Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-98-33-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3

4 Jeudi 06 avril 2000

5

6 L'audience est ouverte à 09 heures 38.

7

8 (En l'absence provisoire du Président Rodriguez, le Juge Riad

9 préside l'audience.)

10 (L'accusé est introduit dans le prétoire.)

11 M. le Président (interprétation). - Bonjour, j'aimerais saluer

12 les parties, l'accusé et vous, Mesdames et Messieurs grâce à qui cette

13 audience est possible. J'aimerais également saluer le public grâce auquel

14 le tout peut fonctionner très bien. Monsieur le Greffier, pourriez-vous

15 annoncer la cause ?

16 Mme Ameerali (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président,

17 Madame le Juge. Il s'agit de la cause du Procureur contre Radislav Krstic.

18 Il s'agit de l’affaire n° IT-98-33-T.

19 M. le Président (interprétation). - Bonjour, Monsieur Egbers.

20 Nous allons continuer votre témoignage et je crois que c'est M. Harmon qui

21 va vous poser les questions.

22 M. Harmon (interprétation). - Merci, Monsieur le Président,

23 Madame le Juge. J'aimerais saluer mes éminents collègues. Bonjour,

24 Monsieur Krstic.

25 Capitaine Egbers, lorsque nous avons terminé votre témoignage

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1 hier, vous étiez en train de nous raconter, de nous parler des événements

2 qui ont eu lieu le 13 juillet, lorsque vous étiez en train d'escorter un

3 convoi de femmes et d'enfants musulmans en direction de Kladanj. Vous

4 étiez en train de nous dire que vous aviez décrit les observations des

5 prisonniers qui étaient sur un terrain de football à Nova Kasaba.

6 Donc Capitaine Egbers, j'aimerais que vous continuiez, et

7 j'aimerais que vous nous décriviez les observations que vous avez faites

8 pendant votre voyage vers Kladanj.

9 M. Egbers (interprétation). - Lorsque j'ai traversé la ville de

10 Nova Kasaba, je me suis dirigé vers le sud en direction de Milici et par

11 la suite vers l'ouest, vers Vlasenica. C’est sur cette route que l'un des

12 autobus est tombé en panne, de notre convoi je crois. J’ai été en mesure

13 d'arrêter une Wolkswagen de couleur rouge, avec quatre Serbes bosniens

14 militaires à l'intérieur qui étaient vêtus de noir.

15 J'ai vu l'un des Serbes de Bosnie militaire, c'était le colonel

16 de l'armée serbe de Bosnie, et je lui ai demandé d'organiser un autobus

17 additionnel pour les femmes et les enfants qui se trouvaient dans

18 l'autobus en panne.

19 M. Harmon (interprétation). - L'a-t-il fait ?

20 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est exact. Il s'est

21 organisé de la sorte.

22 M. Harmon (interprétation). - Par la suite, l'autobus a

23 poursuivi sa trajectoire en direction de Kladanj ?

24 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est exact.

25 M. Harmon (interprétation). - Vous êtes arrivé à un endroit où

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1 les femmes musulmanes et les enfants ont été débarqués des autobus. Est-ce

2 exact ?

3 M. Egbers (interprétation). - Je suis arrivé au même endroit que

4 le jour précédent, avec les femmes et les enfants qui ont donc quitté cet

5 autobus.

6 M. Harmon (interprétation). - Y a-t-il eu un événement

7 particulier à cet endroit, ou le tout se déroulait-il plutôt normalement ?

8 M. Egbers (interprétation). - C'était la même scène que le jour

9 précédent.

10 M. Harmon (interprétation). - Après que les femmes et les

11 enfants soient descendus des autobus, êtes-vous revenu, avez-vous repris

12 le même chemin en direction de Potocari ?

13 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est exact.

14 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous nous expliquer ce

15 qui s'est passé par la suite ?

16 M. Egbers (interprétation). - On m'a arrêté à un barrage routier

17 avant de pénétrer dans le village de Nova Kasaba.

18 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous nous montrer, à

19 l'aide du pointeur qui se trouve à côté de vous, nous montrer sur la

20 pièce 1E l'endroit où on vous a arrêté au barrage routier ?

21 M. Egbers (interprétation). - On m'a arrêté juste ici.

22 M. Harmon (interprétation). - Indiquant au sud de la ville de

23 Nova Kasaba, que s'est-il passé à cet endroit, Capitaine ?

24 M. Egbers (interprétation). - Il y avait quelques hommes

25 d'infanterie qui pointaient leur AK47 dans notre direction en nous disant

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1 d'arrêter. Ils nous ont dit de sortir de la voiture, ils ont pris notre

2 voiture. Ils l'ont emmenée quelque part, ils ont vérifié nos cartes

3 d'identité et nous ont gardés sur place.

4 M. Harmon (interprétation). - Lorsque vous dites "nous", de qui

5 parlez-vous ?

6 M. Egbers (interprétation). - Je croyais d'abord qu'il

7 s'agissait seulement de moi-même et du conducteur qui était sur place.

8 Mais par la suite, j'ai pu remarquer d'autres membres du Bataillon

9 néerlandais qui étaient assis sur le bord de la route et qui étaient sous

10 le contrôle des Serbes de Bosnie.

11 M. Harmon (interprétation). - Combien y avait-il de soldats

12 néerlandais sous le contrôle des soldats serbes de Bosnie ?

13 M. Egbers (interprétation). - Il y en avait environ 10.

14 M. Harmon (interprétation). - Combien de véhicules se trouvaient

15 dans la zone ou dans cette région ?

16 M. Egbers (interprétation). - Il y avait quatre Mercedes des

17 Nations Unies, tout près du barrage routier.

18 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que les soldats et les

19 véhicules étaient libres de quitter cet endroit ou est-ce que vous étiez

20 détenus ?

21 M. Egbers (interprétation). - Nous n'étions pas libres de

22 partir, il a fallu que nous attendions au bord de la route.

23 M. Harmon (interprétation). - Qu'avez-vous fait par la suite ?

24 M. Egbers (interprétation). - J'ai demandé à parler avec le

25 commandant en charge.

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1 M. Harmon (interprétation). - Le commandant en charge de quoi ?

2 M. Egbers (interprétation). - Le commandant responsable des

3 soldats qui pointaient leurs armes en notre direction près du barrage

4 routier, près de Nova Kasaba.

5 M. Harmon (interprétation). - Que s'est-il passé par la suite ?

6 M. Egbers (interprétation). - Par la suite, l'un des soldats

7 conscrits qui parlait anglais m'a emmené au commandant Zoran Milanovic qui

8 avait les troupes sous sa responsabilité, et qui était en commandement de

9 ces hommes qui pointaient les armes vers nous.

10 M. Harmon (interprétation). - Où vous ont-ils emmené ?

11 M. Egbers (interprétation). - J'étais à environ 100 mètres de

12 cette route, il y avait une école tout près, et l'école représentait leur

13 quartier général.

14 M. Harmon (interprétation). - J'aimerais que l'on montre au

15 témoin la pièce 87 et la pièce de l'accusation 88. Monsieur l'huissier,

16 s'il vous plaît, pourriez-vous le montrer au témoin et le placer sur le

17 rétroprojecteur ?J'aimerais débuter avec la pièce à conviction 87.

18 J'aimerais vous montrer la question suivante, Capitaine Egbers.

19 Vous avez vu cette pièce dans mon bureau avant de venir témoigner. Est-ce

20 exact ?

21 M. Egbers (interprétation). - C'est exact.

22 M. Harmon (interprétation). - Etiez-vous en mesure d'identifier

23 sur la pièce de l'accusation 87 l'endroit où on vous a emmené ?

24 M. Egbers (interprétation). - Oui, je suis en mesure.

25 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous indiquer à l'aide du

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1 pointeur où sur cette pièce à conviction 87 le soldat conscrit vous a

2 emmené ?

3 M. Egbers (interprétation). - Voici, c'était ici : le barrage

4 routier se trouvait tout près. Il y a un chemin qui mène vers une école

5 -voici l'école qui servait de quartier général-, et voici une aire de

6 stationnement. Et là nous pouvons voir un tout petit immeuble.

7 M. Harmon (interprétation). - Aux fins du transcript, lorsque le

8 capitaine Egbers dit : "Ceci est la route qui mène vers Nova Kasaba", il

9 se réfère à une route assez large qui se trouve à droite du diagramme, et

10 cela représente la route principale. Lorsqu'il se référait à l'immeuble où

11 il a été emmené, il parlait plutôt de l'immeuble qui se trouve au bas de

12 la pièce à conviction. Lorsqu'il parlait de l'aire de stationnement, il se

13 réfèrait à la partie qui se trouve devant l'immeuble où deux autobus

14 apparaissent stationner.

15 Par la suite, à la fin de la route qui mène vers Nova Kasaba,

16 c'est la route qui mène à Nova Kasaba avant d'entrer dans l'aire de

17 stationnement.

18 M. Harmon (interprétation). - Permettez-moi de vous présenter

19 maintenant la pièce à conviction de l'accusation 88. Vous reconnaissez

20 l'immeuble sur la pièce 88. Est-ce exact ?

21 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est exact. Voici l'école

22 dont j'ai parlé plus tôt.

23 M. Harmon (interprétation). - C'est donc le grand immeuble dont

24 vous avez parlé ?

25 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est exact, celui qui

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1 servait de quartier général.

2 M. Harmon (interprétation). - Merci, Monsieur l'huissier, je

3 n'aurai plus besoin de ces pièces. Lorsque vous êtes arrivé à ce grand

4 bâtiment, vous avez dit que vous avez rencontré le capitaine Zoran

5 Malinic. Est-ce le nom ?

6 M. Egbers (interprétation). - C'était un capitaine, c'était un

7 commandant, et il s'appelait Malinic.

8 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous nous le décrire pour

9 nous ?

10 M. Egbers (interprétation). - Il avait environ 40 ans, il était

11 vêtu d'un tee-shirt vert, il portait un pantalon vert de camouflage et des

12 chaussures noires. Il avait des cheveux noirs, il y avait un peu de gris

13 sur ses cheveux. J'ai l'impression que ses cheveux étaient gris depuis sa

14 naissance à cet endroit-là.

15 M. Harmon (interprétation). - S'est-il identifié comme étant la

16 personne responsable du barrage routier ?

17 M. Egbers (interprétation). - Il m'a dit que ses soldats étaient

18 responsables du barrage routier.

19 M. Harmon (interprétation). - Est-ce qu'il vous a dit d'où il

20 venait ?

21 M. Egbers (interprétation). - Il m'a dit qu'il était responsable

22 de trois bataillons qui encerclaient Sarajevo, et il avait pris un

23 bataillon pour se diriger vers Srebrenica.

24 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous avez fait une

25 plainte au commandant Zoran Malinic concernant votre détention et celle

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1 des autres soldats des Nations Unies au barrage routier ?

2 M. Egbers (interprétation). - Non seulement j'ai mentionné

3 l'histoire des véhicules volés, mais j'ai également mentionné que l'on

4 nous a volé nos armes et nos gilets pare-balles, nos casques bleus. Je lui

5 ai demandé de nous escorter à Potocari pour que l'on puisse escorter un

6 autre convoi de femmes et d'enfants déportés en direction de Kladanj.

7 M. Harmon (interprétation). - Capitaine Egbers, permettez-moi de

8 poser cette question : avez-vous fait une plainte par écrit ou vous êtes-

9 vous adressé oralement ?

10 M. Egbers (interprétation). - J'ai d'abord dit au commandant que

11 les choses qui se passaient étaient inadmissibles. Par la suite, nous

12 l'avons écrit en serbo-croate, il y avait un interprète, il avait une

13 machine à écrire et il a tapé à la machine à écrire une déclaration de ma

14 part pour que cette déclaration soit signée par ce commandant Zoran. Il a

15 eu une copie de ce rapport écrit. Je ne sais pas en fait comment

16 l'appeler, c'est une lettre de plainte.

17 M. Harmon (interprétation). - Oui, de plainte.

18 M. Egbers (interprétation). - Oui, de plainte.

19 M. Harmon (interprétation). - Connaissez-vous un soldat, un

20 sergent Mulder qui était un soldat néerlandais ?

21 M. Egbers (interprétation). - Le soldat Mulder est venu nous

22 voir à l'école, il m'a dit ce qu'il fallait faire, il m'a parlé des

23 soldats serbes de Bosnie qu'il avait rencontrés sur son chemin. Je me suis

24 plaint de cela également.

25 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous expliquer au

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1 Tribunal ce qu'il vous a dit et de quoi il a été question avec le

2 commandant Malinic ?

3 M. Egbers (interprétation). - Il a dit qu'il avait été arrêté

4 par les Serbes de Bosnie, il a fallu qu'il s'assoie sur un blindé de

5 transport de troupe, à l'avant, qui était conduit par un Serbe de Bosnie,

6 un Serbe de Bosnie qui portait un casque et on lui a donné un AK47.

7 M. le Président (interprétation). - Qui portait le casque bleu ?

8 Un soldat des Nations Unies ou un soldat serbe ?

9 M. Egbers (interprétation). - Les Serbes.

10 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'ils avaient le

11 droit de porter les casques bleus ?

12 M. Egbers (interprétation). - Non, bien sûr que non, Monsieur le

13 Président.

14 M. le Président (interprétation). - Merci.

15 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous poursuivre la

16 description de ce que le sergent Mulder vous a décrit ?

17 M. Egbers (interprétation). - Il a fallu qu'il s'assoie au-

18 devant du blindé de transports de troupes. Les soldats bosniens

19 conduisaient ce blindé. Il fallait qu'il dise aux Musulmans que c'était

20 sûr de se présenter à la base des Nations Unies, et qu'il fallait qu'ils

21 leur tirent dessus par la suite. Et par la suite, on lui a donné un AK 47.

22 M. Harmon (interprétation). - Mais qui a demandé au sergent

23 Mulder de dire que les Musulmans étaient en sécurité et qu'ils devaient

24 sortir des bois ?

25 M. Egbers (interprétation). - C'étaient les Serbes de Bosnie qui

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1 se trouvaient juste en face de la route qui faisait face aux bois où les

2 Musulmans se trouvaient.

3 M. Harmon (interprétation). - Mais qui a demandé au sergent

4 Mulder de dire qu'ils allaient tirer sur les Musulmans ?

5 M. Egbers (interprétation). - Il m'a dit que c'était le

6 chauffeur et les autres soldats qui se trouvaient sur le blindé qui ont

7 dit de dire cela.

8 M. Harmon (interprétation). - Qu'est-ce que le commandant

9 Malinic a dit concernant cette plainte ?

10 M. Egbers (interprétation). - Il a dit qu'il ne pouvait rien

11 faire avec cette plainte, qu'il a fallu qu'il informe ses supérieurs et

12 c'était un colonel qui s'appelait Berer.

13 M. Harmon (interprétation). - Permettez-moi de vous poser

14 maintenant la question suivante, Capitaine. A un moment donné, pendant que

15 vous étiez dans les environs, est-ce que vous avez donné l'ordre aux

16 soldats de prendre les blindés, qui étaient détenus, et de retourner à

17 Potocari ?

18 M. Egbers (interprétation). - J'ai demandé au commandant Zoran

19 pourquoi nous ne pouvions pas revenir à Potocari pour escorter un autre

20 convoi vers Kladanj, parce que nous étions retenus. Il m'a expliqué qu'il

21 y avait beaucoup d'autres bataillons en train de se préparer autour de

22 Srebrenica parce qu'il y avait beaucoup de Musulmans cachés dans les bois,

23 qu'ils ne s'attendaient pas à voir un si grand nombre de Musulmans....

24 Excusez-moi, j'attendais la traduction.

25 Donc il n'a mis qu'il n'avait aucune influence sur ces troupes-

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1 là, que c'était mieux pour notre propre sûreté de rester avec lui, là où

2 il se trouvait.

3 M. Harmon (interprétation). - Mais à deux de vos blindés qui

4 étaient retenus au barrage routier, leur avez-vous ordonné de retourner à

5 Potocari ?

6 M. Egbers (interprétation). - Il n'y avait pas de blindé,

7 c'étaient seulement des véhicules légers de type Mercedes. Nous avions

8 quatre véhicules de marque Mercedes avec nous.

9 J'ai ordonné à trois de ces véhicules, avec les Nations Unies,

10 d'aller à Nova Kasaba et d'essayer de rejoindre Potocari.

11 M. Harmon (interprétation). - Que s'est-il passé avec ces

12 soldats-là, et avec ces véhicules ?

13 M. Egbers (interprétation). - A environ 200 mètres de là, ils se

14 sont fait arrêter par des hommes portant des AK47 qu'on a pointés sur leur

15 tête. Il a fallu qu'ils retournent tous à l'école. Il n'y avait qu'une

16 Mercedes en fait au lieu de trois, ils avaient pris d'assaut deux Mercedes

17 et, lorsqu'ils sont revenus, il n'y avait qu'une Mercedes.

18 M. Harmon (interprétation). - Par la suite, qu'avez-vous décidé

19 de faire ?

20 M. Egbers (interprétation). - J'ai décidé de rester à l'école,

21 de faire un rapport au quartier général de Potocari et de faire le rapport

22 que deux véhicules avaient été volés. Je voulais des garanties de ce

23 commandant Zoran, qu'il nous garantirait un passage vers Potocari.

24 M. Harmon (interprétation). - Mais pendant que vous étiez à

25 l'école, ou en fait dans la région qui se trouvait dans la zone tout près

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1 du barrage, est-ce que vous avez vu des blindés volés conduits par des

2 soldats serbes de Bosnie vêtus de vêtements appartenant aux Nations Unies,

3 de vêtements volés ?

4 M. Egbers (interprétation). - Oui, il y avait un blindé conduit

5 par un Serbe de Bosnie qui portait un casque bleu.

6 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous avez passé la nuit

7 à l'école ?

8 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est exact.

9 M. Harmon (interprétation). - Cette nuit-là, avez-vous entendu

10 des coups de feu ?

11 M. Egbers (interprétation). - Il y avait beaucoup de coups de

12 feu que l'on pouvait entendre. On entendait des tirs de mitrailleuse, mais

13 on entendait que quelques rondes, en fait. Il y avait environ cent rondes

14 qu'on entendait ; par la suite cela s'arrêtait, par la suite on entendait

15 une autre ronde de cent tirs, et puis donc on entendait beaucoup de tirs

16 de mitrailleuse.

17 M. Harmon (interprétation). - Etiez-vous en mesure de dire d'où

18 provenaient ces tirs ou ces coups de feu ?

19 M. Egbers (interprétation). - Non, je n'étais pas en mesure de

20 le dire.

21 M. Harmon (interprétation). - A quelle distance de cette école,

22 que vous avez identifiée sur la pièce à conviction de l'accusation 87, se

23 trouvait le terrain de football de Nova Kasaba ?

24 M. Egbers (interprétation). - A environ 800 mètres.

25 M. Harmon (interprétation). - J'aimerais demander à

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1 M. l'huissier de placer la pièce à conviction sur le rétroprojecteur.

2 (L'huissier s'exécute.)

3 Quand vous avez été détenu à l'école, avez-vous été en mesure

4 d'inspecter un petit immeuble qui se trouvait sur la base où vous étiez

5 détenu ?

6 M. Egbers (interprétation). - Oui, Monsieur, le jour suivant

7 j'ai été en mesure de vérifier ce petit bâtiment pour quelques minutes,

8 c'est le bâtiment où l'on retenait, l'on détenait les Musulmans.

9 M. Harmon (interprétation). - Le témoin montre un petit immeuble

10 qui est représenté par un point blanc, qui démontre où se trouvait ce

11 petit bâtiment. Et au centre de la page, il y a un tout petit immeuble

12 blanc.

13 Capitaine Egbers, pourriez-vous dire aux Juges quelles étaient

14 vos observations de ce bâtiment, de ce petit bâtiment ?

15 M. Egbers (interprétation). - Il y avait une clôture, et

16 derrière la clôture il y avait environ 30 hommes musulmans qui étaient

17 assis. Ils attendaient. Quelques-uns d'entre eux étaient même blessés. Il

18 y en avait un qui était blessé au ventre, et l'autre avait un visage bleu.

19 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps êtes-vous resté à

20 cet endroit où vous avez fait ces observations ?

21 M. Egbers (interprétation). - Quelques minutes seulement. Au

22 début, on ne pouvait pas entrer ou pénétrer dans l'immeuble. Mais le

23 lendemain, on nous a permis de vérifier, pendant quelques minutes,

24 puisqu'on se plaignait de ces coups de feu qu'on avait entendus.

25 M. Harmon (interprétation). - Par la suite, que s'est-il passé ?

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1 M. Egbers (interprétation). - Plus tard, ce jour-là, lorsque

2 j'étais en contact ou j'essayais d'établir le contact avec Potocari, on

3 avait entendu des coups de feu de fusils. Il y avait quelques rondes

4 autour de l'école, on ne savait pas d'où ces tirs venaient, mais les

5 Serbes de Bosnie ont réagi à ce feu.

6 M. Harmon (interprétation). - De quelle façon ont-ils réagi à

7 ces coups de feu ?

8 M. Egbers (interprétation). - D'abord, ils ont tiré quelques

9 mortiers. Par la suite, ils ont riposté avec des mitrailleuses qui se

10 trouvaient au-dessus de leurs blindés. Par la suite, ils ont sorti deux

11 garçons de ce bâtiment et ils les ont forcé à marcher en direction d'où

12 provenaient les tirs, ils ont donc fait deux boucliers humains.

13 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que c'étaient des garçons

14 musulmans ?

15 M. Egbers (interprétation). - Oui.

16 M. Harmon (interprétation). - Est-ce qu'ils sont retournés par

17 la suite ?

18 M. Egbers (interprétation). - Ils sont retournés par la suite.

19 Ils les ont enfermés de nouveau et ils ont dit qu'ils ne pouvaient pas

20 trouver les tireurs.

21 M. Harmon (interprétation). - A un moment donné, est-ce que

22 l'homme du nom du colonel Beara est arrivé à cet endroit ?

23 M. Egbers (interprétation). - Oui, il était à bord d'une voiture

24 tout à fait ordinaire. Je me suis présenté, je lui ai présenté la lettre

25 de plainte. Je lui ai dit que nous avions été détenus à cet endroit, qu'il

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1 fallait retourner à Potocari pour escorter d'autres convois. Et je lui ai

2 demandé s'il pouvait nous assurer le retour à Potocari ou nous escorter

3 d'une manière sécuritaire vers Potocari.

4 M. Harmon (interprétation). - Que s'est-il passé par la suite ?

5 M. Egbers (interprétation). - Il a dit qu'il allait se pencher

6 sur la chose et qu'il allait nous contacter.

7 M. Harmon (interprétation). - Par la suite, vous a-t-on contacté

8 effectivement ? Ou bien le commandant Zoran est-il entré en contact avec

9 vous ?

10 M. Egbers (interprétation). - Non, personne ne nous a contactés.

11 Il a fallu que l'on reste sur place et il ne nous a rien dit. J'ai donc

12 négocié avec notre quartier général de Potocari.

13 En fait, nous avions des tee-shirts verts et des pantalons

14 verts. Les Serbes de Bosnie portaient nos casques bleus et nos vêtements,

15 et nos gilets pare-balles. On ne pouvait même plus faire la différence

16 entre les membres des Nations Unies et les Serbes de Bosnie.

17 J'ai cru qu'il était vraiment bien de quitter l'endroit le plus

18 tôt possible. Alors, j'ai demandé à Potocari de laisser derrière les deux

19 Mercedes à l'école. Je leur ai demandé de nous donner un transport à bord

20 d'un blindé vers Potocari.

21 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous êtes revenu vers

22 Potocari dans un véhicule militaire des Serbes de Bosnie ?

23 M. Egbers (interprétation). - C'était un BOW à quatre roues. Ils

24 ont emprunté le même chemin vers Bratunac et l'enclave.

25 M. Harmon (interprétation). - Lorsque vous dites "BOW", je ne

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1 connais pas ce terme, et je crois que les Juges ne le connaissent pas non

2 plus. Pourriez-vous nous expliquer ce que cela veut dire, ce "BOW" ?

3 M. Egbers (interprétation). - C'est un véhicule de transport de

4 troupes armées avec une mitrailleuse se trouvant au-dessus, avec quatre

5 roues. On s'en sert pour transporter les troupes.

6 M. Harmon (interprétation). - Sur votre retour vers Potocari,

7 est-ce que vous avez suivi la même direction : Nova Kasaba,

8 Konjevic Polje, Santici, Glogova, Bratunac et puis Potocari ?

9 M. Egbers (interprétation). - Est-ce que vous pouvez reprendre

10 toutes les appellations de localité ?

11 M. Harmon (interprétation). - Je vais reprendre les localités,

12 et je reprendrai la question. Est-ce que vous êtes allé par Nova Kasaba,

13 Konjevic Polje, Santici, Kravica, Glogova, Bratunac, pour arriver à

14 Potocari en fin de compte ?

15 M. Egbers (interprétation). - Oui, Monsieur.

16 M. Harmon (interprétation). - Permettez-moi de vous poser la

17 question suivante : est-ce que vous êtes passé à côté du stade de foot à

18 Nova Kasaba sur votre retour ?

19 M. Egbers (interprétation). - Oui.

20 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous pouvez décrire aux

21 Juges ce que vous avez vu à cet endroit-là ?

22 M. Egbers (interprétation). - Sur ce terrain de foot, il n'y

23 avait plus les hommes qui s'y trouvaient. Le terrain était vide.

24 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous remarqué autre chose de

25 significatif sur votre retour vers Potocari qu'il serait bon de mentionner

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1 devant les Juges ?

2 M. Egbers (interprétation). - J'ai vu énormément d'effets

3 personnels qui étaient en train de brûler à côté de la route. J'ai vu

4 beaucoup de membres de l'infanterie qui regardaient vers les forêts où ils

5 pensaient qu'il y avait des Musulmans, et j'ai vu un corps inanimé sur le

6 sol à côté de l'endroit où nous sommes passés.

7 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous pouvez décrire ce

8 corps inanimé ?

9 M. Egbers (interprétation). - Il s'agissait d'un vieillard qui

10 avait toujours son sac à dos. Il était couché sur le dos en plein milieu

11 de la route.

12 M. Harmon (interprétation). - Je vous remercie, Capitaine

13 Egbers. Je crois que j'ai fini avec l'interrogatoire principal du

14 capitaine Egbers, Monsieur le Président.

15 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur

16 Harmon.

17 Monsieur le Capitaine, les avocats de la défense vont maintenant

18 vous contre-interroger.

19 M. Petrusic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président,

20 Madame le Juge, bonjour chers collègues, bonjour Monsieur le Témoin.

21 Je voudrais dire que vous avez reçu un ordre en date du

22 8 juillet, et que vous vous êtes dirigé -en fonction de cet ordre-là- en

23 direction de Srebrenica et d'un poste d'observation s'y trouvant.

24 M. Egbers (interprétation). - Oui, tout à fait.

25 M. Petrusic (interprétation). - Vous aviez l'ordre de renforcer,

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1 c'est-à-dire de délimiter les lignes de contact entre les Serbes et les

2 Musulmans de Bosnie, n'est-ce pas ?

3 M. Egbers (interprétation). - C'est exact.

4 M. Petrusic (interprétation). - Et à quelque quatre kilomètres

5 de cet endroit-là, les soldats musulmans ont jeté des grenades à main vers

6 vos véhicules, n'est-ce pas ?

7 M. Egbers (interprétation). - Cela est exact aussi.

8 M. Petrusic (interprétation). - Suite à cela, vous étiez dirigés

9 vers la compagnie Bravo sise à Srebrenica ?

10 M. Egbers (interprétation). - C'est cela, Monsieur.

11 M. Petrusic (interprétation). - Aviez-vous une bonne vue

12 d'ensemble sur ce qui se passait dans la région de Srebrenica ?

13 M. Egbers (interprétation). - Ce n'est pas tout à fait exact. Il

14 s'agissait d'abord, pour moi, de montrer au capitaine Groen où se trouvait

15 la ligne de conflit entre les Serbes de Bosnie et les Musulmans, et je

16 n'étais pas censé être emmené par les Musulmans vers un poste de blocage.

17 Ils ont jeté des grenades à main vers notre blindé des transport de

18 troupes.

19 J'ai décidé de revenir jusqu'au capitaine Groen pour lui dire

20 que je ne pouvais pas rester là-bas. Et je ne voulais pas que les

21 Musulmans m'obligent à intervenir, c'est-à-dire à riposter et à partir de

22 ce poste de blocage. Le capitaine Groen m'a dit alors de me rendre vers un

23 autre poste d'observation, non pas dans cette base-ci, mais en direction

24 de l'emplacement que j'ai montré sur la carte, et c'est l'emplacement qui

25 porte la désignation n° 1. Et c'est de là que j'ai pu voir la partie sud

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1 de l'enclave.

2 M. Petrusic (interprétation). - Ce soir-là, vous aviez aperçu

3 des groupes différents de combattants musulmans, n'est-ce pas ?

4 M. Egbers (interprétation). - Oui.

5 M. Petrusic (interprétation). - Ils portaient des uniformes de

6 camouflage ou des uniformes ukrainiens ?

7 M. Egbers (interprétation). - Eh bien, certains d'entre eux

8 portaient des éléments d'uniforme ukrainien, mais la plupart avaient des

9 vêtements civils.

10 M. Petrusic (interprétation). - Le Bataillon ukrainien se

11 trouvait également faire partie de la mission des Nations Unies, n'est-ce

12 pas ?

13 M. Egbers (interprétation). - Le Bataillon néerlandais faisait

14 certainement partie de la Forpronu.

15 M. Petrusic (interprétation). - Mais moi j'avais demandé si le

16 Bataillon ukrainien faisait également partie de la mission de l'ONU ?

17 M. Egbers (interprétation). - Oui.

18 M. Petrusic (interprétation). - Pour ce qui est des armements

19 portés par ces soldats musulmans que vous aviez vus, ils portaient des

20 fusils automatiques, à savoir des AK47 et des mitrailleuses ?

21 M. Egbers (interprétation). - Il y avait des combattants

22 musulmans qui avaient des fusils tels que vous les avez décrits, en effet.

23 M. Petrusic (interprétation). - Capitaine, au cours de votre

24 témoignage d'hier, vous avez mentionné des armements antichars. Est-ce que

25 ces armements-là sont désignés par le code RPG7 dans la terminologie

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1 militaire ?

2 M. Egbers (interprétation). - Oui. J'ai témoigné en effet et

3 j'ai dit que, arrivé sur le marché, j'avais vu qu'il y avait des armements

4 antichars et c'étaient des RPG7.

5 M. Petrusic (interprétation). - Et tout ce que vous venez de

6 nous dire est lié à la journée du 8 juillet. Le 9 juillet, vous avez reçu

7 un ordre de votre commandement pour ce qui était d'apporter un soutien

8 concernant les quatre véhicules, vos quatre véhicules restants ?

9 M. Egbers (interprétation). - Oui. Le 9 juillet, j'ai reçu

10 l'ordre de porter, d'apporter un soutien à ces quatre transporteurs qui se

11 trouvaient à Srebrenica.

12 M. Petrusic (interprétation). - Quand vous quittiez vos

13 positions, des soldats musulmans ont ouvert le feu vers vous, n'est-ce

14 pas ?

15 M. Egbers (interprétation). - Oui. L'un des soldats qui étaient

16 assis à côté des armements sur le blindé a été blessé à cette occasion. En

17 effet, un feu, des tirs ont été ouverts vers nous par des Musulmans.

18 M. Petrusic (interprétation). - Capitaine, Médecins sans

19 frontières ont évacué l'hôpital de Srebrenica. Est-ce que vous pouvez nous

20 dire si cela a eu lieu en date du 10 juillet ?

21 M. Egbers (interprétation). - Cela a eu lieu le même jour où

22 deux avions hollandais F16 ont attaqué l'enclave et, lorsque nous avons

23 été en mesure de revenir jusqu'à la compagnie Bravo, et avant que les

24 Serbes n'accèdent à la ville, nous avons transporté les malades de cet

25 hôpital avec nos véhicules et sommes partis avec eux vers Potocari.

Page 2259

1 M. le Président (interprétation). - Excusez-moi. Vous avez dit

2 deux avions F16 néerlandais ont attaqué l'enclave ?

3 M. Egbers (interprétation). - Non, il s'agissait d'un appui

4 rapproché aérien.

5 M. le Président (interprétation). - Mais vous avez dit que deux

6 avions néerlandais avaient attaqué l'enclave ?

7 M. Egbers (interprétation). - Non, ils étaient en mission

8 d'appui aérien rapproché. Cela fait que nous avons pu accéder à la base de

9 la Compagnie B. C'est là que les Médecins sans frontières nous ont demandé

10 si on pouvait se rendre jusqu'à l'hôpital en sécurité pour en sortir les

11 patients. Ils nous avaient demandé d'emmener ces malades vers Potocari.

12 M. le Président (interprétation). - Merci.

13 M. Petrusic (interprétation). - Est-ce que c'est le seul appui

14 aérien qui avait été destiné à cette zone sous protection ?

15 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est le seul que j'ai pu

16 voir.

17 M. Petrusic (interprétation). - C'est avec votre véhicule à vous

18 que vous avez transporté des malades. Y avait-il là seulement des malades

19 qui se trouvaient dans l'hôpital de Srebrenica depuis déjà un bon moment,

20 ou y avait-il aussi des blessés qui ont donc subi des blessures au cours

21 des événements dans les journées précédentes, dont nous avons parlé ?

22 M. Egbers (interprétation). - Il n'y avait que des malades ainsi

23 que des handicapés mentaux, puis des femmes avec de tout petits enfants.

24 Il n'y avait qu'eux dans mon véhicule, je ne sais pas s'ils avaient été

25 blessés à l'occasion du pilonnage du 6 juillet.

Page 2260

1 M. Petrusic (interprétation). - Capitaine, à l'occasion de votre

2 témoignage, vous aviez dit que les soldats serbes tenaient l'enclave dans

3 un tel encerclement que vos collègues soldats et officiers, qui se

4 trouvaient en congé, ne pouvaient pas accéder au sein de l'enclave. En

5 d'autres termes, les Serbes ne les laissaient pas accéder à cette

6 enclave ?

7 M. Egbers (interprétation). - C'est cela, Monsieur.

8 M. Petrusic (interprétation). - Les membres de deux unités de

9 SAS n'étaient pas membres des forces de l'ONU ?

10 M. Egbers (interprétation). - Je ne sais pas, Monsieur.

11 M. Petrusic (interprétation). - Est-ce que les membres de ces

12 deux unités britanniques spéciales... Enfin, je voudrais savoir si vous

13 aviez eu vent de leur présence au sein de l'enclave ?

14 M. Egbers (interprétation). - Oui, ils se trouvaient dans

15 l'enclave.

16 M. Petrusic (interprétation). - Clarifions la chose, je vous

17 prie. Tout à l'heure, vous aviez répondu que vous ne saviez pas s'ils

18 étaient membres des forces qui étaient destinées à la pacification de la

19 région ?

20 M. Egbers (interprétation). - Ils séjournaient dans le

21 commandement du Bataillon néerlandais. Ils portaient des casques bleus.

22 Ils se trouvaient dans l'enclave, mais ils n'étaient pas membres de notre

23 Bataillon.

24 M. Petrusic (interprétation). - Mais ils sont arrivés dans

25 l'enclave juste avant le 9 juillet ?

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1 M. Egbers (interprétation). - Ils se trouvaient dans l'enclave

2 depuis quelques mois déjà. J'ai souvent eu l'occasion de les voir. Nous

3 nous sommes pas mal entretenus au cours de ces quelques mois.

4 M. Petrusic (interprétation). - Capitaine, votre entretien avec

5 le commandant Malinic... Je retire cette question.

6 Pouvez-vous nous dire si le commandant Malinic attendait le

7 colonel Beara pour approuver votre départ de Nova Kasaba ?

8 M. Egbers (interprétation). - Il m'a juste dit qu'il fallait

9 qu'il s'entretienne avec son supérieur à ce sujet et nous avons dû

10 attendre.

11 M. Petrusic (interprétation). - Donc ce supérieur, c'était bien

12 le colonel Beara ?

13 M. Egbers (interprétation). - Je pense que ce colonel était

14 effectivement le supérieur du commandant Zoran, du moins c'est ce qu'il

15 m'a dit.

16 M. Petrusic (interprétation). - Vous avez vu le colonel Beara,

17 vous vous êtes entretenu avec lui. Auriez-vous remarqué un insigne qu'il

18 aurait éventuellement arboré sur son uniforme ?

19 M. Egbers (interprétation). - Il ne portait qu'un uniforme

20 d'infanterie vert avec des galons jaunes dessus. Il n'avait pas d'insigne

21 du style Loup ou quoi que ce soit d'autre.

22 M. Petrusic (interprétation). - Vous avez passé pas mal de temps

23 à cet endroit-là, toute une après-midi et c'est jusqu'à lendemain. Est-ce

24 que vous avez pu déduire à quelle unité avait appartenu le commandant

25 Malinic, et de ce fait le colonel Beara ? S'agissait-il d'une unité

Page 2262

1 spéciale, particulière ?

2 M. Egbers (interprétation). - Je n'ai pu voir que des chiens,

3 des bergers allemands, qui se trouvaient à proximité de l'école. J'ai

4 discuté avec ce commandant de son unité. Il m'avait dit qu'il était

5 commandant de trois bataillons qui étaient normalement chargés du siège de

6 Sarajevo, et qu'il avait dû amener l'un de ces trois bataillons sur place

7 et se présenter dans les environs de Srebrenica. Il était fort bien

8 informé. Il y avait sur sa table une carte, un plan de l'enclave, et tous

9 nos postes d'observation étaient portés dessus. Il savait donc ce qu'il

10 devrait faire. Mais il ne m'a jamais dit à quelle unité il appartenait.

11 M. Petrusic (interprétation). - Capitaine, à l'occasion de votre

12 témoignage, vous avez dit à un moment que l'armée des Musulmans de Bosnie

13 était mal formée et mal armée. Etant donné qu'au cours de ce témoignage

14 vous aviez tiré certaines conclusions, vu votre qualité d'officier

15 notamment, je voudrais vous poser une question qui se situe précisément au

16 niveau des conclusions que vous avez tirées.

17 L'armée des Musulmans de Bosnie s'était concentrée vers Susnjari

18 en date des 10 et 11 juillet, et a effectué une percée, donc a réussi à se

19 sortir ou à se tirer de l'encerclement pour arriver jusqu'à Tuzla. Je

20 parle là de 4 000 à 5 000 soldats armés.

21 Pouvez-vous nous dire, du point de vue de votre qualité de

22 soldat, comment se peut-il qu'une armée aussi mal organisée, aussi mal

23 formée, aussi mal équipée puisse accomplir une percée de la sorte ?

24 M. Egbers (interprétation). - Je pense qu'ils avaient ramassé

25 toutes les armes de ceux qui quittaient l'enclave. Il se peut aussi que

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1 les Serbes n'aient pas été prêts à une telle chose. Il se peut qu'à la

2 tête... il ne s'agissait peut-être pas des avants de ceux qui avaient

3 réussi à quitter l'enclave ; peut-être n'ai-je vu que ceux qui étaient

4 restés et qui étaient mal formés et qui n'avaient pas d'uniforme.

5 M. Petrusic (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

6 Témoin.

7 Monsieur le Président, j'en ai fini avec le contre-

8 interrogatoire de ce témoin.

9 M. le Président (interprétation). - Merci, Monsieur Petrusic.

10 Monsieur Harmon, vous avez peut-être des questions

11 supplémentaires ?

12 M. Harmon (interprétation). - Quelques questions, Monsieur le

13 Président.

14 Mon distingué collègue vous a posé des questions concernant le

15 Bataillon ukrainien qui faisait partie de la mission des Nations Unies.

16 Est-ce que dans cette enclave de Srebrenica il y avait un

17 Bataillon ukrainien faisant partie de la mission de l'ONU ?

18 M. Egbers (interprétation). - Non.

19 M. Harmon (interprétation). - Où se trouvait le Bataillon

20 ukrainien en qualité de partie intégrante de la mission ONU ?

21 M. Egbers (interprétation). - Il se trouvait dans l'enclave de

22 de Zepce, au sud de notre enclave de Srebrenica.

23 M. Harmon (interprétation). - Mon collègue vous a posé une

24 question relative à votre blindé de transports de troupes qui avait subi

25 le feu de combattants musulmans. Je crois que cela a eu lieu le 9 juillet,

Page 2264

1 n'est-ce pas ?

2 M. Egbers (interprétation). - Cela est arrivé au premier jour,

3 lorsque je devais me diriger vers le sud et entrer en contact avec le

4 capitaine Groen.

5 M. Harmon (interprétation). - Donc vous vous trouviez en fait

6 sur un point de blocage pendant que l'armée serbe avançait vers l'enclave.

7 M. Egbers (interprétation). - Oui. Mais avant cela, étant donné

8 que les points d'observation E et F étaient tombés, c'est-à-dire étaient

9 perdus, on m'avait dit de prendre deux blindés transports de troupes et

10 d'essayer de déterminer où se trouvent les lignes de conflit sans pour

11 autant être attirés ou incités à prendre partie au conflit.

12 M. Harmon (interprétation). - Quelles étaient les attentes des

13 Musulmans de Bosnie, de Srebrenica dans l'enclave ? Ils s'attendaient à

14 une protection de votre part ?

15 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est cela, Monsieur.

16 M. Harmon (interprétation). - Quand vous vous êtes dirigé avec

17 un blindé pour le transport des troupes en direction du sud, c'est-à-dire

18 lorsque vous vous êtes dirigé du sud de l'enclave vers Srebrenica, est-ce

19 bien la direction que vous avez prise ?

20 M. Egbers (interprétation). - Quand j'ai vu les 50 soldats

21 d'infanterie qui entraient vers le sud de Srebrenica, le capitaine Groen

22 m'a dit d'y aller et d'essayer de leur porter appui. J'ai conduit pour

23 m'éloigner des Musulmans. Ils ont pensé que nous les quittions, c'est

24 peut-être pour cela qu'ils ont tiré.

25 M. Harmon (interprétation). - Mais vous avez une opinion précise

Page 2265

1 concernant les raisons pour lesquelles les Musulmans ont ouvert le feu

2 vers vous ?

3 M. Egbers (interprétation). - Je ne pouvais pas leur expliquer

4 pourquoi je partais. Par contre, je devais partir tout de suite pour aider

5 quatre autres blindés transports de troupes. Ils ont dû penser que je les

6 abandonnais à leur sort, et que nous supprimions ce poste de blocage. Mais

7 nous sommes allés vers la ville de Srebrenica. Je crois qu'il y avait un

8 manque de communication. Ils devaient être déçus et fâchés par ce qu'il se

9 passait au sud de l'enclave. C'est la raison pour laquelle ils avaient

10 tiré quelques balles vers nous.

11 M. Harmon (interprétation). - Ils étaient fâchés parce qu'ils

12 pensaient que vous les abandonniez à cette partie-là de l'enclave, n'est-

13 ce pas ?

14 M. Egbers (interprétation). - Oui, c'est cela, Monsieur.

15 M. Harmon (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

16 Président. Je n'ai plus de questions pour ce témoin.

17 M. le Président (interprétation). - Avez-vous des questions pour

18 le témoin ?

19 Mme Wald (interprétation). - Capitaine, je voudrais revenir à

20 l'incident dont vous avez été informé par le sergent Mulder, parce que

21 vous étiez à Nova Kasaba.

22 Pour autant que je me souvienne de vos dires, il avait dit qu'il

23 avait été obligé de monter dans le véhicule qui était conduit par les

24 Serbes qui portaient des casques bleus, qu'il devait sortir et se rendre.

25 Vous a-t-il dit, en fait, combien de fois il a réussi à le

Page 2266

1 faire ? Est-ce qu’il vous a dit combien de personnes étaient sorties des

2 forêts sur ses incitations, si cela a pour autant été le cas ?

3 M. Egbers (interprétation). - Il n'a pas réussi parce que,

4 malheureusement, personne n'est entré dans les bois.

5 Mme Wald (interprétation). - Donc il n'a jamais été mis dans une

6 situation de devoir tirer sur quelqu'un au cas où cette personne

7 sortirait ? Même si vous avez déclaré que c'était ce qu'on lui avait

8 demandé de faire ?

9 M. Egbers (interprétation). - C'est exact, Madame le Juge.

10 Mme Wald (interprétation). - Est-ce qu'il vous a donné une idée

11 des menaces qui ont été prononcées contre lui ou exprimées contre lui à ce

12 moment-là ? Lui a-t-on dit peut-être qu'on le tuerait s'il ne faisait pas

13 ce qu'on lui demandait ?

14 M. Egbers (interprétation). - Oui, Madame. Ils ont pointé

15 leur AK47 sur lui tout le temps.

16 Mme Wald (interprétation). - Et ils ont dit : "Vous faites cela

17 ou bien alors... ?".

18 M. Egbers (interprétation). - Oui, Madame.

19 Mme Wald (interprétation). - Est-ce que lui, ou un autre des dix

20 soldats des Nations Unies qui étaient détenus à ce moment-là, a déclaré

21 avoir reçu d'autres tâches du même genre ?

22 M. Egbers (interprétation). - Non, Madame, seulement lui.

23 Mme Wald (interprétation). - Merci. C'est tout, Monsieur le

24 Président.

25 M. le Président (interprétation). - Merci.

Page 2267

1 Capitaine Egbers, vous avez présenté une déposition qui est déjà

2 très claire, mais j'aimerais vous demander quelques détails

3 supplémentaires au cours de quelques-unes de mes questions. Je reprendrai

4 là où Mme le Juge Wald s'est arrêtée s'agissant de l'incident lié au

5 sergent Mulder.

6 Avez-vous rendu compte de cet incident aux autorités

7 supérieures, au commandant des divisions serbes de Bosnie, par exemple ?

8 M. Egbers (interprétation). - J'ai eu des contacts avec le

9 commandant Zoran, je me suis plaint auprès de lui. Cet incident a figuré

10 dans une déclaration écrite en bosno-serbe ou serbo-bosniaque. Je me suis

11 plaint auprès du commandant Zoran de l'incident mais aussi du fait que des

12 véhicules avaient été volés aux Nations Unies et utilisés par les Serbes

13 de Bosnie.

14 M. le Président (interprétation). - Cette action était-elle un

15 vol qui, ensuite, devait être suivi de restitution ou à vous pousser à

16 tirer sur les Musulmans ? Est-ce que votre plainte a obtenu une réponse ou

17 a provoqué une quelconque action ?

18 M. Egbers (interprétation). - Non, monsieur.

19 M. le Président (interprétation). - Cet incident s’est-il

20 reproduit ou a-t-il été un incident isolé ? Est-ce qu’il est arrivé à

21 nouveau que vos objets vous soient volés, que vos vêtement en particulier

22 vous soient dérobés ou utilisés pour faire pression sur les Musulmans

23 d'une façon ou d'une autre ?

24 M. Egbers (interprétation). - Les vols de véhicules se sont

25 poursuivis deux jours. Les casques et les gilets pare-balles, c'étaient

Page 2268

1 des objets qu'on nous volait tout le temps. Et l'incident lié à Mulder

2 n'est survenu qu'une fois. Au total, nous avons perdu 12 à 14 véhicules

3 des Nations Unies et un certain nombre de blindés transports de troupes

4 ont été utilisés par les Serbes de Bosnie.

5 M. le Président (interprétation). – Passons maintenant au

6 terrain de football, si vous le voulez bien. Vous passiez à côté, je

7 crois, le 12 juillet, non loin de Nova Kasaba. Il était plein de Musulmans

8 qui avaient les mains attachées derrière la nuque, n'est-ce pas ?

9 M. Egbers (interprétation). - Je ne voyais pas s'ils étaient

10 attachés ou pas, mais leurs mains étaient sur la nuque.

11 M. le Président (interprétation). – Leurs mains étaient donc sur

12 la nuque. Avaient-ils tous les mains sur la nuque ou certains se passaient

13 peut-être les mains dans les cheveux ?

14 M. Egbers (interprétation). – Ils avaient tous les mains sur la

15 nuque et ils étaient alignés. Tout cela était donc organisé.

16 M. le Président (interprétation). – Ils avaient tous les mains

17 sur la nuque. C'était organisé, avez-vous dit. Vous êtes repassé à cet

18 endroit, et vous n’avez plus vu personne sur le terrain de foot, il était

19 vide ?

20 M. Egbers (interprétation). - En effet.

21 M. le Président (interprétation). - C'était un jour plus tard ou

22 deux jours plus tard ?

23 M. Egbers (interprétation). – Le lendemain.

24 M. le Président (interprétation). – Y avait-il le moindre signe

25 de ce qui s'était passé à cet endroit ou la destination vers laquelle ces

Page 2269

1 personnes avaient été envoyées ? Sur le terrain, voyait-on des traces ?

2 M. Egbers (interprétation). - Il faisait presque nuit. Je ne

3 voyais pas de choses inhabituelles sur le terrain de foot à ce moment-là.

4 M. le Président (interprétation). - Pas de sang ? Rien du tout ?

5 M. Egbers (interprétation). - Rien de ce genre-là.

6 M. le Président (interprétation). - Vous avez dit avoir vu des

7 bagages en feu, était-ce sur le terrain ou ailleurs ?

8 M. Egbers (interprétation). - Pas seulement sur le terrain, mais

9 sur toute la route qui menait à Bratunac. Il y avait des endroits où des

10 objets personnels brûlaient.

11 M. le Président (interprétation). - Pensez-vous que c'étaient

12 les bagages des personnes qui se trouvaient sur le terrain ?

13 M. Egbers (interprétation). - J'en suis sûr.

14 M. le Président (interprétation). - Mais vous n'avez jamais fait

15 la moindre enquête au sujet de l'endroit où ces personnes avaient été

16 emmenées ?

17 M. Egbers (interprétation). - Non, Monsieur.

18 M. le Président (interprétation). - Avez-vous pensé au nombre de

19 ces personnes quand vous les avez vues sur le terrain ?

20 M. Egbers (interprétation). - J'en ai vu quelques centaines.

21 M. le Président (interprétation). - Vous avez mentionné, à un

22 certain moment, que deux garçons musulmans avaient été utilisés pour

23 servir de boucliers humains, qu'ils ont donc été emmenés mais qu'ils sont

24 revenus. Etait-ce un incident récurrent ? Des personnes étaient-elles

25 utilisées comme boucliers, notamment des prisonniers musulmans ?

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1 M. Egbers (interprétation). - Je n'ai vu que cet incident

2 s’agissant de cela. Je ne sais pas si cela avait déjà été fait par le

3 passé.

4 M. le Président (interprétation). – Quel âge avaient ces

5 garçons ?

6 M. Egbers (interprétation). - Je pense qu'ils avaient 14 ou

7 15 ans.

8 M. le Président (interprétation). – Ils étaient prisonniers,

9 détenus ?

10 M. Egbers (interprétation). - Ils étaient détenus dans une

11 maison que j'ai montrée avec le pointeur.

12 M. le Président (interprétation). - Y avait-il beaucoup

13 d'enfants de cet âge qui étaient détenus ?

14 M. Egbers (interprétation). – Ils étaient les plus jeunes ; la

15 plupart des Musulmans qui se trouvaient dans ce bâtiment avaient 30, 40 ou

16 50 ans.

17 M. le Président (interprétation). - Il n'y avait pas de femmes

18 prisonnières ?

19 M. Egbers (interprétation). – Non, Monsieur, pas de femmes.

20 M. le Président (interprétation). - L'une des dernières

21 questions que la défense vous a posées portait sur les armements. Vous

22 avez parlé des armements de mauvaise qualité et des uniformes insuffisants

23 des combattants musulmans. Puisque nous en sommes à ce sujet, quelle

24 était, à votre avis, la source des armements que possédaient les Musulmans

25 et les Serbes ?

Page 2271

1 M. Egbers (interprétation). - J'ai vu avant la chute de

2 l'enclave, j’étais dans le sud, et j'ai vu des Musulmans qui étaient

3 armés. J'ai vu quatre cinq ou six mitrailleuses, ainsi que des AK47 et,

4 pendant la chute de l'enclave, des lance-roquettes multiples RPG7, et bien

5 sûr, il y avait des grenades à main. Les Serbes de Bosnie avaient des

6 véhicules, des canons antiaériens, des ambulances de transports de

7 troupes.

8 Tous les soldats portaient une arme alors que tous les Musulmans

9 ne portaient pas une arme parce qu'il n'y en avait pas assez pour tous les

10 hommes dans l'enclave. Mais j’ai vu des Musulmans de Bosnie par groupe qui

11 étaient armés et qui portaient les armes que je viens de décrire.

12 M. le Président (interprétation). – Quelles armes, excusez-moi ?

13 M. Egbers (interprétation). - Des AK47, quelques mitrailleuses,

14 et de temps en temps une pièce d'artillerie qui n'était jamais utilisée.

15 M. le Président (interprétation). - Jamais utilisée ?

16 M. Egbers (interprétation). – Non, Monsieur.

17 M. le Président (interprétation) - Mais il y avait interdiction

18 de livraison d’armes provenant de l’extérieur, n’est-ce pas ?

19 M. Egbers (interprétation). – En effet.

20 M. le Président (interprétation) - Pour les deux parties ?

21 M. Egbers (interprétation). – Les Musulmans n’étaient pas

22 autorisés à porter des armes à l’intérieur de l’enclave.

23 M. le Président (interprétation) - Je vois. Merci beaucoup.

24 M. Egbers (interprétation). – Je vous en prie.

25 M. le Président (interprétation) - Je pense que nous en sommes à

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1 la fin de votre déposition. Nous aimerions vous remercier pour votre

2 contribution. Nous avons maintenant une pause. S'il y a des pièces à

3 conviction, il est temps d’en demander le versement au dossier.

4 M. Harmon (interprétation). – Oui, merci beaucoup, Monsieur le

5 Juge Riad. J’ai quatre pièces à conviction dont j’aimerais demander le

6 versement au dossier. Pièce à conviction de l’accusation 87, c'est la

7 photo aérienne au sujet de laquelle le capitaine Egbers a témoigné ; pièce

8 à conviction de l’accusation 88, photographie de l'école ; pièce à

9 conviction 89, la grande carte de l'enclave où l'on voit l'emplacement de

10 la compagnie Charly et de la compagnie Bravo ; et pièce à conviction 86,

11 une carte de plus petite taille qui montre les positions des postes de

12 blocage pris par le capitaine Egbers.

13 M. le Président (interprétation) – Maître Petrusic, des

14 objections au versement de ces pièces ?

15 M. Petrusic (interprétation). – La défense n’a pas

16 d'objection au versement de ces pièces du Procureur,

17 et nous n'avons pas de pièce à verser au dossier.

18 M. le Président (interprétation) – Merci beaucoup, Maître

19 Petrusic. Capitaine Egbers, merci encore. Nous allons lever la

20 séance pour vingt minutes.

21

22 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

23 (L’audience, suspendue à 10 heures 40, est reprise à

24 11 heures 10.)

25

Page 2273

1 (Le témoin, M. Stoelinga, est introduit dans le prétoire -

2 Audience publique présidée par le Juge Rodriguez.)

3 M. le Président. - Bonjour. Je vais assumer de nouveau la

4 présidence d'audience. J'en étais empêché avant. Je remercie mes collègues

5 de m'avoir permis de continuer l'audience, et notamment au Juge Fuad Riad.

6 Je salue les parties et les personnes dans la salle.

7 Monsieur le Témoin, vous m'entendez ?

8 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

9 M. le Président. - Vous allez lire la déclaration solennelle que

10 M. l'huissier va vous tendre, s'il vous plaît.

11 M. Stoelinga (interprétation). - Je déclare solennellement que

12 je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

13 M. le Président. - Vous pouvez vous asseoir. Je salue aussi

14 l'interprète qui est aussi, je vous le rappelle, sous serment.

15 Je dois vous remercier d'être venu. Pour l'instant, je vois que

16 vous aller répondre aux questions que M. Cayley va vous poser.

17 Monsieur Cayley, c'est à vous maintenant. Vous avez la parole.

18 M. Cayley (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

19 Bonjour à nouveau parmi nous. Je salue également les autres Juges et les

20 conseils de la défense.

21 Monsieur le Témoin, entre nous, lorsque nous parlons, il y a des

22 interprètes. Donc je vous prierai de bien vouloir penser à aménager une

23 pause entre la fin de ma question et le début de votre réponse. Je vais

24 essayer de parler à un rythme suffisamment lent pour que cette pause soit

25 naturelle dans notre dialogue.

Page 2274

1 Vous vous appelez André Stoelinga, n'est-ce pas ?

2 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

3 M. Cayley (interprétation). - Vous êtes né en 1973 ?

4 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

5 M. Cayley (interprétation). - Et en janvier 1994 vous avez été

6 envoyé pour deux ans dans les rangs de l'armée royale néerlandaise pour un

7 engagement particulier ?

8 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

9 M. Cayley (interprétation). - Votre spécialisation dans l'armée,

10 je crois, consiste à être motocycliste, n'est-ce pas ?

11 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

12 M. Cayley (interprétation). - Vous avez quitté l'armée en

13 janvier 1997 en tant que soldat de 1ère classe. Aujourd'hui, vous êtes

14 étudiant, si je ne m'abuse ?

15 M. Stoelinga (interprétation). - C'est également exact.

16 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous servi dans les rangs du

17 Bataillon néerlandais 3 dans l'enclave de Srebrenica de janvier à

18 juillet 1995 ?

19 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

20 M. Cayley (interprétation). - Et suis-je en droit de dire qu'en

21 juillet 1995 vous vous trouviez au poste d'observation Kilo dans l'enclave

22 de Srebrenica, et que vous conduisiez un blindé transports de troupes du

23 Bataillon néerlandais ?

24 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

25 M. Cayley (interprétation). - Je vous demanderai maintenant

Page 2275

1 d'examiner la pièce à conviction de l'accusation 1E, et de montrer avec le

2 pointeur où se trouvait votre poste d'observation dans l'enclave.

3 Pour le compte rendu d'audience, j'indique que le témoin a placé

4 le pointeur sur le poste d'observation Kilo qui se trouve dans la partie

5 sud de l'enclave. Il l'a indiqué sur la pièce à conviction de

6 l'accusation 1E.

7 Suis-je en droit de dire que, le 8 juillet 1995, votre poste

8 d'observation a été repris par les forces serbes de Bosnie ?

9 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, c'est exact.

10 M. Cayley (interprétation). - Et je crois que c'est en

11 application des ordres qui avaient été donnés au commandant de votre poste

12 d'observation que vous vous êtes rendu aux Serbes, et que vous êtes parti

13 avec eux. Est-ce exact ?

14 M. Stoelinga (interprétation). - C'est également exact.

15 M. Cayley (interprétation). - Quelles étaient les armes que vous

16 possédiez au moment de la capture du poste d'observation ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Mon arme était un fusil Uzi.

18 M. Cayley (interprétation). - Et lorsque le poste d'observation

19 a été capturé, qu'est-il advenu de votre arme ?

20 M. Stoelinga (interprétation). - D'abord je l'ai prise avec moi,

21 mais après avoir parcouru 300 ou 400 mètres, nous avons dû nous arrêter et

22 remettre toutes nos armes aux Serbes.

23 M. Cayley (interprétation). - Je crois savoir que les Serbes

24 vous ont escorté depuis le poste d'observation Kilo jusqu'à la ville de

25 Milici. Est-ce exact ?

Page 2276

1 M. Stoelinga (interprétation). - C'est également exact.

2 M. Cayley (interprétation). - Et je crois savoir que c'est vous

3 qui conduisiez le blindé de transports de troupes de l'armée néerlandaise

4 jusqu'à Milici, blindé dans lequel se trouvaient les hommes qui avaient

5 gardé le poste d'observation.

6 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

7 M. Cayley (interprétation). - Pouvez-vous indiquer à l'aide du

8 pointeur la ville de Milici sur la carte qui se trouve devant vous ? Pour

9 le compte rendu d'audience, j'indique que le témoin a placé le pointeur

10 sur la ville de Milici, sur la pièce à conviction de l'accusation 1E ;

11 Milici étant une ville que l'on trouve dans la partie sud de la pièce à

12 conviction sur la route reliant Vlacenica à Nova Kasaba.

13 Monsieur le Témoin, où est-ce que les Serbes vous ont emmené à

14 Milici ?

15 M. Stoelinga (interprétation). - Ils nous ont emmenés dans ce

16 qu'ils nous ont dit être un ancien commissariat de police.

17 M. Cayley (interprétation). - Quel équipement aviez-vous encore

18 avec vous ? Vous avez dit dans votre déposition écrite que vous aviez déjà

19 perdu vos armes personnelles à ce moment-là, mais quelles étaient les

20 autres pièces d'équipement que vous aviez encore en votre possession ?

21 M. Stoelinga (interprétation). - Chacun d'entre nous possédait

22 encore son casque, son gilet pare-balles et ses objets personnels.

23 M. Cayley (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges ce

24 qu'il est advenu de tous ces objets lorsque vous êtes arrivé dans cet

25 ancien commissariat de police de Milici ?

Page 2277

1 M. Stoelinga (interprétation). - J'ai dû garer mon blindé. Nous

2 sommes tous sortis du blindé. Il y avait plusieurs Serbes à cet endroit.

3 Ils nous ont demandé de leur remettre nos casques et nos gilets pare-

4 balles.

5 M. Cayley (interprétation). - De quelle couleur était le casque

6 que vous avez remis aux Serbes ?

7 M. Stoelinga (interprétation). - Bleu clair.

8 M. Cayley (interprétation). - Dans cet ancien commissariat de

9 police, combien de membres du Bataillon néerlandais ont été placés dans

10 cet ancien commissariat de police par les Serbes ?

11 M. Stoelinga (interprétation). - Au début, il n'y avait là que

12 les hommes qui constituaient l'équipe du poste d'observation Kilo, c'est-

13 à-dire une dizaine d'entre nous.

14 M. Cayley (interprétation). - Comment les Serbes vous ont-ils

15 traités dans ce commissariat de police ?

16 M. Stelinga (interprétation). - Au début, lorsque nous nous

17 sommes arrêtés pour garer notre véhicule, ils nous ont ordonné de leur

18 remettre nos gilets pare-balles et nos casques. Un peu plus tard, un

19 commandant est arrivé et nous a assuré que rien de négatif n'allait nous

20 arriver.

21 M. Cayley (interprétation) - Vous étiez conducteur de ce blindé

22 transport de troupes. Où l'avez-vous garé ?

23 M. Stoelinga (interprétation). - Je l'ai garé sur un parking qui

24 se trouvait devant l'ancien commissariat de police.

25 M. Cayley (interprétation) - Avez-vous remarqué quelque chose de

Page 2278

1 particulier au sujet de ce blindé dans les quelques jours qui ont suivi ?

2 M. Stoelinga (interprétation). - Une fois que nous sommes

3 descendus du blindé, trois ou quatre Serbes l'ont couvert d'une bâche en

4 plastique de façon à le rendre invisible du ciel.

5 M. Cayley (interprétation) - Je crois savoir que, aux environs

6 du 12 ou 13 juillet, l'équipe qui se trouvait au poste d'observation

7 Charly vous a rejoint, n'est-ce pas ?

8 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

9 M. Cayley (interprétation) - Donc quel était le nombre total des

10 soldats néerlandais qui se trouvaient à ce moment-là dans le commissariat

11 de police ?

12 M. Stoelinga (interprétation). - Une vingtaine. Je dis une

13 vingtaine parce que je ne me rappelle pas exactement combien il y avait

14 d'hommes au poste d'observation Charly.

15 M. Cayley (interprétation) - Vous rappelez-vous à quel moment

16 exactement les hommes du poste d'observation Charly vous ont rejoint ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Je crois qu'ils sont arrivés

18 cinq jours après nous.

19 M. Cayley (interprétation) - Vous êtes arrivé le 8 juillet, cela

20 devait donc être le 13 juillet, à peu près ?

21 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, à peu près.

22 M. Cayley (interprétation) - Une fois que les hommes du poste

23 d'observation Charly vous ont rejoint, j'aimerais que vous nous disiez à

24 quel moment vous vous êtes trouvé assis au bord d'une rivière en train de

25 vous rafraîchir les pieds dans l'eau, parce qu'il faisait très chaud ce

Page 2279

1 jour-là, en compagnie d'autres hommes de l'armée néerlandaise ? Car en

2 effet il y avait une rivière non loin du commissariat de police. Pouvez-

3 vous dire ce que vous avez vu à cet endroit ?

4 M. Stoelinga (interprétation). - Eh bien, nous étions assis à

5 cet endroit, et de l'autre côté de la rivière il y avait une route, et

6 nous avons vu des autobus et des camions sur cette route. Dans ces autobus

7 et dans ces camions il n'y avait que des femmes et des enfants.

8 Ces véhicules circulaient en convois qui étaient au départ

9 conduits par des militaires des Nations Unies, mais après quelque temps

10 nous n'avons plus vu de militaires des Nations Unies à la tête de ces

11 convois.

12 M. Cayley (interprétation) - Donc suis-je en droit de dire que

13 vous avez vu un certain nombre de convois composés de véhicules à bord

14 desquels se trouvaient des femmes et des enfants, et que les premiers

15 convois que vous avez vus étaient escortés par des membres du Bataillon

16 néerlandais ? Est-ce exact ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

18 M. Cayley (interprétation) - Quant aux convois suivants, ils

19 n'étaient plus escortés du tout, c'est bien ce que vous vous rappelez ?

20 M. Stoelinga (interprétation). - En effet.

21 M. Cayley (interprétation) - Je crois que le 15 juillet tous les

22 soldats du Bataillon néerlandais qui se trouvaient dans le commissariat de

23 police ont reçu l'ordre de monter à bord d'un autobus. Est-ce exact ?

24 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

25 M. Cayley (interprétation) - Qui vous a accompagnés à bord de

Page 2280

1 cet autobus ?

2 M. Stoelinga (interprétation). - Un Serbe nous a accompagnés

3 dans l'autobus et le chauffeur était un civil.

4 M. Cayley (interprétation) - Vous dites avoir été accompagnés

5 par un Serbe. Qui était ce Serbe ?

6 M. Stoelinga (interprétation). - C'était l'un des hommes qui

7 s'étaient trouvés tous les jours au commissariat de police auparavant.

8 M. Cayley (interprétation) - Etait-il armé ?

9 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, il avait un AK sur lui.

10 M. Cayley (interprétation) - Vous voulez dire un AK47 ?

11 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

12 M. Cayley (interprétation) - Portait-il un uniforme militaire ?

13 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

14 M. Cayley (interprétation) - Pouvez-vous décrire aux Juges le

15 trajet que vous avez emprunté pour aller de Milici à votre destination ?

16 M. Stoelinga (interprétation). - Nous avons quitté Milici dans

17 la direction du Nord.

18 M. Cayley (interprétation) - Vous pourriez peut-être vous lever

19 pour indiquer cela aux Juges sur la carte ?

20 M. Stoelinga (interprétation). - De Milici nous sommes allés

21 vers le nord par cette route.

22 M. Cayley (interprétation) - Un instant, je vous prie. Le témoin

23 a montré sur la pièce à conviction de l'accusation 1E que le bus à bord

24 duquel il se trouvait est allé à partir de Milici vers le Nord, vers

25 Nova Kasaba et Konjevic Polje.

Page 2281

1 Monsieur le Témoin, vous pouvez vous rasseoir, et nous allons

2 parler de la première partie de votre voyage. Pouvez-vous décrire aux

3 Juges ce que vous avez vu à ce moment-là ?

4 M. Stoelinga (interprétation). - Au début, l'autobus roulait

5 assez vite, mais après quelques instants il a rencontré un convoi de chars

6 et de blindés transports de troupes appartenant aux Serbes qui se

7 trouvaient devant nous. Le chauffeur du bus a essayé de dépasser ce

8 convoi, mais il n'y a pas réussi, il a donc dû ralentir et suivre le

9 convoi.

10 M. Cayley (interprétation) - Maintenant, sur ces chars et les

11 blindés, est-ce que vous voyiez des soldats ?

12 M. Stoelinga (interprétation). - Il y avait plusieurs soldats

13 assis sur les véhicules et d'autres étaient en bicyclette.

14 M. Cayley (interprétation) - Pourriez-vous décrire aux Juges de

15 quelle façon les soldats serbes que vous avez vus assis sur ces véhicules

16 étaient vêtus ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - La plupart d'entre eux avaient

18 leur propre uniforme, mais quelques-uns d'entre eux portaient des tee-

19 shirts néerlandais et des uniformes néerlandais, des gilets pare-balles

20 néerlandais ; et quelques-uns d'entre eux avaient également nos casques

21 bleus et également les bérets bleus.

22 M. Cayley (interprétation) - Lorsque vous parlez de ces

23 personnes assises sur ce véhicule, vous parlez des blindés de transports

24 de troupes que vous avez vu passer. Vous rappelez-vous combien de chars et

25 de blindés vous avez vu passer devant vous ?

Page 2282

1 M. Stoelinga (interprétation). - Il est très difficile d'évaluer

2 le nombre exact puisqu'ils se trouvaient devant nous, mais il y avait

3 environ de 10 à 15 véhicules.

4 M. Cayley (interprétation) - Maintenant, pendant que vous

5 parcourriez cette route, avez-vous vu d'autres personnels militaires ?

6 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, sur la route il y avait un

7 petit groupe de Serbes, des groupes de 2 à 3 Serbes par groupe. Ils

8 étaient assis sur le bord de la route et cela ressemblait à une pause. On

9 aurait dit que ces groupes de 30 à 40 hommes prenaient une pause.

10 M. Cayley (interprétation) - Pourriez-vous maintenant décrire

11 aux Juges leur apparence ?

12 M. Stoelinga (interprétation). - Ils étaient couchés, plus ou

13 moins, comme s'ils voulaient se reposer après une journée de fatigue.

14 M. Cayley (interprétation) - Maintenant, lorsque vous vous êtes

15 rendu au carrefour juste avant Konjevic Polje, vous avez tourné à droite.

16 Pourriez-vous nous indiquer le chemin que vous avez pris ?

17 (Le témoin l'indique sur la carte.)

18 Le témoin est en train d'indiquer sur la pièce à conviction de

19 l'accusation 1E qu'il a pris la route qui a tourné à droite sur la

20 jonction en T vers la ville de Bratunac et après le village de

21 Nova Kasaba.

22 Pourriez-vous décrire maintenant le parcours qu'a pris l'autobus

23 quand vous avez tourné à droite sur le chemin de Bratunac ?

24 M. Stoelinga (interprétation). - Pourriez-vous répéter la

25 question ?

Page 2283

1 M. Cayley (interprétation) - Vous venez de décrire aux Juges, en

2 vous servant de votre doigt, la route que vous avez empruntée, ou que

3 l'autobus a empruntée, donc en tournant à droite. Pourriez-vous décrire

4 votre voyage aux Juges ? Qu'avez-vous vu de l'autobus où vous étiez

5 assis ?

6 M. Stoelinga (interprétation). - Au début, le Serbe qui était

7 juste à côté de l'autobus, qui était à bord d'un véhicule à côté de

8 l'autobus était vraiment nerveux. Il a essayé de charger son arme, mais il

9 n'a pas réussi, et par la suite il a essayé de le faire avec ses pieds. Sa

10 réaction était très nerveuse, donc nous pensions que peut-être quelque

11 chose n'allait pas.

12 M. Cayley (interprétation) - Vous dites que le Serbe qui

13 conduisait parallèlement à l'autobus, vous dites qu'il y avait deux Serbes

14 dans l'autobus, qu'il y avait un conducteur et un soldat ; c'était

15 lequel ? C'était le soldat qui était dans l'autobus ?

16 M. Stoelinga (interprétation). - A un moment donné, nous avons

17 senti quelque chose. C'était une odeur que je n'étais pas capable

18 d'identifier à ce moment-là, mais tout le monde savait que quelque chose

19 allait se passer.

20 A ce moment-là nous avons aperçu un très grand camion avec un

21 container sur le dessus. Ce container se trouvait du côté droit de la

22 route. Moi, j'étais dans l'autobus à droite, l'autobus a dépassé le camion

23 qui était stationné. J'ai bien regardé à droite et j'ai vu à l'intérieur

24 du container -je ne pouvais pas regarder à l'intérieur parce que c'était

25 trop haut-, mais j'étais quand même en mesure de voir des corps qui se

Page 2284

1 trouvaient empilés dans le container.

2 M. Cayley (interprétation) - Monsieur Stoelinga, vous rappelez-

3 vous quelle était la dimension de ce container qui se trouvait derrière ce

4 camion ?

5 M. Stoelinga (interprétation). - C'était un camion tout à fait

6 normal, donc d'après moi il était environ de 5 à 6 mètres de long et peut-

7 être de 2,5 mètres en largeur et environ un mètre et demi en profondeur.

8 M. Cayley (interprétation). - Vous dites que vous étiez en

9 mesure de voir des corps à l'intérieur ; vous ne pouviez pas regarder

10 directement à l'intérieur mais vous avez vu des corps. Combien de corps

11 avez-vous vus ?

12 M. Stoelinga (interprétation). – J’ai vu de 7 à 8 corps.

13 C'étaient des corps qui ressortaient du container, qui étaient sur le

14 dessus du container.

15 M. Cayley (interprétation). - Pourriez-vous décrire l'apparence

16 de ces corps aux Juges ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Les cadavres que j'ai vus

18 étaient tous enflés et un peu bleuâtres, bleutés. Et tous ces cadavres ne

19 portaient que des pantalons.

20 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que c’étaient des hommes ou

21 des femmes ?

22 M. Stoelinga (interprétation). – Les corps que j'ai vus étaient

23 des corps d’hommes.

24 M. Cayley (interprétation). - Je sais que c'est très difficile

25 d'évaluer dans une situation comme celle-là l'âge de ces personnes que

Page 2285

1 vous avez vues, mais pourriez-vous nous donner l'âge approximatif de ces

2 cadavres que vous avez vus ?

3 M. Stoelinga (interprétation). - La moyenne d'âge des cadavres

4 que j'ai vus aurait pu être de 20 à peut-être 40 ans.

5 M. Cayley (interprétation). - Vous dites qu'ils ne portaient que

6 des pantalons. Voulez-vous dire qu'ils étaient torse nu ?

7 M. Stoelinga (interprétation). – Oui, c'est exact.

8 M. Cayley (interprétation). - Vous rappelez-vous s'ils portaient

9 des chaussures ? Est-ce que vous pouvez vous rappeler ?

10 M. Stoelinga (interprétation). – Non. Mais je suis certain

11 qu'ils ne portaient pas de chemise.

12 M. Cayley (interprétation). – Maintenant, vous avez dit non.

13 Est-ce que cela veut dire que vous ne vous souvenez pas ?

14 M. Stoelinga (interprétation). – Oui, c'est exact, je ne me

15 souviens plus.

16 M. Cayley (interprétation). – Pouviez-vous voir la nature des

17 blessures de ces cadavres ?

18 M. Stoelinga (interprétation). – Non, je n'étais pas en mesure.

19 M. Cayley (interprétation). – Maintenant, vous avez décrit une

20 odeur. Vous parliez d'une odeur que vous ne reconnaissiez pas. Quelle

21 était l'intensité de cette odeur ?

22 M. Stoelinga (interprétation). – C'était une odeur très forte.

23 C'est une odeur que je n'oublierai jamais.

24 M. Cayley (interprétation). - Maintenant, à l'époque, vous nous

25 avez parlé de cette odeur intense. Est-ce que vous avez pu conclure ou

Page 2286

1 évaluer le nombre de corps qui se trouvaient dans ce container ?

2 M. Stoelinga (interprétation). – Non, à l'époque, je n'étais pas

3 en mesure de conclure en ce qui a trait au nombre des corps.

4 M. Cayley (interprétation). – Par la suite, avez-vous pu évaluer

5 le nombre de corps ?

6 M. Stoelinga (interprétation). - Par la suite, j'ai pu conclure

7 que le container de ce camion était probablement complètement rempli de

8 cadavres.

9 M. Cayley (interprétation). – Maintenant, après avoir passé ce

10 camion qui se trouvait du côté droit de la route, pourriez-vous dire aux

11 Juges ce que vous avez vu par la suite ?

12 M. Stoelinga (interprétation). - L'autobus a continué son chemin

13 et, à un moment donné, l’autobus a ralenti. Il y avait un corps qui était

14 allongé sur la route et le chauffeur ne savait pas quoi faire : s'il

15 devait arrêter ou dépasser le corps. Il y avait également deux hommes qui

16 portaient des manteaux jaunes, des vestes jaunes, et il y avait deux

17 véhicules ; l'un ressemblait à un bulldozer, et l'autre…

18 Il y avait une niveleuse. On aurait dit qu'ils étaient en train

19 de nettoyer la route. Ils étaient tout près des corps et on aurait dit

20 qu'ils étaient justement en train de mettre ce corps à l'intérieur du

21 véhicule.

22 M. Cayley (interprétation). - Quand vous parlez de ce véhicule,

23 vous parlez d'un véhicule qui aurait une pelle mécanique ?

24 M. Stoelinga (interprétation). – Oui, c'est exact.

25 M. Cayley (interprétation). – Lorsque vous avez vu cette scène,

Page 2287

1 vous avez vu ce bulldozer et un corps sur le bord de la route. Que

2 pensiez-vous de la scène ?

3 M. Stoelinga (interprétation). - J'avais l'impression qu'ils

4 étaient en train de nettoyer la route ou qu'ils se débarrassaient des

5 corps.

6 M. Cayley (interprétation). - De quelle façon les autres membres

7 du Bataillon néerlandais ont-ils réagi quand ils ont vu cette même scène ?

8 M. Stoelinga (interprétation). - Quelques-uns d'entre-nous ont

9 réagi de la façon qui voulait dire plutôt que nous ne voulions pas

10 regarder, et d'autres ont regardé.

11 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous avez continué à

12 regarder ?

13 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

14 M. Cayley (interprétation). - Je pense que l'autobus a poursuivi

15 son chemin pendant encore quelques centaines de mètres. Pourriez-vous

16 décrire ce que vous avez vu au juste par la suite ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Après cela, sur le côté droit

18 de la route, il y avait quelques petit tas de vêtements et on pouvait

19 apercevoir sur le dessus de ce tas des souliers, des couteaux, des clefs.

20 Tous ces tas se trouvaient à un mètre les uns des autres.

21 M. Cayley (interprétation). - Juste pour être clair pour le

22 compte rendu, vous avez donc vu des piles de vêtements à une distance d'un

23 mètre les uns des autres et vous avez vu, sur le dessus de ces piles de

24 vêtements, soit des couteaux, des clefs ou des chaussures. Est-ce exact ?

25 M. Stoelinga (interprétation). – Oui, c'est exact.

Page 2288

1 M. Cayley (interprétation). – Maintenant, pendant combien de

2 mètres vous aperceviez ces piles de vêtements ?

3 M. Stoelinga (interprétation). - Sur une distance de 200 à

4 300 mètres.

5 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que c’était désordonné, ou

6 étaient-ce des piles qui avaient été empilées de façon ordonnée ?

7 M. Stoelinga (interprétation). - Cela avait l'air de piles qui

8 avaient été empilées de façon ordonnée.

9 M. Cayley (interprétation). - Dans votre témoignage, vous avez

10 dit que vous avez vu un camion avec des cadavres sur le dessus et, par la

11 suite, vous avez vu ces vêtements empilés d'une façon très ordonnée sur le

12 bord de la route. Quelle était votre opinion à l’époque ?

13 M. Stoelinga (interprétation). – Je n’avais pas fait de lien

14 entre les deux à l’époque. C’est seulement par la suite que je l'ai fait.

15 M. Cayley (interprétation). - Et qu'avez-vous pensé par la

16 suite ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Je crois que les corps qui se

18 trouvaient dans le camion étaient probablement… C'étaient probablement des

19 gens qui ont dû enlever leurs vêtements.

20 M. Cayley (interprétation). – Je crois que l'autobus a poursuivi

21 son chemin pendant quatre ou cinq minutes, et vous avez vu autre chose.

22 Pouvez-vous décrire aux Juges ce que vous avez vu par la suite ?

23 M. Stoelinga (interprétation). – Sur le côté gauche de la route

24 et à une distance d’environ 200 mètres, j’ai vu d'autre véhicules en train

25 de nettoyer… Il y avait encore une fois un bulldozer et il y avait

Page 2289

1 également un camion qui était là, mais la distance était trop importante

2 pour que je puisse voir quelque chose. Je n'ai pas pu voir quelque chose

3 de très précis.

4 M. Cayley (interprétation). - J'aimerais maintenant que l'on

5 parle de nouveau du camion rempli de cadavres et les piles de vêtements

6 qui se trouvaient à intervalles d'un mètre. J’aimerais que vous indiquiez

7 sur la carte qui est derrière vous, qui est la pièce à conviction 1E,

8 pouvez-vous nous dire, d'après vos souvenirs : où croyez-vous avoir vu ce

9 camion et ces piles de vêtements sur le bord de la route ?

10 M. Stoelinga (interprétation). – (Hors micro).

11 M. Cayley (interprétation). - Je vais le lire pour le compte

12 rendu. Le témoin a indiqué que l’endroit qu’il a vu se trouvait sur la

13 route entre Konjevic Polje et Bratunac, et plus précisément ce qu'il a vu,

14 il a indiqué que c’était entre les villages de Kravica et Kladovo. Est-ce

15 exact, Monsieur le Témoin ?

16 M. Stoelinga (interprétation). – Oui, c'est exact.

17 M. Cayley (interprétation). - Par la suite, vous vous êtes rendu

18 à Bratunac et puis vous avez été évacué de l'enclave ; donc de Bratunac

19 par la Serbie et, ensuite, en Croatie. C’est là que vous êtes revenu aux

20 Pays-Bas, est-ce exact ?

21 M. Stoelinga (interprétation). – Oui, c’est exact.

22 M. Cayley (interprétation). - Merci beaucoup, Monsieur

23 Stoelinga.

24 Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres questions. Si mes

25 collègues de la défense veulent bien contre-interroger le témoin.

Page 2290

1 M. le Président. - Merci beaucoup. Je vois que c’est

2 Me Petrusic. Vous allez maintenant répondre aux questions que Me Petrusic,

3 avocat de la défense, va vous poser, s’il vous plaît. Maître Petrusic,

4 vous avez la parole.

5 M. Petrusic (interprétation). – Merci Monsieur le Président.

6 Bonjour, Monsieur Stoelinga. Le capitaine Groen était le commandant de la

7 compagnie B, est-ce exact ?

8 M. Stoelinga (interprétation). - C'est exact.

9 M. Petrusic (interprétation). - Est-ce qu'il vous a suggéré que,

10 si jamais les troupes serbes prenaient les postes d'observation, il serait

11 important que vous décidiez de réagir en conséquence ?

12 M. Stoelinga (interprétation). - Il ne m'a pas donné ce genre

13 d'avis. Par contre, il a visé ou donné une suggestion au commandant du

14 poste d'observation.

15 M. Petrusic (interprétation). - Je ne voulais pas dire vous dire

16 vous-même, mais je pensais plutôt à l'unité à laquelle vous apparteniez.

17 Donc votre commandant, d'après la situation, a décidé que vous deviez

18 quitter avec l'armée serbe. Est-ce exact ?

19 M. Stoelinga (interprétation). - Je crois que notre capitaine a

20 essayé d'établir le fait qu'il n'était pas sur la scène à l'époque et donc

21 il ne savait pas ce qui se passait. Il a donc donné au commandant du poste

22 d'observation, qui avait une meilleure idée de la situation, il leur a

23 donné le choix.

24 M. Petrusic (interprétation). - Est-ce que c'était donc le

25 commandant du poste d'observation ?

Page 2291

1 M. Stoelinga (interprétation). - Le commandant de notre poste

2 d'observation a décidé de partir avec les Serbes.

3 M. Petrusic (interprétation). - Est-ce que les membres de la VRS

4 ont utilisé des menaces ou des armes, ou est-ce qu'ils ont menacé

5 d'utiliser des armes ?

6 M. Stoelinga (interprétation). - Nous avions été pilonnés par

7 une pièce d'artillerie pendant six heures et les Serbes, qui avaient pris

8 notre poste d'observation, ne se sont pas servis d'armes, n’ont pas

9 riposté. Ils n’ont pas utilisé d'armes à feu.

10 M. Petrusic (interprétation). - A l'endroit où vous avez aperçu

11 le camion avec le container, dont vous nous avez parlé tout à l'heure, y

12 avait-il des combats à cet endroit-là entre les forces serbes et les

13 forces musulmanes ?

14 M. Stoelinga (interprétation). - Je ne suis pas au courant s'il

15 y avait des combats à cet endroit de l'enclave.

16 M. Petrusic (interprétation). - Vous étiez soldat, êtes-vous au

17 courant des termes "assainissement du terrain" ?

18 M. Stoelinga (interprétation). - De quelle façon vous voulez

19 dire "assainissement" ou "ratissement" du terrain ?

20 M. Petrusic (interprétation). - Après une action de combat ?

21 M. Stoelinga (interprétation). - Après une action de combat, je

22 crois qu'il est tout à fait logique de ramasser les morts et d'essayer de

23 les enterrer.

24 M. Petrusic (interprétation). - M. Stoelinga, je vous remercie,

25 je n'ai pas d'autres questions. Merci, Monsieur le Président.

Page 2292

1 M. le Président. - Merci beaucoup, Monsieur Petrusic.

2 Monsieur Cayley, avez-vous des questions supplémentaires ?

3 M. Cayley (interprétation). - Seulement quelques questions,

4 Monsieur le Président, merci.

5 Monsieur Stoelinga, mon éminent collègue, Me Petrusic, vous a

6 posé quelques questions concernant ces cadavres que vous aviez vus et il

7 vous a demandé si vous aviez vu une lutte ou un combat qui avait lieu dans

8 la zone en question. Vous vous rappelez de cela ?

9 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, c'est exact.

10 M. Cayley (interprétation). - Il a suggéré dans les questions

11 qu'il vous a posées que les soldats ou les personnes que vous avez vues à

12 l'arrière de ce camion étaient des combattants ?

13 M. le Président. - Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur

14 Cayley. Maître Petrusic veut prendre la parole. Maître Petrusic ?

15 M. Petrusic (interprétation). - Monsieur le Président, dans mes

16 questions je n'ai pas du tout suggéré rien de la sorte, donc j'objecte à

17 la question ou à l'intervention de M. Cayley.

18 M. le Président. - Monsieur Cayley ?

19 M. Cayley (interprétation). - Si je puis répliquer, Monsieur le

20 Président, je crois que la conclusion a été très claire, M. Petrusic

21 voulait suggérer que les corps que M. Stoelinga a vus étaient des

22 combattants. C'est ce que j'ai compris et je suis sûr que tout le monde à

23 l'intérieur de cette salle d'audience a compris la même chose. Et

24 j'aimerais demander au témoin s'il a pu comprendre exactement la même

25 chose, que c'étaient donc des gens qui ont été tués.

Page 2293

1 M. le Président. - Monsieur Cayley, vous pouver poser la

2 question. Vous comprenez la réplique de M. Cayley, je crois qu'il a

3 raison, Maître Petrusic. Donc vous pouvez poursuivre, Monsieur Cayley.

4 M. Petrusic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, mais

5 mon objection était à l'effet seulement concernant la constatation de

6 M. Cayley que j'ai dit quelque chose avec certitude, je n'ai pas essayé de

7 certifier des choses, mais j'accepte votre suggestion, merci.

8 M. le Président. - Donc M. Cayley va poser la question.

9 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Stoelinga, lorsque vous

10 avez vu ces cadavres et ces vêtements le long de la route, est-ce que vous

11 pensiez que ces individus que vous avez vus dans le camion étaient morts

12 au combat ou tombés au combat ?

13 M. Stoelinga (interprétation). - Non, ce n'est pas cela que j'ai

14 cru, puisqu'à ce moment-là j'aurais probablement vu des armes.

15 M. Cayley (interprétation). - De quelle façon pensez-vous que

16 ces gens ont été tués, que pensiez-vous à l'époque ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Je croyais qu'ils étaient

18 exécutés.

19 M. Cayley (interprétation). - Pourquoi concluez-vous ce fait ?

20 M. Stoelinga (interprétation). - A cause de la pile des

21 vêtements et des chaussures, et également parce que ces corps ne portaient

22 pas de chemises, ils étaient torse nu. Donc, au combat, un mort tombé au

23 combat porterait quand même une chemise.

24 M. Cayley (interprétation). - Merci, Monsieur le Président, je

25 n'ai pas d'autres questions pour ce témoin.

Page 2294

1 M. le Président. - Merci, Monsieur Cayley.

2 Monsieur le Juge Fuad Riad ?

3 M. Riad (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

4 Bonjour, Monsieur Stoelinga. Pour continuer dans la même veine

5 de questions concernant cette pile de corps dans le camion, vous avez

6 mentionné qu'ils étaient enflés et qu'ils étaient bleus. Qu'est-ce que

7 vous voulez dire par cela ? Est-ce qu'ils étaient enflés ? Vous voulez

8 dire que c'étaient des gens obèses ou qu'ils avaient bu énormément de

9 bière, ou quoi d'autre ? Que voulez-vous dire par cela ?

10 M. Stoelinga (interprétation). - Je crois que ces cadavres ont

11 été empilés là pendant un certain temps et que, dans la chaleur

12 environnante, il faisait environ 30 degrés centigrades, c'est la raison

13 pour laquelle je crois qu'ils étaient légèrement enflés et que la couleur

14 était légèrement bleuâtre.

15 M. Riad (interprétation). - Donc vous pensez que c'était le

16 résultat de la température ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, et également à cause du

18 temps qu'ils ont passé là.

19 M. Riad (interprétation). - Et cette couleur bleue ne vous a pas

20 donné une impression de torture ou de quoi que ce soit de ce genre ?

21 M. Stoelinga (interprétation). - Non.

22 M. Riad (interprétation). - Très bien. Les vêtements que vous

23 avez aperçus empilés sur la route étaient des vêtements militaires ou

24 avez-vous pu remarquer si c'étaient des vêtements civils ?

25 M. Stoelinga (interprétation). - Non, c'étaient des vêtements

Page 2295

1 civils.

2 M. Riad (interprétation). - Bon, donc des vêtements civils.

3 Vous avez mentionné que vous étiez assis tout près de la

4 rivière, vos pieds dans l'eau, et qu'à ce moment-là vous avez aperçu un

5 nombre de convois avec des femmes et des enfants. D'abord ces convois

6 étaient escortés et par la suite ils ne l'étaient plus.

7 Par la suite, est-ce que vous avez appris quelque chose

8 concernant ces convois, soit des gens qui les ont escortés, soit d'autres

9 sources ?

10 M. Stoelinga (interprétation). - Par la suite, j'ai entendu que

11 c'étaient des gens qui étaient probablement déportés de Potocari vers une

12 autre destination.

13 M. Riad (interprétation). - Est-ce qu'ils sont arrivés ? Où se

14 sont-ils dirigés ?

15 M. Stoelinga (interprétation). - Je ne peux pas vous le dire

16 puisque je les ai simplement vus de la route à une distance de 50 mètres,

17 donc je ne sais pas où ils se sont rendus.

18 M. Riad (interprétation). - Vos collègues qui ont accompagné les

19 premiers convois, est-ce qu'ils les ont emmenés à un endroit sécuritaire ?

20 M. Stoelinga (interprétation). - Nous n'avions pas à moment-là

21 de contact radio avec nos gens, de sorte que je ne sais pas s'ils se sont

22 rendus à destination.

23 M. Riad (interprétation). - Vous avez mentionné avoir vu un

24 cadavre sur la route. Etait-ce le seul corps que vous avez vu directement

25 sur la route ? Est-ce exact ?

Page 2296

1 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, c'était le seul cadavre

2 qui était sur la route.

3 M. Riad (interprétation). - Est-ce que ce corps était vêtu ?

4 M. Stoelinga (interprétation). - Non, il ne portait que des

5 pantalons.

6 M. Riad (interprétation). - Et le corps n'était pas couvert ?

7 M. Stoelinga (interprétation). - Non, il ne portait pas de

8 chaussures non plus.

9 M. Riad (interprétation). - Pas de chaussures. Merci beaucoup.

10 M. le Président. - Merci beaucoup, Monsieur le Juge Fuad Riad.

11 Madame le Juge Wald.

12 M. Wald (interprétation). - Seulement quelques questions.

13 D'après ce que j'ai compris, quand vous avez aperçu les corps

14 pendant que vous retourniez vers Bratunac, il s'agissait bien du 15

15 juillet, est-ce exact ? Je crois que vous avez témoigné à cet effet.

16 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, c'est exact.

17 M. Wald (interprétation). - Donc, en d'autres mots, c'était

18 quelques jours après que vous ayez aperçu les premiers convois, donc quand

19 vous étiez près de la rivière ?

20 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

21 M. Wald (interprétation). - Je ne sais pas si je comprends très

22 bien. De quelle façon est-ce que vous étiez en mesure de voir les 7 ou

23 8 corps que vous avez vus, si vous ne pouviez pas voir à l'intérieur du

24 container, alors que vous étiez dans un véhicule qui essayait de dépasser

25 ce même véhicule ? Je sais que c'était du même côté, du côté droit. Mais

Page 2297

1 est-ce que les corps que vous étiez en mesure de voir se trouvaient sur le

2 dessus ou sortaient du dessus ?

3 M. Stoelinga (interprétation). - Les corps que j'ai pu

4 apercevoir débordaient, en fait, étaient sur le dessus.

5 M. Wald (interprétation). - Donc ils débordaient du container ?

6 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, c'est exact.

7 Mme Wald (interprétation). - Vous avez mentionné également que

8 les effets personnels, les chaussures, etc., se trouvaient très bien

9 empilés, d'une façon ordonnée, à quelques centaines de mètres les uns des

10 autres.

11 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, pendant 200 ou 300 mètres

12 on les voyait. Par la suite, il y avait une distance d'un mètre entre les

13 piles. C'étaient des piles qui étaient très bien ordonnées.

14 Mme Wald (interprétation). - Mais ça n'apparaît pas que c'était

15 encore des piles très bien ordonnées ; personne ne les avait dérangées ?

16 M. Stoelinga (interprétation). - Oui, c'est exact.

17 Mme Wald (interprétation). - Maintenant, M. Petrusic vous a

18 demandé si, en tant qu'ex-militaire, vous connaissiez l'expression

19 "ratissement du terrain après un combat". Vous avez dit que vous

20 connaissiez ce terme parce qu'il est tout à fait usuel, après un combat,

21 de ramasser les corps pour pouvoir les enterrer.

22 Est-ce que vous savez si, lorsque cela arrive après un combat,

23 on enlève les vêtements des soldats ? Ou est-ce que ces gens-là et ces

24 soldats morts au combat sont enterrés avec les vêtements qu'ils portaient

25 au moment de la mort ?

Page 2298

1 M. Stoelinga (interprétation). - Je n'ai jamais personnellement

2 été impliqué dans ce genre de situation, mais je ne crois pas qu'on

3 enlèverait les vêtements des morts au combat.

4 Mme Wald (interprétation). - Merci.

5 M. le Président. - Monsieur Stoelinga, j'ai une question. Quelle

6 heure était-il quand vous êtes passé dans cette route entre Kravica et

7 Glogova, plus ou moins ?

8 M. Stoelinga (interprétation). - Je pense qu'il devait être vers

9 midi.

10 M. le Président. - Vers midi. Donc il y avait beaucoup de

11 lumière. Vous pouviez bien voir ?

12 M. Stoelinga (interprétation). - Oui.

13 M. le Président. - Une autre question : vous avez parlé de

14 camions escortés et d'autres qui n'étaient pas escortés. Est-ce que,

15 après, vous avez appris pourquoi il y avait des camions escortés et

16 d'autres camions qui n'étaient pas escortés ?

17 M. Stoelinga (interprétation). - Eh bien, d'après ce que j'ai pu

18 apprendre au début, les membres de mon bataillon de Potocari avaient

19 essayé d'escorter tous les groupes qui sortaient. Mais on les enlevait de

20 leur véhicule tout simplement. Et ils ont dit : "Bien ! Nous ne pouvons

21 plus les escorter, car nous n'avons pas suffisamment de véhicules ou pas

22 suffisamment d'effectifs pour les accompagner".

23 M. le Président. - Je crois que vous avez dit que quelqu'un vous

24 a dit qui étaient ces personnes qui vous ont expliqué ça.

25 M. Stoelinga (interprétation). - Cela est arrivé une fois que

Page 2299

1 nous étions entrés aux Pays-Bas, aux premières réunions d'information que

2 nous avions effectuées.

3 M. le Président. - Monsieur Stoelinga, vous avez fini votre

4 témoignage, ici, au Tribunal international. Nous vous remercions

5 beaucoup. Vous êtes encore jeune. Vous êtes étudiant. Je crois

6 que vous avez vécu tous ces événements horribles indépendamment

7 de celui qui est le responsable. Vous êtes dans de bonnes

8 conditions, à mon avis, pour expliquer aux gens que vous

9 rencontrez qu'une injustice quelque

10 part sera toujours une menace partout.

11 Monsieur Cayley, est-ce que nous avons des pièces à conviction à

12 régler ? Je crois que non.

13 M. Cayley (interprétation). - Non, il n'y en a pas, Monsieur le

14 Président.

15 M. le Président. - Je voudrais profiter de l'interruption de

16 M. Cayley pour que l'identité du témoin reste bien claire, parce que j'ai

17 vu, au début du transcript, un nom "Van der Zwan", et je vois qu'il s'agit

18 de M. Stoelinga. Est-ce que vous pouvez clarifier cela ?

19 La sténotypiste me fait signe que cela est déjà corrigé. Donc il

20 s'agit bien de M. Stoelinga. C'est bien. Merci beaucoup.

21 Nous vous remercions encore une fois, Monsieur Stoelinga. Merci

22 beaucoup d'être venu.

23 Monsieur l'huissier peut aider le témoin.

24 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

25 M. le Président. - Monsieur Cayley, du point de vue de

Page 2300

1 l'organisation des travaux, je voudrais savoir si le prochain témoin est

2 un témoin qui va déposer en audience publique ?

3 M. Cayley (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.

4 M. le Président. - Pour ne pas couper, nous allons faire une

5 pause de vingt minutes maintenant. Pour le public, je dois dire que l'on

6 reprendra vingt minutes après en session publique.

7 (L'audience, suspendue à 12 heures, est reprise à 12 heures 20.)

8 (Le témoin, Martin Van der Zwan, est introduit dans le prétoire

9 - Audience publique.)

10 M. le Président. - Bonjour, Témoin Van der Zwan. Vous allez

11 faire la déclaration solennelle que M. l'huissier va vous tendre.

12 M. Van der Zwan (interprétation). - Je déclare solennellement

13 que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

14 M. le Président. - Je rappelle à notre interprète qu'il est

15 aussi sous serment. Merci beaucoup d'être venu. Vous allez, pour

16 l'instant, répondre aux questions -je vois que c'est M. Harmon, le

17 Procureur- que l'on va vous poser.

18 Maître Harmon, c'est à vous. Vous avez la parole.

19 M. Harmon (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

20 Monsieur le Témoin, pouvez-vous me dire comment on écrit votre

21 nom ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - J'épelle : Z-W-A-N.

23 M. Harmon (interprétation). - Vous êtes membre de l'armée

24 néerlandaise ?

25 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

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1 M. Harmon (interprétation). - Quel est votre grade ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - Je suis sergent.

3 M. Harmon (interprétation). - Vous êtes entré dans l'armée

4 néerlandaise en 1992 ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

6 M. Harmon (interprétation). - Vous avez fait votre service en

7 ex-Yougoslavie en tant que membre de deux missions, n'est-ce pas ?

8 M. Van der Zwan (interprétation). - Si on additionne l'ensemble,

9 cela fait trois pour le moment.

10 M. Harmon (interprétation). - Nous allons discuter des deux

11 premières missions. Quand êtes-vous allé pour la première fois en mission

12 de l'ONU en ex-Yougoslavie ? Et où êtes-vous allé ?

13 M. Van der Zwan (interprétation). - C'était en 1993, dans la

14 partie que nous appelions "secteur Sud", dans la Krajina. Je me trouvais à

15 Benkovac.

16 M. Harmon (interprétation). - Et combien de temps avez-vous

17 passé à cet endroit-là ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - J'y ai passé quelque

19 six mois.

20 M. Harmon (interprétation). - Et où avez-vous été présent

21 physiquement ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Il s'agissait d'une base

23 dans une caserne de l'armée serbe à Benkovac.

24 M. Harmon (interprétation). - S'agissait-il de l'armée des

25 Serbes de la Krajina ?

Page 2302

1 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

2 M. Harmon (interprétation). - Et quand êtes-vous allé pour la

3 deuxième fois en mission de l'ONU en ex-Yougoslavie ?

4 Je vous prie de patienter entre mes questions et vos réponses.

5 Nous en avons déjà parlé hier. Il est très important que vous fassiez une

6 petite pause après ma question pour répondre.

7 Je vous prie de me dire quand êtes-vous allé pour la deuxième

8 fois en mission en ex-Yougoslavie ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Il s'agit de l'année 1995 et

10 je me suis trouvé à Srebrenica.

11 M. Harmon (interprétation). - Vous étiez membre du 3e Bataillon

12 néerlandais à Srebrenica ?

13 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

14 M. Harmon (interprétation). - Quelles ont été vos tâches pendant

15 votre service dans l'enclave ?

16 M. Van der Zwan (interprétation). - J'étais tireur, j'ai

17 patrouillé, et j'ai travaillé à des points d'observation.

18 M. Harmon (interprétation). - Je voudrais que vous vous référiez

19 à l'époque où vous vous trouviez au point d'observation qui s'appelait

20 "U", "Uniforme".

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, c'est là que j'étais.

22 M. Harmon (interprétation). - Je voudrais que vous nous montriez

23 avec le pointeur où, sur la carte 1E, que vous nous montriez, que vous

24 montriez aux Juges où se trouvait ce poste d'observation Uniforme.

25 M. Van der Zwan (interprétation). - A ce point-ci.

Page 2303

1 M. Harmon (interprétation). - Je ne vois pas sur le moniteur,

2 sur l'écran, mais je vois sur la carte que le témoin est en train de nous

3 montrer, avec son pointeur, un point au sud de l'enclave, près de

4 l'emplacement où se trouve la lettre U. C'est là que se trouvait ce poste

5 d'observation ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est cela.

7 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous me dire, et aux Juges

8 également, quand les membres de l'armée serbe de Bosnie avaient pris ce

9 point d'observation ?

10 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

11 M. Harmon (interprétation). - Etiez-vous présent quand ce poste

12 avait été pris ?

13 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, j'étais présent.

14 M. Harmon (interprétation). - Combien de soldats néerlandais y

15 avait-il à ce poste d'observation, à l'époque où ce poste avait été pris ?

16 M. Van der Zwan (interprétation). - Il y avait 6 soldats et un

17 sergent.

18 M. Harmon (interprétation). - Avant que les membres de l'armée

19 des Serbes de Bosnie n'aient pris ce point d'observation, le poste avait-

20 il été pilonné par les Serbes de Bosnie ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

22 M. Harmon (interprétation). - Et de quelle sorte de pilonnage

23 s'était-il agi ? Et combien de temps cela avait-il duré ?

24 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, cela a commencé

25 avec des roquettes qui ont survolé notre poste d'observation. Puis il y a

Page 2304

1 eu une brève interruption, puis des tirs d'artillerie et ensuite des tirs

2 de mortier de petit calibre. Puis est arrivée l'infanterie.

3 M. Harmon (interprétation). - Je prierai M. l'huissier de

4 montrer les pièces à conviction 96 et 93 sur le rétroprojecteur.

5 Monsieur le Témoin, avant que je ne vous montre ces pièces à

6 conviction, pouvez-vous nous dire si les membres de l'infanterie des

7 Serbes de Bosnie étaient entrés en contact avec vous et d'autres membres

8 du Bataillon néerlandais se trouvant à ce poste d'observation ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

10 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire les

11 premiers soldats qui ont réalisé quelque contact avec vous ?

12 M. Van der Zwan (interprétation). - Certes. Il s'agissait de

13 soldats bien habillés. Ils avaient des uniformes de camouflage avec des

14 gilets pare-balles de couleur noire. Ils avaient des insignes sur leur

15 manche où l'on voyait un loup en train de hurler.

16 M. Harmon (interprétation). - Je vous prie de placer la pièce à

17 conviction n°96.

18 (L'huissier s'exécute.)

19 Vous avez déjà pu voir cette photo dans mes bureaux ?

20 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

21 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous voyez l'insigne

22 sur la manche de ce soldat ?

23 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

24 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous montrer aux Juges

25 quand vous avez parlé de l'insigne sur la manche portant donc le dessin

Page 2305

1 d'un loup ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est ceci.

3 M. Harmon (interprétation). - Il s'agit donc de l'insigne que

4 l'on voit sur le côté droit de la photographie. Pas tout à fait à droite,

5 parce que c'est une autre personne que l'on y voit. Est-ce que tous les

6 soldats qui sont parvenus à votre poste d'observation portaient ce même

7 insigne ?

8 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

9 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous vu des soldats qui

10 portaient des insignes différents, et qui étaient arrivés jusqu'à ce poste

11 d'observation ?

12 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Un peu plus tard,

13 lorsque ces soldats sont allés plus loin dans l'enclave, un autre groupe

14 est arrivé avec un officier. Ils sont donc venus à notre poste

15 d'observation.

16 M. Harmon (interprétation). - Je voudrais demander à

17 M. l'huissier de placer la pièce à conviction n°93 sur le rétroprojecteur.

18 Quoi que l'image ne soit pas tout à fait claire sur l'écran, je

19 voudrais que vous nous décriviez, c'est-à-dire qu'une fois que vous avez

20 vu cet insigne sur la manche de ce soldat, je voudrais que vous disiez aux

21 Juges ce que vous avez à commenter au sujet de ces images ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, il s'agit d'un

23 insigne qui m'avait été donné par l'un des soldats qui étaient arrivés à

24 notre poste d'observation. Il est arrivé jusqu'à la clôture, il a commencé

25 à s'entretenir avec nous, il nous a offert des cigarettes. Je lui ai

Page 2306

1 demandé, à cet homme qui nous a offert des cigarettes, je lui ai demandé

2 de savoir quel genre d'insigne c'était puisque je faisais collection de

3 différents emblèmes de différentes armées. Et quand je lui ai posé cette

4 question, il a arraché cet insigne de sa manche et il me l'a donné en

5 guise de souvenir.

6 M. Harmon (interprétation). - Et ici, nous voyons la

7 photographie de l'insigne que vous avez reçu ?

8 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, tout à fait.

9 M. Harmon (interprétation). - Et qu'est-il arrivé aux autres

10 membres de votre unité lorsque cet officier est arrivé et est entré avec

11 vous en contact ? Etes-vous resté à votre poste d'observation ?

12 M. Van der Zwan (interprétation). - Non.

13 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges ce qui

14 s'est passé par la suite ?

15 M. Van der Zwan (interprétation). - Suite à l'arrivée de cet

16 officier jusqu'au poste d'observation, il nous a dit que nous avions la

17 possibilité de choisir entre notre retrait vers l'enclave, vers l'arrière

18 donc jusqu'à notre base, ou alors de les accompagner à Bratunac et de

19 partir, de rentrer chez nous le lendemain.

20 M. Harmon (interprétation). - Et à votre avis ou selon l'opinion

21 de votre commandant, s'agissait-il d'une bonne option, d'une option

22 réalisable pour ce qui était de revenir vers l'enclave ?

23 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, c'était exclu.

24 M. Harmon (interprétation). - Pourquoi ?

25 M. Van der Zwan (interprétation). - Parce qu'il y avait encore

Page 2307

1 des combats en cours, et le premier groupe qui avait ces insignes avec un

2 loup dessus s'avançait plus en profondeur de l'enclave, ce qui fait que la

3 ligne de front, là où avaient lieu les combats, se trouvait derrière nous.

4 Pour nous retirer vers là-bas, il fallait passer par des régions où il y

5 avait des combats en cours. Avant d'arriver à notre base, il fallait donc

6 passer par là.

7 Un de nos soldats qui avait essayé de le faire était mort. Il

8 s'agissait du caporal Renssen.

9 M. Harmon (interprétation). - Oui, il s'agissait du caporal

10 Renssen ?

11 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, en effet.

12 M. Harmon (interprétation). - Il n'était pas membre du poste

13 d'observation U ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, il était au poste

15 d'observation F.

16 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous accepté l'offre de cet

17 officier serbe ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

19 M. Harmon (interprétation). - Je vais avancer un peu plus en

20 avant de votre témoignage. Avez-vous eu l'autorisation de passer un coup

21 de fil ce soir-là et êtes-vous reparti le lendemain chez vous ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Non.

23 M. Harmon (interprétation). - Je vais vous demander autre chose.

24 Au moment où vous avez accepté de partir avec cet officier de l'armée des

25 Serbes de Bosnie, qu'est-il arrivé à vos armes ?

Page 2308

1 M. Van der Zwan (interprétation). - Le premier groupe qui est

2 arrivé avait déjà pris nos armes.

3 M. Harmon (interprétation). - Que s'est-il passé avec vos gilets

4 et vos casques ? Vous les avez gardés ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, nous avons refusé de

6 les leur remettre.

7 M. Harmon (interprétation). - Etes-vous partis avec, de votre

8 poste d'observation ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

10 M. Harmon (interprétation). - Je voudrais que vous repreniez le

11 pointeur, Monsieur Zwan, et que vous nous montriez la direction dans

12 laquelle vous êtes partis de ce poste d'observation. Quel est l'itinéraire

13 que vous avez suivi ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Nous avons suivi ce chemin,

15 ici se trouve le poste d'observation U ; nous avons suivi le chemin que

16 vous voyez ici.

17 M. Harmon (interprétation). - Pour le compte rendu d'audience,

18 le témoin montre le chemin qui va de la lettre U vers la droite et qui

19 remonte vers le nord, vers la ville de Pribicevac.

20 Vous vous êtes donc arrêtés quelque part sur ce chemin ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

22 M. Harmon (interprétation). - Qu'avez-vous remarqué à l'endroit

23 où vous vous êtes arrêtés ?

24 M. Van der Zwan (interprétation). - Nous nous sommes arrêtés sur

25 un monticule, et il y avait beaucoup d'activités militaires, des activités

Page 2309

1 militaires fort intenses à cet endroit-là. A notre gauche, il y avait un

2 véhicule de communication avec des antennes et des pièces d'artillerie qui

3 étaient en train de tirer vers l'enclave. Il s'agissait notamment d'un

4 char T55. Nous avons vu des soldats courir vers les véhicules.

5 M. Harmon (interprétation). - Quand vous dites "véhicule de

6 communication", est-ce que vous parlez d'un véhicule destiné aux

7 transmissions ?

8 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

9 M. Harmon (interprétation). - Il s'agissait d'un centre de

10 communication mobile ?

11 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, c'était un centre de

12 communication mobile.

13 M. Harmon (interprétation). - Vous avez vu plusieurs pièces

14 d'artillerie ?

15 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

16 M. Harmon (interprétation). - Dans quel sens ont-ils tiré ?

17 M. Van der Zwan (interprétation). - Vers l'enclave.

18 M. Harmon (interprétation). - A l'intérieur même de l'enclave ?

19 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

20 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps avez-vous passé à

21 cet endroit ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Deux heures environ.

23 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous décrire les uniformes

24 portés par les soldats que vous avez vus à cet endroit-là ?

25 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Il y avait plusieurs

Page 2310

1 types d'uniforme. En général, il s'agissait d'uniformes de camouflage

2 serbes.

3 M. Harmon (interprétation). - De quelle couleur étaient ces

4 uniformes ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Vert avec un motif de

6 camouflage dessus. Il s'agissait donc de soldats qui étaient proprement

7 vêtus.

8 M. Harmon (interprétation). - Je prierai maintenant

9 M. l'huissier de montrer et de poser sur le rétroprojecteur la pièce à

10 conviction n° 98. Mais avant que de poser cette pièce à conviction sur le

11 rétroprojecteur, il faut la distribuer à toutes les personnes présentes.

12 Avant donc que de poser cette photographie sur le

13 rétroprojecteur, je voudrais vous demander, Monsieur, la chose suivante :

14 vous avez dit que vous avez été auparavant dans la mission de l'ONU dans

15 le secteur Sud en 1992, plutôt en 1993, et qu'il s'agissait d'une base

16 militaire serbe.

17 Partant de cette expérience, auriez-vous vu quelque chose qui

18 aurait attiré votre attention quand vous parlez de ce véhicule de

19 communication ?

20 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

21 M. Harmon (interprétation). - Qu'est-ce que vous avez vu ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - J'ai vu des soldats portant

23 des insignes des Serbes de la Krajina. C'étaient les mêmes insignes que je

24 regardais pendant six mois en 1993, lorsque je me suis trouvé dans la base

25 dont j'ai parlé.

Page 2311

1 M. Harmon (interprétation). - Monsieur l'huissier, je vous prie

2 maintenant de placer cette pièce à conviction 98 sur le rétroprojecteur.

3 (L'huissier s'exécute.)

4 Est-ce que cet insigne est l'insigne que vous avez pu voir à cet

5 endroit-là ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, c'est bien cet insigne-

7 là.

8 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous vous êtes

9 entretenu avec l'un quelconque de ces soldats portant cet insigne-là ?

10 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Ils s'avançaient vers

11 nous. Lorsque je les ai aperçus, j'ai été très surpris de voir la chose,

12 et j'ai dit à l'un des soldats : "Est-ce que cela vient de Benkovac" ?

13 M. Harmon (interprétation). - Mais qu'est-ce que Benkovac ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Benkovac est la localité où

15 se trouvait la caserne ou j'avais séjourné.

16 M. Harmon (interprétation). - S'agissait-il de la caserne où

17 vous étiez installé en 1993, dans le secteur sud ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, tout à fait.

19 M. Harmon (interprétation). - Et est-ce qu'on vous a répondu ?

20 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Il a réagi en souriant.

21 Il m'a dit : "Je viens de Knin".

22 M. Harmon (interprétation). - Combien de personnes avez-vous vu

23 à cet endroit-là portant le même insigne ?

24 M. Van der Zwan (interprétation). - Quatre, j'en ai vu quatre.

25 M. Harmon (interprétation). - Vous avez dit que vous êtes resté

Page 2312

1 là pendant un certain temps. Est-ce qu'à un moment quelconque quelqu'un

2 est venu vous chercher pour vous amener à Bratunac ?

3 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Quand il a commencé à

4 faire nuit, une Lada Niva de couleur blanche -c'est un véhicule tout

5 terrain- est arrivé et un officier est sorti du véhicule. Il nous a fait

6 monter dans la voiture, dans un véhicule, et nous a dit de le suivre.

7 M. Harmon (interprétation). - Je vais vous montrer maintenant

8 une pièce à conviction qui porte le n 28/5.1.

9 Est-ce que vous avez pu identifier l'officier avec lequel vous

10 vous êtes entretenu ?

11 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, c'est lui.

12 M. Harmon (interprétation). - L'individu que vous voyez sur la

13 pièce à conviction 28/5.1 est l'individu qui est venu vous voir et qui

14 vous a dit de le suivre vers Bratunac ?

15 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est tout à fait exact.

16 M. Harmon (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur

17 l'huissier.

18 Et avez-vous suivi cette personne ?

19 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, nous l'avons suivie.

20 M. Harmon (interprétation). - Où êtes-vous allés ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Nous avons suivi la route

22 jusqu'à la localité de Bratunac. Nous sommes arrivés là-bas, à la caserne

23 locale.

24 M. Harmon (interprétation). - Vous semblait-il qu'il s'agissait

25 d'un bâtiment militaire ?

Page 2313

1 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, tout à fait.

2 M. Harmon (interprétation). - Arrivés à la caserne, l'homme que

3 vous avez vu sur la pièce à conviction 28/5.1 est resté avec vous ?

4 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

5 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous vu quelqu'un d'autre ?

6 Non, je retire cette question. Avez-vous été présenté à quelque autre

7 personne, membre de l'armée des Serbes de Bosnie, et que vous pourriez

8 identifier par son nom ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, ils nous ont emmenés

10 dans une pièce. Nous étions attendus là-bas par un monsieur qui s'était

11 présenté à nous comme étant le commandant Nikolic.

12 M. Harmon (interprétation). - Cet homme-là, qui figure sur la

13 pièce à conviction 28/5.1, est le commandant Nikolic. Vous les avez

14 revus ?

15 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

16 M. Harmon (interprétation). - Combien de fois avez-vous vu la

17 personne de la pièce à conviction 28/5.1 et le commandant Nikolic, pendant

18 que vous étiez en captivité ?

19 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, quelque quatre

20 fois.

21 M. Harmon (interprétation). - Vous avez dit, Monsieur Van Der

22 Zwan, que vous ne vous souveniez pas bien des dates. Je me propose de vous

23 placer à des endroits différents et de relier la chose aux événements.

24 Maintenant, combien de temps êtes-vous resté dans cette caserne ?

25 M. Van der Zwan (interprétation). - Plusieurs heures.

Page 2314

1 M. Harmon (interprétation). - Où êtes-vous allé par la suite ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - A l'hôtel Fontana.

3 M. Harmon (interprétation). - Pour autant que vous vous en

4 souveniez, combien de temps avez-vous passé à l'hôtel Fontana ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Trois, peut-être quatre

6 jours.

7 M. Harmon (interprétation). - Combien de vos collègues étaient

8 avec vous à l'hôtel Fontana ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Au début nous étions 7 et

10 par la suite, nous étions 25 à 30.

11 M. Harmon (interprétation). - Et pendant votre séjour à l'hôtel

12 Fontana, avez-vous eu l'occasion de voir le général Mladic dans cet

13 hôtel ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

15 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous vu votre commandant, le

16 colonel Karremans, dans ce même hôtel ?

17 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

18 M. Harmon (interprétation). - Combien de fois avez-vous vu le

19 colonel Karremans après avoir vu Mladic ?

20 M. Van der Zwan (interprétation). - Pendant une minute.

21 M. Harmon (interprétation). - Il était en compagnie de

22 quelqu'un ?

23 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, il y avait un homme de

24 grande taille, un officier, avec lui.

25 M. Harmon (interprétation). - Y avait-il encore quelqu'un avec

Page 2315

1 le colonel et cet officier de grande taille ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, il y avait un sergent-

3 chef qui ne s'est pas joint à nous, et je ne sais pas comment il

4 s'appelle.

5 M. Harmon (interprétation). - Vous l'avez vu ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, nous l'avons vu passer.

7 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que vous pouvez le

8 décrire ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, il était de bien

10 plus petite taille que ce grand homme. Il avait des cheveux bruns, je

11 crois bouclés, et il portait une moustache noire.

12 M. Harmon (interprétation). - J'aimerais que l'on vous montre la

13 pièce à conviction de l'accusation 95. Monsieur l'huissier, prenez

14 également la pièce à conviction de l'accusation 94.

15 Je vais vous montrer ces pièces. Je rappelle que vous n'êtes pas

16 tout à fait certain de la date à laquelle ces photographies ont été

17 prises. Mais prenons, si vous le voulez bien, d'abord la pièce à

18 conviction de l'accusation 95 ; plaçons-là sur le rétroprojecteur.

19 (L'huissier s'exécute.)

20 Je vous demanderai, Caporal Van Der Zwan, si vous pouvez nous

21 parler des conditions dans lesquelles cette photographie a été prise ? Et

22 à partir de quel endroit elle a été prise ?

23 M. Van der Zwan (interprétation). - Nous étions à ce moment-là

24 dans les locaux de l'hôtel Fontana, où nous nous efforcions encore de

25 recueillir un maximum d'informations puisque c'était notre travail. Nous

Page 2316

1 avons donc pris quelques photographies dont nous pensions qu'elles

2 pourraient s'avérer utiles par la suite. Et celles-ci figurent au nombre

3 de ces photos.

4 M. Harmon (interprétation). - Monsieur l'huissier, j'aimerais à

5 présent que vous remettiez au témoin la pièce à conviction de

6 l'accusation 94, la photo suivante, et que vous la placiez également sur

7 le rétroprojecteur.

8 (L'huissier s'exécute.)

9 Caporal, est-ce l'une des photographies qui a été prises par

10 l'un de vos collègues ?

11 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

12 M. Harmon (interprétation). - Etiez-vous présent quand cette

13 photographie a été prise ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

15 M. Harmon (interprétation). - Que voit-on sur cette

16 photographie ?

17 M. Van der Zwan (interprétation). - On y voit l'un de nos

18 véhicules sur la route, à côté du supermarché dans la ville de Bratunac. A

19 bord de ce véhicule se trouvent des soldats serbes.

20 M. Harmon (interprétation). - Des soldats serbes vêtus de quelle

21 façon ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Ils sont dans notre

23 matériel.

24 M. Harmon (interprétation). - Que voulez-vous dire par "notre

25 matériel" ? Pourriez-vous décrire la couleur de ces vêtements ?

Page 2317

1 M. Van der Zwan (interprétation). - Le casque est bleu et celui

2 qui est assis à l'arrière porte un casque bleu des conducteurs de char.

3 M. Harmon (interprétation). - Caporal Van der Zwan, j'aimerais à

4 présent vous demander si vous avez finalement quitté l'hôtel Fontana pour

5 vous rendre en un autre lieu dans la ville de Bratunac ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

7 M. Harmon (interprétation). - Je demande la pièce à conviction

8 de l'accusation 6/3, dont j'aimerais qu'elle soit placée sur le

9 rétroprojecteur.

10 Caporal Van der Zwan, je vous prierai de prendre le pointeur et

11 de le placer d'abord sur ce qui, sur cette pièce à conviction de

12 l'accusation 6/3, représente l'hôtel Fontana.

13 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est ici.

14 M. Harmon (interprétation). - Pour le compte rendu d'audience,

15 Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges, le témoin a placé le

16 pointeur sur une forme triangulaire qui se trouve plutôt au bas de

17 l'image, qui est entourée par deux routes, et au sommet du triangle

18 constitué par ces deux routes se trouve le carré sur lequel le témoin a

19 placé son pointeur qui représente l'hôtel Fontana.

20 Caporal, pourriez-vous maintenant placer le pointeur sur le

21 point qui représente l'endroit où vous avez été emmené après l'hôtel

22 Fontana ?

23 (Le témoin s'exécute.)

24 Pour le compte rendu d'audience, le témoin a placé le pointeur

25 sur le côté gauche du même triangle que celui dont nous parlions tout à

Page 2318

1 l'heure où l'on voit un bâtiment de grande taille. Merci beaucoup.

2 Etes-vous resté en ce lieu, Caporal Van der Zwan, jusqu'au

3 moment de votre remise en liberté ?

4 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

5 M. Harmon (interprétation). - En ce lieu, vous et vos collègues

6 étiez-vous maintenus en détention ? Et était-ce à un endroit où des

7 soldats serbes de Bosnie étaient stationnés, ou bien à un endroit proche

8 d'un poste de stationnement des soldats serbes de Bosnie ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

10 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous décrire les soldats

11 qui vous entouraient et leur tenue vestimentaire ?

12 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Ils portaient pour

13 certains un pantalon de camouflage, un tee-shirt civil, noir, une

14 protection de poitrine, et deux d'entre eux portaient un couteau de

15 samouraï d'une quarantaine de centimètres de long. Certains avaient un sac

16 de couleur noire également qui était suspendu à leur protection de

17 poitrine.

18 L'un des soldats portait un jogging de camouflage de conducteur

19 de char. Un autre avait un jogging de couleur vert olive, normal.

20 M. Harmon (interprétation). - Combien de soldats composaient

21 cette unité, à peu près ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Dix, peut-être onze.

23 M. Harmon (interprétation). - Cette unité possédait-elle des

24 chiens ?

25 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

Page 2319

1 M. Van der Zwan (interprétation). - Quelle était la race de ces

2 chiens ?

3 M. Van der Zwan (interprétation). - Des bergers allemands.

4 M. Harmon (interprétation). - A un certain moment, alors que

5 vous étiez en détention à cet endroit, avez-vous eu une conversation avec

6 l'un des membres de l'unité ?

7 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

8 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous décrire cette

9 conversation aux Juges ?

10 M. Van der Zwan (interprétation). - Cela s'est passé le deuxième

11 jour de notre présence dans l'enceinte de l'école, assez tard dans la

12 journée. Comme d'habitude, ils ont pénétré dans le bâtiment en faisant

13 beaucoup de bruit. Moi, j'étais encore réveillé à ce moment-là, j'ai donc

14 ouvert la porte pour voir ce qui se passait. J'ai vu l'un de ces hommes

15 qui, pratiquement devant notre porte, était assis sur les marches qui

16 descendaient vers l'école...

17 M. Harmon (interprétation). - Un instant, je vous interromps.

18 Cela s’est-il passé... ou plutôt, cette unité se rendait-elle tous les

19 jours sur le terrain pour participer à des opérations particulières

20 pendant la durée de votre séjour ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, c'est ce que l'on m'a

22 dit.

23 M. Harmon (interprétation). - Je vous prie de m'excuser pour

24 cette interruption, nous pouvons maintenant entendre la suite de votre

25 témoignage au sujet de la conversation que vous avez eue avec ce soldat.

Page 2320

1 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, je me suis assis à

2 côté de cette personne qui était assis devant la porte, j'ai essayé de

3 bavarder un peu avec lui, j'ai remarqué qu'il était assez tendu. J'ai donc

4 dit quelques mots au sujet du chien parce que j'ai un chien, moi-même. Il

5 s'occupait très bien de son chien. Il m'a dit qu'il avait été entraîneur

6 de chiens avant la guerre et que, désormais, au sein de l'unité, son

7 travail consistait à s'occuper des chiens.

8 Il a ensuite dit quelques mots au sujet de l'emploi qu'ils

9 faisaient des chiens, qu'ils utilisaient les chiens contre les gens et il

10 a parlé d'un événement.

11 Un jour où ils ont encerclé une maison dans l'enclave -parce

12 qu'ils pensaient qu'il y avait quelqu'un dans cette maison-, ils se sont

13 donc dirigés vers cette maison et un homme âgé, accompagné d'une petite

14 fille, est sorti d'un abri qui se trouvait être une remise qui se trouvait

15 derrière la maison.

16 Ces hommes souhaitaient les arrêter, et l'un de ces hommes a

17 donc lâcher son chien qui a attaqué l'homme âgé, l'a mordu. Et un des

18 membres du groupe, celui qui avait lâché le chien, s'est approché du vieil

19 homme, l'a tué à coups de couteau, et celui qui -mon interlocuteur

20 devenait de plus en plus tendu au fur et à mesure qu'il me racontait cet

21 événement-, et il m'a dit qu'un acte sexuel s'était produit avec la petite

22 fille, qu'il l'avait tuée en plaçant le couteau d'abord entre ses jambes

23 et en remontant.

24 Lorsqu'il m'a raconté cela, il a commencé à pleurer et il est

25 sorti du bâtiment. Je l'ai suivi, nous avons fumé une cigarette. Après

Page 2321

1 quoi, je suis retourné auprès de mes collègues à qui j'ai raconté cette

2 histoire parce que j'étais légèrement choqué par cette histoire.

3 M. Harmon (interprétation). - Ce soldat a-t-il identifié le

4 membre de son unité qui avait commis cet acte ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, il me l'a montré du

6 doigt, il était allongé sur le sol, sur les escaliers complètement ivre, à

7 quelques mètres de distance.

8 M. Harmon (interprétation). - Mais cet homme a-t-il été

9 identifié à votre attention d'une façon ou d'une autre ?

10 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, il a essayé de me

11 préciser que son nom -ou son surnom plutôt- était "le boucher".

12 M. Harmon (interprétation). - Caporal Van der Zwan, ce même

13 soir, avez-vous vu des chiens dans l'enceinte de la base ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Quand nous étions dehors et

15 que nous fumions une cigarette avant mon retour dans le bâtiment, oui,

16 j'ai vu des chiens.

17 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous décrire ces chiens ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - Mon interlocuteur parlait

19 encore d'un chien, et il m'en a montré un en particulier ; celui dont il

20 parlait qui avait participé à cette histoire.

21 Et ce chien avait une tâche de sang sur la patte avant gauche.

22 Et mon interlocuteur m'a montré que ce chien réagissait au chargement d'un

23 fusil.

24 M. Harmon (interprétation). - Mais cet homme qui a été identifié

25 comme répondant au surnom de "boucher" -qu'il s'agisse de sa profession ou

Page 2322

1 de son surnom-, l'avez-vous vu le lendemain ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

3 M. Harmon (interprétation). - Qu'avez-vous vu se produire le

4 lendemain, s'agissant de cet homme surnommé "le boucher" ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Il est venu dans l'enceinte

6 de l'école, il était à bord d'un camion. Il y avait un veau à l'arrière du

7 camion. Il a fait sortir le veau, il est allé à l'arrière sur le côté du

8 bâtiment.

9 L'un des hommes qui l'accompagnait a fait un geste de la main

10 dans ma direction, comme s'il voulait que je m'approche. J'étais curieux,

11 je souhaitais voir ce qui se passerait avec ce veau, donc j'y suis allé.

12 J'ai contourné le bâtiment, et j'ai trouvé le boucher qui était debout à

13 cet endroit-là.

14 Il avait son bras autour du corps du veau, il le caressait et

15 tout d'un coup il l'a saisi par le coup ; il a saisi son couteau et lui a

16 tranché la gorge. Le veau a commencé à saigner et l'homme a continué son

17 travail en égorgeant le veau comme le ferait un égorgeur professionnel.

18 L'autre homme était debout à côté de lui, il riait. Il a dit à

19 celui qui était en train d'égorger le veau que c'était exactement comme ce

20 qui s'était passé avec la petite fille dans l'enclave de Srebrenica.

21 M. Harmon (interprétation). - Caporal, un jour est arrivé où

22 vous avez été libéré avec vos collègues, mais vous ne connaissez pas la

23 date exacte, n'est-ce pas ?

24 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, c'est exact.

25 M. Harmon (interprétation). - Le jour de votre libération est-il

Page 2323

1 antérieur au 21 juillet, date à laquelle la totalité du Bataillon

2 néerlandais n°3 a quitté l'enclave ?

3 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

4 M. Harmon (interprétation). - Merci beaucoup, Caporal

5 Van der Zwan.

6 Je n'ai pas d'autres questions à poser à ce témoin, Monsieur le

7 Président.

8 M. le Président. - Merci beaucoup, Monsieur Harmon. Caporal,

9 vous allez maintenant répondre aux questions de l'avocat de la défense,

10 Maître Visnjic.

11 Vous avez la parole, Maître Visnjic.

12 M. Visnjic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

13 Monsieur Van der Zwan, au début de votre déposition, vous avez

14 expliqué que le poste d'observation que vous gardiez avait été pilonné.

15 Pouvez-vous donner quelques détails complémentaires à ce sujet ?

16 Les troupes serbes visaient-elles directement votre poste d'observation ?

17 Ou bien y avait-il des tirs d'artillerie aux environs, ou peut-être

18 visaient-elles d'autres postes d'observation ?

19 M. Van der Zwan (interprétation). - Les forces serbes ne

20 visaient pas notre poste d'observation mais les environs. Nous n'étions

21 donc pas la cible directe de leurs tirs.

22 M. Visnjic (interprétation). - Les forces musulmanes occupaient-

23 elles des positions non loin de votre poste d'observation ? Avez-vous

24 quelque connaissance que ce soit à ce sujet ?

25 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, elles occupaient des

Page 2324

1 positions dans les environs.

2 M. Visnjic (interprétation). - Les forces musulmanes ont-elles

3 opposé une résistances aux forces serbes avant leur entrée dans

4 l'enclave ? Y a-t-il eu échanges de tirs ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, il y a eu échanges de

6 coups de feu tirés par des armes légères.

7 M. Visnjic (interprétation). - Merci. Monsieur Van der Zwan, ce

8 qui m'intéresse est que vous nous parliez du moment où vous avez quitté

9 votre poste d'observation en suivant les représentants des forces serbes,

10 que vous nous parliez donc du laps de temps écoulé entre ce moment et le

11 dernier jour de votre séjour à Bratunac.

12 Avez-vous subi des menaces personnelles ? Craigniez-vous pour

13 votre sécurité ? Les forces serbes vous ont-elles menacé d'une façon ou

14 d'une autre pendant toute cette période ?

15 M. Van der Zwan (interprétation). - Il n'y a pas eu de menace

16 directe, mais la tension était importante. Je ne me sentais pas en

17 sécurité.

18 M. Visnjic (interprétation). - Que voulez-vous dire par là

19 exactement ? Etait-ce un sentiment subjectif ce que vous ressentiez ? Ou

20 existait-il des indices justifiant ce sentiment ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - A l'extérieur de la pièce

22 dans laquelle nous nous trouvions, deux hommes se trouvaient debout et

23 portaient des Kalachnikov. Nous étions tout le temps entourés de cameramen

24 qui nous demandaient de parler à des fins de propagande, en nous posant

25 des questions militaires.

Page 2325

1 A mes yeux, tout cela signifiait que nous n'étions pas les hôtes

2 de l'armée serbe, contrairement à ce qu'ils prétendaient, mais que nous

3 étions utilisés dans leur intérêt.

4 M. Visnjic (interprétation). - Vous nous avez décrit les

5 emblèmes caractéristiques portés par les soldats qui sont arrivés dans

6 votre poste d'observation, et que vous avez vus à Pribicevac.

7 Mais pendant votre séjour à l'hôtel Fontana, avez-vous remarqué

8 les emblèmes portés par les soldats qui se trouvaient également à l'hôtel

9 Fontana ? Avaient-ils des insignes particuliers ?

10 M. Van der Zwan (interprétation). - J'ai vu quelques-uns de ces

11 soldats qui portaient un emblème circulaire sur lequel on voyait des

12 bandes de couleurs blanche, rouge et bleu, et des inscriptions, des

13 lettres de l'alphabet.

14 M. Visnjic (interprétation). - Monsieur Van der Zwan, savez-vous

15 que d'autres unités serbes avaient un emblème assez semblable sur lequel

16 on voyait le même motif que celui que l'on voit sur l'emblème représenté

17 dans la pièce à conviction de l'accusation 98 ? Un aigle à deux têtes

18 surmonté d'une couronne. Je vous demande donc si d'autres unités serbes

19 avaient le même emblème, le même insigne, en dehors des unités de

20 Krajina ? Etes-vous au courant de cela ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, je sais qu'il existe

22 plusieurs insignes sur lesquels figurent les quatre "C" cyrilliques ou

23 l'aigle à deux têtes.

24 M. Visnjic (interprétation). - L'unité qui vous gardait, si l'on

25 peut s'exprimer ainsi, dans l'enceinte de l'école, l'unité dont vous voyez

Page 2326

1 les représentants le plus fréquemment pendant votre séjour dans les locaux

2 de l'école de Bratunac, pouvez-vous l'identifier, nous dire de quelle

3 unité il s'agissait ?

4 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, je ne peux pas le

5 faire.

6 M. Visnjic (interprétation). - Ces hommes avaient-ils eux aussi

7 un emblème particulier ?

8 M. Van der Zwan (interprétation). - Aucun emblème.

9 M. Visnjic (interprétation). - Lors de vos conversations avec

10 eux, avez-vous réussi à savoir qui était leur commandant ? De qui ils

11 étaient les subordonnés ?

12 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

13 M. Visnjic (interprétation). - Qui était leur supérieur ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne connais pas son nom,

15 mais c'était un homme de grande taille, très musclé, qui portait un

16 pantalon de camouflage, un tee-shirt noir, une protection de poitrine de

17 couleur noire, et un petit couteau de samouraï ainsi qu'un revolver de

18 marque Zastava 99. C'était un revolver très moderne.

19 M. Visnjic (interprétation). - Caporal, cet homme portait-il les

20 insignes de son grade ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, mais à mes yeux il

22 était tout à fait clair qu'il était le commandant, compte tenu du

23 comportement qu'il avait à l'égard des autres hommes du groupe.

24 M. Visnjic (interprétation). - Monsieur Van der Zwan, l'un où

25 l'autre des membres de ce groupe vous a-t-il parlé des tâches qu'ils

Page 2327

1 avaient accomplies auparavant, ou des endroits où ils avaient combattu

2 auparavant, avant Srebrenica ?

3 M. Van der Zwan (interprétation). - Non.

4 M. Visnjic (interprétation). - Vous fondant sur votre expérience

5 avec les forces serbes, expérience que vous avez acquise en Krajina et

6 également pendant votre séjour à Srebrenica, êtes-vous en mesure de nous

7 dire si cette unité était une unité normale ou s'il aurait pu s'agir d'une

8 unité spéciale ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - A mon avis, il s'agissait

10 sans l'ombre d'un doute d'une unité spéciale.

11 M. Visnjic (interprétation). - Merci. J'ai encore une question à

12 vous poser. Vous nous avez dit que vous gardiez le poste

13 d'observation "U", si je ne m'abuse ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

15 M. Visnjic (interprétation). - Et que les combattants de la

16 Brigade de Bratunac sont arrivés à ce poste d'observation "U" ?

17 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne me rappelle pas avoir

18 dit, ici, que les hommes de la Brigade de Bratunac sont arrivés au poste

19 d'observation. J'ai parlé de certains emblèmes, mais je ne saurais dire à

20 quelle brigade ces emblèmes appartenaient.

21 M. Visnjic (interprétation). - Donc des hommes portant l'emblème

22 qui figure sur la pièce à conviction 93 sont arrivés à ce poste

23 d'observation, et je vous remonte cet emblème, n'est-ce pas ?

24 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. J'ai reçu de l'un de

25 ces hommes un emblème qui correspond exactement à celui que vous êtes en

Page 2328

1 train de me montrer et je me trouvais à ce moment-là au poste

2 d'observation Uniforme.

3 M. Visnjic (interprétation). - Merci, Monsieur Van der Zwan.

4 Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres questions, j'en ai

5 terminé avec mon contre-interrogatoire du témoin.

6 M. le Président. - Merci, Monsieur Visnjic.

7 Monsieur Harmon, vous avez des questions supplémentaires ?

8 M. Harmon (interprétation). - Quelques questions simplement,

9 Monsieur le Président.

10 M. le Président. - Allez-y.

11 M. Harmon (interprétation). - Caporal, mon collègue Me Visnjic

12 vous a demandé quelle était l'unité qui vous gardait. Or, dans mon esprit,

13 il y a un doute quant au lieu auquel faisait référence Me Visnjic.

14 Dans votre déposition, vous avez dit être d'abord allé dans une

15 caserne, puis dans les locaux de l'hôtel Fontana, et enfin dans un endroit

16 de grande taille, un complexe, où se trouvait cette unité qui avait des

17 chiens ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

19 M. Harmon (interprétation). - Répondant aux questions de

20 Me Visnjic, si j'ai bien compris, vous avez dit que les individus qui vous

21 gardaient portaient un pantalon de camouflage, un tee-shirt noir, une

22 protection de poitrine, ainsi qu'un revolver spécial de marque Zastava 99.

23 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

24 M. Harmon (interprétation). - Ces hommes qui vous gardaient et

25 qui étaient vêtus de cette même façon vous gardaient-ils également lorsque

Page 2329

1 vous étiez dans la caserne ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - Non.

3 M. Harmon (interprétation). - Ces mêmes hommes, ces hommes vêtus

4 comme vous venez de le décrire, vous gardaient-ils dans les locaux de

5 l'hôtel Fontana ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - Non.

7 M. Harmon (interprétation). - Lorsque vous avez répondu aux

8 questions de Me Visnjic donc, vous décriviez les hommes qui vous ont

9 gardés dans votre troisième lieu de détention, n'est-ce pas ?

10 M. Van der Zwan (interprétation). - Je parlais des hommes qui

11 avaient des chiens et qui ont été présents pendant la soirée et la nuit,

12 et qui d'une certaine façon nous gardaient puisqu'ils étaient présents.

13 M. Harmon (interprétation). - Dans le troisième lieu dont vous

14 avez parlé dans votre déposition ?

15 M. Van der Zwan (interprétation). - Je parlais de l'école qui se

16 trouve derrière l'hôtel Fontana, effectivement.

17 M. Harmon (interprétation). - Merci, je n'ai pas d'autres

18 questions, Monsieur le Président.

19 M. le Président. - Merci, Monsieur Harmon.

20 Monsieur le Juge Fuad Riad ?

21 M. Riad (interprétation). - Bonjour, Caporal Van der Zwan.

22 J'aimerais vous poser quelques questions de détail au sujet de

23 ce récit très pénible que vous nous avez rapporté, récit fait par un

24 officier serbe et qui a eu une suite le lendemain.

25 Ce soldat serbe -si j'ai bien compris il s'agissait d'un

Page 2330

1 officier- vous a parlé d'un chien qui a attaqué le vieil homme, et du fait

2 que lui-même avait ensuite tué ce vieil homme ; à moins qu'il ne s'agisse

3 de celui qui l'accompagnait. Je crois qu'en fait c'est son collègue qui a

4 tué ce vieil homme. Et je suppose qu'ensuite, c'est lui qui a violé la

5 petite fille, n'est-ce pas ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, le même homme qui a tué

7 le vieil homme...

8 M. Riad (interprétation). - A violé la petite fille ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - A violé la petite fille

10 effectivement. Et celui qui me racontait cette histoire n'était pas un

11 officier, c'était un soldat.

12 M. Riad (interprétation). - Mais le soldat n'avait rien à voir

13 avec cet acte, il n'était que spectateur ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est lui qui tenait le

15 chien.

16 M. Riad (interprétation). - Ah oui, il tenait le chien. La

17 première question que j'ai à vous poser est la suivante : finalement,

18 vous, vous étiez un représentant des Nations Unies, et je vous demande

19 donc s'il était si normal que cela que cet homme vous raconte une histoire

20 aussi horrible que cela ? Est-ce qu'ils étaient fiers de ce genre d'acte ?

21 Est-ce qu'ils s'en vantaient ? Est-ce qu'ils vous racontaient cette action

22 pour vous effrayer ? De quoi s'agit-il exactement ?

23 Et puis vous avez ajouté que le lendemain vous avez vu l'homme

24 appelé "le boucher" qui a égorgé un veau, qui lui a tranché l'abdomen, et

25 qui a ensuite dit que cela ressemblait à ce qui s'était passé avec la

Page 2331

1 petite fille, et il savait que vous étiez dans les environs. Donc il

2 n'était pas inconscient de votre présence et néanmoins, il racontait tout

3 cela sans se soucier du fait que vous l'entendiez ou le voyiez ?

4 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, tout d'abord,

5 lorsqu'il m'a raconté cette histoire, moi je pensais que l'homme que

6 j'avais en face de moi n'était pas un soldat professionnel, mais que

7 c'était un homme dépassé par les événements ; simplement un entraîneur de

8 chiens qui faisait partie du groupe en tant que volontaire, mais qui

9 n'était pas un professionnel et qui n'en pouvait plus. Il parlait, il

10 pleurait, il ne supportait plus ce qu'il avait dans l'esprit.

11 M. Riad (interprétation). - Etait-il sous l'influence d'une

12 boisson quelconque ?

13 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, il ne buvait pas à ce

14 moment-là.

15 M. Riad (interprétation). - Il était sobre et il vous racontait

16 un fait de la réalité ?

17 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Il m'a beaucoup

18 impressionné. Il ne se vantait pas.

19 M. Riad (interprétation). - Mais le "boucher", lorsqu'il est

20 arrivé, c'était bien un officier, n'est-ce pas ?

21 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne sais pas. Il faisait

22 partie d'un groupe. Je ne le voyais pas, je ne le considérais pas comme un

23 commandant.

24 M. Riad (interprétation). - Mais c'est bien le "boucher" qui a

25 violé la petite fille ?

Page 2332

1 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est celui qui a été

2 désigné à mon intention comme l'ayant fait, oui.

3 M. Riad (interprétation). - Et il se vantait à ce sujet, et

4 montrait comment il avait fait ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, il a égorgé un veau,

6 mais c'est l'homme qui était debout, à côté de lui, qui a formulé un

7 commentaire à ce sujet en serbe ; commentaire qui ne m'était pas destiné,

8 mais qui était destiné à celui qui avait égorgé le veau.

9 M. Riad (interprétation). - Il s'agissait de cela comme si

10 c'était naturel, comme si cela avait été fait de façon très naturelle ?

11 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

12 M. Riad (interprétation). - Comment avez-vous pu comprendre si

13 cela a été dit en serbe ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Parce que j'avais séjourné

15 dans une caserne serbe en 1993, et que j'avais été entouré de Serbes

16 pendant un certain temps. J'ai donc appris un certain nombre de mots, et

17 je peux comprendre en gros une phrase lorsque je l'entends.

18 M. Riad (interprétation). - Très bien. Il parlait donc de tout

19 cela de façon très naturelle. Cela signifiait-il à vos yeux qu'ils étaient

20 libres de faire tout ce qui leur plaisait ? Est-ce que ces soldats

21 pouvaient faire tout ce qu'ils leur plaisaient sans aucune contrainte et

22 sans être tenus responsables de leurs actes ?

23 M. Van der Zwan (interprétation). - S'agissant du groupe qui se

24 trouvait à l'intérieur du bâtiment et que j'ai vu faire ses bagages pour

25 partir en mission, c'était un groupe indépendant, à mes yeux. Ils ne

Page 2333

1 recevaient d'ordre d'aucun niveau hiérarchique supérieur. Ils

2 travaillaient, en tout cas c'est l'impression qu'ils donnaient, ils

3 travaillaient à leur propre initiative.

4 M. Riad (interprétation). - Je veux dire : faisaient-ils partie

5 d'une armée ? Ou était-ce une bande de voyous ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - Absolument ! Ils faisaient

7 partie d'une armée professionnelle.

8 M. Riad (interprétation). - Donc ils avaient des commandants ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, ils devaient en avoir,

10 mais je ne les ai pas vu recevoir des ordres.

11 M. Riad (interprétation). - Et d'après leur comportement,

12 pensez-vous qu'ils pouvaient faire tout ce qu'il leur plaisait puisqu'ils

13 n'avaient même pas l'air de se cacher de vous ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, ils plaisantaient à ce

15 sujet, Monsieur le Juge.

16 M. Riad (interprétation). - Et vous dites que cette unité,

17 l'unité par laquelle vous étiez gardé au cours de votre détention -ces dix

18 soldats serbes si je ne m'abuse- avait l'habitude tous les jours d'aller

19 sur le terrain pour effectuer certaines opérations.

20 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, il s'agit bien de cette

21 même unité.

22 M. Riad (interprétation). - Avez-vous compris de quelle

23 opération il s'agissait exactement ?

24 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, mais ils emmenaient les

25 chiens.

Page 2334

1 M. Riad (interprétation). - Ils emmenaient les chiens ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui.

3 M. Riad (interprétation). - Avez-vous compris, plus ou moins, à

4 quelle fin ils utilisaient ces chiens ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est ce que m'a expliqué

6 l'entraîneur du chien, celui qui tenait le chien.

7 M. Riad (interprétation). - Et de quoi s'agissait-il ?

8 M. Van der Zwan (interprétation). - De nettoyer les maisons, de

9 pourchasser les gens qui pouvaient encore s'y trouver.

10 M. Riad (interprétation). - Lorsque vous étiez gardé par ces dix

11 soldats, vous n'étiez pas libre de circuler à votre guise, vous étiez

12 pratiquement un prisonnier, n'est-ce pas ? Ou bien étiez-vous un homme

13 libre, libre de circuler et de voir tout ce qui l'entourait ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Nous n'étions pas autorisés

15 à sortir du bâtiment, ni par notre commandant ni par les Serbes qui nous

16 gardaient. Mais comme je connaissais un petit peu leur langue, mon

17 commandant m'a accordé une certaine liberté. Je pouvais me rendre à la

18 porte principale du bâtiment pour parler aux soldats.

19 M. Riad (interprétation). - Avez-vous entendu autre chose à part

20 ce que vous nous avez dit ? D'autres personnes qui se seraient vantées de

21 ce qu'elles avaient faites, etc. ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui. Un jour, j'ai vu un

23 véhicule de l'armée, un Tam 110 qui se dirigeait en sens inverse du convoi

24 des réfugiés. J'ai demandé à l'un des gardes de quoi il s'agissait. Il m'a

25 dit que ces hommes allaient être jugés pour les crimes qu'ils avaient

Page 2335

1 commis contre les Serbes, contre les forces serbes.

2 M. Riad (interprétation). - C'est tout ?

3 M. Van der Zwan (interprétation). - C'est tout.

4 M. Riad (interprétation). - Merci beaucoup.

5 M. le Président. - Merci, Monsieur le Juge Fuad Riad.

6 Madame la Juge Wald, s'il vous plaît

7 Mme Wald (interprétation). - Caporal, vous avez mentionné que

8 vous avez déjà été en service sur une caserne serbe et que vous

9 connaissiez un peu la langue ou quelques mots du pays. Etes-vous

10 également, est-ce que vous connaissez l'alphabet cyrillique ? Ce que je

11 veux dire par là, c'est : est-ce que vous êtes en mesure de lire des mots

12 en serbo-croate ?

13 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne peux pas lire

14 l'alphabet cyrillique, mais je peux reconnaître quelques signes. Je peux

15 savoir de quoi il s'agit vaguement.

16 Mme Wald (interprétation). - Lorsque vous avez témoigné plus tôt

17 les faits que, après que les gens avec les enseignes, avec les têtes de

18 loup se sont montrés, vous avez dit qu'un soldat vous avait donné son

19 insigne parce que vous collectionnez les insignes, il y avait plusieurs

20 inscriptions sur cet insigne. Il s'agit de la pièce à conviction 93.

21 Il apparaît les mots "Bratunac", "Brigade" apparaissent sur

22 cette enseigne. Est-ce que vous avez demandé par la suite ce que ces mots

23 voulaient dire, ou saviez-vous ce que cela voulait dire à l'époque ?

24 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, je ne savais pas.

25 Mme Wald (interprétation). - Vous avez témoigné par la suite que

Page 2336

1 vous avez vu d'autres soldats à un moment donné, plus tard, avec une

2 enseigne qui apparaissait être la même que celle que vous aviez déjà

3 rencontrée ou vue lors de votre mission en Krajina. Vous aviez l'air

4 surpris. Quelle importance est-ce que cela avait pour vous de voir ce

5 soldat avec ce badge de la Krajina ? Que pensiez-vous ?

6 M. Van der Zwan (interprétation). - Eh bien, je trouvais cela

7 très étrange.

8 Mme Wald (interprétation). - Pourquoi ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Parce qu'ils étaient très

10 loin de chez eux.

11 Mme Wald (interprétation). - En fait, brièvement, de combien, à

12 quelle distance ? Etaient-ils à des centaines de mètres, des centaines de

13 mille ou 50 000 de là ?

14 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne peux pas vraiment vous

15 donner une évaluation précise.

16 Mme Wald (interprétation). - Mais vous étiez surpris, vous ne

17 vous attendiez pas à les voir dans cette zone-là ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne m'attendais pas du

19 tout à les voir là, j'étais très surpris.

20 Mme Wald (interprétation). - Maintenant, vous avez témoigné en

21 répondant aux questions de l'avocat de la défense, et vous avez dit que

22 vous étiez pas mal sûr que c'était une unité spéciale qui était avec vous

23 pendant que vous étiez détenu. Je veux simplement m'assurer que j'ai bien

24 compris.

25 Etait-ce bien l'unité avec les chiens ? S'agissait-il de l'unité

Page 2337

1 simplement qui était sur place, à l'école ou à l'hôtel, qui vous tenait en

2 détention ? De quelle unité vous pensiez que c'était une unité spéciale ?

3 M. Van der Zwan (interprétation). - Je parlais des gens avec les

4 chiens.

5 Mme Wald (interprétation). - Très bien. Mais est-ce la raison

6 pour laquelle vous croyiez que c'était une unité spéciale, le fait qu'ils

7 utilisaient des chiens et que, généralement parlant, les unités qui

8 utilisent des chiens sont des unités spéciales ?

9 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, pas seulement à cause

10 de cela, mais également à cause du matériel qu'ils utilisaient. Ils

11 avaient beaucoup de bonnes nouvelles armes, ils avaient des protecteurs de

12 poitrine, alors tout cela indique qu'ils étaient mieux équipés que les

13 soldats réguliers.

14 Mme Wald (interprétation). - Pendant la conversation que vous

15 avez eue avec l'entraîneur de chiens, l'homme qui vous a raconté cette

16 triste histoire, saviez-vous à quelle unité il appartenait ? Ou a-t-il

17 désigné une unité ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, il n'a pas mentionné de

19 nom, mais il disait qu'il venait de Sarajevo. C'est tout ce que je peux

20 dire sur lui.

21 Mme Wald (interprétation). - Bien, merci.

22 M. le Président. - Moi-même, j'ai quelques questions aussi. Si

23 j'ai bien compris, vous collectionnez des insignes. Donc vous êtes un

24 expert en insignes ?

25 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne suis pas un expert en

Page 2338

1 insignes, mais j'ai plusieurs insignes différents appartenant à l'armée

2 serbe, oui.

3 M. le Président. - Quand vous avez vu l'insigne, qui est la

4 pièce à conviction du Procureur 98, l'insigne de la Krajina, est-ce que

5 vous êtes en condition de faire la liaison entre l'insigne et l'uniforme

6 que ces soldats portaient ? Quel était l'uniforme ?

7 M. Van der Zwan (interprétation). - Ils portaient des uniformes

8 du nouveau type de l'armée serbe, donc c'était un uniforme vert avec des

9 taches bariolées brunes, des tâches de couleur brune.

10 M. le Président. - Bien. Est-ce que vous vous rappelez de la

11 date à laquelle le poste d'observation U a été pilonné, ou a été pris ?

12 Excusez-moi.

13 M. Van der Zwan (interprétation). - Non, je ne me rappelle pas

14 des dates du tout.

15 M. le Président. - Autre question : quand un officier est venu

16 avec une Jeep et vous a fait monter pour aller à Bratunac, combien étiez-

17 vous ?

18 M. Van der Zwan (interprétation). - Nous étions 7 donc :

19 6 soldats, 1 sergent et notre blindé.

20 M. le Président. - Les mêmes soldats qui, au début, étaient

21 arrivés à l'hôtel Fontana ?

22 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne comprends pas cette

23 question, Monsieur le Président.

24 M. le Président. - Vous nous avez dit que, à l'hôtel Fontana, au

25 début, il y avait 7 soldats, et après entre 25 et 30 soldats hollandais.

Page 2339

1 Quand vous nous avez parlé de l'officier qui est arrivé avec les Jeep,

2 vous n'avez pas dit combien vous étiez. Maintenant, je voudrais savoir si

3 les sept qui ont été transportés par ces Jeep, sont les mêmes que vous

4 avez mentionnés comme étant au début à l'hôtel Fontana ?

5 M. Van der Zwan (interprétation). - Ce sont les 7 soldats avec

6 lesquels je travaillais au poste d'observation et nous n'avons pas pris

7 place dans cette Jeep. Il a fallu que nous suivions cette Jeep à bord de

8 notre propre blindé transport de troupes.

9 M. le Président. – Je comprends maintenant. L’autre question :

10 dans le troisième endroit où vous étiez, il y avait un homme avec un

11 revolver, Zastava 99. Vous dites qu’il était le commandant, et vous avez

12 conclu qu’il était le commandant par son comportement. Est-ce que vous

13 pouvez dire quel était son comportement qui vous a fait conclure qu'il

14 était le commandant ?

15 M. Van der Zwan (interprétation). - Oui, il était très clair que

16 c'était un commandant, parce qu'il donnait des ordres aux autres membres

17 du groupe, il leur disait quoi faire, à quel moment ils devaient emballer

18 leurs choses, à quel moment ils devaient quitter. Il le faisait d'une

19 façon comme un vrai sergent.

20 M. le Président. - Une fois que vous étiez en condition de

21 comprendre un peu de serbe, est-ce que vous avez compris ou entendu et

22 compris les ordres qu'il donnait ?

23 M. Van der Zwan (interprétation). - Je ne peux pas me souvenir.

24 M. le Président. - Vous avez mentionné aussi que, quand vous

25 étiez dans cet endroit, vous avez vu passer un camion ou un autocar avec

Page 2340

1 des réfugiés, combien d'autocars avez-vous vu passer ?

2 M. Van der Zwan (interprétation). - J'en ai vu, un, c'était un

3 véhicule de l'armée, un camion, avec un container derrière, avec une

4 petite fenêtre et des barres devant. Je pouvais voir qu’il y avait des

5 gens à l'intérieur, parce qu'il n’y avait plus de fenêtre, il y avait des

6 bras qui sortaient de cet orifice. Quand j'ai entendu ce qui se passait à

7 l’intérieur de ce camion, je suis allé directement à mon commandant pour

8 lui dire. Je ne sais pas s'il y aurait d'autres camions qui suivraient.

9 M. le Président. - Etiez-vous en condition de savoir quelles

10 personnes allaient dans ce camion. Il s'agissait de femmes, d’enfants,

11 d’hommes ?

12 M. Van der Zwan (interprétation). - L'homme serbe qui se tenait

13 debout juste à côté de moi m'a dit que ce serait des hommes qui seraient

14 jugés. Je ne pouvais pas le voir de moi-même.

15 M. le Président. - Merci beaucoup de nous avoir apporter ces

16 éclaircissements. Nous vous remercions beaucoup, Caporal, d'être venu ici.

17 Je crois, Monsieur Harmon, qu'il y a des pièces à conviction à

18 régler ? S'il vous plaît ?

19 M. Harmon (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, nous

20 aimerions que les

21

22 pièces à conviction 93, jusqu'à 96 et 98 soient versées au

23 dossier.

24 M. le Président. - Maître Visnjic, avez-vous des objections ?

25 M. Visnjic (interprétation). – Non, Monsieur le Président,

Page 2341

1 aucune objection.

2 M. le Président. - Les pièces à conviction sont versées au

3 dossier.

4 Caporal, vous pouvez sortir. Monsieur l'huissier, vous pouvez

5 aider. Nous vous remercions beaucoup d'être venu ici, et nous vous

6 souhaitons le calme et la paix de votre paix pays.

7 (Le témoin est raccompagné hors du prétoire.)

8 (Pas de témoin - Audience publique)

9 Je crois que nous allons avoir un autre témoin, protégé ou non ?

10 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, nous

11 avançons vraiment rapidement aujourd'hui. Nous ne pensions donc pas

12 terminer la journée sans témoin. Nous avons un témoin dans l'ordre de

13 présentation qui est une vieille personne qui a survécu le massacre de

14 Branjevo. On lui avait qu’on l’appellerait demain. Nous ne voulions pas

15 qu'il commence le témoignage aujourd’hui et qu’il continue le lendemain.

16 En revanche, nous avons discuté avec nos collègues, il y a

17 quatre témoignages qui ont été présentés à l'audience du Tribunal pour

18 l'audience de M. Krstic et Mladic. Nous avons une cassette aujourd’hui qui

19 pourrait durer 58 minutes. C’est le témoignage d’une des personnes, c'est

20 un soldat néerlandais qui a vu une exécution à Potocari. Nous pourrions

21 vous suggérer de vous faire jouer cette cassette pour la fin de

22 l'audience.

23 M. le Président. - Oui Maître Harmon. Je crois que c'est une

24 bonne idée. Je dois vous féliciter pour être allé plus vite. Nous sommes

25 en train de gagner un peu une vélocité de croisière.

Page 2342

1 Nous allons faire une pause. Après on peut reprendre. Vous avez

2 dit 58 minutes plus ou moins…Peut-être nous sommes préparés pour voir

3 l'intégralité d'une vidéo, et demander peut-être aux interprètes de rester

4 un peu plus. Demain, on vous fera la compensation, comme je l’ai déjà

5 annoncé, vous pouvez rester à dormir un peu plus, une demi-heure, nous

6 allons commencer seulement demain à 10 heures.

7 Nous devons changer de salle d'audience. Je dis cela à

8 l’intention du public. Nous allons tenir notre audience dans la salle II,

9 avec la possibilité d'avoir la transmission en direct. Le public intéressé

10 peut suivre les débats.

11 Je n'ai pas reçu la réponse des interprètes.

12 L’interprète. – La réponse est oui, Monsieur le Président.

13 M. le Président. - Maître Harmon, étiez-vous en train de dire

14 autre chose ?

15 M. Harmon (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, nous

16 étions également en train de dire que nous avions une traduction en

17 français et en anglais des témoignages que nous allons vous donner avant

18 de faire passer la vidéo.

19 M. le Président. - J'en profite pour enregistrer la bonne

20 nouvelle, d’avoir des traductions en français.

21 On va donc faire la pause d’un quart d'heure pour ne pas

22 retarder beaucoup. Après, on va reprendre pour revoir la vidéo.

23 Monsieur Harmon a dit qu'il avait l'accord de la défense. Etes-

24 vous d'accord, Maître Petrusic et Maître Visnjic .

25 M. Petrusic (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

Page 2343

1 M. le Président. - Merci à vous. Un quart d'heure de pause. On

2 reprend avec la vidéo. Je demande à la Greffière et à la cabine technique

3 d’avoir les choses bien préparé pour reprendre tout de suite avec la

4 vidéo.

5 (L'audience, suspendue à 13 heures 40, est reprise à 13

6 heures 55.)

7 M. le Président. – Monsieur Harmon ?

8 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, nous

9 demandons le versement au dossier de la cassette de la déposition du

10 caporal Groenwegen, recueillie au cours de l'audience tenue au titre de

11 l'article 61 du Règlement de procédure et de preuve, relativement à

12 Karadzic et Mladic, le 4 juillet 1996. Il s'agit de la pièce à conviction

13 de l'accusation 32.

14 Et nous aimerions également demander le versement au dossier de

15 la pièce à conviction de l'accusation 32 A, qui est la traduction en BCS

16 de ce compte rendu d’audience, ainsi que la pièce à conviction 32 C qui

17 est la transcription en français.

18 La diffusion peut commencer dès que les Juges le décideront.

19 M. le Président. – Maître Petrusic, vous ne vous êtes pas

20 prononcé sur les pièces 32 A et 32 C. Avez-vous quelque objection ?

21 M. Petrusic (interprétation). – Non, Monsieur le Président.

22 M. le Président. – Donc les pièces, madame la Greffière, sont

23 versées au dossier. Merci beaucoup.

24 On peut donc commencer, si la cabine technique est prête, nous

25 sommes prêts aussi.

Page 2344

1 (L’accusé est introduit dans le prétoire.)

2 Excusez-moi la cabine technique, est-ce que vous pouvez

3 reprendre.

4 Excusez-moi, Général Krstic, je ne me suis pas rendu compte que

5 vous n'étiez pas là. Est-ce que l'on peut reprendre dès le début ?

6 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, j'aimerais

7 demander le versement au dossier de la pièce à conviction suivante qui est

8 la cassette du témoignage du caporal Groenewegen, recueillie le

9 4 juillet 1996, au cours de l’audience tenue au titre de l'article 61

10 contre Karadzic et Mladic.

11 Je demande également le versement au dossier de

12 trois transcriptions de cette cassette, les pièces à conviction de

13 l’accusation 32 A pour la version anglaise, 32B pour la version en BCS et

14 32C qui est la version en français de cette cassette.

15 M. le Président. - Monsieur Harmon, pour l’instant, je suis un

16 peu confus. Vous aviez déjà demandé le versement de ces pièces, n’est-ce

17 pas ?

18 M. Harmon (interprétation). – Je pensais, Monsieur le Président,

19 que vous me demandiez de me répéter parce que j'avais parlé en l'absence

20 du général Krstic, j'ai donc répété ce que j'avais dit en son absence.

21 M. le Président. – De fait, vous avez raison.

22 Donc je crois que la défense va répéter qu'elle est de

23 d'accord ?

24 M. Petrusic (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

25 M. le Président. - Merci beaucoup.

Page 2345

1 Encore une fois, je m'excuse devant le général Krstic.

2 Donc maintenant, nous sommes prêts. Merci beaucoup.

3

4 (Diffusion de la cassette.)

5 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Merci, Monsieur le

6 Président.

7 L’accusation appelle le caporal Groenewegen à la barre.

8 (Le témoin est introduit dans la salle d’audience.)

9 M. le Président. – Je crois qu’il faut que je passe par

10 l’interprète.

11 Vous m’entendez madame ?

12 L’interprète. – Oui.

13 M. le Président. – Vous allez demander au témoin de procéder à

14 la lecture de la déclaration.

15 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Je déclare

16 solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la

17 vérité.

18 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Merci, Monsieur le

19 Président.

20 Bon après-midi, Caporal Groenenwegen.

21 Je vous demanderai de donner vos nom et prénom, et de les épeler

22 je vous prie.

23 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Je m’appelle

24 caporal Groenewegen.

25 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Caporal Groenenwegen,

Page 2346

1 vous servez actuellement dans l’armée néerlandaise, c’est bien cela ?

2 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Oui.

3 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous donner

4 votre rang actuel et vos responsabilités dans votre arme ?

5 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Je suis

6 caporal suppléant dans un groupe de dragons d’infanterie.

7 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Avez-vous servi en

8 Bosnie-Herzégovine ?

9 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Oui.

10 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous dire à la

11 Cour quand vous avez été en service en Bosnie-Herzégovine ?

12 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – De

13 janvier 1995 à juillet 1995.

14 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Qui était votre

15 officier commandant à cette époque ?

16 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Vous demandez

17 le nom du sergent du groupe ?

18 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Oui.

19 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – C’était le

20 sergent Mulder.

21 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Qui était votre

22 officier de commandement supérieur au moment où vous étiez stationné en

23 Bosnie-Herzégovine ?

24 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Le lieutenant

25 Schopmans ( ?).

Page 2347

1 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Avez-vous été

2 stationné à Potocari pendant votre séjour en Bosnie-Herzégovine ?

3 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Oui.

4 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Avez-vous été affecté

5 à la Compagnie Bravo ?

6 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Non, à la

7 Compagnie Charly.

8 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Combien de compagnies

9 y avait-il dans la région de Potocari ?

10 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Une compagnie.

11 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Y avait-il d’autres

12 compagnies dans l’enclave de Srebrenica ?

13 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Oui.

14 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous décrire

15 ces compagnies ?

16 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – La Compagnie

17 Bravo ?

18 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous décrire à

19 la Cour vos responsabilités spécifiques lors de votre arrivée dans la zone

20 de Potocari ?

21 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Mes

22 responsabilités consistaient à travailler dans les postes d’observation, à

23 patrouiller à pied et à occuper l’enclave.

24 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Vous avez utilisé le

25 sigle OP, s’agit-il d’un sigle qui signifie poste d’observation ?

Page 2348

1 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – C’est exact.

2 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Vous serviez dans

3 l’infanterie, dans l’un des postes d’observation, est-ce bien cela ?

4 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – C’est exact.

5 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pourriez-vous dire à

6 la Cour, étant un membre de l’infanterie affecté à un poste d’observation,

7 quelles étaient vos tâches quotidiennes ?

8 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Mon travail

9 consistait à effectuer des patrouilles au poste d’observation lui-même.

10 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Y avait-il des types

11 de patrouilles différents ?

12 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – C’est exact.

13 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous les

14 décrire ?

15 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Deux types de

16 patrouilles : les patrouilles dites "frontalières" et les patrouilles

17 dites "sociales".

18 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Quelle était la

19 différence entre ces deux types de patrouilles ?

20 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Les

21 patrouilles dites "sociales" avaient pour but d’installer des contacts

22 avec la population et de vérifier la situation au sein de l’enclave.

23 Quant aux patrouilles frontalières, elles avaient pour but de

24 vérifier si les parties belligérantes respectaient les accords.

25 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Monsieur le

Page 2349

1 Président, j’aimerais que l’on montre la pièce à conviction 60, une carte

2 de l’enclave.

3 Avez-vous été affecté à un poste d’observation précis ? Est-ce

4 bien cela ?

5 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – En fait, j’ai

6 été affecté à deux postes d’observation.

7 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Quelles étaient vos

8 responsabilités dans ces deux postes ?

9 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – J’ai été

10 affecté aux postes d’observation Mike et November.

11 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous montrer

12 sur la carte la localisation de ces deux postes d’observation au sein de

13 l’enclave de Srebrenica ?

14 (M. Groenewegen indique ces lieux sur la carte.)

15 Pourriez-vous repointer ces lieux, je vous prie ? La carte

16 n’était pas à l’écran. De quel poste d’observation s’agit-il ?

17 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – C’est le poste

18 d’observation Mike.

19 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous nous

20 montrer l’autre poste d’observation où vous avez servi ?

21 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – C’est le poste

22 d’observation November.

23 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Au cours des premiers

24 mois de l’année 1995, au moment où vous êtes arrivé à Potocari, à quoi

25 cela ressemblait-il de servir dans un poste d’observation ? Qu’est-ce que

Page 2350

1 cela impliquait ?

2 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - C’était très

3 agréable, la journée se passait à effectuer des patrouilles, à rester en

4 sentinelle, à se reposer. Peu de patrouilles dans la journée, donc pas

5 grand-chose à faire en fait.

6 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Avez-vous eu à faire

7 face à une résistance quelconque ou à un antagonisme de la part de l’armée

8 serbe bosniaque pendant vos patrouilles ?

9 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Non.

10 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Est-ce qu’à un moment

11 donné, au cours de vos patrouilles, la situation a commencé à changer ?

12 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Tout à fait,

13 cela a eu lieu le dernier mois.

14 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Que s’est-il passé au

15 cours du dernier mois ?

16 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Il y a d’abord

17 eu interruption complète de la circulation des convois, ce qui nous a

18 empêché de poursuivre notre travail. Et puis nous n’avions plus

19 suffisamment de vivres, de fuel, de carburant.

20 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – A la fin du mois de

21 juin, début juillet 1995, à quel poste d’observation étiez-vous affecté ?

22 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Au poste

23 d’observation Mike.

24 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Pouvez-vous décrire à

25 la Cour ce qui s’est produit au poste d’observation Mike ? Je veux parler

Page 2351

1 du comportement des soldats serbes bosniaques aux abords de ce poste

2 d’observation.

3 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Depuis les

4 positions serbes que nous étions en mesure de voir à partir de nos

5 positions, nous avons commencé à voir des soldats qui adressaient des

6 signes, intimant l’ordre de quitter le poste d’observation et la région.

7 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Quand ont-ils

8 commencé à vous adresser ce genre de gestes ?

9 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Vous voulez

10 dire le moment ?

11 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Oui.

12 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Le matin.

13 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Combien y avait-il de

14 soldats dans le contingent serbe bosniaque qui a commencé à vous adresser

15 des indications vous intimant l’ordre de partir ?

16 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Environ une

17 dizaine d’hommes.

18 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Comment étaient-ils

19 armés ?

20 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Nous étions

21 trop loin, nous ne pouvions pas le voir.

22 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Vous ont-ils crié

23 quelque chose que vous pouviez entendre à cette distance ?

24 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Oui.

25 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Quel genre de choses

Page 2352

1 avez-vous entendues ?

2 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Nous avons

3 entendu un mot de la langue locale qui signifie quelque chose comme

4 "Fichez le camp ! Partez d’ici !". Nous le comprenions bien ce mot.

5 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Combien de temps ces

6 provocations ont-elles durées ?

7 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Dix à

8 15 minutes.

9 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Cela s’est-il passé

10 plusieurs jours d’affilée ?

11 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Moi, je ne

12 l’ai vécu qu’une seule fois, un jour.

13 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Finalement, est-ce

14 que l’armée serbe bosniaque, aux abords du poste d’observation Mike, a

15 décidé d’un type quelconque d’action agressive ?

16 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Ils ont lancé

17 des obus contre le poste d’observation ?

18 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Quand cela s’est-il

19 passé ? Je veux parler du moment de la journée et du jour où cela s’est

20 passé.

21 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). – Cela a dû se

22 passer le 10 juillet, presque immédiatement après les menaces. C’est à ce

23 moment-là qu’ils ont commencé à tirer.

24 M. Bowers (interprétation de l’anglais). – Vous vous trouviez

25 personnellement au poste d’observation lorsque le bombardement des Serbes

Page 2353

1 bosniaques a commencé ?

2 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui, c'est

3 exact.

4 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Vous rappelez-vous à

5 quelle heure cela s'est passé dans la journée ? Le matin ? L'après-midi ?

6 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Le matin.

7 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Pourriez-vous dire

8 approximativement combien d'autobus sont tombés aux abords ou sur le poste

9 d'observation ?

10 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Cela a duré

11 plusieurs heures, je dirais une vingtaine.

12 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Combien d'autres

13 soldats d'infanterie se trouvaient avec vous au poste d'observation Mike

14 lorsque le pilonnage au mortier a commencé ?

15 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Nous étions

16 dix à ce moment-là.

17 M. Bowers (interprétation de l'anglais) .- Qu'avez-vous tous

18 fait lorsque ces tirs de mortier ont commencé ?

19 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Nous passions

20 pratiquement toute la journée à l'intérieur du bunker.

21 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Savez-vous si, au

22 moment où l'attaque au mortier a commencé contre le poste d'observation

23 Mike, il y a eu des attaques contre d'autres postes d'observation dans

24 l'enclave de Srebrenica ?

25 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui, cela

Page 2354

1 s'est passé à d'autres postes d'observation également.

2 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Comment pouvez-vous

3 dire qu'il y a eu d'autres attaques contre d'autres postes d'observation à

4 l'intérieur de l'enclave ?

5 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Nous avons

6 reçu des nouvelles de temps en temps et nous pouvions également entendre

7 les tirs dans toute la région.

8 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Vous avez dit que le

9 pilonnage a duré une grande partie de la journée. C'est bien cela ?

10 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui, en

11 particulier de jour.

12 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Y a-t-il encore eu

13 des pilonnages au cours de la nuit ?

14 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Presque pas.

15 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Etant donné votre

16 situation personnelle, qu'avez-vous fait quand le pilonnage a commencé ?

17 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Je suis resté

18 dans le bunker. En tant que membres du personnel du poste d'observation,

19 après le pilonnage nous avons recommencé notre travail le plus rapidement

20 possible.

21 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Y a-t-il eu d'autres

22 problèmes le lendemain lorsque vous avez repris votre travail ?

23 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Le lendemain

24 matin, il y a eu quelques obus qui ont été tirés. Dans l'après-midi, je

25 suis revenu à la base.

Page 2355

1 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Vous êtes retourné à

2 la base parce que c'était le moment pour vous dans le cadre de la rotation

3 prévue de retourner à la base de Potocari ? C'est bien cela ?

4 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - C'est exact.

5 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Lorsque vous êtes

6 arrivé à la base de Potocari, quelle y était la situation ?

7 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - La situation

8 était tendue. Nous avons également passé pas mal de temps à la base à

9 l'intérieur du bunker.

10 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Lorsque vous êtes

11 retourné à la base, avez-vous pu voir des armes aux mains de l'armée serbe

12 bosniaque dans les environs ?

13 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Négatif.

14 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Quelque temps plus

15 tard, avez-vous pu voir quelles armes ils possédaient ?

16 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - C'est exact.

17 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - A quel moment cela

18 s'est-il produit et qu'avez-vous vu ?

19 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - C'était aux

20 alentours de midi le lendemain, et nous ne cessions de voir des flammes là

21 où les obus étaient tirés. Nous pouvions voir d'où venaient ces flammes.

22 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Cela signifie-t-il la

23 présence d'un lance-roquettes multiple de quelque type que ce soit ?

24 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - C'est exact.

25 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Où se trouvait situé

Page 2356

1 ce lance-roquettes multiple ?

2 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Dans les

3 montagnes les plus proches, près du poste d'observation Papa.

4 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Avez-vous pu

5 déterminer quelle était la nature des cibles visées ?

6 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Non, il n'y

7 avait pas de cible précise. Probablement s'agissait-il uniquement d'une

8 provocation, de façon à empêcher les gens de circuler.

9 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Merci.

10 Après votre retour à la base de Potocari, des réfugiés ont

11 commencé à un certain moment à arriver de la zone de Srebrenica. Est-ce

12 bien exact ?

13 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Cela s'est

14 passé le 11 juillet, le matin.

15 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Est-ce que la

16 Compagnie Bravo a circulé en même temps que certains réfugiés ?

17 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui, nous

18 avons vu un groupe important de réfugiés, après quoi un nombre croissant

19 de membres de la Compagnie Bravo.

20 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Aviez-vous quelques

21 responsabilités que ce soit quant à l'accueil de ces personnes fuyant, en

22 exode, de Srebrenica ?

23 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - C'est exact.

24 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Quelles étaient vos

25 responsabilités ?

Page 2357

1

2 (25 minutes de texte manquent.)

3

4 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - A votre avis, ces

5 coups de feu étaient-ils le résultat de combats?

6 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Non, c'étaient

7 des coups de feu isolés.

8 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Ce qui, à votre avis,

9 n'indique pas qu'il y avait combat ?

10 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Non.

11 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Au moment où vous

12 avez entendu ces coups isolés, je suppose qu'il y avait des soldats serbes

13 qui se trouvaient sur ce périmètre ?

14 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui.

15 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Ont-ils manifesté de

16 l'inquiétude en entendant ces coups isolés ?

17 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Non.

18 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Etes-vous en mesure

19 de reconnaître le général Mladic ?

20 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui.

21 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Comment pouvez-vous

22 expliquer que vous êtes en mesure de le reconnaître ?

23 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Par des

24 briefings que nous avons eus, des sessions d'informations, des nouvelles

25 d'une manière générale.

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1 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Avez-vous vu le

2 général Mladic à Potocari ?

3 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui.

4 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Combien de fois

5 approximativement, l'avez-vous vu ?

6 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Environ quatre

7 fois.

8 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - A quelles occasions

9 avez-vous vu le général Mladic à Potocari ?

10 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Le 13 juillet

11 et pratiquement toute la journée.

12 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Pourriez-vous décrire

13 à la Cour un peu ce qu'il faisait au cours de cette journée ?

14 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Je l'ai vu

15 parler à ces gens et quelques personnes du Bataillon. C'est tout ce que

16 j'ai vu.

17 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Avez-vous eu

18 l'impression qu'il avait les choses en main, qu'il dirigeait les

19 opérations ?

20 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui.

21 M. Bowers (interprétation de l'anglais). - Le 13 juillet, quand

22 vous avez vu le général Mladic à Potocari, avez-vous vu les soldats

23 commencer à séparer les hommes en âge de se battre des femmes, le même

24 jour ?

25 M. Groenewegen (interprétation du néerlandais). - Oui.

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1 (Fin de la diffusion.)

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3 M. le Président. - Monsieur Harmon, je crois que nous avons

4 terminé ici aussi ?

5 M. Harmon (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.

6 M. le Président. - Après avoir vu cette vidéo, on va suspendre

7 l'audience jusqu'à demain 10 heures, dans la salle d'audience II.

8 C'est clair pour tout le monde.

9 On se retrouve demain à 10 heures, donc je lève l'audience.

10 Merci.

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12 L'audience est levée 14 heure 57.

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