LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit : M. le Juge Antonio Cassese, Président

M. le Juge Richard May

Mme le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba

Assistée de : Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Décision rendue le : 6 octobre 1998

 

 

 

LE PROCUREUR

c/

ZORAN KUPRESKIC, MIRJAN KUPRESKIC, VLATKO KUPRESKIC,
DRAGO JOSIPOVIC, DRAGAN PAPIC, VLADIMIR SANTIC ALIAS "VLADO"

_________________________________________________________________________

DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE DE LA DÉFENSE
AUX FINS DE CITER DES TÉMOINS À COMPARAÎTRE

__________________________________________________________________________

 Le Bureau du Procureur :

M. Franck Terrier
M. Albert Moskowitz

Le Conseil de la Défense :

M. Ranko Radovic, pour Zoran Kupreskic
Mme Jadranka Glumac, pour Mirjan Kupreskic
M. Borislav Krajina, Vlatko Kupreskic
M. Luko Susak, pour Drago Josipovic
M. Petar Puliselic, pour Dragan Papic
M. Petar Pavkovic, pour Vladimir Santic

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 ("Tribunal international") ;

VU la requête verbale présentée par le Conseil de Vlatko Kupreskic lors de l’audience qui s’est tenue durant l’après-midi du 5 octobre 1998, faisant état du refus de comparaître en tant que témoins à décharge, pour des raisons de sécurité personnelle et d’éventuelle intimidation, de quatre témoins qu’il souhaite citer, et affirmant que leur présence devant la Chambre ne peut être obtenue qu’en les citant à comparaître en tant que témoins du Tribunal ;

ATTENDU qu’en ces circonstances, il paraît être dans l’intérêt de la justice et d’un procès équitable que lesdits témoins comparaissent devant la Chambre et que le Tribunal est tenu de veiller à ce que le procès soit équitable et rapide, en application des articles 20 et 21 du Statut ;

ATTENDU, en outre, qu’en application de l’article 22 du Statut, le Tribunal est également tenu de prévoir des mesures de protection des victimes et des témoins et que la Défense fonde sa demande de citation à comparaître sur un risque de harcèlement des témoins ;

ATTENDU, par conséquent, que tant l’exigence d’un procès équitable que la nécessité de protéger les témoins commandent de décerner les citations à comparaître demandées ;

ATTENDU, cependant, que l’article 98 du Règlement ("Pouvoir des Chambres d’ordonner de leur propre initiative la production de moyens de preuve supplémentaires"), qui dispose que "[ l] a Chambre de première instance peut ordonner la production de moyens de preuve supplémentaires par l’une ou l’autre des parties. Elle peut citer d’office des témoins à comparaître", ne s’applique pas en l’espèce dans la mesure où il porte sur la production d’éléments de preuve supplémentaires, alors que le Conseil de la Défense demande dans ce cas particulier à la Chambre de rendre une ordonnance citant les témoins à comparaître en qualité de témoins de la Chambre ;

 

ATTENDU, cependant, que les articles 54 et 75 A) du Règlement sont applicables en l’espèce :

Article 54

Disposition générale

À la demande d’une des parties ou d’office un juge ou une Chambre de première instance peut délivrer les ordonnances, citations à comparaître, ordonnances de production ou de comparution forcées, mandats et ordres de transfert nécessaires aux fins de l’enquête, de la préparation ou de la conduite du procès.

Article 75

Mesures destinées à assurer la protection des victimes et des témoins

A) Un Juge ou une Chambre peut, d’office ou à la demande d’une des parties ou de la victime ou du témoin intéressé, ou de la Division d’aide aux victimes et aux témoins, ordonner des mesures appropriées pour protéger la vie privée et la sécurité de victimes ou de témoins, à condition toutefois que lesdites mesures ne portent pas atteinte aux droits de l’accusé.

[ ...]

 

DÉCIDE DE CITER les quatre témoins visés par la requête de la Défense à comparaître en tant que témoins du Tribunal,

ORDONNE, en application de l’article 85 B) du Règlement que, s’agissant de ces quatre témoins, l’ordre de présentation des éléments de preuve sera le suivant : interrogatoire principal par le Conseil de la défense de Vlatko Kupreskic, éventuellement, interrogatoire complémentaire par un autre Conseil de la Défense, contre-interrogatoire par l’Accusation et interrogatoire supplémentaire par le Conseil de la Défense de Vlatko Kupreskic.

ORDONNE en outre, en conséquence de ce qui précède, que le conseil de la défense de Vlatko Kupreskic ait seul l’autorisation d’entrer en contact et de communiquer avec lesdits témoins avant qu’ils ne prêtent serment, mais qu’ensuite, toute communication cesse jusqu’à la fin de leur déposition, en application de la Décision rendue le 18 septembre 1998 par la Chambre (Décision relative à la communication entre les parties et leurs témoins).

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

 

Le Président de la Chambre

de première instance

(signé)

Juge Antonio Cassese

Fait le six octobre 1998

La Haye (Pays-Bas)

[ Sceau du Tribunal]