Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 7 avril 2005

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez faire entrer le témoin, s'il

  6   vous plaît.

  7   M. POWLES : [interprétation] Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Monsieur Powles.

  9   M. POWLES : [interprétation] Une question que M. Topolski n'avait pas posé

 10   au témoin, je voudrais la poser maintenant.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais oui, je suis sûr que M. Mansfield

 12   n'y verra pas d'objection.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur Jasovic.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous rappelle engagement solennelle

 16   que vous avez fait au début de votre déposition équivaut toujours.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris. Je comprends.

 18   LE TÉMOIN: DRAGAN JAOSVIC [Reprise]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] M. Powles doit vous poser une

 21   question. C'est la première question qui vous sera posée cette après-midi.

 22   Oui, Maître Powles.

 23   M. POWLES : [interprétation] Oui, je vous remercie.

 24   Contre-interrogatoire par M. Powles : 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Jasovic. Mon nom est Steven Powles


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  1   et je suis le co-conseil pour Isak Musliu.

  2   R.  Bonjour, très heureux.

  3   Q.  Il y a quelques questions que M. Topolski a oublié de vous poser hier

  4   après-midi et j'ai l'intention de vous les poser maintenant. Est-ce que

  5   vous comprenez ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce que vous connaissez la terminologie bon flic, mauvais flic et

  8   les méthodes d'interrogatoire bon flic, mauvais flic ?

  9   R.  Bon flic, mauvais flic, je ne sais pas. Je sais pour moi-même que je

 10   suis un bon policier et que j'ai rempli mes fonctions de façon honnête et

 11   honorable.

 12   Q.  Brièvement, Monsieur Jasovic, au cours de l'interrogatoire d'un témoin,

 13   on peut être d'abord sympathique avec le témoin, puis l'autre policier est

 14   plutôt méchant. C'est juste pour vous assurer que quand M.Topolski et moi-

 15   même vous posons des questions, je suis le bon. Je vais essayer de vous

 16   poser les questions de façon relativement gentille.

 17   La première question, c'est : connaissez-vous Adem Ibrahimi ?

 18   R.  En ce qui concerne les noms, pourriez-vous me dire d'où il était ?

 19   Q.  Oui, je peux vous le dire. Il était le chef adjoint du directorat, du

 20   secrétariat de l'Intérieur du SUP pour la région de Ferizaj de 1970 à 1989.

 21   Il était au SUP de Ferizaj.

 22   R.  Oui. C'est un nom qui m'est connu, mais on avait l'habitude de

 23   l'appeler Adem Goga. Il était adjoint pour la sécurité publique à Urosevac

 24   et il a pris sa retraite.

 25   Q.  Oui. Il était au SUP à Ferizaj, à l'époque quand vous avez commencé,


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  1   étant donné que vous avez commencé vers 1980.

  2   R.  Le 1er juillet 1970, à partir du 1 mai 1981 j'ai été nommé chef adjoint

  3   du poste de police d'Urosevac.

  4   Q.  Mais vous connaissez cet homme ? Vous vous êtes trouvé avec lui à

  5   Ferizaj ?

  6   R.  J'ai travaillé à la sécurité publique tandis que M. Adem Goga Ibrahimi

  7   travaillait à la sécurité de l'Etat. Sécurité de l'Etat est distinct des

  8   services de sécurité publique.

  9   Q.  Je vous remercie beaucoup Monsieur Jasovic. J'ai promis de vous poser

 10   gentiment les questions, c'était bien le cas, n'est-ce

 11   pas ?

 12   R.  Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Powles. Oui.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Par rapport à hier, effectivement, c'était

 15   très bien.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois que ceci devrait vous

 17   encourager Maître Mansfield à suivre cet exemple.

 18   M. MANSFIELD : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr de savoir où

 19   j'en suis, mais nous verrons ensuite.

 20   Contre-interrogatoire par M. Mansfield: 

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Jasovic. Je représente avec mon co-

 22   conseil M. Karim Khan, Fatmir Limaj qui est assis derrière, là vous pouvez

 23   le voir.

 24   Je voudrais demander avant de traiter d'une personne précise dont on a

 25   parlé hier et qu'on a appelée X pendant les audiences publiques, avant de


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  1   parler de lui, reprendre certains des points qui ont été évoqués hier.

  2   Pour commencer, au cours des années 1990, saviez-vous que le poste de

  3   police de Ferizaj où vous travailliez avait une réputation dans la

  4   communauté, une réputation de brutalité ?

  5   R.  Non, je ne sais rien de tout cela. Je n'en ai pas connaissance en ce

  6   qui concerne le fait que des personnes aurait pris une attitude brutale à

  7   l'égard des Albanais, c'est cela que vous voulez dire ?

  8   Q.  Non, c'est un petit peu plus large que cela, un peu plus vaste. Ma

  9   question était de savoir si vous saviez que le poste de police dans lequel

 10   vous travailliez dans les années 1990 avait une réputation au sein de la

 11   communauté, une réputation de brutalité ? Est-ce que vous aviez

 12   connaissance de cette réputation ?

 13   R.  Non, je ne le savais pas parce que, depuis 1986, j'étais policier en

 14   civil, inspecteur. Je travaillais au troisième étage et je n'arrive pas à

 15   m'en souvenir maintenant, le département de la police proprement dit se

 16   trouvait au second étage.

 17   Q.  Nous y viendrons, mais vous étiez associé à des membres de la

 18   communauté albanaise, vous rendiez visite à certains d'entre eux, chez eux

 19   n'est-ce pas ?

 20   R.  J'avais pour habitude de rendre visite à des Albanais, mais ce n'était

 21   pas des visites amicales, ce n'était pas des visites de personnes que je

 22   connaissais. Je m'y rendais à titre officiel de 1975 à 1981. Nos

 23   patrouilles comprenaient un chef de patrouille, un assistant du chef, et

 24   comme j'étais un jeune policier, je me rappelle qu'il y avait des chefs de

 25   patrouille qui étaient des Albanais. Notre poste de police à Stimlje


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  1   comptait sept à huit personnes et deux ou trois étaient des Serbes qui

  2   étaient employés dans ce service. Nous étions trois. Par la suite, l'un

  3   d'entre eux a été muté du poste de police de Stimlje au poste de police

  4   d'Urosevac.

  5   Q.  Sur quelles années est-ce que vous ai-je posé précisément la question ?

  6   R.  Vous avez parlé de l'année 1990.

  7   Q.  Là, il faut que je vous repose la question à nouveau. Je vous ne vous

  8   pose pas de questions sur la période de 1975 ou la période 1981. Je vous

  9   parle des années des dix années '90. Au cours de cette période, vous vous

 10   êtes rendu chez des Albanais qui vous étaient connus et vous êtes allé les

 11   trouver chez eux, n'est-ce pas ? Vous êtes allé chez eux.

 12   R.  Pour être aussi concret que possible, je me suis rendu dans la plupart

 13   de ces maisons d'Albanais en tant que policier alors que je travaillais à

 14   Stimlje en qualité de policier avec mon collègue albanais. Dans les années

 15   1990, étant donné le fait que mon beau-père se trouve dans un village là-

 16   bas, j'avais l'habitude de lui rendre visite ainsi qu'à ses voisins. Je ne

 17   souhaite pas mentionner leurs noms. C'est tout. J'avais pour habitude de

 18   rendre visite à des collègues albanais du SUP d'Urosevac.

 19   Q.  Je ne vais pas mentionner son nom pour le moment du tout, à l'évidence

 20   en audience publique, mais vous avez rendu visite à X chez lui et X nous

 21   allons y venir plus tard, n'est-ce pas ?

 22   R.  J'avais l'habitude d'aller là-bas en ma qualité de policier lorsque

 23   j'étais dans les années 1975 à 1981 pendant la période où je travaillais au

 24   poste de police de Stimlje. Son père ou disons la personne A, j'avais

 25   l'habitude de le rencontrer à Urosevac, et à Stimlje. Il arrivait que je le


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  1   rencontre dans les cafés ou dans la rue.

  2   Q.  La question que je pose pour le moment c'est : j'affirme que vous

  3   saviez parfaitement quelle était la réputation du poste de police dans la

  4   communauté albanaise et que c'était une réputation de brutalité, vous

  5   saviez cela, n'est-ce pas ? C'était bien la réputation de ce poste ?

  6   R.  Ceci n'est pas exact. Je n'ai pas connaissance de cela, je n'étais pas

  7   commandant ou chef de ce poste de police, ni chef du département de la

  8   police. Ce qu'ils ont pu faire bon ces policiers, bon, ils devaient

  9   évidemment en rendre compte ou en être responsable devant leurs supérieurs

 10   immédiats.

 11   Q.  Je suppose que vous dites qu'à l'intérieur du poste de police

 12   proprement dit, il n'y avait pas de réfectoire ou une cantine où vous

 13   pouviez rencontrer les autres fonctionnaires des autres étages, avoir des

 14   entretiens, vous rencontrer. Est-ce que vous êtes en train de nous dire que

 15   vous ne saviez pas ce qui se passait aux autres étages ?

 16   R.  Je ne sais pas, je ne savais pas. Je faisais mon travail dans mon

 17   bureau au troisième étage. Je n'avais pas pour habitude d'aller me promener

 18   pour aller voir ce qui se passait au deuxième étage. Pour ce deuxième

 19   étage, il s'y trouvait un certain nombre de bureaux, deux ou trois étaient

 20   des bureaux de chef de sécurité. Mais l'officier de permanence se trouvait

 21   au rez-de-chaussée et le bureau du chef du poste de police, du chef et de

 22   son assistant -- l'adjoint et plusieurs assistants. Je ne sais pas le

 23   nombre.

 24   Q.  Qu'est-ce qu'il y avait au sous-sol ?

 25   R.  Au sous-sol. Non pas au sous-sol. Il y avait l'officier de permanence.


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  1   Mais ce n'était pas au sous-sol c'était au rez-de-chaussée. Il y avait le

  2   chef de service, ou les officiers de permanence, c'était là qu'on se

  3   changeait, qu'on enlevait son uniforme. Il y avait quatre ou cinq

  4   policiers, je ne suis pas sûr ce qui s'est passé là à ce moment-là.

  5   Q.  Est-ce que vous essayez encore de cacher ce qui se passait dans ce

  6   poste de police en feignant l'ignorance ?

  7   R.  Je suis en train de vous dire, Maître, que je suis venu ici

  8   volontairement et que j'ai fait une déclaration solennelle, que je dis la

  9   vérité, toute la vérité, que la vérité triomphera tôt ou tard.

 10   Q.  Maintenant le deuxième sujet en ce qui concerne ce

 11   secteur : est-ce que vous saviez en 1990, ou dans les années 1990, qu'en

 12   plus de cette réputation de poste de police, vous-même, personnellement,

 13   vous aviez une réputation dans la communauté albanaise et c'était la

 14   réputation d'être un policier brutal ?

 15   R.  Excusez-moi, ceci n'est pas vrai. Je peux le prouver. Même à ce jour,

 16   j'ai un grand nombre d'amis dans la communauté albanaise. Eux-mêmes m'ont

 17   dit que je peux aller les trouver pour le prouver. "Dragan, va là-bas pour

 18   prouver la vérité. Va là-bas à La Haye."

 19   Q.  Aucun de ses amis n'a été en mesure de vous dire que la réputation que

 20   vous aviez ainsi que le poste de police était une réputation de brutalité.

 21   R.  Mes amis n'auraient pas pu me dire cela, parce que ce n'est pas vrai.

 22   Je ne l'ai pas fait.

 23   Q.  Je crois que vous ne comprenez pas pour le moment. On en reviendra à

 24   savoir si vous l'avez fait ou pas en ce qui concerne une personne en

 25   particulier qui a un lien très pertinent avec la présente affaire.


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  1   Ce dont je parle maintenant, c'est de la réputation qui était la

  2   vôtre. Je suis en train de vous dire, de vous affirmer qu'il n'est pas

  3   possible que vous n'ayez pas eu connaissance de la réputation qui était la

  4   vôtre en 1990, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je sais par moi-même que j'avais une bonne réputation pour les

  6   Albanais. Je l'affirme. Je l'y tiens.

  7   Q.  Je voudrais vous demander en ce qui concerne la même période et à la

  8   suite de ce qui s'est passé au cours de la même période, et en allant

  9   jusqu'à l'an dernier en 2004, je crois que c'est la première fois que vous

 10   avez été auditionné par quelqu'un au nom du Tribunal en 2004; est-ce

 11   exact ?

 12   R.  Oui. En 2004, le bureau du Tribunal à Belgrade, je crois, que c'était

 13   en mai, le 12 mai, m'a auditionné. Un M. Ole. Je ne suis pas sûr de son nom

 14   de famille. Il est finlandais.

 15   Q.  Bon. Je vais maintenant vous poser cette question de façon progressive.

 16   Je traite de la période qui précède mai 2004. Est-ce que vous avez connu le

 17   fait qu'il y avait des rapports établis par des organisations et qui

 18   faisaient état de brutalité au poste de police de Ferizaj ? En d'autres

 19   termes, des publications qui vous ont été citées hier et qui suggéraient

 20   qu'il y avait des preuves qu'un très grand nombre de personnes qui

 21   passaient par votre poste de police était brutalisé. Est-ce que vous avez

 22   eu connaissance de l'existence d'un seul rapport de ce genre ?

 23   R.  Non, je n'en ai pas connaissance. Je n'ai pas suivi la situation. Je

 24   n'y suis pas intéressé, parce que de façon certaine, concrète, je sais,

 25   c'est un fait que j'ai rempli mes fonctions. Je me suis acquitté de mes


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  1   fonctions et de mes devoirs conformément aux lois et à la constitution de

  2   Serbie.

  3   Q.  Oui. Je me rends bien compte que vous répétez cela. La question était

  4   de savoir si vous avez appris entre 1999 et 2004 du fait qu'il y avait des

  5   rapports, des articles, des publications, qui rendaient compte

  6   d'allégations fondées importantes du fait qu'il y avait des tortures

  7   pratiquées dans votre poste de police. Est-ce que vous avez appris cela ?

  8   R.  Je viens de vous dire que je n'ai rien entendu dire à ce sujet.

  9   Q.  Parce que si vous en aviez entendu parler, vous auriez intéressé, mais

 10   puisque vous dites que vous n'avez rien fait de mal, ceci vous aurait

 11   intéressé, n'est-ce pas ?

 12   R.  Je n'en ai pas entendu parler, et je ne me serais pas intéressé à la

 13   question même si j'en avais entendu parler. Pour moi, tout cela c'est

 14   pareil. Je vous dis que je n'en ai pas eu connaissance, et que même si j'en

 15   avais eu connaissance, je n'aurais rien faire pour essayer de me procurer

 16   ces articles ou ces rapports, parce que je n'ai commis aucun crime.

 17   Q.  Avant 2004, est-ce que quelqu'un s'était mis en rapport avec vous pour

 18   vous auditionner, pour vous poser des questions concernant des suggestions

 19   de ce genre, pour savoir si vous saviez quoi que ce soit à ce sujet ? Est-

 20   ce que quelqu'un a essayé de se mettre en rapport avec vous ?

 21   R.  A propos de quel sujet ? Je n'ai pas compris votre question.

 22   Q.  Oui. Je vais simplifier ma question. Entre 1999 et 2004, est-ce que

 23   quelqu'un au nom d'une autorité que ce soit en Serbie ou au Kosovo s'est

 24   mis en rapport avec vous pour essayer de savoir si vous pourriez aider à

 25   propos d'allégations qui étaient faites concernant des tortures à votre


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  1   poste de police ? Est-ce que quelqu'un a essayé de se mettre en rapport

  2   avec vous pour vous poser des questions à ce sujet ?

  3   R.  Voyez-vous, Maître, si quelqu'un venait nous trouver au secrétariat, il

  4   y avait le chef du secrétariat, et je ne sais pas si quelqu'un a voulu se

  5   mettre en rapport avec lui. J'avais mon domaine d'opération. Il n'était pas

  6   nécessaire de s'adresser à moi, et ceci aurait d'ailleurs été contraire aux

  7   procédures du SUP. C'était au chef de secrétariat qu'il fallait s'adresser.

  8   Je ne peux pas vous dire si quelqu'un s'est mis en rapport avec lui ou non.

  9   Je peux vous dire que personne ne s'est mis en rapport avec moi.

 10   Q.  Bon. La question vous concernait, vous, donc, s'il vous plaît,

 11   concentrez sur cette question. Vous nous dites que personne ne s'est mis en

 12   rapport avec vous avant 2004. Alors, je voudrais maintenant revenir à 2004.

 13   Lorsque vous avez rencontré les enquêteurs en 2004, est-ce que

 14   quelqu'un à un moment quelconque vous a posé des questions concernant ces

 15   allégations avant que vous ne fassiez votre déclaration pour le Tribunal ?

 16   R.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter la question ?

 17   Q.  Oui. Quand on vous a rencontré en 2004 pour le compte du Tribunal lors

 18   d'une audition que vous avez mentionnée au mois de mai à laquelle vous vous

 19   êtes prêté, est-ce que quelqu'un à ce stade vous a posé des questions

 20   concernant les brutalités dans votre poste de police et la question de

 21   savoir si vous aviez vous-même exercé des brutalités sur quelqu'un en

 22   particulier ?

 23   R.  Dans le poste de police ? Vous voulez dire le SUP d'Urosevac ? Il se

 24   trouvait à Leskovac.

 25   Q.  Je vais être plus précis. Est-ce qu'une personne recueillant la


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  1   déclaration qui traitait des événements survenus en 1998 -- on vous a

  2   demandé, donc 1998, 1999, on vous a posé des questions concernant des

  3   brutalités au poste de police de Ferizaj pendant cette période ?

  4   R.  Personne ne m'a posé de question.

  5   Q.  Est-ce que vous avez été averti d'une manière quelconque du risque

  6   qu'il y aurait à vous incriminer vous-même dans les domaines de ce genre,

  7   sur des points de ce genre.

  8   R.  Je n'ai pas été averti par personne, car il n'y avait pas de motifs de

  9   me donner un avertissement. Je m'acquittais de mes fonctions, de mes

 10   devoirs conformément à la loi ou en droit.

 11   Q.  J'y viendrais pour cette année, précisément pour cette raison. Lorsque

 12   vous êtes arrivé à La Haye, comme on le voit il y a un jour environ, un ou

 13   deux jours après la période de Pâques, les vacances de Pâques, c'est-à-

 14   dire, les 2, 3, 4 avril de cette année, vous avez été à nouveau entendu,

 15   n'est-ce pas, par les représentants du Tribunal ?

 16   R.  A quelle date, s'il vous plaît ?

 17   Q.  Nous avons une déclaration supplémentaire ou complémentaire, ou une

 18   feuille de renseignements qui porte la date du 4 avril. Je comprends en

 19   fait qu'il s'est peut-être agi du 3 avril aussi, mais cela se trouve

 20   quelque part dans la période pour laquelle vous avez été interviewé à La

 21   Haye avant de faire votre déposition ?

 22   R.  L'entretien qui a eu lieu dans les locaux du Tribunal a été mené par M.

 23   Black. Je crois qu'il s'appelait comme cela. C'était samedi, dimanche et

 24   lundi, les 2, 3 et 4 avril.

 25   Q.  Les 2, 3 et 4 avril.


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  1   R.  Je sais que c'était un samedi, un dimanche et un lundi.

  2   Q.  Bien. Question suivante : Au cours de cette période, qui que ce soit,

  3   je parle de personnes membres du bureau du Procureur, vous a-t-on dit

  4   qu'ils étaient en train de recueillir des éléments de preuve au Kosovo ces

  5   mêmes jours, les 2, 3 et 4, sur vos activités vis-à-vis de personnes qui

  6   avaient été amenées dans les locaux du poste de police de Ferizaj. Vous a-

  7   t-on dit cela ?

  8   R.  Non. Personne ne me l'a dit. Mon téléphone portable ne fonctionne plus.

  9   Je n'ai pas été en mesure de contacter qui que ce soit. Je n'ai plus

 10   qu'appelé ma famille à la maison en utilisant le téléphone de l'hôtel.

 11   Q.  Peut-être, m'avez-vous mal compris. Ce que j'essaie de vous dire porte

 12   sur une coïncidence, une autre coïncidence assez extraordinaire. Il y en

 13   avait une qui a été signalée hier, et voici l'autre. Pendant que vous étiez

 14   interrogé par le bureau du Procureur, ici à La Haye, quelqu'un du bureau du

 15   Procureur vous a-t-il dit que le bureau du Procureur avait recueilli ou

 16   rassemblé des informations et des déclarations issues de témoins se

 17   trouvant au Kosovo, déclarations vous concernant ?

 18   R.  Non. Personne ne m'a dit cela. C'est la première que je l'entends

 19   parler.

 20   Q.  J'aimerais passer simplement un instant sur cette question, parce

 21   qu'hier on vous a posé des questions concernant trois individus, et d'après

 22   ce que nous montre le compte rendu, vous n'avez pas reconnu ces personnes,

 23   ou en tout cas, vous n'en avez plus le souvenir. J'aimerais vous reposer

 24   des questions sur des personnes qui ont fourni des déclarations au cours de

 25   cette même fin de semaine au cours de laquelle, vous-même, vous trouviez à


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  1   La Haye pour y être interroger.

  2   Je vais les passer en revue, les uns après les autres.

  3   M. MANSFIELD : [interprétation] A cette fin, Monsieur le Président, une

  4   liasse de déclarations a été préparées, déclarations émanant de ce témoin,

  5   de manière à ce que les Juges de la Chambre disposent des noms de ces

  6   individus. En temps voulu, je demanderai également à ce que la version

  7   albanaise soit communiquée au témoin.

  8   M. Whiting nous a gentiment communiqué un certain nombre d'exemplaires de

  9   ces documents ce matin. Permettez-moi de vérifier -- Q.  Monsieur Jasovic,

 10   je vais vous faire passer un ensemble de déclarations en albanais.

 11   M. BLACK : [interprétation] Elles sont en albanais ou en B/C/S ?

 12   M. MANSFIELD : [interprétation] Non, celles pour le témoin sont en

 13   albanais. Les autres sont des versions anglaises.

 14   M. BLACK : [interprétation] Il parle B/C/S.

 15   M. MANSFIELD : [interprétation] Oui, oui, je sais.

 16   M. BLACK : [interprétation] Si ce sont les mêmes que celles qui ont été

 17   communiquées hier, elles sont en B/C/S. Je ne sais pas s'il y a un

 18   exemplaire distinct en B/C/S et non pas en albanais ?

 19   M. MANSFIELD : [interprétation] Je ne sais pas si la liasse que j'ai reçue

 20   hier est exactement la même que celle que j'ai reçue aujourd'hui. On me dit

 21   que oui. Très bien.

 22   Bien. Afin que les choses soient bien claires, la version en anglaise, la

 23   première version, présente le nom d'Afrim Mustafa. C'est celle qui doit

 24   apparaître en premier, sur le haut de cette liasse de déclarations.

 25  Q.  Je vais m'intéresser sur ce nom en particulier. Il a été vu le 1er avril


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  1   de cette année à Pristina, ainsi que le 2 et le 3 avril.

  2   Tout d'abord, ce nom vous dit-il quelque chose ?

  3   R.  Ce nom, je ne le connais pas. Comme je l'ai dit, je ne me souviens pas

  4   bien des prénoms et des noms de famille.

  5   Q.  A la lumière de cette réponse, veuillez, s'il vous plaît, saisir les

  6   déclarations qui se trouvent jointes à la déclaration faite au TPY. Vous y

  7   trouverez une traduction anglaise d'une déclaration que vous avez

  8   recueillie le 17 janvier 1999. Veuillez, s'il vous plaît, examiner

  9   l'exemplaire que vous avez sous les yeux. Il s'agit bien sûr de

 10   l'exemplaire de la version originale, de la déclaration originale,

 11   déclaration que vous aviez recueillie le 17 janvier 1999.

 12   R.  Non, pas le 17; le 16 janvier. Il s'agit d'un document qui relate un

 13   entretien avec Afrim Mustafa. Je ne sais pas ce que vous avez comme date,

 14   si c'est le 16 janvier 1999.

 15   Q.  Au début, la date est celle du 16 janvier 1999, et sur notre deuxième

 16   page, peut-être que vous n'en avez qu'une sous les yeux, figure la date du

 17   17. Ce que je souhaite savoir auprès de vous c'est si c'est bien une

 18   déclaration que vous avez recueillie en janvier 1999 ?

 19   R.  Je ne sais plus. Pourrais-je consulter la signature de la personne

 20   ayant recueillie la déclaration. Je n'ai pas la deuxième page sous les

 21   yeux.

 22   Q.  Malheureusement, je ne peux faire qu'avec les documents qui nous ont

 23   été remis. On nous a donné à penser qu'il s'agissait d'une déclaration

 24   recueillie par vous et votre collègue comme toutes les autres déclarations

 25   qui ont été examinées par vous, d'après, en tout cas, ce que l'on aperçoit


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  1   sur le document. Vous les avez passé en revue hier. Pourrais-je vous

  2   demander s'il existe un exemplaire comportant la signature du témoin. Si

  3   tel n'est pas le cas, je ne peux aller plus loin dans mes questions. Il

  4   semblerait que cela ne puisse être.

  5   M. BLACK : [interprétation] Je ne l'ai pas quant à moi. Nous allons essayer

  6   de voir si nous pouvons mettre la main dessus.

  7   M. MANSFIELD : [interprétation]

  8   Q.  Bien. Monsieur Jasovic, sur la base des informations qui nous ont été

  9   communiquées, peut-on dire néanmoins qu'il s'agit là d'une déclaration qui

 10   a été recueillie en janvier 1999. Peut-on travailler sur ces prémices-là.

 11   S'il transparaît qu'il ne s'agit pas de votre signature, si elle ne figure

 12   pas sur ce document, et bien, nous apporterons les nuances requises.

 13   Mais, dans l'hypothèse où vous avez effectivement recueilli cette

 14   déclaration, ce que je crois être vrai, j'aimerais savoir comment cette

 15   personne s'est trouvée dans le poste de police de Ferizaj ? Comment elle

 16   est arrivée jusque-là ?

 17   R.  Eu égard à cette déclaration, je ne sais pas si c'est moi qui l'ai

 18   recueillie avec mon collègue. Je ne le sais pas. Par conséquent, je ne

 19   souhaite pas en discuter. Je ne me souviens pas de ce nom. Si vous

 20   retrouvez la deuxième page, la deuxième partie de ce document, bien il y

 21   aura plus de difficulté.

 22   Q.  Je suis sûr que nous retrouverons la deuxième partie de ce document. En

 23   ce qui concerne la version anglaise dont nous disposons, on y aperçoit

 24   votre nom. Si vous regardez le premier paragraphe de cette déclaration, on

 25   n'y trouve aucun renseignement, aucune information quant à la raison de la


Page 5392

  1   présence de cet individu au poste de police, et ce qu'il était censé y

  2   faire. Me suivez-vous ? J'aimerais savoir, si vous pouvez nous le dire,

  3   comment il s'est trouvé au poste de police. Il avait 16 ans, à l'époque.

  4   R.  Vous voyez, comme je l'ai déjà dit, je ne peux pas débattre de la

  5   question. Si effectivement, mon collègue et moi-même avions recueilli cette

  6   déclaration, je pourrais vous en dire plus.

  7   Q.  C'est le jeune homme, je ne vais pas rentrer dans les détails, nous en

  8   avons déjà parlé hier. C'est le jeune homme qui était si jeune, qui a été

  9   soumis à des chocs électriques afin de le faire parler. Vous en souvenez-

 10   vous ? Son cas a été abordé avec vous hier.

 11   R.  Oui. Je sais qu'hier le nom d'Afrim Mustafa a été mentionné, je m'en

 12   souviens. Mais je ne connais pas ce jeune homme. Je n'ai plus le souvenir

 13   d'un garçon si jeune. Je suis sûr que tout ceci est un tissu de mensonges.

 14   Il n'y a pas eu actes de torture, il n'y a pas eu chocs électriques, il n'y

 15   a pas eu violences physiques ou mauvais traitements physiques. Il n'y

 16   aurait aucune raison d'infliger cela à un enfant de 16 ans.

 17   Pourquoi a-t-il été amené au poste ? Je sais que ce n'est pas de mon

 18   fait, mais peut-être que la police l'a découvert dans un lieu suspect. Ce

 19   n'est qu'une hypothèse. Je vois qu'il est du village de Racak.

 20   Q.  Cela suffirait-il pour l'amener au poste ?

 21   R.  Je n'ai pas lu la déclaration en question.

 22   Q.  Je vous en prie.

 23   R.  Non, cela ne suffirait pas. Pas seulement en ce qui concerne Afrim

 24   Mustafa, mais à ce moment-là, aucune personne n'avait été victime de crime.

 25   Je ne sais pas pourquoi il a été amené au poste. Les policiers avaient des


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  1   commandants, des assistants et je suis sûr que s'ils faisaient venir

  2   quelqu'un au poste, et bien, ils vérifiaient des choses auprès de leur

  3   supérieur. Ce n'était pas de mon ressort de demander aux policiers pourquoi

  4   ils amenaient au poste tel ou tel individu. Je n'ai pas le souvenir d'une

  5   personne répondant au nom et à la description de ce jeune homme. En ce qui

  6   concerne les allégations de torture, je peux vous affirmer qu'il n'y a pas

  7   eu de torture, ni contre lui, ni contre qui que ce soit.

  8   Q.  Si on l'a fait venir au poste pour une raison particulière, on pourrait

  9   s'attendre à ce que ceci soit explicité dans le paragraphe introductif de

 10   sa déclaration. Parce qu'il avait agi d'une manière suspecte ou parce qu'on

 11   le suspectait d'être en possession d'armes, et cetera.

 12   R.  Voulez-vous répéter, s'il vous plaît ?

 13   Q.  On pourrait s'attendre à ce que la raison de sa présence au poste de

 14   police soit exposée dans le paragraphe introductif de sa déclaration.

 15   R.   Ce n'était pas la pratique d'exposer les motifs de la présence de

 16   telle ou telle personne dans une déclaration. Il s'agissait sans doute du

 17   16 janvier 1999, alors que des échanges de tirs avaient lieu dans la région

 18   de Racak. Des combats y faisaient rage, je ne sais pas véritablement

 19   pourquoi il a été amené au poste parce que ce sont les policiers qui s'en

 20   sont chargés. Chaque fois qu'un officier de police amenait quelqu'un au

 21   poste à Urosevac, ils étaient tenus de rédiger une note officielle destinée

 22   au commandant du poste de police expliquant les motifs de la présence de

 23   cet individu. Ce n'était pas à moi de faire figurer cela dans la note

 24   officielle ou dans les déclarations.

 25   Q.  Y avait-il eu un massacre commis à Racak par les forces serbes ?


Page 5394

  1   R.  Je n'en sais rien parce que je n'étais pas à Racak. Quant à je pense

  2   qu'il n'y a pas eu de massacre, mais je n'étais pas sur place, je n'étais

  3   pas dans le village de Racak. Vous pouvez poser la question au responsable

  4   du SUP d'Urosevac, Bogoljub Janicevic. Vous pouvez lui poser la question.

  5   Il était mon supérieur, il était aussi un représentant politique.

  6   Q.  Mais en tant que --

  7   R.  Je vous distance, je vous dis qu'il n'y a pas eu de massacre.

  8   Q.  Oui. Même au jour d'aujourd'hui, malgré une reconnaissance

  9   internationale du massacre qui s'y est produit, vous n'êtes toujours pas

 10   prêt à admettre qu'il a eu lieu ?

 11   R.  Je ne peux pas l'admettre parce que ce n'est pas vrai.

 12   Q.  J'aimerais passer à la deuxième personne. Peut-être allons-nous nous

 13   retrouver confrontés au même problème. Je ne peux faire qu'avec ce qui m'a

 14   été donné, ici le nom est Muhadin Xheladini.

 15   R.  Muhadin Xheladini. Je vois le nom écrit ici.

 16   Q.  Connaissez-vous cet homme ?

 17   R.  Je ne connais pas cet homme. Je vois que la déclaration a été signée

 18   par moi-même et par Momcilo Sparavalo même si l'exemplaire qui m'a été

 19   remis est de mauvaise qualité. Je ne connais pas l'homme, mais il a été

 20   interrogé à titre informatif.

 21   Q.  Par conséquent, vous dites qu'en ce qui concerne cet homme-là, il

 22   s'agit de l'homme dont le nom vous a déjà été soumis hier, le nom d'un

 23   homme qui, lui aussi, a subi des violences dans votre poste de police. Il a

 24   aperçu du sang sur le solution, et cetera. Vous souvenez-vous en avoir

 25   entendu parlé hier ?


Page 5395

  1   R.  Sur Afrim Mustafa, non. Ecoutez, je n'ai pas un ordinateur à la place

  2   du cerveau. Il m'est impossible de me souvenir de tous les noms.

  3   Q.  Vous savez, ceci remonte seulement à hier. Je vais poursuivre. Pouvez-

  4   vous me dire pourquoi --

  5   R.  Je suis désolé, je ne m'en souviens plus. Je ne parviens pas à me

  6   souvenir du prénom et du nom de famille. Peut-être qu'effectivement il en a

  7   été question hier.

  8   Q.  Avez-vous consciemment ou inconsciemment oublié ces noms parce que vous

  9   savez pertinemment bien qu'il s'agit là de victimes de votre poste de

 10   police.

 11   R.  Non, il est faux de dire que j'ai effacé de ma mémoire ces noms. Parce

 12   que son nom, qu'il s'agisse de Muhadin, Dragan ou Bajram ou toute autre

 13   personne qui vient d'un autre pays, et bien, tous les gens sont pareils.

 14   Q.  J'aimerais vous reposer la question. Comment se fait-il que cet homme

 15   ait été interrogé par vous ? Pour que les choses soient bien claires, je

 16   préciserais que ces déclarations portent principalement sur l'UCK.

 17   R.  Oui. Il est fait référence à l'UCK dans ces déclarations. Je ne sais

 18   pas si la personne en question s'est rendue de son plein gré au secrétariat

 19   ou si elle a été amenée par des policiers. Je ne m'en souviens parce que

 20   cela fait presque plus de six ans et je ne me souviens plus.

 21   Q.  Pourtant ceci est important pour ce qui va suivre. Il y deux catégories

 22   de personnes, n'est-ce pas ? Il y a ceux que vous amenez et il y a ceux qui

 23   ont été amenés au poste par des policiers de votre poste de police et qu'on

 24   a fait parlés. Cela est une première catégorie. L'autre catégorie ce sont

 25   des personnes qui sont bien disposées à votre égard et contre lesquelles


Page 5396

  1   vous ne deviez pas utiliser de la force. Ce sont là les deux grandes

  2   catégories, n'est-ce pas ?

  3   R.  Non, ce n'est pas exact.

  4   Q.  J'aimerais maintenant passer à la dernière déclaration. Je crois

  5   qu'hier le nom mentionné a été mal prononcé, mais je vais corriger les

  6   choses. Le troisième nom qui m'intéresse vous le trouverez sur la

  7   déclaration dont vous disposée, c'est Shemsi Emini.

  8   R.  Shemsi Emini.

  9   Q.  Je crois que sur l'exemplaire dont vous disposé, vous ne manquerez pas

 10   de reconnaître qu'il s'agit d'une personne qui a eu affaire à vous, n'est-

 11   ce pas ?

 12   R.  La déclaration a été recueillie par moi-même et M. Momcilo Sparavalo.

 13   Q.  Là encore, pourriez-vous nous dire comment cette personne s'est

 14   retrouvée dans votre poste de police à parler de l'UCK ?

 15   R.  Je n'en sais rien. Je ne sais pas si cette personne s'est présentée

 16   volontairement ou si elle a été amenée par des policiers. Cette personne

 17   vient du village de Racak. Il est possible qu'il ait été amené par des

 18   policiers du poste de police de Stimlje, mais je n'en sais rien. Je ne sais

 19   pas si cette personne a été retrouvée à Stimlje ou Urosevac, je n'en sais

 20   rien, je ne pourrais le dire. C'est possible, mais je n'en sais rien. Je ne

 21   sais pas où on l'a trouvé.

 22   Q.  A mon avis, étant donné la brutalité qui caractérisait votre poste de

 23   police, les gens n'allaient pas faire la queue à l'extérieur pour pouvoir

 24   rentrer, n'est-ce pas ?

 25   R.  A Urosevac il y quatre postes de police, Urosevac, Stimlje, Strpce et


Page 5397

  1   Kacanik. Je ne sais pas auquel vous faites référence. Pouvez-vous être plus

  2   précis ?

  3   Q.  Oui, bien sûr, celui au sein duquel vous avez recueilli ces

  4   déclarations.

  5   R.  Je le répète, je ne sais pas si cette personne a été amenée, je ne sais

  6   pas où on l'a trouvée, et si on l'a trouvée quelque part.

  7   Q.  Mais sans cette signature sur la déclaration, je suis bien certain que

  8   vous m'auriez répondu que vous n'aviez rien à voir avec cette personne. Le

  9   fait est que ce n'est pas le cas, n'est-ce pas ? 

 10   R.  Même s'il n'y avait pas eu de signature, il me suffit de voir mon nom

 11   sur ce papier et je reconnais toute déclaration portant mon nom, même si ma

 12   signature n'y figure pas. Je reconnais avoir interrogé Shemsi Emini. Je ne

 13   sais pas si j'ai été suffisamment clair.

 14   Q.  Lui suggère avoir été frappé avec des battes de baseball ou des objets

 15   analogues.

 16   Vous disposiez dans votre bureau, n'est-ce pas, d'objets ressemblant

 17   des battes de baseball ?

 18   R.  Je n'avais rien de tout cela, je n'avais même pas de matraque, encore

 19   moins des battes de baseball ou des bâtons. C'est faux, il n'y avait pas

 20   d'objets de ce type dans le bureau 59. Même si la personne hier a fait

 21   mention d'un certain nombre d'autres numéros avant que nous nous soyons mis

 22   d'accord sur le numéro 59.

 23   Q.  A la lumière de cette réponse, j'aimerais vous parler d'un autre

 24   individu, nous sommes en audience publique, je vous demanderais de ne pas

 25   citer son nom. Si je vous parle de la personne X, vous savez de qui je


Page 5398

  1   parle, n'est-ce pas ?

  2   R.  X est la personne dont nous avons parlé hier ?

  3   Q.  Oui.

  4   R.  Oui, je vois.

  5   Q.  Ma première question le concernant est la suivante : savez-vous ce

  6   qu'il a dit au Tribunal vous concernant, ce Tribunal ?

  7   R.  Je ne sais pas si vous allez me croire ou pas, mais très sincèrement je

  8   n'ai pas suivi du tout ce procès et je ne sais pas ce qu'il a dit.

  9   Q.  Pour bien comprendre les choses, cela signifie-t-il qu'au cours du

 10   week-end de Pâques, samedi, dimanche et lundi, aucun membre du bureau du

 11   Procureur ne vous a posé de questions concernant des allégations émanant de

 12   lui et vous concernant ?

 13   R.  A Pâques, je ne sais plus très bien quelle était la date parce que j'ai

 14   reçu un certain nombre d'appels des assistants ici ainsi que de Belgrade,

 15   je ne sais plus qui m'a appelé, enfin je ne sais plus quelles sont les

 16   personnes, toutes les personnes qui m'ont appelé, mais personne ne m'a

 17   parlé du nom, ne m'a cité le nom de X, à aucun moment il n'a été question

 18   de lui. D'ailleurs, je ne m'intéressais pas à ce qu'il avait à dire.

 19   Simplement, les gens du Tribunal de la Haye m'ont dit que je viendrais

 20   déposer les 14, 25, ou 28. C'est ce dont nous avons parlé au téléphone.

 21   M. BLACK : [interprétation] Je ne sais pas si mon intervention sera d'une

 22   quelconque utilité, mais les 2, 3, 4 avril ne correspondait pas au week-end

 23   de Pâques. C'est peut-être de là que vient la confusion.

 24   M. MANSFIELD : [interprétation] Oui, effectivement, merci.

 25   Q.  Ce n'est pas seulement la période, ce n'est pas véritablement la


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  1   période qui compte, je parle de la période que vous avez passé ici. Ce que

  2   vous êtes en train de dire, c'est qu'à ce moment précis, au moment où vous

  3   avez été interrogé, interviewé, par le bureau du Procureur, personne n'a

  4   fait mention d'allégations proférées contre vous par le témoin X, n'est-ce

  5   pas ?

  6   R.  Vous me posez la question ?

  7   Q.  Oui.

  8   R.  Pourriez-vous répéter cette question et notamment les dates auxquelles

  9   vous faites référence ?

 10   Q.  Laissons les dates de côté pour un instant. Au moment où vous avez été

 11   interrogé par les membres du bureau du Procureur préalablement à la

 12   déposition que vous alliez faire ici. Vous avez dit que c'était une samedi,

 13   un dimanche et un lundi, au mois d'avril. Au cours de cette période,

 14   personne au sein du bureau du Procureur, ne vous a posé des questions sur

 15   les allégations proférées par X contre vous ? C'est bien cela ?

 16   R.  Pendant le week-end ? Je ne vous comprends pas. Parlez-vous du week-end

 17   passé, dans les locaux de ce Tribunal ?

 18   Q.  Oui, je crois, vous y étiez présent, n'est-ce pas ?

 19  (expurgée)

 20  (expurgée) Je ne sais pas si je vous ai tout dit.

 21   Je ne sais pas si j'ai été suffisamment clair.

 22   Q.  Attendez, un instant. Je vous demanderais d'être particulièrement

 23   attentif à ne pas prononcer de nom.

 24   M. MANSFIELD : [interprétation] Je demanderais une expurgation, deux lignes

 25   plus haut --


Page 5400

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi.

  2   M. MANSFIELD : [interprétation]

  3   Q.  Bien, écoutez la question. De cette manière, nous procéderons beaucoup

  4   plus rapidement. La question est très simple.

  5   R.  Oui. Je serais moi-même très content d'aller plus vite.

  6   Q.  Bien, quelle est la réponse à la question suivante. La question étant :

  7   L'un des membres du bureau du Procureur, avant que vous ne déposiez, vous

  8   a-t-il parlé d'allégations proférées contre vous par le témoin X ?

  9   R.  Non. Personne ne m'en a parlé. Personne parmi les personnes à qui j'ai

 10   parlé. M. Black ne m'en a pas parlé.

 11   Q.  Bien, j'aimerais maintenant vous parler de cette personne et j'aimerais

 12   que vous fassiez preuve de la plus grande prudence.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Une ordonnance d'expurgation vient

 14   d'être rendue, Maître Mansfield.

 15   M. MANSFIELD : [interprétation] Je vous en serai gré.

 16   Q.  J'aimerais commencer par le père de X. Depuis combien de temps

 17   connaissiez-vous son père en 1998, 1999 ?

 18   R.  Je le connaissais depuis au moins 20 ans. Il me serait difficile de

 19   vous dire si je le connaissais depuis 18 ou 22 ans, mais en moyenne, si on

 20   prend la moyenne, cela fait à peu près 20 ans.

 21   Q.  Vous avez décrit son père hier comme étant un bon ami. Vous souvenez-

 22   vous de cela ?

 23   R.  Oui, et je n'en ai certainement pas honte.

 24   Q.  Vous avez également indiqué que vous l'aviez également rencontré. Je

 25   fais référence au père, au début de 1998.


Page 5401

  1   R.  Oui. Je ne me souviens pas exactement de quel mois il s'agissait. Je

  2   sais qu'il faisait froid. C'était peut-être en janvier, février ou mars. Si

  3   je l'avais su que vous alliez me poser la question, j'aurais inscrit la

  4   date.

  5   Q.  Je vous pose la question avec la plus grande prudence parce que lorsque

  6   je parlerai de X, vous avez donné des versions différentes de vos relations

  7   avec lui. Je reviendrais dans quelques instants. C'est la raison pour

  8   laquelle je suis très prudent.

  9   Lorsque vous alliez voir le père, vous alliez chez lui, chez le père

 10   et vous alliez boire un verre avec lui de temps en temps; est-ce exact ?

 11   R.  Je vous l'ai déjà dit. Pour continuer ce que je disais tout à l'heure,

 12   j'allais le voir chez lui, son père, de temps en temps entre 1975 et 1981.

 13   Puis ensuite, il m'arrivait d'aller boire un verre dans un café, la plupart

 14   du temps à Stimlje ou Urosevac. Entre 1975 et 1981, je suis allé le voir à

 15   plusieurs reprises en ma qualité de policier et au cours de mes patrouilles

 16   dans cette zone.

 17   Q.  Je souhaite m'interrompre quelques instants, parce que je souhaiterais

 18   conjointement avec vous que nous identifiions un point précis. Vous nous

 19   avez dit qu'il y avait un registre, et que figurait sur ce registre votre

 20   unique informateur officiel; est-ce exact ? J'imagine qu'il y en avait

 21   d'autres.

 22   R.  La personne B était le seul contact que j'avais. Je doublais cette

 23   personne "B". J'ai parlé hier ou était-ce avant-hier ? Je ne sais plus.

 24   Q.  Je souhaiterais parler de cette personne pendant quelques instants.

 25   Cette personne-là vous donnait des informations de temps à autre. Mais, la


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  1   question que je vous pose est de savoir où cette information était inscrite

  2   ou enregistrée ?

  3   R.  On préparait des notes officielles. Bien des instructions

  4   -- je ne comprends pas votre question. Qu'est-ce que vous voulez dire, où

  5   était-ce inscrit ou enregistré ?

  6   Q.  Je souhaiterais savoir très précisément, parce que jusque-là, toute la

  7   lumière n'a pas été faite sur ce point, l'informateur officiel. C'est ainsi

  8   que nous l'avons appelé. C'est de lui que je souhaite parler. Il vous

  9   donnait des informations. Vous lui confiez la mission de vous fournir des

 10   informations de temps à autre, mais où inscriviez-vous ces informations ?

 11   Où étaient-elles inscrites, enregistrées ?

 12   R.  Ce n'est pas tout à fait clair, une fois de plus pour moi, votre

 13   question. Qu'est-ce vous voulez dire ? Pendant les conversations ou après

 14   les conversations ?

 15   Q.  Ma question est redoutablement simple. Où inscriviez-vous les

 16   informations qu'il vous fournissait ?

 17   R.  Sur la base d'un entretien ? Si la question que vous posez c'est de

 18   savoir où nous nous rencontrions ? Je ne sais pas si c'est un problème de

 19   traduction, mais ce n'est pas clair pour moi, votre question. Je suis

 20   désolé. Ce que j'entends dans mes écouteurs, ce n'est pas clair du tout.

 21   Q.  Dans quels documents gardiez-vous trace écrite des informations qu'il

 22   vous fournissait au cours de cette période de deux ans ?

 23   R.  Suite à l'achèvement d'un entretien, il arrivait parfois que cette

 24   personne fournisse lui-même des notes manuscrites. Il arrivait parfois que

 25   ce soit moi qui prenne des notes. Mais, je vous l'ai dit hier, on se


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  1   rencontrait généralement dans des endroits discrets en dehors d'Urosevac,

  2   et puis ensuite, je préparais les notes officielles ou bien les

  3   instructions. Tout cela dépendait, bien entendu, de la nature des

  4   informations qui m'aient été fournies.

  5   Q.  Ces notes, qu'elles soient officieuses ou officielles, en a-t-on encore

  6   une trace écrite ?

  7   R.  Certaines notes existent encore. J'ai essayé, mais je ne sais pas si on

  8   les a retirées du secrétariat d'Urosevac, parce qu'il a fallu que nous

  9   l'abandonnions dans les 24 heures. J'ai essayé, je continuerais d'essayer

 10   de trouver quelque chose dans notre secrétariat, parce que nos bureaux sont

 11   très encombrés. Maintenant, nous sommes dans des locaux beaucoup plus

 12   petits. Il y a une trentaine d'officiers qui travaillent dans deux bureaux.

 13   Donc, il est possible qu'il y ait encore quelques notes quelque part à

 14   Leskovac, mais je n'en suis pas sûr. Je suis sûr qu'il reste encore pas mal

 15   de documents qui sont restés au secrétariat d'Urosevac. Je ne sais pas si

 16   s'est faisable, je ne sais pas si elles ont été détruites ou pas. Il se

 17   peut ceci dit que certaines documentations soient restées au numéro 59 au

 18   troisième étage.

 19   Q.  Est-ce qu'à quelque moment que ce soit on vous a demandé d'identifier

 20   des notes ou des -- reprenant des informations fournies par l'informateur

 21   officiel ?

 22   R.  Qu'est-ce qu'on me demandait ? Quoi ? Vous voulez bien répéter, s'il

 23   vous plaît, votre question.

 24   Q.  Vous a-t-on demandé à quelque moment que ce soit, et là je fais

 25   référence au bureau du Procureur, vous a-t-on demandé d'identifier des


Page 5404

  1   notes, des rapports, ou quoi que ce soit contenant les informations

  2   fournies par l'informateur officiel ?

  3   R.  Quel genre de bureau du Procureur demanderait ce genre de chose ? La

  4   question n'est pas claire.

  5   Q.  Est-ce que vous êtes en train délibérément de prétendre ne pas

  6   comprendre ces questions. Elles sont très simples. Je vous la pose pour la

  7   dernière fois. Une personne quelle qu'elle soit au nom du bureau du

  8   Procureur vous a-t-elle demandé d'identifier des dossiers contenant des

  9   informations telles que fournies par l'informateur officiel ?

 10   R.  Vous voulez dire M. Black ? Je ne sais même pas à qui vous faites

 11   allusion. Toutes mes excuses, mais je n'ai aucune mauvaise intention. Vous

 12   n'y voyez aucune mauvaise intention de ma part, mais je ne vois franchement

 13   pas à quel procureur vous faites allusion. Je ne sais pas. Vous voulez dire

 14   le bureau du Tribunal pénal international pour l'ancienne Yougoslavie à

 15   Belgrade, ou bien

 16   M. Black ici à La Haye ?

 17   Q.  Sur ce point, vous ne voulez pas répondre aux questions, n'est-ce pas ?

 18   R.  Si, je veux bien répondre aux questions, mais je ne sais pas très bien

 19   si vous êtes en train de parler des entretiens que j'ai eus à Belgrade, ou

 20   bien des entretiens que j'ai eus ici au Tribunal. A propos du contact

 21   officiel, M. Black et d'autres à Belgrade ne connaissaient pas le nom de

 22   cet informateur officiel, puisque personne ne m'a posé la question à

 23   Belgrade. Ici, une fois que mon entretien avec M. Black a été terminé, j'ai

 24   parlé de cet informateur officiel. 

 25   A propos de ces notes officielles, je lui ai dit que s'agissant des


Page 5405

  1   attaques portées contre certaines maisons, il y en avait, mais que je

  2   n'étais pas en mesure de lui dire s'il restait de telles notes dans nos

  3   bureaux parce que je n'y ai pas accordé énormément d'attention. Les gens du

  4   Tribunal m'ont indiqué que le sujet de nos entretiens serait la prison de

  5   Lapusnik. Je peux aller vérifier au bureau à Leskovac, mais les gens de

  6   Belgrade ne m'ont jamais posé de questions à propos de l'informateur

  7   officiel.

  8   Je ne sais pas si je suis clair, mais j'ai dit à M. Black : "Je ne

  9   sais pas quel genre de notes il me reste." D'ailleurs, je lui ai montré une

 10   note officielle, et pour ce qui est du reste, je lui ai répondu : je ne

 11   sais pas. Je ne sais pas si on les a amenées depuis le secrétariat

 12   d'Urosevac ou si elles y ont resté. Non, ce n'est pas que j'ai de mauvaises

 13   intentions, que je refuse de répondre.

 14   On m'a téléphoné à plusieurs reprises. Je suis, moi-même, allé à

 15   Belgrade à plusieurs reprises. Je ne sais pas si vous êtes en train de

 16   faire référence à mes entretiens avec eux à Belgrade ou ici à La Haye,

 17   parce que M. Black, une fois que je lui ai parlé de cet informateur

 18   officiel, il m'a demandé : est-ce que vous avez des traces écrites, des

 19   dossiers, sur ce point.

 20   Est-ce que je suis clair ?

 21   Q.  Finalement on en arrive à la réponse. Vous avez dit que peut-être il y

 22   avait une trace écrite. Parce que vous voyez ce que nous essayons de faire

 23   : c'est de retrouver les sources d'information. On essaie de retrouver quel

 24   type d'information vous aviez. C'est la raison pour laquelle vous êtes ici.

 25   Vous comprenez cela tout de même, non ? 


Page 5406

  1   R.  Oui, c'est parfaitement clair pour moi. Il doit y avoir des notes.

  2   Maintenant, est-ce qu'elles sont à Leskovac ou est-ce qu'elles sont restées

  3   au bâtiment d'Urosevac ? Là, je n'en sais rien, parce que c'est vrai que

  4   pas mal de documents sont restés à Urosevac.

  5   Q.  A l'exception faite de votre agence, est-ce que d'autres agences de

  6   l'Etat Serbe avaient des informateurs officiels ? UDBA et KOS ?

  7   R.  Pour ce qui est des autres services, il est très probable que oui, mais

  8   je ne peux pas répondre en lieu et place de ces autres services. Je ne sais

  9   s'ils en avaient. D'ailleurs, je l'ai dit hier, il y a toute la question de

 10   la confidentialité, pour des raisons de conspiration, je ne sais pas si mes

 11   collègues proches avaient des informateurs officiels ou pas. Ceci dit, si

 12   mes collègues me

 13   disaient : "J'ai un informateur," je n'en connaîtrais certainement pas

 14   l'identité. Je ne connaîtrais pas son nom, je ne connaîtrais pas sa taille,

 15   ou autres données sur sa personne. Pour les autres secrétariats, oui,

 16   sûrement. Pour qu'un informateur soit officiellement enregistré, il faut

 17   qu'il y ait un officier supérieur qui traite de cette question. Donc, c'est

 18   le département de l'instruction, le chef de ce département des enquêtes, si

 19   vous voulez, qui se mettrait en contact avec nous. En raison du caractère

 20   confidentiel de ce type d'information, il est bien évident qu'il faut

 21   veiller à ce qu'il n'y ait aucune fuite. Donc, l'officier supérieur

 22   conservait le registre de ces informateurs chez lui.

 23   Concrètement parlant, dans notre département il s'agissait du chef du

 24   département des enquêtes criminelles et du département de la criminalité

 25   générale et de la criminalité administrative qui était chargée par cette


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  1   personne et par le chef du secrétariat désigné par Branko Debeljkovic qui

  2   conservait ce registre. C'est lui qui était le mieux placé pour parler de

  3   nombre de personnes et de quel type de personnes étaient enregistrés sur ce

  4   registre.

  5   Pour ce qui est d'autres sections, là je ne sais pas. Si on avait

  6   confiance en un policier, alors on pouvait peut-être lui confier cette

  7   tâche-là de conserver le registre. Cela est le pouvoir discrétionnaire en

  8   quelque sorte du chef de la police. C'est lui qui déterminait l'endroit, ou

  9   la personne auprès de laquelle devaient être conservés ces registres

 10   d'informateurs officiels.

 11   Q.  Je souhaiterais passer à présent à un autre sujet : celui des

 12   informateurs non officiels. Si vous aviez un contact amical, est-ce que

 13   pour les contacts amicaux vous aviez également une liste de ce type ?

 14   R.  Il n'y avait pas de liste de contacts amicaux. Les contacts amicaux ce

 15   sont simplement des gens avec lesquels on a des contacts au quotidien,

 16   qu'ils soient Rom, Serbes, ou Albanais, entre autres. Je ne sais pas

 17   comment vous expliquer cela ? Ce sont des gens que l'on fréquentait dans la

 18   vie de tous les jours, que ce soit au café, que ce soit chez eux ou

 19   ailleurs. Un contact amical peut être dire : "Ah, j'ai vu telle ou telle

 20   chose dans telle ou telle affaire." Mais ce contact amical ne s'intéresse

 21   pas forcément aux questions liées au terrorisme. Un contact amical, cela

 22   peut être, par exemple, un balayeur de rue que j'ai fréquenté à telle

 23   occasion. Des gens tels que cela, c'est vrai que ce sont des gens qui

 24   peuvent fournir des informations, mais ce à titre amical encore une fois.

 25   Ce ne sont pas des gens que l'on contraint par la force à fournir des


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  1   informations. Ceci dit, on n'a jamais contraint personne par la force à

  2   fournir des informations.

  3   Q.  X et sa famille, ces gens-là relèvent de cette dernière catégorie que

  4   vous venez de citer, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non, non, non. Cela c'est un ami, ce n'est pas un contact amical. Avec

  6   X, j'entretiens des relations de longue date, mais je ne le fréquentais

  7   pas. En revanche, son père oui, je le fréquentais.

  8   Q.  C'est de son père que je parle à l'heure actuelle. Son père, après 20

  9   ans de relations amicales, il relevait de la catégorie des contacts ou des

 10   opérationnels amicaux, n'est-ce pas ?

 11   R.  Non, ce n'est pas un contact amical. C'était un ami. Il comptait parmi

 12   mes amis. Je ne sais pas comment vous le dire.

 13   Q.  Je souhaiterais vous montrer maintenant une photographie. Je dois dire

 14   que ce n'est pas un cliché d'une remarquable qualité, mais au moins on peut

 15   discerner les traits et les contours.

 16   M. MANSFIELD : [interprétation] Je crois que le bureau du Procureur a eu

 17   l'occasion de voir ce cliché, mais désolé on ne peut pas faire mieux que

 18   cela.

 19   Q.  A ce stade-ci, je souhaiterais vous inviter, Monsieur le Témoin, à bien

 20   vouloir examiner ce cliché et à nous dire, sans citer aucun nom, si vous

 21   reconnaissez l'une quelconque des personnes figurant sur ce cliché.

 22   R.  Je vous présente mes excuses, mais je dois dire que ce n'est vraiment

 23   pas une très bonne photographie.

 24   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, je remarque que la

 25   caméra fait un gros plan sur cette photo et on voit cela à l'écran dans la


Page 5409

  1   galerie du public. Je ne sais pas si cela risque de poser un problème, mais

  2   peut-être serait-il préférable que nous passions en audience à huis clos

  3   partiel. Je ne sais pas si c'est la meilleure solution.

  4   M. MANSFIELD : [interprétation] Monsieur le Président, pour pouvoir avancer

  5   l'argument que je souhaitais avancer, je pense qu'il serait effectivement

  6   préférable que nous passions en audience à huis clos partiel.

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  9   [Audience à huis clos partiel]

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  4   [Audience publique]

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Compte tenu de l'heure, je

  6   propose que nous fassions notre première pause à présent. Puisqu'il y a

  7   aussi quelques éléments qui doivent être expurgés, je propose que nous

  8   fassions une pause d'une demi-heure. Il y a une ordonnance supplémentaire

  9   que je dois signer avant que de quitter le prétoire.

 10   Nous suspendons l'audience jusqu'à 16 heures 10.

 11   --- L'audience est suspendue à 15 heures 41.

 12   --- L'audience est reprise à 16 heures 18.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mansfield.

 14   M. MANSFIELD : [interprétation] Pourrions-nous reprendre en audience à huis

 15   clos partiel, s'il vous plaît.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Audience à huis clos partiel.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes, Monsieur le Président.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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25   [Audience publique]


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  1   M. MANSFIELD : [interprétation]

  2   Q.  Juste pour qu'on le sache, je ne vais pas mentionner de noms, mais on

  3   vous a montré une photographie dans lequel vous avez réussi à identifier le

  4   père de X dans un groupe de personnes que le témoin, la personne qui

  5   s'appelle X --

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Oui, excusez-moi, laissez-moi finir. Je suis juste en train de résumer

  8   ceci pour le compte rendu public. Donc le père de X se trouve dans un

  9   groupe de Serbes pour une partie de chasse et vous avez donné le nom d'une

 10   des personnes pour autant que vous pouvez vous en souvenir, est-ce que ceci

 11   constitue bien un résumé exact de ce que nous venons de faire, dire ?

 12   R.  Oui, c'est exact. C'est exact en ce qui concerne le nom du père de X.

 13   Q.  Je voudrais poursuivre maintenant et passer à M. X lui-même. Avant le

 14   18 juillet, lorsque vous l'avez interrogé à propos de l'enlèvement de son

 15   père, du fait que son père avait été enlevé, l'aviez-vous jamais

 16   rencontré, X lui-même ?

 17   R.  Je comprends. Oui, je l'avais rencontré avant le 18 juillet, mais

 18   certainement pas en 1997 et en 1998. Savoir si c'était trois, quatre, cinq

 19   ou six ans plus tôt je ne peux pas en être sûr car comme je l'ai déjà dit,

 20   je le connaissais, mais ce n'est pas la personne avec qui j'allais

 21   m'asseoir dans des cafés ou dans d'autres lieux, tandis que je le faisais

 22   avec son père. Permettez-moi de répéter que je ne sais pas quand je l'ai

 23   rencontré dans le passé. Je n'arrive pas à m'en souvenir.

 24   Q.  Je voudrais simplement vous poser une question sur un petit détail

 25   concernant X avant que nous n'allions plus loin. Vous avez dit au bureau du


Page 5414

  1   Procureur l'an dernier, lorsque vous avez été auditionné pour la première

  2   fois, que vous ne connaissiez pas personnellement M. X : "Mais X, je savais

  3   qui il était." Lorsque vous avez été entendu cette année-ci vous avez

  4   modifié ce que vous disiez et vous avez dit que vous connaissiez

  5   personnellement X. Quelle est l'explication de ce changement, s'il vous

  6   plaît ?

  7   R.  Je peux l'expliquer. C'est probablement une erreur d'interprétation.

  8   J'ai signé une déclaration qui était en anglais. Je ne l'ai pas lue en

  9   serbe.

 10   Q.  Bien. Je voudrais maintenant vous dire ce que X a dit à votre sujet.

 11   Vous me suivez ?

 12   R.  Oui. Je vous suis et j'aimerais bien entendre ce qu'il a à dire à ce

 13   sujet, car je n'ai pas pu suivre les débats lorsqu'il y était.  

 14   Q.  Pour autant que d'autres puissent suivre s'ils le souhaitent, il s'agit

 15   d'un compte rendu du jour 24, cela fait déjà un certain temps. C'est à la

 16   page 37. Cela traite de sa visite dans votre poste de police le 18 juillet.

 17   Maintenant, peut-être qu'il serait bon que vous ayez ce document devant

 18   vous, en l'occurrence c'est un document qui est sous pli scellé. Pièce à

 19   conviction présentée par l'Accusation numéro 210 à l'intercalaire 26. Je

 20   vais vous demander de le mettre devant vous. Il s'agit de l'intercalaire

 21   26, la cote est P210, mais je voudrais d'abord indiquer pourquoi. Vous avez

 22   cette pièce devant vous ?

 23   R.  Non, je n'ai pas cette déclaration devant moi. Merci.

 24   Q.  Vous n'avez pas besoin de lire pour le moment parce que je vais parler

 25   de ce qu'il dit s'être passé, comment il est venu, comment ceci a eu lieu.


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  1   Je vais vous demander vos observations à ce sujet. Je vais résumer la

  2   première partie.

  3   Il a dit au Tribunal qu'il avait été arrêté au point de contrôle avec son

  4   oncle dans la voiture de son oncle et qu'on les a emmenés -- ils ont été

  5   emmenés ensemble à votre poste de police. Cela, je l'ai simplement résumé.

  6   C'est comme cela que cela commence.

  7   Avez-vous donné l'ordre qu'ils soient amenés au poste de police ?

  8   R.  Il n'est pas exact que j'ai ordonné qu'ils soient amenés, je le

  9   connaissais je n'avais pas besoin qu'il vienne là. Parce que comment

 10   pouvais-je savoir qui la patrouille verrait au point de contrôle et ferait

 11   amené ?

 12   Q.  Oui. En ce qui concerne ce témoin particulier, comprenez que je

 13   demande que vous m'aidiez sur ce qu'il a dit. Vous dites que vous n'avez

 14   pas donné l'ordre de le faire amener. Ensuite, il lui est demandé ce qui

 15   s'est passé lorsqu'il est arrivé au poste de police avec son oncle. Je vais

 16   maintenant citer ce qu'il dit ici, en fait.

 17   "Nous y sommes allés au SUP, au quartier général de la police. On nous a

 18   laissés là pendant une ou deux heures dans un bureau, puis on nous a

 19   emmenés dans le bureau d'un inspecteur, son nom était Dragan Jasovic."

 20   Est-ce que vous savez si avant d'arriver à votre bureau, on les a retenus

 21   pendant une ou deux heures ?

 22   R.  Maître, je n'ai pas connaissance de cela, je ne sais pas qu'ils aient

 23   été détenus là.

 24   Q.  Je sais que cela fait un certain temps, mais est-ce qu'il était en

 25   compagnie de son oncle, pour ce qui est de ce document que je vous ai


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  1   demandé de regarder ? Est-ce qu'il était accompagné par son oncle ?

  2   R.  Ce n'est que si je pouvais lire cette déclaration que je pourrais dire.

  3   Je ne sais pas.

  4   Q.  Ecoutez, je vais gagner du temps parce que vous pouvez lire cette

  5   déclaration, nous allons la regarder dans un moment mais pas de façon très

  6   détaillée. Il n'y a pas de référence dans cette déclaration à son oncle.

  7   Est-ce que vous me suivez ? Est-ce que vous voulez accepter ce que je vous

  8   dis pour le moment ?

  9   Q.  Si cela n'est pas mentionné dans la déclaration, à ce moment-là, il ne

 10   me l'a probablement pas dit qu'il avait été amené avec son oncle. Parce que

 11   je le connais et il est possible que j'aie connu son oncle à l'époque où

 12   j'étais allé leur rendre visite entre 1975 et 1981. Je le connais peut-être

 13   de vue, bien que je ne puisse pas me rappeler son visage maintenant. Il se

 14   peut qu'ils aient été ensemble ou peut-être que non. En tous les cas, il ne

 15   m'en a rien dit en ce qui concerne cet interrogatoire. S'il m'avait dit

 16   cela, à ce moment-là, je les aurais reçus tous les deux dans mon bureau. Je

 17   leur aurais dit d'appeler son oncle et de le faire entrer aussi.

 18   Q.  La question que je vous pose était de savoir si son oncle était avec

 19   lui lorsque vous l'avez vu.

 20   R.  Non, il ne l'était pas.

 21   Q.  Bien. Parce que c'est cela qu'il a dit ici. "Nous avons été emmenés

 22   dans le bureau d'un inspecteur." Vous ne vous rappelez pas oncle. Je

 23   poursuis.

 24   La question qui a ensuite été posée ici au Tribunal : "Maintenant, cette

 25   personne Dragan Jasovic, est-ce que vous l'avez rencontré avant ?"


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  1   Réponse : "Je ne l'avais pas personnellement rencontré avant, mais je

  2   l'avais vu à Stimlje et parfois à Ferizaj."

  3   Je m'arrête un instant ici. Il va y avoir davantage. Ce n'est pas vrai,

  4   n'est-ce pas ? Vous le connaissiez personnellement, ou vous l'aviez

  5   rencontré, n'est-ce pas ?

  6   R.  Comme je l'ai dit, je ne sais pas quand je l'ai connu, mais c'était à

  7   un moment donné entre 1975 et 1981. Ce qu'il dit ici, à savoir que je ne

  8   suis jamais allé chez lui, il se peut qu'il ait eu peur de donner ces

  9   renseignements, de répondre à ces questions. Moi, je ne sais pas ce qu'il

 10   voulait dire par là. Je ne saurais le dire. Mais je suis certain qu'il me

 11   connaissait et qu'il m'a vu chez lui dans la période entre 1975 à 1981.

 12   Q.  Oui. Je saute un passage et je vais un peu en avant. Lorsque je lui ai

 13   posé des questions moi-même -- il y avait des questions qui étaient de

 14   l'Accusation en l'occurrence. Je lui posais des questions. Il a nié cela

 15   également, qu'il ne vous ait jamais vu chez lui.

 16   Est-ce que vous pourriez imaginer les raisons pour lesquelles il

 17   niait ce contact avec vous ? A moins, bien sûr, qu'il ne s'agisse d'un

 18   informateur amical ?

 19   R.  Il l'a nié. Je serai très bref dans mon commentaire ici, et très clair.

 20   Il a fait une fausse déclaration devant ce Tribunal sur le point de savoir

 21   s'il m'avait rencontré avant ou si j'avais été chez lui. Il était préoccupé

 22   ou inquiet pour sa propre sécurité et la sécurité de sa famille. Il avait

 23   peur de vengeance, et il n'a pas dit la vérité parce qu'il avait peur.

 24   Je vous dirais, que même encore aujourd'hui de nombreux Albanais qui

 25   ont été des victimes s'adresseraient probablement à ce Tribunal s'ils


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  1   n'avaient pas peur. Je dispose de renseignements selon lesquels certains

  2   Albanais viennent chez les gens pour les menacer et leur dire que s'ils

  3   viennent au Tribunal, ils seront tués et que leurs maisons seront

  4   incendiées. C'est la raison pour laquelle le témoin a mentionné le nom de X

  5   n'a pas dit la vérité, et peut-être qu'il avait raison. Je ne sais pas,

  6   mais c'est son opinion.

  7   Q.  C'est votre opinion à vous, bien sûr. Est-ce que vous savez que X est

  8   un témoin protégé et avait la possibilité de déposer en audience à huis

  9   clos partiel ? Est-ce que vous saviez cela ?

 10   R.  Je ne savais pas qu'il s'agissait d'un témoin protégé, parce que comme

 11   je l'ai dit, je n'ai pas suivi ce procès.

 12   Q.  Alors, il poursuit dans sa réponse. Je me suis arrêté au milieu, et il

 13   dit ceci : "Dragan Jasovic était bien connu à Stimlje et à Ferizaj comme

 14   étant un inspecteur dangereux, un homme dangereux."

 15   Je vous ai très soigneusement posé des questions concernant votre

 16   réputation. Pourquoi dirait-il cela à votre sujet ?

 17   R.  A mon avis, il aurait dû dire cela, ou il s'est senti obliger de dire

 18   cela, et j'ai expliqué pourquoi : pour sa propre sécurité et la sécurité de

 19   sa famille. Je suis convaincu qu'il a dit cela pour les raisons que j'ai

 20   données.

 21   Q.  Alors, en lui posant davantage de questions à ce sujet, la question est

 22   : "Pouvez-vous nous dire ce que vous voulez dire par là ?" C'est la

 23   question. "Comment était-il connu que c'était un inspecteur dangereux, un

 24   homme dangereux ?"

 25   Il a répondu : "De nombreux habitants, des Albanais, ont souffert


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  1   entre ses mains. Il y a des gens qui pourraient nous dire qu'ils ont eu des

  2   difficultés à cause de lui, qui ont souffert à cause de lui. En bref, il

  3   était connu comme une personne dangereuse."

  4   Est-ce que c'est exact ?

  5   R.  Je voudrais redire qu'il a dit cela pour les raisons que j'ai

  6   expliquées. Je ne me rappelle pas la date, mais je peux vous dire qu'il y a

  7   deux ou trois ans, celui en rapport avec Bogoljub Janicevic, l'ancien chef

  8   du SUP, il lui a dit qu'il voulait venir devant le Tribunal pour dire toute

  9   la vérité. A ce moment-là,

 10   M. Janicevic m'a dit : "j'ai parlé à X et il t'envoie ses salutations."

 11   Tout ce qu'il a dit ici, il l'a dit pour les raisons que j'ai

 12   expliquées. C'est parce qu'il avait peur pour sa sécurité et la sécurité de

 13   sa famille.

 14   Q.  Il n'a jamais dit, voyez-vous, qu'il avait dû dire tout cela pour

 15   protéger sa famille, que ce soit en audience à huis clos partiel ou

 16   ailleurs. Vous comprenez ? Vous me suivez ?

 17   R.  Je vous suis, mais je répète qu'il n'osait dire la vérité vraie ici.

 18   Q.  Et vous, est-ce que vous osez dire la vérité vraie ici ?

 19   R.  Je suis venu devant cet honorable Tribunal, poussé par le désir de

 20   coopérer, de dire la vérité. Je ne viens pas d'une famille qui m'amènerait

 21   à diffuser des contrevérités, avec tout le respect que je dois à votre

 22   Tribunal.

 23   Q.  Alors, je voudrais maintenant poursuivre comme cela. Nous parlons du 18

 24   juillet. Il y a, à ce moment-là, ce qui s'est passé dans votre bureau,

 25   indique que vous avez posé beaucoup de questions concernant l'UCK et des


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  1   personnes qui portaient des uniformes de l'UCK et Petrova, et ainsi de

  2   suite, et il a dit qu'il devait répondre, qu'il pouvait pas éviter de

  3   répondre. Il a donné cette explication assez longue. Je cite : "Pour

  4   commencer, dans son bureau il y avait deux bâtons de police dans son bureau

  5   que j'ai vus."

  6   Est-ce que vous avez dans votre bureau, deux bâtons de police ou des battes

  7   de baseball, ou quelque chose de ce genre ?

  8   R.  Depuis la date à laquelle j'ai cessé d'être un policier en uniforme,

  9   depuis 1986, je suis devenu inspecteur. Je n'ai jamais eu de bâtons, ni de

 10   matraques, ni de battes de baseball, ni quoi que ce soit comme bâtons dans

 11   mon bureau. Je répète que pour les raisons qui ont été expliquées par moi

 12   pour cela, il a dû dire cela. Certainement, je me mettrais en rapport avec

 13   lui après ceci. Nous en parlerons au téléphone.

 14   Q.  Ah oui, vous ferez cela ? Vous connaissez son numéro de téléphone

 15   alors ?

 16   R.  Je ne connais pas son numéro de téléphone, mais Bogoljub Janicevic, je

 17   suis sûr, a son numéro. C'est l'ancien chef qui était au poste d'Urosevac.

 18   Je crois qu'il a ce numéro, parce qu'ils sont fréquemment en contact.

 19   Q.  Ils ont des contacts fréquents parce que c'est une relation qui dure

 20   depuis longtemps ?

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  8   R.  Comme je l'ai dit il y a un instant, je n'avais pas de bâtons dans mon

  9   bureau. Deuxièmement, ce qu'il a dit n'est pas vrai. Mais là encore, à mon

 10   avis, comme je l'ai déjà exprimé, et c'est mon avis à moi, il était obligé

 11   de dire cela pour sa propre sécurité et la sécurité de sa famille. Parce

 12   que je le connais, je connais son père; il n'était pas nécessaire de le

 13   traiter d'aucune manière, ni lui ni quelqu'un d'autre. Après tout, je

 14   n'avais aucun bâton dans mon bureau.

 15   Q.  Voudriez-vous maintenant regarder après l'intercalaire 26, la pièce à

 16   conviction numéro 210, présenté par l'Accusation. Je vais en traiter de

 17   manière générale.

 18   Ce qu'il dit de sa déclaration, on le trouve sous le titre

 19   "déclaration", à la première page et jusqu'à la fin. Il semblerait que tous

 20   les détails aient été fournis par vous et qu'il s'est contenté

 21   d'acquiescer; est-ce exact ?

 22   R.  Voulez-vous, s'il vous plaît, répéter la question ? J'étais en train de

 23   lire la déclaration ?

 24   Q.  Oui. Excusez-moi. Au lieu de passer en revue l'ensemble des phrases et

 25   en grand dire la même chose, j'essaie de traiter la chose de manière


Page 5422

  1   globale. Il dit que les mots qui figurent dans la déclaration ainsi que les

  2   détails qui y figurent émanent de vous, et que vous ne vous êtes contenté

  3   d'obtenir une confirmation de sa part sur ces différents détails. Ce qui

  4   signifie --

  5   R.  Concrètement --

  6   M. BLACK : [interprétation] Où en sommes nous, s'il vous plaît ? Quel est

  7   le numéro de page ?

  8   M. MANSFIELD : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

  9   Il s'agit de la 27e jour d'audience, contre-interrogatoire effectué par M.

 10   Topolski, en réalité, qui commence, je pense, à la page 44 et qui se

 11   poursuit aux pages 45 à 47.

 12   M. BLACK : [interprétation] Je vous remercie.

 13   M. MANSFIELD : [interprétation]

 14   Q.   Excusez-moi. Je reviens à la question que je posais. J'essaie

 15   simplement de saisir l'esprit des questions posées à ce témoin par M.

 16   Topolski.

 17   X a affirmé ici que la teneur de cette déclaration en réalité émane

 18   de vous, et qu'il s'est contenté de confirmer les choses en acquiescant à

 19   vos propositions, mais qu'en fait, à l'exception de l'enlèvement à

 20   proprement parler, tout cela n'était pas vrai.

 21   R.  Je vous suis, mais ce que X a dit n'est pas exact, parce que je ne

 22   connaissais pas les mouvements des uns et des autres à Petrovo, dans le

 23   village. Je n'aurai pu inventer ou concocter la déclaration qu'il a faite

 24   le 16 juillet, ou plutôt, à propos du 16 juillet, et cetera, et cetera. Je

 25   lui ai posé des questions sur l'UCK dans le village de Petrovo, et en


Page 5423

  1   réponse, il s'est exprimé de son plein gré. Je peux le voir dans sa

  2   déclaration. Il dit : "Des membres de l'UCK sont venus à Granicka Reka

  3   [phon] et dans d'autres lieux." Je n'aurai pas pu inventer tout cela. C'est

  4   le récit qu'il a fait. Il ne l'a pas fait sous la contrainte. Il a fait ce

  5   récit de son plein gré.

  6   Je lui ai demandé : qu'est-ce qui passe au village de Petrova ? Il y

  7   a-t-il des membres de l'UCK ? Des questions de ce genre. Je ne me souviens

  8   plus exactement des choses précises que je lui ai demandé.

  9   Q.  Je comprends bien. Je ne vais pas entrer dans les détails de la

 10   déclaration. Je souhaitais simplement vous poser des questions générales.

 11   J'aimerais maintenant passer à votre rencontre suivante. Je vous renvoie

 12   notamment à l'intercalaire 27, pièce de l'accusation 211, versée sous pli

 13   scellé. Vous trouverez ce document à l'intercalaire suivant dans votre

 14   classeur. Ou plutôt, non, dans un document distinct.

 15   Vous devriez disposer de deux exemplaires de ce document; l'un en

 16   anglais -- non, en fait, trois. Suivez-moi sur n'importe quelle version;

 17   celle de votre choix. J'aimerais que nous déterminions précisément comment

 18   il s'est retrouvé dans votre bureau. Je vais commencer par vous donner

 19   certaines dates, certaines qui ont déjà été couvertes par vous, d'ailleurs.

 20   La date qui figure sur cette note officielle, à savoir, la date à

 21   laquelle vous avez consigné ces propos, c'est le 5 août. Voyez-vous cette

 22   date ?

 23   R.  Oui je vois, et c'est la date exacte. C'est vrai --

 24   puis-je poursuivre ?

 25   Q.   Vous devez me laisser poursuivre. Vous aurez le temps de le faire un


Page 5424

  1   peu plus tard. S'il y a quelque chose, s'il y a un point que vous voulez

  2   soulever plus tard, vous pourrez le faire lorsque j'aurai terminé.

  3   R.  Oui, je voulais simplement dire que c'est moi-même et

  4   M. Momcilo Sparavalo qui avons mené cet entretien.

  5   Q.  Oui.

  6   R.  C'est une note officielle.

  7   Q.  Oui, je comprends. Dans cette note officielle apparaît également le

  8   fait que vous l'auriez vu le 1er août 1998 [comme interprété].

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Afin de poursuivre, je vous renvoie au corps même de la déclaration. A

 11   la page 0 -- non, pardon. Peut-être qu'il y a des numéros de page en bas

 12   des pages. Ce sera peut-être plus rapide.

 13   R.  Ce n'est pas une déclaration. C'est une note officielle.

 14   Q.  Effectivement. A la deuxième page de la version anglaise, on voit la

 15   date du 25 juillet. Je pense que vous serez à même de retrouver cette date

 16   dans la version que vous compulsez. Le 25 juillet étant la date, il y a

 17   même l'heure, midi, date à laquelle il dit que des prisonniers ont été mis

 18   en rond dans la cour de la prison. Retrouvez-vous cette date ? La date du

 19   25 juillet.

 20   R.  D'après la déclaration, le 25 juillet vers 12 heures, les prisonniers

 21   ont été amenés à l'extérieur de la cour et on les a fait s'aligner.

 22   Q.  Si vous regardez le paragraphe qui se trouve juste en dessous. Il est

 23   clair qu'il dit que, plus tard au cours de cette même journée du 25, il a

 24   eu la possibilité ou l'opportunité de fuir. Ceci nous amène à la page

 25   suivante de la version anglaise 0306-6563 au milieu de la page à peu près.


Page 5425

  1   Ce que vous retrouverez à la troisième page de votre version, je pense.

  2   R.  Dans ma version ?

  3   Q.  Oui. Vous servez-vous de la version anglaise ou de la version serbe ?

  4   R.  La version serbe ?

  5   Q.  La version serbe. Voyez-vous l'endroit où il dit qu'il a eu

  6   l'opportunité de s'échapper le 25 juillet ? Ce paragraphe se trouve sur

  7   notre troisième page dans notre version juste en dessous des caractères

  8   gras indiquant : "Le nom des personnes ayant été condamnées," et cetera.

  9   Avez-vous retrouvé le passage ?

 10   R.  "Au nom du peuple, vous avez été condamnés" ?

 11   Q.  C'est cela, c'est ce qui figure en caractère gras, une citation.

 12   R.  "Au nom du peuple, vous avez été condamnés." Oui, c'est juste en

 13   dessous.

 14   Q.  Oui, effectivement, c'est juste en dessous, il indique à cet endroit

 15   qu'il a eu l'opportunité de s'échapper. Vous le voyez ?

 16   R.  Oui. Je le vois. (expurgée)

 17  (expurgée)

 18  (expurgée)," il a à nouveau donné le nom de l'individu et "utilisé

 19   l'occasion qu'il avait de fuir."

 20   M. BLACK : [interprétation] Un nom a été cité, pouvons-nous obtenir une

 21   expurgation, s'il vous plaît.

 22   M. MANSFIELD : [interprétation] Excusez-moi, tout à fait.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] A quelle ligne, s'il vous plaît ? Oui

 24   ça y est, nous l'avons vu.

 25   M. MANSFIELD : [interprétation] Oui, tout à fait, ligne 34.


Page 5426

  1   Q.  Bien. Sans prononcer le nom, s'il vous plaît, nous nous concentrons

  2   maintenant sur X. Sans lire ce qui est écrit, d'après votre récit un peu

  3   plus loin, c'est vous et votre collègue qui écrivez cela, vous dites la

  4   chose suivante : "X a déclaré qu'il avait couru au travers de la forêt de

  5   Lapusnik vers la route principale de Pristina-Pec et qui s'était livré à

  6   des policiers à un poste de contrôle de Komorane, qu'il leur avait fait

  7   récit de l'incident, après quoi il a été pris en charge par des officiers

  8   des services de la Sûreté d'Etat à Pristina qui ont mené un interrogatoire

  9   détaillé recueilli auprès de lui."

 10   Maintenant, j'aimerais que nous procédions par étapes. Vous avez dit

 11   à M. Black lorsqu'il vous a posé la question de savoir comment vous

 12   connaissiez la route qui mène à Lapusnik, vous avez dit que X vous avait

 13   expliqué comment y aller, parce qu'il avait suivi une partie de cette route

 14   lorsqu'il s'était enfui et qu'il avait rejoint la route principale et le

 15   poste de contrôle. Vous souvenez-vous avoir répondu cela à M. Black, le

 16   Procureur à votre droite ?

 17   R.  Oui, c'est exact. Lorsque j'ai parcouru l'endroit avec X, je lui ai

 18   demandé où nous allions. C'était la première fois que je me rendais sur

 19   place et il m'a indiqué la direction dont il était venu.

 20   Q.  D'accord. Pour que les choses soient bien claires --

 21   R.  Ce n'est pas un terrain connu pour moi. Je me souviens qu'il m'ait dit

 22   être venu de cette direction lorsqu'il s'était échappé.

 23   Q.  Oui, je comprends ce que vous dites, mais un instant, s'il vous plaît.

 24   Lorsque je lui ai posé des questions, malheureusement, je ne sais plus au

 25   cours de quelle journée cela a eu lieu. Vous n'avez pas de toute façon ce


Page 5427

  1   compte rendu, ce n'est pas pour vous que je donne cette référence. C'est à

  2   la page 2 416 et par la suite dans l'exemplaire dont je dispose.

  3   Je lui ai posé des questions précises sur ce point, et il a répondu

  4   que rien de tout cela n'était vrai, qu'il n'avait pas suivi cet itinéraire,

  5   qu'il avait suivi une direction totalement différente, qu'il avait traversé

  6   les champs, la campagne en direction de Ferizaj.

  7   Auriez-vous tromper et mal comprendre ce qu'il vous avait dit ?

  8   R.  Il n'aurait pas pu dire qu'il était allé en direction d'Urosevac, parce

  9   que comment vous expliquer c'est au sud-est et, à mon avis, il venait du

 10   nord. Le fait est que, lorsque je lui ai posé la question, parce

 11   qu'Urosevac se trouve dans la direction opposée, il devait se rendre vers

 12   le village de Crnoljevo. S'il était allé en direction de Stimlje, et bien

 13   il serait passé par Komorane, nous parlons de deux directions bien

 14   différentes. 

 15   Q.  Avez-vous la moindre idée qui expliquerait pourquoi il aurait, devant

 16   ce Tribunal, donné une version totalement différente de celle qu'il semble

 17   vous avoir donné lorsque vous l'avez interrogé et que vous l'avez emmené à

 18   Lapusnik.

 19   R.  Ce que je peux dire ici, c'est qu'il s'est présenté volontairement M. X

 20   afin de raconter ce qui lui était arrivé. Il a fait un faux témoignage ici

 21   pour des raisons évoquées plus tôt, à avoir la sécurité de sa personne et

 22   de sa famille.

 23   Q.  Ce que je vous dirais, c'est que ceci n'avait rien à voir avec la

 24   sécurité de sa famille.

 25   Pouvons-nous avancer un petit peu. Dans ce récit que vous avez


Page 5428

  1   consigné sur le papier, il est emmené à Pristina, enfin, il y a deux étapes

  2   distinctes. Tout d'abord, il se livre à un policier qui se trouvait à un

  3   poste de contrôle et il lui raconte, ou leur raconte  s'il y a plus d'un

  4   policier, l'incident en question. Commençons par là.

  5   Il n'est jamais revenu signer sa déclaration ou même avant avez-vous

  6   vérifié auprès de l'un quelconque des policiers qui se trouvaient au poste

  7   de contrôle de Komorane si, effectivement, il leur avait raconté ce qui lui

  8   était arrivé.

  9   R.  Etant donné les circonstances, lorsque, nous sommes venus de Pristina à

 10   Komorane avec M. X, le même groupe, qui se trouvait auparavant au poste de

 11   contrôle au cours de la nuit de son arrivée à Komorane, se trouvait là

 12   encore. Lors d'une brève conversation avec les policiers, ils m'ont dit

 13   qu'il avait déclaré avoir été enlevé, emmené à Lapusnik et avoir réussi à

 14   s'échapper.

 15   Ensuite, des officiers de la Sûreté d'Etat l'on emmené afin de

 16   l'auditionner, je ne sais si ces officiers sont venus au poste de contrôle

 17   de Komorane ou s'il a été emmené par des policiers jusqu'à eux. En raison

 18   des circonstances, nous avons eu la chance de tomber sur le même groupe de

 19   policiers qui étaient déjà présents au poste de contrôle lorsque M. X a

 20   raconté son histoire. Il n'y était pas allé pour s'expliquer, mais il était

 21   en train de s'enfuir et il était arrivé à ce poste de contrôle.

 22   Q.  Bien. Ce qui m'amène à la deuxième étape. Des officiers chargés de la

 23   Sûreté de l'Etat le prennent en charge, nous en sommes, n'est-ce pas au 25

 24   ?

 25   R.  Oui, oui, c'est cela. Je suis bien, le 25.


Page 5429

  1   Q.  Pouvez-vous nous dire où a eu lieu cette audition approfondie le 25 ?

  2   R.  Je ne le sais pas. Je présume, mais c'est une présomption, que cette

  3   audition a eu lieu dans les locaux de la Sûreté d'Etat à Pristina, mais je

  4   n'en sais rien puisqu'il s'agit là d'un crime grave, un enlèvement donc. Il

  5   est tout a fait probable que les officiers chargés de la Sûreté de l'Etat

  6   n'aient pas menés cette audition en plein milieu de la rue. Je ne l'aurais

  7   pas fait non plus. Ce que je veux dire, c'est que je ne sais pas

  8   véritablement où a eu lieu cet entretien.

  9   Q.  En fait, ce que j'aimerais vous demander, c'est de savoir si vous avez

 10   jamais essayé d'obtenir des informations supplémentaires concernant ce qui

 11   s'est passé par la suite et si vous avez demandé à obtenir un exemplaire de

 12   la déclaration obtenue à l'issue de cet entretien puisque vous étiez vous-

 13   même en contact avec cet individu ?

 14   R.  Non. Je n'ai jamais formulé cette demande parce que, comment dire, en

 15   règle générale, les officiers de la Sûreté de l'Etat ne transmettaient pas

 16   les déclarations qu'ils recueillaient aux officiers chargés de la Sécurité

 17   publique. C'était une question de procédure et d'organisation, de liens

 18   entre les responsables de la Sûreté de l'Etat et de la Sécurité publique.

 19   Je ne saurais dire pourquoi. D'ailleurs, je ne m'y aventurerais pas. Dans

 20   des cas exceptionnels, lorsque des poursuites doivent être engagées, et

 21   cetera, les choses sont peut-être différentes, mais, dans ce cas-ci, nous

 22   n'en avons pas vu le besoin. Je n'en ai pas ressenti le besoin parce qu'il

 23   avait raconté son histoire.

 24   Nous étions convaincus que ce qu'il disait était la vérité. Nous

 25   avons ensuite engagé des poursuites contre les auteurs, même s'ils étaient


Page 5430

  1   inconnus.

  2   Q.  Vous voyez ce que je vais vous demander c'est, en réalité, quelque

  3   chose de différent. Il dit qu'il a parcouru une certaine distance jusqu'à

  4   Ferizaj, qu'il n'est pas allé juste au poste de contrôle, qu'il n'est pas

  5   allé ailleurs non plus, parce que tout ceci n'est jamais arrivé.

  6   R.  Je peux vous dire qu'il a dit qu'il était arrivé au poste de contrôle

  7   de Komorane et qu'ensuite, il s'était trouvé dans les bureaux des

  8   responsables ou des officiers de la Sûreté d'Etat à Pristina et cela on

  9   peut le vérifier. Il a été libéré le 25 juillet. Il est venu nous voir le

 10  1er août, et il nous a raconté tout cela. Je ne sais pas combien de temps il

 11   a passé dans les bureaux de la Sûreté d'Etat ou à Pristina ou ailleurs,

 12   mais ce qui est certain, c'est qu'il s'y trouvait bien.

 13   Q.  En fait, ceci m'amène à la question suivante. Il n'a jamais été

 14   véritablement libéré, n'est-ce pas ?

 15   R.  Libéré d'où ? Vous voulez dire de la prison ?

 16   Q.  Je ne suis pas à même de savoir où il a été détenu, où il a été retenu

 17   pendant qu'il était auditionné, mais on ne sait pas s'il a été libéré de

 18   Pristina après l'entretien, n'est-ce pas ? Cela n'est pas dit.     

 19   R.  Il a été libéré de Pristina. Comme je l'ai déjà dit, il avait peur, il

 20   était angoissé et le responsable du secrétariat de l'Intérieur, Bogoljub

 21   Janicevic a dit à M. X de se représenter deux jours plus tard. Je ne sais

 22   pas combien de temps il a passé dans les bureaux de la Sûreté publique de

 23   Pristina. Comme je l'ai dit hier, nous n'avons pas mené d'audition

 24   approfondie parce qu'il était terrifié, il était angoissé. On lui a dit de

 25   revenir dans deux jours sur ordre du responsable du secrétariat.


Page 5431

  1   Q.  J'en viendrai à son état dans un instant. Je pense que vous serez

  2   d'accord avec moi pour dire que votre déclaration ne reflète pas le fait

  3   qu'il ait été libéré de Pristina. En fait, vous ne savez pas où il se

  4   trouvait en le 26 et le 31 juillet, la veille du jour où il est venu vous

  5   voir le 1er, n'est-ce pas ?

  6   R.  Si je devais dire à quel moment il a été libéré de Pristina, des

  7   bureaux de la Sûreté de l'Etat pour le dire, il aurait fallu que je le

  8   sache. Or, je ne l'ai pas fait figuré dans ma déclaration. Je lui ai

  9   demandé : "Qu'est-ce qui t'es arrivé ?" Il a dit : "J'ai parlé aux

 10   inspecteurs de la Sûreté de l'Etat à Pristina." Je suppose qu'il y est allé

 11   le 25 juillet, je ne sais pas quand il a été libéré et je ne sais pas où il

 12   se trouvait au cours de la période intermédiaire.

 13   Q.  Réfléchissez-y un instant. Vous ne tenez pas particulièrement à savoir

 14   où il se trouvait, n'est-ce pas au cours de cette période intermédiaire ?

 15   Se trouve-t-il simplement qu'il était détenu par des officiers de la Sûreté

 16   de l'Etat soit à Pristina, soit à Ferizaj ?

 17   R.  Non, il n'a pas été détenu à Urosevac. Je suppose que je lui aurais

 18   demandé où il était resté entre le 25 juillet et le 31, où il était

 19   demeuré, je suppose que je lui aurais posé la question.

 20   Q.  Comment est-il arrivé jusqu'à vous dans votre bureau ? Des policiers

 21   l'on-t-il amené jusque là ?

 22   R.  Il est venu dans mon bureau parce que, précédemment, il était allé dans

 23   le bureau du responsable du secrétariat de l'Intérieur d'Urosevac. Je ne

 24   sais pas quand il est entré en contact avec lui. Je sais simplement que le

 25   chef m'a téléphoné en disant : "Nous avons un cas à traiter, viens dans mon


Page 5432

  1   bureau," et je me suis exécuté. Puisque je dois me conformer aux ordres

  2   donnés par le responsable du secrétariat.

  3   Q.  Vous voyez, il dit qu'il a été intercepté par des policiers et amené au

  4   poste de police. Qu'avez-vous à nous dire là-dessus ?

  5   R.  Je ne connais pas les détails de la chose parce qu'il n'a rien dit, il

  6   n'a pas évoqué le fait qu'il aurait été amené ici par des policiers. Ce

  7   qu'il a dit c'est : "Je suis venu ici pour signaler un enlèvement. J'ai été

  8   enlevé."

  9   Q.  Oui, je vous suis.

 10   Avez-vous dû lui fournir des pièces d'identité ou des documents de ce

 11   genre ? 

 12   R.  Une carte d'identité vous voulez dire ?

 13   Q.  Oui, c'est cela.

 14   R.  Sincèrement, je ne sais pas s'il portait sur lui sa carte d'identité.

 15   S'il y a un numéro officiel d'identification indiqué dans cette note

 16   officielle, je suppose qu'il avait avec lui sa pièce d'identité. Si ce

 17   numéro ne figure pas dans cette note officielle, et bien, c'est qu'il n'en

 18   avait pas. Je ne m'en souviens plus précisément, ce ne sont pas des détails

 19   importants en ce qui me concerne. Je n'avais pas besoin d'obtenir une pièce

 20   d'identité puisque je le connaissais.

 21   Q.  Lorsque vous êtes venu l'interroger, vous avez dit, il y a quelques

 22   jours à M. Black à propos de cela, qu'un entretien bref avait eu lieu dans

 23   le bureau du responsable du secrétariat et qu'il y avait eu un autre

 24   entretien dans votre bureau. La question est la suivante : au cours de ces

 25   deux entretiens, avez-vous consigné par écrit les informations qu'il vous a


Page 5433

  1   livrées ?

  2   R.  Nous avons passé un certain temps dans le bureau du responsable du

  3   secrétariat. Par la suite, le chef m'a dit : "Dragan va dans ton bureau

  4   avec lui, et il pourra ainsi te faire le récit plus précis de ce qui lui

  5   est arrivé." Bien entendu, il y avait un nombre d'allées et venues dans le

  6   bureau du responsable. Il était occupé. Bien entendu, j'ai consigné dans

  7   mon carnet les informations qui m'ont été communiquées par lui.

  8   Q.  Ce carnet n'existe plus, n'est-ce pas ?

  9   R.  Je vous dis la vérité ici. En ce qui concerne mon carnet, il n'existe

 10   plus. Lorsque nous avons quitté le Kosovo-Metohija, j'ai essayé de

 11   localiser mon carnet, mais à ce jour, je n'ai pas réussi à mettre la main

 12   dessus, et pas seulement sur ce carnet, mais sur d'autres, car ces carnets

 13   contenaient des informations relatives à des interrogatoires que j'ai menés

 14   en bonne et due forme. Malheureusement, je ne suis pas parvenu à remettre

 15   la main dessus, et pas seulement sur ce carnet, mais également sur

 16   plusieurs autres.

 17   Q.  Ce que j'aimerais savoir également, c'est la chose

 18   suivante : Lorsque vous avez noté ce qu'il vous a dit, c'est-à-dire, le 5

 19   août, quatre jours plus tard, vous l'avez fait sur la base des notes que

 20   vous aviez prises et qui se trouvaient dans votre carnet, n'est-ce pas ?

 21   R.  Comme je l'ai déjà dit, je croyais qu'il devait revenir deux jours plus

 22   tard. Je l'ai attendu, j'en ai parlé à mes collègues et puis nous nous

 23   sommes dit : "Bon, allez, on va lui donner encore deux jours à peu près,

 24   deux jours de plus."

 25   La note officielle reprend tout ce que j'ai consigné par écrit dans


Page 5434

  1   mon carnet sur base, bien entendu, de l'entretien et des propos qu'il a

  2   tenus au cours de cet entretien.

  3   Q.  J'aurais une question de plus à vous poser à propos de X. Je

  4   souhaiterais vous faire lecture à présent d'une description de son

  5   apparence physique au moment où vous l'avez vu. "X était bouleversé, mais

  6   physiquement il avait l'air normal."

  7   Est-ce que cela vous paraît être une description fidèle ?

  8   R.  Oui. Il était bouleversé. Maintenant, physiquement ? Bien, écoutez,

  9   cela c'est ce que nous avons pensé. C'est ce qu'en a pensé également le

 10   chef. On a estimé qu'il serait bon qu'il se repose un petit peu pendant un

 11   jour ou deux, et puis qu'il revienne nous voir. Ceci dit, je ne suis ni

 12   médecin, ni expert médical. Je pourrais -- mais j'avais l'impression qu'on

 13   ne pouvait pas discuter de tous les détails avec lui. J'en ai parlé

 14   d'ailleurs au chef du secrétariat et il était d'accord avec moi.

 15   Q.  Oui, mais je viens de vous faire lecture d'une description qui en fait

 16   est la description que vous avez faite. Je répète : "X était bouleversé,

 17   mais physiquement, il avait l'air normal."

 18   Voilà très précisément ce que vous avez dit au bureau du Procureur,

 19   et ce, au mois de mai de l'année dernière. C'est exact, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit. Lorsque je disais,  "physiquement il avait

 21   l'air normal," j'entends par là qu'il parlait normalement des événements.

 22   Mais je ne suis pas un médecin, je le répète.

 23   Q.  Une question de plus, et je regrette de vous signaler qu'il va falloir

 24   qu'on retourne un petit peu en arrière parce que j'ai maintenant un

 25   document que je n'avais pas tout à l'heure.


Page 5435

  1   M. MANSFIELD : [interprétation] Il serait peut-être souhaitable que des

  2   exemplaires en soient remis au Président, ainsi qu'à Monsieur   Madame les

  3   Juges. Il s'agit de la deuxième page de la déclaration écrite d'Afrim

  4   Mustafa, deuxième page sur laquelle figure les signatures, alors que ces

  5   signatures ne figuraient pas sur nos propres exemplaires. Est-ce que l'on

  6   pourrait peut-être remettre au témoin un exemplaire ainsi qu'aux Juges.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Me permettez-vous d'aller aux

  8   toilettes ? Il ne me faut que 15 secondes.

  9   M. MANSFIELD : [interprétation] Ma question ne durera que 15 secondes

 10   aussi, mais enfin on ne va pas commencer à faire une course.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien, si l'on pouvait accompagner

 12   le témoin --

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je peux attendre un petit peu.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous avez 15 secondes, Monsieur

 15   Mansfield.

 16   M. MANSFIELD : [interprétation]

 17   Q.  S'il vous plaît, est-ce que vous pouvez confirmer que dans cette

 18   déclaration il s'agit bien de la déclaration de ce jeune homme de 16 ans,

 19   Mustafa Afrim. Vous disiez tout à l'heure que vous ne voyez pas la

 20   signature. Or, est-ce que vous pouvez nous confirmer que maintenant cette

 21   signature apparaît sur le document et que vous êtes à même de la

 22   reconnaître ?

 23   R.  Oui, c'est exact. Cette déclaration a été recueillie par Momcilo

 24   Sparavalo et par moi-même. Je ne me souviens pas de la personne en

 25   question, mais maintenant que vous me montrez la page avec la signature,


Page 5436

  1   effectivement, c'est ma signature. Cela confirme que c'est bien M.

  2   Sparavalo et moi-même qui avons recueilli cette déclaration.

  3   M. MANSFIELD : [interprétation] Je crois qu'il y a trois exemplaires

  4   supplémentaires, Monsieur le Président et Madame et Monsieur les Juges, si

  5   vous ne les avez pas. Deuxième page.

  6   Oui. Merci. Je n'ai plus de questions.

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Mansfield.

  8   Compte tenu des circonstances, je propose que nous interrompions nos

  9   travaux à présent. Il y a eu quelques expurgations, je vous propose de

 10   reprendre l'audience à six heures moins dix.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 12   --- L'audience est suspendue à 17 heures 21.

 13   --- L'audience est reprise à 17 heures 52.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Guy-Smith.

 15   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

 16   Contre-interrogatoire par M. Guy-Smith : 

 17   Q.  [interprétation] Monsieur Jasovic, en 1986, vous avez accédé au poste

 18   d'inspecteur; est-ce exact ?

 19   R.  Oui, c'est exact.

 20   Q.  Au moment où vous êtes devenu inspecteur, vous a-t-on confié comme

 21   tâche celle d'inspecteur responsable de la délinquance politique ?

 22   R.  Jusqu'à ce moment-là, je ne sais pas si je dois mentionner le prénom et

 23   le nom de famille de l'Albanais qui était en charge de cette tâche. A cette

 24   époque-là, dans ce type de tâche, en fait, on parlait de conflits

 25   interethniques et délinquances politiques. Dans ce contexte, je ne suis pas


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  1   tout à fait sûr, mais c'est le nom qu'on lui donnait, en tout cas, plus ou

  2   moins, quelque chose dans ce genre-là. Il faudrait que je relise la

  3   décision officielle qui me désignait à ce poste.

  4   Q.  A propos de cette tâche que vous assumiez en tant qu'inspecteur chargé

  5   de la délinquance politique, est-ce que vous pourriez nous dire plus ou

  6   moins en quoi consistaient ces attributions ? Qu'est-ce que vous étiez

  7   censé faire ou inspecter ?

  8   R.  Voyez-vous, Monsieur, - et là, je vous parle très franchement et à

  9   titre tout à fait honorable, - dans ces années-là, il y avait des conflits

 10   interethniques entre les membres de différents groupes ethniques. Dans tous

 11   les conflits de ce type, il y avait des victimes qui étaient des Serbes et

 12   qui avaient été victimes d'attaques perpétrées par les Albanais. Il y avait

 13   des luttes physiques, des attaques, on abattait les arbres de vergers, on

 14   se livrait à des persécutions sur la personne d'enfants, on portait

 15   préjudice aux cultures. C'est sur ces questions-là que nous travaillions.

 16   Q.  Très bien. A partir du moment où vous êtes devenu agent de police et

 17   jusqu'au moment où vous êtes devenu inspecteur en charge des questions de

 18   délinquance politique, vous aviez été associé à toute une série de tâches

 19   et attributions. Si j'ai bien compris, vous aviez commencé à perfectionner

 20   votre technique pour ce qui est des entretiens et interrogatoires; est-ce

 21   exact ?

 22   R.  Oui, c'est exact. J'occupais le poste de commandant adjoint du poste de

 23   police. J'ai suivi un cours à Zemun pour devenir commandant. Par la suite,

 24   j'ai suivi un cours opérationnel qui m'a permis de devenir inspecteur. Ce

 25   cours je l'ai suivi à Zemun également, les deux ans qui ont suivi la


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  1   deuxième -- l'école secondaire pour le ministère de l'Intérieur.

  2   Q.  Maintenant, s'agissant des méthodes que vous appliquiez pour vos

  3   interrogatoires.

  4   R.  Tout opérationnel a sa propre méthode quand il s'agit de mener un

  5   entretien, avoir une déclaration forcée, dépasser les limites de

  6   l'autorité. Dans chaque entretien, ma propre méthode, je crois que je l'ai

  7   dit il y a deux ans, était toujours la même. Elle ne changeait pas. Je

  8   rédigeais des notes officielles, et je n'acceptais aucune information si

  9   elle n'émanait que d'une seule source. Si trois sources me fournissaient le

 10   même élément d'information, à ce moment-là, j'estimais personnellement que

 11   les informations étaient fiables. Maintenant, pour ce qui est des

 12   entretiens, je ne sais pas ce que veut dire votre question. Qu'est-ce que

 13   vous entendez par là ? Vous voulez dire recueillir des dépositions, ou bien

 14   la rédaction de notes et informations ?

 15   Q.  Nous aurons la possibilité de parler de ces deux situations. Pour

 16   l'heure et pour ce qui est de l'homme avec lequel vous aviez des entretiens

 17   sur des questions de délinquance politique, les informations que vous

 18   receviez, vous les receviez d'un certain nombre de sources. Ces sources

 19   vous en avez discuté avec nous, c'est-à-dire que vous receviez les

 20   informations de la part d'un individu qui était un informateur officiel.

 21   Vous aviez également des sources opérationnelles. Là, il s'agissait

 22   d'individus auxquels vous confiiez une mission, puis, vous receviez des

 23   informations d'une troisième source, à savoir, contact à titre amical ou

 24   contacts amicaux. Si j'ai bien compris, ces personnes-là sont des gens avec

 25   lesquels vous alliez boire un café ou boire un verre. Vous aviez également


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  1   des informations émanant d'autres sources de renseignement. Est-ce que cela

  2   vous paraît une description correcte ?

  3   R.  Entre 1986 et 1990, s'agissant des conflits ethniques, nombreux sont

  4   les cas et les affaires qui n'ont jamais été résolus. En règle générale, il

  5   s'agissait des proches et des familles des victimes qui en parlaient. Là,

  6   il s'agissait de délits pour la plupart et non pas de crimes.

  7   Pour ce qui est des contacts amicaux, et bien, un contact amical,

  8   c'est quelqu'un qui, éventuellement, au cours d'une conversation, donnera

  9   de son plein gré telle ou telle information. Par exemple, je n'ai jamais

 10   insisté auprès d'un ami pour qu'il me fournisse telle ou telle information.

 11   Ceci étant dit, si nous avions l'occasion de nous rencontrer à plusieurs

 12   reprises, et si par hasard nous étions assis dans un café, il se peut qu'il

 13   me fournisse une information de son plein gré, à titre volontaire. Un

 14   informateur, par contre, parfois sait qu'il est informateur, parfois il ne

 15   le sait. C'étaient les définitions qui figuraient dans les règles. En

 16   revanche, un collaborateur, cela c'était quelqu'un qui était censé savoir

 17   qu'il fournissait des informations à la police.

 18   Q.  S'agissant des hommes que vous décrivez comme étant des informateurs,

 19   ce sont des gens, si j'ai bien compris, que vous utilisiez - et qui ne le

 20   savaient pas - et que vous les utilisiez afin de recueillir des

 21   informations. Vous cherchiez des individus, vous les identifiiez, et vous

 22   veilliez à ce que ces individus vous fournissent des informations sur des

 23   sujets qui vous préoccupaient.

 24   R.  Un contact officiel, c'est une chose. Un contact officiel, il sait

 25   qu'il travaille pour les services de Renseignement. Maintenant, un contact


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  1   opérationnel ou un contact amical, c'est autre chose. Ces contacts-là, ce

  2   sont des personnes qui, volontairement, de leur plein gré, fournissent des

  3   informations. Là, je parle de moi-même, je parle de mes propres principes,

  4   de mes propres méthodes de travail. Maintenant, pour ce qui est de mes

  5   collègues, là, je n'en sais rien. Un contact officiel, c'est quelqu'un qui

  6   recueille des informations probablement auprès de ses proches et des

  7   membres de sa famille. Je ne me suis pas intéressé très près à la façon

  8   dont ils recueillaient l'information.

  9   Q.  Comment définissait-on un contact officiel ? Est-ce que vous aviez un

 10   registre dans lequel vous demandiez à quelqu'un de fournir les informations

 11   et que vous leur fournissiez une rémunération à la semaine ou au mois;

 12   quelque chose comme cela ?

 13   R.  Je ne sais pas. Je ne peux que vous parlez de moi-même. Les personnes à

 14   qui on offre de faire cela, je ne peux pas vous expliquer ce qui se faisait

 15   chez mes collègues. S'agissant de la rémunération, là, c'est au chef du

 16   secrétariat qu'il faudrait poser la question. Il serait beaucoup mieux à

 17   même de vous l'expliquer, parce que cela, c'est un aspect qui ne me

 18   concernait pas et dont je ne m'occupais pas. Pour ce qui est de mes propres

 19   contacts, ils fournissaient toujours l'information à titre volontaire. Ils

 20   se portaient volontaires pour être mon contact.

 21   Q.  Cette forme de collecte d'informations très spécifiques, j'entends par

 22   là l'information recueillie auprès de contacts amicaux qui se sont portés

 23   volontaires, est-ce que cette collecte d'informations a changé après 1998,

 24   ou bien est-ce que vous avez utilisé la même méthodologie que celle à

 25   laquelle vous aviez recours au cours des années précédentes ?


Page 5441

  1   R.  J'ai appliqué la même méthode, la même méthodologie avant et après.

  2   Cela se faisait en conformité avec les instructions portant sur

  3   l'inscription, l'enregistrement des informateurs. Je ne peux pas vous

  4   donner le titre exact de ces instructions au ministère de l'Intérieur.

  5   Q.  S'agissant des renseignements que vous obteniez, si j'ai bien compris,

  6   une des choses que vous faisiez au cours de l'année 1998, c'était que vous

  7   parliez à vos collègues de la police, et vous parliez de choses qui vous

  8   intéressait tout particulièrement; est-ce exact ?

  9   R.  Vous faites allusion aux collègues du secrétariat de l'Intérieur, là ?

 10   Q.  Bien sûr.

 11   R.  Pour ce qui est des renseignements ou des informations, nous avions des

 12   inspecteurs qui étaient des Albanais et qui étaient mieux à même de

 13   recueillir ces informations que les inspecteurs d'appartenance ethnique

 14   serbe.

 15   Q.  Permettez-moi de vous poser cette question : vous pouviez écrire une

 16   note officielle, vous nous l'avez dit, vous nous avez dit d'où venait vos

 17   informations s'agissant d'une note officielle. Là, je vais vous donner un

 18   exemple dans quelques instants, mais si vous utilisez la terminologie

 19   "renseignement", quand vous dites renseignement vous faites référence à des

 20   officiers de police, des officiers de la Sûreté d'Etat, des officiers

 21   albanais ? A qui faites vous faites référence très exactement ? Pourriez-

 22   vous nous le dire, s'il vous plaît ?

 23   R.  Voyez-vous les collègues du secrétariat pouvaient difficilement être

 24   mes opérationnels, mes contacts amicaux ou mes informateurs officiels

 25   puisqu'il s'agissait de personnes qui avaient le statut de responsables


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  1   officiellement agréés, si vous voulez. Il fournissait des informations de

  2   leur plein gré et à titre volontaire.

  3   Q.  Non, cela je comprends bien, mais c'est une autre question que je vous

  4   pose. Je crois que vous avez dit très clairement que vous receviez des

  5   informations de ce que j'appellerais des sources de type dit civil. Des

  6   gens qui n'étaient pas employés par le service de police ou par la Sûreté

  7   de l'Etat et leur service.

  8   Non, je fais référence aux individus appartenant au service de

  9   Sécurité. Est-ce que là vous receviez des informations de la part de ces

 10   gens-là, de ce genre de personnes et leurs noms apparaissent dans vos notes

 11   officielles.

 12   R.  Si j'ai bien compris la question pour ce qui est des employés de la

 13   Sûreté de l'Etat, dans un assez grand nombre de cas, nous travaillons

 14   conjointement. Si nous travaillions avec des parties, alors l'information

 15   émanait des déclarations faites. Nous interrogions des personnes ensemble.

 16   Puis ensemble, nous rédigions des notes officielles. Enfin, je n'inclurais

 17   pas dans des notes officielles des informations émanant d'employés de la

 18   Sûreté de l'Etat.

 19   Q.  Lorsque vous travailliez sur une affaire donnée, j'imagine que ce que

 20   vous faisiez c'était que vous donniez à telle affaire tel numéro d'affaire.

 21   De manière à ce que soit désignée clairement l'enquête, d'un manière

 22   précise, de manière à ce que vous puissiez assurer le suivi de tout ce qui

 23   se passait dans le courant de votre enquête, n'est-ce pas ? Je vais vous

 24   donner un exemple. Cela pourra peut-être vous aider à mieux comprendre. Je

 25   vais vous citer un exemple et vous devriez avoir les documents sous les


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  1   yeux. Il s'agit de l'intercalaire numéro 9.

  2   R.  Un petit instant, s'il vous plaît.

  3   Q.  Là, je vais vous parler de la toute première page de l'intercalaire 9.

  4   Je crois qu'il va falloir que vous reculiez d'une page. Tout en haut, il

  5   est marqué, voyez-vous, "Case A/VI-025". Vous voyez ? Il va falloir que

  6   vous reculiez d'une page. Revenez une page en arrière. Vous voyez tout en

  7   haut de la page ?

  8   R.  Oui, oui.

  9   Q.  Est-ce que c'est là un numéro d'affaire que vous avez donné à ce

 10   dossier ?

 11   R.  Vous faites référence au numéro 101 en haut ?

 12   Q.  Non, je fais référence à la page juste avant celle que vous avez sous

 13   les yeux. Ceci étant dit, si vous voulez que nous examinions cette page-là,

 14   cela ne me pose aucun problème.

 15   R.  Non, non, c'est bon, j'ai trouvé la page à laquelle vous faites

 16   référence. Il s'agit d'une note officielle enregistrée au numéro 101/98,

 17   auprès du secrétariat de l'Intérieur d'Urosevac.

 18   Q.  Comment ce numéro a-t-il été choisi, est-ce que c'est un numéro que

 19   vous lui avez donné à ce document ?

 20   R.  Il y a une personne qui est employée, c'est sa tâche, une personne du

 21   secrétariat de l'Intérieur d'Urosevac. Les notes officielles, les

 22   informations et tout ce que j'ai mentionné, le chef du secrétariat, afin

 23   d'éviter qu'il y ait des fuites et pour des raisons de confidentialité, si

 24   le chef -- parce que si chaque note et chaque information rédigées par nos

 25   soins, nous n'en savions rien, à moins que cela nous soit envoyé et que


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  1   cela relève de nos compétences. Ce n'était que les opérationnels qui

  2   savaient. Mes supérieurs hiérarchiques immédiatement au-dessus de moi

  3   étaient responsables des inspecteurs d'une manière générale et du crime

  4   économique également. C'est le chef du département de la police chargée de

  5   la criminalité qui se chargeait d'enregistrer ces notes officielles, et si

  6   le chef du secrétariat pouvait désigner un agent de police ordinaire et

  7   s'il avait suffisamment confiance en lui pour qu'il enregistre ces notes

  8   officielles, alors ces notes étaient données dans un ordre croissant.

  9   Par exemple, aujourd'hui je donnerais le numéro 101 à une note, et un

 10   collègue rédigera la prochaine note et son numéro sera 102. Donc, il

 11   commence par 1, au début d'une année par exemple et puis cela continu ainsi

 12   de suite jusqu'à la fin de l'année. Cela fait toujours référence à une

 13   année donnée. Je ne sais pas si j'ai été clair.

 14   Q.  Oui, oui. Vous avez été clair, maintenant je vous demanderais de bien

 15   vouloir examiner la note officielle qui porte la cote K0225793. Cela

 16   devrait être la sixième page à l'intérieur du document, plus ou moins. Là,

 17   vous verrez qu'il est indiqué également - cela est inscrit à la main - on

 18   voit apparaître le chiffre A/VI-25/167. Ce sont des numéros que vous avez

 19   inscrits dans ce document ?

 20   R.  A/VI-025, ce numéro -là, c'est Branko Debeljkovic qui l'a inscrit. Il

 21   est le chef du département d'enquêtes criminelles. Permettez-moi de vous

 22   expliquer cela de manière un peu plus détaillée.

 23   En général, ce que je faisais pour éviter toute erreur, je lui demandais,

 24   je lui disais affaire A, affaire D. Si une personne qui a été enlevée ou

 25   qui est décédée, on pouvait la désignée par la lettre A ou D ou cela


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  1   pouvait être l'inverse, je ne sais pas qui a enregistrer ceci, là je sais

  2   que c'est la note officielle numéro 101 parce que cela été enregistré.

  3   C'est à Leskovac, au secrétariat de l'Intérieur, c'est leur genre de

  4   numérotation. Mon collègue Branko Debeljkovic travaillait sur des affaires

  5   d'enlèvements et de meurtres, maintenant il travaille à Belgrade. Je ne

  6   pourrais pas vous dire qui a adopté cette numérotation. Il en sait beaucoup

  7   plus que moi.

  8   J'ai préparé une note officielle. Cette note officielle, elle a été

  9   inscrite, enregistrée si vous voulez par ses soins. Cette inscription et

 10   cette numérotation A/VI, c'est une sorte de code, pourrait-on dire. Je sais

 11   que les responsables du TPIY ont demandé à Belgrade, peut-être que ce sont

 12   eux qui ont donné cette cote au document. C'est peut-être le MUP à Belgrade

 13   aussi.

 14   Q.  A propos de la fin de cette numérotation, le 25, est-ce que vous savez

 15   à quoi cela correspond, ce 25 à la fin ? Il y a le VI romain, puis ensuite

 16   il y a un trait d'union, puis il y a le 25 ? Si vous le savez tant mieux.

 17   Si vous ne le savez pas ce n'est pas très grave.

 18   R.  Je préfère ne pas dire de contrevérités. Je ne sais pas. Je ne peux pas

 19   expliquer à quoi cela correspond. Je ne sais pas, cela pourrait être

 20   l'année dernière. Cela pourrait être, il y a deux ans. Pour moi, en tout

 21   cas, cela ne veut strictement rien dire.

 22   En revanche, ce qui est pertinent pour moi, c'est le contenu de la

 23   note officielle. Ceci étant dit, je peux vous expliquer cette référence

 24   101/98.

 25   Q.  Bien, si vous ne pouvez pas l'expliquer, je ne vous poserai plus de


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  1   question sur ce point. Expliquez-moi ceci.

  2   S'agissant d'une organisation s'appelant RDB, la Sûreté de l'Etat,

  3   est-ce que cela vous dit quelque chose cette organisation ? Est-ce que vous

  4   avez déjà eu affaire à cette organisation ?

  5   R.  RDB, c'est la Sûreté de l'Etat. C'est le secteur Sûreté de l'Etat ou

  6   département Sûreté de l'Etat. Si vous voulez savoir ce qui se passait

  7   concrètement à Urosevac, je peux vous dire que nous avions quelques

  8   contacts parce qu'ils nous arrivaient de coopérer sur certaines missions.

  9   Il y a deux jours, lorsque j'ai fait lecture de certaines déclarations, il

 10   y avait des déclarations qui ont été prises par mes soins et par ceux de M.

 11   Sparavalo, mais il y en a d'autres qui ont été recueillies conjointement

 12   par nos services et ceux de la Sûreté de l'Etat. Cela n'était pas quelque

 13   chose qui était systématique. Parfois les inspecteurs de la Sûreté de

 14   l'Etat venaient me rendre visite ou venaient me voir dans mon bureau. Il

 15   est bien évident qu'il fallait que je maintienne des contacts avec eux.

 16   Q.  Est-ce que vous travailliez avec quelqu'un dont le nom est Momcilo

 17   Momcilovic ?

 18   R.  Je n'ai jamais travaillé avec lui. Il me semble qu'il était responsable

 19   d'un détachement de la Sûreté de l'Etat. C'est un niveau hiérarchique

 20   inférieur à celui du département. Il est la personne qui a été assassinée à

 21   Lipjan, il y a de cela deux ans. Je ne sais pas si c'est lui. Il y a deux

 22   ans, ou peut-être que cela n'était pas il y a deux ans. Vous savez cette

 23   histoire du travailleur qui l'a assassiné. Je sais qu'il a été assassiné,

 24   cela, oui. Je connais cette personne, mais je n'ai jamais travaillé avec

 25   lui, avec Momcilo Momcilovic.


Page 5447

  1   Q.  Est-ce que vous avez déjà partagé des informations avec lui à propos

  2   l'une ou l'autre de vos enquêtes ?

  3   R.  Non, parce qu'ils étaient responsables de la zone de Lipjan, et c'est

  4   là une zone qui relevait de la juridiction du centre de la Sûreté d'Etat de

  5   Pristina. Je ne me souviens pas très exactement du titre de cette

  6   institution ou du nom de cette institution. En tout cas, c'était une

  7   organisation séparée de la Sûreté de l'Etat. Ils avaient leurs propres

  8   bureaux et leurs officiers supérieurs et les agents responsables de la

  9   sûreté de l'Etat.

 10   Q.  S'agissant maintenant du type d'enquêtes auxquelles vous vous livriez

 11   encore une fois, il y avait des informations, par exemple, émanant du

 12   village de Belince. Cela, c'est quelque chose dont vous vous seriez occupé

 13   à l'époque, en 1998 ?

 14   R.  Comme je l'ai déjà dit, je ne quittais pas mon bureau. Je procédais

 15   essentiellement à des auditions dans mon bureau. Je ne peux pas me rappeler

 16   quand j'ai été, pour la dernière fois, à Belince. En 1998, certainement, je

 17   n'étais pas dans ce village. Si vous parlez de l'affaire où des gens ont

 18   été blessés.

 19   Q.  Vous n'avez pas eu à classer des notes officielles ou archiver des

 20   notes officielles concernant des renseignements que vous auriez reçus

 21   concernant Belince, n'est-ce pas ? Parce que ceci n'était pas de votre

 22   ressort; c'est exact

 23   R.  Je veux dire la vérité. Il y avait des notes officielles. Je ne peux

 24   pas me rappeler des circonstances auxquelles elles se référaient. Je sais

 25   qu'il y en a eu. Je ne sais pas si je les ai eues au secrétariat d'Urosevac


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  1   qui avait été déplacé à Leskovac.

  2   Je vous dirais volontiers. Je sais que des notes officielles ont été

  3   rédigées, mais je ne peux pas me rappeler des circonstances, les tenants et

  4   les aboutissants, le comment et le pourquoi. Cette note officielle a été

  5   rédigée par des policiers de Stimlje, et elles étaient ensuite traitées et

  6   enregistrées, ensuite elles m'étaient transmisses, elles concernaient

  7   essentiellement cet événement, et je procédais à des auditions. Je ne peux

  8   pas dire que je ne l'ai pas fait. Mais je ne peux pas m'en souvenir.

  9   Q.  Est-ce que vous avez présenté une note officielle en ce qui concerne

 10   les renseignements que vous aviez reçus ?

 11   R.  Non. Je n'ai pas présenté de note officielle concernant cet événement.

 12   Je ne me souviens que j'aie procédé à certaines auditions et qu'il y a eu

 13   certaines déclarations faites ou des auditions où j'ai recueilli des

 14   renseignements. Cela je m'en souviens. Mais je ne peux plus dire avec qui

 15   j'y ai procédé. Il n'était pas nécessaire de s'en souvenir.

 16   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de présenter une note officielle en

 17   ce qui concerne les renseignements relatifs aux divers aspects de l'UCK et

 18   à leur pouvoir en octobre 1998, dans laquelle vous auriez expliqué,

 19   notamment, vous auriez parlé des villages de Petrova, Belince, Rance,

 20   Godance. Est-ce que c'est quelque chose que vous auriez fait ?

 21   R.  Certainement, je ne me rappelle pas le mois ou la date exacte, mais en

 22   ce qui concerne les mouvements de l'UCK, j'ai présenté non seulement une

 23   note, mais plusieurs notes. Je ne me souviens pas des dates pourtant. Cela

 24   a pu être en octobre, novembre, décembre. Mais Sparavalo et moi-même

 25   rédigions des notes officielles, et peut-être même des mémorandums. Je ne


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  1   peux pas vous dire comme cela exactement quoi, mais nous préparions tous

  2   les deux des notes officielles et des comptes rendus des renseignements ou

  3   des mémorandums.

  4   Q.  En ce qui concerne, une fois encore, les endroits où vous receviez des

  5   renseignements, est-ce que vous travailliez avec un inspecteur dont le nom

  6   était Djura du poste de police de Magure ?

  7   R.  Pourriez-vous répéter son nom ou son nom de famille ? Je ne suis pas

  8   sûr.

  9   Q.  Son nom était Djura. Il se peut que cela ait été son prénom. Il était

 10   inspecteur au poste de police Magure, peut-être que je prononce mal son

 11   nom ?

 12   R.  Peut-être Magure. Magura n'existe pas. Je ne le connais pas. Magure et

 13   Goresh. Je ne sais pas s'ils sont dans notre municipalité ou dans la

 14   municipalité de Lipjan. Je ne connais pas cette personne. Je sais qu'à

 15   Magure, il y a un poste de police mais je ne sais pas s'il utilise les

 16   services d'un inspecteur. Je connais des inspecteurs qui viennent de Lipjan

 17   s'il y a des enquêtes à diligenter. Je ne sais pas avec certitude s'ils

 18   avaient recours à des inspecteurs et s'ils étaient promus à un rang plus

 19   élevé dans l'organisation ou dans le tableau du ministère de l'Intérieur,

 20   mais je ne connais pas cette personne Djura. Il n'y a aucune raison pour

 21   moi de ne pas dire la vérité.

 22   Q.  Est-ce que vous auriez connaissance d'un autre policier ou inspecteur

 23   qui avait la même réputation que celle qui vous avait été attribuée, l'une

 24   d'être un homme dangereux et l'autre d'être un homme qui passe les autres à

 25   tabac ?


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  1   R.  Personnellement, je n'en connais pas. Je ne sais pas à qui ceci se

  2   réfère, à quel poste de police ou à quel secrétariat de l'Intérieur cette

  3   personne travaillait.

  4   Q.  D'après ce que je comprends, alors que vous êtes ici assis dans cette

  5   salle, votre déclaration, votre déposition, c'est qu'aucun policier serbe

  6   n'a jamais torturé de détenu albanais; c'est bien cela ? C'est la position

  7   que vous prenez et que vous soutenez devant nous ?

  8   R.  Ma position, Maître, c'est que je ne sais rien de tout cela. Ce que je

  9   dis c'est, si j'ai commis des crimes, la justice gagnera, la justice sera

 10   faite. Je ne suis pas venu ici pour dire des contrevérités, mais seulement

 11   pour dire la vérité. Je suis convaincu que la justice prévaudra.

 12   Q.  En ce qui concerne la question dont vous parliez un peu plus tôt, à

 13   savoir, un massacre à Racak, est-ce que votre position est de dire que rien

 14   de ce genre n'a jamais eu lieu; c'est exact ?

 15   R.  Est-ce que vous pourriez clarifier votre question ? J'ai dit qu'il n'y

 16   avait pas eu de massacre à Racak. Je n'y étais pas. Je ne sais pas comment

 17   ceci s'est déroulé d'une manière détaillée. Je ne connais absolument aucun

 18   détail à ce sujet.

 19   Q.  Une dernière question, si vous le permettez. Après 1970 --pardon, 1997,

 20   vous ne quittiez plus votre bureau pour faire du travail à l'extérieur.

 21   Toutes les auditions auxquelles vous procédiez avaient eu lieu dans votre

 22   bureau; c'est exact ? Vous n'alliez pas sur le terrain. Des gens venaient

 23   vous trouver où vous étiez amené. C'est bien cela ?

 24   R.  Vous voyez, conformément aux ordres que j'avais du chef de secrétariat,

 25   je remplissais essentiellement mes fonctions avec mon collègue Sparavalo,


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  1   dans nos bureaux, parce qu'il y avait deux inspecteurs qui étaient chargés

  2   du service homicide, ou meurtre. Ils allaient faire des enquêtes in situ.

  3   Il y avait un Albanais, l'autre était un Serbe. Je me souviens, comme je

  4   l'ai dit hier, que je suis une fois allé avec Danica Marinkovic, la juge

  5   d'instruction, pour procéder à une enquête sur les lieux, lorsque le chef

  6   du poste de police de Kacanik a été tué le 20 juillet. Mais je voudrais me 

  7   rappeler avec quelle juge d'instruction je suis allé là bas. Mais ensuite,

  8   des bombes à fragmentation sont tombées. Elles étaient jetées par l'OTAN.

  9   Elles ont tué cinq enfants albanais dans un village près de Kacanik. Je ne

 10   me rappelle pas les noms, parce que je suis de Pec. Je ne connais pas bien

 11   la situation là-bas.

 12   Q.  Je comprends votre réponse, mais ma question était un peu plus précise.

 13   Vous aviez dit que vous ne quittiez pas votre bureau et que vous procédiez

 14   aux auditions des personnes qui venaient vous parler, où qui étaient

 15   amenées à votre bureau, et que vous ne quittiez pas le poste de police.

 16   Est-ce que c'est exact ce que je viens de dire ? Est-ce que c'est cela que

 17   vous nous dites aujourd'hui ici ?

 18   R.  Vous avez raison. Toutes les auditions interrogatoires avaient lieu

 19   dans ce bureau, mais pas seulement mon bureau. Comment pourrais-je dire ?

 20   Les personnes étaient amenées. Il était possible que des policiers de

 21   Kacanik ou de Stimlje procèdent à ces interrogatoires.

 22   Q.  Simplement le fait que vous procédiez à des auditions.

 23   R.  J'ai procédé à des auditions ou interrogé des personnes qui m'étaient

 24   amenées par la police ou des personnes qui venaient de leur propre gré pour

 25   rendre compte d'une affaire ou d'une autre.


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  1   Q.  En ce qui concerne ces personnes qui vous étaient amenées par la

  2   police, vous n'étiez pas avisé d'avance qu'elles venaient vous voir. C'est

  3   cela que vous dites ici aujourd'hui. Que la police arrêterait certaines

  4   personnes et vous les amènerait de façon à être interrogé par vous sans que

  5   vous le sachiez d'avance ?

  6   R.  C'est exact. Je ne savais pas d'avance qui ils allaient amener.

  7   Q.  Cela devait être un travail très passionnant. Je vous remercie. Je n'ai

  8   pas d'autres questions.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, M. Guy-Smith.

 10   Monsieur Black.

 11   M. BLACK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Nouvel interrogatoire par M. Black : 

 13   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Jasovic. J'ai juste quelques

 14   questions à vous poser.

 15   R.  Bonjour, Monsieur.

 16   Q.  M. Guy-Smith venait de vous poser des questions en ce qui concerne les

 17   auditions interrogatoires et sur le point de savoir si vous aviez travaillé

 18   en dehors de votre bureau. Que se passait-il lorsque vous travailliez avec

 19   votre source enregistrée ? Est-ce que vous obteniez des renseignements de

 20   cette personne dans votre bureau, ou où cela avait-il lieu ? Vous n'avez

 21   pas besoin d'être précis en ce qui concerne un endroit donné, mais je

 22   voudrais savoir si c'était dans votre bureau ou en dehors de votre bureau ?

 23   R.  Je fais une distinction entre les sources enregistrées. Tous les

 24   contacts avec les sources officiellement enregistrées étaient maintenus en

 25   dehors des locaux du SUP d'Urosevac et en dehors du secteur d'Urosevac,


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  1   dans un autre lieu, pas nécessairement dans une autre municipalité, que ce

  2   soit Lipljan, Pristina, ou une autre ville. Je pourrais vous donner une

  3   liste de ces villes si vous le voulez.

  4   Q.  Non, cela va. Ce n'est pas nécessaire. Par ailleurs, outre les

  5   interrogatoires auditions, est-ce que vous avez rempli d'autres tâches de

  6   police en dehors de votre bureau en 1998 ?

  7   R.  Je n'accomplissais pas d'autres tâches de police si ce n'est de mon

  8   bureau, comme je l'ai dit tout à l'heure. Une ou deux fois, sur les ordres

  9   du chef de poste, j'ai accompagné le juge d'instruction qui instruisait une

 10   affaire crime pour aller faire une descente sur les lieux et enquêter sur

 11   les lieux.

 12   Q.  Plusieurs fois dans votre déposition, vous avez fait référence à la

 13   sûreté de l'Etat et à la sécurité publique. Je ne sais pas si vous pouvez

 14   le faire, mais pourriez-vous, s'il vous plaît, nous expliquer brièvement la

 15   différence entre ces deux branches de la police.

 16   R.  Je peux vous l'expliquer. La sécurité publique s'occupe de prendre des

 17   actions préventives pour prévenir la perpétration de crimes, pour empêcher

 18   que des crimes ne soient commis, pour identifier les personnes qui auraient

 19   commis des crimes au vu des personnes inconnues, pour établir, pour

 20   maintenir un ordre public stable, assurer la police de la circulation,

 21   également le service des passeports. Je n'y travaillais pas, mais il y a

 22   également un service pour les étrangers et pour les ressortissants du pays,

 23   pour nos nationaux.

 24   Je n'ai pas travaillé à la sûreté de l'Etat. Je ne peux pas

 25   l'expliquer. C'est un type de travail qui porte sur des crimes qui


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  1   découlent de motivation politique. Je ne peux pas vraiment l'expliquer,

  2   mais c'est une partie du travail de la sûreté de l'Etat dont il s'occupait.

  3   Q.  Je vous remercie.

  4   M. BLACK : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser

  5   pour le moment, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Black.

  7   Monsieur Jasovic, ceci met fin aux questions qui devaient vous être posées

  8   à l'occasion de ce procès. Vous allez être heureux de savoir que vous êtes

  9   maintenant en mesure de quitter le Tribunal, et à l'extérieur on va vous

 10   aider avec les arrangements qui seraient nécessaires. Vous êtes maintenant

 11   libre de repartir.

 12   Monsieur Black, je regarde l'heure, et là encore, ce n'était pas une

 13   très bonne heure pour commencer avec un nouveau témoin.

 14   M. BLACK : [interprétation] Monsieur le Président, nous serons tout à fait

 15   d'accord pour commencer demain. Le témoin est prêt à commencer aujourd'hui

 16   si vous le souhaitez, mais nous sommes entièrement entre vos mains.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup. Au revoir.

 18   [Le témoin se retire]

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que nous allons suspendre la

 20   séance, Monsieur Black. Je pense que nous aurons l'esprit plus frais

 21   demain. L'audience est levée.

 22   --- L'audience est levée à 18 heures 36 et reprendra le vendredi 8 avril

 23   2005, à 14 heures 15.

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