Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (L'audience est ouverte à 9 heures 30.)

  2   (Audience publique avec mesures de protection.)

  3   M. le Président (interprétation): Veuillez citer l'affaire.

  4   Mme Chen (interprétation): Il s'agit de l'affaire IT-97-25-T, le

  5   Procureur contre Krnojelac.

  6   M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, quel est votre prochain

  7   témoin? Excusez-moi, Maître Vasic, je ne m'étais pas rendu compte que Me

  8   Bakrac n'était pas à l'audience aujourd'hui.

  9   M. Vasic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour Madame

 10   et Monsieur les Juges. Je représenterai la défense aujourd'hui, puisque Me

 11   Bakrac avait quelques engagements en rapport avec la présente affaire

 12   qu'il ne pouvait repousser. Nous avons maintenant un témoin protégé, le

 13   Témoin A. Je vais demander à M. l'huissier de bien vouloir m'amener le

 14   témoin dans le prétoire.

 15   (L'huissier s'exécute.)

 16   (Le Témoin A est introduit dans le prétoire.)

 17   M. le Président (interprétation): Veuillez donner lecture de la

 18   déclaration solennelle qui vous est remise maintenant, un document qui

 19   vous permettra de le faire.

 20   Témoin A (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

 21   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 22   M. le Président (interprétation): Madame, je vous remercie. Veuillez vous

 23   asseoir.

 24   Maître Vasic, vous avez la parole?

 25   (Interrogatoire principal du Témoin A par Me Vasic.)


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   1   M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

  2   Bonjour Madame.

  3   Témoin A (interprétation): Bonjour.

  4   Question: Etant donné que vous êtes un témoin protégée, je vais demander à

  5   l'huissier de bien vouloir vous remettre le document qui porte la cote

  6   IDD-148.

  7   Réponse: Je vous remercie.

  8   Question: Madame, sur cette feuille de papier figure votre nom, nom de

  9   famille de femme mariée ainsi que votre de jeune fille?

 10   Réponse: Oui.

 11   Question: Etant donné que vous êtes témoin protégée, vous serez aux fins

 12   de cet interrogatoire le "Témoin A".

 13   Réponse: Oui.

 14   Question: A la ligne 2, est-ce qu'il est dit quel est votre lieu ainsi que

 15   votre date de naissance?

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: Etant donné que vous êtes témoin protégée, je vais vous demander

 18   la chose suivante, Madame: lorsque vous évoquez des lieux mentionnés aux

 19   lignes 3 et 4, est-ce que vous pourrez parler de la ville qui figure à la

 20   ligne A, ville "A", et celle qui figure à la ligne 4, ville "B"? Etes-vous

 21   d'accord?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: Je vous demanderai aussi ne de ne pas donner le nom de votre

 24   père. Dites simplement qu'il s'agit de votre père si vous le mentionnez.

 25   Réponse: Oui.


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  1   Question: A la ligne 5, est-ce que l'on voit figurer le nom de votre père,

  2   Madame?

  3   Réponse: Oui.

  4   Question: A la ligne suivante, est-ce que l'on trouve le nom de votre ami?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Quand vous mentionnerez cet ami, veuillez dire qu'il s'agit de

  7   votre ami sans mentionner son nom.

  8   Témoin A (interprétation): D'accord.

  9   M. le Président (interprétation): Il s'agira de la pièce D148 versée sous

 10   pli confidentiel. Pourrait-on veiller à ce que mon microphone fonctionne.

 11   Je vous remercie.

 12   M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

 13   Est-ce que je peux poursuivre, Monsieur le Président?

 14   M. le Président (interprétation): Evidemment, excusez-moi.

 15   M. Vasic (interprétation): Merci.

 16   Madame, dans la ville A, est-ce que c'est là que vous avez terminé l'école

 17   primaire ainsi que l'école secondaire?

 18   Témoin A (interprétation): Oui.

 19   Question: Est-ce que vous êtes mariée?

 20   Réponse: Oui.

 21   Question: Et vous vous êtes mariée quand? En quelle année?

 22   Réponse: En 1981.

 23   Question: Pourriez-vous nous dire à quel moment vous avez déménagé de la

 24   ville A pour vous installer dans la ville B?

 25   Réponse: Je crois que c'était en en 1981/1982.


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  1   Question: Est-ce que vous avez déménagé pour vous installer dans la ville

  2   B avec votre famille?

  3   Réponse: Oui.

  4   Question: Est-ce que vous avez exercé un métier, un emploi dans cette

  5   ville B?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Et jusqu'à quel moment avez-vous travaillé dans cette ville B?

  8   Réponse: Jusqu'au 4 avril 1992, jusqu'au début de la guerre.

  9   Question: Et après le début de la guerre, est-ce que vous avez obtenu des

 10   informations concernant votre famille, votre père, votre mère, votre

 11   soeur?

 12   Réponse: En octobre 1992, j'ai découvert que mon père avait été emmené et

 13   sans doute tué. Quant à ma soeur et ma mère, je n'étais pas au courant à

 14   ce propos mais le 4 avril, ou le 5, j'avais discuté avec elles par

 15   téléphone et elles avaient déménagé dans la municipalité voisine. C'est à

 16   peu près tout. Pendant deux ans, je n'ai plus rien eu en tant que

 17   nouvelles en ce qui concerne ma mère et ma soeur. 

 18   Question: Et votre mère ainsi que votre soeur, est-ce-qu'elles vous ont

 19   donné des nouvelles après deux ans? Est-ce que vous avez appris qu'elles

 20   étaient en vie et en bonne santé?

 21   Réponse: Oui. 

 22   Question: Est-ce que votre mère et votre soeur sont parties s'installer

 23   dans la municipalité voisine avant que le début du conflit n'éclate? 

 24   Réponse: Sans doute un jour avant le début du conflit.

 25   Question: Est-ce que vous savez pourquoi votre mère et votre soeur sont


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  1   parties un jour avant le début du conflit?

  2   Réponse: Oui, je le sais. Beaucoup sont partis de la municipalité où

  3   habitaient mes parents quelle que soit leur appartenance ethnique. En

  4   règle générale, c'était les femmes et les enfants que l'on faisait sortir

  5   des villages.

  6   Question: Est-ce que c'était à cause des tensions interethniques qui

  7   prévalaient à l'époque?

  8   Réponse: Oui. Probablement. 

  9   Question: Est-ce que vous pourriez me dire à quel moment vous êtes revenue

 10   de la ville B dans la ville A?

 11   Réponse: Le 23 janvier 1993.

 12   Question: Et est-ce qu'il vous était possible d'aller directement de B à

 13   A, ou est-ce qu'il vous a fallu d'abord traverser des territoires voisins?

 14   Réponse: Oui, j'ai dû contourner toute cette portion du territoire,

 15   prendre un chemin bien plus long en passant par la Serbie et le

 16   Monténégro.

 17   Question: Et est-ce que vous avez emprunté cette route qui longe en fait

 18   la route? Parce que le long de la route qui mène directement de A à B, il

 19   y avait encore des combats?

 20   Réponse: Tout à fait.

 21   Question: Est-ce que vous êtes rentrée dans la maison familiale de la

 22   ville A?

 23   Réponse: Oui.

 24   Question: Est-ce que vous êtes rentrée dans cette maison avec tous les

 25   membres de votre famille?


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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Est-ce que vous pourriez nous dire ce qu'il en est de l'état

  3   dans lequel se trouvait la ville A, lorsque vous êtes rentrée en janvier

  4   1993? Qu’en était-il en matière d'approvisionnement élémentaire par

  5   exemple?

  6   Réponse: Vous voulez parler de ce que l’on trouvait dans les magasins?

  7   Question: Oui, dans les magasins.

  8   Réponse: Il n'y avait pas vraiment grand-chose de quoi que ce soit, les

  9   habitants de la localité n'avaient pratiquement plus d'argent. Il n'y

 10   avait pratiquement rien non plus à acheter dans les magasins, à peine

 11   quelques articles qui étaient déjà périmés.

 12   Question: Dites-nous comment se présentait la situation par rapport au

 13   pain que l'on pouvait trouver dans les magasins dans la ville A.

 14   Réponse: Je ne pense pas qu'il y avait du pain. Moi, je n'avais pas

 15   d'argent donc, de toute façon, je ne pouvais pas me permettre d'aller

 16   chercher du pain, mais je pense qu’il n'y en avait pas dans les magasins.

 17   Et j'ai fait mon propre pain.

 18   Question: Où est-ce que vous avez acheté la farine?

 19   Réponse: La farine, on n'en a pas achetée, on l'a reçue dans le cadre de

 20   l'aide humanitaire.

 21   Question: Dites-moi, quand vous êtes rentrée dans la ville A, est-ce qu'il

 22   y avait suffisamment d'électricité pour tout le monde?

 23   Réponse: Non.

 24   Question: Est-ce qu'il y avait souvent des pannes ou des interruptions?

 25   Réponse: Oui.


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  1   Question: Est-ce que l’on trouvait des vêtements dans les magasins et, à

  2   votre avis, qu'est-ce que les gens portaient dans la ville A?

  3   Réponse: Eh bien, les personnes âgées en général portaient leurs vieux

  4   vêtements, les réfugiés avaient obtenu des vêtements de leurs parents. Le

  5   problème, c'étaient les enfants qui grandissaient et on n'avait pas

  6   d'argent pour acheter de nouveaux vêtements qui leur convenaient. Donc on

  7   a dû se débrouiller comme on a pu.

  8   Par exemple, les pères apportaient du tissu de camouflage pour leurs

  9   enfants, du tissu militaire. Et on cousait des pantalons, des vestes pour

 10   les enfants avec ce tissu militaire que les parents avaient reçu. Et ce

 11   type de vêtement, c’est ce que les enfants portaient quand ils allaient à

 12   l'école.

 13   Je vous ai dit que l'on essayait de se débrouiller avec ce que l'on avait.

 14   Si on trouvait des chemises militaires de plus petite taille, les enfants

 15   les portaient aussi. Pareil pour les chaussures. Vous savez, les enfants

 16   grandissent vite, leurs pieds aussi. On essayait de trouver ce que l'on

 17   pouvait. S'il y avait des bottines militaires qui étaient de la bonne

 18   taille pour nos enfants, on les leur donnait aussi.

 19   Question: Et les personnes qui habitaient dans la ville A, est-ce qu’elles

 20   étaient en uniforme militaire?

 21   Réponse: Oui, les femmes et les enfants en tout cas, pour ce qui est de la

 22   partie supérieure en tout cas, une espèce de veste.

 23   Question: Est-ce que cette situation provenait du fait que les gens

 24   n'avaient pas les moyens d'acheter d'autres vêtements?

 25   Réponse: Tout à fait.


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  1   Question: Après votre retour, quand vous vous êtes réinstallée dans la

  2   ville A en 1993, est-ce qu'il y avait dans cette ville d'autres non-

  3   Serbes?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Est-ce que vous vous souvenez de certains noms?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Est-ce que vous pourriez nous donner ces noms?

  8   Réponse: Ivica Peter, cela concernait les Croates. Stefica Posnjak, sa

  9   fille Nada. Et puis, il y avait aussi plusieurs Musulmans. C'étaient

 10   surtout des gens qui étaient dans des mariages mixtes. Il y avait Nesko,

 11   il y avait Hasna Miletic, Salina sa belle-fille, Salko Zecevic, plusieurs

 12   personnes en fait. Je ne me souviens plus de tous leurs noms. Quelquefois,

 13   je me souviens du prénom ou du nom de famille.

 14   Question: Je vous remercie, Madame.

 15   Est-ce que vous connaissez Milorad Krnojelac?

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: Est-ce qu'il a été votre professeur?

 18   Réponse: Oui, c'était mon professeur de mathématiques mais aussi celui de

 19   ma soeur et de beaucoup de mes parents.

 20   Question: Pourriez-vous me dire quelle était la composition ethnique de

 21   l'école que vous avez fréquentée?

 22   Réponse: Je pense que pour moitié d'une appartenance ethnique et pour

 23   autre moitié de l'autre.

 24   Question: Vous voulez dire que la moitié des élèves était serbe et l'autre

 25   moitié musulmane?


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  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Quelle était la composition ethnique du corps professoral? La

  3   même chose?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Est-ce que cette école avait bonne réputation? Est-ce que ses

  6   professeurs étaient réputés être bons? Et est-ce que cette réputation,

  7   elle s'étendait à toute la région? Est-ce que l'on considérait dans la

  8   région que c'était un des bons établissements scolaires?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Puisque vous nous dites que l'accusé a été votre professeur de

 11   mathématiques, est-ce que vous pourriez dire quelles notes il vous a

 12   données en mathématiques?

 13   Réponse: 2, 3, quelques fois même 1. Est-ce que je peux m'expliquer un

 14   peu?

 15   Question: Allez-y.

 16   Réponse: Très souvent, je recevais une note d'échec, un 1, comme on dit en

 17   Bosnie. Mon professeur me réprimandait et puis me disait comment est-ce

 18   que j'avais pu accepter de tomber si bas, d'avoir une note qui

 19   représentait un échec alors que mes parents s'occupaient si bien de moi,

 20   créaient des conditions d'existence aussi bonnes pour moi. Il me disait

 21   alors: "Reprenez votre place, je vais vous réinterroger plus tard ce qui

 22   vous permettra de réussir".

 23   Il essayait vraiment de stimuler ses élèves, de les inciter à apprendre

 24   quelque chose. Cela vous donne une idée de mes notes en mathématiques.

 25   Voilà, j'ai reçu une note, un 2, un 3 qui m'ont permis de passer. Mais


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  1   Mico, lui, vraiment, il était excellent. Mico, en tant que professeur, il

  2   méritait les meilleures notes, un 5.

  3   Question: Merci. Dites-moi, Madame, savez-vous si l'accusé a également

  4   donné cour à des membres de votre famille qu'il aurait aidé quelquefois du

  5   fait après mauvais comportement de ces membres de famille à l'école?

  6   Réponse: Oui, Mico était le professeur de mon cousin germain. C'était le

  7   responsable de la classe. Mon cousin était très désobéissant. C'était

  8   normal à son âge. Je sais que ma tante allait souvent voir Mico qui

  9   s'occupait de parler avec mon cousin et ses professeurs avec qui il avait

 10   des difficultés. Ce qui veut dire que Mico nous a vraiment aidés, a

 11   vraiment aidé les jeunes. Et comme c'était le cas dans le reste de la

 12   ville et de l'école, dans ce groupe de gamins qu'il a élevés, il y avait

 13   autant de Serbes que de Musulmans. Il n'y avait aucune division entre

 14   nous. Il a aidé tout le monde de la même façon, que l'on soit Serbe ou

 15   Musulman.

 16   Question: Mico Krnojelac était-il équitable quand il attribuait des notes

 17   à ses élèves?

 18   Réponse: Oui, aussi sévère qu'équitable.

 19   Question: Vous dites qu'il était toujours prêt à aider et qu'il était

 20   juste. Est-ce que c'est cela qui expliquait pourquoi ses élèves l'aimaient

 21   autant?

 22   Réponse: Absolument. Mais on s'en est rendu compte de plus en plus à

 23   mesure que l'on grandissait. Maintenant, je m'en rends bien plus compte,

 24   maintenant que j'ai des enfants à moi.

 25   Question: En 1996, est-ce que votre ami vous a demandé de transmettre un


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  1   message à Milorad Krnojelac?

  2   Réponse: Oui.

  3   Réponse: Mon ami et l'ami de Mico Krnojelac m'ont rencontrée à (expurgé) et

  4   m'ont demandé de transmettre ses salutations à Mico. Il m'a dit: "Dis

  5   bonjour à Mico de ma part. Comment va-t-il?". Et je peux ajouter un autre

  6   propos qu'il a tenu, il a dit: "C'est vraiment dommage, j'ai beaucoup de

  7   documents et de photographies que j'ai laissés dans la ville A. Ce qui me

  8   navre le plus, c'est le fait que je n'ai pas ces photographie, des

  9   photographies qui me montrent avec plusieurs amis dont Mico".

 10   M. Vasic (interprétation): Monsieur le Président, je crois que le témoin a

 11   donné le nom de la ville B. Il faudrait donc procéder à une expurgation.

 12   M. le Président (interprétation): Je suis sûr que nos services l'ont déjà

 13   remarqué et y ont remédié.

 14   M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

 15   Madame, lorsque vous avez appris que Milorad Krnojelac avait été arrêté,

 16   quelle a été votre réaction, quel fut votre sentiment?

 17   Témoin A (interprétation): Puisque je connaissais Mico en tant que

 18   professeur, que vous dire? J'ai éclaté en larmes. Mon cadet est venu, mes

 19   deux fils sont allés à l'école où Mico était directeur. Un de mes fils est

 20   venu me dire: "Maman, est-ce que tu sais qu'un de tes professeurs vient

 21   d'être arrêté?". Pourquoi est-ce qu'ils ont dit "ton professeur", parce

 22   que sans doute j'ai beaucoup parlé à mes fils de ce que mes professeurs

 23   m'avaient enseigné. Moi, j'étais vraiment désolée pour lui. Et jusqu'à

 24   aujourd'hui je ne peux même pas en parler, c'est comme cela que je le

 25   ressens.


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  1   Question: Après l'arrestation des Milorad Krnojelac, est-ce que vous vous

  2   êtes entretenue avec certaines personnes d'origine musulmane à propos de

  3   lui dans la ville B?

  4   Réponse: Absolument et beaucoup de personnes ont été étonnées, beaucoup

  5   ont dit qu'ils ne pouvaient pas y croire, que c'était sans doute une

  6   erreur, qu'il n'y avait pas la moindre raison d'arrêter Mico. Les gens ont

  7   parlé de ses vertus et n'ont eu que des louanges à son propos. Tout le

  8   monde regrette ce qui s'est passé et tout le monde espère que cette erreur

  9   sera réparée. En effet, Mico a contacté beaucoup de gens à (expurgé), je

 10   suis vraiment désolée.

 11   Oh, excusez-moi je viens de donner le nom de la ville. J'espère qu'il y

 12   aura expurgation.

 13   M. le Président (interprétation): Oui, oui tout à fait. Ne vous en faites

 14   pas.

 15   M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

 16   Madame, poursuivez s'il vous plaît. Vous vouliez ajouter quelque chose?

 17   Témoin A (interprétation): Non, non, simplement que les gens étaient tout

 18   à fait étonnés. Ils avaient peine à y croire. Si l'on connaissait Mico, on

 19   trouvait inacceptable le fait qu'il ait été arrêté.

 20   Question: Monsieur le Président, ceci sera ma dernière question.

 21   Madame, étant donné la tragédie qui a frappé votre famille, vous avez

 22   parlé de votre père et c'est lui que cette tragédie a frappé. Qu'est-ce

 23   qui vous a décidé à venir comparaître ici?

 24   Réponse: Je vais vous le dire. J'ai pris cette décision car je suis

 25   convaincue que Mico est un homme honnête, honorable. Excusez-moi, je suis


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   1   vraiment bouleversée, c'est la première fois que je comparais en tant que

  2   témoin. Je peux tout simplement dire ceci: je suis convaincue, je suis

  3   venue déposer parce que je suis convaincue de l'innocence de Mico. Je le

  4   connais en tant qu'homme, en tant que professeur, en tant qu'ami de mon

  5   père, ami de nombreux voisins, d'autres enseignants. J'ai discuté avec

  6   beaucoup de gens, mais c'est aussi mon avis personnel et c'est un avis on

  7   ne peut plus positif.

  8   Croyez-moi, je ne serais pas venue aujourd'hui si je ne croyais pas en

  9   l'innocence de Mico.

 10   M. Vasic (interprétation): Merci, Madame. Merci Monsieur le Président.

 11   Nous n'avons plus de questions à poser à ce témoin.

 12   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff?

 13   (Contre-interrogatoire du Témoin A par Mme Uertz-Retzlaff.)

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bonjour Madame le Témoin.

 15   Témoin A (interprétation): Bonjour.

 16   Question: Madame, vous êtes Musulmane, n'est-ce pas?

 17   Réponse: Oui.

 18   Question: Quant à votre mari, il est Serbe. Est-ce exact?

 19   Réponse: Oui.

 20   Question: Avant la guerre, vos parents avaient-ils toujours habité votre

 21   lieu de naissance?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: Je pense à la localité que l'on trouve à la seconde ligne sur ce

 24   papier.

 25   Réponse: Oui, il s'agit de la localité A. Mes parents habitaient la


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  1   localité A.

  2   Question: Oui, c'est ce que nous avons compris, mais cette localité que

  3   nous pouvons lire à la ligne 2 sur ce chiffon de papier que vous avez

  4   devant vous. Vos parents ont-ils toujours habité cette localité? Il s'agit

  5   d'un quartier de la ville A?

  6   Réponse: Non, non, il s'agit de la localité qu'il convient de lire à la

  7   ligne numéro 3, cette fois-ci de la ville A.

  8   Question: Au centre ville?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Vos parents ont-ils habité dans un appartement, dans un bloc

 11   d'habitation ou ont-ils eu une maison familiale dans la ville A?

 12   Réponse: Ils avaient leur maison familiale.

 13   Question: Lorsque la guerre éclata, quel était l'âge de votre père

 14   approximativement. Vous n'êtes pas obligé de nous parler évidemment de la

 15   date de sa naissance?

 16   Réponse: Il avait dans les 62, 63 ans.

 17   Question: Il n'était pas un militaire, il n'était pas un soldat?

 18   Réponse: Non, il ne l'a pas été.

 19   Question: Vous avez dit qu'il avait été emmené par quelqu'un. A quel

 20   moment?

 21   Réponse: Au mois de juin 1992.

 22   Question: Par qui a-t-il été emmené, le savez-vous?

 23   Réponse: Non.

 24   Question: Effectivement, a-t-il été arrêté pour être détenu au KP Dom?

 25   Réponse: Non.


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  1   Question: Où l’a t-on emmené?

  2   Réponse: Des membres de famille étaient restés dans la ville A, et des

  3   parents à moi m’ont dit que des gars sont venus pour l'amener près de la

  4   Drina.

  5   Question: Des gars, disiez-vous? Etait-ce des soldats serbes? Qui étaient

  6   ces jeunes gens?

  7   Réponse: Probablement des militaires serbes.

  8   Question: Comment et dans quelles circonstances a-t-il été tué, le savez-

  9   vous?

 10   Réponse: Non.

 11   Question: Où a-t-il été enterré?

 12   Réponse: Oui, il n’était pas enterré.

 13   Question: Par conséquent, il a été tué et il est considéré comme porté

 14   disparu, n'est-ce pas?

 15   Réponse: Oui.

 16   Question: Vous avez dit que votre mère et votre soeur ont quitté (expurgé)

 17   avant l'éclatement de la guerre, et vous avez dit qu’elles se sont rendues

 18   en aval de la rivière, probablement dans une localité, dans une

 19   municipalité voisine?

 20   Réponse: Oui.

 21   Question: Et elles ne sont pas de retour après la guerre pour retourner à

 22   la ville A, n'est-ce pas?

 23   Réponse: Non.

 24   Question: Pour quelles raisons, pourquoi?

 25   Réponse: Parce que d'autres ne sont pas de retour non plus.


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   1   Question: D'autres qui, les Musulmans?

  2   Réponse: Oui, des Musulmans. Ils ne sont pas de retour les Musulmans.

  3   Question: Quand vous êtes retournée à la ville A en 1993, des parties de

  4   la ville ont été détruites, n'est-ce pas?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Notamment c'étaient les quartiers de la ville habités par les

  7   Musulmans qui ont été démolis, n'est-ce pas?

  8   Réponse: On ne peut pas dire pour autant que les quartiers de la ville

  9   étaient partagés de sorte à être des quartiers musulmans ou serbes. Il y

 10   avait des maisons incendiées qui étaient celles de Serbes mais d'autres de

 11   Musulmans également.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je me vois

 13   obligée de faire mention de quelques localités et quartiers, du fait que

 14   le témoin vient de dire que ces quartiers n'ont pas été divisés en

 15   quartiers serbes et musulmans.

 16   Le Président (interprétation): Il serait plus aisé donc de passer à huis

 17   clos partiel.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, c'est ce

 19   que j'ai demandé.

 20   (Audience à huis clos partiel.)

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 12   Page 5534 – expurgée – audience à huis clos partiel.

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  4   (expurgé)

  5   (expurgé)

  6   (expurgé)

  7   (expurgé)

  8   (Audience publique avec mesures de protection.)

  9   M. le Président (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez dit que lorsque vous étiez

 11   de retour à (expurgé), les Musulmans qui vivaient donc en mariage mixte,

 12   ils y étaient toujours?

 13   Témoin A (interprétation): Oui.

 14   Question: Mais la majorité des Musulmans, ils n'étaient pas là, enfin, ils

 15   avaient fuit la ville?

 16   Réponse: Oui.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je me suis

 18   rendue compte en regardant le transcript et je m'en excuse.

 19   Vous avez dit que lorsque vous étiez de retour vous avez pu vous rendre

 20   compte du fait que beaucoup de gens portaient des articles qui étaient

 21   ceux de vêtements de militaire, parce que tout simplement il y avait une

 22   pénurie de ce genre-là, n'est-ce pas?

 23   Témoin A (interprétation): Oui, parce qu'il n'y avait pas d'habits.

 24   Question: Quant à vous, vous n'avez pas porté de vêtements militaires?

 25   Réponse: Non, parce que même si je manquais enfin de vêtements, c'est que


Page 5536

  1   j'en avais quelques-uns parce que j'ai pu en prendre de la ville B.

  2   Question: Mais les Serbes et ces gens-là qui ont habité la ville en

  3   question, ils ont dû avoir quand même des vêtements, ils ont pu en prendre

  4   s'ils sont venus avec vous?

  5   Réponse: Oui, mais il n'y avait pas beaucoup de réfugiés également.

  6   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous devez faire

  7   attention car souvent vous mentionnez le nom de la ville. Je sais que

  8   c'est difficile mais vous devez bien tenir compte du fait.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, je m'en excuse.

 10   Témoin A (interprétation): Il y a eu beaucoup de Serbes évidemment dont

 11   les maisons ont été incendiées et qui étaient en difficulté eux aussi.

 12   Voilà ce que je voulais ajouter à la question de tout à l'heure.

 13   Question: Pourtant, il y avait beaucoup de vêtements qu'on pouvait

 14   retrouver dans les maisons qui sont restées intactes, même dans les

 15   appartements qui avaient été quittés par des Musulmans; et on pouvait y

 16   trouver beaucoup de vêtements.

 17   Réponse: Oui, bien sûr, il y en a eu des vêtements dont on a pu se servir

 18   mais pas mal de vêtements ont été tout simplement jetés et perdus.

 19   Question: Madame le Témoin, vous avez fait mention d'un ami qui n'habitait

 20   plus à la ville A. Pour quelles raisons n'habitait-il plus la ville A?

 21   Réponse: Pour quelles raisons? Ecoutez, c'est un homme de nationalité

 22   musulmane et, comme tant d'autres Musulmans, il a dû quitter la ville A

 23   comme tant de Serbes ont dû quitter la ville B.

 24   Question: Témoin A, vous avez dit que votre père a été tué, qu'il a été

 25   tué par des militaires serbes. Pour quelle raison a-t-il été tué?


Page 5537

  1   Réponse: Pour quelle raison? Probablement du simple fait qu'il était

  2   Musulman.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai plus

  4   de questions.

  5   M. le Président (interprétation): Avez-vous des questions complémentaires,

  6   Monsieur Vasic?

  7   (Interrogatoire principal supplémentaire du Témoin A par Me Vasic.)

  8   M. Vasic (interprétation): Monsieur le Président, j'ai trois questions

  9   seulement.

 10   Madame, à la question posée par mon éminente collègue, vous avez dit qu'à

 11   (expurgé) des maisons de Musulmans ont été démolies. Avez-vous eu

 12   connaissance du fait que des maisons serbes ont été démolies également à

 13   (expurgé) ?

 14   Témoin A (interprétation): Oui, parce que (expurgé) est le quartier de

 15   la ville qui a été le plus touché, qui a été surtout la cible des

 16   attaques, peu importe la nationalité des propriétaires d'appartements.

 17   Question: Répondant à l'une des questions de mon éminente collègue, vous

 18   avez mentionné la localité. Monsieur le Président, je m'excuse, tout à

 19   l'heure j'ai fait une erreur, je n'avais pas demandé un huis clos partiel

 20   avant de faire mention du nom du quartier de la ville. Or, j'ai une

 21   question qui suit maintenant et qui me semble être liée au nom de la

 22   ville. Peut-on expurger et demander un huis clos partiel?

 23   M. le Président (interprétation): Oui, ce serait beaucoup plus aisé et

 24   pratique bien sûr, je le pense.

 25   Nous sommes à huis clos partiel.


Page 5538

  1   (Audience à huis clos partiel.)

  2   (expurgé)

  3   (expurgé)

  4   (expurgé)

  5   (expurgé)

  6   (expurgé)

  7   (expurgé)

  8   (expurgé)

  9   (expurgé)

 10   (expurgé)

 11   (expurgé)

 12   (expurgé)

 13   (expurgé)

 14   (expurgé)

 15   (expurgé)

 16   (expurgé)

 17   (expurgé)

 18   (expurgé)

 19   (expurgé)

 20   (expurgé)

 21   (expurgé)

 22   (expurgé)

 23   (expurgé)

 24   (expurgé)

 25   (expurgé)


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   1  (expurgé)

  2   (expurgé)

  3   (Audience publique.)

  4   Nous sommes maintenant en audience publique et le témoin vient de quitter

  5   le prétoire.

  6   (Le témoin, M. Slobodan Jovancevic, est introduit dans le prétoire.)

  7   M. le Président (interprétation): Je vous prie de faire la déclaration

  8   solennelle. Lisez le papier qui vous est tendu par l'huissier.

  9   M. Jovancevic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

 10   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 11   M. le Président (interprétation): Vous pouvez vous asseoir, Monsieur.

 12   (Le témoin s'exécute.)

 13   M. Jovancevic (interprétation): Merci.

 14   M. le Président (interprétation): Oui, Maître Vasic, c'est à vous.

 15   (Interrogatoire principal du témoin, M. Slobodan Jovancevic, par Me

 16   Vasic.)

 17   M. Vasic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin.

 18   M. Jovancevic (interprétation): Bonjour.

 19   Question: Avant de commencer l'interrogatoire principal, étant donné que

 20   nous parlons la même langue, toutes les fois où vous aurez entendu ma

 21   question, je vous prie de ménager une petite pause pour permettre aux

 22   interprètes de traduire ma question de sorte que la Chambre d'instance et

 23   mes honorables collègues puissent bien entendre la traduction de ma

 24   question.

 25   Le mieux serait-il peut-être de vous permettre -et je prie l'huissier de


Page 5540

  1   s'en occuper-, de suivre le texte qui coule sur l'écran. Une fois que le

  2   curseur s'arrête, vous pourrez entamer votre réponse, la réponse à ma

  3   question.

  4   Réponse: J'ai compris.

  5   M. le Président (interprétation): Bien sûr, nous devrions connaître le nom

  6   de ce témoin.

  7   M. Vasic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Merci.

  8   Dites-nous, s'il vous plaît, votre nom et prénom.

  9   M. Jovancevic (interprétation): Slobodan Jovancevic.

 10   Question: Dites-nous le jour, le mois et l'année de votre naissances.

 11   Réponse: Le 15 août 1949.

 12   Question: Quel est le lieu de votre naissance?

 13   Réponse: Prvina Glava, près de Sid.

 14   Question: Etes-vous marié?

 15   Réponse: Oui, je suis marié.

 16   Question: Avez-vous des enfants?

 17   Réponse: Oui, j'ai deux fils.

 18   Question: Quel est votre métier, quel est votre profession?

 19   Réponse: Technicien électricien.

 20   Question: Ou êtes-vous employé?

 21   Réponse: Je suis employé à l'"Elektrodistribucija" de Pale, l'unité de

 22   travail, succursale de Srbinje.

 23   Question: Depuis quand êtes-vous employé dans cette entreprise?

 24   Réponse: Depuis 1967.

 25   Question: Où habitiez-vous en 1992?


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  1   Réponse: J'habitais Foca, l'actuelle Srbinje, dans le quartier de la ville

  2   intitulé comme Donje Polje, rue Vojislava Ilica n°2.

  3   Question: Et vous y habitiez avec votre famille?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Revenons à la période du 7 avril 1992. En cette date du 7 avril

  6   1992, vous êtes-vous rendu au travail à l'"Elektrodistribucija"?

  7   Réponse: Non.

  8   Question: Pourquoi?

  9   Réponse: A 6 heures 45 j'étais sorti sur le balcon. Comme il pleuvait, je

 10   devais prendre mon imperméable qui s'y trouvait. Et j'ai pu voir du haut

 11   du balcon, une unité de militaires alignés en rang devant la firme où je

 12   travaillais. Je retourne chez moi aussitôt, je téléphone à Suvalija

 13   Fahrudin, qui était mon chef, pour lui demander ce qui s'y passait.

 14   Fahrudin, quant à lui, m'a dit que ce n'était pas tout à fait en sécurité,

 15   que je ne devais pas me rendre au travail, et que je devrais passer le

 16   message à mon collègue, Bozo Kulic, qui, lui, habitait dans le même

 17   bâtiment que moi, au quatrième étage, de sorte que nous nous rendions ni

 18   l'un ni l'autre au travail ce jour-là.

 19   Question: Vous avez mentionné le nom de Suvalija Fahrudin.

 20   Réponse: Oui.

 21   Question: Etait-ce un citoyen musulman, de nationalité musulmane?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: Avez-vous eu une connaissance peut-être de son appartenance à la

 24   SDA, au parti du SDA?

 25   Réponse: Oui, il y était et il était secrétaire de ce parti.


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  1   Question: Il était donc le secrétaire du SDA pour l'ensemble du territoire

  2   municipal de Foca?

  3   Réponse: Oui.

  4   Question: Dites-moi, Monsieur, si le jour de la veille, le jour précédent

  5   vous vous êtes rendu au travail?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Avez-vous pu peut-être remarquer quelque chose d'inhabituel qui

  8   se serait passé près de l'"Elektrodistribucija", qui était votre poste de

  9   travail?

 10   Réponse: Ce jour-là, devant le bâtiment de ma firme, on a pu voir déposer

 11   des sacs de sable. C'étaient des abris ou une espèce d'abri -comment

 12   dirai-je-, de casemate fortifiée devant la maison de Faric Senad et de

 13   Ramiz Sljivo. Dans ces maisons-là, évidemment il n'y avait pas... et comme

 14   on n'avait pas évidemment d'armes, je me suis rendu à la firme même,

 15   notamment dans la pièce où l'on prenait un café d'ordinaire, et il y a eu

 16   une altercation entre Fahrudin Suvalija et certains de mes collègues qui

 17   étaient de nationalité serbe ou monténégrine; ils ont refusé de travailler

 18   ce jour-là du simple fait que les susmentionnés sacs de sable, abris,

 19   fortifications ont été emménagés devant la firme même.

 20   Quant à Suvalija, il a dit qu'il n'en connaissait pas la cause et que ces

 21   barrages devaient être enlevés, alors que nous autre, Serbes et

 22   Monténégrins, nous devions rester pour travailler parce que c'étaient

 23   quelques jours d'intempérie météorologique et il y avait beaucoup de

 24   pannes sur pas mal de lignes d'alimentation en courant.

 25   La majeure partie des Serbes et Monténégrins n'ont pas suivi son propos.


Page 5543

  1   Ils ont tout simplement quitté la firme, seuls mes collègues de

  2   nationalité musulmane sont restés. Mon collègue, Bozo Kulic et moi sommes

  3   restés parce que Fahrudin Suvalija nous a demandé de le faire. Et étant

  4   donné que j'étais là pendant 15 ans pour faire le même travail, j'ai

  5   considéré qu'il fallait le faire et que nous devions nous rendre au

  6   travail et localiser les pannes qu'il convenait d'éliminer.

  7   Mirsad Vehabovic et moi, une fois que nous avons reçu nos ordres, je

  8   devais me rendre sur le site qui allait depuis la gare de chemin de fer de

  9   Foca jusqu'au village de Kozja Luka. Or, sur ce trajet-là, de Foca à Kozja

 10   Luka, je ne devais que repérer, localiser les pannes; c'est-à-dire tout

 11   simplement nous occuper de sorte qu'il y ait une disjonction des lignes où

 12   des pannes auraient pu avoir lieu. Et passant par ces villages voisins,

 13   nous n'avons pas vu une âme qui vive, une âme qui bouge. Partout les

 14   stores ou les rideaux baissés tant que nous ne sommes pas parvenus au

 15   village de Kozja Luka.

 16   C'est là que nous sommes passés par un bureau pour nous informer, pour

 17   savoir si nous étions en sécurité pour nous rendre dans le village de

 18   Kremin. Ils nous ont dit que oui. Alors c'est là que nous avons, dans

 19   cette maison-là, dans ce bureau-là où nous nous sommes informés de la

 20   situation, que nous avons trouvé des gens Serbes et Musulmans qui étaient

 21   assis. Mais tous avaient des armes. En général, chacun devait avoir une

 22   arme de chasse.

 23   Ils nous ont dit sèchement: "Voilà, nous, nous sommes là pour garder notre

 24   Kozja Luka alors vous, à Foca, je dois être un petit banal, des cons que

 25   vous êtes, vous n'avez qu'à faire la guerre. Nous sommes là pour nous


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  1   occuper de la garde de notre village".

  2   C'est ainsi que nous avons pu nous occuper de la tâche qui était la nôtre

  3   pour retourner ensuite vers les 15 heures à la firme.

  4   Question: Dites-moi, lorsque vous étiez de retour dans votre firme, vous

  5   êtes-vous rendu avec votre collègue dans un buffet pour boire un coup?

  6   Réponse: Oui, nous nous sommes rendus aussitôt au café nommé "Bor" pour

  7   prendre un pot. Dans ce café, s'en était plein de gens de nationalité

  8   musulmane. J'étais le seul Serbe à ce moment-là parmi eux. Ils étaient

  9   tous armés et, s'il faut être précis, il y avait des pistolets, mais de

 10   tubes et canons longs également, fusils.

 11   Si cette Chambre en a besoin, je pourrais peut-être vous énumérer quelques

 12   maisons dont je garde la souvenance encore.

 13   Question: Allez-y?

 14   Réponse: Il y avait Subasic, Saja, Jusufovic, Dervisevic et quelques

 15   autres, voyez-vous il y a longtemps de tout cela, je ne peux pas me

 16   rappeler leur nom, mais ils étaient une trentaine de personnes dans ce

 17   restaurant, dans ce buffet.

 18   Question: Dites-moi, s'il vous plaît, avant l'éclatement du conflit armé,

 19   avez-vous pu remarquer ce fait que des Musulmans de ces différents

 20   quartiers de Foca s'armaient?

 21   Réponse: Oui, je l'ai vu. Je l'ai vu à plus d'une reprise si cela vous

 22   intéresse. Je peux vous dire par un jeu de circonstances une fois que

 23   j'étais de retour de la ville, dans une épicerie, un magasin qui était non

 24   loin du buffet Bor de la mosquée, il y avait une panne d'électricité. Tout

 25   simplement un câble a brûlé, d'un poêle électrique a brûlé, et le


Page 5545

  1   propriétaire là évidemment qui était sorti dans la rue et comme on se

  2   connaissait, c'était Safet, c'était un nommé Safet, il m'a dit: "Sloba,

  3   veux-tu m’aider? Mon magasin risque de brûler."

  4   Aussitôt, évidemment je suis entré dans son magasin pour d'abord sortir

  5   les fusibles. Après quoi, j'ai débranché le poêle, je me suis occupé des

  6   câbles évidemment pour les isoler en bonne et due forme, localisant ainsi

  7   réparant tous et Safet pour sa part de me dire: "Ecoute alors là

  8   maintenant, on va au café Bor pour prendre un pot". C'est ce que nous

  9   avons fait.

 10   Nous avons eu des gens que nous avons connus là. Nous avons commandé un

 11   café.

 12   Il y avait un policier et il y avait un qui était Musulman, deux autres

 13   avec qui portaient tous des fusils automatiques et des pistolets au

 14   ceinturon.

 15   Les fusils se trouvaient dans un coin, près de la table à laquelle ils

 16   étaient assis, deux policiers de nationalité musulmane étaient sortis du

 17   bistrot. Quant à nous, nous sommes restés pour boire notre café et un

 18   autre policier qui était celui-là de nationalité serbe était resté dans le

 19   buffet.

 20   Lorsque je passais pour sortir du buffet, en disant adieu à Safet, non à

 21   une distance de 15 ou 20 mètres, non loin de la mosquée, on a pu voir des

 22   policiers avec des Kalashnikov. C'est à ce moment-là où je me suis posé la

 23   question de savoir comment ils étaient sortis sans armes alors que

 24   maintenant ils avaient des armes. Or, ils se dirigeaient vers la maison de

 25   Ramo Djendusic. Je me suis rendu à la firme où j'ai travaillé.


Page 5546

  1   Le lendemain, je l’ai dit à un policier de nationalité serbe qui était un

  2   des chefs supérieur au commissariat de police. Je lui ai dit: "Mais bon

  3   sang! Comment se fait-il que la police distribue des armes au beau milieu

  4   de la journée et comment se fait-il que ces gens sortent avec leurs armes

  5   de la mosquée en question?".

  6   L'autre m'a dit tout simplement que je devais être un petit peu toqué, que

  7   je ne devais certainement pas bien voir tout cela.

  8   Or, j'étais rentré chez moi, et le lendemain, j'étais sorti sur le balcon

  9   et comme mon appartement se trouve au même niveau que ceux de Sljivo et de

 10   Sahinpasic Senad, on peut bien le voir -nous sommes à une centaine de

 11   mètres-, j'ai pu voir que ces armes ont été déchargées pour être déposées

 12   dans un garage de Mehmed Sljivo. J'ai pu me rendre compte qu'il s’agissait

 13   de caisses de munitions et de fusils, les caisses de munitions étant moins

 14   grandes, le tout étant déchargé devant le garage et au crépuscule même,

 15   vers les 5 heures et quelque, une fourgonnette était venue. A son volant

 16   Ramiz Sljivo et eux, ils se sont arrêtés près de la maison voisine pour

 17   une fois de plus décharger des caisses, de la munition cette fois-ci.

 18   J'ai pris mes jumelles pour voir de quoi il s'agissait et j'ai pu voir un

 19   peu mieux: il s'agissait évidemment d'obus de mortier. Tout cela a été

 20   déposé dans la maison non loin de celle de Ramiz et au même moment, ils

 21   ont placé un fusil-mitrailleur à la fenêtre de cette maison parce que

 22   cette maison semble dominer un petit peu le quartier, c'est-à-dire à

 23   partir de cette fenêtre de cette maison, on pouvait bien contrôler une

 24   partie du quartier, de la localité. Par conséquent, on pouvait toujours

 25   placer ce quartier sous contrôle.


Page 5547

  1   Question: Dites-moi, Monsieur, dans quel quartier de la ville de Foca se

  2   trouvait votre appartement?

  3   Réponse: Mon appartement se trouvait dans la partie de la ville qui

  4   s’appelle Donje Polje. Donje Polje commence tout près du pont sur la

  5   rivière Cehotina et ce quartier se termine en fait près du pont qui se

  6   trouve près du KP Dom à Foca.

  7   Question: Merci. Dites-moi maintenant les événements que vous avez décrits

  8   concernant ces armes qu'on a sortis de la maison de Ramiz Sljivo Mehmed,

  9   pourriez-vous nous dire à quel moment c’est arrivé?

 10   Réponse: Ces événements sont survenus au cours de 10 à 15 jours et en fait

 11   même plus tôt. C'est arrivé à plusieurs reprises vous savez. Même avant

 12   les conflits armés dans la ville. Ces événements survenaient, je ne peux

 13   pas vous donner les dates exactes puisque beaucoup de temps, enfin un

 14   temps important est écoulé entre eux depuis, mais je pourrais vous dire

 15   que c'est arrivé peut-être après les élections législatives en Bosnie-

 16   Herzégovine. Question: Monsieur, est-ce que vous connaissez la personne

 17   qui portait le nom de Sljivo Aziz?

 18   Réponse: Oui, bien sûr. Sljivo Aziz, ou plutôt la maison de son père

 19   Mehmed se trouve de 50 à 60 mètres de l'immeuble dans lequel j'habite et

 20   se trouve peut-être à environ à une trentaine de mètres de l'entreprise

 21   dans laquelle je travaillais.

 22   Question: Avant le début du conflit armé pour qui travaillait-il Sljivo

 23   Aziz? J’entends pendant la période que vous êtes en train de couvrir avec

 24   votre récit?

 25   Réponse: Il travaillait pour Senad Sahinpasic, il était conducteur ou


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  1   chauffeur et c'était un homme qu'on surnommait "Saja".

  2   Question: Merci.

  3   Réponse: Il n'y a pas de quoi.

  4   Question: J'aimerais vous demander maintenant de revenir sur la période du

  5   8 avril 1992. Vous avez dit que, depuis votre fenêtre, vous étiez en

  6   mesure d'apercevoir des gens alignés. Est-ce que c'étaient des hommes qui

  7   étaient armés?

  8   Réponse: Oui, ils étaient vêtus d'uniforme de camouflage et ils étaient

  9   armés de diverses armes. Certains portaient des Kalashnikov, des

 10   "Schmeisser", d'autres des fusils russes, de fabrication russe, des armes

 11   semi-automatiques. C'étaient des armes militaires pour la plupart.

 12   Il y avait des bombes également.

 13   Question: Est-ce que cette personne portait des uniformes?

 14   Réponse: Oui, l'unité au complet était vêtue d'uniforme de camouflage,

 15   c'étaient des uniformes de camouflage.

 16   Question: Est-ce que vous savez si c'était l'unité dont les membres

 17   étaient de nationalité musulmane ou serbe?

 18   Réponse: C'était une unité que j'ai entrevue très brièvement. Comme j'ai

 19   dit, j'étais sorti sur le balcon pour prendre mon anorak de pluie, et

 20   c'est à ce moment-là que j'ai vu trois hommes qui habitaient, plutôt qui

 21   s'entretenaient avec Ninko Jusufovic. Ils étaient là debout, c'étaient des

 22   aides de Sajin, en fait c'étaient des jeunes hommes qui travaillaient pour

 23   lui. Et s'agissant de cette unité, elle était complètement composée de

 24   Musulmans.

 25   Question: Vous nous avez dit que par la suite vous avez appelé votre chef?


Page 5549

  1   Réponse: Oui.

  2   Question: Il vous a dit que vous et votre collègue, vous ne devriez pas

  3   vous présenter à votre travail?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Est-ce qu'à ce moment-là quelqu'un s'est présenté dans votre

  6   appartement après cet entretien?

  7   Réponse: Mon voisin est venu, j'étais resté dans l'appartement. Il y avait

  8   d'abord mon beau-fils qui est venu et, par la suite, il est allé

  9   travailler mais on l'a renvoyé. Après cela, dans mon appartement à moi,

 10   Momcilo Solaja est venu, c'était un collègue qui travaillait dans la même

 11   entreprise que moi. Il avait essayé de se rendre au travail, mais comme on

 12   avait déjà placé une rampe tout près du café qui s'appelait Bor, il avait

 13   essayé d'entrer à l'intérieur de l'entreprise et lorsqu'il a vu la rampe,

 14   en fait il a essayé de se rendre jusqu'à l'entreprise mais quand il a vu

 15   la rampe qui était devant le café Bor, et comme il fallait qu'il traverse

 16   le pont sur la Drina tout près du KP Dom; il y avait des barrages routiers

 17   qui bloquaient le pont et avec des camions remorques et il y avait un

 18   homme qui avait essayé de construire une maison. Et dans cette maison,

 19   d'après Momo, d'après ce qu'il m'a raconté par la suite, il y avait une

 20   trentaine de Musulmans, c'étaient des soldats. Comme mon immeuble se

 21   trouve à 20 mètres de l'entreprise, il est resté chez moi et il est resté

 22   chez moi dans mon appartement jusqu'au lendemain matin, jusqu'à 6 heures

 23   du matin peut-être.

 24   Ce soir-là, mes deux voisins (expurgé) et son directeur, ou son chef

 25   plutôt, Dzulandzic Sefko avec leurs épouses, ils étaient venus avec leurs


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  1   épouses, ils étaient venus chez moi, ils m'ont dit: "Slobo" -étant donné

  2   que j'étais chasseur j'avais des armes-, ils ont dit: "Voisin, nous sommes

  3   venus chez toi pour que tu nous protèges." Moi, je leur ai dit: "De qui

  4   voulez-vous que je vous protège?", et ils m'ont dit: "D'une armée."

  5   Je leur ai dit: "Venez, entrez.".

  6   J'ai demandé à ma femme de leur offrir quelque chose, ils sont restés dans

  7   mon appartement. Je suis sorti devant ma porte. J'ai pris une carabine, je

  8   me suis assis devant la porte sur une chaise, pendant que je suis en vie,

  9   vous êtes en sûreté. Je crois qu'ils sont restés dans mon appartement

 10   jusqu'à peut-être 1 heure ou 1 heure 30 du matin. C'est à ce moment-là

 11   qu'ils sont descendus chez mon voisin (expurgé) qui habite un étage plus bas.

 12   Et c'est ainsi que cet événement s'est terminé.

 13   Question: Merci, Monsieur.

 14   Dites-moi maintenant, est-ce que les autres voisins de votre bâtiment, de

 15   votre immeuble, avaient formé, avaient placé des gardes ou des

 16   sentinelles?

 17   Réponse: Non, je n'étais pas entré par la porte d'entrée cette nuit-là.

 18   Mais le lendemain matin, nous avions organisé une garde, un service de

 19   garde où on travaillait ensemble, où on se mettait ensemble pour protéger.

 20   Comme j'avais quatre armes, j'avais trois fusils et un revolver, j'ai

 21   donné un fusil à (expurgé) mon voisin. L'autre fusil, je l'ai donné à mon

 22   beau-fils alors que j'ai gardé un fusil et le revolver, alors que le

 23   voisin Vebo Mundzandzic avait un fusil semi-automatique, ainsi que Juso

 24   Bostandzic qui avait une carabine qui avait été transformée en fusil

 25   militaire. Alors c'étaient des gens qui étaient là dans l'entrée de


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  1   l'immeuble. C'étaient ces gens-là qui avaient des armes sur eux, ils

  2   étaient armés et nous protégions notre entrée, en fait le sous-sol et

  3   l'entrée, si vous voulez.

  4   Question: Les personnes que vous venez de mentionner, est-ce qu'il s'agit

  5   bien de personnes de nationalité musulmane?

  6   Réponse: Oui, c'est exact.

  7   Question: Ce jour-là ou le lendemain matin, dans votre immeuble à vous,

  8   est-ce que dans votre immeuble des personnes se sont présentées?

  9   Réponse: Dans mon immeuble à moi, dans les deux entrées, il y a eu à peu

 10   près 200 personnes. Etant donné que c'est une partie qui est assez en

 11   sécurité, en fait, les personnes qui habitaient dans mon immeuble et dans

 12   les immeubles environnants, puisque le sous-sol se trouvait à un niveau

 13   inférieur de la rue si vous voulez, de sorte que nous considérions

 14   qu'étant donné qu'il y avait du pilonnage, c'était beaucoup plus

 15   sécurisant de se trouver en cet endroit. Il y avait donc des hommes, des

 16   femmes et des enfants qui étaient d'origine musulmane ainsi que d'origine

 17   serbe.

 18   Question: Est-ce qu’à ce moment-là, les membres armés de l'armée musulmane

 19   se sont présentés également?

 20   Réponse: Oui, les premiers jours il y avait des jeunes hommes et des

 21   personnes qui étaient des membres de la famille, de ces familles. Ils

 22   laissaient les armes dans un casier avec des numéros et ils entraient dans

 23   le sous-sol sans être armés donc sans armes.

 24   Question: Est-ce que vous étiez en mesure de voir ou d'apercevoir ces

 25   armes qu'ils portaient?


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  1   Réponse: Oui, bien sûr. C'étaient des fusils automatiques pour la plupart,

  2   c'étaient des Kalashnikov pour la plupart. J'ai également pu apercevoir

  3   quelques Thompson et quelques fusils semi-automatiques de fabrication

  4   yougoslave.

  5   Question: Est-ce que les membres de l'armée musulmane avaient aussi des

  6   fusils qu'on appelait les "Moskovka"?

  7   Réponse: Oui, c'est exact. Ils disposaient de ce genre d'armes lorsqu'ils

  8   ont pris le contrôle du KP Dom. Ils ont également emmené ce genre d'armes

  9   dans mon immeuble. Ils ont également emmené deux caisses pleines de

 10   revolvers de fabrication Zastava 7.62 millimètres.

 11   Ils démantelaient ces armes pour les nettoyer car c'étaient des revolvers

 12   qu'on avait laissés là depuis longtemps. Après l'ordre de mes voisins, je

 13   procédais à l'assemblement de la culasse de cette Moskovka car ils ne

 14   savaient pas comment assembler ce fusil. Etant donné que j'étais chasseur,

 15   que je connais les armes, j'ai assemblé cette arme et je l'ai remise à un

 16   homme qui était de nationalité musulmane. Il est allé dans un garage se

 17   trouvant non loin de là afin de procéder à la garde de ce garage. En fait,

 18   c'était le garage de M. Kapidzic. Atif de son prénom.

 19   Question: Est-ce qu'en date du 9 avril 1992, après que les Serbes aient

 20   pris une partie de la ville qui s'appelle Aladza, est-ce que les membres

 21   de l'armée musulmane se sont présentés également?

 22   Réponse: Oui. Monsieur le docteur dentiste Aziz Karahasanovic est venu et

 23   j'étais à ce moment-là dans le sous-sol, dans la cave. Il a injurié ma

 24   mère, il a demandé de me voir, il m’a trouvé en bas dans la cave et il

 25   était venu pour me tuer. Il m'a sorti à l'extérieur, sur les billots de


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  1   bois qui se trouvent devant l'immeuble et il a pointé le Kalaschnikov dans

  2   ma direction et mes voisins Juso Bostandzic et (expurgé)

  3   (expurgé), ses voisins également, et le père de Dzevad. Ils sont sortis à

  4   l'extérieur et c'est ainsi qu'ils m'ont libéré à ce moment-là, qu'ils

  5   m'ont sauvé la vie, car ils l'ont informé -et c'est quelque chose que je

  6   ne savais pas-, mais ils l'ont informé que sa mère, en fait que sa maison

  7   était en train de brûler, d’incendier. Et sa mère venait de trouver la

  8   mort dans cette maison incendiée.

  9   Par contre, après cet événement, je suis revenu dans la cave et j'ai été

 10   placé parmi les femmes musulmanes pour me cacher. On a essayé de me

 11   dissimuler de la sorte. Deux ou trois heures se sont écoulées, peut-être

 12   moins depuis cet événement. Aziz est revenu et il m'a de nouveau fait

 13   sortir devant le bâtiment. C'est à ce moment-là qu’il a laissé tombé le

 14   Kalashnikov. Il m'a dit: "Slobo, n’aie pas peur!". J'étais irrité car on

 15   venait de m’informer que ma mère venait de périr dans ma maison qui avait

 16   été incendiée. Cependant, ce n'est pas la vérité. Il a dit: "N’aie pas

 17   peur! Je ne suis pas un soldat de Sajin, je suis un soldat de l'armée de

 18   la Bosnie-Herzégovine qui a été formé il y a trois jours". Et je ne l'ai

 19   plus jamais revu par la suite.

 20   Question: Est-ce que c'était la seule fois où on a voulu vous tuer dans

 21   votre immeuble?

 22   Réponse: Malheureusement non, ce n'était pas la seule fois. De nouveau

 23   deux jeunes hommes se sont présentés, c'était Karahodza et un jeune homme

 24   que je ne connaissais pas.

 25   Ils m'ont fait sortir de nouveau sur le billot où se trouve le bois à


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  1   couper. Ils ont eu l'intention de me tuer de nouveau et le père de Salko

  2   m’a dit: "Qu’est-ce que…" (sic) Salko Lojo est devenu le père de Dzevad et

  3   il a dit: "Qu'est-ce que vous avez avec les voisins?". Et ils sont allés

  4   dans mon entreprise car mon entreprise servait d'hôpital et de poste de

  5   commandement pour leur armée.

  6   Ils sont revenus et par la suite ils m’ont libéré. Ensuite, ils ont pris

  7   mon beau-frère qui était dans le sous-sol et ils lui ont demandé de leur

  8   donner, de remettre les armes.

  9   Il n'avait pas d'arme sur lui. Ensuite, ils voulaient lui graver une croix

 10   sur le front. Ils l'ont fait tomber par terre, et moi, j'ai demandé à

 11   (expurgé) et à Salko et à Juso Bostandzic, j’ai dit: "Mes voisins,

 12   voyons, aidez-nous! Ne permettez pas à ce que l’on tue cet homme.".

 13   Ensuite, ils sont allés, ils ont libéré Dzura de sorte que… Dieu merci, le

 14   tout s’est terminé quand même bien.

 15   Question: Merci. Dites-moi maintenant, Monsieur, si Bostandzic vous a

 16   demandé à ce moment-là de faire quelque chose?

 17   Réponse: Oui. C'était un après-midi, un tireur embusqué de l’armée

 18   musulmane est venu avec un fusil de production yougoslave, avec un fusil

 19   automatique qu'il portait au dos, et il avait tiré en direction d'une

 20   fenêtre.

 21   Il manquait un carreau de vitre, c'était au huitième étage du bâtiment du

 22   salon de meubles. Le salon de meubles se trouve à 150 mètres à vol

 23   d'oiseau de mon immeuble à moi et supposément, il y avait un Serbe qui

 24   était un tireur embusqué qui se trouvait à cet endroit. Il a essayé à ce

 25   moment-là d'éliminer ce dernier.


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  1   Par contre, son tir, en fait son fusil n'était pas bien ajusté, de sorte

  2   qu'il a dû tirer trois coups et il a manqué son coup car il a atteint un

  3   mètre sous la fenêtre. C'est à ce moment-là que Bostandzic m’a dit:

  4   "Prends la carabine", puisque j'avais en fait un Snipper sur la carabine.

  5   Et comme j'avais été chasseur et j'étais très précis dans mon tir, il m'a

  6   demandé d'éliminer le tireur embusqué. Moi, j'ai dit que je ne voulais pas

  7   tirer sur un Serbe, que c’était mieux de mourir tué par eux que d’être tué

  8   par des Serbes parce que j’aurais tiré sur un autre Serbe. C'est tout.

  9   Question: Est-ce que les Musulmans ont pris les armes?

 10   Réponse: Oui, ils m'ont emmené deux jeunes hommes, Kameric et l'autre

 11   m’ont emmené dans mon appartement et ils m'ont dit: "Slobo, donne-nous

 12   l’arme. Nous devons procéder à la perquisition de ces appartements dans

 13   cet immeuble, et nous devons également confisquer ton arme.". Ils m'ont,

 14   par la suite, donné une attestation, un certificat qui avait été signé par

 15   Kameric. Moi, j’ai signé également ce certificat. Ils m'ont pris un fusil

 16   de petit calibre, une carabine, un fusil de chasse et le révolver Beretta.

 17   Ils m'ont confisqué deux téléphones, ils m’ont donné un certificat et ils

 18   m'ont dit que, par la suite, ces armes seront déposées dans 15 minutes à

 19   une demi-heure dans le coffre-fort de mon supérieur de l’époque qui se

 20   trouve Suvalija Fahrudin.

 21   Question: Est-ce que vous avez jamais pu obtenir vos armes à quelque

 22   moment que ce soit par la suite?

 23   Réponse: Non.

 24   Question: Merci, Monsieur.

 25   Réponse: Il n'y a pas de quoi.


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  1   Question: Dites-nous si les membres de l'armée musulmane avaient empêché

  2   les Serbes de sortir de l'immeuble?

  3   Réponse: Oui, c’est arrivé. Lorsque les Serbes ont pris le hameau de

  4   Cohodar Mahala, ou le quartier plutôt de Cohodar Mahala, c’est à ce

  5   moment-là que mon collègue Vehabovic Mirsad s’est présenté chez moi. Il

  6   est venu avec son père, sa mère, sa femme ainsi que leur fils qui était

  7   tout petit et ils sont venus chez moi comme on le dit. Ils n'avaient

  8   absolument rien, comme on le dit chez moi, ils étaient presque nus, ils

  9   n’avaient rien, ils n’avaient pas de chaussures, ils n’avaient rien. Donc

 10   je leur ai donné des vêtements.

 11   Il y avait encore de l'électricité dans notre partie de la ville il faut

 12   dire et Mirsad, à ce moment-là, et son père, lorsque j'ai été désarmé,

 13   eux, ils ont obtenu des fusils de chasse. Alors ce sont eux maintenant qui

 14   procédaient à la garde, qui faisaient la surveillance, alors que moi, je

 15   ne pouvais même pas aller aux toilettes sans être accompagné par des

 16   hommes ou des femmes de nationalité musulmane. Et nous, Serbes, nous

 17   étions devenus leurs otages.

 18   M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur. Je crois que c'est le moment

 19   opportun de faire une pause.

 20   M. le Président (interprétation): Oui, nous allons reprendre nos travaux à

 21   11 heures 30.

 22   (L’audience, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 30.)

 23   M. le Président (interprétation): Maître Vasic, vous avez la parole?

 24   M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

 25   Vous m'entendez, Monsieur le Témoin?


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  1   M. Jovancevic (interprétation): Oui.

  2   Question: Merci.

  3   Réponse: De rien.

  4   Question: Avant l'interruption, nous parlions du fait que les habitants et

  5   les locataires d'origine serbe avaient été empêchés de quitter la ville

  6   par les Musulmans. Mais pendant que vous vous trouviez dans le sous-sol du

  7   bâtiment, avez-vous entendu dire que des maisons serbes avaient été

  8   incendiées à Donje Polje?

  9   Réponse: Oui, oui, j'en ai entendu parler. J'ai entendu dire que la maison

 10   de M. Krnojelac avait été incendiée ainsi que la maison de son voisin,

 11   Drago. Mais aussi d'autres maisons ont été incendiées, notamment celle

 12   d'Obranovic qui travaillait à la poste. C'est toute une rangée de maisons

 13   qui se trouvaient derrière la maison de M. Krnojelac qui se trouve sur un

 14   plateau au pied d'une colline qui s'appelle Trlovinja. Je crois que c'est

 15   là que ça s'est passé.

 16   Question: Dites-moi, pendant que vous étiez dans ce bâtiment, est-ce que

 17   les soldats de Senad Sahinpasic sont venus dans le bâtiment?

 18   Réponse: Oui, ils sont venus en fin d'après-midi, à la tombée du jour.

 19   Subasic, que l'on surnommait "Raho", était le premier à venir. Il était

 20   devant les autres, il portait un fusil militaire à chaque main et il

 21   disait: "Le commandant arrive, sortez d'ici, soyez silencieux." Et puis

 22   suivant M. Sahinpasic sont entrés d'autres soldats. Il y en avait un qui

 23   avait un "Schmeisser". Il avait aussi un sac avec des balles de réserve et

 24   il se trouvait sur la deuxième série d'escalier. Comme on descend dans le

 25   sous-sol, Sahinpasic s'est adressé à ma femme et à d'autres en parlant


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  1   d'eux comme à des "kum", k-u-m, c'est le nom utilisé pour parler des

  2   voisins.

  3   Il a dit: "Voisins, ne soyez pas effrayés, personne ne vous fera de mal".

  4   Subasic a ajouté: "Oui, mais on ne vous fera rien du tout", ce sur quoi

  5   j'ai dit: "Oui, mais qui va nous garantir notre vie?". C'est là-dessus

  6   qu'a porté la conversation. Et puis ils étaient une trentaine, peut-être

  7   40 hommes dans son unité. Ils ont pénétré dans tous les appartements

  8   serbes, nous ont tous verrouillés à l'intérieur et puis, les soldats ont

  9   confisqué toute sorte d'objet dans ces appartements. Nous l'avons vu, nous

 10   avons vu qu'on avait pénétré par effraction dans tous les appartements

 11   jusqu'au quatrième étage.

 12   Aux étages supérieurs, ainsi qu'aux pièces qui se trouvent au quatrième

 13   étage, notamment il y avait l'appartement de Mme Sofa, c'était une

 14   infirmière qui est morte. Il y avait aussi mon voisin (expurgé) mais on leur a

 15   dit qu'au-dessus il n'y avait plus de Serbe qui habitait, parce que la

 16   majorité des Serbes au départ n'étaient pas originaires de la région.

 17   Beaucoup d'appartements étaient restés fermés. Mon appartement est resté

 18   intacte, mais on a pénétré dans l'appartement de mon collègue Kulic.

 19   Question: Les soldats n'ont pillé que des appartements appartenant à des

 20   Serbes?

 21   Réponse: Mais oui, parce qu'aux étages inférieurs c'est différent. Par

 22   exemple, mon bâtiment est protégé par le bâtiment qui se trouve devant

 23   celui-ci. Et puis, là, ce sont des appartements musulmans. On trouvait

 24   dans ces appartements aussi des propriétaires, des amis, des voisins qui

 25   étaient venus dans mon bâtiment à partir de cette partie-là de leur


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  1   bâtiment et d'autres parties de la ville.

  2   Question: Merci. Vous dites qu'ils ont pillé les appartements appartenant

  3   à des Serbes. Est-ce que, par la suite, les soldats de Saja vous ont

  4   enfermé dans ces appartements?

  5   Réponse: Oui, cela s'est passé après le départ de Sahinpasic qui avait

  6   passé la nuit là avec ses hommes. Le lendemain après-midi il a quitté le

  7   bâtiment où se trouvait mon appartement. Ils sont partis vers 18 heures

  8   30, entre 18 heures 30 et 19 heures. Ils nous ont répartis, nous, les

  9   Serbes et les Musulmans qui s'étaient trouvés dans le sous-sol. Ils nous

 10   ont répartis dans plusieurs appartements parce que des soldats d'origine

 11   musulmane commençaient à arriver dans le sous-sol, puisqu'ils s'étaient

 12   retirés de certaines positions qu'ils avaient occupées sur des collines

 13   car il n'y avait pas eu de combats, et nous, nous sommes restés dans ces

 14   appartements.

 15   Il y avait un soldat musulman posté devant chaque appartement, et nous,

 16   nous étions surtout assis au sol pour notre sécurité parce qu'il y avait

 17   des balles qui sifflaient. Et c'est là que nous sommes restés jusqu'à 21

 18   heures. Un ordre est alors arrivé selon lequel nous devions prendre nos

 19   effets personnels les plus nécessaires car nous allions être emmenés au KP

 20   Dom qui était le dernier fief de leur armée. C'est du moins de cette

 21   façon-là qu'ils ont présenté la situation.

 22   Question: Vous voulez parler, ici, de l'armée musulmane?

 23   Réponse: Oui, c'était le KP Dom qui était leur dernier fief. Nous sommes

 24   partis en colonne, nous étions environ 200 personnes aussi bien Serbes que

 25   Musulmanes. Nous nous sommes pratiquement déplacés au pas de course. Nous


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  1   n'avions que nos effets personnels les plus indispensables et beaucoup de

  2   gens dans la colonne se sont débarrassés de leur sac. Sans doute qu'ils

  3   avaient pris trop de chose et qu'ils ne pouvaient pas tout porter. C'est

  4   ainsi que nous sommes arrivés au KP Dom, mais plus exactement au bâtiment

  5   administratif.

  6   Là, nous avons été placés dans une pièce au premier étage, plus exactement

  7   dans le bureau du trésorier du KP Dom. C'est une pièce assez petite dans

  8   laquelle nous étions environ 28 dont des Serbes et des Musulmans. Ma

  9   femme, mes enfants se trouvaient là aussi. Nous avons placé les femmes

 10   derrière le bureau. On a compris qu'il y avait des combats qui se

 11   déroulaient plus loin que le KP Dom, il y avait des coups de feu que l'on

 12   entendait et nous avons passé la nuit à cet endroit.

 13   Le premier qui a quitté cette pièce dans notre groupe, c'était Safet

 14   Imanovic, c'était un commandant d'unité, c'était un voisin à moi. Son

 15   beau-fils, Milan Steric, avait épousé la fille de son frère qui était

 16   décédé. Donc lui a été sorti, ils sont partis. Nous, nous sommes restés là

 17   jusqu'aux premiers heures du matin, jusqu'à environ 4 heures du matin. Il

 18   y avait des mouvements, des gens qui sortaient, d'autres qui entraient.

 19   Mais vers 4 heures et demie, mon voisin (expurgé) a ouvert la porte.

 20   Je lui ai dit: "Mais est-ce que tu vas aller voir dehors ce qui se

 21   passe?". On entendait des injures, on injuriait Sahim Basic. Il y avait

 22   des problèmes parce que les familles musulmanes avaient été placées dans

 23   les pièces pénitencières du bâtiment administratif. Je suppose que ce

 24   bâtiment administratif se trouve dans le bâtiment, mais je n'en suis pas

 25   sûr.


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  1   Et ils sont partis parce qu'à ce moment-là, les combats s'étaient arrêtés.

  2   On n'a pas tiré de coups de feu. Nous sommes sortis vers 6 heures moins

  3   20. Nous sommes allés à l'avant du bâtiment.

  4   Question: Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur. Est-ce que ceci

  5   signifie que les combats se sont poursuivis toute la nuit derrière le KP

  6   Dom?

  7   Réponse: Mais oui, mais oui, jusqu'aux premières heures du matin, le

  8   combat ne s'est jamais interrompu. Les vitres de cette pièce où nous nous

  9   trouvions avaient été brisées, il ne restait plus que le grillage devant

 10   la fenêtre. Ce qui explique notre position au sol: nous étions assis à

 11   même le sol pour avoir un minimum de sécurité. Nous étions en dessous donc

 12   du niveau des fenêtres.

 13   Nous étions assis, les enfants avaient été placés derrière le bureau car

 14   on se disait qu'ainsi ils bénéficiaient d'une meilleure protection, donc

 15   derrière le guichet puisque je vous avais dit que c'était le bureau du

 16   trésorier.

 17   Question: Ce matin-là, est-ce que vous avez entendu des personnes qui

 18   s'étaient trouvées dans les autres pièces quitter le KP Dom? Et qui avez-

 19   vous vu devant votre porte?

 20   Réponse: Eh bien, après ces injures que l'on avait entendues peu de temps

 21   après minuit -et je vous ai dit que nous, nous sommes sortis après 4

 22   heures du matin-, nous sommes entrés dans le couloir et nous avons vu que

 23   trois autres portes de bureau avaient été ouvertes. Une femme avec un

 24   enfant est sortie d'un de ces bureaux. Il y avait aussi une femme plus

 25   âgée et deux hommes plus jeunes.


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  1   Kameric arrivait aussi dans cette direction, il était armé d'un fusil, il

  2   a insulté cette mère, il a dit: "Mais où est-ce que vous prenez la fuite?

  3   Moi, je suis Oustachi, je vous combattrai jusqu'au dernier". Un de ces

  4   soldats qui était sur place s'est approché de lui et lui a donné un coup

  5   de sa Kalashnikof dans l'estomac avec le baril du fusil. La femme plus

  6   âgée a saisi cette arme automatique et a interdit à cet homme de faire

  7   quoi que ce soit.

  8   Une cinquantaine de secondes se sont écoulées, peut-être une minute au

  9   cours de laquelle nous avons réussi à calmer la situation. Nous avons

 10   finalement rejoint le groupe qui, lui, descendait des étages au-dessus de

 11   nous. Il y avait toute une foule de personnes, il était à peu près 5

 12   heures moins 20. Nous avons franchi les portes du bâtiment administratif

 13   pour sortir du pénitencier.

 14   Question: Et lorsque vous êtes sorti, qu'avez-vous vu?

 15   Réponse: Devant le bâtiment administratif, il y a un terrain plat qui mène

 16   au pont, à la route, et il y a cette route qui engendre la Drina; elle

 17   grouillait de monde. Il y avait des femmes, des enfants, c'était vraiment

 18   une situation de chaos complet puisqu'il devait y avoir au moins 3.000

 19   personnes à quelques centaines près. Cette zone est assez grande.

 20   La première colonne, celle donc qui avait franchi le pont, était assez

 21   longue parce qu'il y avait environ 350 personnes dans cette colonne. Elle

 22   avait déjà franchi le pont, alors que d'autres se déplaçaient, étaient

 23   sortis de l'usine où l'on fabriquait des tissus tricotés. Et ils se

 24   déplaçaient vers Ustikolina.

 25   Question: Est-ce que vous avez pu entendre si des gens se préparaient à


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  1   partir, et comment toute cette confusion s'était créée? Avez-vous entendu

  2   des choses?

  3   Réponse: Eh bien, après un certain temps, nous sommes restés près de la

  4   porte. A quelques mètres de cette porte, un groupe s'est arrêté à cet

  5   endroit et y est resté. Mon voisin, (expurgé), et mon collègue Mirsad ont

  6   dit: "Tant qu'il fait encore noir, avant que ne pointe le jour, il

  7   faudrait essayer de parvenir au village de Amdici", qui se trouve à

  8   environ trois kilomètres et demi de l'endroit où nous nous trouvions.

  9   Quelqu'un a dit: "Il faudrait que nous y allions et puis, des bus vont

 10   nous emmener par groupe à Ustikolina, et de là, à Gorazde.

 11   Question: Est-ce que vous êtes allé à Gorazde avec les membres de votre

 12   famille?

 13   Réponse: Non, moi, je ne suis pas parti en direction de Gorazde parce que

 14   j'ai pensé indépendamment de ce qui était dit, à savoir que des gens

 15   avaient des parents à Petkovici et je me suis dit qu'avec ma femme, mon

 16   beau-frère et nos enfants, ainsi que la femme du beau-frère, nous devrions

 17   essayer d'aller à Previla car là nous y avions un autre parent. Mais je ne

 18   me sentais pas en sécurité. Je craignais de ne devoir connaître le même

 19   sort à Ustikolina que le sort que j'avais déjà subi à auparavant.

 20   Je me suis dit autant rentrer chez moi à Donje Polje, dans mon

 21   appartement. J'ai demandé qui venait avec moi. J'ai pris mes fils par la

 22   main, j'ai demandé à (expurgé) s'il voulait venir avec moi. A ce moment-là,

 23   ni (expurgé) ni ma femme, ni mon beau-frère ne voulaient me suivre. Je suis

 24   passé par le couloir du KP Dom, je portais des vêtements de chasse; c'est-

 25   à-dire que j'avais un pull vert, mon chapeau, en fait, c'était un costume


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  1   vert avec un pull rouge, ce que j'interprète. J'avais enlevé ma veste de

  2   cuir, ma femme avait emmené son manteau. Les petits étaient encore très

  3   petits, leurs manteaux traînaient par terre. Mais je les ai pris par la

  4   main, je n'ai pas regardé derrière moi et j'ai continué mon chemin.

  5   Nous sommes passés devant l'atelier où on faisait des meubles. Là, il y

  6   avait un groupe de soldats musulmans qui avaient une discussion assez

  7   animée. De l'autre côté de la rue, ils étaient trois ou quatre sur les

  8   escaliers menant au restaurant ou à la cantine comme on l'appelait. C'est

  9   comme cela qu'on appelait le restaurant du KP Dom. J'ai marché, je suis

 10   passé devant eux. Personne ne m'a arrêté, j'étais à environ une dizaine de

 11   mètres de la boulangerie de Donje Polje. J'étais arrêté par deux soldats

 12   qui se trouvaient là. J'ai été stoppé par Aziz. Aziz autrefois travaillait

 13   à la banque. Un homme que je ne connais pas a dit: "Slobo, arrête!". Ce

 14   que j'ai fait. Il m'a demandé où j'allais et j'ai dit: "Aziz, je rentre

 15   chez moi dans mon appartement". Il se peut que j'ai dit que j'allais en

 16   enfer, je ne me rappelle plus exactement les propos que j'ai tenus.

 17   Comment vous dire? J'étais vraiment dans un état pitoyable.

 18   Il m'a dit: "Ecoute, va dans mon bâtiment, le premier derrière la

 19   boulangerie. Vas-y au sous-sol car y il y a déjà environ 70 personnes.".

 20   Je ne sais pas s'il a dit qu'il y avait 50 Serbes et 20 Musulmans ou

 21   l'inverse. En tout cas, il m'a dit d'aller dans ce bâtiment. Je me

 22   souviens maintenant de son nom: Aziz Sahinovic. Donc il m'a dit que mon

 23   collègue et moi pourrions nous occuper de la sécurité. Mais moi j'ai dit:

 24   "Aziz, laisse-moi rentrer dans mon appartement.". L'homme qui se trouvait

 25   à ses côtés a eu un regard sombre, il a armé sa Kalashnikov. C'est à ce


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  1   moment-là que derrière moi quelqu'un a crié: "Aziz, c'est toi?". Il y

  2   avait de la brume matinale encore. Le ciel se dégageait mais il y avait

  3   encore un peu de brume et quelqu'un a dit: "Aziz, c'est toi?". Il a dit:

  4   "Mais oui, c'est moi. Où vas-tu, toi?". "Je vais avec mon voisin Slobo à

  5   notre bâtiment avec (expurgé)", parce que cette colonne

  6   s'était mise en route.

  7   Il y avait donc ma femme, mon beau-frère et sa femme à lui, d'autres

  8   Serbes de ce groupe qui s'étaient trouvés dans le bureau du trésorier au

  9   KP Dom. Moi, je suis allé à ce bâtiment, j'y suis entré, je suis monté

 10   jusqu'au quatrième étage, à l'appartement de (expurgé). Et là, il n'y avait

 11   pas d'électricité mais on s'est débrouillés pour faire du thé et pour se

 12   réchauffer un peu.

 13   Question: Est-ce que vous avez passé un certain temps dans cet

 14   appartement?

 15   Réponse: (expurgé) avait toujours un téléphone qui fonctionnait. Il a appelé

 16   sa fille qui habitait dans un quartier qui s'appelle Cohodor Mahala. Donc

 17   c'était sept ou huit jours avant le début des combats. Sa fille a dit

 18   qu'ils étaient chez eux, que les Serbes tenaient cette partie-là de la

 19   ville.

 20   Après cela, j'ai appelé un collègue, Vojo Vucic, qui habite dans la partie

 21   de la ville qui s'appelle Prevrac. Je lui ai demandé qu'il appelle ma

 22   sœur, ma soeur qui habitait dans les quartiers d'Aladza, pour lui faire

 23   savoir que j'étais toujours en vie et que nous étions dans notre bâtiment.

 24   Nous sommes restés à cet endroit jusqu'à l'après-midi. Là, à ce moment-là,

 25   il y a eu des coups de feu vraiment très violents. Nous sommes donc


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  1   descendus au sous-sol où nous sommes restés jusqu'à 1 heure, voire 2

  2   heures du matin. Il faisait très, très froid. Nous sommes sortis du sous-

  3   sol et nous sommes allés dans cette chambre qu'il y avait au premier

  4   étage. Là, nous avons fait du feu, nous nous sommes occupés des enfants,

  5   les femmes ont préparé un peu de nourriture mais on n’était capables de

  6   rien manger. Nous avons donc ainsi passé la nuit à cet endroit et très tôt

  7   le matin, le lendemain.

  8   Vous savez, il y avait des voitures garées devant le bâtiment. En dessous

  9   de notre fenêtre il y avait une Yugo nouvelle qui appartenait au Dr

 10   Mandzo. Il devait l'avoir achetée un mois auparavant. Et nous avons, en

 11   regardant à travers les stores, vu trois hommes en uniforme sombre avec

 12   des bérets et les insignes du HOS qui ont brisé les vitres des voitures,

 13   ont cassé les câbles d'abord. Ils ont réussi à s'introduire dans une

 14   voiture qui s'appelle "Fica", mais ils n'ont pas pu la faire démarrer.

 15   Enfin, ils ont réussi à faire démarrer une des voitures, plus précisément

 16   la voiture du médecin, et ils sont partis. Nous ne les avons plus revus.

 17   Quant à nous, nous sommes montés au quatrième étage, nous avons été

 18   chercher à un moment donné du bois de chauffage au sous-sol. A côté de la

 19   porte d'entrée il y avait un sac en plastique. Je l'ai enlevé avec un

 20   bâton parce qu'on entendait des tirs de tireurs isolés de temps à autre.

 21   Toutes les cinq minutes, il y avait des balles qui sifflaient en passant à

 22   proximité de la porte d'entrée. Il y avait encore (expurgé) et mon beau-frère

 23   avec moi.

 24   Nous avons réussi à prendre ce sac à l'intérieur duquel il y avait trois

 25   bâtons de dynamite et diverses charges. J'en ai pris plusieurs de ces


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  1   grenades à main improvisée. J'ai fermé la porte d'entrée du bâtiment, et

  2   j'ai dit qu'il nous fallait remonter au quatrième étage. S'il venait des

  3   soldats, j'avais l'intention de jeter cette dynamite, j'avais l'intention

  4   de miner d’ailleurs l'escalier afin que ma femme, mes enfants, mon beau-

  5   frère, mon voisin (expurgé), nous soyons tous en sécurité. Nous sommes donc

  6   remontés à l'étage.

  7   Après un certain temps, peut-être quelques heures plus tard, la porte

  8   d'entrée a été ouverte. J'ai dit à (expurgé) que j'avais pris deux de ces

  9   bâtons de dynamite, j'ai pris mon briquet et j'ai dit: "Ecoute, je

 10   descends jusqu'au second étage. Si je parviens à revenir, tant mieux. Si

 11   je ne reviens pas, occupe-toi de mes enfants, envoie-les à Belgrade".

 12   Au moment où je descendais, (expurgé) est resté à proximité de la porte

 13   d'entrée. Et comme j'arrivais du quatrième étage au troisième, j'ai

 14   entendu une voix de femme qui a demandé s'il y avait quelqu'un de vivant à

 15   l'intérieur. Je n'ai rien dit. Je suis descendu encore d'un étage,

 16   j'arrivais ainsi au second et j'ai pu voir le canon d'un fusil

 17   automatique. Il y avait un soldat et, derrière ce soldat, une femme, ma

 18   voisine Desanka qui était une enseignante. Elle était donc derrière lui.

 19   Une fois de plus, elle a répété: "Est-ce qu'il y a quelqu'un de vivant à

 20   l'intérieur?". Je lui ai demandé si c'était bien elle, elle m'a dit oui,

 21   elle a dit: "Grand Dieu, merci, vous êtes vivant". Elle s'était trouvée en

 22   ville parce qu'il y avait des Serbes, elle avait une soeur dans ce

 23   quartier, elle était venue chercher certains de ses vêtements.

 24   Elle est donc venue avec Mico Krnojelac dans une Lada. Mico m'a dit que

 25   Donje Polje avait été libérée. Voulez-vous que j'arrête?


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  1   Question: Oui. Vous avez dit vous êtes trouvé dans le bâtiment avec (expurgé)

  2   et sa famille, n'est-ce pas?

  3   Réponse: Oui.

  4   Question: Pendant combien de temps votre famille est-elle restée dans ce

  5   bâtiment?

  6   Réponse: Eh bien, entre le moment où nous avons quitté le KP Dom et ce

  7   moment-là où nous sommes partis, nous avons passé une nuit, une journée,

  8   et je pense que c'est le lendemain -un dimanche-, que nous sommes partis

  9   vers 13 heures, au moment où Desanka est venu.

 10   Question: Et après cela, où êtes-vous allé?

 11   Réponse: Après, nous avons pris la direction d'un quartier appelé

 12   "Barakovac". En effet, ma femme a des parents qui y habitent. Notre voisin

 13   (expurgé) ainsi que Zahra sont venus avec nous, parce qu'il fallait traverser

 14   Cohodor Mahala, à savoir le quartier où habitaient le fils et la belle-

 15   fille de (expurgé).

 16   J'ai dit à (expurgé) de continuer son chemin avec moi pour aller là où je

 17   voulais aller, mais lui, il est resté à Cohodor Mahala. Quant à moi, ma

 18   famille et moi, nous sommes restés à Barakovac pendant une vingtaine des

 19   jours en qualité disons de réfugiés.

 20   Question: Est-ce que vous étiez vous-même à Barakovac pendant tous ces 20

 21   jours avec votre famille?

 22   Réponse: Non, j'étais avec eux pendant les tous premiers jours mais le

 23   troisième ou quatrième jour, j'ai pu entendre une déclaration, l'ordre

 24   plutôt par la Radio Foca, selon lequel ordre tous les conscrits et

 25   astreints au service militaire devaient se manifester au poste de


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  1   rassemblement militaire qui était le leur respectivement. Et telle était

  2   mon affectation. Par conséquent, j'ai dû depuis "l'Elektrodistribucija"

  3   aller à Barakovac et faire le retour tous les jours; c'est-à-dire que je

  4   devais aller travailler.

  5   Question: Est-ce que c'est à "l'Elektrodistribucija" que vous vous êtes

  6   trouvé pour remplir cette tâche qui était la vôtre, obligation de travail?

  7   Réponse: Bien sûr, parce que c'est d'après le livret militaire, d'après

  8   l'affectation qui était la mienne que ce poste m'a été assigné.

  9   Question: Pouvez-vous nous dire à quelle date vous êtes venu à

 10   "l'Elektrodistribucija" selon cet ordre-là, c'est-à-dire cette obligation

 11   de travail qui était le vôtre?

 12   Réponse: Je n'ai pas compris votre question.

 13   Question: Pouvez-vous me dire lorsque vous avez entendu par radio cet

 14   appel de mobilisation suivant lequel cet ordre, tous, vous deviez regagner

 15   votre poste d'affectation, votre lieu de travail plus précisément, vous

 16   vous êtes rendus à "l'Elektrodistribucija". Pouvez-vous dire à quel jour

 17   c'était, en quelle date?

 18   Réponse: Je ne peux pas me souvenir, mais c'était je crois que le

 19   quatrième jour, lorsque j'ai quitté Donje Polje. C'était peut-être le 18,

 20   le 19 ou peut-être le 20, je ne peux pas me rappeler la date exacte.

 21   Question: Est-ce bien à ce moment-là que vous recevez de votre

 22   contremaître un document?

 23   Réponse: Oui, le premier jour quand je devais me présenter à mon poste de

 24   travail, je ne disposais pas d'un permis de circuler car le couvre-feu

 25   était décrété, on ne pouvait pas quitter la ville sans être munis d'un


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  1   laissez-passer. Voilà la raison pour laquelle j'ai dû faire report à mon

  2   supérieur, Bozidar Arsic, lequel m'a fait délivrer un permis de circuler

  3   sur le trajet Foca-Barakovac, lesquels permis ne pouvaient être obtenus

  4   qu'aux autorités serbes.

  5   Question: Avec l'aide de l'huissier, je voudrais présenter à ce témoin la

  6   pièce à conviction IDD-143.

  7   (L'huissier s'exécute.)

  8   Réponse: Oui, il s'agit bien de ce permis de circuler, lequel permis m'a

  9   été délivré ce jour-là.

 10   Question: S'agit-il d'un permis de circuler sur la relation Barakovac-

 11   Foca, signé par le président du conseil exécutif, Radojica Mladjenovic?

 12   Réponse: Oui.

 13   Question: Est-ce que vous avez remis au conseil de la défense l'original

 14   de ce permis de circuler?

 15   Réponse: Oui.

 16   M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur.

 17   Monsieur l'huissier, nous n'avons plus besoin de ce document, vous pouvez

 18   le retirer du rétroprojecteur.

 19   (L'huissier s'exécute.)

 20   M. le Président (interprétation): Avez-vous l'intention de verser cette

 21   pièce à conviction?

 22   M. Vasic (interprétation): Oui.

 23   M. le Président (interprétation): Y a-t-il des objections?

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pas d'objection.

 25   M. le Président (interprétation): Il s'agira donc de la pièce à conviction


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  1   D143 versée au dossier.

  2   M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

  3   Donc en ce temps-là, vous habitiez Barakovac, et vous vous rendiez à Foca

  4   tous les jours pour travailler?

  5   M. Jovancevic (interprétation): Pendant les quelques premiers jours de

  6   cette époque-là je me trouvais à Barakovac. Et comme il n'y avait pas de

  7   courant, pas d'électricité en ville, cela voulait dire que mes collègues

  8   qui, comme moi avait cette tâche à remplir dans le cadre de l'obligation

  9   du travail, qui étaient là notre, ont réussi dans un laps de temps de huit

 10   jours à réparer la ligne à haute tension Celebici/Foca qui alimentait

 11   notre localité. Et cette énergie étant de l'ordre d'un MgW à peu près ou

 12   inférieur à un MgW.

 13   Question: Nous parlerons d'énergie plus tard. Mais dites-nous à quelle

 14   date êtes-vous venu de Barakovac/Foca?

 15   Réponse: Je crois qu'après 10 ou 12 jours je suis rentré. Ma famille était

 16   restée pendant plus loin longtemps peut-être plus de 20 jours, mais moi

 17   donc je suis retourné dans l'appartement qui était le mien et c'est à

 18   partir de cet appartement je me rendais au travail.

 19   Question: Pourquoi avez-vous dû venir de Barakovac Foca pour habiter la

 20   ville tout le temps?

 21   Réponse: Parce que, entre temps, comme je viens de le dire, les lignes ont

 22   été réparées, nous avons eu de l'énergie électrique. Comme c'étaient des

 23   réductions de courant, il y avait des délestages: par priorité c'est

 24   l'armée, l'hôpital d'abord, le bureau de PTT, la boulangerie, le KP Dom

 25   qui ont été alimentés. Pour ce qui est des autres consommateurs des foyers


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  1   et blocs d'habitations, il y avait une liste de délestage dressée suivant

  2   laquelle liste il y avait des coupures de courant de trois ou quatre

  3   heures. Nous, on avait du courant qu'aux heures où l'hôpital évidemment

  4   pouvait nous en passer, ou bien, aux heures où la boulangerie ne

  5   fonctionnait pas, etc.

  6   Question: Après votre retour à Foca, avez-vous reçu de votre contremaître

  7   un autre permis de circuler?

  8   Réponse: Oui, parce que le couvre-feu a été arrêté. Etant donné que nos

  9   dispositifs ne sont pas munis de commandes automatiques, par conséquent,

 10   les délestages doivent se faire à la main, manuellement. Donc vous devez

 11   vous rendre in situ près des transformateurs pour vous en occuper.

 12   Par conséquent, 24 heures sur 24 vous devez avoir la possibilité de

 13   circuler en ville. Voilà pourquoi mes collègues et moi avons reçu de Arsic

 14   Bozidar un permis de circuler, étant donné que le couvre feu était décrété

 15   de 8 heures du soir à 6 heures le matin le lendemain.

 16   Question: Le couvre-feu était donc obligatoire pour tous les habitants de

 17   la ville de Foca?

 18   Réponse: Oui, bien sûr, et ceci était valable même pour nous qui

 19   travaillions à "l'Elektrodistribucija". C'était un décret qui concernait

 20   tous les habitants qui se retrouvaient ces jours-là, ces moments-là à

 21   Foca.

 22   Question: Vous voulez dire valable autant bien pour les Serbes que pour

 23   les Musulmans?

 24   Réponse: Oui.

 25   Question: Maintenant, avec l'aide de l'huissier, je voudrais montrer au


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  1   témoin la pièce à conviction IDD-144.

  2   (L'huissier s'exécute.)

  3   Réponse: Oui, il s'agit bien de ce permis de circuler qui m'a été remis

  4   par mon chef.

  5   Question: Il s'agit donc d'un permis suivant lequel vous êtes autorisé à

  6   circuler, à un employé, vous, personnellement, de "l'Elektrodistribucija",

  7   pour pouvoir circuler pendant les heures du couvre-feu, pour pouvoir

  8   intervenir en vue de réparer les lignes, etc.?

  9   Réponse: Oui.

 10   M. Vasic (interprétation): Monsieur le Président, je propose que cette

 11   pièce à conviction soit versée au dossier.

 12   M. le Président (interprétation): Y a-t-il des objections?

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pas d'objection.

 14   M. le Président (interprétation): Il s'agira de la pièce à conviction

 15   D144.

 16   M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 17   Monsieur, vous nous avez dit tout à l'heure que le couvre-feu courait de

 18   20 heures du soir à 6 heures du matin?

 19   M. Jovancevic (interprétation): Oui.

 20   Question: Pouvez-vous nous dire pendant quelle période le couvre-feu a été

 21   décrété dans la ville de Foca?

 22   Réponse: Le couvre-feu, je crois, était en vigueur -je ne peux pas vous le

 23   dire avec précision-, mais il me semble bien jusqu'au moment où de

 24   nouvelles circonstances avaient été créées; c'est-à-dire tant qu'on n'a

 25   pas eu suffisamment d'énergie électrique en ville pour ce qui évidemment


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  1   ne pouvait pas être fait sans nous qui avons travaillé là-dessus. C'est-à-

  2   dire, tout court jusqu'au moment où, dans notre ville -comment dirais-je-,

  3   le courant a été alimenté suivant les besoins ressentis, mais lesquels

  4   besoins étaient fixés par les autorités. Etait-ce pendant un mois ou un

  5   mois ou deux, je ne peux pas le dire maintenant au moment où je suis. Mais

  6   je crois que c'était une période assez longue.

  7   Question: Merci. Dites-moi, avez-vous reçu un ordre par écrit de la part

  8   du directeur de "l'Elektrodistribucija" portant votre assignation, portant

  9   votre affectation?

 10   Réponse: Oui, il s'agit bien d'une décision suivant laquelle il s'agit de

 11   bien fixer le poste de travail qui était le mien et qui était mon

 12   affectation. C'était une décision qui m'était remise par mon chef

 13   supérieur.

 14   Question: Pouvez-vous nous décrire un peu la situation qui régnait dans le

 15   cadre du système d'énergie électrique de la ville de Foca pendant ce temps

 16   de guerre?

 17   Réponse: Très brièvement. La ville de Foca est alimentée depuis Gorazde.

 18   Etant donné que cette ligne à haute tension a été coupée littéralement,

 19   nous sommes restés sans énergie électrique, sauf le domaine de Celebici

 20   qui se trouve à 50 kilomètres de Foca. Cette localité se trouve alimentée

 21   par une ligne à haute tension qui passe de Pjevlja à Ahim Ratinje. Cette

 22   région-là avait du courant, or, nous nous étions sans courant pendant 10

 23   jours. Et une fois que nous avons pu rétablir la ligne à haute tension

 24   endommagée par les opérations de guerre, il s'agissait d'une ligne à haute

 25   tension de 10 kilowatts qui passait de Zavajit à Foca, par un système de


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  1   conversion nous avons pu avoir de l'énergie électrique d'environ un MgW.

  2   Je dirai que Foca consommait de l'énergie électrique de l'ordre de 12,5

  3   MgW. Or, nous n'avons eu qu'un MgW, même pas plein, pendant ces tous

  4   premiers jours, moins d'un MgW.

  5   Si je peux continuer, étant donné ce manque d'énergie, nous avons fait un

  6   précédent: nous avons cassé les isolateurs d'une ligne à haute tension de

  7   220 kilo volts de Zavajit Haminje, et nous nous sommes branchés sur la

  8   ligne de haute tension de Pjevlja qui va en direction de la centrale

  9   hydro-électrique. C'est ainsi que grâce à cela, nous avons pu avoir de

 10   l'énergie électrique de l'ordre de 3 MgW. Ce qui veut dire peut-être un

 11   peu moins de 4 MgG. A cette époque-là, les délestages étaient moindres,

 12   l'économie a pu être relancée, le combinat de transformation du bois de

 13   Maglic a pu fonctionner même en deux équipes, de même je peux dire que

 14   pendant ces heures-là où le combinat fonctionnait, les foyers et les

 15   maisons donc ont été pratiquement en délestage tout court. On ne devait

 16   alimenter que l'hôpital, le bureau de PTT, l'armée, la police et quelques

 17   entreprises.

 18   Question: Dites-moi quel était le minimum du puissance électrique

 19   nécessaire pour relancer l'économie et le travail de ces entreprises,

 20   surtout Maglic?

 21   Réponse: Quand il s'agit de Maglic, de ce combinat de transformation du

 22   bois, il s'agit de l'ordre de 2,5 MgW, le restant d'énergie électrique

 23   étant distribué à destination d'autres firmes qui se sont remises au

 24   travail. Et je dis bien de façon prioritaire c'était l'hôpital, le bureau

 25   de PTT, le KP Dom, la police et l'armée qui ont été alimentés. Par


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  1   intervalle, nous avons dû procéder à des délestages parce que, écoutez, le

  2   processus de production de panneaux à particules que produisait Maglic ne

  3   devait pas être arrêté parce qu'il travaille avec des huiles et des

  4   goudrons spéciaux. Nous avons dû tout faire pour les alimenter en énergie

  5   électrique en bonne et due forme. Mais vous savez, il y a eu aussi des

  6   pannes souvent parce que cette ligne à haute tension, qui a été prévue

  7   d'abord pour alimenter l'entreprise depuis la centrale hydroélectrique de

  8   Mratinje, évidemment, il s'agissait de sections de câble qui n'étaient pas

  9   importantes.

 10   Voilà pourquoi nous nous sommes préparés à créer une ligne à haute tension

 11   de Foca à Celebici de 35 Kilos Watts. C'est ainsi que nous avons pu, en

 12   raccourci, avoir la même énergie électrique, peut-être une énergie plus

 13   grande, sans aller pour autant à Crknicko Poljel pour nous occuper

 14   évidemment de pannes parce que, autrement, nous avons dû faire en une

 15   journée les localités de Gradac, de Sula. Et puis; comme c'était une

 16   mauvaise communication, nous avons dû faire nos préparatifs. Six mois plus

 17   tard, lorsque nous avons vraiment bien aménagé cette ligne à haute tension

 18   de 27,600 kilomètres, alors cette ligne à haute tension de 20 kilo volts a

 19   été rétablie, parce que c'était pratiquement une ligne dite "de

 20   compensation" qui était déjà prévue par la centrale hydroélectrique de

 21   Mratinje.

 22   Question: Dites-moi d'abord en quelle année vous avez fait ces

 23   réparations?

 24   Réponse: C'était en 1994.

 25   Question: Dites-moi, s'il vous plaît, vous avez dit qu'en 1992/1993 Foca


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  1   disposait de 4 MgW lorsque vous avez fait cette jonction des lignes à

  2   haute tension depuis Mratinje. Vous avez dit aussi que Maglic en

  3   consommait deux autres mégawatts. S’agissait-il de dire que pour la ville

  4   de Foca il ne restait que deux mégawatts?

  5   Réponse: Même moins de deux mégawatts parce que nous avons dû, en

  6   reconversion, alimenter la ligne de charbon brun de Miljevina, parce que

  7   vous savez que la ligne à haute tension de Kalinovik qui alimentait

  8   Miljevina, elle aussi cette ligne était souvent coupée. Par conséquent,

  9   pour la population, disons, nous n'avions qu'un mégawatt, un mégawatt et

 10   demi, pour mettre à leur disposition. Voilà le pourquoi de tous ces

 11   délestages.

 12   Question: Vous avez dit qu'avant les opérations de guerre, la ville avait

 13   besoin de 12 MgW. Vous avez eu à votre disposition 2 MgW, les restants

 14   d'énergie de l'usine de Maglic. Vous avez dit qu'il y avait eu une liste

 15   de priorités. Est-ce que vous avez suivi cet ordre de priorité?

 16   Réponse: Oui, c'est ce que j'ai dit. En premier lieu il a fallu alimenter

 17   l'armée, le bureau de poste PTT, l'hôpital et le pénitencier, le KP Dom.

 18   Question: Vous avez dit que c'était dans cet ordre là?

 19   Réponse: Oui, avant que l'économie n'ait été relancée. Mais une fois

 20   l'économie relancée, c'était d'abord la frime Maglic qui était alimentée

 21   et puis suit cette liste telle que je viens de la citer.

 22   Question: Mais pour respecter ces priorités que vous avez dites, avez-vous

 23   eu suffisamment d'énergie électrique?

 24   Réponse: Mais non, bien sûr, parce que d'après ce que j'ai dit tout à

 25   l’heure, vous pouvez remarquer vous-même et constater qu'il s'agissait de


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  1   très faibles quantités. Oui, bien sûr, ces gens-là ont été alimentés mais

  2   pas 24 heures sur 24, mais seulement quelques heures sur 24 heures.

  3   Question: Vous a t-on appelé depuis la boulangerie municipale pour

  4   remettre sur pied les pompes de mazout utilisées par les dispositifs et

  5   fours de cette boulangerie?

  6   Réponse: Et oui, et comment! Je ne peux plus me rappeler à combien de

  7   reprises je m'y suis rendu. Il y avait très peu de mazout d’abord. La

  8   boulangerie ne recevait, comme on dit, à raison de cuillères et des

  9   grammes. Il y a eu très peu de réserves. Lorsque dans un réservoirs de

 10   30000 litres vous versez 200 litres de mazout, alors qu’est-ce que cela

 11   peut faire? Voilà pourquoi nous avons été souvent obligés de procéder à

 12   des réparations parce que ces pompes évacuaient de la vase et cette

 13   saleté. C’est ainsi que les injecteurs, les buses des pompes d'huile ont

 14   été endommagées, le fuel, le mazout étant donc de mauvaise qualité. Voilà

 15   le pourquoi des pannes. Or, la boulangerie ne pouvait pas évidemment

 16   fonctionner. La boulangerie, je crois, s'était convertie en quelque sorte

 17   pour passer au combustible solide, au bois, pour travailler.

 18   Question: Avez-vous eu connaissance qu'à fin 1993 les fours ont été

 19   adaptés, remaniés, pour pouvoir utiliser du combustible solide?

 20   Réponse: Oui. Une tentative a été faite dans ce sens-là et partiellement

 21   ils y ont réussi, mais il n'y avait pas de moyens non plus et il n'y avait

 22   pas de spécialistes pour le faire. C'est beaucoup plus tard que ceci a été

 23   fait. Un four a été adapté de moindre capacité je dirais, les autres

 24   fourneaux étant toujours à mazout.

 25   Question: Monsieur, dites-moi depuis quand connaissez-vous Milorad


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  1   Krnojelac?

  2   Réponse: Je connais Milorad Krnojelac depuis une trentaine d'années. En

  3   effet, nous nous connaissons depuis le temps de l'électrification de

  4   Zavajt, de la localité de Zavajt, dans laquelle localité il a été employé

  5   à titre d'enseignant. Et puis, notamment, nous nous connaissons bien

  6   depuis le moment où il a commencé à travaillé à l'école fréquentée par mes

  7   écoles (sic). Mais d’une manière générale, je connais l’ensemble de la

  8   famille Krnojelac parce que j'ai fait pas mal de travaux pour installer

  9   des câbles toutes les fois où il a fallu passer à des contrôles des

 10   installations électriques qu'il possédait ou faire des plombage, etc.,

 11   enfin, je m'y rendais personnellement. Par conséquent je le connais, lui

 12   et sa famille, depuis plus de 30 ans.

 13   Question: Est-ce que vous avez connu le fait que son épouse est de

 14   nationalité croate?

 15   Réponse: Bien sûr que oui. Je le sais parce que, une fois qu'il s'est fait

 16   construire une maison à Foca, dans sa maison, je sais que l'on faisait

 17   deux réveillons de Noël, celui des catholiques et des orthodoxes. Milorad

 18   est un être sociable, bon pédagogue, homme dont les horizons sont vastes.

 19   Ce n'est pas lui qui va distinguer les gens d'après leur religion. Il les

 20   voit en tant que bon ou mauvais. Il est prof de mathématiques, une matière

 21   difficile pour les élèves. Il a toujours été compréhensif pour tout le

 22   monde. C'est ainsi que je le vois, c'est ainsi que je peux voir les choses

 23   et je ne peux dire que du bien sur lui, rien de mauvais.

 24   Question: Pouvez-vous nous dire si Milorad Krnojelac était membre d'un

 25   quelconque parti politique pendant la période avant la guerre?


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  1   Réponse: Autant que je sache, il était dans les rangs du parti qui était

  2   le mien également; c'était la KPJ, c'est-à-dire la Ligue des communistes

  3   de Yougoslavie, et plus tard de Bosnie-Herzégovine.

  4   Question: Vous vous référez au parti communiste de Yougoslavie, c'est-à-

  5   dire parti communiste tout court?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Etait-il membre d'un parti politique nationaliste, a-t-il eu un

  8   engagement politique quelconque avant les opérations de guerre?

9   Réponse: Autant que je sache non, je n'en ai pas entendu parler, je n'en

 10   sais rien vraiment. Je pense que non.

 11   Question: En 1994, avez-vous fait des travaux sur la maison de Milorad

 12   Krnojelac?

 13   Réponse: Oui, je m'y étais rendu pour faire les préparatifs nécessaires à

 14   ce que son compteur électrique soit branché; c'est-à-dire les câbles ont

 15   été installés et partiellement, la maison était réparée, la toiture était

 16   faite, la maison couverte, parce que cette maison avait été incendiée. Par

 17   conséquent, une partie de la maison a été remise à fonctionner

 18   normalement.

 19   Tous les câbles ont été installés. Etant donné que ces travaux ont été

 20   effectués, la tâche qui était la mienne est de m'en occuper, de faire des

 21   préparatifs nécessaires pour faire toutes les mesures nécessaires pour que

 22   son compteur électrique puisse être enregistré.

 23   Question: Vous avez dit que la maison a été remise en état de pouvoir

 24   fonctionner. Qu'est-ce que vous voulez dire par là?

 25   Réponse: J'ai dit que la toiture a été terminée. Quand j'ai dit qu'il


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  1   était remis en état de pouvoir fonctionner, c'est que tout simplement les

  2   câbles ont été installés de sorte à pouvoir alimenter la maison, ne

  3   serait-ce que pour permettre une prise de courant. Quelques ampoules

  4   pouvaient être allumées, mais la maison n'a pas été réparée de sorte

  5   qu'elle puisse abriter ses habitants.

  6   Question: Je prie l'huissier de prendre les documents photographiques.

  7   J'aimerais bien que l'huissier présente au témoin la photographie B1 pour

  8   qu'il nous dise s'il s'agit de la maison de Milorad Krnojelac.

  9   (L'huissier s'exécute.)

 10   (L'interprète précise qu'il s'agit de lots de documents, photographies ID-

 11   1.)

 12   Réponse: Oui, sur cette photographie-là on voit bien la maison de Milorad

 13   Krnojelac.

 14   Question: Merci. Nous n'avons plus besoin de cette photographie.

 15   Réponse: Si je m'y retrouve bien, sur cette photographie-là, c'est sur

 16   cette partie-là que je suis en train de montrer qu'il s'agissait de ces

 17   travaux.

 18   Question: Je prie l'huissier de passer au témoin le pointeur.

 19   M. le Président (interprétation): L'huissier vient de vous donner ce

 20   pointeur, et vous êtes prié de montrer sur le rétroprojecteur les parties

 21   de la photographie qui nous intéresse.

 22   M. Vasic (interprétation): C'est sur le rétroprojecteur qu'il faut montrer

 23   cette partie de la maison, pas sur l'écran de votre moniteur.

 24   M. Jovancevic (interprétation): Je crois qu'il s'agit d'une partie, cette

 25   partie-ci de la maison.


Page 5582

  1   Question: Est-ce que c'est la partie de la maison qui existait en 1994,

  2   alors que vous y installiez l'électricité?

  3   Réponse: La maison était allée jusqu'ici, jusqu'à cette partie du toit.

  4   Cette partie-ci est maintenant incendiée. Si je vois bien cette partie-ci

  5   de la maison où dans cette partie-ci il y avait également une autre maison

  6   en fait, qui était juste à côté, à côté de la maison de Milorad. Etant

  7   donné le caractère endommagé de la maison, étant donné maintenant tous ces

  8   échafaudages que nous apercevons sur la maison..., comment je pourrais

  9   m'exprimer... je ne peux pas avoir tellement une bonne idée de ce que

 10   c'était exactement. Il s'agit d'une photographie qui a été prise d'un

 11   certain angle et cela dépend de quel côté on regarde.

 12   Mais je sais très bien qu'il y avait une maison attenante, elle était

 13   attenante à la maison de Milorad. La maison également a été démolie, en

 14   fait les deux ont été démolies donc je ne peux pas vraiment vous dire avec

 15   certitude, avec détail, ou décrire en détail tout ce que vous me demandez.

 16   Question: Pour le compte rendu d'audience, le témoin montre à partir de la

 17   pièce à conviction IDD-1, et il s'agit de la photographie B1.

 18   Réponse: Il s'agit d'une partie qui a été construite préalablement par

 19   rapport à la partie droite dont on voit les blocs qui ne sont pas en

 20   mortier. Il s'agit de la maison appartenant à Milorad Krnojelac.

 21   M. Vasic (interprétation): Très bien, merci. Monsieur le Président, la

 22   défense n'a plus de question pour ce témoin.

 23   M. le Président (interprétation): Merci. Madame Mme Uertz-Retzlaff,

 24   auriez-vous des questions supplémentaires?

 25   (Contre-interrogatoire du témoin, M. Slobodan Jovancevic, par Mme Uertz-


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   1   Retzlaff.)

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci. Bonjour Témoin.

  3   M. Jovancevic (interprétation): Bonjour.

  4   Question: Lorsque la guerre a commencé à Foca, vous aviez environ 42 ans,

  5   n'est-ce pas?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Est-ce que vous avez pris part à cette guerre en tant que soldat

  8   à quelque moment que ce soit?

  9   Réponse: Oui, à un moment donné quand on a procédé à la mobilisation

 10   suivant l'ordre de mon supérieur, je me suis dirigé, je suis allé pour

 11   être sûr que je suis allé près de Lokvice. Il s'agit d'un bunker qui nous

 12   a été assigné à notre groupe à nous pour protéger les positions à cet

 13   endroit.

 14   Question: Quand vous avez été mobilisés, vous rappelez-vous de la date

 15   dont il s'agissait?

 16   Réponse: C'était avant le jour de l'An et après la Saint-Nicolas. Je ne

 17   peux pas vous dire la date exacte, mais c'était certainement avant le jour

 18   de l'An.

 19   Question: Vous parlez donc de la fin de 1992? Est-ce que c'est cela que

 20   vous vous voulez dire?

 21   Réponse: Je crois que je pensais à cette période-là. Je ne me rappelle pas

 22   précisément de la date.

 23   Question: Très bien, nous n'avons pas besoin de la date exacte. Avant la

 24   guerre, étiez-vous enregistré auprès des registres militaires de la ville

 25   de Foca?


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  1   Réponse: Avant la guerre, j'avais reçu une assignation de guerre, j'étais

  2   donc enregistré et c'est de Foca que je suis allé faire mon service

  3   militaire. Je ne sais pas si c'est à cela que vous faites référence. J'ai

  4   fait mon service militaire obligatoire depuis que j'habitais la ville de

  5   Foca.

  6   Question: Je pensais plutôt à la période précédant peu de temps avant la

  7   guerre, donc au début de 1992. Par exemple, avez-vous été enregistré

  8   auprès de la Défense territoriale?

  9   Réponse: Je ne sais pas si j'avais été dans les registres, mais je sais

 10   que l'assignation de guerre se trouvait dans l'entreprise dans laquelle je

 11   travaillais. Maintenant, s'agissant de la Défense territoriale, c'étaient

 12   des groupes de gens qui travaillaient dans diverses entreprises. Avant la

 13   guerre, j'allais tous les ans régulièrement faire quelques jours

 14   d'exercice militaire.

 15   Question: Quel était votre grade?

 16   Réponse: Chef de section en second.

 17   Question: Monsieur Krnojelac faisait également partie de la Défense

 18   territoriale, n'est-ce pas, il avait été membre?

 19   Réponse: Oui, il faisait partie de la Défense territoriale, moi je me

20   trouvais dans l'unité composée de l'union des électrodistributeurs. Il y

 21   avait l'unité de Maglic, l'unité de Runik En fait, c'était un bataillon

 22   qui à l'époque s'appelait le Bataillon, ou en fait, c'était plutôt une

 23   unité spéciale qui devrait être affectée à l'anéantissement ou la

 24   destruction des parachutistes ennemis ou des unités semblables. Donc dans

 25   l'éventualité d'une agression, c'est les tâches que notre unité devait


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  1   faire.

  2   Question: Monsieur Krnojelac, par contre, était capitaine de 1e classe,

  3   n'est-ce pas?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Et quelles étaient ses fonctions au sein de la Défense

  6   territoriale?

  7   Réponse: Je ne sais pas. Lors des exercices auxquels j'ai pris part, il

  8   n'était pas engagé -si vous pensez à cela.

  9   Question: Vous avez dit que vous avez travaillé au sein de

 10   l'Electrodistribution, quelle était votre affectation exacte? Quel était

 11   le poste que vous occupiez, étiez-vous un électricien régulier?

 12   Réponse: Je travaillais en tant que monteur, en tant qu'installateur.

 13   Pendant la guerre je faisais tout, mais il faut dire que les tâches

 14   étaient divisées. Avant la guerre, je travaillais dans le groupe qui

 15   appartient au département de l'achat et de la vente de l'énergie

 16   électrique. Alors que pendant la guerre, j'ai travaillé toutes les tâches,

 17   j'ai eu à faire toutes les tâches qui étaient liées à

 18   l'Electrodistribution, donc depuis la manipulation, l'installation,

 19   ensuite il s'agissait de trouver des bris, de réparer. Je faisais tout ce

 20   dont on avait besoin.

 21   Question: Merci. Dites-nous maintenant combien d'employés travaillaient

 22   dans l'entreprise dans laquelle vous travailliez également?

 23   Réponse: Avant la guerre nous étions 73, si je ne m'abuse.

 24   Question: Il s'agissait de Serbes et de Musulmans, n'est-ce pas?

 25   Réponse: Oui, il y avait des Serbes, des Musulmans et des Monténégrins, et


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  1   je crois qu'il y avait aussi deux Serbes de plus dans mon unité de

  2   travail, alors qu'à Sarajevo, au bureau chef "Valter Peric", il y avait

  3   environ 1700 employés.

  4   Question: Parmi les 73 employés dans votre unité à vous, combien y avait-

  5   il d'entre eux qui étaient de confession musulmane?

  6   Réponse: Eh bien, je vous dis qu'il y avait trois de plus. Si on divise le

  7   tout, donc nous étions 30. 38 d'entre nous et eux ils étaient au nombre de

  8   35.

  9   Question: Qu'en est-il de Seval Soro? C'était un de vos collègues, n'est-

 10   ce pas?

 11   Réponse: Oui.

 12   Question: Quel âge avait-il avant la guerre?

 13   Réponse: Je ne pourrais pas vous donner, rien vous dire avec précision,

 14   mais il avait 24 ou 25 ans, mais en fait il avait moins de 30 ans.

 15   Question: Et quel genre de poste occupait-il au sein de votre entreprise?

 16   Réponse: Il était installateur de l'équipe et il conduisait un véhicule

 17   qui s'appelait "Gaz", c'était une Jeep si vous voulez.

 18   Question: Qu'est-ce que c'est que ce véhicule appelé "Gaz"? Est-ce que

 19   c'est un véhicule particulier?

 20   Réponse: C'est un véhicule russe désigné à traction avant et traction

 21   arrière. Ce véhicule peut transporter six installateurs. Derrière, il y a

 22   un espace réservé aux outils, donc c'est un véhicule qui ressemble aux

 23   Jeep, je ne sais pas comment vous l'expliquer.

 24   Question: Oui, très bien, merci, c'est bien décrit. Dites-nous maintenant

 25   où habitait-il avant la guerre?


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  1   Réponse: Il vivait dans le quartier qui s'appelle Cohodar Mahala ou, pour

  2   être plus précis, il avait une maison, il habitait dans la partie

  3   supérieure de ce quartier.

  4   Question: Etait-il il marié?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Avait-il des enfants?

  7   Réponse: Oui.

  8   Question: Combien d'enfants avait-il?

  9   Réponse: Je crois qu'il avait deux enfants.

 10   Question: Est-ce que vous savez quel âge avaient les enfants?

 11   Réponse: Je ne pourrais pas vous dire exactement. Je ne me souviens pas

 12   mais ils étaient petits.

 13   Question: Monsieur Sovo ne travaille pas dans votre entreprise

 14   aujourd'hui, n'est-ce pas?

 15   Réponse: Dans mon entreprise, les hommes de nationalité musulmane ne

 16   travaillent pas depuis le début des conflits.

 17   Question: A quel moment avez-vous vu M. Sovo pour la dernière fois?

 18   Réponse: C'est un jour avant le début des combats, il s'était dirigé, en

 19   fait il est allé avec mon collègue Kulic comme je l'ai déjà dit

 20   auparavant. Il essayait de réparer certains bris, c'était la dernière fois

 21   que je l'ai vu dans mon entreprise. Après cela, ce qui est arrivé est

 22   arrivé, j'en ai déjà fait part. Je vous en est déjà parlé.

 23   Question: Monsieur Sovo avait été arrêté, il était également détenu au KP

 24   Dom, n'est-ce pas? Est-ce que vous avez ce détail?

 25   Réponse: Oui, j'en ai entendu parler.


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  1   Question: Il a disparu de cet endroit sans trace, n'est-ce pas? Il est

  2   porté disparu, on n'a aucune trace de lui?

  3   Réponse: Non, je ne le sais pas.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, il s'agit de

  5   la pièce C, en fait du numéro C24 sur la liste.

  6   M. le Président (interprétation): Oui, merci.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Qu'en est-il de M. Esad Kiselica, il

  8   était également l'un de vos collègues, n'est-ce pas?

  9   M. Jovancevic (interprétation): Oui.

 10   Question: C'était un homme qui était handicapé, n'est-ce pas?

 11   Réponse: Oui, c'est exact. Il avait été victime d'un accident. Ce qui est

 12   arrivé, c'est qu'il a eu un problème, il y a un arc électrique sur une

 13   station de 10 MgW et il a été électrocuté. Donc cette quantité d'énergie a

 14   brûlé une grande partie de sa peau. Par la suite, il est resté handicapé

 15   et il a été libéré des fonctions ou de la plupart des fonctions qu'il

 16   faisait, mais il ne pouvait plus faire les travaux qu'il faisait avant.

 17   Mais il s'était quand même remis.

 18   Question: Quel âge avait-il avant le début de la guerre?

 19   Réponse: Esad?

 20   Question: Oui, Esad?

 21   Réponse: Oui. Eh bien, je crois qu'il avait 4 ans de moins que moi. Trois

 22   ou quatre ans de moins que moi.

 23   Question: Où habitait-il?

 24   Réponse: Il habitait au centre ville dans le bâtiment qui se trouvait non

 25   loin de l'hôtel Zelengora.


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  1   Question: Etait-il marié?

  2   Réponse: Oui.

  3   Question: Avait-il des enfants?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Combien d'enfants avait-il?

  6   Réponse: Il avait un fils et une fille.

  7   Question: A quel moment l'avez-vous vu pour la dernière fois?

  8   Réponse: Le même jour que le collègue précédent, donc il s'agit d'un jour

  9   avant le début du conflit armé.

 10   Question: Est-ce qu'il avait été arrêté? On l'avait emmené au KP Dom,

 11   n'est-ce pas?

 12   Réponse: Je n'ai pas connaissance de ces faits, mais j'en avais entendu

 13   parler de ma voisine (expurgé) car son mari (expurgé) dont j'ai déjà parlé avait

 14   également fait l'objet d'une arrestation.

 15   Question: Savez-vous si M. Esad Kiselica est porté disparu du KP Dom et

 16   qu'on ait aucune trace de lui. Est-ce que vous avez connaissance de ces

 17   faits-là également?

 18   Réponse: Non, je ne le sais pas.

 19   Question: Mais vous ne l'avez plus revu par la suite, n'est-ce pas, après

 20   la guerre?

 21   Réponse: Non, non.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, il s'agit de

 23   la personne se trouvant sur la liste au numéro C12.

 24   M. le Président (interprétation): Merci.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Qu'en est-il de Hadil Konjo?


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  1   M. Jovancevic (interprétation): Non.

  2   Question: Il ne travaillait pas dans votre entreprise?

  3   Réponse: Non.

  4   Question: Qu'en est-il de M. Nahil Hodzic. Est-ce qu'il avait travaillé?

  5   Réponse: Oui, il avait travaillé dans mon entreprise il était chauffeur.

  6   Question: Quel âge avait-il environ?

  7   Réponse: Environ 60 ans d'après mon évaluation.

  8   Question: Et où habitait-il?

  9   Réponse: Il habitait non loin de mon entreprise ou pour être plus précis,

 10   dans la maison qui se trouvait, la deuxième maison depuis l'entreprise

 11   donc une quinzaine de mètres, donc à une distance de 15 mètres environ. Il

 12   était locataire, il avait vendu sa maison.

 13   Question: Est-ce qu'il était marié?

 14   Réponse: Oui, il avait deux filles de son premier mariage et il n'avait

 15   pas d'enfant de son deuxième mariage.

 16   Question: A quel moment l'avez-vous vu pour la dernière fois?

 17   Réponse: Ce dernier jour lorsque nous sommes tous venus au travail et par

 18   la suite je n'ai plus jamais revu personne.

 19   Question: Mais il s'était fait arrêter et on l'avait emmené au KP Dom?

 20   Réponse: Ce n'est pas de ma connaissance.

 21   Question: Est-ce que vous en aviez entendu parler plus tard?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: Il est également porté disparu ainsi que les autres, n'est-ce

 24   pas?

 25   Réponse: Je ne le sais pas.


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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, il s'agit de

  2   la personne figurant au numéro C10.

  3   Est-ce que vous connaissez M. Huseim Rikalo?

  4   M. Jovancevic (interprétation): Oui.

  5   Question: Est-ce que c'était un de vos collègues?

  6   Réponse: Oui.

  7   Question: Que faisait-il au sein de votre entreprise?

  8   Réponse: Pendant un certain temps il travaillait dans l'entrepôt. Par la

  9   suite, il est devenu installateur dans l'équipe d'installation

 10   d'équipement.

 11   Question: Quel âge avait-il?

 12   Réponse: Je ne sais pas, il devait avoir de 25 à 26 ans d'après mon

 13   évaluation, mais je ne sais pas avec exactitude.

 14   Question: Est-ce qu'il était marié?

 15   Réponse: Oui.

 16   Question: Avait-il des enfants?

 17   Réponse: Il avait un enfant et une épouse.

 18   Question: Où habitait-il à Foca avant la guerre?

 19   Réponse: Avant la guerre, il habitait d'abord chez ses parents dans la

 20   maison à Cohodar Mahala et ensuite, il avait reçu un appartement de

 21   l'entreprise. C'était Gornje Polje le quartier, et c'est comme une espèce

 22   de baraque qui comprenait deux appartements. Alors c'est là qu'il avait

 23   reçu un appartement.

 24   Question: Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois?

 25   Réponse: Ainsi que les autres comme j'ai déjà dit ce même jour, comme dont


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  1   j'ai déjà fait mention, le jour avant le début du conflit armé.

  2   Question: Et il s'est fait arrêter, il avait été emmené au KP Dom et par

  3   la suite il était porté disparu, n'est-ce pas?

  4   Réponse: Je l'ai entendu dire, je sais qu'il avait été au KP Dom, mais je

  5   ne sais pas ce qui lui est arrivé.

  6   Question: Vous avez parlé de M. Fahrudin Suvalija votre ex-chef. Il était

  7   Musulman, n'est-ce pas?

  8   Réponse: Oui.

  9   Question: Monsieur Suvalija n'est plus votre chef maintenant, n'est-ce

 10   pas, c'est quelqu'un d'autre maintenant?

 11   Réponse: Oui.

 12   Question: Il n'est plus à Foca, n'est-ce pas?

 13   Réponse: Ma chef à moi, mon chef qui est une femme est à Foca. Mais si

 14   vous parlez de mon ex-chef, je ne sais pas où il se trouve.

 15   Question: Savez-vous ce qui lui est arrivé?

 16   Réponse: Non, je ne le sais pas. La chef a reçu une décision et elle a été

 17   nommée à ce poste. Et le chef, on m'a informé que l'ex-chef avait été

 18   transféré ou muté pour travailler dans une autre entreprise.

 19   Question: Monsieur Juvalija n'habite plus la ville de Foca, n'est-ce pas?

 20   Réponse: Je n'ai pas eu l'occasion de le voir, de le revoir donc depuis le

 21   début du conflit armé jusqu'à ce jour, je ne l'ai plus revu, sa maison est

 22   encore là. Dans cette maison vivent des gens de nationalité serbe et je

 23   n'ai plus jamais vu que mon collègue Juvalija.

 24   Question: Est-ce que M. Juvalija s'était également fait arrêter? Avait-il

 25   été détenu aussi?


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  1   Réponse: Non, je ne le sais pas, mais je sais qu'il est parti en direction

  2   de Ustikolina, en direction de Sarajevo. Je ne sais pas ce qui lui est

  3   arrivé par la suite, c'est ce que j'ai entendu dire de ma voisine.

  4   Question: Ces gens dont nous venons de faire état?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Ce n'étaient pas des soldats, n'est-ce pas, c'étaient des civils

  7   et ils étaient vos collègues, n'est-ce pas?

  8   Réponse: Quand je les ai vus pour la dernière fois dans l'entreprise, ils

  9   étaient des civils. Pour ce qui est de plus tard, je ne peux pas vous le

 10   dire, je ne sais pas si par la suite ils sont devenus soldats ou s'ils

 11   sont restés civils, je n'ai pas été en contact avec eux, je n'ai pas eu

 12   l'occasion de les voir.

 13   Question: Vous avez dit que vous habitiez à Donje Polje et que vous nous

 14   avez également décrit, vous nous avez dit ce que vous aviez observé à

 15   Trnopolje concernant le début du conflit armé.

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: Est-ce que vous avez également été familier, ou avez-vous vu…

 18   Avant le début de la guerre, vous est-il arrivé de passer par des

 19   quartiers qui étaient serbes, à majorité serbe?

 20   Réponse: Avant la guerre il m'arrivait de passer par des villages ou des

 21   hameaux où il y avait plus de Musulmans ou d'autres villages où il y avait

 22   plus de Serbes, mais comme j'ai déjà dit il n'y avait personne. J'étais

 23   avec le collègue Mirsad Vehabovic, nous pouvions apercevoir que les

 24   rideaux étaient fermés, personne ne sortait de leur maison, il régnait un

 25   silence de mort. Quand nous sommes arrivés à Kozja Luka, nous nous sommes


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  1   informés comment aller à Kremin, je ne sais pas si vous parlez de cet

  2   incident-là.

  3   Question: Non. En fait, je parlais de Foca, de la ville de Foca. Les

  4   quartiers serbes comme Cerezluk par exemple, et les autres quartiers, vous

  5   est-il arrivé de vous y rendre, savez-vous si les Serbes se préparaient

  6   pour un conflit armé aussi?

  7   Réponse: Non je n'ai pas eu à me diriger ou aller là, mais j'ai pu

  8   entendre dire de mon voisin Bodruc qui a dit: "Viens voir, apporte tes

  9   jumelles." C'était juste devant mon immeuble. Il m'a dit: "Vient voir où

 10   tes Chetniks ont placé le mortier.". C'était une partie qui est un peu

 11   surélevée de Cerezluk c'était le seul commentaire. J'ai regardé par les

 12   jumelles, c'était peut-être quelques jours avant le conflit armé.

 13   Question: Vous avez parlé de Ramo Dzenduzic, je n'ai pas vraiment compris

 14   de quel laps de temps vous avez parlé exactement. Vous dites que vous avez

 15   vu un policier musulman aller vers sa maison et qu'il était armé, il avait

 16   des fusils. A quel moment c'est arrivé?

 17   Réponse: C'était l'été, plutôt à l'automne, quelques mois avant

 18   l'éclatement des conflits armés.

 19   Question: Monsieur le Président, je vois qu'il est 13 heures.

 20   M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons prendre la pause

 21   jusqu'à 14 heures 30.

 22   (L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 30.)

 23   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la

 24   parole.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le


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  1   Président.

  2   Avant la pause déjeuner, Monsieur le Témoin, nous étions en train de

  3   parler de Ramo Dzendusic. Vous nous avez parlé de ce que vous avez observé

  4   s'agissant de sa maison et vous avez dit que ses souvenirs remontaient à

  5   l'été 1991, n'est-ce pas?

  6   M. Jovancevic (interprétation): Oui.

  7   Question: Est-ce que M. Dzendusic était une personne âgée?

  8   Réponse: Oui.

  9   Question: Quel âge avait-il à peu près?

 10   Réponse: Je pense qu'il avait plus de 60 ans.

 11   Question: Et savez-vous où il travaillait?

 12   Réponse: Oui. A la défense nationale, on l'appelait plutôt au secrétariat

 13   de la défense nationale.

 14   Question: Pourriez-vous nous dire quel était le type d'emploi qu'il avait,

 15   le métier qu'il exerçait?

 16   Réponse: Je ne sais pas.

 17   Question: Quand la guerre a éclaté en avril 1992, M. Dzendusic il n'était

 18   pas soldat, n'est-ce pas?

 19   Réponse: Je pense que non.

 20   Question: Etant donné son âge déjà avancé ou pourquoi le savez-vous?

 21   Réponse: Je pense qu'il était déjà à la retraite.

 22   Question: Monsieur Dzendusic a été arrêté et conduit au KP Dom, n'est-ce

 23   pas?

 24   Réponse: Ca je ne sais pas.

 25   Question: Est-ce que par la suite vous en avez entendu parler cependant?


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  1   Réponse: Je n'ai rien entendu.

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, ce M.

  3   Dzendusic est mentionné au numéro 8 de la liste C, ainsi qu'à la liste B

  4   au numéro 20.

  5   M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez aussi

  7   parlé de Aziz Sahinovic et vous avez décrit les circonstances dans

  8   lesquelles vous l'avez rencontré après avoir quitté le KP Dom.

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Est-ce que M. Sahinovic était en uniforme lorsque vous l'avez vu

 11   ce jour-là?

 12   Réponse: Oui.

 13   Question: Quel était ce type d'uniforme? Pourriez-vous nous le décrire?

 14   Réponse: C'était un uniforme militaire.

 15   Question: De l'ex-JNA ou était-ce un uniforme différent?

 16   Réponse: Eh bien, c'était l'uniforme de l'ex-armée de l'ancienne armée de

 17   la JNA.

 18   Question: Est-ce que vous savez si M. Sahinovic était tout comme vous dans

 19   la Défense territoriale avant la guerre?

 20   Réponse: Mais je ne sais pas dans quelle unité il était.

 21   Question: Ce jour-là M. Sahinovic lorsque vous l'avez rencontré, est-il

 22   armé?

 23   Réponse: Oui, je ne suis plus tout à fait sûr mais je pense qu'il avait un

 24   fusil automatique, de fabrication yougoslave ou c'était une Kalashnikov.

 25   Question: Vous dites qu'il vous a en fait accompagné là où vous êtes allé?


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  1   Réponse: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que grâce à mon voisin

  2   (expurgé) qui était un ami personnel de Aziz. Aziz m'a proposé de rejoindre

  3   son sous-sol à lui.

  4   Question: Et après cette journée-là, est-ce que vous avez continué de voir

  5   M. Sahinovic?

  6   Réponse: Non.

  7   Question: Est-ce que vous avez appris qu'il avait été arrêté et emmené au

  8   KP Dom?

  9   Réponse: Non, je ne suis pas au courant.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, M. Sahinovic

 11   est mentionné au point 529 de l'Acte d'accusation. C'est un paragraphe

 12   spécifique qui lui est consacré à cet endroit.

 13   M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce qu'il vous arrivait d'assister

 15   à des réunions du parti SDS?

 16   M. Jovancevic (interprétation): Non, je ne suis pas membre de ce parti ni

 17   d'ailleurs du SDA ou d'un autre parti, à l'exception bien sûr de l'ancien

 18   parti communiste de Yougoslavie.

 19   Question: Ce qui veut dire que vous ne connaissiez pas exactement la

 20   composition du SDS. Vous n'en connaissiez pas les membres?

 21   Réponse: Non, je ne connaissais pas.

 22   Question: Mais vous ne savez pas non plus qui aurait été partisan de ce

 23   parti du SDS, n'est-ce pas?

 24   Réponse: Non, je ne sais pas.

 25   Question: Monsieur Jovancevic, vous dites être resté dans votre


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  1   appartement, dans le bâtiment où se trouve votre appartement ou plus

  2   exactement dans le sous-sol pendant plusieurs jours, n'est-ce pas?

  3   Réponse: C'est exact.

  4   Question: Pourriez-vous nous dire combien d'appartements votre bâtiment

  5   comptait?

  6   Réponse: Je pense qu'il y en avait 32. Si l'on compte les deux entrées. Il

  7   y en avait 15 du côté de mon entrée à moi, il y avait 5 studios, il y

  8   avait 5 appartements d'une chambre à coucher et 5 de 2 chambres.

  9   Question: Les locataires ou personnes occupant ces appartements étaient

 10   aussi bien des Musulmans que des Serbes?

 11   Réponse: C'est exact.

 12   Question: Pourriez-vous nous dire combien il y avait de Serbes et de

 13   Musulmans qui habitaient là?

 14   Réponse: Du côté de mon entrée il y avait Koric, Zvetla. Il y avait six

 15   familles. Six familles serbes s'entend, le reste des familles étant des

 16   familles musulmanes. Et parmi les familles serbes en fait il y avait un

 17   Croate qui est mort avant la guerre.

 18   Question: Et vous dites, vous parlez d'une seule entrée et de familles

 19   musulmanes. Pourriez-vous nous dire combien il y avait de Musulmans qui

 20   habitaient dans votre partie du bâtiment, de l'immeuble?

 21   Réponse: Neuf Musulmans et six Serbes, familles musulmanes s’entend.

 22   Question: Et c'était pareil pour l'autre entrée où c'était différent?

 23   Réponse: C'était différent. Je pense que de ce côté-là il y avait plus de

 24   Serbes, peut-être un ou deux locataires de plus.

 25   Question: Et vos anciens voisins musulmans, ils n'habitent plus dans


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  1   l'immeuble, est-ce bien exact?

  2   Réponse: Non, ils ne vivent plus là pour le moment. Il y a un appartement

  3   où habitaient des Musulmans qui est désormais vide du côté de mon entrée

  4   au rez-de-chaussée et dans le reste des appartements, ce sont des réfugiés

  5   qui habitent ou alors des personnes qui habitaient avant, comme moi.

  6   Question: Lorsque vous avez cherché refuge dans la cave, vous avez dit que

  7   s'y trouvaient déjà beaucoup de personnes, aussi bien des Serbes que des

  8   Musulmans?

  9   Réponse: C'est exact.

 10   Question: Est-ce que la majorité des personnes se trouvant dans cette cave

 11   étaient composées de Musulmans, ou de serbes, ou est-ce qu’on retrouvait

 12   les mêmes proportions, moitié moitié?

 13   Réponse: C'étaient surtout des Musulmans qui s'y trouvaient. Il y avait

 14   moins de Serbes provenant du quartier ainsi que d’Aladza et puis de

 15   Cohodar Mahala.

 16   Il y avait mon collègue et sa famille, mon collègue Misanovic et d'autres

 17   personnes qui venaient d'autres quartiers de la ville.

 18   Question: Alors où se trouvaient les habitants ou locataires Serbes de

 19   l'immeuble?

 20   Réponse: Je n'ai pas compris votre question.

 21   Question: Mais vos voisins Serbes qui vivaient dans le même immeuble que

 22   vous où étaient-ils? Est-ce qu’ils étaient sortis de l'immeuble, est-ce

 23   qu’ils avaient déménagé ou s’étaient installés dans d’autres quartier à

 24   Foca lorsque cela s'est passé?

 25   Réponse: Les Serbes qui se trouvaient là le 8 quand les opérations de


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  1   guerre ont commencé, eh bien, vous savez que pendant une heure il a été

  2   possible d'aller dans le centre de la ville. Des parents à eux sont venus

  3   en voiture, sont venus les chercher. J’étais le seul à rester avec ma

  4   femme, ma famille, mon beau-frère. J'étais le seul Serbe ainsi que mon

  5   voisin, une dame qui s'appelait Cveta. Les autres, ils sont tous partis.

  6   Je ne sais pas où ils sont partis.

  7   Il y a mes voisins qui sont partis, des Serbes, mais aussi des Musulmans

  8   qui sont partis de notre quartier.

  9   Question: Avec l'aide de l'huissier, j'aimerais montrer au témoin une

 10   feuille de papier où sera dissimulé un nom qui a déjà été mentionné par le

 11   témoin à plusieurs occasions et puis nous pourrons distribuer ce document

 12   à tout le monde.

 13   (L'huissier s’exécute)

 14   Quand vous allez examiner ce document, je vous demanderai de ne pas

 15   répéter le nom de cette personne.

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: Et je vous demanderai aussi de ne pas mentionner le chiffre ou

 18   le numéro que vous voyez sur ce document.

 19   Réponse: J'ai compris.

 20   Question: Dites simplement quand vous parlez de ce monsieur, de votre

 21   voisin, nous saurons de qui vous parlez.

 22   M. Jovancevic (interprétation): Je comprends.

 23   M. le Président (interprétation): Il s’agira de la pièce P454 qui sera

 24   versée sous pli confidentiel.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous avez dit, Monsieur le Témoin,


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  1   que cet homme et sa femme, ainsi que d'autres personnes, sont venus vous

  2   voir au début de la guerre à la recherche d'aide en fait.

  3   M. Jovancevic (interprétation): Oui, enfin, ce n'était pas de l'aide

  4   qu'ils demandaient. Ils voulaient pouvoir rester chez moi, dans mon

  5   appartement pour que je les protège au cas où le bâtiment serait attaqué

  6   par certains soldats, et j'ai demandé: "Quels soldats?". Ils ont

  7   simplement dit: "Des soldats.".

  8   C'est comme cela que cela s’est passé, je les ai laissés entrer chez moi.

  9   Question: Et cet homme, est-ce qu'il habitait dans votre immeuble?

 10   Réponse: Oui, à un étage en dessous donc on avait pratiquement le même

 11   type d'appartement à une chambre à coucher mais lui il était au quatrième.

 12   Question: Et pourquoi est-il venu vous voir?

 13   Réponse: Cela, je ne sais pas. Il est venu. On était bons amis, bons

 14   voisins. Il est venu à venu avec son directeur, je vous l’ai déjà dit,

 15   ainsi que sa femme.

 16   Question: Est-ce qu'il est venu vous voir parce que vous, vous aviez des

 17   armes alors que lui n'en n'avait pas?

 18   Réponse: Probablement.

 19   Question: Par la suite, est-ce que vous avez accompagné cet homme et sa

 20   femme à Cohodar Mahala?

 21   Réponse: Oui, mais cela s'est passé plus tard, lorsque nous sommes partis

 22   de Donje Polje.

 23   Question: Et vous vous souvenez de la date?

 24   Réponse: C'était le lendemain après avoir quitté le KP Dom.

 25   Question: Alors que vous rendiez à Cohodar Mahala, est-ce que vous avez


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  1   rencontré un groupe de soldat serbes? Vous en souvenez-vous?

  2   Réponse: Oui, je m'en souviens.

  3   Question: Et est-ce que ces soldats ont donné l'ordre à votre voisin de

  4   lever les mains en l'air?

  5   Réponse: J'étais le premier dans ce groupe de personnes et ils nous ont

  6   arrêtés, ils nous ont dit de stopper. Ils étaient à peu près à 80 mètres

  7   de nous. Je me suis arrêté. "Quel est votre nom?" a-t-il été demandé et

  8   j'ai levé la main et j'ai dit: "Slobodan.". J'ai pu passer. Et puis la

  9   même opération a été répétée pour Vidoje, pour (expurgé), pour (expurgé).Elles

 10   devaient rester ici. (expurgé) aussi. Eux, ils ont dû rester, donc certains

 11   sont passés d'autres pas. Puis j'ai relevé la main et j'ai dit au soldat

 12   qui se trouvait à droite, parce que je pensais que c'était le commandant,

 13   je lui ai dit: "Camarade, cet homme m'a sauvé la vie et l'ordre a été

 14   donné que j'aille avec eux."

 15   Nous nous sommes mis en route en direction du pont où nous avons rencontré

 16   un groupe de soldats. Nous avons demandé comment nous pouvions aller à

 17   Cohodar Mahala. Ils nous ont dit de passer par la riva, c'est comme cela

 18   qu'on appelle la route qui franchit ou qui engendre la rivière Cehotina.

 19   La partie basse de la ville, on s'était dit qu'on serait plus en sécurité

 20   de cette façon-là. C'est ainsi qu'on est arrivés sans encombre à Cohodar

 21   Mahala moi, ma femme, mon fils, mon beau-frère, sa femme et mes voisins

 22   (expurgé).

 23   Nous sommes arrivés à la maison de son beau-frère, (expurgé) est resté là;

 24   nous avons bu un café et puis j'ai poursuivi ma route jusqu'à Barakovac et

 25   lui est resté là avec sa femme.


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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vous remercie. Un nom a été

  2   mentionné à plusieurs reprises. Il faudra procéder à l'expurgation.

  3   M. le Président (interprétation): Le problème c'est que le témoin parle si

  4   vite qu'il y a beaucoup dans le texte d'accents circonflexes qui montrent

  5   là où on n'a pas saisi le nom qui a été dit. Donc ce sera difficile de

  6   demander aux techniciens de procéder à l'expurgation. Moi aussi, j'ai

  7   entendu le nom mais au moins une fois.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, je vois aussi dans le

  9   transcript, dans le compte rendu d'audience qu'il est mentionné au moins

 10   deux fois. Monsieur le Témoin, je vous demanderai de ne pas mentionner ce

 11   voisin ni par le prénom ni par le nom de famille. Vous avez dit que

 12   c'était votre ami.

 13   M. Jovancevic (interprétation): Excusez-moi, je ne l'ai pas fait exprès.

 14   Question: Nous vous comprenons bien, Monsieur.

 15   Réponse: Merci.

 16   Question: Vous avez dit que c'était votre ami, mais il a été arrêté et

 17   détenu au KP Dom pendant deux ans et demi?

 18   Réponse: J'ai appris qu'il avait été arrêté, (expurgé)

 19   (expurgé), a dit et elle était d'ailleurs en ville pendant très longtemps.

 20   Elle a été une des dernières à quitter la ville en bus.(expurgé), le nom du

 21   voisin de nouveau donné, était au KP Dom. Moi je ne sais pas combien de

 22   temps il est resté.

 23   Je sais simplement qu'il s'y est trouvé et qu'elle lui a rendu visite.

 24   J'ai envoyé un paquet de cigarettes, ce que je pouvais avoir, afin qu'elle

 25   le lui remette en même temps que mon bonjour si elle allait le voir.


Page 5604

  1   Question: Ce voisin, il était au KP Dom simplement parce qu'il était

  2   Musulman, c'était la seule raison de sa détention, n'est-ce pas?

  3   Réponse: Je ne sais pas si c'est là la seule raison. Sa femme m'a dit que

  4   la police militaire était venue et l'avait emmené au KP Dom.

  5   Question: Mais ce n'était pas un criminel, un délinquant cet homme?

  6   Réponse: Non bien sûr, c'était un brave homme, un bon ami à moi.

  7   Question: Et ce n'était pas un soldat non plus, n'est-ce pas?

  8   Réponse: Un de mes voisins était avec moi. Ce n'était pas un soldat parce

  9   que si vous voulez dire que c'était un soldat parce que c'était lui qui

 10   portait mon fusil lorsqu'on gardait l'entrée de notre immeuble, quand on

 11   gardait nos familles et nos voisins. On ne peut pas parler d'un soldat.

 12   Question: Vous aviez plusieurs fusils, n'est-ce pas?

 13   Vous nous avez donné le détail de tout ceci. Depuis quand disposiez-vous

 14   de ces armes?

 15   Réponse: En fait, je les ai héritées, ces armes, de mon père qui est

 16   maintenant décédé. J'ai acheté la carabine plus tard.

 17   Je la voulais comme arme de chasse. Pour la chasse, on a besoin de ce type

 18   d'arme, cela s'est passé en 1982 je pense. Oui en 1983, excusez-moi.

 19   Question: Il n'est pas inhabituel que les habitants de cette ville,

 20   surtout les hommes, aient des armes de chasse, n'est-ce pas?

 21   Réponse: Oui, il y avait au moins 12.000 hommes qui étaient membres du

 22   club de chasse, de la société de chasse et les membres provenaient de tous

 23   les groupes ethniques.

 24   Question: Donc le fait d'être propriétaire détenteur d'une arme à Foca et

 25   surtout d'un fusil de chasse ne faisait pas de vous pour autant un soldat


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  1   automatiquement?

  2   Réponse: Cela, je ne peux pas juger. Mon avis personnel c'est que les gens

  3   savent exactement à quoi servent les fusils de chasse et un chasseur

  4   sachant chasser est un sportif.

  5   Question: Après avoir entendu votre déposition, j'ai compris que vous

  6   étiez connaisseur en matière d'armes et vous avez dit avoir vu ce fusil ou

  7   ces fusils Moskovka. Vous avez dit qu'ils venaient du KP Dom. Comment le

  8   saviez-vous?

  9   Réponse: Eh bien, j'en ai entendu parler par mon voisin Juso Bostandzic,

 10   celui qui m'a demandé de monter la Moskovka. C'était la première fois

 11   d'ailleurs que je voyais cette arme, arme très dangereuse d'ailleurs parce

 12   qu'il y avait un problème avec la culasse.

 13   Question: Ces armes que vous avez rassemblées, elles ne fonctionnaient

 14   pas, c'est bien vrai?

 15   Réponse: Vous voulez parler de mes armes?

 16   Question: Non, je parle de ces Moskovka?

 17   Réponse: Eh bien, l'arme elle était démontée si vous voulez. Elle n'avait

 18   pas encore été montée et moi, je n'ai pas eu l'occasion de voir si elle

 19   montrait, elle fonctionnerait bien après assemblage. J'ai simplement

 20   essayé de la monter pour que cela marche, mais personne n'a fait d’essais

 21   devant moi.

 22   Juso a donné les munitions de son propre fusil à l'homme qui lui avait

 23   apporté ce Moskovka. Je ne connaissais pas le calibre, je ne savais pas si

 24   cette arme pouvait fonctionner ou pas.

 25   Question: Je vous remercie. Vous avez dit que la maison de M. Krnojelac


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  1   avait été détruite. Depuis le cinquième étage de votre immeuble vous aviez

  2   une bonne vue d'ensemble, un bon panorama de Donje Polje, n'est-ce pas?

  3   Réponse: Oui, jusqu'au début de la guerre et puis jusqu'à la fin de tous

  4   ces événements, je n'ai plus osé sortir sur le balcon. Je crois que je

  5   n'ai osé rentrer chez moi qu'une seule fois pour aller chercher une

  6   bouteille de vin. Puis nous sommes redescendus mon ami et moi au sous-sol

  7   et je suis monté dans mon appartement pendant la nuit, vers 2 ou 3 heures

  8   du matin.

  9   Question: Mais une fois les combats terminés, une fois que les Musulmans

 10   s'étaient retirés, est-ce que vous avez pu constater que les maisons des

 11   Musulmans à Donje Polje étaient en flamme?

 12   Réponse: J'ai déjà dit que pendant tout un temps j'étais à Barakovac, à

 13   quelque cinq kilomètres de mon immeuble. J'y étais en compagnie des

 14   membres de ma famille.

 15   Question: Et puisque quand vous êtes revenu, est-ce que vous avez vu des

 16   maisons appartenant à des Musulmans qui étaient détruites?

 17   Réponse: Oui.

 18   Question: Est-ce que vous avez pu constater que la mosquée de Foca était

 19   détruite?

 20   Réponse: Certes, on peut voir ce qui reste de la mosquée détruite de mon

 21   balcon. Il n'y a plus de minarets, il ne reste plus que le bas de la

 22   mosquée.

 23   Question: Est-ce que vous étiez présent au moment où cette mosquée a été

 24   détruite?

 25   Réponse: Non.


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  1   Question: A quel moment êtes-vous retourné dans votre immeuble? Réponse:

  2   Je ne pourrais pas vous le dire avec certitude. Je pense que c'était dix

  3   ou douze jours après être sorti du KP Dom.

  4   Question: Et quand vous êtes rentré chez vous, est-ce que vous avez

  5   constaté que les appartements occupés par des Musulmans avaient été

  6   fouillés par des soldats serbes?

  7   Réponse: Je n'ai rien remarqué ni personne. J'ai uniquement trouvé Dule,

  8   mon voisin immédiat dans l'immeuble. Plus tard, ma femme et mon voisin

  9   sont revenus. Des noms ont été prononcés. Ils sont revenus par la suite,

 10   les autres appartements étaient vides, aussi les appartements des Serbes

 11   que des Musulmans, donc il n'y avait que trois ou quatre d’entre-nous qui

 12   étaient dans l’immeuble pendant les premiers jours.

 13   Question: Et plus tard, au mois de mai?

 14   Réponse: Plus tard, mes voisins serbes qui étaient partis sont revenus et

 15   je pense que nos voisins, que notre voisine dont le nom est donné est

 16   revenue. Elle venait nous voir de temps en temps puis elle allait, je

 17   pense, passer la nuit chez une autre voisine car elle s’y sentait

 18   davantage en sécurité.

 19   Avant de quitter la ville, elle a laissé certains de ses biens à ses

 20   voisins, elle m'a laissé du cuir et je crois que ce qu’elle m’a donné est

 21   toujours dans mon appartement aujourd'hui.

 22   Question: Est-ce que vous avez pu constater que les hommes musulmans

 23   étaient arrêtés chez eux ou dans les rues et étaient emmenés au KP Dom?

 24   Réponse: Non, je n'étais pas au courant.

 25   Question: Vous avez dit que lorsque les combats se sont arrêtés, vous avez


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  1   repris votre travail à l'"Elektrodistribucija"?

  2   Réponse: C'est exact.

  3   Question: Et vous avez dit que c'était une affectation de combat. Pourquoi

  4   avoir appelé ces activités de la sorte?

  5   Réponse: Bien, c'est ce qui est dit dans mon carnet militaire. C'est

  6   l'endroit où je suis censé me présenter, faire rapport s'il y a un état

  7   d'alerte, danger de guerre, à ce moment-là, je devais me présenter à

  8   "Eleketrodistribucija" à Foca.

  9   Question: Et est-ce qu'il y a eu mobilisation générale qui a été annoncée?

 10   Est-ce que vous vous en souvenez?

 11   Réponse: Non mais souvent la sirène de la société des sapeurs-pompiers

 12   s'est faite entendre pour donner le signal du danger et il était de notre

 13   devoir, même avant la guerre évidemment, de nous présenter sur le lieu de

 14   rassemblement, sans parler d'opérations de guerre, c'est-à-dire de temps

 15   de guerre.

 16   Question: Par conséquent, lorsque vous avez entendu l’alarme donnée, la

 17   sirène donnant le signal, vous deviez vous rendre à

 18   "l’Elektrodistribucija" à l'entreprise, n'est-ce pas, d'après le système

 19   une fois établie pour pouvoir commencer à travailler?

 20   Réponse: Avant que les opérations de guerre ne commencent nous avons tous

 21   été obligés de nous présenter à "l’Elektrodistribucija", toutes les fois

 22   où une panne de coupure dépassait une durée de 15 minutes. Or, souvent,

 23   moi je pouvais passer plusieurs journées entières à

 24   "l’Elektrodistribucija", tout simplement parce que telle était

 25   l'affectation militaire qui était la mienne.


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  1   Si jamais il devait y avoir un danger d'opérations de guerre ou si jamais

  2   une sirène se fait entendre, ou la mobilisation a été décrétée lorsque les

  3   gens se rendaient sur le front, moi et mes collègues nous nous rendions à

  4   "l’Elektrodistribucija" d'abord sur le lieu de rassemblement qui se

  5   trouvait dans la pièce de celui qui était de garde.

  6   Question: Excepté de ce qui était partie intégrante de l'affectation

  7   militaire qui était la vôtre, vous avez dû faire votre travail, à savoir

  8   celui d'électricien, câbleur, n'est-ce pas?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Bon, sans entrer dans le détail, étant donné que la description

 11   que vous en avez donnée a été assez circonstanciée. J'ai tout de même une

 12   question concernant la distribution de l'énergie électrique. Vous avez

 13   parlé de priorité, vous avez parlé que prioritaires étaient le

 14   pénitencier, le KP Dom, la boulangerie, etc., mais le KP Dom, quant à lui,

 15   n'était-il pas muni d'un groupe électrogène à lui, n'est-ce pas?

 16   Réponse: Oui, autant que je sache, certains groupes électrogènes ne

 17   servant qu'à alimenter l’éclairage dans et autour du KP Dom, c'est-à-dire

 18   y compris les guérites dont se trouvent remontés les murs de cimetière.

 19   Tout simplement c'était l'éclairage donc en cas d'urgence, d'autres

 20   détails enfin, je les ignore.

 21   Question: Vous avez mentionné également la boulangerie municipale de la

 22   ville, est-ce que la ville de Foca n'avait pas d'autre boulangerie à cette

 23   époque-là?

 24   Réponse: A cette époque-là il y avait ce qu'on appelait la "Gradska

 25   Pekara", c'est-à-dire la boulangerie de la ville et puis il y avait une


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  1   autre dans le cadre du KP Dom autant que je sache, il n'y avait pas de

  2   boulanger privé sauf peut-être à Ustikolina

  3   Question: Depuis quand la boulangerie municipale a-t-elle recommencé à

  4   travailler normalement, depuis quelle date?

  5   Réponse: Je ne sais pas ce que vous entendez par "normalement", mais

  6   disons que pendant les tout premiers jours de guerre, pendant les

  7   opérations de guerre, pendant plusieurs mois tant que nous n'avons pas pu

  8   rétablir le système d'alimentation d'énergie électrique, la boulangerie

  9   travaillait, plutôt je dirai à un rythme anormal d'après moi. Telle est au

 10   moins mon estimation.

 11   Ce n'est qu'une fois le réseau électrique reconstruit et lorsque la

 12   boulangerie a pu communiquer mieux pour avoir du carburant, la boulangerie

 13   a pu se remettre au travail pour répondre évidemment aux besoins de ses

 14   capacités. Moi, je ne peux pas m'étendre là-dessus.

 15   Question: Vous avez dit aussi qu'à la boulangerie ces gens-là

 16   travaillaient aussi avec de l'électricité et par des carburants aussi

 17   liquides et combustibles solides?

 18   Réponse: Je ne peux pas vous dire l'année exacte à laquelle un four a été

 19   réadapté, réaménagé pour utiliser des combustibles solides parce que

 20   d'abord ils avaient commencé à travailler en utilisant de l'électricité et

 21   puis après d'autres carburants, mais pour dire en quelle année cette

 22   réadaptation a été faite, je ne peux pas vous le dire.

 23   Question: Merci. Vous avez mentionné la localité nommé Barakovac, cette

 24   localité qui a été mentionnée également dans le permis de circuler qui

 25   était le vôtre. A quelle distance se trouve cette localité par rapport à


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  1   Foca?

  2   Réponse: Pour parler évidemment de la firme dans laquelle je travaillais,

  3   Barakovac se trouvait à 5 kilomètres de distance.

  4   Question: Vous nous avez fait voir aujourd'hui ce permis de circuler,

  5   avez-vous été obligé de vous faire délivrer plusieurs permis de circuler?

  6   Ou était-ce le seul le permis dont vous avez été muni et que vous avez pu

  7   utiliser tout le temps pendant la guerre?

  8   Réponse: J'ai reçu ce permis-là que vous avez pu voir et ensuite d'autres

  9   décisions m'ont été délivrées portant sur l'obligation de travail qui

 10   était la mienne et puis il y a là évidemment pas mal de noms qui figurent

 11   à l'emplacement de la signature de ces différents directeurs qui me l'ont

 12   délivrée.

 13   Question: Mais pour ce qui est du permis de circuler, vous n'avez eu qu'un

 14   seul permis de circuler et puis après, d'autres permis vous ont été

 15   délivrés pour pouvoir circuler pendant le couvre feu. Avec l'aide de

 16   l'huissier je voudrais présenter la pièce à conviction du conseil de la

 17   défense D144. (L'huissier s'exécute.)

 18   Monsieur le Témoin, ce document ne porte pas de date. Vous souvenez-vous à

 19   quel moment vous l'avez reçu ce permis?

 20   Réponse: Ce permis je l'ai reçu après le permis préalable; il m'a été

 21   remis par Bozidar Arsic, c'est-à-dire c'était au moment où nous avons

 22   encore une fois pu rétablir le système d'énergie électrique. Je ne peux

 23   pas me souvenir de la date, mais je sais que c'est mon chef supérieur qui

 24   me l'a remis ce permis.

 25   A cette époque-là, je sais qu'il y avait pas mal de délestages, je suis de


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  1   ceux qui en étaient chargés pour délester tel ou tel quartier dans

  2   différents intervalles respectivement. Selon un ordre préalablement

  3   établi.

  4   Question: Oui, merci. Vous avez dit Monsieur, que vous connaissiez M.

  5   Krnojelac pendant plus de 30 ans. A quel point le connaissez-vous pour

  6   bien le connaître?

  7   Réponse: Je crois que je le connais suffisamment bien et longtemps. C'est

  8   ainsi que j'ai pu porter mon jugement sur lui.

  9   Question: Etiez-vous amis?

 10   Réponse: Nous étions de bonne connaissance. Toutes les fois où nous nous

 11   rencontrions nous pourrions nous asseoir prendre un café ou un pot, peu

 12   importe à quelle heure et, de temps en temps, je me rendais à sa maison

 13   pour m'occuper de réparations nécessaires, pour m'occuper de différents

 14   dispositifs électriques qui étaient tombés en panne. Parce qu'entre autres

 15   tel était mon métier.

 16   Question: Vous avez dit aussi que vous connaissiez des parents de M.

 17   Krnojelac, n'est-ce pas?

 18   Réponse: Oui.

 19   Question: Connaissez-vous le frère de M. Krnojelac, Arso Krnojelac

 20   chauffeur?

 21   Réponse: Oui, comme nous sommes ensemble membres de cette société des

 22   sapeurs-pompiers volontaires à cette époque-là.

 23   Question: Celui-là a-t-il eu une maison à Zavajt?

 24   Réponse: Zavajt, je sais qu'Arso avait une maison à Cerezluk. C'est un

 25   quartier de la ville nommé Cerezluk. Je suppose que la famille venant


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  1   évidemment de ce coin-là probablement elle devait avoir une maison là-bas.

  2   Question: Maintenant vous pensez à l'ensemble de la famille Krnojelac?

  3   Réponse: Oui, je pense à Arso, je pense à Risto Krnojelac chez qui j'ai

  4   également fait des travaux pour installer des câbles électriques. Je crois

  5   que lui aussi il a dû avoir une maison avant la guerre à Foca où j'étais

  6   allé pour travailler chez lui et chez son frère, son cousin germain Mirko.

  7   Question: Est-ce que vous connaissez le quartier qui se trouve autour du

  8   cimetière serbe de Foca?

  9   Réponse: Je ne vois pas très bien ce à quoi se rapporte votre question.

 10   Question: Vous savez où se trouve le cimetière orthodoxe de Foca?

 11   Réponse: Oui, bien sûr.

 12   Question: Bon, alors non loin de ce cimetière orthodoxe, y a-t-il des

 13   maisons ou des sociétés économiques, etc.?

 14   Réponse: Il y a là des maisons d'Orthodoxes, mais il y en a d'autres

 15   évidemment qui ne sont pas des Orthodoxes, qui sont des Musulmans, parce

 16   que c'est le quartier mixte quant à la population qui l'habite. Il y a une

 17   partie de ce quartier où des Orthodoxes ont pu se faire construire des

 18   maisons sur les terrains qui leur ont été vendus par des Musulmans.

 19   Question: Y a-t-il quiconque de ces Serbes qui habitent près de ce

 20   cimetière orthodoxe qui serait tonnelier?

 21   Réponse: Tonnelier? Non, je ne le sais pas.

 22   Question: Oui, d'accord. Connaissez-vous Mme Radsestovic Krnojelac, qui

 23   était elle aussi présente lors de votre déposition?

 24   Réponse: Je connais cette dame.

 25   Question: Quelle est sa profession?


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   1   Réponse: Elle est juriste, elle travaille dans le département urbanisme de

  2   la municipalité.

  3   Question: Vous avez eu connaissance du fait qu'en 1992, et en partie en

  4   1993, M. Krnojelac a été directeur du KP Dom de Foca, n'est-ce pas?

  5   Réponse: Je le savais. Bien sûr, tout le monde le savait à Foca.

  6   Question: Mais vous ne saviez pas ce qui s'était passé pendant ce temps-là

  7   dans l'enceinte du KP Dom?

  8   Réponse: Je n'ai jamais pu pénétrer dans l'enceinte du KP Dom, je n'ai

  9   fait que de m'occuper d'ailleurs des compteurs électriques, lorsque mes

 10   collègues et moi avons dû prendre les données les concernant.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous n'avons plus de question pour ce

 12   témoin.

 13   M. le Président (interprétation): Oui, merci. Maître Vasic, vous avez des

 14   questions supplémentaires?

 15   (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Slobodan

 16   Jovancevic, par Me Vasic.)

 17   M. Vasic (interprétation): Oui. A la question de ma collègue vous avez dû

 18   répondre si vous connaissiez M. Krnojelac comme étant le directeur du KP

 19   Dom?

 20   M. Jovancevic (interprétation): Oui.

 21   Question: Savez-vous de quoi il était compétent au KP Dom?

 22   Réponse: Je crois qu'il était chargé de la manutention ou de la gestion du

 23   fonctionnement de l'usine du KP Dom parce que, à mon sens, c'est ce qu'un

 24   directeur devrait faire. Je ne suis pas informé de quoi que ce soit

 25   d'autre.


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  1   Question: Au sujet de cette compétence qui était celle de M. Krnojelac,

  2   est-ce que vous en avez parlé avec votre collègue de

  3   l'"Elektrodistribucija" ou du KP Dom, lorsque vous vous êtes rendu au KP

  4   Dom pour savoir comment se présentait la consommation d'énergie

  5   électrique, pour en parler à vos collègues à l'"Elektrodistribucija"?

  6   Réponse: Je ne sais pas pour ce qui est de sa compétence ce qui s'était

  7   passé parce que, tout simplement, ce qui était déjà une pratique bien

  8   établie depuis l'avant-guerre, moi, je ne me suis occupé que de la partie

  9   du travail qui était la mienne. Je n'avais guère besoin de m'informer de

 10   quoi que ce soit d'autre.

 11   Question: Est-ce que vous avez pu savoir, de la part de ces personnes que

 12   vous avez pu rencontrer là-bas, que, lui, était directeur de cette unité

 13   économique, de l'unité -comme vous avez dit vous-même-, du secteur

 14   commercial et économique?

 15   Réponse: Oui, c'est sur le carton portant consommation énergie que nous

 16   pouvons lire "unité économique Drina". C'est de cela qu'il s'agissait. Et

 17   ipso facto, il devait être le directeur de cet ensemble, de cette entité

 18   économique. Je ne sais pas si je me suis fait bien entendre.

 19   Question: Merci. Vous avez dit que la famille de M. Krnojelac vient de

 20   Zavajt. Est-ce que vous saviez qu'il y avait également une famille, un

 21   village de Bilotic qui se trouve à 12 kilomètres de Zavajt?

 22   Réponse: Excusez-moi d'un lapsus, je m'excuse devant cette Chambre. Je me

 23   suis trompé, j'ai fait une confusion entre Kunarac et Krnojelac. Risto

 24   dont j'ai mentionné le nom tout à l'heure est plutôt Kunarac et non pas

 25   Krnojelac, mais je n'ai pas pu réagir à temps.


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  1   Question: Est-ce que vous avez une connaissance du fait que la famille de

  2   M. Krnojelac, quelque membre que ce soit de la famille de Krnojelac,

  3   aurait une maison à Zavajt?

  4   Réponse: Une maison quelconque? Ecoutez, Monsieur avait travaillé à Zavajt

  5   à l'école élémentaire. Je l'avais déjà connu en tant qu'enseignant de

  6   cette école-là plus tard. Il a enseigné dans une autre école, celle

  7   fréquentée par mes enfants.

  8   Question: Merci. Alors, vous venez de dire qu'il n'est pas d'origine de

  9   Zavajt mais qu'il y avait travaillé?

 10   Réponse: Oui. Nous disons Mico de Zavajt, Mico enseignant de Zavajt. C'est

 11   dans cet ordre d'idées que je disais que je le connaissais. Et d'ailleurs

 12   depuis le moment où cette région a pu être électrifiée.

 13   Question: Pour tirer au clair certaines choses, donc la famille de M.

 14   Krnojelac n'est pas d'origine de Zavajt. C'est ce que vous venez de

 15   préciser?

 16   Réponse: J'ai déjà été très précis pour dire que j'avais commis un lapsus.

 17   C'est qu'à un moment donné j'ai glissé vers la famille de Kunarac. Or,

 18   pour ce qui est de la famille de Krnojelac, ce n'est qu'un lapsus que j'ai

 19   commis.

 20   Question: Merci. Vous avez parlé d'une décision qui vous a été remise par

 21   votre directeur, portant sur votre obligation de travail en vertu de la

 22   loi décrétée. Pouvez-vous nous dire si, dans cette décision, il est dit

 23   que: qui dit obligation de travail dit, en d'autres termes, affectation de

 24   guerre?

 25   Réponse: Autant que je m'en souvienne, il est dit dans ma décision que


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  1   j'ai été affecté à l'obligation de travail tel et tel, ce qui est autre

  2   chose que mon affectation de guerre.

  3   Question: Merci.

  4   Réponse: Je vous en prie.

  5   Question: Vous avez parlé de votre collègue de l'"Elektrodistribucija" en

  6   répondant aux questions de ma collègue pour lesquels collègues qui étaient

  7   les vôtres, vous avez entendu dire qu'ils étaient incarcérés et emmenés au

  8   KP Dom. Par qui, s'il vous plaît?

  9   Réponse: Je ne sais pas, je ne peux pas le savoir. Pour ce qu'il s'agit de

 10   (expurgé), alors il a été incarcéré par la police militaire. Pour d'autres,

 11   je n'en sais rien.

 12   Question: Vous avez dit aussi en répondant aux questions de ma collègue de

 13   l'accusation que vous, vous n'avez pas pu voir depuis Esad Kiseljak.

 14   Combien de gens y a-t-il eu que vous n'avez plus pu voir depuis

 15   l'éclatement de la guerre?

 16   Réponse: Presque tous ces gens-là, tant qu'ils ne se sont pas remis à

 17   venir à Foca. J'ai vu par exemple Subasic Ismet et Radzi Asmetovic Rasim,

 18   mais pour ce qui est d'autres personnes, je n'ai vu personne vraiment

 19   revenir à Foca.

 20   Question: Par conséquent, ce n'est que cette année ou l'an dernier qu'ils

 21   se sont remis à venir à Foca?

 22   Réponse: Oui, il y a des jours fixes où ils reviennent à Foca pour se

 23   mettre à la recherche et la revendication de leurs appartements et leurs

 24   maisons.

 25   Question: Avez-vous pu entendre parler de ces deux autres où ils pouvaient


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  1   être et ce qu'il était advenu d’eux avant de venir à Foca?

  2   Réponse: Non, non plus pour ces deux-là non plus.

  3   Question: Merci.

  4   Avez-vous eu une connaissance du fait que M. Ramo Dzendusic a pu être

  5   membre d'une formation militaire armée depuis l'éclatement des opérations

  6   de guerre?

  7   Je ne dis pas vraiment soldat militaire de telle ou telle armée mais tout

  8   simplement s'il était membre d'une faction, d'une formation armée?

  9   Réponse: Non, pas autant que je le sache, non.

 10   Question: Vous avez parlé de réfugiés, réfugiés qui à la suite de la fin

 11   des hostilités sont venus pour occuper les appartements des Musulmans.

 12   D'où viennent-ils ces réfugiés?

 13   Réponse: De Sarajevo, de Slatina, de Godijevna, d’Ustikolina et d'autres

 14   localités.

 15   Question: S'agit-il de réfugiés de nationalité serbe qui ont été chassés

 16   de leur maison et de leur terre par les Musulmans?

 17   Réponse: C'est exactement le cas. Il y a d'autres cas d’ailleurs où les

 18   gens voulaient se faire construire sa maison ou avoir son fief à lui, si

 19   par exemple quelqu'un a quitté le domaine ou la famille de son père et

 20   voulait vivre ailleurs, par conséquent à Foca.

 21   Question: Vous avez parlé de vos voisins et vous avez dit qu'à un moment

 22   donné vous avez été armé alors que votre voisin ne l’a pas été. Plus tard

 23   peut-on dire que lui il était armé alors que vous ne l'avez pas été

 24   pendant que vous étiez dans votre bâtiment?

 25   Réponse: C'est exactement le cas.


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  1   Question: Et ce cas quand s'est-il produit?

  2   Réponse: Lorsqu’on m'a pris mes armes, seuls les Musulmans étaient restés

  3   armés. Mon collègue Mirsad, son père (expurgé), Velfo Djulandzic, eux ils

  4   étaient presque toujours armés évidemment, à côté les militaires et les

  5   soldats qui venaient toujours normalement armés.

  6   Question: Vous avez parlé aussi d'un certain nombre de fusils de chasse

  7   qui existaient à Foca avant l'éclatement du conflit armé.

  8   Vous avez dit aussi que ces fusils de chasse ne pouvaient être utilisés

  9   qu'à la chasse et pendant la saison de chasse à des fins sportives. Ces

 10   fusils peuvent-ils être utilisés aussi en cas de conflit?

 11   Réponse: Et comment! Toute arme peut être utilisée le cas échéant et

 12   surtout si on se trouve dans la misère.

 13   Question: Merci.

 14   En répondant à des questions de mon honorable collègue, lesquelles

 15   portaient sur le fonctionnement de la boulangerie, vous avez dit que la

 16   boulangerie travaillait peut-être quelque peu mieux à la suite de la

 17   reconstruction. De quelle reconstruction s'agissait-il, de lignes à haute

 18   tension ou de systèmes d’alimentation en énergie électrique comme vous

 19   l’avez dit, vous-même, fin 1993 pour parler de Foca?

 20   Réponse: Oui, fin 1993/1994 la situation s'était normalisée.  Je pensais

 21   donc à cela, je pensais au système d'énergie électrique mais je pensais

 22   aussi à une meilleure communication et à un meilleur approvisionnement en

 23   combustible.

 24   M. Vasic (interprétation): Je n'ai plus de questions, Monsieur le

 25   Président.


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   1   M. le Président (interprétation): Merci Monsieur. Merci d'être venu pour

  2   témoigner. Vous pouvez disposer.

  3   M. Jovancevic (interprétation): C'est moi qui remercie cette honorable

  4   Chambre d'instance d'avoir bien voulu m’écouter.

  5   (Le témoin, M. Slobodan Jovancevic, est reconduit hors du prétoire.)

  6   M. le Président (interprétation): Maître Vasic, votre prochain témoin

  7   c'est M. Mihajlovic?

  8   M. Vasic (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

  9   M. le Président (interprétation): Merci. Nous allons attendre un moment

 10   pour qu'on introduise le témoin.

 11   (Le témoin, M. Milomir Mihajlovic, est introduit dans le prétoire.)

 12   M. le Président (interprétation): Voulez-vous, s’il vous plaît, faire la

 13   déclaration solennelle en lisant ce papier que l’huissier vous présente.

 14   M. Mihajlovic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirais la

 15   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 16   M. le Président (interprétation): Asseyez-vous, Monsieur.

 17   M. Mihajlovic (interprétation): Merci.

 18   M. le Président (interprétation): Maître Vasic, c’est à vous.

 19   (Interrogatoire principal du témoin, M. Milomir Mihajlovic, par Me Vasic)

 20   M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 21   Monsieur Mihajlovic, bonjour avant tout.

 22   Avant de procéder à l'interrogatoire principal, soyez aimable, toutes les

 23   fois lorsque vous aurez entendu mes questions, étant donné que nous

 24   parlons la même langue, ménagez une petite pause de sorte que les

 25   interprètes puissent vous traduire et nous traduire.


Page 5621

  1   Vous avez sur le moniteur devant vous un texte qui court. Une fois le

  2   curseur arrêté, c'est le moment où vous pouvez commencer votre réponse.

  3   Dites-moi d'abord votre nom de famille et prénom?

  4   M. Mihajlovic (interprétation): Je m'appelle Mihajlovic, Milomir de

  5   prénom.

  6   Question: En quelle année êtes-vous né?

  7   Réponse: Je suis né le 14 juin 1961 à Foca.

  8   Question: Où avez-vous fait votre école élémentaire et votre école

  9   secondaire?

 10   Réponse: Mes écoles élémentaires et secondaires, je les ai faites à Foca.

 11   Question: Où et à quel moment avez-vous été employé?

 12   Réponse: En 1974 à l'hôpital de Foca.

 13   Question: Etes-vous marié et avez-vous des enfants?

 14   Réponse: Je suis marié et suis père de deux enfants.

 15   Question: Dans quel quartier de Foca habitez-vous?

 16   Réponse: J'habite le quartier de la ville de Foca intitulé Cohodar Mahala.

 17   Question: Merci. Avez-vous fréquenté l'école élémentaire Veselin Maslesa

 18   de Foca?

 19   Réponse: Oui, à partir de la première année à la huitième année.

 20   Question: Dans cette école-là, est-ce le Pr Milorad Krnojelac qui vous a

 21   enseigné les mathématiques?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: Est-ce que vous pourriez nous dire quelles sont vos impressions

 24   concernant cette personne en tant qu'homme et en tant qu'enseignant, tel

 25   que vous vous le rappelez de cette époque-là?


Page 5622

  1   Réponse: Je me souviens de lui comme étant un bon professeur de

  2   mathématiques, un très bon pédagogue. Il était très juste quand il

  3   accordait des notes aux élèves.

  4   Je me souviens qu'il essayait même d'aider aux élèves qui n'étaient pas

  5   très bons en mathématiques. Il essayait de faire en sorte de faire aimer

  6   en fait les mathématiques aux élèves.

  7   Question: Merci. Dites-nous quelle était la composition ethnique de cette

  8   école s'agissant des élèves aussi bien que des professeurs, des

  9   enseignants?

 10   Réponse: Je pourrais dire que c'était moitié moitié. Car c'était la

 11   composition ethnique qui prévalait en ville également.

 12   Question: Est-ce qu'il vous ait jamais arrivé de remarquer que Milorad

 13   Krnojelac faisait des différences ou faisait une différence entre les

 14   élèves de nationalité musulmane et entre les élèves de nationalité serbe?

 15   Réponse: Non.

 16   Question: Est-ce que vous savez si l'un des fils de M. Krnojelac avant le

 17   début du conflit tenait un café qui s'appelait Gong?

 18   Réponse: Oui et je fréquentais ce café également.

 19   Question: Pendant la période qui précédait les conflits armés, j'entends

 20   la deuxième partie du mois de mars et début avril, alliez-vous à ce café?

 21   Réponse: Oui.

 22   Question: Avez-vous pu remarquer si les habitants de Foca qui étaient de

 23   nationalité musulmane fréquentaient également ce café?

 24   Réponse: Oui.

 25   Question: Pourriez-vous nous nommer quelqu'un, des personnes que vous


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  1   auriez vu dans ce café?

  2   Réponse: Oui, certainement j'avais un collègue qui travaillait avec moi et

  3   il allait manger une pizza, il venait prendre un café. Il s'appelait

  4   Dzendusic Nusret. Je voyais également Zaim je ne me souviens pas de son

  5   nom de famille, mais je sais qu'il était en très bonne relation avec

  6   Spomenko le propriétaire, il y avait également Ifran Djurefic que je

  7   connaissais bien. Il y avait parmi les gens qui fréquentaient le café, il

  8   y avait des Musulmans et des Serbes.

  9   Question: Pourriez-vous nous dire de quel genre de café il s'agissait?

 10   Réponse: C'est un café qui est en même temps une pizzeria.

 11   Question: Dans cette pizzeria, pourriez-vous nous dire si on pouvait

 12   entendre les musiques nationales, les mélodies nationales?

 13   Réponse: Oui, en fait ce qu'on entendait c'était de la musique rock et des

 14   mélodies connues du type "ever green".

 15   Question: Est-ce qu'on entend de la musique forte ou non?

 16   Réponse: La musique n'était pas très forte et je sais que lorsque je

 17   m'entretenais avec les garçons de table, ils me disaient que le

 18   propriétaire désirait que la musique ne soit pas trop forte pendant que

 19   les gens mangent la pizza.

 20   Question: Est-ce que vous avez jamais entendu dire ou entendu parler du

 21   fait que dans ces pizzerias, dans ce café "Gong" on entendait des chants

 22   nationalistes serbes?

 23   Réponse: Non.

 24   Question: Est-ce que vous aviez entendu ce genre de rumeur en ville?

 25   Réponse: Non.


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  1   Question: Merci. A quel moment est-ce que le secrétariat de défense

  2   nationale vous a affecté ou vous a assigné dans une unité de la JNA?

  3   Réponse: C'était 5 à 7 jours avant le début du conflit à Foca.

  4   Question: Est-ce que cette unité était le seul moyen de défense de

  5   l'entrepôt militaire?

  6   Réponse: S'agissant de la caserne de Ustikolina où j'ai été affecté en

  7   tant que réserviste, il y avait peu de personnes qui assuraient la défense

  8   de l'installation. Donc nous les réservistes, nous étions peut-être au

  9   nombre de 10 à 15.

 10   Question: Quelle était la composition ethnique de ces hommes qui avaient

 11   répondu à l'appel de la JNA pour aller à Ustikolina?

 12   Réponse: Il y avait des Serbes et des Musulmans, en fait, il y avait des

 13   personnes que je connaissais et d'autres que je ne connaissais pas et

 14   avant dans la réserve, j'étais avec Buljubasic c'était un jeune homme

 15   musulman et je sais que même avant, dans les années 80 il était en

 16   exercice. Mais en fait, la réponse n'a pas été très importante peu de gens

 17   se sont présentés.

 18   Question: Jusqu'à quand êtes-vous resté dans cette unité à Ustikolina,

 19   cette unité qui appartenait à la JNA?

 20   Réponse: Je suis resté jusqu'au 6 avril et c'est à ce moment-là que le

 21   chef de cette unité nous a renvoyés chez nous car la réponse n'est pas

 22   très bonne, il n'y avait pas assez de gens.

 23   Question: Est-ce que le chef de cette unité était d'origine serbe?

 24   Réponse: Oui.

 25   Question: En date du 8 avril 1992, êtes-vous allé au travail à l'hôpital?


Page 5625

  1   Réponse: Non.

  2   Question: Quelle est la raison pour laquelle vous ne vous êtes pas rendu

  3   au travail?

  4   Réponse: Je suis resté dans la maison familiale et mon père travaille

  5   également à l'hôpital. Il commence normalement sa relève à 6 heures du

  6   matin ou à 6 heures, et mon père était parti et je commence à travailler à

  7   7 heures. Mon père est parti un peu plus tôt il m'a dit: "Non ne

  8   t'inquiète pas, soit à la maison." Quand il est revenu à la maison il a

  9   dit: "Je ne pouvais pas revenir car il y avait des barricades." Je lui ai

 10   demandé qui lui a dit cela et il m'a dit que c'était Rasim Kadic Hazim qui

 11   travaillait avec moi au bureau.

 12   Question: Merci.

 13   Dites-nous quand est-ce que vous vous êtes rendu à l'hôpital pour la

 14   première fois pour aller travailler après le début du conflit armé?

 15   Réponse: Sept à 8 jours après le début du conflit armé.

 16   Question: Est-ce que vous vous êtes rendu à cet endroit-là à la demande du

 17   directeur de l'hôpital?

 18   Réponse: Oui, je suis allé à la demande du directeur de l'hôpital. Il

 19   s'appelle Stanic Sekula.

 20   Question: Est-ce que vous étiez engagé auprès… bibliothécaire ou vous

 21   teniez les registres plutôt de l'hôpital? Est-ce que vous faisiez la

 22   comptabilité pour l'hôpital?

 23   Réponse: Oui, l'homme qui travaillait dans la comptabilité ne pouvait pas

 24   se rendre au travail, c'est pourquoi on m'a appelé et son bureau se

 25   trouvait dans la pharmacie même, c'est pourquoi on m'a appelé car il n'y


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  1   avait plus assez de médicaments et on ne pouvait plus intervenir auprès

  2   des unités de l'hôpital de Foca.

  3   Question: Est-ce que votre directeur vous a dit que c'était votre tâche et

  4   vos responsabilités, que cela faisait partie de l'assignation militaire?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Pourriez-vous nous dire si vous savez qui affectait les

  7   directeurs et les chefs au moment où les conflits armés ont éclaté, qui

  8   nommait ces gens au poste?

  9   Réponse: D'après ce que je sais, c'était le comité exécutif de l'assemblée

 10   municipale.

 11   Question: Merci. Au cours de votre séjour à l'hôpital vous est-il arrivé

 12   de rencontrer Milorad Krnojelac?

 13   Réponse: Oui. Nous nous sommes rencontrés à l'intérieur de l'enceinte de

 14   l'hôpital jusqu'à ce moment-là, nous nous ne voyons pas. J'avais appris

 15   que sa maison avait été incendiée, je lui ai demandé: "Professeur, que

 16   s'est-il passé" et j'essayais de l'encourager je lui disais: "Ne vous en

 17   faites pas vous allez construire une nouvelle maison."

 18   Question: Est-ce qu'il vous a dit à ce moment-là ou quelles étaient ses

 19   fonctions ou le poste au sein du KP Dom?

 20   Réponse: Il m'a dit qu'il avait été nommé de la part du comité exécutif en

 21   tant que chef commercial de l'unité Drina et qu'il fallait essayer qu'il

 22   sauve quelque chose, tout ce qui était possible de sauver concernant les

 23   biens qui avaient été détruits.

 24   Question: Est-ce qu'il vous a invité à venir au KP Dom pour voir ce que

 25   vous pouviez faire des médicaments qu'il avait trouvés sur place et


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  1   éparpillés un peu partout au KP Dom?

  2   Réponse: Oui et j'ai répondu que je connaissais les médicaments, mais

  3   comme je n'étais pas pharmacien, je ne pouvais pas avoir aucune autorité

  4   dans le domaine et je lui ai dit de s'adresser à Mrgud Vito qui était le

  5   chef de la pharmacie au sein de l'hôpital et il était déjà arrivé de

  6   Miljevina de l'hôpital.

  7   Question: A quel moment est-ce que vous vous êtes dirigé de l'hôpital pour

  8   aller à l'unité militaire?

  9   Réponse: C'étaient aux alentours du 20 ou du 22, je suis allé à l'hôpital

 10   au début du mois de mai à la demande des autorités militaires, j'ai été

 11   renvoyé de l'hôpital, en fait j'ai été transféré de l'hôpital à l'unité.

 12   Question: Après votre départ à l'unité, est-ce qu'il vous arrivait de

 13   venir de temps en temps, de retourner à Foca?

 14   Réponse: Oui de temps en temps, quand les autorités militaires nous le

 15   permettaient d'aller nous changer, d'aller nous laver ainsi de suite.

 16   Question: Etant donné que vous veniez ou vous reveniez de temps en temps,

 17   est-ce que vous savez si à Foca dans les magasins il y avait des denrées,

 18   y avait-il assez de pain, de nourriture?

 19   Réponse: Non, pour vous dire, les magasins n'étaient pas toujours ouverts

 20   et ceux qui étaient ouverts vendaient non de la nourriture mais d'autres

 21   articles. Et comme il y avait à peine de l'électricité à l'époque, ou il y

 22   en avait en fait presque pas, tous les congélateurs ne fonctionnaient pas,

 23   donc c'était très critique, l'approvisionnement en nourriture était assez

 24   difficile.

 25   Question: Est-ce vous savez si après le début du conflit armé la plupart


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  1   des Musulmans avaient-ils quitté Foca avec l'armée musulmane qui s'était

  2   retirée vers Ustikolina?

  3   Réponse: D'après les conversations car le téléphone marchait encore, j'ai

  4   parlé à des collègues qui étaient de nationalité musulmane et j'ai même

  5   parlé au début de la guerre, ma femme en fait s'est entretenue avec Mme

  6   Zekija Cengic et c’est par le biais de ces conversations-là que j'ai su

  7   que les Musulmans quittaient Foca.

  8   Question: Est-ce que c'était Mme Zekija qui a dit cela à votre épouse?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Est-ce qu’au cours des fois où vous êtes revenu à Foca, est-ce

 11   qu’il vous arrivait de voir qu'il y avait des habitants qui étaient de

 12   nationalité non serbe?

 13   Réponse: Oui, au mois de mai, au mois de juin, il m'arrivait de voir des

 14   femmes, des hommes, qui travaillaient avec moi dans ma firme.

 15   J'ai vu un Nedzibsud Bubalo. Je me suis entretenu avec elle.

 16   Question: Est-ce que vous savez si à Foca après le début ou l'éclatement

 17   du conflit armé on avait proclamé le couvre-feu?

 18   Réponse: Oui.

 19   Question: Est-ce que ce couvre-feu était valable pour tous les habitants?

 20   Réponse: J'imagine que oui, à l'exception des gens qui travaillaient dans

 21   certaines entreprises ou à certains endroits et qui devaient se déplacer.

 22   Question: Est-ce que ces gens-là avaient des laissez-passer particuliers

 23   pour pouvoir se déplacer à l'heure du couvre-feu?

 24   Réponse: Oui, mon père par exemple devait allé travailler de 7 heures du

 25   soir jusqu'à 7 heures du matin car il travaillait en équipe et il avait


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  1   également un permis particulier,un laissez-passer.

2   Question: Au cours de votre séjour à Foca, est-ce que vous aviez jamais

  3   entendu parler soit dans les médias ou lors de certains rassemblements que

  4   la politique était telle qu'elle visait à chasser les Musulmans? Est-ce

  5   que quelqu'un aurait fait ce genre de déclaration ouvertement?

  6   Réponse: Non, je n'ai jamais entendu cela et à Foca, de toute façon il n'y

  7   avait pas de médias. La radio, en fait il y avait radio Foca mais comme il

  8   n’y avait pas d'électricité, on ne pouvait rien entendre et en fait

  9   c’était assez rare de pouvoir écouter la radio.

 10   Question: Merci, Monsieur.

 11   Est-ce que lors de vos séjours à Foca vous est-il arrivé de rencontrer

 12   Milorad Krnojelac?

 13   Réponse: Oui, certainement que oui, je ne peux pas vous dire à combien de

 14   reprises mais il nous arrivait de nous rencontrer.

 15   Question: Avec qui était-il? Il était accompagné de qui lorsqu’il vous

 16   arrivait de le voir?

 17   Réponse: Je le voyais avec des collègues, des professeurs et en fait je le

 18   voyais avec le collègue, le professeur Zarko Vukovic pour la plupart du

 19   temps. Si je le voyais, il était le plus souvent avec lui et c'est

 20   également un professeur de mathématiques de mon école. Je le connaissais

 21   personnellement.

 22   M. Vasic (interprétation): Merci. Monsieur le Président, la défense n'a

 23   plus de question. Merci.

 24   M. le Président (interprétation): Merci.

 25   Contre-interrogatoire, Madame Kuo, je vous cède le micro.


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   1   (Contre interrogatoire du témoin, M. Mihomir Mihajlovic, par Mme Kuo.)

  2   Mme Kuo (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

  3   Monsieur Mihajlovic, j'aurais quelques questions pour vous.

  4   D'abord concernant votre statut en tant que membre réserviste des forces

  5   armées, vous avez dit que vous avez été appelé avant le début du conflit à

  6   Foca. Est-ce que vous savez la raison pour laquelle on a fait appel à

  7   certaines personnes même avant que le conflit armé ne soit proclamé?

  8   M. Mihajlovic (interprétation): Chaque homme disposait d'une affectation

  9   en temps de paix et presque chaque année, une fois par année, l'on

 10   procédait à la vérification des réservistes et on faisait des appels de

 11   ces réservistes dans les unités dans lesquelles ils étaient affectés.

 12   Question: Et donc, simplement pour être sûrs que l'on comprend très bien,

 13   il y a donc des professionnels, des membres professionnels de l'armée qui

 14   le font de façon professionnelle, donc ils doivent défendre le bien en

 15   temps de guerre et en temps de paix. Ils participent, c'est-à-dire aux

 16   activités militaires en temps de paix et en temps de guerre, n'est-ce pas?

 17   C'est une catégorie qui existait?

 18   Réponse: Non, ce n'étaient pas que des professionnels. Ils ne recevaient

 19   pas, ils ne touchaient pas un cachet pour ce genre de chose mais ils

 20   avaient leur affectation.

 21   Question: Non, écoutez-moi bien. Au sein de l'armée, il y a des gens qui

 22   sont payés pour être soldats n'est-ce pas?

 23   Réponse: Oui.

 24   Question: Et donc il y a aussi des civils qui en temps de guerre sont

 25   appelés à participer aux activités militaires, n'est-ce pas, mais


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  1   seulement en temps de guerre?

  2   Réponse: Non, la mobilisation se faisait par exemple en 1980, quand j'ai

  3   fait mon service militaire, depuis ce moment-là je me suis trouvé à dix

  4   reprises dans cette unité de réservistes.

  5   Question: Est-ce que tout le monde ou en fait est-ce que tous les hommes

  6   en ex-Yougoslavie étaient des membres des forces de réserve?

  7   Réponse: Pour 90 pour cent des cas oui.

  8   Question: Et cela voulait dire que si une personne a fait son service

  9   militaire obligatoire, cela voulait dire qu’automatiquement cette personne

 10   devenait membre des forces de réserve?

 11   Réponse: Oui.

 12   Question: Quel était le grade que vous aviez obtenu ou que vous déteniez

 13   au sein des forces de réserve?

 14   Réponse: J'étais chef de section.

 15   Question: Et par exemple, si vous aviez voulu devenir capitaine qu'aurait-

 16   il fallu que vous fassiez pour accéder à ce grade?

 17   Réponse: Je n'avais absolument pas l'intention de devenir quoi que ce

 18   soit, je faisais mon travail. J'allais de 10 à 15 jours comme cela par

 19   année.

 20   Question: Mais écoutez-moi, si n'importe quelle autre personne qui aurait

 21   voulu devenir capitaine, quelqu'un qui avait été sergent et qui voulait

 22   devenir capitaine, qu'aurait-il fallu qu'il fasse pour accéder à ce grade?

 23   Réponse: Il y avait des écoles d'officiers de réserve donc une fois qu'on

 24   a servi le service militaire régulier il y avait des gens qui se

 25   présentaient pour être un soldat régulier et c'est la section militaire


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  1   qui affectait les gens de la sorte. Il y avait certaines personnes qu'on

  2   envoyait à l'école des officiers de réserve alors que d'autres étaient

  3   envoyés pour devenir des soldats tout à fait ordinaires ou réguliers. Cela

  4   dépendait des besoins bien sûr.

  5   Pour la plupart du temps, c'étaient les gens qui avaient une licence

  6   universitaire qui étaient envoyés à l'école des officiers de réserve.

  7   Question: Pour devenir capitaine une personne aurait dû suivre d'autres

  8   cours et peut-être faire d'autres entraînements, suivre un entraînement

  9   militaire?

 10   Réponse: Oui, cela fait partie du service militaire qu'on fait. Cela

 11   dépendait du nombre d'années, par exemple si on a fait notre service

 12   militaire pendant un an cela faisait une différence, mais cela dépendait

 13   aussi en quelle année l'on a servi notre service militaire. Cela

 14   dépendait. Si on a servi notre service militaire dans les années 50, 60 ou

 15   70 la plupart du temps la personne qui finissait son service militaire

 16   devenait chef de réserve, chef de section.

 17   Question: Est-ce qu'une personne pouvait automatiquement devenir capitaine

 18   si la personne par exemple choisissait de suivre ce cours d'officier?

 19   Réponse: Non, la personne obtenait un grade de lieutenant et c'est à ce

 20   moment-là…, et après chaque exercice militaire on pouvait donner un grade

 21   supérieur à la personne qui avait servi, qui avait fait ces exercices.

 22   Question: Est-ce que ces promotions étaient automatiques? Fallait-il faire

 23   quelque chose de spécial pour obtenir cette promotion ou est-ce que l'on

 24   obtenait un grade supérieur à chaque fois qu'on faisait ces exercices?

 25   Réponse: Non rien de spécial, tout le monde obtenait ces grades.


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  1   Question: Bien. Maintenant l'appel que vous avez décrit les quelques jours

  2   avant le conflit, à Foca est-ce que c'était un appel général envoyé à tous

  3   les hommes qui étaient dans la réserve ou est-ce que c'était simplement

  4   destiné à une unité spécifique?

  5   Réponse: Seulement pour les unités ou pour l'unité qui protégeait les

  6   entrepôts à Ustikolina donc il y avait peut-être de 50 à 60 hommes qui

  7   servaient dans cette unité. Pour les autres unités je ne détiens aucune

  8   autre information, je ne sais pas si la mobilisation avait été faite pour

  9   les autres unités.

 10   Question: Vous avez dit également que la réponse à cet appel n'était pas

 11   bien forte. Est-ce que c'était quelque chose d'obligatoire ou ça ne

 12   l'était pas?

 13   Réponse: La mobilisation était obligatoire si la guerre n'avait pas

 14   éclaté, ces gens auraient subi les conséquences du manque à l'appel.

 15   Question: Vous avez été assigné à l'unité d'Ustikolina, donc cela veut

 16   dire que c'est l'unité dans laquelle vous deviez normalement vous rendre

 17   en tant qu'officier réserviste, n'est-ce pas?

 18   Réponse: C'était mon unité. Chaque personne savait où elle devait aller.

 19   Moi, j'étais affecté à cette unité-là depuis 1980. Je savais quelle était

 20   mon affectation et je m'y étais présenté sept à huit reprises depuis dans

 21   cette réserve. J'étais également allé à Adzic une ou deux fois.

 22   Mme Kuo (interprétation): Monsieur le Président, il est 16 heures.

 23   M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons reprendre nos

 24   débats à 9 heures 30 demain matin.

 25   (Le témoin, M. Mihajlovic Milomir, est reconduit hors du prétoire.)


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  1     (L'audience est levée à 16 heures.)

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