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1 (Lundi 19 mars 2001.)
2 (Audience publique.)
3 (L'audience est ouverte à 9 heures 40.)
4 (Questions relatives à la procédure.)
5 M. le Président: Bonjour Mesdames Messieurs. Bonjour cabine technique,
6 bonjour interprète. Bonjour personnel du Greffe.
7 Pouvez-vous nous annoncer l'affaire, Madame Thomson?
8 Mme Thomson (interprétation): Bonjour Monsieur le Président, affaire IT-
9 98-33-T, le Procureur contre Radislav Krstic.
10 M. le Président: Du côté du Bureau du Procureur, Monsieur Harmon, s'il
11 vous plaît?
12 M. Harmon (interprétation): Bonjour Monsieur le Président, bonjour Madame
13 et Monsieur les Juges, bonjour conseil de la défense, je m'appelle Mark
14 Harmon et je suis ici en compagnie de M. Peter McCloskey pour représenter
15 l'accusation.
16 M. le Président: Merci Monsieur Harmon.
17 Maître Petrusic, s'il vous plaît, du côté de la défense?
18 M. Petrusic (interprétation): Bonjour Monsieur le Président, les conseils
19 de la défense sont représentés par moi même, avocat Petrusic, et mon
20 collègue Me Visnjic.
21 M. le Président: Nous avons deux décisions à rendre et nous allons rendre
22 ces décisions de façon orale en disant qu'il n'y aura pas de décision
23 écrite.
24 Le 26 février 2001, la défense a soumis deux requêtes, la première tendant
25 à exclure la déclaration présumée de l'accusé, la seconde aux fins de
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1 communication d'éléments de preuve à décharge.
2 L'accusation a répondu à ces requêtes et s'y est opposée le 14 mars 2001;
3 la défense a présenté une réplique en ce qui concerne la première requête,
4 requête aux fins d'exclure des déclarations présumées de l'accusé.
5 Le débat porte sur des écoutes pratiquées à l'époque des faits et dont le
6 Procureur soutient qu'elles font entendre la voix du Gal Krstic disant
7 notamment: "Tuez les tous!", et que l'accusation souhaiterait faire
8 admettre comme pièce à conviction.
9 La défense s'y oppose aux motifs: Un, que ces écoutes constituent des
10 déclarations de l'accusé au sens de l'Article 66 du Règlement; deux, que
11 ces éléments touchant au fond de l'affaire ne peuvent pas être admis au
12 stade de la présentation en réplique "rebuttal" de ces éléments de preuve
13 par le Procureur.
14 La Chambre observe que le but de l'Article 66 du Règlement est de
15 permettre par la communication, par l'accusation à la défense des
16 déclarations de l'accusé et des déclarations des témoins, une meilleure
17 préparation de la défense et d'une manière générale de permettre le
18 respect des droits de la défense.
19 Mais la Chambre souligne que l'Article 66 se décompose en deux grandes
20 parties. Si l'Article 66 A) impose la communication des déclarations de
21 l'accusé, l'Article 66 B) fait clairement apparaître que le Procureur
22 n'est aucunement tenu de communiquer la totalité des livres, documents et
23 autres éléments de preuve en sa possession. Il n'est tenu de le faire que
24 si la défense déclenche la procédure de communication réciproque prévue
25 par l'Article 67 du Règlement.
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1 L'accusation n'aurait donc été dans l'obligation de communiquer les
2 écoutes en cause à la défense que dans l'hypothèse où elle constituerait
3 des déclarations de l'accusé au sens propre, tel n'est pas le cas.
4 La Chambre considère que par déclaration de l'accusé au sens de l'Article
5 66 du Règlement, il faut entendre les déclarations faites par l'accusé
6 spontanément ou non, mais alors qu'il est informé que ces propos sont
7 enregistrés sous une forme ou sous une autre dans le cadre d'une procédure
8 de police ou de justice quelle qu'elle soit, tel n'est manifestement pas
9 le cas ici, les écoutes en question doivent être traitées comme des
10 documents au sens de l'Article 66.
11 La requête est donc rejetée sur ce point.
12 S'agissant du caractère tardif de l'utilisation par le Procureur de ces
13 écoutes radio, la Chambre déplore effectivement que l'accusation n'ait pas
14 présenté ces documents à un moment plus opportun pour le déroulement de
15 l'ensemble du procès. Ces documents sont incontestablement pertinents et,
16 à supposer qu'ils soient admis, ils sont de ceux qui à l'évidence touchent
17 au moins autant au fond de l'affaire qu'à la crédibilité de l'accusé en
18 tant que témoin.
19 Cela dit, et quelle que soit leur valeur probante éventuelle, la Chambre
20 observe, sans partager pour autant l'ensemble des considérations faites
21 par le Procureur, que la défense a disposé d'un temps raisonnable pour
22 présenter ses arguments éventuels en opposition à ces documents.
23 En effet, la défense a été informée dès le contre-interrogatoire du Gal
24 Krstic par le Procureur que ce dernier avait l'intention de solliciter
25 l'admission de ces documents au cours de sa réplique, "ribato". La défense
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1 a donc disposé d'un temps suffisant pour se préparer, de telle sorte que
2 le principe de l'équilibre entre les parties ne peut pas être considéré
3 comme ayant été rompu.
4 Ces documents étant donc pertinents, la Chambre décidera de leur admission
5 après avoir examiné l'ensemble des explications fournies par l'accusation
6 et la défense au cours de la réplique "rebuttal" et de la duplique
7 "rejoinder".
8 La requête de la défense concernant les écoutes radio du Gal Krstic est
9 donc rejeté.
10 Voilà la décision de la Chambre par rapport à la requête de la défense aux
11 fins d'exclure des déclarations présumées de l'accusé.
12 Nous avons annoncé aussi qu'il faudrait décider la requête aux fins de
13 communication d'éléments de preuve à décharge. Néanmoins, avant de le
14 faire, la Chambre voudrait avoir un éclaircissement du côté de la défense
15 pour savoir si on a besoin ou non de décider cette question.
16 L'information tient à avoir avec une note de bas de page de la réponse de
17 la défense à la requête pour exclure des déclarations de l'accusé et dans
18 cette note de bas de page, la première note de bas de page, j'ai le texte
19 en anglais, je vais lire en anglais:
20 (interprétation) "La défense a également déposé une requête aux fins de
21 communication d'éléments de preuve à décharge, et elle est convaincue, sur
22 la base des éléments communiqués par l'accusation et par la réponse de
23 l'accusation, que la défense a reçu l'essentiel des documents qu'elle
24 demandait, à savoir des éléments de preuve montrant qu'aucun Musulman n'a
25 été tué suite aux déclarations faites par le Gal Krstic le 2 août."
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1 Je dois demander à la défense si cela signifie que la requête n'est pas
2 encore en vigueur, a été enlevée, ou d'autres informations pertinentes.
3 Maître Visnjic, s'il vous plaît?
4 M. Visnjic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Madame et
5 Monsieur les Juges, bonjour membres de l'accusation.
6 Monsieur le Président, depuis que la défense a présenté cette requête, à
7 ce jour, le Bureau du Procureur a communiqué à plusieurs reprises une
8 certaine documentation qui pourrait satisfaire pratiquement à toutes les
9 requêtes de la défense présentées aux différents points.
10 Le seul point qui demeure litigieux entre l'accusation et la défense, ce
11 sont les déclarations de deux témoins, à savoir les Témoins DB et
12 Obrenovic avec lesquels l'accusation a eu des interviews.
13 Au sujet de la requête portant communication des documents, nous avons
14 obtenu une information de la part du Bureau du Procureur disant que ces
15 deux témoins n'avaient pas été interrogés au cours des interviews sur les
16 entretiens-ci contestés concernant les communications interceptées du 2
17 août.
18 Dans le cas où le Bureau du Procureur nous confirmerait cette information,
19 nous estimerions que la plupart de nos requêtes ont été réalisées, et de
20 ce point de vue nous serions disposés à retirer la requête présentée.
21 M. le Président: Très bien Maître Visnjic.
22 Monsieur Harmon, est-ce que vous avez un commentaire à propos de
23 l'enlèvement de cette requête?
24 M. Harmon (interprétation): Monsieur le Président, pour nous, la note de
25 bas de page au n°1, c'était une requête aux fins de retrait de la demande
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1 qui avait été déposée auprès de la Chambre de première instance, mais en
2 réponse à la réponse qui vient d'être évoquée par mon collègue, Me
3 Visnjic, nous avons répondu au paragraphe 19 de notre requête.
4 J'ai été informé au cours de l'interrogatoire de deux individus ou de deux
5 personnes que mon collègue vient de mentionner qu'aucune de ces personnes
6 ne s'est vue poser des questions au sujet de ces conversations sur cette
7 base. C'est ce que j'ai inclus au paragraphe 19 et que je confirme
8 aujourd'hui.
9 M. le Président: Nous n'avons donc pas besoin de prendre une décision à ce
10 sujet, une fois que la défense nous confirme qu'elle a enlevé cette
11 requête.
12 Nous allons maintenant reprendre notre affaire, comme vous avez vu
13 sûrement après la réplique du Procureur et la réponse de la défense, on va
14 se prononcer sur l'admission de ce document qui était en cause, qui a fait
15 l'objet de discussions entre les parties.
16 Je vois que Me Visnjic veut soulever une question.
17 M. Visnjic (interprétation): Monsieur le Président, je ne voudrais
18 qu'informer la Chambre du fait que les conseils de la défense se proposent
19 de faire appel concernant cette décision. La défense suggère que la
20 procédure soit suspendue en attendant la décision concernant cet appel et
21 que nous poursuivions les travaux entre temps avec la présentation des
22 autres pièces à conviction dans la réplique de l'accusation.
23 Je me réfère à la décision rejetant la requête relative à l'élimination
24 des déclarations présumées de l'accusé.
25 M. le Président: Oui, merci Maître Visnjic.
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1 Monsieur Harmon, avez-vous une réponse par rapport à la requête de
2 décision d'appel mais surtout de suspension?
3 M. Harmon (interprétation): Oui Monsieur le Président.
4 Nous nous opposons à la requête aux fins de suspension de la procédure,
5 nous avons 13 à 15 témoins qui vont venir, qui sont prêts à témoigner,
6 nous n'avons qu'un temps limité, une semaine pour présenter nos arguments
7 et nous sommes prêts à démarrer. Cela constituerait un énorme
8 bouleversement si l'on permettait la suspension de la procédure. La
9 défense a le droit de déposer un appel mais je pense que ce ne serait
10 peut-être pas une très bonne décision de suspendre en attendant toute la
11 procédure.
12 Nous nous opposons à cette demande.
13 Mme Wald (interprétation): Maître Visnjic, je voudrais être sûre que nous
14 partons des mêmes bases et de la même compréhension de la décision du
15 Président, c'est-à-dire que pour l'instant sa seule décision a été de dire
16 que ces communications interceptées ne tombent pas sous le coup de la
17 définition de l'Article 66 d'une déclaration. C'est la question de
18 l'authentification qui n'a pas été réglée.
19 D'autre part, nous n'avons pas pris de décision, même si l'on part du
20 principe que ces communications sont authentifiées, donc nous n'avons pas
21 pris de décision quant à savoir si ces pièces ont été présentées à juste
22 titre dans la réplique au lieu d'être représentées dans la présentation
23 des arguments au principal.
24 Donc voilà le principe de base de la décision prise et je voulais être
25 sûre que nous nous comprenions bien et que nous partions du même principe.
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1 M. Visnjic (interprétation): Madame et Messieurs les Juges, je dois vous
2 dire que je n'ai pas compris la chose ainsi, je viens de consulter
3 mon collègue Petrusic.
4 Nous avions compris que notre requête avait été rejetée dans son ensemble.
5 Si j'ai bien compris, seule la première partie selon le 66 A) a été
6 rejetée.
7 Donc notre première demande d'interruption de la procédure ou de la
8 suspension de procédure en attendant n'aurait pas de sens. Nous allons
9 interjeter l'appel uniquement concernant cette partie-là de la décision.
10 M. le Président: Merci Madame Wald et merci aussi Maître Visnjic.
11 Nous allons donc continuer notre procédure et nos travaux.
12 Vous avez comme toujours le droit de faire l'appel.
13 J'aimerais donner la parole au Procureur pour présenter aux termes de
14 l'Article 85 sa réplique.
15 M. McCloskey (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Madame et
16 Monsieur les Juges.
17 Aujourd'hui notre premier témoin s'appelle Peter French. On lui a demandé
18 d'examiner des cassettes pour une comparaison de voix et également une
19 analyse pour savoir s'il y a eu falsification d'enregistrement. C'est
20 notre premier témoin, mais il vient un petit peu dans le désordre, si je
21 puis dire parce qu'il a des engagements au Royaume-Uni où il doit
22 comparaître en tant que témoin dans une affaire.
23 Donc au lieu d'entendre ceux qui ont procédé à l'interception, nous allons
24 lui demander de passer en premier, comme nous ne procédons pas vraiment
25 par ordre. Je pense qu'il convient que je vous donne un petit peu le
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1 contexte de tout cela parce qu'il y a une nouvelle pièce dans cette
2 affaire.
3 Si vous vous souvenez, il y a eu un certain nombre de requêtes en
4 particulier en ce qui concerne les documents qui figurent dans les notes
5 de bas de page.
6 Peu avant la déposition du Gal Krstic, une de nos équipes a examiné les
7 archives de l'armée de Bosnie à Sarajevo. Cette équipe d'enquêteurs a
8 trouvé un grand nombre de cassettes semblables à celles que nous avons
9 entendues à plusieurs reprises dans cette affaire. Après la fin de la
10 déposition du Gal Krstic, nos équipes d'enquêteurs et d'analystes ont
11 trouvé une nouvelle version de ce qu'on appelle la cassette "Tuez les
12 tous!" du 2 août.
13 Donc cette cassette, nous l'avons envoyée ainsi que la cassette originale
14 que vous avez déjà entendue. Nous avons envoyé tout cela au Dr French afin
15 qu'il puisse procéder à une analyse, à une comparaison de ces cassettes.
16 Aujourd'hui il va nous parler de ces deux enregistrements et ce sera
17 également le cas des deux autres témoins.
18 Mme Wald (interprétation): Est-ce que la défense a la deuxième cassette,
19 est-ce qu'elle est au courant?
20 M. McCloskey (interprétation): Oui, Madame la Juge.
21 Dès que nous avons eu connaissance de cette cassette, nous leur avons
22 communiqué une copie, une transcription, et nous leur avons donné toutes
23 les informations nécessaires au sujet de cet enregistrement. Nous avons
24 travaillé avec la défense, avec l'expert de la défense, notre expert, pour
25 nous assurer que la défense soit en mesure d'avoir accès à toutes les
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1 informations; leur expert d'ailleurs est allé au Royaume-Uni passer deux
2 jours avec leurs experts pour étudier ces documents.
3 Nous n'avons pas reçu le rapport de l'expert de la défense, mais s'il y a
4 un rapport nous espérons pouvoir le recevoir bientôt. A ma connaissance,
5 l'équipe de la défense est tout à fait au fait de tous les éléments,
6 cahiers, cassettes, etc.
7 M. le Président: Monsieur McCloskey, permettez-moi avant de commencer de
8 demander à la défense s'ils ont quelque objection par rapport à la
9 question, en dehors de l'ordre.
10 M. Visnjic (interprétation): Non, nous n'en avons pas, Monsieur le
11 Président.
12 M. le Président: Nous sommes donc en condition d'appeler à la barre le
13 témoin. Monsieur McCloskey?
14 M. McCloskey (interprétation): Faites entrer le docteur French, s'il vous
15 plaît.
16 Peut-être pouvons-nous commencer par distribuer le C.V. du témoin, c'est
17 la pièce 840.A.
18 (Le témoin, M. Peter French, est introduit dans le prétoire.)
19 M. le Président: Bonjour Docteur Peter French. M'entendez-vous?
20 M. French (interprétation): Oui, je vous entends, Monsieur le Président.
21 M. le Président: Vous allez lire la déclaration que M. l'huissier va vous
22 tendre, s'il vous plaît.
23 M. French (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
25 M. le Président: Merci beaucoup d'être venu Docteur French, pour l'instant
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1 vous allez répondre aux questions que le Procureur va vous poser.
2 C'est donc M. Peter McCloskey qui est debout à votre droite.
3 Donc Monsieur McCloskey, vous avez la parole s'il vous plaît.
4 (Interrogatoire principal du témoin, M. Peter French, par M. McCloskey.)
5 M. McCloskey (interprétation): Monsieur le Président.
6 Docteur French, en premier lieu, pouvez-vous s'il vous plaît dire à la
7 Chambre quelle est votre profession, quel est votre poste, et ensuite
8 parler aux Juges de votre formation et ce qui vous a amené à exercer ce
9 métier?
10 M. French (interprétation): Je suis un consultant indépendant en matière
11 de police scientifique, spécialisé dans l'analyse des enregistrements des
12 bandes magnétiques d'extraits vocaux. J'ai un diplôme d'université en
13 phonétique, la science des sons, j'ai donc une licence en linguistique et
14 en phonétique, un doctorat dans l'analyse des conversations enregistrées.
15 Je suis membre et membre associé d'un grand nombre d'organisations
16 professionnelles.
17 Actuellement, je suis Président de l'association internationale de la
18 phonétique utilisée dans la police scientifique, il s'agit de
19 l'association professionnelle qui s'intéresse justement au type de travail
20 pour lequel je comparais aujourd'hui. Je suis membre associé de
21 l'association internationale d'acoustique, l'analyse physique des sons.
22 Mais plutôt que de passer en revue mon Curriculum Vitae, Monsieur
23 McCloskey, je me demande s'il ne serait pas, parce que je pense que c'est
24 tout à fait ennuyeux d'entendre quelqu'un décliner tout ce qu'il a fait au
25 cours de sa vie, peut-être vaut-il mieux distribuer le CV à Mme et MM. les
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1 Juges, cela pourrait peut-être faire gagner du temps.
2 Question: Oui, il s'agit de la pièce à conviction 840A que vous avez sous
3 les yeux et à laquelle la Chambre a également accès. Je pense en effet que
4 votre suggestion est une suggestion très valable, et je voudrais savoir
5 seulement si vous avez déjà comparu comme témoin dans le cadre de votre
6 activité professionnelle?
7 Réponse: Oui, je l'ai dit dans mon C.V. à plusieurs reprises.
8 A peu près à 200 reprises, j'ai été consulté dans 3.000 affaires ou plus,
9 il s'agissait de l'examen de milliers d'enregistrements dans des affaires
10 pénales, j'ai comparu aussi bien pour l'accusation que la défense, peut-
11 être un petit peu plus pour l'accusation en fait.
12 Question: Vous nous parlez de linguistique, vous nous parlez de
13 phonétique, est-ce que vous pouvez expliquer de quoi il s'agit, et ce que
14 vous faites exactement, concrètement pour l'accusation ou la défense?
15 Réponse: Eh bien, oui. Ce que je fais en ce qui concerne l'enregistrement
16 sur bande magnétique, on peut le diviser en deux catégories d'activité.
17 En premier lieu, si on me présente des enregistrements de mauvaise
18 qualité, avec contamination de bruit, eh bien on me demande de procéder à
19 un filtrage pour éliminer les bruits présents sur les enregistrements afin
20 que la conversation en question soit plus intelligible, plus audible.
21 D'autre part, j'analyse des enregistrements sur bande magnétique pour
22 savoir s'il y a eu falsification ou modification avant que
23 l'enregistrement en question ne soit utilisé au Tribunal.
24 D'autre part, je compare les voix dans les enregistrements, vous avez sur
25 une cassette généralement la voix d'un suspect qui est connu et de l'autre
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1 côté sur un autre enregistrement une voix que l'on ne connaît pas. On me
2 demande donc de procéder à la comparaison pour éliminer le suspect
3 éventuellement, ou bien pour confirmer qu'il s'agit de lui.
4 Parfois on me demande de dire si ce qu'on dit sur une cassette, peut-être
5 dans les cas par exemple où quelqu'un parle un dialecte rare ou bien
6 quelqu'un parle anglais avec un accent très fort, ou bien que la qualité
7 de la cassette est un petit peu problématique, on me demande donc
8 d'étudier les schémas du discours du locuteur pour savoir de qui il
9 s'agit.
10 Question: J'imagine donc que votre domaine d'expertise se limite à
11 l'anglais, votre langue maternelle?
12 Réponse: Oui.
13 Question: Quand vous analysez la langue ou les conversations de quelqu'un
14 qui ne parle pas anglais, à ce moment-là j'imagine que vous faites appel à
15 un expert dans la langue en question?
16 Réponse: Oui, je fais appel à quelqu'un qui connaît parfaitement cette
17 langue, soit que ce soit sa langue maternelle soit c'est quelqu'un qui a
18 étudié et qui a fait des recherches sur cette langue.
19 D'autre part, cette personne, je veux que ce soit un linguiste ou
20 quelqu'un qui soit spécialiste en la matière. La raison pour laquelle je
21 fais appel à des experts de ce type, c'est que quand on essaie
22 d'identifier des locuteurs, on essaie de trouver des traits tout à fait
23 caractéristiques du discours du locuteur, c'est-à-dire qui s'éloignent de
24 la norme. Mais pour savoir ce qui s'éloigne de la norme, il faut connaître
25 la norme de la langue en question.
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1 Question: Dans l'affaire qui nous intéresse, je crois que vous avez fait
2 appel à un témoin qui sera un témoin protégé, en l'espèce, nous allons
3 donc faire référence à lui sous le pseudonyme EE. Donc vous avez fait
4 appel à cette personne?
5 Réponse: C'est exact.
6 Question: Que vous a-t-on demandé de faire en l'espèce? Qu'avez-vous fait?
7 Réponse: Eh bien, on m'a demandé de procéder à deux analyses.
8 En premier lieu, on m'a demandé d'analyser un enregistrement sur bande
9 magnétique qui a été réalisé sur deux cassettes. Je ne sais pas si vous
10 voulez que je les identifie pour la Chambre?
11 Question: Oui, allez-y. De quoi s'agit-il?
12 Réponse: Il s'agit de la cassette 48 et de la cassette 32.
13 Question: Pour le compte rendu d'audience, je dirai que la cassette 48 est
14 la pièce à conviction 789 et le nouvel enregistrement sur bande
15 magnétique... je m'excuse, le 48 était l'ancienne pièce et le 49 est la
16 nouvelle cassette, pièce 835.
17 Réponse: Eh bien, moi, je me suis intéressé à l'enregistrement de
18 conversations qui se retrouvent sur ces deux enregistrements, sur ces deux
19 cassettes. On m'a donné une transcription dans laquelle on identifie trois
20 locuteurs, le premier le Gl Krstic, le deuxième le lieutenant-colonnel
21 Obrenovic et le troisième…
22 M. le Président: Je crois que nous avons ici un aspect à éclaircir: vous
23 avez mentionné une cassette n°48 et 32 et M. McCloskey a mentionné une
24 cassette 48 et 49. Je voudrais que cette question soit éclaircie et la
25 correspondance avec les pièces à conviction. Je crois qu'il y a un
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1 problème, je ne sais pas si j'ai bien compris, Monsieur McCloskey?
2 M. McCloskey (interprétation): Vous avez raison, Monsieur le Président, le
3 témoin connaît très bien les différents numéros qui ont été assignés à ces
4 enregistrements.
5 Donc 32, c'est également 39 c'est-à-dire la pièce 835?
6 M. French (interprétation): Oui. C'est donc le nouvel enregistrement.
7 Comme je l'ai dit, il y avait également une transcription de la
8 conversation en question et on avait attribué au Gl Kristic, au commandant
9 Renovic ou au commandant Jevdevic une partie de ces conversations, et donc
10 on m'a demandé d'étudier d'autres enregistrements qui m'avaient été
11 communiqués. Il s'agissait d'enregistrements d'interrogatoires auxquels on
12 avait procéder au sein des institutions des Nations Unies, au cours
13 desquels ces trois officiers, on m'a demandé de comparer les schémas
14 vocaux sur ces cassettes avec les cassettes précédentes.
15 L'objectif bien entendu, c'était d'identifier ou de les éliminer de la
16 conversation qui nous intéresse, à savoir la conversation interceptée dans
17 le cadre d'une communication par radio. J'ai consulté le Témoin EE à ce
18 sujet, le Témoin EE est un expert en matière de langues slaves, en
19 particulier en BCS. Nous avons travaillé de concert en la matière et avons
20 procédé à un nombre de tests.
21 Je dois dire que, quand il s'agit d'identifier les locuteurs dans ce type
22 d'analyse, on pratique deux types d'analyse.
23 En premier lieu, vous avez des analyses de type de phonétique auditive,
24 cela revient à écouter, ce sont des tests d'écoute qui sont pratiqués par
25 quelqu'un qui a l'oreille formée, et donc on écoute la façon dont les
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1 consonnes et voyelles sont prononcées. Un exemple dans l'alphabet romain
2 que la plupart d'entre nous utilisent: nous n'avons que 26 lettres mais
3 quand on procède à une analyse de phonétique auditive on fait appel à un
4 alphabet qui est plus vaste et qui a été mis en place par l'association
5 phonétique internationale pour voir les nuances les plus subtiles de la
6 langue parlée. Cela permet de faire des distinctions subtiles que l'on ne
7 peut faire avec l'alphabet romain. Par exemple quelque soit la manière
8 dont on prononce la lettre T, le son T, avec l'alphabet vous n'avez pas
9 pour enregistrer, pour traduire la façon dont cela a été prononcé alors
10 qu'avec l'alphabet de l'association phonétique internationale vous pouvez
11 faire la différence entre différents types de sons T. Par exemple, il y en
12 a qui sont faits avec la langue un peu plus en avant dans la bouche, ou le
13 contraire sur les dents etc. Je prends le T comme exemple mais il en va de
14 même pour toutes les autres consonnes et voyelles, donc une partie des
15 tests de phonétique auditive est de passer en revue les enregistrements et
16 les échantillons de comparaison et de faire des notes, de prendre des
17 notes quant à la façon dont les consonnes et les voyelles sont prononcées
18 et de les comparer. Cette partie du travail, c'est sans doute le Témoin EE
19 qui est mieux à même d'en parler parce qu'il entre en compte des
20 différences au niveau du dialect, etc. C'est lui qui s'est occupé de cette
21 partie du rapport.
22 Concernant l'analyse de la phonétique auditive, on écoute également
23 l'intonation, la montée, la baisse, la descente de la voix et on
24 s'intéresse également à la qualité de la voix, à savoir la résonance de la
25 voix, à savoir si c'est une voix rauque, nasale ou une voix comme la
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1 mienne, c'est-à-dire qu'on ne cesse de me demander si j'ai un rhume alors
2 que je n'en ai jamais parce que je parle normalement comme cela.
3 A la fin de cette analyse de phonétique auditive, on passe à des tests
4 d'acoustique, cela consiste à enregistrer de nouveau les échantillons
5 analysés sur un ordinateur et on utilise divers logiciels pour analyser le
6 discours en question. Par exemple, nous avons mesuré en l'espèce les
7 fréquences fondamentales, à savoir la vitesse de vibration des cordes
8 vocales quand quelqu'un parle. Entre la pomme d'adam et le larynx, vous
9 avez des muscles qui s'appellent les cordes vocales et quand nous parlons,
10 quand nous produisons des consonnes, des voyelles, ces cordes vibrent
11 extrêmement rapidement et, plus elles vibrent rapidement, plus le ton de
12 la voix est élevé. On a calculé cela aussi bien pour les échantillons de
13 voix que pour les cassettes examinées en tant que telles.
14 D'autre part, nous avons procédé à une analyse spectographique, il s'agit
15 d'examiner la répartition de l'énergie de la voix au fil du temps. La
16 seule personne pour laquelle il a été possible de faire une analyse
17 spectographique, pour les raisons que je vais vous expliquer et cela a été
18 encore très limité, la seule personne pour laquelle nous avons pu le faire
19 c'est la conversation attribuée au lieutenant-colonel Obrenovic. Je dois
20 dire à ce sujet que les comparaisons que nous avons faites ont été rendues
21 assez difficiles, du fait, de deux éléments essentiels.
22 En premier lieu, ce qui s'est passé, c'est que la conversation interceptée
23 par radio se faisait sur une gamme de fréquence très limitée. Je ne sais
24 pas si vous me permettez de me reporter à mon rapport et à mes notes.
25 M. le Président: Monsieur McCloskey, c'est à vous à répondre à la
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1 question.
2 M. McCloskey (interprétation): Oui, si cela peut vous aider, n'hésitez
3 pas. Et pour le compte rendu d'audience, je signale que le témoin a établi
4 deux rapports, l'un qui a trait à l'examen des voix, 839 A, et en ce qui
5 concerne le deuxième rapport, il s'agit d'un rapport sur les
6 enregistrements et il s'agit de la pièce 838A.
7 M. French (interprétation): Oui, comme je l'ai déjà dit précédemment, vous
8 avez deux sortes d'enregistrement sur deux bandes. Sur le premier
9 enregistrement, l'enregistrement 48, eh bien, l'énergie vocale était
10 faible et dépassée très rarement 2,3 kilohertz, 2,3 vibrations par
11 seconde. J'ai utilisé cet enregistrement pour analyser la voix présumée du
12 commandant Obrenovic.
13 En ce qui concerne l'autre enregistrement, l'enregistrement n°32, la
14 qualité du signal était légèrement meilleure. Il s'agissait de la
15 conversation présumée entre le Gal Krstic… Notamment et là rarement
16 l'énergie vocale dépassaient rarement les fréquences, ce genre de
17 fréquence.
18 Or ceci est très faible parce que si vous prenez une conversation
19 téléphonique normale, eh bien, la fréquence vocale est généralement de 3,4
20 kilohertz. Donc les enregistrements en question présentaient des niveaux
21 de fréquence vocale extrêmement faibles qui gênent l'analyse. On n'a pu
22 faire une analyse spectrographique que sur la voix présumée d'Obrenovic
23 sur l'enregistrement 48 et ceci de façon limitée vu la basse fréquence de
24 la voix.
25 Deuxième facteur qui a limité l'étendue de l'analyse et la force de nos
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1 conclusions, c'est le fait qu'apparemment dans la conversation interceptée
2 les gens semblaient crier. C'est moins le cas pour le Gal Krstic que pour
3 les autres locuteurs, mais il parlait de cette façon très fort comme je
4 vous l'ai indiqué, et ceci limitait également la nature de nos analyses
5 parce qu'on devait comparer cela avec les enregistrements où les gens
6 parlaient de façon beaucoup plus mesurée et beaucoup moins forte.
7 A la fin de notre analyse, nous ne sommes pas parvenus à des conclusions
8 définitives. Aucune des analyses que nous avons menées ne nous a permis
9 d'identifier l'un des trois officiers même avec des fortes probabilités.
10 Tout ce que nous pouvons dire, c'est que nous ne pouvons éliminer aucun
11 d'entre eux. Il y a des similitudes dans la qualité de la voix, mais ceci
12 était difficile à évaluer du fait que dans certains enregistrements il
13 crie et dans d'autres, non.
14 D'autre part, tout ce que nous pouvons dire, c'est qu'il est possible que
15 les trois locuteurs dans les communications militaires interceptées ont
16 été effectivement Jevdevic, Obrenovic et Krstic.
17 Afin d'être complet, je dois vous dire que généralement je travaille au
18 moyen d'une échelle d'appréciation avec quatre points positifs et quatre
19 points négatifs. Vous avez le point zéro dans mon échelle des
20 appréciations, c'est celui que j'ai adopté en l'espèce, j'ai dit qu'il
21 était possible, point zéro, je pense qu'il est possible qu'il s'agisse des
22 mêmes locuteurs.
23 Au-dessus, dans cette échelle d'appréciation, vous avez d'autres moyens
24 d'appréciations, que les locuteurs soient identiques est plus probable que
25 contraire, deux qui sont identiques, trois probablement identiques, quatre
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1 très probablement identiques. Dans des cas extrêmement rares lorsque la
2 qualité des enregistrements est extrêmement bonne ou quand quelqu'un a un
3 défaut de prononciation, à ce moment-là, dans un cas sur 200 on peut dire
4 "Je suis sûr à 100% qu'il s'agit de la même personne". Donc là ce serait
5 le point 5 sur cette échelle des appréciations. Et au bas de cette échelle
6 des appréciations, vous avez le point -1 où on est moins sûrs qu'il
7 s'agisse des mêmes personnes.
8 Question: Merci, pour ces informations au sujet de l'analyse sur la
9 comparaison des voix. En ce qui concerne l'aspect technique, en ce qui
10 concerne la spectrographie, vous l'avez fait vous-même?
11 Réponse: Oui. Mais par exemple en ce qui concerne les fréquences
12 fondamentales, le Témoin E était présent et je lui ai signalé ce qui se
13 passait sur l'écran.
14 Question: Très bien, passons à votre analyse et voyons ce qui s'est passé
15 entre les moments où les deux enregistrements ont été faits pour découvrir
16 si oui ou non il y a des preuves de manipulation selon le mot qu'il est
17 courant d'utiliser pour parler de ce genre de chose.
18 Réponse: Oui.
19 Question: J'ajoute, puisque nous parlons vous et moi la même langue, il
20 serait bon que nous ralentissions un peu notre débit pour faciliter le
21 travail des interprètes.
22 Réponse: Je vous prie de m'excuser. Mais, Monsieur McCloskey, avant de
23 parler de cela, je voudrais souligner qu'il y a une erreur dans le rapport
24 dont nous venons de parler vous et moi, si je puis me permettre.
25 Question: Je vous en prie.
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1 Réponse: Il s'agit du rapport 080/A qui est le rapport d'identification de
2 l'orateur, celui qui vient d'être produit. Si vous me donnez un instant,
3 je vais remettre la main dessus. Je crois que nous étions en train de
4 regarder la page 2 du rapport. Question: Ne parlez-vous pas du document
5 839/A, c'est-à-dire le rapport au sujet des échantillons de discours
6 examiné?
7 Réponse: Cela devrait être ce document, mais je n'ai pas de cote sur le
8 mien. Question: Vous devriez en avoir un avec un numéro sur la première
9 page à droite.
10 Réponse: Je ne crois pas.
11 Question: Eh bien, on va vous en apporter un.
12 Réponse: Merci beaucoup. Oui, c'est le document 839/A. Je me rends en page
13 2 de ce rapport, donc c'est la première page du texte, après la page de
14 couverture. Si je regarde à un quart de la page, deuxième titre principal
15 de la page, nous voyons le titre "point 2, matériel examiné et
16 instruction", et quatre lignes plus bas au niveau du 1, je vois les mots
17 "Une magnétique audio de marque Agfa, bande 32," et un peu plus bas au
18 niveau du 2, je lis "Une bande". Au niveau du i) pour le I et au niveau du
19 ii) pour le II.
20 Au niveau du ii), je lis: "Une bande magnétique audio de marque BASF,
21 bande 48". Donc il faut intervertir les chiffres 32 et 48.
22 Question: Merci.
23 Réponse: La deuxième chose qu'on m'a demandé de faire, c'est d'examiner
24 deux versions d'un enregistrement pour constater s'il y a eu manipulation.
25 Je me demandais si je pouvais obtenir une indication des interprètes à ce
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1 stade de mon intervention pour savoir si la vitesse est convenable.
2 M. McCloskey (interprétation): Nous entendons les interprètes de cabine
3 anglaise nous dire que tout va bien.
4 Réponse: Très bien, merci. Pour m'aider dans cette analyse et dans ces
5 examens, on m'a d'abord donné deux bandes magnétiques. C'est le premier
6 élément. Ensuite une transcription en BCS de la conversation à analyser,
7 c'est le deuxième élément, et un troisième élément qui était une
8 traduction en anglais de cette conversation.
9 Par ailleurs, M. Jack Hunter, qui travaille pour le service d'enquête du
10 bureau d'étude des alcools, tabacs et armes à feu aux Etats-Unis m'a
11 envoyé certaines choses et notamment un rapport préliminaire émanant de
12 lui relatif à son inspection d'un certain nombre d'appareils utilisés pour
13 intercepter des messages radio, notamment un enregistreur UHR qui, si j'ai
14 bien compris, a été utilisé pour procéder aux enregistrements que j'ai
15 reçus pour examen.
16 Il m'a également envoyé un rapport qui était un rapport de sa main un peu
17 plus détaillé que le précédent, analysant donc les bandes magnétiques, les
18 cassettes audio utilisées pour enregistrer les enregistrements réalisés
19 initialement par l'enregistreur UHR.
20 Question: Pour que tout soit tout à fait clair, j'aimerais vous demander
21 dans votre analyse sur les manipulations de preuves, combien de documents
22 de Jack Hunter vous avez utilisés?
23 Réponse: Très peu. On m'a donné un certain nombre d'indications pour
24 m'aider dans mon travail.
25 D'abord, on m'a dit que le premier enregistrement qui est apparu, qui a
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1 fait son apparition, était celui que l'on trouve sur la bande. Une fois
2 que l'enregistrement sur la bande 48 a fait son apparition, cet
3 enregistrement a été recopié, a été mis par écrit sous forme de compte
4 rendu, et c'est seulement à une date ultérieure, je crois qu'il s'agit du
5 moment où les archives de Sarajevo ont été examinées, qu'on m'a dit
6 expliqué que la bande 32 avait été découverte au cours de l'exécution d'un
7 mandat de perquisition.
8 On trouve donc sur cette bande 32 le même enregistrement que sur la bande
9 48. On m'a expliqué, cela correspondait aux informations que m'avait
10 fournies Jack Hunter dans son rapport que, durant la guerre, il arrivait
11 que plusieurs postes d'interception interceptent la même conversation.
12 A l'examen des bandes enregistrées, des deux bandes, il apparaît que c'est
13 exactement ce qui s'est produit dans le cas qui nous intéresse.
14 J'expliquerai pourquoi dans quelques instants.
15 Quand j'ai procédé à l'examen des bandes enregistrées, j'ai découvert que
16 l'enregistrement contesté, que l'on trouve sur la bande 48, c'est-à-dire
17 la première qui a fait son apparition, se situait à peu près 20 minutes et
18 15 secondes après le début de la bande magnétique; et la version que l'on
19 trouve sur la deuxième bande, c'est-à-dire 32, se situe à 12 minutes et 50
20 secondes après le début, après le démarrage de la bande.
21 Sur ces deux bandes, l'enregistrement contesté se trouve mêlé à d'autres
22 enregistrements du même genre en d'autres termes ces deux enregistrements
23 semblent contenir des messages interceptés émanant de militaires et dans
24 les deux cas l'enregistrement contesté est au milieu d'autres messages
25 interceptés. Quand j'ai regardé plus en détail les bandes qui m'ont été
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1 fournies, il est apparu que la vitesse d'enregistrement initiale était de
2 4,7 centimètres par seconde, c'est-à-dire un pouce et 7/8 de pouce par
3 seconde, une vitesse qui correspond à celle d'un enregistreur UHR et que
4 les deux conversations étaient monophoniques et non stéréophoniques. Les
5 deux enregistrements. En d'autres termes, la bande magnétique se déroulait
6 jusqu'à pratiquement la fin de la bande. La dimension physique de ces
7 bandes était comparable à celle des tests réalisés par M. Hunter. Les
8 bandes paraissaient usées toutes les deux; il semblait à l'examen physique
9 qu'elles avaient été utilisées et réutilisées très souvent et la bande 32
10 en particulier a été particulièrement usée. L'examen au microscope a
11 montré de nombreuses rayures sur la surface de la bande. Quand j'ai
12 comparé ces bandes avec les deux enregistrements j'ai découvert d'abord
13 qu'il y avait une petite différence dans la vitesse d'enregistrement, de
14 fonctionnement de ces deux bandes et j'ai donc synchronisé les deux bandes
15 pour qu'elles aient la même vitesse et pour qu'elles puissent être
16 utilisées sur un système informatique utilisant deux bandes en même temps.
17 Donc la bande 32 sur le canal 1 avec affichage sur écran informatique,
18 j'ai synchronisé les points de départ des enregistrements et les fins des
19 enregistrements et il m'est apparu finalement que la bande 32 était un peu
20 plus en avance. Elle était en avance de deux minutes 29 secondes au niveau
21 du temps d'enregistrement. Cela montre que la bande 32, qui avait
22 finalement 2 secondes ou plutôt 1,94 secondes d'avance avait dû être
23 enregistrée sur une machine tournant à une vitesse légèrement inférieure à
24 celle de la bande 48. Quand on les réécoute en play-back, on constate la
25 même chose. C'est un phénomène tout à fait courant c'est-à-dire lorsque
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1 l'on a deux enregistrements de la même conversation, cela enregistré par
2 le même appareil la vitesse de fonctionnement nominal est disons de 4,7
3 centimètres par seconde. Mais en réalité et notamment lorsque l'usure est
4 assez importante, au bout d'un certain temps l'enregistrement tourne à une
5 vitesse supérieure ou inférieure. Et il y a une différence de vitesse
6 entre les deux. L'autre différence entre les deux enregistrements c'est la
7 puissance des signaux vocaux. Vous vous rappellerez que dans les
8 communications radio il y a en général deux sens, le rapport de M. Hunter
9 indique qu'il y a une fréquence utilisée pour l'émission et une autre
10 fréquence utilisée pour la reconnaissance du message, c'est-à-dire pour la
11 réception. Lorsqu'on scanne ces réceptions, on se rencontre qu'il faut
12 accorder les deux fréquences pour obtenir une très bonne qualité de voix
13 c'est-à-dire une voix très claire. Les réponses provenant de l'autre canal
14 doivent être non existantes pour le premier canal qui lui doit avoir la
15 puissance maximale. C'est-à-dire que le signal de réception doit être
16 normalement inférieur à l'émission ce qui correspond aux fréquences radio
17 écoutées de façon habituelle. Dans les deux enregistrements dont nous
18 sommes en train de parler c'est-à-dire l'enregistrement 48, discours
19 attribué à Obrenovic, on voit une puissance plus importante, une amplitude
20 plus grande que dans le discours attribué à Jevdevic et à Krstic qui
21 constitue l'autre face de la communication, l'autre partie de la
22 communication. Et sur l'enregistrement 32, c'est l'inverse. En d'autres
23 termes, Krstic parlait plus fort et Jevdevic et Obrenovic parlaient moins
24 fort. Sur l'autre enregistrement il y a des différences également au
25 niveau du démarrage des deux enregistrements sur la bande 48, j'aimerais
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1 peut-être que l'on me donne le rétroprojecteur, qu'on l'allume pour
2 expliquer mon point de vue.
3 Question: Oui, Monsieur l'huissier, pouvez-vous placer la pièce 789A sur
4 le rétroprojecteur. La pièce 789A, il s'agit de la transcription de
5 l'enregistrement 48 sur le rétroprojecteur, je vous prie.
6 Réponse: Oui, nous avons donc ici la transcription de l'enregistrement de
7 la bande magnétique 48.
8 Question: Il faut un petit peu ajuster le rétroprojecteur.
9 Réponse: Vous me donnez un instant, je vous prie. J'ai besoin de m'y
10 retrouver parmi mes documents. Serait-il possible d'utiliser comme point
11 de départ la version BCS de l'enregistrement 48.
12 Question: Oui, absolument.
13 Réponse: Merci.
14 Question: Normalement vous trouvez la version BCS juste après la pièce
15 739A sous la cote 739B, normalement.
16 Réponse: Oui donc dans cette version, la version qui reprend la bande 738,
17 je ne pouvais pas déterminer très clairement si l'enregistrements
18 commençait ici, là où j'inscris ma première flèche c'est-à-dire au niveau
19 où on lit les mots "Obrenovic Sa Palme ou bien au niveau où je mets la
20 deuxième c'est-à-dire deux lignes plus bas. Parce qu'en haut nous avons le
21 début d'un enregistrement, nous entendons un cliquetis, un bruit de
22 cliquetis qui pourrait indiquer le début d'un enregistrement. Mais au
23 niveau de la deuxième flèche, il y a trois autres cliquetis qui pourraient
24 indiquer que le début de l'enregistrement ne se situe pas en haut, mais au
25 niveau de la deuxième flèche.
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1 Question: Monsieur French, je suis désolé, mais quand vous dites au niveau
2 en haut, au niveau en bas il faudrait peut-être que vous mettiez des mots
3 pour que nous puissions comprendre. Le compte rendu d'audience ne peut pas
4 reprendre vos gestes.
5 Réponse: Oui, je vous prie de m'excuser. Ici à ce niveau-là, non excusez-
6 moi, au niveau de la première ligne de la transcription, nous nous situons
7 à 20 minutes et 15 secondes à peu près du démarrage de la banque
8 magnétique. Et nous entendons juste au niveau de cette première ligne un
9 petit bruit de cliquetis qui pourrait être une fréquence transitoire
10 provenant d'une énergie électrique introduite dans le fonctionnement de la
11 bande magnétique par l'enregistreur, par le magnétophone ou par autres
12 éléments. Au niveau 3 de la transcription, 10 secondes plus tard à peu
13 près, nous entendons 3 cliquetis qui pourraient être des transitoires de
14 commutation dus au matériel.
15 Puisque je n'ai pas pu voir le magnétophone utilisé pour cet
16 enregistrement, je n'ai pas pu le voir moi-même, je suis incapable de dire
17 si l'enregistrement a commencé au niveau de la ligne 1, 20 minutes et 15
18 secondes après le début de la bande, ou bien au niveau de la ligne 3,
19 c'est-à-dire 10 secondes plus tard.
20 S'agissant maintenant de la bande 32, la situation est plus compliquée
21 encore. Avec la bande 32, il semble bien que le magnétophone ait continué
22 à enregistrer, c'est-à-dire que le bouton enregistrement était enfoncé à
23 un moment ou toutefois le bouton pause était appuyé lui aussi. C'est-à-
24 dire que par exemple la personne s'apprêtait à pouvoir enregistrer dès
25 qu'elle souhaitait le faire et qu'à ce moment-là elle n'aurait besoin pour
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1 enregistrer une communication très rapidement que d'appuyer sur le bouton
2 pause. Le magnétophone était en pause mais le bouton enregistré était
3 enfoncé, et à peu près au milieu de la page de transcription c'est-à-dire
4 juste avant le prononcé du mot "Momenat" le bouton pause a été levé. C'est
5 à ce moment que l'on trouve l'enregistrement du mot "Momenat" qui est
6 enregistré en premier, comme premier mot sur la bande 32.
7 Question: Pouvons-nous établir pour le compte rendu d'audience que la
8 bande 32 correspond à la pièce à conviction 835? Je vois que vous avez
9 inscrit une troisième flèche sur le texte qui se trouve sur le
10 rétroprojecteur en disant qu'il s'agissait de la bande 32, pourriez-vous,
11 je vous prie, inscrire le n°32 à côté de cette flèche? Cela nous aiderait
12 à nous y retrouver plus tard.
13 (Le témoin s'exécute.)
14 Réponse: Ce qui semble être arrivé, c'est que le bouton pause a été levé,
15 ce qui a permis l'enregistrement du mot "Momenat", mais après
16 l'enregistrement de ce mot "Momenat", le bouton pause à nouveau été
17 appuyé, ce qui a mis fin une nouvelle fois à l'enregistrement.
18 Cette interruption n'a duré que très peu de temps, 0,3/0,5 seconde, et
19 c'est dans cet intervalle de temps très court qu'a été prononcé le mot
20 "Halo" qui a été attribué à Krstic.
21 En appuyant sur le bouton pause, ce qui s'est passé c'est qu'au moment où
22 la personne en question dit le mot "Halo" l'enregistrement est interrompu,
23 donc le mot "Halo" n'est pas enregistré sur la bande. A ce moment-là, le
24 bouton pause est relevé immédiatement après que le mot "Halo" a été
25 prononcé et l'enregistrement se poursuit de manière identique à ce que
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1 l'on constate sur la bande 48.
2 Ce que je veux, c'est dire de la façon la plus claire que sur la bande 32
3 on ne trouve pas l'enregistrement du mot "Halo", on trouve sur la bande 32
4 l'enregistrement du mot "Momenat" suivi immédiatement par ce que dit
5 censément la personne dont le nom est Obrenovic, à savoir la phrase que
6 j'ai un peu de mal à lire en original, c'est-à-dire "Sta se to izgubi…"
7 etc.
8 Question: Si nous regardons la pièce 835B, à savoir la bande 32, qu'est-ce
9 qui est absent de cette bande très précisément? On va vous apporter le
10 document.
11 Réponse: J'en ai une version ici.
12 Question: Nous utilisons le document sur lequel figure la cote de la pièce
13 à conviction, c'est notre habitude.
14 Réponse: Je pense que c'est le texte que j'ai sous les yeux.
15 Question: Nous allons l'utiliser. Peut-on placer sur le rétroprojecteur la
16 version en BCS?
17 Réponse: J'aimerais voir les deux transcriptions l'une à côté de l'autre
18 et les mettre ensemble sur le rétroprojecteur. Il est utile de les voir
19 l'une à côté de l'autre. Donc vous voyez ici à gauche l'enregistrement de
20 la bande 32, on voit le "Halo" et "Momenat" et à droite l'enregistrement
21 48 où il n'y a pas de "Halo", on voit le mot "Momenat" et ensuite
22 directement Obrenovic.
23 Sur la transcription de gauche, on a appuyé deux fois sur le bouton pause
24 qui ensuite a été relevé. Les enregistrements se poursuivent de façon tout
25 à fait parallèle avec un contenu identique jusqu'à la fin. Sur la bande
Page 8643
1 48, à la fin de la conversation, on entend une série de bip bip, ce qui
2 ressemble au bruit d'un magnétophone que l'on débranche.
3 Sur la bande 32, ces sons ne sont pas entendus, l'enregistrement se
4 termine avant que l'on entende ces sons.
5 Question: Pourquoi parvenez-vous à la conclusion que le "halo" est absent
6 d'une transcription parce que le bouton pause a été appuyé? Etes-vous
7 capable de nous expliquer comment vous parvenez à cette conclusion?
8 Réponse: Pour deux raisons, il y a d'abord un petit déclic qui a une forme
9 très particulière quand on examine les ondes acoustiques. Sur le même
10 enregistrement qui m'a été envoyé par Jack Hunter, il a dans son
11 expérience appuyé sur le bouton pause et ensuite levé le bouton pause et
12 la même chose est constatée. Donc la forme des ondes dans les deux cas est
13 tout à fait similaire à ce que l'on trouve sur la version 32.
14 La deuxième raison, c'est que j'ai fait un enregistrement expérimental en
15 utilisant un autre appareil d'enregistrement UHR 4000 et j'ai obtenu la
16 même forme d'ondes avec le déclic, pas identique mais tout à fait
17 comparable.
18 Question: Avez-vous eu la possibilité d'interroger les opérateurs qui ont
19 intercepté ces messages?
20 Réponse: [expurgé].
21 Question: Je vous rappelle le débit de parole.
22 Réponse: Excusez-moi.
23 Question: Tout va bien. Continuez.
24 Réponse: L'opérateur radio auquel j'ai parlé m'a informé qu'il était de
25 pratique courante, quand on surveillait des conversations, d'utiliser le
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1 magnétophone UHR en mode de fonctionnement, en mode d'enregistrement mais
2 avec le bouton pause enfoncé, de façon enfonçée à ce que l'enregistrement
3 ne se fasse pas de façon effective.
4 Dès que l'on entendait quelque chose d'intérressant, on appuyait sur le
5 bouton pause pour que le bouton se soulève et que l'enregistrement puisse
6 se faire. "Très souvent", m'a t-il dit, "une fois que le contact radio est
7 établi, la personne à l'origine de la conversation dit: "Pourrais-je
8 parler au commandant X?" et la voix de l'interlocuteur répond le plus
9 souvent "Momenat" ce qui signifie: "Un moment, je vous prie"."
10 A ce moment-là, l'opérateur appuie à nouveau sur le bouton pause parce que
11 selon celui que j'ai rencontré il m'a dit: "Il peut se passer plusieurs
12 minutes, une dizaine de minutes, avant que la personne qui a dit "Momenat"
13 ne revienne au bout du fil." Donc l'opérateur radio a appuyé sur le bouton
14 pause pour interrompre l'enregistrement et après cette longue interruption
15 qui a permis à la personne, qui allait chercher l'interlocuteur, de
16 demander au bout du fil de le trouver, la conversation reprend et
17 l'opérateur radio appuie de nouveau sur le bouton pause pour reprendre
18 l'enregistrement.
19 Voilà ce qui m'a été expliqué, cette attente peut durer relativement
20 longtemps, c'est l'explication qui permet de justifier l'absence du mot
21 "Halo".
22 Question: Y-a-t-il d'autres explications raisonnables qui pourraient
23 expliquer ces déclics autres que ce que vous venez de nous dire?
24 Réponse: Moi, en utilisant le sens commun, je ne pourrais pas imaginer que
25 l'on puisse supprimer le mot "Halo" d'un enregistrement pour une
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1 quelconque raison. Cela me semblerait, serait beaucoup d'efforts pour
2 supprimer un élément tout à fait anodin de la conversation.
3 Question: Pouvez-vous poursuivre votre analyse?
4 Réponse: Certainement.
5 Question: Je suis un peu comme Mozart, il y a trop de notes sous mes yeux.
6 Hormis ce déclic et l'absence du mot Halo dans la version 32 de
7 l'enregistrement…
8 M. le Président: Il serait convenable d'avoir une pause.
9 M. McCloskey (interprétation):Absolument Monsieur le Président, je vous
10 remercie.
11 M. le Président: Nous allons faire une pause de 20 minutes.
12 (L'audience, suspendue à 10 heures 55, est reprise à 11 heures 25.)
13 M. le Président: Monsieur McCloskey, vous pouvez continuer, s'il vous
14 plaît?
15 M. McCloskey (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
16 Docteur French, je vous prie de continuer là où vous vous étiez arrêté
17 pour ce qui est de votre analyse de cette interception. Vos micros sont
18 déconnectés.
19 M. French (interprétation): J'en étais arrivé à mes conclusions avant la
20 pause, et les conclusions sont les suivantes.
21 A l'exception de ce que j'avais cru être une pause après le mot "Momenat"
22 sur la bande 32, l'enregistrement sur les deux bandes apparaît être,
23 semble être continu. En bref, je n'ai pas d'éléments de preuve pour ce qui
24 est d'une manipulation ou davantage quelconque.
25 Ayant dit cela, je dois ajouter quelque chose. De nos jours, il est
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1 habituel pour des experts audio de dire, à juste titre, que
2 l'impossibilité de trouver des preuves qu'il n'y a pas eu de montage, ne
3 signifie pas qu'il n'y a pas eu effectivement montage.
4 Je le dis parce que ces jours-ci, nous disposons de systèmes digitaux par
5 ordinateur qui permettent d'enregistrer un entretien à partir d'un
6 enregistrement audio et de le réenregistrer par le biais d'un ordinateur
7 en se servant d'un programme de montage par ordinateur. Cela permet de
8 monter une partie de l'enregistrement, de rejeter une autre partie sans
9 laisser de trace du tout.
10 En le faisant de façon compétente, ce montage ne saurait être décelé. Il y
11 a du matériel qui peut être réenregistré, être passé par ordinateur et
12 ramené vers une bande audio d'enregistrement, cela est aujourd'hui
13 faisable. Bon nombre d'experts vous diraient aujourd'hui qu'il est
14 possible de monter des enregistrements en dissimulant les manipulations,
15 ce qui fait qu'un expert en police scientifique ne pourrait pas le
16 déceler.
17 Il est tout à fait inusuel d'avoir ce type d'expérience ici parce que nous
18 avons deux enregistrements distincts. Ce ne sont pas des copies l'un de
19 l'autre. Il s'agit d'originaux, d'enregistrements originaux d'un même
20 entretien.
21 Compte tenu de cela, je dois dire que la possibilité d'un montage digitale
22 se trouve être considérablement plus réduite que cela ne pourrait être le
23 cas dans un cas normal. Pour ce faire, les deux enregistrements auraient
24 dû être montés de façon indépendante l'une de l'autre. Je ne vois pas
25 d'autre façon, et cela aurait dû être fait de façon tout à fait analogue,
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1 c'est-à-dire analogue à l'autre. Je pense que ceux qui pourraient le
2 faire, devraient être habiles à le faire.
3 Question: Si l'on voulait faire monter un tel entretien et si l'on vous
4 demandait de monter un tel entretien, comment feriez-vous? Comment
5 pourriez-vous le faire?
6 Réponse: Eh bien, avec des acteurs peut-être ou alors des gens qui
7 accepteraient de jouer des rôles, le rôle de ceux, de gens qu'ils
8 prétendraient être.
9 Je dois vous dire que j'ai écouté beaucoup d'enregistrements audio où l'on
10 avait rassemblé non pas des acteurs, mais des gens qui avaient improvisé
11 des conversations, qui avaient peut-être lu, qui avaient peut-être
12 improvisé sur place pour faire un enregistrement qui se réutilisait par la
13 suite dans la cours. Il m'avait semblé évident dans des cas semblables
14 qu'il s'agissait de conversations réalisées sans pour autant utiliser un
15 langage vivant. C'était plutôt assez tendu.
16 Dans bien des cas ici, nous avons des chevauchements entre les
17 conversations et il me semble que la conversation n'est pas arrangée, et
18 que c'est en fin de compte ce qui correspond à la façon naturelle dont les
19 gens se parlent les uns aux autres et avec un chevauchement entre, les
20 fragments de conversation et le Témoin EE qui connaît bien les dialectes a
21 été consulté.
22 Je lui ai demandé également s'il pensait qu'il s'agissait d'une
23 conversation tendue ou une conversation où l'on faisait semblant de se
24 parler. Il m'avait dit que non. J'ai posé la question à des gens, des
25 linguistes, dont cela est la langue maternelle, qui traitent de ces
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1 langues, et ils m'ont répondu la même chose.
2 Question: Mais en sus du fait d'avoir là des acteurs parfaits dont la
3 façon de s'exprimer pourrait être parfaite, que devrait-on encore faire
4 pour avoir quelque chose de parfaitement bien fait?
5 Réponse: Eh bien, on devrait passer par une transmission radio et passer
6 par une espèce de dispositif électronique pour obtenir quelque chose
7 d'analogue.
8 Question: Est-il possible qu'une personne puisse disposer de plusieurs
9 conversations de certain groupe de personnes, et en tirer des bouts de mot
10 ou des bouts de phrase en mettant l'un à côté de l'autre sur ordinateur
11 pour en faire des phrases ou une conversation?
12 Réponse: Eh bien, j'ai vu dans une affaire précédente que cela avait été
13 exactement fait de la sorte. On avait l'impression que la conversation
14 était entièrement normale, et quand on écoutait un enregistrement c'était
15 une plaisanterie. Il faut avoir plusieurs aspects à l'esprit. Il faut donc
16 qu'il y ait phonétiquement la même intonation et c'est très difficile à
17 faire. On peut manipuler évidemment par ordinateur, on peut manipuler les
18 tons élevés mais c'est une tâche, à mon avis, très ardue.
19 Question: Quelle est votre opinion finale concernant ces deux
20 enregistrements? Est-ce qu'il y a eu un montage ou modification
21 quelconque?
22 Réponse: Non, je n'ai pas trouvé de preuve pour ce qui est d'un montage ou
23 d'un abus quelconque. Je crois qu'à la lumière de ce que j'ai dit, il me
24 semble très difficile de jouer, de faire l'acteur dans un tel montage.
25 Question: Je n'ai plus de questions.
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1 M. le Président: Maître Visnjic, je vois que c'est Me Visnjic pour le
2 contre-interrogatoire. S'il vous plaît?
3 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Peter French, par Me Visnjic.)
4 M. Visnjic (interprétation): Bonjour, Docteur French.
5 M. French (interprétation): Bonjour.
6 Question: Docteur French, dans votre rapport sur l'enregistrement audio,
7 pièce à conviction du Bureau du Procureur 838, en page 2, vous avez
8 indiqué que les enregistrements qui ont fait l'objet de votre analyse ont
9 été reçus dans votre laboratoire en date du 9 novembre 2000?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Est-ce que c'est bien la première fois que vous avez vu à ce
12 moment-là ces enregistrements?
13 Réponse: Je pense que oui, mais si vous me permettez, j'aimerais bien
14 jeter un oeil sur mes notes. J'ai reçu les copies de transcriptions de ces
15 entretiens et copies d'enregistrement. Mais si vous parlez, je ne sais pas
16 si vous pensez aux enregistrements ou aux copies d'enregistrement?
17 Question: Je parle de l'existence physique des enregistrements qui se
18 trouvent devant vous?
19 Réponse: Je pense que cela est bien le cas.
20 Question: Est-ce que vous avez reçu des copies d'enregistrement avant?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Pouvez-vous nous dire, dire à la Chambre, quand est-ce que vous
23 avez reçu ces copies d'enregistrement?
24 Réponse: Oui, le 3 février 1999. Il s'agissait d'une copie rien que de
25 l'enregistrement de la bande 48, avec des documents en sus.
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1 Question: Partant de ces copies, avez-vous établi ou élaboré un rapport
2 préliminaire? J'entends là les copies que vous avez reçues au mois de
3 février 1999?
4 Réponse: Non.
5 Question: Vous était-il possible d'établir des rapports préliminaires
6 étant donné qu'il s'agissait là de copies?
7 Réponse: Cela avait été possible. Il aurait été possible d'accomplir des
8 activités ou un travail préliminaire. Je n'avais pas travaillé à l'époque
9 avec le Témoin EE, mais avec un autre linguiste dont le BCS était la
10 langue maternelle. Mais au fur et à mesure que le temps passait, il m'est
11 apparu que j'avais besoin de quelqu'un d'autre, d'un collaborateur
12 différent pour m'aider.
13 Question: A la même page 2…
14 Réponse: Oui.
15 Question: Au dernier paragraphe, vous avez dit que vos analyses et celles
16 du [expurgé] ont été effectuées dans votre laboratoire à York et ce du
17 19 au 26 novembre de l'an 2000?
18 Réponse: Oui, je pense qu'il s'agissait, en effet, de la semaine au cours
19 de laquelle le Témoin EE et moi-même avons examiné ces enregistrements.
20 Question: Est-ce que vous saviez que le Témoin EE voyait pour la première
21 fois ces enregistrements?
22 Réponse: Je ne sais pas, je ne m'en souviens pas. Il se peut qu'il ait
23 disposé de copies de ces enregistrements avant que nous ne nous soyons
24 rencontrés à York. Cela me paraît possible.
25 Question: Docteur French, saviez-vous si ces enregistrements avaient été
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1 envoyés à un autre expert? Et si oui, sauriez-vous me dire si quelqu'un
2 d'autre a réalisé une expertise? Dans l'affirmative, sauriez-vous nous
3 dire si vous êtes au courant des résultats de ces expertises?
4 Réponse: Pour autant que je le sache, il n'a point été effectué d'analyse,
5 ou du moins je n'en ai pas eu vent.
6 Question: En date du 1er novembre 2000, lors de l'audience, mon collègue
7 McCloskey a déclaré, et je parle des pages 6083 et 6084 du compte rendu
8 d'audience, que cette copie d'enregistrement audio avait été confiée à un
9 expert et que le Bureau du Procureur s'efforçait depuis des mois d'aboutir
10 à une réponse finale ou définitive de la part de l'expert.
11 Compte tenu de ces paroles, est-ce que vous supposez qu'il s'agissait là
12 de vous-même ou d'un autre expert? Et je parle de la date du 1er novembre
13 2000?
14 Réponse: Il me semble vraiment qu'il ne m'appartient pas de dire ce que M.
15 McCloskey avait en tête, mais cela aurait pu être relié à moi-même. Je ne
16 sais pas si un autre expert y a pris part.
17 Question: Je vous remercie. Docteur French, en page 6 de la version
18 anglaise de votre rapport concernant l'enregistrement audio, pièce à
19 conviction 838 du Bureau du Procureur, point 4, intitulé "Modification,
20 falsification", vous avez expliqué que la technologie moderne permettait
21 certains types de modification ou de falsification.
22 Ma question serait la suivante: est-ce que ces technologies digitales pour
23 le montage ou la falsification que vous pensez avoir pu être utilisées
24 existait en l'an 1998 et auparavant?
25 Réponse: Cela existait certainement en 1998.
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1 Question: A condition de réunir toutes les conditions techniques dont vous
2 parlez dans vos commentaires qui suivent et concernant ces possibilités de
3 montage, d'après votre expérience, est-ce qu'une période de six semaines
4 pourrait être suffisante pour réaliser ou préparer ce type de montage?
5 Réponse: Eh bien, le problème à ce sujet c'est que cela devrait être fait
6 sur deux versions d'un même enregistrement, et cela de façon identique. Si
7 l'on éjectait ou retranchait une partie d'enregistrement pour insérer des
8 éléments d'un autre enregistrement, cela devrait être fait de façon tout à
9 fait identique sur deux versions d'un enregistrements originale, avec une
10 pleine précision pour aboutir au même timing. Vous vous souvenez qu'un
11 enregistrement défilait plus vite que l'autre.
12 Question: Oui, j'ai tout à fait compris la procédure que vous avez
13 expliquée à la Chambre. La question qui se posait de savoir si toute cette
14 intervention peut s'effectuer dans un délai de six semaines?
15 Réponse: Je pense que la question devait être formulée de façon à dire si
16 cela pouvait être réalisé du tout et non pas réalisé en six semaines. Je
17 ne peux vous faire de commentaire concernant le délai nécessaire. A mon
18 avis, pour que cela soit assuré sur deux enregistrements, cela serait une
19 tâche extrêmement difficile à réaliser en six semaines ou dans un délai
20 autre quel qu'il soit.
21 Question: Mais est-ce que six semaines peuvent constituer un cadre pour le
22 faire, pour réaliser une chose pareille ou pas?
23 Réponse: Cela dépendrait de la technologie contemporaine, sophistiquée,
24 disponible, de l'habileté du personnel, des ingénieurs du son, les
25 opérateurs, phonéticiens, opérateurs d'ordinateur. Il serait difficile de
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1 tirer des conclusions sans connaître les détails de cette sorte et les
2 circonstances. Il serait très difficile de le faire.
3 Question: Je vous remercie. Docteur French, dans votre rapport ou plutôt
4 vous avez reçu un rapport émanant de M. Hunter?
5 Réponse: Oui.
6 Question: A la page en question, il s'agit du rapport daté du 23 mars
7 1998. Je ne sais pas si vous l'avez à portée de mains?
8 Réponse: Oui, je pense l'avoir. Oui.
9 Question: Docteur French, avant de poser ma question, je voudrais savoir
10 si le Dr Hunter était également au courant de la technologie de collectes
11 de ces enregistrements. C'était une sorte de professionnel, d'expert en la
12 matière? Ai-je raison de le dire?
13 Réponse: Je ne sais pas. Je ne sais pas quelle a été sa formation, quel
14 type d'expertise il a pu faire et quelle est son expérience.
15 Question: Dans son rapport du 23 mars 1998, il s'agit d'une page qui porte
16 00889128. C'est la deuxième page de son rapport, au paragraphe 4, la
17 dernière phrase dit que: "Tous les enregistrements sont de bonnes
18 qualités".
19 Réponse: Oui, pourriez-vous juste me donner une petite minute pour relire
20 le rapport?
21 Je ne sais pas à quel enregistrement il se réfère à cette fin de
22 paragraphe 4. Voyez-vous, les enregistrements dont il parle ici ne sont
23 pas ces enregistrements-ci de façon claire parce que ces enregistrements
24 ont été faits à une vitesse de 4,7 centimètres à la seconde, alors qu'ici
25 il n'y a aucun enregistrement effectué à une vitesse de 4,7
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1 centimètres/seconde. Il doit donc apparemment parler d'autres
2 enregistrements. Ces enregistrements-là, je ne les ai pas vus.
3 Question: Mais il s'agit d'un rapport qui nous parle des 19 premiers
4 enregistrements sur bobine ouverte, et l'un de ces enregistrements se
5 trouve devant vous, c'est la première des bandes que vous avez reçue et
6 qui porte la désignation 48.
7 Réponse: Je ne puis vraiment pas être tenu responsable de ce que M. Hunter
8 a fait, mais la vitesse de défilement de ces bandes n'est pas celle qui
9 est mentionnée ici. On ne mentionne pas 4,7 centimètres à la seconde,
10 celles-ci ne sont pas de bonne qualité. Je ne sais pas si maintenant M.
11 Hunter est passé outre ou n'a pas entendu tous les enregistrements -je ne
12 tiens pas à lui imputer quoi que ce soit-, mais je ne sais pas ce qu'il a
13 vu.
14 Si vous me dites que c'est l'un des 19 premiers enregistrements, ce que
15 vous dites et ce que je vous lis ici ne correspond pas à ce j'ai constaté
16 en examinant les enregistrements.
17 Question: Si je puis répéter, vous avez constaté dans votre rapport, à la
18 page 3, point 3, que ces enregistrements étaient de mauvaise qualité, et
19 il s'agit de rapports de bande de mauvaise qualité.
20 Réponse: Oui, elles sont de mauvaise qualité.
21 Question: Merci. Docteur French, dans votre rapport relatif à
22 l'enregistrement audio, et je parle de la page 3 point 7 de la version
23 anglaise, vous dites que M. Hunter vous avait communiqué trois bandes
24 audio de type Ampex à bobine ouverte où il y avait des enregistrements
25 expérimentaux qui ont été faits sur un magnétophone de type UHER?
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1 Réponse: Oui.
2 Question: D'autre part, dans le rapport de M. Hunter daté du 24 avril, je
3 crois que nous avons pas mal de documents, mais on va y aller tout
4 doucement.
5 Réponse: Oui, j'ai ce rapport sous les yeux.
6 Question: Il s'agit du paragraphe 7, à partir du haut, le septième
7 paragraphe à partir du haut, nous parlons bien sûr de la page 2.
8 Réponse: Ma page 2 ne compte que 6 paragraphes. Est-ce que vous pourriez
9 me donner lecture des premiers mots de ce paragraphe?
10 Question: "J'ai demandé à voir sur place..."
11 Réponse: Oui, je l'ai retrouvé.
12 Question: Monsieur Hunter indique qu'il a pris les exemplaires
13 expérimentaux de ces bandes pour tout enregistrement, pour tout appareil
14 qu'il a trouvé sur place, et il a procédé à l'identification des
15 magnétophones en allant de cas 1 à cas 7. Il a fait la même chose à la
16 page suivante, la page 3?
17 Réponse: Oui.
18 Question: En remplacement à partir duquel il a été procédé à l'écoute des
19 transmissions radio, il a enregistré des bandes expérimentales et ce, en
20 usant trois enregistreurs UHER?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Partant des échantillons qui vous ont été communiqués par M.
23 Hunter...
24 Réponse: Oui.
25 Question: Avez-vous déterminé quel est le magnétophone sur lequel il a été
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1 procédé à l'enregistrement de n'importe quelle de ces bandes?
2 Réponse: Non, ce serait à une grande entreprise d'essayer de le faire, et
3 je crois que mon rapport final n'aurait pas encore été terminé si je
4 l'avais fait.
5 Question: Mais chacun de ces appareils laisse une trace spécifique sur la
6 bande, n'est-ce pas?
7 Réponse: Pas obligatoirement, il y a plusieurs facteurs qui interviennent
8 ici. L'un de ces facteurs est que le chercheur ne pourrait en aucun cas
9 déterminer si chacune de ces bandes avait sa propre signature ou
10 empreinte. Je me suis entretenu avec M. Hunter, il m'a dit au téléphone
11 qu'aucune de ces bandes ne se trouvait enregistrée sur cet appareil, il se
12 peut que l'appareil est égratigné certaines bandes. Il m'a également dit
13 que lorsqu'il avait examiné ces enregistrements, certaines personnes en
14 Bosnie lui avaient dit qu'ils avaient procédé à des réparations de ces
15 appareils ou têtes d'enregistreur.
16 Si l'un quelconque de ces appareils, qui avait été utilisé, avait
17 certaines caractéristiques, il n'est pas certain ni garanti que l'on
18 pourrait retrouver la chose au moment où l'enregistrement a été fait. Et
19 je crois que l'entreprise n'aurait point de fin si l'on essayait de voir
20 si l'un quelconque de ces enregistrements portait l'emprunte de l'une
21 quelconque de ces machines enregistreuses.
22 Question: Docteur French, d'un point de vue scientifique, est-il plus aisé
23 d'identifier l'appareil ou l'orateur, l'intervenant? Qu'est-ce qui est
24 plus précis?
25 Réponse: Ni l'un ni l'autre ne sont précis, et je ne puis accorder plus de
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1 poids à la procédure de l'un par rapport à l'autre lorsqu'il s'agit de la
2 précision.
3 Question: Docteur French, revenons au rapport de l'analyse des
4 échantillons de conversation. Il s'agit de la pièce à conviction du Bureau
5 du Procureur 839. Excusez-moi, le 839, ce sont les échantillons de
6 conversation, et le 838 c'est l'enregistrement, l'analyse de
7 l'enregistrement audio, à savoir le rapport.
8 M. Visnjic (interprétation): Il s'agit peut-être d'une mauvaise
9 interprétation. Je parlais du rapport qui se référait aux échantillons de
10 parole, pièce à conviction 839 du Bureau du Procureur.
11 Docteur French, en page 4 de la version anglaise de votre rapport…
12 M. French (interprétation): Oui.
13 Question: Dernier paragraphe, je parle à l'intention des interprètes, il
14 s'agit de la page 5 en version BCS.
15 Je me propose de lire cette phrase: "Les échantillons de contrôle et ceux
16 examinés n'étant pas équivalents au niveau de voix normale élevée, tout ce
17 que l'on peut dire en matière de comparaison des qualités de la voix est
18 que cette comparaison ne permet d'éliminer aucun des trois locuteurs
19 identifiés".
20 Est-ce que l'on peut conclure, Docteur French, qu'aucun des intervenants
21 n'a pu être confirmé de façon sûre?
22 Réponse: Oui. Le Procureur pourrait dire au sujet de mon verre qu'il est à
23 moitié plein et vous pourriez vous-même dire qu'il est à moitié vide?
24 Question: Docteur French, nous sommes toujours sur le même rapport et je
25 me propose de vous demander si vous savez ce que c'est que l'association
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1 internationale chargée de l'identification. Est-ce que vous connaissez les
2 normes que cette association adoptées pour procéder à des comparaisons de
3 la parole?
4 Réponse: Je connais certaines de leurs normes. En d'autres termes, je sais
5 que cette institution-là existe.
6 Question: En page 3 de la version anglaise de votre rapport, au point 3, à
7 savoir "Résultat"?
8 Réponse: Oui.
9 Question: Il est question des qualités techniques des deux
10 enregistrements? Réponse: Oui.
11 Question: Vous avez également à juste titre déclaré qu'une très faible
12 énergie a été enregistrée aux fréquences au-dessus de 1,7 kilohertz?
13 Réponse: Oui, c'est exact.
14 Question: Est-ce que vous savez si ces institutions ou ces normes de
15 l'association internationale pour l'identification estiment que, selon ces
16 normes, il est jugé qu'en dessous de 2 kilohertz, on considère que les
17 bandes ne sont pas appropriées pour procéder à des comparaisons techniques
18 étant donné la pauvre qualité de ces derniers?
19 Réponse: Je n'en suis pas conscient. D'abord l'organisation à laquelle
20 vous vous référez n'est pas internationalement acceptée et notamment pour
21 ce qui concerne la communauté européenne de l'analyse du parlé en police
22 scientifique.
23 En deuxième position, je tiens à dire que ce qui ne nous concerne pas
24 c'est une identification objective. Ma tâche n'est pas d'identifier votre
25 client ou ses collègues, ma tâche avait été d'établir si leur voix se
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1 trouvaient enregistrées sur cette bande. Lorsque je procède à ces examens,
2 j'ai une possibilité d'élimination autant que j'ai une possibilité
3 d'identification. L'importance de cette remarque est la suivante: il est
4 parfois possible d'éliminer certains intervenants si leurs voix diffèrent
5 de celles qui figurent sur l'enregistrement lorsque ce matériel est de
6 qualité mauvaise, et pour qu'on puisse le faire, il faut du matériel de
7 bonne qualité.
8 Mais pour procéder à des éliminations on peut souvent procéder avec des
9 enregistrements de ce type. Notamment lorsqu'il s'agit des qualités de
10 voix différentes ou avec des façons dialectiques de s'exprimer ou des
11 qualités pathologiquement spécifiques d'une voix ou d'une autre, même sur
12 un enregistrement très pauvre. Il y a donc des échantillons de comparaison
13 qui nous permettent de traverser du matériel enregistré avec des
14 possibilités d'élimination.
15 Par conséquent, je ne me proposerai pas d'accepter ce type de normes, et
16 je pense que mes collègues dans le contexte européen ne les accepteraient
17 pas non plus.
18 Question: Est-ce que vous savez, Monsieur French, que les laboratoires du
19 FBI ne font pas de comparaison du tout lorsqu'il s'agit d'enregistrement
20 dont l'intensité se trouve en dessous de 2,5 kilohertz?
21 Réponse: Je ne le sais pas mais, si cela est le cas, je ne sais pas
22 comment on peut procéder à cette procédure d'élimination ou
23 d'identification en qualité de possibilité sur pied d'égalité.
24 Question: Dans votre rapport, à la page 5 du texte en anglais, sous le
25 titre "Hauteur de la voix, mesure des fréquences fondamentales", vous
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1 indiquez certains des éléments qui entraînent une modification de la
2 hauteur de la voix, de la fréquence, et l'un de ces éléments est le fait
3 de parler fort, est-ce exact?
4 Réponse: Oui.
5 Question: La colère, la peur, le chagrin chez une même personne, cela
6 peut-il entraîner une modification des fréquences fondamentales?
7 Réponse: Il s'agit de quelques exemples des éléments qui peuvent entraîner
8 une modification des fréquences fondamentales.
9 Question: En va-t-il de même du stress, de la sémantique, de
10 l'accentuation des mots et des phrases?
11 Réponse: Etes-vous en train de me demander si ce genre d'émotion peut
12 affecter ce genre d'intonation?
13 Question: Oui.
14 Question: L'émotion peut affecter l'intonation mais pas la sémantique. La
15 sémantique, c'est la signification des mots, la façon dont les mots et les
16 phrases sont prononcés, le débit.
17 Réponse: Oui, en effet cela dépend, cela peut changer avec des éléments de
18 type émotionnel.
19 Question: Avec une même personne pourrait-on constater des différences
20 dans les fréquences fondamentales du discours? Peut-on remarquer une
21 différence entre le matin et le soir si l'on examine la fréquence
22 fondamentale pendant toute une journée? Reste-t-elle la même pour toute la
23 journée pour un interlocuteur donné?
24 Réponse: Peut-être que oui, peut-être que non, cela dépend.
25 Question: Si on répète le même texte, si la même personne répète le même
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1 texte à l'envi, constatera-t-on une modification de la fréquence
2 fondamentale?
3 Réponse: C'est possible.
4 Question: Peut-on donc en conclure qu'une partie de votre rapport qui
5 consiste à mesurer la hauteur de la voix, les fréquences fondamentales du
6 discours, nous montre qu'en réalité il n'y a pas de ressemblance, de
7 similitude entre les échantillons de contrôle et l'échantillon examiné, et
8 ceci pour de nombreuses raisons, ou qu'il peut exister de nombreuses
9 raisons pour expliquer ce fait?
10 Réponse: On peut le conclure. La raison pour laquelle on procède dans le
11 cas présent à une mesure des fréquences fondamentales, c'est que, comme
12 vous le dites très justement, quand une personne parle plus fort, on voit
13 augmenter ces mesures de fréquence fondamentales.
14 Cela a été établi notamment par Etienne Lombard, un phonéticien français,
15 il a remarqué le phénomène suivant: c'est-à-dire que quand une personne
16 parle plus fort parce qu'elle est dans un environnement bruyant, à ce
17 moment-là on voit que le ton de la voix augmente également. De ce fait, la
18 fréquence fondamentale augmente quand la hauteur de la voix augmente.
19 En l'espèce ici, il s'agissait d'un test d'élimination, vous avez le gl
20 Krstic qui, lors de son interrogatoire, parle de façon posée, mais d'autre
21 part vous avez un homme qui parle très très fort, qui crie dans une
22 communication radio. On pourrait s'attendre que l'enregistrement radio, si
23 c'était la même personne, soit plus élevé.
24 Mais si l'échantillon connu, celui de l'interrogatoire de votre client qui
25 a été enregistré, était supérieur à celui de la personne qui parle avec
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1 une voix nettement élevée sur l'enregistrement radio, ceci pourrait
2 permettre en partie de l'éliminer. C'est donc pour cela qu'il est
3 nécessaire de procéder à cette analyse non seulement dans un objectif
4 d'identification mais éventuellement d'élimination. Vous me suivez?
5 Question: A condition que l'échantillon de contrôle soit réalisé dans une
6 situation où la personne en question n'est pas en situation de stress, de
7 colère, dans un état d'esprit semblable.
8 Réponse: Non, je ne sais pas quel était le stress interne dont souffrait
9 la personne concernée dans l'échantillon de contrôle puisqu'il y a des
10 gens qui souffrent intérieurement de stress et cela ne se sent pas dans la
11 voix, d'autres peuvent subir un stress modéré et cela peut s'entendre
12 clairement dans leur voix. Mais je dois dire qu'en ce qui concerne
13 l'enregistrement fait lors des interrogatoires, la personne ne hurle pas
14 "Dobro Dobro" comme c'est le cas de l'enregistrement radio, parce que
15 c'est la façon dont parle la personne dans la communication militaire.
16 Il est important de faire ce test car quand une personne augmente sa voix,
17 Lombard l'a montré, en fait sur l'échantillon de contrôle lors de
18 l'interrogatoire eh bien on constatait que la fréquence fondamentale était
19 inférieure, ce serait important pour votre client quelque soit l'effet
20 émotionnel qu'ait pu avoir cet interrogatoire pour votre client. En tout
21 cas, il ne haussait pas la voix de la même façon que sur l'autre
22 échantillon, donc il était essentiel de procéder à cette analyse et à
23 cette mesure des fréquences fondamentales.
24 Question: Mais la conclusion du test de fréquence fondamentale n'est pas
25 cette conclusion, n'a rien de conclusif, n'est pas définitive ni dans un
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1 sens ni dans l'autre?
2 Réponse: C'est exact.
3 Question: Docteur French, à la dernière page de votre rapport, en annexe
4 au rapport, vous donnez une échelle des appréciations qui obéit à une
5 certaine logique et une échelle graduée?
6 Réponse: Effectivement.
7 Question: Pourriez-vous s'il vous plaît me dire quelle est la différence
8 ou plutôt s'il y a une différence définie scientifiquement entre les
9 gradations 2 et 3 de votre échelle des appréciations? Est-ce que c'est un
10 pourcentage d'appréciations sur la base d'un certain nombre de mots
11 prononcés?
12 Enfin de quelle manière avez-vous établi cette échelle?
13 Réponse: La première chose que je dois vous dire, c'est qu'il ne s'agit
14 pas d'une échelle de nature numérique ou linéaire où il y a une distance
15 égale entre chacun des points de cette échelle. Non.
16 Il s'agit ici d'une échelle qui est utilisée par la majorité des
17 spécialistes de phonétique au Royaume-Uni, cela ressemble d'ailleurs à ce
18 qui est utilisé au laboratoire national de Rijswijk, au laboratoire de
19 police scientifique de phonétique en Allemagne, etc.
20 Mais en fait, finalement, cela mesure la confiance que l'on a dans son
21 propre jugement, je parle du jugement de l'analyste et du scientifique.
22 Voilà ce que c'est que cette échelle.
23 Question: En suivant la logique de cette échelle des appréciations, si on
24 s'intéresse au point 0, on peut lire, je cite: "Il est possible que les
25 locuteurs X et Y soient identiques."
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1 Gardons à l'esprit une des questions que je vous ai posée précédemment, je
2 souhaiterais savoir si vous conviendriez avec moi que l'on peut également
3 dire "Je pense qu'il est possible que les locuteurs X et Y ne soient pas
4 identiques"?
5 Réponse: Oui.
6 Question: Donc à 0, vous avez: "Je pense qu'il est possible que les
7 locuteurs X et Y soient identiques", la corollaire c'est que X et Y soient
8 différents?
9 Réponse: Cela est possible également, en effet.
10 Question: Docteur French, peut-on donc en conclure que votre rapport de 8
11 pages nous mène à une conclusion qui n'est finalement pas concluante?
12 Réponse: Oui, une conclusion qui n'est pas concluante.
13 Question: Merci, Monsieur le Président, la défense n'a plus de questions à
14 poser au témoin.
15 M. le Président: Monsieur McCloskey.
16 (Interrogatoire principal supplémentaire au témoin, M. Peter French, par
17 M. McCloskey.)
18 M. McCloskey (interprétation): Merci Monsieur le Président.
19 Docteur French, est-ce qu'un expert de la défense a eu l'occasion de venir
20 dans votre laboratoire, d'examiner tous ces éléments? Et si c'est le cas,
21 à quel moment?
22 Réponse: Je n'ai pas les dates sous les yeux, mais en tout cas c'est
23 exact, un expert de l'équipe de la défense est venu dans mon laboratoire,
24 il a examiné et analysé tous ces éléments en présence de la personne qui
25 vient de me contre-interroger. Si vous le souhaitez, je peux mettre la
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1 main sur le document où figurent ces dates. Je me souviens que c'était à
2 peu près il y a deux ou trois semaines.
3 Question: Maître Visjnic est venu à votre laboratoire accompagné de cet
4 expert?
5 Réponse: C'est exact, M. Koenig, un expert qui venait des Nations Unies et
6 qui travaillait précédemment pour le F.B.I., est venu avec Me Visnjic, a
7 étudié les enregistrements, en a réalisé des copies qu'il a emmenées.
8 Question: Combien de temps sont-ils restés en votre compagnie?
9 Réponse: De 10 heures du matin à 17 heures 30, et nous avons peut-être eu
10 une pause, mettons, d'une heure pour le déjeuner.
11 Question: Est-ce que vous savez que M. Koenig a déjà témoigné dans le
12 présent Tribunal comme témoin pour la défense, témoin expert pour la
13 défense?
14 Réponse: Oui.
15 Question: Je n'ai plus de questions.
16 M. le Président: Merci Monsieur McCloskey.
17 Monsieur le Juge Riad?
18 (Questions au témoin, M. Peter French, par M. le Juge Riad.)
19 M. Riad (interprétation): Monsieur French, bonjour.
20 M. French (interprétation): Bonjour.
21 Question: J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt votre exposé très
22 passionnant et j'ai quelques questions à vous poser, questions de profane.
23 Réponse: J'essaierai d'y répondre.
24 Question: Vous nous dites qu'il est possible d'envisager que les trois
25 locuteurs soient les mêmes?
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1 Réponse: Oui.
2 Question: Lorsque vous avez été interrogé par le représentant de la
3 défense, vous avez dit qu'il est toujours possible de dire d'un verre s'il
4 est rempli à moitié, qu'il est à moitié vide ou à moitié plein.
5 On peut donc également, vous pouvez également dire qu'il est possible
6 d'envisager que ces trois locuteurs ne soient pas les mêmes?
7 Réponse: Je ne dirais et ne placerais pas ces possibilités sur le même
8 niveau exactement, dire qu'elles sont équivalentes.
9 Je dirais qu'il est possible que ce soient les trois personnes en
10 question, mais il y a un nombre indéterminé d'autres personnes, d'autres
11 hommes dans cette population qui peuvent également être ces locuteurs.
12 Question: Il y a des éléments qui peuvent mener à l'identification et
13 d'autres à l'élimination?
14 Réponse: C'est exact.
15 Question: Est-il plus facile d'identifier?
16 Réponse: On peut éliminer avec moins de pièces de mauvaise qualité, il
17 n'apparaît pas tout de suite que ce n'est pas la même personne. Par
18 exemple, si nous avions un enregistrement de qualité déplorable de ma voix
19 et de la vôtre, Monsieur le Juge, parlant en anglais, il serait nullement
20 difficile à aucun expert de faire la différence entre nous deux.
21 Mais au contraire si nos voix étaient très semblables, si on avait a peu
22 près la même sorte d'accent en anglais, à ce moment-là un spécialiste de
23 l'analyse phonétique ou acoustique sur base d'un très mauvais
24 enregistrement serait très prudent au moment de rendre une conclusion.
25 Il est plus facile de procéder à une élimination même si l'on a des pièces
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1 de très mauvaise qualité, si les personnes parlent de manière très
2 différente.
3 Question: Vous nous avez parlé d'analyse des fréquences fondamentales. Je
4 voudrais savoir si parfois cet examen peut entraîner une identification?
5 Réponse: Non, pas en tant que telle. Il s'agit simplement d'un test, d'une
6 analyse qui est utilisée comme indicateur dans le cadre de toute une série
7 d'autres tests. Ici, dans le cas qui nous intéresse, cela n'a pas été
8 concluant. Exactement.
9 Question: Dans certaine affaires, cela peut-il être concluant?
10 Réponse: Cela peut être le cas en effet, je viens de terminer de
11 travailler sur une affaire pour l'accusation, je travaillais pour
12 l'accusation en Europe. On entend une jeune personne parler au téléphone
13 et dire qu'il y a le feu. On pense d'ailleurs que c'est la personne qui
14 appelle qui a mis le feu et qui appelle les pompiers pour que l'on envoie
15 une voiture de pompiers. Il est très clair que cette personne parle à
16 haute voix, très fort, on entend beaucoup de bruit derrière. Le suspect
17 quant à lui parlait avec une voix normale, eh bien dans ce cas grâce aux
18 fréquences fondamentales on a été en mesure d'éliminer le suspect.
19 Question: Vous avez parlé de la possibilité de montage, vous nous dites
20 qu'il y avait une cassette dont le défilement était plus rapide que
21 l'autre, cela peut-il montrer qu'il y a eu montage ou modification?
22 Réponse: Non pas du tout, on peut tout à fait prendre le même modèle de la
23 même marque de magnétophone qui au bout de plusieurs années d'utilisation
24 différentes, eh bien vous n'aurez jamais deux modèles identiques qui au
25 bout de quelques années fonctionnent de la même façon.
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1 Question: Vous nous avez parlé de certains éléments tels la différence au
2 début de l'enregistrement, les déclics que l'on entend etc., vous avez dit
3 que cela n'était pas très important mais vous avez également parlé de la
4 puissance du signal vocal, et à cet égard en comparant les deux bandes, 48
5 et 32, vous avez dit que le gal Krstic parlait plus fort qu'Obrenovic et
6 que, sur 48, Obrenovic présentait un discours d'amplitude plus élevée.
7 Réponse: Oui la même chose.
8 Question: Peut-on en déduire qu'il y avait deux personnes différentes?
9 Réponse: Non non, il est très clair qu'il s'agit du même enregistrement.
10 Question: Il n'y a rien dans le timbre, il n'y a pas de différence dans le
11 timbre de la voix?
12 Réponse: Non, rien que j'ai remarqué. Nous avons deux enregistrements,
13 dont l'un est fait avec un canal où le signal est plus fort que l'autre,
14 c'est tout.
15 Question: Mais ce que vous appelez la qualité de la voix est la même?
16 Réponse: Oui autant que l'on puisse le déterminer, il s'agit de
17 l'enregistrement de la même chose.
18 Question: Et le rythme de la voix également?
19 Réponse: Oui.
20 Question: Je n'ai pas d'autres questions, mais en tout cas il y a beaucoup
21 à apprendre en vous écoutant.
22 Réponse: Merci, je suis très flatté.
23 M. le Président: Oui, Madame la Juge Wald, s'il vous plaît.
24 (Questions au témoin, M. Peter French, par Mme la Juge Wald.)
25 Mme Wald (interprétation): Docteur French, y a-t-il moyen de dire si deux
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1 bandes comme 48 et 32 ont été réalisées dans la même période de temps?
2 M. French (interprétation): Non, ce n'est pas possible à dire.
3 Question: Vous nous avez dit que vous avez choisi l'évaluation,
4 l'appréciation 0 sur votre échelle des appréciations en ce qui concerne le
5 niveau de reconnaissance des trois locuteurs, Krstic, Jevdevic et
6 Obrenovic. Pouvez-vous nous dire si, dans cette échelle des appréciations,
7 vous avez donc choisi le point 0, je voudrais savoir s'il y avait pour
8 certaines une voix ou deux voix? Est-ce que vous étiez plus confiant que
9 pour les autres voix?
10 Réponse: Non non, c'était à peu près la même chose pour les trois voix.
11 Question: Je vais vous poser une question hypothétique, je suis sûre que
12 vous connaissez très bien, étant donné que vous avez souvent témoigné dans
13 les procès. Vous nous avez dit qu'il serait très difficile de recréer un
14 enregistrement de ce type après le fait, vous nous avez expliqué pourquoi
15 et pourquoi l'expérience vous incite à le dire. Vous nous avez dit qu'il
16 est souvent relativement facile de déterminer qu'il y a eu falsification,
17 que les gens sont en train de lire un texte.
18 Mais faisons une hypothèse et voyons si dans les conditions suivantes cela
19 serait facile à déterminer. Une hypothèse, je répète. Imaginons que les
20 choses ne soient pas un nouvel enregistrement mais que ce soit la chose
21 suivante: que quelqu'un essaie de piéger quelqu'un d'autre et mette en
22 place une interception tout à fait normale et ensuite, en s'arrangeant à
23 l'avance, demande à quelqu'un de prendre la place d'un des locuteurs en
24 question, mettons le Gal Krstic. Donc cet individu en question demande à
25 l'autre de prendre la place du Gal Krstic, peut-être par exemple dans un
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1 but de désinformation. Par exemple si, au moment de la conversation
2 interceptée, on dit: "Les turcs nous écoutent probablement", enfin vous
3 voyez ce genre de chose, est-ce qu'à ce moment-là ce genre de situation
4 serait aussi facile à identifier qu'une modification de la cassette ou de
5 l'enregistrement qui aurait été enregistré plus tard avec des acteurs par
6 exemple?
7 Réponse: Si on avait un assez bon acteur dont la voix était
8 vraisemblablement semblable à celle du Gal Krstic, ce serait possible en
9 effet. Il serait possible pour cette personne de jouer ce rôle dans cette
10 conversation avec son interlocuteur. Peut-être si l'un d'entre eux pensant
11 qu'il s'agit d'une véritable conversation ou si vous aviez par exemple
12 quelqu'un qui était au courant du type d'échange qui avait lieu lors de
13 ces communications militaires, mais je pense que dans ces conditions il
14 faudrait se mettre dans la position où on peut émettre ce type de message,
15 etc.
16 Question: Merci beaucoup.
17 (Questions au témoin, M. Peter French, par M. le Président.)
18 M. le Président: Merci, Madame la Juge Wald.
19 J'aimerais bien revenir à cette question soulevée par ma collègue, Mme la
20 Juge Wald. Si on vous avait demandé de recréer une conversation comme
21 celle-ci, comment pourriez-vous le faire? C'était un peu aussi la question
22 de M. McCloskey. Mais en nous donnant un exemple, est-ce que ça pourrait
23 être fait d'une façon tout à fait confidentielle?
24 Combien de personnes faudrait-il faire intervenir pour accomplir cette
25 tâche? Est-ce que tout cela pourrait être fait dans le même laboratoire ou
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1 serait-il nécessaire d'avoir d'autres participations venues de plusieurs
2 endroits, si je peux dire? Voilà.
3 M. French (interprétation): Je crois que la réponse à votre question,
4 c'est que ça dépendrait de la façon dont il s'y prendrait. Une des
5 possibilités envisagées par M. McCloskey, c'est que vous auriez à votre
6 disposition des enregistrements de la voix du Gal Krstic, mais est-il
7 vraiment envisageable que quelqu'un puisse dans ces enregistrements
8 prendre ici une phrase, là un mot, et là une autre phrase, dans un
9 troisième enregistrement, cinq mots, dans une sixième bande, sept, sur une
10 autre, etc., et ensuite rassembler tout cela pour produire cette
11 conversation?
12 Faire une telle chose, cela serait vraiment un travail de titan. Si on
13 commence à adopter ce genre de scénario, on se rapproche plus de la
14 fiction, d'un film, d'une grande superproduction américaine que du
15 véritable travail de police scientifique. On pourrait imaginer par exemple
16 un enregistrement où l'on effacerait un certain nombre de mots, on
17 rajouterait d'autres avec un ordinateur. Cela serait plus faisable, cela
18 nécessiterait moins de personnes, moins de moyens. Mais quoi qu'il en
19 soit, il faudrait créer deux bandes avec les mêmes mots qui se suivent à
20 peu près, la même séquence temporaire sauf que l'une est juste un peu plus
21 rapide que l'autre, etc.
22 Donc vraiment je ne sais pas à combien de personnes il faudrait faire
23 appel pour produire cela.
24 J'imagine que le deuxième scénario que je viens d'évaluer pourrait être
25 fait dans un laboratoire, dans un seul laboratoire. On pourrait peut-être
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1 le faire.
2 Question: (Inaudible.)
3 Réponse: Pour effacer un certain nombre de mots et puis reconstruire une
4 bande, un enregistrement, cela dépendrait du nombre de mots effacés, peut-
5 être un jour. Sauf qu'ici il faudrait procéder à d'autres démarches, par
6 exemple, mettre, ajouter d'autres types de conversations sur deux bandes
7 différentes etc. Cela prendrait plusieurs jours. Je ne sais, c'est
8 difficile à dire.
9 M. le Président: Merci, Monsieur French.
10 Docteur French, nous vous remercions beaucoup d'être venu ici. Vous avez
11 beaucoup éclairé les parties et la Chambre sur ces questions. Nous vous
12 remercions beaucoup d'être venu et nous vous souhaitons un bon retour chez
13 vous et aussi un bon travail, fascinant travail aussi.
14 M. French (interprétation): Merci beaucoup, Monsieur le Président.
15 (Le témoin, M. Peter French, est reconduit hors du prétoire.)
16 M. McCloskey (interprétation): Monsieur le Président, ce serait peut-être
17 le moment d'une pause parce que le témoin suivant aurait besoin de mesures
18 de protection, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
19 M. le Président: Avant de faire la pause, si vous me permettez.
20 Maître Petrusic, est-ce que vous préférez du point de vue de la santé du
21 Gal Krstic faire des petites périodes de travail avec des petites pauses,
22 par exemple, 45 minutes avec un quart-d'heure, comme nous avons fait
23 avant?
24 Ou préférez-vous 1 heure 20, par exemple, avec une pause de 20 minutes, ou
25 1 heure 30 avec une pause de 30 minutes du point de vue de la santé du Gal
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1 Krstic?
2 Si vous n'êtes pas en condition de répondre maintenant, vous pouvez parler
3 avec le général pendant la pause et après nous le dire.
4 M. Petrusic (interprétation): C'est très bien, Monsieur le Président. Nous
5 vous répondrons après la pause, si vous voulez bien.
6 M. le Président: Pour l'instant, nous allons faire une pause de 50 minutes
7 pour le déjeuner.
8 (L'audience, suspendue à 12 heures 33, est reprise à 13 heures 30.)
9 (Le Témoin EE est introduit dans le prétoire.)
10 M. le Président: Vous m'entendez-vous bien?
11 Témoin EE (interprétation): Oui, je vous entends bien.
12 M. le Président: Vous allez prêter serment, vous allez faire la
13 déclaration sous serment, je ne sais pas comment vous allez le faire,
14 avez-vous une édition en braille?
15 Témoin EE (interprétation): Monsieur le Président, j'ai mémorisé le texte
16 de la déclaration solennelle.
17 M. le Président: Vous pouvez donc faire la déclaration solennelle, s'il
18 vous plaît.
19 Témoin EE (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la
20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
21 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir, vous pouvez vous installer le
22 plus confortablement possible. Merci d'être venu et pour l'instant vous
23 allez répondre aux questions que M. McCloskey va vous poser, mais avant de
24 le faire, excusez-moi de vous interrompre, il faut que vous confirmiez
25 votre nom sur une feuille de papier, je ne sais pas comment nous allons
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1 faire. Peut-être, Maître McCloskey, pouvez-vous nous aider à faire cela,
2 parce que vous êtes un témoin protégé et vous êtes le Témoin EE et nous ne
3 pouvons pas prononcer votre nom. Mais vous devez confirmer s'il s'agit oui
4 ou non de votre nom, mais si quelqu'un prononce votre nom en silence, il
5 faut débrancher les micros.
6 (Le témoin est aveugle, le greffier parle au témoin.)
7 Oui, Monsieur McCloskey, je vois que vous voulez intervenir. Allez-y, s'il
8 vous plaît.
9 M. McCloskey (interprétation): Je suis prêt dès que vous le direz,
10 Monsieur le Président. Je voulais juste confirmer et savoir si nous nous
11 trouvons bien à huis clos partiel, non nous ne le sommes pas encore.
12 M. le Président: Laissez-nous entendre du Témoin EE si le nom que M.
13 l'huissier lui a prononcé est bien son nom.
14 Le Témoin EE (interprétation): L'huissier n'a pas soufflé mon nom à mon
15 oreille, il m'a donné mon pseudonyme, mais je me ferai un plaisir d'écrire
16 mon nom sur un bout de papier.
17 M. le Président: Oui très bien, je crois c'est une bonne façon de
18 procéder. (L'huissier va vers le témoin qui écrit son nom sur un papier.
19 L'huissier remet le papier au Président qui en prend connaissance et le
20 soumet aux Juges Riad et Wald. L'huissier montre également le papier
21 identifié à la défense.)
22 Avant de commencer le témoignage du Témoin EE, Maître Petrusic, avez-vous
23 une réponse à ma question d'avant le déjeuner, avant la pause?
24 M. Petrusic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Suite à la
25 consultation avec le Gal Krstic, la défense se propose de conserver les
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1 mêmes cadences comme jusqu'à présent, à savoir une pause avant le
2 déjeuner, une pause déjeuner et le temps restant après le déjeuner
3 pourrait être subdivisé en deux parties avec une petite pause.
4 M. le Président: Très bien, peut-être nous allons commencer avec une pause
5 de 10 minutes à la moitié du temps jusqu'a 15 heures. Vous me dites où je
6 vous fais signe. Vous avez la parole, s'il vous plaît, merci.
7 M. McCloskey (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je voudrais
8 que nous passions à huis clos pour la première partie du témoignage, nous
9 en avons déjà parlé avec la défense et ils sont informés des raisons.
10 M. le Président: Nous allons donc passer à huis clos. Nous sommes
11 maintenant à huis clos.
12 Monsieur McCloskey, s'il vous plaît?
13 (Audience à huis clos partiel.)
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24 (Audience publique avec mesures de protection.)
25 M. McCloskey (interprétation): Avant de passer à certains dialectes
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1 pertinents, permettez-moi de vous demander si partant de vos études, de
2 vos recherches, vous avez eu l'occasion de voyager souvent en ex-
3 Yougoslavie?
4 Témoin EE (interprétation): Oui.
5 Question: Est-ce que vous pouvez nous dire brièvement à combien de
6 reprises vous êtes allé là-bas?
7 Réponse: Je suis allé en ex-Yougoslavie pour des raisons de recherche au
8 moins six ou sept fois. Mon séjour le plus long a eu lieu en 1989 et en
9 1990 où j'ai passé 13 mois de recherche aux fins de rédaction de ma
10 dissertation, et j'ai voyagé en Bosnie-Herzégovine, j'y ai visité
11 l'Institut chargé de la langue et de la littérature à Sarajevo, ainsi que
12 l'Académie des sciences et des arts de Bosnie-Herzégovine. J'ai passé
13 aussi beaucoup de temps au sein de l'Académie des sciences et des arts à
14 Belgrade.
15 Depuis lors, je me suis déplacé encore deux fois pour des raisons de
16 recherche après la guerre en 1997 et 1998. En 1997, je suis allé à
17 Belgrade alors qu'en 1998 je me suis rendu une fois de plus en Bosnie à
18 Sarajevo et dans les environs de Sarajevo. Puis je suis revenu à Belgrade
19 et je suis allé aussi au Monténégro.
20 Question: Partant de vos études et de vos connaissances, serait-il
21 possible d'identifier des indices d'appartenance ethnique en écoutant le
22 parlé en Yougoslavie?
23 Réponse: Oui, il faut très bien connaître la langue pour pouvoir en être
24 capable. Je crois qu'un laïc ou personne habituelle ne saurait distinguer,
25 mais lorsque l'on a appris beaucoup et que l'on commence à étudier les
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1 dialectes, et beaucoup de gens ont écrit au sujet des dialectes ethniques,
2 des Musulmans ou des Serbes dans ces zones-là, Bosnie et Croatie, on peut
3 noter des petites divergences, petites certes, mais qui sont quand même
4 audibles entre les différents groupes ethniques.
5 Question: Fort bien. Ne perdons pas cela de vue, est-ce que vous pouvez
6 expliquer à la Chambre ce que le Procureur vous a demandé de faire et ce
7 que vous avez été en mesure de faire pour nous présenter vos conclusions
8 et nous parler des preuves qui appuient ces conclusions?
9 Réponse: Le Bureau du Procureur m'a demandé d'examiner des enregistrements
10 audio et des transcriptions de conversation qui sont attribuées à certains
11 officiers de l'armée, qui sont attribuées aux Gal Krstic [expurgé].
12 [expurgée]
13 [expurgée]
14 On m'a demandé notamment d'analyser dans des conditions de laboratoire ces
15 échantillons de parlé, et de voir s'il me serait possible d'identifier
16 certaines caractéristiques qui permettraient d'identifier les intervenants
17 en leur qualité de Musulmans, Serbes ou Croates. Je me suis efforcé de le
18 faire de façon objective et honnête.
19 Question: Avec qui avez-vous travaillé sur ce projet?
20 Réponse: J'ai travaillé avec le Dr French.
21 Question: Et vous avez vu le rapport que vous avez élaboré tous les deux?
22 Réponse: Oui.
23 Question: Et vous avez également vu son évaluation finale des parties de
24 parlé qui sont traduites par un résultat 0?
25 Réponse: Oui, et j'ai été d'accord avec cela.
Page 8682
1 Question: Fort bien. Maintenant, si vous pouvez le faire, je voudrais que
2 vous nous disiez si vous avez été capable d'identifier quelque
3 particularité de tendance ethnique dans le parlé chez l'un quelconque des
4 trois intervenants au niveau des enregistrements qui vous ont été fournis?
5 Réponse: Oui, je dois ajouter que l'échantillon du parlé avait été très
6 court, mais même dans des échantillons aussi courts, j'ai pu retrouver
7 quelques tendances qui m'ont incité à tirer certaines conclusions.
8 Question: Quelles ont été vos conclusions fondamentales? Et je crois que
9 vous pourriez même nous expliquer quelles sont ces tendances que vous avez
10 relevées sans ce parlé?
11 Réponse: Eh bien, mes conclusions fondamentales ont été les suivantes: les
12 intervenants révèlent des caractéristiques typiques pour des Serbes
13 ethniques. Qu'il s'agisse de dialecte où des Serbes de Serbie eux-mêmes,
14 je n'ai rien retrouvé de ce que l'on pourrait désigné par caractéristique
15 classique musulmane dans le parlé de cette ethnie, dont j'ai parlé dans
16 mes études de dialectes.
17 Question: Pouvez-vous nous dire maintenant, je vous prie, dire à la
18 Chambre, quel a été l'aboutissement de ce que vous avez entendu sur ces
19 deux enregistrements et ces tendances, si vous pouvez nous expliquer?
20 Réponse: Eh bien, nous pourrions peut-être nous servir du rétroprojecteur
21 si cela ne vous dérange pas.
22 Question: Il nous faut vérifier si tout y est. Il s'agit de la pièce à
23 conviction 847 du Bureau du Procureur, et il y a deux ou trois points
24 jaunes qui doivent permettre au témoin de nous aider. Cela n'a aucune
25 autre signification. Est-ce que cela est visible pour tout un chacun?
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1 Réponse: Oui.
2 Question: Eh bien, la subdivision fondamentale de cette langue au niveau
3 du territoire se résume à trois dialectes principaux, je suis en train de
4 vous parler de ces dialectes qui dérivent du Stokavian, il y a le Ikavian
5 et Jekavian et Ekavian. La répartition traditionnelle du Stokavian
6 consiste en trois dialectes subsidiaires, le Ikavian, je suis en train de
7 montrer le Ikavian et le Ekavian. Ces divergences se basent sur la façon
8 dont on prononce les voyelles qui a été hérité des versions précédentes
9 des langues slaves.
10 Dans cette présentation, je ne vais pas traiter du Ikavien parce que cela
11 s'est limité à la Bosnie-Herzégovine occidentale ainsi qu'à la Dalmatie
12 centrale, il n'y a aucune trace du Ikavien dans les échantillons que j'ai
13 examinés.
14 Ce qu'il importe de noter dans cette pièce à conviction, c'est que le
15 Ikavien est parlé exclusivement ou pratiquement uniquement en Serbie, donc
16 il est parlé par les Serbes de Serbie, l'actuelle République fédérale de
17 Yougoslavie.
18 Le dialecte Jekavien, lui, est parlé par les quatre groupes ethniques qui
19 se servent du serbo-croate dans l'ex-Yougoslavie, à savoir les Musulmans,
20 les Croates, les Serbes et les Monténégrins. Toutefois, il y a là des
21 différences, c'est bien plus compliqué, il y a une stratification
22 déterminée dans le parlé des intervenants en Ikavien. Je peux en parler si
23 nécessaire mais il y a des différences entre le parlé de l'ethnie serbe de
24 Bosnie et de la façon dont parle l'ethnie croate et l'ethnie musulmane de
25 Bosnie.
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1 Je peux m'aventurer là aussi, mais ce qui attire l'attention c'est que le
2 parlé dans ces échantillons examinés représente un mélange de ces deux
3 types de dialecte qui sont utilisés. Par exemple, ce qui est attribué au
4 Cdt Obrenovic et ce qui est attribué au Gal Krstic, notamment dans certains
5 mots ils se servent de la "Ekavica", de l'Ekavien, c'est-à-dire du parlé
6 utilisé en Serbie et qui est utilisé entre les Serbes en Bosnie orientale
7 et dans d'autres occasions on retrouve du Jekavien.
8 Permettez-moi d'expliquer à la Chambre quelle est l'importance des
9 divergences entre les dialectes en présence. Je vais vous donner deux ou
10 trois mots dans chaque dialecte pour que vous puissiez enregistrer quelles
11 sont les differences. Je vais m'efforcer de les prononcer de la façon la
12 plus claire possible.
13 Pour le lait dans le Ikavien, on dit "Mliko", dans le Jekavien, on dit
14 "Mlijeko" et dans l'Ekavien, on dit "Mleko". Pour dire jeune fille, on dit
15 en Ikavien "Divojka", en Jekavien on dit "Djevojka", et en Ekavien on dit
16 "Devojka". Et encore un mot pour finir parce que cela apparaît sur
17 l'enregistrement, il y a aussi certaines petites differences en sus des
18 differences essentielles que j'ai mentionnées. Par exemple, pour parler du
19 temps passé du verbe vivre, en Ikavien on dit "zivio", en Jekavian on dit
20 la même chose "zivio", et en Ekavian on dit "ziveo".
21 J'espère ne pas avoir trop fatigué la Chambre avec cette analyse des trois
22 dialectes.
23 Question: Pouvez-vous nous dire lors de cet examen des enregistrements
24 s'il vous a été possible de noter quelques caractéristiques du parlé,
25 quelques façons de prononcer les mots et de les identifier en tant que
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1 termes serbes ou musulmans?
2 Réponse: L'une des premières choses à faire, c'était de noter dans
3 certaines conversations non pas chez tous les intervenants -parce que je
4 n'avais pas suffisamment de matériel parlé pour tous les intervenants-,
5 mais j'ai remarqué certaines caractéristiques qui semblent caser ces
6 intervenants en Bosnie.
7 L'une des caractéristiques, lorsqu'il s'agit d'Obrenovic, ce que l'on
8 attribue au parlé d'Obrenovic et qui dure 53 secondes sur
9 l'enregistrement, on mentionne le passé simple, l'usage du passé simple,
10 chose qui n'est pas habituelle dans le parlé normal. Il dit "Rece", Rece
11 est "Rekose" au passé simple au pluriel. Si vous parlez le français cela
12 ressemblerait à l'usage actif du passé simple et cela a pour moi été un
13 indicateur pour me montrer qu'il y avait une corrélation avec la Bosnie.
14 Maintenant pour ce qui concerne les caractéristiques autres, je dirais
15 qu'il y a un mélange du Jekavien et du Ekavien dans les échantillons de
16 parlé, ce qui me confirme, comme dans les études de dialecte, qu'il s'agit
17 du parlé des Serbes de la Bosnie de l'est. Par exemple, on voit que les
18 intervenants disent "ovde", ici, en Ekavian comme pour le mot "ovdje",
19 alors on voit qu'ils disent "dje" au lieu "gdje" et qu'ils se servent de
20 l'Ekavian, mais ils se servent aussi de formes Jekaviennes qui indiquent
21 qu'il y a une origine potentielle de certaines régions à l'ouest de la
22 rivière Drina, par exemple on dirait "cevi", et en Ekavian ce serait
23 "cijevi", pour dire probablement au lieu de dire "Viero jatno", ils disent
24 "vero vatno". Il y a beaucoup de caractéristiques dont nous pouvons
25 parler.
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1 Question: Monsieur le Témoin, vous attendez-vous à trouver des formes de
2 langague Ekavien dans la bouche d'un Musulman normalement?
3 Réponse: Normalement non.
4 Question: Mais est-ce possible et si oui comment?
5 Réponse: C'est éventuellement possible si un Musulman de Bosnie a passé
6 quelques temps en Serbie ou à Belgrade, dans ce cas cette personne a peut-
7 être commencé à parler en Ekavien mais j'ai le sentiment que cette
8 personne lorsqu'elle rentre en Bosnie va recommencer à parler en Jekavien.
9 Question: Pouvez-vous nous parler des propos qui sont attribués au Gal
10 Krstic sur les enregistrements?
11 Réponse: Oui, le Gal Krstic dans les propos qui lui sont attribués, il n'y
12 en a que 28/secondes à peu près, mais j'ai pu noter quelques éléments
13 significatifs. A certain moment, un locuteur dit: "Ne laissez personne en
14 vie" et je crois que la première fois nous entendons "Nijednog, nemojte,
15 ostaviti, Zivoga".
16 Je vous ai déjà dit que c'est un sujet sur lequel j'ai beaucoup travaillé,
17 j'ai trouvé un élément qui pourrait être typique de personnes habitant à
18 l'ouest de la Drina, c'est-à-dire en Bosnie-Herzégovine et en Croatie, il
19 s'agit de l'utilisation de l'infinitif après une particule négative
20 "Nemoje, nijednog" etc., quand cette ligne est reprise toutefois de façon
21 plus emphatique il me semble que la forme change. Si nous avions la
22 transcription, nous constaterions que ce n'est plus l'usage de l'ouest de
23 la Drina que l'on trouve à ce niveau-là, mais plutôt l'usage de la Serbie
24 et du Monténégro, à savoir la suppression de l'infinitif et l'utilisation
25 de l'expression "da ostavljate", et puis quand on trouve le mot "nemojte"
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1 qui est un pluriel, nous constatons qu'à ce niveau-là il se transforme en
2 singulier à savoir "nemoj".
3 C'est le genre de chose que j'ai trouvé dans le document et on trouve ce
4 même phénomène dans pratiquement tous les dialectes parlés en Serbie et au
5 Monténégro.
6 Question: C'est quelque chose que vous pourriez vous attendre à trouver
7 dans la bouche d'un locuteur Musulman.
8 Réponse: J'ai fait circuler une circulaire parmi les locuteurs musulmans
9 de Bosnie qui traitaient de ce problème et m'ont indiqué qu'ils
10 n'utiliseraient pas cette forme précise.
11 Question: Y a-t-il autre chose que vous aimeriez souligner comme étant une
12 tendance locutoire tout à fait spécifique du Gal Krstic ou quelque chose
13 d'autre que vous auriez à dire au sujet des enregistrements?
14 Réponse: Je crois qu'il y a un autre élément qui vaut la peine d'être
15 souligné à savoir le statut du phonème "ré". Il a été indiqué dans un
16 grand nombres des études relatives à ce dialecte que ce phonème était plus
17 fréquent, je dis bien plus fréquent, ce qui ne signifie pas qu'il est
18 toujours présent mais en tout cas plus fréquent parmi les slaves musulmans
19 alors que les locuteurs serbes tendent à le faire disparaître, ce phonème,
20 et dans les échantillons qui m'ont été proposés, j'ai constaté que le
21 phonème "h" a disparu à de nombreuses reprises chez les trois locuteurs
22 enregistrés notamment dans le mot "oce mo" "hoce mo" qui est un mot que
23 j'ai étudié de près dans le cadre de mes études "dialectales".
24 Et puis, il y a le génitif pluriel "gori nema", c'est ce qu'on trouve sur
25 les enregistrements alors que cela devrait être "gorih nema". On retrouve
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1 cela également dans le mot "halo" qui se dit "halo" et que l'on entend
2 prononcer comme "halo" donc le "h" est supprimé. Ce qui semble indiquer
3 que les locuteurs appartiennent aux groupes ethniques serbes plutôt qu'aux
4 groupes ethniques Musulmans.
5 Question: Vous avez dit vous être appuyé sur des études dialectales
6 concernant la région. Pourriez-vous en quelques mots nous dire simplement
7 dans quelle laps de temps ces études ont été réalisées et peut-être nous
8 donner le nom des auteurs?
9 Réponse: Très bien. C'est un sujet très intéressant.
10 A partir de 1970 à peu près jusqu'au début de la guerre en 1992, dans la
11 Yougoslavie socialiste, il y a eu au moins 18 à 19 études, que je connais
12 en tout cas, qui ont traité de ces dialectes d'un point de vue ethnique
13 plutôt qu'un point de vue géographique. Donc les auteurs de ces études
14 dialectales ont examiné plus spécifiquement la façon dont parlaient
15 certains groupes ethniques en fonction du fait que ces groupes étaient
16 constitués de Serbes, de Croates et de Musulmans.
17 En Bosnie, je crois pouvoir dire que j'ai décompté au moins 14 études
18 dialectales à base ethnique, mais je peux vérifier en relisant les
19 articles dont je suis l'auteur. J'ai utilisé pas mal de ces études, en
20 tout cas j'en ai examiné 18, et j'ai également examiné des études
21 dialectales spécifiques correspondant à des régions précises. J'ai un
22 article qui traite de la Bosnie occidentale, un autre qui traite d'une
23 région où les appartenances ethniques sont mixtes en Croatie.
24 Et plus récemment, j'ai examiné deux études dialectales qui concernent
25 plus précisément la Bosnie orientale, l'une portant sur le dialecte des
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1 Serbes dans une ville de Bosnie orientale, qui est la ville de Kladanj, et
2 l'autre une étude dialectale concernant le dialecte parlé par les
3 Musulmans de la ville de Tuholj qui se trouve tout près de Kladanj. J'ai
4 étudié les différences donc entre ce que l'on parle dans différents
5 endroits en Bosnie orientale.
6 Question: Qui était l'auteur de l'étude concernant les Serbes de Kladanj
7 dont vous venez de parler?
8 Réponse: Le Pr Slobodan Remetic.
9 Question: Est-il un auteur, un expert respecté dans ce domaine?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Et s'agissant des études faites avant la guerre, en avez-vous
12 trouvé qui étaient segmentées en fonction des nationalités?
13 Réponse: Je crois qu'il y en a eu pour la Bosnie, mais toutefois les
14 experts qui ont élaboré ces études étaient des linguistes très sérieux.
15 Bien entendu, ils n'ont pas tous la même qualité, mais certains d'entre
16 eux sont de très grande qualité. En Serbie notamment dans le domaine de la
17 recherche dialectologique, les experts sont le plus souvent de très grande
18 qualité.
19 Question: Vous avez pu lire le rapport d'un expert de la défense. Le
20 rapport de M. Simic. Après avoir lu ce rapport, pouvez-vous dire que vous
21 avez quelque chose de particulier à ajouter à ce que vous avez trouvé dans
22 ces rapports, quelque chose dont vous estimez qu'il est nécessaire de le
23 souligner dans votre témoignage aujourd'hui?
24 Réponse: Dans une grande mesure, je dirais que nos conclusions sont assez
25 similaires. Mais il y a un point que j'aimerais éclaircir parce qu'il
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1 n'est peut-être pas suffisamment clair dans mon propre rapport. Il s'agit
2 du dialecte parlé en Herzégovine orientale. J'aurais dû dire dans mon
3 rapport sans doute que les Serbes de Bosnie-Herzégovine et même de Croatie
4 parlent le même dialecte que celui de l'Herzégovine orientale. C'est-à-
5 dire que ce n'est pas un dialecte identique, mais il a subi probablement
6 certaines modifications mais il est fondamentalement basé sur le dialecte
7 de l'Herzégovine orientale.
8 Et bien entendu, j'ai pris en compte un ouvrage publié en 1984 à Sarajevo,
9 qui s'appelle "Description dialectale phonologique" qui traite plus
10 précisément de deux endroits en Bosnie orientale, la ville de Zepa et
11 Milici, un village, je crois, à moins que ce ne soit une ville où l'on
12 parle une langue très caractéristique de la Herzégovine orientale.
13 Donc c'est un éclaircissement que je voulais ajouter à mon rapport. Je ne
14 dis pas que les locuteurs que l'on entend sur l'enregistrement parlent le
15 même langage qu'en Herzégovine orientale, mais ils manifestent quelques
16 caractéristiques propres à ce langage de l'Herzégovine orientale.
17 Autre chose que je voudrais répondre au rapport que vous venez de
18 mentionner, c'est la notion qu'il existe des différences minimes ou
19 pratiquement inexistantes entre les locuteurs notamment au sein de l'armée
20 populaire yougoslave, l'ex-JNA.
21 Je pense que bien entendu il est clair que les nationalités étaient
22 mélangées au sein de la JNA, mais tout de même la plupart des officiers
23 étaient d'appartenance ethnique serbe. Alors ce n'était pas la majorité
24 absolue mais tout de même une majorité relative. Je ne suis pas expert en
25 la matière, mais je crois avoir compris qu'un grand nombre des officiers
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1 étaient d'origine serbe.
2 Il me semble peu probable, enfin... Je vais reformuler. Il me semble que
3 ces locuteurs sur les bandes qui m'ont été soumises appartenaient à la JNA
4 et qu'ils tendent à mélanger le Ekavien et le Jekavien, ce dont parle le
5 rapport de la défense. Cela va dans le même sens que ce que j'ai dit au
6 sujet des locuteurs que l'on entend sur les bandes quand j'ai dit qu'ils
7 étaient probablement d'origine bosniaque ou en tout cas originaires
8 dialectalement du dialecte Jekavien qui aurait passé quelque temps en
9 Serbie ou occupé des postes importants en Serbie où le dialecte Ekavien
10 est parlé couramment, en tout cas au sein de l'armée.
11 Question: Avez-vous trouvé des indications classiques de tendance
12 locutoire musulmane sur ces bandes enregistrées?
13 Réponse: Non. Il y a un élément qui apparemment est une caractéristique du
14 langage ethnique musulman qui est la non préservation du phonème "h", mais
15 je n'ai pas pu trouver de nombreux exemples de préservation de "h" dans
16 les éléments qui m'ont été soumis.
17 Il y a autre chose, il y a deux "æ" "è", un "æ" dure et un "è" doux dans
18 la langue dont nous parlons, et de très nombreux documents, de très
19 nombreux ouvrages dans la littérature nous indiquent que les slaves
20 musulmans ont tendance à confondre un petit peu ces deux phonèmes; les
21 deux "è" "æ".
22 Or je n'ai trouvé aucune preuve du mélange de ces deux phonèmes dans les
23 bandes enregistrées qui m'ont été soumises. Et puis je crois qu'il y avait
24 un autre point que je voulais évoquer, mais il m'échappe à l'instant. Donc
25 j'y reviendrai si vous le voulez bien dans quelques minutes.
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1 Question: Pas de problème. En dehors des deux enregistrements militaires
2 disons que vous avez examinés, qui ne sont pas très clairs, on vous a
3 fourni aussi des enregistrements plus clairs, des différents locuteurs
4 dont nous parlons. Est-ce que vous les avez utilisés dans votre analyse?
5 Réponse: J'ai écouté ces enregistrements, mais la qualité est vraiment
6 très différente et le contexte est très différent également.
7 Dans un contexte plus formel, les locuteurs ont tendance à utiliser un
8 langage assez standardisé et sur les enregistrements qui m'ont été soumis,
9 qui ont été enregistrés dans un contexte assez informel, ils ont tendance
10 à utiliser des formes plus dialectales.
11 De temps en temps, sur les échantillons de témoignage entendus ici, j'ai
12 entendu que le "h" disparaissait mais je crois qu'il y a tout de même une
13 différence entre quelqu'un qui s'efforce de parler un langage un peu plus
14 littéraire, un langage provenant de son éducation scolaire, dans ce cas-là
15 le locuteur aura tendance à insérer le "h", alors qu'il ne le fera peut-
16 être pas dans la vie quotidienne. Tout le monde peut faire ce genre de
17 choses selon les circonstances.
18 Question: Je ne sais pas si vous souhaitiez parler des différences entre
19 la prononciation des "c". Est-ce que c'est cela que vous vouliez ajouter
20 ou pensez-vous avoir dit tout ce que vous aviez à dire? Auquel cas, je
21 vous demanderai, si vous le voulez bien, de synthétiser un peu
22 l'expérience qui a été la vôtre à l'écoute de ces enregistrements?
23 Réponse: Eh bien, la conclusion globale que je tirerais, compte tenu du
24 fait que les échantillons qui m'ont été soumis étaient très courts, je
25 dirais que j'ai remarqué certaines tendances qui me pousseraient à penser
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1 que les caractéristiques que l'on entend sur ces enregistrements
2 pourraient être associées avec une fréquence plus élevée à un locuteur
3 serbe plutôt qu'à un locuteur provenant d'une autre appartenance ethnique
4 en Bosnie ou dans l'ex-Yougoslavie.
5 Question: Merci beaucoup Témoin EE. Je n'ai plus d'autres questions.
6 M. le Président: Je vous propose une pause de 10 minutes.
7 (L'audience, suspendue à 14 heures 07, est reprise à 14 heures 20.)
8 M. le Président: Maître McCloskey, vous n'allez pas recommencer!
9 M. McCloskey (interprétation): Monsieur le Président, J'ai parlé avec Me.
10 Visnjic et le témoin. Le dernier point qu'il voulait évoquer lui est
11 revenu en mémoire. Ce sera très court. Si vous pouviez lui redonner la
12 parole, Me Visnjic est d'accord.
13 Monsieur le témoin, pouvez-vous nous dire quel était le dernier point qui
14 vous est revenu en mémoire que vous vouliez souligner?
15 Témoin EE (interprétation): C'est un point assez peu important mais que
16 j'ai quand même confirmé dans les deux dialectes de Bosnie orientale.
17 En Bosnie orientale, les locuteurs font disparaître le sont "Ye" ou iota
18 entre 2 voyelles. Par exemple quand ils veulent dire "tout va bien", ils
19 disent "Dobroj", alors que chez les Musulmans qui sont juste à côté dans
20 la même région, apparemment, le "YE" est conservé. C'est donc la petite
21 distinction qui m'est revenue en mémoire tout récemment.
22 Question: Vous rappelez-vous si sur les enregistrements qui vous ont été
23 soumis, vous avez constaté cette différence chez un locuteur et si oui,
24 chez lequel?
25 Réponse: Je pense que c'était la voix attribuée à Obrenovic. Il faudrait
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1 que je réécoute la bande, mais j'ai le sentiment que c'était peut-être
2 aussi présent dans la voix attribuée au Gal Krstic.
3 Question: Plus de questions, Monsieur le Président.
4 M. le Président: Maître Visnjic?
5 (Contre-interrogatoire du Témoin EE par Me Visnjic.)
6 M. Visnjic (interprétation): Monsieur le Témoin EE, bonjour, puisque vous
7 êtes le seul témoin expert de l'accusation qui comprend notre langue, je
8 vous demanderai de bien vouloir ménager une pause à la fin de mes
9 questions avant de me répondre pour faciliter le travail des interprètes.
10 Témoin EE (interprétation): Très Bien.
11 Question: Témoin EE, avez-vous déjà comparu devant ce Tribunal en tant
12 qu'expert pour parler de la comparaison des voix, des accents et des
13 dialectes?
14 Réponse: Non, pas devant ce Tribunal.
15 Question: Témoin EE, si deux personnes ont grandi dans le même milieu, que
16 ces deux personnes ont vécu dans un milieu assez semblable sur le plan
17 social également, ces deux personnes vont-elles parler différemment en
18 fonction de leur appartenance religieuse ou ethnique?
19 Réponse: J'aurais besoin que vous me disiez plus clairement ce que vous
20 entendez par même milieu? Pensez-vous à deux personnes qui pourraient être
21 des voisins, habitant dans la même région ou habitant dans la même ville
22 mais dans des quartiers différents?
23 Question: Je pense à des personnes qui vivent sur le même territoire.
24 Commençons par exemple par les situer en Bosnie orientale. L'un des
25 éléments intéressants que j'ai constaté est que des personnes peuvent
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1 venir de la même région et parler différemment. Cela a été confirmé par
2 des études dialectales relatives à la Bosnie orientale de Senahid
3 Halilovic qui a étudié le dialecte de Touholj et également l'auteur que
4 j'ai évoqué a étudié le dialecte serbe de Kladanj. Deux personnes peuvent
5 venir de la même région et parler tout de même légèrement différemment.
6 Question: Je suppose qu'il peut aussi arriver que des personnes soient
7 originaires de régions différentes et qu'elles parlent de la même façon!
8 Réponse: Pouvez-vous me donner plus de détails sur ce que vous entendez
9 par même région?
10 Question: Si je m'appuie sur l'étude dont vous êtes l'auteur, le dialecte
11 de Kladanj, est-il possible que deux personnes, l'une de Kladanj et
12 l'autre de Zvornik qui ne soient pas des Serbes, parlent avec les mêmes
13 caractéristiques linguistiques, donc de la même façon?
14 Réponse: Je comprends votre question. J'ai également étudié et pris en
15 compte une étude dialectale plus générale et une étude de Asim Peco de
16 l'université de Belgrade qui disent qu'il y a d'autres caractéristiques
17 dans le langage de Bosnie orientale et pas seulement celles qui ont été
18 évoquées dans l'étude de Tujolj. Cet auteur fait la différence entre le
19 langage utilisé par les orthodoxes de cette région et celui utilisé par
20 les Musulmans.
21 Un élément particulier que j'ai remarqué s'agissant de la Bosnie
22 orientale, c'est que la population musulmane peut, dans certains endroits
23 en tout cas, utiliser une accentuation archaïque de Bosnie orientale, ce
24 qui signifie que cette personne n'utilise pas la langue standardisée de
25 l'Herzégovine orientale, qui est donc devenue la norme, dans l'ancien
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1 serbo-croate. Asim Pesic traite de ce point dans son étude.
2 Question: Qu'en est-il du statut social, de l'éducation, d'autres éléments
3 sociaux? Est-ce qu'il diminue les différences ou les augmente-t-il?
4 Réponse: C'est une question très intéressante. Dans la majorité des cas,
5 l'éducation peut en effet avoir un tel effet. Mais ce qui s'applique, y
6 compris à mon environnement américain, si je parle par exemple l'américain
7 de Chicago et que par mon éducation j'accède à l'américain standardisé et
8 que je ne parle plus l'américain de Chicago, lorsque je retournerai à
9 Chicago, j'aurai à nouveau tendance à reparler américain de Chicago.
10 Je pense que même pour une personne ayant un niveau d'éducation très
11 important, qui a donc acquis la langue standardisée, cette personne
12 lorsqu'elle retourne chez elle, aura tendance à reprendre sa langue
13 d'origine, notamment lorsque cette personne ressent des émotions, qu'elle
14 parle rapidement ou qu'elle s'adresse à des personnes qui lui sont chères,
15 comme les membres de sa famille etc.
16 Question: Témoin EE, est-il possible pour un Croate ou un Serbe de Bosnie
17 ou pour un Musulman de Bosnie, de parler la même langue, une langue
18 identique?
19 Réponse: Votre question est assez théorique. Tout dépend de l'endroit où
20 se trouvent ces personnes et du contexte dans lequel elles vivent. Je
21 crois que c'était tout à fait possible avant la guerre. Disons que dans le
22 centre urbain de Sarajevo, il eût été impossible de distinguer la moindre
23 différence entre ces trois appartenances ethniques, mais quand on va
24 davantage en province ces distinctions sont plus audibles.
25 L'une de mes études était concentrée sur la Bosnie occidentale. J'ai
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1 étudié la langue parlée par les Serbes, les Musulmans et les Croates de
2 cette région et j'ai identifié trois caractéristiques primaires dont je
3 dis qu'elles permettent d'identifier ces groupes.
4 Avec la nouvelle réalité de l'émergence de ces trois langues différentes,
5 le serbe, le croate et le bosnien, aujourd'hui par exemple, un Croate de
6 Bosnie aura tendance à utiliser davantage de formes locutoires émanant de
7 la nouvelle Croatie qui affectent le vocabulaire ou certaines formes de
8 vocabulaire. Par exemple, ces gens diront "poduzece" au lieu de
9 "preduzece", n'emploieront plus le mot "avion" pour "avion", mais
10 "zrakoplov", ou encore "kazaliste" au lieu de "pozoriste" pour théâtre.
11 Certains mots sont apparus récemment.
12 Quant aux Musulmans, un élément qui permettrait de les reconnaître, même
13 dans un centre urbain, serait l'usage plus fréquent du "h", et en Bosnie
14 on a beaucoup insisté pour que les Bosniens aujourd'hui utilisent plus
15 fréquemment le "h", y compris dans des mots où cela n'existait pas avant,
16 comme dans le mot "veuve", "udovica". Les Musulmans de Bosnie aujourd'hui
17 disent "Hudovica", alors qu'il n'y a aucune raison pour que ce "H" existe
18 dans ce mot puisqu'il n'a jamais été présent dans le passé, mais
19 aujourd'hui il y est. Pareil pour le café, les Musulmans aujourd'hui
20 auront tendance à dire "Kahva" pour insister sur la nouvelle réalité qui
21 s'est créée dans cette partie des Balkans.
22 Question: Si j'ai bien compris, ce que vous venez de dire concerne la
23 situation d'aujourd'hui, c'est-à-dire celle qui a fait suite aux
24 évolutions survenues dans la région, n'est-ce pas?
25 Réponse: Oui, mais les échantillons que nous avons examinés se situaient
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1 dans le temps à un moment postérieur à l'éclatement de l'ex-Yougoslavie.
2 Il faut tenir compte de cela dans une certaine mesure.
3 Avant l'éclatement de l'ex-Yougoslavie, il y avait déjà un certain nombre
4 de différences entre la façon de parler des Serbes et des Croates. Les
5 Musulmans, pour leur part, avaient tendance à osciller en Bosnie, ils
6 utilisaient par exemple certaines prononciations croates tout en recourant
7 à des formes verbales ou à du vocabulaire d'origine serbe. Les Musulmans
8 avaient à l'époque un langage assez mixte.
9 Mais selon les études dialectales qui ont été réalisées, et j'en ai étudié
10 un certain nombre qui datent des années 80/90 qui portent y compris sur
11 des zones urbaines comme Tuzla ou Visoko en Bosnie, on voit dans ces
12 études que les façons de parler des Musulmans et des autres habitants de
13 ces endroits sont distinguables depuis avant la guerre.
14 Question: Revenons à la situation de Bosnie orientale où la grande
15 majorité de la population -un grand nombre de témoins en ont parlé-
16 dépendait économiquement et sur le plan de l'éducation de la Serbie.
17 Un grand nombre de personnes entendues ici comme témoins travaillaient en
18 réalité à Belgrade dans le bâtiment ou dans certaines entreprises.
19 Admettez-vous la possibilité que le fait que ces personnes aient passé une
20 grande partie de leur vie en Serbie, le fait que la frontière entre la
21 Serbie et la Bosnie était tout près de chez eux et le fait que ces
22 personnes aient suivi une formation qui relevait de divers centres
23 d'éducation, y compris l'armée? Dans ces conditions, admettez-vous que les
24 différences dans la façon de parler que vous venez d'évoquer aient été
25 très réduites chez ces personnes?
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1 Réponse: Très franchement, je crois que tout dépend de l'individu. Là
2 encore, il y a un problème de code: si ces personnes ont beaucoup vécu en
3 Serbie, ont travaillé en Serbie, mais qu'elles rentraient très souvent
4 voir leur famille et leurs amis en Bosnie, je pense que ces personnes
5 auraient conservées ou en tout cas auraient pu reprendre l'usage de leur
6 dialecte d'origine. J'ai connu beaucoup de gens à Belgrade qui vivaient à
7 Belgrade depuis de nombreuses années, qui n'avaient pas de nombreux
8 parents en dehors de Belgrade, je pense à des Monténégrins en particulier
9 qui ont adopté totalement l'Ekavien.
10 Mais s'il s'agit d'une deuxième génération, donc de gens qui parlent
11 l'Ekavien parce qu'ils ont été élevés à Belgrade alors que leurs parents
12 sont arrivés à Belgrade, ils parlerons sans aucun doute Ekavien. Donc tout
13 dépend de l'individu, mais j'hésiterais à dégager des tendances générales.
14 Cela dit, compte tenu de mes connaissances en sociolinguistique, je crois
15 savoir que dans de nombreux endroits dans le monde, y compris dans
16 certaines régions de l'ex-Yougoslavie, les gens changent de code très
17 facilement et en général on oublie jamais son dialecte d'origine.
18 Donc même si on a subi des influences provenant d'autres dialectes, on
19 peut, quand on revient dans son environnement d'origine, reprendre l'usage
20 de son dialecte d'origine.
21 Question: Et ce dialecte maternel, lorsqu'il s'agit des Serbes de Bosnie
22 de l'est, c'est le Jekavien?
23 Réponse: Oui, pour les Serbes, ces Serbes-là, la langue maternelle c'est
24 le Jekavien, mais il s'est exercé pas mal de pressions en Republika Srpska
25 aux fins de faire adopter par les Serbes l'Ekavien de Belgrade. Cette
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1 acceptation de cet Ekavien de Belgrade était censée être une sorte de lien
2 qui devait relier entre eux les Serbes, notamment la famille serbe de
3 l'autre côté de la rivière Drina et ceux de Serbie. Autrement dit, on
4 s'efforçait à maintenir l'Ekavien pour s'identifier avec les Serbes de
5 Serbie.
6 Question: Est-ce que cela signifie que les gens sont conscients de ces
7 différences et qu'ils peuvent parler Jekavien ou Ekavien comme ils le
8 veulent?
9 Réponse: Je crois que la conscience afférente à ce fait-là ne fait que
10 croître. Je vais vous donner plusieurs exemples issus de mes expériences
11 datant de mes voyages dans différentes parties de l'ex-Yougoslavie. Je
12 dirais que le dialecte que j'ai étudié était l'Ekavien. Lorsque je
13 voyageais en Croatie, les gens me rectifiaient, ils savaient que je
14 parlais l'Ekavien qui m'identifiait à un Serbe; et lorsque j'étais en
15 Serbie, je parlais le Jekavien et l'Ekavien, et je n'ai eu aucun problème
16 si j'utilisais par quelque hasard une forme Jekavienne. C'était mon
17 expérience personnelle.
18 Mais rappelez-moi votre question?
19 Question: Est-ce que cela signifie que les gens étaient conscients de la
20 différence de prononciation?
21 Réponse: Il serait difficile de tirer des réponses générales, mais il se
22 peut fort bien que les gens en soient conscients de façon parfaite mais
23 cela découle de mon expérience personnelle et du temps que j'ai mis à
24 étudier. Je me suis entretenu avec beaucoup de gens qui ont voyagé, qui
25 ont beaucoup voyagé, qui sont allés à Belgrade, et notamment lorsque je
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1 suis allé là-bas en 1998 et que je me suis entretenu avec des Serbes de
2 Bosnie qui se trouvaient à Belgrade. Ils ont maintenu leur prononciation
3 Jekavienne de façon délibérée, et ils disaient qu'ils ne voulaient pas
4 faire la transition vers l'Ekavien, alors que leurs enfants parlaient tout
5 à fait Ekavien.
6 Bon nombre de gens à Belgrade, étant donné qu'à l'époque il y avait
7 beaucoup de réfugiés originaires de l'ex-Yougoslavie, disaient que l'on
8 entendait souvent du Jekavien et que l'on notait la présence de toutes ces
9 différences; ces différences étaient remarquées. On pouvait savoir
10 lorsqu'il s'agissait d'une déclaration politique en Jekavien ou Ekavien,
11 on sait par exemple qu'il y a eu des exemples où les leaders politiques
12 serbes de Bosnie s'efforçaient de parler Ekavien mais sans grand succès.
13 Et cela est arrivé pendant plusieurs années notamment dans le courant de
14 la guerre.
15 Question: Est-ce que cela signifie que, dans le cas où une personne
16 voudrait que l'on ait l'impression qu'il s'agit d'un Serbe de Bosnie,
17 cette personne pourrait se servir en partie ou en totalité du dialecte
18 Ekavien?
19 Est-ce que vous pouvez me répondre par un oui ou par un non?
20 Réponse: Excusez-moi, vous vous avez dit Jekavien ou Ekavien?
21 Question: Ekavien.
22 Réponse: Est-ce que vous pourriez reformuler la question parce que pour
23 moi cela faisait une différence?
24 Question: Est-ce que cela signifie qu'une personne souhaitant laisser
25 l'impression d'un parlé de Serbes, cette personne-là pourrait-elle
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1 sciemment utiliser dans son parlé des éléments de Ekavien en totalité ou
2 en partie?
3 Réponse: Bien. Il y a un grande controverse entre les linguistes serbes
4 concernant le statut du Jekavien après la décision des Serbes de Bosnie de
5 déclarer l'Ekavien comme étant le dialecte officiel dans les régions
6 détenues en Bosnie par les Serbes. Je pense que cet homme s'appelait...
7 mais je ne veux pas donner son nom maintenant, je vais me référer à mes
8 notes parce que je ne veux pas me tromper.
9 Cet homme avait dit que la plupart des Serbes de Bosnie parleraient en
10 Jekavien mais que les intellectuels, notamment les gens qui voulaient
11 montrer qu'ils étaient de vrais Serbes, et ils n'étaient pas en grand
12 nombre, ne parlaient qu'en Ekavien, et non pas dans un mélange de Jekavien
13 et de Ekavien.
14 Je voudrais encore souligner une autre chose, à savoir que les dialectes
15 de la Bosnie orientale, comme je l'ai dit auparavant, étaient Jekaviens,
16 mais il y a beaucoup d'éléments Ekaviens qui font partie de cette région,
17 qui font partie intégrante du dialecte maternel. Ce qui signifie que les
18 gens de la Bosnie de l'est avaient peu de termes Ekaviens ou les avaient
19 "ramassés" lorsqu'ils étaient dans la JNA, lorsqu'ils ont travaillé à
20 Belgrade ou dans n'importe quelle autre partie de la Serbie parlant
21 Ekavien.
22 Question: Est-ce que cela concerne également des intervenants qui
23 pourraient être aussi bien Musulmans ou Croates et être eux aussi
24 originaires de la Bosnie orientale? Ai-je raison de le dire?
25 Réponse: Eh bien, la littérature que j'ai lue nous dit que les Musulmans
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1 de Bosnie orientale ont peu de Ekavisme dans leur parlé. Cela est moins
2 fréquent dans leur façon de parler.
3 Concrètement parlant, lorsqu'il s'agit des mots que j'ai retrouvés sur les
4 enregistrements il y a toute une série d'autres formes qui n'ont pas
5 comporté de réflexes Ekaviens. Par exemple, dans les termes "Ovde" ou
6 "Gde", je l'ai remarqué dans certains villages ou dans certaines régions
7 où l'on disait "Dje" qui est une espèce de réflexe de Ekavisme par rapport
8 au Ekavien: au lieu de dire, "Gde", ils disaient "Jde", au lieu de dire
9 "Ovde", ils disaient "Ovdje".
10 Question: Mais cette fréquence du recours à l'Ekavien peut fort bien être
11 la conséquence d'une formation policière ou militaire, ai-je raison ou
12 pas?
13 Réponse: Oui, c'est possible.
14 Question: Témoin EE, combien de temps, à votre avis, faut-il, et vous en
15 avez notamment parlé au début de vos déclarations lorsque vous avez parlé
16 de la phase de désintégration du serbo-croate en langues distinctes,
17 combien de temps faut-il à votre avis pour constituer cette langue
18 distincte? Je ne sais pas si j'ai bien posé la question?
19 Réponse: Non, je préférerais que vous me clarifiez la chose.
20 Question: Au début de votre intervention, vous avez mentionné en qualité
21 de questions d'ordre général, la décomposition du serbo-croate en langue
22 distincte. Je voulais savoir combien à votre avis pouvait durer ce
23 processus de désintégration d'une langue et de la formation d'autres
24 langues?
25 Réponse: Il est impossible de le prédire, et je dois également préciser
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1 que le processus n'a pas commencé en 1991. En fait, je pourrais dire deux
2 choses à ce sujet.
3 Nous avons déjà vu des exemples où la langue croate qui faisait partie de
4 l'Etat croate fasciste de 1941 à 1945, la langue croate avait été déclarée
5 langue officielle et l'on avait imposé une orthographe datant d'avant
6 1892. Mais pour en revenir aux années fin 60 et début 70, les Croates
7 avaient constitué et formé un langage distinct qui avait fait l'objet
8 d'une déclaration sur la position, le nom de la littérature croate, et la
9 distinction du Croate en tant que langue séparée, à part.
10 Le processus a duré 20 à 25 ans avant la décomposition de la Yougoslavie
11 et continue encore. Je ne suis pas un prophète pour vous dire combien de
12 temps cela va encore durer. Mais pour ce qui est de la langue bosnienne,
13 je dirais que cela a commencé avec la constitution fédérale yougoslave de
14 1974 qui a permis une plus grande variété de langages parlés dans les
15 différentes Républiques qui s'exprimaient toutes en serbo-croate.
16 C'est ce qui est arrivé dans la République socialiste de Bosnie-
17 Herzégovine qui a adopté l'idiome linguistique standard de cette
18 République qui était légèrement différent de la variante occidentale,
19 j'entends Zagreb, ou de la variante orientale, j'entends Belgrade: il y
20 avait là cette espèce d'embryon de la langue bosnienne d'aujourd'hui.
21 Lorsque les forces nationalistes ont pris le pouvoir dans les années 80,
22 il y a eu une accélération vers le déplacement en faveur d'une langue
23 bosnienne distincte. Pour ce qui est des Croates et des Serbes, nous
24 devons dire que le Croate se trouve en avance par rapport à tous les
25 autres dans la création de langue distincte.
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1 Il nous faudra encore voir dans quelle direction vont se diriger le
2 Bosnien et le Serbe, mais pour ces choses-là il faut au moins une
3 génération car il s'agit de former toute une génération d'enfants en âge
4 scolaire pour l'apprentissage d'une nouvelle langue.
5 Question: Témoin EE, au cours de votre interrogatoire principal, vous avez
6 indiqué que lorsqu'une personne séjournant pendant assez longtemps à
7 l'extérieur de son propre milieu pouvait acquérir certaines
8 caractéristiques de parlé et les repères une fois revenue dans sa propre
9 région.
10 Ma question est la suivante, quel est le temps nécessaire pour cette
11 personne aux fins de revenir à son parlé originel?
12 Réponse: Je voudrais rectifier quelque chose que vous avez de dire, je
13 n'ai pas dit que ces vieilles caractéristiques se perdaient tout de suite.
14 Je voulais dire qu'une personne connaissant les deux façons de parler peut
15 procéder de façon instinctive une fois revenue dans sa région maternelle
16 ou sa région d'origine vers le dialecte maternel, maintenant l'influence
17 de cette forme autre relâche sa prise, cela ne se fait pas de façon
18 absolument rapide, je ne peux pas vous dire combien de temps cela dure
19 exactement, car cela dépend aussi de la personne en question, cela varie
20 d'un individu à l'autre, mais les gens vont revenir à leur code et à leur
21 dialecte maternel et nous sommes tous capable de le faire. D'ailleurs la
22 littérature linguistique parle du bilinguisme ou du bi-dialectisme, les
23 gens appellent cela la langue maternelle et la langue de travail où à
24 savoir la langue parlée à la maison et la langue parlée à l'extérieur de
25 chez soi.
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1 Question: Je suppose que cette période est inférieure à trois ans?
2 Réponse: Vous parlez de la période du retour vers le dialecte maternel?
3 Question: Précisément.
4 Réponse: Oui, c'est bien moins de trois ans je dois le dire, je dois aussi
5 ajouter que cela varie effectivement d'une personne à l'autre. Je pense
6 que chez bon nombre de personnes, c'est l'une des caractéristiques propres
7 à chacun pour ce qui est du passage d'un code à l'autre, on sait que ceux
8 qui parlent les deux codes ou les deux dialectes sont capables de switcher
9 de l'un à l'autre, c'est-à-dire de leur propre dialecte vers un dialecte
10 qu'ils ont ramassé quelque part dans une autre région. Je crois que c'est
11 définitivement une période inférieure à trois ans, à compter du retour
12 dans le milieu où ce dialecte maternel est parlé. Je puis également
13 ajouter que cela dépend du fait de la durée de ce séjour extérieur, il se
14 peut qu'une personne passe une semaine à l'extérieur et la question est
15 donc très hypothétique et je dois vous dire que cela dépend énormément du
16 particulier dont il s'agit, je ne puis vous donner une période concrète et
17 je crois que j'aurais tort d'essayer de deviner.
18 Question: Dans la transcription qui vous a été soumise pour examen, on
19 trouve le mot "bora", ce mot est-il caractéristique des trois groupes
20 ethniques de Bosnie, c'est ce que je pense mais est ce que j'ai raison de
21 le dire?
22 Réponse: Je ne suis pas du tout sûr pour les Croates, mais je peux le dire
23 pour les Serbes et les Musulmans de Bosnie. Oui, c'est sûr.
24 (L'interprète signale qu'il s'agit du mot Bolan.)
25 Question: je n'ai plus de question pour ce témoin. Merci, Monsieur le
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1 Président.
2 M. le Président: Maître McCloskey, avez-vous des questions supplémentaires
3 et si oui allez-y.
4 (Interrogatoire principal supplémentaire au Témoin EE par M. McCloskey.)
5 M. McCloskey (interprétation): Monsieur le Témoin, quand vous avez examiné
6 les différents enregistrements que l'on vous a soumis en qualité
7 d'éléments de preuve et notamment les enregistrements moins clairs, avez-
8 vous remarqué des moments tout à fait bizarres qui vous auraient permis de
9 penser que quelque chose avait été ajouté à l'enregistrement.
10 Témoin EE (interprétation): Non.
11 M. McCloskey (interprétation): Je n'ai pas d'autre question.
12 M. le Président: Monsieur le Juge Riad, s'il vous plaît.
13 (Questions au Témoin EE par M. le Juge Riad.)
14 M. Riad (interprétation): Bonjour, Monsieur le Témoin EE.
15 Témoin EE (interprétation): Bonjour, Monsieur le Juge.
16 Question: Vous avez souligné les idiosyncrasies qui existent entre le
17 parlé des Musulmans et celui des personnes appartenant à l'appartenance
18 ethnique serbe notamment, vous avez parlé des différences entre
19 l'utilisation du E et du Je etc. Alors supposons qu'un Musulman s'efforce
20 d'imiter la façon de parler de quelqu'un d'appartenance ethnique serbe,
21 trouveriez-vous la moindre difficulté à surmonter une telle différence?
22 Serait-ce aussi difficile que si un Français veut imiter la façon de
23 parler d'un allemand?
24 Réponse: Je crois que ce serait très difficile, je crois que ces personnes
25 auraient besoin d'un expert pour les aider, elles ne pourraient pas le
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1 faire de façon naturelle.
2 Question: Si quelqu'un d'appartenance ethnique musulmane essaie d'imiter
3 la façon de parler de serbes, un expert pourrait détecter les nuances?
4 Réponse: Je crois, ce que j'ai constaté sur les enregistrements c'est que
5 les choses étaient assez constantes, ce qui m'a fait penser que ces gens
6 parlaient de façon authentique et qu'elles ne jouaient pas la comédie.
7 Question: Votre conclusion globale c'est que les caractéristiques que vous
8 avez trouvées sur les enregistrements étaient associables à des locuteurs
9 venant d'un environnement ethnique serbe, c'est votre conclusion très
10 ferme.
11 Réponse: Cela m'aurait été plus facile si l'on m'avait donné des
12 échantillons plus longs, mais compte tenu des circonstances, je pense que
13 j'ai eu assez d'éléments qui me permettent d'arriver à cette conclusion,
14 effectivement, en dépit des limitations.
15 M. le Président: Madame la Juge Wald n'a pas de question, moi non plus.
16 Nous vous remercions beaucoup Témoin EE, d'être venu. Et nous vous
17 souhaitons un bon retour à votre bon travail. Ne bougez pas pour l'instant
18 parce qu'il faut baisser les rideaux pour protéger votre identité. Nous
19 serons ici demain à 9 heures 20 pour continuer nos travaux. Je lève la
20 séance. A demain.
21 (Le Témoin EE est reconduit hors du prétoire.)
22 (L'audience est levée à 15 heures 07.)
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