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1 Le lundi 24 janvier 2005
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 29.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je regrette que le début de cette
6 audience ait dû prendre du retard. Malheureusement, la salle d'audience
7 n'était pas encore disponible. C'était utilisé à d'autres fins.
8 Je vous écoute, Monsieur Whiting.
9 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, avant de faire appeler
10 notre prochain témoin, je souhaiterais aborder une question qui sera mieux
11 débattue à huis clos partiel.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Passons à huis clos
13 partiel.
14 [Audience à huis clos partiel]
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5 [Audience publique]
6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez, je vous prie, lire la
10 déclaration solennelle qui se trouve sur la carte qui vous est donnée.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
12 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez vous asseoir, je vous prie.
14 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Puis-je rappeler les conseils de part
16 et d'autre de ne pas oublier d'éteindre leur micro avant que le témoin ne
17 prenne la parole car il bénéficie des mesures de protection de la voix.
18 Je vous écoute, Monsieur Whiting.
19 M. WHITING : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
20 LE TÉMOIN: L-96 : [Assermenté]
21 [Le témoin répond par l'interprète]
22 Interrogatoire principal par M. Whiting:
23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le témoin, est-ce que vous
24 m'entendez clairement ?
25 R. Oui.
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1 Q. Monsieur le témoin, je vous souhaiterais vous rappeler que vous avez --
2 que l'on vous a accordé des mesures de protection. Ce qui veut dire que
3 les traits de votre visage ainsi que votre voix bénéficient d'une
4 déformation. On s'adressera à vous en vous appelant par un pseudonyme.
5 Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire par là ?
6 R. Oui.
7 Q. Je vous demanderais de ne jamais prononcer votre propre nom. Est-ce
8 que vous comprenez ce que je veux dire par là ?
9 R. Oui.
10 Q. Il nous faudra passer par huit clos partiel lorsqu'il faudra parler des
11 détails qui pourraient révéler votre identité. Est-ce que vous comprenez
12 cela aussi ?
13 R. Oui.
14 Q. Monsieur, avec l'aide de l'Huissier, je vais vous montrer une feuille
15 de papier. Je vous demanderais de jeter un coup d'œil. Ne lisez pas à
16 haute voix ce qui figure sur cette feuille, mais dites-nous simplement si
17 oui ou non c'est bien votre nom qui figure. R. Oui, c'est bien mon nom qui
18 y figure.
19 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais à l'Huissier de montrer cette
20 même feuille au conseil de la Défense.
21 Je demanderais également que ce document soit présenté aux Juges de la
22 Chambre, et que ce document soit également versé au dossier sous pli
23 scellé.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Ce document sera versé au
25 dossier.
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1 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce de l'Accusation
2 portant le numéro P96, versé sous pli scellé.
3 M. WHITING : [interprétation]
4 Q. Monsieur, dans le cadre de votre témoignage d'aujourd'hui, nous allons
5 nous adresser à vous en vous appelant Témoin L-96, ou bien simplement
6 "Témoin".
7 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, pourrait-on passer à
8 huit clos partiel, je vous prie.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien. Huis clos partiel, je vous prie,
10 Madame la Greffière.
11 [Audience à huis clos partiel]
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23 [Audience publique]
24 M. WHITING : [interprétation]
25 Q. Témoin, nous sommes maintenant en audience publique. Je souhaiterais
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1 vous rappeler que vous bénéficiez encore de la déformation des traits du
2 visage et de la voix. Est-ce que vous me comprenez ?
3 R. Oui.
4 Q. Je souhaiterais néanmoins vous rappeler de ne pas utiliser votre propre
5 nom et de ne pas donner le nom de votre village même si je vous pose des
6 questions sur le village. Est-ce que vous comprenez ?
7 R. Oui.
8 Q. Nous sommes encore en 1997 et 1998. Dites-nous, à l'époque, est-ce que
9 vous souteniez un parti politique au Kosovo ?
10 R. Oui.
11 Q. De quel parti s'agit-il ?
12 R. A l'époque, le parti qui couvrait la majeure partie du Kosovo était le
13 LDK; la Ligue démocratique du Kosovo.
14 Q. Pendant combien de temps étiez-vous un partisan de la Ligue
15 démocratique du Kosovo ?
16 R. Depuis qu'elle a vu jour, de 1989 jusqu'en 1998, jusqu'aux dernières
17 élections. Nous avions voté pour ce parti. Nous avons soutenu son président
18 et nous respections les règlements de ce parti.
19 Q. Qui était le dirigeant, le président du LDK ?
20 R. Le dirigeant du LDK était la personne qui est présentement le président
21 du Kosovo, Ibrahim Rugova.
22 Q. Est-ce que vous avez parlé avec d'autres habitants de votre village au
23 sujet de la Ligue démocratique du Kosovo ?
24 R. Oui.
25 Q. Seriez-vous en mesure de nous dire, en 1998, au tout début de 1998,
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1 combien d'habitants de votre village soutenaient ou appuyaient le LDK,
2 environ ?
3 R. A l'époque en 1998, 75 % des habitants du village appuyaient le LDK. Le
4 chiffre est peut-être encore plus important, mais pour être prudent, je
5 pourrais dire qu'il s'agit au moins de 75 % des habitants du village.
6 Q. Témoin, est-ce que vous avez entendu parler de l'UCK à un certain
7 moment donné ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous souvenez-vous à quel moment ?
10 R. C'était au tout début de 1998. C'est à ce moment-là que nous avons
11 entendu parler de l'UCK pour la première fois.
12 Q. Y a-t-il eu un événement particulier qui a fait en sorte que vous ayez
13 connaissance de l'UCK, que vous entendiez parler d'eux ?
14 R. Oui. A l'époque, il y avait un incident impliquant la famille Jashari à
15 Drenica et à Prekaz.
16 Q. Vous souvenez-vous à quel moment cela a eu lieu ?
17 R. Si je me souviens bien, il s'agissait du mois de février ou peut-être
18 du mois de mars, tout juste après la nouvelle année.
19 Q. Témoin, au cours de 1998, est-ce qu'il vous est arrivé de lire des
20 journaux albanais ?
21 R. Oui, pendant cette période, j'ai lu la presse.
22 Q. Vous souvenez-vous des journaux que vous avez pu lire ?
23 R. A l'époque, il y avait deux quotidiens officiels à Kosovo.
24 Q. Qu'est-ce que c'était ?
25 R. L'un d'eux était intitulé Koha Ditore. Il existe encore à ce jour. Il y
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1 avait également un autre journal qui s'appelait Bojko qui n'existe plus.
2 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'il y avait -- si l'un des deux
3 quotidiens appuyait plus l'UCK ?
4 R. Oui. Koha Ditore était un journal qui publiait des articles de l'UCK,
5 qui soutenait fermement l'UCK, alors que Bojko n'était pas contre l'UCK,
6 mais Bojko ne parlait pas exactement de la même façon que Koha Ditore.
7 Q. S'agissant de Bojko, est-ce que vous savez si Bojko appuyait plutôt la
8 politique de la Ligue démocratique du Kosovo ?
9 R. Pour ce qui est de Bojko, oui. Il soutenait plutôt la LDK.
10 Q. Est-ce que vous avez lu des bulletins de l'UCK dans les journaux au
11 cours de 1998 ?
12 R. Oui, j'ai lu plusieurs bulletins de ce type dans Koha Ditore. Très
13 souvent, il m'arrivait de lire de l'UCK pour ce qui est des événements à
14 Drenica, Malisheve, Prekaz, s'agissant des territoires qui avaient été
15 libérés par l'UCK. C'est dans Koha Ditore que je pouvais trouver toutes ces
16 informations.
17 Q. Comment savez-vous que ces bulletins étaient des bulletins de l'UCK ?
18 R. Dans les journaux, on pouvait lire qu'il s'agissait d'un article
19 émanant du QG de l'UCK. Il arrivait également de lire qu'il s'agissait
20 d'une information -- on nous apprenait que c'était une information donnée
21 par l'UCK.
22 Q. Est-ce que vous croyez, effectivement, que ces bulletins provenaient du
23 QG de l'UCK ?
24 M. GUY-SMITH : [interprétation] Excusez-moi.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous étions censés le croire.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Un instant, je vous prie.
2 M. GUY-SMITH : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, sur la
3 pertinence s'agissant de la question posée au témoin, à savoir s'il croit
4 que ces bulletins provenaient du QG.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
6 Monsieur Whiting, qu'est-ce que vous avez à répondre ?
7 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je crois qu'il
8 est très pertinent de poser cette question, puisque ces communiqués étaient
9 censés venir de l'UCK et les résidents du Kosovo croyaient qu'ils lisaient
10 des bulletins provenant de l'UCK.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Donc, vous vouliez demander
12 si un résident du Kosovo, à l'époque, pouvait le croire ou non.
13 M. WHITING : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Le témoin
14 pourrait nous apporter quelque lumière là-dessus.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois qu'il faudrait peut-être
16 laisser de côté cette question.
17 M. WHITING : [interprétation] Très bien, merci.
18 Q. Monsieur le Témoin, concentrons-nous sur la région qui se trouvait tout
19 juste autour de votre village. De nouveau, je ne vais pas prononcer le nom
20 de votre village, mais dites-nous si vous avez eu connaissance que l'UCK
21 avait établi sa présence autour de votre village ou dans la région
22 entourant votre village.
23 R. Oui. C'était tout à fait clair qu'à l'exception des territoires libérés
24 par l'UCK, territoires mentionnés dans les journaux, qu'il y avait
25 également des territoires se trouvant autour de mon village. Il y avait un
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1 endroit qui s'appelait Rance. A l'époque, on faisait référence à cet
2 endroit comme étant (expurgé)
3 (expurgé) la
4 plus rapprochée de mon village.
5 Q. Vous souvenez-vous quand est-ce que vous avez entendu, pour la première
6 fois, parler de ce point de l'UCK à Rance ?
7 R. Oui. Je me souviens très bien. Pour vous dire très franchement, j'avais
8 entendu parler de cette antenne de l'UCK.
9 Q. De quelle façon est-ce que vous avez appris l'existence de cette
10 dernière ?
11 R. Vers la fin du mois d'avril et au début du mois de mai, les membres de
12 l'UCK dans le village étaient assez visibles. Nous, on les voyait pendant
13 la soirée, pendant la nuit. Et s'agissant du village, on disait que
14 l'antenne de l'UCK à Rance était établie.
15 Q. Vous nous dites que vous en aviez parlé avec d'autres habitants du
16 village et que tout le monde savait qu'il y avait un point de contrôle ou
17 une antenne à Rance ?
18 R. Oui. Cela a fait l'objet de discussions dans le village. On en parlait
19 dans les magasins, on en parlait partout. A l'époque, il n'y avait pas
20 grand-chose d'autre dont on pouvait parler. On parlait des massacres qui
21 avaient été commis par les Serbes. On avait dit qu'il y avait un territoire
22 libéré par l'UCK, et cetera. C'est le genre de sujets dont on parlait à
23 l'époque.
24 Q. Vous nous avez dit que les membres de l'UCK se rendaient dans des
25 villages pendant la nuit. Est-ce qu'ils se sont jamais rendus dans votre
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1 village pendant la nuit ?
2 R. Oui. Dans notre village, ils venaient, ils se promenaient pendant la
3 nuit.
4 Q. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez pu voir, personnellement ?
5 R. Oui. Je les ai personnellement vus à au moins deux reprises. Et je me
6 souviens de les avoir vus lors d'une occasion, dans un magasin du village.
7 Il y avait des personnes portant des uniformes et j'ai reconnu l'une des
8 personnes parmi ces trois personnes que j'ai vues.
9 Q. Vous souvenez-vous à quel moment ou quand était-ce ?
10 R. C'était vers la fin du mois d'avril ou au début du mois de mai. Mais je
11 ne peux pas vous donner la date exacte.
12 Q. A l'époque, avez-vous entendu parler d'un commandant à l'antenne de
13 l'UCK situé à Rance ?
14 R. Oui. A l'époque, nous avons entendu que le chef de l'antenne de Rance
15 était Isak Musliu.
16 Q. Vous souvenez-vous quand vous avez appris cela ?
17 R. A l'époque, lorsque ces personnes circulaient pendant la nuit, lorsque
18 je les ai vues au magasin, lorsqu'elles sont entrées dans le magasin, ont
19 acheté quelque chose, puis sont reparties, à l'époque, il s'est passé
20 beaucoup de choses dans le village. Les gens du village voulaient savoir ce
21 qui se passait et quand l'UCK viendrait dans notre village, si bien que
22 nous parlions de beaucoup de choses. Au magasin, il a été dit que l'antenne
23 de Rance était sous le contrôle d'Isak Musliu.
24 M. WHITING : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer à huis
25 clos partiel, s'il vous plaît ?
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Passons à huis clos
2 partiel.
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9 [Audience publique]
10 M. WHITING : [interprétation]
11 Q. Monsieur le Témoin, nous sommes de nouveau en audience publique. Faites
12 attention à ne pas mentionner votre nom ou le nom de votre village.
13 Au cours de l'été 1998, avez-vous entendu parler de combats entre l'UCK et
14 les forces serbes dans votre région ?
15 R. Oui. J'ai entendu parler des combats qui se sont déroulés à Carraleve,
16 dans ma région.
17 Q. Quand avez-vous entendu parler de ces combats ?
18 R. J'ai entendu parler de cela en mai ou peut-être au cours de la première
19 quinzaine du mois de juin.
20 Q. Avez-vous entendu parler d'autres combats ?
21 R. Oui. Dans les médias, les journaux, la télévision, nous avons entendu
22 parler de l'incident de Prekaz et d'autres incidents à Drenica où des
23 combats faisaient rage. Nous avons entendu parler de Malisheve. Nous avons
24 appris que la route qui mène de Shtime à Prizren était bloquée par les
25 forces de l'UCK. Nous avons entendu dire que Malisheve avait été proclamée
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1 zone libre. Voilà ce que nous avons entendu, en substance.
2 Q. Vous souvenez-vous à quel moment vous avez entendu dire que Malisevo
3 avait été proclamée zone libre ?
4 R. Je pense avoir entendu parler de Malisheve au mois de juin. A ce
5 moment-là, nous avons vu, à la télévision, le porte-parole de l'UCK qui
6 faisait une déclaration.
7 Q. Vous souvenez-vous qui était ce porte-parole de l'UCK ?
8 R. A l'époque le porte-parole de l'UCK était Jakup Krasniqi.
9 Q. Avez-vous entendu parler d'éventuels combats à Lapusnik ?
10 R. Oui, nous avons entendu parler des combats à Lapusnik également.
11 Q. Quand en avez-vous entendu parler ?
12 R. Pour ce qui est des combats qui se déroulaient à Lapusnik, j'ai lu dans
13 le journal Koha Ditore des informations à ce sujet, au début du mois de
14 juin.
15 Q. Avant cela, avant le mois de juin 1998, ne vous êtes-vous jamais rendu
16 personnellement à Lapusnik ?
17 R. Non. Si nous parlons ici de la période de la guerre, c'est autre chose;
18 mais avant cela, j'avais traversé Lapusnik au moins 20 ou 30 fois. A
19 l'époque, je participais à des transports dans le cadre de la profession
20 que j'exerçais. La route qui va à Glogovc, la route qui va vers Malisheve
21 était une route que nous empruntions souvent pour notre travail. Je
22 connaissais également d'autres régions du Kosovo en plus de celle que je
23 viens de mentionner.
24 M. WHITING : [interprétation] Pourrait-on passer à huis clos partiel, je
25 vous prie.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] A huis clos partiel.
2 [Audience à huis clos partiel]
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20 [Audience publique]
21 M. WHITING : [interprétation]
22 Q. Monsieur le Témoin, une fois que vous avez entendu parler de ces
23 événements, qu'avez-vous fait ?
24 R. Le jour même, lorsque (expurgé) est revenu de Krajmirovce et que nous
25 avons entendu ce qui s'était produit, j'ai insisté pour, le jour même, me
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1 rendre à Krajmirovce avec (expurgé) ne souhaitait pas s'y rendre
2 ce jour-là. Il a dit : Non, attendons jusqu'à demain. Le lendemain est
3 arrivé. Moi-même et (expurgé) nous nous sommes rendus au QG de Krajmirovce
4 pour essayer de trouver le commandant Luani.
5 Q. Est-ce que vous avez vu le commandant Luani ?
6 R. Non, je ne l'ai pas jamais vu.
7 Q. Est-ce que vous vous y êtes rendu plus d'une fois vers ce QG ?
8 R. Oui, oui, à de multiples reprises. Je me suis rendu au QG où (expurgé)
9 avait dû laisser la personne dont nous parlons.
10 Q. Est-ce que vous n'avez jamais pu rencontrer le commandant Luani ?
11 R. Non, jamais. Nous avons vu beaucoup de personnes de l'UCK en armes.
12 Nous avons rencontré la personne qui vivait sur place, le propriétaire donc
13 de la maison où se trouvait le QG. Nous l'avons cherché à Krajmirovce; nous
14 avons cherché partout mais nous n'avons pu le retrouver. A chaque fois, on
15 nous disait : Il n'est pas là. Il reviendra. Il est au front. C'était cela
16 qu'on nous disait.
17 Q. Vous avez cité d'autres villages où vous vous êtes rendu pour chercher,
18 mais où, ailleurs, vous êtes-vous rendu à la recherche de la personne ?
19 R. Krajmirovce. On nous a dit qu'il fallait aller à Petrastica et qu'il y
20 avait une autre antenne de l'UCK qui s'y trouvait et que le porte-parole
21 s'y trouvait.
22 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez rencontré quelqu'un à
23 Petrastica ?
24 R. Oui. On l'appelait l'adjoint au commandant Luani. Il s'appelait Elez.
25 Q. Vous souvenez-vous de son nom de famille ?
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1 R. Non, non, je ne me souviens plus de son nom de famille mais j'ai revu
2 cette personne après la guerre. Il portait un uniforme TMK du Kosovo.
3 Q. Dans vos recherches, avez-vous été dans d'autres villages que
4 Krajmirovce et les deux autres villages que vous avez cités ?
5 R. Oui, Zborce, Sedlare, Kishna Reka. Dans toute cette région, j'ai
6 recherché la personne en cause.
7 Q. Est-ce que vous vous êtes renseigné auprès des soldats de l'UCK que
8 vous rencontriez ?
9 R. Oui, bien entendu. Nous avons rencontré pas mal de gens de l'UCK. Nous
10 leur posions des questions, de manière différente, on demandait s'il y
11 avait quelque chose que l'on pouvait faire, est-ce qu'il y avait des
12 conditions, est-ce qu'on pouvait faire quoi que ce soit, et pourquoi, il
13 avait été enlevé.
14 Q. Avez-vous entendu de la bouche d'une quelconque de ces personnes, qui
15 était le chef de cette région, le chef pour l'UCK ? Je ne veux pas que
16 vous me donniez le nom, mais, dites-moi si vous avez entendu qui était le
17 commandant suprême de cette région ?
18 R. Oui, bien entendu. Pendant deux semaines, je me suis rendu tous les
19 jours dans la zone de guerre et en fin de compte, nous avons fini par
20 apprendre qui était ce commandant qui aurait pu (expurgée).
21 Q. Je vais vous demander ce que vous avez entendu, d'abord ce que vous
22 avez appris et puis comment ? D'abord, qui vous a-t-on dit était le
23 commandant de cette région ?
24 R. Un jour, une personne est venue chez moi, une personne de mon village.
25 Cette personne qui a un nom et un prénom, bien entendu, m'a demandé où
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1 j'avais été et qu'est-ce que je savais sur ce qui était arrive (expurgée),
2 qui l'avait enlevé, et cetera. Et je lui ai dit que nous cherchions Luani
3 et que seul lui pouvait nous dire. Et cette personne, dont je connais le
4 nom, m'a dit que pendant trois jours, ils s'étaient trouvé dans la zone de
5 guerre à titre civil. Donc, pas, sans porter l'uniforme de l'UCK et il m'a
6 dit qu'il fallait trouver le commandant Celiku car lui pouvait relâcher
7 (expurgée). Il m'a dit ceci, alors que je me trouvais dans la cour de ma
8 propre maison. C'étaient ses paroles. C'était à l'époque où j'essayais de
9 retrouver (expurgé).
10 M. WHITING : [interprétation] Nous allons passer en audience huis clos
11 partiel dans quelques instants et j'aborderai ce sujet.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais avant de ce faire, il y a eu
13 trois utilisations du nom en question. Le témoin a cité à trois reprises ou
14 a dit à trois reprises le mot en question.
15 M. WHITING : [interprétation] Oui, j'allais --
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que c'est une préoccupation ?
17 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Effectivement.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il faudrait expurger ces trois
19 passages à ce moment-là.
20 M. WHITING : [interprétation]
21 Q. Témoin, je vais y revenir dans quelques instants. Témoin, lorsque nous
22 passerons à huis clos partiel. Mais, avant de ce faire, pendant cette
23 période, nous parlons du mois de juillet 1998, est-ce que vous avez entendu
24 dire que d'autres personnes s'étaient fait enlever par l'UCK de votre
25 région ?
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1 R. Oui. J'avais entendu parler d'enlèvements d'autres personnes.
2 M. WHITING : [interprétation] Pourrait-on passer à huis clos partiel, je
3 vous prie, Monsieur le Président ?
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
5 [Audience à huis clos partiel]
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14 [Audience publique]
15 M. WHITING : [interprétation]
16 Q. Témoin, nous sommes maintenant en audience publique. Je vais passer à
17 un sujet. Ce sujet concerne votre village. Nous allons parler, mais sans
18 donner le nom de votre village. Est-ce que vous comprenez cela ? Vous devez
19 répondre par un oui ou par un non, je vous prie.
20 R. Oui, oui, je comprends.
21 Q. Après cet entretien dont nous venons de parler, est-ce qu'il y a eu un
22 rassemblement dans votre village ?
23 R. Oui. Après ceci, une personne qui avait reçu l'autorisation de la Ligue
24 démocratique du Kosovo, un représentant du village, s'est rendu chez tous
25 les habitants du village. Il devait informer les habitants du village qu'il
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1 y avait un rassemblement qui aurait lieu à 10 heures du soir, dans une
2 école, que c'était organisé par les membres de l'UCK et que ce
3 rassemblement -- le rassemblement ou la réunion était organisée par les
4 membres de la Ligue démocratique du Kosovo. A la réunion, devaient être
5 présents également les membres de l'UCK.
6 Q. Témoin, je vous interromps pour quelques instants. Est-ce que l'on vous
7 a informés quelle était la raison de ce rassemblement, de cette réunion ?
8 Vous nous avez dit que la réunion était organisée par la LDK, et que se
9 serait avec les membres de l'UCK. Quel était le but de cette réunion de
10 rassemblement ?
11 R. Jusqu'à ce moment-là, jusqu'au moment où nous étions arrivés à l'école,
12 nous ne savions pas du tout quel était le but de cette réunion.
13 Q. Vous êtes allé au rassemblement, à la réunion ?
14 R. Oui, j'ai personnellement pris part à cette réunion.
15 Q. Qu'est-ce que vous avez appris ?
16 R. Avez-vous appris le motif de cette réunion ?
17 Q. Qu'est-ce que -- de quoi s'agissait-il ?
18 R. La réunion était présidée par (expurgé) de la Ligue démocratique du
19 Kosovo. Il a expliqué aux personnes présentes que ce soir-là, basé sur les
20 votes des personnes présentes, les représentants qui représenteraient l'UCK
21 seraient élus. Il a dit qu'il proposerait un candidat, et que nous devions
22 voter en levant la main.
23 Q. Témoin, je vous interromps ici. Il y a quelques instants, vous nous
24 avez dit que certaines personnes seraient choisies, des personnes qui
25 représentaient l'UCK. Pourriez-vous nous en dire un peu plus là-dessus ?
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1 R. J'avais compris que des personnes seraient choisies de chaque localité
2 que ces représentants représenteraient l'UCK, et que le village n'était pas
3 sous le contrôle entier de l'UCK.
4 Q. Avez-vous compris que les personnes qui seraient élues commanderaient
5 en quelque sorte l'UCK ?
6 R. Non, pas directement. Ces personnes auraient fait partie des structures
7 en place à l'antenne de Rance.
8 Q. Ces personnes auraient représenté votre village à Rance, n'est-ce pas ?
9 R. Oui, c'est ainsi.
10 Q. Est-ce que l'on a procédé à l'élection de ces représentants lors de ce
11 rassemblement ?
12 R. Oui.
13 Q. Quelque chose s'est-il produit lors du rassemblement ou de la réunion
14 en question ?
15 R. A la fin, après l'élection des représentants, deux personnes armées ont
16 fait irruption. Elles portaient des uniformes de l'UCK et portaient des
17 Kalashnikovs. Ces personnes se sont adressées à l'audience, et ont déclaré
18 : Voilà, la guerre a commencé. Nous sommes nous qui allons commander. Ce
19 sont nous allons vous défendre. Après, ces personnes sont parties; elles
20 sont sorties. La personne qui dirigeait la réunion a dit : C'est terminé à
21 présent. En d'autres termes, la réunion était terminée.
22 Q. Est-ce que vous en aviez terminé avec l'élection des représentants à ce
23 moment-là, ou bien est-ce que la réunion a pris fin avant l'élection en
24 question ?
25 R. Les représentants ont été élus. Après leur élection, ces personnes en
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1 uniforme et armées sont entrées dans la pièce. Lorsqu'elles sont parties,
2 la réunion a été ajournée. C'est comme cela que les choses se sont passées.
3 Q. Monsieur le Témoin, ces personnes-là qui ont fait irruption dans la
4 salle, vous avez dit qu'elles portaient des uniformes et des Kalashnikovs.
5 Etaient-elles masquées ?
6 R. Non.
7 Q. Connaissiez-vous ces personnes à l'époque ?
8 R. Non. A l'époque, je ne savais absolument pas qui étaient ces personnes.
9 M. WHITING : [interprétation] Pourrait-on passer à huis clos partiel, s'il
10 vous plaît ?
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
12 [Audience à huis clos partiel]
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11 [Audience publique]
12 M. WHITING : [interprétation]
13 Q. Monsieur le Témoin, nous sommes en audience publique, je vous
14 demanderais de ne pas mentionner le nom de la personne qui se trouvait avec
15 vous et que vous avez mentionné dans votre récit. Si vous le savez, où
16 êtes-vous allés ensuite ?
17 R. Après cela, nous avons quitté le village. Il y a un carrefour. D'un
18 côté on peut aller vers Rance et de l'autre vers Topile. Nous avons pris la
19 direction de Rance. Pendant notre trajet, en direction de Rance, j'ai
20 réussi en cachette à voir la direction que nous empruntions. Avant
21 d'arriver à Rance, nous avons été frappés par des coups de crosse à
22 plusieurs reprises.
23 Q. Qui vous a frappés ?
24 R. Les trois personnes qui se trouvaient dans la partie du véhicule
25 réservée au bagage. Il y avait un espace ouvert entre le coffre et
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1 l'endroit où nous étions assis. Si bien qu'ils pouvaient nous frapper. J'ai
2 été frappé ainsi que la personne qui se trouvait avec moi.
3 Q. Pouvez-vous nous dire à quel niveau, sur quelle partie de votre corps
4 vous avez été frappés à coups de crosse ?
5 R. Nous avons été frappés dans la partie supérieure du dos, avec des coups
6 de crosse. Mon ami qui se trouvait avec moi avait du mal à respirer.
7 Lorsqu'ils ont vu que je regardais en cachette dans quelle direction ils
8 nous emmenaient, ils m'ont frappé.
9 Q. Vous avez dit que vous alliez en direction de Rance. Est-ce que vous
10 êtes arrivé à Rance ?
11 R. Oui, nous sommes arrivés là. Nous avons arrêté le véhicule. Ils ont
12 parlé entre eux et dit qu'ils resteraient là 15 à 20 minutes. Les deux
13 premiers soldats sont sortis de la voiture, alors que les trois autres sont
14 restés à l'endroit où ils étaient. Après cela, la voiture a démarré de
15 nouveau, et nous avons emprunté la route qui va de Carraleve à la route
16 goudronnée. Pour suivre cette route, il faut descendre. Je connaissais bien
17 cette région, d'avant.
18 Q. Est-ce que vous êtes arrivés au niveau de la route goudronnée ?
19 R. Nous sommes rapidement arrivés sur la route goudronnée qui relie Shtime
20 à Cafa Dulec [comme interprété].
21 Q. Que s'est-il passé ensuite ?
22 R. Nous sommes repartis dans la direction de Shtime pendant environ un
23 kilomètre. D'après ce que j'ai pu voir, parce qu'en fait on peut sentir
24 lorsque la voiture quitte la route goudronnée, après nous avons pris une
25 autre direction. Je peux dire que j'ai su à quel moment nous nous sommes
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1 trouvés sur la route, vers Petrastica. Pendant un moment, j'ai pu voir
2 lorsque nous étions sur la route qui va vers Krajmirovce, j'ai pu voir
3 Sedlare, et jusqu'à Nekovce et Kishna Reka. À Kishna Reka, nous avons
4 quitté cette route, et nous avons pris une route de montagne. À partir de
5 ce moment-là, je ne peux pas dire que je savais dans quelle direction nous
6 allions, car il s'agissait d'une région montagneuse.
7 Q. Que s'est-il passé ensuite ?
8 R. Au bout de quelque temps, nous avons traversé Kishna Reka, puis nous
9 sommes arrivés dans un village. A partir de là, je ne savais pas du tout où
10 nous étions. Mais je savais que l'autre route goudronnée qui va vers le
11 carrefour d'Arlat, je savais que nous n'étions pas arrivés à ce carrefour,
12 parce que l'on peut sentir quand on est sur une route de montagne, et quand
13 on est sur une route goudronnée.
14 Q. Excusez-moi de vous interrompre, mais cette route goudronnée qui va
15 vers le carrefour d'Arlat, pourriez-vous nous dire quelles villes il
16 relie ? Pouvez-vous nous dire où est situé ce carrefour, et où est située
17 cette route goudronnée ?
18 R. Après Kishna Reka, lorsque nous avons emprunté la route de montagne, je
19 ne savais pas exactement où nous nous trouvions. Mais à ce moment-là, je
20 pensais que nous ne pouvions pas nous trouver sur une route goudronnée.
21 Q. Vous avez mentionné la route goudronnée qui conduit au carrefour
22 d'Arlat. Est-ce que vous pourriez nous dire de quelle route il s'agit ?
23 R. Il s'agit d'une route qui relie Pristina, Peja, Malisheve, et Orahovac.
24 Q. Combien de temps aviez-vous passé dans la voiture depuis Rance ?
25 R. Une heure environ. Je ne peux pas vous donner une réponse précise.
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1 Peut-être moins d'une heure. La route n'était pas en très bon état, donc
2 c'était peut-être plus d'une heure, mais une heure environ disons.
3 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais que l'on présente au témoin la
4 pièce à conviction P97. Je demanderais qu'elle soit placée sur le
5 rétroprojecteur.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il faudrait que nous passions à huis
7 clos partiel.
8 M. WHITING : [interprétation] Très bien.
9 [Audience à huis clos partiel]
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21 [Audience publique]
22 M. WHITING : [interprétation]
23 Q. Monsieur le Témoin, nous sommes de nouveau en audience publique.
24 Lorsque la voiture s'est arrêtée, vous avez déclaré que vous ne saviez pas
25 exactement où vous étiez, que s'est-il passé ensuite ?
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1 R. Les deux premières personnes qui se trouvaient à l'avant de la voiture
2 sont sorties de la voiture et ont frappé à la porte. Au bout d'un certain
3 temps, les portes ont été ouvertes. Nous avons été emmenés à l'extérieur.
4 Q. Est-ce que vous parlez des portes d'une maison ?
5 R. Apparemment, il s'agissait des portes d'une maison.
6 Q. Est-ce que vous pourriez les décrire ?
7 R. Par exemple, ces portes ressemblaient aux portes de mon portail. Les
8 portes de mon portail sont en bois, alors que ces portes étaient en métal.
9 On peut passer par ce portail avec un véhicule, avec un tracteur. Donc je
10 veux parler de ce type de portes cochères.
11 Q. Ce sont des portes cochères qui donnent sur un ensemble d'habitations ?
12 R. Oui. C'est ainsi que nous les appelons, ce sont des portes que l'on
13 utilise fréquemment au Kosovo. Elles sont différentes des portes ou des
14 portails que l'on a dans les pays de l'ouest.
15 Q. Que s'est-il passé lorsque ce portail s'est ouvert ?
16 R. Nous étions près du portail avec la voiture. Lorsque le portail s'est
17 ouvert, une personne est sortie et a ouvert le portail. Nous avons été
18 emmenés à l'extérieur moi et l'ami qui se trouvait avec moi.
19 Q. Que s'est-il passé ensuite ?
20 R. L'une des deux personnes en question a dit à la personne qui a ouvert
21 le portail, voici deux personnes pour vous. Je ne connaissais pas à
22 l'époque la personne qui est sortie pour ouvrir le portail.
23 Q. Que s'est-il passé ensuite ?
24 R. Il est venu et nous a séparé. Il se tenait debout entre nous, il nous a
25 attrapé par l'oreille et nous a conduit vers un escalier. Il nous a dit que
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1 nous n'étions pas autorisés à regarder d'un côté ou de l'autre. Les autres
2 personnes le suivaient. Je ne sais pas s'ils étaient deux ou trois. Nous
3 avons monté l'escalier et cette personne nous a placé dans une pièce. Il
4 n'y avait pas de lumière dans cette pièce.
5 Q. Cet escalier, lorsque vous entrez par le portail, se trouvait-il devant
6 vous, à gauche ou à droite ?
7 R. Lorsqu'on entre par le portail, l'escalier se trouve à droite. Lorsque
8 vous entrez dans l'enceinte, l'escalier se trouve à droite.
9 Q. Après que l'on vous a placé, vous et cette autre personne dans la
10 pièce, que s'est-il passé ?
11 R. Dans un premier temps, il n'y avait pas de lumière. La personne qui
12 nous avait emmenés avait un briquet en main. Il a allumé son briquet et l'a
13 approché de mon visage et il m'a dit vous cherchez (expurgé)
14 M. WHITING : [interprétation] Peut-on passer en huis clos partiel ?
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
16 [Audience à huis clos partiel]
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15 [Audience publique]
16 M. WHITING : [interprétation]
17 Q. Monsieur le Témoin, nous sommes maintenant en audience publique. Vous
18 aviez commencé à décrire la salle, mais pourriez-vous nous la décrire cette
19 salle ?
20 R. Oui. A l'entrée, à gauche, il y avait un robinet. Du même côté,
21 toujours à gauche, il y avait une fenêtre. Par contre, en face de la porte
22 d'entrée, il se trouvait une autre porte. Voilà.
23 Q. Y avait-il du mobilier ?
24 R. Non, il n'y avait pas de mobilier dans cette pièce. A l'exception du
25 robinet, il y avait un tapis et des matelas en éponge, en mousse.
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1 Q. Depuis combien de temps étiez-vous dans cette pièce ?
2 R. Pour autant que je m'en souvienne, je crois que j'y ai passé trois
3 jours et trois nuits.
4 Q. Receviez-vous de la nourriture ?
5 R. Vers midi, sans heure précise, nous recevions de la nourriture. Cette
6 nourriture nous était amenée par une personne qui s'appelait Shala ainsi
7 que par une autre personne. Son surnom était Murriz, et nous connaissons
8 bien son surnom parce que Shala l'interpellait plusieurs fois au cours de
9 la semaine. En fait, c'étaient les restes de nourriture de quelqu'un
10 d'autre. C'étaient des restes d'un repas consommé par d'autres.
11 Q. Qu'est-ce qu'on vous donnait à manger ?
12 R. Ce que je vous disais, des pâtes, des haricots, de l'eau. Il y avait
13 assez d'eau puisque, de toute façon, il y avait le robinet dans la pièce.
14 Q. La personne que vous appeliez Shala, vous avez entendu d'autres
15 l'appeler de ce nom, l'appeler Shala ?
16 R. Oui. Toutes les personnes présentes l'appelaient Shala. Et nous aussi
17 d'ailleurs, quand nous avions besoin de lui, quand on devait lui demander
18 quelque chose, on l'appelait Shala.
19 Q. Cette personne que vous appeliez Shala et qui vous apportait à manger,
20 est-ce bien la même personne qui vous a passé à tabac le premier soir ?
21 R. Oui, effectivement. C'est la même personne qui nous a accablé par
22 l'oreille, fait monter l'escalier, qui nous a frappé. C'est la même
23 personne qui avait demandé à moi-même et à (expurgé) à se lever, qui avait
24 également pris mes documents, ma montre, mon portefeuille. Il s'agit bien
25 de la même personne.
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1 Q. Lorsque vous deviez aller aux toilettes, comment faire ?
2 R. Il n'y avait pas de toilettes dans la pièce. Il fallait que nous
3 appelions Shala ou Murrizi, l'autre personne qui s'appelait Murrizi. Mais
4 c'était surtout Shala qui était là, donc, il fallait qu'on lui demande la
5 permission d'utiliser les toilettes. A ce moment-là, il demandait à
6 quelqu'un de nous escorter depuis cette pièce vers les toilettes, et
7 quelqu'un armé d'une Kalashnikov nous escortait jusqu'aux toilettes. Ils
8 montaient la garde à un mètre, un mètre 50 de nous; ils nous attendaient
9 devant les toilettes. Puis, ils nous ramenaient dans la pièce. Ils nous
10 disaient que nous n'avions pas l'autorisation de regarder ni à gauche, ni à
11 droite. C'est ainsi que nous pouvions aller aux toilettes.
12 Q. Je vais vous poser des questions sur la personne qui vous a escorté,
13 nous le referons en huis clos partiel. Mais expliquez nous comment vous
14 alliez aux toilettes depuis la pièce où vous vous trouviez ? Pouvez-vous
15 nous décrire ce parcours ?
16 R. Nous passions par la porte. La personne armée de la Kalashnikov était
17 derrière nous. On descendait les escaliers le long de la cour, et c'est là
18 que se trouvait la toilette.
19 Q. Que voyiez-vous quand vous rentriez dans ce jardin, cette cour ?
20 R. Dès qu'on descendait les escaliers et qu'on arrivait à cette cour, on
21 voyait qu'il y avait un bâtiment, une maison. Il y avait un espace. Il y
22 avait un balcon. En allant vers les toilettes, on pouvait voir une porte et
23 d'autres prisonniers au moment où nous passions.
24 Q. Témoin, vous nous avez dit que lorsque vous êtes arrivé à cet endroit-
25 là, vous ne saviez pas où vous vous trouviez exactement. Est-ce que vous
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1 avez appris où vous étiez plus tard ?
2 R. Oui. Le lendemain, je savais que j'étais à Lapusnik.
3 Q. Comment saviez-vous cela ?
4 R. Afin de nous rendre aux toilettes, il nous fallait sortir, et il était
5 possible à ce moment-là de voir des collines derrières; et comme je
6 connaissais bien la région, je savais très bien que ces collines
7 appartenaient à la région de Lapusnik.
8 Q. Vous avez parlé d'une fenêtre se trouvant dans la pièce dans laquelle
9 vous avez passé trois jours. Pourriez-vous nous décrire cette fenêtre ?
10 R. Oui. La fenêtre était située de côté. Il était possible d'avoir une vue
11 panoramique de la nature qui se trouvait à l'extérieur de la pièce.
12 Q. Est-ce que vous pouviez voir sans obstruction par la fenêtre ?
13 R. Oui, mais il fallait plutôt se lever, il s'agissait d'un vitrail. Mais
14 à partir du milieu de cette fenêtre, nous pouvions voir bien, c'est-à-dire,
15 après la moitié de la fenêtre, on pouvait très bien voir à l'extérieur.
16 Q. L'interprétation que nous avons reçue, c'est qu'il s'agissait d'un
17 vitrail. Est-ce que c'était bien un vitrail ou bien est-ce que c'était une
18 fenêtre qui était un peu salie ?
19 R. C'était le genre de verre par lequel il était absolument impossible de
20 voir. C'était une vitre opaque par laquelle il était absolument impossible
21 de voir de l'autre côté. Mais, la partie supérieure de cette fenêtre était
22 faite d'une vitre tout à fait normale, transparente, par laquelle on
23 pouvait voir à l'extérieur.
24 Q. Vous avez parlé de cet homme qui s'appelait Shala. A quelle fréquence
25 le voyiez-vous ?
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1 R. Tous les jours. Je voyais cette personne tous les jours.
2 Q. Vous dites tous les jours, mais combien de fois par jour pouviez-vous
3 voir cette personne ?
4 R. Je le voyais cinq fois, six fois, sept fois par jour.
5 Q. Pourriez-vous nous décrire cette personne ?
6 R. Oui, certainement.
7 Q. Cette personne avait un uniforme de couleur noire et, sur le bras, il
8 abordait un emblème de l'UCK. Il avait des cheveux noirs. Il portait une
9 moustache noire. Il avait une peau assez foncée, de la même stature que
10 moi, probablement. Il avait un regard, son visage était assez maigre, il
11 n'était pas gros. Il était sans doute âgé de 45 ans, pas plus. Il portait
12 toujours une Kalashnikov sans la crosse.
13 Q. Quelle était sa taille ?
14 R. Probablement entre un mètre 70 et un mètre 80. C'est une évaluation.
15 (expurgé) donc, je crois qu'il devait
16 faire environ entre un mètre 75, un mètre 80.
17 Q. Ici, dans le compte rendu d'audience, on peut lire qu'il abordait un
18 emblème de l'UCK sur sa main. Vous avez dit sa main ?
19 R. Non, je veux dire que sur son bras, sur le bras, il arborait un emblème
20 de l'UCK, sur sa chemise noire. Il portait également un béret noir qui
21 arborait l'emblème de l'UCK, avec un aigle et une lettre représentant
22 l'UCK, mais la plupart des fois que je l'ai vu, il ne portait pas de
23 couvre-chef ou de béret.
24 Q. Vous avez décrit cet homme comme étant une personne qui vous a donné
25 des coups dans la noirceur. Est-ce qu'il était fort ?
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1 R. Il ne m'a pas donné l'impression d'avoir une force particulièrement
2 importante ou surhumaine, mais il ressemblait comme une personne tout à
3 fait ordinaire. Mais les coups étaient particulièrement forts, puisque nous
4 ne savions pas d'où provenaient ou d'où allaient provenir les coups.
5 C'était cela plutôt qui était difficile.
6 Q. Témoin, je souhaiterais attirer votre attention sur cette première
7 journée. La première journée de votre détention dans cette pièce, est-ce
8 que quelque chose s'est passé ce premier jour alors que vous vous trouviez
9 dans la pièce en question ?
10 R. Oui, quelque chose s'est passé dans l'après-midi.
11 Q. Que s'est-il passé ?
12 R. Une personne est venue dans la pièce dans l'après-midi. C'était assez
13 étrange, car nous connaissions cette personne, elle portait un uniforme
14 noir. Elle portait une barbe pas trop longue et une moustache. Cette
15 personne est entrée par la porte, et cette personne a ordonné à tout le
16 monde de se lever. Nous avons acquiescé à sa demande. La personne qui s'est
17 présentée à la porte était Isak Musliu, du village de Racak. Il a commencé
18 à me poser des questions, il voulait savoir quel était mon nom.
19 Q. Avant de parler de cela, Témoin, je souhaiterais d'abord vous demander
20 si vous pourriez le décrire, décrivez-nous quelle était son
21 apparence physique à ce moment-là?
22 R. Il avait une moustache noire, il portait une barbe qui n'était pas très
23 longue. C'est le genre de barbe qui peut pousser si l'on ne s'est pas rasé
24 pendant un mois. Il portait un uniforme noir sur lequel on pouvait voir
25 qu'il était indiqué "PU," police militaire. La chose qui nous a le plus
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1 marqués, c'est que c'était une personne que l'on connaissait.
2 Q. Portait-il une arme sur lui ?
3 R. Non, il n'avait pas d'arme, mais il avait un talkie-walkie, autour de
4 sa ceinture, accroché à sa ceinture. Ce talkie-walkie était quelque chose
5 que l'on appelle "German Funk". De l'autre côté, accroché à sa ceinture, il
6 y avait un petit revolver.
7 Q. Portait-il un fusil entre ses mains ?
8 R. Il avait le talkie-walkie à droite, le Funk. A gauche, il avait un
9 revolver.
10 Q. Est-ce que c'était dans un étui ? Est-ce que l'arme se trouvait
11 accrocher à ses vêtements ? Est-ce que c'était dans sa main ?
12 R. C'était accroché à sa ceinture, il ne brandissait pas l'arme, il ne la
13 tenait pas dans la main, il était tout à fait clairement possible de voir
14 le revolver qui était accroché à sa ceinture.
15 Q. Le talkie-walkie, est-ce que vous étiez en mesure de le voir
16 également ?
17 R. Oui. Cela ressemblait à un talkie-walkie de production allemande de
18 type Funk, j'avais l'impression que c'était plutôt un objet dont on s'est
19 déjà beaucoup servi, cela ne ressemblait pas à un talkie-walkie tout à fait
20 nouveau. Lorsque je fais référence à un Funk, je pense au talkie-walkie que
21 j'utilisais alors que je vivais en occident. Je pouvais bien voir que ce
22 talkie-walkie était accroché à sa ceinture.
23 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, pourrions-nous passer
24 à huis clos partiel.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
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1 [Audience à huis clos partiel]
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14 [Audience publique]
15 M. WHITING : [interprétation]
16 Q. Vous nous avez dit que le premier jour Isak Musliu était entré dans la
17 pièce. Je souhaiterais que nous parlions de cette nuit. S'est-il passé quoi
18 que ce soit cette nuit-là ?
19 R. Oui. Vers 9 ou 10 heures ce soir là, je ne saurais vous dire l'heure
20 exacte car je n'avais pas de montre, quelque chose s'est produit. Plusieurs
21 personnes portant des uniformes de l'UCK ont ouvert la porte et ont fait
22 entrer quelqu'un qui portait des chaînes. Ils ont traversé la pièce où nous
23 étions détenus. Il y avait cinq ou six personnes peut-être plus. Ils ont
24 traversé la pièce pour se rendre dans une autre pièce dont la porte était
25 située en face de la porte principale. Nous avons constaté que la personne
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1 qui portait des chaînes était un vieillard. Il portait une chemise plus ou
2 moins blanche. Apparemment, il avait été fortement passé à tabac. Ils l'ont
3 conduit dans l'autre pièce. La porte est restée ouverte et j'ai pu voir que
4 les personnes qui l'avaient conduit dans cette pièce l'ont frappé, ont
5 marché sur lui et l'ont fortement passé à tabac.
6 Q. Vous avez dit que lorsqu'il était entré dans la pièce, vous pouviez
7 déjà voir qu'il avait déjà subi un passage à tabac. Comment pouvez-vous
8 dire cela ?
9 R. Il était manifeste que cet homme avait les mains attachées avec une
10 longue chaîne qui se trouvait sur son corps tout entier. Il y avait deux
11 personnes qui le maintenaient des deux côtés car il ne pouvait pas se tenir
12 debout par lui-même. Il était clair que cet homme avait été complètement
13 détruit. On pouvait voir clairement qu'il avait subi des sévices graves.
14 Q. Est-ce qu'il portait des traces de sang lorsqu'il a été conduit dans la
15 pièce où vous vous trouviez ?
16 R. Oui. A certains endroits de sa chemise, on pouvait voir du sang. Il y
17 avait des traces de sang sur son visage. Nous n'avons pas vu les sévices
18 qu'il avait subis auparavant, mais les traces étaient visibles. Lorsqu'ils
19 ont traversé notre pièce pour se rendre dans l'autre pièce, c'était clair.
20 Q. Vous avez déclaré qu'il y avait deux hommes qui le maintenaient et qui
21 l'ont porté littéralement à travers la pièce. Combien d'hommes sont entrés
22 dans la pièce où vous vous trouviez en compagnie de cet homme qui avait été
23 frappé ?
24 R. Au moins cinq ou six hommes. Je ne dirais pas qu'il y en avait sept.
25 Cinq ou six personnes au plus.
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1 Q. Comment ces hommes étaient-ils habillés ? Avez-vous pu le voir ?
2 R. Ils portaient des uniformes de l'UCK, pas les uniformes noirs, mais les
3 uniformes militaires, les uniformes de l'armée.
4 Q. A-t-on dit quoi que ce soit lorsque cet homme qui avait été frappé a
5 été conduit dans l'autre pièce ?
6 R. Nous n'avons rien entendu.
7 Q. Avez-vous pu voir le passage à tabac qui s'est déroulé dans l'autre
8 pièce ?
9 R. Nous avons pu voir ce passage à tabac quand la porte était ouverte.
10 Lorsqu'ils l'ont conduit dans l'autre pièce, la porte était ouverte, nous
11 avons pu voir cela, (expurgé) moi et (expurgé) qui nous trouvions de ce côté de
12 la pièce, nous pouvions voir clairement ce qui se passait.
13 Q. Pourriez-vous décrire ce passage à tabac ?
14 R. Ils lui donnaient des coups de pied. Ils marchaient sur lui, ils
15 sautaient sur lui, c'est ce que j'ai pu voir.
16 Q. Est-ce qu'ils disaient quelque chose pendant ce passage à tabac ?
17 R. Je ne sais pas exactement si je l'ai entendu à ce moment-là, ou
18 ailleurs, mais j'ai entendu : "Est-ce que tu traduis toujours pour les
19 journalistes russes ?"
20 Q. Comment avez-vous réagi lorsque vous avez vu ce passage à tabac ?
21 R. Qu'est-ce que je peux dire ? Comment j'ai réagi ? Il est triste de voir
22 quelqu'un être frappé ainsi. C'est douloureux, c'est difficile de voir
23 cela.
24 Q. Combien de temps ce passage à tabac a-t-il duré ?
25 R. Une demi-heure environ.
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1 Q. Saviez-vous qui était la personne qui faisait l'objet de ce passage à
2 tabac ?
3 R. Non.
4 Q. L'avez-vous appris par la suite ?
5 R. Nous avons appris cela le lendemain.
6 Q. Qu'avez-vous appris le lendemain ?
7 R. Le lendemain, Shala nous a dit : Est-ce que vous avez vu ce qui s'est
8 passé pour cette personne hier soir ? Nous étions censés répondre, oui,
9 nous l'avons vue. Il a dit que cette personne venait de Pristina, qu'il
10 s'appelait Shaban Hoti, qu'il était professeur de russe, et qu'il était
11 venu dans la zone de guerre pour traduire à l'intention de journalistes
12 russes. C'est tout ce que nous a dit Shala le lendemain.
13 Q. Après ce passage à tabac, que s'est-il passé ? Qu'ont fait les soldats
14 qui l'avaient frappé ?
15 R. Les soldats qui ont procédé à ce passage à tabac sont revenus dans la
16 pièce où nous nous trouvions. L'un d'entre eux avait une torche de la
17 taille que je vous indique ici. Il a commencé à vérifier chacun des
18 prisonniers en utilisant cette lampe de poche ou cette torche. Il s'est
19 tourné vers (expurgé) et a dit : Qu'est-ce vous faites ? Aux autres
20 personnes, je pense qu'il s'agissait de Shala, --
21 Q. Excusez-moi de vous interrompre. Avant de parler de cela, je
22 souhaiterais que nous passions à huis clos partiel. Est-ce que vous
23 pourriez regarder, je vous prie, l'écran qui se trouve devant vous.
24 M. WHITING : [interprétation] Aux fins du compte rendu d'audience, je
25 précise qu'il s'agit de la pièce P005. Toujours aux fins du compte rendu
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1 d'audience, il s'agit du bâtiment A1, extrait de la pièce relative au lieu,
2 portant la cote P006.
3 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous voyez clairement ce qui apparaît
4 sur votre écran ?
5 R. Oui.
6 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce que l'on peut voir ?
7 R. Oui, je connais cet endroit.
8 Q. De quoi s'agit-il ?
9 R. Il s'agit de l'endroit où j'ai été détenu.
10 Q. Est-ce que ce bâtiment ressemble au -- a la même apparence qu'à
11 l'époque où vous y étiez détenu ?
12 R. Il y a quelques petites modifications mineures.
13 Q. Quoi exactement ?
14 R. Ce qu'on peut voir sur les escaliers n'était pas là à l'époque. Il
15 s'agit d'escaliers qui mènent directement à la cour. Ce palier n'était pas
16 là à l'époque. Ce qu'on peut voir sur le balcon n'était pas là à l'époque
17 non plus. C'est tout ce que je peux remarquer à ce stade. Il n'y a pas
18 d'autres différences.
19 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais à M. Younis de bien vouloir
20 nous montrer l'étage supérieur.
21 Peut-être un peu plus lentement. Très bien. Faisons un arrêt sur image.
22 Q. Monsieur le Témoin, nous voyons ici la première pièce de la maison.
23 Est-ce que vous reconnaissez cette pièce ?
24 R. Oui, c'est là que j'ai été détenu.
25 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais que M. Younis nous fasse
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1 entrer dans la deuxième pièce. Nous pouvons continuer.
2 Q. Nous sommes à présent dans la deuxième pièce qui se trouve à l'étage
3 supérieur de la maison. Aux fins du compte rendu d'audience, je demanderais
4 à M. Younis de bien vouloir effectuer une rotation pour que nous voyions
5 l'ensemble de la pièce.
6 Est-ce que vous reconnaissez cette pièce ?
7 R. Oui, il s'agit de la deuxième pièce. J'ai passé quelque temps dans
8 cette pièce également.
9 Q. Est-ce qu'il s'agit là de la pièce dans laquelle Shaban Hoti a été
10 frappé ?
11 R. Oui, Shaban Hoti gisait dans cette pièce. La porte était ouverte.
12 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais que l'on arrête un instant.
13 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous reconnaissez ce qui se trouve dans
14 le coin de cette pièce ?
15 R. Il y avait cette armoire, mais il n'y avait pas de télévision à
16 l'époque. Il y a des câbles ici qui n'étaient pas là à l'époque. Je sais
17 que cette armoire ou ce buffet dans le coin était situé au même endroit à
18 l'époque. Je ne pense pas que l'horloge et l'aigle était là à l'époque.
19 Mais l'armoire était là. La porte était là et tout le reste était là.
20 Q. La pièce que nous pouvons voir depuis la pièce qui apparaît à l'écran
21 dans laquelle Shaban Hoti a été frappé, est la pièce que vous nous avez
22 décrite tout à l'heure dans laquelle vous étiez détenu avec les autres
23 prisonniers ?
24 R. Oui. C'est dans cette autre pièce, juste à côté, que j'ai été détenu.
25 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais à notre commis à l'affaire de
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1 bien vouloir nous emmener derrière ou à l'extérieur de la maison.
2 Q. Je demanderais que l'on examine ce qui se trouvait dans cette cour.
3 Est-ce que vous reconnaissez cette cour ?
4 R. Oui, car c'est le chemin que nous empruntions pour aller aux toilettes
5 qui se trouvent à l'endroit que j'indique.
6 Q. Vous avez parlé des toilettes, est-ce que vous voyez les toilettes
7 ici ?
8 R. Oui. On ne peut voir très clairement car c'est sombre, mais c'est à
9 l'endroit que j'indique ici.
10 Q. Malheureusement, nous ne pouvons pas voir l'endroit que vous indiquez.
11 Est-ce que vous pourriez nous montrer cela ?
12 M. WHITING : [interprétation] Ou peut-être que je pourrais demander à notre
13 commis à l'affaire de déplacer l'image vers la gauche.
14 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire où se trouvaient les toilettes ?
15 R. Si l'on passe ici, il y a une porte, puis une autre porte. Dans la
16 partie avant se trouvent les toilettes. Donc, c'est entre le bâtiment au
17 toit rouge et l'autre bâtiment. Entre les deux.
18 Q. Il s'agit de l'image extraite de la pièce P006 aux fins du compte rendu
19 d'audience. Nous sommes un peu plus près à présent, l'image est un peu plus
20 claire. Est-ce que vous voyez des toilettes maintenant ?
21 R. Oui, c'est là. Mais il fait sombre, on ne peut pas voir la porte.
22 Q. Est-ce que vous pouvez voir si la porte est ouverte ou non ? Ou plutôt,
23 il y a deux portes sur cette image. Il y a une porte à droite et une porte
24 à gauche ?
25 R. La porte de droite n'était pas là à l'époque, mais la porte qui se
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1 trouve à côté était la porte qui conduisait aux toilettes.
2 Q. Est-ce que sur cette image vous pouvez dire si la porte est ouverte ou
3 non ?
4 R. Je ne vois pas très bien, c'est très sombre. Je ne vois rien d'autre.
5 Q. Nous allons essayer de vous montrer une image plus claire pour que ceci
6 soit bien clair.
7 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais à l'Huissier de bien vouloir
8 montrer la page 7 de la pièce P006 et la placer sur le rétroprojecteur. Il
9 faut que nous passions du logiciel d'affichage électronique Sanction au
10 rétroprojecteur.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Là se trouvent les toilettes que nous avons
12 utilisées pendant trois jours et auxquelles nous nous rendions en étant
13 accompagnés.
14 M. WHITING : [interprétation]
15 Q. Est-ce que vous pourriez utiliser votre pointeur pour nous indiquer cet
16 endroit ?
17 R. [Le témoin s'exécute]
18 Q. Je demanderai si l'Huissier peut vous remettre un stylo et si vous
19 pouvez indiquer cet endroit à l'aide d'un "X".
20 R. Voilà les toilettes.
21 M. WHITING : [interprétation] Je demanderais que l'on attribue une cote à
22 cette pièce à conviction.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction de
25 l'Accusation P98, versée sous pli scellé.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Whiting, le moment est-il
2 venu de lever l'audience ?
3 M. WHITING : [interprétation] Il me reste une dernière image à présenter au
4 témoin.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Allez-y, mais soyez rapide, je vous
6 prie.
7 M. WHITING : [interprétation] Je serai rapide.
8 Je souhaiterais que l'on revienne au logiciel d'affichage électronique
9 Sanction, et je demanderais au commis à l'affaire de nous emmener vers la
10 droite.
11 Q. Il s'agit d'une vue de la cour. Vous avez dit que vous pouviez voir les
12 collines, et que c'est la raison pour laquelle vous saviez que vous étiez à
13 Lapusnik. S'agit-il là des collines que vous avez mentionnées plus tôt ?
14 R. Oui. Voilà la vue que nous avions pour aller aux toilettes. Lorsque
15 nous allions aux toilettes, nous voyions cela. D'après la vue, je savais
16 que nous étions à Lapusnik.
17 M. WHITING : [interprétation] Le moment est venu de conclure.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
19 Nous allons lever l'audience pour aujourd'hui.
20 Monsieur le Témoin, je dois vous demander s'il vous est possible de revenir
21 demain pour poursuivre votre déposition. Nous devons nous interrompre pour
22 aujourd'hui. Nous poursuivrons demain après-midi à 14 heures 15. L'audience
23 est levée.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
25 --- L'audience est levée à 19 heures 00,
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1 et reprendra le mardi 25 janvier 2005, à 14 heures 15.
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