Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 12 juillet 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 23.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Le Greffier, pourriez vous

6 citer l'affaire s'il vous plaît ?

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour Monsieur le Président, je vous

8 remercie. Il s'agit de l'affaire IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo

9 Krajisnik.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

11 Monsieur Harmon, avant de vous demander de continuer l'interrogatoire du

12 témoin expert Brown, M. le Juge Hanoteau voudrait vous poser une question.

13 M. LE JUGE HANOTEAU : Monsieur le Procureur, bonjour d'abord. J'ai suivi

14 avec beaucoup d'attention tout ce qui a été dit hier. J'ai dit que les

15 choses allaient très vite, peut-être quelquefois un peu trop vite. Ce que

16 je voulais vous demander, c'est si vous avez pensé à aborder un certain

17 nombre de thèmes qui intéressent le Juge que je suis, et je vais me

18 permettre - j'espère que vous ne serez pas choqué - je vais me permettre de

19 vous dire les thèmes sur lesquels j'aurais aimé avoir, de la part du

20 témoin, un certain nombre de précisions.

21 Le rapport de cet expert nous a été communiqué. Je l'ai lu avec beaucoup de

22 soin, et il y a des points sur lesquels j'aimerais que ce témoin apporte

23 des précisions, peut-être même des développements. Parce qu'un rapport est

24 un rapport, il a forcément un aspect synthétique, et sur ces points-là,

25 j'aurais aimé des développements. Alors je vais prendre la liberté,

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1 Monsieur le Procureur, de vous dire les points sur lesquels j'aimerais

2 avoir ces développements.

3 Dans le rapport, on fait allusion assez longuement sur le fonctionnement

4 des camps de détention et sur le partage des rôles entre la police et

5 l'armée quant au contrôle de ces camps de détention.

6 Un deuxième point qui intéresse le Juge que je suis - mais je crois aussi

7 la Chambre, parce que nous en parlons souvent lors de nos rencontres en

8 dehors du prétoire - c'est le rôle des paramilitaires. J'aimerais en savoir

9 plus sur l'exacte position qu'a prise l'armée régulière face à ces

10 paramilitaires.

11 Le rapport montre qu'il y a peut-être quelques hésitations de la part des

12 commandements, et j'aimerais là-dessus avoir plus d'informations. Dans ce

13 même chapitre, j'aimerais comprendre si l'armée a rendu compte aux

14 autorités civiles des difficultés que pouvaient poser les paramilitaires.

15 Le troisième point : on a parlé et on parle dans ce rapport de la politique

16 de séparation des ethnies. On dit dans ce rapport que les militaires y ont

17 été fortement impliqués. On fait allusion aussi à des réactions des

18 autorités militaires face à cette politique de séparation des ethnies.

19 J'aimerais, là aussi, avoir quelques développements.

20 Quatrième point - et c'est le dernier, je vous rassure tout de suite,

21 Monsieur le Procureur - on dit dans ce rapport qu'il y a eu des

22 débordements au sein de l'armée, et que des morts ont été infligées à des

23 personnes qui avaient été capturées. On pourrait donc appeler cela des

24 incidents. J'aimerais savoir ce que l'expert a à dire sur les réactions

25 qu'a eu l'autorité militaire face à ces débordements.

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1 Voilà les quatre points. J'ai bien conscience, Monsieur le Procureur, que

2 ce sont des points que vous allez peut-être aborder dans toute l'après-

3 midi. Comme je ne connais pas votre stratégie, que je ne connais pas votre

4 ordre du jour, ni votre planning, j'ai pris la liberté, avec l'autorisation

5 du Président, j'ai pris la liberté d'appeler votre attention sur ce qui est

6 pour moi une préoccupation.

7 Voilà. Je vous remercie de m'avoir entendu.

8 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Juge Hanoteau, je vous remercie de

9 ces propositions. J'avais l'intention aujourd'hui de couvrir tous ces

10 points.

11 M. LE JUGE HANOTEAU : Je voudrais poser une simple question au témoin avant

12 que l'on reprenne, parce qu'il y a un point sur lequel je voudrais avoir

13 une réponse précise, si vous êtes d'accord, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela va s'en dire, évidemment.

15 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, en attendant que le

16 témoin entre dans le prétoire, je vous prie de bien vouloir examiner

17 l'intercalaire 16 [comme interprété]. C'est un rapport sur l'armée, et nous

18 allons parler de cela immédiatement, et nous allons parler du deuxième

19 volet de ce document.

20 Ce dont je parle se trouve dans le petit classeur.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire de quelle page

22 il s'agit ?

23 M. HARMON : [interprétation] Les pages 70 et 71.

24 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Monsieur

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1 Brown.

2 Monsieur Brown, je vous rappelle que vous êtes toujours tenu par la

3 déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de votre

4 déposition.

5 LE TÉMOIN : EWAN BROWN [Reprise]

6 [Le témoin répond par l'interprète]

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais Monsieur le Juge Hanoteau a une

8 question à poser, avant que vous ne commenciez Maître Harmon, comme il vous

9 l'a déjà indiqué.

10 M. LE JUGE HANOTEAU : Oui, c'est une question, Monsieur le Témoin, de

11 méthodologie de votre rapport. Je vais vous demander de satisfaire ma

12 curiosité.

13 Dans ce rapport, vous renvoyez à beaucoup de notes de bas de page, de

14 "footnotes". Ces "footnotes" correspondent à ce que vous dénommez des

15 "Krajina Corps reports", ou "1st Krajina Corps regular combat reports, 1st

16 Krajina Corps letters, VRS Main Staff reports." Je prends des exemples,

17 n'est-ce pas, "Prijedor SJB reports." Je voudrais comprendre ou savoir,

18 connaître, les destinataires de ces "reports". Ces rapports ont été

19 établis, mais vous n'indiquez pas à qui ils étaient destinés. Est-ce que ma

20 question est pertinente ou pas ? Relisant votre rapport, je me le disais,

21 mais à qui tout cela était adressé ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je sais que mon rapport est

23 assez long, avec beaucoup de notes de bas de page. De nombreux rapports du

24 1er Corps de la Krajina auxquels j'ai fait référence, sont des rapports qui

25 ont été envoyés au QG principal de la VRS. Il y a un certain nombre de

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1 rapports du 1er Corps de la Krajina qui ont été envoyés aux unités du corps

2 d'armée, et dans les notes de bas de page, on ne dit pas exactement à

3 quelles unités. Les rapports de combat réguliers ont été envoyés à l'état-

4 major principal de la VRS. Ensuite, quand il s'agissait du 5e Corps de la

5 JNA, ils ont été envoyés au 2e District militaire. Donc, les rapports de

6 combat régulier remontaient la filière hiérarchique. D'autres rapports du

7 1er Corps de la Krajina, qui étaient des rapports internes pour les besoins

8 du corps, ont été envoyés aux unités subordonnées. Par exemple, il y a un

9 document en date du 10 juin qui est une instruction au niveau du corps

10 d'armée, pour des nouvelles opérations de combat. Ce rapport a été envoyé

11 aux unités subordonnées au sein du corps d'armée.

12 Il y a d'autres rapports, les rapports concernant le moral des

13 troupes du 1er Corps de la Krajina, qui ont été envoyés aux unités

14 subordonnées du corps d'armée. Je pense que le quartier général principal,

15 de façon générale - je dois vérifier les rapports, probablement

16 individuellement - cela veut dire que quand on fait référence au quartier

17 général principal des cellules du 1er Corps de la Krajina. La majorité de

18 ces documents ont été trouvés dans les archives du Corps de la Krajina.

19 Cela veut dire que ces rapports ont été transmis du quartier général

20 principal au corps, et ont été gardés dans les archives de ce corps

21 d'armée.

22 En ce qui concerne les rapports de la police, il y en a un certain

23 nombre. Je devrai vérifier de quoi il s'agit parce que je n'ai pas, à

24 chaque fois, vérifié tout ce qui est écrit dans ces notes de bas de page.

25 Il y a des rapports de la police qui sont des rapports internes. Il y en a

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1 qui sont adressés à la CSB Banja Luka de la part de la municipalité. Donc,

2 il y a au moins un rapport qui est adressé du CSB de Banja Luka au

3 ministère des Affaires intérieures.

4 Je ne sais pas si j'ai vraiment répondu à votre question, mais --

5 M. LE JUGE HANOTEAU : Vous n'avez pas tout à fait répondu à ma

6 question parce que ce que je voudrais comprendre c'est : est-ce qu'il y

7 avait une transmission de ces rapports vers l'appareil de l'Etat ? Il y

8 avait bien un ministère de la Guerre. Il y avait bien des autorités civiles

9 qui s'occupaient plus particulièrement des questions militaires. Est-ce que

10 dans ce que vous savez, vous avez pu observer que ces rapports, par

11 exemple, qui étaient destinés au quartier général, au commandement Suprême,

12 est-ce que ces rapports étaient aussi dirigés vers l'appareil de l'Etat

13 lui-même ? Est-ce que vous avez eu trace de cela ? En clair, vous avez

14 parlé hier de la "Presidency". Vous avez aussi parlé de l'assemblée. Est-ce

15 que dans les documents que vous avez consultés, vous avez pu observer que

16 des rapports militaires, par exemple de la base, étaient envoyés

17 normalement vers le quartier général, et que le quartier général ensuite

18 faisait passer l'information aux autorités de l'Etat ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit hier, je pense que le

20 rapport concernant le niveau de l'aptitude au combat indique que les

21 dirigeants civils ou le commandement Suprême, au niveau de la présidence,

22 ont été informés en détail de la teneur de ce rapport. C'est la phrase

23 qu'ils ont utilisée. J'ai mentionné aussi un des documents hier concernant

24 les réunions que le commandant de corps d'armée devait avoir avec les

25 membres de la présidence. Ceci s'est produit le 3 juin.

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1 Il y a aussi une référence que j'ai faite hier à la démission des membres

2 de l'armée non-Serbes, un document qui a été adressé à la présidence et au

3 QG principal. Il y a aussi eu des références dans les documents aux

4 sessions de travail de la présidence dont les membres, les officiers du QG

5 principal, ont informé la présidence des bons systèmes de communication qui

6 existaient, ce qui comprenait aussi les lignes téléphoniques avec le

7 gouvernement. Comme je l'ai montré hier, les transcripts d'une certaine

8 conversation interceptée montrent qu'il existait bien un processus de

9 communication, que cette communication existait.

10 Ensuite, au cours de l'enquête que nous avons menée, nous n'avions pas pu

11 accéder aux archives du QG principal de la VRS, même si nous l'avons

12 demandé auprès de nombreuses autorités. En tout cas, c'était le cas pendant

13 que je travaillais au sein de cette équipe d'enquête. Les archives de ce

14 quartier général principal auraient pu nous aider pour ce qui est de ce

15 document qui venait des corps d'armée, et ensuite, a été transmis plus

16 haut.

17 Le 1er Corps de la Krajina était un corps d'armée parmi d'autres. Il

18 s'inscrivait bien dans l'hiérarchie relevant du quartier général principal,

19 dans cette chaîne de commandement. Je ne suis pas étonné qu'il y ait un

20 grand nombre de documents qui ont été transmis du 1er Corps de la Krajina

21 dans le cadre de cette chaîne de commandement, qu'il s'agit du quartier

22 général principal avec le général Mladic à la tête ou d'autres quartiers

23 généraux.

24 Mais en tout cas, il y a un certain nombre de documents qu'ils ont pu

25 envoyer aussi à la présidence, par exemple, le document qui parle du

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1 déplacement des Musulmans en est un.

2 Je parlais de cette chaîne des communications hier quand je parlais aussi

3 des objectifs stratégiques, et quand j'ai dit que dans la documentation

4 militaire, on peut identifier ces objectifs stratégiques, cela veut dire

5 qu'ils ont été transmis au corps d'armée et plus bas.

6 M. LE JUGE HANOTEAU : Mais dans ces "footnotes", est-ce que vous pouvez

7 nous dire par exemple, 5e Corps "regular combat reports" daté du 25 avril

8 1992, est-ce que vous pouvez facilement nous dire quel était le

9 destinataire ou est-ce que c'est très compliqué ? Vous ne pouvez pas de

10 mémoire vous en souvenir, bien entendu. Mais est-ce que vous pouvez

11 retrouver facilement les destinataires systématiquement, de tous ces

12 rapports que vous avez cités.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien --

14 M. LE JUGE HANOTEAU : Pas cet exemple particulier. Nous avons beaucoup de

15 renvois à des rapports. Est-ce qu'il vous est possible, est-ce que c'est

16 facile pour vous de dire qui étaient les destinataires de ces rapports, ou

17 est-ce que c'est très compliqué ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart des rapports réguliers ont été

19 envoyés aux formations militaires supérieures. La plupart des rapports de

20 combat réguliers du Corps de la Krajina ont été envoyés, et on trouve les

21 notes qu'ils indiquent, sur les documents, au quartier général principal et

22 de la VRS. Dans cet exemple, que vous nous avez donné, c'était la période

23 de la JNA, avant qu'elle ne devienne la VRS, et il y a aussi des documents

24 de ce type qui ont été envoyés au 2e District militaire de la JNA avec le

25 QG à Sarajevo.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On vous a demandé s'il vous serait très

2 difficile de vérifier à chaque fois à qui est adressé chacun des documents

3 qui figurent dans ces notes de bas de page. Est-ce que c'est quelque chose

4 qui est très difficile ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Ce n'est pas très difficile puisque

6 tout ceci figure dans ces documents. C'est écrit sur le document.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez ce document ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous les avez à présent ?

10 Est-ce que vous pouvez les retrouver à présent ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas ici. Mais je pourrais --

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, cela je le comprends, mais est-ce

13 que vous pourriez le retrouver ?

14 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par exemple, si on vous donnait une

16 liste de documents, ou si on vous disait, écoutez, à partir de cette page-

17 là à cette page, qui est cette page-là, essayez de nous donner la liste des

18 documents et les destinataires de ces documents, est-ce que ceci serait

19 possible pour vous ? Est-ce que ceci serait une mission possible ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, avec l'aide du bureau du Procureur

21 effectivement, puisque je ne travaille plus ici. Mais j'imagine que la

22 plupart des notes de bas de page ont été déjà versées au dossier en tant

23 que pièces annexes au rapport.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela veut dire qu'en fait il faudrait

25 juste vous fournir ces documents. Vous n'avez pas besoin d'autre aide parce

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1 que vous êtes un témoin expert, et si on vous demande de fournir un travail

2 supplémentaire, il faudrait que cela implique les membres du bureau du

3 Procureur.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement. J'ai uniquement besoin

5 d'avoir les documents.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vous remercie.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Un point, Monsieur le Président. Est-ce qu'il

8 existe un DVD avec les notes de bas de page qui sont des liens textuels,

9 des hyperliens ? Peut-être qu'on pourrait accéder à cela.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela existe ?

11 M. HARMON : [interprétation] Non. Nous pourrions fournir cela.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui --

13 Mme LOUKAS : [interprétation] Justement, je me dis que ceci serait

14 très utile pour le témoin puisque j'ai un exemplaire. J'ai un exemplaire

15 supplémentaire que je pourrais lui donner.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est très gentil de

17 votre part, Maître Loukas.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci comprend aussi la traduction

20 en langue anglaise pour que nous puissions comprendre tout cela ?

21 M. HARMON : [interprétation] Oui.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci beaucoup.

23 M. LE JUGE HANOTEAU : J'en ai terminé. Je vous remercie.

24 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Juge Hanoteau, peut-être que je

25 pourrais vous aider avec un certain nombre de questions que vous avez

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1 posées, puisque nous allons parler d'un certain nombre de documents. Mais,

2 par exemple, le document dont nous allons parler et qui se trouve au niveau

3 de l'intercalaire 54, c'est un document qui traite des paramilitaires. Si

4 vous examinez l'entête de ce document, en haut à gauche, vous allez voir

5 que ce document vient du quartier général principal de la VRS. A la fin du

6 document, vous pouvez voir quels sont les destinataires de ce document, et

7 pour ce document particulier, il a été envoyé à tous les corps d'armée et

8 toutes les unités de corps d'armée de la VRS, le président de la présidence

9 de la RSBiH, le premier ministre de la RSBiH, et aussi au quartier général

10 principal, donc le commandant Suprême de l'armée.

11 Si vous regardez les autres documents, à chaque fois, à la première page,

12 en haut à gauche, vous pouvez voir, donc à l'entête, de qui émane ce

13 document, et en bas, vous pouvez voir quels sont les destinataires à qui ce

14 document a été envoyé, si cela vous est utile, Messieurs les Juges.

15 A présent, je voudrais parler du 1er Corps de la Krajina. Je voudrais

16 me référer à l'intercalaire 6, pages 70 et 71. J'ai déjà attiré votre

17 attention là-dessus, Messieurs les Juges. Au niveau du dernier paragraphe

18 de la page 70, on voit un paragraphe où l'on parle de la totalité des

19 effectifs de la VRS, où il est indiqué que la force comptait 177 341

20 personnes. Et qu'à partir de la date du 3 juillet 1992, on voit un

21 organigramme qui donne les effectifs de chacun des corps d'armée. Si l'on

22 examine le 1er Corps de la Krajina, en ce qui concerne les effectifs pour

23 les combats, il s'agit de 43 128 hommes. Si l'on compare cela aux autres

24 corps d'armée, vous voyez bien qu'il s'agit d'un corps d'armée qui était le

25 plus puissant en terme d'effectifs, à la date du 3 juillet 1992.

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1 Au niveau du tableau 22 de la même page, vous pouvez voir qu'au total cette

2 armée comptait 222 727 personnes, et le 1er Corps de la Krajina, 72 330

3 personnes. Ce qui veut dire que la taille, en ce qui concerne les effectifs

4 évidemment, de ce corps d'armée est bien plus importante que n'importe quel

5 autre corps d'armée de l'armée des Serbes de Bosnie. Là, il s'agit des

6 formations de combat.

7 Sur la page suivante, vous avez aussi un tableau qui parle des unités qui

8 ne sont pas destinées au combat et des services des différents corps

9 d'armée, et là à nouveau, vous pouvez voir quelle était la taille du 1er

10 Corps d'armée de la Krajina.

11 Mme LOUKAS : [interprétation] Par rapport à ceci, je pense qu'il serait

12 tout à fait préférable que le témoin parle plutôt que M. Harmon. Je dis

13 cela juste pour le rappeler à M. Harmon. Nous avons un témoin expert ici,

14 et c'est à lui de répondre à ces questions et de nous fournir ces

15 informations, et pas à M. Harmon.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ceci aurait fait vraiment une

17 différence si M. Harmon avait demandé au témoin de nous dire : "Quels

18 étaient les effectifs du corps d'armée, sur la base du tableau du 22" ou… ?

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous dis que c'est une question de

20 principe.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Cette fois-ci, c'est M. Harmon qui a dit

23 cela, mais je voudrais être sûre qu'à chaque fois, c'est le témoin qui nous

24 donne de telles informations.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Je sais que c'est la

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1 règle générale. Bon, là, nous avons examiné un certain nombre de tableaux,

2 il s'agit de la lecture. Mais non, c'est vrai, c'est une question de

3 principe, et oui, pourquoi pas.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est une question de principe.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons pris note de cela.

6 M. HARMON : [interprétation] Oui, j'ai pris note de cela. Vous savez, je

7 dispose de très peu de temps. Je pourrais poser aussi cinq, six, dix

8 questions au sujet de ces questions-là --

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien --

10 M. HARMON : [interprétation] -- mais j'ai voulu aller le plus rapidement

11 possible.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin est ici. Si M. Harmon attire

13 son attention sur quelque chose et s'il souhaite vous demander ou si, vous,

14 vous avez l'impression, quand M. Harmon lit votre rapport, que vous vouliez

15 ajouter quoi que ce soit ou que vous voulez préciser quelque chose, dites-

16 le-nous, s'il vous plaît, immédiatement.

17 M. HARMON : [interprétation] A présent, nous allons parler des objectifs

18 stratégiques, et ceci figure au niveau du rapport de M. Brown à la page 24.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais poser une question au sujet

20 du tableau 21. Les unités indépendantes qui figurent dans cet organigramme

21 et qui comptent 19 384 hommes, pourriez-vous nous dire quelles sont ces

22 unités indépendantes ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas exactement à quoi ils font

24 référence. Toujours est-il que je sais qu'il existe un certain nombre

25 d'unités indépendantes au niveau des corps d'armée, qui n'étaient pas

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1 forcément attachées aux brigades. On pouvait les déplacer très rapidement

2 d'une brigade à l'autre. C'étaient des unités spéciales, plus flexibles,

3 qu'un commandant de corps d'armée pouvait utiliser de façon plus facile,

4 plus flexible.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là, il ne s'agit pas des unités

6 paramilitaires qui étaient dans l'orbite de ces unités régulières. Ce

7 n'était pas le cas, n'est-ce pas ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais qu'il existe un certain nombre de

9 documents qui indiquent que les paramilitaires, à partir du moment où ils

10 étaient intégrés au sein de la VRS, ont été intégrés, et on les a appelés

11 les unités "d'assaut", "de sabotage", ou "indépendantes." Mais souvent, ils

12 faisaient partie d'une brigade, donc c'était une petite composante d'une

13 brigade plutôt qu'une unité indépendante plus importante. Donc, ce document

14 ne me donne pas suffisamment d'éléments pour vous dire de quoi il s'agit

15 exactement.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

17 Vous pouvez continuer, Monsieur Harmon.

18 Interrogatoire principal par M. Harmon :

19 Q. [interprétation] Monsieur Brown, comme je vous ai dit, nous allons

20 parler à présent des objectifs stratégiques, et je vais vous demander de

21 vous référer à l'intercalaire 43 du dossier numéro 2. Monsieur Brown, je

22 vais essayer de parcourir un grand nombre de documents en très peu de

23 temps, et pour faire cela, nous allons parcourir un certain nombre de

24 documents très rapidement. Pourriez-vous, s'il vous plaît, examinez ces

25 objectifs stratégiques et nous dire quels sont ces objectifs stratégiques,

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1 et quelle partie des ces objectifs se réfèrent à la zone de responsabilité

2 du 1er Corps de la Krajina.

3 R. L'objectif numéro 1, l'objectif numéro 2, et une partie de l'objectif

4 numéro 4.

5 Q. Quelle partie de l'objectif numéro 4 ?

6 R. "Etablir une frontière au niveau de la rivière." D'ailleurs, cet

7 objectif a été partagé entre le 1er et le 2e Corps de la Krajina donc ce

8 n'était pas la mission exclusive du 1er Corps de la Krajina.

9 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, passer au prochain intercalaire,

10 l'intercalaire 44. Monsieur Brown, c'est le procès-verbal de la 16e Session

11 de travail de l'assemblée des Serbes de Bosnie qui a eu lieu le 12 mai 1992

12 à Banja Luka. Pourquoi avez-vous examiné ce document quand vous avez

13 préparé votre rapport ? Quelle est l'importance de ce document pour vous ?

14 R. Quand j'ai commencé à examiner un certain nombre de documents

15 militaires relevant du 1er Corps de la Krajina, je me suis rendu compte

16 qu'on faisait référence, dans un certain nombre de ces documents, aux deux

17 objectifs et j'ai voulu voir de quoi il s'agissait, quelle était

18 l'importance de ces objectifs pour le 1er Corps de la Krajina. Quand j'ai

19 examiné le procès-verbal de cette session de travail de l'assemblée, et

20 surtout l'annonce faite par M. Karadzic de ces objectifs stratégiques, j'ai

21 voulu vérifier si ces objectifs politiques qui étaient mentionnés lors de

22 cette session de travail ont été liés, de quelque façon que ce soit, avec

23 les documents relevant du 1er Corps de la Krajina que j'ai pu examiner, et

24 aussi avec les activités du 1er Corps de la Krajina au cours de l'année

25 1992.

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1 Q. Dans ce procès-verbal, est-ce que vous avez pu trouver des références

2 faites aux opérations militaires, ou les zones de responsabilité du 1er

3 Corps de la Krajina ou autre zone de responsabilité en Bosnie ?

4 R. Oui. Je considère que les six objectifs stratégiques qui ont été

5 énumérés par le Dr Karadzic pourraient être liés a un grand nombre

6 d'opérations militaires, pas seulement d'ailleurs aux opérations menées par

7 le 1er Corps de la Krajina, que je connais sans doute le mieux ou mieux que

8 les autres, mais avec de nombreuses autres activités relevant d'autres

9 corps d'armée. Ces objectifs sont liés étroitement à ces activités. On

10 trouve des exemples clairs des opérations militaires qui sont extrêmement

11 liées à ces objectifs, qui découlent de ces objectifs.

12 Q. Est-ce qu'il existe une hiérarchie dans ces objectifs stratégiques

13 qu'il fallait mettre en œuvre et qui ont été annoncés le 12 mai ?

14 R. Oui, je pense que M. Karadzic lui-même a dit qu'ils n'étaient pas sur

15 le même plan, qu'il existait une hiérarchie au niveau des ces objectifs.

16 D'ailleurs, M. Krajisnik l'a dit lui-même.

17 Q. Je vais parler de ce procès-verbal. Pourriez-vous nous dire tout

18 d'abord au niveau de quelle page on trouve ces informations ?

19 R. Sur la page 13, à partir du moment où Karadzic annonce ces objectifs,

20 on donne aussi leur ordre d'importance. Sur la page 49 de la traduction, M.

21 Krajisnik a dit : "Je voudrais vous donner une explication puisque, moi

22 aussi, j'ai pris part à l'adoption de ces objectifs. Vous devez comprendre

23 que le premier objectif est l'objectif le plus important, et tous les

24 autres objectifs sont des sous objectifs par rapport à ce premier

25 objectif."

Page 16278

1 Je pense que Karadzic a dit que l'objectif concernant Sarajevo pourrait

2 être inversé.

3 Q. Au paragraphe 1.43 de votre rapport, vous dites que l'objectif

4 stratégique numéro 1 impliquerait un déplacement important de la population

5 non-serbe vers l'extérieur de ce nouvel Etat serbe. Comment en êtes-vous

6 arrivé à cette conclusion ?

7 R. Je pense qu'il y a de nombreuses références qui sont faites lors de la

8 16e Session de l'assemblée et qui semblent indiquer qu'en aboutissant à ces

9 objectifs, et en particulier le premier objectif, cela aurait pour

10 conséquence le déplacement d'un certain nombre de personnes. Il y a

11 plusieurs intervenants qui y font d'ailleurs référence. Ratko Mladic, je

12 crois, est le seul intervenant, au cours de la séance de l'assemblée, qui

13 appelle à la prudence ou qui parle de manière un peu prudente en parlant de

14 personnes déplacées. Je peux vous donner des références.

15 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous les donner.

16 R. [aucune interprétation]

17 Q. Nous donner les numéros de pages ?

18 R. Le Dr Karadzic lui-même dit, quand il parle du premier objectif

19 stratégique : "La séparation des deux communautés nationales, la séparation

20 des Etats, et cetera." Il dit : "La séparation de ceux qui sont les

21 ennemis" --

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Brown, je vous interromps dans

23 ce sens. M. Harmon vous a demandé de nous dire quel était le numéro de la

24 page --

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. C'est la page 13 de la

Page 16279

1 traduction, à peu près au milieu de la page.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] "La séparation de ceux qui sont nos ennemis et

4 qui ont utilisé toutes les occasions, en particulier au cours de ce siècle,

5 pour nous attaquer et qui continuerait à appliquer de telles pratiques si

6 nous restions ensemble au sein d'un même Etat." Deuxième paragraphe.

7 Ensuite, à la page 16 de la traduction, le Dr Karadzic déclare : "Nous ne

8 voulons pas que dans notre Etat il y ait un grand nombre de personnes qui

9 soient contre cet Etat."

10 Aux pages 24 et 25, on voit une intervention de Miroslav Vjestica.

11 C'est un dirigeant du SDS de Bosanska Krupa.

12 M. HARMON : [interprétation] Je vous interromps. Veuillez arrêter un

13 instant, je vous prie, Monsieur le Témoin.

14 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Vjestica relate en détail ce qui s'est

17 passé à Bosanska Krupa. Il fait notamment référence au fait qu'un grand

18 nombre de Musulmans sont partis. Au bas de la page, il dit même : "Que font

19 nos adversaires ? Actuellement, ils sont tous dans la Krajina de Kazin. Sur

20 la rive droite de la rivière Una, il n'y a plus de Musulmans dans la

21 municipalité serbe de Bosanska Krupa. Toutes les enclaves qui s'y

22 trouvaient : Rapusa, Veliki, Verbovik [phon], Ostruznica, Babic, Muslim

23 Jasenica, et Zavir, nous les avons évacuées, si bien qu'il n'y en aura

24 aucun là pendant la durée des opérations de guerre. Est-ce qu'ils ont un

25 endroit où retourner ? Je pense qu'il est peu probable depuis que le

Page 16280

1 président nous a donné la bonne nouvelle selon laquelle la rive droite de

2 la Una est devenue la frontière."

3 Il y a également une référence à la page 18 -- non, plutôt 19, page 19.

4 C'est une remarque de Trifko Radic. Il fait mention des frontières, de la

5 séparation, et au milieu de la page, il dit, je cite, troisième paragraphe

6 : "Pour ce qui est de la poursuite de la guerre, il faut traiter de ce

7 problème maintenant et faire en sorte que les lignes de démarcation et les

8 objectifs soient déterminés, et le reste suivra ensuite. J'ai lu des

9 informations selon lesquelles lorsque les Suédois et les Norvégiens se sont

10 séparés, ce processus a duré dix ans. Nous allons voir la même chose ici,

11 mais c'est toujours mieux à faire, pour savoir qui doit être réinstallé. Ce

12 sera un processus difficile qui nécessitera beaucoup d'effort, beaucoup de

13 travail et d'explications pour ceux qui doivent quitter leurs foyers."

14 Il y a également deux observations faites par Ratko Mladic qui, je pense,

15 lui-même pense ce que tout cela implique. Cela semble être l'un des seuls -

16 - c'est assez surprenant -- le seul qui, dans son intervention, met les

17 autres en garde.

18 Q. A quelle page, je vous prie ?

19 R. Page 33. Mais avant de parler de Ratko Mladic, je voudrais d'abord

20 parler de ce que dit, à la page 33, le Pr Milojevic, tout au bas de cette

21 page. Il est en train de parler de cartes et de frontières des Etats. Je

22 cite : "S'il s'agit de la frontière d'un état, cela implique le déplacement

23 de la population."

24 A la page 37, Ratko Mladic déclare -- il est en train de parler des

25 objectifs de manière générale. Il déclare : "Les gens, les peuples, ne sont

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1 pas des pions, ne sont pas des clés que l'on a dans une poche et que l'on

2 peut déplacer. C'est quelque chose qu'il est facile à dire, mais peu facile

3 à réaliser."

4 Plus loin, à la page numéro 39, il déclare --

5 Q. Pouvez-vous nous --

6 M. LE JUGE HANOTEAU : A la page 37, à peu près vers quelle ligne ? Je n'ai

7 pas trouvé cette référence.

8 M. HARMON : [interprétation] Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, où

9 cela se trouve à la page 37 ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est tout en haut de la page.

11 A la page 39, à la 15e ligne environ, Mladic déclare : "Si bien que

12 nous ne pouvons pas nettoyer; nous ne pouvons pas avoir non plus de tamis

13 pour filtrer afin qu'il ne reste que les Serbes ou que les Serbes tombent

14 et que les autres restent. C'est-à-dire que je ne sais pas comment M.

15 Krajisnik et M. Karadzic pourraient expliquer cela au reste du monde. Ce

16 serait du génocide. Il faut que nous en appelions à tous les hommes qui se

17 sont inclinés jusqu'à terre pour embrasser ces territoires et ces zones de

18 l'Etat que nous avons l'intention de réaliser."

19 Voici certaines des observations faites devant la séance de l'assemblée, ce

20 qui nous amène à penser que les déplacements de population étaient pris en

21 compte. Notamment, j'ai regardé tous les documents qui viennent du 1er Corps

22 de la Krajina. Ils savaient non seulement qu'il y aurait déplacement de la

23 population dans les mois qui ont suivi la session de l'assemblée, mais

24 qu'ils participeraient à ce processus et qu'ils le soutenaient.

25 M. HARMON : [interprétation]

Page 16282

1 Q. Monsieur Brown, en dehors du général Mladic et en dehors des

2 représentants des différentes municipalités qui étaient présents lors de

3 cette session, est-ce qu'il y avait d'autres militaires et non militaires

4 dont vous savez qu'ils ont participé à cette session ?

5 R. Oui. Je crois que Bogdan Subotic, le ministre de la Défense, a

6 participé. Je crois que le général Talic également. Milorad Sajic [phon]

7 aussi. Je crois également que les membres de la Région autonome -- ou des

8 régions serbes de Croatie, la Krajina de Croatie, ont participé à cette

9 réunion. Donc, ce n'était pas exclusivement le SDS; il y avait certains

10 membres du personnel militaire et certains membres des zones serbes en

11 Croatie.

12 Q. Monsieur Brown, est-ce que la proclamation publique de ces objectifs a

13 été un moment très fort pour les personnes qui ont participé à cette

14 session ?

15 Mme LOUKAS : [interprétation] Je pense que c'est une question qui est tout

16 à fait inappropriée.

17 M. HARMON : [interprétation] Est-ce qu'on peut me dire pourquoi ?

18 Mme LOUKAS : [interprétation] La question est tendancieuse. On lui parle

19 "d'épiphanie".

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant --

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Cette question, on y a déjà fait objection

22 précédemment.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et --

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Elle n'est pas appropriée.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si c'est une épiphanie ou

Page 16283

1 pas, mais pouvez-vous nous dire comment les gens ont réagi à cette

2 promulgation ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas sûr de pouvoir vous dire

4 exactement comment l'opinion publique a réagi à cette annonce. Si la

5 question de M. Harmon était --

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas demandé comment l'opinion

7 publique avait perçu cet annonce. Si, en fait si -- excusez-moi, je me suis

8 trompé. Je voudrais savoir comment cette promulgation publique a été

9 accueillie par ceux qui ont participé à la séance de travail ?

10 La promulgation ou l'annonce publique des objectifs stratégiques, je crois.

11 Oui, objectifs.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est possible que j'aie des difficultés à

13 répondre à cette question par certains de ces aspects.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayez du mieux que vous pouvez de

15 répondre à cette question, et s'il y a certain des aspects que vous ne

16 pouvez pas aborder, dites-le nous.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois personne, en dehors du général

18 Mladic, qui a prononcé ces mots de mise en garde. Je ne vois rien ici qui

19 puisse indiquer que les gens se sont élevés contre ce qui avait été

20 annoncé, et dits qu'ils allaient entraîner des difficultés ou ont exprimé

21 un désaccord manifeste avec ce qui venait d'être dit au cours de cette

22 séance de l'assemblée. D'ailleurs, si on regarde les propos tenus par

23 certains des membres de l'assemblée, notamment M. Vjestica, cela nous

24 indique que les gens étaient tout à fait en faveur de ce qui était annoncé.

25 Je n'ai vu aucun débat, aucune discussion. Cela, c'est ce que je peux vous

Page 16284

1 dire au sujet des dirigeants politiques, et de la manière dont ils se sont

2 exprimés au cours de cette séance de l'assemblée.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des éléments qui

4 peuvent nous indiquer que ceci a fait l'effet d'une surprise ou que ceux

5 qui participaient, au contraire, étaient tout à fait familiers avec cela ?

6 Est-ce que c'est quelque chose que l'on peut déduire de l'étude du procès-

7 verbal de la séance de travail ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais qu'une partie de ces objectifs

9 avaient déjà été mis en œuvre. J'imagine qu'ils n'auraient pu être mis en

10 œuvre que s'ils avaient été connus. M. Karadzic mentionne notamment que

11 Sarajevo était déjà encerclée, et que certaines municipalités étaient déjà

12 sous contrôle. Il me semble que c'est un des éléments essentiels et

13 nécessaires pour arriver aux objectifs stratégiques concernant Sarajevo.

14 Dans la Krajina, il y avait eu des prises de contrôle de certaines

15 zones, on avait déjà assisté à des attaques militaires. M. Vjestica parle

16 de ce qui se passe à Bosanska Krupa. M. Vjestica, dans son intervention,

17 parlait déjà de la municipalité voisine de Bosanski Novi et de ce qui était

18 en train de s'y dérouler. La simple lecture de ce procès-verbal, ainsi que

19 la référence à d'autres documents, m'amène à penser qu'on peut

20 difficilement penser qu'il s'agissait d'une révélation à l'époque, et je ne

21 pense pas que ce qui a été annoncé lors de cette 16e Séance était une

22 nouveauté totale.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

24 Harmon.

25 M. HARMON : [interprétation]

Page 16285

1 Q. Monsieur Brown, vous nous aviez dit que certaines mesures avaient déjà

2 été prises pour mettre en œuvre ces objectifs stratégiques, vous avez donné

3 un certain nombre de références dans ce sens. Autant que vous le sachiez,

4 pouvez-vous nous dire à quels endroits, dans quels lieux la JNA avait-elle

5 déjà pris des mesures, la JNA ou la Défense territoriale, le SDS avec des

6 unités associées pour mettre en œuvre ces objectifs stratégiques avant le

7 12 mai 1992 ? Pouvez-vous nous donner un certain nombre de municipalités où

8 cela s'applique ?

9 R. Bosanska Krupa en était une, c'est manifeste, je l'ai déjà mis en

10 évidence. Je sais que des éléments du corps de Talic avaient participé à la

11 prise de contrôle de cette municipalité. J'ai également connaissance --

12 enfin là, il s'agissait d'actions de combat et pas uniquement de prise de

13 contrôle.

14 Je sais également qu'avant la session de l'assemblée à Bosanski Novi, on a

15 délivré ou on a lancé des ultimatums pour le dépôt des armes, et il y a eu

16 des attaques contre des zones non-serbes les 10 et 11 novembre -- ou plutôt

17 mai.

18 Je sais qu'à Zvornik, à Bijeljina, en dehors de la Krajina, il y avait eu

19 des opérations militaires.

20 Il y avait eu également des prises de contrôle qui n'impliquaient pas

21 directement des actions de combat à Prijedor et Kljuc avant cette session.

22 Voilà les exemples dont j'ai connaissance.

23 Q. J'aimerais vous demander de vous concentrer sur le rôle des unités de

24 la Défense territoriale serbe pour assurer la sécurité du territoire et la

25 mise en œuvre des objectifs stratégiques avant l'annonce publique de ces

Page 16286

1 dits objectifs lors de la 16e Séance de l'assemblée. En premier lieu, je

2 souhaiterais vous demander de vous rapporter à une pièce que l'on trouve à

3 l'intercalaire numéro 45, il s'agit de la 14e Session de l'assemblée. Nous

4 avons ici un extrait de ce PV. C'est une séance qui a eu lieu à Pale le 27

5 mars 1992.

6 M. HARMON : [interprétation] En bas de la page 22, on annonce un

7 interlocuteur, à savoir, le Dr Radovan Karadzic. Je vais demander à M.

8 Brown de nous parler d'un passage qui figure à la page 23, à peu près au

9 milieu de la page, et qui commence par les termes suivants : "ils peuvent

10 tenter."

11 Q. C'est un passage qui a trait à la Défense territoriale, n'est-ce pas,

12 Monsieur Brown ? Je cite : "Ils peuvent tenter d'intimider les Serbes ici

13 et là à Gorazde. Ils peuvent tuer quelqu'un à Brod. Mais ils ne pourront

14 jamais incorporer les zones serbes au sein de leur Etat ou les conquérir

15 parce qu'ils ne disposent pas des forces requises au vu des territoires

16 importants tenus par les Serbes."

17 Je poursuis la citation : "Nous savons que les nôtres se sont armés. Nous

18 ignorions la manière dont cela s'est fait, mais nous savons qu'ils

19 disposent de suffisamment d'armes. Je dois dire, cependant, que nous ne

20 disposons pas d'unités paramilitaires."

21 Karadzic est en train ensuite de s'adresser aux membres de l'assemblée.

22 Je cite : "Quand vous retournerez dans vos municipalités, en particulier

23 dans les municipalités nouvellement formées, je vous demande de faire ce

24 que vous êtes tenu de faire au terme de la législation. Dès que vous

25 arriverez dans vos municipalités, vous devez de toute urgence y établir des

Page 16287

1 cellules de Crise. Vous devez essayer d'organiser la population pour

2 qu'elle puisse se défendre. Trouvez un certain nombre d'officiers de

3 réserve pour ces cellules de Crise, et enregistrez tous ceux qui possèdent

4 des armes au sein de ces unités. Ils doivent organiser la Défense

5 territoriale, et s'il y a présence de la JNA sur place, elle doit être

6 placée sous son commandement. Si ce n'est pas le cas, il faut les placer

7 sous le commandement d'officiers de réserve."

8 Monsieur Brown, j'aimerais également vous renvoyer à la page 10 du rapport

9 sur l'armée. C'est-à-dire une fois encore l'intercalaire numéro 6, en

10 particulier le dernier paragraphe.

11 Je cite : "La fonction de commandement et de contrôle dans le cadre

12 de la mise en œuvre de l'armée de la Republika Srpska s'est déroulée en

13 deux étapes. D'abord, du 1er avril au 15 juin 1992, et en deuxième lieu, à

14 partir de cette date jusqu'à aujourd'hui. Une évolution importante au cours

15 de la première période a été constituée par l'organisation autonome

16 d'unités régionales et municipales sur la base des unités de la Défense

17 territoriale sous l'influence politique et patriotique du Parti

18 démocratique serbe. Ces unités ont assuré la protection du peuple serbe

19 contre les forces croates ou musulmanes, qui devenaient de plus en plus

20 violentes et qui prenaient en importance. Ces unités ont généralement

21 assuré la sécurité et libéré leurs municipalités au sein de leurs

22 frontières, et ont mis un terme à ces activités."

23 Monsieur Brown, s'agissant de ces passages que je viens de lire, de ces

24 deux passages, j'aimerais que vous nous parliez plus particulièrement du

25 rôle des Défenses territoriales serbes, de leur évolution, et du rôle joué

Page 16288

1 pour réaliser les objectifs stratégiques qui devaient être annoncés

2 ultérieurement.

3 R. Il semble qu'il y ait un lien entre ces deux documents et d'autres

4 documents. Il y en a notamment qui date de la mi-avril et qui marque la

5 mise en œuvre, la place officielle de la Défense territoriale serbe. Je

6 sais que la Défense territoriale a pris part à la prise de contrôle d'un

7 certain nombre de municipalités dans la Krajina au cours du mois d'avril,

8 et dans la période précédant le 12 mai et la mise en œuvre, la place

9 effective de l'armée, le 12 mai. Dans le rapport de 1993, il y est dit

10 qu'il y avait deux phases. D'abord, avant l'établissement de l'armée, et

11 ensuite, suite à quoi ces unités ont été absorbées au sein de l'armée. Je

12 crois qu'à la page 69 du rapport sur l'armée, ceci est repris, à savoir que

13 pendant cette première phase, ils ne sont pas parvenus à atteindre certains

14 des objectifs stratégiques. Mais je sais qu'ils sont parvenus à obtenir le

15 contrôle de certaines municipalités de la Krajina, et que ceci a notamment

16 impliqué des opérations conjointes avec la JNA.

17 Q. Monsieur Brown, si certes ils sont parvenus à atteindre certains de ces

18 objectifs stratégiques annoncés lors de la 16e Séance, vous nous dites

19 qu'ils ne sont pas parvenus à tous les réaliser, n'est-ce pas exact ?

20 R. Oui, c'est ce qui est dit, même par eux même dans le document de 1993,

21 et je voudrais attirer votre attention sur quelque chose qui est dit par M.

22 Krajisnik lui-même, lors de la 16e Séance de l'assemblée, lors de laquelle

23 l'armée a été établie. On a officiellement promulgué l'établissement, la

24 création de l'armée. Une décision formelle a été rendue dans ce sens.

25 M. HARMON : [interprétation] Pendant que vous êtes en train de chercher ce

Page 16289

1 document, Monsieur Brown, j'aimerais indiquer aux Juges un passage dans le

2 rapport sur l'armée. Il s'agit de la page 69. M. Brown y a fait référence.

3 Page 69, à commencer par le troisième paragraphe, qui s'intitule : "Dans le

4 même temps, sur le territoire de la Republika Srpska…"

5 Ensuite, deux paragraphes plus bas, il est indiqué que "les unités de

6 la Défense territoriale ne sont pas parvenues à atteindre les principaux

7 objectifs stratégiques." Dans le paragraphe qui suit, on indique quels

8 objectifs stratégiques la Défense territoriale et les unités de la Défense

9 territoriale ne sont pas parvenues à atteindre.

10 Q. Monsieur Brown.

11 R. A la page 51 de la traduction de la séance du 12 mai, M. Krajisnik dit

12 : "Nous sommes en guerre et il ne sera possible de résoudre toutes ces

13 histoires avec les Musulmans et les Croates que par la guerre. La politique

14 aura un rôle à jouer pour mettre un terme à tout cela. Je ne sais pas si

15 nous avons tout passé en revue, mais avant de conclure, je voudrais vous

16 demander d'adopter et de ne pas vous battre pour savoir qui est le plus

17 grand des Serbes, parce que si on devait faire une élection sur ce point,

18 personne ne serait meilleur Serbe que moi, mais il faut être rationnel pour

19 guider le peuple serbe. Si nous mettons la main sur les territoires que

20 nous avons convenus et que nous avons envisagés aujourd'hui, ainsi que le

21 corridor que nous allons mettre en place, nous aurons beaucoup fait pour

22 cette génération. Que va-t-il arriver en réalité ? Nous allons partir, mais

23 il sera plus facile d'arriver à ces objectifs une fois que nous aurons

24 établi l'armée serbe, et c'est ce que nous avons fait aujourd'hui."

25 Ceci peut nous indiquer que les objectifs auraient pu être plus

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1 facilement acquis maintenant que l'armée a été formée plutôt que ce qui

2 s'était passé avant avec l'utilisation de la Défense territoriale et de ses

3 unités.

4 M. LE JUGE HANOTEAU : Navré de vous interrompre. Lorsque vous citez dans le

5 rapport de l'armée cette phrase : [en anglais] "They failed to achieve the

6 main strategic objectives." [en français] Est-ce que le témoin peut dire

7 pourquoi ces forces territoriales n'ont pas pu atteindre les objectifs

8 principaux ? Etait-ce en raison de la résistance rencontrée, résistance qui

9 n'était pas attendue ? Est-ce qu'il y a une réponse à cela ? Quelle est la

10 raison de l'échec de ces forces territoriales ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, je crois qu'ils avaient réussi de

12 s'emparer de certains territoires. Le Dr Karadzic a parlé de Sarajevo comme

13 étant une ville encerclée. Certaines municipalités avaient déjà été prises

14 avec leur aide. Mais pour parler du corridor, peut-être qu'ils n'étaient

15 pas nécessairement assez bien équipés, ils n'étaient peut-être pas assez

16 forts. Il aurait peut-être fallu avoir plus d'aide, un équipement plus

17 solide, un plus grand nombre d'équipement également. Le commandement, ainsi

18 que le contrôle et le soutien, tout ce processus qui serait venu avec la

19 JNA, une fois que la JNA deviendra ou est devenue la VRS, je ne sais pas si

20 c'est le cas, mais de toute façon, cela aurait pris plus de temps.

21 C'est-à-dire qu'il aurait été plus facile d'arriver à ce but s'ils avaient

22 eu toute l'artillerie, les moyens de communication, des armes lourdes qui

23 venaient avec la JNA lorsque la JNA est devenue la VRS.

24 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci.

25 M. HARMON : [interprétation]

Page 16291

1 Q. Monsieur Brown, au cours de cette période, avant que les objectifs

2 stratégiques eu été annoncés avant la 16e Session, vous nous avez dit que

3 les unités de la Défense territoriale -- vous avez parlé donc de ces

4 unités. Maintenant, pour parler de leurs liens avec la JNA et les entités

5 politiques, ont-ils essayé de mettre en place une partie de ces objectifs

6 stratégiques ?

7 R. Oui. J'ai vu des documents qui faisaient référence aux opérations

8 conjointes entre la JNA et la Défense territoriale.

9 Q. Permettez-moi d'attirer votre attention, Monsieur Brown, sur --

10 Mme LOUKAS : [interprétation] Avant de passer à la prochaine question, on

11 parle de documents. Le témoin a dit que certains documents avaient

12 certaines références, on parlait de références. Je crois qu'il serait peut-

13 être très utile aux Juges de la Chambre de savoir que --

14 M. HARMON : [interprétation] Mais justement, j'y arrive.

15 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, car je ne voulais pas que l'on s'écarte

16 trop du but principal.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que M. Harmon a une très bonne

18 idée de ce qu'il veut poser comme question, alors écoutons-le.

19 M. HARMON : [interprétation]

20 Q. Monsieur le Témoin, le document ou l'intercalaire 46. Il parlait d'un

21 secret militaire qui émane de 5e Corps de l'unité de la JNA. Ce document

22 porte la date du 1er avril. Il est destiné au commandement de la 10e Division

23 des Partisans, il s'agit d'un ordre qui a été signé par le commandant, par

24 le général Talic. Si je puis attirer votre attention, d'abord, je

25 souhaiterais vous demander de nous parler ou d'abord confirmer, Monsieur

Page 16292

1 Brown, s'il s'agit bien d'un ordre qui parle d'éléments qui se trouvent

2 sous le contrôle du général Talic, et qui viennent de la Croatie jusqu'en

3 Bosnie; est-ce que c'est exact ?

4 R. Oui, c'est cela. La 6e Brigade des Partisans, à l'époque, se trouvait

5 en Croatie et revenait de la Croatie.

6 Q. Je souhaiterais vous lire une partie de cet ordre. Vers le milieu de la

7 page 1 de l'ordre, le général Talic ordonne : "Etablissement d'une

8 coopération pleine et entière avec les organes du gouvernement de la

9 municipalité de Sanski Most et la collaboration avec la Défense

10 territoriale et les unités de la police." Pourriez-vous, je vous prie, nous

11 faire vos commentaires là-dessus.

12 R. Je crois que c'est très clair à la lecture de cet ordre. Nous pouvons

13 voir qu'il donne l'ordre aux brigades subordonnées de se rendre à Sanski

14 Most et d'établir une coopération pleine et entière avec les organes de

15 Sanski Most, et c'est effectivement ce qui s'est passé.

16 Q. Je souhaiterais maintenant attirer votre attention à l'intercalaire 47.

17 On parle ici de la coopération des unités de la Défense territoriale ainsi

18 que de la JNA et du SDS avant qu'ils aient annoncé leurs objectifs

19 stratégiques. Maintenant, ce document intercalaire 47 est un document qui

20 émane du ministère de la Défense de la République serbe de Bosnie-

21 Herzégovine. Ce document porte la date du 16 avril 1992, et le document est

22 destiné aux gouvernements de la Région autonome de la Krajina, en réalité,

23 et à la République serbe de Bosnie-Herzégovine ainsi que toutes les

24 municipalités serbes. Le document est signé par Bogdan Subotic. C'est une

25 décision qui a été prise par le ministère de la Défense déclarant une

Page 16293

1 mobilisation, que nous pouvons voir en haut de la page 2, où l'on fait

2 appel à une mobilisation générale. Je vous demanderais de nous faire un

3 commentaire sur le dernier paragraphe de ce document : "En guise de

4 préparation pour les unités et le déploiement, on parle d'un commandement

5 unifié."

6 R. Encore une fois, je crois que c'est tout à fait clair. Avec

7 l'établissement de la Défense territoriale, on mobilise la Défense

8 territoriale. Dans cette section-ci, on instruit, on dit qu'il faudrait y

9 avoir une coopération effective avec les unités de la JNA, et là où on

10 peut, qu'il fallait établir un commandement unifié dans les zones où

11 c'était possible.

12 Q. Monsieur Brown, je vous demanderais de passer à l'intercalaire 48.

13 Monsieur Brown, il s'agit des documents émanant de la cellule de Crise de

14 la municipalité serbe de Sanski Most. Il s'agit de conclusions de cette

15 municipalité, conclusions à la suite d'une réunion qui a eu lieu le 28

16 avril, quelques semaines avant que l'on ait annoncé les objectifs

17 stratégiques, c'est-à-dire, deux semaines avant, si je puis être plus

18 précis.

19 Je souhaiterais attirer votre attention au dernier point, qui se lit comme

20 suit : "Que la cellule de Crise de la municipalité serbe de Sanski Most

21 rencontre le commandement de la 6e Brigade de Krajina, le colonel Basara,

22 et qu'elle commence à organiser et établir des liens entre les forces

23 armées de la Défense territoriale serbe ainsi que des forces de l'armée

24 yougoslave." J'aimerais vous demander de nous faire un commentaire là-

25 dessus.

Page 16294

1 R. Ce document semble indiquer que, d'abord, on sait que la Défense

2 territoriale serbe avait été établie à Sanski Most. Ici, on peut lire

3 également que la 6e Brigade était arrivée à Sanski Most. Le colonel Basara

4 y était le commandant. Le général Talic donne l'ordre d'assurer la

5 coopération avec la Défense territoriale et l'ordre de Subotic disant qu'il

6 faudrait y avoir une coopération avec la JNA, et en fait, on met en œuvre

7 cet ordre, on la suit, et à Sanski Most, la Brigade de Krajina et la

8 Défense territoriale allaient se rencontrer et établir des liens directs.

9 Q. Dans le rapport sur l'armée, on voit assez souvent le terme

10 "liberating," "liberating territory", "territoire qui devait être libéré."

11 Monsieur Brown, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, ce que cela veut

12 dire exactement dans le contexte d'un rapport militaire ?

13 R. Je crois qu'il s'agit de prendre les manivelles du pouvoir sur un

14 territoire où les forces militaires étaient présentes. C'est absolument

15 nécessaire de demander aux forces militaires de prendre le contrôle complet

16 de ce territoire, car c'était la seule façon pour les Serbes, il s'agissait

17 d'un territoire qu'ils voulaient contrôler. Ils voulaient donc prendre le

18 contrôle de ce territoire, et c'est cela que le mot "liberating" veut dire

19 exactement en anglais.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si je vous réfère à une de vos réponses

21 précédentes, vous avez dit que la 6e Brigade des Partisans a été rebaptisée

22 en 6e Brigade de la Krajina; est-ce exact ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

25 M. HARMON : [interprétation]

Page 16295

1 Q. Je souhaiterais maintenant passer à l'intercalaire 49. Monsieur Brown,

2 de nouveau, concernant la collaboration, il s'agit d'un document qui porte

3 la date du 11 mai, il s'agit de la veille avant que l'on ait annoncé les

4 objectifs stratégiques. C'est un document émanant du 5e Corps, destiné à la

5 10e Division des Partisans et la 6e Brigade, et ce document émane du général

6 Talic.

7 On peut voir qu'il dit : "Je voudrais saisir cette possibilité afin de

8 féliciter tous les soldats de la brigade, et vous personnellement, d'avoir

9 libéré la ville de Bosanska Krupa, et ainsi d'avoir accompli votre mission

10 avec succès."

11 Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre ce qui s'est passé à

12 Bosanska Krupa. Vous avez vu un grand nombre de documents là-dessus.

13 R. C'est la même brigade qu'à Sanski Most. On avait déployé une grande

14 partie de cette brigade pour prendre le contrôle de Krupa. Le général Talic

15 ici félicite au commandant et à la brigade d'avoir pu libérer Bosanska

16 Krupa. Si je vous renvois à ce que Miroslav Vjestica a dit concernant ce

17 qui s'est passé à Bosanska Krupa, il est clair que c'est quelque chose qui

18 est survenue avant la 16e Session de l'assemblée. Cela pourra vous indiquer

19 ce que le mot "liberating," "libéré" veut dire.

20 Q. Très bien. Permettez-moi maintenant d'attirer votre attention sur

21 l'intercalaire numéro 50. Nous voyons que c'est le ministre de l'Intérieur,

22 le poste de sécurité publique, c'est le secteur qui rédige un rapport, le

23 secteur de Bosanski Novi. Il s'agit d'un rapport qui a été rédigé à la

24 suite d'une décision rendue par le ministère de la Défense nationale de la

25 Bosnie-Herzégovine, conformément à une décision de la région autonome de

Page 16296

1 Krajina en association avec le QG de la Défense territoriale de Bosanski

2 Novi et avec les représentants du gouvernement. C'est la raison pour

3 laquelle ce rapport a été établi.

4 On peut y lire : "Des centres de réception à Bosanski Novi." Au premier

5 paragraphe, nous pouvons voir une référence à ce centre. Vers le milieu du

6 paragraphe, cela commence avec "However". "Toutefois, ces activités n'ont

7 pas eu l'effet escompté sur la reddition volontaire des armes. Outre cela,

8 pendant la nuit du 10 mai 1992, dans le village de Blagaj Rijeka", selon le

9 rapport, "d'une patrouille de police militaire, on a procédé à une attaque.

10 Ces événements ont provoqué une série d'attaques dans les villages peuplés

11 majoritairement par les Musulmans. C'est ainsi que le 24 mai 1992,

12 l'ensemble de la population des villages de la région de Dolina Japra a été

13 déplacée dans la partie centrale de Blagaj Rijeka."

14 Ce rapport fait référence à une collaboration entre la JNA et les unités de

15 la Défense territoriale, et l'on peut y lire qu'ils ont pris part à ces

16 attaques ensemble. C'est un rapport qui a été rédigé avant la publication

17 des objectifs stratégiques. Pourriez-vous nous dire, Monsieur, ce qui s'est

18 passé dans la région de Japra Valley à Bosanski Novi.

19 R. Sur la base de ce document, on peut lire que, sinon toute la population

20 musulmane, mais tout du moins, un bon nombre de personnes qui habitaient

21 dans la région, avait été déplacées.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, si je me souviens bien,

23 nous avons déjà abordé cette question.

24 M. HARMON : [interprétation] Oui. Je voulais simplement placer le tout dans

25 le contexte.

Page 16297

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vous remercie.

2 M. HARMON : [interprétation] Mais nous avons effectivement déjà entendu

3 suffisamment d'éléments de preuve concernant cette municipalité.

4 R. Je souhaiterais également attirer voter attention, encore une fois, sur

5 Miroslav Vjestica, et je souhaiterais parler encore une fois de sa

6 déclaration lors de la 16e Session de l'assemblée. Il dit avoir visité Novi

7 autour de cette période. Il a parlé également de la région qui avait été

8 coupée du reste de la région, qu'un ultimatum avait été lancé et selon lui

9 -- il parle également de cette question de reddition d'armes, et cetera.

10 Donc, il s'était rendu dans la région lui-même et il l'a dit lors de la 16e

11 Session.

12 Il y a également plusieurs références à cela dans le document en

13 question. En haut, par exemple, on peut voir la référence 1/92 du 16 avril,

14 c'est l'instruction de Bogdan Subotic que nous venons de voir il y a

15 quelques instants. Il y avait également une décision qui a été prise le 4

16 mai, je crois, une décision émanant de la Région autonome de la Krajina et

17 qui faisait référence à l'instruction de Bogdan Subotic qui avait mis cette

18 date butoir pour la reddition des armes. Donc, on peut voir un lien

19 existant entre les instructions émises par Bogdan Subotic du ministère de

20 la Défense et la TO, en passant par la RAK, et plus loin, ces instructions

21 ont été remises également aux représentants des municipalités. C'est la

22 raison pour laquelle ces opérations avaient lieu. Donc, il y a eu un lieu

23 entre le niveau régional, le niveau républicain, et les municipalités.

24 Q. Monsieur Brown, je souhaiterais que l'on passe à l'intercalaire 52. On

25 y parle des unités de Défense territoriale. Je souhaiterais, avant la

Page 16298

1 pause, en parler quelque peu. A l'intercalaire 52, nous pouvons voir une

2 proposition strictement confidentielle émanant du 1er Corps de la Krajina,

3 envoyée au QG principal de l'armée. Ce document porte la date du 27 mai

4 1992. Il s'agit de 15 jours après l'annonce des objectifs stratégiques. Il

5 s'agit d'une proposition visant à ce que les unités de la Défense

6 territoriale soient incorporées dans la VRS, n'est-ce pas ?

7 R. Oui, justement. C'est ce qui a été discuté lors de la 16e assemblé,

8 c'est que la TO devrait être intégrée dans la VRS. Le général Talic, dans

9 son discours du 27 mai, parle de ces unités de la Défense territoriale et

10 dit que ces unités devraient être intégrées dans le corps d'armée, et

11 finalement, on en parle comme étant "des brigades légères," "des brigades

12 d'infanterie". Très souvent, ces brigades légères d'infanterie ont été

13 créées à la suite de cette intégration des unités de la Défense

14 territoriale.

15 Q. Pourriez-vous, je vous prie, passer à la page 4 ainsi qu'à la page 5,

16 partie 4, qui se trouve en bas de la page 4 de votre rapport et qui va

17 jusqu'à la partie 4, qui se termine avec la troisième partie de la page 5.

18 R. La première partie de la quatrième section, à la page 4, les dernières

19 lignes parlent des régions pour lesquelles le général Talic estimait qu'il

20 pouvait créer des brigades légères à partir des unités de la TO déjà

21 existantes. Il propose la façon dont ces unités devraient être regroupées.

22 Ensuite, il fait une note. Il dit que les commandants des Défenses

23 territoriales deviendraient, à ce moment-là, des commandants des brigades

24 légères d'infanterie. Il parle de la force de ces brigades légères

25 d'infanterie, et cetera.

Page 16299

1 Dans la plupart des cas - je ne suis pas tout à fait certain pour ce

2 qui est de Prijedor - mais dans plusieurs cas, nous avons vu que ces

3 brigades légères d'infanterie étaient devenues des unités du Corps de la

4 Krajina intégrées et elles fonctionnaient également sous les ordres du

5 général Talic.

6 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je vois qu'il est peut-

7 être bon de prendre une pause à ce moment-ci.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certainement. Nous allons prendre une

9 pause jusqu'à 16 heures 15.

10 M. HARMON : [interprétation] Je vous remercie.

11 --- L'audience est suspendue à 15 heures 49.

12 --- L'audience est reprise à 16 heures 23.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Harmon, je

14 souhaiterais dire quelque chose concernant le calendrier. Eu égard au

15 calendrier, la Chambre estimait qu'il était peut-être nécessaire d'avoir

16 des heures supplémentaires. En fait, l'une des façons de résoudre le

17 problème, ce serait peut-être de poursuivre demain une demi-heure de plus

18 que prévu, et si cela ne suffisait pas, une demi-heure de plus, en fait,

19 c'est ce que je voulais dire. Si cela n'est pas suffisant, on m'a informé

20 que, si jeudi matin, nous avions besoin d'une heure ou de deux heures,

21 alors que la Chambre considère qu'elle ne souhaiterait pas prolonger quand

22 cela n'est pas nécessaire, ou faire des sessions sans que cela soit

23 vraiment tout à fait indispensable, mais la Chambre pensait que peut-être,

24 à ce moment-là, nous pourrions éventuellement avoir une session dans la

25 matinée de jeudi, alors avant la plénière. Ce serait le 22 juillet.

Page 16300

1 M. HARMON : [interprétation] Non, parce que le 22 juillet, je serai sur un

2 autre continent.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et le 21, alors, qu'est-ce que vous

4 dites du 21 ?

5 M. HARMON : [interprétation] Je serai sur un autre continent le 20,

6 également le 20 juillet.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, je pensais à cette date-là.

8 Il est bon de savoir donc que le 20, 21, et 22, vous seriez sur un

9 autre continent, donc nous ne pouvons peut-être siéger le 21.

10 M. HARMON : [interprétation] Oui, parce que mes collègues seront là encore.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne s'agit que de dernier recours,

12 mais les parties m'informeront. Pour ce qui est de jeudi prochain,

13 j'aimerais savoir si les parties seraient d'accord pour se rendre

14 disponibles jeudi matin, quelques heures dans la matinée de jeudi prochain.

15 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je me suis entretenu

16 avec M. Stewart --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 M. HARMON : [interprétation] -- concernant la possibilité de siéger jeudi-

19 ci --

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. HARMON : [interprétation] -- et M. Stewart m'a informé qu'il n'avait

22 absolument pas d'objections pour que cela se fasse.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Ce n'est pas seulement à nous,

24 mais le Greffe doit organiser également les équipes d'interprètes, et

25 cetera, donc il serait bon de savoir si vous estimez qu'il est nécessaire

Page 16301

1 absolument de prendre ces heures-là. Monsieur Harmon, j'aimerais savoir si

2 vous estimez que cela serait nécessaire.

3 Est-ce que vous pouvez nous donner une idée ?

4 M. HARMON : [interprétation] Est-ce que vous me permettez de répondre à

5 cela à la fin de la session suivante ?

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

7 M. HARMON : [interprétation] Je vais --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, Mme la Greffière aimerait bien

9 savoir maintenant puisqu'elle peut maintenant faire les appels nécessaires;

10 à la fin de la deuxième session, elle ne pourra pas le faire.

11 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, j'aurai besoin de la

12 fin de la journée.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La fin d'aujourd'hui.

14 M. HARMON : [interprétation] Je crois que j'essaierai de terminer un peu

15 plus tôt que prévu, mais j'aurai certainement besoin de la fin de la

16 journée d'aujourd'hui.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Loukas, auriez-vous besoin de

18 plus d'une journée ?

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Voyez-vous, Monsieur le Président, je crois

20 que, oui. Je crois que j'aurai besoin de plus d'une journée.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'une journée et une demi-heure

22 vous suffiraient ?

23 Mme LOUKAS : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président. J'aurai

24 besoin d'une journée pour le contre-interrogatoire, et il y aura également

25 sans doute des questions supplémentaires et des questions supplémentaires

Page 16302

1 de vous, Messieurs les Juges, il y a peut-être des questions de --

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Krajisnik.

3 Mme LOUKAS : [interprétation] -- M. Krajisnik également. Je ne sais pas

4 combien de temps que cela prendra.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je préfère les appeler des questions

6 supplémentaires par M. Krajisnik, et non pas le contre-interrogatoire

7 supplémentaire de M. Krajisnik.

8 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Président.

9 Donc, je me mets à votre disposition pour jeudi. Je serais très

10 heureuse de me rendre ici, soit jeudi prochain ou jeudi demain. Cela me

11 convient tout à fait.

12 Une autre question qui se pose, c'est de savoir -- on m'a

13 demandé si j'étais prête à me mettre d'accord et de commencer une heure

14 plus tôt demain, et j'ai indiqué à mon confrère que j'étais tout à fait

15 heureuse de me rendre disponible pour demain.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous ne pouvons pas combiner

17 une heure et en plus une demi-heure vers la fin de la soirée. On m'informe

18 que non, en fait.

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Non.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

21 Mme LOUKAS : [interprétation] Voilà, Monsieur le Président, cela veut dire

22 que je vais me rendre disponible.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends tout à fait.

24 Mme LOUKAS : [interprétation] Je comprends que l'heure impartie pour ce

25 témoin est telle que, si nous allions terminer l'audition de ce témoin

Page 16303

1 mercredi, avec les heures qui étaient prévues pour ce témoin, à ce moment-

2 là, cela ne serait pas suffisant.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si nous --

4 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est une question de logistiques --

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que nous avons très bien

6 compris, Madame Loukas. Maintenant, nous verrons si M. Harmon pourrait

7 terminer avant 19 heures ce soir.

8 Alors, veuillez poursuivre, Monsieur Harmon. Je vous écoute.

9 M. HARMON : [interprétation] [Hors micro]

10 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Harmon.

12 M. HARMON : [interprétation] Nous allons parler des paramilitaires.

13 Q. Monsieur Brown, au cours de la période avant l'annonce des objectifs

14 stratégiques, est-ce que les forces paramilitaires ont été utilisées en

15 partie pour libérer les territoires que les Serbes de Bosnie voulaient

16 obtenir ?

17 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est une question directrice qui vient

18 d'être posée. C'est le témoin qui devrait nous dire cela. Je pense que la

19 question qui lui est posée doit être posée de façon ouverte. C'est une

20 question importante, et il convient de la poser de façon appropriée.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, même si parfois je

22 pense que Me Loukas objecte un peu trop rapidement aux questions

23 directrices, cette fois-ci, ce n'est pas le cas. Pourrions-nous tout

24 d'abord demander au témoin quelle était l'implication des forces

25 paramilitaires dans les opérations militaires, s'il y en a eu d'ailleurs.

Page 16304

1 M. HARMON : [interprétation] Dans toutes les opérations ou --

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans les opérations militaires, menées

3 par les forces armées des Serbes de Bosnie.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais qu'il existe des documents qui

5 indiquent que certaines unités paramilitaires ont participé aux opérations

6 menées par les Serbes de Bosnie.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel genre d'opérations ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] A Zvornik et à Bijeljina, c'est Arkan qui y

9 était aussi. Je suis au courant de l'intégration de la force de la défense

10 serbe dans la TO serbe ou un document qui parle de la force de la défense

11 serbe, SOS, qui a été intégrée dans la TO de Sanski Most.

12 Je suis aussi au courant des activités de Veljko Milankovic, un leader

13 paramilitaire qui est venu de Prnjavor et qui a opéré en Croatie en 1991 et

14 a été par la suite intégré dans le 1er Corps de la Krajina de la VRS en

15 1992, et cette unité a participé à ces opérations.

16 Je sais aussi qu'il y a eu des activités paramilitaires à Prijedor.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les Juges de la Chambre ont reçu

18 beaucoup de documents et beaucoup de dépositions concernant la prise de

19 contrôle militaire de certaines municipalités. Est-ce qu'ils ont participé

20 à ce genre d'opérations ou les exemples que vous avez donnés, ne sont-ils

21 pas liés à ces genres d'opération ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] A Prijedor, par exemple, je sais que ce groupe

23 faisait partie de la 43e Brigade motorisée, qui a participé aux attaques

24 sur Prijedor en 1992, au mois de mai 1992. La référence au SOS de Sanski

25 Most se trouve dans un document qui date de la fin du mois d'avril 1992.

Page 16305

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons entendu des dépositions à ce

2 sujet, concernant le SOS de Sanski Most.

3 Vous pouvez continuer, Monsieur Harmon.

4 M. HARMON : [interprétation]

5 Q. Je vous prie de bien vouloir vous référer à l'intercalaire 53. Monsieur

6 Brown, la conclusion de la cellule de Crise lors de la réunion qui a eu

7 lieu le 21 et le 22 avril 1992, cette conclusion, en date du 22 avril 1992,

8 c'est le document que nous avons sous nos yeux. Au niveau du point 6, il

9 est écrit : "La cellule de Crise de la municipalité serbe de Sanski Most,

10 par la présente, adopte la conclusion que les forces de la défense serbe

11 doivent être placées à la disposition du commandant de la Défense

12 territoriale serbe et engagées en tant qu'unité spéciale de la Défense

13 territoriale serbe."

14 Les forces de la Défense territoriale serbe : qu'est ce que vous pourriez

15 nous dire au sujet de cette unité, de cette information ? Brièvement,

16 Monsieur Brown.

17 R. Les forces la Défense serbe, le SOS plutôt, ont participé au blocus de

18 Banja Luka au mois d'avril, au début du mois d'avril 1992. Et de façon

19 similaire, ici, ils ont été intégrés à la Défense territoriale, selon ce

20 document.

21 Q. Pourrions-nous ensuite examiner l'intercalaire 54. Là, Monsieur Brown,

22 il s'agit d'un document émanant de l'état-major de l'armée de la République

23 serbe de Bosnie-Herzégovine. Ce document a été distribué à, comme on peut

24 le voir sur la page 6 du document, parmi d'autres unités, au 1er Corps de la

25 Krajina, le 2e Corps de la Krajina, le Corps de la Bosnie de l'est, le

Page 16306

1 Corps de Sarajevo et Romanija, et le Corps d'Herzégovine, ainsi qu'au

2 président de la présidence de la RSBiH et au premier ministre de la RSBiH,

3 ainsi qu'au commandant de l'état-major principal. Ce rapport a été préparé

4 le 28 juillet 1992 et concerne les formations paramilitaires qui existaient

5 et opéraient dans la République serbe de Bosnie-Herzégovine. Pourriez-vous

6 nous dire, Monsieur Brown, qu'est-ce qui saute aux yeux dans ce rapport,

7 enfin, la chose la plus importante ?

8 R. C'est un document assez long où on parle de toute une série de topos.

9 Il s'agit d'un rapport concernant les formations paramilitaires sur le

10 territoire de la RSBiH. On parle de la guerre, des caractéristiques de la

11 guerre, des caractéristiques qui ne sont pas toujours agréables à entendre,

12 la morale qui n'est pas vraiment de beau niveau, du pillage, des meurtres

13 en masse, et cetera. Je pense qu'à un moment donné, ils parlent d'un

14 "élément génocidaire du peuple serbe." Donc, c'est vrai qu'ils sont

15 présentés de façon extrêmement critique.

16 Plus tard dans le document, à peu près à la page 3, on parle des

17 différents groupes qui rentrent dans cette catégorie des paramilitaires, et

18 on les énumère. Ce groupe se trouve dans différentes localités partout en

19 République serbe de Bosnie-Herzégovine, en disant où est-ce qu'ils

20 fonctionnent, qu'est-ce qu'ils ont pu faire, où est-ce qu'ils se trouvent à

21 présent, et cetera. Apparemment, un certain nombre de ces groupes, selon ce

22 document, ont été intégrés à la VRS entre-temps.

23 Q. Je vais vous arrêter là. La liste de groupes dont vous parlez se trouve

24 à la page 3. Ensuite, cette énumération se poursuit jusqu'à la page 5.

25 Pourriez-vous énumérer et identifier les groupes qui opéraient dans la zone

Page 16307

1 de responsabilité du 1er Corps de la Krajina ?

2 R. A la page 3, le troisième paragraphe à partir d'en bas, on parle d'un

3 groupe du Parti radical serbe qui opère à Banja Luka.

4 Ensuite, le paragraphe suivant, un groupe à Sipovo.

5 Sur la page suivante, la page 4, on parle d'un groupe à la tête

6 duquel se trouve Zoran Barisic, la 19e Brigade, qui faisait partie du corps

7 de Talic. Apparemment, cela devait être intégré par le corps.

8 Ensuite, l'unité de Mrkonjic Grad, qui fait partie du corps du

9 général Talic; donc le paragraphe suivant.

10 Ensuite, le paragraphe suivant, on parle des unités paramilitaires

11 dans la région de Kljuc. A nouveau, la zone de responsabilité du général

12 Talic.

13 Le paragraphe suivant, un groupe de 13 personnes, à la tête duquel se

14 trouve Zeljko Skrbic dans la zone de responsabilité du 1er Corps de la

15 Krajina et de la 30e Division; donc, c'est le corps du général Talic.

16 Ensuite, le groupe autoproclamé de la région de Prijedor, le groupe

17 de Cigo, Zolja, et la, à nouveau, il s'agit du corps du général Tadic, en

18 réalité, de la 43e Brigade, une des unités du général Talic.

19 Ensuite, suivant, Veljko Milankovic de Prnjavor. Donc, c'était aussi

20 le corps du général Talic. Mile Janjatovic de Bosanska Gradiska, le corps

21 d'armée du général Tadic. En ce qui concerne Milankovic, il est dit qu'il

22 était placé formellement sous le commandement du 1er Corps d'armée de la

23 Krajina.

24 Ensuite, on trouve une référence faite aux forces de la Défense serbe

25 à Banja Luka. Là, à nouveau, il s'agit du corps d'armée du général Talic.

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1 La page 5, Teslic, qui se trouvait aussi dans la zone de

2 responsabilité du corps du général Talic.

3 Je pense que ce sont là les unités principales que l'on mentionne

4 dans ce document.

5 Q. Quel était le rôle de ces unités paramilitaires, les unités identifiées

6 dans ce document, quand il s'agissait d'atteindre les objectifs

7 stratégiques que nous avons identifiés plus tôt, ceux qui ont été articulés

8 lors de la session de travail de l'assemblée des Serbes de Bosnie ? Quel

9 était leur rôle par rapport à cela ?

10 Mme LOUKAS : [interprétation] Il y a une supposition dans cette question,

11 et je soulève une objection.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je pense que vous

13 devriez tout simplement demander s'ils ont eu un rôle quelconque dans cela,

14 et le cas échéant, quel était ce rôle. Pourriez-vous formuler la question

15 comme cela.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas vous

17 dire ce que faisait chacun de ces groupes paramilitaires. Je n'ai pas, à

18 chaque fois, trouvé des documents concernant tous ces groupes. Ce que je

19 peux dire, c'est que certaines de ces unités ont été intégrées au 1er Corps

20 de la Krajina. Ce document montre qu'un certain nombre de ces unités

21 travaillaient de concert avec le 1er Corps de la Krajina, à l'intérieur de

22 ce corps. Je sais que les unités de Prijedor faisaient partie formellement

23 de la brigade du général Talic, qui a participé, de façon active, aux

24 attaques sur Kozarac, Hambarine, et autres villages de la municipalité de

25 Prijedor. Je sais que Veljko Milankovic, qui est mentionné dans ce rapport,

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1 qui vient de Prnjavor, qu'il a été actif aussi au sein du 5e Corps, mais

2 qu'il a aussi participé aux opérations de combat dans le corridor au mois

3 de juin 1992, puisqu'une de ces unités a participé dans cette opération.

4 Pour certaines de ces unités, je dirais qu'elles étaient intégrées à

5 la VRS, et elles ont participé aux opérations de combat du 1er Corps de la

6 Krajina. Mais je ne pourrais pas affirmer cela pour toutes ces unités

7 puisque je ne les ai pas examinées tout simplement, pas en détail. Mais

8 pour certaines de ces unités, oui, je peux vous donner des informations.

9 D'ailleurs dans ce document, on parle de l'intervention de ces unités

10 dans la VRS quand il s'agit de les placer sur le contrôle de l'armée. Ce

11 document est extrêmement critique quand il s'agit des actes de ces

12 paramilitaires, de ce qu'ils ont fait et de ce qu'ils sont capables de

13 faire. Il parle de l'élément génocidaire du peuple serbe, c'est dans les

14 premières pages de ce document. Ensuite, quand vous arrivez à la page 6,

15 vous trouvez qu'il y a des difficultés à cause de ce qu'ils ont fait ou ce

16 qu'ils font parce que la confiance dans le gouvernement est diminuée. Ils

17 mettent en péril les combats menés par l'armée. Ils demandent que chaque

18 groupe de Serbes armés doit être placé sous le commandement de l'armée, et

19 si ce n'est pas le cas, il faut tout simplement le démanteler, et prendre

20 les mesures juridiques contre eux. Mais ce qu'ils n'ont pas fait dans ce

21 document, ce qu'ils n'ont pas dit, c'est qu'ici nous avons un groupe de

22 gens qui représentent un élément génocidaire, et il faudrait les poursuivre

23 au pénal. Ils n'ont pas dit qu'ils ne veulent pas que ces gens fassent

24 partie de l'armée, ces gens qui sont des pilleurs, des profiteurs de la

25 guerre et qui ont commis des crimes, c'est bien clair qu'ils l'ont fait.

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1 Ils disent qu'il faut les tolérer dans la mesure où ils sont intégrés dans

2 le cadre juridique de l'armée. C'est pour cela que je pense que ce document

3 est important.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux vous poser une

5 question assez directe par rapport à la réponse que vous avez donnée ?

6 S'ils disent que la présence et l'activité a affecté de façon négative le

7 peuple serbe de deux façons, il est logique d'imaginer qu'à partir du

8 moment où ils seront subordonnés, ils vont continuer à se comporter de la

9 même façon ? Ceci ne devrait pas aider en quoi que ce soit qui que ce soit.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pourrais peut-être vous en citer un

11 exemple. Veljko Milankovic a été mentionné vers la fin de l'année 1991; on

12 en parle dans ce document. On avait attiré l'attention sur lui en 1991

13 puisque c'était un homme qui avait un casier judiciaire et qui avait causé

14 des problèmes. Ce groupe faisait partie du 5e Corps et a continué à causer

15 des problèmes. Je pense qu'il a été accusé de pillage. Dans ce document, on

16 parle qu'il continue à agir de la même façon à partir du moment où il est

17 placé sous le commandement du 1er Corps de la Krajina. C'est un homme qui a

18 un casier judiciaire ; ensuite, on l'envoie en Croatie; il continue à ce

19 comporter de la même façon, il continue à causer des problèmes au sein de

20 la VRS, en même temps on le garde au sein de la VRS, et même, on lui donne

21 des ordres d'aller à Knin à la fin de l'année 1992-début 1993, où il a été

22 blessé. Ensuite, il est mort plus tard. Du point de vue militaire et en

23 tant qu'un ancien militaire de carrière, je dois dire que là, il s'agit

24 d'un modèle qui est relatif au passé de ces personnes. En même temps, dans

25 ce document, on dit que ces gens seront tolérés à partir du moment où ils

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1 font partie d'une structure formelle.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En même temps, si vous les intégrez dans

3 les structures de l'armée, les structures normales de l'armée, ce n'est pas

4 utile puisqu'ils diminueraient encore plus la confiance dans le

5 gouvernement puisqu'ils feraient partie de l'armée officielle. Ensuite,

6 s'ils continuent à agir de la même façon, est-ce qu'ils ne mettraient pas

7 en péril le moral des troupes de l'armée de la République serbe de Bosnie-

8 Herzégovine ? J'essaie de comprendre. S'ils continuent à agir comme cela,

9 est-ce que cela changerait quoi que ce soit par rapport à ces soucis qui

10 ont été exprimés dans ce document ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux imaginer qu'ils avaient l'impression

12 que si on les intégrait dans la structure normale, on pourrait les

13 contrôler d'avantage.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais cela impliquerait qu'ils

15 arrêteraient de se comporter de cette façon. Est-ce que je vous ai bien

16 compris ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est peut-être une des raisons, mais

18 apparemment, ils avaient un problème, ils n'arrivaient pas à les contrôler.

19 Ce qui me frappe ici, c'est qu'ils savaient ce qu'il était capable de

20 faire, mais ils ne disent pas ce qu'il faut vraiment faire, à savoir

21 persécuter ces gens-là, les poursuivre au pénal. Donc, je me dis qu'eux

22 aussi, ils avaient un intérêt à les garder à l'intérieur.

23 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce que vous savez quelque chose sur l'origine de

24 ces paramilitaires ? Est-ce que vous savez comment ils sont apparus ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas tous les détails. Je n'ai

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1 pas vraiment étudié tous ces groupes au cas par cas. Je sais que, souvent,

2 ils sont venus de la guerre en Croatie, par exemple, Milankovic en est un

3 exemple. Mais je ne saurais vous expliquer au cas par cas tout ces groupes-

4 là, leur raison d'être.

5 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce qu'on peut dire que ce sont des créations

6 spontanées sur le terrain à partir d'initiatives prises par des hommes

7 particulièrement forts et décidés ? Est-ce que cela correspondait à un

8 besoin exprimé par telle ou telle autorité ? Est-ce que vous savez quelque

9 chose là-dessus ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais peut-être attirer votre attention sur

11 un des documents qui est apparu assez tôt. Il s'agit de la distribution des

12 armes par la JNA et par le SDS. Là, il y a eu l'armement, et dans ce

13 document, on trouve un certain nombre de références. Je pense que je

14 pourrais en parler; on parle des affiliations politiques, des partis

15 politiques, mais aussi au début, il parle du SDS, de différents groupes

16 politiques, et c'est peut-être comme cela que ces groupes ont été armés.

17 M. HARMON : [interprétation]

18 Q. Monsieur Brown, vous avez parlé du "SDS," et je voudrais attirer votre

19 attention sur la page 3, à la municipalité de Sipovo. Voyez-vous le

20 deuxième paragraphe de la troisième page ?

21 R. Oui, et je pense qu'on en parle aussi au niveau de la page 4 par

22 rapport à une autre municipalité, Mrkonjic Grad.

23 Q. On trouve cela en haut de la page 4, effectivement troisième

24 paragraphe, "Les membres du SDS dans la région de Mrkonjic Grad." Est-ce

25 que vous pourriez faire un commentaire à ce sujet ? De qui parle-t-on ?

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1 R. Ils voulaient indiquer qu'il existait un rapport avec le SDS et que les

2 dirigeants du SDS supportaient les dirigeants de Sipovo. Le SDS avait

3 essayé de créer aussi une branche à Mrkonjic Grad, donc, on parle de ces

4 rapports.

5 Q. Monsieur Brown, vous avez parlé du désarmement de ce groupe. Mais de

6 façon générale, quelle était la taille de ce groupe ? Quels étaient les

7 effectifs de ce groupe ? Est-ce que nous parlons de milliers d'hommes, de

8 centaines d'hommes ?

9 R. D'après ce rapport, il s'agit de groupes d'une quarantaine,

10 cinquantaine d'hommes. A l'époque, il y avait à peu près une soixantaine de

11 groupes de paramilitaires qui fonctionnaient, qui opéraient au sein de la

12 VRS. Je pense que cela nous amène à peu près à 2 000 hommes. Si l'on

13 compare leurs effectifs aux effectifs de la VRS, leur importance est bien

14 moindre en termes d'effectifs.

15 Q. Nous avons regardé un organigramme de l'armée plus tôt cet après-midi.

16 A un moment donné, nous avons regardé les effectifs, et par rapport aux

17 paramilitaires, on voit que l'importance est bien plus grande. Est-ce que

18 l'armée était capable de contrôler tous ces groupes de paramilitaires, ceux

19 qui ont été identifiés ?

20 R. S'ils ont pu mener des opérations à grande échelle, telles que les

21 opérations qui ont eu lieu en Bosnie, les corridors, Sarajevo et ailleurs,

22 dans ce cas-là, je pense qu'ils auraient pu très facilement résoudre ce

23 problème-là.

24 Q. Au niveau du premier paragraphe, on parle des hommes d'Arkan, de

25 Seselj, du capitaine Dragan, et cetera. Vous avez parlé de Bijeljina plus

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1 tôt aujourd'hui. Savez-vous à quel moment se sont produits ces événements,

2 les événements de Bijeljina ?

3 R. Oui. C'était les derniers jours du mois de mars et le début du mois

4 d'avril 1992.

5 Q. Savez-vous s'il y a eu des unités paramilitaires qui ont participé à

6 l'avance à la marche sur Bijeljina ?

7 R. Oui. Les paramilitaires d'Arkan.

8 Q. Vers la fin du mois de mars à Bijeljina, on parle des activités

9 paramilitaires et de leur comportement. Ce document date du 28 juillet,

10 donc, quatre mois plus tard. J'ai deux questions à ce sujet. La première :

11 à la date du 28 juillet 1992 dans la zone de responsabilité du 1er Corps de

12 la Krajina, pourriez-vous nous résumer ce qui s'est passé par rapport aux

13 objectifs stratégiques, et l'implémentation de ces objectifs par le 1er

14 Corps de la Krajina, à la date du 28 juillet 1992 ?

15 R. Le gros du territoire qui relevait de la zone de responsabilité du 1er

16 Corps de la Krajina a été contrôlé par le 1er Corps de la Krajina. Ils ont

17 mené des attaques dans de nombreuses municipalités : Prijedor, Sanski Most,

18 Kljuc, Kotor Varos. Ils contrôlaient le corridor, ils avaient le contrôle

19 d'une grande partie de leur zone de responsabilité. Ils ont conduit des

20 opérations à grande échelle dans les corridors avec d'autres corps d'armée

21 et d'autres éléments, d'autres unités. Ensuite, ils ont pris le contrôle du

22 corridor à cette date-là. Puis, il y avait une petite section qu'ils

23 tenaient sur la rivière Una, qu'ils contrôlaient aussi.

24 Q. En ce qui concerne la population non-serbe, qu'est-ce qui s'est passé

25 avec la population non-serbe dans la région du 1er Corps de la Krajina à la

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1 date du 28 juillet 1992 ? De façon générale.

2 Mme LOUKAS : [interprétation] C'est une question à laquelle le témoin ne

3 peut pas répondre. Il a fait son rapport sur la base des documents qu'il a

4 lus. Ce qui s'est produit dans la zone de responsabilité du 1er Corps de la

5 Krajina, d'après M. Harmon, ce qu'il allègue, c'est une question dont les

6 Juges auront à décider un jour, mais pas sur la base de ces rapports, qui

7 se contentait d'analyser des documents d'autres natures.

8 M. LE JUGE ORIE : Oui.

9 M. HARMON : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec Me Loukas. Ce

10 document parle de cela concrètement. Le document qu'il a utilisé pour faire

11 son rapport parle de questions de transfert de population. Il y a une

12 section dans le rapport de M. Brown concernant le transfert de population,

13 le rôle de la JNA, le rôle de la VRS dans tous ces événements, et le rôle

14 de la police. Je pense que M. Brown est tout à fait capable de répondre à

15 la question que je lui ai posée.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Loukas, le témoin, quand on lui a

17 posé des questions au sujet de certains événements, a souvent commencé sa

18 réponse en disant : "Sur la base des documents, j'au pu trouver que…" Donc,

19 essayons de voir quelle est sa réponse. Il a certainement des connaissances

20 personnelles qui ne sont pas forcément basées sur les documents qu'il a

21 étudié.

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendons de voir ce que le témoin peut

24 dire à ce sujet.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après les documents que j'ai vus, que j'ai

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1 examinés, j'y ai trouvé des références par rapport aux expulsions, aux

2 déplacements, aux transferts de la population. On disait que les autorités

3 devaient travailler davantage là-dessus, faire plus d'efforts dans ce sens.

4 Ce sont les documents qui indiquent que de nombreuses personnes ont été

5 déplacées. Il y a des références à des gens qui ont été placés dans des

6 centres de détention, et ensuite, qui ont été déplacés d'un centre à un

7 autre. Il y a des références à des personnes qui ont été chassées du

8 territoire.

9 M. HARMON : [interprétation] Je n'ai plus besoin de poser des questions au

10 sujet des paramilitaires. Est-ce que vous, vous avez des questions ?

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une question. Dans le document en

12 haut de la page 4, j'ai toujours pensé qu'Arkan était Zeljko Raznjatovic,

13 et là, il y a un autre Arkan. Pour moi, c'est un fait nouveau. Est-ce que

14 le témoin peut m'aider, parce que M. Zoran Barisic, il est surnommé Arkan

15 ici. J'ai du mal à comprendre tout le paragraphe de toute façon, hormis

16 cette particularité qui a attiré mon attention.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux simplement penser qu'il a utilisé ce

18 nom, et que cela n'a rien à voir avec l'Arkan qui a pris le contrôle de

19 Bijeljina. Il a simplement peut-être décidé d'utiliser ce nom. Peut-être

20 que c'est ainsi qu'on le désignait.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela, c'est ce que vous pensez, c'est ce

22 que vous supposez ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est tout ce que je peux envisager à

24 partir des documents, mais je ne sais pas vraiment.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais on voit que la chose suivante : "Le

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1 commandement de la 19e Brigade a reçu des menaces de manière constante de

2 la part de ce groupe et du groupe présent."

3 Donc, j'imagine qu'il s'agit plutôt de menaces, "threats," que de

4 "treats."

5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est sans doute une coquille.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est quoi, "ce groupe à présent et

7 passé" ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas clair. On ne sait pas très bien

9 si cela faisait partie de la 19e Brigade ou pas.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, on n'est pas trop sûr.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne sais pas.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

13 M. HARMON : [interprétation] Je procéderai à une vérification de la

14 traduction. En B/C/S, c'est la page 4.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne demande pas qu'on nous fournisse

16 une nouvelle traduction, mais s'il y a erreur, il conviendrait de la

17 corriger.

18 M. HARMON : [interprétation]

19 Q. Une dernière question. Savez-vous que certaines de ces unités

20 paramilitaires intégrées au sein de la VRS, savez-vous si elles ont

21 continué à commettre des crimes ?

22 R. Oui. Je connais un groupe à Prijedor qui a continué à se livrer à ce

23 type d'activités. Je sais que le groupe de Milankovic a créé beaucoup de

24 problèmes. On a parlé de pillage, et à ce moment-là, les unités concernées

25 étaient déjà dans la VRS.

Page 16318

1 Q. Savez-vous ce qu'il est advenu de ceux qui ont été incorporés à la VRS

2 et qui ont continué à se livrer à des activités criminelles ?

3 R. Je sais…que Milankovic est resté dans la VRS jusqu'au moment où il a

4 été blessé et envoyé à Knin par Talic, en février 1993. Il a été blessé là,

5 et ensuite il est décédé à l'hôpital militaire de Belgrade.

6 Quant à l'unité de Cigo, lui-même et son unité sont restés à Prijedor entre

7 la 43e Brigade et une autre brigade qui se trouvait à Prijedor. Je crois

8 qu'il ne lui est rien arrivé pendant la guerre.

9 Zoran Karlica en est un autre qui appartenait à la 43e Brigade. Il a été

10 tué au cours d'une opération à Prijdor. En tout cas, je sais ce qu'il en

11 est de Cigo et de Milankovic. Ils sont restés au sein de leur structure.

12 Q. Nous allons maintenant passer à un autre sujet, Monsieur Brown, et

13 revenir à la 16e Séance de l'assemblée serbe. Je voudrais que vous me

14 disiez si vous savez comment ces objectifs stratégiques ont été distribués,

15 ont été communiqués, aussi bien aux unités militaires au sein du 1er Corps

16 de la Krajina qu'au sein des instances civiles. Si vous le savez, pouvez-

17 vous nous faire part de la situation en la matière.

18 R. Il est manifeste que cela a déjà commencé lors de la séance de

19 l'assemblée, quand M. Karadzic a annoncé les objectifs et a parlé aux

20 députés. C'était un processus de distribution de l'information. Il y avait

21 aussi le général Ratko Mladic, le général Talic. Cette séance de travail

22 même a eu pour objectif de communiquer ces buts. Je pense qu'on peut dire

23 que les séances de l'assemblée peuvent être considérées comme une manière

24 de faire circuler l'information le long de la filière politique.

25 Je sais, d'après les documents que j'ai étudiés, qu'on fait référence à des

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1 documents qui ont été publiés ultérieurement ou peu après, à ces objectifs.

2 On fait référence aux objectifs de notre lutte. On annonce ces objectifs.

3 Donc, on voit bien dans ce document que les objectifs sont connus et

4 compris, si bien qu'effectivement ces objectifs ont bien été transmis

5 jusqu'aux structures de l'armée.

6 Q. Passons maintenant, je vous prie, à l'intercalaire numéro 55. Nous

7 avons ici un document qui est un extrait du procès-verbal d'un

8 enregistrement de la 27e Séance de l'assemblée nationale de la Republika

9 Srpska qui a eu lieu le 3 avril 1993. Je ne sais pas si ce document a déjà

10 été versé au dossier. C'est un document qui nous a été fourni par M.

11 Krajisnik précédemment.

12 J'aimerais attirer votre attention, Messieurs les Juges, sur la page 7

13 dudit document, et au passage qui figure après la mention "chairman," à

14 savoir président, et cela désigne M. Krajisnik. J'aimerais vous citer un

15 passage et je vais vous demander ensuite, Monsieur le Témoin, de nous faire

16 part de vos réactions. Je commence à la cinquième ligne après le mot

17 "chairman."

18 "Pourquoi autant de monde participent aux séances de l'assemblée ? Pourquoi

19 y a-t-il des gens qui sont assis à l'arrière ? Des présidents de comités

20 exécutifs de municipalités et des présidents de branches locales du SDS

21 viennent participer. Pourquoi ? C'est parce que tout ceci a une importance

22 particulière en temps de guerre. C'est la meilleure façon de garder notre

23 peuple informé de ce qui est en train de se passer. Nous avons constaté que

24 ceux qui sortaient des séances de travail de l'assemblée avaient une vision

25 bien claire de ce qu'ils étaient censés faire."

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1 Il poursuit quelques lignes plus tard en disant la chose suivante : "Et

2 croyez-moi, une fois que nos opinions seront limpides, seront claires comme

3 de l'eau roche, à ce moment-là, il est beaucoup plus facile de travailler

4 sur le terrain."

5 Pouvez-vous nous faire part de ces observations ? Vous parlez de la

6 transmission de l'information, des objectifs stratégiques. Pouvez-vous nous

7 faire part de vos observations suite à la lecture que je viens de faire de

8 ce passage ?

9 R. Ceci semble rappeler l'importance qu'ont les sessions de l'assemblée

10 pour transmettre le message afin que tout le monde ait une compréhension

11 bien claire de ce qu'ils doivent faire. Il ne s'agit pas simplement de

12 transmettre l'information, mais de faire comprendre ce qu'il convient de

13 faire suite à ce qui a été décidé.

14 Q. J'aimerais maintenant vous montrer un certain nombre de documents qui

15 attestent de la communication de ces objectifs stratégiques. Commençons par

16 le document que l'on trouvera à l'intercalaire numéro 56 du classeur. Nous

17 avons un document qui émane du commandement de la 1ère Brigade des

18 Partisans, en date du 14 mai 1992, c'est-à-dire deux jours à peine après la

19 proclamation des objectifs stratégiques. Nous avons ici une réunion des

20 présidents des municipalités se trouvant dans la zone de responsabilité de

21 la division. Au point 4, à la page numéro 1, on voit la mention suivante :

22 discussion -- enfin, je signale qu'il s'agit de l'ordre du jour de la

23 réunion. Je reprends : discussion et propositions en vu d'une coopération

24 future avec les unités de la JNA afin d'obtenir des terroristes, et au

25 sujet du traitement des soldats (commandants des unités) dans la zone de la

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1 Krajina de Serbie. Ensuite, on donne le nom des présents.

2 Monsieur Brown, pouvez-vous nous dire qui étaient les militaires présents

3 et quels étaient leurs rôles ?

4 R. Le colonel Galic était le commandant de la 30e Division, c'est-à-dire

5 une unité subordonnée au général Talic, qui appartenait donc au 1er Corps de

6 la Krajina.

7 Le colonel Basara, nous en avons déjà parlé, c'était un commandant de

8 brigade, et sa brigade, on voit ici, c'est la Brigade des Partisans.

9 Ensuite, elle a été rebaptisée sous le nom de Brigade de Krajina. Enfin, ce

10 n'était pas une unité subordonnée. C'était une unité qui était dans la zone

11 de Sanski Most, qui fonctionnait sous les ordres du général Talic.

12 Le lieutenant-colonel Popovic [phon] était un officier d'état-major qui

13 relevait du général Galic. On parle du commandant Bosko Lukic [phon] de la

14 Défense territoriale de Kljuc. Ensuite, on voit les noms de présidents de

15 diverses municipalités, et ces municipalités se trouvaient dans la zone de

16 responsabilité de la 30e Division.

17 Si on regarde le cachet qui figure en haut du document, on voit qu'il

18 s'agit de celui du commandement de la 1re Brigade des Partisans. Il

19 s'agissait d'une unité qui était subordonnée à la 30e Division. Donc, on

20 peut penser, à la lecture de ce procès-verbal, que les informations ont été

21 transmises de la 30e Division jusqu'à la Division des Partisans.

22 Q. J'aimerais maintenant que nous passions à l'examen de la page 3 de ce

23 document. Reportons-nous aux paragraphes 2 et 3. Que pouvez-vous nous dire

24 à ce sujet ?

25 R. On voit que le colonel Galic informe les présents de ce qui se déroule

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1 dans diverses zones, dans les différentes municipalités qui relèvent de la

2 zone de responsabilité. On voit qu'à Kljuc, il y a eu prise de contrôle

3 partiel. La situation dans la municipalité de Kljuc est relativement calme.

4 Au moment de la prise de contrôle, les unités du 9e Corps et du 5e Corps (un

5 bataillon de la 6e Brigade des Partisans) assuraient la sécurité de Kljuc."

6 Q. Moi, c'est plutôt la page 3 qui m'intéresse, Monsieur Brown, surtout

7 s'agissant des objectifs stratégiques. Que s'est-il passé ?

8 R. Le colonel Galic donne une idée de la situation dans les municipalités.

9 Ensuite, le président de la municipalité de Mrkonjic Grad, Milan Nalija

10 [phon], présente les conclusions d'une réunion qui s'est tenue à Banja

11 Luka. Il faut savoir que ceci a eu lieu deux jours après le 12 mai. Ce dont

12 on parle ici c'est des questions qui ont été débattues le 12 mai. J'imagine

13 qu'il avait participé à cette réunion. Il parle de la formation de l'armée

14 et il dit ici : "Il a été estimé que cette armée peut occuper un territoire

15 vaste." Il parle des objectifs stratégiques formulés lors de la réunion de

16 Banja Luka, et il les présente. Ensuite, nous avons une liste des objectifs

17 stratégiques tels qu'ils ont été définis. Il ne s'agit pas d'une copie mot

18 pour mot des propos de Radovan Karadzic, mais il s'agit, pour l'essentiel,

19 des mêmes objectifs : séparation, corridor de la Drina, rive droite de la

20 Sava, Sarajevo doit être divisée -- il dit "ou rasée" - accès à la mer

21 éventuel.

22 Donc, il semble transmettre ces objectifs dans ce forum, avec les

23 dirigeants municipaux, les commandants militaires, et on voit, d'après le

24 cachet que porte ce document, que ceci a été transmis le long de la chaîne

25 hiérarchique militaire en aval.

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1 Q. A la fin de ce document, le colonel Galic fait une proposition. Pouvez-

2 vous examiner cette proposition, la commenter, cette proposition qui a fini

3 d'ailleurs par être adoptée lors de cette réunion.

4 R. La première proposition, c'est "Mettre en œuvre les décisions de la

5 réunion de Banja Luka, mais les soumettre aux commandants des unités et des

6 municipalités."

7 Ensuite, il dit : "Toutes les forces de la République serbe de Bosnie-

8 Herzégovine doivent travailler dans le sens des mêmes objectifs." Il parle

9 des profiteurs de guerre dont il faut empêcher les activités.

10 Il parle des soldats, des "résultats obtenus au combat," et cetera.

11 Ensuite, il dit que les conclusions étaient unanimement adoptées.

12 Ensuite, il dit : "Il faudrait qu'il y ait une réunion tous les 15 jours"

13 et que "les présidents des assemblées municipales en soient responsables."

14 Donc, selon moi, ce document est assez intéressant. Pourquoi ? Parce que ce

15 document est produit très peu de temps après la réunion de l'assemblée.

16 Ici, on informe au sujet des objectifs. On voit qu'il y a coopération entre

17 l'armée et les dirigeants civils. On insiste, dans les décisions, qu'il

18 faut mettre en œuvre les conclusions de la réunion de Banja Luka et que

19 tout le monde doit poursuivre les mêmes objectifs. Ces décisions sont

20 adoptées unanimement par ceux qui sont présents lors de cette réunion. Il

21 est dit également qu'il doit y avoir de nouvelles réunions à l'avenir.

22 Q. S'agissant de la communication des objectifs stratégiques, j'aimerais

23 que nous examinions l'intercalaire numéro 57 très brièvement, parce que

24 nous avons beaucoup de documents à examiner ensemble. Nous avons, à

25 l'intercalaire 57, un document en date du 21 mai 1992 --

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1 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

2 M. HARMON : [interprétation] Est-ce que c'est le document que vous avez,

3 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, à votre intercalaire 57, un

4 document en date du 21 mai 1992 ?

5 Mme LOUKAS : [interprétation] Je pense qu'il s'agit du document qui se

6 trouve à l'intercalaire 58.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document que nous avons à

8 l'intercalaire 57, il semble --

9 M. HARMON : [interprétation] Je m'excuse.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- qu'il s'agisse d'un document qui

11 vient du commandement du corps et qui date du 2 août 1992.

12 M. HARMON : [interprétation] En fait, cela devrait se trouver se trouver à

13 l'intercalaire 57. Il y a peut-être eu une peut-être confusion. Est-ce que

14 le document qui se trouve à votre intercalaire 57 est un document datant du

15 21 mai 1992 ?

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non.

17 M. HARMON : [interprétation] A ce moment-là, on pourrait passer à

18 l'intercalaire numéro 9. Il y a peut-être eu une erreur. Le document figure

19 peut-être en réalité à l'intercalaire numéro 9.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'un document du 21 mai.

21 M. HARMON : [interprétation] Ce doit être normalement un document du 1er

22 Corps de la Krajina, en date du 21 mai 1992, ordre relatif à la

23 mobilisation générale.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

25 M. HARMON : [interprétation] Bien.

Page 16325

1 Q. Avez-vous le document sous les yeux, Monsieur le Témoin ?

2 R. Oui.

3 Q. Nous sommes en train de parler de la transmission des objectifs.

4 Pouvez-vous nous donner une idée de l'importance de ce document, qui est

5 publié neuf jours après la proclamation des objectifs stratégiques.

6 R. J'ai parlé brièvement de ce document hier, et je crois que je vous ai

7 demandé de vous référer au point 6, qui figure à la page 2 dudit document.

8 Le général Talic -- nous avons ici un ordre général de mobilisation qui

9 découle de la décision de la présidence de la veille. Au point 6, il est

10 dit : "Expliquez aux conscrits, à leur arrivée, l'objectif de notre lutte

11 et les informer sur leurs droits et leurs devoirs."

12 Q. Si on voit la liste des destinataires en fin du document, on voit

13 qu'elle est assez conséquente.

14 R. Oui. Ce sont les différentes unités et sous unités du corps.

15 Q. J'aimerais maintenant que nous passions à l'intercalaire numéro 58.

16 Laissons à MM les Juges le temps de retrouver ce document.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On s'y fait peu à peu, Monsieur Harmon.

18 M. HARMON : [interprétation]

19 Q. À l'intercalaire 58, Monsieur Brown, nous avons un document qui émane

20 du 1er Corps de la Krajina et qui date du 21 mai 1992. Ce document est

21 adressé au commandement. A la fin on voit la liste des destinataires, à la

22 fin du document, en bas de la page 3. On voit que c'est envoyé à toutes les

23 unités du corps. Ce document a été préparé par le commandant adjoint chargé

24 du moral des troupes, le colonel Vukelic. J'aimerais vous demander de vous

25 reporter, Monsieur le Témoin, au paragraphe qui figure en haut de la page

Page 16326

1 numéro 2, troisième ligne. "Le peuple serbe constitutif de la population

2 qui vit sur 65 % de la zone et qui représente plus de 35 % de la population

3 de la Bosnie-Herzégovine doit lutter pour obtenir la séparation complète

4 d'avec les peuples croate et musulman afin de créer son propre Etat."

5 Vos observations sur ce point, Monsieur Brown.

6 R. Ici, on reprend vraiment l'objectif numéro 1, séparation des

7 communautés. C'est un rapport qui a été établi par l'officier chargé du

8 moral des troupes, qui a été envoyé à toutes les unités, et qui donne une

9 idée de la situation du conflit telle qu'elle se présente à ce moment-là.

10 J'aimerais attirer voter attention sur la dernière phrase, juste

11 avant les signatures. "Informez tous les membres de l'armée de la

12 République serbe de Bosnie-Herzégovine de la teneur de ce rapport de la

13 manière la plus appropriée." On voit que le document a été "envoyé à toutes

14 les unités du corps."

15 Il me semble que ceci nous renvoie assez clairement à l'objectif

16 stratégique numéro 1.

17 Q. Ces objectifs stratégiques, j'aimerais que l'on parle du fait

18 qu'on les a remis en exergue, qu'on les a soulignés, après la 16e Session

19 de l'assemblée des Serbes de Bosnie. Pour ce faire, j'aimerais que nous

20 examinions tout d'abord le document qui figure à l'intercalaire 59. C'est

21 un document très volumineux.

22 A la page numéro 1, on voit ce qu'est ce document. C'est un journal.

23 On voit le nom du colonel Novica Simic. Qui est ce colonel Novica Simic ?

24 Le savez-vous ?

25 R. Oui.

Page 16327

1 Q. Qui est-ce ?

2 R. Au départ, c'était un officier de la JNA au sein du 1er Corps de la

3 Krajina. Mais à ce moment-là, il était le chef du corps de la Bosnie

4 orientale. Il avait son QG à Bijeljina.

5 Q. J'aimerais attirer l'attention des Juges, ainsi que la votre, Monsieur

6 Brown, à la page 37 de ce journal. Nous allons nous intéresser aux pages 37

7 à 39 de ce journal. On voit ici la référence à "une réunion avec la

8 présidence de la RS," le 2 septembre. On voit les participants à cette

9 réunion.

10 Si on passe maintenant à la 38e page, on y voit mentionné le président de

11 l'assemblée, M. Krajisnik. En bas de la page, sous la mention "Objectifs

12 stratégiques," mentionné ici par M. Simic, ici on voit la liste, et le

13 premier objectif c'est "la séparation d'avec les Musulmans." Le point 2,

14 c'est "corridors"; 3, "Division de Sarajevo"; 4, "Vallée de la Drina-

15 Serbes"; 5, "Frontière sur la Neretva,"; 6, "Sortie sur la mer."

16 Monsieur Brown, pouvez-vous nous faire part de vos observations au sujet de

17 ce qui figure ici dans le journal du colonel Simic ?

18 R. Il semble que lors de cette réunion de septembre, on représentait à

19 nouveau, on insistait à nouveau sur les objectifs stratégiques, donc, à un

20 haut niveau, nous avons ici un commandant de corps d'armée. Il s'agit des

21 mêmes objectifs stratégiques que ceux qui avaient été énoncés en mai.

22 Q. J'aimerais maintenant que vous vous munissiez du classeur suivant,

23 Monsieur Brown, il s'agit du classeur numéro 3.

24 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y, Monsieur Harmon.

Page 16328

1 M. HARMON : [interprétation]

2 Q. Passons à l'intercalaire 60. Il s'agit d'un extrait de la 20e Séance de

3 l'assemblée de Republika Srpska, qui s'est tenue le 14 et le 15 septembre

4 1992 à Bijeljina. J'aimerais vous demander de vous reporter, vous, ainsi

5 que Messieurs les Juges, à la page 3 de cet extrait. J'aimerais en citer

6 les passages qui peuvent nous intéresser. Il s'agit du passage qui se

7 trouve à la page 3. Je vais lire ce passage qui commence à la 11e ligne où

8 il est fait mention de M. Krajisnik. L'intervenant, celui qui tient ces

9 propos, c'est le Dr Karadzic, comme on peut le constater en haut de la page

10 numéro 1. Le Dr Karadzic dit la chose suivante --

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Problème ?

12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, certainement. Je ne peux pas suivre

13 puisqu'on parle toujours en anglais, c'est-à-dire qu'on cite des passages

14 en anglais, on nous donne des titres en anglais mais on ne me dit pas où me

15 référer en serbo-croate.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, pour nous c'est déjà

17 assez difficile de s'y retrouver, est-ce qu'on pourrait permettre ou

18 indiquer où se trouvent les passages pertinents en langue B/C/S ?

19 M. HARMON : [interprétation] Malheureusement, c'est en cyrillique, et je ne

20 lis pas le cyrillique. Cela se trouve à la page 3 de la traduction en

21 anglais du document; il y est fait mention de M. Krajisnik. M. Krajisnik

22 sera peut-être en mesure de trouver assez facilement ledit passage. Je vais

23 en donner lecture, Monsieur le Président, et pendant que je lis, M.

24 Krajisnik sera en mesure peut-être de trouver le passage concerné, cela va

25 peut-être l'aider en m'entendant --

Page 16329

1 Mme LOUKAS : [interprétation] J'ai demandé à notre assistant de bien

2 vouloir apporter son concours à M. Krajisnik.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous voyons cela.

4 M. HARMON : [interprétation]

5 Q. Je vais donner lecture d'un extrait des propos tenus par M. Karadzic

6 qui dit la chose suivante, je cite : "M. Krajisnik, Koljevic et moi-même

7 nous étions à Visegrad hier et ensuite nous sommes allés à Rudo. Les chefs

8 militaires de la Brigade de Cajnice se trouvent également à Rudo --"

9 Mme LOUKAS : [interprétation] Excusez-moi. Je vous interromps mais, en

10 fait, il nous serait assez utile d'avoir le numéro ERN en B/C/S.

11 M. HARMON : [interprétation] Mais je ne sais pas lire le cyrillique,

12 comment puis-je m'y retrouver ?

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le numéro ERN, il n'est pas en

14 cyrillique.

15 M. HARMON : [interprétation] Il s'agit du numéro 04226207. Pour la première

16 page jusqu'à 04226212.

17 Je reprends ma lecture.

18 Q. "M. Krajisnik, Koljevic et moi-même sommes allés à Visegrad hier, puis

19 ensuite à Rudo. Les dirigeants militaires de la Brigade de Cajnice se

20 trouvaient également à Rudo, et nous avons parlé du fait que depuis que la

21 pression s'est fait moindre sur Gorazde, les pressions qui s'exercent sur

22 les autres municipalités augmentent. Si bien qu'il va falloir augmenter la

23 pression sur Gorazde afin de soulager ces municipalités. Il y aura une

24 autre réunion de commandants demain et nous pensons qu'avec eux, nous

25 allons pouvoir prendre des décisions importantes, à savoir que la Drina a

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1 une importance stratégique très grande pour nous. En fait, elle a une

2 importance stratégique suprême. Si la transversale verte doit être coupée

3 le long de la Drina, à ce moment-là, la Bosnie musulmane perdra sa

4 signification."

5 Quelques lignes plus tard, le Dr Karadzic dit : "Nous voulons nous assurer

6 le contrôle de la Drina et de toutes les municipalités, et de toutes les

7 maisons qui se trouvent le long de la Drina. Ceci afin de faire la jonction

8 avec le Corps oriental de Sanski."

9 Monsieur Brown, passons à l'intercalaire numéro 61 maintenant. Il s'agit

10 d'un document émanant du commandant du 1er Corps de Krajina en date du 14

11 septembre 1992. Ce document a été rédigé par le colonel Vukelic, il s'agit

12 d'un rapport sur les consultations militaires. Comme vous pouvez le voir au

13 premier et deuxième paragraphe, il s'agit d'un rapport concernant les

14 consultations pour lesquelles parmi d'autres personnes il y avait le

15 général Maldic, le général Talic, le général Ninkovic, le colonel Bogdan

16 Subotic qui était le ministre de la Défense.

17 Dans le deuxième paragraphe, on peut lire : "Outre les commandants des

18 unités et des institutions du 1er Corps de la Krajina, les présidents de 26

19 municipalités ont été présents lors de ces consultations, ainsi que le

20 ministre de l'Intérieur et les organes du MUP dans notre zone de

21 responsabilité."

22 Nous pouvons lire dans ce document, deux paragraphes plus bas : "Dans sa

23 présentation, le lieutenant-général Ratko Mladic a décrit la situation

24 politique générale comme étant très complexe, et a demandé une unité

25 absolue de toutes les forces armées et de toutes les structures politiques,

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1 ainsi que des organes du MUP, plus particulièrement eu égard à l'exécution

2 de nos opérations ainsi que de nos missions stratégiques, le fonctionnement

3 du gouvernement et de la prévention des pillages et des profiteurs de

4 guerre, qui représentent un lourd fardeau sur le moral des personnes."

5 Maintenant Monsieur Brown, est-ce que vous aviez rencontré, dans les

6 documents que vous avez lus, les documents militaires, que l'on fait

7 référence à ces objectifs stratégiques qui ont été discutés lors de la 16e

8 Session ?

9 R. Tout à fait. Le premier document, le document que vous avez mentionné,

10 le document de la vallée de la Drina, il s'agissait, bien sûr, d'objectifs

11 stratégiques, et on demande au Corps de la Drina de prendre le contrôle des

12 municipalités dont nous avons parlé hier. On insiste dans ce document -- en

13 fait, M. Karadzic, M. Krajisnik et un autre, Koljevic, étaient en mesure de

14 se rendre sur les lieux, de parler aux commandants militaires. Il y a eu

15 d'autres réunions subséquentes.

16 Le deuxième document parle de représentants municipaux qui ont reçu

17 des instructions des commandants militaires plus haut placés, et encore une

18 fois, les directives et les autres documents que j'ai lus, ils semblent

19 indiquer que les objectifs stratégiques étaient vraiment très importants,

20 c'est-à-dire que l'on insiste sur ces objectifs dans tous ces documents.

21 Q. Monsieur Brown, parlons de la demande de répéter et de mettre à bien

22 ces objectifs stratégiques et de la mise en œuvre de ces objectifs. Dans

23 votre rapport aux paragraphes 2.2 et 2.3, à la page 60 et 61, vous décrivez

24 les opérations de combat comme étant deux types différents, c'est-à-dire

25 l'une, opération de combat qui représente une série d'opérations, qui a

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1 pour but de saisir le contrôle, et de s'assurer le contrôle d'un territoire

2 qui est pris par les Serbes. Au paragraphe 2.3 de votre rapport, vous dites

3 que la deuxième catégorie de l'opération consistait à mener une opération à

4 grande échelle, formelle, militaire, à la tête de laquelle serait l'état-

5 major. Vous avez parlé de l'opération Vrbas et de l'opération Corridor,

6 l'opération Vrbas qui parlait de Jajce.

7 Je ne veux pas trop insister sur l'opération Corridor, Monsieur Brown, mais

8 pourriez-vous brièvement nous décrire le but et l'objectif de cette

9 opération ?

10 M. HARMON : [interprétation] En fait, Monsieur le Président, l'opération

11 Corridor a été décrite dans le rapport de M. Brown aux paragraphes 2.212 à

12 2.217.

13 Q. Je ne veux pas m'étaler trop longuement sur l'opération Corridor,

14 Monsieur Brown, mais j'aimerais que vous décriviez aux Juges de la Chambre

15 que représentait l'opération Corridor.

16 R. L'opération Corridor, comme vous pouvez l'imaginer de par son nom,

17 consistait à ouvrir un corridor dans la Krajina, c'est-à-dire que Radovan

18 Karadzic, dans son but stratégique numéro deux, avait parlé de cela.

19 Brièvement, lorsqu'il y a eu un document dont j'ai parlé hier -- une

20 réunion a eu lieu -- qui devait avoir lieu le 3 juin, et le 9 juin une

21 directive a été donnée. Le 1er Corps de la Krajina a reçu ces directives;

22 ils ont agi conformément à cette directive. Le général Talic, ce même jour

23 -- ou plutôt, le 9 ou le 10, a envoyé son instruction à travers tout le

24 Corps pour des opérations de combat ayant deux buts : d'assurer le

25 territoire, de sécuriser le territoire, et deuxièmement de préparer une

Page 16333

1 opération, l'opération Corridor. Il l'a fait vers le 20 et 24 juin. Lorsque

2 l'opération Corridor a été formellement lancée le 24 juin, les éléments du

3 1er Corps de la Krajina et du Corps de la Bosnie orientale - Milan Maric

4 représentait le MUP de Knin, et Veljko Milankovic et d'autres ont pris part

5 à l'exécution de l'opération Corridor le 24 juin. Ils ont pu mener à bien

6 cette tâche, c'est-à-dire, ils ont pu ouvrir un corridor déjà le 4 juillet.

7 Cela a pris dix jours environ. L'opération a duré environ quelques jours,

8 ensuite, pendant le restant de l'été on a assuré ce corridor. Le 4 juillet,

9 le corridor était ouvert, et le corridor n'a jamais été coupé, c'est-à-

10 dire, on ne l'a pu jamais refermé pendant la guerre.

11 Q. A partir du moment où on a annoncé les objectifs stratégiques, donc, à

12 partir de ce moment-là jusqu'à ce que l'on ait vraiment mené à bien cet

13 objectif stratégique numéro 2, cela n'a pris que sept semaines. Est-ce que

14 c'est exact ?

15 R. C'est exact.

16 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que

17 l'on passe à l'intercalaire 62 qui décrit ces événements, 62 et 62.1, ces

18 deux intercalaires parlent de la façon dont l'opération a été menée. Il

19 s'agit de documents émanant de diverses autorités félicitant les autres

20 entités au sein du service, par exemple, au 1er Corps de la Krajina envoyant

21 leurs félicitations à ces personnes ayant mené à bien, avec succès,

22 l'opération Corridor. L'intercalaire 63 nous parle à la dernière page, à la

23 page 6, il s'agit d'une déclaration - nous avons un CD d'ailleurs - et

24 c'est le général Talic qui est le commandant du 1er Corps de la Krajina, et

25 le 30 juin 1992 dit, entre autres : "Vous savez que nous avons mené à bien

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1 notre tâche de -- d'établir un lien entre la Bosnie orientale avec la Mère

2 Serbie." Il dit vers la fin : "Nous devons être unis afin de réaliser notre

3 but commun. Lorsque je parle d'unité, je parle de tous les Serbes à travers

4 l'ex-Yougoslavie.

5 Je ne vais pas m'étaler plus longuement sur ces documents. Ce sont des

6 documents de contexte plutôt, et je souhaiterais maintenant changer de

7 sujet.

8 Q. Monsieur Brown, dans votre rapport au paragraphe 2.2 --

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, si vous passez à un

10 autre sujet, je préfèrerais prendre une pause maintenant et nous

11 reprendrons à 6 heures.

12 M. HARMON : [interprétation] Très bien, merci.

13 --- L'audience est suspendue à 17 heures 41.

14 --- L'audience est reprise à 18 heures 02.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, lorsque le témoin sera

16 dans le prétoire…

17 Plutôt, Monsieur l'Huissier, pourriez-vous justement faire rentrer le

18 témoin dans le prétoire.

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis soulever

20 une question.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

22 Mme LOUKAS : [interprétation] Vous vous souviendrez qu'au cours de la

23 dernière session, M. Krajisnik avait du mal à suivre --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

25 Mme LOUKAS : [interprétation] -- car le document lui a posé quelques

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1 problèmes. M. Krajisnik m'a demandé de demander à M. Harmon s'il serait

2 possible de nous assurer que le numéro ERN soit donné à chaque fois --

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 Mme LOUKAS : [interprétation] -- afin qu'il puisse retrouver facilement les

5 pages concernées.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certainement.

7 Mme LOUKAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne dirais pas que mon cyrillique est

9 particulièrement bon, mais je veux dire que je peux suivre les passages

10 pertinents J'examine le document pour savoir combien s'il y a énormément de

11 pages en cyrillique.

12 Mme LOUKAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président --

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

14 Mme LOUKAS : [interprétation] -- car vous savez, mon cyrillique n'est pas

15 particulièrement extraordinaire.

16 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Monsieur Brown.

18 Monsieur Harmon, veuillez continuer, je vous prie.

19 M. HARMON : [interprétation]

20 Q. Monsieur Brown, nous allons passer en revue assez brièvement du sujet

21 qui se trouve au point 2.2 de votre paragraphe [comme interprété]. Vous

22 parlez des opérations du 1er Corps de la Krajina et vous parlez du fait que

23 le Corps de la Krajina voulait prendre le contrôle et s'emparer du

24 territoire.

25 Alors brièvement, Monsieur Brown, je souhaiterais que l'on parle de cela,

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1 et pour ce, je vous demanderais de passer à l'intercalaire 64. A

2 l'intercalaire 64, je vous demanderais de passer à la page 4 de cet

3 intercalaire, je vous prie. Il s'agit d'un commandement émanant du 1er Corps

4 de la Krajina en date du 9 juin 1992 --

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 M. HARMON : [interprétation]

7 Q. -- envoyé à la 670e PONTB - je ne sais pas ce que représente cette

8 abréviation.

9 R. Oui. C'est le bataillon ponton. C'est une unité du génie au sein du

10 corps.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, pour vous, il s'agit

12 du numéro ERN 872.

13 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai remis au témoin

14 les classeurs. Je donne l'intercalaire au témoin.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais il faut donner aussi les trois

16 derniers numéros ERN pour la version en B/C/S. Ce que vous venez de citer

17 se termine par 872.

18 M. HARMON : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur le Président.

19 Q. Monsieur Brown, je souhaiterais attirer votre attention sur quelque

20 chose dont vous élaborez dans votre rapport. Vous parlez du fait que cette

21 opération avait pour but de s'emparer du territoire, assurer le contrôle

22 d'un territoire précis. Je souhaiterais attirer votre attention à la page

23 8, qui porte le numéro ERN -- Je vous demanderais de faire référence à la

24 partie C de ce rapport. On fait référence à un ordre du 30 PD de prendre

25 les mesures nécessaires afin d'assurer un contrôle complet du territoire.

Page 16337

1 Si vous descendez un peu plus bas, au sous-paragraphe 5.11, il y a un ordre

2 destiné à l'unité du génie, et vous parlez des mesures prises pour assurer

3 le contrôle du territoire.

4 Est-ce que cela reflète effectivement ce que vous aviez dit ? Vous aviez

5 dit, dans votre rapport, que "les efforts ont été déployés pour assurer le

6 contrôle du territoire."

7 R. Oui, justement. Il y a deux composantes, que les unités subordonnées

8 devaient assurer le contrôle du territoire, c'est-à-dire de mener à bien

9 les opérations dans le corridor.

10 Q. Parlons maintenant des efforts déployés et intégrés pour assurer les

11 objectifs stratégiques. Je souhaiterais attirer votre attention sur une

12 série de documents qui commence d'ailleurs par le document que l'on peut

13 trouver à l'intercalaire 66. Monsieur Brown, il s'agit-là d'un document qui

14 représente les conclusions d'une session de la cellule de Crise de Sanski

15 Most, en date du 30 mai 1992. Dans la partie A, on peut voir que l'on

16 identifie 12 personnes, 12 membres de la cellule de Crise, et chacune de

17 ces personnes ayant un but particulier, c'est-à-dire ayant une tâche

18 particulière à mener. Est-ce que vous pouvez nous identifier les membres de

19 la VRS, -- plutôt, je retire cette question.

20 Au numéro 7, nous pouvons lire le nom de Nedjo Anicic, et au numéro 10,

21 nous pouvons lire le nom de Branko Basara, qui est le commandant du 6e

22 Corps de la Krajina. Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit lorsqu'on

23 parle de ce document ?

24 R. Il s'agit d'un document qui présente un exemple d'un document de la

25 cellule de Crise dans lequel on parle d'un effort concerté par la Défense

Page 16338

1 territoriale et les dirigeants civils. Nous avons parlé un peu plus tôt du

2 colonel Basara. Nedjo Anicic était le commandant de la Défense territoriale

3 de la municipalité.

4 Q. Donc, ces personnes devenaient des membres de la cellule de Crise,

5 n'est-ce pas ? Ils devenaient des représentants politiques, n'est-ce pas ?

6 R. Oui. Il semblerait qu'il s'agisse de cela, à lecture de ce document.

7 Q. A la partie 2, on peut lire, sous conclusions, on peut lire, et je

8 cite, en bas de la page 1, presque vers la fin de la page 1 : "Entrez en

9 contact également avec les dirigeants de la Région autonome de la Krajina

10 concernant la mise en œuvre de l'idée du déplacement de la population." De

11 quelle façon vous pouvez interpréter ces propos sur la base des documents

12 que vous avez examinés ?

13 R. Il semblerait qu'il y a un certain lien entre la cellule de Crise et

14 les autorités régionales. Ils sont en train de discuter de la question du

15 déménagement, c'est-à-dire de relocation. Cela donne suite aux activités

16 qui ont eu lieu avant. On parle de solution à long terme. Il faut trouver

17 une "solution à long terme pour les réfugiés de la région musulmane de

18 Mahala." Donc, on parle de la relocation des personnes qui se trouvaient à

19 Sanski Most.

20 Q. Passons maintenant à l'intercalaire 67. Il s'agit d'un document qui est

21 daté du 19 juin 1992. Ce sont des conclusions de la cellule de Crise de

22 Sanski Most. Ici, on parle de M. Basara, qui était le commandant de la VRS

23 et on parle également de M. Anicic comme étant des membres permanents de la

24 cellule de Crise, n'est-ce pas ?

25 R. Oui.

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1 Q. Nous pouvons également voir la liste des membres permanents, c'est-à-

2 dire on peut voir que des membres permanents de la cellule de Crise se

3 rencontrent de façon quotidienne et prennent des décisions. Ce sont des

4 décisions qui sont présentées aux autres personnes qui doivent les mettre

5 en œuvre."

6 R. Oui. Ce document parle de la coopération qui existe entre les

7 dirigeants politiques et les dirigeants militaires dans cette municipalité.

8 Q. Pourriez-vous, de façon générale, nous faire un commentaire, Nous

9 allons examiner d'autres documents concernant la coopération entre les

10 militaires, et le SDS, et les autorités politiques que vous avez vues dans

11 la zone en général. Donnez-nous un survol, je vous prie, de leur

12 coopération.

13 R. Sur la base des documents que j'ai pu examiner, j'ai vu qu'il y avait

14 une collaboration assez importante dans la région de la RAK. Le général

15 Talic collaborait avec la police, le SDS, les dirigeants politiques du SDS.

16 Il y a également des documents faisant état d'un certain nombre de

17 municipalités dans lesquelles les commandants militaires, c'étaient soit

18 des membres permanents, et d'autres personnes étaient des personnes ex

19 officio. Je l'ai vu dans Kotor Varos, Sanski Most, Prijedor, et je crois

20 également à Kljuc. Il me semblait également que la cellule de Crise était

21 une entité très importante pour ce qui est des opérations à Krajina. La

22 cellule de Crise était celle qui faisait le lien entre les militaires, la

23 police, et qui faisait en sorte que le travail était mené à bien de façon

24 concertée.

25 Q. Je souhaiterais que l'on passe maintenant à l'intercalaire 68. Il

Page 16340

1 s'agit d'un extrait de procès-verbal d'une session de la cellule de Crise

2 qui a eu lieu le 7 juillet 1992. J'aimerais que l'on passe aux points 8 et

3 3, après l'énumération des personnes, donnez-nous un commentaire.

4 R. Encore une fois, nous pouvons voir un exemple où l'on voit que "le

5 lieutenant-colonel Peulic coordonnera les travaux de la présidence de

6 Guerre." Le colonel Peulic était le commandant de la 122e Brigade, qui

7 était l'une des brigades dont on a parlé dans le document du 9 juin. Pour

8 ce qui est du Groupe opérationnel de Vlasic, c'était un groupe d'une taille

9 assez grande sous Talic. Il était, pour ce qui est de ce groupe, le

10 commandant militaire qui couvrait Kotor Varos, Skender Vakuf, qui était

11 donc le commandant de cette zone-là. Il a semblé participer également à

12 d'autres réunions. Il y a d'autres documents de Kotor Varos qui nous

13 parlent de sa présence et de sa participation à d'autres réunions de la

14 cellule de Crise.

15 Q. Passons maintenant à l'intercalaire 69.

16 R. [aucune interprétation]

17 Q. Un instant, je vous prie, Monsieur Brown.

18 R. Pardon.

19 Q. C'est un document venant de la présidence de Guerre de la municipalité

20 de Celinac en date du 23 juillet 1992. Il s'agit d'une décision concernant

21 le statut de la population non-serbe de Celinac. Pourriez-vous me donner

22 vos commentaires au sujet de ce document.

23 R. Dans ce document, on attire l'attention sur la décision concernant les

24 restrictions sévères de ce que la population non-serbe a le droit de faire.

25 Par exemple, dans l'Article 5, on énumère tout ce qu'ils n'ont pas le droit

Page 16341

1 de faire. Par exemple, rester dans la rue, circuler dans la rue, prendre

2 des bains, utiliser le téléphone, et cetera --

3 Q. Monsieur Brown, sans nous parler du contenu du document, puisque les

4 Juges auront la possibilité de le lire, est-ce que vous pourriez me dire de

5 quelle façon ceci montre qu'il existait bien une coordination entre les

6 civils et les militaires ?

7 R. Si vous regardez les destinataires, vous voyez que ceci a été envoyé à

8 la Brigade d'infanterie légère de Celinac, donc ils éprouvaient le besoin

9 de leur envoyer cette décision à toutes fins utiles.

10 Q. Maintenant, nous allons regarder un autre document, intercalaire 70. Il

11 s'agit d'un document émanant de la municipalité de Kljuc, de sa présidence

12 de Guerre, la cellule de Crise. C'est un rapport. Il est daté du mois de

13 juillet 1992 et il couvre la période entre le 15 mai 1992 et juillet 1992.

14 Dans ce rapport, à la page 3 de ce rapport, on dit ce qui suit : "Pendant

15 les conflits armés, les représentants, les commandants de l'armée de la

16 République serbe de Bosnie-Herzégovine ont participé, de façon régulière,

17 aux sessions de travail de la cellule de Crise et de la présidence de

18 Guerre. Ces représentants avaient un rôle de commandement et ont conduit

19 des activités de combat pour défendre les territoires et les citoyens de la

20 municipalité de Kljuc contre les extrémistes musulmans et pour maintenir un

21 bon niveau de coopération et de coordination avec la cellule de Crise et

22 l'assemblée municipale de Kljuc. Toutes les questions importantes

23 concernant l'armée et la police ont été résolues au sein de la cellule de

24 Crise ou de l'assemblée municipalité. Cette période, on peut la décrire

25 comme une période qui a fait preuve d'une très bonne coopération entre la

Page 16342

1 cellule de Crise et les organes militaires quand il s'agissait d'écraser la

2 résistance armée des extrémistes musulmans. La cellule de Crise de

3 l'assemblée municipale a remercié tout particulièrement la 30e Division du

4 1er Corps d'armée pour le travail bien fait quand il s'agissait d'écraser la

5 résistance armée des extrémistes musulmans."

6 Est-ce que vous pourriez nous donner votre commentaire au sujet de ce

7 document.

8 R. C'est à peu près la même chose que ce qu'on trouve dans le document

9 émanant des autres municipalités, où on voit bien qu'il existait bien une

10 coopération entre la police et les autorités civiles, surtout au niveau de

11 la cellule de Crise. On fait aussi une référence à la 30e Division. Je sais

12 que c'était la 1ère Brigade des Partisans, c'était son nom avant la

13 transition, et une de ces unités a participé aux opérations qui ont eu lieu

14 à Kljuc au début du mois de juin 1992, donc je pense qu'il les félicite de

15 ce travail.

16 C'est la même unité que celle dont on va parler quelques jours plus tard

17 quand on va discuter des objectifs stratégiques.

18 Q. A présent, je vous prie de bien vouloir passer à l'intercalaire 74. Il

19 s'agit de la cellule de Crise de Banja Luka de la RAK. C'est la cellule de

20 Crise qui envoie ce document au président municipal, Radoslav Brdjanin, qui

21 est identifié comme président dans ce document. Pouvez-vous nous dire de

22 quoi il s'agit ?

23 R. On y voit la liste de la cellule de Crise de la RAK, qui comprend aussi

24 bien les membres politiques, les membres du SDS, mais aussi le général

25 Talic, Stojan Zupljanin, qui était à la tête du CSB de Banja Luka, et il

Page 16343

1 faudrait dire qu'au niveau régional, la cellule de Crise était composée de

2 la façon similaire et avait des fonction similaires.

3 Je voudrais aussi attirer votre attention sur le numéro 15, Nenad

4 Stevandic. Je pense qu'on fait référence à lui dans ce document concernant

5 le paramilitaire, mais il faudrait que je vérifie encore cela. J'ai

6 l'impression que c'est la même personne.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que je croyais.

9 M. HARMON : [interprétation]

10 Q. Là, il s'agit d'un document en date du 6 mai 1992.

11 Il se trouve à l'intercalaire 75.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour qu'il n'y ait pas d'erreurs, c'est

13 Stevandic qui était membre du SOS, n'est-ce pas ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

16 M. HARMON : [interprétation]

17 Q. Ces documents ont montré qu'il existait une certaine coordination entre

18 les autorités militaires et les autorités politiques, ainsi qu'avec la

19 police.

20 Je voudrais attirer votre attention sur ce rapport de combat régulier qui

21 vient du 1er Corps de la Krajina et qui est envoyé au quartier général

22 principal de l'armée, signé par le général Talic à la fin du document. Je

23 voudrais attirer votre attention sur le paragraphe 2 de ce document qui

24 commence par "Le déploiement de combat des unités." Pourriez-vous examiner

25 ce paragraphe et nous dire de quoi il s'agit.

Page 16344

1 R. Ceci démontre bien qu'il existait une certaine coopération entre le

2 ministère de l'Intérieur, la police, et les militaires quand il s'agissait

3 de nettoyer les terrains et de confisquer les armes. Je pense qu'on

4 pourrait lier cela avec les délais pour rendre les armes, qui ont été des

5 ultimatums et qui ont été formulés dans différentes municipalités à

6 Krajina, à Prijedor, à Sanski Most, aussi à Kljuc. Je le sais des autres

7 documents, des documents de la police surtout, et cela montre aussi qu'ils

8 ont participé aux opérations de police dans ces municipalités et qu'il

9 existait bien une coopération à l'époque à tous les niveaux.

10 Q. En ce qui concerne la coopération et la mise en œuvre des objectifs

11 stratégiques, et les opérations conjointes des autorités, je voudrais

12 attirer votre attention sur l'intercalaire 76. Il s'agit d'un rapport

13 émanant du ministère de l'Intérieur serbe. On parle de ce qui s'est passé

14 dans un certain nombre de municipalités pendant cette période-là, des

15 municipalités qui relevaient de la zone de responsabilité du Corps de la

16 Krajina. Notamment Prijedor y est mentionné, Sanski Most aussi à la page 6,

17 Bosanski Novi, page 8. Ce document, c'est un rapport qui relate la

18 situation telle qu'elle a été trouvée, et il parle aussi des prisonniers,

19 il parle des questions de transfert de population et du rôle de la police

20 dans toutes ces activités.

21 Je voudrais attirer votre attention sur la deuxième page de ce document. On

22 y parle de la municipalité de Prijedor. Essayez, s'il vous plaît,

23 d'examiner le deuxième paragraphe de cette page. En ce qui concerne la

24 coordination entre la police et les militaires et la cellule de Crise et le

25 transfert de la population de cette municipalité dans différents centres de

Page 16345

1 détention, est-ce que vous pourriez nous dire si on en parle ? Qu'est-ce

2 qu'on y dit ?

3 R. Les documents parlent de tout cela effectivement; c'est corroboré par

4 d'autres documents militaires, mais ce document est très riche en

5 informations, surtout en ce qui concerne la municipalité de Prijedor mais

6 aussi les autres municipalités. On y voit bien que la police et les

7 militaires coopéraient avec la cellule de Crise, que c'est l'armée qui

8 emmenait les prisonniers dans les centres de détention. Ces centres de

9 détention ont été organisés ou gérés par la police. Dans ce document, on

10 parle d'un certain nombre de personnes qui sont parties, soit avant les

11 opérations de combat, ou qui sont placées dans les centres de détention, ou

12 qui sont en train de partir, comme ils disent, volontairement, ou en

13 quittant ou non leurs biens. Je pense que c'est un document très important,

14 très grand, avec beaucoup d'informations. Il démontre bien l'existence de

15 la coopération quand il s'agissait de déplacer la population, de les placer

16 dans les centres de détention, dans les camps; cela montre aussi le sort de

17 la population de ces municipalités.

18 Q. C'est un document extrêmement dense, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. On pourrait en parler longuement, mais malheureusement je n'ai pas le

21 temps, mais je voudrais attirer votre attention sur un certain nombre

22 d'informations qui y figurent, et de vous demander de commenter brièvement

23 ces points.

24 Dans ce document, on fait référence au fait que l'armée transporte la

25 population, et que des équipes composées de militaires et de membres de la

Page 16346

1 police interrogeaient ces gens-là. Est-ce que cela figure dans le

2 document ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que dans ce document on trouve systématiquement ces efforts

5 coordonnés de l'armée et de la police, quand il s'agissait d'arrêter,

6 placer en détention, enfermer et interroger la population non-serbe ? Est-

7 ce qu'il s'agissait des opérations conjointes là ?

8 R. Je pense que ce document justement met en lumière ceci, et montre qu'il

9 existait un rapport, un lien. Notamment à la page 3, il parle de la

10 catégorisation des prisonniers. Je connais un autre document concernant

11 Sanski Most, où on parle aussi de la catégorisation des prisonniers, qui

12 était normalement le fruit du travail aussi bien des militaires que des

13 policiers.

14 Q. Est-ce --

15 R. Je pense que ce rapport met en lumière le fait que les individus ont

16 été arrêtés par l'armée. Je pense qu'à Novi, c'était aussi l'œuvre des

17 membres de la Défense territoriale et de la JNA. Apparemment, c'est l'armée

18 qui arrêtait ces gens-là et qui les plaçaient dans les centres de

19 détention. Ensuite, ces centres de détention étaient gérés par la police.

20 Ensuite, on parle de la coopération qui existait dans le camp de détention

21 de Manjaca, qui était un camp de l'armée et qui était organisé et géré par

22 le 1er Corps d'armée de la Krajina. Ceci est corroboré par d'autres

23 documents militaires et je dirais que le document met en lumière ce travail

24 commun.

25 Q. On identifie aussi un certain nombre de personnes placées en détention

Page 16347

1 à l'époque, dans différents endroits à différents moments.

2 R. Oui, il y a pas mal de détails dans ce document.

3 M. HARMON : [interprétation] Je ne veux pas passer trop de temps là-dessus,

4 mais je voudrais vous dire qu'il y a d'autres documents dans ce dossier qui

5 parlent de cela. Ce que je vois dans ce document, c'est que chacune de ces

6 municipalités a préparé un rapport qui a été envoyé à une commission. J'ai

7 inclus dans ce dossier les rapports de chacune des municipalités, les

8 rapports qui ont été envoyés sur la base de ce document. En ce qui concerne

9 la municipalité de Bosanski Novi, vous n'avez pas besoin de le regarder

10 tout de suite mais vous allez trouver ce rapport à l'intercalaire 50. En ce

11 qui concerne Prijedor, le rapport qui a été envoyé à la commission figure à

12 l'intercalaire 77.1. Pour répondre à la question de Sanski Most, vous avez

13 cela à l'intercalaire 77.

14 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, après le document

16 76, je n'ai pas l'impression qu'il y ait un document 77, mais le document

17 77.1.

18 M. HARMON : [interprétation] On vient de me le dire --

19 M. HARMON : [interprétation] Il faudrait peut-être réorganiser ce

20 classeur.

21 On pourrait constater aux intercalaires que j'ai mentionnés que ce

22 sont les documents qui ont été utilisés pour produire le rapport, auquel M.

23 Brown a fait référence il y a quelques instants à peine.

24 Vous avez peut-être besoin d'un peu plus de temps pour vous y

25 retrouver dans vos classeurs. Si c'est le cas, faites-le moi savoir. Sinon,

Page 16348

1 je poursuivrai mon interrogatoire principal.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous sommes en train de

3 consulter les documents que vous nous avez indiqués, et qui ont été

4 utilisés pour produire le rapport en question. Dans le classeur, on va --

5 on passe de 76 -- du document 76 au point 77.1, et ensuite à 78.

6 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne faut pas que je parle au nom de

8 tous les Juges de la Chambre --

9 M. HARMON : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- puisque je suis le seul qui -- est

11 ait été brimé, apparemment.

12 M. HARMON : [interprétation] Nous allons tout de suite vous donner un

13 exemple du document en question.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

15 M. HARMON : [interprétation] Puis-je poursuivre ? Merci.

16 Passons à l'intercalaire 78. Il s'agit d'un rapport assez classique

17 qui vient de Prijedor et qui couvre une période assez longue. Le rapport de

18 la commission datait du mois d'août. Nous avons ici un rapport qui concerne

19 les neuf derniers mois du travail du poste de sécurité publique de

20 Prijedor, en date de janvier 1993. Ce document vient du ministère de

21 l'Intérieur à Banja Luka; il s'agit d'un rapport qui est très détaillé.

22 Q. Monsieur Brown, j'aimerais que vous nous fassiez part de vos

23 observations au sujet de ce rapport, et de ce qu'il dit notamment de la

24 coopération entre l'armée et la police, dans le cadre des opérations

25 militaires. J'aimerais vous demander de vous reporter à la page 4 du

Page 16349

1 document.

2 R. Ceci reflète plus ou moins ce qu'on l'on a pu trouver dans le rapport

3 précédent en ce qui concernait Prijedor. Ceci reprend également le rapport

4 de combat, qui indiquait que la police participait aux opérations de

5 combats à Prijedor. Au paragraphe 4 ici, on voit que la police participait

6 à des opérations de combats dans certains villages, à Prijedor, Kozarac,

7 Kozorusa, Trnopolje.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vois aucun paragraphe 4 sur cette

9 page 4. Je signale à l'intention de M. Krajisnik qu'il s'agit, semble-t-il,

10 de la page 3 de la version en B/C/S du document.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit du paragraphe du paragraphe 4 -- de

12 la page 4, paragraphe B : participation des membres du poste aux opérations

13 de combats.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

15 M. HARMON : [interprétation] Bien.

16 Q. Pourriez-vous passer à la page suivante où nous avons ici le nombre

17 d'heures passées par les policiers de Prijedor dans des opérations de

18 combat ?

19 R. Oui. On indique également les municipalités où ils sont intervenus,

20 donc ce n'était pas uniquement à Prijedor.

21 Ensuite, en dessous du tableau, au milieu de la page, dans le

22 paragraphe qui suit, il est question de la mise en place de Keraterm,

23 Trnopolje et Omarska, et du nombre d'interrogatoires qui ont été menés dans

24 ces camps. Il est dit ici qu'à l'exception de Trnopolje, je cite : "Les

25 autres centres d'accueil ou de réception ont été démantelés le 21 août

Page 16350

1 1992."

2 Q. Une question au sujet de ces camps. A la fin de la page 5, au bas de

3 cette page, il est question de personnes ayant résidé à Omarska et

4 Keraterm. Ensuite, il est dit et je cite : "Plusieurs convois ont été

5 organisés pour le transport de ces personnes vers Skender Vakuf, Bugojno."

6 Est-ce qu'il s'agit-là de territoires qui se trouvaient à l'extérieur des

7 territoires contrôlés ou occupés par les Serbes de Bosnie ?

8 R. Skender Vakuf et Bugojno se trouvaient juste à la frontière entre le

9 territoire de la RS et de la Bosnie centrale. Je crois que c'est là que se

10 dirigeaient ces convois, ils se dirigeaient vers cette zone frontalière à

11 Skender Vakuf et Bugojno.

12 Q. Il s'agissait de personnes qui devaient être transportées à l'extérieur

13 de la Republika Srpska, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, il s'agit de la page

16 4.

17 M. HARMON : [interprétation]

18 Q. Passons à la page 4 de nouveau, numéro ERN 01108987, paragraphe B. On

19 parle ici des opérations de combats menées notamment avec les membres de la

20 police, notamment à Kozarac, Hambarine et Prijedor même. Il est indiqué que

21 "la police a participé à des opérations de ratissage intensives dans ces

22 zones."

23 Savez-vous ce qui s'est passé dans ces localités, savez-vous ce qu'il

24 est advenu de la population non-serbe dans ces localités ?

25 R. Oui, la population en question a été déplacée. Pour beaucoup de ces

Page 16351

1 villages, les habitants ont été déplacés vers Omarska, Trnopolje et

2 Keraterm.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est sur la base de documents que vous

4 pouvez affirmer cela, que vous dites cela ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président,

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien merci.

7 Continuez.

8 M. HARMON : [interprétation]

9 Q. Monsieur Brown, passons maintenant à la question du désarmement.

10 J'aimerais vous demander de consulter le premier document sur ce point.

11 Vous avez parlé, Monsieur Brown, dans votre rapport d'expert, de ces

12 opérations de désarmement de la population non-serbe. Vous avez dit que

13 cela faisait partie d'une sorte de schéma, que c'était quelque chose de

14 systématique, vous l'avez vu dans les documents militaires. Vous parlez de

15 cela au paragraphe 2.4 de votre rapport, page 61, paragraphe 2.4. Vous

16 dites, Monsieur Brown, dans ce rapport que d'après ce que vous avez pu voir

17 dans les documents, il s'agissait de -- on assistait à un mouvement des

18 forces dans les zones non-serbes avant les combats, et à une réaction

19 militaire intense suite à des événements finalement de faible importance.

20 On assistait à des ultimatums pour que les armes soient rendues, à des

21 pilonnages, attaques, destructions de villages et de villes, coopération

22 avec la Défense territoriale et les unités de la police, déplacement forcés

23 de certaines parties de la population, qui était ensuite interrogée et

24 détenue dans des centres de détention et des camps. Pillages, meurtres, et

25 transfert des non-Serbes en-dehors de la zone.

Page 16352

1 Monsieur Brown, nous allons nous intéresser à tous les éléments qui

2 viennent d'être décrits, qui font partie de ce système, et que vous avez pu

3 identifier dans les documents que vous avez examinés. Passons à

4 l'intercalaire numéro 71. C'est un document qui vient de la municipalité de

5 Kljuc, de sa cellule de Crise, un ordre issu -- donné par cette cellule de

6 Crise le 28 mai 1992 à 8 heures du matin. Je vous demande de vous reporter

7 au point 1 et de nous expliciter ce point 1, le point de cet ordre qui a

8 été donné par le président de la cellule de Crise, Jovo Banjac.

9 R. Oui. Ici on en appelle à tous les citoyens qui détiennent illégalement

10 des armes, à remettre ces armes ce jour-là, faute de quoi, des mesures

11 seront prises pour mener à bien le désarmement." J'ai pu retrouver qu'il en

12 a été de même dans de nombreuses municipalités, on a fixé des ultimatums de

13 ce type à Bosanski Novi, Prijedor, Sanski Most, Kljuc, cela a été le cas,

14 ainsi qu'à Celinac me semble-t-il. Comme je l'ai déjà mentionné

15 précédemment, j'ai pu constater qu'il semblait y avoir une relation entre

16 les instructions d'avril, la décision de la RAK au début du mois d'avril,

17 l'instruction Subotic -- lien entre ces instructions et les décisions de

18 cellules de Crise dans les municipalités au sujet du désarmement, avec

19 toujours ces ultimatums qui étaient fixés, et qui, quand ils expiraient,

20 débouchaient sur des opérations de combats. Je pense que la question de ces

21 ultimatums a une importance potentielle, si on regarde tout ce qui se

22 passe, et on voit que cela s'est passé dans un nombre important de

23 municipalités dans la Krajina.

24 Q. Suite au non respect de ces échéances ainsi fixées, que se passait-il ?

25 R. C'est un document qui vient de la municipalité de Kljuc, de sa cellule

Page 16353

1 de Crise, un ordre donné par cette cellule de Crise, le 28 mai 1992 à 8

2 heures du matin. Je vous demande de vous reporter au point 1 et de nous

3 expliciter le point 1 de cet ordre qui a été donné par le président de la

4 cellule de Crise, Jovo Banjac.

5 R. Oui. Ici, on en appelle à "tous les citoyens qui détiennent

6 illégalement des armes à remettre ces armes ce jour-là, faute de quoi, des

7 mesures énergiques seront prises pour mener à bien le désarmement." J'ai pu

8 retrouver qu'il en a été de même dans de nombreuses municipalités. On a

9 fixé des ultimatums de ce type. A Bosanski Novi, Prijedor, Sanski, Most,

10 Kljuc, cela a été le cas, ainsi qu'à Celinac, me semble-t-il. Comme je l'ai

11 déjà mentionné précédemment, j'ai pu constater qu'il semblait y avoir une

12 relation entre les instructions d'avril, la décision de la RAK au début du

13 mois d'avril, l'instruction Subotic, un lien entre ces instructions et les

14 décisions des cellules de Crises dans les municipalités au sujet du

15 désarmement, avec toujours ces ultimatums qui étaient fixés et qui, quand

16 ils expiraient, débouchaient sur des opérations de combats. Donc, je pense

17 que la question de ces ultimatums a une importance potentielle si on

18 regarde tout ce qui se passe, et on voit que cela s'est passé dans un

19 nombre important de municipalités dans la Krajina.

20 Q. Suite au non-respect de ces échéances ainsi fixées, que ce se passait-

21 il, qu'advenait-il à la population si les échéances n'étaient pas

22 respectées, d'après les documents que vous avez vus ?

23 R. D'après les documents, une fois que les échéances expiraient, les

24 attaques étaient menées par les forces serbes.

25 Q. Qu'advenait-il de la population non-serbe ?

Page 16354

1 R. Les non-Serbes étaient rassemblés, interrogés, et un nombre important

2 apparaît dans des camps de détention. Cela figure dans un certain nombre de

3 documents de la police.

4 Q. Passons maintenant à l'intercalaire numéro 79.

5 On parle de Kljuc, mais c'est un document en date du 28 mai 1992.

6 C'est un rapport de combat régulier qui vient du poste de commandement de

7 Sipovo, qui est adressé au commandement de la 30e Division d'infanterie.

8 J'aimerais attirer votre attention, Monsieur Brown, sur ce qui figure à la

9 page 2 de ce document, deuxième paragraphe au-dessus de la ligne du bas,

10 numéro ERN 03009308.

11 Pouvez-vous examiner ce paragraphe, je vous prie, Monsieur Brown, et

12 nous expliquer de quoi il s'agit.

13 R. Est-ce que c'est le paragraphe qui commence par la mention, "A cause de

14 la situation à Kljuc…" ?

15 Q. Oui.

16 R. "Le 3e Bataillon de la 1ère Brigade d'infanterie a été placé en situation

17 de préparation au combat pleine et entière telle que cela a été ordonné. Si

18 les Musulmans ne rendaient pas leurs armes le 27 mai 1992, à 12 heures au

19 plus tard, le bataillon mènera à bien une opération de nettoyage."

20 C'est le bataillon qui relevait de la 30e Division et qui a été

21 félicité dans un document précédent qui venait de la cellule de Crise de

22 Kljuc. Je sais que ce bataillon, ce 3e Bataillon de la 30e Division, a

23 participé à des opérations de combat à Kljuc dans les jours qui ont suivi

24 ce rapport.

25 Q. On utilise ici le mot "mopping-up," "ratissage". Pourriez-vous

Page 16355

1 expliquer à la Chambre ce que représente vraiment ce terme. A la lecture de

2 ces documents militaires, qu'est-ce que vous avez pu conclure ?

3 R. "Mopping-up," selon moi, en tant qu'ex-officier militaire, veut dire la

4 chose suivante : c'est-à-dire, lorsqu'il y a des unités qui sont déjà

5 fragmentées, il faut les rassembler dans une zone dans laquelle une

6 opération a eu lieu. Mais je ne suis pas tout à fait certain si cet usage

7 correspond à ce contexte-ci, puisque l'on parle de l'opération de Kljuc.

8 Cette zone avait été attaquée, les gens avaient été emmenés dans des

9 centres de détentions. Il ne s'agirait pas là d'une phrase qui serait

10 utilisée dans un contexte militaire comme le mien, par exemple. Donc, le

11 fait de faire ce que l'on demande de faire à Kljuc, ne représente pas,

12 selon mon expérience militaire, un "mopping-up" ou un nettoyage.

13 Q. Ce qui est indiqué à la page 1 au tableau numéro 1, on parle de

14 rassembler ou de "mop-up" 269 personnes, n'est-ce pas ?

15 R. Oui. Ce n'est pas la seule unité qui avait pris part dans les

16 opérations de Kljuc. Il y avait également d'autres unités, mais celle-ci en

17 a fait partie.

18 Q. Très bien. Je souhaiterais maintenant examiner deux ordres, avec votre

19 permission, deux ordres qui parlent de Sanski Most et qui ont trait à ce

20 sujet justement que l'on aborde en ce moment. L'intercalaire 80, on voit

21 qu'il s'agit d'un document de la cellule de Crise de Sanski Most en date du

22 23 mai 1992. Il s'agit d'une conclusion de la cellule de Crise, et à la

23 partie 3, on peut lire : "La question du désarmement des formations

24 paramilitaires ou de personnes armées, mettre en place les conclusions de

25 la réunion de la cellule de Crise précédente, d'émettre une proclamation à

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1 la radio samedi le 23 mai 1992, proclamation qui devrait être lue et qui

2 devrait durer 20 minutes."

3 Maintenant, j'aimerais parler du 23 mai. Je vous demanderais de passer à

4 l'intercalaire 81. Encore une fois, il s'agit de Sanski Most. Il s'agit là

5 d'un document qui a été émis par la Défense territoriale et son commandant,

6 le colonel Anicic. Nous avons déjà vu son nom précédemment en tant membre

7 de la cellule de Crise. Il s'agit là d'un ordre visant une opération de

8 désarmement. Que représente ce document, Monsieur Brown, brièvement ?

9 R. C'est un ordre lancé à la Défense territoriale, demandant la

10 coopération de la 6e Brigade également, de mener à bien les opérations de

11 Mahala et d'autres parties comme Mahala, Otoka, afin de désarmer, comme ils

12 le disent ici, les hameaux en question. On y fait référence à la 6e Brigade

13 et on dit qu'elle ait fait également partie de cette opération.

14 Q. Le paragraphe 2 fait référence à -- 4 lignes après le début -- "De

15 maintenir et de coordonner les actions, les unités de la 6e Brigade, et

16 d'établir un contrôle complet du territoire afin d'établir un

17 fonctionnement stable de notre gouvernement et de créer les conditions de

18 vie et de travail sans embûches."

19 L'attaque, s'il on se base sur ce document, si l'on lit ce document à la

20 page 2, l'attaque devait commencer à 5 heures du matin le 26. Si vous

21 prenez le paragraphe 8 de cette même page, on peut voir : "De mener à bien

22 les attaques d'artillerie en tirant sur des cibles telles le village de

23 Bonjancic, de Mahala, d'Otoka, Demisevci, et cetera."

24 Selon les documents que vous avez examinés, est-ce que vous savez ce qui

25 est arrivé à Mahala et à Otoka ?

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1 R. Je sais ce qui s'est passé, en fait, non pas du fait d'avoir lu des

2 documents, mais je sais que cette attaque a eu lieu.

3 Q. Monsieur Brown, page 3, paragraphe 15, dernière partie du paragraphe,

4 on peut voir : "Lorsque cette tâche sera menée à bien, emmener les

5 prisonniers au centre de sports de l'école secondaire et remettre le butin

6 de guerre à la cellule de Crise de la Défense territoriale serbe de Sanski

7 Most."

8 Est-ce que ce document reflète assez fidèlement ce dont nous avons déjà

9 parlé auparavant ?

10 R. Oui. Nous pouvons voir qu'il y a un lien très étroit entre la 6e

11 Brigade, la Défense territoriale; on tire sur des cibles, on tire sur une

12 zone non-serbe. Le contrôle complet devait être fait sur cette zone. Je

13 sais, de par des documents provenant de la police de Sanski Most, je sais

14 que ce centre sportif de cette école secondaire a servi de centre de

15 détention où on avait emmené des personnes. Donc, ce document corrobore ce

16 fait, et c'est un document qui semble mettre en lumière plusieurs

17 composantes de ceci, de ce que nous pouvons appeler un schéma.

18 Q. Passons maintenant à l'intercalaire 82. Donnez-nous l'interprétation de

19 ce document, je vous prie, Monsieur Brown. Il s'agirait d'un document du 1er

20 Corps de la Krajina en date du 31 mai 1992. C'est un document qui a été

21 envoyé à l'état-major de l'armée serbe de Bosnie. Le document est signé par

22 le général Talic.

23 Je souhaiterais attirer votre attention sur la deuxième page, qui porte le

24 numéro ERN 00867035. Au point 5(B), on peut lire : "Après les actions de

25 Kozarac, Kljuc, et Sanski Most, quelques conscrits de nationalité musulmane

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1 ont demandé d'être libérés des unités. Ils ont exprimé leur insatisfaction

2 du fait que leur ville avait été détruite de façon massive."

3 Plus loin dans ce paragraphe, on peut lire : "Cela a empiré après avoir

4 entendu une déclaration publique dans les médias par le SDS, les dirigeants

5 de la Région autonome de Bosanska Krajina, qui parlent du déplacement et de

6 l'expulsion de tous les Musulmans et Croates de ces régions."

7 Q. Monsieur Brown, comment interprétez-vous ce paragraphe, plus

8 particulièrement eu égard à ce que nous avons vu un peu plus tôt ? Nous

9 avons parlé des attaqués menées à Sanski Most. Est-ce que vous pouvez

10 établir un lien ?

11 R. Oui, tout à fait. C'est quelques jours après que l'ordre de l'attaque a

12 eu lieu. On parle d'une destruction importante dans ces municipalités.

13 Encore une fois, on parle du fait que des personnes devraient être

14 expulsées, c'est-à-dire que des Musulmans et des Croates devaient être

15 expulsés de ces régions. Il y a d'autres références dans ce document.

16 Par exemple, à la page 1, au bas de la page, on parle de "la

17 municipalité de Kljuc et des zones autour de la municipalité de Kljuc. On

18 dit que des armes avaient été prises des Musulmans," et cetera.

19 Encore une fois, je peux dire que c'est un document qui nous parle des

20 actions qui ont eu lieu, et on nous parle de l'armée qui a pris part à ces

21 actions militaires. On parle d'une destruction importante à la suite de ces

22 actions militaires. Plus loin, on voit également que l'on parle de

23 l'expulsion et du déplacement de la population, et c'est quelque chose qui

24 est connu.

25 Q. Maintenant, Monsieur Brown, j'aimerais que l'on parle des documents qui

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1 font état des meurtres des civils. D'abord, le document que l'on peut

2 trouver à l'intercalaire 82.1.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourrais-je poser simplement une

4 question --

5 M. HARMON : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que certaines personnes ont

7 été particulièrement insatisfaites à la suite de la destruction des villes

8 musulmanes. Cette insatisfaction provenait des conscrits de nationalité

9 musulmane, vous nous avez dit. Que pouvez-vous nous dire concernant la

10 présence, en date du 31 mai 1992, de conscrits de nationalité musulmane ?

11 Nous avons entendu plusieurs éléments de preuve, plusieurs témoignages,

12 nous disant que des officiers musulmans avaient quitté les unités, donc

13 comment expliquez-vous la présence des conscrits en cette date-là ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas le pourcentage ou le nombre

15 de conscrits musulmans au sein du 1er Corps de la Krajina. Je n'ai pas

16 examiné cela de plus près. Je n'ai pas obtenu non plus de données. Je ne

17 sais pas quel serait le nombre exact d'officiers. Je sais qu'il y a eu des

18 personnes qui avaient été -- en juin, on leur a donné une permission. Ils

19 étaient en permission, ils n'étaient plus là. Mais je ne sais pas combien

20 de conscrits musulmans servaient au sein du 1er Corps de la Krajina.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.

22 Veuillez continuer, Monsieur Harmon.

23 M. HARMON : [interprétation]

24 Q. Maintenant, j'aimerais que l'on passe à l'intercalaire 82.1. Monsieur

25 Brown, d'abord, dites-nous, à l'examen des documents que vous avez lus, on

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1 fait référence à des personnes qui avaient été tuées, aux civils qui

2 avaient été tués, n'est-ce pas ?

3 R. Oui. Il y a un certain nombre de références aux personnes tuées, aux

4 civils tués, et je crois que j'en parle dans mon rapport justement. Il y a

5 plusieurs exemples de civils tués dans les rapports du 1er Corps de la

6 Krajina.

7 Q. De façon générale, et nous allons passer au document sous peu, mais

8 pourriez-vous nous dire quelle était la réaction des autorités militaires

9 face à ces meurtres de civils ? Qu'est-ce que vous avez pu conclure à la

10 lecture des documents que vous avez examinés ?

11 Mme LOUKAS : [interprétation] Monsieur le Président, cette question est

12 très générale. On parle de quelque chose de très important. C'est une

13 question assez sensible. Alors, je demanderais à ce que l'on puisse peut-

14 être poser au témoin des questions précises et de nous parler de certains

15 documents. Cela pourrait nous aider. Mais je crois qu'il s'agit d'une

16 question qui est un peu trop généralisée.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais au moins ce n'est pas une

18 question directrice, n'est-ce pas, Madame Loukas ?

19 Mme LOUKAS : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président --

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous être plus précis quant à

23 vos sources, je vous prie, Monsieur Harmon.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens d'un d'incident qui a été

25 retrouvé dans un document. Il s'agit d'un meurtre dont on a donné suite

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1 dans un processus militaire judiciaire. J'aimerais toutefois faire

2 référence à une série de documents faisant état des meurtres à Kljuc en

3 1992, c'était à l'école de Velagici. Lorsque nous avons suivi la trace

4 documentaire, en passant par les registres militaires, nous avons trouvé

5 que l'enquête n'a pas été menée au bout, c'est-à-dire qu'on avait débuté

6 une enquête, mais rien n'a été fait après un certain temps.

7 Je me souviens d'avoir vu certains exemples où l'on a fait référence

8 à certains meurtres dans le document du 1er Corps de la Krajina, mais je

9 n'ai pas pu voir si on a donné suite à ces meurtres.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous parlez des

11 meurtres de civils ou parlez-vous de personnes ayant été tuées ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je parle de massacres de civils, ou de

13 meurtres de civils. Je ne parle pas de combattants tués, bien sûr.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harmon, je crois que l'heure

15 est venue de suspendre l'audience.

16 M. HARMON : [interprétation] Oui, simplement un document supplémentaire --

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

18 M. HARMON : [interprétation]

19 Q. -- que l'on peut trouver à l'intercalaire 81.1 [comme interprété]. Il

20 s'agit d'un rapport de combat régulier en date du 4 novembre 1992. Le

21 document émane du 1er Corps de la Krajina. Il est envoyé à l'état-major de

22 l'armée, et c'est un document qui a été préparé et signé par le colonel

23 Vukelic. Monsieur Brown, je voudrais que vous preniez le paragraphe 2. Il

24 s'agit du deuxième paragraphe de la page 2. Pourriez-vous nous parler de ce

25 massacre brutal ?

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1 R. Oui, tout à fait. Je voulais simplement terminer la question que m'a

2 posée le Juge Orie, s'agit-il de civils ou de prisonniers. Il s'agit ici

3 d'un très bon exemple où l'on peut voir que l'on fait état de meurtres de

4 prisonniers. A Kotor Varos, même s'il y a eu des opérations militaires au

5 mois de juin dans cette ville, il y a eu une petite poche de personnes qui

6 avaient résisté au cours de l'été 1992 à Vecici. Il y a eu ce groupe de

7 personnes qui essayait de mener des négociations afin de pouvoir être

8 déplacées, ou que l'on ait pu sortir. Il semblerait que des hommes sont

9 sortis de cette petite poche de Kotor Varos. Ils avaient été capturés au

10 cours de ces négociations.

11 Ce document, qui est rédigé le 4 novembre, fait référence au fait que

12 ces hommes appartenant à ce petit groupe de négociateurs avaient été

13 capturés, et un massacre brutal a eu lieu, ils ont été massacrés. C'était à

14 Vecici.

15 A la suite, il y a un autre document émanant du 1er Corps de la

16 Krajina - d'ailleurs, j'en fais référence dans mon rapport - et du document

17 qui a été rédigé par la suite. Dans cet autre document, on parle de ce

18 groupe d'hommes tués comme étant des combattants, donc des combattants tués.

19 Le commandant, qui était le commandant de Kotor Varos, de la Brigade légère

20 d'infanterie, a continué d'être le commandant de ce groupe jusqu'au moins

21 1993. Alors, il s'agirait de massacre brutal dont on a parlé. Mais en on a

22 parlé plus tard comme de personnes tuées dans le cadre de combat régulier,

23 et je n'ai pas rencontré d'autres documents qui parlent plus précisément de

24 cet incident comme étant un massacre brutal.

25 M. HARMON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est 19 heures 3 minutes. La séance

2 est levée jusqu'à demain, 14 heures 15.

3 Je veux informer les parties que certains arrangements devaient être

4 pris pour que l'on puisse poursuivre l'audience jeudi matin.

5 L'audience est levée jusqu'à demain.

6 --- L'audience est levée à 19 heures 04 et reprendra le mercredi 13 juillet

7 2005, à 14 heures 15.

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