommé."

17 Cette déclaration donne une impression très ferme que vous ne vouliez

18 pas montrer cette autorisation au SDS parce que vous aviez peur qu'elle

19 puisse avoir pour résultat le remplacement de M. Dzamilija. Est-ce que

20 c'est une impression correcte ? Est-ce que c'est exact comme impression ?

21 R. Mon appréciation de la situation, c'est que c'était prématuré.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez mis de côté ce

23 document ? Est-ce que vous l'avez caché ? Parce qu'à l'époque, vous pensiez

24 que le remplacement de M. Dzamilija, ce n'était pas le bon moment pour le

25 faire remplacer et que, par conséquent, vous vous opposiez à son

Page 8162

1 remplacement.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Les deux. A la fois pour qu'il soit gardé en

3 sécurité, et pour que le remplacement ait lieu en temps utile, en temps

4 voulu. J'ai refusé la mobilisation à l'époque de l'unité qui était censée

5 être envoyée à Dubrovnik, l'unité de chars qui était censée partir contre

6 Dubrovnik.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que le fait de cacher une lettre

8 au fond de votre bureau est la procédure normale pour traiter des lettres

9 que vous recevez ? Est-ce que celle-ci n'aurait pas dû être enregistrée et

10 archivée de la manière normale, quelles qu'aient été les raisons, qu'elles

11 aient été de bonnes raisons ou de moins bonnes raisons pour le faire.

12 Encore une fois, s'agit-il d'une façon normale de procéder ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'était quelque chose, c'était un moment

14 exceptionnel. Il était difficile pour moi de --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais que vos raisons aient été bonnes ou

16 non, à tort ou à raison, la question est de savoir si c'était la procédure,

17 ou la façon de procéder ordinaire pour les lettres que vous receviez ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Stewart.

20 M. STEWART : [interprétation]

21 Q. Votre avis selon lequel un tel remplacement ait été prématuré, Monsieur

22 Cengic, c'était que la voie qui convenait, la voie responsable compte tenu

23 de vos fonctions était que cette question fasse l'objet d'une discussion

24 selon une procédure politique correcte par toutes les parties intéressées,

25 et pour que vous puissiez faire valoir votre avis afin qu'il puisse

Page 8163

1 éventuellement l'emporter conformément à une procédure démocratique

2 appropriée; c'est bien cela ? Vous êtes d'accord ?

3 R. Oui.

4 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, ceci m'amène à la fin

5 des questions que je voulais poser.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il est 4 heures moins le quart.

7 Monsieur Cengic, vous êtes invité à aller voir si l'autre partie du journal

8 dont vous avez parlé se trouve ici au Tribunal. Sinon, j'ai bien compris

9 que des préparatifs ont été faits pour vous transporter à votre hôtel de

10 telle sorte que cet article de journal qui s'y trouve puisse être rapporté.

11 Serait-il possible également d'en faire une copie ? Sinon, j'ai

12 l'impression que ce journal va aller de mains en mains dans ce prétoire

13 pendant cinq ou six minutes. Je vois que vous faites un signe

14 d'assentiment.

15 Monsieur le Greffier d'audience, je lève la séance jusqu'à quatre heures un

16 quart.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Très bien.

18 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

19 --- L'audience est reprise à 16 heures 21.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart --

21 M. STEWART : [interprétation] Je pense que vous avez déjà reçu l'article.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement, je vois que quelque chose

23 a été déposé sur mon bureau. Ah bien, on me donne l'original. Je vais jeter

24 un coup d'œil.

25 M. STEWART : [interprétation] Effectivement, je dépends complètement de

Page 8164

1 l'avis de M. Krajisnik et de Mme Cmeric pour vous dire si cet article est

2 pertinent ou non.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, ce qui s'est passé

5 c'est que Mme Cmeric et M. Krajisnik sont en train de lire cet article,

6 avant de terminer avec quelques questions que j'ai encore à poser au

7 témoin, je saurais vous dire si cet article a un intérêt pour la Défense ou

8 non.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. On peut faire entrer le

10 témoin [comme interprété]. Je pense que le témoin voudrait probablement

11 garder l'original. Je voudrais tout simplement pouvoir comparer l'original

12 avec la photocopie que j'aie.

13 M. STEWART : [interprétation] Je ne pense qu'il y a un problème quelconque

14 pour agir de la sorte.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Mais je pense que le

16 Procureur est d'accord.

17 M. STEWART : [interprétation] Est-ce que je peux vérifier cela alors dans

18 ce cas-là ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Si vous voulez bien

20 distribuer ce document aux parties.

21 Madame l'Huissière, en même temps, je vous demanderais d'introduire

22 le témoin.

23 M. STEWART : [interprétation] Evidemment, même nos huissiers n'ont pas le

24 don d'ubiquité, donc ils auront du mal à faire les deux choses à la fois.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cengic, enfin, si j'ai bien

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1 compris, vous n'aviez même pas besoin de voyager pour nous apporter une

2 photocopie de cet article de journal dont on a discuté. Les parties vont

3 inspecter ce document, et si jamais s'il y a des questions à poser au sujet

4 de ce document, vous allez les entendre.

5 Maître Stewart, vous pouvez continuer.

6 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Q. Monsieur Cengic, merci d'avoir apporté cet article.

8 En même temps, il y a quelques instants, je parlais de ce document

9 que vous avez signé, de cette déclaration que vous avez signée en 1998.

10 C'est un autre document [comme interprété], évidemment. Je parle du

11 paragraphe 27 de ce document.

12 Je vais vous fournir la page. C'est la page 5. Vous avez dit : "Au mois

13 d'août 1991, j'ai été en Croatie, à peu près autour du 17, en vacances

14 quand mon remplaçant m'a appelé et il m'a dit que quelqu'un du secrétariat

15 de l'Etat, chargé de la Défense territoriale, a appelé de Belgrade en

16 demandant de venir visiter officiellement la municipalité. Donc j'ai coupé

17 court à mes vacances et je suis revenu à Sarajevo. Nous avons eu quelques

18 réunions avec les représentants officiels qui sont venus de Belgrade;

19 quatre colonels de la JNA. Ils sont venus avec une requête demandant de

20 prendre complètement sous leur contrôle le secrétariat de Défense

21 nationale, et de le placer sous le contrôle de la JNA.

22 Ils voulaient disposer de toute la documentation. Suad Berbic était présent

23 à la réunion, ainsi que Milosevic. Là, ces colonels nous ont fait une

24 proposition verbale. Je leur ai dit quand ils m'ont apporté un document

25 écrit du gouvernement de Bosnie-Herzégovine, que c'est uniquement à partir

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1 de ce moment-là que je ferais droit à leur requête. Ensuite, ils sont

2 partis. Ce qu'ils voulaient c'est le document car ce qu'ils avaient

3 vraiment besoin, c'étaient les documents, s'il voulait mobiliser l'armée et

4 les réservistes pour la guerre en Croatie. Le gouvernement avait déjà

5 décidé qu'il n'allait pas répondre à un tel appel. Nous avons déplacé la

6 documentation du secrétariat de la Défense nationale du bureau municipal

7 et, ensuite, nous l'avons placé dans un lieu sûr. Ils avaient besoin de ces

8 documents pour pouvoir appeler les soldats."

9 Monsieur Cengic, quand vous dites que le gouvernement avait déjà décidé de

10 ne pas donner, suite à des tels appels, est-ce là vous parlez du

11 gouvernement de Bosnie-Herzégovine ?

12 R. Oui.

13 Q. Quand vous dites "nous", vous faites référence à qui ?

14 R. Je ne sais pas si c'était là le gouvernement ou la présidence, mais, de

15 tout façon, je pensais à un lieu supérieur, peut-être pas la présidence de

16 Bosnie-Herzégovine, mais j'ai pensé en tout cas à un niveau supérieur, à

17 savoir au niveau -- qui se trouvait au niveau de Bosnie-Herzégovine.

18 Q. Je vais revenir à la question que je vous ai déjà posée. A un moment

19 donné, vous dites "nous avons décidé"; à qui vous faites référence quand

20 vous parlez de "nous" ?

21 R. A peu près au mois de juin 1991, au plus haut niveau, la présidence, le

22 gouvernement a décidé de ne plus envoyer les réservistes et les recrues

23 dans la JNA. Evidemment, je respectais cette décision, et c'est comme cela

24 que les choses se sont passées.

25 Q. Donc "nous" c'est tout le monde. Tout ceux qui pouvaient faire l'objet

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1 d'un appel à la mobilisation en Bosnie-Herzégovine.

2 R. Tout ceux qui respectaient le gouvernement élu de façon légitime en

3 Bosnie-Herzégovine.

4 Q. Quand vous avez dit que vous avez déplacé ce document pour le garder en

5 lieu sûr, vous avez fait cela justement pour empêcher la mobilisation,

6 n'est-ce pas ?

7 R. Oui. De la part de la JNA.

8 Q. Vous avez justifié votre acte par votre point de vue, qui était que

9 cette mobilisation était illégale.

10 R. C'était le point de vue et la position de mon gouvernement, celui que

11 je respectais, et que je reconnaissais, à savoir les autorités de Bosnie-

12 Herzégovine -- la présidence et le gouvernement de Bosnie-Herzégovine.

13 Q. Mais ce que vous dites, Monsieur Cengic, c'est qu'on vous a donné

14 l'ordre de déplacer ces documents et de les placer dans un autre endroit.

15 R. On nous a recommandé de mettre en lieu sûr ces documents, puisque le

16 SDS, avec la JNA, dans de nombreuses municipalités, se sont emparés des

17 tels documents par la force.

18 M. STEWART : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la pièce 390, s'il

19 vous plaît ?

20 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

21 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisie le commentaire.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'est-ce que vous avez dit, Monsieur le

23 Témoin ? Puisque les interprètes ne vous ont pas entendu.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je connais très bien cette lettre. Cette

25 lettre m'a été adressée, c'est le SDS qui m'a adressée cette lettre.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous pouvez continuer, Maître

2 Stewart.

3 M. STEWART : [interprétation]

4 Q. Hier, vous avez vu cette lettre. Nous n'avons pas besoin de

5 parcourir cette lettre. Mais en bas de la page, on énumère un certain

6 nombre de plaintes, de griefs, où il est écrit au premier tiret d'un

7 paragraphe : "Le déplacement non autorisé et illégale de la documentation

8 militaire et la violation directe des lois fédérales et autres règles;

9 manquement à la procédure en vigueur pour déplacer les secrétaires

10 municipales de la Défense nationale et son remplacement; manquement à

11 l'obligation de mettre en œuvre les conclusions du comité exécutif

12 concernant les analyses des constructions illégales dans notre

13 municipalité; et le fait d'avoir rendu possible d'autres constructions

14 illégales des maisons." Ainsi que : "Les manquements à l'obligation de

15 mettre sur l'ordre du jour l'initiative des citoyens de séparer et établir

16 la commune locale de Rajlovac." Donc il y avait une raison pour tous ces

17 griefs, pour toutes ces plaintes.

18 R. Non, pas du tout. Il n'y en a pas une seule qui soit fondée, parce que

19 nos enfants, notre armée, nos réservistes, ont été envoyés par la JNA pour

20 se battre en Croatie.

21 Q. Est-ce que vous pourriez peut-être m'expliquer davantage cela ?

22 R. Tous les jours il y a avait des corps des soldats morts qui arrivaient

23 dans notre région. C'était les gens qui étaient tués sur le front en

24 Croatie, et les gens qui avaient été mobilisés par la JNA.

25 Q. Donc vous avez décidé de sciemment empêcher les gens d'aller sur le

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1 front en Croatie ?

2 R. Parce que cette possibilité m'a été permise par la loi, et puisque

3 notre présidence avait décidé de ne pas envoyer nos recrues à la JNA.

4 Q. Nous allons continuer, Monsieur Cengic. Dans votre déposition d'hier -

5 il s'agit de la page 87 du compte rendu d'audience - M. Harmon vous a

6 demandé à quelle place vous placeriez M. Krajisnik dans le cadre de

7 l'hiérarchie des leaders serbes de Bosnie. Vous avez dit que M. Krajisnik

8 et M. Karadzic étaient à peu près au même niveau dans cette hiérarchie,

9 alors que tous les autres étaient bien plus loin, bien plus bas sur

10 l'échelle hiérarchique.

11 On n'a pas daté ni la question, ni la réponse. En ce qui concerne votre

12 point de vue, quant à la place dans l'hiérarchie qui revenait à M.

13 Krajisnik et à M. Karadzic, est-ce que votre point de vue est le même pour

14 toute la période allant jusqu'à l'après Dayton, à savoir 1996 ?

15 R. Avant les accords de Dayton, M. Karadzic ne faisait pas partie du

16 pouvoir. Il n'était qu'un membre du SDS, alors que M. Krajisnik était le

17 président du parlement de Bosnie-Herzégovine. En ce qui concerne Novi Grad,

18 puisque M. Krajisnik habitait dans la région de Novi Grad, il était bien

19 plus populaire dans cette région. Si l'on regarde toute la situation, la

20 situation globale, je le mettrais à peu près sur un pied d'égalité au plus

21 haut niveau de la hiérarchie.

22 Je n'ai jamais entendu dire que M. Karadzic est venu sur le

23 territoire de la municipalité de Novi Grad.

24 Q. Vous avez dit qu'avant les accords de Dayton, M. Karadzic n'était que le

25 président du SDS. Est-ce que vous savez s'il a eu d'autres positions ?

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1 L'INTERPRÈTE : Tout à l'heure, il a dit "membre", il s'agissait du

2 président.

3 LE TÉMOIN : Avant l'agression, avant la guerre. Ensuite, je ne sais pas

4 quelles étaient les fonctions de M. Karadzic au sein de la Republika

5 Srpska. Je pense que c'était le président, mais il n'y a pas eu d'élection.

6 Je ne sais pas comment cela s'est fait. Je sais comment se sont passé les

7 élections de 1990. Karadzic ne figurait sur aucune liste à l'époque.

8 Q. Savez-vous si M. Krajisnik avait une autre fonction à part celle de

9 président de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, et par la suite de

10 l'assemblée serbe de l'assemblée de la Republika Srpska ?

11 R. Pour autant que je le sache, il était membre de la présidence -- de la

12 première présidence.

13 Q. C'était quand exactement ?

14 R. Après la signature des accords de Dayton.

15 Q. Le Dr Nikola Koljevic, vous le placerez où dans cette hiérarchie,

16 pendant cette période-là ?

17 R. Il était membre de la présidence. Il n'était pas vraiment apprécié en

18 tant que politicien par le peuple, en tant qu'homme politique.

19 Q. Il fait partie de ceux qui sont très éloignés sur l'échelle

20 hiérarchique du Dr Karadzic et de Momcilo Krajisnik ?

21 R. Oui, c'est ce que je pense. Peut-être ce n'était pas le cas de

22 l'autre côté.

23 Q. Qu'en est-il du Dr Plavsic ? Où la situez-vous sur cette échelle

24 hiérarchique ?

25 R. Quelque part entre les deux.

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1 Q. Entre qui et qui ?

2 R. Entre Karadzic et Krajisnik. D'un côté vous aviez Karadzic et

3 Krajisnik. Ensuite, venait Mme Plavsic qui était à la deuxième place, mais

4 bien au-dessus de Koljevic, à peu près au niveau de Mladic.

5 Q. Le Dr Koljevic était membre de quelle présidence exactement ?

6 R. Koljevic faisait partie de la présidence de l'Etat.

7 Q. Quand cela ?

8 R. Il a été élu au moment des élections qui ont eu lieu en 1990.

9 Q. Hier à la page 89, et ceci commence à la page 88, vous avez décrit une

10 réunion. Celle-ci commence à la page 88. Vous avez dit que vous avez

11 participé à une réunion avec les représentants de la communauté serbe de

12 Rajlovac. Vous avez dit que cette réunion a eu lieu le 26 février 1996,

13 juste après Dayton.

14 R. Non, cette réunion a eu lieu trois jours avant la réintégration de

15 Rajlovac, pas avant Dayton.

16 Q. Vous avez donné une date précise, la date du

17 26 février 1996. Vous gardez bien cette date-là, n'est-ce pas ?

18 R. Le 26 février 1996, c'est le jour où l'intégration a eu lieu. J'ai eu

19 cette réunion trois jours plus tôt. C'est tout à fait par hasard que j'ai

20 sur moi un article de journal qui parle de cette réunion-là.

21 Q. Quel est ce journal ?

22 R. Je pense que c'est Oslobodjenje. Peut-être aussi Vecernje Novine.

23 Puisqu'à l'époque, je découpais et je gardais tous les articles me

24 concernant et concernant la municipalité, en me disant qu'un jour j'allais

25 peut-être faire un livre au sujet de ces événements.

Page 8172

1 Q. Quand vous dites que vous l'avez sur vous, est-ce que vous vous voulez

2 dire que c'est ici, dans votre bâtiment, dans votre sac, à l'hôtel ?

3 R. Ici dans le bâtiment. J'ai aussi quelque chose dans ma poche. Mais vous

4 savez mes poches ne sont pas bien grandes.

5 Q. Vous êtes bien préparé, Monsieur le Témoin. Vous êtes venu avec

6 beaucoup de choses.

7 R. J'ai aussi une interview qui est parue dans la publication Oko. C'est

8 la publication qui a un éditeur privé, un propriétaire privé, Janis Tadic,

9 un Croate. L'éditeur en chef, c'était un Bosnien, et le directeur général

10 était un Serbe. C'est le journal dont nous avons parlé tout à l'heure. La

11 publication dont nous avons parlé tout à l'heure. Le siège de cette

12 publication était dans ce bâtiment à Mojmilo, qui a été détruit plus tard.

13 Ils ont publié pendant la guerre, et il existait des éditions. La première

14 et la deuxième, pour servir la vérité, je pense qu'il serait utile de

15 photocopier cela.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cengic, s'il ne s'agit que des

17 photocopies des publications en temps de guerre, ceci n'est pas

18 suffisamment pertinent, puisqu'ici nous ne sommes pas en train d'écrire

19 l'histoire de la guerre, mais nous sommes ici en train de -- ici pour juger

20 d'une affaire. Si vous voulez en revanche laisser les parties examiner ce

21 document, elles pourront décider si elles considèrent que ce document est

22 pertinent ou non pour chacune d'entre elle.

23 Je vois que la Défense a une position avantageuse en ce moment. Vous

24 pourriez peut-être d'abord donner ces documents à

25 Mme l'Huissière, ensuite, le fournir à la Défense, qui pourrait peut-être

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1 lire ce document.

2 L'INTERPRÈTE : N'entend pas le témoin.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cengic, à cause du bruit

4 du papier, les interprètes ont du mal à vous entendre.

5 Je pense que vous devriez tout simplement laisser les parties examiner ce

6 document puisque nous ne considérons pas qu'il soit acceptable de lire, de

7 façon spontanée, des documents ici dans ce prétoire.

8 Nous apprécions votre désir de contribuer à l'établissement de la

9 vérité.

10 M. STEWART : [interprétation] Je me demande quel est le prochain document

11 que le témoin va nous sortir de sa poche ? Je commence à m'inquiéter un peu.

12 Du point de vue pratique, est-ce que je peux poser une question à M.

13 Cengic ?

14 Q. Est-ce que vous allez rester ici ou est-ce que vous allez partir

15 aujourd'hui ?

16 R. Ce n'est pas moi qui décide de cela. Vous devriez poser la question à

17 ceux qui ont organisé mon arrivée ici.

18 M. STEWART : [interprétation] C'est tout simplement que je me suis dit que

19 si jamais quelque chose de pertinent ressortait de ces documents, il serait

20 utile de savoir si M. Cengic allait rester ou non, à La Haye.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il serait peut-être sage de demander à M.

22 Cengic de laisser tout ce qu'il a sur lui, et de ne pas semer la confusion

23 dans les esprits sur l'administration de la justice, Maître Stewart. Tout

24 ce que vous avez, si vous voulez bien le remettre au Greffe, et nous ferons

25 des photocopies. Ensuite, les parties pourront regarder ceci pour voir s'il

Page 8174

1 y a des éléments pertinents dans tout ceci. Je ne pense pas que M. Cengic

2 s'en aille ce soir. Il serait encore temps de voir s'il y a quelque chose

3 d'important pour demander à M. Cengic de rester, mais ceci n'est pas mon

4 point de départ.

5 Monsieur Cengic, en général, les parties connaissent exactement les

6 questions qu'ils vont poser au témoin. Vous avez, de votre initiative,

7 apporté un certain nombre de choses. Nous apprécions énormément cela. Vous

8 serait-il possible de laisser les originaux de façon à ce que nous

9 puissions les photocopier à la prochaine pause et que les parties puissent

10 regarder pour voir s'ils trouvent des choses intéressantes et s'ils

11 estiment que c'est important de poser des questions à cet égard. Seriez-

12 vous disposé à --

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la raison pour laquelle j'ai apporté

16 ceci.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 Maître Stewart, vous pouvez poursuivre.

19 M. STEWART : [interprétation] Oui.

20 Q. Je vais maintenant vous montrer un article de journal, Monsieur Cengic.

21 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de deux

22 paragraphes. Un article assez court. Nous avons fourni un exemplaire en

23 Serbe aux interprètes. Cela vient de Glas Srpska, daté du 23 janvier 1996.

24 M. HARMON : [interprétation] Pardonnez-moi, mais il me faudrait un

25 exemplaire également.

Page 8175

1 M. STEWART : [interprétation] Oh, pardonnez-moi. Je pensais qu'on s'en

2 était occupé et qu'on vous avait remis un exemplaire. Pardonnez-moi.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela ne coûte qu'un dinar et demi,

4 Monsieur Harmon, donc je suppose que --

5 M. STEWART : [interprétation] Je pense que le niveau de Serbe de M. Harmon

6 doit ressembler au mien, autrement dit, chaque dinar qui contribue à notre

7 compréhension est fort utile.

8 Q. Monsieur Cengic, je vous demande de bien vouloir lire les deux

9 paragraphes. Bien sûr, je ne veux pas vous empêcher de lire les paragraphes

10 intermédiaires, de façon à ce que vous puissiez vous familiariser avec le

11 contexte. Je vous demande de bien vouloir lire le premier paragraphe, où

12 c'est intitulé : Sarajevo, 22 janvier. Premier paragraphe, si vous voulez

13 bien le lire de façon à ce qu'il puisse être traduit ?

14 R. Oui.

15 Q. Pardonnez-moi, j'entendais à voix haute. Pardonnez-moi, Monsieur Cengic.

16 Je vous demande de bien vouloir le lire à voix haute, de façon à ce que les

17 interprètes puissent traduire ce paragraphe.

18 R. Bien que ceci soit écrit en cyrillique, je connais le cyrillique.

19 D'autres personnes demanderaient à ce que ceci soit réécrit dans une autre

20 langue. Fort heureusement, je connais le cyrillique.

21 "Le président de l'assemblée de la République de la Republika Srpska,

22 Momcilo Krajisnik, a lancé un appel à la population aujourd'hui des Serbes

23 de Sarajevo de façon à ce qu'ils ne quittent pas les lieux et a demandé à

24 ceux qui étaient partis déjà de rentrer, de revenir." C'est le passage en

25 question, n'est-ce pas ?

Page 8176

1 R. Oui, tout à fait.

2 Q. Maintenant, je vous demande de bien vouloir lire à voix basse les

3 quelques paragraphes suivants. Mais je vous demande de lire à voix haute le

4 dernier paragraphe de cette troisième colonne ?

5 R. Oui. J'ai déjà lu ceci, donc je vais vous dire ce qui suit. "Je lance

6 un appel au peuple serbe pour qu'il reste dans leur foyer et je demande à

7 ceux qui sont déjà partis de revenir, de façon à ce que nous puissions

8 construire Sarajevo ensemble." C'est ce qu'a dit le président du NS RS,

9 c'est ce qu'il a dit.

10 S'agit-il de nouveau Sarajevo ou Republika Srpska ? NS est une

11 abréviation. Vous souhaitez que je poursuivre la lecture ?

12 Q. Est-ce que NS signifie assemblée du peuple ? Seriez-vous d'accord avec

13 moi ?

14 R. C'est possible étant donné qu'il était président de l'assemblée, oui,

15 c'est possible. "Notre politique n'a absolument pas changé et nous

16 centrons" --

17 Q. Monsieur Cengic, je voulais simplement vous poser une question. Vous

18 souvenez-vous de telles déclarations publiques faites par M. Krajisnik,

19 dont on vous aurait rapporté la teneur au début de l'année 1996 ?

20 R. Dans les journaux publiés à Sarajevo, je n'ai pas eu l'occasion de lire

21 ce genre de chose. Il est vrai que je n'achetais pas tous les journaux. Les

22 journaux n'étaient pas publiés si souvent que cela. Néanmoins, à cette

23 époque-là, je n'avais pas ce type de possibilité. Il y a certains journaux

24 qui étaient disponibles, mais la position adoptée par M. Krajisnik n'a

25 jamais été évoquée.

Page 8177

1 Q. Vous avez également, dans votre témoignage, parlé de ce dont vous avez

2 entendu parler dans la presse, autrement dit, la position de M. Krajisnik

3 sur la question d'une communauté multiethnique. Au paragraphe, pardonnez-

4 moi, 90 du compte rendu, on vous a posé une question à ce sujet. Vous

5 n'avez pas parlé de déclarations faites en privé par M. Krajisnik. Quelque

6 chose qui vous aurait été dit, ou quelque chose qui aurait été dit au cours

7 d'une réunion où vous étiez présent, en présence de M. Krajisnik. Est-ce

8 qu'il faut comprendre par cela que M. Krajisnik n'a jamais exprimé, en

9 votre présence, ses opinions sur une communauté multiethnique en Bosnie-

10 Herzégovine ?

11 R. J'ai déjà indiqué que je n'ai eu qu'une seule réunion en présence de M.

12 Krajisnik. Il s'agissait de trouver une solution aux problèmes de la

13 commune locale de Rajlovac. Nous n'avons pas eu d'autres réunions ensemble.

14 Q. Il s'ensuit que tout ce que vous avez entendu dire, que ce soit de

15 façon directe ou indirecte, de M. Krajisnik par rapport à une communauté

16 multiethnique, était quelque chose que vous avez entendu par le biais des

17 médias, ou par un biais public ?

18 R. Oui.

19 Q. Et vous --

20 R. Oui.

21 Q. -- vous évoquez la colère de M. Krajisnik face aux accords de Dayton,

22 eu égard au fait que les accords de Dayton avaient été signés. Il était,

23 souvenez-vous, il était en colère et frustré parce qu'il considérait comme

24 étant l'abandon de Sarajevo, qu'on donnait Sarajevo à la communauté

25 musulmane, n'est-ce pas ?

Page 8178

1 R. Oui, oui.

2 Q. Pardonnez-moi, je --

3 M. STEWART : [interprétation] Veuillez m'accorder quelques instants.

4 Je n'ai pas besoin d'une pause plus longue, mais je souhaite poser quelques

5 questions à Mme Cmeric sur l'article qui a été lu immédiatement après la

6 pause.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais en premier lieu vous

8 demander si vous souhaitez verser ce document au dossier.

9 M. STEWART : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Pardonnez-moi.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit de la pièce -- ?

11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce de la Défense

12 comportant le numéro D62, l'article du journal de Glas Srpska. D32.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que vous nous remettrez une

14 traduction de l'ensemble de l'article, Maître Stewart, parce que je vois

15 que --

16 M. STEWART : [interprétation] Oui. Oui. Tout à fait. Nous ferons en sorte

17 de vous fournir la traduction.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne lis pas le cyrillique, mais je

19 vois que Dayton est mentionné.

20 M. STEWART : [interprétation] Oui. Oui. Absolument.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sarajevo est évoqué également. Il semble

22 que cela fasse partie du contexte.

23 M. STEWART : [interprétation] Nous allons nous en occuper, Monsieur le

24 Président. Il est important de voir le contexte.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon.

Page 8179

1 M. HARMON : [interprétation] Je ne sais pas si cela peut vous être utile,

2 Monsieur le Président. Ceci serait certainement utile de faire en sorte que

3 l'ensemble de cet article soit lu pour avoir un --

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vois que Me Stewart est d'accord

5 avec vous.

6 M. STEWART : [interprétation] Je laisse ceci entre les mains des Juges de

7 la Chambre, à savoir, si le témoin le lit, ou si Mme Cmeric le lit.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que Mme Cmeric connaît la

9 cadence à laquelle les interprètes peuvent traduire un tel texte. Si vous

10 voulez bien demander à Mme Cmeric de lire l'ensemble de l'article.

11 M. HARMON : [interprétation] Pardonnez-moi, mais je demande à ce que Mme

12 Cmeric lise la partie du haut de l'article. L'article où nous avons la

13 ligne où figure la date, car c'est quelque chose que je ne comprends pas

14 moi-même non plus.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous voulez bien commencer à lire dès

16 le début, le nom de M. Krajisnik.

17 Mme CMERIC : [interprétation] Je vais commencer depuis le début de la page,

18 Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

20 Mme CMERIC : [interprétation] "C'est un quotidien de la Republika Srpska.

21 Glas Srpski, Banja Luka. Mardi, le 23 janvier 1996. Numéro 7 877. Année,

22 illisible. LII, 520 en chiffres romains, je crois. Le prix, 1 dinar et

23 demi.

24 "Appel de Momcilo Krajisnik, président de l'assemblée de la RS." Le

25 titre : "Restez, pour que nous puissions construire notre Sarajevo." Sous-

Page 8180

1 titre : "Nous entrons la période suivante avec beaucoup plus d'espoir, et

2 nous espérons que l'injustice de Dayton puisse être corrigée, dit Momcilo

3 Krajisnik."

4 "Sarajevo, le 22 janvier (Crna).

5 "Le président de l'assemblée du peuple de la Republika Srpska,

6 Momcilo Krajisnik, a lancé un appel aujourd'hui à la population de Sarajevo

7 aux fins de ne pas quitter la ville, et a demandé à toutes les personnes

8 qui étaient déjà parties de revenir. Je cite : 'Nous avons déjà réalisé un

9 certain nombre de choses à la manière que nous avions prévue, et ceci a eu

10 un effet pacificateur sur les Serbes de Sarajevo.' Telle était l'estimation

11 de Krajisnik au cours de la séance d'aujourd'hui de l'état-major chargé de

12 la mise en œuvre des désaccords de Dayton concernant la partie serbe de

13 Sarajevo lors de la réunion tenue à Vogosca. Il a souligné : 'au cours des

14 derniers pourparlers, les représentants de la communauté internationale ont

15 promis un grand nombre de choses, non pas parce qu'ils comprennent la

16 position serbe, mais parce que des décisions concrètes doivent être

17 prises'. Il a exprimé le souhait que ces pourparlers permettraient

18 d'aboutir à des résultats concrets.

19 "'Je pense que cette solution sera une solution assez bonne et

20 qu'elle aura un effet positif sur les Serbes se trouvant à Sarajevo, et que

21 ceci contribuera au retour d'un bon nombre de personnes qui ont quitté la

22 région,' a souligné le président Krajisnik. D'après lui, les Serbes dans la

23 partie serbe de Sarajevo 'ont des perspectives d'avenir et n'ont aucune

24 raison de partir ou d'avoir peur.'

25 "'Je lance un appel au peuple serbe pour qu'il reste chez eux, et je

Page 8181

1 demande à ceux qui sont déjà partis de revenir pour pouvoir construire

2 Sarajevo ensemble,' a dit le président de la NS RS, et a ajouté : 'rien n'a

3 changé au niveau de notre politique, et nous entrons dans la période

4 suivante avec beaucoup plus d'espoir et d'optimisme, car nous espérons

5 pouvoir corriger l'injustice commise au moment de la signature des accords

6 de Dayton.'

7 "Au cours de la session tenue aujourd'hui à Vogosca, un appel a été

8 lancé aux professionnels qui avaient quitté la région, et qui n'étaient

9 déjà pas en grand nombre, appel lancé pour que ces personnes rentrent et

10 reprennent leur travail. Le personnel également abordait la question des

11 approvisionnements et du maintien de l'ordre public dans le quartier serbe

12 de Sarajevo."

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je vous donner la bonne réponse ?

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La bonne réponse à quelle question, s'il

15 vous plaît ?

16 M. STEWART : [interprétation] A quelle question, Monsieur le Président ?

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En premier lieu, si vous souhaitez

18 ajouter quelque chose -- M. Stewart, s'il y a des questions ou d'autres

19 questions par rapport à cet article de journal ?

20 M. STEWART : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je n'en ai pas.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si tel n'est pas le cas, je vais

22 permettre au témoin qui a écouté la lecture dans l'intégralité de cet

23 article de dire quelque chose s'il souhaite le faire.

24 Vous avez la parole, Monsieur Cengic.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai lu ceci, je n'ai pas abordé le

Page 8182

1 fond de tout ceci. La partie serbe de Sarajevo est évoquée sans cesse, et

2 on ne parle pas de Rajlovac, et ce qui étaient censé appartenir à la

3 fédération. Ceci n'a pas été pris en compte. Il s'agit d'une partie de la

4 Republika Srpska qui ne faisait plus partie de la Republika Srpska. C'était

5 un appel lancé aux Serbes de la Republika Srpska de ne pas partir, et non

6 pas aux Serbes de la fédération, si je vous ai bien compris.

7 M. STEWART : [interprétation]

8 Q. Dans la déclaration que vous avez signée en 1998, au paragraphe 43, un

9 paragraphe très court, Monsieur Cengic, l'avant-dernier paragraphe à la

10 page 6, vous venez d'évoquer la date de vendredi le 3 avril, lorsque M.

11 Milosevic -- de la région, bien sûr

12 -- il vous a dit : "On se reverra après la guerre." Vous l'avez été parti

13 en voiture. Vous ne l'avez jamais revue. Ensuite, les députés du SDS et les

14 employés de la municipalité ont continué à venir à leur travail, et j'étais

15 en contact avec certains d'entre eux, et certains sont commencés à arriver

16 au travail munis d'armes à feu. Je crois qu'en réalité, vous-même, vous

17 êtes venu travailler ce jour-là, et que vous aviez vous-même une arme à

18 feu, n'est-ce pas ? Vous possédiez une arme, Monsieur Cengic ?

19 R. C'est exact. Après une réunion, bien sûr. Certains représentants du SDS

20 sont venus. Mon secrétaire n'est pas venu. Il a dit qu'il était malade, et

21 qu'il ne pouvait pas venir. Monsieur Milosevic est venu vendredi. Il a dit

22 : "On se reverra après la guerre." Je ne pouvais pas croire qu'une guerre

23 allait éclater. Il y avait certains excès qui étaient commis, mais

24 j'espérais que le sens commun reprendrait le dessus. Je pensais qu'il n'y

25 aurait pas de guerre.

Page 8183

1 Lorsque j'ai pris part à une de ces réunions du conseil exécutif, je

2 ne sais pas s'il s'agissait d'un accident ou non, mais un des membres du

3 conseil exécutif a déplacé sa veste, et j'ai vu qu'il y avait des armes de

4 part et d'autre de sa veste, dans chaque côtés de sa veste. Je peux vous

5 dire que j'ai également apporté une arme lors de notre prochaine réunion

6 parce que j'avais vu cela. C'est la seule fois où j'ai agi ainsi car un

7 pistolet est un objet assez lourd à porter. De toute façon, si des obus

8 commencent à tomber, vous ne pouvez pas vraiment vous protéger avec un

9 pistolet.

10 Q. Monsieur Cengic, j'aimerais revenir un moment sur cet article de Glas

11 Srpska que nous avons abordé il y a quelques instants, lorsque je vous ai

12 demandé de lire deux paragraphes, la pièce D -- si vous voulez bien relire

13 le haut de ce paragraphe. J'aimerais que vous lisiez le premier paragraphe.

14 R. "Rien n'a changé eu égard à notre politique et la période qui s'en suit

15 -- ou de la période à venir, qui est une période que nous abordons avec

16 beaucoup plus d'optimisme et d'espoir, en espérant que l'injustice commis à

17 Dayton puisse se corriger."

18 Q. Est-ce que -- lorsqu'on parle des injustices commises à Dayton, est-ce

19 que vous comprenez ce que cela veut dire ?

20 R. Je crois que ce monsieur signifiait -- bon, il parlait d'injustice.

21 Cela ne fait pas l'ombre d'un doute. Je crois que les deux parties peuvent

22 parler d'injustice. Il s'agit d'un accord que l'on a parvenu, néanmoins

23 qu'il faut appliquer. Mais je crois que

24 M. Krajisnik entendait par là que ceci peut être corrigé par un système de

25 compensation de Dobrinja, qui n'avait pas été réintégré à cette époque-là.

Page 8184

1 Dobrinja n'a été réintégré que par la suite. Bien évidemment, je ne peux

2 pas l'affirmer. Je peux affirmer que c'est en réalité comme cela, que cela

3 s'est passé.

4 Q. Oui, je vois. Je ne vais pas m'étendre sur cette question.

5 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

6 questions à poser au témoin.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, vous avez la

8 parole. Est-ce que vous avez des questions ?

9 M. HARMON : [interprétation] Oui, j'ai quelques questions, Monsieur le

10 Président.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

12 Nouvel interrogatoire par M. Harmon :

13 Q. [interprétation] Monsieur Cengic, la pièce de la Défense que vous avez

14 sous les yeux -- j'espère que vous l'avez toujours sous les yeux, la pièce

15 D32, l'article qui est écrit en cyrillique.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande de bien vouloir

17 présenter ce document au témoin.

18 M. HARMON : [interprétation]

19 Q. J'ai pris des notes lorsque vous avez lu cet article. Il est daté du 23

20 janvier 1996; est-ce exact ?

21 R. Oui.

22 Q. Cet article a été publié un petit peu -- a été un mois avant la réunion

23 que vous avez eu en présence des Serbes de Rajlovac, à laquelle réunion les

24 représentants serbes de Rajlovac vous ont dit que Krajisnik leur avait

25 donné l'ordre de partir; est-ce exact ?

Page 8185

1 R. Oui.

2 Q. J'ai écouté la traduction de cet article, et j'ai noté les points

3 suivants. Peut-être que vous pourriez nous aider. Ce que j'ai écrit est

4 comme suit : "Momcilo Krajisnik a lancé un appel à la population serbe, du

5 quartier serbe de Sarajevo." A quoi correspond le "quartier serbe de

6 Sarajevo" ? Pourriez-vous nous expliciter ceci un petit peu ? Au plan

7 géographique, qu'est-ce que cela signifie ?

8 R. Vous savez que, d'après les accords de Dayton, Sarajevo a été divisé en

9 deux. Une partie appartenait à la Fédération, et l'autre partie à la

10 Republika Srpska. La partie qui faisait partie de la Republika Srpska

11 s'appelait la partie serbe de Sarajevo. Cette partie-là a une frontière

12 avec la région où la partie appartient à la Fédération, et la frontière se

13 trouve à Dobrinja. Plus loin, les autres quartiers, d'autres municipalités

14 qui étaient en dehors de l'agglomération de Sarajevo -- Pale, une partie de

15 Stari Grad, de cette municipalité, la Nouvelle Sarajevo, Sarajevo Ancien,

16 Sarajevo Nouveau, le centre. Donc, pour ce qui est du centre, la

17 municipalité de Novi Grad est devenue serbe. Il y avait la partie 1 et 4,

18 et c'est là qu'on avait tracé la frontière, d'après les accords de Dayton.

19 Q. Donc, il s'agit d'un appel lancé par M. Krajisnik aux Serbes de

20 Sarajevo de ne pas quitter la ville, de ne pas quitter la Fédération; c'est

21 exact ?

22 R. Oui, de Sarajevo.

23 Q. C'est exact ?

24 R. Oui, oui, oui. Exactement. Les Serbes qui vivaient à Grbavica, à Novo

25 Sarajevo, Nedzarici, ensuite, Dobrosevici, Ahatovici, Reljevo, Rajlovac,

Page 8186

1 faisaient partie de la Fédération, et à partir de là. Dans l'autre partie,

2 il y avait des Serbes et -- à l'endroit où se trouvait la Republika Srpska.

3 Ces Serbes-là ont commencé à déménager. C'est un appel lancé aux Serbes qui

4 commençaient à quitter la partie qui était sous l'autorité de la Republika

5 Srpska. Il ne s'agissait pas d'un appel lancé aux Serbes qui étaient

6 intégrés à la Fédération. C'est exactement ce qui dit le texte : "Appel à

7 la population serbe de la partie serbe de Sarajevo." Cette partie existe

8 toujours aujourd'hui. Cela ne s'appelle plus la partie serbe de Sarajevo,

9 mais c'est toujours le même territoire. Cela s'appelle "Sarajevo orientale"

10 ou "Sarajevo Est".

11 Q. La population serbe de Rajlovac, que vous avez rencontrée fin février,

12 était des Serbes qui habitaient dans la partie serbe de Sarajevo, qui

13 étaient rattachés à la Fédération; c'est exact ?

14 R. Oui. La partie, qui est conformément aux accords de Dayton, faisait

15 partie de la Fédération. Oui.

16 Q. Je vous remercie.

17 M. HARMON : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, avez-vous d'autres

19 questions ?

20 M. STEWART : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une ou deux questions à poser.

22 Questions de la Cour :

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il eu des Serbes qui avaient fui

24 avant ou pendant la guerre vers la Republika Srpska qui sont revenus au

25 territoire fédéral de Rajlovac après la guerre ?

Page 8187

1 R. Je n'ai pas connaissance de quiconque qui serait revenu pendant la

2 guerre. Mais je sais qu'effectivement après les accords de Dayton, ceux qui

3 étaient partis, étaient en train de revenir. Maintenant, presque tout le

4 monde est revenu, à moins qu'ils n'aient vendu leur maison, leurs biens,

5 parce qu'il y a eu de nombreux cas dans lesquels les gens avaient vendu

6 leur propriété. Une grande majorité d'entre eux sont revenus.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que les Serbes qui sont revenus

8 après la guerre, comme vous l'avez dit, est-ce qu'ils ont commencé à

9 revenir déjà dans les deux mois qui ont suivi l'accord de Dayton ?

10 R. Petit à petit, alors qu'ils ont eu de plus en plus confiance dans ce

11 que j'avais dit lors de la réunion, à savoir que je leur garantissais

12 qu'ils trouveraient la paix et que nous allions partager le peu que nous

13 avions, ils ont commencé à revenir, et en nombre de plus en plus important.

14 A ce jour, tout le monde n'est pas encore revenu. Un grand nombre ont reçu

15 les clés de leurs appartements ou leurs maisons, mais ne sont pas encore

16 revenus. Ces maisons, ou appartements demeurent vides. Dans les annonces,

17 il y a un grand nombre de maisons et d'appartements à vendre.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vous remercie de votre réponse.

19 Pourrais-je, à moins que cette question ne nécessite la nécessité de

20 poser d'autres questions. Pourrais-je vous inviter, je ne dirai pas à vider

21 vos poches, mais tout au moins, à fournir aux membres de la Chambre les

22 articles de journal découpés que vous avez de façon à ce qu'on puisse les

23 faire photocopier au cours de la suspension ? Je veillerai à ce que les

24 originaux vous soient restitués. Je voudrais que des copies puissent être

25 remises aux parties afin que celles-ci puissent voir, s'il leur est de

Page 8188

1 quelque utilité de vous demander de rester et de répondre à des questions

2 qu'ils pourraient vouloir poser au sujet desdits articles.

3 D'après ce que j'ai compris, Monsieur le Greffier d'audience, ceci va être

4 également transmis à la section des Victimes et des Témoins, afin qu'ils

5 soient bien au courant de la situation.

6 Oui. Pourrais-je -- oui, allez-y, Monsieur Cengic.

7 R. Hier, après avoir quitté la salle d'audience, j'ai pensé à un

8 enregistrement, que j'avais entendu mais auquel je n'avais pas réfléchi, et

9 qui a trait au territoire de la municipalité de Rajlovac, telle qu'elle

10 était censée être. J'ai essayé de la dessiner sur une carte. Lorsque j'ai

11 dit qu'il y avait quelque 20 000 habitants, je l'ai dit, à ce moment-là,

12 mais ce territoire a, en fait, bien plus que 35 000 habitants. J'ai fait

13 une carte. J'ai tracé une carte en utilisant la lampe de l'hôtel. En

14 transparence, j'ai essayé de copier ce croquis en mettant en dessous. Ce

15 qui veut dire que toutes les installations temporaires, ou les

16 installations en général, du point de vue de la capacité, auraient été

17 incluses dans cette municipalité. C'était des éléments importants pour

18 l'ensemble de Sarajevo, pas seulement pour la municipalité de Rajlovac.

19 J'ai mentionné certains de ces immeubles, ou de ces installations aux

20 membres de la Chambre. En fait, aucune des sociétés de très grande

21 importance, à l'exception peut-être d'un ou deux cinémas, seraient restés à

22 Sarajevo. Toutes les autres seraient rentrées dans le ressort de la

23 municipalité de Rajlovac, même la télévision. Si ceci vous intéresse, je

24 pourrais vous montrer le croquis que j'ai fait sur la base de cet

25 enregistrement que nous avons écouté hier. Je n'ai pas eu la possibilité de

Page 8189

1 faire cette analyse plus tôt, donc je l'ai faite hier.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends que vous dites que ce

3 n'était pas 20 000 habitants mais même plus de 35 000, et ceci se rapporte

4 à --

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, beaucoup, parce que c'était

6 -- il y avait un grand nombre de communes locales. Ceci serait rentré dans

7 cette municipalité. Il se serait agi de Reljevo, Rajlovac, Alipasin Most,

8 Buca Potok, Dolac, la garde de chemin de fer à Alipasin Most, toutes les

9 usines qui s'y trouvaient, la société de transports publics, les

10 installations militaires de Zrak, la caserne de Halilovic. C'était le

11 deuxième lieu au point de vue importance, au point de vue entreposage pour

12 toutes les sociétés. J'ai marqué ceci sur le croquis.

13 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cengic, je crois que vous avez

15 ajouté des commentaires à votre déposition d'hier. Lorsque vous avez parlé

16 de la municipalité serbe de Rajlovac, et du fait qu'elle était créée, tout

17 au moins en principe, à la date du 22 février. Si vous étiez au courant de

18 cela, et vous avez répondu : "Alors, non, je n'étais pas au courant, mais

19 je voudrais commenter une partie de la conversation où il est dit que le

20 secteur n'a pas, une population très dense, qu'il n'y a pas un très grand

21 nombre d'habitants qui s'y trouvent. Maintenant, j'ai entendu," - vous avez

22 continué - "cette conversation pour la première fois ces jours-ci," -c'est

23 ce que vous dites, à ce moment-là - "et maintenant je suis en mesure de

24 mieux la comprendre. Le fait qu'ils aient procédé à un décompte de la

25 population, bien que le nombre n'ait pas été précis, à la lumière de cela,

Page 8190

1 je peux soutenir qu'il y avait plus de 20 000 habitants qui vivaient dans

2 le secteur, et que plus de 70 % d'entre eux étaient des Bosniens. Le

3 secteur décrit ici inclus plusieurs communes locales, Reljevo, Rajlovac…"

4 J'ai fini de vous citer. C'est comme cela que vous avez continué.

5 Je comprends que maintenant vous faites des commentaires sur le fait qu'il

6 y avait plus de 20 000 habitants, que c'était au moins

7 35 000, et que ce secteur comportait des installations et des immeubles

8 importants. Est-ce que j'ai bien compris ce que vous venez de dire ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est précisément cela.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Alors, je pense que même sans

11 votre croquis, votre carte, ces précisions suffiront. Je vous remercie

12 beaucoup d'avoir fait ces observations supplémentaires.

13 Je voudrais maintenant que vous remettiez, s'il vous plaît, à Mme

14 l'Huissière, les articles découpés que vous avez apporté avec vous de façon

15 à ce qu'on puisse les faire photocopier au cours de la suspension

16 d'audience. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de demander au témoin de

17 rester au Tribunal à ce moment-là parce que peut-être que vous n'aurez pas

18 la possibilité de lire l'ensemble. Si l'une des parties trouve qu'il y a

19 une question particulière, qu'il s'agisse d'une question importante, pas

20 une question de moindre importance, une question très pertinente sur

21 laquelle la Chambre devrait l'entendre de s'exprimer, je voudrais demander

22 aux parties, à ce moment-là, d'en informer la section des Victimes et des

23 Témoins demain matin au plus tôt, afin qu'on ait le temps ce soir

24 d'examiner la documentation et de voir s'il est nécessaire de poser des

25 questions supplémentaires au témoin.

Page 8191

1 Madame l'Huissière, si vous voulez, s'il vous plaît, rendre les

2 originaux de ces articles de journal qui ont été fournis. D'après ce que

3 j'ai compris, Maître Stewart, les autres pages qui ont été photocopiées ne

4 seront pas versées au dossier comme élément de preuve. Je pense qu'il

5 s'agit seulement de 390 -- je crois que c'est 388.

6 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, c'est clair. Uniquement la

8 partie qui a été retenue, ce qui veut dire, que cette partie est présentée

9 pour versement au dossier.

10 Monsieur Harmon.

11 M. HARMON : [interprétation] Du point de vue de la procédure,

12 Monsieur le Président, je me demande si nous examinons ces documents

13 apportés par M. Cengic à un moment donné, cela pourrait nécessiter un peu

14 de temps. Quand il reviendra, est-ce qu'il pourra, à ce moment-là, être

15 officiellement excusé après avoir terminé sa déposition ?

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je souhaiterais que

17 M. Cengic puisse s'absenter provisoirement du prétoire. On lui demandera

18 d'être disponible. S'il reçoit une communication demain, qu'il puisse

19 revenir dans cette salle d'audience si on lui demande de le faire. Les

20 parties, à ce moment-là, seraient invitées à informer la section des

21 Victimes et des Témoins pour le cas où ils souhaiteraient poser des

22 questions supplémentaires à M. Cengic. Bien entendu, nous ne pouvons jamais

23 exclure qu'à la lecture des articles de journal, ceci pourrait amener les

24 parties à procéder à des recherches supplémentaires. Ceci conduirait à une

25 situation dans laquelle, à ce moment-là, M. Cengic alors qu'il serait peut-

Page 8192

1 être parti, serait appelé à revenir. A ce moment-là, la Chambre

2 souhaiterait savoir dès que possible, quelles seraient les raisons

3 contraignantes qui s'imposent pour poser les questions supplémentaires, sur

4 la base de ces articles de journal.

5 Voilà ce que les membres de la Chambre ont à l'esprit pour le moment.

6 Si ceci est une procédure sur laquelle les parties souhaitent s'exprimer,

7 elles ont la possibilité de le faire.

8 M. HARMON : [interprétation] Pour être parfaitement clair, lorsque les

9 parties se mettent d'accord sur le fait qu'il n'est pas nécessaire que M.

10 Cengic continue de faire sa déposition, ceci est basé sur l'accord du fait

11 qu'il n'a pas besoin de comparaître à des audiences, à de nouvelles

12 audiences du Tribunal ? Est-ce que ceci met officiellement fin à sa

13 déposition à la barre ?

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je peux dire à

15 M. Cengic quelle est la situation. S'il reste des questions à poser, vous

16 pouvez les poser.

17 Monsieur Cengic, vous avez répondu à toutes les questions qui vous ont été

18 posées par les parties et par les membres de la Chambre. Vous nous avez

19 surpris avec de nouveaux documents, de la nouvelle documentation que, bien

20 entendu, les parties vont devoir examiner. Telles que sont les choses

21 maintenant, les parties vont examiner les documents en question ce soir, et

22 décideront s'il est nécessaire de vous poser des questions supplémentaires

23 en ce qui concerne les documents que vous avez apportés. J'ai invité les

24 parties d'informer la section des Victimes et des Témoins qui s'occupent de

25 vous, de les informer au plus tôt dans la matinée demain matin, si vous

Page 8193

1 n'entendez rien de la section des Victimes et des Témoins qui vous

2 demanderait de revenir demain dans l'après-midi dans ce prétoire, vous

3 pouvez vous retirer. Ceci veut dire que vous êtes libre de repartir. Ceci

4 n'exclut pas à 100 % la possibilité, qu'après avoir examiné avec beaucoup

5 de soin, une partie puisse avoir le sentiment qu'il faut demander

6 l'autorisation de la Chambre de vous faire venir à nouveau à la barre, à ce

7 moment-là, on vous appellera pour que vous veniez à nouveau à La Haye.

8 Par conséquent, même si vous n'avez pas de message demain pour vous dire

9 que nous souhaitons vous voir à 14 heures 15 de l'après-midi, il y a quand

10 même une petite possibilité qu'ultérieurement, il puisse être nécessaire

11 que vous reveniez à La Haye. Pour le moment, vous pouvez vous retirer. Je

12 vous remercie beaucoup d'être venu. Si je ne vous vois pas demain après-

13 midi, je souhaiterais vous remercier beaucoup d'avoir fait le voyage,

14 d'être venu de si loin. Je vous donne pour instruction de ne parler à

15 personne de votre déposition que vous avez faite dans cette salle

16 d'audience, au moins pendant les 24 heures qui viennent.

17 Je m'adresse maintenant aux parties. Je pense qu'il n'y a aucune raison de

18 supposer que M. Cengic va revenir, ce qui l'oblige de ne pas parler à qui

19 que ce soit après que soit échu ce délai de

20 24 heures. Monsieur Harmon.

21 M. HARMON : [interprétation] Le seul problème que je vois, c'est si M.

22 Cengic n'a plus l'obligation de porter témoignage, de faire déposition

23 devant la Chambre, normalement, l'interdiction de parler pour ce témoin

24 prend fin. Je voudrais remercier M. Cengic à la conclusion de l'audience

25 d'aujourd'hui. Si nous communiquons avec lui dans la matinée, si ce n'est

Page 8194

1 pas le cas, M. Cengic risquerait d'être déjà sur un avion avant que j'aie

2 le temps de le remercier.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En tout les cas, Monsieur Cengic, nous

4 avons maintenant entendu le fait que l'Accusation souhaite vous remercier

5 d'avoir répondu à son appel et d'être venu témoigner devant cette Chambre.

6 Si ceci vous convient, Monsieur Harmon, si ceci peut résoudre la question

7 on verra, sinon on invitera Me Stewart. Je vais faire vite maintenant. Me

8 Stewart a demandé si l'heure de 10 heures demain, pourrait convenir, et si

9 le témoin ne revient pas --

10 M. STEWART : [interprétation] Oui, ceci me semble parfaitement convenir,

11 Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon,[comme interprété] vous

13 êtes censé ne parler à personne de votre déposition jusqu'à demain 10

14 heures. Si vous recevez un message provenant de la Chambre --

15 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- dans l'après-midi. Vous ne devrez

17 quand même parler à personne de votre déposition. Mais si vous ne recevez

18 aucun message, alors à partir de 10 heures demain matin, vous êtes libre,

19 bien que je ne vous conseille pas de discuter de façon approfondie de votre

20 déposition telle que vous l'avez faite dans cette salle d'audience.

21 M. HARMON : [interprétation] Je voudrais simplement corriger un point au

22 compte rendu, Monsieur le Président. A la ligne 10 de la page 62, il est

23 dit "M. Harmon, vous êtes censé ne parler à personne de votre déposition …"

24 Alors que le compte rendu devrait dire

25 M. Cengic.

Page 8195

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je ne sais pas ce que j'ai dit.

2 J'aurais dû dire M. Cengic.

3 M. STEWART : [interprétation] Je m'oppose à cela, Monsieur le Président,

4 parce que je voudrais procéder à un contre-interrogatoire.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cengic, par conséquent,

6 attendez jusqu'à demain matin 10 heures. Merci encore si nous ne vous

7 revoyons pas. Si vous devez revenir, je voudrais vous remercier encore

8 après la conclusion de votre déposition.

9 Je vous remercie beaucoup. Madame l'Huissière, est-ce que vous voulez, s'il

10 vous plaît, escorter le témoin.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a encore un point. J'ai une partie de la

12 documentation ici avec moi, mais j'ai d'autres documents à l'hôtel. Je ne

13 voudrais pas pour ma part apprécier quelle est la pertinence de tous ces

14 documents, mais je voudrais pouvoir remettre tout ce que j'ai apporté avec

15 moi à La Haye. L'hôtel n'est pas très loin d'ici; le chauffeur pourra peut-

16 être prendre les documents en questions. C'est la façon dont on pourrait

17 procéder, je crois.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a beaucoup de documents,

19 Monsieur Cengic ? Qu'est-ce que cela représente comme volume ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je procéderai à un choix, une sélection en

21 quelque sorte. Il se peut qu'il y ait 10 articles que j'ai apportés avec

22 moi. Bien sûr, j'ai une pile de documentation chez moi, parce que j'ai

23 toute la documentation qui a trait à toute la période de la guerre, mais je

24 ne l'ai pas apportée avec moi. Je n'ai apporté que les éléments qui, je

25 pensais pouvaient être utiles. Je procéderai à une sorte de sélection, et

Page 8196

1 j'enverrai le reste par le truchement du chauffeur. Il s'agit d'une dizaine

2 d'articles environ.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Cengic, je préférerais vous

4 demander de ne pas faire ce choix, parce que quels que soient les documents

5 que vous avez apportez maintenant, je vous serais reconnaissant de les

6 remettre à Mme l'Huissière pour qu'ils puissent être photocopiés. Je suis

7 sûr que vous avez pris, vous avez emporté avec vous ceux que vous

8 considérez comme étant les plus pertinents.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit, bien entendu, d'articles de

11 source publique. Laissons-en les choses à ce stade, ils seront distribués

12 aux parties, et laissez ici, si vous le voulez bien, les documents que vous

13 avez apportés avec vous.

14 M. STEWART : [interprétation] Je me demande si à la lumière de ce que vous

15 venez de dire, Monsieur le Président, il ne serait pas bon de demander au

16 témoin pour que nous soyons bien au clair avant qu'il ne parte, s'il ne

17 s'agit pas que d'articles de journal, s'il n'y a pas, en fait, de

18 différents types de documents. Il vaudrait peut-être mieux éclaircir ce

19 point dès maintenant.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a autre chose que des

21 articles découpés dans des journaux, Monsieur Cengic ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il s'agit essentiellement d'articles de

23 journal. Je me réfère au document que j'ai apporté ici. Il se peut qui en

24 est simplement deux ou trois qui ne soient pas des articles de journal.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, de quoi s'agit-il si ceux ne sont

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1 pas des articles de journal ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a une brochure de la municipalité de Novi

3 Grad qui parle de la structure de la municipalité, et ceci, je pense n'est

4 pas pertinent. J'ai également des statistiques concernant le nombre de

5 personnes qui ont été tuées pendant la guerre, le nombre de maisons qui ont

6 été dévastées, endommagées, et ainsi de suite. Fondamentalement, il s'agit

7 d'un document officiel qui contient une carte de la municipalité actuelle,

8 la structure administrative jusqu'aux élections, et ainsi de suite.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre vous invite a fournir les

11 articles de journaux et pas les autres documents dont vous venez de faire

12 état, et de remettre ces articles de journaux à Mme l'Huissière.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame l'Huissière, voulez-vous,

15 s'il vous plaît, escorter M. Cengic hors de la salle d'audience.

16 [Le témoin se retire]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon.

18 M. HARMON : [interprétation] J'ai un autre article que Mme l'Huissière m'a

19 passé qui a été fourni par M. Cengic. Je vais le faire passer.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, afin qu'il puisse également être

21 photocopié.

22 M. HARMON : [interprétation] Ceci serait le moment qui convient pour

23 débattre très brièvement de la question de l'interprétation. Est-ce que je

24 pourrais décrire les solutions que nous proposons, et la Chambre pourrait

25 prendre la décision qu'elle juge appropriée ?

Page 8198

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Allez-y.

2 M. HARMON : [interprétation] J'ai eu un entretien avec le chef des services

3 linguistiques concernant les cabines. Nous avons parlé hier soir et ce

4 matin de cette question. Ce qui a été convenu pour le moment, et ce qui est

5 proposé, c'est que les interprètes qui se trouvent dans la cabine aient une

6 transcription des conversations téléphoniques enregistrées, et qu'ils

7 puissent en donner lecture à un rythme normal plutôt que d'essayer de

8 comprimer les choses dans le temps qui est donné pour le fait de présenter

9 l'original de l'enregistrement, ce qui veut dire qu'ils auraient seulement

10 à lire d'après le compte rendu, la transcription. Il ne s'agirait pas

11 d'interprétation. Ceci s'entendrait par-dessus l'enregistrement, et il

12 irait probablement au-delà du temps que prendrait la déclaration

13 enregistrée.

14 Un deuxième interprète dans la cabine écouterait l'enregistrement, et

15 dans la mesure où il y aurait des corrections importantes qui devraient

16 être apportées au compte rendu, la cabine préviendrait les parties de ces

17 modifications importantes, et nous apporterons ces modifications à

18 l'intention des membres de la Chambre si nous pensons qu'elles sont

19 pertinentes. Voilà la proposition qui est faite, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maître Stewart.

21 M. HARMON : [interprétation] Il y a un autre aspect également de la

22 proposition, Monsieur le Président, et c'est le suivant : Les interprètes

23 liraient ce que dit l'orateur. Si l'enregistrement, par exemple, est entre

24 M. Krajisnik et M. Karadzic, ils pourraient dire Karadzic ou Krajisnik, et

25 de cette façon le compte rendu serait plus complet.

Page 8199

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart.

2 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes tout à

3 fait d'accord avec cela. Juste pour préciser les choses, nous supposons que

4 pendant que les interprètes lisent à un rythme normal, tout ceci peut être

5 évidemment sténographié comme il faut, mais néanmoins, on fera entendre

6 l'enregistrement, n'est-ce pas ? Parce que Mme Cmeric et M. Krajisnik

7 souhaitent l'entendre.

8 M. HARMON : [interprétation] Oui. On fera entendre l'enregistrement. Tout

9 le monde aura la possibilité de l'entendre, et comme je l'ai dit, s'ils

10 jugent nécessaire d'augmenter ce qui est dans le compte rendu écrit, et

11 qui vient d'être lu par ceux qui se trouvent dans la cabine, ils nous le

12 diront.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si j'ai bien compris ce que vous

14 avez dit, ce que nous aurons à la fin ce sera un enregistrement audio du

15 texte B/C/S que l'on fait entendre, et qui fait partie de l'enregistrement

16 audio de ce procès de cette audience. Nous aurons aussi un texte en anglais

17 qui est la traduction de la transcription de l'enregistrement en B/C/S de

18 la conversation téléphonique interceptée, et qui fera l'objet de

19 modification si le compte rendu en anglais ne reflète pas pleinement la

20 traduction de ce qui est dit dans l'original en B/C/S. Pour finir, nous

21 aurons une traduction en français qui sera une traduction de huit textes

22 anglais tel qu'elle aura été prononcée par les interprètes sur la base de

23 la transcription du B/C/S. Les interprètes de la cabine anglaise traduiront

24 à partir du compte rendu écrit plutôt que par rapport aux mots prononcés

25 dans l'original en B/C/S. Je comprends que dans la cabine anglaise, l'un

Page 8200

1 des interprètes traduira alors ce qui est dit en B/C/S, tandis que l'autre

2 interprète ne lira pas mais suivra ce qui est dit en B/C/S de façon à

3 repérer quelles sont les différences importantes entre le compte rendu ou

4 la transcription, et plus particulièrement la traduction en anglais de ce

5 qui ait été dit en B/C/S. Est-ce que j'ai bien compris votre suggestion ?

6 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. La Chambre adopte votre suggestion,

10 Monsieur Harmon, et les parties -- et pas seulement les parties mais

11 également les interprètes. Ceux qui sont responsables de l'interprétation

12 pour cette Chambre méritent qu'on les remercie beaucoup d'avoir réfléchi

13 avec les parties et les membres de la Chambre à la manière de résoudre ce

14 problème.

15 M. HARMON : [interprétation] Demain, Monsieur le Président, je présenterai

16 à la Chambre l'enregistrement d'une conversation qui a été interceptée, et

17 dans lequel il y avait le mot "fantastique," une conversation qui a été

18 entendue hier. J'ai fait en sorte que les interprètes puissent examiner la

19 question. On en a parlé dans mon bureau.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Après la suspension, Monsieur Harmon,

21 est-ce que l'Accusation est prête à faire entendre le témoin suivant ?

22 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il des mesures de protection

24 demandées ?

25 M. HANNIS : [interprétation] Boro Bjelobrk, Monsieur le Président.

Page 8201

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Bjelobrk, je comprends. Nous allons

2 suspendre l'audience jusqu'à 18 heures 05, mais pas avant que M. le

3 Greffier ne nous ait dit quels étaient les numéros attribués aux pièces à

4 conviction, tout au moins si le ruban dont nous disposons nous permet

5 d'enregistrer jusqu'au bout.

6 Oui, Monsieur le Greffier, allez-y, s'il vous plaît.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

8 Juges, pièce à conviction présentée par l'Accusation, P382, carte de

9 Sarajevo; pièce à conviction présentée par l'Accusation, P383, données

10 concernant, en 1991, le recensement en 1991 pour la Bosnie; pièce à

11 conviction de l'Accusation, P384, procès-verbal des réunions des habitants

12 de la commune locale de Rajlovac tenues le 16 juillet 1991; la pièce à

13 conviction de l'Accusation, P385, ce sont des extraits du compte rendu de

14 la réunion des habitants à Zabrdje, Smiljevici, le 2 juillet 1991; pièce à

15 conviction présentée par l'Accusation, P386, c'est une carte de la commune

16 locale de Rajlovac Zabrdje avec une légende; la légende sur la carte reçoit

17 la cote P386.1

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous demander de

19 changer cette numérotation et de faire que ce soit P386A, et quant à la

20 légende, ce soit P386.A.1 pour la traduction en anglais.

21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Ceci est fait.

22 P387, les résultats du recensement de Rajlovac; la pièce à conviction

23 présentée par l'Accusation, P388, l'article qui a trait à Sarajevo dans le

24 Novo Gradzko Oko de la pièce à conviction présentée par l'Accusation P389A.

25 Il s'agit du dossier qui contient 11 conversations interceptées

Page 8202

1 enregistrées qui ont été authentifiées par le témoin, Ismet Cengic.

2 Le P389A.1, traduction en anglais du document précédent.

3 P390B, il s'agit d'un CD-ROM.

4 Pièce à conviction de l'Accusation P390, la lettre des membres du

5 club du comité du SDS de la municipalité de Novi Grad, Sarajevo, daté de 27

6 décembre 1991, et la pièce à conviction présentée par l'Accusation P391,

7 une lettre de [inaudible] adressée à l'assemblée municipale.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons aussi une pièce

9 présentée par la Défense.

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] En ce qui concerne les pièces présentées

11 par la Défense, il s'agit de la pièce à conviction D32. C'est un article de

12 Glas.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La description de P388 doit être

14 modifiée pour dire qu'il s'agit de Zabrdje plutôt que de Sarajevo. La pièce

15 388, c'est la première page du Novo Gradsko Oko. C'est à la page 6 que se

16 trouve ce texte, ceci juste pour préciser les choses, parce que nous avons

17 les autres pages du même journal devant nous, lesquelles ne sont pas

18 présentées pour versement au dossier. Il s'agit juste de la première page

19 et de la page 6.

20 Monsieur Harmon ?

21 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, à la ligne 8 de la page

22 68, la description de la pièce à conviction n'a pas été correctement

23 enregistrée. Il s'agit des données du recensement, et non pas de consensus.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il s'agit de recensement --

25 "census" avec un "C" en anglais, plutôt qu'un "S". Ayant terminé de cette

Page 8203

1 question, nous allons suspendre la séance jusqu'à 6 heures 10. La séance

2 est suspendue.

3 --- L'audience est suspendue à 17 heures 49.

4 --- L'audience est reprise à 18 heures 16.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis, pour le compte rendu

6 d'audience, vous êtes ici au nom du bureau du Procureur, et vous allez

7 interroger le prochain témoin, à savoir, M. Bjelobrk.

8 M. HANNIS : [interprétation] Oui, effectivement. C'est bien cela, Monsieur

9 le Président.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, pourriez-vous, s'il

11 vous plaît introduire le témoin dans le prétoire ? Monsieur Bjelobrk.

12 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Bjelobrk, bonjour. Avant de

14 déposer ici dans ce prétoire, la Règlement de procédure et de preuve vous

15 demande de faire la déclaration solennelle qui vous engage de dire la

16 vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Le texte de la dite

17 déclaration vous est à présent présenté par l'Huissière, et je vous demande

18 de lire le texte de cette déclaration.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

21 LE TÉMOIN : BORO BJELOBRK

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je vous remercie. Vous pouvez vous

24 asseoir, M. Bjelobrk.

25 Monsieur, c'est tout d'abord M. Hannis, le conseil du bureau du Procureur,

Page 8204

1 qui va vous poser ses questions.

2 Interrogatoire principal par M. Hannis :

3 Q. [interprétation] Monsieur, pourriez-vous commencer -- vous présenter

4 pour le compte rendu d'audience ?

5 R. Je m'appelle Boro Bjelobrk.

6 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais faire

7 l'usage de l'Article 89(F) avec ce témoin, et c'est pour cela que je vais

8 demander que l'on note en tant que pièce à conviction sa déclaration qu'il

9 a fournie pour le bureau du Procureur, la version en B/C/S de ce document.

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Très bien. Il s'agit de la pièce du

11 bureau du Procureur P392.

12 M. HANNIS : [interprétation]

13 Q. Monsieur Bjelobrk, avez-vous une copie, une photocopie de ceci ? Non,

14 pas encore ?

15 R. Oui, je l'ai.

16 Q. Nous allons vous fournir une photocopie officielle de ce document.

17 Reconnaissez-vous ce document comme étant une photocopie de la déclaration

18 préalable que vous avez fournie au personnel du bureau du Procureur en

19 l'espèce ?

20 R. Oui, effectivement. C'est bien ma déclaration préalable.

21 Q. Est-ce que vous avez eu la possibilité de la relire avant de venir

22 déposer ici aujourd'hui, puisque je vais vous poser des questions

23 directrices par rapport à un certain nombre d'informations qui figurent

24 dans cette déclaration préalable ? Mais à part ceci, à part les parties

25 expurgées de votre déclaration préalable, est-ce que vous pouvez confirmer

Page 8205

1 que le restant de la déclaration qui est lisible est bien -- correspond

2 bien à la déclaration que vous avez fournie ?

3 R. Oui, je le confirme.

4 Q. En plus de cette déclaration, pour vous préparer pour votre déposition

5 d'aujourd'hui, est-ce que vous avez eu la possibilité, l'opportunité

6 d'écouter un certain nombre de conversations interceptées avant de venir

7 déposer ?

8 R. Oui. J'ai eu la possibilité de le faire.

9 Q. Est-ce que vous étiez en mesure d'identifier un certain nombre de

10 personnes qui participaient à ces conversations, qui ont parlé, et -- de

11 faire votre commentaire par rapport au contenu de certaines de ces

12 conversations ?

13 R. Oui, effectivement. J'ai pu aussi bien reconnaître les personnes qui

14 parlent que faire part de mon commentaire.

15 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je remarquer que

16 M. Hannis a en effet demandé au témoin s'il a eu la possibilité de revoir

17 sa déclaration préalable avant de venir déposer. C'est une question tout à

18 fait convenable, habituelle, mais, dans le compte rendu d'audience, on ne

19 voit pas la réponse qu'il a fournie à cette question. Puisqu'il lui a

20 demandé s'il a eu la possibilité de lire, donc de revoir, sa déclaration

21 préalable avant de venir déposer, ensuite il y a une autre question qui

22 suit. On n'a pas de réponse.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, quand vous avez dit

24 que vous confirmiez qu'il s'agissait bien de votre déclaration préalable,

25 vous n'avez pas vraiment répondu à la question qui vous a été posée à même

Page 8206

1 temps, à savoir si vous avez eu la possibilité de relire -- de lire à

2 nouveau cette déclaration préalable.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, j'ai eu la possibilité de lire à

4 nouveau la déclaration préalable, et je confirme à présent qu'il s'agissait

5 bien de ma déclaration préalable.

6 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président et le

7 conseil de la Défense. Ensuite, je voudrais présenter une autre pièce à

8 conviction. Il s'agit de l'authentification des conversations interceptées

9 faite par le témoin, et je voudrais que l'on attribue une cote à ce

10 document.

11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce du Procureur P393.

12 M. HANNIS : [interprétation]

13 Q. Monsieur Bjelobrk, reconnaissez-vous ce document ? Est-ce bien le

14 document que vous avez élaboré, où vous avez noté qu'elles sont les

15 conversations interceptées que vous avez écoutées ? Quelles sont les

16 locuteurs que vous avez pu identifier, et d'éventuels commentaires, de

17 votre part, par rapport à ces conversations interceptées ?

18 R. Oui, effectivement. Ici figure ce que j'ai dit au sujet de ces

19 conversations interceptées que j'ai pu entendre, et j'ai authentifié ceux-

20 ci avec ma signature en bas de page.

21 Q. Vous avez paraphé aussi les deux autres pages, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Merci.

24 M. HANNIS : [interprétation] A présent, Monsieur le Président, je propose

25 de lire le résumé en vertu de l'Article 89(F). Je pense que nous pourrions

Page 8207

1 le faire toute suite. C'est vrai que parfois nous le faisons à la fin,

2 parfois nous le faisons à la fin.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'il conviendrait mieux de le

4 lire toute suite, et nous savons quel est le point de départ de vos

5 questions.

6 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous lui avez demandé

8 s'il a eu la possibilité, et j'ai vu que vous indiquiez quant à la

9 formulation de votre question, mais il a, d'après ce que j'ai compris, tout

10 de même dit qu'il a vraiment lu cette déclaration. C'est ce qu'il importe.

11 M. STEWART : [interprétation] Oui, effectivement. Justement, j'ai fait ce

12 commentaire à Mme Cmeric. C'est vrai que c'est une question qui se pose

13 souvent. Mais je me suis dit que le témoin a répondu par l'affirmative.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je vous ai vu discuter de

15 cela avec Mme Cmeric. Mais vous pouvez continuer, Monsieur Hannis.

16 M. HANNIS : [interprétation]

17 Q. Pour l'instant, je vais vous lire le résumé de votre déclaration.

18 M. HANNIS : [interprétation] Ce témoin était membre du parti Sociale

19 Démocratique de Bosnie-Herzégovine (SDP). Il était membre de l'assemblée

20 nationale de Bosnie-Herzégovine. Dans cette capacité, il a négocié avec les

21 représentants du SDS pour décider du futur de la Bosnie-Herzégovine. Il

22 explique que la plate-forme nationale du SDS, ou le programme nationale du

23 SDS, et sa réponse -- la réponse, il explique quel était le programme du

24 SDS, et quelle était la réponse de son parti à ce programme. Le témoin

25 aussi décrit comment en 1991 le SDS a participé dans le processus de la

Page 8208

1 création des structures d'état parallèle, en discutant du déplacement de la

2 population, l'organisation des municipalités serbes, et la formation des

3 régions autonomes serbes.

4 Bjelobrk décrit la personnalité publique de l'accusé, qui est assez

5 différente de la façon dont il agissait dans des réunions qui n'étaient pas

6 publics, et auxquels le témoin a participé en tant que représentant des

7 syndicats.

8 Le témoin décrit le rôle de Momcilo Krajisnik en tant que président de

9 l'assemblée comme une position qui est beaucoup plus importante que la

10 position du président ou du porte-parole d'autres parlements européens. Il

11 décrit les processus législatifs qui existaient, à l'époque, et il donne

12 des exemples de la façon dont l'accusé usait de son autorité pour

13 promouvoir l'agenda du SDS. Le témoin va faire des commentaires sur les

14 conversations interceptées par rapport à ces questions-là, et d'autres

15 questions importantes.

16 M. Bjelobrk raconte la réunion qui a eu lieu en octobre 1991, à la caserne

17 de Lukavica pendant laquelle un commandant de la JNA lui a offert la

18 possibilité de commander un groupe de 150 personnes dans le village de

19 Miljevici.

20 Le témoin raconte la session de l'assemblée de la BiH qui a eu lieu

21 au mois d'octobre 1991, au cours de laquelle, Radovan Karadzic a fait son

22 discours infâme concernant l'extinction ou disparition du peuple musulman,

23 et la façon dont les représentants serbes ont quitté cette session. Il

24 décrit les efforts qui ont suivi par d'autres législateurs pour arriver à

25 une solution politique, et pour éviter la guerre.

Page 8209

1 M. Bjelobrk décrit sa visite, la visite qu'il a fait au mois d'octobre

2 1991, en tant que représentant de l'assemblée pour inspecter la ligne de

3 front de Posavina et la réunion qu'il a eu avec les dirigeants locaux, y

4 compris, Radoslav Brdjanin et Predrag Radic. Le témoin fait un commentaire

5 au sujet de l'interview que Krajisnik a donnée au mois de janvier 1992, et

6 au sujet d'un rapport de presse en date du mois de mars 1992, concernant

7 les documents appelés Variante A et Variante B.

8 Monsieur Bjelobrk raconte aussi la conversation qu'il a eue au mois de mars

9 1992 avec un autre Serbe et avec Krajisnik quand l'accusé a demandé

10 pourquoi il ne voulait pas supporter le SDS. Krajisnik a parlé des

11 intellectuels serbes qui n'étaient pas capables de vivre avec d'autres

12 nationalités dans le même pays.

13 Sa déposition est pertinente pour les paragraphes 7, 8, 12, 17 et 19 de

14 l'acte d'accusation.

15 M. STEWART : [interprétation] Le seul document que j'ai sous mes yeux, est

16 un petit peu différent, et il est vrai que je dirais que là il s'agit

17 presque de journalisme.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, effectivement, j'ai été

19 étonné d'avoir entendu ce mot.

20 M. STEWART : [interprétation] Oui, parce que c'est assez étrange ?

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons entendu beaucoup de

22 dépositions et beaucoup d'informations au sujet de cette réunion et, de

23 toute façon, il n'est absolument pas nécessaire de parler des discours

24 infâmes ou quoi que ce soit, il n'est pas besoin d'ajouter de tels

25 qualificatifs.

Page 8210

1 M. HANNIS : [interprétation] Nous allons nous conformer à cette instruction

2 dans le résumé que nous allons faire à l'avenir en vertu de l'Article

3 89(F).

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

5 M. HANNIS : [interprétation]

6 Q. Monsieur Bjelobrk, maintenant je voudrais parler de votre passé.

7 Je vais vous lire cela et vous allez me dire si c'est exact.

8 Vous êtes né à Ilidza en 1949. Vous avez fait des études d'ingénieur

9 électronique. Vous êtes devenu membre du parti communiste en 1968. Ensuite,

10 ce parti s'est transformé en parti socio-démocrate, le SDP de Bosnie-

11 Herzégovine. Depuis 1991, vous êtes membre du comité principal du SDP, et

12 vous étiez membre de sa présidence à l'époque de votre déclaration. En

13 1990, lors des élections, vous avez été élu dans le conseil de la

14 municipalité et vous êtes devenu membre du parlement de Bosnie-Herzégovine,

15 ou de l'assemblée nationale. Vous êtes Yougoslave, d'appartenance ethnique

16 yougoslave. Est-ce que tout ceci est exact ?

17 R. Tout sauf un détail, à savoir qu'en 1990, j'ai été élu au conseil des

18 municipalités de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine.

19 Q. Merci de votre correction.

20 Nous allons utiliser votre déclaration en tant qu'élément de preuve

21 en l'espèce, mais j'aurais besoin tout de même de vous poser quelques

22 questions à ce sujet. Tout d'abord, au paragraphe 20 de votre déclaration,

23 vous dites que vers la mi-1991, il y a eu beaucoup de discours dans

24 l'assemblée où l'on disait que les Serbes des différentes régions "devaient

25 se protéger". Ensuite, vous continuez en disant que vous pouviez voir que

Page 8211

1 l'idée venait des dirigeants de haut niveau du SDS. Je voudrais commencer

2 en vous posant une question. D'après vous, qui étaient ces hauts

3 dirigeants, les dirigeants au top niveau du SDS ?

4 R. Au sommet du SDS, pour moi, c'était d'abord les personnes qui avaient

5 des fonctions au sein de ce parti, le président et les membres du SDS qui

6 disposaient des fonctions importantes, les membres de la présidence, le

7 président de la municipalité, les membres du gouvernement, ainsi qu'un

8 certain nombre de députés, puisque le SDS donnait beaucoup d'importance au

9 rôle des députés du SDS.

10 Q. Y avait-il d'autres personnes que vous estimiez être des hauts

11 dirigeants, hormis les personnes qui avaient nommément un poste comme vous

12 venez de l'indiquer ?

13 R. Bien sûr. D'après le statut de ce parti, il s'agit là des membres de

14 ces organes exécutifs, comme la présidence, le conseil principal, et

15 cetera. Mais je crois qu'en terme d'importance, les postes que j'ai évoqués

16 étaient occupés par des personnes qui étaient considérées comme des

17 autorités et perçues comme telles par le public.

18 Q. Bien. Vous étiez membre de l'assemblée et en cette qualité, est-ce que

19 vous traitiez régulièrement avec les représentants du SDS et les autres

20 membres de l'assemblée nationale ?

21 R. Bien sûr. A cause du fonctionnement de ce parlement, notre système

22 nécessitait une communication officielle, si je puis l'appeler ainsi,

23 pendant les sessions du parlement en tant que tel. Ensuite, il y avait

24 différentes commissions de l'assemblée et d'autres comités. Bien sûr, il y

25 avait des conversations également dans les couloirs de l'assemblée, il

Page 8212

1 s'agit là des travaux effectués au sein de l'assemblée. Mais il y avait

2 également des contacts personnels en dehors des réunions de l'assemblée.

3 Q. Suite à ce contact avec les membres de l'assemblée qui faisaient partie

4 du SDS, avez-vous pu jauger qui ils considéraient être les membres les plus

5 éminents du SDS ou, en tout cas, les hauts dirigeants ?

6 R. Je crois que cela ne fait pas l'ombre d'un doute que la plus haute

7 autorité était entre les mains du président du SDS. Au fil du temps, le

8 poste de président de l'assemblée était devenu plus important, car le SDS

9 faisait beaucoup plus d'importance au rôle joué par les représentants aux

10 yeux du public. Les membres de la présidence n'exerçaient pas cette

11 autorité aux yeux du public tout en remplissant des fonctions importantes,

12 donc il y avait certaines personnes qui étaient importantes aux yeux du

13 public.

14 Q. En 1991 et au début de l'année 1992, pourriez-vous nous dire qui était

15 le président du SDS ?

16 R. Le président du SDS était Radovan Karadzic.

17 Q. Le président de l'assemblée ?

18 R. Le président de l'assemblée était Momcilo Krajisnik.

19 M. HANNIS : [interprétation] La question suivante, je souhaite que l'on

20 entende une conversation interceptée et je souhaite que l'on donne le

21 numéro de la pièce suivante et que nous mettions en œuvre la procédure

22 décrite par M. Harmon un peu plus tôt.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce de l'Accusation P394, Messieurs

24 les Juges.

25 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite indiquer

Page 8213

1 aux interprètes, la Chambre, le conseil et le témoin au point de départ. Je

2 ne vais pas entendre l'ensemble de la conversation. Cela commence à la page

3 3, dans la quatrième rubrique, lorsque M. Milosevic prend la parole en

4 B/C/S. Cela commence à la page 2 de ce document, trois cases à partir du

5 bas lorsque

6 M. Milosevic parle. Je crois qu'il va falloir prendre le temps nécessaire

7 pour retrouver l'endroit en question avant que l'on entende la cassette.

8 [Diffusion de cassette vidéo]

9 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas de texte.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le président note que les interprètes

11 n'ont pas trouvé le bon texte. Je crois que nous pouvons maintenant --

12 [Diffusion de cassette vidéo]

13 L'INTERPRÈTE : [Voix sur voix]

14 "Slobodan Milosevic : Vous a appelé au bon moment. Regardez, j'ai

15 gribouillé une lettre.

16 Radovan Karadzic : Hm-hm.

17 Slobodan Milosevic : Là, à cet endroit-là. Je vais l'envoyer à tous

18 ceux que nous appelons. Je dirais qu'au cours de ce processus, la crise

19 yougoslave ni en Bosnie, au Monténégro et en Serbie, les décisions n'ont

20 pas été prises sur la proclamation de la cessation de l'indépendance. C'est

21 la meilleure indication qui soit que l'intérêt a la préférence de tout

22 l'ensemble de le population vivant dans ces républiques, et que la

23 Yougoslavie soit sauvée comme état conjoint pour toutes les républiques, et

24 que son évolution soit ainsi réglementée. En particulier, la responsabilité

25 de tous les organes les plus importants de ces républiques aux fins de

Page 8214

1 trouver une solution pour un aboutissement pacifique de la crise. C'est la

2 raison pour laquelle l'accord entre les présidents des républiques et des

3 assemblées nationales des républiques, sur les points les plus importants,

4 sur la résolution de la crise yougoslave, serait une bonne base pour notre

5 initiative commune, à savoir que les organes des républiques, dans

6 l'intérêt d'une solution, ou aux fins de trouver une solution qui

7 protégerait les intérêts de tous les peuples yougoslaves. Ensuite, je vais

8 ajouter maintenant par ce que je n'ai pas évoqué; j'ai seulement commencé à

9 écrire. J'ai suggéré que lundi le président des républiques et des

10 assemblées nationales, les présidents se réunissent. Je vais leur demander

11 de --

12 Radovan Karadzic : De le confirmer.

13 Slobodan Milosevic : Oui.

14 Radovan Karadzic : Oui, confirmer. Excellent. Excellent. Très bien.

15 Slobodan Milosevic : Très bien, alors.

16 Radovan Karadzic : Très bien. Ils viendront tous, peut-être qu'ils

17 viendront quasiment tous.

18 Slobodan Milosevic : Ils pourraient tous venir. Peut-être qu'Alija ne

19 viendra pas.

20 Radovan Karadzic : Oui, oui.

21 Slobodan Milosevic : Parce que soyez conscient du fait que la

22 personnalité-clé, c'est Krajisnik.

23 Radovan Karadzic : Oui, oui, effectivement.

24 Slobodan Milosevic : Si Krajisnik ne venait pas, alors les

25 représentants de Bosnie-Herzégovine ne viendront non plus.

Page 8215

1 Radovan Karadzic : Oui, oui, oui.

2 Slobodan Milosevic : Si Krajisnik vient, je m'en fous si Alija ne

3 vient pas.

4 Radovan Karadzic : Oui. Faites-le directement, séparément et

5 adressez-le en nom propre.

6 Slobodan Milosevic : Oui, oui, en nom propre."

7 [Fin de la diffusion de la cassette]

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais demander à la cabine anglaise

9 s'il y a une différence entre la version en B/C/S, s'il y a des disparités

10 entre ce qui a été lu et ce qui a été entendu."

11 L'INTERPRÈTE : La cabine anglaise, à notre connaissance, non. Car cela

12 était très rapide et difficile à suivre.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Pas de différences notables en

14 tout cas. Veuillez poursuivre, Monsieur Hannis.

15 M. HANNIS : [interprétation]

16 Q. Monsieur Bjelobrk, cette écoute est datée du mois d'août -- non, du

17 mois de juillet. Pardonnez-moi du mois d'août 1991. A ce moment-là, dans

18 l'ex-République de Yougoslavie, d'après ce que j'ai compris, il y avait six

19 républiques qui composaient la Yougoslavie, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Chacune de ces républiques avaient son propre président. Donc, un

22 président pour chaque république pour les six républiques; c'est exact ?

23 R. Les constitutions des différentes républiques étaient-elles, que dans

24 cinq de ces républiques, le poste le plus élevé était occupé par la

25 présidence qui, à ce moment-là, était au nombre de trois ou six membres. La

Page 8216

1 seule différence avec la Bosnie-Herzégovine était que contrairement aux

2 autres républiques qui avaient leur président, la République de Bosnie-

3 Herzégovine était régie par un organe collectif.

4 Q. Chacune de ces six républiques avaient sa propre assemblée ?

5 R. Oui, c'est exact.

6 Q. Pour ce qui est de ce qui était géré au niveau de la République, qui au

7 sein de chaque organe ou de chaque parti, devait traiter avec son homologue

8 de l'autre république ? Si vous comprenez ma question.

9 R. Après la constitution des différentes républiques, l'autorité en

10 revenait au président de la République. Pour la Bosnie-Herzégovine, il

11 s'agissait, -- la plus haute instance, c'était la présidence. Les

12 assemblées n'exerçaient pas ce type d'autorité, car un peu plus tôt, les

13 présidents des républiques avaient évoqué cette question, et avaient essayé

14 de trouver une solution commune à la crise yougoslave.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis, par rapport à une

16 réponse précédemment donnée, cela sème un petit peu la confusion, je crois.

17 Le témoin a répondu, que d'après la constitution de ces républiques, il y

18 avait cinq républiques, et le poste le plus élevé était celui de la

19 présidence. Cette présidence était composée de trois à six membres. Un peu

20 plus loin, il est précisé que la Bosnie-Herzégovine était différente, car

21 la différence des autres républiques qui avaient à leur tête des

22 présidents, la république de Bosnie-Herzégovine était régie par un organe

23 collectif. Je considère qu'un organe qui est composé de trois à six membres

24 n'est pas un organe collectif.

25 M. HANNIS : [interprétation]

Page 8217

1 Q. Monsieur le Témoin, avez-vous entendu ce qu'a dit le président, et

2 savez-vous pourquoi il y a une petite confusion à cet égard ? Pourriez-vous

3 nous faire la clarté là-dessus ?

4 R. Bien sûr. Des six républiques et conformément aux dispositions de la

5 constitution de ces républiques, il y avait cinq républiques; la Slovénie,

6 la Croatie, la Serbie. Le Monténégro et la Macédoine avaient des

7 présidents, alors que la République de Bosnie-Herzégovine avait une

8 présidence. C'est là qu'était la différence par rapport aux autres

9 républiques.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette présidence était composée de trois

11 à six membres; c'est exact ?

12 L'INTERPRÈTE : Le témoin hoche de la tête.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas entendu. Nous n'avons

14 pas pu entendre votre réponse, car vous ne l'avez pas dit à voix

15 suffisamment haute. Vous avez répondu en disant oui ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Hannis.

18 M. HANNIS : [interprétation]

19 Q. Dans les cinq républiques et à l'exception de la Bosnie-Herzégovine,

20 chaque république avait son président; c'est exact ?

21 R. Oui.

22 Q. En Bosnie-Herzégovine, à ce moment-là, il y avait une présidence

23 collégiale; c'est exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Dans la conversation interceptée que vous venez d'entendre, où M.

Page 8218

1 Milosevic semblait organiser une réunion où il voulait inviter les

2 présidents des six républiques ainsi que des présidents des assemblées

3 nationales de ces mêmes républiques a eu une réunion. Avez-vous estimé que

4 la liste des personnes invitées était significative?

5 R. Oui, effectivement. Avant le 7 août, ces discussions, qui avaient pour

6 but de trouver une solution à la crise yougoslave, ont été -- ces

7 discussions ont été menées par les présidents des républiques. Cette

8 conversation ou cet échange proposait que les présidents des assemblées

9 participent également à ces discussions. Ce point avait été mis à l'ordre

10 du jour avant cette date. D'aucuns pensaient que la traduction de la

11 présidence de l'assemblée, à ces discussions, était une nouvelle tentative

12 après que la séance de l'assemblée de 1991 avait échoué sur ce point-là, en

13 grande partie due à la personnalité du président de l'assemblée, qui avait

14 pu asseoir son autorité. Milosevic avait gardé ceci à l'esprit. Il

15 souhaitait avoir cette possibilité. Il souhaitait garder cette possibilité,

16 dans le cas où la République de Bosnie-Herzégovine souhaitait se faire

17 entendre, sur la question de la solution proposée à la crise yougoslave.

18 Q. Au paragraphe 20, des discours des Serbes qui parlaient de l'obligation

19 qu'ils avaient de se protéger. Dans votre déclaration ici, on voit cela

20 émanait des hauts dirigeants du SDS. Comment pouviez-vous savoir, ou

21 pouviez en déduire que cette idée venait des hauts dirigeants du SDS ?

22 R. Pour commencer, l'état d'esprit général au cours du printemps et vers

23 la moitié de l'année 1991, faisait qu'il n'y avait pas eu d'importants

24 incidents, qui auraient nécessité une forme protection quelconque.

25 Deuxièmement, nous avions entendu ces idées d'établir ou de créer des

Page 8219

1 formes de gouvernement régionales, et ce qui est intéressant, c'est

2 qu'elles avaient été formulées à Romania, en Herzégovine orientale, et en

3 Krajina, où la population serbe est majoritaire. A l'évidence, ce

4 mécanisme, ce système de protection était en cours de formation dans les

5 régions où les Serbes avaient la majorité, et où se trouvait le SDS.

6 Si vous vouliez créer un système de protection, il serait logique de

7 le créer dans les endroits, dans les secteurs où un certain groupe ethnique

8 constituait une minorité par rapport aux autres groupes ethniques.

9 Toutefois le temps qui s'est écoulé, a montré par la suite, qu'il

10 s'agissait d'une pratique appliquée par le SDS jusqu'à la formation de

11 l'assemblée du peuple serbe, et jusqu'aux prises de contrôle

12 anticonstitutionnelles qui ont commencé à avoir lieu là-bas.

13 A mon avis, c'était une idée qui était développée par les dirigeants

14 pour commencer parce que les citoyens de base localement, n'avaient aucune

15 intention particulière, ou objectif particulier de protection.

16 Deuxièmement, comme vous le verrez à partir de l'une des transcriptions

17 d'enregistrement, le croquis sur la carte en ce sens, était fait par un

18 cercle très restreint de personnes qui appartenaient à la direction du SDS.

19 Q. Je vous remercie. Egalement au paragraphe 20, vous parlez, enfin vous

20 dites, je vous cite : "Le processus d'organisation régionale et de

21 protection régionale avait progressé à partir de ce groupement de

22 municipalités en Romanija. La création de Sajo, les régions autonomes

23 serbes, en Herzégovine et en Krajina, et cetera, jusqu'à la création de la

24 Republika Srpska." Vous terminez en concluant que c'était je vous cite :

25 "Très bien organisé, une stratégie très bien organisée et progressive,

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1 visant à enfin de compte comme conclusion, une séparation nationale."

2 Qu'est-ce qui vous a conduit à cette conclusion, sur quoi avez-vous basé

3 cette conclusion ?

4 R. Il y avait plusieurs éléments qui indiquaient qu'il était logique de

5 parvenir à une telle conclusion, pour tout participant une façon active aux

6 événements. Pour commencer, le développement de la politique du SDS par

7 l'assemblée et les organes municipaux, était d'une certaine façon une

8 politique défensive. Ils formulaient leur réponse aux initiatives des

9 autres, et ils avaient uniquement ces idées de répondre à cela sous une

10 forme défensive. A partir du moment où la crise a commencé à être

11 d'actualité, les gens ont essayé de trouver des compromis, et typiquement

12 en ce qui les concerne, ils essayaient de trouver des compromis par une

13 telle politique défensive.

14 En second lieu, en 1991, il y avait une théorie selon laquelle chaque

15 groupe ethnique aurait son propre gouvernement, et dirigerait son propre

16 groupe, donc on aurait des mécanismes gouvernementaux dans tel ou tels

17 secteurs. Il y aurait séparation des groupes ethniques, suivant ces

18 critères. Il n'y avait pas de problème dans les secteurs dans lesquels les

19 trois groupes ethniques pouvaient parvenir à un accord. Mais dans ceux où

20 ils ne pouvaient pas le faire, c'est là que posaient les problèmes, et que

21 le SDS faisait savoir que leur position était la position du peuple serbe.

22 Lorsque nous parlons du groupement de municipalités suivant cette politique

23 de réorganisation de la SAO, et compte tenu du fait que l'assemblée avait

24 proclamé, avait dit qu'elle avait une majorité légitime dans les régions où

25 la population était prédominante, ce processus a duré de dix à 11 mois, et

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1 on pouvait voir de quelle façon cette question des secteurs à majorité

2 faisait son chemin.

3 Q. Je vous remercie, Monsieur le Témoin. Aux paragraphes 21 à 25, et

4 également au paragraphe 50 de votre déclaration, vous exposez d'une façon

5 assez détaillée comment à votre avis, M. Krajisnik s'était servi de son

6 autorité, en tant que président de l'assemblée de la Bosnie-Herzégovine,

7 pour en fait faire de l'obstruction au bon fonctionnement de cet organe. Au

8 paragraphe 22, vous décrivez en tant qu'exemple de cela, en vous rapportant

9 plus particulièrement à une proposition que votre parti et vous-même, vous

10 vouliez inscrire à l'ordre du jour de l'assemblée. Est-ce que je pourrai

11 tout d'abord vous demander si vous rappelez de quelle proposition il

12 s'agissait, quelle proposition essayez-vous de faire inscrire sur l'ordre

13 du jour de l'assemblée ?

14 R. Après le fait que les négociations n'avaient pas abouti à Split, ceci a

15 déclenché le fait que tous les présidents des républiques ont essayé de

16 parvenir à un accord, le Parti social démocrate, c'est-à-dire, ses

17 représentants ont, à ce moment-là, présenté comme proposition de trouver

18 une solution pour la Bosnie-Herzégovine, pour l'ensemble de la crise, et il

19 y avait deux aspects particuliers de cette proposition. Pour commencer, le

20 fait que la Bosnie-Herzégovine devrait se trouver à une équidistance par

21 rapport à la Serbie, et à la Croatie, compte tenu du fait que la Bosnie-

22 Herzégovine était composée d'une population d'origine ethnique serbe,

23 croate, et bosnienne, donc il n'aurait pas été étrange, et peu réaliste de

24 rechercher une conclusion qui n'aurait pas créé une symétrie, une sorte de

25 relation symétrique vis-à-vis de la Croatie, et de la Serbie.

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1 Deuxièmement, le fait de garantir les droits de l'homme, les droits humains,

2 pas seulement en ce qui concerne les groupes ethniques de toutes les

3 populations de Bosnie-Herzégovine, mais c'était la base de cette plate

4 forme qui comportait d'ailleurs d'autres aspects.

5 Nous avons présenté cette proposition à l'assemblée. Parmi les

6 représentants du SDS, nous avons rencontré une opposition très tôt,

7 lorsqu'il s'agit d'inscrire ce point à l'ordre du jour. M. Krajisnik a voté

8 pour que ce point soit inscrit à l'ordre du jour, et c'était l'ordre de la

9 séance particulière que les représentants du SDS ont quitté l'enceinte. De

10 façon à faire adopter cette proposition, il nous fallait de 120 à 121 voix,

11 ce qui aurait représenter 51 %. Il nous manquait une voix, et cette voix

12 qui était la clé de tout manquait à cause -- c'est la raison pour laquelle

13 notre plate-forme n'a pas été adoptée, et la raison de cela, c'était que M.

14 Krajisnik était opposé à cette idée.

15 Je dois admettre qu'il a mis en œuvre l'ensemble de la procédure d'une

16 façon pleinement démocratique. Toutefois, si l'attitude du SDS était même

17 de quitter la salle en cours de séance plutôt que de voter concernant cette

18 plate-forme, il ne l'a pas fait. Il est resté. Pour nous, il était normal

19 tout au moins de s'attendre à une sorte de débat. La seule chose qui s'est

20 passée, c'est que fondamentalement, il nous a manqué une voix.

21 D'une façon générale, cette idée, bien, cela ne plaisait pas aux

22 représentants du SDS, mais il se trouvait que cela pouvait aboutir soit au

23 fait que le représentant du SDS allait sortir, soit faire face à

24 l'obstruction de M. Krajisnik à la fin de l'ensemble de la procédure. Mais

25 ceci s'est produit indépendamment du sujet, compte tenu du nombre de

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1 suspensions qui ont eu lieu au cours d'une séance et des autres sujets

2 évoqués, par exemple, le système de scrutin qui permettait en fait de

3 contourner l'obstruction des représentants du SDS. En fait, nous avons eu

4 des séances qui étaient interrompues, ou nous avons eu des représentants du

5 SDS qui se levaient et sortaient.

6 Finalement, il y a eu un espoir que l'assemblée soit en mesure de

7 voter une proposition en ce sens. Les représentants du SDS ont dit que

8 seuls ces points pouvaient être inscrits à l'ordre du jour lorsqu'un

9 consensus aurait été réalisé par tous les représentants des trois groupes

10 ethniques, et cette deuxième proposition avait besoin d'un vote de 51 %, et

11 elle n'allait pas être adoptée par une proposition de ce genre parce que

12 cette proposition, selon les termes qu'ils ont employés, était trop forte.

13 Pour finir, tout ceci voulait dire que tous les travaux de

14 l'assemblée allaient faire l'objet d'une obstruction.

15 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que peut-être

16 ce serait le bon moment pour que je m'arrête, si vous ne pensez pas que

17 c'est trop tôt.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Il n'est pas trop tôt.

19 Monsieur Bjelobrk, nous allons maintenant lever l'audience. Je vous

20 demanderais de revenir demain à deux heures et quart dans cette même salle

21 d'audience. Toutefois, je dois vous dire que, bien qu'il y ait peu de

22 chance que vous ayez autre chose à faire, mais il y a peu de probabilité,

23 je dois quand même vous dire d'avance que vous ne devez parler à personne

24 de votre déposition, la déposition que vous avez faite aujourd'hui, et que

25 vous allez également faire et poursuivre devant cette Chambre.

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1 Madame l'Huissière, pourriez-vous, s'il vous plaît, escorter

2 M. Bjelobrk en dehors de la salle d'audience ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

4 [Le témoin se retire]

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis, juste pour que nous

6 soyons bien informés, ce témoin, on avait prévu de le faire entendre là,

7 c'est sur le dernier feuillet, le 9 novembre à 14 heures. Ici nous avons

8 quelque chose de plutôt récent, puisqu'il est maintenant question de six

9 heures. En même temps, je peux considérer que compte tenu de l'application

10 de l'Article 89 du Règlement, vous avez une autre prévision qui est plus

11 réaliste.

12 M. HANNIS : [interprétation] Oui, c'est cela, Monsieur le Président. J'en

13 ai parlé avec Me Stewart avant de commencer et j'espère que je pourrai

14 terminer l'interrogatoire principal de ce témoin en trois heures.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Dans l'ensemble, vous dites que

16 demain vous aurez simplement besoin d'un peu plus de deux heures.

17 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Maintenant, je comprends mieux que

19 les parties pensent toujours qu'ils pourront terminer de faire entendre les

20 témoins qui sont prévus cette semaine. Je vais lever la séance.

21 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il y a deux remarques

22 que je voudrais faire.

23 Premièrement, je ne suis pas tout à fait sûr lorsque nous allons recevoir

24 la documentation du témoin précédent qui, je crois, est retourné à son

25 hôtel, ou qui va poursuivre ses recherches.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais demander au Greffier.

2 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après ce que je comprends, les textes

4 en question ont déjà été photocopiés. Ils se trouvent là sur le coin de la

5 table, et vous allez les recevoir immédiatement après l'audience.

6 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il autre chose ?

8 M. STEWART : [interprétation] Deux remarques, Monsieur le Président.

9 L'autre est que nous avons remarqué que ce témoin a avec lui, nous ne

10 sommes pas préoccupés de cela parce qu'il ne semblait pas s'y référer, mais

11 apparemment il avait devant lui une sorte d'agenda assez épais, ou de

12 journal. Nous nous demandons si on pourrait vérifier demain avant qu'il

13 parte, si on pourrait vérifier si cela se trouve ou non à la place du

14 témoin, parce qu'il ne faut pas qu'il emporte quoi que ce soit. Cela s'est

15 déjà produit.

16 M. HANNIS : [interprétation] Oui. Je vais vérifier cela, Monsieur le

17 Président. Je pense que c'est une copie de la déclaration et une copie des

18 pièces à conviction qui étaient proposées, et qu'on devait lui montrer. Je

19 vais examiner la question demain.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais en tous les cas que vous

21 disiez au témoin de garder cela à un endroit tel que cela ne puisse pas

22 être consulté.

23 M. HANNIS : [interprétation] Je vais le faire.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Y a-t-il d'autres questions ?

25 M. STEWART : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je lève la séance jusqu'à demain à

2 14 heures et quart dans la même salle d'audience.

3 --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le mercredi 10

4 novembre 2004, à 14 heures 15.

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