Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 2 mars 2005

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 34.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Je vois que tous les accusés

6 ont pu être présents aujourd'hui, ce qui me rassure.

7 Est-ce que nous pouvons procéder --

8 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'aimerais vous dire où nous en sommes en

9 ce qui concerne l'état de santé de M. Bala. Il a été hospitalisé hier. Il a

10 subi un examen, notamment, en ce qui concerne ses fonctions cardiaques et

11 il a pu retourner au pénitencier. Vers 7 heures du soir, il a, d'après ce

12 qu'il m'a dit, il a de nouveau ressenti de douleurs aiguës; il a nécessité

13 des soins, mais personne n'est arrivé pour lui administrer ces soins. Il se

14 sent mieux aujourd'hui. J'ai discuté avec lui pour savoir s'il se sent en

15 état de procéder parce que franchement, d'après ce que je peux voir, il n'a

16 pas l'air en forme. Cela fait un moment que je le fréquente et je sais qu'à

17 certains moments son état de santé est manifestement mauvais.

18 Il m'a dit qu'il ne sentait pas très bien aujourd'hui, mais qu'il veut bien

19 que l'on poursuive parce qu'il ne veut pas que la procédure doive être

20 reportée ou que l'on puisse avoir l'impression qu'il tente de freiner la

21 procédure. Il est très préoccupé que l'on puisse avoir cette impression de

22 lui.

23 Je lui ai dit que s'il est prêt à poursuivre aujourd'hui, je veux bien le

24 faire. Je lui ai demandé que si jamais il ressent de la douleur ou qu'il ne

25 se sent pas confortable, qu'il me le signale tout de suite afin que nous

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1 puissions faire ce qu'il faut sans tarder.

2 Je ne sais pas si c'est le meilleur moment de soulever de nouveau la

3 question. Par le passé, nous avions déjà parlé d'un examen médical complet

4 et global pour M. Bala. Ce n'est pas la première fois qu'il est victime

5 d'une crise. Il y a quelque chose qui se passe. Je ne suis pas médecin. Je

6 ne pourrais pas présumer prétendre de savoir ce qui se passe, mais il y a

7 manifestement quelque chose de plus profond qui se passe. Nous n'arrivons

8 pas à comprendre ce qu'il en est. Je pense qu'il serait prudent que la

9 Chambre, si vous pensez que c'est important, ordonne un autre examen

10 médical complet de M. Bala pour tenter d'élucider la chose pour de

11 nombreuses raisons, avant tout évidemment, sa santé, et puis assurer que le

12 procès puisse se poursuivre comme le souhaite M. Bala.

13 Sinon, je n'ai rien d'autre à dire sur cette question.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Guy-Smith.

15 Je vais me renseigner pour voir si, à l'avis de ceux qui sont à l'heure

16 actuelle responsables de ses soins médicaux, s'il y aurait une raison de

17 donner suite à votre proposition. Par ailleurs, la position dont vous

18 faites état correspond à ce que la Chambre trouverait adéquat. Si votre

19 client ne se sent vraiment pas bien, il faut le signaler à la Chambre.

20 Sinon, s'il est possible de poursuivre, c'est souhaitable. Votre client ne

21 devrait pas à quelque moment que ce soit avoir le sentiment qu'il ne

22 devrait pas nous signaler ses problèmes de santé parce qu'il est préoccupé

23 par le fait ce qu'on puisse penser qu'il tente de retarder les choses.

24 M. WHITING : [interprétation] Si je pourrais juste ajouter quelque chose,

25 un élément d'information, c'est une question effectivement qui a été

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1 soulevée par le passé et si j'ai bien compris en 2003 ou en 2004 un examen

2 médical complet a été ordonné pour la même raison et a été effectué. Les

3 résultats sont disponibles. Le procès a pu suivre son cours. Bien entendu,

4 l'état de santé peut varier au fil du temps puisque cela fait déjà un

5 certain temps que cet examen a été fait. Peut-être conviendrait-il

6 d'effectuer un autre examen, mais je voulais juste préciser qu'un tel

7 examen a déjà été fait. Cela a peut-être eu lieu avant que M. Guy-Smith ne

8 commence à défendre les intérêts de M. Bala.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En tout cas, avant que cette Chambre

10 n'ait été instituée.

11 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, en effet, avant que cette Chambre

12 n'ait été instituée. Il est vrai que des examens médicaux ont déjà été

13 faits. Apparemment, il y a une étiologie qu'on n'arrive pas bien à cerner,

14 mais tout le monde reconnaît qu'il y a quelque chose qui ne va pas. Nous

15 savons tous que la science médicale est tout sauf exacte même si nous

16 pourrions souhaiter le contraire.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous n'allons pas la comparer avec le

18 droit.

19 M. GUY-SMITH : [interprétation] Non, surtout pas, je ne ferais jamais cela.

20 M. TOPOLSKI : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur, Madame les

21 Juges, le témoin n'est pas encore dans le prétoire, comme je l'ai demandé.

22 Si j'ai bien compris, M. Whiting en a terminé avec son interrogatoire

23 principal du témoin. J'ai pu lui indiquer ce matin une question que

24 j'aimerais soulever avant de commencer le contre-interrogatoire. J'aimerais

25 soulever cette question dans un moment. Tout d'abord, est-ce que je peux

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1 dire quelque chose concernant M. Limaj et M. Mansfield. Je tiens à

2 remercier la Chambre de toute son aide en coulisse ce matin.

3 Les choses ne se passent bien pour M. Mansfield dans le cas de son autre

4 procès. Encore une fois, un juré est tombé malade, mais je peux vous dire

5 qu'il a pu conclure son réquisitoire final ce matin. Il est sur le chemin

6 du retour à l'heure actuelle.

7 Je pense que je serai le seul conseil de la Défense à contre-interroger M.

8 Qeriqi. Même si je procédais très lentement, je ne pense pas que je

9 pourrais prendre tout le temps qu'il faudrait avant que M. Mansfield

10 n'arrive, vers 18 heures, sans doute. Si j'ai bien compris, la Chambre

11 accepterait que M. Qeriqi reste encore jusqu'à demain afin que M. Mansfield

12 lui-même puisse aussi procéder à son contre-interrogatoire. M. Limaj vous

13 en est très reconnaissant. M. Whiting et moi-même avons discuté du fait que

14 M. Qeriqi pourrait être contre-interrogé après un autre témoin, mais pour

15 toute une série de raisons que je comprends bien, cela n'est pas considéré

16 comme une bonne idée par les conseils. Avec nos remerciements à l'égard de

17 la Chambre, voilà notre position en ce qui concerne M. Mansfield.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Topolski. En

19 effet, c'est regrettable, je crois que ce serait dans le meilleur intérêt

20 du client de M. Mansfield si M. Mansfield lui-même peut souffler un moment

21 après son retour et peut se familiariser avec ce qui aura eu lieu

22 aujourd'hui dans le cadre du contre-interrogatoire.

23 Ne vous sentez-vous pas obligé de prendre tout votre temps. Accélérez les

24 choses, et si nous avons une pause, tant mieux.

25 M. TOPOLSKI : [interprétation] J'espère que vous n'allez pas penser que mon

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1 nom est synonyme d'accélération. Mais bon, je ne vais pas insister.

2 Il y avait une autre question que je voulais poser concernant le témoignage

3 de M. Qeriqi, témoignage principal. C'est un peu insolite de soulever la

4 question. Je vais vous indiquer tout de suite ce dont il s'agit. J'aimerais

5 demander à M. Whiting quelle est exactement la position de l'Accusation en

6 ce qui concerne la déposition de ce témoin à ce jour. Bien entendu, l'on

7 comprend bien, qu'en fin de compte, ce sont des questions qui auront à être

8 tranchées par la Chambre lorsqu'elle aura à décider de la culpabilité ou de

9 l'innocence des accusés. Mais notre thèse est que cela empiète sur des

10 questions que je pourrais poser lors du contre-interrogatoire. Pourquoi

11 cela concerne exclusivement M. Qeriqi. Tout d'abord, il n'y pas eu et il

12 n'y aura pas de requête visant à ce qu'il soit considéré comme un témoin

13 hostile. En deuxième lieu, en tout cas, dans le système judiciaire qui

14 m'est familier et qui est familier à la Chambre et à M. Whiting, le fait

15 qu'un témoin soit cité par l'Accusation comme un témoin véridique est une

16 notion répandue dans tout ces systèmes juridiques.

17 On peut soutenir qu'on ne cite pas forcément à comparaître un témoin en

18 pensant qu'il donne des réponses fiables et véridiques à toutes les

19 questions, mais uniquement à certaines questions. Notre thèse, c'est que la

20 situation par rapport à ce témoin est différente d'un point de vue

21 qualitatif. Cela rend nécessaire, à notre avis, que M. Whitting nous expose

22 sa position pour les raisons qui suivent. Tout d'abord, ce témoin est et

23 d'après ce que nous savons, reste un suspect. On le lui a dit très

24 clairement au début de son entretien, M. Whiting était présent lorsqu'il a

25 été interrogé pour la première fois par le tribunal. C'est aussi clairement

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1 indiqué dans les moyens de preuve que vous avez sous les yeux, qu'il a été

2 cité à comparaître en tant que suspect et qu'il s'est plié à cette citation

3 à comparaître. Je me propose de lui demander s'il se considère encore comme

4 suspect dans cette affaire. Que M. Whiting soit prêt ou non à indiquer s'il

5 est suspect ou non encore, ou si on lui aurait indiqué qu'il ne l'est plus.

6 Nous allons la réponse de M. Whiting à ce propos.

7 Deuxième point : d'autres témoins, je prends un exemple tout à fait

8 évident, nous sommes en audience publique, son pseudonyme c'est le L-07. Il

9 a témoigné concernant un interrogatoire au cours duquel ce témoin-ci était

10 présent, un interrogatoire que le témoin a dû aborder hier. Il a parlé de

11 bières et de cigarettes en ce qui concerne les deux parties au Kosovo. Ce

12 qu'on ne lui a pas soumis, c'est l'allégation très grave faite par L-07

13 que, lors de cet interrogatoire, plusieurs dents de ce témoin L-07 ont été

14 cassées a coup de crosse de fusil; en d'autres termes, ce témoin pourrait

15 être l'auteur d'une infraction criminelle ou avoir été impliqué directement

16 en tant que supérieur hiérarchique.

17 L'on se souvient très bien du ton que M. Whiting a utilisé pour soumettre à

18 ce témoin un certain nombre de noms de personnes disparues et décédées, et

19 l'allégation implicite était manifestement que ce témoin savait ou aurait

20 pu en savoir plus que ce qu'il était prêt à avouer. Aucune demande

21 concernant la nature hostile du témoin n'a été faite. En fait, il nie ou

22 continue à nier tout aspect qui pourrait l'incriminer.

23 Il ne s'agit pas d'une enquête publique. A notre avis, l'Accusation ne peut

24 pas être neutre et nous avons le droit de savoir quelle est la position

25 juste de l'Accusation afin de pouvoir mener mon contre-interrogatoire, en

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1 fonction de la réponse de M. Whiting, à ce que j'avance. Pourquoi est-ce

2 que c'est important pour mon contre-interrogatoire d'être fixé. Ce témoin,

3 a témoigné hier sur ce qui, d'après lui, était la position de mon client à

4 Lapusnik. Vous avez les textes des entretiens qui ont précédé ces

5 audiences. Alors disons de façon neutre qu'il y a là un contraste avec les

6 réponses qu'il a données auparavant. J'utilise le terme de "contraste" au

7 sens strict, express. Que j'explore cette question plus avant dépend, je

8 peux vous l'assurer de la réponse que donnera M. Whiting à ce que je lui

9 demande.

10 Puis, une autre raison que j'ai déjà évoquée. J'ai déjà donné un exemple,

11 il y a aussi l'exemple de Ramadan Behluli. Cette Chambre a entendu des

12 allégations d'autres témoins concernant la conduite ou le comportement de

13 ce témoin. L'on pourrait imaginer dans un esprit d'équité que, si ces

14 allégations sont en pris en compte, ce témoin devrait pouvoir réagir à ces

15 allégations. C'est un domaine dans lequel je cherche la direction et

16 l'orientation de la Chambre en réponse aux arguments que je viens

17 d'énoncer, parce que j'aimerais savoir si, de mon point de vue, c'est un

18 domaine approprié à explorer, est-ce que c'est prudent ou non ? Bien sûr,

19 il faut aussi que j'apprécie cela.

20 Je pense que nous sommes là dans une situation tout à fait unique, tout à

21 fait exceptionnelle. Dans le cadre de ce procès, je crois qu'il était

22 opportun de soulever la question maintenant. Bien entendu, si la Chambre

23 estime que tout cela relève des décisions de la Chambre à la fin du procès

24 et que je dois prendre ces décisions moi-même, je le ferai. J'espère que la

25 Chambre apprécie le fait qu'il y a tout de même des difficultés

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1 potentielles qui se posent en l'occurrence. Nous estimons que se serait

2 bien de les explorer maintenant, plutôt que d'attendre que ce soit trop

3 tard.

4 Je vous prie d'excuser le temps que j'ai pris pour ces explications. Mais

5 voilà, je cherche l'assistance de la Chambre.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

7 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, je tiens à me rallier aux arguments

8 avancés par M. Topolski. J'aurais une autre réflexion à faire mais cela

9 dépend aussi de la réponse de M. Whiting au cas où, vous lui demanderiez de

10 répondre.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

12 Monsieur Whiting.

13 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation est très

14 réticente en ce moment, au milieu, au beau milieu d'un témoignage,

15 réticente à évaluer ce témoignage et à donner le point de vue de

16 l'Accusation sur ce qui pourrait être véridique, ce qui ne l'est peut-être

17 pas et quels sont les éléments du témoignage que l'Accusation va utiliser

18 par la suite. Bon, il y a plusieurs raisons pour cela. Tout d'abord,

19 l'évaluation finale du témoignage relève non pas de l'Accusation, mais de

20 la Chambre, qu'il s'agisse d'accepter ce témoignage en partie seulement, ou

21 dans son intégralité. Même si l'Accusation devait faire état de son point

22 de vue vis-à-vis du témoin, je ne pense pas que la Chambre en fera de même.

23 Ainsi, M. Topolski ne sera pas en meilleure posture pour savoir comment

24 mener son contre-interrogatoire, puisqu'en fin de compte, c'est le jugement

25 de la Chambre qui compte, et pas celui de l'Accusation. M. Topolski aura à

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1 garder cela à l'esprit.

2 En deuxième lieu, ce témoignage, comme tout les témoignages, devra être

3 évalué à la lumière de tous les moyens de preuve qui seront présentés. Il

4 sera parfois possible de faire des jugements à l'emporte-pièce, mais en fin

5 de compte, les témoins, les documents, tout ce qui est présenté doit être

6 évalué à la lumière de l'ensemble, en fin de compte. C'est à ce moment-là

7 qu'il convient que l'Accusation présente ses arguments concernant les

8 moyens de preuve qu'elle retient.

9 De façon générale, il arrive souvent, et cela arrivera sans doute

10 dans le cadre de ce procès, si cela n'a pas déjà été le cas, cela arrive

11 dans le cadre de chaque procès devant ce Tribunal. Il arrive que les

12 témoins disent la vérité sur certains points et sur d'autres points sont

13 inexacts, que ce soit intentionnel ou non. Plus particulièrement, les

14 témoins ne sont pas toujours sincères quant à leur propre participation

15 dans certaines questions, où ils se sont rangés dans le conflit. Je crois

16 que c'est une question qui est abordé au paragraphe 7 du jugement Strugar

17 de cette Chambre, le fait que les témoins disent la vérité sur certains

18 points, et pas sur d'autres, exagèrent l'importance de certaines questions,

19 minimise l'importance d'autres. Il est important que la Chambre pèse tous

20 ces aspects et décide si le témoignage doit être accepté en tout ou en

21 partie.

22 Dans ses arguments, M. Topolski, je crois, a accepté ce principe. Je

23 ne l'ai pas sous les yeux, mais il a dit qu'il est très fréquent que

24 l'Accusation ou la Défense appelle à la barre des témoins qui seront

25 véridiques sur certains points, et pas sur d'autres. Mais maintenant il

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1 tente de nous dire que cette situation concernant ce témoin est unique,

2 exceptionnelle. Il a dit que ce témoin avait été interrogé en tant que

3 suspect. On se demande : est-il toujours suspect ou non ? Sur ce point je

4 pense que je dois réagir. On a dit au témoin qu'il était un suspect. Si, à

5 un moment donné, on lui a donné des informations contraires, une autre

6 évaluation de son statut, je pense que cela pourrait avoir un impact sur

7 son témoignage, et je serais obligé de vous le communiquer, de vous le

8 divulguer. Cela ne s'est jamais passé. On n'a pas donné de telle

9 information au témoin. Sur ce point précis, je crois qu'il conviendrait que

10 l'Accusation soit obligée de le divulguer si on avait informé le témoin que

11 son statut avait changé à cet égard.

12 Cela dit, qu'il soit suspect ou non, ce qui adviendra de lui, ceux sont

13 d'autres questions. Ce qu'on lui a dit peut avoir un impact sur son

14 témoignage. Mais sinon, ce qu'il en est par ailleurs de son statut aux yeux

15 de l'Accusation, je ne crois pas que ce soit pertinent.

16 Deuxième point à soulever par M. Topolski, cela ne distingue pas ce témoin

17 d'autres témoins qui auraient pu être impliqués dans certaines activités ou

18 qui viendraient témoigner. Par ailleurs,

19 M. Topolski affirme que le témoignage de ce témoin, concernant son client,

20 est différent de ce qu'il aurait dit dans un entretien antérieur. Cela ne

21 le distingue en rien d'autres témoins qui sont venus déposer dans ce

22 prétoire, qui peuvent dire la vérité sur certaines questions et pas sur

23 d'autres. M. Topolski peut très bien approfondir cela dans son contre-

24 interrogatoire.

25 Puis, M. Topolski a dit que la Chambre a entendu des allégations

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1 formulées contre ce témoin, que le témoin devrait avoir l'occasion de se

2 prononcer au sujet de ces allégations. C'est exactement ce que j'ai essayé

3 de faire à la fin de mon interrogatoire principal, de confronter le témoin

4 aux allégations qui ont été faites à son encontre, et lui donner l'occasion

5 de se prononcer, et laisser la Chambre évaluer à la lumière de tous les

6 autres moyens de preuve, donc évaluer si elle estime que le témoin dit la

7 vérité dans ses réponses sur ces questions.

8 J'ai tenté de couvrir tous ces poids de la manière la plus étendue

9 possible. J'ai posé des questions générales et spécifiques. Il se peut

10 qu'il y ait des allégations très précises que je n'ai pas soumises au

11 témoin. M. Topolski a identifié une de ces questions concernant le témoin

12 L-07. Je n'ai pas passé en revue le compte rendu, ce qui est dit concernant

13 L-07. Mais si je me souviens bien, j'ai tout de même passé en revue cet

14 incident de façon assez approfondie, avec des questions tant générales que

15 spécifiques, et le témoin s'est prononcé très clairement dans sa déposition

16 sur cet incident.

17 Selon moi, rien ne distingue ce témoin d'autres témoins dans cette

18 affaire, et rien de justifie que l'Accusation, en cours du déposition, se

19 prononce sur la crédibilité de ce témoin.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La position est claire. L'Accusation,

23 lorsqu'elle a cité ce témoin à comparaître et a guidé sa déposition, l'a

24 fait en partant du principe que la déposition de ce témoin, au moins en

25 partie, serait acceptée par la Chambre. Si j'ai bien compris, la position

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1 qui a été exposée ne consistait pas à dire qu'en citant à comparaître ce

2 témoin l'Accusation se portait garante du caractère véridique de

3 l'intégralité de sa déposition. S'agissant des questions soulevées par M.

4 Topolski, je pense qu'elles indiquent, pour ce qui est de ce témoin, que

5 certains éléments revêtent une importance particulièrement importante par

6 rapport à d'autres témoins. Des allégations assez graves ont été relevées

7 dans des témoignages contre ce témoin, notamment concernant sa

8 participation à certains événements.

9 Cela étant dit, la position de la Chambre reste la même. Ce témoin a

10 été appelé à la barre dans les conditions expliquées par l'Accusation.

11 L'Accusation a posé des questions au témoin concernant certaines

12 allégations graves qui ont été relevées dans d'autres témoignages. Dans sa

13 déposition, le témoin a nié avoir participé de quelque manière que ce soit

14 aux incidents qui ont été mentionnés dans d'autres témoignages.

15 Si l'Accusation avait une position claire et solide à ce stade, il aurait

16 convenu qu'elle le fasse savoir notamment dans l'intérêt de la Défense.

17 Cependant, l'Accusation a indiqué que pour ce qui est du poids à accorder à

18 la déposition de ce témoin dans le cadre de sa thèse, donc ce poids sera

19 apprécié à la lumière de l'ensemble des éléments de preuve. La Chambre ne

20 pense pas que les circonstances justifient une intervention de sa part afin

21 de modifier ce point de vue qui semble correct dans le principe et

22 l'Accusation a adopté une position équitable par rapport à la poursuite de

23 ce procès.

24 Pour ces raisons, Maître Topolski, nous demanderons pas précisément à

25 l'Accusation d'indiquer plus avant sa position, mais je pense que vous

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1 pourrez, dans le cadre de votre contre-interrogatoire, explorer ces pistes,

2 si vous le jugez nécessaire.

3 M. TOPOLSKI : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Que l'on fasse entrer le témoin, je

5 vous prie.

6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur Qeriqi.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Heureusement, comme vous pouvez le

10 voir, tous les accusés ont pu être présents aujourd'hui si bien que nous

11 allons pouvoir poursuivre votre déposition. Je vous rappelle que la

12 déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de votre déposition

13 est toujours applicable, et que vous êtes toujours lié par celle-ci.

14 Monsieur Whiting, avez-vous d'autres questions à poser au témoin ?

15 M. WHITING : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions à pose.

16 Merci, Monsieur le Président.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans ce cas, Monsieur Qeriqi, la

18 Défense aura quelques questions à vous poser.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Si vous me le permettez, je souhaiterais que

20 tout cela soit traduit dans ma langue.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Apparemment, vous n'étiez pas sur le

22 bon canal. Nous allons y remédier.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant, cela va.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce qu'à présent vous pouvez suivre

25 les débats en albanais ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, maintenant, oui.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez que je

3 répète ce que je viens de dire ou est-ce que vous avez suffisamment compris

4 ce qui se passait ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. J'ai compris, car j'ai déjà précisé

6 que je connais quatre langues en plus de ma langue maternelle.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Qeriqi. La Défense

8 aura quelques questions à vous poser.

9 Monsieur Topolski, vous avez la parole.

10 LE TÉMOIN: RAMIZ QERIQI [Reprise]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 Contre-interrogatoire par M. Topolski :

13 Q. [interprétation] Monsieur Qeriqi, je représente les intérêts de M. Isak

14 Musliu et je souhaiterais vous poser quelques questions cet après-midi, si

15 je le puis.

16 R. Allez-y.

17 Q. Lorsque vous avez été interrogé par des représentants du bureau du

18 Procureur en avril 2003, vous avez été interrogé en qualité de suspect,

19 n'est-ce pas ?

20 R. C'est exact. Je ne sais pas si c'est exact ou non, mais cela s'est

21 passé dans ces conditions.

22 Q. Pour autant que vous le sachiez, aujourd'hui, dans ce prétoire, alors

23 que vous déposez, pensez-vous être toujours un suspect ?

24 R. Tout le monde a le droit de soupçonner quelqu'un, mais je crois qu'ils

25 n'ont plus le droit de le faire.

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1 Q. N'avez-vous jamais reçu des communications sous quelque forme que ce

2 soit de la part du bureau du Procureur indiquant que vous n'étiez plus

3 considéré comme un suspect ?

4 R. Je n'ai pas compris votre question. Je ne sais pas ce que vous entendez

5 par communication.

6 Q. Je veux parler de lettre, d'appel téléphonique, de télécopie, de

7 courrier électronique, n'importe quel type de communication émanant du

8 bureau du Procureur vous indiquant que vous n'étiez plus considéré comme un

9 suspect. Avez-vous reçu quoi que ce soit de ce genre ?

10 R. Je n'ai rien reçu par écrit.

11 Q. Dans le cadre de votre audition par des représentants du bureau du

12 Procureur, et hier encore, vous avez dit que vous aviez commencé à

13 participer à la guerre en tant que soldat de l'UCK et de façon clandestine.

14 Je souhaiterais que l'on en parle brièvement. Votre surnom, votre nom de

15 guerre était Luani, n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Aurais-je raison de dire que vous ainsi que beaucoup d'autres ont

18 utilisé un surnom pour deux raisons : essentiellement pour éviter que les

19 Serbes n'aient connaissance de votre véritable identité, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, oui, pour me protéger et surtout pour protéger ma famille et mes

21 parents proches. A l'époque, si le gouvernement savait qu'il y avait des

22 opposants, que des gens luttaient contre lui, le gouvernement lançait des

23 représailles contre toute la famille, que ce soit en les plaçant en

24 détention ou en détruisant leurs maisons pendant la nuit, en leur faisant

25 subir des mauvais traitements et ainsi de suite. C'est pour cela que nous

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1 avons fait cela.

2 Q. Très bien. Merci de m'avoir répondu en détail. La deuxième raison pour

3 laquelle vous souhaitiez protéger votre identité, c'était pour protéger

4 votre famille, vous en avez parlé.

5 Je souhaiterais à présent poser d'autres questions concernant l'Allemagne,

6 et le temps que vous y avez passé, car je pense qu'en Allemagne, vous avez

7 rencontré Isak Musliu, mon client, et que vous êtes devenus amis, n'est-ce

8 pas ?

9 R. Oui.

10 Q. Si vous vous en souvenez, Isak Musliu résidait à Degendorf. Est-ce que

11 vous vous souvenez de cet endroit ?

12 R. Non, pas Degendorf, mais près de chez moi, Barkenberg, ou quelque chose

13 de ce genre.

14 Q. Saviez-vous qu'il était membre d'un club de karaté local, et qu'il

15 jouait au football ?

16 R. Oui, c'est ce que j'ai appris, après l'avoir rencontré.

17 Q. Selon les termes que vous avez utilisés hier, vous êtes devenus

18 inséparables. Je dirais que vous êtes devenus des amis proches, n'est-ce

19 pas ?

20 R. Oui, à un stade ultérieur, plus tard. Mais je peux vous en parler.

21 Q. Je vais y venir. Je souhaiterais que l'on parle de votre première

22 rencontre. Ai-je raison de dire qu'il faisait des travaux agricoles dans un

23 village appelé Arnhofen, près de la ville de Neuseddin en Allemagne ? Il

24 faisait froid, ce jour-là. Il travaillait dans les champs avec deux de ses

25 cousins. Un homme a apporté du thé dans une bouteille thermos. Cet homme,

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1 c'était vous. Vous souvenez-vous de cela, Monsieur Qeriqi ?

2 R. C'est exact. Ce n'était pas moi qui ai acheté le thé. Ma famille

3 habitait non loin de là, je leur ai apporté du thé. J'habitais là avec mon

4 épouse et mon fils. Il travaillait dans un endroit situé non loin de là où

5 habitait mon famille. J'étais heureux d'aider certains de mes compatriotes,

6 ne serait-ce qu'en leur apportant du thé.

7 Q. Nous allons passer en revue ces événements assez rapidement. Ces

8 événements concernent mon client, et je souhaiterais simplement que nous en

9 parlions, pour que vous nous formuliez quelques commentaires à ce sujet.

10 Vous avez commencé à travailler ensemble dans une organisation qui

11 s'occupait de la sécurité fournie lors des rassemblements visant à soutenir

12 l'UCK. Vous avez commencé à travailler avec de nombreuses personnes qui,

13 par la suite, se sont portées volontaires pour participer à des réunions et

14 pour organiser des rencontres de l'organisation qui, par la suite, a été

15 appelée l'UCK. Etes-vous d'accord, Monsieur Qeriqi ?

16 R. Oui, c'est exact. C'était un plaisir lorsque nous nous rencontrions,

17 toutes ces personnes. C'était un plaisir de rencontrer toutes ces personnes

18 qui ont participées à cette organisation, à ce mouvement.

19 Q. Je souhaiterais que l'on passe à autre chose, et que nous parlions des

20 événements de façon chronologique. Je souhaiterais que nous parlions du

21 moment où vous, lui et dix autres personnes avez quitté l'Allemagne pour

22 revenir au Kosovo. Tout d'abord, Monsieur Qeriqi, vous nous avez dit que

23 vous aviez demandé à la permission de le faire; est-ce exact ?

24 R. Oui. Je voulais revenir au Kosovo. Je voulais quitter l'Allemagne, et

25 c'est la raison pour laquelle j'ai fait cette demande, parce nous voulions

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1 rejoindre nos camarades afin de défendre nos territoires.

2 Q. Vous avez fourni très aimablement à M. Whiting et à ses collègues une

3 photocopie de cette demande. Je ne veux pas vous la présenter, mais nous

4 avons une traduction, et on peut voir une liste de noms qui apparaissent

5 dans ce document. Je souhaiterais savoir à qui vous avez présenté cette

6 demande.

7 R. J'ai présenté cette demande à Aargau avec des membres du LPK, car ce

8 sont eux qui s'occupaient de cela. C'est eux, plus que d'autres qui

9 s'occupaient de l'organisation.

10 Q. Dans cette liste comportant 12 noms, on peut voir le nom d'Isak Musliu

11 et le vôtre, ainsi que le nom de 10 autres personnes. Aurais-je raison de

12 dire que la raison qui vous a amené à revenir au Kosovo est les souffrances

13 de la famille Jashari ?

14 R. Oui, vous avez raison. Non seulement les souffrances de la famille

15 d'Adem Jashari, mais également le fait que les Serbes avaient commencé à

16 exercer des pressions sur nous avant cela. Je ne souhaite pas m'attarder

17 sur ce sujet, et expliquer pourquoi ce n'est pas seulement moi, Isak Musliu

18 et les autres qui avons participé aux événements, mais tous les Albanais

19 qui souhaitaient le faire voulaient rentrer chez eux afin de défendre nos

20 territoires, notre identité nationale en tant qu'Albanais, défendre nos

21 enfants et nos femmes qui étaient impuissants et fragiles. Ce n'était pas

22 simplement à cause d'une seule famille, mais pour servir un intérêt plus

23 général.

24 Q. Je ne souhaite en aucun cas minimiser l'importance de cet événement. Ce

25 qui m'intéressait davantage, c'est la date, en fait, de ce voyage de

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1 l'Allemagne vers le Kosovo, voyage que vous avez effectué, vous et vos

2 camarades. C'était en début mars, Monsieur Qeriqi; est-ce exact ?

3 R. Oui. En mars, nous avons participé à quelques rassemblements. Comme je

4 l'ai déjà dit, cela s'était passé même avant cela, mais c'est en mars que

5 nous avons fait ce voyage. Je ne suis pas sûr de la date. C'était peut-être

6 fin mars ou début avril, mais plutôt fin mars.

7 Q. Ce voyage que vous avez fait avec Isak Musliu, je ne vais en parler

8 dans trop de détail, mais ce voyage a duré quelques jours, environ une

9 semaine ? Vous avez passé une semaine à Tirana, en Albanie ? En fait, vous

10 étiez le chef de ce groupe qui revenait au Kosovo, n'est-ce pas ?

11 R. Oui, j'étais le chef de groupe, mais à Tirana, d'autres chefs nous ont

12 également aidé à revenir au Kosovo.

13 Q. Excusez-moi si je ne prononce pas les noms correctement, mais vous

14 êtes-vous rendus dans un endroit appelé Kukes, dans une maison où on vous a

15 remis un uniforme et des armes ? Est-ce que vous en conviendrez avec moi ?

16 R. Non, nous n'avons pas pris d'uniformes à Kukes. Nous avons pris ces

17 uniformes ailleurs, à Krume. C'est à cet endroit que nous avons pénétré sur

18 le territoire du Kosovo.

19 Q. Le nom du village n'est pas trop important.

20 Lorsque vous êtes entrés au Kosovo, lorsque vous avez traversé la frontière

21 en tant que groupe, vers la fin du mois de mars 1998, vous vous êtes rendus

22 dans une maison située de l'autre côté de la frontière. Vous avez rencontré

23 un homme dénommé Abedin Rexha et vous, Musliu et les autres avez découvert

24 que l'UCK à l'époque n'était pas aussi organisée que ce que vous pensiez.

25 Si vous souhaitez, je peux formuler ma question de façon différente, en

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1 plusieurs volets, mais, de façon générale, est-ce que vous êtes d'accord

2 avec ce que je viens de vous dire ?

3 R. En ce qui concerne Abedin et Ilaz, nous les avons rencontrés ailleurs,

4 en Allemagne, pas à cet endroit au Kosovo dont vous venez de parler, peut-

5 être que vous m'avez mal compris.

6 Q. Non, c'est de ma faute si je me suis trompé. Est-ce que le reste de ma

7 thèse, vous l'acceptez, notamment, ce que je vous ai suggéré concernant le

8 fait que vous et les autres membres du groupe avaient appris, à ce moment-

9 là, que l'organisation de l'UCK n'était pas aussi bien faite que ce que

10 vous pensiez ?

11 R. Oui, les noms sont les mêmes, les noms que j'ai mentionnés hier; mais,

12 en ce qui concerne le lieu que avez mentionné, ceci n'est pas exact, car

13 nous avons rencontré ces deux autres personnes en Allemagne. Lorsque nous

14 sommes arrivés là, nous nous sommes rencontrés à Likovc et non pas dans une

15 maison située ailleurs. C'était à Likovc que nous avons rencontré ces deux

16 personnes.

17 Q. Merci, je souhaiterais vous montrer une photographie qui vous a été

18 présentée, il y a quelques jours, il s'agit de la pièce P153 qui va vous

19 être remise avec l'aide de l'huissier.

20 M. TOPOLSKI : [interprétation] Peut-être, pourrait-on placer cette photo

21 sur le rétroprojecteur. Merci.

22 Q. Cette photographie a été placée sur votre gauche, mais elle doit

23 normalement apparaître à l'écran également; est-ce que vous l'a voyez ?

24 R. Oui, oui, je la vois.

25 Q. L'homme à genoux à droite de la photographie est Qerqizi, n'est-ce pas,

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1 c'est-à-dire, Isak Musliu ?

2 R. Oui. Oui.

3 Q. Sur cette photographie, il porte une barbe assez fournie et drue qui a

4 continué à pousser pendant le printemps et l'été. Je suis sûr que vous êtes

5 en mesure de répondre à cette question car vous l'avez vu jusqu'à fin mai à

6 Lapusnik. Sa barbe a continué à s'épaissir et à pousser, n'est-ce pas ?

7 R. Oui, oui. A l'époque, il ressemblait à Qerqiz Topulli, il portait cette

8 barbe. Qerqiz Topulli était un héros du passé qui a lutté pour la cause

9 nationale, et c'est ainsi qu'il a obtenu ce surnom de Qerqizi.

10 Au fur et à mesure que les jours passaient, la barbe poussait, je suis

11 d'accord, je n'ai rien d'autre à ajouter.

12 Q. C'est tout ce que j'attendais de votre part en ce qui concerne

13 l'importance qu'il conviendrait d'accorder à l'épaisseur de cette barbe

14 d'autres s'en chargeront.

15 Passons à autre chose. Parlons de vos rapports avec Qerqizi, notamment à

16 Lapusnik. La première visite que vous avez effectuée à Lapusnik a eu lieu

17 le 9 mai, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Si j'ai bien compris la teneur de votre déposition, vous avez participé

20 aux combats, ce jour-là; vous partez dans les 24 heures; et vous revenez

21 une deuxième fois, le 29 mai, et vous ne revenez pas à cet endroit jusqu'à

22 la fin de la guerre. Est-ce que je vous ai bien compris pour ce qui est de

23 Lapusnik ?

24 R. Oui, vous m'avez bien compris.

25 Q. Parlons des événements dans l'ordre chronologique, ce sera plus facile.

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1 En premier lieu, la décision de vous rendre à Lapusnik le 9 mai a été prise

2 par des individus. Personne n'a donné l'ordre à qui que ce soit de se

3 rendre là-bas. Etes-vous d'accord avec moi ?

4 R. Comme je l'ai dit hier, nous étions à Klecka quand nous avons entendu

5 des tirs, nous nous sommes partis de Klecka et nous sommes venus à l'aide.

6 Q. Monsieur Qeriqi, ne vous préoccupez pas trop de ce que vous avez déjà

7 dit. Si quelqu'un ici pense que je perds du temps, je suis sûr que la

8 Chambre me rappellera à l'ordre. Je souhaiterais simplement que vous

9 répondiez à mes questions.

10 Personne ne vous a donné l'ordre de vous rendre là-bas. Vous avez entendu

11 ces tirs et vous avez tous décidé, ceux qui le souhaitaient qu'il fallait

12 aller à Lapusnik pour aider les villageois, n'est-ce pas ?

13 R. Vous avez raison.

14 Q. Merci.

15 R. Notre lutte était une lutte de libération. Dans de nombreux cas, dont

16 je n'ai pas nécessairement parlé, des gens nous rejoignaient, ils avaient

17 un fusil, un fusil de chasse, et cetera. Nous nous allions au front et ces

18 gens nous rejoignaient. Comme je j'ai dit, il s'agissait d'une guerre

19 volontaire. C'est un fait de notoriété publique. Comme tous ces gens qui

20 voulaient se rendre au Kosovo, mais dont certains malheureusement n'y sont

21 pas parvenus. Toutes les personnes qui nous ont rejoint, qui sont reparties

22 au Kosovo l'ont fait d'une manière volontaire.

23 Q. Si je devais vous présenter une vue aérienne de Lapusnik, seriez-vous

24 en mesure de nous dire où vous avez combattu le 9 mai, ou pas ?

25 R. Je pourrais vous le décrire avec des mots, sans carte, si vous le

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1 voulez.

2 Q. L'endroit dans lequel vous avez combattu portait-il un nom ?

3 R. J'ai dit avant-hier que nous sommes arrivés sur place assez tard. Après

4 l'incendie du véhicule blindé transport de troupes, le groupe que je

5 dirigeais est arrivé assez tard. Les Serbes étaient en train de se replier

6 à ce moment-là. Ce véhicule était dans un endroit qui s'appelait Guri,

7 aujourd'hui d'ailleurs, il y a un drapeau sur ce lieu.

8 Q. Est-ce que ce terme de "guri" signifie rocher, et sur ce drapeau, voit-

9 on un aigle rouge à deux têtes ?

10 R. Oui, tout à fait, cette aigle bicéphale, c'est notre symbole national,

11 c'est un symbole important.

12 Q. Vous avez quitté Lapusnik ce jour-là, le 9 mai, et vous n'y êtes pas

13 retournés avant une vingtaine de jours comme vous nous avez dit que c'était

14 le cas. J'aimerais connaître quelques informations concernant votre retour

15 du 29 mai.

16 R. [aucune interprétation]

17 Q. Mais, je ne vous ai pas encore posé de questions ?

18 R. Excusez-moi.

19 Q. Là encore, vous a-t-on ordonné de retourner à Lapusnik où s'agissait-il

20 simplement d'une décision que vous et d'autres avez pris afin d'aider le

21 village, une nouvelle fois ?

22 R. Ce jour-là, j'étais à Kroimire, nous avons entendu des tirs. J'ai pris

23 trois camarades avec moi et nous nous sommes rendus dans les environs de

24 Komorane, à proximité de Lapusnik. C'est là que nous avons pris nos

25 positions et c'est à partir de là que nous avons attaqué les Serbes. Ils

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1 ont utilisé leurs armes pour riposter, tout types d'armes en réalité, en

2 direction de Lapusnik. Nous souhaitions simplement aider. Comme je l'ai

3 déjà dit, chaque fois que nous entendions des coups de feu, nous pensions

4 qu'il nous fallait aider les autres parce que nous nous battions tous sous

5 la même bannière, la bannière de l'UCK.

6 Q. Avez-vous rencontré Isak Musliu, Qerqizi, le 29 mai ?

7 R. Non.

8 Q. Avez-vous appris que sa position à Lapusnik avait changé entre le 9 et

9 le 29 mai ?

10 R. Je n'ai pas d'informations sur ce point. Je ne sais pas si cette

11 position s'est déplacée. Je n'étais pas là.

12 Q. Permettez-moi de vous dire quel a été le changement afin de voir si

13 effectivement vous en avez eu connaissance. Aux environs du 14 mai,

14 d'autres soldats lui ont demandé à Lapusnik de devenir le dirigeant "de

15 l'une", et je souligne plus précisément, des unités de l'UCK à Lapusnik.

16 Avez-vous entendu des informations sur ce changement avant de retourner à

17 Lapusnik le 29 mai ?

18 R. J'ai déjà dit qu'Isak était peut-être le dirigeant d'une unité ou d'une

19 section; c'est ce que je pensais. Mais je n'en ai jamais été absolument

20 convaincu, parce que je n'avais pas de moyen d'en être certain. C'est ce

21 que je pensais, et je pense que ceci d'ailleurs concorde avec ce que vous

22 avancez.

23 Q. Ce qui m'intéresse c'est ce que vous saviez à l'époque. Vous disposiez-

24 vous de quelconques informations sur l'organisation et la structure de

25 l'UCK à Lapusnik, ou étiez-vous tout à fait ignorant - et ce n'est pas là

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1 un terme péjoratif - quant à la manière dont les différentes unités étaient

2 organisées ?

3 R. Je l'ignorais.

4 Q. J'aimerais aborder un autre volet de l'organisation sans faire

5 référence à Lapusnik.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Si vous passiez à autre chose, peut-

7 être serait-il bon de faire une pause ? C'est vrai que pour vous, vous

8 n'avez pas eu beaucoup de temps puisque nous avons eu une introduction

9 relativement longue.

10 M. TOPOLSKI : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans ce cas, nous reprendrons nos

12 travaux à 16 heures.

13 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je vous en prie.

14 --- L'audience est suspendue à 15 heures 37.

15 --- L'audience est reprise à 16 heures 03.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Topolski, le contre-

17 interrogatoire parviendra à son terme très rapidement sans témoin.

18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Monsieur Topolski.

20 M. TOPOLSKI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 Q. Monsieur Qeriqi, j'aurais encore quelques questions à vous poser. Comme

22 je vous l'ai dit, j'aimerais que nous poursuivions l'examen des événements

23 par ordre chronologique. Nous avons couvert les événements du 9 et du 29

24 mai. Vous avez également déclaré ou fait des déclarations il y a deux jours

25 concernant des combats qui auraient eu lieu le 14 juin. Vous en souvenez-

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1 vous ?

2 R. Pourriez-vous expliquer votre question ?

3 Q. Oui. Vous nous avez parlé de combat dans votre secteur à Carraleve le

4 14 juin 1998. Vous souvenez-vous avoir abordé cette question devant cette

5 Chambre il y a deux jours lors de votre témoignage ?

6 R. Oui. Oui, avant-hier, effectivement.

7 Q. C'est exact. Vous nous avez dit que vous meniez ces combats, et vous

8 nous avez parlé des armes qui étaient à votre disposition. J'aimerais vous

9 poser des questions sur l'une des armes. Vous avez dit que l'une des armes

10 dont vous disposiez était un lance-roquette portatif.

11 Monsieur Qeriqi, êtes-vous véritablement en train de dire à cette

12 Chambre qu'il n'y avait qu'une seule arme de ce type le 14 juin ?

13 R. Oui, c'était un lance-roquette portatif 150 millimètres. C'était l'arme

14 de plus gros calibre. Il y avait des Kalachnikovs, des armes automatiques,

15 des vieux fusils à lunette, et certains combattaient avec des fusils de

16 chasse. Ce que je souhaitais dire lors de mon témoignage c'est que nos

17 armes étaient plus puissantes que les armes de l'ennemi. C'est cela que je

18 voulais dire.

19 Q. Ce lance-roquette portatif devait être partagé entre les différentes

20 unités puisqu'il y en avait qu'un, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. A titre d'exemple, si l'unité, disons numéro 1, avait besoin de ce

23 lance-roquette, quelqu'un devait aller le chercher auprès de quelqu'un

24 d'autre; est-ce bien ce qui se passait en juin 1998 ?

25 R. Oui. Parfois nous l'utilisions à Zborce, parfois à Carraleve, parfois à

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1 Blinaje, et c'est ce que je voulais dire lorsque je vous ai expliqué tout

2 cela. A ma connaissance, cette arme n'a pas été utilisée ailleurs.

3 Q. Passons maintenant à l'équipement. Vous nous avez dit avant-hier que

4 vous n'aviez pas d'équipement radio et que vous aviez recours à des

5 estafettes.

6 Monsieur Qeriqi, pendant combien de temps n'avez-vous pas disposé

7 d'équipement radio; ou plus précisément, pouvez-vous nous dire quand, pour

8 la première fois, vous avez pu utiliser ce type d'équipement au cours de la

9 guerre ?

10 R. Au sein de mon unité nous n'en n'avions, personne. La première fois que

11 j'ai utilisé une radio c'est pendant les combats à Koshare.

12 Q. Quand cela s'est-il passé ? Au cours de quel mois ?

13 R. Si je me souviens, comme je l'ai déjà dit avant-hier, en avril 1999. Il

14 y avait de nombreux postes de radio. Il s'agissait d'une armée régulière.

15 Les moyens étaient différents.

16 Q. Monsieur Qeriqi, êtes-vous en train de dire devant cette Chambre de

17 première instance que vous en votre qualité de commandant local, vous

18 n'avez pas eu la possibilité d'utiliser d'émetteur radio tout au long de

19 l'année 1998; est-ce bien ce que vous dites ?

20 R. Je n'ai pas utilisé de radio.

21 Q. Merci. Passons maintenant à la suite des événements, j'aimerais vous

22 parler d'un événement qui s'est déroulé le 24 juillet 1998. Monsieur

23 Qeriqi, nous avons entendu d'autres témoins incontestables nous dire que

24 Lapusnik était tombée au cours de l'été de l'offensive d'été menée par les

25 Serbes. J'aimerais vous parler d'un lieu particulier et d'une date

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1 particulière pour voir si vous pouvez nous être utile. Je vous dirais que

2 vous-même et Shukri Buja à l'époque vous vous trouviez à proximité ou à la

3 périphérie du village de Fustica aux environs du mois de juillet 1998. Vous

4 souvenez-vous vous êtes retrouvé dans ce lieu, Fustica ?

5 R. Je ne me souviens pas avoir été chez moi. Nous avons été là-bas pour

6 contribuer à l'effort de guerre à Fushtice, mais je ne me souviens plus de

7 Shukri. Je me souviens avoir été sur place avec d'autres soldats, mais

8 lorsque nous sommes arrivés sur place, les forces ennemies avaient pris le

9 contrôle du lieu et nous n'avons pas pu y entrer.

10 Q. Peut-être, pourrais-je vous rafraîchir la mémoire. A part Shukri Buja

11 vous avez également rencontré Qerqizi sur place et Qerqizi venait d'arriver

12 de Rahovec. Je vois que vous acquiescez. Avez-vous un quelconque souvenir

13 de ce que je viens d'évoquer ?

14 R. Querqiz était avec un autre groupe, et moi, avec d'autres personnes

15 lorsque nous sommes allés aider à Fustica. C'est exact.

16 Q. Je suis désolé d'insister. Je crois que vous n'avez pas répondu à notre

17 question. J'essaie d'être précis. Si vous ne pouvez pas répondre, faites-le

18 moi savoir. Ce que j'affirme c'est que Qerqizi vous a dit, et c'est peut-

19 être ce qui s'est passé, qu'il venait de Rahovec et qu'il vous a rencontré

20 sur place, vous et Shukri Buja, et qu'en fait il a décidé d'attaquer les

21 forces serbes à Fustica. Avez-vous un quelconque souvenir de cet événement

22 ou pas ?

23 R. Ce dont je me souviens c'est que Qerqiz et de nombreux autres étaient

24 sur place, parce que notre objectif c'était d'empêcher les forces serbes

25 d'entrer à Rusinoc, mais nous n'avons pas pu rentrer à Fustice pendant la

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1 guerre. Nous tenions une certaine position à l'extérieur de Fustice entre

2 Rusinoc et Fustice, qui étaient deux des villages. C'est à partir de là que

3 nous tirions, mais nous n'avons pas réussi à entrer à l'intérieur de

4 Fustice.

5 C'est vrai que Qerqiz était sur place. Peut-être m'a-t-il dit ce dont vous

6 parlez, mais je n'en ai plus le souvenir. Si c'est effectivement ce qu'il a

7 dit, vous avez raison. Mais puisque vous parlez de Fustice, je souhaite

8 insister sur le fait que nous n'avons pas pu y entrer et que nous avons

9 combattu à partir des positions que nous occupions entre Fustice et

10 Rusinoc.

11 Il y avait de nombreux groupes sur place. J'avais cinq ou six personnes

12 avec moi et ensuite je suis reparti à Carraleve parce qu'il fallait que j'y

13 sois en cas d'attaque éventuelle.

14 Q. Merci. Faites-moi une leçon de géographie.

15 M. TOPOLSKI : [interprétation] Peut-on soumettre la pièce P6 de la carte

16 numéro 1. Merci beaucoup. Peut-être pourrait-on la placer sur le

17 rétroprojecteur puisque je tiens à ce que vous m'indiquiez quelques

18 endroits sur cette même carte, Monsieur Qeriqi ?

19 J'aimerais que le témoin puisse apercevoir Lapusnik sur la carte.

20 Excusez-moi, mon écran semble flou. Voyez-vous Lapusnik sur la carte ?

21 Pouvez-vous descendre un petit peu la carte sur le rétroprojecteur. Un peu

22 plus. Voilà, très bien. Merci beaucoup. Merci.

23 Q. Monsieur Qeriqi, pourriez-vous utiliser la carte sur votre gauche, et

24 utiliser le pointeur, parce que j'aimerais que vous m'indiquiez sur cette

25 carte un ou deux endroits. Tout d'abord, vous voyez Lapusnik, qui se trouve

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1 indiqué dans un carré rouge. A votre gauche, je vous invite à regarder la

2 carte qui se trouve sur le rétroprojecteur, Monsieur Qeriqi, et non sur

3 votre écran.

4 R. Oui, je le vois. Voilà.

5 Q. Plutôt, sur votre gauche, avec l'aide de l'Huissier, merci, vous voyez

6 Lapusnik. Bien. Nous venons de parler, vous et moi, de Fustica. Pourriez-

7 vous nous indiquer Fustica sur cette carte, s'il vous plaît. Merci.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Q. Combien de temps faudrait-il en voiture pour aller de Lapusnik à

10 Fustica, à peu près, environ ?

11 R. Ce serait difficile à dire parce qu'il n'y a pas de route directe. Il

12 fallait partir de Nekovce, et puis de Nekovce à Bajice, puis revenir par

13 ici. Je ne saurais vous expliquer. Je pourrais me tromper. Je n'ai jamais

14 emprunté cette route.

15 Q. Peu importe. J'allais vous demander si oui ou non vous avez fait ce

16 voyage.

17 Est-ce que vous pourriez nous montrer où se trouve Klecka sur cette carte,

18 s'il vous plaît.

19 R. [Le témoin s'exécute]

20 Q. Est-ce que vous avez fait le trajet de Klecka à Lapusnik vous-même, en

21 voiture ?

22 R. Oui, j'ai fait le trajet de Klecka à Lapusnik, mais jamais en voiture;

23 seulement à pied.

24 Q. Cela vous a pris combien de temps à pied, environ ?

25 R. Cela m'a pris longtemps; deux, trois heures, peut-être. Je ne suis

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1 peut-être pas tout à fait précis. Je n'ai pas compté au juste.

2 Q. Enfin, parce que nous l'avons évoqué, nous venons de parler de Rahovec.

3 Est-ce que vous pourriez nous montrer ce village ?

4 R. Il ne s'agit pas d'un village, mais d'une ville.

5 Q. Pardon, la ville de Rahovec.

6 R. Je ne vois pas sur la carte. Je vois une flèche qui indique la

7 direction de Rahovec, la route qui part vers Rahovec, mais je ne vois pas

8 Rahovec ici. C'est très loin.

9 Q. J'allais vous demande : est-ce que vous avez fait le trajet par route,

10 en voiture, ou à pied, de Rahovec à Lapusnik ? Est-ce que vous avez fait ce

11 trajet vous-même ?

12 R. Je l'ai fait mais uniquement après la guerre, pour aller jouer au foot

13 dans une équipe de foot.

14 Q. Est-ce que vous pourriez nous donner une idée approximative du temps

15 qu'il faut pour aller en voiture de Rahovec à Lapusnik ?

16 R. Si on conduit à toute allure, je dirais une heure et demie, environ.

17 Q. Merci.

18 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je n'ai plus besoin de la carte.

19 Q. Alors, maintenant j'espère ne vous poser que quelques questions,

20 Monsieur Qeriqi, concernant la structure et l'organisation de l'UCK. Encore

21 une fois avec l'aide de l'Huissier, est-ce que l'on pourrait vous soumettre

22 la pièce P155.

23 [problèmes techniques]

24 Q. Vous nous avez dit quelque chose à leur propos il y a deux jours. Est-

25 ce que vous vous en souvenez ?

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1 R. Oui, je peux vous le dire sans que vous me posiez des questions.

2 Q. Très bien. Nous pourrions procéder par télépathie, mais je ne suis pas

3 sûr que cela nous avancerait beaucoup. Ce que j'aimerais encore une fois

4 essayer, c'est d'être aussi explicite que possible, notamment en ce qui

5 concerne la création de la police militaire. Encore une fois, je vous

6 soumets que la police militaire en tant que structure au sein de l'UCK

7 n'existait pas jusqu'à plus tard, c'est-à-dire après l'été 1998. Est-ce que

8 vous comprenez la thèse que je vous soumets ? C'est ma première question.

9 R. Je ne comprends pas très bien ce que vous voulez dire par la fin de

10 l'été. Est-ce que vous voudriez bien vous répéter ?

11 Q. Je propose que la police militaire n'existait pas en tant que groupe

12 jusqu'à quelque temps après que les brigades et les bataillons aient été

13 constitués. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette thèse ?

14 R. Oui, je suis d'accord.

15 Q. Lorsque vous nous avez dit hier que dans votre secteur vous avez deux,

16 trois, quatre policiers militaires, ce que j'affirme c'est que si c'est

17 vrai ils n'étaient pas membres d'une unité de police militaire formée au

18 sein de l'UCK parce que de telles unités n'ont pas été constituées jusqu'à

19 plus tard dans l'année. Est-ce que vous êtes d'accord avec affirmation ?

20 R. Les policiers dont je disposais, je vous ai dit qu'ils étaient là pour

21 s'occuper des soldats et de la population civile. Lorsque j'ai pris la

22 décision en tant que commandant de bataillon, à partir de ce moment-là, ils

23 étaient policiers au niveau de la brigade. Il y a eu une unité spéciale, en

24 fait, une fois que la brigade avait été constituée.

25 Q. Il s'ensuit d'après les réponses que vous venez de donner concernant la

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1 constitution des brigades, et ainsi de suite, que ce que vous nous avez

2 décrit n'aurait pu se passer avant mi-août au plus tôt; est-ce exact ?

3 R. Oui. Je ne peux pas me souvenir avec exactitude, mais quelque temps

4 après que j'ai pris la décision, il y a eu des policiers mais ils n'étaient

5 pas sous l'autorité du bataillon, c'était quelque chose de distinct.

6 Q. Vous n'étiez pas en position en tant que commandant de bataillon

7 d'organiser quoi que ce soit ou de donner des ordres avant que vous ne

8 deveniez commandant du bataillon, n'est-ce pas ?

9 R. Jusqu'à ce moment-là, je contribuais à creuser des tranchées, à

10 construire les bunkers, comme je l'ai déjà expliqué. Lorsqu'il y avait des

11 combats, j'y ai participé, bien entendu. C'est normal que je ne sois pas

12 commandant, que je ne donne pas d'ordres, tout ce que je faisais c'était me

13 battre et consolider des positions, des bunkers. De Carraleve à Belince,

14 les positions que nous avions. J'ai formé des soldats. C'est ce que je

15 faisais à l'époque.

16 Q. Ma dernière question. Est-ce que vous avez eu connaissance du fait que,

17 plus tard en 1998, votre vieil ami d'Allemagne, Isak Musliu, Qerqizi, est

18 devenu commandant de la police militaire. Est-ce que vous avez eu

19 connaissance de ce fait ou non ?

20 R. Non, je n'en ai pas eu connaissance.

21 Q. Je n'ai plus de questions. Je vous remercie de votre patience.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Topolski.

23 Monsieur Guy-Smith, vous avez la parole.

24 M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

25 Il semblerait que je sois combattant errant à ce propos.

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1 Contre-interrogatoire par M. Guy-Smith :

2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Qeriqi.

3 R. Bonjour.

4 Q. Je représente Haradin Bala et j'ai toute une série de questions à vous

5 poser et j'espère que vous voudriez bien faire preuve de patience à mon

6 égard.

7 R. Bien entendu.

8 Q. J'aimerais commencer par mieux comprendre ce qui s'est passé en termes

9 très généraux lorsque vous vous êtes entretenu avec M. Whiting le 23 avril.

10 Est-ce que vous vous souvenez de cet entretien ?

11 R. Oui.

12 Q. Est-ce que vous vous souvenez que lors de cet entretien vous avez

13 commencé assez tôt le matin, vers 9 heures, 9 heures et demie, et que vous

14 avez fait une pause au bout de trois heures environ ?

15 R. Non, nous n'avons pas fait une pause de trois heures. Si je me souviens

16 bien, et je ne pense pas avoir oublié, nous avons passé toute la journée de

17 9 heures du matin et nous n'avons pas fait une pause de trois heures. Nous

18 avons eu une pause de 5 minutes afin que je puisse fumer une cigarette.

19 Puis, nous avons fait une courte pause déjeuner. J'ai mangé en l'espace de

20 dix minutes.

21 Q. Ce que je voulais dire c'est après vous êtes entretenu pendant trois

22 heures vous avez fait une pause, ils ont pu changer les cassettes, les

23 bandes. Après vous avez retrouvé M. Whiting dans l'après-midi. L'entretien

24 s'est déroulé en deux phases. La matinée puis la pause déjeuner, puis vous

25 vous êtes retrouvé l'après-midi, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui, une courte pause, pas plus de dix minutes. J'ai été confiné à

2 l'intérieur toute la journée. J'ai pu quitter cette petite pièce simplement

3 pour manger un sandwich et puis je suis retourné dans la pièce.

4 M. WHITING : [interprétation] Le compte rendu est disponible et je crois

5 que c'est dénaturé les éléments de preuve que de dire que cela s'est

6 déroulé pendant trois heures, j'attire l'attention du conseil sur la

7 première page, l'entretien a commencé à 9 heures 23 et la première pause à

8 10 heures 56. Donc au bout d'une heure et demie.

9 M. GUY-SMITH : [interprétation] Toutes mes excuses. J'avais noté l'heure de

10 midi 57, c'est vrai que l'heure exacte n'est pas primordiale, mais je vous

11 remercie de m'avoir corrigé.

12 Q. Lorsque vous avez rencontré M. Whiting pour la première fois il vous a

13 dit que vous aviez été cité en tant que suspect, n'est-ce pas ?

14 R. C'est ce qui était écrit sur la citation à comparaître qu'on m'a

15 présentée.

16 Q. Oui. Je le sais bien. Ce que je vous demande c'est lorsque vous avez

17 parlé à M. Whiting, lorsque vous l'avez rencontré pour la première fois, il

18 vous a dit : "Dans le cadre de notre enquête du moment vous êtes considéré

19 comme un suspect."

20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je me réfère à la pièce L010-9668.

21 Q. C'est bien ce qu'il vous a dit, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, c'est exact.

23 Q. Après cela, M. Lehtinen, un enquêteur, vous a parlé et vous a dit :

24 "Nous avons décidé d'avoir cet entretien avec vous, de vous citer en tant

25 que suspect. Mais dans les faits, ne vous en souciez pas, que cela ne vous

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1 préoccupe pas."

2 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'invite les conseils à se référer à la

3 page suivante, 9669.

4 Q. Est-ce que vous vous souvenez que l'on vous a dit cela ?

5 R. Je ne me souviens peut-être pas de l'entretien dans son ensemble mais

6 c'est vrai qu'on m'a posé des questions en qualité de suspect. Bien

7 entendu, je ne me souviens pas de tous les détails.

8 Q. Après la pause de la matinée lorsque vous êtes retourné dans l'après-

9 midi, M. Whiting, vous a décrit plus avant votre condition de suspect et

10 vous a dit de façon très explicite quelles devraient être vos

11 préoccupations et quel était votre statut et il vous a dit ce qui suit et

12 je vous demande si vous vous souvenez ou non qu'on vous ait tenu ces

13 propos ?

14 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'attire votre attention sur la page 109634

15 -- avec mes excuses. J'ai perdu la page; mais je vais la retrouver. C'est

16 9696.

17 Q. M. Whiting vous a dit plusieurs choses. Il a dit :

18 "Avant toutes choses, je souhaiterais vous dire ce qui suit :

19 "Ce que vous devez comprendre c'est que, comme nous vous l'avons dit, vous

20 êtes suspect, mais nous nous intéressons surtout à ce que vous avez à nous

21 dire en tant que témoin. Ce qui nous intéresse, c'est que vous nous avez à

22 dire à condition que ce soit véridique. Le mieux que vous puissiez faire

23 dans votre intérêt, c'est de dire la vérité. Bien entendu, il est difficile

24 de parler de certaines choses et, bien entendu, difficile de décrire votre

25 propre rôle dans ces événements. Mais si nous souhaitons que vous

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1 comparaissiez en tant que témoin, il faut que vous soyez véridique, sinon,

2 nous allons devoir nous demander si vous êtes plutôt un suspect pour nous,

3 ou plutôt un témoin. C'est pour vous l'occasion de sauvegarder vos intérêts

4 en disant la vérité même si c'est difficile. Personne ne suggère que vous

5 étiez au centre de ces événements, mais vous y avez participé et vous devez

6 nous le dire, et nous expliquer pourquoi ces événements ont eu lieu."

7 Est-ce que vous vous souvenez du fait que M. Whiting vous a fait cette

8 déclaration ?

9 R. A l'instant même, je ne m'en souviens pas, mais si c'est écrit dans le

10 procès verbal dont vous nous avez donné lecture, alors il m'a déclaré ces

11 choses. Au début, je lui ai dit que j'allais dire la vérité et j'ai dit la

12 vérité.

13 Q. Mais quelques minutes plus tard, le fait qu'il vous dise : "Personne

14 n'est ici pour critiquer les choses importantes, les bonnes choses que vous

15 avez faites, vous nous avez parlé de certaines de ces choses importantes,

16 de ces bonnes choses dont vous avez raison d'être fier. Mais pour qu'on

17 puisse vous accorder le crédit que vous méritez pour ces choses, vous devez

18 également assumer la responsabilité pour les choses moins bonnes qui ont eu

19 lieu. Nous voulons savoir si vous vous étiez, si vous étiez impliqué ou

20 alors si vous vous trouviez sur les lieux et que vous n'étiez pas impliqué,

21 mais que vous avez vu ce qui se passait."

22 Est-ce que vous vous souvenez que M. Whiting vous a dit ces choses ?

23 R. Probablement qu'il les a dites, mais à l'instant même je ne m'en

24 souviens pas. Mais puisque c'est écrit, il a dû les dire, mais là pour le

25 moment, je ne m'en souviens pas.

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1 Q. Dans le cadre de l'entretien que vous avez eu avec M. Whiting au mois

2 d'avril, les questions qui ont été abordées comprennent certaines des

3 questions, sinon toutes les questions dont vous nous avez parlé ici, dans

4 le cadre du témoignage. J'entends par-là, la question de Xhemshiti. Est-ce

5 que vous vous en souvenez d'en avoir parlé ?

6 R. Oui.

7 Q. Vous avez aussi parlé d'autres individus.

8 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'aimerais que l'on passe quelques instants

9 au huis clos partiel.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Très bien.

11 [Audience à huis clos partiel]

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21 [Audience publique]

22 M. GUY-SMITH : [interprétation]

23 Q. Au terme de l'entretien que vous avez eu avec M. Whiting, il vous a

24 invité à venir à La Haye pour témoigner.

25 M. GUY-SMITH : [interprétation] Là, je me réfère à la page 9738.

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1 Q. Il vous a dit : "Si on vous cite à comparaître afin de témoigner devant

2 la Chambre, est-ce que vous serez prêt à dire devant la Chambre tout ce que

3 vous nous avez dit aujourd'hui ?"

4 Est-ce que vous vous souvenez qu'il vous a posé cette question ?

5 R. Oui, je lui ai dit que je serais prêt à dire ces choses, c'est-à-dire,

6 que je ne subissais aucune pression. Je ne suis pas venu ici sous l'effet

7 de la contrainte. J'étais prêt à venir témoigner sur ce que j'ai fait et

8 sur les choses que je sais.

9 Q. Depuis cet entretien avec M. Whiting au mois d'avril, avez-vous reçu

10 quelque notification que ce soit, notification orale, puisque M. Topolski

11 vous a posé des questions sur ce que vous auriez pu recevoir par écrit, des

12 informations orales concernant le fait que votre statut avait changé, que

13 vous étiez témoin pour venir à La Haye parler de certaines choses ?

14 R. Je n'ai rien reçu par écrit. L'autre personne Ole, j'ai oublié son nom,

15 lorsque nous nous sommes rencontrés, il m'a dit qu'après l'enquête qui

16 avait été effectuée, ils s'étaient rendus compte que je n'étais pas un

17 suspect. C'était vers la fin avant que je ne vienne ici.

18 M. GUY-SMITH : [interprétation] J'aimerais passer à un autre sujet. Si vous

19 voulez bien de nouveau soumettre au témoin la carte. Q. Est-ce que vous

20 avez la carte sous les yeux ?

21 R. Oui.

22 Q. Voilà qui est parfait. Est-ce que vous vous voudriez prendre le

23 pointeur et tenter de situer le village de Sedlare ou Shale ?

24 R. Voilà où se trouve Shale.

25 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire environ quelle est la distance entre

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1 Sedlare et Lapusnik ou Lapusnik et Shale ?

2 R. Je ne suis pas sûr d'être tout à fait précis, mais cela pourrait

3 représenter 12 ou 13 kilomètres environ; 13 kilomètres.

4 Q. Dans la période qui va du mois de mai et au mois de juillet, est-ce

5 qu'il vous est arrivé de faire le voyage de Shale à Lapusnik ?

6 Q. Entre mai et juillet ?

7 R. Oui.

8 R. Comme je l'ai dit, lorsque je voulais rejoindre les combats, sinon je

9 ne me suis pas rendu à Lapusnik.

10 Q. Sur cet itinéaire, est-ce qu'il y a une route bétonnée ou une route

11 directe qui relie Shale à Lapusnik, pour autant que vous le sachiez ?

12 R. Il n'y a pas de route bétonnée. Il n'en a même pas aujourd'hui et il

13 n'y avait pas à l'époque.

14 Q. Pouvez-vous nous aider et nous dire, si vous le savez, combien de

15 routes différentes il faut emprunter pour aller de Shale à Lapusnik ? Est-

16 ce qu'il s'agit d'une seule route ou de plusieurs routes ? Quelle est la

17 situation, si vous le savez ?

18 R. Je ne saurais vous le dire. Comme je l'ai déjà déclaré, je n'empruntais

19 pas ces routes, mais il est possible toutefois que leurs états ne soient

20 pas très bons.

21 Q. En ce qui concerne les trajets de Klecka vers Lapusnik, vous avez dit

22 que vous aviez emprunté cette route à pied et qu'il vous fallait environ

23 deux ou trois heures pour parcourir cette distance. Est-ce que vous suiviez

24 la route, ou est-ce que vous suiviez un sentier ? Est-ce que vous passiez

25 par les champs ? Comment avez-vous pu vous rendre à Lapusnik le 9 mai pour

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1 y combattre ?

2 R. Nous avons utilisé de petits sentiers de forêt.

3 Q. Est-ce que Klecka est situé à la même altitude que Lapusnik ou est-ce

4 qu'il s'agit d'un point plus élevé ou moins élevé ?

5 R. Vous voulez dire un point plus élevé sur la colline ? Je ne comprends

6 pas votre question.

7 Q. C'est exactement ce que je voulais dire. Est-ce qu'il s'agit d'un point

8 plus élevé sur la colline ?

9 R. Il y a deux jours, j'ai dit que c'était une position très importante au

10 plan géostratégique en cas de guerre. Il s'agit d'une position plus élevée

11 que tous les autres villages que nous avons mentionnés.

12 Q. Etes-vous en mesure de nous dire à quelle altitude se trouve cet

13 endroit par rapport aux autres villages que vous avez mentionnés de façon à

14 ce que nous puissions mieux comprendre l'importance géostratégique de cet

15 endroit ?

16 R. Je ne sais pas. Je ne saurais vraiment vous le décrire. Je ne sais pas.

17 Q. Ayant parcouru à pied la distance qui sépare Lapusnik de Klecka après

18 la bataille qui s'est déroulée le 9 mai, est-ce que vous pourriez nous dire

19 si à l'époque vous gravissiez la colline ?

20 R. Bien sûr, je gravissais la colline.

21 Q. Est-ce que la pente était raide ?

22 R. A l'époque nous étions en bonne condition physique et cela ne posait

23 aucun problème, mais si j'y allais maintenant peut-être que ce serait plus

24 difficile pour moi.

25 Q. Quelle est la distance qui sépare Lapusnik de Klecka ?

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1 R. Qu'est-ce que vous voulez dire ? Combien y a-t-il de kilomètres ?

2 Quelle est la distance entre ces deux endroits ?

3 Q. Tout à fait.

4 R. Je ne sais pas. Comme je vous l'ai dit, je n'ai fait ce trajet qu'une

5 seule fois.

6 Q. Serait-il exact de dire, et corriger si je me trompe, que les monts

7 Berisa font partie du territoire sur lequel se trouve Klecka ?

8 R. Vous avez raison. Comme je l'ai dit, Klecka se trouve à un endroit plus

9 élevé sur la colline. Il est possible que Berisa soit encore plus élevé car

10 le poste radio ou la station radio du Kosovo libre était stationnée à cet

11 endroit.

12 Q. Vous dites qu'il y avait une radio qui se trouvait à cet endroit, une

13 station radio. De quelle station de radio s'agissait-il ?

14 R. Le Kosovo libre.

15 Q. Quand cette station radio a-t-elle vu le jour ?

16 R. Je ne sais pas. Quand cette radio a commencé à émettre, j'avais déjà

17 quitté la région pour aller à Tirana, mais j'ai entendu que cette station

18 radio fonctionnait à cet endroit. D'après ce que je sais, cette station

19 radio a vu le jour plus tard.

20 Q. Pour en revenir à la carte, est-ce que vous voyez l'endroit appelé

21 Bajice sur cette carte ?

22 R. Bajice est un village, et non pas une ville. Mais, je peux voir cet

23 endroit.

24 Q. Est-ce que vous pourriez nous l'indiquer, s'il vous plaît.

25 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Est-il possible d'aller de Bajice à la région de Lapusnik en suivant

2 une route goudronnée ?

3 R. Non, non, ce n'est pas possible. Il n'y a pas de route goudronnée à

4 Bajice. Il n'y a pas de route goudronnée qui mène à Bajice. C'est

5 impossible.

6 Q. A tout hasard, est-ce que vous pourriez nous aider à ce propos, et nous

7 dire, quelle est la distance qui sépare Bajice de Lapusnik ?

8 R. Je ne le saurais vous le dire. Je pourrais me tromper. Lorsque j'ai

9 parlé de Shale, ou de Sedlare, j'ai dit qu'il y avait une distance de 12 ou

10 13 kilomètres de Komorane. Je ne sais pas exactement.

11 Q. Pourriez-vous nous indiquer où se trouve Nekovce sur cette carte ?

12 R. Oui. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Vous êtes-vous trouvé à Nekovce entre mai et août 1998 ?

14 R. Non. Shukri se trouvait dans ce secteur plus souvent que moi.

15 Q. N'avez-vous jamais pu avoir des contacts avec Shukri Buja alors qu'il

16 se trouvait à Nekovce par voie radio pendant l'été ?

17 R. Non. Comme je vous l'ai di, je n'ai jamais disposé d'une radio.

18 Q. A votre connaissance, est-ce que d'autres unités disposaient

19 d'équipement de communication ou de transmission pendant l'été ?

20 R. Je ne sais pas. Je ne me souviens pas.

21 Q. D'accord.

22 M. GUY-SMITH : [interprétation] Nous n'avons plus besoin de cette carte. Je

23 vous remercie.

24 Q. Vos préoccupations, dans le cadre des activités que vous meniez avec

25 d'autres soldats, étaient notamment liées aux pertes éventuelles. Quelqu'un

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1 pouvait être blessé.

2 R. Ce n'était pas seulement ma préoccupation, mais c'était la

3 préoccupation de tout le monde. C'est bien normal.

4 Q. Tout à fait. A ce propos, j'espère que vous allez pouvoir nous aider.

5 Savez-vous si, oui ou non, il y avait une clinique à Lapusnik pendant

6 l'été ?

7 R. Je ne sais pas.

8 Q. A Malisevo ?

9 R. Je ne sais s'il y en avait une à Malisevo. Peut-être, mais je ne sais

10 pas.

11 Q. A Shale, est-ce que quelque part à Shale, il y avait un endroit où une

12 personne qui avait été blessée ou avait besoin de soins médicaux pouvait se

13 rendre afin d'y être soignée ?

14 R. Il y avait deux médecins.

15 Q. Vous souvenez-vous à tout hasard du nom de ces deux médecins ?

16 R. L'un d'entre eux s'appelait Avdullah, et l'autre Fetim.

17 Q. Le dénommé, Fetim, était-ce Fetim Selimi ?

18 R. Oui.

19 Q. Savez-vous s'il y avait une clinique ou un endroit où les gens

20 pouvaient se faire soigner à Klecka ?

21 R. Je ne sais pas. Comme je vous l'ai déjà dit, je me rendais rarement à

22 cet endroit. Après avoir été nommé commandant de bataillon, j'y suis allé

23 toutes les semaines, mais avant cela, comme je l'ai déjà dit, j'y allais

24 très rarement. Même s'il y en avait un tel endroit, je ne l'aurais pas su.

25 Q. Vous avez mentionné les noms d'Avdullah et de Fetim Selimi.

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1 Aujourd'hui, êtes-vous en mesure de vous souvenir s'il y avait d'autres

2 médecins dans ce secteur qui aidaient les blessés, les malades, les

3 invalides, au cours de l'été 1998 ?

4 R. Il y en avait à Kroimire, également. Il y avait le

5 Dr Jakupi, le Dr Nasir. L'un était médecin généraliste. Il y avait

6 également un dentiste. S'il n'y avait pas eu ces médecins, la situation

7 aurait été très difficile.

8 Q. Lorsque vous dites : s'il n'y avait pas eu ces médecins, la situation

9 aurait été très difficile, je suppose que vous voulez dire par là que les

10 médecins ne s'occupaient pas uniquement des membres de l'UCK qui avaient

11 été blessés ou qui étaient malades, mais que ces médecins s'occupaient

12 également de la population civile; est-ce exact ?

13 R. Oui, c'est assez normal. Nous entretenions des rapports étroits avec la

14 population. Nous étions comme une seule et grande famille. Ils s'occupaient

15 de la population et des soldats. A l'époque, pour les personnes qui

16 habitaient dans le secteur où nous étions stationnés, il était très

17 difficile de trouver refuge dans d'autres endroits, comme à Pristina, par

18 exemple, parce qu'elles auraient pu être emprisonnées ou tuées. Elles

19 devaient rester avec nous. Bien entendu, les enfants, les personnes âgées,

20 avaient besoin des soins médicaux.

21 Q. Vous dites qu'il était difficile de trouver refuge à Pristina, par

22 exemple. En fait, Pristina est l'un des endroits où se trouvait l'hôpital,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Oui, il y a un hôpital. Mais à l'époque, il n'y avait que des Serbes

25 qui travaillaient dans cet hôpital. Je pense que vous savez que nos

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1 médecins avaient tous été licenciés des hôpitaux. A l'époque, il y avait

2 peu d'Albanais qui travaillaient; peut-être même aucun. Il n'y avait peut-

3 être même aucun employé albanais.

4 Q. Vous dites qu'à l'hôpital de Pristina, il n'y avait que des Serbes qui

5 travaillaient. Je suppose que les seuls patients autorités à y être soignés

6 étaient également des Serbes au cours de l'été 1998 ? Est-ce qu'il y avait

7 des autres hôpitaux où les Albanais pouvaient se faire soigner ?

8 R. Je n'avais pas le temps d'aller vérifier s'il y avait des gens qui

9 travaillaient ou pas, mais je ne crois pas. Si tel avait été le cas, ils

10 auraient dû payer beaucoup d'argent pour être soigné. Un Albanais, par

11 exemple, aurait dû payer 5 000 Euros, ou 10 000 marks allemands à l'époque,

12 pour être soigné. Je pense qu'il n'y avait pas d'autre manière de se faire

13 soigner. Comme je l'ai déjà dit, j'arrivais d'Allemagne, j'ai débarqué au

14 milieu de la guerre. Je n'étais pas en mesure de savoir si les hôpitaux

15 fonctionnaient ou de demander autour de moi quels sont les hôpitaux qui

16 fonctionnaient et quels sont ceux qui ne fonctionnaient pas.

17 Q. Mais ce que je veux savoir, c'est s'il existait un hôpital où les gens

18 pouvaient être soignés au cours de l'été 1998. Parmi ces endroits, ceux qui

19 m'intéressent, c'est Komorane, Negroc, Lapusnik, Fustica, Kishna Reka,

20 Berisa, Bajice, Shale, Klecka, Malisevo, Belanica, Luznica, Suva Reka, et

21 Kroimire.

22 R. Je n'ai pas de connaissance à ce sujet. Je sais qu'il y en avait un à

23 Shale et à Kroimire. Pour ce qui est des autres endroits, je ne sais pas

24 parce que je ne me rendais pas là-bas. C'est possible, mais personnellement

25 je ne suis pas allé.

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1 Q. Pour ce qui est de l'hôpital qui se trouvait à Shale - et là encore,

2 répondez-moi uniquement si vous le savez - est-ce qu'il y avait un hôpital

3 où vous pouviez vous faire soigner si, par exemple, vous aviez des

4 problèmes cardiaques ?

5 R. Les médecins qui travaillaient là-bas étaient bien préparés. Ils

6 étaient là parce que la situation l'exigeait. Ils devaient soigner des

7 gens. Même s'ils n'avaient pas la spécialisation nécessaire pour le faire,

8 ils devaient aider les gens. Personnellement, je ne sais pas où ils avaient

9 obtenu leur diplôme, et en quel était leur spécialisation. Je sais que de

10 nombreux enfants sont nés dans cet hôpital. Il y avait des médecins comme

11 Jakup Ismajli, qui raconte que plus de 150 enfants sont nés grâce à son

12 aide. En d'autres termes, un médecin qui n'était pas cardiologue pouvait

13 très bien être amené à soigner quelqu'un qui avait des problèmes

14 cardiaques.

15 Q. Lorsque Me Topolski vous avez posé des questions, l'un des sujets qu'il

16 a abordé avec vous était le type d'armes que vous aviez à votre

17 disposition. Ma question ne concerne pas les armes, mais les connaissances

18 que vous avez au sujet des équipements médicaux et sanitaires, ceux qui

19 étaient disponibles. Là encore, je souhaiterais savoir si vous le savez,

20 s'agissant de la clinique qui se trouvait à Shale, s'il y avait des

21 fournitures médicales dans cet hôpital, ou si les médecins avaient du mal à

22 obtenir les médicaments de base qui leur auraient permis de traiter les

23 patients albanais.

24 R. Parfois, même les hôpitaux ne disposent pas de tous. Je ne vous parle

25 même pas de conditions de guerre.

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1 Q. Merci, Monsieur.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Guy-Smith.

3 Je pense que nous en avons terminé pour aujourd'hui. Nous allons attendre

4 le retour de Me Mansfield demain pour poursuivre.

5 Monsieur Qeriqi, il me faut vous demander de revenir demain matin à 9

6 heures. Les deux conseils de la Défense représentant M. Limaj seront

7 présent demain matin, et vous poseront à ce moment-là quelques questions.

8 Nous allons lever l'audience pour reprendre nos travaux demain matin à 9

9 heures.

10 S'agissant du calendrier, je souhaite vous informer que le président

11 du Tribunal a convoqué une nouvelle session plénière, vendredi 11 mars, si

12 bien que nous ne serons pas en mesure de siéger ce jour-là.

13 L'audience est levée. Nous reprendrons demain à 9 heures.

14 --- L'audience est levée à 17 heures 07 et reprendra le jeudi 3 mars

15 2005, à 9 heures 00.

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