LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit : M. le Juge Antonio Cassese, Président

M. le Juge Richard May

Mme le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba

Assistée de : Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Décision rendue le : 11 janvier 1999

 

LE PROCUREUR

c/

Zoran KUPRESKIC, Mirjan KUPRESKIC, Vlatko KUPRESKIC,
Drago JOSIPOVIC, Dragan PAPIC, Vladimir SANTIC alias "VLADO"

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DÉCISION

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Le Bureau du Procureur :

M. Franck Terrier
M. Albert Moskowitz

Le Conseil de la Défense :

M. Ranko Radovic, pour Zoran Kupreskic
Mme Jadranka Glumac, pour Mirjan Kupreskic
M. Borislav Krajina, pour Vlatko Kupreskic
M. Luko Susak, pour Drago Josipovic
M. Petar Puliselic, pour Dragan Papic
M. Petar Pavkovic, pour Vladimir Santic

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II du Tribunal pénal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le "Tribunal international"),

VU la Décision orale rendue par la Chambre de première instance le 11 janvier 1999 dans laquelle elle statuait comme suit sur les points ci-après,

VU l’argumentation avancée par l’Accusation à l’audience du 11 janvier 1999 selon laquelle les déclarations préalables de témoins communiquées par la Défense, en application de l’article 73 ter du Règlement de procédure et de preuve (le "Règlement") et les ordonnances rendues par la Chambre de première instance en application des dispositions prises pendant la Conférence préalable à la présentation des moyens à décharge qui s’est tenue le 14 octobre 1998, sont excessivement résumées et ne donnent aucune idée du contenu du témoignage à venir, contrevenant ainsi au principe de l’égalité des armes,

VU la Requête de l’Accusation demandant, à la lumière de cette lacune, qu’il lui soit donné l’occasion d’interroger au moins quelques témoins à décharge avant leur déposition afin d’établir la teneur de leur témoignage et de lui permettre de préparer correctement son contre-interrogatoire,

ATTENDU QUE M. Pavkovic rejette la présente Requête au nom de tous les Conseils de la Défense,

ATTENDU QUE la nature extrêmement succinte et résumée de bon nombre des déclarations préalables de témoins à décharge viole le principe de l’égalité des armes, puisque l’Accusation a communiqué à la Défense et à la Chambre de première instance beaucoup plus de déclarations à charge détaillées et ce, avant la présentation de son dossier, permettant ainsi à la Défense de préparer son contre-interrogatoire des témoins à charge,

ATTENDU QUE les Conseils de Zoran Kupreskic et de Mirjan Kupreskic ont déclaré, à l’audience du 11 janvier 1999, que ces deux accusés allaient témoigner pour leur propre défense, mais que les autres Conseils n’ont donné aucune indication quant à la comparution de leurs clients en tant que témoins et que de telles informations doivent être communiquées en application de l’article 73 ter du Règlement et que la Défense est tenue de communiquer à la Chambre de première instance et à l’Accusation sa liste de témoins avant le début de la présentation des arguments de la Défense,

ATTENDU QUE le Conseil de Vlado Santic a indiqué à l’audience du 11 janvier 1999 que la défense de celui-ci consisterait en une défense d’alibi mais qu’il n’a pas fourni l’information requise par l’article 67 A) ii) a) du Règlement et que, par conséquent, si Vlado Santic lui-même peut témoigner du fait qu’il a un alibi, en application de l’article 67 B) du Règlement, si son Conseil ne dépose pas une notification d’alibi pertinente en vertu de l’article 67 A) ii) a) précité, les éléments de preuve d’autres témoins impliquant l’alibi risquent d’être rejetés par la Chambre de première instance,

PAR CES MOTIFS,

ORDONNE ce qui suit :

i) l’Accusation est tenue de fournir, pour le 12 janvier 1999 au plus tard, une liste des témoins à décharge dont elle pense avoir reçu une déclaration préalable inappropriée ; la Défense dispose ensuite de deux semaines à compter de la réception de ladite liste pour communiquer à la Chambre de première instance et à l’Accusation des déclarations plus détaillées des mêmes témoins, faute de quoi l’Accusation pourra interroger les témoins dont les déclarations détaillées ne lui auront pas été fournies,

ii) la Défense décidera et annoncera, dès que possible et au plus tard le 19 janvier 1999, si les accusés, hormis Zoran Kupreskic et Mirjan Kupreskic, comptent témoigner pour leur propre défense,

iii) la Défense est tenue, à la fin de chaque semaine au plus tard, de fournir à l’Accusation et à la Chambre de première instance la liste des témoins cités à comparaître la semaine suivante ainsi qu’une liste de témoins de réserve. Si de nouveaux témoins doivent être cités, dix jours doivent s’écouler entre l’annonce de leur comparution et leur appel à la barre de sorte que l’Accusation dispose de suffisamment de temps pour se préparer pour les nouveaux témoins,

iv) la Défense est tenue de décider et d’annoncer, dès que possible, quels témoins inclus dans sa liste elle ne compte pas citer,

v) Vlado Santic peut témoigner du fait qu’il a un alibi, en application de l’article 67 B) du Règlement, mais si son Conseil ne dépose pas une notification d’alibi pertinente en vertu de l’article 67 A) ii) a) précité, les éléments de preuve d’autres témoins relatifs à un alibi risquent d’être rejetés par la Chambre de première instance,

vi) le témoin à décharge, Vlado Divkovic, constitue une exception aux conditions précitées et est autorisé à témoigner cette semaine sans autre formalité,

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

 

Le Président de la

Chambre de première instance II

(signé)

M. le Juge Antonio Cassese

Fait le 11 janvier 1999

La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]