Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 21 septembre 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

6 LE TÉMOIN: STEVE PLEJO [Reprise]

7 [Le témoin répond par l'interprète]

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je voudrais juste vous rappeler que

11 vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous avez faite

12 au début de votre déposition, à savoir de dire la vérité, toute la vérité

13 et rien que la vérité. Est-ce que vous vous en souvenez ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais bien sûr que je m'en souviens. Je vais

15 respecter cet engagement.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Monsieur Milovancevic, vous

17 pouvez poser vos trois dernières questions.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour.

19 Interrogatoire principal par M. Milovancevic : [Suite]

20 Q. [interprétation] Bonjour, M. Plejo.

21 R. Bonjour.

22 Q. Dites-nous, la police pouvait-elle entrer dans la prison du district de

23 Knin, d'après la procédure qui existe ?

24 R. Non. Ils pouvaient entrer jusqu'à l'entrée. Nous avions une espèce de

25 hall d'entrée. C'est jusque-là qu'ils pouvaient emmener ces personnes, les

26 personnes qu'ils arrêtaient ou qu'ils escortaient, mais ils ne pouvaient

27 pas entrer dans la prison même.

28 Q. La police pouvait-elle faire sortir les détenus, les personnes

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1 capturées ?

2 R. Non.

3 Q. Ma dernière question réfère à trois personnes : le capitaine Dragan, M.

4 Mladic et M. Martic. Sont-elles passées par la prison ? Est-ce que ces

5 personnes ont eu accès aux prisonniers ?

6 R. Aucune des trois personnes mentionnées n'est jamais entrée dans la

7 prison.

8 Q. Ma dernière question. Il y a des témoins qui nous ont dit que les

9 gardiens de prison leur auraient raconté que certaines des personnes

10 étaient venues, seraient venues dans la prison.

11 R. Monsieur le Président, je suis ici sous serment et j'affirme en toute

12 responsabilité que jamais aucune de ces personnes n'était venue dans la

13 prison.

14 Q. Merci. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai terminé mon

17 interrogatoire principal.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est vous, Monsieur Whiting, qui

19 allez continuer ?

20 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

22 Contre-interrogatoire par M. Whiting :

23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Plejo. Je m'appelle Alex Whiting et

24 je suis un des Procureurs en l'espèce.

25 R. Bonjour.

26 Q. Je voudrais commencer par quelques questions au sujet de votre rôle de

27 gardien. Vous avez dit que vous étiez le gardien dans la prison de Knin à

28 partir du mois d'août 1991 et jusqu'à peu près le mois d'octobre 1992, avec

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1 une toute petite interruption à partir du moment où Nikola Kukavica a

2 assumé cette fonction; est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous avez dit qu'en tant que gardien de la prison, enfin, chef de la

5 prison, vous aviez des contacts avec M. Matkovic et que vous lui avez même

6 proposé des actions ?

7 R. C'est vrai.

8 Q. Mais M. Matkovic savait que vous étiez le directeur de la prison depuis

9 le début du mois d'août 1991, n'est-ce pas ? Il le savait.

10 R. Non. Je n'étais pas le directeur avant cela. C'est à ce moment-là,

11 justement, que la prison du district de Knin avait été créée. J'ai été

12 nommé au poste du directeur à partir du moment --

13 Q. A partir du mois d'août 1991. Vous avez été nommé à ce poste à partir

14 du mois d'août 1991.

15 R. Oui.

16 Q. C'est M. Matkovic qui vous a nommé à ce poste ?

17 R. Oui.

18 Q. Jovica Novakovic n'était pas le directeur de la prison ?

19 R. Non.

20 Q. Il ne l'a jamais été, n'est-ce pas ?

21 R. Non, jamais.

22 Q. On va parler de ce poste, le poste de gardien, enfin, de directeur que

23 vous aviez. Vous avez dit que le chef de gardiens, tout d'abord Jovica

24 Novakovic, et ensuite Ilija Tauz, devait vous répondre à vous, n'est-ce pas

25 ?

26 R. Oui. Ils m'étaient subordonnés. Mais je ne pouvais pas les licencier ou

27 démettre de leurs fonctions, puisque c'était le ministre qui les avait

28 nommés à ce poste sur ma proposition. Il n'y avait que lui qui pouvait les

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1 démettre de leurs fonctions.

2 Q. C'est juste une question de subordination, donc essayez de vous

3 concentrer.

4 Vous avez dit qu'il vous appartenait de créer, de mettre en place une

5 procédure disciplinaire dans le cas où l'on ne respecterait pas les règles.

6 Vous pouviez être à l'origine de cette procédure disciplinaire.

7 R. Oui.

8 Q. Je n'avais pas besoin de m'adresser comme vous adressez les Juges.

9 Vous avez dit aussi que cette procédure disciplinaire pouvait être

10 entreprise ou commencée par une commission disciplinaire, mais que c'était

11 vous le directeur qui aviez le dernier mot à dire là-dedans.

12 R. Oui, c'est exactement comme cela.

13 Q. S'il y avait eu des mauvais traitements des prisonniers en 1991 et en

14 1992, ceci quotidiennement, si les conditions de détention n'étaient pas

15 appropriées pour détenir les gens dans cette prison à Knin, si la police de

16 la SAO Krajina avait le droit de venir à la prison pour passer à tabac et

17 maltraiter les prisonniers, dans ce cas-là, c'est vous en tant que

18 directeur de la prison qui auriez été tenu responsable de cela ? Parce que

19 si ces choses-là se sont vraiment passées, vous, vous n'avez jamais rien

20 fait pour l'empêcher; c'est vous qui auriez été tenu responsable de cela ?

21 R. Monsieur le Procureur, oui, effectivement, mais cela ne s'est jamais

22 passé.

23 Q. Est-ce que vous avez répondu à ma question ?

24 R. Mais cela ne s'est pas passé.

25 Q. Vous avez déjà répondu à ma question. En réalité, vous auriez pu être

26 poursuivi au pénal si ces choses s'étaient passées alors que vous, vous

27 étiez le responsable et vous n'avez rien fait pour les empêcher ?

28 R. Je ne sais pas si j'aurais pu être poursuivi au pénal, mais j'aurais

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1 été remplacé, cela c'est sûr, et j'aurais été remplacé de mon poste de

2 directeur de prison si de telles choses s'étaient effectivement produites,

3 s'il y avait eu des gens de l'extérieur qui seraient venus dans la prison.

4 Mais cela ne s'est jamais passé.

5 Q. Monsieur, si ces choses-là s'étaient passées alors que vous étiez le

6 responsable, vous l'auriez su et vous étiez au courant de ces choses-là,

7 n'est-ce pas ? Vous n'avez rien fait pour les punir, vous n'avez rien fait

8 pour les empêcher, et vous pourriez effectivement être poursuivi au pénal

9 en tant que criminel de guerre; vous le savez, n'est-ce pas ?

10 R. Mais je ne m'en défais pas. Je ne fuis pas ma responsabilité. J'ai tout

11 fait ce que j'ai pu faire.

12 Q. Répondez à ma question, s'il vous plaît. Vous savez que ces choses se

13 sont passées, se sont produites effectivement alors que vous, vous étiez le

14 responsable, sous vos yeux, et vous étiez au courant de cela.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur.

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Le témoin a bien répondu. Mon collègue

18 du bureau du Procureur, il peut poser la question encore mille fois, mais

19 il a déjà répondu à la question. Il le maltraite. Je ne sais pas comment

20 appeler cela autrement. Ce n'est pas le boulot du Procureur que d'intimider

21 le témoin. A combien de reprises il va lui poser la question de savoir s'il

22 était un criminel de guerre ou non pour obtenir la réponse qu'il souhaite

23 obtenir ?

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qu'il était un criminel de guerre ?

25 Ecoutez, je ne comprends pas la dernière question que vous avez posée.

26 "Combien de temps le Procureur doit poser la question au témoin pour savoir

27 s'il était un criminel de guerre ou non, pour obtenir la réponse souhaite

28 obtenir ?" Ecoutez, le témoin a dit qu'il ne savait pas qu'il pouvait être

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1 poursuivi au pénal, et je pense que la dernière question était bien posée.

2 On peut juste attendre de voir ce qu'il a à dire.

3 M. WHITING : [interprétation] Oui, c'est vrai que j'ai un petit peu insisté

4 auprès du témoin, mais je ne pense pas que j'ai exagéré. J'ai un petit peu

5 insisté sur la dernière question, la dernière réponse que je souhaitais

6 obtenir parce qu'il a dit qu'il ne savait pas s'il pouvait être poursuivi

7 au pénal ou non. Je lui ai posé la question encore une fois. C'est vrai que

8 j'ai un petit peu insisté, mais je ne pense pas que j'ai vraiment exagéré.

9 Je ne lui ai pas demandé s'il était un criminel de guerre.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, j'ai tout à fait compris cela.

11 C'est la dernière question. La question était s'il savait qu'il aurait pu

12 être poursuivi au pénal.

13 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président,

14 mais comment répondre à la question qui a été posée par le Procureur ? La

15 question aurait été logique si le témoin avait répondu : "Oui, je sais que

16 j'aurais été responsable de ce qui s'est passé, mais cela ne s'est pas

17 passé." Le Procureur ne prend pas cela en considération. Il essaie de

18 présenter sa thèse et de présenter les choses de la façon dont il pense

19 qu'elles se sont passées. Effectivement, il dit que le témoin aurait été un

20 véritable criminel de guerre si les choses qu'il prétend qui se sont

21 passées s'étaient vraiment passées.

22 Le témoin n'a laissé aucun doute. Il a dit un non définitif quant à

23 la chose que le Procureur présente qu'elle s'était vraiment passée. C'est

24 le Procureur qui insiste et qui présente son propre argument. Il demande

25 qu'est-ce qui se serait passé si la situation avait été différente.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Milovancevic,

27 mais je pense que M. Whiting peut poser la dernière question.

28 M. WHITING : [interprétation] Merci.

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1 Q. Monsieur, pourriez-vous répondre à ma question ? Si vous saviez que ces

2 choses-là s'étaient passées, qu'il y a eu des abus dans la prison, que les

3 conditions n'étaient pas adéquates, qu'il y a eu des passages à tabac de la

4 police de la SAO Krajina, si toutes ces choses-là s'étaient passées dans la

5 prison de Knin alors que sous vos yeux et que vous étiez au courant de cela

6 et que vous n'aviez rien fait pour l'empêcher, si vous aviez fait tout

7 cela, est-ce que vous acceptez la possibilité que vous auriez pu être

8 poursuivi comme un criminel de guerre ?

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de répondre, est-ce que vous

10 êtes sûr d'avoir bien compris la question ? N'ajoutez rien, essayez de

11 répondre exactement à la question.

12 M. WHITING :

13 Q. Pourriez-vous répondre à la question, s'il vous plait, ou voulez-vous

14 que je la répète ?

15 R. N'importe qui peut être un criminel de guerre dans la guerre.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous arrêter. La question vous

17 a été posée. Vous répondez à cette question-là. Vous répondez à cette

18 question-là et à rien d'autre. N'ajoutez rien, s'il vous plaît. Ensuite, on

19 passe à la question suivante. La réponse, c'est quoi ? C'est "je le sais"

20 ou "je ne le sais pas". C'est aussi simple que cela.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je sais. J'en suis conscient.

22 M. WHITING : [interprétation]

23 Q. On va revenir sur le début de votre déposition quand vous avez parlé de

24 cette usine à Knin où vous avez travaillé, à Tvik. Vous avez dit qu'un jour

25 les employés croates ne se sont pas présentés à leur travail. Dans le

26 résumé de votre déposition, vous avez dit que ceci s'est produit en 1991,

27 que c'est en 1991 que les Croates ne sont pas venus travailler un jour,

28 tout simplement; est-ce exact ? Est-ce que cela s'est produit en 1991 ?

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1 R. Oui.

2 Q. Mais vous conviendrez que la population de la municipalité de Knin

3 comptait à peu près 92 % de Serbes et 8 % de Croates, n'est-ce pas ?

4 R. Oui, c'est à peu près cela.

5 Q. Saviez-vous qu'au mois de juillet 1990, M. Martic et autres ont pris

6 l'initiative d'organiser une pétition dans le cadre de la police de Knin

7 qui était contre les nouveaux badges qui étaient proposés et les nouveaux

8 uniformes ? Est-ce que vous avez entendu parler de cela ?

9 R. Je ne sais pas si tel était le cas. A l'époque, je travaillais à Tvik,

10 donc je ne sais pas qui était à l'origine de cette initiative. Je ne sais

11 pas qui a signé cela. Je n'avais pas de contact avec la police à l'époque.

12 Je n'avais rien à faire avec la police. Je travaillais ailleurs, dans une

13 usine.

14 Q. Monsieur, je vous ai demandé si vous avez entendu parler de cela. Est-

15 ce que vous avez entendu parler de cela ?

16 R. Non.

17 Q. Saviez-vous qu'au mois d'août 1990, Milan Martic avait dit publiquement

18 à la télé que la police du peuple de Knin n'allait pas écouter le

19 gouvernement croate ?

20 M. WHITING : [interprétation] Il s'agit des pièces 4 et 5, Monsieur le

21 Président.

22 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de cela ? Est-ce que vous avez vu

23 cela à la télé ?

24 R. Non, je ne m'en souviens absolument pas.

25 Q. Vous habitiez Knin à l'époque, n'est-ce pas ?

26 R. J'étais à cinq ou six kilomètres de Knin, peut-être même 10, dans les

27 environs de Knin pour être plus exact.

28 Q. Dans quel village habitiez-vous ?

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1 R. Kosovo.

2 Q. Vous ne suiviez pas ce qui se passait à Knin, les déclarations de la

3 police, les barrages, tout ce qui s'est passé au mois d'août 1990 ?

4 R. Evidemment que j'ai suivi les barrages, parce qu'il y en a eu dans mon

5 village aussi, mais cela n'a rien à voir avec la première question que vous

6 m'avez posée.

7 Q. Mais dans les médias, vous n'avez pas suivi ce que racontaient les

8 dirigeants de Knin, Milan Martic, Milan Babic ? Vous n'avez pas suivi cela

9 ni regardé cela dans les médias ?

10 R. Non, Monsieur le Procureur.

11 Q. Les barrages, est-ce que vous avez participé à ces barrages ? Plutôt,

12 est-ce que vous avez participé à leur organisation ou est-ce que vous étiez

13 présent aux barrages ?

14 R. Mais oui, nous tous ensemble, les villageois, nous avions tous

15 participé à ces barrages.

16 Q. On ne va pas maintenant débattre du fait s'il s'agissait des barrages

17 organisés de façon spontanée ou non, mais vous savez, n'est-ce pas, que ces

18 barrages étaient organisés et dirigés par les Conseils de la Défense de la

19 résistance populaire ?

20 R. Je ne sais pas si qui que ce soit a dirigé cela. C'était une action

21 spontanée. Les gens érigeaient ces barrages partout dans les villages où il

22 y avait besoin. Je n'ai vraiment pas l'impression que c'était quelque chose

23 d'organisé, d'orchestré.

24 Q. Vous nous dites, comme en août, septembre, octobre, novembre, décembre

25 1990, tous ces barrages ont continué à être spontanés, à savoir non

26 organisés, sans directives ou directions d'ailleurs ?

27 R. Oui, j'imagine que oui. Vous savez, il y avait un barrage dans mon

28 village. J'étais à sept ou huit kilomètres de Knin, mais les villageois,

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1 ils avaient même mis un barrage à deux kilomètres de Knin, de sorte que

2 moi-même je ne pouvais pas me rendre à Knin. C'est cela qui me fait dire

3 que ce n'était pas organisé, parce que ce n'était pas logique à l'époque.

4 Nous ne pouvions suivre que la télévision croate. Les menaces étaient

5 réelles. Les gens avaient érigé ces barrages de façon spontanée, craignant

6 pour leurs villages, leurs voisins, leur famille.

7 Q. Monsieur, ce n'était pas ma question. Vous maintenez que d'après ce que

8 vous saviez, personne n'a organisé ou dirigé ces barrages entre le mois

9 d'août et le mois de décembre 1990 ? C'est ce que vous dites ?

10 R. Monsieur le Procureur, la municipalité de Knin est une grosse

11 municipalité. Je ne sais pas si quiconque a pris part à cela, je n'en sais

12 rien. Je ne connais pas le nom de ces personnes. En ce qui concerne mon

13 village, je sais que c'était quelque chose de spontané.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La question qui vous a été posée est :

15 est-ce que dans l'état de votre déposition, vous affirmez que -- ? C'était

16 cela, la question qu'on vous a posée, donc essayez de répondre précisément

17 à la question. Ecoutez-la.

18 M. WHITING : [interprétation]

19 Q. En fait, vous nous avez dit que vous ne saviez pas vraiment.

20 R. [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Attendez, Monsieur Whiting. Vous avez

22 posé une question. Vous avez demandé si c'est cela, si c'était cela sa

23 déposition. Je voudrais avoir la réponse du témoin. Si vous voulez savoir

24 quelle est vraiment la déposition que vous avez faite, qu'est-ce que vous

25 avez dit, il peut vous le répéter. Mais c'était cela la question. La

26 question posée, en définitive, c'était de savoir si c'était bien cela que

27 vous déposez, si c'était bien cela que vous affirmez sous serment.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai bien compris, le Procureur m'a demandé

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1 qui a dirigé, qui a géré les barrages.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non. La réponse est : "Vous affirmez

3 que d'après votre meilleure connaissance, personne n'a organisé ou dirigé

4 les barrages pendant toute la fin de l'année 1990, à partir du mois d'août,

5 et ainsi de suite ?" Est-ce bien votre déposition ? C'était la question.

6 Qu'est-ce que vous répondez ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai répondu que je ne savais pas.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites que vous ne savez pas que

9 c'était bien votre déposition ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dis que dans mon village, personne n'a

11 organisé les barrages. Comment voulez-vous que je sache si quelqu'un a fait

12 cela à 50 kilomètres de chez moi ?

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais ce n'est pas la question qu'on

14 vous a posée. Je vous ai demandé d'écouter les questions et de répondre aux

15 questions. La question qui vous a été posée est, je la répète : "Est-ce que

16 vous maintenez, Monsieur, que d'après votre meilleure connaissance,

17 personne n'a organisé ou commandé les barrages entre les mois d'août et la

18 fin du mois de décembre 1990 ? Est-ce bien votre déposition ?"

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

21 M. WHITING : [interprétation] Merci.

22 Q. Vous avez déposé au sujet de ce conflit à Plitvice et vous avez dit, je

23 cite : "Un certain nombre de mes amis ou de mes voisins de l'endroit où

24 j'habite étaient aussi à Plitvice et ils faisaient partie de la force de la

25 police de Krajina."

26 C'est la page 27 du compte rendu d'hier. Le conflit à Plitvice,

27 c'était entre les membres de la police de Krajina et quelques officiers de

28 Knin et du MUP croate; est-ce exact ?

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1 R. Je n'étais pas à Plitvice, mais je connais un homme qui y a été. Un de

2 mes amis y a été. Je ne sais pas vous dire dans quelle qualité, mais il y a

3 été. Après son service militaire, il a tout de suite été dans l'élément de

4 réserve de la police. Personnellement, je n'ai pas été à Plitvice, donc je

5 n'en sais rien. J'ai entendu parler de ces conflits, c'est tout.

6 Q. Hier, vous avez dit ce qui suit : "Quelques-uns de mes amis," non des

7 amis, des voisins, "ont été à Plitvice. Ils étaient des éléments de la

8 police de Krajina."

9 Vous savez que des éléments de la police de Krajina de votre région ont été

10 à Plitvice, n'est-ce pas ? C'est ce que vous avez dit hier.

11 R. Je vous ai dit tout à l'heure pour un. Après, par la suite, j'ai connu

12 quelques autres, et en leur parlant, j'ai appris qu'eux aussi avaient été à

13 Plitvice. C'est pour cela que j'ai dit hier quelques-uns de mes amis. Il

14 s'agit de quelques amis dont j'ai fait la connaissance par la suite, mais

15 jusque-là, je ne les connaissais pas. Je n'en connaissais qu'un avant le

16 conflit de Plitvice.

17 Q. Bien. Comment s'appelle celui que vous connaissiez avant le conflit ?

18 R. Dragan Vujakovic.

19 Q. Et les noms des autres ? Comment s'appellent-ils ?

20 R. J'en connais les prénoms. Il y avait un Milan et il y avait un Jovan.

21 Mais les noms de famille, je ne m'en souviens pas.

22 Q. Vous ne pouvez pas vous rappeler leur patronyme ?

23 R. Non, Monsieur le Procureur. Le temps était court, les connaissances

24 étaient rapides. Souvent, on savait se tabler à un café, prendre un café

25 sans connaître les noms les uns des autres. Mais maintenant même, si on se

26 rencontrait, on irait boire un café. Les prénoms, si, on les savait, mais

27 pas forcément les patronymes.

28 Q. Bien. Vous avez déclaré qu'après Plitvice, vous aviez été convoqué par

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1 Milan Martic, vous avez été invité par Milan Martic pour adhérer à la

2 police de réserve de Krajina.

3 En ce moment-là, vous n'aviez aucune expérience policière et aucune

4 qualification pour devenir policier; est-ce que cela est vrai ?

5 R. Oui, je n'avais aucune expérience préalable.

6 Q. Vous n'avez reçu aucune formation ? Vous n'avez reçu aucune formation

7 policière ?

8 R. Non, je n'ai pas été formé pour être policier. Mais j'ai été soldat et

9 j'ai fait même mon service militaire. Il arrivait qu'après le service

10 militaire, quelqu'un restait militaire de réserve, et d'autres, policiers

11 de réserve.

12 Q. Je voudrais vous demander d'écouter attentivement les questions et d'y

13 répondre. Après avoir accepté cela, on vous a donné de l'équipement, de

14 l'armement et un véhicule de police; est-ce que cela est vrai ?

15 R. Oui, c'est vrai.

16 Q. Qu'est-ce que vous avez reçu comme armes ?

17 R. Un pistolet de fabrication Zastava, qui était une arme de dotation de

18 toute la police, calibre 7,62, une arme de dotation de la police.

19 Q. Et quelles autres armes ?

20 R. Un fusil automatique, comme tout autre policier.

21 Q. Qui vous a livré ces armes, cet armement ?

22 R. Lorsque je me suis présenté au poste de police, on m'a enregistré --

23 Q. Je vous interromps. Est-ce que vous pouvez me donner le nom de la

24 personne qui vous a livré les armes ?

25 R. Non, je ne peux pas. C'est quelqu'un qui était préposé à ces activités.

26 Je n'en connais pas le nom.

27 Q. Bien. Une vingtaine de jours après, il vous a été dit de vous présenter

28 à Golubic; est-ce que cela est vrai ?

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1 R. Oui.

2 Q. Qui vous a dit de vous présenter à Golubic ? Pouvez-vous me donner un

3 nom ?

4 R. De même, j'ai été convoqué par le secrétariat à l'Intérieur,

5 probablement une personne qui était de service, et par la

6 radiocommunication, j'ai été appelé par cette personne de service à ce

7 moment-là, donc j'en ignore le nom. Je connaissais peu au commissariat à ce

8 moment-là, dans ce poste de police.

9 Q. Vous avez décrit la formation qui vous a été dispensée. Vous avez dit

10 que c'était une "formation classique." Cela figure sur la page 33 du

11 transcript d'hier. Comment pouvez-vous savoir en quoi consiste une

12 formation policière classique ?

13 R. Comment ne le saurais-je ? On a montré des éléments de ces formations à

14 la télévision. J'ai fait le service militaire.

15 Cela n'était pas du tout la même chose que la formation que nous avons

16 reçue au service militaire.

17 Q. Bien. Ce que vous appelez une formation policière classique, cela

18 ressemble à la formation que vous avez reçue à l'armée ?

19 R. Non. Bien au contraire, cela, c'est complètement différent de ce qu'on

20 recevait comme formation à l'armée. Il y avait beaucoup plus de gens et il

21 y avait un armement différent, et la formation était différente. J'ai dit

22 que bien au contraire, cette formation ne ressemblait pas à celle du

23 service militaire.

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Ligne 12, page 15, il a été constaté

25 tout à fait le contraire de ce que le témoin a dit. On y lit que "ces

26 formations ressemblaient à celle de l'armée" alors que le témoin a dit tout

27 le contraire.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, c'est ce que le témoin vient

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1 d'expliquer, Maître Milovancevic.

2 M. WHITING :

3 Q. En fait, --

4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Mais je m'excuse, il a été inscrit dans

5 le transcript une réponse erronée comme quoi il aurait eu la même formation

6 que dans l'armée, alors que cela est faux.

7 Les interprètes devraient faire attention à ce qu'ils disent. Je le dis

8 parce que M. Martic m'a attiré l'attention à ce que les interprètes disent

9 qu'ils ne peuvent pas être parties au procès. Les interprètes ne doivent

10 pas être parties au procès.

11 L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Je remercie l'interprète.

13 Monsieur Milovancevic, le témoin l'a entendu. Il était en train de corriger

14 en s'adressant à l'avocat. Je voudrais soutenir ce que l'interprète a dit :

15 votre commentaire les concernant n'est pas fondé. Ce n'est peut-être pas

16 une première erreur, mais il ne s'agit pas d'erreur régulière. Elles sont

17 rares. Nous croyons que l'on travaille ici sous une grande pression, aussi

18 bien pour les interprètes que pour nous autres, et vous devez comprendre

19 que ces gens-là font leur travail de façon honorable.

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je le sais et je le respecte, mais la

21 question a été -- je m'excuse.

22 Il faut mettre au clair cette question. La question du Procureur a été très

23 brève --

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic --

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] -- "comment savez-vous que c'était une

26 formation spéciale ?" Je m'excuse, Monsieur le Président, le témoin a donné

27 une réponse précise qui ne saurait aucunement être traduite autrement que

28 comme il l'a dit, parce que je prends ma langue maternelle qui est traduite

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1 en anglais, donc cela ne peut pas figurer dans le transcript. C'est une

2 chose incroyable. Le sens de ce que cet homme a dit a été complètement

3 inversé.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Permettez-nous d'éclairer cela. Maître

5 Milovancevic, est-ce que vous soutenez que l'interprète a fait exprès de

6 traduire de façon erronée la déclaration du témoin ? Dites-nous cela

7 clairement et sans ambiguïté. Je ne peux pas évaluer si cette erreur a été

8 quelque chose d'inévitable à ce moment-là ou non. Si vous dites que la

9 question était simple et que la réponse a été aussi simple et que l'erreur

10 ne pouvait pas se faire, si vous le soutenez, vous devez engager une

11 plainte, et nous nous occuperons des interprètes par voie des plaintes.

12 Est-ce que vous soutenez que l'interprète a fait exprès de commettre cette

13 erreur ?

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai juste voulu

15 attirer l'attention de la Chambre au problème.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous ai posé une question directe,

17 Maître Milovancevic. Est-ce que vous soutenez que l'interprète a fait

18 exprès de mal traduire la déclaration du témoin ? Vous le soutenez. Très

19 bien, alors.

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'était impossible, sinon, s'il dit que

23 la formation policière était différente de la formation militaire et qu'ils

24 traduisent que c'était la même chose, alors je ne sais pas de quoi il

25 s'agit. Ils doivent faire attention à ce qu'ils font.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, je vais vous

27 poser une question à propos de ce que vous allez faire à ce propos. Vous

28 venez de dire que les interprètes ont fait exprès de mal traduire. Qu'est-

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1 ce que vous voulez que l'on entreprenne ?

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Rien, Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous ne pouvez pas ne rien

4 entreprendre. Il s'agit d'une observation très grave, d'une accusation

5 grave. Vous devez entreprendre une démarche.

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'est une question de notre choix. Je

7 suis le transcript. J'ai voulu faire un effet, et l'effet a été fait. Je ne

8 tiens pas à accuser qui que ce soit par une plainte. Tout ce que je veux,

9 c'est que tout ceux qui font ce travail sachent que cela est enregistré et

10 que nous suivons le transcript. C'est cela qui importe pour moi.

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je crains, Maître Milovancevic, que je

12 ne suis pas d'accord avec vous. Vous avez prononcé une accusation très

13 grave contre le bureau -- je m'excuse, contre les interprètes. Si

14 l'interprète a fait exprès et si l'on établit que cela est vrai, alors cet

15 interprète fera l'objet de l'application de notre Règlement de cette

16 institution, et vous aurez publiquement à répéter ce que vous avez dit. Je

17 vais demander le nom de l'interprète.

18 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Maître Milovancevic, peut-être

19 avez-vous exagéré un peu. Peut-être que vous regrettez ce que vous venez de

20 dire au moment de votre réaction. Lorsqu'on met en question l'intégrité

21 professionnelle d'un professionnel, c'est une accusation très grave. Nous

22 savons combien est dur le travail des interprètes et combien d'efforts

23 investissent-ils pour s'acquitter honorablement de leur tâche, et ils le

24 font de façon très correcte. Ceci dit, je vous prie de retirer ce que vous

25 avez dit.

26 Vous avez effectivement eu l'effet voulu, mais étant donné les

27 circonstances, je crois que votre déclaration n'est pas inadéquate et qu'il

28 serait honorable de votre part de retirer ce que vous dites.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'accepte entièrement, Maître Nosworthy.

2 Je retire ce que j'ai dit.

3 Je voudrais juste rajouter que la raison de ma réaction a été un

4 événement de vendredi sur lequel M. Martic a attiré mon attention. Ceci

5 dit, je retire ma remarque de tout à l'heure. Je vous remercie.

6 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vous remercie, Maître

7 Milovancevic. Je m'excuse au Président.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Juge Nosworthy.

9 Est-ce que je peux avoir le nom de l'interprète ?

10 M. WHITING : [interprétation] Peut-être devrions-nous passer à huis clos

11 partiel, parce que l'identité des interprètes est protégée. C'est une

12 habitude dans ce Tribunal.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suis d'accord que son identité nous

14 soit communiquée plus tard.

15 Maître Milovancevic, je n'accepte pas que vous ayez retiré votre

16 déclaration pour la simple raison que cela vous a été suggéré par quelqu'un

17 d'autre. Ce n'est pas de votre initiative. Je ne crois pas que vous le

18 sentiez sincèrement, et je vous demanderais de supporter les conséquences

19 pour ce que vous venez de dire. Vous avez mis en question l'intégrité de

20 l'interprète. Vous l'avez fait de façon très claire et vous m'avez donné

21 une réponse claire. Je vous avais demandé si ce que vous soutenez est que

22 l'interprète a fait exprès, vous avez dit que oui, et maintenant je

23 voudrais que vous argumentiez cela.

24 Indépendamment de ce que Me Nosworthy a dit, vous devrez vous en

25 occuper davantage, maintenant. J'ai vu l'interprète qui était en train

26 d'interpréter à ce moment-là. Je n'en connais pas le nom, mais je pourrais

27 procéder à la suite et je vais présenter un rapport au Président. Cela va

28 être à vous de vous en occuper par la suite.

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, en acceptant la

2 suggestion du Juge Nosworthy, je l'ai fait en tant que professionnel, de

3 façon responsable et en obéissant à ma conscience. Le fait que je l'aie

4 pensé sincèrement peut être prouvé de la très simple façon, parce que j'ai

5 dit à savoir que je ne voulais pas aller plus loin dans ce problème.

6 Ma réponse a été sur votre insistance. Votre insistance, Monsieur le

7 Président Moloto, me met dans une situation désagréable, moi-même, la Juge

8 Nosworthy et toute la Chambre. Or, j'accepte une suggestion d'un membre de

9 la Chambre. En tant que membre qui est sur le pied d'égalité avec les

10 autres, je le fais d'une façon responsable. J'ai accepté, Monsieur le

11 Président, cette suggestion comme une suggestion de la Chambre.

12 Pour moi, en tant que professionnel, cela m'est égal si cette suggestion

13 vient du Président, du Juge Hoepfel ou du Juge Nosworthy. Je communique

14 avec le Tribunal, avec la Chambre, et c'est à la Chambre que j'ai dit que

15 c'était "ma position".

16 En ce qui concerne ce problème, je vais donner très volontiers une

17 explication pourquoi j'ai réagi de la sorte. Mais je pense qu'il ne serait

18 pas bon d'engager cette procédure.

19 Vendredi, j'ai arrêté M. Martic pour ne pas qu'il vous dise les

20 choses que lui avait entendues des interprètes, les interprètes qui sont là

21 et que je ne connais pas. En retirant ces propos, je me suis excusé en

22 croyant qu'il ne fallait pas aggraver les problèmes. En ce moment-ci

23 encore, je fais appel à la Chambre de ne pas le faire. Il n'y a pas besoin

24 de le faire.

25 Tout simplement, j'avais une raison pour faire ressortir ce problème.

26 C'est pour cela que je l'ai fait d'une façon que j'ai cherchée à présenter

27 aussi grave que possible, sans vouloir faire outrage au Tribunal ou mettre

28 en question l'intégrité de qui que ce soit.

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1 J'ai respecté aussi bien le Tribunal que les gens qui travaillent.

2 Beaucoup de gens circulent ici, je sais que leur travail est dur, je le

3 respecte, mais je respecte aussi ce que je fais. Mon travail de Défense est

4 de suivre comment les textes sont traduits. Si quelque chose a été traduit

5 de façon -- non pas un peu de façon erronée, mais si le sens est contraire,

6 je dois réagir.

7 Je voudrais et je vous demande que cette question ne soit pas

8 aggravée.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous voulez vous arrêter un

10 instant ? Est-ce que vous avez terminé ? Maître Milovancevic, maintenant,

11 vous êtes en train d'embellir vos propres propos. Vous soutenez maintenant

12 que vous vous étiez excusé à votre interprète au moment de retirer vos

13 propos. Retirer une déclaration est une chose, et s'excuser à l'interprète

14 est une autre chose. Et vous, vous ne l'avez pas fait. C'est une chose.

15 Autre chose. Quand vous avez répondu à la Juge Nosworthy, maintenant et la

16 dernière fois, vous avez toujours essayé de justifier pourquoi et vous avez

17 dit à cause de ce qui est arrivé vendredi. Vendredi, c'était ce que disait

18 M. Martic. Vous avez dit que vous ne voudriez pas élargir cette question.

19 Pour une seconde fois, je vous ai demandé si vous vouliez que l'on soulève

20 cette question, et vous avez répondu que non. Je ne sais pas ce qui est

21 arrivé vendredi. Je n'en sais rien. Cela n'a rien à voir avec la

22 traduction, avec l'interprétation.

23 J'ignore si vous voulez soutenir maintenant que c'est le même interprète

24 qui, dans les deux cas, aurait dit une chose erronée, le même qui l'a dit

25 vendredi. Je ne cherche pas à m'aventurer dans ce genre de question.

26 Mais maintenant, vous voulez justifier votre intervention

27 d'aujourd'hui par ce qui est arrivé vendredi. Cela ne veut pas dire que

28 vous vous êtes excusé à l'interprète.

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1 Nous avons ici le procès-verbal d'audience. C'est une trace de ce qui

2 est arrivé. Cela ne peut pas être rayé. Je dois m'occuper de cela et faire

3 aboutir cette question, et le seul moyen de le faire, Monsieur, c'est de

4 vous mettre en contact direct à un endroit propice avec l'interprète, pour

5 vous en occuper de façon adéquate. En ce qui concerne ces procédures, je ne

6 voudrais pas que plus tard, vous disiez : "J'engage une plainte parce que

7 les interprètes ont mal traduit les dépositions de mon témoin." Si vous

8 soutenez que cet interprète a fait exprès de mal traduire, cet interprète

9 doit être éloigné de ce dossier. Nous avons besoin des interprètes qui

10 travaillent correctement, et pour éviter les irrégularités que l'on

11 pourrait évoquer à la fin de ce procès.

12 Vous ne pouvez pas proférer des accusations pour les retirer tout de suite

13 en disant que tout cela doit être oublié. C'est un endroit public où les

14 débats sont publics. Je comprends très bien que vous faites votre travail,

15 mais tout le monde ici fait son travail sous une grande pression. Je dois

16 entreprendre les démarches qui s'imposent et je saisirai le Président et je

17 demanderai que cet interprète soit éloigné s'il est établi qu'il a fait

18 exprès de mal traduire.

19 Je crois qu'il ne faut pas continuer ce dialogue. Dites ce que vous

20 avez, mais brièvement.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Vous dites que j'utilise

22 l'incident de vendredi pour justifier ce qui s'est passé aujourd'hui en

23 disant que vous ne savez pas ce qui s'est passé vendredi, et moi, je le

24 sais.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais c'est ce que vous nous

26 dites. Vous vous adressez à la Juge Nosworthy en lui expliquant pourquoi

27 vous avez réagi, et vous auriez réagi à cause de ce qui s'est passé

28 vendredi. A mes yeux, vous n'avez pas fait preuve d'avoir un regret

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1 sincère, vous ne faites que vous justifier.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais

3 que cela soit réglé de façon publique. Je m'excuserai à cette dame, si

4 c'est une dame qui a traduit. Il ne faut pas, je pense, surcharger Monsieur

5 le Président du Tribunal ni vous-même par un détail.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quand est-ce que vous allez le

7 faire ?

8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je le fais en ce moment. Je

9 m'excuse à Mme l'Interprète pour la phrase que j'ai prononcée à son propos.

10 J'ai retiré mes propos et je me suis excusé.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Afin de vous faire comprendre,

13 Maître Milovancevic, à quel point ceci est sérieux, vous avez dit également

14 que ceci n'était pas la première fois, et ce faisant, vous avez mis en mal

15 la réputation de ce Tribunal. Je trouve que la question est très grave, moi

16 aussi.

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Juge, nous parlons du

18 service d'interprétation et d'une erreur concrète. Lorsque j'ai mentionné

19 le cas précédent, j'ai mentionné les erreurs de dates, de numéros, ce genre

20 de chose, ce qui peut être toléré, ce que nous avons toléré jusqu'à

21 maintenant. Il n'y a pas eu de telle réaction. Bien sûr que je n'accuse pas

22 le Tribunal, bien au contraire. D'ailleurs, mon intention n'était pas cela.

23 Pour moi, c'était une question technique. Sans interprétation, nous

24 ne pouvons pas travailler. Puisque maintenant, la question a été posée au

25 sujet de ma réaction, c'est pour cela que j'ai dit ce que j'ai dit. Je

26 pense que j'ai terminé tout cela en faisant ce que j'ai fait. Si j'ai créé

27 un problème à la Chambre de première instance, je le regrette. Ce n'était

28 pas du tout dans mon intention. Je ne souhaitais pas du tout reprocher quoi

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1 que ce soit ni à la Chambre de première instance, ni à l'Accusation, ni au

2 Tribunal dans son ensemble. Simplement, je traitais d'un problème concret

3 et d'une erreur d'interprétation. Je me suis d'ailleurs excusé, Monsieur le

4 Juge.

5 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci de dire cela, mais je ne suis

6 pas d'accord pour dire que vous avez traité seulement de ce problème

7 concret. Mais vous avez fait une allégation générale, ce qui est une

8 question bien grave. Vous avez dit que ceci était exactement le contraire

9 de ce qui avait été dit à l'origine et que ce n'était pas la première fois.

10 Le poids de ceci est extrêmement lourd, donc je pense que nous avons un

11 problème réel.

12 Vous avez dit quelque chose au sujet de l'intention que vous aviez afin de

13 provoquer un certain effet et que vous considérez que ceci a réussi. Que

14 vouliez-vous dire par là ?

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Juge, dans l'ensemble de mon

16 intervention, s'agissant de cette erreur d'interprétation, j'ai parlé très

17 concrètement. J'ai parlé du travail de la personne qui interprète, et

18 lorsque j'ai dit que j'ai abouti, j'ai obtenu l'effet souhaité, je voulais

19 dire qu'en attirant l'attention du public au problème de l'interprétation,

20 que j'ai averti les interprètes et qu'ils vont faire plus attention à la

21 manière dont ils travaillent. Mon intention n'est pas de faire perdre le

22 travail à quelqu'un qui travaille ici à cause de cette erreur.

23 Puis, je considère aussi qu'il suffisait de dire publiquement :

24 faites attention, c'est grave et sérieux si une telle erreur apparaît.

25 C'est tout ce que je voulais dire, Monsieur le Juge.

26 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] C'est une chose d'expliquer

27 réellement ce que vous vouliez dire en disant que ceci n'était pas la

28 première fois, car lorsque je vous ai demandé, vous avez dit : ce n'est pas

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1 la même chose qu'auparavant. Vous avez mentionné les chiffres erronés, de

2 simples erreurs, donc vous pouvez expliquer. Est-ce que vous pouvez

3 expliquer ce que cette phrase veut dire, car il s'agit d'une déclaration

4 publique extrêmement véhémente lorsque vous dites : "Ce n'est pas la

5 première fois."

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Juge, ce n'est pas la

7 première fois au cours de ce procès que nous avons dû corriger le compte

8 rendu d'audience en raison d'une erreur d'interprétation, qu'il s'agisse de

9 la date ou d'une donnée ou d'un chiffre.

10 J'ai expliqué ma réaction. C'est normal si les gens font des erreurs. Il y

11 a des erreurs. Mais pour moi, c'était une erreur dramatique, c'est pour

12 cela que je l'ai dite. Vous savez, je ne suis pas un fou, tout d'un coup,

13 qui réagit au premier problème. Mais simplement, j'ai voulu dire qu'il y a

14 déjà eu des problèmes. C'est normal. Mais j'ai pensé que c'était une

15 omission plus grave.

16 Là, maintenant, les choses se sont compliquées, car on m'a demandé

17 d'expliquer mon point de vue, et je comprends maintenant vos raisons. Mais

18 ce que j'ai dit ne portait pas sur cette institution, mais sur le travail

19 d'une personne dans une phrase. Je me suis excusé auprès de cette personne

20 et j'ai retiré ce que j'avais dit.

21 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Afin que les choses soient claires à

22 ce sujet, est-ce que vous insinuez que des erreurs d'interprétation se sont

23 déjà passées dans le cadre de cette affaire sans que vous en parliez ? Est-

24 ce que c'est cela que vous insinuez ?

25 Vous avez clairement indiqué cela. Si quelque chose s'est passé, nous avons

26 tout fait afin de corriger les erreurs. Bien sûr, il y a parfois des

27 erreurs, mais il est très important de les corriger immédiatement.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Juge, jusqu'à présent, nous

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1 avons toujours réagi aux erreurs s'agissant des chiffres, s'agissant des --

2 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Merci.

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] -- données concrètes, mais pour éviter

4 tout problème et pour que moi-même je ne devienne pas victime de mes

5 propos. Vendredi, nous avons entendu un commentaire des interprètes

6 concernant ma personnalité et lié au travail de la Chambre de première

7 instance qui pouvait susciter mes suspicions par rapport aux personnes qui

8 travaillaient. Cela ne m'intéresse pas qui travaillait ce jour-là.

9 Je ne souhaitais pas et je ne souhaite toujours pas soulever cette

10 question, mais je souhaitais attirer l'attention des personnes qui font ce

11 travail que nous sommes en train de lire cela; ni plus, ni moins, Monsieur

12 le Président.

13 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Juge ?

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous voulez continuer avec

15 votre contre-interrogatoire ?

16 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je souhaite

17 simplement noter que l'erreur avait été totalement clarifiée pour le compte

18 rendu d'audience avant que Me Milovancevic ne commence à parler. Le témoin

19 l'a clarifié. C'est clair dans le compte rendu d'audience.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et je lui ai mentionné.

21 M. WHITING : [interprétation] Puis, je souhaite ajouter que

22 personnellement, je suis tout à fait choqué par ce qui vient de se passer

23 et j'imagine que l'interprète, et je suppose que tous les interprètes, mais

24 surtout l'interprète en question est probablement tout à fait choqué et en

25 détresse en raison de ce qui s'est passé. Maintenant, je ne sais pas si la

26 Chambre souhaite savoir si l'interprète peut continuer ou s'il faut prendre

27 une pause, mais je trouve cela très troublant. C'est la raison pour

28 laquelle je soulève cela.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci d'avoir soulevé cela. J'allais

2 le demander. Nous n'avons pas entendu la personne, si elle accepte l'excuse

3 ou pas, et j'aimerais bien qu'elle s'adresse à moi. Mais je ne suis pas

4 sûr, enfin, je ne suis pas sûr si je peux lui demander si elle souhaite

5 procéder à une pause ou nous devrions faire une pause.

6 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas de problème. De toute façon, compte

7 tenu de la nature de notre travail, nous n'aimons pas être dans le centre

8 de l'attention. Poursuivons.

9 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Elle parle en tant qu'un vrai

10 professionnel, et je sais qu'elle l'est.

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, c'est exact. Mais même lorsque

12 l'on est professionnel, on reste un être humain avec des sentiments humains

13 qui sont affectés par ce qui est dit. Nous avons la responsabilité d'être

14 sensibles à cela. Ce n'est pas un automate; il s'agit d'un être humain avec

15 des sentiments.

16 Je suggère que l'on procède à une pause et que l'on revienne dans un quart

17 d'heure.

18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 00.

19 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La Chambre de première instance a

21 décidé de demander, et c'est ce que nous faisons maintenant, que le chef du

22 service d'interprétation prenne le compte rendu d'audience concernant

23 l'interprétation qui a prétendument été mal faite, d'écouter

24 l'enregistrement, l'original, et de soumettre un rapport à la Chambre sur

25 ce qu'il aura constaté. Lorsque la Chambre aura reçu ce rapport, elle

26 décidera de la manière à procéder. Pour le moment, nous allons nous en

27 arrêter là et poursuivre le travail habituel.

28 Monsieur Whiting.

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1 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Q. Monsieur Plejo, avant la pause, vous avez dit au cours de votre

3 déposition que l'entraînement à Golubic était différent de celui que vous

4 aviez reçu au cours de votre entraînement militaire. En fait, n'est-il pas

5 vrai que l'entraînement à Golubic, en 1991, englobait également

6 l'entraînement militaire, n'est-ce pas ?

7 R. Non, ce n'est pas vrai.

8 Q. N'est-il pas exact de dire, Monsieur, que les unités spéciales étaient

9 entraînées à Golubic et que l'intention - et en fait, c'est ce qui s'est

10 passé - était que les unités spéciales aillent aux endroits tels que Knin

11 et Benkovac et Obravac afin de s'engager dans des opérations militaires

12 après leur entraînement ? Ils ont été entraînés pour ce faire.

13 R. Dès hier, j'ai dit ce que nous avions fait. Quant à la question de

14 savoir quelles étaient les intentions des uns et des autres, je ne peux pas

15 le dire.

16 Q. N'était-il pas évident, à Golubic, que des unités spéciales étaient

17 entraînées pour des opérations militaires ?

18 R. Vous savez, pendant mon entraînement, j'avais l'impression que j'allais

19 être affecté à un poste où j'allais assurer la sécurité d'une personnalité,

20 peut-être du président de la municipalité ou quelqu'un d'autre. Je ne

21 m'attendais pas à être déployé dans le cadre d'une unité de guerre, d'une

22 unité opérationnelle de guerre.

23 M. WHITING : [interprétation] Nous allons maintenant nous pencher sur la

24 pièce à conviction numéro 622.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant d'examiner cette pièce à

26 conviction, je dois exprimer ma préoccupation puisque certaines réponses ne

27 correspondent pas aux questions.

28 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai compris la

Page 8783

1 réponse s'agissant de la dernière question. Je ne sais pas si c'est la

2 question dont vous parlez, Monsieur le Président. Le témoin a répondu que

3 pour lui, ce n'était pas évident qu'il y avait des unités spéciales qui

4 s'entraînaient pour des buts militaires. C'est la manière dont j'ai compris

5 la dernière phrase.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais vous voyez, le problème,

7 c'est qu'il ne peut pas conclure, à savoir, il ne peut pas conclure qu'il

8 allait être déployé dans une unité de guerre. Cela ne se fonde pas sur ce

9 qui avait été fait à Golubic, mais sur son impression de ce qui allait se

10 faire ensuite après l'entraînement.

11 M. WHITING : [interprétation] Oui, vous avez tout à fait raison, Monsieur

12 le Président. Je vais poser d'autres questions à ce sujet.

13 Q. Vous avez été entraîné à Golubic pendant 20 jours et ensuite vous avez

14 participé à l'entraînement. Ne trouviez-vous pas cela évident que c'était

15 un entraînement militaire qui était en cours là-bas ?

16 R. Non, pour moi ceci n'était pas évident.

17 Q. Examinez cette pièce à conviction. Comme vous pouvez le voir, c'est --

18 je vérifie justement pour voir si nous avons la version en anglais.

19 Vous pouvez voir, il s'agit ici d'un compte rendu d'une réunion du 14 juin

20 1991. A l'époque, vous étiez à Golubic, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, c'est possible.

22 Q. Que voulez-vous dire par "c'est possible" ? Vous étiez là, n'est-ce pas

23 ? Je ne veux pas dire à la réunion, mais à Golubic.

24 R. A Golubic, probablement, oui, à cette époque-là. Mais je ne peux pas

25 vous donner la date exacte. Je vous ai déjà dit que je ne me souviens pas

26 des dates exactes. Veuillez tenir compte de cela. Il est possible même qu'à

27 l'époque, j'aille été dans le vieil hôpital. Peut-être que ceci correspond

28 à cette période. Hier, nous avons parlé de cela, et je ne peux pas le dire

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1 d'après la date. Peut-être que je suis parti avec ce groupe de 15 à 20

2 personnes dans le vieil hôpital. Nous en avons parlé hier.

3 Mais peut-être que j'étais à Golubic, mais je ne sais rien au sujet de

4 cette réunion.

5 Q. Nous allons voir maintenant ce document. Vous voyez, dans le premier

6 paragraphe, deux participants, ce sont des personnes que vous avez

7 mentionnées dans votre déposition, Dragan Karina et le capitaine Dragan.

8 Est-ce que vous voyez cela ?

9 R. Oui. Oui, je vois.

10 Q. Vous voyez que les buts de la réunion ce sont "l'accord sur le suite du

11 travail à Golubic; les unités qui doivent couvrir les alentours, qui

12 doivent être déterminées; et l'entraînement des unités." Vous voyez cela ?

13 Un, deux, trois ?

14 R. Oui.

15 Q. Ensuite, nous avons la section suivante : "L'accord sur la suite du

16 travail à Golubic," puis apparemment, une liste des unités différentes et

17 des groupes différents, Plitvice, le groupe de Knin, Medak, et cetera. Vous

18 voyez cela ?

19 R. Oui.

20 Q. Je souhaite que vous examiniez maintenant la page suivante en B/C/S, et

21 ceci figure en bas de la page en anglais. Est-ce que vous voyez, là où il

22 est écrit par rapport au groupe de Medak :

23 "Les gens doivent être entraînés pour miner et démolir les routes et pour

24 tendre des embuscades en profondeur pour attirer les autres dans les

25 embuscades et pour se défendre depuis cette embuscade. Puis, les gens de

26 Glina et Vojnic doivent être entraînés pour miner les véhicules, les

27 bâtiments et les installations, et pour tirer à coup de fusil à lunette."

28 Si nous examinons la page suivante en anglais :

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1 "Plaski : Il s'agit de la construction des positions de la défense,

2 du blocage de la ville en utilisant les grenades à main, de tendre des

3 embuscades."

4 Est-ce que c'est de cela que vous parliez lorsque vous parliez de

5 l'entraînement de police classique ? C'est de ce genre de chose que vous

6 parliez ?

7 R. Non. Peut-être que pendant cette réunion, ils ont parlé de cela, mais

8 je ne connais pas les personnes qui ont assisté à la réunion. Peut-être ils

9 ont adopté, ils ont pris une telle décision pour la défense aux alentours,

10 mais nous n'avons pas eu de tel entraînement. Je ne sais rien au sujet des

11 explosifs ni de la manière dont on mine certains endroits. Je n'ai jamais

12 tenu un engin explosif entre mes mains et je ne sais pas comment les faire

13 fonctionner.

14 Q. Peu importe ce que vous avez appris lors de votre entraînement et ce

15 que vous aviez entre les mains, c'était l'entraînement qui se déroulait à

16 Golubic, n'est-ce pas ? C'est cela qui est décrit dans ce mémorandum ?

17 R. Je n'ai pas vu ce genre d'entraînement qui portait sur la manière de

18 poser les mines et de créer les positions de défense. Je vous ai expliqué

19 hier quel était l'entraînement que nous suivions à Golubic.

20 M. WHITING : [interprétation] Nous allons maintenant nous pencher sur la

21 pièce à conviction 620, s'il vous plaît.

22 Q. Avant cela, Monsieur, est-ce qu'il y a une raison pour laquelle vous ne

23 souhaitez pas dévoiler l'aspect militaire de l'entraînement à Golubic ?

24 R. Ecoutez, je n'ai pas compris votre question. Pourquoi voulez-vous que

25 je ne réponde pas exactement ce que l'on faisait là-bas ? Je ne comprends

26 pas la question que vous me posez.

27 Q. C'est pour cela que je vous ai posé la question, parce que j'ai voulu

28 exactement connaître les raisons. Précisément, c'est ce qui m'intéressait.

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1 Mais à présent, je vais vous demander d'examiner la pièce 620. Je voudrais

2 que l'on examine la dernière page de cette pièce. C'est un rapport, et vous

3 allez voir la signature de ce rapport, et vous voyez que c'est bien le nom

4 du capitaine Dragan ?

5 R. Cette signature ? Non. C'est la signature, mais je ne sais pas.

6 Q. Non, je parle du nom. Daniel Snedden, c'est un des noms utilisés par le

7 capitaine Dragan. Vous le savez, cela, n'est-ce pas ?

8 R. Non. C'est la première fois que j'entends ce nom.

9 Q. Il s'agit du rapport concernant l'entraînement à Golubic.

10 Après le premier paragraphe, on peut lire :

11 "Le premier groupe a suivi une formation de 21 jours."

12 On a vu que c'est votre groupe, n'est-ce pas ? Puisque vous, vous

13 avez suivi aussi une formation d'une vingtaine de jours, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. "Pendant l'entraînement, le programme ne s'est arrêté que pendant 36

16 heures à cause d'une opération qui a eu lieu à Bratiskovci."

17 Est-ce que vous vous souvenez ?

18 R. C'est possible qu'il y ait eu une interruption.

19 Q. Est-ce que vous vous rappelez de cette opération à Bratiskovci ?

20 R. Non. Je ne me souviens que d'une action qui a eu lieu à l'extérieur de

21 Golubic, à Udbina. Je pense que moi, mis à part cette opération-là, je n'ai

22 pas quitté le camp d'entraînement ou peut-être que ma mémoire flanche.

23 Q. Un petit peu plus loin dans le paragraphe, on peut lire :

24 "Il était impossible d'entraîner les stagiaires pour arriver au niveau

25 auquel ils pouvaient agir en tant qu'une unité."

26 Ensuite, au niveau du prochain paragraphe :

27 "Je considère que vu la complexité de la situation politique dans le pays,

28 la seule chance pour créer l'unité dans nos forces armées est de

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1 dépolitiser les unités armées."

2 L'entraînement à Golubic consistait d'un entraînement ou de la formation

3 des unités armées, n'est-ce pas ?

4 R. Je dis "non", mais si vous considérez cela, c'est votre problème.

5 Q. Mais en voyant ce rapport, vous dites toujours "non" ? Vous répondez

6 toujours par la négative ?

7 R. Je ne sais pas qui a écrit ce rapport. Je ne vois pas de quoi il

8 s'agit. D'ailleurs, cela ne m'intéresse pas. Ce que je peux vous dire,

9 c'est qu'une dizaine d'hommes de chaque municipalité ne peuvent pas

10 vraiment représenter une force armée. C'en est d'une.

11 Ensuite, je voyais ces gens par la suite, et en général, c'étaient des

12 chauffeurs qui servaient de chauffeurs de différentes personnes travaillant

13 pour la sécurité. Je suis sûr que cette unité était censée effectuer ces

14 missions-là. Comment voulez-vous qu'une dizaine de personnes représentent

15 une force armée ? Je n'y croyais pas du tout, moi.

16 Q. Monsieur Plejo, vous ne saviez pas qu'à l'automne 1991, au moment où

17 vous, vous travailliez dans la prison du district de Knin, une unité

18 spéciale de la police de la SAO Krajina a participé aux opérations

19 militaires ? Vous ne le savez pas ? Vous n'êtes pas au courant de cela,

20 qu'ils aient participé avec la JNA aux opérations militaires ?

21 R. Puisque je travaillais au Tribunal, comment vouliez-vous que je sache ?

22 Comment voulez-vous que je sache qui participait aux opérations

23 militaires ? Je ne recevais pas de rapports quant aux participants.

24 Q. Quand tout à l'heure vous avez répondu que tous ces gens qui avaient

25 été formés à Golubic étaient en réalité des chauffeurs, en réalité, vous ne

26 savez pas ce qu'ils faisaient en automne 1991, puisque vous venez de me

27 répondre ceci ?

28 R. Je vous ai dit que par la suite, j'en ai vu, j'ai vu quelques-uns de

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1 ces hommes servir de chauffeurs de différents ministres et personnalités ou

2 comme "bodyguards", et c'est pour cela que je me suis dit qu'ils étaient

3 formés à faire cela.

4 Cela étant dit, c'est possible qu'il y en ait eu qui se soient portés

5 volontaires pour participer aux opérations militaires.

6 Comment voulez-vous que je sache cela ? Je travaillais dans la prison du

7 district. Je savais où était mon frère et je savais où était mon père, mais

8 je ne pouvais pas savoir où étaient les autres personnes faisant partie de

9 ce groupe.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que je peux vous interrompre ?

11 Pourriez-vous parler plus lentement, puisque les interprètes s'efforcent

12 pour vous suivre et ils ont du mal.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

14 M. WHITING : [interprétation]

15 Q. Vous avez dit : "Il est possible qu'il y en ait eu qui ont rejoint les

16 unités militaires sur la base de volontariat," mais là vous ne faites que

17 deviner qu'imaginer les choses. Vous ne savez pas ce qui s'est passé avec

18 ces hommes, vous ne savez pas si on leur a donné ordre de rejoindre les

19 unités ou s'ils se sont portés volontaires éventuellement pour rejoindre

20 des unités et pour participer aux opérations militaires ?

21 R. Oui, effectivement, je ne sais pas ce qui s'est passé avec ces gens par

22 la suite et je ne sais pas où ils étaient.

23 Q. Très bien. Je vais vous demander d'examiner la page suivante de ce

24 document, en B/C/S et en anglais, où l'on peut lire --

25 M. WHITING : [interprétation] En B/C/S, c'est le premier tiers du document.

26 Peut-être qu'il serait possible d'agrandir cette partie pour que le témoin

27 puisse le voir.

28 Q. En anglais, on peut lire : "Notre objectif principal serait que les

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1 gens qui finissent ce stage d'entraînement rentrent chez eux et créent de

2 nombreux polygones dans les régions où cela est possible, ainsi que des

3 dépôts d'où de nouvelles formations vont voir jour."

4 Vous ne saviez que le but à Golubic, le but était que ces unités, que ces

5 unités spéciales soient entraînées pour créer des nouvelles formations, à

6 partir du moment où ils revenaient dans leur village. Vous le saviez,

7 n'est-ce pas ?

8 R. Mais pourquoi voulez-vous que je sache cela ? J'étais en haut, j'étais

9 à Golubic. Comment voulez-vous que je sache ce qu'ils faisaient là-haut,

10 quels étaient leurs plans à eux, dans la forteresse ?

11 Q. Mais on parlait de l'entraînement à Golubic, et vous y étiez. Vous

12 n'êtes au courant de rien de tout cela ?

13 R. Si j'avais été à Golubic, il a fallu que moi aussi, que je rentre chez

14 moi et que je crée une autre unité. Vous voyez bien que ce n'est pas cela

15 que j'ai fait. J'ai eu un travail au ministère de la Justice. Peut-être que

16 quelqu'un avait cette intention-là, mais je ne saurais faire de

17 commentaires là-dessus.

18 Q. Je vous ai tout simplement demandé ce qui s'est passé à Golubic.

19 Vous saviez aussi que Frenki Simatovic, surnommé Frenki, était à

20 Golubic ? Ce nom vous dit quelque chose, n'est-ce pas ?

21 R. Frenki Simatovic, oui, ce nom me dit quelque chose, mais de Belgrade.

22 Après les bombardements, puisqu'il a été arrêté et envoyé à La Haye, c'est

23 là que j'ai entendu son nom pour la première fois.

24 Q. Vous n'aviez pas entendu son nom ? Vous ne l'avez pas vu à Golubic ?

25 R. Non.

26 Q. Qu'en est-il de Mark ? Est-ce qu'il y avait un formateur qui s'appelait

27 Mark ? A Golubic, je veux dire.

28 R. C'est tout à fait possible. Enfin, c'est possible, mais je n'y ai passé

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1 que peu de temps, et je ne m'en souviens pas. C'est vrai que je n'y étais

2 que pendant 20 jours. Ensuite, j'ai été à Udbina pendant cette période-là.

3 Tout cela s'est passé il y a 15 ans. Ecoutez, je ne m'en souviens pas, tout

4 simplement.

5 Q. Pendant l'interrogatoire principal, vous n'aviez pas de problème avec

6 votre mémoire, n'est-ce pas ? Vous vous rappeliez de tout.

7 R. J'ai du mal pour me rappeler d'un nom et d'un prénom, les noms et les

8 prénoms. A l'époque, je n'étais pas marié, donc je me souviens mieux du nom

9 des jeunes filles.

10 Hier, je vous ai dit que j'ai du mal à me rappeler des dates et des

11 noms. Mais vous savez, je n'y ai passé que 10, 15, 20 jours. Cela s'est

12 passé il y a 15 ans.

13 Hier, j'ai mentionné des gens qui ont travaillé avec moi dans la prison,

14 mais j'ai passé quatre années dans la prison; alors c'est peut-être pour

15 cela que je m'en souviens mieux.

16 Q. Cela devait représenter un grand changement dans votre vie, puisque

17 vous avez travaillé à Tvik depuis 1985. Vous y avez travaillé pendant six

18 ans, et ensuite, tout d'un coup, en avril 1991, vous devenez un policier de

19 réserve. On vous donne un pistolet, vous avez une voiture de police, vous

20 allez à Golubic, vous devenez un instructeur là-bas, un formateur.

21 C'étaient des événements importants dans votre vie, n'est-ce pas ?

22 R. Je me souviens de ces événements, mais je ne me souviens pas des dates

23 précises. Je ne me souviens pas des gens, des noms des gens qui n'ont passé

24 que très peu de temps avec moi.

25 Q. Un autre entraîneur, Fico ou Fica, est-ce que ce nom vous dit quelque

26 chose ?

27 R. Non.

28 Q. Vous avez dit que Milan Martic était responsable du camp à Golubic.

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1 Mais il est aussi venu dans le camp, n'est-ce pas ? Il est venu

2 physiquement, en personne dans le cas, n'est-ce pas ?

3 R. Non, je n'ai pas dit que c'était lui qui était responsable. Quand je

4 suis venu à Golubic, c'est mon commandant, Dragan Karina, qui m'a

5 accueilli.

6 Pendant ces 20 jours que j'y ai passés, je n'ai jamais vu Milan Martic.

7 Cela étant dit, je ne sais pas s'il venait ou non, s'il était venu pendant

8 cette période-là.

9 Q. Hier, à la page 42 de votre déposition, M. le Président Moloto vous a

10 demandé si Milan Martic était responsable de Golubic, et vous avez dit :

11 "Oui, j'imagine que oui." Est-ce que maintenant vous changez la nature de

12 votre déposition ?

13 R. Non. Mais vous m'avez demandé s'il était venu à Golubic. Comment

14 voulez-vous que je sache ? Je venais d'arriver à Golubic. J'ai rencontré

15 mon commandant. Il m'a donné ma mission. Pourquoi voulez-vous que je sache

16 qui est le plus important ?

17 Q. Monsieur, la raison pour laquelle je vous ai rappelé de votre

18 déposition réside dans le fait que vous avez dit il y a un instant que vous

19 n'avez pas dit que Milan Martic était responsable du camp. Mais c'était

20 bien lui qui était responsable du camp, n'est-ce pas ?

21 R. Je dis peut-être. Vous savez, quand vous dites peut-être, cela veut

22 dire peut-être bien que oui, peut-être bien que non. Je connaissais mon

23 commandant, je venais d'arriver. Comment voulez-vous que je sache qui était

24 son commandant ? Vous savez, j'ai passé deux jours ici et je ne sais pas

25 qui est la personne la plus importante dans ce prétoire, et je n'ai pas

26 besoin de le savoir.

27 Q. Monsieur, vous avez dit que vous avez été formé à Golubic et que vous

28 êtes devenu un formateur et qu'il s'agissait d'une formation classique aux

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1 missions de la police. Vous saviez que Milan Martic était le secrétaire du

2 secrétariat des Affaires intérieures à l'époque. Est-ce que vous avez une

3 quelconque raison pour douter que c'était bien lui qui était responsable de

4 l'entraînement de la police ?

5 R. Mais c'est pour cela que je dis peut-être que oui. Mais en réalité, je

6 ne sais pas quelle était sa responsabilité. Je n'étais arrivé là que depuis

7 deux ou trois jours. Je connaissais mon officier direct, mon supérieur

8 direct.

9 Q. Mais est-ce que l'on n'apprend pas au cours d'une formation classique

10 de policier ce que c'est qu'une chaîne de commandement, de quelle façon on

11 transmet les ordres, quels sont les supérieurs, qui a le pouvoir, et

12 cetera ?

13 R. Je vous ai dit qui était mon commandant, mon commandant direct. Peut-

14 être qu'au-dessus, il y avait les SUP ou le secrétaire du SUP, ou peut-être

15 que c'était le ministre. Mais vous savez, je ne connais pas la verticale de

16 la chaîne de commandement.

17 Q. [aucune interprétation]

18 R. [aucune interprétation]

19 Q. Vous nous dites que vous devenez un officer formé à Golubic sans

20 connaître le fonctionnement de la chaîne de commandement de la police de la

21 Krajina ? Vous ne saviez même pas ce que c'était qu'une chaîne de

22 commandement ?

23 R. Oui, c'est tout à fait possible que je ne connaissais pas toute la

24 chaîne de commandement. Je connaissais le commandant, le chef direct, mais

25 c'est tout. A l'époque, je ne pouvais absolument pas savoir qui était le

26 commandant de mon commandant et ainsi de suite. Je ne connaissais pas la

27 chaîne de commandant en entier.

28 Q. Vous avez dit qu'il y avait des hommes qui sont venus de Benkovac pour

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1 suivre une formation, et je pense que vous les avez formés, d'ailleurs.

2 Goran Opacic faisait partie de ces hommes, les hommes venus de Benkovac,

3 n'est-ce pas ?

4 R. Non. Je n'ai pas dit que je les ai formés. J'ai formé les gens de

5 Korenica, et il y avait quelques jeunes hommes d'Udbina, où nous étions sur

6 le terrain. Mais je n'ai jamais dit que c'est moi qui ai formé ces gens de

7 Benkovac. Donc, 10, 15 personnes sont venues de Benkovac, Obrovac, et

8 autres municipalités. Mais je n'étais pas leur commandant.

9 Q. Bon, alors cela veut dire que je ne vous ai pas très bien compris. Mais

10 cela étant dit, parmi ces hommes qui sont venus de Benkovac, il y avait

11 Goran Opacic, n'est-ce pas ? Il faisait partie des hommes venus de

12 Benkovac, n'est-ce pas ?

13 R. C'est possible. Mais je ne le connais pas personnellement. J'ai entendu

14 parler de cet homme. J'ai entendu dire qu'il faisait du karaté, que c'était

15 un sportif.

16 Q. Vous avez dit que vous ne le connaissiez pas personnellement, mais est-

17 ce que vous avez entendu dire qu'il avait été à Golubic à l'époque ?

18 R. Je ne m'en souviens pas. C'est tout à fait possible qu'il ait été là-

19 bas, mais je ne m'en souviens pas.

20 Q. Vous avez dit que vous êtes allé à Udbina pour y suivre une formation.

21 Si vous suivez une formation classique de police, et vous dites que c'est

22 ce que vous avez fait, pourquoi alors deviez-vous vous rendre à Udbina ?

23 R. Vous savez, vous recevez un ordre, vous l'exécutez et vous ne posez pas

24 de questions.

25 C'était comme cela à l'armée et à la police. Mais je vais vous dire ce que

26 je pensais. Ces hommes, ces jeunes hommes qui étaient là-bas, ils étaient

27 originaires du coin, donc ils ont dit qu'ils voulaient rentrer chez eux.

28 Cela ne nous dérangeait pas que d'être dans leur village, alors qu'on

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1 pouvait dormir là-bas. Ce n'était pas un problème de passer quelques jours

2 dans leur lieu de naissance, dans leur village d'origine.

3 Q. Maintenant, vous nous dites que parce que les gens, enfin, les

4 stagiaires qui suivaient une formation, ils voulaient rentrer chez eux,

5 c'est pour cela que vous avez dit "bon, d'accord, cela ne nous dérange pas,

6 on va aller là-bas" ? Ou est-ce que vous avez fait cela parce que vous

7 aviez reçu un ordre vous indiquant d'aller là-bas ?

8 R. Ces jeunes hommes, j'étais leur commandant, il y en avait qui étaient

9 d'Udbina et il y en avait qui étaient de Korenica, et ils ont dit qu'ils

10 auraient voulu que l'on fasse leur formation là-bas. Effectivement, le

11 commandant a fait droit à leur demande et a dit : mais pourquoi pas là-bas,

12 qu'ils passent un court séjour là-bas, qu'ils soient formés là-bas, qu'ils

13 voient leurs familles. On ne voyait pas où était le problème. Je ne vois

14 pas ce que vous ne comprenez pas, vous.

15 Q. Hier, quand vous avez parlé de vos formations, vous avez dit que vous

16 avez descendu une corde qui était sur les rochers. Enfin, est-ce que cela

17 fait partie de l'entraînement classique de la police, descendre une corde

18 comme un alpiniste, en réalité, d'un rocher ?

19 R. Mais pourquoi pas ? Je pense que c'est bien le cas.

20 Q. Et pourquoi ? Parce que c'est quelque chose que vous avez vu à la

21 télé ?

22 R. Mais pourquoi pas ? Je n'ai pas besoin de le voir à la télé. Mais

23 quelqu'un pensait que cela faisait partie de l'entraînement; pourquoi pas ?

24 Je ne vois pas pourquoi vous posez la question. Je ne vois pas la

25 différence parce que quelqu'un d'autre l'a vu à la télé.

26 Q. Monsieur, la question qui se pose, c'est de savoir s'il s'agit là d'un

27 entraînement de la police ou d'un entraînement des militaires de l'armée.

28 Vous, vous pensez toujours qu'il s'agit là d'un entraînement de police, de

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1 la police.

2 R. Monsieur le Procureur, en 1984, j'étais à l'armée. D'ailleurs, la

3 formation que nous avons suivie à l'armée était tout à fait différente de

4 celle que nous avons suivie pour la police.

5 Q. Vous nous avez déjà dit cela.

6 R. C'est pour cela que je pensais que c'était un entraînement de la

7 police.

8 Q. Mais quand vous descendez une corde tendue sur un rocher, vous dites

9 que c'est un entraînement destiné à entraîner la police, et pas les

10 militaires ?

11 R. Oui. Puisque quand j'étais soldat, je n'ai jamais descendu d'un rocher

12 à l'aide d'une corde, alors je me suis dit que c'était probablement un

13 entraînement classique de la police.

14 Q. Bon. On va revenir à Udbina. Vous avez dit que c'est la JNA qui vous a

15 renvoyé d'Udbina et que Milan Martic et Milan Babic ont essayé de négocier,

16 mais qu'on vous a quand même renvoyé de là-bas. Vous avez dit que c'était

17 parce que vous ne faisiez pas une formation classique destinée aux

18 policiers, comme vous l'avez appelée, mais parce qu'en réalité, ce que vous

19 faisiez, vous vous entraîniez aux activités militaires, c'était un

20 entraînement au combat. C'est pour cela que la JNA vous a renvoyé de là-

21 bas.

22 R. Ce n'est tout simplement pas possible. Vous avez 20 hommes, alors que

23 nous n'étions qu'une vingtaine et que l'armée avait des hélicoptères, des

24 chars, des véhicules blindés. Nous ne représentions aucun danger.

25 Q. Je n'ai pas dit que vous représentiez un danger face à la JNA, j'ai dit

26 que la JNA ne voulait pas de votre présence puisque vous étiez là-bas pour

27 faire l'entraînement aux activités de combat, un entraînement militaire, et

28 c'est pour cela qu'on vous a renvoyé.

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1 R. Je vous ai dit quel était l'entraînement que nous avons suivi. Cela

2 étant dit, je ne sais pas pourquoi ils nous ont virés de là.

3 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner une raison pour laquelle la JNA vous

4 aurait demandé de quitter les lieux alors que vous ne faisiez rien d'autre

5 que suivre une formation de police classique et que vous étiez là tout

6 simplement pour que les stagiaires puissent aller chez eux visiter leur

7 famille ? Pourquoi la JNA aurait fait cela ?

8 R. Je ne sais pas. Nous étions une toute petite unité très disciplinée, et

9 je n'ai pas participé aux négociations avec les officiers, avec l'armée.

10 Tout ce qui s'est passé, c'est que nous avions reçu l'ordre de nous

11 retirer.

12 Q. Vous avez dit, à propos de Golubic, que vous aviez entendu que l'un de

13 vos collègues avait giflé, à Golubic, quelques prisonniers de guerre

14 croates et que le capitaine Dragan avait demandé à Martic combien encore on

15 allait tolérer cela, ce type de comportement, et que Martic avait renvoyé

16 ce commandant. Vous souvenez-vous de cette déclaration ?

17 R. Oui, je me souviens.

18 Q. [aucune interprétation]

19 R. Je crois que nous l'avons un peu corrigée par la suite.

20 Q. C'est très bien, Monsieur. Maintenant, je vais vous poser une autre

21 question. La question était ce que le capitaine Dragan a dit exactement.

22 Mais vous n'avez pas raconté la fin de l'histoire, n'est-ce pas ?

23 R. Quelle fin ?

24 Q. En fait, le commandant qui a été renvoyé a tout de même reçu

25 l'autorisation de rester à Golubic ? L'ordre n'a pas été exécuté ? Il a été

26 autorisé de rester ?

27 R. J'ai expliqué que ce jour-là, je devais être chez moi ou à Knin, et

28 ensuite --

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1 Q. Monsieur, je dois vous interrompre --

2 R. [aucune interprétation]

3 Q. Vous savez, vos amis vous ont dit qu'ils avaient été autorisés de

4 rester.

5 R. Mes amis m'ont dit que M. Martic était venu et qu'il l'avait renvoyé.

6 Je ne sais pas quel sort lui a été réservé par la suite, pas plus que je ne

7 connais son nom.

8 Q. Je vais vous citer le résumé de votre déposition, le document qui nous

9 a été fourni par la Défense. C'est ce qu'ils disent qui serait l'objet de

10 votre témoignage :

11 "Une fois, quelques Croates prisonniers de guerre ont été emmenés à

12 Golubic. L'un des instructeurs les a attaqués physiquement. Le capitaine

13 Dragan en a informé Milan Martic, et ce dernier a donné l'ordre que cet

14 instructeur soit renvoyé du campement. Cependant, les stagiaires de cette

15 formation se sont opposés à cet ordre, si bien qu'il est resté, mais il lui

16 a été interdit strictement d'approcher les Croates."

17 R. Je ne sais pas comment il s'appelle. Peut-être que nous n'avons pas

18 formulé toute la question hier. Je sais qu'on m'a dit que les stagiaires

19 s'étaient opposés, et ils ont dit que s'il devait partir, ils partiraient

20 eux aussi, et comme ils m'ont dit, il est resté. Ce qui lui est arrivé par

21 la suite, je ne le sais pas. Peut-être est-il resté à Golubic, mais sous

22 certaines conditions que j'ignore parce que je n'ai pas été présent.

23 Q. Monsieur --

24 R. Maintenant que je dis que je ne sais pas, c'est que je ne sais même pas

25 qui est-ce ni ce qui lui est arrivé par la suite.

26 Q. Monsieur, il y a cinq minutes, quand je vous ai posé la question

27 suivante : "Vous savez, grâce à ce que vos amis vous ont dit, qu'il pouvait

28 rester, n'est-ce pas ?" Vous avez répondu : "Mes amis m'ont dit que M.

Page 8800

1 Martic l'a renvoyé. Je ne sais pas ce qui lui est arrivé et j'ignore son

2 nom."

3 Mais c'est un mensonge, n'est-ce pas ? Parce que vous venez de nous

4 dire que vous avez appris que d'autres s'étaient opposés à son renvoi et

5 qu'il était autorisé à rester.

6 R. Est-ce que vous voulez que je répète ma réponse ?

7 Q. Je veux que vous répondiez à ma question. Avant de vous citer ce qui

8 figure dans le résumé de votre déclaration, vous avez menti à ce Tribunal ?

9 R. Non, Monsieur le Procureur. Je n'ai pas menti. J'aurais préféré être là

10 ce jour-là. J'aurais connu les détails. Je vous dis ce que j'ai entendu.

11 Ils m'ont dit qu'ils s'étaient opposés à son renvoi et qu'ensuite, il a pu

12 rester. Mais je vous ai dit que je ne sais pas qui il était. Peut-être il

13 est resté, peut-être est-il resté ensuite. Mais à ce moment-là --

14 Q. Mais, Monsieur --

15 R. [aucune interprétation]

16 Q. Monsieur, vous ne nous avez pas dit cela hier, et quand je vous ai posé

17 la question concrète s'il pouvait rester, vous m'avez dit que vous ignoriez

18 ce qui était arrivé.

19 Ce témoignage n'était pas exact, parce que vous savez qu'il a été

20 autorisé de rester.

21 R. Je ne vois pas l'objectif. Mes collègues m'ont dit que quelqu'un a

22 giflé un Croate, et pour ne pas répéter toute l'histoire, M. Martic est

23 venu et l'a renvoyé. Mais --

24 Q. Non, non, Monsieur. Je ne veux pas que vous répétiez ce que vous avez

25 déjà dit. Mais toute cette histoire, vous la connaissez d'après ce que vos

26 collègues vous ont dit. Vous-même, vous n'avez rien vu de tout cela; est-ce

27 que cela est vrai ?

28 R. J'ai dit que ce jour-là, j'étais probablement chez moi ou à Knin.

Page 8801

1 Q. Par conséquent, vous avez entendu que Martic avait renvoyé cette

2 personne et aussi vous avez entendu qu'après cela, il a été autorisé de

3 rester. Vous avez entendu les deux informations ?

4 R. Oui, je les ai entendues, et mon intention n'était pas de mentir au

5 Tribunal. Pourquoi mentirais-je ? Je n'ai aucune raison.

6 Q. Vous n'avez pas de raison de mentir au Tribunal, Monsieur ?

7 R. Non, je n'ai pas de raison de mentir.

8 Q. Vous ne pouvez pas nous donner le nom du commandant qui a été impliqué

9 dans cette histoire, qui a giflé le prisonnier de guerre croate et qui a

10 été renvoyé et n'a pas été renvoyé ? Vous ne pouvez pas nous révéler son

11 nom ?

12 R. J'ignore son nom.

13 Q. Ou peut-être que vous ne voulez pas le dire ?

14 R. Non, je ne connais pas son nom. Cela ne m'intéressait pas. Il n'était

15 pas commandant. C'était un chef d'un petit groupe venu d'une ville. Moi,

16 vraiment, je ne connais pas son nom.

17 Q. Monsieur, est-ce que vous êtes en train d'inventer ce témoignage ?

18 Parce que tout à l'heure, vous avez dit qu'il s'agissait d'un commandant ou

19 d'un chef de groupe. Qu'est-ce qu'il était ?

20 R. Monsieur, vous avez dit "commandant" ou "chef de groupe." J'ai dit un

21 des chefs de groupe, hier comme aujourd'hui. Tout à l'heure, vous avez dit

22 "commandant", ce qui est une notion tout à fait différente.

23 Q. Parlons maintenant un peu de la prison. Hier, vous avez déclaré

24 qu'une quinzaine à une vingtaine de personnes avaient été envoyées depuis

25 Golubic pour transférer des prisonniers de guerre croates dans l'ancien

26 hôpital. Vous avez décrit l'hôpital. Je cite :

27 "Les carreaux étaient cassés, ainsi que les portes défoncées, il n'y

28 avait pas d'eau chaude. Je me demande même s'il y avait de l'eau froide."

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1 C'est sur la page 45 du transcript de la session d'hier.

2 Telles étaient les conditions que vous avez retrouvées dans l'ancien

3 hôpital ?

4 R. J'ai dit que l'ancien hôpital était composé de deux ailes.

5 Q. Non, Monsieur --

6 R. [aucune interprétation]

7 Q. -- c'est avant que vous nous le disiez. Vous avez décrit l'ancien

8 hôpital en disant que la personne qui était en charge de votre groupe

9 s'était plainte qu'elle devait assurer l'ancien hôpital et le réparer. Vous

10 vous souvenez de l'avoir dit ?

11 R. Oui, je me souviens de l'avoir dit.

12 Q. Ensuite, sur la page 53, vous avez dit que deux ou trois pièces étaient

13 habitables et que les prisonniers de guerre pouvaient y demeurer pendant

14 que vous répariez l'hôpital. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

15 R. Oui. Toutes les pièces étaient endommagées au même degré. Dans chacune

16 des pièces, il y avait des choses à faire, mais dans une plus, dans

17 d'autres moins. Mais il y en avait qui étaient moins endommagées.

18 Q. Monsieur, malgré ce que vous avez dit, qu'il n'y avait pas d'eau chaude

19 et que peut-être qu'il n'y avait même pas d'eau froide, vous nous dites que

20 "dans deux ou trois pièces, les carreaux étaient entiers, les portes

21 n'étaient pas défoncées." Vous nous le dites que maintenant.

22 R. Je ne le dis pas. Vous ne m'avez pas bien compris.

23 Q. Expliquez-nous ou je vais vous dire ce qui suit, en fait. Les

24 conditions étaient telles et les prisonniers de guerre vivaient dans ces

25 conditions jusqu'au moment des réparations, n'est-ce pas ?

26 R. Lorsque les prisonniers ont été amenés, ils ont été installés dans

27 l'aile droite, dont la moitié était occupée par les services médicaux, des

28 médecins et des infirmières. A côté de ces pièces, il y avait des pièces

Page 8803

1 désaffectées depuis quelques années.

2 Cependant, il y avait des choses à refaire dans ces pièces. Dans une

3 pièce un peu plus, dans d'autres moins. Il y avait un carreau à réparer, et

4 dans une autre pièce, il y en avait cinq de cassés. L'eau chaude n'y était

5 pas tout de suite, nous ne l'avions pas, tandis que dans la partie gauche,

6 il n'y avait pas du tout d'eau. Je crois avoir été clair à ce propos.

7 Q. En ce cas, est-ce que vous pouvez m'éclairer un petit peu ? Si dans une

8 partie de cet hôpital, il y avait des pièces où l'on pouvait les utiliser,

9 pourquoi la situation était urgente ? Pourquoi le chef de votre groupe

10 s'inquiétait du fait de devoir réparer l'hôpital et l'assurer à la fois ?

11 S'il y avait assez de place, pourquoi c'était urgent ?

12 R. Parce qu'il y avait des choses urgentes. Ce n'était peut-être pas

13 urgent, mais il fallait faire ces choses. Il fallait réparer.

14 Cet homme, pendant deux, trois jours, il a beaucoup travaillé. Il

15 avait demandé quelqu'un pour l'aider. Je n'y vois rien de singulier.

16 Q. Il a demandé une assistance ? Il ne pouvait pas faire tout cela tout

17 seul parce que la chose était urgente ou parce que les prisonniers étaient

18 détenus aux endroits inadéquats ? Cet espace ne correspondait pas à la

19 nécessité.

20 R. Certes, les conditions n'étaient pas comme ici. Mais écoutez, on

21 n'avait pas mieux. C'est tout ce qu'on avait. Mais notre volonté a été

22 d'améliorer les conditions au maximum.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre.

24 J'ai voulu avoir la réponse à la question qui vous a été posée par

25 l'Accusation et que je n'ai pas entendue.

26 Je ne vous ai pas entendu répondre à la question suivante : c'étaient les

27 conditions de l'hôpital, et les détenus vivaient dans ces conditions

28 jusqu'au moment où ces conditions ont été améliorées. Les conditions ont

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1 été telles que vous les avez décrites hier dans votre déposition, donc il

2 n'y avait pas de carreaux, il n'y avait pas d'eau chaude, et même vous

3 doutiez de la présence de l'eau froide. Les portes étaient défoncées. Vous

4 vous en souvenez ? Est-il vrai que ces prisonniers de guerre vivaient dans

5 ces conditions jusqu'à ce que ces dernières n'aient été améliorées ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je l'ai dit

7 précisément, hier, que --

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je dois vous interrompre. Je ne vous

9 ai pas demandé ce que vous avez dit hier. Je vous demande de nous dire

10 maintenant si cela est vrai.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dis que nous avons choisi cette aile où il

12 y avait de l'eau. Dans l'aile gauche, il n'y avait pas d'eau. Il n'y avait

13 --

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je dois vous interrompre encore. Est-

15 il vrai ? Voilà ma question. Est-ce que vous voulez bien répondre à ma

16 question ? Ne formulez pas la question vous-même, mais répondez à la

17 mienne. Est-ce que cela est vrai ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous voulez bien répéter la

19 question, parce que je crois ne l'avoir pas bien comprise.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-il vrai que les détenus vivaient

21 des ces conditions jusqu'au moment où celles-ci n'ont pas été améliorées ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Pourquoi est-il si difficile de

24 répondre à une question aussi simple ? Vous me parliez de ce que vous

25 disiez hier. Pourquoi vous avez besoin d'autant de détails ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne fais pas une grande pause après votre

27 question, mais il m'est difficile de répondre parce que la situation était

28 complexe. Il faut que je revienne dans cette période pour m'en souvenir.

Page 8805

1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Encore une fois, vous ne répondez pas

2 à ma question. Je ne vous demande pas sur les pauses. Je vous demande

3 pourquoi vous faut-il tellement longtemps pour répondre, pourquoi c'est si

4 difficile de me répondre.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est difficile de

6 répondre par un "oui" ou par un "non" à cette question.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi cela est difficile ? Si l'on

8 peut répondre avec un "oui" ou un "non", pourquoi est-ce difficile ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce je voudrais donner une explication pour

10 vous expliquer pourquoi les choses étaient --

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais je ne vous l'ai pas demandé, de

12 me donner des explications. Si je veux une explication, je vous la

13 demanderai.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous demande de répondre à une

16 question précise.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Monsieur Whiting.

19 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

20 Q. Vous avez dit dans votre dernière question qu'il n'y avait pas d'eau

21 chaude à l'endroit où les détenus étaient installés, dans l'aile droite.

22 R. Les premiers trois, quatre ou cinq jours, au plus six jours,

23 effectivement, il n'y avait pas d'eau chaude.

24 Q. Soit dit en passant, au mois d'août 1991, il y avait plus de 50 détenus

25 dans la prison de Knin; est-ce que cela est vrai ?

26 R. Je ne sais pas combien de détenus il y avait, parce que la situation

27 changeait de jour en jour. Si nous parlons de la période --

28 Q. En août 1991, vous avez été nommé directeur de cette prison. En août

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1 1991, il y avait une cinquantaine de détenus ?

2 R. Cela est possible.

3 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Sur la page 52, cinquième ligne,

4 réponse : "Les premiers deux, trois, quatre, cinq ou six jours, il n'y

5 avait pas d'eau chaude, six au plus." Je me demande ce que cela veut dire

6 dans ce contexte, "six au plus". Est-ce que vous pouvez m'éclairer là-

7 dessus ? L'expression que vous avez utilisée ne m'est pas claire.

8 M. WHITING : [interprétation] J'ai compris que cela veut dire "six jours au

9 maximum".

10 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vous remercie. Je viens

11 d'apprendre quelque chose.

12 M. WHITING : [interprétation]

13 Q. Une fois encore, au début de votre réponse, vous dites : "Il est

14 possible." Est-ce que vous savez ou ne savez pas -- quand vous avez été

15 nommé directeur de la prison, c'est la fonction la plus importante que vous

16 ayez jamais eue dans la vie, et vous ignorez s'il y avait 50 ou à peu près

17 50 détenus dans la prison ?

18 R. Comment puis-je savoir ? Je devrais voir le rapport de ce jour-là.

19 Q. Monsieur, si vous écoutez attentivement ma question, j'ai dit : "A peu

20 près 50," peut-être 48 ou 52.

21 R. [aucune interprétation]

22 Q. Lorsque je vous ai posé la question, vous m'avez dit : "Cela est

23 possible." Maintenant, vous m'avez dit : oui, il y avait à peu près 50.

24 R. Peut-être qu'il y en avait 20, peut-être 50. Je ne peux pas me

25 souvenir, en 1991, combien de prisonniers y avait-il un jour, et en 1993 et

26 en 1995.

27 Q. Quand vous dites "il est possible", c'est que vous l'ignorez ? Vous

28 n'en avez pas l'idée ?

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1 R. Non, je ne sais pas.

2 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Quelle était la capacité de la prison

3 à ce moment-là ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons sauté cette partie. Avec

5 l'augmentation du nombre des personnes détenues --

6 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Qu'est-ce que vous voulez dire par

7 là, "sauté" ? C'est qui, "nous", et qu'est-ce que "nous avons sauté" ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, on n'en parlait pas

9 ici.

10 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je vous ai posé une question, et s'il

11 vous plaît, répondez-moi. Ne commentez pas, mais répondez. Au moment où

12 vous êtes devenu directeur de la prison, quelle était la capacité de

13 détenus ? Combien de détenus pouvaient-ils être installés dans la prison ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Plus que le nombre mentionné par ce monsieur.

15 Il y avait une quinzaine de chambres.

16 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Quelle était la capacité de cette

17 prison ? Combien de détenus pouvaient-ils être détenus à cet endroit, étant

18 donné la capacité du moment ? Est-ce que vous pouvez m'avancer un chiffre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être une centaine.

20 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Officiellement, il n'y avait pas de

21 chiffre officiel ? Vous ne pouvez pas nous donner un chiffre officiel ?

22 Parce que vous dites "peut-être, à peu près --"

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne peux pas.

24 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous avez dit 15 chambres ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

26 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Combien de personnes par chambre ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela dépend des pièces. Il y en avait qui

28 étaient un peu moins grandes que celle-ci, et on pouvait y installer

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1 beaucoup de personnes. Selon notre règlement, une personne détenue devait

2 disposer d'au moins 8 mètres cubes ou 12, j'ai oublié.

3 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître

4 Whiting.

5 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

6 Q. Est-ce que je vous ai bien compris --

7 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

8 M. WHITING : [interprétation]

9 Q. Vous avez dit que dans cet hôpital il y avait des pièces dont les

10 dimensions ressemblaient à celles de cette salle d'audition ?

11 R. Oui, il y en avait qui étaient à peu près aussi grandes, et il y en

12 avait des moins grandes. Autrefois, c'étaient des chambres d'hôpital. Il y

13 en avait qui avaient 30 mètres carrés, et d'autres 40 ou 15. C'était cet

14 ordre de grandeur de ces pièces.

15 M. WHITING : [interprétation] Peut-être le moment est venu.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Effectivement, nous allons faire une

17 pause et nous reviendrons à midi et demi.

18 --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.

19 --- L'audience est reprise à 12 heures 30.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Whiting.

21 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 Q. Monsieur Plejo, hier, vous avez déposé et vous avez dit dans le cadre

23 de cette déposition, que vous avez fait en sorte qu'il n'y ait pas de

24 personnes non autorisées qui entrent dans la prison et que vous avez

25 empêché cela en mettant les gardiens à l'entrée de la prison. C'est à la

26 page 48.

27 R. C'est tout à fait possible.

28 Q. Je ne vois pas ce que vous voulez dire par "tout à fait possible,"

Page 8810

1 parce que la dernière fois, quand vous avez dit que quelque chose était

2 tout à fait possible, à la fin, il s'est avéré que c'était quelque chose

3 dont vous n'aviez aucune idée. Est-ce que vous voulez que je vous relise ?

4 R. Non, non. Vous n'avez pas besoin de le faire. Mais vous savez, la

5 sécurité des accès à la prison, c'était une chose obligatoire. L'objectif

6 était d'empêcher toute personne non autorisée à entrer dans la prison, mais

7 aussi d'empêcher toute fuite de la prison.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

9 M. WHITING : [interprétation]

10 Q. C'est à la page 48, et je vous ai posé la question :

11 "Comment avez-vous fait pour vous assurer que des personnes non

12 autorisées ne puissent pas accéder à la prison ?

13 "Réponse : Nous avons placé les gardiens aux portes de la prison pour

14 assurer la sécurité de la prison."

15 Est-ce que vous vous souvenez de cela ?

16 R. Oui, mais nous aurions procédé exactement de la même sorte pour

17 empêcher toute fuite de la prison. Je n'ai fait qu'élargir ma réponse, la

18 compléter, en quelque sorte.

19 Q. Essayez, s'il vous plaît, de vous concentrer sur les questions précises

20 que je vous pose. Comme cela, nous allons aller plus vite.

21 En réalité, Monsieur, ou tout au moins au début, les gardiens n'étaient pas

22 en mesure, n'étaient pas capables d'empêcher les personnes venant de

23 l'extérieur d'entrer dans la prison, et parfois, ils insultaient ces

24 personnes venant de l'extérieur, insultaient les prisonniers, et même les

25 attaquaient ?

26 R. Non, ce n'est pas exact.

27 Q. Monsieur, je vais à nouveau vous donner lecture du résumé de la

28 déclaration qui nous a été fournie par la Défense. C'est le résumé de votre

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1 future déposition.

2 "Le témoin a été envoyé à Knin pour organiser une prison là-bas dans

3 le bâtiment de l'ancien hôpital. Parce que cet hôpital n'avait pas été

4 construit à l'origine pour être une prison, au début, les gardiens avaient

5 du mal à empêcher les gens de l'extérieur de pénétrer dans la prison.

6 Parfois, ils entraient, et parfois, ils attaquaient ou ils insultaient les

7 prisonniers."

8 Je vous ai lu cela. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que cela

9 s'est produit au départ ?

10 R. Mais c'est tout à fait possible que cela s'était produit tout à fait au

11 début. Mais là, j'avais l'impression que vous m'aviez posé une question au

12 sujet de la prison du district. C'est de cela que je parle, parce que c'est

13 tout à fait possible que ces choses-là s'étaient produites avant la

14 création de la prison proprement dite. Mais à partir du moment où on a créé

15 la prison, non.

16 Q. Bien. On va procéder pas à pas. Je vous ai lu le résumé de votre

17 déposition.

18 "Le témoin a été envoyé à Knin pour y organiser la prison dans le bâtiment

19 de l'ancien hôpital. A cause du fait que ce bâtiment n'a pas été à

20 l'origine construit pour servir de prisons. les gardiens avaient du mal à

21 empêcher les gens de l'extérieur d'entrer dans la prison et parfois

22 insultaient ou attaquaient les prisonniers."

23 Cela s'est produit, n'est-ce pas ?

24 R. Les gardiens, comme je l'ai dit hier, faisaient partie de la Défense

25 territoriale. Ils avaient leur commandant et ils étaient censés empêcher

26 toutes les personnes d'entrer dans la prison. Mais ils ne pouvaient pas

27 toujours y arriver. Ils ne pouvaient pas toujours empêcher les gens

28 d'entrer dans la prison. Mais à partir du moment où la prison du district a

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1 été créée, quand les professionnels ont commencé à travailler dedans, ceci

2 ne s'est plus reproduit. Cette possibilité n'existait plus.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous demander quelque chose.

4 Je vais faire une demande. Ne créez pas vos propres questions. Arrêtez de

5 créer vos propres questions et vos propres réponses à ces questions.

6 Essayez de répondre aux questions qui vous sont posées. On vous a demandé

7 si ces choses-là s'étaient produites ou non au début, et vous devez dire

8 "oui" ou "non".

9 LE TÉMOIN : [interprétation] A partir du moment où je suis devenu le

10 directeur de la prison, non, cela ne s'est plus produit.

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais on ne vous a pas demandé quelle

12 était la situation à partir du moment où vous étiez le directeur de la

13 prison; on vous a demandé quelle était la situation au début. On vous a

14 donné lecture du résumé supposé de votre déclaration, de votre déclaration

15 préalable. C'est ce que vous avez dit aux avocats.

16 Vous avez dit aux avocats que vous alliez raconter cela devant les

17 Juges, qu'au début, c'était difficile d'empêcher les gens d'entrer,

18 d'attaquer les prisonniers et de les insulter. Est-ce que vous avez dit

19 cela ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être que oui.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais non, non, non. Cela ne marche

22 pas. Vous devez me répondre par un "oui" ou par un "non". Vous le savez, ce

23 que vous avez dit.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je ne sais pas ce que j'ai dit. Je ne

25 sais pas si j'ai dit vraiment cela.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais si vous ne l'avez pas dit,

27 pourquoi voulez-vous que les avocats le disent ? Pourquoi les avocats

28 seraient allés voir le Procureur pour lui dire : notre témoin va raconter

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1 ceci ou cela, si vous ne leur avez pas dit au préalable ce que vous alliez

2 raconter ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que j'ai été clair. Si vous voulez,

4 je peux répéter. Pendant la Défense territoriale, à l'époque de la Défense

5 territoriale, il est arrivé que des gens entrent --

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, non. Vous ne répondez pas à la

7 question. Je vous ai demandé d'où vos avocats tiennent cette information.

8 D'où leur est-elle venue ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est possible qu'ils aient appris cela, mais

10 je ne sais pas qui leur a dit cela. Je ne sais pas d'où vient

11 l'information.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ils ont dit que c'est la déposition,

13 que c'est votre déposition, que c'était le résumé de votre déposition.

14 C'est ce qu'ils disent.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je leur ai raconté, c'est exactement la

16 même chose que ce que je vous raconte maintenant.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce n'est pas exactement la même chose.

18 Cela ne correspond pas. Est-ce que vous avez dit à vos avocats qu'au début

19 il n'était pas toujours possible d'empêcher que les gens de l'extérieur

20 entrent dans la prison pour insulter et parfois attaquer les prisonniers ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous l'avez fait. Bien. Merci. A

23 nouveau, je vous pose la question suivante : pourquoi vous avez besoin

24 d'autant de temps pour répondre ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est très difficile de répondre par un "oui"

26 ou par un "non". Je voudrais ajouter des informations et vous expliquer

27 comment les choses se sont passées vraiment.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous venez de le faire. Vous avez

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1 dit "oui." C'est très simple. Où est le problème ? Pourquoi c'est aussi

2 difficile que cela ?

3 Vous pouvez continuer, Monsieur Whiting.

4 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Q. Monsieur, dites-nous pourquoi, avant que je ne vous donne lecture

6 de ce résumé, quand je vous ai posé une question très simple, à savoir :

7 "Il est un fait qu'au début, au moins au début, les

8 gardiens n'arrivaient pas à empêcher les gens de l'extérieur d'entrer dans

9 la prison et parfois d'insulter les prisonniers et même de les attaquer;

10 est-ce exact ?"

11 Vous avez répondu :

12 "Non, ce n'est pas vrai."

13 Là, vous nous dites que c'est vrai.

14 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Non, non. C'est une autre question.

15 Parce que là, on a demandé au témoin ce qu'il a dit à ses avocats, alors

16 que là, vous lui demandez ce qui s'est passé sur le terrain.

17 M. WHITING : [interprétation] Je peux éclaircir cela, si vous le voulez.

18 Q. Maintenant, vous nous dites que vous avez bel et bien dit cela à vos

19 avocats, qu'au début, il n'était pas toujours possible d'empêcher les gens

20 d'entrer, d'insulter les prisonniers et parfois de les attaquer. Vous avez

21 dit : Oui, je leur ai dit cela. Vous avez dit cela aux avocats parce que

22 c'était vrai, n'est-ce pas ?

23 R. Monsieur le Procureur, je l'ai dit, mais quand j'ai dit cela, je

24 faisais référence à la période où existait la Défense territoriale.

25 Q. Monsieur, ce que vous avez dit aux avocats, c'était vrai, n'est-ce

26 pas ? Oui ou non ?

27 R. Oui.

28 Q. Bien.

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1 R. C'était vrai. Oui.

2 Q. Très bien. Maintenant, je pose la question suivante. Pourquoi tout à

3 l'heure, quand je vous ai demandé, à la page 56 :

4 "En réalité, Monsieur, tout au moins au début, les gardiens n'étaient pas

5 en mesure d'empêcher les gens de l'extérieur d'entrer dans la prison et

6 parfois même de les insulter ou de les attaquer; est-ce exact ?"

7 Là, j'utilise vraiment texto, je cite texto le résumé de votre déclaration.

8 J'ai utilisé exactement les propos qui figurent dans le résumé de votre

9 déclaration. Vous avez dit :

10 "Non, ce n'est pas vrai."

11 Pourquoi vous avez dit cela ? Pourquoi vous avez dit à l'époque que ce

12 n'était pas vrai et maintenant vous dites que c'est vrai ?

13 R. Vous devez me dire quels étaient ces gardiens, et là je peux vous

14 répondre par oui ou par non.

15 Q. Mais vous n'avez pas répondu comme cela. Vous ne m'avez pas demandé qui

16 étaient les gardiens. Vous avez tout simplement dit : "Non, ce n'est pas

17 vrai." Pourquoi ?

18 R. Parce que j'ai pensé tout d'abord à ces gens qui étaient des

19 professionnels qui ont commencé à faire ce travail en tant que

20 professionnels. A partir du moment où ces gens-là ont commencé à

21 travailler, cela ne se reproduisait plus. Ce n'était pas possible que cela

22 se reproduise. C'est possible que j'aie dit que c'était possible parce que

23 je faisais référence au tout début, quand il y avait encore la Défense

24 territoriale, quand c'étaient des gens qui n'étaient pas expérimentés, qui

25 ne connaissaient pas ce travail-là et qui n'étaient pas en mesure

26 d'empêcher que cela arrive. Je pense que maintenant, j'ai été clair.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les gardiens professionnels, est-ce

28 qu'ils étaient là au début ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Une dizaine ou une quinzaine de jours avant la

2 création de la prison départementale de Knin, ce sont les membres de la

3 Défense territoriale qui assuraient la sécurité des pièces dans lesquelles

4 étaient enfermés les détenus.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je repose ma question. Au début, est-

6 ce que les gardiens professionnels étaient présents ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi alors vous avez pensé aux

9 gardiens professionnels ? Vous parlez du début, et le mot "début" vient de

10 votre résumé même. Pourquoi avez-vous pensé aux gardiens professionnels ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut savoir de quelle période vous parlez.

12 Je vous ai dit que la Défense territoriale était là pendant les 10 ou 15

13 premiers jours. Après, ils avaient été remplacés par les gardiens

14 professionnels. Donc, ce n'est pas la même chose.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous saviez qu'au début les gardiens

16 professionnels n'étaient pas là, et vous saviez qu'on vous avait posé une

17 question au sujet du début. Pourquoi avez-vous pensé aux gardiens

18 professionnels alors que vous faisiez référence au début de l'existence de

19 la prison, alors que vous saviez qu'ils n'étaient pas là ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que j'ai été clair. Je ne comprends

21 toujours pas quel est l'objet de votre question.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je répète la question. Vous saviez que

23 les gardiens professionnels n'étaient pas là au début. Le Procureur vous a

24 posé une question au sujet du début. Pourquoi les gardiens professionnels

25 étaient les premiers qui vous sont venus à l'esprit ? Pourquoi vous avez

26 pensé à eux ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Le Procureur ne m'a pas dit qu'il s'agissait

28 d'une question qui concernait le début. Il m'a juste demandé s'il est vrai

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1 qu'ils venaient. Il n'a pas précisé la période.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur, est-ce que vous voulez qu'on

3 vous donne lecture du compte rendu d'audience pour vous présenter

4 exactement la façon dont la question vous a été posée ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je veux bien.

6 M. WHITING : [interprétation] C'est la page 56.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Regardez la page 56, ligne 18. C'est

8 là que l'on vous a posé la question pour la première fois par le Procureur.

9 Je cite, je lis la question :

10 "En réalité, Monsieur, tout au moins au début," et là je souligne le mot

11 "au début", "les gardiens n'étaient pas en mesure d'empêcher les gens de

12 l'extérieur d'entrer dans la prison et parfois d'insulter ou même

13 d'attaquer les prisonniers; n'est-ce pas vrai ?" Votre réponse, je cite :

14 "Non, ce n'est pas vrai."

15 Le Procureur nous a dit que ce mot "au début" vient du résumé de votre

16 déclaration, et vous nous avez dit que vous avez bel et bien déclaré cela

17 devant vos avocats.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, quand on dit "au

19 début", je me suis dit qu'au début, on faisait référence au début de ma

20 fonction de directeur ou au début de la création de la prison

21 départementale de Knin. Quand vous dites au début, je ne sais pas si vous

22 faites référence à la période qui a précédé ma prise de fonction, 10 ou 15

23 jours avant, quand c'était la Défense territoriale.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne sais pas ce que vous voulez dire

25 par le "début". Vous-même vous n'avez déclaré que ce qui s'était passé au

26 début.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut être plus précis. Je ne peux pas

28 répondre.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est à vous de définir, puisque ce

2 sont vos propos. C'est vous qui avez dit cela. De toute façon, on n'est pas

3 ici pour débattre de définitions. Je vous ai posé une question -- et là je

4 dois retrouver la question. Je vous ai demandé pourquoi vous pensiez qu'il

5 s'agissait des gardiens professionnels alors que vous saviez pertinemment

6 que les gardiens professionnels n'étaient pas là au début. C'était la

7 question que je vous ai posée.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas répondre autrement qu'en vous

9 disant ce qui suit. C'est arrivé pendant l'époque où la Défense

10 territoriale était encore là. Après, cela ne s'est plus reproduit. Je pense

11 que je suis clair. Je ne saurais être plus précis.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La "Défense territoriale", c'est vous

13 qui introduisez ces termes dans ce contexte. Dites-moi à quel moment le

14 Procureur parle de la "Défense territoriale", depuis qu'on vous a posé la

15 question à la page 56, ligne 18.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est vrai que le Procureur n'en a pas parlé,

17 mais c'est moi qui ai été précis. J'ai situé dans le temps --

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi vous dites que le Procureur a

19 mentionné la Défense territoriale ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais non, je n'ai pas dit, justement, qu'il

21 l'a mentionné. Justement, c'est moi qui l'ai mentionné, et les gardiens

22 professionnels. Pendant qu'il y avait la Défense territoriale, cela est

23 arrivé.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous donner lecture de ce que

25 vous venez de dire : "Je ne saurais répondre autrement qu'en disant que

26 cela s'est produit, que des incidents se sont produits pendant la période

27 où la Défense territoriale était là."

28 Comment vous savez qu'il a parlé des incidents qui se seraient produits

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1 pendant la période où la Défense territoriale était là, alors qu'il n'a pas

2 mentionné la Défense territoriale ? Il a tout simplement parlé du "début".

3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai complété -- j'ai été plus complet. J'ai

4 complété sa question et je lui ai dit qu'effectivement, au début, cela

5 s'était produit, mais que ce début correspondait à la période où la Défense

6 territoriale était là.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que je peux consigner au compte

8 rendu d'audience le fait que vous ne souhaitez pas répondre à ma question,

9 c'est-à-dire : pourquoi vous faites un lien entre les gardiens

10 professionnels et le début ? Ou est-ce que ce que vous avez dit tout à

11 l'heure, c'est votre réponse ? Qu'est-ce que je dois -- je dois prendre

12 note de quoi, exactement ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Le début du fonctionnement de la prison

14 départementale correspond au moment où les gens ont été embauchés. Quand

15 j'ai dit au Procureur que cela ne s'était pas produit au début, je l'ai dit

16 parce que comme début, pour moi, c'était le début de l'existence de la

17 prison départementale. C'était cela, "le début".

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

19 Vous pouvez continuer, Monsieur Whiting.

20 M. WHITING : [interprétation] Bien.

21 Q. On va continuer avec cette période où la Défense territoriale était là.

22 Vous, vous étiez là aussi au moment où la Défense territoriale était là ?

23 R. Oui.

24 Q. Mais pourquoi il était si difficile d'assurer la sécurité des portes de

25 la prison et d'empêcher les gens d'entrer et d'insulter ou attaquer les

26 prisonniers ? Pourquoi cela ne pouvait pas être fait ?

27 R. Mais vous savez, je vous ai déjà expliqué que dans la Défense

28 territoriale, il y avait des gens plutôt âgés, dans la cinquantaine, je

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1 dirais, et quand quelqu'un qui jusqu'à la veille était un commerçant ou un

2 médecin, comment voulez-vous qu'il empêche un jeune homme d'entrer quelque

3 part ? Il avait du mal à le faire. C'est pour cela que c'était difficile.

4 Q. Je pense que vous devez faire attention avec votre façon de déterminer

5 la notion de personnes âgées. Mais ces membres de la Défense territoriale

6 étaient armés, n'est-ce pas ? Ils avaient des armes ? Ils avaient des

7 fusils ?

8 R. Oui, mais vous savez, ce n'étaient pas des professionnels et ils

9 n'osaient pas tirer. Ils ne pouvaient pas tirer sur qui que ce soit dans

10 ces conditions.

11 Q. Monsieur, vous me dites que ces hommes, ces jeunes hommes faisant

12 partie de la Défense territoriale n'étaient pas en mesure d'empêcher les

13 gens d'entrer et d'attaquer les prisonniers ? C'est ce que vous dites ?

14 R. Je n'ai pas dit qu'ils étaient vieux. J'ai dit qu'ils étaient un petit

15 peu plus âgés, parce que ceux qui ont travaillé par la suite, ils avaient

16 entre 20 et 30 ans. J'ai dit que c'étaient des personnes qui étaient un

17 petit peu plus âgées. Je suis désolé si j'ai offensé qui que ce soit, mais

18 effectivement, c'est un terme relatif. Mais bon, ils n'étaient pas en

19 mesure d'empêcher l'entrée, enfin, pas toujours; parfois, c'était le cas,

20 mais parfois non.

21 Q. Monsieur, hier vous avez dit que sur les 15 ou 20 hommes qui étaient à

22 Golubic, vous êtes resté. Les autres étaient revenus à Golubic, mais vous,

23 vous êtes resté parce que :

24 "Le nouveau commandant de la Défense territoriale n'était pas très

25 expérimenté et il ne se sentait pas en mesure de contrôler tout cela tout

26 seul. C'est pour cela que je suis resté pour l'aider."

27 Ceci figure à la page 48. Avec tout le respect que je vous dois, vous

28 n'aviez aucune expérience vous non plus à l'époque, n'est-ce pas ?

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1 R. Effectivement, je n'avais pas beaucoup d'expérience, mais j'y étais

2 déjà depuis une dizaine de jours. Je savais un peu plus que lui et j'étais

3 peut-être un peu plus courageux que lui.

4 Q. Est-ce que vous avez dit plus courageux ?

5 R. Oui, un peu plus que ce chef de groupe qui était un peu apeuré.

6 Q. Pouvez-vous nous dire son nom ? Comment s'appelait ce chef du groupe ?

7 R. Je ne suis pas sûr, mais Novkovic ou Novakovic. Je me souviens qu'avant

8 la guerre il travaillait dans la même usine que moi, mais je ne sais pas

9 exactement son nom.

10 Q. Y a-t-il une autre raison pour laquelle vous seriez resté à votre poste

11 dans la prison ? En parlant de ce groupe de Golubic, y aurait-il une autre

12 raison pour laquelle vous avez été désigné pour rester ?

13 R. Aucune autre raison. J'étais censé juste rester et l'assister pour --

14 je ne vois pas quelle autre raison il pourrait y avoir.

15 Q. Ensuite, vous avez dit avoir consulté le ministre de la Justice, en

16 personne de M. Risto Matkovic, en lui disant que vous n'aviez pas la

17 formation nécessaire ni la qualification requise pour le poste de directeur

18 de la prison, et que même vous ne souhaitiez pas ce poste. Ce sont des

19 choses précises. Vous n'aviez ni formation ni qualification et vous ne

20 souhaitiez pas ce poste; est-ce que cela est vrai ?

21 R. Exactement.

22 Q. Pourtant, c'est lui qui vous a nommé directeur de la prison, n'est-ce

23 pas ?

24 R. Oui, j'ai expliqué hier qu'il m'a demandé de rester jusqu'à l'arrivée

25 des gens qui étaient professionnels, jusqu'à ce qu'ils ne soient embauchés,

26 et que vite nous trouverions une solution pour le poste que j'occupais là.

27 Effectivement --

28 Q. Monsieur --

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1 R. [aucune interprétation]

2 Q. Les professionnels sont arrivés en août 1991, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Parmi eux, il y avait beaucoup de candidats au poste de directeur. Il y

5 avait beaucoup de personnes qui pouvaient occuper ce poste, n'est-ce pas ?

6 R. Non. Parmi ceux-là, non. Il n'y avait pas de candidats capables

7 d'assumer cette fonction.

8 Q. Vraiment ?

9 M. WHITING : [interprétation] Allons voir la pièce à conviction 906, s'il

10 vous plaît. La page 1 de B/C/S, et la page 10, version anglaise.

11 Q. Vous souvient-il avoir vu hier ce document ?

12 R. Oui, je m'en souviens.

13 Q. Bien. Sous le numéro 3, le point numéro 3 --

14 M. WHITING : [interprétation] Avons-nous la version anglaise ? Est-ce que

15 les Juges voient la version anglaise ?

16 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

17 M. WHITING : [interprétation] Vous avez la version anglaise ?

18 M. LE JUGE MOLOTO : Oui.

19 M. WHITING : [interprétation] Très bien, merci. Parce que je ne vois pas

20 sur mon moniteur -- je ne vois pas la version anglaise.

21 Q. Sous le point 3, Jovica Novakovic. Il aurait commencé le 17 août 1991,

22 et auparavant, il travaillait dans le tribunal du district de Zagreb. Il

23 avait donc l'expérience qui vous manquait à vous; est-ce vrai ?

24 R. Oui.

25 Q. Monsieur, allons voir maintenant la seconde page en B/C/S, page 11 en

26 version anglaise. Plus concrètement, c'est le point numéro 8. Il y a M.

27 Ilija Gambiroza. Il avait commencé à travailler dans la prison du district

28 de Knin à la même date. Auparavant, il avait travaillé à Sibenik dans la

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1 prison du district; est-ce que cela est vrai ?

2 R. Oui. Il a travaillé comme gardien à Sibenik.

3 Q. Voyons maintenant la page suivante en anglais, et en B/C/S, cela

4 demeure la même page. Sous le numéro 9, Zoran, je crois que cela se

5 prononce "Dzukic" ou "Dukic".

6 R. Dukic.

7 Q. Il a commencé à travailler également le 17 août 1991. Il a été formé

8 pour être gardien à Zadar, où il a travaillé avant de venir à Knin; est-ce

9 que cela est vrai ?

10 R. Oui, c'est vrai.

11 Q. Je ne veux pas lire maintenant la liste exhaustive, à moins que vous ne

12 le vouliez, mais vous me croirez peut-être, nous avons 21 noms sur cette

13 liste. Il s'agit des personnes qui avaient commencé à travailler soit en

14 août, soit en automne, et qui avaient reçu une formation, qui avaient déjà

15 travaillé, qui bénéficiaient d'une certaine expérience, du travail dans une

16 prison. Quinze sur 21 personnes ont été embauchées au mois d'août 1991.

17 Toutes ces personnes avaient des qualifications supérieures aux vôtres.

18 Ils étaient mieux qualifiés que vous pour être directeur; est-ce que

19 cela est vrai ?

20 R. Je ne le dirais pas. Ils avaient une ancienneté comme gardiens. Mais le

21 premier que vous avez cité, nous l'avons désigné pour être chef des

22 gardiens.

23 Q. Vous, vous n'aviez aucune expérience. Vous n'avez jamais travaillé dans

24 une prison. Vous n'avez jamais eu une formation. Vous n'avez jamais été

25 policier. Vous avez eu juste cette formation à Golubic. Pourquoi auriez-

26 vous été plus qualifié que les autres ?

27 R. Je n'étais pas plus qualifié, mais je ne l'étais pas moins. Je vous

28 disais que le directeur ne devait pas être un professionnel.

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1 Q. Monsieur, vous nous avez dit hier que vous aviez dit à M. Matkovic que

2 vous n'étiez pas qualifié, que vous n'aviez pas eu la formation et que vous

3 ne souhaitiez pas ce travail. Pourquoi il n'a pas confié alors ce travail à

4 quiconque de ces 21 personnes qui avaient une qualification, contrairement

5 à vous ? Ils avaient plus de qualifications, vous ne pouvez pas le nier.

6 R. J'ignore pourquoi il n'a pas confié ces tâches à quelqu'un d'autre.

7 C'est à lui de répondre. Mais je vous dis que personne de ces personnes

8 citées n'avait pas la qualification requise pour le directeur, et nous

9 avons laissé cette solution pour plus tard, effectivement. En février

10 suivant, nous avons trouvé une solution.

11 Q. A vous écouter, 15 ou 16 mois, jusqu'en octobre 1992, une solution n'a

12 pas été trouvée ?

13 R. Ce n'est pas vrai.

14 Q. Mais Monsieur, en conformité avec ce que vous avez dit hier, peut-être

15 en mars ou avril, M. Nikola Kukavica a été nommé directeur, mais très

16 brièvement. Il n'a passé que quelque temps. Ensuite, vous avez assumé cette

17 fonction jusqu'en octobre 1992 lorsque M. Nikola Ljubojevic a été nommé.

18 Vous avez assumé cette fonction jusqu'en octobre 1992 ?

19 R. Oui, mais en réfléchissant hier, je crois que ce n'était pas à cette

20 deuxième reprise. Nikola Kukavica a été directeur de prison à Lepoglava,

21 quand il a été chassé de la Croatie. Lui, il a été vu pour une solution

22 finale, parce qu'il avait toutes les conditions requises pour la fonction.

23 Après un certain temps, je ne me souviens plus, quelques mois, il est

24 parti chez sa fille en Serbie pour vivre. Mais alors, j'avais déjà une

25 certaine expérience, et le ministre m'a demandé de reprendre ces fonctions

26 jusqu'à ce qu'une autre solution ne soit trouvée.

27 Je m'excuse. Peut-être que le ministre a jugé que la prison

28 fonctionnait bien, et moi aussi je pense qu'elle a très bien fonctionné, et

Page 8826

1 c'est peut-être la raison pour laquelle il m'a préféré à ce poste. Je ne

2 vois aucune autre raison possible.

3 Q. Monsieur, n'est-il pas vrai que vous avez été désigné à cette fonction

4 pour diriger cette prison, contrairement à ces 21 personnes qui, elles,

5 bénéficiaient d'une expérience pénitentiaire, précisément parce que vous

6 étiez lié à Milan Martic, vous avez dit hier que vous le connaissiez très

7 bien - cela figure sur la page 27 du transcript - et parce que vous avez

8 été dans ce campement de formation à Golubic ? Est-ce que cela est la

9 raison de votre nomination ?

10 R. Ce n'est certainement pas la raison.

11 Q. Comment pouvez-vous savoir que cela n'est pas une raison ? Quand je

12 vous ai demandé la raison, vous m'avez répondu que vous ne le saviez pas et

13 que je devais demander à M. Matkovic. Alors comment vous pouvez savoir que

14 cela n'est certainement pas la raison ?

15 R. Parce que je vous ai dit hier que M. Matkovic m'a invité pour discuter,

16 et je lui ai dit tout de suite que je ne voulais pas être directeur. Il a

17 tout de suite accepté. Il ne m'a pas forcé. Il m'a demandé d'accepter ces

18 fonctions jusqu'à ce qu'on ne trouve une bonne solution, quelqu'un qui

19 avait déjà l'expérience de directeur de prison, que j'assume cette fonction

20 jusqu'à ce que cette solution ne soit trouvée.

21 Q. Il voulait que vous restiez à ces fonctions parce que vous étiez un des

22 hommes de Martic ?

23 R. Il n'insistait pas quand je lui ai proposé d'en trouver un autre. S'il

24 en avait trouvé un autre le lendemain, il l'aurait gardé. Mais voilà, il a

25 fallu du temps pour qu'il trouve Kukavica Nikola.

26 Q. Tout cela parce que vous étiez en charge de cette prison ? C'est la

27 raison pour laquelle la police de la SAO Krajina avait la possibilité

28 d'entrer dans la prison, de tabasser les détenus, et c'était précisément

Page 8827

1 parce que vous avez été à ces fonctions de directeur.

2 R. Monsieur le Procureur, je vous le répète, personne ne pouvait entrer

3 dans la prison de Knin. Qu'est-ce que cela voulait dire ? Je ne connaissais

4 pas ces gens de la police. Il y avait des professionnels qui eux aussi

5 avaient été chassés de la police croate. Qui je pouvais connaître ? Comment

6 pouvaient-ils savoir que j'étais moi, et venir ? C'est une offense, pour

7 moi. Pour moi, c'est une insulte.

8 Q. Monsieur, allons maintenant voir la page 12 de ce même document,

9 version anglaise, et la version en B/C/S, c'est la page suivante.

10 M. WHITING : [interprétation] Veuillez, s'il vous plaît, agrandir la partie

11 supérieure de la page.

12 Q. On y voit votre nom. Vous en parliez déjà hier. Là, on peut lire

13 quelque chose que l'on n'a pas évoqué hier, à savoir que vous aviez au

14 total huit ans d'ancienneté. Est-ce que vous voyez cette information ?

15 R. Oui.

16 Q. Pour être très précis, voyons la date de ce document. C'est le 19 mai

17 1993. A ce moment-là, à la date du 19 mai 1993, vous aviez au total deux

18 années, deux ans d'ancienneté, et non huit.

19 R. Monsieur le Président, les années d'ancienneté, c'était l'ancienneté

20 pour calculer le salaire, mais chez nous, on compte aussi les années

21 passées dans d'autres sociétés. Avant cela, j'avais travaillé déjà dans

22 l'usine Tvik, et là on additionne les anciennetés. Par exemple, si vous

23 partez dans un autre tribunal, on calculera dans votre ancienneté celle qui

24 relève de ce Tribunal aussi.

25 Q. Ici, on lit "huit ans d'ancienneté," mais cela veut dire le nombre

26 total d'années de travail depuis votre première embauche ?

27 R. Oui. J'ai trouvé mon premier travail en 1985. Probablement, le document

28 provient de l'année 1993.

Page 8828

1 Q. Vous avez dit dans votre déposition, j'aborde maintenant un autre

2 sujet, que vous n'étiez pas content de Jovica Novakovic parce qu'il n'avait

3 rien empêché du mauvais traitement des détenus par deux gardiens. Qui

4 étaient ces deux gardiens ?

5 R. Ce sont des incidents de 1991. Je ne peux pas vous le dire comme cela.

6 Je n'ai pas les archives devant moi et je ne peux pas vous dire de quels

7 gardiens il s'agit. Ce que je sais, c'est qu'une procédure disciplinaire a

8 été engagée contre eux. Plus tard aussi, des procédures ont été engagées,

9 donc je ne retiens pas tout cela dans ma tête. Tout cela a figuré sur les

10 papiers, mais ces papiers comme nos maisons sont restés là-bas et ont été

11 incendiés.

12 Q. Monsieur, la dernière partie de votre réponse n'a été aucunement la

13 réponse à ma question.

14 Poursuivons. Vous avez dit à M. Matkovic que vous souhaitiez que M.

15 Novakovic soit muté parce que vous aviez découvert cet incident. C'est ce

16 dont vous avez informé M. Matkovic.

17 R. Il relevait de mon devoir d'en référer au ministre.

18 Q. Je ne vous ai pas demandé cela. Je vous ai demandé ce que vous avez

19 fait, et non pas ce que vous deviez faire. Est-ce que vous l'avez fait ?

20 Est-ce que vous en avez informé le ministre ?

21 R. Oui.

22 Q. Vous êtes allé voir M. Tauz et vous lui avez demandé de remplacer M.

23 Novakovic, et vous l'avez dit à M. Matkovic ?

24 R. Avant, d'abord j'ai dit à M. Matkovic qu'il y avait quelqu'un qui avait

25 travaillé à Zadar, qu'il était un grand professionnel, qu'il avait de

26 l'autorité auprès des gens parce que certaines gens avaient travaillé avec

27 lui à Zadar. Je ne connaissais pas cet homme. Il habitait à Zadar, et moi à

28 Knin. Tout de suite après cet incident, j'ai proposé à M. Matkovic de

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1 l'engager au poste de chef des gardiens.

2 Q. M. Matkovic connaissait la raison pour laquelle vous vouliez que M.

3 Tauz soit embauché, parce que vous vouliez vous débarrasser de M. Novakovic

4 pour des raisons que vous avez citées, parce qu'il ne faisait pas respecter

5 le règlement ? M. Matkovic le savait ?

6 R. Exactement.

7 Q. Lorsque M. Tauz est venu, il a insisté, n'est-ce pas, pour que soient

8 documentées les raisons pour lesquelles les détenus ont été mis en

9 détention ? Il a insisté là-dessus, n'est-ce pas ?

10 R. Non. Je me souviens d'un autre détail semblable à celui-ci, mais ce

11 n'est pas exactement cela. Si vous voulez, je peux poursuivre.

12 Q. Si vous me dites que vous ne vous en souvenez pas, je n'insisterai pas.

13 R. Je ne sais pas ce qu'il y a 15 ans, il a pu dire au ministre, quelles

14 étaient ces conditions, mais il a parlé au ministre, en tout cas.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez dit insisté, est-ce que vous

16 voulez dire par là qu'il s'agissait des conditions qu'il avait précisées

17 avant d'endosser cette tâche ? Ou après avoir endossé ces fonctions, il a

18 insisté ?

19 M. WHITING : [interprétation] Bon. Il a insisté sur ces conditions avant

20 d'avoir accepté ces fonctions. Il a insisté pour qu'il y ait une

21 documentation complète sur les détenus pour que lui, il puisse s'engager

22 dans ces fonctions.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

24 M. WHITING : [interprétation]

25 Q. Il y avait des civils détenus dans cette prison comme des prisonniers

26 de guerre, n'est-ce pas ?

27 R. Monsieur le Procureur, cela ne m'intéressait pas, qui est civil et qui

28 est autre chose. Ce qui m'intéressait, c'était le papier, donc la décision

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1 du tribunal compétent. Qu'il fût civil ou militaire, cela ne nous

2 intéressait pas. Nous, nous détenions les gens sur la base des jugements.

3 Q. Je voudrais maintenant nous concentrer sur ce que vous avez dit,

4 comment il y avait des catégories différentes de détenus. Une de ces

5 catégories, c'étaient des prisonniers de guerre. Vous savez, en ce qui

6 concerne l'automne 1991, que parmi ces prisonniers de guerre, il y avait

7 des civils, n'est-ce pas ?

8 R. Non, je ne le sais pas. Cela ne m'intéressait pas.

9 Q. Cela ne vous intéressait pas.

10 R. Si un tribunal compétent m'envoie quelqu'un avec un jugement en force,

11 c'est cela qui m'importait, pour que je puisse prendre en charge ces

12 personnes.

13 M. WHITING : [interprétation] Voyons maintenant la pièce à conviction 909,

14 s'il vous plaît.

15 Je crains que ce ne soit pas cela. Je m'excuse, j'ai donné la

16 mauvaise cote. J'ai voulu dire la cote "919", et non "909".

17 Q. Monsieur, nous avons ici la liste des détenus. Je voudrais que vous

18 jetiez un coup d'œil sur le numéro 204, Mijo Bacic. Vous voyez sa date de

19 naissance, le 28 janvier 1920. Il était âgé de 71 ans quand il a été

20 arrêté, un monsieur de 71 ans. Vous étiez directeur de la prison.

21 R. Je ne dis pas qu'il n'était pas -- je ne me souviens pas de cet homme-

22 là. Je ne suis pas obligé de m'en souvenir, c'était un parmi les autres.

23 Q. Monsieur, vous ne vous souvenez pas de cet homme âgé de 71 ans ?

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, mon document en anglais

25 vient de disparaître, et je viens d'avoir à l'écran la version en B/C/S.

26 M. WHITING : [interprétation] Oui. Peut-on replacer la version en anglais à

27 l'écran ?

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

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1 M. WHITING : [interprétation]

2 Q. Monsieur, peut-être que vous ne vous souvenez pas de cet homme d'après

3 son nom, mais est-ce que vous vous souvenez d'un homme de son âge, de 70

4 ans, qui était détenu de votre prison et avait été amené en octobre ou

5 novembre 1991 ? Est-ce que vous vous en souvenez ?

6 R. Je ne m'en souviens pas concrètement, mais je ne dis pas qu'il n'était

7 pas amené. C'est possible. S'il est sur la liste, certainement, il y était.

8 Q. Est-ce que ceci n'est pas quelque chose qui vous frapperait, que vous

9 auriez remarqué, un homme de 70 ans qui serait amené, détenu en tant que

10 prisonnier de guerre ? Est-ce que ce n'est pas quelque chose que vous

11 auriez remarqué ?

12 R. Je vous l'ai dit, il aurait pu être agé de 20 ans ou de son âge. Si le

13 tribunal municipal ou du district avait adopté une décision afin de

14 l'incarcérer, pour moi, peu m'importait, qu'il fût âgé de 70 ans. Peut-être

15 que vous avez des personnes emprisonnées à La Haye qui sont âgées de 70 ou

16 même de 80 ans.

17 Q. Est-ce que vous nous dites que si quelqu'un en position d'autorité

18 faisait quelque chose, vous y prêtiez la sourde oreille et vous ne formiez

19 pas votre propre jugement au sujet de cela ? C'est bien cela que vous nous

20 dites ? A partir du moment où ils avaient des documents appropriés ou si

21 c'était l'autorité appropriée, vous ne vous mêliez pas de cela, n'est-ce

22 pas ?

23 R. Si c'était par exemple une cour de district qui avait rendu la

24 décision, un verdict, qu'est-ce que j'étais censé dire ?

25 Q. Nous en parlerons, mais vous n'êtes pas en train de répondre à ma

26 question. Je vais vous donner un exemple. Si quelqu'un avait des documents

27 appropriés ou l'autorité appropriée lui permettant de faire quelque chose,

28 vous décidiez que ceci ne vous regardait pas, de vous immiscer, de vous

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1 mêler de cela; est-ce exact ?

2 R. Oui.

3 M. WHITING : [interprétation] Je souhaite que l'on examine maintenant un

4 document. Il y en aura plusieurs, mais là, il s'agit de la page 6 en

5 anglais, la page 3 en B/C/S du document que nous avons devant nous. Il

6 s'agit du numéro 236 sur la liste.

7 Q. Est-ce que vous y voyez le numéro 236, Bozo Plazanic, né en 1905, âgé

8 de 86 ans, si je ne me trompe pas dans mes calculs ? Est-ce que vous vous

9 en souvenez ?

10 R. Monsieur le Procureur, je ne me souviens pas avec exactitude du visage

11 de cet homme, mais je me souviens de la période à laquelle il y avait eu

12 plusieurs personnes âgées. Je sais qu'ils ont été libérés. C'est ce qui est

13 marqué ici. Ils ont été immédiatement "relâchés".

14 Q. Oui, c'est vrai. Ils ont été libérés au bout de six jours. Ils ont été

15 arrêtés le 13 novembre 1991 et ils ont été détenus pendant six jours avant

16 leur libération. Est-ce que vous vous souvenez de cet homme ? Est-ce que

17 vous vous souvenez de ce groupe d'hommes et d'autres hommes âgés qui

18 étaient détenus ?

19 R. C'est possible. Je ne doute pas. Il était peut-être libéré, mais la

20 décision n'avait pas encore été rendue.

21 Je ne sais pas pourquoi il a été libéré, peut-être que c'était lié

22 aux circonstances de sécurité dans la région dans laquelle il vivait. Je ne

23 sais pas. Ou peut-être qu'il a aidé quelqu'un à faire quelque chose. Je ne

24 sais pas. Il faudrait voir la décision pour voir pour quelle raison cette

25 personne avait été détenue. Je vois qu'il a été libéré assez rapidement.

26 Q. Est-ce que vous pensiez que cet homme âgé de 86 ans était un vrai

27 prisonnier de guerre, un combattant ? Est-ce que vous le pensiez à

28 l'époque, compte tenu de ce que vous nous avez dit au sujet de la Défense

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1 territoriale et des hommes qui étaient âgés de 50 ans et de leurs

2 capacités ?

3 R. Monsieur, ce que je pensais ou ce que je ne pensais pas, ceci

4 n'importait pas à qui que ce soit. Pour moi, ce qui était important,

5 c'était la décision rendue par l'institution pertinente et compétente.

6 Q. Pour moi, c'est important, Monsieur, c'est pour cette raison que je

7 vous pose la question. Est-ce que vous pouvez répondre à la question ? Est-

8 ce que vous avez pensé que cet homme âgé de 86 ans était un combattant ?

9 R. Je n'y ai pas pensé et je ne pourrais pas vous répondre à cela. Je n'ai

10 pas réfléchi à cela.

11 Q. Vous n'avez pas réfléchi à cela ?

12 R. J'avais un million d'autres obligations auxquelles je devais réfléchir.

13 Je ne pouvais pas penser à cela.

14 Q. Monsieur, vous étiez directeur de la prison ?

15 R. Oui.

16 Q. Nous allons passer à autre chose. Vous avez dit au cours de votre

17 déposition, s'agissant de la discipline, vous avez dit que les options sur

18 le plan de la discipline dont vous disposiez étaient la réprimande,

19 l'amende, la suspension et le licenciement, et que vous en tant que

20 directeur, vous aviez le dernier mot. Est-ce que vous vous souvenez de

21 cette partie de votre déposition ?

22 R. Je m'en souviens, et c'est effectivement ce que j'avais dit.

23 Q. Par conséquent, vous avez décidé que même si Jovica -- excusez-moi. Je

24 ne suis plus sûr si c'était Jovica ou Jovan. Mais Novakovic, M. Novakovic,

25 même si lui, il avait omis de vous informer au sujet de cet abus des

26 prisonniers et même s'il n'avait rien fait à ce sujet, vous aviez décidé

27 qu'il pouvait rester en prison, continuer à y être employé et qu'il pouvait

28 même jouer un rôle de surveillant, n'est-ce pas ? C'était votre décision.

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1 R. Monsieur le Procureur, déjà hier, je vous ai dit que le directeur

2 et le chef étaient nommés par le ministre. C'était le ministre qui pouvait

3 les relever de leurs fonctions. Le directeur ne pouvait pas relever le chef

4 de ses fonctions, mais il pouvait se plaindre au sujet de son travail

5 auprès du ministre.

6 Q. Mais, Monsieur --

7 R. Je pouvais imposer des mesures de discipline aussi sur tous les

8 employés, sauf le chef, qui était responsable devant le ministre lui-même.

9 Q. Monsieur, hier, vous nous avez dit qu'il avait été suspendu. Il y a eu

10 une procédure disciplinaire à son encontre. Ma question est de savoir

11 pourquoi n'a-t-il pas été licencié ? Pourquoi lui a-t-on permis de

12 continuer à travailler dans cette prison ? Pourquoi est-ce qu'on ne l'a pas

13 licencié ?

14 R. Il a été suspendu, et c'était le ministre qui l'avait suspendu. Quant à

15 la raison pour laquelle il l'avait réinstauré, je peux faire seulement des

16 suppositions. Il était celui qui avait le grade le plus élevé. Il était le

17 seul, donc je suppose que c'est pour cela qu'il est resté.

18 Q. Bien, nous allons parler --

19 R. Nous avions cinq à six chefs --

20 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] De quel grade parlez-vous, s'il vous

21 plaît ?

22 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Il était sergent.

24 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Veuillez poursuivre.

25 M. WHITING : [interprétation]

26 Q. Nous allons parler de ce grade. Hier, vous avez dit qu'il ne pouvait

27 pas être dégradé, compte tenu de son grade, et que le grade était quelque

28 chose qu'on obtenait à l'école. Est-ce que vous vous souvenez de cette

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1 partie de cette déposition ?

2 R. Oui, c'est exact.

3 Q. Très bien. Peut-on nous pencher maintenant sur la pièce à conviction

4 906, s'il vous plaît ? Nous devons examiner la page 10 de la version en

5 anglais et la page 1 de la version en B/C/S.

6 Je souhaite que l'on se penche en particulier sur le numéro 3, Jovica

7 Novakovic, l'homme dont vous avez parlé tout à l'heure. Voyons quel était

8 son parcours. Il a terminé l'école primaire à Vrhovine, puis il était dans

9 une école de traitement de bois, et ensuite il a poursuivi ses études à

10 Zagreb pendant deux ans encore. Il était ingénieur dans l'industrie du

11 traitement de bois, puis finalement, il a terminé trois ans de faculté de

12 communications.

13 Comment a-t-il pu obtenir le grade de sergent sur la base de cela ?

14 R. C'était à Zagreb, comme vous pouvez le voir. Donc je ne sais pas

15 comment il avait obtenu ce grade à Zagreb. C'était un homme ayant une

16 éducation universitaire, et je suppose qu'il avait passé des examens

17 spéciaux afin d'obtenir le titre de surveillant. Mais je ne sais pas

18 vraiment ce qu'il aurait pu faire d'autre comme études. Il nous a juste

19 apporté ces dossiers montrant qui il était.

20 Q. En réalité, je souhaite trouver mon lot de documents. Un instant, s'il

21 vous plaît, seulement.

22 Je dois voir deux documents différents à la fois, donc je vais

23 retirer la pièce 905 pour le moment, garder ce document à l'écran et

24 ensuite faire distribuer l'imprimé de la pièce 905, avec l'aide de

25 l'huissier.

26 M. WHITING : [interprétation] Peut-on fournir un texte aux interprètes ?

27 Cela dit, il n'y a pas de texte, il ne s'agit que des noms. Normalement,

28 cela ne posera pas de problème.

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1 Q. Il s'agit là d'un document que nous avons examiné -- excusez-moi, je

2 pense que vous l'avez en anglais, mais il s'agit simplement des noms. Je ne

3 sais pas si le conseil de la Défense a un exemplaire en B/C/S à fournir au

4 témoin. Il s'agit de la pièce 905. Je pense que j'ai omis d'imprimer la

5 version en B/C/S, mais il s'agit simplement des noms, de toute façon.

6 C'est le document que nous avons vu hier, lorsque vous avez commencé

7 à parler des grades. Vous avez expliqué pourquoi M. Novakovic était

8 toujours sur la liste en tant que surveillant de garde et vous avez dit que

9 "c'était son grade --" excusez-moi.

10 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Excusez-moi. Malheureusement, je n'ai

11 pas ce document sur moi, mais c'est le document que nous avons vu hier, je

12 peux le confirmer. Excusez-moi de cette interruption.

13 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi, et encore une fois, je m'excuse

14 de ne pas l'avoir, mais si le témoin a besoin de voir la version en B/C/S,

15 nous pouvons placer cela à l'écran.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting.

17 M. WHITING : [interprétation]

18 Q. En fait, ici, il n'est pas question des grades, mais des positions au

19 sein d'une prison. Le surveillant de gardes, ce n'est pas un grade, mais

20 une position, un poste.

21 R. Le surveillant des gardes, c'est un grade.

22 Q. Je croyais que vous aviez dit que son grade était celui de sergent.

23 C'est ce que vous avez dit il y a quelques minutes.

24 R. Oui, oui. Pardon. Je voulais dire surveillant.

25 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Excusez-moi, mais c'était la réponse.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être est-ce moi qui ai fait une erreur,

27 un lapsus.

28 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] J'avais demandé quel était son grade,

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1 et vous aviez répondu que c'était celui de "sergent". Essayez d'éviter de

2 nous induire en erreur.

3 M. WHITING :

4 Q. Monsieur, je --

5 R. Excusez-moi, mais il n'y a pas de sergents dans une prison, seulement

6 des surveillants de gardes. Excusez-moi, peut-être que j'ai fait une

7 erreur. Excusez-moi.

8 Q. Monsieur, est-ce que vous êtes en train d'inventer cela au fur et à

9 mesure ? Lorsque l'on vous montre un document, vous proposez une réponse ?

10 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Monsieur, pourquoi est-ce que vous

11 êtes en train de rire, de sourire comme cela ? Est-ce que vous voulez dire

12 quelque chose par là ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge.

14 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Essayez d'être sérieux.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je pense que c'est moi qui

16 ai provoqué les sourires. J'ai fait un lapsus. J'ai dit "sergent" au lieu

17 du "surveillant de gardes".

18 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] C'est vous qui aviez un sourire, et

19 je faisais référence à cela, et non pas aux autres.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je souris quand je suis en colère contre moi,

21 même lorsque j'ai fait une erreur. Ce n'est pas une erreur de la part de

22 qui que ce soit d'autre que moi.

23 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Très bien. Merci.

24 M. WHITING : [interprétation]

25 Q. Monsieur, en fait, si vous examinez la pièce à conviction 905, à savoir

26 la liste que vous avez devant vous, d'après la pièce 906 que nous avons à

27 l'écran, presque tous les hommes énumérés comme gardes avaient plus de

28 diplômes et de connaissances en matière de prisons, de même que de

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1 l'expérience, que M. Novakovic, alors qu'eux, ils étaient des gardes, et

2 lui il était le surveillant de gardes. Est-ce que vous pouvez nous

3 expliquer cela ?

4 R. Oui, je peux, Monsieur le Procureur. A l'époque, d'après la loi, le

5 surveillant de gardes pouvait être seulement une personne ayant un diplôme

6 universitaire, à savoir le diplôme qui vient après le lycée, des études

7 d'au moins deux ans après les études secondaires. Si vous vous penchez sur

8 le cas des autres gardes, aucun d'eux ne remplissait ces critères. Ils

9 avaient simplement terminé leurs études secondaires.

10 Q. Vous avez répondu à cette partie de la réponse, mais est-ce que vous

11 pouvez maintenant prendre l'exemple d'Ilija Tauz ? Vous avez son nom à

12 l'écran, c'est le numéro 2. Voyons son éducation. Il a terminé l'école

13 primaire à Kistanje et l'école secondaire d'administration à Zadar. Or,

14 vous dites qu'il n'y a pas eu d'études après les études secondaires,

15 l'école secondaire.

16 D'après ce que vous nous dites, "seulement une personnes ayant un degré

17 universitaire plutôt élevé, donc au moins deux ans d'études après l'école

18 secondaire, pouvait être le surveillant de gardes." Apparemment, ce n'est

19 pas vrai.

20 R. Je vais vous expliquer. Les numéros 1 et 2, M. Tauz et --L'INTERPRÈTE :

21 Un autre dont l'interprète n'a pas saisi le nom. LE TÉMOIN :

22 [interprétation] -- ces personnes avaient travaillé dans les prisons de la

23 Croatie. D'après la pratique, au bout de quelques années, lorsque ces gens-

24 là étaient à quelques années de leur retraite et si c'étaient de bons

25 professionnels, il était possible que ces personnes ayant seulement fini

26 leur école secondaire soient promues par le ministre au grade de

27 surveillants. Cette possibilité existait, et c'était la pratique dans de

28 nombreuses parties de l'ex-Yougoslavie. Mais une jeune personne ne pouvait

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1 pas obtenir ce grade sans être qualifiée de manière appropriée.

2 Ces deux personnes que vous avez mentionnées avaient déjà pris leur

3 retraite, ayant ce grade-là, et nous avions besoin de ce genre de

4 personnes, donc nous ne posions pas de problèmes.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, mais quel était l'âge de

6 ces personnes ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'étaient des personnes

8 qui avaient pu prendre leur retraite anticipée. C'était souvent le cas des

9 policiers et des militaires. Ils pouvaient prendre leur retraite et ils

10 avaient le droit de prendre leur retraite anticipée bien plus tôt que

11 d'autres personnes. Parfois, il s'agissait d'une différence de trois mois,

12 de quatre mois par an, en fonction de l'institution pour laquelle ils

13 travaillaient. Ils prenaient leur retraite d'habitude à l'âge de 45 à 50

14 ans.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] De quelles personnes parlez-vous

16 lorsque vous dites qu'ils avaient pris leur retraite ? Quelles personnes

17 sur cette liste ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Les personnes dont les noms figurent aux

19 numéros 1 et 2, donc Tauz et Orlovic. Il y a Tauz et Jovo Orlovic.

20 M. WHITING : [interprétation]

21 Q. Le numéro 1 n'est pas -- excusez-moi de vous interrompre.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ceci m'étonne encore. D'après ma

23 liste, le numéro 1 n'est pas Jovo Orlovic. Ilija Tauz si, mais le numéro 1,

24 d'après ma liste, est Nikola Ljubojevic.

25 M. WHITING : [interprétation] Je pense qu'il fait référence à la pièce 905

26 que nous avons en version imprimée.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi. Merci.

28 M. WHITING : [interprétation] Oui.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

2 M. WHITING : [interprétation] Dans le document 906, pour la Chambre,

3 j'indique que Jovo Orlovic est le numéro 5.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites que ces personnes avaient

5 pris leur retraite en quelle année ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils avaient pris leur retraite, je ne sais

7 pas, peut-être en 1990. C'était une retraite anticipée, je pense. Il y en a

8 qui avaient pris leur retraite. Il y en a qui étaient expulsés,

9 pratiquement, ceux qui remplissaient les critères de prendre leur retraite.

10 C'était en Croatie, à Zadar et ailleurs. Je ne sais pas, je n'y étais pas.

11 Mais de toute façon, c'étaient les personnes qui avaient les titres qui

12 sont indiqués dans ce document.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous réalisez qu'en 1990, Orlovic

14 était âgé seulement de 41 ans. Il n'avait même pas 45 ans encore, et Tauz

15 était encore plus jeune que cela, il avait 39 ans.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais les Croates les ont poussés à

17 partir. Si la situation avait été normale, ils n'auraient pas pu prendre

18 leur retraite encore.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ils ne se sont pas retirés à cause de

20 ce traitement préférentiel et à cause de cette accumulation des années en

21 exerçant leurs fonctions au sein de la police, ils se sont retirés car ils

22 y ont été poussés. Mais quelle est la bonne version, maintenant ? Vous

23 venez de nous dire qu'il y avait un schéma de la retraite au sein de la

24 police qui est différent par rapport aux usines, que vous pouviez accumuler

25 des jours et des mois en raison de trois mois par an. Maintenant vous dites

26 : "Non, non, ils ont été expulsés, pratiquement." Laquelle des deux

27 versions est la bonne ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce qu'ils me disaient, ils auraient dû

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1 travailler pendant encore quelques années jusqu'à la retraite. Mais

2 puisqu'ils étaient des Serbes, simplement ils devaient quitter leurs

3 positions dans les prisons croates. Donc, ils ont été obligés de prendre

4 leur retraite anticipée, alors que d'autres étaient simplement expulsés.

5 C'était le cas d'un grand nombre de gardes de prisons, par exemple. Ils ont

6 été simplement expulsés de leur travail des prisons dans des villes croates

7 de Zagreb, Sibenik, Zadar et ailleurs.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répondre à ma

9 question ? Merci de ce long discours, mais veuillez répondre à ma question,

10 maintenant.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient des personnes retraitées, mais

12 nous les avions engagés, car nous n'avions pas suffisamment de personnel

13 pour nous aider. Là, je parle concrètement de ces deux personnes. Ils

14 étaient déjà retraités et ils recevaient leur retraite, et nous leur avions

15 demandé de venir nous aider, car nous n'avions pas de personnes capables de

16 faire leur travail. Ils ont accepté, ils sont venus et ils ont travaillé

17 pour nous.

18 Est-ce que c'était cela, votre question, Monsieur le Président ?

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Encore une fois, je vous demande de

20 répondre à ma question.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, est-ce que vous pouvez répéter

22 votre question ? Je croyais que c'était cela, votre question.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous auriez l'amabilité

24 d'écouter mes questions lorsque je les pose ? Voici ma question. Vous nous

25 avez dit qu'il y avait des schémas de retraite préférentiels au sein de la

26 police différents par rapport aux usines et que les gens pouvaient prendre

27 une retraite anticipée. Maintenant, vous nous dites qu'ils ont pris une

28 retraite anticipée simplement car ils étaient expulsés de la police croate.

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1 Maintenant, je vous demande laquelle des deux versions est la bonne, est

2 exacte. C'est cela, ma question. Vous nous avez fourni et proposé deux

3 versions. Je vous demande laquelle des deux est la bonne.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] La première version, c'était la règle, c'était

5 la loi, c'est ce qu'on faisait. La deuxième version, cela porte seulement

6 sur ces deux hommes-là.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répondre à ma

8 question ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je viens de répondre.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, vous ne l'avez pas fait. Laquelle

11 des deux versions est la bonne ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Les deux versions sont exactes. A l'âge de 39

13 ans, ces deux personnes ne pouvaient pas --

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cela, c'est autre chose. C'est déjà

15 mieux.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis en train de vous le dire tout le

17 temps. Formellement, ils ne pouvaient pas partir à la retraite. Il leur

18 manquait encore trois ou quatre années d'ancienneté. Dans une usine, ils

19 auraient dû travailler jusqu'à l'âge de 60 ans.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Nous avons un peu

21 dépassé le temps prévu. Est-ce le moment approprié ?

22 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bon, nous allons terminer pour

24 aujourd'hui et nous poursuivrons demain à 14 heures 15.

25 Levez-vous, s'il vous plaît.

26 --- L'audience est levée à 13 heures 50 et reprendra le vendredi 22

27 septembre 2006, à 14 heures 15.

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