LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Patrick Robinson, Président
M. le Juge O-Gon Kwon
M. le Juge Iain Bonomy

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
18 octobre 2005

LE PROCUREUR

c/

MILAN MILUTINOVIC
NIKOLA SAINOVIC
DRAGOLJUB OJDANIC
NEBOJSA PAVKOVIC
VLADIMIR LAZAREVIC
VLASTIMIR DJORDJEVIC
SRETEN LUKIC

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DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE URGENTE DE L’ACCUSATION AUX FINS DE SURSEOIR À STATUER SUR L’EXCEPTION PRÉJUDICIELLE D’INCOMPÉTENCE SOULEVÉE PAR DRAGOLJUB OJDANIC OU, À DÉFAUT, DE REPORTER LA DATE LIMITE DE DÉPÔT D’UNE RÉPONSE

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Le Bureau du Procureur :

M. Thomas Hannis
Mme Christina Moeller
Mme Carolyn Edgerton

Les Conseils de l’Accusé :

MM. Eugine O’Sullivan et Slobodan Zecevic pour Milan Milutinovic
MM. Tomislav Visnjic et Peter Robinson pour Dragoljub Ojdanic
MM. Toma Fila et Vladimir Petrovic pour Nikola Sainovic
MM. John Ackerman et Aleksander Aleksic pour Nebojsa Pavkovic
M. Mihaljo Bakrac pour Vladimir Lazarevic
M. Theodore Scudder pour Sreten Lukic

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal international »),

VU la requête urgente de l’Accusation aux fins de surseoir à statuer sur l’exception préjudicielle d’incompétence (coaction indirecte) soulevée par le général Ojdanic ou, à défaut, de reporter la date limite de dépôt d’une réponse (Urgent Prosecution Motion to Adjourn General Ojdanic’s Preliminary Motion Challenging Jurisdiction / Indirect Co-Perpetration or Alternatively for an Extension of Time in Which to File a Response), requête déposée le 13 octobre 2005 (la « Requête urgente de l’Accusation »), par laquelle l’Accusation prie la Chambre de première instance de ne pas se prononcer sur l’exception préjudicielle d’incompétence soulevée par Dragoljub Ojdanic tant que la Chambre d’appel n’aura pas rendu son arrêt dans l’affaire Le Procureur c/ Milomir Stakic, nIT-97-24-A (« l’affaire Stakic »)1, ou, à défaut, de l’autoriser à répondre dans les trois jours suivant la décision relative à sa Requête urgente,

VU la notification par l’Accusation du dépôt d’un acte d’accusation unique et sa demande de modification de l’acte d’accusation et des ses accompagnée d’annexes (Prosecution’s Notice of Filing Amended Joinder Indictment and Motion to Amend the Indictment with Annexes), déposées le 16 août 2005, par lesquelles l’Accusation sollicite, entre autres, l’autorisation de modifier les actes d’accusation déposés dans les affaires nos IT-99-37 et IT-03-70 comme il est proposé dans l’acte d’accusation unique proposé,

VU l’exception préjudicielle d’incompétence (coaction indirecte) soulevée par le général Ojdanic le 7 octobre 2005, (General Ojdanic’s Preliminary Motion Challenging Jurisdiction / Indirect Co-Perpetration, « l’Exception préjudicielle d’incompétence de Dragoljub Ojdanic), déposée le 7 octobre 2005, par laquelle Dragoljub Ojdanic dénie au conteste la compétence qu’aurait le Tribunal le pouvoir de le poursuivre sur la base de la responsabilité découlant de la pour « coaction indirecte », comme il est envisagé proposé dans l’acte d’accusation unique proposé, au motif que ce mode de participation, introduit par l’Accusation « pour tenir compte du jugement se conformer à la jurisprudence née de l’affaire Stakic », n’entre pas dans le cadre de n’est pas visé par l’article 7 1) du Statut2 et n’est pas ni reconnu en droit international coutumier3,

VU les écritures conclusions par lesquelles l’accusé Milutinovic s’associe se joint à l’exception préjudicielle d’incompétence (coaction directe) soulevée par le général Ojdanic le 7 octobre 2005 (Milutinovic’s Submission joining General Ojdanic’s Preliminary Motion Challenging Jurisdiction : On Direct Co-perpetration Filed on 7 October 2005), écritures déposées le 10 octobre 2005 (la « Requête jointe de Milan Milutinovic »),

ATTENDU en outre que le Juge de la mise en état a ordonné aux conseils de la Défense de répondre à la Demande de modification présentée par l’Accusation et de faire connaître leurs griefs quant à la soulever toutes les objections pour vices de forme de l’acte d’accusation dans les 15 jours suivant la réception de la version b/c/s de l’acte d’accusation unique proposé4, et que les conseils de Milan Milutinovic et de Dragoljub Ojdanic ont déposé leurs réponses respectives concernant la compétence dans les délais impartisprescrits,

ATTENDU que le mode de participation mis en cause attaqué dans l’Exception préjudicielle de Dragoljub Ojdanic a été invoqué pour la premičre fois en l’espèce dans l’acte d’accusation unique proposé, ce qui constitue et qu’il s’agit là d’un motif valable de justifiant que l’on considèrer l’Exception préjudicielle de Dragoljub Ojdanic et la Requęte jointe de Milan Milutinovic comme des exceptions préjudicielles au sens de l’article 72 du Règlement,

ATTENDU que dans sa Requête urgente, l’Accusation fait valoir que le sursis demandé permettrait de ménager les ressources judiciaires, en ce sens que5 1) la Chambre d’appel Stakic fournira peut-être des indications lignes directrices importantes concernant les questions soulevées dans l’Exception préjudicielle d’incompétence de Dragoljub Ojdanic6, 2) le procès en appel dans l’affaire Stakic s’étant déroulé durant la première semaine d’octobre 2005, il est probable que l’arrêt Stakic y afférent sera rendu bien avant l’ouverture du procès en l’espèce7, puisque le procès en appel s’est tenu dans la 1ère semaine d’octobre 2005 et 3) cela éviterait de gaspiller des ressources judiciaires, que ce soit à ce stade ou au stade d’un éventuel appel interlocutoire8,

VU la réponse du général Ojdanic à la requęte de l’Accusation aux fins de surseoir à statuer sur l’exception préjudicielle qu’il a soulevée (General Ojdanic’s Response to Prosecution Motion to Adjourn General Ojdanic’s Preliminary Motion), réponse déposée par la Défense de Dragoljub Ojdanic le 17 octobre 2005, par laquelle celle-ci elle s’oppose à la Requête urgente de l’Accusation mais ne voit pas d’objection s’oppose pas à ce que cette dernière bénéficie d’un délai supplémentaire pour répondre à l’Exception préjudicielle de Dragoljub Ojdanic,

ATTENDU que la Chambre de première instance n’est pas convaincue qu’en sursoyant à statuer sur l’Exception préjudicielle de Dragoljub Ojdanic, elle contribuerait nécessairement à ménager les ressources judiciaires, étant donné que :

1) l’Accusation reconnaît que la question de savoir si la notion de « coaction indirecte », considérée par la Chambre de première instance Stakic comme une forme de commission, entre dans le cadre de est visée par l’article 7) 1 du Statut ou est reconnue en droit international coutumier n’a pas été soulevée par les parties devant la Chambre d’appel dans l’affaire Stakic saisie de l’espèce,

2) pour émettre l’hypothèse que de l’Accusation selon laquelle la Chambre d’appel fournira peut-être des indications lignes directrices importantes sur ce concernant les point,s l’Accusation évoqués se fonde simplement essentiellement sur le fait que cette dernière a entendu des exposés à ce sujet y afférents en réponse à la question de savoir si « vu les conclusions de la Chambre de première instance, les éléments de l’entreprise criminelle commune seraient réunis si la responsabilité de l’appelant était analysée à travers dans le cadre de sa participation à ladite entreprise9 »,

3) même si l’arrêt Stakic devait fournir des indications lignes directrices à la présente Chambre de première instance, on ne saurait présumer que tous les arguments avancés par Dragoljub Ojdanic dans son Exception préjudicielle d’incompétence, ou par l’Accusation dans sa réponse, auront été examinés par la Chambre d’appel et que, partant, aucun nouvel appel interlocutoire ne sera interjeté, rendant remettant ainsi très hypothétique l’en cause la date d’ouverture prévue du procès à la date du procès, et , et

4) si la Chambre d’appel était saisie de cette question de relative à la compétence dans le cadre d’un appel interlocutoire pour lequel des arguments détaillés seraient présentés, il n’y aurait pas pour autant cela n’entraînerait pas de gaspillage des ressources judiciaires,

ATTENDU qu’il est donc inutile d’examiner plus avant le bien-fondé de l’argument de l’Accusation selon lequel le sursis demandé ne porterait pas préjudice aux accusés10,

ATTENDU que l’argument avancé par l’Accusation à l’appui de sa demande subsidiaire de prorogation de délai, selon à savoir qu’elle n’a pas encore mis la dernière main à lequel l’Accusation n’a pas encore finalisé sa réponse à l’Exception préjudicielle de Dragoljub Ojdanic car elle a dű répondre à cinq autres exceptions préjudicielles pour vices de forme de l’acte d’accusation unique proposé, justifie l’octroi d’un délai supplémentaire de courte durée,

EN APPLICATION des articles 65 ter E), 72, 73 et 127 du Règlement,

ACCUEILLE EN PARTIE la Requête et ORDONNE à l’Accusation de répondre à l’Exception préjudicielle de Dragoljub Ojdanic dans les trois jours suivant le dépôt de la présente décision.

Pour le surplus, la Requête est REJETÉE.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.
Le 18 octobre 2005
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre de première instance
______________
Patrick Robinson

[Sceau du Tribunal]


1. Requête urgente de l’Accusation, par. 3 et 13.
2. Exception préjudicielle d’incompétence de Dragoljub Ojdanic, par. 10 à 12. Voir aussi ibidem, par. 13, dans lequel Ojdanic fait remarquer que dans l’acte d’accusation unique, l’Accusation ne met pas en cause sa responsabilité pour avoir participé à une entreprise criminelle commune en tant que « coauteur », un mode de participation retenu par la Chambre de première instance Stakic, mais pour avoir participé à une entreprise criminelle commune en tant que « coauteur indirect », ce qui représente une interprétation erronée de la portée de l’article 7 1) du Statut.
3. Ibid., par. 16 à 23 (absence présumée d’opinio juris) et par. 24 à 31.
4. Ordonnance rendue par le Juge de la mise en état à la suite de la conférence de mise en état, 1er septembre 2005.
5. Requête urgente de l’Accusation, par. 6.
6. Ibidem, par. 6 à 10.
7. Ibid., par. 2 et 11.
8. Ibid., par. 12.
9. Ibid., par. 2 et note de bas de page 3.
10. Requête urgente de l’Accusation, par. 14 et 18.