Affaire n° : IT-02-65-PT

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Patrick Robinson, Président
M. le Juge O-Gon Kwon
M. le Juge Iain Bonomy

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
25 janvier 2005

LE PROCUREUR

c/

ZELJKO MEJAKIC
MOMCILO GRUBAN
DUSAN FUSTAR
DUSKO KNEZEVIC

__________________________________________

DÉCISION PORTANT SUR LA DEMANDE DE DUSKO KNEZEVIC AUX FINS DE LA CERTIFICATION D’UN APPEL INTERLOCUTOIRE CONTRE L’« ORDONNANCE RELATIVE À LA REQUÊTE PRÉSENTÉE PAR L’ACCUSATION AUX FINS DE MODIFIER LES APPENDICES A À F DE L’ACTE D’ACCUSATION CONSOLIDÉ, LES RÉSUMÉS DES DÉCLARATIONS DE TÉMOINS RELEVANT DE L’ARTICLE 65 TER DU RÈGLEMENT ET LES RÉSUMÉS DES FAITS EXPOSÉS DANS LE MÉMOIRE PRÉALABLE AU PROCÈS »

__________________________________________

Le Bureau du Procureur :

Mme Ann Sutherland
M. Michael Mc Vicker

Les Conseils des Accusés :

M. Jovan Simic pour Zeljko Mejakic
M. Branko Lukic pour Momcilo Gruban
MM. Theodore Scudder et Dragan Ivetic pour Dusan Fustar
Mme Slobodanka Nedic pour Dusko Knezevic

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal international »),

VU la demande de certification (Knezevic’s Request for Certification), déposée le 23 décembre 2004 à titre confidentiel par Dusko Knezevic en vertu de l’article 73 B) du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement »), par laquelle l’Accusé demande la certification de l’appel qu’il envisage contre l’« Ordonnance relative à la requête présentée par l’Accusation aux fins de modifier les Appendices A à F de l’acte d’accusation consolidé, les résumés des déclarations de témoins relevant de l’article 65 ter du Règlement et les résumés des faits exposés dans le mémoire préalable au procès », rendue par la Chambre de première instance le 17 décembre 2004 (la « Demande de certification »),

VU la réponse à la Demande de certification (Prosecution’s Response to Knezevic’s Request for Certification), déposée par le Bureau du Procureur le 7 janvier 2005, dans laquelle l’Accusation s’oppose à la Demande de certification au motif que Dusko Kneževic n’a pas rempli les conditions énoncées à l’article 73 B) du Règlement, et sollicite de la Chambre de première instance qu’elle rejette ladite demande de certification,

VU l’article 73 B) du Règlement qui prévoit qu’une Chambre de première instance ne peut exercer son pouvoir discrétionnaire pour certifier l’appel interlocutoire d’une décision qu’après avoir vérifié que deux critères sont remplis, à savoir que 1) la décision touche une question susceptible de compromettre sensiblement l’équité et la rapidité du procès, ou son issue, et que 2) le règlement immédiat de cette question par la Chambre d’appel pourrait concrètement faire progresser la procédure,

VU les observations présentées par Dusko Knezevic, selon lesquelles la premičre condition énoncée à l’article 73 B) du Règlement est remplie pour les raisons suivantes :

  1. La Chambre de première instance a commis une erreur en acceptant, bien qu’implicitement, que la modification n’entraînait pas de nouvelles accusations à l’encontre de Dusko Kneževic et Dusan Fustar1 ;

  2. La Chambre de première instance a commis une erreur dans son interprétation de l’Arrêt Krnojelac2 ;

  3. La Chambre de première instance n’a pas motivé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle a autorisé la modification3 ; et

  4. La possibilité de présenter des observations orales n’a pas été donnée aux parties4 ;

ATTENDU que Dusko Kneževic fait observer que la seconde condition énoncée ŕ l’article 73 B) du Règlement est remplie en l’espèce puisque le procès est prêt à s’ouvrir et que le « fait d’accorder l’autorisation de modifier l’acte d’accusation aura pour conséquence une augmentation du nombre de témoins qui déposeront au procès, dont la durée sera prolongée et l’ouverture retardée », et qu’ainsi « le règlement immédiat de la question fera concrètement progresser la procédure5 »,

ATTENDU que, en ce qui concerne le premier critère, même si les moyens d’appel potentiels sont énoncés de manière assez détaillée dans la Demande de certification, aucun des arguments invoqués ne démontre que la décision rendue par la Chambre de première instance le 17 décembre 2004 touche une question susceptible de compromettre sensiblement l’équité et la rapidité du procès, ou son issue,

ATTENDU que, même s’il peut y avoir des arguments étayant que la décision est susceptible d’influer sur l’issue du procès (point sur lequel la Chambre de première instance n’émet aucune opinion définitive), l’observation selon laquelle « le fait d’accorder l’autorisation de modifier l’acte d’accusation aura pour conséquence une augmentation du nombre de témoins qui déposeront au procès, dont la durée sera prolongée et l’ouverture retardée » n’est néanmoins nullement fondée6 ; que par conséquent, il n’est pas établi dans la Demande de certification que le second critère de l’article 73 B) est rempli,

PAR CES MOTIFS,

EN APPLICATION de l’article 73 B) du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international,

REJETTE LA DEMANDE DE CERTIFICATION DE L’APPEL.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre de première instance
_____________
Patrick Robinson

Le 25 janvier 2005
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]


1. Demande de certification, par. 5 et 6.
2. Le Procureur c/ Krnojelac, affaire n° IT-97-25-A, Arrêt, 17 septembre  2003, par. 138 ; Demande de certification, par. 8.
3. Demande de certification, par. 12.
4. Ibidem, par. 11.
5. Ibid., par. 20.
6. Aucune date n’a été fixée à ce jour pour l’ouverture du procès en l’espèce, et une requête aux fins du renvoi de l’affaire devant la Cour d’État de Bosnie-Herzégovine – présentée par l’Accusation en application de l’article 11 bis du Règlement – est pendante.