Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 18 janvier 2005

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 27.

5 M. KHAN : [interprétation] Avant de faire entrer le témoin, Monsieur le

6 Président, s'il vous plaît, pour venir en aide à l'Accusation, je dois dire

7 que je leur ai notifié une transcription de l'interview de la Défense.

8 L'entretien mené par l'équipe de la Défense avec ce témoin auquel ils ont

9 assisté. Ceci a été présenté, Madame, Messieurs les Juges, pour pouvoir

10 venir en aide aux Juges de la Chambre et permettre à cette affaire

11 d'avancer.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Khan, cela est très apprécié et

13 nous permettra de résoudre une des questions posées et ce, dans l'intérêt

14 de l'Accusation.

15 Vous êtes, je crois, au milieu de votre interrogatoire principal.

16 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, je suis plutôt vers la fin.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Plutôt vers la fin que le milieu.

18 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vais tenter d'être bref. Comme j'ai

19 terminé hier, j'ai eu la possibilité de relire les comptes rendus et les

20 entretiens qui ont eu lieu précédemment. Je vais essayer de ne pas trop

21 répéter ce qui a déjà été fait. Madame, Messieurs les Juges, vous parlez de

22 la différence entre les différentes déclarations et ce que le témoin a

23 déclaré devant vous hier.

24 Deux questions simplement administratives. Le rapport que j'ai montré

25 au témoin, l'intercalaire numéro 6, qu'il a identifié, là où il reconnaît

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1 sa signature qui porte le numéro U000-7650 à 51. Je demande à ce que ce

2 document soit versé au dossier, s'il vous plaît.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agit là de sa déclaration

4 préalable ?

5 M. NICHOLLS : [interprétation] Non. Il s'agit de l'ordre que je lui ai

6 montré hier concernant un groupe de personnes ainsi que des risques

7 provoqués par les pilonnages. Ceci se trouve à l'intercalaire numéro 6.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Ceci pourra être versé au

9 dossier.

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce de l'Accusation portant le numéro

11 P93.

12 M. NICHOLLS : [interprétation] Pages 35 à 37 du compte rendu d'hier, j'ai

13 indiqué qu'il s'agissait de la carte P1. Au niveau du compte rendu, cela

14 n'était pas clair. Il s'agit en réalité de la carte numéro 6 comportant le

15 numéro U008-3706.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous lui avez également montré la

17 carte numéro 10.

18 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, et ceci apparaît clairement au compte

19 rendu d'audience. C'est la carte qui lui a été montrée juste avant la carte

20 numéro 10.

21 Il y a autre chose qui vous a été remis. Si vous regardez le dos de ce

22 document.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

24 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui. Très bien.

25 Si je puis, je vais tâcher rapidement de parcourir certains de ces écarts.

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1 Je vais tenter de vous citer les pages concernées. Hier, Madame, Messieurs

2 les Juges, au cours du témoignage, le témoin dit avoir rencontré Fatmir

3 Limaj et lorsqu'il a appris quel était son pseudonyme, Celiku, par

4 opposition au moment où il le connaissait sous le nom de Fatmir, Fatmir

5 Limaj. Ceci apparaît au compte rendu d'audience aux pages 44 à 47, que vous

6 avez devant vous. Le témoin, dans sa déposition hier, a dit devant la

7 Chambre,

8 "Qu'aucun nom n'a été cité, que cette personne ne lui a pas été présentée.

9 A ce moment-là, cela n'était pas très clair. Il ne savait pas si cette

10 personne lui avait été présentée sous le nom de Fatmir ou Celiku. Mais, à

11 ce moment-là, il le connaissait sous le nom de Celiku. Je ne suis pas tout

12 à fait certain. Il est possible qu'il m'ait été présenté comme étant

13 l'oncle 'Daja', si je me souviens bien."

14 "-- mais, au moment où nous nous sommes rencontrés," un peu plus loin : "il

15 ne se souvient pas si la personne lui a été présentée comme étant Daja.

16 L'échange était très court."

17 Bien. Monsieur le Président, vous avez indiqué que, par rapport à un

18 passage de sa déclaration, ceci n'était pas très clair. Le témoin ne se

19 souvenait plus, après cette réunion avec Fatmir Limaj au mois de mars 1998,

20 sous quel nom il le connaissait.

21 Dans l'entretien avec l'Accusation en 2003, le compte rendu que vous avez

22 date du mois de novembre 2003. Cela est beaucoup plus clair et beaucoup

23 plus précis. Il est beaucoup plus clair et beaucoup plus précis dans ses

24 réponses. On lui pause la question suivante :

25 "Q. Connaissez-vous Fatmir Limaj. Saviez-vous qui s'appelait Celiku ?

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1 R. Non. Pas au début. Lorsque je le connaissais, je le connaissais sous le

2 nom de Celiku. Après, j'ai appris quel était son nom."

3 Un peu plus loin:

4 "Q. Lorsqu'il est arrivé accompagné de son groupe en Suisse, vous ne

5 connaissiez pas son nom ?

6 R. Non, je ne connaissais pas son nom.

7 Q. Mais, lorsqu'il est allé de l'autre côté de la route, vous ne le

8 connaissiez pas ou comment avez-vous appris à le connaître ?

9 R. Après un mois ou deux, j'ai eu connaissance de son nom également.

10 C'était Fatmir. Mais au début, il était le commandement de l'Unité Celiku."

11 J'ai apporté les notes de l'enquêteur hier qui vous ont été également

12 fournies ainsi que l'entretien en présence de l'équipe de la Défense. Les

13 notes de l'enquêteur ont également été remises à la Défense qui déclarait

14 comme suit, posée par la Défense : connaissiez-vous le pseudonyme de Fatmir

15 Limaj, et il a répondu que c'était toujours Celiku.

16 On nous a remis un enregistrement du compte rendu quelques minutes avant le

17 début de l'audience. Je dois remercier mes collègues pour m'avoir permis

18 d'éclaircir ceci. Si vous regardez à la page 7, de ce compte rendu, vous

19 constaterez qu'en haut, vous avez la question de celui qui pose des

20 questions dans l'équipe de la Défense.

21 "Q. Vous dites avoir connu Fatmir. Quel surnom avait-il ?

22 R. (du général Selimi) Je connaissais Fatmir, et son surnom était Celiku."

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous avez cité la page 7 ?

24 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est la pagination sur --

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous avons ici une numérotation tout à

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1 fait différente --

2 M. NICHOLLS : [interprétation] Pardonnez-moi. Je parle ici de l'anglais,

3 compte rendu des questions posées au témoin par l'équipe de la Défense au

4 mois d'octobre 2004. Je pense que Me Khan a dit qu'il en avait fourni un

5 exemplaire aux Juges de la Chambre également.

6 Pour ce qui est du tableau auquel vous avez fait référence, Madame,

7 Messieurs les Juges, cela se trouve à la page 1 et 2 de ce tableau que je

8 vous ai remis.

9 Encore une fois, d'après les notes de l'enquêteur et d'après le compte

10 rendu d'audience en anglais, ceci est très clair.

11 Question posée en 2004, le témoin a déclaré qu'il connaissait Fatmir et que

12 son surnom était Celiku. Ceci était la question posée au mois d'octobre

13 2004 par l'équipe de la Défense.

14 Comme je vous l'ai dit, les questions qui ont été posées à ce sujet n'ont

15 pas été très claires, hier. Les réponses fournies par le témoin n'ont pas

16 été très claires, hier. En revanche, ce qui est clair, c'est que le témoin

17 ait dit que le pseudonyme ou le surnom de Fatmir a toujours été Celiku. Il

18 l'a toujours dit que ce soit dans ses déclarations préalables ou par

19 rapport à ce qu'il a dit hier. Le surnom de "Daja" n'a jamais été évoqué

20 jusqu'à présent.

21 Un autre domaine qui est contesté se trouve en haut de la page 6 de

22 ce tableau que je vous ai fourni et je parle ici des écarts et non

23 concordance entre son témoignage et ses déclarations qu'il a faits

24 précédemment. Il s'agit du document que vous aviez sous les yeux, Monsieur

25 le Président, il y a quelques instants.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Monsieur Nicholls.

2 M. NICHOLLS : [interprétation] Il s'agit en fait de la question de Fatmir

3 Limaj et de ce monsieur qui était commandant des unités de Celiku et qui

4 étaient déployées dans la zone de Pastrik, qui jouxte la zone de Drenica,

5 qui est celle qui était la zone de responsabilité du témoin au mois de mai

6 1998. Sous le compte rendu à la page 39, ici le compte rendu d'audience, le

7 témoin a répondu à la question :

8 "Q. Quelles unités y avait-il de l'autre côté de la route ?

9 R. De l'autre côté de la route, il n'y avait aucune formation. Il y avait

10 quelques unités. Ces quelques unités de Celiku qui commençaient à

11 s'organiser, à ce moment-là, mais travaillaient de façon indépendante."

12 Un peu plus tard, j'ai posé la question très précisément à la page 47

13 du compte rendu :

14 "Q. Qui était le commandant des unités Celiku dans la bataille du

15 mois de mai 1998, la bataille dans les gorges de Lapusnik ?

16 R. Je vous ai répondu un peu plus tôt. Les unités qui étaient là,

17 n'avaient pas de commandant et opéraient de façon indépendante, et

18 agissaient de façon tout à fait indépendante."

19 Un peu plus bas, il dit : "Les unités, comme je vous l'ai dit,

20 n'étaient pas harmonisées et elles n'avaient pas de commandant."

21 Encore une fois, un peu plus bas, à la page 7 de mon tableau : "Donc

22 les unités ont opéré de façon complètement indépendantes à ce moment-là."

23 Il s'agit là d'une question essentielle et les réponses du témoin ont

24 été différentes. Précédemment à la droite de la page 6, nous avons le

25 compte rendu des pages 32 et 33. Ici retranscription de l'entretien de

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1 l'Accusation avec le témoin en 2003. Aux pages 32 et 33, est précisé ceci :

2 lorsqu'une question a été posée sur la date à laquelle Fatmir Limaj est

3 arrivé de l'étranger en 1998 : "Est-ce qu'il s'est d'abord présenté dans

4 votre région ?" Question posée au témoin.

5 Un peu plus bas le témoin a déclaré : "Je ne sais pas exactement s'il

6 était basé à Klecka. L'état-major était basé à Klecka, à ce moment-là, et

7 Fatmir souhaitait cela également car il était originaire de cette région.

8 Il connaissait un certain nombre de personnes de la région."

9 Le témoin a déclaré : "Bien évidemment, il avait un rôle au sein de

10 l'état-major et on lui avait demandé de mettre sur pied ces unités. Il

11 connaissait bien la région et il devait se mettre en contact, ou en tout

12 cas coordonner les opérations de ces unités avec les Unités de Celiku."

13 A la page 7, on poursuit :

14 "Q. Vous, en tant que commandant, est-ce que vous étiez en contact

15 direct avec Fatmir Limaj à propos de ces questions, ou à propos de ces

16 gorges, et à propos de Lapusnik ?

17 R. En général, les ordres nous venaient de l'état-major général."

18 Ceci a été expliqué un peu plus tôt. Il y avait une ligne

19 hiérarchique. Il y avait une zone de commandement et il y avait en dessous

20 des commandants comme lui, il y avait les unités.

21 Plus bas à la page 8 de ce tableau --

22 M. KHAN : [interprétation] Pardonnez-moi, si j'interromps. J'ai essayé de

23 ne pas le faire, mais cela n'est pas clair. Je ne comprends pas ce que fait

24 mon éminent confrère. S'il y a très clairement non concordance entre le

25 témoignage qui a été entendu hier et un entretien mené avec l'Accusation,

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1 je pense que ceci peut être fait de manière beaucoup plus succincte. On

2 peut indiquer aux Juges de la Chambre qu'il y a eu une modification au

3 niveau de l'histoire.

4 Mon éminent confrère est en train simplement de passer en revue un nombre

5 important de pages. Je ne pense pas que cela suffit pour transformer le

6 témoin en témoin de la partie adverse.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Khan.

8 Je dois reconnaître que pour ce qui me concerne, j'ai du mal à suivre

9 tout ce que vous dites, Monsieur Nicholls, mais en substance, je crois que

10 ce que vous voulez faire, c'est comparer le témoignage d'hier, ou en tout

11 cas, l'opposer aux dépositions de ce témoin à d'autres occasions.

12 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est tout à fait exact.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il est vrai que l'endroit où apparaît

14 cette différence n'est pas toujours aisé à signaler. Je comprends bien que

15 dans votre tête cela est clair, mais que pour les Juges de la Chambre, ils

16 connaissent mal le contenu de tous ces entretiens. Il est important en tout

17 cas, à propos de deux points que vous avez cités, il est vrai que la

18 distinction très précise entre deux éléments, ne m'est pas apparue de façon

19 très claire.

20 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 Il y a effectivement une non concordance très claire entre les noms

22 sous lesquels était connu Fatmir Limaj. Devant la Chambre il a clairement

23 indiqué, il ne se souvenait pas très bien. Il était un peu confus et il a

24 déclaré qu'en 1998, il ne se souvenait pas comment on le lui avait

25 présenté. C'est la première fois qu'il cite ce nom de l'oncle ou Daja.

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1 Dans les entretiens précédents, il a clairement indiqué que c'était Celiku,

2 le commandant Celiku des unités de Celiku. Quelques mois plus tard, il a

3 appris que cette personne du nom de Celiku était en réalité le commandant

4 des unités de Celiku et qu'il s'agissait en réalité de Fatmir Limaj,

5 premier point.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Premier point. Mais je dois parler

7 pour essayer d'expliquer ceci qu'au mois de mars 1998, il connaissait

8 l'accusé sous le nom de Celiku.

9 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est tout à fait exact. Il connaissait le

10 nom Celiku; cependant, c'est différent de ce qu'il a déclaré plus tôt car

11 il le connaissait sous le nom de commandant Celiku. Il ne savait pas que le

12 nom de cette personne était Fatmir Limaj. Dans d'autres entretiens, seul le

13 surnom qu'il a évoqué, celui de Celiku.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il y avait d'autres surnoms qui ont

15 été cités, ou est-ce que c'est simplement le surnom de Celiku qui a été

16 désavoué par le témoin. Il est dit ne pas connaître ce nom-là depuis le

17 début.

18 M. NICHOLLS : [interprétation] Non, Monsieur le Président, il ne s'agit pas

19 de l'élément non concordant le plus important; néanmoins, c'est un point

20 pertinent et important.

21 Le deuxième point que j'ai évoqué, et qui est le plus important, est le

22 moment où il assurait le commandement des unités de Celiku.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

24 M. NICHOLLS : [interprétation] Il s'agit d'une période bien précise qui

25 commence au mois de mai 1998. Le témoin a déclaré devant la Chambre hier,

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1 il a réitéré ceci deux fois. Il a dit que ces unités, en mai 1998, au cours

2 de la bataille des gorges de Lapusnik, elles n'avaient aucun commandant.

3 C'est ce qu'il a dit dans son témoignage. Dans d'autres déclarations --

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cette réponse portait sur quelle

5 époque ?

6 M. NICHOLLS : [interprétation] Mai 1998. La question est à la page 47 :

7 "Qui était le commandant des unités de Celiku pendant la bataille des

8 gorges de Lapusnik au mois de mai." Je crois que la date du 9 n'est pas

9 indiquée. C'est le 9 mai 1998. La réponse encore a été de dire qu'il n'y

10 avait pas de commandant.

11 Dans une autre partie du compte rendu que j'ai indiquée, il dit avoir eu

12 connaissance du nom de Celiku les quelques mois qui ont précédé cette

13 époque là. Il connaissait le commandant Celiku, qui commandait les Unités

14 de Celiku.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Où est-ce que vous y trouvez ceci ?

16 Vous parlez ici du début de la page 7; c'est exact ?

17 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est la page 37, Madame, Messieurs les

18 Juges. A la page 37, c'est le compte rendu d'audience de l'Accusation, un

19 des entretiens en présence de l'Accusation.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agit de quel compte rendu, s'il

21 vous plaît ?

22 M. NICHOLLS : [interprétation] Page 2 du tableau que je vous ai fourni.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Page 2 du tableau.

24 M. NICHOLLS : [interprétation] A droite. En fait, la colonne de droite.

25 Nous les avons ici, les déclarations préalables.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous vous reportez à ceci au début,

2 "C'était davantage le commandant de l'unité de Celiku ?"

3 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous vous reposez là-dessus ?

5 M. NICHOLLS : [interprétation] Pas seulement. Je ne me reporte pas

6 seulement à cela. Il y a également d'autres déclarations.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Mais avant que vous ne

8 passiez à autre chose, où se trouve l'apostrophe du mot unité ? Il n'est

9 pas au bon endroit, mais si vous le mettez au bon endroit, il est au

10 singulier, ce qui semble être conforme au témoignage; si vous rajoutez un

11 "s", bien sûr, à ce moment-là, vous auriez l'apostrophe et le "s".

12 M. NICHOLLS : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Je

13 l'entends au pluriel. Il y a d'autres déclarations qui indiqueraient qu'il

14 y a un pluriel ici, parce qu'il y avait évidemment de multiples unités de

15 Celiku.

16 Je regarde maintenant la page 8 de ce tableau, pages 35 et 36 de

17 l'entretien du témoin avec l'Accusation. Ceci se poursuit à la page 9. On a

18 demandé au témoin si le nom des unités de Celiku -- ou d'où venait ce nom,

19 unités de Celiku. Après quelques questions, il a répondu en disant, il a

20 tout d'abord dit qu'il ne savait pas, et ensuite il a dit que :

21 "R. C'était à cause de sa personnalité, ou en tout cas, la manière dont

22 les unités se battaient.

23 Q. Les unités de Fatmir ?

24 R. Oui."

25 Egalement, ceci est en contradiction avec son témoignage d'hier à la page

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1 47, ce que vous n'avez pas dans votre tableau. On lui a demandé s'il savait

2 d'où venait le nom, Unités de Celiku. Il a répondu en disant : "Je ne sais

3 pas".

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez faire une pause, je vous

5 prie.

6 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Pardonnez-moi si je

8 vous ai retardé.

9 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

10 Si vous tournez à la page 10, à droite de ce tableau, ici c'est un extrait

11 de l'entretien avec l'Accusation, en haut du compte rendu, page 39. On a

12 demandé au témoin :

13 "Q. Je me demande si vous saviez qui commandait les forces à Lapusnik, de

14 l'autre côté de la route et plus bas que Fatmir Limaj ?

15 R. Plus bas ?

16 Q. Oui, plus bas.

17 R. En tout cas quelqu'un qui était son subordonné. Je ne connaissais

18 personne dans cette ligne hiérarchique ou la structure de commandement dans

19 cette région, à l'exception de Fatmir, dont je connaissais le nom. Mais je

20 ne connaissais personne d'autre dans cette région."

21 Un peu plus bas l'entretien de l'Accusation, page 40, celui qui pose

22 les questions tente de clarifier ce point :

23 "Q. En guise de conclusion, le seul nom et position de cette région

24 de l'autre côté de la route des unités de Celiku, la seule chose que vous

25 savez c'est que Fatmir Limaj commandait cette région ?

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1 R. Pardon ?

2 Q. Le seul nom et la seule position dont vous avez connaissance, eu

3 égard aux unités de Celiku, est cet homme Fatmir Limaj, qui en était le

4 commandant.

5 R. Fatmir Limaj était le nom de Kumanova également, mais je ne le

6 connaissais pas. Je ne l'avais vu qu'une seule fois."

7 Ici le témoin déclare que Fatmir Limaj était le commandant des Unités

8 de Celiku.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vais vous demander de faire une

10 pause à nouveau, s'il vous plaît. Je digère ce que vous dites et je prends

11 des notes en même temps.

12 Merci.

13 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai évoqué cette

14 question hier. A l'intercalaire 18 de vos classeurs, c'est l'article rédigé

15 en 2000 par le témoin, entretien donné au journal Zeri. A la page 12 de cet

16 entretien en anglais, nous avons la traduction ici --

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agit d'un entretien avec un

18 journaliste, c'est exact ?

19 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, c'est tout à fait exact, Monsieur le

20 Président. C'est un entretien qui a duré longtemps. Il était en plusieurs

21 volets. A la page 12, le titre, ici, de cette partie c'est : "Où et comment

22 nous avons fermé les gorges de Lapusnik."

23 A la page 13, le journaliste pose la question : "La bataille pour les

24 gorges de Lapusnik représente un des éléments-clé de cette guerre. Comment

25 les unités de votre zone ont-elles contribué à cette bataille ?"

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1 Le témoin poursuit en parlant de l'importance de cette bataille. Ceci

2 doit être la bataille du 9 mai car, plus tard dans l'article, ils évoquent

3 l'offensive serbe qui a eu lieu à la fin du mois de juillet. La bataille a

4 été perdue, les gorges ont été perdues, et l'importance de cette bataille

5 ou accordée à cette bataille par l'homme qui est interviewé est la même

6 chose qu'il a décrite hier au cours de son témoignage. Il parle de

7 l'ouverture d'un axe pour que l'UCK puisse emprunter cet axe routier.

8 Un peu plus loin, le témoin déclare dans sa réponse que les soldats

9 appartenaient à la 113e et la 121e Brigades. Il déclare : "Les Unités de la

10 Brigade 121, qui allaient être formées plus tard, dirigées par le

11 commandant Celiku, Fatmir Limaj, opéraient de l'autre côté."

12 C'est exactement ce qu'il a dit hier, hormis le fait que lorsqu'il

13 parlait hier il a dit que ces unités n'avaient pas de commandants, ces

14 unités qui, par la suite, devaient être intégrées ou faire partie de la

15 121e Brigade.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

17 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci. Cela ne se trouve pas dans le

18 tableau, mais c'est une référence au compte rendu de l'entretien que le

19 témoin a accordé aux représentants de la Défense en octobre 2004. Si vous

20 prenez la page 5 de ce compte rendu, Monsieur le Président, la troisième

21 question qui a été posée au témoin, à la page 5, on lui demande : quelle

22 était sa zone opérationnelle lorsqu'il a rallié l'UCK ? Quelle était sa

23 fonction ou sa tâche.

24 Dans le contexte, il est évident que c'est une question qui fait

25 référence à Fatmir Limaj, puisque la question précédente était quand est-ce

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1 que le témoin a rencontré Fatmir Limaj. Je ne vais pas vous donner lecture

2 de l'ensemble de la réponse, mais d'une partie de la réponse qui était

3 comme suit : "A ce moment-là lorsque Fatmir est arrivé à Drenica, Fatmir

4 était connu sous le nom de Celiku." Ensuite, il est indiqué qu'il avait

5 exercé sa responsabilité à Pastrik quand j'étais commandant de la zone.

6 Lorsque vous avez la responsabilité d'une zone, c'est la même que

7 lors de la déposition d'hier : il est arrivé dans la zone et, en fait,

8 lorsqu'il a établi ces unités, qu'il avait une responsabilité dans la zone

9 de Pastrik, de l'autre côté de la route.

10 La dernière question qui est posée à la page 5 est comme suit :

11 "Q. Mais ces unités, comme vous les appelez, les unités de Celiku 1,

12 2, 3, est-ce que vous saviez comment elles opéraient ? Qui dirigeait ces

13 opérations ?

14 R. Je ne sais pas comment elles opéraient parce qu'il s'agissait

15 d'une autre zone de responsabilité. La responsabilité que j'avais dans la

16 zone de Drenica était divisée suivant les différentes brigades. Fatmir

17 avait une zone de responsabilité pour ce qui est de la route qui commence

18 par Komorane et Klina."

19 Ensuite, il parle encore de la 113e Brigade.

20 Il parle de cette route qui est, en fait, la ligne de démarcation qui

21 permet de diviser les zones de responsabilités avec Fatmir Limaj au moment

22 où les unités de Celiku 1, 2 et 3 ont été créées, et ce, après le retour de

23 Fatmir Limaj qui revenait de l'Occident. D'ailleurs, il faut savoir que

24 dans le contexte, cela s'est passé pendant la période mars/mai 1998.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

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1 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais maintenant

2 mettre en exergue le thème des mesures disciplinaires. Il y a eu un long

3 dialogue qui porte sur quelque cinq pages de compte rendu d'audience, de la

4 page 29 à la page 34. Après moult questions, et après quelques difficultés,

5 et je parle en fait des pages 12 à 17 du tableau, le témoin a indiqué qu'il

6 était possible que l'on dise à un soldat de quitter l'unité, que le soldat

7 pouvait être congédié. Je pense qu'il y a eu de nombreux efforts déployés

8 de sa part pour essayer d'éviter de répondre à mes questions.

9 Vous avez la page 12 qui fait référence aux pages 44 et 45 de

10 l'entretien que M. Selimi a accordé aux représentants du bureau du

11 Procureur. On lui pose une question très, très simple :

12 "Q. Que se passerait-il, que se passait-il, s'il y avait un conflit

13 entre les soldats ou si un soldat quittait son poste ? Quelle sorte de

14 mesures disciplinaires était à votre disposition ?

15 R. Le commandant de l'équipe, le commandant de la compagnie

16 présentait un rapport au bataillon au commandant de la brigade qui devait

17 prendre une décision. A l'époque, nous n'étions pas préparé pour ce genre

18 d'éventualités. En fait, nous avons véritablement appris de façon

19 empirique.

20 Q. Par exemple, si quelqu'un se comportait, elles sont véritablement

21 désastreuses, qu'il s'agissait plus d'un conflit ? Est-ce que vous pouviez

22 renvoyez cette personne de l'unité ?

23 R. Oui, oui, souvent. Souvent, ce qui se passait, en fait, c'est ce qu'on

24 leur reprenait les armes, on leur reprenait l'uniforme. Cela, c'était la

25 pire des choses qui pouvait leur arriver puisqu'ils ne pouvaient plus

Page 2127

1 jamais être membre de l'UCK, plus jamais."

2 A la fin de la déposition, il donne une réponse qui est assez logique. Je

3 pense que cet un autre exemple, s'il en fut, des efforts du témoin qui

4 essaie d'éviter de répondre à des questions, et qui essaie de ne pas nous

5 fournir les mêmes informations que celles qu'il a fourni dans ses

6 déclarations précédentes.

7 Nous avons, en fait, aujourd'hui, transmis une lettre, et je pense

8 que la Chambre de première instance l'a déjà reçue. Elle est adressée à la

9 Chambre de première instance, c'est une lettre qui a été envoyée en

10 novembre 2004, et il indique qu'il ne sera pas un témoin pour l'Accusation.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous ne l'avons pas.

12 M. NICHOLLS : [interprétation] Je m'en excuse. Je pense que la lettre a été

13 distribuée.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agit de la première page de la

15 liasse de documents. Il s'agit de la liasse qui porte sur l'analyse des

16 entretiens de l'Accusation, nous ne l'avions pas vu jusqu'à présent.

17 M. NICHOLLS : [interprétation] Bon. J'ai inclus cette lettre, Monsieur le

18 Président, car il s'agit de deux questions qui sont assez différentes. Dans

19 un premier temps, il s'agit du fait que le témoin est un témoin de la

20 partie adverse, conformément aux règles que je connais, puisqu'en fait il

21 s'est aligné à la partie opposée, ce qui est manifestement la situation de

22 ce témoin. Il a déclaré ouvertement qu'il ne souhaitait pas venir pour

23 nous. Me Khan a indiqué hier que le témoin avait refusé d'être un témoin de

24 l'Accusation, et qu'il était tout à fait disposé à être un témoin de la

25 Défense. Donc, il se considère adverse au bureau du Procureur.

Page 2128

1 Deuxièmement, il s'agit en fait des Règlements de preuve et de procédure

2 des Etats-Unis numéro 611, en fait, je pense que je devrais être autorisé à

3 utiliser des questions directrices s'il est déclaré comme témoin de la

4 partie adverse. Qui plus est --

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Non, non, pas qui plus est. Je ne

6 pense pas que nous en sommes là au Tribunal.

7 M. NICHOLLS : [interprétation] Très bien. Je voulais juste indiquer par le

8 truchement de cette lettre et en vous montrant ces déclarations, que

9 lorsque cette injonction de production lui a été présentée, il a également

10 à nouveau déclaré à la personne qui lui délivrait cela : je ne veux pas

11 venir. Il a obéi à une injonction, mais il s'agit d'un témoin de la partie

12 adverse. J'ai montré plusieurs exemples à la Chambre de première instance

13 qui prouvent qu'il s'agit également d'un témoin hostile en ce sens qu'il

14 essaie d'éviter de fournir l'information requise, et qu'il a donné

15 différentes déclarations hier, ici, une déposition qui est tout à fait

16 différente des entretiens qu'il a accordé auparavant, à la Défense, à la

17 presse. Il s'agit d'une contradiction évidente. Il essaie manifestement

18 d'essayer d'éviter de répondre aux questions.

19 Je pense, en fait, qu'en matière de jurisprudence, il y a quelque chose

20 d'acquis. Je demande à pouvoir poser des questions directrices afin de

21 pouvoir lui poser des questions pour essayer d'élucider ces questions, et

22 pour essayer de faire en sorte qu'il explique pourquoi il y a ces

23 discordances. Il n'y a pas de jury qui permettra à la Chambre de première

24 instance de mieux évaluer sa déposition. Je pense avoir prouvé qu'il

25 s'agissait d'un témoin hostile et d'un témoin de la partie adverse. Il

Page 2129

1 s'agit d'un témoin hostile au sens juridique du terme ou de l'expression.

2 La Chambre de première instance étudiera la question, et si la Chambre de

3 première instance n'est pas d'accord avec ce que j'avance, je demanderai à

4 pouvoir présenter à nouveau une requête s'il y a encore des moments où il

5 nous communique des questions qui seront différentes de ce qu'il a indiqué

6 dans les déclarations précédentes.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que nous pouvons indiquer

8 d'ores et déjà que si nous ne faisons pas droit à cette requête, il ne vous

9 sera pas possible de renouveler cette requête si quelque chose de nouveau

10 se produisait. Donc, vous n'aurez pas besoin d'en demander la permission.

11 Est-ce que vous en avez terminé, Monsieur Nicholls ?

12 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous vous portez volontaire, Maître

14 Topolski ?

15 M. TOPOLSKI : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je me tournais vers Me Khan.

17 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je me porte volontaire.

18 Nous indiquons que cette requête n'est pas fondée. Nous indiquons, en

19 fait, que la Chambre de première instance peut adopter sans aucun problème

20 le principe qu'un témoin de la partie adverse signifie un témoin hostile,

21 et non pas seulement un témoin qui n'est pas bien disposé. Nous ne

22 concédons absolument pas ce faisant, que c'est à quoi nous parvenons

23 aujourd'hui, et nous ne pensons pas que nous en sommes proches non plus.

24 Nous espérons pouvoir vous être utiles en présentant une ou deux idées, et

25 ce, afin de placer cette requête dans son contexte, car nous pensons et

Page 2130

1 nous avançons que le contexte a son importance. Car c'est en évaluant le

2 contexte que nous pourrons savoir ce qui aurait dû se passer, ici.

3 Premièrement, il s'agit d'un commandant de l'UCK. Je pense à ce témoin, il

4 s'agit d'un commandant de l'UCK qui a une certaine expérience. Il vient ici

5 aujourd'hui, c'est un général qui est encore en exercice au KPC. C'est au

6 vu de ces circonstances que nous invitons la Chambre de première instance à

7 lire la dernière phrase de la lettre qui a été rédigée en son nom qui

8 indique le fait qu'il n'est pas disposé à présenter sa déposition. Il nous

9 donne des raisons et il faut savoir qu'il ne fait pas preuve d'animosité

10 vis-à-vis du bureau du Procureur, mais il s'agit de reconnaître la position

11 délicate du point de vue historique, et la position délicate dans laquelle

12 il se trouve aujourd'hui.

13 Il faut savoir, et M. Nicholls nous l'a dit hier et nous en

14 convenons, il est le seul témoin qui a été interrogé par une équipe de la

15 Défense qui avait demandé que le bureau du Procureur soit représenté

16 pendant cet entretien. Ce qui est une indication, et c'est ce que nous

17 avançons, qu'il est très éloigné du sentiment d'animosité vis-à-vis de la

18 partie qui l'a convoqué. Il n'a pas présenté de déclaration signée au

19 bureau du Procureur. Il a fait l'objet d'une injonction de comparution, et

20 on lui a demandé de venir. Une lettre a été rédigée en son nom, une lettre

21 a été rédigée à la fin du mois de novembre 2004.

22 Toutefois, et nonobstant tous ces éléments, ils ont choisi de le

23 convoquer. Ils ont choisi, en fait, de la convoquer pour pouvoir le

24 déstabiliser. Car à partir de 1946 un précédent avait été adopté, il

25 s'agissait, en fait, d'une affaire médicale au procès de Nuremberg. Ils

Page 2131

1 auraient pu demander au Tribunal de convoquer ce témoin. Mais lorsque l'on

2 connaît le contexte, lorsque l'on connaît l'historique, je pense que c'est

3 une requête, qui aurait certainement été considérée de façon favorable.

4 J'aimerais maintenant m'éloigner du contexte, et revenir sur ce qui

5 s'est passé hier, et voilà ce j'aimerais avancer. Dans un premier temps, il

6 faut pouvoir reconnaître, car cela a son importance, qu'à l'instar de tous

7 les témoins qui viennent ici, ou qui viennent dans n'importe quel tribunal

8 du monde, que s'ils ne s'expriment pas dans leur propre langue, si on leur

9 pose des questions par l'entremise d'un interprète, il y a certaines

10 difficultés inhérentes ou potentielles. Comme tout témoin, nous indiquons

11 que ce témoin continuera à bénéficier du fait que l'on -- si on lui posait

12 des questions claires et concises. C'est avec regret que nous avançons le

13 fait suivant, lors de l'interrogatoire principal d'hier cela n'a pas

14 toujours été le cas.

15 Je vais vous donner des exemples, je vais vous donner des exemples de

16 questions qui selon moi englobent quatre questions en une. A la page 13 du

17 compte rendu non corrigé, ligne 3 :

18 "Q. Pourquoi est-ce qu'il aurait eu des contacts avec l'état-major

19 général, quelle en était la nature, que lui aurait dit de faire l'état-

20 major général, ou quel était la ou les raisons de ces contacts ?"

21 Il s'agit de quatre questions exprimées en une seule et même

22 question. La réponse du témoin qui est maintenant qualifié comme un témoin

23 faisant preuve d'animosité, a été de dire :

24 "R. J'espère que c'est une question qui est destinée à l'état-major

25 général et non pas à moi."

Page 2132

1 Nous indiquons que ce genre de question et des questions qui sont

2 assez directrices représentent une des caractéristiques principales de cet

3 interrogatoire principal jusqu'à présent, dans la mesure où ce n'est

4 qu'après l'intervention de la Chambre de première instance, que nous avons

5 pu obtenir des renseignements assez clairs, à propos de la réunion et de la

6 rencontre avec Limaj. D'ailleurs, Limaj depuis les six dernières semaines,

7 n'a jamais réfuté le fait qu'il était Celiku, d'après ce que je crois

8 comprendre.

9 Je vais vous donner un exemple d'une question directrice à propos

10 d'une question qui porte à controverse. En fait, alors

11 M. Nicholls a demandé :

12 "Q. Quand est-ce que les brigades ont été créées, et par qui ?"

13 Cela a son importance, lorsqu'on examine la question du conflit armé

14 à la page 39. Voilà la question qui est posée :

15 "Q. Le 9 mai 1998, vous vous souvenez probablement de cette date,

16 que se passait-il et qu'est-il advenu de la 113e Brigade ? Les unités

17 Pellumbi qui ont commencé dans cette zone ?"

18 Peu importe ce que signifie la question, mais cela pose comme point

19 de départ, le fait qu'il existait une 113e Brigade le 9 mai. En fait, il

20 faut savoir que lorsque nous avons essayé de mener à bien une analyse très

21 circonspecte de ce que nous a présenté cet après-midi, même si on mène à

22 bien une analyse particulièrement minutieuse, il est évident que lorsque

23 quelqu'un accorde un entretien à la presse ou lorsque quelqu'un fait des

24 déclarations à d'aucun, il faut lorsque l'on mène à bien une analyse de ce

25 qui a été dit, il est évident que cela va permettre de dégager des

Page 2133

1 décalages ou des discordances. D'ailleurs, M. Nicholls a jeté le gant,

2 lorsqu'il vous a demandé de prendre la page 12, et qu'il a mentionné la

3 question de la personne qui menait à bien un entretien, il a dit qu'il

4 s'agit d'une question très simple. Regardez la question simple :

5 "Q. Que se passerait-il s'il y avait un conflit entre soldats, ou

6 qu'un soldat a quitté son poste, quelles sont les mesures disciplinaires

7 qui étaient à votre disposition ?"

8 C'est une question qui appelle une réponse. C'est une question qui

9 est simple, claire, concise, précise. Voilà quel est le problème d'après

10 nous. Il ne s'agit pas d'un comportement d'hostilité ou d'animosité vis-à-

11 vis de l'Accusation.

12 La requête qui consiste à pouvoir mener à bien un

13 contre-interrogatoire, car c'est véritablement ce que veut dire et ce que

14 veut M. Nicholls, il s'agit en fait d'un article accordé à la presse. Il

15 met en quelque sorte la charrue avant les bœufs, car il n'y a pas de preuve

16 que cet article a repris de façon exacte ce qui avait été dit. Je pense que

17 c'est certainement l'écueil que devra surmonter M. Nicholls. Il s'agit en

18 fait d'une question de principe, a-t-il la possibilité de poser des

19 questions à propos d'un article donné à la presse par un témoin ?

20 Voilà, Monsieur le Président, le contexte, voilà quel est le point de

21 vue que nous exprimons dans notre présentation et c'est la raison pour

22 laquelle nous avons indiqué d'emblée au début de notre réponse, que nous

23 pensons que cette requête n'est pas fondée et ne comporte aucune

24 justification, et qu'il ne devrait pas être fait droit à cette requête.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

Page 2134

1 Maître Khan.

2 M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je m'excuse. Je pensais que c'était

4 encore Me Topolski, je vais maintenant vous donner la parole.

5 M. KHAN : [interprétation] Je vous remercie. Je ne vais pas répéter

6 ce que vient d'indiquer mon estimé confrère. J'ai énormément de sympathie

7 pour mon estimé confrère, mais je dirais que nous avons maintenant gaspillé

8 plus d'une heure d'un temps de la Chambre de première instance, qui est

9 extrêmement précieux. Monsieur le Président, il faut savoir que nous

10 faisons tous les efforts possibles pour faire en sorte d'avoir une

11 procédure aussi rapide que possible. Ce matin, par exemple, nous avons eu

12 une réunion avec l'Accusation, pour nous mettre d'accord à propos de toute

13 une série de témoins experts. Lorsque les témoins sont dans le prétoire,

14 nous n'essayons pas de retarder la procédure, et dans ce contexte afin

15 justement d'essayer de faire en sorte que la roue continue de tourner. Nous

16 souhaiterions faire en sorte que cela soit traité de façon juste et

17 équitable, malheureusement je dois vous dire que j'ai un sentiment de

18 malaise, car je pense que la requête présentée par mon estimé confrère, est

19 un tant soi peu frivole et dénuée de justification. Compte tenu des Règles,

20 nous savons que la requête a été présentée, et il a été indiqué sans aucune

21 information et sans aucun fondement que nos frais juridiques n'ont pas été

22 payés. Cette requête a été faite, et il faut savoir qu'il y a en plus un

23 semblant de diffamation qui a maintenant a été jetée contre un officier

24 supérieur du Kosovo.

25 Il y a beaucoup de témoins qui considèrent, qui ont un extrême estime

Page 2135

1 pour mon client. Vous vous souviendrez peut-être que lors de la déclaration

2 liminaire, vous vous souviendrez certainement de ce qu'avait dit mon estime

3 confrère Me Mansfield, il se peut qu'il y ait d'autres témoins qui

4 viendront ici et qui n'auront que de bonnes choses à dire à propos de M.

5 Limaj. Monsieur le Président, si l'Accusation souhaite appeler ces témoins

6 comme des témoins qui vont dire la vérité, ils doivent tout simplement en

7 assumer les conséquences. Mais essayez d'alléguer qu'un général qui opère

8 sous les auspices des Nations Unies n'est pas un homme auquel il faut

9 croire en la parole, et puisque l'Accusation a dit aujourd'hui que c'est

10 une personne qui avait changé ses propos, il s'agit tout simplement de

11 traiter de menteur un homme qui porte l'uniforme. Je ne vois pas comment

12 l'Accusation peut véritablement récuser la crédibilité de leur propre

13 témoin, tout simplement parce qu'ils n'ont pas su véritablement mener le

14 jeu de l'interrogatoire principal. Je pense que l'Accusation n'a absolument

15 pas su prouver qu'il y avait hostilité ou animosité de la part du témoin

16 qui est venu ici.

17 Le témoin a été contacté un certain nombre de temps par l'Accusation.

18 Le 19 novembre 2003, il a été interrogé. Vous en avez d'ailleurs le

19 document, il a été à nouveau interrogé le 4 mai 2004, l'Accusation a eu

20 quelque problème technique, l'entretien a été perdu; il n'y a pas eu

21 d'enregistrement. Je pense que les notes qui avaient été prises ne

22 correspondaient pas tout à fait à la réalité. Monsieur le Président,

23 l'Accusation était présente lorsque la Défense s'est entretenue avec ce

24 témoin, à la fois le 11 octobre 2004 et dimanche. Ce témoin est maintenant

25 ici.

Page 2136

1 Il faut faire preuve de sensibilité culturelle dans le cadre d'un procès

2 international, qu'il s'agit que cela est un procès au pénal ou d'un procès

3 civil. Il y a de nombreux témoins qui opèrent dans un système juridique qui

4 est tel que l'on ne connaît pas le concept de propriété du témoin. Le

5 concept d'un témoin de l'Accusation, ou d'un témoin de la Défense est un

6 concept qui leur était tout à fait étranger. Vos collègues dans des

7 affaires précédentes ont déjà eu ce genre de problèmes. Je pense que

8 c'était dans l'affaire Blaskic, où il y a eu une décision qui a été faite

9 et peut-être d'ailleurs qu'elle a été ensuite réfutée. Mais une fois qu'un

10 témoin arrive dans la salle d'audience, c'est un témoin de la Chambre, et

11 cela d'ailleurs a été précisé hier. Il s'est évertué de répondre de façon

12 honnête à toutes les questions qui lui ont été posées.

13 Monsieur le Président, vous vous souviendrez certainement qu'avant qu'il ne

14 quitte cette salle hier, sur l'invitation de l'Accusation, ou plutôt

15 puisque l'Accusation lui avait demandé, il a dit une fois de plus : "Je

16 suis tout à fait disposé à fournir des explications."

17 Cela ne correspond pas du tout à ce qu'on nous dit, un homme qui

18 essaie de tout faire pour ne pas dire la vérité. Monsieur le Président, je

19 ne peux même pas vous dire que les décalages ou les discordances sont plus

20 apparentes que réelles parce que je pense que ces discordances n'existent

21 pas. Je me sens un peu comme le jeune garçon qui a crié : "L'empereur est

22 nu." C'est ainsi que je ressens les choses. Je ne dirais pas que ce qui a

23 été indiqué était tout à fait saugrenu et incongru, mais pour ce qui est du

24 nom Celiku, je pense que le témoin a été assez franc à ce sujet. Il nous a

25 dit qu'il savait que M. Limaj était Celiku, mais il ne se souvenait pas du

Page 2137

1 nom en 1996. Il se souvient du nom à partir de 1998, mais je pense en fait

2 qu'il ne se souvient pas la première fois sous quel nom cette personne lui

3 a été présentée. Mais j'aimerais vous poser une question importante. Quelle

4 est la pertinence de tout cela ? Est-ce que cela justifie des véritablement

5 que nous avons perdu autant de temps précieux pour la Chambre ?

6 Monsieur le Président, nous avons vu de nombreux exemples dans ce

7 Tribunal. Comme l'a dit Me Mansfield, avec le témoin précédent, il réagit

8 assez lentement lorsque des questions directrices sont posées.

9 Mais, bien entendu, les questions de type directrice ne font que contaminer

10 en quelque sorte le processus de l'entretien car à la page 35 de

11 l'entretien avec l'Accusation, une question est posée au témoin. On lui

12 pose une question à propos du nom des unités de Celiku. Je pense qu'il

13 fournit une réponse tout à fait honnête. Il répond en disant : "Je ne sais

14 pas. Je ne sais pas d'où vient ce nom. Peut-être que Celiku, cela veut dire

15 quelque chose de fort, de puissant. Je n'en sais rien, je n'en sais rien."

16 Alors, Monsieur le Président, lorsque l'enquêteur du Procureur nous dit

17 ensuite qu'ils ont parlé des unités de Fatmir, vous comprendrez, vous-même,

18 quelle est la pertinence de tout cela. Il se peut qu'un témoin spécule. Il

19 se peut qu'il fournisse un témoignage à propos de véritables éléments de

20 preuve qu'il connaît et je dirais que très souvent l'on demande à un témoin

21 de s'écarter de ce qu'il sait et de pénétrer dans un terrain qui est tout à

22 fait incertain, qu'il ne connaît pas. A maintes reprises, lors des

23 entretiens ici également alors que le témoin était cité à la barre, l'on

24 demande au témoin de se livrer à ce genre de spéculations. Monsieur le

25 Président, c'est un autre problème auquel nous nous sommes heurtés.

Page 2138

1 Alors, Monsieur le Président, mon estimé confrère a abordé la

2 question de l'absurdité des observations faites à propos d'un article de

3 journal. Il ne nous appartient pas à nous de dire au Procureur comment il

4 doit gérer son travail. Il s'agit de quelque chose de tout à fait

5 fondamental en matière d'article de journal. Il n'y a pas de journaliste

6 ici. M. Whiting n'a même pas demandé au témoin si cet article de la presse

7 correspond exactement à ce qu'il a dit. Il essaie en quelque sorte de

8 réfuter la crédibilité de son témoin sur la base d'un entretien accordé à

9 un journal, alors que cela n'a pas été ni vérifié, et que cela n'est pas du

10 tout basé. Je ne pense pas que cela corresponde véritablement à une

11 justification qui permette d'expliquer le temps passé ici.

12 En matière de mesures disciplinaires, Monsieur le Président, et c'est

13 la fin de mon intervention, parce qu'il est évident que vous en jugerez,

14 vous-même, et que vous déciderez vous-même à propos de ce témoin. A la page

15 44 de cet entretien, on lui pose une question à propos des mesures

16 disciplinaires qui étaient mises à sa disposition, à l'époque. Bien

17 entendu, il décrit le fait que l'unité de Drenica était dans une phase

18 d'évolution supérieure à d'autres unités. Ce qu'il dit n'est pas du tout en

19 contradiction avec l'essence de ce qu'il a avancé hier. Il dit en haut de

20 la page 45 en fait :

21 "A l'époque, nous n'étions pas prêts pour ce genre de choses. Nous

22 n'étions pas prêts à avoir des mesures disciplinaires. Nous n'étions pas

23 prêts pour avoir ce genre d'expérience. En d'autres termes, nous avons

24 appris de façon empirique."

25 Ensuite, bien sûr, il dit que les gens peuvent être renvoyés, les

Page 2139

1 armes leur sont confisquées, mais c'est exactement ce qu'il avait dit hier.

2 Il se peut qu'il ne serve pas tout sur un plateau d'argent à M. Nicholls,

3 mais lorsque l'on pose une question précise au témoin, il répond de façon

4 tout à fait logique et de façon véridique.

5 Pour cette raison, Monsieur le Président, et pour d'autres raisons,

6 j'avance que la requête, en dépit de tout le respect que je dois ici, est

7 tout à fait frivole et tout à fait dénuée de justification et qu'elle

8 devrait être réfutée. J'ai essayé d'être aussi rapide que possible.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Khan.

10 Maître Guy-Smith.

11 M. GUY-SMITH : [interprétation] Très bien. Je crois, dans une grande mesure

12 que la difficulté qui se pose avec la demande de M. Nicholls, correspond en

13 fait à son manque d'habilité dans les questions qu'il a posées jusqu'à

14 présent, par opposition aux réponses assez importantes qui ont été fournies

15 par le témoin où il a répondu en substance aux questions que lui ont été

16 posées. Etant donné que M. Nicholls a suggéré hier que nous avons la

17 pratique d'un même système juridique, je partage avec lui sa réflexion

18 quant à la manière dont sont traités les témoins. Malheureusement, à ce

19 stade, je crois qu'il nous faut dire que M. Nicholls a cité mon nom en vain

20 car, eu égard à la manière dont il a plaidé, c'est-à-dire, le type de

21 questions qu'il a posées au témoin, et les réponses qu'il lui ont été

22 fournies devant les juridictions que je reconnais, ce type de demande

23 aurait été rejetée sur la base des éléments qu'il a présentés jusqu'à

24 présent.

25 Pour ce qui est de la question de la conduite de ce monsieur, je

Page 2140

1 trouve assez étrange que cet homme, serait d'une manière ou d'une autre,

2 décrit comme un témoin de la partie adverse. En réalité, nous avons eu un

3 exemple d'un témoin qui a fait preuve d'hostilités par rapport aux

4 personnes qui lui pont posé des questions devant cette Chambre. M. Safiulin

5 qui a commencé à faire des plaisanteries, ce qui n'a pas été le cas avec ce

6 témoin. Il n'a pas répondu de cette manière-là. Dans un cas, on lui a

7 présenté une carte où il manquait des éléments d'information pour qu'il

8 puisse donner à l'Accusation la réponse souhaitée. Il a tenté de son propre

9 gré de parcourir le document péniblement et d'essayer de retrouver

10 l'élément que recherchait l'Accusation.

11 Pour ce qui est de deux points concernant, par exemple, l'action des

12 mesures disciplinaires, je fais référence aux pages qui ont déjà été

13 citées, à savoir l'Accusation n'a pas recherché les informations à la page

14 44 de leur entretien, en haut de la page, lorsque leur enquêteur a posé la

15 question :

16 "Q. Quelles étaient les obligations de la police militaire ?"

17 Il a répondu en disant :

18 "R. Il s'agissait de faire en sorte que les soldats respectent la

19 discipline, mais quelquefois, ils étaient en charge ou devaient s'occuper

20 du maintien de l'ordre public. Mais ceci ne se produisait pas très souvent,

21 car nous étions sans cesse attaqués, sur la défensive. Nous devions nous

22 déplacer souvent. Donc, lorsque l'on parle de la police militaire, il

23 s'agissait de personnes qui s'occupaient beaucoup des blessés. Ils

24 transportaient les blessés, ils s'occupaient d'eux, et cetera.

25 On n'a pas essayé d'obtenir cette réponse et cette réponse n'a pas

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1 été fournie. Par conséquent, le fait que cette réponse n'ait pas été

2 fournie au cours de cette procédure, par rapport aux questions qui lui ont

3 été posées par M. Nicholls, c'est que n'ayant pas répondu de la façon à

4 laquelle on s'attendait, par rapport à la manière dont M. Nicholls lui

5 avait posé des questions, on ne peut pas considérer qu'il s'agisse là d'un

6 témoin hostile.

7 Je pense, en résumé, que cette demande est sans fondement et doit

8 être rejetée.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

10 Monsieur Nicholls.

11 M. NICHOLLS : [interprétation] Je serai très bref. Devant ce Tribunal, dans

12 Brdjanin et Talic, Blagojevic, la jurisprudence veut qu'une des parties

13 puisse considérer qu'un témoin est un témoin de la partie adverse.

14 Lorsqu'un témoin est hostile, cela ne signifie pas pour autant que le

15 témoin est en colère, au sens général du terme. Cela peut-être manifeste

16 également lorsqu'un témoin modifie ses déclarations surtout lorsque la

17 partie qui cite le témoin modifie les déclarations. C'est sur quoi se fonde

18 sa déposition.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-il exact de dire qu'un témoin ne

20 répond pas en disant la vérité et ne répond pas de son plein gré ?

21 M. NICHOLLS : [interprétation] Un témoin qui n'est disposé à répondre à

22 chaque question, qui est posée ou en tout cas, qui tente d'éviter la

23 question, vous avez raison. Il ne tente pas de modifier, mais il ne répond

24 pas en disant la vérité. Ceci n'est pas conforme à sa déclaration

25 préalable.

Page 2142

1 M. Topolski a évoqué ce point, de façon quelque peu contradictoire,

2 que le témoin a coopéré avec nous. Il nous a permis d'assister à son

3 entretien avec la Défense, et a clairement expliqué, tout au long de sa

4 procédure, qu'il était disposé à témoigner, qu'il ne souhaitait pas être

5 cité par l'Accusation. Sur la base de ces éléments-là, je pense que nous

6 sommes en mesure d'attendre que lorsqu'il vient témoigner, il dira la même

7 chose que ce qu'il a dit au cours de tous les entretiens.

8 L'article de ce magazine, cet article de journal n'est pas un élément

9 en soi, mais il est conforme à ce que nous venons de dire par rapport à

10 toutes ces autres déclarations.

11 Le mémoire de la Défense, au paragraphe 26 de Limaj, il s'agit de

12 mémoire préalable au procès : "M. Limaj, lorsqu'il est venu à Klecka, a

13 rapidement acquis le surnom de "Daja," ou oncle en albanais et le surnom

14 "d'Arben." C'était le signe de ralliement d'une de ses unités. C'est ainsi

15 que l'on l'a surnommé ainsi. Ceci était aussi le ralliement d'une de ses

16 unités qui a été créées par la suite. Il n'a pas donné ce nom-là à

17 certaines de ses unités. Il a dit que ses unités n'avaient pas de nom."

18 Pour finir, je n'ai pas cité ce témoin pour essayer de réfuter son

19 témoignage.

20 Je ne tente pas de l'insulter ni de lui faire un affront. L'objet de

21 cette demande est simplement pour pouvoir poser des questions directrices

22 pour montrer que le témoin a dit un certain nombre d'éléments qui sont

23 incohérents. C'est-à-dire qu'il y a des incohérences entre ses déclarations

24 préalables. J'ai essayé d'expliquer aux Juges de la Chambre qu'il y a ces

25 incohérences et je souhaite simplement en faire la preuve et qu'il y a des

Page 2143

1 incohérences notables sur des questions essentielles.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre estime que la demande doit

5 être rejetée. La question dont nous devons tenir compte porte sur l'élément

6 suivant : à savoir si le témoin doit être considéré comme un témoin de la

7 partie adverse. En général, il s'agit d'un témoin qui n'est pas disposé à

8 dire la vérité. C'est dans ce contexte-là que cela s'applique de façon

9 générale. C'est-à-dire qu'il peut refuser de donner des réponses ou de

10 faire tout témoignage ou qu'il peut omettre des éléments d'information

11 pertinents. La demande de M. Nicholls semble préciser que sur certaines des

12 déclarations préalables, on peut considérer qu'il y a des incohérences avec

13 la déposition du témoin devant cette Chambre.

14 Les éléments qui ont été présentés par M. Nicholls sont sujets à une

15 interprétation et pourraient venir à l'appui d'une telle demande. Par

16 conséquent, nous ne partageons pas le même point de vue que la personne qui

17 fait cette demande. Nous ne partageons pas le point de vue de la Défense

18 qui a indiqué que cette demande est sans fondement. Nous estimons

19 simplement que les éléments proposés ne nous permettent pas de nous

20 convaincre. Nous estimons que le témoin n'est pas un témoin de la partie

21 adverse dans le sens où j'entends ce terme.

22 Pour ce qui est des éléments qui ont été invoqués, référence a été

23 faite à une réunion, au mois de mai 1998, le nom "Celiku" a certainement

24 prêté à confusion. Ceci a été éclairci néanmoins à la fin. Je crois que

25 ceci a été fait en termes assez clairs. Hormis le fait que cet homme ait

Page 2144

1 été présenté sous un autre nom, il s'agit là, en fait, d'un élément de

2 détail. Néanmoins, pour finir, le nom était bien Celiku. Ce qui était en

3 fait l'objet même de la déclaration sur laquelle nous nous sommes reposés.

4 Il semblait qu'il n'y ait pas différences essentielles concernant ce point-

5 là.

6 Il y a certainement, il est vrai, et il semble qu'il y ait encore une

7 différence entre la déposition du témoin qui est faite ici devant la

8 Chambre, pour ce qui est des unités qui se battaient au sud de la route

9 Pristina-Pec et des unités qui combattaient dans le nord. La différence

10 porte sur le commandement de ces unités. Il ne s'agit pas là d'une question

11 simple, néanmoins, à la manière dont les questions ont été posées, au cours

12 de ces audiences, et à la manière dont les questions et les réponses ont

13 été fournies précédemment dans les déclarations préalables, qui ont été

14 faites et qui ont été mentionnées ici.

15 Il y a des difficultés au niveau du cadre temporel, dans la mesure où la

16 mise sur pied de ces unités et l'intégration de ces unités dans des

17 brigades, ou en tout cas le fait que ces unités aient été constituées par

18 des brigades par la suite, semble avoir été fait de façon progressive, en

19 tout cas, au cours de la période qui nous concerne. L'élément de référence

20 qui ait été fourni ici, vient à l'appui de la demande de M. Nicholls,

21 puisqu'il fait très précisément allusion à la région dans laquelle cette

22 128e Brigade sera constituée par la suite. Pour ce qui est de la Chambre,

23 c'est ainsi que la Chambre comprend ce concept de brigade qui a été

24 commandée par Celiku. Dans le sens où ces références portent sur des dates

25 différentes, il s'agit là d'unités qui ont été constituées au début, ou de

Page 2145

1 positions de tirs qui ont été mis sur pied vers la fin. On ne sait pas s'il

2 s'agit là de quelque chose qui appartenait en totalité à la 121e Brigade.

3 Sans entrer dans le détail de tout ceci, je crois qu'il suffit de dire que

4 cela relève de la certitude. En tout cas, c'est ce qu'estime la Chambre eu

5 égard des éléments qui lui ont été présentés. Je crois que nous allons nous

6 en tenir à cela pour l'instant. Cela n'est pas très clair. La différence

7 est sans doute due à une explication très simple qui peut être fournie, ou

8 il s'agit peut-être d'un changement de position de la part du témoin. Quoi

9 qu'il en soit, la réponse, nous n'avons aucun moyen de le savoir pour

10 l'instant. Nous n'avons pas de point de vue sur la question qui puisse être

11 suffisamment motivée pour déclarer qu'il s'agit d'une hostilité à

12 proprement parler.

13 La question des mesures disciplinaires était l'autre différence

14 significative, positions auxquelles nous sommes parvenus avec difficulté.

15 Cela, d'après nous, semble correspondre aux déclarations faites

16 précédemment. Pour ces raisons, la Chambre n'est pas convaincue qu'il y ait

17 suffisamment de justifications pour considérer que ce témoin est, pour

18 l'instant, un témoin de la partie adverse ou en tout cas, hostile à

19 l'Accusation.

20 Je vois l'heure et je pense qu'il serait approprié de faire notre première

21 pause. Nous reprendrons à 16 heures 10. Néanmoins, nous avons du mal à être

22 précis. C'est vrai que parfois les parties ne reviennent pas toujours

23 exactement à l'heure. Nous avons quelques difficultés dans ce Tribunal,

24 mais quoi qu'il en soit, j'espère que tout à chacun pourra revenir à

25 l'heure précise. Merci.

Page 2146

1 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.

2 --- L'audience est reprise à 16 heures 12.

3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Général. Je vous remercie de

5 votre patience, et je vous remercie de nous avoir attendu. Nous avons

6 solutionné les difficultés qui étaient les nôtres. Nous pouvons poursuivre

7 avec le témoignage que vous faites devant ce Tribunal. Je vais vous

8 rappeler que vous avez fait une déclaration solennelle au début de votre

9 déposition, et que cette déclaration solennelle s'applique toujours.

10 M. Nicholls a encore des questions à vous poser avant que le conseil de la

11 Défense ne vous en pose.

12 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci. Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Nicholls.

14 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci.

15 LE TÉMOIN: SYLEJMAN SELIMI [Reprise]

16 [Le témoin répond par l'interprète]

17 Interrogatoire principal par M. Nicholls : [Suite]

18 Q. [interprétation] Bonjour, Général.

19 R. Bonjour.

20 Q. Nous allons essayer de reprendre là où nous sommes arrêtés hier. Je

21 vais poursuivre mes questions dans ce sens. Je suis désolé que vous ayez dû

22 attendre un certain temps dans une petite pièce qui se trouve à l'extérieur

23 du prétoire. A un moment donné hier, nous avons évoqué la question de la

24 bataille de Lapusnik du 9 mai 1998. Vous souvenez-vous, nous avons parlé de

25 cette bataille, hier ?

Page 2147

1 R. Oui. Oui, je me souviens bien, je l'ai présent à l'esprit.

2 Q. Vous avez commencé à parler de l'importance que revêtait cette bataille

3 pour l'UCK et qu'elles étaient sur le plan stratégique l'importance de

4 cette bataille ? Pourriez-vous, peut-être, en parler davantage ? Vous avez

5 dit hier que cela devrait ouvrir un corridor qui serait emprunté par l'UCK

6 et c'est pour cela que c'était tellement important. Pourriez-vous en parler

7 davantage ?

8 R. Oui, j'ai expliqué ceci hier, mais je peux en reparler aujourd'hui.

9 C'est parce que le réapprovisionnement en armes et nos différends, les

10 mouvements de nos unités et de citoyens, tout ceci, chacun était isolé en

11 différentes -- isolé -- se trouvait dans des régions distinctes.

12 Q. Pourriez-vous nous dire quel type d'armes et de munitions a été

13 transporté le long de ce couloir, s'il vous plaît ?

14 R. Il s'agissait surtout d'armes légères que l'on pouvait porter à

15 l'épaule.

16 Q. Hormis ces armes, est-ce que des munitions ont été transportées le long

17 de ce corridor que vous aviez ouvert ?

18 R. Lorsque les armes étaient transportées, elles étaient transportées en

19 même temps que les munitions. C'était normal.

20 Q. Pourriez-vous, très brièvement, nous dire d'où venaient ces armes et

21 ces munitions, s'il vous plaît ?

22 R. Il est vrai que c'est la mère patrie, l'Albanie qui nous fournissait

23 ces armes.

24 Q. Les munitions qui venaient d'Albanie, pourriez-vous nous dire quel en

25 était le fabricant ? Vous dites que ceci avait été fabriqué. Ceci avait été

Page 2148

1 fabriqué par qui ?

2 R. Je ne sais pas où ceci a été fabriqué. Quoi qu'il en soit, nous

3 recevions ces armes, comme je vous l'ai dit, de l'Albanie. C'étaient les

4 armes qui nous provenaient -- qui venaient de l'Albanie, de l'Etat

5 albanais, des citoyens albanais. C'étaient les armes que nous utilisions, à

6 ce moment-là. Mais nous avions également des armes qui étaient utilisées

7 d'eux -- également nous avions les armes qui provenaient des usines

8 yougoslaves.

9 Q. Très bien, dernière question. Je vais simplement essayer d'être clair.

10 Vous dites qu'il s'agissait d'armes de munitions albanaises. Est-ce que

11 cela signifie que les armes et les munitions provenaient et étaient

12 fabriquées en Albanie ?

13 R. Oui. Ils étaient fabriqués en Albanie ou en Chine.

14 Q. Vous avez également parlé de la libre circulation des citoyens une fois

15 que ce corridor avait été ouvert. Vous en avez parlé un petit peu. Je vous

16 demande de bien vouloir nous en parler davantage, s'il vous plaît ?

17 R. Ceci était important car nous étions limités. Les gens avaient besoins

18 de différentes choses et les produits de première nécessité manquaient. Il

19 en fallait pour vivre.

20 Q. Très bien. Donc, après la bataille du 9 mai, les forces de l'UCK ont

21 gardé le contrôle du corridor pendant combien de temps ?

22 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous dire précisément combien de temps.

23 Cela a duré longtemps, c'est tout ce que je sais.

24 Q. Pourriez-vous me donner un chiffre approximatif, s'il vous plaît, en

25 termes de mois ou de semaines ?

Page 2149

1 R. Comme je vous l'ai dit un peu plus tôt, je ne peux pas vous le dire.

2 Les forces serbes se déplaçaient souvent et parfois tout était bloqué. Je

3 ne sais pas combien de temps -- pendant combien de temps.

4 Q. Bien. Maintenant, pardonnez-moi j'ai une voix un petit peu enroué. A

5 partir ou vers la fin du mois de juillet, le 25 juillet, pourriez-vous me

6 parler un petit peu des opérations militaires dans la zone de Lapusnik,

7 dans la zone des gorges de Lapusnik, si manœuvres ou opérations militaires

8 il y avait ?

9 R. Je ne me souviens pas.

10 Q. Vous ne vous en souvenez absolument pas ?

11 R. La date du 25 juillet, je ne m'en souviens pas précisément. Non pas

12 parce que c'était le 25 juillet, mais il est vrai qu'au cours de l'année

13 1998 et 1999, j'étais dans la région de Drenica. J'étais dans cette zone

14 opérationnelle, moi-même.

15 Q. Une fois que cette route ou ce couloir avait été ouvert après le 9 mai,

16 quelles unités du côté de la Drenica, ou est-ce que des unités, qui se

17 trouvaient dans la région de Drenica, ont pris part à la défense de la

18 route, après le 9 mai ?

19 R. Oui. C'étaient des unités, comme je vous l'ai dit, qui agissaient en

20 tant que tel. Alpha, Guri et Pellumbi, ces différentes unités se trouvaient

21 là, à ce moment-là. C'est tout.

22 Q. A ce moment-là, après le 9 mai, comme vous l'avez déjà décrit hier,

23 vous avez parlé de la zone de Drenica, et vous dites qu'elle était

24 délimitée par l'autoroute goudronnée qui allait entre Pristina et Pec. Est-

25 ce que vous dites qu'après le 9 mai, c'était -- cette route continuait à

Page 2150

1 délimiter la région de Drenica ?

2 R. Oui, tout à fait. Il s'agissait là en fait d'un endroit qui se trouvait

3 à l'intérieur de la zone opérationnelle de Drenica.

4 Q. De l'autre côté de la route, dans la région de Bastenik, quelles unités

5 étaient déployées dans cette région-là, après le 9 mai ?

6 R. Les Unités de Celiku étaient déployées ou opéraient dans cette région.

7 Q. Quelle était leur responsabilité, si responsabilité ils avaient, eu

8 égard à la route qui délimitait la région ou, en tout cas, qui marquait la

9 frontière de leurs zones de responsabilité ?

10 R. Les unités n'étaient pas liées entre elles. Elles étaient déployées

11 dans d'autres régions également.

12 Q. Je vais répéter ma question. Quelles unités, qui se trouvaient de ce

13 côté-là, avaient -- devaient s'occuper ou avaient la responsabilité de

14 surveiller sur ce qui se passait sur cette route ?

15 R. Je ne sais pas car cette région ne fait pas partie -- ne faisait pas

16 partie de ma zone de responsabilité. Je sais simplement que les Unités de

17 Celiku y étaient déployées.

18 Q. Quels contacts y avait-il entre ces unités, entre ces différentes

19 zones, pour ce qui est de la route ou en tout cas de la question de la

20 sécurité qu'il fallait assurer sur cette route, après le 9 mai 1998 ?

21 R. Les unités communiquaient entre elles, comme elles le pouvaient, soit

22 par les moyens radio; aussi ces unités étaient proches les unes des autres,

23 elles communiquaient entre elles de différentes manières.

24 Q. Si vous pouviez, s'il vous plaît, nous donner un exemple des questions

25 sur lesquelles ces unités auraient communiqué entre elles. Qui aurait été

Page 2151

1 l'objet de ces échange ou pour ce qui est de cette route qui constitue la

2 frontière entre ces deux zones ?

3 R. Pour ce qui est de cette route, je ne sais pas quelle question a été

4 évoquée, mais, de façon générale, si un village était attaqué quelque part

5 par les forces serbes, à ce moment-là, il fallait assurer une certaine

6 coordination pour pouvoir venir en aide aux habitants de ce village. Pour

7 ce qui est des gorges de Lapusnik, toutes les unités, qui étaient placées

8 sous mon commandement, la plupart de ces unités devaient partir en renfort

9 et venir en aide ou à l'appui de ceux qui étaient dans les gorges de

10 Lapusnik.

11 Q. Très bien. Vous avez dit également hier que cette route Pristina-Pec

12 avait été empruntée par les forces serbes aux fins de monter des attaques

13 contre les civils. Est-ce bien ce que vous avez dit hier ?

14 R. Oui, c'est ce que j'ai dit.

15 Q. Une fois que cette route était sous votre contrôle ou sous le contrôle

16 de vos groupes armés ou des unités de Celiku de l'autre côté, quelles

17 mesures ont été prises pour surveiller la circulation sur cette route ?

18 R. La route n'a jamais été bloquée, comme cela a été dit, car les forces

19 serbes arrivaient souvent à emprunter cette route.

20 Q. Très bien. Vous avez expliqué qu'il s'agissait d'un axe important, que

21 cette route était utilisée pour pouvoir déplacer des civils et des

22 munitions. Pendant toute la période où cette route est sous le contrôle de

23 l'UCK, après le 9 mai, avez-vous entrepris des efforts pour surveiller

24 l'allée et venue des véhicules sur cette route ? Est-ce que ce serait

25 quelque chose qui était considéré comme important à l'époque ?

Page 2152

1 R. Non. Cela n'était pas si important que cela, car cet axe était un axe

2 sur lequel on pouvait circuler librement. On a essayé de réorganiser nos

3 unités en brigade à ce moment-là. Pour nous, c'était plus important de

4 coordonner nos efforts avec les unités dans les autres zones

5 opérationnelles.

6 Q. Si j'ai bien compris, la route, donc cet axe qui allait entre Pristina

7 et Pec, cette autoroute, était-ce votre unité, de votre côté de la Drenica,

8 ou des Unités de Celiku qui montaient la garde sur cette route ou qui

9 contrôlaient la circulation sur cette route ?

10 R. C'étaient les deux à la fois, les deux unités.

11 Q. Lorsque je parle de qui était responsable de cela, est-ce que quelqu'un

12 était responsable ou, en tout cas, chargé de surveiller la circulation, de

13 voir quels véhicules empruntaient cette route dans un sens ou dans un

14 autre ?

15 R. Je ne sais pas. Je ne m'en souviens pas car il y avait certaines unités

16 qui étaient là, à ce moment-là. Mais, en tout cas, à mes soldats, nous

17 avions donné la consigne de ne pas traverser la route, et de ne pas engager

18 de contacts avec les unités qui se trouvaient de l'autre côté sans

19 autorisation préalable de la part des commandants ou de représentants

20 officiels.

21 Q. Qui était susceptible de fournir ces autorisations ?

22 R. Il y avait les unités et, bien évidemment, c'était normal que le

23 commandant donne ce genre d'autorisation. En tout cas, c'était la personne

24 qui était responsable des unités, en tout cas, pendant toute la durée de

25 vie des unités, c'est ainsi que les choses fonctionnaient.

Page 2153

1 Q. J'aimerais revenir sur un autre thème que nous avions abordé

2 d'ailleurs, hier. Il s'agit de votre rencontre avec Fatmir Limaj lorsqu'il

3 est rentré d'Occident en 1998. Vous vous souviendrez que nous avions

4 commencé à parler de cela.

5 R. Oui.

6 Q. Lorsqu'il est rentré en 1998, et lorsque vous l'avez rencontré, vous

7 avez déclaré qu'à cette époque-là, il était un soldat alors qu'en 1996,

8 c'était un étudiant, n'est-ce pas ?

9 R. Oui. Je l'ai rencontré lorsqu'il était étudiant en 1996, alors qu'en

10 1998, je l'ai rencontré pour la première fois, alors qu'il portait

11 l'uniforme et qu'il était soldat.

12 Q. Dites-moi si vous vous souvenez de la date à laquelle vous l'avez

13 rencontré en 1998 lorsqu'il était un soldat portant l'uniforme.

14 R. C'était après mars, après l'événement tragique de la chute du

15 commandant légendaire. C'était probablement après avril.

16 Q. Pourriez-vous nous décrire brièvement les liens personnels que vous

17 aviez avec M. Limaj ? Comment est-ce que vous le considériez ? Quelle était

18 la nature de vos liens ?

19 R. Pendant la période au cours de laquelle je l'ai rencontré vous voulez

20 dire ?

21 Q. A partir du moment où vous l'avez rencontré jusqu'à aujourd'hui.

22 R. Lorsque je l'ai rencontré, c'était une personne qui m'était inconnue.

23 En tant que soldat pendant la guerre, je l'ai dans un premier temps

24 rencontré en tant que soldat de l'autre côté. Ensuite, je l'ai rencontré

25 plus tard comme le commandant Celiku.

Page 2154

1 Q. Qu'entendez-vous lorsque vous nous dites : je l'ai rencontré en tant

2 que soldat, je l'ai d'abord rencontré en tant que soldat de l'autre côté ?

3 R. Lorsque je parle de l'autre côté, je le dis parce que, la première fois

4 que nous nous sommes rencontrés, il se trouvait de l'autre côté, à Klecka

5 sur ce territoire où il était né du côté de Berisa.

6 Q. Très bien. Alors, pour être précis, cela se trouve de l'autre côté de

7 l'axe routier Pristina-Pec dans la zone de Prastik ?

8 R. Oui.

9 Q. Maintenant, aujourd'hui, comment considérez-vous M. Limaj ? Est-ce que

10 c'est un ami pour vous ? Est-ce que c'est un collègue ? Est-ce que vous

11 pourriez nous décrire ce que vous ressentez pour lui ?

12 R. J'éprouve du respect pour lui. J'éprouve du respect pour Limaj et pour

13 tous les membres de l'UCK, et pour toutes les personnes qui sont présentes

14 ici, à savoir, Isak Musliu et Haradin Bala. J'ai beaucoup de respect pour

15 toutes ces personnes qui se sont battues et qui ont versé leur sang pour

16 l'armée de Libération du Kosovo et j'éprouve le même respect pour Limaj

17 également.

18 Q. Alors, après l'avoir rencontré en 1998, lorsqu'il est revenu, où s'est-

19 il rendu ensuite ? Où est-ce qu'il a été envoyé en tant que soldat ?

20 R. Comme je l'ai déjà dit, et vous l'avez dit vous-même, il est allé de

21 l'autre côté dans l'autre partie de Berisa. D'ailleurs, il pourra

22 certainement l'expliquer beaucoup mieux que moi. Mais autant que je le

23 sache, il se trouvait dans les villages avoisinants, et je pense qu'il se

24 trouvait à Klecka.

25 Q. Vous nous avez dit qu'il est devenu commandant. Quel fut son premier

Page 2155

1 poste de commandement ? D'après ce que vous savez, bien entendu, est-ce

2 que vous pourriez nous parler de sa carrière militaire à son retour ?

3 Quelles sont les missions qui lui ont été confiées ?

4 R. Quelles sont les missions qui lui ont été confiées, quelles étaient ses

5 responsabilités ? Vous pouvez lui poser vous-même la question. Je ne peux

6 vous parler que de mes responsabilités. Il me semble me souvenir qu'il

7 était à l'époque commandant de la 121e Brigade.

8 Q. Quand est-ce qu'il a été investi de ce commandement ?

9 R. Je n'en sais rien. Je ne sais pas exactement.

10 Q. Mais grosso modo.

11 R. Si je ne me trompe pas, je pense que cela s'est fait en septembre 1998

12 et en octobre. Je ne peux pas vous le dire avec certitude. Cela s'est

13 probablement fait à la fin de l'année 1998.

14 Q. Avant qu'il n'assume le commandement de la 121e Brigade, quelles

15 étaient ses fonctions, quel était son rôle à ce moment-là ? Qui commandait-

16 il ?

17 R. Je le connaissais tout simplement sous le nom de Celiku, et je le

18 connaissais en tant que Fatmir dans cette zone.

19 Q. Dans quelle zone ?

20 R. Quand je dis dans "cette zone", j'entends la zone de Berisa. On peut

21 l'appeler la zone opérationnelle de Pastrik.

22 Q. Les Unités de Celiku, pendant les mois de mai et juin 1998, vous nous

23 avez dit qu'il y avait donc un contact à propos de la route entre les

24 Unités de Pellumbi de votre côté, et les Unités de Celiku.

25 R. Oui, c'est exact.

Page 2156

1 Q. Il s'agit de la zone qui était adjacente à votre zone. Qui était le

2 commandant des unités de Celiku en mai et juin 1998 ?

3 J'aimerais vous demander ce que vous êtes en train de consulter, car vous

4 avez pris des documents.

5 R. Il s'agit des comptes rendus de ma première déclaration que vous avez

6 également.

7 Q. Est-ce que vous aimeriez utiliser ces documents pour vous rafraîchir la

8 mémoire ? Est-ce que c'est pour cela que vous venez de les prendre, pour

9 vous aider à vous souvenir ?

10 R. Non, je n'en ai pas besoin parce que cela est clair pour moi. Mais,

11 toutefois, si je ne me souviens pas de quelque chose, il se peut que j'y

12 jette un œil.

13 Q. Très bien.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Général, vous comprenez que vous

15 faites cette déposition pour cette Chambre de première instance pour que

16 nous apprenions ce qui s'est passé. Il nous serait utile d'entendre dans un

17 premier temps ce dont vous vous souvenez, et si vous ne vous souvenez pas

18 d'un événement précis et que vous souhaitez consulter des documents

19 originaux que vous avez ou votre déclaration, vous pouvez à ce moment-là

20 l'indiquer, et ainsi, nous saurons si vous êtes en train de relater ce dont

21 vous vous souvenez ou s'il s'agit de quelque chose dont vous vous souveniez

22 plutôt.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. C'est clair pour moi maintenant.

24 M. NICHOLLS : [interprétation]

25 Q. J'aimerais vous poser une question : est-ce que vous vous souvenez qui

Page 2157

1 commandait les Unités de Celiku en mai et juin 1998 ?

2 R. Les unités, pendant toute la période du temps où elles ont été unités,

3 il faut savoir que personne n'a commandé ces unités. Chacun avait une

4 responsabilité au sein de ces unités. Les unités étaient séparées. Je l'ai

5 dit hier, et je ne l'avais pas dit auparavant. Je le dis maintenant pour

6 vous expliquer que les unités étaient indépendantes les unes des autres et

7 il faut savoir, du point de vue logique, que lorsque j'ai opéré dans cette

8 zone que les unités étaient indépendantes les unes des autres. Donc, il n'y

9 avait pas un commandant, il n'y avait pas quelqu'un qui commandait cette

10 unité ou ces unités.

11 Q. Vous nous dites dans votre réponse que vous avez dit hier, et que vous

12 ne l'avez pas dit dans le compte rendu auparavant. Mais pourquoi est-ce que

13 vous ne l'avez pas dit auparavant ? Pourquoi est-ce que cela ne fait pas

14 partie de vos déclarations ?

15 M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que vous

16 pourriez lui demander ce qu'il entend par compte rendu préalable.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Poursuivez vos questions, Monsieur

18 Nicholls.

19 M. NICHOLLS : [interprétation]

20 Q. Je vous demanderais de répondre à ma question, Général.

21 R. Oui, je peux tout à fait répondre à cette question. J'aimerais en fait

22 développer un peu cette question si vous me le permettez. Lorsque j'ai reçu

23 la première injonction de comparution qui m'a été délivrée par le

24 Procureur, Carla Del Ponte, alors il s'agissait de mes données

25 personnelles, de ma carrière militaire et de l'activité de l'UCK en 1998 et

Page 2158

1 1999. M. Ole Lehtinen était l'enquêteur. A cette époque, ils m'ont demandé

2 de bien vouloir répondre à leurs questions. Alors, je ne sais pas si M.

3 Lehtinen est présent ici. Mais il m'a demandé si j'étais disposé et si

4 j'étais disponible pour être interrogé. En fait, il m'a dit : Vous pouvez

5 être interrogé aujourd'hui ou demain ? J'ai marqué mon accord avec le

6 lendemain. Le lendemain, j'ai effectivement fait l'objet de cet entretien.

7 En fait, cela n'avait pas été clairement défini parce qu'il s'agissait des

8 activités pendant les années 1998 et 1999, et cela englobait de nombreuses

9 choses. Lorsque nous avons abordé les gorges de Lapusnik ou le terme

10 relatif aux unités, je l'ai dit et cela se trouve dans le compte rendu.

11 Nous pouvons en parler maintenant, j'ai parlé des unités de Celiku. Alors,

12 j'ai dit certaines choses à propos du camp et des unités. Mais il y a

13 certaines choses qu'ils ne m'ont pas rappelées à ce moment-là. Ils ne m'ont

14 pas posé de questions à ce moment-là. Alors, il faut savoir que c'étaient

15 les années 1998, 1999, ce qui correspond à une très longue période. Je

16 n'étais pas tout à fait prêt. Je me suis contenté de leur dire ce qu'ils me

17 demandaient.

18 Alors, je m'excuse. Je souhaiterais poursuivre. Mais hier, je n'ai pas

19 indiqué certaines choses parce que j'avais prononcé cette déclaration

20 solennelle et je m'étais engagé à dire la vérité, toute la vérité, et rien

21 que la vérité. Il faut savoir qu'à cette époque, je ne me souvenais pas de

22 beaucoup de choses, il y a beaucoup de choses qui correspondent à cette

23 période, qu'ils n'ont pas portées à ma connaissance ou à propos desquelles

24 ils ne m'ont pas posé de questions.

25 Q. Alors, pour bien m'assurer d'avoir compris ce que vous venez de nous

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1 expliquer, vous avez dit que lors de votre entretien avec le Procureur,

2 vous n'avez pas dit que les Unités de Celiku étaient toutes des unités

3 indépendantes, sans commandants parce que cette question ne vous a pas été

4 posée ? Alors, est-ce que cette question ne vous a pas été posée ou vous ne

5 vous en souveniez plus à l'époque ?

6 R. Non, non. Ce que j'ai dit est clair. Vous pouvez tout à fait vérifier

7 les propos que j'ai tenus, ces propos qui sont écrits. J'ai le document et

8 vous avez le document également.

9 Q. J'aimerais que vous m'indiquiez quel est le passage auquel vous faites

10 référence si vous le pouvez ?

11 R. Il s'agit de l'intercalaire 19, probablement au milieu de

12 l'intercalaire 19, lorsqu'une question est posée : "Est-ce que vous saviez

13 qui était le commandant des forces de l'autre côté de la route sous le

14 commandement de Fatmir Limaj ?"

15 Voilà ce que je réponds, je ne sais pas si vous l'avez maintenant.

16 Alors, voilà ce que j'ai dit à l'époque. Puis-je vous en donner lecture ?

17 Q. Oui, oui, je vous en prie.

18 R. Voilà ce que j'ai répondu : "Non. Dans cette partie, je n'ai jamais su

19 qui avait la responsabilité, à savoir, qui commandait cette partie à

20 l'exception de Fatmir."

21 Lorsque je dis : j'ai dit ce que je voulais dire, ce n'est pas

22 Celiku, mais Fatmir, Fatmir, la personne que je connaissais. Toutefois,

23 j'ai dit que je le connaissais dans cette partie ou dans cette région comme

24 Fatmir.

25 Q. Est-ce que vous pourriez me donner le numéro de la page dont vous venez

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1 de nous donner lecture si vous le lisez de l'Albanais.

2 R. Il s'agit de la page 19. Il s'agit du numéro V000-4792.

3 Q. Merci.

4 M. NICHOLLS : [interprétation] Je dirais que pour et à l'attention de la

5 Chambre de première instance qu'il s'agit de la page 39 de la traduction

6 anglaise.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour la traduction albanaise, il s'agit de la

8 page 19.

9 M. NICHOLLS : [interprétation]

10 Q. Merci. Est-ce que vous vous souvenez n'avoir jamais dit pendant ces

11 entretiens que Limaj était commandant et qu'il était un commandant connu

12 sous le nom de Celiku ? Que Celiku était un commandant ?

13 R. Oui, je l'ai dit et je le répète, je le réitère. Je l'ai dit

14 auparavant. J'ai dit qu'il était commandant et je le connaissais comme

15 commandant de la 121e Brigade.

16 Q. J'aimerais vous demander de consulter la page 18, la page précédente de

17 votre document.

18 M. KHAN : [interprétation] Bien --

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Khan. Je pense que nous

20 sommes certainement sur la même longueur d'ondes, mais je vous demande de

21 vous exprimer en premier lieu.

22 M. KHAN : [interprétation] J'espère que nous sommes sur la même longueur

23 d'ondes. Alors, j'espère que mon estimé confrère ne va pas essayer de

24 transcender la décision que vous avez prise avant la pause. Il me semble

25 que si cela n'a pas déjà été fait que ce soit ce qu'il est sur le point de

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1 faire.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il se peut que cela soit le cas,

3 effectivement.

4 M. KHAN : [interprétation] Oui.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Par conséquent, j'allais le mettre en

6 garde.

7 Vous vous rendez compte que le témoin vous a donné de son propre gré

8 certaines informations. Je vous ai tout à fait autorisé à poursuivre, mais

9 vous devez le faire dans le cadre d'un interrogatoire principal, et non pas

10 dans le cadre d'un contre-interrogatoire. Par conséquent, vous devez être

11 un peu limité sur la façon de procéder pour ce qui est de ces déclarations

12 préalables.

13 M. NICHOLLS : [interprétation] Oui. Mais il se fait que le témoin a

14 maintenant parlé de ce document en expliquant que le document tient compte

15 --

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je sais ce que vous entendez, mais

17 vous ne pouvez pas faire fi des limites qui vous ont été imposées quant à

18 votre capacité de traiter cette situation.

19 M. NICHOLLS : [interprétation] Je pense que la situation est légèrement

20 différente maintenant parce que le témoin nous a expliqué que dans ce

21 document, dans cette déclaration dont il parle, il a parlé du lieu du

22 commandement, de la date, de la période. Donc, je pense qu'il est un temps

23 soit peu artificiel de cibler juste un élément dans le document en

24 question.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pourriez demander au témoin s'il

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1 a dit d'autres choses à propos de ce thème, ce qu'il a dit et ce qu'il

2 entendait par cela. Tant qu'il présente une déposition, et vous êtes en

3 train de vous assurer que nous pouvons comprendre entièrement ce qu'il

4 croit avoir dit et ce qu'il entendait, et si c'est cela, très bien.

5 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

6 Q. Alors, j'allais vous poser une question, Monsieur le Témoin. J'allais

7 vous demander si vous avez parlé dans d'autres paragraphes de la

8 déclaration du commandement de Celiku ?

9 R. Vous avez la déclaration. Alors, il se peut que j'aie fait référence à

10 d'autres endroits où il se trouvait ou même à d'autre chose.

11 Q. Ce que j'entends, Général : C'est que j'aimerais savoir si vous vous

12 souvenez, pendant l'entretien, avoir parlé du commandement de Limaj, et

13 d'avoir indiqué qui il commandait, quelles unités étaient sous son

14 commandement ?

15 R. Je ne le sais pas, je ne m'en souviens pas. Pour autant que je m'en

16 souvienne, vous vous souvenez qu'ils m'ont donné ce document, et ensuite,

17 il y a eu cette injonction de production. En fait, même lorsque j'ai

18 demandé à avoir le document, il ne m'a pas été donné. Autant que je m'en

19 souvienne, Fatmir est allé dans cette partie de Berisa parce qu'il

20 connaissait cette zone. Mais en tant que commandant, je ne le sais pas. Je

21 le connais sous le nom du commandant Celiku. Je le répète à nouveau, si

22 j'ai dit ce genre de choses je peux vous fournir des précisions à ce sujet.

23 Q. Je vais vous demander de nous fournir quelques explications parce que

24 cela n'est pas entièrement clair pour moi. J'entends ou je parle de votre

25 réponse qui porte sur l'extrait dont vous nous avez donné lecture, qui

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1 correspond à la page 19 de votre version, et à la page 39 de la version

2 anglaise. Alors, je vais vous poser quelques questions parce que je ne

3 comprends pas entièrement. On vous a demandé si vous saviez qui commandait

4 les forces à Lapusnik de l'autre côté de la route, et s'il y avait d'autres

5 personnes ayant un grade inférieur à Fatmir Limaj. Votre réponse a été :

6 "Je ne connaissais personne d'autre qui faisait partie de la structure du

7 commandement dans cette région à l'exception de Fatmir, dont je connaissais

8 le nom. Je ne connaissais personne d'autre dans cette région."

9 Alors, est-ce que vous pourriez expliquer, je vous prie, ce que vous

10 entendiez par ces mots ?

11 R. C'est clair. Je vais à nouveau vous fournir une explication. La seule

12 personne que je connaissais dans cette zone et dans ces unités, était

13 Fatmir. Toutefois, je n'ai pas dit que Fatmir commandait ces unités. Soyons

14 clair à ce sujet.

15 Q. N'avez-vous jamais décrit --

16 M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, une fois de plus, je

17 soulève une objection. Car de toute évidence, il s'agit d'une façon de

18 passer outre la décision qui a déjà été rendue par la Chambre. On peut

19 demander au témoin de décrire la responsabilité de commandant allégué de M.

20 Limaj. On peut lui demander de décrire la structure alléguée de l'UCK à ce

21 moment-là, mais il s'agit, en fait, de questions directes et de réponses

22 directes.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Nicholls, je pense que vous

24 vous acheminiez vers une voie erronée pour le moment. Cette objection a été

25 bien présentée. Pendant que vous réfléchissiez à ce que vous allez aborder

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1 comme thème, je souhaiterais avoir la possibilité d'intervenir.

2 Général, vous nous avez dit que vous avez, dans un premier temps, rencontré

3 l'accusé, Fatmir Limaj, en sa capacité de soldat lorsqu'il revenu en 1998

4 au Kosovo. Vous l'avez rencontré en tant que soldat, et vous avez appris

5 qu'il répondait au nom de Celiku. Puis ensuite, d'après ce que je crois

6 comprendre de ce que vous indiquez, vous avez appris que son nom était

7 Fatmir. Est-ce que c'est ainsi qu'il faut comprendre votre point de vue ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il y a un petit moment de cela, vous

10 nous avez dit que vous le connaissiez comme le commandant Celiku.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai dit que je le connaissais sous le

12 nom du commandant Celiku parce que lorsque les unités ont été créées à

13 Berisa ou dans la zone opérationnelle de Pastrik, avec la formation de la

14 121e Brigade, je le connaissais comme le commandant Celiku. C'est ainsi que

15 je le connaissais.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc, vous nous dites que vous avez

17 appris qu'il s'agissait du commandant Celiku seulement lorsque la 121e

18 Brigade a été formée; c'est cela ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ainsi que les choses se sont

20 passées. Après la création des brigades, je l'ai reconnu après un certain

21 temps comme le commandant Celiku, parce qu'il y avait un conflit en cours.

22 Lorsque les brigades ont été formées, je n'étais pas présent. Je ne savais

23 pas dans quelle circonstance cette brigade a été créée ou formée. Par

24 conséquent, je l'ai rencontré en 1998. Je pense que c'était au mois de

25 septembre, mais je ne suis pas très sûr du moment où j'ai entendu parler de

Page 2165

1 lui comme le commandant Celiku.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous avez utilisé le nom de

3 commandant Celiku lorsque vous parliez de lui ou lorsque lui parliez ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Lorsque je parlais de lui, je parlais de

5 lui en tant que commandant Celiku, mais la période de temps pendant

6 laquelle nous avons opéré et pendant laquelle nous avons communiqué est

7 importante.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous n'aviez jamais entendu

9 que l'on parlait de lui comme le commandant Celiku avant la formation de la

10 121e Brigade ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il se peut que cela soit le cas. Le commandant

12 Celiku, commandant de l'unité 1, par exemple, parce que très souvent,

13 lorsqu'il me voyait comme commandant ou lorsqu'il y avait un autre

14 commandant d'une unité de guerre, il faut savoir que dans ce contexte, l'on

15 faisait référence à moi en tant que commandant, et cela, c'était avant la

16 formation de la brigade. Donc, il est très probable que j'ai fait référence

17 à lui dans ce contexte, et il est très, très probable que j'ai fait

18 référence à lui en tant que tel.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pour être très clair, est-ce que vous

20 faisiez référence en tant que commandant d'une unité ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai déjà dit, je n'étais pas très, très

22 sûr de la structure de l'organisation dans cette zone. Mais quand

23 j'entendais les gens dire commandant Celiku, je savais que c'était Fatmir,

24 et je savais que c'était le commandant Celiku. Alors, il se peut que

25 c'était le commandant Celiku numéro 1, numéro 2. Il y avait de nombreuses

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1 Unités de Celiku qui étaient opérationnelles.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous n'aviez aucune connaissance

3 détaillée de ces unités ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous ne saviez pas non plus qui était

6 le commandant de ces différentes unités ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, à l'exception de Fatmir, que j'avais

8 rencontré. Comme je vous l'ai expliqué plus tôt, je ne connaissais pas les

9 autres commandants des autres Unités de Celiku.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Nicholls, vous avez la

11 parole.

12 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 Q. Au cours de l'été 1998, en mai, en juin et en juillet, au cours de

14 quelle période, pour autant que vous vous en souveniez, connaissiez-vous le

15 commandant Celiku en tant que commandant de l'une des Unités de Celiku,

16 Celiku 1 ou l'une, quelconque, des autres unités ?

17 R. Je ne saurais vous le dire quand exactement je l'ai connu sous ce nom.

18 Je ne m'en souviens pas vraiment.

19 Q. Vous souvenez-vous avoir déclaré que les unités dont vous avez parlé,

20 d'un côté de la route, communiquaient directement avec les unités situées

21 de l'autre côté de la route ?

22 R. Oui.

23 Q. Est-ce que l'unité Celiku 1 était l'une des unités qui se trouvait de

24 votre côté de la route qui communiquait ainsi en mai, juin, et juillet

25 1998 ?

Page 2167

1 R. Ils communiquaient avec l'Unité Celiku 1, mais avec d'autres unités

2 Celiku également.

3 Q. Au cours de quelle période communiquait-il avec ces autres Unités

4 Celiku ?

5 R. En cas de besoin ou lorsque l'une de ces unités formulait une demande

6 d'assistance.

7 Q. Vous souvenez-vous s'il est arrivé qu'il y ait eu des communications ou

8 des incidents lors de ces demandes d'assistance adressées au commandant

9 Celiku ?

10 R. Non, je ne m'en souviens pas à présent.

11 Q. Au cours de cette période, à savoir, mai, juin et juillet, quelles

12 étaient les tâches principales qui incombaient aux unités Celiku, Celiku 1

13 et les autres ?

14 R. Je ne sais pas.

15 Q. Que savez-vous au juste au sujet des opérations qui se déroulaient de

16 l'autre côté de la route, à l'exception des demandes d'assistance dont vous

17 avez parlées ?

18 R. Non, je ne savais pas dans quelles opérations elles étaient engagées

19 car je devais m'occuper de ce qui se passait dans mon propre secteur.

20 Q. Quelles opérations, quelles activités, pour autant que vous le sachiez,

21 étaient celles auxquelles le commandant Celiku a participé en mai, juin, et

22 juillet 1998 ?

23 R. [aucune interprétation]

24 Q. Excusez-moi, votre réponse n'a pas été consignée au compte rendu

25 d'audience.

Page 2168

1 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent au témoin de bien vouloir se

2 rapprocher du microphone.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, je ne sais pas.

4 M. NICHOLLS : [interprétation]

5 Q. Au cours de la bataille qui s'est déroulée le 9 mai 1998 dans les

6 gorges de Lapusnik, nous en avons parlé hier, est-ce que les Unités de

7 Celiku ont participé à cette bataille ?

8 R. Oui.

9 Q. Est-ce que le commandant Celiku commandait l'une des unités Celiku ? Le

10 commandant Celiku a-t-il participé, a-t-il pris part à ce combat

11 important ?

12 R. Je ne sais pas. Pour autant que je m'en souvienne, oui. Il a pris part

13 à cette bataille. Il pourra vous le dire lui-même.

14 Q. Pourriez-vous nous dire, pour autant que vous vous en souveniez, quel

15 rôle il a joué dans cette bataille, quelles actions a-t-il entreprises

16 contre les forces serbes ?

17 R. Je ne sais pas quelle action il a entreprise, mais il se trouvait là

18 probablement en sa capacité en tant que Fatmir ou en tant que soldat de

19 l'UCK, il s'est efforcé de son mieux, avec son unité, comme je le faisais

20 avec mes unités, de participer à cette bataille.

21 Q. Dans cette bataille contre les forces serbes, vous souvenez-vous qui

22 était en position favorable ? S'agissait-il de vos unités ou des Unités

23 Celiku de l'autre côté ? Qui avait l'avantage par rapport aux forces

24 Serbes ?

25 R. Je ne sais pas comment vous expliquer cela. La position des unités

Page 2169

1 Celiku voulait qu'elle soit plus près des unités ennemies. Nous avions une

2 position plus favorable en termes d'opération, d'attaques.

3 S'agissant de la concentration des forces, mes forces étaient plus

4 importantes. Notre zone opérationnelle disposait d'effectifs plus

5 importants. Plusieurs unités de notre zone opérationnelle de Drenica ont

6 participé à la bataille qui s'est déroulée dans la gorge de Lapusnik.

7 Q. Vous souvenez-vous notamment de la position du commandant Celiku ?

8 Quelle était sa position ? Avait-il une position plus ou moins favorable

9 dans le cadre de cette bataille ?

10 R. Sa position stratégique était, je ne sais pas si vous connaissez bien

11 les gorges de Lapusnik. Nous avions tous les deux pris nos positions.

12 Lorsque je dis "nous", je veux parler des unités de la zone opérationnelle

13 de Drenica et des autres unités. Les uns et les autres avaient pris leurs

14 positions respectives de l'autre côté de la route. Lorsque je dis de

15 l'autre côté de la route, je veux parler de la zone de Berisa.

16 Q. Si vous vous en souvenez, au cours de cette bataille qui a gagné le

17 plus de terrain, vos unités ou celles de Fatmir Limaj ? Qui avait

18 l'avantage ?

19 R. Quand vous dites avantage, vous voulez parler des positions

20 stratégiques ?

21 Q. Oui. Il s'agit d'une région montagneuse.

22 R. Les unités de Celiku étaient plus près de la route, mais nos unités

23 également. Lorsqu'elles opéraient dans ce secteur, certaines unités sont

24 venues en aide aux Unités Celiku. Je ne sais pas si je me fais bien

25 comprendre, mais nos unités étaient essentiellement concentrées dans la

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1 gorge de Lapusnik.

2 Q. Pour être tout à fait clair, lorsque vous parlez de venir en aide aux

3 Unités de Celiku ou des unités commandées par le commandant Celiku, est-ce

4 que vous êtes venu en aide à l'une quelconque de ces unités ?

5 R. Le commandant Celiku n'avait pas de position de commandement. Comme je

6 l'ai dit plus tôt, lorsque certaines unités avaient besoin d'aide, d'autres

7 unités venaient à leur secours.

8 Q. Dans le contre rendu d'audience, il est dit que le commandant Celiku

9 n'avait pas de position de commandement ou de fonction de commandement.

10 Est-ce que vous pourriez préciser vos propos aux fins du compte rendu de

11 l'audience ?

12 R. Vous m'avez demandé qui était le commandant, si j'ai bien compris votre

13 question.

14 Q. Vous avez expliqué un peu plus tôt, en réponse aux questions posées par

15 la Chambre, que le commandant Celiku commandait l'une des unités Celiku;

16 est-ce exact ?

17 R. Oui, oui.

18 Q. Ma question est la suivante : au cours de la bataille qui s'est

19 déroulée le 9 mai, vous avez parlé de la participation de Fatmir Limaj.

20 Savez-vous si son unité était l'une de celle auxquelles vous êtes venu en

21 aide ou l'une de celle avec qui vos unités étaient en communication ?

22 R. Nous ne sommes pas venu en aide aux unités Celiku. Nous avons aidé les

23 unités déployées près de ce secteur, Guri, Pellumbi, comme je l'ai dit.

24 D'habitude, lors des combats, il était possible que certaines unités aident

25 d'autres unités. Ce n'était pas le cas uniquement avec les Unités Celiku.

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1 Q. Vous avez déclaré qu'il s'agissait d'une bataille importante et vous

2 avez déclaré que vous respectiez Fatmir Limaj. Pourriez-vous dire aux Juges

3 de la Chambre comment il s'est comporté lors de cette bataille ?

4 R. Je pense que Fatmir est plus à même de répondre à cette question. Je ne

5 sais pas comment il a combattu. Je ne sais pas ce qu'il a fait. Il

6 s'agissait d'un moment très difficile. Des villages ont été incendiés, les

7 habitants ont commencé à fuir leurs domiciles. Je ne peux pas vous dire

8 comment il a combattu. Je pense que c'est à lui qu'il convient de répondre

9 à cette question.

10 Q. Est-ce qu'à un moment quelconque, après le 9 mai, vous avez participé à

11 des opérations de combat ensemble en collaboration avec des unités

12 commandées par Fatmir Limaj ?

13 R. Je ne m'en souviens pas.

14 M. NICHOLLS : [interprétation] Un instant je vous prie, Monsieur le Juge.

15 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

16 M. NICHOLLS : [interprétation]

17 Q. Une partie de la frontière délimitant votre zone de responsabilité,

18 comme nous l'avons vu sur la carte, la route menant de Pristina à Pec,

19 traverse le village de Lapusnik; est-ce exact ?

20 R. Oui.

21 Q. Vous êtes-vous rendu personnellement à Lapusnik en mai, juin ou juillet

22 1998 ?

23 R. Oui, lorsque le conflit a éclaté. Mais je n'ai pas pu rentrer à

24 Lapusnik, seulement à Krekov [phon], près de Lapusnik.

25 Q. Savez-vous quelle unité, ou quelles unités étaient responsables de

Page 2172

1 Lapusnik de l'autre côté de la route, du côté de Pastrik ?

2 R. Les Unités Celiku étaient responsables de ce secteur.

3 Q. Si vous vous en souvenez, de quelles unités Celiku s'agissait-il ?

4 R. Comme je l'ai déjà dit un certain nombre de fois, je ne sais pas

5 combien d'Unités de Celiku existaient. Je sais qu'il y en eu plusieurs qui

6 opéraient dans ce secteur. Mais je ne sais pas combien il y en avait ni qui

7 elles étaient.

8 Q. Outre Fatmir Limaj, y avait-il d'autres commandants répondant au nom de

9 Celiku, qui opéraient dans ce secteur, à savoir, de l'autre côté de la

10 route Pristina-Pec en mai, juin et juillet 1998, à votre connaissance ?

11 R. Toutes les unités avaient leur propre commandant, mais je ne les

12 connaissais pas.

13 Q. Je vous demandais s'il existait un commandant répondant au nom de

14 Celiku outre Fatmir Limaj qui opérait dans ce secteur en mai, juin ou

15 juillet 1998.

16 R. Oui, mais je ne les connaissais pas.

17 Q. Il y avait d'autres commandants répondant au nom de Celiku outre Fatmir

18 Limaj; vous ai-je bien compris ?

19 R. J'ai dit que les unités de Celiku avaient leur propre commandant, mais

20 je ne les connaissais pas.

21 Q. Je vais essayer de préciser ma question et de la reformuler.

22 Connaissiez-vous des soldats de l'UCK répondant au surnom de Celiku en mai,

23 juin et juillet 1998 dans la zone dont vous nous avez parlé, outre que

24 Fatmir Limaj ?

25 R. Outre Fatmir Limaj, j'ai déclaré que je ne connaissais pas d'autre

Page 2173

1 commandant de ce côté de la route. Je n'avais de contact qu'avec Fatmir

2 après l'avoir rencontré.

3 Q. Je vous ai peut-être déjà posé la question, mais savez-vous qui a

4 participé à la création des unités Celiku ? Quels sont les soldats ou les

5 commandants de l'UCK qui ont reçu pour tâche de créer ces unités ?

6 R. Probablement quelqu'un de l'état-major général, mais je ne sais pas.

7 Q. Est-ce que c'est l'état-major général qui a décidé qui devait mettre en

8 place ces unités ?

9 R. Je ne sais pas.

10 Q. Excusez-moi. Est-ce que vous pourriez préciser ce que vous entendiez

11 par "probablement quelqu'un de l'état-major général". C'est ce que vous

12 avez déclaré dans votre réponse précédente. Vous dites que c'est quelqu'un

13 de l'état-major général qui était sans doute responsable de la création de

14 ces unités; les unités de Celiku.

15 M. KHAN : [interprétation] Là encore, le problème se pose, et le danger que

16 j'ai évoqué précédemment surgit de nouveau. On demande au témoin de faire

17 des suppositions. Le témoin a déclaré qu'il ne savait pas. On lui demande

18 de deviner. Je pense que ce n'est pas équitable à l'égard du témoin de lui

19 demander d'aller au-delà de ce qu'il a dit. Je tenais à le souligner.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Khan.

21 Dans sa réponse précédente, le témoin a évoqué quelque peu le rôle de

22 l'état-major général. La question suivante pourrait préciser ses

23 connaissances.

24 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Nicholls.

25 M. NICHOLLS : [interprétation] Je vous remercie.

Page 2174

1 Q. Monsieur le Témoin, je répéterai ma question. Vous avez répondu à la

2 question que je vous ai posée s'agissant de l'identité des personnes qui

3 ont participé à la formation de ces unités. Vous avez répondu qu'il

4 s'agissait probablement de quelqu'un de l'état-major général. Je vous ai

5 demandé si c'était l'état-major général qui avait décidé de ceux qui

6 devaient former ces unités. Vous avez répondu que vous ne saviez pas. Est-

7 ce que vous vouliez dire par là que quelqu'un, l'un des membres de l'état-

8 major général, a participé à la formation des Unités Celiku ? Est-ce que

9 vous pourriez nous dire pourquoi vous avez dit qu'il s'agissait

10 probablement de quelqu'un de l'état-major général ?

11 R. Je l'ai dit compte tenu de mon expérience. Lorsque les commandants

12 d'unités étaient nommés, il y avait un membre de l'état-major général qui

13 était présent. C'était le cas également lorsqu'ils m'ont élu commandant de

14 la zone opérationnelle de Drenica. Lors de cette réunion, il y avait un

15 représentant de l'état-major général. C'est la raison pour laquelle j'ai

16 dit que si d'autres unités étaient créées, ils voulaient élire leur propre

17 commandant, dans ce cas précis le commandant Celiku, je suppose qu'il y

18 avait à cette occasion un représentant de l'état-major général. Je peux me

19 tromper peut-être qu'il n'y avait personne, mais, d'après mon expérience,

20 je suppose que les choses se sont déroulées de la même manière.

21 Q. En mai, juin et juillet 1998, après votre première rencontre avec

22 Fatmir Limaj, l'avez-vous rencontré, ou lui avez-vous parlé de nouveau ?

23 R. Je ne sais pas, je l'ai rencontré à maintes reprises. Je ne sais pas en

24 quoi cela est important. Je l'ai, effectivement, rencontré à plusieurs

25 reprises.

Page 2175

1 Q. Dans quelles circonstances l'avez-vous rencontré au cours de cette

2 période ?

3 R. Nous nous sommes rencontrés en tant qu'amis.

4 Q. Où avez-vous rencontré votre ami, Fatmir Limaj, en mai, juin et juillet

5 1998 ?

6 R. Je ne m'en souviens pas.

7 M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai oublié quand

8 nous devions faire notre prochaine pause.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Plus ou moins maintenant.

10 M. NICHOLLS : [interprétation] Si nous sommes près de la pause, je pense

11 que le moment serait opportun de la faire. Ceci pourrait accélérer les

12 choses.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Nous reprendrons nos

14 travaux à 6 heures moins dix.

15 --- L'audience est suspendue à 17 heures 27.

16 --- L'audience est reprise à 17 heures 51.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Nicholls, vous avez la

18 parole.

19 M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Général, je n'ai plus de questions à

20 vous poser, à cet stade.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

22 Maître Topolski, vous avez la parole.

23 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je représentant Isak Musliu.

24 Malheureusement, encore une fois je n'ai pas de chance, mais bon. J'ai

25 quelques questions à vous poser si je puis.

Page 2176

1 Contre-interrogatoire par M. Topolski :

2 Q. [interprétation] L'UCK était une armée composée uniquement de

3 volontaires, n'est-ce pas ?

4 R. Au début c'était une armée de volontaires organisée par l'état-major.

5 Q. La réponse que vous nous avez fournie à l'instant, commence par ces

6 termes, "au début", est-ce que cela signifie qu'il y a eu un moment où

7 cette armée est devenue une armée de recrus ? Est-ce que vous comprenez, ce

8 que j'entends par ma question ?

9 R. Au début tout était bénévole, ou sur une base volontaire.

10 Q. Est-ce que ceci a changé, à aucun moment ?

11 R. Avec le temps, l'UCK a évolué et était réorganisé en brigade et en zone

12 opérationnelle.

13 Q. L'UCK n'a jamais eu la possibilité de contraindre qui que ce soit à

14 servir dans son armée -- à la rejoindre, n'est-ce pas ?

15 R. Non, jamais.

16 Q. Pour ce qui est de ceux qui ont intégré l'UCK, Général, je vais

17 concentrer votre attention sur la première partie de l'année 98, et

18 certaines personnes qui ont décidé de rejoindre l'armée, avaient eu déjà

19 une formation militaire par le passé, n'est-ce pas ?

20 R. C'est exact.

21 Q. Un bon nombre néanmoins de personnes, n'avait pas de formation

22 militaire.

23 R. C'est exact.

24 Q. Ma question suivante, porte sur la période qui va jusqu'à la création

25 des brigades. Ma question est comme suit : pour ce qui est de la discipline

Page 2177

1 militaire, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que cette discipline

2 militaire était pour le moins assez souple ?

3 R. Oui, c'est exact. Il est vrai qu'il ne s'agissait pas d'une discipline

4 militaire stricte à proprement parler et ce jusqu'à la création des

5 brigades. Il a fallu un certain temps pour mettre sur pied ces brigades.

6 Q. Jusqu'à la création des brigades, est-il exact de dire que pour ce qui

7 est de la discipline militaire, que comme vous nous l'avez dit hier, il est

8 arrivé souvent qu'on ne pouvait pas agir si un soldat se comportait mal,

9 n'est-ce pas ?

10 R. Oui, parce que tout était sur une base volontaire, et un homme qui

11 s'était porté volontaire pouvait simplement se retirer.

12 Q. Oui, effectivement. La mort au mois de mars 1998 d'Adem Jashari est un

13 événement qui a rallié un grand nombre de volontaires, n'est-ce pas ?

14 R. Oui, c'est exact.

15 Q. Dans mon pays, Général, on dirait que la mort d'Adem Jashari en quelque

16 sorte a joué le rôle de sergent qui a permis de recruter un certain nombre

17 de gens au sein de l'UCK. Est-ce que vous comprenez ce que j'entends par ma

18 question ?

19 R. Oui, tout à fait.

20 Q. Drenica, cette région géographique du Kosovo était l'endroit où se

21 rendaient les tout premiers volontaires; est-ce exact, Général ?

22 R. Oui, c'est exact.

23 Q. C'est à partir de Drenica, cette zone géographique que ces volontaires

24 étaient ensuite répartis autour du Kosovo. J'entends par là des tout

25 premiers mois précédents la création des brigades. Etes-vous d'accord avec

Page 2178

1 cela ?

2 R. Oui. Une partie de ces volontaires qui ont rejoint l'UCK sont venus à

3 Drenica. Je ne sais pas s'ils sont tous venus à Drenica. Mais un certain

4 nombre d'entre eux ne sont pas allés à Drenica, ils sont allés dans leur

5 propre région, cela ne va pas sans dire que tout le monde s'est rendu à

6 Drenica.

7 Q. Je ne pense pas que ma question laissait sous entendre que tous les

8 gens s'y rendaient. J'ai simplement parlé d'un grand nombre ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Général, je vais tenter de résumer la manière dont l'UCK a évolué au

11 cours du printemps et de l'été de l'année 1998. Je me demande si vous

12 pouviez prêter attention à ceci. Est-ce une manière de résumer la

13 situation ? Des hommes ont rejoint l'UCK; les hommes ont ensuite rejoint

14 d'autres hommes qui se sont alors transformés en unités; les unités

15 combattaient les unes à côté des autres; des groupes d'unités se sont

16 transformés en zones; et des zones pour finir ont été transformées en

17 brigades.

18 J'espère que j'ai pu lire ceci lentement, étape par étape. Je vais

19 répéter ce que je viens de dire, si vous le souhaitez. Est-ce que vous me

20 suivez ?

21 R. Oui.

22 Q. Etes-vous d'accord avec moi ?

23 R. Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous.

24 Q. Pour ce qui est des premiers moments que j'ai déjà définis à deux

25 reprises, à savoir la période qui va jusqu'au printemps et à l'été de

Page 2179

1 l'année 1998, n'est-il pas exact de dire que différentes zones avaient mis

2 sur pied leur propre structure et évolué à des rythmes différents; d'autres

3 avançaient plus rapidement que d'autres; êtes-vous d'accord avec cela ?

4 R. Oui.

5 Q. Pourrions-nous simplement regarder ensemble ces zones qui ont été

6 appelées par la suite zones opérationnelles. Je souhaite le faire par

7 l'intermédiaire d'une carte qui vous a été montrée brièvement hier. Il

8 s'agit de la carte P1. M. Nicholls vous l'a montré hier. Merci. Il s'agit

9 de la carte numéro 10, la dernière.

10 Général, j'espère qu'il s'agira là, la façon la plus efficace et la plus

11 courte de procéder. Tout d'abord, si vous regardez cette carte en même

12 temps que je vous demande, s'il vous plaît, de garder à l'esprit le fait

13 que cette carte a été dessinée par le ministère de la Défense britannique,

14 n'est-ce pas. Cette carte n'a pas été dessinée par un membre de l'UCK. Il

15 est précisé en bas, à droite de cette carte : "Ceci a été fourni par le

16 ministère de la Défense du Royaume-Uni, 1998."

17 Peut-être que vous seriez d'accord, Général, pour dire que pour une

18 fois le ministère de la Défense britannique a fait quelque chose

19 correctement. Lapusnik se trouve au milieu de la carte, au-dessus du est de

20 Kosovo.

21 R. Je le vois bien.

22 Q. Au-dessus, délimitée par les inscriptions en rouge se trouve la région

23 qui est décrite comme étant Drenica. Est-ce que cela correspond à la

24 manière dont vous avez conçu ou compris la zone qui devait ensuite

25 s'appeler zone de Drenica ?

Page 2180

1 R. Pour ce qui est de la zone que nous voyons ici, il est vrai que ceci

2 pourrait être amélioré car il y a un bon nombre de villages qui ne figurent

3 pas sur cette carte pour ce qui est de la zone opérationnelle de Drenica en

4 tout cas. Je ne sais pas si cette carte est très détaillée. Je ne sais pas

5 si les lignes de responsabilité sont clairement indiquées.

6 Q. Parce que cette carte a été dessinée par, nous savons par qui et, sans

7 doute, repose évidemment sur les éléments dont ils disposaient, et parce

8 que cela semble avoir été dessiné, bien sûr, par le ministère cité, cela

9 n'est pas précis à 100 %. C'est pour cela que j'ai utilisé la phrase :

10 "Correspond à la manière dont vous comprenez la disposition générale."

11 En dessous de Drenica et à gauche de Drenica, alors que l'on regarde

12 la carte, il y a là une autre zone opérationnelle, ou une autre région

13 opérationnelle, n'est-ce pas ?

14 R. Oui. La région de Dukagjini à gauche.

15 Q. En contournant la carte ensemble, Général, la grande zone suivante, des

16 endroits comme Suva Reka; Orahovac que nous connaissons, représentent la

17 zone de Pastrik, n'est-ce pas ? Il vous faut répondre, Général.

18 R. Oui, environ.

19 Q. A côté, si vous voulez, près d'Edilmja il y a une ligne en pointillée,

20 Nerodimlje, on voit la zone de Karadak et la zone de Pristina. Encore une

21 fois, dans les grandes lignes, êtes-vous d'accord pour dire que ceci est

22 une représentation assez relativement exacte de la manière dont les zones

23 opérationnelles ont été organisées ?

24 R. Oui. Encore une fois, je dirais que c'est assez approximatif car la

25 manière, dont sont délimitées les autres zones, est quelque chose que je

Page 2181

1 connais mal. Je connais surtout ma propre région, mais je crois que dans

2 les -- ceci correspond à peu près à la réalité sur le terrain.

3 Q. M. Nicholls vous a posé beaucoup de questions sur les unités qui se

4 sont positionnées le long de l'axe Pec-Pristina. Général, je souhaite être

5 tout à fait clair si c'est possible. Pour autant que -- en ce qui vous

6 concernait, quelles unités encore une fois, il s'agit toujours du printemps

7 et de l'été de l'année 98. Quelles unités étaient sous votre

8 responsabilité ? Comment s'appelaient ces unités ?

9 R. Au printemps après le 5 mars, il n'y avait que Shkoza.

10 Q. D'après cette réponse, Général, vous n'aviez aucune responsabilité

11 personnelle par rapport aux Unités Celiku, que l'on appelait Celiku; ai-je

12 raison ?

13 R. Oui, vous avez tout à fait raison car je n'avais pas -- je n'exerçais

14 pas une telle responsabilité.

15 Q. Est-ce que cela ne signifie pas également, d'après votre réponse, que

16 vous n'aviez aucune responsabilité personnelle -- vous n'étiez pas

17 responsable personnellement des Unités Pellumbi ou d'autres unités hormis

18 les vôtres; ai-je raison ?

19 R. Oui, vous avez raison. Jusqu'au moment où j'ai été nommé commandant, je

20 n'exerçais aucune responsabilité sur ces unités.

21 Q. Pour que la Chambre comprenne bien. Ces unités étaient des unités qui

22 étaient distinctes les unes des autres. Certaines unités avaient à leur

23 tête quelqu'un qui en avait la responsabilité, d'autres unités n'avaient

24 personne; est-ce exact ? Ai-je bien compris votre point de vue ?

25 R. Chaque unité avait quelqu'un à sa tête qui était responsable de

Page 2182

1 l'unité. Je ne sais pas ce qui en était des autres unités. Je ne

2 connaissais pas toutes les unités.

3 Q. Avant de vous demander d'autres questions de détail, je vais vous

4 demander de m'aider à mieux comprendre ceci. Il y a une lettre qui a été

5 signée par vous, qui a été envoyée en votre nom à ce Tribunal.

6 Général, je ne sais pas si vous avez devant vous une photocopie d'une

7 lettre qui a été datée, je ne sais pas quand cela a été écrit, mais c'est,

8 en tout cas, daté du 24 novembre 2004. Il a été signé par vous et par votre

9 avocat, M. Krajisnik. Est-ce que vous l'avez devant vous ?

10 R. Non, je ne l'ai pas là.

11 Q. Général, ceci est important, car il est important que la Chambre

12 comprenne bien quel est votre point de vue dans cette affaire. Je souhaite,

13 par conséquent, vous demander votre aide.

14 M. NICHOLLS : [interprétation] Je peux vous fournir une photocopie de cette

15 lettre.

16 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur

17 Nicholls.

18 Q. Général, on va vous remettre un exemplaire.

19 M. TOPOLSKI : [interprétation] Est-ce que c'est en anglais ? Bien, parfait.

20 Madame, Messieurs les Juges, merci.

21 M. TOPOLSKI : [interprétation]

22 Q. Première question : Monsieur le Témoin, est-ce que vous reconnaissez

23 qu'il s'agit d'une lettre qui a été signée, dont vous avez signé

24 l'original, et qui est écrite en votre nom, conformément à vos

25 instructions ? D'abord, première question : ceci, cette lettre a-t-elle été

Page 2183

1 écrite en votre nom ? Il vous faut répondre, Général.

2 R. Oui, ceci a été écrit en mon nom. J'ai demandé à mon avocat d'inscrire

3 par écrit les raisons qui étaient les miennes. C'est effectivement ce

4 qu'il a fait.

5 Q. Cette lettre a-t-elle été rédigée suite à vos instructions, ou les

6 instructions que vous avez données ? Autrement dit, êtes-vous d'accord

7 avec le contenu de cette lettre ?

8 R. Oui, je suis tout à fait d'accord.

9 Q. L'original a été signé par vous ?

10 R. Cette copie ou cette -- n'a pas été, cet exemplaire n'a pas été signé.

11 Mais je suis d'accord pour dire que ce sont les choses que j'ai exprimées

12 oralement, et il les a effectivement consignées par écrit et remises au

13 Tribunal.

14 Q. Général, la partie importante de cette lettre est sans doute le

15 deuxième paragraphe. Peut-être que c'est ce paragraphe que je vais lire

16 maintenant parce que c'est important.

17 "Je ne serai pas un témoin à charge, mais si la Défense propose mon

18 nom, alors je serai un témoin à décharge, conseil de Fatmir Limaj. La

19 raison est celle-ci : étant donné les circonstances politiques du Kosovo,

20 mon rôle en tant que premier fondateur -- un des premiers fondateurs de

21 l'UCK, plus tard chef de l'état-major de l'UCK, et maintenant commandant

22 adjoint du KPC, ceci a eu une incidence sur l'autorité que j'ai exercée sur

23 la population."

24 Général, je souhaite mieux comprendre, et d'aucuns le souhaiteront aussi

25 également. Il est important de comprendre le sens de cette question. Comme

Page 2184

1 ceci a été écrit en votre nom, auriez-vous l'obligeance de nous dire ce que

2 cela signifie ?

3 R. Oui. Je peux parler de ce qui est écrit ici, en parler davantage, et

4 vous dire pourquoi ceci a été rédigé de cette façon.

5 Q. Oui. Si vous auriez l'obligeance de le faire.

6 R. La raison était celle-ci : je vais commencer par le début. J'ai prêté

7 serment devant cette Chambre. Il s'agit de la deuxième fois où j'ai prêté

8 serment. La première fois, j'ai prêté serment devant mon drapeau et mon

9 commandant légendaire. La deuxième fois que j'ai prêté serment, c'est ici

10 lorsque j'ai déclaré solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité

11 et rien que la vérité. J'ai toujours été disposé à venir devant ce Tribunal

12 pour coopérer avec le Tribunal car il s'agit d'une instance démocratique et

13 indépendante. La première fois, j'ai reçu une convocation, une injonction à

14 comparaître de la part de Mme Carla Del Ponte. J'ai répondu à cette

15 injonction avant d'en venir à la question qui est débattue aujourd'hui. De

16 même le bureau de la Défense m'a demandé si j'étais disposé à avoir un

17 entretien avec eux. J'ai indiqué que j'aurais un entretien avec eux avec

18 plaisir. J'ai demandé à l'enquêteur du bureau du Procureur d'assister à

19 cette réunion. Je dois dire, et ceci est important, que j'étais à la

20 disposition et que je suis toujours à la disposition du Tribunal.

21 Pour ce qui est de ma déclaration, cette déclaration a été écrite pour les

22 raisons suivantes : j'ai entendu dire qu'au Tribunal, d'anciens commandants

23 et d'autres commandants se sont battus contre les forces serbes. Sachant

24 qu'il y a eu un génocide commis par les forces serbes contre notre peuple,

25 et en application de la stratégie de l'académie des Sciences appliquée par

Page 2185

1 Milosevic et par les commandants serbes, et ceci allant du commandant -- et

2 du simple commandant au général de division, ils ont infligé une très

3 grande souffrance à mon peuple. Il s'agissait de génocide. Nous ne savons

4 pas dans bon nombre de cas où gisent les corps des victimes. Lorsqu'on

5 vient témoigner devant ce Tribunal, et lorsque je dois témoigner à propos

6 de mes soldats, des soldats de l'UCK, qui ont combattu sans uniformes, sans

7 armes, sans fusils, je n'étais pas disposé à venir témoigné ici et à venir

8 témoigner comme témoin à charge. Voici mes raisons.

9 Mais quoi qu'il en soit, l'injonction à comparaître m'a demandé de me

10 présenter ici devant le Tribunal. C'est quelque chose que j'ai accepté.

11 Ceci m'a donné l'occasion de dire la vérité, rien que la vérité, de dire

12 comment les choses se sont passées, car nous croyons à la justice. Voici

13 mes raisons.

14 Je peux déclarer ici devant ce Tribunal, devant la Chambre de première

15 instance, que je n'ai jamais hésité une seule seconde à venir. Je

16 n'hésiterais jamais à l'avenir non plus. Je n'hésiterais pas à dire la

17 vérité et à défendre la vérité, à dire la vérité sur les choses qui sont

18 arrivées à notre peuple, aux massacres qui ont été commis au Kosovo. Bon

19 nombre d'entre vous et une grande partie de l'opinion publique ne savent

20 toujours pas ce qu'il s'est passé en réalité au Kosovo.

21 Le lendemain de mon injonction à comparaître, le Procureur m'a demandé si

22 je pouvais rencontré l'équipe de la Défense. Je voulais qu'il soit présent,

23 car je souhaitais être correct envers les deux parties. Je souhaitais être

24 transparent. Je n'ai jamais rencontré un conseil de la Défense, car je suis

25 sous serment, le serment que j'ai prêté hier. Il y a beaucoup de choses que

Page 2186

1 j'ai dites, beaucoup de choses que j'ai pu oubliées, mais ce que j'ai dit

2 correspond à la vérité. C'est tout.

3 Q. Je souhaite maintenant vous lire les derniers mots que vous avez

4 littéralement prononcés. Ceci figure sur une cassette qui a été enregistrée

5 par le bureau du Procureur lors de votre entretien du 19 novembre 2003. Je

6 souhaite vous demander, à la fin du court extrait de cinq ou six lignes que

7 je vais vous lire, si vous vous en tenez toujours à ces propos ou non, si

8 vous en tenez toujours à cela aujourd'hui.

9 Vous avez dit ceci à la page 58 du document en question si quelqu'un

10 souhaite suivre avec ce document.

11 "Tout pays démocratique devrait arriver être réconcilié avec les personnes

12 qui ont commis des crimes durant la guerre; même des pays qui doivent

13 peaufiner leur système démocratique, les pays qui ont des problèmes, même

14 nous qui partons sur cette voie-là sans expérience. Personne n'est au-

15 dessus de la loi. Les gens pourront commettre certains actes dans un moment

16 euphorique, mais après cela, ils doivent en porter la responsabilité

17 générale."

18 Etes-vous d'accord avec ces propos aujourd'hui ?

19 R. Messieurs, je l'ai dit à plusieurs reprises, et je le répète : Personne

20 n'est au-dessus de la loi. C'est quelque chose que je dis. Dans n'importe

21 pays, des crimes de ce genre peuvent être commis. J'ai dit ceci car l'État

22 qui a organisé ce génocide contre nous a organisé son armée pour la lancer

23 contre nous. Cette armée était une armée expérimentée, alors que l'UCK

24 commençait tout simplement à s'organiser dans des conditions qui étaient

25 difficiles dans ces circonstances. Tout pays peut commettre des erreurs. Je

Page 2187

1 ne fais allusion à personne en particulier, ici. Mais quel que soit le pays

2 dont il est question, ceci peut toujours arriver. Ces personnes doivent

3 toujours être traduites en justice et doivent payer pour les crimes qu'ils

4 ont commis. Au Kosovo, le seul génocide commis a été commis par les forces

5 serbes sous l'autorité de Milosevic car ils ont commis des crimes contre

6 l'ensemble de la population civile du Kosovo.

7 Q. Général, je voudrais maintenant passer du domaine des questions

8 générales au domaine des questions plus précises.

9 En août, septembre, octobre 1998, à l'automne, il existait un plan ou des

10 propositions qui étaient mises en vigueur, et qui visaient la création de

11 brigades et de zones opérationnelles. Cela a déjà été établi. Est-ce vous

12 êtes d'accord ?

13 R. Oui.

14 Q. Lors du même entretien - et si quelqu'un souhaite suivre cela, il

15 s'agit de la page 16 - vous avez indiqué au bureau du Procureur que : "En

16 1998, le plan," - et ce sont vos propres mots - "a commencé à être mis en

17 vigueur. Je pense que cela existait auparavant parce que je n'avais pas eu

18 connaissance de ce qui se passait au niveau de l'état-major général. Je

19 n'en suis pas sûr, mais des personnes plus compétentes le sauront."

20 Général, je pense que vous devriez pouvoir répondre par l'affirmative ou la

21 négative à cette question. Est-ce que vous vous en tenez à cette réponse ?

22 Est-ce que cela correspond bien à la situation telle que vous la

23 compreniez ?

24 R. J'ai dit cela parce que je n'étais pas membre de l'état-major général.

25 Je ne pouvais pas savoir ce qui s'y passait.

Page 2188

1 Q. Etes-vous d'accord avec moi pour dire que Shukri Buja était une

2 personne qui aurait dû savoir ce qui s'y passait ?

3 R. Je ne peux pas vous le dire. Je ne sais pas s'il le savait ou non.

4 Probablement pas parce qu'il n'était pas membre de l'état-major. S'il

5 l'était, il l'aurait su, mais autant que je le sache, il n'était pas

6 membre.

7 Q. N'a-t-il pas été promu en juin 1998, au grade de commandant au sein

8 d'une sous-zone ? Le savez-vous ou non ?

9 R. Même s'il est devenu membre de l'état-major général, je ne sais pas à

10 quelle date il est devenu membre de l'état-major général.

11 Q. Bien, j'ai un avantage ici parce que je consulte la déclaration qu'il a

12 faite à ce Tribunal, et je l'aie ici. Je souhaiterais vous poser une

13 question. Saviez-vous qu'il y avait des discussions afin de créer des zones

14 politiques au début des années 1990, en 1993 pour être plus précis ?

15 R. Non. Je ne le savais pas. Je n'étais pas membre de l'état-major

16 général.

17 Q. A l'époque, d'aucuns peuvent dire que le plan politique consistait à

18 libérer tous les territoires albanais. Savez-vous que cela faisait l'objet

19 de discussions au début des années 90, Général ?

20 R. Au début des années 90, lorsque nous avons commencé à nous organiser,

21 et lorsque nous sommes ralliés à l'UCK, nous ne nous sommes pas battus pour

22 l'ensemble du territoire du Kosovo. Je ne le savais pas, je n'étais pas au

23 courant de toutes les choses que vous venez de mentionner.

24 Q. Compte tenu de votre réponse, je pense qu'il serait tout à fait inutile

25 que je continue à vous poser des questions alors que Shukri Buja pourrait

Page 2189

1 certainement y répondre lui-même. Je vais passer à autre chose.

2 Je me demande si, avec votre aide, je pourrais faire une description

3 de la situation qui prévalait lors du printemps et de l'été de 1998,

4 Général. Il s'agit des mois d'avril, mai, juin, et cetera. Je parle

5 seulement de cette période pour le moment. Est-ce que pendant cette

6 période, il y avait des hommes qui s'étaient ralliés à l'UCK, et qui

7 n'avait toujours pas d'armes pour pouvoir combattre ? Est-ce que cela était

8 encore la situation à l'époque ?

9 R. Oui. Souvent, il y avait encore des soldats qui n'avaient pas d'armes.

10 Cela est vrai. Très souvent, les mêmes armes, ou la même arme était

11 utilisée par un soldat, puis était utilisée par un autre soldat lorsqu'il

12 devait prendre son repos parce que nous n'avions pas suffisamment d'armes.

13 Q. J'aimerais mettre, ou établir le contraste entre cette situation et la

14 situation un peu plus tard pendant cette année, Général. Dans la mesure de

15 vos moyens, et je ne parle que de votre expérience, est-ce que dans un

16 premier temps, ce type de situation a été modifié ou a évolué au fil de

17 l'année 1998 ?

18 R. Vous parlez des armes ? Pour ce qui est des armes, nous n'avons jamais

19 eu suffisamment d'armes. Plus tard, la situation s'est améliorée; nous

20 avons obtenu du renfort. Nous n'avions toujours pas suffisamment d'armes.

21 Il y avait également des soldats qui n'avaient pas leur propre uniforme.

22 Q. Général, vous émettiez des documents, des documents qui étaient censés

23 être des ordres, et cela à partir de l'endroit où vous étiez cantonné. Nous

24 en avons vu un hier par lequel vous, où il était question plutôt de

25 rassemblement de personnes dans des lieux publics; est-ce bien exact ?

Page 2190

1 R. C'est exact.

2 Q. Je pense que vous aurez certainement certains de ces documents, que

3 vous avez certains de ces documents plutôt. J'aimerais vous poser des

4 questions à propos de l'un ou l'autre de ces documents, si vous me le

5 permettez. Tout d'abord, il s'agit de l'intercalaire, ou du document qui

6 correspond à l'intercalaire 3.

7 R. Est-ce que vous pourriez me donner ce document parce que je ne l'ai

8 pas.

9 Q. Je connais quelqu'un qui va vous le fournir dans une petite seconde.

10 Général, j'espère que l'on vous a fourni une copie de ce document en

11 anglais et en albanais.

12 R. Oui, oui.

13 Q. Il semble porter la date du 27 août 1998. C'est un document qui

14 commence comme suit : "Compte tenu, ou en fonction de la législation

15 militaire et du règlement de libération du Kosovo et du besoin qu'il y a à

16 nommer du personnel à l'unité spéciale de la sous zone opérationnelle de

17 Drenica, je nomme," ensuite, vous indiquez le nom de la personne pour cette

18 unité spéciale.

19 Dans le deuxième paragraphe, c'est ce qui m'intéresse, Général, vous nommez

20 quelqu'un, mais vous lui donnez le droit de faire appel de la décision, et

21 cela dans le même document. Est-ce que vous a bien été traduit, ou plutôt

22 si cela a bien été traduit ? Est-ce bien exact ?

23 R. Oui. Cela a été écrit à l'intention de l'état-major général. Il devait

24 procéder à une évaluation de cette personne, ensuite, renvoyer le document

25 avec une réponse.

Page 2191

1 Q. D'après le document, si je le comprends, Général, si cette personne

2 n'appréciait pas, ou n'était pas en faveur de la décision qui consistait à

3 le nommer, cette personne pouvait faire appel contre cela. Est-ce que c'est

4 bien cela qui est indiqué dans le document ?

5 R. Oui, il avait la possibilité de faire appel de la décision, oui, ou il

6 pouvait fournir sa propre opinion.

7 Q. Pour dire, je ne veux pas de ce travail et je voudrais qu'il soit

8 confié à quelqu'un d'autre. Il pouvait dire cela également, n'est-ce pas ?

9 R. Cela dépendait des circonstances. S'il avait de bonnes raisons qui

10 militaient contre l'acceptation de cette responsabilité, nous pouvions

11 avoir des consultations. Il pouvait proposer le nom d'une autre personne.

12 Q. Il y avait de nombreuses discussions qui avaient lieu à propos de

13 l'exécution d'ordres et à propos des requêtes qui étaient présentées par --

14 à l'état-major général. Si quelqu'un n'aimait pas telle ou telle idée,

15 cette personne pouvait s'exprimer contre cette idée. On s'attendait à ce

16 que cette personne le fasse, n'est-ce pas ?

17 R. Oui. Ils pouvaient exprimer leur propre opinion parce que nous étions

18 en pleine réorganisation. Lorsque les unités existaient, nous étions tous

19 égaux. Lorsque les commandants étaient nommés, c'est à partir de ce moment-

20 là que l'on commençait à mettre en application certaines des règles

21 militaires.

22 Q. J'aimerais maintenant vous poser quelques questions à propos de

23 Lapusnik, à proprement parler.

24 R. Oui.

25 Q. Lors de votre déposition d'aujourd'hui, si j'ai pris bonne note, M.

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1 Nicholls, qui se trouve de l'autre côté de la salle, vous a posé des

2 questions. Vous avez dit qu'en mai, juin et juillet, vous n'étiez pas en

3 mesure de pénétrer dans Lapusnik.

4 R. [aucune interprétation]

5 Q. Oui, je vous en prie, Général ?

6 R. Est-ce que vous pourriez répéter la question ?

7 Q. Vous nous avez dit en début d'après-midi, que vous n'étiez pas en

8 mesure pendant les mois de mai, juin et juillet 1998. J'espère vous citer

9 de façon exacte : "De pénétrer dans Lapusnik." Vous souvenez-vous avoir dit

10 cela un peu plus tôt aujourd'hui ? Je m'excuse, je n'ai pas entendu la

11 traduction.

12 R. Oui. C'est lorsque nous avons parlé de Lapusnik, j'ai dit que je

13 n'avais pas été en mesure de pénétrer dans Lapusnik. Ce n'était pas pendant

14 les mois de mai, juin et les mois que vous avez mentionnés. C'était juste

15 une journée lors des combats.

16 Q. Pendant la guerre, et avant la fin du mois de juillet 1998, Général,

17 avez-vous pu pénétrer dans le village de Lapusnik ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce qu'on vous a conduit dans des bâtiments ou des maisons, ou des

20 endroits dans le village de Lapusnik, où il y avait d'autres soldats de

21 l'UCK ?

22 R. Non. Je ne m'en souviens pas.

23 Q. Essayez d'y réfléchir un peu. Est-ce que vous vous souvenez maintenant,

24 vous souvenez-vous avoir passé un certain temps à Lapusnik, et par cela,

25 j'entends vous souvenez-vous si vous avez passé une nuit à Lapusnik,

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1 pendant la guerre, pendant l'été de 1998 ?

2 R. J'ai dormi dans bien des endroits, mais je ne me souviens pas des

3 circonstances pendant lesquelles je suis resté à Lapusnik. Il se trouve

4 que j'ai passé beaucoup de nuits dans de nombreux endroits.

5 Q. Si je vous montrais --

6 R. Je ne m'en souviens pas.

7 Q. Si je vous montrais une photographie d'un bâtiment ou deux. Pensez-vous

8 que peut-être cela vous permettrait de vous souvenir de cela ?

9 R. Oui. Vous pouvez me les montrer.

10 Q. Très bien.

11 R. Cela aurait mieux de les montrer avant.

12 Q. Général, vous ne pouvez faire confiance à personne par les temps qui

13 courent, encore moins, aux avocats qui semblent subtilisés [phon] tout ce

14 que vous avez lorsque vous y attendez le moins. Je m'excuse de ce petit

15 retard.

16 M. TOPOLSKI : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait donner la pièce P6

17 au Général. Monsieur Hasan vient à notre rescousse, il a le document.

18 Q. Général, je vous demanderais de bien vouloir regarder ces

19 photographies, peut-être que, pour ne pas trop perdre de temps, vous

20 pourriez les avoir toutes en face de vous. Je vous demanderais de les

21 regarder --

22 R. Oui, oui. Je regarde ces photographies. Je vois des bâtiments, des

23 maisons.

24 Q. Très bien. Vous voyez cette enceinte. La photo suivante qui n'est pas

25 très utile parce que c'est une vue aérienne. Est-ce que nous pouvons

Page 2194

1 revenir sur terre, je vous prie.

2 R. Oui, oui, je vois très bien.

3 Q. C'est une maison tout à fait typique, Général, c'est une maison du

4 village de Lapusnik. Est-ce que vous la reconnaissez ?

5 R. Non, non, non. Je ne la reconnais pas.

6 Q. Un autre bâtiment qui fait partie de la même enceinte. Voilà, celle-là

7 qui lui ressemble ?

8 R. Non, je ne la reconnais pas non plus.

9 Q. Vous avez là les portails du périmètre en question de l'enceinte entre

10 un bâtiment plus petit et l'Oda --

11 R. Oui, oui. Je le vois très clairement.

12 Q. Est-ce que vous reconnaissez cela comme un endroit où vous vous seriez

13 peut-être rendu ?

14 R. Non.

15 Q. J'aimerais vous montrer une autre photographie, une photographie qui

16 comporte le numéro 18 au bas. Il s'agit d'un ensemble différent de

17 bâtiments, de l'autre côté de la route. Est-ce que cela vous dit quelque

18 chose, Général ?

19 R. Non, cela n'évoque absolument rien pour moi.

20 Q. La première série de photographies que je vous ai montrées correspond à

21 des photos d'un camp de prisonniers géré par des soldats de votre armée

22 pendant le printemps et l'été de 1998 où des gens ont été détenus, torturés

23 et assassinés. Général, étiez-vous conscient de l'existence de cet endroit,

24 oui ou non ?

25 R. Non, et je l'ai déjà dit au Procureur parce qu'ils m'ont posé cette

Page 2195

1 question à maintes reprises et je leur avais dit que c'était la première

2 fois que j'entendais parler de ce genre de choses. Lorsqu'ils ont emmené

3 Fatmir Limaj, je dois dire, lorsqu'ils l'ont emmené ici, je n'avais jamais

4 entendu parler de ce genre de choses.

5 Q. Général, j'aimerais que nous passions à d'autres photos, ou plutôt

6 c'est tout ce que je voulais vous demander à propos des photos et

7 j'aimerais en fait vous poser une autre question. Il s'agit de la police

8 militaire. La raison pour laquelle je vous pose cette question c'est que

9 mon client est devenu membre de la police militaire plus tard en 1998.

10 Alors, je pense que je devrais d'abord vous poser une première

11 question. Est-ce que vous avez jamais rencontré Isak Musliu pendant la

12 guerre, que l'on connaissait également sous le nom de Qerqiz ?

13 R. Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas de l'avoir rencontré. Il

14 se peut que je l'aie rencontré, mais je ne m'en souviens pas.

15 Q. J'aimerais vous poser quelques questions à propos de la police

16 militaire et c'est pour cela que je souhaite vous poser ces questions.

17 Voilà quelle sera ma première question : dans la mesure où vous vous en

18 souvenez, quand est-ce que la police militaire de l'UCK a été formée ?

19 R. Je dirais que règle générale, je ne sais pas quand est-ce que la police

20 militaire de l'UCK a été créée, mais dans ma zone lorsque la brigade a

21 commencé à être constituée, il était considéré que cela était raisonnable

22 et judicieux. C'est ainsi que la police militaire a commencé également à

23 être constituée.

24 Q. Par conséquent, si nous prenons comme point de départ le moment où la

25 brigade a commencé à être constituée, nous parlons de la période après

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1 août, à savoir l'automne 1998, êtes-vous d'accord, Général ?

2 R. Cela s'est passé jusqu'à l'automne de 1998, mais également jusqu'en

3 1999, parce que nous n'avons jamais véritablement pu renforcer tout cela

4 comme nous le souhaitions.

5 Q. Voilà pour ce qui est de leur création. J'aimerais maintenant aborder

6 avec vous le thème de leur rôle.

7 Premièrement, est-il exact de dire que dans votre zone, vous étiez

8 responsable de la création de la police militaire ? Donc, vous avez

9 participé directement à leur création dans votre zone; est-ce bien exact ?

10 R. Dans ma zone, j'ai commencé à assumer la responsabilité pour la

11 création de la zone et comme je l'ai mentionné préalablement cela a

12 commencé avec la création des brigades et, ensuite, avec les unités, ou la

13 police militaire dans la zone.

14 Q. Je vous suggère que l'objectif était d'améliorer la discipline au sein

15 des rangs de l'UCK. Etes-vous d'accord avec cela ?

16 R. Outre la discipline, il pensait qu'il était tout à fait judicieux de

17 pouvoir avoir des policiers également.

18 Q. Oui. A la page 44 de votre entretien avec le bureau du Procureur, alors

19 en tout cas à la page 44 de la traduction anglaise, vous dites :

20 "L'objectif principal était de discipliner les soldats. Parfois il fallait

21 faire en sorte d'assurer l'ordre public, ce qui ne se passait pas très

22 souvent. Il participait au combat et s'occupait également des personnes qui

23 avaient été blessées," et cetera.

24 Donc, il s'agissait de fonctions générales, y compris de discipline; est-ce

25 bien exact ?

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1 R. Oui, c'est exact.

2 Q. On leur a donné des uniformes noirs à porter, n'est-ce pas, bien

3 entendu, après leur création. Est-ce que cela est exact, Général ?

4 R. Oui, c'est exact.

5 Q. Ce pour faire la différence avec d'autres unités et d'autres grades ?

6 R. Oui.

7 Q. J'aimerais revenir au premier jour, Général. J'aimerais, en fait,

8 revenir au mois de mai 1998, et de la situation. Voilà ce que j'aimerais

9 avancer, Général. Je suppose que vous avez eu une certaine expérience de

10 cela, et que cela aura été apporté à votre connaissance.

11 Au début, lorsque les hommes franchissaient la frontière, ils

12 prenaient leur propre décision à propos de l'endroit où ils allaient se

13 rendre pour prendre les armes. Etes-vous d'accord avec moi à ce sujet ?

14 R. Oui.

15 Q. Très souvent personne ne leur indiquait quelle était la direction à

16 suivre, et souvent ils disaient tout simplement ils se rassemblaient, ils

17 disaient nous avons entendu qu'il y avait dire qu'il y a des problèmes ici

18 et là. Bien entendu je paraphrase et je ne relate que l'essentiel, mais

19 est-ce que cela correspondait à la situation du mois de mai 1998 ?

20 R. Je peux dire que cela correspond à la réalité, approximativement, parce

21 qu'il s'agissait de volontaires. Ils n'avaient pas d'adresse où se rendre.

22 Q. Ce n'est que plus tard pendant l'été que vous avez eu des fichiers à

23 propos des personnes qui s'étaient ralliées, donc vous ne saviez même pas

24 le nom de tous vos camarades dans votre zone; est-ce bien exact ?

25 R. Oui, nous n'avions même pas les noms de nombreuses personnes qui

Page 2198

1 s'étaient reliées à nous.

2 Q. Pour ce qui est des endroits, prenons, par exemple, Lapusnik à titre

3 d'illustration. Ils allaient se battre à Lapusnik et s'ils entendaient

4 qu'il y avait eu un problème ailleurs, ils y allaient tout simplement. Ils

5 n'avaient pas besoin d'ordre, ils n'avaient pas besoin de demande. Ils le

6 faisaient de leur propre gré. En quelque sorte, est-ce que vous avez eu une

7 expérience de ce genre de situation, Général ?

8 R. Oui, c'est mon expérience. Tant que nous avons opéré en tant qu'unité,

9 nous agissons en tant que volontaires. Nous nous rendions dans des endroits

10 en tant que volontaires. Ils savaient qu'il y avait une autre unité. Ils

11 savaient que quelque chose s'était passé là, et c'est ainsi que notre unité

12 venait prêter main-forte.

13 Q. Cette situation, d'après ce que je vous dis, est une situation qui en

14 réalité a duré jusqu'au moment où les brigades ont été constituées. Est-ce

15 que vous êtes d'accord avec ce que je viens de dire. Il s'agit là en fait

16 d'une suggestion que je vous fais, et qui est assez générale.

17 R. Oui.

18 M. TOPOLSKI : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, veuillez

19 m'accorder quelques instants, s'il vous plaît. Je crois que j'ai terminé.

20 Je vous remercie d'avoir répondu à mes questions. Je n'ai plus d'autres

21 questions.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Khan, vous avez la parole.

23 M. KHAN : [interprétation]

24 Q. Général, je représente Fatmir Limaj. J'espère que nous allons pouvoir

25 en terminer avec les questions que j'ai à vous poser ce soir.

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1 Vous avez dit qu'après la mort d'Adem Jashari, il y a eu un afflux énorme

2 de personnes qui ont à ce moment-là rejoint l'UCK; est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. C'était un assez grand défi pour l'UCK, que d'absorber et d'assimiler

5 toutes ces personnes. Est-ce exact de dire cela également ?

6 R. Oui.

7 Q. En réalité, un des grands défis posé à l'UCK pendant la plus grande

8 partie de l'année 1998, une autre difficulté qui se posait vis-à-vis des

9 Serbes, il s'agissait de survivre, de les combattre. Il fallait donner un

10 semblant d'organisation à tous ces civils qui affluaient et qui voulaient

11 rejoindre les rangs de l'armée de libération du Kosovo; est-ce exact ?

12 R. Oui.

13 Q. Je vais repartir au début du conflit, et jusqu'au mois de juin 1998.

14 Vous avez dit que hormis l'UCK, avez-vous connaissance d'autres groupes

15 armés opérant au Kosovo jusqu'au mois de juin 1998, groupe armé combattant

16 les forces serbes ?

17 R. Non, je n'avais pas connaissance d'unité autre que l'UCK et les forces

18 serbes. S'il y avait des forces paramilitaires ou des unités

19 paramilitaires, je n'en avais pas connaissance.

20 Q. Avez-vous entendu parler d'un groupe qui s'appelait le mouvement

21 national de Libération du Kosovo ?

22 R. Non, je n'ai pas entendu parler d'un tel groupe à l'époque. Si vous

23 voulez parler du l'UCK, oui, j'en avais entendu parler, mais je n'ai pas

24 entendu parler du mouvement national de Libération du Kosovo.

25 Q. LKCK, ce groupe était opérationnel jusqu'à quelle époque, vous en

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1 souvenez-vous ?

2 R. Ce groupe avait démarré ses activités encore plus tôt. Je ne suis pas

3 au courant des activités qu'il exerçait par la suite. Il vaut mieux

4 demander la question directement aux personnes responsables du LKCK, ou aux

5 membres de l'état-major général, qui était à la tête de ce mouvement ?

6 Q. Si vous le savez, pardonnez-moi, ma prononciation qui est épouvantable,

7 la région de Belacevac.

8 R. Oui, je connais cette région, la région de Belacevac. Il avait des

9 membres de l'UCK qui se sont battus dans cette région. C'était sous le

10 contrôle de l'UCK.

11 Q. A quelle zone opérationnelle était rattachée cette région de Belacevac,

12 si vous vous en souvenez ?

13 R. Belacevac se trouve à l'intérieur de la zone opérationnelle de Drenica

14 et se trouve le long de la zone opérationnelle de Shales.

15 Q. Vous souvenez-vous quelles étaient les Unités de l'UCK qui opéraient

16 dans cette zone ?

17 R. Je ne me souviens pas.

18 Q. Vous dites qu'après le mois de septembre 1998, vous avez eu

19 connaissance du fait que Fatmir Limaj était le commandant de la

20 121e Brigade; c'est exact, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, ce n'était qu'à ce moment-là.

22 Q. A ce moment-là, vous étiez vous-même commandant de brigade, n'est-ce

23 pas ?

24 R. Non, j'étais un commandant de zone.

25 Q. Bien. Savez-vous que des civils déplacés se trouvaient dans la zone de

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1 Pastrik ?

2 R. Il y avait des civils déplacés dans ma zone également, ainsi que dans

3 la zone de Pastrik. Les civils déplacés étaient en plus grand nombre dans

4 la région de Pastrik.

5 Q. C'étaient surtout des civils qui avaient fui l'attaque des Serbes,

6 n'est-ce pas ?

7 R. Oui, précisément. Ils cherchaient un refuge, ils cherchaient un abri,

8 et avaient fui ces régions. Ils se sont rendus dans cette région.

9 Q. Merci. Il s'agissait de civils qui quittaient leurs maisons et qui

10 avaient très peur, et qui n'avaient que ce qu'ils portaient sur eux

11 lorsqu'ils fuyaient; est-ce exact ?

12 R. Oui, c'est exact.

13 Q. Les conditions de vie de ces civils étaient des conditions de vie

14 extrêmement difficiles, n'est-ce pas ?

15 R. Oui, c'est exact.

16 Q. Il y avait un manque de nourriture, de médicaments, de vêtements, de

17 couches pour bébés, et cetera. Les conditions de vie étaient très

18 difficiles pour ces civils; est-ce vous êtes d'accord avec cela ?

19 R. Oui. Ils manquaient des produits de première nécessité. Ils n'avaient

20 même pas de pain à manger, sans compter des vêtements et d'autres choses

21 dont on manquait. Ils vivaient dans des conditions misérables.

22 Q. Pourriez-vous décrire, je souhaite terminer avec cette question,

23 j'espère que nous pourrons terminer pour aujourd'hui. Savez-vous comment

24 Fatmir Limaj a traité les civils qui étaient dans sa zone de

25 responsabilité ? Si oui, pourriez-vous en parler à la Chambre ?

Page 2202

1 R. J'aurais aimé être dans la situation de Fatmir Limaj pour pouvoir

2 porter secours aux personnes qui souffraient. J'aurais fait la même chose,

3 et j'aurais aidé les personnes de cette région. Mais en raison de toutes

4 les difficultés dans cette région, Fatmir avec ses soldats et ses amis ont

5 porté secours à ce groupe de personnes. C'est quelque chose qui doit être

6 apprécié.

7 M. KHAN : [interprétation] Peut-être que nous pouvons en terminer pour

8 aujourd'hui.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Khan.Nous

10 devons maintenant lever l'audience.

11 Général, l'heure est venue, encore une fois, de lever l'audience. Je vous

12 demande de bien vouloir revenir demain. Je crois pouvoir vous dire que

13 votre déposition sera terminée demain après-midi. Nous allons reprendre

14 demain après-midi à 14 heures 15.

15 [Le témoin se retire]

16 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je sais que M. Cayley est présent dans la

17 salle d'audience. Je sais qu'il est venu nous dire au revoir. Je souhaite

18 simplement dire au nom de l'équipe de la Défense que cela a été un grand

19 plaisir de travailler avec M. Cayley comme adversaire. Je dois dire que

20 c'est un homme qui a véritablement mis en œuvre les pratiques du barreau

21 britannique de la meilleure façon possible. Nous serons triste de le voir

22 partir et nous quitter, mais nous lui souhaitons un avenir fructueux et

23 agréable.

24 M. CAYLEY : [interprétation] Merci beaucoup. Je vais être très bref. Je

25 voulais simplement que ce soit consigné au compte rendu d'audience. Vous

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1 savez déjà que j'ai envoyé un courrier à la Chambre de première instance,

2 lettre qui a été envoyée également en photocopie à l'équipe de la Défense.

3 Ceci n'a rien d'inhabituel. Ceci n'a rien à voir avec cette affaire. C'est

4 quelque chose qui avait déjà été prévu il y a plus d'un an. Je le savais,

5 j'étais au courant, et je le savais déjà à ce moment-là. Cette affaire

6 sera, par conséquent, sous la responsabilité de M. Alex Whiting à partir de

7 maintenant. Il y aura une personne, M. Shin rejoindra l'équipe à la fin de

8 ce mois-ci, un autre juriste hors classe.

9 Je souhaite simplement vous remercier pour votre patience pendant toute

10 l'époque où j'ai travaillé dans cette affaire. Bien évidemment, je souhaite

11 remercier Me Topolski pour ses commentaires fort agréables à mon propos.

12 Madame, Messieurs les Juges, je vous dis par conséquent au revoir.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Cayley, nous partageons les

14 points de vue exprimés si généreusement par Me Topolski.

15 Vous nous avez beaucoup aidé puisque c'est dans le cadre de cette affaire,

16 nous vous souhaitons plein de bonnes choses à l'avenir. J'espère également

17 recevoir une aide semblable à celle que nous avons eue de votre part des

18 autres membres de votre équipe.

19 Nous allons maintenant lever l'audience.

20 --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le mercredi 19 janvier

21 2005, à 14 heures 15.

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