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1 Le mardi 11 novembre 2008
2 [Audience d'appel]
3 [Audience publique]
4 [L'appelant est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 33.
6 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Madame le
7 Greffier, pourriez-vous introduire le numéro de l'affaire, s'il vous plaît.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Mesdames, Messieurs les Juges.
9 Bonjour à tous et à toutes. Il s'agit de l'affaire IT-00-39-A, le Procureur
10 contre Momcilo Krajisnik.
11 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Je me tourne vers M. Krajisnik.
12 Nous entendez-vous, êtes-vous en mesure de suivre les débats dans une
13 langue que vous comprenez ?
14 L'APPELANT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous remercie.
15 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.
16 Bien. Je crois que les conseils de M. Krajisnik sur la question de
17 l'entreprise criminelle conjointe ne sont pas là.
18 M. KREMER : [interprétation] Katharina Margetts avec Alma Imamovic, notre
19 commis à l'affaire, et je suis moi-même Peter Kremer, nous représentons
20 tous ensemble l'Accusation.
21 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. L'amicus curiae, sans
22 micro, malheureusement.
23 Vous n'avez pas allumé votre micro, Monsieur. Sans micro, toujours ?
24 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Colin Nicholls et Quincy Whitaker.
25 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.
26 Il s'agit d'une audience publique visant à recueillir des élément de preuve
27 dans le cadre de l'affaire le Procureur contre Momcilo Krajisnik.
28 L'objectif de cette audience est d'entendre la déposition de M. Nicholas
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1 Stewart, qui a été cité par l'accusé, M. Krajisnik, au titre de l'article
2 115 du Règlement de procédure et de preuve. Je vais résumer les éléments de
3 preuve qui ont été reçus dans le cadre de cet appel, ensuite je vous
4 parlerai de la manière dont nous allons entendre la déposition du témoin
5 aujourd'hui.
6 Dans sa décision du 20 août 2008, la version publique qui a été déposée le
7 4 novembre 2008, la Chambre d'appel a autorisé, au titre de l'article 115
8 du Règlement, le versement au dossier de deux pièces, les pièces AD1 et AD2
9 signées de la main de George Mano et Stefan Karganovic respectivement. Les
10 deux déclarations concernent la conduite de Me Stewart en tant que conseil
11 principal au cours du procès de l'appelant.
12 Dans sa décision du 8 octobre 2008, la Chambre d'appel a accepté de verser
13 au dossier sept documents présentés par l'Accusation comme étant des
14 éléments de preuve en réfutation à ces déclarations, il s'agit des pièces
15 AP1 à AP7.
16 Le 4 novembre 2008, la Chambre d'appel a entendu la déposition de MM. Mano
17 et Karganovic, s'agissant de leurs déclarations préalablement versées au
18 dossier.
19 Le 6 novembre 2008, la Chambre d'appel a accepté le versement au dossier au
20 titre de l'article 115 du Règlement de procédure de six autres documents
21 relatifs également à la conduite de Me Stewart dans le cadre du procès de
22 l'accusé, et il s'agit des pièces AD4 à AD9. Dans la même décision, la
23 Chambre d'appel a ordonné à l'appelant d'entrer en contact avec Me Stewart
24 afin que celui-ci comparaisse devant la Chambre d'appel en qualité de
25 témoin conformément à l'article 115 du Règlement de procédure et de preuve.
26 Je rappellerai aux parties ainsi qu'à l'ami de la Cour que toutes les
27 pièces versées au dossier dans le cadre de la procédure d'appel l'ont été
28 sous pli scellé. Par conséquent, si les parties ou l'ami de la Cour
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1 souhaitent faire référence à ces documents, ils devront demander à ce que
2 l'on passe en audience à huis clos partiel.
3 Nous allons procéder ainsi cet après-midi : d'abord, l'appelant aura une
4 heure pour procéder à l'interrogatoire principal de Me Stewart. Puis l'ami
5 de la Cour sera autorisé pendant 30 minutes à poser, lui aussi, des
6 questions à Me Stewart. Par la suite, nous ferons une pause. Ensuite,
7 l'Accusation disposera d'une heure pour le contre-interrogatoire, et il y
8 aura ensuite questions supplémentaires de la part de l'appelant adressées à
9 M. Stewart pendant 20 minutes. Il s'agit là, bien sûr, de durées
10 approximatives, elles pourront être revues en fonction des besoins si la
11 Chambre de première instance le juge nécessaire.
12 Bien entendu, je rappelle aux parties qu'elles ne sont pas censées épuiser
13 tout le temps qui leur a été imparti, et les Juges seront libres, bien sûr,
14 d'interrompre les parties à quelque moment que ce soit pour poser leurs
15 propres questions au témoin.
16 Avant de citer le témoin, j'aimerais aborder une question supplémentaire
17 s'agissant des mémoires supplémentaires que les parties et l'ami de la Cour
18 sont libres de déposer sur les incidences des pièces AD1 et AD2, sur les
19 éléments de preuve présentés en réfutation et sur les dépositions viva voce
20 de MM. Mano, Karganovic et Karadzic. Le délai de dépôt de ces mémoires est
21 fixé au 14 novembre 2008, et le 5 novembre 2008, la Chambre d'appel a
22 décidé qu'ils devraient être présentés dans un seul document consolidé qui
23 ne devra pas dépasser 7 500 mots.
24 A la lumière de sa décision consistant à autoriser le versement au dossier
25 des pièces AD4 à AD9, la Chambre d'appel permet aux parties et à l'ami de
26 la Cour de faire figurer dans ces documents des arguments sur toute
27 incidence éventuelle de ces six pièces et la déposition de M. Stewart
28 d'aujourd'hui dans ce mémoire supplémentaire consolidé. Par ailleurs, la
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1 Chambre d'appel proroge le délai de dépôt de ce mémoire au 18 novembre
2 2008, et permet que ces mémoires soient plus longs que ce qui avait été
3 prévu au départ, et autorise un maximum de 9 000 mots.
4 Je demanderais maintenant à ce que l'on introduise le témoin, Me Stewart,
5 dans le prétoire.
6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
7 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour, Maître Stewart. M'entendez-
8 vous ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends. Merci. Bonjour.
10 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Je vous demanderais de bien
11 vouloir donner lecture de la déclaration solennelle qui vous est tendue par
12 l'huissier.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
15 LE TÉMOIN : NICHOLAS STEWART [Assermenté]
16 [Le témoin répond par l'interprète]
17 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Monsieur Stewart, asseyez-vous.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
19 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Stewart, pourriez-vous
20 indiquer aux Juges de la Chambre quel est votre patronyme ainsi que votre
21 date de naissance.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Nicholas John Cameron Stewart, 16 avril 1947.
23 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Pourriez-vous, s'il vous plaît,
24 nous dire quelle est votre profession, et l'occupation que vous avez
25 aujourd'hui et que vous aviez il y a quelque temps.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis avocat en exercice, je suis membre du
27 barreau d'Angleterre et du Pays de Galles depuis 1972. J'ai été nommé
28 "Queen's Counsel" en 1987, et depuis 1992 ou peut-être 1991, je suis juge
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1 adjoint dans la "High Court" d'Angleterre et du Pays de Galles, une
2 occupation à temps partiel, si je puis dire.
3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Vous avez été convoqué ici pour
4 témoigner dans le cadre de cette procédure d'appel dans l'affaire le
5 Procureur contre Momcilo Krajisnik. C'est M. Krajisnik, l'appelant, qui
6 vous a cité à comparaître, c'est donc lui qui va procéder à
7 l'interrogatoire principal.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Si vous --
9 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Attendez. Après cela, l'ami de la Cour
10 pourra vous poser des questions, ensuite le Procureur procédera au contre-
11 interrogatoire, et vous répondrez ensuite aux questions supplémentaires de
12 l'appelant. Les Juges, bien sûr, auront peut-être des questions à vous
13 poser à quelque moment que ce soit de votre déposition, bien sûr, s'ils le
14 souhaitent.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je comprends
16 tout à fait. Tout ceci est très clair. Pourrais-je poser deux questions ?
17 Je ne souhaite pas, bien sûr, utiliser de manière indue le temps alloué à
18 qui que ce soit.
19 Bien sûr, je sais que deux témoins ont déposé lundi dernier et, bien sûr,
20 je connais leur identité, puisque leur identité n'a pas été confidentielle.
21 Mais je crois que la plus grosse partie de leur témoignage a été entendue
22 en audience à huis clos partiel, alors si ce n'est pas inopportun de ma
23 part, je voulais savoir pourquoi, parce que je dois vous dire que je ne
24 vais pas demander à ce que le même régime s'applique à moi-même, dans mon
25 propre intérêt. Et c'est vrai que j'aurais préféré que ces dépositions
26 aient lieu dans la mesure du possible en audience publique. Je ne souhaite
27 pas en tout cas, moi, déposer à huis clos partiel, je souhaiterais dans la
28 mesure du possible que ma déposition soit entendue en public, je voulais
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1 simplement -- je ne comprends pas très bien pourquoi le gros de ces
2 témoignages a été entendu en audience à huis clos partiel. J'aurais voulu
3 comprendre, si toutefois, je peux poser la question.
4 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] En tant que témoin, vous devriez
5 davantage répondre à des questions plutôt que d'en poser. Quoi qu'il en
6 soit, la plupart des documents qui ont été utilisés au cours de ces
7 dépositions dont vous parlez étaient des documents à caractère
8 confidentiel, ainsi toute référence faite à ces documents devait être faite
9 en audience à huis clos partiel.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. Ceci répond à la question
11 d'un point de vue technique, et j'espère que vous comprenez tout à fait ma
12 position.
13 L'autre question qui me paraît tout à fait légitime pour un témoin, parce
14 que je vais essayer, bien sûr, d'apporter la plus grande assistance
15 possible dans le cadre de ma déposition, il se peut que la question du lien
16 de confidentialité qui me lie avec M. Krajisnik soit abordée très
17 rapidement, or, en tant qu'ex-conseil de M. Krajisnik, il y a sans doute
18 certaines choses que je ne suis pas en mesure d'aborder.
19 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais ce sera à vous de voir
20 effectivement si des éléments peut-être relèvent de ce lien de
21 confidentialité. Si tel est le cas, je vous inviterais à ne pas l'évoquer.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce cas-ci, ma position a toujours été la
23 même s'agissant de ce lien de confidentialité, et à moins de recevoir des
24 instructions contraire, je m'en tiendrai, bien sûr à cette position.
25 [La Chambre d'appel se concerte]
26 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui. Je voulais poser la question à
27 l'appelant, bien sûr. Pensez-vous que le témoin doit s'en tenir à ce secret
28 professionnel ou pas ? C'est à vous de nous le dire, d'une certaine
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1 manière.
2 L'APPELANT : [interprétation] Oui. M. Dershowitz et M. Sladojevic m'ont
3 indiqué que je ne devrais pas autoriser la levée de ce secret
4 professionnel, et j'aurais tendance à suivre leur conseil puisqu'ils sont
5 plus versés dans ce genre de chose que moi.
6 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Nous prenons note de ceci et,
7 bien entendu, vous tiendrez compte de cela lorsque vous poserez vos
8 questions au témoin.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, et j'ai pris, bien sûr, bonne note
10 de ceci également. Merci.
11 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur le Juge Meron.
12 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Il me semble, Monsieur le Président,
13 que le secret professionnel compte pour l'accusé plutôt que pour l'avocat.
14 M. Krajisnik a invité M. Stewart à déposer sur un certain nombre de
15 questions, et je suppose donc que M. Krajisnik serait prêt à lever le
16 secret qui pèse sur ses échanges avec Me Stewart. Compte tenu des questions
17 sur lesquelles M. Krajisnik souhaite que M. Stewart dépose, ce sont
18 précisément des questions qui renvoient à des allégations d'assistance
19 inefficace et des questions relatives à l'iniquité du procès. Donc il me
20 semble que M. Krajisnik ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre.
21 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Krajisnik.
22 L'APPELANT : [interprétation] Excusez-moi. Puis-je prendre la parole ?
23 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais je vous en prie.
24 L'APPELANT : [interprétation] M. Sladojevic m'a conseillé de mener à bien
25 l'audition de ce témoin, et si à quelque moment que ce soit ce droit devait
26 se retrouver violé d'une certaine manière, il nous faudrait prendre une
27 décision en la matière. Pour respecter la confidentialité d'une part et
28 l'intérêt du public de l'autre, si ce cas de figure se présente, bien sûr,
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1 je prendrai une décision, mais je ne souhaite pas qu'il y ait d'obstacle à
2 une déposition complète de M. Stewart.
3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui. C'est précisément ce que
4 j'essayais de dire tout à l'heure. Vous allez voir effectivement dans
5 quelle mesure vous serez prêt à renoncer à ce droit dans le cadre des
6 questions que vous allez souhaiter poser à M. Stewart. Mais il est clair
7 que si vous poser une question et que vous souhaitez obtenir une réponse,
8 il faudra peut-être aller dans ce sens, puisque évidemment vous allez
9 chercher à obtenir réponse à votre question.
10 Bien. Ceci étant dit, nous allons peut-être pouvoir donner la parole
11 à M. Krajisnik afin que l'interrogatoire principal puisse débuter. Vous
12 avez la parole, Monsieur Krajisnik.
13 Interrogatoire principal par M. Krajisnik :
14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Stewart.
15 R. Bonjour, Monsieur Krajisnik.
16 Q. J'ai été mis en garde par la Chambre d'appel, à savoir que nous
17 devrions sans doute passer en audience à huis clos partiel au moment de
18 faire référence à certains documents. Je vais donc demander à ce que l'on
19 passe en audience à huis clos partiel pendant quelques instants pour que
20 nous puissions faire référence à certains documents sous pli scellé.
21 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Madame la Greffière, passons en
22 audience à huis clos partiel, s'il vous plaît.
23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos
24 partiel.
25 [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité partiellement levée par une ordonnance de la Chambre]
26 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Krajisnik,
27 allez-y.
28 M. KRAJISNIK : [interprétation] Merci beaucoup.
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1 Q. J'aimerais attirer l'attention de M. Stewart sur les documents dont il
2 dispose, j'espère, les documents AD4, AD5 et AD6.
3 R. Monsieur Krajisnik, je n'ai rien avec moi et je ne sais pas non plus à
4 quels documents ces cotes correspondent.
5 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vais demander à ce que l'on remette
6 les trois documents en question au témoin, les trois documents cités par M.
7 Krajisnik; AD4, AD5 et AD6.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. Merci bien. Ça y est. J'ai
9 trois documents, Monsieur Krajisnik, sous les yeux, Messieurs les Juges
10 également.
11 M. KRAJISNIK : [interprétation]
12 Q. Bien. C'est votre lettre, la lettre que vous adressez à la Chambre avec
13 un mémo en pièce jointe et des notes que vous avez prises au cours de votre
14 réunion avec le Juge Orie et M. Zahar. Avez-vous eu l'occasion de reprendre
15 connaissance de ce document au préalable ? Le connaissez-vous bien, ce
16 document ? Si tel n'est pas le cas, je vous invite à le reconsulter.
17 R. Oui, j'ai trois documents; la lettre avec ce mémorandum assez long qui
18 figure en annexe, ainsi que les notes avec ma réunion avec le Juge Orie, la
19 note de ma réunion avec M. Zahar. La réponse est oui, j'ai examiné tous ces
20 documents qui semblent être des exemplaires des documents en question. Je
21 les ai bien revus, effectivement, au cours des 48 heures passées.
22 Q. Monsieur Stewart, êtes-vous en mesure de confirmer à l'attention des
23 Juges que tous ces documents ont été écrits de votre main, ou en tout cas
24 que vous avez participé à leur rédaction ?
25 R. Oui, bien sûr je peux le faire. Le document le plus long que l'on
26 trouve en annexe de la lettre du 28 octobre et peut-être une partie de la
27 lettre, ceci a été rédigé avec M. Josse, mon co-conseil. Je crois que nous
28 avons fait chacun la moitié du travail, mais là aujourd'hui, je ne me
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1 souviens plus très exactement qui a rédigé quoi. Cela étant, oui,
2 effectivement ce document porte mon nom et il a été signé de ma main, oui.
3 Q. Merci, Monsieur Stewart. Votre réponse me satisfait tout à fait.
4 Y a-t-il quoi que ce soit dans ce document que vous aimeriez corriger ?
5 Vous avez dit que vous avez eu la possibilité de vous rafraîchir la
6 mémoire, de revoir le contenu de ces documents au cours des 48 heures qui
7 viennent de passer.
8 R. Oui. Il y a deux petites corrections à apporter, sans compter, bien
9 sûr, les erreurs de ponctuation. Dans les notes correspondant à la réunion
10 avec le Juge Orie le 31 octobre, c'est un lundi, dans l'avant-dernier
11 paragraphe de la première page, (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 Puis il y a aussi le mot "days" qui manque à la page suivante, à peu près
17 au milieu. On parle de "120" et point. Bien sûr, on doit lire "120 jours."
18 Voilà, ce sont des petites corrections. A part cela, je n'ai rien remarqué
19 d'autre, et je confirme que ces documents expriment mon opinion personnelle
20 et que c'est l'opinion que j'avais à ce moment-là. Elle est exprimée de
21 manière la plus honnête possible. Les faits que je décris dans ce document
22 demeurent tout à fait véridiques, les faits tels que je les décris, tels
23 que je les ai perçus ici.
24 Q. Cela signifie-t-il que vous confirmez aujourd'hui toute la teneur de
25 ces trois documents ? Est-ce là une conclusion que l'on peut tirer,
26 Monsieur Stewart ?
27 R. Oui, Messieurs les Juges, je vous le confirme. Oui.
28 Q. Merci beaucoup.
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1 M. KRAJISNIK : [interprétation] Je demanderais à ce qu'on repasse en
2 audience publique, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Madame la Greffière.
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous y sommes.
5 [Audience publique]
6 M. KRAJISNIK : [interprétation]
7 Q. J'aimerais à ce stade de cet entretien que nous parlions de l'ouverture
8 du procès et des témoins qui ont été cités. Mme Plavsic et M. Djeric, entre
9 autres, ont été cités. Voici quelle est ma question : pensez-vous que la
10 Chambre de première instance a alloué suffisamment de temps pour
11 l'interrogatoire de ces témoins ?
12 R. M. Krajisnik nous parle de l'ouverture du procès. Je crois qu'il n'est
13 pas contesté que Mme Plavsic et M. Djeric ont été cités à la toute fin du
14 procès.
15 Mais à cette nuance près, Monsieur Krajisnik, non, je ne crois pas
16 que la Chambre de première instance n'a pas alloué suffisamment de temps.
17 Lorsqu'on examine le temps qui a été consacré à l'audition d'autres témoins
18 dans le cadre du procès, et compte tenu du peu de temps qui a été autorisé
19 pour ces deux témoins, alors que pour Mme Plavsic en particulier on aurait
20 pu s'attendre à ce que celle-ci ait une connaissance beaucoup plus large
21 des événements qui intéressaient la Chambre au cours de ce procès par
22 rapport à la connaissance qu'auraient pu avoir de nombreux autres témoins,
23 il m'a semblé, à moi et à mon co-conseil, qu'en fait le temps alloué à
24 l'audition de ces témoins avait été ridiculement bref, particulièrement
25 pour ce qui est de Mme Plavsic.
26 Q. Cela signifie-t-il alors que vous n'avez pas eu assez de temps à votre
27 disposition pour procéder à l'interrogatoire de Mme Plavsic.
28 R. Je crois qu'il y a deux choses, Monsieur Krajisnik. Premièrement,
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1 puisque nous savions que nous n'avions que très peu de temps, nous avons
2 ajusté l'interrogatoire au temps qui nous était alloué et nous n'avons pas
3 procédé ou préparé le contre-interrogatoire que nous aurions pu avoir si
4 nous avions eu plus temps. Mais étant donné les limites qui s'appliquaient
5 à nous et les nombres de sujets que nous cherchions à couvrir, il me
6 semble, Monsieur Krajisnik, même si je n'en ai plus de détails exactement
7 précis en esprit, qu'effectivement il nous semblait - et c'est ce que
8 montrera le compte rendu d'audience - que nous agissions un peu isolés, que
9 nous n'arrivions pas à aller dans les sujets dans lesquels nous voulions
10 aller, y compris, par exemple, mais sans aller dans trop de détails, des
11 extraits de l'ouvrage de Mme Plavsic.
12 Q. En ce qui concerne le livre de Mme Plavsic, son titre
13 était : "Je témoigne." Cet ouvrage avait-il été pleinement traduit avant
14 que vous ne puissiez procéder à l'interrogatoire de
15 Mme Plavsic ?
16 R. Je ne le crois pas. Non, Monsieur Krajisnik. Il me semble que non,
17 effectivement.
18 Q. Monsieur Stewart, vous souvenez-vous comment la Chambre de première
19 instance, pendant son interrogatoire de Mme Plavsic, a, ou plus exactement,
20 dans quelle mesure les Juges ont dépendu de l'ouvrage de Mme Plavsic, et
21 comment ils faisaient référence à certains extraits ou paragraphes de cet
22 ouvrage ?
23 R. Monsieur Krajisnik, Messieurs, Monsieur le Président, je ne m'en
24 souviens pas très en détail, mais je me souviens qu'un agent de la Chambre
25 de première instance avait été en Suède s'entretenir avec Mme Plavsic. Je
26 ne sais pas exactement quels extraits ou quels paragraphes tirés du livre
27 avaient été identifiés. Je me souviens seulement que c'était un choix assez
28 limité, assez biaisé des écrits de Mme Plavsic. Pour répondre à votre
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1 question plus précisément, de savoir combien les Juges de la Cour
2 dépendaient de cet ouvrage, il me semble effectivement que puisque Mme
3 Plavsic était un témoin présenté par la Chambre, c'est effectivement la
4 Chambre de première instance qui dépendait de ces extraits. C'était eux qui
5 avaient pris l'initiative de présenter ces éléments de preuve.
6 Q. Maître Stewart, avez-vous pu procéder à un contre-interrogatoire de
7 façon satisfaisante de Mme Plavsic, plus particulièrement en ce qui
8 concerne son fameux ouvrage intitulé : "Je témoigne" ?
9 R. Non, Monsieur Krajisnik. Je croyais que l'exercice était insatisfaisant
10 et je crois qu'il n'y avait pas vraiment la possibilité ni pour
11 l'Accusation ni pour la Défense d'interroger de façon correcte Mme Plavsic.
12 En ce qui concerne les extraits de son ouvrage en tout cas, c'est ce dont
13 je me souviens. Il me semblait effectivement que nous avons été arrêtés en
14 plein vol, si j'ose dire, et nous n'avons pas pu réellement remettre en
15 perspective l'ouvrage dont on nous présentait des extraits. Mais j'imagine
16 que ceci est assez clair et que le compte rendu d'audience le montrera très
17 clairement. Je ne pense pas que je puisse amener d'éléments supplémentaires
18 en utilisant mes souvenirs.
19 Q. Vous souvenez-vous, Maître, que j'avais voulu procéder moi-même à un
20 interrogatoire de Mme Plavsic ? Vous vous souviendrez certainement qu'on
21 m'a empêché de procéder à son contre-interrogatoire ?
22 R. Je m'en souviens tout à fait, Monsieur Krajisnik. Messieurs les Juges,
23 je dois dire que c'est le seul extrait du compte rendu d'audience de
24 l'interrogatoire de Mme Plavsic que j'ai relu pour l'audience d'aujourd'hui
25 tout simplement parce que - et j'imagine que vous le savez parfaitement M.
26 Krajisnik et ses collaborateurs me l'ont passé - Alors effectivement, j'ai
27 relu ce document. Cela m'a rafraîchi la mémoire, mais je m'en souviens très
28 bien, effectivement. Vous lirez en lisant le compte rendu d'audience
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1 qu'effectivement le Juge Orie vous a, d'autorité, interrompu et empêché de
2 procéder au contre-interrogatoire. Je peux vous dire ça, alors même que je
3 n'étais pas un grand fan du moment où vous, vous procédiez à des contre-
4 interrogatoires, que ce soit nos témoins ou les témoins de la partie
5 adverse d'ailleurs.
6 Q. Merci. Revenons à la phase préliminaire au procès, lorsque vous avez
7 été embauché comme conseil. Lorsque vous avez repris l'affaire, vous
8 souvenez-vous qui était mon conseil avant vous et qui il avait été ?
9 R. Oui. Je m'en souviens très bien, je m'en souviens parfaitement bien,
10 Messieurs, Monsieur le Président. C'était M. Brashich -- M. Dan Brashich.
11 Le greffe me l'avait dit d'ailleurs.
12 Q. Savez-vous ou vous souvenez-vous pendant combien de temps M. Brashich
13 avait travaillé avec moi ?
14 R. Oui. Depuis plusieurs années déjà. Deux, trois ans, quatre peut-être,
15 en tout cas, depuis déjà bien longtemps. Vous avez été arrêté et transféré
16 ici en avril 2000; et je crois que Me Brashich est devenu votre conseil
17 très rapidement. Je ne sais plus exactement quand, mais très peu de temps
18 après votre arrivée ici en tout cas.
19 Q. Monsieur Stewart, lorsque vous avez repris le dossier, vous attendiez-
20 vous à recevoir de M. Brashich un produit qui vous permettrait de
21 travailler à la constitution de ma défense ?
22 R. Oui. Le greffe m'a dit - et d'une certaine façon c'était exact - on
23 m'avait dit que le procès devait commencer le 14 mai, je crois - on peut
24 vérifier ça - le procès devait commencer le 14 mai, disais-je, et à la fin
25 avril il était apparu que Me Brashich avait été ou devait être radié du
26 barreau pendant un an, et donc retiré de cette affaire. Ce que j'ai compris
27 très rapidement, c'était exactement ça, qu'effectivement on était à 15
28 jours du procès géré par quelqu'un qui connaissait l'affaire depuis très
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1 longtemps, et quelles que soient les raisons qui avaient motivé le barreau
2 de New York pour le suspendre, il me semblait évidemment que le dossier
3 était prêt à l'usage à échéance de deux, ou trois, ou quatre semaines.
4 Evidemment, je me suis vite rendu compte que ce n'était pas le cas, mais en
5 tout cas lorsque j'ai commencé, c'était l'impression que je me faisais des
6 choses.
7 Donc, oui, je m'attendais effectivement à recevoir une matière utile, un
8 dossier utile à la conduite d'un procès en le recevant de l'avocat
9 précédant.
10 Q. Pourriez-vous dire à Mme et MM. les Juges ce que vous avez
11 effectivement reçu, et si vous avez reçu ce que vous vous attendiez à
12 recevoir de Me Brashich ?
13 R. Non, ce n'est pas ce que j'ai eu. Me Brashich est venu. On avait prévu
14 de se retrouver moi, Me Loukas, mon co-conseil, que j'avais ramené
15 d'Australie, et lui; et nous nous sommes retrouvés ici pendant une semaine
16 en août 2003, nous sommes venus vous voir, Monsieur Krajisnik. Me Brashich
17 était supposé venir avec un dossier complet. C'est bien pour ça que le
18 greffe avait payé son voyage. Et il n'a amené que très peu de choses, rien,
19 en fait, quelques fragments de papier et quelques documents.
20 J'ai réussi à en obtenir un peu plus deux ou trois mois plus tard, et en
21 gros, c'était 13 grosses boîtes venant de Me Brashich et 53 petites boîtes
22 revenant de l'un de ses co-conseils, Me Kostic, qui me sont arrivées à la
23 fin de l'automne après une bataille rude pour les obtenir. Donc il y avait
24 beaucoup de choses, mais ce n'était absolument pas organisé et traité. En
25 tout cas, ce n'était absolument pas le dossier auquel je m'attendais
26 lorsque j'ai repris l'affaire.
27 Q. Monsieur Stewart, avez-vous pu comprendre ce qu'il y avait parmi ces
28 éléments et parmi ces documents ? Après tout, lorsque l'on reprend une
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1 affaire, il faut bien comprendre ce qui s'y passe pour pouvoir organiser la
2 défense, n'est-ce pas ?
3 R. Oui. Je me perds peut-être en conjecture, Madame, Messieurs les Juges,
4 mais j'imagine que Me Brashich avait été assez réticent à m'envoyer ces
5 documents, il m'avait dit que sa secrétaire devait l'aider. J'ai eu
6 l'impression qu'effectivement le classement avait été fait en toute hâte.
7 Il y avait quelques sections. J'ai effectivement été en mesure de rédiger
8 des listes, une espèce de grande structure du dossier, mais dans chaque
9 boîte il y avait 20 ou 30 catégories peut-être, et dans chaque groupe rien
10 n'était très organisé.
11 Puis, je le dis en passant, j'ai reçu également un certain nombre de
12 CD, et également des disquettes déjà démodées dont certaines comportaient
13 quelques documents, parfois 100, parfois 1 000 documents ou plus, mais il
14 fallait ouvrir chacun de ces documents individuellement pour savoir ce
15 qu'ils représentaient.
16 Q. Monsieur Stewart, lorsque vous avez repris l'affaire, aviez-vous déjà
17 un certain nombre d'affaires en cours à Londres que vous deviez finaliser ?
18 R. Oui, évidemment, j'avais du travail. Je suis un avocat qui exerce. Et
19 je suis ravi de pouvoir vous dire qu'effectivement, je n'étais pas au
20 chômage, donc il y avait effectivement des choses à faire, et j'en ai parlé
21 avec le greffe. Il fallait évidemment que j'organise ma charge de travail,
22 que je finisse ce que je pouvais finir pour me libérer et travailler sur
23 votre affaire. Et comme n'importe lequel de mes confrères, je n'ai pas pu
24 finaliser absolument tout; et j'ai eu parfois des obligations envers mes
25 clients.
26 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Le Juge Meron avait une question.
27 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Monsieur Stewart, vous nous avez dit que vous avez eu de vraies difficultés
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1 de ce que Me Brashich ne vous avait pas vraiment préparé un vrai dossier.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Effectivement.
3 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Et vous avez reçu toutes ces boîtes.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.
5 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc il y avait peu de temps, et
6 l'Amicus Curiae, dans sa version de son mémoire, nous a fait remarquer que
7 vous n'avez pas demandé à repousser l'audience de début de procès. Si c'est
8 exact, pouvez-vous nous dire pourquoi ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge --
10 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Oui, mais qu'est-ce que cela montre de
11 votre charge de travail et de votre habilité, Maître --
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'il est inexact, Monsieur le Juge,
13 de considérer que je n'ai pas cherché à retarder le début du procès. Au
14 contraire, je voulais absolument que le procès commence. Mais
15 effectivement, nous n'avons pas demandé de façon formelle à ce que le
16 procès soit suspendu, nous avons eu des entretiens en grand nombre, je ne
17 sais plus combien, avec M. Harhoff à l'époque, aujourd'hui c'est le Juge
18 Harhoff, nous avons eu des entretiens avec le Juge Orie. Souvent seul, si
19 j'ai bonne mémoire, plutôt qu'accompagné de ses deux co-Juges, et nous
20 avons parlé de tous ces sujets de façon très claire, et j'ai dit très
21 clairement à M. Harhoff exactement la situation dans laquelle nous nous
22 trouvions; et je l'ai dit exactement également au Juge Orie. Ce que nous
23 étions en train d'essayer de faire, c'était de négocier, et ça a duré un
24 certain temps, effectivement, et à un moment ou à un autre, je me souviens
25 très bien avoir entendu le Juge Orie dire : "Maître Stewart, ce procès
26 commencera le 3 février." Ou le 4. Enfin, je ne sais plus quel jour était
27 un lundi. Mais en tout cas, le Juge m'a dit très clairement : "Cette
28 affaire commencera." Et je l'ai cru. C'était évident pour moi que le Juge
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1 Orie pensait ce qu'il disait.
2 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Quel impact cela avait-il sur
3 l'adéquation et la pertinence de la défense ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, le procès n'a pas
5 commencé le 4 février puis a continué cinq jours à la semaine. Le Juge Orie
6 nous a proposé une charge de travail - je vais faire référence à des
7 chiffres, mais je ne m'en souviens pas exactement, j'espère que vous
8 m'excuserez, je n'ai pas relu tous mes documents - mais le Président Orie
9 nous proposait 18 jours, me semble-t-il, à utiliser de façon assez
10 flexible, alors je ne sais pas si c'était six semaines de trois jours ou
11 quatre semaines de quatre jours. Il y avait une certaine marge de
12 flexibilité, et une fois qu'on aurait couvert ces 18 jours de procès,
13 effectivement il y aurait eu une suspension; jusqu'après Pâques, qui devait
14 tomber le 10 ou 11 avril.
15 Et étant donné que le Juge Orie avait dit : "Ce procès commencera," et
16 puisqu'il nous avait proposé ces modalités, il me semblait qu'une requête
17 en suspension était inutile. Et il me semblait effectivement que nous
18 pouvions gérer cela, puis d'une certaine façon c'était utile aussi
19 d'apprendre à gérer un tribunal inconnu, à gérer l'ambiance.
20 Il me semblait qu'effectivement les témoignages quant aux activités
21 criminelles seraient présentés et ça, ça serait assez facile à gérer.
22 Le plus compliqué, en fait, c'était lorsque M. Deronjic a été cité à
23 comparaître, et là nous nous y sommes opposés. Nous n'avons pas réussi à
24 faire valoir nos arguments. Mais voilà. Evidemment tout cela était lié avec
25 le fait que M. Deronjic était sur le point d'être condamné ici. D'autant
26 que le Juge Orie était le Président de la Chambre qui jugeait M. Deronjic.
27 Donc il y avait un vrai débat quant à savoir si M. Deronjic devait entendre
28 sa sentence avant d'être cité à comparaître ou l'inverse. En tout cas,
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1 c'est le Juge Orie qui a remporté la partie.
2 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais une question, Monsieur Stewart.
3 Vous nous dites que vous avez rencontré dans l'ensemble la plupart du temps
4 le Juge Orie. En même temps, vous nous avez dit qu'une requête en
5 suspension formelle ou une requête en retardement du début de l'audience
6 aurait été futile étant donné la position du Juge Orie. Mais vous n'avez
7 pas pensé que présenter cette requête permettrait d'informer les deux
8 autres Juges ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, évidemment j'y ai pensé
10 mais ça n'a rien changé à mon analyse. Malgré tout le respect que je dois
11 aux deux autres Juges, d'autant plus qu'il y a également eu un changement
12 de Juge; M. Harhoff était un agent de la cour extrêmement efficace et qui
13 connaissait bien la maison, et il nous semblait effectivement que le Juge
14 Orie était bien celui qui était aux commandes. Même si ce n'était pas un
15 fait, en tout cas c'était comme ça qu'on le voyait.
16 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci de cette analyse.
17 Monsieur le Juge Guney, vous vouliez poser une question.
18 M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Monsieur Stewart, je voudrais vous
19 poser une question complémentaire à celle du Juge Meron. Puisque vous étiez
20 le conseil principal de la Défense pour M. Krajisnik le 30 juillet 2003 et
21 que vous avez reçu le dossier de façon très désordonnée avec beaucoup de
22 retard de la part de l'avocat précédent, Me Brashich, diriez-vous que vous
23 étiez prêt à entamer les audiences dès le 3 février 2004 ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, d'une certaine
25 façon, non, en toute honnêteté, il nous semblait que le procès n'aurait
26 jamais dû commencer si tôt que ça; hormis ce que j'ai évoqué à propos de M.
27 Deronjic, le fait est que ce n'est pas en février que nous avons eu le plus
28 de problèmes. Hormis le témoin Deronjic, ces premiers témoins dans cette
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1 période de 18 jours d'audience étaient gérables, nous semblait-il, si l'on
2 travaillait dur.
3 Et ainsi la question de savoir s'il fallait continuer de nous battre, faire
4 des requêtes en suspension, tout cela doit être examiné à la lumière du
5 fait que l'offre que nous faisait la Chambre de première instance était
6 assez bien réfléchie, et je ne dis pas ça de façon méprisante, après tout,
7 effectivement, on nous proposait 18 jours d'audience, une certaine marge de
8 manœuvre sur la flexibilité de l'organisation de ces jours d'audience, et
9 ensuite une suspension. Le fait est que M. Treanor a été entendu dans son
10 interrogatoire principal pendant ces premiers jours, je crois qu'on l'a
11 entendu avant la fin de février 2004; mais je n'ai pas eu à procéder au
12 contre-interrogatoire avant le retour après le congé de Pâques, autour du
13 10 ou 11 avril. Evidemment, nous savons tous que le rapport de M. Treanor
14 était extrêmement détaillé, très fouillé, et c'était un vrai défi pour
15 chacun d'entre nous de comprendre ce que c'était. Et c'est moi qui ai
16 procédé au contre-interrogatoire; effectivement avoir ce délai de quelques
17 semaines avant le contre-interrogatoire était extrêmement utile pour nous.
18 Tous ces éléments sont entrés en jeu lorsque nous avons cherché à voir si,
19 étant donné ce que le Juge Orie nous avait dit, il était pertinent ou utile
20 de se confronter à lui plutôt que de poursuivre cette approche de
21 négociation, une négociation qui a duré pendant bien les premiers mois de
22 l'audience.
23 D'ailleurs, il nous semblait que dans cette négociation nous n'avions pas
24 la position de force - lorsque je dis d'ailleurs que c'est le Juge Orie qui
25 faisait tourner la boutique, j'entends par là que c'est bien la Chambre de
26 première instance - il nous semblait bien effectivement que la Chambre de
27 première instance était sous pression d'ailleurs pour voir si oui ou non le
28 procès devait commencer, et cetera.
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1 De façon générale, je crois qu'on peut dire qu'il y avait des pressions qui
2 venaient de New York. C'est peut-être pas très précis comme analyse, mais
3 en tout cas, il nous semble que cette affaire de 2000 à 2003 avait été mal
4 gérée, 2003 et 2004, et c'est pour ça qu'il y avait des pressions.
5 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge Meron.
6 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci.
7 Monsieur Stewart, je crois que vous avez présenté une requête le 22 février
8 2005.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Une requête en suspension jusqu'à août
11 2005. Vous dites que l'avocat en charge du dossier, à savoir vous, n'aviez
12 pas lu plus de "15 % des documents et du dossier."
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je vais dire ça
14 très clairement. Je ne remets pas cela en cause. Mais effectivement nous
15 avons présenté cette requête en suspension en juillet 2004. Donc je crois
16 que vous faites référence, Monsieur le Juge, à la deuxième requête, n'est-
17 ce pas ?
18 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Oui, en effet.
19 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
20 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mais vous nous dites quand même que
21 vous n'aviez pas lu plus de 15 % du dossier, et le 28 février 2005, pendant
22 l'audience, votre co-conseil, Me Loukas disait et se plaignait en citation,
23 je cite, que : "La stratégie n'avait pas été finalisée."
24 Et voici ma question : avez-vous jamais pu réexaminer tous les documents et
25 être tout à fait au point ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, non. Nous n'avons jamais été
27 en mesure de tout lire. Mais je ne pense pas non plus, de façon suggérée,
28 que n'importe quel conseil principal, dans n'importe quelle affaire, lirait
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1 absolument 100 % du dossier. Après tout, on délègue, c'est normal. Puis il
2 faut trier les documents.
3 En ce qui concerne cette Défense et cette stratégie --
4 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc ce n'est pas finalement un vrai
5 problème que vous n'ayez pas tout lu. Ça ne posait pas un problème en terme
6 d'efficacité de la défense.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, non, absolument pas,
8 ce n'est pas ce que je suis en train de dire. Ce serait en dire trop. J'ai
9 eu un entretien, disons, semi-formel - ce n'était pas sur la terrasse mais
10 bon - j'ai eu un entretien avec le Juge Harhoff, alors par M. Harhoff à
11 l'époque. Il me disait - il avait tout à fait raison : "Evidemment, il y a
12 tous ces papiers, mais on sait très bien que 60 % de ces documents, de ces
13 papiers sont inutiles."
14 Et je lui disais : "Mais bien sûr, Fred, je suis tout à fait
15 d'accord. Mais dites-moi, dites-moi déjà quel 60 % de documents ne servent
16 à rien et que je pourrais traiter les 40 % restants ?" Alors, je ne cherche
17 pas assez à vous faire rire mais d'une certaine façon c'était un vrai
18 problème. Evidemment, on peut d'une certaine façon identifier assez
19 rapidement les éléments qui ne vont servir absolument à rien. Mais c'était
20 un problème, Monsieur le Juge, c'est resté un vrai problème. Je ne veux pas
21 dire - comme auraient pu le dire certains hommes politiques - je ne savais
22 pas ce que je ne savais pas.
23 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Et ce que Mme Loukas a dit à propos
24 d'une stratégie de défense inadéquate.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je ne pense pas qu'il faille mettre
26 trop l'accent là-dessus. Les grandes lignes d'une stratégie qui permettait
27 d'identifier ce que l'on cherchait à faire pendant les contre-
28 interrogatoires, un des témoins de l'Accusation était assez évident. Et
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1 quelles que soient les priorités que je m'étais fixées ou que j'aurais pu
2 me fixer, je n'aurais jamais commencé un contre-interrogatoire sans avoir
3 une idée au moins générale de mes objectifs, même si je n'étais pas
4 absolument certain que mes co-conseils et moi-même aurions pu mettre la
5 main sur tous les documents pertinents.
6 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Monsieur Stewart.
7 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bien, Monsieur Krajisnik, poursuivez
8 votre interrogatoire principal.
9 M. KRAJISNIK : [interprétation]
10 Q. Monsieur Stewart, j'aimerais maintenant vous demander de bien
11 vouloir parler avec moi du temps dont a pu disposer l'équipe de la Défense
12 au cours du procès, peu de temps, beaucoup de documents. J'aimerais vous
13 renvoyer à la requête que vous avez déposée le 14 juillet 2004. Dans le
14 paragraphe 14 de ce document, vous dites, en parlant du manque de temps,
15 question d'ailleurs qui vous a été posée par plusieurs Juges de la Chambre
16 d'appel, vous dites donc que vous avez souligné l'existence de ce problème
17 avant même le début du procès.
18 R. Oui. Vous parliez de la première requête, Monsieur Krajisnik,
19 n'est-ce pas, la première requête que nous avons déposée en vue d'obtenir
20 une suspension substantielle, n'est-ce pas ?
21 Q. Je vais citer le texte de cette requête et je vous demanderais de bien
22 vouloir vous prononcer. Deux citations donc. Le 14 juillet 2005, vous avez
23 dit la chose suivante :
24 "Nous sommes certains que les documents qui nous ont été communiqués par
25 l'Accusation sont les éléments relevant de l'article 68 du Règlement
26 dépassent les 500 000 pages. Ce que nous savons c'est qu'il s'agit là d'une
27 quantité considérable de documents que nous n'avons pas été en mesure de
28 l'examiner, encore moins de le lire."
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1 Puis, au paragraphe 15 de la même requête, vous dites ce qui suit :
2 "Nous n'avons pas été en mesure de lire et de tenir compte de manière
3 satisfaisante de tous les éléments de preuve renvoyant aux témoins qui ont
4 déjà fait l'objet de contre-interrogatoire. On nous a souvent présenté trop
5 d'éléments en trop peu de temps. Nous ne serons jamais en mesure d'y
6 parvenir avant la fin de la présentation des éléments à charge et il sera
7 trop tard, à ce moment-là, pour le faire."
8 Alors, j'interromps ma lecture et je vous pose la question : êtes-vous
9 d'accord avec moi pour reconnaître que l'équipe de la Défense, en juillet
10 2004, n'avait pas eu suffisamment de temps pour se préparer au procès ?
11 R. Monsieur Krajisnik, ce qui est dit au paragraphe de la requête que vous
12 citez est tout à fait véridique. Dans mon système, bien sûr, nous, nous
13 présentons des arguments en tant que conseil. Est-ce que nous y croyons,
14 bon, c'est une autre question, bien sûr. Mais lorsque nous disons où nous
15 en sommes dans notre préparation, de notre prise de connaissance des
16 documents, bien entendu, nous faisons part aux juges de la Chambre à
17 laquelle nous nous adressons de notre avis et nous faisons part de notre
18 avis en toute honnêteté, nous disons où nous en sommes. Alors, oui, bien
19 sûr, c'est vrai, Monsieur Krajisnik, nous ne l'aurions pas dit si ça
20 n'avait pas été le cas.
21 Q. Merci. Merci. Alors le 16 juillet 2004, en page 4 478 du compte rendu
22 d'audience, je lis ce qui suit et je reprends vos propos ici :
23 "On ne peut pas tout faire. Lorsque l'on établit ses priorités entre
24 six tâches fondamentales, nous ne pouvons en retenir que deux. Nous sommes
25 parvenus à la conclusion selon laquelle nous ne sommes pas en mesure de
26 défendre M. Krajisnik de manière satisfaisante. Il le sait également. Et
27 nous aussi."
28 Et le même jour, le 16 juillet 2004 toujours, en page 4 485 et 4 486
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1 du compte rendu d'audience, vous ajoutez devant les Juges et à l'égard de
2 la quantité considérable de documents et du manque de temps qui vous est
3 donné pour vous y préparer, vous dites donc :
4 "Je n'aurais pas dû sous-estimer le problème depuis si longtemps et
5 je n'aurais pas dû ignorer le problème comme je l'ai fait parfois. J'aurais
6 dû mettre en garde la Chambre de première instance, avec toute la
7 promptitude requise, j'aurais dû le faire, mais je le fais aujourd'hui. Et
8 je lui dit que nous avons besoin de temps."
9 Voici quelle est ma question : avant cette date, avez-vous mis en
10 garde la Chambre, l'avez-vous prévenue que vous ne disposez pas
11 suffisamment de temps et qu'il y avait une quantité considérable de
12 documents qu'il convenait d'examiner afin de pouvoir me défendre de la
13 meilleure manière possible ?
14 R. A de multiples reprises, Monsieur Krajisnik. Je ne saurais même pas
15 vous dire combien de fois je l'ai fait. Le message, je l'ai exprimé haut et
16 clair pendant des mois, des mois et des mois, à chaque fois que nous avons
17 pu le faire. Bien entendu, à M. Harhoff, et de manière permanente à ce
18 dernier. Et dès que nous avons eu l'occasion de le faire, nous l'avons fait
19 haut et clair, je le répète.
20 Q. Merci beaucoup. Le 29 août 2004, en page 7 668 du compte rendu, vous
21 dites la chose suivante :
22 "Le problème est exacerbé. Nous sommes au point de rupture du côté de
23 la Défense, parce que notre équipe n'a pas été en mesure de faire face,
24 quelles que soient les apparences que nous donnons, nous n'avons pas réussi
25 à gérer ce procès de manière satisfaisante jusqu'à présent."
26 Vous serez d'accord avec moi pour reconnaître qu'en octobre 2004 la
27 situation ne s'était pas améliorée, qu'en octobre 2004 la Défense ne
28 disposait toujours pas de suffisamment de temps pour se préparer au procès
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2 R. Monsieur Krajisnik, je n'essaie pas de me soustraire à vos questions du
3 tout, mais il y a plusieurs choses à dire ici, dans le cadre d'un long
4 procès, qui sont vraiment des tournants véritables, des jalons. J'en vois
5 un, à l'été 2004, qui m'a poussé à faire cette demande, si vous voulez. Ça
6 renvoie à ce mode de négociation dont j'ai parlé plus tôt, négociation
7 s'agissant notamment du calendrier du procès, et cetera. Puis, ils ont un
8 revirement, un changement de cap.
9 Nous avons eu une longue discussion avec le Juge Orie, et avec
10 l'Accusation d'ailleurs qui était représentée ici dans l'une de ces
11 réunions 65 ter. Je ne sais plus si c'était 65 ter, mais en tout cas,
12 c'était une réunion relativement informelle. L'idée, c'était de se mettre
13 d'accord sur un nombre important de faits. Le Juge Orie était disposé à ce
14 moment-là à nous donner des semaines, voire peut-être même plusieurs mois
15 en échange d'un engagement de notre part en vue de nous mettre d'accord sur
16 un nombre important de faits avec l'Accusation.
17 Alors, je vous parlais il y a un instant de ce mode de négociation.
18 C'est l'expression qui convient, en l'occurrence, parce que le Juge Orie
19 nous disait souvent ceci en réunion : "Bien, si vous parvenez à ceci et à
20 cela" - et c'est vraiment le message qu'il essayait de faire passer haut et
21 clair - "si nous vous donnons ceci et cela, bien, ceci va me coûter ou va
22 nous coûter tant de jours ou tant de semaines." Bon. C'est vrai que nous
23 avons eu des échanges parfois un peu musclés - et je le dis avec tout le
24 respect qui lui est dû - mais parfois, je lui disais : "Mais on dirait un
25 banquier," ce qui était moins une insulte à l'époque que ça ne pourrait
26 l'être aujourd'hui, et c'est ce que je lui ai dit et c'était exactement ce
27 que je ressentais. Bien sûr, je le respecte en tant -- je suis moi-même
28 parfois amené à siéger en tant que juge, et même si je n'ai pas à gérer ce
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1 genre de difficulté, en général. Bon. Bien sûr, la préoccupation première
2 d'un juge, c'est de faire en sorte que les choses avancent. Alors je
3 comprenais très bien en l'occurrence vous n'avez pas de ressources
4 inépuisables, donc c'est ce qu'on essaie un peu, ce genre de marché auquel
5 on essaie de parvenir.
6 Mais en très bref, nous avons sué sang et eau pour essayer de nous
7 mettre d'accord sur un certain nombre de faits. M. Mano vous en aura sans
8 doute parlé. Nous avons sué sang et eau, je l'ai dit, pour essayer de nous
9 mettre d'accord, et j'ai dû vraiment pousser une équipe par ailleurs très
10 réticente. Mais à un moment donné, en fin de semaine, j'ai fait le bilan,
11 j'ai réfléchi à notre position, je savais que l'Accusation disposait de
12 ressources bien plus importantes que les nôtres et avait une connaissance
13 bien plus approfondie de ce dont nous parlions. Et j'ai l'impression que
14 nous dérivions, en quelque sorte, dans le domaine des faits, et que --
15 bien, il n'était pas sûr véritablement d'accepter certaines choses, et je
16 suis parvenu à la conclusion un week-end que ceci, bien, n'allait pas dans
17 notre sens, que ceci n'était pas dans l'intérêt de M. Krajisnik, que cet
18 exercice n'était pas dans l'intérêt de M. Krajisnik. J'en ai informé le
19 Juge Orie, qui était absolument furieux. C'était très clair.
20 Par la suite, j'ai eu plusieurs discussions avec le Juge Harhoff, et
21 nous sommes passés dans un autre mode, le mode procès proprement dit. La
22 suspension a pris fin et j'ai dit au Juge Harhoff que j'avais le sentiment
23 que nous étions punis, parce que nous n'avions pas réussi à nous mettre
24 d'accord sur un certain nombre de faits. Le Juge Harhoff a été d'accord
25 avec cette opinion-là. Alors, vous, Monsieur Krajisnik, avez été puni, tout
26 comme moi en tant que votre conseil. Ça a été difficile pour nous tous,
27 mais je crois que nous avons travaillé de manière consciencieuse dans le
28 cadre de ce procès. Ceci, bien sûr, a eu un effet fort sur la dynamique des
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1 choses. Je n'ai pas l'habitude à ce qu'une Chambre ne me fasse pas
2 confiance.
3 Dans les 30 années de pratique que j'ai derrière moi, c'est quelque
4 chose qui ne m'arrive pas souvent. D'habitude, on me comprend bien, et
5 lorsque je dis que j'ai fait de mon mieux, et en l'occurrence, j'ai fait de
6 mon mieux, mais le Juge Orie ne m'a pas cru. Nous sommes donc passés dans
7 ce mode procès. Nous avons abandonné le mode de négociation que nous avions
8 mis en branle. Nous avons déposé une demande de suspension qui ne nous a
9 pas menés bien loin d'ailleurs. Et c'est à ce moment-là que l'équipe a
10 commencé à s'épuiser. Lorsque nous nous sommes retrouvés après la fin de la
11 suspension, je dois vous dire que cette équipe n'avait plus les ressources,
12 les capacités et l'énergie pour faire face au calendrier. Je vais conclure
13 ma réponse ici. Paradoxalement, nous avons été sauvés par le départ du Juge
14 de la Chambre qui nous a quittés en décembre, le Juge El Mahdi.
15 C'est son départ qui nous a sauvés, physiquement, de l'effondrement.
16 Le Juge El Mahdi qui a été remplacé par le Juge Hanoteau. Le Juge Hanoteau,
17 bien sûr, a certifié qu'il avait pris connaissance de tous les documents,
18 et la date de reprise des travaux nous a été annoncée avant même que nous
19 sachions quel Juge allait remplacer le Juge El Mahdi, ce qui nous a
20 d'ailleurs un peu sidérés, mais le --
21 Q. Monsieur Stewart, avec tout le respect que je vous dois, puisque nous
22 n'avons pas suffisamment de temps, je vais vous remercier de votre réponse
23 et je vais vous demander de bien vouloir répondre à la question suivante
24 sur le même point, d'ailleurs.
25 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Le Juge Guney aimerait poser une
26 question sur ce point précis.
27 M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Monsieur Stewart, l'appelant et l'ami
28 de la Cour disent tous deux qu'en tant qu'ex-conseil, vous n'avez pas reçu
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1 l'assistance nécessaire au cours de la phase préalable au procès, ainsi que
2 pendant le procès, et que ceci a entraîné une situation dans laquelle
3 l'appelant n'a pas bénéficié d'un procès équitable, ou bien subsidiairement
4 ceci a entraîné une situation dans laquelle le jugement rendu ne saurait
5 être considéré comme fiable.
6 A la lumière de la situation, s'agissant de l'assistance dont vous avez
7 bénéficié, comment la décririez-vous ? Diriez-vous que le traitement qui
8 vous a été réservé était exceptionnel, spécial, ordinaire, juste ou
9 supérieur à la moyenne ? Si possible, pourriez-vous choisir l'un de ces
10 adjectifs pour décrire l'assistance dont vous avez bénéficié.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je m'interroge sur votre
12 question. Me demandez-vous de qualifier le traitement qui nous a été
13 réservé par la Chambre de première instance à la lumière du droit à un
14 procès équitable qui était le nôtre, ou bien êtes-vous en train de me
15 demander d'évaluer mon efficacité en tant que conseil de la Défense pour M.
16 Krajisnik, ou les deux ? Je suis désolé, je n'ai pas très bien compris la
17 question. Question, par ailleurs, importante, à laquelle j'aimerais pouvoir
18 répondre, mais je souhaite véritablement bien la comprendre.
19 M. LE JUGE GUNEY : Peut-être les deux à la fois.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur une échelle -- alors, ce que la Chambre de
21 première instance a offert à M. Krajisnik en ce qui concerne l'équité de
22 son procès sur une échelle de 1 à 10, avec le 1 représentant une iniquité
23 totale, une parodie de procès, si vous voulez, le verdict préparé à
24 l'avance, à 10, qui correspond à un niveau de perfection absolue, une
25 équité immaculée, 3 ou 4.
26 Pour la seconde question, c'est à d'autres de répondre à cette
27 question. J'ai fait de mon mieux, je crois, et je crois que d'un point de
28 vue professionnel, j'ai fait de mon mieux dans une situation qui s'est
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1 avérée beaucoup plus difficile que ce que j'aurais pu imaginer, mais là
2 encore, je ne suis pas le juge.
3 M. LE JUGE GUNEY : [interprétation] Merci, Monsieur Stewart.
4 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Krajisnik.
5 M. KRAJISNIK : [interprétation]
6 Q. J'aimerais revenir avec vous sur certains des arguments que vous avez
7 présentés et qui sont consignés au compte rendu. Je vous renvoie au compte
8 rendu d'audience du 26 novembre 2004, pages 8 907 à 8 910. Vous dites que
9 vous êtes insatisfait et que vous ressentez même de la honte, parce que
10 vous n'êtes pas en mesure de parcourir tous les documents.
11 Le 28 février 2005, aux pages 9 598, 9 599 du compte rendu, vous
12 parlez de centaines de documents totalement mal classés, désorganisés, et
13 vous dites qu'il y a des dizaines et des dizaines et des dizaines et des
14 dizaines de pages de documents que vous n'avez pas lues. Et vous ne savez
15 même pas de quoi elles parlent. Si j'ouvre un CD, dites-vous, je vois des
16 milliers de dossiers, je ne m'y retrouve pas. C'est absolument impossible.
17 La situation est impossible.
18 Le 28 septembre 2005, en page 17 167 vous dites que vous avez "essayé de
19 faire le minimum."
20 Et vous rajoutez, le 27 octobre 2005, aux pages 17 883 et
21 17 884, vous dites ce qui suit devant les Juges de la Chambre :
22 "Je n'ai cessé de faire référence à ces questions, et la Chambre de
23 première instance n'en a pas tenu compte comme si ceci ne faisait pas
24 partie de la réalité des choses. Vous ne vous intéressez pas aux éléments
25 qui ont une incidence sur la Défense et ça a été la position que vous avez
26 défendue pendant tout le procès. De ce fait" --
27 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Veuillez poser la question que vous
28 souhaitez poser au témoin.
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1 M. KRAJISNIK : [interprétation]
2 Q. Voici quelle est ma question : au cours des années 2004 et 2005, avez-
3 vous disposé de suffisamment de temps pour préparer ma défense comme il
4 convenait ?
5 R. Nous ne cessions de cavaler pour rester immobiles en quelque sorte,
6 pour ne pas reculer. C'est ça --
7 Q. Quelle serait votre analyse de vos méthodes de
8 préparation ? Avez-vous été en mesure de vous préparer convenablement,
9 parce qu'à plus d'une reprise vous avez dit aux Juges de la Chambre de
10 première instance que vous ne disposiez pas de temps suffisant, que les
11 documents auxquels vous deviez vous intéresser étaient volumineux, et que
12 vous ne pouvez pas vous préparer comme il le fallait.
13 R. Oui, j'ai fait ce que tout conseil compétent aurait fait, et je crois
14 que Mme Loukas aurait eu la même démarche que moi. Vous essayez toujours,
15 bien sûr, de vous concentrer sur ce que vous souhaitez faire. Vous essayez
16 de trouver les éléments dont vous avez besoin. Parfois vous disposez d'un
17 temps extrêmement long. Vous êtes en mesure de prendre connaissance de tous
18 les documents, pourquoi pas; mais dans de très nombreux cas, Monsieur
19 Krajisnik, soyons tout à fait honnêtes, nous n'avions pas de handicap
20 véritable par rapport à tous les témoins, parfois nos objectifs étaient
21 extrêmement simples. Nous essayions de prouver qu'en fait tel ou tel témoin
22 n'avait pas véritablement de connaissance directe de telle ou telle chose,
23 et il était possible de l'établir sans faire une référence à une quantité
24 considérable de documents, le problème c'est que vous voulez simplement
25 pouvoir être convaincu que votre équipe a suffisamment de temps et de
26 ressources pour au moins examiner les documents et pour veiller à ce que
27 vous ne passiez à côté de rien; et c'est ce que nous n'avons pas été en
28 mesure de faire à aucun moment, parce que nous n'avions ni le temps
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1 nécessaire ni les ressources suffisantes pour traiter tous ces documents,
2 encore une fois, extrêmement volumineux.
3 Q. Merci beaucoup. Voici que vous soulevez une question très importante,
4 c'est le lien entre Krajisnik et les auteurs directs des crimes. Je vais
5 vous donner lecture de ce qu'a dit Mme Loukas à la Chambre de première
6 instance le 28 février 2005. C'est en page 9 577. Elle dit :
7 "Le fait que nous n'ayons pas lu et analysé en profondeur tous les
8 documents potentiellement pertinents signifie que notre contre-
9 interrogatoire de ces témoins au cours de la présentation des éléments à
10 charge a été entravé, voire même empêché."
11 Ce sont là des propos tenus en public par Me Loukas devant les Juges de la
12 Chambre. Etes-vous d'accord avec elle ?
13 R. Oui, même si globalement, Monsieur Krajisnik, même si ce n'est pas
14 véritablement en lien direct avec les auteurs directs des crimes, les
15 individus à l'origine de ces crimes. Ce n'était pas là véritablement que
16 résidait cette difficulté fondamentale. Je ne pense pas que nous violons
17 quelque secret que ce soit ici, ce n'était pas là la clé du problème.
18 Q. Monsieur Stewart, je vous ai demandé simplement si vous partagiez
19 l'opinion de Mme Loukas, je vous parle, moi, de témoins qui ont fait
20 l'objet d'un interrogatoire ici même et qui ont évoqué les liens entre
21 Krajisnik et les auteurs des crimes. Etes-vous d'accord avec son analyse ?
22 Oui, non ?
23 R. Monsieur Krajisnik, je crois que la chose est claire dans la mesure où
24 ce que Mme Loukas dit ici s'applique aux témoins de cette catégorie. Je ne
25 suis pas en désaccord avec elle globalement. Je dis simplement que le
26 problème ne renvoie pas tant à cette question des auteurs, des individus à
27 l'origine de ces crimes sur le terrain. C'est vrai, ce que dit Mme Loukas
28 est vrai, mais ce n'était pas le problème fondamental pour nous.
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1 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Krajisnik, je dois vous
2 prévenir que vous avez dépassé déjà le temps qui vous était imparti depuis
3 cinq minutes. J'ai décidé de vous laisser poursuivre du fait des nombreuses
4 questions qui ont été posées par les Juges, mais je vous demanderais
5 maintenant de bien vouloir conclure en cinq minutes.
6 M. KRAJISNIK : [interprétation]
7 Q. Je vais vous poser une question qui renvoie au compte rendu du 23
8 février 2006. Aux pages 2 853 et 2 854. Il y est question des témoins
9 experts. Vous avez dit :
10 "Nous avons manqué considérablement de temps. Nous n'avons pas disposé du
11 temps dont nous avions besoin pour faire un travail qui par ailleurs exige
12 des heures et des heures d'attention, et nous sommes parvenus à une
13 décision radicale qui consiste à mettre un terme à toute enquête ultérieure
14 en ce qui concerne les témoins experts. Nous avons donc dû les retirer de
15 la liste. C'est tout à fait déplorable. Messieurs les Juges, ils ont été
16 délibérément retirés de la liste, parce que pour être tout à fait honnête
17 nous n'avons pas eu le temps de nous en occuper."
18 Etes-vous satisfait de la décision que vous avez dû prendre à ce moment-là
19 et du fait que vous ayez décidé de ne pas citer d'experts.
20 R. Monsieur Krajisnik, si cette réponse était interprétée comme signifiant
21 qu'à un moment donné ou à un autre, nous n'avons pas examiné avec tout le
22 sérieux requis la question des témoins experts, c'est une mauvaise
23 interprétation. Mme Loukas, sous ma houlette et à mes côtés, en réalité a
24 préparé un mémo complet sur les témoins experts qui a traversé, si je puis
25 dire, trois étapes. La troisième version ayant été une vraie amélioration
26 par rapport aux deux premières; et elle-même et moi-même avons débattu de
27 chaque élément de la question par rapport, notamment, aux témoins experts
28 présentés par l'Accusation.
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1 Et nous sommes parvenus à une conclusion provisoire raisonnable, à
2 savoir que finalement l'utilité véritable de témoins experts pour vous,
3 Monsieur Krajisnik, était très limitée. C'était l'opinion que j'avais à
4 l'époque et je m'y tiens aujourd'hui en réalité. Mme Loukas ne se sentait
5 pas très à l'aise à l'idée d'approfondir le travail eu égard à un mémo qui
6 avait déjà été préparé. Je dois dire que les versions 1 et 2 n'étaient pas
7 très satisfaisantes; mais la version 3 était un bon travail, bien ficelé.
8 Nous aurions pu, dans l'idéal, y consacrer plus de temps, mais sachant les
9 avantages que vous alliez en tirer, nous nous sommes dit que c'était peut-
10 être là un domaine que nous pouvions, disons, laisser de côté parmi toutes
11 les priorités qui étaient les nôtres, mais nous avons dûment réfléchi à
12 cette question.
13 L'APPELANT : [interprétation] Pourrais-je poser deux brèves questions
14 encore au témoin, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Si elles sont très brèves, oui.
16 M. KRAJISNIK : [interprétation]
17 Q. La première des deux questions, Monsieur Stewart, est la suivante : il
18 y avait des enquêteurs sur place à Pale, et à la
19 page 4 476 du transcript il est indiqué que vous faites référence à la
20 gestion dont l'équipe à Pale faisait l'objet, l'organisation de leur
21 travail. Vous nous dites qu'il n'y avait pas vraiment de moyen de les
22 diriger dans leur enquête. Si vous demandiez des rapports, il n'y avait pas
23 assez de temps pour étudier ces rapports.
24 En quelques mots, est-ce que vous aviez raison et est-ce que vous vous
25 tenez à cette analyse ? Répondez simplement par oui ou par non, si vous le
26 pouvez.
27 R. Oui.
28 Q. Dernière question. Dans le jugement, il est indiqué -- il y a, plus
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1 exactement, 555 notes de bas de page qui font référence aux experts de
2 l'Accusation. L'Accusation en a appelé 22.
3 Pourriez-vous expliquer à Mme et MM. les Juges comment il aurait pu être
4 utile de citer à comparaître des experts qui auraient pu être utiles pour
5 rédiger au mieux le jugement ? Après tout, sur les 1 000 ou 2 000 notes de
6 bas de page, il y en avait 550 qui faisaient référence à des experts.
7 R. Monsieur Krajisnik, je le répète, je ne pense pas que des témoins
8 experts auraient fait une grande différence pour soutenir votre position.
9 Q. Et une question finale : pourriez-vous avoir la gentillesse de
10 dire à Mme et à MM. les Juges si vous, en tant que conseil, pourriez nous
11 dire ce que sont les procès-verbaux de la présidence ? Est-ce que c'est un
12 document juridique ? Est-ce que ce ne sont que des notes de la présidence ?
13 Est-ce que vous pouvez nous dire un peu plus ce que c'est.
14 M. KREMER : [interprétation] Ce n'est pas une vraie question.
15 L'APPELANT : [interprétation] Je suis désolé. Je n'ai pas entendu ce que
16 disait le Procureur.
17 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Pouvez-vous répéter ?
18 M. KREMER : [interprétation] Je m'oppose à cette question, c'est une
19 question qui demande un avis de ce témoin, alors que la Chambre de première
20 instance a réglé cette affaire et a donné son avis. Cela ne relève pas du
21 sujet que nous traitons ici aujourd'hui.
22 L'APPELANT : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, si vous me le
23 permettez, je voudrais vous dire ce que je cherche. Je souhaiterais
24 entendre la réponse de M. Stewart pour qu'il nous dise comment il a traité
25 ces procès-verbaux pendant le procès.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je dois répondre à cette question ?
27 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] C'est une question tout à fait
28 différente.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas bien en quoi la question est
2 différente. Est-ce qu'on pourrait me dire très clairement quelle est cette
3 nouvelle mouture de la question ?
4 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Reposez-nous cette question, la
5 nouvelle version de la question.
6 M. KRAJISNIK : [interprétation]
7 Q. Monsieur Stewart, vous aviez entre vos mains des comptes rendus de
8 sessions à la présidence. Pouvez-vous me dire, en tant que juriste, en tant
9 qu'avocat, quelle était votre attitude, votre rapport à ces procès-verbaux
10 ? Qu'étaient-ils ? Etaient-ils des documents juridiques, des notes ou
11 d'autres documents ? Comment les traitiez-vous pendant le courant de
12 l'audience ?
13 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Oui, c'est toujours la même question.
14 Elle est posée différemment, mais c'est toujours la même. Non, voilà. Vous
15 ne pouvez pas poser cette question. Le témoin ne répondra pas à cette
16 question.
17 Monsieur Krajisnik, vous avez pris cinq minutes de plus que ce que je vous
18 avais accordé, je crois qu'il serait temps de conclure cet interrogatoire
19 principal.
20 L'APPELANT : [interprétation] Ai-je la permission de reformuler cette
21 question ou dois-je m'arrêter ?
22 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je crois qu'il faut terminer. Vous avez
23 reformulé la question, en fait, c'était la même, il est temps de s'arrêter
24 là.
25 L'APPELANT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Merci,
26 Monsieur Stewart.
27 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je crois que nous en arrivons à la fin
28 de l'interrogatoire principal. Nous allons prendre une pause jusqu'à 16
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1 heures 30, nous reprendrons avec la parole qui sera donnée à l'Amicus
2 Curiae, s'il veut prendre la parole.
3 La séance est suspendue.
4 --- L'audience est suspendue à 16 heures 06.
5 --- L'audience est reprise à 16 heures 30.
6 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous reprenons. Je comprends que le
7 Juge Shahabuddeen voudrait poser une question. Monsieur le Juge, vous avez
8 la parole.
9 Oui, évidemment, il faut attendre que le témoin soit parmi nous. Je ne
10 l'avais pas remarqué. Toutes mes excuses.
11 [Le témoin vient à la barre]
12 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur le Juge.
13 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Monsieur Stewart, je dois dire
14 que la façon dont vous avez porté témoignage m'a grandement impressionné.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
16 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Je vous informe que nous aurons
17 sans doute à voir comment la Chambre de première instance, sous la
18 présidence du Juge Orie, s'est comportée, mais votre témoignage n'a pas
19 pour objectif de répondre à une quelconque accusation contre lui. Je
20 comprends que votre témoignage doit répondre à la question suivante : avez-
21 vous, en tant qu'avocat, fourni une aide efficace à l'appelant; est-ce bien
22 cela ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en suis pas absolument certain, Monsieur
24 le Juge. Je dois dire que mon témoignage a pour but de répondre aux
25 questions qu'on me pose. J'avais cru comprendre que les questions de M.
26 Krajisnik tournaient autour de l'équité du jugement et de la Chambre de
27 première instance. Je ne sais pas quelles sont les questions et à quoi
28 elles ont trait, mais moi, j'essaie d'y répondre. En tout cas, il n'est pas
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1 à moi de porter des accusations contre les uns ou les autres. Vous verrez,
2 Madame, Messieurs les Juges, que les pièces écrites, et mon témoignage les
3 a confirmées, qu'effectivement certains éléments, certaines modalités de
4 traitement et de gestion de cette affaire m'ont porté à être assez critique
5 de la façon dont ces éléments ont été traités en tant qu'ancien conseil de
6 M. Krajisnik.
7 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Vous comprendrez bien que cette
8 Chambre d'appel cherche à voir si votre témoignage aide effectivement la
9 Chambre d'appel à juger de l'efficacité de votre conseil à M. Krajisnik.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends bien que c'est un des sujets
11 essentiels de votre travail. Je le comprends, Madame, Messieurs les Juges.
12 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] C'est l'élément essentiel de
13 votre témoignage.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui mais, évidemment, comme j'allais le dire,
15 Monsieur le Juge, ce n'est pas à moi de dire ce qui est le plus important.
16 C'est à vous de le faire.
17 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] En effet. Vous nous avez dit que
18 vous avez dû gérer des dizaines et des dizaines et des dizaines et des
19 dizaines de milliers de pages et de documents. Ailleurs, vous nous avez
20 parlé de 500 000 pages, peut-être.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai cru entendre ce matin,
22 effectivement -- cet après-midi, pardon.
23 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Oui. Je me félicite de ce que
24 vous avez effectivement indiqué, que vous deviez procéder à une évaluation
25 intelligente de cette affaire, que vous deviez déléguer, là où il vous
26 semblait que c'était utile, certaines missions à certains membres de votre
27 équipe.
28 Je vous rappelle incidemment que le Tribunal vous a alloué des sommes
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1 de façon à vous rémunérer, rémunérer le co-conseil et quelques
2 collaborateurs. Combien ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Combien en somme ou en nombre de
4 collaborateurs ?
5 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Combien de
6 personnes ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Au début de l'affaire, autant que je me
8 souvienne, il y avait moi, Chris Luka [comme interprété] en tant que co-
9 conseil, Tatjana Cmeric qui était le commis aux affaires, Lucy Robb, une
10 jeune fille qui venait d'Australie et qui était extrêmement intelligente,
11 qui nous venait comme conseiller juridique. Il me semble que nous avions
12 peut-être encore un conseiller juridique, puis un peu plus tard à l'été
13 quelqu'un d'autre. Je crois qu'effectivement on en était à peu près à cette
14 taille-là. J'imagine qu'au greffe vous trouverez les éléments différents.
15 Mais en tout cas, il y avait une équipe de trois; moi, Me Loukas et Me
16 Cmeric, puis nous avions un ou deux collaborateurs juristes.
17 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Oui, j'entends bien. Avec cette
18 équipe vous avez réussi à gérer l'affaire ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je vous l'ai dit, Monsieur le Juge,
20 c'était à peine faisable. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous courions
21 pour ne pas nous effondrer. C'était exactement ça.
22 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Hm-hm.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne le financement, c'est vrai
24 que c'était un peu compliqué. Le greffe - et je suis sûr que Madame,
25 Messieurs les Juges, vous le savez - le greffe accorde un budget
26 prédéterminé pour notre affaire puisque c'était une catégorie 3.
27 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] C'est la catégorie la plus
28 élevée, n'est-ce pas ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais je crois qu'effectivement, même
2 parmi les autres affaires de catégorie 3, c'était une affaire d'une grande
3 importance, mais le greffe nous a alloué une somme prédéterminée, puis ils
4 font un calcul de ce que M. Krajisnik doit payer de lui-même. Le greffe
5 doit compléter cette somme seulement. Nous nous sommes entretenus avec M.
6 Krajisnik et nous nous sommes tenus à cette somme jusqu'à ce qu'à la toute
7 fin du procès. Le greffe nous accorde des sommes supplémentaires.
8 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Très bien. Il me semble, dirais-
9 je, c'est ce que je comprends de ce que vous nous dites, que la Chambre de
10 première instance n'a pas siégé tous les jours de la semaine, peut-être
11 seulement trois jours par semaine, puis en même temps la Chambre vous a
12 accordé quelques suspensions, si je comprends. C'est une façon de faire qui
13 vous a ou pas permis de gérer l'affaire ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'était pas tout à fait ça. Evidemment,
15 Monsieur le Juge, vous pourrez trouver dans les comptes rendus d'audience
16 les jours d'audience.
17 Je crois que les premiers mois du procès, jusqu'au mois de juillet,
18 effectivement il y avait des trous dans le programme, si j'ose dire. Il y a
19 eu une première phase, puis nous avons repris en avril. Il y a eu une
20 suspension au mois de mai. Je ne sais plus trop pourquoi. Il y avait
21 l'exercice sur les faits reconnus qui n'a pas abouti. Mais à la fin de
22 l'automne, lorsque nous avons repris, même si ça dépendait évidemment de la
23 disponibilité des témoins, je crois que le principe était de dire
24 qu'effectivement les audiences auraient lieu cinq fois la semaine.
25 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Est-ce que réellement il y a eu
26 des audiences tous les jours de la semaine ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas, Monsieur le Juge. En tout cas,
28 j'en ai eu l'impression. L'affaire dans laquelle je suis pour l'instant est
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1 gérée de façon à avoir un jour de repos toutes les semaines, c'était vrai.
2 Mais lorsque j'ai repris l'affaire Krajisnik, effectivement on m'avait dit
3 qu'il y aurait un jour de repos par semaine ou une semaine par mois. Mais
4 en fait ce n'était pas le cas. Lorsque réellement nous nous sommes engagés
5 dans notre rythme de croisière après l'été 2004, le principe de base était
6 de dire que c'était cinq jours par semaine, mais il n'y avait pas de jour
7 de suspension de prévu. Mais évidemment, Madame, Messieurs les Juges, vous
8 savez fort bien comment ça se passe.
9 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Bien. Passons à autre chose. Le
10 28 février 2005, la Chambre a exposé ses motifs quant à la suspension de
11 six mois. M. Krajisnik a dit à la Chambre à ce moment-là, et je cite :
12 "Je dois dire que quoi que mes conseils aient pu dire aujourd'hui dans ce
13 prétoire, je le reprends à mon compte. Je n'ai rien à rajouter quant aux
14 services offerts par mon conseil. Ils sont tous deux d'excellents
15 juristes."
16 Vous souvenez-vous avoir entendu ces mots ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne savais pas que c'était le 28
18 février, mais je me souviens parfaitement d'avoir entendu M. Krajisnik à
19 plusieurs reprises dire des choses de ce type, nous offrir quelques
20 compliments.
21 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Vous souvenez-vous que le 18
22 août 2005, la Chambre de première instance a motivé sa décision orale sur
23 la représentation par lui-même de l'accusé ? Au paragraphe 35, il est
24 indiqué, et je cite :
25 "L'équipe de la Défense," y compris vous donc, "ne fait pas preuve d'un
26 disfonctionnement existentiel ou d'une rupture dans la relation entre
27 client et ses avocats. Au contraire. L'équipe de la Défense actuelle est
28 compétente, dévouée à son travail, fonctionne et travaille en bonne
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1 intelligence avec l'accusé. Il n'est pas dans l'intérêt général de
2 démanteler une telle équipe."
3 C'est ce que disait la Chambre de première instance en rejetant la demande
4 de l'accusé de se représenter par lui-même.
5 Vous souvenez-vous de cela ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'en souviens dans l'ensemble, Monsieur le
7 Juge.
8 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Est-ce que cela reflète les
9 faits, effectivement ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'ensemble, oui, sauf à dire
11 qu'évidemment faire preuve de "disfonctionnement," c'est peut-être un peu
12 surfait. Mais il est vrai que la pression sous laquelle nous nous trouvions
13 à cause de cette affaire, évidemment il y avait des difficultés entre nous,
14 peut-être plus que la Chambre ne pouvait s'en douter.
15 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Merci, Monsieur Stewart.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
17 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Madame le Juge Vaz.
18 Mme LE JUGE VAZ : Je vous remercie, Monsieur le Président.
19 Maître Stewart, je voudrais vous poser une petite question. Tout à l'heure,
20 vous avez fait part largement des difficultés rencontrées quant aux
21 ressources allouées et au temps insuffisant dont vous avez bénéficié.
22 Cependant, vous avez ajouté que vous avez été sauvé - si c'est bien le
23 terme que vous avez employé - par le départ du Juge El Mahdi, pour que le
24 Juge Hanoteau, qui a été désigné pour le remplacer, s'imprègne du dossier.
25 Doit-on considérer que vous avez alors pu combler le déficit de temps
26 dont vous nous avez parlé, et qu'à partir de ce moment-là vous avez été
27 plus à l'aise pour défendre votre client, M. Krajisnik ? Merci.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était effectivement utile, Madame le Juge,
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1 d'avoir ce temps. Ce temps a été utilisé à bon escient, mais je ne crois
2 pas que nous puissions dire que cela nous a permis de compenser l'entièreté
3 du déficit, si j'ose dire.
4 Mme LE JUGE VAZ : L'entièreté ? L'entièreté. Pouvez-vous nous donner au
5 moins une évaluation, très rapidement, s'il vous plaît.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Le Juge El Mahdi a quitté, je crois, l'affaire
7 le 14 décembre, ou à peu de jours près. Donc nous avons eu deux mois et
8 demi à notre disposition. Me Loukas, si j'ai bonne mémoire, est partie
9 pendant un mois en Australie, semble-t-il. C'était normal, et il fallait
10 qu'elle y aille. J'étais tout à fait d'accord avec ça, je l'ai soutenue à y
11 aller. Elle y est allée et n'a pas travaillé sur cette affaire. Ensuite, il
12 y a eu la suspension, d'ailleurs je crois que j'ai travaillé en partie
13 pendant ces vacances judiciaires. Donc lorsque nous sommes revenus en
14 janvier, il ne nous restait que six semaines. Je ne crois pas que nous
15 ayons réellement pu faire beaucoup de rattrapage pendant les vacances
16 judiciaires, ensuite, il n'y avait que six semaines.
17 Madame le Juge, je ne veux pas ne pas vous répondre, mais il ne
18 restait que six semaines, en fait.
19 Mme LE JUGE VAZ : Merci. Je vous remercie, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Juge Meron, vous avez la parole.
21 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Stewart, vous nous avez parlé
22 de la tactique ou de la stratégie de la Chambre pour que vous puissiez
23 avoir des suspensions de séance assez longues qui vous permettraient de
24 rattraper votre travail et de procéder à la lecture de ces documents. Avez-
25 vous eu, à un moment quelconque, l'impression d'avoir rattrapé votre
26 travail et d'avoir une maîtrise assez bonne de tout ce dossier ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Vous dites que j'ai parlé de la tactique
28 ou de la stratégie du Tribunal permettant des suspensions, en fait, je ne
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1 fais que reconnaître qu'à partir du 4 février, disons, et jusqu'en juin,
2 jusqu'à l'exercice d'acceptation des faits, effectivement, il n'y a pas eu
3 tant de jours d'audience que de jours disponibles. Il y avait un certain
4 degré de flexibilité à ce moment-là, mais ultérieurement, ce n'était plus
5 le cas.
6 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc vous n'avez jamais été vraiment à
7 l'aise avec ce dossier, ou en tout cas, pas autant que vous auriez voulu
8 l'être en tant que professionnel, n'est-ce pas ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ce qui est certain, c'est
10 qu'à la fin des arguments de l'Accusation, nous n'étions jamais tout à fait
11 à l'aise pendant la phase du procès qui relevait de l'Accusation.
12 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Très bien. Merci, Monsieur Stewart. Je
13 crois tout à l'heure qu'en répondant au Juge Guney, vous avez noté l'équité
14 de la Chambre en lui donnant une note de 3 ou 4.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
16 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous indiquer
17 quelque chose que vous n'avez pas pu faire, parce que vous n'avez pas eu le
18 temps et qui aurait pu avoir une incidence négative sur l'affaire Krajisnik
19 ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je le dis depuis le début en détail, en
21 général, lorsque nous procédions aux contre-interrogatoires des témoins de
22 l'Accusation, nous n'étions jamais tout à fait convaincus d'avoir pu
23 examiner tous les documents qui auraient pu être utiles. Quant à savoir -
24 et ce serait ça la deuxième question - à quels documents nous faisons
25 référence et ce qui aurait pu sortir de ces documents, c'est en fait un
26 exercice en spéculation, c'est justement ça que je ne sais pas.
27 Et si vous le permettez, je me souviens que j'ai parlé de cet
28 exercice de 60 % pour les contre-interrogatoires accordés par la Chambre.
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1 Je l'ai dit à plusieurs reprises, je l'ai fait savoir, je trouvais que
2 cette règle était appliquée de façon trop rigide. On passait son temps à se
3 battre. Le Juge Orie passait son temps à faire référence à cette règle des
4 60 %, et je lui disais : "Mais ce n'est qu'une recommandation" et il
5 répondait : "Oui." Et en même temps, il faisait quand même référence à une
6 règle. D'une certaine façon, je passais mon temps à essayer de faire valoir
7 notre position ou à l'annoncer. Mais c'est vrai que dans l'ensemble,
8 c'était appliqué comme une règle, et je crois que si l'on regarde le compte
9 rendu d'audience, il doit y avoir plusieurs occasions où je fais référence
10 au fait que j'aurais voulu poser des questions supplémentaires pendant le
11 contre-interrogatoire et que nous n'avions pas encore atteint les 60 %.
12 Mais ça, c'est un élément particulier. Mais effectivement, je ne sais pas
13 s'il y avait des points de contre-interrogatoire particuliers, mais ce qui
14 est certain, c'est que cette règle était appliquée de façon trop rigide.
15 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci.
16 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Le Juge Shahabuddeen, s'il vous plaît.
17 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Le fait que l'on vous interrompe
18 pendant les contre-interrogatoires n'a pas grand-chose à voir, me semble-t-
19 il, avec la façon de savoir si vous avez eu du temps pour gérer le dossier.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, en effet, Monsieur le Juge. J'essayais de
21 donner deux exemples différents au Juge Meron.
22 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Oui, très bien. Vous avez dit
23 tout à l'heure qu'il y avait des dizaines et des dizaines et des dizaines
24 de milliers de pages. Je vous pose la question
25 suivante : si vous aviez dû, par vous-même, lire chacune de ces pages,
26 passer un peu de temps à examiner les illustrations qui les accompagnaient,
27 seriez-vous en mesure aujourd'hui même de commencer le procès ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, vous avez anticipé ma
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1 réponse. Evidemment je serais encore en train de tout lire en ce moment
2 même.
3 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Merci.
4 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Merci. Avant de donner la
5 parole à l'Amicus Curiae, je voulais vérifier un point. Ai-je bien compris
6 que vous nous avez dit qu'il y avait eu une pause dans le procès lorsque le
7 Juge El Mahdi a quitté l'affaire ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je crois que c'était autour du 14
9 décembre. C'était juste avant les vacances judiciaires de la Noël.
10 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je n'ai pas vérifié au compte rendu
11 d'audience, mais ça a peut-être commencé un mois plus tôt.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien, peut-être.
13 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je crois que les mandats de Juges
14 arrivaient à échéance au 16 novembre, donc vous avez peut-être eu quatre
15 semaines de plus.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Corrigez-moi, si j'ai tort.
17 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je rectifie le compte rendu d'audience.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais je crois qu'il y avait une
19 différence entre le moment où le juge El Mahdi n'a pas été réélu et le
20 moment où il a dû se retirer de l'affaire. C'est sans doute une de mes
21 erreurs, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Passons à l'interrogatoire
23 par l'Amicus Curiae s'il est prêt à ce faire.
24 Vous avez une demi-heure, Maître.
25 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.
26 Questions de l'Amicus Curiae M. Nicholls:
27 Q. [interprétation] Monsieur Stewart, je voulais vérifier un point avec
28 vous. A l'époque où vous avez repris l'affaire Krajisnik, vous exerciez
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1 depuis déjà 33 ans comme avocat, n'est-ce pas ?
2 R. Oui, effectivement, 33 ans.
3 Q. Dont 18 ans comme "Queen's Counsel" ?
4 R. Dix-sept.
5 Q. Dix-sept. Et vous pratiquez particulièrement les affaires commerciales,
6 n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Mais vous aviez un peu d'expérience en droit pénal ?
9 R. Du droit pénal, oui, ou du droit quasi pénal, si j'ose dire, avec
10 quelques audiences devant la cour européenne des droits de l'homme. J'avais
11 été impliqué dans des affaires en Turquie, des missions d'enquête sur des
12 accusations au pénal, donc, oui.
13 Q. Vous savez certainement, dans ce cas-là, que dans la préparation d'un
14 procès au pénal, la préparation est essentielle, n'est-ce pas ?
15 R. Oui, mais c'est essentiel au civil aussi, cher Maître. Mais je sais
16 très bien que c'est un principe qui s'applique pour toute affaire.
17 Q. Lorsque vous avez repris le dossier pour des raisons concrètes et
18 pratiques, en ce qui vous concerne, vous n'avez quasiment pas eu de
19 préparation dans la phase préalable ?
20 R. Vous voulez dire, en fait, c'est ça ?
21 Q. En fait ?
22 R. Vous voulez dire l'équipe dans son ensemble ou lorsque j'ai repris par
23 rapport à l'équipe précédente ?
24 Q. Lorsque vous avez repris le dossier.
25 R. En effet, je n'ai pas vu de preuve de ce que le dossier était prêt. Je
26 n'ai pas l'impression que Me Brashich était prêt à entamer les audiences
27 dès le mois de mai, lorsque j'ai repris l'affaire au mois d'avril,
28 lorsqu'il a été suspendu par le barreau de New York.
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1 Q. Est-ce qu'il est exact qu'il ne vous a rien donné ou presque rien ?
2 R. C'est exact.
3 Q. Et à l'occasion d'une audience précédente, il avait dit au Juge Orie
4 qu'effectivement, tout le dossier était dans sa tête ?
5 R. En effet, et j'aurais aimé que quelqu'un me l'ait fait remarquer
6 lorsque j'en ai parlé au départ avec le greffe, je ne l'ai pas su avant
7 très longtemps après.
8 Q. Vous n'avez pas reçu un dossier complet ou en tout cas raisonnablement
9 complet avant la fin du mois de novembre 2003 ?
10 R. Je n'ai pas reçu, effectivement, un ensemble complet de documents avant
11 cette date.
12 Q. Très bien. Et c'est à ce moment-là que vous et Mme Loukas avez eu des
13 discussions sérieuses sur la situation à laquelle vous étiez confrontés ?
14 R. C'est exact. Ajoutez à cela que le greffe n'a pas consenti à autoriser
15 Mme Loukas à venir ici jusqu'à un mois avant le début ou six semaines avant
16 le début du procès. Elle se trouvait en Australie à l'époque. Ils n'étaient
17 pas disposés à la faire venir si ce n'est en une brève occasion au mois
18 d'août.
19 Q. Mme Loukas était expérimentée en matière pénale, n'est-ce pas ?
20 R. En effet, oui. Elle travaillait effectivement pour le bureau du
21 défenseur public. Je crois que c'est là qu'elle a passé la plupart de sa
22 carrière à Sidney, en effet.
23 Q. Très bien. Et vous a-t-elle dit qu'il faudrait au moins un an pour se
24 préparer convenablement ?
25 R. Je ne me souviens pas précisément qu'elle l'ait dit, mais ça ne me
26 surprendrait pas.
27 Q. Très bien. Est-ce qu'au cours des mois de décembre, janvier 2003, 2004,
28 est-ce qu'elle vous a poussé constamment à demander une suspension
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1 d'audience ?
2 R. En effet, oui.
3 Q. Ou un report, plus précisément.
4 R. Oui, en effet, elle l'a fait, elle a dit que nous devions nous mettre
5 en grève. Elle a dit que nous devions refuser de commencer le procès. Elle
6 a dit un certain nombre de choses, effectivement, elle avait une opinion
7 très marquée là-dessus.
8 Q. Bien. Et en dépit de tout ceci, vous avez pensé que vous étiez prêt à
9 vous lancer dans l'affaire, que le procès pouvait démarrer, c'est ce que
10 vous avez dit en réponse aux questions de M. Krajisnik ?
11 R. Je n'ai pas du tout dit que le procès pouvait commencer, Monsieur
12 Nicholls. J'ai été réaliste par rapport à ce qui allait se produire. Et ce
13 n'était pas à moi de prendre la décision.
14 Q. Bien. Et vous étiez disposé à ne pas demander un report sur la base du
15 fait que vous ne pensiez qu'elle serait accueillie favorablement, cette
16 demande ?
17 R. Je l'ai expliqué, j'ai vite compris que dans cette institution, bien
18 plus que dans les tribunaux auxquels nous sommes habitués vous et moi - et
19 ce n'est pas une critique ici que je formule - mais je me suis vite rendu
20 compte qu'on discute beaucoup plus de ce genre de choses hors du contexte
21 formel du prétoire qu'on le fait dans d'autres systèmes. Et j'ai décidé que
22 l'on procéderait de la sorte.
23 Q. Mais si vous aviez déposé une demande de report ou de suspension, il se
24 peut que les Juges y aient fait droit.
25 R. Non, je crois que c'était voué à l'échec, quasiment. Pourquoi ? Parce
26 qu'il aurait s'agit d'une demande dont on aurait
27 dit : Nous vous proposons 18 jours avec un calendrier flexible au cours des
28 prochains mois. Demandez une suspension dans un ou deux mois, si cela
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1 s'avère nécessaire, si ça ne fonctionne pas.
2 Q. Avez-vous --
3 R. Je vous demanderais de bien vouloir me laisser finir. La
4 question de savoir quand l'on devait demander une suspension, cette
5 question-là a fait l'objet de multiples discussions; et pour les raisons
6 que j'ai déjà évoquées, nous avons dû abandonner ce mode de négociation. Et
7 lorsque vous regardez le calendrier des audiences de février jusqu'à la fin
8 du mois de juin, vous verrez que finalement ça n'a pas très bien
9 fonctionné, on n'a pas tellement réussi à nous aménager un peu de temps au
10 cours de cette période, mais lorsque tout cet exercice d'admission de
11 certains faits a pris fin, nous avons à ce moment-là présenté cette
12 demande.
13 Q. Vous serez d'accord pour dire qu'en ne présentant pas une telle
14 demande à la Chambre de première instance, vous avez perdu une occasion
15 d'un nouvel appel devant la Chambre d'appel ?
16 R. Non, pas du tout, Monsieur Nicholls, parce que mon avis, à l'époque -
17 et cela reste mon avis aujourd'hui - est que je ne pense pas m'être trompé
18 à ce moment-là. Je pensais à ce moment-là que notre demande n'aurait pas
19 été accueillie par la Chambre, et si c'était bien le cas, nous aurions
20 perdu réalistement toute chance d'appel.
21 Q. Mais vous seriez d'accord pour dire qu'avec le recul, vous n'avez pas
22 pris la bonne décision ?
23 R. Non.
24 Q. Mais vous avez dit une fois, n'est-ce pas : "Je n'aurais pas dû sous-
25 estimer le problème pendant si longtemps. Je n'aurais pas dû écarter
26 certaines questions. J'aurais dû attirer l'attention de la Chambre de
27 première instance là-dessus depuis longtemps." C'est ce qui est dit dans la
28 requête de juillet --
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1 R. Oui, je m'en souviens très bien. Vous dites, avec le recul,
2 consentirais-je à reconnaître que ma décision était erronée ? Avec le
3 recul, finalement je me rends compte que nous n'étions pas dans une
4 meilleure situation que si j'avais fait la demande d'emblée. Mais vous me
5 demandez aujourd'hui si je pense que lorsque j'ai décidé ceci en janvier ou
6 en février, c'était une mauvaise idée. Non, je ne crois pas. Et j'aimerais
7 revenir à ce que vous avez dit en citant le compte rendu, il y a un
8 élément, et je ne crois pas essayer de tromper qui que ce soit ici en
9 disant cela, il y a un élément de souhait, si vous voulez, de souhait de
10 remonter le moral de mon équipe qui se trouvait effondrée, en quelque
11 sorte, par la situation, et particulièrement Mme Loukas. Et il n'y a pas
12 ici d'autoflagellation de ma part, pas du tout, non -- Monsieur Nicholls,
13 attendez, je finis. Je voulais simplement indiquer que compte tenu de
14 l'évolution de la situation, nous étions toujours désabusés, si vous
15 voulez, et en fait, avec le recul - et je l'ai reconnu auprès de Me Loukas
16 - j'ai fait trop confiance à ce que je pensais être une volonté de la part
17 de la Chambre de première instance d'examiner des demandes de suspension au
18 fil de l'évolution de la situation.
19 Q. Je n'ai qu'une demi-heure, Maître Stewart.
20 R. Oui, mais j'essaie simplement d'apporter des réponses à vos questions.
21 Q. Bien. Simplement, quels ont été les résultats de cette décision. Vous
22 avez commencé le procès le 3 février --
23 R. Je ne sais pas si c'est le 3 ou le 4, mais c'était un lundi.
24 Q. Très bien, peu importe. En ce qui concerne la deuxième requête de
25 suspension, vous avez dit que votre équipe n'avait lu que 15 % des
26 documents de l'affaire.
27 R. Non, je ne suis pas en train de vous disputer sur des détails, mais --
28 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] N'interrompez pas les questions. Je
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1 n'arrive pas à suivre.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, excusez-moi.
3 M. NICHOLLS : [interprétation]
4 Q. Dans la deuxième requête, celle après 13 mois après le début du procès,
5 vous avez dit que votre équipe n'avait lu que 15 % des documents. Pourriez-
6 vous nous dire le pourcentage des documents que votre équipe avait lu le 3
7 ou le 4 février lorsque le procès a débuté ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, 1 %, 2 %. Monsieur Nicholls, s'il y
9 avait un demi-million de documents, je ne sais pas, nous avons peut-être lu
10 quelques milliers d'entre eux, donc c'est un petit pourcentage.
11 Q. Avez-vous jugé bon de commencer le procès alors que votre équipe
12 n'avait lu qu'entre 1 et 2 % des documents ?
13 R. Je ne pensais pas que c'était une bonne idée, non, Monsieur Nicholls,
14 mais si vous me permettez de répondre à votre question, dans une certaine
15 mesure c'est une discussion qui a eu lieu entre moi-même et Me Loukas. Et
16 elle m'a dit : Nous devons nous mettre en grève, et je lui ai dit :
17 Chrissa, nous sommes devant un tribunal, et si le tribunal dit que le
18 procès doit commencer, peut-être que cela ne nous arrange pas, peut-être
19 que nous pouvons nous plaindre, que nous pouvons essayer d'aller à
20 l'encontre de cette réalité; mais si une chambre ou un tribunal dit : le
21 procès va commencer, le procès commence.
22 Q. Je passe à ma question suivante. A ce moment-là, le 3 ou le 4 février,
23 votre équipe avait-elle mené convenablement des enquêtes afin de tester la
24 crédibilité des témoins à charge ?
25 R. Non, nous n'avions pas pu mener la moindre enquête, Monsieur Nicholls,
26 parce que Mme Loukas, Mme Cmeric, et moi-même n'avions pas eu la
27 possibilité de nous rendre sur les lieux dans la région. Nous avions les
28 gens à Pale. Et les personnes qui se trouvaient à Pale nous ont communiqué
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1 de temps en temps des informations, mais je dois vous dire en toute
2 honnêteté, et M. Krajisnik ne sera sans doute pas très content de
3 l'entendre, mais ces personnes étaient des amateurs.
4 Q. Bien. Aviez-vous examiné les éléments communiqués par l'Accusation ?
5 R. Oui, dans la mesure du possible, bien sûr. Nous avons examiné le plus
6 grand nombre possible d'éléments qui avaient un rapport avec les témoins de
7 l'Accusation. Mme Cmeric nous a aidés; c'était une personne très
8 intelligente, et elle avait connaissance de l'affaire, en tout cas quelques
9 connaissances.
10 Q. Avez-vous examiné des éléments à décharge susceptibles d'avoir été
11 disponibles à ce moment-là ?
12 R. Relativement peu. Il me semble que cette Mme Cmeric a examiné certains
13 documents en B/C/S, je dois dire qu'elle n'a pas accordé grand crédit à un
14 certain nombre d'entre eux, à beaucoup d'entre eux en réalité.
15 Q. Bien. Avez-vous obtenu des éléments matériels de preuve de M. Krajisnik
16 ?
17 R. Non, Monsieur Nicholls.
18 Q. Avez-vous reçu des instructions détaillées de sa part quant aux
19 objectifs poursuivis dans le cadre du contre-interrogatoire pour sa défense
20 ?
21 R. Bien sûr.
22 Q. Dans quelle mesure ?
23 R. Nous nous sommes concentrés sur les témoins qui se présentaient au fur
24 et à mesure, c'était naturel.
25 Q. Bien. Avez-vous essayé de préparer quelque chose pour M. Krajisnik ?
26 R. Finalement, je l'ai fait. Mais ce n'était pas une priorité au tout
27 début en tout cas, bien sûr, Monsieur Nicholls.
28 Q. Bien. Et le 3 ou le 4, aviez-vous identifié des témoins de la Défense à
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1 part M. Krajisnik dont nous venons de parler ?
2 R. Non, j'en doute -- non, vraiment j'en doute.
3 Q. Mme Loukas s'est plainte, à savoir qu'il n'y avait pas de stratégie de
4 défense à proprement parler. Vous vous en souvenez ?
5 R. Oui, je me souviens effectivement qu'elle s'en soit plainte, sur ça et
6 sur d'autres choses souvent.
7 Q. Avait-elle raison de dire qu'il n'y avait pas de stratégie de défense ?
8 R. Non, pas vraiment. Nous étions d'accord pour reconnaître que, bien sûr,
9 nous aurions aimé disposer de plus de temps pour tout. Nous étions d'accord
10 pour reconnaître que nous aurions aimé disposer de plus de temps pour
11 développer plus avant la stratégie, et pour effectivement pouvoir faire ce
12 que vous dites, pour -- Monsieur Nicholls, attendez, je n'ai pas terminé.
13 Q. Oui, mais n'oubliez pas, je n'ai qu'une demi-heure.
14 R. Oui, je m'en souviens; mais si vous me posez une question, Monsieur le
15 Président, j'aimerais pouvoir y répondre.
16 Q. Répondez plus brièvement, Monsieur Stewart.
17 R. Oui, si je peux répondre à la question, je le ferai bien sûr plus
18 brièvement.
19 Q. Poursuivez.
20 R. Comme je crois l'avoir déjà dit, nous avons pu et nous avions
21 d'ailleurs une idée assez claire de la stratégie que nous entendions suivre
22 pour que cela ne pose pas problème dans le cadre des contre-interrogatoires
23 des témoins à charge.
24 Q. Mais n'est-il pas vrai que le 3 février ou le 4 février, votre équipe
25 était absolument mal préparée à la perspective d'un début de procès ?
26 R. Nous avons fait de notre mieux, Monsieur Nicholls, mais simplement le
27 procès a commencé trop tôt.
28 Q. Voici quelle est ma question. Le 3 ou le 4 février, votre équipe
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1 n'était absolument pas prête pour commencer ce procès.
2 R. Si vous regardez l'ensemble du procès, bien sûr que si, oui; bien sûr
3 que non, nous n'étions pas prêts. Bien sûr.
4 Q. Très bien. Et si vous vous étiez mis à la place de M. Krajisnik, vous
5 vous seriez rendu compte que ce ne pouvait être un procès équitable ?
6 R. Nous l'avons dit à M. Krajisnik. Nous lui avons dit. Mais je le répète,
7 je ne pense pas que ceci ait vraiment eu un impact sur le premier lot de
8 témoins, disons, de février; mais c'est vrai que oui, nous étions
9 absolument mal préparés pour commencer ce procès, pour commencer un procès
10 dans toute sa durée. Nous l'avons dit tout à fait à M. Krajisnik. Nous
11 avons dit que nous le déplorions. Il l'a su. Il savait bien quelle était
12 notre position. Nous n'avons pas caché quoi que ce soit. Nous n'avons pas
13 caché nos préoccupations, c'était notre client. Et nous nous devions de lui
14 expliquer honnêtement ce que nous pensions.
15 Q. Il ne pouvait donc pas y avoir de procès équitable dans les
16 circonstances telles qu'elles existaient les 3 ou 4 février ?
17 R. Il ne pouvait pas y avait de procès équitable si le procès débutait le
18 3 ou le 4 février, à moins que l'on accorde une marge de manœuvre
19 suffisante par la suite, à moins qu'un temps suffisant soit accordé par la
20 suite. Mais commencer le procès le 4 février, ça ne veut pas dire que ça
21 allait nécessairement être un procès inéquitable, mais ça aurait été un
22 procès inéquitable effectivement dès lors que les ajustements nécessaires
23 n'étaient pas faits par la suite, dès lors que l'on ne nous donnait pas
24 suffisamment de temps et l'occasion suffisante pour présenter les arguments
25 à l'appui de la cause de M. Krajisnik.
26 Q. Mais Mme Loukas a dit que vous aviez besoin de 12 mois, n'est-ce pas ?
27 R. Oui, enfin -- on n'allait jamais obtenir ces 12 mois, soyons clairs,
28 Monsieur Nicholls, mais oui, bien sûr, j'étais d'accord avec Mme Loukas,
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1 c'est vrai, si l'on avait pu nous donner ceci, bien sûr; et je n'ai jamais
2 été en désaccord avec elle sur ce genre d'analyse et je serais d'accord
3 encore aujourd'hui.
4 Q. Cette réunion du 3 janvier, réunion 65 ter, si je puis dire, le Juge
5 Orie fait référence aux documents et nous dit qu'ils sont en réalité
6 complètement désorganisés et que le chaos le plus grand règne ?
7 R. Oui, effectivement, et c'est de moi qu'il a reçu cette information,
8 puisqu'il ne le savait pas, comment l'aurait-il su, c'est moi qui avais les
9 documents de la Défense.
10 Q. Et il a reconnu les difficultés auxquelles vous étiez confronté ?
11 R. Je ne sais pas. Il faudrait que vous me donniez lecture des éléments
12 qui pourraient m'amener à confirmer qu'effectivement il a reconnu ceci.
13 Q. Mais en dépit de tout ceci, en dépit du fait qu'il ait reconnu que la
14 Défense était confrontée à des difficultés, que tous ces documents étaient
15 totalement chaotiques, vous n'avez pas demandé une suspension ?
16 R. J'en ai parlé au Juge Orie. Nous étions autour de la même table, et à
17 la lumière de tout ce qu'il a dit, j'ai dit que la date ne conviendrait
18 pas, la date de début de procès, et le Juge Orie a dit : "Le procès
19 commencera" -- le 3 ou le 4 février, quelle que soit la date réelle du
20 début du procès.
21 Q. Vous avez finalement présenté votre première demande de suspension en
22 juillet, n'est-ce pas ?
23 R. Oui, lorsque effectivement, nous n'avons pas réussi à nous mettre
24 d'accord sur tous ces faits avec l'Accusation.
25 Q. Et à ce moment-là, vous avez fait part de vos préoccupations quant au
26 temps dont vous disposiez et aux ressources mises à votre disposition ?
27 R. En effet.
28 Q. Et c'est à ce moment-là, n'est-ce pas, que vous avez dit que vous
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1 n'auriez pas dû sous-estimer le problème pendant si longtemps et que vous
2 auriez dû écouter votre co-conseil.
3 R. Non, -- l'idée, c'était de veiller à ce que l'équipe soit satisfaite,
4 fonctionne. J'ai écouté mon co-conseil, bien entendu. Et simplement, je
5 n'étais pas toujours d'accord avec elle.
6 Q. Mais il n'a pas été fait droit à la requête déposée en juillet 2004 ?
7 R. En effet.
8 Q. Vous n'avez pas fait appel --
9 R. C'est exact.
10 Q. -- de cette décision.
11 R. C'est exact.
12 Q. Pourquoi pas ?
13 R. Parce que j'étais absolument certain que nous allions perdre, et que
14 j'étais sûr qu'il se passerait ce qui s'est passé avec la deuxième requête,
15 qui n'a pas été accueillie non plus et à propos de laquelle nous avons fait
16 appel. Nous pensions que la Chambre d'appel, effectivement, confirmerait la
17 décision de la Chambre de première instance et que cela pousserait la
18 Chambre de première instance à accélérer encore la cadence du procès. J'ai
19 préféré en rester là. J'ai préféré faire une nouvelle demande à une date
20 ultérieure au moment où nous penserions que le moment serait le bienvenu.
21 Q. Monsieur Stewart --
22 R. C'est une position que nous avons prise à ce moment-là. Et je pense que
23 c'était une position qui était tout à fait valable.
24 Q. Et votre client était-il d'accord avec vous ?
25 R. Je ne m'en souviens plus, Monsieur Nicholls.
26 Q. L'avez-vous consulté ?
27 R. Bien entendu.
28 Q. Pensez-vous que vous avez fait preuve de discernement en ne demandant
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1 pas une suspension ou en ne déposant aucune autre demande sachant
2 simplement que vous le faisiez sur la base du fait que vous estimiez que le
3 Tribunal ne ferait pas droit à la requête en
4 question ?
5 R. Oui, je pense qu'effectivement, c'est un facteur fondamental, oui, je
6 le pense, Monsieur Nicholls.
7 Q. Les première et deuxième requêtes de suspension n'ont pas abouti, comme
8 vous l'avez dit, et vous vous êtes retrouvés dans une position où vous
9 deviez suivre le déroulement en essayant d'éteindre les feux au fur et à
10 mesure où ils s'allumaient, n'est-ce pas ?
11 R. Oui, effectivement, c'est tout à fait ça, Monsieur Nicholls.
12 Q. Est-il exact qu'en réalité vous n'avez jamais pu compenser le déficit
13 de préparation du début ?
14 R. Du début, c'est-à-dire ?
15 Q. Au moment où le procès s'est ouvert.
16 R. Nous n'avons jamais pu rattraper -- oui, nous n'avons effectivement
17 jamais pu rattraper le déficit constaté dès le début du procès, oui. Ni par
18 la suite dans la phase préalable et au moment où le procès a commencé.
19 Q. Et en ce qui concerne les contre-interrogatoires, vous n'avez jamais
20 été à même de dire que vous pouviez effectivement procéder à tous les
21 contre-interrogatoires, sachant que vous n'aviez pas pris connaissance de
22 tous les éléments dont vous auriez eu besoin pour pouvoir le faire de
23 manière efficace ?
24 R. Oui, ce n'était pas le cas pour chaque témoin, Monsieur Nicholls, mais
25 de manière générale, oui, c'est exact, en tout cas pour les témoins les
26 plus importants.
27 Q. Donc ceci s'appliquait à certains témoins, et pour certains témoins,
28 vous avez eu le sentiment que vous n'étiez pas en maîtrise des éléments
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1 nécessaires, et pour d'autres témoins, vous ne le savez pas parce que vous
2 ne saviez pas simplement ce que contenaient certains éléments, vous n'aviez
3 pas été en mesure de les consulter ?
4 R. Oui, en effet. Là, c'est un peu radical de dire que nous n'étions
5 absolument par prêts, parce que pour certains témoins, c'est vrai, ils
6 étaient, disons, plutôt mineurs compte tenu de la nature de leur
7 déposition. Mais ce n'est pas la majorité.
8 Q. J'aimerais que nous parvenions aux éléments à décharge pour quelques
9 instants.
10 R. Oui.
11 Q. Vous avez dit que vous étiez très préoccupés de savoir si vous auriez
12 suffisamment de temps pour préparer la présentation des éléments à charge
13 [comme interprété].
14 R. En effet.
15 Q. Il s'agit d'abord de témoins qui allaient déposer pour M. Krajisnik.
16 R. Oui.
17 Q. Il s'agissait ensuite de décider qui allaient être ces témoins.
18 R. C'est exact.
19 Q. De l'ordre dans lequel ils allaient comparaître et, bien entendu, de la
20 teneur de leur déposition.
21 R. Oui, en effet, Monsieur Nicholls. La seule nuance que j'apporterais,
22 c'est que s'agissant de l'ordre de comparution, ça faisait partie des
23 priorités les plus basses, si vous voulez, parce que je suis sûr que c'est
24 un constat que peut faire aussi l'Accusation, lorsque vous faites venir des
25 témoins de la région jusqu'ici, en général, leur ordre de comparution est
26 dicté par vos capacités à faire venir les personnes.
27 Q. Avez-vous eu suffisamment de temps pour préparer l'interrogatoire de
28 ces témoins -- en tout cas, pour décider de l'identité des témoins qui
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1 allaient déposer et pour se préparer par rapport à ce qu'ils allaient dire
2 ici ?
3 R. S'agissant des éléments à décharge, la position n'était pas aussi
4 difficile que par rapport aux témoins de l'Accusation. Nous n'avons jamais
5 eu autant de temps que nous l'aurions voulu, et nous avons eu énormément de
6 difficultés au début pour la préparation et le dépôt de la liste; et on le
7 voit bien, d'ailleurs, dans le compte rendu, on voit bien les énormes
8 problèmes que nous avons rencontrés pour respecter les délais fixés par la
9 Chambre. Mais si vous voulez, les témoins de la Défense n'ont pas présenté
10 le plus de difficulté pour nous.
11 Q. Avez-vous demandé à disposer de davantage de temps ?
12 R. Oui -- oui, pour le dépôt de la liste 65 ter et le début de la
13 présentation des éléments à décharge, oui, je crois que nous avons demandé
14 à plusieurs reprises -- d'ailleurs, nous avons demandé à disposer de plus
15 de temps, nous avons demandé des prorogations de délais, et il me semble
16 que ces demandes ont été accueillies favorablement.
17 Q. Avez-vous eu des difficultés considérables à présenter des résumés des
18 dépositions de témoins ?
19 R. Bien sûr. Et d'ailleurs, à ce moment-là, une difficulté supplémentaire
20 était que Mme Loukas nous avait quittés et que M. Josse était nouveau, et
21 ça constituait une difficulté supplémentaire pour nous.
22 Q. Et ces difficultés ont-elles provoqué des problèmes considérables avec
23 le Juge Orie, y a-t-il eu conflit du fait de tous ces éléments ?
24 R. Il y a eu beaucoup de choses qui ont provoqué des situations de conflit
25 avec le Juge Orie, parce que nous n'appréciions pas beaucoup les décisions
26 rendues par le Juge Orie, et - je ne lis pas dans les pensées, mais je
27 crois que beaucoup de difficultés sont nées du non-aboutissement à l'été
28 2004 de cet exercice consistant à se mettre d'accord sur un certain nombre
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1 de faits avec l'Accusation.
2 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Krajisnik,
3 allez-y.
4 L'APPELANT : [interprétation] Puis-je quitter le prétoire pendant quelques
5 minutes, s'il vous plaît, avec votre autorisation, et je reviendrai, bien
6 sûr, à l'issue de ces quelques minutes.
7 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous en prie.
8 L'APPELANT : [interprétation] Je vous remercie.
9 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Peut-on reprendre. Monsieur Nicholls,
10 il vous reste trois minutes pour conclure.
11 M. NICHOLLS : [interprétation]
12 Q. Monsieur Stewart, avez-vous jugé disposer du temps dont il vous fallait
13 pour rédiger votre mémoire final ?
14 R. Non, non, pas du tout, pas du tout. Le délai était extrêmement serré,
15 c'est un travail extrêmement difficile. On aurait préféré disposer de bien
16 plus de temps.
17 Q. Bien. Au cours du procès, étiez-vous très préoccupé par la question des
18 priorités ?
19 R. Oui, ce n'est pas inhabituel. Mais oui, effectivement, les priorités
20 étaient une véritable source de préoccupation.
21 Q. Mais surtout dans la présente affaire, compte tenu du temps disponible
22 pour accomplir le travail à accomplir ?
23 R. Oui, tout à fait, je suis tout à fait d'accord avec vous.
24 Q. A-t-il fallu également abréger la recherche juridique proprement dite ?
25 R. Oui, Monsieur Nicholls, bien sûr, mais en réalité ce n'était pas le
26 cœur du problème. Oui, bien sûr, nous aimerions pouvoir avoir pu faire
27 plus. Parfois, je crois que Me Loukas aurait bien aimé procéder à certaines
28 recherches juridiques plutôt que de devoir effectuer les contre-
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1 interrogatoires; et je respecte tout à fait ce point de vue. Nous n'avons
2 pas été entravés dans notre travail dans ce sens-là, si vous voulez. Nous
3 en avons fait assez, bien sûr. Oui c'est vrai qu'une feuille de route
4 juridique aurait pu être utile, si vous voulez mais, bon.
5 Q. Il faut commencer, n'est-ce pas, par identifier les membres de l'équipe
6 susceptible de procéder aux recherches ?
7 R. Oui, mais ce n'était pas là la difficulté, compte tenu de l'équipe. Il
8 n'y avait pas grand choix. Je me suis souvent porté volontaire d'ailleurs
9 pour ce genre de travail.
10 Q. Très bien. Or, dans ce cadre d'exercice, il faut, bien sûr,
11 sélectionner les personnes qui seront chargées de le faire.
12 R. En effet.
13 Q. Et votre équipe était extrêmement limitée, n'est-ce pas, en nombre ?
14 R. Oui, bien sûr.
15 Q. En ce qui concerne les avocats à proprement parler, il y avait vous et
16 Me Loukas, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Ensuite, il y avait vous et Me Josse; c'est ça ?
19 R. Oui. Josse, c'est ça, pas Jossie.
20 Q. Vous deux, eux deux, étiez-vous réellement en mesure, dans le temps qui
21 vous était imparti, d'identifier les sujets, les recherches autour de ces
22 sujets qu'il faudrait faire pour fournir un service de qualité à M.
23 Krajisnik ?
24 R. Maître, permettez-moi de répondre. Vous avez dit qu'il y avait Lucy
25 Robb; elle y était, certes, elle n'était pas avocat mais elle avait une
26 très belle carrière et elle avait eu de très beaux diplômes en Australie.
27 Donc nous avions quelques moyens de faire de la recherche juridique. Encore
28 une fois, ce n'était pas vraiment un problème, je sais que je me répète,
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1 mais nous avions suffisamment de moyens de savoir où nous allions.
2 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Maître Nicholls, je crois que vous avez
3 épuisé votre temps.
4 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, je m'arrêterais.
5 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Passons à l'Accusation pour
6 le contre-interrogatoire.
7 Contre-interrogatoire par M. Kremer :
8 Q. [interprétation] Monsieur Stewart, je comprends de votre témoignage en
9 réponse aux questions de Me Nicholls que M. Krajisnik participait
10 activement à sa défense ?
11 R. En effet, M. Krajisnik travaillait extrêmement dur, et était capable de
12 produire des documents en grande quantité.
13 Q. Et dans le courant de sa défense, avez-vous eu des entretiens réguliers
14 avec lui ?
15 R. Oui.
16 Q. En ce qui concerne les accusations à charge, M. Krajisnik vous
17 proposait-il des questions à soumettre aux avocats, aux témoins à charge ?
18 R. Oui. Il participait. Je ne sais pas si c'était toujours des questions à
19 poser, parfois c'étaient des notes mais il produisait toujours quelque
20 chose, des notes, et il l'écrivait dans sa propre langue et c'est Tatjana
21 Cmeric qui traitait cela en premier, en effet.
22 Q. Par rapport aux 500 000 pages de documents qui auront été transmises
23 par l'Accusation, est-ce que tous ces documents ont été transmis à M.
24 Krajisnik dès le début et pendant toute la phase préalable au procès et
25 pendant le procès à proprement parler ?
26 R. Ce n'était pas tout à fait possible. En tout cas, pas une photocopie ou
27 des exemplaires papier de tous ces documents. Il n'était pas possible de
28 fournir tous ces documents qui remplissaient une pièce complète mais nous
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1 avions un échange de CD assez régulier avec M. Krajisnik et cela lui
2 permettait de voir ces documents.
3 Q. Est-il acceptable de dire que la contribution de M. Krajisnik à cette
4 affaire et au dossier était assez importante étant donné sa connaissance de
5 l'histoire politique, sa connaissance intime de l'histoire politique de la
6 Bosnie-Herzégovine en 1992 ?
7 R. Oui. Evidemment, M. Krajisnik connaissait beaucoup de choses sur son
8 propre dossier. Il travaille dur, comme je l'ai dit; et d'autant qu'il
9 travaille naturellement dur, donc oui.
10 Q. Est-ce que vous avez fait preuve de jugement professionnel pour voir
11 s'il fallait effectivement poser ces questions au témoin ?
12 R. Nous triions également le matériel, les documents transmis par M.
13 Krajisnik. M. Krajisnik était un client exigeant mais je ne lui en tiens
14 pas rigueur. Mieux vaut un client exigeant. Il nous a effectivement
15 transmis des documents qui nous prenaient du temps à traiter, c'est vrai.
16 Q. Pendant la phase de procès et l'audition des témoins à charge, est-il
17 exact de dire que vous avez reçu un classeur complet des éléments de preuve
18 relatifs aux événements dans les
19 Municipalités ?
20 R. Ecoutez, je ne sais pas si nous avons toujours reçu ces dossiers
21 toujours en avance des auditions des témoins relatifs à une municipalité
22 particulière. Je n'en suis pas absolument certain. Je ne saurais le dire.
23 Q. Est-ce que vous n'avez pas non plus reçu des dossiers récapitulant les
24 déclarations des témoins, les documents auxquels les témoins pouvaient
25 faire référence ?
26 R. Oui.
27 Q. Ça vous a été fourni ?
28 R. En effet.
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1 Q. Donc, vous saviez à peu près, dans la page de préparation, quel
2 élément l'Accusation cherchait à obtenir des témoins ?
3 R. Comme vous l'avez particulièrement indiqué, je crois que toutes les
4 déclarations des témoins disaient clairement sur quoi on allait mettre
5 l'accent, hormis peut-être les listes 65 ter.
6 Q. Revenons un peu en arrière. Lorsque vous avez commencé à prendre
7 l'affaire Krajisnik, est-ce que vous l'avez rencontré avant de commencer et
8 avant le début du procès ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous avez reçu de lui des instructions quant à sa défense ?
11 R. Oui.
12 Q. Lorsque vous avez commencé en tant que conseil, et lorsque vous avez
13 repris la phase préalable et les documents préparés par l'équipe Brashich,
14 j'ai l'impression, n'est-ce pas, qu'il fallait mettre à l'épreuve
15 l'Accusation; est-ce que c'est exact ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que vous avez reçu des instructions de M. Krajisnik selon
18 lesquelles il fallait être plus ouvert ou plus conciliant pendant cette
19 première phase du procès ?
20 R. Je ne sais plus avec quel degré de réticence il l'a fait, mais M.
21 Krajisnik a accepté de s'engager dans l'exercice cherchant à définir une
22 liste de faits acceptés et reconnus. C'était quelque chose de très
23 différent de l'approche de Me Brashich, qui n'aurait pas adopté cette
24 approche.
25 Q. Lorsque vous vous êtes retiré de cet exercice sur les faits admis --
26 R. Les faits acceptés.
27 Q. Très bien. Faits acceptés. Vous êtes-vous consulté avec M. Krajisnik ?
28 R. En fait, je crois que la décision définitive de se retirer a été prise
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1 par moi un week-end, sans consultation avec M. Krajisnik. Je crois que
2 c'est ça.
3 Q. Lorsque vous en avez informé M. Krajisnik, vous a-t-il incité à
4 reprendre ces négociations ?
5 R. M. Krajisnik ne se posait aucun problème. Si j'avais cru que ça lui
6 aurait posé un problème, j'aurais attendu de lui rendre visite au centre de
7 Détention avant de ce faire. En fait, mon équipe, dans son ensemble, était
8 ravie de cette décision. D'ailleurs, j'ai l'impression d'avoir été le seul
9 à vouloir poursuivre cet exercice aussi loin que possible.
10 Q. Passons à votre vision de la défense de M. Krajisnik lorsque les
11 audiences ont commencé. Vous nous avez dit que vous aviez eu l'occasion de
12 le rencontrer à de nombreuses reprises avant le début des audiences.
13 Saviez-vous quels étaient les éléments principaux de la défense
14 lorsque vous avez entamé les premiers contre-interrogatoires ?
15 R. Oui.
16 Q. Je vais vous proposer un résumé de la stratégie de Défense.
17 Premièrement, vous vouliez distancier autant que possible M. Krajisnik et
18 M. Karadzic; est-ce exact ?
19 R. Ça en faisait partie, en effet.
20 Q. Deuxièmement, il fallait montrer que M. Krajisnik n'était que le
21 président de l'assemblée, un homme politique, et pas un décisionnaire.
22 R. Oui. C'est mis un peu plus brutalement que ce que j'aurais pu dire,
23 mais dans l'ensemble, c'est à peu près ça.
24 Q. Il n'y avait pas de rapport, pas de lien entre M. Krajisnik et les
25 crimes commis sur le terrain ?
26 R. Oui. Le lien était clé, effectivement.
27 Q. Il ne faisait pas partie de la présidence élargie.
28 R. Oui.
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1 L'APPELANT : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse, mais je
2 ne sais pas si le Procureur doit réellement poser des questions directrices
3 de ce type au témoin.
4 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je ne sais pas si ce sont des questions
5 directrices.
6 M. KREMER : [interprétation] Ce sont des questions directrices, mais je
7 crois que j'ai le droit de les poser.
8 L'APPELANT : [interprétation] S'il a le droit de les poser, je m'en excuse,
9 mais je crois que le Procureur devrait mettre l'accent sur ce qui a été dit
10 dans l'interrogatoire principal et poser moins de questions directrices.
11 Nous avons ici un témoin qui est un juriste professionnel qui répondra
12 comme il le faut, mais c'est à la Chambre de décider.
13 M. KREMER : [interprétation] J'essaie juste de vous aider.
14 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je ne crois pas que ce soit des
15 questions directrices. Quant à savoir si le contre-interrogatoire ne fait
16 que réagir à l'interrogatoire principal, c'est à vous de le voir.
17 M. KREMER : [interprétation] Mais puisque nous venons de parler de la
18 question de l'équité du jugement et de l'efficacité du conseil, je crois
19 qu'effectivement ces questions relèvent de cette question centrale, et je
20 m'en tiendrai à l'efficacité du conseil et à l'équité du procès.
21 Q. Dans le cadre de cette stratégie de Défense, avez-vous cherché à
22 montrer que M. Krajisnik a participé aux négociations internationales et
23 qu'il cherchait à résoudre le conflit par la
24 paix ?
25 R. Oui, et pas seulement dans le cadre international.
26 Q. Votre objectif stratégique était-il d'indiquer que M. Krajisnik n'avait
27 aucun lien avec la police ou avec l'armée ?
28 R. Nous cherchions effectivement à le minimiser autant que possible et de
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1 montrer combien ce lien était faible ou inexistant.
2 Q. Et que les Variantes A et B n'étaient pas des documents officiels ?
3 R. Oui. Nous cherchions à miner l'approche de l'Accusation sur les
4 Variantes A et B, en effet.
5 Q. Très bien. Les objectifs stratégiques étaient fondamentalement
6 criminels, et c'était une politique et non pas un plan criminel, n'est-ce
7 pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous avez reçu des instructions quant aux objectifs stratégiques de la
10 Défense de M. Krajisnik avant le premier contre-interrogatoire au mois de
11 février 2004 ?
12 R. Vous utilisez l'expression "objectifs stratégiques" de façon très
13 différente des six objectifs stratégiques auxquels on faisait référence.
14 Q. En effet.
15 R. Oui, nous étions effectivement le conseil, donc effectivement la
16 stratégie du procès relevait des instructions de M. Krajisnik.
17 Q. Mais en tant que conseil, et sur la base des instructions de M.
18 Krajisnik, vous aviez identifié ces objectifs particuliers que nous venons
19 d'évoquer comme étant les domaines sur lesquels vous vouliez mettre
20 l'accent ou lorsque cela était évoqué par les témoins; est-ce bien le cas ?
21 R. En effet. Mais effectivement le plaignant, M. Krajisnik, a appelé ces
22 instructions, mais certaines de ces instructions et de ces objectifs sont
23 assez évidents pour un plaignant quel qu'il soit.
24 Q. La Chambre peut regarder les déclarations liminaires que vous avez
25 faites au mois d'octobre 2005, si je ne m'abuse.
26 R. Oui, ça doit être la date.
27 Q. Tous les objectifs que nous avons identifiés y étaient reconnus comme
28 des questions que soulevait la Défense et sur lesquelles la Défense
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1 souhaitait apporter une réponse, par exemple, que M. Krajisnik n'était
2 qu'un pauvre président d'assemblée et qu'il ne pouvait prendre aucune
3 décision.
4 R. Je ne me souviens pas des détails, mais ça m'étonnerait qu'on n'en ait
5 pas parlé à ce moment-là.
6 Q. Les arguments de la Défense ont cherché à montrer que tous les
7 objectifs de la Défense étaient fondés avant même le début des arguments de
8 l'Accusation, et présentaient une vision des choses tout à fait différente
9 de celle de l'Accusation à la Chambre de première instance, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, c'est tout à fait ça.
11 Q. Il me semble avoir compris que M. Krajisnik allait toujours apporter
12 son témoignage dans le courant de sa défense ?
13 R. Oui, effectivement.
14 Q. Il avait été indiqué à la Chambre qu'il apporterait son témoignage si
15 la décision était favorable dans le cadre de l'article 92 bis. Vous l'avez
16 dit clairement et M. Krajisnik l'a dit également, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, c'est assez inhabituel, c'est vrai, mais il était tout à fait
18 clair que M. Krajisnik avait fait comprendre clairement que c'était ce
19 qu'il voulait faire.
20 Q. En ce qui concerne la répartition du temps, est-il exact que M.
21 Krajisnik a témoigné pendant 40 jours en tout ?
22 R. Oui, il faudrait vérifier, mais je crois que c'est à peu près ça.
23 Q. En ce qui concernait la présentation de ses éléments de preuve, je
24 crois que c'était 23 jours au départ, n'est-ce pas ?
25 R. Oui, ça doit être ça.
26 Q. Dans son interrogatoire principal, y a-t-il eu des domaines dans
27 lesquels vous pensez que sa position n'était pas clairement exprimée ou
28 suffisamment exprimée ?
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1 R. A la fin de l'interrogatoire en chef, je n'ai pas eu l'impression qu'il
2 y avait des trous éblouissants dans sa présentation des éléments.
3 Q. Lorsque vous avez décidé quels témoins à décharge seraient cités à
4 comparaître, est-ce que M. Krajisnik participait ?
5 R. Oui, bien sûr.
6 Q. Un témoin précédent nous a laissé entendre que certains témoins à
7 décharge ont, par leur simple présence, surpris M. Krajisnik. Avez-vous
8 souvenir d'avoir cité à comparaître un témoin que vous n'auriez pas annoncé
9 à M. Krajisnik ?
10 R. Non.
11 Q. Pour préparer les arguments de la Défense, est-ce que vous avez
12 consulté régulièrement et activement M. Krajisnik pour savoir quelles
13 questions poser aux témoins à décharge et comment ils pourraient être
14 utiles ?
15 R. Oui. Si vous dites vous, est-ce que c'est moi et/ou M. Josse, la
16 réponse est oui. En effet, à ce moment-là, Me Loukas nous avait déjà
17 quittés à ce moment-là.
18 M. KREMER : [interprétation] Si vous me le permettez, j'aimerais passer à
19 huis clos partiel. Je voudrais traiter de documents sous pli scellé.
20 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Madame la Greffière.
21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
22 [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité partiellement levée par une ordonnance de la Chambre]
23 M. KREMER : [interprétation]
24 Q. Je voudrais évoquer quelques-uns des documents relevant de l'article
25 115. Je voudrais tout d'abord faire référence à la pièce AD1, la lettre
26 signée de George Mano.
27 R. Oui. Non, je n'ai pas ce document.
28 Q. Oui, je sais. Je crois comprendre que vous avez eu connaissance de
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1 cette lettre en septembre, octobre 2004.
2 R. Oui, septembre, je crois.
3 Q. Et vous avez pu --
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que le greffier vous a permis de rédiger une
6 réponse ?
7 R. Le greffe ne m'a pas interdit. Je peux évidemment écrire.
8 Q. Très bien. En ce qui concerne cette lettre, à proprement parler,
9 pourriez-vous nous dire ce que vous pensez des accusations portées dans
10 cette lettre ?
11 R. Ça fait bien longtemps que je n'ai pas lu cette lettre. Je vais essayer
12 de m'en souvenir au mieux. Il y avait certaines insultes personnelles
13 cherchant à me détruire, évidemment, mais je crois qu'il se plaignait
14 particulièrement de l'exercice sur les faits reconnus.
15 Ça, je m'en souviens. Il me semble également que George Mano n'avait pas de
16 formation juridique, et je ne lui en tiens pas rigueur, mais il n'avait pas
17 vraiment d'idée de ce que nous cherchions à faire. Ce pourquoi je lui en
18 tiens rigueur, c'est qu'il ne reconnaissait pas qu'il ne savait rien. Il
19 est vrai que nous ne sommes jamais devenus de grands amis, mais lorsqu'il
20 me demandait si je pourrais demander au greffier si lui aurait eu le droit
21 d'aller voir M. Krajisnik seul, parce que disait-il, et je cite : "J'ai
22 quelques questions à lui poser," je lui ai répondu : "Non". Lorsqu'il m'a
23 demandé : "Pourquoi ?" je lui disais : "Je pense que le greffe ne vous le
24 permettra pas," et franchement, ça ne me servirait à rien.
25 Il a commencé à s'agiter. Il trouvait qu'un stagiaire devait pouvoir
26 faire ça, mais franchement ça me surprenait. Il avait un sacré toupet,
27 quand même. Je me souviens de l'avoir emmené avec moi. Après tout, j'aime
28 bien emmener mes stagiaires avec moi. C'est normal. Je crois que je l'avais
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1 emmené rencontrer M. Harmon, M. Tieger, M. Hannis.
2 Je voyais qu'à un certain moment M. Harmon a été surpris de voir que
3 George Mano a commencé à dire à l'autre bout de la table : "C'est
4 inacceptable." Franchement, quel culot. Visiblement, il avait l'impression
5 que ce qu'il nous fallait faire c'était apprendre tout ce qu'il y avait à
6 apprendre sur l'histoire de la Serbie, alors que nous, il nous semblait
7 qu'il fallait en connaître juste assez pour pouvoir aller de l'avant avec
8 ce procès.
9 Voilà certains éléments dont je me souviens. Mais je me souviens
10 effectivement qu'il y avait des accusations personnelles puis des choses
11 qui étaient extrêmement inexactes. Il disait que j'avais passé 15 jours en
12 Espagne, pendant 15 jours. C'est vrai que c'était le cas, mais j'y allais
13 avec mes enfants et je travaillais jusqu'à ce qu'ils se lèvent, soit vers
14 midi. Effectivement, j'y suis allé en Croatie pour quelques jours avec mon
15 nouveau-né qui devait avoir 1 an à peu près à l'époque. Ce n'était pas
16 complètement ridicule. En tout cas, c'était vraiment n'importe quoi, cette
17 lettre. Maintenant que vous m'en reparlez, j'en suis furieux encore
18 aujourd'hui.
19 Q. Très bien.
20 R. [aucune interprétation]
21 Q. Il dit que les avocats disent toujours que les clients sont l'ennemi
22 des avocats.
23 R. Oui. Evidemment, je m'en souviens. C'est effectivement un collègue en
24 Lettonie qui m'avait dit qu'effectivement dans son cabinet, tout le monde
25 dit c'est le client l'ennemi. D'accord, mais c'est une blague entre
26 avocats, c'est-à-dire qu'il faut effectivement poser des limites à
27 l'agitation des clients et faire preuve de jugement. C'est tout ce que je
28 disais.
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1 Q. Donc il vous a mal compris ?
2 R. Je pense que c'est faire preuve d'une grande générosité que dire qu'il
3 ne m'avait pas compris. En tout cas, il a complètement dévoyé ce que je
4 disais.
5 Q. Je vais passer au AD2 --
6 R. De toute façon, tout ce qu'il y a d'autre dans cette lettre c'est du
7 n'importe quoi.
8 Q. Très bien. Passons à cette lettre AD2. C'est une déclaration de Stefan
9 Karganovic, qui était le commis aux affaires d'avril 2005 à mai 2006; c'est
10 ça ?
11 R. Oui, jusqu'à avril, mai 2006.
12 Q. Il allègue que vous ne vous intéressiez pas particulièrement au
13 contexte historique et factuel de cette affaire. Que dites-vous ?
14 R. La même réponse. Je m'y intéressais juste suffisamment. D'ailleurs, M.
15 Krajisnik était critique parfois, c'est normal, mais je ne me souviens pas
16 qu'il ait fait preuve d'une grande critique quant à ce que nous disions.
17 D'ailleurs, je crois qu'il m'a parfois félicité sur ma compréhension des
18 événements.
19 Q. Sur les témoins qui apportaient des éléments de preuve politiques, est-
20 ce que M. Krajisnik participait à leur contre à la préparation du contre-
21 interrogatoire ?
22 R. Oui.
23 Q. Et à leur interrogatoire ?
24 R. Oui, bien sûr. Nous ne nous sommes jamais interdits d'aller parler à M.
25 Krajisnik. Nous nous rendions disponibles, il se rendait disponible,
26 félicitons-le aussi de sa disponibilité.
27 Q. Il est dit que du temps de Stefan Karganovic, la Défense était un grand
28 exercice d'improvisation ?
Page 696
1 R. Oui, ça décrit très bien M. Karganovic, oui. C'était un excellent
2 interprète et un excellent traducteur, ça c'est évident. Sans doute un des
3 meilleurs, le meilleur peut-être que j'aie jamais rencontré. Mais oui,
4 c'était de l'improvisation, j'ai déjà dit comment nous travaillions. S'il
5 est en train de décrire ce que j'ai déjà dit, alors c'est un terme exact.
6 Sinon, c'est inexact.
7 Q. Bien. Passons à AD4, la lettre à M. Zahar --
8 R. Oui.
9 Q. -- et les pièces jointes y attachées. Quelles étaient, d'après vos
10 souvenirs, les circonstances dans lesquelles vous avez préparé cette lettre
11 ?
12 R. Je crois me souvenir que le Juge Orie a insulté, a accusé l'étude de la
13 Défense dans toutes sortes de circonstances. Je crois me souvenir qu'il y
14 avait d'ailleurs eu des insultes ou des accusations directes de la Défense
15 alors même que nous travaillions dur et que nous faisions, me semble-t-il,
16 étant donné les circonstances, du bon boulot dans des circonstances
17 extrêmement difficiles. J'avais l'impression que ces modalités étaient
18 imposées sur nous. En ce qui concerne les derniers mois des arguments à
19 charge, juin, juillet 2005, c'était une catastrophe, je crois me souvenir,
20 un vrai cauchemar. Mme Loukas nous a quittés avant même qu'elle ait
21 réellement fini, c'était épuisant pour elle. Nous avions Me Josse qui nous
22 avait rejoints. Nous étions complètement perdus, d'une certaine façon, mais
23 nous travaillions extrêmement dur. Nous faisions de notre mieux et personne
24 ne le reconnaissait.
25 Q. Bien. Au cours du moment où vous avez représenté M. Krajisnik, avez-
26 vous jugé que vous n'étiez plus en mesure de défendre ses meilleurs
27 intérêts ? Avez-vous proposé de démissionner ?
28 R. Ça n'était pas envisageable, parce que lorsque Chrissa Loukas a demandé
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1 à quitter l'équipe dès octobre 2004, elle voulait rentrer chez elle,
2 simplement. Elle est rentrée de la période des vacances judiciaires et elle
3 a dit je veux rentrer chez moi, c'est-à-dire en Australie. Le greffe nous a
4 dit que ça ne serait pas possible, qu'il n'allait même pas envisager la
5 possibilité de modifier la composition de l'équipe de la Défense.
6 Finalement, nous avons réussi à organiser un changement et ça a été
7 extrêmement difficile. Il a fallu faire en sorte que ceci ne coûte rien
8 pour le greffe, ce qui a demandé beaucoup de travail à M. Josse par
9 ailleurs. Mais la directive qui s'applique à la commission d'office de
10 conseil de la Défense ne m'autorisait pas une démission quelle qu'elle
11 soit. J'ai dit à M. Krajisnik, assez tôt d'ailleurs, au moment sans doute
12 où Mme Loukas a demandé à pouvoir partir, je lui ai dit, "Monsieur
13 Krajisnik, je serai à vos côtés jusqu'à la fin de cette affaire."
14 Q. Parce que vous jugiez que c'était là une obligation qui vous incombait
15 d'un point de vue professionnel ?
16 R. Puis surtout parce que je voulais qu'il sache que certaines personnes
17 souhaitaient partir, abandonner l'équipe. Il n'en était pas content. Je lui
18 ai promis que je resterais à ses côtés jusqu'à la fin. Je crois que, je
19 dois le reconnaître, M. Krajisnik en a été reconnaissant. Il a toujours eu
20 l'esprit qu'il convenait d'avoir à ce moment-là et, bien sûr, je suis
21 resté.
22 Q. Bien. Je vous inviterais à examiner la page 7 192 du compte rendu
23 d'audience qui renvoie aux difficultés rencontrées par la Défense du fait
24 que M. Krajisnik n'a pas apporté sa contribution financière à l'équipe ou
25 au travail accompli par son équipe. (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 698
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 R. Manifestement, à l'évidence, ceci a eu une incidence négative, bien
6 sûr. C'était inévitable. Mais j'ai dit au greffe, et je pense l'avoir dit
7 également aux Juges de la Chambre à un moment donné ou à un autre, j'ai dit
8 que ce dont cette affaire avait besoin en réalité pour évoluer au rythme
9 choisi par la Chambre, c'était trois conseils, ou en tout cas plus de deux.
10 Q. Avez-vous obtenu ces trois conseils, finalement ?
11 R. Non.
12 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bien, il va falloir faire une pause.
13 Alors le moment s'y prête-t-il bien ?
14 M. KREMER : [interprétation] Oui, quand vous voulez.
15 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous allons faire une pause de 15
16 minutes.
17 --- L'audience est suspendue à 18 heures 03.
18 --- L'audience est reprise à 18 heures 18.
19 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous allons reprendre l'audience et je
20 donne la parole à M. Kremer afin qu'il poursuive --M. KREMER :
21 [interprétation] Merci.
22 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Le contre-interrogatoire.
23 M. KREMER : [interprétation]
24 Q. Monsieur Stewart, encore quelques questions avant de repasser en
25 audience publique. Je fais référence au paragraphe 9 de la lettre de M.
26 Karganovic. Je vais vous donner lecture de ce qu'il dit ici et je vous
27 demanderais de bien vouloir vous prononcer sur ce paragraphe. Voici ce
28 qu'il dit :
Page 699
1 "Il semble que l'équipe de la Défense n'a pas de plan sur lequel ils
2 se basent pour fonctionner, particulièrement dans la phase au cours de
3 laquelle la Défense a commencé à présenter ses éléments de preuve et ne
4 s'est plus contentée de réagir aux démarches de l'Accusation. La démarche
5 suivie par la Défense est plutôt de nature expérimentale et n'est pas
6 véritablement guidée par des orientations particulières."
7 Comment répondre à ceci ?
8 R. Je ne suis pas d'accord.
9 Q. Aviez-vous un plan, un plan de Défense, lorsque vous avez commencé à
10 présenter vos éléments à décharge ?
11 R. Oui, bien sûr. M. Josse est un conseil très expérimenté, et nous en
12 avons parlé largement avec lui. C'est vrai que nous n'avons pas
13 véritablement fait participer M. Karganovic à ces discussions.
14 Q. Et lorsque M. Mano était stagiaire au sein de l'équipe, a-t-il
15 participé aux discussions relatives à la stratégie que vous deviez suivre
16 au cours du procès ?
17 R. Non.
18 Q. Et M. Karganovic, a-t-il été invité à participer à des réunions entre
19 vous, M. Josse et les autres assistants juridiques pour évoquer cette
20 stratégie ?
21 R. Oui, oui. M. Karganovic était une personne très affable au sein de
22 l'équipe. Nous nous réunissions sous différentes formes et pas toujours
23 peut-être, mais pratiquement, M. Karganovic était à nos côtés lorsque nous
24 allions rendre visite à M. Krajisnik. Mais il y a eu énormément de
25 discussions entre M. Josse et moi-même sans que personne d'autre ne soit
26 présent, et c'est tout à fait normal.
27 Q. M. Karganovic a dit à la Chambre au cours de son témoignage qu'il vous
28 avait dit, à vous et à Chrissa Loukas, que ses recherches sur les
Page 700
1 allégations liées à M. Davidovic étaient erronées et qu'en dépit du fait
2 qu'il vous en ait informé le 27 juin, au cours de la matinée de l'audience,
3 dans l'après-midi, Chrissa Loukas lui a posé des questions pour savoir si
4 effectivement il avait extorqué des fonds à un certain médecin. Vous
5 souvenez-vous de cela ?
6 R. Je m'en souviens. Je me souviens du foin qu'a soulevé ce contre-
7 interrogatoire de M. Davidovic par Mme Loukas. Mais je ne me souviens pas -
8 - quoi, on suggère que Chrissa Loukas savait déjà que les allégations
9 étaient fausses avant même qu'elle interroge le témoin à cet effet ?
10 Q. Et que vous le saviez aussi. C'est ce que M. Karganovic a dit la
11 semaine dernière à cette Chambre.
12 R. C'est complètement faux. C'est absolument faux. C'est absolument faux
13 en ce qui concerne Chrissa Loukas, parce qu'à moins qu'elle n'ait menti du
14 début jusqu'à la fin là-dessus, je dois vous dire que je suis absolument
15 certain que cette allégation est totalement fausse eu égard à Chrissa
16 Loukas et je suis tout à fait sûr qu'elle est fausse me concernant
17 également.
18 Q. Bien.
19 M. KREMER : [interprétation] Peut-être pourrait-on repasser en audience
20 publique.
21 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Madame la Greffière, repassons en
22 audience publique.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur Stewart, excusez-moi, que la chose
24 soit tout à fait claire, parce qu'après tout, je sais que M. Karganovic a
25 déposé à huis clos partiel. C'est une allégation faite par M. Karganovic
26 selon laquelle Mme Loukas, alors qu'elle savait que l'information qu'elle
27 allait soumettre au témoin était fausse, alors donc qu'elle le savait, que
28 Mme Loukas a néanmoins présenté l'information au témoin ? Je suis désolé de
Page 701
1 me répéter, mais je suis sidéré. Est-ce ça que l'on a dit à propos de Mme
2 Loukas ?
3 M. KREMER : [interprétation]
4 Q. C'est l'interprétation que j'ai faite de ce qu'il a dit. Peut-être que
5 je pourrais vous donner lecture de ce qu'a dit M. Karganovic. Alors je fais
6 référence aux pages 484 et 485 du compte rendu :
7 "Qu'avez-vous dit exactement à Mme Loukas à propos de votre
8 conversation téléphonique ?"
9 Et c'est là que le témoin dit que c'est faux. Voici ce qu'il répond :
10 "J'ai dit à Mme Loukas que le médecin a dit que l'extorsion qui
11 faisait l'objet d'allégation, extorsion de M. Davidovic, n'avait en fait
12 pas été perpétrée. Le docteur a infirmé l'allégation qui avait été faite
13 par les enquêteurs de M. Krajisnik."
14 "Très bien." Et je poursuis la lecture : "Etiez-vous présent dans le
15 prétoire lorsque l'allégation a été présentée à M. Davidovic à propos de
16 ceci ?"
17 Et il répond : "J'en suis certain."
18 Ensuite, il y a une autre question : "Avez-vous dit à M. Stewart que
19 vous étiez préoccupé du contre-interrogatoire qui faisait l'objet
20 d'objections de la part de l'Accusation ?"
21 Et la réponse a été : "La Défense, oui," c'est-à-dire Mme Loukas et
22 M. Stewart, "savaient tous deux que cette conversation téléphonique avait
23 eu lieu, et les conjectures étaient les suivantes : M. Davidovic était un
24 personnage tellement puissant et intimidant que même s'il n'avait pas nui à
25 cette personne, ils n'auraient pas osé en parler."
26 Etiez-vous au courant ou pas ?
27 R. Je suis désolé. Je ne me souviens pas de tous les détails, tous les
28 tenants et aboutissants, mais à l'époque c'est vrai que toute la question
Page 702
1 avait fait un vrai foin; et j'en ai parlé à Chrissa Loukas, bien sûr.
2 La Chambre de première instance a fait part de ses grandes
3 préoccupations. Et je suis arrivé à la conclusion suivante : même si le
4 contre-interrogatoire de Chrissa Loukas avait été poussé jusqu'au bout en
5 ce qui concerne toutes les questions qu'elle était en mesure de poser au
6 témoin, je ne pense pas qu'elle avait dépassé les bornes. Or, c'est ici ce
7 que je crois lire de ce qui est dit ici, à savoir qu'elle aurait violé
8 certaines règles déontologiques et que -- non, non, je ne le crois pas.
9 Q. Je vais poser une question simple, Monsieur. M. Karganovic, vous a-t-il
10 dit que suite à cette conversation téléphonique, il avait appris que le
11 témoin dont on disait qu'il avait été l'objet d'une extorsion de la main de
12 M. Davidovic, que ce témoin donc avait dit qu'en réalité ces allégations
13 n'étaient pas fondées ? Vous l'a-t-il dit ?
14 R. Je --
15 Q. Le 27 juin --
16 R. Le 27 juin ?
17 Q. -- 2004, avant la déposition du témoin ?
18 R. Non, non, je suis certain que non. Non. Il y a eu beaucoup de
19 discussions par la suite, et je me souviens avoir exprimé mon
20 insatisfaction s'agissant de la fiabilité de l'information obtenue par M.
21 Karganovic. Je crois qu'il fallait effectivement creuser la question. C'est
22 ce qu'a fait Chrissa Loukas en posant un certain nombre de questions au
23 témoin. Mais dire qu'on nous avait prévenu comme cela et que nous avons
24 fait fi de ce que nous avions appris, et cetera, non, non. Je ne me
25 souviens pas des dates et je ne peux pas admettre une chose pareille.
26 M. KREMER : [interprétation] Nous pouvons repasser en audience publique
27 maintenant.
28 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à nouveau en audience
Page 703
1 publique.
2 [Audience publique]
3 M. KREMER : [interprétation]
4 Q. Bien. Je reviens à la stratégie de la Défense que vous avez déployée.
5 J'aimerais rajouter quelques éléments à la liste des différents éléments
6 qui ont constitué la stratégie de la Défense au moment de la présentation
7 des éléments de preuve à charge, puis des éléments de preuve à décharge. Y
8 a-t-il eu tentative pour démontrer que M. Krajisnik n'avait aucune
9 connaissance des crimes qui avaient été perpétrés sur le terrain ?
10 R. Oui.
11 Q. Puis il y a eu également une tentative qui visait à montrer que M.
12 Krajisnik, enfin, qu'il n'y avait pas de plan criminel commun, et en tout
13 cas que M. Krajisnik n'en faisait pas partie ?
14 R. Oui.
15 Q. Oui ?
16 R. Oui et oui.
17 Q. Bien. Finalement, vous avez déposé un mémoire final dans cette affaire,
18 n'est-ce pas ?
19 R. Oui.
20 Q. Et tous ces éléments faisant partie de la stratégie de la Défense ont
21 été repris dans ce mémoire final. Vous avez d'abord contesté la manière
22 dont l'Accusation avait dépeint ces différents événements et vous avez
23 également montré pourquoi votre version devait être privilégiée au
24 détriment de celle de l'Accusation, n'est-ce pas ?
25 R. Oui, je le crois, oui.
26 Q. Bien. Alors quelques points sur l'entreprise criminelle commune.
27 Lorsque vous avez pris cette affaire, vous avez bien saisi que l'un des
28 pivots des arguments présentés par l'Accusation par M. Krajisnik était
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1 précisément cette thèse de l'entreprise criminelle commune ?
2 R. Bien, oui. J'ai dû, bien sûr, lire l'acte d'accusation avant d'avoir
3 accepté cette affaire, et je vous répondrai par l'affirmative. Je ne crois
4 pas avoir jamais entendu parler du concept d'entreprise criminelle commune
5 avant cela dans ma vie.
6 Q. Très bien. Avant le début du procès en février 2004, vous étiez-vous
7 pleinement familiarisé avec la notion d'entreprise criminelle commune ?
8 R. Oui, bien sûr, et Mme Loukas également, parce que nous avons été en
9 mesure de saisir le concept sans aucun document de la part de M. Brashich.
10 Bien sûr, oui, nous avions l'acte d'accusation. Ce n'est pas que nous
11 étions complètement démunis.
12 Q. Bien. Au départ, en attendant d'obtenir tous les documents, vous avez
13 dû procéder à certaines recherches juridiques, procéder à une réflexion
14 juridique pour faire face à un certain nombre de difficultés ou de défis
15 factuels connexes que vous alliez rencontrer plus tard dans le courant du
16 procès ?
17 R. Oui. Au tout début, effectivement, c'était la seule chose que nous
18 puissions faire; et c'était par ailleurs quelque chose de tout à fait
19 logique. Chrissa était une juriste tout à fait expérimentée, mais
20 néanmoins, je crois que cette entreprise criminelle commune était une bête
21 dont nous n'avions jamais entendu parler.
22 Q. Je ne pense pas que vous ayez répondu à ma question. Vous l'avez fait,
23 n'est-ce pas, cette recherche, cette réflexion ?
24 R. Oui, excusez-moi, bien sûr.
25 Q. Bien. Et vous saviez alors quels étaient les différents éléments
26 inhérents au mode de responsabilité lié à l'entreprise criminelle commune ?
27 Vous les aviez à l'esprit au moment du contre-interrogatoire des témoins de
28 l'Accusation ?
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1 R. Bien sûr.
2 Q. Et dans votre mémoire final, vous avez indiqué que l'entreprise
3 criminelle commune, dans la forme plaidée, si vous voulez, n'était pas le
4 mode de responsabilité approprié en l'espèce et que les conditions
5 nécessaires à l'établissement des responsabilités au titre d'une entreprise
6 criminelle conjointe n'étaient pas réunies en la présente affaire ?
7 R. Oui, en effet, et nous avons quelques renforts pour procéder à ce
8 travail à l'époque, oui. Nous avions Mme Butler, qui était un cerveau, en
9 l'occurrence, qui nous a beaucoup aidés, puis des stagiaires par ailleurs.
10 Donc la réponse est oui.
11 Q. Bien. Et Mme Butler a rejoint l'équipe de la Défense septembre 2005 ?
12 R. Oui.
13 Q. A ce moment-là ?
14 R. Oui, à peu près.
15 Q. Bien. Et elle a recruté à son tour quelques stagiaires pour aider à la
16 rédaction du mémoire final ?
17 R. Oui, effectivement. Ils ont procédé aux analyses et ils ont rassemblé
18 les documents, et cetera.
19 Q. Bien. S'agissant de l'entreprise criminelle commune, le mémoire final
20 de ces pages 39 à 58 traite précisément de cette question ?
21 R. Bien, je vous crois sur parole s'agissant de la pagination, oui. Mais
22 en tout cas, il contient effectivement une rubrique sur ce point.
23 Q. Bien. Et à votre connaissance, M. Karganovic, a-t-il jamais demandé à
24 participer à ces discussions sur l'entreprise criminelle commune ?
25 R. Je n'en sais rien. J'en doute. J'en doute, pour être tout à fait
26 honnête. J'en doute vraiment. Au moment où nous avons rédigé ce mémoire, il
27 n'était déjà plus là.
28 Q. Bien.
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1 R. Il avait quitté l'équipe quelques mois auparavant. Non, je ne le crois
2 pas. Non, je ne pense pas.
3 Q. Bien. Au cours de la période que vous avez passée à défendre M.
4 Krajisnik, pensez-vous qu'à un moment donné ou à un autre, vous n'avez pas
5 respecté les obligations professionnelles qui étaient les vôtres, à savoir
6 de protéger et de défendre au mieux les intérêts de votre client ?
7 R. Non, pas du tout. Pas du tout. Mon devoir professionnel consistait à me
8 pousser à faire de mon mieux. Je pense effectivement que j'ai accompli mon
9 devoir professionnel, pour répondre à votre question. Mais je dois vous
10 dire néanmoins que -- bon, bien sûr, mon devoir professionnel, ce n'est pas
11 seulement de faire de mon mieux. Ce mieux doit se situer à un certain
12 niveau de qualité. Mais je veux que les choses soient tout à fait claires,
13 j'ai fait de mon mieux, moi-même et mon équipe, et je pense que, ce
14 faisant, nous avons accompli notre devoir professionnel.
15 Q. Bien. A la fin du procès, il me semble avoir compris que M. Krajisnik a
16 demandé à ce que vous-même et M. Josse soient ajoutés à la liste des
17 personnes chargées de l'aider dans le cadre de son appel. Vous souvenez-
18 vous avoir parlé à M. Krajisnik de cette possibilité ?
19 R. Je ne suis pas certain. Je ne me souviens pas avoir été ajouté à cette
20 liste. En fait, je croyais ne pas l'avoir été, mais peut-être que ma
21 mémoire me fait défaut. Je crois que --
22 Q. Bien.
23 R. En tout cas, M. Josse a été ajouté à la liste, parce que je crois
24 d'ailleurs que M. Josse a aidé -- est-ce que c'est au sein de l'équipe de
25 M. Nicholls ou autre, je ne sais pas, depuis qu'il est devenu ami de la
26 Cour, ou est-ce qu'il était conseil de M. Krajisnik, je ne sais plus. Mais
27 en tout cas, il était inscrit sur cette liste.
28 Q. Bien. Et vous avez dit que M. Krajisnik avait été un client très
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1 difficile pendant le procès. En tout cas, une fois, M. Krajisnik a essayé
2 de défendre une requête visant à assurer sa propre défense.
3 R. Oui. Je ne lui en veux pas d'avoir été difficile.
4 Q. Non, non.
5 R. Mais c'est un fait, il l'a été.
6 Q. Vous avez fini par parvenir à un consensus avec la Chambre de première
7 instance. Il a été autorisé à poser des questions dès lors que la Chambre
8 l'y autorisait, des questions aux témoins de l'Accusation, mais également à
9 des témoins de la Défense ?
10 R. Oui, en effet. C'était là une solution très peu satisfaisante. En tant
11 que conseil, après tout j'ai été conseil pendant tout le procès, bon, je
12 n'ai pas considéré que ceci allait dans l'intérêt de M. Krajisnik, en tout
13 cas, de lui conférer ce droit parce qu'il allait l'exercer.
14 Je le dirai de manière très franche, il me semble que les circonstances
15 dans lesquelles la question s'est retrouvée sur le tapis, c'était la
16 déposition de M. Bjelobrk, pourquoi M. Krajisnik s'est-il vu conférer ce
17 droit. Bien, pour des raisons qui, à mon avis, ne sont pas bonnes. Voici ce
18 qui s'est passé : il nous fallait plus de temps pour que M. Krajisnik
19 puisse me donner les instructions nécessaires dans le cadre du contre-
20 interrogatoire de ce témoin, M. Bjelobrk; et si mon souvenir est bon, la
21 Chambre de première instance a dit, mais puisque M. Krajisnik connaît tout
22 ceci dans le détail, pourquoi ne procéderait-il pas à la suite du contre-
23 interrogatoire, et j'ai fait objection; j'ai dit à ce moment-là que ceci
24 n'était pas une bonne raison pour contourner le conseil, en quelque sorte,
25 et donner à son client le droit de poser des questions. En fait, bien sûr,
26 ça s'insérait bien dans la démarche globale, parce qu'en réalité, l'idée
27 c'était de gagner du temps et de permettre, si possible, à M. Bjelobrk de
28 terminer sa déposition le vendredi, même si je crois qu'au final il a dû
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1 revenir ultérieurement.
2 Mais il me semble là que les raisons invoquées n'étaient pas les bonnes.
3 C'était une décision injuste parce qu'il était évident que M. Krajisnik
4 allait, bien sûr, saisir l'occasion qui lui était donnée de poser des
5 questions, ce que je ne lui reproche pas, mais malheureusement, ceci allait
6 être un peu contraire à ses intérêts. Et je l'ai dit à M. Harhoff, j'étais
7 un peu agacé, parce que je savais que ceci allait provoquer des conflits
8 considérables entre
9 M. Krajisnik et moi-même, c'était inévitable, et c'était vraiment contre-
10 productif, et je l'ai dit à M. Harhoff, bien sûr, je souhaitais qu'il fasse
11 passer le message. J'ai pensé que c'était contre-productif et que ceci
12 allait provoquer des conflits tout à fait inutiles entre M. Krajisnik et
13 moi-même, que c'était contraire à ses intérêts. Et j'ai d'ailleurs essayé
14 de solliciter des conseils de la part de l'association des conseils de la
15 Défense, et de mon barreau en Angleterre.
16 Q. Mais vous avez fait objection ?
17 R. Oui, absolument. J'ai fait objection à de multiples reprises.
18 Q. Oui.
19 R. Oui, bien sûr. Evidemment je n'allais pas me lever et faire objection
20 tous les matins, mais quoi qu'il en soit mes objections ont été rejetées.
21 Q. Très bien. S'agissant des moyens matériels dont vous disposiez, à
22 plusieurs reprises vous avez dit que vous disposiez d'une équipe très forte
23 à la fin du procès.
24 R. En effet.
25 Q. Et au cours de la précédente de présentation des éléments à décharge,
26 serait-il exact de dire que l'équipe était également
27 forte ?
28 R. Ça a dépendu. Mais oui, au final.
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1 Q. Très bien. Et au cours de cette période de présentation des éléments à
2 décharge, on peut dire, n'est-ce pas, que vous n'avez pas rencontré les
3 mêmes crises ou les mêmes difficultés que celles que vous avez rencontrées
4 au cours de la présentation des moyens à
5 charge ?
6 R. Oui. Je crois que les choses étaient différentes. Je crois qu'il faut
7 reconnaître ça. Les difficultés n'étaient pas les mêmes. Les difficultés
8 physiques étaient plus importantes, matérielles, et on nous a d'ailleurs
9 octroyé davantage de fonds au cours des derniers mois de l'affaire. Mais
10 oui, c'est vrai, la composition de l'équipe, le nombre de membres de
11 l'équipe a changé au fil du temps. Mais tout à la fin, c'est vrai que même
12 si l'équipe était relativement petite en nombre, elle était de haute tenue.
13 Q. Pouvez-vous citer un témoin de l'Accusation pour lequel vous avez jugé
14 que votre contre-interrogatoire d'un point de vue professionnel n'était pas
15 suffisamment bon ?
16 R. Je n'ai pas procédé à l'exercice qui consisterait à revoir les comptes
17 rendus pour essayer de voir à quel endroit mon contre-interrogatoire avait
18 péché par manque de qualité. Je ne l'ai pas fait, je ne me suis pas livré à
19 cet exercice.
20 Q. Vous êtes-vous livré à l'exercice pour les contre-interrogatoires
21 réalisés par Me Loukas ou Me Josse ?
22 R. Non.
23 Q. Donc vous n'êtes pas en mesure de citer un témoin en particulier dont
24 le contre-interrogatoire n'a pas été mené de manière efficace ou a été
25 entravé du fait du manque de temps de préparation, du manque de capacité à
26 examiner les documents, et cetera ?
27 R. Non, je n'ai pas procédé à l'exercice, mais lorsque l'on examine le
28 compte rendu, je crois qu'on verra bien le nombre de fois où j'ai protesté
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1 du fait du manque de temps.
2 M. KREMER : [interprétation] Je n'ai plus de questions.
3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Je me tourne donc vers M.
4 Krajisnik pour les questions supplémentaires.
5 Pardon, le Juge Shahabuddeen souhaite intervenir avant M. Krajisnik.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge Shahabuddeen, je
7 ne vous entendais pas.
8 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] J'aimerais revenir aux raisons
9 que vous avez invoquées pour ne pas solliciter une suspension du procès, un
10 point qui a été évoqué par Me Nicholls dans ses questions. Ai-je bien
11 compris la position que vous avez défendue, à savoir qu'aujourd'hui vous
12 pourriez avoir certaines raisons vous poussant à remettre en question
13 certaines des décisions prises par le passé mais que, à l'époque, compte
14 tenu des circonstances de l'espèce, les décisions que vous avez prises à
15 l'époque l'ont été sur la base de l'opinion que vous aviez des choses en
16 tant que professionnel honnête ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait, c'est exact.
18 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] J'aimerais vous poser une autre
19 question, la voici : vous vous souvenez de ce que vous avez dit, à savoir
20 que vous n'aviez pas pu lire plus de 15 % de l'ensemble des documents ? Je
21 n'ai pas moi-même le document sous les yeux, mais c'est une déclaration qui
22 aurait été faite par vous-même et non pas par les autres membres de votre
23 équipe.
24 Qu'en pensez-vous ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que j'allais poser la question il y a
26 une heure de cela, la question qui m'avait été posée, c'était est-ce que
27 moi, personnellement, je n'ai pas lu tout ça, ou est-ce que c'est toute
28 l'équipe, je ne sais pas. Je crois que vous avez tout à fait raison de
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1 relever cette question, Monsieur les Juges.
2 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Oui.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Juge, je crois
4 comprendre que votre question est de savoir si personnellement je n'avais
5 pas lu plus de 15 % des documents.
6 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Oui.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, si je l'ai dit, et je l'ai
8 dit à l'époque, je ne pense pas pouvoir faire un commentaire pertinent et
9 utile aujourd'hui de la position exacte.
10 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Je comprends de ce que vous
11 dites que vous n'aviez pas lu plus de 15 % du dossier et de tous les
12 éléments, je ne crois pas que vous disiez à l'époque que votre équipe dans
13 son ensemble n'avait pas lu plus de 15 % du document.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas absolument certain de ce que
15 j'ai dit à l'époque, mais en ce qui me --
16 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Une dernière question : qui a
17 interrogé M. Krajisnik ? Vous avez dit qu'il a apporté un témoignage
18 pendant 40 jours, que 23 des ces jours avaient été passés pendant
19 l'interrogatoire principal. Qui l'a interrogé ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai fait l'essentiel de l'interrogatoire. Me
21 Josse a posé des questions pendant deux ou trois jours, je crois qu'il
22 avait posé des questions particulièrement sur les conversations
23 interceptées, mais je ne sais pas si c'était tout ce dont il s'est occupé.
24 M. LE JUGE SHAHABUDDEEN : [interprétation] Merci.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
26 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci. Juge Meron, vous avez la parole.
27 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous nous avez dit
28 tout à l'heure en répondant aux questions de M. Kremer il y a quelque temps
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1 de cela que vous ne pouviez pas identifier un moment particulier pendant
2 lequel vous ou Mme Loukas avez manqué de temps pour procéder au contre-
3 interrogatoire. Il faudrait que je vérifie, mais dans ce que vous nous avez
4 dit aujourd'hui même en répondant aux questions des Juges, j'avais
5 l'impression qu'effectivement votre contre-interrogatoire avait souffert
6 tout simplement, parce que vous n'aviez pas eu assez de temps et que vous
7 avez dû interrompre vos contre-interrogatoires sur des questions
8 d'importance. Pourriez-vous m'éclairer ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne crois pas qu'il y ait contradiction,
10 Monsieur le Juge. On m'a demandé d'identifier un témoin ou une liste de
11 témoins particuliers; ça, je ne peux pas le faire. Je ne peux pas donner de
12 nom, puisque je n'ai pas relu le compte rendu d'audience de tous mes
13 contre-interrogatoires.
14 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Et la proposition générale.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] La proposition générale.
16 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous vous en tenez à ce que vous avez
17 dit tout à l'heure à propos des contre-interrogatoires ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, en effet, Monsieur le Juge. Sans pouvoir
19 donner des noms exacts, nous avions cette compréhension de ce qu'il nous
20 manquait du temps pour procéder au contre-interrogatoire.
21 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc ce que vous avez répondu à M.
22 Kremer c'est que vous ne pouvez pas identifier par nom l'un ou l'autre des
23 témoins.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, mais cette affaire s'est conclue il
25 y a deux ans de cela, et je n'ai pas relu le compte rendu d'audience de
26 l'affaire Krajisnik.
27 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Donc vous vous en tenez à ce que vous
28 avez dit tout à l'heure, mais vous ne pouvez pas donner d'exemple concret;
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1 c'est cela ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Juge vous avez tout
3 compris parfaitement.
4 M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin.
5 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je donne désormais la parole à M.
6 Krajisnik qui peut poser des questions supplémentaires. Vous avez 20
7 minutes pour ce faire.
8 L'APPELANT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Nouvel interrogatoire par M. Krajisnik :
10 Q. [interprétation] Maître Stewart, à plusieurs reprises aujourd'hui vous
11 nous avez dit - et je vais vous donner quelques exemples - que vous n'avez
12 pas eu assez de temps pour vous préparer, vous nous avez dit que vous
13 deviez éteindre l'incendie comme il se déclenchait; aux pages 35 et 36 du
14 compte rendu de l'audience de ce jour, vous avez dit, par exemple, que vous
15 n'avez pas eu assez de temps pour interroger des témoins-clés et que cela
16 était particulièrement vrai de Mme Plavsic et de M. Djeric.
17 Ma question est la suivante : le Procureur vous a proposé aujourd'hui une
18 analyse de votre approche qui était de disjoindre les activités de M.
19 Krajisnik des crimes, de montrer qu'il n'y avait pas de lien entre lui et
20 les criminels directs, qu'il n'était pas un membre de la présidence, qu'il
21 n'était pas un membre de l'entreprise criminelle conjointe et qu'il n'était
22 finalement que le président de l'assemblée et un membre de l'équipe de
23 négociation.
24 Ma question est la suivante : le manque de temps dont vous avez parlé et le
25 fait même que vous n'ayez pas eu les moyens de vous préparer de façon
26 adéquate étaient-ils des raisons pour lesquelles vous n'avez pas pu
27 apporter la preuve de votre argumentaire ? M. Kremer vous a fourni certains
28 éléments particuliers, et je viens de vous donner quelques suggestions.
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1 Est-ce que bien le cas ?
2 R. Monsieur Krajisnik, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges,
3 je ne comprends pas, je ne peux pas vous dire exactement pourquoi nous
4 n'avons pas pu réussir à dissiper les accusations de l'Accusation, je ne
5 sais pas pourquoi nous n'avons pas pu argumenter adéquatement. Je crois,
6 Madame, Messieurs les Juges, qu'il y a plus en jeu que des questions de
7 temps. Et je ne sache pas qu'il faille que j'en parle.
8 Q. Très bien. Merci. J'espère que la Chambre d'appel se prononcera sur
9 l'influence et l'importance du manque de temps sur l'incapacité que vous
10 avez eu à remplir la mission que vous vous étiez fixée.
11 J'ai désormais trois questions brèves à vous poser. Et j'espère vous les
12 poser de façon très claire, il semble qu'il y ait un malentendu qu'il
13 faille dissiper, je voudrais parler de Davidovic et Karganovic.
14 Je voudrais vous rappeler certains éléments du procès. Vous souvenez-vous
15 pourquoi Chrissa Loukas avait interrogé M. Davidovic d'extorsion de fonds ?
16 R. Comme je l'ai déjà dit, Monsieur Krajisnik, je n'en ai pas un souvenir
17 exact et précis. Non.
18 Q. Et si je vous disais que Me Loukas avait à sa disposition une
19 déclaration rédigée par les enquêteurs du Tribunal, est-ce que cela
20 rafraîchirait votre mémoire ?
21 R. Ce dont je me souviens c'est que -- j'ai dit ce que j'ai dit,
22 qu'effectivement j'avais fait une enquête et qu'il me fallait faire ces
23 éléments. Nous avons examiné cette question avec Me Loukas et nous en
24 sommes arrivés à la conclusion que j'ai exposée dans mes réponses aux
25 questions de M. Kremer, mais je ne suis pas en mesure aujourd'hui de me
26 souvenir des détails, malgré le rafraîchissement de ma mémoire que vous me
27 proposez.
28 Q. Très bien. Une dernière question. La dernière ou l'avant-dernière peut-
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1 être.
2 L'Accusation vous a rappelé aujourd'hui que Krajisnik vous a préparé toutes
3 sortes de documents et vous les a soumis, la question est la suivante :
4 nous ne pouvions pas communiquer en direct, je ne parle pas anglais, Maître
5 Stewart, vous ne parlez pas le serbe, n'est-ce pas ?
6 R. C'est exact.
7 Q. Est-ce que les ressources en manière d'interprétation et de traduction
8 étaient une restriction quant à la compréhension des documents que je vous
9 soumettais ?
10 R. Monsieur Krajisnik, c'était évidemment une source de frustration de
11 votre part et c'était évidemment naturellement un élément supplémentaire de
12 travail pour nous. C'était vrai de Mme Cmeric lorsqu'elle était commis aux
13 affaires, c'était effrayant, effectivement comme charge de travail, c'était
14 également vrai de M. Sladojevic ultérieurement, vous savez parfaitement que
15 je respecte éminemment son travail, le matériel était là, les équipements
16 étaient là. Et vous savez très bien, Monsieur Krajisnik, qu'ils ont lu,
17 trié avant de me passer des documents. Sinon ils seraient encore en train
18 de travailler sur les traductions aujourd'hui. J'exagère peut-être un peu,
19 mais vous comprenez ce que je veux dire.
20 Monsieur Krajisnik, nous avons parfaitement examiné les documents que vous
21 nous soumettiez. Nous le faisions en équipe, par étapes, de façon déléguée,
22 c'est normal.
23 Q. Dernière question si vous le voulez bien : vous nous avez dit - et
24 c'est exact - que j'ai apporté un témoignage pendant 40 jours. Considérez-
25 vous qu'un témoignage de la part de l'accusé pourrait avoir compensé le
26 déséquilibre en termes de témoins cités à comparaître par l'Accusation et
27 par la Défense, ou est-ce que nous l'avons fait pour compenser le fait que
28 nous n'ayons pas pu citer à comparaître les témoins que nous aurions voulu
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1 citer ?
2 R. Pardon -- est-ce que vous êtes en train de nous dire en fait que je
3 vous ai cité à comparaître parce que nous étions obligés de le faire; c'est
4 ça ? Je n'ai pas bien compris.
5 Q. Non, ce n'est pas ça. Je repose ma question si vous me le permettez.
6 R. Je vous en prie.
7 Q. Considérez-vous que citer l'accusé à comparaître, un accusé qui a
8 comparu comme témoin pendant 40 jours, pouvait compenser le déséquilibre du
9 nombre de témoins cités à comparaître par l'Accusation et par la Défense
10 tout simplement, parce que nous n'avons pas réussi à préparer plus de
11 témoins à décharge ?
12 R. Monsieur Krajisnik, vous nous avez dit clairement et dès le départ
13 qu'effectivement vous déposeriez. Je dirais, quelle que soit la pertinence
14 de votre témoignage, que l'accusé lui-même vaut de nombreux témoins, tout
15 simplement parce que vous avez une connaissance intime des sujets en cours,
16 donc si l'on devait peser les témoignages, vous avez certainement dû
17 représenter un certain nombre de témoins, oui, certainement.
18 L'APPELANT : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les
19 Juges, je voudrais vous remercier et vous reverser les cinq minutes que
20 vous m'aviez accordées au départ.
21 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci, Monsieur Krajisnik.
22 Ceci nous amène à la conclusion de l'interrogatoire du témoin. Maître
23 Stewart, la Chambre d'appel vous remercie d'avoir apporté votre témoignage.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges.
25 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous pouvez vous retirer.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
27 [Le témoin se retire]
28 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Ceci conclut également notre audience
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1 de ce jour. La Chambre d'appel lève la séance. La séance est levée.
2 --- L'audience d'appel est levée à 18 heures 59.
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