Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le vendredi l2 janvier 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour. On s'excuse d'avoir été en

6 retard ce matin; cela ne dépendait pas de Me Milovancevic.

7 Je vous prie de continuer et d'en finir avec la présentation de vos

8 arguments.

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame et

10 Monsieur les Juges, et bonjour à tout le monde.

11 Pour comprendre l'essence de l'accusation, la nature et le caractère des

12 infractions alléguées et la nature du conflit et la situation qui prévalait

13 réellement sur le terrain au début de cette journée, il faut donner une

14 explication. Il faut donner une opinion de la Défense par rapport au

15 caractère constitutif des peuples et par rapport aux questions qui ont été

16 abordées par rapport à cela. Qu'est-ce que cela veut dire, ce terme,

17 caractère constitutif des peuples ? Pour la Défense, il y a un fait qui est

18 incontestable, à savoir que les données statistiques de 1991 disaient qu'en

19 Croatie, il y avait 561 000 Serbes en Croatie, qui avait à l'époque à peu

20 près quatre millions et demi d'habitants.

21 A plusieurs reprises, on a posé la question concernant le statut de cette

22 population. Les témoins ont confirmé - et je pense que mes collègues de

23 l'Accusation seront d'accord sur ce fait - que jusqu'en 1990, la République

24 de Croatie, selon la constitution, a été définie en tant qu'un Etat dans

25 lequel vivait le peuple serbe et croate. Egalement, il ne devrait pas être

26 contestable que les nouvelles autorités croates avec le HDZ après les

27 élections multipartites en 1991, déjà à l'année 1990, on annonçait les

28 modifications de la constitution, et vers la fin de cette année les

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1 modifications ont été faites et le statut a été changé, le statut de la

2 population serbe en Croatie de cette façon-là, à savoir que cette

3 population maintenant a eu le statut de minorité, et pas d'un peuple.

4 Il faut expliquer deux points. Comment est-il possible que 561 000

5 habitants dans une entité fédérale qui a quatre millions et demi

6 d'habitants ait le statut d'un peuple ? Est-ce que la réponse qui se pose

7 est logique ? Parce que cela nous montre le statut qui n'était pas égal par

8 rapport au statut du peuple croate; 12 % d'habitants par rapport à 88 %

9 d'autres habitants. La question qui se pose est la suivante : est-ce que

10 cette solution constitutionnelle jusqu'en 1990 existait pour que la

11 population croate soit en position inférieure ?

12 La réponse possible est la suivante : lorsqu'on ne dispose pas de

13 vraies informations, on pourrait avoir cette image de cela. Monsieur le

14 Président, il faut savoir - et les collègues de l'Accusation n'ont pas

15 contesté cela - qu'au cours de la Deuxième Guerre mondiale, de 1941

16 jusqu'en 1945, sur la territoire de la Croatie, le génocide contre les

17 Serbes a été perpétré. Nous avons vu les documents qui parlent de 750 000

18 habitants égorgés. Ce génocide a été la raison, la raison principale

19 fondamentale pour que dans toutes les constitutions de la Croatie, après la

20 Deuxième Guerre mondiale, une disposition figurait selon laquelle les

21 Serbes étaient un peuple constitutif. Pourquoi ? Après la Deuxième Guerre

22 mondiale, deux solutions ont été possibles parce que le résultat du

23 génocide n'a pas pu être avoué.

24 Soit les territoires habités par les Serbes devaient faire la sécession de

25 la Croatie pour diminuer le territoire de la Croatie d'un tiers - c'était

26 une solution possible et équitable - ou la deuxième solution qui était

27 également équitable, acceptée par les Serbes et par les Croates en Croatie,

28 à savoir que les Serbes restent au sein de la République de Croatie comme

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1 unité fédérale, mais avec des garanties qui leur assureraient que jamais en

2 Croatie ils n'auraient le statut d'une minorité nationale pour que le

3 génocide soit perpétré à nouveau. Il fallait éviter cela.

4 Monsieur le Président, cette solution existait, c'est-à-dire les

5 Serbes avaient le statut d'un peuple en Croatie. Le génocide perpétré sur

6 les Serbes en Etat croate indépendant entre 1941 et 1945 a été perpétré

7 dans une entité fasciste reconnue par les pays fascistes, l'Italie,

8 l'Autriche et le Vatican en 1941, en tant que pays indépendant croate. Mon

9 collègue m'a corrigé; c'étaient l'Allemagne, l'Italie et le Vatican. Ce

10 sont les pays qui ont reconnu et qui ont créé le pays indépendant croate

11 qui a perpétré le génocide sur les Serbes en Croatie.

12 La première chose qui se passe en 1990 où le HDZ a pris le pouvoir

13 est la chose suivante : ils ont essayé, pour ce qui est de cette

14 disposition qui protégeait les Serbes en Croatie, leur statut de peuple, de

15 les priver de ce statut. La seule garantie de protection de cette

16 population était ce statut de peuple. Pourquoi ? Parce que c'est seulement

17 un peuple qui a le droit de décider de son sort, de son statut. Une

18 minorité nationale dans aucun pays n'a le droit ni selon la législation

19 nationale ni selon le droit international, ne peut pas avoir ce droit et

20 dire maintenant : Je ne veux pas être en Croatie.

21 Les Serbes, compte tenu du fait que jusqu'en 1990, ils jouissaient du

22 statut de peuple et du fait qu'ils ont eu peur de voir encore un génocide

23 perpétré contre eux, leur donnaient le droit de dire : Nous ne voulons plus

24 être dans le pays indépendant croate. C'était le sens, le droit à

25 l'autodétermination, et c'était le sens du terme de caractère constitutif

26 d'un peuple.

27 Il y a une question logique qui se pose là. Pourquoi les nouvelles

28 autorités croates du HDZ, à la mi-1990, ont privé les Serbes de ce statut

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1 de peuple ? Parce qu'ils pouvaient prévoir la réaction des Serbes et ils

2 savaient que les Serbes ne voulaient jamais quitter la Yougoslavie et,

3 selon la constitution, devaient être dévoués à la Yougoslavie. Ils ne

4 voulaient pas quitter la Yougoslavie pour une seule raison; ils avaient

5 peur d'un nouveau génocide.

6 En décembre 1990, la Croatie a fait des modifications de sa constitution et

7 a chassé les Serbes de la constitution, à savoir leur donnait le statut de

8 minorité nationale. Voilà un miracle qui s'est passé. Les mêmes pays qui

9 ont créé le pays indépendant croate en 1941, l'Allemagne et l'Italie, et

10 maintenant l'Autriche et le Vatican, sont les premiers pays qui ont reconnu

11 l'indépendance de cet Etat qui, par une rébellion armée et par une

12 sécession forcée, a fait la sécession de la Yougoslavie par la force. C'est

13 le premier élément.

14 Pourrais-je en finir avec ce chapitre --

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, je m'en excuse.

16 Un peu plus tôt, vous avez mentionné l'Italie, l'Autriche et le Vatican,

17 ensuite vous vous êtes corrigé en disant : Non, ce n'était pas l'Autriche,

18 c'était l'Allemagne. Maintenant, vous dites : L'Allemagne, l'Autriche et,

19 je pense, le Vatican. Est-ce qu'il s'agit de l'Autriche ou de l'Italie ou

20 de l'Allemagne, ou il s'agit de l'Autriche, de l'Allemagne, de l'Italie et

21 du Vatican ?

22 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Lorsque vous parlez de l'Allemagne, à

23 quelle Allemagne pensez-vous ? Parce qu'après la guerre, il y avait deux

24 Etats, deux Allemagne.

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] En 1941, au moment où les puissances

26 fascistes et le Vatican ont reconnu l'Etat indépendant croate qui a

27 perpétré le génocide contre les Serbes, c'était seulement l'Allemagne qui

28 existait en tant qu'Etat, et non pas l'Autriche, parce qu'elle a été

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1 annexée à l'Allemagne par Hitler. Donc, il s'agissait de l'Allemagne

2 fasciste, l'Allemagne de Hitler, parce que l'Autriche n'existait pas en

3 tant qu'Etat à l'époque.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il ne faut pas que vous nous donniez

5 une leçon d'histoire. Est-ce que vous parlez de l'Autriche ou de

6 l'Allemagne ? Continuez, s'il vous plaît, nous n'avons pas beaucoup de

7 temps. Est-ce que vous incluiez l'Allemagne ou l'Autriche ensemble avec

8 l'Italie et le Vatican dans vos arguments ?

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Le fait que par votre question on peut

10 voir que vous ne connaissez pas l'histoire, c'est la raison pour laquelle

11 vous m'avez posé cette question et vous m'avez demandé une explication.

12 L'Autriche n'existait pas à l'époque.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, je vous ai posé

14 une question simple, parce que vous mentionnez l'Autriche et l'Allemagne

15 sans cesse. Ne parlez pas d'autre chose. Ce que je vous demande de me dire

16 est de me dire s'il s'agissait de l'Autriche ou de l'Allemagne. Il ne faut

17 pas que vous me donniez une leçon d'histoire et de me dire que je ne

18 connais pas si l'Autriche existait à l'époque ou pas.

19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] En 1991, il s'agissait de l'Autriche, de

20 l'Allemagne, de l'Italie et du Vatican.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

22 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Par rapport à ce sujet portant sur le

23 caractère constitutif de peuple, il faut dire qu'après la réminiscence --

24 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Maître Milovancevic, c'était en

25 1991 ? Lorsque vous parlez de l'Autriche, de l'Allemagne, de l'Italie et du

26 Vatican, vous parlez de l'année 1991 ? Parce que c'est quelque chose qui

27 est consigné au compte rendu.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] En 1991, l'Autriche, l'Allemagne,

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1 l'Italie et le Vatican étaient les pays indépendants, et au début de 1992,

2 ils ont reconnu, ces pays ont reconnu la Croatie. C'est ce que je voulais

3 dire.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Vous allez voir à la page 4, à

5 la ligne - et c'est la raison pour laquelle je vous ai interrompu - la

6 ligne commençant par la ligne 10. Vous avez dit : "La Défense essaie de

7 vous expliquer qu'en décembre 1990, la Croatie a fait des modifications

8 dans sa constitution. Elle a écarté les Serbes de la constitution et les a

9 transformés en minorité nationale. Voilà un miracle qui s'est passé. Les

10 mêmes pays qui ont créé l'Etat indépendant croate en 1941, l'Allemagne,

11 l'Autriche", ensuite dans le compte rendu y figure une autre chose, mais

12 j'ai entendu que vous avez dit "le Vatican", puis je suppose que c'était le

13 Vatican qui "a reconnu à nouveau l'Etat qui a fait sécession de la

14 Yougoslavie."

15 Ma question à vous est la suivante : est-ce que vous avancez que

16 l'Allemagne et l'Autriche, l'Italie et le Vatican ont créé l'Etat de

17 Croatie ? Est-ce que c'est cela, votre assertion; oui ou non ?

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, mais par des démarches illégales.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Continuez, s'il vous

20 plaît.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Ce qui est évident des moyens de preuve

22 présentés durant cette affaire est que tout de suite après la

23 reconnaissance de la sécession et la rébellion en Croatie, la population

24 serbe sur le territoire de cet Etat a eu le même sort qu'en 1941. Le statut

25 de peuple selon la constitution qui les a protégés du génocide n'existait

26 plus.

27 En Maslenica, en juin 1992 et en janvier 1993, sur le plateau de Miljevci,

28 et en septembre 1993 dans la poche de Medak, et en

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1 mai 1995 à Bijesa [phon] dans l'opération Eclair, et en août 1995 dans

2 l'opération Tempête, cet Etat indépendant croate, pendant la période entre

3 1991 jusqu'à 1995 et selon la déposition de l'expert de l'Accusation, M.

4 Gruic, a chassé entre 250 000 à 300 000 habitants. La population quitte la

5 Krajina, la population entière, et des milliers de personnes ont été tuées.

6 C'est un sujet sur lequel je voulais attirer votre attention et c'est

7 important pour comprendre la position de l'accusé Martic et des Serbes et

8 pour comprendre les raisons pour lesquelles les autorités en Croatie se

9 sont comportées ainsi.

10 Le deuxième point que je voulais souligner qui est très important dans

11 cette affaire est que l'accusé Martic et la position de la Krajina, et ce

12 qui s'est passé en Yougoslavie selon l'acte d'accusation, c'est quelque

13 chose qui a des liens, et sur tout cela la communauté internationale a eu

14 une grande incidence. Dans l'acte d'accusation, le Procureur parle dans les

15 arguments à la fin de l'acte d'accusation du fait que la Communauté

16 européenne, jusqu'en juin, a donc joué le rôle d'intermédiaire dans la

17 crise en Yougoslavie, et dans l'acte d'accusation on parle du plan de

18 Vance, et qu'en 1992 la Communauté européenne a reconnu l'indépendance de

19 Slovénie et de Croatie.

20 Des centaines et des centaines de documents des Nations Unies, au

21 cours de ce procès, des documents des Nations Unies, de l'UNHCR, de la

22 FORPRONU, de la Croix-Rouge internationale ont été présentés ici au cours

23 de l'affaire. Pourquoi je parle de tout cela, Monsieur le Président ? Je

24 parle de tout cela parce qu'ici, la Défense présente la thèse, sa thèse de

25 défense, qu'il s'agissait ici du démantèlement d'un grand pays européen, de

26 la Yougoslavie qui, en 1991, en tant qu'Etat, avait la surface plus grande

27 que la surface de la Grande-Bretagne, 256 000 kilomètres carrés et 23

28 millions d'habitants, et ce, par cet acte de démantèlement, de dissolution

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1 de cet Etat était la conséquence de différentes influences étrangères.

2 Quand j'ai mentionné l'Allemagne, je pensais à cela.

3 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Maître Milovancevic, je m'excuse

4 de vous avoir interrompu et que par cette interruption, je vais donc

5 prolonger le temps. Je voulais dire la chose suivante : dans les

6 circonstances qui prévalaient à l'époque, les Serbes, selon la

7 constitution, étaient une minorité. Dans de telles circonstances, dites-

8 nous ce que les Serbes ne pouvaient pas faire et ce qu'ils pouvaient, ce

9 qu'ils auraient pu faire dans de telles circonstances s'ils avaient eu le

10 statut de peuple constitutif, et M. Martic ne serait pas venu ici en tant

11 qu'accusé. Je n'ai pas pu comprendre cela même si j'ai bien suivi vos

12 arguments, parce que nous ne sommes pas encore arrivés à ce stade où vous

13 pouvez nous expliquer cela ?

14 J'ai suivi vos arguments, tous vos arguments à partir du début du

15 procès, mais je vous serais reconnaissante si vous m'expliquiez cela. En

16 tant que minorité, pouvez-vous nous dire ce que les Serbes ne pouvaient pas

17 faire ?

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, seulement un

19 peuple, seulement un groupe ethnique qui, selon la constitution, a le

20 statut de peuple a le droit à l'autodétermination. Dans ce cas-là, ce droit

21 signifiait que les Serbes avaient le droit de dire : Nous ne voulons pas

22 quitter la Yougoslavie, nous voulons rester dans notre pays, dans la

23 Yougoslavie. Au moment où ils ont eu le statut de minorité, ils n'avaient

24 plus ce droit. Cet acte d'accusation n'aurait pas été dressé si le

25 Procureur avait respecté les dispositions de la constitution de la

26 Yougoslavie à l'époque.

27 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Dites-moi pourquoi vous dites

28 cela, la raison pourquoi vous dites cela pour pouvoir tirer des

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1 conclusions ? Parce que j'aimerais faire cela à la fin de tout cela.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] La population serbe en Croatie, pendant

3 que la constitution de la Croatie était en vigueur jusqu'à la fin de

4 l'année 1990, donc l'ancienne constitution, a fait des démarches politiques

5 pour exprimer et pour réaliser ses pouvoirs constitutionnels. Ils ont dit :

6 Nous avons une autonomie dans le cadre de la Croatie et nous resterons en

7 Croatie. La SAO a appliqué la législation croate en décembre, en 1990, au

8 moment où la SAO de la Krajina a été créée. C'était en conformité avec la

9 constitution de la Croatie avec le droit de peuple constitutif. Tout ce que

10 les Serbes ont fait en Croatie en 1990 était en conformité avec la

11 constitution yougoslave parce qu'ils jouissaient du statut de peuple.

12 Comme la population croate avait le droit à l'autodétermination, de

13 la même façon la population serbe avait le même droit, parce que les Serbes

14 n'étaient pas [phon] là-bas. Il s'agissait de leur espace ethnique, de leur

15 territoire ethnique, de leur pays. Un tiers de la Croatie, selon le rapport

16 des Nations Unies, selon le rapport S2381, il s'agit de la pièce à

17 conviction 107. Selon ce rapport, un tiers de la Croatie était l'espace

18 ethnique des Serbes dans le cadre duquel les Serbes étaient soit en

19 majorité, soit représentaient un groupe important.

20 Selon leur statut les Serbes avaient le droit d'exprimer leur volonté

21 politique à l'autodétermination. Ils ont fait cela de façon correcte en

22 conformité avec la constitution yougoslave, la constitution de la Croatie

23 en conformité avec le droit international. La Croatie a procédé à la

24 sécession armée et a organisé la rébellion armée. Ils n'ont pas permis

25 d'exécuter leur droit par la force et par l'utilisation des armes. Elle a

26 démantelé par ces mêmes armes la Yougoslavie. C'est la thèse de la Défense.

27 La sécession par les armes par la Croatie est la raison principale de

28 tout ce qui s'est passé et non pas comme la Procureure a affirmé, une idée

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1 absurde de la population serbe de détruire les membres d'autres groupes

2 ethniques, de les torturer, de les chasser, de les persécuter. C'est ce qui

3 figure dans l'acte d'accusation. Cela n'a aucun fondement. Je vais indiquer

4 encore un fait. La pièce à conviction 236, la lettre du président du

5 gouvernement de la SAO de Krajina, Milan Babic, le 5 septembre 1991 à la

6 conférence sur la Yougoslavie qui s'était tenue à La Haye, la lettre

7 adressée à Lord Carrington et aux Nations Unies, qui lui a été présentée et

8 pour laquelle il a confirmé de l'avoir écrite.

9 Cette lettre parle justement de ce droit à l'autodétermination. C'est

10 le document dans lequel M. Milan Babic en 1991 a dit que la Yougoslavie a

11 été agressée, a été attaquée et que la Croatie a organisé la rébellion

12 armée et voulait faire la sécession, et que l'armée régulière a été

13 encerclée et attaquée et tuée, et que les Serbes jouissaient de leur droit

14 à l'autodétermination. Ils ne contestaient pas le droit au peuple croate de

15 faire la même chose.

16 La question qui se pose, c'est pourquoi M. Babic, en tant qu'accusé,

17 soudainement dit quelque chose qui est tout à fait opposé et qui a signé

18 après l'accord sur le plaidoyer de culpabilité. Si vous permettez, je

19 voudrais continuer.

20 Nous allons revenir sur ce deuxième point qui est très important pour

21 comprendre l'affaire Martic. Beaucoup de faits qui figurent dans l'acte

22 d'accusation parlent de la participation de la Communauté européenne --

23 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Vous avez terminé votre

24 réponse, je vous en remercie, Maître Milovancevic. A présent, vous pouvez

25 continuer.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Madame le Juge

27 Nosworthy.

28 Le deuxième fait important pour être en mesure de comprendre tout ce qui

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1 figure dans les actes en l'espèce - et là, je fais surtout référence aux

2 documents des Nations Unies et aux dépositions de certains des

3 représentants des Nations Unies, comme McGregor, par exemple, et bien,

4 c'est justement cette participation cruciale des différents facteurs de la

5 communauté internationale dans la crise yougoslave. La Défense ne dit pas

6 cela, Monsieur le Président, pour essayer d'accuser qui que ce soit ou pour

7 jeter la culpabilité sur quelqu'un d'autre, non. J'ai dit cela, parce que

8 ce sont les faits qui sont cruciaux, qui sont importants pour que les Juges

9 puissent prendre la bonne décision, puisque nous avons énormément de

10 dispositions, énormément de pièces écrites, d'éléments écrits et qui vous

11 aiderait à élucider cette affaire et trouver la vérité.

12 Je voudrais attirer votre attention, notamment sur un document qui est une

13 pièce à conviction en l'espèce. C'est la pièce 104. Tout à l'heure, j'ai

14 parlé de la pièce 107, mais en réalité, c'est la pièce 104. C'est le

15 rapport adressé au Conseil de sécurité, numéro

16 23280 en date du 11 décembre 1991. Ce rapport a été écrit après les accords

17 de Genève du 23 novembre 1991 signés par l'envoyé spécial des Nations

18 Unies, M. Vance, le président de la Serbie de l'époque, M. Milosevic, le

19 président de la Croatie, M. Tudjman et le ministre de la Défense,

20 Kadijevic.

21 Ce document, cette pièce à conviction, la pièce 104, évoque les principes

22 de base de l'intervention des Nations Unies sur les territoires de la

23 Yougoslavie ainsi que des thèses de base de

24 M. Vance, qui est l'envoyé spécial du secrétaire des Nations Unies et de M.

25 Mark Goulding, qui était le sous-secrétaire des Nations Unies. L'approche

26 dans ce document dont nous avons parlé déjà, consiste à dire qu'il met en

27 garde qu'une reconnaissance trop active de certaines des républiques

28 yougoslaves qui demandent d'être reconnues, puisque dans ce rapport ont dit

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1 bien que la Croatie et la Slovénie, ce sont des républiques yougoslaves, on

2 le dit dans ce même rapport des Nations Unies, alors que le Procureur nous

3 disait que la Croatie était indépendant depuis le mois d'octobre 1991,

4 alors que ce rapport date du mois de décembre 1991. C'est étrange, non.

5 Justement dans ce rapport ont dit qu'une reconnaissance active de ces

6 républiques représenterait une catastrophe, une véritable catastrophe dans

7 la région, qui menacerait la paix dans le monde, la paix dans les Balkans

8 et la paix en Yougoslavie, qu'il fallait trouver une solution globale pour

9 la crise yougoslave et c'était l'approche que prenait les Nations Unies. Ce

10 qui était intéressant aussi, c'est que le secrétaire général des Nations

11 Unies, justement dans ce document, met en garde la Communauté européenne

12 dont le président à l'époque était le ministre des Affaires étrangères de

13 la Hollande, Van Den Broek. Donc, il met en garde la Communauté européenne

14 qu'une éventuelle reconnaissance active des républiques yougoslaves

15 représenterait une véritable catastrophe pour la paix dans la région et que

16 ceci minerait tous les efforts des Nations Unies.

17 C'est un document écrit qui date du 11 décembre 1991. En dépit de cela,

18 l'Allemagne, l'Italie, l'Autriche et le Vatican, la Belgique et les Pays-

19 Bas, les pays les plus importants de l'Europe reconnaissent justement ces

20 républiques sécessionnistes. Ils reconnaissent, par exemple, la Croatie

21 qui, à l'époque, ne contrôle même pas son propre territoire. En faisant

22 ceci, ces pays n'ont fait rien d'autre que légitimiser [phon] leurs

23 intérêts stratégiques sur le territoire de la Yougoslavie en minant

24 justement l'opération de paix des Nations Unies en Yougoslavie, puisque les

25 troupes des Nations Unies ne viennent sur le territoire yougoslave, mais

26 ils viennent en Croatie.

27 Puisque ces pays, justement, ont préjugé la solution prônée par les

28 Nations Unies, et l'issue de ces efforts, elles ont, en faisant cela, violé

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1 les intérêts des Nations Unies qui étaient là pour protéger justement

2 l'intégrité territoriale de la Yougoslavie. Elles ont violé en le faisant

3 aussi le Protocole II des conventions de Genève, notamment l'article 3.

4 Puisque qu'hier, nous avons très bien dit que l'intégrité territoriale d'un

5 pays ne doit être violé sous aucun prétexte. Donc, ces pays sont devenus

6 des acteurs, de véritables acteurs de la rébellion armée de ces pays

7 sécessionnistes, de ces républiques sécessionnistes. Pourquoi l'ont-ils

8 fait ? Et bien, ils l'ont fait justement parce qu'ils avaient des intérêts

9 politiques.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je

11 voudrais vous rappeler que depuis le début de la matinée, je ne vous ai pas

12 entendu parler d'aucun des chefs d'accusation figurant en l'acte

13 d'accusation. Je vous arrête, parce que je me dis que tout à l'heure vous

14 allez me dire que vous n'avez pas eu suffisamment de temps. C'est

15 précisément le cas, parce que vous ne parlez pas de ce qui est au cœur de

16 l'acte d'accusation.

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la

18 Défense qui décide quels sont les chefs d'accusation dont elle va traiter.

19 La Défense a le droit de présenter sa défense. Nous avons passé autant de

20 temps que le Procureur à présenter leurs moyens de preuve. Là, vous me

21 mettez en garde pour me dire que pendant ma plaidoirie qui est la phase la

22 plus délicate de la défense, au moment où nous sommes en train de vous

23 présenter les arguments les plus cruciaux. Alors qu'hier vous m'avez dit

24 que vous ne comprenez quelle était la thèse de la Défense. Et là, vous

25 m'interrompez. De fait, ce que j'essaie, c'est d'avoir le droit, je vous

26 demande de me donner le droit de vous présenter mes arguments, les

27 arguments de la Défense. Je vous prie de ne pas m'interrompre pendant que

28 je fais cela.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

2 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je

3 pense que vous devriez comprendre les propos tenus par le Juge Moloto, par

4 le Président comme des instructions pour vous guider, pour vous aider

5 plutôt que de miner ou préjuger la présentation de moyens de preuve de la

6 Défense et votre plaidoirie. Vous avez des choses que vous souhaitez nous

7 dire, vous considérez essentielles, et le Juge Moloto a tout simplement

8 essayé de vous guider davantage, de vous mettre dans la direction qui est

9 la plus productive. Je pense que vous auriez dû le comprendre de la sorte.

10 Evidemment, si vous avez des soucis quant à la façon de présenter vos

11 moyens de preuve ou la possibilité de présenter vos arguments, évidemment

12 que vous devez en faire part au Juge. Mais vous devez vraiment comprendre,

13 que le Président, tout ce qu'il a voulu faire, c'était vraiment de vous

14 guider, de vous diriger un petit plus pour vous donner la possibilité

15 justement de présenter à juste titre votre plaidoirie et vos arguments.

16

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous,

18 Madame le Juge. Vous savez, j'ai réagi uniquement parce que j'ai compris

19 que le Président me dit que mon plaidoyer pourrait être interrompu, parce

20 que les arguments présentés ne sont pas concrètement liés à l'acte

21 d'accusation. J'avais tellement peur de cette possibilité, que j'ai réagi

22 un peu activement. Mais je n'ai pas voulu, aucunement, montré un quelconque

23 irrespect pour le Tribunal.

24 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Cela étant dit, je suis tout à

25 fait d'accord avec le Président. Je pense que ce que vous racontez, votre

26 plaidoyer, vos arguments doivent être liés à l'acte d'accusation. Cela

27 étant dit, la décision vous appartient et vous présentez votre plaidoyer

28 comme bon vous semble, la meilleure façon que vous le souhaitez.

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1 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec Mme

2 le Juge Nosworthy.

3 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Pourquoi avons-nous dépensé autant de

4 temps à aborder ce thème ? Parce que nous pensons que tout ce qui figure

5 dans l'acte d'accusation, du point de vue juridique que de fait et même

6 l'entreprise criminelle commune qui figure dans l'acte d'accusation, et

7 bien, qu'ils ne sont pas dirigés par les intérêts de la justice, ils ne

8 sont pas fondés sur les faits. Les faits présentés dans l'acte d'accusation

9 sont complètement détournés, contournés.

10 La Défense est convaincue que cet acte d'accusation et le travail du

11 Procureur n'a pour but rien d'autre que de réaliser des objectifs

12 politiques qui, forcément, auront des conséquences sur le démantèlement

13 d'un pays légitime reconnu mondialement. Cela à quelque chose à voir avec

14 le démantèlement de la Yougoslavie, cette sécession par les armes et tout

15 ce qui s'en est suivi. Nous avons essayé de parler de cela quand nous avons

16 présenté l'expert, Dr. Smilja Avramov, mais nous avons été empêchés de le

17 faire, puisqu'ils ne voulaient pas que la communauté internationale soit

18 impliquée à cela. Je pense que les Juges ont eu tort lorsqu'ils ont dit que

19 ceci porterait préjudice à la Défense. Les Juges ainsi que le bureau du

20 Procureur.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Attendez. Qu'est-ce que vous

22 voulez dire par là ? Vous avez dit que les Juges se sont mis du côté du

23 Procureur quand ils ont évalué que ceci portait préjudice à la Défense ?

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Non, je n'ai pas dit que vous vous

25 êtes mis de leur côté; vous avez acceptez leur proposition. Vous avez

26 accepté la préposition du Procureur en disant que celle-ci devrait être

27 expurgée.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Arrêtez de dire ce que vous

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1 dites, vous venez de le dire. C'est bien dit. Ici, si on dit ce qui est

2 écrit dans les comptes rendu d'audience, on peut lire texto. Je pense que

3 les Juges de la Chambres ont eu tort quand ils se sont rangés du côté du

4 Procureur. Cela figure bien à la page 15, ligne 9. Qu'est-ce que vous avez

5 dit ? Ou c'est encore l'interprète qui vous a mal interprété ? Vous n'avez

6 pas dit cela ? Que les interprètes se corrigent, alors.

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, effectivement, je pense qu'il

8 convient de corriger l'interprète, puisque j'ai dit que les Juges ont

9 accepté la position du Procureur quand il a dit que ceci ne fait pas partie

10 des faits qui nous concernent et qu'il ne fallait pas en traiter. Nous,

11 nous avions un avis complètement opposé. Mais évidemment que je n'ai jamais

12 dit que les Juges étaient du côté du Procureur, s'étaient rangés du côté du

13 Procureur en acceptant ou en prenant ces décisions. Je pense que la

14 traduction a été mauvaise, l'interprétation a été mauvaise ou peut-être que

15 je n'étais pas suffisamment précis.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qu'est-ce qui s'est passé exactement ?

17 Est-ce que l'interprétation a été mauvaise ou est-ce que vous vous êtes mal

18 exprimé ou vous n'étiez pas suffisamment précis ? Peut-être que c'était les

19 deux. Enfin, dites-nous où se trouve la vérité.

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Ce que j'ai dit, c'est que le Procureur

21 était contre la présentation de l'expert, le professeur de droit

22 international qui devait être là pour élucider les faits.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Attendez, attendez, un instant. Je

24 vous pose une question très simple. Je vous pose la question uniquement au

25 sujet de cette phrase où, d'après le transcript, vous auriez dit : "Les

26 Juges de la Chambre ont eu tort quand ils se sont rangés du côté du

27 Procureur." Est-ce que vous avez dit cela ? Est-ce que vous avez dit

28 exactement cela ?

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1 Le cas échant, dites-nous ce que vous avez dit.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Ce que j'ai dit, c'est que la Chambre de

3 première instance s'est trompée, parce qu'elle a accepté la position du

4 Procureur, qu'il s'agisse de la bonne ou de la mauvaise position, celle qui

5 a été prise par le Procureur.

6 Nous avons pensé que cette position n'était pas bonne, qu'elle était

7 erronée et que, par conséquent, les Juges de la Chambre ont accepté une

8 position qui était erronée d'après la Défense.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A quel moment les Juges de la Chambre

10 ont-ils accepté le point de vue du Procureur ?

11 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Au moment, Monsieur le Président, où

12 nous avons reçu une version expurgée du rapport d'expert où tous les

13 éléments relevant du rôle de la communauté internationale dans la crise

14 yougoslave, de notre expert, Dr Smilja Avramov, ont été expurgés. C'est

15 votre décision, ce n'est pas la nôtre. C'est vous qui avez décidé au sujet

16 de tout cela. Nous étions complètement contre cela.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'était le point de vue des Juges de

18 la Chambre, ce n'était pas le point de vue du Procureur. Cela n'a rien à

19 voir. C'était notre décision. Nous n'avons pas accepté ou adopté la

20 position prise par le Procureur. Si vous pensez que cela vous a porté

21 préjudice et que les Juges de la Chambre ont eu tort, vous n'aviez qu'à

22 faire appel. Est-ce que vous avez fait appel, Monsieur ?

23 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur, vous savez, tout cela a été

24 fait à moins une. Quand nous avons voulu réagir, on nous a dit qu'on

25 n'avait plus de temps, que c'était la fin de la procédure.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez interjeté un

27 appel; oui ou non ? Si vous n'étiez pas d'accord avec la décision telle

28 qu'elle était, vous n'aviez qu'à interjeter l'appel. Ce n'est pas

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1 maintenant que vous pouvez venir nous dire que vous n'avez pas interjeté

2 l'appel parce que vous n'aviez pas eu le temps de le faire. Nous

3 n'acceptons pas la position de qui que ce soit d'autre. Nous avons nos

4 positions à nous, nous prenons nos décisions. Si votre position, la

5 position de la Défense coïncide, est la même que la position des Juges de

6 la Chambre, cela ne veut pas dire que nous avons accepté votre position.

7 C'est une coïncidence, rien d'autre. Il en va de même avec le Procureur.

8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Nous avons aussi essayé de prouver

9 quelle était la vraie nature du conflit armé. Nous avons essayé de prouver

10 l'existence d'une rébellion armée. Les forces croates, la pièce 402 qui a

11 été présentée par le Procureur par le témoin Agotic montre qu'il y avait

12 200 000 soldats lourdement armés en 1991. D'après le Procureur, le

13 Procureur dit que les activités sur Zagreb n'avaient pas une justification

14 militaire, alors que notre expert, Milisav Sekulic, a fait une opinion

15 d'expert, mais toutes ses réponses ont été expurgées. C'est justement les

16 Juges de la Chambre qui ont décidé d'enlever cela de son rapport d'expert

17 et, avec ceci, nous ont porté préjudice, lourd préjudice. Heureusement

18 existe-t-il d'autres pièces, d'autres éléments qui corroborent notre thèse.

19 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je dois

20 vous arrêter puisqu'il existe une pratique qui régit, ainsi que le

21 Règlement, qui régit le travail des Juges de la Chambre et de la Chambre de

22 première instance. Nous avons pris un certain nombre de décisions au cours

23 du procès. Si vous vouliez accepter ces décisions, vous pouviez les

24 accepter. Si vous ne vouliez pas les accepter, à l'époque vous aviez le

25 droit d'interjeter un appel interlocutoire. Il s'agit de quelque chose que

26 vous auriez dû faire pendant le procès.

27 Notre Président vous a dit à juste titre que vous auriez pu et vous aviez

28 le droit d'exercer ce droit, ce que vous n'avez pas fait. C'est la

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1 procédure normale, habituelle, et toutes les parties au procès ont le droit

2 de le faire. A présent, vous ne pouvez absolument pas en parler. Ce n'est

3 pas le moment d'en parler, pas pendant la plaidoirie. Je l'ai dit pour vous

4 aider, pas pour vous gêner et pas pour vous insulter. C'est tout simplement

5 quelque chose qui relève de ce système contradictoire, qui est le système

6 en vigueur devant ce Tribunal.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [hors micro]

8 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Peut-être que vous ne le savez

9 pas, peut-être que dans votre système les choses sont différentes, mais je

10 vous le dis pour que vous le sachiez. Vous ne pouvez pas en parler à

11 présent parce que vous ne pouvez pas attaquer une décision à présent. Ce

12 n'est tout simplement pas clair, ce n'est pas correct du point de vue de la

13 procédure.

14 M. WHITING : [interprétation] Je suis désolé d'intervenir, mais pour que

15 les choses soient claires au compte rendu d'audience, il y a un petit

16 détail que nous n'avons peut-être pas pris en compte. On vient d'attirer

17 notre attention là-dessus. Je pense que ceci doit figurer au compte rendu

18 d'audience. La Défense a en effet demandé l'autorisation d'interjeter

19 l'appel sur ces deux décisions, par rapport aux décisions prises par les

20 Juges de la Chambre concernant ces deux témoins experts. Ce sont les Juges

21 de la Chambre qui ont refusé l'autorisation d'interjeter l'appel. Cela

22 étant dit, je ne pense pas que ceci change quoi que ce soit à votre

23 conclusion.

24 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Oui, effectivement, vous avez bien

25 fait de me corriger. Il a demandé le droit d'interjeter l'appel, ce droit

26 lui a été refusé, et ceci est tout à fait normal. C'est tout à fait le

27 droit de la Chambre de première instance de le faire. Monsieur

28 Milovancevic, dans ce cas-là, il faut respecter cette décision, et dans le

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1 futur vous devez savoir que vous devez vous en tenir aux décisions des

2 Juges de la Chambre.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je dois tout simplement vous dire que

4 nous allons prendre une pause à 10 heures 15, et que d'ici là, j'espère que

5 vous en aurez fini avec votre plaidoirie.

6 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'accepte ce que Mme le Juge Nosworthy

7 vient de dire et je retire ce que je viens de dire. Je souhaite vous

8 fournir une explication. J'ai essayé d'attirer votre attention sur un

9 certain nombre de faits. Je n'essaie pas de contredire les Juges de la

10 Chambre.

11 En ce qui concerne la possibilité de terminer la présentation de mes

12 arguments d'ici dix heures et quart, je suis navré, mais je ne pense pas

13 que je serai en mesure de le faire. Cela étant dit, je pense pouvoir

14 terminer aujourd'hui, effectivement. Je vais terminer. Je vais continuer.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, vous pouvez continuer.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Le témoin de la Défense

17 MM-117 a confirmé que les autorités de la République serbe de la Krajina,

18 le ministère des Affaires intérieures, le gouvernement, tous les organes

19 ont fait tout ce qu'ils ont pu pour protéger l'ordre public. Ils ont tout

20 fait pour protéger toutes les personnes, quelle que soit leur appartenance

21 ethnique. Ils ont tout fait pour coopérer avec la FORPRONU, et que cette

22 coopération était correcte. Ce témoin, comme de nombreux autres témoins,

23 comme tous les témoins de la Défense, ont confirmé que tout a été fait pour

24 empêcher la criminalité, pour faire la lumière sur tous les crimes. Il a

25 confirmé que la coopération avec la FORPRONU était correcte, fort correcte,

26 et que tout d'un coup des rapports des Nations Unies sont arrivés disant

27 tout le contraire.

28 Par le biais de ce témoin, la Défense a introduit une pièce à

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1 conviction, 965. Il s'agit d'une réunion entre M. Martic et M. Cedric

2 Thornberry qui représentait la mission des Nations Unies à Zagreb. Dans ce

3 document qui a été d'ailleurs corroboré par toutes les autres pièces

4 présentées, M. Martic, d'après le texte de ce procès-verbal, s'adresse à M.

5 Thornberry et lui dit : "La presse occidentale a commis un crime grave

6 contre les Serbes. Nous, tout ce que nous faisons, c'est de nous défendre,

7 alors que vous avez tout présenté à travers. Pourquoi ne faites-vous pas

8 quelque chose, M. Thornberry, pour changer cela ?"

9 Dans ce même document, le document 965, M. Thornberry répond

10 directement à M. Martic en disant : "Je vous comprends entièrement, M.

11 Martic, complètement. Je n'arrive pas à comprendre comment se fait-il que

12 les médias occidentaux ont fait des rapports semblables. C'est un fait que

13 le Conseil de sécurité, en ce moment même - et là, écoutez bien ce que je

14 vais vous dire - a une image un peu plus claire. Je pense même que la

15 communauté internationale est en train de comprendre mieux ce qui se passe,

16 mais je ne peux pas prétendre qu'ils ont vraiment une image claire et

17 objective de ce qui se passe, parce qu'à cause de la propagande politique,

18 la communauté internationale voit tous les Serbes d'un même œil."

19 Ces mots prononcés par M. Thornberry, qui était l'adjoint du chef de

20 mission en charge de la Yougoslavie, n'ont pas vraiment porté leurs fruits.

21 C'est ce qui a été confirmé par un autre témoin, M. Barriot, qui lui a dit

22 qu'il était prêt à abandonner sa carrière alors qu'elle était pourtant

23 prometteuse à l'époque. Il a dit : "J'étais prêt à abandonner ma carrière

24 militaire, parce que sur le terrain, j'ai vu que l'on faisait un mauvais

25 procès aux Serbes et je ne pouvais pas cacher cette vérité." M. Cedric

26 Thornberry a confirmé exactement la même chose.

27 Ce document contient la déclaration de Cedric Thornberry comme quoi

28 le chef de la police civile, UNCIVPOL, est directement subordonné à moi et

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1 que la coopération est excellente. Il y a d'autres témoins de l'Accusation,

2 comme McElligott, par exemple, qui ont essayé de dire quelque chose de

3 complètement différent et de nier tout ce qui avait été quand même prouvé,

4 démontré par un homme qui, lui, était sur le terrain.

5 Dans le même document, le 965, en date du 14 juin 1993, M. Martic

6 déclare à M. Thornberry que tout est fait pour protéger la population et

7 qu'il n'y aucune distinction faite entre Serbes et Croates, que tout est

8 fait pour protéger la population des menaces qui pèsent sur elle. Le

9 problème intervient quand la population croate veut quitter le territoire à

10 cause de la situation difficile. Tout d'abord, il faut une déclaration

11 écrite pour dire qu'ils sont en train de quitter le territoire

12 volontairement, ensuite quand ils arrivent chez les Croates, ils leur

13 racontent quelque chose qui n'a absolument plus rien à voir et qui est tout

14 à fait contraire à cela.

15 M. Martic déclare à M. Thornberry qu'ils ne veulent plus de départs

16 de ce type sans participation de la FORPRONU. En réponse à cela, dans le

17 document 965, Cedric Thornberry explique qu'il comprend bien M. Martic,

18 qu'il comprend bien que M. Martic est en train de protéger la population,

19 et ce, dans des circonstances extrêmement difficiles.

20 Vous voyez que la vérité, c'est ce qui s'est passé sur le terrain. De

21 nombreux témoins de la Défense l'ont confirmé, d'ailleurs. Mais M. Cedric

22 Thornberry parle des médias occidentaux qui ont commis ce crime contre les

23 Serbes en 1993. Maintenant, même à l'heure actuelle, en 2006 et en 2007, le

24 Procureur, lui, utilise ces rapports des médias pour accuser M. Martic. Il

25 les utilise en tant que moyens de preuve contre Martic. Mais nous avons vu

26 les documents des Nations Unies qui compromettent totalement les

27 résolutions des Nations Unies, compromettent les Nations Unies pour des

28 raisons qui sont mentionnées par M. Thornberry, parce que le Conseil de

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1 sécurité ne comprend pas très bien ce qui se passe et parce que la

2 communauté internationale n'est pas informée correctement.

3 Que signifie exactement la Résolution 762 des Nations Unies, la

4 résolution qui a été publiée en juin 1992 après la première agression

5 croate contre une zone protégée des Nations Unies sur le plateau de

6 Miljevac, où 40 Serbes ont été massacrés, littéralement massacrés et jetés

7 dans un puits ? Que signifie cette résolution qui condamne les deux

8 parties, les deux côtés, et qui dit plus ou moins que finalement les zones

9 roses vont revenir à la Croatie sous mandat croate ? Ils condamnent

10 l'agression, certes, mais ils ne prennent aucune mesure pour y remédier, et

11 en même temps ils récompensent la Croatie en lui donnant les zones roses.

12 Le témoin Kirudja d'ailleurs a dit que cela ne faisait pas partie du

13 plan de Nations Unies, qu'il faut aller bien au-delà des dispositions du

14 plan Vance des Nations Unies. C'est ainsi que la communauté internationale

15 s'est comportée. Nous essayons d'attirer votre attention là-dessus, alors

16 que dans cet acte d'accusation, le Procureur semble compléter le travail et

17 tout simplement mettre en œuvre les intérêts qui étaient déjà à l'œuvre en

18 1992. Pourquoi est-ce que je vous raconte tout cela, Messieurs les Juges ?

19 Parce qu'il n'y a jamais eu de conférence de paix sur la Yougoslavie. Cet

20 acte d'accusation, en fait, c'est l'illustration, c'est la satisfaction

21 enfin des désirs qui avaient été émis par la Croatie à l'époque.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous interromps quand même,

23 parce que vous ne suivez pas du tout les règles du métier en ce moment,

24 puisque le Procureur finalement est un fonctionnaire, fonctionnaire de ce

25 Tribunal. Il a des instructions qui lui ont été données par mandat de ce

26 Tribunal. Il sait exactement ce qu'il doit faire. Il n'est pas chargé de

27 mettre en œuvre une vengeance personnelle ou de travailler au nom des

28 Nations Unies ou au nom des personnes de la FORPRONU qui se trouvaient là.

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1 Il fait son travail, son métier, comme vous faites le vôtre en défendant

2 votre client. Donc, son métier, c'est d'accuser et c'est d'étayer ses

3 accusations. Donc, arrêtez de l'injurier, s'il vous plaît. Poursuivez.

4 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Vous ne m'avez pas compris.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Arrêtez d'insulter le Procureur et

6 poursuivez votre plaidoirie.

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Mais je vous dis que je ne suis pas ici

8 -- je n'ai aucune injure personnel contre le Procureur. Je parle juste de

9 la constitution.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oubliez la constitution. Puisque vous

11 êtes en train non seulement d'insulter le Procureur, mais vous êtes aussi

12 en train d'insulter notre noble institution - et je ne parle pas du tout de

13 ma personne, mais de l'institution que je représente. Et je dis que le

14 Procureur, tel que vous y faites référence, n'a absolument pas fait ce que

15 vous alléguez qu'il était en train de faire dans votre plaidoirie. Donc, il

16 fait son travail, son travail qui est d'étayer sa cause en se basant sur

17 des faits qui lui sont connus. Maintenant, vous pouvez poursuivre.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

19 Passons à l'acte d'accusation. Nous allons voir comment le Procureur

20 a fait son travail et sur la base de quelle loi et de quels faits il a

21 étayé ses accusations.

22 Le paragraphe 4 de l'acte d'accusation parle du but de l'entreprise

23 criminelle commune, en indiquant que son but pour ce qui est d'un tiers de

24 la population croate et d'une grande partie de la Bosnie-Herzégovine était

25 de nettoyer ces territoires de toute population non-serbe et de les annexer

26 à une Grande-Serbie. Ce libellé, cette définition d'un territoire où des

27 crimes seraient arrivés constitue - parce qu'ici, l'acte d'accusation

28 couvre la période allant de 1990 à 1995 - or, en 1991 au moins et au moins

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1 jusqu'en mai 1992, il n'existait pas d'entité qui s'appelait la République

2 de Croatie. Il n'y avait pas non plus d'entité qui s'appelait la République

3 de Bosnie-Herzégovine. Ce n'était pas des entités qui existaient au titre

4 de la loi internationale. Il n'y avait que la Yougoslavie qui existait.

5 Que se passe-t-il ici ? Au paragraphe 4, on ne parle plus de d'Etats

6 souverains. Le but, l'objectif du libellé est de cacher le fait que comme

7 l'affirme la Défense, d'ailleurs il y avait bel et bien une rébellion armée

8 en cours, et il fait ceci en évitant de mentionner la Yougoslavie qui

9 serait une entité au titre de la loi internationale. Alors, pourquoi est-ce

10 que l'Accusation fait cela ? Passons au paragraphe 6 de l'acte d'accusation

11 pour le prouver.

12 Je ne fais pas ceci sans raison, mais voici ce que je veux vous prouver,

13 que M. Martic est un innocent ici. C'était un réfugié, un président d'un

14 peuple réfugié. Il est ici depuis quatre ans et sept mois malgré des faits

15 qui sont tout à fait contraires à tout ce qui est énoncé dans l'acte

16 d'accusation, car à quel titre est-il ici ? Au paragraphe 4, vous avez la

17 République de Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine, qui sont

18 définies comme étant des Etats souverains. Or, à l'époque, c'était des

19 Etats qui n'existaient pas. Il n'y avait que la Yougoslavie qui existait.

20 Ensuite, au

21 paragraphe 6, il y a une liste de participants à l'entreprise criminelle

22 commune.

23 Il y a des personnes qui sont nommées, ensuite on parle du JNA, puis de

24 l'armée yougoslave, puis de l'armée de la Republika Srpska, des forces de

25 police, de la Défense territoriale, de la police de Martic, des unités

26 volontaires de Serbie-et-Monténégro, de Bosnie, d'autres personnages

27 politiques, de la République fédérative socialiste de Yougoslavie. Vos

28 voyez, cette dernière allégation au paragraphe 6 vous montre un peu une

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1 idée de ce qui se passait véritablement.

2 C'est sans doute un lapsus de la part de l'Accusation, puisque le fait que

3 cette entreprise criminelle commune ait eu lieu dans le territoire de la

4 RSFY entre 1990 et 1991, alors qu'il y avait à ce moment-là quand même une

5 rébellion armée qui était en cours. Donc, on ne parle pas d'Etats

6 souverains comme la Croatie et la Slovénie. Finalement, les participants

7 allégués à cette soi-disant entreprise criminelle commune dont les noms

8 figurent au paragraphe 6 ne sont que des citoyens, des officiers, des

9 soldats, des officiers de police, des volontaires de la seule entité

10 existante à l'époque au titre de la loi internationale, qui était la

11 Yougoslavie, qui était le seul pays qui soit membre des Nations Unies à

12 l'époque. Or, tout ce que font ces gens finalement, c'est leur devoir, leur

13 droit au titre de la constitution, au titre de la juridiction dont ils

14 dépendent. Il ne font absolument rien au titre d'autres Etats, de la

15 Croatie et la Slovénie. Ils ne peuvent pas le faire d'ailleurs puisque ces

16 Etats n'existent pas. Ils font leur travail dans le territoire, au sein du

17 territoire de la Yougoslavie, sous le mandat de la présidence fédérale afin

18 de supprimer une rébellion armée au titre du Protocole II de la convention

19 de Genève de 1949. C'est tout ce qui se passe. C'est l'essence même de ce

20 qui s'est passé à l'époque.

21 Comme vous le voyez, Messieurs les Juges, vous voyez bien, dans tout ce que

22 j'ai dit, je n'ai absolument pas parlé du Procureur. Au paragraphe 4 et au

23 paragraphe 6 de l'acte d'accusation, on parle de l'élaboration de cette

24 entreprise criminelle commune. Pourquoi est-ce que tout d'un coup on se

25 met à parler de cette entreprise criminelle commune ? C'est l'Accusation

26 qui a introduit ce concept. A notre avis, le Tribunal s'est trompé quand il

27 a accepté ce type de responsabilité puisqu'il n'existe pas dans le Statut.

28 Cela ne peut être présenté que par le Conseil de sécurité. Alors, quel

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1 était le but de la présentation et de l'introduction de ce nouveau

2 concept ? Je pense qu'il y en avait deux. Tout d'abord, l'énumération des

3 participants allégués à cette entreprise criminelle commune relève

4 l'Accusation de toute obligation de prouver --

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous nous l'avez déjà dit déjà. Dites-

6 nous quelque chose que nous n'avons pas encore entendu.

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Très bien.

8 Ce que je n'ai pas dit hier, c'est qu'en introduisant ce concept

9 d'entreprise criminelle commune, l'Accusation est maintenant relevée de son

10 obligation de prouver un grand nombre d'aspects et un grand nombre de

11 choses, par exemple, le moment, le lieu, la personne qui aurait fait

12 quelque chose, qui est le responsable éventuel, quelle était la chaîne de

13 commandement, la subordination, les connexions horizontales entre

14 participants, et cetera. Tout d'un coup, l'Accusation n'a plus à prouver

15 quoi que ce soit une fois que l'on a ce concept d'entreprise criminelle

16 commune, et la Défense, après, doit se débrouiller avec ce concept pour

17 arriver à défendre son client. Or, que s'est-il passé ? Pourquoi surtout y

18 a-t-il eu ce nouveau concept qui a été introduit ? Cela était fait afin de

19 modifier la relation de ce qui s'était passé en Yougoslavie selon leur

20 ordre chronologique, pour accepter tout d'un coup un acte parfaitement

21 illégal qui était la démantèlement de la Yougoslavie et la création de

22 l'Etat de Croatie.

23 Je vais vous donner un exemple, par exemple. L'Accusation n'a pas poursuivi

24 les personnes qui étaient en charge de l'opération Eclair, et pourtant,

25 l'Accusation maintenant accuse Martic.

26 Passons ensuite au paragraphe 7 de l'acte d'accusation. Il s'agit

27 d'une description des formes par lesquelles Martic aurait participé à cette

28 fameuse entreprise criminelle commune. Il est écrit dans ce paragraphe

Page 11372

1 qu'il y a participé, puisque sa force de police a été organisée en vue

2 d'aider à l'exécution de cette entreprise criminelle commune au travers de

3 la commission de crimes. C'est un chèque en blanc finalement. C'est tout ce

4 que cela représente. C'est, bien sûr, quelque chose que le Procureur

5 poursuit dans l'acte d'accusation, mais c'est complètement nié par tous les

6 éléments de preuve qui ont été montrés. Le témoin de l'Accusation,

7 Kerkkanen, a confirmé que dans de nombreuses pages du document portant sur

8 le secrétariat de l'Intérieur, il a sélectionné certains passages de ces

9 documents. Or, pourtant il dit qu'il n'a jamais pu trouver le moindre

10 document dans lequel Martic aurait ordonné que l'on commette des actes

11 illégaux ou des actes de non-droit. Pourtant un plan si monstrueux devrait

12 quand même être étayé par ce type d'ordre donné par Martic. Or, ceci n'a

13 jamais été prouvé.

14 Je pense que maintenant il serait tout à fait opportun de faire une pause.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Nous allons faire une pause et

16 nous reviendrons à onze heures moins quart.

17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 15.

18 --- L'audience est reprise à 10 heures 45.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Comme je l'ai indiqué avant la

20 pause, je considère que cette séance va être la séance où nous allons en

21 terminer de la présentation de la Défense. La Défense a déjà présenté de

22 nombreux arguments par oral. J'imagine que ceci n'a pas été couvert par la

23 plaidoirie orale de la Défense pourra l'être par des plaidoiries écrites.

24 Monsieur Whiting, s'il vous plaît, il faut que vous prépariez à la

25 réplique.

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui.

28 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'aimerais que la Chambre de première

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1 instance me montre la disposition dans le Règlement de procédure et de

2 preuve qui permet de savoir que la Chambre de première instance va lire le

3 mémoire en clôture et va en tirer ce que la Défense doit présenter dans sa

4 plaidoirie. J'aimerais que la Chambre de première instance ne m'empêche pas

5 de finir ma plaidoirie. Je vous l'ai demandé. Il s'agit quand même d'une

6 audience qui a été programmée par vous-même, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, les Juges vont

8 prendre des décisions. Cette décision est que nous n'allons pas vous

9 montrer quoi que ce soit dans le Règlement. Nous n'allons pas vous donner

10 de temps supplémentaire, vous avez bien assez de temps comme cela. Donc, la

11 décision a été rendue, et s'il vous plaît, il faut maintenant que vous vous

12 y pliiez.

13 Monsieur Whiting, c'est à vous pour la réplique.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] S'il vous plaît, donnez-moi la parole,

15 Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je ne vous

17 donne pas la parole. Vous êtes en train de vous répéter. Vous en avez

18 terminé.

19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous demande juste de me donner la

20 parole, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vous donne pas la parole,

22 Monsieur Milovancevic. C'est un Tribunal, ce n'est pas autre chose. Donc,

23 vous n'avez plus la parole.

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Dans ce cas-là, la Défense ne peut plus

25 assister à ce procès, puisque nous n'allons pas être présents dans ce

26 prétoire, Vous m'avez empêché de terminer ma plaidoirie. Je ne peux plus

27 défendre mon client. Vous m'avez empêché de défendre mon client. Ma seule

28 alternative maintenant est de quitter ce prétoire.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et bien, c'est votre choix de le

2 faire.

3 Monsieur Whiting, c'est à vous.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, s'il vous

5 plaît, restez dans le prétoire. Je vous demande instamment de ne pas

6 quitter la salle.

7 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Il se pourrait que ce soit une

8 question de --

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Whiting, vous avez la parole.

10 M. WHITING : [interprétation] Merci.

11 Je serai très rapide. Je ne vais pas répondre à tous les points qui

12 ont été soulevés par le conseil de la Défense, puisque je suis bien certain

13 que les Juges de la Chambre vont se pencher sur les affirmations avancées

14 par le conseil de la Défense pour voir si elles sont étayées oui ou non

15 dans le compte rendu, tout comme d'ailleurs, vous allez procéder exactement

16 au même exercice en ce qui concerne ce que nous avons avancé soit dans

17 notre mémoire de clôture, soit dans notre réquisitoire. Ensuite, la plupart

18 des arguments qui ont été soulevés par le conseil de la Défense, les

19 arguments que nous avons contrés soit dans notre mémoire en clôture, soit

20 dans notre réquisitoire. Donc, je ne vais pas tout reprendre en détail à

21 moins que vous le souhaitiez.

22 Je vais quand même me pencher sur certaines choses. Tout d'abord, ce

23 propos de rébellion armée. Puisque, pendant toute la plaidoirie de la

24 Défense, du début jusqu'à la fin, on a parlé de cette rébellion armée.

25 L'affirmation était que ce qui s'était passé en 1991 était une rébellion

26 armée, rébellion armée du fait de la Croatie contre la Yougoslavie.

27 Différentes conclusions en sont tirées, conclusions de faits portant sur

28 l'entreprise criminelle commune et conclusions juridiques sur

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1 l'admissibilité du droit international humanitaire. C'est deux points que

2 j'aimerais traiter.

3 Tout d'abord, le fait est de dire que les événements qui avaient

4 cours pouvaient être libellés de rébellion armée de la Croatie contre la

5 Yougoslavie. Mais ceci n'est pas étayé par les faits, puisque dès le

6 printemps 1991, il était déjà clair que la Yougoslavie telle qu'elle avait

7 existé jusque-là n'allait pas survivre. Le 16 mars 1991, M. Milosevic lui-

8 même a déclaré à la télévision - d'ailleurs cela se trouve dans la pièce

9 979 - que la Yougoslavie était entrée dans la phase finale de son agonie.

10 En juin 1991, M. Milosevic a dit à M. Karadzic que la Croatie et la

11 Slovénie devaient avoir le droit de faire sécession et de s'en aller, mais

12 que la question essentielle était que cette désintégration et ce

13 démantèlement devaient se faire selon nos propres intérêts. C'est ce que

14 disait M. Milosevic. Tout le monde avait bien compris que la Yougoslavie

15 n'allait pas rester en l'état, qu'elle n'allait pas pouvoir exister,

16 qu'elle se désintégrait, qu'elle se démantelait. Même l'expert de la

17 Défense en droit constitutionnel, Mme Avramov, a été d'accord pour dire que

18 dès l'été 1991 tout le monde comprenait que la Yougoslavie resterait

19 intacte.

20 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je pense qu'il y a une erreur. Vous

21 avez dit que la Yougoslavie allait rester intacte.

22 M. WHITING : [interprétation] Je m'excuse. J'ai fait un lapsus. Je voulais

23 dire, bien sûr, que la Yougoslavie n'allait pas rester en l'état.

24 Donc, essayer de présenter les événements après cette date et la guerre qui

25 s'en est suivie au cours de l'été 1991, c'est arrivé au cours de l'été et

26 du printemps 1991 et a continué jusqu'en 1995 comme une rébellion armée de

27 la Croatie contre la Yougoslavie, n'est pas étayé par les faits, puisque ce

28 qui se passait en Yougoslavie, c'était que la Yougoslavie était en train de

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1 s'effondrer. La seule question qui restait était de savoir comment elle

2 allait s'effondrer. Les leaders serbes à Belgrade et en Krajina voulaient

3 créer un Etat pour les Serbes en rassemblant tous les Serbes de Croatie, de

4 Bosnie-Herzégovine, de Serbie-et-Monténégro. C'était ce qu'ils voulaient.

5 Je fais une pause ici --

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Mais avant de vous poser la

7 question que j'ai en tête, j'aimerais que vous en terminiez avec ce sujet.

8 M. WHITING : [interprétation] Oui. J'ai quelque chose à dire à propos de

9 cette rébellion armée, mais vous pouvez m'interrompre à tout moment.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Voilà ma question. Comment allez-vous

11 réagir au fait que les articles 3 et 5 du Statut du TPIY sont applicables,

12 que le conflit soit interne ou soit international ?

13 M. WHITING : [interprétation] Oui, je peux répondre à cela maintenant.

14 J'avais prévu d'y répondre un peu plus tard.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous en parlerez quand le moment sera

16 venu.

17 M. WHITING : [interprétation] Je vous remercie.

18 Je vais continuer avec les faits.

19 Bien avant l'été, le printemps 1991 bien avant qu'il soit évident que

20 la Yougoslavie était en train de se désintégrer, les leaders serbes, y

21 compris l'accusé, M. Martic, en Krajina était en train d'essayer d'obtenir

22 ce qu'il voulait, donc qui était d'obtenir un Etat séparé pour les Serbes.

23 Ils l'ont fait en promouvant la séparation ethnique, le conflit ethnique.

24 Et en Krajina, ceci a été effectué en essayant de chasser par la force la

25 population croate.

26 La Défense était en train d'essayer de dépeindre une rébellion armée

27 qui serait le fait de la Croatie contre la Yougoslavie. Et la Défense

28 affirmait que la Yougoslavie et les Serbes de Krajina étaient des entités

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1 étatiques tout à fait régulières. Aujourd'hui, la Défense nous a dit que

2 tout ce qui s'était passé en Krajina avait suivi la constitution croate,

3 que tout ceci était autorisé par la loi et que les Serbes étaient en train

4 de s'organiser en Krajina de façon tout à fait légale.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, vous voulez dire légale,

6 mais en suivant la constitution croate ou la constitution yougoslave ?

7 M. WHITING : [interprétation] Les deux, il me semble. Mais

8 aujourd'hui, ils ont affirmé que les Serbes de Krajina, dans leur propre

9 organisation qu'ils avaient appelé la SAO Krajina au cours des années 1990

10 et 1991, avaient le droit au titre de l'ancienne constitution croate de se

11 dire nation constitutive. Du fait qu'ils étaient une nation constitutive,

12 ils avaient le droit de faire ce qu'ils faisaient.

13 Mais les éléments de preuve montrent qu'il n'y avait absolument rien

14 de légal en ce qui concerne ce qui se passait en SAO Krajina en 1990 et

15 1991. Avant que la constitution croate ne change en

16 décembre 1990, il s'est passé déjà des choses qui étaient parfaitement

17 illégales, et les témoins de la Défense ainsi que les témoins de

18 l'Accusation ont été d'accord là-dessus. Il y avait déjà le fait que les

19 Serbes étaient en train de s'armer de façon illégale. Il y avait des

20 barricades qui étaient tenues par des Serbes et qui étaient illégales. Il y

21 avait le Conseil de la Résistance nationale qui était engagé dans les

22 provocations.

23 Les leaders serbes, y compris M. Martic, ont ouvertement renoncé --

24 ont ouvertement nié l'autorité des Croates et de la police croate, par

25 exemple. Ceci a été fait de façon publique et de facto en août 1990. On le

26 trouve d'ailleurs dans les pièces 4 et 5. Ensuite, officiellement, cela a

27 été fait le 4 janvier 1991. Il s'agit d'une pièce dont la cote m'échappe,

28 mais c'est une pièce où la SAO Krajina rejette officiellement l'autorité de

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1 la police croate. Il y a eu des provocations, il y a eu des communiqués de

2 presse émanant de M. Martic, qui n'étaient pas autorisés. D'ailleurs, il a

3 été suspendu de ses fonctions. Dire que ce qui s'est passé en 1990 en SAO

4 Krajina était tout à fait normal, suivait le droit et que les Serbes là ne

5 faisaient qu'exercer leurs droits en tant que nation constitutive n'est

6 absolument pas étayé par les faits.

7 Je parle encore, bien sûr, des faits, ensuite je parlerai de droit

8 international. Hier, la Défense a aussi affirmé que c'était la JNA qui

9 était en train de supprimer et d'essayer de supprimer cette rébellion armée

10 en Krajina et que la TO et la police de la SAO Krajina étaient, et je cite,

11 "loyaux envers l'Etat fédéral", et je cite à nouveau : "Ils avaient le

12 devoir de respecter tous les ordres émanant de l'Etat fédéral." Il s'agit

13 ici de la ligne 11 266 du compte rendu d'hier.

14 Il y a plusieurs choses à dire à propos de cette affirmation mis à

15 part ce que j'ai déjà évoqué, c'est-à-dire le fait qu'il ne s'agissait pas

16 d'une rébellion armée du fait de la Croatie contre la Yougoslavie. Il

17 s'agissait d'un Etat de la Yougoslavie qui était en train de se désintégrer

18 et différents leaders qui, chacun, était en train d'essayer d'influer sur

19 le cours même de cette désintégration. On parle ici de devoir, et cetera.

20 Or, personne n'a le devoir de rejoindre une entreprise criminelle commune

21 ou de se lancer dans des entreprises criminelles. Personne n'a le droit de

22 le faire ni la police ni les leaders serbes de Krajina, y compris

23 M. Martic. Dire que M. Martic est en train de suivre les ordres de la JNA

24 dans ses agissements est tout à fait erroné puisque rien ne peut autoriser

25 la commission de crimes.

26 De plus, là on est en train de raconter tout à l'envers. Il y a

27 beaucoup de preuves qui vont dans ce sens, puisque la réalité ce n'est pas

28 que la JNA était en train d'essayer d'étouffer la rébellion et de donner

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1 des ordres à la TO et à la police, c'était le contraire qui se passait.

2 D'ailleurs, on le voit à partir d'août 1990 que ce sont les leaders serbes

3 de la Krajina, y compris M. Martic, qui essaient d'attirer la JNA dans le

4 conflit, et ce, bien sûr, de leur côté. Ils essaient d'obtenir le soutien

5 de Belgrade et ils essaient d'obtenir le soutien de la JNA, mais ce sont

6 eux qui sont en première ligne dans le conflit.

7 Regardez la pièce 496. C'est une interview de M. Martic qui date

8 d'octobre 1994. Il parle d'août 1990 et dit qu'il a envoyé le message

9 suivant à Belgrade : Soit nous avons besoin d'armes, soit nous avons besoin

10 de la JNA pour nous protéger. Souvenez-vous de Plitvice et de ce qui s'est

11 passé à la fin mars 1991 et après. M. Martic dit - il s'agit de la pièce

12 207 - il dit : "Nous allons attendre pour voir ce que fait l'armée, mais si

13 l'armée ne fait rien, ce seront nos hommes qui prendront en charge le fait

14 de chasser les Croates hors d'ici."

15 C'est lui. Il est vrai de dire que si l'armée ne vient pas à leur

16 rescousse, ils prendront les choses en main eux-mêmes et c'est lui qui

17 dirigera les opérations. Il l'a dit et il le répète. Il y a énormément de

18 pièces qui montrent la coopération très étroite qu'ils avaient avec la JNA,

19 le fait qu'ils partagent les mêmes objectifs, que Slobodan Milosevic lui a

20 promis son soutien, lui a promis le soutien et des armes aussi. Souvenez-

21 vous, avant août 1991, la JNA est un peu un tampon qui essaie de faire le

22 tampon entre les deux côtés, les deux côtés, chaque partie étant, bien sûr,

23 les Serbes et les Croates. Chaque fois qu'il y a un conflit, chaque fois

24 qu'il y a une escarmouche, la JNA arrive et agit en tant que tampon. Ce

25 n'est qu'en 1991 que la JNA doit prendre la partie côté serbe, et après

26 août 1991, là, la JNA se range du côté des Serbes et combat pour les

27 Serbes. Ceci est d'ailleurs montré très clairement dans le livre de M.

28 Kadijevic, qui est la pièce numéro 24.

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1 En décembre maintenant, déclaration 1991, il s'agit de la pièce 917,

2 M. Martic est présent à la séance de la présidence de la RSFY. Il est en

3 train de se plaindre en disant que les leaders à Belgrade ne sont pas

4 suffisamment agressifs, qu'ils veulent bien accepter ce plan de paix qui a

5 été élaboré, le plan Vance, et lui, il est en train de dire qu'il ne veut

6 absolument pas de ce plan, qu'il préfère de loin la guerre à ce plan de

7 paix. M. Milosevic, ensuite, arrive à le persuader, à le convaincre et à

8 lui faire accepter le plan. Les preuves sont là. Ensuite, en février 1992,

9 il revient à nouveau. Il est à nouveau en train de parler avec les leaders

10 à Belgrade et en train de louer M. Milosevic pour le soutien qu'il obtient

11 de Belgrade.

12 On voit bien que la Krajina demande à Belgrade son soutien et demande

13 aussi le soutien de la JNA. Ils travaillent tous ensemble finalement. Il

14 n'y a aucune preuve qui montrerait que la TO et la police de la Krajina ne

15 font que suivre des ordres qui leur sont donnés par la JNA.

16 Maintenant, je vais parler du point de vue légal. Il y a plusieurs

17 questions légales dont il faudra discuter. Voici la première dont vous nous

18 avez parlé d'ailleurs, Monsieur le Président. Il s'agit de savoir si les

19 articles 3 et 5 - je vois que l'on m'aide un peu à ma droite. Je vais

20 pouvoir étayer mes arguments à l'aide d'arguments tout à fait légaux -

21 donc, il convient de savoir si les articles 3 et 5 s'appliquent aux

22 conflits internes aussi bien qu'aux conflits externes. L'article 3

23 s'applique sur tous conflits armés interne ou international. Avec

24 l'assistance de Mme Valabhji, je me réfère à l'arrêt dans l'affaire Galic,

25 au paragraphe 120. L'article 5 parle de façon explicite de crimes commis

26 dans un conflit armé, dans un conflit armé soit international, soit

27 interne.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que dans cet article on fait

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1 une distinction entre la guerre civile et la rébellion ?

2 M. WHITING : [interprétation] Non. Ce que j'ai cru comprendre dans les

3 arguments de la Défense, il s'agit de savoir si à l'époque il existait un

4 conflit armé. Le conseil de la Défense a cité les dispositions du Protocole

5 II des conventions de Genève, plus précisément l'article 1 et les

6 paragraphes 1 et 2. Il ne s'agit pas de savoir s'il s'agit d'une rébellion

7 armée ou la guerre civile et si quelque chose est légal ou illégal.

8 La question qui se pose, c'est de savoir s'il s'agissait d'un conflit

9 armé. A l'article 1, on donne la définition d'un conflit armé. Cela a été

10 bien étudié dans l'arrêt Tadic pour ce qui est du conflit armé, et dans

11 notre mémoire en clôture on en a parlé en détail. Il y a deux éléments :

12 c'est l'intensité du conflit et le degré de l'organisation des parties au

13 conflit, ce qui n'est pas inclus selon le paragraphe 2, et je pense que le

14 conseil de la Défense s'est peut-être référé à cela au moment où il a parlé

15 de la rébellion, je cite : "Ce protocole n'est pas appliqué aux situations

16 concernant les troubles internes et tensions internes comme rébellion ou

17 des actes de violence isolés ou sporadiques ou d'autres actes de nature

18 similaire qui ne sont pas considérés comme conflits armés." Donc, il s'agit

19 des rébellions, des événements isolés, des émeutes.

20 Mais ce n'est pas le sujet dont on discute ici. Il y a beaucoup de moyens

21 de preuve qui montrent cela, et je ne crois pas que la Défense puisse

22 s'opposer à cela, surtout lorsqu'on tient compte du fait qu'on a parlé de

23 façon exagérée de l'armement, des préparatifs du côté croate, de l'armée et

24 d'autres forces dont ils disposaient. Je ne dis pas que cela soit inexact

25 ou pas, mais je ne vois pas comment on peut contester qu'en août 1991 il

26 existait un conflit armé, compte tenu du degré d'organisation et de

27 l'intensité de ce conflit et de ces deux parties au conflit armé.

28 C'est pour cela que je vais énumérer encore quelques moyens de preuve.

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1 Rappelez-vous que la JNA, avant août 1991, a joué le rôle d'intermédiaire

2 ou de tampon au conflit. Il y avait deux parties dans ce conflit. Avant

3 août 1991, il y avait un cessez-le-feu. Il n'y a aucun doute là-dessus. Il

4 y a deux rapports qui ont été versés au dossier lors du contre-

5 interrogatoire du témoin de la Défense, M. Djukic - je n'ai pas le numéro

6 des pièces à conviction, mais il est facile de les retrouver - dans

7 lesquelles on peut voir que les violations de cessez-le-feu ont continué.

8 Il y avait des combats à grande échelle dans la région de la Banija en

9 juillet 1991 et à nouveau en septembre 1991. Il y avait des combats à

10 Kijevo. La pièce à conviction 491 est une pièce à conviction intéressante.

11 C'est le document qui représente une déclaration officielle faite par la

12 RSK, je crois, en 1992, où la date a été déterminée, la date du conflit

13 armé, et c'est la date du 17 août 1990.

14 Dans le livre de M. Kadijevic, ce qui représente la pièce à conviction 24,

15 on parle des différentes phases du conflit armé ou d'abord de la guerre. M.

16 Martic même a fait des déclarations qu'on avait citées dans notre

17 réquisitoire et notre mémoire en clôture. On a parlé des combats, de la

18 guerre, donc il n'y a aucun doute qu'en août 1991, il existait un conflit

19 armé, et les articles 3 et 5 sont applicables sans aucun doute. La question

20 qui se pose s'il s'agissait de la rébellion ou pas, donc la question ne se

21 pose pas. S'il existe un conflit armé, selon les articles qui le

22 définissent, donc ces articles sont appliqués.

23 La Défense a avancé un argument juridique. Je pense que je peux en

24 parler brièvement. Hier, on en a parlé et également aujourd'hui, et il

25 s'agit du fait que par les protocoles, l'intervention d'un pays tiers est

26 interdite. Ce qui est interdit, c'est qu'un pays tiers utilise les

27 protocoles comme la base pour intervenir, mais ici il ne s'agit pas de

28 cela, il ne s'agit pas d'un pays tiers qui serait intervenu ou qui a

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1 utilisé ces protocoles pour intervenir. Cela n'est pas applicable tout

2 simplement et cela n'a rien à faire avec l'analyse de la querelle entre les

3 combattants serbes et les forces serbes de la Krajina et la JNA de

4 Belgrade, d'un côté et de l'autre côté, du côté croate. Il n'y a pas de

5 pays tiers là-bas. C'est complètement inapplicable.

6 Maintenant, je vais aborder un autre sujet, à moins que vous n'ayez

7 d'autres questions sur ce sujet.

8 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Est-ce que je pourrais,

9 Monsieur Whiting, vous demander si cela concerne les arguments du conseil

10 de la Défense par rapport à l'article 3 et par rapport à l'intervention et

11 par rapport à la souveraineté ?

12 M. WHITING : [interprétation] Oui, je crois que oui. Quand il s'agit

13 de la question concernant la souveraineté de la Yougoslavie, ce n'est pas

14 la question qui concerne cette affaire. Rien dans cette affaire ne concerne

15 le fait si la souveraineté de la Yougoslavie a été violée de quelle façon

16 que ce soit par pays tiers. Cela ne change rien pour ce qui est des crimes

17 allégués ou par rapport aux moyens de preuve qui ont été présentés dans

18 cette affaire.

19 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je pensais plutôt aux

20 dispositions auxquelles vous vous êtes référé. Je vous remercie, j'ai pu

21 suivre votre argument. Je vous remercie, Monsieur Whiting.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous poser une question

23 par rapport à ce sujet avant que vous ne continuiez. Est-ce qu'on peut dire

24 quoi que ce soit par rapport à la pratique de ce Tribunal, quand il s'agit

25 du fait que cette pratique concerne des individus et non pas des Etats ?

26 Admettons qu'un pays tiers, un Etat tiers serait intervenu, comment cela

27 affecterait le fait que le Tribunal n'a pas de compétence judiciaire sur

28 les Etats ?

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1 M. WHITING : [interprétation] Oui, je pense que vous avez raison. Au

2 cas où un Etat se sera plaint que sa souveraineté a été violée par un autre

3 Etat, indépendamment du fait si cet Etat a cité le protocole II ou pas,

4 cela ne relève pas de la compétence de ce Tribunal. C'est exact. Je pense

5 que c'est quelque chose qui pourrait être soulevé devant un Tribunal, la

6 Cour pénale internationale, mais ce n'est pas la question qui se pose ici,

7 ce n'est pas la défense par rapport aux crimes.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Commis par les individus.

9 M. WHITING : [interprétation] Par les individus, oui. Je ne peux pas

10 dire si un Etat est intervenu dans le conflit et a cité le Protocole II,

11 donc cela n'affecte en rien cette affaire.

12 Maintenant, je voudrais parler d'un autre sujet, l'entreprise

13 criminelle commune. La Défense, pour la première dans cette affaire hier, a

14 avancé l'argument selon lequel l'entreprise criminelle commune n'est pas

15 couverte par le Statut, et c'est pour cela que M. Martic ne peut pas être

16 condamné sur cette base ou pour avoir participé à cette entreprise

17 criminelle commune. Pour cela, il y a plusieurs raisons.

18 La première raison, c'est que du point de vue de la procédure cette

19 question est résolue. Il s'agit de la constatation qui aurait dû être

20 avancée conformément à l'article 72 par une requête après que l'acte

21 d'accusation avait été dressé ainsi que des documents l'accompagnant. Selon

22 l'article 72, la Défense devrait avancer des exceptions préjudicielles.

23 Dans l'article 72(D), il est dit que cela englobe les requêtes qui

24 contestent l'acte d'accusation, et cela ne concerne pas la violation

25 envisagée aux articles 2 à 7 du Statut.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites que cela relève de la

27 question de la compétence ?

28 M. WHITING : [interprétation] Oui.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La question de la rébellion armée

2 relève aussi de la question de la compétence ?

3 M. WHITING : [interprétation] Non, c'est une question factuelle, et on en a

4 parlé beaucoup durant le procès.

5 J'aimerais dire une dernière chose par rapport à la rébellion armée.

6 C'est un conflit armé. Hier et aujourd'hui, la Défense n'a jamais contesté

7 qu'il s'agissait du conflit armé dans la région. Si vous regardez les

8 questions posées aux témoins, il était tout à fait clair qu'il s'agissait

9 du conflit armé dans cette région, auquel les deux parties avaient

10 participé. Nous citons un témoin de la Défense qui a parlé de dates du

11 conflit armé.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce que j'ai essayé de dire, c'est que

13 depuis le début du procès la Défense disait que ces troubles, ils ne

14 représentaient pas un conflit armé, et que dans ce cas-là on aurait pu

15 poser la question de la compétence. A notre avis, il ne s'agit pas du

16 conflit armé comme la Défense l'a dit, et les articles 3 et 5 ne peuvent

17 pas être appliqués.

18 M. WHITING : [interprétation] Je pense que c'est quelque chose qu'on ne

19 peut pas rejeter, à moins que cela n'ait été soulevé avant le procès.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

21 M. WHITING : [interprétation] Je voudrais dire que ces citations, de cela

22 on parle de façon générale dans l'arrêt Celebici, au paragraphe 640, et

23 dans l'arrêt Naletilic, au paragraphe --

24 Lorsqu'il s'agit de l'entreprise criminelle commune par rapport au Statut,

25 c'est une question qui a été beaucoup discutée devant ce Tribunal.

26 Cela a été clairement résolu, et cela est relié par le Statut. Ce

27 n'est pas la première fois que l'entreprise criminelle commune est

28 contestée, l'existence de cette entreprise est contestée. J'aimerais dire

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1 que dans l'arrêt Tadic, aux paragraphes 220 et 226, on en parle. Ensuite,

2 dans la décision dans Ojdanic - j'ai peut-être mal prononcé cela, je ne

3 peux pas correctement prononcer cela -- dans la décision par rapport à la

4 requête déposée à Ojdanic, c'est la date du

5 21 mai 2003 au paragraphe 30.

6 Ensuite, dans l'affaire Karemera, devant le tribunal pour le Rwanda,

7 il s'agit ensuite de la décision de la Chambre d'appel concernant la

8 question de l'entreprise criminelle commune du

9 12 avril 2006, paragraphe 13. Il est clair que par rapport aux

10 dispositions, cela est reconnu, l'entreprise criminelle commune est

11 reconnue comme une forme de responsabilité. C'est dans le cadre de

12 l'article 7(1) du Statut.

13 Troisièmement, la Défense n'a pas bien cité le droit applicable

14 devant ce Tribunal. Il ne s'agit pas uniquement des déclarations du Conseil

15 de sécurité, mais aussi du droit coutumier. J'aimerais également dire que

16 dans la décision dans l'affaire Ojdanic du 21 mai, au paragraphe 9, et la

17 décision dans l'affaire Hadzihasanovic suite à l'appel interlocutoire, on

18 cite que c'est une forme de responsabilité. Cette décision date du 16

19 juillet 2003, et c'est le paragraphe 44. Le droit coutumier a également une

20 source pour cela.

21 L'Accusation a présenté des éléments que nous avons dû prouver au-

22 delà de tout doute raisonnable, et je pense que nous l'avons fait.

23 Ensuite, le sujet suivant, c'est Skabrnja. La Défense a présenté

24 plusieurs arguments par rapport à Skabrnja, et je vais répondre brièvement

25 à ces arguments. La Défense affirme que --

26 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je m'excuse. La Défense n'a présenté

27 aucun argument par rapport à Skabrnja. Je pense que l'on n'a pas permis de

28 le faire. De quoi le Procureur parle-t-il ? Nous n'avons pas mentionné cela

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1 dans nos plaidoiries parce que nous n'avions pas été autorisés par vous de

2 le faire.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne sais pas ce que le Procureur

4 veut dire par rapport à Skabrnja. Je ne dis pas que vous n'avez pas raison

5 pour dire cela. Permettons-lui de dire ce qu'il veut dire, et après on va

6 voir.

7 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Vous ne pouvez pas décider de voir

8 d'abord ce que le Procureur va dire. De mon côté, je n'ai rien dit sur

9 Skabrnja. Il n'a pas le droit de parler de Skabrnja. Je demande à la

10 Chambre de rendre une décision là-dessus, parce que selon le Règlement

11 c'est à la Chambre d'en statuer.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez une réponse à

13 cette objection, Monsieur Whiting ?

14 M. WHITING : [interprétation] Oui. Je vais répondre à des affirmations

15 particulières qui ont été présentées. C'est au compte rendu d'hier, à la

16 page 11 273. L'affirmation est la suivante : "Le 20 novembre 1991, Split,

17 Zadar, Zemunik, l'aérodrome à Zemunik ont été bloqués." Je vais parler de

18 cela.

19 M. LE JUGE MOLOTO : A Split, à Zadar, Zemunik, est-ce que c'est comme

20 Skabrnja ?

21 M. WHITING : [interprétation] Non, mais c'était dans le contexte dans

22 lequel on a parlé de Skabrnja. C'était au début du paragraphe. C'est Me

23 Milovancevic qui a parlé. "Il a confirmé qu'à Skabrnja, les unités étaient

24 sur les lignes jusqu'à un certain point dans le temps."

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites que c'est à la ligne 11

26 273 ?

27 M. WHITING : [interprétation] Oui. C'est au compte rendu d'hier.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'hier, oui.

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1 M. WHITING : [interprétation] Il s'agit des points qu'il a soulevés par

2 rapport à Skabrnja, et je veux répondre à cela, à ce qu'il a dit en parlant

3 de cela.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La ligne 11 273.

5 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

7 Maintenant, je regarde la page 11 273. Il est écrit sur cette page : "Il a

8 confirmé qu'à Skabrnja, les unités étaient sur les lignes jusqu'à un

9 certain dans le temps, c'est-à-dire jusqu'à

10 11 heures 30, après quoi les lignes ont été percées." M. Milovancevic a

11 parlé de cela hier, et vous avez parlé de Skabrnja. Votre objection est

12 rejetée, Maître Milovancevic.

13 Monsieur Whiting, vous pouvez continuer.

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Permettez-moi de prononcer une phrase,

15 une seule phrase.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic.

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'ai parlé de la rébellion armée en tant

18 que sujet général, et la question de Skabrnja, je n'ai pas parlé de cela.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez mentionné Skabrnja. Vous

20 avez mentionné ici Skabrnja. Il faut qu'on entende maintenant ce que M.

21 Whiting va dire de Skabrnja.

22 M. WHITING : [interprétation] Je vais répondre plus spécifiquement à ce

23 qu'a dit M. le conseil de la Défense. Il a dit que le 20 novembre 1991,

24 Split, Zadar et Sibenik et l'aéroport à Zemunik ont été bloqués. Cela n'a

25 pas été corroboré par les moyens de preuve. Selon les moyens de preuve, on

26 peut dire qu'en octobre, il y avait un cessez-le-feu qui a été appliqué et

27 respecté sans aucun problème. Le témoin de la Défense Lakic a dit que les

28 avions décollaient de l'aéroport de Zemunik en novembre 1991, et il n'y a

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1 pas de moyens de preuve selon lesquels ces localités ont été bloquées le 20

2 novembre 1991.

3 La deuxième affirmation, cela se trouve dans le paragraphe suivant, sur la

4 même page. L'utilisation de cet équipement n'était pas possible parce que

5 toutes les routes ont été bloquées. Encore une fois, les moyens de preuve

6 nous démontrent la chose contraire. Toutes ces routes n'ont pas été

7 bloquées. La JNA a utilisé d'autres routes, et les témoins étaient

8 cohérents par rapport à leurs témoignages sur ce point.

9 Finalement, par rapport à ce sujet, la Défense encore une fois, s'est

10 référée au témoignage de Marko Miljanic. Je voudrais dire encore une fois,

11 mais cela a été déjà dit avant, mais je voudrais encore une fois dire que

12 la Défense a choisi de façon sélective des portions de son témoignage, et

13 nous appelons la Chambre à lire son témoignage dans son intégralité et de

14 voir quel est le contexte, de voir ce qui s'est passé à Skabrnja et ce que

15 ces hommes ont fait à Skabrnja et quel était l'objectif de leurs actes.

16 Parlant de Bruska, le conseil de la Défense, selon nous, a spéculé

17 lorsqu'il a dit que la raison pour laquelle les hommes qui se sont rendus

18 jusqu'à l'appartement de Jasna Denona et qui ont frappé sur la porte de son

19 appartement et que la raison pour laquelle ils se sont présentés en tant

20 que les membres de la police de Martic étaient pour qu'ils leur ouvrent la

21 porte. Cette théorie n'a aucun sens. Même en novembre en 1991, si vous

22 aviez voulu entrer dans une maison à Bruska, vous ne vous seriez pas

23 présenté en tant que membre de la police de Martic, parce que selon les

24 moyens de preuve, on peut dire que la police de Martic venait dans ce

25 village, et pendant des semaines avant que cela arrive. Mais frapper sur la

26 porte et dire que vous êtes policier de Martic pour que quelqu'un vous

27 ouvre là-bas, là cette théorie n'a aucun sens. Selon les moyens de preuve,

28 on peut dire qu'ils ont tiré sur la porte. Ils ont commencé à tirer avant

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1 d'être entrés dans la maison.

2 Le deuxième problème par rapport à cette spéculation est qu'on omet

3 le fait qu'Ante Marinovic a témoigné qu'il a vu que ces hommes non

4 seulement se sont présentés en tant que la police de la SAO de Krajina,

5 mais qu'ils portaient aussi les uniformes de la police de la SAO de

6 Krajina, et cela, c'est un peu exagéré, dire que ces hommes ont mis des

7 uniformes rien que pour entrer dans la maison.

8 La Défense a suggéré, et c'est un peu bizarre, que les Serbes ont

9 traité correctement Mme Denona à l'hôpital, ce qui est vrai. Elle a

10 témoigné là-dessus. Elle a témoigné qu'elle était restée avec les Serbes

11 pendant une année. Mais en tout cas, il ne faut pas dire que c'est le

12 mérite de M. Martic pour cela, parce que cela n'a rien à faire avec la

13 police.

14 Pour savoir ce que Mme Denona a pensé de tout cela, il faut se

15 référer à la page 1 299 du compte rendu, où M. Milovancevic a posé la

16 question suivante : "Madame Denona, vous avez survécu à un événement

17 atroce, et à part le fait que vous étiez sérieusement, gravement blessée et

18 que 10 hommes ont été tués à cette occasion, est-ce que vous avez parlé

19 avec vos amis et vos parents des motifs de cet acte atroce ?"

20 Son explication était : "La seule explication était que nous étions

21 Croates. Il n'y avait pas d'autres raisons pourquoi les civils innocents,

22 et moi en particulier, auraient été un obstacle pour qui que ce soit.

23 J'avais 15 ans seulement à l'époque."

24 Il y a un détail dont je voudrais parler. Hier, le conseil de la

25 Défense a dit que le témoin MM-78 a témoigné par rapport à la politique des

26 autorités de la Krajina qui consistait à expulser les Croates de leurs

27 domiciles et de leurs villages où ils vivaient. Il a dit qu'il s'agissait

28 de la RSK, de la police de la RSK, mais selon le contexte de son

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1 témoignage, il est clair qu'il a parlé de la SAO de Krajina, parce qu'il a

2 parlé de l'année 1991 et de Potkonje, de Vrlika et de Drnis. Le conseil de

3 la Défense a suggéré qu'il s'agissait des réponses données aux questions du

4 Procureur, mais en fait, c'est ce que le témoin a témoigné lors du

5 contre-interrogatoire. Son témoignage, donc c'étaient les réponses aux

6 questions du conseil de la Défense.

7 Le sujet suivant, c'est Milan Babic. Tout d'abord, le Procureur n'a pas

8 avancé ses arguments sur un seul témoin. Il n'a pas basé tous ses arguments

9 sur un seul témoin. Babic est un témoin important, mais il n'est pas le

10 seul. Tout ce qu'il a dit a été corroboré par les faits, par ce qui s'est

11 passé sur le terrain et par ce que les autres témoins ont raconté. Le

12 conseil de la Défense a l'air de dire que M. Babic était dérangé,

13 psychiquement dérangé et instable au moment où il a déposé. C'est pour cela

14 qu'il en arrive à la conclusion que sa déposition ne devrait pas être prise

15 en compte.

16 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Excusez-moi, mais nous, on nous

17 parlait plutôt d'un déséquilibre émotionnel, et je pense que c'est encore

18 plus précis.

19 M. WHITING : [interprétation] Très bien, donc émotionnellement instable.

20 Très bien.

21 Tout d'abord, la Commission de Parker, c'est un rapport dont la Défense a

22 parlé hier. Je n'ai pas objecté, je n'ai pas soulevé d'objection. Peut-être

23 que j'aurais dû. Je pense que ce rapport ne figure pas parmi les pièces à

24 conviction en l'espèce, et il était tout à fait inapproprié de le lire

25 devant les Juges de la Chambre. Il a été lu de façon sélective, vous

26 induisant en erreur. De toute façon, ce n'est pas un élément de preuve et

27 il ne devrait pas être pris en compte.

28 Ensuite, le fait que M. Babic s'est suicidé n'indique absolument pas

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1 de façon certaine qu'il était émotionnellement instable et que c'est pour

2 cela que sa déposition n'était pas fiable. Je pense que cet argument a déjà

3 été rejeté aussi bien par la Chambre de première instance que par la

4 Chambre d'appel. A nouveau, si les Juges de la Chambre devaient à nouveau

5 réfléchir à ce sujet, je pense qu'il faudrait à nouveau qu'ils rejettent

6 cet argument puisqu'on ne peut pas en arriver à une telle conclusion. On ne

7 peut pas dire que sa déposition n'est pas fiable par le simple fait qu'il

8 s'est suicidé. Il n'y a pas de lien entre les deux.

9 Ensuite, il faudrait aussi noter que M. Babic a été interrogé très

10 longuement par le bureau du Procureur, c'était en 2002. Ceci a commencé

11 peut-être même en 2001. Il a aussi déposé dans l'affaire Milosevic très

12 longuement en 2002. Il a aussi fourni des bases factuelles pour son

13 plaidoyer de culpabilité en 2003, et tout cela s'est passé avant qu'il

14 n'ait été condamné à une peine de 13 années d'emprisonnement, alors que le

15 conseil de la Défense essaie de dire que c'est à partir du moment où M.

16 Babic a été condamné que les choses se sont dégradées, que sa situation

17 psychique s'est dégradée.

18 Le conseil de la Défense a eu la possibilité d'attirer l'attention

19 des Juges de la Chambre sur toute incohérence éventuelle entre la

20 déposition de M. Babic devant cette Chambre de première instance et toutes

21 les autres interviews ou dépositions qu'il a données avant de déposer en

22 l'espèce. Le conseil de la Défense a effectivement réussi à montrer

23 certaines incohérences qui sont relativement mineures par rapport aux

24 interrogatoires qu'il a subies de la part du bureau du Procureur, mais il

25 n'a pas réussi à démontrer, par rapport à la déposition dans l'affaire

26 Milosevic ou par rapport aux entretiens qui ont précédé son plaidoyer de

27 culpabilité. En ce qui concerne les incohérences qui existent par rapport

28 aux interrogatoires du bureau du Procureur, aucune ne concerne les faits

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1 qui sont au cœur même de l'entreprise criminelle commune et de la

2 responsabilité pénale de M. Martic.

3 Tout simplement, il est clair qu'on ne peut pas en arriver à la

4 conclusion que ses dépositions n'étaient pas incohérentes, puisque ses

5 dépositions, tout ce qu'il disait était incohérent pendant des années. Même

6 s'il était devenu émotionnellement instable pendant le procès ou après,

7 ceci n'échange aucunement sa déposition puisqu'il a déjà déposé sur le même

8 fait avant cela.

9 La Défense aussi a essayé de montrer qu'il n'existait pas

10 d'entreprise criminelle commune, puisque les membres, les participants à

11 ces entreprises criminelles communes pouvaient ne pas être d'accord sur

12 leur propre stratégie, le pouvoir, et cetera. Le Procureur ne peut pas

13 accepter cela, puisque de toute façon, ils ont poursuivi un but commun, un

14 objectif joint. Le fait qu'ils se soient disputés quant à la façon

15 d'aboutir à cela ou à la façon de faire n'échange rien à l'existence d'un

16 objectif commun.

17 M. Martic a eu aussi des disputes avec Frenki Simatovic et Milan

18 Babic au sujet du pouvoir; c'est bien clair. Au mois de décembre 1991, les

19 dirigeants de la Krajina serbe étaient plus agressifs dans leur approche

20 que les dirigeants de Belgrade. C'est évident si vous lisez, par exemple,

21 la pièce 917, la session de travail de la présidence. Mais n'empêche qu'en

22 dépit de toutes ces différences et rivalités, ils oeuvraient à obtenir un

23 objectif comment les éléments de preuves qui démontrent cela.

24 La Défense, aujourd'hui a attiré votre attention sur la

25 pièce 236, cette lettre que M. Babic a écrit au mois de

26 septembre 1991, la conférence de La Haye qui est rempli, farci des termes

27 extrémistes. Malheureusement, à l'époque ceci n'était très étonnant,

28 puisqu'il y avait plein d'autres documents qui étaient tout à fait

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1 semblables. La Défense a longuement contre-interrogé M. Babic au sujet de

2 ces documents, vous allez vous en rappeler.

3 On a lu l'intégrité de ces documents. A ce moment-là, on lui a posé

4 une question qui a été posée aujourd'hui aussi par le conseil de la Défense

5 en lui demandant : "Comment vous avez pu raconter cela à l'époque alors

6 qu'aujourd'hui vous dites autre chose ?" M. Babic a répondu que c'était

7 effectivement une exagération. Qu'il a effectivement exagéré. Ensuite, il

8 disait qu'il disait autre chose parce qu'il a reconnu que ce qu'il faisait

9 ce n'était pas bien, que c'était un comportement criminel. Il exagérait

10 dans ce qu'il disait à l'époque et ce n'était pas exact aujourd'hui. Après

11 son plaidoyer de culpabilité, il a assumé sa responsabilité, il trouve que

12 ce n'était pas bien, il dit autre chose.

13 Ensuite, concernant M. Babic, la Défense a contre-interrogé

14 M. Babic concernant les points-clés de sa déposition par rapport à

15 l'entreprise criminelle commune et par rapport à leur thèse de défense par

16 rapport à ces entreprises criminelles communes telles qu'elles sont. Je ne

17 veux pas analyser cela en détail, mais nous avons dans notre écriture en

18 date du 6 avril 2006 parlé de cela, et ceci, par rapport à la déposition de

19 M. Babic au niveau du

20 paragraphe 39 jusqu'au paragraphe 43. Il s'agit d'une analyse très

21 détaillée à ce sujet et je voudrais que cette référence figure dans notre

22 réquisitoire puisque l'analyse figure déjà dans ces paragraphes.

23 Ensuite, nous allons aborder le thème suivant, le thème de la peur.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de passer à cela, j'ai une

25 question à poser. M. Babic a été accusé dans l'acte d'accusation de la

26 participation prétendue dans l'entreprise criminelle commune. Dans le

27 réquisitoire du Procureur au niveau du paragraphe 82, on dit que M. Milan

28 Babic a accepté la responsabilité pour son rôle dans l'entreprise

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1 criminelle commune en l'espèce.

2 Cependant, quand vous faites référence aux paragraphes 283 au 284 du

3 mémoire en clôture du Procureur, les membres, différents membres,

4 différents participants participant à l'entreprise criminelle commune sont

5 énumérés et le nom de M. Babic n'y figure pas. Est-ce que c'est un oubli

6 par rapport du Procureur ? Comment cela se fait-il que son nom n'y est

7 pas ?

8 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je

9 suis absolument désolé. C'est une omission. Je vous remercie vraiment

10 d'avoir attiré mon attention là-dessus. Il est absolument participant à

11 cette entreprise criminelle commune.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie.

13 M. WHITING : [interprétation] Le prochain thème est le thème de la

14 peur. Le conseil de la Défense dit que les dirigeants serbes agissaient

15 comme ils ont agi à cause de la peur des autorités croates, et M. le

16 conseil de la Défense a choisi un terme assez intéressant, il a parlé du

17 "mal" quand il a parlé des autorités croates. Ceci figure au niveau de la

18 ligne 11 281 du compte rendu d'audience. Il y a plusieurs points à faire à

19 ce sujet là-dessus.

20 Tout d'abord …

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous venez de tirer mon attention sur

23 le fait que cette omission que vous avez faite, une omission vraiment

24 sérieuse et vous devriez peut-être corriger cela. On vient d'attirer mon

25 attention là-dessus. Est-ce que vous venez de faire cette correction

26 oralement ?

27 M. WHITING : [interprétation] Oui, et je vous demande conformément de

28 changer ce paragraphe et d'inclure M. Babic.

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Nous vous accordons

2 ce changement.

3 M. WHITING : [interprétation] Le premier argument que je souhaite avancer

4 par rapport à cette peur, Monsieur le Président.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, est-ce que vous

7 avez quoi que ce soit à ajouter au sujet de cet ajour, de cette correction

8 par rapport au mémoire en clôture du Procureur ?

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Nous sommes tout à fait d'accord pour

10 que ceci soit corrigé.

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

12 En acceptant cette correction, nous souhaitons qu'il apparaisse au compte

13 rendu d'audience qu'il existe des preuves qui vont à l'appui de cette

14 correction.

15 M. WHITING : [interprétation] Par rapport à la peur, tout d'abord, le

16 Procureur n'a jamais souhaité, voulu dire quelque chose exagéré, à savoir

17 que les Serbes en Croatie n'avaient pas de raison d'avoir peur. Bien sûr

18 qu'il existait des peurs, des craintes. Les Serbes devenaient une minorité,

19 une minorité en Croatie après avoir eu une position dominante en

20 Yougoslavie. Effectivement, il y a eu souci, des peurs à cause des

21 déclarations extrémistes qui ont été publiées et rendues publiques par des

22 Croates. Effectivement, il y avait des peurs, parce que ce n'était pas

23 seulement la Yougoslavie qui se démantelait, c'était le communisme tout

24 entier qui disparaissait. Un nouveau pays se profilait. M. Babic a parlé de

25 cela et lui aussi il avait ses peurs.

26 Ce que le Procureur dit, c'est que les Serbes ont exploité ces peurs, les

27 ont exagérées et les ont utilisées à leurs fins. Et là se trouve la

28 différence, une différence de taille. Parce que ce n'est qu'une chose que

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1 d'avoir des craintes pour votre futur pour ce qui va se passer à l'avenir,

2 sur la façon dont un Etat va être organisé à l'avenir ou les questions

3 politiques, et c'est tout autre chose de reparler à l'infini des Oustachi,

4 des exterminations biologiques, du génocide, des meurtres, et cetera. Ceci

5 a commencé très tôt. On a commencé de parler de tout cela en 1990.

6 C'est justement ces exagérations-là qui font que la coexistence, la

7 cohabitation devient impossible. C'est cela qui mène à la séparation des

8 différents groupes ethniques, à la haine ethnique, au conflit, aux crimes.

9 C'est justement ces discours-là qui sont bien différents des craintes

10 ordinaires, des peurs ordinaires, normales, des craintes normales que

11 différents groupes ethniques pouvaient avoir ou avaient en Yougoslavie et

12 dans d'autres pays. C'est cela qui a incité la commission des crimes et la

13 poursuite de l'entreprise criminelle commune en l'espèce. Les dirigeants

14 serbes, au vu du démantèlement de la Yougoslavie, ont choisi la voie du

15 nationalisme et de l'extrémisme et du conflit ethnique. C'est eux qui ont

16 fait ce choix.

17 Ensuite, cette question de peur, ce n'est pas une défense de l'entreprise

18 criminelle commune quelle que soit la façon dont ces peurs se

19 matérialisent. Même s'il s'est matérialisé de la façon dont la Défense le

20 prétend, cela ne diminue aucunement l'existence de l'entreprise criminelle

21 commune ou son importance. On allègue dans l'acte d'accusation qu'il y

22 avait une entreprise criminelle commune visant à enlever les Croates d'un

23 Etat dominé par les Serbes. Si cela était fait à cause de la peur, et bien,

24 ce n'est pas un moyen de défense. La loi ne disparaît à cause de la peur, à

25 cause de l'existence de la peur. C'est justement là ce qui est le plus

26 important, que la loi doit exister. Elle a sa raison d'être. C'est facile

27 de respecter la loi quand il n'y a pas de conflit, quand il n'y a pas de

28 peur, quand il n'y a pas de guerre.

Page 11400

1 C'est justement pas à cause des guerres, à cause de peur, à cause des

2 menaces, à cause du nationalisme, qu'il est important que les personnes

3 comme Milan Martic prennent la responsabilité de commandant, de personne

4 qui est le commandant de la police, assume sa responsabilité et respecte la

5 loi. La peur ne vous permet pas de ne pas respecter la loi, cela ne vous

6 permet pas d'ignorer la loi.

7 C'est intéressant que la Défense s'appuie justement sur la déposition

8 de M. Dzakula.

9 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Est-ce que la peur peut vous

10 inciter à agir pour se défendre ? Comment liez-vous cela aux faits qui nous

11 ont été présentés ?

12 M. WHITING : [interprétation] C'est intéressant, parce que le conseil

13 de la Défense a dit lui-même qu'il ne s'agissait pas là d'une autodéfense.

14 Même s'il s'agissait d'une autodéfense, cela ne veut pas dire -- même si

15 vous agissez pour votre propre défense, cela ne vous permet pas, parce que

16 vous vous défendez et parce que c'est une autodéfense et parce que vous

17 avez peur, d'agir de façon illégale. Vous ne pouvez pas tout simplement

18 pour ces raisons créer un Etat par la force et chasser la population croate

19 par la force en commettant des crimes. Parce que c'est tout simplement pas

20 possible, parce que sinon, on se trouverait très rapidement dans toutes

21 sortes de conflits armés dans cette spirale infernale qui est

22 particulièrement dangereuse.

23 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vous remercie de continuer.

24 M. WHITING : [interprétation] Il est intéressant de noter que la Défense

25 s'appuie sur la déposition de M. Dzakula, notre premier témoin, pour

26 corroborer le fait que les Serbes avaient peur et étaient inquiets. Nous

27 considérons qu'ils n'ont tout simplement pas compris de quoi parlait M.

28 Dzakula. Puisque M. Dzakula, au cours de son contre-interrogatoire, a

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1 effectivement évoqué les inquiétudes et les peurs des Serbes en Croatie,

2 qui étaient inquiets à cause des nouveaux symboles croates, à cause de la

3 nouvelle constitution croate, à cause du fait que la Croatie a pris la voie

4 de l'indépendance. Rappelez-vous qu'il a aussi déposé qu'au mois de juillet

5 1991, que lui et les autres ont créé le Forum démocratique serbe - ceci

6 figure à la page 350 du compte rendu d'audience - dont l'objectif était

7 d'empêcher la guerre.

8 Au mois d'août 1991, il a créé la SAO de la Slavonie occidentale.

9 L'objectif était de commencer à négocier avec les Croates. Au mois de

10 février 1993, il a pris part à l'accord de Daruvar, l'objectif étant de

11 commencer la réconciliation, entamer la réconciliation avec les Croates. Il

12 était aussi en faveur du plan Z-4 en 1995. Donc, je lui ai posé des

13 questions additionnelles pour essayer de faire les liens entre les deux

14 choses, parce qu'il a parlé de la peur, de l'anxiété, de l'inquiétude qui

15 existait, que les Serbes avaient en 1990 et 1991, la peur des symboles, des

16 institutions et de l'indépendance, et en même temps il fait tout pour

17 favoriser une initiative paisible.

18 C'est justement à la page 604 à 605 dans le compte rendu d'audience

19 que vous trouvez la réponse. Je ne vais pas tout lire parce que c'est assez

20 long. Je lui demande : Pourquoi vous faites cela si vous avez peur ? Ce

21 qu'il répond, c'est - je vais citer une partie : "Nous savions que les

22 Serbes et les Croates avaient peur, les deux, et nous savions qu'aussi bien

23 les citoyens croates que les citoyens serbes de Croatie étaient des otages

24 de ces deux types de politiques qui étaient pratiquement identiques, même

25 si elles étaient opposées." Autrement dit, nous avons été des otages de

26 l'extrémisme, du nationalisme.

27 Le conseil de la Défense a parlé de ses parents. Aussi il en a parlé,

28 parce qu'il avait une expérience directe de la Deuxième Guerre mondiale,

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1 puisque ses propres parents sont passés par les camps de concentration

2 pendant la Deuxième Guerre mondiale. Des membres de sa famille ont été tués

3 dans ces camps, les frères de son père, par exemple. Quand on lui a posé

4 une question à ce sujet, il a dit qu'il a appris à faire la différence

5 entre les Croates qui ont commis ces crimes et les autres Croates, puisque

6 justement ses parents ont été libérés du camp, sont sortis du camp avec

7 l'aide des Croates.

8 En dépit de son expérience directe personnelle de ces événements, il

9 a compris que tous les Croates n'étaient pas des Oustacha, qu'ils n'étaient

10 pas tous menaçants, qu'un génocide allait se produire. Il savait qu'on

11 pourrait faire le choix, qu'ils avaient le choix à faire entre l'extrémisme

12 et le nationalisme, le conflit ethnique et une autre voie. M. Dzakula a

13 choisi cette autre voie. Le Témoin MM-78 a aussi choisi cette autre voie.

14 M. Martic, non, il ne l'a pas choisie. M. Babic ne l'a pas choisie. M.

15 Milosevic ne l'a pas choisie. D'autres membres, les autres membres de cette

16 entreprise criminelle commune ne l'ont pas choisie. Ils ont choisi au

17 contraire la voie de la séparation ethnique, du conflit, de la création

18 d'un Etat par la chasse, le déplacement forcé des Croates de cet Etat.

19 C'est ce qu'ils ont choisi. Ceci ne leur a pas été imposé. C'était leur

20 choix.

21 Le conseil de la Défense a aussi dit que M. Dzakula a fourni des

22 éléments de preuve concernant les crimes commis par des Croates dans la

23 région de Pakrac et dans la Slavonie occidentale pendant l'automne 1991. Si

24 vous lisez ce qu'il a dit, ce qui est écrit dans sa déposition, surtout sa

25 déposition précédente qui est la pièce 830, il a parlé des crimes qui ont

26 été commis aussi bien par des Serbes que par les Croates dans la Slavonie

27 occidentale. De façon générale, il a dit que les crimes serbes ont précédé

28 les crimes commis par de Croates. Je voudrais attirer votre attention sur

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1 la page 10 428 jusqu'à 29 du compte rendu d'audience, et ceci a été

2 corroboré également par le témoin de la Défense 105, aux numéros de pages

3 du compte rendu d'audience 10 515 jusqu'à 10 519.

4 Monsieur le Président, je pense qu'il me reste encore une dizaine de

5 minutes, mais peut-être le moment est-il opportun de prendre la pause à

6 présent, ou souhaitez-vous que je continue ?

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous pouvons terminer.

8 M. WHITING : [interprétation] Très bien. Pas de problème, Monsieur le

9 Président.

10 Le dernier point que je voulais aborder est un point qui a été présenté

11 aujourd'hui. Il s'agit de la modification de la constitution qui a eu lieu

12 en décembre 1990, la modification à la constitution croate. Tout d'abord,

13 je tiens à dire que je ne soutiens pas ce qu'a affirmé le conseil de la

14 Défense, donc le fait qu'il y ait des nations constitutives et le lien avec

15 la Deuxième Guerre mondiale. Je ne pense pas que ce soit étayé par quoi que

16 ce soit. Je pense que l'histoire est bien plus compliquée. En fait, il

17 s'agit de républiques multiethniques qui existent et qui coexistent au sein

18 d'un Etat fédéral. C'est à vous, bien sûr, Messieurs les Juges, de

19 déterminer ce qui s'est véritablement passé, mais l'explication se trouve

20 dans les faits qui ont été présentés lors de la présentation des moyens.

21 Ce qui est le plus important maintenant, c'est de savoir ce que la Chambre

22 de première instance va en faire. Nous, on parle du prix des œufs. Vous, en

23 anglais, aux Etats-Unis, vous parlez du prix du beurre --

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, nous parlons du prix du fromage.

25 M. WHITING : [interprétation] Très bien, très bien. Cela dit, toutes ces

26 métaphores anglaises veulent dire que ce qui est important, c'est la

27 conséquence du changement, et rien d'autre. Nous avons entendu de nombreux

28 témoins de la Défense en parler et nous avons demandé à tous les témoins

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1 quelle était la conséquence de cette modification de constitution et ce que

2 cela signifiait véritablement. Nous n'avons jamais eu de réponse à notre

3 question. La seule réponse que nous avons eue, c'est que cela signifie que

4 les Serbes pouvaient empêcher la Croatie de devenir indépendante. Mais cela

5 ne semble pas être vraiment très logique, puisque les conséquences n'ont

6 pas été suivies de faits finalement. Cela contredit parfaitement les

7 conclusions de la Commission Badinter qui sont au dossier et qui ont

8 démontré tout d'abord que la Croatie n'a pas fait sécession depuis la

9 Yougoslavie, mais que c'est plutôt la Yougoslavie qui a été désintégrée. De

10 plus, les droits à "l'autodétermination des groupes, particulièrement des

11 Serbes, au sein de la Croatie, ne signifie pas qu'ils avaient droit à une

12 souveraineté territoriale, mais qu'ils avaient droit à jouir de tous les

13 droits qu'un groupe minoritaire pouvait avoir au sein d'un groupe".

14 Ce qui est le plus important en l'espèce, cela dit, c'est que cela ne

15 permet pas du tout de défendre ce point. Ce changement de position ne

16 permet absolument pas de défendre l'entreprise criminelle commune. Il est

17 impossible de croire que les choses auraient été différentes si la position

18 n'avait pas changé.

19 Or, le fait qu'il y ait eu des modifications à la constitution ne

20 change pas les faits, puisque de toute façon les faits ont eu lieu. Et on

21 ne peut pas dire que finalement les leaders serbes ont eu le droit de se

22 lancer dans une entreprise criminelle commune visant à chasser les Croates

23 de leurs territoires pour créer un Etat dominé par les Serbes, en étayant

24 ceci par le fait qu'il y a eu une modification de constitution. Ce n'est

25 pas autorisable.

26 Je tiens à faire remarquer que bien avant la constitution croate soit

27 adoptée en décembre 1990, les dirigeants serbes, y compris M. Martic,

28 avaient rejeté l'autorité croate sur la SAO Krajina. Pour ce qui est

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1 maintenant des différentes attaques qui ont eu lieu et qui ont été à

2 l'initiative du côté croate après 1992, je pense que le fait que l'argument

3 de la Défense selon lequel ceci est bien la preuve qu'il y avait un plan

4 croate, un plan délibéré croate, ne tient pas debout, puisque tout ceci est

5 postérieur à la plupart des crimes qui sont présentés dans l'acte

6 d'accusation. Cela ne peut en aucun cas servir de défense à ce qui est

7 allégué dans l'acte d'accusation.

8 Nous avons entendu à de nombreuses reprises que le peuple serbe, du

9 fait du changement de la constitution, ne pouvait plus dire et qu'il

10 voulait rester en Yougoslavie. Il n'avait plus voix au chapitre, si je puis

11 dire. Or, ce n'est pas vrai puisque la constitution a été adoptée en 1990.

12 Mais en mai 1991, les Serbes ont organisé un référendum, un référendum au

13 cours duquel ils ont exprimé le désir de rester en Yougoslavie. Il y a bien

14 eu un référendum. Ce référendum a connu une grande participation, donc ils

15 ont eu voix au chapitre. M. Martic, d'ailleurs, en a parlé dans la pièce

16 973. Il a fait référence à cette voix qui s'est élevée du côté serbe, donc

17 ils ont bel et bien eu voix au chapitre.

18 Ensuite, le conseil de la Défense a cité une pièce à plusieurs

19 reprises - il me semble que c'est la pièce 346 - il s'agit du rôle de la

20 communauté internationale. Je ne vais pas l'aborder, d'ailleurs, mis à part

21 sur un point. A part cette réunion avec M. Thornberry et ce que M.

22 Thornberry aurait soi-disant dit, de toute façon cette réunion a eu lieu en

23 1993. C'est tout à fait clair, d'ailleurs. Mais voici ce que je tiens à

24 dire. Tout d'abord, le procès-verbal n'est pas du tout le procès-verbal

25 officiel de cette réunion, puisque c'est un procès-verbal qui a été préparé

26 par le côté serbe. Personne n'a pu l'authentifier, personne n'était présent

27 à cette réunion, donc personne ne peut vraiment jurer de l'authenticité de

28 ce que M. Thornberry aurait ou n'aurait pas dit lors de cette réunion. Il

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1 faut bien quand même le garder à l'esprit quand on parcourt ce PV de

2 réunion.

3 M. Martic ensuite est censé avoir dit ce qui suit, ce qui, à notre avis,

4 confirme bien qu'il faisait bel et bien partie de l'entreprise criminelle

5 commune.

6 Puisqu'il dit, et je cite : "Il faut expliquer quand même que la

7 cohabitation entre Croates et Serbes dans un seul Etat est tout à fait

8 impossible à cause de la politique génocidaire de la Croatie. Nous voulons

9 être séparés en deux Etats." "Nous voulons être séparés" et la

10 "cohabitation" est absolument impossible. Cela, c'est le but qui a été

11 poursuivi en 1990, 1991, 1992, 1993, et par la suite. Ils voulaient un Etat

12 séparé; que les Croates aient leur Etat, nous aurons le nôtre. Notre plan

13 commun comprenait l'éviction forcée des Croates de l'Etat qui serait serbe.

14 Ceci a été, à notre avis, tout à fait prouvé, démontré au-delà de tout

15 doute raisonnable, et nous demandons donc instamment à la Chambre de

16 première instance de condamner M. Martic au titre de tous les chefs de

17 l'acte d'accusation.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting. Cela

19 met un terme visiblement à votre réquisitoire. Nous allons maintenant faire

20 une pause. Nous reprendrons à midi et demi.

21 --- L'audience est suspendue à 12 heures 06.

22 --- L'audience est reprise à 12 heures 31.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, si vous le

24 voulez, les Juges vous autorisent à prononcer votre réplique.

25 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

26 M. Perovic va traiter de deux points, ensuite je prendrai la parole.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Perovic, vous avez la parole.

28 M. PEROVIC : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs, Madame les

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1 Juges. Je vais tout d'abord vous dire quelques mots à propos de moi-même,

2 donc je vais me présenter. Je ne peux être impressionné que par les faits.

3 J'ai travaillé en tant que magistrat, juge et avocat pendant des années. Il

4 n'y a que les faits pour moi qui comptent, rien d'autre, que ce soit dans

5 cette enceinte ou ailleurs. Je vais faire référence à la rébellion armée de

6 la Croatie contre le gouvernement central de la RSFY qui existait à

7 l'époque. Il s'agit du sujet qu'a abordé M. Whiting lors de sa réplique.

8 Les faits sont absolument clairs et évidents.

9 En 1990 et 1991, les autorités de l'époque de Croatie ont fait leurs

10 préparatifs et, en 1991, ils ont mis en œuvre leur rébellion armée contre

11 l'Etat qui existait à l'heure actuelle et le gouvernement qui existait à

12 l'heure actuelle et qui était la RSFY.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Parlez un petit peu moins vite, s'il

14 vous plaît.

15 M. PEROVIC : [interprétation] Je vais essayer. Je poursuis.

16 En 1990, les autorités qui étaient au pouvoir à l'époque en Croatie, le

17 HDZ, se sont préparées pour ce qui allait arriver en 1991. Ces préparatifs

18 ont été couronnés, si je puis dire, par la nouvelle constitution croate

19 rédigée en 1990, en décembre 1990. Il s'agit d'un document qui refusait aux

20 Serbes, Serbes qui avaient jusqu'alors eu le statut de nation constitutive,

21 donc dans ce document le droit à l'autodétermination était nié aux Serbes.

22 Ils ne pouvaient plus décider de leur propre destin, quant à savoir s'ils

23 allaient continuer à cohabiter ou s'ils allaient cohabiter dans ce nouvel

24 Etat croate ou s'ils allaient continuer à vivre dans l'Etat qui avait

25 existé jusqu'à présent. La constitution de 1990 a nié aux Serbes ce droit,

26 leur a ôté ce droit qui était le leur jusqu'à présent.

27 En 1991, dès le printemps 1991 et jusqu'à la fin de l'année, les

28 autorités croates au pouvoir se sont lancées dans une rébellion armée

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1 contre leur propre Etat, puisqu'il s'agissait d'un seul Etat reconnu

2 internationalement à l'époque sur ce territoire. Il s'agissait de la RSFY.

3 Je ne vais pas poursuivre ce point puisque ce n'est pas contesté.

4 Ce qui est contesté en revanche, à mon avis, c'est la position qu'a

5 prise l'Accusation par rapport à ce sujet. Il s'agit ici de la

6 désintégration d'un Etat. Je tiens à dire que c'est la première fois que

7 j'entends ce type d'argument, puisque je pensais qu'il n'y avait

8 désintégration que pour un corps, il s'agit d'un terme médico-légale. Des

9 cadavres se désintègrent, des substances organiques se désintègrent, se

10 décomposent. Je n'ai jamais entendu que l'on ait appliqué ce terme à un

11 Etat. Or, je considère que la RSFY ne s'est pas désintégrée. Elle a été

12 démantelée suite à des facteurs internes qui ont agi de concert avec la

13 communauté internationale. Voici ce qui s'est passé.

14 La constitution de 1990 a été abordée à de nombreuses reprises ici.

15 Cela dit, jusqu'à présent, nous n'avons jamais entendu la justification qui

16 expliquerait pourquoi le droit des Croates, qui étaient aussi une nation

17 constitutive jusqu'à présent, serait supérieur au droit des Serbes qui

18 était l'autre nation constitutive en Croatie, qui aurait eu le droit de

19 rester dans l'Etat qui existait jusqu'alors. Je suis convaincu - et c'est

20 étayé par de nombreuses preuves, d'ailleurs, des moyens de preuve - je suis

21 convaincu que ces deux droits étaient égaux, et ces deux droits auraient dû

22 être traités de façon égale et identique.

23 Or, le conflit de 1991 a éclaté justement à cause de cette

24 constitution de décembre 1990. C'est la constitution de décembre 1990 qui a

25 provoqué le conflit armé qui a commencé en 1991. En effet, les Serbes se

26 sont rendu compte qu'on leur avait ôté leur statut de nation constitutive,

27 ce qui signifiait qu'on leur avait aussi ôté le droit à l'autodétermination

28 en tant que nation. C'est la seule façon, à mon avis, d'envisager ce qui

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1 s'est passé. En 1991, il y a eu un putsch armé des autorités croates de

2 l'époque contre le gouvernement central, et il s'agissait ici d'un coup qui

3 visait à faire une sécession violente et illégale d'une unité fédérale

4 envers l'Etat fédéral.

5 Ceci n'est pas contesté, c'est étayé. On ne peut pas dire que l'Etat s'est

6 désintégré, parce que c'était un Etat malade, parce qu'il était fiévreux ou

7 ceci ou cela. Ce sont des symptômes médicaux. Cela s'applique à la

8 médecine. Cela ne s'applique pas à la constitution. Cela ne peut pas

9 s'appliquer à un Etat.

10 La Yougoslavie ou la RSFY a existé jusqu'au printemps 1992, point final. En

11 1992, cette nouvelle entité, la République de Croatie, nouvelle créature,

12 si je puis dire, a été reconnue par plusieurs Etats de l'Union européenne.

13 M. Milovancevic en a parlé d'ailleurs, mais on ne peut pas dire, parce que

14 quelques membres de l'Union européenne faisaient que ce nouveau pays

15 devenait un sujet international. Absolument pas. Ce statut n'a été acquis

16 que plusieurs mois plus tard, quand il a été admis en tant que membre des

17 Nations Unies, ce qui signifie que jusqu'au printemps 1992, au sein du

18 territoire de l'ex-Yougoslavie, il n'y avait qu'un sujet international,

19 qu'une seule entité internationale; il s'agissait de la RSFY. Ce que les

20 autorités croates ont fait au cours de la période pertinente à l'acte

21 d'accusation en 1991 est une rébellion armée contre l'Etat fédéral central,

22 qui était le seul Etat existant. C'est la seule façon d'envisager les

23 choses.

24 Maintenant, je comprends quand même le dilemme auquel a été confronté M.

25 Whiting quand il essayait de comprendre quelles étaient les raisons qui ont

26 fait que les Serbes avaient le même statut constitutionnel que Croates,

27 alors qu'il y avait beaucoup moins de Serbes que de Croates. M. Whiting ne

28 sait peut-être pas cela, mais j'ai passé 60 ans dans cet Etat. Je le

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1 connais bien; j'y suis né. Cette solution constitutionnelle a été édictée

2 suite à ce qui s'était passé lors de la Deuxième Guerre mondiale et suite

3 au génocide qui a été commis contre la nation serbe par l'Etat indépendant

4 de Croatie.

5 Pour empêcher que cela ne se répète en 1945 ou que cela se répète à

6 quelque moment que ce soit, la constitution croate a été rédigée de façon à

7 ce que les Serbes aient le droit de se considérer comme une nation

8 constitutive, tout comme les Croates, même si les Croates étaient en

9 majorité en Croatie. Grâce à cette solution constitutionnelle, les Serbes

10 étaient sûrs que ce qui leur avait été infligé en 1941 et en 1945 ne se

11 répéterait jamais.

12 En insistant pour exercer leur droit à l'autodétermination, les Serbes,

13 n'ont en aucune façon, gêné la demande légitime des Croates, qui était

14 d'avoir leur propre Etat indépendant. Il y avait un droit légitime, tout

15 comme tout autre nation constitutive de Croatie y avait droit aussi. Ils

16 pouvaient opter pour autre chose d'ailleurs, opter, par exemple, de vivre

17 au sein de la Yougoslavie qui existait encore à l'époque. Les droits des

18 Serbes n'étaient en aucun cas moins importants que les droits des Croates.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Perovic, seriez-vous d'accord

20 avec moi pour dire que M. Martic n'est pas accusé d'avoir insisté de

21 bénéficier de son droit à l'autodétermination ? Vous êtes d'accord avec

22 moi, quand même ? Ce n'est pas de cela qu'il est accusé.

23 M. PEROVIC : [interprétation] Non, je ne suis pas tout à fait d'accord avec

24 vous, puisque je pense que la sécession très violente de la Croatie est la

25 cause même, la racine même de tous les autres événements, tout ce qui est

26 arrivé après, au cours des cinq à six années qui ont suivi. C'est de cela

27 que je parle. S'il n'y avait pas eu cette tentative de sécession violente

28 de la Croatie, il n'y aurait pas de Milan Martic, il n'y aurait pas eu de

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1 RSK et il n'y aurait pas eu d'affaire, cette affaire qui nous est présentée

2 depuis plus d'un an. Mais la racine, c'est ce qui est arrivé en Croatie. Ce

3 conflit entre Serbes et Croates résulte de ce qu'a fait ce conseil des

4 autorités croates quand ils ont essayé de faire sécession de quelque moyen

5 que ce soit de la Yougoslavie.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais poser la question

7 différemment. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que M. Martic et la

8 RSK ont fait ce qui leur est reproché, ce qui est en tout cas reproché à M.

9 Martic aujourd'hui, à cause des agissements de la Croatie ? C'est cela que

10 vous êtes en train de nous dire ? Vous êtes en train de nous dire qu'à

11 cause des agissements violents de la Croatie, M. Martic et la RSK de

12 l'époque ont pu et ont eu le droit finalement de faire les choses qui leur

13 sont reprochées dans l'acte d'accusation ?

14 M. PEROVIC : [interprétation] Ce n'est pas mon opinion, bien sûr. Je ne

15 pense pas que M. Martic ni qui que ce soit de ce qui s'est appelé à

16 l'époque la SAO Krajina et plus tard la RSK avait le droit de commettre des

17 crimes du fait des agissements des autorités croates. Quant à savoir s'ils

18 ont commis des crimes, oui ou non, là ce sera à la Chambre d'en décider.

19 Je ne pense pas que M. Martic soit coupable des chefs de l'acte

20 d'accusation et je tiens à dire que son comportement, ses agissements dans

21 les situations qui nous ont été décrites, ainsi que les agissements de tous

22 les dirigeants de la RSK, ne peuvent être décrits que comme une réaction.

23 Ils ont été obligés d'agir de la sorte. Voici ce que je tenais à dire pour

24 répondre à l'Accusation. Maintenant, parlons du témoignage de Milan Babic.

25 Il n'est absolument pas contesté qu'en septembre 1991, Milan Babic,

26 dans la lettre qu'il a adressée à la conférence qui avait lieu à La Haye à

27 l'époque sur la Yougoslavie, il ait écrit ce qu'il a écrit. Nous avons tous

28 lu ses propos à un moment ou un autre. Quand il a témoigné ici, il a parlé

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1 de quelque chose qui est tout à fait contraire à ce qui avait été écrit

2 dans sa lettre à l'époque. Là, j'attire l'attention des Juges sur le fait

3 que cette lettre qui avait été envoyée à la conférence de La Haye en

4 septembre 1991, avait été écrite par Milan Babic, Milan Babic, homme libre.

5 Ce n'est pas n'importe qui. Il avait quand même une fonction officielle et

6 il avait un certain pouvoir.

7 Ensuite, il est complètement revenu sur les propos de lettre et a dit

8 complètement le contraire, mais il l'a fait après avoir fait son accord de

9 plaidoyer avec l'Accusation. Il faut bien s'en souvenir puisque tout

10 d'abord, il a écrit une lettre en tenant de propos dans le cadre de son

11 statut d'homme libre, ensuite il s'est retrouvé, que ce soit délibérément

12 ou non, lié par un accord de plaidoyer avec l'Accusation. Il est bien

13 évident qu'il espérait obtenir quelque chose en retour de cet accord de

14 plaidoyer. Quant à savoir ce qu'il attendait et ce qu'il espérait, nous

15 n'en saurons jamais rien puisqu'il n'est plus avec nous.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans votre thèse, pourriez-vous nous

17 dire quelles sont ces contradictions entre la lettre qu'il aurait écrite en

18 1991 et ce qu'il a dit après avoir fait son accord de plaidoyer ? Pourriez-

19 vous nous éclairer un petit peu là-dessus ?

20 M. PEROVIC : [interprétation] Bien sûr. Dans la lettre envoyée en septembre

21 1991 à la conférence de La Haye, Milan Babic parle exclusivement du statut

22 des Serbes qui sont une minorité en Croatie. Il déclare que les Serbes en

23 Croatie sont confrontés à une situation difficile et complexe. Il dit que

24 les autorités croates ont manifesté une certaine violence envers les

25 Serbes. Je ne tiens pas à répéter les propos tenus dans la lettre, mais

26 quand il est venu témoigner ici, en revanche, il a dit des choses tout à

27 fait différentes. Il concédait que les Serbes et que lui-même, en tant que

28 l'un des dirigeants de la RSK ainsi que d'autres fonctionnaires de la RSK,

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1 auraient plus ou moins paniqué délibérément les Serbes pour que les Serbes

2 se retournent contre la Croatie et les Croates.

3 C'est ce qu'il a dit, ce qui est complètement contraire à son

4 opinion, l'opinion qu'il a exprimée dans sa lettre. Dans sa lettre de 1991,

5 il disait que c'était la violence employée par les autorités croates qui

6 avait poussé les Serbes à se défendre et à agir, à faire en sorte de

7 préparer leur défense. Toutes les différences entre la lettre et son

8 témoignage sont des éléments qui deviendront extrêmement clairs quand les

9 Juges se pencheront dessus.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, mais j'en reviens à la question

11 que je vous ai posée il y a quelques minutes. Vous nous dites que M. Babic,

12 dans sa lettre de 1991, avait dit que les gens de la RSK réagissaient à la

13 violence. J'essaie de retrouver vos termes exacts. Vous avez dit qu'il a

14 dit que la violence des autorités croates à l'époque a poussé les Serbes à

15 se défendre.

16 Je vous ai demandé il y a quelques minutes de me dire si vous aviez

17 dit que l'accusé a été accusé à cause de la violence envers les Croates.

18 Vous avez dit que non. Vous avez dit que c'était la position de Babic en

19 tant que dirigeant, en tant qu'un homme libre qui a essayé d'avancer cela à

20 la conférence de La Haye.

21 Ma question est la suivante : à cause de la violence des Croates, les

22 Serbes dans la RSK ont fait ce qui est allégué dans l'acte d'accusation

23 comme étant l'autodéfense, n'est-ce pas ? Vous avez dit qu'ils n'ont fait

24 que se défendre.

25 M. PEROVIC : [interprétation] Maintenant, je comprends mieux votre

26 question. A aucun moment je n'exclus la possibilité que du côté serbe, des

27 crimes ont été commis. Il y en avait, mais je suis tout à fait sûr, et

28 c'est ce que j'ai dit au début de mes arguments, ces crimes et d'autres

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1 actes liés à Martic et à la RSK n'auraient pas eu lieu s'il n'y avait pas

2 eu de sécession violente, et c'est de cela que j'ai parlé. Le conflit armé

3 entre les Croates et les Serbes en Croatie a provoqué des crimes des deux

4 côtés, et je ne les justifie nullement. C'est quelque chose qui est au-delà

5 de tout doute raisonnable. Pour ce qui de la responsabilité de M. Martic,

6 la responsabilité éventuelle pour l'un de ces crimes, c'est quelque chose

7 qui n'est pas sûr, qui est douteux, et c'est la Chambre qui rendra la

8 décision là-dessus.

9 Lorsque j'ai parlé des contradictions, lorsqu'il s'agit des actes de

10 Milan Babic, je considère que le Tribunal aura la possibilité de qualifier

11 la gravité de ces moyens de preuve en tenant compte des circonstances dont

12 je parlais. J'ai encore deux phrases à prononcer. Lorsqu'il s'agit de ce

13 témoin et de sa déposition, il s'est suicidé au cours de la présentation de

14 moyens de preuve, au cours de sa déposition, en fait. De cette façon, selon

15 moi - et je pense qu'il n'est pas nécessaire d'être médecin - que cela a

16 montré qu'il était dans une grande mesure déséquilibré. Quelqu'un qui se

17 suicide ne peut pas avoir une sorte d'équilibre psychique. Au moment où il

18 a déposé, il s'est suicidé, et à cause de cela il faut se poser la question

19 logique si sa déposition a une valeur et mérite une attention, si l'on sait

20 qu'il a déposé dans un tel état de santé. J'ajouterais --

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant que vous n'ajoutiez quoi

22 que ce soit, je voudrais - je m'excuse de vous avoir interrompu - je

23 voudrais m'assurer qu'on utilise les mêmes termes. Dans la traduction, il

24 figure que vous avez dit qu'il avait des "troubles psychiques", d'ordre

25 psychique. Est-ce que vous avez parlé d'une sorte de déséquilibre "mental"

26 ou "émotionnel" ?

27 M. PEROVIC : [interprétation] Je vais répondre. J'ai utilisé le terme

28 "déséquilibre". Le déséquilibre est être déséquilibré, parce que quand il

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1 s'agit de la médecine, je ne suis pas expert, mais je pense que le

2 déséquilibre psychique, c'est quelque chose, une étape psychique qu'on peut

3 remarquer chez quelqu'un facilement. Après avoir étudié la médecine légale,

4 je peux vous dire que les gens qui se suicident ne sont pas les gens qui

5 sont équilibrés psychiquement, et le fait qu'au moment de sa déposition il

6 s'est suicidé, à cause de cela j'ai des raisons pour mettre des doutes par

7 rapport à son état mental au moment de sa déposition. Bien sûr, c'est à la

8 Chambre d'en trancher.

9 Nous avons - et là je pense à la Défense - ce n'était pas de notre

10 faute que le procès ait été interrompu par son suicide. A cause des

11 dépositions de ce témoin, on nous a privés de moyens pour en finir avec la

12 déposition de ce témoin. On s'est trouvé dans une position inégale, et ici

13 je ne veux pas donc objecter à l'adresse de qui que ce soit, mais je pense

14 qu'on nous a porté préjudice à cause de cela.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Mais avant de vous rasseoir, je

16 vous ai posé une question concernant le déséquilibre émotionnel ou mental,

17 et en essayant à répondre à ma question, vous avez prononcé le terme

18 "mental" dans la traduction à plusieurs reprises. Il nous est clair que

19 vous n'êtes pas expert pour ce qui est des questions de la médecine, mais

20 je veux savoir si vous avez parlé de "déséquilibre émotionnel" ou "mental"

21 ?

22 Je vous pose cette question parce qu'il y avait une correction qui a

23 été apportée aujourd'hui, et j'aimerais savoir quelle est la position de la

24 Défense par rapport à l'état de santé de M. Babic. Est-ce que la Défense

25 considère qu'il était "déséquilibré pour ce qui est de son état mental", ou

26 son "état émotionnel" ? Compte tenu du fait que nous ne sommes pas experts

27 par rapport à ces questions et que nous n'avons pas de moyens de preuve

28 d'expert dans ce domaine de médecin légiste. C'est une spéculation. Pouvez-

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1 vous donc choisir un terme ?

2 M. PEROVIC : [interprétation] Selon mon expérience professionnel et en tant

3 qu'homme, je pense qu'il s'agissait du déséquilibre psychique. Mais c'est

4 une spéculation, je ne suis pas expert dans le domaine. Je ne suis pas

5 psychiatre.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Je ne vous

7 ai pas donné le droit d'émettre des spéculations. Vous avez déjà spéculé

8 avant que je n'aie dit cela. A la page 74, à la ligne 1, vous avez dit :

9 "Le fait qu'il s'est suicidé au cours du procès me donne le droit de

10 penser", que c'est comme cela que vous avez exprimé votre opinion, et

11 c'était une spéculation avant que le mot spéculation ait été utilisé.

12 M. PEROVIC : [interprétation] Je comprends cela, mais c'est justement pour

13 cela que j'ai utilisé le terme de déséquilibre. Je n'ai pas parlé de

14 détails. Donc, c'est un terme qui n'est pas un terme spécialisé ou d'un

15 expert.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Perovic.

17 Maître Milovancevic.

18 M. PEROVIC : [interprétation] Je vous remercie.

19 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Maître Perovic, avant que vous ne

20 finissiez avec vos arguments, j'aimerais donc attirer votre attention sur

21 un point dont vous avez parlé. Le témoignage de M. Babic n'est pas fiable,

22 et on ne peut pas s'appuyer sur son témoignage, compte tendu des

23 circonstances de sa mort. C'est pour cela qu'on ne peut pas s'appuyer sur

24 son témoignage. Mais vous vous souvenez que l'Accusation a présenté un

25 argument selon lequel il y avait des moyens de preuve à étayer cela.

26 C'était la réponse donnée au président Moloto, et ce qui a été souligné

27 encore une fois par rapport à un autre point.

28 Lorsqu'il s'agit des moyens de preuve, des témoignages des Témoins

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1 MM-079 et MM-03, on peut considérer cela comme étant un moyen de preuve qui

2 corrobore, qui étaye d'autres témoignages sur lesquels la Chambre peut

3 s'appuyer au cas où une condamnation serait rendue. C'est quelque chose qui

4 évite à ce que la Chambre ne soit pas en mesure de s'appuyer sur ces

5 témoignes de ces témoins.

6 M. PEROVIC : [interprétation] Le témoignage de Babic, je l'ai mis en doute

7 sur deux points. D'abord, parce qu'il s'est suicidé, et deuxièmement, ses

8 actes contradictoires. C'est pour cela que j'ai énuméré les différences qui

9 existent entre ces deux points. Il ne faut pas que je répète cela. Quant

10 aux témoins qui prétendument selon l'Accusation confirmaient le témoignage

11 de Milan Babic, pour ce qui est des dépositions de ces témoins, je ne

12 voudrais pas en parler maintenant. Mon collègue, Me Milovancevic, en

13 parlera. Mais je dois dire parce que je sais de quel témoin il s'agit, des

14 Témoins MM-03 et MM-079, que par rapport à ces témoins, que je ne pense pas

15 que leurs témoignages représentent la confirmation significative de ce que

16 Milan Babic a dit devant le Tribunal, surtout pour ce qui est du témoignage

17 du Témoin MM-079. Pour ce qui est du Témoin MM-03, hier dans la

18 présentation de ses arguments, Me Milovancevic l'a disqualifié en tant que

19 témoin fiable, et il en parlera un peu plus plus tard.

20 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Je vous remercie, Maître Perovic.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, vous avez la

22 parole.

23 M. PEROVIC : [interprétation] Merci.

24 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

25 Dans les contre-arguments, le Procureur a dit que la raison principale de

26 la commission des crimes est la vision que les Serbes avaient sur un Etat

27 séparé, et que la création de la SAO de Krajina et par la suite de la RSK

28 n'était pas en conformité avec la constitution croate, et que rien n'était

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1 régulier en Croatie, que pour cela les crimes ont été commis. Mais les

2 arguments de la Défense contredisent cela. La pièce à conviction 237, la

3 transcription de la conversation entre le ministre de la Défense de la

4 Croatie, le général Spegelj, et le ministre de la Police de la Croatie --

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, je suis désolé de

6 faire cela, mais l'interprète a traduit que rien en Croatie n'était

7 régulier. Corrigez-moi si j'ai tort. Je pensais qu'il avait dit que rien

8 n'était régulier dans la SAO de Krajina ou dans la RSK.

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie de m'avoir attiré mon

10 attention sur cela. Je voulais souligner cette phrase du Procureur. Il a

11 dit : Rien n'était régulier dans la Krajina par rapport à la Croatie. Je me

12 suis mal exprimé. Je n'étais pas précis quand j'ai dit cela. Je vous

13 remercie.

14 M. LE JUGE HOEPFEL : [interprétation] Je m'excuse, Maître Milovancevic.

15 Pour pouvoir suivre de façon claire, vous répondez par rapport à quel point

16 maintenant, à quel point par rapport à la république du Procureur ?

17 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'est par rapport à ce que le Procureur

18 a dit par rapport à la vision d'un Etat séparé, la vision qui était celle

19 des Serbes en 1991, et ce que tout ce que les Serbes ont fait par rapport à

20 cela n'était pas régulier. C'était l'essence des arguments présentés par le

21 Procureur dans sa réplique. Par rapport à cela, la Défense ne fait que

22 souligner que les dispositions constitutionnelles de la constitution de la

23 Croatie et de Yougoslavie ont prévu de façon explicite de l'auto-

24 organisation des municipalités, et seulement des municipalités. Il y avait

25 beaucoup de témoins qui ont témoigné sur le fait que la tentative des

26 autorités croates après les élections de 1990 de, entre autres, priver les

27 municipalités de leur droit de s'auto-organiser, était une raison pour le

28 rassemblement en Srb le 25 juillet 1990.

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1 Nous pensons que la vision d'un état indépendant serbe, loin avant 1990,

2 était la raison pour ces crimes. Je pense que le Procureur inverse,

3 retourne les faits. La pièce à conviction 237 est la transcription de la

4 conversation entre Spegelj et Boljkovac; Spegelj, ministre de la Défense,

5 et Boljkovac, ministre de la police. En octobre 1990, donc, avant toute

6 organisation effective des Serbes, où Bojlkovac dit : Le problème de Knin

7 va être résolu par le massacre. C'est Spegelj qui a dit cela. Et Bojlkovac

8 lui répond : Et le problème de Knin va être résolu par la disparition de

9 Knin en tant que Knin. Nous allons utiliser des armes. Rien ne sera comme

10 avant. Les Croates doivent savoir que nous allons créer un Etat à tout

11 prix.

12 Ce sont les propos qui ont été enregistrés dans la pièce à conviction

13 qui a été présentée devant ce Tribunal, et la question se pose elle-même,

14 comment les Serbes, la population serbe aurait dû réagir à de telles

15 intentions des autorités croates les plus hauts placés. Monsieur le

16 Président, il ne leur a pas été nécessaire de les entendre à ce moment-là.

17 Vingt-et-un témoins de la Défense ont confirmé quels étaient les événements

18 sur le terrain, et de cela parlent les pièces à conviction 1013 et 1014

19 d'Amnesty International pour ce qui est de la campagne de terreur et des

20 disparitions sur le territoire de la Croatie et sur une campagne

21 généralisée, surtout contre la population serbe qui n'a pas accepté

22 l'indépendance de la Croatie.

23 D'ailleurs, au tout début du réquisitoire, M. le Procureur a cité au

24 moins cinq moyens de preuve où il a cité peut-être tout à fait précisément

25 les propos de M. Martic, qui ne sont pas contestables, selon moi, où M.

26 Martic a dit : "Et nous, nous allons défendre nos foyers." Pour ce qui est

27 de la présidence de la Yougoslavie et conformément à l'acceptation du plan

28 de Vance, il a dit : Par notre sang, nous allons défendre nos territoires.

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1 Et jamais M. Martic n'a dit que la Défense de son propre territoire et de

2 leurs propres foyers engloberaient là l'anéantissement des Croates. C'est

3 seulement ce qui figure dans le réquisitoire du Procureur.

4 Par rapport aux commentaires du Procureur que la JNA, la TO et la

5 police ont coopéré - et par rapport au point de vue de la Défense qu'ils

6 étaient loyaux à l'Etat - le colonel Radislav Maksic, un témoin de

7 l'Accusation a expliqué en détail que selon les compétences de l'armée et

8 de l'Etat fédéral, qu'il s'agissait d'une rébellion armée, que la JNA était

9 subordonnée à la présidence, que la police avait pour devoir de participer

10 à des actions, et même, il a expliqué, ce témoin, M. Maksic, que l'armée ne

11 pouvait pas ordonner à la police de participer à cette action, mais elle

12 aurait dû selon la législation en vigueur à l'époque s'adresser au

13 ministère des Affaires intérieures, en leur demandant qu'une unité leur

14 soit envoyée, et il y avait des réunions qui ont été tenues lors desquelles

15 on a décidé qu'une unité de la police aurait, par exemple, participé à des

16 opérations militaires.

17 Il est intéressant que pour le Procureur il suffit de constater qu'à

18 un endroit, à un point, ils étaient ensemble, à savoir les représentants du

19 ministère, la JNA ou la police, indépendamment sur quelle forme c'était. Le

20 Procureur a oublié le témoignage de son témoin, du témoin de l'Accusation

21 selon lequel lors des opérations de l'armée fédérale en janvier 1991, il

22 arrivait que toutes les unités soient re-subordonnées aux unités de la JNA;

23 toutes les unités de la TO et toutes les unités de la police ont été re-

24 subordonnées au commandant de la JNA.

25 Le colonel Maksic a expliqué de façon explicite que le commandant de

26 l'unité de la JNA répondait du respect de la législation, de la discipline,

27 tout acte commis et de violations éventuelles des dispositions légales, et

28 que le commandant de l'unité de la JNA auquel ont été re-subordonnées les

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1 unités de la TO de la police avaient pour devoir d'entamer des procès. Le

2 commandant de l'unité de laquelle ces hommes étaient venus, par exemple

3 d'une unité de la TO ou d'une unité de la police, pour être re-subordonnés

4 à cette unité plus grande de la JNA qui opérait, est-ce que le commandant,

5 par exemple, de la police ou de la TO peut engager des poursuites pénales,

6 c'est leurs membres qui, sur le commandement de la JNA, auraient commis des

7 crimes. Le colonel Maksic, le témoin de l'Accusation a dit que ce n'était

8 pas possible selon la législation en vigueur. C'est seulement le commandant

9 de l'unité qui opère, peut faire cela. Et la Défense ne souligne pas cela

10 pour renvoyer la responsabilité aux autres, mais indique que le témoignage

11 du général Djukic selon lequel -- c'est en 1991 seulement au 9e Corps,

12 pendant quelques mois, 332 plaintes criminelles ont été déposées contre les

13 auteurs présumés de crimes.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Milovancevic, est-ce que

15 c'est pertinent pour ce qui est de la responsabilité de commandement de M.

16 Martic ? Il est certain que si vous acceptez le fait que certaines unités

17 qui appartenaient au département de M. Martic ont été subordonnées à la

18 JNA, on se pose la question, qui ? On ne peut pas savoir si le commandant

19 de ces unités aurait pu punir les auteurs de crimes qui étaient au sein de

20 cette unité au moment où le commandant de la JNA n'a pas fait ainsi. Cela

21 m'est clair, le commandant de la JNA n'est pas accusé ici pour cela. La

22 personne qui se trouve à la tête de cette unité, comme M. Martic par

23 exemple, après le retour des unités, il aurait dû prononcer des sanctions

24 disciplinaires à leur égard. Il aurait dû recevoir le rapport de ces unités

25 selon lequel les membres de cette unité auraient commis des crimes sous le

26 commandement de la JNA, et que c'est répréhensible. Est-ce que M. Martic

27 était en mesure de faire quoi que ce soit par rapport à cela, est-ce que

28 quelque chose a été fait par rapport à cela ? Vous comprenez cela ?

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'ai une remarque à faire. M. Martic n'a

2 jamais été commandant d'une unité. Il était ministre des Affaires

3 intérieures, et il exécutait ses pouvoirs conformément à la loi. Il n'a

4 jamais commandé au sein d'aucune unité.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est ce que je voulais dire. C'était

6 ma question. Cela m'est clair. C'est pourquoi que je dis ici, il n'y a pas

7 général. Nous avons ici les autorités politiques, les autorités qui sont

8 au-dessus du général lui-même, et le commandant de la TO et de la police.

9 Nous disons, voilà, c'est lui qui avait le plus grand pouvoir et le

10 commandant sur le terrain. Il m'est clair que les commandants ont été

11 subordonnés à la JNA, et si les membres de leurs unités commettent des

12 crimes et la JNA ne fait rien pour les punir, est-ce que ce sont eux qui

13 doivent transmettre l'information à Martic en disant : Monsieur Martic, ce

14 sont les membres de nos unités de la police, par exemple, qui ont fait

15 cela, il faut les punir.

16 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je vous remercie. Je comprends cela.

17 Le colonel Maksic, le témoin de l'Accusation, a expliqué que l'unité

18 qui a participé au combat en supposant qu'il s'agissait d'une unité de la

19 JNA, d'une unité de la TO et d'une unité de la police ont été commandés par

20 l'officier de la JNA le plus haut gradé. Nous avons vu dans les documents

21 que l'officier qui commande l'unité au combat répond de tout ce que les

22 membres de cette unité font, indépendamment du fait qu'il s'agit de l'unité

23 de la TO et de la police militaire. Notamment, Maksic a également expliqué

24 qu'il est expert pour ce qui est des questions liées à la TO et était

25 officier au sein de l'état-major du général. Il a expliqué

26 qu'essentiellement l'officier de la JNA peut engager des poursuites pénales

27 contre d'éventuels auteurs de crimes d'infractions pénales.

28 Il a dit explicitement que le commandant de l'unité, par exemple, du

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1 poste de police à Benkovac, le chef du poste de police de Benkovac ne peut

2 pas seul engager des poursuites contre cet auteur. C'est le devoir et la

3 tâche du tribunal militaire parce que le crime a été commis sous la

4 compétence de l'armée. Voilà la réponse à votre question.

5 Bien sûr que M. Martic ou chef d'un poste de police dont le membre a

6 commis un crime sous la compétence de l'armée avait pour devoir d'engager

7 des poursuites contre cet homme seulement s'il avait reçu l'information là-

8 dessus. Quel moyen de preuve nous a été présenté par le Procureur qui

9 aurait confirmé qu'il s'agissait d'une telle chose ? Nous devons disposer

10 d'un document là-dessus. Le témoin, qui était président de la cour de

11 district, a parlé des poursuites pénales engagées contre les auteurs de

12 crime. Nous avons vu des documents qui disaient quel était le nombre

13 d'auteurs de tentatives de meurtres qui ont été condamnés. C'est le

14 document présenté par le biais du Témoin MM-99. Le rapport de ce témoin qui

15 date de la fin de l'année 1994, nous pouvons peut-être le retrouver et

16 l'examiner.

17 Voilà ma position : tout citoyen, tout citoyen de la Yougoslavie, qui

18 aurait appris qu'un crime a été commis selon la législation en vigueur a

19 pour devoir d'informer les autorités là-dessus et les organes compétents

20 ont pour devoir d'engager des poursuites criminelles. Je souligne cela

21 parce que l'Accusation considère en appliquant le principe concernant

22 l'entreprise criminelle commune que M. Martic est responsable de tous ces

23 crimes, indépendamment du fait qu'il était au courant ou pas de ces crimes

24 qu'il aurait pu en avoir connaissance ou qu'il aurait pu supposer que ces

25 crimes ont été commis ou supposer que ces crimes auraient pu être une

26 conséquence logique du conflit armé seulement en se basant sur le fait

27 qu'il était participant présumé de l'entreprise criminelle commune. Nous

28 affirmons qu'il n'y a aucun moyen de preuve pour étayer cela.

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1 M. le Procureur, par rapport à cela, dit : Voilà Martic a loué sa

2 coopération avec Milosevic, et par le biais de M. Kirudja, il a présenté un

3 moyen de preuve. Le Procureur a présenté un moyen de preuve selon lequel M.

4 Kirudja a dit explicitement que M. Milosevic, en tant que dirigeant présumé

5 de l'entreprise criminelle commune, n'a jamais voulu avoir la Krajina au

6 sein de la Serbie. Il était pour la Krajina qui serait restée dans le cadre

7 de Croatie et qui était uniquement pour le respect de la population serbe

8 sur ces territoires.

9 Pour ce qui est de M. Milosevic, il a dit qu'à la différence de M.

10 Tudjman il était quelqu'un qui n'avait pas de préjugé par rapport à

11 l'appartenance ethnique et qu'il se vantait du fait que son pays était un

12 pays multinational. C'est ce que le Procureur a prouvé par le biais du

13 témoin Kirudja. Ce qu'il serait important de souligner, c'est le fait que

14 M. Kirudja nous a donné des documents là-dessus, les documents qui montrent

15 que le rapport entre M. Milosevic et

16 M. Martic n'était pas le rapport entre deux criminels qui ont participé à

17 l'entreprise criminelle commune, mais qu'il s'agissait du rapport de deux

18 hommes sérieux qui ont coopéré pendant une période difficile en respectant

19 les dispositions du droit international et en appliquant les décisions des

20 Nations Unies. J'attire votre attention sur la pièce 764. C'est le document

21 de M. Kirudja, en date du

22 10 février 1994.

23 M. Kirudja en a parlé ici dans ce prétoire où il dit au sujet du

24 problème de la restriction de la circulation de la police civile et des

25 organisations internationales, il dit, je cite : Cette question est arrivée

26 à l'ordre du jour en 1994. Parce que lors des élections de 1994 quand

27 Martic a été élu président de la république, le parlement et le

28 gouvernement ont été emportés par Milan Babic, avec le SDS et les radicaux.

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1 Il dit que le plan des radicaux, de Leskovac à Krajina et de Milan Babic,

2 était de bloquer les routes, d'empêcher l'arrivée de l'aide humanitaire,

3 ensuite sous le prétexte que les Nations Unies ne soutiennent pas la

4 population serbe d'attaquer la FORPRONU et de la chasser en dehors du

5 territoire. Dans ce document, M. Kirudja dit que c'est pour cela que

6 Milosevic avait soutenu Martic, pour empêcher que l'on accuse les Nations

7 Unies de la sorte.

8 C'est écrit clairement dans ce texte. On lit, je cite : "Il

9 semblerait que l'opposition" - et là on fait référence à Babic et aux

10 radicaux - "souhaite soulever la population pour s'approcher de son

11 objectif politique, à savoir forcer les soldats de la zone UNPA." C'est à

12 cause de cela que Milosevic appuyait Martic et pas Babic dans la campagne

13 récente. La question qui se pose maintenant, c'est de savoir si Martic sera

14 en mesure de garder le pouvoir, oui ou non. C'est un document précieux qui

15 a été présenté par un témoin du Procureur, un représentant des Nations

16 Unies, qui parle de tout autre relation qui prévalait entre Milosevic et

17 Martic. Ce n'est pas la relation qui existe entre deux criminels, et cela

18 découle clairement de ce document. Le Procureur devrait le voir lui aussi.

19 Le Procureur dit que Martic a respecté les ordres de la JNA alors que

20 le témoin Martic -- et le Procureur prétend que c'est soi-disant la preuve

21 de l'entreprise criminelle commune. C'est justement pour cela, Monsieur le

22 Président, qu'on attire votre attention sur l'insurrection armée. La JNA

23 est une force régulière d'un Etat fédéral, et chaque citoyen, comme dit le

24 témoin Maksic, est obligé de respecter les autorités fédérales et cette

25 force armée fédérale. Martic était aussi, lui aussi, obligé de le

26 respecter. C'est pour cela que vous avez entendu beaucoup de témoins de la

27 Défense; des gens, des fois des gens éduqués, instruits, qui ont été

28 quadrillés par le contre-interrogatoire et ces gens ont dit la vérité.

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1 Ce qu'ils vous ont dit, c'est que Martic était un homme qui n'a jamais

2 détesté qui que ce soit, qui a tout fait pour protéger la population.

3 D'ailleurs, c'est ce qui figure aussi dans le rapport des Nations Unies, le

4 rapport qui a été introduit en tant que pièce 897, où les Nations Unies

5 constatent que le 2 février 1993, au moment de l'attaque croate sur

6 Maslenica, l'opération Maslenica, que les réfugiés serbes qui ont survécu

7 et qui ont été chassés, qui ont perdu leurs proches, qui ont été pillés, et

8 cetera, ils sont arrivés à Knin et ils sont enragés. Ils ont été armés pour

9 essayer de se venger contre les Croates.

10 Ce document de la FORPRONU montre que la police serbe, la police de Martic,

11 a hébergé ces gens dans un lieu sûr, dans une zone sûre, dans une maison,

12 et un des témoins a décrit les conditions qui y prévalaient. La police

13 civile des Nations Unies a dit que ceci a été fait correctement et les

14 Croates ne se sont pas plaints du traitement qui leur a été réservé là-bas.

15 Le Procureur ici a amené le Témoin MM-03 et MM-78, qui ont dit que ces

16 gens-là ont été sûrs là-bas, qu'ils ont été placés en lieu sûr. Qu'ils ont

17 été protégés, mais qu'ils ont été envoyés là-bas justement pour être

18 chassés. C'est incroyable, mais c'est vrai.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous vous référez à quel point de la

20 réplique, Monsieur Milovancevic ?

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] C'est le thème qui a été abordé au début

22 quand M. Whiting a parlé de la vision d'un Etat séparé des Serbes, quand il

23 a dit que rien du côté serbe n'a été légal ou fait de façon régulière en

24 Croatie. Ensuite, il parlait de quelle façon M. Martic parlait de ses

25 rapports avec la JNA. Ce que j'essaie de démontrer, c'est que M. Martic a

26 tout fait pour protéger toute la population.

27 Mon éminent collègue a abordé tout particulièrement un thème qui est

28 le thème du conflit armé. Il dit qu'il cite l'arrêt Galic, où on, comme il

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1 dit, on ne fait pas la différence entre la guerre civile et l'insurrection.

2 Quel est le rapport avec nous, avec notre affaire, Monsieur le Président ?

3 Nous sommes ici pour faire ces différences. Nous sommes obligés de faire

4 ces différences, si une telle différence existe. Elle existe pour le

5 Procureur, comme il dit, peu importe si c'est l'insurrection ou la guerre

6 civile. Peut-être que c'est sa position à lui, mais le droit international,

7 les conventions de Genève disent que l'insurrection armée ne relève pas de

8 la compétence du droit international. Nous avons bien vu quelle était la

9 date officielle de l'existence d'une Yougoslavie souveraine. Jusqu'au mois

10 de mai 1992, cet Etat a existé.

11 Le Procureur parle du conflit armé en disant que ce conflit armé a commencé

12 le 17 août 1990, d'après un document du gouvernement de la Krajina. Ce

13 n'est pas le gouvernement de la Krajina qui décide du début du conflit

14 armé; c'est le droit international qui en décide. Dans le paragraphe 18, il

15 est écrit : "Pendant toute la période couverte par le présent acte

16 d'accusation, il existait en Croatie et en Bosnie un état de conflit armé."

17 Cela veut dire que pendant toute la période pendant laquelle existaient les

18 zones protégées des Nations Unies, il y avait un conflit armé à partir de

19 la mi-1992 jusqu'à la fin 1995. Je vous demande, Monsieur le Président,

20 comment se fait-il que les Nations Unies ont toléré cela ?

21 Tout ce qui existait, c'était les agressions. Il y en a eu cinq, les cinq

22 agressions commises par les Croates contre les zones sûres des Nations

23 Unies. La Croatie a fait cela en tant qu'un Etat reconnu par la communauté

24 internationale. C'était un Etat reconnu par la communauté internationale

25 depuis le 21 mai 1992, et déjà en 1992, cet Etat attaque une zone sûre des

26 Nations Unies sur le plateau de Miljevac, et tout cela s'est poursuit

27 jusqu'au massacre commis au cours de l'opération Tempête. Quelle est la

28 punition des Nations Unies ? Pour l'instant et jusqu'à présent, il n'y en a

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1 pas eu.

2 Autre chose. Au moment où le conflit éclate en Croatie et au moment où le

3 conflit éclate en Yougoslavie, je peux dire que ces deux moments sont

4 différents. La rébellion en Croatie commence avec l'armement illégal de la

5 population croate, c'est-à-dire, à la mi-1990. Les préparations ont

6 commencé en octobre 1993, d'après le document 1005. C'est une lettre qui a

7 été écrite par 142 membres du secrétariat de l'intérieur de Zadar,

8 indiquant qu'à partir de la mi-1990, le ministère des Affaires intérieures

9 de la Croatie s'empare illégalement des armes de la police de réserve et

10 les distribue de façon illégale à la population des municipalités de

11 Benkovac, Zadar et Obrovac, et uniquement aux personnes appartenant à un

12 seul groupe ethnique.

13 Cette rébellion commence et se termine à partir du moment où la Croatie a

14 été admise dans les Nations Unies, c'est-à-dire au mois de mai 1992,

15 autrement dit, au moment où la JNA s'est retirée de ce territoire en accord

16 avec les exigences des Nations Unies et du plan Vance. Après cela, il n'y a

17 pas eu de conflit armé. Tout ce qu'il y a eu par la suite sont les

18 agressions, les agressions contre les Nations Unies qui font partie d'une

19 agression, y compris l'opération Eclair dans la Slavonie occidentale. Les

20 Nations Unies n'ont jamais riposté à cela. Ils ne l'ont pas empêchée, ils

21 ne l'ont pas arrêtée. Ils n'ont pas empêché les troupes d'entrer dans ces

22 territoires. Ils ne les ont pas forcés de sortir de ces territoires.

23 Ces territoires ont été occupés. Ces territoires n'ont jamais été

24 contrôlés par le gouvernement croate. C'était un crime contre les Nations

25 Unies, puisque c'était leur propre zone, la zone protégée par les Nations

26 Unies, mais c'était aussi une violation flagrante des accords

27 internationaux, tout particulièrement l'opération Tempête. Puisqu'en vertu

28 de l'accord de Zagreb du 29 mars 1994, qui a été signé aussi par le côté

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1 serbe, par la République serbe de la Krajina, il a été reconnu en tant que

2 signataire de cet accord.

3 A partir du mois de mai 1992 jusqu'à l'opération Tempête et jusqu'à

4 la fin, tout ce qui existe ce sont les agressions contre les zones

5 protégées des Nations Unies. Il n'y a pas eu de conflit armé, et il y a eu

6 pas moins que 700 attaques qui ont été menées pendant ces trois années, et

7 ceci a été décrit par nos témoins.

8 En ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine, il serait intéressant d'entendre

9 le Procureur pour savoir si le conflit armé a eu lieu le même jour qu'en

10 Croatie en Bosnie, puisque la Bosnie-Herzégovine, un Etat sécessionniste

11 également, en a été reconnue que le 6 avril 1992, et encore contrairement à

12 la recommandation du Conseil de sécurité. C'est après cela qu'une guerre

13 civile éclate dans le territoire de Bosnie-Herzégovine. Donc, c'est très

14 important de caractériser la nature du conflit pendant la période et dans

15 la région couverte par l'acte d'accusation.

16 Parce qu'en Bosnie-Herzégovine, il y a une guerre civile où vous avez

17 trois parties au conflit; les Croates, les Serbes et les Bosniaques. Parce

18 que ceci crève les yeux, les photos qu'on vous a montrées, pardonnez-moi

19 l'expression, crèvent les yeux. Ce sont les photos montrées par mon

20 psychiatre, l'expert M. Loncar, qui montrent les victimes, les victimes que

21 l'on vous a montrées. J'ai voulu vous montrer de quoi il s'agissait, parce

22 que quand je vous ai montré ces images, vous vous êtes demandé pourquoi on

23 vous montre tout cela. Quel est le rapport avec le conflit ? Justement, le

24 rapport est de démontrer qu'il s'agissait d'une guerre civile sanglante.

25 Ensuite,

26 M. le Témoin Barriot a parlé de l'attaque des troupes d'Alija Izetbegovic

27 en 1994, quand ils ont attaqué Cazin Krajina, leur propre territoire, leur

28 propre population musulmane, tout simplement parce qu'ils étaient

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1 favorables à une solution paisible.

2 Les troupes d'Alija Izetbegovic ont chassé 40 000 Musulmans qui sont

3 arrivés sur le territoire de la République serbe de la Krajina, et Martic

4 et son gouvernement ont mis à leur disposition tout ce qu'ils avaient,

5 toutes les réserves dont ils disposaient, qui étaient minimales à l'époque

6 parce que c'était la guerre civile. Alija Izetbegovic les a chassées.

7 En ce qui concerne la Défense, cette nature, la nature de ce conflit

8 est importante. Le conflit armé en Bosnie-Herzégovine a éclaté au moment où

9 la communauté internationale, contre la recommandation du secrétaire

10 général des Nations Unies en 1991, en décembre 1991, reconnaisse ces Etats,

11 parce que ce que l'on recommandait, c'était une solution générale à la

12 crise. A la place de cela, ils ont reconnu la Bosnie-Herzégovine, ensuite

13 la guerre a éclaté.

14 Ensuite, le Procureur dit que ce conflit n'a rien à voir avec la

15 Yougoslavie, que cet acte d'accusation ne concerne pas la Yougoslavie et

16 que les protocoles additionnels ne sont pas pertinents en l'espèce. Mais

17 nous, nous n'avons pas, nous, en tant que Défense, nous n'avons pas demandé

18 que l'on traduise quelqu'un devant la justice parce qu'il a fait ce qu'il a

19 fait contre la Yougoslavie. Non, ce n'est pas notre thèse. Ce n'est pas ce

20 que l'on veut prouver. Ce que l'on veut prouver, c'est que le facteur

21 international avait son rôle à jouer dans cette rébellion qui a eu lieu en

22 Yougoslavie. La Yougoslavie est une entité qui existe pendant toute la

23 durée de cette rébellion, armée de cette insurrection à partir de la mi-

24 1990 jusqu'au moment où la JNA se retire de ce territoire à la demande des

25 Nations Unies et pour mettre en place le plan Vance.

26 Ensuite, avec l'arrivée des troupes des Nations Unies - et nous avons vu un

27 document hier qui a été introduit par le témoin de la Défense M. Kirudja -

28 nous avons vu que les Nations Unies ont reçu des garanties de la JNA qu'on

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1 allait leur remettre un territoire qui fonctionne du point de vue

2 administratif et militaire. A partir du moment où les troupes des Nations

3 Unies ont été déployées sur ce territoire qui a été placé sous la

4 protection des Nations Unies. Ce n'est pas à M. Martic qui répond de la

5 sécurité de la population, ce n'est pas le MUP qui répond de la sécurité de

6 la population. C'est la police civile des Nations Unies qui en est

7 responsable aussi bien de la sécurité de la population serbe que de la

8 population croate.

9 La police civile des Nations Unies était là pour contrôler le travail

10 de la police locale. Il ressort du document 965, le rapport fait suite à la

11 réunion entre Thornberry qui est le sous-secrétaire de la mission des

12 Nations Unies et M. Martic, en date du

13 14 juillet 1993. Vous pouvez voir que ce commandant, l'adjoint au

14 commandant dit que le commandant de la police civile des Nations Unies lui

15 est directement subordonné et qu'il coopère très bien.

16 M. Thornberry continue pour dire : Je comprends que vous protégez les

17 Croates dans des circonstances extrêmement difficiles. Le seul argument que

18 le Procureur a utilisé pour discréditer ces rapports pour anéantir sa

19 crédibilité, c'était de dire que ces documents n'ont pas été autorisés.

20 Voici la question que je vous pose : comment peut-on se plaindre que

21 nous n'avons pas authentifié notre document alors qu'aucun des documents du

22 Procureur n'a été authentifié par le côté serbe. Cedric Thornberry dit

23 qu'une guerre des médias est en cours contre les Serbes et qu'il ne peut

24 pas comprendre pourquoi la communauté internationale fait cela.

25 M. le témoin Barriot a dit que les Serbes ont été amochés, qu'on les a

26 dépeints à tort de façon calomniatrice et qu'il renonçait à sa carrière de

27 militaire pour servir la vérité. Cela en est un autre homme d'honneur.

28 Tout a été fait à l'intérieur de la Krajina par rapport à ces

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1 arguments du Procureur pour organiser l'Etat, le système juridique, le

2 système pénitentiaire, carcéral, d'éducation, de santé. Tout a été

3 organisé, les salaires, les titres. On nous a dit tout cela pour démontrer

4 que ce n'était pas une structure parallèle. C'était un système qui a été

5 fondé conformément aux lois yougoslaves.

6 Le fait que les Serbes dans la Krajina utilisent les lois

7 yougoslaves, -- par le Procureur comme étant la preuve de l'entreprise

8 criminelle commune. La Croatie a déclaré le

9 21 février 1992, j'espère que je ne me suis pas trompé de date, que les

10 lois fédérales n'étaient plus appliquées sur notre territoire. Je me suis

11 trompé effectivement, il s'agit de 1991, du 21 février 1991.

12 Où est le problème, si les conseils exécutifs de la Krajina dit

13 qu'ils vont appliquer les lois de la Yougoslavie. Quelles lois pouvaient-

14 ils appliquer ? Ils ne pouvaient pas appliquer les lois croates. Les lois

15 serbes correspondaient aux lois fédérales.

16 C'est tout, rien de plus.

17 Ensuite, le Procureur dit que la question de l'entreprise criminelle

18 commune a été résolue par des arrêts de ce Tribunal et que la Défense a eu

19 l'occasion de poser cette question auparavant. C'est parfaitement

20 incorrect. Avant le début du procès, la jurisprudence du Tribunal avait

21 déjà pris sa décision par rapport à l'entreprise criminelle commune. Quelle

22 utilité alors de faire une écriture en vertu de l'article 72 parce que

23 c'est complètement inutile. C'était une cause perdue à l'avance. Au moment

24 de notre plaidoirie, nous pouvons dire que ce n'est pas le même organe, le

25 Tribunal qui a adopté ces décisions. Il ne peut pas décider de cela.

26 Ce n'est que le Conseil de sécurité parce que vous ne pouvez pas être

27 juge et partie. C'est ce que l'on dit en Serbie. Nous n'avons pas tout

28 simplement de deuxième instance ici. C'est un Tribunal qui n'a qu'une seule

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1 instance, et je ne pense pas que vous vouliez créer cette impression parce

2 que telle serait la situation. C'est difficile d'aborder cette question

3 alors qu'une décision a été prise déjà à ce sujet.

4 En ce qui concerne Skabrnja, mon collègue dit que le témoin Lakic a

5 confirmé que les avions ont décollé. Ce n'est pas exact. Ce qu'a dit le

6 témoin Lakic, il a dit que les avions ont effectivement décollé mais qu'on

7 leur a tiré dessus et qu'ils ont été endommagés. Ceci explique tout. C'est

8 un peu ironique quand le témoin du Procureur, le témoin MM-80 dessine le

9 chemin de toutes les routes qui ont été bloquées de Benkovac à Zemunik,

10 quand le Procureur dit qu'ils pouvaient utiliser une autre route alors que

11 le témoin Lakic dit que 20 soldats au moins ont été tués. C'était une

12 rébellion armée. C'est de cela qu'a parlé Agotic quand il a dit que vous

13 aviez 200 000 soldats lourdement armés qui s'opposaient aux 20 000 soldats

14 de la JNA.

15 En ce qui concerne Bruska, le Procureur a dit que nous nous livrons à des

16 conjectures quand nous demandons les raisons pourquoi quelqu'un pourrait

17 venir frapper à la porte de quelqu'un alors qu'il s'agit d'un policier.

18 Mais non, il ne s'agit pas de conjectures. Nous réfléchissons, c'est tout.

19 Si vous venez commettre un crime, est-ce que vous vous présentez ? Est-ce

20 qu'ils se seraient déguisés pour entrer dans une maison ? Est-ce que nous

21 nous livrons à des conjectures ? C'est vrai. Le Procureur dit exactement la

22 même chose quand il dit, à savoir est-ce qu'on a besoin de se déguiser pour

23 entrer chez quelqu'un ? Le Procureur ne peut pas se livrer à des

24 conjectures. Il y appartient de prouver à qui appartenaient ces gens. Vous

25 avez entendu beaucoup de témoins. Vous avez entendu aussi l'ordre de M.

26 Martic la pièce 602, que tous ces gens bariolés, comme dit M. Martic, qui

27 portent des uniformes de camouflage, que tous ces policiers qui ne

28 portaient pas de pièces d'identité valables qu'ils devraient être désarmés.

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1 Ils ont vu beaucoup de films. Ils ont vu des policiers tuer, voler,

2 faire des cambriolages, braquer des banques mais des policiers déguisés.

3 C'est la réalité. Le Procureur ne peut pas se fonder sur des conjectures,

4 parce que Jasna Denona et Ante Marinovic ont dit que les Serbes les ont

5 soignés, les ont protégés. Le Procureur se demande qu'est-ce que cela à

6 voir avec Martic. Si c'est Martic qui a créé ce climat de terreur, comment

7 est-il possible alors que tout fonctionnait dans ce même climat et qu'on a

8 aidé ces gens et qu'on ne les a pas empêchés de les aider ?

9 Je pense que le Procureur se livre à des conjectures, tout au moins

10 dans une certaine mesure. Je vous remercie. Je pense que nous sommes

11 arrivés à la fin de notre session de travail d'aujourd'hui. Je n'en ai pas

12 terminé de ma duplique, parce qu'il y a encore un certain nombre de points

13 que je souhaiterais aborder.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas-là, nous les recevrons

15 sous forme écrite puisque nous n'avons plus de temps, Monsieur

16 Milovancevic. Nous n'avons plus d'audience prévue. Ceci met un terme aux

17 audiences.

18 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une

19 proposition à vous faire. Etant donné qu'il n'y a plus d'audience cet

20 après-midi, en tout cas dans cette salle, pourrions-nous poursuivre

21 l'audience d'aujourd'hui ainsi je pourrai terminer ma plaidoirie. Il ne va

22 pas être facile de tout écrire sur papier, il n'y aurait pas égalité des

23 armes. Mon éminent collègue de l'Accusation a pu vous présenter ses

24 arguments par oral et moi j'aimerais recevoir le même traitement.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'égalité des armes signifie aussi une

26 égalité devant le temps, Monsieur Milovancevic. Vous avez eu autant de

27 temps que l'Accusation. Alors, je ne sais vraiment pas quelle réponse

28 donnée à votre requête.

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1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] De combien de temps vous faut-il

4 encore ?

5 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Encore 40 minutes à peu près, une demi-

6 heure, nous croyons.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Une demi-heure ?

8 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui.

9 M. WHITING : [aucune interprétation]

10 M. MILOVANCEVIC : [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous connais une demi-heure, ce

12 sera une heure.

13 M. WHITING : [aucune interprétation]

14 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] J'essaierai de réduire. J'essaierai de

15 réduire mon intervention.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous donne cinq minutes, mais pas

17 plus.

18 M. WHITING : [interprétation] Qu'en est-il ?

19 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, cela fait un an

20 que nous sommes en audience.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, je vous donne

22 cinq minutes. Si vous pouvez utiliser intelligemment ces cinq minutes et en

23 terminer avec votre plaidoirie, sinon vous n'aurez rien.

24 M. WHITING : [interprétation] Je pense que c'est la bonne solution de leur

25 donner cinq minutes et rien de plus puisqu'ils ont déjà présenté leurs

26 arguments. Ils les ont répétés à plusieurs reprises. Je soulève une

27 objection très forte à la possibilité d'avoir une plaidoirie écrite et que

28 vous lisiez une plaidoirie écrite. Cela va ouvrir la boîte de pandore. On

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1 va avoir eu une écriture, puis encore une autre. Je pense qu'il faut en

2 terminer une bonne fois pour toutes. Je pense que cinq minutes devraient

3 largement suffire.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, vous avez cinq

5 minutes. Nous allons voir.

6 [La Chambre de première instance se concerte]

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, vous avez cinq

8 minutes. Nous arrêterons la séance à 13 heures 55, envers et contre tout.

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Très bien.

10 L'Accusation a avancé un argument selon lequel quand on se défend même si

11 c'est parce que l'on a peur sans permettre, non je reprends. Je suis

12 désolé. Si l'on se défend parce que l'on a peur, ce droit à l'autodéfense

13 n'autorise pas la commission de crimes. Or, à aucun moment la Défense n'a-

14 t-elle déclaré que le droit à l'autodéfense autorisait la commission de

15 crimes. L'Accusation a dit qu'on ne peut pas se prévaloir d'autodéfense

16 pour persécuter une population.

17 M. Thornberry -- Monsieur le Procureur en revanche déclare qu'on ne peut

18 pas persécuter une population en se prévalant de l'autodéfense. M.

19 Thornberry qui était commandant des Nations Unies à l'époque en 1993, a dit

20 : "Je comprends très bien que vous faites votre travail dans des

21 circonstances très difficiles et que vous essayez de protéger la

22 population." J'en conclus donc que l'Accusation n'a rien pour étayer ses

23 dires.

24 Il a aussi mentionné le témoin Dzakula. Il a dit qu'il avait été à

25 l'origine de quelques propositions de paix, mais ce témoin Dzakula, en tant

26 que témoin de l'Accusation, a dit que chaque initiative visant à la paix

27 était évincée par le côté croate, dans toutes ces tentatives de trouver une

28 solution ont échoué, même ce qui s'est passé à Plitvice quand ils ont été

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1 désarmés à Borovo Selo, même pour ce qui est de l'accord de Daruvar. Le

2 témoin MM-05 a dit : "Qu'est-ce que cela signifie quand on signe un accord

3 sur la normalisation et qu'on le publie ?" Cela met un terme à toute

4 négociation éventuelle.

5 Ces campagnes qui avaient un but bien délibéré et le témoin Dzakula a

6 dit la vérité, puisque ce qui se passait sur l'autoroute la veille du 1er

7 mai 1985, c'est quelque chose que l'Accusation elle-même a reconnu comme

8 s'étant passé. Il n'y a aucune raison d'une justification d'agression

9 quelle qu'elle soit. La Défense est très reconnaissante à notre éminent

10 collègue de l'Accusation d'avoir déclaré lors de son réquisitoire ce qu'il

11 a dit.

12 Pour ce qui est de Zagreb, j'ai besoin d'une minute ici.

13 M. WHITING : [interprétation] Je tiens à vous dire que je n'ai absolument

14 pas parlé de Zagreb dans ma duplique.

15 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] En effet, je vous le concède. Cela dit,

16 je n'ai plus qu'une minute et demie. Je tiens à dire que dans notre

17 plaidoirie nous n'avons pas été autorisés à traiter les points qui

18 n'étaient pas pris en compte dans notre mémoire en clôture. Nous voulions

19 les soulever lors de la plaidoirie. Dans le mémoire en clôture, nous avons

20 traité de certains points que nous avions choisis parce que nous voulions

21 les traiter à fond. Pour ce qui est des autres points en suspens, nous

22 voulions les traiter lors de la plaidoirie.

23 Maintenant, nous sommes dans une situation injuste qui n'a qu'une

24 conclusion logique étant donné les preuves qui ont été versées jusqu'à

25 présent. Nous tenons à dire qu'il n'y a aucune preuve valide permettant de

26 prouver qu'il existait une entreprise criminelle commune, qu'il n'y avait

27 aucune intention de commettre des crimes, que M. Martic n'a jamais

28 participé à tout cela, dans quelque forme que ce soit.

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1 C'est tout à fait le contraire en revanche qui a existé. Tout montre

2 qu'il a été un héro. Dans des circonstances extrêmement difficiles, comme

3 l'a montré M. Thornberry, il a protégé la population. Je ne vois aucune

4 autre possibilité pour vous que de décider d'acquitter notre client. On ne

5 peut pas baser un verdict sur des hypothèses tout comme on ne peut pas

6 baser un acte d'accusation sur des hypothèses non plus.

7 La personne qui est accusée ici, c'est le président d'un peuple persécuté,

8 qui est innocent tout comme ces personnes qui ont été chassées de leurs

9 maisons il y a 12 ans. Toutes ces maisons que vous avez vues quand vous

10 vous êtes rendus sur place, vous avez vu ces maisons sans fenêtres, ces

11 maisons sans portes, toutes ces maisons sont des foyers serbes. Je vous

12 remercie.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, nous vous

14 remercions.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrais-je maintenant avoir trois minutes,

17 s'il vous plaît pour m'exprimer ?

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y, Monsieur Martic, vous avez

19 trois minutes.

20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs et Madame les

21 Juges. Le premier acte d'accusation a été rédigé contre moi pour ce qui

22 s'est passé à Zagreb en 1995. C'était un acte d'accusation qui a été rédigé

23 à la hâte, qui couvrait une période de 50 jours pour lequel il n'y avait eu

24 aucune enquête. Or, je ne l'ai jamais vu, d'ailleurs, cet acte

25 d'accusation, je n'en ai qu'entendu parler. Cet acte d'accusation est resté

26 en l'état pendant sept ans. S'il y avait eu des preuves supplémentaires, je

27 suis sûr qu'il aurait été modifié.

28 Je me suis rendu ici volontairement le 15 mai 2002, et à ce moment-là

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1 les médias croates ont suggéré qu'il y avait d'autres points qui devaient

2 être pris en compte dans mon acte d'accusation, et bien sûr le Procureur a

3 accepté ce qui est écrit dans les médias croates. Tout ce qui a été écrit

4 dans les médias a immédiatement été ajouté à l'acte d'accusation contre

5 moi. J'ai été accusé de tout et n'importe quoi. Ensuite, quand on a entendu

6 que tout ceci n'était que de la calomnie, personnellement je dis en effet

7 que cet acte d'accusation est entièrement calomnieux.

8 Pourquoi le Procureur a-t-il agi de la sorte ? Je ne lui en veux pas,

9 certes. Je pense qu'ils veulent absolument que je sois condamné. Bien sûr,

10 c'est le métier d'un Procureur, et un jeune Procureur comme nous avons ici

11 en l'espèce veut obtenir une condamnation importante. Mais vous voyez, ce

12 Procureur vient quand même d'un certain pays. Il en parle souvent en

13 faisant référence à son pays, à son système juridique, et ce, pour une

14 raison, parce qu'il vient d'un pays extrêmement puissant qui a participé à

15 la persécution de mon propre peuple. Il est ici pour justifier les actes

16 effectués par son pays en me faisant porter le chapeau pour ce qui a été

17 fait par quelqu'un d'autre.

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 (expurgé) Je suis

22 très surpris qu'on n'en parle absolument pas.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Martic, je suis désolé, mais

24 vous ne pouvez pas parler ainsi. Pourquoi parlez-vous de la braguette de M.

25 Clinton ?

26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, cela a été publié par tous les médias.

27 Ce n'est pas un secret. Tout le monde en a parlé.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vois absolument pas quelle est

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1 la pertinence de ce détail vestimentaire en l'espèce, donc je demande à ce

2 que ce soit expurgé. Vous avez encore quelques minutes.

3 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais croire, Messieurs, Madame, que vous

4 allez pouvoir évaluer correctement ce qui s'est vraiment passé et que votre

5 jugement sera juste et équitable. Je ne vais pas vous dire ce que vous

6 devez prononcer comme jugement; c'est mon conseil qui en a déjà parlé. Mais

7 si vous suivez la proposition de l'Accusation, il sera évident que nous

8 aurons là un jugement rendu par son propre système juridique.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Comme je l'ai dit précédemment, nous

11 sommes donc arrivés à la fin des audiences. Il reste quelques points en

12 suspens que j'aimerais voir inscrits au compte rendu pour que l'on puisse y

13 donner suite. Tout d'abord, nous n'avons pas encore le compte rendu de la

14 visite sur site. J'espère que nous le recevrons très bientôt. Quand il sera

15 prêt, j'espère qu'il sera correctement circulé à tout le monde ainsi qu'aux

16 Juges afin d'être pris en compte lors de la rédaction du jugement.

17 Ensuite, deuxième point toujours en suspens, il s'agit des versions

18 publiques des mémoires en clôture. Lors de l'écriture, l'Accusation a

19 indiqué qu'ils allaient rapidement pouvoir présenter la version publique de

20 ce document. La Défense, en revanche, n'en a pas parlé. Nous en parlons

21 maintenant parce que dans les versions non expurgées, il y a eu référence à

22 des victimes ou à des témoins protégés. Nous voulons bien sûr que la

23 procédure soit rendue la plus publique que possible. Dans ce cas-là, il

24 serait très utile d'avoir les versions publiques des mémoires en clôture.

25 Il faudrait qu'ils soient déposés le plus vite possible. C'est très simple.

26 Il suffit d'expurger ce qui doit l'être, on prend la version

27 confidentielle, on en expurge les passages pertinents et on nous donne une

28 copie de la version expurgée.

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1 J'aimerais donc savoir quand les deux parties pourront nous présenter

2 leur version publique expurgée.

3 Monsieur Whiting.

4 M. WHITING : [interprétation] Ce document devrait être prêt mercredi,

5 Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mercredi de la semaine prochaine ?

7 M. WHITING : [interprétation] Oui.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Milovancevic, quant à vous ?

9 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je pense qu'on pourrait aussi arriver à

10 avoir ce document d'ici la fin de la semaine prochaine, s'il vous plaît.

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Mais qu'est-ce que cela signifie

13 exactement pour vous, cette expurgation ? Il faudra nous donner des

14 conseils extrêmement précis, puisque lorsque nous avons rédigé notre

15 mémoire en clôture, nous nous sommes assurés de ne pas prononcer ou ne pas

16 citer le moindre nom de témoins qui soient protégés.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si vous êtes absolument certain que la

18 version que vous nous avez donnée peut être rendue publique sans que cela

19 ne compromette la sécurité du moindre témoin ou de la moindre victime, pas

20 de problème. C'est le but de l'expurgation.

21 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Je comprends bien.

22 M. WHITING : [interprétation] Mais je vais peut-être vous expliquer comment

23 nous avons procédé. Peut-être que la Défense trouvera cela utile. Nous

24 n'avons pas non plus fait de référence à aucun témoin protégé, pardon, mais

25 nous allons continuer à expurger toute référence éventuelle qui pourrait

26 permettre d'identifier un témoin. Par exemple, s'il y a un témoin qui a

27 déposé à propos d'un événement bien spécifique et qu'il pourrait être

28 identifié du fait de cet événement, il faut expurger la totalité du

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1 passage. C'est ainsi que nous avons procédé.

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs et

3 Madame les Juges, ceci demande beaucoup de travail dans ce cas-là. On va

4 essayer de vous donner une version publique mercredi, mais comme cela

5 demande beaucoup de travail, j'aimerais que la date butoir soit plutôt

6 fixée à vendredi prochain.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour la Défense, la date butoir sera

8 vendredi de la semaine prochaine. Je vous remercie.

9 Je tiens à dire que mis à part ces deux documents en suspens, aucun autre

10 document ne pourra être déposé par l'une des deux parties. Je remarque

11 aussi que dans ce Tribunal, lors de la plaidoirie et du réquisitoire, on

12 présente des arguments à la fois sur le fond de l'affaire et sur la

13 sentence, la peine. J'ai bien remarqué que la Défense n'a absolument pas

14 parlé de peine. J'ai bien compris, bien sûr, qu'ils veulent un acquittement

15 pur et simple, mais j'aimerais m'assurer que le fait qu'ils n'aient

16 absolument pas abordé le problème de la peine soit délibéré de leur part,

17 et non pas une omission éventuelle.

18 Cela dit, nous ne voulons plus entendre quoi que ce soit à ce propos.

19 Mais Monsieur Milovancevic, vous avez quand même la parole.

20 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Oui, j'ai quelque chose à poser, une

21 question à poser. Il y a deux jours, nous avons appris certaines choses à

22 propos du versement du compte rendu portant sur la visite des sites. On

23 nous avait dit que nous pourrions déposer une requête à ce propos; or, vous

24 nous dites qu'on ne peut plus déposer quoi que ce soit par écrit,

25 maintenant. Est-ce que cela signifie que votre décision d'aujourd'hui

26 annule ce que vous avez dit il y a certains jours et qu'il n'y aura plus de

27 requête possible à propos du compte rendu portant sur la visite sur site ?

28 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Vous parlez d'une requête ?

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1 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Ecoutez, au début de cette phase du

2 procès, donc le 10, on nous a dit que les comptes rendus de la visite sur

3 site n'avaient pas encore été rédigés et que la Chambre de première

4 instance autoriserait à la fois l'Accusation et la Défense à déposer des

5 requêtes quand elle aurait reçu ces comptes rendus par écrit, si tant est

6 qu'elles en aient envie et qu'on en ait besoin. Alors je voudrais savoir si

7 cette possibilité tient encore ou si elle vient d'être annulée par votre

8 récente décision ?

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvez-vous, s'il vous plaît nous,

10 faire référence aux passages du compte rendu qui mentionnent tout ceci,

11 pour que je sache exactement ce que les Juges ont dit à ce moment-là ?

12 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'était le

13 premier jour, tout au début. Nous parlions de problèmes logistiques, mais

14 je ne peux vraiment pas vous aider en ce qui concerne la page.

15 M. WHITING : [interprétation] Je peux. Il s'agit de la page 11 173 en date

16 du 10 janvier.

17 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Pouvez-vous nous dire maintenant

18 quelle est la ligne, s'il vous plaît, Monsieur Whiting ?

19 M. WHITING : [interprétation] Pas de problème, bien sûr. C'est au milieu de

20 la page. Cela commence à la ligne 15.

21 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Mais cela fait référence à des

22 écritures, à des arguments par écrit.

23 M. WHITING : [interprétation] Oui, tout à fait. On ne faisait pas référence

24 à des requêtes, uniquement à des écritures.

25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez proposer, vous pouvez

26 déposer des écritures si vous avez des corrections à apporter au compte

27 rendu de visite sur site si vous pensez que ce qui est écrit sur le fichier

28 électronique ne correspond pas correctement. Vous pouvez donc faire une

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1 écriture, mais en aucun cas une requête. Vous êtes d'accord ?

2 M. MILOVANCEVIC : [interprétation] Mais le 10 janvier, j'avais compris que

3 je pourrais utiliser ces éléments de preuve, donc que le compte rendu de la

4 visite sur site pouvait être utilisé par la Défense pour étayer nos propos

5 lors de la présentation de nos moyens. Ce ne sont pas des corrections

6 techniques qui m'intéressent.

7 Ce qui m'intéresse, moi, c'est d'utiliser ce qui est écrit dans le

8 compte rendu pour étayer ma défense. Nous avions compris que c'est ce que

9 la Chambre nous avait autorisé à faire. Alors que pourrons-nous faire étant

10 donné qu'à l'époque, lorsque nous avons commencé à rédiger nos arguments,

11 ce compte rendu écrit n'était pas encore disponible ?

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, je vous entends bien,

14 Monsieur Milovancevic. Je vous comprends bien. Vous pouvez faire ces

15 écritures.

16 J'essaie de me retrouver dans la procédure. Bien. Je pense que j'en suis

17 arrivé à la fin. Je tiens juste à remercier tout le monde pour la façon

18 dont ce procès s'est tenu et je tiens à dire qu'en application de l'article

19 87 du Règlement de procédure et de preuve de ce Tribunal, en tant que

20 Président de cette affaire, je déclare que les audiences sont terminées. Je

21 vous remercie.

22 --- L'audience est levée à 14 heures 12.

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