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1 Le lundi 22 novembre 2004
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, tout le monde dans le prétoire.
6 Monsieur le Greffier d'audience, appelez la cause.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, il s'agit
8 de l'affaire IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier
10 d'audience.
11 Mme Edgerton, je vois que vous êtes debout et que pour la Défense ici c'est
12 Mme Loukas et Mme Cmeric. Est-ce que vous êtes prête à ce que le témoin
13 suivant entre dans le prétoire.
14 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas de mesures de protection
16 accordées à ce témoin.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Non.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, il s'agit de
19 M. Medmed Music.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai reçu le résumé de sa déclaration
22 conformément à l'Article 90(F); est-ce que vous en avez discuté avec la
23 Défense ?
24 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai vu ce résumé
25 concernant l'Article 89(F). Je peux dire qu'il y a encore la question que
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1 je voudrais soulever et qui n'a pas trait avec l'Article 89(F).
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Compte tenu du fait que je ne sais de
3 quoi il s'agit, est-ce qu'il vaut mieux parler de cela après avoir invité
4 le témoin à entrer ?
5 Mme LOUKAS : [interprétation] Je pense, Monsieur le Président, que je
6 pourrais soulever cette question maintenant.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez la parole.
8 Mme LOUKAS : [interprétation] Nous avons de nouveau un problème concernant
9 le fait qu'une feuille complémentaire au résumé est arrivée dimanche après-
10 midi et le témoin a fait quatre autres déclarations auparavant pendant 11
11 [comme interprété] ans et, maintenant, le témoin a dit qu'il avait vu M.
12 Krajisnik dans un établissement destiné à des camps de détention des
13 personnes.
14 Monsieur le Président, compte tenu du fait que, le dimanche, il n'est
15 pas possible de rendre visite au prisonnier au quartier pénitentiaire des
16 Nations Unies, j'ai prié Mme Cmeric de donner à
17 M. Krajisnik cette feuille complémentaire, additionnelle, contenant ces
18 informations et je peux vous dire, Monsieur le Président, qu'à la fin de
19 l'interrogatoire principale, la Défense ne sera pas en position de contre-
20 interroger ce témoin, compte tenu du fait que ces informations nouvelles
21 sont arrivées avec un grand retard. C'est pour cela, Monsieur le Président,
22 que j'avance cela aujourd'hui.
23 Maintenant, il y a deux possibilités, Monsieur le Président, c'est que ce
24 témoignage ne sera pas admis au dossier et que de précéder sur la base de
25 la désinformation qui a été déjà versée au dossier concernant ce témoin ou,
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1 si Monsieur le Président le veut, de permettre à l'Accusation d'obtenir ces
2 informations du témoin. Dans ce cas-là, Monsieur le Président, il faut
3 réunir d'autres informations parce que ces informations concernent une
4 autre personne qu'il faut conseiller concernant cette question. Compte tenu
5 de toutes ces circonstances, Monsieur le Président, ces informations qui
6 sont arrivées en retard mettent la Défense dans une position défavorable.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Edgerton, je voudrais vous poser
8 certaines autres questions. Donc, nous avons ici un témoin qui va témoigner
9 concernant l'Article 90(F) [comme interprété] et je dirais que nous ne
10 demandons pas au témoins, selon cet article, de lire des parties de sa
11 déclaration, mais de son résumé, ces parties qui ne sont pas conformes à
12 cet article du Règlement de procédures.
13 Mais cette sorte d'interrogatoire mettrait le témoin dans une position qui
14 était différente de la position qui était habituelle jusqu'ici, c'est-à-
15 dire, il s'agit de la question de savoir si le témoin était présent dans un
16 établissement de détention. C'est quelque chose de nouveau, à part ces deux
17 suggestions présentées par Mme Loukas, je voudrais poser une autre
18 question.
19 A mon avis, en ce moment, l'Accusation s'appuie sur les informations que le
20 témoin fournit beaucoup avant le commencement du procès, beaucoup de temps
21 avant que l'accusé apparaisse ici dans le prétoire. Ensuite, nous attendons
22 le dernier jour pour mettre à jour ces informations et nous savons que le
23 témoignage -- que le témoin sera entendu ici et que ces informations
24 essentielles ne sont pas présentes. Elles sont présentées avant le
25 commencement du témoignage. Je pense que tout cela, il faut préparer avant
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1 le témoignage pour savoir quelles sont les surprises auxquelles nous
2 pouvons nous attendre.
3 Est-ce que vous voudriez dire quelque chose, Mme Edgerton ?
4 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous prie de m'accorder quelques
5 instants, Monsieur le Président.
6 Mme LOUKAS : [interprétation] Pendant que nous attendons l'intervention de
7 Mme Edgerton, pendant que nous attendons la réponse --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous avez la parole.
9 Mme LOUKAS : [interprétation] Pendant que nous attendons la réponse, il me
10 semble qu'il y ait un problème concernant le compte rendu, c'est que,
11 paraît-il, je l'ai sur l'écran et, sur nos écrans, le texte apparaît, mais
12 ici sur l'autre écran, cela ne paraît pas.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est exact. Nous allons prier les
14 techniciens de la cabine vidéo de nous aider à résoudre ce problème.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui va donner à l'Accusation un peu
16 plus de temps pour préparer sa réponse.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,
18 mais j'aurais du -- je devais consulter M. Hannis concernant certaines
19 questions de notre stratégie, mais je pense que vous avez raison.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Edgerton, je pense qu'il ne faut pas
21 rien de plus, avant que le compte rendu n'apparaisse de nouveau sur
22 l'écran.
23 A présent, nous allons voir si le compte rendu apparaît, non, toujours pas.
24 Je suppose que, maintenant, le compte rendu apparaît sur l'écran. Il semble
25 qu'il n'y a plus de problème. Est-ce que, contenu du compte rendu apparaît
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1 sur d'autres écrans, d'autres ordinateurs portable, parce que sur le mien,
2 c'est le cas.
3 Madame Edgerton, vous pouvez continuez.
4 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, comme vous le voyez, Monsieur le
5 Président, c'est le cas dans cette affaire. Les déclarations ont été faites
6 pendant plusieurs années dans le cas de M. Music, c'était beaucoup de temps
7 avant que le procès commence et avant que l'on ne sache que la Chambre de
8 première instance serait saisie de cette affaire. J'ai parlé avec lui, et
9 je peux dire que je ne posais pas de questions concernant le fait s'il
10 avait vu quelqu'un, des leaders, des Serbes de Bosnie. Mais il est exact de
11 plusieurs raisons, et concernant pour la plupart la stratégie d'achèvement
12 du Tribunal et du budget que ces témoins ne doivent pas être de nouveau
13 préparés après ce temps écoulé, après qu'une déclaration a été faite parce
14 que c'est seulement le service chargé des Victimes et des Témoins. Je peux
15 dire qu'hier, après avoir vu, pour la première fois, M. Music, parce que
16 nous l'avons vu il y a un an, et je l'ai félicité de son témoignage dans
17 l'affaire Milosevic, et ici, pour la première fois, il a dit qu'il avait vu
18 M. Krajisnik à cet endroit-là. Tout simplement, nous allons fait tout pour
19 que ces informations soient communiquées à l'autre partie.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, quand même, il surprend au fait de
21 savoir si M. Music était ici, il y a un an, et que son nom figurait sur la
22 liste de témoins, on pouvait s'attendre à ce que nom figure sur la liste de
23 témoins qu'à ce moment-là, on n'a pas posé de questions concernant cette
24 affaire.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Quand il s'agit de son témoignage à
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1 l'affaire Milosevic, je n'ai pas participé à la séance de récolement par
2 rapport à ce témoin, et je ne peux rien dire de cela parce qu'à ce moment-
3 là, je n'étais pas chargée de séance de récolement de ce témoin pour
4 l'affaire Krajisnik. Tout simplement, je lui ai parlé parce que je le
5 connaissais, mais il faut que je souligne que M. Music était auparavant le
6 témoin conformément inscrit sur le 92 bis. Plus tard, il est devenu un
7 témoin de vive voix, et un autre témoin, entre-temps, est décédé.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une grande coïncidence parce que,
9 s'il avait agi du témoin, conformément à l'Article 92 bis, il ne serait pas
10 venu à La Haye. Cette information ne nous aurait pas été fournie.
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, c'est exact.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Juste quelques instants, s'il vous
13 plaît. Il faut que je consulte mes collègues.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre de première instance n'a reçu
16 aucune information supplémentaire dont on a parlé ici. C'est pour cela que
17 nous ne pouvons pas rendre de décision aussi radicale que, par exemple, une
18 décision de ne pas verser ces documents au dossier, mais la Chambre est
19 consciente, tout à fait, qu'il y a un besoin d'analyser une séance de
20 récolement pour ce témoin, mais nous cherchons à éviter cela. L'Accusation
21 est invitée à considérer le fait que ce n'est pas pour la première fois
22 qu'on a eu des surprises au dernier moment. C'est pour cela qu'il faut voir
23 ces huit ou dix semaines en avance pour que le témoin soit récolé pour
24 éviter tout cela.
25 Madame Loukas.
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1 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Mais il faut que
2 je dise encore quelque chose. Ce n'est pas nécessaire pour que le témoin
3 vienne à La Haye pour que les conversations préliminaires soient tenues
4 avec lui. Nous pouvons lui parler au téléphone.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que je propose. J'ai parlé de
6 six, huit ou dix semaines à l'avance, de lui parler à l'avance. Mais si
7 c'est par téléphone ou par d'autres moyens, ce n'est pas important. Mais en
8 tout cas, il faut qu'on lui parle de nouveau, il faut que de telles
9 surprises.
10 Mme LOUKAS : [interprétation] Même des chocs parfois, Monsieur le
11 Président.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
13 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, vous avez la parole.
15 Mme EDGERTON : [interprétation] Il y a encore une chose, Monsieur le
16 Président. Il s'agit des informations dont on a parlé. Je voudrais dire que
17 j'ai envoyé cette information par e-mail à M. Lazar et M. De Hemptinne --
18 ces informations, en même temps que je les ai envoyées à la Défense. Elle
19 aurait dû essayer de vous envoyer un exemplaire de ce rapport.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, bien que la Chambre
21 sache comment recevoir des déclarations écrites au stade de récolement oral
22 du témoin, dans ce cas-là, la Chambre préfèrerait entendre toutes les
23 informations qui sont des informations nouvelles, les entendre de vive voix
24 directement du témoin. Il ne faut lui lire sa déclaration pour qu'on lui
25 arrache ces nouvelles informations. Si vous êtes prête à procéder à un
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1 interrogatoire principal du témoin, je prierais Mme l'Huissière de faire
2 entrer le témoin dans le prétoire.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je suis prête.
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Music. Vous pouvez
6 m'entendre dans une langue que vous comprenez ? Je suppose que sur la base
7 de votre réponse que vous m'entendez ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Music. Mais
10 avant de commencer votre témoignage, selon le Règlement de procédure et de
11 preuve, vous devez faire la lecture de la déclaration solennelle pour dire
12 que vous allez dire la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité. Mme
13 l'Huissière va vous donner le morceau de papier sur lequel le texte de la
14 déclaration solennelle figure.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
16 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
17 LE TÉMOIN : MEHMED MUSIC [Assermenté]
18 [Le témoin répond par l'interprète]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Music.
20 Veuillez vous asseoir.
21 Tout d'abord, Mme Edgerton va vous poser des questions. Elle
22 représente l'Accusation.
23 Madame Edgerton, avec que vous ne commenciez, pourrais-je vous --
24 attirer votre attention au paragraphe 4 de ce que nous avons reçu comme un
25 résumé de déclaration du témoin, selon l'Article 89(F). Au paragraphe 4, il
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1 est dit : "Le témoin pouvait voir--" Ensuite, il y a un numéro. Ensuite, il
2 y a une expression, un mot, "autour" apparaît dans le texte. Si -- où il
3 figure les chiffres 50 ou 60. Si vous résumez la déclaration du témoin, je
4 pense qu'il serait bien si ces termes sont utilisés comme les termes dans
5 cette phrase pour indiquer clairement qu'il s'agit des mots du témoin et
6 non pas d'une autre personne; sinon, nous aurions pu lire que le témoin
7 avait vu 50 ou 60 personnes qu'il les appelle comme cela. Ce serait peut-
8 être plus neutre d'utiliser les mots comme cela.
9 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, c'est vrai, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer.
11 Interrogatoire principal par Mme Edgerton :
12 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Music.
13 R. Bonjour.
14 Q. Je me demande si l'on puisse donner au témoin des copies de ces quatre
15 déclarations qu'il avait faites dans les différents moments.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'une cote a été attribuée à ces
17 déclarations ou pas, Madame Edgerton ?
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Non, pas encore.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier d'audience.
20 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La version B/C/S sera présentée au
22 témoin.
23 Mme EDGERTON : [interprétation] Je ne sais pas de quelle façon la
24 Chambre veut agit dans le sens du traitement des déclarations. Nous en
25 avons de 1993, 1994 et 1998. Ils sont des originaux en B/C/S' Mais celle de
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1 1997 est en anglais.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, la langue originale, elle est cotée
3 sans le point qui suit : ".1", ce qui veut dire que les premières
4 déclarations, ce serait le point 1 pour la traduction anglaise, et pour ce
5 qui est de la déclaration de 1997, la version B/C/S aurait le point 1 après
6 la cote. Je vous demande un moment.
7 Veuillez procéder, Madame Edgerton.
8 Mme EDGERTON : [interprétation]
9 Q. Monsieur Music, je vois que vous avez, devant vous, dans votre langue,
10 les exemplaires de quatre documents dont l'un est de 1993, l'autre de 1994;
11 un troisième de 1997; et un de 1998; est-ce ainsi ?
12 R. Oui.
13 Q. Avez-vous eu l'occasion de revoir ces documents en détail récemment ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que vous reconnaissez ces documents ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que ce sont des copies de déclarations que vous avez faites, à
18 quatre occasions différentes, devant les autorités de Bosnie-Herzégovine et
19 qu'on a présentement le Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie ?
20 R. Oui.
21 Q. En examinant ces déclarations, avez-vous pu établir que ces
22 déclarations sont, d'après votre mémoire, exactes ?
23 R. A deux endroits, il y a eu des corrections -- des rectifications, à
24 deux ou trois endroits. C'étaient des fautes de -- des coquilles. Puis, des
25 éléments que j'ai ajoutés c'est des choses dont je me suis souvenu par la
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1 suite.
2 Q. Maintenant, à propos de ces corrections que vous voulez qui figurent
3 dans les comptes rendus et dont les deux concernent votre déclaration de
4 1997, à savoir, le paragraphe 43, vous souhaitez corriger le nom de la
5 localité à la ligne avant-dernière du paragraphe 43, le nom de "Rastovica",
6 et vous avez dit qu'il fallait écrire "Rasteljica"; est-ce ainsi ?
7 R. Oui.
8 Q. Deuxième correction, j'ai pu bien remarqué, est au paragraphe 76, dans
9 la phrase qui, en anglais, dit : "Je n'ai jamais vu ce groupe qui nous a
10 battus dans le couloir de nouveau. Je n'ai plus jamais revu le groupe qui
11 nous a battus dans le couloir." Si j'ai bien compris, dans votre langue, il
12 manque la lettre "g" dans le mot "groupe", et vous m'aviez demandé de faire
13 figurer ces corrections dans le compte rendu.
14 R. Oui.
15 Q. Mettons de côté, pour le moment, les informations dont vous vous
16 souvenez, est-ce que vous pouvez confirmer que les déclarations qui sont
17 devant vous sont des copies de vos déclarations qui, d'après votre mémoire,
18 sont exactes ?
19 R. Oui.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander
21 que des cotes soient attribuées à ces documents.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, aidez-nous, s'il
23 vous plaît.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le premier document du 18 avril 1993,
25 c'est la P407/A, et la traduction aura encore un point 1. Le deuxième
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1 document à la même date du 18 avril 1993 aura la cote P407/A, puisque c'est
2 l'original. Le document du 23 mars 1994 est une traduction et c'est la cote
3 P407/B.1.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'utilisons pas barre oblique
5 normalement. Dites tout simplement 407A et 407A.1.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
7 Je m'excuse. Maintenant, je vais au document du 23 mars 1994. Il serait
8 P407B, puisque c'est un original. Ensuite, le document du 26 juin 1997,
9 déclaration du témoin, sera la pièce P407C. Le document de la même date
10 portera la cote P407C.1, puisque c'est une traduction d'un ancien document.
11 Le document du 21 février 1998 portera la cote P407D.1, puisque c'est une
12 traduction. Le document de la même date, du 21 février 1998, portera la
13 cote P407D, puisque c'est un original. Je vous remercie, Monsieur le
14 Président.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Vous pouvez poursuivre, Madame
16 Edgerton.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Maintenant, avec votre permission et avec celle de M. Music, je
19 voudrais faire lecture du résumé de la déclaration qui a été soumise
20 collectivement comme pièce à conviction 407.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, s'il vous plaît.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur Music est un Musulman de Donji
23 Hadzici. Avant la guerre, il vivait dans la localité musulmane Musici. Vers
24 le début mars 1992, le témoin a pu voir des Serbes, en uniformes de
25 l'ancien JNA, monter -- escalader une colline dominant un village serbe,
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1 transportant des armes et des munitions. Ils venaient de la caserne de
2 Blazuj. Vers la fin avril 1992, il a été demandé aux Musulmans de rendre
3 leurs armes. Au début mai, après l'éclatement des hostilités sur le
4 territoire de Hadzici, des balles explosives et des balles à trajectoire
5 visible ont été tirées sur le village, ainsi que des grenades.
6 Le 17 ou le 18 mai, à deux reprises, les Serbes locaux avaient, de
7 nouveau, demandé aux paysans musulmans de rendre leurs armes en leur
8 disant, par mégaphone, que le village serait brûlé dans le cas contraire.
9 Les habitants ont refusé de rendre leurs armes, et le village a été
10 bombardé le soir même, et le bombardement a duré pendant trois jours.
11 Le 20 mai 1992, vers midi, les forces serbes ont encerclé Musici et
12 sont entrés dans le village. Ils ont été appuyés par deux canons DC1. Music
13 était dans sa maison avec quelques personnes encore. Deux Serbes locaux,
14 que le témoin connaît, armés de fusils automatiques et vêtus en uniformes
15 de la JNA, sont entrés dans la maison et ont braqué leurs armes sur les
16 personnes qui s'y trouvaient. Le témoin croit que ces Serbes étaient des
17 éléments de la police militaire.
18 14 hommes musulmans de Musici, y compris le témoin, ont été réunis --
19 rassemblés devant la maison. Le témoin a pu voir autour quelques 50 ou 60
20 personnes qu'il appelle Chetniks. Devant la maison, le témoin a vu des
21 corps mâles de trois personnes de Musici. L'un des frères, Miralem, se
22 trouvait dans ce groupe de 14 personnes. Les personnes qui les avaient fait
23 prisonniers l'avaient mené à travers le village et avait appelé les gens à
24 se rendre.
25 Ces 14 personnes ont été emmenées dans les locaux de l'école primaire
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1 de Hadzici, et là-bas, dans le garage -- et de là-bas, au garage de l'hôtel
2 de ville. Les interrogatoires ont commencé tout de suite et ont eu lieu
3 dans le bâtiment même de la municipalité.
4 Le témoin a été enfermé dans ce garage pendant six jours. A ce
5 moment-là, deux ou trois prisonniers y ont été emmenés, tous des Musulmans.
6 Enfin, dans ce garage, il y a eu 47 personnes. Le troisième jour de sa
7 détention, le témoin a été emmené, avec d'autres personnes de Musici, pour
8 charger les munitions de l'arsenal de la JNA à Zunovnica. Un autre groupe
9 de détenus du centre culturel sportif et de récréation de Hadzici, y ont
10 été emmenés pour faire cette besogne.
11 Le sixième jour de sa détention, le témoin a été emmené, avec tous
12 les autres, sauf trois personnes, de Musici à KSIRC, où il y avait eu une
13 soixantaine de personnes, hommes et une femme. Le témoin avait reconnu le
14 chef de l'établissement de détention de KSIRC, et il s'agissait de Momo
15 Vujovic. Il connaissait aussi les gardiens.
16 Le témoin a vu que les détenus à KSIRC avaient été battus et
17 malmenés. Le deuxième jour du Bajram, le témoin a pu voir des personnes
18 qu'on lui a expliqué être des éléments d'Arkanovci. Ils portaient des
19 masques, des uniformes, et des gants avec les pointes coupées. Leur visage
20 était peint en noir. Parmi ces personnes, il y avait une femme. Le témoin a
21 reconnu une femme d'Ilidza. Il l'a vue malmener sexuellement deux hommes.
22 Un, elle avait commandé de ces détenus de faire la fellation à un autre. Il
23 a vu les autres chasser un homme avec une lance.
24 Jusqu'au 22 juin, dans une partie de la salle des sports où se
25 trouvait ce témoin, il s'est trouvé 282 détenus, tous des hommes. Le 22
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1 juin, ou à peu près à cette date, les détenus ont été transférés dans la
2 prison de Kula. Là, des personnes se sont embarquées dans le bus, que le
3 témoin appelle Chetniks, et qui ont battu les détenus. Après ce tabassage,
4 les autobus se sont rendus à la caserne de Slavisa Vajner Cica à Lukavica.
5 Toutes les personnes ont été emmenées dans les locaux de la caserne.
6 Pendant tout le trajet et pendant qu'ils montaient l'escalier, les détenus
7 devaient courir entre de rangées de personnes, que le témoin appelle
8 Chetniks, qui les battaient pendant qu'ils couraient. Les détenus ont été
9 installés dans deux pièces. Le témoin a vu que les témoins [comme
10 interprété] étaient appelés par prénom et qu'ils revenaient de la salle
11 d'interrogations battus. Après avoir entendu des cris d'un détenu, ce
12 détenu n'est pas entré. Le lendemain, toutes les 280 personnes ont été
13 transférées dans une autre pièce, dans l'autre bout de la caserne.
14 L'un des officiers avait pris une liste et avait appelé les 48 noms
15 de ces détenus. Le témoin croit avoir entendu son nom en tant que 48e. En
16 se rendant à la poste, il a dû courir doucement à travers le couloir, entre
17 des personnes qui portaient des bérets rouges et qui l'ont battu
18 cruellement et qui l'ont injurié. Selon la façon dont ces personnes portant
19 des bérets rouges parlaient, le témoin a pu conclure qu'ils n'étaient pas
20 locaux. Il avait trouvé un homme en sang, et il a reconnu son frère. On lui
21 a dit de l'amener.
22 Dans la pièce suivante, le témoin a vu des détenus rangés contre le
23 mur, et à la table, il y avait trois officiers serbes. Ils demandaient au
24 témoin de dire qui était lui, et le témoin avait dire pourquoi il était
25 venu. Le témoin a vu que ces personnes avaient, devant eux, une longue
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1 liste de noms, et les noms qui avaient été appelés avaient été marqués au
2 crayon rouge. Il a été dit au témoin que son nom ne se trouvait pas sur la
3 liste et qu'il devait sortir. Il a dû encore courir entre ces personnes,
4 vers le premier groupe de prisonniers, et a encore été battu. Le témoin n'a
5 jamais vu personne du groupe de 47 personnes, y compris son frère, depuis
6 ce moment-là.
7 Après quelque temps, un autre groupe est venu qui devait battre les
8 autres détenus. Ils avaient contraint les détenus à chanter des chansons
9 serbes. Le témoin a passé, à Lukavica, trois jours, mais les détenus
10 étaient toujours battus quand ils allaient aux toilettes.
11 Le troisième jour, le témoin, et encore quelques autres détenus ont
12 été transférés en autocar à Kula.
13 A Kula, les détenus ont été divisés en deux pièces. Ces pièces
14 avaient été surpeuplées, et les conditions hygiéniques étaient mauvaises.
15 Pendant qu'il était détenu à Kula, le témoin a été interrogé par un certain
16 Predrag Ceranic. Enfin, les détenus ont été divisés en plusieurs chambres
17 où les conditions étaient un peu moins mauvaises. Le 30 juin 1992, toutes
18 les personnes nées avant 1936 ont été libérées. Quelques 75 détenus ont été
19 libérés sur quelques 290 et ont été tout de suite transférés à Vrbanja.
20 Le 23 juillet 1992, le témoin et encore cinq personnes ont été
21 appelés, et il leur a été dit qu'ils seraient échangés. Des éléments du
22 FORPRONU sont venus les chercher. A Ilidza, le véhicule s'est arrêté. Il a
23 été dit au témoin de sortir, ainsi que les autres. Ils ont été emmenés dans
24 une cellule dans le bâtiment de la police d'Ilidza. Dans cette cellule, il
25 n'y avait pas de fenêtre. Le témoin était installé dans cette pièce
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1 jusqu'au 8 septembre 1992. Le chef du poste s'appelait Tihomir Glavas.
2 Pendant sa détention dans ce poste de police à Ilidza, un policier avait
3 dit au témoin qu'il y avait trois différentes forces : les forces d'Etat,
4 municipales, et une unité spéciale. Le témoin y a vu les Chetniks de
5 weekend qui venaient de Serbie et du Monténégro.
6 Le 8 septembre, après deux tentatives d'échange avortées, le témoin a
7 été transféré à KSIRC,où se trouvaient 500 détenus, hommes, femmes, enfants
8 et personnes âgées. Environ huit jours plus tard, toutes les femmes et tous
9 les enfants et certains hommes âgés ont été libérés. De sorte que sur ces
10 500 détenus, il ne restait plus que 84 personnes, y compris le témoin.
11 Le 23 octobre, le témoin, et encore quelque 70 détenus ont été transférés
12 de Hadzici dans le camp de Svrake où il y avait à peu près 102 détenus. Le
13 témoin a été à Svrake jusqu'au 5 novembre 1992.
14 Ceci termine ce résumé.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame Edgerton. Je présume que
16 vous avez des questions à poser au témoin.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Posez-les, s'il vous plaît
19 Mme EDGERTON : [interprétation]
20 Q. Monsieur Music, après avoir lu ce résumé, je voudrais vous poser
21 quelques questions qui sont, en fait, des clarifications sur la base des
22 informations figurant dans les quatre déclarations qui se trouvent devant
23 vous.
24 R. Oui.
25 Q. Concernant les premiers paragraphes de votre déclaration, vous parlez
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1 de votre village Musici. Je voudrais vous montrer maintenant une carte que
2 vous avez préparée hier.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] Un instant, Monsieur le Président.
4 Monsieur le Greffier, avez-vous une copie de la carte ? Je vais
5 demander que cette carte soit cotée.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, veuillez nous aider, Monsieur le
7 Greffier.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, la cote pour cette
9 carte sera P408.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Madame Edgerton.
11 Mme EDGERTON : [interprétation]
12 Q. Vous avez marqué certains points sur cette carte.
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que vous voulez nous dire ce que vous avez marqué par le chiffre
15 1 ?
16 R. J'ai marqué par le chiffre 1 l'endroit où se trouve mon village à
17 Hadzici.
18 Q. Un peu plus loin dans votre déclaration, dans les paragraphes 7 et 8 de
19 votre déclaration, vous mentionnez les camps de Catina Bara à Blazuj. Est-
20 ce que vous pouvez nous montrer la localité de Blazuj sur la carte ?
21 R. Blazuj, c'est là que se trouve la caserne à Blazuj. Depuis que j'ai
22 suivi, la caserne s'y trouvait, c'était la caserne de la JNA jusqu'à 1991.
23 A l'automne de cette année, les réservistes de Monténégro et de Serbie y
24 venaient que je voyais, personnellement, sur nos prés au-dessus de mon
25 village, et nous les avons chassés une fois là-bas. Ils dessinaient des
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1 cartes.
2 Q. C'est l'événement dont vous avez consigné dans plusieurs de vos
3 déclarations ?
4 R. Oui.
5 Q. Dans votre déclaration de l'année 1993, vous dites que vous avez été
6 emmené à Zunovnica, et que vous étiez obligé de charger la munition. Est-ce
7 que vous pouvez nous montrer la localité Zunovnica sur la carte ?
8 R. Numéro 3.
9 Q. Quels types d'armement avez-vous chargés ?
10 R. Nous chargions des grenades, de l'armement d'infanterie, des mines, des
11 munitions pour les chars. Nous chargions à partir des magasins d'arrière,
12 parce que nous, Bosniens, venaient de Brezovaca et prenaient ces munitions
13 de sorte qu'ils retiraient ces munitions vers le milieu de la caserne où se
14 trouvaient des hangars en béton. Nous transportions ces munitions en
15 camions, et nous les déchargions dans ce nouvel endroit.
16 Q. Vous étiez gardé pendant que vous chargiez ces munitions ?
17 R. Oui.
18 Q. Comment ces gardiens étaient-ils habillés ?
19 R. Leur police portait l'uniforme de camouflage, couleur olive. Les autres
20 portaient les uniformes de la JNA.
21 Q. Merci. Laissons cette carte de côté pour le moment, et revenons à notre
22 ordre chronologique, donc, au début de vos déclarations à l'époque, d'avant
23 l'éclatement de la guerre. Vous avez dit qu'un voisin, Goran Todorovic,
24 était venu dans votre village, et qu'il avait demandé que vous vous
25 rendiez. Dites-nous, s'il vous plaît : quelle était son appartenance
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1 ethnique, ce M. Todorovic ?
2 R. Je m'excuse. Il n'était pas Goran, mais Gavro; il était Serbe. Jusqu'à
3 l'éclatement de la guerre, c'était un grand ami à moi. J'avais beaucoup de
4 confiance en lui. Je le respectais plus que certains membres de ma famille.
5 Mais à ce concours de circonstances, il ne voulait même pas me voir, pas
6 seulement moi, mêmes les autres, mes parents, mes frères et mes voisins.
7 Q. Monsieur Music, dites-nous, s'il vous plaît : comment M. Todorovic
8 était-il habillé au moment où il s'est rendu dans le village ?
9 R. Il portait l'uniforme, couleur olive, de l'armée de la JNA. Il y avait
10 le standard téléphonique -- transporté de Blazuj dans sa maison en 1991, en
11 automne. Il ne le reniait pas, il nous l'a dit. Il nous l'a dit parce que
12 la réserve en provision des 100 maisons et notre village --
13 Q. Permettez-moi de vous interrompre, Monsieur Music. Ce sont les
14 informations que vous nous aviez fournies dans votre déclaration de 1997,
15 n'est-ce pas ?
16 R. Oui.
17 Q. Ce sont les déclarations qui sont maintenant des pièces à conviction
18 devant ce Tribunal. Le Tribunal est informé à propos du contenu de ces
19 déclarations, il peut le lire et bien les étudier. On ne vous demande que
20 des clarifications de ce que vous avez déjà dit.
21 R. Oui.
22 Q. Allons un peu plus loin. Vous avez dit que Djukanovic était venu
23 demander que vous vous rendiez ?
24 R. Oui.
25 Q. Comment était-il habillé ?
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1 R. Il portait l'uniforme couleur olive. Il portait un brassard blanc sur
2 une manche.
3 Q. Vous avez mentionné aussi Dragan Pusara qui, par mégaphone, vous
4 demandait de vous rendre, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Comment savez-vous que c'est précisément Pusara qui appelait à vous
7 rendre ?
8 R. Je le voyais. A vol d'oiseau, il y avait une centaine de mètres. Il
9 était vojvoda et il commandait les personnes qui ont participé à l'attaque
10 du village. En même temps, j'avais des binoculaires. Mon grand-père était
11 chasseur, et j'avais cette lunette. Je pouvais suivre ses mouvements. Nous
12 ne pouvions rien faire pour l'empêcher.
13 Q. Djukanovic et Pusara sont Serbes à leur appartenance ethnique ?
14 R. Oui.
15 Q. Deux personnes nommées Elcic qui sont venues chez vous, et qui vous ont
16 fait prisonniers, quelle est leur nationalité ?
17 R. Serbes également. Leur mère est née dans la même localité, je les
18 connaissais, et l'un d'eux --
19 Q. Dans le paragraphe numéro 3, de votre déclaration de 1993 à 97 et
20 dans le paragraphe 28, vous parlez de votre emprisonnement. Vous avez dit
21 qu'un grand groupe de personnes ont emprisonné entre 50 et 60 personnes.
22 Voyons d'abord ce groupe de personnes, pouvez-vous nous dire s'ils étaient
23 habillés en uniforme ou la défense civile, et s'ils portaient des
24 uniformes, quel type d'uniforme est-ce ?
25 R. Leur police portait un uniforme de camouflage tandis que leur soutien
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1 et les autres policiers portaient l'uniforme de la JNA, ils portaient des
2 casques tandis que les policiers ne portaient pas de casque.
3 Q. Parmi ces personnes, vous avez mentionné un homme nommé Rade
4 Veselinovic. Quelle était son appartenance ethnique ?
5 R. Il était Serbe, il était transporteur ainsi que son fils, qui était
6 dans la guerre était vojvoda. C'est lui qui m'a le plus provoqué pendant
7 que j'étais sur le territoire de Hadzici, ainsi que mon épouse.
8 Q. Vous avez dit que, devant la maison de Alija Music, vous aviez vu le
9 corps de trois personnes; est-ce que ces trois personnes étaient de vos
10 parents ?
11 R. Alija Music et Dervis Music, c'était mes oncles, plus exactement frères
12 de mon père, et Fadil était un parent de mon père, un neveu de mon père.
13 Donc, nous étions tous des cousins.
14 Q. Je vous remercie et, maintenant, je voudrais vous montrer à vous et à
15 la Chambre une photo portant la cote 00520200-35.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier, aidez-nous,
17 s'il vous plaît.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document portera la cote P49, Monsieur
19 le Président.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Edgerton.
21 Mme EDGERTON : [interprétation]
22 Q. Monsieur Music, vous avez vu cette photo hier ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce que vous voyez sur la photo devant
25 vous ?
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1 R. C'est le bâtiment de l'assemblée municipale et nous avons été détenus
2 dans ce premier garage. Celui qui est en noir, c'est là que nous avons,
3 nous étions 47 personnes pendant que j'y étais. C'était plus facile de nous
4 interroger, ils nous ont emmenés pour l'interrogatoire là où se trouve
5 cette voiture verte.
6 Q. Je vous remercie.
7 R. Bienvenue.
8 Q. J'ai voulu vous demander uniquement, vous avez montré par votre crayon,
9 mais la Chambre ne peut pas voir ce que vous montré. Je vous prie de bien
10 vouloir décrire ce que vous montrez, ou est-ce que nous pouvons mettre la
11 photo sur le rétroprojecteur ?
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, dans ce cas, nous verrons ce que le
13 témoin est en train de montrer, mais, en tout cas, nous vous prions que Mme
14 Edgerton vous décrive ce que le témoin montre.
15 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
16 Q. Monsieur Music, pourriez-vous montrer aux Juges de la Chambre l'endroit
17 où vous étiez détenu ?
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, je vous demanderais s'il
19 vous plaît de nous montrer cet endroit sur votre projecteur afin que nous
20 puissions voir l'endroit.
21 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Vous nous indiquez la porte de garage qui
23 se trouve complètement à droit.
24 Q. Monsieur Music, lorsque je vous ai interrompu, vous parliez d'une
25 voiture verte. De quoi parliez-vous exactement ?
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1 R. C'est là qu'on m'interrogeait, ici il y a une fenêtre, donc c'est dans
2 cette pièce où l'on m'a interrogé. Il y avait aussi des passages à tabac,
3 vous savez, ici il y avait une toilette, alors que quand on entrait par
4 cette porte, c'est là qu'on se faisait tabasser. Chaque fois qu'ils
5 voulaient battre quelqu'un, ils les battaient et ils ont battu le plus
6 Mujcic [phon] et Hamidic [phon] et, comme il avait un commerce, on lui
7 demandait de l'argent. C'est lui qui s'est fait passer à tabac le plus.
8 Lorsque nous nous sommes rendus, c'est lui qui m'en parlé.
9 Q. Monsieur Music, cette photo complète-t-elle l'apparence du bâtiment de
10 l'Assemblée municipale tel que ce bâtiment était en mai 1992 ?
11 R. Non. Lorsqu'on a signé l'accord de Dayton, c'est à ce moment là qu'on a
12 incendié ce bâtiment. Comme vous voyez, ce bâtiment ressemblait à cette
13 photo quoique le bâtiment n'était pas incendié, je veux dire par là, qu'il
14 y avait des fenêtres, bien sûr, à l'époque, mais c'est quand même le même
15 bâtiment.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Edgerton, lorsque le témoin nous
17 montrait à l'aide du pointeur les deux endroits où il s'est fait tabasser,
18 il a montré deux ouvertures qui se trouvaient directement derrière la
19 voiture verte.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie.
21 Q. Très bien. Maintenant, mettons de côté cette photo et passons à une
22 autre photo. Je demanderais que l'on attribue une côte à cette photo.
23 Mme LOUKAS : [interprétation] Simplement, avant de passer à cette autre
24 photo, j'aimerais savoir si vous pourriez nous dire à quel moment cette
25 photo a été prise.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a une date, Madame Loukas, sur
2 cette photo, mais je ne -- c'est ainsi. Vous avez une raison quelconque
3 pour ne pas croire que cette photo a été prise au mois de juin.
4 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, très bien, mais très souvent les dates
5 sont erronées.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Edgerton.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] Cette photo a été prise le 16 juin 1997 et
8 vous pouvez apercevoir, au coin inférieur droit, je porte une jupe rouge
9 très longue.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vous avais par remarquée.
11 Mme LOUKAS : [interprétation] Moi non plus, Monsieur le Président. Je
12 n'avais pas remarqué Mme Edgerton -- en fait, je ne l'avais peut-être pas
13 reconnue.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une question, c'est une autre
15 chose, cela ne nous concerne pas présentement.
16 Vous allez poursuivre, Madame Edgerton.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien, je souhaiterais qu'on apporte la
18 photo suivante et que l'on place une autre photo sur le projecteur qui
19 recevra une cote, cette cote sera 00500200-20. Cette photo a également été
20 prise à la même date
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agira, bien sûr, si je ne m'abuse,
22 Monsieur le Greffier, de la cote P410.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, c'est cela, Monsieur le Président.
24 Mme EDGERTON :
25 Q. Monsieur Music, vous avez déjà eu l'occasion hier de voir cette
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1 photographie, n'est-ce pas, la photo qui se trouve sur le rétroprojecteur
2 présentement ?
3 R. Oui.
4 Q. Pourriez-vous me dire ce que vous voyez présentement ?
5 R. C'est le centre sportif où j'ai été détenu moi-même, mes voisins, mes
6 amis et des membres de ma famille.
7 Q. Bien. Vous êtes en trains de nous montrer un endroit qui ressemble à
8 une entrée qui se trouve au point inférieur droit. Pourriez-vous nous
9 montrer l'endroit par lequel, ou plutôt l'endroit où vous avez été détenu,
10 dans quelle pièce avez-vous été détenu ?
11 R. Voilà, il y avait les deux sorties mais en fait, on avait fait de cette
12 sortie çi la sortie principale alors à l'intérieur c'était cela,
13 l'intérieur, comme vous le voyez, je ne vous ai jamais dit que lorsque je
14 vous ai fait une déclaration au mois de septembre, j'avais oublié de vous
15 dire que l'on a lancé des obus, ou des bombes, vous pouvez voir les traces
16 sur le toit. Nous avons été très souvent, plusieurs d'entre nous avons été
17 blessés. Vous pouvez voir ici que l'on a lancé des obus sur le toit mais je
18 n'avais pas déclaré ceci, en fait, car il y avait des vitres ici et nous
19 essayions de -- nous avons nettoyé ou essayé de nous débarrasser de ce
20 verre froid. Il pleuvait. Pour ce qui est des mentions à l'intérieur, vous
21 savez, c'est un centre sportif. On jouait souvent du basketball à cet
22 endroit-là. Il y avait peut-être des milliers de personnes, et l'on faisait
23 sortir des Serbes, des Serbes qui avaient plus d'argent, qui avaient
24 suffisamment d'argent pour payer afin de se faire sortir.
25 Q. Je vous arrête ici. Pour le compte rendu d'audience, le témoin est en
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1 train de nous montrer un endroit qui ressemble à un toit, en fait, nous
2 montrait le toit endommagé à droite, au coin supérieur droit.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Le témoin nous a
4 montré la partie supérieure droite de cette photo ainsi qu'il montrait
5 qu'il se trouvait au centre de la photo. Veuillez poursuivre.
6 Mme EDGERTON : [interprétation]
7 Q. Monsieur Music, je vous demanderais de laisser de côté cette photo. Je
8 vous demanderais de passer à quelque chose que vous avez dit dans votre
9 déclaration afin de pouvoir préciser certains points. Vous avez été
10 transféré à Sarajevo. Vous avez également dit que vous avez été emmené à
11 bord d'un autocar. Pourriez-vous nous dire si les chauffeurs de ces
12 autocars portaient des uniformes ? Est-ce que vous avez pu observer le
13 fait ?
14 R. Oui, oui. Ils portaient des uniformes de camouflage de l'armée
15 yougoslave, l'armée populaire yougoslave.
16 Q. Lorsque vous êtes arrivé à la prison de Kula, vous nous dites que les
17 personnes se faisaient montées à bord de ces autobus, et que l'on faisait
18 passer à tabac les prisonniers. Est-ce que vous avez vu des personnes en
19 uniforme ?
20 R. Oui. Ils portaient tous des uniformes de camouflages. Lorsque nous
21 sommes arrivés à Kula, à la porte de la prison de Kula, c'est là qu'on
22 était censé nous arrêter. C'est à ce moment-là qu'on nous a dit : voilà,
23 regardez la munition de balija. J'étais complètement derrière, alors que
24 mon beau-père était assis devant. Vous pouvez imaginer ce qu'ils nous ont
25 fait. Mon beau-père était né en 1926. Il avait participé à la Deuxième
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1 guerre mondiale. Ils nous brûlaient des cigarettes sur la peau. Ils nous
2 faisaient passer à tabac.
3 Q. Monsieur Music, vous êtes en train de vous remémorer des souvenirs
4 assez difficiles, et je suis vraiment désolée de devoir vous rappelez que
5 c'est une chose que vous nous avez déjà dit auparavant dans votre
6 déclaration, et ces déclarations, en fait, font partie du dossier de la
7 Chambre de première instance, et les Juges de la Chambre disposent de vos
8 déclarations.
9 Ce que je souhaiterais vous poser comme question maintenant et votre
10 permission, c'est lorsque vous parlez du moment où vous êtes arrivé au
11 baraques de la caserne de Slavica Vajner Cica, vous dites que vous avez été
12 passé à tabac, alors que vous quittiez l'autobus et que vous deviez vous
13 rendre dans le bâtiment pour remonter les escaliers. Il s'agissait d'une
14 haie d'honneur et on vous passait à tabac alors que vous passiez par cette
15 haie. Est-ce que vous savez si ces personnes portaient des uniformes ?
16 R. Oui, ils portaient des uniformes. Nous n'avions pas le droit de
17 regarder puisqu'il nous fallait mettre les mains derrière la nuque et
18 courir. Par la suite, ils sont entrés dans les dortoirs, et ils appelaient
19 nos noms, et ensuite, à chaque fois que nous voulions aller aux toilettes,
20 ils nous passaient à tabac avec toutes sortes d'objets. Je me souviens
21 qu'il y avait un voisin qui m'a demandé -- il m'a dit qu'il allait faire
22 ses besoins, et c'est à ce moment-là qu'on l'a frappé avec la crosse d'un
23 fusil. Je ne sais pas qui exactement l'a frappé. Je sais qu'il est tombé.
24 Mme LOUKAS : [interprétation] Je suis terriblement désolée d'interrompre, à
25 ce moment-ci, puisque nous sommes en train de procéder en vertu de
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1 l'Article 89(F). Je crois qu'il serait plutôt utile pour ce qui est des
2 références à venir, il faudrait probablement nous soumettre au compte rendu
3 d'audience de quel paragraphe l'on parle.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que Mme Edgerton opine du chef.
5 Mme EDGERTON : [interprétation] Certainement. Je peux certainement
6 mentionner le paragraphe. Le paragraphe présent a trait au paragraphe 6 de
7 la déclaration de 1993, et il s'agit également du paragraphe 62 de la
8 déclaration fournie aux enquêteurs du Tribunal. Je parle de la haie
9 d'honneur par laquelle le témoin a dû courir en quittant l'autobus, et en
10 montant les escaliers.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
12 Mme EDGERTON : [interprétation]
13 Q. Monsieur Music, vous souvenez-vous d'avoir entendu quiconque faisant
14 partie de cette haie d'honneur vous parler, alors que vous courriez ?
15 R. Ils nous injurieraient, ils injurieraient nos mères de balija, notre
16 état d'Alija. Il y avait énormément de provocations.
17 Q. Vous souvenez-vous si vous avez remarqué quelque chose de particulier ?
18 Est-ce que leurs accents vous ont frappé ? Avez-vous reconnu des accents ?
19 R. Je l'ai déjà dit dans ma déclaration. Quand on a appelé mon nom, selon
20 leur accent, j'ai pu reconnaître qu'il s'agissait des gens de Serbie et du
21 Monténégro puisque j'avais servi 18 mois à Nis. J'avais travaillé pendant
22 18 mois à Nis, et pendant que j'étais en Allemagne, j'y ai passé cinq ans.
23 J'avais également des collègues serbes, et ensuite, quand j'ai travaillé à
24 l'entreprise de Coca-Cola, c'est là également que j'avais des Serbes comme
25 collègues. Je me rendais aussi souvent au Monténégro ainsi qu'en Serbie.
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1 C'est comme cela que je peux reconnaître cet accent.
2 Q. Le témoin nous a maintenant parlé du paragraphe 7 de la déclaration de
3 1993, paragraphes 3 et 4 de la déclaration de 1994. Il s'agit également des
4 lignes 70 à 73 pour ce qui est de la déclaration qui a été donnée en 1998
5 au Tribunal. Il nous parle maintenant de 48 prisonniers dans la caserne de
6 Lukavica.
7 Maintenant, Monsieur Music, dans les paragraphes que je viens d'énumérer,
8 vous décrivez cette haie d'honneur, et vous dites que les membres de cette
9 haie d'honneur portaient des bérets rouges; est-ce exact ?
10 R. Oui.
11 Q. Est-ce que vous avez pu remarquer leurs uniformes ?
12 R. Ils portaient tous des uniformes de camouflage. Ils portaient des
13 bérets rouges. Selon leur façon de parler, selon leurs expressions, je peux
14 être sûr à 1 000 % qu'il s'agissait de Serbes. C'étaient les membres de
15 l'unité spéciale de Nis. C'est ce que j'ai déjà dit dans ma déclaration
16 préalable que j'ai fournie au Tribunal au mois de décembre de l'année
17 dernière.
18 Q. Maintenant, au paragraphe 7 de votre déclaration de 1993, et dans le
19 paragraphe 4 de votre déclaration de 1994, ainsi qu'au paragraphe 74 de
20 votre déclaration fournie au Tribunal, vous nous dites que lorsque vous
21 êtes arrivé dans la pièce, vous avez vu trois officiers assis derrière un
22 bureau. Je souhaiterais que vous nous informiez de quelle façon est-ce que
23 vous avez pu conclure qu'il s'agissait d'officiers.
24 R. Ils portaient des uniformes, leurs grades étaient visibles également.
25 Lorsque je suis entré, j'ai vu du sang. Je n'avais pas le droit de
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1 regarder. En fait, je n'avais pas le droit de lever la tête. Lorsque je
2 suis entré j'ai vu complètement à gauche mon frère, et il m'a fallu mettre
3 les mains derrière la nuque, et c'est ainsi que je n'avais pas le droit de
4 regarder à gauche ou à droite, mais je devais regarder devant moi. Il y
5 avait un homme de Serbie qui portait un couvre-chef de Lika, et j'ai pu
6 remarquer qu'il s'agissait d'un homme de Serbie. Il m'a dit : "Bre, d'où
7 viens-tu, toi ?" Il m'a dit : "Où sont tes fils, sur la ligne de combat ?
8 J'ai répondu : "Je n'ai pas de fils. Je n'ai que des filles." Alors, il m'a
9 injurié. Il a
10 dit : "Qu'est-ce c'est cette confusion. Il aurait fallu que l'homme qui a
11 des fils soit présent," ici alors qu'ils m'ont confus avec mon frère. Lui,
12 ils l'ont laissé à la maison, et c'est moi qu'on a emmené là. C'est ce
13 Monténégrin, il m'a interrogé, comme je l'ai dit, alors que le Serbe qui se
14 trouvait avec nous, qui -- je ne sais pas d'où il venait exactement. Il ne
15 m'a pas fait subir de mauvais traitements.
16 Q. Monsieur Music, très bien, merci. Nous pouvons voir ceci dans votre
17 déclaration préalable. Mais simplement, pour apporter quelques précisions -
18 -
19 R. Oui.
20 Q. J'ai remarqué, à la page 30, ligne 3 du compte rendu d'audience, M.
21 Music fait référence à sa déclaration qu'il a donnée au mois de décembre de
22 l'année dernière.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'il s'agit plutôt de son
24 témoignage dans l'affaire Milosevic.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, c'est justement cela. Merci, Monsieur
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1 le Président.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder.
3 Mme EDGERTON : [interprétation]
4 Q. Maintenant, Monsieur Music, je souhaiterais que l'on passe au
5 paragraphe 84 de votre déclaration fournie au Tribunal. C'est dans cette
6 déclaration que vous mentionnez avoir vu ou rencontré un homme que vous
7 identifiez comme étant Slobodan Avlijas. Pourriez-vous, je vous prie, nous
8 préciser où est-ce que vous avez vu M. Avlijas ?
9 R. J'ai vu M. Avlijas alors que je me trouvais à Kula. Il est venu me
10 rejoindre dans la pièce dans laquelle je me trouvais, étant donné que
11 Semsic était son collègue. C'est lui qui avait étudié le droit avec lui. Il
12 lui était venu lui rendre visite. C'est ainsi qu'il m'a [comme interprété]
13 donné des cigarettes, un paquet de cigarettes serbes et de l'argent. Il y
14 avait également de l'argent. C'est la première fois que j'ai vu, à ce
15 moment-là, lorsque j'étais dans un camp, ceci. Enfin, je l'ai vu, lui.
16 Ensuite, il l'a fait sortir pour qu'ils aillent prendre un café. C'est
17 ainsi que je l'ai vu là pour la première fois. Ensuite, je l'ai revu
18 lorsque j'ai été dans la commission d'échange après ma sortie du camp. J'ai
19 vu Masovic [phon]. Je lui ai posé une question à savoir où étaient les 47
20 personnes qui étaient disparues. Il a dit : "Avlijas, où sont ces hommes ?"
21 Il a dit : "Mais, je te l'aurais dit. Mais je n'étais même pas là. J'étais
22 à Bijeljina." Lorsque j'ai dit que ce n'était pas vrai, et je lui ai dit à
23 quel moment je l'avais vu, il a dit : "Oui, effectivement, c'est vrai."
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music. On vous a posé une
25 question fort simple. On voulait savoir où vous aviez vu
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1 M. Avlijas. Je comprends tout à fait que vous aimeriez nous faire un récit
2 précis et nous raconter toute l'histoire que vous avez vécue. Mais nous
3 avons vos déclarations écrites en notre possession, dans le dossier. Si
4 nous entendions -- nous écoutions toutes les histoires de toutes les
5 personnes -- des histoires vécues par tous les témoins, il nous faudrait
6 siéger encore dix à 20 ans. C'est la raison pour laquelle ce Tribunal a
7 statué que l'on permettrait aux parties de déposer des déclarations écrites.
8 En fait, nous avons tout ce que vous avez vécu, dans vos déclarations.
9 Mais Mme Edgerton pourrait peut-être vous poser quelques questions
10 précises. Elle voudra peut-être vous demander d'élucider certains points --
11 certains détails. C'est la raison pour laquelle elle vous posera quelques
12 questions. Je ne vous dis pas, toutefois, que votre récit ne nous est pas
13 intéressant. Mais je vous demanderais de vous concentrer de ne répondre
14 qu'aux questions qui vous sont posées par Mme Edgerton. Je vous invite donc
15 à être bien précis.
16 Veuillez poursuivre, Madame Edgerton.
17 Mme EDGERTON : [interprétation]
18 Q. Monsieur Music, vous étiez en mesure de reconnaître
19 M. Avlijas parce que vous le connaissiez personnellement, vous le
20 connaissiez d'avant la guerre, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Pourriez-vous me dire quelle était sa profession avant la guerre ?
23 R. Il était juge à la municipalité de Hadzici, et il habitait au même
24 étage que mon beau-père, dans le bâtiment de la Défense territoriale. Donc,
25 là vous -- sur la photo que vous m'avez montrée, c'est environ à 100 mètres
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1 de là.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, de nouveau, je vais vous
3 demander de répondre qu'à la question. La question était de savoir quelle
4 était la profession de M. Avlijas. Vous nous répondez qu'il était un juge
5 de la municipalité de Hadzici, puis ensuite, vous nous dites où il habitait.
6 Mais Mme Edgerton ne vous a demandé que de nous dire quelle était sa
7 profession. Je vous demanderais, de nouveau, de vous concentrer plus
8 précisément et de répondre plus brièvement aux questions qui vous sont
9 posées par Mme Edgerton.
10 Veuillez poursuivre, Madame Edgerton.
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Puisque le témoin a déjà répondu de façon
12 plus longue à ma question, il a presque anticipé ma question suivante.
13 C'était ce que je voulais lui demander en guise de deuxième question.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais puisque nous avons déjà
15 inscrit le témoin de s'en tenir qu'à vos questions, ce sera un peu
16 difficile de contredire ce que l'on vient de dire. Mais vous pouvez
17 poursuivre, Madame Edgerton.
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie. Ce que j'aimerais faire
19 maintenant, c'est de vous faire passer une conversation téléphonique.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Combien de temps est-ce que -- de
21 combien de temps est-ce que vous aurez besoin ?
22 Mme EDGERTON : [interprétation] En fait, je ne vais pas demander au témoin
23 de nous donner des commentaires contextuels concernant les conversations
24 interceptées. Mais selon nous, l'Accusation estime que ces conversations
25 peuvent corroborer certains incidents qui sont évoqués dans les
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1 déclarations données par le témoin préalablement et qui corroborent
2 également son témoignage. Donc, je souhaiterais que l'on passe cette
3 cassette audio à ce moment-là --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je suis sûr que vous allez poser
5 certaines questions au témoin.
6 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, effectivement.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Est-ce que vous ne croyez pas que
8 cela serait mieux de faire passer une conversation téléphonique maintenant
9 et, ensuite, de lui poser des questions, au lieu de faire passer les deux
10 conversations interceptées maintenant, et de ne poser les questions
11 qu'après la pause car cela ne serait pas frais dans son esprit ? Donc, je
12 propose que l'on fasse passer la conversation interceptée qui dure 12
13 minutes.
14 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
15 Mme EDGERTON : [interprétation] Je crois que, si l'on faisait passer
16 la conversation interceptée, cela ferait en sorte que nous déborderions
17 quelque peu, et nous pourrions pas prendre notre pause dans les 12 minutes
18 qui suivent.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. A ce moment-là, je
20 propose que l'on prenne une pause jusqu'à 10 heures 50 et, Monsieur Music,
21 nous allons vous poser quelques questions après la pause, qui va durer 25
22 minutes.
23 A moins que, Monsieur Hannis, je vois que vous êtes debout. Non, très
24 bien.
25 A ce moment-là, nous reprendrons nos travaux à 10 heures 50.
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1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 24.
2 --- L'audience est reprise à 10 heures 59.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, vous pouvez continuer.
4 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que,
5 maintenant, nous allons procéder à l'écoute des conversations interceptées,
6 la première et la deuxième, avec une brève pause entre les deux. La
7 première conversation interceptée que nous allons écouter, la conversation
8 interceptée -- Mme Javier va me corriger si je fais des erreurs. Il s'agit
9 de la conversation que nous avons déjà en partie écoutée devant cette
10 Chambre, et le CD a eu la cote P292. Autrement dit, toute cette
11 conversation interceptée a été admise au dossier en tant que pièce à
12 conviction après que nous n'avons écouté qu'une partie. Je propose qu'on
13 écoute cette conversation interception en intégralité, en utilisant la même
14 cote, bien sûr. Je vais prier qu'on montre au témoin un exemplaire du
15 compte rendu de cette conversation interceptée pour qu'il puisse suivre.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. S'il n'y a pas d'objection à
17 soulever, nous pouvons le faire. Nous allons décider si une nouvelle cote
18 sera accordée au compte rendu de cette conversation interceptée ou c'était
19 une conversation interceptée et est suffisamment présent dans le document
20 portant cette cote 209.
21 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est 292, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est exact. Je m'excuse. Mais nous
23 allons régler cela plus tard. Veuillez procéder.
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien.
25 Q. Monsieur Music, hier, avec moi et M. Hannis, vous écoutez deux
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1 conversations interceptées. Nous allons procéder de nouveau à l'écoute de
2 ces deux conversations interceptées, Je vous prie de suivre le compte rendu
3 de ces deux conversations interceptées. La première conversation
4 interceptée est datée du 26 juin 1992 entre Momcilo Krajisnik et Momcilo
5 Mandic.
6 [Diffusion de cassette audio]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, nous n'entendons rien,
8 et nous ne recevons pas non plus la traduction.
9 Mme EDGERTON : [interprétation] Je comprends.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, pouvez-vous procéder à
11 l'écoute de la conversation interceptée de nouveau parce que les
12 interprètes n'entendent pas l'original en B/C/S.
13 [Diffusion de cassette audio]
14 Mme EDGERTON : [interprétation] Je peux constater que les interprètes ne
15 reçoivent pas de son.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je pense qu'au début, j'entends la
17 même chose que vous. Mais si j'ai bien compris, il n'y a pas de début
18 d'interprétation.
19 Mme EDGERTON : [interprétation] Le technicien va venir ici dans le
20 prétoire, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous savons où est le
22 problème, c'est le premier pas vers la solution du problème. Il faut que
23 nous sachions où est le problème.
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai aucune idée où est le problème,
25 Monsieur le Président, mais il serait adéquat qu'on écoute maintenant cette
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1 conversation interceptée parce que cela suit l'ordre chronologique. Mais
2 nous pouvons peut-être procéder autrement, c'est-à-dire, soulever d'autres
3 questions et revenir à ces conversations interceptées.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, nous avons des problèmes
5 techniques face à ces conversations interceptées. Mme Edgerton abordera un
6 autre sujet concernant votre témoignage, et nous allons revenir à ces
7 conversations interceptées un peu plus tard.
8 Vous pouvez procéder, Madame Edgerton.
9 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui. Si le technicien n'arrive pas à
10 résoudre le problème, nous allons essayer de travailler selon les comptes
11 rendus, mais nous allons voir si le problème va être résolu.
12 Q. Monsieur Music, je voudrais maintenant parler de l'année 1992 et, plus
13 précisément, je voudrais parler d'un événement qui est arrivé au poste de
14 police à Ilidza, et cela commence au paragraphe 93 de la déclaration faite
15 au Tribunal international. D'abord, je voudrais résoudre certains problèmes
16 concernant de nouvelles informations que vous avez fournies au cours de ce
17 weekend.
18 Monsieur Music, maintenant, dans vos déclarations, vous dites qu'avec un
19 petit nombre de prisonniers, vous avez été détenu dans une cellule au poste
20 de police à Ilidza, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. De cette cellule, je comprends que de cette cellule --
23 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, par rapport à cela, je
24 dois dire qu'il ne faut pas continuer à poser des questions suggestives,
25 directes, compte tenu de la nature des informations qu'il faut éclairer.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, vous devez faire de
2 votre mieux; sinon, Mme Loukas va me rappeler de cela tout le temps.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien.
4 Q. Monsieur Music, pouvez-vous nous dire où se trouvait cette cellule ?
5 R. La cellule au poste de police à Ilidza se trouvait au milieu de ce
6 bâtiment où on montait à l'étage au bureau du chef de police. Si nous
7 montions à l'étage, si c'était ouvert, il y avait une grille métallique, de
8 fer, autrefois, il y avait des toilettes à cet emplacement.
9 Q. Je m'excuse, Monsieur Music, qu'est-ce que cela veut dire, ces
10 dimensions, 25 x 20 ?
11 R. C'était un trou parce qu'il n'y avait pas de fenêtre, c'est pour
12 pouvoir aérer la pièce; sinon, nous aurions été étouffés. Auparavant, il y
13 avait des toilettes à cet emplacement, ensuite, il y avait une prison et
14 nous étions entre 10 et 12 dans cette pièce parfois.
15 Q. S'il vous plaît, éclaircissez cela. Il y avait une cellule, une porte
16 avec un trou, cela donnait où ?
17 R. Cela donnait à toutes les sorties du poste de police et, à l'étage de
18 cet étage, je pouvais voir qui entrait, qui sortait, et j'ai pu voir
19 plusieurs personnes que je connaissais qui étaient de Hadzici mais nous ne
20 pouvions pas les appeler parce qu'ils cachaient le fait, en fait que
21 l'emplacement se trouvait un camp.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, Monsieur Music, la
23 question qui vous a été posée était : "Où donnait cette porte ?" Vous avez
24 répondu à cette question et avez continué à parler des choses qui
25 pourraient être pertinentes, mais, indépendamment de ce fait, vous devez
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1 attendre que la question suivante de Mme Edgerton vous soit posée.
2 Madame Edgerton, vous pouvez continuer.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] :
4 Q. À propos de ce trou dans la porte au dimension 25 x 20, vous essayez de
5 montrer la taille de ce trou en utilisant vos mains. Est-ce que vous
6 essayez de montrer à la Chambre quelle était la taille de ce trou ?
7 R. Oui, c'est exact.
8 Q. Vous avez dit que cette porte donnait sur l'escalier, où se trouvaient
9 l'entrée et la sortie menant vers tous les offices du poste police, n'est-
10 ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Juste un instant, Monsieur le Président. Concernant cela, c'est-à-dire,
13 concernant la cellule et sur quoi elle donnait, pourriez-vous nous dire
14 approximativement quel jour vous avez vu l'Accusé au poste de police à
15 Ilidza.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, je n'ai jamais entendu
17 une question aussi directive que la vôtre.
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce vous me
19 permettez que je lui pose la question suivante ? Est-ce qu'il n'a jamais vu
20 l'Accusé pendant qu'il était détenu à Ilidza ?
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En particulier, concernant cette
22 surprise, il serait peut-être plusieurs adéquat que je fasse cela moi-même.
23 Monsieur Music, quand vous avez dit qu'on pouvait voir à travers la porte,
24 est-ce que vous avez les gens -- est-ce que vous avez reconnu des personnes
25 qui entraient ou sortaient ? Est-ce que vous n'avez jamais reconnu qui que
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1 ce soit dans ces bureaux ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui avez-vous reconnu ? D'abord, dites-
4 nous quel était le nombre de personnes que vous avez reconnues qui
5 entraient ou sortaient ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je connaissais beaucoup de personnes de
7 Hadzici, ils venaient au poste de police, au chef Tomo Kovac, qui était, à
8 l'époque, chef du poste de police. A la mi-août, j'ai vu Momcilo Krajisnik
9 venir à Ilidza parce qu'à l'époque, il devait avoir une sorte de change.
10 Glavas a remplacé Kovac qui était au poste de police à partir du début des
11 événements, à partir du début de la guerre à Hadzici et c'est, comme cela,
12 que j'ai eu l'occasion, parce que je m'occupais des ordures. Si je me
13 trouvais à la proximité de la poste ouverte où se trouvait la police,
14 j'étais en train de nettoyer et j'ai pu les entendre dire. M. Momcilo
15 Krajisnik et Tomo Kovac devraient devenir -- devraient être nommé ministre
16 de l'Intérieur.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre ici.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez entendu les genres
20 dire que M. Krajisnik était venu, ou est-ce que vous l'avez vu M.
21 Krajisnik ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu la voiture venir, mais je me suis
23 caché parce qu'il était escorté. J'étais à coté de la fenêtre où se
24 trouvait la police parce que la police m'appelait toujours à faire quelque
25 chose.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre encore
2 une autre fois. La question était : "Est-ce que vous avez entendu des gens
3 parler -- les gens dire que M. Krajisnik était venu rendre visite au poste
4 de police, ou est-ce que vous avez vu en personne M. Krajisnik ?"
5 LE TÉMOIN : [interprétation] À travers leurs conversations, j'ai pu
6 entendre qu'il était venu.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non et non. Ma question était :
8 "Est-ce que vous les avez entendu parler de sa visite, ou est-ce vous
9 l'avez vu, en personne" ? Peut-être fallait-il se concentrer sur cette
10 partie de question : est-ce que vous avez vu de vos propres yeux M.
11 Krajisnik ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, de l'autre côté, j'entrais et je sortais;
13 je n'entrais pas et je ne sortais pas par la porte principale. C'était une
14 autre porte à côté et c'est, à moment-là, où je l'ai reconnu.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, est-ce que vous étiez dans la
16 cellule -- dans votre cellule ou non lorsque vous dites que vous avez vu M.
17 Krajisnik ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été fait retourné dans la cellule pour
19 que je ne vois pas cela, mais ils parlaient de cela et je ne savais ce que
20 ces messieurs faisaient parce que j'étais dans le camp et je n'étais pas au
21 courant de tous ces événements.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela veut dire que vous
23 l'avez vu à travers cette ouverture dans la porte ou à travers la fenêtre,
24 parce que la porte n'était pas tout à fait fermée ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] La porte était toujours fermée, toujours
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1 fermée à clé et je l'ai vu à travers cette ouverture.
2 Q. Mais vous avez dit que la porte était entrouverte.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette petite ouverture était, cette fenêtre
4 était entrouverte; sinon, nous aurions été étouffés.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] est-ce que cela veut dire qu'il y avait
6 une sorte de persienne sur cette ouverture au-dessus de cette fenêtre pour
7 pouvoir la fermer ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je vous ai compris lorsque
10 vous avez dit que cette fenêtre était presque fermée mais pas tout à fait
11 fermée ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas tout à fait fermée parce qu'il nous
13 fallait de l'air et il y avait des toilettes là-bas et j'étais complètement
14 trempé et je ne pouvais être constamment couché sur le sol.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Combien de personnes y avait-il dans
16 votre cellule au moment de cet événement ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait moi, ensuite, j'étais seul parce
18 que mon collègue chauffeur était parti et il prenait tous des Musulmans
19 avec des Croates, tout ce qui avait une valeur. Nous conduisions cela dans
20 un entrepôt qui se trouvait à Blazuj.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous nous avez dit que vous aviez
22 vu M. Krajisnik. Alors combien de temps pouviez-vous le regarder ? Est-ce
23 qu'il était en train de passer à côté de vous ? Est-ce qu'il se tenait
24 debout ? Est-ce qu'il a --
25 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était juste je l'ai vu au moment où il
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1 passait.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Dans quelle direction il se
3 dirigeait ? Est-ce qu'il partait vers la droite ou vers la gauche ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'il entrait, je vous ai dit, j'étais en
5 train de nettoyer la cour de la [imperceptible], et cetera.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, je ne vous ai pas
7 demandé si M. Krajisnik savait, mais plutôt dans quelle direction il se
8 dirigeait au moment où vous l'avez vu.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Vers la sortie.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vers la sortie. Est-ce qu'il venait de
11 votre gauche ou de votre droite ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais -- il était 1 mètre devant moi, devant
13 l'endroit où je me trouvais. Il entrait par la porte, et par rapport à
14 cette cellule, l'escalier est à une distance de moins de deux mètres.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A quelle hauteur se trouvait,
16 approximativement, cette ouverture dans la porte ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette ouverture se trouvait à la hauteur de la
18 tête.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Approximativement donc au milieu de la
20 porte, si tient en compte la hauteur moyenne de la porte.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'était plus haut, un peu plus haut.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous dire à quelle hauteur
23 se trouvait cette ouverture ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Par exemple, à une occasion, une personne
25 s'est agenouillée, et l'autre a commencé à lui pisser dessus. Ensuite, ils
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1 nous ont versé de l'acide sur nous. Ils nous ont fermé la porte, à cette
2 occasion-là. Là, par un concours de circonstances, un Serbe qui était un
3 Serbe honnête, nous a ouvert la porte. Nous avons commencé à tousser, à
4 pleurer. Au niveau de menton, c'était cela, la hauteur de cette ouverture.
5 Parce que je pouvais voir, à chaque fois qu'ils allaient manger, je pouvais
6 savoir qui entrait et qui sortait. Parce que je ne les reconnaissais pas.
7 Même si la porte était fermée, je les priais de faire n'importe quel
8 besogne, parce que je ne voulais pas être renfermé. Tous ceux qui ont cela
9 -- à cela, ils le savent.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous n'avez pas répondu à ma
11 question, à savoir s'il venait de votre gauche ou de votre droite.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais là. Il descendait l'escalier, et c'est
13 ainsi que je pouvais voir sa tête, et cetera. Je ne savais pas pourquoi il
14 venait, jusqu'au moment où --
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, maintenant, vous m'avez
16 donné beaucoup d'information, mais vous n'avez toujours pas répondu à ma
17 question à savoir s'il venait de votre gauche ou de votre droite, en se
18 dirigeant vers la sortie.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] De ma droite. Il descendait l'escalier devant
20 moi. Je l'ai vu, mais je ne savais pas, à l'époque, si je survivrais;
21 sinon, j'aurais prêté plus attention à tout cela pour que je puisse vous
22 expliquer maintenant.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Madame Edgerton.
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
25 Q. Maintenant, je vais aborder un autre sujet. Je m'excuse --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne veux pas dire que ce sujet a été
2 épuisé par mes questions. Je voudrais être tout à fait clair. Je n'ai pas
3 vu d'autres informations additionnelles. Je n'ai pas lu cela. Même, en ce
4 moment, je ne sais pas si cela existe. Mes questions ont été exclusivement
5 fondées sur mes raisons -- ce n'était pas pré formulé -- préconçu. Vous
6 pouvez poser d'autres questions à ce sujet.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
8 Q. Monsieur Music, au paragraphe 10 de votre déclaration de 1993, et au
9 paragraphe 103 de votre déclaration faite au Tribunal, vous parlez du
10 retour au centre des sports à Hadzici, où vous avez pu constater qu'il y
11 avait eu approximativement 500 détenus. Dites-nous si, dans ce groupe de
12 500 personnes, il y avait des membres de votre famille plus proche.
13 R. Oui. Il y avait mon feu père qui était décédé tout de suite après avoir
14 sorti du camp. Ensuite, ma belle soeur, mon frère, le fils de mon frère,
15 qui est handicapé mental. Ensuite, son deuxième frère, qui est né en 1981.
16 Ensuite, ma femme, Zumreta Music. Ensuite, mon cousin, Hamid Music. Son
17 épouse, Hasnija Music.
18 Q. De la conversation avec d'autres détenus, est-ce que vous avez peut-
19 être appris d'où ils venaient ?
20 R. Tous étaient habitants de Hadzici, de Kucica [phon], Gadici [phon],
21 Dupovici [phon], Binocivo [phon], Donji Hadzici, et cetera. C'est ainsi que
22 je connaissais presque tous les gens qui étaient là-bas.
23 Q. Je vous remercie. Maintenant, nous parlons du paragraphe 11 de votre
24 déclaration de 1993 et les paragraphes 108 à 112 de votre déclaration faite
25 au Tribunal. Vous parlez de la situation à Svrake et de votre transfert à
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1 Svrake.
2 Maintenant, je voudrais vous montrer encore une photo, qui porte le
3 numéro 03616938, une pièce à conviction de cette affaire, qui porte la cote
4 P379, qui a été précédemment montrée. J'ai des copies de cette photo.
5 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience, peut-être
6 que -- je vous prie qu'une copie de cette photo soit montrée au témoin.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, je pense que le témoin voudrait
9 montrer quelque chose sur le rétroprojecteur. Il serait bien que M.
10 l'Huissier déplace un peu la photo pour que nous puissions voir toute la
11 photo sur le rétroprojecteur.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur l'Huissier, pourriez-vous
13 déplacer un peu la photo pour que nous puissions voir toute la photo, un
14 peu plus haut ?
15 Mme EDGERTON : [interprétation]
16 Q. Monsieur Music, est-ce que vous avez eu l'occasion de voir cette photo
17 hier ?
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce que montre cette photo ?
20 R. C'est à Svarke, la maison de Planja. C'est le camp Duja [phon].
21 L'entrée était là-bas. Il y avait aussi un endroit pour faire fumer la
22 viande.
23 Q. Le témoin montre l'entrée à la partie gauche de la photo.
24 R. J'étais à l'étage, en fait, ici.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Le témoin indique le deuxième étage et,
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1 plus tard, la première étage ?
2 R. Oui, c'était le premier étage.
3 Q. Est-ce que le témoin montre l'une des fenêtres au deuxième étage,
4 n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Est-ce que cette photo pour laquelle vous dites qu'il s'agit de la
7 maison de Planja a le même aspect qu'elle avait en 1992 ?
8 R. Oui, c'est la même maison.
9 Q. Au paragraphe 11 de votre déclaration de 1993, vous dites que vous avez
10 trouvé là-bas 102 détenus quand vous êtes arrivé. En parlant avec ces gens,
11 est-ce que vous avez peut-être appris d'où ils venaient ?
12 Vous pouvez retirer cette photo.
13 R. J'ai pu apprendre qu'ils venaient de Semizovac Svrake, Ahatovici, Bioca,
14 qui se trouve, je pense, qui appartient à la municipalité de Visoko parce
15 que là-bas, j'ai des cousins. J'ai trouvé deux genres du fils de la tante
16 de mon père. Je suis monté à l'étage, eux, ils étaient à l'escalier pendant
17 toute la nuit. De là, ils étaient emmenés pour former le bouclier humain à
18 Zuc. Ensuite, ils ont procédé à creuser --
19 Q. Monsieur Music, --
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît, Monsieur
21 le Président.
22 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
23 Mme EDGERTON : [interprétation] Je voudrais qu'on montre au témoin un autre
24 document. Je pense que Mme Javier est partie dans la cabine technique, et
25 peut-être que M. l'Huissier pourrait nous aider.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pourriez-vous aider
2 Mme Javier ?
3 Mme EDGERTON : [interprétation] Il s'agit d'une série de documents. En fait,
4 il s'agit du recueil de deux groupes portant les numéros ERN 00577933
5 jusqu'à 00577938, avec une page qui porte un numéro ERN différent, c'est
6 02100578. Tous ces documents datent du 22 octobre 1992. Maintenant, je prie
7 qu'on donne une cote à la pièce à conviction.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience, aidez-
9 nous.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document portera la cote P412, 411, je
11 m'excuse.
12 Mme EDGERTON : [interprétation]
13 Q. Monsieur Music, dans le paragraphe 11 de votre déclaration de 1993,
14 vous avez constaté que vous aviez été transféré à Svrake, le 23 octobre
15 1992; est-ce vrai ?
16 R. Oui.
17 Q. Monsieur Music, avez-vous eu l'occasion de voir ces deux documents
18 hier ?
19 R. Oui.
20 Q. Monsieur Music, vous pouvez lire les caractères cyrilliques ?
21 R. Oui. Je préfère les lettres latins, mais je peux lire cyrillique aussi.
22 Q. En regardant les documents, avez-vous pu en comprendre le contenu ?
23 R. Oui.
24 Q. Après avoir consulté ces documents, Monsieur Music, pouvez-vous dire à
25 la Chambre quels sont ces documents ?
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1 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, à ce propos. Le
2 document est éloquent. Il parle de lui-même. Il est complètement évident.
3 Comme le témoin n'a pas mentionné ces documents avant de s'être entretenu
4 avec l'Accusation, cela n'a pas une grande valeur.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela dépend des questions qui s'en
6 suivront. Madame Edgerton, je pense que l'explication en présence du témoin
7 n'est pas très sage.
8 Mais avant, Monsieur Music, est-ce que vous comprenez l'anglais ? Est-ce
9 que vous pouvez le lire ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux comprendre que vous
12 ne comprenez pas l'anglais et que vous ne pouvez pas suivre une
13 conversation en anglais, de lire un texte en anglais ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, aidez-nous, s'il
16 vous plaît, et demandez au témoin d'enlever ses écouteurs.
17 Madame Edgerton, quelles sont ces questions que vous poseriez et par
18 lesquelles le témoin pourrait éclaircir ces documents ?
19 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pourrais proposer les détails. C'est un
20 document daté du 22 octobre 1992. Il s'agit de plusieurs documents portant
21 la même date. Le premier de ce document est une lettre du ministre Momcilo
22 Mandic adressée au président de la présidence de la Republika Srpska, au
23 président de la RS, le président de l'assemblée, le premier ministre. La
24 deuxième lettre est le rapport sur la situation dans les lieux de détention
25 des prisonniers de guerre, et porte la même date.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends. Mais qu'est-ce que le
2 témoin peut ajouter encore ? A part son témoignage, qu'il avait été détenu
3 à l'endroit XY, et que cet endroit réapparaît dans cette lettre. Même sans
4 poser ces questions au témoin, la Chambre est capable de tirer des
5 conclusions de la liaison entre le témoignage et ces lettres. Mais qu'est-
6 ce que le témoin peut apporter ?
7 Mme EDGERTON : [interprétation] Le témoin confirmera qu'il avait été un des
8 prisonniers de guerre installé dans le centre sportif de Hadzici, ce que
9 l'on peut lire au paragraphe 10 de ce rapport. S'agissant de ce dernier
10 document, c'est une lettre adressée aux municipalités serbes de Hadzici et
11 Ilidza, signée par Momcilo Mandic, en disant que ces détenus devaient être
12 transférés à Svrake. Il peut confirmer qu'immédiatement après cette date,
13 ce transfert a eu lieu.
14 Mme LOUKAS : [interprétation] Juste un propos. Je dois dire qu'à propos du
15 document que nous avons reçu, et je confirme avec Mme Cmeric, il s'agit de
16 deux documents assortis de leurs traductions, mais le troisième.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allons voir. Cet autre document qui nous
18 a été donné, en ce moment, et non pas avec les documents antérieurs. Il
19 faut le remettre à la Défense.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Exactement.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est le document du 22
22 octobre 1992 ?
23 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vois que oui.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, vous auriez dû le
25 recevoir maintenant parce qu'il vient d'être distribué et la traduction
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1 anglaise porte la cote 0578 comme dernier quatre chiffres.
2 Mme LOUKAS : [interprétation] Je crois que nous allons le recevoir
3 maintenant.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous vous accorderons du temps pour le
5 consulter.
6 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, à la lumière de la
8 réponse qui nous a été fournie par Mme Edgerton, auriez-vous d'autres
9 questions à présenter ?
10 Mme LOUKAS : [interprétation] A propos de ce dernier document.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
12 Mme LOUKAS : [interprétation] Une rectification concernant l'anglais.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
14 Mme LOUKAS : [interprétation] Le dernier document en B/C/S parle
15 d'une pièce et, en anglais, c'est marqué "argument" comme argument alors
16 que "pièce" devrait dire un "attachment" en anglais. Il s'agit donc d'une
17 erreur de traduction.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois. C'est marqué le chiffre 4,
19 48. En anglais, la traduction, c'est 48.
20 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est là le problème. C'est la faute de la
21 traduction parce que la pièce jointe a été traduite, en anglais, comme
22 argument.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, on voit le numéro 623,
24 et on croit qu'il s'agit d'une pièce jointe; jointe à quoi ?
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Il me semble, Monsieur le Président,
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13 pagination anglaise et la pagination française.
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1 effectivement. J'ai la traduction anglaise de ce même document, sans les
2 annotations faites à la main, et il porte des numéros ERN différents.
3 Aussi, ne suis-je pas sûr de pouvoir vous aider, sauf que je peux dire que
4 nous avons deux copies séparées, dans notre système, du même document. Une
5 copie est manuscrite de notations, et l'autre, non.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, si possible, la traduction
7 anglaise devrait être la version originale. Vous avez donc travaillé sur
8 deux exemplaires différents.
9 Madame Loukas, est-ce que nous pouvons agir de sorte que la Chambre
10 attendra une réponse à cette question de Mme Edgerton, qui doit trouver le
11 document qui commence par "Republika Srpska 523", et où nous avons
12 différents numéros ERN ? Madame Edgerton, est-ce que vous pouvez me donner,
13 pour un instant, l'original sur lequel vous travaillez, et là, nous pouvons
14 constater s'il est plus ou moins identique.
15 Monsieur l'Huissier, aidez-nous, s'il vous plaît.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que nous
17 avons tous le même original, mais que j'ai la traduction de l'autre
18 document. C'est ce qui me semble aussi.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre traduction porte un numéro ERN
20 différent et votre traduction ne correspond pas à l'original.
21 Mme EDGERTON : [interprétation] Non. Nous ne tarderons pas de corriger ceci
22 dès que possible. Il semble que ce soit deux exemplaires d'un même document,
23 qui ont été reçus de différents individus de localités différentes. Mais je
24 m'occuperai de cela pour que ce soit résolu.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur l'Huissier, rendez
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1 cela à Mme Edgerton.
2 Mme LOUKAS : [interprétation] Maintenant, que nous avons résolu le problème
3 de l'erreur de traduction, nous voyons de pouvoir attendre une solution
4 concernant les documents.
5 En effet, la question qui m'était posée par le Président, si j'avais
6 quelque chose à ajouter à propos de la réponse de Mme Edgerton concernant
7 les documents à produire au témoin. Je propose, Monsieur le Président, que
8 la position présentée par l'Accusation ne répond aucunement à l'argument
9 que j'avais présenté moi-même parce que le document parle pour lui-même. Si
10 l'on doit retirer des conclusions, la Chambre peut le faire dans --
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
12 Mme LOUKAS : [interprétation] -- par une procédure régulière. Il est clair
13 que le témoin ne peut apporter rien de nouveau à propos de ces documents.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'abord, je parle des informations qui
15 nous ont été fournies par Mme Edgerton, certes, je ne pensais pas que le
16 témoin puisse nous parler du contenu des rapports, surtout, il n'y a pas
17 besoin qu'il nous dise quoi que ce soit.
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Non.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il est dit, dans le rapport, qu'un
20 centre de détention s'est trouvé à Hadzici, et que, si le témoin en a
21 témoigné lui-même, en confirmant que c'était un centre sportif, et si nous
22 en avons vu la photo, si l'on pouvait même en conclure qu'il s'agissait
23 probablement d'un même bâtiment, nous n'avons même pas besoin du témoin qui
24 nous permettrait de tirer la même conclusion.
25 D'autre part, Madame Loukas, nous avons toujours le problème pour
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1 savoir comment verser ce document dans le dossier. Est-ce que la Défense,
2 d'une quelconque façon, aurait une objection sur le versement de ce
3 document ?
4 Mme LOUKAS : [interprétation] Mon objection se base sur le fait qu'il n'y a
5 pas lieu que ce document soit traité moyennant ce témoin. De même, il est
6 clair, Monsieur le Président, il s'agit là d'un document qui est scié et
7 qui porte même l'empreint d'un cachet. De toute évidence, il s'agit d'un
8 document qu'on devrait traiter moyennant un autre témoin à un autre moment,
9 vu la personne qui l'a signé, il est un homme qui viendra encore. En tout
10 cas, ce document ne devrait pas être traité moyennant ce témoin.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais si vous dites que nous pouvons
12 tirer nos propres conclusions, il faut que ce document soit versé au
13 dossier. Je voudrais savoir si -- je n'ai pas dit qu'il aurait fallu
14 adopter -- accepter ce document.
15 Mais ce document est de nature quelque peu différente.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, la Chambre a fini par
18 conclure que le témoin peut témoigner de ce qu'il a vécu dans ses -- il
19 s'agit de sa détention à Hadzici, et la détention ensuite, une fois qu'il a
20 été transféré. Mais, effectivement, il ne peut apporter rien de nouveau à
21 ces documents, et ce n'est pas une façon appropriée de faire intervenir ces
22 documents par ce témoin. Je reste ouvert la question de savoir si vous
23 allez traiter ce document par un autre témoin ou par une autre information,
24 après avoir, peut-être, donné cette information à la Défense. L'on verra
25 encore s'il faut encore appeler un autre témoin pour parler de la source de
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1 ce document, mais ce témoin n'est pas la personne par laquelle ces
2 documents doivent être versés au dossier. Je ne dis donc rien sur la
3 pertinence de ces documents, ni s'il faut les verser au dossier ou non. Ces
4 vous, en son nom, qui demandez au témoin quelque chose qui est parfaitement
5 évident. Si vous en connaissez le témoignage et le document, vous devez
6 savoir que ce témoin n'est pas en position de pouvoir nous enrichir à ces
7 propos. En ce moment, ce n'est pas le rejet de ce document, mais une
8 décision de non adoption par ce témoin. Vous pouvez poursuivre, s'il vous
9 plaît.
10 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, j'ai compris, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Aussi, je pense que nous devrions
12 annuler les cotes attribuées à ce document -- plutôt les numéros; donc, le
13 P411 sera le numéro qui sera attribué à un autre document suivant. Madame
14 Edgerton, cette photo a déjà figurée dans le dossier donc nous ne devons
15 plus nous en occuper.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
18 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président --
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
20 Mme LOUKAS : [interprétation] -- avant que Mme Edgerton poursuive,
21 j'aimerais indiquer pour le compte rendu d'audience que, certes, nous ne
22 sommes pas obligés de nous en occuper, en ce moment, mais qu'il existent
23 des erreurs importantes au niveau de la traduction des documents que nous
24 venons d'évoquer.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, nous demandons à Mme
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1 Edgerton de faire superviser les traductions.
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme Loukas, vous pourriez peut-être
4 aider Mme Edgerton pour lui indiquer les points problématiques.
5 Mme EDGERTON : [interprétation] Si on pouvait dire au témoin de reprendre
6 ses écouteurs.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, je vous remercie de
8 votre patience.
9 Madame Edgerton, vous pouvez poursuivre.
10 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, cela nous mène au
11 deux derniers dossiers. Il s'agissait des communications interceptées. Les
12 techniciens avaient promis de s'acquitter de leurs tâches, mais M. Harris
13 nous a dit qu'il avait besoin d'une pause de cinq minutes.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous proposez une pause, je l'accorde
15 une pause de cinq minutes. Je vous prie que tous les participants soient
16 près d'ici
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Levez-vous, s'il vous plaît. Une pause de
18 cinq minutes.
19 --- La pause est prise à 11 heures 48.
20 --- La pause est terminée à 12 heures 06.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, est-ce que les
22 problèmes techniques ont été résolus ?
23 Mme EDGERTON : [interprétation] [hors micro]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'entends pas. Si vous branchez votre
25 micro, nous allons résoudre le premier problème technique.
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1 Mme EDGERTON : [interprétation] Mme Javier a testé -- maintenant, nous
2 pourrions entendre la communication interceptée.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pourrions nous servir, donc, si les
4 choses vont trop vite, les interprètes traduiront à base de la traduction
5 écrite et les autres veilleront à ce qu'il n'y aie pas d'erreur, c'est une
6 procédure que nous avons déjà utilisée, je vous prie de poursuivre.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] La première communication interceptée,
8 Monsieur Music, a été celle du 26 juin 1992 entre Momcilo Krajisnik et
9 Momcilo Mandic.
10 Q. Vous avez écouté cette conversation interceptée, vous en avez la
11 transcript devant vous. Est-il vrai ?
12 R. Oui.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Technicien, nous
14 pouvons commencer.
15 [Diffusion de cassette audio]
16 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
17 "Miljana : Allo, Monsieur le Ministre, comment allez-vous ?
18 Momcilo MANDIC : Ça va, très bien.
19 Miljana : Mandic, si c'est toi, comme tout le monde, Dieu nous en
20 préserve.
21 Momcilo KRAJISNIK : Allo ?
22 Momcilo MANDIC : Allo, la communication a été interrompue.
23 Momcilo KRAJISNIK : Mandic ?
24 Momcilo MANDIC : Allo, oui.
25 Momcilo KRAJISNIK : Quelque chose nous a interrompus, c'était chez
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1 vous.
2 Momcilo MANDIC : Comment ça va, dis-moi. Je ne suis pas au courant
3 mais là-bas, mais ils ne sont pas rentrés.
4 Momcilo KRAJISNIK: Il y a deux choses, j'ai demandé des choses pour
5 voir [imperceptible] et je vois que -- je me demande ce que c'est, donc on
6 n'a pas respecté ce que nous avions convenu.
7 Momcilo MANDIC : Oui.
8 Momcilo KRAJISNIK : Aujourd'hui c'est encore une occasion pour
9 terminer.
10 Momcilo MANDIC : Oui.
11 Momcilo KRAJISNIK : Oui, c'est tout simplement, tu n'as pas relâché
12 celui dont je t'avais parlé.
13 Momcilo MANDIC : Oui.
14 Momcilo KRAJISNIK : Oui ?
15 Momcilo MANDIC : Oui et il est parti il y a une heure pour Vrbanja.
16 Momcilo KRAJISNIK : Bon, très bien.
17 Momcilo MANDIC : C'est celui-ci ?
18 Momcilo KRAJISNIK : Oui, c'est lui.
19 Momcilo MANDIC : Et bien, il est parti.
20 Momcilo KRAJISNIK : Je demande autre chose. S'il vous plaît, dis-moi
21 ce que tu sais de Savic Milos, parce c'est un frère à moi, c'est vraiment -
22 -
23 Momcilo MANDIC : Voilà, j'ai établi une liste, Président. Le premier
24 échange, quand il y aura un premier échange, tout sera fait.
25 Momcilo KRAJISNIK : Regarde en bas, est-ce que tu peux contacter
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1 quelqu'un ? Est-ce que tu as un tuyau ?
2 Momcilo MANDIC : Il y a un Vukovic, le jeune Serbe qui nous critique
3 parce que nous avons ici 400 détenus, vous savez.
4 Momcilo KRAJISNIK : Qui est-ce qui critique ?
5 Momcilo MANDIC : J'en ai 400
6 Momcilo KRAJISNIK : Mais, qui critique ?
7 Momcilo MANDIC : Mais Vukovic, Filip, le jeune Serbe, il nous dit :
8 'Vous êtes en train des épurer,' mais ils sont pour, eux --
9 Momcilo KRAJISNIK : Filip Vukovic ?
10 Momcilo MANDIC : Oui
11 Momcilo KRAJISNIK : C'est le cadre communiste là ?
12 Momcilo MANDIC : Oui, oui.
13 Momcilo KRAJISNIK : Qu'est-ce qu'il veut ?
14 Momcilo MANDIC : Il est Président de cette commission pour les
15 Echanges.
16 Momcilo KRAJISNIK : De la leur ?
17 Momcilo MANDIC : Oui
18 Momcilo KRAJISNIK : Qu'est-ce qu'il veut ?
19 Momcilo MANDIC : Des prisonniers, non, ils sont des anciens pour eux.
20 Ils s'intéressent à peu de gens, ils ne s'intéressent uniquement qu'à la
21 munition et la viande. Maintenant, ces hommes et ces femmes que nous sommes
22 en train de relâcher à Vrbanja, qu'ils rejoignent leur peuple. Il dit que
23 ces épurations ethniques…
24 Momcilo KRAJISNIK : C'est lui qui le fait.
25 Momcilo MANDIC : Il a dit ici : 'Je veux lui faire son affaire.'
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1 Momcilo KRAJISNIK : Et où il est maintenant ?
2 Momcilo MANDIC : Là-bas, je suppose.
3 Momcilo KRAJISNIK : Chez eux, n'est-ce pas ?
4 Momcilo MANDIC : Oui.
5 Momcilo KRAJISNIK : Il est l'heure alors ?
6 Momcilo MANDIC : Oui, oui, oui.
7 Momcilo KRAJISNIK : Mon Dieu, un traître après l'autre.
8 Momcilo MANDIC : Oui, oui.
9 Momcilo KRAJISNIK : Toi, c'est bien, regarde aussi si tu peux
10 l'appeler. J'aimerais qu'on puisse aider Savic ou son frère.
11 Momcilo MANDIC : Mais, mon Dieu, après le premier échange et tout
12 sera fait ?
13 Momcilo KRAJISNIK : Bien, Momo.
14 Momcilo MANDIC : Et l'autre alors, il est parti ?
15 Momcilo KRAJISNIK : Non, non. Je veux te demander quelque chose.
16 Momcilo MANDIC : Oui ?
17 Momcilo KRAJISNIK : Qui est-ce qu'on veut nommer pour le Procureur
18 delà République6
19 Momcilo MANDIC : Avlijas Slobodan
20 Momcilo KRAJISNIK : Avlijas Slobodan ?
21 Momcilo MANDIC : Oui.
22 Momcilo KRAJISNIK : Mais est-ce que c'est vraiment --
23 Momcilo MANDIC : Oui, Président et c'est l'homme qui sait tout.
24 Momcilo KRAJISNIK : Je le connais.
25 Momcilo MANDIC : Vous le connaissez, non ?
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1 Momcilo KRAJISNIK : Bon, s'il a été Procureur, non, il a été
2 Magistrat.
3 Momcilo MANDIC : Il a été dans mon ministère; cependant, il est
4 capable et il connaît ses personnes. Il est très actif, je pense qu'il est
5 bon pour cela.
6 Momcilo KRAJISNIK : Kovac Slobodan, celui-ci ne peut pas.
7 Momcilo MANDIC : Mais quel -- Kovac Slobodan ?
8 Momcilo KRAJISNIK : C'est bon.
9 Momcilo MANDIC : Déjà ?
10 Momcilo KRAJISNIK : Prépare ces propositions et qu'il vienne ici.
11 Momcilo MANDIC : Entendu.
12 Momcilo KRAJISNIK : Allez.
13 Momcilo MANDIC : Au revoir.
14 Momcilo KRAJISNIK : Allez au travail et tu n'es pas là vraiment, tu
15 me dis que tu t'enverrais une télécopie tout de suite. Je te donnerai le
16 numéro de téléphone, tout de suite.
17 Momcilo MANDIC : Riant.
18 Momcilo KRAJISNIK : Nous devons te libérer de cette télécopie
19 vraiment parce que --
20 Momcilo MANDIC : Non, ne le faites pas, il viendra Skrbo --
21 Momcilo KRAJISNIK : Tu n'es pas obligé.
22 Momcilo MANDIC : Riant -- voilà, je ne sais pas ce que je vais faire
23 avec --
24 Momcilo KRAJISNIK : N'allez pas dans une action sur ce terrain.
25 Momcilo MANDIC : Et nous, maintenant, Président, qu'est-ce que nous
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1 allons faire ?
2 Momcilo KRAJISNIK : Allez, envoyez quelqu'un là-bas.
3 Momcilo MANDIC : C'est deux ou trois hommes, certains passent par
4 Kasindol, Papazi, voici l'ordre, il est venu, le Dr Avramovic est vraiment
5 de Kasindol, personne n'a jamais appelé, ils chassent le docteur là-bas.
6 Ils nomment les leurs pour directeurs.
7 Momcilo KRAJISNIK : Qui est celui-ci ?
8 Momcilo MANDIC : A Kasindol, dans l'hôpital.
9 Momcilo KRAJISNIC : Qui sont ces personnes ? De quel --
10 Momcilo MANDIC : De la communauté locale de Kasindol, c'est une
11 cellule de crise.
12 Momcilo KRAJISNIC : C'est une municipalité; laquelle ?
13 Momcilo MANDIC : Mais, rien c'est une communauté locale. Ilidza est
14 une municipalité et Kasindol est la communauté locale.
15 Momcilo KRAJISNIC : Et ils ont aussi un secrétariat pour Ilidza,
16 pourquoi ils ne travaillent pas là-bas ?
17 Momcilo MANDIC : Je ne sais pas mais ces docteurs sont venus, les
18 directeur sont ici, ils ont laissé une certaine Divljan Sonja, à la place
19 de ce directeur.
20 Momcilo KRAJISNIC : Et comment ils peuvent faire cela ?
21 Momcilo MANDIC : La cellule de crise de la communauté locale de
22 Kasindol les a nommées.
23 Momcilo KRAJISNIC : Allez, faites-le, s'il vous plaît.
24 Momcilo MANDIC : Alors, Popovic Koviljka, la caissière pour que l'on
25 voit comment les salaires sont payés.
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1 Momcilo KRAJISNIK : Maintenant, je vais appeler Prstojevic pour qu'il
2 parte. Qu'il envoie quelqu'un parce qu'il a une cellule de crise à Ilidza
3 et c'est Ilidza.
4 Momcilo MANDIC : C'est une honte, Président.
5 Momcilo KRAJISNIK: Maintenant, je vais le faire tout de suite pour
6 qu'il asservisse la situation.
7 Momcilo MANDIC : Mais, ils sont au courant avec ce même Prstojevic ?
8 Momcilo KRAJISNIK : Allez, vas boire quelque chose, s'il ne fait pas
9 ce qu'il faut, nous allons envoyer quelqu'un là-bas.
10 Momcilo MANDIC : Ils ont un accord avec Prstojevic Jevic. Ils font de
11 la contrebande ou quelque chose comme cela.
12 Momcilo KRAJISNIK : Il ne peut rien faire pour lui-même, maintenant,
13 il a un secrétariat car il y a dans le secrétariat des personnes
14 extraordinaires, tu le sais, ce n'est plus les mêmes, les anciens.
15 Momcilo MANDIC : Mais voilà, il y a des docteurs qui sont venus et
16 ils pleurent.
17 Momcilo KRAJISNIK : Tu leur diras que tout sera réglé.
18 Momcilo MANDIC : Pourquoi ne les a-t-on pas ? Pendant trois jours,
19 ils ne leur ont donné rien à manger.
20 Momcilo KRAJISNIK : Qui ?
21 Momcilo MANDIC : Ceci de la communauté locale parce que --
22 Momcilo KRAJISKIK : Qui est-ce qui ne donne pas un bout de pain pour
23 manger ?
24 Momcilo MANDIC : Ils ne permettent que ceux-là partent directement à
25 l'hôpital Kasindol, pas eux. Alors, ils coupent les approvisionnements, et
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1 leur donne un tout petit peu. C'est vraiment une honte.
2 Momcilo KRAJISNIK : Momo, je vais voir.
3 Momcilo MANDIC : Il faut les arrêter ces personnes.
4 Momcilo KRAJISNIK : Maintenant, je vais trouver Dragan Kalinic pour qu'il
5 aille là-bas, pour qu'il voit ce qu'il faut faire.
6 Momcilo MANDIC : S'il vous plaît, appelez un docteur. Ces personnes qui
7 sont là, en face de moi, ils me regardent.
8 Momcilo KRAJISNIK : Momo, ce que tu as promis, je vais le faire."
9 [Fin de la diffusion de cassette audio]
10 Mme EDGERTON : [interprétation]
11 Q. Monsieur Music, vous venez d'écouter cette conversation ?
12 R. Oui.
13 Q. Hier, avant ou plutôt après avoir entendu cette conversation
14 interceptée, et avant d'examiner le transcript, est-ce que vous étiez en
15 mesure de reconnaître les voix des deux interlocuteurs prenant part à cette
16 conversation téléphonique ?
17 R. Oui.
18 Q. De qui s'agissait-il ?
19 R. Au fait, c'étaient Krajisnik Momcilo, et Momcilo Mandic, donc, entre
20 ces deux personnes.
21 Q. De quelle façon étiez-vous à même de reconnaître ces deux voix ?
22 R. J'ai pu reconnaître ces voix car je connaissais ces personnes avant la
23 guerre. Pour ce qui est de Momcilo Mandic, je l'ai vu à plusieurs reprises
24 à Kula. Il est venu là où l'on mangeait puisque ma fenêtre donnait sur leur
25 cantine, là où il se nourrissait chez son frère.
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1 Q. Monsieur Music, je vous arrête ici, simplement pour vous demandez une
2 question précise. Lorsque vous avez dit que vous les connaissiez avant la
3 guerre, est-ce que cela veut dire que vous les connaissiez personnellement
4 avant la guerre, ou est-ce que vous avez simplement eu l'occasion
5 d'entendre leurs voix avant la guerre ?
6 R. Non, j'avais eu la possibilité d'entendre leurs voix à la télévision.
7 Q. Vous avez dit que l'un des interlocuteurs pendant cette conversation
8 interceptée était Momcilo Mandic, est-ce que vous n'avez jamais pu voir une
9 personne qui vous a été identifiée comme étant Mandic venir rendre visite à
10 Kula pendant que vous vous y trouviez ?
11 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De nouveau, Madame Edgerton, vous avez
13 fait exactement la même chose que plutôt. Vous avez employé plus de mots,
14 mais vous êtes en train de poser des questions directrices au témoin. Il
15 s'agit de questions bien sensibles. Je vais poser quelques questions au
16 témoin afin qu'il puisse nous répondre.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Il m'a, en fait, donné des éléments de
18 réponse avant que je ne l'interroge, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je l'ai remarqué, effectivement.
20 Cela n'est pas une justification et ce n'est pas une raison pour laquelle
21 vous devriez poser des questions directrices.
22 Je vous prie de poursuivre.
23 Mme EDGERTON : [interprétation]
24 Q. Monsieur Music, outre --
25 R. Oui.
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1 Q. Donc, autrement le fait d'avoir vu ces deux personnes à la télé, est-ce
2 que vous avez eu la possibilité de les voir personnellement ?
3 R. Non. Mais pour ce qui est de Momcilo Krajisnik, il venait de Zabrdje.
4 J'ai un ami de Trnopolje, qui se trouve tout juste au sud de l'endroit d'où
5 il provient. Je sais que sa femme est une enseignante, et je sais
6 exactement où il vivait, où sa maison se trouvait. Je suivais le tout à la
7 télé, et c'est quelque chose dont on entendait parler aussi avant la
8 guerre.
9 Q. Je vous remercie, Monsieur Music. C'est pour ce qui est de M. Krajisnik
10 comme interlocuteur. Maintenant, vous nous avez dit avoir reconnu la voix
11 de M. Mandic comme étant l'autre interlocuteur. Maintenant, outre d'avoir
12 vu M. Mandic à la télévision, est-ce qu'il vous est arrivé de le
13 rencontrer ?
14 R. Je l'ai rencontré, je l'ai vu personnellement puisqu'il venait à Kula.
15 Il mangeait de l'autre côté -- enfin, ma fenêtre donnait sur le restaurant,
16 le réfectoire où il mangeait. C'est ainsi que je pouvais le voir. Il avait
17 des cheveux plutôt blonds et assez rares. Il souffrait d'une légère
18 calvitie. C'est ainsi que j'ai pu le reconnaître, même avant la guerre. A
19 plusieurs reprises, je l'ai donc vu.
20 Q. Très bien. Monsieur Music, vous nous avez dit l'avoir vu à Kula.
21 Pourriez-vous nous dire à combien de reprises est-ce que vous l'avez vu à
22 Kula pendant que vous y étiez détenu ?
23 R. Je ne pourrais pas vous donner le nombre exact, car sous notre fenêtre,
24 il y avait un chien qui était attaché, et nous n'avions pas le droit de
25 nous approcher de la fenêtre afin de ne pas les voir. Si les gardes nous
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1 voyaient nous approcher de la fenêtre, ils nous avaient dit qu'ils nous
2 passeraient à tabac puisque nous n'avions pas le droit de voir qui venait
3 et qui partait.
4 Q. Est-ce que c'était à plus d'une reprise ?
5 R. Oui, à plusieurs reprises. Je ne sais pas s'ils venaient prendre leurs
6 cafés ou s'ils venaient déjeuner ou prendre leurs petits déjeuners. Je ne
7 sais pas, mais ils venaient assez nombreux. Je n'étais pas tellement
8 intéressé par la chose. Ce qui était important, c'était d'avoir un peu de
9 nourriture. J'ai travaillé le 20 juillet 1992 sur la rue Ozrenska. Nous
10 devions travaillés sur les toits. C'est à ce moment-là qu'un homme s'est
11 approché de moi et --
12 Q. Monsieur Music, vous avez parlé de votre travail sur la rue Ozrenska
13 dans votre déclaration qui se trouve, en fait, sous l'étude des Juges. Mais
14 je voudrais vous poser une seule autre question concernant cette
15 conversation interceptée, et la question a trait au nombre de détenus qui
16 se trouvaient à Kula selon votre connaissance. C'est-à-dire, au moment où
17 cette conversation avait lieu, combien y avait-il de détenus à Kula selon
18 votre propre connaissance, bien sûr, donc, en date du 26 juin ?
19 R. Puisque nous parlons de 280 hommes, on en a séparé 47, c'est ce que
20 j'ai déclaré, c'est ce que je vous ai déjà dit, donc, vous pouvez
21 soustraire 47 de 280, vous arriverez au total. Mais j'ai entendu des
22 personnes pleurer à côté. J'entendais des femmes, des enfants, des cris
23 provenant du bâtiment attenant. Nous, on nous passait à tabac. On nous
24 forçait de chanter des chansons serbes. Ils nous disaient : Voilà, votre
25 Alija.
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1 Q. Je vous remercie, Monsieur Music. Vous avez très bien répondu aux
2 questions que je vous ai posées. Maintenant, je crois que le moment est
3 opportun pour passer à la deuxième conversation interceptée.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, Madame, j'ai quelques questions
5 à poser puisqu'il me semble qu'il a une confusion quelque peu légère.
6 Madame Loukas, est-ce que vous voulez ajouter quelque chose ?
7 Mme LOUKAS : [interprétation] En fait, Monsieur le Président, brièvement.
8 Je comprends ce que fait Mme Edgerton, mais c'est tout à fait inapproprié.
9 Je trouve qu'on ne peut pas dire ce genre d'affaire, ce genre de
10 commentaires tels : "Vous avez répondu aux questions très bien." Je crois
11 qu'il ne faut surtout pas donner ce genre de réflexion.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends tout à fait ce qu'a voulu
13 dire Mme Edgerton, c'est-à-dire, je crois qu'elle a voulu dire au témoin
14 qu'il a répondu de façon brève. Maintenant, avant de passer à autre chose,
15 je souhaiterais poser une question au témoin.
16 Monsieur Music, vous nous avez dit --
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- si je vous ai bien compris que vous
19 aviez vu M. Mandic à plusieurs reprises.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais que vous nous parliez de
22 l'événement lorsque vous l'avez vu la première fois. Pour la toute première
23 fois que vous l'avez vu, quand était-ce ? Où l'avez-vous vu ?
24 R. Je l'ai simplement vu de passage, c'est-à-dire, il entrait dans le
25 réfectoire.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Mais permettez-moi d'abord de
2 vous poser la question suivante : où vous trouviez-vous lorsque vous l'avez
3 vu pour la première fois ? J'entends M. Mandic, bien sûr.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Puisque j'ai été plutôt passé à tabac lorsque
5 j'étais à Kula, et puisque l'on me battait beaucoup, donc, j'étais debout
6 devant la fenêtre.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, d'accord. Vous me dites que vous
8 étiez debout devant la fenêtre --
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- dans une pièce, dans une cellule,
11 dans le hall ? Où étiez-vous exactement ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait d'une pièce qui avait des
13 fenêtres, c'est-à-dire qu'il y avait des fenêtres longeant tout le long du
14 mur. C'était une pièce dans laquelle il y avait 25 prisonniers.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc, vous étiez dans une
16 pièce qui avait des fenêtres allant du plafond au plancher, ou de quelle
17 façon ? Comment -- à quoi ressemblaient ces fenêtres ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Les fenêtres allaient du plafond jusqu'au
19 radiateur. C'est pour vous donner une idée.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Maintenant vous dites que ces
21 fenêtres -- ou plutôt que vous l'aviez vu par la fenêtre, et qu'il se
22 rendait au réfectoire. Est-ce que le réfectoire se trouvait dans le même
23 bâtiment ou dans un autre bâtiment ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était dans le bâtiment d'en face. Il y a 50
25 mètres ou 60 mètres entre nous. En fait, c'était en forme de fer à cheval.
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1 Puis, c'est ainsi que je l'ai vu entrer par la fenêtre -- je l'ai vu, par
2 la fenêtre, entrer par la porte qui se trouvait dans la partie qui se
3 trouvait en face.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que -- je voudrais bien
5 comprendre, qu'il ne s'agissait pas d'un autre bâtiment, mais bien du même
6 bâtiment, mais simplement d'une aile de ce bâtiment qui se trouvait à
7 l'opposé de la pièce dans laquelle vous vous trouviez ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, merci. Maintenant, essayez de nous
10 dire, concentrez-vous, s'il vous plaît, et dites-nous à quel moment vous
11 avez vu M. Mandic se rendre au réfectoire pour la première fois.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il portait un uniforme de camouflage.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais si vous attendez la fin de ma
14 question, vous saurez ce que je vous pose comme question. Alors, voici ce
15 que je vous demande : lorsqu'il est arrivé, est-ce qu'il marchait, est-il
16 arrivé par quelque moyen de transport, à bord d'un véhicule ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, les véhicules ne pouvaient pas
18 entrer dans l'enceinte. Leur voiture était garée devant le bâtiment, et
19 lorsqu'il est arrivé, je ne peux pas vous dire si --
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends que vous voulez
21 expliquer votre réponse, mais je souhaiterais d'abord entendre la réponse à
22 ma question, avant d'en avoir l'explication. Donc, vous nous dites qu'il se
23 déplaçait en marchant; est-ce exact ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Il marchait. Ce bâtiment peut avoir -- peut se
25 trouver à une cinquantaine de mètres du bâtiment dans lequel j'étais. Je
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1 les ai vus entrer dans cet autre bâtiment. Je le connaissais même avant
2 qu'il ne fasse partie de la police. On m'a dit, voilà, son frère est avec
3 lui. C'était le collègue d'Avlijas qui m'a dit cela. C'est lui qui les
4 connaissait puisqu'il a dû les rencontrer.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Où est-ce que vous avez rencontré M.
6 Mandic pour la première fois ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne l'ai jamais rencontré. J'étais dans la
8 pièce dans laquelle je me trouvais lorsque je vous ai expliqué tout à
9 l'heure, et c'est là que je l'ai vu marcher. Il était en train d'entrer par
10 la porte qui donne au réfectoire.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois vous avoir mal compris alors.
12 Vous nous avez dit, dans votre témoignage : "Je l'ai vu. Je le connaissais
13 avant puisqu'il travaillait dans la police. Je l'ai reconnu moi-même."
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite : "Il a dit qu'il était son
16 frère." C'est ce que vous avez déclaré. Quand est-ce qu'il l'a dit ? Et à
17 qui a-t-il dit que c'était son frère ?
18 R. Ce n'était pas lui.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez, je vous prie, fournir plus
20 d'explication parce que je ne vous ai pas très bien compris.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'était pas lui qui disait cela.
22 C'était le collègue qui était venu lui rendre visite. Il m'a dit :
23 "Avlijas." C'était Avlijas qui était le juge. Il a dit, voilà son frère. Je
24 sais que c'est un peu ridicule de ne pas connaître toutes les personnes qui
25 se trouvent -- qui sont des personnes prominentes, parce que je regardais
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1 la télé.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce que nous aimerions savoir, c'est
3 la chose suivante : vous nous avez dit que vous saviez qui était M. Mandic
4 puisque vous l'avez vu à la télévision.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Avant la guerre, je suivais tous les
6 événements à la télé, et je le connaissais de par avant. Je ne connaissais
7 pas son frère. Je connaissais également Krajisnik pendant plusieurs années.
8 Mais je ne connaissais pas son frère.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, très bien. Mais essayez, je
10 vous prie, de vous concentrer sur les questions que je vous pose. Vous
11 connaissiez M. Mandic seulement de par la télévision. Vous pouviez -- vous
12 l'aviez vu à la télé.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le connaissais avant la guerre puisqu'il
14 travaillait au MUP. Mon beau-frère -- tous mes cousins y travaillaient donc
15 je le connaissais. Tout comme Kovac était au poste de police --
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, écoutez, Monsieur Music --
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- essayer de faire une distinction
19 claire entre ce que vous avez vu personnellement et ce que vous connaissez
20 et ce que vous avez entendu dire. Je ne sais pas si vous comprenez ce que
21 je veux dire. Je peux dire, par exemple, je sais qui est le maire de La
22 Haye parce que je l'ai lu dans les journaux. Mais à même temps, il est tout
23 à fait possible que je ne l'aie jamais vu en personne. Est-ce que vous
24 comprenez ce que je veux dire par là ? Donc, vous aviez connaissance, vous
25 saviez quel était le poste qu'occupait M. Mandic, tout simplement parce que
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1 d'autres personnes vous l'ont dit ou parce que vous l'aviez vu à la télé;
2 est-ce exact ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je l'ai vu à la télé, je lisais les
4 journaux donc je savais très bien qui se trouvait sur les positions
5 importantes --
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] -- qui occupait les positions importantes.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, de par les médias et par le biais
9 de ce que d'autres personnes vous ont dit, vous saviez quels étaient les
10 postes qu'occupaient certaines personnes. Vous saviez également -- vous
11 connaissiez leur visage, vous connaissiez qui ils étaient.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il vous est jamais arrivé de
14 voir M. Mandic personnellement ? Est-ce que vous l'avez vu ? Est-ce qu'il
15 s'est jamais trouvé devant vous ? Est-ce que vous avez jamais été face à
16 face avec lui ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'il passait dans la ville de Sarajevo,
18 avant la guerre, simplement comme cela, de passage, mais il ne
19 m'intéressait pas beaucoup à l'époque. Que voulez-vous que je vous dise.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, d'accord. Mais revenant à la
21 première fois que vous l'avez vu, lorsque vous étiez dans la prison de
22 Kula. Vous nous avez dit qu'il déambulait et il se dirigeait vers le
23 réfectoire; est-ce exact ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous avez raison, c'est cela.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous l'avez vu à une distance d'environ
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1 50 à 60 mètres; est-ce que je vous ai bien compris ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Lorsque vous l'avez vu à cette
4 distance, comment est-ce que vous avez fait pour le reconnaître ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je le connais. Vous savez, je suis tout
6 ce qui le concerne. Je sais quelle est la fortune qu'il possède, lui et les
7 autres personnes autour de lui. Cela m'intéresse.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi maintenant de vous reposer
9 la même question. Je ne vous demande pas si vous savez si M. Mandic est
10 pauvre ou riche, mais je voulais simplement savoir qu'est-ce qui vous a
11 permis de le reconnaître lorsque vous l'avez vu se diriger vers le
12 réfectoire ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont les collègues qui m'ont dit, voilà,
14 Mandic et son frère sont en train d'entrer dans le réfectoire. Il y avait
15 d'autres personnes qui nettoyaient en bas, et comme j'étais épuisé, je ne
16 pouvais pas. J'étais complètement épuisé. J'avais de très longs cheveux,
17 j'avais une très longue barbe. Même mon ami ne m'a pas reconnu lorsqu'ils
18 m'ont fait sortir pour couper ma barbe et me couper les cheveux.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, maintenant, concentrons-nous à ce
20 que vous nous avez dit au tout début de votre réponse. Vous avez dit : "Mes
21 collègues m'ont dit que c'était Mandic, et qu'il allait au réfectoire avec
22 son frère pour manger quelque chose."
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Vous savez, je l'ai vu entrer dans la
24 cantine. Vous savez, quand vous êtes dans une prison, vous ne faites que
25 prier, en espérant que vous aurez une bouchée ou quelque chose à manger, et
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1 que l'on vous relâchera un jour.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je comprends très bien que ce
3 n'est pas une position dans laquelle vous vous trouviez. Mais dites-nous,
4 est-ce que vos collègues l'ont reconnu ? Est-ce que c'est eux qui ont
5 attiré votre attention sur le fait qu'il se trouvait là ou est-ce que c'est
6 vous-même qui avez remarqué qu'il était là, avant que vos collègues ne vous
7 disent quelque chose, qu'ils ne le reconnaissent.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais là, debout. Il y avait d'autres
9 collègues autour de moi. Je ne pourrai pas vous donner leurs noms. Ils
10 étaient à côté de moi, nous regardions dans cette direction. Je n'étais pas
11 tellement intéressé par qui entrait et qui n'entrait pas. Ensuite, mon
12 collègue m'a dit : Voilà Mandic et son frère. Je l'ai regardé, je l'ai
13 reconnu puisqu'il souffrait légèrement d'une calvitie, il commençait à
14 perdre ses cheveux, et je pouvais voir, le reconnaître par cela. Il entrait
15 à l'intérieur, et je pouvais donc le voir. Je n'ai pas de choses à dire sur
16 lui. Je n'ai rien de mal à dire sur lui en particulier.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre collègue a attiré votre attention
18 sur le fait que la personne qui se dirigeait vers la cantine était M.
19 Mandic, que l'autre personne était son frère. Ensuite, vous avez regardé et
20 vous l'avez reconnu. Est-ce que je vous ai bien compris ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez d'autres
23 informations concernant sa visite ? Est-ce que vous avez su quelle était la
24 raison de sa visite à cet endroit-là ? Est-ce que vous savez combien de
25 temps il est resté, combien de temps cette visite a-t-elle duré ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi maintenant de vous ramener
3 à quelque chose que vous avez dit un peu plus tôt, et qui figure au compte
4 rendu d'audience. Permettez-moi de retrouver le passage.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque vous avez vu Mandic et qu'une
7 personne vous a dit que c'était son frère, est-ce que vous aviez une bonne
8 vue de la cour ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne comprends pas tout à fait ce que vous
10 voulez dire par là.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que votre vue était obstruée ou
12 non obstruée ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je vous ai dit, il y avait un chien qui
14 était attaché tout près de la fenêtre. Il y avait un policier qui se
15 promenait par là, et à chaque fois qu'il nous voyait à la fenêtre, il
16 venait nous passer à tabac puisqu'il ne voulait pas qu'on sache quelles
17 sont les allées et venues des officiers, des hauts gradés et cetera.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que cela veut dire que vous
19 n'étiez pas près de la fenêtre ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. J'étais peut-être à un mètre de la
21 fenêtre. Je ne pouvais pas regarder directement par la fenêtre puisque je
22 ne voulais pas le garde m'aperçoive, mais nous regardions par la fenêtre
23 tout le temps, bien sûr. Ils nous étaient impossible de ne pas regarder
24 puisque nous étions intéressés par ce qui se passe puisqu'il n'y avait rien
25 d'autre à faire. On ne pouvait même pas marcher dans cette pièce. Nous
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1 étions 25, entassés. Nous étions tous couchés à même le sol. Comme j'avais
2 été passé à tabac, on m'a donné un conseil amical, on m'a dit qu'il était
3 mieux que je me tienne debout. Mais je ne suis pas juge, même si je ne suis
4 pas juge, j'aurais conclu moi-même de ce qui a été dit.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Que voulez-vous dire par là ? De quelles
6 conversations vous parlez ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, concernant Mandic, je n'avais pas
8 l'occasion de lui poser quelque question que ce soit. J'étais pire que
9 chien. Nous étions tout le temps maltraité. On se faisait humilier. Je ne
10 pouvais pas lui dire : est-ce que vous voulez que je vous dise quelque
11 chose que je ne peux pas vous dire ? Qu'est-ce vous voulez que je vous dise,
12 et cetera.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends. Mais pour ce qui est des
14 autres visites, est-ce que vos observations de M. Mandic étaient les
15 mêmes ? Je veux dire par là, est-ce que vous vous trouviez derrière la
16 fenêtre également ? Etiez-vous à la même distance de lui que la dernière
17 fois ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour vous dire que oui, nous étions tous
19 nerveux. Nous étions épuisés, on se faisait maltraité. On ne nous
20 permettait même pas d'aller aux toilettes quand nous devions y aller. Nous
21 avions un litre et demi d'eau pour nous, les 25 personnes qui étaient là.
22 Je ne pouvais même pas boire. Je pouvais simplement rapprocher la bouteille
23 et humidifier mes lèvres.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais en fait, je voulais vous poser
25 les questions suivantes, est-ce que vous l'avez vu dans des circonstances
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1 semblables ? Est-ce que vous l'avez revu, c'est-à-dire, est-ce que vous
2 étiez au même endroit ? Est-ce que vous vous trouviez à la même distance de
3 lui que la première fois que vous l'avez vu ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, nous n'avions pas le droit de nous
5 approcher trop de la fenêtre. Nous étions toujours à environ un mètre de la
6 fenêtre, car le garde regardait toujours, et s'il nous voyait tout près de
7 la fenêtre, il venait à la porte, il nous faisait sortir, et il nous
8 passait à tabac. Nous essayions d'éviter ce genre de choses. Ces personnes
9 qui tabassaient les gens étaient plutôt les personnes qui venaient de temps
10 en temps. Mais je dois dire que le directeur de prison était vraiment un
11 très bon homme.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, j'essaie simplement de
13 comprendre quelque chose. Lorsque vous nous avez dit que la première fois
14 que vous avez vu M. Mandic, vous vous trouviez à une certaine distance de
15 lui. Vous nous avez dit que vous vous trouviez peut-être à un mètre de la
16 fenêtre. Mais j'aimerais savoir si la deuxième fois, c'était la même chose.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'était la même chose. Nous n'avions pas
18 le droit de nous approcher de la fenêtre. Je l'ai dit une fois. Je crois
19 qu'il n'est pas utile de vous le répéter dix fois. Je pensais que vous
20 m'aviez compris.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, je vous ai compris. Dites,
22 est-ce que vous vous souvenez combien de temps s'est écoulé entre la
23 première fois où vous avez vu M. Mandic et les fois subséquentes ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux vraiment pas vous le dire. Cela ne
25 m'intéressait pas. Tout ce que je voulais, c'est qu'on me laisse marcher,
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1 que l'on me donne à manger. Pour ce qui est du reste, rien d'autre ne
2 m'intéressait. Je ne voulais pas savoir qui venait et qui allait.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Combien de fois l'avez-vous
4 vu en tout ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous dire cela.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous répondre de façon
7 approximative ? Je comprends qu'il y avait plus d'une fois que vous l'avez
8 vu, mais cela aurait pu être aussi une dizaine de fois, ou 15 fois, ou 50
9 fois. Pouvez-vous nous donner une réponse plus précise. Mais si vous ne le
10 savez pas, dites-le nous.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas. Je ne sais pas combien
12 de fois je l'avais vu.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Même pas un nombre approximatif ?
14 Pouvez-vous nous dire fournir un nombre approximatif ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous dire cela.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Aviez-vous des informations concernant
17 l'objectif de la visite du ministre Mandic ? Est-ce que c'était le fait que
18 vous avez entendu dire qu'il se dirigeait vers le réfectoire pour y
19 manger ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Tous les détenus ne pensaient qu'à obtenir un
21 peu de nourriture et la liberté. Je ne pouvais pas dire. Je ne pouvais pas
22 non plus savoir quel était l'objectif de sa visite et tout le reste.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Etait-il toujours accompagné de son
24 frère ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etait-il accompagné d'autres personnes à
2 chaque fois qu'il venait sans son frère ? Est-ce qu'il y avait une autre
3 personne, d'autres personnes avec lui ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y en avait plusieurs qui entraient. Je ne
5 prêtais pas attention à cela. Pour nous, ils étaient tous les pareils, mes
6 ennemis. Je ne pensais y survivre pour pouvoir vous parler de cela en
7 détail. Je ne peux vous parler de cela que très brièvement parce que cela
8 me touche profondément.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, vous devriez savoir que
10 personne ne vous considère coupable de ce que vous avez vu ou n'aurez pas
11 vu, concernant les détails de ces événements à l'époque.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque vous avez dit que vous ne saviez
14 pas l'objectif de sa visite, est-ce que c'était votre réponse à ma question,
15 qui était de savoir toutes les informations concernant cet objectif de sa
16 visite ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque vous vous retrouvez dans une situation
18 dans laquelle vous n'avez pas votre carte d'identité, vos documents
19 personnels, votre appareil radio, et cetera, vous ne pouvez pas savoir quel
20 était l'objectif de cette visite ou d'autre chose.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'était votre réponse.
22 Madame Edgerton, est-ce que vous souhaiteriez continuer avec d'autre sujet
23 ou vous voudriez plutôt faire une pause ? Maintenant, il est 1 heure moins
24 10. Je vous prie, Monsieur l'Huissier, de faire sortir M. Music du prétoire.
25 Monsieur Music, nous allons faire une pause de 20 minutes, une deuxième
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1 pause qui va durer une vingtaine de minutes.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Je vous remercie.
3 [Le témoin se retire]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, tout d'abord, est-ce
5 que vous avez une idée du temps dont vous avez besoin pour votre
6 interrogatoire principal ?
7 Mme EDGERTON : [interprétation] [hors micro] Nous avons encore une
8 conversation interceptée, après cela, encore deux questions.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, une conversation interceptée et
10 deux questions. Approximativement, 15 minutes, si la Chambre n'y
11 intervienne pas.
12 L'une des questions à soulever sera si nous pouvons commencer avec le
13 contre-interrogatoire. Nous avons compris, Maître Loukas, que vous êtes
14 surprise de l'information concernant la présence de
15 M. Krajisnik au poste de police.
16 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui. Je devrais dire que le témoignage de ce
17 témoin fournit encore plus de surprises.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame Edgerton, je suppose que --
19 toutes les parties surprenantes sont derrière nous, ou il y a toujours
20 d'autres surprises --
21 Mme EDGERTON : [interprétation] A ma connaissance, il n'y a pas de points
22 qui pourraient surprendre.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous vous invitons maintenant
24 à expliquer à la Chambre la chose suivante, c'est-à-dire, si un contre-
25 interrogatoire est nécessaire et dans quelle mesure ce contre-
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1 interrogatoire est nécessaire, Maître Loukas, par rapport à quoi
2 l'Accusation pense que cette partie est pertinente pour prouver quoi que ce
3 soit. Plutôt, je vous invite à dire à la Chambre ce qu'à votre avis et
4 jusqu'à quel niveau -- dans quelle mesure, à votre avis, sont de nouveaux
5 éléments du témoignage, dans quelle mesure ces nouveaux éléments dans le
6 témoignage ont contribué à la présentation des moyens de preuve de
7 l'Accusation. Vous comprenez qu'il y a toute une série d'options. Par
8 exemple, si l'objectif de cela a été pour prouver que M. Krajisnik était à
9 ce poste de police, indépendamment du fait ce qu'il faisait vraiment là-bas,
10 pour prouver le fait qu'il était là-bas, cela serait différent de l'autre
11 objectif qui consisterait à prouver qu'il était là-bas, mais la Chambre
12 souhaiterait éviter que ce témoin soit convoqué de nouveau. Mais si ce
13 témoin doit être convoqué de nouveau, pour le contre-interrogatoire, pour
14 les questions qui, à l'avis de l'Accusation, est quelque chose qui n'a pas
15 été prouvé par la présentation des moyens de preuve, cette conversation ne
16 sera pas très utile.
17 Donc, nous vous invitons à vous bien préparer -- vous préparer très
18 bien pour cela. Ces questions, vous pouvez les poser après la pause. Après,
19 nous allons procéder au contre -- après, vous pouvez en terminer.
20 Maintenant, nous allons faire une pause jusqu'à 13 heures 10.
21 --- L'audience est suspendue à 12 heures 53.
22 --- L'audience est reprise à 13 heures 14.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Edgerton, s'il vous plaît,
24 d'abord répondez à la question que la Chambre vous a posée avant la pause.
25 Cette question concernait principalement le témoignage par rapport à la
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1 présence de M. Krajisnik et de M. Mandic aux endroits où le témoin était
2 détenu.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] D'abord, concernant l'information qui dit
4 que M. Krajisnik était présent au poste de police à Ilidza, je voudrais
5 souligner que, par le biais de ce témoin, nous ne demanderons pas d'autres
6 informations, tout simplement, l'indication de sa présence au poste de
7 police entre le 23 juillet et le 8 septembre 1992. Mais, pendant la pause,
8 j'ai consulté d'un membre de mon équipe qui est plus au courant de ce qui
9 s'est passé dans cette région que moi, et qui a dit que le fait qu'il était
10 présent est quelque chose qui, avec d'autres moyens de preuves, pourrait
11 montrer que l'accusé était au courant de l'existence de cet établissement
12 de détention au poste de police à Ilidza ou d'autres établissements. Mais
13 il y a une chose qui est encore plus important, c'est qu'à la fin, il
14 ferait partie des arguments, avec d'autres moyens de preuve, pour montrer
15 l'influence de l'accusé sur des fonctionnaires, des officiers de police
16 haut placés, mon collègue m'a dit que la visite de M. Krajisnik à ce poste
17 de police s'est passé pendant la période pendant laquelle le poste de
18 police -- les forces de ce poste de police ont été transférées vers
19 Bijeljina, vers la partie nord-est de la Bosnie-Herzégovine.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons limité les raisons pour
21 lesquelles on a dit qu'il s'agissait de la visite de
22 M. Krajisnik, s'il s'agit de la fiabilité de ces opérations. Mais est-ce
23 que la raison pour laquelle ce chef de la police, c'est-à-dire, vous
24 pourriez nous dire peut-être, selon son témoignage, quelle était la raison
25 de sa visite ? C'est que les autres lui ont dit quelle était la raison de
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1 sa visite.
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Je comprends cela. Je n'ai pas de compte
3 rendu sous les yeux pour le parcourir, mais je pense que cela est en
4 relation au fait que Tomo Kovac a été renvoyé, c'est-à-dire, il a été
5 promu, en fait, en fonctions plus hautes.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. La promotion et le renvoi d'un
7 poste n'est pas la même chose.
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, je m'excuse. Il s'agissait de sa
9 promotion.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La promotion. Est-ce que vous savez, à
11 votre avis, de quelle sorte de promotion il s'agissait ?
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pense que le témoin a dit qu'il
13 s'agissait d'une promotion au poste de ministre.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Etes-vous, vous estimez, vous
15 pensez que la pertinence de cette visite ne serait pas en premier lieu pour
16 voir qui deviendrait ministre, et que cette personne appartenait aux forces
17 de police, à l'époque, mais plutôt pour s'intéresser au fait qui
18 deviendrait ministre ?
19 Mme EDGERTON : [interprétation] Nous allons nous appuyer sur -- juste un
20 instant, s'il vous plaît.
21 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, deux en fait.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous dire cela d'une façon plus
24 claire maintenant. Si une personne doit devenir ministre et si cette
25 personne est, disons, directeur d'une brasserie, si vous vous adressez à
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1 une telle personne, si vous lui rendrez visite, est-ce que cela montrerait
2 votre intérêt pour la brasserie ou bien pour la personne qui devrait
3 devenir ministre ? Je sais que cette comparaison n'est pas parfaite comme
4 toute autre comparaison, mais n'importe, Madame Edgerton.
5 Mme EDGERTON : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président. Cela
6 représenterait l'intérêt pour la personne qui deviendrait ministre et non
7 pas, bien sûr, en tenant compte d'autres moyens de preuve devant,
8 précédemment, la Chambre de première instance, mais je comprends que le
9 plan était de montrer qu'excepté l'intérêt même porté à cet égard, l'accusé
10 était en possibilité d'assurer cette promotion et sa réalisation.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas la conclusion que
12 vous pouvez en tirer sur la base de ce moyen de preuve, Madame Edgerton.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Mais concernant l'existence des
15 établissements de détention, est-ce que le témoignage du témoin est tel que
16 le visiteur ne pouvait pas le remarquer, là-bas, en tant que détenu ?
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, il a mentionné le fait que même s'il
18 se trouvait à proximité de l'autre établissement, il s'agit d'une école
19 secondaire pour les arts graphiques, mais les documents sont toujours à
20 discussion, et vous avez déjà pris une décision concernant cela. Donc, il
21 s'agissait de l'autre établissement de détention.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais est-ce que vous pensez qu'il
23 s'agit d'une autre visite ?
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Il s'agit d'une proximité entre deux
25 établissements.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais c'est parce que le témoin a
2 dit qu'ils étaient cachés. C'est pour cela que lui, il était caché, et que
3 peut-être il ne savait pas qu'il était là-bas.
4 Cela veut dire aussi qu'il est difficile de conclure du fait que quelqu'un
5 s'est rendu au poste de police pour le visiter, aurait pu être conscient de
6 la distance d'une prison, excepté le fait que vous auriez visité tous les
7 établissements de détention sans avoir disposé de toutes les informations
8 complètes.
9 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est comme cela.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est comme cela. Bien sûr, c'est
11 concernant la visite de M. Krajisnik et d'autres points, c'est-à-dire,
12 d'autres surprises.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le
14 Président.
15 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
16 Mme EDGERTON : [interprétation] En ce qui concerne la visite de M. Mandic,
17 mon argumentation a été que cela est une preuve beaucoup plus importante et
18 beaucoup plus directe, notamment, le jour de l'entretien de Krajisnik et de
19 Mandic, ce qui prouve la connaissance de l'accusé quant à l'existence des
20 établissements de détention pour les civils et des régions ethniquement
21 épurées.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
23 Mme EDGERTON : [interprétation] Donc, là, il y a beaucoup moins de
24 conjectures.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends. Mais est-ce que ce
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1 serait principalement sur la base de sa visite ou de la conversation
2 interceptée ? Sur la base de quoi arrivez-vous à ces informations ?
3 Mme EDGERTON : [interprétation] L'une vient supporter l'autre, Monsieur le
4 Président, n'est-ce pas ? D'autant plus que nous parlons des événements de
5 cette époque-là. Cela couvre la période où le témoin était détenu. Cela a
6 été soutenu par d'autres preuves documentaires.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Maintenant, c'est clair.
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous pouvez poursuivre. M.
10 l'Huissier, veuillez faire entre le témoin.
11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour ce qui est d'autre part de l'ordre
13 du jour, je sais que demain, nous avons un autre témoin. D'abord, nous
14 allons voir comment nous allons procéder à l'interrogatoire. Je pense un
15 peu plus tard aujourd'hui, et j'en parlerai davantage.
16 Madame Edgerton, poursuivez, s'il vous plaît.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
18 Q. Maintenant, nous allons écouter encore une communication interceptée,
19 Monsieur Music. Effectivement, c'est une communication que nous n'avons pas
20 encore entendue.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Elle ne figure sur aucun des CD qui ont
22 été versés dans le dossier. Je vois que Mme Javier hoche la tête de façon
23 négative.
24 Mme EDGERTON : [interprétation] A ce que je sache, nous devons encore
25 verser le CD.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Mais nous allons vous faire entendre
3 l'enregistrement. Vous avez le transcript en B/C/S et en anglais.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le transcript dans la langue
5 originale aura la cote A et la traduction portera la cote A.1, Monsieur le
6 Greffier d'audience, pourriez-vous nous donner un numéro de cote, n'est-ce
7 pas ?
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, ce sera la pièce P411 et, bien
9 entendu, nous devons y ajouter encore la traduction en anglais.
10 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que le témoin a reçu un exemplaire
11 de ce transcript ?
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne crois pas, mais Monsieur
13 l'Huissier, veuillez en donner un au témoin.
14 Monsieur l'Huissier, est-ce que vous avez quelques exemplaires pour nous,
15 pour la Chambre ? Oui.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Maintenant, nous allons vous faire entendre
17 l'enregistrement de l'entretien du 1er juillet 1992, que l'on soutient être
18 un entretien entre Radovan Karadzic et Momcilo Mandic.
19 Q. Monsieur Music, avez-vous reçu une copie ?
20 R. [aucune interprétation]
21 Mme EDGERTON : [interprétation] Maintenant, voici l'enregistrement.
22 [Diffusion de la cassette audio]
23 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
24 "Femme non-identifiée : Oui.
25 Colonel SIPCIC : Bonjour, beauté.
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1 Femme non-identifiée : Bonjour.
2 Colonel SIPCIC : Sipcic.
3 Femme non-identifiée : Pardon ?
4 Colonel SIPCIC : Colonel Sipcic.
5 Femme non-identifiée : Et bien, bonjour. Vous allez bien ?
6 Colonel SIPCIC : Merci. Je vais bien.
7 Femme non-identifiée : Et bien, je ne suis pas habituée que l'on me parle
8 ainsi.
9 Colonel SIPCIC : Dites-moi, est-ce que votre chef est là ?
10 Femme non-identifiée : Oui, le ministre est arrivé. Voilà, un moment
11 seulement, Colonel.
12 Colonel SIPCIC : Je vous en prie.
13 Momcilo MANDIC : Pardon.
14 Colonel SIPCIC : Salue, Monsieur le Ministre.
15 Momcilo MANDIC : Salue, Général.
16 Colonel SIPCIC : Où es-tu ?
17 Momcilo MANDIC : Me voici. Hier, tu n'as pas travaillé. Tu n'as pas été là.
18 Colonel SIPCIC : Comment ne pas travailler ? Hier, c'était la pire des
19 journées que j'ai vécues.
20 Momcilo MANDIC : Que c'est hier ou avant-hier. Mais, ma foi, hier, tu
21 n'étais pas là. Il y avait un compatriote à toi. Mais oui, j'ai été vers
22 midi et demi.
23 Colonel SIPCIC : J'étais sur le terrain. Tu vas passer pas ici ?
24 Momcilo MANDIC : Oui, je veux bien.
25 Colonel SIPCIC : Voilà, le Président veut te parler. Allô.
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1 Momcilo MANDIC : Très bien, je viendrai. Quand tu es libre ?
2 Colonel SIPCIC : Je suis là.
3 Momcilo MANDIC : Bien, quand ils ont terminé, je viendrai.
4 Colonel SIPCIC : Et bien.
5 Momcilo MANDIC : C'est entendu.
6 Colonel SIPCIC : Un instant, voici.
7 Momcilo MANDIC : Bon, au revoir.
8 Radovan KARADZIC : Allô.
9 Momcilo MANDIC : Oui.
10 Radovan KARADZIC : Bonjour.
11 Momcilo MANDIC : Bonne chance, Monsieur le Président.
12 Radovan KARADZIC : Qu'est-ce qu'il y a ? Quoi de neuf, Momo ?
13 Momcilo MANDIC : Rien de particulier. Voilà j'ai été en haut, à une session
14 du gouvernement et je reviens ici.
15 Radovan KARADZIC : Ah bon.
16 Momcilo MANDIC : Nous sommes en train de faire un échange maintenant. Les
17 quelques Serbes, nous sommes en train de les évacuer de Hrasnica et de
18 Sokolovic Kolonija.
19 Radovan KARADZIC : Ah bon, c'est une chose importante.
20 Momcilo MANDIC : Oui.
21 Radovan KARADZIC : Nous allons tout de suite mobiliser ceux qui sont prêts
22 au combat, et les autres…
23 Momcilo MANDIC : Oui, on va les évacuer.
24 Radovan KARADZIC : Ils seront combien ?
25 Momcilo MANDIC : Je n'en sais pas, croyez-moi. Nous en avons pas mal sur la
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1 liste. Il y en a, de Hadzici, quelques 300. Les gens sont ici depuis une
2 semaine, et personne ne demande après eux. Je ne sais pas quoi ils
3 pourraient faire. Ce sont les Musulmans.
4 Radovan KARADZIC : Qu'est-ce qu'il --
5 Momcilo MANDIC : Mais personne ne demande après eux -- après ces Musulmans.
6 Radovan KARADZIC : Mais, bien oui.
7 Momcilo MANDIC : Et bien, nous allons essayer maintenant de faire un
8 échange pour les gens de Hrasnica.
9 Radovan KARADZIC : Vous m'avez trouvé ce Croate à Kula ?
10 Momcilo MANDIC : Il n'est pas là-bas.
11 Radovan KARADZIC : Tomic. Il doit être à Kula.
12 Momcilo MANDIC : Non, Président, c'est sûr. Tous les Croates sont partis.
13 Ici, il n'y a pas un seul Croate à Kula.
14 Radovan KARADZIC : Non, non. Il a été arrêté avant, à Dobrinja -- pas à
15 Dobrinja.
16 Momcilo MANDIC : Tous sont croates, Président. Ils sont -- tous les Croates,
17 Monsieur le Président, ont été échangés. Et bien, je vais vous rappeler
18 dans cinq minutes, après avoir --
19 Radovan KARADZIC : Bien. S'il n'est pas là, on va le chercher ailleurs.
20 Momcilo MANDIC : Mais est-ce qu'il sait, celui qui s'intéresse après Tomic,
21 où a-t-il été envoyé ?
22 Radovan KARADZIC : Voilà, ils étaient trois frères. Deux ont été relâchés à
23 Ilidza et un a été retenu à Ilidza et transféré à Kula. Voilà, c'est cela.
24 Ils ont été arrêtés à Ilidza.
25 Momcilo MANDIC : Président, je vais vous rappeler dans cinq minutes.
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1 Radovan KARADZIC : Bien. Et bien, dites-le-moi - qu'est-ce que je voulais
2 vous dire - est-ce que vous ne savez pas qu'ils sont venus d'en haut ? Que
3 les gens de Karlo sont là ?
4 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
5 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
6 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
7 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
8 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
9 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
10 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
11 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
12 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
13 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
14 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
15 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
16 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
17 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
18 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
19 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
20 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]
21 Radovan KARADZIC : [aucune interprétation]
22 Momcilo MANDIC : [aucune interprétation]"
23 [Fin de la diffusion de cassette audio]
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Je voudrais juste dire, si j'ai bien
25 compris, que la procédure a été telle qu'il a fallu dire quand quel
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1 locuteur parle.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est ce qu'on fait d'habitude,
3 notamment parce que cela peut provoquer une confusion, et on ne sait pas
4 qui a dit quoi. Comme cela n'a pas été dit, Madame Loukas, si jamais une
5 intervention devait être faite à propos de cela, je vous prie de bien
6 vouloir nous le faire savoir. Dans le cas contraire, sur la base de ce que
7 nous avons dans le procès-verbal, nous allons considérer que le transcript
8 est exact.
9 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder.
11 Mme EDGERTON : [interprétation]
12 Q. Monsieur Music, vous avez entendu ce qui a été dit dans cette
13 conversation interceptée.
14 R. [aucune interprétation]
15 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire : à partir du 1er juillet 1991, pendant
16 -- combien de jours vous avez passé à Kula ?
17 R. J'ai passé du 1er au 21 juillet à Kula. J'ai passé seulement trois nuits
18 à Lukavica, ensuite, on nous a transférés à Kula. Une fois transférés à
19 Kula, nous avons été dans deux pièces. Nous étions 40 -- ils n'ont d'abord
20 trouvé personne --
21 Q. Je m'excuse, Monsieur Music. Peut-être devrais être plus claire en vous
22 posant cette question. Dans vos déclarations, effectivement, qui ont été
23 présentées à la Chambre, vous avez dit que, de Lukavica, vous avez été
24 transféré à Kula après quelques deux ou trois jours passés à Lukavica; est-
25 ce que cela est vrai ?
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1 R. Oui, c'est vrai.
2 Q. Jusqu'au 1er juillet, combien de nuits aviez-vous déjà passées à Kula ?
3 R. Trois nuits j'ai passées à Lukavica, et après cela, j'ai été transféré
4 à Kula. A Kula, nous étions dans les deux pièces. C'était surpeuplé.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, la question ne portait
6 pas sur le nombre de personnes qui s'y trouvaient, mais jusqu'au 1er juillet,
7 combien de jours vous aviez déjà été à Kula. Combien de jours ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais là cinq ou six jours, car j'avais déjà
9 déclaré qu'ils avaient relâché 75 personnes âgées.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Music, ce qui nous intéressait,
11 c'est précisément combien de temps, vous, vous avez passé à Kula jusqu'au
12 1er juillet. Donc, vous avez répondu. Merci.
13 Mme EDGERTON : [interprétation]
14 Q. Est-ce que toutes les personnes qui, en ce moment-là, étaient avec vous,
15 étaient de Hadzici ?
16 R. Oui.
17 Q. Je vous remercie, Monsieur Music. C'étaient toutes les questions que
18 j'avais à vous poser.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de prendre une décision sur la
20 question de savoir si on va demander à Mme Loukas si elle va commencer le
21 contre-interrogatoire, est-ce que je peux lui poser une question
22 maintenant : à propos du témoin suivant, est-ce que vous préférez attendre
23 --
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pense que M. Hannis veut dire quelque
25 chose.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hannis. Peut-être pourrions-
2 nous rappeler le témoin à enlever ces écouteurs.
3 Maintenant, nous nous occupons, Monsieur Music, d'une question procédurale
4 qui concerne votre présence dans le prétoire. S'il vous plaît, enlevez vos
5 écouteurs.
6 Mme EDGERTON : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, je
7 devrais maintenant sortir pour parler à M. Tieger, qui s'occupera du témoin
8 suivant.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Même si vous pouviez -- vous
10 aviez pu vous attendre à cette situation. Il aurait mieux valu que vous
11 pensiez à l'avance, mais ne perdons pas de temps. Je vous prie de vous
12 assurer des réponses à nos questions.
13 Mme LOUKAS : [interprétation] Peut-être pourriez-vous faire une petite
14 pause de sorte de Mme Edgerton puisse inviter M. Tieger à se rendre dans
15 notre classe, cela nous coûtera moins de temps.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous avez raison, peut-être trois
17 minutes. Est-ce que cela vous suffit Mme Edgerton ? Oui. Donc, nous aurons
18 une pause de trois minutes.
19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Levez-vous, s'il vous plaît.
20 --- La pause est prise à 13 heures 38.
21 --- La pause est terminée à 13 heures 41.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président --
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux demander à M. Music
24 d'enlever encore vos écouteurs.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] J'ai parlé à M. Tieger, il ignore où le
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1 témoin se trouve, en ce moment, probablement, il est en train de voyager
2 ici et il préférerait que nous remettions cette affaire à demain et que
3 nous terminions avec ce témoin.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela voudrait dire que nous
5 devrions rappeler ce témoin, ce qui serait une dépense supplémentaire, ce
6 qu'inquiète le plus la Chambre, c'est ceci.
7 Jusqu'à quelle mesure le contre-interrogatoire sur cette question
8 pertinente contribuerait ou aiderait la Défense à réduire la valeur de
9 preuve du témoignage sur ces questions ? En comparaison avec la situation
10 où on n'aurait pas à contre interroger le témoin. Avant tout,
11 indépendamment de ce qui va être dit maintenant ici, autrement dit tout ce
12 qui est dit en ce moment est conditionné par ce moment précis. Je veux
13 dire, toutes les impressions que la Chambre présente en ce moment, ce sont
14 des impressions provisoires et qui se basent sur ce que nous avons entendu
15 jusqu'à présent.
16 Oui, Madame Loukas.
17 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, nous devons dire que
18 ceci est limité selon plusieurs aspects à ce que nous avons déjà entendu,
19 nous devons dire aux parties que la valeur de preuve de l'interrogatoire
20 principal est pratiquement inexistante. Donc la Chambre se demande et la
21 Défense a le droit de dire si le contre-interrogatoire aura lieu sur
22 d'autres questions et s'il y a besoin d'influencer sur l'impression
23 provisoire pour le moment de la Chambre. Et quand cela est clair, pour
24 toutes les parties, cette influence sur la Chambre pourrait être plutôt au
25 détriment de la Défense qu'à son profit.
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1 Mme LOUKAS : [interprétation] Je reviendrai à ce que j'ai dit préalablement
2 concernant ce témoin ce matin. J'ai dit qu'il y avait deux voies possibles
3 qui, à mon avis, pourraient être suivies par la Chambre d'abord. Excepté ce
4 témoignage, parce que cette nouvelle information vient d'être apprise, plus
5 exactement hier, douze ans après l'événement et après la déposition de
6 quatre déclarations mais indépendamment de cela, je dois dire, Monsieur le
7 Président, que je crois d'avantage qu'il faut adopter cette voie, étant
8 donné la façon dont ce témoignage a été fait, avec toutes ses surprise, je
9 voudrais vous rappeler la règle 89(B) où l'on dit que la Chambre peut faire
10 exception de preuve si ces éléments de preuve dont la valeur probante est
11 largement inférieure à l'exigence d'un procès équitable. Il était dit que
12 la valeur probante est infime et je dis qu'il faut exclure cette preuve si
13 ces preuves restent dans la dossier, elles seront certainement sujettes à
14 une certaine position, comme le Président l'a dit, une position provisoire
15 qui, il y a le fait que l'Accusation insiste sur ces preuves et que
16 l'Accusation voudrait plus tard y insister encore. Dans ces circonstances,
17 Monsieur le Président, la seule bonne approche est de d'évaluer ce qui est
18 essentiel, donc la valeur probante d'un côté et de l'autre, l'importance ou
19 la nécessité d'un jugement juste. Pour moi, la seule voie que la Chambre
20 puisse choisir, après entendu le témoin, après avoir connu le caractère de
21 son témoignage d'exclure ces preuves. Dans ces conditions, le
22 contre-interrogatoire serait parfaitement limité; sinon, le
23 contre-interrogatoire devrait se faire.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends, Madame Loukas. Je puis
25 imaginer que l'Accusation adopterait cette position s'il n'étais pas
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1 difficile de prendre une décision définitive concernant les preuves qui
2 sont là pour à même notre part -- l'option de dire dès à présent que le
3 témoin serait rappelé pour se prononcer sur la preuve qu'il n'a pas encore
4 entendu n'est pas encore très attrayante. Je vous invite à me faire part de
5 votre position. Votre réponse doit être très brève, parce que nous nous
6 rapprochons de 14 heures. Disons que la Chambre décidera d'exclure ces
7 preuves, pour ce qui est des parties pertinentes que nous définirions à ce
8 moment-là de façon précise, et dire que l'Accusation peut demander que
9 d'autres preuves additionnelles soient apportées sur la base de ce que nous
10 aurons entendu plus tard, et qui pourraient contribuer à la pertinence de
11 ces preuves. Comme je l'ai déjà dit, pour le moment, il semble que la
12 valeur probante de ces preuves est infime. Mais il ne serait pas juste de
13 dire non plus que le vivo de cette valeur demeurera à jamais aussi basse.
14 L'Accusation a dit que par rapport à certaines autres preuves, sa valeur
15 peut augmenter. Nous ne connaissons pas ces preuves. Nous ne savons pas
16 quelles sont les preuves qui suivent.
17 Est-ce que je peux entendre la réponse des parties, ce qu'elles pensent de
18 la décision de la Chambre d'agir ainsi ?
19 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est précisément contraire à ce que
20 j'avais proposé. Etant donné que la Chambre n'attribue que peu de valeur
21 probante à ces preuves, elles restent dans le dossier, et ensuite, sur la
22 base de certaines autres preuves, la Défense pourra inviter le même témoin.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On devra agir de toute façon contraire.
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Exactement.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'est-ce que vous en pensez, Madame
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1 Loukas, sur le problème pratique ?
2 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous dirai ce que j'en pense. Je pense que
3 l'exclusion provisoire dans cette phase --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce serait l'exclusion d'une preuve, mais
5 on n'exclurait pas la possibilité d'accepter ensuite une demande exigeant
6 que ces preuves soient versées au dossier, mais avant tout, il faudrait
7 qu'il y ait pour cela une occasion. Avant même d'examiner cette demande,
8 vous auriez la possibilité de contre-interroger de nouveau ce témoin quand
9 il sera rappelé.
10 Mme LOUKAS : [interprétation] Je pense que ce serait une solution
11 acceptable. Donc, exclusion dans la phase actuelle avec la possibilité que
12 l'Accusation demande de reverser dans le dossier ces preuves, et assurer
13 une occasion appropriée à la Défense pour le contre-interrogatoire.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, la Chambre a examiné cette
15 question. Combien de temps vous faut-il pour le contre-interrogatoire à
16 l'exclusion de ces deux visites de ces deux personnes ?
17 Mme LOUKAS : [interprétation] Si ces parties de témoignage sont exclues, je
18 suppose qu'il me faudrait une heure, entre une demi-heure et une heure.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, je demande au témoin de
20 remettre ses écouteurs.
21 [La Chambre de première instance se concerte]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre a décidé que le témoignage de
23 ce témoin par rapport à la présence de M. Krajisnik et de M. Mandic aux
24 endroits où le témoin avait été détenu soit exclu. Sans pour autant exclure
25 la possibilité pour l'Accusation de demander que ces parties du témoignage
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1 soient versées plus tard au dossier avec toutes les conséquences que cela
2 peut entraîner, c'est-à-dire, un interrogatoire additionnel par la Défense
3 et la Défense voudrait pouvoir commencer son contre-interrogatoire, demain
4 à 9 heures. Parce que je pense que la Défense s'est préparé pour le
5 contre-interrogatoire pour la partie qui apparaît dans les déclarations du
6 témoin.
7 Mme LOUKAS : [interprétation] Ceci est vrai, Monsieur le Président, sauf la
8 partie où il y a une apparition mystérieuse d'une information additionnelle.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes, et nous définirons plus
10 précisément ce qui sera exclu du transcript, bien que je pense que cela est
11 déjà clair dès à présent.
12 Monsieur Music, nous terminons notre travail aujourd'hui. Vous avez entendu
13 la décision de la Chambre excluant certaines parties de votre témoignage.
14 Ne vous en faites pas.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux dire un mot. Après
16 plusieurs années, je suis arrivé à une conclusion pour savoir qui a séparé
17 ces 47 personnes.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, Monsieur. En ce moment, vous
19 ne pouvez rien ajouter à votre témoignage, en ce moment. Peut-être, si
20 demain Mme Loukas vous aura posé des questions supplémentaires, peut-être
21 même Mme Edgerton -- j'ai voulu vous faire savoir uniquement que cette
22 décision a été prise en vertu du Règlement de procédure, et n'a rien à voir
23 avec vous en tant que personne. C'est sur quoi je voulais insister.
24 Maintenant, je vous conseille, Monsieur Music, à ne parler à personne
25 que ce soit aux membres des équipes de la Défense ou de l'Accusation, avec
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1 les passants, avec les personnes que vous aurez rencontrées, que vous ne
2 parliez à personne de sur ce témoignage. Aussi bien sur le témoignage que
3 vous avez déjà fait que sur celui que vous allez faire demain matin. Car,
4 nous vous reverrons demain matin à 9 heures. S'il n'y a pas d'autres
5 questions procédurales, nous terminons.
6 Monsieur Stewart, je vous vois vous lever. Vous êtes maintenant du bon côté
7 du verre.
8 M. STEWART : [interprétation] Je vais de rentrer, et en fait, je préfère
9 être devant que dehors. Puisque je suis déjà ici, je voudrais commenter
10 certaines informations qui m'ont surprises. Si j'ai bien compris, M.
11 Krajisnik -- je vois dans la Chambre que M. El Mahdi est là, qu'il y avait
12 un CD concernant la documentation concernant le témoin dont nous avons
13 entendu le témoignage.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'en sais rien. Je n'ai pas été ici
15 la semaine dernière.
16 M. STEWART : [interprétation] Peut-être pourrais-je le dire en moins de
17 temps aujourd'hui. Si je peux vous demander que la Chambre, je pense à tous
18 les membres de la Chambre, que la Chambre ne regarde pas la documentation
19 contenue sur ce CD jusqu'à demain matin, et alors, je vais présenter les
20 pièces appropriées.
21 [La Chambre de première instance se concerte]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant tout, j'ai voulu vérifier si
23 quelqu'un la Chambre a déjà vu ces documents. Personne ne les a vus. Nous
24 avons regardé le CD, mais nous n'avons pas vu son contenu, pas plus que
25 nous savons quoi que ce soit à ce propos. Nous ne ferons rien jusqu'à
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1 demain.
2 M. STEWART : [interprétation] Je pense qu'il faut y inclure tous vos
3 collaborateurs dans les autres Chambres.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne peux que les instruire s'ils ne
5 l'ont pas vu -- je peux les renseigner, s'ils n'ont pas vu, de ne pas
6 regarder, et s'ils ont vu ce document, de ne rien nous en dire.
7 M. STEWART : [interprétation] Telle serait ma demande.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien sûr, cela dépend de ce qui a déjà
9 été fait. On ne peut pas y revenir.
10 Nous recommençons demain à 9 heures.
11 --- L'audience est levée à 13 heures 58 et reprendra le mardi 23
12 novembre 2004, à 9 heures 00.
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