Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-97-24-T

2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

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4 LE PROCUREUR

5 c/

6 Milan Kovacevic

7 Mardi 7 juillet 1998

8 L’audience est ouverte à 9 heures 35.

9 M. le Président (interprétation). - Je prie le greffier de

10 présenter l'affaire.

11 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agit de l'affaire IT.97-

12 24, le Procureur contre M. Kovacecic.

13 M. le Président (interprétation). - Nous nous passerons des

14 présentations et nous imaginons que le conseil sera ici pour cette

15 affaire. Si c'est le cas, nous n'aurons pas les présentations, mais si le

16 conseil principal n'est pas là, alors ce sera peut-être nécessaire.

17 Mme Hollis (interprétation). - Je vous remercie,

18 Monsieur le Président. Madame le professeur Greve, je vous rappelle que

19 vous êtes toujours sous serment.

20 Mme Greve (interprétation). - Oui.

21 Mme Hollis (interprétation). - Hier, nous parlions à la fin de

22 l'audience de l'évacuation de Trnopolje par le CICR. Ce matin, j'aimerais

23 vous fournir un document que nous souhaiterions enregistrer comme la

24 pièce P37 aux fins d'identification.

25 (La pièce est transmise au greffier.)

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1 Mme Hollis (interprétation). - Il s'agit là de renseignements

2 tirés du rapport qu'on a transformé en pièces, pour faciliter les choses

3 au témoin.

4 Madame le professeur Greve, pouvez-vous nous dire de quoi il

5 s'agit ?

6 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit d'un article qui est

7 tiré d'un accord sur la libération et le transfert des prisonniers, sa

8 date est le 1er octobre 1992, il s'agit d'un accord. L'initiative de cet

9 accord vient du comité international de la Croix-Rouge, il a été signé par

10 toutes les parties au conflit en Bosnie-Herzégovine.

11 Mme Hollis (interprétation). - Cet article, pouvez-vous nous

12 dire à quoi il fait référence ?

13 Mme Greve (interprétation). - Il parle de la validité des

14 documents et il affirme que tout document -il s'agit du paragraphe 1- tout

15 document, y compris un document de renonciation de transfert de titre de

16 propriété, d'avoir ou de créance assignée par un prisonnier, qui doit être

17 libéré ou transféré, n'a pas de validité légale et n'a pas d'incidence sur

18 les droits et obligations de ce prisonnier.

19 Au paragraphe 2, il est dit qu'un tel document signé par des

20 civils qui doivent être transférés vers une région autre que leur région

21 de résidence précédente, n'aura pas de validité.

22 Mme Hollis (interprétation). - Autant que vous sachiez, pourquoi

23 a-t-on estimé nécessaire d'inclure cet article dans l'accord ?

24 Mme Greve (interprétation). - On l'a inclus parce que le CICR,

25 le comité international de la Croix-Rouge, a constaté que pratiquement

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1 tout le monde, toutes les personnes qui quittaient une zone avec l'aide de

2 la Croix-Rouge, devaient signer un tel document, pour qu'on les autorise à

3 quitter les documents de la part des autorités serbes de facto à Prijedor.

4 Mme Hollis (interprétation). - Nous souhaiterions verser cette

5 pièce en tant que pièce P37. Et maintenant, nous aimerions que le témoin

6 prenne connaissance de la pièce 38A.

7 Mme Hollis (interprétation). - Madame Greve, pouvez-vous nous

8 dire de quoi il s'agit ?

9 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit également d'un

10 paragraphe extrait de mon rapport. Il s'agit des changements de population

11 par nationalité, en d'autres termes, les nationalités déclarées des

12 habitants de l'Opstina Prijedor entre 1991, c'est-à-dire l'époque du

13 recensement officiel, et 1993, un comptage de population des autorités

14 serbes dans l'Opstina de Prijedor.

15 En 1991, les chiffres sont tirés du recensement, du recensement

16 que j'ai utilisé à l'époque où j'ai rédigé mon rapport, qui comporte des

17 chiffres différents, quelque peu différent des chiffres que vous avez pu

18 voir hier qui venaient de Bosnie-Herzégovine. Pour 1993, il s'agit des

19 chiffres fournis par les autorités serbes de l'époque. J'ai effectué des

20 soustractions, des additions, j'ai examiné les chiffres et j'ai essayé de

21 voir ce que cela signifiait en termes de réductions et en termes de

22 nouvelles arrivées.

23 Mme Hollis (interprétation). - Nous souhaiterions que cette

24 pièce soit la pièce 38A.

25 A présent, je demanderai que l'on montre au témoin, la

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1 pièce P 38B, et je vous demanderai, pour les chiffres de 1993, d'où vous

2 avez tiré vos renseignements.

3 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit de chiffres publiés par

4 le journal Kozarski Vjesnik, dans un article du 2 juillet 1993, dont le

5 titre était :"Résultats officieux du recensement, qui sommes-nous et

6 combien sommes-nous ?"

7 Mme Hollis (interprétation). - Madame Greve, la pièce qu'on

8 vient de vous tendre, s'agit-il de l'article dont vous venez de parler ?

9 Mme Greve (interprétation). - Oui.

10 Mme Hollis (interprétation). - A la lecture de cet article,

11 examinez la troisième ligne, est-ce que vous pouvez nous dire d'où

12 viennent les chiffres ? Quelles sont les sources ?

13 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit de la Republika Srpska

14 et du Bureau

15 républicain des statistiques.

16 Mme Hollis (interprétation). - Et à la ligne suivante, que

17 peut-on lire ?

18 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit de la Commission

19 municipale du recensement.

20 Mme Hollis (interprétation). - Examinez cet article et

21 pouvez-vous nous dire quel est le nombre total d'habitants de la

22 municipalité, conformément à ce recensement ?

23 Mme Greve (interprétation). - Il est dit qu'il y a

24 65 551 habitants.

25 Mme Hollis (interprétation). - Et la ligne suivante, pouvez-vous

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1 nous dire ce qu'elle dit du nombre des Musulmans ?

2 Mme Greve (interprétation). - Il est dit qu'il y a

3 6 124 Musulmans.

4 Mme Hollis (interprétation). - Et qu'en est-il du nombre des

5 catholiques ?

6 Mme Greve (interprétation). - 3 169.

7 Mme Hollis (interprétation). - Est-ce que vous pourriez nous

8 dire, en termes généraux, quel groupe ethnique correspond aux catholiques

9 dans l'Opstina de Prijedor ?

10 Mme Greve (interprétation). - Ils étaient associés à la

11 population croate, et les orthodoxes sont associés aux Serbes.

12 Mme Hollis (interprétation). - Et qu'en est-il des pourcentages

13 de la population de citoyenneté serbe à l'époque du recensement ?

14 Mme Greve (interprétation). - 96,3 %.

15 Mme Hollis (interprétation). - Nous souhaiterions que cette

16 pièce 38 B de l'accusation soit versée au dossier, et je demanderai que

17 l'on donne au témoin ce que nous souhaiterions enregistrer comme la

18 pièce 39 de l'accusation aux fins d'identification.

19 Madame Greve, pouvez-vous nous dire de quoi s'il s'agit ?

20 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit d'un communiqué de

21 presse émanant du Comité international de la Croix-Rouge en date du

22 3 octobre 1992, le titre étant "Sauver des

23 vies en Bosnie-Herzégovine".

24 Mme Hollis (interprétation). - De qui émane cette déclaration ?

25 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit du Président de la

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1 Croix-Rouge internationale, M. Samaruza*.

2 Mme Hollis (interprétation). - Je vous prie de vous reporter à

3 la page 2 de ce document, troisième paragraphe. Qu'est-il dit dans ce

4 document sur le respect des principes du droit international humanitaire ?

5 Mme Greve (interprétation). - Il est dit expressément à la

6 troisième ligne, à la fin de cette ligne, que les principes les plus

7 fondamentaux du droit international humanitaire continuent d'être ignorés

8 sur le terrain.

9 Mme Hollis (interprétation). - Reportez-vous au paragraphe

10 suivant qui commence par "De plus", "Morever". Que peut-on lire dans ce

11 paragraphe sur ce qui est dénommé « nettoyage ethnique » ?

12 Mme Greve (interprétation). - On donne une description de ce

13 qu'il faut entendre par nettoyage ethnique, et, à la première ligne de ce

14 paragraphe, on voit que sous couvert d'une politique de "nettoyage

15 ethnique", des dizaines de milliers de membres de groupe de minorité dans

16 des zones contrôlées par les partis, sont encore à la merci de mesures de

17 répression impliquées localement, conformément à une idéologie de

18 discrimination.

19 Mme Hollis (interprétation). - Passez maintenant à la dernière

20 page de ce document, et veuillez vous reporter au troisième paragraphe.

21 Que peut-on lire là-dessus, sur le CICR et sur ce que le CICR a dû faire ?

22 Mme Greve (interprétation). - Le CICR considère qu'il a un

23 devoir moral de sauver les vies des civils, même si cela implique le

24 transfert temporaire de ces civils hors de leur zone de résidence. Si je

25 peux me permettre de l'ajouter, c'était à l'époque où le CICR était

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1 critiqué au plan international, car il avait participé à l'évacuation de

2 populations.

3 Mme Hollis (interprétation). - Madame Greve, le document que

4 vous avez sous les yeux et les déclarations qui y sont contenues, est-ce

5 que cela coïncide avec votre analyse et vos conclusions sur la zone de

6 Prijedor ?

7 Mme Greve (interprétation). - Oui.

8 Mme Hollis (interprétation). - Nous souhaiterions que cette

9 pièce soit enregistrée comme pièce de l'accusation P 39.

10 Nous n'avons pas d'autres questions, Monsieur le Président.

11 M. le Président (interprétation). - Maître Vucicevic.

12 M. Vucicevic (interprétation). - (Intervention hors microphone)

13 Je vous remercie d'être venu témoigner au cours de cette

14 procédure. Au début de votre déposition, la pièce n° 8 de l'accusation a

15 été présentée, il s'agit de votre curriculum vitae. Pouvez-vous nous

16 expliquer exactement quelles ont été vos missions et vos tâches dans le

17 domaine international qui vous ont conféré le statut d'expert pour évaluer

18 la situation en Bosnie ? Veuillez résumer brièvement.

19 Mme Greve (interprétation). - Mon savoir-faire porte sur les

20 violations des Droits de l'Homme et des enquêtes sur des violations

21 éventuelles de Droits de l'Homme, et cela remonte à un travail que j'ai

22 effectué, en effet, de 1979 à 1981. J'ai été officier adjoint de

23 protection auprès du Haut commissariat des Nations Unies aux réfugiés,

24 j'ai été en poste à Bangkok. A l'origine, je travaillais avec des réfugiés

25 de Birmanie, du Laos et, par la suite, lorsque davantage de personnes sont

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1 arrivées dans cette région, je me suis occupée plus particulièrement de la

2 situation du Cambodge, j'y ai travaillé deux ans environ.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Si je puis me permettre,

4 s'agissait-il d'une affectation permanente, ou est-ce que, à l'époque,

5 vous travailliez également à d'autres tâches dans votre pays ?

6 Mme Greve (interprétation). - Non,c'était une affectation

7 permanente, si je peux

8 m'exprimer ainsi, il s'agissait d'une situation d'urgence, nous avons

9 travaillé pratiquement jour et nuit pendant deux ans. A l'issue de cette

10 période, j'ai estimé que je devais mettre sur le papier un certain nombre

11 de choses fondamentales que j'avais vues, et je pensais que cela serait

12 rapide et que cela serait une tâche aisée.

13 Or, il s'est avéré que c'était ma thèse de doctorat, mais j'ai

14 eu d'autres affectations également, et je suis restée en Norvège. J'ai

15 travaillé pendant six ans sur ce qui allait devenir ma thèse de doctorat.

16 Elle a trait à une situation moderne des réfugiés en comparaison avec les

17 conventions internationales sur les réfugiés.

18 J'ai travaillé brièvement en Ethiopie pendant la famine en 1985.

19 On m'a demandé d'examiner tout particulièrement la situation des enfants

20 qui vivaient seuls, j'ai travaillé pour "Save the children" et j'ai essayé

21 d'évaluer la situation avec l'aide d'une personne éthiopienne qui

22 travaillait sur le plan local pour "Save the children" ; on nous a demandé

23 de formuler des recommandations.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Puis-je vous demander combien

25 de temps vous avez travaillé en Ethiopie ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Il s'agissait d'une brève mission,

2 je pense que les dates exactes se trouvent dans mon curriculum vitae. Et

3 si vous me le permettez, si vous me donnez le curriculum vitae, je pourrai

4 vous donner les dates plus précises.

5 M. le Président (interprétation). - Il s'agit de la pièce n° 8.

6 Mme Greve (interprétation). - Les dates exactes se trouvent en

7 page 3, c'est une période qui va du 20 août au 4 septembre, une période de

8 15 jours, c'était une période d'établissement des faits. Et ensuite, j'ai

9 fait du travail administratif, j'en avais déjà fait avant de partir pour

10 l'Ethiopie et j'ai recommencé après mon retour d'Ethiopie. Cela a abouti à

11 un certain changement de politique et à des recommandations sur

12 l'orientation du travail de "Save the children" pour les enfants.

13 Par la suite, j'ai travaillé au cours d'une mission

14 d'établissement des faits qui était brève également, en Angola. Il

15 s'agissait d'examiner les camps de réfugiés pour des personnes venant de

16 Namibie, sous le contrôle de la SOAPO*, l'Organisation des peuples

17 d'Afrique du Sud-Ouest. A l'époque, il s'agissait de voir si les Droits de

18 l'Homme fondamentaux avaient subi des violations.

19 Je pensais que cette visite était trop brève. Pour me rendre en

20 Ethiopie, non, en Angola, il s'agissait de la période du 30 novembre au

21 6 décembre 1987. Par conséquent, j'ai dit que j'étais disposée à me rendre

22 en Angola, mais que mon travail consisterait essentiellement à revoir le

23 cadre juridique, législatif, la constitution, examiner les procédures

24 pénales pour voir si cela correspondait aux normes juridiques. C’est ce

25 que j'ai fait, ils y ont apporté un certain nombre de changements.

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1 Le changement principal a été le suivant : le droit pénal a été

2 subdivisé en deux parties, premièrement une partie qui énonçait ce qui

3 était interdit et deuxièmement on énumérait les différents types de

4 peines, mais il n'y avait pas de lien entre les deux. Cela dépendait d'un

5 commissaire politique et du tribunal. Ultérieurement, on a modifié les

6 choses et des peines maximum ou minimum ont été instaurées pour différents

7 délits.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous avez d'autres

9 missions internationales qui vous ont permis d'observer des violations du

10 droit humanitaire ? Vous vous êtes rendue sur le terrain et vous avez

11 observé les choses sur le terrain. Vous avez parlé d’Indochine,

12 d’Ethiopie, d’Angola.

13 Mme Greve (interprétation). - J'ai également travaillé...

14 J'essaie de retrouver la chose... J'ai été médiateur avec l'autorité de

15 transition des Nations Unies au Cambodge et sur ma suggestion, les Nations

16 Unies ont créé un bureau d'un médiateur, d’un Ombudsman, pour le retour

17 des rapatriés au Cambodge. Il existait donc un bureau de médiateur,

18 d’Ombudsman, au sein des bureaux de Luntac*, de l'autorité transitoire

19 pour le Cambodge. J'y ai travaillé pendant

20 un an.

21 Toutes les plaintes devant ces autorités, à l'époque,

22 parvenaient à notre bureau. Donc nous examinions tout type d'allégation,

23 de crime et d'abus et de violation des Droits de l'Homme. Il s'agissait

24 d'une mission continue sur six mois.

25 Les Nations Unies, suite à ma recommandation... On a modifié, le

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1 libellé et on a parlé d'atrocités.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Page 5, est-ce qu’il s'agit là

3 de ce à quoi vous faites référence ? Est-ce qu’il s'agit du premier

4 paragraphe de la page 5 dont vous venez de parler, ce projet de

5 formation ?

6 Mme Greve (interprétation). - Non, veuillez m'excuser, il s'agit

7 de la page 4, j'aurais dû le dire, il s'agit du 4 août 1992 au

8 3 février 1993.

9 Pour toutes les fonctions que j'ai assumées, vous trouverez les

10 dates exactes, pour cette mission précise. Peut-être qu'un certain travail

11 administratif s'est poursuivi après.

12 Lorsque j'ai rédigé ma thèse de doctorat, j’ai examiné les

13 prisons de la République Cambodgienne et cela se fondait sur des

14 entretiens avec des réfugiés et cela a été diffusé entre autres au Haut-

15 Commissaire pour les réfugiés et Amnesty International. J'ai travaillé

16 pour Amnesty International dans le domaine des Droits de l'Homme.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Et cela se trouve à quel

18 paragraphe de votre curriculum vitae ?

19 Mme Greve (interprétation). - Ce profil des prisons n'est pas

20 cité, car il s'agit d'une initiative personnelle que j'ai eue et je

21 n'étais pas employée pour le faire.

22 M. Vucicevic (interprétation). - J’essaie très rapidement de

23 faire le total des périodes que vous avez passées en mission

24 internationale au cours de votre carrière professionnelle et il semble

25 qu'au total cela représente trois ans, trois ans et demi ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Ou même moins de trois ans sur le

2 terrain, en

3 mission.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez été juriste

5 professionnelle au début de votre carrière, vous avez également occupé des

6 postes de juge dans votre pays, en Norvège ?

7 Mme Greve (interprétation). - Oui, c'est exact.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Peut-on donc raisonnablement

9 penser que vous avez assumé vos mandats de Droit international en

10 parallèle et en plus de votre profession de juge ?

11 Mme Greve (interprétation). - Je dirai que ma carrière -peut-

12 être ne peut-on pas parler de carrière- mais ma vie professionnelle s'est

13 déroulée sur trois plans : en tant que juge, en tant que professeur de

14 droit et dans le domaine des Droits de l'Homme au plan international.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Où avez-vous été nommée ou

16 élue ? Je ne sais pas comment fonctionne le système de nomination ou

17 l'élection des juges, mais quand cela s’est-il produit pour la première

18 fois ?

19 Mme Greve (interprétation). - Dans mon pays, il n'y a pas de

20 carrière séparée, indépendante pour les juges. Cela dépend des notes que

21 vous recevez lorsque vous réussissez votre examen, cela dépend de vos

22 expériences antérieures. Vous posez votre candidature pour un poste et

23 c'est en fait le ministère de la Justice qui nomme les juges, le ministre

24 de la Justice.

25 D'autre part, en Norvège, nous devenons des juges assistants, si

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1 je puis dire, c'est notre premier poste en tant que juge. Ceci ne peut

2 dépasser une période de deux ans. Par conséquent, on ne peut pas être juge

3 pendant plus de deux ans, à ce niveau-là en tout cas.

4 En fait, j'ai exercé pendant un certain temps, et puis j'ai

5 arrêté, et puis je suis revenue par la suite pour exercer à nouveau la

6 profession de juge. Mais j'ai pu obtenir un congé lorsque j'étais dans mes

7 missions pour les Nations Unies.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Mais j'aimerais vous poser la

9 question suivante : pendant que vous étiez juge à la Cour d'appel du

10 district ouest de Norvège, vous étiez employée

11 à temps plein, si je puis dire ?

12 Mme Greve (interprétation). - Oui, bien sûr, c'était un emploi

13 permanent.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Et vous statuiez sur

15 différentes affaires ?

16 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Des affaires civiles, pénales ?

18 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Peut-être du droit commercial

20 également et peut-être que vous statuiez sur des cas de violation des

21 droits civils qui existaient en Norvège, je ne sais pas. Est-ce que cela

22 s’est déjà produit ?

23 Mme Greve (interprétation). - Oui, bien sûr, à plusieurs

24 reprises.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Ce que je veux dire, c’est est-

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1 ce que vous vous souvenez de ce type d'affaire ? Est-ce que cela s’est

2 déjà présenté ?

3 Mme Greve (interprétation). - Oui, effectivement, il a été dit

4 que nous avions violé la convention européenne des Droits de l'Homme.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Et avez-vous statué sur cette

6 affaire ?

7 Mme Greve (interprétation). - Peut-être que j'ai effectivement

8 eu à connaître certains témoignages recueillis par la police et puis

9 témoignages qui arrivaient devant le Tribunal par la suite.

10 M. Vucicevic (interprétation). - N'est-il pas exact de dire

11 qu'au cours de votre activité en tant que juge, vous n'étiez plus alors

12 impliquée dans vos missions internationales ? Vous étiez extrêmement

13 occupée à statuer sur les affaires que vous connaissiez à l'époque ?

14 Mme Greve (interprétation). - C'est exact, effectivement, mais

15 je dois dire que j'ai passé nombre de mon temps libre, nombre d'heures de

16 mon temps libre sur ces questions spécifiques, notamment lorsqu'il est

17 question du Cambodge et de l'ex-Yougoslavie.

18 La nature des choses était telle que je me suis sentie obligée

19 d'utiliser un peu de mon

20 temps libre pour travailler sur ces questions.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, après vos

22 heures de travail, vous avez pris sur votre temps libre pour examiner ces

23 déclarations, pour les analyser ?

24 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Je crois que dans votre

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1 témoignage d'hier, et si ce n'est pas le cas, c’est une déclaration que

2 nous a communiquée le Procureur plus tôt, vous avez dit, je crois, que

3 vous ne vous êtes pas rendue en ex-Yougoslavie au cours de la période à

4 laquelle vous avez étudié cette question, n'est-ce pas ?

5 Mme Greve (interprétation). - Non, je ne l'ai pas dit hier, je

6 ne l'ai pas dit dans mon rapport non plus. Je suis allée en Slovénie et en

7 Croatie et j'espérais pouvoir me rendre dans les zones en Croatie qui

8 étaient protégées par la Forpronu à l'époque, mais cette proposition a été

9 rejetée.

10 Je voulais également me rendre en Bosnie, je n'ai pas pu le

11 faire ; mais je suis allée une fois en Slovénie et en Croatie, mais

12 j'avais bien sûr l'espoir de pouvoir aller plus loin et me rendre dans les

13 zones mentionnées.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Mais vous n’êtes jamais allée

15 en Bosnie, n’est-ce pas, en Bosnie telle qu’elle était définie par ses

16 anciennes frontières, en tant qu’Etat de l'ex-Yougoslavie ?

17 Mme Greve (interprétation). - Non, par la suite j’ai reçu une

18 invitation de me rendre en Bosnie, mais pas dans la zone de Prijedor en

19 particulier et j'ai pensé qu’il n'était pas nécessaire que je m'y rende,

20 mais ceci aurait été de toute façon un voyage personnel et non-officiel.

21 M. Vucicevic (interprétation). - C'est donc vous qui avez pris

22 la décision de ne pas vous rendre dans la zone de Prijedor ou bien vous

23 l’a-t-on interdit, les autorités vous l'ont-elles interdit ?

24 Mme Greve (interprétation). - On ne m'a jamais proposé d'aller à

25 Prijedor, au contraire on m'a toujours refusé la possibilité de m’y

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1 rendre. Lorsque le bureau du Procureur devait s’y rendre, j'ai suggéré

2 moi-même que je serais tout à fait prête à les accompagner, mais on n'a

3 pas donné la permission. Mais je n'ai pas demandé officiellement

4 l'autorisation de me rendre à Prijedor, une fois mon travail terminé au

5 sein de la commission d'experts.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Mais, pour que les choses

7 soient bien claires, vous avez dit que vous avez été invitée à vous rendre

8 en Bosnie, mais que vous n'avez pas obtenu l'autorisation d'aller à

9 Prijedor. Qui vous a convié ? Est-ce la même personne ou la même entité

10 qui vous a refusé d'aller ou l'accès à Prijedor ?

11 Mme Greve (interprétation). - On m'a demandé à plusieurs

12 reprises de me rendre, d'assister à des conférences, et notamment à

13 Sarajevo, et j'ai décliné l'invitation. Cependant, j'ai précisé que s'il

14 pouvait organiser un voyage pour moi à Prijedor, je serais prête à m'y

15 rendre. Mais, la réponse a été non. Par la suite, une fois mon travail

16 terminé au sein de la commission des experts, je n'ai pas renouvelé ma

17 demande, en revanche lorsque j'y travaillais, j'ai demandé l'autorisation

18 de m'y rendre, mais on me l'a refusée. Quoi qu'il en soit, de façon

19 générale, la commission d'experts n'était pas la bienvenue, et elle n'a

20 presque jamais reçu l'autorisation de se rendre sur le terrain.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Au moment où vous réalisiez

22 cette étude sur la zone de Prijedor, avez-vous pu vous entretenir avec un

23 enquêteur ou avec des autorités de la police ou avec des diplomates, qui

24 vous avaient communiqué un rapport sur lequel vous avez fondé entre autres

25 votre déclaration ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Oui, avec un certain nombre

2 d'entre eux.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Pourriez-vous nous donner le

4 nom de certaines de ces personnes et quelle était la nature de vos

5 conversations ?

6 Mme Greve (interprétation). - Peut-être puis-je donner une

7 explication générale de

8 la façon que j'ai utilisée pour étudier la zone de Prijedor ?

9 M. le Président (interprétation). - Oui, répondez comme vous le

10 souhaitez à la question.

11 Mme Greve (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

12 Lorsque j'ai exprimé le souhait d'étudier la zone de Prijedor, j'ai

13 commencé par analyser des déclarations de Suède, et à ce moment-là, j'ai

14 rencontré la personne qui avait organisé le recueil de ces déclarations.

15 C'était un juriste qui travaillait pour le Secrétaire Général des Nations

16 Unis, il s'appelle Hans Korell*, il m'a dit comment et pourquoi il avait

17 organisé ce recueil de déclarations en Suède. Il avait en fait participé

18 lui-même à une mission du Conseil de l'Europe en ex-Yougoslavie, et a

19 déclaré que nombre d'allégations avaient été proférées, allégations

20 faisant état de violations graves du droit, et de violations des droits et

21 coutumes de la guerre.

22 Il a donc suggéré à son ministère, le ministère des Affaires

23 Etrangères, de rester en Suède. Il a proposé que ces réfugiés restent en

24 Suède également et qu'ils aient la possibilité de s'exprimer sur ce qu'ils

25 avaient vu et sur ce qui pouvait éventuellement constituer des violations

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1 du droit en ex-Yougoslavie. Par conséquent, lorsque je suis allée en

2 Suède, j'ai pu consulter ces déclarations suédoises.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Excusez-moi, M. Hans Korell*

4 vous a-t-il dit des déclarations qu'il avait lui-même recueillies, soit

5 personnellement soit pour son étude ?

6 Mme Greve (interprétation). - Non, mais il m'a dépeint, de façon

7 générale, la façon dont il avait organisé le recueil de ces déclarations.

8 Et lorsque j'ai essayé de comprendre ce qui se passait à Prijedor, il a

9 fallu que je m'intéresse à l'idéologie. Or, à ma connaissance, aucune

10 étude sur ce point n'avait été faite jusque-là.

11 Par conséquent, je ne pouvais pas me reporter à certains livres,

12 pour des raisons de sécurité, je ne pouvais pas trop impliquer les

13 témoins, et puis je voulais que les informations qui m'étaient disponibles

14 soient les plus exactes possibles. Par conséquent, j'avais décidé que je

15 ne

16 m'adresserais qu'aux gens qui avaient quitté l'ex-Yougoslavie, qui

17 vivaient maintenant à l'étranger, de préférence dans des pays extrêmement

18 lointains et différents, dans le nombre de pays le plus grand possible,

19 afin que personne ne puisse menacer ces réfugiés à cause de mon étude.

20 Et puis, je me suis dit également qu'étant donné mon expérience,

21 dans ce type de recueil de témoignages de réfugiés, il serait sage par

22 exemple que les témoins soient séparés, parce que parfois les témoins se

23 retrouvent le soir et ils partagent leurs informations, et ce n'est pas

24 qu'ils veulent mentir, mais ils ont tous peur de faire des erreurs et ils

25 essaient de préciser leur vérité. Moi, je ne voulais pas que cela arrive,

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1 je voulais que les informations que je puisse recueillir soient aussi

2 véritables et authentiques que possible.

3 Par conséquent, je voulais que les déclarations proviennent de

4 lieux extrêmement distincts et de préférence de façon simultanée. C'est

5 pourquoi -et je rappelle que nous n'avions pas un sou pour réaliser cette

6 étude sur Prijedor, alors, je me suis rendue dans différents pays, le mien

7 notamment, et nous nous disions : « Très bien, nous avons un pays voisin,

8 dans ce pays voisin Hans Korell* a utilisé une démarche extrêmement

9 positive pour obtenir ces déclarations », je suggérais que mon pays suive

10 la même démarche.

11 Et j'ai effectivement rassemblé autour de moi certains

12 volontaires bénévoles, des juges, des juristes, des juristes militaires,

13 des enquêteurs, et je leur ai dit : « Voilà, j'aimerais entendre les

14 déclarations de ces réfugiés de cette façon ».

15 Et, je voudrais ajouter quelque chose, étant donné que j'ai

16 travaillé au HCR, j'ai informé le HCR et le HCR m'a dit également qu'un

17 certain nombre de personnes avec qui le HCR avait été en contact

18 lorsqu'ils étaient sortis de Bosnie, lorsqu'ils allaient à Kolavac*, et il

19 relevait de la compétence du HCR, le HCR avait donc demandé que ces

20 réfugiés soient relocalisés ou évacués vers des pays tiers.

21 Par conséquent, le HCR a pu me fournir une liste des pays dans

22 lesquels ces

23 personnes étaient installées à présent, notamment les gens qui provenaient

24 de la région de Prijedor. Comme cela est dit dans mon rapport, un

25 journaliste américain, Roy Gutman, le 2 août 1992, a écrit un article dans

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1 ce journal.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Non, j'objecte à cette partie

3 de la déclaration, parce que je ne parlais moi que de méthodologie, je

4 crois que nous allons là bien au-delà du cadre du contre-interrogatoire et

5 de ma question.

6 M. le Président (interprétation). - Eh bien, laissez cette

7 personne de côté, M. Gutman.

8 Mme Greve (interprétation). - Très bien, je ne parlerais pas de

9 M. Gutman. Ce que je voulais dire donc, c'est qu'à cette époque le HCR et

10 le CICR, parce que la presse s'intéressait particulièrement à Prijedor,

11 c'était la première zone à partir de laquelle des transferts à grande

12 échelle ont été réalisés grâce à l'aide internationale, et pour cette

13 raison, le HCR détenait des informations précises parce qu'il avait une

14 idée des groupes d'âge des personnes qui se trouvaient à Prijedor en

15 octobre, novembre, décembre 1992, et il avait dû faire appel à la

16 communauté internationale, afin de voir s'il pouvait faire sortir ces

17 personnes d'autres pays, et si ces pays tiers pouvaient les accueillir.

18 C'est pourquoi, je savais qu'il serait difficile pour le haut-

19 commissaire aux réfugiés d'avoir des informations extrêmement précises

20 parce que c'était une situation un peu chaotique.

21 Cependant, j'ai décidé de poursuivre le travail excellent

22 qu'avait réalisé M. Hans Korell* jusque là, et de suivre une procédure qui

23 avait déjà été utilisée en Suède. J'ai donc rencontré personnellement les

24 gens qui menaient ces entretiens en Norvège, et je leur ai expliqué la

25 méthodologie à utiliser avant qu'ils ne commencent ces entretiens. J'ai

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1 également parlé avec certaines de ces personnes par la suite, mais je ne

2 leur ai rien dit sur la procédure d'entretien en tant que telle. Il

3 s'agissait de professionnels, et je leur ai laissé une marge de manoeuvre.

4 Je pensais qu'il serait plus sage que j'analyse les informations qui

5 m'étaient données

6 plutôt que de m'impliquer dans la procédure de rassemblement des

7 informations.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Juge Greve, laissez-moi

9 poursuivre. D'où avez-vous obtenu d'autres déclarations, à part la Suède

10 et la Norvège ? Pouvez-vous simplement nous énumérer les pays ?

11 Mme Greve (interprétation). - Bien sûr, la Norvège, la Suède,

12 les Pays-Bas, la Malaisie, l'Allemagne, la Croatie, sur ma propre

13 initiative je précise. En fait, je n'étais pas au courant à cette époque

14 et le format utilisé était un peu différent, mais j'ai obtenu des

15 informations également de la Grande-Bretagne, des Etats-Unis, de la

16 France, de l'Italie, de la Suisse, du Danemark, je crois que je les ai

17 tous cités.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Merci.

19 Mme Greve (interprétation). - Non, excusez-moi, j'ai également

20 obtenu un certain nombre de déclarations du Portugal dans une forme

21 également un peu différente. Et ces 400 déclarations dont j'ai parlé au

22 départ, je les ai obtenues dans les six premiers pays que j'ai mentionnés,

23 et les autres déclarations sont venues s'ajouter à ces 400 premières.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, vous avez fondé

25 votre rapport seulement sur ces 400 déclarations obtenues des six premiers

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1 pays, à savoir la Suède, la Norvège, les Pays-Bas, la Croatie, la Malaisie

2 et l'Allemagne, c'est cela ? Et vous avez laissé de côté les autres

3 déclarations ?

4 Mme Greve (interprétation). - Non, c'est inexact. J'ai utilisé

5 ces déclarations comme informations de base, mais j'ai analysé toutes les

6 autres informations, je ne me suis pas limitée à seulement quelques

7 sources. J'ai utilisé, j'ai exploité toutes les sources possibles. Je me

8 suis adressée à tous les journalistes que je connaissais et qui s'étaient

9 rendus dans la zone qui m'intéressait. J'ai même rencontré des diplomates

10 serbes à Genève, j'ai essayé de m'entretenir avec tout le monde.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Vous parlez de diplomates

12 serbes, mais, à l'époque,

13 il y avait deux entités différentes : il y avait Republika Srpska d'un

14 côté et de l'autre côté, il y avait la République de Yougoslavie. Alors,

15 ces diplomates, ils venaient d'où ? Parce qu'à l'époque, il y avait des

16 diplomates en Europe de la Republika Srpska également ?

17 Mme Greve (interprétation). - Lorsque je parlais des diplomates,

18 je dois ajouter que l'article 3 de la Constitution de la Republika Srpska

19 ou de la République du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine -qui a été

20 rebaptisée République serbe de Bosnie-Herzégovine, puis rebaptisée encore

21 Republika Srpska- l'article 3 de sa constitution, donc, dit que cette

22 entité fait partie de la République fédérale de Yougoslavie ; il ne s'agit

23 donc pas d'un Etat séparé, ceci se trouve dans sa constitution.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Objection, parce que cela se

25 rapporte à la dernière question, la question à laquelle il faudra répondre

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1 en dernier.

2 M. le Président (interprétation). - Oui, effectivement, nous

3 acceptons cette objection pour l'instant.

4 Mme Greve (interprétation). - Comme je l'ai dit hier, le seul

5 document que j'ai obtenu des autorités serbes dans le sens large était

6 cette constitution justement. Et comme cela a été précisé dans la

7 constitution telle qu'elle nous a été fournie, elle appartenait à l'Etat,

8 et, en vertu de cet article 3, nous nous sommes adressés aux autorités

9 fédérales à Genève.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Merci.

11 Mme Greve (interprétation). - Et je dois dire également que j'ai

12 essayé d'obtenir cette déclaration, parce que, je parle l'anglais, le

13 norvégien, le français et j'essayais de trouver toutes les sources

14 possibles, notamment des articles de journaux de Kozarski Vjesnik. Nous

15 l'avons vu, j'ai essayé d'en obtenir le plus possible, j'ai essayé de les

16 faire traduire. Donc, toutes les sources disponibles, j'ai essayé de les

17 utiliser, mais pour des raisons de confidentialité le CICR et le HCR ne

18 pouvaient pas partager avec moi un certain nombre d'informations.

19 En revanche, les gens pouvaient me dire de façon privée si

20 j'étais dans une impasse

21 ou s'il fallait que je cherche ailleurs.

22 M. Vucicevic (interprétation). - Vous venez de parler de la

23 constitution de Republika Srpska et j'aimerais continuer sur cette voie.

24 Docteur Greve, savez-vous que la Bosnie-Herzégovine a été reconnue en tant

25 qu'Etat indépendant en avril 1992 ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Oui, on m'en a informé.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Et savez-vous que la

3 Bosnie-Herzégovine avait sa propre constitution en tant qu'Etat

4 indépendant ?

5 Mme Greve (interprétation). - Oui, je crois que je le sais, je

6 n'ai pas lu cette constitution, mais je suppose que c'est exact.

7 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez lu la Constitution de

8 la Republika Srpska, n'est-ce pas ?

9 Mme Greve (interprétation). - L'avant-projet nous a été fourni,

10 la version finale, je crois, portait la date du mois d'août de cette même

11 année. Je l'ai lu par la suite, mais je crois que c'est un avant-projet

12 qui nous a été fourni, en tout cas, c'est ce que nous avons reçu. C'est

13 l'une des pièces d'ailleurs, et si je m'en souviens bien, cet avant-projet

14 date de février.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Mais la Constitution, c'est le

16 droit suprême d'un Etat indépendant, n'est-ce pas ?

17 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

18 M. Vucicevic (interprétation). - D'après votre déclaration, il

19 s'ensuit logiquement que la Republika Srpska est un pays indépendant ?

20 Mme Greve (interprétation). - Je n'essaierai pas de parler de

21 questions juridiques.

22 M. le Président (interprétation). - Je crois que c'est une

23 question qui nous revient, la réponse nous revient en tout cas.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, lorsque vous

25 avez parlé à des diplomates du gouvernement au pouvoir à Belgrade, vous ne

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1 saviez pas avec certitude s'ils

2 représentaient légalement la Republika Srpska ou non ?

3 Mme Greve (interprétation). - Je ne me suis pas adressée à eux

4 pour leur demander de me fournir des informations officielles. Je ne

5 savais pas s'ils représentaient effectivement les autorités légales, en

6 tout cas les Serbes de Bosnie également. Je me suis adressée à eux par

7 politesse, non parce que nous ne recevions pas d'informations, mais je

8 voulais simplement leur présenter les progrès réalisés dans mon étude.

9 Je n'ai pas révélé mes sources, puisque je ne connaissais même

10 pas le nom des témoins dont j'utilisais les témoignages, mais je leur ai

11 expliqué comment j'avais abordé la question, je leur ai expliqué quelles

12 étaient mes conclusions, mes résultats.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Professeur, je voudrais

14 simplement déterminer qui vous a interdit l'accès à la Bosnie, même si

15 vous avez reçu la Constitution de la Republika Srpska ; je vous demanderai

16 une réponse claire.

17 Mme Greve (interprétation). - Je crois l'avoir déjà dit, je ne

18 sais pas si la Constitution peut être incluse, mais nous, à savoir la

19 Commission d'experts, avons obtenu cet avant-projet de constitution et une

20 lettre accompagnait ce document, disant que : "Bien que nous vous

21 fournissions cette constitution..." -et cette lettre était adressée à

22 M. Kokler* qui était un secrétaire juridique pour la Commission, il est

23 russe-, il est donc dit que : "Bien que nous vous fournissions cette

24 Constitution, cela ne veut pas dire que nous voulions coopérer avec vous.

25 Il ne faut pas voir ceci comme un signe de coopération." C'est la démarche

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1 générale, ils ne voulaient pas coopérer avec nous, ils ne voulaient pas

2 nous fournir des documents, ils ne voulaient pas nous permettre d'avoir

3 accès à des documents.

4 M. Kokler* de la Commission d'experts a tenté de permettre ces

5 contacts, il a écrit une lettre officielle demandant une coopération de la

6 part de ces personnes.

7 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez indiqué que vous

8 n'avez pas reçu l'autorisation de voyager en Bosnie par les diplomates

9 fédéraux en Suisse. A l'époque, représentaient-ils,... leur position

10 officielle était-elle celle de la Republika Srpska, ou bien n'avaient-ils

11 pas de position officielle ?

12 Mme Greve (interprétation). - Peut-être n'ai-je pas été

13 suffisamment claire. Je voudrais souligner que lorsque je me suis

14 entretenue avec ces diplomates, moi-même, je n'ai pas abordé la question

15 d'un voyage à Prijedor. C'est la Commission, en tant que telle, en tant

16 que Commission d'experts, qui s'est adressée aux autorités de la

17 Republika Srpska et à Belgrade, mais cette question a été abordée de façon

18 officielle par la Commission, pas par moi personnellement. C'est le

19 secrétaire juridique qui a lancé cet appel, mais cela ne s'est pas passé,

20 nous n'en avons pas parlé dans ma réunion avec les diplomates.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez dit avoir remplacé un

22 membre de la Commission qui était décédé. Ces demandes de la Commission

23 ont-elles été formulées avant ou après votre nomination ?

24 Mme Greve (interprétation). - Les deux, et je crois qu'elles ont

25 été répétées plusieurs fois avant mon arrivée. Elles ont été répétées par

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1 la suite, cela, c'est certain.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Vous dites que ces questions

3 avaient été soulevées par la suite, alors que vous étiez déjà membre de

4 cette Commission. Avez-vous eu l'occasion de voir des documents émanant du

5 gouvernement de la FRY ou de la Republika Srpska qui interdisait l'accès

6 de la Commission à cet endroit ?

7 Mme Greve (interprétation). - Je ne pense pas avoir vu les

8 documents, à l'exception de celui dont j'ai déjà parlé, puisque le texte

9 de la Constitution nous a été envoyés.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Avez-vous reçu des déclarations

11 orales de la part des représentants des Nations Unies ou de la Commission,

12 selon lesquelles le gouvernement de la Republika Srpska, ou le

13 gouvernement de la République fédérale de Yougoslavie aurait manifesté son

14 refus. Pourriez-vous nous traduire la quintessence de ces conversations ?

15 Mme Greve (interprétation). - Cette question a été soulevée à

16 plusieurs reprises,

17 elle était soulevée à pratiquement chacune des réunions de la Commission

18 d'experts. Nous nous rencontrions une fois ou deux fois par mois, une fois

19 tous les 15 jours. Chacun d'entre nous avait son projet, sa mission, sa

20 tâche, et nous voulions, nous devions, nous aurions voulu avoir un accès

21 général à ces documents. Cette question a été évoquée par notre Président,

22 ainsi que par un des secrétaires juridiques de premier plan qui s'occupait

23 de l'administration.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Avez-vous insisté pour pouvoir

25 accéder à Prijedor ou à la Republika Srspka, puisque c'était le sujet de

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1 votre étude ?

2 Mme Greve (interprétation). - Il se peut que je ne m'exprime pas

3 de cette façon-là. Je n'ai pas insisté, si vous voulez, mais j'ai demandé

4 instamment que cette requête nous soit accordée.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Pourquoi auriez-vous pensé que

6 cela aurait été beaucoup plus utile à l'époque , pourriez-vous motiver cet

7 avis ?

8 Mme Greve (interprétation). - Si vous voulez vous faire une idée

9 la plus précise possible d'une situation, je crois qu'il est préférable de

10 se rendre sur les lieux, dans la région dont vous parlez.

11 Il m’est plus facile de comprendre quelque chose que j'ai vu que

12 quelque chose que j'ai lu. Il faut plus d'efforts lorsqu'on se contente ou

13 qu'on n’a que de la lecture. C'était possible de réaliser ce travail de

14 cette façon-là, mais il aurait été préférable de voir les lieux à

15 Prijedor.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Serait-il exact de dire que

17 vous vouliez avoir une idée assez précise et que pour cela, il vous

18 fallait faire ou prendre un échantillon de la situation, parce que vous

19 avez repris dans ce rapport plusieurs éléments et qu'il vous fallait les

20 connaître pour chacun d'entre eux, en tout cas en ce qui concerne Prijedor

21 et les alentours ?

22 Mme Greve (interprétation). - Disons que je formulerai cette

23 idée quelque peu différemment. Je crois qu'il aurait été très utile de se

24 rendre sur les lieux, effectivement, mais nous avions une source très

25 importante qui nous donnait bien l’avis des Serbes de la région,

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1 c'était la presse officielle contrôlée par les autorités de Prijedor. Il y

2 avait ce Kozarski Vjesnik que j'ai lu avec la plus grande attention. J'ai

3 étudié tous les journaux que j'ai pu consulter. Il y avait aussi des

4 informations plus limitées qui me provenaient par le truchement de

5 rapports et d'informations radiodiffusées de Prijedor. Il y avait aussi

6 des émissions télévisées, qui venaient de la télévision et de Banja Luka.

7 Je crois que ceci aurait été vraiment utile, ceci m'aurait

8 facilité la tâche. J'aurais voulu rencontrer les personnes de la région,

9 mieux connaître cette région, c'est vrai.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Mais même si vous vous trouviez

11 à grande distance des lieux, certains éléments qu'on trouvait dans la

12 presse pouvaient être considérés comme dignes de foi, alors que s'agissant

13 d'autres articles, d'autres reportages, c'était plutôt des avis

14 personnels, des déclarations de personnalités individuelles.

15 Soyons plus précis. Lorsque vous aviez un article dans lequel le

16 journaliste cite les propos d'un représentant officiel, vous estimiez que

17 ceci était digne de foi ?

18 Mme Greve (interprétation). - Je ne parlerai pas de façon aussi

19 générale. Ce que je trouve le plus important, c'est que toutes les sources

20 disponibles nous disent pratiquement la même chose. Nous avons recueilli

21 quelques 400 déclarations de témoins. J'ai supervisé ce projet. A

22 l'exception de détails mineurs, on peut dire que toutes les personnes

23 s'expriment de la même façon, disent la même chose. C'était à ce point

24 surprenant que je me suis dit qu'il me fallait sonder plus loin et voir

25 s'il y avait d'autres sources pour corroborer ces déclarations des

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1 témoins.

2 M. Vucicevic (interprétation). - J'aimerais ici mettre en garde

3 le témoin par votre truchement, Monsieur le Président. Même s'il s'agit

4 d'une juriste émérite, le témoin ne répond pas toujours à la question

5 comme moi je la pose, elle répond avec un certain décalage. Quelquefois,

6 je lui demande si elle est d'accord ou si elle n'est pas d'accord, alors

7 qu'elle revient sur le sujet même de son étude. J'ai quelque peu le

8 sentiment qu'il me faut avoir la possibilité de poser des questions qui

9 vont creuser un peu certains sujets.

10 M. le Président (interprétation). - Je ne vais pas ici lancer un

11 avertissement à l'égard du témoin, je dirai simplement qu'il faudra peut-

12 être qu'elle se tienne plus près du texte, ou plus près de la question.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Je m'excuse, Madame.

14 Hier, au cours de votre déposition, vous vous êtes prononcée sur

15 les pièces versées au dossier et vous avez cité la déclaration d'un

16 fonctionnaire bien particulier, nous y reviendrons dans un instant. Mais

17 s'agissant de ces déclarations que vous avez citées à l'audience hier, il

18 y avait là des déclarations formulées par les fonctionnaires des

19 différentes entités qui existaient à l'époque dans la Republika Srpska.

20 Avez-vous le sentiment que cette déclaration était digne de foi, était

21 crédible ?

22 Mme Greve (interprétation). - Effectivement, j'ai le sentiment

23 que nombre des citations, nombre des articles de presse traduisaient un

24 avis qui était à l'appui de mes conclusions et c'était quelque chose de

25 surprenant.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Vous nous dites donc

2 aujourd'hui dans le cadre de votre déposition que même si vous vous êtes

3 fondée sur le Kozarski Vjesnik, qui était une des trois sources

4 d'information dont vous disposiez, les deux autres étant la radio...

5 Plutôt donc, il y avait deux sources dans lesquelles vous avez puisé. Vous

6 nous dites cela d'un côté et d’un autre côté vous nous dites que vous

7 n'avez fait qu’utiliser ceci que pour corroborer des conclusions déjà

8 tirées. Est-ce qu’il n'y a pas possibilité de réconcilier ceci. C’est le

9 problème de la poule et de l'oeuf. Qu'est-ce qui a été votre première

10 source d'information ? Pourquoi avoir utilisé cette première source alors

11 que vous aviez déjà tiré des conclusions après avoir consulté les

12 400 déclarations ? Pourriez-vous replacer ceci dans le contexte de votre

13 étude ?

14 Mme Greve (interprétation). - En fait, certains articles de

15 presse m'étaient disponibles avant que j'obtienne les déclarations.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Avez-vous eu des doutes quant à

17 la véracité de ces déclarations à l'époque, ou avez-vous pensé que

18 certaines de ces déclarations étaient plus véridiques, plus dignes de foi

19 que d'autres ?

20 Mme Greve (interprétation). - Non, ce n'est pas l'impression que

21 j'ai retirée. Il y avait quelques déclarations qui étaient plus courtes

22 que d'autres. Ces déclarations montrent bien que chaque être peut avoir

23 son expérience personnelle d'une situation générale, ce sont des avis

24 exprimés dans ces déclarations. Et j'ai demandé que des explications

25 soient fournies par ces personnes quant aux expériences qu'elles ont

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1 faites avant de quitter Prijedor, avant aussi qu'elles ne rencontrent des

2 problèmes, pour autant qu'elles en aient connu.

3 Mais permettez-moi d'ajouter ceci. Je n'ai pas déclaré que

4 j'étais à la recherche de déclarations spécifiques qui viendraient à

5 l'appui de ce que j'ai trouvé dans les déclarations des témoins ; je dirai

6 que j'ai été étonnée de voir à quel point les déclarations des témoins

7 étaient effectivement corroborées par ces déclarations très claires.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Ce n'est pas cela qui

9 m'intéresse.

10 Mme Hollis (interprétation). - Objection, je pense que le témoin

11 se prononce précisément sur la question.

12 M. le Président (interprétation). - Laissez-nous le soin d’en

13 juger.

14 Quelle est la question suivante que vous avez l’intention de

15 poser, Maître Vucicevic ?

16 M. Vucicevic (interprétation). - Quand avez-vous obtenu les

17 premiers numéros de Kozarski Vjesnik ?

18 Mme Greve (interprétation). - Il se peut que ce soit vers la mi-

19 février 1994.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Vous n'en étiez alors qu'au

21 tout début de votre étude ?

22 Mme Greve (interprétation). - Pas tout à fait, puisque je me

23 suis mise à l’oeuvre,

24 j'ai commencé à travailler avec la Commission en octobre 1993. Le bureau

25 du Secrétaire général m’a informé de ma nomination le 19 octobre, la

Page 37

1 nomination s'est faite grâce à la nomination du Secrétaire général le

2 21 octobre et nous ne savions pas à l'époque si la commission d'experts

3 allait terminer ses travaux au printemps de l'année, au moment de Pâques

4 ou plus tard. Donc, nous n'étions pas qu'au tout début. Puisque nous

5 devions terminer nos travaux pour Pâques, nous travaillions 24 heures sur

6 24.

7 M. Vucicevic (interprétation). - Je vais vous aider. Vous avez

8 reçu les premiers numéros de Kozarski VjesniK. Est-ce qu’à l'époque, vous

9 aviez sur votre bureau des déclarations fournies par les témoins, venant

10 de plusieurs pays ?

11 Mme Greve (interprétation). - Oui.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Et aviez-vous lu ces

13 déclarations avant de lire les numéros de Vjesnik ?

14 Mme Greve (interprétation). - Oui.

15 M. le Président (interprétation). - Laissez le témoin terminer

16 sa phrase.

17 Mme Greve (interprétation). - Oui, parce qu'en fait toute cette

18 étude a commencé par la lecture de ces déclarations de Suède.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Vous aviez lu combien de ces

20 déclarations ? Donnez-nous le pourcentage des déclarations que vous aviez

21 lues avant d'obtenir les premières informations du côté serbe.

22 Mme Greve (interprétation). - Il se peut que j'en ai lu la

23 moitié, un peu moins. Je ne suis vraiment pas en mesure de me souvenir du

24 nombre précis.

25 M. Vucicevic (interprétation). - C’est tout à fait normal,

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1 Madame.

2 Mme Greve (interprétation). - Ce n’est pas une question de temps

3 qui s’est écoulé. Il se peut que je ne me sois pas vraiment concentrée sur

4 la question de savoir à quel moment l'information arrivait, parce que j’ai

5 été vraiment inondée de tellement d'informations que je ne le

6 sais plus. Et même si j'avais toute une pile de déclarations sur mon

7 bureau avant de recevoir ces articles de presse, il se peut que j'ai

8 commencé ma lecture par une pile ou l'autre, je n'ai pas fait vraiment

9 attention à l'ordre dans lequel je faisais cette lecture, d'où mon

10 incapacité à vous donner une réponse précise maintenant.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Je comprends bien, Madame, que

12 ma question aurait pu donner l'impression que je vous aidais quelque peu

13 dans votre déposition ; loin de moi cette idée, je tiens à le préciser.

14 Une question vous a été posée quant à la crédibilité de

15 certaines déclarations, de certains renseignements obtenus de ce journal

16 Kozarski Vjesnik. Ce qui revient à dire qu'après avoir lu pratiquement la

17 moitié des déclarations que vous aviez reçues, vous pouviez consulter le

18 Kozarski Vjesnik, le passer au peigne fin et voir quels étaient les

19 articles dignes de foi et ceux qui ne l'étaient pas. Est-ce bien cela ?

20 Mme Greve (interprétation). - Non. D'abord, vous le constaterez,

21 plusieurs des articles provenant de Kozarski Vjesnik sont postérieurs à la

22 fin de mes travaux dans le cadre de ce rapport.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Madame, il y a peut-être un

24 contentieux sur le temps. Je ne vous pose pas des questions à propos des

25 articles que vous avez reçus avant de terminer votre étude ; je vous pose

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1 une question à propos des documents, des 50 % des articles. Vous avez dit

2 avoir utilisé plusieurs sources et tout ce que je vous demande, c’est de

3 nous dire comment vous avez utilisé ces sources, puisque vous avez

4 plusieurs fois répété hier que certains de ces articles ne correspondaient

5 pas à vos conclusions, ou tout du moins correspondaient à l'ensemble de

6 l'étude.

7 Or, nous sommes au moment où l'étude n'est pas encore terminée.

8 Vous avez lu la moitié des déclarations des témoins et vous vous mettez à

9 la lecture de ce Kozarski Vjesnik. Comment avez-vous procédé pour

10 comprendre ces citations de fonctionnaires, citations reprises

11 dans les articles de presse ?

12 Mme Greve (interprétation). - J'ai essayé de comprendre la

13 situation générale, j'ai essayé de comprendre comment les choses s'étaient

14 déroulées à Prijedor et j'ai donc utilisé plusieurs sources, ce journal en

15 étant une.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Avez-vous pensé qu'une

17 quelconque de ces déclarations que vous aviez reçues était tout à fait

18 fausse, du fait de la lecture de ces articles de presse ?

19 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai pas pensé que ces

20 déclarations étaient erronées ou fausses, mais j'ai pensé que les termes

21 utilisés dans ces articles ne se trouveraient pas dans un quotidien, dans

22 un article de presse ordinaire dans une région où il n'y a pas de conflit.

23 M. Vucicevic (interprétation). - En d’autres termes, vous avez

24 découvert que dans le contexte du conflit armé, les quotidiens, les

25 journaux ont tendance à modifier leur façon de relater les événements ?

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1 Mme Greve (interprétation). - J'ai constaté que dans certains

2 articles, il y avait des termes assez péjoratifs qu'on n’a pas coutume

3 d'utiliser dans un journal ordinaire.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Vous parlez de terme péjoratif,

5 on peut parler aussi d'insultes à connotations ethniques. Mais, même si

6 elles existent, alors que les termes utilisés sont neutres, on pourrait

7 considérer que ce sont là des informations exactes.

8 Mme Greve (interprétation). - Oui, c'est là un des critères, un

9 des indices manifestant l'état ou le degré de véracité d'une information.

10 J'ai toujours fait preuve d'une grande ouverture d'esprit à l'encontre de

11 chacune de mes lectures, je ne voulais pas exclure dès le départ quoi que

12 ce soit, je me proposais chaque fois d'avoir une lecture la plus objective

13 possible, c'était d'ailleurs là le mandat qui m'avait été confiée, et j'ai

14 toujours essayé de respecter cet état d'esprit.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Je vous remercie madame, nous

16 allons laisser cette question de Kozarski Vjesnik pour en reprendre les

17 citations directes plus tard. Vous avez parlé de Hans Korell, vous avez

18 dit qu'il avait présenté, avec une autre personnalité, les résultats d'une

19 étude au monde international. Quel était le nom de cette autre personne ?

20 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai pas parlé avec cette autre

21 personne, un homme, il y avait aussi une femme qui travaillait avec eux,

22 j'ai lu sa déclaration plus tard.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Il y a plusieurs mois de cela

24 que j'ai lu cette étude, mais je pense qu'elle a été soumise à une

25 enceinte internationale. Est-ce que c'était le Conseil de Sécurité des

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1 Nations Unies et est-ce que ceci s'est produit avant que votre étude ne

2 soit soumise à ce Conseil ?

3 Mme Greve (interprétation). - Je crois que cette étude avait été

4 mandatée par le Conseil de l'Europe. Je pense que c'est le cas. Mais je

5 n'en suis pas tout à fait sûre. Je ne trouverais pas surprenant que cette

6 étude ait été soumise au Conseil de Sécurité, ce dernier ne l'a toutefois

7 pas mandaté.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que M. Korell vous a dit

9 ce qu'il l'avait poussé à mener cette étude ? Il était votre premier

10 contact, il vous initiait en quelque sorte à cette tâche.

11 Mme Greve (interprétation). - Si j'ai bien compris, il avait été

12 chargé de mener cette tâche à bien, par une entité chargée de

13 l'organisation, il se peut que ce soit le Conseil de l'Europe, ce n'est

14 pas quelque chose qu'il a décidé de faire tout seul.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Merci. Vous a-t-il communiqué

16 des documents lui ayant permis de réaliser cette étude ?

17 Mme Greve (interprétation). - Non.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous avez, lui et

19 vous, utilisé les mêmes témoins pour vos études respectives ?

20 Mme Greve (interprétation). - Il a réalisé cette étude avec deux

21 collègues à partir d'une mission effectuée en ex-Yougoslavie. S'il se fait

22 qu'ils ont interrogé des personnes qui sont par la suite devenues des

23 témoins dans l'étude de Prijedor, l'un ou l'autre de ces quatre cents

24 témoins, là je ne suis pas en mesure de le dire, puisque dans le rapport

25 que j'ai lu, on ne donne pas les noms de ces personnes interrogées. Je ne

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1 connais pas les noms de mes témoins, d'ailleurs. Mais dans ce rapport, de

2 M. Korell, je n'ai rien trouvé qui était déjà exprimé et que j'aurais

3 retrouvé dans mes déclarations de témoin.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Vous parlez d'un rapport. On

5 peut donc dire que vous avez lu le rapport de M. Korell ?

6 Mme Greve (interprétation). - Tout à fait, ceci a été remis à la

7 commission d'experts.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Et avez-vous posé des questions

9 à M. Korell quant à la méthode qu'il a utilisée ?

10 Mme Greve (interprétation). - Non, parce qu'en fait il avait un

11 mandat différent, il avait été envoyé en mission dans le cadre de

12 l'établissement de fait.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Lui avez-vous demandé s'il

14 avait été en Republika Srpska ?

15 Mme Greve (interprétation). - Je ne lui ai pas posé la question.

16 Par contre, je lui ai demandé comment il s'y était pris pour organiser son

17 travail en Suède ; ou j'ai dû lire des déclarations.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Dans le cadre de cette étude,

19 avez-vous dit qu'il aurait été utile de pouvoir interroger des personnes

20 de Prijedor, et pourtant au début de votre étude, vous dites avoir obtenu

21 des renseignements d'une personne qui se trouvait sur le terrain ?

22 Mme Greve (interprétation). - C'est exact, mais je ne sais pas

23 dans quelles conditions M. Korell a pu se déplacer et faire son travail,

24 je ne connais pas ces détails. Certaines informations peuvent être

25 obtenues à la lecture du rapport, mais je ne pensais pas qu'il soit

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1 nécessaire de connaître à fond les détails de la mission qu'il avait

2 réalisée, aux fins de mon étude.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez dit que vous ne lui

4 avez pas parlé de la méthode utilisée. Il se trouvait sur le terrain en

5 Bosnie, ce qui n'était pas votre cas, sans doute les méthodes utilisées

6 devaient-elles être différentes, d'où le fait que vous n'ayez pas posé de

7 question ?

8 Mme Greve (interprétation). - Je lui ai demandé ce qu'il avait

9 utilisé comme méthode, comment il s'était préoccupé de faire son travail

10 en Suède. Mais à l'époque, je ne pense pas que j'avais déjà lu son

11 rapport, il avait été fourni à la commission d'experts, je l'ai lu à un

12 moment donné, mais je ne me suis jamais entretenue avec M. Korell à propos

13 de la méthode utilisée dans le cadre de ce rapport-là.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Madame Greve, ne serait-il pas

15 plus exact de dire que le temps vous manquait, l'argent vous manquait,

16 vous l'avez dit vous-même, et que dès lors votre rapport devrait être

17 rédigé dans le cadre d'un délai imparti par le Conseil de Sécurité, et

18 qu'il vous semblait plus efficace, plus commode de demander à M. Korell ce

19 qu'il avait fait en Bosnie ?

20 Mme Greve (interprétation). - Si j'avais cru que dans le cadre

21 de mon étude, j'avais besoin d'obtenir ces informations je n'aurais pas

22 hésité à téléphoner à M. Korell pour obtenir directement ces informations.

23 Il aurait bien sûr été préférable de disposer de davantage de temps, de

24 sources et d'avoir la possibilité de se rendre à Prijedor. Je crois

25 néanmoins que nous avions un délai à respecter pour la remise de ce

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1 rapport, mais que malgré ces difficultés, ce rapport rend bien les aspects

2 fondamentaux de la question.

3 M. le Président (interprétation). - Il est 10 heures 55, nous

4 allons suspendre l'audience à 11 heures, et lorsque le moment vous

5 semblera approprié, Maître Vucicevic, nous procéderons à cette pause.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Merci. Vous avez dit que vous

7 aviez recueilli des informations dans six pays, dont l'Allemagne, la

8 Malaisie, la Croatie. Comment ou quelles consignes avez-vous données à vos

9 assistants, aux personnes qui se sont chargées d'interviewer les citoyens

10 de Bosnie qui avaient quitté ce pays et se trouvaient dans d'autres pays ?

11 Mme Greve (interprétation). - Et bien, c'était différent de pays

12 à pays. Mon prédécesseur disposait d'un secrétaire personnel

13 Morten Bergsmo, qui, par la suite après le décès de mon prédécesseur, a

14 travaillé avec moi. Son nom est d'ailleurs repris à la première page du

15 rapport de l'étude de Prijedor. Il nous a donc aidé. J'avais aussi le

16 privilège d'avoir une collègue néerlandaise, Trinity Kleeran*, qui avait

17 fait office de coordinateur, entre les personnes chargées de recueillir

18 ces entretiens et ces déclarations dans plusieurs pays. Pour ce qui est de

19 la situation en Malaisie, je n'ai fait que m'entretenir avec la mission

20 diplomatique de ce pays, à Genève, je ne me suis pas rendue en Malaisie à

21 cette occasion-là, je suis allée en Malaisie, mais pas dans ce cadre-là.

22 M. Vucicevic (interprétation). - La question, que je vous

23 posais, était la suivante : savez-vous quelles furent les consignes et

24 instructions données aux personnes chargées de mener ces interrogatoires,

25 ces interviews sur le terrain ? Que savaient-ils de cette étude, de la

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1 méthode générale, du schéma général de l'étude ? Qui procédait à la

2 communication avec ces personnes et comment ces personnes chargées des

3 entretiens étaient-elles contrôlées de façon "scientifique", afin que vous

4 soient remis les résultats de ces entretiens ?

5 Mme Greve (interprétation). - Ils avaient des informations

6 précises, ils savaient que je voulais étudier la situation à Prijedor, ils

7 avaient été informés du fait que je ne voulais pas limiter la quantité ou

8 le type d'informations que je cherchais à d'éventuelles violations des

9 Droits de l'Homme. Je voulais savoir ce qui s'était effectivement passé

10 avant la prise de pouvoir par les Serbes à Prijedor, je voulais également

11 savoir ce qui s'était passé dans la phase antérieure avant que ces

12 personnes quittent Prijedor et je voulais savoir aussi dans quelles

13 conditions ces personnes avaient quitté tant Prijedor que la Bosnie-

14 Herzégovine. En d'autres termes, il y avait des personnes qui étaient

15 d'abord arrivées à Travnik, en Bosnie centrale.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Nous reparlerons de Travnik

17 plus tard.

18 Mme Greve (interprétation). - Je voulais simplement dire que des

19 questions... Que je ne m'intéressais pas à la situation générale qui

20 prévalait à Travnik, ce qui m'intéressait c'était la situation qu'avaient

21 connue ces personnes, avant de quitter les régions qui en avaient été

22 détenues par les Serbes. Je voulais avoir des informations nombreuses sur

23 ces éléments-là, pour avoir une base générale. J'ai dit à ces personnes

24 chargées des entretiens qu'elles devaient se contenter de consigner les

25 propos des témoins, et je voulais aussi qu'il y ait différentes personnes

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1 qui se chargent de ces entretiens et que les témoins formulent, à leur

2 façon personnelle, les événements qu'ils avaient connus à cette époque.

3 Voilà donc les instructions que j'avais données. Il y avait beaucoup de

4 personnes différentes, chargées des entretiens, et si vous parlez du

5 contrôle scientifique, Maître Vucicevic, je peux vous garantir que ces

6 personnes étaient habituées à ce genre de travail ; c'était des

7 enquêteurs, des fonctionnaires chargés des services de l'immigration, des

8 juges, des avocats.

9 Je reconnais volontiers que tous n'étaient pas qualifiés de la

10 même façon, mais c'étaient tous des professionnels.

11 M. le Président (interprétation). - Il est 11 heures, nous

12 reprendrons nos travaux à 11 heures 20

13 La séance suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 25.

14 M. le Président (interprétation). - Monsieur Vucicevic, vous

15 pouvez reprendre.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Madame Greve, nous en étions

17 restés à votre collecte de données, de l'Allemagne, de la Croatie et de la

18 Malaisie. Vous nous avez dit que des

19 représentants diplomatiques de ces trois pays vous ont donné des

20 renseignements, et vous deviez transmettre des instructions à leurs

21 enquêteurs qui allaient interroger les personnes, c'est exact ?

22 Mme Greve (interprétation). - Non, j'ai dit que pour la

23 Malaisie, j'avais parlé aux représentants diplomatiques à Genève.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Qu'en est-il de l'Allemagne et

25 de la Croatie ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Cela ne s'est pas fait par voie

2 diplomatique.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Pouvez-vous nous expliquer

4 comment vos instructions sont parvenues aux enquêteurs de ces deux pays ?

5 Mme Greve (interprétation). - De la même manière générale que

6 précédemment, et, en partie, grâce à l'aide de mon assistant,

7 Morten Bergsmo.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'agissait de votre

9 assistant, par conséquent, il savait certainement que faire de vos ordres

10 et de vos instructions, qu'a-t-il fait ?

11 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit de quelqu'un de très

12 doué pour faire conformément aux instructions, et je pense qu'il l'a fait.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Je pense qu'il l'a certainement

14 fait, étant donné que vos hautes qualités,...

15 Mme Greve (interprétation). - Il ne s'agit pas d'une question

16 que vous m'avez directement posée, mais je dirais que toutes les

17 déclarations ont été mises à disposition du Conseil de Sécurité et même si

18 elles n'ont jamais été publiées, elles étaient à la disposition de tout le

19 monde, et tout le monde, au sein du Conseil de Sécurité pouvait les lire.

20 Elles étaient donc à disposition du Conseil de sécurité, la totalité

21 d'entre elles.

22 M. Vucicevic (interprétation). - Madame Greve, vous avez fait

23 une thèse de doctorat, vous avez déposé dans l'affaire Tadic, vous avez

24 parlé de terminologies imprécises, est-ce que vous pourriez, compte tenu

25 de cette déposition dans l'affaire Tadic, répondre à cette

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1 question : comment vous êtes-vous mise à l'abri d'un parti pris dans la

2 rédaction de vos instructions vers la Croatie et l'Allemagne ? Est-ce que

3 ce parti pris dans l'obtention des déclarations des représentants de ces

4 deux pays vous préoccupait ?

5 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai pas obtenu de déclarations

6 de représentants officiels, j'ai obtenu des déclarations de témoins, mais

7 des personnes qui avaient une carrière professionnelle et officielle les

8 ont interrogés. Ce qui me préoccupait, c'est que toute déclaration aurait

9 pu être partielle, aurait pu être erronée, mais j'ai fait preuve d'un

10 esprit d'ouverture, et j'attendais de voir s'il pouvait exister quelque

11 chose dans les allégations faites. Donc j'ai souhaité comparer les

12 renseignements, ne pas disposer d'une région, d'une source. Bien entendu,

13 j'ai imaginé que la Croatie participait au conflit, donc peut-être qu'il y

14 aurait un parti pris, mais je crois que, comme je l'ai dit précédemment,

15 dans l'affaire Tadic en tout cas, j'ai été surprise de constater que de

16 manière générale, les gens s'exprimaient dans les mêmes lignes ; c'est ce

17 qui m'a surprise. C'est ce qui m'a donnée à penser que les renseignements

18 que j'ai obtenus auraient pu être imprécis, oui, mais, pourtant, il

19 s'agissait de déclarations qui allaient dans le même sens sur les éléments

20 fondamentaux. J'ai peur de ne pas pouvoir me rappeler exactement la

21 citation à laquelle vous faites référence sur l'affaire Tadic, si vous

22 souhaitez que je m'exprime là-dessus, je vous serais reconnaissante de

23 bien vouloir me donner lecture de cette déclaration.

24 M. le Président (interprétation). - Si vous devez citer une

25 partie d'une déposition d'une autre affaire, il faudrait citer le passage

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1 au témoin. Si vous ne l'avez pas, vous pourrez peut-être retrouver ce

2 passage pendant la suspension d'audience.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Très bien.

4 Dans votre rapport, vous avez dit qu'en avril, à la fin du mois

5 d'avril 1992, la situation dans la Bosanska Krajina est devenue si

6 dangereuse que deux membres de la mission militaire des Nations Unies en

7 Bosnie -c'était la Forpronu à l'époque-, qui étaient cantonnés à

8 Banja Luka ont été déplacés ?

9 Mme Greve (interprétation). - La Forpronu a un organe spécial

10 constitué d'observateurs militaires, on les appelle observateurs

11 militaires. Ce que j'ai cru comprendre en visitant le quartier général de

12 la Forpronu, et compte tenu de tous mes renseignements sur la Forpronu et

13 les observateurs militaires, ... Tous mes renseignements viennent de ce

14 quartier général où je me suis rendue. A l'époque, il était situé à

15 Zagreb. Il se trouve que mon supérieur hiérarchique au Cambodge,

16 Yasushi Akashi, était le chef de la mission à l'époque, et un certain

17 nombre de hauts représentants, de hauts fonctionnaires étaient des amis

18 que j'avais connus au Cambodge et ils venaient directement du Cambodge

19 pour se rendre en Yougoslavie. Par conséquent, j'ai donc bénéficié de

20 l'assistance du bureau du haut représentant, j'ai eu accès à la Forpronu,

21 j'ai eu accès aux observateurs militaires, à leur direction. J'ai essayé

22 d'orienter le bureau du Procureur quant aux sources des dates citées dans

23 mon rapport. En effet, j'ai transmis à ce Tribunal une valise et plusieurs

24 cartons de documents qui ont été transmis au Procureur adjoint, M. Louit*

25 à l'époque, et, je crois que l'unité de documentation d'informations et le

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1 bureau du Procureur en ont été saisis à l'époque. Ils n'ont pas pu trouver

2 de documents précis, et je dirais que je n'ai gardé aucune copie de

3 documents sur moi, je ne peux donc retrouver l'endroit exact, le document

4 exact où il est dit que deux observateurs militaires ont quitté

5 Banja Luka.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Je pense pouvoir fournir le

7 paragraphe en question, après la suspension d'audience, à la Chambre de

8 première instance. Mais dans votre déclaration, j'aimerais vous demander

9 si vous avez parlé à ces deux observateurs militaires, à ces deux

10 officiers militaires qui ont été retirés de Banja Luka le 28 avril ?

11 Mme Greve (interprétation). - Non, malheureusement pas. Ils

12 n'étaient plus en service à l'époque, on n'a pas pu les identifier

13 conformément aux dirigeants de l'UNMO*, à Zagreb, à l'époque, car j'ai dit

14 précisément que je souhaitais les rencontrer, tout comme j'aurais souhaité

15 rencontrer tous les autres qui y avaient été. J'ai demandé s'il y avait

16 des rapports

17 là-dessus, on m'a dit que non,... de cette date-là.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Apparemment la mission

19 militaire des Nations Unies, à l'époque, en Yougoslavie, estimait que les

20 conditions étaient dangereuses en Bosanska Krajina ; deux observateurs ont

21 reçu l'ordre de quitter la région, en raison de craintes pour leur

22 sécurité personnelle, et, pourtant, on ne vous a fourni aucun document sur

23 leur décision, sur la décision du bureau pertinent des Nations Unies, ou

24 de décision de communication et ces deux officiers n'ont pas pu être

25 localisés, c'est exact ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Oui et non. Une partie de votre

2 déclaration est correcte.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Madame le juge, ce que j'essaie

4 de dire, vous avez dit qu'il y avait plusieurs valises, plusieurs boîtes

5 de documents, si vos souvenirs sont bons, qu'est-ce qui était dans ces

6 cartons pour que nous puissions avoir accès aux documents ?

7 Mme Greve (interprétation). - Comme je l'ai dit, je crois qu'il

8 s'agissait de deux observateurs militaires. Généralement, les observateurs

9 militaires se trouvent dans une région donnée si les Nations Unies pensent

10 que leur envoi sur place peut leur permettre d'arriver à un résultat. Il

11 serait idéal d'avoir des observateurs militaires partout, à tout moment,

12 mais dans un conflit armé, ils ont un niveau qui leur permet de déterminer

13 quand il faut retirer du personnel, ce qui était le cas en

14 Bosnie-Herzégovine. J'ignore pourquoi ils ont décidé de retirer ces deux

15 représentants de Banja Luka, à l'époque.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Professeur Greve, la

17 déclaration que vous venez de faire, la réponse à ma deuxième question se

18 décompose en deux parties. Premièrement, vous parlez de la politique des

19 Nations Unies sur les observateurs militaires, et, deuxièmement, vous

20 parlez du fait que vous n'avez pas obtenu de renseignements dessus. Où se

21 situe la source de votre connaissance en termes de politique militaire des

22 Nations Unies dans ce cas précis ? D'où tenez-vous ces renseignements ?

23 Est-ce que vous les avez eus du Cambodge, de Zagreb, de la

24 suite de votre carrière ? Comment avez-vous appris cela ?

25 Mme Greve (interprétation). - Je crois que je l'ai déjà dit, mes

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1 renseignements là-dessus proviennent du quartier général de la Forpronu et

2 de l'unité spéciale qui s'occupe des observateurs militaires. J'ai

3 rencontré à la fois les dirigeants de la Forpronu et les dirigeants de

4 cette unité précise à Zagreb, au début de 1993. Mes renseignements sur

5 leur présence en Bosnie-Herzégovine proviennent de là. Je crois que la

6 date précise figure dans mon rapport, et je l'ai par écrit de cette

7 source. Je crois que cela est peut-être un rapport de la situation, un

8 sitrepe* qui est publié tous les jours dans des cas comme celui-ci, et qui

9 donne les faits essentiels qui peut être très bref. Tout ce qui se passe

10 en un jour peut tenir en cinq lignes par exemple. Il s'agit peut-être de

11 militaires, d'observateurs militaires à Banja Luka, retirés conditions

12 dangereuses, ce type de libellé,... Je ne dis pas que c'était là le

13 libellé exact, mais je dis que cela aurait pu être la formulation. Je vous

14 prie de m'excuser si je n'ai pu retrouver ce document précis. Mais, la

15 source de l'information ne fait aucun doute.

16 M. Vucicevic (interprétation). - J'aimerais revenir sur ce que

17 vous venez de dire : source d'information. Lorsque vous avez lu cette

18 information quel que soit le document en question, vous venez de nous de

19 l'expliquer, cela vous a intéressé, vous avez vu qu'il s'agissait d'un

20 élément très important, vous avez poursuivi l'enquête, vous avez parlé aux

21 autorités civiles, aux autorités militaires. Est-ce que vous vous souvenez

22 des noms des officiers que vous avez interrogés, plus particulièrement au

23 sujet de ces deux observateurs militaires, qui ont été retirés ? Est-ce

24 que vous vous souvenez du nom des représentants militaires ou civils ? Ou

25 est-ce que vous avez ces informations par écrit quelque part ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Je sais qu'il s'agissait du

2 commandant de l'époque, et si je peux utiliser la pause déjeuner pour

3 essayer de retrouver, de vous aider à retrouver ce document, je le ferai

4 bien volontiers.

5 M. le Président (interprétation). - Je vous prie de m'excuser de

6 vous interrompre, mais nous devons avancer. Si vous pouvez le trouver,

7 Madame le juge Greve, nous vous serions reconnaissants de le faire, mais

8 veuillez passer à une autre question.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Je pense que ce ne sera pas

10 nécessaire pendant la pause déjeuner, je pense que nous pourrons le faire

11 d'ici à demain.

12 M. le Président (interprétation). - J'espère que vous n'allez

13 pas contre interroger ce témoin trop longtemps, peut-être pourriez-vous le

14 faire pendant la pause déjeuner, ce qui nous permettrait de finir plus

15 rapidement.

16 Mme Greve (interprétation). - Est-ce que cela vous serait utile

17 si j'ajoutais un élément, la raison pour laquelle j'ai rédigé cela, c'est

18 que je recherchais des sources militaires, il n'y en n'avait pas à

19 Prijedor, il n'y en n'avait pas à Banja Luka à l'époque, comme je l'ai dit

20 de manière précise.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Hier, vous nous avez parlé et

22 vous avez déposé sur la pièce de l'accusation, sur une pièce de

23 l'accusation, c'était la déclaration du CSO sur la Bosnie-Herzégovine. Je

24 vais essayer de retrouver le numéro ? Est-ce que vous pourriez nous dire

25 si vous avez reçu des renseignements que vous avez inclus dans votre étude

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1 émanant du CSO ? De l'organisation sur la sécurité et la coopération en

2 Europe ?

3 Mme Greve (interprétation). - Le CSO faisait partie de l'OSCE

4 qui maintenant s'appelle "Organisation de la Sécurité de la Coopération en

5 Europe". Oui, ce qu'ils avaient, en matière de publication, il s'agit là

6 d'une déclaration prononcée par eux, et lorsque la CSO ou la CSCE* de

7 l'époque a fait une déclaration, cette dernière a été publiée et a été

8 mise à disposition. Parmi les sources que j'ai utilisées, on trouve toutes

9 les organisations, les instances internationales et les ONG que je pouvais

10 rencontrer, qui avaient travaillé dans la région. Il était donc naturel

11 pour moi d'essayer de déterminer ce que je pouvais de cette instance.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Ma question est la suivante :

13 Est-ce que vous avez

14 reçu des renseignements sur ces quatre cents personnes, qui ont fait

15 l'objet d'un examen par le truchement de l'OSCE ou non ? Ou est-ce que

16 vous avez eu simplement des renseignements généraux sur le contexte

17 général ?

18 Mme Greve (interprétation). - Du CSO et des institutions, je

19 n'ai rien appris sur ces quatre cents personnes. Il s'agissait de sources

20 distinctes. J'ai essayé d'aboutir à une compréhension générale, de

21 compiler l'information et de voir si les renseignements d'autres sources,

22 à part les témoins, aller appuyer ou contredire leurs déclarations. Il

23 s'agissait donc d'une source, parmi de nombreuses sources, que je n'ai pas

24 obtenue par le biais des témoins. Quant aux témoins, aucune de ces sources

25 n'a attiré mon attention dessus.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Nous avons parlé de vos études,

2 de votre étude, et vous avez dit que vous avez donné des instructions aux

3 enquêteurs pour qu'ils examinent les conditions à Prijedor avant les

4 élections de 1990, après les élections et examiné ce qui s'est passé après

5 l'éclatement du conflit armé. Vous êtes experte en droit humanitaire, vous

6 êtes experte dans le domaine des réfugiés de par vos qualifications, et

7 toutefois la déclaration de la CSO sur la Bosnie-Herzégovine contient

8 essentiellement des renseignements d'ordre militaire, qui étaient les

9 combattants. Est-ce que c'est exact ?

10 Mme Greve (interprétation). - Oui, il s'agit d'une déclaration

11 générale qui évalue la situation générale en Bosnie-Herzégovine, à la fois

12 cette déclaration porte également sur certains aspects que j'ai étudiés.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Madame le professeur Greve,

14 vous n'êtes pas experte en questions militaires et en lisant les journaux,

15 vous avez été informée qu'il y avait un conflit armé et qu'il y avait

16 plusieurs parties au conflit armé, c'est exact ?

17 Mme Greve (interprétation). - Je ne suis pas experte en

18 questions militaires, si j'ose dire, je connais relativement bien les lois

19 de la guerre, mais je ne déposerai pas là-dessus, c'est quelque chose de

20 différent. J'ai examiné les choses comme le ferait un historien

21 contemporain, j'ai pris cet élément comme un des éléments d'information à

22 prendre en compte pour comprendre la situation générale.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Donc, essentiellement toute

24 opinion que vous avez pu exprimer sur le lien entre la JNA et l'armée de

25 la Republika Srpska ne proviennent pas d'une opinion d'expert mais d'une

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1 opinion d'un citoyen du monde qui a suivi la presse, qui a suivi les

2 rapports ?

3 Mme Greve (interprétation). - Non, ce n'est pas exact. J'ai

4 considéré les choses comme le ferait un historien contemporain, j'ai

5 essayé de prendre en compte toutes les sources différentes pour évaluer la

6 situation, bien entendu il est vrai que je ne suis pas spécialisée dans

7 les questions militaires.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez parlé d'historien

9 contemporain, est-ce que vous pourriez énumérer tous les cours

10 d'histoire ?

11 M. le Président (interprétation). - Nous n'avons pas besoin

12 d'entrer là-dedans, le témoin utilisait une expression qu'il ne faut pas

13 prendre au pied de la lettre.

14 Mme Greve (interprétation). - Je peux vous dire que dans mon

15 curriculum vitae vous verrez que j'ai étudié pendant un an l'histoire

16 ancienne, mais il y avait également d'autres cours d'histoire qui

17 portaient sur la culture romaine.

18 M. le Président (interprétation). - Très bien.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Passons maintenant à la

20 pièce 18 de l'accusation. Il s'agit d'une déclaration émanant de plusieurs

21 officiers militaires de l'armée de la Republika Srpska, est-ce exact ?

22 Mme Greve (interprétation). - Oui, je crois qu'il s'agit

23 essentiellement de deux personnes : le colonel Radmilo Zeljaja et

24 Pera Tolic. Veuillez m'excuser de ma prononciation.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Et vous avez souligné certains

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1 aspects de cet article. J'aimerais tout particulièrement que vous

2 examiniez le deuxième paragraphe, entier. Vous n'avez pas besoin de nous

3 en donner lecture à haute voix, je vous demanderai de le lire pour vous et

4 ensuite je vous poserais un certain nombre de questions.

5 (Le témoin s'exécute).

6 Mme Greve (interprétation). - Je l'ai lu.

7 M. Vucicevic (interprétation). - Que faut-il entendre

8 par :"Prince Lazar" pour le peuple serbe ?

9 Mme Greve (interprétation). - Je crois qu'il est vénéré à juste

10 titre comme l'une des personnes les plus nobles et les plus remarquables

11 de l'histoire. Il est mort au champ de bataille en 1389 à Kosovo Polje,

12 contre les envahisseurs turcs.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez parlé de la bataille

14 de Kosovo Polje et de la mort du Prince Lazar au cours de cette bataille,

15 et je parlerai de l'Empire ottoman, car la Turquie est une nation

16 aujourd'hui et n'est pas Etat successeur de l'Empire ottoman, à part dans

17 une perspective historique, que s'est-il passé pour les officiers qui

18 commandaient l'autre armée à Kosovo Polje ?

19 Mme Greve (interprétation). - Qu'entendez-vous par là ?

20 M. Vucicevic (interprétation). - Que s'est-il passé pour la

21 partie adverse à Kosovo Polje ?

22 Mme Greve (interprétation). - Je ne connais pas ce personnage

23 historique précisément, mais lorsqu'ils ont pris le pouvoir dans la région

24 après cela, je crois que les opposants au Prince Lazar ont, d'une manière

25 ou d'une autre, envahi la région, peut-être que j'ai mal compris votre

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1 question.

2 M. Vucicevic (interprétation). - L'Empire ottoman venait vers

3 les Balkans, et la bataille décisive s'est déroulée à Kosovo Polje, qui a

4 décidé du fait si cet empire allait se poursuivre dans les Balkans. Et

5 peut-être que je peux vous rafraîchir la mémoire, son nom était le sultan

6 Murat, est-ce que vous savez ce qui lui est arrivé à Kosovo Polje ?

7 Mme Greve (interprétation). - J'ai bien peur de ne pas connaître

8 la réponse à cette question.

9 M. le Président (interprétation). - Je crois, Maître Vucicevic,

10 que nous nous écartons de la question.

11 Mme Greve (interprétation). - Je vous prie de m'excuser, mais je

12 n'ai pas pris le temps de parcourir de manière détaillée l'histoire

13 complexe et forte intéressante du peuple serbe.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Dans l'histoire serbe, une

15 signification bien précise est rattachée à la bataille du Kosovo et vous

16 avez déposé sur cette signification dans l'affaire Tadic, je crois ?

17 Mme Greve (interprétation). - Je sais que j'ai mentionné la

18 bataille de Kosovo Polje dans l'affaire Tadic.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Le jour de St Vitus, et je

20 dirais Vidovdan ?

21 Mme Greve (interprétation). - Oui, Vidovdan, St Vitus, et le

22 roi Lazar est mort le jour de ce saint, donc dans la célébration de cette

23 journée, on célèbre également le jour où le roi Lazar a perdu la vie, au

24 Kosovo.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Cet article est paru le jour où

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1 l'armée de la Republika Srpska, le jour qui était pour cette armée le jour

2 du roi, et qu'était-ce jour ?

3 Mme Greve (interprétation). - L'article date du

4 1er juillet 1994.

5 M. Vucicevic (interprétation). - J'aimerais attirer votre

6 attention sur la deuxième ligne du premier paragraphe.

7 Mme Greve (interprétation). - Oui, j'ai lu cette ligne.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Peut-on dire que les

9 déclarations faites à l'occasion du jour de gloire de l'armée serbe, qui

10 était le même jour que Vidovdan, jour traditionnel de gloire, ou jour du

11 martyre du peuple serbe,... ?

12 Mme Greve (interprétation). - C'est la manière dont j'ai lu et

13 compris l'article. Je

14 crois qu'il correspond à l'histoire, autant que je sache.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Pour essayer de resituer ces

16 déclarations dans leur contexte, lorsque deux commandants militaires

17 s'adressent à leurs troupes, au moins dans des pays où l'histoire remonte

18 à bien longtemps, on fait référence à certains jours de gloire du passé

19 national, c'est exact ?

20 Mme Greve (interprétation). - Oui.

21 M. Vucicevic (interprétation). - J'aimerais attirer votre

22 attention sur les deux dernières phrases d'un paragraphe de la première

23 page qui commence par "Faith", le "destin". Est-ce que vous pourriez en

24 donner lecture ?

25 Mme Greve (interprétation). - Je vous prie de m'excuser ?

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'agit des deux dernières

2 phrases de la pièce 18.

3 Mme Greve (interprétation). - Où faut-il commencer la lecture ?

4 M. Vucicevic (interprétation). - "Le destin a décidé que le jour

5 de St Vitus,...", etc, le dernier paragraphe de la première page, les deux

6 dernières phrases de ce paragraphe.

7 Mme Greve (interprétation). - Je vous prie de m'excuser, oui,

8 j'ai retrouvé l'endroit. "Le destin a décidé que le jour de St Vitus

9 serait le jour de la vérité serbe, c'est la raison pour laquelle les

10 Serbes vont gagner cette troisième guerre mondiale également, même si elle

11 n'est menée que contre les Serbes. Nous gagnerons, car nous avons décidé,

12 nous sommes déterminés à ne plus vivre en fraternité avec ceux qui

13 massacrent nos enfants et avec des faux frères qui ont méprisé plusieurs

14 fois la bonté et l'honnêteté serbe"

15 Est-ce que vous souhaitez que je relise ?

16 M. Vucicevic (interprétation). - Non.

17 En prononçant une telle déclaration, un officier militaire

18 pourrait faire cette déclaration en pensant que ce qu'il dit est exact ?

19 Mme Greve (interprétation). - Je n'essaie pas de suggérer qu'il

20 ne croie pas ce qu'il

21 est en train de dire.

22 M. Vucicevic (interprétation). - En d'autres termes, ce que vous

23 essayez de suggérer, c'est que ce qu'il dit,... il n'y a aucune raison de

24 douter qu'il dit ce qu'il pense être la vérité.

25 Mme Greve (interprétation). - Il s'exprime conformément à la

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1 manière dont il voit les choses et à la manière dont il pense qu'il faut

2 présenter les choses à ses soldats, du moins c'est ce que j'imagine.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Je voudrais vous demander

4 maintenant de lire le deuxième paragraphe qui commence par : "Si cet

5 honorable homme avait fait cela".

6 Mme Greve (interprétation). - "Si cet honorable Serbe avait fait

7 cela" -je crois qu'il parle du roi Lazar-, le nom serbe aurait disparu, il

8 y a également 605 ans, le monde aurait manqué du peuple le plus tolérant

9 et le plus magnifique de toute la planète, et, dans ce cas, la liberté

10 aurait un autre visage, et l'Europe également aujourd’hui.

11 M. Vucicevic (interprétation). - D'un point de vue historique, à

12 quoi fait-il référence ?

13 Mme Greve (interprétation). - Là encore, je crois qu'il fait

14 référence à la bataille que vous avez qualifiée de décisive, à Kosovo

15 Polje. Il explique que c'était là un grand succès, et qu'il y a de

16 nombreuses raisons pour fêter cet événement.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Saviez-vous que l'empire

18 ottoman se battait, ou plutôt avait régné sur le peuple serbe pendant

19 500 ans ?

20 Mme Greve (interprétation). - Oui, bien sûr, je le sais.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Et il s'agit là d'une

22 déclaration symbolique, n'est-ce pas ?

23 Mme Greve (interprétation). - Oui, je crois qu'il y a eu un

24 accord de paix en 1888, et que c'est à ce moment-là que l'empire ottoman

25 s'est retiré de la zone serbe, entends-je.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Je vais maintenant utiliser une

2 carte. Puis-je demander l'aide de l'huissier pour que cette carte soit

3 placée sur le rétroprojecteur ?

4 M. le Président (interprétation). - De quelle pièce s'agit-il,

5 Monsieur Vucicevic, s'il vous plaît ?

6 M. Vucicevic (interprétation). - La pièce 17.

7 (L'huissier s'exécute)

8 Pourra-t-elle être placée sur le rétroprojecteur, s'il vous

9 plaît, afin que les Juges puissent voir cette carte ? A moins que ce soit

10 plus simple pour les Juges de jeter un oeil directement sur ces cartes ?

11 Mme Greve (interprétation). - Mais je crois que ces cartes ont

12 été rendues à l'accusation hier.

13 M. le Président (interprétation). - Oui, effectivement, mais je

14 crois que cette carte a été retirée, et l'accusation devait faire quelques

15 expurgations sur ce document, je crois ?

16 Mme Hollis (interprétation). - Oui, effectivement, c'est exact.

17 M. le Président (interprétation). - Donc nous n'avons pas de

18 copie de cette carte. Mais quel est votre objectif ?

19 M. Vucicevic (interprétation). - Je voudrais montrer la Krajina,

20 parce que je crois que cette carte n'a été admise que parce que c'était

21 une carte justement, et que toutes les autres indications ont été

22 barrées ; mais je ne savais pas qu'elle avait été retirée.

23 M. le Président (interprétation). - Quel est le problème avec la

24 Krajina ?

25 M. Vucicevic (interprétation). - L'objectif est simplement que

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1 le témoin puisse utiliser cette carte, afin qu'elle réponde à la question

2 suivante : Madame le témoin, vous-même avez apposé ces indications en

3 jaune, sur la carte ?

4 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez parlé de la Krajina

6 dans votre

7 déclaration, s'agissait-il de la Krajina croate ?

8 Mme Greve (interprétation). - Oui.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Il y avait également la

10 Bosanska Krajina, n'est-ce pas ?

11 Mme Greve (interprétation). - Oui.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Mais quel est le sentiment

13 historique ? Quel est le sens historique de ceci ?

14 M. le Président (interprétation). - Vous savez, nous avons un

15 certain nombre de connaissances sur la question et nous n'allons pas

16 explorer ces différentes voies, à moins que cela ne soit vraiment

17 nécessaire. Mais je crois que nous avons déjà tout cela, donc je ne pense

18 pas qu'il soit nécessaire de revenir à la Krajina, à moins que vous n'ayez

19 un objectif particulier en utilisant cette carte.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, mais dans le contexte de

21 la déclaration du colonel Colic, lorsqu'il dit : "Dans ce cas, la liberté

22 aurait un autre visage et l'Europe également aujourd'hui." Dans ce

23 contexte, je vais utiliser cette carte afin d'expliquer quel était le sens

24 de sa déclaration.

25 M. le Président (interprétation). - Laissez-moi vous

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1 interrompre. Si vous pouviez quitter ce cadre historique le plus

2 rapidement possible, nous vous en serions reconnaissants.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.

4 Je vais essayer d'apporter mon aide au témoin très rapidement,

5 Monsieur le Président.

6 Savez-vous que la Krajina est un terme traduit par district

7 militaire, et qu'après l'invasion de l'empire ottoman, des Balkans, de la

8 péninsule des Balkans, pendant plusieurs siècles, il y a eu des

9 affrontements constants entre les Chrétiens au nord, et les Musulmans

10 ottomans au sud ? Que la population serbe chrétienne a toujours tenté de

11 protéger ses voisins du

12 nord qui partageaient la même religion et, à leur tour, les Autrichiens,

13 les Italiens, les Hongrois, à l'ouest, ont essayé d'apporter leur aide à

14 la résistance contre l'occupation turque ? Par conséquent, le long de la

15 rivière Sava, dans le nord-ouest de la Bosnie, s'est constituée cette

16 Krajina, ce district militaire. Etes-vous d'accord avec moi sur ce point ?

17 Mme Greve (interprétation). - J'ai écouté votre explication et

18 je n'ai pas de raison de la mettre en doute, mais je dois bien avouer que

19 je ne savais pas que la Krajina était un nom utilisé lorsque l'empire

20 ottoman avait progressé dans les Balkans après 1389. Mais, je sais que

21 l'Europe peut être très heureuse de ce que les Serbes ont fait à ce

22 moment-là, à savoir qu'ils ont gardé les frontières qui les séparaient de

23 l'empire ottoman et qu'ils ont réussi à stopper les progrès de l'empire

24 ottoman.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Puisque nous sommes d'accord

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1 sur ce point, je voulais simplement vous poser la question suivante :

2 est-il raisonnable de conclure que le colonel Colic faisait référence à

3 cet événement, à ce fait de l'histoire, un fait dont le peuple serbe est

4 fier, et peut-être que l'Europe d'ailleurs leur en est reconnaissante ?

5 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai aucune raison de ne pas

6 partager les sentiments de l'Europe sur la résistance des Serbes et sur

7 l'aspect positif de l'intervention des Serbes, pour toute la communauté

8 européenne.

9 M. le Président (interprétation). - Il semble qu'effectivement,

10 le colonel faisait bien référence à cela, je crois que M. Vucicevic,...

11 Excusez-moi un instant. Ce sont des questions que nous devrons étudier en

12 temps opportun, et nous, les Juges, devrons interpréter tous les documents

13 à ce moment-là. Le témoin ne peut qu'offrir ces documents. Peut-être que

14 nous pouvons poursuivre, si vous n'avez pas de questions particulières à

15 poser sur point.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Dans cet article, pour la

17 première fois, nous trouvons le terme "couloir" à la page 2, ou "corridor"

18 en anglais, au milieu du paragraphe.

19 Mme Greve (interprétation). - Excusez-moi, on m'a enlevé cette

20 pièce, peut-être

21 pourrais-je la récupérer ? Excusez-moi de vous avoir interrompu.

22 Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît, la référence ?

23 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, il s'agit de la pièce 18

24 de l'accusation, deuxième page, dernier paragraphe, qui débute par : "Dans

25 l'opération ayant pour but d'ouvrir ce que l'on a appelé le couloir,...".

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1 Vous pourrez d'ailleurs le lire, et je vous poserai ensuite une question

2 sur ce point.

3 Mme Greve (interprétation). - Je l'ai trouvé, je l'ai lu.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Savez-vous que ce couloir a été

5 fermé par des soldats à la fin du mois d'avril, début du mois de

6 mai 1992 ?

7 Mme Greve (interprétation). - Je ne sais pas s'il a été fermé,

8 mais je sais que cela a été un champ de bataille, alors quand une guerre

9 fait rage, peut-être que c'est un endroit qu'on ouvre et qu'on ferme, je

10 ne sais pas, mais je n'ai pas véritablement étudié tout le couloir à

11 toutes les périodes de la guerre.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, au cours de

13 votre témoignage vous avez parlé du couloir, mais vous ne savez pas quelle

14 était son importance particulière du point de vue militaire ou autre ?

15 Mme Greve (interprétation). - J'en connais l'importance, mais je

16 n'ai pas la chronologie exacte des événements qui se sont produits à ce

17 moment-là, je ne sais pas à quel moment ce couloir était ouvert, à quel

18 moment il était fermé, mais je sais que cela a été un champ de bataille.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Mais vous l'avez dit hier, le

20 couloir était important pour les Serbes. Si je vous dis -et c'est une

21 hypothèse- que ce couloir avait été fermé par l'armée, par des Musulmans

22 et des Croates et que les Serbes de Bosnie se trouvaient encerclés, ceci

23 jetterait-il une lumière sur la déclaration que vous venez de lire sur

24 cette opération militaire ayant pour objectif de briser ce blocus ?

25 Mme Greve (interprétation). - Oui, c'est une possibilité,

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1 j'imagine oui.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Merci.

3 Dans la pièce de l'accusation 19, il a été question de la JNA et

4 du lien entre le SDS et la JNA. Au moment où la guerre faisait rage en

5 Croatie, la Bosnie-Herzégovine était une unité fédérale de la RSFY, n'est-

6 ce pas ?

7 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Et les autorités d'une nation

9 souveraine, quelles qu'elles soient, peuvent délivrer un ordre de

10 mobilisation, n'est-ce pas ?

11 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Et dans tout pays civilisé, il

13 y a des sanctions lorsque cet ordre de mobilisation n'est pas respecté,

14 n’est pas suivi, n'est-ce pas ?

15 Mme Greve (interprétation). - Oui, c'est exact.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Et en temps de guerre, les

17 autorités civiles et les autorités politiques doivent coopérer, en vertu

18 des lois en vigueur dans ce pays, n'est-ce pas ?

19 Mme Greve (interprétation). - Oui, c'est une situation tout à

20 fait normale.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Et à cette période, les

22 citoyens de Prijedor qui ont répondu favorablement à l'ordre de

23 mobilisation ont légalement exécuté leurs tâches, les tâches qui leurs

24 étaient assignées ?

25 Mme Greve (interprétation). - C’est correct, oui.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Et la guerre de Croatie a pris

2 fin en décembre, fin novembre, début décembre 1992.

3 Mme Greve (interprétation). - Je crois qu'il y a eu un accord de

4 cessez-le-feu officiel au début du mois de janvier 1992.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Et l'ancienne JNA, après cette

6 date, a été retirée, n'est-ce pas ?

7 Mme Greve (interprétation). - Oui, ils ont été retirés de

8 Croatie. Dans quelle mesure certains des soldats sont restés sur les

9 lieux, je n'en suis pas certaine.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, le SDS était un

11 parti politique en Bosnie à l'époque, l'un des partis politiques de

12 Bosnie ?

13 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Et les Serbes, dans leur grande

15 majorité, ont répondu à cet ordre de mobilisation ?

16 Mme Greve (interprétation). - D'après les informations que j'ai

17 pu consulter, oui ; mais mes informations se limitent à Prijedor et donc

18 d'après ces informations je peux vous répondre, effectivement oui.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Et la plupart des personnes qui

20 n'ont pas répondu à cet ordre de mobilisation étaient des Croates et des

21 Musulmans, n’est-ce pas ?

22 Mme Greve (interprétation). - Des personnes qui se déclaraient

23 Croates et Musulmans, effectivement.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Et qui ont refusé d'obéir à

25 l'ordre émanant d'un pays indépendant à l'époque, pays dont ils étaient

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1 citoyens en vertu des lois en vigueur ?

2 Mme Greve (interprétation). - C’est correct, oui.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Peut-on donc conclure que ceci

4 a entraîné une grande mésentente entre ces deux ou trois groupes

5 ethniques, en tout cas à Prijedor ?

6 Mme Greve (interprétation). - C'est peut-être une des raisons de

7 cela, mais je crois que toute la guerre en Croatie a mené également à une

8 mésentente ; en tout cas, les gens ne la percevaient pas de la même façon

9 selon le groupe ethnique auquel ils appartenaient.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Dans cet article, le terme

11 "Turc" semble être péjoratif pour un Musulman de Bosnie, en êtes-vous

12 certaine ?

13 Mme Greve (interprétation). - D'après ce que j'ai compris, les

14 Musulmans préféraient être appelées Bosniens, Musulmans, Prijedoriens,

15 plutôt que de se voir qualifiés du nom d'un peuple étranger.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Mais il s'agissait là de leur

17 préférence en faisant référence à la période dont vous parlez, mais

18 élargissons un peu cette période, disons de 1945 à 1995, lorsque les

19 relations entre les citoyens de Prijedor étaient normales -et là c'est

20 peut-être encore une hypothèse-. La plupart des résidents musulmans de

21 Bosnie sont des slaves qui se sont convertis à l'Islam au cours de la

22 période pendant laquelle l'empire ottoman régnait, vous êtes d'accord ?

23 Mme Greve (interprétation). - Oui.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, pour quelqu'un

25 qui était véritablement musulman dès le départ, peut-être qu'il serait

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1 plutôt flatteur d'être appelé « turc » ?

2 Mme Greve (interprétation). - Et bien, d'après ce que j'ai

3 compris, au départ c'était l'empire ottoman qui venait envahir les lieux

4 et non pas l’état turc, vous l'avez dit vous-même à juste titre. J'ai

5 parlé à plusieurs personnes de cette question en particulier parce que

6 j'ai lu dans les témoignages que les Musulmans considéraient que c'était

7 un terme péjoratif. Donc, de façon générale, j'en ai parlé à plusieurs

8 personnes et ils m'ont répondu qu'ils ne trouvaient pas que c'était une

9 bonne façon de s'adresser à eux et qu'il n'était pas véritablement

10 apprécié par des Musulmans qu'ils se voient appelés "turcs". Mais bien

11 sûr, je n'ai pas parlé aux gens après la deuxième guerre mondiale, je ne

12 travaillais pas à l'époque.

13 Et, en ce qui concerne l'histoire de la seconde guerre mondiale,

14 peut-être que c'était encore plus péjoratif de se voir appelé « turc »

15 étant donné que les partisans ont pris le pouvoir et ont dirigé la

16 Yougoslavie après 1945.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Oui attendez, je suis un peu

18 perdu, je ne vois pas le

19 lien entre les partisans et...

20 M. le Président (interprétation). - Là encore, nous nous

21 écartons de cette affaire. Passons à quelque chose d'autre, s'il vous

22 plaît.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Très bien Monsieur le

24 Président. Peut-être que vous parliez de la première guerre mondiale et

25 non de la deuxième, dans votre réponse précédente, et des activités des

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1 Turcs dans cette guerre avec la Serbie...

2 M. le Président (interprétation). - Cela n'a aucune importance !

3 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, je vais poursuivre

4 Monsieur le Président.

5 Sur le même article, « pour le bien du peuple », contient un

6 article dont je voudrais que vous fassiez lecture.

7 Mme Greve (interprétation). - Pouvez-vous me dire où je peux

8 trouver ce paragraphe ?

9 M. Vucicevic (interprétation). - Pièce 19, page 2 au milieu,

10 intitulée « pour le bien du peuple », deuxième paragraphe, qui commence

11 part "dès le début "...

12 Mme Greve (interprétation). - J'ai lu le paragraphe en question.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Le nom de Jovan Raskovic vous

14 dit-il quelque chose ?

15 Mme Greve (interprétation). - Oui.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Pouvez-vous dire aux juges qui

17 était Jovan Raskovic ?

18 Mme Greve (interprétation). - Il était un des dirigeants du SDS

19 en Krajina, Krajina dans ce contexte étant la partie croate de Krajina.

20 C'était un Serbe, à l'époque il était ressortissant de Croatie. C'était

21 l'une des personnes qui, dès le début, a défendu la cause Serbe dans cette

22 région en tant qu’homme politique.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Etait-ce un nationaliste

24 serbe ?

25 Mme Greve (interprétation). - J'hésite à utiliser ce terme.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Oui bien sûr, je comprends

2 votre hésitation. Nous pouvons dire qu'il y a un bon nationalisme et un

3 mauvais nationalisme. Un bon nationaliste par exemple, c’est une personne

4 qui apprécie sa culture, son pays, la population qui vit dans son pays,

5 mais qui en même temps ne veut pas aller à l'encontre des sentiments

6 d’autres personnes qui vivent sur le même territoire et qui pense que tous

7 les ressortissants d'un même pays doivent se voir attribuer les mêmes

8 droits, vous êtes d'accord ?

9 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai aucune raison de mettre en

10 doute qu'il ne voulait pas défendre son peuple, je ne sais pas s'il

11 défendait également les droits de toutes les personnes qui vivaient sur

12 son territoire et s'il ne souhaitait pas heurter les sentiments d'autres

13 populations, cela je ne peux pas vous le dire.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Mais vous ne savez rien d'autre

15 sur M. Raskovic, décédé depuis ?

16 Mme Greve (interprétation). - Non, je crois que j'ai lu certains

17 des articles qu'il a écrit, mais il n'abordait pas des aspects qui

18 m'intéressaient à l'époque, donc par conséquent je n'ai pas véritablement

19 attaché une attention particulière à ce que j'ai lu à ce moment-là et je

20 ne peux donc pas répéter ce que j'ai lu et en informer les juges.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Mais ici, il est considéré

22 comme le père idéologique du SDS à Prijedor, n'est-ce pas ?

23 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai pas lu le paragraphe

24 ainsi, en tout cas je ne l'ai pas interprété de cette façon. Je pense

25 qu'effectivement on loue ses actions parce que cela a été un homme

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1 visionnaire et qu'il a défendu la cause du SDS.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Et bien imaginons la chose

3 suivante, que le docteur Raskovic était présent lors de la création du SDS

4 à Prijedor et disons que sa femme -qui est encore vivante- était croate,

5 hésiteriez-vous plus à imaginer que c'était un extrémiste

6 nationaliste ?

7 Mme Hollis (interprétation). - Je crois qu'il s'agit là d'une

8 hypothèse, que si ce sont des faits, alors le témoin peut répondre à la

9 question, mais en l'occurrence il s'agit véritablement d'une hypothèse.

10 M. le Président (interprétation). - Excusez-moi, arrêtons de

11 dire « il » ou « elle », je voudrais que les noms des conseils soient

12 utilisés. Monsieur Vucicevic, s'il s'agit de fait, précisez-le, s'il

13 s'agit d'une hypothèse précisez-le également, mais je ne pense pas que

14 cette question nous aide beaucoup. Le témoin ne pourra que formuler des

15 remarques sur des questions dont elle n'a aucune connaissance.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Très bien Monsieur le

17 Président.

18 Dans le même paragraphe, Professeur Greve, deux termes sont

19 mentionnés, un terme qui frappe l'esprit de toute personne qui connaît

20 bien l'histoire des Balkans, on y voit « Jasenovac », de quoi s'agit-il ?

21 Mme Greve (interprétation). - Jasenovac est un camp de

22 concentration de triste réputation. Au cours de la Deuxième guerre

23 mondiale, il se trouvait à proximité de Prijedor en Croatie, au niveau de

24 la frontière.

25 M. le Président (interprétation). - Excusez-moi, je vous

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1 interromps, nous connaissons ces questions, dans une affaire que nous

2 avons traité récemment, nous avons entendu de nombreux témoignages, de

3 nombreux éléments de preuve sur Jasenovac. Ce n'est pas la peine.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Merci beaucoup, Monsieur le

5 Président.

6 Nous utilisons ici une procédure nouvelle, alors je vous demande

7 une certaine latitude s'il vous plaît.

8 M. le Président (interprétation). - Oui bien sûr, vous pouvez

9 obtenir les éléments de preuve dont vous avez besoin, mais nous avons déjà

10 entendu parler de cela.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, mais si le témoin n'était

12 pas là lorsque ces éléments de preuve ont été fournis et si le témoignage

13 de ce témoin contient ces éléments...

14 M. le Président (interprétation). - Ne perdons plus de temps,

15 s'il vous plaît. La seule chose qui m'intéresse et que je veux que vous

16 gardiez à l'esprit, c'est que cette Chambre n'est pas ignorante, qu'elle

17 connaît l'histoire. Par conséquent, ce qui m'intéresse, c'est que nous ne

18 perdions pas trop de temps à aborder des questions qui de toute façon ne

19 vont pas nous aider pour le résultat final, parce que nous en avons déjà

20 entendu parler. Alors poursuivons, s'il vous plaît.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Très bien, Monsieur le

22 Président. Professeur Greve, étant donné cette décision, je dois dire que

23 dans l’affaire Tadic vous avez parlé de l'influence de la presse serbe,

24 qui a modifié l'état d'esprit de la population serbe dans la région de

25 Prijedor, n’est-ce pas ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Oui.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Et quelle donc était

3 l'influence de la presse serbe sur l’état d’esprit général de la

4 population de Prijedor ?

5 Mme Greve (interprétation). - D'après ce que j'ai compris des

6 déclarations des témoins et d'autres sources, contrairement aux années

7 précédentes, les Musulmans sont dépeints comme des fanatiques qui sont

8 prêts à se lancer dans une guerre de religion. Les Croates sont dépeints

9 comme étant des Oustachis extrêmement violents.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Qui étaient les Oustachis ?

11 Mme Greve (interprétation). - A ma connaissance, les Oustachis

12 étaient d'abord un parti minoritaire, peut-être d'origine paysanne, en

13 Croatie. Je crois que les dirigeants de ce parti vivaient dans l'Italie

14 fasciste et avaient grandi dans le climat fasciste de l'Italie. Et lorsque

15 les Allemands ont ouvert la Deuxième Guerre mondiale, ils ont pris le

16 pouvoir dans l'Etat indépendant de Croatie qui couvrait également à

17 l’époque la Bosnie-Herzégovine. Ils avaient également une politique

18 extrême, terrible et ils traitaient les Serbes d'une façon extrêmement

19 violente.

20 Je crois qu'il avait réussi à exiler un tiers des Serbes et que

21 leur volonté était d'exterminer le reste des Serbes, à savoir tous les

22 Serbes qui vivaient dans leur zone finalement. Et Prijedor, si je peux me

23 permettre de le préciser, est une zone qui a été contrôlée rapidement par

24 les partisans et qui a beaucoup souffert en 1942. A l'époque, d’après les

25 informations dont je dispose, les Allemands, les Autrichiens, à l'époque

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1 Kurt Waldheim, Secrétaire Général des Nations Unies, était l'adjoint du

2 dirigeant principal à Banja Luka. Par conséquent, c'est un domaine qui a

3 fait l'objet de nombreuses enquêtes, par des sources peut-être pas

4 officielles, mais en tout cas qui a fait l'objet de différentes enquêtes.

5 Ces forces conjointes, les Autrichiens, ainsi qu'une fraction du

6 mouvement des Chetniks, mais pas tous les Chetniks, cependant une fraction

7 de ce mouvement, ont commis des atrocités terribles en juillet 1942 dans

8 la zone de Prijedor. C’est pourquoi l'un des monuments se trouve à

9 Prijedor, un monument qui est à la mémoire des personnes qui sont mortes

10 au cours de ces atrocités.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Et Jasenovac se trouve dans la

12 même région ?

13 Mme Greve (interprétation). - C'est un peu plus au nord, de

14 l’autre côté de la frontière avec la Croatie. Je pourrais vous l'indiquer

15 sur une carte, mais c'est plus au nord nord-est dans cette même région.

16 Jasenovac ne se trouve pas sur le territoire de la municipalité de

17 Prijedor, ni en Bosnie-Herzégovine.

18 M. Vucicevic (interprétation). - A quelque 30 kilomètres de

19 distance ?

20 Mme Greve (interprétation). - Je pensais que c'était un peu plus

21 éloigné, car si vous voyez la taille de Prijedor, je dirai que c'est situé

22 à quelque 25 ou 30 kilomètres.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez fait état des

24 Oustachis, notamment dans le contexte de ce paragraphe. Vous avez dit

25 qu'ils avaient mené une politique d'extermination

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1 d'au moins un tiers de la population serbe. Dites-moi si vous avez la même

2 compréhension de l'histoire. Il y a eu des exterminations de toute le

3 monde, même des femmes, des enfants, des hommes.

4 Mme Greve (interprétation). - C’est ce que j’ai cru comprendre

5 aussi et je ne serais pas surprise qu'ils aient exterminé encore davantage

6 de personnes que le nombre qu'ils avaient prévu. Ils avaient une politique

7 absolument inhumaine.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez fait état de

9 M. Kurt Waldheim, qui a été Secrétaire Général des Nations Unies, qui à ce

10 moment-là se trouvait être le commandant en second dans la région. Vous

11 avez dit qu'il y a eu des enquêtes, mais peut-être n'ont-elles pas été

12 suffisamment approfondies, que pour donner une idée précise de ce qui

13 s'était passé. Êtes-vous d'accord avec cette représentation ?

14 Mme Greve (interprétation). - Je ne sais pas pourquoi les

15 renseignements relatifs à de telles enquêtes n'ont pas été divulgués, mais

16 je sais qu'il y a eu ces enquêtes et à mon humble avis, il aurait été plus

17 équitable de publier ces informations relatives à ce qui s'est passé au

18 cours de la Deuxième Guerre mondiale.

19 Je vous ai dit que M. Waldheim était le numéro 2 au niveau du

20 commandement, au niveau des renseignements à Banja Luka, mais je ne peux

21 pas vous dire quelle était sa position au sein de la hiérarchie générale.

22 J'ai entendu dire qu'il était le numéro 3, mais je n'en suis pas sûre.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Et vous savez qu'il y a eu des

24 survivants de ces camps d'Oustachis qui entouraient Prijedor ?

25 Mme Greve (interprétation). - Oui, je suis au courant. Après ces

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1 massacres, après les horreurs de juillet 1942, des Serbes furent emmenés à

2 Jasenovac, mais certains furent aussi emmenés en Norvège, dans mon propre

3 pays, où ils étaient des esclaves pratiquement, ils devaient être soumis à

4 des travaux forcés. Je sais aussi qu’il y avait un gouvernement

5 minoritaire

6 nazi en Norvège à l'époque qui les a traités de façon extrêmement

7 exécrable. J'ai rassemblé des informations à Belgrade, j’ai obtenu des

8 listes précises de tous les noms des personnes qui ont été envoyées en

9 Norvège et qui venaient de la région de Prijedor, ceci en 1942. La plupart

10 de ces personnes étaient serbes, mais il y avait aussi des Croates et des

11 Musulmans. Malheureusement, beaucoup de ces personnes ont trouvé la mort

12 dans mon pays.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Des personnes avaient été

14 internées dans des camps nazis en Norvège, mais par la suite il y a eu des

15 associations formées entre les personnes qui avaient été en Norvège et

16 d'autres en Yougoslavie, il y a eu pas mal d'associations. Avez-vous suivi

17 cela ?

18 Mme Greve (interprétation). - Oui, manifestement, il y a des

19 liens très forts d’amitié entre la Norvège et les gens de Yougoslavie.

20 M. le Président (interprétation). - Nous allons suspendre.

21 Quelle est la durée que vous voulez accorder à votre contre-

22 interrogatoire, Maître Vucicevic ?

23 M. Vucicevic (interprétation). - D’abord, nous allons étudier

24 les faits repris dans les différentes pièces à conviction déposées et il

25 se peut que Me Vann pose quelques questions supplémentaires, car dans le

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1 cadre de la préparation de ce contre-interrogatoire, nous n'avions que la

2 première déclaration du témoin et nous avions envisagé une partie du

3 contre-interrogatoire mené par Me Vann. Me Vann ne travaille avec nous que

4 depuis 10 ou 15 jours, mais moi j'y travaille depuis plus longtemps.

5 M. le Président (interprétation). - Et bien nous allons étudier

6 la question, mais normalement un seul contre-interrogatoire est accordé.

7 Si vous voulez déposer une requête, nous l'examinerons, mais la

8 pratique courante est qu'une partie ne peut procéder qu'à un seul contre-

9 interrogatoire.

10 Nous avons ce témoin qui est ici, il faut penser au séjour

11 qu'elle peut faire ici et il

12 faut penser aussi au temps qui s'écoule.

13 M. Vucicevic (interprétation). - J’en suis conscient,

14 Monsieur le Président, mais c'est le premier témoin qui comparaît en ce

15 procès et qui dépose sur des points de fait, des points d'histoire. C'est

16 un témoin tout à fait sincère, qui peut aider la Chambre à se faire une

17 idée qui soit la plus objective possible, c'est bien l'intention

18 poursuivie. Je m'excuse d'ores et déjà du temps que ceci pourra prendre.

19 M. le Président (interprétation). - Nous reprendrons à

20 14 heures 05.

21 L'audience, suspendue à 12 heures 35, est reprise à

22 14 heures 10.

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5 (L’audience se poursuit en public)

6 M. Vucicevic (interprétation). - Une question avait été posée

7 par moi sur la méthode et les citations, voici la page que je peux vous

8 citer désormais. Il s'agit de la page 609 de la transcription du procès

9 Talic et la ligne 29 est concernée plus précisément.

10 (Le témoin est introduit dans la salle.)

11 M. le Président (interprétation). - Maître Vucicevic, veuillez

12 poursuivre.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Nous étions arrêtés au moment

14 où nous nous intéressions à une déclaration concernant les médias serbes

15 et à la façon dont ces médias ont relaté les événements de l'époque.

16 Dans la présentation que vous avez faite du rapport de

17 M. Mazowiecki, vous avez déclaré que puisque c'est là votre domaine de

18 savoir-faire, certains propos des médias serbes avaient été incendiaires,

19 péjoratifs et incitant la population au génocide. Est-ce bien ce que vous

20 avez dit ?

21 Mme Greve (interprétation). - Ceci incitait la population à

22 avoir un jugement beaucoup plus négatif à l'encontre des autres groupes

23 ethniques dans l’Opstina.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Donc, vous ne dites pas que les

25 médias les incitaient à commettre des violations du droit international

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1 humanitaire, mais plutôt que ces médias contribuaient à ce que les gens

2 fassent preuve de moins de bonne volonté à l'encontre des autres groupes

3 ethnique ?

4 Mme Greve (interprétation). - La presse n'intimait pas qu'on

5 devait inciter au génocide, c'était moins explicite que cela, mais on

6 parlait des autres groupes de façon très hostile.

7 M. Vucicevic (interprétation). - Prenons ce postulat général,

8 nous croyons tous en la liberté de la presse ?

9 Mme Greve (interprétation). - Oui.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Et même si certains événements

11 sont de nature désagréable et peuvent être vexatoires pour des groupes

12 ethniques différents, si une relation est faite de ces événements, cette

13 relation permet aux journalistes de la presse libre de s'exprimer ?

14 Mme Greve (interprétation). - Oui, s'il y a liberté de presse,

15 liberté est donnée de relater des événements de façon différente, ceci

16 étant un des éléments de la situation générale.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Voyons les événements qui se

18 sont déroulés entre 1945 et 1990. Est-ce qu’en Yougoslavie, il existait

19 une liberté de la presse ?

20 Mme Greve (interprétation). - Je ne sais pas tout à fait ce

21 qu'il en est en matière de liberté de la presse, je ne serais pas tout à

22 fait de cet avis, je ne pense pas qu’elle soit tout à fait libre, mais je

23 n'ai pas les moyens permettant de donner un avis plus précis.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Mais pour la courte période où

25 il y eut démocratie à Prijedor, pensez-vous que la presse y a été libre ?

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1 Mme Greve (interprétation). - A mon avis, la presse a changé de

2 démarche, d'attitude. Si je comprends bien les autorités, les nouvelles

3 autorités, les autorités serbes, après avoir pris le pouvoir le

4 30 avril 1992, voulaient contrôler les médias et c'était une question

5 d'urgence pour ces nouvelles autorités.

6 M. Vucicevic (interprétation). - S'agissant du rapport de

7 M. Mazowiecki, vous vous êtes penchée uniquement sur les exagérations ou

8 la partialité des médias serbes. Avez-vous relevé dans ce rapport d'autres

9 éléments qui évoquent d'éventuelles partialités de la part des médias

10 d'autres groupes ethniques ?

11 Mme Greve (interprétation). - Je m'intéressais tout

12 particulièrement aux renseignements tels qu'ils étaient diffusés à

13 Prijedor.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Donc, si vous examinez tout le

15 territoire de la Bosnie-Herzégovine tel qu’il est évoqué dans ce rapport,

16 il semblerait qu'effectivement la presse, de tous les côtés, pour toutes

17 les parties en présence, était assez tendancieuse.

18 Mme Greve (interprétation). - C’est indiqué effectivement dans

19 ce rapport.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Si la presse serbe parlait des

21 événements survenus dans le camp de Jasenovac, pour vous est-ce de la

22 partialité ou plutôt la représentation d'événements historiques ?

23 Mme Greve (interprétation). - Si on fait état d'événements

24 historiques, là il n'y a pas de partialité ; par contre si l'on dit qu'un

25 nouveau Jasenovac est en train de voir le jour, à ce moment-là,

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1 effectivement, il y a partialité et subjectivité ou parti pris.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Avez-vous lu des déclarations

3 selon lesquelles on parlerait d'un nouveau Jasenovac ? Vous pourrez

4 répondre à cette question un peu plus tard, inutile d'essayer de trouver

5 la réponse sur le champ, mais ceci m'intéresserait. Nous pouvons remettre

6 ceci à plus tard.

7 Mme Greve (interprétation). - Ceci se trouve, permettez-moi de

8 vous donner lecture de la page 2 du document qui m'a été remis. Il s'agit

9 de la pièce 19, c'est l'article du Kozarski Vjesnik, « la fidélité à la

10 patrie et à ses idéaux ». Je prends le deuxième paragraphe : à la page 2,

11 on trouve l'intitulé principal, « pour le bien du peuple ». Je lis une

12 phrase du deuxième paragraphe : « Nous avons utilisé toutes nos ressources

13 pour soutenir le combat des Serbes contre les nouveaux et les anciens

14 Oustachis, contre un nouveau génocide qui se préparait dans des endroits

15 que nous connaissons déjà trop bien, Jasenovac, Jadovno*, etc. »

16 Si l'on fait une référence au passé, ce n'est pas quelque chose

17 de tendancieux, mais il y a peut-être parti pris lorsqu’on semble suggérer

18 qu'il y avait des plans élaborés afin de poursuivre la manière d'agir qui

19 avait été celle de la Deuxième guerre mondiale.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Si l'auteur de ce paragraphe ou

21 la personne qui aurait cité ce paragraphe, Ranko Gnjatovic craignait

22 vraiment à l'époque que des cas tels que celui de Jasenovac puissent se

23 reproduire, est-ce qu'il n'avait pas le droit d’en parler ou pas le droit

24 d’en faire état dans ses rapports ? Est-ce bien ce que vous nous dites ?

25 Mme Greve (interprétation). - Non.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce là une incitation de la

2 part de la presse ?

3 Mme Greve (interprétation). - S’il disposait d'informations

4 allant dans ce sens, non seulement il aurait le droit d’en parler mais il

5 devrait le faire, il en aurait le devoir.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Mais vous n'avez pas parlé à

7 l'un quelconque de ces Serbes, il est donc impossible de conclure s'il y

8 avait de telles informations, de tels renseignements, c'est vous qui

9 parvenez à la conclusion qu’il n'y avait pas de telles informations mais

10 vous ne pouvez étayer ceci par aucunes données.

11 Mme Greve (interprétation). - Dans toutes les sources et

12 documents que j'ai étudiés, je n'ai rencontré aucunes informations

13 concrètes à ce propos.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Parlons du rapport de

15 M. Mazowiecki, là où il parle des Musulmans de Bosnie et de la presse des

16 Musulmans de Bosnie. Plus particulièrement il parle de la radio Hajat.

17 Vous souvenez-vous de ce passage dans son rapport ?

18 Mme Greve (interprétation). - Je crains que non, en effet je

19 n'ai pas essayé de me prononcer sur toutes ces déclarations, je crois

20 qu'il avait de bonnes raisons de dire la plupart des choses qu'il a dites.

21 Hier, j'ai parlé de ce qu'il disait des médias, ceci est arrivé après que

22 j'en aie terminé de mon rapport, mais cela corrobore mes conclusions sur

23 les médias à Prijedor.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Prenons la page 9 du rapport de

25 M. Mazowiecki.

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1 M. le Président (interprétation). - Il s'agit de la pièce P 27.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Paragraphe 32, veuillez

3 examiner la dernière phrase qui commence par « le 1er avril 1993 ».

4 Pouvez-vous nous en donner lecture ?

5 Mme Greve (interprétation). - Le 1er avril 1993, le journal de

6 Tuzla, Zmaj od Bosnie, a publié un article dans lequel il est déclaré

7 ceci : « Instinctivement, tout Musulman voudrait aller au secours de son

8 voisin serbe, plutôt que l'inverse, alors que tout Musulman doit citer le

9 nom d'un Serbe et jurer de le tuer ».

10 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que ceci, à votre avis,

11 est en infraction du droit international humanitaire ? Quand fut-il

12 publié ?

13 Mme Greve (interprétation). - Le 1er avril 1993.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Et ce journal, Zmaj od Bosnie

15 était publié à Tuzla qui, à l'époque, se trouvait sous le contrôle du

16 gouvernement bosniaque.

17 Mme Greve (interprétation). - Je ne sais pas, mais si vous me le

18 dites, je le crois.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Merci.

20 Même page, paragraphe 30, dernière phrase de ce paragraphe. Un

21 exemple nous est fourni par l'appel lancé par Radio Hajat. Pourriez-vous

22 nous en donner lecture ?

23 Mme Greve (interprétation). - « Un exemple nous en a été fourni

24 par l'appel lancé par Radio Hajat, le 5 février 1994, à la suite du

25 massacre sur la place du marché Markale afin que des représailles soient

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1 organisées par les Musulmans contre les Serbes et les Croates de Sarajevo.

2 M. Vucicevic (interprétation) - Avez-vous lu ce paragraphe avant

3 de déposer hier à ce propos ?

4 Mme Greve (interprétation). - J'ai lu tout le rapport la fois

5 précédente.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Fort bien. Est-ce que vous

7 connaissez et êtes au courant du massacre qui fut perpétré sur la place du

8 marché Markale ?

9 Mme Greve (interprétation). - Oui, je connais les détails

10 généraux, cela a d'ailleurs été repris dans le rapport rédigé par la

11 Commission d'experts, même si je ne me suis pas intéressée tout

12 particulièrement à cette question, ce n'était pas moi qui étais chargée de

13 cet examen.

14 M. le Président (interprétation) - Non, ne commencez pas par

15 cette question.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Je la retire.

17 M. le Président (interprétation). - Fort bien.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Vous venez de nous donner

19 lecture de cette phrase. Si vous en examinez les termes, pour autant que

20 vous puissiez en juger, s'agit-il là d'une incitation qui pousserait la

21 population de Sarajevo à commettre des infractions du droit international

22 humanitaire contre les Serbes et les Croates ?

23 Mme Greve (interprétation). - On incite aux représailles, et

24 pour moi cela veut dire que c'est un appel à commettre des infractions.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Excusez-moi de vous dire ceci,

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1 mais nous avons un expert en droit international humanitaire à qui

2 j'aimerais demander qu'elle nous précise, qu'elle nous qualifie les termes

3 de représailles, car je ne voudrais pas que ceci passe à la postérité sans

4 que ce soit corrigé.

5 M. le Président (interprétation). - Posez la question.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Au titre du droit international

7 humanitaire, les représailles sont-elles des mesures dont on pourrait dire

8 qu'elles sont autorisées de la part d'une population civile ?

9 Mme Greve (interprétation). - A ma connaissance, la notion de

10 représailles en tant que telle ne s'inscrit pas dans le droit

11 international. Je parle ici de façon générale sans penser particulièrement

12 à Sarajevo ni à quoi que ce soit. On ne peut pas répondre à un crime par

13 un nouveau crime ; quelquefois il y a des provocations, mais la

14 représaille ou les représailles ce n'est pas un concept qu'on retrouve

15 dans le droit international. Toutefois, étant donné qu'ici on leur demande

16 de réagir, de lancer des représailles du fait d'un massacre, je crains que

17 ceci n'entraîne de nouveaux crimes.

18 M. Vucicevic (interprétation). - S'agit-il ou ne s'agit-il pas

19 d'incitation à ce que soient commises des violations du droit

20 international ?

21 Mme Greve (interprétation). - Puisqu'on ne dit pas de façon

22 explicite que de nouveaux crimes peuvent être commis, votre interprétation

23 est peut-être la bonne.

24 M. le Président (interprétation). - Je crois que ceci suffira

25 sur le sujet.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Dans votre déposition

2 précédente, vous avez déclaré que les violations du droit international

3 humanitaire commises sur le territoire de Prijedor ont été le fait

4 d'Oustachis alors soutenus par le gouvernement de l'Etat indépendant de

5 Croatie, ceci au cours de la Deuxième Guerre mondiale. Auriez-vous des

6 informations vous permettant de croire que des actes similaires ont été

7 commis par des ressortissants serbes à l'encontre de Musulmans ou de

8 Croates ?

9 Mme Greve (interprétation). - J'ai lu des documents historiques,

10 et je sais que tous les Chetniks n'ont pas voulu cibler de façon explicite

11 les Musulmans se trouvant dans certaines régions, loin de là. Je ne peux

12 pas vous citer des incidents spécifiques relevant de la Deuxième Guerre

13 mondiale.

14 M. le Président (interprétation). - Vous n'êtes pas ici pour en

15 parler et de toute façon je n'autoriserai plus de question relative à

16 cette période de l'histoire. Maître Vucicevic, veuillez passer à autre

17 chose.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Vous avez parlé de l'esprit de

19 solidarité, de fraternité, de paix qui régnait entre les groupes ethniques

20 à Prijedor. Pourriez-vous nous expliquer quelle est la signification

21 attribuée à cette notion de fraternité dans la terminologie de l'histoire

22 moderne ?

23 Mme Greve (interprétation). - A ma connaissance, il y avait des

24 rapports tout à fait amicaux, affables entre les différents groupes de

25 Prijedor ; ce n'était pas une région qui était secouée par des hostilités

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1 inter-ethniques, c'étaient des gens qui coexistaient, cohabitaient comme

2 le font toutes les communautés, toutes les sociétés qui ne rencontrent pas

3 beaucoup de divergences entre elles. Je crois comprendre que ces groupes

4 ethniques eux-mêmes, tout du moins au cours de ce siècle, ont vécu ce

5 siècle comme un siècle de fraternité, ces liens ayant été tout à fait

6 renforcés au cours de la Seconde Guerre mondiale, puisqu'à titre d'exemple

7 nous

8 avions là les Musulmans et les chefs musulmans de la communauté se sont

9 très vite prononcés contre les attaques menées par les Oustachis au cours

10 de la Seconde Guerre mondiale contre les Serbes, et où les partisans

11 comprenaient une majorité de Serbes, certes, mais aussi des Croates ainsi

12 que des Musulmans.

13 Alors, ils ont combattus ensemble au cours de la Deuxième Guerre

14 mondiale, et même des gens qui allaient à Keraterm dans ces camps,

15 puisqu'ils n'avaient pas fait l'expérience d'attaque menée contre des

16 villages entiers, ne pouvaient pas s'imaginer ce qui se passait. Et même

17 après la prise de pouvoir par les Serbes, le maire musulman qui avait été

18 évincé s'est adressé à la population par la radio Prijedor, début mai. Il

19 a dit ceci : "Rappelez-vous la fraternité, rappelez-vous les bons rapports

20 que nous avions ; des gens sont venus de l'extérieur, nous ont usurpé le

21 pouvoir, nous n'avons rien à craindre car finalement nous sommes une

22 communauté pacifique."

23 Par ces termes, je n'entends pas dire qu'il n'y avait pas les

24 problèmes que la plupart des communautés connaissent.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Mais vous savez que ce principe

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1 de la fraternité a été imposé par les communistes qui ont pris le pouvoir

2 après 1945, n'est-ce pas ?

3 Mme Greve (interprétation). - Je sais que dans mon propre pays,

4 qui n'a jamais été communiste, on utilise ce terme.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Non, je parle directement de ce

6 concept.

7 Mme Greve (interprétation). - Je ne peux pas vous dire si ce

8 terme a été introduit par les communistes, c'est un concept tout à fait

9 courant, tout du moins je suppose qu'il existait aussi au moment de la

10 guerre.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Mais vous n'en êtes pas sûre en

12 ce qui concerne cette question ?

13 Mme Greve (interprétation). - Non, je ne me suis pas penchée sur

14 la question du

15 début de l'utilisation de ce concept.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Et pourtant en présentant des

17 statistiques, est-ce que cela vous a préoccupé de comprendre que la

18 plupart des villages étaient entièrement musulmans, entièrement serbes ou

19 entièrement croates ? Et comment pouviez-vous concilier la fraternité et

20 l'unité avec une telle ségrégation ?

21 Mme Greve (interprétation). - Si je peux me permettre,

22 j'aimerais vous ramener une fois de plus aux statistiques émanant du

23 recensement. Je crois que des chiffres, et pas forcément de la carte

24 simplifiée, mais des chiffres, on peut en déduire que pratiquement dans

25 tous villages vous trouverez une population mélangée.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Revenons au tableau,

2 Madame le professeur Greve, et peut-être que le Tribunal comprendra mieux,

3 j’attire votre attention. Où se trouve Prijedor ?

4 Il s'agit de la page 2, il s'agit de la pièce 21 B. Examinons le

5 village qui s'appelle Vistrica*. C’est la troisième ligne en partant du

6 bas de la page, dont le chiffre en bas de page à droite se termine

7 par 201.

8 Il y a 1 490 Serbes et un Musulman.

9 Passons maintenant au village suivant : Biscani : le rapport est

10 différent. Il y a 1 150 Musulmans et deux Serbes. Voyons maintenant

11 d'autres villages, plus grands. Cela concernerait la page 203 car il

12 semblerait qu'il s'agisse là de deux pages qui ont été coupées.

13 Mme Greve (interprétation). - C’est exact, il s'agit de deux

14 pages qui étaient l'une en face de l'autre.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Prenons maintenant le village

16 Carakovo où il y a 2 128 Musulmans et 38 Serbes.

17 M. le Président (interprétation). - Je crois que ces chiffres

18 concernent 1981.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, mais je crois que ces

20 chiffres ont peu changé,

21 mais nous pouvons examiner le recensement de 1981.

22 M. le Président (interprétation). - Je ne vous invite pas à le

23 faire.

24 M. Vucicevic (interprétation). - J’essaie d'attirer votre

25 attention sur un certain nombre de villages.

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1 Mme Greve (interprétation). - Les noms sont énumérés à la

2 colonne de gauche.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Vous trouvez le village de

4 Surkovac par exemple, qui contient 647 Croates, pas de Musulmans et

5 18 Serbes. Il ne s'agit pas d'un échantillon statistiquement

6 représentatif, mais il nous fournit une indication selon laquelle il n'y

7 avait aucune intégration de la population, malgré ce terme, ce slogan de

8 fraternité, n’est-ce pas ?

9 Mme Greve (interprétation). - Si je lis bien toutes les

10 statistiques, je crois qu'il y a un mélange plus que cela n'est suggéré

11 par ces statistiques. Oui, c’est exact, il y a énormément de variations.

12 M. Vucicevic (interprétation). - J’ai un devoir d’équité vis-à-

13 vis de la Chambre et je vais donc examiner la ville de Prijedor où la

14 population se répartissait à 50/50. Il s'agit de la page 205 de l'année

15 1981 encore, mais je vois qu'il y a environ 10 000 Musulmans et 10 000

16 Serbes à l'époque. En 1991, il y avait environ 24 000 Serbes, mais il

17 existe encore cette catégorie de Yougoslaves. Que peut-on dire de cette

18 catégorie ?

19 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit d'une catégorie qui

20 n'énonce pas le groupe ethnique ou la religion de la personne. Quelqu'un

21 peut souhaiter se déclarer comme yougoslave, alors qu'il appartient à tout

22 autre groupe. Ils sont libres de leur choix à cet égard.

23 Bien des personnes se désignent comme yougoslaves car elles

24 souhaitent montrer qu'elles sont attachées à l'Etat yougoslave. D'autres

25 choisissent une telle appellation parce que deux grands-parents viennent

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1 d'un groupe et un grand-parent appartient à un deuxième, un grand-parents

2 à un troisième... Ils ne sentent pas comme appartenant à un groupe donné.

3 Ou encore, pour une autre raison, des personnes estiment qu'il était bon

4 de ne pas s’identifier à un

5 groupe.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Peut-on dire raisonnablement

7 que le recensement de l'époque permettait aux gens de dire où ils

8 sentaient... où ils appartenaient...où ils croyaient appartenir ? Ce que

9 nous pouvons constater, c'est que la plupart de ces villages sont

10 exclusivement, à grande majorité, soit serbes, soit musulmans, soit

11 croates, sans mélange.

12 Mme Greve (interprétation). - Pour ce qui est du mélange, je

13 pense que les chiffres se passent de commentaires. On pourrait examiner

14 les chiffres village par village, voir les chiffres précis, mais c'est

15 exact que les gens étaient libres de se déclarer comme appartenant à un

16 groupe.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce qu’on pourrait en

18 déduire raisonnablement également que le mélange dans les zones rurales ne

19 s’est pas produit, en raison des souvenirs des atrocités commises pendant

20 la deuxième guerre mondiale ?

21 Mme Greve (interprétation). - A mon avis, il n'est pas justifié

22 de le dire, ou pas entièrement. Peut-être est-ce vrai en partie. Un

23 certain nombre de personnes ont quitté Prijedor ; ces personnes-là étaient

24 de famille mixte, avaient des ancêtres mixtes, et ils pouvaient épouser

25 quelqu'un d'un autre groupe et ils pouvaient se déclarer comme appartenant

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1 à ce groupe-là.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Ce sont des personnes qui se

3 sont converties, donc essentiellement, et qui se déclarent comme

4 appartenant à l'autre groupe ? L'un des yougoslaves le plus célèbre qui

5 s'est converti -vous le savez peut-être- est le prix Nobel yougoslave de

6 littérature, Ivo Andric. Il est né croate, mais il s'est déclaré serbe. Il

7 s'agit de l'une des figures les plus les plus importantes de la

8 littérature serbe.

9 Donc certaines personnes se sont converties pour différentes

10 raisons et ont rejoint les autres groupes ethniques, mais à la lecture de

11 ces chiffres ici, il s'agit d'une ségrégation importante dans tous les

12 secteurs de la municipalité de Prijedor, à part Prijedor même.

13 Mme Greve (interprétation). - Je ne saurais pas dire qu’il y a

14 une immense majorité

15 de cas de ségrégation.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Je vais modifier le terme que

17 j'ai employé. J’ai parlé de ségrégation et je dirai qu'il y a une

18 ségrégation qui est préoccupante. Est-ce que vous pourriez être d'accord

19 avec cela, étant donné qu'il y avait une politique officielle de

20 fraternité ?

21 Mme Greve (interprétation). - Je crois que le concept de

22 fraternité peut être compris de plusieurs manières et je crois que le

23 sentiment de fraternité peut signifier que dans une région donnée,

24 composée de plusieurs villages, de plusieurs unités administratives, les

25 habitants estiment qu'ils ne sont pas hostiles les uns vis-à-vis des

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1 autres. Et pourtant ils peuvent conserver leur hameau ou autre ce qui,

2 comme vous l'avez déjà dit, sont à majorité composés d'habitants qui

3 disent appartenir à un groupe ethnique.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Cela me rappelle un vieil adage

5 du système communiste, c'est-à-dire que certains étaient plus libres que

6 d’autres. Il semble que cette répartition ethnique dans la municipalité de

7 Prijedor montre qu'on faisait plus confiance à ceux qui étaient de son

8 côté qu'à d'autres, ce qui amenait un regroupement des habitations, n’est-

9 ce pas ?

10 Mme Greve (interprétation). - Etant donné que je n'ai pas posé

11 cette question précise aux gens, je ne serai pas à même de vous répondre.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Je crois que cela ressortira

13 lorsqu’on examinera la carte de Prijedor et qu'on pourra répondre à cette

14 question.

15 Il s’agit de la pièce 22.

16 A regarder la répartition par couleur, il est évident que les

17 Musulmans étaient au sud-ouest de Prijedor, alors que les Serbes étaient

18 au sud-est de la municipalité de Prijedor. Il y avait une concentration

19 importante de population musulmane à Kozaruza, Kozarac, Brdani, Babici,

20 dans ces régions-là qui sont le long de la route. Il n'y a pas de route,

21 mais vous connaissez bien les cartes. Donc sur la route de Prijedor à

22 Banja Luka.

23 Il y a une concentration de Serbes à nouveau au nord de

24 Prijedor.

25 Mme Greve (interprétation). - Oui, c'est la une simplification

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1 de la répartition des majorités des groupes ethniques.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Or sur la prochaine pièce à

3 conviction, qui est votre dessin -il s'agit de la pièce 24- vous avez

4 déclaré que Prijedor et les municipalités de Prijedor et Kotor Varos

5 étaient les municipalités musulmanes. Qu'entendiez-vous par là ? Quelle

6 était votre intention lorsque vous avez colorié ces parties de différentes

7 couleurs ?

8 Mme Greve (interprétation). - Les couleurs différentes sont

9 liées au fait que les Opstina, les municipalités en rouge, avaient une

10 influence serbe très importante, pas entièrement composée d'une population

11 serbe, mais avaient une telle influence des Serbes qu'il a été décidé, au

12 sein de l’Opstina, de rejoindre la région autonome de Krajina, dont on a

13 parlé hier, par opposition aux trois autres Opstina : Prijedor,

14 Sanski Most et Kotor Varos.

15 Là, certes il y avait une population serbe importante, une

16 petite partie de la population était croate, et il y avait une grande

17 partie de la population musulmane. Dans ces trois Opstina, municipalités,

18 l'influence des Serbes n'était pas aussi forte pour que les autorités

19 locales, pour que les pouvoirs locaux décident de se rattacher à la région

20 autonome de Krajina.

21 Voilà la seule raison qui m'a amené à leur donner une couleur

22 différente.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Je vais vous faire remonter

24 dans le temps et revenir aux élections de décembre 1990.

25 Suite à ces élections, comme vous l'avez dit dans votre

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1 déposition de l'affaire Tadic, et conformément au rapport de cette

2 affaire, le SDA a obtenu trente sièges le SDS vingt-huit et le parti

3 croate avait deux sièges. Quant aux autres partis, en d'autres termes les

4 partis libéraux où des restes des adeptes du système communiste, ils ont

5 obtenu trente sièges. Est-ce que c’est exact ?

6 Mme Greve (interprétation). - Oui, c'est exact.

7 M. Vucicevic (interprétation). - Les membres du SDA et du SDS

8 formaient un gouvernement de coalition dans la municipalité de Prijedor ?

9 Mme Greve (interprétation). - L'assemblée municipale reflétait,

10 je crois, les résultats des élections.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Mais il y avait un accord entre

12 le SDA et le SDS pour mener une campagne de coalition contre les partis

13 communistes au pouvoir, qui avaient été au pouvoir jusqu'à l'époque.

14 Connaissez-vous cela ?

15 Mme Greve (interprétation). - Je ne connais pas la situation

16 d'avant les élections de 1990 et la campagne électorale, mais je sais par

17 contre que le SDA et le SDS ont coopéré et ont obtenu trente et vingt-huit

18 sièges respectivement et se sont répartis les postes importants entre eux.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Si vous n'êtes pas au courant

20 d'accords d'avant les élections, imaginons donc que l’élection ait eu lieu

21 et qu'il s'agit là de la composition qui doit mener à la composition du

22 gouvernement. Chaque partie a trois possibilités : le SDA peut rejoindre

23 les partis communistes, ou les réformistes, les libéraux, le parti

24 socialiste, d'autres partis ou il aurait pu s’allier au SDS pour

25 constituer un gouvernement.

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1 De même, le SDS aurait pu s’allier au parti de la gauche qui

2 avait perdu les élections. Il y avait donc trois groupes importants qui se

3 partageaient le pouvoir.

4 Pourquoi selon vous le SDS et le SDA auraient-ils constituer une

5 telle coalition ?

6 Mme Greve (interprétation). - J'imagine que compte tenu des

7 circonstances c'était naturel, s'il s'agissait de réagir au régime

8 précédent, je ne suis pas entièrement qualifiée pour le dire mais

9 j'imagine que, compte tenu de la nouvelle situation politique, ils ont

10 estimé que c'était utile, que c'était sensé et que cela correspondait aux

11 engagements pris vis-à-vis des électeurs.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Et ces engagements visant à

13 remplacer un gouvernement totalitaire qui ne reconnaissait pas la liberté

14 d'expression, la liberté religieuse,

15 compte tenu de cela, pourrait-on en déduire que les membres du SDA

16 souhaitaient avoir des représentants élus et pouvoir pratiquer leur

17 religion ? Et de la même manière, les personnes qui étaient des

18 sympathisants et qui avaient voté pour les représentants du SDS, ces

19 personnes souhaiteraient également avoir des représentants élus, un

20 gouvernement élu et pouvoir pratiquer leur religion.

21 Par ailleurs, le gouvernement démocratiquement élu fournirait un

22 rempart pour l'économie qui permettrait à la société de prospérer. Compte

23 tenu de ces principes, est-ce qu'on peut raisonnablement imaginer qu'ils

24 ont constitué un gouvernement de coalition ?

25 Mme Greve (interprétation). - Etant donné ce que nous savons de

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1 façon générale sur l'Europe orientale et les élections libres, il y a eu

2 une coopération étroite entre des partis politiques qui étaient de

3 nouveaux partis politiques et les partis qui favorisaient l'ancien

4 système. J'imagine donc qu'à Prijedor, de façon générale, -et c'est une

5 supposition que je fais-, j'imagine qu'ils auraient travaillé ensemble

6 avec ceux qui étaient pour cette nouvelle situation de liberté.

7 M. Vucicevic (interprétation). - On peut donc raisonnablement

8 imaginer que même ceux qui étaient des membres du parti à l'époque,

9 n'avaient pas de ressentiment vis-à-vis des autres, car ils ont coopéré.

10 Je ne vous pose pas de questions de détail, mais est-ce qu'on peut

11 raisonnablement imaginer une telle chose ?

12 Mme Greve (interprétation). - Il est bien entendu difficile

13 d'estimer les sentiments de la population, mais étant donné qu'à Prijedor

14 il semblait que la fraternité et la coopération prévalaient, je pense que

15 cela avait cours également pour les hommes politiques ; peut-être que cela

16 a changé avec le temps, mais je crois que c'est le cas, oui.

17 Je crois que le changement principal est peut-être intervenu

18 lorsque des structures parallèles ont commencé à émerger et à se mettre en

19 place.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous pensez que la

21 guerre en Croatie a précédé ces éléments et que cette division ethnique a

22 commencé avec l'éclatement de la guerre

23 en Croatie ?

24 Mme Greve (interprétation). - Je sais que des débats politiques

25 ont eu lieu et je crois qu'ils ressortent de ligne directrice dont j'ai pu

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1 prendre connaissance après la fin de mon étude uniquement. Je crois que

2 des débats ont eu lieu au sein du SDS, le parti démocratique serbe, dès

3 août 1991, c'est-à-dire immédiatement avant ou après le début de la guerre

4 en Croatie. Et, à l'époque, des structures parallèles ont été évoquées. Je

5 parle d'août 1991.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Avez-vous des renseignements

7 sur un nettoyage ethnique de population serbe dans la guerre en Croatie ?

8 Mme Greve (interprétation). - J'ai des renseignements au moment

9 où la guerre a commencé en Slavonie orientale. Certaines des victimes

10 étaient clairement des Serbes lorsque des groupes se sont affrontés.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous pensez que de

12 tels renseignements auraient pu avoir des répercussions sur les Serbes

13 dans la zone de Prijedor ?

14 Mme Greve (interprétation). - Oui, je crois que cela a eu des

15 conséquences, notamment parce que cela a été repris dans les médias et

16 parce que cela a été utilisé pour généraliser un sentiment de peur et le

17 besoin pour les Serbes d'être particulièrement alerte.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous savez s'il y a

19 eu des rapports dans la presse occidentale de nettoyage ethnique de Serbes

20 en Croatie, à l'époque ?

21 Mme Greve (interprétation). - Je ne peux évoquer d'informations

22 précises, mais je crois savoir que des rapports ont été publiés, et que si

23 les journalistes directement n'en ont pas parlé, le Haut-Commissariat des

24 Nations Unies aux réfugiés en a fait état, a fait état de déplacements de

25 populations en Slavonie orientale, dont des Serbes.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Mais les Nations Unies, les

2 organisations internationales, les pays occidentaux, ont-ils essayé

3 d'arrêter cette guerre ? Ont-ils essayé de faire quelque chose à votre

4 connaissance ?

5 Mme Greve (interprétation). - A ma connaissance, la communauté

6 des pays occidentaux était préoccupée et s'occupait de négociations qui se

7 poursuivaient depuis quelque temps. Cela avait fait l'objet de débats au

8 sein de la communauté européenne, d'institutions internationales dont le

9 siège était en Europe. Cela a fait l'objet de conférences, de débats, de

10 discussions.

11 Je crois que tout le monde pensait à l'époque que cette guerre

12 pouvait être évitée et qu'on pourrait arriver à un règlement pacifique

13 autour d'une table de négociation.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Il pourrait donc être

15 raisonnable de penser, étant donné que les nettoyages ethniques de Serbes

16 en Slavonie orientale s'étaient produits, étant donné que certaines

17 organisations officielles, et la communauté européenne avait des rapports

18 là-dessus, mais l'on s'attendait à ce que la guerre soit courte... Il

19 était raisonnable que les Serbes de la Krajina aient un sentiment

20 d'appréhension. Je ne demande pas s'ils avaient tort ou s'ils avaient

21 raison, mais est-ce qu'ils avaient des raisons d'avoir des appréhensions ?

22 Mme Greve (interprétation). - J'essaie de cibler mes réponses,

23 je n'essaie pas de porter un jugement, mais j'essaie d'évaluer la

24 situation et de vous fournir mes observations.

25 Je ne sais pas si le terme de nettoyage ethnique a déjà été

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1 utilisé en Slavonie orientale début août 1991, mais je sais que des

2 parties importantes de population, y compris les Serbes, ont été déplacées

3 au cours des combats entre les Croates essentiellement et les Serbes

4 essentiellement.

5 Je sais qu'ultérieurement ce terme a été utilisé, souligné et je

6 crois que la population a été effrayée. Mais à Prijedor, la population se

7 reposait sur son expérience passée. Dans la Deuxième Guerre mondiale,

8 l'expérience avait été différente, il s'agissait d'une zone contrôlée par

9 les partisans qui avaient été attaqués par les non-partisans ; mais à

10 l'époque, cela a été confirmé par bien des sources, ils ont estimé que le

11 fait d'avoir été côte à côte dans le passé les aiderait à surmonter des

12 moments difficiles à l'avenir.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Quelle est votre conclusion

14 vis-à-vis de cela ? Est-ce qu'ils ont estimé qu'ils étaient dans une sorte

15 d'arche de Noe tout simplement parce qu'ils étaient au coeur des partisans

16 pendant la Deuxième Guerre mondiale et qu'ils ne se préoccupaient pas des

17 événements qui avaient lieu dans le reste du pays ?

18 Mme Greve (interprétation). - Oui et non. Oui, je crois qu'ils

19 étaient attentifs à ce qui se produisaient ailleurs, oui je crois que ces

20 personnes-là étaient très préoccupées par le fait qu'une guerre avait

21 lieu. Oui, je crois qu'ils suivaient intensément ce qui se passait mais

22 non, je ne pense pas qu'ils avaient si peur d'être... Ils ne se sentaient

23 pas aussi influencés par l’expérience au plan local d'un groupe contre un

24 autre, ils avaient des expériences différentes, une histoire différente

25 qui faisait qu'il était plus facile avec eux d'entretenir de bonnes

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1 relations avec leurs voisins que pour les Serbes de Slavonie orientale.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Monsieur le Président,

3 j'aimerais présenter la pièce numéro 1 de la défense. A ce stade, je sais

4 Monsieur le Président que cela n'est pas fait pour remettre en question la

5 crédibilité de ce témoin, mais uniquement pour contredire la validité des

6 données qui fondent sa déclaration. Il s'agit d'un ouvrage de

7 Samuel P. Huntington, Professeur de l'université de Harvard et à la

8 page 283, il parle de cette question.

9 M. le Président (interprétation). - Avez-vous des photocopies

10 que vous pourriez nous remettre ?

11 M. Vucicevic (interprétation). - Je vais faire des photocopies

12 mais je pensais que l'on pourrait peut-être le placer sur le

13 rétroprojecteur et citer une phrase.

14 M. le Président (interprétation). - Nous aurons besoin d’obtenir

15 des photocopies mais vous pouvez présenter l'ouvrage au témoin.

16 Mme Greve (interprétation). - Excusez-moi, je vais devoir me

17 tourner vers le livre.

18 M. le Président (interprétation). - Allez-y. Qu'est-il dit ?

19 M. Vucicevic (interprétation). - Peut-on rendre l'image plus

20 nette, s’il vous plaît ?

21 Mme Greve (interprétation). - Cela suffit comme cela ?

22 M. le Président (interprétation). - Très bien.

23 Mme Greve (interprétation). - Voulez-vous que je lise ceci ?

24 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, je vous demanderai de lire

25 les deux premières phrases du premier paragraphe qui commence par " le

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1 soutien de l'ouest ".

2 Mme Greve (interprétation). - "Le soutien de l’ouest pour la

3 Croatie incluait également le fait de ne pas avoir considéré le nettoyage

4 ethnique et les violations des Droits de l'Homme et des lois de la guerre

5 pour lesquels les Serbes ont régulièrement été dénoncés. L'Occident est

6 resté silencieux lorsqu'en 1995 ; l'armée de Croatie, ayant acquis une

7 nouvelle force, a lancé une attaque contre les Serbes de Krajina qui

8 étaient sur ce territoire depuis des siècles et qui a conduit des milliers

9 d'entre eux à l'exil en Bosnie et en Serbie".

10 M. Vucicevic (interprétation). - Cela suffit merci. Il est donc

11 raisonnable de penser que les informations que vous avez consultées au

12 cours de vos recherches ne sont pas les mêmes puisque visiblement vos

13 conclusions et celles du Professeur Huntington ne concordent pas.

14 Mme Greve (interprétation). - Je ne suis pas d'accord avec ce

15 que dit M. Huntington dans la première phrase.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Je ne vous demande pas votre

17 opinion, je ne vous demande pas non plus de comparer vos deux opinions,

18 mais je vous demande simplement la chose suivante : est-il raisonnable de

19 dire que les informations sur lesquelles il s’est fondé pour parler de la

20 même chose que vous ne sont pas les mêmes que celles que vous avez

21 utilisées ?

22 Mme Greve (interprétation). - Vous m'avez demandé précédemment

23 si j'avais eu connaissance de rapports faits dans la presse occidentale,

24 relatifs à la Slavonie orientale. Ce à quoi j'ai répondu que je ne me

25 rappelais aucun rapport en particulier, mais que je savais que par exemple

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1 le haut-commissariat aux réfugiés avait attiré l’attention de la

2 communauté internationale sur ce point. Etant donné que je n'ai pas

3 consacré de temps à cette question en

4 particulier, je ne peux pas être considérée comme étant experte sur ce

5 qu'a dit la presse internationale et sur ce soutien apporté par l'Occident

6 à la Croatie. Je crois que cela sort du champ de mes compétences. Je ne

7 peux pas m'exprimer sur ce point, Monsieur le Président.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Eh bien je vais passer à une

9 autre série de questions, Monsieur le Président. Par conséquent, il est

10 donc raisonnable de conclure que les Serbes de Prijedor avaient une

11 certaine appréhension par rapport à leur avenir et les conclusions liées à

12 la fraternité semblent être plus objectives, avec le recul, que les vôtres

13 parce qu'il y a eu en Krajina un nettoyage ethnique et les Etats

14 occidentaux n’ont pas réagi.

15 Mme Greve (interprétation). - La référence à la Krajina et aux

16 Serbes de Krajina remonte à 1995, c'est-à-dire trois ans après les

17 événements de Prijedor vraisemblablement. J'ai fait une étude générale des

18 sentiments de la population, j’ai fait une étude générale de la réalité

19 des choses à ce moment-là.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Je vous invite maintenant à

21 passer à la pièce de l'accusation 29.

22 Cet article de journal, lorsqu'on le lit dans son intégralité,

23 indique l'existence d'un certain nombre de critiques à l'encontre de la

24 police et notamment du chef de la police ; or Delic, qui était à l'époque

25 chef de la police, répond à ces différentes critiques. C'est bien cela

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1 n’est-ce pas ?

2 Mme Greve (interprétation). - Tout à fait. Et en fait, ces

3 critiques étaient adressées à l'ensemble des autorités de Prijedor. Le

4 CICR et le haut-commissariat aux réfugiés, à ce moment-là, avaient eu à

5 faire à des personnes qui souhaitaient quitter la zone.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Et par conséquent, la faute est

7 rejetée sur le chef de la police de Prijedor qui contrôlait de nombreux

8 biens qui étaient entreposés à Keraterm, parce que dans ce contexte, on ne

9 parle pas de prisonniers, on parle surtout de biens qui étaient entreposés

10 dans ces bâtiments.

11 Mme Greve (interprétation). - C’est exact.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Et ces biens ont disparu

13 soudainement ?

14 Mme Greve (interprétation). - C’est exact également.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Mais il est dit explicitement

16 qu'il y a eu coopération entre la police, l’armée et les autorités et que

17 cette coopération existe toujours.

18 Est-il raisonnable de penser que, dans un pays en temps de

19 guerre, une certaine coopération va s'établir entre la police militaire et

20 les autorités civiles ?

21 Mme Greve (interprétation). - Je suppose que tout pays en temps

22 de guerre va essayer d'unir ses forces.

23 M. Vucicevic (interprétation). - C'est une proposition

24 raisonnable.

25 Mme Greve (interprétation). - Tout à fait.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Pour exécuter des tâches qui en

2 fait se chevauchent, cette unification a pour but de soutenir l'effort de

3 guerre ?

4 Mme Greve (interprétation). - Bien, dans une plus ou moins

5 grande mesure, oui pour coopérer.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Lorsque vous avez commenté la

7 pièce 30, vous avez dit qu'à l'époque M. Radmilo Zeljaja avait prononcé

8 une déclaration. Savez-vous quel était son grade au moment de l'éclatement

9 du conflit à Prijedor ?

10 Mme Greve (interprétation). - Je crois qu'il était maire, non

11 excusez-moi, major.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Major ?

13 Mme Greve (interprétation). - Oui, major.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Et quand vous avez parlé, vous

15 avez mentionné le nom de M. Kurt Waldheim ?

16 Mme Greve (interprétation). - Oui.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Et quand vous avez lu les

18 articles, qui n'étaient pas

19 disponibles, avez-vous pu déterminer quel était son grade à l'époque ?

20 Mme Greve (interprétation). - Je ne me rappelle pas son rang,

21 son grade, je sais qu'il était décrit comme étant commandant en second à

22 Banja Luka et qu'il était autrichien, et qu'il travaillait dans le cadre

23 des autorités allemandes et autrichiennes.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, s'il était

25 major à l'époque, même si ce grade n'était pas si élevé, il aurait pu

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1 commander un grand nombre d'hommes, n'est-ce pas ?

2 M. le Président (interprétation). - Nous nous écartons de la

3 question.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Je retire cette question donc.

5 M. Zeljaja était un commandant de la JNA, n'est-ce pas ?

6 Mme Greve (interprétation). - C'était un officier de la JNA, et

7 la JNA a été transformée en 1992 pour devenir l'armée des Serbes de

8 Bosnie.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Et le major Zeljaja, à

10 l'époque, commandait la quarante-troisième ?

11 Mme Greve (interprétation). - Ce qui était à l'époque la

12 quarante-troisième brigade motorisée.

13 M. Vucicevic (interprétation). - La brigade motorisée ?

14 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Qui se trouvait à Prijedor ?

16 Mme Greve (interprétation). - Oui.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Et cette brigade est intervenue

18 en Slavonie en 1991, n'est-ce pas ? A l'été 1991 ?

19 Mme Greve (interprétation). - Oui, la brigade a été mobilisée

20 afin de se rendre à cet endroit sur le front de Slavonie, en automne 1991.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Et les réservistes, qui sont

22 arrivés pour renforcer les rangs de l'unité, ils venaient de Prijedor,

23 n'est-ce pas ?

24 Mme Greve (interprétation). - Oui.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Et presque tous les Serbes ont

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1 répondu à l'appel et la plupart des Musulmans n'y ont pas répondu ?

2 Mme Greve (interprétation). - C'est exact, et je crois même

3 avoir lu qu'il n'a pas réussi à combler le manque d'hommes dans son unité.

4 Donc il est allé en Croatie sans avoir une unité complète.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'est donc lancé dans la

6 bataille en tant qu'officier militaire, il a dû se rendre et combattre

7 alors qu'il lui manquait peut-être 50 % du nombre d'hommes qui lui étaient

8 nécessaires. Et toutes personnes, qui manquaient, semblaient être des

9 Musulmans. Par conséquent, peut-on dire que le lien entre le commandant et

10 les soldats ne sera pas suffisamment fort dans la bataille ?

11 Mme Greve (interprétation). - Je suppose que les gens qui

12 étaient sous son commandement et lui-même avaient un rapport normal, un

13 rapport auquel on peut s'attendre sur un champ de bataille.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Et si la plupart des membres de

15 cette unité, étant donné le fait que les Musulmans n'ont pas répondu à

16 l'appel de mobilisation, donc si la plupart des membres de cette quarante-

17 troisième brigade était des Serbes, ce n'était pas la faute du

18 commandant Zeljaja, n'est-ce pas ? C'était quelque chose que le colonel ne

19 pouvait pas empêcher, n'est-ce pas ?

20 Mme Greve (interprétation). - Oui, ceci était dû aux

21 circonstances, à la situation qui prévalait à l'époque. Il n'avait pas eu

22 son mot à dire dans cette histoire.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Et si le commandant militaire

24 doit faire face à une situation dans laquelle un certain groupe ethnique

25 ne répond pas à un appel, pensez-vous qu'il peut lui faire confiance par

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1 la suite ?

2 Mme Greve (interprétation). - Et bien cela dépend. Peut-être

3 qu'il va comprendre

4 les raisons pour lesquelles ce groupe ne se présente pas.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Mais ce n'est pas un homme

6 politique, c'est un militaire, je vous demande si sa proposition est

7 raisonnable.

8 Mme Greve (interprétation). - Eh bien, étant donné que je ne

9 suis pas moi-même membre de l'armée, je crois qu'il faut nous tourner vers

10 la capacité humaine à faire confiance à une autre personne. Parfois on

11 comprend pourquoi les gens refusent de faire quelque chose et nous

12 continuons cependant à leur faire confiance, donc je crois qu'il est assez

13 difficile d'évaluer ceci.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Cet homme était tout à fait

15 raisonnable, n'est-ce pas ? Un homme raisonnable, tout comme vous venez de

16 le décrire. Dans cet article, c'est ce que l'on voit, en tout cas.

17 Mme Greve (interprétation). - Voulez-vous que …

18 M. Vucicevic (interprétation). - Non, non, non, à partir de cet

19 article, je ne vous demande pas d'entrer dans les détails, si vous ne

20 pouvez pas vous en souvenir, je passerai à une autre question ?

21 Mme Greve (interprétation). - C'est un entretien avec lui,

22 effectivement.

23 M. Vucicevic (interprétation). - A la page où l'on voit le

24 tampon 49, en bas à droite, je fais particulièrement référence à la phrase

25 qui commence par :" on leur a également dit (je crois que ma déclaration a

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1 été publiée officiellement par la presse, selon laquelle ce commandement

2 ne permettra pas à Prijedor de devenir Tuzla (ou des soldats de l'armée

3 ont été précédemment tués dans une colonne) ou Sarajevo ; comme Arsic et

4 moi-même ne sommes pas Kukanjac)".

5 Savez-vous ce à quoi il est fait référence ? Connaissez-vous ce

6 concept d'histoire moderne puisque vous êtes un expert en la matière ?

7 Mme Greve (interprétation). - Kukanjac ?

8 M. Vucicevic (interprétation). - Oui.

9 Mme Greve (interprétation). - Je ne sais pas ce que cela

10 représente.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Et si je vous disais qu'il

12 était un général de la JNA, qui a ordonné le retrait de ses troupes à la

13 mi-mai de Sarajevo, et que plus de 120 soldats non armés ont été tués par

14 des Musulmans qui les ont bloqués en embuscade dans les rues de Sarajevo,

15 lorsque des dizaines de personnes, médecins et infirmières ont été tués

16 également. Pensez-vous que ceci serait une violation du droit humanitaire

17 international ?

18 Mme Greve (interprétation). - Eh bien je comprends votre

19 déclaration et j'aimerais pouvoir ajouter quelques éléments sans avoir à

20 formuler de jugement quant à savoir si c'est une description fidèle à la

21 réalité ou non. Il semble effectivement, telles que les choses sont

22 décrites, qu'il y ait eu violation du droit humanitaire international,

23 mais je souhaiterais ne pas me prononcer sur ces questions.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Je vous pose cette question pas

25 en tant qu'expert, et je ne sais pas si l'on peut demander à un témoin de

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1 se prononcer sur une hypothèse.

2 M. le Président (interprétation). - Mais là encore je crois que

3 nous nous écartons de la question. Y a-t-il quoi que ce soit d'autre sur

4 ce document qui vous intéresse ?

5 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, je vais poser une question

6 directe. Madame, avez-vous entendu parler de l'attaque de la JNA contre

7 Sarajevo à la mi-mai 1992, lorsque le général Kukanjac, un officier

8 commandant de l'armée populaire yougoslave, a subi une attaque et lorsque

9 plus de 100 de ses soldats ont été massacrés ?

10 Mme Greve (interprétation). - J'ai lu un certain nombre

11 d'informations sur des attaques, je n'ai pas fait suffisamment attention à

12 ces événements pour pouvoir m'en souvenir avec précision, mais

13 effectivement j'ai lu un certain nombre d'informations qui ont été

14 rassemblées par la commission d'experts.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Mais vous n'avez pas lu ce

16 rapport ?

17 Mme Greve (interprétation). - Si, je l'ai lu, mais je ne peux

18 pas à ce stade m'en souvenir en détails.

19 M. Vucicevic (interprétation). - D’accord. Brièvement,

20 connaissez-vous l'attaque menée par les civils armés musulmans contre la

21 JNA lorsque celle-ci se retirait de Tuzla , quelque deux ou trois jours

22 plus tard. Je parle encore de la mi-mai 1992.

23 Mme Greve (interprétation). - Eh bien là encore, oui je sais

24 qu’il y a eu des affrontements.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Et pourtant, le Major Zeljaja

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1 n'a pas ouvert le feu sur la population musulmane, dans les villages

2 musulmans, quand il y a eu provocation auparavant ?

3 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai pas pu déterminer s'il y a

4 eu provocation qui aurait pu justifier cette attaque.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Si je vous dis que dans

6 l’affaire Tadic... Non, excusez-moi... Connaissez-vous le nom de

7 Mirza Mujadzic, un médecin ?

8 Mme Greve (interprétation). - Oui.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Qui est-ce ?

10 Mme Greve (interprétation). - Il était dans le SDA, le parti

11 musulman.

12 M. le Président (interprétation). - Non, vous ne pouvez pas

13 faire des remarques sur des événements de preuve qui ont été amenés par un

14 autre témoin.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Très bien. A partir de cet

16 article qui a été versé au dossier, et de la déclaration émanant du

17 major Zeljaja, je vous poserai la question suivante. Il dit : « Sur le

18 champ de bataille, près de Hambarina, on a tiré sur nos soldats ».

19 M. le Président (interprétation). - Mais où est-ce ? Où est-ce

20 dans ce document ?

21 M. Vucicevic (interprétation). - C’est à la page où l'on trouve

22 le tampon 49 en bas à droite. Il s’agit du long paragraphe en bas,

23 deuxième phrase à partie du haut.

24 Je vais la lire, si vous me le permettez. « Le 22 mai, dans le

25 camp en-dessous de Hambarina, on a tiré sur nos soldats, nos soldats qui

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1 constituaient à l'époque le cinquième bataillon. Et deux en sont morts.

2 Cependant aucune ambulance n'a été autorisée à venir chercher les trois

3 soldats qui étaient également blessés ».

4 Il s'agissant doute de la vérité, il pensait, lui, que c'était

5 la vérité. Et il demande à son unité de riposter lorsque les coupables ne

6 lui ont pas été livrés.

7 Cependant, cette action serait considérée comme étant une

8 représaille, n'est-ce pas ?

9 Mme Greve (interprétation). - On pourrait utiliser ce terme,

10 effectivement, mais il n'est pas dit explicitement qu'il pourrait réagir

11 de cette façon. Si vous me le permettez, vous avez parlé de Kozarac, je

12 crois, dans une question précédente. Ici, il s'agit de Hambarine.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Non, attendez, je vous

14 demanderai de répondre à une question à la fois et je demanderai aux juges

15 d'intervenir dans ce sens.

16 M. le Président (interprétation). - De toute façon, je crois

17 qu'il est temps de suspendre nos travaux pour une pause. Allez-vous en

18 terminer avant la fin de nos travaux d'aujourd'hui avec ces documents,

19 Maître Vucicevic ?

20 M. Vucicevic (interprétation). - Ecoutez, il y a encore deux ou

21 trois documents qui sont extrêmement importants, qui vont au coeur de la

22 question. Par conséquent, j’en doute.

23 M. le Président (interprétation). - Un quart d’heure de pause.

24 *(L’audience, suspendue à 15 heures 30, est reprise à

25 15 heures 55.)

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1 M. Vucicevic (interprétation). - J’attire votre attention sur la

2 pièce de l'accusation 32.

3 L'accusation vous a demandé de nous donner lecture de la

4 dernière phrase de la première page, qui porte le tampon 347. Cependant,

5 je vais vous demander quant à moi, de lire

6 la première phrase de ce paragraphe, afin que nous ayons une lecture du

7 paragraphe tout entier.

8 Mme Greve (interprétation). - Il est dit, « A l’aube, le 30 mai,

9 les Bérets verts ont lancé une attaque organisée contre Prijedor de

10 différents fronts. Après plusieurs heures de combats, l'attaque a été

11 repoussée, les attaquants ont été mis en déroute et partiellement

12 détruits. Dans ces opérations plusieurs soldats de l'armée Serbe et cinq

13 policiers ont été tués ».

14 M. Vucicevic (interprétation). - Merci, vous avez lu le reste

15 hier. Pourriez-vous nous dire qui étaient les Bérets verts ?

16 Mme Greve (interprétation). - Les Bérets verts sont des

17 Musulmans, peut-être que ces attaquants regroupaient des Musulmans et des

18 Croates. On pense qu'il y en avait 150 qui ont effectivement attaqué ce

19 matin-là.

20 M. Vucicevic (interprétation). - 150 hommes, c'est cela ?

21 Mme Greve (interprétation). - Oui c'est cela.

22 M. Vucicevic (interprétation). - Dans votre déclaration écrite,

23 vous avez utilisé le mot de « petites attaques », lorsque vous décriviez

24 ces attaques. Alors, il y avait 150 hommes armés. Ceci est-il pour vous

25 une petite unité lançant une attaque contre une ville un dimanche à

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1 l'aube ?

2 Mme Greve (interprétation). - Eh bien, c’est une utilisation

3 comparative du mot. Effectivement, cette unité était de petite taille par

4 rapport à d'autres forces engagées dans d'autres activités.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Mais cette force de petite

6 taille, 150 hommes, a provoqué la mort de nombreuses personnes et a fait

7 de nombreuses victimes.

8 Mme Greve (interprétation). - Je crois que cela a provoqué la

9 mort de 12 personnes, mais cela fait 12 personnes de trop, bien sûr.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, je suis tout à fait

11 d'accord.

12 Mais lorsqu'il y a eu ce coup d'état, cette prise de pouvoir à

13 Prijedor, pas un coup de

14 feu n'a été tiré, n’est-ce pas ?

15 Mme Greve (interprétation). - C'est exact. Le 30 avril, le

16 pouvoir a été pris sans qu'un seul coup de feu ne soit tiré.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, avec ce

18 témoignage nous pouvons arriver à la conclusion raisonnable selon laquelle

19 il y avait des Musulmans qui avaient pour désir de mettre en place des

20 opérations militaires contre les forces serbes qui se trouvaient dans la

21 région ?

22 Mme Greve (interprétation). - A la suite des événements survenus

23 le 20 mai, dont vous avez parlé avant l'interruption, événements qui ont

24 débouché sur une attaque armée contre Hambarine le 23, elle-même suivie

25 d'une attaque à grande échelle dans la région de Kozarac. Ceci s'est

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1 produit aussi avant le 30 mai. A cette époque-là, il y avait des

2 Musulmans, il se peut qu'il y ait eu parmi eux des Croates. Je ne sais pas

3 quels étaient les effectifs des Musulmans et des Croates, en tout cas, ils

4 se sont rassemblés sur la rive occidentale de la Sana.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Et ces forces musulmanes, ces

6 Bérets verts, d'où venaient ces forces, le savez-vous ?

7 Mme Greve (interprétation). - Est-ce que je pourrais utiliser la

8 carte de la région ? Je pourrais ainsi vous montrer où se situe cet

9 endroit, à l'intention des juges.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Vous parlez de la grande carte.

11 M. le Président (interprétation). - Pièce 35.

12 Mme Greve (interprétation). - Voici la région d'en bas qui a été

13 l'objet d'une attaque dans l'après-midi. (Le témoin parle hors micro.)

14 M. le Président (interprétation). - Excusez-moi Madame, je sais

15 que cela n'est pas facile de regarder la carte et de parler dans le micro,

16 mais les interprètes nous demandent de vous demander si vous pouvez parler

17 dans le micro. Pouvez-vous recommencer votre intervention ?

18 Mme Greve (interprétation). - Puisque nous avons déjà parlé au

19 cours de la journée de cette région, je vous précise qu'il y a eu un

20 incident impliquant des tirs le 22 mai 1992, incident qui est survenu au

21 barrage routier se trouvant sur la route menant à Hambarine. Deux personne

22 furent tuées, deux Serbes et un Musulman, et tous les Musulmans habitant

23 la région.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Pouvez-vous apporter une

25 correction, c'était peut-être un lapsus : est-ce qu’il y a eu un Musulman

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1 de tué ?

2 Mme Greve (interprétation). - Un musulman a été blessé sur les

3 lieux, sur le champ, et est mort de ses blessures. Pour être précis, les

4 responsables du barrage routier reçurent l'ordre de remettre les

5 responsables à l'autorité. C'est une région administrative qui reprend

6 plusieurs villages que celui de Hambarine et qui est adjacente à toute une

7 forêt qui se trouve davantage au sud. Voici la rivière Sana qui traverse

8 cette région. Et lorsqu'il y a eu une attaque menée contre Hambarine, dans

9 l'après-midi, après 12 heures, le 23 mai, des personnes ont pris la fuite

10 dans plusieurs directions, certains se dirigeant vers Risanovici qui se

11 trouve ici, plus au nord, alors que d'autres se sont dirigés vers la

12 région de Biscani, qui est encore plus au nord, tandis que d'autres se

13 sont dirigés vers une partie de la forêt au sud et qui va vers Prijedor et

14 vers Ljubija.

15 Ceux qui se trouvaient dans la forêt, après la fin des échanges

16 de feu, sont pour certains d'entre eux rentrés chez eux, alors que

17 d'autres sont restés dans cette forêt. Oui, ils furent touchés aussi par

18 des tirs d'artillerie, ceci s'étant produit le 23.

19 Le 24, se déclenche l'attaque principale, qui est engagée du

20 côté de Kozarac, là je plie la carte différemment, mais c'est plus vers

21 l'est.

22 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que des ultimatums

23 avaient été lancés à l'égard des autorités musulmanes à Hambarine ou est-

24 ce qu’il y a eu un ultimatum délivré aux autorités serbes de Kozarac.

25 Mme Greve (interprétation). - Puisque vous le dites, je reviens

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1 là-dessus. Les autorités de Hambarine devraient, si j'ai bien compris,

2 remettre les hommes qui se trouvaient au barrage routier, ainsi qu'un

3 policier vivant dans la région.

4 Il avait été fait en sorte qu'après la prise de pouvoir par les

5 Serbes dans la nuit du 30 avril, certains policiers avaient été priés

6 d'abandonner leurs fonctions. D'autres furent priés d'abandonner leur

7 loyauté par rapport aux autorités de Sarajevo et de prêter allégeance vis-

8 à-vis des nouvelles autorités de Prijedor. Un des policiers qui

9 appartenait aux forces de police ordinaire et vivait dans cette zone, ce

10 policier, d'après les sources recueillies par nous, aurait le 22, après

11 ces échanges de coups de feu, après l'incident, alors que ce policier

12 n'était pas impliqué dans l'incident au départ, avait été prié de se

13 rendre. C'était un barrage routier où des fonctionnaires demandaient ou

14 exigeaient des personnes franchissant ce barrage routier de ne pas le

15 franchir armées.

16 Donc un ultimatum exigeait la remise de ces personnes aux

17 autorités de Prijedor, mais l'ultimatum n'a pas été respecté. De ce fait,

18 cette région plus grande a fait l'objet de pilonnages.

19 M. Vucicevic (interprétation). - Revenons sur la question de

20 l'ultimatum et du fait que deux soldats serbes ont été tués. A cette

21 époque-là, la loi était déjà violée dans la région, puisqu'on ne pouvait

22 pas entamer de poursuites à l'encontre de quelqu'un responsable d'un

23 meurtre, quelle que soit l'appartenance ethnique de cette personne, ce qui

24 veut dire que tout le système judiciaire était paralysé, n'est-ce pas, et

25 qu'en d'autres termes il y avait situation état de guerre ?

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1 Mme Greve (interprétation). - Ce n'est pas tout à fait cela.

2 Tout le monde n'est pas d'accord sur l'origine des premiers coups de feu à

3 ce barrage routier, vous le verrez dans mon rapport. A radio Prijedor, il

4 a été dit que c'étaient les Serbes qui avaient ouvert le feu, mais il y a

5 eu contentieux à ce propos. Il semblerait que les autorités de Hambarine

6 ne se sont pas senties

7 en mesure d'exiger que quelqu'un se rende, même si cette personne était

8 coupable de meurtre, que cette personne se rende aux autorités qui avaient

9 pris le pouvoir à Prijedor dans la nuit du 30 avril 1992.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Merci de rappeler ce point que

11 vous avez consigné dans votre rapport, mais ni votre rapport, ni votre

12 déposition faite jusqu'à ce moment ne se fondent sur des faits. Est-ce que

13 vous avez vu le barrage routier ? Est-ce que vous pourriez le décrire ?

14 Est-ce que vous pourriez dire ce que faisaient les Serbes à cet endroit ?

15 Comment se fait-il que, tout d'un coup, les Serbes se sont retrouvés à un

16 barrage routier tenu par des Musulmans ?

17 Mme Greve (interprétation). - Pouvons-nous remonter quelque peu

18 dans le temps ? En effet, comme l'un des documents le montrait hier, et

19 ceci a été corroboré dans un article de presse par un des militaires

20 serbes, l'équipement militaire, l'armement qui autrefois appartenait à la

21 Défense territoriale et à ces unités, et bien, cet armement, cet

22 équipement a été repris par les autorités serbes avant que celles-ci ne

23 prennent le pouvoir.

24 Au moment du cessez-le-feu en Croatie, les forces de la JNA qui

25 avaient été engagées dans la guerre, surtout sur les champs de bataille en

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1 Croatie et en Slavonie occidentale, pourraient être redéployées sur le

2 territoire soit de la Bosnie-Herzégovine, soit de la Serbie en empruntant

3 le couloir de Prijedor.

4 A cette époque, les autorités qui avaient été élues à Prijedor

5 avaient constitué une assemblée dont nous avons parlé dans le cadre des

6 élections générales. Nous avons parlé de la composition de cette

7 assemblée, mais il y avait aussi un comité local de Défense nationale.

8 M. Vucicevic (interprétation). - Tout ce que je vous demandais,

9 c'était une question tout à fait simple, je vous ai demandé si vous étiez

10 en mesure de décrire le lieu de l'incident, ce qui nous permettrait de

11 suivre logiquement les événements. Bien sûr on pourrait se demander qui

12 était plus ou moins armé, mais nous voulons savoir qui se trouvait sur les

13 lieux du barrage routier dans la soirée du 22, à Hambarine, au moment de

14 cet incident et des coups de feu.

15 Mme Greve (interprétation). - Je crois que votre question

16 précédente était de savoir comment les Serbes avaient pu se retrouver dans

17 cette situation. C'est ce que j'essayais d'expliquer avec quelques

18 détails, mais je comprends que vous exigiez de moi une réponse concise.

19 Il y avait un barrage routier. L'ordre avait été donné de

20 l'établir par les autorités locales de Prijedor, qui voulaient établir des

21 barrages routiers partout. Ceci avait été prévu avant la prise du pouvoir.

22 Suite à la prise du pouvoir par les Serbes, tous ces barrages routiers

23 n'ont pas été levés immédiatement et, à l'évidence, les gens ressentaient

24 un certain malaise.

25 Ce sont finalement les autorités installées à Sarajevo qui ont

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1 pris la décision qu'il y avait de nouvelles personnes au pouvoir à

2 Prijedor. Il fut exigé qu'un barrage routier soit érigé, conformément aux

3 instructions fournies par les autorités d'alors. C'était un barrage

4 routier ordinaire, tenu par quelques Musulmans, je ne pourrai pas vous

5 dire exactement s'il y en avait quatre ou plus. De trois à cinq, je crois

6 que c'est le chiffre généralement avancé.

7 Quatre ou cinq Serbes se sont dirigés vers ce barrage routier en

8 voiture et, si j'ai bien compris, il s'agissait de personnel militaire

9 armé. Ils furent priés de s'arrêter, c'est ainsi que nous avons pu

10 reconstituer les faits rétrospectivement à partir des déclarations

11 fournies et d'autres sources d'information publiques.

12 Ces militaires serbes furent priés d'arrêter et de remettre

13 leurs armes. Et c'est alors qu'il y eut un échange de coups de feu.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Dans la description que vous

15 avez faite de ce barrage routier, vous avez dit que c'était un barrage

16 tout à fait ordinaire, tenu par quelques Musulmans. Est-ce qu’il y en

17 avait d'autres, est-ce qu'il y avait des barrages routiers plus

18 renforcés ? Je ne vous demande pas d'explication trop longue, mais j'ai

19 pris note de ce

20 qualificatif que vous avez apporté, en disant que ce barrage routier était

21 ordinaire.

22 Mme Greve (interprétation). - Je pense qu'il y a eu pas mal de

23 barrages routiers avant la prise de pouvoir par les Serbes dans la nuit du

24 30 avril, et c'est une question qui avait porté à controverse au sein des

25 conseils locaux de Défense nationale. Et c'est la raison pour laquelle,

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1 les non Serbes ne voulaient pas redéployer des soldats revenant du champ

2 de bataille en Croatie. Ils ne voulaient pas que les armes soient

3 déposées, pardon, ils voulaient que les armes soient déposées, apparemment

4 il y avait encore un ou deux barrages routiers à Hambarine, peut-être y en

5 avait-il davantage ?

6 Certains articles de ce journal que nous avons déjà souvent

7 cités, ont fait référence à ces barrages routiers. Le Kozarac Vjesnik

8 parlait aussi de ces barrages, apparemment il y en aurait eu deux

9 supplémentaires.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Lesquels étaient-ils ?

11 Mme Greve (interprétation). - Puis-je utiliser la carte pour

12 vous les montrer ?

13 M. Vucicevic (interprétation). - Je vous en prie.

14 Mme Greve (interprétation). - Revenons à la région de Kozarac.

15 Il y avait un barrage routier dans la région de Kozarac plus près de

16 Kozaruca, mais vous voyez qu’il y a deux routes qui traversent Kozarac,

17 une route plus ancienne et une route plus nouvelle qui traversent cette

18 ville, vont vers Prijedor et vers l'est, pour traverser plus loin

19 Banja Luka qu'on ne voit pas sur la carte.

20 Mais là, il y avait dans la région principale de Kozarac un

21 barrage routier et l'on a fait état d'un autre barrage routier. Je suppose

22 qu'il était installé sur une route différente, il était plus petit, dans

23 la région de Jakubovic, et vous le voyez ici, là aussi il est installé à

24 un carrefour alors qu'il y a une partie haute et une partie basse de cette

25 ville de Jakupovic.

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1 Donc, c'est à cet endroit, au carrefour que se situait ce

2 barrage routier dont on a parlé. Toutefois...

3 M. Vucicevic (interprétation). - Parlons davantage des barrages

4 routiers, pour revenir à cet autre sujet plus tard. Vous avez dit qu'il y

5 avait un barrage routier qui avait été érigé avant la prise du pouvoir à

6 Prijedor, n’est-ce pas ?

7 Mme Greve (interprétation). - Oui c'est exact, non pas un seul

8 mais quelques uns.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Quelques uns dont ces trois

10 dont vous avez parlé dans votre déposition ?

11 Mme Greve (interprétation). - Je ne peux pas vous affirmer que

12 tous ces barrages routiers...

13 M. Vucicevic (interprétation). - Oui d'accord, vous dites

14 quelques uns. Et ceux-ci avaient été établis sur les ordres, soit des

15 autorités existantes, à savoir les autorités de la municipalité de

16 Prijedor, ou de l'état de Bosnie-Herzégovie.

17 Mme Greve (interprétation). - C'étaient les autorités de

18 Prijedor qui faisaient partie de l’Etat de Bosnie-Herzégovine qui les

19 avaient ordonnés.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Et savez-vous qui était le

21 fonctionnaire de la municipalité qui avait donné l'ordre d'ériger ces

22 barrages routiers ?

23 Mme Greve (interprétation). - Je crois que c'était Osic* qui

24 était le commandant en chef et qui participait aux réunions du Conseil

25 local de la défense nationale, unité qui existait dans toutes les

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1 municipalités. En général, c'étaient des hommes politiques qui siégeaient

2 à ce Conseil local de la défense nationale.

3 Plusieurs hommes politiques sont cités dans mon rapport. Ils

4 participaient à ces conseils locaux. Toutefois, une situation particulière

5 s'est présentée au moment où fut débattue la question des barrages

6 routiers au conseil local. Je m’explique : les Musulmans qui étaient

7 majoritaires ne voulaient pas ces barrages routiers, ils ne voulaient pas

8 que des soldats rentrant du champ de bataille, la plupart de ceux-ci étant

9 serbes, que ces soldats soient redéployés dans la région.

10 Mais, ils reçurent un ordre qu'ils comprirent comme étant un

11 ultimatum, selon lequel ils pouvaient faire une visite guidée de l'un ou

12 l'autre village de Croatie qui se trouvait à proximité de Prijedor, mais

13 du côté croate de la frontière, village qui avait été rayé de la carte.

14 M. Vucicevic (interprétation). - Excusez-moi de vous

15 interrompre, mais c'est peut-être là une logique difficile à suivre parce

16 que le juge Greve a bien sûr rassemblé tous ces renseignements et je ne

17 sais pas s'il est possible de ventiler ceci de façon un peu plus

18 digestible.

19 Je rencontre aussi quelques difficultés. Je me suis aussi déjà

20 souvent retrouvé à Prijedor, j'ai parcouru ces rues, c'est peut-être plus

21 facile pour vous, Madame et Messieurs les juges, de mieux comprendre ce

22 témoignage, car le témoin nous fournit des informations mais il nous

23 manque quelques maillons de ce récit.

24 M. le Président (interprétation). - Effectivement, il serait

25 plus utile d'être plus concis. Je vous demanderai, Madame, de raccourcir

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1 vos réponses, ainsi nous pourrions mieux suivre. Et attachez-vous

2 uniquement aux questions vraiment pertinentes en matière de barrages

3 routiers.

4 M. Vucicevic (interprétation). - Vous dites que le conseil local

5 de la défense nationale dont M. Lasic* avait été membre, avait ordonné

6 l'érection de barrages routiers ?

7 Mme Greve (interprétation). - Oui, pour qu'il y ait

8 redéploiement des forces et établissement de barrages routiers.

9 M. Vucicevic (interprétation). - A l'époque, le Président du

10 Conseil de la défense était Muhamed Cehajic, c'était le maire ?

11 Mme Greve (interprétation). - Effectivement. Quant à savoir s’il

12 faisait partie des conseils locaux de défense nationale, je ne sais pas.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous savez si

14 M. Asij* était Président de Conseil ?

15 Mme Greve (interprétation). - Je ne sais pas, je sais que le

16 colonel Asij*a participé

17 à ces discussions.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Donc d'après les sources que

19 vous avez recueillies, vous avez donc le colonel Asij* dans ce comité.

20 Est-ce que ceci veut dire que c'est lui qui avait donné cet ordre ?

21 Mme Greve (interprétation). - D'après les sources dont je

22 dispose, il y avait contestation d'un côté entre les Serbes et ceux qui

23 s'étaient déclarés Serbes et de l’autre côté ceux qui ne s'étaient pas

24 déclarés Serbes.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Revenons à ces villages que

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1 vous venez de citer. Si vous examinez votre rapport, vous constaterez que

2 l'écrasante majorité de ces villages étaient musulmans. Vous avez dit que

3 c'étaient ces hommes qui tenaient ces barrages routiers, vous avez dit que

4 des Serbes avaient été tués, que les Musulmans avaient tiré sur les

5 Serbes. Vous avez aussi déclaré que Asij était présent à cette réunion, à

6 l'issue de laquelle cet ordre fut donné. Qui a donné l'ordre ?

7 Mme Greve (interprétation). - C'est le conseil qui a donné cet

8 ordre, les gens respectaient cet ordre.

9 M. Vucicevic (interprétation). - C'était donc le gouvernement

10 légitime qui de Bosnie-Herzégovine, qui par le truchement de ces

11 municipalités, a donné l'ordre d'ériger des barrages routiers.

12 S'agissant de ces barrages routiers, même après la prise de

13 pouvoir à Prijedor par les Serbes, ces barrages routiers étaient toujours

14 tenus dans trois régions, essentiellement musulmanes, est-ce exact ?

15 Mme Greve (interprétation). - Oui.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Et même si le 30 avril, les

17 Serbes avaient réussi un coup d’état sans qu'une goutte de sang ne soit

18 versée, avaient constitué un gouvernement de la municipalité et s'étaient

19 rendus, mais ils ne sont pas allés à ces barrages routiers pour attaquer

20 les Musulmans qui les tenaient. C'était toujours les Musulmans qui

21 tenaient ces barrages routiers ?

22 Mme Greve (interprétation). - C'est exact, ils ont pris le

23 pouvoir, d'abord dans la ville de Prijedor.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Et s'agissant des choses les

25 plus graves qu'auraient fait les Serbes au moment de la prise de pouvoir,

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1 ils ont chanté des chants patriotiques, ils ont hissé le drapeau national

2 sur le bâtiment de l'Assemblée municipale, mais ils n'ont pas dégagé les

3 routes qui constituaient un obstacle à leur libre circulation ?

4 Mme Greve (interprétation). - Puis-je vous informer de ce qui

5 s'est passé après la prise de pouvoir par les Serbes ? L'explication qui

6 fut fournie donne l'impression que j'ai limité cette manifestation de

7 nationalisme serbe par le simple fait de chanter des chants patriotiques,

8 mais je crois qu'il faut expliquer dans le détail ce qui s’est passé.

9 M. le Président (interprétation). - Des questions vous sont

10 soumises auxquelles vous devriez être en mesure de répondre.

11 Mme Greve (interprétation). - Si la question qui m'est posée est

12 celle-ci, si elle consiste à savoir s'il n'y a eu que des drapeaux et des

13 chants en guise de manifestation nationaliste, je dirai que non. Il y a eu

14 bien plus que cela.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Revenons à la question des

16 barrages routiers et revenons à Hambarine. Il y a donc eu un affrontement

17 militaire entre des Musulmans civils armés ou entre des membres de l'armée

18 de Bosnie-Herzégovine et d'autres. Est-ce que vous savez si le

19 gouvernement de Bosnie-Herzégovine, établi à Sarajevo, avait mobilisé la

20 Défense territoriale, peu après avoir bénéficié de la reconnaissance

21 internationale ?

22 Mme Greve (interprétation). - Là-aussi, ceci porte à

23 controverse, vous le verrez dans mon rapport. Il y a eu un fax qui a été

24 diffusé à certains médias.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Je sais de quoi vous voulez

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1 parler, vous faites

2 allusion à cet ordre émis le 29 et envoyé au ministère de la police. Je ne

3 parle pas de cela, je vous demande si les unités de la Défense

4 territoriale qui étaient contrôlées par le gouvernement de l'Etat ont été

5 mobilisées par les autorités de l'Etat de Bosnie-Herzégovine, peu après la

6 reconnaissance de l’indépendance de l'Etat de Bosnie-Herzégovine.

7 Mme Greve (interprétation). - Mais ils étaient déjà à l'action

8 auparavant et ils étaient en service d'active.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Etaient-ils en service d'active

10 parce qu'à l'époque il y avait un appareil militaire yougoslave et que

11 celui-ci contrôlait la Défense territoriale ? Qui contrôlait ces unités de

12 la Défense territoriale ? Parce que là, ce sont des faits consacrés, qui

13 ont déjà été établis au cours de ces débats.

14 Mme Greve (interprétation). - Les autorités de

15 Bosnie-Herzégovine contrôlaient les unités locales de la défense

16 territoriale.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Qu'entendez-vous par-là ? Est-

18 ce qu'il y a eu mobilisation, appel au service actif ?

19 Mme Greve (interprétation). - Oui.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Et est-ce que du fait de cet

21 appel à la mobilisation, il continuait à tenir ces barrages routiers ?

22 Mme Greve (interprétation). - Oui, il n'y avait pas eu d'ordre

23 allant dans le sens contraire et il continuait à tenir ces barrages

24 routiers.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Par rapport à ce que nous avons

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1 dit précédemment, puisqu'on a ouvert le feu contre des membres de la JNA à

2 Sarajevo, provoquant la mort de nombreuses victimes, puisque le feu a été

3 ouvert contre des unités qui se retiraient de Tuzla, il y a eu le feu qui

4 était ouvert à Hambarine, vous avez des membres de l'armée de Bosnie-

5 Herzégovine qui ouvrent le feu sur des membres de la JNA, est-ce que ce ne

6 sont pas là des provocations, n'est-ce pas là une conclusion logique qu'on

7 pourrait tirer ?

8 Mme Greve (interprétation). - C'est ce que vous dites.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Par le biais de la pièce

10 précédente, nous avons examiné certains faits, notamment les déclarations

11 faites par le colonel Zeljaja. Apparemment, les unités du gouvernement du

12 Bosnie-Herzégovine ne permettaient pas aux ambulances de franchir ces

13 barrages routiers, alors qu'elles acheminaient les blessés vers les

14 hôpitaux, est-ce là raisonnable ou logique ?

15 M. le Président (interprétation). - Tout ceci est une question

16 d'opinion, de commentaire qu'on peut formuler, que vous pouvez émettre,

17 formuler par le biais de plaidoirie ou d'argument mais ceci ne nous aide

18 pas, car Maître Vucicevic, vous demandez des commentaires du témoin sur ce

19 genre de question, je crois que c'est inutile. Pouvons-nous passer à autre

20 chose ?

21 M. Vucicevic (interprétation). - Puis-je intervenir ?

22 M. le Président (interprétation). - Non, passez à autre chose.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Monsieur le Président,

24 j'aimerais consulter mon coconseil sur cette affaire, un instant je vous

25 prie.

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1 M. le Président (interprétation).- Oui, mais je souhaite que

2 nous avancions.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Très bien.

4 (Me Vucicevic consulte ses coconceils pour l'affaire et ils

5 quittent le prétoire).

6 (Les juges aussi se consultent sur le siège).

7 M. le Président (interprétation). - Maître Vucicevic, vous avez

8 le droit de vous entretenir avec votre coconseil, mais vous n'avez pas le

9 droit de quitter le prétoire. Cela pourrait être regardé, considéré comme

10 un acte peu courtois, et si vous voulez vous entretenir avec votre

11 coconseil, veuillez-le faire dans le prétoire à l'avenir.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Merci, il ne s'agissait pas de

13 manquer de courtoisie mais nous avions mal compris les choses.

14 Madame le professeur, j'aimerais passer maintenant à la pièce 33

15 de l'accusation.

16 J'aimerais que vous vous concentriez sur le dernier paragraphe

17 de la deuxième page, qui porte le chiffre 284.

18 Mme Greve (interprétation). - Vous souhaitez que je vous en

19 donne lecture ?

20 M. Vucicevic (interprétation). - Oui.

21 Mme Greve (interprétation). - "La coopération entre les

22 autorités civiles et le poste de police a été satisfaisante, au cours de

23 la prise de pouvoir, tout le monde a fait ce qu'il avait affaire, après la

24 prise de pouvoir toutefois, la population n'a pas bien compris le vrai

25 rôle de la police, la tentative de transformer la police en un organe de

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1 conseil qui exécuterait des ordres émanant des autorités civiles du

2 conseil a été inacceptable et des malentendus sont apparus. Le personnel a

3 changé entièrement, et ils ont été remplacés par des membres du SDS, quels

4 que soient leur formation et leur savoir-faire. Je crois que c'était

5 préférable que les experts restent là. Il y aura toujours des

6 professionnels dans tout système, et même maintenant que le SDS est au

7 pouvoir, si quelque chose n'avait pas été fait correctement, alors il

8 devrait être remplacé parce qu'ils ont exécuté mes ordres et ceux du chef

9 du poste de police centrale de Banja Luka et du ministère de l'Intérieur".

10 M. Vucicevic (interprétation). - En clair, l'article de

11 Kozarski Vjesnik dit qu'à l'époque, lui-même et le ministre de la police,

12 M. Drljaca, étaient responsable de la police, et il n’a permis à aucun

13 homme politique du SDS de l'influencer ou de le contrôler. C'est exact ?

14 Mme Greve (interprétation). - Il parle des critiques à

15 l'encontre de la police et de certaines activités de la police et il

16 répond que, dans les activités de la police, les ordres émanent de lui et

17 du poste de police centrale de Banja Luka.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Vous êtes en train

19 d'interpréter cette déclaration, je crois que la formulation est claire.

20 Mme Greve (interprétation). - Oui.

21 M. Vucicevic (interprétation). - Page 283, M. Drljaca, décédé

22 depuis, fait une déclaration et il parle de 6000 entretiens d'informations

23 qui se sont tenus dans les centres de rassemblement d'Omarska, Keraterm,

24 et Trnopolje ?

25 Mme Greve (interprétation). - Oui.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Même s'il s'agissait de forces

2 brutales, d'événements brutaux, il s'agissait d'enquête policière d'une

3 certaine manière ?

4 Mme Greve (interprétation). - Oui, en partie, il s'agissait

5 d'enquête de police.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que beaucoup de

7 personnes ont survécu à ces centres de détention de rassemblement, autant

8 que vous le sachiez ?

9 Mme Greve (interprétation). - Il parle d'un groupe de

10 1503 Musulmans et Croates qui ont été emmenés au camp de Manjaca.

11 M. Vucicevic (interprétation). - Mais une déclaration a

12 également été faite et la Croix-Rouge internationale a évacué des

13 personnes, environ 2000 détenus de Trnopolje, à la fin du mois d'octobre,

14 si je ne m'abuse. Est-ce exact ?

15 Mme Greve (interprétation). - C'est exact. Les groupes, si je

16 peux m'exprimer ainsi, enfin certaines personnes ont été emmenées

17 directement d'Omarska à Trnopolje, d'autres avaient été détenues à

18 Trnopolje pendant toute la durée, et certains sont allés à Manjaca de

19 Trnopolje, lorsqu'ils ont été libérés.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous dites que

21 certaines personnes ont été libérées de Manjaca et allées à Trnolpolje ?

22 Mme Greve (interprétation). - Pas pour aller dans ce camp, mais

23 de passage.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Par conséquent, certaines

25 institutions humanitaires internationales acceptaient des réfugiés de

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1 Trnopolje et les rapprochaient de la route au nord-ouest ?

2 Mme Greve (interprétation). - Oui, peut-être parfois.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Il y avait des prisonniers qui

4 allaient d'Omarska à Trnopolje et de Manjaca à Trnopolje ?

5 Mme Greve (interprétation). - Je crois qu'ils allaient peut-être

6 à Karlovac, mais je ne sais pas.

7 M. Vucicevic (interprétation). - Donc, nous ne pouvons pas

8 accepter la déclaration selon laquelle 6000 entretiens d'informations ont

9 été tenus et 1503 uniquement ont été transférés à Manjaca, cela ne

10 signifie pas que 4500 personnes environ ont été tuées, ce n'est pas là ce

11 qu'il faut en déduire de ces chiffres ?

12 Mme Greve (interprétation). - Non, et je crois que je donne plus

13 de détails dans mon rapport, j'essaye de faire le point sur les chiffres

14 entre Omarska et Trnopolje. La majorité ont été déplacés d'Omarska le 5 et

15 le 6 août, 100 à150 ont été déplacés le 22 et 23 août, vers Trnopolje,

16 donc vous avez raison.

17 M. Vucicevic (interprétation). - J'aimerais passer maintenant à

18 la pièce 34.

19 Vous n'avez cité qu'une phrase ou deux peut-être de cet article,

20 vous nous avez donné lecture d'une phrase à la première page, troisième

21 paragraphe, et j'aimerais maintenant que vous nous donniez lecture de tout

22 le paragraphe.

23 Mme Greve (interprétation). - Vous voulez parler du premier

24 paragraphe, sur la première page ?

25 M. Vucicevic (interprétation). - Non, le troisième paragraphe.

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1 Mme Greve (interprétation). - « Il y a deux ans de cela, le

2 peuple serbe a senti qu'une fois de plus, il se voyait confronté au danger

3 des mêmes personnes, qui en 1941, ont commencé le processus

4 d'extermination du peuple serbe et ont formé leur propre partie. Le

5 2 août 1991, dans le district de Prijedor, nous avons constitué le SDS,

6 dit Miskovic. Avant cela, nous avons essayé, de toutes nos forces,

7 d'aboutir à un accord avec les Musulmans et les Croates ».

8 M. le Président (interprétation). - Est-ce que vous pourriez

9 ralentir, je vous prie, pour les interprètes ?

10 Mme Greve (interprétation). - Je m'excuse, Monsieur le

11 Président.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Cela suffira.

13 Comment comprenez-vous cette déclaration : « M. Miskovic dit que

14 le peuple serbe a senti instinctivement que,... » ? Est-ce que vous pensez

15 que cela vient de ce qu'il a entendu de la population lui-même, ou est-ce

16 qu’il prononce là une déclaration politique après l'établissement des

17 camps ?

18 A l'époque, il y avait des détenus dans les centres de détention

19 et ils avaient tous été transférés, et cela n'est pas relié dans le temps.

20 Est-ce que vous pensez qu'il s'agit d'une déclaration ayant une intention,

21 ou est-ce qu’il dit objectivement ce qu'il sent à l’époque ?

22 Mme Greve (interprétation). - Il dit ce qui lui paraît

23 raisonnable et il parle du fait que le peuple a senti instinctivement.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce qu’il exprime là ces

25 sentiments ? Est-ce qu’il exprime son opinion, opinion qui découle du fait

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1 qu'il est représentant du peuple ?

2 Mme Greve (interprétation). - Oui, cela pourrait être le cas.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Parlons maintenant de la

4 pièce 36, qui parle de l'évacuation internationale. Vous avez déposé sur

5 la pièce 36 de l'accusation et vous avez parlé du rapport du CICR du

6 3 octobre 1992. Est-ce qu’il y a quelque chose dans ce rapport qui indique

7 que les Serbes ont perpétré des nettoyages ethniques, lorsqu'on examine le

8 deuxième paragraphe en partant du bas de la page, à la deuxième page du

9 rapport ?

10 Mme Greve (interprétation). - Je vous prie de m'excuser...

11 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'agit de la page 987.

12 Mme Greve (interprétation). - On m'a donné la mauvaise page, je

13 vous prie de m'excuser.

14 M. le Président (interprétation). - Il s'agit de la pièce 39.

15 M. Vucicevic (interprétation). - Je viens de la recevoir.

16 Mme Greve (interprétation). - Est-ce qu’il s'agit de la

17 page 937 ?

18 M. Vucicevic (interprétation). - Oui.

19 Mme Greve (interprétation). - A l'avant-dernier paragraphe, le

20 CICR fait un commentaire d'ordre général sur la manière dont il envisage

21 le fait que, sous couvert d'une politique de nettoyage ethnique, des

22 dizaines de milliers de membres groupes minoritaires -on ne donne pas

23 d'exemple- dans des zones contrôlées par les parties au pluriel -pas

24 d'exemple non plus- sont encore à la merci de mesures de répression qui

25 sont appliquées au plan local, conformément à une idéologie de

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1 discrimination.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Donc ce rapport est neutre ? Il

3 ne rejette la responsabilité, ni sur les Serbes, ni sur les Musulmans, ni

4 sur les Croates, il dit que ces événements se sont produits ?

5 Mme Greve (interprétation). - Le CICR rapporte les événements de

6 cette manière, et ce que j'ai dit hier dans ma déposition, c'est que pour

7 la zone de Prijedor, cela coincide avec la manière dont j'ai décrit les

8 changements intervenus à Prijedor.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Il y avait un autre rapport du

10 CICR que j'aimerais vous soumettre. C'est un rapport du Comité

11 International de la Croix-Rouge, qui émane de Cornelio Somaruvga*, en date

12 du 29 juillet 1993.

13 M. le Président (interprétation). - Il s'agit de la pièce

14 n °12 ?

15 M. Vucicevic (interprétation). - Oui, c'est la pièce n °12. J'ai

16 examiné ce document. A la deuxième page, -la numérotation figure en haut

17 de la page- au quatrième paragraphe de cette page, le paragraphe qui

18 commence par : «Behind, derrière, au-delà de cette situation de cauchemar

19 etc. »...

20 Mme Greve (interprétation). - J'ai bien trouvé le paragraphe.

21 M. Vucicevic (interprétation). - On trouve le terme de

22 « nettoyage ethnique » dans ce paragraphe.

23 Mme Greve (interprétation). - Oui.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce qu’à l'époque, le monde

25 connaissait les centres de détention à Prijedor ? Il s'agit du

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1 29 juillet 1992.

2 Mme Greve (interprétation). - A ma connaissance, des

3 représentants de la communauté internationale en avaient connaissance,

4 mais le public ne l'a pas appris avant le 2 août, au moment où un article

5 de journal a été publié dans un journal américain.

6 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous aviez lu des

7 rapports de la Croix-Rouge Internationale, des déclarations de personnes

8 qui avaient, qui connaissaient de première main la situation ?

9 Mme Greve (interprétation). - Non, je n'ai pas lu de

10 déclarations du CICR. En effet, le CICR avait pour politique de ne pas

11 diffuser de tels rapports. Le CICR publiait des communiqués de presse, des

12 déclarations publiques, mais il ne permettait pas à des personnes de

13 l’extérieur d'avoir accès à ces dossiers. C'était un de leur principe de

14 base en termes de politique. Ils pensaient qu'ils ne pourraient pas

15 s'acquitter de leur travail s'ils partageaient des renseignements, s’ils

16 commençaient à partager des renseignements.

17 M. Vucicevic (interprétation). - Mais si des infractions du

18 droit pénal international étaient commises, j'imagine qu'une organisation,

19 ou toute entité internationale, face à des atrocités à grande échelle,

20 comme cela est allégué pour Prijedor, aurait réagi de la même manière que

21 les personnes qui ont rédigé le rapport. Or, cela est une déclaration

22 neutre, qui ne dit pas si cela est commis, par quel groupe ethnique de

23 Bosnie c'est commis, c'est neutre.

24 M. le Président (interprétation). - Il s'agit là de

25 commentaires.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Je poserai une autre question.

2 M. le Président (interprétation). - Veuillez poursuivre.

3 M. Vucicevic (interprétation). - Page 3 de ce rapport, on parle

4 de Sarajevo et il est dit que des convois du CICR ont fait l'objet

5 d'attaques délibérées et que Frederick Moris* est décédé de ses blessures,

6 ce qui a entraîné l'interruption des opérations d'aide du CICR. Est-ce que

7 vous en connaissez plus sur les circonstances de l'attaque contre

8 M. Moris* et ses blessures ?

9 Mme Greve (interprétation). - Non. J'ai lu ce document et je

10 connais son nom, mais je n'ai pas de renseignements supplémentaires.

11 Toutefois, si je peux me permettre d'ajouter un élément utile,

12 le fait que le CICR ne rende pas publics tous les renseignements qu'il a,

13 le fait que le CICR décide de ne pas rendre ces éléments publics ne

14 signifie pas qu'il n'est pas en train de travailler sur quelque chose ou

15 de réagir à quelque chose.

16 Le CICR est en contact permanent et continu avec toutes les

17 parties au conflit armé, et je suis certaine qu'ils ont demandé d'avoir

18 accès à tous les camps dont ils avaient connaissance avant que des

19 renseignements ne parviennent à l'opinion publique.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Dans le contexte d'une guerre

21 civile, lorsqu'un représentant d'une institution humanitaire est tué,

22 est-ce qu’il ne serait pas adapté, du moins pour une Commission d'experts,

23 que de voir qui a commis cet acte ?

24 Mme Greve (interprétation). - Je crois que toutes les personnes

25 qui ont été tuées dans le conflit en ex-Yougoslavie méritaient que la

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1 Commission d'experts, dans la mesure du possible, examine la situation. Je

2 crois que lorsqu'il s'agit du CICR, il s'agit là d'une institution

3 internationale qui était présente, et qui, elle-même, pouvait s'occuper de

4 cette affaire précise. Etant donné qu'ils ne nous ont pas demandé

5 expressément de les assister en la matière, je pense qu'on n'a pas accordé

6 de priorité à cela, mais, bien entendu, toute vie perdue en

7 Bosnie-Herzégovine était une vie de trop et elle méritait d'être prise en

8 compte.

9 M. Vucicevic (interprétation). - La raison pour laquelle je vous

10 pose cette question, c'est qu'une guerre civile est comme un incendie de

11 forêt, cela commence par des coups de feu, il est difficile de savoir

12 comment les gens ont péri, est-ce que c'est exact ?

13 Mme Greve (interprétation). - Oui, je crois que c'est peut-être

14 exact, je pense qu'on ne peut peut-être pas faire de déclaration aussi

15 générale, je pense que cela dépend.

16 M. Vucicevic (interprétation). - Si un membre d'une organisation

17 internationale est tué dans une guerre civile, il est très important de

18 voir qui en est responsable, et sur qui on peut rejeter la responsabilité.

19 Je voulais vous demander tout simplement si vous avez eu un quelconque

20 intérêt à voir de qui il s'agissait.

21 Mme Greve (interprétation). - J'y ai travaillé d'arrache-pied,

22 j'ai consacré tout mon temps libre pour étudier tous les aspects du

23 conflit de l'ex-Yougoslavie pendant que je travaillais pour la Commission.

24 Mais j'ai essayé essentiellement de me concentrer sur les événements à

25 Prijedor, pour comprendre, de manière générale, la situation plus

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1 globalement.

2 M. Vucicevic (interprétation). - J'ai encore quelques questions,

3 Madame Greve.

4 Dans votre déclaration, page 626, il s'agit de la pièce 10 de

5 l'accusation, paragraphe 56, ainsi qu'à la page 765 dans l'affaire Tadic,

6 vous avez dit, vous avez parlé d'événements historiques qui ont eu des

7 conséquences pour les Serbes dans la zone de Prijedor.

8 Mme Greve (interprétation). - Je vous prie de m'excuser, on

9 vient de me donner ce document.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Je vous prie de m'excuser. Je

11 vous redonne les références, il s'agit de la page 17, en haut de la page

12 de la pièce n°10, il s'agit de votre rapport. Il s'agit du paragraphe 56,

13 ainsi que de la page 765 du transcript de l'affaire Tadic.

14 M. le Président (interprétation). - A quoi fait référence le

15 chiffre 765 dans le transcript ?

16 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'agit de la page 765 du

17 transcript de

18 l'affaire Tadic.

19 M. le Président (interprétation). - Oui, j'y suis.

20 M. Vucicevic (interprétation). - Cela commence à la première

21 ligne et cela se poursuit sur les trois pages suivantes.

22 M. le Président (interprétation). - Oui, très bien.

23 M. Vucicevic (interprétation). - Vous ne devez pas le relire,

24 Madame le Juge Greve. Si vous vous en souvenez ; j'ai quelques questions à

25 vous poser sur les données qui fondent ces déclarations, et, je pense,

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1 Monsieur le Président, que cela a trait à cet interrogatoire.

2 Madame Greve, d'où viennent ces déclarations ?

3 Mme Greve (interprétation). - Pour mes déclarations sur Prijedor

4 uniquement, et pour les renseignements sur Prijedor,...

5 M. Vucicevic (interprétation). - Ce dont je parle ici plus

6 précisément, vous parlez de Chetnik, de Drajgisa Vasic, vous parlez de

7 Goljevic*, vous parlez de Draza Mihajlovic, il s'agit de noms du

8 paragraphe 57.

9 Mme Greve (interprétation). - La citation du paragraphe 57 vient

10 du livre de Noël Malcom* qui a écrit "Bosnie, une brève histoire". Il

11 s'agit d'une citation directe de cet ouvrage.

12 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que M. Malcom* est votre

13 seule source d'information pour toutes ces données historiques, ces

14 chiffres historiques ?

15 Mme Greve (interprétation). - Non, mais la citation précise au

16 paragraphe 57 vient de cette source. J'ai lu des ouvrages généraux sur la

17 Deuxième guerre mondiale, je n'ai pas étudié en profondeur la Deuxième

18 guerre mondiale, cela a semé la confusion dans mon esprit à un moment

19 donné. J'avais des significations très différentes sur le terme de

20 Chetnik, parfois il s'agissait d'un terme digne, honorable et d'autres

21 estimaient que c'était le contraire, j'ai donc essayé qu'il valait la

22 peine de comprendre pourquoi les points de vue divergeaient à tel point

23 sur

24 ce terme de Chetnik.

25 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce que vous avez réussi à

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1 résoudre ces questions qui se posaient à vous là-dessus ?

2 Mme Greve (interprétation). - Résoudre n'est peut-être pas le

3 terme approprié, mais j'ai réussi à voir qu'il y avait de bonnes raisons

4 de faire des remarques élogieuses et positives sur une partie du mouvement

5 des Chetnik et j'ai également compris que d'autres mouvements chetniques

6 ne méritaient pas d'être respectés. J'ai compris que les chiffres étaient

7 en question, et je crois que le rôle du général Draza Mihajlovic prête à

8 controverse. Je sais qu'en 1943, à Jajce, les partisans ont décidé de se

9 séparer de lui, Churchill a fait de même plus tard, les Américains

10 également, et il a été exécuté après la Deuxième guerre mondiale pour ce

11 qu'il avait fait pendant la Deuxième guerre mondiale, mais cela prête à

12 controverse.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Est-ce qu’il y avait un procès

14 du général Mihajlovic ?

15 Mme Greve (interprétation). - Je ne sais pas si c'était une cour

16 martiale ou non, je sais qu'il a été capturé et je sais que cela prête à

17 controverse.

18 M. Vucicevic (interprétation). - Monsieur le Président,

19 j'aimerais présenter les pièces 2 et 3 de la défense, qui parleront des

20 faits qui sous-tendent la déclaration du témoin qui vont les contredire.

21 M. le Président (interprétation). - S'agit-il de faits qui

22 remontent à 40 ou 50 ans ?

23 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'agit des faits sur

24 lesquels le témoin vient de déposer. Le témoin en parle pendant trois

25 pages de sa déposition dans l'affaire Tadic qui font maintenant partie du

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1 dossier d'audience de cette affaire. Nous allons réfuter les déclarations

2 qui fondent l'opinion de ce témoin.

3 M. le Président (interprétation). - Comment est-ce que cela va

4 assister la Cour, Maître Vucicevic ? Peut-être que le témoin a fait ses

5 commentaires, mais en quoi cela va-t-il nous aider à examiner des

6 événements du début des années 90 ? En quoi des événements qui ont eu lieu

7 dans les années 40 peuvent être pertinents dans cette affaire ?

8 M. Vucicevic (interprétation). - Mais nous allons faire le lien

9 lorsque nous procéderons aux interrogatoires.

10 M. le Président (interprétation). - Comment allez-vous faire ce

11 lien ? Quelle en est l'utilité ?

12 M. Vucicevic (interprétation). - Mon assistant, Maître Vann,

13 vient de me dire que cela tient à la crédibilité de l'accusation dans

14 cette affaire, on a parlé du rôle des Chetniks dans l'extermination, on a

15 parlé de Yatce Novac*, on a parlé de Serbes qui ont participé, on essaie

16 de dire les choses, on essaie de généraliser et c'est précisément ce que

17 nous remettons en cause.

18 M. le Président (interprétation). - Je ne vais pas vous empêcher

19 de présenter ce type d'éléments de preuve, car l'accusation a, en quelque

20 sorte, ouvert le feu en présentant ce type d'éléments de preuve. Mais

21 j'aimerais vous dire que pour ce qui est de la Chambre de première

22 instance, nous souhaitons nous conformer à la règle de pertinence et

23 l'appliquer à nous-mêmes. Je vous demanderai donc de traiter la chose très

24 rapidement, et nous n'allons pas accorder énormément d'importance à ce

25 type d'éléments de preuve comme présenté par l'accusation.

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1 M. Vucicevic (interprétation). - Il s'agit de la pièce n°2 et de

2 la pièce n°3 de la défense.

3 Professeur Greve, c'est une copie d'un article de "Time

4 magazine", connaissez-vous ce magazine ?

5 Mme Greve (interprétation). - Oui, comme tout le monde.

6 M. Vucicevic (interprétation). - J'attire votre attention sur la

7 date de publication de cet exemplaire, le 25 mai 1992.

8 M. le Président (interprétation). - Un instant, s'il vous plaît.

9 Interprète. - L'interprète se corrige : 1942, 25 mai 1942.

10 M. le Président (interprétation). - Excusez-moi, veuillez

11 poursuivre.

12 Interprète. - Les interprètes demandent que l'article soit placé

13 sur le rétroprojecteur, si Maître Vucicevic a l'intention d'en donner

14 lecture.

15 M. Vucicevic (interprétation). - L'avez-vous lu ? Si c'est le

16 cas, je souhaiterais vous poser des questions.

17 Mme Greve (interprétation). - Excusez-moi, je regardais

18 l'article, mais je ne l’ai pas lu. Voulez-vous que je le lise avant

19 d'entendre vos questions ?

20 M. Vucicevic (interprétation). - J'attirerai votre attention sur

21 la page 23, dernier paragraphe de cette page.

22 Mme Greve (interprétation). - Oui, dernier paragraphe, « la

23 presse nazie ».

24 M. Vucicevic (interprétation). - Juste à côté de la carte.

25 Mme Greve (interprétation). - Le paragraphe dit la chose

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1 suivante, la presse suivante a révélé que l'armée de Mihajlovic était, je

2 cite, « des rebelles, des juifs, et des communistes, sans aucun doute ce

3 sont des rebelles, sans aucun doute certains d'entre eux sont des juifs,

4 certains sont des communistes marxistes d’une tendance ou d’une autre,

5 beaucoup plus sans doute sont des communistes, des Balkans ce qui veut

6 dire généralement des partisans du pays, de la campagne contre la ville,

7 le paysan contre l'homme d'affaires. Ces gens en général ont des tendances

8 slaves pro-russes, tzaristes ou stalinistes. Les Nations Unies ou plutôt

9 la presse des Nations Unies a souvent fait référence aux forces de

10 Mihajlovic, les qualifiant de Chetnik, le nom de l'instance patriotique

11 serbe qui s'est battue en utilisant la guérilla contre les oppresseurs

12 serbes. Il ne fait aucun doute que nombre d'entre eux sont des Chetniks ou

13 leurs descendants, mais l’armée de Mihajlovic peut être mieux décrite par

14 le qualificatif de force balkane patriotique, regroupant une majorité de

15 Serbes et regroupée autour d'un noyau important de soldats yougoslaves

16 bien entraînés ».

17 M. Vucicevic (interprétation). - Cela suffira, merci. Par

18 conséquent, si nous devons prendre en considération ces articles de presse

19 ou les commentaires formulés par des historiens qui n'étaient pas là

20 lorsque les événements se sont produits, je pense que nous pouvons placer

21 ou nous pouvons accorder une plus grande fiabilité à l'article publié par

22 le Time à l'époque, au paroxysme de la guerre. Et Mihajlovic et ses forces

23 étaient considérés comme étant des combattants alliés, luttant contre les

24 forces nazies, n'est-ce pas ? Peut-on en arriver à cette conclusion

25 d’après cet article ?

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1 Mme Greve (interprétation). - En 1942, oui c’est correct.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Oui. J’aimerais également vous

3 demander pourquoi le Général Mihajlovic a été exécuté et qui s'est chargé

4 de son exécution ? Quel gouvernement, quel pays et pour quelles raisons ?

5 Mme Greve (interprétation). - Je ne peux pas vous donner les

6 circonstances exactes de cette exécution. D'après ce que j'ai compris, les

7 personnes qui ont pris le pouvoir après la fin de la guerre l'ont

8 rapidement exécuté.

9 M. Vucicevic (interprétation). - Très bien. Si je devais vous

10 rappeler qu'il a été exécuté pour avoir collaboré avec les nazis, cela

11 vous rafraîchirait-il la mémoire ?

12 Mme Greve (interprétation). - Oui.

13 M. Vucicevic (interprétation). - Donc, il a été accusé d’être un

14 collaborateur avec les Allemands, n’est-ce pas ?

15 Mme Greve (interprétation). - Oui, je suis d'accord.

16 M. Vucicevic (interprétation). - J'aimerais que vous regardiez

17 maintenant la pièce de la défense 3, intitulée « déclaration de Truman ».

18 Je vous demande de lire cette page et lorsque vous arriverez à

19 l'encadré, je vous demanderai de le lire à haute voix.

20 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit d'une déclaration dans

21 laquelle M. Mihajlovic reçoit une décoration posthume pour le remercier

22 d'avoir sauvé une personne qu'il avait sauvé pendant la guerre. Et il y a

23 la reconnaissance de ses services aux forces alliées.

24 M. Vucicevic (interprétation). - Quel est le titre de

25 l'article ?

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1 Mme Greve (interprétation). - « Déclaration de Truman, la légion

2 du mérite accordée au Général Dragoljo Mihajlovic ».

3 M. Vucicevic (interprétation). - Pour ceux qui ne s'y

4 connaîtraient pas en décorations militaires, il s'agit de la plus haute

5 décoration que l'on peut accorder à une personne étrangère, à un officier

6 étranger, n’est-ce pas ? Je pose cette question à Me Hollis qui s'y

7 connaît sans doute.

8 Mme Hollis (interprétation). - Il faudrait que je fasse des

9 recherches avant de pouvoir vous répondre.

10 M. Vucicevic (interprétation). - Madame Greve, pourriez-vous

11 nous donner lecture rapidement de la déclaration qui fait état de la

12 raison pour laquelle M. Dragoljo Mihajlovic reçoit cette décoration

13 américaine ?

14 Mme Greve (interprétation). - La citation qui précède la

15 déclaration est la suivante : « le Général Dragoljo Mihahlovic s'est

16 distingué de façon remarquable en tant que Commandant en chef des forces

17 armées yougoslaves et ensuite, en tant que ministre de la Guerre, en

18 organisant et en menant des forces de résistance importantes contre

19 l’ennemi qui occupait la Yougoslavie de décembre 1941 à décembre 1944.

20 Grâce à ses efforts soutenus et l’effort soutenu de ses soldats, de

21 nombreux pilotes américains ont été sauvés et ont été ramenés en toute

22 sécurité dans des zones contrôlées par les alliés. Le Général Mihajlovic

23 et ses forces, bien que manquant des approvisionnements nécessaires et

24 bien que combattant dans des circonstances extrêmes, ont contribué de

25 façon très importante à la cause alliée et ont été très utiles pour

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1 arriver à la victoire finale des alliés.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Et je crois qu'il s'agit du

3 29 mars 1948, n’est-ce pas ?

4 Mme Greve (interprétation). - C’est exact.

5 M. Vucicevic (interprétation). - Je n'ai plus de questions,

6 Madame et Messieurs les juges.

7 M. le Président (interprétation). - Maître Hollis, voulez-vous

8 exercer votre droit de réplique ? Je vous pose la question parce que je

9 vois l’heure et je crois qu'il est temps de lever l'audience, mais vous

10 aurez peut-être quelques questions à poser qui occuperont à peine quelques

11 minutes.

12 Mme Hollis (interprétation). - Effectivement, j'ai quelques

13 questions, mais elles sont rares.

14 M. le Président (interprétation). - Fort bien, si ceci prendra

15 cinq minutes, allez-y.

16 Mme Hollis (interprétation). - Je vous remercie.

17 La pièce P 34 peut-elle être remise au témoin ?

18 C'est un article publié à l'occasion du troisième anniversaire

19 du parti.

20 M. le Greffier (interprétation). - Oui.

21 Mme Hollis (interprétation). - Le conseil de la défense a porté

22 votre attention sur ce troisième paragraphe qui commence par les mots

23 suivants :"il y a deux ans, les Serbes, le peuple serbe a ressenti

24 instinctivement", et le texte se poursuit, c'est alors que Me Vucicevic

25 vous a posé une question quant à l'existence de camp, examinez la date à

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1 laquelle a été publié cet article. Quelle est cette date ?

2 Mme Greve (interprétation). - Il s'agit de 1993 ?

3 Mme Hollis (interprétation). - Août 1993 ?

4 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

5 Mme Hollis (interprétation). - Donc deux ans plus tôt, on se

6 retrouvait en

7 août 1991 ?

8 Mme Greve (interprétation). - Oui.

9 Mme Hollis (interprétation). - Est-ce qu'à cette époque, les

10 Serbes avaient déjà pris le pouvoir à Prijedor ?

11 Mme Greve (interprétation). - Non.

12 Mme Hollis (interprétation). - Est-ce qu'il y avait eu ces

13 incidents dont on a parlé à Hambarine, est-ce qu’il y avait déjà des

14 barrages routiers érigés à cette époque-là ?

15 Mme Greve (interprétation). - Non. Toutefois, je m'interroge,

16 est-ce qu'il n'y a pas une erreur qui s’est glissée dans ce texte, en

17 effet, on dit que c'est à l'occasion du troisième anniversaire, alors

18 qu'on se trouve en 1993, et on parle du 2 août 1991, date à laquelle il y

19 avait déjà eu des élections, et les participations du SDS, donc je crois

20 que là il y a une erreur et qu'on devrait parler de 1990.

21 Mme Hollis (interprétation). - Donc 1990 plutôt que 1991 ?

22 Mme Greve (interprétation). - Je crois que c'est exact, en

23 effet on fait état du troisième anniversaire, or ce parti avait participé

24 aux élections qui s'étaient tenues en 1990.

25 Mme Hollis (interprétation). - Donc près de trois ans avant la

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1 prise de pouvoir à Prijedor et les événements qui s'ensuivirent ?

2 M. Vucicevic (interprétation). - Objection, de toute façon, on

3 nous dit qu'il y a deux ans et pas trois. La date importe peu.

4 M. le Président (interprétation). - Je suis d'accord.

5 Mme Hollis (interprétation). - Veuillez examiner la pièce 30 de

6 l'accusation.

7 Au moment du contre-interrogatoire, vous avez entendu la

8 question, concernant le colonel Radmilo Zeljaja. La question vous a été

9 posée de savoir si le colonel avait été commandant de la quarante-

10 troisième brigade motorisée, vous vous souvenez de cette question ?

11 Mme Greve (interprétation). - Oui.

12 Mme Hollis (interprétation). - Examinez la troisième page de ce

13 document. Là, vous voyez un petit texte, une légende de la sagesse ou la

14 sagacité, la sagesse du général Talic. Plus haut, vous voyez le passage

15 qui commence par ces termes :"surtout le colonel Arsic". Le paragraphe

16 commence par les mots :"je répète".

17 Mme Greve (interprétation). - Oui.

18 Mme Hollis (interprétation). - Voyez la deuxième ligne de ce

19 paragraphe, on voit les termes "spécialement le colonel Arsic" ?

20 Mme Greve (interprétation). - Oui.

21 Mme Hollis (interprétation). - Et puis, on vous a demandé quel

22 était le poste occupé par le colonel Arsic ?

23 Mme Greve (interprétation). - A l'époque, il était commandant de

24 brigade et je cite le texte :"j'étais chef d'état-major".

25 Mme Hollis (interprétation). - Pour que tout soit clair, à

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1 plusieurs reprises, le conseil de la défense vous a demandé si vous aviez

2 eu des entretiens avec des Serbes de Republika Srpska ou de Prijedor dans

3 le cadre de la rédaction de votre rapport, après analyse, et vous avez dit

4 que vous n'aviez pas reçu accès à la région. Est-ce que vous avez reçu ou

5 eu l’autorisation de recevoir des documents avec des Serbes dans la

6 région ?

7 Mme Greve (interprétation). - Je n'ai pas de façon précise

8 demandé que me soit accordée une modalité spécifique d'entretien à

9 Prijedor, j’ai demandé à me rendre sur place, et je voulais trouver des

10 personnes avec qui je puisse m'entretenir, mais ceci m'a été interdit.

11 Vous savez qu'il y a certaines familles mixtes composées de personnes qui

12 ont épousé des Serbes et qui ont quitté la région.

13 Mme Hollis (interprétation). - Donc, vos efforts se sont soldés

14 par un échec. Vous n'avez pas réussi à obtenir ces renseignements ?

15 Mme Greve (interprétation). - C'est exact.

16 Mme Hollis (interprétation). - On a parlé d'un certain

17 M. Raskovic, dirigeant du SDS. Des questions vous ont été posées pour

18 savoir si vous connaissiez cet homme. Vous avez dit que vous aviez lu des

19 articles. A partir de ces articles, avez-vous pu déterminer quelles

20 étaient les idées qui étaient les siennes ?

21 Mme Greve (interprétation). - Pour reprendre les termes du

22 conseil de la défense, il avait fait sien certain des termes de parti pris

23 nationaliste.

24 Mme Hollis (interprétation). - Qu'entendez-vous par-là ?

25 Mme Greve (interprétation). - Je dirai qu'en fait il…

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1 Interruption de Me Vucicevic.

2 M. Vucicevic (interprétation). - Là, on fait une citation

3 erronée de mes propos. J'essayais de savoir s'il y avait un bon

4 nationalisme ou un mauvais nationalisme, et puis nous avons abandonné ce

5 type de question. Et nous n'avons pas du tout demandé à ce témoin de

6 donner une qualification de M. Raskovic que je connais fort bien.

7 Mme Hollis (interprétation). - Je crois me souvenir que le

8 conseil de la défense avait demandé au témoin ce qu'elle savait de cet

9 homme. Mais je poursuis. Au cours de l'interruption, j'avais demandé que

10 plusieurs pages de la pièce 1 soient photocopiées, est-ce que ceci a été

11 fait ? Et vous pouvez remettre cet ouvrage, qui est la première pièce de

12 la défense, à celle-ci avec mes remerciements.

13 Madame, la défense vous a montré la pièce de la défense n° 1, et

14 vous avez fait la lecture de la page 283 où il est question de l’avis

15 occidental en ce qui concerne, de l’avis de l'auteur, pardon,...

16 concernant le soutien apporté par l'occident à la Croatie. Vous vous en

17 souvenez ?

18 Mme Greve (interprétation). - Oui.

19 Mme Hollis (interprétation). - Et là, le conseil de la défense

20 vous a posé plusieurs questions pour savoir si certains événements avaient

21 pu pousser les Serbes à entretenir certaines craintes ou inquiétudes à

22 propos de leur avenir ?

23 Mme Greve (interprétation). - Je m'en souviens.

24 Mme Hollis (interprétation). - Et ceci c'était dans le contexte

25 des actions qui avaient été menées au cours de cette période concernée par

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1 votre analyse ?

2 Mme Greve (interprétation). - Je m'en souviens.

3 Mme Hollis (interprétation). - Est-ce qu'on pourrait remettre au

4 témoin la pièce de la défense n° 1 qui avait reçue cette cote aux fins

5 d'identification ?

6 Veuillez lire la page 281 de cet ouvrage.

7 Prenez le texte, après un tiers du texte de cette page, vous

8 voyez une ligne qui commence par :" la Croatie, le gouvernement croate et

9 les Croates" voyez-vous cette ligne ?

10 Mme Greve (interprétation). - Oui.

11 Mme Hollis (interprétation). - Pourriez-vous commencer votre

12 citation à la fin de cette ligne où vous trouvez le terme :"et" ? Est-ce

13 que vous voyez au niveau secondaire ? Est-ce que vous voyez ces termes

14 cités dans le texte ?

15 Mme Greve (interprétation). - Et vous voulez dire après "et en

16 Bosnie-Herzégovine" ? Pourriez-vous faire une lecture silencieuse de ce

17 passage qui se poursuit jusqu'à la dernière ligne ? C'est alors que vous

18 trouvez une phrase qui commence par les termes :"au niveau secondaire",

19 est-ce que vous trouvez ce passage ?

20 (Les interprètes demandent que le texte soit placé sur le

21 rétroprojecteur).

22 Mme Hollis (interprétation). - Est-ce que je peux aider le

23 témoin en surlignant ce passage qui m'intéresse ? On pourra alors

24 remettre, je fais ceci sur la photocopie ce qui permettra à la défense de

25 reprendre son ouvrage. Veuillez examiner la partie que j'ai surlignée. Et

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1 pourriez-vous nous en donner lecture ?

2 Mme Greve (interprétation). - "Au niveau secondaire, le

3 gouvernement serbe encourageait l'idée d'une grande Serbie en aidant les

4 Serbes de Bosnie et de Croatie, et le gouvernement serbe aspirait à une

5 grande Serbie soutenait les…Pardon, et le gouvernement croate aspirait à

6 une grande Croatie et soutenait les Croates de Bosnie."

7 Mme Hollis (interprétation). - Merci. Au cours du contre-

8 interrogatoire, la question vous a été posée de l'avis que vous portiez

9 sur ces sources, étaient-elles fiables ou pas ? Est-ce que vous avez

10 essayé de déterminer la fiabilité, la cohésion ou l'absence de cohésion de

11 toutes ces sources ?

12 Mme Greve (interprétation). - J'ai essayé d'établir une cohésion

13 générale.

14 Mme Hollis (interprétation). - Je n'ai plus de question à poser

15 à ce témoin, je vous remercie.

16 M. le Président (interprétation). - Une partie s'oppose-t-elle

17 à ce que cette personne se retire ? Je pense que ce n'est pas le cas et

18 tout au long du procès, nous partirons du principe que les témoins peuvent

19 se retirer de façon définitive à moins qu'une objection soit formulée par

20 l'une ou l'autre des parties. Merci d'être venue déposer devant nous, vous

21 pouvez vous retirer, Madame.

22 Mme Greve (interprétation). - Je vous remercie

23 Monsieur le Président.

24 M. le Président (interprétation). - Eh bien, l'audience est

25 levée jusqu'à demain matin.

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1 L’audience est levée à 17 heures 25.

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