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1 Le jeudi 1er septembre 2005
2 [Plaidoiries]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Topolski, vous avez la parole.
7 M. TOPOLSKI : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Messieurs
8 les Juges, j'ai creusé les arguments de la Défense concernant les crimes
9 commis au camp. Je souhaiterais revenir à l'acte d'accusation établi à
10 l'encontre d'Isak Musliu, s'agissant des chefs de meurtres, à savoir, les
11 chefs 7 et 8. Nous allons, tout d'abord, parler du meurtre allégué d'Ajet
12 Gashi. D'après le
13 témoin L-64, il a été exécuté à un carrefour à l'extérieur du camp. Selon
14 lui, Alushani a dit à L-64 qu'ils avaient des ordres selon lesquels ils
15 devaient exécuter Ajet Gashi. D'après L-64, voilà précisément ce
16 qu'Alushani et Tamuli ont fait.
17 Notre thèse est très simple : il n'existe aucun élément de preuve indiquant
18 l'implication personnelle d'Isak Musliu dans le décès d'Ajet Gashi avant,
19 pendant ou après le décès de celui-ci; il n'existe aucun élément de preuve
20 sur ce point.
21 L-10, dans sa déposition, a déclaré que cette victime a été sortie d'une
22 pièce par M. Bala et par Isak Musliu. Vingt minutes plus tard, on le ramène
23 dans cette pièce; dix minutes après, il meurt. Dans son mémoire préalable
24 au procès, l'Accusation prétend que c'est M. Bala et M. Musliu qui l'ont
25 ramené dans cette pièce où il est mort. Cette victime est décédée suite à
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1 une blessure par balle au thorax; il s'agit essentiellement de la cause de
2 sa mort. Avant de savoir cela, nous sommes partis du principe qu'il avait
3 été battu à mort.
4 L-06, quant à lui, qui se trouvait lui aussi dans cette pièce,
5 raconte différemment la façon dont Fehmi Tafa a été sorti de la pièce. Ce
6 récit ne fait pas état de la présence de M. Musliu, ni de celle de M. Bala;
7 il y aurait eu deux autres personnes : Ramadan Behluli et Ali Gashi. L-06 a
8 parlé de ces deux mêmes hommes qui avaient ramené la victime dans cette
9 pièce. L-10, comme nous venons de le mentionner, dans sa version, parle du
10 fait que cette victime a été sortie de la pièce par les deux hommes masqués
11 qu'il a identifié comme étant Qerqiz et un autre homme; c'est ce qu'il a
12 dit.
13 Il est important de noter qu'à propos de Qerqiz, L-10 a également dit
14 la chose suivante. Je vous renvoie à la page 2949 du compte rendu
15 d'audience. Il dit, je cite : "Je ne sais pas comment les gens, là-bas,
16 l'ont identifié, mais cette personne portait tout le temps un masque."
17 "Q. Comment avez-vous pu faire la différence entre Qerqiz et
18 d'autres soldats ou personnes que vous avez vus ?
19 "R. Je ne serai sans doute pas en mesure de faire la différence car
20 il portait un masque."
21 Il poursuit en disant qu'il a entendu que Qerqiz était devenu
22 policier et qu'il avait appris que son véritable nom était Isak Musliu.
23 Vous vous souviendrez que c'est L-10 qui poursuit dans sa déposition en
24 parlant de réunion et de conversation avec L-96. (expurgée)
25 (expurgée)
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1 (expurgée)
2 (expurgée) C'est curieux. C'est tout ce que je dirais à ce sujet.
3 Ces récits ne cadrent absolument pas, ils ne sont certainement pas
4 suffisamment clairs et concordants, pour ce qui est de la plus grave des
5 accusations portées à l'encontre d'Isak Musliu.
6 Jefta Petkovic et Zvonko Marinkovic, deux autres victimes d'Isak Musliu,
7 prétendument selon L-04, auraient été sortis de l'étable par M. Musliu.
8 L'ensemble des éléments de preuve produits en l'espèce indique qu'aucun
9 autre témoin n'a parlé de l'implication d'Isak Musliu dans cet épisode.
10 Dans cinq entretiens préalables, L-04 n'a jamais décrit Isak Musliu. Tout
11 au plus, on lui a montré U-1, la planche photographique de M. Kereakes, à
12 quoi il a répondu : "J'ai l'impression de le reconnaître."
13 L'homme qu'il connaissait sous le nom de Qerqiz portait toujours un
14 masque. Pourquoi, dans son entretien accordé le
15 16 janvier 2002, dans le cadre duquel il parle d'une plaque
16 d'immatriculation et donne le nom de 16 personnes, comment se fait-il qu'il
17 ne parle pas de Qerqiz. On lui pose la question et il répond : "Je ne me
18 souviens pas qu'on m'ait posé la question."
19 Selon nous, ces éléments de preuve sont loin de permettre de conclure
20 à la culpabilité, s'agissant des allégations portées, encore moins celle de
21 meurtre.
22 Agim Ademi et Vesel Ahmeti ont été enlevés en juin 1998. Ils ont été vus
23 vivants pour la dernière fois, d'après L-04, lorsqu'ils ont été emmenés par
24 Isak Musliu. J'avance les mêmes arguments, ici, que pour les cas
25 précédents.
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1 Enfin, Sinisa Blagojevic. Il est reconnu qu'il n'existe aucun élément de
2 preuve permettant d'établir la participation d'Isak Musliu à ce crime.
3 Qu'en est-il ? Soit il n'y a pas d'éléments de preuve, soit ils ne sont pas
4 suffisamment fiables et crédibles sur la base desquels la Chambre pourrait
5 être convaincue qu'Isak Musliu a pris part aux meurtres reprochés au regard
6 de l'Article 7(1) du Statut.
7 S'agissant des arguments de la Défense, pour ce qui est des crimes commis
8 au camp et je vous renvoie aux chefs d'accusation 3 à 6 où il est question
9 de tortures, d'actes inhumains et de traitement cruel.
10 Huit épisodes sont mentionnés dans le mémoire préalable au procès de
11 l'Accusation. Nous espérons les avoir suffisamment résumés, inutile de
12 revenir là-dessus. Au paragraphe 932 du mémoire en clôture de la Défense,
13 nous en parlons, quatre témoins à charge ont parlé du fait qu'Isak Musliu
14 aurait perpétré des mauvais traitements à l'encontre des prisonniers. L-96,
15 comme je l'ai mentionné hier, a reconnu Isak Musliu et ceci a été assimilé
16 à une identification formelle. Il y a eu, également, L-04, L-10, L-12 qui,
17 tous, parlent de mauvais traitements qui auraient été commis par Qerqiz
18 d'une manière ou d'une autre.
19 D'autres qui auraient reconnu Qerqiz comme les ayant maltraités, L-04
20 notamment, avait un bandeau sur les yeux; il aurait été frappé par Qerqiz
21 et il a parlé de sévices corporels quotidiens. Cela étant, il n'a jamais
22 formellement identifié Isak Musliu comme étant l'homme qu'il connaissait
23 sous le nom de Qerqiz. Je fais une pause car je constate que j'ai sans
24 doute fait quelque chose que je n'aurais pas dû faire.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'ai remédié à ce problème.
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1 M. TOPOLSKI : [interprétation] Apparemment, ma faute n'était pas très
2 grave. Je présente tout de même mes excuses.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agissait du nom d'une personne.
4 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je n'aurais pas dû faire cela, je m'en
5 excuse.
6 Je souhaite revenir sur ce que je disais, L-04, selon nous, n'a jamais
7 dûment identifié Isak Musliu comme étant l'homme qu'il connaissait sous le
8 nom de Qerqiz.
9 Milan Kamberi qui n'a jamais été cité à comparaître a parlé d'Isak Musliu.
10 L-04, pourtant, a dit que Qerqiz portait toujours un masque. C'est L-04 qui
11 a dit aux enquêteurs que la femme qui a frappé L-12 était la sœur de
12 Qerqiz. Il a reconnu, lorsqu'on lui a posé davantage de questions à ce
13 sujet, que c'est quelqu'un, un proche qui lui avait dit cela. Cependant, il
14 ne se souvenait plus du nom, il ne se souvenait plus d'avoir mentionné la
15 sœur de Qerqiz.
16 D'après nous, le témoignage de ce témoin manque de clarté et ne permet pas
17 de donner lieu à une déclaration de culpabilité.
18 Je parlerai, à présent, de L-10 qui a parlé d'un litige avec une autre
19 famille, litige qui n'a jamais été résolu. J'insiste là-dessus, "il n'a
20 jamais été résolu." Qerqiz les a soumis à de mauvais traitements, dit-il,
21 selon L-10. Emini a été frappé par Qerqizi et d'autres. L-06, dit-il, a,
22 également, été sorti de la pièce par trois hommes. L-06, lui-même, raconte
23 de façon différente les sévices corporels dont il a fait l'objet, à savoir
24 que c'est à 11 heures que Ramadan Behluli et Ali Gashi lui ont bandé les
25 yeux et l'ont sorti."
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1 (expurgée)
2 (expurgée)
3 (expurgée)
4 La Chambre de première instance dispose d'exemples de témoins qui font de
5 leur mieux, mais qui, pour des raisons tout à fait compréhensibles, ne sont
6 ni fiables, ni suffisamment précis, séparément ou ensemble. Il en va de
7 même pour L-12. Il affirme qu'il a été frappé par quelqu'un du nom de
8 Rahman Qerqiz. A propos de Qerqiz, il dit : "Oui, j'ai entendu ce nom, mais
9 je ne sais pas qui était cette personne." Lorsqu'on lui demande quand il a
10 entendu par de son nom, ses propos deviennent encore plus vagues : "Je ne
11 sais pas qui était là. Je ne sais pas qui était cette personne."
12 Selon lui, sa famille avait un conflit avec une autre famille. A ce
13 sujet, il déclare : "Cela devait être en rapport avec ce qui s'est passé."
14 Lorsqu'il parle de "ce qui s'est passé," il parle de sa détention et du
15 fait qu'ils ont été sortis de la pièce.
16 Pour ce qui est de Rahman, il a dit : "Il a fait ce qu'il devait faire."
17 Rahman aurait dit : "Tu pensais que ne tomberais jamais entre mes mains."
18 Que s'est-il passé ici ? Est-ce qu'il peut se tromper ? Est-ce qu'il
19 voulait dire par là que ce n'était pas Rahman Qerqiz, mais Ramadan, entre
20 les mains duquel il était tombé ? Est-ce que cela n'expliquerait pas la
21 remarque qui lui a été faite, à savoir, est-ce qu'il ne s'agit pas là de
22 régler de vieux comptes et non pas l'application d'une politique ? Il vous
23 appartient de décider de cela.
24 Revenons-en, pour terminer, à L-12. Lorsque vous examinerez sa déposition,
25 vous vous rendrez compte qu'elle est vide s'agissant des allégations
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1 portées contre Musliu.
2 Pour ce qui est de L-96, il appartient à une catégorie bien différente.
3 Nous n'en avons pas beaucoup parlé jusqu'à présent, mais je vais parler de
4 lui plus en détail dans quelques instants.
5 Si, à votre avis, L-96 est honnête, précis et fiable, il s'agit de voir son
6 témoignage à lumière de l'accusation de passage à tabac. Mais je vais
7 m'interrompre pour quelques instants, car apparemment j'ai commis une
8 erreur de nouveau.
9 M. WHITING : [interprétation] On a cité un extrait de déposition fait à
10 huis clos partiel.
11 M. TOPOLSKI : [interprétation] Est-ce bien le cas ?
12 M. WHITING : [interprétation] Oui.
13 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je ne pense pas avoir mentionné de nom, mais
14 je m'en excuse.
15 Selon nous, à propos de L-96, il convient de dire qu'il y a des
16 doutes au sujet de sa déposition. A vous de déterminer s'il est honnête,
17 précis et fiable. Même s'il affirme le contraire, nous avançons qu'il est
18 possible que lui et d'autres membres de sa famille étaient en rapport avec
19 les autorités serbes. Nous y reviendrons beaucoup plus tard.
20 (expurgée). Nous
21 faisons valoir que son déni d'un boycott de sa famille en 1992 n'est pas
22 vrai, ainsi que le fait qu'il aurait fourni des informations détaillées
23 volontairement à Jasovic et à Sparavalo lors de son entretien avec eux
24 avant d'être détenu à Lapusnik. Je souhaiterais parler quelques instants de
25 Jasovic et de Sparavalo. Malgré tout ce que nous savons à leur sujet et au
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1 sujet de leurs activités, ils ont dû pouvoir mener quelques entretiens qui
2 ont été effectués volontairement. Ils n'ont pas pu torturer et menacer tout
3 le monde, y compris ceux qui les aidaient de leur plein gré, même s'ils ne
4 voulaient pas le reconnaître par la suite.
5 Selon nous, le fait que L-96 ait nié connaître Momcilo Sparavalo, un
6 fonctionnaire de la Sûreté de l'Etat qui a fourni une déclaration à ce
7 Tribunal, dans laquelle il a affirmé qu'il avait des rapports conviviaux
8 avec lui et avec sa famille, tout cela est faux. Nous avançons, par
9 conséquent, que le fait que L-96 se soit livré volontairement à un poste de
10 contrôle serbe après s'être échappé de Berisa correspond à ce qu'on pouvait
11 attendre de sa part. Les récits que lui et Jasovic font des circonstances
12 de cet événement et de ce qui s'est passé lors de ces deux rencontres ne
13 concordent pas. Je vous invite à comparer la version donnée par L-96 aux
14 pages 2 275 à 2 279 du compte rendu d'audience avec celle faite par
15 Jasovic, pages 5 279 à 5 397 du compte rendu d'audience. Selon nous, ils
16 n'ont pas été honnêtes.
17 Si l'on pensait de lui ou de ses proches qu'ils étaient des collaborateurs
18 ou des indicateurs, cela ne veut pas dire pour autant que l'on peut
19 justifier des actes de tortures ou de meurtres. Personne n'affirme cela.
20 Cela étant, ceci pourrait expliquer la raison pour laquelle il serait peut-
21 être prêt à mentir et à inventer certaines choses au sujet d'Isak Musliu,
22 de façon même limitée. Nous faisons valoir qu'il semblait particulièrement
23 peu disposé à l'égard d'Isak Musliu. Lorsqu'on lui a soumis l'idée que
24 Musliu aurait pu se trouver à Rahovec à l'époque où il était en détention,
25 il a répondu : "Je suis convaincu qu'il n'est jamais allé combattre. Tout
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1 ce qu'il pouvait faire, c'était aller chercher des gens, les attacher et
2 les frapper. Voilà ce que je pense."
3 En d'autres termes, dans sa déposition, il accuse Musliu de lâcheté. Est-ce
4 que c'est une manière pour lui de régler de vieux comptes ? Est-ce qu'il
5 éprouve de l'animosité à l'égard de certaines factions de l'UCK ? Toujours
6 est-il qu'il connaissait Musliu et qu'il pouvait facilement le reconnaître,
7 et qu'il en a parlé aux Serbes en 1998. Ceci est peut-être révélateur d'un
8 témoin qui attend des informations. Quelques instants avant que son proche
9 ne meure, il affirme que ce dernier aurait parlé de Qerqiz. Pour ce qui est
10 des descriptions, il intéressant de noter qu'il n'a jamais dit qu'Isak
11 Musliu portait une barbe avant de venir témoigner devant ce Tribunal.
12 Pourquoi ? Il dit que c'est parce qu'on ne lui a jamais posé la question.
13 En fin de compte, pour ce qui est de L-96, et des excuses qu'il
14 aurait pu faire à propos d'Agim Murtezi, L-96 a refusé de s'excuser. Il
15 avait perdu un proche. Il avait peut-être perdu tout contact avec sa
16 patrie, peut-être à tout jamais, et il avait toutes les raisons d'être amer
17 et de chercher à se venger. Sa situation dans son pays était mise en péril
18 par ses rapports avec certains éléments du régime serbe, un rapport qu'il
19 entretenait depuis longtemps, un rapport qui était profond. D'autres ont
20 fourni des déclarations signées à ce Tribunal dans lesquelles il était
21 qualifié de menteur. Xheladin Ademi en a parlé également. Avant et après sa
22 détention, il se trouvait avec Jasovic. Selon nous, il n'existe que des
23 témoignages douteux en tout ou en partie, et nous affirmons qu'aucune
24 déclaration de culpabilité ne peut être prononcée sur la base de la
25 déclaration de ce témoin.
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1 Repassons maintenant aux chefs d'accusation numéros 1 et 2 de l'acte
2 d'accusation : emprisonnement et traitement cruel. L-96, à propos duquel
3 nous venons de parler et à propos duquel nous n'avons plus rien à dire est
4 pertinent ici. Bien sûr, L-64 également, qui a dans son témoignage, parlé
5 de ces éléments-là ainsi que d'autres. Et L-64, dit l'Accusation, est un
6 témoin à 100 % fiable qui doit être pris en compte pour tel par la Chambre
7 de première instance; au paragraphe 88 de leur mémoire en clôture.
8 Consacrons peut-être quelques instants pour parler de L-64, qui mérite une
9 certaine attention. S'il y avait des malfrats au sein de l'UCK qui
10 agissaient sans commandement ou contrôle à proprement parler, agissant de
11 façon indépendante, et si les éléments de preuve avancent, comme c'est
12 effectivement le cas, que Musliu ne faisait pas partie de cela, et s'ils
13 ont commis certains des actes qui sont cités ici, ceci doit être largement
14 pris en compte dans vos délibérations.
15 Il y a deux parties que j'aimerais traiter par rapport à ces
16 questions-là. Les malfrats : y avait-il des malfrats au sein de l'UCK ?
17 Oui. Qui le dit ? Jan Kickert le dit, et l'a dit devant vous le 23 novembre
18 de l'année dernière. Je cite : "Faisant partie de factions qui s'étaient
19 éloignées de l'UCK." A la page 676 du compte rendu d'audience, il a dit :
20 "Il y avait un problème d'ordre général à l'époque que j'avais pu évaluer à
21 l'ouest du Kosovo. Il y avait quelques groupes armés qui partaient seuls,
22 et agissaient seuls, et ne suivaient pas forcément un quelconque
23 commandement."
24 Susanne Ringaard Pedersen, dont nous avons déjà parlé, s'est exprimée sur
25 la question ici et a également parlé de ces malfrats. La deuxième partie la
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1 question que j'ai posée concernant cette région : "Ont-ils commis des
2 actes, oui ou non, qui ont été une source d'inquiétude pour vous ?
3 "R. Là, est bien la question."
4 Si effectivement il y avait quelqu'un qui avait posé sa candidature
5 pour être à la tête d'un groupe de malfrats, c'était bien L-64. Où et avec
6 qui termine-t-il ? Il termine à Lapusnik en compagnie de Voglushi.
7 L'Accusation s'appuie beaucoup sur ce témoin considéré comme pertinent. Un
8 exemple, au moment où on le présente dans cette affaire, un homme qui, du
9 début à la fin, est considéré comme un élément-clé de la thèse de
10 l'Accusation contre Isak Musliu. Par rapport à l'emplacement du camp, par
11 rapport aux tranchées, par rapport aux positions, par rapport aux règles,
12 et jusqu'au serment d'allégeance, de présentations, ainsi que de
13 responsabilité de commandement, ce témoin revient et revient sans cesse
14 pour venir témoigner contre Isak Musliu. Comme avec L-96, il faut être tout
15 à fait sûr qu'en rapport avec toutes les questions essentielles ici, c'est
16 un homme honnête, précis, et fiable.
17 Nous avançons qu'avec un corpus de 595 pages de témoignage, je crois que
18 ceci représente une mine d'or dans laquelle on peut creuser. Par exemple,
19 sa moralité, ses antécédents, ses activités criminelles passées, sa
20 violence, sa malhonnêteté, sa duplicité, le fait qu'il ait été parjure
21 devant cette Chambre de première instance, tout ceci a été amplement
22 démontré. Qui pourra jamais oublié l'euphémisme qu'il a utilisé pour parler
23 de meurtre ? Il a parlé d'escorte. Est-ce qu'on peut véritablement le
24 croire lorsqu'il dit qu'il n'a pas frappé les pieds de cette pauvre femme
25 serbe qui prétendait être malade et souffrante de troubles psychologiques ?
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1 Cette image mentale de cet homme qui est entré comme un rat en train de se
2 cacher, dans cette pièce, pour enlever un fusil à un homme, restera graver
3 dans la mémoire de tous à venir. Lorsqu'il est entré dans cette étable,
4 Monsieur le Président, pas comme aucun de nous ne l'aurait fait, au barreau
5 de la Défense, en entrant dans le quartier de détention, en passant par la
6 route. Il n'a pas donné son identité. Il n'est pas rentré dans les portes
7 qui n'étaient pas verrouillées. Vous pouvez y réfléchir, si vous voulez, à
8 votre guise, simplement pour comprendre ce qui s'est passé à cet endroit-
9 là.
10 Regardez bien attentivement, si vous le voulez bien, son récit de Lladroc,
11 lorsqu'il cherchait des armes. Regardons notre argument. Il a été renvoyé
12 par Musliu, car il ne voulait rien avoir à faire avec cela. Il avait
13 préparé un meurtre.¸
14 Vous vous souviendrez peut-être de ce meurtre qui avait été préparé contre
15 un homme qui s'appelait Mziu. Je ne sais pas si je l'ai prononcé
16 correctement, M-z-i-u. Entre les pages 4 839 et 4 868, il a répondu que :
17 "lui-même ne l'a pas tué," mais "il y avait une tentative de meurtre à son
18 égard." Au mois de mai 2003, il a nié avoir eu un entretien au mois de mai
19 2003 lorsqu'il est allé en prison. Il a avoué, avant que vous avez essayé
20 de le lui extraire, qu'il faisait référence à une période donnée, pour
21 essayer de vérifier son affirmation qu'il n'avait pas été maltraité "à
22 l'exception d'une gifle."
23 L'Accusation dit que s'il avait inventé son témoignage, il aurait en tout
24 cas, embelli son récit. Mais il est plus subtil que cela, beaucoup plus
25 subtil que cela. Réfléchissez un petit peu. Il est capable de reprendre un
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1 indice qui lui est proposé devant vous. Par exemple, pour ce qui est des
2 autorisations de voyager. On lui montre une de ces autorisations; c'est la
3 pièce 151 [comme interprété].
4 "Q. Dans ce cas-ci, cette autorisation est signée de la main d'un
5 commandant. A Lapusnik, est-ce que cela serait signé par Qerqiz ?"
6 Question quelque peu suggestive, il est vrai.
7 "R. Oui, Qerqiz."
8 L-64, est-il véritablement quelqu'un de crédible, quelqu'un auquel on peut
9 donner foi lorsqu'il prend des notes et lorsqu'il parle de Karpuzi ? Avant
10 d'arriver à Lapusnik et de parler de la période qu'il a passée au début de
11 l'année 1998 dans une unité appelée Zjarri, Z-j-a-r-r-i, je crois que cela
12 signifie feu, il a dit ceci : "Je ne me considérais pas, à proprement
13 parler, comme un soldat de l'UCK. J'estime être devenu un soldat de l'UCK.
14 Mais pour les raisons susmentionnées, je ne le reconnaissais pas."
15 Quelles étaient ces raisons susmentionnées ?
16 Nous avons mené des opérations sporadiques. Ymer aurait créé ce groupe avec
17 ou sans la permission de Nekovce; il s'agissait d'opérations sporadiques.
18 Sa capacité à être retors et malhonnête n'avait véritablement -- il
19 s'est exprimé sans vergogne devant vous. Lorsqu'il était interrogé par M.
20 Whiting : "Vous souvenez-vous" -- ou plutôt, par moi.
21 "Vous souvenez-vous de ce que vous lui avez dit," M. Whiting, "que
22 signifie le mot, le terme d'escorte ?"
23 Sa réponse tout à fait extraordinaire a été de dire : "Messieurs les Juges,
24 pour accompagner quelqu'un."
25 Cela ne l'intéressait pas de parler à quiconque du tort que Murizzi avait
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1 fait à l'accusé. C'était le meilleur soldat possible; c'était un homme
2 important, un bandit, quelqu'un dont on se souviendrait. Un autre soldat de
3 l'UCK, comme Zenel, Zeneli, est quelqu'un que j'ai évoqué hier. On a parlé
4 de cet homme qui faisait du karaté. Il y a un autre homme qui fait du
5 karaté à Lapusnik -- en tout cas, un autre, c'est celui-ci, c'est Zeneli.
6 C'est peut-être à lui que L-07. L-64 est tout à fait quelqu'un qui pourrait
7 en vouloir à Musliu pour l'avoir renvoyé et ne réfléchirait pas deux fois,
8 s'il pensait qu'il pouvait en tirer avantage et monter de toutes pièces
9 certains récits à son encontre. Nous suggérons que c'est ce qu'il a fait et
10 c'est ce qu'il a peut-être fait. Compte tenu de ce que vous savez du
11 personnage, pouvez-vous en toute certitude vous reposer sur lui ? Nous vous
12 répondons que non.
13 Nous en avons terminé, quant à la question des crimes commis dans le camp.
14 Nous avons, hier, abordé la question de la responsabilité de commandement,
15 eu égard à ces questions-là et par voie de conséquence et pour toutes ces
16 mêmes raisons, Musliu n'est pas responsable des crimes qui lui sont
17 reprochés et qui sont ceux représentés à l'Article 7(3); par conséquent, on
18 ne peut pas estimer qu'il ait pris part à l'entreprise criminelle commune,
19 à supposer, bien sûr, qu'on puisse prouver cela.
20 Avec ces mots, nous en avons terminé avec l'analyse de la thèse de
21 l'Accusation et je puis, maintenant, passer à la thèse de la Défense.
22 Messieurs les Juges, comme je vous l'ai indiqué hier, je vais certainement
23 terminer ou en tout cas, d'ici la première pause de cet après-midi.
24 Quelle est cette thèse contre Isak Musliu ? En six points, je dois dire, si
25 on veut parler de l'essentiel. En premier lieu, au mois de mai, il est
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1 devenu le leader ou le chef d'un groupe de volontaires à Lapusnik. Ce
2 groupe a grossi et avant le 25 juillet, s'appelait Celiku 3. Ce qui était
3 composé de cinq postes de combat; il a eu la responsabilité de ces cinq
4 postes de combat et sur le plan juridique, j'insiste, en termes juridiques,
5 sur l'expression "postes de combat, positions de combat." Troisièmement,
6 Fatmir Limaj devait confirmer que Musliu était commandant de Celiku 3,
7 après le 16 août, commandant adjoint de la 121e Brigade. Quatrièmement, il
8 y avait d'autres unités placées sous différents commandements à Lapusnik.
9 Il n'y avait pas et ceci est notre cinquième point, de commandement général
10 vers Lapusnik. Pour finir, en résumé, la thèse de Musliu est celle-ci :
11 au-delà de la détention peu longue qu'il a évoquée au mois de
12 mai 2001 et de l'entretien, il n'a aucune connaissance, ni participation
13 dans ce camp de prisonniers. Il n'a commandé aucun soldat et d'après lui,
14 il n'a joué aucun rôle à un tel endroit.
15 Nous vous invitons à lire - ou plutôt, à relire - l'ensemble des entretiens
16 qu'il a donnés en l'an 2001, à propos duquel nous avons déjà fait un
17 certain nombre de commentaires hier. Je viens de parler en substance de
18 thèses de cet accusé; tout ceci est contenu là-dedans. Si vous lisez ces
19 entretiens attentivement, tout est contenu là-dedans. Ceci est tout à fait
20 extraordinaire, si on regarde à quel moment ces entretiens ont eu lieu.
21 A l'appui de la thèse de l'accusé, ces déclarations ont été versées
22 conformément à l'Article 92 bis et à cette procédure. Cela pourrait vous
23 aider, Messieurs les Juges, de résumer ce que contiennent ces différentes
24 déclarations car ceci nous permettra, à ce moment-là, d'aborder la dernière
25 partie de cette plaidoirie.
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1 Le témoin Hafif Bajrami, DM8, numéro de référence, avait un doctorat et
2 était un professeur d'histoire qui a dirigé les archives au Kosovo et
3 président de l'organisation Mère Teresa. Il fournit une analyse détaillée
4 et historique de l'oppression et de la discrimination des Albanais sous le
5 joug serbe. Aux paragraphes 44
6 à 47, il donne des statistiques tout à fait effrayantes quant à la perte en
7 vies humaines qu'a provoqué tout ceci au Kosovo, entre les années 1981 et
8 suivantes. Il démontre, comme le colonel Crosland l'a démontré devant vous,
9 qu'on peut décrire de façon tout à fait légitime que ce régime serbe en
10 1988 [comme interprété] constituait une attaque généralisée et systématique
11 contre les Albanais Kosovars.
12 (expurgée)
13 (expurgée)
14 (expurgée) [comme interprété]. Il parle de la mise à
15 disposition d'uniformes et des munitions. D'après lui, la structure de
16 commandement était insuffisante. (expurgée).
17 (expurgée). Je puis dire
18 qu'il y a des liens étroits entre
19 L-96 et les Serbes. Je l'ai vu porter un pantalon, un uniforme qu'il avait
20 obtenu de la main des Serbes. Je n'ai pas eu de contact depuis l'année 1996
21 ou 1997, mais d'après moi et d'après ce que je sais,
22 L-96, ce n'est pas quelqu'un qu'on peut toujours croire.
23 DM15, Raif Veliu est un homme âgé de 43 ans, un Albanais, un non-combattant
24 qui n'a aucune connaissance quelle qu'elle soit ou n'a jamais eu d'échange
25 de tractations avec Isak Musliu. Au lieu de cela, il parle de L-96, au lieu
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1 de parler de lui.(expurgée). Ils parlent
2 de façon tout à fait indépendante par rapport au témoin précédent. Il dit
3 que L-96 était assez curieux dans la mesure où il aimait porter l'uniforme
4 serbe pour devenir l'ami des Serbes. C'est comme cela qu'il s'est exprimé.
5 L-96 pouvait être vu souvent en compagnie des officiers de police serbe.
6 Cela n'était un secret pour personne. Il venait leur rendre visite chez
7 eux.
8 Agim Kameri est né à Racak, âgé de 39 ans et président du LDK de Racak en
9 1994. Après la guerre, c'était le maire de Racak, c'est un non-combattant.
10 C'est quelqu'un qui a pris part au directorat civil, autorités civiles qui
11 ont mis en place différentes organisations pour venir en aide à la
12 population civile. Il connaissait Musliu depuis sa tendre enfance. Il se
13 souvient l'avoir vu dans la mosquée à Racak et il se souvient que Musliu
14 insistait sur l'importance de l'UCK. Il disait que l'UCK devait respecter
15 la population civile et il disait : Nous, en tant qu'armée, nous sommes
16 absolument déterminés à battre contre les forces d'occupation uniquement.
17 D'après lui et d'après les habitants de ce village, nous dit M. Kameri,
18 Musliu est, comme il le dit lui-même, un héros vivant. Je suis fier d'être
19 un habitant de son village de Racak.
20 Le village tout entier ne pouvait dire que du bien de lui, lorsque M.
21 Musliu a rejoint le KPS. Suite aux massacres de Racak, vous savez que ceci
22 a eu lieu au mois de janvier 1999, ce témoin a beaucoup participé à la
23 suite de ces opérations. Musliu est le seul à nous avoir conforté et à
24 avoir tranquillisé la situation. Nous avions tous perdu nos maisons.
25 Sous scellé, un témoin que je vais nommer sous le numéro
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1 DM11, (expurgée).
2 (expurgée). A décrit la démarcation ethnique de
3 la police qui avait commencé au mois de
4 mai 1989, suite à quoi il a été limogé pendant un certain temps. Mais en
5 1989, il a réussi à être réhabilité comme chef des services de Sécurité de
6 Ferizaj. Il connaissait Jasovic et Sparavalo. Il les connaissait. Il savait
7 que ces hommes-là maltraitaient et tuaient des civils innocents. Il savait
8 qu'ils les emmenaient et qu'ils obligeaient les détenus à rédiger des
9 déclarations. Il parle, également, de leur participation à cette
10 organisation main noire tristement célèbre. Il parle des organes des
11 services de Sûreté qui concentrent leur attention sur la possibilité de
12 neutraliser, paralyser, comme il le dit, les institutions albanaises ainsi
13 que la politique qui consistait à prendre pour cible la population
14 albanaise. Il dit avoir quitté les effectifs de la police pour pouvoir
15 échapper à tout cela et il a été menacé et on l'a intimidé depuis.
16 (expurgée)
17 (expurgée)
18 (expurgée)
19 (expurgée). Il parle de Jasovic qui a maltraité les Albanais.
20 On passait à tabac certaines personnes pour que les gens assistent à des
21 manifestations au poste de police de Ferizaj au troisième étage; c'était un
22 endroit de prédilection pour ce genre d'activités. Momcilo Sparavalo était,
23 dit-il, un extrémiste, quelqu'un qu'on considérait comme étant un
24 nationaliste et extrémiste. Il n'était pas censé faire partie du SUP, dit
25 ce témoin, mais Sparavalo l'était, en faisait partie.
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1 La déclaration parle dans le détail des différents comportements de
2 Jasovic, comportement brutal contraire à la loi de la police et des
3 services faisant partie des services de sûreté.
4 DM12, également sous scellé, (expurgée)
5 (expurgée); il parle, dans des termes très
6 similaires, des travaux des policiers des services de Sûreté de l'état. Il
7 parle de Mika, également et il dit que c'était le père de Momcilo
8 Sparavalo, également, un extrémiste et un nationaliste. Il parle, ensuite,
9 de Dragan Jasovic, ancien plombier et de sa conduite tout à fait déplorable
10 au sein des rangs de la police et qu'il fallait arrêter d'agir ainsi.
11 Ismail Smajli, un homme âgé de 34 ans de Carraleve et un ancien soldat de
12 l'UCK. Juin 1998, il a rejoint l'UCK et il est devenu un des membres de
13 l'UCK à Rance où Zeneli avait la responsabilité de ce secteur, se souvient-
14 il. Il connaît Musliu depuis sa tendre enfance et il parle de lui en des
15 termes très élogieux. Il dit que c'est quelqu'un qui respecte l'état de
16 droit et qui respecte le droit de tout un chacun. Ce témoin était un
17 collègue, au sein du KPS, avec Musliu dans les rangs de la police au mois
18 juin ou juillet 1999. Il dit que c'était un homme qui travaillait dur et
19 qui devait travailler au sein de la communauté serbe. C'est là où il a vu
20 comment il fallait mettre en place ces systèmes de sécurité pour les civils
21 serbes.
22 Shyqeri Salihu est devenu chef du service logistique dans la zone Pastrik,
23 rejoint l'UCK en août 1998. Les deux ont travaillé au sein des forces de la
24 police à Nerodime. Il parle de Musliu en termes très chaleureux parce qu'il
25 aurait sauvé un enfant Rom en avril 2002. Ce petit garçon, il l'aurait
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1 sauvé; il était tombé dans le fleuve glacé et Isak Musliu qui n'était pas
2 de service aurait essayé en vain de sauver la vie de cet enfant. Voici
3 encore d'autres récits du comportement d'Isak. Il faisait passer toujours
4 la vie des autres avant la sienne.
5 (expurgée)
6 (expurgée), il y a une longue déclaration de
7 K5 qui dit qu'il est indicateur. Il déclare en détail et cette affaire fait
8 froid dans le dos, comment il a rejoint les forces de la police serbe et a
9 été recruté pour bombarder et tirer sur des cibles albanaises
10 préselectionnées. Pour une partie de ses travaux, K5, on sait qu'on lui a
11 remis un uniforme de l'UCK et un Kalashnikov chinois ainsi que des grenades
12 à main chinoises. Le but de cet exercice, bien sûr, était de tromper les
13 gens et de croire que ces attaques, en réalité, étaient menées par l'UCK.
14 Pour finir, le sous scellé DM19, un rapport médical auquel je fais
15 simplement référence et que je souhaite vous rappeler.
16 En résumé, voici ce que nous avons présenté par rapport au document 92 bis.
17 La Chambre de première instance n'oubliera pas qu'il y a un corpus très
18 important de textes présentés par M. Lehtinen concernant les travaux de M.
19 Musliu au sein des forces de la police.
20 Dans notre mémoire en clôture, nous avons le chapitre intitulé "Antécédents
21 et circonstances actuelles," un certain nombre de questions sont
22 importantes et pertinentes, eu égard à la question de la culpabilité et
23 aussi parce qu'elles sont relatives à la question de la moralité et tout à
24 fait, évidemment, bien sûr, à cause du prononcé de la peine. Je recommande
25 ces passages-là pour cette double raison aux Juges de la Chambre. Il a été
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1 renvoyé par Musliu du KPS, comme nous pouvons le constater d'après les
2 documents fournis par
3 M. Lehtinen parce qu'il n'était pas honnête par rapport à ses diplômes
4 qu'il avait obtenus à l'école. Nous avançons, par conséquent, que son
5 renvoi avait peut-être davantage à voir avec sa participation présumée dans
6 cet acte d'accusation, savoir s'il avait menti, que s'il avait menti sur
7 ses diplômes. D'après nous et comme nous le dirions dans notre propre
8 juridiction, c'est un homme de bonne moralité qui, d'après les différents
9 documents qui vous ont été soumis, c'est un homme qui a une bonne moralité.
10 Par son comportement, par sa conduite, devant bon nombre de personnes, il
11 s'est avéré être un bon père de famille et quelqu'un qui aimait travailler,
12 qui n'a jamais rechigné à travailler, un homme calme, un homme agréable de
13 compagnie qui se préoccupait du bien-être de sa communauté, qui était
14 disposé à défendre sa communauté ainsi que d'autres de façon tout à fait
15 constructive. C'est le type d'homme qui est prêt à essayer de sauver la vie
16 d'un enfant au détriment de la sienne, un homme qui pense que la discipline
17 et le contrôle de soi est important, un homme qui souhaitait se battre dans
18 les règles et qui ne souhaitait que se battre contre d'autres combattants,
19 un homme qui respectait l'importance de la protection de la population
20 civile, un homme pour qui le sacrifice de sa propre vie était important
21 s'il s'agissait de défendre les droits de son peuple. Bien sûr, un homme de
22 bonne moralité. En soi, évidemment, ceci ne constitue pas le seul argument
23 de la Défense contre une charge criminelle, mais c'est quelque chose dont
24 nous vous demandons de bien vouloir tenir compte.
25 Il a choisi de ne pas témoigner, et c'est son droit. Par notre
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1 intermédiaire, il est en droit d'être assis là où il est assis et de garder
2 le silence et de demander à l'Accusation de prouver sa thèse contre lui. Il
3 n'y a pas de déduction contraire. Rien ne pourra être déduit contre lui
4 s'il a décidé de garder le silence. La Chambre de première instance ne
5 pourra pas spéculer sur la question pour laquelle il n'aura pas donné un
6 témoignage ni cité un témoin à la barre, ni sur ce qu'il aurait pu dire ou
7 comment il se serait comporté ici à la barre des témoins. Un commentaire,
8 et c'est ici à l'attention de l'Accusation, au début de la semaine,
9 concernant l'alibi qui ne s'est pas traduit dans la réalité, ceci ne change
10 en rien la position qui est la nôtre, à savoir, de la décrire comme nous
11 venons de faire. Quoi qu'il en soit, étant à Rahovac, est-ce un alibi pour
12 ne pas avoir été à Lapusnik, si vous regarder la carte ?
13 Nous en sommes maintenant arrivés au terme de ce que nous voulions dire, et
14 je voudrais tout simplement faire quelques remarques en guise de
15 conclusion. Mais je vois des gens qui passent devant moi, ce qui me
16 déconcentre en quelque sorte.
17 Lorsque M. Cayley, à la fin de sa déclaration liminaire le 15
18 novembre dernier, avait dit : "Nous allons maintenant faire en sorte de
19 laisser parler les éléments de preuve."
20 Nous avons eu ces 80 jours qui se sont écoulés sur une période de dix
21 mois, et avec un compte rendu d'audience qui remplit quelque 15 classeurs,
22 ainsi que les éléments vidéo et audio.
23 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, c'est la dernière
24 fois que nous interviendrons ici, et je souhaiterais pour ce faire, faire
25 quelques observations. J'aimerais, dans un premier temps, vous demander de
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1 nous excuser. Car nous avons parfois fait des jeux de mots. Nous avons
2 essayé, en quelque sorte, de faire de l'humour. Nous savons qu'il s'agit
3 d'un lieu de travail pour nous au cours des dix derniers mois, et un lieu
4 de travail serait justement un lieu fort triste si de temps à autre, il n'y
5 avait pas un sourire qui était placé sur les visages des personnes. Mais
6 bien entendu, rien ne peut nous détourner de la tâche solennelle qui nous a
7 été conférée.
8 Nous aimerions remercier tout le personnel du prétoire qui nous a été
9 d'une aide extrêmement précieuse, les membres du Greffe, les représentants
10 de la Chambre, les différents huissiers, les gardiens des prisonniers, qui
11 ont dû nous supporter. Nous aimerions également rendre hommage aux
12 différents interprètes qui ont œuvré à la fois dans les cabines ainsi que
13 dans le prétoire, et sans l'aide desquels nous n'aurions absolument pas pu
14 œuvrer. Puis, nous aimerions également remercier tous ceux qui nous ont
15 aidés, Me Mansfield, Me Guy-Smith, moi-même, Me Powles, au Kosovo ainsi
16 qu'ici. Nous aimerions remercier tous nos assistants juridiques, sans qui,
17 une fois de plus, très peu de choses auraient pu être faites. Cela fut pour
18 nous un grand honneur de représenter Isak Musliu. Nous avons eu le grand
19 privilège d'assurer sa défense ici. Nous n'avançons pas que ce fut une
20 tâche aisée. Nous avons gravi cette montagne que nous avions l'intention de
21 gravir depuis hier après-midi. Nous sommes maintenant arrivés à la cime de
22 cette montagne, et nous pouvons maintenant regarder vers le bas, et nous
23 pouvons avancer qu'il n'y a pas d'éléments de preuve qui ont été prouvés
24 au-delà de tout doute raisonnable.
25 Après toutes ces semaines, après tous ces mois, après l'étude de tous
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1 ces documents, et après que tous ces propos aient été tenus, nous ne
2 pouvons vous dire que nous attendons de votre part un verdict de non
3 culpabilité.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Topolski.
5 Je ne pense pas que la Chambre ait autre chose à ajouter. Nous
6 aimerions remercier vivement les conseils, car je dois dire qu'ils ont tous
7 fait preuve d'une extrême compétence et ont été extrêmement méticuleux lors
8 de la présentation de leurs moyens à décharge, ce qui a été extrêmement
9 utile pour la Chambre. Je dois dire que la procédure a été diligentée de
10 façon plus rapide et de façon plus efficace grâce aux efforts déployés par
11 le conseil. Maître Topolski, je vous remercie d'avoir remercié ainsi et
12 apprécié ainsi toutes les personnes qui œuvrent dans les coulisses, qui ne
13 sont pas forcément sous les feux de la rampe, mais dont la tache est
14 essentielle si nous voulons que cette Chambre et ce Tribunal fonctionnent.
15 Bien entendu, nous devrons maintenant examiner et étudier cette
16 affaire. Comme l'a dit le conseil, nous avons beaucoup de choses à faire,
17 avec beaucoup de soin et avec beaucoup de circonspection, et c'est pour
18 cela que nous réservons cette décision, et nous rendrons ces décisions
19 lorsque nous pourrons le faire en bonne et due forme.
20 L'audience est maintenant close.
21 --- L'audience est levée à 15 heures 21.
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