Page 50
1 Le vendredi 15 septembre 2006
2 [Audience de la Règle 11 bis]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière. Pouvez-
7 vous citer le numéro de l'affaire, je vous prie ?
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il
9 s'agit de l'affaire IT-98-32/1-PT, le Procureur contre Milan Lukic et
10 Sredoje Lukic.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Nous sommes en audience au titre
12 11 bis du Règlement.
13 Madame Sommers, vous avez la parole.
14 Mme SOMERS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis ici
15 en compagnie de mon confrère, M. Aleksandar Kontic, et Mme Carmela Javier,
16 la commise à l'audience, et M. Greg Bodulovic.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
18 Présentation du côté de la Défense.
19 D'abord la Défense de Sredoje Lukic, je vous prie.
20 M. CEPIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis
21 Djuro Cepic, conseil principal de la Défense de Sredoje Lukic. A ma gauche
22 se trouve mon co-conseil, M. Jens Dieckmann, et nous sommes accompagnés de
23 notre assistant juridique, M. Erez Zaionce.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
25 La Défense de M. Milan Lukic.
26 M. YATVIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je défends
27 l'accusé Milan Luckic et je m'appelle Alan Yatvin.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que les représentants
Page 51
1 argentins pourraient se présenter maintenant ?
2 M. GONI : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis
3 l'ambassadeur d'Argentine, au Pays Bas, Santos Goni, et je suis accompagné
4 de Mme Silvia Raiola.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. J'aimerais également qu'un
6 représentant de la Serbie se présente.
7 M. OBRADOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
8 son Excellence. Bonjour, Mesdames et Messieurs. Au nom du gouvernement de
9 la République de Serbie, vous avez devant vous aujourd'hui Sasa Obradovic,
10 premier ambassadeur de la Serbie au Pays Bas, et nous sommes accompagnés de
11 Dusan Knezevic, qui est procureur adjoint chargé des crimes de guerre en
12 République de Serbie.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci bien.
14 Nous allons procéder à une visioconférence avec les représentants de
15 Bosnie-Herzégovine. J'aimerais que ces derniers se présentent.
16 M. POPADIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Nous sommes
17 une délégation de la Bosnie-Herzégovine. A ma gauche est assise, Mme
18 Biljana Potparic, Greffière adjointe des divisions 1 et 2 du tribunal
19 d'Etat de Bosnie-Herzégovine; M. Mirsad Strika, le représentant du bureau
20 du Procureur de la Bosnie-Herzégovine; M. Emir Neradin, et Mme Metjir Blaud
21 [phon], du bureau de Greffe des divisions 1 et 2, de l'Etat de Bosnie-
22 Herzégovine; M. Toby Cadman, du bureau du Procureur de Bosnie-Herzégovine;
23 et moi-même, Miljana Popadic, représentant le ministère de Justice de la
24 Bosnie-Herzégovine.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame Popadic.
26 Monsieur Sredoje Lukic, les parties s'étant désormais présentées. Je
27 vous demande si vous pouvez m'entendre dans une langue que vous comprenez ?
28 L'ACCUSÉ SREDOJE LUKIC : [interprétation] Oui, oui.
Page 52
1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Même question, à votre intention,
2 Monsieur Milan Lukic.
3 L'ACCUSÉ MILAN LUKIC : [interprétation] Oui, oui, je comprends ce qui
4 se dit, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons informé les parties
6 quant à l'ordre du jour de la présente réunion. La Chambre tient à
7 souligner une nouvelle fois que les Juges aimeraient disposer par écrit de
8 tous les arguments des diverses parties présentes. Aucune nécessité de
9 répondre nécessité de répéter oralement ce qui figure noir sur blanc sur le
10 papier.
11 J'aimerais d'abord donner la possibilité à l'Accusation de s'adresser
12 à la Chambre. Quinze minutes est le temps qui lui est imparti, et qu'il
13 devra être strictement respecté.
14 Mme SOMERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 D'abord, pour diverses raisons, j'aimerais m'opposer à l'intervention de la
16 Serbie à ce stade. Car elle n'est pas concernée par les propositions de
17 revoie émanant du bureau du Procureur de ce Tribunal selon prescription
18 imposée par le Règlement de ce Tribunal. Nous savons que la Chambre l'a
19 demandé, mais nous n'avons pas encore pu présenter nos objections
20 officielles, ce que nous faisons maintenant.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Somers, ceci correspond à
22 la jurisprudence qui régit le fonctionnement des Chambres de renvoie.
23 Veuillez poursuivre.
24 Mme SOMERS : [interprétation] Nous nous en tenons fermement à notre
25 avis. L'Accusation n'a pas été invitée à présenter ses commentaires sur les
26 divers aspects de cette affaire, donc, si la Chambre aimerait commencer par
27 entendre notre point de vue, nous aimerions le présenter. Mais l'hésitation
28 que j'exprime vient du fait que la demande ne nous en n'a pas été
Page 53
1 officiellement.
2 Avant tout, nous estimons que la présente affaire est tout à fait
3 propice à un renvoie. Les écritures qui nous ont été présentées ne nous
4 sont néanmoins pas entièrement convaincues pas plus que les réponses faites
5 à nos écritures, en application de votre ordonnance du 30 juin. Avec
6 l'autorisation de la Chambre, nous aimerions pouvoir présenter nos
7 commentaires et arguments et entendre ensuite les réponses qui seront
8 faites.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Somers, pour répondre à
10 votre question et informer les parties, comme il se doit, je dirais que
11 tout le temps qui pourrait être économisé, et je vous indique que vous avez
12 déjà utilisé trois minutes sur les 30 minutes qui vous sont imparties, donc
13 tout le temps que vous n'aurez pas utilisé vous pourrez l'utiliser pour
14 répondre aux arguments d'autres parties. Je vous prie, de ne pas commencer
15 les uns et les autres par dire que vous n'aviez rien à ajouter à mon
16 propos. Car nous passerions directement à la deuxième phase de décompte du
17 temps. En tout état de cause, vous aurez tous la possibilité de répondre
18 aux arguments soulevés par les uns et les autres et le cas échéant y
19 compris par écrit.
20 Mme SOMERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
22 [La Chambre de première instance se concerte]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] À présent, j'aimerais donner la
24 possibilité aux représentants argentins de s'exprimer en abordant les
25 points précis qu'ils souhaitent exposer. Vous le savez sans doute, la
26 Chambre de renvoie à demander à être informée plus avant quant au sens
27 exact de la demande de l'Argentine, c'est la raison pour laquelle vous êtes
28 invités à l'audience d'aujourd'hui.
Page 54
1 M. GONI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie,
3 allumer votre micro, Monsieur ?
4 M. GONI : [interprétation] Est-ce que je peux m'asseoir ?
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
6 M. GONI : [interprétation] Je vais vous donner lecture, en espagnol, du
7 texte qui présente le point de vue du gouvernement de l'Argentine à propos
8 des éléments qui sont présentés à la formation de renvoi aujourd'hui.
9 Conformément aux instructions de la formation de renvoi, dans son
10 ordonnance du 30 juin 2006, le point de vue du gouvernement de l'Argentine
11 --
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excellence, nous n'entendons pas
13 l'interprétation de l'espagnol vers l'anglais. J'aimerais savoir en fait
14 quel est le canal sur lequel nous allons entendre cette interprétation.
15 L'INTERPRÈTE : Il s'agit du canal numéro 4.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, Excellence, je vous
17 inviterai à recommencer et je vous demanderais de ne pas lire trop vite
18 car, sinon, la tâche sera peut-être un peu difficile pour les interprètes.
19 M. GONI : [interprétation] Le texte intégral de mon intervention a
20 été donné à la Greffière, ce qui fait que les interprètes ont eu le texte.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
22 M. GONI : [interprétation]
23 Conformément aux instructions de la formation de renvoi, dans son
24 ordonnance du 30 juin 2006, l'avis du gouvernement argentin est présenté,
25 avis afférent à la décision prise le 10 janvier 2006 par le Tribunal
26 national pénal et correctionnel fédéral numéro 8, décision en vertu de
27 laquelle Lukic a été transféré au Tribunal pénal international pour l'ex-
28 Yougoslavie, et ce, conformément et en prenant en considération l'article
Page 55
1 11 bis, statuant sur le renvoi de l'Accusation vers un autre tribunal,
2 article 11 bis du Règlement des procédures et de preuves.
3 "Il faut indiquer en fait, comme antécédent, et ce afin d'étayer ce
4 qui était décidé par le Tribunal argentin, dans sa décision du 10 janvier
5 2006, et avec le consentement de l'accusé, que nous avons, en fait, fait
6 droit à la demande de transfert présentée par le TPY pour que la personne
7 indiquée soit jugée au siège de ce tribunal. Il a été également indiqué que
8 Lukic n'avait pas le droit d'être renvoyé dans un autre endroit qui ne soit
9 pas autorisé par la décision présente pour être traduit en justice sans
10 l'autorisation de l'État argentin.
11 Ainsi, il a été décidé, en fait, d'octroyer dans les mêmes conditions
12 indiquées ci-dessus au gouvernement de la Serbie et du Montenegro,
13 l'extradition de Milan Lukic, accord qui avait été demandé par le juge du
14 tribunal de première instance de Belgrade, mais la décision, en fait -- il
15 a été décidé que la décision serait différée après, en fait, que le procès
16 ait eu lieu au TPY.
17 A la suite de ceci, le 21 février de cette année, Milan Lukic fut
18 donc remis au TPY afin d'être jugé par le tribunal, dans un premier temps,
19 et postérieurement par les autorités judiciaires de Serbie. Ces
20 circonstances ont fait en fait que nous avons présenté une note verbale au
21 TPY. C'est par le truchement de l'ambassade d'Argentine de La Haye, dans
22 laquelle il avait été exprimé des remerciements pour l'assistance et la
23 coopération octroyée par les autorités argentine en espèce. Par la suite,
24 le TPY a informé, dans une communication, que le Procureur avait indiqué au
25 Tribunal que les conditions permettant en fait de renouveler la procédure
26 conformément à l'article 11 bis étaient remplies.
27 Conformément à cette règle, le Procureur a demandé que l'affaire
28 contre Monsieur Lukic soit renvoyée aux autorités de Bosnie Herzégovine
Page 56
1 pour qu'il puisse être jugé par le tribunal correspondant dans cet Etat, et
2 ce, conformément aux résolution 1534/04 et 1533/03 du Conseil de sécurité
3 des Nations Unies. La formation de renvoi a considéré, dans son ordonnance
4 du 30 juin 2006, que conformément à la procédure, la décision argentine
5 avait été telle que le tribunal devait juger Milan Lukic au siège de
6 tribunal, et ce pour les actes et délits qui sont indiqués dans l'Acte
7 d'accusation officiel prononcé à l'encontre de Milan Lukic ou encore que le
8 tribunal pouvait, conformément aux Statuts du Tribunal à l'article 11 bis
9 et résolution 1534/04 et 1503/03 du Conseil de sécurité à renvoyer Milan
10 Lukic pour qu'il soit jugé par un tribunal national compétent, mais que ce
11 renvoi ne pouvait pas se faire sans l'autorisation préalable de l'État
12 argentin.
13 Par conséquent, le TPY a invité l'ambassade de la République
14 d'Argentine à envoyer son avis à propos des liens établis entre la décision
15 du tribunal argentin et la procédure de renvoi du Tribunal international
16 conformément à l'article 11 bis
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaiterais vous demander de
18 ralentir. Nous savons que lorsqu'on lit, on a tendance à accélérer la
19 cadence et les interprètes vous demande de ralentir un peu. Je
20 souhaiterais, en fait, que vous repreniez par la phrase qui commence par :
21 "C'est la raison pour laquelle"
22 M. GONI : [interprétation] Par conséquent, le TPY a invité
23 l'ambassade de la République argentine à envoyer son avis, eu égard aux
24 liens entre la décision du tribunal argentin et la procédure de renvoi du
25 Tribunal international, et ce, conformément à l'article 11 bis. D'ailleurs,
26 précisément, le TPY a invité le gouvernement argentin à se présenter lors
27 de l'audience prévue pour le 15 septembre et a indiqué si l'État argentin
28 était en mesure de partager le point de vue provisoire mentionné dans le
Page 57
1 paragraphe précédent, à propos en fait de l'effet et de la décision
2 argentine. Il ressort de la lecture de l'ordonnance, rendue par la
3 formation de renvoi du 30 juin, qu'après analyse de la décision argentine,
4 le tribunal, en fait, envisage deux possibilités.
5 La première possibilité étant que la décision établit que Milan Lukic
6 doit être jugé seulement par le Tribunal pénal international pour l'ex-
7 Yougoslavie et, ce faisant, il sera interdit le renvoi de cette affaire à
8 un autre tribunal ou encore, et il s'agit de la deuxième possibilité
9 envisagée, le TPY peut tout à fait exécuter l'article 11 bis en renvoyant
10 cette affaire à un tribunal national compétent en Bosnie Herzégovine, bien
11 que l'autorisation doit préalablement en être demandée à l'État argentin.
12 Il faut souligner, en principe, qu'en vertu de la décision argentine,
13 Lukic a été transféré et remis au TPY pour qu'il soit jugé au TPY et ce
14 pour les crimes et délits indiqués dans l'acte d'accusation officiel. Dans
15 l'ordonnance relatif au transfert et à la remise de cette personne,
16 ordonnance rendue par le tribunal, il n'était absolument pas fait mention
17 de la requête présentée par le Procureur, requête visant le renvoi de cette
18 affaire à un tribunal national compétent, ce qui est prévu par l'article 11
19 bis. Il s'agit donc en d'autres termes du fait que, par son ordonnance, le
20 TPY n'a pas indiqué à la République argentine que cette possibilité en fait
21 était envisagée.
22 Je parle et je fais référence à la possibilité, donc, de renvoi de
23 cette affaire vers un tribunal de Bosnie Herzégovine. Cette possibilité, en
24 fait, a vu le jour après que Lukic a été -- lorsque le tribunal a informé
25 le Procureur du fait que toutes les conditions avaient été respectées, à
26 savoir cette personne, Lukic, était au tribunal. Il a donc été indiqué donc
27 que toutes les conditions avaient été respectées pour pouvoir faire droit à
28 la requête de renvoi. Ainsi, il ne faut pas oublier que lorsque Lukic était
Page 58
1 détenu à Buenos Aires et attendait d'être transféré à La Haye, le
2 gouvernement de Bosnie Herzégovine n'a absolument pas présenté de demande
3 d'extradition officielle. Elle n'a manifesté aucun intérêt à propos de sa
4 détention à des fins d'extradition, qui plus est, et conformément aux
5 informations officieuses de la Section interpole de la police fédérale
6 argentine les autorités de Bosnie-Herzégovine n'ont délivré aucun ordre
7 d'arrêt international à l'encontre de Lukic.
8 Bien au contraire. C'est un intérêt qui fut manifesté par le
9 gouvernement de la Serbie dont l'ambassade a présenté officiellement une
10 demande d'extradition qui fut ensuite par la suite octroyée bien que la
11 remise de cette personne à ce pays a été en fait conditionnée à la fin du
12 procès devant le TPY -- conformément à ce qui vient dit.
13 J'indique aux interprètes qu'il s'agit d'un nouveau paragraphe.
14 Conformément à ce qui vient d'être dit nous pouvons avancer sans aucun
15 doute que l'intention et l'intérêt des autorités argentines ont été de
16 respecter les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies en
17 offrant au TPY la meilleure collaboration pour que ces objectifs soient
18 respectés et pour qu'ils puissent aboutir à ces objectifs.
19 Il a également été reconnu la primauté de la compétence du TPY face à la
20 demande présentée par la Serbie et c'est la raison pour laquelle Lukic fut
21 remis au TPY et que sa remise aux autorités serbes a fait l'objet de
22 condition.
23 Par conséquent, eu égard à l'interprétation à accorder à la décision
24 argentine et sans préjuger du fait que nos autorités n'ont pas été
25 informées de la demande de renvoi de cette affaire vers des tribunaux de
26 Bosnie-Herzégovine présentés par le Procureur. Nous ne souhaitons
27 absolument pas l'amener ou le priver le Tribunal de son droit d'exercer ces
28 possibilités de renvoi surtout si nous prenons en considération le fait que
Page 59
1 ces possibilités sont envisagées par le Règlement de procédure et de preuve
2 et que les autorités de la République argentine ont depuis le début
3 collaboré - donc depuis le début de cette affaire. Au vu de ces éléments,
4 il faut de surcroît mettre en exergue le fait que la procédure de ré
5 extradition est prévue par notre législation interne. La loi 24767 stipule
6 dans son article 18 qu'une personne ayant fait l'objet d'extradition depuis
7 la République argentine ne pourra pas être ré extradé vers un autre Etat
8 sans avoir au préalable obtenu l'autorisation de l'Argentine. A moins que
9 la personne ne fasse l'objet d'extradition, il renonce de façon libre et il
10 précise à cet avantage. La procédure requise pour obtenir cette
11 autorisation est établie par l'article 54 de ladite norme considérant ce
12 qui vient d'être présenté et sans oublier les normes applicables et je
13 pense à la fois aux normes du TPY comme à la législation argentine, sans
14 oublier la décision rendue par la justice argentine, et la volonté
15 renouvelée de collaboration de la République d'Argentine avec le Tribunal
16 le gouvernement de la République argentine indique qu'il souhaiterait que
17 l'affaire Lukic soit traitée par ce Tribunal dans son siège, et ce,
18 conformément à la décision qui fut prise par l'Argentine, et que, sans
19 préjudice de ce qui vient d'être avancé au cas où il serait décidé de
20 renvoyer cette affaire à un tribunal national compétent conformément à
21 l'article 11 bis, il faudra que l'autorisation soit demandée à l'Etat
22 argentin et ce conformément à la procédure établie en ce sens par les
23 normes argentines. Conformément à la dernière clause de l'ordonnance du 30
24 juin qui fut rendue par la formation de renvoi, en d'autres termes, le
25 Tribunal peut tout à fait verser son droit et faire droit à la requête
26 consistant à renvoyer le procès de Milan Lukic devant un tribunal national
27 compétent, mais il ne faudra pas que ce renvoi soit fait sans pour autant
28 que n'ait été demandé l'autorisation préalable à l'Etat argentin.
Page 60
1 Je vous remercie beaucoup.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
3 M. GONI : [interprétation] J'indique aux interprètes que le dernier doit
4 être relié au paragraphe antérieur et que les deux paragraphes en question
5 sont séparés par une virgule.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Merci.
7 J'aimerais maintenant donner la possibilité aux représentants de Bosnie-
8 Herzégovine de s'adresser à la Chambre pour traiter de touts points ne
9 faisant pas l'objet d'écriture.
10 Madame Popadic, vous pouvez prendre la parole.
11 Mme POPADIC : [interprétation] Je tiens à souligner que les autorités de
12 Bosnie-Herzégovine s'en tiennent aux divers arguments qu'elles sont
13 présentées par écrit, ainsi qu'aux réponses qu'elles ont fournies dans le
14 cadre de la présente affaire, ainsi qu'à leurs arguments écrits et oraux
15 présentés devant les institutions de Bosnie-Herzégovine compétentes dans
16 d'autres affaires et qui pourraient être utiles au TPY dans le but de
17 rendre une décision valable.
18 Considérant l'expérience positive vécue dans les diverses requêtes
19 similaires déjà présentées au gouvernement de Bosnie-Herzégovine dans les
20 affaires Stankovic, Jankovic, Meakic, et autres, ainsi que dans des
21 affaires plus récentes dont il est permis de s'attendre à ce que des
22 demandes similaires y soient présentées. Considérant également les diverses
23 activités du Procureur de la République de Bosnie-Herzégovine, qu'il
24 convient de ne pas perdre de vue, nous considérons que la justice de
25 Bosnie-Herzégovine est tout à fait prête à être saisie de la présente
26 affaire. Je tiens à souligner également que le gouvernement de
27 Bosnie-Herzégovine, depuis quelques mois a pris des mesures importantes
28 dans le sens de garantir les moyens financiers nécessaires pour un bon
Page 61
1 fonctionnement du tribunal de Bosnie-Herzégovine dans les années à venir.
2 Par ces mots, je souhaite indiquer que la Bosnie-Herzégovine est absolument
3 et entièrement prête à être saisie de l'affaire Milan et Sredoje Lukic.
4 Etant entendu qu'il importe de ne pas exclure pour notre gouvernement la
5 possibilité d'apporter des réponses à toute question éventuellement posée
6 par le Tribunal pénal international ou d'autres institutions.
7 Je m'engage dans les délais requis par la Chambre à apporter une
8 réponse à toute question éventuellement posée.
9 Je vous remercie.
10 M. Le JUGE ORIE : [Interprétation] Merci beaucoup, Madame Popadic.
11 L'intervention suivante prévue à l'ordre du jour est celle du représentant
12 de Serbie. Monsieur Obradovic, je vous invite à prendre la parole devant
13 cette Chambre.
14 M. OBRADOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
15 je tiens avant tout à vous remercier de nous avoir invité à la présente
16 audience. Ce qui nous donne la possibilité d'exposer notre avis dans cette
17 affaire relative à un éventuel transfert de Milan et Sredoje Lukic devant
18 d'autres instances judiciaires.
19 A cet égard, nous vous prions de prendre en compte l'exposé soumis le
20 4 septembre par M. Rasim Lajic, président du Conseil national chargé de la
21 Coopération avec le TPY ainsi que toutes les initiatives prises dans le but
22 de respecter pleinement les dispositions diverses de l'article 11 bis.
23 Je ne vais pas insister sur la bonne volonté de notre gouvernement
24 ainsi que du Procureur chargé des crimes de guerre dans l'ex-Yougoslavie.
25 Je vais simplement indiquer une nouvelle fois que notre gouvernement tient
26 à ce que la justice prévale. Ce que divers représentants de notre
27 gouvernement ont déjà dit dans d'autres affaires de ce Tribunal. J'aimerais
28 prononcer quelques mots sur d'autres aspects qui seront pris en compte par
Page 62
1 les responsables de la justice de notre pays.
2 Je tiens à indiquer avant tout que M. Knezevic et moi-même, parlerons
3 aujourd'hui des crimes de guerre et de la culpabilité éventuelle des
4 accusés, uniquement en rapport avec la procédure dont nous nous occupons
5 aujourd'hui, ainsi qu'en rapport avec un certain nombre de points de l'acte
6 d'accusation sans la moindre intention de mettre en cause la présomption
7 d'innocence des accusés qui est un droit fondamental dans toute affaire
8 judiciaire.
9 La Chambre est déjà au courant que deux procès ont été intentés à Milan
10 Lukic par le tribunal chargé des crimes de guerre de Belgrade. Les crimes
11 imputés à Milan Lukic par le Procureur du TPY ainsi que les crimes dont
12 l'examen a commencé dans le cadre de l'enquête menée à Belgrade, sont des
13 actes criminels qui correspondent à la même période et aux mêmes
14 territoires.
15 Nous considérons que le tribunal puisse fonctionner de façon efficace
16 et que le concept bien connu ici, de bonne administration de la justice,
17 puisse être respectée. Il importerait que tous les faits imputés et
18 reprochés à Milan Lukic soient jugés par un seul et même tribunal, et en
19 même temps.
20 Ceci, dans l'intérêt de l'accusé, mais également dans l'intérêt des
21 victimes et des témoins. C'est dans l'intérêt de l'efficacité de la
22 justice. Nous constatons avec regret aujourd'hui que ces intérêts n'ont pas
23 été pris en compte par l'Accusation jusqu'à présent. Le même principe
24 impose que le procès de Sredoje Lukic soit mené par le même tribunal que
25 celui qui jugera Milan Lukic. La simultanéité des procès menés par le
26 tribunal chargé des crimes de guerre de Belgrade permettrait de porter plus
27 loin la coopération entre les instances judiciaires de Serbie et de Bosnie-
28 Herzégovine dont le niveau, jusqu'à présent, a été considéré par Mme Del
Page 63
1 Ponte, le Procureur du TPY comme étant le plus haut niveau. Elle l'a dit au
2 Conseil européen chargé d'examiner la coopération des instances judiciaires
3 en Autriche, à Vienne.
4 Ceci va également dans l'intérêt de la justice de Bosnie-Herzégovine qui à
5 en juger par le contenu de son exposé, a à faire face à des difficultés
6 financières importantes.
7 M. Le JUGE ORIE : [Interprétation] Je me permets de vous interrompre
8 en vous priant de bien vouloir ralentir. Comme nous le savons tous, la
9 lecture se fait en général à un rythme plus rapide que la parole puisqu'il
10 n'y a pas nécessité de formuler sa pensée.
11 M. OBRADOVIC : [interprétation] Absolument, Monsieur le Président.
12 Dans la fin de l'exposé de la Bosnie-Herzégovine, nous pouvons à juste
13 titre penser que la justice de Bosnie-Herzégovine n'est pas en mesure de
14 garantir une procédure efficace dans la présente affaire. Nous considérons
15 que le transfert de cette affaire à la Serbie ne nuirait en rien à la
16 décision des tribunaux argentins s'agissant de la situation de l'accusé
17 Milan Lukic.
18 J'aimerais indiquer en quoi consiste l'intérêt du gouvernement serbe qui
19 souhaite que ce procès se déroule dans notre pays. Il est certain que la
20 situation du bureau du Procureur de la République de Serbie chargé des
21 crimes de guerre et son image serait considérablement promue dans une
22 situation telle que celle-ci. Ce qui est dans l'intérêt de notre
23 gouvernement.Par ailleurs, les citoyens ne sauraient être mieux informés eu
24 égard aux crimes de guerre commis dans le cadre des événements de Bosnie-
25 Herzégovine que dans une situation où le procès se déroulerait devant eux,
26 dans leur pays.
27 Jamais un jugement des crimes commis par les Serbes vis-à-vis des
28 représentants d'autres religions et d'autres Etats, ne pourrait être plus
Page 64
1 efficace que si un procès pour crimes de guerre était mené sur le
2 territoire de la Serbie. Je pense que le bureau du Procureur du TPY
3 pourrait prendre ceci en considération. Milan Lukic a été, en son absence,
4 condamné déjà à 20 ans de réclusion et cet élément devra être pris en
5 compte dans la procédure à venir.
6 Le travail mené en commun par le bureau du Procureur du TPY et le
7 Procureur du tribunal de Belgrade chargé des crimes de guerre a toujours
8 été considéré, jusqu'à présent, comme exceptionnel. Ceci pourrait être un
9 exemple pour tous les pays de la région quant à la meilleure façon de mener
10 un procès pour crimes de guerre.
11 La coopération du tribunal de Belgrade avec le TPY est à un niveau
12 très élevé et nous considérons qu'il n'existe aucune raison pour que la
13 Chambre que vous dirigez, Monsieur le Président, ne fasse pas confiance à
14 la justice serbe. Ce qui, jusqu'à présent, n'a pas été encore le cas.
15 Les dispositions respectées par le TPY s'agissant de faire prévaloir
16 certains critères sur d'autres, à savoir le critère de l'endroit où le
17 crime a été commis et des intérêts des victimes et de leurs familles sont
18 importants. Mais, en dépit de cela, ce critère se limite au niveau de
19 l'Etat. Les crimes en question n'ont pas été commis à Sarajevo, pas plus
20 qu'à Belgrade mais dans une région frontalière, la région de Visegrad. Pour
21 quelles raisons dans ces conditions, ce procès devrait-il se dérouler à
22 Sarajevo plutôt qu'à Belgrade ?
23 Le Procureur du TPY a pris une décision inverse de celle qu'il
24 propose de prendre en l'espèce dans l'affaire relative aux crimes commis à
25 Zvornik en Bosnie-Herzégovine. L'affaire en question a été renvoyée en
26 Bosnie-Herzégovine et le procès en question se déroule avec le plus grand
27 succès en ce moment devant les autorités judiciaires compétentes chargées
28 des crimes de guerre à Belgrade.
Page 65
1 Pou l'essentiel, j'indique que nous nous en tenons à nos écritures. Je
2 mettrais simplement l'accent sur le fait que le paragraphe 7 de notre
3 exposé écrit constitue une erreur de manipulation de l'ordinateur sans
4 doute car c'est un passage qui est en rapport avec une autre affaire. Je
5 vous prie de nous excuser pour cette erreur.
6 J'invite instamment le TPY à ne pas tenir compte de ce paragraphe. Mon
7 collègue et moi-même ajouterons quelques mots pour traiter de la
8 possibilité de voir cette affaire jugée en Serbie car nous sommes entrés
9 dans la présente procédure à un stade assez tardif et nous n'avons pas eu
10 la possibilité de répondre à toutes les questions qui nous ont été posées
11 pour le gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Par conséquent, j'aimerais
12 maintenant donner la parole à mon collègue M. Knezevic à cette fin.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Avant de donner la parole à votre
14 collègue, Monsieur Obradovic, je tiens à dire qu'un point me préoccupe
15 quelque peu. En effet, je crains que ces commentaires supplémentaires
16 n'excèdent le temps qui vous a été imparti pour votre intervention
17 conjointe. Je me vois dans l'obligation de vous indiquer que vous ne
18 disposez plus que de cinq minutes.
19 Pourriez-vous respecter ce temps de parole ?
20 M. KNEZEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
21 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, son excellence, chers
22 collègues, Mesdames et Messieurs. Je suis conscient des cinq minutes dont
23 je dispose qui est un temps assez bref. Je m'engage à respecter ce délai
24 pour répondre aux questions qui ont été posées ce qui est mon rôle ici.
25 L'article 11 bis du Règlement de procédure et de preuve dans son paragraphe
26 (A)(iii) prévoit la possibilité de renvoyer une affaire devant des
27 juridictions compétentes et souhaiteuses [phon] d'être saisi de cette
28 affaire après préparatifs opportuns. La loi sur l'organisation et les
Page 66
1 compétences des organes d'Etat dans les poursuites contre les auteurs des
2 crimes de guerre en République de Serbie, loi datant de 2003, a été amendée
3 en 2004 et établit la compétence des instances officielles serbes pour
4 juger de crimes de guerre commis sur le territoire de l'ex-République
5 socialiste fédérative de Yougoslavie.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Knezevic, je me permets de vous
7 interrompre. N'est-il pas exact que dans les écritures échangées il a déjà
8 été stipulé que la Serbie était compétente pour exercer sa compétence et y
9 compris pour mettre en accusation des auteurs présumés de crimes de guerre.
10 Cette compétence ne fait pas l'ombre d'un doute, je vous prie de
11 poursuivre.
12 M. KNEZEVIC : [interprétation] Je comprends bien ce que vous venez de dire,
13 Monsieur le Président. Sans répétition, j'indique que cette loi prévoit la
14 possibilité de juger tous les auteurs présumés de crimes de guerre
15 indépendamment de l'endroit où résident les victimes et les témoins.
16 Le représentant de notre ambassade, Sasa Obradovic, vous a déjà
17 exposé un certain nombre d'arguments. Pour ma part, j'ajouterais simplement
18 que nous pensons avoir primauté pour juger Milan Lukic car c'est notre
19 gouvernement, nos instances officielles qui ont engagé les poursuites
20 contre cet homme, les premières. Je pense que ceci n'a pas encore été dit
21 jusqu'à présent. Nous avons demandé à l'Etat d'Argentine, les premiers, le
22 transfert de Milan Lukic pour pouvoir le juger.
23 Il y a autre chose que j'aimerais dire en indiquant une nouvelle fois qu'en
24 cinq minutes il est difficile de tout dire. Cette question de primauté
25 territoriale évoquée au paragraphe 2, mérite quelques commentaires. Il y
26 est question du territoire de Strpci [phon], qui est une zone très réduite
27 de cinq kilomètres de long à la limite du Monténégro et qui se trouve entre
28 la Serbie et la Bosnie-Herzégovine.
Page 67
1 Il m'appartient de souligner qu'il existe une loi qui protège les
2 participants à des poursuites judiciaires intentées pour crime de guerre.
3 Loi datant de janvier 2006 et plus précisément du 1er janvier 2006. Je crois
4 qu'il est important d'indiquer par conséquent que toute personne accusée de
5 crime de guerre, comme c'est le cas de Sredoje Lukic sur la base de l'acte
6 d'accusation qui a été dressée à son encontre, peut être jugé sans la
7 moindre difficulté sur le territoire de l'Etat de Serbie.
8 J'ajouterais également que les procédures appliquées dans notre pays pour
9 les procès pour crime de guerre s'appliquent de façon égale dans tous les
10 procès. Nous avons souscrit à un accord de coopération avec la Bosnie-
11 Herzégovine, signé par le Procureur du tribunal de Belgrade chargé de
12 poursuivre les crimes de guerre, ainsi que par le tribunal correspondant de
13 Sarajevo. L'affaire de Zvornik a déjà été renvoyée dans notre pays. Tous
14 les témoins de Bosnie-Herzégovine vont à Belgrade sans le moindre obstacle
15 et témoignent sans aucune difficulté ce qui montre bien que cet accord
16 fonctionne de façon satisfaisante.
17 Je peux maintenant répondre à toute question qui me serait éventuellement
18 posée, je vous remercie.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Knezevic.
20 Prochaine exposée prévue à l'ordre du jour, il s'agit de l'exposé de la
21 Défense. Les conseils de la Défense sont invités à se partager le temps
22 dans le respect du délai imparti.
23 La Défense.
24 M. YATVIN : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons pris une
25 décision solennelle et nous nous sommes partagés les temps par moitié.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous également décidé qui
27 s'exprimerait le premier ?
28 M. YATVIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est moi qui
Page 68
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 69
1 m'exprimerai le premier.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous disposez donc de 20 minutes sur un
3 total de 40.
4 M. YATVIN : [interprétation] Je demanderais à la Chambre au préalable de me
5 réserver quelque temps à la fin de la présentation des arguments des uns et
6 des autres car je suppose que les questions seront et j'aimerais y
7 répondre.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sans problème.
9 Veuillez procéder.
10 M. YATVIN : [interprétation] Au moment précis où il semblait que rien de
11 nouveau n'existait dans l'univers régi par l'article 11 bis, voilà, nous
12 sommes ici aujourd'hui. Je suppose qu'il serait bon que je commence par
13 évoquer les arguments de la République d'Argentine présentés par
14 l'ambassadeur de cette même république ici même aujourd'hui.
15 Première question qui se pose, quelles sont les conditions qui nous ont
16 emmenés ici dans ce prétoire aujourd'hui ? L'accusé est incarcéré en
17 Argentine et la République d'Argentine s'est penchée sur la demande du TPY
18 favorable à un transfert de cet accusé, ici même. La République d'Argentine
19 fait partie des Nations Unies. Le Tribunal Pénal International est régi
20 également par les dispositions officielles émanant des Nations Unies, ce
21 qui implique une coopération entre les deux.
22 Le Procureur a demandé à la présente Chambre de prendre une décision qui va
23 au-delà de cela. Elle n'a aucun rapport avec le Conseil de sécurité des
24 Nations Unies et pas plus de rapports avec la décision de la République
25 d'Argentine. Il n'appartient pas au gouvernement de la République
26 d'Argentine d'exercer un contrôle sur les dispositions judiciaires
27 régissant l'extradition.
28 Ce que je déclare c'est que la Chambre de renvoie devant laquelle nous nous
Page 70
1 trouvons doit tenir compte également des intérêts de la Bosnie-Herzégovine
2 qui n'a pas demandé l'extradition de l'accusé en l'espèce. Bien sûr, nous
3 avons entendu qu'une deuxième extradition n'était pas un interdit de la
4 part de l'Etat qui a transféré l'accusé ici. Ce n'est pas parce qu'une
5 disposition dans un livre que cette deuxième extradition ne peut pas avoir
6 eu lieu. Nous invitons la Chambre de renvoi à se pencher sur les conditions
7 très particulières qui régissent notre situation. Le transfert de Milan
8 Lukic devant le TPY a été accepté comte tenu de l'exposé d'un certain
9 nombre de circonstances particulières, mais notre admission de la chose
10 n'implique pas que nous n'insistions pas sur le respect de d'autres
11 dispositions. Bien sûr, l'article 11 bis du Règlement permet un transfert
12 devant d'autres tribunaux, mais ce que nous demandons à la Chambre de
13 renvoi, c'est de poser les intérêts respectifs de la justice, d'une part,
14 du TPY, d'autre part, et des autorités de la République d'Argentine d'autre
15 part. Nous pensons que le renvoi dans ces conditions n'est pas indiqué. Je
16 ressens maintenant le besoin de revenir sur un point qui a été évoqué par
17 la Chambre à l'ouverture de notre audience cet après-midi. Nous avons
18 entendu la représentante de Bosnie Herzégovine affirmer qu'elle maintenait
19 l'avis exprimé jusqu'à présent. Ce n'est pas notre cas. Quels ont été les
20 avis exposés par la Bosnie Herzégovine ? Dans le cadre de la procédure,
21 nous voyons que la Bosnie Herzégovine considère Milan Lukic comme étant
22 l'homme le plus gravement responsable de tous les crimes commis dans la
23 région en question et dans la période en question. Maintenant, nous voyons
24 que la Bosnie Herzégovine ne s'en tient pas au même avis.
25 Est-ce qu'elle s'en tient au même avis que celui exprimé dans
26 l'affaire Popovic lors des propos luminaires ? Non. Ce que veut la Bosnie
27 Herzégovine, semble-t-il aujourd'hui, c'est que ce tribunal, de façon
28 éminemment artificielle, limite l'examen des faits à l'examen de la gravité
Page 71
1 des crimes présumés commis.
2 Or, il est tout à fait manifeste que la présente Chambre de renvoi
3 permet un examen plus nuancé du droit avec admission d'un certain nombre de
4 compromis. Donc, mon argument, c'est qu'il n'est plus logique aujourd'hui,
5 compte tenu du fonctionnement du TPY depuis le début de son action, de
6 considérer qu'une décision, même si elle a été rendue, est irrévocable.
7 Vous l'avez dit vous-même, le Procureur a soumis un certain nombre
8 d'informations à la Chambre, informations qu'il importe de ne pas perdre de
9 vue compte tenu de la gravité des infractions imputées à M. Lukic au cours
10 du conflit. J'indique une nouvelle fois que tous mes propos ne porte que
11 sur des allégations car aucune preuve de responsabilité n'a encore été
12 apportée. Il est très important de tenir compte des mots utilisés à présent
13 le Conseil de sécurité dans ses résolutions où il est fait référence à
14 l'article 11 bis. Ce libellé ne limite pas l'examen nécessaire à l'examen
15 de la gravité du comportement imputé à l'accusé, mais implique d'examiner
16 de très près les compétences respectives des tribunaux nationaux et du TPY.
17 Dans ces conditions, je dirais que même si vous ne prenez en compte
18 que la gravité des charges imputées aux accusés, il importe toutefois que
19 vous vous penchiez de très près sur le rôle joué par Milan Lukic au cours
20 du conflit, et pas seulement sur les accusations retenues contre lui. Ces
21 deux examens étant accompli, vous constaterez que cette affaire n'est pas
22 propice à un renvoi.
23 Je renvoie la Chambre aux arguments déjà exposés par les
24 représentants du gouvernement de Serbie indiquant que, pour des raisons
25 d'économie judiciaire et d'unité de procédures, l'affaire devrait être
26 renvoyée devant un tribunal de Serbie.
27 Je m'arrêterai ici, en fait, car la Chambre peut m'aider à l'aider en
28 me donnant la possibilité de répondre à des questions qui indiqueront quel
Page 72
1 est son intérêt majeur. Je vous remercie.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Yatvin.
3 Monsieur Cepic.
4 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mon confrère, M.
5 Yatvin, a soulevé les différents points que notre équipe de la Défense. M.
6 Dieckmann va présenter les arguments de l'équipe de la Défense, que je
7 représente.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez présenter vos arguments.
9 M. DIECKMANN : [interprétation] Monsieur le Juge, je m'appelle Jens
10 Dieckmann et je représente, dans ces procédures, Sredoje Lukic. Je viens
11 d'Allemagne.
12 Dans la déclaration de la Défense, je souhaite me concentrer sur la
13 question du droit applicable et de l'équité du procès. Je m'en tiens ici
14 aux différentes écritures précédemment présentées, mais j'aimerais parler
15 des questions de procédure dans le détail. Question de jurisprudence et de
16 pratique de ce tribunal et j'aimerais parler de la façon dont ce cadre
17 juridique fonctionne.
18 Nous connaissons bien le cadre juridique et, dans quelles
19 circonstances, la Chambre de renvoi renvoie des affaires. Dans la décision
20 du 11 juillet 2005, la Chambre de renvoi a parlé de la question du droit
21 applicable comme suit :
22 "La Chambre de renvoi insiste sur le fait que ce n'est pas aux
23 autorités compétentes de décider de façon exécutoire dans le cas où ceci
24 est renvoyé devant les tribunaux de Bosnie Herzégovine. Ceci relève de la
25 compétence du gouvernement de Bosnie Herzégovine. Si une telle ordonnance
26 est rendue, la Chambre de renvoi doit être convaincue du fait que si les
27 deux accusés devaient être déférés, un cadre juridique approprié devrait
28 exister."
Page 73
1 La Défense fait valoir le fait que cette Chambre de renvoi doit
2 fonder sa décision sur des faits vérifiables et circonstances vérifiables,
3 tels qu'ils existent en Bosnie. Ils doivent -- être bien préparé ne
4 signifie pas simplement bien connaître le cadre juridique, mais respecter
5 le droit d'un procès équitable et toutes les questions liées aux bonnes
6 pratiques d'un tribunal.
7 La Chambre de renvoi, dans plusieurs décisions, a indiqué qu'elle
8 faisait confiance au tribunal étatique de Bosnie, qu'elle serait capable de
9 faire respecter le droit et un procès équitable.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dieckmann, pour éviter toute
11 confusion, je veux intervenir pendant quelques instants. La situation avec
12 laquelle vous avez commencé votre argument, lorsqu'il s'agit de notre
13 Chambre de renvoi, là, je crois qu'il s'agit de l'application du droit
14 positif. Il ne s'agit pas d'équité ni de droit de procédure. Il me semble
15 que vous avez -- qu'avancer votre exposer sur des questions de droits
16 positifs et que vous avez voulu ensuite enchaîner sur des questions de
17 procédure, sur le droit de la procédure. En ce qui me concerne, je ne sais
18 pas, je pense que mes confrères vont dire quelque chose. Je crois que vous
19 avez mal compris les décisions qui ont été rendues, car le droit de
20 procédure a été évoqué à d'autres reprises dans les décisions que nous
21 avons prises.
22 Veuillez poursuivre.
23 M. DIECKMANN : (interprétation) Merci, Monsieur le Président.
24 La Défense souhaite évoquer ici trois décisions prises par la Chambre
25 des crimes de guerre dans l'État de Bosnie afin de montrer que la Chambre
26 chargée des crimes de guerre n'est pas en mesure de retrouver un droit
27 applicable, conformément aux règles de droit pour obtenir un procédure
28 juste et équitable.
Page 74
1 Nous devons parler d'un manque de compétence dans l'application de
2 règles de base du droit international public, ce qui a des conséquences
3 dramatiques pour l'accusé.
4 La première décision est celle prise le 1er juillet 2005, prise par la
5 chambre chargée des crimes de guerre de l'État de Bosnie, condamnant M.
6 Maktuf à l'emprisonnement. L'appel a été rejeté le 4 avril 1996. Il ne
7 s'agit pas d'un cas de renvoi, il a été déclaré coupable, parce qu'il avait
8 capturé 3 civils croates par l'unité des Mujahedin à Travnik en 1993.
9 La position de l'équipe de la Défense consiste à dire que
10 conformément à l'article 142 du code pénal en ex-Yougoslavie, ce devrait
11 être appliqué. Après l'abolition de la peine de mort, la sanction auquel il
12 est fait référence à l'article 142 du code pénal de l'ex-Yougoslavie, est
13 une sanction peu sévère par rapport à toute peine pénale, tel que cela est
14 indiqué à l'article 173(1) du code pénal de Bosnie, et que c'est un
15 principe juridique qui, dans l'affaire, s'inscrit l'application obligatoire
16 de ce code pénal.
17 La Chambre chargée des crimes de guerre a déclaré qu'un tel argument était
18 sans fondement, qu'il n'y a pas de cas concert en l'espèce que la
19 disposition auquel il est fait référence à l'article 173(1) du code pénal
20 de Bosnie devrait être appliqué. Les arguments pour la Chambre de charger
21 des crimes de guerre sont les suivants :
22 Tout d'abord, pour commencer, l'article 3 du code pénal de Bosnie stipule
23 que le principe de l'égalité est tel que le verdict nécessite que sur un
24 principe qui existait à l'époque, que l'acte incriminé -- ou que la
25 personne ait commis l'acte incriminé, ou a refusé ou manqué à agir. C'est
26 un principe appliqué.
27 A l'article 4 du code pénal de Bosnie, il stipule que le droit en vigueur à
28 l'époque où le crime a été commis par l'auteur du crime, à l'article 4.1,
Page 75
1 que si la loi a été amendée entre-temps, la loi qui est plus souple envers
2 l'accusé doit être appliquée. C'est ce qui figure au code pénal de Bosnie à
3 l'article 4. Il régit l'article 3 et 4.
4 Il ne devrait pas porter préjudice au procès ou à la punition de toute
5 personne pour acte ou omission d'agir à l'époque où il a commis ce crime,
6 que ce crime a été commis et devrait se conformer à l'application du droit
7 international.
8 La Chambre chargée des crimes de guerre estime que l'article 4(A) a adopté
9 toutes les provisions de l'article 7(2) des conventions humaines du droit
10 de l'homme.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez ralentir, s'il vous plaît.
12 M. DIECKMANN [interprétation] C'est le crime qui comporte la violation du
13 droit international.
14 Par conséquent, c'est une conclusion rendue par la Chambre chargée des
15 crimes de guerre. L'article 4(A) s'applique à tous les crimes -- dans tous
16 les cas de crimes de guerre.
17 La deuxième décision rendue par la Chambre chargée des crimes de guerre
18 auquel il faisait référence est celui de Nedzo Samardzic, qui a été
19 condamné à 12 ans de peine d'emprisonnement, conformément à l'article 172,
20 par un jugement rendu le 7 avril 2006. La Chambre chargée de crimes de
21 guerre a répété les quatre arguments déjà précisés, et --
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez résumé, mais la vitesse est
23 encore la même.
24 M. DIECKMANN [interprétation] Désolé.
25 La Chambre chargée des crimes de guerre a dit comme suit, je cite : "En
26 rapport avec ceci, la Chambre indique que les crimes cités à l'acte
27 d'accusation en la période qui nous concerne constituent des crimes de
28 guerre, conformément au droit coutumier de la guerre. Le droit coutumier de
Page 76
1 la guerre fait partie du droit international, comme ceci est indiqué à
2 l'article 4(A) du code pénal de Bosnie."
3 Ensuite, la Chambre chargée des crimes de guerre cite une série
4 d'exemples et des raisons pour lesquels ils ont parlé de ce droit coutumier
5 international. Il cite une liste du rapport du secrétaire des Nations
6 Unies, des commissions de droit international, des différents rapports, des
7 citations de TPIR à Arusha. Il n'y a pas de commentaire, ni explication, ni
8 débat au-dessus.
9 La Chambre chargée des crimes de guerre avance le point de vue
10 suivant : La Cour européenne des droits de l'homme insiste sur le caractère
11 applicable à la disposition de l'article 7(2) dans l'affaire Naletilic
12 contre la Croatie pour faire valoir leur argument.
13 Ces deux décisions citées par la Chambre de -- par la Chambre chargée des
14 crimes de guerre contiennent un certain nombre d'erreurs juridiques, ce
15 qui, par conséquent, exclut le principe de -- dans le cas des crimes de
16 guerre devant un tribunal de Bosnie.
17 L'article 4(A), le code pénal de Bosnie, n'est pas le même et ne correspond
18 pas à l'article 7(2) des conventions des droits de l'homme, conventions
19 européennes.
20 La Chambre chargée des crimes de guerre ignore la différence évidente entre
21 le principe général des crimes de guerre à l'article 4(A) du code pénal de
22 Bosnie, et les principes généraux de droit reconnus par toutes les nations
23 civilisées. Article 7(2) des conventions européennes des droits de l'homme,
24 et les propos de l'article 7(2) sont extraits de l'article 32 de la Cour
25 internationale de Justice, et c'est une opinion juridique incontestée, et
26 au niveau des décisions rendues par les différents tribunaux.
27 Mais le deuxième point est plus grave, à savoir la compréhension de
28 l'article 7(2) des conventions européennes des droits de l'homme est
Page 77
1 erronée.
2 Cet article est une règle subsidiaire, et ne peut être appliqué que lorsque
3 la possibilité s'offre à nous de pouvoir l'appliquer. Par conséquent, ceci
4 vient après l'article 7(2), et c'est l'article 38 ici, en fait, auquel il
5 est référence de la Cour international de Justice, comme on peut lire le
6 commentaire du Statut de la Cour internationale de Justice.
7 Comme on peut lire dans le commentaire du statut de l'appelant de ICJ, je
8 cite : "Oui, les principes ici sont des principes auxquels on se tourne
9 simplement pour combler un fossé lorsque ceci existe dans le droit
10 coutumier ou les traités qui ont été signés, et dans le cas d'un litige
11 particulier. On ne veut pas les invoquer dans d'autres cas. Lorsqu'il
12 s'agit du moment où ces actes ont été commis, ceci ne me peut pas relever
13 du droit national. Ce n'est qu'à ce moment-là que l'article 7 soit
14 applicable."
15 Ici, les crimes allégués sont visiblement couverts par l'article 42 du code
16 pénal de l'ex-Yougoslavie à l'époque où les actes présumés auraient du être
17 commis. Par conséquent, il n'y a pas de fossé juridique, et rien ne permet
18 de justifier l'application de l'article 7(2) de la convention européenne
19 des droits de l'homme. Par conséquent, on ne peut pas justifier du fait que
20 l'on puisse exclure complètement l'article 4(2) du code pénal de Bosnie, et
21 le principe de loi.
22 Par conséquent, à cause de l'article 7(2) de la constitution, article 7,
23 paragraphe 2 de la constitution de Bosnie qui déclare que la convention
24 européenne des droits de l'homme rejette toujours le droit national,
25 contradictoire à article 4(A). Ceci se trouve dans le code pénal de Bosnie
26 et ne permet pas l'exclusion du 4(2) -- l'article 7(2) de la convention
27 européenne des droits de l'homme, exclu le principe ici.
28 Donc, il n'y a pas un -- lorsqu'il n'y a pas un cas de subsidiarité, ce qui
Page 78
1 est le cas ici.
2 La troisième décision que nous voulons invoquer est celle du 23 mai 2006
3 dans l'affaire Panovic, qui a été condamné à 20 ans d'emprisonnement. Cette
4 décision a été rendue six semaines seulement après la décision rendue dans
5 l'affaire Omadovic, et dans ce jugement, la Chambre chargée des crimes de
6 guerre a encore une fois répété le même argument qui est celui de l'article
7 7(3), 7(4) -- 4(A), et celui de la convention européenne des droits de
8 l'homme, également.
9 Mais, à ce moment-là, sans autres explications ou justifications, ou sans
10 autres débats sur la position initiale, la Chambre déclare quelque six
11 semaines plus tard que d'après le 4(A) du droit pénal de Bosnie, on parle
12 des principes généraux du droit international, alors que le droit
13 international ou la convention européenne des droits de l'homme n'utilisent
14 pas le même terme. Donc, il s'agit d'une association ici, une association
15 de ce principe et de ces -- et de droit international, et des principes
16 généraux de droit reconnus par les nations civilisées.
17 Cette position est due, encore une fois -- d'après l'équipe de la
18 Défense, c'est une position erronée, et les principes de droit
19 international ne constituent pas une association ou un mélange de quelque
20 chose. Il s'agit de quelque chose qui s'inscrive dans le droit coutumier
21 international.
22 Nous ne savons pas si la Chambre des crimes de guerre est en train de nous
23 dire que la Bosnie est en train de mettre en place de nouveau texte de
24 droit international qui ne figure pas dans leur droit pénal national. Nous
25 ne comprenons pas cela. Dans la décision suivante, la Chambre chargée des
26 crimes de guerre en juin 2006 répète encore une fois la définition du 7(2)
27 de la convention européenne des droits de l'homme. Encore une fois, il
28 interprète mal cet article. Notre position consiste à dire que le sexe --
Page 79
1 le 7(2) n'est qu'un droit subsidiaire, et c'est une décision rendue par la
2 Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg.
3 Nous souhaitons citer ici la décision la plus importante jamais rendue,
4 celle qui a été rendue le 22 mars 2001 contre Krens, Kursla [phon] et
5 Strelitz, les anciens dirigeants de la République d'Allemagne de l'est.
6 Dans cette décision, la Cour européenne de Strasbourg a déclaré que les
7 crimes ont été jugés par des tribunaux nationaux d'après les codes
8 nationaux en vigueur à l'époque -- quand les crimes ont été commis. Nous ne
9 comprenons pas que comment le gouvernement de Bosnie ni la Chambre chargée
10 des crimes de guerre répètent, à maintes reprises, que l'affaire Naletilic
11 contre la Croatie devrait être renvoyée.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Dieckmann, pardonnez-moi,
13 je souhaite attirer votre attention sur le fait que cela fait maintenant 15
14 minutes que vous avez pris la parole. Je vous demande de bien vouloir
15 conclure.
16 M. DIECKMANN : [interprétation]
17 Monsieur le Président, je crois ou nous pensons que l'un des arguments
18 avancés par la Chambre chargée des crimes de guerre se fonde sur une
19 mauvaise compréhension des règles de base du droit international il se
20 méprenne sur l'interprétation des conventions Européennes des droits de
21 l'homme ce qui a des conséquences -- ce qui a des conséquences suivantes à
22 savoir d'exclure le principe de lex mitior. Cette Chambre fait confiance --
23 ou devrait faire confiance à une Chambre chargée des crimes de guerre
24 lorsque le droit applicable en vertu du respect de la règle de droit fait
25 en sorte qu'il y a un procès équitable qui peut se dérouler. Les décisions
26 de la Chambre ici ont illustré cela mais nous ne pensons pas que ceci soit
27 le cas pour l'accusé que nous défendons qu'il y a un manque de compétence
28 et que ceci provoque beaucoup d'irritation de notre part.
Page 80
1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître
2 Dieckmann.
3 M. CEPIC : [interprétation] Pardonnez-moi. Il y a juste une correction que
4 j'aimerais apporter au compte rendu. A la page 30, ligne 16, mon confrère a
5 parlé de lex mitior et je vois quelque chose de différent ici dans le
6 compte rendu.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Oui. Quelquefois, ne vous
8 inquiétez pas, le compte rendu sera corrigé ce soir, comme nous parlons
9 latin, ce n'est pas toujours facile de saisir cela. La sténotypiste
10 travaille très bien et c'est consigné au compte rendu.
11 M. CEPIC : [aucune interprétation] Je vous remercie.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de donner la parole aux
13 parties pour le temps qui nous reste, je souhaite donner la parole aux
14 Juges de la Chambre, si tant est qu'ils souhaitent poser des questions aux
15 parties et les représentants des différents Etats représentés ici
16 aujourd'hui dans le prétoire.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La question est une question qui m'est
18 venu en raison des questions posées par M. Yatvin. C'est une question que
19 j'adresse à Mme Somers.
20 Il est clair qu'il y a des différences importantes entre l'acte
21 d'accusation modifié du 12 juillet 2001, et l'acte d'accusation
22 actuellement utilisé, le deuxième acte d'accusation qui est celui du 2
23 novembre 2005. L'acte d'accusation, au paragraphe 28, accuse les deux
24 accusés, ainsi que Mitar Vasiljevic, de toutes les formes de
25 responsabilité, conformément à l'article 7(2), et allègue également que les
26 trois accusés ont agi de concert les uns avec les autres pour réaliser les
27 crimes allégués et l'Accusation dans l'affaire Vasiljevic souhaitait
28 attendre ici la participation à une entreprise criminelle commune.
Page 81
1 La Chambre a condamné M. Vasiljevic sur la base de l'entreprise criminelle
2 commune lorsqu'elle a rendu son jugement au mois de novembre 2002, en
3 estimant que sa participation à l'entreprise criminelle commune avec Milan
4 Lukic et Sredoje Lukic. Quoi qu'il en soit, dans l'acte d'accusation que
5 nous avons actuellement, toutes les formes de responsabilité ont été
6 enlevées, à l'exception des actes physiques et le fait d'aider et
7 d'encourager. Les allégations sur les lieux du crime ont été diminuées de
8 façon à nous confiner à une zone géographique plus davantage circonscrite.
9 C'est une modification tout à fait inhabituelle et rare à mon sens. Plutôt
10 que d'ajouter des charges à l'encontre de l'accusé, l'Accusation l'a
11 retirées.
12 Ce qui m'inquiète ici c'est le fait que la requête aux fins de modifier
13 l'acte d'accusation précédent a été déposée le 17 novembre 2005 suite à la
14 demande de renvoi qui a eu lieu le 1er février de l'année dernière, et après
15 la décision rendue dans l'affaire Stankovic au mois de mai.
16 Par conséquent, la question que je vous pose est celle-ci : est-ce que ce
17 que l'objet derrière l'acte d'accusation modifié était -- est de diminuer
18 la responsabilité et les faits incriminés contre ces accusés plus conformes
19 à un renvoi conformément à l'article 11 bis ?
20 Mme SOMERS : [interprétation] Non, pas du tout, tel n'était pas notre
21 objectif. Nous voulions simplement répondre à une requête au 70 et déposée
22 par l'accusé dans l'affaire Sredoje Lukic de façon à donner davantage
23 d'éléments de détail et pour préciser les allégations existantes par
24 rapport à l'acte d'accusation original, nous voulions en fait préciser le
25 moment dans le temps le champ d'application et l'élément temporel de l'acte
26 d'accusation; être plus précis quant au mode de responsabilité allégué et
27 de remplacer les allégations de violence avec les allégations de traitement
28 cruel. Il s'agissait, à ce moment-là, de mettre en place des meilleures
Page 82
1 pratiques en ce qui nous concernait aussi. Je suis sûre que les deux
2 Chambres, la Chambre de renvoi et toute Chambre de première instance
3 constatera qu'un acte d'accusation qui est bien préparé est un outil
4 essentiel si l'on veut essayer de réduire le temps du procès, et cetera.
5 Mais le but n'était certainement pas de se conformer page après page à
6 l'acte d'accusation.
7 Si tel avait été le cas, ceci n'empêcherait pas la Chambre d'examiner
8 l'acte d'accusation sur cet angle-là car les raisons qui nous ont motivé
9 sont cette requête 72 bis à laquelle nous souhaitions répondre. En réalité,
10 si vous regardez les éléments de preuve, quel que soit l'endroit où cette
11 affaire est jugée, cette affaire devrait être jugée, et le procès ne
12 devrait être très long. Nous estimons qu'il était important d'avertir
13 suffisamment à l'avance l'accusé des chefs qui lui étaient reprochés, et
14 d'enlever les événements dans l'intérêt du temps et des éléments présentés,
15 des éléments dont nous ne parlerons pas.
16 Monsieur le Juge, peut-être que telle est notre préoccupation, et nous
17 n'étions pas soucieux qu'il y ait chevauchement dans ce cas. Nous
18 souhaitions simplement présenter correctement notre plaidoirie. Nous
19 souhaitons vous rappeler que -- c'est ce que les Chambres nous demandent
20 souvent.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai quelques questions. Tout
23 d'abord, une question posée par les représentants de Bosnie-Herzégovine. Il
24 a été argué du fait que les accusés dans les rapports récents de l'OSCE
25 dans l'affaire Jankovic et Stankovic qu'il serait bien que la Bosnie-
26 Herzégovine répondre aux critiques qui lui ont été faites : "Il incombe à
27 la Chambre de renvoi de demander des arguments de la Bosnie-Herzégovine sur
28 les préoccupations qui sont celles évoquées par les rapports de l'OSCE dans
Page 83
1 l'affaire Jankovic et Stankovic."
2 Je ne vous demande pas de répondre immédiatement, mais à la lecture
3 des préoccupations par le conseil de Milan Lukic, est-ce que vous pourriez
4 répondre à ces préoccupations et rapidement donner votre réponse à la
5 Chambre ?
6 Mme POPADIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais faire
7 de mon mieux pour fournir une réponse à votre question. Si ma réponse avait
8 été incomplète, je souhaite demander à la Chambre de première instance de
9 fixer un délai, de façon à que nous puissions fournir une réponse par
10 écrit.
11 Si je tiens compte du droit qui s'applique dans le cas de renvoi de
12 champs, de renvoi d'affaires et compte tenu des préoccupations qui sont
13 celles soulevées par le rapport de l'OSCE, je dois dire que les articles
14 2(1) et 1(2) sur le renvoi des affaires indiquent clairement que le
15 principe de base qui s'applique ici est l'application du droit en matière
16 de procédures pénales en Bosnie-Herzégovine dans tous les cas, à moins que
17 le droit portant sur le renvoi des affaires ne précisent que le droit en
18 matière de procédures pénales en Bosnie-Herzégovine ne sera pas appliqué.
19 Néanmoins, dans les deux affaires qui ont été renvoyées devant les
20 tribunaux, Jankovic et Stankovic, les approches ont été différentes en
21 raison de la complexité de la procédure de renvoi, elle-même. Le renvoi des
22 affaires est quelque chose de nouveau et en matière d'application de droit
23 pénal en Bosnie-Herzégovine, et c'était quelque chose auquel nous devions
24 nous attendre. Nous n'avons pas pu tout prévoir à l'avance, un manque de
25 clarté dans l'interprétation du droit lorsqu'il s'agit de tenir compte
26 d'une situation particulière. Dans l'affaire Meakic, nous avons trouvé une
27 solution à cette question-là, le tribunal a adopté une position différente,
28 et avant la décision de renvoi, elle s'est penchée sur les règles de
Page 84
1 détention et les a comparé aux dispositions du droit en matière de
2 procédures pénales en Bosnie-Herzégovine. L'article 2.4 du droit sur le
3 renvoi déclare que la détention devait être régie conformément à la
4 procédure pénale appliquée en Bosnie-Herzégovine.
5 Donc, il est nécessaire que nous ayons les garanties juridiques
6 nécessaires. Ce qui est le cas maintenant. Il peut y avoir des défaillances
7 dans les affaires -- il a pu y avoir des défaillances dans les affaires
8 précédentes, mais ces défaillances, elles ne s'appliquent plus.
9 Certains amendements à l'article 8 du droit sur le renvoi prévoient
10 que la procédure soit accélérée dans le cadre de transfert de dossiers et
11 de documents. Par conséquent, les critiques faites par l'OSCE dans son
12 rapport ont été prises en compte par le gouvernement de Bosnie-Herzégovine.
13 Ce qui signifie que le gouvernement envisage maintenant de procéder à des
14 amendements de la loi.
15 Une décision a été rendue par la Chambre d'appel du TPY dans
16 l'affaire contre Mitar Rasovic et Todovic. Cette décision est datée du 4
17 septembre 2006. A la page 39 de cette décision, la Chambre d'appel a
18 déclaré que, malgré certaines erreurs commises par les Chambres dans des
19 affaires précédentes en matière d'application de dispositions pertinentes,
20 la Chambre de renvoi n'a pas abusé de ses pouvoirs discrétionnaires
21 lorsqu'elle a constaté que le cadre juridique permet de garantir les droits
22 de l'accusé.
23 De surcroît, j'aimerais vous citer un extrait d'une autre décision
24 rendue par la Chambre d'appel du TPY le 4 septembre 2006. Encore une fois,
25 c'était l'affaire contre Rasovic et Todovic.
26 Dans cette décision-là, au paragraphe 124, la Chambre a
27 déclaré : "Que la Chambre de renvoi n'a pas commis d'erreur lorsqu'elle a
28 fait droit à la requête de renvoi en constatant que toutes les exigences
Page 85
1 d'un procès équitable avait été respectées."
2 Si la Chambre n'est pas convaincue par la réponse que nous venons
3 d'apporter maintenant, je souhaiterais vous demander de nous autoriser à
4 vous présenter des écritures à ce sujet. Je vous remercie.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup, Madame Popadic.
6 J'aimerais poser une question à Monsieur l'Ambassadeur Obradovic.
7 Vous avez fait référence à la peine qui a été imposée donc, 20 ans
8 d'emprisonnement in absentia. Alors, est-ce qu'il s'agit, en fait, d'un
9 verdict, en fait, qui pourrait être exécuté ou est-ce que la personne ainsi
10 condamnée devra être traduite à nouveau en justice dès qu'elle arrivera ou
11 lorsqu'elle arrivera en République de Serbie ? Parce que, dans certains
12 systèmes, lorsqu'il y a condamnation ou procès in absentia et lorsqu'il y a
13 jugement rendu in absentia, cela doit être remplacé par un jugement en
14 présence de l'accusé.
15 Donc, quelle est la situation qui prévaut en Serbie ? Mais, je vois,
16 en fait, que vous regardez en direction de Knezevic et je souhaiterais
17 qu'il soit bref lorsqu'il nous apportera sa réponse.
18 M. KNEZEVIC : [interprétation] Je vais vous fournir une réponse
19 brève, Monsieur le Président.
20 Lorsqu'une personne a été condamnée in absentia, dès que les
21 conditions existent pour que cette personne puisse être traduite en justice
22 en sa présence, cette personne est, en nouveau, jugée. Mais tous les
23 éléments de preuve apportés lors du procès précédent sont pris en
24 considération tel que cela est stipulé par la loi relative à la compétence
25 des organes étatiques lors des procès sur les crimes de guerre, et cela,
26 conformément à l'article 18 du droit de procédure pénale de la République
27 de la Serbie, et cela est également en conformité, et je dois dire
28 également que les Règlements de procédure et de preuve du TPY seront pris
Page 86
1 en considération.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur
3 Knezevic.
4 Maître Dieckmann, j'ai deux questions succinctes à vous poser.
5 Premièrement, je dirais que vous avez, en fait, présenté vos arguments sur
6 la base du concept du procès équitable, alors que j'ai cru comprendre que
7 vous insinuez qu'il y avait violation des droits de l'homme. Donc, il ne
8 s'agit pas forcément ou nécessairement du concept du procès équitable
9 puisque vous avez fait référence à la convention européenne des droits de
10 l'homme. En fait, je pense, en fait, que l'article 6 garantit l'équité de
11 la procédure, alors que le principe de l'article 7 n'a pas forcément de
12 liens directs avec la question de l'équité du procès.
13 Alors, est-ce que nous nous comprenons bien ?
14 M. DIECKMANN : Dans un premier temps, en fait, je pense qu'il faut prendre
15 la situation concrète de l'accusé dans une situation de procès et compte
16 tenu du système qui régit cela. Donc, je pense que vous m'avez bien
17 compris.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, en fait, il se peut, en fait,
19 qu'il ait bénéficié d'un procès équitable mais une décision erronée a été
20 prise parce que la décision n'est pas conforme à la convention européenne
21 des droits de l'homme.
22 Puis, j'aimerais, en fait, vous dire que, puisque vous avez insisté sur ce
23 principe, la Formation de renvoi, en fait, à une -- on n'a pas encore
24 statut pour ce qui est du droit à appliquer. Donc, est-ce que cela signifie
25 en fait que les chefs d'inculpation dressés à l'encontre disons de Sredoje
26 Lukic, seraient en fait couverts par d'autres législations, la législation
27 par exemple qui était en vigueur à l'époque. Est-ce que c'est ainsi qu'il
28 faut concevoir la situation ?
Page 87
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 88
1 M. DIECKMANN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, parce que nous
2 pensons que les crimes allégués par M. Sredoje Lukic sont couverts par
3 l'article 142 de l'ancien code pénal de la Yougoslavie.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes, mais est-ce que cela signifie
5 donc que la peine maximale serait plus lourde ou moins importante ?
6 M. DIECKMANN : [interprétation] Nous pensons en fait qu'il y a une
7 différence importante. Si vous avez un code pénal qui vous donne une peine
8 maximale de 20 ans, ou si vous avez un code pénal qui envisage la
9 possibilité d'avoir une peine maximale qui dépasse les 20 ans
10 d'emprisonnement ou qui envisage un emprisonnement à vie.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Dieckmann.
12 M. DIECKMANN : [interprétation] Donc, il faut évaluer, en fait, le
13 degré -- le niveau des sanctions. Donc, bien entendu, vous aurez une
14 sanction plus clémente si vous avez un maxi -- une peine maximale de 20
15 ans.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-il vrai, en fait -- bon, il faut
17 savoir donc, cela ne serait pas appliqué bien entendu. Mais c'est, en fait,
18 la peine de mort qui était la peine maximale prévue par l'article 142.
19 M. DIECKMANN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis, une autre question : Vous avez
21 fourni plusieurs exemples, quelle serait donc la peine qui serait appliquée
22 en plus, plus longue que la peine maximale qui serait donc applicable,
23 conformément au droit que vous pensez -- qui devra être appliqué.
24 M. DIECKMANN : [interprétation] Ici il s'agit d'une question tellement
25 complexe, Monsieur le Président. Bien entendu, nous avons des systèmes
26 juridiques bien différents, mais je pense, en fait, qu'il est difficile de
27 comparer les différents systèmes.
28 Mais je pense, en fait, que si nous opposons l'article 142, si nous
Page 89
1 le faisons valoir, cela sera une peine qui sera moins longue.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, donc, la -- il est facile de
3 répondre à cette question. La réponse est négative, mais vous souhaitiez
4 attirer notre attention sur le fait, ou sur le problème ou le contexte des
5 peines à prendre en considération. Il faut savoir, en fait, que la peine
6 imposée devra être prise en considération, devra être s'inscrire dans cet
7 autre contexte.
8 M. DIECKMANN : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous l'avons compris.
10 M. DIECKMANN : [aucune interprétation]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais poser une question à M.
12 L'ambassadeur de l'Argentine. Vous avez donc présenté votre thèse qui s'est
13 beaucoup appuyée sur les règles de l'extradition, la loi argentine en
14 matière d'extradition. Est-ce que vous considérez qu'un renvoi en Bosnie-
15 Herzégovine, par exemple, ou en Serbie, comme une extradition ou est-ce que
16 vous considérez qu'il ne s'agit pas exactement d'une extradition parce que
17 je suis sûr que vous êtes parfaitement conscient du fait que si l'affaire
18 est renvoyée, le Tribunal ne requiert pas de mandat d'arrêt préalable, ce
19 qui est habituel pour les extraditions, et c'est, en fait, le Tribunal qui
20 supervise en quelque sorte la procédure et qui peut, s'il y a de bonnes
21 raisons pour le faire, reprendre en quelque sorte la procédure.
22 Donc, dans cette mesure, les renvois ne sont pas considérés par la
23 formation de comme l'équivalent d'une extradition, et la formation de
24 renvoi a considéré cela dans ce contexte parce que les Etats sont en toute
25 latitude pour avoir des relations eues égard aux extraditions, ils sont
26 tout à fait libres, bien entendu, de formuler des lois qui régissent des
27 conditions d'extradition, mais il y a un devoir coopération avec le
28 tribunal qui est en quelque sorte inconditionnel.
Page 90
1 Donc, dans quelle mesure est-ce que vous avez pris en considération ces
2 éléments bien précis lorsque vous avez aujourd'hui formulé le point de vue
3 adopté par le gouvernement de l'argentine ?
4 M. GONI : [interprétation] Je comprends tout à fait votre question,
5 Monsieur le Président. Toutefois, j'ai reçu des instructions, et je n'ai
6 absolument pas participé à l'élaboration et la formulation de mes
7 instructions car je suis l'ambassadeur aux Pays-bas, j'ai reçu ces
8 instructions directement depuis la capitale, Buenos Aires et, bien entendu,
9 c'est avec grand plaisir que je prendrais note de votre question et que je
10 la transmettrai aux autorités d'Argentine.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous vous invitons à le faire, Monsieur
12 l'Ambassadeur.
13 M. GONI : [interprétation] Je vous remercie.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. le Juge Kwon a une question brève à
15 poser.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais, en fait, poser une question
17 à propos du point de vue exprimé par le représentant de la Bosnie. Je ne
18 sais pas si c'est Mme Popadic ou M. Strika qui peut -- qui pourra y
19 répondre. Vous aurez remarqué d'après ce qu'a avancé Mme Somers que les --
20 il y a eu modification de l'acte d'accusation contre -- dressée contre nos
21 deux accusés, et qu'il y a eu donc diminution de la responsabilité ainsi
22 que des faits incriminés. Alors, voilà quelle est ma question : j'aimerais
23 savoir si vous envisagez comme possibilité que ces chefs d'inculpation donc
24 qui ont été en quelque sorte minimisés par le Procureur puissent être
25 ajoutés à nouveau à l'acte d'accusation lorsqu'il y aura renvoi.
26 Mme POPADIC : [interprétation] Je vous remercie. Je vais vous expliquer en
27 fait ce qu'indique le droit positif en Bosnie-Herzégovine en la matière.
28 Alors, bien entendu, nous avons donc la loi où le droit relatif à la
Page 91
1 procédure pénale en Bosnie-Herzégovine et en fonction, conformément à ce
2 droit, il y a certaines conditions préalables juridiques qui permettent
3 d'ajouter de nouveaux chefs d'inculpation à un acte d'accusation si de
4 nouveaux renseignements ou relatifs aux faits sont disponibles. Cela,
5 d'ailleurs, peut également être fait après, lorsque la procédure est
6 terminée, il y a une nouvelle procédure qui peut être instaurée pour des
7 actes ou des mesures qui n'ont pas été prises en considération par le
8 procès précédent. Donc, on ne fait pas de limites pour ce qui est de cette
9 possibilité en fonction du droit, et la mise en application, l'application
10 du droit est valable pour les procès présentés aux organes judiciaires
11 nationaux, tout comme aux procès tels que ceux du tribunal.
12 Les autorités de la Bosnie-Herzégovine considèrent qu'en l'espèce la
13 formation de renvoi statuera et rendra une décision en fonction de l'acte
14 d'accusation qui fait l'objet de considération ici et non pas en fonction
15 sur la base de suppositions suivant lesquelles les organes judiciaires
16 pourraient acquérir de nouveaux faits ou de nouveaux éléments de preuve qui
17 permettraient à l'acte d'accusation d'être modifié de nouveaux chefs
18 d'inculpation.
19 Je vous remercie.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les - nous n'avons plus des questions à
23 poser, donc je sais en fait, puisque j'ai veillé au grains, je sais encore
24 combien de temps il vous reste, et peut-être que je vais dans un premier
25 temps donner la parole à Mme Somers. De combien de temps avez-vous besoin ?
26 Prenez votre temps si vous souhaitez répondre ou peaufiner votre réponse à
27 la suite de la question du Juge Kwon. Donc, si vous voulez ajouter quelque
28 chose --
Page 92
1 Mme SOMERS : [interprétation] J'ai été très brève lorsque j'ai répondu à M.
2 Le Juge Kwon et je souhaiterais donc, étoffer cela et dans un premier temps
3 ajouter quelques observations.
4 Premièrement, la Chambre a indiqué que la procédure en vertu de l'article
5 11 bis ne représente pas -- ne constitue pas une procédure d'extradition,
6 et cela a d'ailleurs été affirmé par la Chambre d'appel. Nous aimerions en
7 fait indiquer qu'aucune condition ne peut être opposée à une action -- une
8 mesure, prise par cette Chambre, de la part d'un pays membre qui réagirait,
9 conformément à l'article 29, et je pense aux applications du chapitre 7 qui
10 indique quelles sont les modalités du renvoi. Le pays a une obligation vis-
11 à-vis de ce tribunal, en tant qu'organe du Conseil de sécurité des Nations
12 Unies.
13 Ce qui m'a préoccupé en fait, c'est que, dans le compte rendu d'audience,
14 il n'a pas été consigné le fait qu'il y a eu un échange de correspondances
15 entre le Tribunal et le gouvernement de l'Argentine et peut-être, en fait,
16 que cette correspondance portait sur l'article 11 bis. Alors, j'aimerais
17 indiquer qu'il y a échange de correspondances le 2 décembre 2005, adressé à
18 l'ambassade de l'Argentine à La Haye. Je m'excuse, je voudrais avoir un
19 exemplaire de cette lettre. On a demandé si le Tribunal, en fait, a réagi
20 aux questions posées par le Procureur Carla Del Ponte. Il faut savoir que
21 le 1er décembre 2005, le Procureur a déposé une requête dont la formation de
22 renvoi afin que soit suspendu l'examen de la requête jusqu'à ce que Milan
23 Lukic soit transféré à La Haye. Le bureau du Procureur apprécierait
24 particulièrement le fait que l'ambassade d'Argentine puisse transmettre
25 cette information aux autorités appropriées, et cetera, et cetera.
26 Deuxièmement, correspondance du 16 décembre 2005, toujours destinée à
27 l'ambassade d'Argentine à La Haye.
28 "Le 15 décembre, la formation de renvoi du tribunal international a
Page 93
1 décidé de suspendre l'examen de la requête du Procureur afin que l'affaire
2 puisse être renvoyée en Bosnie Herzégovine, conformément à l'article 11 bis
3 du Règlement et Procédure et de preuve, jusqu'à ce que Milan Lukic soit
4 transféré au siège du tribunal à La Haye.
5 "Puis la décision du 14 décembre 2005 et la décision du 15 décembre
6 2005 sont présentée en annexe."
7 Puis, nous avons également la République de l'Argentine, et je vais
8 lire une traduction, bien entendu, de ce qui a été écrit. Une fois de plus,
9 il est indiqué, en fait, qu'il ne s'agit pas d'extradition. Mais, le
10 gouvernement de l'Argentine reconnaît le fait que nous avons l'article 58
11 qui a un libellé particulièrement véhément, qui aurait pu poser un problème
12 pour ce qui est de l'extradition. Vous avez également les obligations
13 stipulées par l'article 29 du Statut, qui prévaudront contre tout obstacle
14 au transfert de l'accusé ou d'un témoin au tribunal.
15 Vous avez également la référence à l'article 58, que l'on retrouve
16 dans une correspondance, une lettre qui fait partie, en fait, du dossier du
17 Greffe, d'après ce que je crois comprendre, la date du 10 janvier 2006. Des
18 exemplaires pourront très facilement être fournis aux juges, s'ils n'en ont
19 pas. Cela pourra -- si les juges -- si le veut le Greffe, il n'en a pas à
20 sa disposition.
21 Puis, il faut également savoir, et cette situation a son importance :
22 "Par conséquent, il faut se souvenir que l'article 58 du Règlement de
23 procédures et de preuves du Tribunal international stipule que les
24 obligations stipulées par l'article 29 du Statut prévaudront."
25 Il s'agit donc d'une citation de ladite lettre. Alors, pour ce qui
26 est d'imposer ou de limiter les pouvoirs qui sont conférés à ce Tribunal,
27 toute tentative à ce sujet n'aura aucune valeur. En fait, tout pays, qu'il
28 s'agisse de l'Argentine ou du Brésil, tous les pays, en fait, pour ce qui
Page 94
1 est de l'article 29, sont logés à la même enseigne. Tout comme, d'ailleurs
2 toutes les république de l'ex-Yougoslavie. J'entends par cela l'obligation
3 de coopération en cas de transfert d'un accusé ou d'une personne contre
4 laquelle un acte d'accusation a été dressé.
5 Il y a même des dispositions permettant de notifier le conseil de
6 sécurité en cas de manque de coopération. Cela est prévu par notre
7 Règlement.
8 Donc, je voulais tout simplement réitérer le point de vue du
9 Procureur, qui s'en tient aux décisions et aux Statuts et Règlements de ce
10 tribunal et qui se fonde en fait également sur le raisonnement sous-jacent
11 au processus de renvoi.
12 Je vais maintenant aborder les observations de la Serbie. Cette
13 formation de renvoi a été formée par la Chambre d'appel et a utilisé le
14 critère de lien le plus important par opposition à la sélection
15 hiérarchique stricte pour le lieu où l'affaire pourra être jugée après
16 transfert. Il faut savoir en fait que les victimes essentiellement résident
17 en Bosnie Herzégovine. Les crimes ont été commis en Bosnie Herzégovine.
18 Nous avons en fait l'aptitude et le fait que les tribunaux de la Bosnie ont
19 indiqué qu'ils étaient tout à fait disposés à juger cette affaire.
20 La Serbie, du fait d'un lien possible de citoyenneté ne peut pas
21 respecter en l'espèce le critère ou la norme qui a été essentiellement
22 utilisée par la formation de renvoi.
23 Puis, peut-être en contradiction avec ce que mon estimé confrère, Me
24 Yatvin, a indiqué, je dirais que cela est absolument unique pour ce qui est
25 du renvoi.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais est-ce qu'il s'agit
27 peut-être tout simplement d'un nouvel élément que nous n'avons jamais vu
28 auparavant ?
Page 95
1 Mme SOMERS : [interprétation] En terme de renvoi, Monsieur le
2 Président, en fait, je n'avais peut-être pas fait la transition adéquate.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
4 Mme SOMERS : [interprétation] Pour ce qui est, en fait, de la Serbie,
5 et comme je l'ai indiqué au début de cette audience, la Serbie n'a pas été
6 le pays désigné d'office par cette formation de renvoi. Il faut savoir que
7 les arguments qui préconisent ou qui militent en faveur de la Bosnie
8 Herzégovine sont très très importants.
9 Pour ce qui est de l'acte d'accusation, et je ne vais pas réitérer
10 les arguments parce que la formation de renvoi est pertinemment consciente
11 de la situation du camp d'Omarska, qui a été décrit comme une entreprise
12 criminelle connue, et qui en fait nous permet de comprendre les pires
13 atrocités commises sur le continent européens depuis la deuxième guerre
14 mondiale. Il faut en fait savoir que son commandant a été renvoyé en Bosnie
15 Herzégovine pour être traduit en justice dans un tribunal national. En
16 fait, toutes les circonstances convergent vers le renvoi pour ce qui est de
17 la gravité des crimes commis et de la position hiérarchique des accusés.
18 Nous pensons qu'ils devraient être traduits en justice ensemble, dans un
19 tribunal national.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, si j'ajoute le temps que
21 vous avez pris au début et à la fin --
22 Mme SOMERS : [interprétation] Non, je ne peux pas répondre, Maître
23 Dieckmann, mais je pense que la Chambre m'a posé les questions nécessaires.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous en avez terminé ?
25 Mme SOMERS : [interprétation] Oui.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Yatvin, vous avez encore
27 quelque temps à votre crédit.
28 M. YATVIN : [interprétation] Je pense, en fait, que lorsque vous avez
Page 96
1 dit qu'il ne s'agissait pas exactement d'extradition, voilà où réside le
2 problème car, en fait, nous avons eu le transfert vers le tribunal. Il ne
3 s'agit pas d'une extradition, parce que les Nations Unies ont décidé que
4 les nations membres, pour que ce tribunal puisse faire son travail, doivent
5 transférer des personnes au tribunal. Il ne s'agit pas exactement d'une
6 extradition, c'est quelque chose de différent. C'est quelque chose qui
7 appartient à une catégorie légèrement différente.
8 Mais, lorsqu'il y a retransfert du tribunal vers une autre nation --
9 écoutez, si cela a l'apparence d'un canard, que cela ressemble à un canard
10 et que cela marche comme un canard, il faut en conclure qu'il s'agit d'un
11 canard. C'est justement ce que nous avons ici. Nous avons, en fait, ce qui
12 est essentiellement, fondamentalement, une extradition du tribunal vers la
13 nation de Bosnie Herzégovine. Alors, malgré tous les tours de passe-passe
14 auxquels on peut penser, il n'empêche que c'est de cela qu'il s'agit. Le
15 Procureur a fait référence à l'article 58. L'article 58 préconise ou
16 stipule quelles sont les conditions de transfert vers le Tribunal ? Il
17 n'est absolument pas question de transfert du Tribunal vers un autre
18 endroit. La nation souveraine argentine a d'excellentes raisons d'assurer
19 que le mécanisme ne sera pas utilisé comme un passe-droit, comme une ruse,
20 en quelque sorte, pour pouvoir -- et la République d'Argentine veut
21 s'assurer que sa législation soit respectée, que le gouvernement de Bosnie-
22 Herzégovine vienne plaider en Argentine.
23 S'ils veulent avoir M. Lukic, ils n'ont même pas demandé cela, ils
24 dépendent entièrement de la formation de renvoi pour faire leur salle
25 travail.
26 Mme SOMERS : [interprétation] Je n'apprécie absolument pas ce qui a
27 été dit et lorsque ce genre d'interprétation est apportée, je demande à ce
28 que cela soit biffé du compte rendu d'audience, parce que ce n'est
Page 97
1 absolument pas fondé c'est une thèse absolument offensive et cela ne fait
2 pas partie en fait de la pratique retenue dans ce Tribunal.
3 M. YATVIN : [interprétation] En fait, je disais le gouvernement de la
4 Bosnie, et non pas le Procureur. Mais je retirai ce terme. Il ne s'agissait
5 pas d'un terme péjoratif pour autant que je le sache, en tout cas pas dans
6 mon vocabulaire, comme le suppose le Procureur, mais je pourrais peut-être
7 tout simplement dire, que la Bosnie-Herzégovine ne voulait surtout pas
8 manquer de respect à la nation de Bosnie-Herzégovine. Je pense qu'il
9 pourrait -- qu'il serait plus approprié de dire qu'il voulait que l'on
10 fasse le travail de cette nation.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Compte tenu des derniers propos de Me
13 Yatvin, cela sera consigné au compte rendu d'audience. La Chambre a pris ou
14 la formation de renvoi plutôt a pris note de ce que vous avez dit, Maître
15 Yatvin, de ce que vous avez dans un premier temps et ce que vous avez dit
16 après.
17 M. YATVIN : [interprétation] Je vous remercie.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.
19 M. YATVIN : [interprétation] Je ne vais plus m'attarder sur ce sujet,
20 puisque la formation de renvoi s'est exprimée de façon très, très claire.
21 J'ai oublié une chose.
22 Dans son paragraphe 10, et je pense à la première requête de transfert, le
23 Procureur cite la déclaration du Président du Conseil de sécurité et cette
24 formation de renvoi sait ensuite que cela a été repris par l'article 11 bis
25 et par des Résolutions du Conseil de sécurité. Il y a une des catégories de
26 personnes dont il est question et qui ne peut pas être transférés, il
27 s'agit de dirigeants paramilitaires. Je l'ai déjà présenté cela dans ma
28 thèse, mais ce que je voulais dire à propos des dirigeants paramilitaires
Page 98
1 ou des chefs paramilitaires c'est que nous devons supposer qu'il s'agit
2 d'un principe essentiel, nous devons supposer que ces mots avaient un sens
3 et qu'ils avaient une intention.
4 Il n'y a pas d'autres dirigeants paramilitaires présentés depuis que ces
5 remarques ont été faites au Tribunal. M. Lukic est ici. Il se peut qu'il y
6 ait des gens, des policiers ou des politiciens qui avaient des liens, qui
7 avaient forgé des liens avec le paramilitaire, mais d'après ce que j'ai
8 compris de l'acte d'accusation et je sais il y a en plusieurs et ils sont
9 nombreux -- ils sont volumineux - mais il n'y a pas d'autres
10 paramilitaires.
11 Si vous nous dites que M. Lukic n'est qu'un chef paramilitaire, qui était
12 confiné à un certain cadre temporel et à une certaine zone géographique
13 bien précise, même si vous dépendez de l'acte d'accusation ce que je ne
14 pense pas que vous devrez faire, il ne peut pas être considéré pour un
15 transfert parce que justement sa situation correspond exactement à cette
16 définition, et vous ne pouvez pas dire, Bien, il y a d'autres chefs
17 paramilitaires qui seront plus appropriés -- qui devront être traduits en
18 justice devant ce Tribunal parce qu'il n'y a aucun autre d'après ce que je
19 sais qui ont été inculpés.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il a quelqu'un qui est décédé.
21 M. YATVIN : [interprétation] Oui, quelqu'un qui est décédé en 1998, avant
22 que le Président du Conseil de sécurité ne fasse ses remarques, et, par
23 conséquent, avant que le Conseil de sécurité n'adopte les Résolutions de
24 2002/2004.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez quelque chose à ajouter,
26 Maître Yatvin ?
27 M. YATVIN : [interprétation] Non, à moins que les Juges ne souhaitent me
28 poser d'autres questions.
Page 99
1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, je n'ai pas de question à vous
2 poser.
3 De toute façon nous devons maintenant mettre un terme à cette audience ne
4 serait-ce que pour les besoins techniques de la cassette.J'aimerais savoir
5 s'il y a des questions urgentes que vous souhaitez soulever - je m'adresse
6 d'abord à un membre ou à un représentant de la Bosnie-Herzégovine - si vous
7 souhaitez ajouter quoi que ce soit à ce qu'a dit Me Yatvin ? Je pense que
8 je peux vous dire que la structure de l'article 11 bis est tel soit que le
9 Procureur soit l'information de renvoi peut d'elle-même décider d'une
10 procédure de renvoi, et je dirais que de façon implicite ou de façon
11 explicite, et cela n'a jamais été exprimé -- il n'a jamais été exprimé de
12 façon implicite ou de façon explicite qu'il devrait demander à cette
13 formation de renvoi d'être servi de leurs intérêts. Je voulais que cela
14 soit indiqué de façon très, très claire.
15 J'aimerais savoir, Madame Popadic, si vous souhaitez ajouter quoi que ce
16 soit aux différentes questions qui ont déjà été soulevées ?
17 Mme POPADIC : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges. Je
18 n'ai effectivement rien à ajouter, si ce n'est que je souhaite dire, compte
19 tenu de tout ce qui a été indiqué ici, que ni en l'espèce ni dans d'autre
20 cas il y a un seul argument qui indiquerait que les critères n'ont pas été
21 respectés ou les conditions n'ont pas été respectées par la Bosnie-
22 Herzégovine -- et que la Bosnie-Herzégovine ne respectera pas ces critères
23 au cas où la présente affaire venait dans les tribunaux de la Bosnie-
24 Herzégovine.
25 Merci.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame Popadic.
27 Je demanderais maintenant à vous-même, Monsieur l'Ambassadeur de la
28 République d'Argentine, ou à la personne qui vous accompagne si vous avez
Page 100
1 quelque chose à ajouter. Je tiens au préalable à vous rappeler qu'il ne
2 reste que deux ou trois minutes sur la cassette qui enregistre nos débats.
3 Si vous avez quelque chose d'urgent à ajouter vous pouvez le faire, je vous
4 en donne la possibilité. Si vous avez quelque chose de plus long à dire il
5 serait préférable que vous le fassiez par écrit, je vous en donne
6 officiellement la possibilité.
7 M. GONI : [interprétation] Monsieur le Président, je suis sûr que c'est
8 toujours le cas mais en tout état de cause je tiens à vous informer qu'une
9 traduction très soignée et précise des propos que j'ai tenus ici peut être
10 mise à la disposition du TPY par l'ambassade d'Argentine.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette traduction sera déposée
12 officiellement dans la présente affaire.
13 Monsieur Obradovic, c'est à vous.
14 M. OBRADOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais
15 finalement ajouter que la République de Serbie est tout à fait prête à
16 soumettre des écritures sur toutes questions relatives au renvoi de la
17 présente affaire dans notre pays au cas où la Chambre de renvoi
18 l'estimerait nécessaire. Merci de votre attention.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous avons besoin de telles
20 écritures, nous vous le ferons savoir.
21 Madame Somers.
22 Mme SOMERS : [interprétation] Monsieur le Président, une petite réponse à
23 ce qu'a dit Me Yatvin à savoir que le descriptif de cette affaire ne
24 correspond pas aux termes généraux figurant dans les Résolutions du Conseil
25 de sécurité s'agissant de déterminer les priorités judiciaires. En fait, la
26 Chambre a examiné tous les critères nécessaires, et notamment la teneur de
27 l'acte d'accusation, la gravité des charges retenues contre les accusés,
28 les questions de liens hiérarchiques entre les accusés et des
Page 101
1 responsabilités hiérarchiques et les conditions dans lesquelles les
2 Tribunaux nationaux pourraient juger de ces affaires. Jankovic était un
3 dirigeant important. Le fait d'être supérieur hiérarchique n'est donc pas
4 le seul facteur déterminant.
5 Deuxièmement, s'agissant des Résolutions du Conseil de sécurité elles
6 sont discutées par le TPY de façon générale, dans le cadre de la nécessité
7 d'appliquer les dispositions prévues, mais s'agissant de la juridiction de
8 renvoi le Président du Tribunal demande que les mesures nécessaires soient
9 appliquées, ce qui implique, entre autres, de tenir compte des Règlements
10 mis en place.
11 Quelqu'un peut se trouver n'importe où dans le monde et être amené
12 devant le TPIY. Cela est possible grâce à l'article 29 du Règlement, et il
13 n'y a pas de limite aux dispositions possibles une fois que ces personnes
14 soient ici.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame Somers.
16 D'autres arguments, Monsieur Cepic ?
17 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, oui. Permettez-moi
18 d'ajouter simplement une correction. Il y a deux procès intentés à Milan
19 Lukic dans -- par la justice serbe.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
21 M. CEPIC : [interprétation] Le premier a été évoqué, le deuxième est
22 l'affaire relative à Strpci, tous deux jugés par la Chambre spéciale
23 chargée des crimes de guerre après enquête lancée sur l'initiative de cette
24 Chambre. M. Knezevic peut vous en dire plus, si vous le souhaitez, sur ce
25 point, dans le cadre des limites de temps impartis.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une autre affaire.
27 M. CEPIC : [interprétation] Me Yatvin m'en a parlé.
28 M. YATVIN : [interprétation] Je disais simplement que l'Etat de Bosnie ne
Page 102
1 s'appuie pas sur cet affaire comme le fait éventuellement la Serbie et
2 l'Argentine.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, Maître Yatvin, vous pouvez
4 l'indiquer dans vos écritures et appeler notre attention sur ce point, si
5 vous le jugez utile.
6 M. YATVIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Messieurs Lukic, cette audience était
8 assez particulière. J'espère que vous avez tous compris -- assez juridique
9 en tout cas.
10 La Chambre lève l'audience.
11 --- L'audience de la Règle 11 bis est levée à 16 heures 22.
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28