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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-16-T
2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE
3 Mercredi 7 Juillet 1999
4 L'audience est ouverte à 9 heures.
5 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)
6 Mme Lauer. - Affaire IT-95-16-T, le Procureur contre
7 Zoran Kupreskic, Mirjan Kupreskic, Vlatko Kupreskic, Drago Josipovic,
8 Dragan Papic et Vladimir Santic.
9 M. le Président (interprétation). - Bonjour. Monsieur Vidovic,
10 vous êtes déjà parmi nous, je le vois. Bonjour, veuillez vous lever pour
11 donner lecture de la déclaration solennelle.
12 M. Vidovic (interprétation). - Bonjour. Je déclare
13 solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la
14 vérité.
15 M. le Président (interprétation). - Merci. Veuillez vous
16 asseoir.
17 Maître Pavkovic, vous avez la parole.
18 M. Pavkovic (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président,
19 Madame, Messieurs les Juges. Tout d'abord, permettez-moi de vous annoncer
20 qu'un groupe de mes témoins est arrivé très tard hier soir vers
21 22 heures 30 et que c'est la raison pour laquelle nous n'avons pas pu
22 prévoir leur comparution aujourd'hui.
23 Ainsi donc, seul M. Vidovic déposera aujourd'hui.
24 Bonjour Monsieur Vidovic.
25 M. Vidovic (interprétation). - Bonjour.
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1 M. Pakovic (interprétation). - Pouvez-vous, s'il vous plaît,
2 vous présenter à la Chambre ?
3 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
4 M. Pavkovic (interprétation). - Où êtes-vous né, quand êtes-vous
5 né ?
6 M. Vidovic (interprétation). - Je suis né à Vitez. J'y vis
7 aujourd'hui dans le village de Pirici. Je suis menuisier de formation.
8 J'ai suivi un stage et je travaille à Busovaca.
9 M. Pavkovic (interprétation). – C'est au TKC* que vous avez été
10 formé ?
11 M. Vidovic (interprétation). - Oui, il s'agit de
12 télécommunication.
13 M. Par (interprétation). - Vous êtes né à Pirici ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
15 M. Par (interprétation). - Par rapport à ce que nous savons
16 déjà, il existe Pirici-le-Bas et Pirici-le-Haut. Vous êtes d’où ?
17 M. Vidovic (interprétation). - Je suis de Pirici-le-Bas, c'est
18 là que je suis né et c'est là que je vis.
19 M. Pavkovic (interprétation). - Pourriez-vous, s'il vous plaît,
20 attendre la fin de ma question avant de commencer à répondre, tout en
21 laissant une pause entre la fin de ma question et le début de votre
22 réponse ?
23 S'il vous plaît, là dans ce bas Pirici, quelle est la
24 composition ethnique qui y prévalait jusqu'au premier et deuxième conflit
25 avec les Musulmans ?
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1 M. Vidovic (interprétation). - C'était une population
2 majoritairement croate .
3 M. Pavkovic (interprétation). - Et dans le haut Pirici ?
4 M. Vidovic (interprétation). – Là, c'étaient les Musulmans.
5 M. Pavkovic (interprétation). - Monsieur Vidovic, nous allons
6 nous intéresser aujourd'hui à deux sujets. Notamment, nous allons aborder
7 la question des patrouilles villageoises et nous allons parler de votre
8 départ à Kuber, votre séjour à Kuber, ainsi que tout ce qui s'est produit
9 pendant cette période-là.
10 En premier lieu, pourriez-vous me dire, s'il vous plaît, ce que
11 vous savez des patrouilles villageoises qui ont été organisées dans le bas
12 Ahmici, excusez moi à Pirici ?
13 M. Vidovic (interprétation). - Cela était organisé par les
14 villageois.
15 M. Pavkovic (interprétation). - Et pour quelle raison a-t-on
16 organisé les patrouilles villageoises ?
17 M. Vidovic (interprétation). - A cause de la population serbe
18 qui habitait dans un village en amont du nôtre.
19 M. Pavkovic (interprétation). - Pourquoi à cause de la
20 population serbe ?
21 M. Vidovic (interprétation). - Parce qu'ils avaient déjà
22 commencé à lancer des attaques contre des villages croates et musulmans.
23 La guerre avait déjà commencé. Ils s'emparaient du pouvoir et ainsi de
24 suite.
25 M. Pavkovic (interprétation). - Pouvez-vous nous dire à quel
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1 moment cela s'est produit ?
2 M. Vidovic (interprétation). - Je ne connais pas la date exacte,
3 mais les gens se sont organisés eux-mêmes par village dans chaque village.
4 M. Pavkovic (interprétation). – Etait-ce en 1992, la deuxième
5 moitié de l'année ?
6 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
7 M. Pavkovic (interprétation). - Très bien. Alors dites-moi
8 comment se sont organisées ces patrouilles villageoises ? Y avait-il une
9 personne en charge qui était responsable ? Qui a ordonné que cela se
10 fasse ? Pouvez-vous nous le décrire un peu dans le détail ?
11 M. Vidovic (interprétation). - Pour autant que je sache, il n'y
12 avait pas de responsable. Les villageois se sont mis d'accord entre eux et
13 nous montions la garde ensemble avec les Musulmans.
14 M. Pavkovic (interprétation). - Pendant ces tours de garde,
15 portiez-vous des armes ?
16 M. Vidovic (interprétation). - Non, mais les patrouilles que
17 nous venions relever nous remettaient des armes. Il y avait deux fusils,
18 pour autant que je m'en souvienne ,pour nous les villageois croates, deux
19 carabines M48.
20 M. Pavkovic (interprétation). - Vous aviez des armes alors ?
21 Seulement, vous n'emportiez pas ces armes à la maison, mais à chaque
22 moment où il y avait relève, vous rendiez vos armes ? En fait, vous les
23 remettiez à la nouvelle équipe ?
24 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
25 M. Pavkovic (interprétation). - Combien de temps duraient vos
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1 tours de garde lorsque vous en étiez chargé ? Combien de temps restiez
2 vous de garde ?
3 M. Vidovic (interprétation). - Cela durait deux heures pour tout
4 le monde.
5 M. Pavkovic (interprétation). - Et que faisiez-vous pendant tout
6 ce temps là ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, on faisait un tour du
8 village, des maisons.
9 M. Pavkovic (interprétation). - En parlant de ces patrouilles,
10 vous nous avez dit qu'à l'époque les Musulmans montaient la garde ensemble
11 avec vous.
12 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
13 M. Pavkovic (interprétation). - Autrement dit, à un moment
14 ultérieur, il y a eu une séparation de ces patrouilles.
15 M. Vidovic (interprétation). - Oui, cela s'est produit lorsque
16 les Musulmans ont dressé un barrage sur la route principale Vitez -
17 Busovaca. Ils ont d'abord monté un poste de contrôle à la gare
18 autoroutière, en face de la maison d'Ahmic Mehmet et Papic Ivo.
19 Par la suite, le lendemain, ils ont déplacé cela à l'endroit où
20 se trouve le cimetière croate. C'est à 150... 200 mètres. C'est là qu'ils
21 ont creusé. Ils ont creusé et installé des obstacles sur la route et ils
22 contrôlaient la circulation. Ils arrêtaient tous ceux qui passaient sur la
23 route.
24 M. Pavkovic (interprétation). - Et pourquoi ont-ils installé ces
25 obstacles, ces postes de contrôle, le savez-vous ?
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1 M. Vidovic (interprétation). - A l'époque, personne n'en
2 connaissait la raison.
3 M. Pavkovic (interprétation). - Et quelles étaient les relations
4 à l'époque entre les Croates et les Musulmans ?
5 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, jusqu'à ce moment-là,
6 ces relations étaient bonnes.
7 A partir du mois d'octobre 1992, à partir du moment où ils ont
8 dressé ce poste de contrôle...
9 M. Pavkovic (interprétation). - Donc ils ont installé ce
10 barrage. Pour contrôler qui ?
11 M. Vidovic (interprétation). - Tous les véhicules qui passaient
12 étaient obligés de s'arrêter, ils ne pouvaient pas passer librement, que
13 ce soit un véhicule ou un piéton.
14 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce que cela révoltait ou
15 mécontentait les Croates ?
16 M. Vidovic (interprétation). - Oui, parce qu'il y avait là des
17 maisons habitées, des enfants. S'il y avait eu un incident, ils auraient
18 été pris pour cible.
19 M. Pavkovic (interprétation). - On peut donc dire que les
20 relations se dégradaient entre les Croates et les Musulmans.
21 M. Vidovic (interprétation). - Oui, ils se sont mis à nous
22 éviter un petit peu.
23 M. Pavkovic (interprétation). - Parlant de ces patrouilles, à
24 partir du moment où elles se sont séparées, vous étiez de garde d'un côté,
25 eux de l'autre. J'aimerais savoir comment ils étaient équipés, eux,
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1 comment ils étaient armés. Est-ce qu’ils organisaient leur tour de garde ?
2 M. Vidovic (interprétation). - Oui, leur commandement se
3 trouvait à l'école du village d'Ahmici. C'est là qu'ils avaient une
4 station radio, un émetteur, et s'agissant des armes, ce sont les réfugiés
5 venus de Jajce et de Krajina qui leur ont apporté des armes parce qu'ils
6 avaient déjà été en guerre contre les Serbes là-bas. Et ils étaient mieux,
7 considérablement mieux armés que nous.
8 M. Pavkovic (interprétation). - Je voudrais aborder un autre
9 sujet à présent.
10 Le deuxième sujet que je souhaite aborder aujourd'hui concerne
11 Kuber. Devant cette Chambre, il a été déjà beaucoup question de Kuber.
12 J'essaierai d'éviter la répétition.
13 Que savez-vous de Kuber et de l'organisation des gardes à
14 Kuber ?
15 M. Vidovic (interprétation). - Moi, je m'y suis rendu pour une
16 première fois et j'ai été surpris : je ne savais pas ce qui se passait là-
17 bas. Donc je ne l'ai appris qu'une fois que j'y suis arrivé.
18 M. Pavkovic (interprétation). - Quand vous êtes-vous rendu alors
19 à Kuber ?
20 M. Vidovic (interprétation). - Avant le conflit pour trois ou
21 quatre jours. Il me semble que c'était le 13. Un ami est venu et voilà.
22 M. Pavkovic (interprétation). - Vous dites "avant le conflit".
23 Quel conflit ?
24 M. Vidovic (interprétation). - Avant le deuxième conflit.
25 M. Pavkovic (interprétation). - Vous avez dit que vous êtes
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1 parti vers le 13. Le 13 de quel mois ?
2 M. Vidovic (interprétation). - 13 avril.
3 M. Pavkovic (interprétation). - Quelle année ?
4 M. Vidovic (interprétation). - 1993.
5 M. Pavkovic (interprétation). - Ainsi donc le 13 avril 1993 vous
6 êtes parti à Kuber ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
8 M. Pavkovic (interprétation). - Et dites-moi, en compagnie de
9 qui êtes-vous allé à Kuber ?
10 M. Vidovic (interprétation). - J'étais chez moi. Un ami,
11 Zarko Kristo est venu et il m'a demandé si je souhaitais partir avec lui à
12 Kuber. Nous étions de très bons amis. A l'époque, je n'étais pas obligé
13 d'y aller, mais puisque je sais que c'est très beau là-haut et comme nous
14 étions amis, je lui ai dit qu'effectivement je souhaitais y aller avec
15 lui.
16 M. Pavkovic (interprétation). - Vous dites que vous n'étiez pas
17 obligé d'y aller ?
18 M. Vidovic (interprétation). - Je ne savais pas qu'on y allait
19 et je n'avais pas été informé qu'il fallait y aller. Tout simplement, un
20 collègue, un ami est venu me voir et me l'a demandé.
21 M. Pavkovic (interprétation). - Les autres personnes qui y sont
22 allées avec vous étaient obligées d'y aller ?
23 M. Vidovic (interprétation). - Les gens se sont organisés eux-
24 mêmes pour y aller.
25 M. Pavkovic (interprétation). - Mais pourquoi allait-on à
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1 Kuber ?
2 M. Vidovic (interprétation). - C'était un village serbe là-bas
3 et les gens avaient peur qu'ils ne fassent quelque chose.
4 M. Pavkovic (interprétation). - Les Musulmans se rendaient-ils à
5 Kuber ?
6 M. Vidovic (interprétation). - Oui, ils étaient à une distance
7 de 100 à 150 mètres de nous.
8 M. Pavkovic (interprétation). - Vous vous y rendiez ensemble ?
9 M. Vidovic (interprétation). - Non, nous empruntions la route
10 jusqu'à Nadioci et nous montions par la suite en traversant Nadioci,
11 Kratina, etc.
12 M. Pavkovic (interprétation). - Revenons au 13, le jour où
13 Zarko Kristo est venu vous voir et où vous êtes partis en direction de
14 Kuber. Vous vous êtes rassemblés à un endroit. Où ?
15 M. Vidovic (interprétation). - Dans le village de Nadioci. Il y
16 avait un magasin là-bas et nous avons acheté des produits alimentaires et
17 puis nous avions déjà emporté des choses de chez nous à manger.
18 M. Pavkovic (interprétation). - Aviez-vous des armes ?
19 M. Vidovic (interprétation). - Nous n'avions pas d'armes, c'est
20 là que nous les avons trouvées.
21 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce qu'une personne
22 quelconque d'entre vous, le jour en question où vous êtes allé à Kuber,
23 portait des armes sur elle ?
24 M. Vidovic (interprétation). - Non.
25 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce que l'un quelconque
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1 d'entre vous avait un équipement militaire ?
2 M. Vidovic (interprétation). - Non, il y en a peut-être eu
3 quelques uns qui avaient un pantalon.
4 M. Pavkovic (interprétation). - Qui sont les personnes qui se
5 sont rassemblées le jour en question à Nadioci, dans ce magasin qui est en
6 fait une brasserie ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Nous étions 12 à 15. Vous
8 souhaitez que je donne les noms ?
9 M. Pavkovic (interprétation). - Si vous arrivez à vous rappeler
10 les noms de quelques personnes.
11 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Mon ami Zarko Kristo,
12 Ivica Plavcic, Stipica Grgic, un autre Stipica Grgic, Ivo Pranjkovic,
13 Zeljo Livancic, Mirko Livancic, Anto Santic, Mirko Vidovic, surnommé
14 Pitola.
15 M. Pavkovic (interprétation). - Ivan Pranjkovic y était-il ?
16 M. Vidovic (interprétation). - Oui, j'ai déjà dit son nom.
17 M. Pavkovic (interprétation). - Oui, excusez moi. Vous êtes donc
18 parti là-haut sans y avoir été contraint ?
19 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
20 M. Pavkovic (interprétation). - Avez-vous demandé à votre ami
21 combien de temps vous alliez rester là-bas ?
22 M. Vidovic (interprétation). - Oui, je lui ai posé cette
23 question, il m'a dit 7 jours.
24 M. Pavkovic (interprétation). - Donc, ces tours de garde
25 duraient ce nombre de jours ?
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1 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
2 M. Pavkovic (interprétation). - Essayons d'accélérer. Ainsi
3 donc, vous êtes parti, vous vous êtes organisé, vous avez pris de la
4 nourriture et vous êtes parti en direction de Kuber ?
5 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
6 M. Pavkovic (interprétation). - Pendant combien de temps avez-
7 vous marché jusque là-bas ?
8 M. Vidovic (interprétation). - Une heure et demie, deux heures.
9 M. Pavkovic (interprétation). - A pied ?
10 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
11 M. Pavkovic (interprétation). - Auriez-vous pu prendre une
12 voiture ?
13 M. Vidovic (interprétation). - Non, on ne pouvait pas circuler
14 en voiture.
15 M. Pavkovic (interprétation). - Arrivé à Kuber, où vous êtes-
16 vous installé ?
17 M. Vidovic (interprétation). - Il y avait deux maisons de
18 campagne là-haut.
19 M. Pavkovic (interprétation). - Qui appartenaient à qui ?
20 M. Vidovic (interprétation). - L'une appartenait à quelqu'un qui
21 s'appelle Samija et l'autre probablement à quelqu'un qui est de sa
22 famille.
23 M. Pavkovic (interprétation). - Et qui avez-vous trouvé sur
24 place ?
25 M. Vidovic (interprétation). - Des gens, des villageois, je ne
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1 me rappelle pas exactement qui j'ai vu.
2 M. Pavkovic (interprétation). - C'étaient des gens qui montaient
3 la garde avant vous ?
4 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
5 M. Pavkovic (interprétation). - Vous êtes venu les relever ?
6 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
7 M. Pavkovic (interprétation). - A ce moment-là, ils vous ont
8 remis des armes ?
9 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Ivo Pranjkovic et Zeljo
10 Livancic ont accusé réception de tout cela. Et ils nous ont remis les
11 armes, ainsi que tout ce qui se trouvait là-haut.
12 M. Pavkovic (interprétation). - Parlant des armes, pouvez-vous
13 nous préciser de quoi il s'agissait ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Il y avait un Kinez, un fusil-
15 mitrailleur, des fusils, des fusils anciens M48, un fusil antiaérien, puis
16 un fusil russe Spagin, et puis des fusils automatiques.
17 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce que chacun d'entre vous a
18 accusé réception d'une arme à ce moment-là ?
19 M. Vidovic (interprétation). - Non, les cuisiniers n'avaient pas
20 d'armes.
21 M. Pavkovic (interprétation). - Et vous-même vous avez accusé
22 réception d'une arme ?
23 M. Vidovic (interprétation). - Non, parce que je n'avais pas été
24 prévu là-bas. Il y avait autant de personnes que d'armes. Moi, il n'était
25 pas prévu que je m'y rende.
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1 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce qu'il y avait un émetteur
2 sur place ?
3 M. Vidovic (interprétation). - Oui, mais il ne fonctionnait pas.
4 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce qu'il y avait d'autres
5 appareils de communication ?
6 M. Vidovic (interprétation). - Non, peut-être un téléphone... En
7 fait, il y avait un coursier.
8 M. Pavkovic (interprétation). - Vous n'aviez aucun moyen d'être
9 en contact avec le village ?
10 M. Vidovic (interprétation). - Non, seulement par le truchement
11 du coursier.
12 M. Pavkovic (interprétation). - Quand vous parlez du coursier,
13 qui était-il, que faisait-il ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, si quelque chose se
15 produisait, il fallait qu'il puisse mettre en garde les villageois, qu'ils
16 soient, eux, sur leur garde.
17 M. Pavkovic (interprétation). - A présent, je souhaite dire
18 quelques mots au sujet de ces gardes, de ces tours de garde, à Kuber.
19 Combien de temps restiez-vous de garde ? Qui ? A quel moment ? Etc..
20 Dites-moi, les tours de garde se passaient de jour comme de nuit ?
21 M. Vidovic (interprétation). - Non, pas le jour, puisque nous
22 étions tous debout, éveillés, ensemble. Et puis, la nuit, on montait la
23 garde par deux pendant deux heures.
24 M. Pavkovic (interprétation). - Et vous étiez ensemble jusqu'à
25 quelle heure ?
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1 M. Vidovic (interprétation). - Jusqu'à 10 heures du soir, toute
2 la journée.
3 M. Pavkovic (interprétation). - Par la suite, donc il y avait
4 des tours de garde qui duraient deux heures chacun par deux hommes ?
5 M. Vidovic (interprétation). - Oui, cela commençait à 10 heures
6 du soir.
7 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce qu'il y avait une
8 personne qui était chargée d'organiser ces tours de garde ?
9 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'était Ivo Pranjkovic et
10 Zeljo Livancic.
11 M. Pavkovic (interprétation). - Ils étaient chefs d'équipe, on
12 peut le dire comme ça ?
13 M. Vidovic (interprétation). - Oui, ce sont eux qui nous
14 répartissaient. Voilà !
15 M. Pavkovic (interprétation). - S'il vous plaît, pourriez-vous
16 attendre la fin de ma question, patienter un petit moment et ne commencer
17 votre réponse qu'à ce moment-là.
18 A partir de 10 heures du soir, commencent les tours de garde qui
19 durent chacun deux heures ?
20 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
21 M. Pavkovic (interprétation). - Pendant que les uns montent la
22 garde, où se trouvent les autres ?
23 M. Vidovic (interprétation). - Les autres sont dans l'une des
24 deux maisons de campagne qui étaient sur place ; ils dormaient.
25 M. Pavkovic (interprétation). - Et que se trouvait-il dans
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1 l'autre maison ?
2 M. Vidovic (interprétation). - C'était comme une cuisine, c'est
3 là qu'on préparait à manger.
4 M. Pavkovic (interprétation). - Où montiez-vous la garde dans la
5 nuit du 15 au 16 avril 1993 ?
6 M. Vidovic (interprétation). - Autour de ces maisons de
7 campagne, il y avait un chemin qui débouchait là et c'est uniquement ce
8 chemin qui permettait d'atteindre ces maisons de campagne.
9 M. Pavkovic (interprétation). - C'est à quelle distance de
10 l'endroit où dormaient les autres ?
11 M. Vidovic (interprétation). - C'est à 40 mètres environ.
12 M. Pavkovic (interprétation). - A l'endroit où vous montiez la
13 garde, vous étiez debout, immobile, ou bien vous marchiez ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Nous nous déplacions autour de
15 ces maisons de campagne et, parfois, nous nous arrêtions un petit peu sur
16 le chemin.
17 M. Pavkovic (interprétation). - Vous voyiez bien la maison où
18 dormaient les autres depuis cet endroit ?
19 M. Vidovic (interprétation). - Oui, on voyait tout.
20 M. Pavkovic (interprétation). - Pendant la nuit du 15, vous
21 souvenez-vous du moment où, vous, vous avez monté la garde ?
22 M. Vidovic (interprétation). - Entre 2 heures et 4 heures du
23 matin.
24 M. Pavkovic (interprétation). - Donc du matin, n'est-ce pas,
25 entre 2 heures et 4 heures du matin ?
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1 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
2 M. Pavkovic (interprétation). - Vous montiez la garde donc le 16
3 au matin, entre 2 heures et 4 heures, n'est-ce pas ?
4 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
5 M. Pavkovic (interprétation). - Vous souvenez-vous en compagnie
6 de qui vous étiez ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Avec Zarko Kristo, c'était tout
8 le temps mon compagnon.
9 M. Pavkovic (interprétation). - Quand vous êtes-vous couché
10 cette nuit-là ?
11 M. Vidovic (interprétation). - Vers 10/11 heures.
12 M. Pavkovic (interprétation). - Vous souvenez-vous où se
13 trouvait Zeljo Livancic à ce moment-là ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Lui et Ivo Pranjkovic... Zeljo a
15 monté la garde jusqu'à 10 heures ou minuit et Ivo Pranjkovic a repris la
16 garde à ce moment-là lorsque l'autre s'est couché.
17 M. Pavkovic (interprétation). - Etant donné qu'ils étaient chefs
18 d'équipe, qu'Ivo Pranjkovic était son remplaçant en quelque sorte, ils
19 surveillaient les gardes, n'est-ce pas ?
20 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
21 M. Pavkovic (interprétation). - Donc, Zeljo Livancic était
22 debout et de garde jusqu'à minuit ?
23 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
24 M. Pavkovic (interprétation). - Vous vous êtes couché un peu
25 plus tôt, n'est-ce pas ?
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1 (Le témoin acquiesce.)
2 Lorsqu'on vous a réveillé à 2 heures du matin, avez-vous vu
3 Zeljo Livancic à ce moment-là ?
4 M. Vidovic (interprétation). - Oui, son lit se trouvait à côté
5 du mien.
6 M. Pavkovic (interprétation). - Lorsque vous êtes rentré à
7 4 heures, avez-vous vu Zeljo Livancic et où se trouvait-il ?
8 M. Vidovic (interprétation). - Il se trouvait au même endroit,
9 endormi, là où je l'avais laissé dans cette maison de campagne.
10 M. Pavkovic (interprétation). - Vous vous êtes couché vers
11 4 heures du matin ?
12 M. Vidovic (interprétation). – Oui, après avoir monté la garde.
13 M. Pavkovic (interprétation). - Et quand vous êtes-vous réveillé
14 ce matin là ?
15 M. Vidovic (interprétation). - Vers 5 heures et demie, 6 heures.
16 On se levait toujours à la même heure.
17 M. Pavkovic (interprétation). - Vous tous ?
18 M. Vidovic (interprétation). - Oui, on prenait tous notre café à
19 cette heure-ci.
20 M. Pavkovic (interprétation). - L'avez-vous vu, Zeljo Livancic,
21 lorsque vous vous êtes levé ?
22 M. Vidovic (interprétation). - Oui, il était avec nous, il a
23 pris son café avec nous.
24 M. Pavkovic (interprétation). - On parle à présent du
25 16 avril 1993. Donc vous êtes en train de prendre votre café du matin.
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1 Quand les tirs ont-ils commencé à Kuber ?
2 M. Vidovic (interprétation). - Vers 10 heures.
3 M. Pavkovic (interprétation). – Qui tirait en direction de qui ?
4 M. Vidovic (interprétation). - On était là, on plaisantait, on
5 prenait notre petit déjeuner et un obus est tombé à une quinzaine de
6 mètres de la maison de campagne, mais c'était heureusement de l'autre
7 côté. Donc on n'a pas été blessés, uniquement le toit était un peu
8 endommagé. On a été quelque peu étonnés.
9 On ne savait pas ce qui se passait, jusqu'au moment où les
10 Musulmans ont commencé à tirer sur nous. On était surpris, personne ne
11 savait de quoi il s'agissait, et puis l'attaque à commencé. On s'est
12 défendus, nous nous sommes déployés sur place et nous nous sommes retirés,
13 chacun faisait comme il pouvait jusqu'au village de Kratine.
14 M. Pavkovic (interprétation). - Donc, suite aux tirs que vous
15 avez entendus, vous vous êtes déployés ? Où vous trouviez-vous ?
16 M. Vidovic (interprétation). - Je me trouvais en bas de la
17 maison de campagne avec un ami qui avait un fusil. Je ne pouvais pas
18 sortir, il était trop tard.
19 M. Pavkovic (interprétation). - Avez-vous riposté lorsque les
20 Musulmans ont commencé ?
21 M. Vidovic (interprétation). - Oui, tout le monde tirait.
22 M. Pavkovic (interprétation). - Est-ce que quelqu'un était
23 blessé à ce moment-là ?
24 M. Vidovic (interprétation). - Mirko Livancic a été tué à cette
25 occasion et Stipica Grbic aussi ; on a perdu toute trace d'eux.
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1 M. Pavkovic (interprétation). – Qu'est-ce qui s'est passé par la
2 suite ?
3 M. Vidovic (interprétation). - On n'avait plus de munitions et
4 on se retirait vers Kratine ; les habitants nous ont accueillis là-bas.
5 M. Pavkovic (interprétation). - Donc le conflit a commencé vers
6 10 heures ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
8 M. Pavkovic (interprétation). - A quelle heure vous êtes-vous
9 retiré vers Kratine ?
10 M. Vidovic (interprétation). - Nous nous sommes retrouvés vers
11 6 heures, 7 heures du soir à Kratine.
12 M. Pavkovic (interprétation). - Avez-vous revu Zeljo Livancic ce
13 jour-là, vers 6 heures, 7 heures ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Oui, lorsque nous nous sommes
15 tous retrouvés à Kratine.
16 M. Pavkovic (interprétation). - L'avez-vous vu à Kuber après
17 10 heures du matin, après les premiers tirs ?
18 M. Vidovic (interprétation). - Je l'ai vu lorsque j'ai entendu
19 des tirs et, après, comme chacun occupait une position spéciale, je ne
20 l'ai plus revu. Il y avait des buissons, donc je ne pouvais pas le voir.
21 M. Pavkovic (interprétation). - Vous l'avez revu pour la
22 première fois à Kratine, le soir de ce jour-là ?
23 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
24 M. Pavkovic (interprétation). - Où l'avez-vous vu ?
25 M. Vidovic (interprétation). - Près de la maison de Jerko Bralo.
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1 M. Pavkovic (interprétation). - Avez-vous discuté avec lui ?
2 M. Vidovic (interprétation). - Je lui ai posé la question :
3 "Est-ce que tout le monde est resté en vie ?". Et c'est à ce moment-là que
4 j'ai appris que deux d'entre nous n'étaient plus là. On a perdu leur
5 trace.
6 M. Pavkovic (interprétation). - Dans la nuit du 16, les conflits
7 ont-ils aussi eu lieu ?
8 M. Vidovic (interprétation). - On n'a rien entendu, je ne sais
9 pas.
10 M. Pavkovic (interprétation). - Vous étiez à Kratine à ce
11 moment-là ?
12 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
13 M. Pavkovic (interprétation). - Les habitants du village vous
14 ont accueillis ?
15 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
16 M. Pavkovic (interprétation). - Il s'agit du 16 au soir, donc
17 pendant cette nuit-là y a-t-il eu des conflits ?
18 M. Vidovic (interprétation). - Oui, lorsque nous sommes
19 descendus dans le village, on entendait des tirs de tous les côtés.
20 M. Pavkovic (interprétation). - Que savez-vous de Zeljo
21 Livancic ? Que lui est-il arrivé par la suite ?
22 M. Vidovic (interprétation). - Le lendemain, nous avons établi
23 une ligne juste au-dessus du village pour les empêcher d'entrer dans le
24 village. J'ai entendu dire que Zeljo avait été tué. Je ne l'ai revu qu'au
25 moment où on a transporté son corps.
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1 M. Pavkovic (interprétation). - Quand a-t-il été tué ?
2 M. Vidovic (interprétation). - Le 17.
3 M. Pavkovic (interprétation). - Donc le 17. Monsieur Vidovic, à
4 quelle distance se trouve Kuber du village d'Ahmici ?
5 M. Vidovic (interprétation). - 4 à 5 kilomètres.
6 M. Pavkovic (interprétation). – Peut-on rejoindre Ahmici en
7 voiture par un autre moyen de transport ?
8 M. Vidovic (interprétation). - Non, on ne peut pas rejoindre
9 Ahmici en voiture, on ne peut prendre la voiture que jusqu'à Nadioci.
10 M. Pavkovic (interprétation). - Ma dernière question sera la
11 suivante. Vous avez dit que, depuis votre position de garde, vous pouviez
12 bien voir la maison de campagne où dormaient vos compagnons ?
13 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
14 M. Pavkovic (interprétation). - Etait-il possible que Zeljo
15 Livancic qui dormait, d'après ce que vous nous avez dit, lorsque vous vous
16 êtes rendu pour monter la garde, qu'il sorte de cette maison sans que vous
17 vous en aperceviez ?
18 M. Vidovic (interprétation). - Non, ce n'était pas possible, non
19 seulement lorsqu'il s'agit de Zeljo mais des autres aussi.
20 M. Pavkovic (interprétation). - Pourquoi personne ne pouvait
21 sortir ?
22 M. Vidovic (interprétation). - Surtout la nuit ! Dans la
23 journée, on était tous ensemble. La nuit, on ne pouvait pas circuler et on
24 pouvait voir chaque mouvement dès que quelqu'un bougeait, on le voyait.
25 M. Pavkovic (interprétation). - Merci, je n'ai plus de
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1 questions. Merci, Monsieur le Président. Je souhaiterais, Monsieur le
2 Président, dire que mes collègues Par et Susak poursuivront
3 l'interrogatoire du témoin.
4 M. le Président (interprétation). - Vous voulez parler de
5 contre-interrogatoire ?
6 M. Pavkovic (interprétation). - Oui.
7 M. le Président (interprétation). - Merci.
8 Maître Par ?
9 M. Par (interprétation). - Merci, Monsieur le Président, je
10 serai très bref.
11 Monsieur Vidovic, aujourd'hui, lorsque vous avez cité les noms
12 des personnes qui vous accompagnaient à Kuber, vous avez cité également
13 Mirko Vidovic surnommé Pitola. Est-ce exact ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
15 M. Par (interprétation). - Pouvez-vous nous donner plus
16 d'informations sur cette personne ? Quel âge a-t-il ?
17 M. Vidovic (interprétation). - C'est mon cousin. Il était avec
18 nous, il restait en vie au moment où nous étions à Kratine. Après, il
19 s'est rendu vers la ligne de défense dans son village, la guerre avait
20 déjà commencé.
21 M. Par (interprétation). - Si vous pouvez juste nous donner ces
22 éléments, les éléments le concernant, ses données personnelles... Est-il
23 mort ?
24 M. Vidovic (interprétation). - Oui, dans le village de
25 Buhine Kuce. Lui, son frère, l'épouse de son frère et leur fils.
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1 M. Par (interprétation). - Quand ?
2 M. Vidovic (interprétation). - C'était au moment où Buhine Kuce
3 est tombée. Il a été massacré.
4 M. Par (interprétation). - Quel âge avait-il à l'époque ?
5 M. Vidovic (interprétation). - 40-45 ans.
6 M. Par (interprétation). - Où habitait-il auparavant ?
7 M. Vidovic (interprétation). - A Buhine Kuce.
8 M. Par (interprétation). - Je n'ai plus de questions, merci.
9 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie,
10 Maître Par.
11 Maître Susak ?
12 M. Susak (interprétation). - Merci, Monsieur le Président. Je
13 serai très bref.
14 Monsieur Vidovic, vous avez dit que vous êtes né à Donje Pirici,
15 Pirici-le-Bas.
16 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
17 M. Susak (interprétation). - Vous avez dit également que le
18 16 avril 93, vous vous trouviez à Kuber.
19 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
20 M. Susak (interprétation). - Connaissez-vous Drago Josipovic ?
21 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'est mon voisin.
22 M. Susak (interprétation). - Drago Josipovic est de Santici et
23 vous, vous êtes de Pirici.
24 M. Vidovic (interprétation). - Oui, mais nos maisons se trouvent
25 à une distance de 500 mètres environ.
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1 M. Susak (interprétation). - Savez-vous où se trouvait
2 Drago Josipovic pendant le premier conflit, à savoir le 20 octobre 92 ?
3 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas où se trouvait
4 Drago Josipovic durant le premier conflit.
5 M. Susak (interprétation). - Avez-vous entendu parler de
6 Drago Josipovic le 16 avril 1993 ? Saviez-vous où il se trouvait ? En
7 avez-vous entendu parler ?
8 M. Vidovic (interprétation). - Je ne le sais pas, mais j'ai
9 entendu dire que... Les gens du bureau de la Défense venaient frapper à la
10 porte, alors on m'a dit qu'il s'était dirigé vers Rovna.
11 M. Susak (interprétation). - Quel âge a votre père ?
12 M. Vidovic (interprétation). - Mon père est né en 39.
13 M. Susak (interprétation). - Connaissez-vous Nenad Santic ?
14 M. Vidovic (interprétation). - Si c'est bien la personne à
15 laquelle je pense, c'est quelqu'un qui travaillait à la station-service à
16 Vitez.
17 M. Susak (interprétation). - Est-ce qu'il y travaillait
18 immédiatement avant la guerre ? Est-ce qu'il s'y trouvait le 15 avril 93 ?
19 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas, mais probablement
20 oui parce qu'il y travaillait.
21 M. Susak (interprétation). - Avez-vous discuté avec lui, le
22 connaissez-vous ?
23 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'était quelqu'un de bavard.
24 M. Susak (interprétation). - Donc vous le connaissez.
25 Monsieur le Président, je n'ai plus de questions pour le témoin.
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1 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.
2 Maître Puliselic ?
3 M. Puliselic (interprétation). - Monsieur le Président, je
4 souhaiterais juste poser une question au témoin, si c'est possible.
5 M. le Président (interprétation). - Je vous en prie.
6 M. Puliselic (interprétation). - Monsieur Vidovic, pouvez-vous
7 nous dire si vous aviez un surnom ?
8 M. Vidovic (interprétation). - Oui, Acko.
9 M. Puliselic (interprétation). - Je vous remercie. Je n'ai plus
10 de questions.
11 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.
12 Maître Terrier ?
13 M. Terrier. - Merci, Monsieur le Président. Monsieur le Témoin,
14 mon nom est Franck Terrier. Je suis l'un des représentants de l'accusation
15 dans ce procès. Je vais vous poser quelques questions.
16 Vous nous avez dit tout à l'heure que vous habitiez Pirici-le-
17 bas. Est-ce que vous pouvez préciser exactement où se trouve ou où se
18 trouvait votre maison ? Quels étaient vos voisins ?
19 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Ma maison se trouve au bord
20 de la route principale. Avant l'entrée dans le village d'Ahmici, ma maison
21 se trouve à une centaine de mètres si on vient dans le village en
22 provenance de Vitez, peut-être même moins.
23 M. Terrier. - Monsieur le Témoin, quelle était votre profession
24 à l'époque ? Vous nous avez dit qu'aujourd'hui, vous êtes menuisier, mais
25 à l'époque, quelle était votre profession ?
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1 M. Vidovic (interprétation). - Je venais de terminer mes études
2 et je n'avais pas encore d'emploi. Avant la guerre, j'entends.
3 M. Terrier. - Avez-vous suivi une formation professionnelle qui
4 vous destinait à une profession particulière ?
5 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Après la guerre, un
6 séminaire a été organisé à Vitez et j'ai obtenu une autre qualification
7 plus tard, un autre diplôme.
8 M. Terrier. - Vous nous avez dit que votre surnom est Acko. Quel
9 est le nom de votre père ?
10 M. Vidovic (interprétation). - Simun.
11 M. Terrier. - Donc quand quelqu'un parle de Andljelko Vidovic,
12 fils de Simun, autrement appelé Acko, c'est bien de vous qu'il s'agit ?
13 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
14 M. Terrier. - Avez-vous un ou des frères ?
15 M. Vidovic (interprétation). - J'ai un frère et trois soeurs.
16 M. Terrier. - Pouvez-vous indiquer le prénom de votre frère ?
17 M. Vidovic (interprétation). - Vinko Vidovic.
18 M. Terrier. - Quelles étaient les activités de Vinko à
19 l'époque ? Je parle du mois d'octobre 92 au mois d'avril 93. Quelles
20 étaient les activités de votre frère Vinko à cette époque-là ?
21 M. Vidovic (interprétation). - Comme tout le monde.
22 M. Terrier. - Je suis obligé de vous demander de préciser tout
23 de même.
24 M. Vidovic (interprétation). - Ce qu'il faisait, comme tous les
25 autres, il était déployé sur la ligne.
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1 M. Terrier. - Vous voulez dire qu'il n'avait pas de profession
2 dans le cadre civil mais qu'il avait des activités militaires ?
3 M. Vidovic (interprétation). - Oui, probablement. Je ne suis pas
4 sûr.
5 M. Terrier. - Comment cela, vous n'êtes pas sûr ? Vous êtes
6 nécessairement sûr ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Oui, moi je me trouvais à Kuber
8 sur la ligne et on ne se voyait que rarement.
9 M. Terrier. - Est-ce qu'il est exact de dire que vous, comme
10 votre frère Vinko, vous n'aviez pas d'activité civile, mais vous étiez
11 occupés à titre militaire pendant cette période qui va d'octobre 1992 à
12 avril 1993 et au-delà bien entendu ?
13 M. Vidovic (interprétation). - J'étais mobilisé pendant la
14 guerre, et j'allais à Kuber. Donc je suis devenu soldat.
15 M. Terrier. - Pouvez-vous dire quand vous avez été mobilisé ?
16 M. Vidovic (interprétation). - Au moment où la guerre a
17 commencé, les circonstances l'ont voulu.
18 M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez préciser l'époque ou même
19 la date à laquelle vous avez été mobilisé ?
20 M. Vidovic (interprétation). - Le jour, c'était la date quand
21 les Musulmans nous ont attaqués à Kuber.
22 M. Terrier. - Donc vous avez été mobilisé le 16 avril 1993 ?
23 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'est exact.
24 M. Terrier. - Mais depuis au moins le 13 avril 1993, vous aviez
25 une activité militaire puisque vous montiez la garde sur une ligne de
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1 front, est-ce bien exact ?
2 M. Vidovic (interprétation). - On s'était organisés nous-mêmes.
3 Il ne s'agissait pas de mobilisation au sens propre.
4 M. Terrier. - Est-il exact dans ces conditions de dire, Monsieur
5 le Témoin, que la notion de mobilisation est une notion purement formelle
6 mais qu'en réalité elle n'a rien changé sur le terrain ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Je ne vous ai pas compris.
8 M. Terrier. - Je vais passer à une autre question. Est-ce que
9 vous connaissez Zeljo Vidovic ?
10 M. Vidovic (interprétation). - Non.
11 Oui, je connais une personne qui porte ce nom-là. Il a un frère,
12 Bruno, et c'est un boulanger à Vitez. C'est mon cousin.
13 M. Terrier. - Pardonnez-moi, Zeljo Vidovic est votre cousin,
14 c'est bien cela ?
15 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
16 M. Terrier. - Est-ce que vous savez où il se trouvait le
17 16 avril 1993, votre cousin Zeljo Vidovic ?
18 M. Vidovic (interprétation). - Vous parlez de Zeljo Vidovic ?
19 M. Terrier. - Zeljo Vidovic, où se trouvait-il le
20 16 avril 1993 ?
21 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas. Il habite à Vitez
22 et moi, j'habite ailleurs. Je me trouvais à Kuber, je ne sais même pas où
23 se trouvaient mes parents et encore moins où il se trouvait lui.
24 M. Terrier. - Vous nous avez dit, Monsieur le Témoin, que le
25 13 avril 1993, par amitié pour votre ami Zarko Kristo et parce que Kuber
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1 est un bel endroit, vous êtes allé monter la garde, mais vous n'aviez pas
2 d'uniforme et vous n'aviez pas d'armes car vous étiez en surnombre. J'ai
3 bien compris vos déclarations ?
4 Vous nous avez dit qu'à Kuber étaient responsables
5 Zeljo Livancic et Ivo Pranjkovic ?
6 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
7 M. Terrier. - A quel titre ces deux personnes étaient-elles
8 responsables ? S'agissait-il de soldats ?
9 M. Vidovic (interprétation). - Ils étaient comme nous. Mais
10 chaque village avait un président de la communauté locale, et c'est cette
11 personne-là qui décidait des tâches confiées aux hommes. Personne n'avait
12 d'uniforme. Pas eux.
13 M. Terrier. - Pouvez-vous préciser, Monsieur le Témoin, quelles
14 étaient les responsabilités d'un président de la communauté locale ?
15 M. Vidovic (interprétation). - Quelle que soit la tâche, la
16 mission, qu'il s'agisse de la construction d'une route, c'est lui qui
17 décidait, c'était lui le responsable dans les villages j'entends, dans le
18 village duquel il était responsable.
19 M. Terrier. - C'était la situation de Zeljo Livancic ?
20 M. Vidovic (interprétation). - Oui, lorsqu'il s'agit de Kuber.
21 M. Terrier. - Monsieur le Témoin, est-ce qu'avant d'aller au
22 mois d'avril 1993 à Kuber, vous aviez subi un entraînement à caractère
23 militaire ?
24 M. Vidovic (interprétation). - Non, je n'ai même pas fait de
25 service militaire dans l'ancienne armée.
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1 M. Terrier. - Je vous pose cette question parce qu'un témoin,
2 Mirsad Ahmic, a déposé devant le juge d'instruction de Zenica le
3 9 novembre 1994 et a dit que plusieurs mois avant le conflit, vous et
4 votre frère Vinko, vous avez suivi un entraînement militaire à Celiste, à
5 Nadioci.
6 Qu'est-ce qu'il y a de drôle à cela ?
7 M. Vidovic (interprétation). - Je n'ai jamais entendu parler
8 d'une localité portant le nom Celiste ! Il n'y a pas eu d'entraînement.
9 Mon frère a fait son service militaire dans l'ancienne Armée yougoslave,
10 mais moi je n'ai même pas fait mon service militaire.
11 M. Terrier. - Vous est-il arrivé de vous rendre avant le
12 16 avril 1993 au Bungalow ? Vous connaissez le Bungalow ?
13 M. Vidovic (interprétation). - Oui, je sais où se trouve le
14 Bungalow. Mais je ne m'y rendais pas.
15 M. Terrier. - Vous avez parlé tout à l'heure des événements du
16 20 octobre 1992. Où étiez-vous le 20 octobre 1992 ?
17 M. Vidovic (interprétation). - Vous pensez à la date à laquelle
18 le conflit a commencé ? Je n'ai pas très bien compris.
19 M. Terrier. - Vous avez parlé de ce qui s'est passé le
20 20 octobre 1992, à Ahmici, le premier conflit. Je vous demande où vous
21 étiez ce jour-là.
22 M. Vidovic (interprétation). - J'étais chez moi, une explosion
23 m'a réveillé le matin.
24 M. Terrier. - Qu'avez-vous fait au cours de cette journée ? Est-
25 ce que vous avez pris part aux événements ?
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1 M. Vidovic (interprétation). - Non, puisque je ne savais pas ce
2 qui se produisait. Le poste de contrôle était un peu plus loin par rapport
3 à ma maison là où le conflit à éclaté
4 M. Terrier. - Je vous pose cette question parce qu'un témoin
5 Salih Ahmic a déclaré au juge d'instruction de Zenica le 20 décembre 1994,
6 vous avoir vu vous, Andjelko Vidovic, alias Acko, fils de Simun, tirer sur
7 la maison de Mehmed Ahmic et mettre ainsi en danger sa famille.
8 Mme Glumac (interprétation). - S'il vous plaît, Monsieur le
9 Président, ce que je n'arrive pas à savoir, c'est de quel témoin il
10 s'agit. Quels sont les témoins que cite Monsieur le Procureur ? Nous ne
11 les avons pas entendus et il vient de mentionner un Ahmic, on n'a même pas
12 pu saisir le prénom de cet Ahmic, en disant qu'il aurait déclaré telle ou
13 telle chose. Je ne sais pas d'où il tire ces informations. Ce ne sont pas
14 des témoins qui ont été cités à comparaître ici, pendant la présentation
15 des moyens de preuve jusqu'à présent. Nous ne sommes pas en mesure de
16 suivre les questions du Procureur, s'il vous plaît.
17 M. Terrier. - Monsieur le Président je reconnais qu'il y a là
18 une question de méthode, mais aussi une difficulté pour l'accusation.
19 Il se trouve que nous avons évidemment des témoins qui, sur des
20 questions tout à fait périphériques par rapport à l'accusation, sans citer
21 par exemple l'un ou l'outre des accusés, mentionnent le témoin, le témoin
22 qui vient aujourd'hui. Et il se trouve que ces déclarations de témoins
23 sont tout à fait contradictoires avec ce que les témoins qui ont déposé
24 par écrit, sont tout à fait contradictoires avec ce que dit ici le témoin.
25 Alors, je me conformerai bien entendu aux directives du Tribunal, mais je
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1 ne sais pas très bien comment procéder. Est-ce que nous devons remettre
2 ces déclarations ? Est-ce que nous devons nous interdire d'évoquer ces
3 déclarations écrites dont nous disposons ? Est-ce que nous devons
4 auparavant les remettre à la défense ? C'est un point de méthode. Je
5 conviens qu'il existe, je conviens qu'il peut y avoir une difficulté pour
6 la défense dans la méthode que je suis à cet instant, et pour cette
7 raison-là, je me conformerai aux directives de la Cour.
8 J'ai plusieurs déclarations écrites de témoins que nous n'avons
9 jamais communiquées il est vrai à la défense, car elles ne se rapportent
10 pas directement à la situation des accusés, mais qui évoquent très
11 précisément le témoin et son comportement dans des termes tout à fait
12 différents de ce qu'il a dit lui-même au Tribunal. Je me conformerai à vos
13 directives.
14 (Les Juges se consultent sur le Siège.)
15 M. le Président. - Nous considérons que comme il s'agit de
16 déclarations que vous n'avez pas remises, si j'ai bien compris, à la
17 défense, donc, il faudrait éviter, il faut éviter de mentionner ces
18 déclarations, mais vous pourriez peut-être utiliser des informations que
19 vous tirez de ces déclarations pour poser des questions au témoin pour
20 contester des faits au témoin, et parce que nous considérons que les
21 questions que vous allez poser ou que vous avez posées en effet peuvent
22 être pertinentes pour ce qui est de la crédibilité du témoin. Mais donc,
23 il faut éviter de citer une déclaration ou le nom de quelqu'un que vous
24 avez interviewé à l'époque.
25 M. Terrier. - En fait Monsieur le Président, il y a trois types
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1 de déclarations que j'entends, dans le cadre de ce contre-interrogatoire,
2 opposer au témoin. Il y a des déclarations qui ont été faites ici devant
3 le Tribunal sous serment. Pas de difficulté bien entendu. Il y a des
4 déclarations écrites de témoins qui ont été communiquées à la défense,
5 dans le cadre de l'article 66. Certains de ces témoins sont venus mais
6 n'ont pas évoqué la situation particulière de ce témoin, car il n'y avait
7 pas de raison de le faire. Et ce sont des déclarations dont dispose la
8 défense, et il y a effectivement des déclarations dont la défense ne
9 dispose pas. Donc je me conforme aux directives du Tribunal pour ce qui
10 concerne les déclarations dont la défense n'a pas connaissance.
11 M. le Président. - Merci.
12 Mme Glumac (interprétation). - Monsieur le Président, si vous me
13 le permettez, je tiens à préciser un point pour savoir quelle est
14 l'attitude que nous devons adopter à l'avenir. Il y aura un certain nombre
15 de problèmes puisqu'il y a des déclarations qui effectivement ont été
16 communiquées à la défense, mais ces témoins n'ont pas comparu, ils n'ont
17 pas déposé devant la Chambre. Ainsi donc, nous n'avons pas eu la
18 possibilité de les contre-examiner, de les contre-interroger et nous
19 n'avons pas pu contester un certain nombre de faits. Par conséquent, si
20 l'accusation pose un certain nombre de questions, cherchant à dire que ce
21 témoin a affirmé des choses alors que ce témoin n'a pas déposé ici, n'a
22 pas été contre-interrogé et que sa déclaration ait été communiquée à la
23 défense, à en juger d'après l'exposé du Procureur, c'est quand même très
24 contestable de lui autoriser la possibilité de citer ces éléments.
25 Donc nous estimons qu'effectivement il peut se servir de toutes
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1 les informations dont il dispose dans les déclarations, mais sans citer
2 ces témoins et ces déclarations comme il vient de le faire. D'ailleurs la
3 défense n'a pas le droit d'agir de la sorte.
4 M. Terrier. - Monsieur le Président, je suis un peu surpris il
5 me semble que donner le nom de la personne qui a fait la déclaration,
6 c'est-à-dire citer la source à laquelle je me réfère, est une garantie
7 pour la défense. Elle peut de cette manière-là vérifier les questions que
8 je pose et le bien-fondé des questions que je pose. Il me semble que citer
9 le nom, dès lors qu'ils ont le document à leur disposition, est pour eux
10 une garantie. Bon, s'ils ne souhaitent pas disposer de cette garantie, je
11 me conformerai à ce souhait, mais il me semble que c'est une garantie.
12 Par ailleurs, il y a le problème que n'évoque pas Me Glumac, du
13 témoin qui a été entendu par le Tribunal, mais qui a fait plusieurs
14 déclarations écrites et qui dans ces déclarations écrites, a évoqué des
15 faits qui n'ont pas été évoqués au cours de l'audience. Ces témoins
16 évidemment n'ont pas été invités chacun à répéter tout ce qui se trouvait
17 dans leur déclaration écrite, ils n'ont été invités à répéter que ce qui
18 était utile à l'époque au procès, c'est-à-dire grosso modo les
19 informations dont ils disposaient concernant les accusés mais non pas
20 concernant toutes les personnes qui sont intervenues à un titre ou l'autre
21 au cours de ces événements.
22 Donc il me semble que pour garantir réellement les droits de la
23 défense, qu'elle puisse vérifier la source à laquelle je me réfère, dès
24 lors qu'ils disposent de cette source, que cette déclaration leur a été
25 communiquée, il me semble utile que je puisse donner le nom.
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1 M. Radovic (interprétation). - Monsieur le Président, je ne peux
2 absolument pas accepter ce que vient d'affirmer le Procureur, avant tout
3 pour la raison suivante : nous ne savons pas si le témoin que cite le
4 Procureur devant cette Chambre, déclarerait la même chose que ce qu'il a
5 dit devant le Tribunal de Zenica. Si on cherchait à suivre ce que vient
6 d'affirmer le Procureur, à savoir qu'il faut faire confiance à ce qu'a dit
7 le témoin devant le juge d'enquête de Zenica, alors, (expurgée)
8 (expurgée)
9 (expurgée)
10 Donc s'agissant de la déclaration préalable, il faudrait que ce
11 témoin l'a confirme. Tant que nous n'avons pas la possibilité d'interroger
12 ce témoin, afin de savoir s'il s'agit d'un témoin fiable et crédible ou
13 non, le Procureur ne peut pas citer des documents et pour affirmer sur la
14 base de ces témoins, de ces papiers que ce qui est dit est fiable et
15 crédible. Nous nous opposons donc à cette ligne d'interrogatoire et nous
16 estimons qu'il a violé le principe de la publicité et nous estimons que le
17 Procureur cite des éléments pour lesquels personne ne sait si ces éléments
18 auraient été confirmés devant la Chambre ou non. Je vous demande donc de
19 ne pas autoriser le Procureur de poursuivre de la sorte puisque nous
20 n'avons aucun moyen d'établir la fiabilité et la crédibilité de ces
21 témoins, car il s'agit des témoins qui viennent du territoire musulman et
22 qui de toute manière ne souhaitent pas prendre contact avec nous. Ce sera
23 tout.
24 M. Terrier. - Monsieur le Président, si vous me le permettez une
25 observation sur ce que vient de dire Me Radovic.
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1 Maître Radovic vient de dire que j'affirme certains faits sur la
2 base de documents qui ne sont pas soumis à l'examen contradictoire des
3 parties. Je n'affirme rien, je ne fais que poser des questions en
4 soumettant au témoin des déclarations qui sont contraires aux siennes. La
5 vérité, je l'espère, viendra de cette confrontation faite à l'audience et
6 devant les Juges.
7 Par ailleurs, je pense que le fait que la défense dispose de
8 documents écrits relatant les déclarations que j'évoque est une garantie
9 que le contradictoire n'est pas mis en cause de ce point de vue.
10 (expurgée)
11 (expurgée)
12 (expurgée)
13 (expurgée)
14 (expurgée)
15 (expurgée)
16 (expurgée)
17 (expurgée)
18 (expurgée)
19 (expurgée) Il se trouve que si l'on suivait la position de Me Radovic et de
20 Me Glumac, il faudrait, chaque fois qu'un témoin de l'accusation comparait
21 devant le Tribunal, l'interroger sur tout ce qu'il a vu de manière à tout
22 prévoir de ce qu'il peut après s'en suivre.
23 Je pense qu'il faut garder raison, il faut permettre aux
24 contradictoires de s'exercer, il faut que la défense puisse examiner de
25 manières contradictoires les documents que l'accusation évoque, mais, si
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1 je considère qu'effectivement il y a un problème lorsque j'évoque ici dans
2 le cadre de l'interrogatoire une pièce dont la défense n'a pas
3 connaissance, là je reconnais qu'il y a un problème.
4 Je pense que lorsque j'évoque une pièce qui a été communiquée à
5 la défense il y a plusieurs mois, je suis dans le cadre du débat
6 contradictoire et je ne porte pas atteinte aux droits de la défense.
7 (Les Juges se consultent sur le Siège.)
8 M. le Président. - Reprenons donc les trois catégories dont
9 Me Terrier nous a parlé. Il va sans dire que pour ce qui est de la
10 catégorie des personnes qui ont été entrevues par l'accusation, et pour
11 lesquelles l'accusation n'a pas passé à la défense de déclarations, le
12 Procureur ne peut pas poser des questions en citant la personne qui a été
13 interviewée.
14 On a déjà décidé que vous allez, Maître Terrier, vous borner à
15 poser des questions, à contester des faits, sans citer toutefois la source
16 de vos informations parce qu'en effet il s'agit de documents que la
17 défense ignore parce qu'elle n'a pas eu la possibilité d'examiner ces
18 documents.
19 Autre catégorie, la catégorie des documents qui concernent les
20 témoin pour lesquels on a passé à la défense les déclarations et qui ont
21 été cités ici, donc qui ont été l'objet du contre-interrogatoire, même si
22 le contre-interrogatoire n'a pas porté sur les faits ou les éléments que
23 le Procureur souhaite soulever ici. Donc il a le droit de poser ces
24 questions.
25 Maître Terrier a raison, il ne peut pas, chaque fois qu'on cite
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1 un témoin, lui poser toute une série de questions en songeant qu'à
2 l'avenir... Autrement, il faudrait revenir sur la question. Il a donc le
3 droit de poser la question.
4 Maintenant, que va-t-on faire pour ce qui est de la troisième
5 catégorie, donc une personne pour laquelle, Me Terrier, l'accusation a
6 passé les déclarations à la défense ; mais la défense, comme le témoin n'a
7 pas été cité, n'a pas eu la possibilité de contre-interroger la personne.
8 Nous considérons que Me Terrier a le droit de poser des
9 questions en citant aussi la source. Pourquoi ? Parce qu'il ne s'agit pas
10 d'éléments de preuve. C'est-à-dire qu'il va citer une déclaration et non
11 pas la preuve donnée par le témoin en salle d'audience. La déclaration
12 n'est pas un élément de preuve, c'est une source qui peut être contestée ;
13 donc qu'elle a la valeur qu'elle a, donc une valeur qui va être évaluée
14 par la Cour à la lumière de la preuve qui se forme à l'audience. Dans ce
15 système de contre-interrogatoire, la preuve se forme à l'audience. Ce
16 n'est pas une preuve qui existe avant.
17 Donc nous considérons qu'à la lumière de tout cela, Me Terrier,
18 et l'accusation, a le droit de poser des questions parce que la défense
19 doit comprendre la valeur limitée de la référence qu'on va faire à une
20 déclaration écrite d'une personne qui n'a pas témoignée.
21 Comme elle n'a pas témoigné, la personne n'a pas témoigné, nous
22 considérons bien qu'il s'agit d'un élément, de quelque chose qui n'a pas
23 la valeur d'un élément de preuve, mais qui peut être très utile pour
24 contester des faits ; et je crois que, là aussi, je suis d'accord avec
25 Me Terrier, cela en effet constitue aussi une garantie pour la défense. Du
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1 fait qu'on cite une déclaration spécifique émanant d'une personne dont la
2 défense connaît le nom et tous les éléments, la défense a des éléments de
3 garantie.
4 Maître Radovic ?
5 M. Radovic (interprétation). - Monsieur le Président, nous ne
6 nous attendions pas à ce que la décision de la Chambre soit comme vous
7 venez de l'énoncer. Il s'agit là d'un point que nous avons contesté et
8 nous allons utiliser notre droit de déposer une requête à ce sujet.
9 M. le Président (interprétation). - D'accord, merci.
10 Maître Par ?
11 M. Par (interprétation). - Une question, si vous me le
12 permettez, concernant votre décision. Ce que je ne comprends pas au sujet
13 de ces déclarations de la troisième catégorie que vous venez d'énoncer,
14 c'est si cela veut dire que M. le Procureur peut citer cette déclaration
15 en en lisant une partie uniquement par rapport au témoin qu'il est en
16 train d'interroger et non pas par rapport au reste du contenu de ces
17 déclarations ?
18 Je ne sais pas si je suis suffisamment clair. Nous avons
19 aujourd'hui un exemple. On souhaite présenter au témoin une partie d'une
20 déclaration. S'agit-il uniquement de la partie qui concerne ce témoin qui
21 est présent ici, ou bien peut-on rentrer dans le reste du contenu de cette
22 déclaration ?
23 M. le Président. - Ce que nous avons décidé, c'est que le
24 Procureur peut poser une question, peut contester un fait, un témoin en
25 disant : "Ecoutez, quelqu'un d'autre -et il cite le nom, et il peut même
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1 lire un passage de la déclaration- affirme que ce jour-là vous étiez
2 ailleurs", par exemple, je ne sais pas, à Pirici au lieu d'être à Kuber.
3 On cite un fait, et voilà. Le témoin -et cela c'est l'élément de preuve-
4 peut dire oui ou non, peut contester ce fait ou dire "Oui, c'est vrai".
5 Donc l'élément de preuve qui se forme à l'audience résulte, découle de ce
6 que le témoin dit. La contestation de la part du Procureur d'un fait
7 spécifique avec citation de la source de ce fait a pour but de pousser le
8 témoin à dire ce qu'il sait, donc à dire oui ou non ou à donner sa version
9 des faits.
10 M. Par (interprétation). - Je vous ai bien compris, mais je ne
11 sais pas si j'ai moi-même été assez clair. Ainsi donc, au moment où
12 Me Terrier cite cela, est-ce qu'il peut dire : "Ce témoin a dit au sujet
13 de vous, Monsieur Vidovic, telle ou telle chose" ? Ou bien M. Terrier
14 peut-il dire la chose suivante : "Ce témoin a déclaré dans ses
15 déclarations telle ou telle chose sur telle ou telle personne" ? Autrement
16 dit, peut-il uniquement citer des choses s'agissant concrètement du
17 témoin ?
18 M. le Président. – Oui, seulement le témoin, oui bien sûr, parce
19 que c'est une contestation précise qui a pour but, je le répète, d'amener
20 le témoin à se prononcer sur un fait qui peut être contesté.
21 Vous comprenez bien la différence entre la valeur probante de la
22 déclaration de cette personne qui n'a pas été citée et qui donc n'est pas
23 venue à la Cour, qui n'a pas été contre-interrogée, et la valeur de preuve
24 de ce que le témoin qui est là peut dire sur le même fait. Il y a une
25 différence quand même.
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1 M. Par (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le
2 Président. Je me conformerai à votre décision.
3 M. le Président – Merci. Maître Terrier ?
4 M. Terrier. – Merci, Monsieur le Président.
5 Monsieur le Témoin, puis-je avoir votre attention ? Avez-vous
6 pris part aux événements du 20 octobre 1992 à Ahmici étant armé ? Avez-
7 vous tiré sur des maisons ? Avez-vous agi militairement ce jour-là à
8 Ahmici ?
9 M. Vidovic (interprétation). - Non.
10 M. Terrier. – Monsieur le Témoin, avez-vous, après le
11 20 octobre 1992 et pendant quelques jours, tenu un point de contrôle à
12 l'entrée d'Ahmici étant armé et en uniforme ?
13 M. Vidovic (interprétation). - Non. Il y avait là uniquement ...
14 (L'interprète signale qu'elle n'a pas compris le nom de
15 famille.)
16 ... et comme il n'était pas présent, je gardais leur maison, moi
17 et mon père. Et ma mère aussi devait traire leurs vaches, tant qu'ils
18 étaient absents.
19 M. Terrier. – Avez-vous effectué cette garde étant en uniforme
20 et armé ?
21 M. Vidovic (interprétation). - Non, puisqu'à l'époque, je
22 n'avais ni fusil ni aucune autre arme, ni uniforme.
23 M. Terrier. – Monsieur le Témoin, vous nous avez dit que le
24 13 avril 1993, vous êtes donc allé à Kuber, et que, dans la nuit du 15 au
25 16 avril, vous avez été de garde de 2 à 4 heures du matin, qu'à 4 heures
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1 du matin vous êtes allé vous coucher, que vous vous êtes réveillé vers 5
2 ou 6 heures et que vous avez été attaqué vers 10 heures. J'ai bien compris
3 vos déclarations ?
4 M. Vidovic (interprétation). - Oui.
5 M. Terrier. – Est-ce que lorsque vous vous êtes réveillé entre
6 5 heures 30 et 6 heures, vous avez entendu le bruit du "conflit" qui avait
7 lieu à Ahmici à ce moment-là ?
8 M. Vidovic (interprétation). - Non, rien d'autre que cet obus
9 qui est tombé sur nous. Nous ne pouvions rien voir en bas puisque le
10 brouillard était très dense, voilà.
11 M. Terrier. – Je ne parlais pas de voir, Monsieur le Témoin,
12 mais d'entendre. Le brouillard ne devait pas vous empêcher d'entendre ce
13 qui se passait à Ahmici.
14 M. Vidovic (interprétation). - On n'entendait rien et personne
15 ne nous a informés de rien.
16 M. Terrier. – Monsieur le Témoin... Je vous demande une seconde,
17 Monsieur le Président. Monsieur le Président, je vais évoquer le nom de
18 certains témoins qui ont déposé ici et qui ont été protégés, donc je pense
19 que nous devrions passer en audience à huis clos. Peut-être peut-on
20 suspendre ?
21 M. le Président. - Oui, en effet. Je crois comprendre que vous
22 avez beaucoup d'autres questions. Donc un certain nombre de questions.
23 M. Terrier. – La plupart se référant à des témoignages protégés.
24 M. le Président. – Alors on va procéder à huis clos, mais peut-
25 être que cela vaudrait la peine de faire maintenant une pause de
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1 30 minutes et ensuite, lorsqu'on recommencera, on passera à huis clos.
2 Parfait.
3 L'audience, suspendue à 10 heures 25, est reprise à 11 heures
4 Audience à huis clos partiel.
5 (expurgée)
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12 Pages 10139 à 10147 – expurgées – audience à huis clos partiel.
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22 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. En
23 l'absence d'autres questions, nous pouvons lever l'audience jusqu'à demain
24 matin 9 heures.
25 L'audience est levée à 11 heures 20.