Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 18 janvier 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais demander à Monsieur van de

6 Vliet de faire asseoir le témoin sur son siège.

7 Monsieur van de Vliet, avez-vous des réponses à nous apporter ?

8 M. VAN DE VLIET: [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Alors, je voudrais juste vous

10 dire d'abord, Monsieur van de Vliet, que j'espère que tout un chacun a reçu

11 un exemplaire, une copie du courrier que vous nous avez rédigé. Nous avons

12 lu et nous avons compris ce que vous avez expliqué.

13 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse, mais nous

14 n'avons pas, nous, une copie de ce mémo.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas-là, si vous n'avez pas ce

16 mémo, je crois que vous devriez pouvoir le parcourir.

17 M. VAN DE VLIET : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être serait-

18 il bon pour ce qui nous concerne de vous faire passer, de vous le faire

19 parcourir. Je ne vais pas m'arrêter à chaque détail, mais je vais vous

20 donner une image d'ensemble. Comme je vous l'ai dit, je m'entretiendrai

21 avec le personnel pour trouver les détails de la planification des

22 ressources pour ce qui est de l'équipe de la Défense. Nous avons dû

23 accomplir une petite procédure avant que de prendre une décision finale.

24 Cela englobe l'obtention des déclarations officielles de la part de

25 l'équipe de la Défense concernant le degré de complexité, le processus de

26 consultation avec les Juges de la Chambre et le niveau de complexité pour

27 ce qui est de la présentation des éléments de preuve de la Défense. C'est

28 suite à cette procédure-là que nous prenons une décision, nous adoptons une

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1 décision finale.

2 Les écritures finales de la Défense ont été communiquées le

3 11 décembre. Nous avons procédé à des consultations avec des représentants

4 de la Chambre en date du 13; et le 14, il y a eu une décision rendue, le 14

5 décembre 2005, pour ce qui est de l'allocation des ressources aux fins du

6 procès.

7 Nous avons insisté, comme nous le faisons d'ailleurs tout le temps aux fins

8 de procédure, à l'envoi d'une facture aux services financiers, mais nous

9 allons faire un estimation des ressources et leur allocation à l'équipe de

10 la Défense. Or, nous l'avons reçue seulement le 5 janvier. C'est suite à

11 cela que nous avons procédé au traitement de cette facture conformément à

12 la réglementation qui régit nos activités. Après notre audience d'hier,

13 j'ai procédé aux vérifications auprès du service des finances, et ils m'ont

14 assuré que le paiement sera effectué cette semaine-ci.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qu'est-ce que signifie cette semaine ?

16 Est-ce que vous pouvez nous donner une date ?

17 M. VAN DE VLIET : [interprétation] Je crois que cela signifie d'ici à la

18 fin de cette semaine-ci. Avant la fin de cette semaine.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je crois pouvoir dire que la Chambre

20 est tout à fait mécontente de ce type d'arrangement, Monsieur van de Vliet.

21 Dans votre mémo, vous dites que le

22 14 décembre, une lettre d'OLAD a été adressée à la Défense pour ce qui est

23 du niveau de complexité quant à l'allocation des ressources demandées, et

24 il a été procédé à une requête pro forma. Or, vous nous dites aujourd'hui

25 qu'à la date du 14 décembre, il a été rendu une décision concernant

26 l'allocation de fonds aux fins de ce procès. Donc, si une décision a été

27 adoptée le 14 décembre pour ce qui est de l'allocation de ces ressources,

28 je ne comprends vraiment pas pourquoi, pourquoi à ce jour, le paiement n'a

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1 pas été effectué. Ensuite, on nous dit que le paiement sera fait quelque

2 part dans le courant de cette semaine-ci.

3 M. VAN DE VLIET : [interprétation] Monsieur le Président. Nous ne

4 pouvons pas procéder aux paiements sans qu'il y ait une facture. C'est

5 ainsi que le système fonctionne. La facture ne nous a été communiquée que

6 le 5 janvier. C'est après la réception, après le 5 janvier, une fois cette

7 facture reçue, nous avons procédé à la procédure qui est conforme à notre

8 Règlement, et nous l'avons envoyée au département financier.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais combien de temps cela

10 prend-il ?

11 M. VAN DE VLIET : [interprétation] Monsieur le Président, nos

12 services desservent 17 équipes de la Défense. Je le dis pour votre

13 information, cela prend deux semaines. Pour la moyenne du Tribunal, pour ce

14 qui est du traitement d'une facture, il convient de compter un mois. Il

15 faut deux mois ou deux grosses semaines pour mon bureau et deux semaines

16 pour les autres départements impliqués dans tout ceci.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur van de Vliet,

19 quelles sont les démarches à la disposition de tout un chacun pour faire

20 accélérer la procédure, et quelles sont les dispositions que vous avez

21 prises pour ce faire ?

22 M. VAN DE VLIET : [interprétation] Est-ce que vous pourriez être plus

23 concrète, Madame le Juge, parce que je me demande si vous vous référez à la

24 procédure concernant la prise de la décision concernant le taux de

25 complexité de l'affaire pour ce qui est de l'élaboration d'une facture.

26 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Ce que je veux dire, c'est quels

27 sont les pas à faire pour rendre cette procédure plus rapide pour payer les

28 10 % nécessaires à la Défense ? Quelle est la règle générale et quelles

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1 sont les mesures concrètes que vous avez prises pour que ceci se fasse plus

2 rapidement ?

3 M. VAN DE VLIET : [interprétation] Oui, je comprends. En général, les

4 factures présentées par les équipes de la Défense, or ces équipes sont

5 assez nombreuses devant ce Tribunal, parcourent plusieurs bureaux au sein

6 du Greffe et de l'administration des Nations Unies.

7 D'abord, cela vient dans mon bureau, au bureau des affaires légales

8 et des affaires reliées à la détention. Nous procédons aux vérifications

9 des montants, puis nous le signons. Ensuite, nous nous adressons à

10 l'administration et dans l'administration ce document parcourt deux ou

11 trois bureaux pour finir par être réglé.

12 Dans ce cas concret, comme je vous l'ai déjà dit, nous avons reçu

13 cette facture à la date du 5 janvier. En dépit du fait que la décision a

14 été prise le 14 décembre, ce n'est que le 5 janvier que nous avons pu

15 traiter la facture et l'envoyer au département financier. J'ai vérifié hier

16 pour savoir si la facture avait été traitée. Cela n'a pas été le cas, mais

17 ils avaient la facture chez eux. Je leur ai demandé d'accélérer cela et ils

18 m'ont assuré que cela se ferait avant la fin de cette semaine.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur van de Vliet.

20 Monsieur Milovancevic, j'espère que vous venez d'entendre

21 l'explication qui vient d'être fournie. M. van de Vliet a indiqué que la

22 facture pro forma, sans laquelle aucun paiement ne saurait être fait, leur

23 a été communiquée par vos soins le 5 janvier. Il semblerait qu'il faut deux

24 semaines pour que leur bureau traite le document; puis ensuite, deux autres

25 semaines pour le département financier pour le traiter également. Ce qui

26 signifie un mois en tout et pour tout, à savoir que pour le mieux vous

27 devriez vous attendre au paiement le 4 février. Toutefois, ils se sont

28 efforcés d'accélérer le paiement et il y a une promesse s'agissant de

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1 l'obtention de ces moyens, de ces ressources par l'équipe de la Défense

2 d'ici à la fin de cette semaine-ci. A moins que vous ne contestiez le fait

3 que cette facture pro forma ait été communiquée le 5 janvier, il me semble

4 qu'il n'y aurait pas grand-chose à faire de plus pour rendre ces paiements

5 plus rapides encore. Si vous avez des commentaires, j'aimerais que vous

6 soyez bref.

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Il est exact

8 de dire que cette facture pro forma a été envoyée à la date indiquée. On

9 nous a demandé d'envoyer en même temps que cette facture, des écritures

10 d'information, et nous avons en effet parlé de la complexité du procès tout

11 entier.

12 Nous avons bien précisé que dans la lettre du 5 janvier que nous demandions

13 la compréhension du Greffe, étant donné que le procès devait commencer le

14 16 et nous n'avions plus de temps pour faire mieux. Je vous remercie.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

16 Milovancevic.

17 J'espère, toutefois, que vous comprendrez qu'étant donné que cette facture

18 pro forma n'a été envoyée qu'à la date du 5 janvier, il apparaît que

19 l'équipe de la Défense ne saurait considérée qu'elle n'a rien à se

20 reprocher non plus, mais je ne voudrais pas me pencher davantage encore sur

21 le sujet. Ce que je puis dire, comme M. van de Vliet l'a promis, que le

22 paiement se ferait quelque part dans le courant de cette semaine, ce qui

23 permettra à la Défense de se préparer pour la présentation de son affaire.

24 Monsieur van de Vliet, je vous remercie beaucoup, et je crois pouvoir

25 dire que vous pouvez vous retirer.

26 M. VAN DE VLIET : [interprétation] Je vous en prie.

27 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, juste une petite

28 question administrative que j'aimerais que nous prenions en considération

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1 avant que le témoin ne soit acheminé vers ce prétoire.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Nous avons également des

3 questions administratives, mais je vous demande de passer en premier.

4 M. WHITING : [interprétation] Fort bien. Merci, Monsieur le Président. Je

5 crois qu'il s'agit ici d'une pièce à conviction qui porte le numéro 3. Il

6 s'agit de la traduction d'une carte. Je vois que le Greffier est en train

7 de nous confirmer le fait qu'il s'agit bel et bien de la pièce numéro 3. Je

8 propose que cela soit distribué, et ce que je proposerais, c'est que ces

9 traductions soient présentées comme une pièce à conviction. J'aimerais que

10 cela fasse partie de la même pièce ou alors que cela constitue une pièce

11 distincte.

12 Je demanderais à M. l'Huissier de distribuer ce document aux Juges de la

13 Chambre et aux parties en présence. Je me propose de l'expliquer

14 brièvement. Cela est un document qui s'explique en tant que tel, mais je

15 voudrais être certain que les choses soient tout à fait claires pour ce qui

16 est des indications à poser au niveau de la traduction.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Peut-être devrions-nous demander à ce

18 que le Greffe ait une cote, et j'aimerais que la cote qui sera attribuée

19 établisse une corrélation avec la carte originale. Je vous remercie de

20 procéder ainsi.

21 M. WHITING : [interprétation] Si vous le permettez, je voudrais proposer

22 que, enfin, ceci est une question qui concerne davantage le procès et non

23 pas une question administrative puisqu'il s'agit d'une pièce à conviction.

24 Pourrons-nous laisser cela pour la fin ?

25 M. WHITING : [interprétation] Bien sûr.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Parlons d'abord des questions

27 administratives en suspens que les Juges de la Chambre ont à soulever.

28 Le Greffe s'est adressé à nous pour dire que le vendredi,

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1 le 20, je suppose, il nous faudra siéger dans la Chambre numéro II à partir

2 de 14 heures et quart. Ceci est dû à des travaux à accomplir ici et autres

3 tâches de nature logistique. Une demande à été présentée à cette fin afin

4 que la session de cette Chambre-ci débute en ce jour à 8 heures du matin

5 pour finir une heure avant qu'à l'accoutumée. C'est parce que nous ne

6 commencerons pas à 9 heures, mais bien à 8 heures. Cela signifie que nous

7 terminerions à une heure moins le quart plutôt que de terminer à deux

8 heures moins le quart.

9 Les Juges de la Chambre ont été d'accord de ce faire sous des réserves pour

10 ce qui est d'attendre la confirmation des parties en présence concernant

11 leur accord sur le fait de commencer à 8 heures du matin ce jour-là. Alors,

12 je voudrais d'abord savoir si les parties sont à même de venir à l'heure

13 indiquée à la date du 20. Si vous ne pouvez pas nous le dire tout de suite,

14 vous pouvez nous le dire demain.

15 M. WHITING : [interprétation] Nous sommes disponibles, Monsieur le

16 Président.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous êtes disponibles. Je vous

18 remercie, Monsieur Whiting.

19 Monsieur Milovancevic ?

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Nous sommes également disponibles,

21 Monsieur le Président.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les Juges de la Chambre remercie les

23 deux parties pour leur disponibilité indépendamment du préavis très court

24 qui a été pris.

25 Très bien. Il n'y a pas de prévision pour ce qui est de la journée de

26 demain. Il s'agit donc de prévoir notre démarrage de travaux à 8 heures

27 vendredi matin.

28 La deuxième question qui a été soulevée, c'est une question que les deux

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1 parties devraient prendre en considération, et notamment les interprètes.

2 De quoi il s'agit, les Juges de la Chambre sont informés du fait que les

3 bandes d'enregistrement ne durent qu'une heure et demie. S'il s'agit de

4 faire une pause de 30 minutes au bout de chaque une heure et demie de

5 travail, aux fins de procéder à l'enregistrement et à la diffusion décalée

6 de ce qui se passe dans le prétoire, une autre suggestion a été faite, à

7 savoir que chaque une heure et demie était peut-être quelque peu trop

8 longue pour les interprètes qui doivent, comme on nous l'a dit, se garder

9 une concentration bien plus grande que quiconque dans le prétoire pour bien

10 accomplir le travail.

11 Si nous procédions à des audiences d'une heure et quart, cela les

12 arrangerait en particulier. Si nous procédons ainsi, il me semble que nous

13 pourrions avoir trois audiences d'une même durée, d'une heure et quart.

14 Telles que les choses se présentes à présent, nous avons deux audiences

15 d'une heure et demie, et une audience de 45 minutes à la fin. Il y a des

16 arguments pour et contre les deux possibilités. La preuve en est, c'est que

17 nous avons tenu hier soir une audience qui a duré moins de temps, alors que

18 nous étions tous assez fatigués, mais le fait est que les interprètes ont

19 été gardés pendant plus d'une heure et demie et ils étaient fatigués.

20 Toutes les audiences ne dureraient qu'une heure et quart. Cela nous

21 permettrait d'avoir une dernière audience qui durerait la même période.

22 Cela serait plus court pour ce qui est de l'intervention des interprètes à

23 chaque audience.

24 Est-ce que cela convient à toutes les parties ? L'Accusation ?

25 M. WHITING : [interprétation] Je crois que nous préférerions cette

26 suggestion alternative, à savoir, des segments identiques dans le courant

27 de la journée, mais nous laissons aux Juges de la Chambre à décider à la

28 question, et nous ferons comme bon vous semblera. Nous estimons que cela

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1 arrangera les interprètes qui sont également sous une pression assez

2 considérable, et que pour eux ce serait plutôt bénéfique. Nous nous

3 efforçons, bien entendu, de tenir compte du temps dépensé, et de tenir

4 compte des désirs des Juges de la Chambre pour ce qui est des pauses. Mais

5 si nécessaire, les Juges pourront attirer nos attentions sur la nécessité

6 de procéder à une pause le moment venu.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Certainement.

8 Monsieur Milovancevic, quel est le segment que vous préféreriez ?

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'estime que la

10 solution d'une heure et quart avec une demi-heure de pause entre les

11 différentes audiences est tout à fait une bonne proposition. Je vous en

12 remercie.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

14 De façon évidente, nous venions de procéder à ce petit changement. Nous

15 avons parlé des interprètes, mais nous n'avons pas entendu leurs opinions.

16 Peut-être, pour être tout à fait équitable à leur égard, serait-il bon de

17 les laisser nous donner leur opinion ?

18 L'INTERPRÈTE : Nous nous fions à vous, Messieurs et Madame les Juges.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ces arrangements sont faits en

20 considération de vos besoins. Nous apprécierions grandement que vous nous

21 indiquiez ce que vous préféreriez vous-mêmes.

22 L'INTERPRÈTE : Ceci nécessiterait une consultation avec les deux autres

23 cabines, mais peut-être pourrions-nous vous donner notre opinion à la

24 prochaine pause. Nous vous en remercions. Nous ne sommes pas en mesure de

25 le faire dès à présent.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Un grand merci.

27 En attendant d'avoir votre opinion, nous allons procéder à un

28 fonctionnement en trois audiences identiques, et nous entendrons l'opinion

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1 des interprètes plus tard. Donc, nous allons faire trois audiences d'une

2 heure et quart aujourd'hui.

3 L'INTERPRÈTE : Les interprètes remercient le Président.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'était les questions administratives

5 que je voulais soulever en ce moment-ci. L'Accusation voudrais soulever une

6 question.

7 Monsieur Whiting, vous vouliez expliquer cette carte avant que M.

8 Milovancevic ne continue son contre-interrogatoire.

9 M. WHITING : [interprétation] Je crois que les choses sont tout à fait

10 claires en soi, mais étant donné qu'il s'agit d'un document qui a été

11 traduit, il y a eu une traduction avec une numérotation différente des

12 pages, ce qui fait qu'on doit faire état d'une première page, une deuxième

13 page, et cetera. Le service de traduction a un imprimé différent de celui

14 que nous avons. Avec l'aide des interprètes, nous nous sommes efforcés de

15 comparer les passages entre la carte et la traduction pour voir si les

16 numérotations coïncidaient. Il est claire à quoi les choses se réfèrent.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en remercie. Merci, Monsieur

18 Whiting.

19 Monsieur Milovancevic, avant que de vous donner la parole, j'aimerais que

20 le témoin soit introduit dans le prétoire.

21 Pendant que nous attendons l'entrée du témoin, je demanderais au Greffier

22 de nous donner une cote pour la carte et pour la traduction de celle-ci.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs et Madame les Juges, ce sera

24 les pièces à conviction 15 et 16.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Un grand merci. Quel est le numéro

26 15 ? Est-ce la carte ou est-ce la traduction ?

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, la carte

28 porte la cote numéro 15 et la traduction porte la cote numéro 16.

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1 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

3 Bonjour, Monsieur Dzakula.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Dzakula, on vous rappelle que

6 vous êtes encore tenu par la déclaration solennelle que vous avez faite au

7 tout début de votre témoignage, à savoir que vous direz la vérité, toute la

8 vérité, et rien que la vérité. Je vous remercie.

9 LE TÉMOIN : VELIJKO DZAKULA [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez la parole, Maître

12 Milovancevic.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

15 Contre-interrogatoire par M. Milovancevic : [Suite]

16 Q. [interprétation] Monsieur Dzakula, hier nous avons terminé

17 l'interrogatoire en parlant d'une réunion que la délégation serbe avait

18 tenue à Belgrade en novembre 1990. C'était une réunion avec MM. Jovic et

19 Milosevic. Pourriez-vous me dire si M. Ante Markovic, le premier ministre

20 de la Yougoslavie, a assisté à cette réunion ?

21 R. Non, il n'a pas assisté.

22 Q. Est-ce que vous avez reçu une explication de cette absence ?

23 R. Il nous était dit qu'il n'allait pas nous accueillir.

24 Q. Merci, Monsieur Dzakula. Nous allons maintenant revenir sur -- là, on

25 parlait de la fin de l'année 1990, et on devrait parler de la mi-1990. Vous

26 avez parlé, Monsieur Dzakula, des premières élections multipartites. Vous

27 avez dit également que vous aviez voté, vous en tant que membre du Parti

28 des changements démocratiques de

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1 M. Racan. Vous avez voté pour ce parti. Que s'est-il produit après les

2 premières élections multipartites en ce qui concerne les Serbes et en ce

3 qui concerne vous ?

4 R. Les nouvelles autorités ont été établies. Le nouveau gouvernement a

5 tenu place, dirigé par l'Union démocratique croate, et ils ont commencé à

6 restructurer l'état. Ils ont adopté de nouvelles lois, de nouveaux

7 règlements, de nouvelles appellations, de nouveaux symboles, emblèmes,

8 drapeaux, et cetera, ont été introduits. Tout a commencé à changer de

9 manière considérable. Ces changements étaient surprenants pour les Serbes,

10 qui ne s'attendaient pas que ces changements aillent prendre un tel cours.

11 Là, je parle des changements au niveau de nouveaux emblèmes, de nouveaux

12 symboles, drapeau, de nouvelles appellations. Ceci a été suivi par la

13 préparation, l'adoption de la nouvelle constitution qui comportait d'autres

14 nouveautés.

15 Tout cela a commencé à inquiéter la communauté serbe, car ils s'attendaient

16 à d'autres changements que ceux à qui, pour eux, étaient surprenants. L'on

17 commençait à se préparer pour faire sécession de la Yougoslavie. Tous les

18 jours, on s'opposait de plus en plus à l'existence de la Yougoslavie. On

19 disait qu'il fallait changer les faits, qu'il y avait beaucoup trop de

20 Serbes au sein du système judiciaire, de la police et de l'armée. Dans ce

21 sens, les gens ont commencé à être relevés de leurs fonctions dans des

22 stations de télévision, des grandes entreprises, le système judiciaire, et

23 cetera. Les policiers ont dû prendre la préretraite. C'était une option qui

24 leur était offerte afin que de nouvelles personnes puissent être engagées.

25 Je vous ai déjà dit que les symboles avaient été changés. Au lieu de

26 l'étoile rouge, un nouveau symbole a été adopté, à savoir, le drapeau à

27 damier, alors que tout d'abord, la première proposition portait sur un

28 damier avec du rouge et du blanc, et par la suite, ils ont opté pour le

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1 rouge, car c'était le symbole qui avait été utilisé pendant l'existence de

2 l'état indépendant de Croatie.

3 Q. Merci, Monsieur Dzakula. Est-ce que c'était la raison pour laquelle les

4 Serbes, vous-mêmes, et les Serbes qui avaient été membres du parti de M.

5 Racan, ont commencé à faire partie du Parti démocratique serbe ?

6 R. Oui. C'était l'une des raisons importantes, car ce parti, le parti

7 auquel l'on appartenait, le Parti des changements démocratiques pour lequel

8 nous avions voté, ne faisait rien face à ces changements. Simplement, ils

9 observaient ce qui se passait. C'était l'une des raisons pour lesquelles

10 les Serbes ont décidé d'opter pour cet autre parti politique qui pouvait

11 mieux protéger leurs intérêts.

12 Q. En juin 1990, est-ce qu'une association a été créée, l'association des

13 municipalités de la Dalmatie du nord et de la Lika ?

14 R. Oui. Je pense que c'est à ce moment-là que plusieurs municipalités se

15 sont rassemblées et ont établi l'association des municipalités de la

16 Dalmatie du nord et de la Lika.

17 Q. Vous avez dit qu'une grande congrégation de Serbes a eu lieu le 25

18 juillet 1990. Il s'agissait de Serbes de Croatie; est-ce exact ?

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce qu'à ce moment-là une déclaration portant sur l'autonomie et la

21 souveraineté du peuple serbe a été adoptée ?

22 R. Oui, elle a été adoptée.

23 Q. Est-ce qu'à ce moment-là le conseil national serbe a été créé ?

24 R. Oui, c'était le cas.

25 Q. Est-ce qu'à ce moment-là une décision a été prise visant à organiser un

26 référendum au sujet de l'autonomie serbe ?

27 R. Oui. Une décision a été prise afin d'organiser un référendum portant

28 sur l'autonomie culturelle.

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1 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire dans quelle période ce référendum a

2 eu lieu, si vous vous en souvenez ?

3 R. Si mes souvenirs sont bons, je dirais que peu de temps après le

4 référendum portant sur l'autonomie culturelle a eu lieu, et ce, seulement

5 sur le territoire de ces municipalités-là. Par la suite, en 1991, si mes

6 souvenirs sont bons, un autre référendum a eu lieu portant sur le maintien

7 de cette communauté au sein de la Yougoslavie.

8 Q. Ai-je tort de dire que ce premier référendum avait été fixé pour la

9 date du 19 août 1990 ? Est-ce que ceci rafraîchit vos souvenirs ?

10 R. Je pense que oui. Je pense que c'était bien la date.

11 Q. Donc, il fallait que le référendum a eu lieu ce jour-là ?

12 R. Oui, c'est ce qui était prévu.

13 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle a été la réaction des

14 autorités croates face à cette décision d'organiser un référendum ?

15 R. Les dirigeants croates de l'époque disaient qu'ils allaient empêcher

16 cela, interdire ce référendum, que ceci était inacceptable de leur point de

17 vue. Ils ont dit que par le biais de leurs services et de leurs

18 institutions, ils allaient empêcher cela.

19 Q. Savez-vous s'ils prenaient des actions à l'égard des postes de police

20 dans lesquels les Serbes travaillaient dans la région de la Krajina ?

21 R. Je pense qu'ils souhaitaient changer la structure du personnel et

22 introduire de nouveaux insignes ou de nouveaux emblèmes.

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je souhaite que l'on place sur le

24 rétroprojecteur la pièce à conviction de l'Accusation numéro 5, la partie

25 constituée du texte.

26 Q. Vous avez devant vous, Monsieur Dzakula, le texte proféré par l'accusé,

27 M. Milan Martic, au journaliste de la télévision croate; est-ce exact ?

28 Est-ce que vous reconnaissez ce texte ?

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1 R. Ceci est en anglais. Je ne le comprends pas.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] La Chambre de première instance me

3 permet-elle de lire ce texte au témoin ?

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez faire cela, Monsieur

5 Milovancevic.

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

7 Q. Monsieur Dzakula, ceci est un texte qui représente l'enregistrement, la

8 transcription de ce que M. Martic disait cela,

9 cette séquence vidéo à une journaliste de la télévision croate lorsqu'il

10 dit : "Dites dans votre rapport que cette police est la police du peuple,

11 qu'elle protège la population, qu'ils sont contre le gouvernement croate

12 qui les met en mal, dites-le haut et fort."

13 Je ne vais pas lire l'ensemble du texte. Est-ce que vous vous souvenez de

14 cette déclaration de M. Martic ?

15 R. Oui, je m'en souviens.

16 Q. Avez-vous eu l'occasion d'entendre la partie précédente du texte de la

17 même séquence, lorsque la journaliste de la télévision croate explique pour

18 quelle raison elle est venue dans la région de Knin, pour quelle raison

19 elle s'adressait à un policier serbe ?

20 R. J'aimerais que vous me rafraîchissiez la mémoire à ce sujet.

21 Q. La Défense a reçu de la part de l'Accusation le texte comportant le

22 contenu de cette séquence vidéo, et dans le texte en anglais, nous avons un

23 texte que je vais vous lire. "Nous sommes venus afin que quelqu'un confirme

24 ou nie la déclaration faite publiquement près de Knin, lorsqu'il a été

25 exigé lors d'une assemblée que la JNA protège le peuple serbe en Croatie

26 face à la police croate." Tout ceci, ce sont les mots de la journaliste de

27 la télévision croate.

28 Puis, un avertissement a été adressé au secrétariat municipal de

Page 510

1 l'Intérieur de Sibenik. Donc, c'était la police de Sibenik, et au poste de

2 police de Drnis et à Cin [phon]. Il a été dit que le feu allait être ouvert

3 contre eux sans aucun avertissement, à moins qu'ils n'arrêtent les

4 véhicules qui s'acheminent vers Knin. La police de Sibenik n'est pas du

5 tout au courant de cette information, mais elle a confirmé que sur la

6 route, il y avait des barrages, sur la route de Strmica et de Badjani

7 [phon] notamment. Dans sa déclaration faite hier, le président de

8 l'assemblée municipale de Knin a appelé les événements qui se sont déroulés

9 à Petrinja et le désarmement de la police de réserve --

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, vous êtes

11 toujours en train de citer ou c'est vous qui avez pris la parole ?

12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je

13 ne cesse de citer.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Car d'après le compte rendu

15 d'audience, la fin de la citation était après les mots "la police croate."

16 "Nous sommes venus ici afin de recevoir une confirmation ou un déni de la

17 déclaration faite lors de l'assemblée près de Knin, et cetera." Ensuite,

18 après les mots police croate, nous avons le signe indiquant la fin de la

19 citation. Ensuite, vous dites que ce que vous avez dit par la suite dans le

20 texte, c'était toujours les propos tenus par la journaliste de la

21 télévision croate.

22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai jamais

23 dit que c'était la fin de la citation. Je m'excuse si j'ai été peu précis,

24 mais je n'arrête pas de lire le texte de la journaliste que l'on entend sur

25 la même séquence, le texte qui précède la réponse de M. Martic. Tout ceci

26 était des propos tenus par la journaliste.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'est ce que j'ai cité sur la base de la

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1 transcription que le bureau du Procureur vous avait fournie.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas-là, vous dites que

3 les signes indiquant la fin de la citation, après les mots police croate,

4 doivent être effacés. Puis, vous dites que vous avez continué à citer

5 jusqu'à ce que je ne vous aie interrompu.

6 Je demanderais aux sténotypistes de tenir compte de cela.

7 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Excusez-moi, mais ceci n'est

8 toujours pas tout à fait clair. Car si nous lisons la transcription --

9 L'INTERPRÈTE : Le micro est fermé.

10 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vais redire ce que j'avais dit.

11 Si je lis bien le compte rendu d'audience, il y a une phrase dans laquelle

12 le conseil de la Défense explique que ceci fait partie de la transcription.

13 C'est la partie qui a été dite par la journaliste. Donc, il faudrait après

14 cela ouvrir de nouveau les guillemets. Ai-je raison de dire cela ?

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui. Vous avez tout à fait raison. A un

16 moment donné, j'ai inséré mon commentaire. J'ai dit que je continue la

17 lecture. A ce moment-là, effectivement, j'ai interrompu la citation. Il

18 faudrait d'abord fermer les guillemets et les rouvrir après ce commentaire

19 que j'ai proféré, justement conformément à ce que vous venez de dire.

20 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Merci.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Il me reste une seule phrase, et je vais

22 terminer. Excusez-moi. C'est une portion un peu longue. Nous nous étions

23 arrêtés à la dernière phrase que je cite : "Dans sa déclaration faite hier,

24 le président de l'assemblée municipale de Knin a dit en parlant des

25 événements qui se sont déroulés à Petrinja et du désarmement de la police

26 de réserve, qu'il s'agissait là de la terreur continue d'état à l'encontre

27 de la population serbe en Croatie, et il a fait appel à la population pour

28 qu'elle défende son autonomie et sa liberté." Fin de la citation.

Page 512

1 Q. Monsieur Dzakula, après ce texte, nous avons pu entendre la déclaration

2 de M. Martic qui dit en réponse : "Dites dans votre reportage qu'il s'agit

3 là d'une police du peuple qui protège ce peuple à l'encontre du

4 gouvernement croate." Ma question est la suivante : y a-t-il un lien entre

5 les événements, l'irruption faite par la police croate et le désarmement

6 opéré par la police croate à l'encontre de la police de réserve d'un côté,

7 et d'autre part, cette attitude et le comportement de M. Martic ?

8 R. Oui. Si vous tenez compte de ce qui s'est passé, de ce qui s'était

9 passé à Petrinja et de la situation qu'ils souhaitaient empêcher à Knin,

10 dans ce cas-là, la réponse, c'est oui. Probablement, M. Martic tenait

11 compte de cela lors de sa réponse.

12 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez nous dire comment les Serbes de Croatie

13 ont voté lors de ce premier référendum qui a eu lieu en 1990, le référendum

14 portant sur l'autonomie ?

15 R. Je pense que s'agissant de ce référendum portant sur l'autonomie

16 culturelle, il a eu lieu de manière partielle seulement, et a été ordonné

17 de la municipalité de la Dalmatie du Nord et de Lika. J'ai entendu dire que

18 les gens avaient répondu au référendum en masse. Cependant, je n'ai pas

19 beaucoup d'information à ce sujet, et notamment pas d'information

20 officielle. Je ne sais pas s'il s'agit d'une liste officielle ou si

21 simplement les gens se présentaient pour voter. Je peux vous donner plus

22 d'informations concernant le deuxième référendum qui a eu lieu le 12 mai.

23 Q. Merci. Nous en parlerons plus tard. Est-ce qu'il est vrai qu'à la fin

24 décembre 1990, la Croatie avait adopté une nouvelle constitution selon

25 laquelle les Serbes n'étaient plus une nation mais ils sont devenus une

26 minorité nationale ?

27 R. Oui, la Croatie avait adopté une nouvelle constitution selon laquelle

28 les Serbes ont cessé d'être un peuple constitutif et son devenus une

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1 minorité ethnique.

2 Q. Est-ce qu'il est exact que face aux changements de la constitution

3 croate, un statut de la Krajina a été adopté et la SAO Krajina a été

4 adoptée ?

5 R. Oui, je pense que c'est ce qui s'est passé.

6 Q. Est-ce qu'il est exact de dire que ceci s'est produit à la fin de

7 l'année 1990, notamment le 21 décembre 1990 ?

8 R. Oui, c'était à la fin de l'année 1990.

9 Q. Quelle était le statut de la SAO Krajina selon le document émanant de

10 la fin 1990 ? Est-ce que qu'il s'agissait là d'un territoire autonome au

11 sein de la Croatie ?

12 R. Oui, c'est justement la raison pour laquelle c'était appelé Région

13 autonome.

14 Q. En ce qui concerne le film portant sur M. Spegelj et l'armement de la

15 Croatie, qu'est-ce qui s'est produit au début de l'année 1990 ? Est-ce que

16 la Croatie s'est armée, et est-ce que vous disposez des informations à ce

17 sujet ?

18 R. Nous avons simplement entendu dire de la part des gens que l'on

19 procédait à l'armement de la population. Nous n'avions pas la possibilité

20 de voir comment ceci était effectué, mais les rumeurs circulaient dans ce

21 sens.

22 Q. Merci. Est-ce que vous avez entendu parler de l'augmentation du nombre

23 des policiers croates ? Est-ce qu'une telle augmentation a eu lieu ?

24 R. Oui, ils avaient procédé à une augmentation du nombre des policiers

25 croates afin, comme on disait à l'époque, de changer la structure nationale

26 au sein de la police. Si mes souvenirs sont bons, ils ont envoyé une

27 quarantaine de nouveaux policiers à Pakrac afin de changer les proportions,

28 car ils considéraient qu'il y avait trop de Serbes et trop peu de Croates

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1 dans la police de Pakrac d'après l'interprétation du ministère de

2 l'Intérieur croate de l'époque. Sur la base de cela, ils ont envoyé des

3 renforts, des policiers dans des localités différentes.

4 Q. Est-ce que mis à part ces renforts au sein de la police, le Corps de la

5 Garde nationale a été créé ?

6 R. Oui. Peu de temps après, le passage en revue de la Garde nationale

7 croate a eu lieu.

8 Q. Peut-on dire qu'il s'agissait de la nouvelle armée croate ?

9 R. On considère que ceci représentait l'embryon de la nouvelle armée

10 croate.

11 Q. Est-ce que vous savez que la Croatie, à la deuxième moitié du mois de

12 février 1991, avait adopté la décision selon laquelle les lois fédérales ne

13 s'appliquaient plus sur son territoire et a assumé les ingérences des

14 autorités fédérales ?

15 R. Oui, je me souviens. Ceci a eu lieu le 21 février 1991.

16 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle a été la réaction des Serbes

17 face à une telle décision ?

18 R. Les gens étaient fortement surpris. Ils n'ont pas approuvé cela, car

19 les Serbes considéraient que la Yougoslavie était un Etat commun dans

20 lequel tout le monde vivait bien, et de leur point de vue, ceci était une

21 nouveauté inattendue.

22 Q. Est-ce que le 28 février 1991, la SAO Krajina a pris la décision de se

23 séparer de la Croatie justement en raison de cela ?

24 R. Je ne me souviens pas de la date. Je me souviens qu'une décision a été

25 prise à la fin du mois de février ou début mars, au cours de cette période-

26 là.

27 Q. Vous avez déjà mentionné les éléments qui s'étaient déroulés à Pakrac

28 le 1er mars 1990.

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1 R. Oui.

2 Q. Est-ce qu'il est exact que le gouvernement croate avait envoyé ses

3 policiers à Pakrac et qu'ils ramenaient les fusils automatiques chez eux;

4 est-ce exact ? Sinon, expliquez-nous ce qui s'était passé.

5 R. Non, je vais vous expliquer. Vers la fin du mois de février, lorsque

6 les renforts sont arrivés sous forme d'une quarantaine de policiers croates

7 à Pakrac, qui portaient des insignes différents sur leurs couvre-chefs, du

8 coup, il y avait les policiers avec les anciens insignes et des policiers

9 avec de nouveaux insignes sur leurs couvre-chefs, les uns aux côtés des

10 autres. Sur les informations reçues par la personne qui, à l'époque, était

11 le chef de la police, Jovo Vezmar, il disait que les officiers qui étaient

12 armés prenaient les armes du poste de police et les ramenaient chez eux. Le

13 président de l'assemblée municipale de Pakrac, Milan Bozic, et son

14 collègue, président du conseil exécutif, ont donné l'ordre au chef de la

15 police afin que ces nouveaux policiers soient désarmés, les policiers qui

16 sont venus avec de nouveaux insignes, et que ceux-là soient relevés de

17 leurs fonctions. Ils ont dit également qu'il fallait appeler tous les

18 policiers de réserve dont les noms figuraient sur les listes précédentes

19 afin qu'ils viennent en aide à ceux sur place et afin que ceux-ci soient

20 activés. C'est justement ce qui s'est passé. Ce qui a donné le prétexte au

21 ministère de l'Intérieur de la République de Croatie d'envoyer leurs forces

22 spéciales à Pakrac afin de libérer les policiers qui avaient été désarmés

23 afin de rétablir le contrôle du poste de police de Pakrac.

24 Q. Merci beaucoup, Monsieur Dzakula.

25 Est-ce que vous pouvez nous dire comment ils ont rétabli le contrôle

26 total ?

27 R. Ils avaient annoncé leur arrivée, si mes souvenirs sont bons. Ils sont

28 partis à bord des véhicules transport de troupes blindés, et ils étaient

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1 prêts pour des actions armées intenses. De plusieurs directions, les

2 policiers de réserve ont été activés. Puis, un nombre d'hommes serbes ont

3 été activés. Il y en a qui étaient armés, il y en avait qui n'étaient pas

4 armés. Ils ont bloqué l'accès de Pakrac, car ils souhaitaient empêcher

5 l'entrée des forces croates et le changement de la structure de police. Au

6 cours de la nuit, une unité de la JNA est arrivée. Ils sont entrés au poste

7 de police et ils ont demandé auprès des policiers d'enlever le barrage

8 routier en disant qu'ils allaient empêcher qu'un conflit éclate. Lorsque la

9 police a agi conformément à cette demande, la JNA a permis aux véhicules

10 transport des troupes croates d'entrer à Pakrac avec les forces spéciales

11 croates tôt dans la matinée. Peu de temps après, il y a eu une échange de

12 tir entre la nouvelle police croate qui était venue de Zagreb et les

13 policiers croates, et les policiers d'active de la municipalité de Pakrac.

14 Cet échange de tir a eu lieu pendant une demi-heure ou une heure, et les

15 policiers serbes de Pakrac se sont éloignés de Pakrac par la suite. Une

16 nouvelle structure a été établie au poste de police de Pakrac, remplie par

17 des gens venus de Zagreb. Un certain nombre d'anciens policiers ont été

18 arrêtés, mais ils ont été libérés au bout de quelques jours, et par la

19 suite, l'armée est venue à Pakrac, de même que les représentants des

20 autorités de Zagreb.

21 Q. Lorsque vous parlez de véhicules transport de troupes, s'agissait-il de

22 véhicules blindés dont ils tiraient ?

23 R. Ils sont venus à bord des véhicules de transport de troupes, et

24 certains d'entre eux étaient blindés. Je ne sais pas s'ils tiraient depuis

25 ces véhicules-là. Je suppose que oui. Je ne l'ai pas vu, mais j'ai entendu

26 dire qu'ils tiraient effectivement.

27 Q. Merci. Pourriez-vous nous dire si à cette occasion-là, on a tiré sur la

28 JNA également ?

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1 R. Cela s'est passé le lendemain, ou peut-être le même soir. Le véhicule

2 de transport de troupes de la JNA était-là et, en fait, c'est la police

3 croate qui leur a tiré dessus, mais ils n'ont pas riposté.

4 Q. A la suite de ces événements à Pakrac, est-ce que quoi que ce soit

5 s'est passé ? Je pense, par exemple, à la présidence de la Yougoslavie.

6 Est-ce qu'il y a une demande pour que soit déclaré l'état d'urgence ?

7 R. Oui, des tentatives ont été faites.

8 Q. Merci. Merci, cela suffit. Je m'excuse. Est-ce que l'état d'urgence a

9 finalement été déclaré ?

10 R. Non, pas pour autant que je m'en souvienne.

11 Q. Nous avons parlé des événements de Pakrac le 1er mars 1991. Après cela,

12 il y a eu l'incident de Plitvice le 31 mars 1991, ainsi que le 1er avril

13 1991. Vous avez expliqué qu'il y a eu à Plitvice une réunion du SDS. C'est

14 ce que vous avez dit, n'est-ce pas ?

15 R. Oui. Le 31 mars, il y a eu une réunion du conseil principal et du

16 conseil exécutif du SDS à Obrovac.

17 Q. Lors de cette réunion, est-ce qu'il n'a pas été convenu d'adopter une

18 stratégie, et ce, afin de négocier et de pouvoir envisager une conciliation

19 avec les autorités croates ?

20 R. Oui. Ce fut une longue session. Une décision fut prise pour essayer de

21 négocier avec les autorités croates afin d'adopter une approche

22 conciliatrice. On a, en quelque sorte, posé les bases, si vous voulez.

23 Q. Est-ce que des contacts ont été pris avec les autorités croates pour ce

24 faire ?

25 R. J'avais annoncé que la réunion allait avoir lieu le

26 31 mars. J'avais annoncé quelle serait la nature de cette réunion, et

27 quelle serait la teneur des décisions qui seraient prises. Cela avait été

28 annoncé. Je ne sais pas quand est-ce que s'est terminée la séance en

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1 question, mais je sais que le président du parti, Raskovic, a annoncé cette

2 nouvelle décision. Je ne sais pas si cela a été transmis à quiconque. Je ne

3 sais pas si cela était envoyé aux médias.

4 Q. Mais qu'en est-il de la journée suivante, le 1er avril 1991 ? Est-ce que

5 les autorités Croates ont envoyé deux autocars dans lesquels se trouvaient

6 des officiers de police à Plitvice, et ce, afin qu'ils s'emparent de la

7 station de police serbe ? Ou peut-être que cela s'est passé le 31. Je ne

8 suis pas sûr des dates.

9 R. Cela s'est passé au petit matin le 1er avril.

10 Q. Est-ce qu'il s'agissait d'un jour férié ?

11 R. Oui. Autant que je m'en souvienne, il s'agissait de la Pâque orthodoxe,

12 ce jour-là.

13 Q. Est-ce que vous pensez que l'on pouvait appeler cela une attaque de la

14 part de la police croate contre les officiers de police serbes, et ce, le

15 jour de la Pâque orthodoxe ?

16 R. Si quelqu'un s'empare d'armes, on peut effectivement parler d'attaque,

17 certainement.

18 Q. Merci. Vous avez dit que M. Hadzic était présent à la réunion

19 d'Obrovac. Vous avez dit qu'il était également partisan de cette position

20 pacifique, de la solution qui consistait à essayer de concilier les points

21 de vue, et vous avez dit qu'il fut arrêté par la police croate après cette

22 réunion; est-ce exact ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous avez expliqué, n'est-ce pas, que lors de la détention de M. Hadzic

25 par la police croate, M. Hadzic a été passé à tabac, n'est-ce pas ?

26 R. Oui. Il a été effectivement passé à tabac.

27 Q. Au vu de la situation à Borovo Selo le 2 mai 1992, et je sais que nous

28 avons parlé jusqu'à présent du 1er avril, et nous parlons maintenant du 2

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1 mai 1992, j'aimerais savoir s'il est vrai qu'il y a eu des négociations

2 avec la partie croate ?

3 R. Oui, c'est exact.

4 Q. Est-il vrai que vous avez prêté main-forte lors des négociations

5 relatives à la mise en liberté de M. Hadzic ?

6 R. Oui. Je suis allé le rencontrer lorsqu'il a été finalement mis en

7 liberté.

8 Q. Est-ce qu'il y avait des barrages à Borovo Selo ?

9 R. Oui, il y en avait.

10 Q. Est-il vrai de dire qu'après vos négociations avec les autorités

11 croates, vous avez utilisé votre influence pour que les Serbes du cru

12 enlèvent les barrages ?

13 R. Oui. Je suis allé parler aux gens du cru. Je leur ai dit d'enlever les

14 barrages dans les rues.

15 Q. Est-ce qu'ils vous ont écouté ?

16 R. Oui.

17 Q. Quelle fut la réaction des Croates le 2 mai 1991 ?

18 R. Je pense que cela s'est passé au petit matin, ou un moment de cette

19 journée. Il y a eu un bus rempli d'officiers de police qui est arrivé à

20 Borovo Selo. Des tirs ont été ouverts. Il y a eu une confrontation entre

21 les gens de Borovo Selo, d'un côté, et les forces de police croates.

22 Q. Est-ce que des gens étaient tués ?

23 R. Oui. Les médias ont relaté qu'un certain nombre d'officiers de police

24 avaient été tués, mais des Serbes ont également été tués.

25 Q. Je pense qu'il y a un petit malentendu entre nous deux. Lorsque vous

26 parlez de "officiers de police," à quels officiers de police faites-vous

27 référence ?

28 R. Je pense aux officiers de police qui se trouvaient à bord du bus qui

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1 est arrivé à Borovo Selo, mais je pense également à certains serbes, à des

2 officiers de police et à des civils qui ont été tués.

3 Q. Est-ce que la JNA est intervenue pour essayer de faire en sorte de

4 juguler la propagation de ces confrontations ?

5 R. Oui. La JNA est intervenue pour empêcher justement que le conflit ne se

6 propage.

7 Q. Nous avons parlé de ce qui s'est passé le 2 mai. Est-ce qu'un

8 référendum avait été prévu en Croatie en mai 1991 ?

9 R. Oui. Le gouvernement croate avait prévu l'organisation d'un référendum

10 relatif à la sécession de la Yougoslavie. Il y en avait un autre qui avait

11 été prévu par la SAO de la Krajina. Il s'agissait d'un référendum dont la

12 question portait sur le fait que cette région resterait au sein de la

13 Yougoslavie. Par conséquent, dans l'espèce d'une semaine, deux référendums

14 ont été organisés en quelque sorte.

15 Q. Merci. Il s'agit toujours du mois de mai 1992. Est-ce qu'il y a eu

16 d'autres modifications, et je pense à la présidence de la Yougoslavie, et

17 je pense plus particulièrement à Stjepan Mesic. Est-ce qu'il n'a pas été

18 nommé ou élu président à la présidence yougoslave ?

19 R. Oui. Il y a eu en quelque sorte des tiraillements --

20 M. WHITING : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre, mais pour

21 être précis, je pense que toutes les questions portaient sur l'année 1991,

22 alors je me dis de temps à autre il a été fait référence à l'année 1992, et

23 cela vient de se produire à nouveau. Je souhaiterais que l'on précise bien

24 une chose : tous les événements dont nous venons de parler se sont passés

25 pendant l'année 1991, y compris le dernier incident qui vient d'être

26 mentionné.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est exact, Maître

28 Milovancevic ? Est-ce que c'est une erreur que de faire référence à 1992 et

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1 vous n'entendiez que l'année 1991 ?

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Si l'année 1992 a été mentionnée, il

3 s'agit d'une erreur, car nous avons constamment fait référence aux

4 événements du mois de mars, avril, mai 1991.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Si vous prenez la page 27

6 du compte rendu d'audience, vous avez posé une question, Maître, et vous

7 dites : "Je vous remercie. Il s'agit toujours du mois de mai 1992. Est-ce

8 qu'il y a eu des changements au niveau de la présidence de la Yougoslavie

9 et, plus précisément, est-ce que Stjepan Mesic n'a pas été nommé ou élu

10 président de la présidence yougoslave," et là vous faites référence à

11 l'année 1992. Est-ce qu'il s'agit de l'année 1991 ?

12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'est un lapsus. Monsieur le Président,

13 effectivement, il s'agit bien de l'année 1991.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Milovancevic. Merci à

15 vous, Monsieur Whiting.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

17 Q. Afin de bien comprendre l'élection de M. Mesic à ce poste, pouvez-vous

18 nous dire, Monsieur Dzakula, que si la présidence était un organe

19 collectif ?

20 R. Oui, un organe collectif pour les six républiques.

21 Q. Est-ce que cela signifiait que les six républiques nommaient leur

22 président, lorsque cela était leur tour ?

23 R. Oui, c'est exact.

24 Q. Nous parlons maintenant du mois de mai 1991. Il revenait à la Croatie

25 de nommer son représentant et il revenait à la Croatie de faire en sorte

26 que son représentant soit élu au poste de président de la présidence, donc

27 de cet organe collectif; est-ce cela est bien exact, Monsieur Dzakula ?

28 R. Oui, c'est exact.

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1 Q. Vous avez dit que M. Mesic n'avait pas été élu ou nommé lorsque cela

2 était son tour, qu'il y avait quelques problèmes à ce sujet ?

3 R. Oui, parce que sa nomination a été contestée.

4 Q. Est-ce que des pressions ont été exercées par la Communauté européenne

5 ainsi que par les Etats-Unis à la suite de quoi Stjepan Mesic a été nommé

6 président de la présidence de la RSFY ?

7 R. Oui, c'est exact. A la suite des pressions exercées par eux, M. Stjepan

8 Mesic a été nommé président de la présidence de la RSFY.

9 Q. Est-ce que cela signifie qu'un représentant de la République de la

10 Croatie a été nommé chef d'Etat, et il s'agit de la même Croatie qui

11 quelques mois précédemment avait déclaré qu'aucune des lois fédérales ne

12 seraient en vigueur sur son territoire ? Est-ce qu'il s'agit de la même

13 Croatie qui en mai avait déclaré qu'elle faisait sécession de l'Etat

14 fédéral et que cela avait été déclaré après un référendum ?

15 R. Oui, c'est exact. Mais au vu des pressions exercées par la Communauté

16 européenne, les résultats de ce référendum étaient censés entrer en vigueur

17 seulement plusieurs mois après.

18 Q. Très bien. Je vous remercie. Nous reviendrons sur ce sujet un peu plus

19 tard.

20 Pouvez-vous nous dire quelle fut la durée de la présidence assurée par M.

21 Stjepan Mesic ?

22 R. Il se peut que je me trompe, mais je pense que cela a duré jusqu'à

23 l'automne de 1991, jusqu'au mois d'octobre 1991. Mais ceci étant dit, je ne

24 me souviens pas de la date exacte.

25 Q. Vous souvenez-vous d'une phrase prononcée par Stjepan Mesic lors de son

26 retour à Zagreb, à la capitale de la Croatie ? Il a dit à l'assemblée

27 croate après qu'il a cessé d'être président de la présidence de la

28 Yougoslavie ?

Page 524

1 R. Oui. Autant que je me souvienne, voilà quelle était cette phrase :

2 "J'ai accompli ma tâche et j'ai détruit la Yougoslavie." Quelque chose de

3 ce style-là.

4 Q. Si je vous corrigeais et que je vous disais qu'il a exactement dit :

5 "J'ai accompli ma tâche. La Yougoslavie a cessé d'exister. Elle n'existe

6 plus."

7 R. Oui, je pense que vos propos sont plus précis, effectivement.

8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, au vu de notre

9 nouvel horaire, je me demande si le moment est un moment opportun pour

10 avoir une pause ? Nous voulons nous en tenir à ces séances d'une heure et

11 quart.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si cela convient à la Défense, nous

13 allons maintenant avoir notre pause. Je vous remercie et nous nous

14 retrouverons dans une demi-heure. Nous reprendrons l'audience à 16 heures.

15 --- L'audience est suspendue à 15 heures 31.

16 --- L'audience est reprise à 16 heures 02.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de poursuivre le contre-

18 interrogatoire du témoin, j'aimerais juste vous dire ce qui suit : la

19 Chambre de première instance a entendu de la part des interprètes, que les

20 interprètes sont extrêmement reconnaissants à la Chambre de prendre en

21 considération leurs préoccupations, mais que ceci étant dit, les

22 interprètes n'ont pas véritablement de préférence pour l'une ou l'autre des

23 solutions proposées pour l'horaire de travail. Nous allons donc nous en

24 tenir à ce que nous étions convenus tout à l'heure, à savoir, une heure

25 quinze minutes par séance. Ceci étant dit, les interprètes sont extrêmement

26 reconnaissants de se voir octroyer une demi-heure de pause, ce qui est

27 extrêmement important pour eux. Nous remercions les interprètes de nous

28 avoir fait part de leur point de vue. Je vous remercie.

Page 525

1 Maître Milovancevic, vous pouvez reprendre votre

2 contre-interrogatoire.

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

4 Q. Monsieur Dzakula, nous allons revenir à la date du 2 mai 1991. Nous

5 avions parlé des événements à Borovo Selo. Savez-vous ce qui s'est passé le

6 2 mai 1991 à Zadar ? Est-ce que vous en avez entendu parler ?

7 R. Je ne sais pas si vous faites référence aux véhicules de transport de

8 troupes?

9 Q. Non, non.

10 R. Alors, je ne vois pas.

11 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de la démolition de certains

12 bâtiments à Zagreb auxquels on a mis le feu - cela à Zadar - cela s'est

13 passé le 2 mai 1991 ? Si vous n'avez pas entendu parler de cela, dites-nous

14 le ?

15 R. Je ne me souviens pas de cela.

16 Q. Avez-vous entendu parler du discours du général Tudjman le 5 mai 1991,

17 discours dans lequel il exhorte le peuple croate à fomenter une rébellion

18 contre la JNA, à la suite de quoi nous avons eu les événements de Split ?

19 R. Je m'en souviens.

20 Q. Vous vous en souvenez. Est-ce que vous avez vu à la télévision les

21 événements qui sont se sont passés à Split deux jours après le discours de

22 M. Tudjman ?

23 R. Ce dont je me souviens, c'est qu'un groupe de citoyens a attaqué un

24 véhicule de transport militaire, des véhicules de transport de troupes. Je

25 pense qu'ils se sont emparés des armes. Ils ont appréhendé un soldat. Ils

26 l'ont tiré par le cou, par la tête. Ils ont cassé les armes. Je pense même

27 qu'il y a eu certains blessés, des victimes ce jour-là.

28 Q. Si je vous disais qu'à cette occasion les caméras de télévision ont

Page 526

1 filmé la façon dont ils avaient étranglé un soldat qui répondait au nom de

2 Sasko, qui ensuite, est mort; est-ce que cela correspond à la vérité ?

3 R. Oui.

4 Q. Il s'agit toujours du mois de mai 1991. A la suite de tous ces

5 événements, est-ce que l'on pourrait décrire la situation en Croatie comme

6 suit, les Serbes faisaient l'objet de harcèlement, leurs maisons étaient

7 incendiées, on s'emparait de leurs maisons, eux-mêmes étaient emmenés dans

8 des postes de police ?

9 R. Oui. On les mettait en détention, ils étaient provoqués, ils étaient

10 attaqués. Je ne pourrais pas dire que cela s'est passé sur une grande

11 échelle, comme vous venez de le dire.

12 Q. Pourriez-vous alors nous dire où cela s'est passé ? Où est-ce que des

13 gens ont été arrêtés ? Où est-ce que ces gens ont été emmenés en

14 détention ? Est-ce qu'il y a eu des cas de disparition de personnes ?

15 R. Non pas seulement au mois de mai; cela s'est passé avant l'été, pendant

16 le mois de juin avant les événements de Vukovar. J'ai entendu dire que des

17 gens étaient portés disparus. J'ai entendu dire qu'il y avait eu des

18 provocations, que des gens avaient répondu au téléphone et qu'ils avaient

19 été menacés. Cela s'est passé à Pozega. Je sais que cela s'est passé. Pour

20 ce qui est du reste, j'en ai tout simplement entendu parler. C'est tout.

21 Q. Merci. Est-il vrai que la Croatie et la Slovénie ont déclaré de façon

22 unilatérale leur indépendance, donc leur sécession de la Yougoslavie, le 25

23 juin, 1991 ?

24 R. Je ne connais pas la date exacte. Je ne peux pas corroborer la date que

25 vous venez de mentionner, mais je sais qu'ils ont adopté la décision et

26 qu'ils ont fait sécession par rapport à la Yougoslavie.

27 Q. Vous souvenez-vous de ce qui s'est passé en Slovénie, après que la

28 Slovénie et la Croatie - et je dirais même que la Slovénie avec la Croatie,

Page 527

1 simultanément avec la Croatie, a décidé de devenir indépendante ?

2 R. D'après ce dont je me souviens, la TO de la Slovénie voulait se saisir

3 de douaniers et d'officiers de douanes qui se trouvaient à la frontière, à

4 la suite de quoi il y a eu un conflit entre la JNA et la Défense

5 territoriale de la Slovénie. Ce conflit a duré quelques jours.

6 Q. A la suite de ces affrontements, est-ce que la JNA, l'armée fédérale

7 s'est retirée de la Slovénie en suivant ou en obéissant aux ordres émis par

8 la direction, et ce, afin d'éviter l'escalade du conflit ?

9 R. Oui, cela est exact. La JNA s'est retirée de la Slovénie conformément à

10 l'ordre qui avait été émis par le président de la Présidence de la RSFY.

11 M. WHITING : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, à propos

12 de ces questions, enfin pour ce qui est de ces questions, j'aimerais en

13 connaître la base. Est-ce que d'aucun essaie de savoir si le témoin a

14 entendu parler de cela ou a été le témoin de ces événements.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez une réponse à

16 apporter à cela, Maître Milovancevic ?

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je pose ces questions au témoin, et je

18 peux être beaucoup plus précis si nécessaire. Jusqu'à présent, j'ai posé

19 des questions à propos d'événements dont tous les médias à l'époque ont

20 parlé, qu'il s'agisse de la radio, de la presse écrite, de la télévision.

21 Il s'agissait de sujets brûlants d'actualité dont parlait tout le monde.

22 C'est pour cela que je pose ces questions au témoin afin de lui demander

23 s'il s'en souvient. Il ne s'agit pas d'aborder l'analyse juridique de ces

24 événements, pas du tout. Il s'agit tout simplement d'établir les faits,

25 d'établir ces événements et d'établir que ces événements ont eu lieu.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je comprends, Maître Milovancevic. Un

27 moment, s'il vous plaît.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

Page 528

1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Poursuivez votre

2 contre-interrogatoire, Maître Milovancevic. Je vous demanderais de préciser

3 peut-être vos questions ou la portée de vos questions. Il est vrai que le

4 témoin a parlé de choses assez générales lors de l'heure de

5 l'interrogatoire principal. Il nous a parlé d'incidents à propos desquels

6 il avait lu certaines choses, il nous a dit qu'il avait entendu de la part

7 de certaines personnes, qu'il a entendu de la part des médias. Je pense que

8 vous avez tout à fait le droit de lui poser des questions à ce sujet.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

11 Q. Lorsque nous avons abordé les événements qui se sont déroulés en mars

12 et en avril, vous avez fait état d'une décision qui fut suspendue. Il

13 s'agissait d'une décision relative à l'indépendance. Nous allons revenir

14 sur ceci. Vous nous avez dit qu'en juin 1991, la Croatie et la Slovénie

15 avaient adopté une décision pour ce qui était de prendre leur indépendance

16 par rapport à la Yougoslavie. Est-ce que le terme, le mot "moratorium de

17 Brioni" évoque quelque chose pour vous, car ce moratoire, en quelque sorte,

18 a été en vigueur à partir du 8 juillet 1991, et ce, pendant trois mois ?

19 R. Oui. Je me souviens du document, document qui stipulait que le résultat

20 du référendum ou que la mise en vigueur du résultat du référendum serait

21 prorogée. Il fallait surseoir à la mise en vigueur de ce référendum, et ce,

22 pendant trois mois.

23 Q. Est-il exact que ce moratoire était relatif à la décision prise par la

24 Slovénie et par la Croatie à propos de cette sécession, et que cela fit

25 l'objet d'un accord entre la Communauté européenne, la Croatie, la Slovénie

26 et l'Etat yougoslave ?

27 R. Oui, c'est exact. C'est ainsi que les choses se sont passées.

28 Q. Monsieur Dzakula, est-ce que vous savez quels sont les événements qui

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1 se sont passés à la fin du mois d'août près de Gradus et Cavtat ? Est-ce

2 que vous avez entendu parler de mesures prises par le ZNG dans ce secteur ?

3 R. Je ne m'en souviens véritablement pas.

4 Q. Est-ce que Reichl-Kir vous dit quelque chose ? Ce nom vous dit-il

5 quelque chose et est-ce que vous pouvez nous dire quelque chose de bref à

6 ce sujet, si tant est que cela vous dit quelque chose ?

7 R. Oui. Ce nom est assez connu en Croatie. Cet homme avait été chef de la

8 police à Osijek. Il a conduit des négociations avec les Serbes à Vukovar et

9 dans la banlieue d'Osijek. Il s'est efforcé de tomber d'accord pour écarter

10 les appréhensions des Serbes de là-bas aux fins de normaliser la situation,

11 et dans l'une des actions, il a été tué dans une embuscade. Il a été tué

12 par des extrémistes croates. On lui avait tendu une embuscade.

13 Q. Avez-vous entendu parler de ce qui s'est produit avec les Serbes en été

14 et automne 1991 à Sisak ? Avez-vous des renseignements à ce sujet ?

15 R. J'en ai entendu parler, et dans les années qui ont suivi, cela s'est

16 confirmé. Il y a eu des Serbes qui ont disparu. On en a retrouvé dans la

17 rivière Sava, et on en a retrouvé chez eux tuer ou alors passer à tabac.

18 Q. Pouvez-vous nous dire brièvement où se trouve Osijek, dans quelle

19 partie de la Croatie ?

20 R. Vous avez dit Sisak ?

21 Q. Oui, je voulais dire Sisak. Excusez-moi.

22 R. Sisak se trouve dans le centre, la partie centrale de la Croatie, dans

23 la région de Banija et Kordun. Autour de Sisak, il y avait des

24 municipalités avec une majorité de population du groupe ethnique serbe.

25 Vojnic, Vrgin Most, Glina.

26 Q. Est-ce qu'à l'époque, comme vous le dites, lorsque des Serbes ont

27 disparu, ont été tués ou passés à tabac, il y a eu des conflits armés à

28 Sisak ou pas ?

Page 530

1 R. Non, il n'y a pas eu de conflits armés à Sisak. Ce sont des gens qui

2 ont disparu en leur qualité de civils.

3 Q. Savez-vous nous dire quelque chose au sujet de Pakracka Poljana, Marino

4 Selo, et notamment s'agissant du mois d'octobre et du mois de novembre 1991

5 et au-delà ?

6 R. Oui. A l'époque, on a ouï dire qu'il y avait un camp, une prison, un

7 camp de détention, une prison à Marino Selo et Pakracka Poljana, vers

8 Marino Selo. C'est un territoire sur le territoire de la municipalité de

9 Pakracka, en direction de Kutina. Ce sont des emplacements où on a tué des

10 Serbes pendant toute la guerre. On ignore encore le nombre de personnes

11 tuées et c'est des gens de Zagreb et autres localités de la Croatie qui ont

12 été acheminés vers ces endroits-là, vers Pakracka Poljana.

13 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ce qui s'est passé avec les Serbes là-

14 bas ?

15 R. Une partie a été tabassée, puis tuée; une partie de ceux qui ont été

16 emmenés là-bas n'ont jamais été retrouvés. On sait seulement qu'ils ont été

17 emmenés vers Pakracka Poljana et ils sont considérés comme étant disparus.

18 Une partie a été relâchée avec des montants très élevés de rançon et

19 certains ont réussi à s'échapper ou être relâchés, grâce à l'intervention

20 d'amis pour se retrouver en liberté.

21 Q. Est-ce que dans ces situations-là, il s'agissait d'emprisonnement de

22 Serbes sans ordre d'un tribunal ? Est-ce qu'il y a eu des gens de

23 torturer ? Avez-vous des renseignements à ce sujet ?

24 R. Oui. Des Serbes originaires de ces villes ont été arrêtés et ont été

25 emmenés sans aucun ordre de quelque tribunal que ce soit. Ils

26 disparaissaient tout simplement.

27 Q. Vous avez parlé du mémorandum de Brioni et d'une décision de surseoir à

28 la décision précédente pour trois mois. Je vais vous poser une question au

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1 sujet du 21 septembre 1991. C'est dans le cadre de ce mémorandum. Cela

2 s'est passé à Karlovac et on a parlé de Koranski Most ? Est-ce que cela

3 vous dit quelque chose ?

4 R. Oui, l'événement est connu. C'est à Koranski Most, au pont de Korana,

5 qu'il y a eu des conflits. Je crois que c'était entre les soldats de la JNA

6 et des membres croates du ZNG, où il y a eu restitution ou reddition d'un

7 certain nombre de soldats, reddition d'un certain nombre de soldats qui ont

8 été tués, abattus, sur le pont même.

9 Q. Est-ce que ce que vous avez entendu dire correspond à ce qui suit : On

10 leur aurait donné l'ordre de se coucher, puis on les aurait tués. Certains

11 se seraient sauvés en sautant du pont, et il y a eu des procès à ce sujet.

12 R. Oui. C'est ce que j'ai appris moi-même par les médias.

13 Q. Savez-vous nous dire si cette procédure a été menée à bon terme, à

14 quelque moment que ce soit ?

15 R. Bien, l'affaire a été renvoyée pour un nouveau procès parce que l'on

16 n'a pas été satisfait d'un premier jugement rendu. Pour autant que je le

17 sache, c'est toujours en cours.

18 Q. Nous avons parlé de septembre 1991. Nous sommes en 2006, et l'affaire

19 est encore en cours ?

20 R. Oui. L'affaire n'est pas encore terminée. Elle est encore en instance.

21 Q. Merci. Pouvez-vous nous dire quelque chose au sujet de l'attitude des

22 autorités croates, de ces forces de police et des forces paramilitaires des

23 ZNG, du rassemblement de la Garde nationale à l'égard de la JNA. Ou alors,

24 pour aller plus rapidement -- ou plutôt, non, répondez d'abord à cette

25 question et je vous en poserai une autre tout à l'heure.

26 R. On demandait à la JNA de quitter la Croatie et de restituer ses armes,

27 de restituer ses armes à la Croatie.

28 Q. Avez-vous entendu parler des blocages de caserne, de l'eau et de

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1 l'électricité, et des lignes téléphoniques de couper, des encerclements,

2 des sièges de caserne, des soldats tués ?

3 R. Oui, j'ai entendu parler de tout cela.

4 Q. Savez-vous me dire quoi que ce soit au sujet du sort des grandes

5 casernes de l'armée fédérale, à savoir, de l'armée populaire yougoslave,

6 notamment en Slavonie, à Daruvar, Virovitica, à Varazdin, et autres ?

7 R. Oui, en effet. Ces casernes ont été encerclées et il y a eu des

8 négociations pour la reddition des soldats. Varazdin s'est rendue avec une

9 unité assez importante de blindés. A Bjelovar, il y a eu des conflits où un

10 commandant, me semble-t-il, s'est fait sauter lui-même et les entrepôts

11 ainsi que la caserne. A Julica [phon], il y a eu reddition. A Oljani

12 [phon], il y a eu des conflits. Des forces se sont emparées des casernes et

13 des entrepôts.

14 Q. Est-ce que les autorités croates et leurs forces se sont ainsi

15 procurées d'armes en quantité énorme de blindés et de camions, de munitions

16 en quantité considérable ?

17 R. C'est en s'emparant de ces casernes qu'ils se sont procurés bon nombre

18 de pièces d'artillerie et d'armes. Je ne sais pas combien de pièces ils se

19 sont procurées, mais je sais qu'il a été question de quantité importante de

20 pièces d'artillerie, d'armes, et autre matériel.

21 Q. Avez-vous entendu parler d'attaques contre des convois militaires se

22 retirant de la Slovénie ? Le sommet de l'état a décidé que la JNA devait se

23 retirer de la Slovénie, et une partie de ces convois militaires passaient

24 par la Croatie. Avez-vous entendu parler de ces attaques ?

25 R. Pour autant que je m'en souvienne, un convoi de cette nature a été

26 stoppé en Croatie.

27 Q. Qu'est-il advenu des armes ?

28 R. Je crois que c'est resté en Croatie.

Page 533

1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, vous êtes prié

2 de ralentir quelque peu.

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

4 Q. Est-ce que vous vous souvenez des entretiens avec

5 M. Karadzic - fin octobre 1991 - au sujet de la situation prévalant en

6 Slavonie occidentale ?

7 R. Oui, je m'en souviens.

8 Q. Il s'agit du mois d'octobre 1991, disais-je. Aviez-vous mentionné le

9 fait que la Slavonie occidentale se trouvait être encerclée ?

10 R. Oui, j'ai mentionné le fait que la Slavonie occidentale se trouvait

11 être encerclée.

12 Q. Avez-vous à l'occasion de cet entretien mentionné le fait que le

13 général Uzelac, avec le 5e Corps d'armée de l'armée yougoslave, a essayé

14 d'opérer une percée et de sauver les femmes et les enfants de cet

15 encerclement ?

16 R. Je ne me souviens pas des détails. Il se peut que je l'aie dit, mais si

17 vous avez cette déclaration, j'aimerais la relire pour vous confirmer. Je

18 sais qu'il y a eu une percée d'opérée, et que la Slavonie occidentale a été

19 jointe à la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine à l'époque, et il y a eu

20 un convoi de femmes et enfants qui a quitté la Slavonie occidentale.

21 Q. Pouvez-vous nous dire, Monsieur Dzakula, qui est-ce qui avait encerclé

22 la Slavonie occidentale ?

23 R. Je vais devoir vous répondre de façon plus ample à cette question.

24 Lorsqu'il y a eu des conflits le 19 août, et cela avait démarré le 14, en

25 réalité, à Okucani, la Défense territoriale de Pakrac, de Daruvar, de

26 Grubisno Polje, de Slatina et de Posega [phon], avait tenu des positions à

27 l'extérieur des villes que je viens de vous citer, où il y avait des

28 villages majoritairement serbes. Il y avait quelques villages croates

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1 aussi, peu nombreux d'ailleurs. La Défense territoriale d'Okucani, entre

2 Gradiska et Novska, pendant 50 jours a tenu ces positions sans qu'il y ait

3 intervention quelle qu'elle soit de la JNA. Celle-ci, c'est en y mêlé que

4 plus tard. Il n'y a pas eu de contact entre la Bosnie-Herzégovine et ces

5 différentes parties de la Croatie. Il y a eu des combats entre la Défense

6 territoriale et les forces de la police et les forces du maintien de

7 l'ordre de la Croatie. Il y a eu même des blessés qui étaient en train de

8 mourir parce qu'il n'y avait pas de médecins pour les aider. Personne ne

9 venait, ni les hélicoptères militaires, ni qui que ce soit d'autre pour

10 prendre en soin les blessés. Comme je disais, il se trouvait autour de nous

11 des forces de la police croate, le ZNG ou de l'armée. Je ne sais plus si à

12 l'époque il était question du rassemblement de la Garde nationale ou déjà

13 d'une armée.

14 Q. Lorsque vous dites que la JNA n'ait intervenu que pour opérer une

15 percée de cet encerclement, pour se passer les femmes et les enfants, est-

16 ce que cela signifie que la JNA s'est portée au secours de cette population

17 serbe encerclée ?

18 R. On s'attendait à l'arrivée des forces de la JNA dans l'objectif de

19 faire mettre un terme au conflit, et nous, on s'attendait à ce que la JNA

20 sépare la Défense territoriale serbe et la police croate. La JNA n'ait

21 arrivé que jusqu'à Okucani et Bijela Stijena pour procéder à l'ouverture

22 d'un corridor, et ceci vers la Bosnie-Herzégovine. Ils ne sont arrivés en

23 Slavonie occidentale que jusqu'à Pakrac. Une ligne de démarcation a été

24 placée à Novska et Nova Gradiska, et il y a eu des combats entre l'armée et

25 la Défense territoriale d'une part, et le ZNG et la police croate d'autre

26 part. Sur le territoire au-delà de Pakrac, il n'y avait -- enfin, Pakrac

27 jusqu'à Slatina Daruvar et autre, il n'y a eu que des membres de la TO

28 locale originaires de ces municipalités locales.

Page 535

1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on montre sur le

2 rétroprojecteur une pièce à conviction de la Défense, à savoir, la pièce

3 1D00-0001.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est une cote d'une pièce

5 à conviction ou est-ce que c'est le numéro ERN, Monsieur Milovancevic ?

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Nous avons reçu ici au Tribunal une cote

7 pour cette pièce. Le numéro tout à fait en bas est 00307122. Alors, nous

8 avons apposé une cote qui est le 1D00-0001.

9 [La Chambre de première instance le Greffier se concertent]

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci beaucoup. Nous n'allons pas

11 oublier cela.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

14 Q. Vous voyez ce document, Monsieur Dzakula ?

15 R. Oui, je le vois. C'est en langue anglaise.

16 Q. Il s'agit d'un texte en anglais du document qui a été rédigé par le

17 commandement du 5e Corps d'armée. Il s'agit d'une région qui faisait partie

18 de l'armée populaire yougoslave, et cela se rapporte à des renseignements

19 relatifs au génocide à l'égard du peuple serbe, envoyé à l'attention aux

20 représentants de la mission d'observation de l'Union européenne. Je me

21 propose pour ma part de vous donner lecture d'une partie de ce texte, qui

22 dit : "A partir du 1er novembre 1991, les forces armées de la République de

23 Croatie ont lancé une attaque généralisée sur les territoires de la

24 Slavonie occidentale et la Moslavina."

25 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

26 J'aimerais que l'on détermine d'abord si le témoin a connaissance de ce

27 document ou une information générale à son sujet, afin que cela soit

28 indiqué auparavant.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que ce n'est pas un document

2 qui n'aurait pas été confié par l'Accusation, Maître Milovancevic ?

3 M. WHITING : [interprétation] Oui, mais c'est bien sûr nous qui l'avons

4 confié au conseil de la Défense, mais avec des milliers d'autres documents.

5 Ce que je voulais dire, c'est que je n'étais pas sûr que ce témoin ici ait

6 des connaissances au sujet de ce document concret.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, pouvez-vous

8 déterminer si, oui ou non, le témoin a connaissance de ce document avant

9 que de lui poser une question à son sujet ?

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

11 Q. Monsieur Dzakula, avez-vous, à la période concernée, à savoir, dans la

12 deuxième moitié de 1991, avez-vous entendu dire qu'il y a eu bon nombre de

13 communiquées de la part de la JNA au sujet de la situation dans le pays ?

14 R. Oui, j'ai eu l'occasion de prendre connaissance d'un bon nombre de

15 communiqués.

16 Q. Est-ce que dans ces communiqués, il a été question de la situation tant

17 au niveau du pays entier qu'au niveau de la Croatie ?

18 R. Oui.

19 Q. Je parle là de l'information que vous auriez obtenue par le biais des

20 moyens d'information, des médias ?

21 R. Oui, j'en ai entendu parler.

22 Q. Je me propose de vous montrer à présent un document se rapportant à

23 cette période. Ce que je voudrais savoir c'est si la teneur de ce document

24 correspond à vos connaissances, aux connaissances que vous avez, à propos

25 de la situation de l'époque.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Si tant est que les Juges de la Chambre

27 veulent bien m'y autoriser.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez continuer.

Page 537

1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

2 Q. Dans ce document, le commandement de la 5e Région militaire de l'armée

3 fédérale informe la Communauté européenne. C'est un document qui est signé

4 par le général de division, Andrija Raseta, qui est le commandant en chef

5 adjoint. Il dit : "En 1991, il y a une attaque généralisée de la part des

6 forces croates sur le territoire de la Slavonie occidentale et de la

7 Moslavina. Les objectifs de ces attaques sont les habitants du groupe

8 ethnique serbe qui constitue la majorité de la population dans la région de

9 Grubisno Polje. On dit également qu'il a été établi au-delà de tout doute

10 raisonnable que les villages qui suivent sont démolis et incendiés. On

11 énumère : Velika et Mala Peratovica, Mio Kovicevo, Veliki et Mali Grdjevac,

12 Velika Dapcevica, Sibenik et Gakovo."

13 R. Sibenik.

14 Q. Oui, Sibenik. Je continue. "Conformément aux déclarations des réfugiés,

15 le même sort a été réservé aux villages suivants : Velika et Mala Barna,

16 Topolovica, Kovacica, Donja Rasenica et six autres. Dans la région de

17 Djakovo" --

18 R. Gakovo.

19 Q. Oui, Gakovo. "Les forces armées croates ont incendié une forêt de 630

20 hectares où se trouvait un millier de réfugiés. L'on pense que ces gens-là

21 ont brûlé avec. On dit également, mis à part les réfugiés de la région de

22 Banja Luka, quelque 4 000 réfugiés et 10 000 autres Serbes se trouvent en

23 tant que réfugiés dans les montagnes autour de Psunj et de Papuk. Il s'agit

24 essentiellement de personnes malades âgées, de femmes et d'enfants. En

25 raison de la pénurie d'aliments ou de vivres et de médicaments, et compte

26 tenu du temps extrêmement froid, ces gens-là se trouvent en situation des

27 plus critiques. Les habitants qui n'ont pas réussi à fuir à l'époque ont

28 été tués."

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1 Est-ce que ces renseignements issus de ce rapport correspondent à ce

2 que vous savez nous en dire en votre qualité de personne originaire de

3 cette région-là ?

4 R. Je me trouvais sur ce territoire-là à l'époque, à l'époque où il y a eu

5 exode du territoire de Grubisno Polje. Cet exode a commencé le 15 octobre.

6 Partant des combats qui ont eu lieu là-bas, je dirais que les effectifs de

7 la Défense territoriale étaient assez peu nombreux. Ils ont dû quitter le

8 territoire de Grubisno Polje avec leurs familles et ils se sont réfugiés

9 ailleurs. Les villages qui sont restés à l'époque là-bas ont été incendiés

10 et les civils qui sont restés sur place ont été tués.

11 Q. Merci.

12 R. S'agissant de la partie du texte où vous avez parlé d'un millier de

13 personnes qui ont brûlé, je dirais que cela ne s'est pas passé ainsi. Il

14 n'y avait pas tant d'individus dans les forêts. La plupart d'entre eux ont

15 été évacués. Il n'y a que certaines personnes, notamment les personnes

16 âgées ou malades qui n'ont pas pu fuir, qui ont péri de la sorte.

17 Q. Merci, Monsieur Dzakula.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je propose aux Juges de la Chambre

19 d'accepter le versement au dossier de ce rapport afin qu'il constitue une

20 pièce à conviction de la Défense.

21 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis pas sûr --

22 enfin, je voudrais faire objection au versement de ce document au dossier.

23 Le témoin a indiqué que ce document n'était pas précis. Dans une certaine

24 mesure, dans le document, il se trouvait des renseignements dont des

25 parties ont été confirmées par lui. Alors, je ne vois pas comment un

26 document rédigé par quelqu'un d'autre, or, il n'a pas été établi que le

27 témoin ait connaissance de ce document ou ne se trouve à être l'auteur du

28 même document, je ne vois pas ce que ceci ajoute à ce que nous savons.

Page 539

1 L'essentiel, c'est qu'il a constaté des imprécisions.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est là un document qui

3 est fourni par l'Accusation ?

4 M. WHITING : [interprétation] Oui, c'est effectivement le cas, mais cela

5 n'a pas été fourni dans le contexte de la déposition de ce témoin.

6 L'Accusation a fourni des milliers de documents se trouvant être en

7 corrélation avec l'affaire. Cela dit, l'Accusation, je précise, reçoit des

8 documents de toutes sortes de sources. Le fait que nous ayons fourni ce

9 document ne garantit pas qu'il y ait précision et authenticité de celui-ci.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quelle est la finalité de la

11 fourniture de ce document, Monsieur Whiting, si l'Accusation ne veut pas

12 que ce document soit utilisé ? Ce que je veux dire, c'est que ce document

13 ne découle ou ne provient d'aucune source qui se trouverait être placée

14 sous le contrôle de la Défense. Cela prend sa source à un endroit qui se

15 trouve être maîtrisé par l'Accusation. La Défense n'a-t-elle pas le droit

16 de poser aux témoins des questions au sujet de documents fournis par

17 l'Accusation ? Ils ne savent pas quels sont les documents que l'Accusation

18 avait l'intention à citer lorsqu'elle a communiqué ces documents. S'il y a

19 des parties qui coïncident avec ce document ou elles ne coïncident pas avec

20 d'autres, ne rendent-ils pas un document admissible ou inadmissible à part

21 entière ?

22 M. WHITING : [interprétation] Je crois que les Juges de la Chambre ont mis

23 différentes questions sur la table, parce que cela peut concerner toute

24 sorte de documents qui peuvent être mis sur la table ici. L'Accusation, en

25 application des Règles de procédure et de preuve, ont communiqué toute une

26 série de documents qui figurent sur la liste des pièces à conviction. Mais

27 il y a communication de milliers de pièces et de documents en application

28 des dispositions de l'article 68. Conformément à la pratique et à la

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1 jurisprudence de ce Tribunal international, l'Accusation a l'obligation de

2 fournir ces documents indépendamment du fait de savoir s'ils comportent des

3 informations au sujet de leur authenticité. Or, l'Accusation, elle s'est

4 procurée ces documents à partir de toutes sortes de sources. Alors, s'il y

5 a prima facie des éléments qui peuvent être acceptables pour la Défense et

6 qui peuvent être placés sous les dispositions de l'article 68, ces

7 documents doivent être fournis en application de la réglementation à la

8 Défense. Mais cela ne signifie pas que l'Accusation garantit l'authenticité

9 ou la fiabilité de quoi que ce soit dans ces documents-là. L'Accusation

10 dispose d'un grand nombre de documents qui, à notre avis, ne sont pas du

11 tout fiables. Le fait que nous ayons fourni en notre qualité d'accusation

12 des documents, cela ne constitue pas en soi un préalable pour le versement

13 au dossier d'un document ou d'un groupe de documents.

14 Deuxièmement, comme vous l'avez dit, le témoin a confirmé que des éléments

15 ou des portions de documents se trouvaient être conformes à la vérité. Mais

16 je confie aux Juges de la Chambre le soin de permettre ou de rejeter

17 l'admission.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il y a un point, Monsieur Whiting, que

19 les Juges de la Chambre aimeraient bien soulever. C'est vous-même qui dites

20 que le fait que l'Accusation ait communiqué une pièce ou un document ne

21 signifie pas que vous garantissez l'authenticité dudit document. Or, si

22 l'Accusation qui, en sa qualité de partie qui produit un document, ne peut

23 pas garantir son authenticité, la question pour les Juges de la Chambre est

24 celle de savoir quelle est la difficulté pour la Défense de garantir

25 l'authenticité de celui-ci. Ils ont reçu un document. C'est un document que

26 l'Accusation à l'intention d'utiliser à une phase de l'affaire ou une

27 autre. Ils ont obtenu de la part de l'Accusation un document. Ils veulent

28 vérifier auprès d'un témoin ce que celui-ci sait au sujet de ce document.

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1 Alors, comment la Défense peut-elle garantir l'authenticité d'un document

2 si tant est que l'Accusation, en sa qualité d'entité qui a fourni ce

3 document, ne saurait garantir l'authenticité de celui-ci ?

4 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, en ce moment-ci, je ne

5 peux pas vous confirmer si c'est un document que nous aurions l'occasion

6 d'utiliser nous-mêmes. Je n'ai même pas vérifié le fait de savoir si

7 c'était un document faisant partie de notre liste de pièce à conviction.

8 Mais nous avons communiqué un grand nombre de documents qui ne font pas

9 partie de notre liste de pièces à conviction. Le fait que nous ayons mis à

10 disposition ces documents ne signifie pas que quiconque serait à même de

11 l'authentifier. Il se peut qu'il ne soit pas authentique. Mais la pratique,

12 la jurisprudence de ce Tribunal n'est pas celle qui signifierait que le

13 fait que nous produisons un document veuille dire automatiquement qu'il y

14 ait un fondement de recevabilité de ce document dans le dossier de

15 l'affaire. Je ne vois pas de corrélation entre ces deux choses. Le

16 versement au dossier d'une pièce à l'occasion du procès doit d'abord, pour

17 que cela se fasse, qu'il y ait pertinence. Il doit y avoir une preuve d'un

18 certain degré d'authenticité ou quoi que ce soit de ce genre. Il se peut

19 que cela ait été démontré ici mais je ne suis pas certain.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Deux points. Nous revenons un pas en

21 arrière. Vous êtes en train de nous dire que l'Accusation a communiqué un

22 grand nombre de documents partant d'une obligation qui est la sienne de

23 communiquer des documents. Alors, quelle est la finalité de ce type de

24 communication ? C'est la question numéro 1 ?

25 La question numéro 2, au sujet du point relatif à la pertinence, veuillez

26 nous dire si le fait que le témoin ait effectivement confirmé une partie de

27 la teneur d'un document montre ou pas la pertinence de celui-ci dans la

28 mesure ou la Défense est en train de présenter ses éléments de preuve, et

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1 cela ne montre-t-il pas que cela est en corrélation avec leur affaire ?

2 M. WHITING : [interprétation] En ce qui concerne le premier point, Monsieur

3 le Président, d'après la pratique judiciaire et le Règlement de ce

4 Tribunal, l'Accusation doit remettre à la Défense chaque document qui, a

5 première vue, potentiellement, est un document à décharge. Qui plus est,

6 d'après le nouveau système de communication des pièces électroniques, ce

7 que fait l'Accusation, c'est que tout simplement, elle met à la disposition

8 de la Défense tous ses documents qu'elle possède, sans nécessairement avoir

9 parcouru tous les documents et sans avoir déterminer leur pertinence

10 éventuelle. La Défense, par le biais du système "electronic disclosure

11 suite" peut avoir accès à un grand nombre de documents qui n'ont rien à

12 voir avec cette affaire. Ces documents sont accessibles à la Défense, car

13 nous ne pouvons pas savoir exactement sur quoi se fonde la Défense.

14 Finalement, l'Accusation met à leur disposition toute la collection,

15 ensuite, la Défense peut procéder à une recherche des documents qui, selon

16 eux, pourront leur être utiles. C'est la raison pour laquelle un nombre

17 énorme de documents sont communiqués. Car d'un côté, même s'il s'agit des

18 documents qui sont à première vue à décharge, et même parfois, si à

19 première vue ce n'est pas le cas, nous les communiquons à la Défense. Ce

20 qui a pour résultat le fait que la Défense a accès parfois aux documents

21 qui ne concernent pas nécessairement cette affaire. C'est la raison pour

22 laquelle j'insiste sur le fait qu'il n'y a pas de lien entre le fait qu'un

23 document a une numéro ERN ou qu'il émane de l'Accusation et sa pertinence

24 ou authenticité dans cette affaire. C'est le premier point.

25 Le deuxième point, je suis d'accord pour dire qu'il est possible d'avancer

26 l'argument que si un témoin peut confirmer certaines parties d'un document,

27 dans ce cas-là, sur la base de cela, le document peut-être pertinent. Je

28 suis entre les mains de la Chambre en ce qui concerne cela.

Page 544

1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Concernant le premier point, Monsieur

2 Whiting, est-ce que vous pourriez expliquer à cette Chambre de première

3 instance quelle a été la pratique judiciaire de ce Tribunal en ce qui

4 concerne la finalité de la communication des documents à la Défense en

5 vertu de l'article 68. Lorsque la Défense trouve un document qu'elle

6 souhaite utiliser parmi les documents qui ont été communiqués en vertu de

7 l'article 68, comment doivent-ils procéder afin de verser au dossier ce

8 document ? Là, je parle d'un document qui n'émane pas de la Défense ni d'un

9 de leur témoin. Un document qu'ils obtiennent de la part de l'Accusation en

10 vertu de la pratique judiciaire de ce Tribunal. Comment font-ils cela ?

11 M. WHITING : [interprétation] Je vais répondre aux deux parties de la

12 question. D'abord, si j'ai bien compris la première question, c'est de

13 savoir quelle est la finalité de la communication des documents à la

14 Défense en vertu de l'article 68. L'article 68 comporte deux parties depuis

15 un an ou un an et demi, à savoir, les documents dont l'Accusation a pris

16 connaissance et qui ont ou peuvent avoir des éléments de charge peuvent

17 être communiqué à la Défense. Par exemple, si nous avons un document disant

18 que Milan Martic vivait sur la lune en 1991, 1992, nous devrions

19 communiquer cette pièce. Nous n'avons pas le droit de déterminer qu'il

20 s'agit visiblement d'un faux. D'après le Règlement du Tribunal, même si à

21 première vue il s'agit de quelque chose de complètement farfelu, nous avons

22 l'obligation de communiquer ce document, et c'est ce que nous faisons.

23 C'est la première partie de l'article 68. La deuxième partie est contenue

24 dans la disposition qui concerne "electronic disclosure suite." Nous

25 faisons cela afin de compléter la communication des pièces, à savoir, mous

26 mettons tous les documents obtenus par l'Accusation à la disposition à

27 l'électronique de la Défense. Il s'agit de documents émanant de toutes

28 sortes de sources. Il s'agit de millions de documents. La Défense a accès à

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1 cela et peut procéder à des recherches et trouver les documents. C'est ce

2 qui est prévu par la Règle. Il n'y a pas de finalité. Tout simplement, les

3 documents sont communiqués, notamment en ce qui concerne la deuxième

4 catégorie. C'est à leur disposition. Il n'y a pas de finalité. Il en

5 revient à eux d'en décider si cela les intéresse ou pas.

6 Concernant la deuxième partie de la question, ce que doit faire la

7 Défense pour le verser au dossier, la Défense, tout comme c'est le cas de

8 l'Accusation, doit présenter les documents par le biais des témoins - on me

9 signale qu'il faut que je ralentisse - donc, ils doivent les verser au

10 dossier présenté par les biais d'un autre témoin ou d'un autre moyen afin

11 qu'ils obtiennent leur versement au dossier. S'agissant de cet aspect-là,

12 pour ce qui est de l'authenticité, est moins élevée que bien des systèmes

13 judiciaires nationaux. Toutefois, il est nécessaire à la fois que

14 l'Accusation et la Défense présentent le document soit par le biais d'un

15 témoin soit de prouver par un autre moyen qu'il s'agit d'un document qui

16 est fiable et authentique. Il n'est pas possible à la Défense de les verser

17 au dossier simplement du fait de les avoir reçus de la part de

18 l'Accusation. J'espère que j'ai été clair dans ma réponse.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous m'avez rendu encore plus

20 perplexe. Vous me dites l'article 68 n'a pas de finalité. Je ne peux pas

21 comprendre cela. Car pourquoi est-ce que ceci est contenu dans le Règlement

22 dans ce cas-là ? C'est la première confusion face à laquelle se trouve

23 cette Chambre de première instance. Puis, lorsque vous dites que le seuil

24 est plus bas dans ce Tribunal par rapport au système judiciaire national,

25 je trouve que le seuil est plus élevé. Bien sûr, nous venons de systèmes

26 différents. Là d'où je viens, si un document est communiqué par une partie,

27 l'autre partie a le droit de l'user sans devoir prouver son authenticité.

28 D'après moi, le seuil ici est plus élevé que dans mon système, par exemple.

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1 Logiquement parlant et physiquement parlant, je trouve qu'il est impossible

2 qu'une partie qui a reçu un document de la part d'une autre partie puisse

3 établir l'authenticité de ce document, alors que la partie dont le document

4 émane ne peut pas établir son authenticité. Donc, je ne vois pas comment on

5 peut s'attendre à ce que la Défense établisse l'authenticité de ce

6 document. Car tout ce que c'est, c'est que c'est un document émanant de

7 l'Accusation, et c'est présenté par le biais d'un témoin de l'Accusation.

8 Si le témoin de l'Accusation a présenté le document, il peut répondre aux

9 questions. Mais si tel n'est pas le cas, il dira : Je ne sais rien au sujet

10 de ce document, je ne peux faire aucun commentaire au sujet du contenu de

11 ce document. Jusqu'au moment où il y a un témoin qui viendra en disant :

12 Oui, je suis au courant et je peux établir l'authenticité de ce document.

13 Si c'est nécessaire déjà. Comment est-ce que la Défense est censée savoir

14 quel témoin de l'Accusation pourrait établir l'authenticité d'un document.

15 D'après votre explication, je trouve qu'il est très difficile, voire

16 impossible d'accomplir cela. J'aimerais que vous m'aidiez à surmonter cette

17 difficulté.

18 M. WHITING : [interprétation] Je vais essayer.

19 En ce qui concerne le premier point, je ne souhaitais pas du tout dire que

20 l'article 68 n'avait aucune utilité ou finalité. Tout ce que je souhaitais

21 dire, c'est que lorsque nous communiquons un document, lorsque nous le

22 mettons à la disposition de l'autre partie, un document ou un recueil ou un

23 nombre de documents, lorsque nous les mettons à la disposition de la

24 Défense, dans cet acte par le biais duquel nous mettons cela à la

25 disposition de la Défense, il n'y a aucune implication selon laquelle ce

26 document aurait été authentique. Nous leur permettons d'avoir accès à nos

27 documents. Nous ne disons pas que tous ces documents sont pertinents dans

28 le cadre de cette affaire. Tout simplement, il s'agit de documents que nous

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1 avons reçus, et nous les mettons à leur disposition.

2 Bien sûr, que l'article a une finalité, à savoir, de donner l'accès à la

3 Défense, l'accès à tous les documents dont nous disposons nous-mêmes, et en

4 particulier tous les documents dont nous sommes conscients et qui

5 contiennent des informations en vertu de l'article 68 ou des éléments

6 potentiellement à décharge.

7 En ce qui concerne ce que vous avez dit, en ce qui concerne le seuil,

8 vous avez raison de dire que dans des systèmes judiciaires nationaux, les

9 règles sont différentes. Dans mon système, si l'Accusation présente un

10 document, à moins qu'elle dise qu'il s'agit d'un document qui a déjà été

11 versé au dossier dans une affaire ou s'il lie cela d'une autre manière à

12 l'affaire, le fait même que l'Accusation a communiqué un document à la

13 Défense, dans mon système judiciaire, ceci ne permettrait pas

14 automatiquement à la Défense d'obtenir le versement au dossier de ce

15 document. L'Accusation dit qu'elle ne peut pas établir l'authenticité de ce

16 document. Elle ne dit pas cela; tout simplement, nous n'avons pas fait

17 cela, au moins pour autant que je le sache. Il ne nous revient pas de ce

18 faire. S'ils souhaitent l'utiliser, la charge d'établir son authenticité

19 revient à eux par le biais d'un témoin tout comme nous le faisons nous-

20 mêmes.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous dire ce qui est, à mon

22 avis, la finalité de l'article 68. A mon avis,

23 l'article 68 vise à faire en sorte que tout ce qui existe est mis à la

24 disposition de la Défense pour que celle-ci puisse utiliser ce document

25 dans le cadre de leur présentation des moyens à décharge. Autrement dit, si

26 l'Accusation possède des documents à décharge, d'après le Règlement, elle

27 est tenue de remettre ce document à la Défense pour que la Défense puisse

28 les utiliser dans le prétoire sans nécessairement avoir à établir leur

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1 authenticité. Car il est impossible pour eux de ce faire, à moins que, bien

2 sûr, l'Accusation ne leur dise - je vois que vous secouez la tête - mais je

3 le dis la manière dont je comprends l'article 68. Peut-être que je me

4 trompe. Je comprends cela parfaitement. Mais ce que j'essaie de dire,

5 c'est, qu'à mon avis, il s'agirait là de la finalité logique et

6 raisonnable. Car même dans les systèmes nationaux, c'est le cas.

7 Lorsque l'Accusation possède des informations à décharge, elle est tenue de

8 les communiquer à la Défense et non pas de les cacher de la Défense. Quel

9 serait le but de la communication de ces documents à la Défense si la

10 Défense ne peut pas les utiliser ? Bien sûr, elle est censée pouvoir les

11 utiliser en disant : Voici un document que nous avons reçu de l'Accusation.

12 Il est dit, en fait, dans ces documents : Nous ne sommes pas coupables

13 concernant ce que vous alléguez. Donc, c'est un document à décharge. Car

14 dire que la finalité est de communiquer, c'est absurde. Parce que je me dis

15 quelle est la finalité de la communication ? La finalité est de permettre

16 au document d'être utilisé.

17 M. WHITING : [interprétation] La finalité, si la question, si j'ai bien

18 compris, si le document qui est communiqué est vraiment un document à

19 décharge, mais je souhaite clarifier que nous avons communiqué un grand

20 nombre de documents qui, à notre avis, ne sont pas des documents à

21 décharge. Mais si un document est effectivement à première vue un document

22 à décharge, toutefois, la Défense peut l'utiliser, mais seulement si d'une

23 certaine manière elle peut le verser au dossier au cours du procès. Car

24 sinon, je suggère que la Défense pourrait simplement apporter des classeurs

25 et des classeurs de documents et les introduire, les verser au dossier en

26 disant : Voici, ce sont les documents que nous avons reçus de la part de

27 l'Accusation. Voici, nous les versons au dossier.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense que nous commençons à parler

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1 sur le plan de la théorie et de la spéculation.

2 Monsieur Whiting, je ne pense pas qu'un document, disons, par exemple, là

3 je vais vous donner un exemple ridicule --

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Un document qui, par exemple, dit Tony

6 Blair est le premier ministre de la Grande-Bretagne, vous ne le

7 communiquerez pas, car il ne concerne pas cette affaire. Les documents qui

8 sont communiqués et qui doivent être communiqués à la Défense, ce sont les

9 documents qui, d'après l'Accusation, ont une certaine pertinence dans le

10 cadre de l'affaire présente. C'est la raison pour laquelle l'Accusation

11 doit les communiquer. Vous ne communiquez pas tous les documents que vous

12 avez vus depuis le début de votre vie.

13 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi, mais ceci n'est pas exact. Par

14 le biais de "electronic disclosure suite", l'Accusation met à la

15 disposition de la Défense tous les documents qu'elle possède, y compris les

16 documents qui sont pertinents mais aussi les documents qui ne sont pas

17 pertinents pour cette affaire. Simplement, je souhaitais dire que le fait

18 même qu'ils ont reçu un document du système EDS ou si c'est un document qui

19 a un numéro ERN, ceci n'implique pas que l'Accusation avait décidé qu'il

20 s'agissait d'un document pertinent dans cette affaire. Et même si

21 l'Accusation a communiqué à la Défense des documents dont il est question

22 de manière plus concrète dans l'article 68, lorsqu'il est dit que

23 l'Accusation doit procéder effectivement la connaissance du fait que ce

24 document comporte des éléments à décharge, même si c'est un document qui

25 fait l'objet d'une telle détermination de la part de l'Accusation, elle a

26 une interprétation très large, même de ce volet-là. Même les documents qui

27 ont des liens très faibles avec cette affaire, ou très indirects, qui peut-

28 être pourraient être interprétés comme des documents à décharge, même ces

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1 documents-là sont communiqués à la Défense. Même en ce qui concerne cette

2 disposition-là de l'article, bien sûr parfois il y a des documents que nous

3 considérons comme des documents clairement à décharge. Je ne souhaite pas

4 me disputer au sujet de ces documents-là, mais souvent il y a des documents

5 qui sont communiqués en vertu de cette disposition-là, et qui ne sont pas

6 nécessairement les documents qui peuvent être versés au dossier, car

7 parfois leur authenticité n'a pas été établie.

8 Bien sûr, un élément est commun à nos systèmes judiciaires, car lorsque

9 l'article 68 a été établi, les documents qui font l'objet de cet article

10 doivent avoir une certaine pertinence. Mais si un document comporte un

11 numéro ERN, ou s'il émane de l'Accusation, cela ne veut pas dire que nous

12 avions pris la décision selon laquelle c'est un document qui est pertinent

13 pour notre affaire.

14 Excusez-moi, mais un rappel d'un point simplement. Ce document notamment

15 n'est pas un document qui figure sur notre liste de pièces à conviction. Il

16 ne s'agit pas-là d'un document que nous souhaitions verser au dossier dans

17 le cadre de cette affaire.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que c'est un document que vous

19 avez communiqué ?

20 M. WHITING : [interprétation] Je ne peux pas vous le confirmer absolument.

21 Je ne peux pas vous le dire si ceci a été communiqué par nous en vertu de

22 la première disposition de l'article 68, ou s'ils l'ont trouvé simplement

23 par le biais du système EDS.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je comprends, mais je souhaite dire,

25 là, il s'agit d'un document qui a été communiqué par l'Accusation d'une

26 manière ou d'une autre.

27 M. WHITING : [interprétation] Oui. Cela est tout à fait exact.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

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1 Maître Milovancevic, est-ce que vous avez des commentaires à formuler au

2 sujet de l'objection qui a été soulevée ?

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Très brièvement, Monsieur le Président.

4 C'est un document que la Défense a reçu de la part de l'Accusation. Ce

5 n'est pas un document privé, écrit par un individu, mais c'est un document

6 qui émane d'un organe d'Etat, le plus haut organe militaire de l'Etat, qui

7 a été adressé au chef de la mission d'observateurs pour l'ex-Yougoslavie.

8 L'on mentionne dans ce document au moins 16 ou 17 villages qui existent.

9 L'authenticité de cette information et la période pertinente one été

10 confirmées par le témoin.

11 Rien ne peut compromettre le contenu de ce rapport. Il nous dit qu'une

12 forêt avait été incendiée, une forêt dans laquelle se trouvait des

13 réfugiés. On y spécule selon lequel un grand nombre de personnes ont trouvé

14 la mort dans cet incendie. Le témoin nous a dit que certains sont morts,

15 certains ne le sont pas. A base de ce document, nous voulons obtenir des

16 informations concernant le contexte général et la manière dont les civils

17 étaient traités. Le document nous permet de créer une image peu flatteuse.

18 C'est un document qui est pertinent pour nous. C'est un document qui est

19 pertinent par rapport à ce que le bureau du Procureur avait demandé auprès

20 de ce témoin. Il s'agit des événements qui font l'objet de l'interrogatoire

21 principal de ce témoin. Je pense que le témoin est bien placé pour se

22 pencher sur ce document. Ensuite, il reviendra à la Chambre de décider de

23 la valeur probante de ce document, mais il n'y a pas de raison de ne pas

24 utiliser ce document. Merci.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez verser au

26 dossier ce document par le biais du témoin qui est dans le prétoire, ou

27 est-ce que vous souhaitez faire autre chose ? Si tel est le cas, je vous

28 invite à y procéder.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la position de la

2 Défense est qu'il s'agit-là sans aucun doute d'un document que nous avons

3 obtenu de la part du bureau du Procureur. Le fait qu'il ne figure pas sur

4 une liste de pièces à conviction de l'Accusation ne prouve rien, car

5 visiblement c'est un document qui va à l'encontre des allégations proférées

6 par le bureau du Procureur. D'autre part, le témoin a confirmé le contenu

7 de ce document, et pour cette raison, je souhaite proposer le versement au

8 dossier de ce document. Merci.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Milovancevic.

10 Il s'agit-là d'une question au sujet de laquelle la Chambre souhaite

11 réfléchir, et peut-être nous pouvons profiter de l'occasion pour procéder à

12 une pause cinq minutes en l'avance, et nous allons revenir cinq minutes en

13 avance pour pouvoir rendre une décision concernant l'objection.

14 Nous allons faire une pause à présent.

15 --- L'audience est suspendue à 17 heures 10.

16 --- L'audience est reprise à 17 heures 40.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La Chambre de première instance a

18 réfléchi et envisagé la jurisprudence du Tribunal à propos de ce type de

19 question, et la Chambre a tiré la conclusion suivante : le document va être

20 admis et la valeur probante de ce document sera déterminée à une étape

21 ultérieure.

22 Merci beaucoup.

23 M. WHITING : [interprétation] A propos de quelque chose de tout à fait

24 différent, Monsieur le Président, nous avons eu une discussion avec le

25 conseil de la Défense à propos de l'horaire, et nous sommes d'avis qu'il

26 serait important de pouvoir terminer cinq minutes plus tôt ce soir, et ce,

27 afin d'avoir une discussion relative à notre calendrier pour le reste de la

28 semaine et pour le témoin suivant.

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1 Je pense que Me Milovancevic est d'accord avec cela.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites que cette discussion va

3 prendre cinq minutes ? Donc, nous allons nous interrompre à 18 heures 55 ?

4 M. WHITING : [interprétation] Nous sommes juristes, avocats, donc cela va

5 prendre certainement un peu plus de temps. Peut-être que nous aurions

6 besoin de dix minutes; ce serait beaucoup plus prudent.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous confirmez, Maître

8 Milovancevic, que dix minutes suffiront à cette discussion ?

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] La question que je pourrais lui poser

10 est la suivante : quand est-ce que la Défense pourra terminer son contre-

11 interrogatoire ? Nous avons passé beaucoup de temps à parler de la pièce à

12 conviction, de la présentation de la pièce à conviction, donc il faudrait

13 que cela soit pris en considération également. Je pense que ce n'est que

14 lorsque nous aurons terminé notre contre-interrogatoire que nous pourrons

15 envisager d'autres questions. Avec l'autorisation et l'aval de la Chambre,

16 ce que je vous dis c'est que je ne suis pas sûr de pouvoir avoir cette

17 discussion ce soir.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous nous dites que vous n'êtes pas

19 sûr que nous pourrons avoir la discussion à propos de quoi, à propos de ce

20 dont parle M. Whiting; c'est cela ?

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous êtes

22 d'avis que nous devons en parler maintenant, il n'y a aucun problème, mais

23 M. Whiting nous a dit que nous pourrions avoir cette discussion à la fin de

24 l'audience aujourd'hui. Je ne suis pas sûr de pouvoir terminer mon contre-

25 interrogatoire aujourd'hui, compte tenu de tout le temps que nous avons

26 perdu à parler d'autre chose. Voilà ce que je souhaite dire. Hormis cela,

27 il est évident que je suis d'accord avec la proposition de mon confrère.

28 Effectivement, il faudrait que nous examinions ces autres questions cinq ou

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1 dix minutes.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour ne pas trop retarder davantage

3 l'audience, le Chambre indique maintenant que cette discussion aura lieu au

4 moment où le contre-interrogatoire se terminera, parce que de toute façon

5 le calendrier relatif aux autres témoins ne pourra être discuté que lorsque

6 nous en aurons terminé avec ce témoin.

7 Vous pouvez, Maître Milovancevic, reprendre le fil de votre contre-

8 interrogatoire.

9 Est-ce que nous pouvons avoir une cote pour cette pièce à conviction ?

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il s'agira de

11 la pièce 17.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

13 LE TÉMOIN: VELIJKO DZAKULA [Reprise]

14 [Le témoin répond par l'interprète]

15 Contre-interrogatoire par M. Milovancevic : [Suite]

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher le

17 document suivant, pièce à conviction de la Défense 1D00-0041. Dans ce

18 document, vous verrez qu'il y a eu un extrait qui a été surligné. Il s'agit

19 de document 1D00-0043 et 44.

20 Q. Monsieur Dzakula, êtes-vous en mesure de voir sur votre écran cet ordre

21 dans une langue que vous comprenez ?

22 R. Oui. Je le vois et je l'ai lu.

23 Q. Connaissez-vous cet ordre ?

24 R. Oui. Je le connaissais au moment où tout se passait en Slavonie

25 occidentale.

26 Q. Pourriez-vous nous dire de quoi s'agit-il ? Quelle est la teneur de cet

27 ordre ?

28 R. Je peux voir maintenant une traduction anglaise, mais je vais essayer

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1 de résumer ce document. Un ordre a été donné --

2 Q. Un petit moment, je vous prie --

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis pas

4 sûr que ce que je vais demander est possible. Est-ce que ce document

5 pourrait être maintenant montré au témoin dans sa langue. Le 0043 est la

6 version anglaise alors que le 0044 et la version B/C/S. Il y a donc deux

7 versions. Ce qui fait que le témoin pourra ainsi lire le document puisqu'il

8 ne comprend absolument pas l'anglais. Est-ce que ce document pourrait être

9 maintenant être montré au témoin.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait montrer au

11 témoin le document dans sa langue. Il s'agit du document 0044. C'est moi

12 maintenant qui voit ce document 0044 en anglais.

13 Est-ce que nous pourrions l'avoir, nous, sur nos écrans en version

14 anglaise. Je l'ai maintenant. Je vous remercie.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

16 Q. Je m'excuse. Est-ce que vous pourriez nous dire qui a émis cet ordre ?

17 R. Cet ordre a été émis par l'état-major de la Défense de la municipalité

18 de Slavonska Pozega. Il s'agit de la cellule de Crise de la municipalité de

19 Slavonska Pozega.

20 Q. Est-ce que vous pourriez nous donner lecture du premier paragraphe de

21 cet ordre ?

22 R. "Effectuez une évacuation de tous les citoyens et de leurs biens

23 personnels, leurs vêtements, leurs chaussures, leurs effets personnels,

24 leurs couverts, lierres, bijoux ainsi que les détails des endroits

25 suivants: Oblakovac, Vucjak, Cecavacki, Jeminovac, Snjegavic" --

26 Q. Pouvez-vous aller plus lentement ?

27 R. "Koprivna, Rasna, Pasikovci, Vranic, Kujnik, Orljavac, Crljenci,

28 Slobostina, Milivojevci, Podsrece, Njezic, Pozeski Markovac, Klisa,

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1 Ozdakovci, Poljanska, Kantrovci, Gornje Vrhovci, Lucinci et Oljasi, et ce,

2 en 48 heures.

3 Q. Je vous remercie, Monsieur Dzakula. Est-ce que vous pourriez également

4 nous donner lecture du paragraphe numéro 2.

5 R. "La population va quitter, se déplacer vers d'autres villages dans la

6 municipalité de Slavonska Pozega, et ce, suivant leur propre choix. Ceux

7 qui n'ont aucun endroit où se rendre doivent s'adresser aux équipes de

8 réception de l'équipe de protection civile pour l'évacuation dans les zones

9 de réception suivantes, dans les endroits suivants : Ivandol, Dezevci,

10 Perenci, Toranj et Buskupvci."

11 Q. Je vous remercie. Est-ce que vous pouvez maintenant me donner lecture

12 du paragraphe 3.

13 R. "Cet ordre entre en vigueur le 29 octobre 1991 à 12 heures. La période

14 pendant laquelle cet ordre va être mis en vigueur dépendra des

15 circonstances dans la zone en question."

16 Q. Au paragraphe 4, est-ce qu'ils interdisent tout mouvement de la

17 population à l'expiration de cette date butoir ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce que vous pouvez me donner lecture de l'introduction de cet ordre

20 dans laquelle les raisons sont avancées, les raisons de cet ordre sont

21 avancées ?

22 R. "Récemment, des forces terroristes chetniks et des unités de l'armée

23 yougoslave ont menacé de plus en plus de par leurs activités de combat la

24 population civile dans la partie occidentale de la municipalité de

25 Slavonska Pozega afin de protéger la vie des résidents et afin d'assurer

26 une défense positive dans ce secteur. La cellule de Crise de la

27 municipalité de Slavonska Pozega a émis cet ordre."

28 Q. Je vous remercie, Monsieur Dzakula. Est-ce que vous pourriez maintenant

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1 nous dire à quelle partie de la population ou quelle était l'appartenance

2 ethnique de la population qui était visée par cet ordre ?

3 R. Tous les villages de cette zone avaient de résidents serbes, et les

4 résidents de ces villages ont quitté leurs villages.

5 Q. Qu'est-il advenu de leurs villages, et où s'est rendue la population ?

6 R. La grande majorité s'est retirée vers Pakrac. Ensuite, ils ont continué

7 vers la Bosnie. Ceux qui sont restés étaient essentiellement des personnes

8 âgées, des personnes handicapées, et ont été tuées. Leurs maisons ont été

9 pillées et ont été incendiées.

10 Q. En ce qui concerne les événements antérieurs dans cette région et dans

11 d'autres zones de la Croatie, est-ce que vous pensez que les habitants

12 avaient le choix, hormis partir ?

13 R. Non, ils n'avaient absolument pas le choix; ils devaient quitter.

14 Q. Je vous remercie, Monsieur Djakula.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Messieurs les Présidents, Mesdames,

16 Messieurs les Juges. Je souhaiterais verser ce document au dossier en tant

17 que pièce à conviction de la Défense.

18 M. WHITING : [interprétation] Je n'ai pas d'objection à ce que cette page

19 soit versée au dossier, mais je remarque qu'il y a quand même 64 pages.

20 Cette page fait partie d'un document de 64 pages. Je suppose, que seule

21 cette page va être versée au dossier. Je n'ai absolument aucune objection à

22 ce que cela soit fait si tel est le cas.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Le document tel

24 qu'il est affiché à l'écran va être versé au dossier. Je souhaiterais

25 qu'une cote soit attribuée à ce document.

26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il s'agira de

27 la pièce à conviction numéro 18.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

2 Q. Monsieur Dzakula, vous nous avez déjà expliqué comment les casernes de

3 la JNA avaient été attaquées. Est-ce que ces attaques ont seulement eu lieu

4 en Slavonie ou dans toute la Croatie ? Vous avez certainement entendu

5 parler de cela de par les médias.

6 R. Cela s'est passé dans toute la Croatie, là où il y avait des casernes.

7 Q. Que savez-vous de ces 14 cessez-le-feu ou de ces 14 trêves qui ont été

8 conclues entre la JNA et les dirigeants croates qui essayaient de parvenir

9 à une solution pacifique ?

10 R. Oui, je m'en souviens. D'ailleurs, nous avons respecté chacune de ces

11 trêves.

12 Q. J'aimerais maintenant aborder les événements

13 d'octobre 1991. Est-ce que le nom de famille Zec évoque quelque chose pour

14 vous; c'est une famille de Zagreb ?

15 R. Oui, j'en avais entendu parler.

16 Q. Que savez-vous de cette famille et de son sort ?

17 R. La famille a été emmenée par des extrémistes croates qui travaillaient

18 pour la police. Cette famille a été emmenée vers le mont Sljeme qui se

19 trouve à l'extérieur de Zagreb. Le mari et la femme ont été tués. La fille

20 a soit été violée, puis tuée ou seulement tuée.

21 Q. Vous souvenez-vous de l'âge de cette jeune fille ?

22 R. Je pense qu'elle avait 12 ans.

23 Q. Vous ne nous avez pas dit l'appartenance ethnique de cette famille.

24 R. Ils étaient Serbes.

25 Q. Est-ce qu'il y avait des activités de combat à Zagreb à ce moment-là ?

26 R. Non, il n'y en avait pas.

27 Q. Est-ce que les auteurs de ces crimes n'ont jamais été identifiés ?

28 R. Oui. Cela a été fait. Ils ont fait l'objet d'une enquête.

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1 Q. Savez-vous qu'ils n'ont pas été condamnés et qu'ils faisaient partie de

2 la garde de sécurité de M. Tudjman ?

3 R. Oui, c'est exact.

4 Q. Monsieur Dzakula, nous allons maintenant aborder des événements qui ont

5 trait à l'arrivée des forces internationales. Vous avez avancé des éléments

6 de preuve, et vous avez dit que le

7 2 janvier 1992, le plan Vance a été signé; est-ce exact ? Est-ce que je

8 vous ai bien cité ?

9 R. Oui, c'est exact.

10 Q. Ai-je raison de dire que le 2 janvier à Sarajevo, un cessez-le-feu a

11 été signé entre la JNA et les représentants de l'armée croate, et ce, afin

12 de pouvoir mettre en application le plan Vance ?

13 R. Oui, c'est exact.

14 Q. Vous avez dit que les troupes ou les soldats des Nations Unies sont

15 arrivés en mars 1992. Sur quoi vous fondez-vous pour avancer qu'ils sont

16 arrivés exactement pendant le mois de mars ?

17 R. Je m'en souviens tout simplement. Je ne peux pas en être absolument sûr

18 et certain, mais je sais qu'il y avait eu, dans un premier temps, des

19 préparatifs avant leur arrivée, puis ils sont arrivés.

20 Q. Ai-je raison d'avancer que le plan Vance envisageait que les soldats

21 des Nations Unies seraient déployés dans les zones serbes en Croatie où la

22 population serbe représentait soit une majorité de la population ou

23 représentait une minorité importante de la population ? Il s'agit

24 d'endroits où à la suite des accords ethniques il y a eu conflit. Est-ce

25 que vous savez que c'était une disposition du plan Vance ?

26 R. Oui, je pense que c'est exact.

27 Q. Vous avez dit que les forces des Nations Unies sont arrivées pendant le

28 premier semestre de l'année 1992. C'est ce dont vous vous souvenez, n'est-

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1 ce pas ? Avez-vous entendu parler d'un rapport de l'ancien 5e Corps de la

2 JNA, qui stipulait que la Slavonie occidentale a été confiée aux Nations

3 Unies en juin 1992 ?

4 R. Oui.

5 Q. Avez-vous entendu parler d'une opération qui s'est déroulée sur le

6 plateau Miljevac ? Est-ce que cela s'est passé le 21 juin 1992 ?

7 R. J'ai entendu parler de l'opération sur le plateau Miljevac, mais je ne

8 me souviens pas de cette date exacte. Je sais toutefois qu'il y a eu une

9 opération là.

10 Q. Est-ce que le plateau Miljevac, est-ce qu'il se trouvait dans la zone

11 qui a été déclarée comme une zone sûre pour les Nations Unies ?

12 R. Oui, c'est exact.

13 Q. Est-ce que les forces armées de la Croatie ont attaqué cette zone qui

14 était placée sous la protection des Nations Unies, et est-ce qu'ils ont tué

15 un nombre important de membres de la Défense territoriale serbe ?

16 R. Oui, c'est exact.

17 Q. Avez-vous entendu que le conseil de Sécurité des Nations Unies a

18 condamné cette opération et a intimé ou a donné l'ordre à la Croatie de

19 retirer ses forces de la zone occupée ?

20 R. Oui.

21 Q. Avez-vous entendu parler du fait suivant, à savoir, à cette occasion,

22 les forces croates ont tué une quarantaine de membres de la TO serbe et les

23 ont jetés dans un puits ?

24 R. Oui. Pendant très longtemps, des demandes ont été présentées pour que

25 ces corps puissent être localisés et exhumés.

26 Q. Est-ce que vous savez quoi que ce soit à propos de l'état dans lequel

27 les corps de ces victimes ont été récupérés, ont été rendus ?

28 R. Non.

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1 Q. Avez-vous entendu parler de l'opération qui s'appelait opération

2 Maslenica en janvier 1993 ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que le secteur de Maslenica, est-ce qu'il était placé sous la

5 protection des Nations Unies ?

6 R. Oui.

7 Q. Le 21 janvier 1993, est-ce que l'armée croate avec des forces spéciales

8 ont attaqué cette zone ?

9 R. Oui.

10 Q. Pouvez-vous nous dire ce qu'il est advenu des villages serbes de cette

11 zone ?

12 R. Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas des événements de

13 Maslenica.

14 Q. Est-ce que vous vous souvenez, en général, s'il y a eu des victimes ou

15 non ?

16 R. Je sais qu'il y a eu des combats qui ont eu lieu autour de Maslenica.

17 Je sais qu'il y a eu des victimes, mais je ne sais pas exactement dans

18 quelle localité cela s'est passé.

19 Q. Est-ce que des résidents serbes ont péri lors de ces opérations, si

20 vous vous en souvenez de façon générale ?

21 R. Comme je vous l'ai déjà dit, j'avais entendu dire qu'il y avait eu des

22 combats, qu'il y a eu des victimes, que des personnes ont perdu la vie et

23 que des maisons ont été détruites.

24 Q. Avez-vous entendu dire qu'à propos de cette opération des forces

25 croates menées contre la zone protégée des Nations Unies, que le conseil de

26 Sécurité, disais-je, avait condamné cette opération et avait exigé le

27 retrait des forces croates ?

28 R. Oui.

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1 Q. Nous avons mentionné l'opération de Maslenica qui a eu lieu en janvier,

2 à partir du mois de janvier 1993. Les combats se sont poursuivis pendant un

3 certain temps; est-ce exact, Monsieur ?

4 R. Oui.

5 Q. Vous avez déjà témoigné à propos de l'accord Daruvar, est-ce que vous

6 vous souvenez quand est-ce que cet accord a été conclu ?

7 R. Il a été signé le 18 février 1993.

8 Q. Vous nous avez expliqué comment vous avez signé cet accord, car vous

9 espériez résoudre les problèmes quotidiens de la population; est-ce exact ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-il exact que lors des négociations avec le côté croate, il y avait,

12 outre vous, des membres de la FORPRONU ou du Haut-commissariat pour les

13 Réfugiés des Nations Unies également ?

14 R. Oui.

15 Q. Pourriez-vous nous dire rapidement quelle fut la teneur de l'accord

16 Daruvar ?

17 R. Dans un premier temps, il s'agissait d'une expression du manifestation

18 de bonne volonté pour essayer de créer une atmosphère de tolérance, une

19 atmosphère -- en fait, il s'agissait d'instaurer une atmosphère qui serait

20 telle que les problèmes posés par l'eau, le gaz et l'électricité seraient

21 réglés, parce que tout cela avait été coupé. Il s'agissait de déterminer

22 les endroits où des familles et des amis avaient été séparés pendant la

23 guerre, pour qu'ils puissent se retrouver à nouveau.

24 Q. Merci, Monsieur Dzakula. Au moment où l'accord Daruvar a été conclu,

25 est-ce que vous aviez un poste au sein du gouvernement de la Krajina

26 serbe ?

27 R. J'étais vice-premier ministre de la Krajina serbe.

28 Q. Vous nous avez dit qu'afin de parvenir à un accord, vous êtes allé de

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1 façon dissimulée à cette réunion sans en informer le cabinet et des

2 ministres, l'assemblée; est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que l'accord de Daruvar contenait une disposition qui précisait

5 dans quelles conditions l'accord deviendrait public ?

6 R. L'accord consistait à ne pas annoncer aux médias le texte de l'accord

7 tant qu'il n'avait pas été confirmé par l'assemblée de la région serbe de

8 la Slavonie occidentale. Une fois qu'ils l'ont ratifié, les deux, les deux

9 parties étaient censées assurer la publicité de l'accord.

10 Q. Avez-vous respecté les dispositions de l'accord de Daruvar ?

11 R. Oui, nous avons respecté.

12 Q. Qu'a fait la partie croate ?

13 R. La partie croate a annoncé le même jour, le jour de la signature de

14 l'accord de Daruvar -- la partie croate, en fait, a accordé une mauvaise

15 interprétation, car ils ont dit nous avons signé un accord qui accepte le

16 nouvel ordre juridique ou constitutionnel de la République de Croatie.

17 Q. Avez-vous accepté le nouvel ordre constitutionnel et juridique de la

18 Croatie par le truchement de cet accord, tel que les Croates l'avaient

19 annoncé ?

20 R. Non. Ce genre de disposition ne figurait pas dans l'accord de Daruvar.

21 Q. Ce faisant, est-ce que la Croatie n'a pas laminé en quelque sorte

22 l'accord et il vous a exposé à une condamnation publique ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous avez dit qu'à la suite de cela, il y a eu des conséquences pour

25 vous, et que vous avez été congédié en quelque sorte de votre poste ?

26 R. Oui.

27 Q. Après que vous avez été congédié et après cette mesure prise par les

28 autorités croates, avez-vous continué à essayer d'obtenir un accord avec

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1 les autorités croates ?

2 R. Oui.

3 Q. Après l'accord de Daruvar, quand est-ce que cela s'est passé ? Quelle

4 était cette période en question ?

5 R. Cela s'est fait une fois que je suis devenu président de la

6 municipalité de Pakrac, à la fin du mois de mai 1993. J'avais préconisé que

7 les postes de contrôle devraient continuer à exister, mais que les gens

8 devraient se rencontrer et communiquer. Je pense qu'il est extrêmement

9 important d'analyser les relations.

10 Q. Vous en avez déjà parlé, Monsieur Dzakula.

11 Est-ce que vous avez informé le gouvernement de la République de la Krajina

12 serbe des mesures que vous preniez ? Est-ce que vous avez informé d'autres

13 organes ?

14 R. Ce n'est pas la peine de les informer, parce qu'il n'y avait pas de

15 contact direct avec la partie croate. Nous nous parlons -- ou nous prenons

16 contact avec les représentants des Nations Unies qui étaient sur la place

17 pour assurer une protection et qui instauraient les circonstances pour que

18 les réfugiés puissent revenir et pour que la situation puisse se

19 normaliser.

20 Q. Est-ce qu'en plus des contacts avec les Nations Unies, vous avez eu des

21 contacts avec les autorités croates dans cette même intention ?

22 R. Non, ce n'est pas le cas.

23 Q. Vous nous avez dit que vous avez été arrêté et que vous avez été en

24 prison pendant pas mal de jours; 73 jours, me semble-t-il. Est-ce exact, M.

25 Dzakula ?

26 R. Dans le premier cas de figure, 73 jours. Oui.

27 Q. Vous nous avez dit que vous avez été arrêté par la police de la

28 République de la Krajina serbe ?

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1 R. C'est exact.

2 Q. Vous avez également dit que l'enquête a été diligentée par le Juge

3 d'instruction, celui du Tribunal devant lequel l'enquête a été diligentée;

4 est-ce exact ?

5 R. Oui, c'est exact.

6 Q. On vous a communiqué un document de prolongation de détention. Je crois

7 que cela était placé sur le rétroprojecteur avant-hier; est-ce bien exact ?

8 R. Oui, c'est exact.

9 Q. Il s'agit d'un document que vous avez certainement bien gardé à

10 mémoire, Monsieur Dzakula. Ne vous souvenez-vous pas qu'il s'agissait d'une

11 prorogation de la détention suite à une ordonnance de la part du juge

12 d'instruction ?

13 R. Oui, en effet.

14 Q. Merci, Monsieur Djakula.

15 S'agissant d'un événement de septembre 1993, et s'agissant des

16 accords de Daruvar et des événements après, tout ceci se passe à partir du

17 début 1993 et on arrive au mois de septembre maintenant. En septembre 1993,

18 il y a un événement qui est appelé les événements ou l'événement de Medak,

19 de la "Poche de Medak." Est-ce que vous en savez quelque chose ?

20 R. Oui, bien sûr. Cette espace de la poche de Medak, cela se trouve dans

21 la Lika, en contrebas de la montagne Velebit. Il y a eu une action

22 militaire de l'armée et de la police croate, à l'occasion de laquelle il a

23 été tué un assez grand nombre de civils. On a également incendié un assez

24 grand nombre de villages serbes qui se trouvaient être placés sous le

25 contrôle des Nations Unies. Cela se passait sur le territoire appelé, à

26 l'époque, République de la Krajina serbe.

27 Q. Est-ce que je cite exactement les noms des villages : Citluk, Pocetelj,

28 Sitovo [phon], qui ont été complètement détruits à ce moment-là, n'est-ce

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1 pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Est-ce que vous avez entendu parler d'une déclaration de la part du

4 général de la FORPRONU, M. Jean Cot, qui, en septembre, a inspecté la

5 région, ou a réalisé cette opération de la poche de Medak ? Il a dit :

6 "J'ai fait le tour de cette région. Je n'ai pas retrouvé de trace de vie,

7 ni d'homme, ni de bête. La destruction a été systématique, intentionnelle

8 et complète." Est-ce que vous avez connaissance de cette déclaration qu'on

9 a entendu parler de Jean Cot ? Est-ce que vous avez entendu de cette

10 déclaration de sa part ?

11 R. Oui.

12 Q. Savez-vous que le 29 mars 1993, il y a eu signature d'un accord appelé

13 de Zagreb ? Si je puis vous aider, et là je m'excuse, vous avez dit quelque

14 chose, il s'agissait d'un accord concernant la cessation des hostilités,

15 accord signé entre la partie serbe et la partie croate ?

16 R. En effet.

17 Q. Est-ce que la communauté internationale a aidé à la signature de cet

18 accord ? En avez-vous connaissance ou pas ?

19 R. Ce que je sais, c'est qu'elle avait servi d'intermédiaire.

20 Q. Etes-vous au courant d'une disposition de cet accord qui met un terme

21 aux hostilités et qui prévoit la séparation des forces militaires, aux

22 termes de quoi l'artillerie devait se déplacer vers les arrières de 20

23 kilomètres, les chars de dix kilomètres et les armes à petit calibre de un

24 kilomètre ?

25 R. Oui. J'ai entendu parler de l'accord, mais je ne connais pas les

26 détails de celui-ci.

27 Q. Savez-vous que la partie serbe a respecté ces accords ou pas ?

28 R. Je n'ai pas d'information.

Page 568

1 Q. Vous avez parlé de l'opération Eclair, qui a eu lieu le

2 1er mai 1995. Pouvez-vous nous dire une fois de plus de quel type

3 d'opération il s'agissait-là ?

4 R. Il s'agissait d'une opération militaire, policière qui a suivit la

5 fermeture de l'autoroute entre Zagreb et Belgrade, qui traversait la

6 Slavonie, et il y a eu des pilonnages dans le matin sur deux ou trois axes.

7 Il a été opéré des percées par les forces croates. Nous avons été coupés

8 puis encerclés. Nous avons juste appris que la partie inférieure de la

9 Slovénie occidentale d'Okucani à Donjo Selo [phon] a été évacuée et que les

10 combats ont donné lieu à la mort de bon nombre de personnes sur la route en

11 direction de Bosanska Gradiska.

12 Q. Monsieur Dzakula, excusez-moi de vous interrompre. Quels sont les gens

13 qui ont été tués sur la route en direction de Bosanska Gradiska ? Etait-ce

14 des soldats ou des civils ?

15 R. Il y a eu des soldats et des civils de tués parce que les civils se

16 retiraient en voiture ou avec ce qu'ils avaient. Ils fuyaient le secteur

17 d'Okucani et de la Slavonie occidentale en direction de Bosanska Gradiska.

18 En cette occasion-là, la colonne de civils a été pilonnée à l'artillerie et

19 autres armes.

20 Q. Est-ce qu'on peut dire qu'il y a eu un mort massif de civils dans cette

21 colonne ?

22 R. J'ai ouï dire de la bouche de certaines personnes qui se trouvaient

23 dans la colonne qu'un très grand nombre de personnes avaient péries.

24 Q. Pouvez-vous nous relater un détail intéressant ? Vous avez eu affaire à

25 des témoins oculaires, n'est-ce pas ?

26 R. Oui, ils m'ont dit qu'on leur tirait dessus depuis Rasnik, qu'ils ont

27 été même ciblés par l'aviation, et ensuite on a nettoyé après le massacre,

28 la route a été lavée pour dissimuler toutes les traces de sang.

Page 569

1 Q. Vous avez indiqué qu'en cette occasion, grâce à la médiation et le

2 représentant des Nations Unies, vous avez essayé d'aboutir à un cessez-le-

3 feu; est-ce exact ?

4 R. Oui. C'était mes collègues et mes collaborateurs qui ont établi un

5 contact avec les Nations Unies. Nous avions demandé un cessez-le-feu et des

6 négociations.

7 Q. Combien de temps ces négociations ont-elles eu lieu avant que vous

8 n'ayez été arrêté par les autorités croates ?

9 R. Deux jours et demi, presque trois -- non, deux jours.

10 Oui, vous vouliez dire quelque chose ?

11 Q. Nous devons attendre les interprètes.

12 Si l'opération a commencé le 1er mai, et j'imagine que vous êtes en train de

13 parler de la date du 3 mai ?

14 R. Le 1er mai, nous avons eu toute la journée des pilonnages. Ce n'est que

15 tard qu'il y a eu un contact avec les Nations Unies, et les négociations se

16 sont passées le 2 et le 3, jusqu'au 4. Les négociations ont été entrées

17 dans une phase finale, puis elles ont été interrompues, et les pilonnages

18 ont repris vers deux ou trois heures de l'après-midi. La reddition est

19 intervenue à quatre heures. Q. Pour ce qui est des gens qui ont péri dans

20 les colonnes, vous nous dites que les gens vous ont relaté qu'il y avait eu

21 des frappes aériennes. Est-ce qu'il a été question aussi de tir à l'arme

22 d'infanterie ?

23 R. Depuis Prasnik [phon], qui se trouve jusqu'à côté de la route entre

24 Okucani et Bosanska Gradiska, il y avait des tirs de mitrailleuses qui ont

25 été ouverts en direction de cette colonne.

26 Q. De civils ?

27 R. De civils, oui.

28 Q. Est-ce que le nom de lieutenant colonel Harambasic vous dit quelque

Page 570

1 chose ?

2 R. Oui. Il se trouve à être le commandant d'une brigade à Pakrac. Il a

3 fait partie de l'équipe chargée des négociations avec nous, avec les

4 Nations Unies et la partie croate.

5 Q. Pouvez-vous nous dire quel est l'accord que vous avez obtenu ? Est-ce

6 que c'est pour son unité que vous aviez réalisé un accord ?

7 R. C'était un accord conjoint. Il s'agissait de confier les armes de la

8 FORPRONU, chose qui a été faite, d'ailleurs. Par la suite, on a demandé à

9 ce que nous nous rendions tous, nous tous qui nous trouvions sur ce

10 territoire; les civils et cette armée désarmée.

11 Q. Quand vous dites accord, est-ce que cela veut dire qu'il y a eu accord

12 entre la FORPONU et la partie serbe, ou est-ce qu'il y a eu également

13 participation des croates, à savoir, des représentants croates ?

14 R. Les trois parties étaient représentées, la partie croate, la FORPRONU

15 et nous autre pour la partie serbe.

16 Q. En cette occasion-là, suis-je en droit de dire qu'il y a été convenu

17 que les Serbes rendent leurs armes au personnel des Nations Unies et qu'ils

18 aient ensuite le droit de s'en aller ?

19 R. Oui. C'est ce qui a été convenu. Il était convenu de rendre les armes

20 et que ceux qui le voulaient pourraient être escortés pour quitter la

21 région.

22 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire de quel nombre de soldats il

23 s'agissait et de quel nombre de civils également ?

24 R. Il devait y avoir environ 1 500 hommes aptes au combat, et il devait y

25 avoir environ 4 000 civils environ en tout.

26 Q. N'avez-vous pas dit tout à l'heure qu'après que les Serbes ont rendu

27 leurs armes et respecté les termes de l'accord, ils ont été emprisonnés par

28 les Croates pour être emmenés en détention ?

Page 571

1 R. Avant que d'avoir été arrêtés, ils aient fait l'objet de pilonnage. On

2 ne s'y attendait guerre. Nous avons demandé à ce qu'il y ait un cessez-le-

3 feu. Les représentants de la FORPRONU et ceux de la mission d'observation

4 de la Communauté européenne étaient avec nous. D'autre part, on a dit que

5 l'on cesserait les tirs seulement à condition qu'il y ait une reddition

6 inconditionnelle. J'ai demandé à ce que les gens qui étaient présents se

7 prononcent. Je ne voulais pas prendre la décision en leur nom. Les gens ont

8 dit qu'ils voulaient se rendre à condition que les pilonnages cessent,

9 parce qu'ils avaient redouté d'être tous abattus et c'est là qu'il y a eu

10 reddition.

11 Q. Monsieur Dzakula, vous nous avez dit qu'il y a eu un pilonnage. Où ces

12 gens-là civils et soldats serbes se trouvaient-ils et qui est-ce qui les a

13 pilonnés ?

14 R. Les Serbes étaient déjà en train de se retirer des villages situés sur

15 le pourtour des zones de conflit. Ils se sont installés vers les villages

16 Brusnik, Kraguj, Gavanica [phon], Seonica et Japaga. Il y a eu pilonnage

17 dans ces localités-là, ce qui fait que tout le secteur a été couvert par

18 des tirs à l'artillerie.

19 Q. Est-ce qu'il y a eu avant cela des raisons qui expliqueraient du côté

20 serbe ou qui motiveraient ces tirs ?

21 R. Les Serbes ont rendu leurs armes et n'ont, en aucune façon, donné lieu

22 à ces tirs.

23 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur Milovancevic, M. le

24 Témoin n'a pas en réalité répondu à votre question pour ce qui est de

25 savoir qui est-ce qui a procédé au pilonnage. Il ne l'a pas encore fait.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Madame le Juge.

27 Q. Vous avez entendu la question, Monsieur le Témoin. Veuillez répondre ?

28 R. Certes. C'est en majorité effectué par l'armée croate.

Page 572

1 Q. Savez-vous nous dire combien de personnes ont été emprisonnées cette

2 fois-la ?

3 R. D'après les tous premiers renseignements que nous sommes procurés, il a

4 été arrêté plus de 1 500 personnes dont l'âge allait de 18 à 80.

5 Q. Savez-vous nous dire combien de civils serbes ont quitté cette région

6 de la Slavonie occidentale englobée par l'opération Eclair ?

7 R. Environ 20 000 personnes, d'après nos estimations.

8 Q. Les Nations Unies ont cité un renseignement au terme duquel juste après

9 cela, il n'y ait resté dans la région que 800 civils; est-ce exact ?

10 R. D'après le recensement que nous avons effectué, juste après l'opération

11 Eclair pour savoir quels sont les noms des personnes qui se trouvaient

12 encore là-bas, parce que nous redoutions que des gens ne viennent à

13 disparaître ou à être tués. Ils étaient 1 250.

14 Q. Sur les quelque 22 000 personnes, il en est resté

15 1 250. Vous ai-je bien compris ?

16 R. Oui, exact.

17 Q. Etant donné que vous avez procédé à un recensement, avez-vous pu

18 constater quelle était la situation sur le terrain, qu'est-il advenu des

19 maisons serbes, de leurs biens, qu'en était-il du point de vue des

20 victimes ?

21 R. Il y a eu des victimes dans le secteur de Pakrac. Nous n'avons pas pu

22 tout voir. L'autre partie qui se trouvait vers Okucani, nous n'avons pas pu

23 y accéder pendant bon nombre de jours. Ce qui fait que nous avons ouï-dire

24 bon nombre de récits, mais nous n'avons jamais su combien de personnes

25 étaient tuées, combien de personnes étaient disparues. De nos jours encore,

26 on cherche à savoir combien de personnes ont disparu. Mais les rapports ont

27 afflué pour ce qui est de toutes les maisons dans le secteur d'Okucani, qui

28 ont été pillées, et un autre nombre moindre cette fois-ci de maisons qui

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1 ont été incendiées.

2 Q. Vous nous avez dit que vous aviez ouï-dire que l'armée croate, après

3 cette opération, avait lavé le sang sur les routes pour dissimuler les

4 traces des crimes. Vous ai-je bien compris ?

5 R. Oui. Ce récit a sans cesse été relaté après la guerre en Slavonie

6 occidentale.

7 Q. Avez-vous des renseignements sur le nombre de victimes ? Il s'est passé

8 plus de dix ans depuis, 11 ans même.

9 R. Je ne sais pas. Je ne connais pas le chiffre exact. Les premiers

10 chiffres que nous avons eus, qui ont été publiés, sont ceux qui sont

11 communiqués par le ministre Susak, qui a dit qu'il y en avait 400 de tués.

12 Cela n'a jamais été démenti. De nos jours, on nous dit qu'il y a eu une

13 centaine, mais le nombre de personnes disparues ne fait que grandir. Et au

14 fil de ces quelques dernières années, je n'ai pas tenu de registre ou de

15 fichier à jour à ce sujet. Ce sont d'autres organisations qui s'en sont

16 chargées.

17 Q. Cette zone sous la protection des Nations Unies a connu une fin de

18 l'attaque en question, attaque qui s'est réalisée à partir du 1er mai et par

19 la suite. Savez-vous nous dire ce qui s'est produit le 4 août 1995 ?

20 R. Le 4 août 1995, il y a eu une autre opération militaire et des forces

21 de l'ordre qui s'appelait Tempête, et qui a duré quatre jours.

22 Q. Quelle est la région attaquée à ce moment-là ? Etait-ce là également

23 une région sous la protection des Nations Unies ?

24 R. C'était effectivement une région sous la protection des Nations Unies.

25 C'était la région de l'ex-SAO de la Krajina ou de la République serbe de la

26 Krajina depuis Zadar jusqu'à la Slavonie occidentale.

27 Q. Qui est-ce qui s'est attaqué à cette région, et avec quels effectifs ?

28 R. C'était une opération militaire de l'armée de la police croate. Je sais

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1 que les forces, les effectifs étaient considérables, mais je ne sais plus

2 qui est-ce qui a pris part.

3 Q. Est-ce que la région était sous la protection des Nations Unies ? Est-

4 ce qu'il se trouvait des Casques bleus, des soldats des Nations Unies à

5 l'époque, là-bas ?

6 R. Oui.

7 Q. Est-ce que dans l'attaque il a été fait recours à l'aviation, à

8 l'artillerie, aux chars et aux armements les plus modernes ?

9 R. D'après ce que les médias en ont rapporté, oui.

10 Q. Qu'est-il advenu de la population de cette partie sud de la République

11 de la Krajina serbe, cette zone ou secteur sud ?

12 R. Une grande partie de cette population s'est réfugiée ailleurs. Ceux qui

13 sont restés ont été malmenés, abattus et leurs biens ont été incendiés et

14 pillés.

15 Q. Dans l'acte d'accusation dressé devant ce Tribunal contre les généraux

16 Cermak et Gotovina, pour ce qui est de cette opération Tempête, il est

17 question de 22 000 maisons détruites dans le secteur sud rien que pendant

18 le mois d'octobre, si je cite à juste titre l'acte d'accusation. D'autres

19 informations en parlent également. Avez-vous entendu parler de ces

20 chiffres ?

21 R. Oui, j'ai entendu parler de ces chiffres.

22 Q. Savez-vous me dire combien de civils serbes ont dû quitter la région ?

23 R. A l'époque, on parlait de quelque 200 000 personnes.

24 Q. Avez-vous déterminé à quelque date que ce soit combien de Serbes sont

25 restés ? Vous avez parlé d'une partie de ces Serbes.

26 R. S'agissant d'une partie, cela n'a pas été possible puisque la région

27 est assez grande; elle est très grande. On n'a pas pu en faire le tour,

28 puisque cela avait été bloqué par les forces de la police croate qui s'y

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1 trouvaient. Cela fait que nous n'avons jamais pu constater et déterminer

2 combien de gens étaient restés et combien de gens ont été tués. Je vous

3 dirais, que de nos jours encore, on recherche des disparus. Ce nombre de

4 disparus ne fait que croître. Bon nombre de réfugiés n'arrêtent sans cesse

5 de rechercher des membres de leurs familles disparues à l'époque.

6 Q. Avez-vous des renseignements quelconques concernant le nombre de

7 personnes tuées et disparues ?

8 R. Au total, les Serbes disparus - et c'est le chiffre qui est utilisé

9 actuellement - s'élève à 1 500. C'est le nombre des personnes disparues.

10 Pour ce qui est des personnes tuées, leur nombre exact m'est inconnu.

11 Q. Vous parlez de personnes tuées et disparues à l'occasion de l'opération

12 Tempête, 4 août 1995, n'est-ce pas ?

13 R. Pour ce qui est des personnes disparues, j'en parle pour le territoire

14 entier de la Croatie. Pour ce qui est des tués à l'occasion de l'opération

15 Tempête, certains disent 200, d'autres disent 400, mais je n'ai pas de

16 chiffres, ni de fichiers exacts. Donc, je ne voudrais pas me perdre en

17 conjecture. Je crois que ce serait manqué de respect à l'égard des victimes

18 que de le faire.

19 Q. Avez-vous entendu parler de Veritas, Monsieur Dzakula ?

20 R. Oui, j'ai entendu parler de cette organisation, en effet.

21 Q. Pouvez-vous me dire brièvement de quoi elle s'occupait ou elle s'occupe

22 encore ?

23 R. Elle s'occupe de personnes disparues, de personnes tuées sur le

24 territoire de la Krajina serbe pendant la guerre à l'époque en Croatie.

25 Q. Avez-vous entendu parler de renseignements émanant de Veritas où il est

26 question de 1 791 personnes serbes civiles -- des civils serbes, ou pour

27 être plus précis de ressortissants du groupe ethnique serbe --

28 L'INTERPRÈTE : l'interprète n'a pas entendu le chiffre --

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1 -- 996 civils et 444 femmes dont 11 enfants ?

2 R. Je ne sais pas. J'ai entendu parler de ces chiffres, mais le nombre

3 final n'est pas encore constaté. Cela n'arrête pas de changer, puisqu'il y

4 en a qui sont encore considérés comme étant disparus.

5 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il est dit au

6 compte rendu d'audience 791 alors qu'il s'agit de 1 791. J'aimerais que la

7 chose soit rectifiée.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation] Hors micro.

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Il s'agit de la ligne 17.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ligne 17.

11 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Ligne 18.

12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Fin de la ligne 17, début 18.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans la ligne 17, il est écrit : "Est-

14 ce que vous avez entendu parler du fait avancé par Veritas selon lequel 791

15 Serbes ont été tués ou portés disparus dans l'affaire de l'opération

16 Tempête." Apparemment, vous avez dit 791 et

17 non pas 1 791. Vous dites qu'il faut corriger cela en 791 ?

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai lu au témoin

19 la donnée qui concernait 1 791. Ceci n'a pas été consigné au compte rendu

20 d'audience. Autre chose, le début du chiffre, 1 000, a été omis.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc, 791 est erroné. Il faut corriger

22 cela en 1 791. Est-ce bien cela que vous dites ?

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.

24 Merci.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

26 Peut-on faire apparaître la correction sur le compte rendu d'audience ?

27 Merci.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

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1 Q. Monsieur Dzakula, nous avons mentionné le chiffre de 22 000 foyers

2 détruits. Est-ce que ceci se réfère seulement aux maisons ou toutes sortes

3 d'autres installations aussi ?

4 R. Des enceintes des maisons étaient détruites dans leur intégralité, à la

5 fois les maisons résidentielles, puis d'autres bâtiments aussi.

6 Q. Vous avez dit qu'un grand nombre de personnes étaient portées

7 disparues. Au bout de dix ans après la fin de la guerre, est-ce que ces

8 personnes sont toujours portées disparues ?

9 R. Oui.

10 Q. Merci, Monsieur Dzakula.

11 Est-ce que les troupes des Nations Unies qui sont arrivées dans cette

12 région à la mi-1992, dans la zone des Nations Unies, ou dans la zone de

13 sécurité des Nations Unies afin de protéger toute la population, y compris

14 la population serbe, est-ce qu'ils ont accompli leur tâche ou pas ?

15 R. Je peux dire qu'ils n'étaient pas à la hauteur des attentes et qu'ils

16 n'ont pas fourni cette protection. Des opérations militaires ont eu lieu,

17 qui se sont soldées par un exode de la population et un grand nombre de

18 personnes tuées.

19 Q. Vous avez parlé des crimes, Monsieur Dzakula. Vous les avez mentionnés

20 en parlant de l'année 1991, 1992, 1993, et cetera, toute les périodes qui

21 ont suivi l'année 1991. Est-ce que vous n'étiez jamais témoin oculaire d'un

22 quelconque crime ou est-ce que vous avez eu des entretiens directs avec les

23 victimes de telles situations ?

24 R. Je n'étais pas témoin oculaire d'un quelconque meurtre, mais j'ai

25 entendu les dires des personnes qui avaient perdu un proche dans des

26 meurtres.

27 Q. Vous avez dit que par le biais des médias, y compris les médias

28 croates, vous avez entendu parler de ces crimes au sujet desquels vous avez

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1 parlé; est-ce exact ?

2 R. Oui, c'est ce que j'ai dit.

3 Q. Vous avez parlé notamment de l'année 1991, Skabrnja, Kruska, Kostajnica

4 et d'autres localités; est-ce exact, Monsieur Dzakula ?

5 R. Oui, j'ai mentionné ces localités-là.

6 Q. S'agit-il d'une période de temps lors de laquelle les attaques des

7 nouvelles forces croates se sont intensifiées, les attaques contre les

8 casernes, les soldats, la population ? Là, on parle de l'année 1991. On en

9 a parlé d'ailleurs aujourd'hui.

10 R. Oui.

11 Q. Pourriez-vous nous répéter de quelle manière --

12 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais j'ai

13 une objection à la dernière question. Je pense que cette question comporte

14 plusieurs questions qui ont été toutes présentées sous forme d'une seule

15 question.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

17 Maître Milovancevic, je pense que vous avez posé plusieurs questions, et

18 que vous pouvez répartir votre question en plusieurs, car il n'est pas

19 clair ce à quoi se réfère, le oui du témoin.

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'ai bien compris, Monsieur le

21 Président.

22 Q. Monsieur Dzakula, vous avez parlé aujourd'hui de l'encerclement, des

23 attaques et de la prise de contrôle des casernes à travers la Croatie; est-

24 ce exact ?

25 R. Oui.

26 Q. Est-ce qu'il est exact de dire que les casernes des forces armées

27 fédérales étaient attaquées non pas seulement avec des armes, ont été non

28 seulement encerclées, mais ont fait l'objet d'une propagande extrêmement

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1 hostile dans les médias croates ?

2 R. Oui, il y a eu de la propagande aussi.

3 Q. Est-ce que les forces armées fédérales étaient appelées les forces

4 serbo-communistes, serbo-chetniks, l'armée d'occupation ?

5 R. Oui.

6 Q. Est-ce que les forces de la JNA ont franchi un pas en dehors de leur

7 pays, à savoir, la RSFY ?

8 R. Non.

9 Q. Vous avez dit que les soldats et les membres de la Défense territoriale

10 étaient tués. Vous avez parlé de l'incident qui s'est produit sur le pont

11 sur la rivière Korana, et ils étaient tués sans merci ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce que vous avez dit à l'Accusation que vous aviez entendu dans les

14 médias croates que l'armée yougoslave, l'armée serbo-communiste et chetnik,

15 attaquaient les villages croates et les saisissaient ?

16 R. Oui, ou plutôt les occupaient.

17 Q. Est-ce que vous avez entendu parler ou est-ce que vous avez lu dans la

18 presse, que dans de telles localités se trouvaient des forces croates, des

19 formations au niveau de la compagnie, plus élevées ?

20 R. Je n'avais pas d'information directe à ce sujet.

21 Q. Je vous ai demandé si vous aviez entendu parler de cela dans la presse.

22 R. Oui.

23 Q. Est-ce que dans la presse, on parle du fait qu'il y avait des conflits

24 réguliers ?

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je interrompre ? Je constate que

26 les interprètes ont beaucoup de mal à vous suivre. Veuillez ralentir, car

27 il est très difficile aux interprètes de vous suivre puisque vous êtes en

28 train de parler en même temps.

Page 580

1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une demande

2 à faire. Si je parle trop vite, les interprètes n'ont qu'à m'avertir. Cela

3 va être plus facile pour moi. Parfois, j'omets de penser à la rapidité avec

4 laquelle nous parlons. Je m'excuse. Je ne souhaite pas créer de problèmes.

5 M. WHITING : [interprétation] Puis-je faire une suggestion. D'après mon

6 expérience, les interprètes, non seulement qu'ils souhaitent que l'on

7 ralentissent, mais lorsque les personnes parlent la même langue, ils

8 souhaitent que les deux parties ménagent une pause à la fin de la question,

9 de manière à ce que, à la fin de la question, le témoin devrait ménager une

10 pause avant de répondre. Et pareillement à la fin de la réponse du témoin,

11 il faut ménager une pause avant de reposer la question. Les interprètes

12 trouvent cela extrêmement utile.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting.

14 Maître Milovancevic, je pense que nous ne sommes pas censés nous perdre à

15 cause de cette procédure. N'oubliez pas que non seulement que vous êtes en

16 communication avec le témoin mais que vous êtes dans un prétoire. Le tout

17 va être enregistré. Vous devez être interprété, et tout le monde doit

18 suivre votre rythme, y compris les sténotypistes. Donc, il faut faire une

19 pause. J'ai déjà entendu cette demande. Lorsque vous vous entendez parler

20 en même temps que l'interprète, ceci devrait vous servir d'avertissement,

21 comme quoi vous allez trop rapidement.

22 Veuillez ralentir et vous pouvez poursuivre. Allez-y.

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'ai compris.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

26 Q. Vous avez dit que d'après les médias croates, vous avez entendu parler

27 des attaques contre les villages croates, attaques effectuées par les

28 forces fédérales, forces de la JNA, aux côtés de la Défense territoriale.

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1 On disait que des civils croates ont été tués lors de ces opérations; est-

2 ce exact ?

3 R. Oui, c'est ce que j'avais dit.

4 Q. Est-ce qu'il est exact de dire que les médias croates aussi, à des

5 moments pareils, parlaient des combats de leurs forces qui s'opposaient aux

6 forces de la JNA et de la Défense territoriale ?

7 R. Oui, ils parlaient de ceci aussi.

8 Q. N'avez-vous jamais eu l'occasion, en parlant de la situation sur le

9 terrain, d'expliquer que les communications radio et par téléphone en

10 Croatie, et notamment en Slavonie, étaient interrompues. Puis, aussi le

11 fait qu'il y avait des coupures d'électricité depuis août 1991 ?

12 R. Oui.

13 Q. Est-ce qu'il est exact de dire que vous avez dit que compte tenu de la

14 coupure d'électricité, il n'était pas possible d'écouter la radio ni de

15 regarder la télévision, et que seuls ceux qui avaient des postes de radio,

16 comme la police ou éventuellement les membres de la Défense territoriale,

17 pouvaient suivre les actualités. Ils étaient peu nombreux ?

18 R. Oui, c'est exact. Puis ceux qui avaient des transistors, les gens qui

19 se déplaçaient sur le terrain avec leurs transistors.

20 Q. Est-ce que je cite correctement vos propos si je cite la déclaration

21 que vous avez faite au début de cette procédure en répondant à la question

22 du Procureur, lorsque vous avez dit que les médias croates parlaient des

23 mêmes événements d'une manière et que les autres médias, les médias serbes

24 en parlaient d'une manière différente ?

25 R. Oui, c'est ce que j'avais dit.

26 Q. Est-ce qu'à cette époque-là la Croatie menait une grande guerre de

27 propagande à l'encontre de son propre pays, à savoir, la Yougoslavie ?

28 R. Oui.

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1 Q. Avez-vous des données indiquant que la partie croate exagérait

2 s'agissant des victimes et des véritables détails des événements ?

3 R. Oui, ceci se produisait également.

4 Q. Monsieur Dzakula, vous avez dit que depuis longtemps déjà, vous

5 travaillez au sein du Forum démocratique serbe ?

6 R. Oui, depuis 11 ans maintenant.

7 Q. Est-ce que vous avez dit que ce Forum démocratique serbe avait été créé

8 en juin 1991 ?

9 R. Oui, c'est exactement ce que j'avais dit.

10 Q. Est-ce qu'il est exact de dire que le bureau du Procureur vous a montré

11 une lettre signée par Mme Ljubisa Solaja, en tant que président du Parti

12 démocratique serbe de Krajina, lettre concernant vos activités ?

13 R. Oui. Concernant non pas nos activités mais la constitution du Forum

14 démocratique serbe.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je souhaite que l'on montre si possible

16 à l'écran la pièce à conviction de l'Accusation numéro 1.

17 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, si cette lettre

18 ne fait pas partie du système électronique, je demanderais qu'on la place

19 sur le rétroprojecteur.

20 Q. Est-ce que vous voyez le texte ?

21 R. Oui.

22 Q. Pouvez-vous nous lire le titre de ce texte ?

23 R. "Communiqué du Parti démocratique serbe de Krajina."

24 Q. Pourriez-vous nous lire la première phrase juste au-dessous

25 de l'intitulé ?

26 R. "A l'occasion de l'assemblée constituante du Forum démocratique

27 serbe prévue à Vojnic, le Parti démocratique serbe de la Krajina rend

28 public le communiqué suivant."

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1 Q. Merci, Monsieur. Est-ce que j'aurais tort si je disais que ce document

2 est considéré comme un communiqué public émanant d'un parti politique et

3 non pas comme une lettre personnelle ?

4 R. Il est écrit que c'est un communiqué.

5 Q. Est-ce qu'il est exact de dire qu'il s'agit là d'un communiqué par le

6 biais duquel le Parti démocrate serbe de la Krajina s'adressait à

7 l'ensemble de la population, à l'opinion publique dans son ensemble,

8 concernant un point concret. Dans l'affaire présente, il s'agit du Forum

9 démocratique serbe ?

10 R. Oui, c'est ce qui était écrit au départ. L'assemblée a été interdite

11 par la suite. C'est ce qui est expliqué au public, car il n'était pas

12 possible à l'époque de s'adresser au Forum démocratique serbe, car il

13 n'avait pas encore été établi. Un communiqué a été rendu public selon

14 lequel l'assemblée constitutive ne pouvait pas avoir lieu à Vojnic.

15 Q. Est-ce que vous pourriez nous indiquer une quelconque partie de ce

16 communiqué portant sur cette interdiction ?

17 R. "Compte tenu de l'intention de base du Forum démocratique serbe, à

18 savoir, d'annuler la lutte menée jusqu'à présent par le peuple serbe de la

19 Krajina pour se séparer de manière définitive et se libérer de la Croatie

20 fasciste, le Parti démocrate serbe de la Krajina rend publique son opinion

21 que pour des raisons non pas démocratiques mais de principe. Une telle

22 assemblée doit avoir lieu en dehors de la Krajina, par exemple, à

23 Kumrovec."

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Encore une fois, je vais vous

25 interrompre, car vous êtes en train de lire très rapidement, Monsieur

26 Dzakula. Veuillez ralentir pour les interprètes

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour des raisons de principe --

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ralentissez, Monsieur Dzakula.

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1 Ralentissez.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

3 "Sur le territoire de la SAO Krajina qui a été établi sur la base de

4 la volonté du peuple serbe de la Krajina, de telles assemblées sont

5 inutiles et peuvent uniquement prêter à la confusion."

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation]

7 Q. Merci, Monsieur Dzakula. Ai-je raison de dire que ce communiqué ne

8 s'adresse pas personnellement à une quelconque personne en particulier mais

9 plutôt au public vaste ?

10 R. Oui. C'était justement le but de cela, c'est-à-dire, d'informer le

11 public qu'il fallait empêcher une telle assemblée, car il n'était pas

12 possible d'adresser ce communiqué à qui que ce soit puisque ce forum

13 n'existait pas à ce moment-là en tant qu'organisation.

14 Q. Est-ce que sur la base de cette position politique du parti démocrate

15 serbe, est-ce que vous avez renoncé à la tenue de cette assemblée ?

16 R. J'ai entendu parler de cela de la part des personnes de Zagreb. C'est

17 M. Pupovac qui m'en a parlé personnellement, à savoir, il m'a dit, qu'après

18 ce communiqué, des pressions étaient exercées sur certaines personnes pour

19 empêcher qu'une telle assemblée n'ait lieu. Puisque moi-même, en Slavonie

20 occidentale, j'ai subi des pressions de la part du SDS alors que j'étais

21 loin de la Krajina, il m'était facile de croire qu'effectivement les gens

22 de la Krajina subissaient les mêmes pressions, et que c'est pour cette

23 raison-là qu'ils n'ont pas tenu leur assemblée à la fin.

24 Q. Merci. Est-ce qu'en répondant aux questions de l'Accusation vous avez

25 dit qu'à la fois Belgrade et Zagreb avaient été informées de cette

26 initiative et que les médias, dans les deux camps, passaient cet événement

27 complètement sous silence ?

28 R. Oui, je leur ai dit cela.

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1 Q. Est-ce que par conséquent les médias croates ont passé cet événement

2 sous silence ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous avez dit que cette lettre avait été envoyée au mois de juin 1991 ?

5 R. Je pense que c'était en juin. Je ne suis pas sûr. De toute façon,

6 c'était avant l'assemblée constitutive.

7 Q. Est-ce que la partie croate, la partie avec laquelle vous essayiez

8 d'avoir des contacts paisibles, est-ce que la partie croate était au

9 courant de vos intentions, ou je vais retirer ma question avant que mon

10 collègue ne soulève son objection, ou plutôt je vais la reformuler avec

11 votre permission pour éviter des complications.

12 M. WHITING : [interprétation] En fait, je me levais pour une autre raison.

13 Je pense que une autre erreur a été faite au sujet de la date concernant le

14 Forum démocratique serbe. Car avant, on parlait de l'année 1991, et ici,

15 tout d'un coup, nous avons l'année 1990. Je suggère que l'on clarifie cela;

16 peut-être il s'agit d'une erreur.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Milovancevic ?

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Au début,

19 j'avais dit qu'il s'agissait de l'année 1991, et à la fin j'ai mentionné

20 l'année 1990. Excusez-moi, je n'étais pas tout à fait précis.

21 Q. Donc, ma question est de savoir si ceci s'est déroulé au mois de juin

22 1991 ?

23 R. Oui.

24 Q. Est-ce que cette initiative visant à créer ce Forum démocratique serbe

25 s'est déroulée après le référendum croate lors duquel la majorité de la

26 population avait voté pour la sécession de la Yougoslavie ?

27 R. Oui.

28 Q. Etiez-vous au courant des positions de la majorité de la population

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1 serbe à Krajina en ce qui concerne ce qu'ils souhaitaient faire au cas de

2 la sécession de la Croatie par rapport à la Yougoslavie ?

3 R. Oui, je le savais. Je savais qu'ils souhaitaient continuer à faire

4 partie de la Yougoslavie.

5 Q. Au cours de cette période de cinq ans, avec votre engagement important

6 et par le biais de vos efforts, avez-vous pu conclure un accord avec la

7 partie croate, un accord qui aurait été mis en œuvre par la suite, respecté

8 par la partie adverse ?

9 R. Non.

10 Q. Est-ce que vos actes de bonne volonté, comme à Borovo Celo en 1991

11 lorsque les barrages ont été écartés, est-ce que ces efforts-là ont fait

12 l'objet des abus brutaux de la part de la partie croate ?

13 R. Oui.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, vous avez besoin

15 d'encore combien de temps encore ?

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Peut-être encore 15 à

17 20 minutes encore, Monsieur le Président. Peut-être nous pourrions laisser

18 cela pour demain car je pense que nous avons tous l'air assez fatigués.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que le moment est opportun pour

20 vous pour que l'on lève l'audience ?

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, c'est tout à fait le cas.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Nous allons nous réunir de

23 nouveau demain à deux heures et quart dans la salle III. Merci.

24 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le jeudi, 19 janvier

25 2006, à 14 heures 15.

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