Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (L'audience est ouverte à 11 heures 32.)

2 (Le témoin, Mme Ana Najman, est déjà dans le prétoire.)

3 (Audience publique.)

4 M. le Président (interprétation): Veuillez citer l'affaire, s'il vous

5 plaît.

6 Mme Chen (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Il s'agit de

7 l'affaire IT-97-25-T, le Procureur contre M. Milorad Krnojelac.

8 (Questions relatives à la procédure.)

9 M. le Président (interprétation): Madame la Juge Mumba ne pourra nous

10 retrouver qu'après la pause du déjeuner pour des raisons personnelles.

11 Nous allons poursuivre conformément aux dispositions de l'Article 15B du

12 Règlement de procédure et de preuve.

13 Il y a une autre question que je souhaitais soumettre à votre attention:

14 Lundi prochain nous avions prévu de participer à une conférence d'une mise

15 en état dans le cadre d'une autre affaire. On nous avait indiqué que

16 c'était la seule date disponible pour toutes les parties concernées,

17 malheureusement l'accord que nous avions conclu ne peut tenir. Il ne peut

18 donc pas y avoir de conférence de mise en état lundi prochain. Nous nous

19 retrouverons donc à 9 heures 30 comme à l'accoutumée.

20 Par ailleurs, mardi le bâtiment du Tribunal sera interdit à l'accès du

21 public parce que se tiendra ce jour-là des audiences qui supposent la

22 prise de mesures de sécurité assez sévères. Je me suis élevé en contre

23 parce qu'il me semble que ces procédures doivent être ouvertes au public

24 mais je n'ai pas vu mes efforts couronnés de succès.

25 Mardi n'est pas un jour pendant lequel nous pourrons travailler. Nous nous

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1 retrouverons donc mercredi, espérons que nous pourrons avancer de façon

2 satisfaisante. Mme Uertz-Retzlaff, c'est à vous.

3 (Contre-interrogatoire du témoin, Mme Ana Najman, par Mme Uertz-

4 Retzlaff)

5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci. Bonjour Madame Najman.

6 Mme Najman (interprétation): Bonjour.

7 Question: Madame Najman, dans le cadre de votre interrogatoire principal

8 vous avez déclaré que vous n'aviez pas eu accès aux déclarations

9 préliminaires de témoins indiquant quel était le comportement de l'accusé

10 avant les événements et pendant les événements, c'est bien cela? Par

11 ailleurs, vous n'avez pas eu l'occasion de poser des questions aux proches

12 et aux parents de l'accusé: questions portant sur son comportement pendant

13 les événements, n'est-ce pas?

14 Réponse: Vous avez raison, je n'ai vu personne d'ailleurs.

15 Question: Et vous n'avez pas pu l'observer pendant son procès n'est-ce

16 pas?

17 Réponse: C'est vrai.

18 Question: Vous n'avez pas eu l'occasion de le voir alors qu'il se trouvait

19 en détention, alors qu'il passait ses tests qu'il n'aimait pas, comme vous

20 nous l'avez dit.

21 Réponse: C'est exact.

22 Question: Toutefois, dans votre analyse et votre interprétation

23 psychologique, vous émettez un certain nombre de conclusions d'ordre

24 général. Par exemple à la page 11, paragraphe 1, vous indiquez: "il a une

25 peur presque paralysante".

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1 J'attends que vous trouviez cette page: "une peur presque paralysante, un

2 certain nombre de symptômes d'état végétatif. Ces états se présentent dans

3 presque toutes les situations nouvelles, les situations qui sont générées

4 et contrôlées par d'autres."

5 Vous avez par ailleurs déclaré dans votre déposition que, dans presque

6 toute nouvelle situation, l'accusé ressentait cette anxiété accrue. Vous

7 précisez également que son évaluation générale de la situation était

8 fortement influencée par cet état d'esprit. Les psychologues tels que

9 vous-même, Madame, décrivent des probabilités, des possibilités n'est-ce

10 pas?

11 Réponse: Oui, généralement mais je pense avoir tenu compte d'un élément

12 supplémentaire, à savoir l'anamnèse de M. M. Krnojelac m'a permis de voir

13 que je ne serais peut-être pas tout à fait précise en disant cela- au

14 moment où il s'est présenté ici devant la Chambre, il a également éprouvé

15 le même type de symptôme, une sorte de malaise. C'était comparable à ce

16 que nous avons pu constater dans la situation de test. Par conséquent,

17 c'était une information supplémentaire dont j'ai pu bénéficier. C'est une

18 information qu'il m'a fournie lui-même.

19 Pour ce qui est des réactions neurovégétatives, nous avons ici présente

20 Mme Folnegovic-Smalc qui peut aborder ce sujet également. Ces réactions,

21 c'est quelque chose que vous ne pouvez pas contrôler de manière consciente

22 puisque ce sont d'autres mécanismes qui régissent cela. S'il se comporte

23 de telle façon, alors moi, en tant que psychologue qui travaille depuis

24 quinze ans dans le domaine de la médecine légale, considère qu'il s'agit

25 d'un symptôme suffisamment fiable me laissant considérer que dans un autre

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1 type de situation comparable, il se comporterait de la même façon.

2 Par ailleurs pour ce qui est des tests et notamment du test PIE, ce que

3 j'ai abordé hier, et je ne voudrais pas me répéter: il enregistrait assez

4 fort au niveau de l'échelle de l'anxiété. J'en ai tenu compte également.

5 C'est pour cela que j'ai mis dans mon rapport ce que j'ai mis.

6 Question: Toutefois, vous ne pouvez pas être catégorique quant à son état

7 affectif émotionnel et quant à son comportement pendant les événements?

8 Vous ne pouvez pas vous prononcer avec certitude, vous ne savez pas

9 comment il réagissait?

10 Réponse: Mes conclusions sont des conclusions indirectes. J'applique une

11 méthode déductive, compte tenu de la personnalité du sujet, de l'individu

12 et compte tenu des examens auxquels nous nous avons procédé. Je m'exprime

13 ici en tant que psychologue, je tiens donc compte de ses réactions

14 psychologiques et je tiens compte de son anamnèse. Je tiens compte de son

15 récit personnel et de mes hypothèses en tant que médecin-légiste; donc du

16 comportement auquel on peut s'attendre de la part de ce genre de

17 personnalité.

18 Question: Ma question était très simple: vous ne pouvez pas être

19 affirmative et catégorique, et vous me répondez par l'affirmative. Vous ne

20 pouvez pas être sûre de la façon dont il réagissait et se comportait en

21 1992 lorsqu'il a été désigné comme commandant. Vous ne pouvez pas vous

22 prononcer avec certitude? Votre réponse est affirmative.

23 Réponse: Pas de cette façon-là. Ça, c'est sûr.

24 Question: Supposons qu'il ressentait cette peur paralysante, supposons

25 qu'il se sentait saisi d'anxiété lorsqu'il a été désigné comme directeur

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1 de la prison. Il me semble que pourtant après avoir occupé ce poste

2 pendant un certain temps, il aurait dû voir ses symptômes disparaître et

3 cette peur s'amenuiser.

4 Réponse: Voyez-vous cette affirmation me semble être assez simplifiée.

5 Puisqu'il s'agit d'un comportement, des réactions qui ne peuvent pas être

6 contrôlées dans la situation telle que vous la citez. Donc lorsqu'on est

7 nommé au poste de chef de ce KP Dom, cela signifie se trouver dans une

8 situation où de nouveaux événements se produisent régulièrement. Il s'agit

9 d'entrer en contact, d'établir des contacts nouveaux, régulièrement et

10 fréquemment. On ne peut donc pas contrôler ce genre de situation.

11 Question: Madame Najman, normalement une peur paralysant et une anxiété

12 accrue se dissipent au bout d'un quart d'heure, dans les conditions

13 habituelles. Est-ce que ce n'est pas ainsi généralement?

14 Réponse: C'est un fait qui concerne une peur réellement vécue, éprouvée.

15 Cela s'arrête donc au moment où, sur le plan imaginaire ou réel, le danger

16 disparaît. D'ailleurs cela est décrit dans les classifications des

17 maladies. On voit comment la peur se manifeste et comment elle disparaît,

18 comment elle cesse.

19 Question: Vous avez précisé que M. M. Krnojelac et je me réfère à la page

20 8 de la version en anglais- vous précisez que la structure de la

21 personnalité de M. M. Krnojelac est du type neurotique avec des

22 caractéristiques d'anxiété prépondérante qui sont combinées avec des

23 traits de personnalité passifs, avec une certaine tendance à la répression

24 et au déni. Ce sont là des mécanismes de défense dominants.

25 Vous vous rappelez avoir écrit cela, je pense? Le déni, pardon la

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1 répression sont des mécanismes de défense, auxquels nous avons tous

2 recourt de façon occasionnelle. Cela n'a rien d'anormal, n'est-ce pas?

3 Réponse: C'est exact, dans une mesure plus ou moins importante.

4 Question: Je vois. Mais je ne comprends pas vraiment les critiques que

5 vous avez émises vis-à-vis des phrases écrites dans les rapports de Dr

6 Folnegovic-Smalc. Vous avez discuté avec les conseils de la défense.

7 Il s'agit de la phrase suivante, je cite: "Il a tendance à obéir aux

8 ordres qui émanent d'autorités supérieures." C'est à la page 9, deuxième

9 paragraphe du rapport de votre collègue.

10 Réponse: Page 9, deuxième paragraphe. Je n'arrive pas à le trouver.

11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est la phrase que vous évoquiez

12 hier et vis-à-vis de laquelle vous émettiez des critiques.

13 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Vasic?

14 M. Vasic (interprétation): On nous a dit que c'était en page 9, deuxième

15 paragraphe alors que, chez-moi, c'est la page 12, deuxième paragraphe.

16 M. le Président (interprétation): Peut-être que dans les différentes

17 versions, les numérotations ne sont pas exactes.

18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, en anglais, c'est toujours un

19 peu plus synthétique. Donc ce n'est pas toujours la même phrase.

20 M. le Président (interprétation): Mais tout de même, Maître Vasic, nous

21 vous remercions de votre aide.

22 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bien. La phrase critique que vous

23 avez critiquée d'une certaine façon était la suivante je cite: "Il a

24 tendance à obéir aux ordres qui émanent d'autorités supérieures." C'est ce

25 que vous avez dit vous-même?

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1 Mme Najman (interprétation): C'est exact.

2 Question: Bien. Il comprend l'ordre, il le traite sur plan intellectuel et

3 émotionnel. Il se conforme à l'ordre, il prend les actes qui s'imposent,

4 ensuite supprime et ensuite utilise ses mécanismes de défense, de déni et

5 de suppression.

6 Est-ce que vous contesté le fait qu'il comprenait ce qu'on lui demandait,

7 ce qu'il se voyait ordonné de faire?

8 Réponse: Il me semble que nous avons plutôt abordé la deuxième partie de

9 la phrase hier, à savoir "par la suite, il se sert des mécanismes de

10 défense, la négation et le refoulement." Et je pense que Me Vasic m'a posé

11 une question à ce sujet.

12 Lorsque j'ai fait mon commentaire, j'évoquais justement cette partie de la

13 phrase, ce qui sous-entend que je suis entièrement d'accord avec la partie

14 de la phrase. Ce que j'ai contesté, c'est la formulation de la phrase,

15 l'articulation de la phrase au sujet de la négation et du refoulement,

16 donc de la manière dont Me Vasic l'a lue.

17 Mais Mme le Dr Folnegovic-Smalc se prononcera là-dessus. Elle sera

18 d'accord ou pas forcément d'accord avec ce que j'ai dit hier. Dans le

19 cadre de ses capacités intellectuelles que nous avons évoquées hier, dans

20 le cadre de la structure de base de sa personnalité, il comprend

21 parfaitement ce qui se passe dans un contexte où il se trouve, il comprend

22 parfaitement ce qu'on lui demande. Ce qui était contesté, c'était le fait

23 de se servir, d'utiliser les mécanismes de la défense.

24 Du moins, c'est mon avis.

25 Question: Je vois, mais vous-même et votre collègue établissez toutes les

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1 deux qu'il utilise le déni et le refoulement. Et moi, je dis que c'est un

2 petit peu normal de faire ceci.

3 Par ailleurs, dans vos conclusions qui apparaissent à la dernière page, au

4 point 1, vous indiquez: "de réaction de panique". Faut-il comprendre par

5 là qu'il a des attaques de panique, des crises de panique? Ce n'est pas

6 vraiment ce dont il souffre au sens clinique du terme, n'est-ce que?

7 Réponse: Il me semble qu'hier, j'ai précisé mon point de vue. Je devais

8 préciser, définir quelle était la structure de personnalité, quelles

9 étaient ses potentialités et ses capacités actuelles intellectuelles

10 d'identifier ces mécanismes de défense, et le niveau et le modèle de

11 fonctionnement de la personnalité. Sur ce plan, je me suis exprimée sur le

12 plan qualitatif et quantitatif. Et sur la base de mon rapport c'est au

13 psychiatre de se prononcer; Donc ce que j'ai dit dans mon rapport, quant à

14 moi, c'est que cet individu réagit d'une façon qui traduit la panique et

15 l'anxiété, que c'est cette catégorie-là.

16 Question: Certes, mais ce n'est pas une pathologie. Les personnes tout à

17 fait normales auraient agi de la même façon?

18 Réponse: Je répète encore une fois qu'au sujet de la normalité ou de la

19 pathologie, l'avis définitif est celui du psychiatre. Moi, ce que je dis

20 se fonde sur les données objectives dont se sert la psychologie comme

21 discipline, qui sont le fondement qui nous permet de nous prononcer. Sur

22 la base de la classification internationalement reconnue des maladies, le

23 psychiatre se prononce en dernier lieu en disant s'il s'agit ou non d'une

24 pathologie, d'une maladie.

25 Question: Ma question était celle-ci: ce qu'il a fait dans le cadre des

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1 réactions de panique, ce sont des choses que feraient des personnes tout à

2 fait normales? C'est normal que la personne réagisse ainsi? C'est cela que

3 j'essaye de vous faire dire.

4 Réponse: Les réactions de panique, bien entendu, ce sont des réactions que

5 nous pouvons tous avoir à un moment donné. Mais si le niveau de cette

6 réaction est quelque chose qui bloque ou qui influe sur le fonctionnement

7 préalable de la personnalité, alors cela dépasse un certain seuil, le

8 seuil de ce que vous qualifiez de réaction normale, ce que nous

9 considérons tous généralement comme réaction normale.

10 Question: Vous avez précisé que M. Krnojelac est quelqu'un qui suit les

11 ordres, qui va effectuer les tâches que les ordres requièrent. Il y a

12 beaucoup de personnes qui font cela parce qu'elles souhaitent éviter une

13 situation de conflit?

14 Réponse: C'est possible.

15 Question: Et nombre d'individus font cela pour en tirer un certain

16 bénéfice et en tirer une certaine gratification?

17 Réponse: C'est vraisemblable.

18 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Vasic?

19 M. Vasic (interprétation): Je me demande un petit peu où nous mènent ces

20 questions qui ne concernent pas notre expert, pas vraiment le domaine

21 d'expertise du témoin que nous avons cité. Je ne vois pas comment notre

22 expert peut se prononcer sur une question aussi générale, sur la base de

23 son expérience personnelle ou professionnelle?

24 M. le Président (interprétation): Il me semble que, si vous demandiez à un

25 psychologue ou à un psychiatre s'ils sont ou non qualifiés pour répondre à

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1 cette question, ils vous répondraient très fermement que oui, qu'ils le

2 sont. Je peux vous affirmer qu'au cours de mes quarante années

3 d'expérience, j'ai eu l'occasion d'entendre de telles personnes s'exprimer

4 sur la question mais, en dehors de cela, il s'agit là de questions qui

5 peuvent tout à fait être posées dans le cadre du contre-interrogatoire,

6 car cela se porte sur des propos tenus par le témoin précédemment. Le

7 témoin est à même de répondre en s'appuyant sur son expérience de

8 psychologue et il s'agit là d'une façon tout à fait correcte de s'appuyer

9 sur ce qu'elle a pu dire tout à l'heure.

10 Je partage peut-être en partie ce que vous venez de dire, mais il revient

11 à l'accusation d'essayer de démontrer que l'un des arguments avancés par

12 ce témoin ne peut être accepté et il faut respecter cela. J'espère en

13 temps utile que tout deviendra clair mais je crois, pour ma part,

14 comprendre quelle est la voie explorée à l'heure actuelle par Mme Uertz-

15 Retzlaff.

16 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pourriez-vous nous dire quels

17 pouvaient être les motifs pour lesquels M. Krnojelac choisissait d'obéir

18 aux ordres? Est-ce qu'il choisit des motifs que j'évoquais tout à l'heure?

19 Mme Najman (interprétation): Excusez-moi, je n'ai pas compris votre

20 question. Dans quel sens vous parlez de motivation?

21 Question: Oui, je disais que tout à l'heure, il pouvait choisir d'obéir à

22 des ordres pour éviter le conflit ou qu'il choisissait d'y obéir pour en

23 retirer une certaine gratification, un certain bénéfice. Puisque vous le

24 connaissez aujourd'hui, d'après vous, quelles étaient ses motivations au

25 moment d'obéir à ces ordres?

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1 Réponse: Compte tenu de l'examen psychologique auquel j'ai procédé, il me

2 semble que cela découle de la structure de sa personnalité dans son

3 ensemble.

4 Question: Sur quoi vous appuyez-vous pour dire cela?

5 Réponse: Parce que je l'ai décrit comme quelqu'un qui fondamentalement a

6 des mécanismes de défense qui sont d'ordre névrotique, qui réagit par

7 l'anxiété et parfois par des réactions de panique. Nous avons déjà évoqué

8 cela. Il s'agit d'un individu qui a ce genre de structure de capacité

9 intellectuelle et qui, dans sa palette de comportements, n'a pas de

10 réaction agressive pulsionnelle que nous avons également abordée hier.

11 Nous avons parlé du niveau de manipulation hier également. Je l'ai exclu,

12 du moins pour ce qui est des données psychologiques que j'ai pu

13 recueillir, comme je l'ai expliqué hier.

14 Quant aux échelles qui nous permettent de mesurer la possibilité de se

15 présenter sous une autre lumière, de mieux se présenter, de manipuler, je

16 n'ai pas pu détecter cela dans son comportement. Donc cela m'a permis de

17 tirer les conclusions que j'ai déjà citées.

18 Question: Vous avez indiqué hier, durant votre déposition je ne fais pas

19 référence à votre rapport, vous avez indiqué que l'accusé, lorsqu'il se

20 trouvait dans une situation nouvelle et menaçante d'après lui, essayait de

21 s'en extirper.

22 Est-ce que cela n'entre pas en contradiction avec son caractère un peu

23 conformiste, avec ses traits de personnalité passifs parce que, pour

24 s'extirper d'une situation, il faut passer à l'action. Alors, comment

25 tirez-vous cette conclusion parce que c'est vous-même qui nous avez parlé

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1 de sa passivité, de son conformisme dont il fait preuve?

2 Réponse: J'ai dit qu'il était indécis, qu'il tardait à prendre une

3 décision, que dans un certain sens il était ambivalent, qu'il était passif

4 et qu'enfin, il cherchait à éviter une situation. Il se retirait d'une

5 situation. Il me semble que c'est dans cet ordre que j'ai énoncé cet

6 événement.

7 Question: Vous ne diriez pas qu'il tenterait activement de se sortir de la

8 situation? Ce n'est pas ce que vous vouliez dire?

9 Réponse: Non, non.

10 Question: Je vous ai mal comprise. Dans votre rapport, vous indiquez que,

11 dans de petits endroits, de petites villes comme Foca -et je n'ai que la

12 version anglaise sur laquelle m'appuyer, à la page 11, paragraphe 2; on me

13 dit que cela se trouve également dans votre rapport en BCS-, vous dites

14 que, dans de petites villes telles que Foca, les enseignants, les prêtres

15 sont des personnalités revêtues d'une certaine autorité. Ils ont des

16 attributs sociaux et un statut qui correspond. C'est ce que vous avez

17 établi et ce que vous pouvez nous dire grâce à votre expérience.

18 Par ailleurs, au deuxième paragraphe de cette même partie, vous nous

19 parlez d'un article qui porte sur les idées qui permettent de devenir un

20 bon enseignant; un article rédigé par Kizlik Bob. Et vous dites que "les

21 bons enseignants devraient manifester notamment une capacité à expliquer

22 les choses et une capacité à faire suivre les élèves".

23 (Assentiment du témoin.)

24 Est-ce que vous avez l'impression que M. M. Krnojelac est à même de

25 prendre la tête d'une initiative et de faire en sorte que les autres

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1 suivent dans cette initiative?

2 Réponse: Je dois peut-être préciser un petit peu cela. Ce paragraphe 2, en

3 page 11 de la version BCS, ainsi que le paragraphe 3, ce sont des

4 paragraphes qui contiennent mon interprétation psychologique et mon

5 analyse de son comportement et son rôle d'enseignant, comme le dit

6 d'ailleurs le titre de ce chapitre. Cela ne concerne pas le texte des

7 événements d'un autre genre. Lorsque je parle ici de consignes à se mettre

8 en tête dans une situation, cela concerne avant tout le rôle d'un

9 enseignant, cela concerne donc son contexte professionnel. Et les deux

10 paragraphes, le paragraphe 2 et le paragraphe 3, sont présentés dans ce

11 contexte-là.

12 Question: Toutefois, ce n'était pas seulement un notable du fait de son

13 statut d'enseignant; il n'était pas seulement une personnalité importante

14 aux yeux de ses élèves. Lorsqu'il était au KP Dom, c'était lui le

15 directeur et, le premier jour, il va voir le comité et il dit à chacun de

16 ses membres ce qu'il ou elle doit faire. C'est ce qu'il a dit, c'est ce

17 qu'il vous a dit qu'il avait fait.

18 Réponse: Oui, quant à cette commission du moins. C'est comme cela que je

19 l'ai compris moi-même.

20 Il m'a dit que, "quand il est arrivé, la situation était plutôt chaotique,

21 enfin difficile". Il me semble que c'étaient les termes qu'il a utilisés.

22 Il ne se se sentait donc pas compétent pour y remédier seul et que c'est

23 pour cela qu'il a mis sur pied des petits groupes. Il a réuni des gens au

24 sein des petits groupes et il leur a confié des tâches conformément à leur

25 compétence pour qu'ils puissent, eux, prendre en charge un certain nombre

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1 de questions.

2 C'est du moins comme cela que je l'ai compris, moi, dans le cadre de mon

3 interprétation psychologique: comme une mesure devant lui permettre de ne

4 pas s'engager dans des tâches qui dépassaient le cadre de ses compétences.

5 Question: Mais le fait de constituer des petits groupes, le fait de dire à

6 chacun ce qu'il doit faire, le fait de confier des tâches à chacun, c'est

7 une façon de prendre la tête et la direction des choses. Cela suppose donc

8 que l'on ait des possibilités de le faire, des capacités à le faire?

9 Réponse: Eh bien, mon avis personnel est que cette manière de procéder à

10 la constitution des commissions n'était pas quelque chose de très formel.

11 Vous savez, moi, du moins mon impression, c'était que simplement, c'était

12 quelque chose d'ad hoc. Il a réuni les gens en leur disant: "Toi, tu vas

13 faire ceci et toi, tu vas faire cela". Donc il ne s'agissait pas de

14 quelque chose de très formel, de très officiel; du moins, il n'a pas

15 mentionné de documents écrits. Tout simplement, il s'est trouvé dans une

16 situation où il a cherché de l'aide auprès des autres pour résoudre la

17 situation qui prévalait.

18 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): La passivité que vous avez décelée

19 chez M. Krnojelac a simplement trait au fait qu'il reçoit des ordres?

20 Parce que, lorsqu'il s'agit de passer à l'action et d'obéir aux ordres, il

21 est très actif, n'est-ce pas? Il change tout à fait?

22 Mme Najman (interprétation): La passivité est un trait de personnalité.

23 Lorsque vous l'analysez par rapport à la structure fondamentale de la

24 personnalité, vous voyez que, dans certaines situations, elle peut se

25 manifester. Donc selon les circonstances, vous serez soit actif ou passif.

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1 La passivité est du côté opposé du registre par rapport à l'activité, mais

2 les traits de personnalité ne sont pas quelque chose qui se manifeste

3 d'une même façon, dans chacune des situations puisqu'il s'agit d'un

4 ensemble de traits de personnalité et de caractère; donc qui se

5 manifestent d'une manière variable d'un individu à l'autre. Vous avez donc

6 par exemple un sujet qui a des traits de personnalité passive qui aura

7 quand même un comportement assez uniforme. C'est-à-dire il ne se

8 comportera d'une manière totalement opposée dans une autre situation.

9 M. le Président (interprétation): Je crois que nous avons un petit

10 problème technique parce que nous recevons du français. Nous allons

11 recommencer, Mme Uertz-Retzlaff.

12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Une personnalité conformiste serait

13 la personnalité de quelqu'un qui serait prêt à joindre un parti politique,

14 s'il est bon à ce moment-là de rejoindre ce parti politique en

15 particulier, n'est-ce pas? C'est ainsi que l'on pourrait décrire une

16 personnalité conformiste?

17 Mme Najman (interprétation): Oui, c'est l'une des caractérise du fait

18 d'adhérer à quelque chose mais cela en est une.

19 Question: Et un conformiste, ce serait également par exemple un officier

20 de réserve en ex-Yougoslavie? Et qui aurait ce poste parce que,

21 socialement, il serait bien vu d'avoir ce poste à ce moment-là, n'est-ce

22 pas?

23 Réponse: Je ne suis pas du tout un expert qui travaille dans le domaine

24 militaire. Donc pour ce qui est des officiers de réserve, je ne peux pas

25 vous expliquer cela, je ne suis pas expert dans ce domaine-là. Je ne sais

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1 pas comment on devient un officier de réserve. Je suppose qu'il y a une

2 hiérarchie, que cela dépend de l'âge. Du moins c'est comme ça, en tant que

3 profane, que je me l'explique. Je me dis qu'au bout d'un certain nombre

4 d'années, lorsqu'on ne fait plus partie des troupes d'active, on devient

5 quelqu'un qui fait partie des unités de réserve ou des cadres de réserve,

6 mais c'est tout ce que je peux vous dire.

7 Question: Une personnalité conformiste aurait tendance à prendre part aux

8 partis politiques, si le fait d'y participer serait bien vu socialement et

9 serait bien perçu également par l'ensemble de la population?

10 Réponse: Oui. D'une certaine façon, on peut dire que c'est un des facteurs

11 mais je suppose que, pour ce genre d'activité, il faut qu'il y ait aussi

12 d'autres motivations, d'autres choses qui vous amènerait à faire cela. Il

13 n'y a pas que le conformisme qui vous pousserait à cela; il me semble que

14 se serait un petit peu exagéré de dire cela.

15 Question: Si une telle personnalité se voyait offrir un poste de premier

16 rang dans une hiérarchie locale, il se sentirait honoré et accepterait

17 avec un certain orgueil, n'est-ce pas?

18 Réponse: Je ne le qualifierais pas dans ces termes-là. Concrètement, si

19 nous parlons ici de M. M. Krnojelac, alors cette position en fait relève

20 d'une attitude passive à l'égard des tâches qu'il est appelé à faire. Et

21 d'après son curriculum vitae, je crois qu'on peut voir donc qu'il a

22 accepté d'accomplir ce genre de tâches.

23 Question: Dans un environnement où les personnes qui l'entourent se

24 comportent très mal et commettent même des actes illégaux, la réaction la

25 plus prévisible de la personne qui a des traits conformistes ne serait pas

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1 de s'opposer à ce type de comportement. Au contraire, cette personnalité

2 essaierait de répondre aux attentes des autres et essaierait d'une

3 certaine façon de suivre ce qui est fait par les autres, n'est-ce pas?

4 Réponse: Non, pour les raisons suivantes. Ce monsieur, dont nous parlons

5 ici, n'a pas de potentialité de se comporter de manière agressive ou

6 pulsionnelle et il n'a pas non plus cette motivation première à prendre

7 l'initiative. Donc, dans le cadre de ses traits conformistes que vous

8 soulignez, les premiers traits pourraient l'amener à se comporter de la

9 façon que vous évoquez. Mais comme je l'ai indiqué hier, sur la base des

10 résultats assez significatifs aux tests que je lui ai fait passer, rien ne

11 me laissait conclure que cette personnalité a des traits agressifs, du

12 moins pour ce qui est de l'aspect négatif de l'agressivité.

13 Question: Madame Najman, nous ne parlions pas d'actes d'agression, d'actes

14 sanglants, par exemple la torture. Nous parlions d'actes illégaux, mais je

15 ne me référais pas à des actes qui supposent une certaine agressivité ou

16 une certaine tendance à l'impulsivité. Je parle d'un groupe qui se

17 comporte mal, qui se comporte de façon illégale.

18 En présence d'un tel groupe, est-ce qu'il manifesterait une opposition à

19 ces actes? Ou est-ce qu'il est plus probable qu'il se joindrait à ce

20 groupe et est-ce qu'il n'essaierait pas d'assumer ces tâches dans cet

21 environnement sans essayer d'y changer quoi que ce soit.

22 Réponse: Si je l'ai cité, c'est parce que l'impression que j'ai, c'est que

23 vous soulignez notamment le conformisme. Et comme je l'ai déjà dit, il y a

24 un instant, ce n'est qu'un trait pris à part; à lui seul, il ne suffit

25 pas. Donc en tant que psychologue, je ne peux parler d'aucun patient et

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1 non plus de M. M. Krnojelac de cette manière-là. L'organisme est quelque

2 chose de complexe qui réunit un ensemble de traits de personnalité, de

3 caractère, d'habitudes, de caractéristiques émotionnelles, de mécanismes

4 de défense. Donc on ne peut pas prendre de manière isolée un seul

5 mécanisme ou un seul trait. Cela peut nous induire en erreur. C'est dans

6 ce sens-là que je cherchais à englober l'ensemble.

7 Question: Au vu du fait que vous avez établi des traits de personnalité

8 assez semblables chez M. Radic, chez le commandant d'équipe d'Omarska et

9 chez M. M. Krnojelac, est-ce que vous pourriez dire que la personnalité

10 obéissante, conformiste est précisément celle que choisiraient des

11 personnes revêtues d'une certaine autorité, si elles souhaitaient que

12 certaines tâches déplaisantes soient accomplies?

13 Réponse: Eh bien, voyez-vous, comparez les cas entre eux, y compris donc

14 les cas de M. Radic et de M. M. Krnojelac, c'est vraiment une tâche

15 ingrate. C'est toujours ingrat pour un expert. Mais si vous cherchez à

16 faire cela, si vous insistez -et c'est ce que j'ai cru comprendre hier-,

17 je crois qu'il est très important de voir que des différences

18 considérables existent dans ces deux cas quant au conformisme et quant à

19 l'obéissance, sans parler des capacités intellectuelles et de la structure

20 de la personnalité.

21 De même M. Radic est quelqu'un qui était formé au travail de policier,

22 agent de circulation. Et si je le souligne, c'est parce que...

23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Madame Najman, je faisais référence à

24 M. Radic et je parlais de M. M. Krnojelac pour des raisons différentes que

25 celles que vous évoquez. Nous voulons savoir quels sont vos sentiments à

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1 ce sujet.

2 Diriez-vous que la personnalité obéissante et conformiste en général est

3 une personnalité qui serait susceptible d'être choisie par des personnes

4 revêtues d'une autorité, qui souhaiterait voir un certain nombre de tâches

5 déplaisantes accomplies? Ou est-ce que, au contraire, elle ne choisirait

6 pas ce type de personnes?

7 Réponse: Si. Généralement parlant, c'est vrai, mais ce que je cherchais,

8 c'était simplement à préciser que ces deux personnes sont très différentes

9 quant à leur personnalité de base et quant à leur manière d'accepter

10 l'autorité, parce que vous avez, d'un côté, M. M. Krnojelac chez qui la

11 question de l'autorité se pose uniquement en termes formels mais également

12 concerne sa manière de percevoir l'autorité nous parlons d'autorité

13 imaginaire en psychologie, donc il ne s'agit pas d'une subordination au

14 sens direct du terme, mais il s'agit d'une autorité imaginaire qu'il

15 souhaite satisfaire. Il s'agit de ses représentations, de l'ensemble des

16 représentations qu'il a acquises au cours de son enfance etc. par rapport

17 aux attentes de ses parents. Il ne s'agit donc pas seulement d'une figure

18 d'autorité concrète.

19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai plus

20 de questions à poser.

21 M. le Président (interprétation): Maître Vasic.

22 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, Mme Najman, par Me

23 Vasic.)

24 M. Vasic (interprétation): Je vous remercie Monsieur le Président, je

25 n'aurai que quelques questions à poser.

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1 Madame Najman, ma collègue vous a demandé aujourd'hui de préciser quelles

2 sont les données que vous avez recueillies au moment de rédiger votre

3 rapport et votre avis sur M. M. Krnojelac. Ce que je souhaite savoir,

4 c'est la chose suivante. Pendant ces examens que vous avez conduits,

5 teniez-vous compte de tout ce qui est habituellement pris en compte lors

6 de l'examen d'un individu dans le cadre des règles de votre discipline, de

7 la psychologie.

8 Mme Najman (interprétation): Oui, bien sûr.

9 Question: A la question de mon honorable collègue, vous avez dit, entre

10 autre, que l'un des traits de la personnalité consistait à indiquer un

11 conformisme, à savoir il était prêt à être membre d'un seul parti. Pouvez-

12 vous nous dire, lorsqu'il s'agit d'une telle personnalité qui posséderait

13 parmi les traits de sa personnalité le conformisme à être d'ailleurs

14 conformiste à un seul parti, serait-il un "défectionnaire", serait-il

15 membre d'un autre parti, est-ce que ceci pourrait être son propre (sic)?

16 Réponse: Non, et secundo, ce que je crois avoir déjà mis en relief et je

17 dois le redire, le conformisme présente l'un des traits de la personnalité

18 qu'en psychologie, en aucune interprétation, on ne saurait interpréter

19 isolément; c'est-à-dire isolé comme trait dans l'appréhension globale

20 d'une personnalité. Ce trait-là, le conformisme, n'est que l'un des

21 segments, l'un des éléments à prendre en considération.

22 Question: Je vous remercie, c'est ce que je me proposais de vous poser

23 comme question suivante. J'ai une autre question à poser. Mon honorable

24 collègue tout à l'heure, au moment où vous avez dit que le côté impulsif

25 et agressif faisait défaut parmi les traits de la personnalité de M. M.

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1 Krnojelac, voulait savoir si ceci a pu être considéré à la lumière

2 d'agression, comme étant un comportement plutôt sanguinaire et sanglant.

3 Je voulais dire est-ce que c'est seulement dans des cas de tortures,

4 d'homicides, etc. que ces traits se font en quelque sorte voir, se

5 manifestent ou peut-être sont-ils perceptibles également quotidiennement?

6 Réponse: Pour parler évidemment du côté impulsif et agressif, cela dépasse

7 les traits mêmes de la personnalité. Il s'agit de potentiels plutôt, de

8 nature à dicter le comportement de la base même de la personnalité et

9 seraient de nature à se manifester depuis le bas âge et après, depuis

10 l'adolescence prématurée jusqu'au comportement passif ou jusqu'aux formes

11 plutôt passives d'une manifestation asociale; par exemple lorsqu'on se

12 soustrait à ses obligations de travail par exemple, lorsqu'on ne vaque pas

13 à ses occupations, lorsqu'on évite d'exercer telle ou telle tâche, etc.

14 Voilà ce qui est une attitude passive ou, comme vous avez dit, lorsque,

15 intentionnellement, on veut faire du mal, faire souffrir quelqu'un, faire

16 du mal à une autre personne, faire souffrir une autre personne, blesser,

17 léser une personne, endommager, etc.

18 En dernière conséquence, je dirais que ce serait la manifestation d'un

19 potentiel agressif.

20 Question: Avez-vous vu toutes ces différentes sphères de la vie du sujet

21 lorsque vous lui avez fait faire les tests et dans la réalisation des

22 tests par M. M. Krnojelac, vous n'avez pas repéré de potentiel agressif?

23 Mme Najman (interprétation): Bien entendu que oui. Si vous me permettez,

24 je pourrais ajouter encore que la tâche d'un psychologue consiste à

25 analyser les tests, les tests qu'il a fait faire à n'importe quel sujet

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1 pour pouvoir analyser l'histoire de sa vie ainsi obtenue, de même que

2 pouvoir analyser toutes les autres données pertinentes. Après quoi, sur la

3 base de tous ces éléments, le psychologue tente de brosser le portrait de

4 la personnalité du sujet de même que celui de ses comportements. Or, toute

5 donnée qui cadre ou ne cadre pas avec ce que nous avons obtenu en tant que

6 résultat de nos examens, c'est quelque chose que nous ne prenons pas en

7 considération vraiment à la légère.

8 M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Madame Najman.

9 Monsieur le Président, le conseil de la défense n'a plus de questions pour

10 ce témoin expert.

11 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Madame Najman, d'être

12 venue pour témoigner. Vous pouvez disposer maintenant. Mais nous savons

13 bien que vous allez rester encore avec le conseil de la défense pour les

14 seconder pendant que le témoin expert du conseil de l'accusation sera avec

15 nous pour déposer.

16 Mme Najman (interprétation): Je vous remercie.

17 (Le témoin, Mme Ana Najman, est reconduit à côté du banc de la défense.)

18 M. le Président (interprétation): Mme Uertz-Retzlaff, c'est à vous

19 maintenant que je m'adresse.

20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, j'ai promis

21 d'être encore plus brève qu'avec Mme Najman.

22 M. le Président (interprétation): Oui, je crois que vous allez faire tout

23 comme le témoin expert qui vous a pressée, il ne s'agira pas seulement des

24 résultats mais il s'agira également de la biographie.

25 (Le témoin, Mme Vera Folnegovic-Smalc, est introduit dans le prétoire.)

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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je vous

2 remercie.

3 Madame, voulez-vous, s'il vous plaît, faire la déclaration solennelle.

4 (Interrogatoire principal du témoin, Mme Vera Folnegovic-Smalc, par Madame

5 Uertz-Retzlaff )

6 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Je déclare solennellement que je

7 dirai la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité.

8 M. le Président (interprétation): Veuillez-vous asseoir, Madame.

9 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Merci beaucoup.

10 M. le Président (interprétation): Oui, Mme Uertz-Retzlaff.

11 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bonjour.

12 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Bonjour.

13 Question: Voulez-vous vous présenter, s'il vous plaît, et nous dire quand

14 vous êtes née?

15 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Je m'appelle Vera Folnegovic-Smalc

16 et je suis née le 28 juillet 1943.

17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, l'accusation

18 voudrait verser au dossier les données biographiques de Mme Vera

19 Folnegovic-Smalc. Il s'agira de P-54.

20 M. le Président (interprétation): Maître Vasic, vous avez une objection?

21 M. Vasic (interprétation): Non, Monsieur le Président.

22 M. le Président (interprétation): Alors la biographie de Mme Folnegovic-

23 Smalc sera P-458.

24 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous aimerions voir si nous pouvons

25 avoir les deux versions, dans les deux langues, BCS et anglais?

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1 M. le Président (interprétation): Avez-vous une objection, Maître Vasic?

2 M. Vasic (interprétation): Non, Monsieur le Président.

3 M. le Président (interprétation): Il s'agira donc des pièces à conviction:

4 P-459 et P-459A.

5 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous n'allons pas maintenant examiner

6 évidemment votre curriculum vitae ni entrer trop dans le détail, pour

7 parler évidemment de votre travail et de l'opinion qui est la vôtre. Mais

8 nous allons essayer de poser quelques questions au sujet de ce que votre

9 collègue a dit tout à l'heure.

10 Votre collègue a dit hier que la formation et la carrière de M. Krnojelac

11 était en quelque sorte d'ordre spécial. En quoi consistait ce trait

12 spécial de sa carrière et de sa formation, pour que nous puissions

13 comprendre?

14 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Monsieur le Président, Monsieur le

15 Juge, Madame, pour expliquer ce trait spécifique dont parlait Mme Najman,

16 je crois qu'on devrait dire comme suit: il ne s'agissait pas de quelque

17 chose de particulier et qui le concernait. Ces traits particuliers sont

18 plutôt le résultat des situations dans lesquelles il a pu vivre et qu'ils

19 ont édictées.

20 Pour être concret, enfant encore, M. Krnojelac va à l'école un peu plus

21 tard que ne le font d'habitude les gens qui ont vécu en Yougoslavie.

22 Ensuite, étant donné que son domicile était éloigné de l'école, il

23 fréquente une première école élémentaire un peu plus tard que ne le font

24 les enfants d'habitude.

25 M. le Président (interprétation): S'il vous plaît, Madame, pouvez-vous

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1 parler un peu plus lentement si possible. Il est difficile de vous suivre

2 pour parler ainsi de nos interprètes lorsque vous parlez si vite.

3 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Je tenterai de le faire, Monsieur

4 le Président.

5 Le second trait spécifique, c'est qu'une fois sorti d'une école

6 élémentaire de quatre années c'est, selon les souhaits, pour répondre au

7 souhait de sa mère qu'il s'inscrit au lycée. Or à cette époque-là,

8 l'éducation en Yougoslavie est l'objet d'une réforme, c'est-à-dire depuis

9 le système de l'école élémentaire de quatre ans, on passe à un système

10 d'école élémentaire de huit ans.

11 Cette réforme donc a lieu au moment où M. Krnojelac va à l'école, où il se

12 fait former, et au moment où lui devait terminer une première année de son

13 lycée dans sa ville, la ville de Foca, une école préparant des

14 instituteurs a été fondée. C'est ainsi que lui, ayant fait déjà quelques

15 années de lycée, passe à l'école normale et c'est ainsi qu'il a pu réduire

16 pratiquement la durée de ses études de deux ans, il me semble.

17 Voilà un tout premier trait de la spécificité de ses études, de sa

18 formation.

19 L'autre spécificité de sa formation, c'est qu'en tant que maître de

20 classe, employé, il est nommé par décret, étudiant qui peut poursuivre ses

21 études, parallèlement au travail qu'il accomplit. En d'autres termes,

22 cette situation s'avère spécifique déjà au cours de sa formation.

23 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Au fait, lorsque je vous pose une

24 question, vous n'êtes pas obligée évidemment de nous répéter l'ensemble

25 des faits. Il s'agit tout simplement d'entendre de votre part la substance

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1 même de ce que je me proposais de vous demander. Est-ce que vous pouvez

2 dire par là que du fait qu'il a suivi une forme d'éducation spécifique,

3 étant donné qu'il a vécu dans la situation du genre, il a peut-être pu en

4 tirer quelque profit?

5 Réponse: Il m'est difficile de dire, de parler de profit, mais en faisant

6 réduire ses études, du point de vue intellectuel, je crois que c'est

7 plutôt un minus. Il ne pouvait pas acquérir autant de connaissances qu'il

8 devrait faire. Mais pour parler évidemment du point de vue du rêve, etc.,

9 de ses études, certainement ceci devrait être utile pour lui. Par

10 conséquent, c'est un profit réalisé.

11 Question: Vous avez pu entendre Mme Najman dire que l'accusé manque de

12 curiosité, qu'il ne possédait pas un esprit analytique. Etes-vous d'accord

13 là-dessus? Avez-vous, vous-même, observé ces traits chez votre sujet?

14 Réponse: Pour ce qui est de la curiosité, je crois qu'il en a fait preuve,

15 qu'il n'en fait pas preuve (sic), et je crois que dans le résultat nous

16 pouvons nous mettre d'accord là-dessus.

17 Question: Je ne suis pas tout à fait sûre que vous ayez bien compris ma

18 question ou peut-être que la traduction n'a pas été tout à fait exacte.

19 Mais Mme Najman a dit que le sujet, l'accusé en question, faisait défaut

20 d'esprit de recherche et qu'il manquait de curiosité. Alors, si j'ai pu

21 bien vous comprendre, vous avez dit le contraire?

22 Réponse: Non, en ce qui me concerne, je ne peux pas dire qu'a priori, lui,

23 en tant que personnalité, en tant qu'individu, il ne fait pas preuve de

24 curiosité. Je voulais dire que, dans son comportement, il ne l'extériorise

25 pas.

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1 Question: A la lumière de l'évaluation des résultats qui sont tels que

2 vous les avez obtenus, lorsque nous parlons de la situation mentale du

3 sujet telle que vous l'avez décrite, vous utilisez toujours les termes

4 "normal", "adéquat", "adapté". Cela veut-il dire que l'accusé est tout

5 simplement une personne d'ordre moyen? Est-ce bien votre résultat?

6 Réponse: Je vous remercie de cette question. Avant de dire quelque chose

7 au sujet du statut psychique de la personne, je voudrais dire d'abord

8 qu'il s'agit d'une suite à donner à l'interprétation faite par Mme Najman.

9 Aujourd’hui lorsqu'elle dit que, sur la base des tests, un psychologue

10 offre, présente une structure de la personnalité qui est d'ordre

11 descriptif. Alors que le psychiatre a pour tâche de dire ce qui s'est

12 présenté sous forme pathologique du sujet au moment où nous en parlons ou

13 peut-être à un autre moment, ce qui était d'ailleurs considéré comme un

14 trouble ou comme un phénomène.

15 En psychiatrie, lorsqu'il s'agit évidemment de maladies ou de troubles, ce

16 dont on parle en terminologie nouvelle, il importe de dire de façon

17 décidée qu'il en est ainsi. Sur la base des tests, le psychologue offre

18 une chance, pour simplifier un peu plus grande de voir que pour ce sujet

19 il en sera de la sorte.

20 Or, ce statut psychique de la personne en question est celui d'un homme

21 normal qui se trouve en face de tests. Mais lequel sujet, au cours de sa

22 vie durant, n'est-ce pas, n'a pas toujours satisfait aux critères

23 nécessaires pour établir le diagnostic d'un trouble psychique quelconque.

24 Question: Vous êtes consciente du fait que votre collègue Mme Najman a pu

25 observer une anxiété accrue chez le sujet, chez l'accusé. Elle a même dit

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1 qu'il en faisait preuve dans toute situation nouvellement créée. Etes-vous

2 d'accord là-dessus?

3 Réponse: L'anxiété dont M. M. Krnojelac a fait preuve au cours d'un test

4 que lui a fait faire ma collègue était une anxiété qui était manifeste.

5 Or, cette anxiété n'a pas pu pour autant satisfaire les critères

6 nécessaires pour établir l'existence d'un trouble psychique.

7 Il s'agirait plutôt de parler d'un type de réaction sous forme d'anxiété.

8 Il ne s'agit pas encore de dire que nous avons pu obtenir tous les

9 éléments nécessaires pour établir le diagnostic d'un trouble psychique

10 sous forme d'anxiété, d'angoisse.

11 Question: Toutes ces difficultés d'ordre émotionnel, cette anxiété

12 éprouvée par le sujet ont été liées à une situation concrète: celle de

13 tests qu'on lui a fait faire pendant qu'il était en détention.

14 Par conséquent, lui, en tant que maître de classe, en tant qu'enseignant,

15 il se trouvait dans une situation tout à fait opposée à la sienne. Il a

16 été en quelque sorte en position subordonnée. Est-ce que vous l'avez

17 trouvé, vous aussi, ce résultat-là?

18 Réponse: Ecoutez, lui, en tant que maître de classe, a toujours été

19 quelqu'un qui examinait. C'est lui qui posait les questions, c'est lui qui

20 examinait. Et l'examinateur se trouve tout d'un coup dans la situation où

21 c'était lui qui était examiné à la différence de la situation où c'étaient

22 ses élèves.

23 Or, c'est une autre question de voir la situation où quelqu'un se trouve à

24 faire un test, où il ne peut pas se débrouiller. Or lui, ayant tout de

25 même une formation supérieure, pour lui c'est une situation stressante.

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1 Ce jeu de circonstances que M. M. Krnojelac a pu vivre, il me semble, se

2 traduit par une condition de stress qu'il a ressentie et que nous avons

3 notée chez lui.

4 Question: Monsieur M. Krnojelac est-il capable de saisir la situation de

5 façon intellectuelle pour réagir même dans des situations difficilement

6 prévisibles?

7 Réponse: C'est de manière indirecte que j'ai pu répondre à cette question

8 et je l'ai fait par écrit. Mais je dirai d'une façon tout à fait concrète

9 en répondant par oui.

10 Question: Madame Najman nous a fait la description de réactions de panique

11 de M. M. Krnojelac, évidemment d'après les résultats qu'elle a obtenus.

12 Quant à vous-même, avez-vous remarqué de telles réactions de panique chez

13 le sujet?

14 Réponse: Ecoutez, pour un psychologue, pour un psychiatre, il s'agit d'un

15 phénomène similaire mais différent. Par la même occasion, ma collègue Mme

16 Najman a expliqué et décrit cela comme étant une façon de réagir sous

17 forme de panique.

18 Or moi, en tant que psychiatre, je peux dire qu'il s'agira d'un type de

19 réaction sous forme de panique mais dont l'intensité n'est pas aussi

20 grande pour que je puisse diagnostiquer ce comportement comme tel, comme

21 étant de la panique, comme tenant de la panique.

22 Ma collègue a parlé évidemment de l'ICCD, c'est-à-dire de cette

23 classification américaine de maladies ou la classification européenne qui

24 disent que, pour établir le diagnostic d'une attaque de panique, il faut

25 que nous observions au moins parmi les 13 symptômes, 4 symptômes chez un

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1 sujet donné. Or, chez le monsieur en question, à un moment donné il a fait

2 preuve d'une situation qui était plutôt "panicoforme", pas tellement de la

3 panique et lequel élément ne suffisait pas évidemment pour que j'établisse

4 un diagnostic pour dire qu'il s'agissait d'une attaque de panique.

5 Question: Votre collègue a trouvé également que dans presque chaque

6 situation nouvellement créée, contrôlée par d'autres, l'accusé se trouvait

7 en proie à la peur et faisait preuve d'anxiété. De sorte qu'il ne pouvait

8 plus estimer la situation d'une façon intellectuelle.

9 Etes-vous d'accord là-dessus? Pouvez-vous dire qu'on pouvait peut-être

10 tirer une conclusion aussi générale que cela?

11 Réponse: Je crois que ma collègue Najman, lorsqu'elle a parlé d'une

12 situation nouvellement créée, parlait de quelque chose de nouveau mais

13 parfaitement, spécifiquement nouveau. Elle a ajouté ensuite que pendant le

14 premier jour de tests, M. M. Krnojelac a fait preuve d'émotion mais déjà

15 le second jour, le lendemain, il a pu bien faire ce test.

16 Tout dépend de savoir ce que ma collègue voulait dire en parlant d'une

17 situation nouvelle. Le lendemain, il a donc pu résoudre le problème, il a

18 pu faire ce test.

19 Question: Oui, alors supposons que l'accusé ait ressenti une peur, une

20 anxiété lorsqu'il a été nommé directeur de la prison. D'après vous,

21 d'après votre expérience, pendant combien de temps devrait prévaloir ce

22 sentiment de peur et d'anxiété?

23 Réponse: Ceci ne devrait pas durer trop longtemps, devrait pouvoir

24 s'arrêter pour réapparaître sous une forme peut-être un peu, tout de même,

25 modifiée et légère, je dirais. En tout cas, cette fois-ci ce n'est pas une

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1 situation, un état durable chez lui.

2 Question: Lorsque vous dites une réaction de courte durée, est-ce que vous

3 pouvez être concrète pour préciser ou peut-être on ne pourrait pas le

4 préciser?

5 Réponse: D'après nos définitions, une telle anxiété dure de quelques

6 minutes à une demi-heure, et jusqu'à une heure.

7 Concrètement parlant, d'après la classification en vigueur, pour parler

8 d'attaque de panique, l'accumulation, enfin l'apogée de cet état est

9 atteint au bout de 10 minutes.

10 Question: Vous avez mentionné aussi que M. M. Krnojelac a suivi les

11 ordres, il les a exercés. Tout comme Mme Najman l'a dit, dans un

12 environnement où les gens se comportaient mal, tous ces gens-là autour de

13 lui se comportaient mal, ils perpétraient des crimes.

14 Quelle serait sa réaction la plus prévisible? Serait-il prêt à s'opposer à

15 un tel comportement? Ou devait-il pour ainsi dire évidemment se rallier à

16 d'autres gens autour de lui, à ce groupe?

17 Réponse: Un psychologue en général travaille dans le cadre d'une équipe.

18 Pour évidemment parler des traits de la personnalité, ceci tient du

19 domaine de la compétence d'un psychologue. Je n'ai rien contre les

20 commentaires faits par ma collègue, j'aimerais plutôt qu'on s'en tienne à

21 l'explication faite ou plutôt à la déclaration faite par ma collègue.

22 Question: Oui. Quant à vous, diriez-vous qu'un individu qui serait

23 conformiste, prêt à suivre un ordre et qui serait obéissant, serait

24 l'individu que les autorités pourraient évidemment sélectionner pour le

25 nommer pour l'accomplissement de tâches désagréables? Est-ce que vous

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1 pouvez répondre à cette question?

2 Réponse: Ecoutez, je pourrais peut-être répondre à un niveau qui tient de

3 la théorie: tout dépend si nous pouvons savoir ce que les autorités

4 voulaient faire. En tout cas, c'est très complexe.

5 Les conformistes sont des gens qui correspondent bien à des autorités; en

6 tout cas, si c'est un conformiste et, sur cela, ma collègue et moi nous

7 sommes d'accord: cet individu ne doit pas toujours faire preuve de

8 conformisme. Ceci pourrait être, si vous voulez, une réponse d'ordre

9 plutôt général à la question que vous venez de poser.

10 Question: Dans ce rapport, Mme Najman disait que dans les localités de

11 petite taille, tout comme la ville de Foca, qui dit un maître de classe,

12 qui dit un clerc, un prêtre ou un médecin, dit un notable et qu'il

13 représentait un statut social tout à fait à part.

14 Etes-vous d'accord là-dessus pour parler de l'ancienne Yougoslavie?

15 Réponse: Oui, absolument. Oui.

16 Question: Et M. Krnojelac, étant donné la personnalité qui est la sienne,

17 était-il capable de mener d'autres personnes qui lui auraient été

18 subordonnées? Pouvait-il posséder de telles capacités?

19 Réponse: Je crois que oui. Oui.

20 Question: Tout comme votre collègue, vous avez dit au même moment que lui

21 n'a qu'à suivre les autorités qui lui sont supérieures lorsque la

22 situation le demande.

23 Ne s'agit-il pas de dire que c'est contradictoire?

24 Réponse: Oui, cela est contradictoire. Mais ceci justement fait preuve de

25 ce que la psychologie fait dans son domaine, à savoir: en psychologie, on

Page 8036

1 dit que la personne fera ainsi et en temps, mais pas toujours avec

2 certitude.

3 J'ai beaucoup aimé l'article que cite ma collègue sur l'avant-dernière

4 page de son interprétation. Je crois que ma collègue a sélectionné cet

5 article d'une bibliographie assez ample, quand elle dit que "l'individu

6 peut nommer ou suivre selon que la situation le demandera".

7 C'est dans cette phrase que nous pouvons voir qu'il s'agit de deux

8 éléments opposés et contraires, alors que nous parlons d'un même individu

9 et où l'on devrait évidemment avoir un individu modèle capable de suivre

10 ou de mener à la fois. Tout dépendra évidemment de la situation mise en

11 place.

12 Question: Votre collègue a mentionné aussi que M. Krnojelac, une fois

13 qu'il était mis dans une situation difficile, aurait plutôt tendance à

14 s'en sortir, à se sortir de cette situation difficile.

15 Est-ce que vous vous attendez à son comportement, toujours compte tenu de

16 son caractère passif et compte tenu du fait qu'il ne faisait que suivre et

17 exercer les ordres?

18 Réponse: Il m'est difficile de répondre à cela parce que je ne dispose pas

19 de suffisamment d'arguments pour dire vraiment avec justesse quel serait

20 son comportement dans cette situation-là. Par exemple, il était envoyé à

21 faire des études; ses études se sont fait longues, mais il les a

22 terminées. Il aurait pu évidemment les arrêter, ses études, parce que cela

23 faisait assez long, ses études. En définitive, il a été directeur du KP

24 Dom et c'est lui qui a déposé une demande portant sur sa démission de

25 cette fonction.

Page 8037

1 Question: Il vous serait peut-être difficile de répondre à cette question

2 puisque vous n'avez pas suffisamment de données, mais est-ce que cela ne

3 s'applique pas également à Mme Najman? Elle-aussi, elle n'a peut-être pas

4 suffisamment de données?

5 Réponse: Madame Najman est psychologue de formation. Elle est formée pour

6 pouvoir juger sur la base des résultats des tests, pour pouvoir formuler

7 sur la base de ces résultats une hypothèse sur la structure vraisemblable

8 de la personnalité.

9 Question: Mais lorsqu'on parle d'une personnalité conformiste, ce serait

10 par exemple un individu qui adhérerait à un parti lorsque cela est

11 généralement admis que l'on devienne membre d'un parti?

12 Réponse: Oui, c'est vraisemblable.

13 Question: Vous êtes au courant du fait que M. Krnojelac était officier de

14 réserve?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Et à ce moment-là, dans l'ex-Yougoslavie, était-ce populaire,

17 était-ce gratifiant d'avoir ce statut d'officier de réserve, à votre avis?

18 Réponse: Eh bien, il m'est difficile de vous répondre à cette question, je

19 suis une femme. Dans mon environnement immédiat, je ne connais personne

20 qui m'aurait dit à un moment quelconque qu'il était officier de réserve.

21 Donc il m'est très difficile de vous répondre. Je ne sais pas s'il

22 s'agissait d'un privilège qu'on passait plutôt sous silence, mais je ne

23 connais personne qui aurait eu ce statut d'officier de réserve dans l'ex-

24 Yougoslavie.

25 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je n'ai plus de questions.

Page 8038

1 M. le Président (interprétation): Le contre-interrogatoire, Maître Vasic?

2 (Contre-interrogatoire de Mme Folnegovic-Smalc par Me Vasic.)

3 M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Madame

4 Folnegovic-Smalc.

5 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Bonjour.

6 Question: Pendant mon interrogatoire principal adressé à Mme Najman, j'ai

7 posé une question concernant votre rapport.

8 Vous étiez présente ici, donc vous avez entendu cette question. Cela

9 concerne ce qui figure en page 12, au paragraphe 2, qui a été cité

10 aujourd'hui par ma collègue de l'accusation: "Il a tendance à recevoir les

11 ordres des autorités supérieures, il comprend ces ordres, il est capable

12 d'en analyser le contenu et de les exécuter. C'est par la suite qu'il a

13 recours au mécanisme de défense qui consiste en déni et refoulement."

14 M. le Président (interprétation): Maître Vasic, j'ai l'impression que les

15 interprètes sont en train de chercher ce texte dans le rapport. Pourriez-

16 vous citer encore une fois la référence?

17 M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Il s'agit du

18 paragraphe 2 en page 12 du rapport de Mme Folnegovic-Smalc.

19 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Oui, en version croate.

20 M. Vasic (interprétation): Oui, version croate.

21 M. le Président (interprétation): Version anglaise ou en version BCS?

22 M. Vasic (interprétation): En version BCS.

23 M. le Président (interprétation): Merci. Non, c'est en version BCS.

24 M. Vasic (interprétation): Ce serait peut-être plus facile si je disais

25 que c'était la dernière page du rapport, quelle que soit la version, la

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1 version anglaise ou BCS. C'est la page sur laquelle figure la signature de

2 Mme Folnegovic-Smalc.

3 M. le Président (interprétation): Voulez-vous continuer, Maître Vasic?

4 M. Vasic (interprétation): Merci. Madame, je citerai encore une fois le

5 paragraphe 2 en page 12. Vous avez écrit que "M. Krnojelac avait tendance

6 à recevoir les ordres des autorités supérieures, qu'il comprenait ces

7 ordres, que sur un plan intellectuel et émotionnel, il était capable

8 d'analyser ces ordres, qu'il le faisait et qu'il les exécutait. Ensuite,

9 il avait recours ou il a recours aux mécanismes de défense qui consistent

10 en déni et refoulement." Fin de citation.

11 Madame Folnegovic-Smalc, il me semble qu'il s'agit ici d'une description

12 des actes rationnels de quelqu'un. Mme Najman nous a expliqué qu'il ne

13 s'agissait pas d'actes rationnels. J'aimerais savoir si vous pourriez

14 ajouter quelque chose à l'avis de Mme Najman en réponse à ma question?

15 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Je vous remercie de m'avoir posé

16 cette question.

17 Oui, Mme Najman et moi-même avons compris de cette phrase, en nous basant

18 sur les spécificités de notre langue, donc notre supposition était

19 d'office qu'il s'agissait de mécanismes qui n'étaient pas conscients.

20 Donc, pour quelqu'un qui n'est pas psychiatre ou psychologue, cela pouvait

21 être gênant, cela pouvait l'induire en erreur parce qu'il se demandait

22 alors pourquoi on ne précise pas de quelle nature sont ces mécanismes.

23 Si vous me permettez, j'essaierai de reformuler cela dans les termes d'un

24 langage un peu plus courant.

25 M. Vasic (interprétation): Madame, pourriez-vous ralentir un petit peu,

Page 8040

1 s'il vous plaît? J'ai l'impression que les interprètes ne parviendront pas

2 à tout saisir.

3 Réponse: "Il a tendance à recevoir des ordres émanant des autorités

4 supérieures. Il comprend l'ordre, il teste et analyse dans son ensemble

5 cet ordre, sur le plan intellectuel et émotionnel, ainsi que l'exécution

6 de l'ordre. Point. Il utilise comme mécanismes de défense le déni et le

7 refoulement". Fin de citation.

8 Question: Je vous remercie, Madame Folnegovic-Smalc.

9 En page 7 de votre rapport, vous soulignez un point. Vous dites que la

10 maison de M. Krnojelac a été incendiée. Alors, à votre avis, pourriez-vous

11 nous dire comment il a perçu cet événement, le fait que sa maison brûle?

12 Réponse: Ce monsieur était très triste. Au moment où il a décrit cet

13 événement, il a manifesté la tristesse, le fait que cela l'a secoué et il

14 a montré de la souffrance.

15 Question: Vous avez dit qu'il a été secoué, que cela le faisait souffrir.

16 Dans le domaine psychiatrique, ce genre de manifestation est d'une

17 importance diagnostique ou non? Dans l'établissement d'un diagnostic ou

18 non?

19 Réponse: Oui, ce genre de manifestation d'émotion est significative dans

20 le domaine psychiatrique. Nous dirions que, dans une situation de stress,

21 l'individu réagit émotionnellement d'une manière adéquate.

22 Question: Vous venez de parler d'une situation de stress et de la réponse

23 émotionnelle d'un individu: le stress figure-t-il dans la liste des

24 troubles, dans une classification psychiatrique?

25 Réponse: Dans les deux classifications qui sont aujourd'hui en vigueur et

Page 8041

1 admises sur le plan international, dans le domaine psychiatrique, le

2 stress figure comme un des termes utilisés dans le domaine psychiatrique.

3 Alors il est décrit sur un plan qualitatif et quantitatif de manière

4 différente. D'un côté vous avez une réaction imminente dans une situation

5 de stress, d'autre part vous avez des troubles d'adaptation qui font

6 partie dans ce grand groupe et vous avez quelque chose qui dans les pays

7 de l'ex-Yougoslavie et également aux Etats-Unis est très populaire, suite

8 à la guerre du Vietnam à savoir le PTSD, le syndrome de stress post-

9 traumatique.

10 M. Vasic (interprétation): Vous venez de mentionner le syndrome de stress

11 post- traumatique. Il se manifeste pendant combien de temps et quelles en

12 sont les conséquences?

13 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Le PTSD dure de manière variable.

14 D'après la classification en fait on a plutôt tendance à déterminer le

15 moment où il se manifeste. Et il se manifeste un mois à peu près après

16 l'événement qui a provoqué le stress.

17 Puis vous avez une forme aiguë qui peut former jusqu'à six mois, mais vous

18 avez aussi une forme qui peut durer toute la vie. Cela dépend du

19 traitement. Il peut se transformer aussi en trouble psychologique donc il

20 peut y avoir une détérioration de ce syndrome post-traumatique et là on le

21 qualifie d'une nouvelle façon, enfin on considérera qu'il est pratiquement

22 irréversible.

23 M. le Président (interprétation): Madame Folnegovic-Smalc, vous commencer

24 votre réponse sans faire de pause après avoir entendu la question, puisque

25 vous parlez la même langue. Donc vous ne laissez pas suffisamment de temps

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1 aux interprètes pour terminer la traduction de l'idée précédente.

2 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Veuillez m'en excuser, Monsieur le

3 Président.

4 M. Vasic (interprétation): Monsieur le Président, cela nous arrive à tous

5 dans ce prétoire à un moment ou à un autre.

6 M. le Président (interprétation): Y compris aux Juges.

7 M. Vasic (interprétation): En page 7, Madame Folnegovic-Smalc vous citez

8 les données, les faits qui concernent le moment où les fils de M.

9 Krnojelac ont été blessés. Et ce que vous dites ici est la chose suivante:

10 Monsieur Krnojelac montre toujours une réaction émotionnelle d'une

11 intensité prononcée au moment où il décrit cet événement. Pourriez-vous

12 nous donner un peu plus de détails lorsque vous êtes en train de nous

13 décrire cette réaction émotionnelle qui est la sienne en parlant de ces

14 événements tragiques?

15 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Sa description, sa réaction

16 émotionnelle lorsqu'il décrit le moment où ont été blessés ses fils

17 rappelle sa réaction émotionnelle au moment où il décrit le moment où sa

18 maison a brûlé. Donc vous voyez un visage où se manifeste la douleur, je

19 peux dire que cela n'est même pas verbalisé. C'est une personne qui tout

20 en étant capable de verbaliser a aussi la possibilité de communiquer par

21 le langage corporel, donc de manifester par les traits de son visage ou

22 les gestes, son état émotionnel.

23 Pour un psychiatre, il est clair qu'il s'agit d'une personne qui éprouve

24 toujours un certain abattement et un grand malaise en décrivant, en se

25 remémorant un événement.

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1 Question: Vous avez parlé de ses émotions au sujet de sa maison incendiée

2 au moment où il décrit sa maison. Donc il manifeste les mêmes sentiments,

3 les mêmes émotions que lorsqu'il parle de cet événement où ses fils ont

4 été blessés, c'est cela que vous voulez dire?

5 Réponse: Oui, c'est totalement similaire.

6 Question: Je vous remercie Madame Folnegovic-Smalc.

7 Ma collègue vous a posé des questions au sujet du comportement d'une

8 personnalité qui a, parmi ses traits de personnalité, le conformisme.

9 Alors, ce que j'aimerais savoir: dans ce genre de situation, ce trait

10 devient un trait dominant ou non? Ou bien d'autres traits de caractère ou

11 de personnalité entrent-ils en jeu à ce moment-là?

12 Réponse: Il me semble que Mme Najman a répondu à cette question

13 aujourd'hui et je m'associe à sa réponse. Un trait qui a été identifié à

14 l'aide d'un examen psychologique n'est jamais un trait dominant dans le

15 comportement d'un individu.

16 Il faut donc être prudent lorsqu'on interprète les tests psychologiques.

17 Un psychologue débutant, par exemple qui est appelé à analyser les

18 résultats d'un test, manque d'expérience. Un expert doit être expérimenté

19 pour pouvoir évaluer à quel point l'un ou l'autre des traits de la

20 personnalité se manifeste.

21 Autrement dit, je répondrai à votre question en disant la chose suivante:

22 dans le comportement de l'individu, il y a de fortes chances qu'il se

23 comporte d'une manière conformiste. Ce qui n'exclut pas la possibilité

24 qu'il se comporte autrement dans une situation donnée, mais les chances

25 sont plutôt grandes.

Page 8044

1 Si vous vous l'acceptez, je voudrais ajouter quelque chose. En

2 psychologie, on parle des chances que cela se produise. Lorsque vous avez

3 quelqu'un qui n'analyse pas la réalité de la situation, alors là, vous

4 avez quelqu'un de malade, de pathologique. Alors qu'ici, vous avez des

5 chances accrues qu'il en soit ainsi.

6 M. Vasic (interprétation): Je vous remercie, Mme Folnegovic-Smalc.

7 Monsieur le Président, il me semble que le moment est venu de suspendre.

8 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Nous reprendrons

9 l'audience à 14 heures 30.

10 (Le témoin, Mme Vera Folnegovic-Smalc, est reconduit hors du prétoire.)

11 (L’audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 33.)

12 (Le témoin, Mme Vera Folnegovic-Smalc, est introduit dans le prétoire.)

13 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Vasic.

14 M. Vasic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Re-bonjour à tout

15 le monde.

16 Madame Folnegovic-Smalc, lors de l'interrogatoire principal, lors du

17 contre-interrogatoire, dans votre déposition et dan la déposition de Mme

18 Najman, on a souvent parlé de ce trait caractère de la personnalité. Avez-

19 vous compris que M. M. Krnojelac devait être un conformiste ou l'avez-vous

20 vécu ainsi pour ainsi dire ou un autre type de personnalité?

21 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Je suis certaine pour pouvoir dire

22 que j'ai pu comprendre que M. M. Krnojelac était une personnalité tout à

23 fait complète. Il n'y a pas que le conformisme dont on devrait parler. Il

24 y a toute une série d'autres propriétés de sa personnalité mais nous avons

25 parlé du conformisme comme étant un élément déterminant de sa

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1 personnalité.

2 Voilà la raison pour laquelle nous nous sommes occupés tellement de cet

3 élément-là et du conformisme. Je pourrais peut-être énumérer plusieurs

4 autres éléments que nous avons rencontrés au niveau de sa personnalité et

5 que nous n'avons pas décrits, que nous pouvons faire, mais nous ne l'avons

6 pas fait parce que nous n'avons pas considéré cela comme parfaitement et

7 particulièrement intéressant ou significatif pour notre expertise.

8 Question: Pour ce qui est de ces autres traits de la personnalité que vous

9 avez constatés chez M. M. Krnojelac, sont-ils de nature à avoir une forte

10 influence, un important impact sur son comportement?

11 Réponse: Oui, certainement oui.

12 Question: Oui, merci Madame Folnegovic-Smalc. Au cours de l'interrogatoire

13 principal pour répondre à la question de mon honorable collègue pour

14 savoir s'il y avait une anxiété chez M. M. Krnojelac lorsqu'il était

15 directeur, vous avez dit qu'au début il y avait une certaine anxiété,

16 après quoi est survenue une période d'adaptation. Par conséquent l'anxiété

17 était peut-être moins prononcée, dans un moindre degré peut-être, du point

18 de vue évidemment quantité de la réaction.

19 Je voudrais savoir maintenant. Après que M. M. Krnojelac a été nommé

20 directeur et lorsqu'il y avait un degré diminué d'anxiété chez lui, lors

21 de certaines situations, lorsqu'il avait à affronter certains problèmes

22 pour exercer la fonction qui était la sienne, à savoir directeur

23 intérimaire de l'unité économique, pouvait-on dire que, chez lui, le degré

24 d'anxiété s'était accru au moment par exemple où il tentait de résoudre

25 certains problèmes qu'il ne pouvait pas résoudre étant donné ses

Page 8046

1 compétences et expériences?

2 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Oui, je vois. D'après les tests

3 psychologiques, M. M. Krnojelac est une personne sujette à des anxiétés, à

4 de telles réactions. C'est un des traits de sa personnalité. Lorsque nous

5 avons dit qu'il y avait un peu plus d'anxiété, c'est cette anxiété-là qui

6 s'était manifestée mais le trait caractériel qui est le sien, lorsqu'il

7 doit répondre par anxiété dans telle ou telle situation, il me semble que

8 c'est un trait qui lui est propre et qui peut se manifester dans des

9 circonstances réunies.

10 M. Vasic (interprétation): Merci, Madame Folnegovic-Smalc.

11 Monsieur le Président, le conseil de la défense n'a plus de questions dans

12 le cadre du contre-interrogatoire.

13 M. le Président (interprétation): Merci, Maître Vasic.

14 Vous avez des questions, Madame Uertz-Retzlaff?

15 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, Mme Vera Folnegovic-

16 Smalc, par Mme Uertz-Retzlaff.)

17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, très brièvement. Lorsque le

18 conseil de la défense a voulu poser des questions concernant les réactions

19 émotionnelles de l'accusé, c'est-à-dire lorsqu'il a parlé de la maison qui

20 a été incendiée, lorsqu'il a parlé des circonstances dans lesquelles ses

21 fils ont été blessés et lésés, la réaction émotionnelle de M. M. Krnojelac

22 était-elle vraiment cette réaction à laquelle vous vous attendiez lorsque

23 vous avez une personne qui se trouve dans de telles circonstances?

24 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Si nous supposons que M. M.

25 Krnojelac est une personne normale, ce qui est le cas, alors c'était une

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1 réaction normale face à un stress de ce genre-là.

2 Question: Avez-vous trouvé en lui des signes, des symptômes de stress

3 post-traumatique après l'avoir examiné?

4 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): Lors des analyses faites et des

5 examens, j'ai dû faire attention à de tels indices considérant le syndrome

6 post-traumatique, c'est-à-dire de cette catégorie psychique qui suit le

7 PTSD(?). Avec certitude, je peux dire que, d'après l'anamnèse que nous a

8 offerte l'état de M. Krnojelac, il n'y avait pas de symptômes de PTSD, non

9 plus qui ne les a maintenant.

10 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je n'ai

11 plus de questions à poser à ce témoin.

12 M. le Président (interprétation): Eh bien, Madame, merci infiniment. Merci

13 d'être venue devant cette Chambre. Vous pouvez maintenant vous retirer.

14 Nous vous sommes reconnaissants, à vous et à Mme Najman, parce que vous

15 nous avez permis de faire une grande économie de temps.

16 Mme Folnegovic-Smalc (interprétation): C'est moi qui vous remercie.

17 M. le Président (interprétation): Donc nous nous tournons à nouveau vers

18 la défense qui doit continuer à présenter ses éléments à décharge.

19 (Les témoins, Mme Ana Najman et Mme Vera Folnegovic-Smalc, sont reconduits

20 hors du prétoire.)

21 M. le Président (interprétation): C'est effectivement la déposition de

22 l'accusé qui se poursuit.

23 (M. Krnojelac s'installe à la barre pour être interrogé par Mme Kuo.)

24 (Contre-interrogatoire de l'accusé, M. Milorad Krnojelac, par Mme Kuo.)

25 M. le Président (interprétation): Monsieur Krnojelac, vous pouvez-vous

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1 asseoir.

2 Monsieur Krnojelac, vous êtes toujours sous serment. N'oubliez pas que

3 vous avez prononcé la déclaration solennelle avant de commencer votre

4 déposition. Etes-vous conscient de cela?

5 M. Krnojelac (interprétation): Oui, Monsieur le Président, et je vous ai

6 bien compris.

7 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

8 Madame Kuo, vous avez la parole.

9 Mme Kuo (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

10 Monsieur Krnojelac, avant l'interruption de votre déposition, vous nous

11 avez déclaré que vous aviez oralement demandé à M. Radovic qu'il répare

12 votre maison. Vous souvenez-vous nous avoir dit cela?

13 M. Krnojelac (interprétation): Oui, je me souviens que c'était fait

14 oralement.

15 Question: Peu de temps après vous être entretenu avec lui, vous avez reçu

16 du bois de Maglic et vous avez reçu des carreaux d'une coopérative. Je

17 crois que ces carreaux et ces matériaux ont été amenés au KP Dom, c'est

18 bien cela?

19 Réponse: Pas tout de suite. C'est-à-dire que ces matériaux de construction

20 de Maglic ne venaient pas directement au KP Dom mais plutôt directement à

21 la maison, sur les lieux où se trouve ma maison incendiée. Et pour ce qui

22 est des tuiles nécessaires pour couvrir ma maison, ces tuiles ont d'abord

23 été transportées au KP Dom à bord d'un véhicule qui était la propriété de

24 la société Zelengora.

25 Question: Ces tuiles qui ont été utilisées pour reconstruire votre toit

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1 ont été amenées au KP Dom dans un premier temps, n'est-ce pas? Puis, dans

2 un deuxième temps, elles ont été transportées vers votre maison?

3 Réponse: Oui.

4 Question: En outre, il me semble que des portes de métal et qu'un escalier

5 de fer ont été amenés vers votre maison. Ces éléments de métaux

6 provenaient de l'unité économique de fabrication d'éléments de fer Drina?

7 Réponse: C'est plus tard que cette porte en métal et l'escalier ont été

8 transportés vers ma maison parce que, d'abord, ceci n'a pas encore été

9 fini dans l'atelier de mécanique. On les a construits, c'est vrai, mais

10 c'est ultérieurement seulement qu'ils ont été transportés.

11 Question: Ces éléments en fer provenant de l'atelier de sidérurgie ont été

12 réalisés par des détenus musulmans qui se trouvaient là-bas, n'est-ce pas?

13 Réponse: Oui, ils ont été produits à l'atelier de mécanique, mais les

14 matériaux étaient à moi et probablement que c'était l'œuvre de ces détenus

15 musulmans.

16 Question: Vous n'avez jamais dû payer de factures pour les éléments

17 réalisés par les détenus musulmans, n'est-ce pas?

18 Réponse: J'ai dit que les matériaux étaient à moi; pour lesquels matériaux

19 j'ai une facture, cela m'a été facturé. Et j'ai honoré cette facture à la

20 caisse du KP Dom après avoir d'ailleurs déjà repris la porte en métal en

21 question et cette cage d'escalier, enfin cette construction en métal.

22 Après quoi j'ai honoré la facture.

23 Question: Vous n'avez pas payé la main d'oeuvre ?

24 Réponse: Pourquoi donc devrais-je payer encore si je n'ai pas payé la main

25 d'oeuvre? Parce que pour parler de matériaux, c'était à moi.

Page 8050

1 Rappelez-vous, s’il vous plaît seulement un document où une demande a été

2 faite d'une certaine quantité de tôle, il n'y avait pas de tôle au KP Dom.

3 Par conséquent j'ai dû en acheter à la société de Maglic.

4 Qu'est-ce que je devais payer encore sinon le travail des artisans? Parce

5 que les matériaux étaient à moi, je vous l'ai déjà dit. Et sur la facture

6 on peut lire, fait sur la base des matériaux, avec les matériaux de celui

7 qui a passé la commande.

8 Question: Quelle somme avez-vous payée pour cette porte en métal et cet

9 escalier de métal?

10 Réponse: Croyez-moi maintenant je ne peux pas m'en souvenir, même si je

11 pouvais. Il y a eu depuis une dévaluation du dinar si forte qu'évidemment

12 les chiffres m'échappent. En tout cas une chose est sûre et ce dont je me

13 souviens, c'est que j'ai payé tout cela. Je ne peux pas vous dire le

14 chiffre exact.

15 Le KP Dom devait travailler suivant certaines normes de travail en

16 vigueur. Par conséquent tant et tant d'heures de travail devaient être

17 payées. Avant la guerre tout a été programmé. Par exemple un tel travail à

18 effectuer nécessite tant et tant d'heures de travail. Le calcul étant

19 fait, tout cela a été payé par moi.

20 Question: Pourriez-vous nous donner une idée de la somme que vous avez

21 versée?

22 Réponse: Je ne peux pas. S'il faut mentir, inventer, mon honneur ne me le

23 permet pas et je viens de jurer ici que je dirai la vérité. Par

24 conséquent, je ne peux pas m'en rappeler.

25 Mme Kuo (interprétation): Monsieur M. Krnojelac, n'est-il pas exact que

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1 vous ne pouvez pas me donner cette estimation parce qu'en fait vous n'avez

2 rien payé, vous n'avez pas déboursé un centime pour ce travail qui a été

3 réalisé. C'est quelque chose qui a été fait gratuitement.

4 M. Krnojelac (interprétation): Je vous prie, n'allez pas affirmer jusque-

5 là pour dire que c'était gratuit. Moi, pour ma part, j'affirme que j'ai

6 payé, mais je déplore pour moi le fait que nous n'ayons pas pu retrouver

7 ces documents, cette facture. Mais je suis certain que ces paiements je

8 les ai effectués à la caisse, au trésorier du KP Dom. Je le dis à 100%,

9 moi je sais que j'ai payé et vous qui n'y êtes jamais allé, vous dites

10 maintenant, vous affirmez que je n'ai pas payé. Sur la base de quoi? je

11 vous en prie.

12 M. le Président (interprétation): Madame Kuo, qu'il n'y ait pas de

13 problème dans le compte rendu. Lorsque l'accusé déclare qu'il a payé cette

14 facture, je crois qu'il faudra que vous établissiez qu'il a payé la main

15 d'œuvre parce qu'il dit qu'il y a eu un paiement indépendant qui a été

16 réalisé, qu'il a par ailleurs payé les matériaux.

17 Mme Kuo (interprétation): Bien sûr il faudra que je fasse toute la lumière

18 sur ce point précis, Monsieur le Président.

19 Monsieur M. Krnojelac, je vous posais une question qui portait sur la main

20 d'œuvre. Ce que vous venez de dire à l'instant avait trait à la main

21 d'œuvre, n'est-ce pas?

22 M. M. Krnojelac (interprétation): C'est justement cela. J'ai payé le

23 travail même, la main d'œuvre, quant aux matériaux de construction, je les

24 ai payés à la société de Maglic; lesquels matériaux ont été transportés à

25 l'atelier mécanique et seule la main d'œuvre a été payée ensuite, c'est-à-

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1 dire pour ce qui a été fait pour effectuer le travail.

2 Question: Une facture de cette nature serait conservée dans les archives

3 du KP Dom, n'est-ce pas?

4 Réponse: Ceci devrait être le cas, il devrait y avoir une copie de ce

5 document, de cette facture dans les livres du trésorier, à la caisse pour

6 dire à quel moment et combien il a été payé.

7 Question: Mais à cette époque-là, c'est vous qui étiez responsable de

8 l'unité économique, n'est-ce pas?

9 Il vous était possible d'accéder à ce type de documents et d'archives?

10 Réponse: Non, je ne pouvais pas avoir accès à ces archives parce qu'il y a

11 un service de comptabilité à part qui s'occupe de tout cela et qui

12 accomplit tout ce travail . Ceci n'était pas dans ma prérogative, moi je

13 ne pouvais pas y avoir accès. Si évidemment je l'avais demandé

14 probablement ceci m'aurait été autorisé, pour sûr.

15 Question: Dans le cadre de la préparation de votre affaire et de votre

16 défense, vous n'avez jamais eu accès à ce reçu qui apparaît dans les

17 archives tenues par le KP Dom?

18 Réponse: Le 15 juin 1998, j'ai quitté la ville de Foca. J'ai été

19 incarcéré, j'ai été arrêté. Comment voulez-vous que j'ai accès à cette

20 documentation, ceci n'est pas possible. Comment voulez-vous que j'ai ces

21 documents?

22 Question: Alors que vous répariez votre maison, vous teniez un journal

23 très précis de ce qui a été réalisé, toutes les réparations qui étaient

24 menées à bien, n'est-ce pas?

25 Réponse: Je n'ai jamais tenu une documentation quelconque dans le détail

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1 pour savoir… je sais seulement quels étaient les travaux effectués en ce

2 qui concerne ma maison. Pour dire que j'ai tenu un journal ou quelque

3 chose du genre, je ne peux pas dire. J'ai dit que tout simplement on a

4 complètement retapé à neuf la toiture, et que nous avons déblayé un petit

5 peu tout ce qu'il y avait, toutes ces différentes scories étant donné que

6 la maison avait été incendiée Par conséquent qu'est-ce que j'avais à faire

7 pour tenir un journal ou quoi que ce soit.

8 Question: Etes-vous en train d'affirmer que vous avez personnellement

9 payer pour la façon nécessitée par la réalisation de cet escalier de fer.

10 Vous dites que de votre bourse vous avez tiré l'argent pour honorer cette

11 facture.

12 Réponse: J'affirme tout comme vous pouvez me voir ici où je suis assis que

13 j'ai payé tout cela de ma propre poche.

14 Question: Monsieur M. Krnojelac, je ne comprends pas pourquoi avez-vous dû

15 vous rendre au bâtiment de la municipalité pour demander à ce que votre

16 maison soit réparée? Pourquoi si vous, vous étiez à même de le faire vous

17 même?

18 Réponse: Je vous ai déjà, il y avait la dévaluation. Par conséquent si

19 certains fonds existaient et si par exemple les travaux ont été effectués

20 et les travaux ont été facturés et si on devait payer seulement 30 jours

21 plus tard, on pouvait s'acquitter de toutes ces dettes et on aurait les

22 factures. Mais plus tard si on devait faire étaler la dette pour plus tard

23 en 1995/1996, j'aurais pu m'en acquitter encore plus facilement. Si vous

24 pouvez me comprendre, si vous voulez me comprendre: si par exemple je

25 prends 10 dinars ou 10 Marks; et si vous biffez évidemment le 0, reste 1

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1 Mark ou 1 dinar. La dévaluation a été si forte à ce moment-là qu'il me

2 semble avoir dû dire à quelqu'un lors d'une conversation, d'une enquête

3 ici ou ailleurs, si par exemple, tu touches ton salaire et tu peux par

4 exemple acheté deux œufs aujourd'hui, le lendemain tu ne peux même pas en

5 acheter un.

6 Question: Monsieur Krnojelac, nous comprenons tous la définition du terme

7 dévaluation, ce n'était pas l'objet de ma question. Je crois qu'il règne

8 une certaine confusion dans le compte rendu du fait de la réponse que vous

9 venez de m'apporter.

10 Vous avez déclaré que vous vous étiez rendu au bâtiment de la municipalité

11 avec une intention toute autre en 1995, en 1996 et c'est ce qui apparaît

12 dans le compte rendu en anglais. Est-ce que vous nous dites que vous vous

13 êtes rendu dans bâtiment de la municipalité pour la première fois en 1995

14 et 1995 pour y parler de votre maison ou bien vous y êtes d'abord aller en

15 1992? Je voudrais que vous soyez très clair sur ce point.

16 Réponse: Je vous dis que pour une première fois, je m'y suis rendu en

17 1992, plus tard je l'ai fait aussi en 1995 et 1996.

18 Question: Lorsque vous vous êtes rendu à la municipalité pour demander une

19 aide pour pouvoir reconstruire votre maison, c'était du fait des problèmes

20 économiques que vous aviez à affrontés ainsi que certaines parties de la

21 population de Foca, n'est-ce pas.

22 Réponse: A ce moment la mairie s'est vue dotée d'une aide humanitaire qui

23 venait de la part de divers organismes. Ainsi j'ai voulu tout simplement

24 aller leur signaler qu'ils devaient avoir en vue mon cas aussi. C’est-à-

25 dire que je voulais faire réparer ma maison de sorte à pouvoir évidemment

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1 regagner le plus tôt possible mon foyer à moi.

2 Question: D'autres personnes en ville avaient besoin de faire réparer leur

3 maison comme Savo Obrenovic. Or, dans certains cas, ce sont les

4 entreprises qui ont accepté de payer les réparations?

5 Réponse: Savo Obrenovic a été employé au bureau de poste, à la direction

6 des postes. Et avant la guerre encore, c'est évidemment la direction des

7 PTT qui a pu faire agir ainsi l'homme en question et moi qui étais employé

8 au KP Dom plus tard. Seulement, le KP Dom n'avait rien à voir en tant

9 qu'obligation à mon égard.

10 Question: Donc il n'y a pas eu d'entreprises qui se soient présentées pour

11 couvrir les factures liées aux restaurations de votre maison. C'est pour

12 cette raison que vous avez dû vous tourner vers la municipalité? Je vous

13 comprend bien?

14 Réponse: A quelle période vous référez-vous?

15 Question: Je parle de 1992. Oublions l'année 1995. En 1992, c'est pour ces

16 raisons que j'invoquais à l'instant que vous êtes allé voir M. Radovic à

17 la municipalité, n'est-ce pas?

18 Réponse: C'était une toute première fois pour moi de me rendre à la mairie

19 pour demander ces matériaux, juste pour protéger la maison. Je crois que

20 je me suis fait entendre clairement hier. J'avais demandé des toiles de

21 tente ou des feuilles de nylon.

22 Question: Monsieur, vous n'avez pas à vous répéter. Je vous demande de

23 confirmer que nous nous comprenons bien. Je voudrais que vos réponses

24 soient très claires. C'est pour cela que je vous demande des précisions.

25 Lorsque vous êtes allé voir le représentant de la municipalité, lorsque

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1 vous lui avez exposé vos problèmes, vous avez reçu du bois, vous avez reçu

2 des tuiles qui provenaient de la municipalité. C'est grâce à ces matériaux

3 que vous avez reconstruit votre maison, n'est-ce pas exacte?

4 Réponse: Est-ce que vous ne voulez pas me comprendre ou est-ce que

5 l'interprétation que je reçois est mauvaise? En tout cas, une première

6 fois que je me suis rendu à la municipalité, je ne suis pas allé voir

7 Mladjenovic, je suis allé voir Radovic qui, lui, était chargé des

8 réfugiés.

9 Question: Alors, il y a dû y avoir un problème d'interprétation. J'ai bien

10 parlé de M. Radovic. Suite à l'entretien que vous avez eu à la mairie,

11 vous avez reçu du bois, des tuiles qui vous ont permis de réparer votre

12 maison, c'est bien cela?

13 Réponse: Non, je l'ai eu gratuitement comme cadeau de la part de la

14 société Maglic, de la part de M. Jolocevic. Il s'agit d'une industrie du

15 bois.

16 Question: Et les tuiles vous ont également été données, n'est-ce pas?

17 Réponse: Les tuiles également. Je les ai reçues de la part de la

18 coopérative agricole, c'était un cadeau qui m'a été fait, un cadeau, un

19 cadeau tout court, pour réparer ma maison.

20 Question: Et qu'en est-il des éléments métal? Est-ce que c'était également

21 un don?

22 Réponse: J'étais obligé de payer les éléments en métal à la société Maglic

23 parce qu'ils n'avaient pas suffisamment de matériaux pour pouvoir être

24 définitivement si agréables à mon égard. Il s'agit évidemment d'éléments

25 en métal et en zinc, en tôle.

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1 Question: La municipalité ne vous a rien donné en dépit du fait que vous

2 ayiez demandé de l'aide. En 1992?

3 Réponse: Non, rien.

4 Question: Personne n'était disponible en ville pour assurer la réparation

5 de votre maison. Il n'y avait personne qui soit disponible pour poser les

6 tuiles sur la charpente. Les artisans n'étaient plus là, personne n'était

7 disponible?

8 Réponse: Je ne sais pas s'il y avait suffisamment d'artisans ou pas, mais

9 je sais que pour des cas pareils, c'était le quartier général de la

10 Protection civile près de la municipalité. Notamment lorsqu'il a fallu

11 aider dans des travaux d'assainissement et réparations, là où ceux-ci

12 étaient possibles de faire plus rapidement et facilement.

13 Question: Voyons si tout est bien clair. Vous n'avez rien reçu de la

14 municipalité pour ce qui est de matériaux mais vous avez reçu une certaine

15 forme d'aide puisque de la main d'œuvre vous a été fournie.

16 Réponse: Quant à moi, je ne peux rien affirmer pour dire par qui cette

17 main d'oeuvre a été fournie. Je sais qui a travaillé là-dessus, mais sur

18 ordre de qui ils ont travaillé et comment cette main d'œuvre a été

19 assurée, je n'en sais rien.

20 Question: Et les personnes qui ont travaillé à la réparation de votre

21 maison étaient toutes des détenus musulmans, n'est-ce pas? Des artisans

22 différents?

23 Réponse: C'est pour cela que je vous le dis, je ne sais pas qui a ordonné

24 à ces gens-là. Je sais qui y était pour travailler: il y avait avec ces

25 deux artisans un autre artisan qui avait travaillé avant que la maison

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1 soit incendiée. C'était Bogdan Kostic. Lui, il était le contremaître et

2 celui qui devait faire l'inspection des travaux de la maison lorsqu'elle

3 était construite pour la première fois.

4 Question: Vous n'avez jamais payé la main d'œuvre qui a réalisé les

5 travaux de votre la maison. Je ne parle plus de cet escalier, de cette

6 porte en métal réalisée en atelier, je parle de la maison et du travail

7 réalisé sur l'emplacement de votre maison. Vous n'avez jamais eu à payer

8 la main d'œuvre, n'est-ce pas?

9 Réponse: Jamais personne ne m'a rien facturé, jamais aucune facture ne m'a

10 été envoyée pour que je paie.

11 Question: Et vous n'avez jamais pu établir ou vous n'avez jamais essayé

12 d'établir qui avait permis que des détenus musulmans du KP Dom viennent

13 travailler à la réparation de votre maison?

14 Réponse: J'aimerais bien que vous puissiez me comprendre avec tous les

15 problèmes que j'ai eus et que vous n'êtes pas sans connaître. En février,

16 j'avais encore d'autres problèmes survenus et des cas graves. Ne serait-ce

17 que pour parler des travaux qu'il fallait effectuer dans l'unité

18 économique et pour parler de ces malheurs qui se sont abattus sur moi au

19 mois de février. Vraiment avec tout cela, dans cette situation-là, je n'ai

20 jamais pu savoir par qui les ordres avaient été donnés et comment il se

21 faisait que ma maison ait été recouverte. J'ai tout simplement considéré

22 que c'était l'œuvre du quartier général de la protection civile de la

23 municipalité de Foca et qu'ils s'étaient chargés de tout.

24 Question: Au mois de février, le toit était déjà réparé, n'est-ce pas?

25 Réponse: Oui, le toit oui. Le toit était réparé.

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1 Question: Ce qui signifie que les personnes qui ont travaillé à la

2 réparation de votre toit ont dû travailler pendant les mois d'hiver alors

3 qu'il faisait très froid, n'est-ce pas?

4 Réponse: Je pense bien que c'était au mois de novembre ou bien plutôt au

5 mois de décembre que ma maison a été recouverte à nouveau en 1992.

6 Question: Qui a pris les dispositions nécessaires pour que les détenus

7 amenés au KP Dom se mettent à travailler sur la restauration de votre

8 maison?

9 Réponse: Tout le temps j'essaie de dire que je ne savais pas par qui tout

10 cela a été organisé. Croyez-moi, je l'ignore.

11 Question: Mais vous avez vous-même, en une occasion, transporté des

12 détenus vers votre maison, n'est-ce pas, dans votre Yugo rouge? Et vous

13 avez même dit que rien n'arriverait à ces prisonniers tant que vous étiez

14 directeur, n'est-ce pas?

15 Réponse: Je peux vous affirmer une fois de plus, en jurant sur ma tête,

16 que je n'ai jamais transporté qui ce soit vers le terrain où se trouve ma

17 maison pour que cette personne travaille, que ce soit ma voiture à moi ou

18 à bord d'une autre voiture. Je parle bien sûr de la Yugo.

19 Question: Lorsque les détenus travaillaient à la réparation de votre

20 maison, ils étaient gardés par vos fils, n'est-ce pas?

21 Réponse: Je ne sais pas s'ils étaient seuls à les garder mais en tout cas

22 je sais que mon fils, Spomenko, se tenait là tout le temps pendant que la

23 maison devait être réparée. C'était, évidemment son devoir à lui de les

24 garder, je ne peux pas vous le garantir.

25 Question: Mais les détenus devaient être entourés de forces de sécurité

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1 alors qu'ils travaillaient parce qu'ils étaient toujours prisonniers.

2 D'une certaine façon, ils n'étaient pas libres de leurs mouvements et pas

3 libres de quitter les lieux.

4 Réponse: Je ne sais pas pour quelle raison vous insistez tellement alors

5 que je vous ai répondu, Dieu sait combien de fois déjà, pour dire que je

6 n'avais rien à faire avec les détenus, ni pour les faire sortir ni pour

7 prendre des dispositions de leur sécurité.

8 Question: Il fallait qu'il y ait sur place des forces de sécurité, n'est-

9 ce pas? Et vous le saviez.

10 Réponse: Je vous dis encore que celui qui les a fait sortir devait être

11 chargé de leur sécurité, chargé des services de sécurité et prendre toutes

12 les mesures nécessaires. Je ne sais pas, pour ma part, qui c'était parce

13 que je ne les ai jamais fait sortir. Je vous ai déjà dit qui a été

14 compétent de quoi.

15 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous étiez tout de même présent à

16 l'époque alors que ces détenus travaillaient à la réparation de votre

17 maison, est-ce que je me trompe?

18 Réponse: Ma présence pendant une période de cinq ou dix minutes ne veut

19 pas dire pour autant que je devais être présent in situ. Si j'allais voir

20 ce qu'ils faisaient, c'était tout simplement pour voir comment les travaux

21 progressaient, pour leur offrir une cigarette. On ne peut pas parler de ma

22 présence. C'étaient mes venues par hasard et ad hoc. Ce n'était pas autre

23 chose que de contrôler un petit peu le travail et même pas cela, juste

24 fumer une cigarette et voir dans quelles mesures ils pouvaient progresser.

25 On ne peut pas parler de présence vraiment permanente, ce n'était qu'une

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1 présence de cinq ou de dix minutes. Et peut-être à deux reprises seulement

2 que je m'y suis rendu pendant une période si brève définitivement pour me

3 rendre sur l'emplacement de ma maison.

4 Question: Monsieur M. Krnojelac, il est tout à fait normal, que lorsqu'on

5 a des travaux qui sont faits chez soi, on se rende sur les lieux pour voir

6 quel est l'état d'avancement de ces travaux. Je pars également du principe

7 que lorsqu'on essaie de voir où en sont les travaux, on essaye aussi de

8 voir qui exactement travaille sur les lieux. Est-ce que vous nous dites

9 que vous ne saviez pas qui surveillait ces détenus qui travaillaient à la

10 réparation de votre maison? Vous ne saviez pas s'il s'agissait de gardes

11 ou de qui que ce soit d'autre?

12 Réponse: Moi je sais seulement qui est… et c'est ce que j'essaie de dire,

13 il y avait là mon fils Spomenko tout comme cet homme nommé Bogdan. Est-ce

14 que c'est Spomenko qui avait pour tâche de les garder, de les surveiller…?

15 Mais lorsque je m'y suis rendu à deux reprises, j'ai vu une fois -

16 maintenant je m'en souviens, j'en suis certain- j'ai vu un policier du

17 poste de police qui lui portait un uniforme. Il se tenait devant la

18 maison.

19 Question: Un policier civil, le SUP?

20 Réponse: Oui, oui, il appartenait au SUP.

21 Question: C'est lui qui surveillait les détenus?

22 Réponse: Je l'ai vu là. Avait-il pour tâche de monter la garde ou est-ce

23 qu'il y avait d'autres gens là à surveiller qui ont travaillé? Je ne peux

24 pas le savoir. Mais en tout cas, je l'ai vu là-bas sur le terrain même et

25 il se tenait d'ailleurs dans la rue, en face de ma maison.

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1 Question: Dans la rue?

2 Réponse: Oui, dans la rue devant ma maison parce que, par rapport à la

3 distance, il n'y a que 5 mètres qui séparent ma maison de la rue.

4 Question: Vous n'avez pas essayé d'établir s'il gardait effectivement les

5 prisonniers ou s'il était simplement de garde à cet endroit-là? Vous

6 n'avez pas essayé de voir si sa mission était effectivement de surveiller

7 les personnes qui travaillaient chez vous?

8 Réponse: Non, c'est-à-dire que j'essaye d'expliquer dans quelles

9 circonstances tout cela devait avoir lieu. C'était toujours en vitesse, on

10 a toujours été en quelque sorte affairé et je n'ai pas pu vraiment

11 remarquer si c'était sa principale tâche ou s'il avait une tâche à

12 accomplir.

13 Question: Monsieur M. Krnojelac lorsque vous vous êtes entretenu avec les

14 enquêteurs du Bureau du Procureur, le 27 juillet, vous avez indiqué:

15 "c'était peut-être des soldats qui assuraient la surveillance des

16 prisonniers." Est-ce que ce n'est pas ce que vous avez dit?

17 Réponse: Si je l'ai dit ainsi alors cela doit être exact aussi. Alors mon

18 fils Spomenko, que faisait-il d'autre que d'être soldat? Mais s'il a été

19 affecté pour être là, je ne peux pas le savoir.

20 Question: Et vous n'avez jamais posé la question à votre propre fils? Vous

21 ne lui avez pas demandé s'il avait été affecté à cette tâche dans le cadre

22 de ses fonctions militaires? Quand je parle de cette tâche, c'est-à-dire

23 le fait de surveiller les détenus musulmans qui travaillaient à la

24 réparation de votre maison.

25 Réponse: Non, je ne lui ai jamais posé la question. Mais en tout à cas, je

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1 suis certain que tout simplement jamais une seule parole qui serait enfin

2 mal intentionnée n'a été proférée à l'égard de ces gens-là qui

3 travaillaient.

4 Question: Excusez-moi, je ne comprends pas ce que vous venez de dire.

5 Réponse: Je n'ose pas trop expliquer parce que vous me reprochez tout le

6 temps de m'étaler trop dans mes récits. Je voulais dire que j'étais sûr

7 qu'en le voyant là-bas, qu'aucun mal ne devait être fait à ces gens-là et

8 que ces gens-là ne devraient jamais être maltraités par qui que ce soit;

9 par exemple, par des gens qui traversaient la rue ou qui passaient à côté,

10 etc.

11 Question: Vous nous dites donc que votre fils Spomenko surveillait ces

12 personnes alors qu'elles travaillaient. Il portait par ailleurs son

13 uniforme de soldat, c'est bien que ce que vous nous dites.

14 Réponse: Moi je dis peut-être.

15 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous nous avez dit que lorsque ces

16 prisonniers musulmans travaillaient à la réparation de votre maison, vous

17 les traitiez fort bien, vous et votre famille, et nous ne contestons pas

18 cela.

19 Vous avez déclaré ainsi que d'autres personnes que vous leur donniez de la

20 nourriture, des cigarettes, voire de la bière.

21 J'aimerais vous poser la question suivante: votre famille ne se trouvait

22 pas dans une situation particulièrement privilégiée à Foca, n'est-ce pas?

23 Elle n'avait pas un accès particulier à des denrées alimentaires ou à

24 d'autres choses à cette époque?

25 Réponse: Tout comme les autres citoyens, je veux dire comme ces citoyens

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1 pouvaient vivre et dans quelle position il se trouvait, moi j'en faisais

2 autant. On ne pouvait pas parler évidemment de privilège quant à moi et ma

3 famille.

4 Question: Pourtant vous aviez de la nourriture en quantité suffisante pour

5 que vous puissiez en distribuer aux ouvriers qui travaillaient à la

6 réparation de votre maison?

7 Réponse: Il me semble que j'en ai déjà parlé, si je ne l'ai pas fait je

8 m'en excuse. Tout ce qu'on pouvait faire c'est en quelque sorte d'empiéter

9 un petit peu sur nos propres possibilités et ressources. C'est-à-dire on

10 devait pouvoir se faire alimenter à partir de mon village pour préparer

11 quelque nourriture ou une pita, un gâteau, un millefeuille. Et vous savez

12 chez les Musulmans après un travail fourni on lui offre une Pita, il

13 préfère tout cela à un rôti.

14 Question: Vous avez également partagé de la bière, de l'eau de vie avec

15 les détenus, n'est-ce pas?

16 Réponse: Quant à moi, je ne leur donnais jamais rien sauf les cigarettes

17 et si jamais il y avait quelque chose à la maison, ma femme leur a offert

18 certainement de la rakija, de l'eau-de-vie. Pour évidemment de l'eau de

19 vie on n'a jamais eu de problème, mon frère et mon gendre, eux, avaient

20 toujours des centaines de litres d'eau de vie qu'ils faisaient eux-mêmes

21 parce qu'ils avaient des fruits. Mais en tout cas, on ne leur en offrait

22 pas beaucoup, un verre ou deux juste. Alors qu'est-ce que c'est que cette

23 maison-là qui n'ait pas un pot de pot rakija à offrir à quelqu'un qui

24 serait venu ou à un ami.

25 Question: Vous avez également partagé de la bière avec eux, ce n'était pas

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1 de la bière faite maison?

2 Réponse: Non, je ne m'en souviens pas, je ne leur ai jamais offert de la

3 bière. Si c'est Spomenko qui leur offrait de la bierre, probablement il

4 pouvait s'en procurer. Etait-ce dans un magasin quelconque, ou l'a-t-il eu

5 par le biais d'un de ses collègues, je n'en sais rien. En tout cas, je

6 n'ai pas pris part à tous ces ravitaillements.

7 Question: Une des raisons pour lesquelles vous manifestez tant

8 d'hospitalité à l'égard de ceux qui réparaient votre maison, c'est que

9 vous aviez peur que votre maison se voit faire l'objet d'un sort qui lui

10 serait jeté, n'est-ce pas? C'est ce que vous avez dit en tout cas aux

11 enquêteurs avec qui vous vous êtes entretenu?

12 Réponse: Cela tient des coutumes mais pour ce qui me concerne, si je leur

13 ai offert des cigarettes, alors là je voudrais vous dire que j'aimerais

14 leur offrir autres choses et offrir à d'autres gens également et non pas

15 seulement ceux qui ont travaillé sur la maison. Mais vous savez que ceux

16 qui sont des fumeurs, il leur suffit tout simplement d'aspirer une bouffée

17 de fumée de cigarette, et leur âme est rassasiée. Mais je crois que cela

18 tient plutôt de nos coutumes. Celui qui travaille sur une maison ne doit

19 jamais jeûner bien sûr, pratiquement jamais. Et ceci nulle part ne devrait

20 être le cas, mais quand on fait des travaux sur une maison alors c'est la

21 coutume.

22 Question: Tandis que ces personnes travaillaient à la réparation de votre

23 maison, il ne vous est jamais venu à l'esprit que vous pouviez les laisser

24 partir et les laisser se déplacer dans Foca librement, pendant peut-être

25 une journée par exemple?

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1 Réponse: En vérité vous souhaitez ou peut-être vous avez l'intention de me

2 sous-estimer. Ecoutez, comment voulez-vous que je leur permette d'aller se

3 balader en ville? De quel droit je pourrais le faire, leur permettre

4 d'aller déambuler en ville, moi qui n'y suis pour rien. Maintenant vous

5 voilà au moment où il faut que je vous dise que ce sont les souris qui

6 évidemment chassent des chats au lieu du contraire qui se produit.

7 Je ne vous comprends pas à quel point vous ne voulez pas me comprendre que

8 je ne pouvais pas les autoriser à faire cela. Je n'étais pas là pour les

9 surveiller.

10 Question: En d'autres termes, alors qu'ils travaillaient chez vous, ils

11 étaient à tous égards des prisonniers, ils n'étaient pas libres d'aller où

12 que ce soit d'autre. Ils n'avaient pas le choix de se rendre ailleurs. Ils

13 n'avaient qu'un seul choix celui de travailler à la réparation de la

14 maison pendant ce moment-là?

15 Réponse: C'est beaucoup de questions que vous me posez, puisque déjà vous

16 ne voulez pas me comprendre et vous ne voulez pas me suivre, je n'arrive

17 pas à vous expliquer. Ils étaient emmenés là-bas pour travailler. Ils

18 avaient le droit d'être sur place autour de la maison, ils n'étaient pas

19 obligés de travailler tout le temps, sans répit, ils pouvaient se reposer

20 un petit peu. Je vous dis qu'en 1980, lorsque cette maison devait être

21 construite, je vous le redis; il y avait 3 artisans et quelque fois ils

22 étaient trois ou quatre et rien qu'en deux journées ma maison était

23 couverte. Or ces gens-là qui étaient venus plus tard, ils n'étaient

24 pressés par qui que ce soit, et ils pouvaient rester 5 ou 10 jours, etc.

25 En ce qui me concerne, je ne leur disais jamais rien lorsque je m'y

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1 rendais par hasard et lorsque je les voyais assis. Tout simplement ils

2 avaient le droit de fumer une cigarette ou de prendre un café.

3 Question: Monsieur, s'il vous plaît, j'ai l'impression que vous parlez de

4 1980 et des travaux qui ont été faits sur votre maison en 1980. Or, ce

5 n'est pas d'un intérêt immédiat pour nous. Tâchez de maintenir votre

6 niveau de concentration.

7 Vous travailliez au KP Dom de 7 heures du matin à 3 heures de l'après-

8 midi, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui, pendant que j'étais là-bas en ville au KP Dom, en ville,

10 c'était toujours comme ça.

11 Question: Et vous avez pu voir tous ceux qui travaillaient sur place et

12 vous avez pu nouer des liens avec eux, les gardes, ceux qui travaillaient

13 à l'administration, toutes les personnes qui travaillaient sur place?

14 Réponse: Oui, j'étais toujours et uniquement en société du personnel qui

15 était employé par l'entité économique de la Drina. Jamais je n'étais en

16 compagnie de gardes, à moins que je n'aie été dans la situation de croiser

17 quelques-uns d'entre eux lorsque je me rendais soit à la fabrique de

18 meubles soit à la cantine, etc. Ce n'est pas que je les ai fréquentés.

19 Question: Lorsque vous les rencontriez par hasard, vous vous entreteniez

20 parfois avec eux, vous leur posiez parfois des questions. Je crois qu'il y

21 a eu une occasion où vous avez posé des questions aux gardes sur la façon

22 dont se réalisaient les échanges?

23 Réponse: Ce n'était qu'une fois, à une occasion, parce que j'ai entendu

24 dire qu'un échange a été effectué. C'est ce que je vous affirme. J'en ai

25 entendu parler et j'ai demandé à l'homme en question: "Dis-moi s'il te

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1 plaît dans quelles circonstances cet échange a eu lieu?" L'autre m'a dit:

2 "Milorad, on a apporté une liste, on a fait l'appel et on a fait sortir

3 les gens pour les échanger". J'ai dit: "Où?", il a dit qu'il ne savait pas

4 et que c'étaient les militaires qui s'en étaient chargés. C'est tout.

5 Question: Il n'y avait pas certains lieux du KP Dom auxquels vous ne

6 pouviez pas accéder, n'est-ce pas?

7 Il n'y a pas eu d'occasions où des gardes vous ont dit: "Non, Monsieur

8 Krnojelac, vous ne pouvez pas aller au-delà de cette limite."?

9 Réponse: Je n'ai jamais demandé à personne pour savoir si j'étais autorisé

10 ou pas, mais une fois j'avais une expérience où j'ai pu comprendre que je

11 n'avais même pas le droit de les contacter.

12 Question: Parlez-nous de cet incident?

13 Réponse: J'ai vu un homme dans l'enceinte du KP Dom à cette époque-là. A

14 cette époque-là, je me trouvais toujours dans ce bureau, cette pièce

15 réservée à la fouille, et j'ai vu cet homme-là pleurer. Je l'ai appelé, il

16 est venu. Enfin j'ai voulu plutôt frapper à un carreau, à la fenêtre.

17 Il m'a aperçu et vu que je me trouvais dans ce bureau et j'ai demandé au

18 garde de le faire venir. L'autre l'a fait et nous avons pris un café

19 ensemble.

20 Cet homme a pleuré, je lui dis "Qu'est-ce que tu as, pauvre ami, pour

21 pleurer?" Il m'a dit: "J'ai du retard pour me rendre sur la ligne de front

22 et j'ai été incarcéré" Moi je lui dis: "Ce n'est pas une raison pour

23 pleurer", moi aussi je suis là ou en prison et je ne pleure pas. C'était

24 pratiquement un de mes gendres, enfin le mari de l'une de mes cousines. 15

25 minutes plus tard, le téléphone sonne et quelqu'un du commandement

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1 militaire se présente.

2 Alors quelqu'un qui me dit de l'autre côté, une voix: "Milorad, de quoi te

3 mêle-tu? Tu as relâché cet homme-là" J'ai dit "qui?", "Milorad Radovic

4 Brcina" Alors, j'ai dit que ce n'était pas le cas et que si seulement ceci

5 devait être le cas, qu'ils n'avaient qu'à venir et me tuer moi-même, s'il

6 l fallait. C'est ainsi que j'ai compris cet incident, cette expérience,

7 que je ne devais pas avoir de contact avec…

8 Question: Revenons sur ce que vous venez de dire. L'homme qui pleurait

9 était un soldat serbe qui avait été détenu au KP Dom parce qu'il avait

10 enfreint, c'est bien cela?

11 Réponse: C'est exact.

12 Question: Lorsque vous l'avez vu en train de pleurer, il se trouvait juste

13 à l'extérieur de votre bureau. Donc vous l'avez vu depuis la fenêtre,

14 depuis le rez-de-chaussée du bâtiment administratif, n'est-ce pas?

15 Réponse: Oui, c'est cela.

16 Question: Il n'était pas détenu dans une cellule. Il était simplement dans

17 la cour.

18 Réponse: Oui, à ce moment-là, il se tenait dans la cour.

19 Question: Et sur votre demande, un garde est allé le chercher, lui a fait

20 franchir le portail en métal, l'a fait entrer dans le bâtiment

21 administratif et l'a conduit dans votre bureau, n'est-ce pas? C'est là que

22 vous avez partagé une tasse de café?

23 Réponse: Ce n'était pas sur ma demande, sur mon ordre. Mais c'était plutôt

24 que je l'ai prié le garde.

25 Question: C'est ce que je dis. A votre demande le garde est allé chercher

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1 l'homme, lui a fait franchir le portail en métal, l'a amené à l'intérieur

2 du bâtiment administratif et enfin à l'intérieur de votre bureau, n'est-ce

3 pas? Vous lui avez demandé de le faire et le garde l'a fait.

4 Réponse: Oui, je l'ai prié d'aller, enfin, le chercher et lui dire de

5 devenir chez moi et c'est ce qu'il a fait. Ce n'est pas que j'ai vraiment

6 fait une demande expresse, je l'ai prié. Il y a une différence là-dedans.

7 Question: Monsieur M. Krnojelac, écoutez-moi bien s'il vous plaît, j'ai

8 utilisé le mot "demande" et vous êtes en accord avec moi, c'est bien ce

9 qui s'est passé?

10 Réponse: Il se peut que ce soit une erreur d'interprétation. Oui, alors

11 que ce soit une demande, oui.

12 Question: Lorsque vous vous êtes entretenu avec cet homme et lorsqu'il

13 s'est plaint du fait qu'il s'est trouvé dans la prison, vous lui avez dit

14 que vous aussi vous vous trouviez dans une cellule?

15 Réponse: J'ai dit ça comme ça "Me voilà moi aussi en prison et puis

16 qu'est-ce que ça te fait. Un jour ou deux plus tard, tu vas regagner le

17 front." Et en effet, il était, autant que je sache, en prison trois ou

18 quatre jours. Le quatrième jour, il était parti, et le pauvre homme, il

19 s'est fait tuer sur la ligne de front.

20 Question: Monsieur M. Krnojelac, est-ce que vous essayez de nous dire

21 qu'il n'y avait pas de différence entre quelqu'un qui était détenu dans la

22 prison contre sa volonté, qui était donc totalement incapable d'en sortir

23 et votre statut au sein de la prison. A ce moment-là vous étiez directeur

24 de la prison et vous rentriez chaque soir chez vous pour retrouver votre

25 famille. Vous n'établissiez pas de différence parce que d'après vous, vous

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1 étiez tous les deux physiquement à l'intérieur de la prison. Cependant,

2 les situations sont très différentes. N'êtes-vous pas d'accord?

3 Réponse: Oui, les situations sont tout à fait différentes. Mais tout

4 simplement, j'ai voulu le soulager un petit peu, le faire parler un peu.

5 Je ne savais pas d'ailleurs de quoi il s'agissait. C'est que peut-être

6 c'était seulement à ce moment-là où il a été amené. Je ne sais pas à quel

7 moment c'est fait son incarcération. Je l'ai vu à ce moment-là et le fait

8 qui m'a surpris, c'était de le voir pleurer, voir pleurer quelqu'un qui a

9 plus de 34, 35 ans, c'est surprenant pour moi.

10 Et pour lui, c'était très difficile. Je voulais tout simplement le

11 soulager un petit peu. C'est tout.

12 Question: Vous saviez qu'en tant que membre de l'armée serbe, s'il se

13 trouvait détenu là, ce ne serait que pour quelques jours. Ensuite, il

14 allait être libéré et il pourrait retourner sur la ligne de front. Cela

15 était très clair dans votre esprit, n'est-ce pas, parce que c'est ce que

16 vous lui avez dit vous-même?

17 Réponse: C'est ce que je lui ai dit moi, mais je n'ai jamais pu savoir

18 pour quelles raisons, quand et comment ces gens-là ont été jugés. Mais on

19 a pu entendre dire que de tels cas s'étaient produits, c'est-à-dire, de

20 telles infractions à la loi militaire. Ou peut-être si quelqu'un n'a pas

21 répondu à l'appel ou pour vol ou homicide, etc on l'a su en ville et les

22 nouvelles se répandent.

23 Question: Vous avez essayé de réconforter cet homme. Est-ce qu'ensuite il

24 a été autorisé à sortir ou est-ce qu'il a été ramené dans l'enceinte?

25 Réponse: Si, si on l'a ramené dans l'enceinte. Il a été ramené dans

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1 l'enceinte.

2 Question: Mais vous nous avez dis qu'il y a eu un appel qui vous a été

3 passé. On vous a dit que vous l'aviez remis en liberté et que vous n'aviez

4 aucun droit de le faire. Est-ce que je vous ai mal compris?

5 Réponse: Vous l'avez fort bien compris. Quelqu'un donc a dû les informer

6 là-bas pour dire: "Voilà que c'est Milorad qui a relâché Brcina de la

7 prison." Voilà la raison pour laquelle la police m'a téléphoné pour

8 vérifier tout cela. Moi, pour ma part, j'ai dit que ce n'était pas le cas,

9 mais j'ai expliqué un petit peu et que si jamais j'en faisais autant, si

10 je le relâchais, qu'il n'avait qu'à venir me tuer ou faire de moi ce qu'il

11 voulait.

12 Question: Les personnes qui vous ont appelé n'étaient pas contentes parce

13 qu'elles pensaient que vous l'aviez remis en liberté, ce qui n'était pas

14 effectivement le cas. Je parle de cet homme qui était un parent, un

15 proche.

16 Réponse: Oui, c'est exactement cela qui s'est produit.

17 Question: Pendant cette période de temps, l'appartement où vous résidiez

18 était dans le même immeuble que l'appartement Mitar Rasevic, n'est-ce pas?

19 Réponse: Oui, on se trouvait dans le même bloc d'habitations, dans le même

20 immeuble. Nous ne partagions pas les mêmes entrées pour parler de ces

21 immeubles. Dans ce bloc d'habitation, il y avait trois entrées. Moi,

22 j'entrais par l'entrée du milieu, lui, il était plutôt au-dessus de moi,

23 pour parler de l'entrée.

24 Question: Monsieur Rasevic quittait également son lieu de travail à 15

25 heures tous les jours, n'est-ce pas?

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1 Réponse: Pas toujours, pas toujours à 3 heures. Tout dépendait ce qu'il

2 devait faire. Il lui arrivait évidemment de partir à 3 heures mais pas

3 toujours, probablement selon ce qu'il fallait faire.

4 Question: Mais ses horaires de travail étaient exactement identiques aux

5 vôtres, 7 heures du matin, 15 heures, n'est-ce pas?

6 Réponse: Jamais je ne lui ai demandé son horaire de travail et je ne lui

7 en ai jamais parlé là-dessus.

8 Question: Donc vous le voyiez arriver au travail et quitter le travail,

9 c'est bien cela?

10 Réponse: Oui, j'ai pu le voir mais je ne lui ai jamais posé la question de

11 son arrêt de travail.

12 Question: Une fois encore Monsieur, je vais vous demander de bien écouter

13 ma question. Je ne vous demande pas si vous lui avez posé des questions

14 sur ses horaires de travail, je vous demande si vous l'avez vu entrer au

15 KP Dom et en sortir, à peu près aux mêmes horaires que vous-même le

16 faisiez?

17 Réponse: Il m'arrivait bien sûr de le voir, de le voir venir. Il nous

18 arrivait à tous les deux de venir ensemble au travail.

19 Question: Alors que vous arriviez au travail ensemble, vous discutiez

20 entre vous, n'est-ce pas? Parce que vous aviez des liens d'amitié?

21 Réponse: Ce n'est pas dire autant que c'étaient des liens d'amitié mais la

22 situation qui régnait dans la ville de Foca était telle qu'on préférait

23 parler d'autres choses. C'est-à-dire pour savoir ce qui était arrivé, qui

24 c'est qui a été tué hier et sur les enterrements, etc.

25 Question: Vous saviez que Mitar Rasevic était le commandant des gardes au

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1 KP Dom à ce moment-là, n'est-ce pas?

2 Réponse: On le savait, on savait qu'il se trouvait à la même fonction

3 qu'avant la guerre.

4 Question: Pendant que vous vous parliez, vous avez également abordé les

5 événements au KP Dom, n'est-ce pas?

6 Réponse: Croyez-moi, jamais je ne lui ai parlé de ces choses-là.

7 Question: Ce qui se passait au KP Dom et ce qui se passait dans votre

8 travail de l'un ou de l'autre, cela n'a jamais fait l'objet de vos

9 conversations?

10 Réponse: Croyez-moi, jamais.

11 Si évidemment j'en suis coupable alors là, dites que je suis coupable mais

12 je ne lui ai jamais parlé de ça

13 Question: Avez-vous fait un effort pour éviter ce sujet de conversation

14 donc le KP Dom, dans vos conversations avec Mitar Rasevic ou simplement

15 cela ne s'est jamais présenté comme sujet?

16 Réponse: C'est-à-dire que ceci n'était, pour ainsi dire, jamais à l'ordre

17 du jour parce que Rasevic, c'était un homme qui préférait toujours parler

18 de quelque chose d'agréable ou de bon, si jamais il y avait quelque chose

19 de bon ou d'agréable sauf le travail qui était le nôtre.

20 Vous savez ces gens-là qui travaillaient pendant si longtemps au KP Dom,

21 il a fallu vraiment leur arracher des mots de la bouche. Je ne suis pas

22 quelqu'un qui serait trop curieux pour les lui demander. Vous savez ces

23 gens-là du premier jusqu'au dernier, ils avaient cette pratique-là, de ne

24 pas trop parler de ce qu'ils faisaient. C'est ainsi qu'ils ont pour ainsi

25 dire, pris l'habitude de leurs travaux d'avant guerre. Parce que qui dit

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1 KP Dom, dit travail de la justice. C'est tout de même un pénitencier, au

2 moins était-ce ma conclusion.

3 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous avez dit que M. Rasevic préférait

4 des sujets plus agréables et cependant vous nous avez dit que dans vos

5 conversations, vous parliez toujours de ceux qui s'étaient fait tués ou

6 qui avaient été enterrés?

7 Réponse: J'ai dit, j'ai souligné si jamais des choses agréables

8 existaient, je ne sais pas si cela a été traduit pour vous. Parce qu'on

9 aurait préféré parler de choses agréables si jamais il y en avait eu car

10 la ville de Foca se trouvait dans une situation telle où il n'y avait que

11 des morts autour de nous, des malheurs qui se produisaient d'un jour à

12 l'autre.

13 Question: Vous n'avez jamais évoqué auprès de M. Rasevic tout ce qui

14 arrivait comme désagréable aux hommes musulmans détenus au KP Dom, n'est-

15 ce pas? Donc vous n'avez jamais évoqué ce genre de malheurs avec lui?

16 Réponse: Je dois vous dire ce que j'en ai perçu personnellement. C'était

17 malheureux tout autant pour les Musulmans que pour moi ici présent mais

18 nous n'en avons pas parlé, non.

19 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous connaissiez les trois enquêteurs du

20 SUP, Adzic, Starovic, Jakopovic, n'est-ce pas? Les trois qui se rendaient

21 au KP Dom pour mener les interrogatoires.

22 Réponse: Oui, on peut dire que je les connaissais. Quant à dire qu'avant

23 la guerre on était particulièrement proche, non. On se connaissait de vue,

24 on se disait "Bonjour, comment ça va Milorad", voilà c'était tout.

25 Question: A l'époque vous saviez qu'il ne travaillait pas pour le

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1 ministère de la Défense mais plutôt pour le ministère de l'Intérieur, pour

2 la police civile.

3 Réponse: Quant à savoir pour qui il travaillait, ça, en toute

4 responsabilité, je vous affirme que je ne le savais pas. Toujours est-il

5 qu'il conduisait les interrogatoires des personnes qui étaient

6 interpellées. Qui l'a nommé à ces fonctions-là, ça je ne le sais pas.

7 Question: Il portait des vêtements civils, il n'était pas en uniforme

8 militaire, n'est-ce pas?

9 Réponse: Je n'ai absolument pas porté attention à cela. Il me semble, il

10 me semble que c'étaient des vêtements civils, il me semble que c'était un

11 uniforme civil.

12 Question: Eux aussi avaient à peu près les mêmes horaires de travail que

13 vous, de 7 heures du matin jusqu'à 15 heures?

14 Réponse: Je pense que c'est parce que le commissariat de police

15 travaillait de 7 heures à 15 heures à partir du moment où la guerre a

16 éclaté. Donc, c'est par analogie que j'en arrive à considérer qu'ils

17 avaient les mêmes horaires de travail.

18 Question: Mais il est arrivé que vous quittiez le KP Dom pour entrer chez

19 vous en leur compagnie, n'est-ce pas? En même temps? Vous partiez pour

20 rentrer chez vous les uns et les autres?

21 Réponse: Puisqu'on habitait à peu près dans la même direction, il est

22 possible que ce soit arrivé, mais c'était plutôt rare.

23 Question: Et à ces occasions-là, vous parliez de ce qui se passait au KP

24 Dom ou bien vous n'avez absolument pas évoqué cela?

25 Réponse: Compte tenu du fait qu'ils ne souhaitaient pas particulièrement

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1 parler de cela, je n'ai jamais parlé de travail avec eux.

2 Question: Vous voulez dire qu'il vous est arrivé de leur poser des

3 questions au sujet de leur travail et qu'ils ne vous ont pas répondu?

4 Réponse: Je ne leur ai pas posé de questions parce que je sais qu'ils ne

5 m'auraient pas répondu puisque ce sont des inspecteurs. Ils sont tous

6 comme cela, ils ne souhaitent pas aborder la question de leur travail sauf

7 avec leur supérieur.

8 Question: Les pièces qui étaient utilisées pour conduire les

9 interrogatoires se trouvaient juste au-dessous de ce bureau du chef dans

10 lequel vous avez emménagé, n'est-ce pas?

11 Réponse: Mais alors pourquoi me posez-vous la question sous forme "n'est-

12 ce pas?" Ne vous ai-je pas dit "la pièce au-dessous de mon bureau", au-

13 dessous du bureau du chef. C'est la pièce où se trouvait la comptabilité

14 de l'unité qui s'appelait la Drina.

15 Question: Eh bien, où se trouvaient alors la pièce ou les pièces où

16 étaient menés ces interrogatoires par ces trois inspecteurs?

17 Réponse: Au même étage où se trouvait également la comptabilité. C'était à

18 l'opposé de l'escalier à gauche et à droite, il y avait le personnel

19 administratif. Mais ça, c'était peut-être après ce document qui a été

20 rendu. Ils sont peut-être restés deux ou trois jours là-bas avant de

21 déménager et ils sont venus s'installer dans le bâtiment qui était occupé

22 par les gardes.

23 Question: De quel document parlez-vous, excusez-moi?

24 Réponse: Du document qui existe et qui dit que la partie où étaient

25 installés, en fait pas les Musulmans, mais toutes les personnes détenues,

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1 que ce document a été émis à l'armée. C'était au mois de mai de ce

2 document-là.

3 Question: Monsieur M. Krnojelac, vous êtes en train de dire que ces

4 inspecteurs utilisaient le bureau qui se trouvait juste au-dessous, à

5 l'étage au-dessous du bureau du chef, quelques jours après la date du 10

6 mai, n'est-ce pas? La date du document où les militaires ont repris en

7 main une partie du KP Dom?

8 Réponse: Je ne sais pas la date exacte, mais je répète, ce n'était pas au-

9 dessous du bureau du chef puisque c'était une pièce réservée à

10 l'administration, c'est là que se trouvait le personnel administratif.

11 C'est une grande pièce mais c'était sur la gauche par rapport à leur

12 bureau.

13 Question: Je souhaite vous présenter maintenant une esquisse, un plan,

14 mais je voudrais savoir de quel étage vous parlez?

15 M. le Président (interprétation): Lequel, celui de M. Smith ou le plan par

16 étage?

17 Mme Kuo (interprétation): Le plan par étage, c'est pour cela qu'il est

18 important pour moi de savoir de quel étage il s'agit.

19 M. M. Krnojelac (interprétation): Il s'agit du premier étage car au rez-

20 de-chaussée où je travaillais, c'était bien au rez-de-chaussée, puis au

21 premier étage il y avait le bureau réservé à l'administration.

22 (L'huissier s'exécute.)

23 Question: La pièce 6/2, c'est la pièce que je vais vous montrer. On voit

24 le premier étage au-dessus du rez-de-chaussée. Je demanderai à l'huissier

25 de déplacer légèrement en haut et à droite le schéma, je vous remercie.

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1 Monsieur Krnojelac, je vous prie de nous montrer sur ce plan où, au début,

2 ces inspecteurs menaient les interrogatoires?

3 Réponse: S'il vous plaît, j'ai vu ce plan beaucoup de fois et nous avons

4 toujours pu constater qu'il n'était pas correct. Donc, à la fin, on aura

5 une grande difficulté, on ne pourra plus s'orienter et je ne suis pas le

6 seul qui ne pourra pas s'orienter. Tous les autres qui s'en serviront

7 auront des problèmes car je ne sais pas où exactement cela se trouve. Cela

8 n'est pas l'escalier qui mène à l'étage du bâtiment de direction. Cet

9 escalier se trouve à l'extérieur du bâtiment réservé à la direction, donc

10 ce que je suis en train de montrer. Cela, ce n'est pas du tout l'escalier

11 qui mène au bâtiment central réservé à la direction.

12 Je ferai une erreur quoi que j'en dise mais quoi qu'il en soit, c'est ici

13 que se trouve la comptabilité et je ne sais pas exactement où il y a des

14 bureaux. Je pense par ici, quelque part dans cette partie-là, puisque je

15 ne sais pas où est l'escalier maintenant.

16 Question: Qu'il soit consigné au compte rendu d'audience que le témoin a

17 montré où se trouve la comptabilité et c'est à peu près vers le mot

18 "Zgarda". Merci.

19 Pouvez-vous nous montrer maintenant où se trouvaient les pièces où étaient

20 les inspecteurs?

21 M. M. Krnojelac (interprétation): Je ne sais pas quelles sont les pièces

22 qu'ils ont utilisées, seulement ils ont déménagé dans cette pièce réservée

23 aux gardes.

24 Mme Kuo (interprétation): Excusez-moi, attendez, je ne vous demande pas où

25 ils ont déménagé.

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1 M. le Président (interprétation): Allez-y, la défense.

2 M. Bakrac (interprétation): J'ai l'impression que nous avons un problème

3 de traduction ici. Le témoin vient de montrer l'endroit où est inscrit le

4 mot "Zgrada" et il ne sait pas laquelle de ces deux pièces a été utilisée

5 par les inspecteurs. Je ne sais pas quelle est la traduction que vous avez

6 eue vous, et quelle est la traduction qu'a eue l'accusation, mais c'est

7 précisément ce que le témoin est en train de montrer, à savoir les pièces

8 utilisées par les inspecteurs.

9 Il me semble que notre collègue qui comprend la langue vient de confirmer

10 à ma collègue, Mme Kuo, que ceci a été précisé.

11 Mme Kuo (interprétation): J'ai compris que c'était la comptabilité qui

12 utilisait ces pièces et donc que ce n'étaient pas les inspecteurs, mais

13 maintenant, j'ai compris que c'était bien la pièce qu'utilisait la pièce

14 et plus tard, c'était la comptabilité.

15 M. le Président (interprétation): Dans tous les cas, cela ne m'a pas paru

16 très clair à moi.

17 Mme Kuo (interprétation): Monsieur M. Krnojelac, vous avez montré les

18 pièces où est inscrit le mot "Zgrada" sur ce plan et où vous nous avez

19 montré où se trouvait le bureau de la comptabilité. Je vous pose la

20 question suivante: quelle est la pièce ou les pièces qu'utilisaient les

21 inspecteurs, étaient-ce les mêmes pièces qu'ils ont utilisées au début,

22 avant de déménager?

23 M. M. Krnojelac (interprétation): Au début, je ne sais pas laquelle de ces

24 pièces que je suis entrain de montrer, ça je ne le sais pas.

25 Question: Et d'après votre déposition, et je vous prie de me corriger si

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1 je ne m'abuse, à peu près un jour ou deux après la date du document qui

2 montre que les militaires ont pu reprendre en main une partie du KP Dom,

3 les inspecteurs ont déménagé pour s'installer dans une autre pièce ou dans

4 un autre bâtiment, n'est-ce pas?

5 Réponse: Un jour ou deux ou peut-être sept jours, je vous prie de ne pas

6 me demander cela mais à ce moment-là ils ont déménagé. Ils se sont

7 installés dans le bâtiment des gardes et je ne sais pas précisément dans

8 quelle pièce de ce bâtiment.

9 Question: Le témoin est en train de montrer le bâtiment et une série de

10 pièces qui se trouvent à gauche par rapport à l'entrée lorsqu'on rentre

11 dans le KP Dom. Donc c'est l'autre aile du bâtiment administratif. Parfois

12 on dit que c'est un autre bâtiment et parfois on dit qu'il s'agit d'une

13 autre aile, donc c'est plutôt à gauche qu'à droite.

14 Question: Vous dites qu'il s'agit du bâtiment des gardes. C'est le

15 bâtiment où se trouvaient les gardes. C'est pour cela que vous l'appelez

16 comme cela.

17 Réponse: Non, même avant on appelait cela le bâtiment des gardes et c'est

18 le nom qui a été conservé et qui s'est toujours maintenu.

19 Question: Ce bâtiment des gardes, il a été repris en main par les

20 militaires?

21 Réponse: Les gardes ont gardé cela pour eux. Ce bâtiment est resté

22 toujours là dans la même situation que l'autre partie qui était réservée

23 aux détenus.

24 Question: Mais le bâtiment des gardes, il comportait plusieurs pièces.

25 C'était l'endroit où étaient gardées les personnes détenues et pas les

Page 8082

1 personnes interpellées, et pas les détenus, c'est cela.

2 Réponse: Je ne le sais pas.

3 Question: Alors jamais personne ne vous a dit que vous n'aviez pas le

4 droit d'aller dans ce bâtiment, le bâtiment des gardes, n'est-ce pas?

5 Réponse: Ecoutez, je dois vous dire que j'avais suffisamment de travail

6 pour ne pas avoir besoin de poser ce genre de questions ou d'aller là-bas.

7 Question: Le 18 avril c'est bien la date où vous êtes arrivé pour la

8 première fois et que vous avez passé une nuit ici. C'est ce que vous nous

9 avez dit, n'est-ce pas, le 18 avril 1992.

10 Réponse: Je vous ai dit à plusieurs reprises que je suis resté plusieurs

11 fois au sein du même… où se trouvait la pièce réservée à la fouille.

12 Question: Y avait-il un lit ou avez-vous dormi dans un fauteuil, une

13 chaise ou par terre?

14 Réponse: Eh bien, il y avait un fauteuil à table et c'est dans ce

15 fauteuil, sur ce fauteuil que je suis resté toute la nuit.

16 Question: Puisque nous parlons des meubles, lorsque vous êtes venu vous

17 installer à l'étage, dans ce bureau réservé au chef, il y avait aussi des

18 fauteuils ou des divans là-dedans?

19 Réponse: Eh bien quand j'ai déménagé, quand je suis venu m'installer dans

20 ce bureau, lorsque mes collègues ont nettoyé les lieux, il n'y avait

21 absolument pas de divan ni à ce moment-là ni plus tard. Quant aux chaises,

22 c'étaient des chaises qui étaient recouvertes de tissu et il y avait un

23 bureau avec une chaise. Et puis il y avait une autre table un peu plus

24 grande avec six chaises identiques. Et il y avait aussi une petite table

25 avec deux petits fauteuils. Aussi, il y avait une espèce de coffre-fort et

Page 8083

1 ce coffre-fort a été ouvert.

2 Et lorsque Zoran est venu, il m'a dit: "Mais enfin, tu aurais dû mettre

3 cela dehors, jeter cela puisqu'il n'est pas en bon état." Et moi, je lui

4 ai répondu: "Je n'avais pas à qui demander pour m'aider, donc j'ai laissé

5 ça là." Quant au divan ou au sofa, il n'y avait rien de ce genre dans

6 cette pièce.

7 Question: Lorsque vous parlez de M. Zoran, à qui faites-vous référence?

8 Réponse: Je pense à M. Zoran Sekulovic qui est venu par la suite.

9 Question: Oui, veuillez poursuivre.

10 Lorsque Monsieur Zoran Sekulovic est venu dire cela, c'est au moment où il

11 a été nommé chef donc c'était en 1993, n'est-ce pas?

12 Réponse : Oui.

13 Question: Donc cette conversation s'est déroulée au moment où vous deviez

14 quitter ce poste et où lui venait s'installer. Donc, vous lui montriez

15 votre bureau pour qu'il puisse s'installer?

16 Réponse: Non, je ne lui montrais pas le bureau. Je lui montrais cette

17 espèce de coffre-fort. C'est une espèce de boîte en métal ou d'armoire en

18 métal qui pouvait être fermée à clef et c'est là que l'on conservait des

19 objets. Mais comme la serrure a été cassée, eh bien, le coffre-fort se

20 trouvait toujours dans le bureau et il a été cassé avant que je n'arrive.

21 Question: Ce que je suis en train de dire c'est que cette conversation au

22 sujet du coffre-fort a eu lieu au moment où Zoran Sekulovic venait

23 s'installer en tant que chef en 1993. Vous, vous étiez là pour l'aider au

24 moment de cette passation de pouvoir, de fonctions. Donc, vous lui avez

25 montré le bureau et c'est à ce moment-là qu'il vous a posé cette question

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1 qui était de savoir pourquoi ce coffre-fort était toujours là.

2 Réponse: Oui, il venait d'arriver, il était déjà arrivé parce qu'à partir

3 du 1er juillet, la seule chose que j'ai faite c'était de conduire les

4 préparatifs pour accueillir une nouvelle personne à ses fonctions puisque

5 je savais que je devais déjà partir.

6 Question: Vous rappelez-vous la date de l'arrivée de M. Sekulovic?

7 Réponse: Eh bien, c'était fin juillet à peu près. Début, juillet, fin

8 juillet pour autant que je m'en souvienne.

9 Cela fait des années, des années, je ne peux pas me rappeler tout ce qui

10 s'est passé.

11 Question: La pièce P3.139, c'est la date où Zoran Sekulovic a dit que

12 c'est le 9 août à laquelle il a pris ses fonctions, c'est la date à

13 laquelle l'accusation souhaite attirer l'intention de la Chambre.

14 Monsieur Krnojelac, vous avez déclaré aux enquêteurs du Bureau du

15 Procureur que vous n'avez jamais passé une nuit entière au KP Dom sauf une

16 fois, quand vous êtes resté pour être sûr que la boulangerie du KP Dom

17 fonctionnait?

18 Réponse: S'il vous plaît, je ne sais pas comment on m'a compris, je n'ai

19 pas passé cette nuit là-bas, c'était la nuit du 18 au 19. Quant à cette

20 nuit-là, je ne l'ai pas passée entièrement au KP Dom, je suis resté tard

21 le soir, peut-être jusqu'à 9 heures, je ne pas le dire exactement. Je suis

22 resté l'après-midi pour m'assurer ou plutôt pour faire tout ce que je

23 pouvais pour que M. Relja qui était en charge de la maintenance s'il avait

24 besoin d'une pièce de rechange de l'entrepôt ou de l'atelier central parce

25 que le chef de l'entrepôt central avait laissé les clefs dans une

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1 enveloppe sous scellés, mais nous en avons parlé hier. Il m'a confié donc

2 cette enveloppe et au cas où le besoin se présentait, je devais pouvoir

3 ouvrir cela, ouvrir l'entrepôt inscrire la pièce qui a été prise et à qui

4 elle a été remise si il y avait besoin de prendre une telle pièce.

5 Mais enfin cela n'a pas duré toute la nuit. Je ne sais pas comment vous

6 avez compris, mais il me semble qu'il ne faisait pas encore la nuit, ce

7 n'était pas encore la nuit au moment où cela s'est terminé.

8 Question: Donc s'il y avait du travail à faire, il vous était possible de

9 rester au-delà des horaires de travail ordinaires, n'est-ce pas, c'était

10 possible si c'était nécessaire?

11 M. M. Krnojelac (interprétation): Le directeur de cette unité économique,

12 bien sûr, c'est évident, mais à l'époque ce n'était pas nécessaire pour

13 moi que je reste, mais c'était nécessaire pour l'autre travail, pour la

14 boulangerie, pour qu'elle fonctionne pour que le lendemain on puisse faire

15 du pain pour les citoyens, pour les détenus, pour le KP Dom. Parce que

16 c'est M. Sipcic qui est arrivé et l'autre le chef de la boulangerie et

17 Relja a dit qu'il pensait pouvoir la faire fonctionner s'il avait toutes

18 les pièces détachées, enfin toutes les pièces dont il avait besoin.

19 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît.

20 Je ne suis pas sûr que cela ait vraiment du sens dans le transcript. Je ne

21 sais pas si le témoin est sarcastique dans sa première phrase, mais je ne

22 sais pas comment il faut l'interpréter.

23 Mme Kuo (interprétation): Oui.

24 M. le Président (interprétation): Autrement dit, il cherche à dire qu'il

25 avait la responsabilité de rester. En fait ce qu'il cherche à dire c'est:

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1 mais comment peut-on supposé qu'il en soit à l'opposé, qu'il en soit

2 autrement?

3 Mme Kuo (interprétation): Oui, je pense que de l'intonation on peut

4 déduire cela. Mais je reformule ma question: j'ai demandé si vous aviez la

5 possibilité de rester, vous avez dit mais enfin, quelqu'un qui est à la

6 tête d'une unité économique, comment aurait-il pu ne pas rester.

7 Donc autrement vous voulez dire que cela aurait été surprenant qu'en cette

8 qualité quelqu'un ne puisse pas rester au delà des horaires de travail

9 normaux, n'est-ce pas?

10 Je voudrais simplement que ce soit tout à fait clair, qu'on le précise,

11 parce que nous on a pu comprendre le sens d'après l'intonation de votre

12 voix.

13 M. M. Krnojelac (interprétation): Le soir en question j'étais obligé de

14 rester et plus jamais je ne suis resté, le besoin ne s'est jamais présenté

15 que je reste.

16 Question: Ce n'est pas la question que je vous pose, je voulais simplement

17 préciser vos paroles pour qu'il n'y ait pas de malentendu. En tant que

18 celui que la personne qui se trouvait à la tête de l'unité économique,

19 vous aviez la possibilité, l'autorisation de rester sur place, au-delà des

20 horaires de travail normaux, n'est-ce pas?

21 M. M. Krnojelac (interprétation): Eh bien, s'il vous plaît, mais ce

22 n'était pas absolument nécessaire en cette qualité-là pour les besoin de

23 cette unité économique. Je vous ai dit quels étaient mes horaires de

24 travail, de 7 heures à 15 heures, mais là je suis resté parce que je

25 devais transmettre les clefs si le besoin se présentait.

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1 M. le Président (interprétation): Je suis désolé, mais nous n'avons pas la

2 traduction. Je ne sais pas quelle est la réponse, oui ou non, mais nous

3 n'avons pas la traduction.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Krnojelac, je suis vraiment

5 désolé de devoir poser cette question directement, mais je vous prie de

6 bien vouloir me répondre directement. Donc si nécessaire, vous aviez

7 l'autorisation, la possibilité de rester au-delà des horaires normaux?

8 M. M. Krnojelac (interprétation): Mais puisque je n'étais pas dans cette

9 situation, ce cas de figure ne s'est jamais présenté. Je ne sais pas si

10 l'armée m'aurait autorisé à le faire. Mais ce jour-là je suis resté, à

11 d'autres occasions le besoin ne s'est pas présenté, donc je ne suis pas

12 resté.

13 M. le Président (interprétation): Il me semble qu'on ne pourra pas avancer

14 au-delà de cela.

15 Mme Kuo (interprétation): Oui.

16 M. le Président (interprétation): Je rappelle que l'audience continuera à

17 9 heures 30 lundi et non à 11 heures 30 comme cela a été annoncé au

18 préalable.

19 Je vous souhaite un agréable week-end, je vous reverrai lundi.

20 (L'accusé est reconduit hors du prétoire.)

21 (L'audience est levée à 16 heures 04.)

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