Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-16-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Mercredi 26 août 1998

4 L'audience est ouverte à 9 heures 30.

5 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

6 M. le greffier. – L'affaire n° IT-95-16-T : le Procureur du

7 Tribunal contre Zoran Kupreskic, Mirjan Kupreskic, Vlatko Kupreskic,

8 Drago Josipovic, Dragan Papic et Vladimir Santic, alias Vlado.

9 M. le Président (interprétation). – Bonjour. J'espère que le

10 Greffe, l'huissier est certainement en train d'amener le témoin, et je

11 profite de ces quelques secondes pour vous dire que nous avons décidé

12 maintenant de connaître d'une autre affaire. Par conséquent, nous allons

13 modifier nos projets et j'aimerais vous annoncer quelle sera

14 l'organisation de notre travail pour les semaines à venir.

15 Nous nous réunirons l'ensemble de la semaine prochaine, à

16 l’exception de lundi après-midi : cela nous l’avions déjà décidé. Ensuite,

17 la semaine du 7 septembre ne comportera pas d’audience, pas seulement

18 lundi et mardi, mais du 7 au 11, pas d’audience, ainsi que lundi

19 14 septembre. Une semaine sans audience plus le lundi 14 sans audience.

20 Nous reprendrons le 15 septembre.

21 Pour ce qui est de la semaine du 21 septembre au 28 septembre,

22 trois jours d’audience : les 28, 29 et 30 septembre. Les 1er et 2 octobre,

23 il n’y aura pas d’audience. Si l’accusation n’en a pas terminé avec

24 l’exposé de ses moyens de preuve, nous poursuivrons

25 jusqu’au 9 octobre.

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1 J’espère que d’ici au 9 octobre, l’accusation en aura terminé

2 avec l’exposé de ses moyens de preuve. A ce moment-là, la défense

3 disposera peut-être d'une, deux ou trois semaines -peut-être plutôt

4 deux semaines- pour se préparer. Donc nous aurions une interruption de

5 deux à trois semaines.

6 Si la défense souhaite trois semaines, c'est dommage, car le

7 2 novembre, nous avons une plénière. Nous devrions donc ne pas nous réunir

8 cette semaine-là ; nous devrions donc faire une interruption de

9 quatre semaines et reprendre le 9 novembre. Si la défense pouvait

10 commencer l'exposé de ses moyens de preuve le 26 octobre, cela serait

11 préférable. A ce moment-là, nous aurions une interruption les 2, 3 et

12 4 novembre et, le 9 novembre, nous reprendrions.

13 Mais comme je viens de le dire, ce qui compte, c'est que nous

14 espérons que d'ici au 9 octobre, au plus tard, l'accusation en aura

15 terminé avec l'exposé de ses éléments de preuve. Donc, comme je vous l'ai

16 dit, une fois de plus, la semaine du 7 septembre, il n'y aura pas

17 d'audience ; le 14, le lundi suivant, non plus. Nous reprendrons le

18 15 septembre pour poursuivre jusqu'à la fin, à l'exception du 2 et

19 3 octobre.

20 Je me tourne maintenant vers Me Pavkovic. J'aimerais lui

21 demander combien de conseils de la défense vont contre interroger le

22 témoin ?

23 M. Pavkovic (interprétation). – Bonjour, Monsieur le Président.

24 Le témoin sera contre interrogé par notre confrère, Mme Glumac. Après

25 quoi, ce sera le tour de Me Susak ; après lui, Me Radovic, Me Pulisevic

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1 ou, pour ne pas tous les citer, tous les maîtres qui sont les conseils de

2 la défense ici. Merci, Monsieur le Président.

3 M. le Président (interprétation). - Mais pas vous-même, à ce

4 moment-là ?

5 M. Pavkovic (interprétation). - Monsieur le Président j'ai dit

6 presque tout, c'est ainsi que je me suis donné la possibilité de prendre

7 la parole.

8 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Avant que

9 Maître Glumac ne reprenne son contre-interrogatoire, j'aimerais demander à

10 tous les conseils de la défense, compte tenu de l'âge du témoin, je vous

11 demanderai de vous abstenir de harceler le témoin.

12 Mme Glumac (interprétation). - Merci Monsieur le Président.

13 Je crois que je vais continuer là où je me suis arrêtée hier,

14 seulement ce qu'il me faut ce sont les questions pratiquement de clôture

15 de mon contre-interrogatoire d'hier soir. Hier nous avons notamment traité

16 les quatre déclarations faites par vous même, Monsieur le Témoin, il

17 s'agit d'une déclaration à la Présidence, Commission de l'Etat chargée de

18 recueillir les faits concernant les crimes de guerre dans le territoire de

19 Bosnie-Herzégovine. Avez-vous fait cette déclaration ? C'était justement

20 après ces événements le2 mai 1993.

21 (Hochement de la tête du témoin.)

22 Mme Glumac (interprétation). - Avez-vous ensuite témoigné devant

23 le Juge d'instruction de Zenica, le 7 décembre 1993, et puis après,

24 Monsieur le Témoin, avez-vous fait les deux déclarations suivantes devant

25 les officiers du bureau du Procureur du Tribunal de la Haye, du

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1 4 mars 1998, et du 4 au 10 1998, et le 23 octobre 1994. Cela est vrai ?

2 Témoin C (interprétation). - Oui.

3 Mme Glumac (interprétation). - Si vous êtes d'accord, après

4 avoir consulté ces dossiers nous n'avons pas entendu dire que ce groupe de

5 soldats avec les Kupreskic, vous n'avez pas mentionné d'avoir eu des

6 rubans sur leurs uniforme ?

7 Témoin C (interprétation). - Qu'est-ce que vous voulez dire par

8 rubans ?

9 Mme Glumac (interprétation). - Vous l'avez dit vous même.

10 Interprète. - Nous prions Me Glumac de parler un peu plus dans

11 le micro.

12 Témoin C (interprétation). - Si je ne l'ai pas mentionné, c'est

13 qu'il n'y a pas eu de ruban du tout.

14 Mme Glumac (interprétation). - Vous l'avez mentionné pour la

15 première fois hier

16 ici en audience. Vous n'avez pas dit non plus hier que les soldats

17 lorsqu'ils étaient devant votre maison avaient des rubans jaunes.

18 Témoin C (interprétation). - Je ne l'ai pas mentionné hier ?

19 Mme Glumac (interprétation). - Non vous ne l'avez pas non plus

20 mentionné dans cette déclaration de 1998.Y a-t-il des changements

21 intervenus ?

22 Témoin C (interprétation). - Non ils avaient tous des rubans,

23 ceux qui étaient devant notre maison.

24 M. le Président (interprétation). – Maître Glumac, désolé de

25 vous interrompre mais est-ce que vous pourriez ralentir je vous prie et

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1 attendre quelques secondes après la réponse du témoin sinon le transcript

2 ne reflétera pas fidèlement les débats.

3 Témoin C (interprétation). - Non ce n'est que plus tard je m'en

4 suis souvenu.

5 Mme Glumac (interprétation). - Toutes les fois vous avez signé

6 vos déclarations, je vais vous donner lecture de ce que vous avez dit à la

7 fin de vos déclarations, il s'agit d'une déclaration par écrit vous avez

8 dit : " après avoir lu la déclaration, vous approuvez son contenu ce que

9 vous confirmez par votre signature."

10 Témoin C (interprétation). - Pour la première déclaration, je ne

11 l'ai pas faite, je ne l'ai pas lue.

12 Mme Glumac (interprétation). - Mais je peux lire ici que vous

13 l'avez lue et avoir approuvé et signé. Qui l'a rédigée pour vous ?

14 Témoin C (interprétation). - C'était quelqu'un qui s'était

15 présenté comme étant un journaliste, c'était la première des déclarations.

16 Mme Glumac (interprétation). - Mais elle a été recueillie par un

17 officier, un commis, donc c'est officiel et il y a votre signature

18 apposée.

19 Témoin C (interprétation). - Oui mais cela était ainsi.

20 Mme Glumac (interprétation). - Pouvez-vous nous dire le temps où

21 vous avez

22 entendu les coups de feu tirés ?

23 Témoin C (interprétation). - Tôt le matin.

24 Mme Glumac (interprétation). - Tôt le matin. Quand, à quelle

25 heure ?

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1 Témoin C (interprétation). - Vers les cinq ou six.

2 Mme Glumac (interprétation). - Etait-ce encore la nuit, la

3 pénombre ?

4 Témoin C (interprétation). - Oui on n'y voyait goutte.

5 Mme Glumac (interprétation). - Vous avez dit qu'il pleuvait, y

6 avait-il du brouillard ?

7 Témoin C (interprétation). - Non à ce moment-là au début il ne

8 pleuvait pas au moment même, mais uniquement lorsque le jour a commencé à

9 se lever, il a commencé à pleuvoir.

10 Mme Glumac (interprétation). - Lorsque vous êtes venu voir Joso,

11 est-ce que le jour s'était déjà levé ?

12 Témoin C (interprétation). - Oui c'est cela.

13 Mme Glumac (interprétation). - Y a-t-il parmi vos frères des

14 gens qui ont travaillé dans la société ?

15 Témoin C - (pas d'interprétation)

16 Mme Glumac (interprétation). - Merci je n'ai plus de questions.

17 M. Le Président (interprétation). - Merci Madame Glumac.

18 Maître Susak ?

19 M. Susak (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président. J'ai

20 quelques questions à poser à notre témoin. Voulez-vous nous dire, s'il

21 vous plaît, s'il y avait de la lumière dans cette maison où vous avez

22 dormi ?

23 Témoin C (interprétation). - Oui.

24 M. Susak (interprétation). - Qui a allumé ?

25 Témoin C (interprétation). - C'était ma soeur.

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1 M. Susak (interprétation). - Pour quelle raison ?

2 Témoin C (interprétation). - Tout simplement pour qu'on puisse

3 se lever.

4 M. Susak (interprétation). - Est-ce que la lumière était déjà

5 allumée lorsque les coups de feu se sont déclarés ?

6 Témoin C (interprétation). - Non.

7 M. Susak (interprétation). - Mais pourquoi l'avez vous allumée ?

8 Témoin C (interprétation). - Non, non, nous l'avons tout de

9 suite éteinte la lumière.

10 M. Susak (interprétation). - Pour quelle raison avez-vous éteint

11 la lumière ? De peur ou quoi ?

12 Témoin C (interprétation). - Oui tout simplement, nous nous

13 sommes levés parce qu'il y avait partout des balles. Nous avons éteint.

14 M. Susak (interprétation). - Quand est-ce que vos pères étaient

15 venus à la maison ?

16 Témoin C (interprétation). - Mais il était à la maison.

17 M. Susak (interprétation). - Il y était le 15 ?

18 Témoin C (interprétation). - Il était tout le temps à la maison.

19 M. Susak (interprétation). - Et le 15, était-il à la maison ? Ou

20 s'était-il rendu à une réunion où on devait parler de guerre ou de paix ?

21 En date du 15 ?

22 Témoin C (interprétation). - Non.

23 M. Susak (interprétation). - Vous avez dit que vous avez sauté

24 du haut du balcon.

25 Témoin C (interprétation). - Oui.

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1 M. Susak (interprétation). - Quelle est la hauteur de ce balcon

2 à partir de la terre ?

3 Témoin C (interprétation). - Trois mètres et demi.

4 M. Susak (interprétation). - Vous êtes-vous blessé en sautant ?

5 M. Susak (interprétation). - Non.

6 M. Susak (interprétation). - Votre père a-t-il appartenu à la

7 Défense territoriale ?

8 Témoin C (interprétation). - Oui.

9 M. Susak (interprétation). - Hier, vous avez dit qu'il n'avait

10 pas eu d'armes. Avait-il eu des armes ?

11 Témoin C (interprétation). - Non.

12 M. Susak (interprétation). - A-t-il conservé ses armes quelque

13 part ailleurs, autre que dans sa maison ?

14 Témoin C (interprétation). - Non.

15 M. Susak (interprétation). - A-t-il eu un assignement quelconque

16 à porter des armes ?

17 Témoin C (interprétation). - Non.

18 M. Susak (interprétation). - Encore une dernière question.

19 Connaissez-vous Dzidic Nenad et Muharem ?

20 Témoin C (interprétation). - Non.

21 M. Susak (interprétation). - Connaissez vous Karic Ibrica?

22 Témoin C (interprétation). - Je crois que je le connais, je n'en

23 suis pas sûr.

24 M. Susak (interprétation). - A-t-il été blessé en date

25 du 16 avril ?

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1 Témoin C (interprétation). - Je ne sais pas où il habite.

2 M. Susak (interprétation). - Je vous demande s'il a été blessé

3 en date du 16 avril.

4 Témoin C (interprétation). - Je ne le sais pas.

5 M. Susak (interprétation). - Une autre question. Avez-vous

6 appris que des patrouilles de village ont été formées dans votre

7 localité ?

8 Témoin C (interprétation). - Oui.

9 M. Susak (interprétation). - Y a-t-il eu des patrouilles ?

10 Témoin C (interprétation). - Non, je sais qu'il y a eu des

11 sentinelles de nuit.

12 M. Susak (interprétation). - Etaient-elles régulières ?

13 Témoin C (interprétation). - Je ne le sais pas.

14 M. Susak (interprétation). - Je n'ai plus de questions.

15 M. Le Président (interprétation). - Merci Monsieur Susak.

16 Maître Radovic ?

17 M. Radovic (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président. Je

18 serai très bref aujourd'hui.

19 Premièrement, je m'occuperai de votre première déclaration faite

20 devant la commission d'Etat chargée de recueillir les faits portant sur

21 les crimes de guerre dans le territoire de Bosnie-Herzégovine. Lorsque que

22 l'homme, qui vous a interrogé, était venu s'était-il présenté ?

23 Témoin C (interprétation). - Oui.

24 M. Radovic (interprétation). - Qu'a-t-il dit ? Qui était-il ?

25 Témoin C (interprétation). - Je ne me souviens pas de son nom.

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1 J'étais là, dans cette salle.

2 M. Radovic (interprétation). - Qu'est-ce qu'il vous a dit sur la

3 finalité même de cette interrogation ?

4 Témoin C (interprétation). - Non, tout simplement il parlait

5 d'une déclaration et comme quoi il devait recueillir des faits.

6 M. Radovic (interprétation). - Mais il a dû vous dire tout de

7 même pour quelles raisons il devait recueillir ces faits et avoir votre

8 déclaration ?

9 Témoin C (interprétation). - C'est parce qu'il s'est présenté en

10 journaliste.

11 M. Radovic (interprétation). - S'est-il présenté en tant que

12 journaliste ?

13 Témoin C (interprétation). - Oui.

14 M. Radovic (interprétation). - A-t-il attiré votre attention sur

15 le fait que vous deviez parler la vérité ?

16 Témoin C (interprétation). - Oui c'est cela.

17 Témoin C (interprétation). - Il vous a dit qu'ils allaient

18 rédiger cette déclaration ?

19 Témoin C (interprétation). - Oui.

20 M. Radovic (interprétation). - Vous a-t-il lu cette

21 déclaration ?

22 Témoin C (interprétation). - Non.

23 M. Radovic (interprétation). - Je veux dire, est-ce qu'il vous a

24 lu le contenu de cette déclaration ? Ce qu'il a rédigé ?

25 Témoin C (interprétation). - Non.

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1 M. Radovic (interprétation). - Vous avez dit ensuite que vous

2 étiez chez le Juge d'instruction. Le Juge d'instruction vous a-t-il dit

3 qu'il ne s'agissait pas seulement de répondre à ces questions ? Mais qu'il

4 fallait relater tout ce dont vous avez eu connaissance, et que vous ne

5 deviez surtout pas garder le silence ou quoi que ce soit, et que vous

6 deviez dire la vérité. Vous a-t-il averti de cela ?

7 Témoin C (interprétation). - Oui. Il me l'a dit que je devais

8 dire la vérité, et qu'il ne s'agissait pas seulement de répondre à ces

9 questions.

10 M. Radovic (interprétation). - Vous a-t-il prévenu que vous ne

11 deviez rien passer sous silence ?

12 Témoin C (interprétation). - Oui.

13 M. Radovic (interprétation). - Alors comment se fait-il qu'en

14 réponse à la question de Me Glumac pour ce qui est de ces rubans sur

15 l'uniforme, vous n'en parliez pas. Parce que personne ne vous a posé de

16 questions là-dessus, alors que le Juge d'instruction vous avez prévenu la

17 dessus ?

18 Témoin C (interprétation). - Je ne pensais pas que ceci était si

19 important, pour ne pas dire essentiel. Tout simplement parce qu'elle m'a

20 demandé de présenter le signalement de ces soldats par leur emblème, on a

21 voulu savoir aussi quelque chose sur les insignes et c'est ainsi que je

22 suis descendu dans le détail.

23 M. Radovic (interprétation). - Donc à chaque juge d'instruction

24 vous avez dit tout ce que vous saviez, mais ce qui vous semblait être

25 d'après vous-même essentiel. Par conséquent, vous êtes permis de dire ce

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1 qui est essentiel ?

2 Témoin C (interprétation). - Non, non, non c'est tout

3 simplement que j'ai du répondre.

4 M. Radovic (interprétation). - Est-ce que ce n'est pas par une

5 relation de faits que vous vous êtes lancé dans ce détail ? Y a-t-il une

6 différence ?

7 Témoin C (interprétation). - Non, c'est lui-même qui a posé la

8 question.

9 M. Radovic (interprétation). - Est-ce à dire que vous avez vous-

10 même relaté tout dans cette déclaration ?

11 Témoin C (interprétation). - Vous parlez de la déclaration ?

12 M. Radovic (interprétation). - Oui.

13 Témoin C (interprétation). – Non c'est-à-dire qu'il m'a dit de

14 relater tout, j'ai relaté.

15 M. Radovic (interprétation). - Avez-vous entendu qu'il y a eu un

16 texte dicté de votre déclaration ?

17 Témoin C (interprétation). - Je ne comprends pas ce que veut

18 dire "dicter".

19 M. Radovic (interprétation). - Tout simplement il y avait une

20 dactylo qui devait prendre le tout qui était dicté.

21 S'agit-il d'une dame qui était dactylo et qui a rédigé tout cela

22 sur une machine à écrire ? Elle s'appelait Amira Hasanica ?

23 Témoin C (interprétation). – Non tout simplement on m'a dit que

24 c'était une déclaration et que j'ai du poursuivre.

25 M. le Président (interprétation). - Maître Radovic, les

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1 interprètes vous demandent de ralentir un peu le débit de vos questions et

2 d'attendre surtout un moment pendant que le témoin répond à votre

3 question, je vous remercie.

4 M. Radovic (interprétation). - Avant de signer cette

5 déclaration, l'avez-vous lue ? Ou avez-vous dit tout simplement qu'après

6 avoir entendu ce qui était dicté vous n'aviez guère besoin de le lire ?

7 Témoin C (interprétation). - Je ne m'en souviens plus.

8 M. Radovic (interprétation). - Y a-t-il eu une demande

9 d'indemnisation pour dégâts causés à vous-même lors de cette déclaration

10 devant le Juge d'instruction ?

11 Témoin C (interprétation). - Je ne m'en souviens plus.

12 M. Radovic (interprétation). - Vous avez dit là-bas que vous

13 avez été lésé et que vous alliez demander une indemnisation pour tout

14 dommage causé.

15 Témoin C (interprétation). - Je ne m'en souviens plus.

16 M. Radovic (interprétation). - Lorsque vous avez été interrogé

17 par les officiers du bureau du Procureur du Tribunal international,

18 lorsque vous avez mentionnié les noms de Zoran et Mirjan Kupreskic, c'est-

19 à-dire des frères Kupreskic, vous a-t-on montré leur photo ?

20 Témoin C (interprétation). - Non.

21 M. Radovic (interprétation). - Vous a-t-on demandé de présenter

22 leur signalement, de décrire ?

23 Témoin C (interprétation). - Je ne sais pas ce que vous voulez

24 dire par là.

25 M. Radovic (interprétation). - Pour dire que, par exemple, l'un

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1 d'entre eux serait joli garçon, d'autre serait chauve, aurait évidemment

2 une chevelure touffue, etc.

3 Témoin C (interprétation). - Non on ne me l'a pas demandé.

4 Lorsqu'on m'a montré les photos...

5 M. Radovic (interprétation). - Quand est-ce qu'on vous a montré

6 les photos ?

7 Témoin C (interprétation). - Hier ou avant-hier.

8 M. Radovic (interprétation). - Vous a-t-on montré les photos

9 avant que vous ayez identifié les frères Kupreskic ? Est-ce que j'ai bien

10 compris ?

11 (Le témoin acquiesce de la tête.)

12 M. Terrier. - Monsieur le Président, je n'ai pas saisi le sens

13 de la dernière question à laquelle le témoin a répondu par l'affirmative.

14 Est-ce que Maître Radovic peut la préciser ?

15 M. le Président (interprétation). - Maître Radovic ?

16 M. Radovic (interprétation). - J'ai été parfaitement précis dans

17 ma question. J'ai demandé au témoin si jamais avant la photo soit de

18 Mirjan ou de Zoran Kupreskic lui avait été montrée.

19 Le témoin a répondu que non et que ces photos lui ont été

20 montrées immédiatement avant l'audience ici, avant d'avoir fait lui-même

21 l'identification des accusés dans la salle d'audience. A quelle occasion,

22 il n'a pas montré Zoran, Mirjan mais il a montré tout simplement en

23 paquet, pour ainsi dire, les frères Kupreskic.

24 M. le Président (interprétation). - Peut-être que je me trompe,

25 malheureusement je ne peux pas vérifier sur le transcript la réponse du

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1 témoin au sujet des photographies. Maître Radovic vient de nous dire que

2 des photographies ont été montrées au témoin ici, à La Haye, juste avant

3 l'audience. C'est bien ce qu'il a dit ?

4 M. May (interprétation). – Maître Terrier, est-ce qu'on a montré

5 des photographie au témoin, comme il l’a dit, avant qu'il ne dépose ici ?

6 M. Terrier. – Monsieur le Juge, effectivement ; c'est pour cela

7 que je m'interrogeais sur le sens de la question. Après que le témoin,

8 dans le cadre des entretiens que nous avions eus avec lui, ait mentionné

9 la présence -comme il l'avait d'ailleurs fait au cours de ses précédentes

10 déclarations écrites- la présence sur les lieux, le 16 avril, de Mirjan et

11 de Zoran Kupreskic, nous lui avons effectivement montré des photos de

12 Mirjan et de Zoran Kupreskic. Mais c’est après la désignation de ces

13 deux personnes que nous lui avons montré ces photographies.

14 M. le Président. - C'est bien au mois de mars de cette année ?

15 Ou bien avant

16 l’audience ?

17 M. Terrier. – Avant l’audience, Monsieur le Président. Après son

18 arrivée à La Haye et avant l’audience.

19 M. le Président. – Avant l’audience. Merci. Maître Radovic ?

20 M. Radovic (interprétation). – Monsieur le Président, Madame et

21 Monsieur les Juges, compte tenu de la déposition du témoin ici,

22 aujourd'hui, il est clair qu'avant son arrivée ici, au Tribunal, on ne lui

23 a jamais montré de photographies. Je n'ai eu aucun entretien avec ce

24 témoin, avant ses réponses ici, qui aurait été de nature à lui suggérer

25 une question ou plutôt une réponse.

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1 M. le Président. - Je vous remercie. Maître Puliselic ?

2 M. Puliselic (interprétation). – Je serai extrêmement bref.

3 Monsieur le Témoin C, en réponse à la question de mon collègue de

4 l'accusation sur le prénom du frère de Dragan Papic, vous avez dit qu'il

5 s'appelait Goran ou Zoran. Donc vous ne savez pas exactement. Mais je

6 voulais dire qu'à Ahmici, il y avait toute une série de personnes dont le

7 nom de famille était Papic.

8 Par ailleurs, il existe une personne qui s’appelle Goran Papic ;

9 il existe également quelqu'un qui s'appelle Zoran Papic. Est-ce que vous

10 savez cela ?

11 Témoin C (interprétation). - J'ai dit ici que c'était le frère

12 de Dragan Papic, Zoran ou Goran.

13 M. Puliselic (interprétation). – Oui, très bien. Je ne fais que

14 constater ; je n'ai aucune objection. Est-ce que vous pourriez nous

15 décrire cette personne dont vous affirmez qu'il s'agit du frère de

16 Dragan Papic ? Par exemple, quelle est sa taille, sa couleur de cheveux,

17 quel âge a cette personne environ, pour voir qui est cette personne. Est-

18 ce que vous pourriez la décrire ?

19 Témoin C (interprétation). - Il fait environ 1,80 mètre ou

20 1,90 mètre. Il a les

21 cheveux bruns.

22 M. Puliselic (interprétation). – Quel âge avait-il à l'époque ?

23 Témoin C (interprétation). - Environ 20 ans.

24 M. Puliselic (interprétation). – Qu’en est-il de sa couleur de

25 cheveux ?

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1 Témoin C (interprétation). - Il est blond, blond châtain.

2 M. Puliselic (interprétation). – Dans votre déclaration à

3 l'enquêteur du 10 mars 1998, vous dites que deux ou trois jours après

4 l'attaque, alors que vous vous trouviez dans la maison de Jozo, Papic Ivo

5 est venu ?

6 Témoin C (interprétation). - Oui.

7 M. Puliselic (interprétation). – Est-ce qu'il a demandé à Jozo

8 de l'aider à enterrer certains Croates ?

9 Témoin C (interprétation). – Non, il ne lui a pas demandé, mais

10 il est venu le chercher et ils sont repartis pour enterrer quelqu'un.

11 M. Puliselic (interprétation). – Oui, enfin, il a dit qu'ils

12 allaient enterrer des Croates ?

13 Témoin C (interprétation). - Il ne l'a pas dit ; il a dit

14 "enterrer quelqu'un".

15 M. Puliselic (interprétation). – Mais dans votre déclaration, on

16 peut lire cela, précisément.

17 Témoin C (interprétation). – Au cimetière.

18 M. Puliselic (interprétation). – Vous avez dit :"qu’il lui a

19 demandé de l’aider pour enterrer des Croates". C’est ce que l’on peut lire

20 dans la déclaration.

21 Témoin C (interprétation). – Il lui a demandé de l’aider à

22 enterrer quelqu’un ; il est revenu le soir, Jozo, et il a dit qu’ils

23 étaient allés enterrer quelqu’un au cimetière.

24 M. Puliselic (interprétation). – Mais quand est-ce qu'Ivo Papic

25 est venu chez Jozo, environ ?

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1 Témoin C (interprétation). - L'après-midi.

2 M. Puliselic (interprétation). – Et quand Jozo est-il revenu ?

3 Témoin C (interprétation). - Le soir.

4 L’interprète se reprend : Ivo Papic est arrivé à midi et non pas

5 l'après-midi.

6 M. Puliselic (interprétation). – J’aimerais vous rappeler que

7 vous avez dit expressément qu’il s'agissait de Croates. Nous avons cette

8 déclaration ici. Est-ce que vous vous en souvenez ?

9 Témoin C (interprétation). – Il s'agissait de Croates, mais Ivo

10 n'a pas dit à moment-là : "Nous allons enterrer des Croates".

11 M. Puliselic (interprétation). – Je vous remercie.

12 Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres questions.

13 M. Le Président (interprétation). - Je vous remercie.

14 Maître Pavkovic, allez-vous contre interroger le témoin ? Ou est-ce que

15 nous nous en tiendrons là ?

16 M. Pavkovic (interprétation). - Non Monsieur le Président.

17 M. Le Président (interprétation). - Je vous remercie. Est-ce que

18 l'accusation a des questions supplémentaires à poser au témoin ?

19 M. Terrier. - Quelques questions en effet Monsieur le Président.

20 Aussi rapidement que possible.

21 Monsieur le Témoin, au cours de l'audience d'hier, vous avez

22 désigné dans cette salle, Zoran et Mirjan Kupreskic sans pouvoir donner à

23 chacun son prénom. Je voudrais que vous indiquiez au Tribunal comment vous

24 connaissiez, à l'époque, les frères Kupreskic : Zoran et Mirjan Kupreskic.

25 Dans quelles circonstances vous les aviez, avant le 16 avril 1993,

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1 rencontrés ?

2 Témoin C (interprétation). - Je les connaissais, j'allais là-

3 haut au magasin et c'étaient des voisins. C'était pas très loin de ma

4 maison, 300, 400 mètres. Voilà. Zoran venait

5 chez nous à la maison et voilà.

6 M. Terrier. - Celui que vous désignez comme Zoran Kupreskic,

7 venait-il fréquemment à votre maison ?

8 Témoin C (interprétation). - Oui.

9 M. Terrier. - Pour quelles raisons venait-il à votre maison ?

10 Témoin C (interprétation). - Il venait avec mon frère, mon frère

11 aîné, au sujet d'un pull-over que tricotait ma mère.

12 M. Terrier. - Vous voulez dire que votre mère tricotait un pull-

13 over pour Zoran Kupreskic ?

14 Témoin C (interprétation). - Je ne m'en souviens plus

15 maintenant. Je ne sais plus si elle tricotait ou pas, mais il venait.

16 M. Terrier. - Monsieur le Témoin, vous avez été entendu

17 le 2 mai 1993 par un officier du centre d'enquêtes sur les crimes de

18 guerre et les génocides.

19 Est-ce que vous vous souvenez des conditions dans lesquelles

20 s'est passée cette rencontre ? Où était-ce ? Combien de temps ça a duré ?

21 Qui était la personne qui vous posait des questions ? Comment avez-vous

22 répondu à ces questions ?

23 Témoin C (interprétation). - C'était au cinéma, dans la salle de

24 cinéma, il y avait peut-être 60 à 100 personnes dans cette salle. Il est

25 arrivé, il s'est présenté comme journaliste et d'autres personnes avant

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1 moi ont également fait de telles déclarations. A ce moment-là, il m'a posé

2 quelques questions ; ça a duré une vingtaine de minutes ou une demi-heure.

3 M. Terrier. - Est-il bien exact que dans cette déclaration datée

4 du 2 mais 1993, vous citez, parmi d'autres noms, les noms de Zoran et de

5 Miro Kupreskic comme ayant été vus par vous comme soldats

6 ce 16 avril 1993 ?

7 Témoin C (interprétation). - Est-ce que vous pourriez répéter

8 votre question, s'il vous plaît ?

9 M. Terrier. - Est-il bien exact que, dans cette déclaration dont

10 nous parlons, qui a été prise le 2 mai 1993, vous avez cité notamment

11 Miro Kupreskic et Zoran Kupreskic comme des soldats que vous avez vus le

12 16 avril 1993 ?

13 Témoin C (interprétation). - Je ne m'en souviens pas.

14 M. Terrier. - Vous avez été entendu ensuite en décembre 1993 par

15 un juge d'instruction de Zenica. Est-il bien exact qu'à cette occasion

16 encore vous citez notamment Zoran et Mirjan Kupreskic comme soldats le

17 16 avril 1993 ?

18 Témoin C (interprétation). - Je ne m'en souviens pas.

19 M. Terrier. - Revenons un instant sur ce qui s'est passé le

20 16 avril au matin, lorsque votre frère est emmené par un soldat ou a sauté

21 du balcon du premier étage, et qu'ensuite vous entendez cette fusillade.

22 Pour que tout soit bien clair, est-ce que vous pouvez décrire précisément,

23 ou aussi précisément que possible, de quelle manière votre frère était

24 habillé ?

25 Témoin C (interprétation). - Il portait un gilet noir. Je crois

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1 qu'il portait une veste en jean bleue et des blue-jeans.

2 M. Terrier. - De quelle manière au même instant vous-même étiez-

3 vous habillé ?

4 Témoin C (interprétation). - Je portais un T-shirt bleu clair,

5 un bas de survêtement bleu marine. C'est tout.

6 M. Terrier. - Pour l'information complète du Tribunal, pouvez-

7 vous préciser ce qui est arrivé ce matin-là à votre père ?

8 Témoin C (interprétation). - Quand les tirs ont commencé, il est

9 parti de la mosquée pour ouvrir la porte, parce que c'est lui qui avait la

10 clef, et il est passé à côté de la maison d'un voisin. Il y avait des

11 soldats qui l'ont appelé, qui lui ont dit : "Viens ici ! Lui a essayé de

12 s'enfuir et ils l'ont blessé à l’épaule.

13 M. Terrier. - Pouvez-vous dire ce qui est arrivé à votre frère

14 aîné ; je ne parle pas de celui qui a été tué le 16 avril 1993. Je parle

15 de votre frère aîné dont vous ne donnerez pas le

16 nom. Pourriez-vous simplement, pour l'information du Tribunal, dire ce qui

17 lui est arrivé ?

18 Témoin C (interprétation). - Mon frère aîné ?

19 M. Terrier. – Oui, le premier de la famille.

20 Témoin C (interprétation). - Il est mort au front, là-bas.

21 M. Terrier. - Je n'ai pas d'autres questions,

22 Monsieur le Président.

23 M. le Président. – Merci.

24 M. May (interprétation). – J’ai une question à vous poser. Les

25 deux frères que vous connaissiez, les deux frères Kupreskic, est-ce que

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1 vous pouvez nous donner une idée depuis combien de temps vous les

2 connaissiez au mois d'avril de l'année dont nous parlons ? Depuis combien

3 de temps les connaissiez-vous ?

4 Témoin C (interprétation). - Vous parliez du 16 avril 1993 ?

5 M. May (interprétation). - Oui, avant cette période ?

6 Témoin C (interprétation). - Je les connais depuis que, enfin...

7 Je les connaissais depuis 8 ans, depuis que j'ai des souvenirs.

8 M. May (interprétation). - Oui. Et est-ce que vous leur aviez

9 jamais parlé vous-même ? Est-ce que vous leur aviez parlé ?

10 Témoin C (interprétation). - Oui.

11 M. May (interprétation). – Zoran ? Vous aviez parlé à Zoran ?

12 Témoin C (interprétation). – Oui. Là, autour de l'école, l'été,

13 on jouait au football ; tout le monde jouait. C'est là qu'on se voyait le

14 plus.

15 M. May (interprétation). – Et son frère, est-ce que vous l'avez

16 également rencontré ? Est-ce que vous lui parliez ?

17 Témoin C (interprétation). - Oui, il m'arrivait de le

18 rencontrer.

19 M. May (interprétation). - Je vous remercie.

20 M. le Président (interprétation). - J'ai encore une ou

21 deux questions de détail à

22 poser. J'ai bien peur que je n'ai pas eu le temps de vérifier le

23 transcript de l'audience d'hier et je ne me souviens plus ce que vous avez

24 dit sur l'endroit où vous vous trouviez avec Tomo, au moment où vous avez

25 vu Zoran et Mirjan Kupreskic entrer dans la maison de Jozo. Est-ce que

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1 vous étiez dans la cour à quelque mètres de la maison de Jozo ou étiez-

2 vous dans une autre maison ?

3 Témoin C (interprétation). - J'étais dans une maison, j’étais

4 dans une autre maison que la maison de Jozo.

5 M. le Président (interprétation). – Bien. C'est bien ce que

6 j'avais cru comprendre. Est-ce que vous pourriez montrer la pièce de

7 l'accusation numéro 68 ? Est-ce qu’on pourrait montrer cette pièce au

8 témoin ?

9 Je vous demanderai, Monsieur le témoin, de nous indiquer sur

10 cette pièce à conviction où se trouve cette maison ?

11 M. Terrier. - Peut-être pourrions-nous passer à huis clos

12 puisque cette pièce avait été montrée, mais effectivement à huis clos.

13 M. le Président (interprétation). – Oui. Un instant.

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15 (Audience à huis clos.)

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1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (Audience publique.)

4

5 M. le Président (interprétation). - Bonjour témoin D. Est-ce que

6 je peux vous demander de lire la déclaration solennelle ?

7 Témoin D (interprétation). - Je déclare solennellement que je

8 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

9 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Vous

10 pouvez vous asseoir.

11 M. Terrier - Monsieur le Président, j'ai remis un papier plié en

12 souhaitant qu'il soit montré au témoin.

13 Mme Le Greffier. - C'est la pièce de l'accusation numéro 72.

14 M. Terrier. - Madame le Témoin, vous bénéficiez ici de mesures

15 de protection. Je vais donc vous poser un certain nombre de questions en

16 vous demandant de ne pas donner de noms ou d'éléments d'identification. Et

17 si nous souhaitons que le Tribunal puisse entendre des précisions de cette

18 sorte, nous passerons à huis clos. Vous êtes donc protégée et vous pouvez

19 vous exprimer ici de manière parfaitement sereine et parfaitement

20 tranquille.

21 Madame, est-ce que je peux vous demander d'abord quelle était la

22 composition de votre famille ?

23 Témoin D (interprétation). - J'avais cinq enfants et mon mari.

24 M. Terrier. - En 1993, quel était l'âge de vos enfants ?

25 Témoin D (interprétation). - Le plus âgé est de 1964, le

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1 deuxième de 1966, le troisième est né en 1972, le quatrième en 1973 et le

2 cinquième en 1979.

3 M. Terrier. - Vous êtes née à Ahmici, vous avez pratiquement

4 toujours résidé à Ahmici ?

5 Témoin D (interprétation). - Oui.

6 M. Terrier. - Dans quel quartier d'Ahmici était votre maison ?

7 Témoin D (interprétation). - Dans la partie basse.

8 M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez, Madame, nous parler de

9 cette période qui précède le 16 avril 1993 à partir de la fin du mois de

10 septembre, ou octobre 1992, jusqu'à avril 1993 ? Nous dire quelles étaient

11 vos relations avec vos voisins, en particulier les résidents croates

12 d'Ahmici ? Avez-vous connu ou rencontré des difficultés ? Savez-vous si

13 d'autres personnes, d'autres Musulmans que vous ont rencontré des

14 difficultés au cours de cette période ?

15 Témoin D (interprétation). - Bien sûr. Nous étions... enfin

16 surtout dans le bas d'Ahmici. Nous étions en danger, très en danger. Ceux

17 qui étaient le plus près de la route, donc, tous les jours pratiquement,

18 quelqu'un devait vivre un incident. On les trouvait le long de la route,

19 on insultait les gens, on traitait les femmes de "Balinka". Etant donné

20 que je ne savais pas les hommes, je ne savais pas qui était dans les

21 voitures. On traitait les gens de "baljia" de tout un tas de choses.

22 Le soir ils tiraient. Le soir nous étions là assis, il y avait

23 des tirs, on tirait des grenades dans nos champs et ceux qui étaient le

24 plus près de la route voyaient des coups de feu traverser, passer à

25 proximité de leurs fenêtres. Tout le monde était triste, on ne savait pas

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1 ce qui se passait. Enfin ce genre de chose. C'est ainsi que les choses

2 allaient. Nous voyions que les rapports n'étaient pas les mêmes qu'avant.

3 Avant il nous arrivait de nous rendre visite les uns aux autres,

4 et tout d'un coup, ils se sont séparés, ils ont fait des choses en

5 cachette et nous ne savions pas ce qu'ils faisaient. Les choses n'étaient

6 pas comme avant.

7 M. Terrier. - Les choses ont changé à quel moment ?

8 Témoin D (interprétation). - En 1992, les choses n'étaient pas

9 comme avant. Quand cela a commencé, les nôtres sont partis à Visoko. Et à

10 partir de ce moment-là les rapports

11 n'étaient plus enfin... nous ne nous rendions plus visite, très peu.

12 M. Terrier. - Est-ce qu'avant ce changement, des voisins Croates

13 avaient avec vous des relations amicales ?

14 Témoin D (interprétation). - Oui, tout à fait. Nous rendions

15 visite les uns aux autres et ceci a été une grande surprise pour nous. Nos

16 étions très gentils les uns envers les autres.

17 M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez citer les noms des voisins

18 croates avec lesquels vous aviez ces relations amicales, avant le

19 changement ?

20 Témoin D (interprétation). - Oui tout à fait. Tout d'abord il

21 s'agissait de la famille Papic, ensuite les Kupreskic, puis par exemple,

22 lorsque Vlatko Kupreskic a eu une opération du coeur, il était jeune, nous

23 sommes allés voir sa mère et aussi la mère de Zoran, elle aussi elle

24 venait chez nous. Nous avions de très bons rapports.

25 Ensuite, il y avait les Vidovic, on était tous gentils. Il n'y

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1 avait jamais de problèmes entre nous.

2 M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez décrire plus précisément

3 les problèmes que vous avez rencontrés par exemple avec les voisins que

4 vous avez cités ? Et les plus proches de ces voisins croates en

5 particulier. Quels types de problèmes avec ces voisins-là se sont-ils

6 produits ?

7 Témoin D (interprétation). - Nous étions menacés. Tout d'abord

8 lorsqu'à Nadioci il y a eu les premiers incidents où les gens ont été

9 chassés de chez eux, donc les gens sont venus chez nous. Ils se

10 plaignaient pour nous dire que le soir des gens venaient en cagoule, ils

11 les intimidaient.

12 Apparemment il y avait une armée mais nous, nous ne connaissions

13 pas tous ces détails-là, et les nôtres sont partis là-bas, eux aussi. Et

14 je sais qu'ils s'y rendaient souvent. Nous avons pu constater que quelque

15 chose n'était pas normal, qu'il y avait des problèmes. Ils ne voulaient

16 pas contacter les autres, avoir des contacts avec les nôtres, ils

17 restaient toujours parmi

18 eux, et les gens de Nadioci venaient chez nous, ils pleuraient.

19 Il s'agissait d'un petit village musulman et ils venaient chez

20 nous. Par exemple, Salkic, quel est son prénom... c'est le père d'Isa, non

21 je ne m'en souviens pas maintenant.

22 M. Terrier. - Est-ce que vous vous souvenez de ce qui est arrivé

23 à cette famille Salkic de Nadioci ?

24 Témoin D (interprétation). - Oui bien sûr. A l'époque il ne se

25 passait rien d'autre que des provocations. Et une fois, j'ai passé la nuit

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1 chez une cousine étant donné que nous étions en danger chez nous. Il

2 m'arrivait assez souvent d'aller là-bas, étant donné que moi je vivais

3 près de la route et les soldats passaient donc, j'avais peur. Et parfois,

4 j'allais dormir à Ahmici-le-Haut.

5 Et un jour, j'ai vu son père près de la mosquée haute. Il m'a

6 dit :"tu vois ce qui nous arrive", moi j'ai dit :"rien de bien", il m'a

7 dit :"tu vois hier, ils ont tué mon fils et maintenant je suis ici pour

8 préparer son enterrement conformément aux rites religieux". Et ensuite

9 nous n'avons plus discuté, j'étais pressée de rentrer chez moi, je me

10 disais que la situation n'est pas normale du tout. Je voulais voir si

11 quelque chose était arrivé à ma maison. Et maintenant, je ne me rappelle

12 plus du prénom de son père. Il y avait Ahmic Tiric qui est venu nous voir,

13 qui pleurait. Il disait qu’il y avait quelque chose de pas normal :

14 qu'eux, ils se tenaient entre eux et qu'ils provoquaient les autres.

15 Nail Ahmic, lui aussi, il venait et sa femme aussi. Ils ont quitté leur

16 maison à cause de ces provocations.

17 Tout ceci était en bas par rapport à ma maison. C'est ainsi que

18 les événements se produisaient. Ensuite, ils ont miné une maison d’une

19 personne qui était, qui avait été en Australie ; elle aussi est venue nous

20 voir et nous en parler. Donc je savais un peu ce qui se passait.

21 Donc, nous, nous avons été très surpris de cette réaction de nos

22 voisins étant donné que nos rapports avaient été très bons, à la fois chez

23 nous et à Nadioci. Nous nous rendions les

24 uns chez les autres et il n'y a jamais eu de problème avant.

25 M. Terrier. - Cet homme que vous avez rencontré et qui vous a

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1 parlé de la mort de son fils, disant : "Ils l'ont tué", de qui parlait-

2 il ? Qui était ce "il" ?

3 Témoin D (interprétation). – Eso. Il a dit : "Les voisins ont

4 tué mon Eso ; ils ont mis des explosifs". Je ne m'y connais pas trop en ce

5 qui concerne ces détails-là. Il a parlé de certaines parties de cela. Moi,

6 je ne sais pas. Il m’a parlé très rapidement ; il pleurait. Il est allé

7 vers la mosquée et moi, je suis rentrée chez moi. Voilà.

8 M. Terrier. - Avez-vous le souvenir d’autres événements au cours

9 de cette période dont des personnes que vous connaissiez, des Musulmans,

10 auraient été victimes ?

11 Témoin D (interprétation). - La situation continuait à être

12 ainsi. Il y a eu plus de provocations. Ensuite, le 20 octobre, il y a eu

13 cet événement-là. Après cela, nous avions peur d'être chez nous parce que

14 nous avons été expulsés de chez nous et nous avons vécu notre propre mort,

15 pour ainsi dire. Moi, je pensais que je n'allais pas survivre. Ils ont mis

16 à feu ma maison, ma voiture tout ce qu'il y avait autour de ma maison ; le

17 rez-de-chaussée a brûlé. Ils ont tué mon homme, il a été complètement

18 noir, il a été couvert de bleus. Et, à l'époque, à Nadioci, le commandant,

19 il y avait un commandant de je-ne-sais-pas exactement quelle armée ; ils

20 l'ont passé à tabac. Il devait être allongé, il ne pouvait pas bouger et

21 c'est alors que nous avons quitté notre village et je suis rentrée un ou

22 deux jours plus tard. Le voisin m’a dit que mes vaches rôdaient sur la

23 route. Je suis rentrée avec ma belle-sœur. J'y suis allée avec une

24 voisine ; je n'osais pas rentrer toute seule. J'ai voulu prendre quelques

25 vêtements : étant donné que j'étais à Vrhovine, je n'avais pas

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1 suffisamment de vêtements. Lorsque je suis entrée dans la maison, tout

2 était noir : le rez-de-chaussée avait complètement brûlé et, en haut, il y

3 avait des traces d'incendie, ma chambre était encore en feu.

4 Il y avait des genres d’hommes qui gardaient ma maison. Il y en

5 avait un qui avait un couvre-chef de type français. Ils nous ont dit de

6 rentrer chez nous, de ne rien craindre mais de

7 remettre les armes. Moi, je ne disais rien, je ne parlais pas avec eux. Et

8 ma belle-fille m'a dit que, de toute façon, nous n'avions pas d'armes et

9 que, si nous en avions eu, nous n'aurions pas vécu tous ces problèmes-là.

10 Donc, j'ai pris tout ce qu’il me fallait et je suis allée à Vrhovine.

11 Plus tard, je suis revenue encore une fois. Au bout de

12 vingt jours, je suis allée pour la première fois chez ma sœur, dans la

13 partie supérieure du village. A l'époque, je n'osais pas rentrer chez moi.

14 Plus tard, j'ai été un peu plus libre et, le soir, je dormais dans la

15 partie supérieure du village.

16 Les provocations ont continué. Pendant la journée, parfois, tout

17 allait bien et, le soir, ils tiraient sur les maisons. Ou bien, s'ils nous

18 voyaient sur la route, s'ils étaient dans leur voiture, ils nous

19 provoquaient. Il y avait des gens qui ont été chassés de chez eux, des

20 gens de Jajce, qui sont venus pour rester avec nous. La situation a duré

21 comme ça jusqu'au 16 avril. Moi, j'ai dû quitter ma maison et je suis

22 restée dans une maison de campagne à Djunda. Il m'était très difficile de

23 travailler : je n'avais plus d'électricité chez moi. Déjà après le premier

24 conflit. Voilà.

25 M. Terrier. - Madame, pour la précision de votre relation.

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1 Vous avez dit tout à l'heure que votre mari avait été battu par

2 des soldats. C'est bien cela ?

3 Témoin D (interprétation). - Oui.

4 M. Terrier. - Est-ce que vous vous souvenez des raisons

5 qu'avaient ces soldats ou que pouvaient avoir ces soldats de procéder

6 ainsi ?

7 Témoin D (interprétation). - Il est rentré pour libérer les

8 vaches. Nous avons commencé à courir. (expurgé)

9 (expurgé), qui a donc été tué le 16 avril, est entré et la

10 mère Kalid, qui a été tuée par la suite. Ils ont dit : "Sors de la maison.

11 Il faut sortir de la maison". J'avais été à la cave et donc je suis

12 sortie. Mon mari a vu que les tables étaient mises à feu ; pour sauver les

13 vaches, il est sorti et l'autre l'a attrapé. C'était un

14 jeune homme de vingt ans. Il a dit : "Tu vas voir maintenant" et il l'a

15 roué de coups. Et encore aujourd'hui, il porte des séquelles de ce passage

16 à tabac sur son visage. Voilà. C'était cela la raison. Il est rentré pour

17 libérer les vaches ; sinon, lui aussi, il voulait aller vers le haut du

18 village. Voilà, c’est tout ce que je sais.

19 M. Terrier. – Merci. Toujours pour la précision de votre récit,

20 tout ceci se passait le 20 octobre 1992, n'est-ce pas ?

21 Témoin D (interprétation). - Tout cela était avant le 16 avril.

22 Moi, je ne connais pas tous les détails. Nous avons vécu tout cela avant

23 le 16 avril. Mais moi, je ne sais pas, je ne pouvais pas savoir que

24 j'allais témoigner là-dessus ; je n'essayais pas de mémoriser toutes les

25 dates.

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1 M. Terrier. - Madame, tout à l'heure, vous avez parlé de la

2 famille Papic, comme étant des voisins croates avec lesquels vous aviez

3 d'excellentes relations ou de bonnes relations amicales, tout en précisant

4 qu’à un moment donné, ces relations se sont transformées. Est-ce que vous

5 vous souvenez de ce qu’était le comportement ou l'attitude de

6 Dragan Papic, fils d’Ivo Papic ?

7 Témoin D (interprétation). – Dragan Papic sait tout. Il faudrait

8 qu'il jure sur son âme et sur son enfant qu'il sait qui a tué les nôtres,

9 lui et tous les autres voisins qui ont été mis en accusation, étant donné

10 qu'ils portaient des gants quand ils faisaient ce qu'ils ont fait. Ils

11 doivent savoir ce qui est arrivé aux nôtres, à tous ces gens, à toutes ces

12 victimes innocentes, à tous ces enfants qui ont perdu leurs parents. Nous,

13 nous ne savions rien et lui, il sait tout. Il passait à côté du

14 "Bungalow" ; il y avait des soldats qui se regroupaient tous, tous les

15 jours,. Le soir, ils faisaient du mal, ils buvaient, ils célébraient et

16 nous, nous étions tristes. Nous ne savions pas ce qui allait nous arriver.

17 M. Terrier - Monsieur le Président, peut-on passer à huis clos

18 je voudrais montrer quelques documents à Madame le témoin ?

19 (Audience à huis clos)

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1 (Audience publique.)

2 M. Terrier - Madame le Témoin, nous sommes revenus en séance

3 publique et je vous demande de ne pas donner de noms et d'identifications.

4 Vous avez tout à l'heure parlé de Dragan Papic; vous avez dit

5 que vous le voyiez aller au "Bungalow". Est-ce que vous vous souvenez de

6 la manière dont il était habillé ?

7 Témoin D (interprétation). - Ca dépendait des fois, il faisait

8 tout ce qu'il voulait. Ca dépendait de sa volonté. Parfois il était vêtu

9 de noir lui-même ainsi que sa femme et se promenait ainsi, il provoquait,

10 il intimidait, il prenait un fusil. (expurgé)

11 (expurgé), il m'a dit : "il est

12 venu dans le jardin avec son fusil". Moi, j'ai dit : " mais pourquoi tes

13 enfants ont peur de ça ?", et lui a répondu :"est-ce qu’il y a un animal

14 malade ?. Je vais le tuer ". Nous, nous étions de bons voisins avant, il

15 n'y a jamais eu de conflits entre nous, mais à l'époque il est devenu

16 comme ça. Par exemple, une fois, je traversais la route, c'était notre

17 fête du ramadan, j'allais vers Milija Ahmic, et je l'ai vu, il allait vers

18 le "Bungalow", et il ne me disait rien et je trouvais ça très bizarre.

19 C'était plutôt vers le soir, il faisait pratiquement nuit déjà.

20 Moi, je l'ai croisé personnellement et il ne m'a rien dit. Il

21 est passé à côté de moi, mais moi-même, je suis plus âgée, c'est à lui de

22 me saluer d'abord mais il ne m'a rien dit. Moi, j'avais deux champs et si

23 je travaillais dans mon champ je pouvais le voir, je pouvais le voir aussi

24 si j'étais sur le balcon de ma maison. Donc, j'ai pu voir qu'il allait

25 souvent dans cette direction-là.

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1 M. Terrier. - Madame, est-ce que vous voyez dans cette salle la

2 personne dont vous venez de parler ?

3 Témoin D (interprétation). - Je vois. Il porte une barbe.

4 M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez dire à quel endroit il se

5 trouve ?

6 Témoin D (interprétation). - Oui, à côté de la porte, près de la

7 porte.

8 M. Terrier. - Madame, je souhaiterais maintenant que vous

9 expliquiez au Tribunal ce qui s'est passé le 16 avril au matin ? Selon vos

10 souvenirs et avec les mots qui sont les vôtres.

11 Témoin D (interprétation). - Le 16 avril au matin, j'étais dans

12 ma maison. Je ne dormais pas, j'étais debout pour faire mes prières avec

13 ma fille et mon mari. Mon mari est parti faire ses prières et ma fille

14 s'est préparée pour sortir, pour faire ses prières elle aussi. Je me

15 rappelle, elle a mis un pull et elle a mis un foulard. Lui, il est sorti

16 et il a fermé la porte à clef et elle est restée, elle n'est pas partie.

17 Donc, nous sommes restées là. Moi je faisais mes prières et j'ai mis de

18 l'eau pour préparer un café, et elle, elle faisait ses prières et puis on

19 a entendu un tir de feu qui est tombé sur le mur.

20 Elle, elle était toujours en bas et ensuite un autre coup de feu

21 est arrivé près de l'armoire au-dessus de sa tête. Elle s'est assise

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5 M. Terrier. - Monsieur le Président, peut-on passer à huis

6 clos ?

7 M. Le Président (interprétation). - Oui. Et puis il va falloir

8 expurger le compte rendu.

9 M. Terrier. - Je crois qu'il n'est pas possible de lui demander

10 de ne pas prononcer de prénoms.

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12 (Audience à huis clos.)

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3 (L'audience suspendue à 12 heures 25 est reprise à

4 14 heures 30.)

5 Audience à huis clos.

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19 (Audience publique.)

20 M. le Président (interprétation). - Maître Radovic, vous

21 demandez la parole ?

22 M. Radovic (interprétation). - Oui, nous pouvons être en

23 audience plénière ouverte pour ce que j'ai à dire. Voyez-vous,

24 MM les Juges, lorsque j'ai posé la question à Madame le Témoin qui était

25 là pour déposer, si elle avait peur lors des dépositions faites la

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1 première fois en Bosnie et ici à la Haye. Elle disait que non, qu'elle ne

2 ressentait aucune peur. Je me demande comment il était possible pour cette

3 femme qui n'a jamais observé de peur, et pour qui objectivement je

4 considère qu'il n'y a aucun danger pour son intégrité physique, le

5 Procureur a demandé trois mesures de protection, un pseudonyme et moyens

6 d'altération de traits de visage.

7 Je crois que le Procureur a voulu cette fois-ci rendre un procès

8 public en un procès à huis clos avec exclusion du public pour essayer

9 d'anticiper sur certains dangers qui en vérité n'existent pas, dangers et

10 menaces. Voilà pourquoi je demande à MM. Les Juges de reconsidérer la

11 nécessité de tant de mesures de protection et si toutes ces mesures de

12 protection ne finiront pas par rendre le procès ouvert en un procès à huis

13 clos, c'est-à-dire en dehors de l'opinion publique.

14 Je vous remercie MM. les Juges. Je tâcherai de poser toutes ces

15 questions à d'autres témoins pour voir qu'on exagère souvent avec

16 certaines de ces matières qui sont débattues ici.

17 M. le Président (interprétation). - Oui, j'aurais une réponse à

18 vous donner, mais je vais me tourner maintenant vers le bureau du

19 Procureur afin d'expliquer pourquoi nous avons adopté ces mesures de

20 protection.

21 M. Terrier - Monsieur le Président, le statut et le règlement de

22 ce Tribunal prévoient que les mesures de protection qui sont prises en

23 faveur des témoins, qui viendront

24 prêter leur concours à votre Tribunal, visent à la fois à garantir leur

25 sécurité personnelle, mais aussi le respect de leur vie privée. Et c'est à

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1 ces deux titres toujours, que nous devons les mesures de protection qui

2 sont sollicitées pour certains témoins et qui sont accordées.

3 Je voudrais dire une chose à propos du témoin que nous venons

4 d'entendre mais aussi à propos d'autres témoins, en particulier un des

5 très prochains témoins. Ces témoins ont été entendus, ces deux témoins ont

6 été entendus dans le cadre du procès suivi contre le général Blaskic

7 devant une autre Chambre de ce Tribunal et ils ont déposé sans demander de

8 mesures de protection. Je voudrais dire à cet égard que la situation dans

9 le cadre de ces deux procès n'est évidemment pas identique. Dans le cadre

10 du procès suivi contre le général Blaskic, ces témoins déposent sur ce

11 qu'ils ont vécu, le drame qu'ils ont personnellement vécu, mais le

12 personnage de l'accusé reste un personnage lointain pour eux, qu'ils ne

13 connaissaient pas et qu'ils n'ont pas eu à reconnaître devant le Tribunal.

14 Il n'y a pas de problème dans le cadre du procès suivi contre le

15 général Blaskic, pour ces témoins-là, de problèmes de reconnaissance, de

16 confrontation.

17 Et la situation, l'état d'esprit de ces témoins qui viennent ici

18 devant ce Tribunal apporter leurs concours est évidemment tout à fait

19 différent, je pense que nous devrons le prendre en compte.

20 Et pour mémoire, j'ajouterai tout de même que pendant la mise en

21 état de cette affaire, nous avons eu connaissance, votre Tribunal a eu

22 connaissance, d'un certain nombre d'incidents qui peuvent justifier

23 certaines appréhensions. Et nous avons eu il y a quelques jours aussi un

24 autre incident qui pourrait susciter certaines craintes ou certaines

25 difficultés des témoins.

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1 Il me semble que dans ces conditions-là, les mesures qui sont

2 sollicitées de votre Tribunal me paraîssent, au regard du Statut et des

3 objectifs suivi par le Statut et le règlement, parfaitement justifiées.

4 M. Le Président (interprétation). - Oui mais, avec tout le

5 respect que nous devons à l'accusation, je crois que ce n'était pas ce

6 qu'a évoqué Me Radovic. Il a souligné ce qu'il considère comme une

7 incohérence entre l'affirmation du témoin, du témoin précédent, selon

8 laquelle elle n'avait pas peur de répondre aux questions et la demande de

9 mesures de protection.

10 Moi-même, je ne vois pas d'incohérence. Je ne sais pas ce qu'en

11 pensent mes collègues, mais je pense que ce que disait le témoin c'est

12 qu'elle n'avait pas eu peur des questions qui lui avaient été posées par

13 l'enquêteur, et aujourd'hui par les représentants de l'accusation, de la

14 défense et par les Juges, parce qu'elle n'avait rien à cacher.

15 Mais c'est une question différente de demander des mesures de

16 protection vis-à-vis du public, de l'opinion publique, des gens dans son

17 pays, etc. Elle n'avait pas peur des Juges et des membres de cette

18 Chambre. Par conséquent, je ne vois aucun problème.

19 Je ne sais pas si vous souhaitez ajouter quoi que ce soit

20 Monsieur Terrier ?

21 M. Terrier. - Non. Simplement, je voudrais faire part de mon

22 accord. Je partage effectivement tout à fait ce sentiment. C'est une chose

23 que de répondre aux questions d'un enquêteur ou de répondre aux questions

24 des Juges sans crainte, car il n'y a aucune raison, bien entendu, de

25 craindre les Juges ou les enquêteurs. C'est une autre effectivement, que

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1 de devoir affronter un environnement, éventuellement au retour, dans le

2 pays d'où l'on vient en Bosnie.

3 Ce sont deux choses tout à fait différentes et il me semble que

4 par conséquent, les questions de Me Radovic étaient finalement assez peu

5 pertinentes et assez peu démonstratives.

6 M. Le Président (interprétation). - Merci. Avant d'entendre le

7 témoin suivant, je voudrais brièvement aborder les différentes questions

8 qui nous intéressent.

9 Je crois qu'il y a une requête, ou plutôt c'est un document

10 déposé par le conseil de la défense de Vlatko Kupreskic, M. Krajina je

11 crois, document déposé le 25 août et comprenant une liste des témoins de

12 la défense.

13 Tout d'abord nous vous en remercions, Monsieur Krajina. Ceci

14 correspond

15 effectivement à la demande formulée par la Chambre, mais je voudrais

16 demander à l'accusation si, oui ou non, elle a eu la possibilité de

17 consulter cette liste, si l'accusation a effectivement l'intention

18 d'appeler également un certain nombre de ces témoins, en tant que témoins

19 de l'accusation.

20 M. Terrier. – Monsieur le Président, nous avons consulté cette

21 liste, mais je ne pense pas que nous soyons en mesure de répondre à votre

22 question aujourd'hui même.

23 M. Le Président (interprétation). - Très bien. Je suppose que le

24 conseil de la défense, en tout cas M. Krajina, se réserve le droit de

25 citer Vlatko Kupreskic à la barre en tant que témoin dans le cas de sa

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1 propre défense. C'est un droit fondamental de l'accusé, donc il pourra le

2 faire à la dernière minute s'il le souhaite.

3 Je voudrais donc maintenant demander à l'accusation de nous

4 faire savoir le plus rapidement possible si elle souhaite citer l'un ou

5 l'autre de ces témoins en tant que témoins de l'accusation.

6 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience)

7 M. le Président (interprétation). - Passons maintenant à notre

8 témoin suivant. Je crois qu'il y a simplement une distorsion des traits du

9 visage c'est tout.

10 M. Moskowitz (interprétation). - Oui, c'est tout

11 Monsieur le Président.

12 M. Le Président (interprétation). - Pas de pseudonyme, donc nous

13 pouvons l'appeler par son nom. Et nous ne sommes pas en audience à huis

14 clos n'est-ce pas ? Nous pouvons donc repasser en audience publique.

15 M.F. Ahmic (interprétation). - Je déclare solennellement que je

16 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

17 M. le Président (interprétation). - Merci.

18 M. Moskowitz (interprétation). - Monsieur le Président, puis-je

19 poursuivre ?

20 M. le Président (interprétation). - Oui.

21 Mais sommes-nous en audience publique ?

22 M. le Greffier (interprétation). - Oui.

23 M. le Président (interprétation). - Mais vous ne levez pas les

24 stores ? Je crois que normalement c'est la procédure suivie.

25 M. le Greffier (interprétation). - Oui mais il y a distorsion

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1 des traits du visage donc, ceci est communiqué dans le hall du Tribunal.

2 M. le Président (interprétation). - Je comprends que c'est une

3 audience publique, mais étant donné cette mesure de protection et la

4 distorsion des traits du visage nous devons maintenir les stores baissés.

5 Maître Moskowitz, allez-y.

6 M. Moskowitz (interprétation). - Merci Monsieur le Président.

7 Monsieur, s'il vous plaît, pourriez-vous décliner votre identité et nous

8 donner votre date de naissance ?

9 M. F. Ahmic (interprétation). - Ahmic Fahrudin, né le

10 8 novembre 1953 à Ahmici.

11 M. Moskowitz (interprétation). - Vous avez demandé que vos

12 traits du visage soient déformés, cette demande a été accordée. Par

13 conséquent, vous pouvez témoigner en toute confiance, cette mesure de

14 protection a bien été accordée.

15 Monsieur Ahmic, jusqu'en 1993 où viviez-vous ?

16 M. F. Ahmic (interprétation). - En 1993, à Ahmici.

17 M. Moskowitz (interprétation). - Combien de temps avez-vous vécu

18 à Ahmici ?

19 M. F. Ahmic (interprétation). - Depuis ma naissance en 1994,

20 lorsque j'ai été banni, sauf que j'ai pu travailler à Rjeka pendant une

21 période de trois ans et demi.

22 M. Moskowitz (interprétation). - Par conséquent, en fait, vous

23 avez vécu pratiquement toute votre vie à Ahmici ?

24 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui j'ai vécu à Ahmici toute ma

25 vie.

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1 M. Moskowitz (interprétation). - Quelles études avez-vous

2 suivies ?

3 M. F. Ahmic (interprétation). - J'ai terminé une école de

4 huit ans, je travaille aux aciéries de Zenica comme métallo aux

5 concasseurs du coke.

6 M. Moskowitz (interprétation). - Y travaillez-vous toujours aux

7 aciéries de Zenica ?

8 M. F. Ahmic (interprétation). - Je suis toujours employé aux

9 aciéries.

10 M. Moskowitz (interprétation). - Vous avez dit avoir vécu à

11 Ahmici toute votre vie. Avez-vous toujours habité dans la même maison ou

12 avez-vous vécu dans des maisons différentes ?

13 M. F. Ahmic (interprétation). - J'habitais chez mes parents

14 jusqu'au moment où je me suis fait construire une nouvelle maison à moi.

15 J'ai eu un terrain que j'ai acheté pour moi, pour y construire une maison.

16 M. Moskowitz (interprétation). - Dans quel quartier d'Ahmici

17 vivaient vos parents ?

18 M. F. Ahmic (interprétation). - Dans les hauts d'Ahmici.

19 M. Moskowitz (interprétation). - Et où avez-vous construit votre

20 maison ?

21 M. F. Ahmic (interprétation). - J'ai construit à Tuk. Il s'agit

22 d'un terrain, d'un prêt qui s'appelle Tuk.

23 M. Moskowitz (interprétation). - Comment aviez-vous construit

24 cette maison ? La nouvelle maison ?

25 M. F. Ahmic (interprétation). - J'ai commencé à construire cette

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1 nouvelle maison vers les années 80, en 1980, en 1980 oui.

2 M. Moskowitz (interprétation). - Et vous avez parlé des

3 environs. Pouvez-vous nous donner le nom de certains de vos voisins, les

4 voisins de cette nouvelle maison ?

5 M. F. Ahmic (interprétation). - Pour parler de mes voisins les

6 plus proches, c'étaient Papic, Maria Papic, Pero. Il y a aussi un peu plus

7 loin Papic Dragan et puis après les

8 Skore. Les trois frères de la famille Skore.

9 M. Moskowitz (interprétation). - Il s'agissait donc de vos

10 voisins croates, n'est-ce pas ?

11 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, tous des croates sauf un

12 peu plus en bas, la famille de Ahmic Alja qui lui était plus en bas, enfin

13 mon premier voisin définitivement. Pour ce qui est des Musulmans, il y en

14 avait de l'autre côté. Il y avait Sulejman Ahmic et son fils Enver Ahmic,

15 avec sa femme.

16 M. Moskowitz (interprétation). - Je crois que vous avez parlé

17 d'Alja Ahmic. Avait-il un fils prénommé Abdulah ?

18 M. F. Ahmic (interprétation). - (pas d'interprétation)

19 M. Moskowitz (interprétation). - Puis-je demander à l'huissier

20 de montrer cette pièce au témoin, s'il vous plaît ?

21 Mme le Greffier. – C'est la pièce de l'accusation 75.

22 M. Moskowitz (interprétation). - Avant que vous ne nous

23 indiquiez différents lieux sur cette photo, je voudrais vous demander

24 quelque chose : avez-vous eu la possibilité d'examiner cette pièce avant

25 d'entrer dans ce prétoire aujourd'hui ?

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1 M. F. Ahmic (interprétation). - Non, je n'ai pas eu l'occasion

2 de le faire.

3 M. Moskowitz (interprétation). - Et à la vue, ou plutôt vous

4 souvenez-vous avoir consulté plusieurs vues aériennes sur lesquelles vous

5 avez placé certains cercles précisant où se trouvaient certaines maisons

6 que vous avez pu identifier ?

7 M. F. Ahmic (interprétation). - Je n'ai pas bien compris votre

8 question.

9 M. Moskowitz (interprétation). - Vous souvenez-vous avoir

10 examiné une photographie similaire auparavant, lorsque nous nous sommes

11 rencontrés, et vous m'avez indiqué certaines des maisons que vous pouviez

12 reconnaître : la vôtre, la maison des Papic et nous avons tracé un certain

13 nombre de cercles autour de ces maisons, vous souvenez-vous avoir

14 fait cela ?

15 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, ici je me souviens mais

16 avant je n'ai jamais eu l'occasion de voir ceci, non plus que de montrer

17 quoi que ce soit.

18 M. Moskowitz (interprétation). - Oui, je comprends. Pourriez-

19 vous maintenant regarder cette pièce qui est maintenant la pièce 75 et

20 nous dire s'il s'agit bien des cercles qui correspondent aux cercles que

21 vous-même avez placés sur la carte qui vous a été soumise ?

22 M. F. Ahmic (interprétation). - 75 vous dites ? Le cercle 75, je

23 ne le vois pas.

24 M. Moskowitz (interprétation). - Non, non. Je crois que vous

25 m'avez mal compris. Laissez-moi vous poser la question suivante : voyez-

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1 vous votre maison sur cette carte ?

2 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, je la vois.

3 M. Moskowitz (interprétation). - Quel numéro y est apposé ?

4 M. F. Ahmic (interprétation). - Le n° 37.

5 M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce la maison dont vous

6 venez de dire que vous avez commencé à construire en 1980 ?

7 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, c'est la maison que j'ai

8 fait construire, oui la nouvelle maison.

9 M. Moskowitz (interprétation). - Vous avez également mentionné

10 Alja Ahmic qui avait un fils du nom d'Abdulah. Il s'agissait d'un de vos

11 voisins musulmans. Apercevez-vous sa maison et si c'est le cas, quel

12 numéro la désigne-t-elle ?

13 M. F. Ahmic (interprétation). - Ici, en bas désignée par 38.

14 C'est cette maison-là où il était.

15 M. Moskowitz (interprétation). - Vous avez également dit avoir

16 vécu à côté de certains voisins croates ; je crois que vous avez parlé de

17 Marja et de Pero. Apercevez-vous leur maison sur cette photographie et si

18 oui quel numéro les désigne ?

19 M. F. Ahmic (interprétation). - Pour ce qui est de la maison de

20 Pero, elle est

21 désignée par la lettre H, la maison de Marja par la lettre I.

22 M. Moskowitz (interprétation). - Et vous avez parlé également

23 d'Ivo Papic ou de Dragan Papic et de leur maison. Quelle lettre ou quel

24 chiffre représente cette maison, s'il y en a un toutefois ?

25 M. F. Ahmic (interprétation). - La première est désignée par la

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1 lettre A, il s'agit de la maison de Papic Ivo, où Dragan Papic habitait

2 également avec.

3 M. Moskowitz (interprétation). - Vous avez dit avoir vécu toute

4 votre vie à Ahmici et que vous aviez déménagé dans votre maison indiquée

5 par le chiffre 37 sur cette carte en 1980. Pourriez-vous décrire le type

6 de relations existant avec vos voisins croates à ce moment-là, disons

7 entre 1980 et 1991 ou 1992 ?

8 M. F. Ahmic (interprétation). - Nous étions très proches les uns

9 des autres. Nous étions en bons termes, nous nous sommes respectés, nous

10 nous fréquentions les uns les autres. Lorsque Dragan Papic était parti

11 pour aller sous les drapeaux faire son service militaire, je me suis rendu

12 à la fête. Marja venait chez moi, tous on venait les uns chez les autres

13 et on vivait vraiment bien ensemble.

14 M. Moskowitz (interprétation). - Vous êtes-vous rendu parfois

15 dans la maison d'Ivo Papic et est-ce qu'on vous recevait en tant qu'ami,

16 dans cette maison ?

17 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, je me suis rendu dans la

18 maison d'Ivo Papic. Ivo Papic est un maître qui a travaillé chez moi pour

19 installer tout ce qu'il fallait dans ma salle de bain. On le fréquentait,

20 on se fréquentait, on était en bons termes.

21 M. Moskowitz (interprétation). - Je crois vous avoir entendu

22 dire qu'Ivo Papic vivait dans une maison où se trouvait également

23 Dragan Papic ?

24 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, Ivo Papic habitait à

25 l'étage du bas et Dragan Papic habitait l'étage supérieur.

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1 M. Moskowitz (interprétation). - Vous avez déclaré que

2 Dragan Papic, à un

3 moment donné, a rejoint la JNA, c'est-à-dire l'armée nationale yougoslave,

4 n'est-ce pas ?

5 M. F. Ahmic (interprétation). - Je n'ai pas bien compris cette

6 question.

7 M. Moskowitz (interprétation). - Excusez-moi. Vous avez dit

8 avoir été à la maison d'Ivo Papic lorsque Dragan Papic a rejoint la JNA.

9 Qu'est-ce que la JNA alors ?

10 M. F. Ahmic (interprétation). - Lorsque Dragan Papic partait

11 pour faire son service militaire à la JNA, c'était la yougoslavie encore

12 et j'étais à cette fête-là. Mais lorsqu'il s'est marié, je me suis rendu

13 également à la fête.

14 M. Moskowitz (interprétation). - Avez-vous également servi dans

15 les rangs de la JNA à un moment donné ?

16 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, j'ai fait mon service en

17 JNA, à Novisad.

18 M. Moskowitz (interprétation). - Quand à peu près ?

19 M. F. Ahmic (interprétation). - C'était en 1976, au mois

20 d'octobre 1976 que j'étais allé faire mon service.

21 M. Moskowitz (interprétation). - Je voudrais maintenant attirer

22 votre attention sur le début des années 90 et des événements qui se sont

23 produits à Ahmici. Tout d'abord, étiez-vous membre de la Défense

24 Territoriale à ce moment-là ?

25 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui je l'ai été, j'ai été membre

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1 de la Défense Territoriale.

2 M. Moskowitz (interprétation). - Pourriez-vous nous dire en bref

3 ce qu'était la Défense territoriale d'Ahmici ?

4 M. F. Ahmic (interprétation). - La Défense territoriale d'Ahmici

5 existait pour des raisons de sécurité pour ne pas qu'il y ait d'incident.

6 Personnellement, j'ai abordé la Défense Territoriale parce que, d'abord,

7 nous avons été licenciés par l'aciérie ; on était à la disposition donc,

8 par conséquent j'aurais pu avoir une justification comme quoi certificat à

9 présenter à l'entreprise des aciéries pour pouvoir bénéficier encore des

10 prestations familiales.

11 M. Moskowitz (interprétation). - Pourquoi avez-vous été

12 licenciés des aciéries ?

13 M. F. Ahmic (interprétation). - Tout simplement nous avons été

14 en chômage, main d'oeuvre à la disposition. Il n'y avait pas de travail à

15 faire.

16 M. Moskowitz (interprétation). - Donc, en fait, il y a eu une

17 vague de licenciements. C'est cela ?

18 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, étant donné que la

19 production s'était arrêtée, et après ils ne pouvaient plus évidemment nous

20 avoir sur leurs listes.

21 M. Moskowitz (interprétation). - Lorsque vous avez rejoint la

22 Défense territoriale au départ, y avait-il des tours de garde conjoints, y

23 avait-il des Croates et des Musulmans qui coopéraient dans le cadre de

24 patrouilles et de tours de garde à Ahmici ?

25 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, moi-même j'ai fait part de

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1 ces patrouilles de tours de garde de nuit parce que ma maison se trouvait

2 à côté de la route, en bas de la route, et je les ai rejoints en

3 patrouille. Ces gens-là m'ont donné les armes. J'avais un fusil M48 et

4 c'est un dénommé Rafail Skoro et c'est à lui, d'ailleurs, que je devais

5 rendre le fusil une fois le tour de garde terminé.

6 M. Moskowitz (interprétation). - Et cette personne qui vous

7 donnait cette arme, était-ce un voisin croate ou un voisin musulman ?

8 M. F. Ahmic (interprétation). - Il ne s'agit pas d'un fusil

9 automatique, il s'agit d'un fusil M47. Il était bien croate, ils

10 s'appellait Rafail Skoro.

11 M. Moskowitz (interprétation). - Et c'est au moment où il y

12 avait des patrouilles conjointes entre les Croates et les Musulmans à

13 Ahmici, n'est-ce pas ?

14 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui.

15 M. Moskowitz (interprétation). - Et au bout d'une certaine

16 période cette coopération a-t-elle pris fin ?

17 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, la coopération a pris fin.

18 M. Moskowitz (interprétation). - Mais que s'est-il passé ?

19 M. F. Ahmic (interprétation). - Eh bien, il s'est produit que

20 tout simplement on nous a appris que... Rafail Skoro nous a appris que

21 nous ne pouvions plus observer la garde ensemble : "Tu n'as qu'à te rendre

22 auprès des tiens". C'est ce qui s'est passé, je les ai abandonnés pour

23 rejoindre les miens de l'autre côté de la route pour observer, organiser

24 les mêmes tours de garde.

25 M. Moskowitz (interprétation). - Pourriez-vous nous décrire la

Page 1056

1 Défense Territoriale après cette division et diriez-vous qu'il s'agissait

2 d'un groupe militaire organisé ou plutôt d'une surveillance organisée

3 entre voisins ?

4 M. F. Ahmic (interprétation). - Lorsque nous avons commencé à

5 organiser nos tours de garde, nous n'avons pas eu d'armes. Rares étaient

6 les révolvers, les pistolets que d'aucuns pouvaient avoir eux-mêmes en

7 propriété privée. Les tours de garde étaient organisés tout simplement

8 pour prévenir les incidents.

9 Vous savez, quand on dit "tour de garde", on s'asseoit, on joue

10 aux échecs, on se raconte des blagues, etc. C'est ainsi qu'on a organisé

11 ces tours de garde. Mais pour ce qui est de l'organisation de la Défense

12 Territoriale, c'étaient les citadins qui, eux aussi chômeurs, étaient là

13 et il n'y avait pour ainsi dire aucune organisation dans l'acception du

14 terme.

15 M. Moskowitz (interprétation). - Et à un moment donné la Défense

16 Territoriale a-t-elle été intégrée dans l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

17 M. F. Ahmic (interprétation). - Je ne sais dire à quel moment on

18 était inclus à l'armée de la Bosnie-Herzégovine, ça je ne le sais pas.

19 M. Moskowitz (interprétation). - Mais sans nous donner la date,

20 savez-vous si oui ou non cela s'est bien produit ? Cette intégration a-t-

21 elle bien eu lieu ?

22 M. F. Ahmic (interprétation). – Je sais que ça s'est produit,

23 mais à quel moment ? Je ne le sais pas.

24 M. Moskowitz (interprétation). – Et cette modification, ce

25 changement, ce passage de la Défense territoriale à une partie de l'armée

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1 de Bosnie-Herzégovine a-t-il entraîné un changement de procédure ? Par

2 exemple, dans la façon dont étaient menées les patrouilles à Ahmici ?

3 M. F. Ahmic (interprétation). – Non, il n'y a pas eu de

4 changement. Tout était comme avant.

5 M. Moskowitz (interprétation). – Je voudrais maintenant attirer

6 votre attention sur l'incident qui s'est produit à Ahmici, en

7 octobre 1992. En avez-vous le moindre souvenir ?

8 M. F. Ahmic (interprétation). – Je m'en souviens.

9 M. Moskowitz (interprétation). – Quels sont vos souvenirs de cet

10 incident ?

11 M. F. Ahmic (interprétation). – A la veille de l'incident même,

12 je n'étais pas chez moi ; j'étais chez un ami, à Han Bila, pour

13 travailler. Le soir, rentrant chez moi -tout simplement, c'était ma femme

14 qui me l’a appris-, je devais me rendre auprès des miens pour mon tour de

15 garde auprès de la maison parce que la situation n'était pas bonne et

16 qu'il y avait des problèmes.

17 Et ce soir-là, j'avais mon tour de garde ; le lendemain, je ne

18 sais plus à quelle heure -je pense bien que c'était vers les 5 heures 30-,

19 lorsqu'était venu le moment de la prière pour nous autres Musulmans, on a

20 entendu des explosions détoner, on a entendu des coups de feu tirés. De là

21 où j’étais, pour dire comment ces coups de tir s'étaient déclarés, je ne

22 sais ni pourquoi ni comment. Tout simplement, j'avais été désigné pour mon

23 tour de garde. Abdulah était avec moi. Plus tard, Muniz était venu –Muniz

24 est le frère d’Abdulah- qui nous a dit qu'il fallait nous retirer vers les

25 Ahmici.

Page 1058

1 Pourtant, chez moi, à la maison, il y avait ma femme et mes

2 enfants. Je me suis rendu aussitôt pour les réveiller. En fait, ils

3 étaient déjà sur pied ; ils me demandaient eux aussi ce qui s'était passé.

4 Comme je ne savais répondre, je leur ai dit sèchement qu'il fallait se

5 préparer

6 pour évidemment les escorter ensuite, tout de suite, vers les hauteurs

7 d'Ahmici. Et c’est ce que j’ai fait d'ailleurs.

8 Ils se sont vite préparés et je les ai emmenés vers les hauts

9 Ahmici. Après quoi, je suis retourné vers l’étable de Sakib, car c'est à

10 un premier moment, auprès de cette étable que nous nous sommes retirés

11 pour une première fois. C'est là que j'ai rencontré Sakib Ahmic ; il

12 venait à notre rencontre. Et on voyait en même temps l'étable d’Abdulah en

13 flammes. Il nous posait la question pour savoir pourquoi cette étable

14 était en feu. Nous, on ne répondait rien ; lui, il s'arrachait les cheveux

15 pour aller aussitôt chercher Papic Ivo.

16 Pendant ce laps de temps, j'ai personnellement entendu des coups

17 de feu tirés depuis la forêt, depuis la direction de la maison de Dragan,

18 en direction de la maison de Mehmed. Je ne me suis pas attardé longuement.

19 Après, il n'y avait aucun commandement : chacun faisait comme bon lui

20 semblait et comme il le pouvait d'ailleurs.

21 Je me suis retiré vers les hauts Ahmici. Vers la soirée, j'ai pu

22 voir clairement que la femme de Mehmed, qui s’appelle Sasna, était sortie

23 avec les enfants et, probablement, sa mère avec elle. Elle nous a appris

24 également que sa maison était mise à feu et qu'ils ont eu du mal à s'en

25 sortir tout juste.

Page 1059

1 M. Moskowitz (interprétation). – Puis-je vous interrompre un

2 instant afin d'apporter un éclaircissement sur certains points,

3 Monsieur Ahmic. ?

4 Je crois que ce soir-là, vous nous avez dit que vous étiez de

5 garde. En utilisant la pièce 75, cette feuille de papier juste à côté de

6 vous, si vous vous en souvenez, pourriez-vous nous montrer où vous vous

7 trouviez exactement de garde lorsque les tirs ont commencé ?

8 M. F. Ahmic (interprétation). – En-dessous de la maison

9 d’Abdulah, chez Aljia qui est le fils d’Abdulah.

10 M. Moskowitz (interprétation). – Donc, c'est autour de la

11 maison 38, n'est-ce pas, tel que précisé par cette pièce.

12 M. F. Ahmic (interprétation). – Oui, 38.

13 M. Moskowitz (interprétation). – Portiez-vous une arme à ce

14 moment-là ?

15 M. F. Ahmic (interprétation). – Non, je n'avais pas d'arme.

16 M. Moskowitz (interprétation). – Et une fois que ces coups de

17 feu ont commencé, où êtes-vous allé ? Pourriez-vous nous montrer

18 l'itinéraire que vous avez suivi, sur cette pièce ?

19 M. F. Ahmic (interprétation). - Je me suis rendu aussitôt vers

20 ma maison pour en sortir ma femme et mes enfants pour leur dire de se

21 retirer aussi vers le haut Ahmici. C'est à ce moment-là que je suis sorti

22 avec eux pour les escorter jusqu'au haut Ahmici, c'est-à-dire jusqu'à

23 l'endroit qui se trouve en dessus de la maison de Vladko pour reprendre le

24 même chemin en retour jusqu'à l'étable de Sakib.

25 M. Moskovitz (interprétation). - Arrêtons-nous là un instant.

Page 1060

1 Vous avez parlé de Sakib. Y avait-il deux Sakib à Ahmici, M. Ahmic ?

2 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui il y a deux Sakib.

3 M. Moskovitz (interprétation). - Et le Sakib dont vous parlez à

4 l'instant... Enfin de quel sakib parlez vous exactement ?

5 M. F. Ahmic (interprétation). - Je parle de Sakib Bircin.

6 M. Moskovitz (interprétation). - Et avait-il un quelconque lien

7 de parenté avec Abdulah ?

8 M. F. Ahmic (interprétation). - C'est son oncle en fait, Sakib,

9 c'est l'oncle d'Abdulah.

10 M. Moskovitz (interprétation). - Donc de toute façon il y avait

11 un rapport entre lui et Abdulah.

12 M. F. Ahmic (interprétation). - Effectivement, ils étaient

13 cousins.

14 M. Moskovitz (interprétation). - Est-ce que vous avez amené

15 votre famille à ce moment-là à la maison de votre père et votre mère à

16 Ahmici le haut ?

17 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, je les ai accompagnés. On

18 est passés en haut de la maison de Vladko, là où les maisons musulmanes

19 commencent et je leur ai dit d'aller à Ahmici le haut.

20 M. Moskovitz (interprétation). - Et ensuite, vous êtes rentrés à

21 la maison de Sakib. Pouvez-vous nous montrer où se trouvait la maison de

22 Sakib ?

23 M. F. Ahmic (interprétation). - Je ne suis pas rentré dans la

24 maison de Sakib.

25 M. Moskovitz (interprétation). - Je m'excuse.

Page 1061

1 M. F. Ahmic (interprétation). - Je suis rentré jusqu'à l'étable

2 de Sakib, j'étais près de l'étable de Sakib

3 M. Moskovitz (interprétation). - Pourriez-vous nous montrer sur

4 la carte ?

5 M. F. Ahmic (interprétation). - Voici, ici. Attendez, attendez

6 ...l'étable de Sakib, ça doit être ici. Voici.

7 M. Moskovitz (interprétation). - Et ce serait juste à côté de

8 cet endroit qui est marqué par la lettre X sur la carte n'est-ce pas ?

9 M. F. Ahmic (interprétation). - Tout à fait. Très exactement

10 ici.

11 M. Moskovitz (interprétation). - Et qu'avez-vous fait ou vu

12 lorsque vous êtes arrivé à cette étable ?

13 M. F. Ahmic (interprétation). - Lorsque je suis arrivé il y

14 avait deux autres personnes sur place, deux voisins qui m'ont dit que

15 Mehmed était à la maison avec sa femme et ses enfants, qu'il y avait des

16 coups de feu et qu'ils ne pouvaient pas sortir.

17 M. Moskovitz (interprétation). - Vous avez mentionné Mehmed.

18 Voyez-vous sa maison sur la pièce à conviction 75 ?

19 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui je la vois, elle est marquée

20 par le N °3.

21 M. Moskovitz (interprétation). - Continuez, que s'est-il passé

22 ensuite ?

23 M. F. Ahmic (interprétation). - Lorsqu'ils ont dit que Mehmed

24 était dans la maison

25 avec sa femme et ses enfants et qu'ils ne pouvaient pas sortir à cause des

Page 1062

1 coups de feu qui provenaient de l'endroit en face de la maison de Dragan

2 et d'Ivo Papic, ils sont restés sur place tout simplement, ils n'étaient

3 pas armés.

4 M. Moskovitz (interprétation). - Avez-vous vu les coups de feu

5 qui venaient de la maison d'Ivo et Dragan Papic et qui visaient la maison

6 de Mehmed ?

7 M. F. Ahmic (interprétation). - Je n'ai pas vu cela, mais j'ai

8 entendu ces deux hommes qui me disaient : "On tire depuis là-bas," et moi-

9 même j'ai entendu qu'on tirait, mais moi-même je ne l'ai pas vu.

10 M. Moskovitz (interprétation). - Qu'avez vous fait ensuite ?

11 M. F. Ahmic (interprétation). Après cela je me suis retiré à

12 Ahmici le haut pour chercher ma femme et mes enfants. Cependant eux, ils

13 sont partis plus loin à Brovine en haut, et moi je suis resté à Ahmici le

14 haut, je faisais mon tour de garde.

15 M. Moskovitz (interprétation). - Vous avez dit que votre famille

16 était allée à Ahmici le haut. Est-ce que vous savez s'il y avait d'autres

17 familles de cette partie-là d'Ahmici qui ont quitté leur maison et qui se

18 sont installées dans d'autres parties du village pour éviter les coups de

19 feu ?

20 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui, il y en avait plusieurs,

21 plus de la moitié du village s'est échappée vers Brovine et Poculica.

22 M. Moskovitz (interprétation). - Et est-ce que vous savez

23 qu'est-ce qui a provoqué ce conflit en 92; soit sur la base de votre

24 connaissance personnelle ou bien de ce que d'autres personnes vous ont

25 dit ?

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1 M. F. Ahmic (interprétation). - Moi personnellement; je ne sais

2 rien là-dessus en ce qui concerne la cause de ce conflit.

3 M. Moskovitz (interprétation). - Et qu'elle est votre

4 compréhension de ce qui s'est passé ?

5 M. F. Ahmic (interprétation). - Je ne sais pas, je ne sais pas

6 ce qui s'est passé.

7 M. Moskovitz (interprétation). - Avez-vous entendu quoi que ce

8 soit sur une barricade qui a été... sur un barrage routier qui a été

9 établi sur la route principale entre Vitez et Busovaca près du cimetière ?

10 M. F. Ahmic (interprétation). - J'ai entendu qu'un barrage

11 routier a été placé, mais moi je n'y étais pas et je ne sais rien en ce

12 qui concerne le barrage routier.

13 M. Moskovitz (interprétation). - Vous avez dit que votre famille

14 est allée vivre dans une maison à Ahmici le haut. Est-ce que vous les avez

15 rejoints peu après ?

16 M. F. Ahmic (interprétation). - Non, ils sont allés à Brovine,

17 et moi par la suite, au bout d'un certain temps, je ne sais pas exactement

18 au bout de combien de jours, je suis allé les chercher, et je les ai

19 ramenés à Ahmici-le-Haut.

20 M. Moskowitz (interprétation). - Et est-ce que vous êtes resté à

21 Ahmici-le-Haut avec votre famille pendant une certaine période ?

22 M. F. Ahmic (interprétation). - J'ai été à Ahmici-le-Haut.

23 Après, nous sommes revenus à la maison. Je ne sais pas très exactement

24 quand cela s'est produit, mais je n'ai pas dit qu'après ce problème, que

25 je suis descendu et le deuxième jour, quant Halid a été tué, je l'ai sorti

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1 ensemble avec Mirsad Ahmic de la maison et nous l'avons amené jusqu'à la

2 mosquée de Adjia et son corps a été repris de sa mère là-bas.

3 M. Moskowitz (interprétation). - Qui était Halid Pezer ?

4 M. F. Ahmic (interprétation). - Halid Pezer était le fils de

5 Omer Pezer.

6 M. Moskowitz (interprétation). - Quel était son âge ?

7 M. F. Ahmic (interprétation). - Il avait 17 ans ou 18 ans, je ne

8 sais pas très exactement.

9 M. Moskowitz (interprétation). - Où avez-vous trouvé son corps ?

10 M. F. Ahmic (interprétation). - Nous l'avons trouvé derrière la

11 maison de Pjanic.

12 M. Moskowitz (interprétation). - Savez-vous comment il a été

13 tué ?

14 M. F. Ahmic (interprétation). - Il a été tué par une balle. Je

15 pense qu'il a été tué d'un snipper.

16 M. Moskowitz (interprétation). - Savez-vous quand il a été tué ?

17 M. F. Ahmic (interprétation). - Je ne sais pas quand il a été

18 tué mais j'ai entendu qu'il a été tué.

19 M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce que ceci a été lié à

20 l'incident que vous avez décrit concernant les coups de feu qui ont été

21 tirés vers la maison de Mehmed Ahmic ?

22 M. F. Ahmic (interprétation). - Non, ça n'a pas été lié à cet

23 incident-là. Il a été tué là-bas.

24 M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce que cela s'est produit

25 le même jour ?

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1 M. F. Ahmic (interprétation). - Cela s'est produit le même jour,

2 le même jour que cet échange... que ces tirs de feu.

3 M. Moskowitz (interprétation). - Après que vous avez rejoint

4 votre famille à Ahmici-le-Haut, après cet incident, je crois que vous avez

5 dit que vous êtes rentré à un certain moment, plus tard dans votre maison.

6 Est-ce que vous êtes rentré avec votre famille ou sans votre famille ?

7 M. F. Ahmic (interprétation). - Je suis rentré à la maison avec

8 ma famille. Lorsque je suis parti dans cette direction-là, j'étais près de

9 la maison de Pero lorsque Dragan et Vinko m'ont arrêté, lorsque j'étais

10 sur le chemin de ma maison.

11 M. Moskowitz (interprétation). - En utilisant la pièce à

12 conviction devant vous, pourriez-vous nous indiquer la route que vous avez

13 prise pour rentrer à la maison le jour où les Papic vous ont arrêté ?

14 M. F. Ahmic (interprétation). - C'est ici que Dragan Papic et

15 Vinko Vidovic m'ont arrêté. Ils m'ont dit qu'il fallait que j'aille chez

16 Slavko Skoro pour lui demander la permission de

17 rentrer à la maison. Cependant moi, je n'ai pas obéi et je suis rentré à

18 la maison.

19 M. Moskowitz (interprétation). - Il y a certains marqueurs près

20 de vous. Veuillez en prendre un et marquer par la lettre X l'endroit où

21 vous avez été arrêté par les Papic sur le chemin de votre maison.

22 L'huissier va vous aider.

23 Très bien. Veuillez nous dire qui se trouvait en cet endroit-là

24 lorsque vous y êtes arrivé avec votre famille, lorsque vous étiez sur le

25 chemin de votre maison ?

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1 M. F. Ahmic (interprétation). - J'ai vu Slime près d'un

2 blockhaus qui était constitué en utilisant les blocs de construction et il

3 y avait une mitraillette là-bas. Je pense qu'il s'agissait de M53, un

4 vieux modèle.

5 M. Moskowitz (interprétation). - Vous dites qu'il y avait une

6 casemate constituée des blocs qui ont été pris de votre maison ?

7 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui.

8 M. Moskowitz (interprétation). - Et qu'il y avait une sorte de

9 mitraillette derrière ces blocs ?

10 M. F. Ahmic (interprétation). - Oui.

11 M. Moskowitz (interprétation). - Qui était près de cette

12 mitraillette au moment où vous êtes arrivé ?

13 M. F. Ahmic (interprétation). - C'était Slime Vidovic, fils de

14 Vinko Vidovic celui qui m'avait arrêté, et Dragan Papic.

15 M. Moskowitz (interprétation). - Si vous vous en souvenez,

16 dites-nous comment Vinko Vidovic était habillé. Il était en vêtements

17 civils ou en uniforme ?

18 M. F. Ahmic (interprétation). - Il portaient tous des uniformes

19 de camouflage.

20 M. Moskowitz (interprétation). - Vinko Vidovic ou Dragan Papic,

21 qu'est-ce qu'ils vous ont dit lorsque vous vous êtes approché d'eux ?

22 M. F. Ahmic (interprétation). - Ils ont dit qu'il fallait que

23 j'aille voir Slavko Skoro

24 afin d'obtenir un certificat, une permission afin de pouvoir retrouver ma

25 maison.

Page 1067

1 M. Moskowitz (interprétation). - Avez-vous compris pourquoi vous

2 aviez besoin d'une permission afin de rentrer dans votre propre maison ?

3 M. F. Ahmic (interprétation). - Je ne l'ai pas compris, je ne

4 les ai pas compris du tout.

5 M. Moskowitz (interprétation). - Avez-vous mentionné quoi que ce

6 soit à Dragan Papic ou à l'autre personne qui était avec vous en ce qui

7 concerne le fait d'avoir vu les blocs de construction de votre maison qui

8 ont été utilisés sans votre permission ?

9 M. F. Ahmic (interprétation). - Non, je n'ai pas mentionné cela.

10 M. Moskowitz (interprétation). - Pourquoi ne leur avez-vous pas

11 parlé de cela ?

12 M. F. Ahmic (interprétation). - Je n’osais pas. Tout simplement.

13 Nous étions des personnes condamnées là-bas.

14 M. Moskowitz (interprétation). – Que voulez-vous dire par

15 "personnes condamnées" ?

16 M. F. Ahmic (interprétation). – Ma femme avait peur. Par

17 exemple, lorsque moi, je faisais mes tours de garde, elle me disait :

18 "pourquoi moi, j'allais en haut pour faire cela alors qu'eux, ils

19 restaient tout seuls parmi les autres qui portaient leur uniforme de

20 camouflage, qui portaient des armes, qui se pavanaient avec tout ça". Et

21 tout simplement, nous ne savions pas que faire.

22 M. Moskowitz (interprétation). – Etes-vous allé à la maison

23 malgré le fait qu'on vous ait dit qu'il fallait une permission pour faire

24 cela ?

25 M. F. Ahmic (interprétation). – Je suis allé à la maison et j'y

Page 1068

1 ai passé cette nuit-là. J'ai protégé mes fenêtres pour qu'on ne jette rien

2 à l'intérieur. Le matin, lorsque nous nous sommes levés, Dragan Papic et

3 Vinko Vidovic –moi, j’étais assis à table avec ma femme, à l'extérieur,

4 dans la cours- et ils sont arrivés. Je ne sais pas quelle était leur

5 intention. Je sais que

6 Dragan avait un détonateur et ma femme lui a demandé ce que c'était. Lui,

7 il a répondu tout seul qu'il s'agissait d'un détonateur. Et c'est là que

8 Vinko Vidovic m'a montré sa carte où l’on pouvait voir qu'il était membre

9 des forces spéciales, des "Jokeri", qui se trouvaient dans le "Bungalow".

10 Ils nous ont demandé : "Pourquoi vos singes ne se rendent pas ?

11 Qu'est-ce qu'ils veulent faire ?" C'est le laid mot qu'ils ont employé.

12 Moi, j'ai répondu : "Je ne sais pas", étant donné que moi, tout cela ne

13 m'intéressait pas.

14 Plus tard, j'ai évacué ma femme et mes enfants. Pour leur propre

15 sécurité, je les ai envoyés à Bistricak. Et moi-même, j'ai déménagé plus

16 loin, plus haut, où j'ai continué à faire des tours de garde.

17 M. Moskowitz (interprétation). – Vous avez dit que, lorsque le

18 lendemain Dragan Papic s'est rendu chez vous, il avait un détonateur. A

19 quoi ressemblait-il ?

20 M. F. Ahmic (interprétation). – C'était comme une sorte de

21 baguette ; c'était de cette taille-là.

22 M. Moskowitz (interprétation). – Et vous avez dit que

23 Vinko Vidovic parlait d'une sorte d'unité spéciale qui se trouvait dans le

24 "Bungalow". Est-ce qu’il vous a montré quelque chose pour corroborer

25 cela ?

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1 M. F. Ahmic (interprétation). – Je ne lui demandais pas cela,

2 mais il m'a montré une carte, une pièce d'identité et il m'a dit lui-même

3 qu'il était membre de l'unité spéciale, de ces "Jokeri" qui se trouvaient

4 dans le "Bungalow" ou bien la police.

5 M. Moskowitz (interprétation). – Est-ce qu'ils vous ont dit

6 autre chose, mis à part la question : "Pourquoi les singes ne se rendent

7 pas ?" Vous ne devez pas nous dire mot à mot ce qu'ils ont dit, mais si

8 vous pouvez nous donner une idée générale.

9 M. F. Ahmic (interprétation). – Je ne m'en souviens pas.

10 M. Moskowitz (interprétation). – Est-ce que vous vous souvenez

11 s'ils ont dit quelque chose concernant la protection de votre maison

12 contre l'attaque pendant l'incident que

13 vous venez de décrire ?

14 M. F. Ahmic (interprétation). – Effectivement, lorsqu'ils se

15 sont approchés de moi, à ce moment-là, ils m'ont dit que leurs soldats,

16 les soldats du HVO, ont essayé de faire irruption dans ma maison.

17 Dragan Papic m'a dit personnellement que c'était… ou plutôt, leur a dit

18 personnellement que c'était une maison croate et qu'il ne fallait pas la

19 toucher. Parce que moi, quand je suis arrivé, j'ai vu sur la porte des

20 traces de bottes de soldat avec lesquelles ils frappaient, ils donnaient

21 des coups de pied contre la porte pour rentrer à force.

22 M. Moskowitz (interprétation). – Je vais poser maintenant une

23 dernière question parce que je pense que c'est le moment de suspendre

24 l'audience.

25 Vous avez dit que, le lendemain, vous avez quitté votre maison,

Page 1070

1 le lendemain, après la visite de M. Papic et de M. Vidovic. Pourquoi

2 l'avez-vous quittée ?

3 M. F. Ahmic (interprétation). – Je l’ai quittée parce que je

4 n'étais pas sûr qu'on allait me laisser tranquille, que personne n'allait

5 jeter une grenade sur ma maison. Donc, je me suis dit qu’il fallait que je

6 quitte la maison.

7 M. Moskowitz (interprétation). – Monsieur le Président, peut-

8 être le moment est-il judicieux pour suspendre l'audience ?

9 M. le Président (interprétation). - Oui, je dois conclure. Je

10 suppose que vous avez encore quelques questions.

11 M. Moskowitz (interprétation). – Effectivement, j’en ai

12 plusieurs sur l'attaque du 16.

13 M. le Président (interprétation). - Merci. L’audience est

14 suspendue.

15 L'audience est levée à 16 heures 17.

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