Affaire no.: IT-98-30/1-A
LA CHAMBRE D’APPEL

Devant :
M. le Juge David Hunt, Juge de la mise en état en appel

Assisté de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
16 juin 2003

LE PROCUREUR

C/

Miroslav KVOCKA, Mlado RADIC, Zoran ZIGIC et Dragoljub PRCAC

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DÉCISION RELATIVE À LA DEMANDE D’AUTORISATION DE L’ACCUSATION DE DÉPASSER LE NOMBRE LIMITE DE PAGES

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Le Bureau du Procureur :

M. Christopher Staker

Les conseils de la Défense :

M. Krstan Simic, pour Miroslav Kvocka
M. Toma Fila, pour Mlado Radic
M. Slobodan Stojanovic, pour Zoran Zigic
M. Jovan Simic, pour Dragoljub Prcac

 

1. Dans le cadre de la requête aux fins d’admission de moyens de preuve supplémentaires à l’appui de l’appel interjeté contre la déclaration de culpabilité, déposée par trois des quatre appelants restants, en application de l’article 115 du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement »), et qui s’étire quelque peu en longueur , l’appelant Zoran Zigic (« Zigic ») a déposé une réplique1. Dans le cadre de cette procédure en application de l’article 115, l’Accusation a déposé un document dans lequel elle reprochait à la Réplique de soulever des points qui, d’après elle, appelaient une réponse et elle a demandé l’autorisation d’y répondre 2. Ce document contenait également la duplique de l’Accusation3, qui portait sur quatre (ou peut-être cinq) points.

2. L’Accusation a été autorisée à déposer une duplique en se limitant à deux de ces points, parce que c’était là les deux seuls points nouveaux soulevés dans la Réplique4, à savoir a) le point exposé au paragraphe 6 de la Réplique selon lequel l’Accusation a manqué à ses obligations de communication prescrites à l’article 68 du Règlement, et b) le point exposé au paragraphe 9 selon lequel les trois déclarations antérieures du témoin sont admissibles aux fins de renforcer la crédibilité de celui-ci5. Il est également indiqué dans la Décision6 :

Étant donné que l’argumentation proposée en duplique concernant le deuxième de ces points, telle qu’exposée dans la Réponse au Supplément, n’envisage pas la possibilité que la conduite du procès en première instance aurait rendu admissibles les déclarations antérieures recoupant la déposition du témoin au procès, et la Chambre d’appel demandant des éclaircissements sur ce point de la part de l’Accusation, cette dernière est priée de déposer séparément une Duplique à la Réplique dans laquelle elle exposera de manière distincte (et de préférence, en détail) ses arguments sur ces deux points7.

3. Le document déposé en exécution de la Décision comprend (mise à part une annexe, dont il n’est pas tenu compte) la page de garde, 12 pages complètes d’argumentation et une page supplémentaire sur laquelle figurent une ligne et demi d’argumentation, la signature du conseil et la date8. Ce document contient une demande d’autorisation de dépasser de 4 pages la limite de 10 pages (page de garde comprise) fixée par la Directive pratique relative à la longueur des mémoires et des requêtes9 s’agissant des réponses aux requêtes. Comme « circonstances exceptionnelles », qu’une partie est tenue de fournir pour être autorisée à déposer une écriture plus longue 10, l’Accusation a fait valoir que le deuxième point soulevé (l’admissibilité des déclarations antérieures recoupant la déposition du témoin au procès) « nécessit[ait] des recherches, ainsi que l’examen et l’analyse de la jurisprudence pertinente11 ».

4. L’Accusation ne s’est pas conformée à la Directive pratique, qui exige que l’autorisation de déposer une écriture plus longue soit demandée à l’avance12, mais au vu des circonstances de l’espèce, la Chambre ne rejette pas la Demande d’autorisation pour cette seule raison. Le problème réside dans le fond de la demande.

5. On peut comparer les 13 pages déposées par l’Accusation concernant les deux points pour lesquels elle a été autorisée à déposer une duplique aux arguments avancés dans sa Demande d’autorisation s’agissant des quatre (ou peut-être cinq) points pour lesquels elle demandait une autorisation, exposés en moins de deux pages. L’Accusation s’est épuisée en efforts inutiles dans sa Duplique :

1) S’agissant du premier des deux points pour lesquels l’Accusation a été autorisée à déposer une duplique (« le point exposé au paragraphe 6 de la Réplique selon lequel l’Accusation a manqué à ses obligations de communication prescrites à l’article 68 du Règlement »), il était indiqué dans la Décision qu’il s’agissait là d’une « question nouvelle, et [que] l’Accusation est en droit de s’expliquer sur les circonstances de la communication des éléments en question13  ». C’est ce qu’elle a fait aux paragraphes 7 à 18 de la Duplique, sur un peu plus de trois pages. Elle a ainsi complété de manière satisfaisante les arguments qu’elle avait avancés dans sa Demande d’autorisation, à l’exception du paragraphe 10, où sont exactement répétés les arguments des paragraphes 7 et 8. Cependant, dans cette partie, l’Accusation a consacré presque une page à la question de la diligence voulue (par. 5 et 6), un point pour lequel la Chambre avait refusé son autorisation.

2) S’agissant du deuxième de ces points (« le point exposé au paragraphe 9 selon lequel les trois déclarations antérieures du témoin sont admissibles aux fins de renforcer la crédibilité de celui-ci »), il est indiqué dans la Décision qu’étant donné que l’argumentation exposée dans la Demande d’autorisation « n’envisage pas la possibilité que la conduite du procès en première instance aurait rendu admissibles les déclarations antérieures recoupant la déposition du témoin au procès », et « la Chambre d’appel demandant des éclaircissements sur ce point de la part de l’Accusation »14, cette dernière pouvait préciser ses arguments sur ce point, comme sur le premier. L’Accusation s’est expliquée aux paragraphes 20 à 44, sur un peu plus de six pages, dont cinq sont consacrées à l’admissibilité des déclarations antérieures et concordantes d’un témoin, un point qu’il n’y avait pas vraiment lieu de développer (et certainement pas dans de telles proportions). Les seuls éclaircissements demandés par la Chambre qui ont été fournis quant à la question de savoir si la conduite du procès en première instance aurait rendu admissibles les déclarations antérieures recoupant la déposition du témoin au procès se trouvent à la dernière phrase du paragraphe 43 :

L’Accusation n’était pas tenue de mettre en doute la crédibilité du témoin en présentant au procès des déclarations antérieures et contradictoires, laissant ainsi la possibilité à la Défense de demander l’admission des déclarations antérieures et concordantes.

Cet argument est dûment développé au paragraphe 43. Les autres arguments exposés aux paragraphes 39 à 43, qui totalisent environ une page et demi, étaient pertinents dans le cadre de la Duplique.

6. Au vu de ces circonstances, ainsi qu’il a été déclaré lors de la conférence de mise en état :

a) l’autorisation de dépasser de quatre pages le nombre limite de pages est refusée  ; et

b) une duplique conforme à la Directive pratique peut être déposée au plus tard le jeudi 19 juin 2003.

Zoran Zigic peut déposer une réponse à cette duplique dans un délai de sept jours à compter de la date du dépôt de celle-ci.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Fait le 16 juin 2003
La Haye (Pays-Bas)

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M. le Juge David Hunt
Juge de la mise en état en appel

[Sceau du Tribunal]


1 - (Confidential) Zoran Zigic’s Reply to Prosecution’s Response to Zoran Zigic’s Second Motion to Present Additional Evidence, 19 mai 2003 (la « Réplique »).
2 - (Confidential) Prosecution’s Response to the “Supplement to Zoran Zigic’s Second Motion to Present Additional Evidence” and Prosecution Motion to File a Further Pleading, 29 mai 2003 (« Demande d’autorisation »).
3 - Au paragraphe 4 de sa Demande d’autorisation, l’Accusation indique que sa duplique se trouve dans la partie C du document, intitulée « Prosecution’s Reply to the Zigic Second Motion Reply ». Au paragraphe 18, elle signale que cette partie porte sur des « points soulevés dans la réplique à la deuxième requête de Zoran Zigic qui appelaient une réponse ».
4 - Décision relative à la demande d’autorisation de l’Accusation aux fins de déposer une duplique, 6 juin 2003 (la « Décision »).
5 - Décision, par. 6 1).
6 - Ibid., par. 5.
7 - La « Réponse au Supplément » correspond au document que nous avons appelé « Demande d’autorisation » dans la présente décision.
8 - Prosecution’s Further Response to the Reply Pursuant to “Decision on Application by Prosecution for Leave to File Further Response”, 12 juin 2003 (la « Duplique »).
9 - IT/184 Rev. 1, 5 mars 2002 (la « Directive pratique »), par. 5.
10 - Ibid., par. 7.
11 - Duplique, par. 3.
12 - Directive pratique, par. 7.
13 - Décision, par. 4 ii).
14 - Ibid. par. 5.