Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 19 juillet 2005

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 14.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, je dis bonjour à tous ceux qui

6 se trouvent à l'intérieur du prétoire et à l'extérieur du prétoire.

7 Je demande à Madame la Greffière de citer le numéro de l'affaire au

8 rôle.

9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour Monsieur le Président. Il

10 s'agit de l'affaire IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

12 Monsieur Tieger, êtes-vous prêt à poursuivre l'interrogatoire principal de

13 M. Neskovic.

14 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous remercie.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, veuillez faire

16 entrer le témoin dans le prétoire.

17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Neskovic.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous rappelle que vous êtes toujours

21 lié par votre déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de

22 votre audition.

23 LE TÉMOIN : RADOMIR NESKOVIC [Reprise]

24 [Le témoin répond par l'interprète]

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger veuillez procéder.

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1 Interrogatoire principal par M. Tieger: [Suite]

2 Q. [interprétation] Bonjour, M. Neskovic.

3 R. Bonjour. Je vous remercie.

4 Q. Avant de passer au document suivant, je souhaitais vous poser une

5 question complémentaire au sujet du document que l'on trouve à

6 l'intercalaire 12 en rapport avec les versions A et B du document que l'on

7 trouve à l'intercalaire 11. Pour ce faire, je vous demanderais de vous

8 pencher d'abord sur l'intercalaire 11 et de lire assez rapidement le point

9 9 du chapitre version A.

10 Je cite ce paragraphe : "Préparer une estimation du nombre de policiers

11 d'active et de réserve nécessaires, des unités de la Défense territoriale

12 et des unités de la protection civile nécessaires et sur cette base, amener

13 ces effectifs à un niveau de préparation accomplie, et prendre toutes les

14 mesures nécessaires pour leur engagement conformément à l'évolution de la

15 situation."

16 Je vous demanderais à présent de vous pencher sur l'intercalaire 12, et

17 plus particulièrement sur le point 9. Il s'agit d'un procès-verbal d'une

18 réunion de la cellule de Crise de Novo Sarajevo tenue le 23 décembre 1991.

19 A ce point 9, nous lisons : "Les personnes responsables de l'exécution de

20 ce qui est prévu au point 9 sont Drago Kovac, Milanko Jovanovic et Momir

21 Garic." Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre qui sont ces personnes,

22 et quels sont les postes occupés par elles, car à droite de leurs noms sur

23 ce document, nous voyons mention de la protection civile, du MUP et de la

24 Défense territoriale. Pourriez-vous dire à la Chambre si ces mots rendent

25 bien compte des positions qui étaient les leurs ?

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1 R. Milanko Jovanovic était chef du poste de police de la municipalité de

2 Novo Sarajevo. Drago Kovac était un responsable, ou en tout cas un

3 représentant de la Défense territoriale dans la municipalité de Novo

4 Sarajevo car selon l'ancienne loi, la municipalité avait compétence sur les

5 unités territoriales, et donc sur la Défense territoriale. Quant à Momir

6 Garic, je ne sais pas si à l'époque il travaillait aux côtés de Drago Kovac

7 au sein de la Défense territoriale; c'est possible. Mais en tout cas, je

8 pense que Drago Kovac et Momir Garic représentaient la Défense territoriale

9 de Novo Sarajevo. Quant à Jovanovic, il était le chef du poste de police de

10 Novo Sarajevo.

11 Q. Merci. Je vous demanderais maintenant de prendre l'intercalaire 13.

12 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

13 l'intercalaire 13 et la pièce à conviction P595 [comme interprété], c'est

14 un document qui a déjà été versé au dossier, Hanson, intercalaire 260.

15 Q. Nous avons ici un document qui est le procès-verbal d'une réunion de la

16 cellule de Crise, tenue le 29 janvier 1992, dans la communauté locale de

17 Lukavica. Au premier paragraphe de ce procès-verbal, nous trouvons la liste

18 des participants. La réunion a été ouverte par M. Bogdanovic, commandant

19 adjoint de la cellule de Crise. Et suivant, ces 11 points, qui ont chacun

20 un titre et parmi ces titres, nous trouvons : point relatif à l'assemblée,

21 tâches à accomplir, entrepôt de stockage, plan d'évacuation, et cetera, et

22 cetera.

23 Je vous demanderais, Monsieur, de vous pencher plus précisément sur le

24 point 11 où nous trouvons une liste de tâches. Dans ces tâches, il est

25 prévu notamment de fournir de grandes quantités de vivres et de médicaments

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1 et de les transporter jusqu'à un endroit sûr et d'établir des contacts avec

2 les directeurs d'entreprises, et ensuite suivre les noms des personnes

3 responsables de l'exécution de cette tâche. Radomir Bogdanovic, Milivoje

4 Prijic, M. Nastic et Dragan Sojic. Je vous demanderais d'abord si les

5 tâches que l'on trouve énumérées ici sont identiques à celles que l'on

6 trouve au point 7 document du procès-verbal de la réunion du 23 décembre

7 1991, et si les personnes responsables de l'exécution de cette tâche sont

8 également les mêmes.

9 R. Il y a correspondance pour partie, et absence de correspondance pour

10 partie également, car dans ce document comme dans le document précédent, je

11 ne trouve pas mention de la personne qui était le chef de la cellule de

12 Crise. Je ne vois pas qui dirigeait la cellule de Crise. Cette réunion je

13 m'en souviens, j'y ai assisté sans y participer d'une façon

14 particulièrement active car les thèmes évoqués n'avaient pas de rapports

15 directs avec moi, mais je suis en mesure de reconstituer un peu ce qui

16 s'est passé. Je crois comprendre qu'il est question ici d'un plan

17 d'évacuation de la population serbe résidant dans certaines communautés

18 locales en cas de crise, de guerre ou d'événements comparables car ce

19 paragraphe 11 a un certain rapport avec le paragraphe 6 qui s'intitule

20 "Plan d'évacuation" et dans lequel on trouve la liste de toutes les

21 communautés locales qui devraient subir une telle évacuation. Quant au

22 paragraphe 11 : "Il est prévu de fournir de grandes quantités de vivres et

23 de médicaments et de les transporter jusqu'à un lieu sûr." Il est tout à

24 fait clair qu'il devait exister à l'époque un plan d'évacuation visant une

25 partie de la population serbe qui résidait dans certaines parties de la

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1 municipalité de Novo Sarajevo. Mais dans ce document-ci comme dans le

2 document précédent, il y a pour moi quelque chose qui manque tout de même

3 car j'ai un peu de mal à comprendre pourquoi, dans un plan aussi important,

4 aussi global on évoque uniquement une communauté locale ou en tout cas

5 qu'on en débatte dans une cellule de Crise d'une communauté locale. Il me

6 semble qu'il aurait été logique, pour un plan aussi important, d'en

7 discuter au niveau municipal, à la cellule de Crise municipale. Il me

8 parait manquer ici le nom de quelqu'un qui est tout de même important, j'en

9 ai déjà parlé hier, à savoir le chef de la cellule de Crise. Après

10 reconstitution par mes soins, je pense qu'il est question d'un plan

11 d'évacuation car nous trouvons ici mention d'un entrepôt ainsi que d'un

12 certain nombre de lieux, d'un système de communication par estafette et de

13 divers équipements, et je pense que ce qui est impliqué ce sont les

14 modalités des communications entre ces différents lieux, des transmission

15 donc.

16 Ceci à mes yeux, en tout cas d'après ce que je comprends, est un plan

17 d'évacuation de la population serbe vivant dans certaines communautés

18 locales en cas de guerre ou d'événements comparables.

19 Q. Si vous regardez les participants, Monsieur Neskovic, je vous demande

20 si M. Djurovic, M. Prijic et la plupart des personnes qui ont été nommées

21 responsables de l'exécution des tâches durant la première réunion sont bien

22 les mêmes que l'on voit mentionnées ici. N'oubliez pas le poste

23 qu'occupait M. Bogdanovic. Je vous demande si ceci est bien la réunion

24 suivante de la cellule de Crise, autrement dit, une réunion de suivi par

25 rapport à la réunion du 23 décembre 1991 de cette même cellule de Crise ?

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1 R. Oui, oui. Les deux réunions sont liées.

2 Si vous permettez, j'aimerais ajouter quelques mots. Il y a autre

3 chose dont j'estime que cela aurait du se trouver dans ce document et je

4 vois que cela n'y figure pas. Je ne trouve pas mention de la personne qui

5 dirigeait la cellule de Crise et puisque les tâches opérationnelles sont

6 distribuées entre les municipalités, il aurait sans doute fallu qu'un

7 rapport soit présenté à la cellule de Crise au sujet de l'état d'exécution

8 des tâches en question. Or, je ne vois pas mention d'un tel rapport. En

9 effet, si les gens avaient des affectations, des tâches qui auraient été

10 confiées sur le plan opérationnel, ces personnes auraient dû, à une

11 deuxième réunion, rendre compte de l'état d'accomplissement de ces tâches.

12 Je ne vois pas mention de cela. Ce qui ne permet pas d'avoir une

13 vision globale de la situation parce que si nous parlons ici d'une deuxième

14 réunion de la cellule de Crise et que je ne suis même pas capable de

15 déterminer qui est président, commandant ou chef de la cellule de Crise, il

16 me semble qu'il manque quelque chose. Nous voyons le nom de Bogdanovic

17 mentionné ici en tant que participant.

18 Q. Je crois que le procès-verbal de la réunion du 29 janvier indiquait que

19 Bogdanovic n'était pas seulement membre de la cellule de Crise, mais

20 également commandant adjoint de celle-ci. Est-ce que vous avez un souvenir

21 quant à l'identité du commandant de la cellule de Crise ?

22 R. Le problème, c'est justement que je ne m'en souviens pas. Je devrais

23 m'en souvenir parce que c'est tout de même une personnalité importante.

24 C'est sûrement Zarko Djurovic qui était responsable sur le plan formel des

25 plans A et B, mais les documents que nous voyons ici indiquent que M. Zarko

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1 Djurovic n'était peut-être pas présent à ces réunions et n'avait peut-être

2 pas reçu les plans A et B. La municipalité de Novo Sarajevo lui a sans

3 doute fait parvenir ces plans A et B ultérieurement par courrier. Djurovic

4 jouait un rôle un peu particulier à l'époque parce qu'il a continué à

5 prêter allégeance aux autorités de l'époque en respectant les plans qui

6 étaient mis au point tout en, par ailleurs, faisant obstruction parce que

7 sur le plan personnel, il n'était pas souvent pas d'accord avec ces plans.

8 Il y avait contradiction entre ces deux attitudes et son rôle, par

9 conséquent, était assez particulier. Sur le plan hiérarchique, c'est lui

10 qui aurait dû être le chef de la cellule de Crise, mais nous voyons ici

11 qu'il n'est pas question de son nom. Nous trouvons le nom de Bogdanovic et

12 d'autres noms, mais pas le sien. Ne m'en voulez pas, je vous prie, mais

13 vraiment il me semble qu'ici il y a un vide, il y a quelque chose qui

14 manque. Je ne vois pas ici qui a créé la cellule de Crise, qui a commandé

15 cette cellule de Crise. Moi-même j'ai reçu une tâche à accomplir. Je

16 faisais partie d'un groupe. On ne voit pas où il se trouvait, lui.

17 Q. Monsieur Neskovic, hier - et nous allons maintenant passer à un autre

18 document - mais hier, vous avez dit dans votre déposition qu'un problème

19 important avait surgi à Novo Sarajevo entre le parti et le gouvernement de

20 M. Djurovic qui présidait le comité exécutif. Vous avez parlé dans votre

21 déposition d'une opposition entre Djurovic, chef du comité exécutif

22 municipal et le président du SDS, qui d'après vos souvenirs était M.

23 Prijic. Si je me souviens bien, vous avez dit que ce problème était si

24 important que M. Krajisnik et M. Karadzic ont dû intervenir lors d'une

25 réunion du conseil municipal en faisant intervenir leur autorité

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1 personnelle pour régler le problème.

2 A présent, je vais vous poser une question ou deux au sujet de cet

3 affrontement entre Djurovic et Prijic. Vous nous avez parlé aussi hier des

4 contacts noués par M. Djurovic avec la direction en nous disant que M.

5 Karadzic et M. Krajisnik le connaissaient. Alors, je vous demande si M.

6 Djurovic a demandé au Dr Karadzic et à M. Krajisnik ou à M. Krajisnik de

7 faire usage de leur autorité en son nom dans le cadre de ce conflit ?

8 R. Cet affrontement était vraiment important, et le courant créé dans le

9 parti par Milivoje Prijic était très bien organisé et se comportait de

10 façon assez extrême. Je crois savoir qu'ils ont remplacé Djurovic à son

11 poste au cours de cet affrontement et quand Karadzic et Krajisnik sont

12 arrivés, je crois me rappeler que tous les deux ont réussi à ramener le

13 calme, ce qui signifiait qu'on est revenu à un statu quo -- autrement dit,

14 il a été décidé que Djurovic demeurerait président du conseil municipal.

15 Mais je crois que sans l'aide de Karadzic et de Krajisnik, Djurovic aurait

16 réussi à contrôler totalement le pouvoir municipal. Donc, Karadzic et

17 Krajisnik ne sont pas intervenus directement dans le conflit, mais non pas

18 pris parti pour les uns ou pour les autres, mais ont usé de leur autorité

19 pour ramener le calme, ramener le statu quo et ce statu quo a été bien

20 accueilli par Djurovic parce qu'il n'a pas perdu son poste. Cela a ramené

21 le calme. Ils ont aidé Djurovic à conserver son poste.

22 Q. Je comprends, d'après votre déposition, que le Dr Karadzic et M.

23 Krajisnik sont intervenus dans les conditions que vous venez de décrire.

24 Mais ma question portait sur quelque chose d'un peu différent. Je veux

25 demander si M. Djurovic avait demandé l'aide de

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1 M. Krajisnik ou du Dr Karadzic, avait demandé l'intervention que vous venez

2 de décrire.

3 R. Pour autant que je le sache, avant la réunion en question, il s'est

4 adressé à Krajisnik. En tout cas, il a appelé son cabinet à l'assemblée et

5 je ne me souviens plus si Karadzic a participé à cette rencontre,

6 également. Mais pour autant que je le sache, il a demandé de l'aide avant

7 la réunion dont nous parlons.

8 Q. Je vous demanderais maintenant de vous pencher sur l'intercalaire 18.

9 M. TIEGER : [interprétation] Je demanderais une cote pour ce document.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction de

12 l'Accusation P913.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

14 M. TIEGER : [interprétation]

15 Q. Monsieur Neskovic, la pièce P913 est un procès-verbal d'une réunion

16 extraordinaire du conseil municipal du SDS de Novo Sarajevo tenu le 28

17 février 1992. Si vous me le permettez, j'appellerais votre attention sur un

18 passage particulier du texte, mais pour l'instant, je vous donne quelques

19 minutes pour le parcourir rapidement.

20 Comme vous le constaterez certainement en consultant rapidement ce

21 document, il y est beaucoup question du Dr Prijic, notamment. J'appellerais

22 d'abord votre attention sur le deuxième paragraphe du point 1 de l'ordre du

23 jour qu'on trouve à la page 3 de la version anglaise et en page 3 également

24 de la version serbe. Au bas de la page, nous lisons, je cite : "Ceci s'est

25 également produit lors de la dernière réunion du conseil municipal à

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1 laquelle ont participé le Dr Karadzic et M. Krajisnik."

2 Est-ce que ceci fait référence à la réunion dont vous venez de parler

3 ou s'agit-il d'une autre réunion à laquelle auraient assisté le Dr Karadzic

4 et M. Krajisnik ?

5 R. Je cherche à retrouver ce passage. Je ne vois pas où cela se trouve.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, pendant que le témoin

7 cherche le passage, je vois sur votre liste de pièces à conviction que la

8 pièce P913 est censée représenter le procès-verbal de la 13e Réunion

9 "Irregular," en anglais. Alors, je suppose que "irregular" n'est pas le mot

10 qui s'applique et que "extraordinary" serait tout me même un mot plus

11 approprié, n'est-ce pas, pour réunion extraordinaire ?

12 M. TIEGER : [interprétation] Je le pense également, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame la Greffière, prenez note de

14 cela, je vous prie.

15 M. TIEGER : [interprétation]

16 Q. Monsieur Neskovic, cela peut vous aider; je crois que cela se trouve à

17 la page 3 de la version serbe et il y a un numéro de référence en haut de

18 la page qui est SA029201.

19 R. Oui.

20 Q. Vous verrez, en bas de page, point 1 à l'ordre du jour, AD1. Je vous

21 parle du deuxième paragraphe de ce point AD1. Dans la version anglaise,

22 c'est la dernière phrase de ce paragraphe. Je

23 cite : "Ceci s'est également produit lors de la dernière réunion du conseil

24 municipal à laquelle ont assisté le Dr Karadzic et

25 M. Krajisnik."

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1 R. [Inaudible]

2 Q. Ma question consistait à vous demander si cette mention faisait

3 référence à une réunion dont vous avez déjà parlé dans votre déposition ou

4 à une autre réunion à laquelle auraient assisté le

5 Dr Karadzic et M. Krajisnik ?

6 R. Je crois que cette phrase porte sur la réunion dont j'ai parlé. Pour

7 autant que je le sache, ils n'ont assisté qu'à une seule réunion et je

8 crois qu'il est question, ici, de la réunion dont je parlais, il y a

9 quelques instants.

10 Q. J'aimerais, maintenant, appeler votre attention sur la

11 page 6 de la version anglaise qui, si je ne m'abuse, correspond à la page 7

12 en version serbe. Juste au-dessus de l'intitulé AD2, point 2 à l'ordre du

13 jour, on trouve une réflexion sur les résultats obtenus lors de cette

14 réunion, indiquant que le Dr Prijic a été relevé de ses fonctions, le

15 président du conseil municipal et que c'est

16 M. Gajevic qui a été chargé de diriger le conseil jusqu'à la réunion

17 suivante et que Karadzic et Krajisnik seraient informés de cette décision.

18 Alors, encore une fois, je vous demande si cette phrase fait

19 référence à ce conflit, à ce différend dont nous avons parlé il y a

20 quelques instants et indique comment ce différend a été réglé, à savoir,

21 par le fait que le Dr Prijic a été relevé de ses fonctions et que M.

22 Djurovic a conservé son poste.

23 R. Oui. Oui.

24 Q. Merci. Je crois que M. le Juge Hanoteau a une question à vous poser.

25 M. LE JUGE HANOTEAU : Ce qui m'intéresserait, c'est de connaître la nature

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1 de l'opposition entre ce Dr Prijic et

2 M. Djurovic. Je vois, à la page 4 du document que nous présente le

3 Procureur, à la page 4 dans la troisième ligne, il semble qu'on vise ce

4 monsieur - excusez-moi de la prononciation - M. Kutalj [phon] qui

5 intervient. Il dit, il est noté : [interprétation] "A son avis, les gens

6 qui ne font aucun effort pour obtenir la séparation des communautés locales

7 serbes par rapport à la direction des communautés locales sont des gens qui

8 font parti du clan du Dr Prijic."

9 [En français] Alors, qu'est-ce qu'on reprochait au Dr Prijic

10 exactement ? Est-ce que vous pouvez donner des indications sur ce point,

11 Monsieur ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois pouvoir dire, d'après ce dont je me

13 souviens, qu'on peut évoquer trois éléments. Premier élément, le Dr Prijic

14 estimait qu'en tant que parti, il fallait influer sur l'action des cadres

15 des partis au sein du gouvernement. Autrement dit, les cadres du parti

16 quand ils faisaient partie du gouvernement, auraient dû, d'après lui,

17 consulter le parti et ce d'autant plus lorsque des questions relatives aux

18 cadres du parti étaient en discussion. Djurovic, sur ce point, avait un

19 avis tout à fait différent. Il pensait que le président du conseil exécutif

20 de la municipalité qu'il présidait était une position très importante et

21 que le gouvernement était multiethnique. La municipalité comptait, environ,

22 100 000 habitants; c'était une grande municipalité. Diriger ce gouvernement

23 était un poste tout à fait conséquent. Il désirait agir conformément au

24 statut de la municipalité, à ses réglementations, sans forcément tenir

25 compte du parti. Il n'avait pas envie d'être aux ordres du comité municipal

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1 du SDS. C'était l'une des raisons du différend.

2 Deuxième élément et deuxième raison, c'est qu'un grand nombre

3 d'appartements et d'emplois dans les bureaux de la municipalité de la

4 mairie existaient; il était très important, pour qui que ce soit, d'avoir

5 une influence sur le comité exécutif de ce point de vue pour l'attribution

6 de ces locaux.

7 Troisième raison, c'est que les deux hommes étaient monténégrins; ils

8 n'étaient pas Bosniens. Ils avaient des comptes à régler de ce point de vue

9 que je ne connais pas dans le détail.

10 Puis, il y avait une autre raison encore : le Dr Prijic était un directeur

11 très respecté de l'entreprise Galenika, une société pharmaceutique qui

12 avait des rapports commerciaux avec la

13 Bosnie-Herzégovine et était présente physiquement sur le territoire de la

14 Bosnie-Herzégovine, du Monténégro, du Kosovo et avec une tendance à vouloir

15 tout contrôler. Lorsque ce différend a surgi avec Djurovic, Prijic s'est

16 mis à regrouper des mécontents par rapport au pouvoir et il a réuni autour

17 de lui de très nombreuses personnes mécontentes de la situation du point de

18 vue de la répartition du pouvoir et qui étaient membres de Galenika.

19 Finalement, Prijic a été remplacé et Djurovic a remporté la victoire.

20 M. LE JUGE HANOTEAU : Monsieur le Témoin, je vous demande instamment de

21 vous reporter à la partie du procès-verbal que je vous ai signalée. Dans la

22 version anglaise, page 4, à partir de la deuxième ligne. C'est ce M. Kutalj

23 qui parle et il dit "at the end…" vous voyez cette partie ? Oui.

24 [Interprétation] "A la fin, il a insisté sur le fait que si le Dr Prijic ne

25 pourra pas être démis de ses fonctions, le chaos va continuer à régner."

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1 "A son avis, les gens qui ne font aucun effort pour obtenir la

2 séparation des communautés locales serbes de la division administrative des

3 communautés locales sont des gens qui appartiennent au clan du Dr Prijic."

4 [En français] Maintenant, je voudrais que vous commentiez cette

5 phrase; ceux qui ne font pas d'efforts pour accomplir la séparation des

6 communautés serbes de l'administration des communautés locales. Qu'est-ce

7 que cela veut dire et quel était le problème ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela avait été, en quelque sorte, un problème

9 continu à tous les niveaux de la communauté. Il y avait, par exemple, la

10 communauté locale; il y avait des communautés locales avec les partisans de

11 Prijic, où les partisans de Prijic étaient les plus nombreux. C'était le

12 cas de certaines communautés du comité local tel que par exemple Lukavica,

13 Tilava, et il y avait d'autres, également, des communautés locales dans ce

14 cas. Puis, il y avait les communautés locales qui avaient tendance à se

15 rallier à Djurovic. Il y avait, par exemple, une communauté urbaine,

16 Grbavica, et ils ont, en quelque sorte, institutionnalisé l'ensemble du

17 conflit parce qu'ils disaient : Très bien; à moins que cela ne se passe,

18 les communautés locales ne font plus partie de la zone de compétence du

19 gouvernement municipal et nous n'allons plus leur obéir. Il y a eu

20 véritablement institutionnalisation et fondamentalement, les communautés

21 locales ont été utilisées à mauvais escient. On a pris avantage et on a

22 essayé de les utiliser surtout pour régler le conflit et il y avait une

23 division, également, au niveau des communautés locales.

24 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci, Monsieur.

25 M. TIEGER : [interprétation]

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1 Q. Monsieur Neskovic, pour enchaîner à la suite de la question posée par M.

2 le Juge Hanoteau, j'aimerais attirer votre attention sur un autre

3 paragraphe de cette même page, un peu plus bas dans la page. Je vais voir

4 si cela correspond, également, à la même page de votre version; je vais

5 voir si je peux le faire. Voilà ce dont il s'agit : "Le Dr Prijic n'était

6 pas présent durant le plébiscite. Il n'a pas protesté, lorsque les

7 Musulmans et les Croates ont apposé des affiches pour le référendum dans

8 les bureaux. Les immigrants de Sandzak ont commencé à construire des

9 maisons de façon illégale et le Dr Prijic n'a pris aucune mesure pour les

10 arrêter."

11 Sous grief, cette plainte qui est exposée à l'égard du

12 Dr Prijic du fait qu'il n'a pas su prendre des mesures pour empêcher que

13 les immigrants de Sandzak construisent des maisons, est-ce que cela

14 correspond à ce qui est évoqué pendant la conversation téléphonique entre M.

15 Djurovic et le Dr Karadzic dont nous avons parlé hier ? Il s'agit de cette

16 conversation téléphonique du mois de novembre 1991.

17 R. Oui.

18 Q. Très bien. Vous avez, également, fait référence à un gouvernement

19 multiethnique à l'époque. Est-il exact de dire que les municipalités serbes

20 de Novo Sarajevo n'avaient pas encore été déclarées ou proclamées à

21 l'époque ? A ce sujet, j'aimerais vous demander de prendre l'intercalaire

22 22.

23 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le

24 document qui se trouve à l'intercalaire 22 est le document P826,

25 intercalaire 3.

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1 Q. Monsieur Neskovic, le document P826, intercalaire 3, qu'on trouve dans

2 ce classeur à l'intercalaire 22 justement est un document du 1er avril 1992;

3 il s'agit d'une édition du Vicani Novani [phon] de Sarajevo à propos,

4 justement, de la décision qui a été prise. La première phrase de cet

5 article indique que : "La session constitutive du peuple serbe de la

6 municipalité de Novo Sarajevo s'est tenue jeudi dernier." Etant donné qu'il

7 s'agit d'une édition du mercredi, sans faire de calcul mathématique, je

8 suppose que cela s'est passé lors de la dernière partie du mois de mars

9 1992.

10 Est-ce que cela correspond à la date de l'établissement de la création de

11 la municipalité serbe de Novo Sarajevo ?

12 R. Oui, j'étais présent. J'étais présent à cette assemblée portant

13 création. Je pense que cela s'était passé à la fin du mois de mars. Cela

14 s'est passé au centre Mémorial à Vrace. C'est un endroit où un certain

15 nombre de Juifs ont perdu la vie lors de la Deuxième guerre mondiale. Il y

16 avait les représentants des autorités de la ville, des représentants du

17 SDS. Il s'agissait de créer la municipalité serbe de Novo Sarajevo, qui

18 devait être fusionnée avec Novo Romanija. L'assemblée a eu lieu certes,

19 mais cela a été un peu un échec, parce que la municipalité serbe n'a pas

20 été effectivement établie. M. Djurovic a fondamentalement essayé de

21 démontrer qu'il faisait quelque chose. Il voulait qu'on le voie en train de

22 faire quelque chose, mais il n'était pas si partisan de cela. Les autres

23 ont commencé à poser des questions à propos de qui allait être le

24 président. Puis d'autres encore ont pris la parole à propos de questions

25 territoriales, d'aucuns se sont demandés d'où devrait venir le

Page 16683

1 gouvernement, puis ensuite après une heure, une heure et demie de

2 discussions, cela s'est terminé comme cela. Il y a eu une tentative, certes

3 d'établir ou de constituer la municipalité serbe, mais cela ne s'est jamais

4 concrétisé parce que cette réunion a été soldée par un échec. Elle n'a pas

5 été couronnée de succès. De toute évidence, il y a eu un rapport dans les

6 médias, mais les journalistes, de toute évidence n'étaient pas au courant

7 de tous les détails.

8 Ensuite, à la suite de cela, il y a eu un vide puisque la municipalité

9 serbe de Novo Sarajevo a finalement été établie aussi tardivement que le 10

10 juin 1992.

11 Q. --

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, j'aimerais savoir si

13 vous en avez fini avec ce thème parce que je souhaiterais demander au

14 témoin de reprendre le document précédent.

15 M. TIEGER : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez fini ?

17 M. TIEGER : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Neskovic, j'aimerais vous

19 demander de prendre le document qui se trouve à l'intercalaire 18.

20 J'aimerais attirer votre attention sur la page numéro 3, premier paragraphe

21 qui est précédé de AD1. Est-ce que vous voyez les mots "Bane Surbat" il

22 s'agit d'un nom propre ? Vous le voyez ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous donner

25 lecture à partir de ces mots jusqu'à la fin du paragraphe, à partir des

Page 16684

1 mots "Bane Surbat."

2 Est-ce que vous pourriez nous en donner lecture à voix haute, je vous

3 prie ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] "Il y a trois jours de cela, dans la

5 communauté locale de "Bane Surbat", la réunion a été interrompue parce que

6 le Dr Prijic a commencé à essayer des comptes de façon physique. Il s'est

7 battu avec l'un des représentants. En sus du travail du conseil municipal,

8 nous avons également eu un exemple de la très mauvaise relation dont

9 l'apogée s'est terminée à cette réunion, et qui a été indiqué par M.

10 Andric."

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je ne sais pas si vous avez

12 remarqué M. Tieger, mais il y a toute une ligne qui ne se trouve pas dans

13 la traduction. Ce qui pose quelques problèmes quand même à propos de la

14 qualité de la traduction de ces documents. "Après la mention de

15 l'altercation avec le Dr Prijic," vous voyez qu'il y a deux lignes qui ne

16 se trouvent pas, puisqu'il y a la référence à Andric qui se trouve là.

17 Toute la phrase, "hormis le travail du conseil municipal, nous avons pu

18 ainsi juger de la mauvaise qualité des relations humaines," cela ne se

19 trouve pas. Je vous regarde, ce n'est pas vous qui êtes le coupable bien

20 entendu, ce n'est pas vers vous que je pointe un doigt accusateur.

21 M. TIEGER : [interprétation] Non, non mais je comprends tout à fait,

22 Monsieur le Président. De toute évidence, nous allons essayer de régler ce

23 problème et ce faisant, nous allons essayer de prendre un certain recul et

24 d'essayer de façon systématique, d'essayer d'empêcher ce genre de problème

25 à l'avenir.

Page 16685

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Poursuivez, je vous prie.

2 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie.

3 Q. Monsieur Neskovic, j'aimerais vous demander de prendre un document, un

4 document qui a été publié il y a un certain temps de cela, deux mois

5 environ après que la décision a été prise d'établir la municipalité serbe

6 de Novo Sarajevo, dont vous avez parlé. J'aimerais vous demander à cette

7 fin de prendre l'intercalaire 23.

8 M. TIEGER : [interprétation] Le document qui se trouve à l'intercalaire 23,

9 document P529, intercalaire 158. Il s'agit d'un rapport d'activités de la

10 part de la cellule de Crise de la municipalité serbe de Novo Sarajevo. Vous

11 voyez que cela est adressé au président de la présidence de la République

12 serbe de Bosnie-Herzégovine. Vous voyez que vous avez la signature de

13 M. Neskovic, président de la cellule de Crise.

14 Q. Monsieur Neskovic, est-ce qu'il s'agit d'un rapport relatif aux

15 activités de la cellule de Crise que vous avez préparé et présenté au

16 président de la présidence ?

17 R. Oui, il s'agit effectivement de ce document. C'est un document que j'ai

18 rédigé, c'était un rapport.

19 Q. Après les problèmes dont vous nous avez fourni les descriptions, je

20 pense aux problèmes relatifs à l'établissement de la municipalité serbe de

21 Novo Sarajevo, vous avez ensuite assumé les fonctions de président de la

22 cellule de Crise. Ainsi, vous étiez redevable au président de la présidence

23 et vous lui envoyiez des rapports portant sur les activités menées à bien

24 par la cellule de Crise à ce moment-là ?

25 R. Permettez-moi de préciser quelque chose qui me semble indispensable.

Page 16686

1 Avant cette cellule de Crise, il y avait une autre cellule de Crise qui

2 avait été établie. Elle était dirigée par M. Djurovic et j'étais membre de

3 cette cellule de Crise. Nous étions environ une quinzaine. Nous nous

4 trouvions dans un bâtiment qui se trouvait près de ce centre, de ce

5 mémorial. On nous a tous attribué des tâches. Ce fut la première et la

6 dernière réunion d'ailleurs. A la suite de cette réunion, lorsque nous

7 avons commencé à nous acquitter de nos fonctions, je m'occupais des

8 réparations aux bâtiments, aux entreprises, et cetera. Tout le monde s'est

9 dispersé. Djurovic est allé à Belgrade, puis quelqu'un d'autre est allé en

10 Serbie, et les membres de cellule de Crise se sont enfuis. C'était

11 Bogdanovic qui s'est rendu en Serbie. Moi-même, ainsi que Mirko Sarovic,

12 étions les seuls à être restés. Je pense que la cellule de Crise de départ

13 a disparu et je pense qu'à l'époque, Jasarevic faisait référence aux

14 décisions du gouvernement. Il y avait un ensemble d'instructions qui

15 régissait le travail des cellules de Crise à cette occasion. Puis ensuite,

16 Jasarevic et moi-même, nous sommes retrouvés dans le pétrin en quelque

17 sorte, parce que tous les autres officiels s'étaient enfuis. La direction

18 du Parti démocrate serbe s'était enfuie également. Tout ceux qui pouvaient

19 le faire s'enfuyaient, et Jasarevic et moi-même avons essayé de prendre une

20 décision. Nous nous sommes demandés ce qu'il fallait que nous fassions.

21 Nous sommes rencontrés et avec quelque 50 ou 60 citoyens, qui se trouvaient

22 encore dans le secteur, nous avons décidé d'établir une nouvelle cellule de

23 Crise. J'ai été élu président. Sarovic est resté secrétaire parce que

24 c'était un expert juridique. C'est ainsi que nous avons décidé d'établir

25 une cellule de Crise. Nous avons fait, dans la mesure de nos moyens, du

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1 mieux que nous pouvions, notre travail. Au vu des circonstances actuels,

2 nous n'avons demandé des instructions à aucune autre autorité supérieure,

3 et nous avons essayé d'adapter notre travail à la situation qui prévalait à

4 l'époque. Nous n'avons jamais demandé d'orientation ou d'instructions.

5 Puis, je pense qu'après deux mois environ, je pense que Karadzic a

6 invité tous les représentants des cellules de Crise à Jahorina à l'hôtel

7 Bistrik afin justement que nous leur présentions des rapports de ce que

8 nous avions fait. Il s'agissait de présentations essentiellement orales, et

9 je pense que j'ai rédigé un rapport écrit. C'est à cette date que la

10 cellule de Crise a cessé d'exister, parce que le 10 juin, l'assemblée

11 municipale et le comité exécutif ont été créés. Fondamentalement, à la fin

12 de cette période, au cours de laquelle nous avons travaillé pour la cellule

13 de Crise, j'ai rédigé ce rapport, et je pense l'avoir présenté, donné moi-

14 même personnellement à Karadzic, et je pense qu'Ostojic était assis à côté

15 de lui également.

16 Q. Nous allons aborder ce document dans un petit moment, mais j'aimerais

17 vous poser une question à propos d'une autre réunion. J'aimerais vous

18 demander de repenser à la période pendant laquelle l'aéroport a été confié

19 à un bataillon français. J'aimerais vous demander si vous-même, ainsi que

20 d'autres, avaient présenté une lettre à la direction à ce moment-là.

21 R. Oui.

22 Q. Sur quoi portait cette lettre ?

23 R. Il s'agissait d'une grande réunion qui avait été organisée à Lukavica.

24 Elle avait été présidée par M. Mucibabic, le commissaire du gouvernement.

25 Il y avait beaucoup de personnes qui ont participé à cette réunion : les

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1 représentants des forces armées, les représentants des forces de police,

2 des citoyens qui étaient venus, des soldats, des membres de la cellule de

3 Crise municipale. C'était une réunion à participation composite, en quelque

4 sorte. Je veux dire qu'il y a un certain nombre de critiques qui ont été

5 avancées à l'intention de la direction à Pale, et à l'intention de la

6 présidence. Lorsque nous disions "Présidence," nous parlions de Plavsic,

7 Koljevic et Karadzic. Il y a quand même un certain mécontentement qui a été

8 exprimé vis-à-vis du gouvernement.

9 Cela n'a pas été ce que l'on aurait pu appeler une réunion qui était

10 bien tenue. A chaque fois qu'il y avait un grief, une plainte, elle était

11 présentée par la personne qui voulait prendre la parole, et ensuite tout

12 cela a été énuméré. Autant que je souvienne, il y a sept ou huit demandes

13 qui ont été présentées au président de la présidence de la République serbe

14 de Bosnie-Herzégovine à Pale, à savoir à Krajisnik, à Biljana, à Karadzic

15 et à Nikola. Je pense que c'était l'armée qui n'était pas satisfaite du

16 fait que l'armée avait été placée sous le contrôle de la FORPRONU. Ils ont

17 exprimé leur mécontentement à ce sujet. Il y a un autre groupe de sous-

18 officiers qui ont exprimé leur mécontentement du fait de leur faible solde,

19 et ils indiquaient que leur solde était inférieur au solde des officiers

20 qui avaient un service actif. D'autres personnes également étaient

21 insatisfaites, parce qu'il y avait beaucoup de pillage, beaucoup de vols,

22 de l'arsin. Les gens étaient d'avis qu'un état d'urgence devrait être

23 instauré afin de restaurer en quelque sorte l'ordre public.

24 Puis M. Prijic -- ou plutôt d'autres personnes qui étaient également très

25 peu satisfaite du sort de Sarajevo, parce que dans la ville il y avait des

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1 bruits qui couraient, suivant lesquels Sarajevo allait être laissé aux

2 Bosniens complètement et que les Serbes allaient partir. Il y avait quelque

3 180 000 Serbes à Sarajevo. Je pense qu'il y avait des ondes de choc dans la

4 population. Je pense que c'est M. Prijic qui a soulevé cette question. Je

5 pense que c'est le point numéro 3 de la réunion. Il s'est érigé contre la

6 légitimité politique de la direction des Serbes de Bosnie-Herzégovine. Il

7 pensait qu'il s'agissait de traîtres, qu'ils avaient trahi les intérêts

8 nationaux des Serbes, et il a suggéré que nous, de la municipalité,

9 devrions essayer de prendre contacte avec d'autres municipalités, afin de

10 nous mettre d'accord à propos de certaines politiques serbes.

11 Alors, que vous soyez d'accord ou pas avec ces éléments, tout cela a été

12 répertorié dans un document. Chacun a eu voix au chapitre, et ensuite, nous

13 l'avons signé, ce document, afin d'indiquer que le document était exact. Je

14 pense que nous avons été quelque 18 à signer le document que nous avons

15 d'ailleurs envoyé. Ensuite, il y a eu une réunion que nous avons eue avec

16 la direction serbe de la Bosnie-Herzégovine à Pale. A cette occasion, nous

17 avons justement évoqué ces requêtes et ces demandes. Malheureusement, je

18 n'ai pas pu conserver ce document. Je l'ai conservé pendant un certain

19 temps, puis ensuite lorsque j'ai déménagé, je l'ai égaré.

20 Mais il y avait quelques sept à huit demandes qui émanaient de groupes

21 différents. Ce qui est intéressant à ce sujet, c'est que le commissaire du

22 gouvernement, M. Mucibabic, semblait se rallier à nous. Je veux dire qu'il

23 a donné son soutien à tout ce que nous avons dit. Il semblait, lui

24 également, penser que cette politique devait faire l'objet des critiques,

25 ce qui a encouragé les gens à parler, puisqu'il y avait un représentant du

Page 16690

1 gouvernement qui nous encourageait. Cela a encouragé les gens à prendre la

2 parole, à s'exprimer et à présenter leurs points de vue.

3 Puis ensuite, je pense que Mucibabic a été un peu effrayé des conséquences

4 possibles de ce genre de mesures. Je pense qu'il s'est enfuit à Belgrade

5 d'ailleurs.

6 Q. Combien de personnes de la municipalité se sont rendues à la réunion ?

7 Vous avez dit que 18 avaient signé le document. Combien étaient présentes ?

8 R. Je ne sais pas. Je pense qu'il y avait au moins 50 ou 60 personnes.

9 Q. Non. Je ne parlais pas de la première réunion. Je vous parle de la

10 réunion qui a eu lieu avec la direction. Combien de personnes, qui se

11 trouvaient à la première réunions, sont allées à la réunion où vous avez

12 rencontré la direction ?

13 R. D'accord. Je m'excuse, je m'excuse. Vous savez, c'est une comédie un

14 peu noire en quelque sorte, parce que tous les signataires étaient censés

15 s'y rendre. Nous avons commencé à prendre la route. Nous voulions aller à

16 cet hôtel à Jahorina, et nous voulions que les 18 coordonnent cela, parce

17 que nous étions censés rencontrer la direction à Kikinda. Mais il y en

18 avait quelque 18 qui sont partis, parce qu'il faut savoir que nous n'étions

19 plus que six ou sept à la fin parce qu'il y en a une douzaine qui ont

20 abandonné. Nous étions quelque sept ou huit. Il faut savoir que pour

21 accorder son soutien à ce que nous avions à dire, le représentant d'Ilidza,

22 Nedeljko Prstojevic, est venu également. Il n'avait pas été invité, mais il

23 est venu nous prêter main-forte.

24 Lorsque nous sommes arrivés, nous avons bu un coup pour nous donner

25 un peu de courage. Ensuite, lorsque nous sommes arrivés à la destination

Page 16691

1 finale, il y avait moi-même, Danilo Skrba. Nous étions quatre. Je pense

2 qu'il y avait également Nedeljko Prstojevic, et sur les 18 personnes, nous

3 n'étions plus que quatre. En quelque sorte, les autres n'ont pas poursuivi

4 leur chemin, se sont égarés et ne se sont pas retrouvés avec nous.

5 Q. Vous avez mentionné qu'un certain nombre de personnes n'ont pas

6 poursuivi leur chemin avec le groupe parce qu'ils avaient peur des

7 conséquences éventuelles. De quelles conséquences avaient-ils peur ?

8 R. Je ne peux pas vous dire maintenant, je ne peux pas faire des

9 hypothèses, mais pendant la guerre, lorsque la vie humaine ne vaut pas

10 beaucoup, vous admettez des critiques publiquement, surtout à propos des

11 dirigeants et vous pouvez vous attendre à voir des conséquences. Mais je ne

12 peux pas, maintenant, faire des hypothèses par rapport à ces conséquences

13 possibles et je dois être franc ici, lorsqu'on est arrivé à la réunion,

14 dans la pièce, se trouvait

15 M. Krajisnik, M. Karadzic et ce qui m'a surpris, il y avait beaucoup de

16 représentants de l'armée; il y avait Mladic, il y avait Gvero, il y avait

17 Tolimir. Il y avait ces trois représentants, ces trois officiers de l'armée

18 les plus hauts gradés et j'étais surpris de les avoir vus à la réunion

19 parce que nous nous sommes adressés à Krajisnik, à Plavsic, à Karadzic et à

20 Koljevic.

21 Quant à la réunion, Karadzic se taisait pour la plupart du temps. Krajisnik

22 a parlé, il a essayé de rendre l'ambiance un peu plus décontracté pour que

23 nous puissions mener -- c'est Mladic qui nous a fait peur. Il y avait un

24 problème concernant Mladic surtout parce que Prijic a eu un conflit verbal

25 avec Mladic et nous avons eu peur si nous resterons vivants après ce

Page 16692

1 conflit verbal avec Mladic et parce qu'il s'est mis en colère, après cela

2 et nous étions contents de sauver notre peau. Mladic nous a fait peur parce

3 qu'il était très en colère, il était arrogant et imprévisible et nous ne

4 pouvions pas lui parler et nous ne nous attendions pas à le voir à la

5 réunion. Nous pensions que nous parlerions avec Plavsic, Koljevic, Karadzic

6 et Krajisnik et nous avons parlé avec Krajisnik pour la plupart du temps,

7 tandis que Prijic s'est disputé avec Mladic et à la fin, il l'a insulté,

8 mais tout compte fait, tout s'est bien passé.

9 Q. Oui, Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE HANOTEAU : Vous avez dit que c'était le temps de guerre et que

11 la vie humaine n'était pas toujours respectée. Vous dites que lorsqu'on se

12 permet de critiquer officiellement les leaders, on peut s'attendre à toutes

13 sortes de conséquences. Est-ce que vous avez eu des exemples où des

14 conséquences graves ont été encourues par telle ou telle personne ? Est-ce

15 qu'il y a eu des exemples à cette époque-là où des gens ont eu leur vie

16 supprimée ou ont été menacées ou est-ce qu'ils ont été obligés de s'enfuir,

17 de quitter le pays ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai un exemple, c'est le

19 Pr Mucibabic; il s'est enfui. Mais quelqu'un aurait pu tuer quelqu'un

20 d'autre, je ne savais rien de cela parce que pendant la guerre, quelqu'un

21 n'aurait pas fui cela de façon publique. Je n'en sais rien. Mais pour être

22 franc, je dois dire que nous avions peur de Mladic beaucoup, mais je pense

23 que Krajisnik a contribué à ce que la situation se calme un peu et qu'un

24 dialogue se mène là-dessus. D'ailleurs, Krajisnik était très habile quand

25 il s'agissait de différentes discussions.

Page 16693

1 Momo Mandic m'a dit que tout allait bien, mais il m'a conseillé de ne pas

2 venir à Pale très souvent après cette réunion parce qu'il fallait passer

3 par la forêt et il m'a conseillé de me calmer à Grbavica pour un certain

4 temps, d'y rester, de ne pas voyager pour ma propre sécurité. Mais je suis

5 désolé de ne pas pouvoir vous répondre. Tout ce que je sais est que le Pr

6 Mucibabic a fui; tout simplement, il a fuit cet endroit et il n'est plus

7 revenu.

8 M. LE JUGE HANOTEAU : Je vous remercie.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une question pour

10 vous : pouvez-vous nous dire brièvement quels étaient les sujets à propos

11 desquels Prijic et Mladic se sont disputés ? Pouvez-vous nous dire quels

12 étaient leurs points de vue par rapport à cela, quelle était cette

13 dispute ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient assis l'un près de l'autre et

15 Mladic a demandé à Prijic - parce qu'il était docteur en pharmacie - ce

16 qu'il pensait des officiers serbes et Prijic lui a demandé s'il pensait aux

17 officiers supérieurs ou subalternes. Mladic lui a dit, par la suite : Bien

18 sûr que je pense aux officiers supérieurs. Prijic lui a répondu qu'il

19 estimait qu'il s'agissait d'escrocs, de lâches, d'incapables. Mladic s'est

20 mis en colère et il a changé de couleur de visage, il était rouge et après,

21 blanc et il lui a demandé à quel pourcentage et Prijic a répondu : 95 %. Il

22 a continué d'être assis comme si de rien n'était. C'était le dialogue qui

23 se déroulait entre eux.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le conflit ne concernait pas les

25 questions concernant les opérations ou les combats ?

Page 16694

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il s'agissait de la compétence des

2 officiers, il pensait qu'il s'agissait d'incapables, de lâches, d'escrocs.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

4 Vous pouvez continuer, Monsieur Tieger.

5 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

6 Q. Monsieur, vous avez mentionné auparavant Sarajevo et le sort qui aurait

7 pu lui être réservé. Est-ce qu'à l'époque, vous étiez au courant des

8 objectifs stratégiques qui ont été adoptées à la réunion de l'assemblée

9 serbe du 12 mai 1992 ?

10 R. Non, pas tout de suite parce que l'assemblée s'est tenue à Banja Luka,

11 mais plus tard, on a appris qu'il s'agissait d'un objectif stratégique,

12 mais cet objectif stratégique de l'assemblée, pour nous, les citoyens de

13 Sarajevo, n'importe pas beaucoup parce qu'on ne savait pas ce que cela

14 voulait dire, c'est-à-dire, est-ce que cela voulait dire qu'il faudrait

15 créer un Sarajevo serbe ou autre chose; on ne savait pas ce que cela

16 voulait dire exactement.

17 Deuxièmement, l'assemblée n'a pas répondu à la question de savoir si

18 Sarajevo musulman ou Sarajevo serbe serait une municipalité avec une

19 assemblée municipale ou ils pensaient plutôt à la division de la ville

20 selon le concept de Berlin. Cela n'était pas très clair. Mais

21 indépendamment de cet objectif stratégique de l'assemblée de Banja Luka,

22 les informations affluaient de différents milieux. Musulmans et Serbes et

23 des citoyens, simples citoyens que les Serbes de Sarajevo étaient déjà

24 déterminés et que Sarajevo devrait appartenir aux Bosniens, ce qui pesait

25 beaucoup sur les citoyens.

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1 Cette rumeur s'est renforcée par le fait que tous les dirigeants de

2 la Republika Srpska se sont sauvés, y compris, les citoyens qui habitaient

3 Grbavica, tels Biljana Plavsic et Nikola Koljevic; même eux, ils se sont

4 sauvés de Grbavica et ils sont arrivés à Pale, ce qui semait beaucoup plus

5 de doutes par rapport au fait que les Serbes à Sarajevo feraient l'objet

6 d'un commerce. Nous avions très peur de Milosevic parce que Milosevic

7 pourrait négocier au nom des Serbes de Sarajevo. Comme il ne savait rien de

8 Sarajevo, nous avions peur qu'il ne fasse une sorte de commerce avec les

9 Serbes de Sarajevo.

10 Malheureusement, après les accords de Dayton, cela s'est réalisé

11 d'une certaine façon.

12 Q. Hier, vous avez parlé d'une conversation téléphonique entre, si je me

13 souviens bien, M. Karadzic et M. Djurovic durant laquelle le Dr Karadzic a

14 parlé de "leurs territoires," et du fait que "tout le monde doit rester

15 chez eux." Cette conversation concernait Sarajevo.

16 Par rapport à cela, pourriez-vous jeter un coup d'œil à

17 l'intercalaire 21 ?

18 M. TIEGER : [interprétation] Je demande qu'une cote soit attribuée à ce

19 document.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction de

22 l'Accusation P914.

23 M. TIEGER : [interprétation]

24 Q. Monsieur Neskovic, il s'agit d'une transcription du film tourné en 1992

25 qui s'appelle "Les épopées serbes." Pouvez-vous vous reporter à la page 5

Page 16696

1 de la traduction en anglais et vous allez voir qu'il y a des -- c'est sous

2 26.35, la première partie de la transcription. J'attire votre attention à

3 la partie qui est six entrées après cela, après qu'un joueur ou un chanteur

4 parle d'une belle turque et des Serbes qui entourent Sarajevo. Voyez-vous

5 cette partie où M. Karadzic parle ?

6 R. S'il vous plaît, juste un moment. Il faut que je voie la traduction en

7 serbe. Ce n'est pas ici.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à la page qui, en haut, porte le

9 numéro 852, Monsieur Neskovic.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

11 M. TIEGER : [interprétation]

12 Q. Là, le Dr Karadzic dit : "Nous allons prouver à la communauté

13 internationale que nous ne tenons pas Sarajevo en siège. Nous protégeons

14 nos territoires et on peut voir que Sarajevo est né sur le territoire serbe

15 en tant que propriété serbe et les environs de Sarajevo sont serbes,

16 également. Ce sont tous des villages serbes, des villes serbes. Mais nous

17 ne voudrons pas résoudre ces questions," et cetera.

18 La partie suivante de la transcription que je vous demande de voir,

19 c'est à la page 8 de la traduction en anglais. C'est la partie où le Dr

20 Karadzic parle à Eduard Liminov.

21 R. C'est quel numéro en haut de la page ?

22 Q. Je pense que cela serait -- il faut que je vérifie. S'il vous plaît,

23 juste un instant.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] "Liminov" en version en anglais, c'est à

25 la page qui porte le numéro 856 en haut de la page de la version en

Page 16697

1 anglais.

2 M. TIEGER : [interprétation] La version en anglais dont je dispose a le

3 numéro 859, en haut.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sous 859, nous voyons que "Liminov"

5 juste au-dessus du milieu de la page, il dit : "its mighty weapon" --

6 M. TIEGER : [interprétation] Je ne pense pas que cela serait utile de

7 trouver la version en serbe pour le témoin parce que

8 M. Karadzic parle en anglais, je pense, dans cette partie.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 M. TIEGER : [interprétation] Je pense qu'il vaut mieux que je lise cette

11 partie après que ce soit interprété.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

13 M. TIEGER : [interprétation]

14 Q. La portion de la transcription qui -- non, je vais recommencer à la

15 page 8 : "Les Turcs et même les Musulmans qui, auparavant, étaient les

16 Serbes et qui se sont convertis à l'islam vivaient pendant des siècles dans

17 des villes pendant que les Serbes possédaient toute la terre et c'était la

18 terre serbe." Il montre Sarajevo et il explique : Lorsque les Turcs sont

19 arrivés, nous pouvons négocier du territoire, mais c'est notre terre. Nous

20 sommes propriétaires de cette terre. Les Turcs étaient des occupants et les

21 Musulmans leur ont succédé." Après, il montre des mosquées.

22 Monsieur Neskovic, est-ce que M. Karadzic a pensé que Sarajevo est serbe,

23 que cela représente la terre serbe et le territoire serbe ?

24 R. Je pense que M. Karadzic a dit cela de façon incorrecte. Il vivait

25 pendant longtemps à Sarajevo et il pouvait savoir à qui appartenait la

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1 terre. Mais la plupart de la terre à Sarajevo appartenait à l'état. I y

2 avait des propriétés musulmanes, des propriétés serbes. Il y avait beaucoup

3 de biens qui appartenaient aux Juifs dans la municipalité de Novo Sarajevo.

4 Il y avait, également, beaucoup de propriétés croates et tout cela, c'était

5 pendant le royaume de Yougoslavie où c'était le régime des propriétés

6 privées qui était en vigueur. Après la révolution socialiste, toutes les

7 propriétés ont été nationalisées et sont devenues la propriété de l'état.

8 Parler de Sarajevo dans ce sens-là, c'est-à-dire que Sarajevo appartenait

9 aux Musulmans ou aux Serbes ou aux Croates exclusivement, ce sont des

10 bêtises et cela ne correspond pas aux faits. Il y avait des propriétés

11 privées qui appartenaient au premier et au deuxième et au troisième et il y

12 avait beaucoup de bâtiments, beaucoup d'édifices qui appartenaient au

13 premier, au deuxième et au troisième, également. Tout simplement, cela

14 n'est pas exact. Karadzic, en tant qu'intellectuel qui vivait à Sarajevo,

15 devait connaître tout cela, toutes ces données. Mais il utilisait cela en

16 tant que propos démagogiques pour éventuellement faire impression sur

17 Liminov. Mais ce que Karadzic a dit ne correspondait pas aux faits, à la

18 réalité.

19 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, il faut que je voie

20 l'heure.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

22 Nous allons faire une pause jusqu'à 11 heures.

23 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

24 --- L'audience est reprise à 11 heures 09.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, vous pouvez continuer.

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1 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

2 Avant de commencer, il y a une chose administrative à soulever. Je

3 pense que le document 914 doit obtenir un nouveau numéro, qui englobera la

4 transcription et la vidéo.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame la Greffière d'audience.

6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La vidéo aura la cote P914 et la

7 transcription, P914A.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

9 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

10 Q. Monsieur Neskovic, il me reste encore quelques questions à vous poser.

11 On va se concentrer sur les événements à Novo Sarajevo.

12 D'abord, est-ce qu'en 1992, et plus précisément dans la deuxième moitié de

13 l'année 1992, au début du mois de mai, au mois de juin, est-ce que les

14 Musulmans ont commencé à quitter Novo Sarajevo ?

15 R. Selon mes connaissances, au début, ils voulaient y rester pour y vivre.

16 Ils ne voulaient pas quitter le lieu, la municipalité. Quant aux relations

17 avec les Serbes, les Musulmans avaient des rapports corrects, les Musulmans

18 et des Croates également. Je pense qu'au début, la situation était bonne,

19 si on peut l'identifier comme cela pendant la guerre. Mais dans la deuxième

20 moitié de l'année 1992, à mes connaissances, c'était déjà au mois de

21 juillet, au mois d'août, des groupes de gens ont commencé à chasser les

22 Musulmans et les faire partir de l'autre côté de la Miljacka. Quand il

23 s'agit de Grbavica, il faut distinguer deux choses -- Grbavica I, où se

24 trouvait notre cellule de Crise et où il y avait des autorités civiles, et

25 Grbavica II, le quartier qui ressemblait à Stalingrad; c'est-à-dire c'est

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1 un théâtre de guerre. La situation était beaucoup plus difficile à Grbavica

2 II, et je pense que c'est de Grbavica II que les déportations ainsi ont

3 commencé, les déportations des Musulmans à travers le pont. Je ne suis pas

4 sûr, mais pour vous dire s'il s'agissait d'un 3e Bataillon dont le

5 commandant était Degbanovic [phon] appelé balija. Ensuite, il y avait une

6 série d'escrocs ou de groupes d'escrocs qui faisaient des actes illégaux,

7 qui pillaient, qui malmenaient les gens, et parmi lesquels le plus connu

8 était Vlahovic, appelé Batko, il était un monstre. Après Grbavica II, à

9 Grbavica I, il y avait une journée pendant laquelle, c'était peut-être au

10 mois d'août 1992, mais je ne suis pas sûr, où un groupe de gens en

11 uniformes, je ne sais pas qui ils étaient, et je ne cherchais pas à le

12 savoir non plus. Ce groupe de gens en uniformes a chassé une partie de la

13 partie de la population musulmane de leurs domiciles, les chassaient et les

14 obligeaient de passer de l'autre côté. Olja Varagic est venue chez moi.

15 Elle a appris que quelque chose allait se passer. Je n'étais pas au

16 courant. Elle m'a demandé de l'aider. J'ai répondu : Non, parce que je

17 n'étais pas influent. Mais j'ai dit : Je viendrai chez toi dans ton

18 appartement. Orhan Dzipa était déjà dans l'appartement. C'était mon

19 collègue de la radiotélévision Sarajevo. Il y avait beaucoup de Musulmans

20 de l'immeuble dans cet appartement d'Olja Varagic, et nous avions un plan.

21 Si un groupe de gens armés venait à l'appartement, je me présenterais pour

22 dire que c'est mon appartement, que j'y habite et qu'il ne devrait pas y

23 entrer.

24 Je ne sais pas si cela aurait marché, mais heureusement, personne ne s'est

25 présenté à la porte de cet appartement. Au mois d'août, on peut dire qu'il

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1 y avait de façon plus organisée, et plus massive des déportations des

2 Musulmans. Mais avant le mois d'août, il y avait des cas isolés, des cas où

3 les Musulmans ont été chassés, et il y avait des demandes également des

4 Musulmans parce qu'ils voulaient partir et passer de l'autre côté parce

5 qu'ils n'étaient pas en sécurité à Grbavica. Il y avait des échanges qui se

6 sont déroulés de façon secrète où les Serbes de Sarajevo passaient du côté

7 de Grbavica, et les Musulmans de Grbavica passaient de l'autre côté. Il

8 s'agissait des activités des groupes de criminels qui ne respectaient pas

9 la loi, et pendant la guerre, cela a continué. Il y avait de tels échanges

10 de la population pendant la guerre.

11 J'ai parlé à des gens qui voulaient partir à tout prix, et les gens qui

12 étaient de Sarajevo, les Musulmans et les Serbes. Tout le monde devait être

13 prêt à avoir faim, à être blessé, et cetera. Mais ils ne pouvaient pas, ils

14 ne voulaient pas être insultés et supporter cela. L'un de mes voisins

15 musulman m'a dit : Je sais que les Serbes ont des armes. Je devrais faire

16 quelque chose. Je pourrais creuser des tranchées ou nettoyer des rues. Je

17 peux faire cela, mais je ne peux pas chanter des chansons chetniks. C'est

18 pour cela que j'aimerais passer de l'autre côté. Là, il s'est adressé à

19 Sipcic Simo, chef de la police, qui l'a aidé à passer de l'autre côté. Simo

20 Sipcic était en mesure de le faire parce qu'en causant à lui, Tomo Sipcic

21 était le commandant du corps, et ils étaient cousins, c'est pour cela qu'il

22 pouvait le faire.

23 Pendant la première moitié de l'année, il y avait des cas isolés comme

24 celui-ci, et dans la deuxième moitié de l'année, cela a été un peu plus

25 organisé. Quant à Grbavica I, pour autant que je m'en souvienne, cela n'a

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1 duré qu'une seule journée. Je pense que cette seule journée a été horrible,

2 c'était un mauvais souvenir. Il y avait beaucoup de mauvaises choses qui se

3 sont passées. Les gens ont été chassés de l'autre côté de la rivière. Ce

4 n'était pas nécessaire parce que je dois souligner que la guerre dans ce

5 quartier urbain a provoqué beaucoup de mauvaises choses. Les Musulmans de

6 Grbavica par rapport aux autorités serbes et à l'armée serbe, je dois dire,

7 je dois dire la vérité, ils étaient très corrects. De l'autre côté un

8 commandant Petkovic Dragan. Il était très correct envers eux parce qu'il y

9 habitait, il y vivait, et ces relations au mois d'avril, et mois de mai

10 étaient correctes, si on peut dire comme cela. Dans des circonstances de

11 guerre, et je suis désolé parce que cela s'est gâté par la suite. C'est

12 tout ce que je peux vous répondre par rapport à votre question. Quant aux

13 autres aspects, je peux vous dire plus lorsque d'autres questions me seront

14 posées.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un élément d'éclaircissement, je vous

16 prie. Vous avez dit que Grbavica ressemblait à -- vous avez dit Stalingrad

17 ou Stari Grad, à ce moment-là ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parlais de Grbavica II, c'est une autre

19 localité. J'ai dit qu'elle ressemblait à Stalingrad, car il y a eu là des

20 combats absolument atroces, et une guerre menée par les tireurs embusqués,

21 qui a vraiment fait de cette localité une ville ressemblant à Stalingrad.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Merci, merci de cette

23 éclaircissement.

24 M. TIEGER : [interprétation]

25 Q. Monsieur Neskovic, vous avez parlé d'un certain Batko. Je vous demande

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1 d'abord si vous êtes au courant du fait que cet homme aurait occupé un

2 poste officiel au sien de la police militaire ou d'un autre organisme ?

3 R. Non, c'était un voyou armé, une atrocité, un homme au caractère

4 pathologique. Je ne sais pas s'il appartenait à une unité régulière ou à

5 une unité irrégulière, parce que je ne suis pas spécialiste de ces unités,

6 et il portait un uniforme en tout cas. Il a fait beaucoup de mal là-bas

7 voyez-vous, parce que quand la situation politique se dégrade un peu, un

8 homme comme celui-là, un homme qui a des tendances à la délinquance peut

9 faire beaucoup de torts. Il y avait là-bas la police. Il y avait aussi par

10 la suite l'armée française et la sécurité était assez bien assurée. Mais le

11 problème se posait la nuit parce qu'il n'y avait pas beaucoup d'éclairage

12 public. Il n'y avait pas beaucoup de lumière la nuit, et les lignes de

13 front se trouvaient dans la ville elle-même. Il n'y avait pas de séparation

14 physique entre l'endroit où quelqu'un habitait et la ligne de front. Lui,

15 ce voyou, accompagné d'un certain nombre de ses amis, attaquait les maisons

16 la nuit, pénétrait par infraction. Il a même été question de lier certains

17 meurtres à son activité nocturne. Je sais parce que j'ai été à plusieurs

18 reprises témoin oculaire de ce genre de choses.

19 Voyez-vous quand vous rencontrez un homme comme lui dans la rue, vous

20 ne savez jamais s'il va vous dire bonjour ou s'il va se mettre à tirer sur

21 vous. Puis par ailleurs, il lui arrivait aussi d'interpeller les gens de sa

22 propre initiative. Le problème, c'est qu'il fallait quelque temps pour

23 rester en vie parce que ce n'était pas le genre à interpeller quelqu'un, à

24 l'arrêter, à le garder deux ou trois jours ce qui aurait laissé à d'autres

25 la possibilité de sauver la tête de celui qu'il avait arrêté. Les choses se

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1 jouaient en deux minutes. Un jour, il a interpellé mon ami Orhan Dzipa, qui

2 promenait son chien, et on est venu me voir pour me dire : "Faisons tout ce

3 que nous pouvons pour sauver Dzipa." J'ai dit : "Je ne peux pas y aller

4 parce qu'il va me tuer." On est allé avoir le commandant de la police

5 militaire, Simo Sipcic, qui est allé tout de suite dans des locaux qui

6 étaient contrôlés par Batko, et il a sauvé notre ami. Tomo Sipcic, un

7 parent à nous a dû intervenir pour que Batko soit ensuite emmené quelque

8 part, mis en prison et jugé dans des conditions normales. Batko a fini par

9 être arrêté effectivement et Grbavica a commencé à respirer, mais dix à

10 quinze jours plus tard il est revenu. Alors, il y a eu de nouvelles

11 interventions pour qu'on l'arrête de nouveau, on la libère de nouveau et à

12 ce moment-là, nous, nous avons eu encore plus peur parce que nous nous

13 sommes rendus compte que Batko n'était sûrement pas un homme sans appui, il

14 était probable qu'il avait des gens qui le soutenaient, puisqu'on le voyait

15 sans arrêt revenir et terroriser la population. Je crois que Biljana

16 Plavsic est même intervenu en personne une fois pour qu'on l'arrête et on

17 l'a arrêté et pour toutes ces raisons, je ne sais pas du tout à quelle

18 formation il appartenait éventuellement ou qui étaient les hommes qui

19 faisaient partie du groupe auquel il appartenait.

20 Vous savez, dans la guerre, il est arrivé des choses très tragiques,

21 on a vu des cas où des paysans - parce que les paysans venaient au marché

22 vendre leurs produits - et si Batko arrivait au marché, tout d'un coup,

23 tous les vendeurs, tous les marchands et tous les clients disparaissaient,

24 le marché restait désert pendant tout le temps où il était sur le marché.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, je me permettrais de

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1 vous interrompre. Votre rapidité d'élocution rend les choses difficiles

2 pour la sténotypiste. Est-ce que vous pourriez ralentir un petit peu ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse.

4 M. TIEGER : [interprétation]

5 Q. Vous venez de décrire la peur ressentie par tout le monde dans un

6 certain nombre d'incidents et je vous demande si tout le monde connaissait

7 cet homme dans la région.

8 R. Oui, tout le monde avait entendu parler de lui. La police

9 militaire le connaissait; la police civile le connaissait; l'armée présente

10 dans la région le connaissait aussi. Ce n'était pas quelqu'un d'inconnu et

11 d'ailleurs, il ne se cachait pas, il faisait les choses dans la plus grande

12 transparence. Je ne voudrais pas qu'il y ait de malentendu en utilisant ce

13 terme. Je ne veux pas laisser entendre que je soutiens son activité, mais

14 c'était quelqu'un que tout le monde connaissait. Les Musulmans et les

15 Croates avaient peur de lui, mais les Serbes aussi, même les Serbes

16 n'étaient pas sûrs de lui.

17 Q. Etait-il entendu que la première cible de ses attaques était les

18 Musulmans et les Croates ?

19 R. Dans une certaine mesure, oui, mais la cible principale de ses

20 attaques, c'était d'obtenir de l'argent par le vol et au premier rang de

21 ses victimes, on trouvait les Musulmans et les Croates. Mais surtout les

22 Musulmans, bien que s'il entendait parler d'une famille aisée et connue

23 quelque part, il y allait, dès lors qu'il savait qu'il y avait de l'argent.

24 Vous savez, il n'hésitait pas, il attaquait tout le monde et n'importe qui

25 : les femmes, les jeunes, les habitations par voie de cambriolage, toute

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1 agression était à sa portée. La seule chose que je me demande, c'est

2 pourquoi une fois qu'il a été arrêté et mis à l'ombre, pourquoi est-ce que

3 finalement, il a fini par revenir ?

4 Q. Je crois que vous avez dit qu'il portait un uniforme, mais que vous

5 n'étiez pas sûr de l'identité de l'unité à laquelle il appartenait

6 éventuellement. Dans votre entretien avec le bureau du Procureur en avril

7 2004, vous parliez de Batko et cela se trouve au bas de la page 126 de

8 votre déclaration, je cite : "C'était toujours la responsabilité de la

9 police militaire et des instances de l'armée qui étaient engagées. Batko

10 était un soldat. Les hommes appartenant à ces institutions portent un

11 uniforme et un fusil et c'est un devoir pour eux."

12 Vous souvenez-vous du type d'uniforme que portait Batko et vous souvenez-

13 vous s'il était considéré comme faisant partie de la police militaire ou de

14 l'armée ?

15 R. Oui, il portait un uniforme militaire. D'ailleurs, ces uniformes

16 n'était pas tous identiques, il y en avait plusieurs sortes. Si je me

17 souviens bien, il portait un uniforme de camouflage, mais parfois, avec un

18 couvre-chef et parfois, sans. Mais c'était un uniforme de l'armée; il ne

19 faisait partie de la police militaire. Il portait un uniforme de l'armée,

20 mais sans aucun emblème, sans aucun insigne et il avait tendance à combiner

21 des parties d'uniformes différents. Il n'avait pas, non plus, le moindre

22 signe d'un grade quelconque; c'était simplement un homme portant un

23 uniforme de l'armée sans aucun signe particulier qui aurait pu laisser

24 entendre qu'il était officier ou qu'il appartenait à telle ou telle unité.

25 Mais pour autant que je sache, il n'a jamais participé à aucun combat sur

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1 le front, là où se trouvait les vrais soldats. Il a surtout agi à

2 l'arrière, derrière les lignes de front et complètement à son gré. Je sais

3 qu'il n'y a pas de très nombreux témoins oculaires de cela, mais c'est de

4 notoriété publique qu'il a été responsable de la disparition d'un

5 gynécologue très connu, le Dr Kondurovic dont l'épouse a survécu. Elle vit

6 quelque part à l'étranger et s'agissant de cet incident entre Batko, elle-

7 même et son mari, elle est certainement au courant de tout. Ce que j'ai

8 entendu, c'est ce qu'on racontait dans les cafés, mais je crois que cette

9 femme est au courant et connaît toute la vérité.

10 M. TIEGER : [interprétation] Je vous demande un instant, Monsieur le

11 Président.

12 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. le Juge Hanoteau voudrait poser une

14 question.

15 M. TIEGER : [interprétation] Ma question va porter sur un nouveau sujet,

16 Monsieur le Président. Si vous voulez poursuivre, je vous en prie.

17 M. LE JUGE HANOTEAU : Monsieur, à cette époque-là dont vous nous parlez,

18 vous étiez en charge de responsabilités civiles.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je voudrais répondre de façon précise. Je

20 suis devenu président de la cellule de Crise aux environs du 10 avril, mais

21 cela ne concernait que le territoire de Vrace parce que Grbavica, pendant

22 un certain temps, à été un "no man's land," a été un territoire qui n'était

23 contrôlé, ni par les Serbes, ni par les Musulmans. La cellule de Crise,

24 entre le 10 avril et le

25 10 mai, Vrace ne figurait que comme communauté locale, à ce moment-là.

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1 Quand Grbavica a été placé sous le contrôle des forces serbes, la cellule

2 de Crise a déménagé ses bureaux à Grbavica. Quant à Batko, au début, il

3 était dans le secteur et au moment où il a commis ces crimes, notamment, le

4 crime visant Miro Kondurovic et d'autres, je crois que c'était un peu plus

5 tard, je crois que c'était en juin ou juillet parce qu'au mois d'avril,

6 tant que le conflit a duré, on n'était pas encore en pleine guerre. Les

7 gens qui habitaient à Vrace, il leur arrivait d'aller de l'autre côté pour

8 travailler et il y avait encore pas mal de gens qui circulaient en passant

9 d'un côté à l'autre. La guerre n'était pas encore intensive, mais à partir

10 du moment où on a pu aller à Grbavica, c'est-à-dire, à partir de mai ou de

11 juin, je sais que Batko a commencé à s'activer de plus en plus, au fil du

12 temps.

13 Je présidais la cellule de Crise. Je l'ai présidé jusqu'au 5 juin et

14 nous n'avions pas d'éléments d'information particuliers au sujet de ces

15 crimes, mais nous étions au courant de ces crimes de façon générale parce

16 que partout, on racontait que Batko devenait de plus en plus dangereux.

17 Chaque fois que j'en ai eu la possibilité, j'ai, par rapport à lui --

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez ralentir, s'il vous plaît.

19 M. LE JUGE HANOTEAU : Dans la cellule de Crise que vous présidiez, est-ce

20 qu'il y avait des représentants des autorités militaires ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Officiellement, il y avait le

22 représentant de la Défense territoriale qui en faisait partie. Mais sa

23 participation était à sens unique.

24 M. LE JUGE HANOTEAU : Mais de l'armée, est-ce qu'il y avait des

25 représentants ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. L'armée en tant que telle, non. Mais

2 avant la création de l'armée, il existait la Défense territoriale et le

3 représentant de la Défense territoriale participait. Il nous demandait

4 toujours des soldes militaires et des vivres, mais représentants de

5 l'armée ? Non.

6 M. LE JUGE HANOTEAU : Ma question -- oui, vous pouvez ralentir le rythme,

7 d'abord, de vos réponses pour le travail de nos interprètes et de Mme la

8 sténotypiste.

9 Ma question est la suivante, Monsieur le Témoin : vous êtes un hommes

10 responsable civil; vous êtes un homme qui avait eu l'occasion de rencontrer

11 les autorités les plus élevées dans la hiérarchie de cette république.

12 Devant des agissements comme ceux commis par Batko, quelle a été votre

13 réaction ? Est-ce que vous avez alerté ? Est-ce que vous êtes entré en

14 contact avec des hauts responsables militaires, avec des hauts responsables

15 civils ? Lorsque Batko a été relâché, après sa détention, est-ce que vous

16 avez protesté ? Est-ce qu'en qualité de citoyen, vous avez assuré votre

17 rôle ? Est-ce que vous avez assumé vos responsabilités ? Parce que dans une

18 phrase, tout à l'heure, vous dites - je l'ai sous les yeux - vous parlez

19 des crimes commis dans Grbavica II -- Grbavica I et II, vous dites : "Je ne

20 peux pas me souvenir si c'était au mois d'août 1992, mais à cette occasion,

21 un groupe d'hommes en uniforme a commis des crimes variés" et vous dites,

22 "un groupe d'hommes en uniforme - je ne sais pas qui c'était - d'ailleurs,

23 je n'ai pas essayé d'obtenir d'information."

24 Je voudrais savoir pourquoi devant tant de crimes commis par

25 M. Batko ou tant de crimes commis par d'autres, vous n'avez pas pris de

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1 décisions pour alerter les plus hautes autorités et pour demander que les

2 choses cessent. Voilà ma question. Merci d'y répondre.

3 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Juge et Monsieur le Président,

4 j'aimerais demander un éclaircissement avant la réponse du témoin. M. le

5 Juge Hanoteau vient de citer un passage qui a donné lieu à d'assez

6 nombreuses questions. J'aimerais beaucoup, personnellement et ce sera peut-

7 être également le cas du témoin, savoir si la question de M. le Juge

8 Hanoteau est la toute dernière de ces quatre ou cinq questions qui ont

9 peut-être servi de préambule à la dernière et véritable question ou est-ce

10 que le témoin est censé répondre à toutes les questions posées ?

11 M. LE JUGE HANOTEAU : Le témoin est censé répondre à cette question :

12 comment explique-t-il que devant les agissements de ce

13 M. Batko ou d'autres, il n'ait pas pris la décision d'alerter les plus

14 hautes autorités civiles ou militaires qu'il pouvait contacter, compte tenu

15 des responsabilités qui étaient les siennes et qui avaient été les

16 siennes ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. S'agissant de moi, personnellement, j'ai

18 informé le chef de la police militaire parce que nous nous connaissions

19 personnellement. Il s'agit de M. Sipcic. Quant aux autorités supérieures de

20 Pale, je ne les ai pas informées parce que je considérais qu'il existait

21 une police civile, une Sûreté de l'état, une police militaire, des

22 structures de l'armée et que ce sont ces instances qui étaient responsables

23 de régler le problème que posait Batko et tous les crimes liés à Batko. Je

24 considérais que les structures de l'armée et que la police dont c'était le

25 devoir officiel - et quand je dis police, je pense surtout au secteur de la

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1 Sûreté d'état - je pensais qu'il était de leur devoir de s'occuper de ce

2 genre de choses, puisque ces crimes tombaient sous leur compétence.

3 Mais s'agissant de mon devoir de citoyen de poser la question de Batko lors

4 d'une réunion de la cellule de Crise ou s'agissant de la nécessité d'en

5 parler et de nous opposer à lui ouvertement, nous n'avions pas eu le

6 courage de le faire parce que nous allions être tués tout simplement, si

7 nous l'avions fait, parce qu'en dehors des autres obligations que nous

8 avions, nous avions également celle de défendre notre vie et celles de nos

9 familles.

10 J'ai envoyé un rapport à Pale. J'ai pris mes distances par rapport à

11 l'armée et à la police et j'indiquais, dans ce document, que je n'avais

12 rien à voir avec tous ces hommes et que Radovan ferait bien de demander un

13 rapport spécial à la police et aux forces armées à ce sujet. Pourquoi est-

14 ce que je n'ai pas fait plus en tant que citoyen ? Très simplement, parce

15 que je pensais que c'était à la police régulière, à la police civile, à la

16 police militaire ainsi qu'aux instances de l'armée et à la Sûreté de l'état

17 et aux responsables de l'unité dont Batko faisait partie, d'intervenir.

18 Manifestement, je n'étais pas d'accord avec ce que faisait Batko, mais si

19 j'avais émis des critiques plus ouvertement, si je m'étais opposé à lui

20 plus ouvertement, j'aurais mis ma vie en danger.

21 Puis, vous avez entendu parler d'une chose qui est une réalité, à

22 savoir que la haute direction de Pale a reçu des informations au sujet de

23 Batko, puisque Mme Biljana Plavsic en a parlé à Pale et que cela n'a donné

24 aucun résultat, ce qui voulait dire que les autorités civiles n'étaient pas

25 en mesure de prévenir ou d'empêcher ces crimes, sauf au cas où ils étaient

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1 commis au sein du commandement de l'armée, au sein des forces armées. Si

2 j'avais été commandant, j'aurais eu un pouvoir réel, un pouvoir de contrôle

3 sur l'armée, sur la police. Or, en tant que chef de la cellule de Crise,

4 j'avais des responsabilités directes, mais je ne voyais pas très bien ce

5 que je pouvais faire par rapport à ce genre de choses. Je n'avais pas le

6 contrôle sur la police ou l'armée. Je n'avais aucun contact avec la police

7 ou l'armée et la cellule de Crise ne pouvait qu'avoir des contacts avec ces

8 institutions. Le fait que je n'avais aucun contact particulier personnel à

9 Pale était aussi un point qui m'empêchait de le faire.

10 M. LE JUGE HANOTEAU : Vous dites dans votre réponse, Monsieur :

11 [interprétation] "J'ai envoyé un rapport à Pale et j'ai pris une distance

12 par rapport à l'armée et à la police. J'ai indiqué que je n'avais rien à

13 faire avec eux."

14 [En français] Vous avez envoyé un rapport à Pale sur ces incidents

15 commis par Batko.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai envoyé un rapport le 5 juin. Dans

17 ce rapport, je ne mentionnais pas le nom de Batko. Je parlais d'un certain

18 nombre de cambriolages, mais je disais que je n'avais rien à voir avec les

19 responsabilités de la police. Je demandais qu'on fasse ce qu'il fallait

20 pour que la police soit informée puisque c'était une question relevant de

21 la responsabilité de la police.

22 M. LE JUGE HANOTEAU : Pardonnez-moi de vous interrompre. Si vous avez fait

23 un rapport à Pale pour des vols qui étaient commis contre la propriété

24 privée, voulez-vous me dire si vous avez fait aussi un rapport lorsqu'il y

25 a eu des meurtres qui ont été commis, des assassinats contre les habitants

Page 16713

1 de ce village. Est-ce que vous avez fait un rapport, oui ou non, à Pale

2 concernant ces meurtres dont vous avez été d'ailleurs, je crois, témoin ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Témoin de meurtres, non, je ne l'ai pas été.

4 Et un rapport au sujet de ces meurtres, je n'en ai pas envoyé parce que je

5 considérais que c'était le travail de la police et de l'armée et que nous,

6 en tant que cellule de Crise, organe civil, nous ne devions pas nous

7 occuper de cela car nous n'étions pas subordonnés à la police ou à l'armée

8 sur le territoire de Grbavica.Je n'ai pas envoyé de rapport au sujet des

9 meurtres.

10 Par ailleurs, si j'avais envoyé à Pale un rapport au sujet des

11 meurtres, il aurait fallu qu'au préalable la police et l'armée m'aient

12 adressé à moi un rapport au sujet de la nature de ces crimes, de ce qui

13 s'était passé exactement, de qui avait été tué, de qui était l'auteur du

14 crime. Il aurait fallu que je dispose d'éléments de départ pour pouvoir

15 rédiger un rapport mais je n'ai jamais demandé, et je n'ai jamais reçu non

16 plus, ces éléments préalables, ni de la police, ni de l'armée. Je ne

17 pouvais pas envoyer un rapport à Pale.

18 Je répète encore une fois que je considérais que c'était légalement

19 le devoir de la sûreté d'Etat de la police, de l'armée et des commandements

20 militaires à tous les niveaux.

21 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, poursuivez, je vous

23 prie.

24 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

25 Q. J'aimerais vous poser une question maintenant, Monsieur Neskovic, à

Page 16714

1 propos du rapport du 5 juin 1992, que vous pourrez trouver à l'intercalaire

2 23. J'aimerais vous demander de prendre le point numéro 6 intitulé

3 "Traitement des Musulmans et des Croates."

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous trouverez ce passage à la page 3 de

5 la version en B/C/S.

6 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

7 Q. Il est indiqué que : "Les citoyens de toutes les nationalités se

8 réunissent fréquemment, notamment à Grbavica et que notre comportement

9 public est tout à fait correct. Nous nommons un responsable pour chaque

10 bâtiment, responsable de la situation dans le bâtiment ainsi que de toutes

11 les informations relatives aux occupants. Secrètement, la police utilise la

12 même procédure pour les personnes qui sont engagées dans des activités

13 militaires contre nous."

14 Dans un premier temps, j'aimerais savoir où se trouvait la police qui était

15 responsable à Novo Sarajevo ?

16 R. Au début, au début du mois d'avril, elle se trouvait à Vrace dans les

17 bâtiments de la communauté locale. Puis ensuite lorsque Grbavica a été

18 placée sous le contrôle des forces serbes, elle se trouvait à la rue

19 Zagrebacka, qui se trouvait d'ailleurs assez proche du siège des autorités

20 civiles. C'était une maternelle et elle se trouvait dans cette rue,

21 Zagrebacka. C'était le poste de police Novo Sarajevo.

22 Q. Vous avez mentionné M. Mandic auparavant. J'aimerais savoir s'il

23 faisait partie des officiers de police supérieurs qui se trouvaient dans la

24 zone générale de Novo Sarajevo ? Soit au sein de la municipalité, soit dans

25 le secteur général où la police de Novo Sarajevo était opérationnelle ?

Page 16715

1 R. Je pense que pour ce qui était du bâtiment de l'institut de la police à

2 Vrace, vous aviez également tout le ministère qui se trouvait là. Il faut

3 savoir que le ministre de l'Intérieur, Mico Stanisic a passé un certain

4 temps là-bas. Je ne sais pas, en fait il y avait des gardes. Je ne sais pas

5 pendant combien de temps ils y ont été, avec quelle fréquence mais cela

6 s'est passé à l'institut de formation de la police à Vrace et c'est là où

7 se trouvait le MUP. Je ne sais pas si c'était temporaire. Je ne sais pas

8 pendant combien de temps mais toujours est-il que M. Stanisic s'y trouvait

9 assez fréquemment.

10 Q. Savez-vous qui était Milenko Karisik ?

11 R. Oui.

12 Q. De qui s'agissait-il ?

13 R. Il était commandant de l'unité de police spéciale.

14 Q. Se trouvait-il également dans votre secteur ?

15 R. Je pense qu'il y a été assez brièvement. Je l'ai rencontré lors des

16 combats autour de l'institut de la police à Vrace. Je ne pense pas qu'il y

17 ait passé beaucoup de temps. Je pense qu'il y était peut-être pour des

18 raisons personnelles mais autant que je m'en souvienne, il s'y est trouvé

19 très, très brièvement. Juste après les activités de combat ou deux jours

20 après, il a quitté ce secteur. Peut-être qu'il y est venu de temps à autre,

21 peut-être qu'il est allé à Pale, et qu'il revenait avec Stanisic et qu'il

22 est reparti ensuite à Pale. Enfin il faisait en quelque sorte la navette

23 entre Pale et Vrace. Parfois ces gens s'y trouvaient, parfois ils ne s'y

24 trouvaient pas mais je pense qu'après les opérations de combat autour de

25 l'institut de la police, il est parti.

Page 16716

1 Q. La dernière phrase du paragraphe numéro 6. Je l'ai déjà mentionné, il

2 est indiqué : "De façon secrète, la police a utilisé la même procédure à

3 l'encontre des personnes engagées dans des activités militaires contre

4 nous."

5 Je voudrais savoir de quelle procédure il s'agissait ? Quelle était la

6 procédure retenue par la police à l'encontre des Musulmans et des Croates ?

7 R. Cela signifiait qu'étant donné que l'on avait demandé aux Musulmans de

8 rendre leurs armes de façon volontaire, ce qu'ils ont d'ailleurs fait, le

9 commandant Petkovic avait dit : "Etant donné que vous avez fait cela,

10 l'armée ne procédera pas à une perquisition de vos appartements. Nous

11 aurons un Musulman à chaque entrée qui se chargera de veiller à ce que tout

12 le monde soit bien là chaque nuit," et ils ont procédé à une sorte de

13 recensement. Ils ont dressé une liste des habitants qui se trouvaient là.

14 Cela préoccupait les Musulmans qui n'avaient pas rendu leurs armes et qui

15 agissaient contre l'armée de la Republika Srpska. Il y avait des tirs de la

16 part des tireurs embusqués parce qu'ils pensaient que ces personnes, qui

17 portaient des armes, n'étaient plus des citoyens, ils étaient des soldats.

18 Si les habitants remarquaient une de ces personnes, ils devaient se rendre

19 à la police civile, indiquer cela et des procédures étaient alors mises en

20 place par la police. Ce qui signifiait que si une de ces personnes se

21 trouvait dans ce bâtiment, ils faisaient l'objet d'un rapport.

22 Q. Pourquoi est-ce que cela a été fait de façon secrète ?

23 R. Voyez-vous cela s'est fait ainsi pour assurer la sécurité des personnes

24 qui présentaient des rapports à propos de ces personnes. Si quiconque

25 agissait contre l'armée serbe, cela se faisait également de façon secrète.

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1 Les personnes qui allaient présenter un rapport à la police le faisaient en

2 secret et ce, afin de dissimuler leur identité pour s'assurer de ne pas

3 subir de conséquences ultérieurement. C'était une obligation, il leur

4 incombait d'informer la police civile s'ils étaient au courant de ce genre

5 d'information et ensuite la police civile devait arrêter la personne en

6 question, et cette personne faisait ensuite l'objet de toute une procédure

7 de police.

8 M. TIEGER : [interprétation] Un petit moment, je vous prie.

9 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

10 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Neskovic. J'en ai

11 terminé avec mon interrogatoire principal.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tieger.

13 Avant de donner la possibilité à la Défense de procéder au contre-

14 interrogatoire, je souhaiterais poser une question supplémentaire puisque

15 nous avons encore ce document.

16 Monsieur Neskovic, je vous demanderais de prendre le paragraphe 8 de votre

17 rapport, qui est comme suit : "Logement pour les combattants provenant

18 d'autres zones." Il est indiqué que : "pour les combattants qui se sont

19 ralliés aux unités régulières, un logement a été fourni."

20 J'aimerais savoir à quel genre de combattant vous faites référence

21 dans cette partie du rapport que vous avez rédigé.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pensais à des personnes qui venaient de

23 l'autre partie de la ville qui se trouvait sous le contrôle musulman. Puis,

24 il faut savoir qu'il y avait la zone de Popalici. Je pensais également aux

25 combattants qui ont quitté la zone de Popalici, lorsque Popalici est tombé

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1 aux mains des Musulmans. Il s'agit d'une référence qui est faite aux

2 combattants qui ne viennent pas de Grbavica. Ils venaient d'autres communes

3 locales, Popalici, Velesici, de la partie centrale de la ville où ils

4 venaient des villages avoisinants. Il s'agit d'une référence qui est faite

5 aux combattants serbes locaux.

6 Autant que je sache, il n'y avait pas d'étrangers dans leurs rangs.

7 Il y avait notamment à Vrace, certains Musulmans qui sont partis d'une zone

8 résidentielle de leur gré, et de temps à autre nous fournissions un

9 logement pour ces combattants lorsqu'il y avait des appartements

10 disponibles. Il ne s'agissait pas d'un logement permanent, mais en quelque

11 sorte, d'une certaine façon ils ont conservé ces appartements. Si les

12 appartements n'avaient pas été utilisés, ils auraient fait l'objet de

13 pillage. Ils auraient été endommagés. Je pense que ce fut utile puisque

14 nous avons en quelque sorte protégé ces appartements tout en accordant à

15 ces personnes un toit.

16 Il y avait des personnes du camp des Musulmans qui ont fait l'objet

17 d'échange ou qui ont été libérées et qui ont été libérées contre une somme

18 d'argent ou qui se sont enfuies. Il faut savoir que parfois nos lignes de

19 front se trouvaient à cinq mètres à dix mètres, parfois à 25 mètres. Il y

20 avait une ligne de font qui se trouvait à 50 centimètres; il y avait juste

21 un mur qui les séparait. Voilà, il s'agissait de combattants auxquels je

22 faisais référence.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez répondu à ma question. Les

24 détails n'étant pas aussi essentiels que cela pour nous.

25 Maître Stewart, êtes-vous prêt à procéder au contre-interrogatoire ?

Page 16719

1 M. STEWART : [interprétation] Oui, tout à fait. Je voudrais juste récupérer

2 mon pupitre.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

4 Monsieur Neskovic, vous allez maintenant répondre aux questions de la

5 Défense dans le cadre du contre-interrogatoire.

6 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

7 Président.

8 Contre-interrogatoire par M. Stewart :

9 Q. [interprétation] Monsieur Neskovic, vous avez signé votre carte

10 d'affiliation, et vous vous êtes rallié au SDS le 12 juillet 1990. C'est ce

11 que vous avez dit à la Chambre de première instance. Pourriez-vous nous

12 dire brièvement ce qui vous a encouragé ou inspiré à rallier le SDS à cette

13 époque-là ?

14 R. A l'époque, j'étais membre d'un autre parti, le Parti démocrate pour la

15 Liberté, il était inscrit à Mostar. Le SDS a été créé à la suite du

16 rassemblement de sept ou huit partis moins importants. Il y avait la

17 représentante d'un autre parti, Mme Bozana Radovic qui a pris contact avec

18 Karadzic. Nous n'étions d'ailleurs pas au courant de cela. Elle a décidé de

19 faire en sorte que notre parti se rallie au SDS. Nous avons eu certains

20 problèmes mais le 11 juillet, juste avant que le SDS ne soit créé, Radovan

21 est venu à l'hôtel Holiday Inn, il a parlé aux différents ou à plusieurs

22 dirigeants de partis en demandant s'ils voulaient se rallier. J'étais le

23 représentant du Parti démocrate pour la Liberté, et justement, c'est lors

24 de cette séance que nous avons rallié les rangs du SDS. J'ai signé ma carte

25 d'affiliation pour ce parti. Quelle était la raison pour ce faire ? En

Page 16720

1 fait, il n'y avait pas véritablement d'autres partis auxquels vous auriez

2 pu vous rallier. Il y avait le SDA, il y avait le Parti musulman; il y

3 avait le HDZ, le Parti croate, puis il y avait le parti d'Anto Markovic. Il

4 faut savoir que ces partis étaient en train de se désintégrer. En tant que

5 Serbes, il était assez normal que je me rallie à ce parti, notamment

6 puisque le terme "démocrate" faisait partie du sigle du parti.

7 Q. Puisque votre parti se ralliait au SDS, vous êtes en train de nous dire

8 qu'il était tout à fait logique que vous le fassiez, et il était donc, le

9 SDS, étant essentiellement le parti auquel vous pouvez vous rallier à cette

10 époque-là ?

11 R. Oui.

12 Q. Aviez-vous été politiquement actif ? Je ne pense pas seulement au fait

13 que vous étiez affilié à un parti politique, mais jusqu'à la période allant

14 jusqu'en juillet 1990, est-ce que vous aviez été actif du point de vue

15 politique ?

16 R. Non.

17 Q. Est-ce que vous n'avez jamais eu un mandant ? Est-ce que vous n'avez

18 jamais travaillé au sein d'un parti politique ? Vous n'avez jamais fait

19 cela, n'est-ce pas ?

20 R. Non, non.

21 Q. Vous êtes d'accord, vous êtes bien d'accord avec moi, cela correspond à

22 la situation ?

23 R. Oui. A moins que nous ne mentionnions le fait que j'ai quand même

24 participé ou je faisais partie du Parti démocrate pour la Liberté avec

25 certaines personnes, mais je n'avais pas véritablement de fonctions bien

Page 16721

1 précises. Jusqu'au mois de juillet, je n'avais pas de fonctions au sein de

2 ce parti politique.

3 Q. Est-ce que vous n'avez jamais eu une fonction officielle au sein du

4 Parti démocrate pour la Liberté ou n'en avez-vous jamais eue ?

5 R. J'étais en fait ou je faisais office de vice-président en quelque

6 sorte, et M. Djukic de Sokolac était le président. C'était au niveau d'un

7 comité. Nous avions été inscrits. Nous voulions qu'il y ait une assemblée

8 portant création à Sarajevo mais étant donné que de nombreux citoyens n'ont

9 pas répondu à l'appel, cela n'a pas été couronné de succès. Il s'agissait

10 d'un petit parti, d'un parti secondaire. Je pense que Djukic était le

11 responsable du parti. Il y avait Bozo Radic de Nevesinje. Il y avait

12 également Goran Milic, qui maintenant est diplomate pour la Bosnie-

13 Herzégovine. Puis, il y avait d'autres personnes également.

14 Q. Oui. Monsieur Neskovic, je vous demanderais de ne pas succomber à la

15 tentation qui consiste à donner moult détails lorsque vous répondez à la

16 question.

17 Monsieur Neskovic, lorsque vous nous dites que vous faisiez, en

18 quelque sorte, office de vice-président, cela signifie tout simplement que

19 vous étiez un vice-président, point à la ligne, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, j'étais le vice-président de ce parti et à l'assemblée

21 constituante, lorsque le président et le vice-président devait être élu, il

22 faut savoir que cela ne s'est pas produit parce que nous avions rallié les

23 rangs du Parti démocratique serbe parce qu'il était assez évident que notre

24 parti ne pouvait pas être établi de façon indépendante.

25 Q. J'essaie juste de comprendre, Monsieur Neskovic. Quelles que soient les

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1 lacunes des formalités, vous avez été le vice-président par opposition à un

2 vice-président, parmi d'autres vice-présidents, vous avez été le vice-

3 président de ce parti précédent, n'est-ce pas ?

4 R. Oui; bien que ce parti n'ait pas été véritablement actif. Il n'y a pas

5 eu de proclamation officielle. Il avait tout simplement été enregistré et

6 il n'en était qu'à ses débuts. Il n'était pas véritablement connu, ce parti.

7 Q. Poursuivons, je vous prie, Monsieur Neskovic. Vous avez fait un

8 discours à Pale, le 10 août 1990, et il y avait, entre autres, le Dr

9 Karadzic qui était présent lorsque vous avez fait ce discours; est-ce que

10 c'est exact ?

11 R. Oui.

12 Q. Avez-vous prononcé ce discours à titre officiel ou est-ce que vous

13 étiez tout simplement un orateur ayant demandé la parole à cette réunion ?

14 R. J'ai fait un discours au nom du comité municipal du Parti démocratique

15 serbe à Pale. Le jour précédent, je m'étais rendu à une réunion du comité

16 municipal et je n'avais pas l'intention, d'ailleurs, de prononcer un

17 discours, mais ils m'ont demandé si je savais ce qu'il fallait faire le

18 lendemain. J'ai présenté quelques suggestions, et c'est ainsi qu'ils m'ont

19 dit : "Mais ces suggestions sont plutôt bonnes. Est-ce que tu ne voudrais

20 pas faire un discours ?" Ce que j'ai fait. Il y a d'autres personnes

21 également qui ont prononcé des discours et cela s'est passé, effectivement,

22 le 10 août, au stade de football de Pale.

23 Q. Est-ce que c'est ce qui s'est passé, Monsieur Neskovic ? Vos collègues

24 locaux ont pensé qu'il serait utile que vous prononciez un discours pour

25 avancer certaines idées et le Dr Karadzic a apprécié les propos que vous

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1 teniez ?

2 R. Je ne sais pas si Karadzic a aimé ce qu'il a entendu ou non. Ce

3 que vous dites, pour le reste, c'est exact. Ce sont mes collègues locaux

4 qui ont pensé qu'il serait utile que je fasse un discours, ce que j'ai fait.

5 Q. Mais le Dr Karadzic a entendu ce que vous avez dit et très peu de temps

6 après, vous a abordé pour vous inviter à jouer un rôle actif au sein du SDS.

7 C'est bien ce qui s'est passé, n'est-ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Monsieur Neskovic, pouvez-vous convenir que le Dr Karadzic a quand même

10 dû apprécier et aimer ce que vous avez dit ? C'est évident, n'est-ce pas ?

11 R. Le Dr Karadzic ne m'a pas abordé pour le discours. Il m'a abordé pour

12 d'autres raisons, du fait du travail que j'avais à la radiotélévision de

13 Sarajevo. Je connaissais bien le processus de la campagne électorale, les

14 élections et c'est pour cela qu'il est venu me parler. Ce n'est pas à cause

15 de mon discours. J'ai fait un discours à l'instar d'autres personnes; le

16 discours que j'ai prononcé ressemblait à de nombreux discours qui ont été

17 prononcés par d'autres. Le Dr Karadzic s'est adressé à moi parce qu'il a

18 pensé que je pourrais lui être utile pour la compagne électorale et du fait

19 de sa profession, il n'avait pas beaucoup d'informations à ce sujet.

20 Q. Mais ce que vous avez dit -- il s'agit de la page 12 du compte rendu

21 d'audience d'hier, ligne 3 -- ce que vous avez dit, disais-je, est comme

22 suit : "Oui, mais après mon discours à Pale, le 10 août, Radovan m'a

23 demandé si je souhaiterais faire des travaux analytiques au sein du SDS."

24 Alors, est-ce que c'est le Dr Karadzic, lui-même, qui a suggéré la

25 teneur, en quelque sorte, de ces tâches analytiques ?

Page 16724

1 R. Oui. Il a dit qu'il fallait que j'analyse, par exemple, le statut des

2 municipalités; puis, il s'agissait, également, de modifier la législation,

3 c'était une autre tâche analytique. Il a été, également, question de tous

4 les facteurs qui peuvent avoir une influence sur les élections. Il a,

5 également, fait référence à une analyse des médias. Il s'agit d'une analyse

6 globale, dans le cadre électoral. Voilà ce qu'il a dit et j'ai accepté

7 cette tâche qui me paraissait intéressante. Cela était une gageure pour

8 moi; c'est quelque chose qui, du point de vue professionnel, m'intéressait.

9 Q. Est-ce que le Dr Karadzic vous a indiqué de façon claire que, lors de

10 ce discours et lors de cette réunion du 10 août, votre responsabilité

11 serait, également, de participer aux réunions du comité central du SDS ?

12 Vous a-t-il fait part de ces responsabilités ?

13 R. Non, il ne me l'a pas dit, il ne m'a même pas parlé, mais il m'a mis

14 sur la liste du conseil central, non pas en tant que membre, mais comme

15 quelqu'un qui devait participer aux séances et aux sessions du conseil

16 central qui avait lieu à l'hôtel Serbia, à Ilidza. J'ai participé à ces

17 séances; j'ai participé, d'ailleurs, activement aux discussions, lors de

18 ces réunions du comité central. Ces discussions portaient, d'ailleurs,

19 toutes sur la campagne électorale. Il faut savoir que c'était le thème

20 principal de ces sessions. J'étais très actif, j'ai participé régulièrement

21 aux réunions. Je me suis acquitté des tâches qui m'avaient été confiées

22 dans la mesure du possible.

23 Q. Lorsque vous participiez aux réunions du conseil central, est-ce que

24 vous avez commencé à le faire tout de suite après l'invitation du Dr

25 Karadzic qui vous a invité à avoir une présence plus active ?

Page 16725

1 R. Oui. Oui.

2 Q. Est-ce qu'il y a des notes de ce discours que vous avez prononcé le 10

3 août 1990 à Pale ? Est-ce que cela a été consigné quelque part ?

4 R. Non, je peux vous dire que je me souviens de certains passages du

5 discours que j'ai prononcé. Ceci étant, je ne sais pas si d'aucuns ont

6 consigné ce discours.

7 Q. Est-ce que cette réunion pour laquelle vous avez fait ce discours était

8 une réunion ouverte à la presse ?

9 R. Oui. C'était une réunion qui se tenait en plein air, au stade de

10 football, une réunion publique et tout le monde pouvait y participer.

11 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'il y a eu des rapports, dans la presse

12 écrite, de ce que vous avez dit ?

13 R. Non, je ne m'en souviens pas. Je pense que dans la presse écrite,

14 il avait été dit que l'assemblée municipale a eu lieu tel et tel jour à

15 Pale parce qu'il y avait de nombreuses assemblées qui ont eu lieu pendant

16 cette période. En deux, trois mois, il y a eu quasiment 70 ou 80 conseils

17 qui ont été établis. Nous recevions des informations au quotidien à propos

18 de l'établissement de ces conseils. En règle générale, la presse faisait

19 état des discours de Karadzic parce que c'était une personnalité beaucoup

20 plus connue que les autres personnes; lorsqu'il y avait un discours

21 prononcé par quelqu'un d'autre, la presse n'était pas véritablement

22 intéressée.

23 Q. Vous nous avez parlé de vos visites, lors de votre déposition - ce

24 n'est pas la peine de vous préoccuper de ces références - mais il s'agit de

25 la page 19 du compte rendu d'audience d'hier. Est-ce que votre

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1 participation aux réunions municipales ont commencé quelque temps après que

2 vous ayez été élu président adjoint du comité exécutif à la fin du mois de

3 juillet 1991 ?

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger.

5 M. TIEGER : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre, mais je

6 me demande s'il y a une raison qui pourrait expliquer la pagination

7 différente. Est-ce que vous pouvez nous donner des références ? Parce qu'il

8 faudrait peut-être, sinon, que je dispose d'un peu plus de temps pour en

9 trouver.

10 M. STEWART : [interprétation] Oui, oui. C'est un problème que je

11 connais très bien. Est-ce que vous pourriez me dire quel est le décalage,

12 quelles sont les pages que vous ne retrouvez pas ?

13 M. TIEGER : [interprétation] Vous avez fait une autre référence tout à

14 l'heure. Vous avez dit page 12, ligne 3, lorsque je regarde mon compte

15 rendu d'audience, la page -- il s'agissait de la page 11 et de la ligne 18.

16 Il y avait un décalage.

17 M. STEWART : [interprétation] Oui, je vois. J'ai page 19,

18 ligne 3 -- ou ligne 2. Il a été dit, "J'ai participé à un certain nombre de

19 réunions municipales dans de nombreux endroits." Il semblerait que cela

20 soit la page 18.

21 M. TIEGER : [interprétation] Oui. Avec votre aide, je pourrais le trouver,

22 j'essaierai. Je vous remercie.

23 M. STEWART : [interprétation] Je vais essayer de vous donner des

24 références, pour que vous puissiez trouver le début du passage.

25 Q. Monsieur Neskovic, je m'excuse de ce petit dialogue. Parfois, il faut

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1 régler certaines choses. Mais pour récapituler les choses, vous avez dit

2 que vous avez été élu président adjoint du comité exécutif du SDS le 31

3 juillet 1991. Ma question est comme

4 suit : parce que vous avez décrit plusieurs visites, est-ce que ces visites

5 ont commencé un certain laps de temps après cela ? Je parle de visites ou

6 de la participation aux réunions municipales.

7 Répondez par l'affirmative ou par la négative, tout simplement.

8 R. Non. Cela a commencé beaucoup plus tôt.

9 Q. Très bien. Pour vous donner une référence factuelle, vous avez dit --

10 et il s'agit de la page 19, ligne 1 - je pense que cela correspond peut-

11 être, également, à plusieurs lignes précédentes -- vous avez dit, lors de

12 votre réponse : "J'étais un militant, en quelque sorte, qui voyageait et me

13 déplaçais afin d'essayer de régler plusieurs problèmes relatifs au

14 personnel ou à l'organisation dans différentes municipalités. J'ai

15 participé à un certain nombre de réunions dans de nombreux endroits.

16 J'étais un militant du parti."

17 Ce que j'aimerais savoir, ce que vous nous dites, c'est qu'en 1993, vous

18 faisiez exactement le même travail que vous faisiez en 1991. La question

19 était comme suit : les activités que vous décrivez vous déplaçaient dans

20 plusieurs endroits et vous participiez à plusieurs réunions municipales;

21 quand est-ce que cela a commencé ?

22 R. Il y avait deux sortes d'activités. Comme vous l'avez déjà expliqué,

23 c'était après le 12 juillet, mais avant le 12 juillet, j'ai beaucoup

24 voyagé, également, pour visiter les comités exécutifs du SDS, mais j'ai

25 fait autre chose, également. Je m'occupais des élections au SDS parce qu'à

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1 partir du printemps 1991 jusqu'au mois de juillet 1991, il y avait des

2 élections au sein du SDS et des réformes étaient en cours au niveau des

3 comités. J'ai travaillé sur les élections au sein du SDS. Une fois les

4 élections finies, j'ai continué en tant que membre et vice-président du

5 comité exécutif et j'ai continué à assister aux réunions du SDS pour

6 m'occuper des questions de routine du parti. Malheureusement, il y avait

7 des conflits entre des différentes fractions. J'ai passé beaucoup de temps

8 à régler ces conflits.

9 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi de faire

10 ce commentaire. A la page 12 du compte rendu d'hier, il est mentionné la

11 date du 12 juillet en 1990 et 1991, dans les deux années et il y a une

12 certaine confusion entre les dates du 12 juin et du 12 juillet. Il faut

13 être prudent quand il s'agit de cette date-là, au cours de l'interrogatoire

14 de ce témoin.

15 Q. Monsieur Neskovic, s'il vous plaît, essayons d'éviter toute confusion

16 par rapport à la date et à l'année. Je vous invite à être le plus précis

17 possible, lorsque vous parlez de vos visites aux municipalités à travers la

18 Bosnie. Quand cela a commencé ?

19 R. Je ne peux pas me souvenir de la date exacte. Les activités concernant

20 les élections et les visites aux municipalités se sont déroulées du mois de

21 mars jusqu'au 12 juillet. Après le 12 juillet et la séance de l'assemblée,

22 un comité exécutif a été élu et j'ai continué à visiter les municipalités

23 en tant que membre du comité exécutif, après le 12 juillet jusqu'à peut-

24 être la fin de l'année. Je ne peux pas être précis par rapport à cela parce

25 que cela s'est passé il y a très longtemps.

Page 16729

1 Q. Monsieur Neskovic, avant tout, il me semble que maintenant, il est

2 clair, lorsque vous parlez des élections, que les dates se rapportent à

3 l'année 1992, sans aucun doute, n'est-ce pas ?

4 R. Oui.

5 Q. Il s'agit du fait que vous avez dit : "J'ai continué à visiter les

6 municipalités en tant que membre du comité exécutif" et je voulais savoir

7 plus précisément quand, à quel moment vous avez commencé à visiter les

8 municipalités. Est-ce que vous avez fait ces visites plus au moins de façon

9 régulière avant, c'est-à-dire, avant la période où des réformes du système

10 électoral se sont déroulées ainsi que les activités au début du mois de

11 mars 1991 ? Je vais être plus bref en posant ma question, Monsieur Neskovic

12 : est-ce que vous avez commencé à visiter des différentes municipalités

13 avant le mois de mars 1991 ?

14 R. Pour autant que je m'en souvienne, avant le mois de mars 1991, j'ai

15 visité peut-être deux municipalités. Le 11 août, j'étais à Sokolac, c'était

16 à l'occasion de la création du SDS Sokolac. J'étais à Rogatica, également,

17 à l'occasion de la création du SDS Rogatica. Ensuite, je ne peux pas me

18 souvenir d'autres visites que j'aurais effectuées. Je pense que non.

19 Q. Le 11 août dont vous parlez, c'est le 11 août 1990, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que votre tâche de se rendre aux municipalités découlait de la

22 nature de votre travail que vous avez effectué au début ou est-ce que

23 c'était une tâche au sein du SDS tout à fait séparée ?

24 R. C'était une tâche séparée, distincte. A Sokolac, j'étais comme une

25 sorte de délégué pour le public et à Rogatica j'étais avec d'autres

Page 16730

1 dirigeants du SDS. Je pense que Danilo Vaselinovic y était et encore

2 d'autres personnes. Et nous avons assisté à la formation du comité

3 municipal du SDS. Cela veut dire qu'il s'agissait de notre rôle. Il ne

4 s'agit pas d'un rôle analytique.

5 Q. Prenons la date à laquelle vous avez été élu adjoint du haut président

6 du comité exécutif du SDS. C'était à la fin de juillet 1991, le 31 juillet.

7 Vous avez été le président adjoint, pouvez-vous nous dire jusqu'à cette

8 date-là, à combien de reprises vous vous êtes rendu pour visiter d'autres

9 municipalités en Bosnie au nom du SDS ?

10 R. Je suis désolé mais je ne peux pas répondre à votre question. Je ne

11 peux pas faire des hypothèses parce que je n'ai pas noté cela. Je ne peux

12 pas me souvenir maintenant de cela. Principalement, je me suis rendu à des

13 municipalités, si cela était nécessaire. Je ne me suis pas rendu aux

14 municipalités en tant que touriste. Si cela était nécessaire j'y allais. Je

15 ne peux pas vous répondre à la question parce que j'ai oublié cela. Je n'ai

16 rien noté et je ne peux pas vous dire précisément après 14 ans qui se sont

17 écoulés, je ne peux pas me souvenir de cela. C'était à partir du mois de

18 juillet 1991 que les activités concernant les visites de municipalités --

19 Q. Non, non, Monsieur Neskovic. S'il vous plaît écoutez plus attentivement

20 ma question. Je ne vous pose pas de questions concernant cette période-là.

21 Vous avez dit : "Nous parlons de la période au courant du mois de juillet

22 1991 et de suite." Je vous ai posé des questions concernant la période

23 jusqu'à la fin du mois de juillet 1991. Monsieur Neskovic, concentrez-vous

24 sur mes questions et donnez-nous votre estimation, la meilleure dont vous

25 êtes capable.

Page 16731

1 C'est-à-dire à combien de reprises vous êtes-vous rendu aux

2 municipalités en Bosnie jusqu'à votre nomination du président adjoint du

3 comité exécutif le 31 juillet 1991 ?

4 R. Je pense que je me suis rendu à beaucoup de municipalités. Il y avait

5 peu de municipalités où je ne me suis pas rendu. Je pense que ne me suis

6 pas rendu en Herzégovine. Les autres municipalités partout en Bosnie, je

7 les ai visitées toutes et certaines à plusieurs reprises. Il me serait plus

8 facile d'énumérer les municipalités que je n'ai pas visitées. Je me suis

9 rendu dans les municipalités partout en Bosnie beaucoup de fois. Je ne me

10 suis pas rendu en Herzégovine, à Foca, à Gorazde, je n'ai pas visité cette

11 région-là, mais quant aux autres -- et l'Herzégovine occidentale, non plus,

12 je ne l'ai pas visitée. Je me suis rendu presque dans tous les endroits

13 dans d'autres parties de la Bosnie et à certains endroits, je me suis rendu

14 à plusieurs reprises.

15 Q. Monsieur Neskovic, tout d'abord, clarifions certaines choses concernant

16 certains chiffres. Je vous ai peut-être mal compris. Est-ce qu'à l'époque,

17 il y avait 109 municipalités ou un autre nombre de municipalités ?

18 R. Oui, 109 avec Neum, mais je pense que dans une dizaine ou une quinzaine

19 de municipalités, le SDS n'a pas été encore organisé comme en Herzégovine

20 occidentale, par exemple. Il n'y avait pas de Serbes là-bas. Je pense que

21 dans ces municipalités peut-être 80 municipalités, dans ces municipalités,

22 le SDS avait son organisation.

23 Q. Monsieur Neskovic, il y aurait bientôt une pause mais je voudrais vous

24 proposer certaines règles à respecter. Lorsque je vous ai posé des

25 questions concernant la confirmation ou la correction du nombre de

Page 16732

1 municipalités, c'était le contenu de ma question. Vous auriez pu vous

2 mettre d'accord avec moi ou prononcer un autre nombre.

3 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'il est venu

4 le moment propice à faire une pause ?

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous pouvons nous arrêter là,

6 interrompre le témoignage du témoin. Il y a d'autres questions procédurales

7 à régler. Nous avons besoin d'encore cinq minutes, mais le témoin devrait

8 revenir dans le prétoire à peu près à 13 heures moins cinq.

9 Monsieur le Témoin, Monsieur l'Huissier va vous aider à quitter le prétoire.

10 [Le témoin se retire]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais lire deux décisions. La

12 première décision concerne le versement aux dossiers de certaines pièces à

13 conviction de différentes raisons. Ces documents ont été provisoirement

14 versés au dossier bien que les parties n'aient pas soulevé d'objection. La

15 Chambre décide de verser aux dossiers les pièces à conviction suivantes, à

16 partir de demain si les parties ne soulèvent pas d'objection dans les 24

17 heures qui suivent.

18 Ce sont les pièces à conviction suivantes : P292. Cette pièce à

19 conviction a été versée au dossier sans commentaires du témoin qui ont été

20 enregistrées avant les écoutes; ensuite le document P573 jusqu'à P574L;

21 ensuite P575 jusqu'à P580; ensuite P742 jusqu'à P746, y compris; ensuite

22 P392 jusqu'à P406, y compris; ensuite P763 jusqu'à 763.B, y compris;

23 ensuite P764 jusqu'à 787, y compris; et P817 jusqu'à 826, y compris;

24 ensuite P791 jusqu'à P800, y compris; ensuite P814 jusqu'à 816, y compris;

25 ensuite P827 jusqu'à 846, y compris; ensuite P890 jusqu'à P892, y compris.

Page 16733

1 Egalement, je voudrais dire au Greffe que le document P220 a été versé au

2 dossier le 7 mars 2005. La référence du compte rendu d'audience est à la

3 page 10 091 pour qu'il n'y ait pas de confusion c'est en se basant sur le

4 compte rendu. Comme il y figure : "Même si les problèmes concernant le

5 compte rendu auraient pu créer un malentendu."

6 Cela conclut la décision de la Chambre par rapport au versement au

7 dossier de certaines pièces à conviction.

8 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite, les parties ont le document

10 dans lequel ils ont clairement énuméré les documents qui sont les documents

11 publics et des documents qui sont des documents sous pli scellé qui ont été

12 versés au dossier.

13 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au lieu de lire de nouveau tous les

15 numéros, je prie Madame la Greffière d'audience de remettre une liste aux

16 parties, une liste qui indique clairement les documents publics et sous pli

17 scellé.

18 M. STEWART : [interprétation] Nous serions reconnaissants si ces documents

19 nous étaient envoyés par voie électronique.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cela a été consigné au compte

21 rendu, Maître Stewart.

22 La décision suivante concerne les pièces à conviction ayant trait au

23 témoin Nielsen.

24 Les pièces à conviction de M. Nielsen, on a obtenu des numéros

25 provisoires, mais ces documents n'ont pas été encore versés aux dossiers.

Page 16734

1 La raison pour cela était parce que le Procureur a décidé de ne pas

2 utiliser tous les intercalaires dans trois classeurs présentés. M. Tieger,

3 entre-temps, a eu une réunion avec la Défense, et a présenté les raisons

4 pour lesquelles le Procureur voulait retenir 32 documents. La Défense ne

5 soulève pas d'objection au versement au dossier de ces pièces à conviction.

6 Pour que cela soit plus clair, nous avons préparé un document qui

7 sera distribué. Je vous prie, Madame la Greffière d'audience, de distribuer

8 les documents aux parties.

9 Comme cela est indiqué dans la liste de 78 intercalaires dans trois

10 classeurs des pièces à conviction provisoirement marquées comme P763.C, un

11 certain nombre de ces intercalaire sont vierges, et un certain nombre on

12 déjà un numéro.

13 M. Tieger a indiqué que le Procureur ne demande pas le versement au

14 dossier des intercalaires indiqués par (d) dans cette liste; quant au

15 Procureur, pourtant il demande le versement aux dossiers de 32 pièces à

16 conviction sous (e) dans cette liste.

17 La Chambre accepte que ces pièces à conviction présentent des document de

18 référence pour comprendre le témoignage de Nielsen ou des résumés de

19 diagrammes ou des documents qui implicitement ou explicitement on été

20 mentionnés durant son témoignage mais qui n'ont pas été distribués par le

21 témoin dans le prétoire.

22 Donc, la Chambre décide de verser aux dossiers les pièces à conviction

23 suivantes :

24 P763, c'est le rapport de l'expert.

25 P763.1, la traduction en B/C/S.

Page 16735

1 P763.A, c'est l'annexe du rapport.

2 P763.B, c'est le CV de M. Nielsen.

3 P763.C, ce sont trois classeurs à présenter.

4 Les intercalaires qui sont versés aux dossiers, c'est la liste qui

5 est jointe à la décision.

6 Ces documents sont publics.

7 Cela conclut la décision de la Chambre quant au versement au dossier

8 des pièces à conviction de M. Nielsen. Madame la Greffière, je vous invite

9 à distribuer la liste dans laquelle on peut voir quels sont les documents

10 qui sont versés au dossier et les documents qui ne sont pas versés aux

11 dossiers.

12 M. STEWART : [interprétation] Je vois que je ne vois pas me mêler à cette

13 solution heureuse. Je voudrais demander à M. Tieger si les documents sur la

14 liste correspondent à l'accord entre Mme Loukas et lui-même ?

15 M. TIEGER : [interprétation] Je n'ai pas vérifié cela, mais si j'ai bien

16 compris, la décision se base sur ce message électronique.

17 M. STEWART : [interprétation] Non, cela suffit. Je ne m'attends pas à ce

18 qu'ils examinent document par documents. Mais --

19 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président --

20 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre a vérifié cela parce que nous

22 étions au courant du contenu de ce message.

23 M. STEWART : [interprétation] Je suis content.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand je dis "la Chambre," je pense à

25 nos assistants juridiques.

Page 16736

1 M. STEWART : [interprétation] J'ai une petite idée du fonctionnement de

2 tout cela, Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger.

4 M. TIEGER : [interprétation] Très brièvement, Monsieur le Président, nous

5 avons commencé à nous préparer, c'est-à-dire à préparer des documents que

6 M. Krajisnik utilisera lors du contre-interrogatoire. Nous n'avons rien

7 reçu par rapport à ce témoin, mais au moins s'il y a des exemplaires des

8 documents, j'aimerais les avoir.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, il y a des

10 documents que M. Krajisnik a communiqués. Les documents qui n'ont pas

11 encore été versés, nous attendons l'évaluation des documents communiqués

12 par M. Krajisnik pour savoir quels sont les documents qui ont été versé au

13 dossiers et les autres, s'il y a une traduction, et cetera.

14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, la ligne 8 du compte

15 rendu, je pense qu'il faut être très prudent.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de voir cela.

17 M. STEWART : [interprétation] C'était tout. Je ne voulais dire cela qu'une

18 sorte de remarque, une blague.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas compris cela, M. Stewart.

20 Nous allons faire une pause et nous allons continuer à 13 heures.

21 --- L'audience est suspendue à 12 heures 41.

22 --- L'audience est reprise à 13 heures 04.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pouvez procéder.

24 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Q. Monsieur Neskovic, vous m'avez fait une proposition que je ne vais pas

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1 accepter. Vous m'avez, en effet, proposé d'énumérer les municipalités dans

2 lesquelles vous ne vous êtes pas rendu dans la période qui nous intéresse.

3 Mais je vais tout de même insister auprès de vous pour que vous fassiez

4 vraiment de votre mieux pour vous rappeler le nombre de municipalités dans

5 lesquelles vous vous êtes rendu jusqu'au 31 juillet 1991 et nous donner un

6 chiffre approximatif, s'agissant de leur nombre.

7 R. Du mois de mars 1991 jusqu'au 31 juillet 1991, j'ai certainement dû me

8 rendre, au moins, dans 25 à 30 municipalités. Je vous prie de m'excuser

9 pour mon manque de précision car il m'est difficile de vous le dire

10 exactement, aujourd'hui, mais elles étaient nombreuses.

11 Q. Monsieur Neskovic, je ne vais certainement pas vous pousser à dire

12 autre chose que ce qui correspond à votre souvenir et les Juges de la

13 Chambre ne le feront pas, non plus.

14 M. STEWART : [interprétation] Je vous demande un instant.

15 Q. Vous avez dit - et cela figure à la page 60 -- fin de la page 60, début

16 de la page 61 --

17 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

18 M. STEWART : [interprétation] Je m'excuse.

19 Q. Début de la page 61 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, vous avez

20 dit, je cite : "Je crois m'être rendu dans pas mal de municipalités. Il n'y

21 a qu'un nombre très limité dans lesquelles je ne suis pas allé."

22 Monsieur Neskovic, votre dernière réponse et ce qui est écrit ici ne

23 correspond pas tout à fait, voyez-vous, parce que le total du nombre de

24 municipalités est de 109 et vous venez de dire que vous vous êtes rendu

25 dans 25 à 30 municipalités; cela ne fait pas vraiment une majorité. Je vous

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1 demanderais instamment d'essayer d'être aussi clair, aussi précis que vous

2 le pourrez. Qu'en est-il exactement ? Vous vous êtes rendu, dites-vous,

3 dans une grande majorité des municipalités et ensuite, vous citez le

4 chiffre de 25 ? C'est bien cela ? Est-ce que nous pourrions obtenir un peu

5 plus d'éclaircissements à ce sujet ? Vous rappelez-vous dans combien de

6 municipalités vous êtes allé dans cette période ?

7 R. Il me serait plus facile de les énumérer l'une après l'autre. Cela me

8 faciliterait le travail de mémoire.

9 M. STEWART : [interprétation] J'hésite un peu à accepter cela, Monsieur le

10 Président. Combien de temps est-ce que cela prendra ?

11 Q. Monsieur Neskovic, est-ce que vous êtes en train de me dire que vous

12 pourriez, en trois ou quatre minutes, les énumérer très rapidement à notre

13 intention ?

14 R. Je vais être rapide. Novo Sarajevo, Sokolac, Pale, Rogatica, Konjic,

15 Tuzla, Travnik, Busovaca, Brcko, Modrica, Obudovac, Doboj aussi, je crois,

16 Derventa, Prijedor, Maglaj, Zenica. Je crois que je suis allé aussi à

17 Jajce. Puis, il y en a encore quelques-unes dans lesquelles je suis allé.

18 Q. La fréquence de vos visites dans les municipalités est-elle restée la

19 même dans la période suivante, c'est-à-dire du 31 juillet jusqu'à la fin de

20 1991 ?

21 R. Non. Jusqu'au 31 juillet, j'y allais pour participer à des activités

22 électorales au sein d'organismes électoraux. Après le

23 31 juillet, mes activités ont été très différentes; il s'agissait d'un

24 travail de routine dans le cadre des instances municipales relatives au

25 fonctionnement de ces instances et destinées à les aider à surmonter des

Page 16739

1 activités fractionnistes en leur sein. La nature du travail était

2 différente, dans un cas et dans l'autre.

3 Q. Est-il exact, Monsieur Neskovic que dans la première phase, c'est-à-

4 dire, jusqu'au 31 juillet, votre travail consistait à organiser et à

5 travailler à la structuration d'un certain nombre d'organismes en rapport

6 avec les élections ?

7 R. Oui.

8 Q. Dans la deuxième phase, après le 31 juillet, votre travail a consisté à

9 régler des problèmes, à résoudre des difficultés ?

10 R. Oui, dans le cadre du fonctionnement de ces instances municipales, pour

11 que les règlements soient respectés, règlements adoptés par les assemblées

12 municipales.

13 Q. Mais il s'agissait de régler les problèmes. A partir du

14 31 juillet, quand vous alliez dans une municipalité, c'était, en général,

15 pour régler un problème bien précis qui avait surgi au sein de cette

16 municipalité; c'est bien cela ?

17 R. Oui, c'est exact.

18 Q. Y avait-il fréquemment des oppositions internes, des problèmes

19 personnels dans ces municipalités ?

20 R. Malheureusement, oui. Les fractions étaient en opposition permanente

21 les unes aux autres parce que certains membres du SDS faisaient partie du

22 pouvoir du gouvernement municipal, d'autres n'en faisaient pas partie. Il y

23 avait des fractions et des divergences sur ce plan-là; il y avait aussi des

24 divergences liées au lobby par rapport à des intérêts privés, liées à des

25 localisations, à des situations géographiques de telle ou telle section,

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1 par exemple, mais il y avait, tout le temps, des affrontements, des

2 divergences entre fractions et nous avons eu beaucoup de travail à cet

3 égard, moi, d'ailleurs, davantage que d'autres. Je pense que les autres ne

4 se sont pas occupés beaucoup de tout cela; c'était une tâche qui

5 m'incombait, avant tout, à moi.

6 Q. Vous alliez souvent dans ces municipalités en qualité de - comment est-

7 ce que je pourrais appeler cela - conciliateur ou médiateur ?

8 R. J'y allais pour régler les problèmes, pour ramener le calme. Le

9 compromis était l'une des possibilités. Si le compromis s'avérait

10 impossible, nous envisagions, y compris, la dissolution du conseil

11 municipal et l'élection d'un nouveau conseil ou alors, il y avait une

12 troisième possibilité qui était de retirer la légitimité aux deux fractions

13 concernées et d'investir, d'une nouvelle légitimité, un troisième groupe.

14 Il y avait plusieurs autres possibilités pour régler les problèmes en

15 question et c'est quand on arrivait sur le territoire de la municipalité

16 qu'on décidait comment on allait se comporter : est-ce qu'on allait se

17 comporter dans la plus grande civilité qui soit ou est-ce qu'on allait

18 affronter les gens d'une façon plus directe. Mais en tout état de cause, il

19 était hors de question d'arriver là en faisant le paon comme si on était

20 supérieur à toutes ces personnes et qu'on allait leur faire la leçon. Il

21 fallait les aborder avec respect, avec considération pour les uns et pour

22 les autres et le compromis était la solution la plus fréquente dans ce cas.

23 Excusez-moi pour la rapidité.

24 Q. Monsieur le Témoin, j'aimerais vous interroger au sujet d'un point

25 particulier de votre déposition d'hier.

Page 16741

1 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je vais devoir fournir

2 au témoin un certain nombre d'éléments d'information contextuelle.

3 Le passage qui m'intéresse commence à la page 18 du compte rendu d'audience,

4 un peu avant, d'ailleurs, peut-être dans le document de M. Tieger. Mais il

5 s'agit d'un moment où un échange se produit, une discussion entre M. Tieger,

6 M. le Juge Orie, la Greffière d'audience et M. Tieger reprend la parole et

7 la question suivante commence par les mots que je cite : "Monsieur Neskovic,

8 le document que vous avez sous les yeux actuellement est le document qui

9 constitue la pièce à conviction de l'Accusation 895." J'espère que ceci va

10 vous aider à retrouver le passage.

11 Puis, ce document date de février 1993.

12 Q. Vous parlez de l'emploi que vous exerciez en février 1993 et ensuite,

13 vous parlez de celui que vous aviez en 1991. Puis, vous décrivez votre

14 participation à des réunions municipales et la raison pour laquelle je

15 viens de prononcer tous ces mots à titre d'introduction, c'est que dans le

16 passage en question, on parle, à la fois, de 1991 et de 1993.

17 On vous a demandé : "Si vous étiez considéré en tant que membre de

18 facto du comité exécutif" et vous avez répondu, en quelques mots, oui. Puis,

19 vous avez parlé de stockage de réserve.

20 La question de M. Ostojic a été évoquée un peu plus loin -- ceci est

21 en page 20 de ma version du compte rendu d'audience, ligne 5, je cite : "M.

22 Ostojic était-il toujours ministre de l'Information à ce moment-là ?" Vous

23 répondez, je cite : "Je ne m'en souviens pas exactement. A ce moment-là, je

24 pense qu'il n'était plus ministre de l'Information."

25 Est-ce que, Monsieur Neskovic, vous êtes d'accord pour dire que vous

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1 parliez tout à fait manifestement de 1993 ?

2 R. Oui. Février 1993, après la rénovation du parti parce qu'entre le mois

3 de juin 1992 et février 1993, le parti avait été interdit. Il a été recréé

4 en février 1993 et un nouveau comité exécutif a été choisi avec un nouveau

5 président qui était Mijatovic et un nouveau gouvernement; tout cela parce

6 que les journalistes avaient signé une pétition contre cet homme qui avait

7 été expulsé du gouvernement. Quant à savoir si Ostojic --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Neskovic, je vous prie de

9 m'excuser, mais vraiment, pour les interprètes, vous allez trop vite.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Monsieur le

11 Président. Je penserai à ralentir.

12 M. STEWART : [interprétation]

13 Q. Puis-je, Monsieur Neskovic, essayer de calmer un peu votre enthousiasme

14 parce que bien sûr, c'est à cause de votre enthousiasme que vous accélérez

15 votre débit, comme vient de vous le signaler le Président de l'audience.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être pourriez-vous vous contenter

17 de répondre aux points très précis qui font l'objet de la question de Me

18 Stewart; ceci vous empêchera également de trop accélérer.

19 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

20 Q. Monsieur Neskovic, vous parliez de 1993. Ensuite, vous dites : "Ostojic

21 aurait pu jouer un rôle parce qu'il était ministre de l'Information" --

22 vous dites : "Il avait certainement des liens avec le gouvernement."

23 Maintenant, je vais vous poser ma question. Vous dites : "Cela n'a

24 pas tellement de sens parce que pour toutes les activités de liaison avec

25 le gouvernement, cela passait par Karadzic et Krajisnik qui étaient les

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1 responsables des supérieurs."

2 Vous avez dit : "Toutes les activités de liaison avec le gouvernement

3 passaient par le truchement de Karadzic et Krajisnik." Est-ce que vous

4 parliez de 1993, de 1991 ou des deux années ?

5 R. La liaison avec le gouvernement de la Republika Srpska passait toujours

6 par Karadzic et Krajisnik, et ce, pendant toutes les années pertinentes.

7 Q. Vous parlez de 1992 également? Ou je vais reformuler.

8 R. Oui.

9 Q. Est-ce que cela est valable pour les années 1991, 1992 et 1993 ?

10 R. Oui.

11 Q. Très bien. Premièrement, pour ce qui est des activités de liaison avec

12 le gouvernement -- et vous l'avez indiqué il y a un petit moment, confrmez,

13 si je ne m'abuse, il s'agissait du gouvernement de la Republika Srpska,

14 n'est-ce pas ?

15 R. Oui.

16 Q. Etes-vous --

17 R. Mais je pense également au gouvernement de Bosnie-Herzégovine.

18 Q. D'accord. Vous avez répondu à la question que j'allais vous poser --

19 R. Il y avait huit ministres serbes dans ce gouvernement.

20 Q. Vous avez répondu à la question que j'allais vous poser.

21 Mais dans un premier temps, pour ce qui est des activités de liaison

22 avec le gouvernement de la Bosnie-Herzégovine, nous allons nous intéresser

23 à cela. Si maintenant vous nous parlez des activités et liaisons avec le

24 gouvernement de Bosnie-Herzégovine qui passe par le Dr Karadzic et

25 Krajisnik, à quelle période faites-vous référence ?

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1 R. J'entends la période qui va du mois de janvier 1991, date à laquelle le

2 gouvernement de la Bosnie-Herzégovine a été établi, jusqu'au mois de

3 décembre 1991, lorsqu'un conseil ministériel serbe spécial a été fondé.

4 Q. Ce que vous entendez, c'est que les contacts à haut niveau entre les

5 Serbes de Bosnie et le gouvernement de la

6 Bosnie-Herzégovine se faisaient par le truchement du Dr Karadzic et de M.

7 Krajisnik ?

8 R. Oui.

9 Q. Oublions M. Ostojic, puisque c'est une période différente. Ce que vous

10 nous dites -- prenons la période qui commence à l'année 1991, Monsieur

11 Neskovic. Les difficultés auxquelles faisaient face la Bosnie-Herzégovine

12 et les difficultés auxquelles faisaient face les Serbes de Bosnie, en

13 Bosnie-Herzégovine étaient des difficultés qui étaient des difficultés

14 politiques, fondamentales, énormes et qui étaient des difficultés pour les

15 différentes nations au sein de la Bosnie, n'est-ce pas ?

16 R. Dans une certaine mesure, je dirais que cela est exact. Mais je ne suis

17 pas entièrement d'accord avec ce que vous avancez.

18 Q. Nous allons voir sur quoi nous sommes d'accord. Pour ce qui est de la

19 deuxième partie de 1991 et de l'année 1992, le problème était l'avenir de

20 la Bosnie-Herzégovine; est-ce que la

21 Bosnie-Herzégovine allait rester, allait continuer à faire partie de la

22 Yougoslavie ou est-ce qu'elle allait choisir la voie de l'indépendance à la

23 suite de la Croatie et de la Slovénie ? Est-ce que vous êtes d'accord avec

24 ce que j'avance ?

25 R. Oui. C'était un problème essentiel que le problème de l'avenir de la

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1 Bosnie-Herzégovine. C'était véritablement un problème fondamental. Mais de

2 surcroît, il y avait un autre problème. Les dirigeants de parti et

3 notamment, Karadzic et Alija Izetbegovic, en un sens, ont transformé le

4 système politique en Bosnie-Herzégovine et l'ont transformé en un état de

5 parti. Il faut savoir que ces problèmes fondamentaux ne faisaient pas

6 l'objet de discussions au sein des institutions. Ces problèmes faisaient

7 l'objet de discussions de la part des dirigeants de partis. Il y avait de

8 nombreuses personnes en Bosnie-Herzégovine qui s'attendaient à une solution

9 favorable. Je pense que le problème essentiel en Bosnie-Herzégovine vient

10 du fait que les problèmes constitutionnels ont complètement été méconnus,

11 ignorés et les problèmes n'ont pas été réglés conformément à la

12 constitution et conformément au droit international. Les problèmes ont été

13 réglés par le biais d'accords interpartites qui n'ont absolument donné

14 aucun résultat et qui ne représentait absolument pas de solution.

15 Q. Monsieur Neskovic, essayons de voir. Ces problèmes avaient une telle

16 importance que lorsqu'on essayait d'y trouver des solutions, il faut savoir

17 que des protagonistes très, très importants de la communauté internationale

18 ont dû y participer, n'est-ce pas ?

19 R. Oui. Mais j'avais l'impression que toutes les personnes puissantes en

20 Bosnie-Herzégovine, toutes les personnes qui avaient le pouvoir - et cela

21 était valable pour des Croates, des Musulmans et des Serbes - j'avais

22 l'impression, disais-je, qu'ils essayaient de créer une situation -- ou

23 plutôt, qu'ils essayaient de gérer et de régler la situation de façon

24 individuelle et qu'ils ne demandaient pas à la communauté internationale

25 d'essayer d'être partie prenante, bien qu'il soit tout à fait clair que les

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1 problèmes de la

2 Bosnie-Herzégovine et les problèmes de son statut en tant qu'état ne

3 pouvaient pas être réglés sans que la communauté internationale n'y

4 participe.

5 Q. Les personnes qui ont été extrêmement actives au nom des Serbes de

6 Bosnie pendant cette période, lorsqu'il s'agissait de traiter avec les

7 autres dirigeants tels que M. Alija Izetbegovic et les représentants de la

8 communauté internationale, incluaient le

9 Dr Karadzic, M. Krajisnik et le Dr Koljevic, également ?

10 R. Et Biljana Plavsic et dans une certaine mesure, Aleksa Buha et Vojislav

11 Maksimovic, comme je vous l'ai déjà dit.

12 Q. Vous, vous n'avez jamais, au grand jamais, participé à ces discussions

13 à ce niveau ?

14 R. Personnellement, j'ai été présent à l'une de ces réunions dans le

15 bureau de M. Krajisnik. Il s'agissait de discussions entre les différents

16 partis, entre le SDS et le SDA, en l'occurrence.

17 Q. Quand est-ce que cela s'est passé ?

18 R. Je ne m'en souviens pas véritablement. C'était en 1991, mais je ne m'en

19 souviens pas de la date.

20 Q. Vous n'avez jamais participé à aucune autre réunion où étaient présents

21 les représentants de la communauté internationale ?

22 R. Non.

23 Q. Lorsque vous vous êtes rendu dans les municipalités, comme vous l'avez

24 décrit pendant l'année 1991, vous n'apportiez pas aux municipalités des

25 instructions émanant de la direction du SDS ?

Page 16747

1 R. Non. Je ne portais pas ou ne transportais pas d'instructions. Le statut

2 était assez suffisant, le statut qui était en vigueur. Pour être franc avec

3 vous, j'oeuvrais de façon indépendante. Il m'était tout à fait possible de

4 décider comment gérer certains problèmes, comment je pouvais agir. Je

5 pouvais le faire de façon indépendante. Mais aucune tâche précise ne

6 m'avait été confiée.

7 Q. Alors - et nous parlons toujours de l'année 1991 -j'aimerais savoir si,

8 à un moment donné, pendant l'année 1991, puisque cette question faisait

9 référence à l'année 1991, avant que vous ne vous rendiez dans ces

10 municipalités, n'avez-vous jamais discuté avec M. Krajisnik ou avez-vous eu

11 une conversation téléphonique avec M. Krajisnik au cours de laquelle il

12 vous aurait fourni des instructions avant que vous ne vous rendiez dans ces

13 municipalités ou dans une municipalité quelle qu'elle soit ?

14 R. Non. Autant que je m'en souvienne, non. Krajisnik ne participait pas à

15 ces activités de parti. En général, j'y allais seul ou je discutais de ces

16 questions avec Karadzic. Mais pour ce qui est de mon travail, Krajisnik ne

17 s'occupait pas des activités ordinaires du parti. C'était le président de

18 l'assemblée. C'était une fonction très, très élevée et lui et Karadzic

19 s'occupaient de questions beaucoup plus sérieuses. Autant que je le sache,

20 il ne s'occupait absolument pas des activités du parti. Il ne s'est jamais

21 mêlé des activités du parti, au niveau de mes activités. Pour ce qui est

22 des autres activités, je n'en sais rien.

23 Q. A la suite d'une visite dans une municipalité en 1991, avez-vous

24 rencontré M. Krajisnik ou lui avez-vous téléphoné pour lui présenter une

25 sorte de rapport à la suite de votre visite dans la municipalité ?

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1 R. Non. Je n'avais rien à faire en son nom ou pour lui. J'étais membre du

2 comité exécutif et Krajisnik était membre du conseil central. Je ne devais

3 absolument pas présenter les rapports à M. Krajisnik. Je présentais les

4 rapports à Karadzic, lui-même ou au comité exécutif et lorsque je revenais

5 du terrain, si je voulais présenter un rapport à Karadzic, je me suis rendu

6 compte, par exemple, qu'il était déjà informé de ce qui s'était passé,

7 d'ailleurs, même avant mon retour du terrain.

8 Q. Vous avez décrit la structure à la page 22 de ma version du compte

9 rendu d'audience. La réponse est assez longue, est assez verbeuse de votre

10 part, Monsieur Neskovic; cela commence à la page 21 de mon compte rendu

11 d'audience et vous dites -- il y a une question de six lignes et la réponse

12 commence comme suit : "Si je peux me permettre de faire une correction,

13 d'après les statuts de 1991 du 12 juillet." Voilà, j'espère que cela vous

14 permet de comprendre de quel passage il s'agit.

15 Ensuite, à 11 ou 12 lignes plus bas, vous dites : "Deux principes

16 fondamentaux ont fait l'objet de décisions à cette occasion," il s'agissait

17 du 12 -- j'essaie de me souvenir de quelle occasion il s'agissait. J'essaie

18 de l'identifier. Le 12 juillet 1991. Corrigez-moi, si je m'abuse, parce

19 qu'il me semble que nous n'arrêtons pas de parler du 12 juillet. Enfin, ce

20 n'est pas tellement surprenant, d'ailleurs.

21 Mais toujours est-il que vous dites : "Deux principes fondamentaux

22 ont fait l'objet de décisions; dans un premier temps, la structure

23 principale ou l'organe de base qui serait une communauté locale ou un

24 comité local et non pas un comité municipal."

25 Ensuite, au paragraphe suivant, vous dites : "La structure de base du

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1 parti était ce comité local, ce qui fait qu'il s'agissait de l'organe le

2 plus important au niveau local; alors que le président" -- et vous parlez

3 du Dr Karadzic -- "avait le plus de pouvoir au niveau global." Il y a, en

4 quelque sorte, les deux maillons.

5 Il s'agissait de la structure de base du bas vers le haut. Vous avez

6 les comités locaux; ensuite, vous avez le conseil municipal et dans

7 certains cas, il y a un conseil régional. Ensuite, vous avez le comité

8 central du SDS et ensuite, vous avez le président du parti. Voilà, en guise

9 de synthèse, Monsieur Neskovic; vous m'avez suivi ?

10 R. Je dois vous fournir une explication. Les activités du parti étaient

11 organisées de telle façon que les comités locaux ont formé la base. Pour ce

12 qui est du Dr Karadzic, il avait énormément d'autorité et il représentait

13 l'organe du parti. Il y avait le conseil central; il y avait le comité

14 exécutif. Le comité exécutif était en rapport avec le conseil central.

15 Karadzic était la personne qui représentait l'organe du parti. Mais le

16 comité local était l'organe grâce auquel le parti pouvait prendre des

17 mesures sur le terrain. Je ne vois pas de contradiction.

18 Q. Mais Monsieur Neskovic, je vais vous inviter à imaginer qu'on dessine

19 un organigramme sur une feuille de papier. Vous avez, au niveau le plus bas,

20 le comité local; ensuite, vous avez le "comité municipal;" puis, vous avez,

21 dans certains cas, "le comité ou le conseil régional;" ensuite, vous avez

22 encore, au-dessus, "le conseil central." Je vous vois hocher du chef, vous

23 semblez acquiescez et êtes d'accord avec la description que je fournis

24 maintenant ?

25 R. Oui, oui.

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1 Q. Dans votre municipalité, combien y avait-il de comités locaux ?

2 R. Cela dépendait du nombre des communes locales parce qu'il faut savoir

3 que les organisations locales du SDS se chevauchaient avec le territoire

4 des communes locales. Si nous faisons référence à Banja Luka, par exemple

5 ou à Sarajevo, vous aviez les communes locales qui étaient importantes, qui

6 étaient larges. Là, il y avait un certain nombre de comités locaux, mais la

7 règle était qu'un comité local devait être composé de 15 membres et que

8 chaque membre du comité local devait être actif au nom de quelques 20

9 foyers. Vous pouviez avoir, sur un territoire donné, un ou plusieurs

10 comités locaux et cela dépendait, en quelque sorte, de la densité de

11 population dans le territoire en question. Mais fondamentalement, ces

12 comités locaux existaient ou ces communes locales existaient afin d'éviter

13 que le parti ne devienne trop bureaucratique et afin d'assurer que les

14 organes du parti n'exercent pas trop d'influence.

15 Pour devenir un membre du conseil municipal, vous deviez passer par le

16 comité local et au vu de ses activités, sur la base des activités que vous

17 aviez accomplies, vous pouviez devenir, ensuite, membre du conseil

18 municipal et cela était valable pour les deux tiers. C'est un principe qui

19 existait pour empêcher que le parti ne devienne trop bureaucratique.

20 Q. Monsieur Neskovic, je vais vous poser une question à propos de

21 l'exécutif, en quelque sorte, de ces organes et de leurs liens les uns avec

22 les autres. Dans un premier temps, convenez-vous avec moi que les conseils

23 municipaux indiquaient qu'ils avaient une grande autonomie et aimaient

24 exercer cette autonomie, autonomie qu'ils avaient par rapport aux instances

25 supérieures du parti ?

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1 R. Oui, ils avaient cette autonomie, je le pense. Je pense que cela était

2 exact. Mais ils étaient très indépendants en matière de questions locales.

3 Il faut également savoir qu'ils devaient et c'était une obligation, ils

4 devaient mettre en œuvre les politiques du parti. Ils avaient une certaine

5 marge de manœuvres, une certaine marge d'indépendance pour ce qui est des

6 questions locales. Ensuite, conformément au statut, ils devaient respecter

7 les décisions prises des autres organes supérieurs. Ils devaient respecter

8 leur programme, leur statut. Il faut savoir que ce programme était

9 contraignant pour les organes supérieurs, également. Dans les différents

10 partis, il fallait trouver un juste équilibre entre, d'une part, la

11 centralisation et d'autre part, la décentralisation. Il fallait essayer, en

12 quelque sorte, de réconcilier ou de concilier ces deux principes, en un

13 sens.

14 Q. Monsieur Neskovic, vous avez eu cette expérience, vous vous êtes rendu

15 auprès des différentes municipalités. J'aimerais savoir si cette structure

16 qui est tout à fait naturelle, cette structure théorique, dans la pratique,

17 elle n'était pas tellement retrouvée. Je pense, en quelque sorte, à la

18 chaîne de commandement depuis l'organe supérieur, conseil central, conseil

19 régional, conseil municipal, comités locaux. Cela n'a jamais véritablement

20 fonctionné aussi parfaitement que cela et aussi parfaitement que cela

21 aurait dû le faire théoriquement ?

22 R. Je pense qu'il faut examiner les différents cas individuels, les

23 différentes municipalités. Cela dépendait, également, des personnes qui

24 avaient certaines fonctions dans les municipalités. Je pense aux fonctions

25 de la direction; certaines personnes avaient tendance à agir de façon

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1 beaucoup plus indépendante. Dans le cas du conseil municipal de Banja Luka,

2 par exemple, ce conseil municipal n'avait pas véritablement l'impression

3 qu'il devait respecter la discipline du parti. Il y avait d'autres conseils

4 municipaux de la sorte. Tout dépendait des personnes qui étaient à la

5 direction de ces conseils municipaux. Cela dépendait de ces personnes, de

6 leur compétence, de leur capacité politique. Il faut savoir que la

7 structure du parti qui était stipulée par le statut a, en quelque sorte, un

8 tant soit peu été perturbée par la possibilité que les représentants des

9 conseils municipaux puissent venir trouver

10 M. Karadzic, lui parler, lui parler des problèmes auxquels ils se

11 heurtaient, ce qui fait que tacitement, Karadzic pouvait les autoriser à

12 agir de façon différente; ce qu'il faisait, d'ailleurs, à ce moment-là. Le

13 contact entre les conseils municipaux et le président était, en quelque

14 sorte, un contact qu'il pouvait tout à fait établir; cela leur était

15 possible d'avoir ce genre de contact.

16 Q. Mais lorsqu'on aborde la fin de l'année 1991 et le début de l'année

17 1992, Monsieur Neskovic, est-ce que ces instructions, lorsqu'elles

18 arrivaient au niveau des conseils municipaux, étaient des instructions qui

19 venaient, qui émanaient de M. Karadzic en tant que président ou du conseil

20 central, du conseil exécutif ou est-ce qu'il s'agissait, en quelque sorte,

21 d'un hybride ou est-ce que les instructions venaient d'ailleurs ?

22 R. C'est une question fort difficile et complexe que vous m'avez posée et

23 je devrais y réfléchir pendant un certain temps avant d'y répondre. Je dois

24 dire que c'est une question qui est extrêmement importante, mais à laquelle

25 il est très difficile de répondre.

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1 M. STEWART : [interprétation] Bien peut-être que nous pourrions laisser le

2 témoin réfléchir à cette question et je pourrais peut-être revenir à la

3 charge dès demain matin.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde l'horloge. Je pense qu'il est

5 toujours utile de s'accorder un temps de réflexion; je vais suivre votre

6 suggestion.

7 Mais avant de lever l'audience, je souhaiterais indiquer au témoin

8 qu'il ne doit absolument pas parler du témoignage ou de la déposition qu'il

9 vient de faire. Vous devrez revenir demain, Monsieur. J'aimerais que vous

10 reveniez à 9 heures du matin dans le même prétoire.

11 Peut-être que vous pourriez escorter le témoin hors du prétoire,

12 Monsieur l'Huissier.

13 [Le témoin se retire]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, pourriez-vous nous dire

15 de combien de temps vous souhaitez disposer.

16 M. STEWART : [interprétation] [hors micro]

17 L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

18 M. STEWART : [interprétation] Je ne vais pas terminer lors de la première

19 séance, demain, mais je m'efforcerai de terminer à la fin de la deuxième

20 séance.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, je vais voir -- il faut que

22 je fasse quelques calculs. Je ne sais pas si cela correspond au temps

23 imparti.

24 Monsieur Krajisnik --

25 M. STEWART : [interprétation] Je pense que je suis dans les temps.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

2 M. STEWART : [interprétation] Mais j'espère que vous n'allez pas vous

3 livrer à des calculs trop sophistiqués.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais vous savez à quel point je

5 déteste l'arithmétique, de toute façon.

6 Monsieur Krajisnik, savez-vous ou est-ce que vous pouvez nous dire, d'ores

7 et déjà, si vous avez des questions à poser au témoin ?

8 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai dit à Me Stewart les questions que je

9 devrais peut-être poser et toutes les questions que Me Stewart posera, je

10 ne vais pas les poser parce que je pense qu'il s'agit d'un certain nombre

11 de questions qui sont très importantes par rapport à ce témoin parce que

12 c'est l'un des témoins qui pourrait beaucoup aider la Chambre. Je ne peux

13 pas vous dire de combien de temps j'aurai besoin pour poser mes questions.

14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une observation.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Stewart.

16 M. STEWART : [interprétation] C'est très pertinent, Monsieur le Président.

17 M. Krajisnik et moi, nous -- à la ligne 15 et 16, nous pouvons voir où est

18 le problème essentiel parce que ce n'est pas donner des instructions à un

19 avocat comment guider l'affaire -- je ne sais pas ce que c'est, il veut

20 faire savoir qu'il m'a donné des instructions par rapport à certaines

21 questions qu'il faut poser et par rapport à d'autres que je devrais omettre

22 de poser. C'est cela, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, j'ai pensé, à ce moment-

24 là - je ne sais pas s'il s'agit de nuances dans l'interprétation - parce

25 qu'il s'agit d'une question très délicate, je voulais demander à M.

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1 Krajisnik s'il savait quelles questions vous devriez poser au témoin. Peut-

2 être que je n'ai pas bien formulé cela, mais il ne faut pas faire un drame

3 de cela.

4 M. STEWART : [interprétation] Je ne fais pas un drame de cela. Je peux

5 expliquer cela dans la lumière des heures et des heures de conversation que

6 j'ai menée avec lui.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

8 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, il est très clair ce

9 que cela veut dire de ses propres mots, nous savons tous que c'est ce qu'il

10 voulait dire parce que si je ne pose pas de questions ici, il est

11 clairement dit que c'est quelqu'un d'autre qui les posera.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Laissons --

13 M. STEWART : [interprétation] On me dit tout simplement ce que je devrais

14 faire. Il me donne des instructions. Il faudrait peut-être que je me lève

15 et que je parte.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons tous le temps pour réfléchir

17 jusqu'à demain matin.

18 Monsieur Tieger, vous avez quelque chose à dire ?

19 M. TIEGER : [interprétation] Par rapport à ces estimations, par rapport au

20 temps nécessaire pour cela, je proposerais une audience supplémentaire

21 demain ou jeudi.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends, Monsieur Tieger.

23 M. TIEGER : [interprétation] Je pense que c'est important de faire cela.

24 M. STEWART : [interprétation] Je m'oppose à une audience supplémentaire

25 demain.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

2 M. STEWART : [interprétation] Je travaille depuis toute la semaine avec ce

3 témoin.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

5 M. STEWART : [interprétation] Et jeudi -- je suis certainement d'accord

6 pour jeudi, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre n'a pas pensé à cela, avoir

8 une audience jeudi.

9 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

10 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'audience est levée jusqu'à demain

12 matin, à 9 heures, dans la même salle d'audience.

13 --- L'audience est levée à 13 heures 49 et reprendra le mercredi 20

14 juillet 2005, à 9 heures 00.

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