Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 1er décembre 2004

2 [Audience sur requêtes]

3 [Audience publique]

4 [L'accusé Ojdanic est introduit dans le prétoire]

5 [Les accusés, Milutinovic et Sainovic étaient absents]

6 --- L'audience est ouverte à 15 heures 06.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais demander à la Greffière de

8 donner le numéro de l'affaire.

9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

10 Messieurs les Juges. Affaire IT-99-37-PT, le Procureur contre Dragoljub

11 Ojdanic, Milan Milutinovic, Nikola Sainovic.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais demander aux parties de se

13 présenter, à commencer par l'Accusation.

14 M. NICE : [interprétation] Le bureau du Procureur est représenté par Mme le

15 Procureur elle-même, et moi-même, ainsi que Mme Romano, qui était à la tête

16 de notre équipe pour cette affaire jusqu'à présent, et M. Hannis, à sa

17 droite, va bientôt reprendre la direction de cette équipe car Mme Romano

18 quitte le Tribunal.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous sommes désolés de l'apprendre

20 et nous lui souhaitons -- nous présentons nos meilleurs vœux de réussite.

21 Nous allons maintenant commencer par l'accusé Ojdanic et ses représentants.

22 M. VISNJIC : [interprétation] Me Tomislav Visnjic, Me Selezan, et Me Peter

23 Robinson, pour la Défense.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais commencer par les pays qui

25 sont sur ma liste. Le Canada.

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1 Mme SWORDS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Colleen Swords,

2 Elaine Krivel, John Currie, et Jacqueline Paulumbo, pour le gouvernement du

3 Canada.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Je vois que le Canada est

5 bien représenté aujourd'hui.

6 La France.

7 Mme DUBROCARD : [interprétation] Je suis Michèle Dubrocard, et je

8 représente la France.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

10 Pour l'Allemagne.

11 M. LÄUFER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je m'appelle

12 Thomas Läufer, avec Susanne Wasum-Rainer, M. Gurtz [phon] Reimann, qui est

13 conseiller juridique de l'ambassade à La Haye, ainsi que Christian

14 Tomuschat.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

16 Pour les Pays-Bas ?

17 M. SWAAK-GOLDMAN : [interprétation] Johan Lammers, ainsi qu'Olivier Swaak-

18 Goldman.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

20 Pour le Royaume-Uni.

21 M. WHOMERSLEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Chris

22 Whomersley pour le ministère des Affaires étrangères, Christopher Greenwood

23 et Dominic Raab, de notre ambassade.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour les Etats-Unis.

25 M. JOHNSON : [interprétation] Clifton Johnson, et M. David Kay, Lisa

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1 Brooks, et Wheatly Alcock.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour la Bosnie.

3 Mme IBRAHIMOVIC : [interprétation] Je m'appelle Zikreta Ibrahimovic. Je

4 représente le procureur général de Bosnie-Herzégovine.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

6 Pour la Turquie.

7 M. NALCIOGLU : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis un

8 juge militaire. Je m'appelle Orhan Nalcioglu. Je suis assistant juridique

9 de la délégué de la Turquie ici.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

11 Comme vous le savez tous, nous sommes réunis ici à l'occasion de l'examen

12 d'une requête de l'accusé Ojdanic, aux fins de production de documents en

13 vertu de l'Article 54 bis du Règlement de procédure et de preuve. L'accusé

14 demande la production d'ordonnances -- la délivrance d'ordonnances aux fins

15 de production de documents, à l'intention de l'OTAN -- d'un certain nombre

16 de pays de l'OTAN et d'autres pays. Un certain nombre de pays nous ont

17 répondu suite à cette requête. La Chambre a délivré une ordonnance portant

18 au calendrier, dans laquelle est indiqué l'ordre dans lequel les arguments

19 seront entendus aujourd'hui.

20 Mais avant d'entendre les parties en présence, il convient d'évoquer un

21 certain nombre de questions de procédure. D'abord, je voudrais savoir si

22 c'est Me Robinson ou Me Visnjic qui vous intervenir. Oui, Me Robinson. Me

23 Robinson donc. Je voulais savoir et préciser le nombre de pays pour

24 lesquels vous demandez la délivrance d'ordonnances de production. Je vais

25 vous donner lecture de la liste dont je dispose, et vous pourrez me

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1 corriger si nécessaire. Ceci résulte, bien entendu, des réponses que nous

2 avons reçues, et peut-être d'une évolution favorable dans ce dossier. Vous

3 demandez des ordonnances à l'intention de l'OTAN, de la Belgique, du

4 Canada, de la République Tchèque, de la France, de l'Allemagne, de la

5 Grèce, de la Hongrie, de l'Islande, de l'Italie, du Luxembourg, des Pays-

6 Bas, de la Pologne, due Royaume-Uni, et les Etats-Unis.

7 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

8 Si on regarde la liste des intervenants de ce jour, il y a deux pays pour

9 lesquels vous ne demandez pas d'ordonnance. Il s'agit de la Bosnie et de la

10 Turquie.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Robinson, s'agissant de la

13 Bosnie et de la Turquie, est-ce que j'ai bien compris ? Est-ce que vous ne

14 demandez pas d'ordonnance ? Est-ce que vous avez retiré votre requête --

15 votre demande les concernant ?

16 M. ROBINSON : [interprétation] Le 10 février 2003, nous avons reçu une

17 lettre de la République de Turquie nous indiquant qu'ils n'avaient pas de

18 dossiers qui correspondaient à notre demande. De même, le 3 mars 2003, nous

19 avons reçu une réponse de la Bosnie-Herzégovine dans laquelle ils nous

20 disaient qu'ils n'avaient pas trouvé de dossiers correspondant à notre

21 requête. Donc, à moins que cette situation n'ait évoluée, à moins que les

22 pays concernés n'aient trouvé des documents pertinents depuis lors, nous

23 retirons notre demande.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais me tourner vers le

25 représentant de la Bosnie. Je dois vous présenter mes excuses. Nous

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1 rencontrons un certain nombre de difficultés pratiques du fait de la nature

2 de ce prétoire. Je vois le représentant de la Bosnie. Vous avez entendu les

3 propos de Me Robinson. Pouvez-vous nous confirmer que la situation est bien

4 celle qu'il a dite, que vous n'avez pas d'information -- pas de nouvelles

5 informations ?

6 Mme IBRAHIMOVIC : [interprétation] Effectivement. Je confirme également que

7 nous n'avons pas d'information supplémentaire; cependant, nous avons reçu

8 une convocation aux fins de comparaître lors de la présente audience, et

9 nous avons voulu faire montrer d'un esprit de coopération avec la TPIY.

10 Cependant, nous n'avons pas d'information supplémentaire ou nouvelle. Les

11 informations dont nous disposions précédemment ont été envoyées par les

12 institutions concernées, des entités pertinentes en Bosnie-Herzégovine.

13 Aujourd'hui, la situation a quelque peu évoluée dans le sens où toutes les

14 fonctions relatives à la sécurité ont été unifiées au sein du ministère de

15 la Justice de Bosnie-Herzégovine.

16 Avant de venir ici, j'ai consulté les services de Renseignements de Bosnie-

17 Herzégovine ainsi que le ministère de la Justice, et on m'a confirmé qu'on

18 n'avait pas trouvé d'information supplémentaire ou de données nouvelles, si

19 bien que notre position reste identique. Merci beaucoup.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup de l'esprit de

21 coopération dont vous avez ainsi fait preuve. Le représentant de la

22 Turquie.

23 M. NALCIOGLU : [interprétation] Monsieur le Président, la Turquie est un

24 pays membre de l'OTAN et avait des troupes au Kosovo. Mais après

25 l'incident, nos hommes étaient sur place -- n'étaient sur place qu'après

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1 les incidents, les crimes de guerre qui sont allégués par le Procureur.

2 Donc, ils ne sont arrivés qu'après.

3 En tant que pays de l'OTAN, nous sommes, bien entendu, prêts à coopérer.

4 Nous sommes ici pour coopérer, pour servir la justice. Nous avons envoyé un

5 certain nombre de documents déjà. Mais pour vous dire la vérité, nos

6 troupes n'avaient pas la possibilité technique de procéder à des

7 interceptions parce que nous n'avons envoyé qu'un contingent très limité

8 sur place. Il n'y avait pas de fonction consacrée aux exercices de

9 renseignement. Mais si les Juges de la Chambre, le conseil de M. Ojdanic

10 souhaite nous poser des questions au sujet de cette affaire, nous sommes

11 prêts à essayer d'y répondre. Merci.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci de cette manifestation de

13 bonne volonté.

14 Vu ce qui a été dit par Maître Robinson, la Chambre n'exige plus la

15 présence des représentants da la Bosnie et de la Turquie, mais ces mêmes

16 représentants souhaitent rester, ils sont tout à fait loisir de demeurer

17 parmi nous.

18 Je souhaite maintenant passer au point suivant. Il s'agit d'une demande qui

19 a été présentée par le Canada, les Etats-Unis et les Pays-Bas afin que

20 l'audience se tienne à huis clos. La Chambre a décidé que l'audience aurait

21 lieu en audience publique jusqu'à ce que la question de l'audience à huis

22 clos soit soulevée. A ce moment-là, nous traiterons de cette question.

23 Il y a une autre question qui se pose, c'est celle de la présence du

24 Procureur, ici. Madame la Procureur, une demande avait été faite pour que

25 le Procureur soit présent pendant l'audience.

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1 Mme DEL PONTE : [interprétation] Oui, tout à fait. D'après ce que je sais,

2 les conseils de la Défense ne s'opposent pas à notre présence ici.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'y a pas d'objection de la part

4 de l'accusé ?

5 Maître Robinson.

6 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous

7 souhaiterions qu'il soit présent, et nous n'avons pas d'objection.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

9 Monsieur Johnson, pour les Etats-Unis.

10 M. JOHNSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous-mêmes,

11 nous n'avons pas d'objection à la présence du Procureur pour l'audience de

12 ce jour, mais si vous me permettez de revenir à la question précédente,

13 nous avons des motifs supplémentaires qui nous incitent à demander à ce que

14 l'audience de ce jour se déroule à huis clos. Si vous me le permettez, je

15 souhaiterais évoquer certains de ces arguments supplémentaires à votre

16 intention.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, allez-y.

18 M. JOHNSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avant de vous laisser parler, je

20 dois simplement dire que le Procureur peut être présent.

21 Mme DEL PONTE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 M. JOHNSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

23 Comme vous l'avez indiqué, vendredi, les Etats-Unis, le Canada et les Pays-

24 Bas ont demandé à ce que l'audience se déroule à huis clos. Depuis lors, le

25 Royaume-Uni, l'Allemagne et la France et la Turquie nous ont indiqué qu'ils

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1 appuient notre demande. En conséquence, je vais m'exprimer au nom de tous

2 les pays de l'OTAN qui participe à cette audience.

3 Nous estimons que vous devriez faire droit à notre requête aux fins de huis

4 clos pour les raisons suivantes. En premier lieu, dans l'Article 54 bis

5 même, il est prévu que les états peuvent demander de faire une telle

6 demande et que celle-ci soit acceptée par la Chambre s'il y a préjudice à

7 leur intérêt national. En l'espèce, au cœur même de la demande de la

8 Défense, nous avons non seulement des informations qui viennent des

9 services de renseignements, mais également tout ce qui a trait aux sources

10 et méthodes d'obtention de ces informations. Tout cela est au cœur de cette

11 requête. Tout ceci risquerait de léser les intérêts des pays concernés. La

12 Défense, elle-même, dans sa requête reconnaît que : "La nature des

13 informations demandée par la présente requête a un impact sur la sécurité

14 nationale." La déclaration qu'ils ont soumise récemment en novembre est une

15 analyse détaillée des sources de renseignements et des méthodes utilisées.

16 Si bien que nous estimons que les débats relatifs à cette requête ne vont

17 cesser de revenir sur les questions du renseignement, des méthodes

18 utilisées qui ont un intérêt brûlant pour les pays concernés.

19 La requête que nous avons présentée à nouveau est une requête à portée

20 limitée, bien qu'au terme des Règlements du Tribunal, nous pourrions

21 demander des mesures supplémentaires, à savoir, une audience ex parte. On

22 pourrait également à ce qu'il n'y ait pas de compte rendu d'audience. Nous

23 n'allons pas demander tout cela. Nous pensons que nos intérêts seront

24 sauvegardés si l'audience a lieu à huis clos, et si la participation est

25 limitée à la présence du Procureur, des Etats participants et du personnel

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1 du Tribunal.

2 Je voudrais revenir brièvement sur des points qui ont été évoqués par la

3 Défense dans leur réponse en opposition à notre demande. La Défense, par

4 exemple, a dit qu'elle plaidait en public, c'est vrai. Nous avons examiné

5 ces interventions, elles ont été faites avec beaucoup de soins pour ne pas

6 porter atteinte à la sécurité des états. Mais dans le cadre de l'audience

7 de ce jour, nous allons entrer plus en détail dans toute cette question.

8 Nous ne pouvons pas prédire la nature des questions qui vont nous être

9 posées. Ce que nous savons, c'est qu'on va parler de manière très détaillée

10 de tout ce qui a trait au service de Renseignement.

11 Nous pensons, d'autre part, que ce ne sera pas très positif de passer

12 indéfiniment du huis clos partiel à l'audience publique. Premièrement, cela

13 risque de perturber la présentation de nos arguments, mais, en deuxième

14 lieu, ceci signalerait immédiatement si, dès que l'on demanderait une

15 audience à huis clos, qu'on allait parler d'une question extrêmement

16 cruciale pour la sécurité nationale. Nous pensons que notre demande est

17 tout à fait justifiée. Il s'agit d'avoir une audience qui sera présentée

18 d'une manière équilibrée et détaillée tous les arguments en présence de la

19 Défense, et que ceci permettra de protéger l'intérêt de nos pays.

20 Nous vous demandons donc de revenir éventuellement sur votre décision

21 précédente.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Robinson.

23 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes fortement

24 opposés à ce que l'audience ait lieu à huis clos. Nous pensons que c'est

25 une question qui aurait un intérêt tout à fait important pour le public.

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1 L'Article 54 bis (F) dit que l'audience peut être obtenue à huis clos. Je

2 suggère que cette disposition particulière traite d'une séance dans

3 laquelle les Juges traitent de documents spécifiques dans lesquels il est

4 nécessaire que l'audience soit huis clos.

5 Je peux vous assurer que je ferai l'intégralité de mon exposé aujourd'hui

6 sans faire la moindre référence à des questions sensibles de sécurité

7 nationale puisque je sais qu'aucune information concernant la sécurité

8 nationale d'aucun pays ne sera évoquée. Je pense que la meilleure façon de

9 procéder --

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, vous n'êtes pas d'accord avec

11 la thèse selon laquelle les questions de sécurité sont si importantes dans

12 cette requête que ne pas procéder de façon efficace, et qu'on risquerait

13 d'aller en audience à huis clos et de revenir en audience publique de façon

14 répétée.

15 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas parler

16 pour les autres, ici, à cette audience, mais je sais que, pour notre

17 exposé, ici, il n'y a absolument aucune raison d'aller en audience à huis

18 clos partiel, ni à huis clos. Si, par exemple, au cours de l'exposé des

19 Etats-Unis, ils souhaitent évoquer quelque chose qui pense être

20 particulièrement sensibles, ils pourront, à ce moment-là, présenter une

21 demande à ce moment-là en ce qui concerne cette partie de l'audience.

22 Mais avoir une audience qui sera entièrement à huis clos ne serait pas du

23 tout ce qu'il faut pour le public, ce serait d'essayer de tuer une mouche

24 avec un fusil pour éléphant. Ce n'est pas nécessaire, et la pratique doit

25 protéger les intérêts, mais ceci ne peut pas être fait nécessairement en

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1 audience à huis clos complet. Nous n'avons pas d'objection pour le reste.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons examiner la question.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ayant examiné cette question, il

5 faut équilibrer les droits de l'accusé à une audience publique par rapport

6 aux préoccupations légitimes des Etats pour les questions de sécurité

7 nationale. Nous estimons que certainement

8 Me Robinson a indiqué que, dans son exposé, il n'invoquera pas des

9 questions qui ont trait à des aspects de sécurité nationale qui pourraient

10 exigées que l'audience se tienne à huis clos. En ce qui nous concerne, son

11 exposé pourra être fait en audience publique.

12 Lorsque l'on viendra à examiner les arguments présentés par les Etats-Unis,

13 il y a des préoccupations effectives, et nous pensons que la Chambre peut

14 en commettre, en les identifiant au fur et à mesure que les problèmes se

15 poseront, c'est ce que nous ferons. Mais si au cours des débats des

16 questions parviennent à un stade où il devient inefficace de poursuivre

17 parce qu'il faudrait passer continuellement de l'audience publique à huis

18 clos partiel ou à huis clos, à ce moment-là, nous aborderons la question du

19 huis clos pour le reste des audiences. Mais au stade actuel, nous allons

20 commencer en audience publique, et M. Robinson peut faire son exposé, et

21 les états feront leurs exposés en audience publique sous réserve

22 d'exceptions que j'ai décrites.

23 Nous allons commencer par entendre le demandeur, Maître Robinson.

24 M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

25 Juges de la Chambre de première instance. Je voudrais me présenter, comme

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1 il convient. Je suis Peter Robinson, je suis le conseil du général Ojdanic,

2 ici, devant le Tribunal, avec mes collègues. Je suis ressortissant des

3 Etats-Unis. Je suis membre du barreau, et j'habite la Californie. Je

4 voudrais remercier tous les Etats de leur participation par rapport à la

5 requête présentée par le général. Je me rends compte que tous les efforts

6 ont été faits pour connaître de cette demande, et j'espère que les débats

7 pourront aboutir à une discussion constructive qui permettra de résoudre

8 les choses dans l'intérêt des droits du général, et d'un procès équitable

9 tout en protégeant les éléments et sources secrets des Etats.

10 Nous avons eu des renseignements dans lesquels le général Ojdanic est un

11 partie, entre le 1er janvier et 20 juin 1999, les conversations interceptées

12 dans lesquelles le général Ojdanic est mentionné, encore entre le 1er

13 janvier et le 20 juin 1999, qui est la période d'événements correspondant à

14 l'acte d'accusation. Egalement, avec cette limite que les conversations ont

15 bien eu lieu en la République de Yougoslavie et qu'également, qu'elles

16 avaient trait à la question du Kosovo. Notre troisième demande concerne des

17 conversations du général Ojdanic avec des représentants de l'Etat ou des

18 personnes qui travaillaient au nom de l'Etat, là encore, pour la période

19 limitée couverte par les événements visés par l'acte d'accusation, le 1er

20 janvier au 20 juin 1999.

21 C'est une demande assez extraordinaire présentée par un accusé. A ma

22 connaissance, c'est la première fois que devant un Tribunal, un accusé ait

23 été prêt à ce que l'on communique de façon publique des conversations

24 privées qu'il a pu avoir sans se douter qu'elles étaient enregistrées. La

25 raison de la présentation de cette demande est simple. Le général Ojdanic

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1 n'est pas coupable. Il n'a jamais planifié, instigué, ordonné, commis ou

2 autrement aidé ou encouragé les crimes de guerre. Il n'avait aucune

3 connaissance d'un plan quelconque visant à déporter les Albanais du Kosovo.

4 Il n'a jamais fait partie d'une entreprise criminelle commune pour le

5 faire. En tant que commandant, ses ordres permanents, dont il ne s'est

6 jamais écarté, étaient qu'il fallait empêcher que les crimes de guerre ne

7 soient commis, et qu'ils puissent être punis. Nous avons besoin de ces

8 éléments de preuve pour essayer de prouver cela dans cette procédure.

9 Si cette requête de l'accusé est extraordinaire, il y a, en tous les cas,

10 des principes juridiques bien établis devant votre Tribunal, qui permettent

11 d'en connaître. Nous avons les dispositions du Statut, du Règlement, deux

12 décisions de la Chambre d'appel, et les décisions de votre Chambre de

13 première instance dans l'affaire Milosevic relative aux questions de la

14 Serbie et du Monténégro. Nous ne vous demanderons pas de créer du droit

15 nouveau; nous vous demandons simplement d'appliquer des principes qui

16 existent déjà.

17 L'Article 29 du Statut dispose que les : "Etats font droits sans délai

18 indue à toute demande d'aide ou toute ordonnance qui serait rendue par une

19 Chambre de première instance, y compris, la sensibilité au fait de

20 recueillir les dépositions et la présentation d'éléments de preuve." Ceci

21 faisait partie de la Résolution 827 qui a été adoptée à l'unanimité par le

22 conseil de Sécurité, y compris les Etats-Unis, le Royaume des Pays-Bas, le

23 Royaume-Uni, et la France. A l'Article 29, il est dit que l'adoption de la

24 Charte sur le fait : "Qu'il y a la base nécessaire existe pour que les

25 états coopèrent de toute façon, de toutes les manières possibles avec les

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1 enquêtes concernant les crimes de guerre." Dans la décision rendue par la

2 Chambre d'appel dans l'affaire Blaskic, les dispositions de l'Article 29

3 ont été considérées comme étant valables et obligatoires. Nous invoquerons

4 cet Article 29 pour les ordonnances que nous demandons aujourd'hui.

5 Nous savons que l'OTAN et quatre pays n'ont pas du tout répondu à cette

6 demande, ces pays étant la Belgique, l'Islande, le Luxembourg et la

7 Pologne. Une ordonnance devrait leur être adressée parce qu'ils ont renoncé

8 à la possibilité d'être présents à cette audience.

9 En ce qui concerne l'Article 29, ceux qui ont comparu ici visent à ce que

10 les éléments classifiés dans certains cas, ils voudraient être considérés

11 comme des personnes présentes concernées, mais la décision rendue en appel

12 dans l'affaire Blaskic dit clairement que l'Article 29 s'applique à tous

13 les pays. La Chambre d'appel a dit qu'il fallait encore une fois souligner

14 que la rédaction très claire de l'Article 29 précise qu'il y a cette

15 obligation qui s'adresse à tous les Etats membres indépendamment du point

16 de savoir si ce sont des états de l'ex-Yougoslavie ou non. Le gouvernement

17 du Canada dit qu'il était un Etat observateur, non impliqué dans l'activité

18 qui fait l'objet de ces enquêtes et que, par conséquent, ils ne veulent pas

19 être soumis à l'application des dispositions de l'Article 29. Ce même

20 argument est présenté par le Royaume des Pays-Bas, et le Royaume-Uni.

21 Je voudrais, tout d'abord, faire remarquer que si quelqu'un allait se

22 promener maintenant en ville, à Belgrade, et voyait ce qu'est le ministère

23 de la Défense ou l'ambassade de Chine, on pourrait voir les dommages qui

24 ont été causés par les soi-disant observateurs du conflit. Le Canada et

25 tous les membres de l'OTAN n'étaient pas des observateurs, c'étaient des

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1 belligérants. Dans l'affaire Blaskic, l'opinion est qu'il est très

2 vraisemblable, qu'ils ont des éléments de preuve qui seraient nécessaires

3 au Tribunal.

4 Le gouvernement du Royaume-Uni semble indiquer cela parce qu'il a

5 déployé les efforts les plus grands pour empêcher qu'il y ait la

6 possibilité de communiquer des documents, tels que visés à l'Article 29. Je

7 voudrais également citer la Chambre de première instance, l'affaire

8 Todorovic, à laquelle vous-même, Monsieur le Président Robinson, vous avez

9 participé où il était question de la SFOR au moment où il y a eu cette

10 arrestation mais on a demandé, à ce moment-là, que les documents des

11 archives relatives à cette arrestation soient présentés. Ces Etats ne sont

12 pas -- n'échappent pas aux dispositions de l'Article 29 et aucun pays ne

13 devrait en être exempté.

14 Nous sommes également régis par les dispositions de l'Article 57 bis

15 du Règlement qui dispose : "Qu'une partie sollicitant la délivrance de

16 l'Etat d'une ordonnance de production de documents ou d'informations en

17 application de l'Article 54 dépose une requête, il demande des documents ou

18 les informations visées par la requête, indique dans quelle mesure ils sont

19 pertinents pour toute question soulevée dans le Juge ou la Chambre et,

20 troisièmement, exposer les démarches qui ont été entreprises par le

21 requérant en vue d'obtenir l'assistance de l'Etat".

22 Je note que la Chambre de première instance a déjà atteint une

23 conclusion préliminaire en ce qui concerne chacun de ces aspects et je

24 voudrais en parler très brièvement.

25 Premièrement, en ce qui concerne la question de la spécificité par

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1 rapport à l'ordonnance portant calendrier du 22 novembre 2002. La Chambre

2 de première instance a déclaré, compte tenu du fait que le demandeur a

3 satisfait aux conditions posées pas l'Article 54 bis a que le demandeur a

4 satisfait. La Chambre de première instance, dans toute la mesure du

5 possible, que les documents ou renseignements auxquels se rapporte la

6 demande. Nous sommes guidés sur ce point par la décision Blaskic qui

7 indique que ces documents doivent être identifiés dans toute la mesure du

8 possible et plus en nombre limité. La décision rendue en appel dans

9 l'affaire Kordic est probablement la plus précise en ce qui concerne la

10 spécificité, elle dit que le but de l'exigence de spécificité de permettre

11 à un Etat d'être capable d'identifier les documents demandés aux fins de

12 les remettre à la partie qui les demande.

13 Cette demande de spécificité interdit clairement l'utilisation de

14 catégories trop vastes, mais n'interdit pas le recours à une telle ou telle

15 catégorie. Ceci a été défié d'une façon suffisamment claire de façon à

16 permettre l'identification de documents qui rentrent dans la catégorie en

17 question.

18 La Chambre qui a rendu l'affaire Kordic dit qu'elle n'exclut que les

19 demandes puissent impliquer la traduction de centaines de documents parce

20 qu'il faut considérer la nature des charges très complexes dont le Tribunal

21 a connaissance pour voir comment on peut éviter de telles demandes.

22 Toutefois, la question essentielle est de savoir s'il y a obligation qui

23 incombe à un Etat est exagérément lourde en tenant compte au point de

24 savoir s'il y a des difficultés pour produire ces éléments de preuve et que

25 ceci ne soit pas disproportionné par rapport à ce qui est justifié par les

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1 exigences du procès.

2 Effectivement, dans les décisions concernant l'affaire Milosevic, en

3 ce qui concerne la Serbie et le Monténégro, la Chambre de première instance

4 a ordonné la production d'un certain nombre de catégories de documents, y

5 compris, les procès-verbaux de réunions, d'organes, ceux-ci portant sur une

6 période de sept ans.

7 Nous notons que le critère peut être la possibilité d'identifier rapidement

8 les documents demandés qui apparemment était satisfaite par un certain

9 nombre de pays qui ont répondu à notre demande. Notons que la Bosnie, la

10 Turquie, la Norvège, le Portugal, l'Albanie, le Danemark, la Macédoine, la

11 Roumanie, l'Espagne et la Croatie ont été en mesure de procéder à des

12 recherches dans leurs archives conformément aux critères qui avaient été

13 indiqués et qu'en fait, la Croatie a promis des documents, des

14 conversations interceptées, à notre demande.

15 A la suite de notre demande, en ce qui concerne la spécificité, nous avons

16 à ajouter qu'il fallait consulter un témoin expert, James Bamford, et nous

17 avons obtenu une déclaration de James Bamford pour aider la Chambre de

18 première instance et dans sa déclaration, il décrit de façon détaillée le

19 processus qui, à sa connaissance, devrait être suivi pour obtenir les

20 archives et à son avis, ce sont des archives telles que nous avons

21 décrites.Il ne serait pas particulièrement difficile de les produire, tout

22 au moins en ce qui concerne les Etats-Unis, pays qui le connaît.

23 Je noterai que les Etats-Unis, en ce qui concerne l'Article Titre 5 du code

24 des Etats-Unis, section 552 (A), ce texte dit : "Que tout citoyen des

25 Etats-Unis, en donnant son nom, sa date de naissance, à l'organe

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1 gouvernemental, peut obtenir du gouvernement qu'il lui fournisse tous les

2 documents en sa possession qui ont trait à la personne en question." Ainsi,

3 aux Etats-Unis, il y a la possibilité de chercher par nom, retrouver toutes

4 les archives et documents relatifs à une personne. Effectivement, ceci est

5 une question qui a fait partie des habitudes ordinaires depuis de

6 nombreuses années. Donc, nous pensons que les catégories que nous avons

7 demandées permettent effectivement aux états d'identifier rapidement les

8 documents que nous essayons d'obtenir.

9 Alors comment savons-nous que ces documents seront utiles ? Le Canada dit

10 que notre demande est basée essentiellement sur de pures spéculations, que

11 ces documents pourraient avoir une certaine valeur pour nous. Pour

12 commencer, nous avons la déclaration de l'expert James Bramford qui dit que

13 les conversation interceptées par les Etats-Unis et par le Royaume-Uni

14 comprenant notamment les conversations avec le général Ojdanic, étant donné

15 sa position, les communications impliquant un chef militaire d'un pays avec

16 lequel les Etats-Unis étaient en guerre, vraisemblablement, ont été

17 conservées. Des rapports dans les médias, y compris ceux que l'on trouve

18 rapportés dans le New York Times concernant l'arsenal de moyens

19 d'espionnage et satellites, de conflits kosovar, qui ont pu observer le

20 pays au moment du conflit sur le Kosovo, aurait produit d'énormes quantités

21 de documents. Il y a des interceptions de conversation téléphoniques ou de

22 conversations radio entre les commandants sur le terrain et ceci est

23 mentionné dans notre requête, sous paragraphe 4. Le Washington Post, en ce

24 qui concerne l'incident Racak, dit que les ordres sont venus du

25 gouvernement serbe, d'après les interceptions téléphoniques des

Page 729

1 gouvernements occidentaux. Les informations, qui ont été données, ont été

2 citées pour ces interceptions téléphoniques qui auraient fait l'objet,

3 ensuite, de fuites dans les médias, comme il est indiqué par des sources

4 occidentales qui ont connaissance de ces interceptions.

5 Dans Newsweek, Miroslav Tudjman a dit que dix millions de dollars avaient

6 été dépensés pour des écoutes, pour intercepter des conversations en Bosnie

7 et en Croatie. Effectivement, le gouvernement bosnien a remis des

8 enregistrements de conversations interceptées, y compris, des conversations

9 où le général Odjanic parlait avec d'autres personnes et ses conversations,

10 par exemple, montrent le général, quelles étaient les relations du général

11 Odjanic avec le Président Milosevic et sa vraie préoccupation pour huit

12 soldats qui avaient été enlevés par l'UCK à l'époque. Ses efforts ont

13 trouvé une solution pacifique à la situation et le fait que dans ces

14 conversations ont été interceptées et qu'il n'a jamais été question

15 d'expulser les Albanais de souche ni de représailles aux victimes de guerre

16 à la suite à l'enlèvement de ces soldats. Une conversation entre le

17 président Milosevic et Milutinovic montre également qu'on lui a demandé

18 d'agir de manière à ce qu'il n'y ait pas de crimes de guerre commis.

19 Nous savons également, d'après l'ouvrage du général Wesley Clark, qu'il a

20 eu également de nombreuses conversations avec le général Ojdanic. Ceci

21 relève de la catégorie de ces documents que nous demandons.

22 Dans un article, écrit par David Gowin, qui est publié dans le, à la page

23 913, du Journal de droit international, a écrit que : "L'on a obtenu, de ce

24 fait, des informations au sujet du gouvernement de la RFY, la nature du

25 déploiement, les pratiques de l'armée, des groupes paramilitaires, et de la

Page 730

1 police de la RFY."

2 Donc, nous avons toute raison de croire que, si les ordonnances que nous

3 demandons sont délivrées, nous obtiendrons des informations extrêmement

4 utiles qui auront une pertinence certaine pour ce procès. Nous n'affirmons

5 pas que nous avions un mot magique qui pourrait nous permettre de tout de

6 suite trouver les documents en question. Nous avons fait de notre mieux;

7 cependant, vu les réponses qui nous ont été faites, nous ne voyons pas de

8 manière de modifier notre réponse.

9 Le Canada nous propose -- nous suggère de limiter notre demande aux

10 conversations montrant que le général Ojdanic a participé à des crimes ou à

11 une entreprise criminelle commune. Les conversations où on lui signale des

12 crimes de guerre, où on voit son état d'esprit et où l'on parle également

13 de la sanction de crimes de guerre, du côté des Pays-Bas, on suggère que

14 les seules conversations qui pourraient être communiquées ce sont celles

15 qui ont un rapport avec la participation du général Ojdanic, sa

16 connaissance des crimes alléguées, et son état d'esprit y afférent. Or,

17 nous estimons que de tels critères sont trop suggestifs pour être

18 effectivement appliqués parce que c'est la Défense ou la Chambre de

19 première instance, qui est le mieux placé pour savoir si une conversation,

20 effectivement, a trait -- à un rapport avec ces éléments.

21 Par exemple, dans les écoutes croates que nous avons reçues, des mentions

22 tout à fait innocentes, qui semblent à priori, pour quelqu'un qui ne

23 connaît pas l'affaire, n'avoir aucun rapport, peuvent, en vérité, se

24 révéler extrêmement pertinent s'agissant des questions dont a à traiter la

25 Chambre en l'espèce.

Page 731

1 De plus, même une déclaration en apparence innocente peut se révéler très

2 utile pour déterminer que le général Ojdanic était à tel endroit à tel

3 moment ou qu'il était ailleurs en train de s'occuper d'une autre mission à

4 un autre moment.

5 Le Royaume-Uni, les Pays-Bas, et les Etats-Unis ont également demandé à ce

6 que nous fournissions les détails des conversations que nous souhaitons.

7 Les conversations entre le général Ojdanic et d'autres personnes.

8 J'aimerais vous demander d'essayer de vous souvenir du nom de toutes les

9 personnes à qui vous avez parlé entre le 1er janvier et la fin juin 1999.

10 C'est impossible. Le général Ojdanic ne dispose pas de documents lui

11 permettant de fournir une telle liste.

12 Nous n'avons pas le moyen de disposer d'une liste de toutes les

13 personnes à qui il a parlé pendant ces six mois. Il n'est pas non plus à

14 même de se rappeler de la teneur de toutes les conversations qu'il a eues

15 pendant ce semestre, si bien que, bien entendu, nous sommes tout à fait

16 prêts à écouter toutes les suggestions qui vont nous être faites

17 aujourd'hui et demain. Mais nous aimerions savoir parce que cela ne nous a

18 pas été dit pourquoi les Etats concernés n'ont pas fourni les documents

19 demandés par le général Ojdanic, et ce qui pourrait être fait pour qu'il

20 soit répondu d'une manière très positive à cette requête.

21 Le deuxième critère qui est énoncé par l'Article 54 bis est celui de

22 la pertinence. Je serai très bref à ce sujet. Vous avez donné une

23 conclusion dans votre ordonnance du 22 novembre 2002, au sujet de la

24 pertinence. Dans Kordic, la Chambre d'appel a été très claire. Les Etats, à

25 qui l'on demande les documents, ne sont pas en droit de contester leur

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1 pertinence. Je n'ajouterai donc rien de plus au sujet de la pertinence. Je

2 ne pense pas que les Etats concernés doivent également parler de la

3 question de la pertinence, mais, si la Chambre de première instance a des

4 questions au sujet de la pertinence, maintenant ou à la fin, je pourrais y

5 répondre.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que c'est bien ce que cela

7 signifie ? Est-ce que cela signifie que la question de la pertinence est

8 une question qui appartient à la Chambre de première instance de

9 déterminer ? Ce n'est pas une question qui doit être décidée -- résolue par

10 l'Etat en question. Mais il peut très bien soulever cette question.

11 M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, mais je ne suis pas d'accord.

12 Il est dit que les Etats à qui on demande les documents n'ont pas lieu de

13 contester leur pertinence. Pourquoi ? Parce que ces Etats ne sont pas en

14 mesure de savoir quelle est la pertinence des documents. Cela intéresse

15 uniquement la Défense et les Juges. Les conseils de l'Accusation peuvent

16 tout à fait sans doute contester la pertinence des documents demandés la

17 pertinence des tiers, s'ils le souhaite, mais les Etats, si -- en fait,

18 c'est mon interprétation de l'arrêt Kordic - ce n'est pas l'affaire des

19 Etats de déterminer si un tel document est pertinent ou pas, cela concerne

20 uniquement les parties au procès, la Chambre de première instance, bien

21 entendu, peut d'office soulever la question de la pertinence. D'ailleurs,

22 elle devra statuer sur cette pertinence. Je suis tout à fait prêt à évoquer

23 cette question, si vous estimez que c'est quelque chose sur laquelle je

24 dois vous présenter mes arguments. Mais nous estimons que, vu la décision

25 Kordic, ce n'est pas une question qui devrait être soulevée et débattue

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1 dans la présente audience.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous, s'il vous plaît,

4 m'indiquer dans quel paragraphe de la décision Kordic ceci figure ?

5 M. ROBINSON : [interprétation] Cela figure au paragraphe 40.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

7 M. ROBINSON : [interprétation] Je vais passer au troisième critère de

8 l'Article 54 bis, qui a trait aux démarches qui ont été entreprises par le

9 requérant au vu d'obtenir l'assistance de l'Etat afin de demander une

10 ordonnance aux fins de production. Dans votre ordonnance du 22 novembre,

11 vous avez conclu que les démarches que nous avions faites étaient

12 adéquates, et nous estimons que vous avez raison de le penser. Le 15 mai

13 2002, c'est-à-dire, moins d'un mois après la reddition volontaire du

14 général Ojdanic au Tribunal, nous avons envoyé une lettre à tous les Etats.

15 Nous leur avons demandé de volontairement produire les éléments et les

16 documents que nous avons demandés dans trois requêtes. C'étaient des

17 requêtes qui concernaient les mêmes informations que celle qui figure dans

18 la requête dont est saisie la Chambre de première instance. Mais nous avons

19 limité, cependant, l'ampleur de ce document parce que nous avons essayé de

20 tenir compte des préoccupations exprimées par les Etats dans leur réponse,

21 afin de limiter au maximum nos demandes pour arriver à notre objectif.

22 C'est le résultat de notre requête présentée en novembre 2002. Nous avions

23 l'intention de déposer notre requête au bout de 30 jours, mais nous avons

24 attendu six mois afin de pouvoir rencontrer les représentants des Etats-

25 Unis et les autres Etats. Nous avons ensuite limité notre requête suite à

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1 leurs objections. Lorsque nous avons déposé, finalement, notre requête le

2 13 novembre 2002, nous l'avons également notifiée, à tous les Etats

3 concernés, directement, et nous leur avons demandé de prendre contact avec

4 nous afin d'essayer de trouver une solution rapide à tout cela. Or, cela

5 fait déjà deux ans que tout cela s'est passé, et nous n'avons reçu aucun

6 découlement. D'après la réaction des Etats qui sont présents aujourd'hui,

7 je vois que -- on peut voir qu'ils ne sont pas désireux de présenter les

8 documents que nous demandons. Soit que ce soit sous forme de requête

9 officielle ou non. Si bien que je pense que nous avons tout à fait rempli

10 les conditions qui sont cherchées à l'Article 54 bis du Règlement, le

11 troisième critère.

12 Maintenant, se pose la question de savoir si un Etat a le droit de

13 refuser de fournir des informations, pour des motifs relatifs à l'intérêt

14 de sa sécurité nationale. La réponse à cette question est clairement non.

15 Cette réponse nous est fournie par la décision de la Chambre d'appel dans

16 Blaskic. La Chambre d'appel a déclaré que : "Le fait de permettre des

17 considérations relatives à la sécurité nationale d'empêcher le Tribunal

18 international d'obtenir des documents qui pourraient se révéler décisifs

19 dans certains procès consisterait à miner et à saper l'essence même des

20 fonctions du Tribunal. Car, autoriser les Etats, pour des raisons de

21 sécurité, à ne pas fournir des documents, pourrait remettre en cause le

22 Tribunal lui-même et son objectif."

23 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'ils ne disposent pas du texte

24 et qu'il s'agit d'une traduction libre. On se reportera aux documents

25 officiels.

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1 M. ROBINSON : [interprétation] Le 28 février 2003, les Etats-Unis ont

2 affirmé que la communication des écoutes, et même la confirmation que de

3 telles conversations existaient ou pas, reviendraient à nuire grandement

4 aux intérêts nationaux en matière de sécurité des Etats-Unis. Je voudrais

5 maintenant présenter à la Chambre de première instance une vidéo d'une

6 minute 20. On y voir le ministre des Affaires étrangères américain, Colin

7 Powell, s'adressant au conseil de Sécurité, et il parle justement des

8 écoutes. Est-ce qu'on peut passer cette vidéo.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

10 [Diffusion de cassette vidéo]

11 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Monsieur le Président, chers collègues, je

12 souhaiterais commencer par vous remercier tous pour les efforts que vous

13 avez faits pour être ici aujourd'hui. Cette journée importante pour nous

14 tous, ce jour où nous examinons la situation de l'Irak et de l'obligation

15 de désarmement en vertu de la Résolution 1441 du conseil de Sécurité des

16 Nations Unies.

17 M. ROBINSON : [interprétation] Nous allons maintenant faire passer deux

18 autres séquences.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'on peut alors passer ?

20 [Diffusion de cassette vidéo]

21 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

22 "Colin POWELL : Monsieur le Président, Monsieur le secrétaire-

23 général, chers collègues, je voudrais commencer par exprimer mes

24 remerciements à tous ceux qui ont tout fait pour être ici aujourd'hui.

25 Cette journée est importante pour nous tous. Alors que nous passons en

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1 revue la situation relative à l'Irak, à ses obligations de désarmement en

2 vertu de la Résolution du conseil de Sécurité des Nations Unies 1441."

3 [Fin de diffusion de cassette vidéo]

4 Deuxième séquence vidéo :

5 [Diffusion de cassette vidéo]

6 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

7 "[imperceptible] --ils n'ont fait aucun effort, des efforts pour

8 procéder à un désarmement demandé par la communauté internationale. Les

9 faits nous montrent que l'Irak, Sadam Hussein et son régime, font tout ce

10 qui est possible pour dissimuler les armes de destruction massive. Je vais

11 maintenant vous passer un enregistrement qui est une conversation qui a été

12 mise sur écoute par mon gouvernement. La conversation a eu lieu en novembre

13 de l'an dernier. C'est une conversation entre un colonel et un général de

14 brigade d'une unité d'élite de l'armée irakienne, la garde républicaine.

15 "Le 20 juin, quatre jours plus tard, l'Irak a promis aux inspecteurs qu'ils

16 effectueraient des recherches supplémentaires. Vous allez maintenant

17 entendre un officier du QG de la garde républicaine donner des instructions

18 d'officiers sur le terrain. Cette conversation a eu lieu la semaine

19 dernière, le 30 janvier."

20 [Fin de diffusion de cassette vidéo]

21 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, alors que les Etats-

22 Unis disaient au Tribunal de La Haye que le simple fait de dire que c'est

23 une conversation écoutée, existait ou pas, pouvait nuire gravement aux

24 intérêts de sécurité nationale des Etats-Unis, on voit qu'au même moment,

25 les Etats-Unis diffusait publiquement des conversations qui avaient été

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1 mises sur écoute une semaine auparavant en Irak. Il est manifeste qu'il

2 faut que les Etats-Unis ait une motivation pour cela serve leur intérêt

3 national, et pour que les conversations soient rendues publiques. J'avance

4 que cette incitation doit venir d'une ordonnance produite par le Tribunal

5 en vertu de l'Article 54 bis du Règlement. Car, les arguments qui nous ont

6 été présentés jusqu'à présent par les Etats-Unis nous montre tout

7 simplement qu'ils n'ont pas envie de rendre public ces conversations

8 interceptées par leurs services en l'espèce parce que cela ne les arrange

9 pas. Mais lorsque cela arrange leur intérêt, ils sont prêts à rendre public

10 de telles conversations même si elles ne datent que d'une semaine à peine,

11 lorsqu'elle essaie de convaincre d'autres pays à envahir l'Irak.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Robinson, je vais revenir au

13 passage que vous avez cité, au passage de la décision Blaskic. Je ne

14 l'interprète pas de la même façon que vous. Pour moi, cela ne veut dire

15 rien d'autre que le fait que les Etats n'ont pas le droit, de manière

16 globale et générale, de refuser la production de documents sur la base

17 d'intérêt de sécurité nationale. La décision Blaskic a été rendue avant

18 l'élaboration de l'Article 54 bis qui a mis au point toute une démarche à

19 suivre avant son application.

20 M. ROBINSON : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, Monsieur le

21 Président. Justement, j'allais dire que l'Article 54 bis montre que les

22 intérêts relatifs à la sécurité nationale doivent recevoir une réponse par

23 l'application de modalité de l'Article 54 bis en son alinéa (F) et (G).

24 Cela ne donne pas un droit à un Etat de retenir ou de procéder à la

25 rétention d'information pour des raisons de sécurité nationale. Cet article

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1 met en place un mécanisme de protection au sujet de ces informations. Mais

2 c'est à la Chambre de première instance ou aux Juges de décider si les

3 informations qui sont communiquées ou pas doivent l'être, pas l'Etat lui-

4 même. L'obligation de fournir les documents existe toujours, et on ne peut

5 l'éviter en invoquant la sécurité nationale. Bien entendu, de telles

6 préoccupations peuvent être soulevées au moyen de documents, à huis clos,

7 ex parte, avec un seul Juge, avec ses propres traducteurs, interprètes,

8 sans compte rendu d'audience. Tout ceci est prévu par l'Article. Cela peut

9 être fourni, expurgé, avec une déclaration sous serment, pour qu'ils

10 remplacent certains des documents, et les documents peuvent être rendues à

11 la partie concernée si la Chambre de première instance estime qu'ils ne

12 doivent pas être communiqués. Voici toutes les mesures de protection qui

13 sont prévues par l'alinéa (F) et (G) de l'Article 54 bis. Voici comment on

14 répond aux préoccupations relatives à la sécurité nationale, mais il ne

15 s'agit pas d'empêcher de faire que les Etats renoncent à remplir leurs

16 obligations. Le gouvernement du Canada a déclaré que le processus de

17 communication d'information sensible prévu par l'Article 54 bis (F) et (G)

18 ne doit pas l'être si un Etat montre que ses intérêts sont lésés, et si cet

19 Etat a longuement coopéré avec le Tribunal, et en tant que simple

20 observateur. J'estime que cela ne tient pas du point de vue du droit.

21 D'abord, ce ne sont pas observateurs. Ils ont effectivement coopérés depuis

22 longtemps avec le Tribunal. Mais cela ne leur permet pas de bénéficier d'un

23 traitement de faveur. Ils ne sont pas ainsi exonérés de leurs obligations

24 prévues par l'Article 54 bis ou l'Article 29 du Statut. Les Pays-Bas nous

25 disent que fournir de telles informations pourraient mettre en cause les

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1 modes de production de telles informations, de tels renseignements. Comme

2 on le voit dans la vidéo que je viens de vous passer, on sait très bien que

3 ce sont des pratiques auxquelles se livrent les gouvernements de manière

4 courante, surtout en temps de guerre.

5 Pour conclure, je voudrais revenir aux propos tenus par Madeleine Albright.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais auparavant, vous n'avez pas parlé

7 de la pertinence. Cela figure très de manière très claire dans l'Article

8 concerné. Même en partant du principe que vous ayez raison au sujet des

9 intentions de la Chambre d'appel dans la décision Blaskic, cette question

10 de la pertinence se pose toujours. Ce que vous demandez dans vos requêtes,

11 ce sont des documents extrêmement généraux. Si on regarde la première, on

12 n'a même pas l'impression que ces documents aient trait au cœur de notre

13 affaire parce que vous parlez de conversations de tous types. Vous demandez

14 toutes les écoutes de toutes les conversations que le général Ojdanic a pu

15 avoir pendant la période en question.

16 M. ROBINSON : [interprétation] Je comprends cela, Monsieur le Président. Il

17 y a une raison à cela. Peut-être que ce serait une bonne occasion pour moi

18 de vous donner ces raisons. Nous pensons que cette communication est

19 nécessaire pour qu'il y ait une détermination juste de ce procès parce que

20 ceci montrera que le général Ojdanic n'a pas participé à aucun des crimes

21 dont il est accusé dans l'acte d'accusation.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. Je veux dire que je suis

23 bien l'argumentation. Ce que je ne parviens pas pour le moment, c'est

24 pourquoi vous ne nous donnez même pas quelques exemples de circonstances

25 dans lesquelles il serait en mesure de se rappeler de la période -- vous

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1 pourriez nous montrer quelque chose qui confirme ceci et qui pourrait être

2 nécessaire dans le contexte de cette affaire, peut-être quelque chose de

3 circonstanciel. Vous voulez vous assurer des éléments concernant ces

4 circonstances, mais il n'y a rien qui soit présenté à cet égard dans votre

5 requête.

6 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je peux vous donner

7 des exemples et je ne pense pas que ce soit, en quoique ce soit, limité par

8 ces exemples, mais je vais vous en donner un. Par exemple, lorsque le

9 général Ojdanic a entendu parler de l'incident de Racak en janvier 1992

10 [comme interprété], il a eu des communications avec des subordonnés. Il

11 leur a demandé d'enquêter et d'essayer de trouver ce qui s'était passé à

12 Racak et quelle avait été la participation de l'armée yougoslave à

13 l'incident. Par la suite, il eu des communications au nom de ses

14 subordonnés dans lesquelles on lui a dit que l'armée n'avait pas participé

15 à cela. C'est un exemple du type de communication qui aurait un caractère

16 pertinent aux fins du procès.

17 Je pense que la raison pour laquelle nous n'avons pas limité notre demande

18 à des incidents précis, c'est parce qu'il y a d'autres éléments pour

19 lesquels il est impossible de prédire ce qui se passait, mais qui

20 pourraient très bien avoir trait à l'état d'esprit du général. De

21 nombreuses autres conversations, qui peut avoir lieu avec ses subordonnés

22 ou avec le président Milosevic, avec d'autres personnes, pourraient

23 traduire quel état son esprit sans nécessairement pouvoir permettre

24 d'identifier le fait qu'il discute de tel ou tel incident particulier qui

25 ne figure pas dans l'acte d'accusation.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Robinson, il n'est pas

2 nécessaire pour une requête de cette nature de couvrir toutes les

3 éventualités possibles. Il y a certaines obligations qui s'imposent au

4 demandeur. Il se peut que vous puissiez retrouver certains documents --

5 certain matériel parce que vous l'avez identifié, de façon suffisante, pour

6 montrer et voir que ce qui est nécessaire pour la Défense. Ceci peut

7 produire, par exemple, au dépôt d'une nouvelle requête. Mais ce que vous

8 demandez ici - et je parle en mon nom propre - nécessite une justification

9 très bien étayée étant donné le caractère très large des demandes qui sont

10 présentées.

11 M. ROBINSON : [interprétation] Je comprends cela, Monsieur le Président. Du

12 point de vue pratique, même dans la déclaration que vous avez lue, de notre

13 expert, ces archives sont concernées et peuvent être recherchées sous forme

14 électronique. C'est la façon la plus habituelle de rechercher des données,

15 sous forme électronique, par des mots clés. Par exemple, si l'on cherche le

16 mot "Ojdanic" on pourra certainement avoir, à ce moment-là, avoir tout un

17 corpus de données qui, à ce moment-là, seront pertinentes, ou tout au

18 moins, potentiellement pertinentes.

19 A ce moment-là, la question doit être qui devrait examiner cette

20 documentation, pour déterminer si, oui ou non, cela porte sur l'état du

21 général Ojdanci, ou si cela a trait à son rôle dans la structure de

22 commandement de la Yougoslavie et d'autres aspects. Nous voulons, tout au

23 moins, que la Chambre de première instance puisse examiner ces documents

24 pour se déterminer -- parce qu'il est vraisemblable que nous aurons un

25 corpus d'événements qui -- peut-être que ce ne sera pas évident pour le

Page 742

1 public en général que cela a un caractère d'éléments à décharge, mais, en

2 fait, cela doit extrêmement utile pour que vous puissiez vous déterminer en

3 ce qui concerne les faits de l'espèce. Donc nous n'avons pas été en mesure

4 pour le moment de restreindre notre demande davantage de façon à obtenir la

5 documentation que nous recherchons.

6 Deuxièmement, les éléments de preuve, les éléments négatifs, pour ce

7 qui est des documents, c'est également très important pour la Chambre de

8 première instance de pouvoir les examiner. Pour montrer que certaines

9 conversations spécifiques que le général Ojdanic a tenues, ces documents

10 ont été examinés et qu'on n'a jamais entendu le général Ojdanic dire quoi

11 que ce soit qui puisse indiquer qu'il avait connaissance ou qu'il ait

12 participé ou qu'il ait accepté, planifié les crimes qui sont visés dans

13 l'acte d'accusation. Ceci est également des éléments de preuve très

14 importants pour la Chambre de première instance. Donc, en ayant la

15 possibilité d'obtenir tous les renseignements pertinents par l'effort des

16 pays concernés, comme nous l'avons demandé à la Chambre, nous serions en

17 mesure de vous présenter les éléments de façon à ce que vous puissiez en

18 juger. C'est un point important dans votre détermination de savoir si, oui

19 ou non, le général Ojdanic a commis les infractions dont il est accusé.

20 Donc, évidemment, nous voudrions idéalement restreindre, au tant que

21 possible, cette requête, mais on ne peut pas le faire au point qu'il y a

22 certaines choses pertinentes et utiles qui échapperaient. Il faut établir

23 un équilibre pour ce problème pour ne pas créer, évidemment, trop de

24 travail pour les Etats, mais avoir un ensemble de renseignements utiles

25 pour la Chambre de première instance et pour le général Ojdanic.

Page 743

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

2 M. ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge. Je

3 voudrais également conclure maintenant mes remarques avec ce qui a été dit

4 par l'ambassadeur Albright. Elle a dit ceci : "Il n'y aura pas de vainqueur

5 -- ce n'est pas un Tribunal de vainqueur. La seule victoire sera si le

6 droit prévaut."

7 Je voudrais demander que toutes les parties concernées par ce procès

8 s'efforcent de parvenir à ce but, qui est de fournir les renseignements

9 nécessaires qui vous permettront de déterminer quelle est la vérité en

10 l'espèce.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Robinson, est-ce que le fait

12 que vous ne réussissiez pas à restreindre la demande, voulait dire

13 qu'essentiellement vous partez à la recherche de renseignements ?

14 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que vous

15 pourriez dire cela. En ce qui concerne une requête, évidemment, ce sont des

16 recherches. Il s'agit également -- on pourrait évoquer les requêtes que

17 vous avez eues dans l'affaire Milosevic. Je pense que toute requête peut

18 être considérée comme étant une espèce de partie de pêche. Mais notre but

19 est de restreindre la mare dans laquelle on pêche, et d'obtenir autant de

20 poissons que possible dans cette mare. Je pense que c'est pour cela qu'il

21 faudra faire droit à notre requête. Je vous remercie.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

23 Nous avons prévu de suspendre l'audience. Nous aurions dû déjà la suspendre

24 à 16 heures. Nous l'interrompons maintenant. Suspension d'audience de 20

25 minutes.

Page 744

1 --- L'audience est suspendue à 16 heures 15.

2 --- L'audience est reprise à 16 heures 44.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons maintenant entendre

4 l'exposé présenté au nom du Canada par Madame Swords.

5 Mme SWORDS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur,

6 Madame les Juges du Tribunal. C'est un honneur de comparaître devant vous

7 au nom du gouvernement du Canada.

8 Le Canada se félicite de cette occasion de comparaître devant le Tribunal

9 car nous sommes très fortement préoccupés par la possibilité qu'un

10 précédent soit créé par l'ordonnance que demande le demandeur. Notre exposé

11 aujourd'hui se centre essentiellement sur la façon dont cette requête ne

12 satisfait pas aux conditions prévues à l'Article 54 bis du Règlement et

13 ainsi compromet la possibilité d'un fonctionnement équitable, dont l'objet,

14 le but de cette règle, de cet Article.

15 Ses points ont été couverts d'une façon relativement détaillée dans nos

16 écritures du 27 février 2003 sur lesquelles nous continuons de nous

17 appuyer. Aujourd'hui, nous allons brièvement éclairer certains aspects des

18 conclusions à la lumière de la nouvelle demande présentée par le demandeur,

19 sur la question de pertinence en juin 2003.

20 Nous soutenons que la requête devrait être rejetée. Egalement, du

21 point de vue pratique, en définitive, nous voudrions souligner que le

22 caractère extrêmement large de sa demande, fait qu'il est extrêmement

23 difficile pour les parties de s'engager de bonne foi, d'une façon qui est

24 significative dans un processus de coopération volontaire telle

25 qu'envisagée par l'Article 54 B du Règlement.

Page 745

1 Je passe tout d'abord à notre préoccupation essentielle concernant

2 cette requête, à savoir qu'elle est incompatible avec le but général et les

3 prévisions de l'Article 57 bis. Rien dans les écritures suivantes,

4 concernant la pertinence présentée par le Demandeur déposée en juin 2003,

5 n'a répondu à cette préoccupation. Le résultat a été que nos objections à

6 cette requête telle que décrite dans nos écritures ont été sans réponse.

7 Comme on l'a fait remarquer dans nos écritures, le Tribunal a estimé, dans

8 sa décision Blaskic, que les pouvoirs de contrainte du Tribunal doivent

9 être appliqués avec retenue et circonspection vis-à-vis des états, qui

10 après tout, ne sont pas directement partis aux poursuites intentées devant

11 le Tribunal. C'est au paragraphe 21 de cette décision. L'observation

12 liminaire, par conséquent, le Canada voudrait respectueusement faire

13 observer que le Tribunal va continuer de veiller à ce qu'il n'ait pas de

14 possibilité de faire un usage abusif des dispositions du Règlement 54 bis.

15 Forte de l'Article 54 bis, notre préoccupation concernant le respect de

16 l'Article 54 bis, en espèce, découle du fait que pratiquement aucune des

17 conditions, posées par cet article, ne sont pas satisfaites par la requête

18 du défendeur.

19 En particulier, la demande soulève deux problèmes essentiels.

20 Premièrement, c'est un cas typique et classique de pêche aux informations

21 et, deuxièmement, elle recherche des informations sans pertinence et

22 inutiles. En outre, elle soulève de façon inutile des préoccupations de

23 sécurité, les intérêts de sécurité nationale. Je voudrais évoquer

24 brièvement ces aspects de la requête qui soulèvent des problèmes.

25 Premièrement, la requête est un cas de pêche aux informations. Le

Page 746

1 demandeur ne donne aucune base pour laquelle il ne peut pas collecter des

2 renseignements particuliers qui pourraient être pertinents et nécessaires à

3 sa Défense, comme le prescrirait l'Article 54 bis et la jurisprudence et

4 relative du Tribunal. Comme le Juge Hunt l'a dit, dans la décision rendue

5 par la Chambre d'appel dans l'affaire Delalic, au paragraphe 4 de la

6 décision, qui est citée dans vos écritures au paragraphe 8, je cite :

7 "Une partie n'a pas le droit d'obtenir une ordonnance de produire de

8 la documentation, afin qu'il puisse y avoir accès, parce qu'il dit, tout

9 simplement, que cette documentation est pertinente à un aspect du procès ou

10 de l'appel. Il n'a pas le droit de procéder à une pêche aux informations en

11 ce sens qu'il souhaiterait pouvoir examiner la documentation de façon à

12 voir s'il peut découvrir des arguments qu'il pourrait présenter. Une

13 ordonnance de produire n'est pas la même chose que d'obtenir la

14 communication contre une partie."

15 Le demandeur devrait être en mesure d'identifier le renseignement

16 précis qu'il estime est essentiel à sa défense et d'expliquer comment ces

17 renseignements sont essentiels. A la différence du bureau du Procureur, les

18 Etats ne sont l'objet d'obligation de communication. Donc, de s'attendre à

19 ce qu'un Etat réponde à ce qui équivaut à une demande généralisée de

20 communication plutôt qu'une demande de production de renseignements

21 identifiés, est déraisonnable, excessif, et tombe en dehors du champ des

22 prévisions de l'Article 54 bis. En d'autres termes, le demandeur s'est

23 lancé dans un cas typique de pêche aux renseignements en demandant qu'on

24 lui fournisse des catégories d'information extrêmement vastes, sans avoir

25 d'abord établi de base pour étayer la croyance selon laquelle le Canada

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1 disposerait de quoi que ce soit de pertinent.

2 Dans les écritures suivantes présentées par le demandeur en juin

3 2003, on ne trouve rien qui permet de restreindre sa requête ou expliquer

4 la base sur laquelle il se fonde. Le demandeur doit limiter sa demande à ce

5 qui est pertinent et nécessaire. S'il n'est pas en mesure de le faire, on

6 peut en déduire qu'en fait il ne sait pas s'il existe ou non des

7 renseignements pertinents et, par conséquent, sa demande a un caractère

8 spéculatif et une pêche aux renseignements à caractère massif. C'est

9 exactement ce que le Règlement et la jurisprudence visent à exclure. En ce

10 qui concerne les conditions posées pour la pertinence et la nécessité, le

11 demandeur n'a pas démontré la pertinence de la plus grande partie des

12 renseignements qu'il recherche -- demande. Sa demande est extrêmement

13 large.

14 Par exemple, telle qu'elle est actuellement formulée, la requête de

15 la Défense vise notamment à obtenir la communication -- toutes les

16 communications au cours d'une période de six mois auxquelles le général

17 Ojdanic a participé. Ceci saisirait pratiquement tout, y compris les

18 conversations téléphoniques dans lesquelles le demandeurs s'occupait de ses

19 engagements privés, comme le Juge Bonomy l'a évoqué. A l'évidence, tout ne

20 saurait être pertinent à sa défense. Donc, la requête n'est évidemment pas

21 adaptée de façon à saisir uniquement les documents pertinents et

22 nécessaires. Là encore, la requête va au-delà des prévisions de l'Article

23 54 bis du Règlement. Le demandeur a dit aujourd'hui que la pertinence des

24 renseignements ne les concernait pas. Il parlait des Etats qui sont

25 présents ici aujourd'hui.

Page 748

1 Son appui pour cette proposition est la décision Kordic, au

2 paragraphe 40. Cette décision est antérieure à l'Article 54 bis. L'Article

3 54 bis, au paragraphe 1, que la pertinence est essentielle pour le

4 renseignement demandé aux Etats. Je voudrais rappeler que l'Article 54 bis

5 vise essentiellement les requêtes de production adressées à des Etats. Il

6 est donc évident que les Etats ont le droit de traiter les questions de

7 pertinence pour répondre à des requêtes visant à obtenir la production de

8 documents. Plus particulièrement, lorsqu'il s'agit de demandes aussi larges

9 que celle dont vous êtes saisis aujourd'hui. Dans ses écritures

10 supplémentaires présentées en 2003, le demandeur essaie de justifier sa

11 requête extrêmement vaste en essayant de prouver que quelque chose n'est

12 pas un fait négatif.

13 Par exemple, à la page 4, paragraphe 9 de ses nouvelles écritures, le

14 demandeur soutient que les interceptions de ces communications lui

15 permettent de montrer qu'il n'avait aucune connaissance coupable des

16 événements au Kosovo. Je le cite : "En montrant que, dans l'ensemble,

17 malgré le fait qu'il est enregistré sur un nombre X d'appels au cours de la

18 période même ou les crimes allégués auraient eu lieu, il n'a jamais été

19 entendu, ordonné, instigué, planifié, aidé, accepté ou empêché de punir un

20 crime de guerre."

21 Encore à la page 5, paragraphe 13 de la nouvelle pièce écrite, le

22 demandeur a dit que : "La communication de ses déclarations faites à

23 l'époque fournira la preuve - là encore je cite que : 'Pour le tout, avec

24 le nombre "X" d'appels téléphoniques, concernant le général Ojdanic, il n'y

25 a eu aucune preuve qui permet de conclure qu'il ait participé, ou qu'il ait

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1 eu connaissance, ou qu'il ait accepté ou manqué de punir un crime de

2 guerre'."

3 Autrement dit, le requérant n'est pas uniquement intéressé par

4 d'éventuels preuves à décharge dont disposerait les Etats. En réalité, ce

5 que veut faire le requérant, c'est s'appuyer sur des éléments dont ne

6 disposent pas les Etats, pour essayer de démontrer son innocence par une

7 déduction négative. Mais ceci pose deux difficultés. En premier lieu, une

8 telle approche nécessiterait que de nombreux ou plusieurs Etats fournissent

9 un volume considérable d'information afin que le requérant puisse faire le

10 tri et espérer n'y rien trouver. Or, ce n'est pas ce qui est prévu à

11 l'Article 54 bis du Règlement. Dans sa décision, dans l'affaire Blaskic, au

12 paragraphe 32, le Tribunal a bien préciser qu'un requérant doit :

13 "Identifier des documents précis et non pas des catégories vastes."

14 D'autre part : "Qu'une partie ne pouvait pas demander la production de

15 centaines de documents."

16 L'autre difficulté posée par cette démarche, c'est qu'elle est complètement

17 inutile. L'approche qui est envisagée sème la confusion s'agissant de la

18 charge de la preuve dans un procès pénal. La Défense n'a pas besoin d'avoir

19 accès à des parties importantes des archives de 25 Etats ou plus, afin de

20 démontrer qu'il n'y rien dans ses archives qui l'incrimine, et donc qu'il

21 peut être prisonnier innocent. Mais c'est, bien au contraire, à

22 l'Accusation de présenter des éléments de preuve concrets de sa

23 culpabilité. Si l'Accusation ne peut pas fournir de tels éléments de

24 preuve, à ce moment-là, forcément, on doit en tirer la conclusion de

25 l'innocence de l'accusé. Mais il n'est pas nécessaire, il n'est pas

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1 pertinent que l'accusé soulève ou invoque la présomption d'innocence en

2 affirmant que lui-même n'a pas été en mesure de trouver quoi que ce soit

3 qui l'incrimine.

4 Il est manifeste que l'ordonnance, ce qui est envisagé, proposé par le

5 requérant sort du champ de l'Article 54 bis. Pour reprendre les termes de

6 l'alinéa (B) de l'Article 54 bis, il convient de ne pas faire droit à cette

7 requête, parce que : "Les documents ou les informations ne sont pas

8 pertinents pour la question concernée et soulevée devant le Juge ou la

9 Chambre de première instance ou ne sont pas nécessaires à la détermination

10 équitable de celle-ci."

11 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, quoi qu'il en soit, le Canada

12 s'oppose à cette requête aux motifs que, dans la manière dont elle est

13 formulée actuellement, elle causerait une préjudice aux intérêts de

14 sécurité nationale du Canada. La position du Canada, au sujet de ses

15 intérêts de sa sécurité nationale, est présentée en détail dans nos

16 documents. Je ne vais pas répéter tout cela aujourd'hui; cependant, je

17 souhaite souligner une chose, c'est que la manière dont est formulée, dont

18 est rédigée la demande du requérant, par nature, vise les formes ou les

19 sources les plus sensibles d'information, qui sont, les interceptions de

20 communication, les écoutes.

21 Lorsque les parties demandent des informations sensibles à une état,

22 elles doivent avoir recours aux moyens qu'ils sont à même de causer le

23 moins de préjudice à la sécurité nationale de l'état en question. Si bien

24 que, le requérant devrait se concentrer sur le contenu des informations

25 concernées et non pas, sur les sources ou sur la façon de se procurer ces

Page 751

1 informations. Or, c'est exactement le contraire qu'il fait.

2 Pour terminer, et c'est une question d'ordre plus pratique, je dirais

3 que cette requête n'est pas une requête en dernier ressort, alors que c'est

4 prévu par le règlement. Le Canada respecte ses obligations statuées du

5 Règlement qui font qu'il doit agir de bonne foi, en répondant aux demandes

6 d'assistance. Mais une partie qui demande assistance doit également agir

7 conformément au Statut et aux Règlements du Tribunal et de bonne foi. Ceci

8 signifie, notamment, qu'il ne convient de demander la production d'une

9 ordonnance contraignante que lorsque toutes les autres possibilités ont été

10 envisagées et explorées. Ceci est inhérent à l'Article 54 bis du Règlement

11 et est essentiel pour le bon fonctionnement, le fonctionnement équitable et

12 efficace du Tribunal.

13 Mais pour explorer toutes les possibilités possibles, il faut faire

14 plus que simplement présenter une requête spéculative et vague suivie pas

15 une demande de mesures contraignantes. Ce qui est exigé c'est qu'une partie

16 requérante explore véritablement toutes les possibilités qui s'offrent à

17 elle, c'est-à-dire que la partie requérante doit respecter les paramètres

18 du statut, du Règlement, l'esprit du Statut et du Règlement en présentant

19 des requêtes appropriées, raisonnables et pertinentes. Si la partie en

20 question ne le fait pas, elle remet en cause toute véritable possibilité de

21 coopération volontaire.

22 En effet, en dépit de la valeur ou du caractère extrêmement général

23 de cette requête, nous avons entrepris des recherches préliminaires et nous

24 allons bientôt, bien vite réaliser que sans précision supplémentaire, nous

25 ne serons pas en mesure de déterminer quelles étaient les informations qui

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1 étaient nécessaires et pertinentes pour la défense. D'ailleurs, ce n'est

2 pas quelque chose que nous sommes contraints de faire, parce que, c'est au

3 requérant lui-même de préciser ou de donner des précision sur ce qu'il

4 souhaite et sur ce qui est pertinent et nécessaire pour sa défense. C'est

5 au requérant de rendre la coopération volontaire possible en présentant des

6 requêtes raisonnables. En d'autres termes, le requérant doit faire des

7 efforts de bonne foi pour donner une véritable chance à la coopération

8 volontaire.

9 Dans cet esprit, nous restons prêts à travailler avec le Conseil du

10 requérant et à discuter avec lui de toute requête ou demande raisonnable

11 aux fins de production d'informations précises et pertinente qui ne

12 remettraient pas en question, ni les intérêts de notre sécurité nationale.

13 Dans nos écritures, nous déjà expliqué que nous ne pouvons, par exemple,

14 pas confirmer l'existence, ou non, d'écoutes. De même, le Canada n'est pas

15 en mesure de fournir des informations qui lui ont été communiquées par des

16 pays tiers. Il serait donc beaucoup plus productif pour le requérant

17 d'identifier les informations qu'il recherche plutôt que simplement la

18 forme de ces informations ou leurs sources. Mais, jusqu'à ce que le

19 requérant

20 ne formule une demande qui permettra aux Etats de coopérer volontairement,

21 une requête aux fins de délivrance d'une ordonnance de production forcée

22 mais pas justifiée.

23 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, avant de conclure, je

24 souhaiterais corriger quelque chose qui a été dit par le conseil du

25 requérant. Le requérant a déclaré que le Canada était un observateur et

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1 n'était donc ou ne relevait pas de l'Article 29. Ce n'est pas le cas. Ce

2 que nous avons dit, au sujet de l'Article 29, c'est que nous reconnaissons

3 le pouvoir du Tribunal de délivrer des ordonnances à l'intention d'Etats,

4 pour fin de production d'éléments de preuve. Ceci est au paragraphe 3 de

5 nos écritures, parce que nous avons cité l'Article 29. Le requérant a tout

6 simplement sorti de son contexte des déclarations du Canada à ce sujet.

7 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'en ai bientôt terminé

8 des arguments du Canada dans le cadre de cette audience. Pour toutes les

9 raisons que nous venons de représenter et qui figurent également dans nos

10 écritures, le gouvernement du Canada demande respectueusement à ce qu'il ne

11 soit pas fait droit à cette requête.

12 Mais avant de terminer, permettez-moi de dire que le Canada souhaite

13 profiter de l'occasion qui lui est donné pour réaffirmer son engagement

14 dans le soutien au travail essentiel réalisé par le Tribunal et son

15 engagement à continuer à fournir une assistance appropriée aux parties

16 devant le Tribunal, dans le cadre de la recherche de la justice pénale

17 internationale.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup, Madame Swords.

19 J'allais justement vous demander ce que vous aviez à dire au sujet du

20 concept d'un état observateur.

21 Mme SWORDS : [interprétation] Oui, j'en ai parlé effectivement, nous en

22 avons parlé dans nos écritures, mais, ce que nous voulons dire, c'est que

23 dans la décision Blaskic, on parle d'Etats observateurs, en fait, on fait

24 référence à des Etats qui ne sont pas des Etats de l'ex-Yougoslavie ou

25 l'Etat du procureur ou de l'accusé. Donc, les seuls Etats qui ne sont pas

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1 des Etats observateurs sont les anciens Etats de la République de

2 Yougoslavie.

3 Ce que nous voulons dire, c'est que les états observateurs n'ont pas

4 d'intérêt direct dans le procès. Nous observons, nous ne sommes pas du côté

5 de l'accusation ni du côté de l'accusé. Mais, nous souhaitons dire que quoi

6 qu'il en soit, toutes les préoccupations que nous avons au niveau des

7 intérêts de notre sécurité nationale ne soient pas prises à la légère. Ceci

8 figure dans les paragraphes 24 et 25 de nos écritures.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Deux questions, Madame Swords. En

10 premier, est-ce que vous avez des sources juridiques à me donner à l'appui

11 de l'affirmation que vous faites, selon laquelle, le Canada n'est pas en

12 mesure de fournir des documents ou des éléments qui lui ont été fournis par

13 des pays tiers ?

14 Mme SWORDS [interprétation] : Je pense qu'en espèce, nous avons 15 pays qui

15 ont demandé des informations et là, je ferais reposer mon argument sur la

16 question de la nécessité, c'est-à-dire qu'il n'est pas nécessaire de

17 demander ces information, de demander à un pays de fournir des informations

18 qui lui ont été fournies par un autre pays, alors que tous les pays se

19 trouvent devant le Tribunal. Donc, c'est la question de la nécessité qui

20 entre en jeu ici.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Deuxième question à laquelle vous ne

22 serez pas forcément en mesure de répondre, c'est peut-être par naïveté que

23 je pose cette question mais, je suis un petit étonné de voir que l'OTAN

24 n'est pas représentée dans l'audience de ce jour et la Défense fait valoir

25 que dans sa requête que le simple fait que, de ne pas comparaître ici, de

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1 ne pas venir ici, revient à renoncer à son droit d'objecter à la requête de

2 la Défense. Est-ce que vous avez des observations à ce sujet, les arguments

3 présentés par Maître Robinson à ce sujet ?

4 Mme SWORDS [interprétation] : Non, peut-être que mes collègues pourront

5 répondre à cela demain.

6 M. LE JUGE BONOMY [interprétation] : Merci, Madame Swords.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons maintenant passer aux

8 représentants des Pays-Bas, Monsieur Lammers. Nous allons faire une pause

9 de cinq minutes afin de permettre aux participants de se réorganiser, de

10 s'asseoir à un autre endroit.

11 --- La pause est prise à 15 heures 07.

12 --- La pause est terminée à 15 heures 12.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, nous allons

14 maintenant entendre les Pays-Bas représentés par

15 M. Lammers.

16 M. LAMMERS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

17 en vertu du paragraphe 1 de l'ordonnance portant au calendrier, délivrée

18 par la Chambre de première instance, le 22 septembre 2004, et en vertu de

19 l'Article 54 bis du Règlement de procédure et de preuve, les Pays-Bas

20 souhaitent émettre un certain nombre d'objections au sujet de la demande

21 faite par M. Ojdanic aux fins de production d'information.

22 La demande du général Ojdanic est une demande par laquelle il demande

23 à la Chambre de première instance d'ordonner à l'OTAN et à un certain

24 nombre d'Etats de produire trois types d'information et de documents.

25 Premièrement, tout enregistrement, résumé, note ou texte relatif à des

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1 écoutes sous forme électronique, orale ou écrite, réalisé entre le 1er

2 janvier et le 20 juin 1999, et à laquelle aurait participé le général

3 Ojdanic.

4 En deuxième lieu, tous les enregistrements, résumés ou notes de

5 communications interceptées pendant cette même période initiées à partir de

6 la Yougoslavie et ayant trait au Kosovo, et dans laquelle on mentionnait ou

7 on se référait au général Ojdanic.

8 En troisième lieu, tout correspondance, mémo, rapport, compte rendu

9 ou résumé de toute déclaration réalisée par le général Ojdanic au cours de

10 la même période.

11 Les Pays-Bas sont tout à fait au courant des obligations qui sont les

12 nôtres aux termes de l'Article 29 du Statut du Tribunal et de la Résolution

13 du conseil de Sécurité numéro 827, obligation de répondre à toute demande

14 d'assistance ou ordonnance émanant du Tribunal et concernant la production

15 de documents, et d'aider dans la preuve, notamment. Le gouvernement des

16 Pays-Bas a toujours soutenu activement le Tribunal et cherche à assister le

17 Tribunal pour qu'il puisse réaliser sa mission.

18 Cependant, les Pays-Bas souhaitent invoquer la possibilité prévue au

19 paragraphe 1 de l'ordonnance portant au calendrier pour s'opposer à la

20 demande faite par le requérant, et ceci pour des raisons de pertinence,

21 pour des raisons de nécessité absentes, et pour des raisons de sécurité

22 nationale. Cependant, si la Chambre de première instance devait faire droit

23 à cette requête et délivrer une ordonnance, nous estimons que ceci devrait

24 être reformulé et prendre en compte un certain nombre d'objections

25 importantes et légitimes, et que les Etats concernés soient consultés avant

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1 que l'ordonnance ne soit délivrée.

2 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, notre argument principal,

3 c'est que la Chambre de première instance doit rejeter cette requête. En

4 vertu de l'Article 54 bis (B)(i), la Chambre de première instance peut

5 rejeter une requête si elle est convaincue que, je cite : "Les documents et

6 les informations ne sont pas pertinents pour la question concernée et

7 soulevée devant le Juge ou la Chambre de première instance ne sont pas

8 nécessaires au règlement équitable de celle-ci."

9 Nous affirmons qu'il convient de rejeter cette requête pour ces deux

10 motifs. De surcroît, même si la Chambre estime que la requête justifie la

11 production d'information en général, elle ne justifie pas cependant que

12 l'on passe outre aux préoccupations légitimes des Pays-Bas en matière de

13 sécurité nationale.

14 Les Pays-Bas estiment que, dans sa requête, le requérant n'a pas

15 prouvé que ces informations étaient nécessaires au règlement équitable de

16 la question concernée. Si la jurisprudence du Tribunal existe pour appuyer

17 la délivrance de telles ordonnances pour des catégories de documents, en

18 revanche, les catégories beaucoup trop générales, telle que celle qui nous

19 intéresse ici, sont interdites. Je voudrais vous référer à une décision

20 rendue dans l'affaire Kordic et Cerkez.

21 Les catégories d'information demandées sont inacceptables, car

22 beaucoup trop larges du point de vue de la source du sujet, de la période

23 et du lieu. La nature extrêmement de cette requête ainsi que le fait que le

24 requérant n'ait pas fait référence à des informations précises. Tout ceci

25 nous montre que le requérant est en train de se lancer dans une expédition

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1 de pêche aux informations. Le requérant n'est même pas sûr que ces

2 informations existent. Il essaie d'utiliser les pouvoirs du Tribunal pour

3 s'assurer qu'effectivement, c'est le cas. Or, de telle spéculation ne

4 justifie pas la délivrance d'une ordonnance par le Tribunal aux fins de

5 production d'information.

6 En plus, du fait que cette demande est beaucoup trop vaste et que le

7 requérant n'a même pas démontré que ces informations existaient, cette

8 requête ne répond pas aux conditions de nécessité, vu la charge importante

9 que cela ferait poser sur les Etats concernés. D'après la Chambre d'appel,

10 lorsque l'on statue sur la nécessité ou non de faire droit à une telle

11 requête : "Il faut trouver un équilibre; d'une part, entre la nécessité

12 pour le Tribunal d'obtenir l'assistance des Etats pour trouver des éléments

13 de preuve permettant de poursuivre les personnes responsables de violations

14 graves du droit humanitaire international, et la nécessité, d'autre part,

15 de faire en sorte que l'obligation des Etats d'assister le Tribunal dans

16 cette démarche ne soit pas excessivement laborieuse."

17 De surcroît, dans l'affaire Blaskic, la Chambre d'appel a statué que,

18 je cite : "Une partie ne saurait faire la demande de centaines de

19 documents, en particulier lorsqu'il est manifeste que l'identification, la

20 localisation et l'examen de tels documents par les autorités nationales

21 compétentes serait exagérément compliqué et ne serait pas forcément

22 justifié pour les exigences du procès." C'est exactement la situation à

23 laquelle nous sommes confrontés en l'espèce, Monsieur le Président.

24 En l'espèce, vu la nature extrêmement générale de la demande et le très

25 nombreux d'Etats concernés, la charge qui poserait sur les Etats concernés

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1 est considérable. Ceci est encore accentué par la nature extrêmement

2 sensible de certaines des informations demandées. L'accès à des

3 renseignements, en particulier à des écoutes, est nécessairement limité. Il

4 y a très peu de personnes qui puissent répondre à de telles demandes

5 d'information. Or, ici on voit que cette charge irait bien au-delà de la

6 nécessité qui n'a pas été démontrée par le requérant.

7 De plus, si cette ordonnance devait être délivrée, on pourrait

8 s'attendre à ce que d'autres accusés suivent le même exemple espérant

9 trouver, dans les archives de tel ou tel Etat, des éléments pouvant aider

10 leur affaire. Un tel précédent augmenterait la charge pesant sur les Etats

11 concernés. Ceci limiterait leur capacité à coopérer avec le Tribunal. Une

12 telle charge est particu --

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Lammers.

14 M. LAMMERS : [interprétation] Oui.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les interprètes vous demandent de

16 parler un peu plus lentement.

17 M. LAMMERS : [interprétation] Plus lentement ? Bien.

18 Une telle charge est injustifiée, et particulièrement injustifiée

19 lorsqu'elle concerne un Etat qui peut être qualifié d'observateur concerné.

20 La Chambre d'appel, dans l'affaire Blaskic, a statué que, lorsqu'il

21 convenait de statuer sur la demande d'une ordonnance de production, il

22 convient de faire une distinction entre les Etats qui sont des Etats

23 observateurs concernés et les Etats qui participent directement au conflit.

24 Or, en l'espèce, on peut dire que les Pays-Bas sont un observateur

25 concerné, s'agissant des crimes allégués. Je le répète, s'agissant des

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1 crimes allégués. Si bien que les efforts considérables qui sont requis par

2 l'ordonnance que l'on vous demande de délivrer, est encore plus injustifié

3 Enfin, le requérant n'a pas démontré que l'ordonnance demandée était

4 nécessaire puisque les informations demandées ne pouvaient pas être

5 obtenues d'une autre manière. En particulier, lorsqu'il s'agit de

6 communications auxquelles a participé le requérant, ou des déclarations

7 qu'il a faites lui-même, il semble qu'il paraisse inutile d'avoir recours à

8 une ordonnance à destination d'un Etat.

9 Le requérant est le mieux à même de savoir quelles déclarations qu'il a

10 faites, quelles communications il a initiées, ou auxquelles il a participé.

11 Il existe d'autres manières plus simples de fournir ces informations à la

12 Chambre de première instance. On peut, par exemple, citer à la barre les

13 participants à de telles conversations. Comme cela a été dit par la Chambre

14 d'appel dans l'affaire Blaskic, le Tribunal doit réserver ses pouvoirs de

15 contrainte : "A des cas qui sont véritablement nécessaires."

16 Les Pays-Bas font valoir que, vu le caractère extrêmement général de la

17 demande, vu qu'il s'agit d'une sorte d'expédition de pêche, la charge ou

18 les efforts considérables que cela requit de la part des Etats concernés

19 dont beaucoup peuvent être qualifiés d'observateurs concernés, s'agissant

20 des crimes allégués, ainsi que l'existence d'autres manières de se procurer

21 ces informations, ne permet pas de dire que c'est le cas.

22 Les informations demandées ne sont pas pertinentes en l'espèce. Comme cela

23 a été dit précédemment, l'ordonnance demandée est extrêmement large. Le

24 requérant demande un gros volume d'information. Or, on peut se demander de

25 quelle manière ces informations sont pertinentes en l'espèce. Le requérant

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1 fait valoir que les informations demandées ont une pertinence directe

2 s'agissant de sa participation aux crimes allégués, pour montrer si des

3 crimes de guerre lui ont été signalés ou montrer quel était son état

4 d'esprit s'agissant des événements qui avaient lieu au Kosovo et s'agissant

5 également de la prévention et de la sanction des crimes de guerre.

6 Cependant, en formulant sa demande, il ne se limite pas à ces

7 questions. Au contraire, il demande des copies de toutes les communications

8 ayant eu lieu pendant une période de six mois, toutes les communications

9 auxquelles il a participé ou toutes celles dans lesquelles il est

10 mentionné, ou toutes les correspondances concernant des déclarations faites

11 par lui-même pendant cette période. Il n'est pas nécessaire que ces

12 communications et ces déclarations aient un rapport avec la participation

13 du requérant, sa connaissance des crimes commis ou allégués, et son état

14 d'esprit s'agissant de ces mêmes crimes.

15 Dans sa nouvelle requête -- ses nouvelles écritures à l'appui de la

16 demande d'ordonnance à l'intention de l'OTAN et d'autres Etats aux fins de

17 production d'information, le requérant essaie de remédier à cette lacune.

18 Il fait valoir qu'à partir des informations qu'il demande, il montrera

19 qu'il n'a pas participé aux crimes allégués ou qu'il n'en avait pas

20 connaissance. En d'autres termes, il essaie de montrer que le fait qu'on ne

21 fasse pas référence à sa participation ou à sa connaissance des crimes

22 allégués prouve qu'il n'y a pas participé ou qu'il n'avait pas connaissance

23 de ces crimes. Cependant, la nature extrêmement vaste de sa demande et le

24 caractère douteux d'une preuve par [imperceptible] ou par l'inexistence ou

25 la négative, fait poser un grand doute sur la pertinence des documents

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1 demandés.

2 En conséquence, le requérant n'a pas démontré que les informations

3 demandées étaient pertinentes en l'espèce, et il convient de rejeter sa

4 demande de délivrance d'une ordonnance.

5 La communication des renseignements demandés soulève des

6 préoccupations légitimes en ce qui concerne les intérêts de sécurité

7 nationale qui doivent être respectés. La jurisprudence du Tribunal établit

8 que les Etats ont le droit de soulever des objections à des demandes de

9 production d'information basé sur des préoccupations des intérêts de la

10 sécurité nationale. Cette possibilité est incluse dans l'Article 54,

11 paragraphe (F). Les Pays-Bas, par conséquent, élève une objection de cet

12 ordre.

13 Les Pays-Bas sont conscients du fait que cette affirmation à

14 caractère général, selon laquelle la sécurité nationale serait en jeu est

15 insuffisante. Mais suivant les termes de l'Article 54 bis, au paragraphe

16 (F)(i), il faut : "Identifier, dans toute la mesure du possible --

17 préciser, dans toutes les mesures du possible, les arguments sur lesquels

18 il se fonde pour déclarer que ces intérêts de sécurité nationale seraient

19 compromis."

20 A cet égard, les Pays-Bas souhaitent faire remarquer, en particulier,

21 en ce qui concerne les deux premières catégories d'information demandée, le

22 caractère sensible des renseignements qui ont trait aux communications

23 interceptées et enregistrées. La communication même de tels renseignements

24 pourrait causer de graves préjudices aux intérêts de sécurité nationale,

25 non seulement compromettant les méthodes et les sources utilisées pour

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1 engendrer ce type de renseignements, mais également la possibilité pour les

2 Etats à qui la demande est présentée de réunir de tels renseignements à

3 l'avenir. Ces arguments sont également applicables à la troisième catégorie

4 de renseignements demandés, dans la mesure où ceci inclut des

5 renseignements recueillis par les personnes.

6 Des dispositions peuvent être prises pour protéger l'information,

7 mais les risques demeurent inhérents. Le Tribunal devrait seulement

8 demander aux Etats de se soumettre à de tels risques si le Tribunal conclut

9 que le demandeur a, effectivement, satisfait à la charge supplémentaire

10 d'accompagner ce risque. Ceci est d'autant plus le cas lorsque le Tribunal

11 envisage une ordonnance de communication adressée à un Etat qui a un

12 dossier de bonne coopération, de bonne foi.

13 Monsieur le Président, membres de la Chambre, pour les raisons

14 indiquées, la Chambre de première instance ne devrait pas délivrer

15 l'ordonnance demandée. Si toutefois la Chambre décide de ne pas rejeter la

16 demande complètement, les Pays-Bas font respectueusement valoir que la

17 Chambre devrait restreindre la portée de l'ordonnance qui serait rendue.

18 Comme on l'a déjà indiqué, la demande est beaucoup trop large, et

19 l'ordonnance de ce genre, si elle est rendue, devrait réduire

20 considérablement l'étendue de la demande à un minimum qui ne comprendrait

21 que des renseignements qui ont trait directement aux crimes allégués et

22 devrait être également exclus les renseignements en ce qui concerne la

23 demande qui pourrait mettre en danger les intérêts de sécurité nationale de

24 cet Etat. A cet égard, toute ordonnance devrait prévoir l'arrangement

25 nécessaire pour protéger les intérêts de l'Etat, à qui cela est demandé, y

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1 compris, ils ne soient pas limités à la possibilité de présenter les

2 renseignements sous une forme expurgée. Je me réfère à l'Article 54 bis

3 (F)(ii), pour offrir une protection analogue que celle qui doit être

4 fournie par le bureau du Procureur sur une note confidentielle.

5 Il est soutenu que, si la Chambre devait faire droit de donner une

6 ordonnance de ce genre, elle consulte les Etats qui demandent des faits en

7 ce qui concerne les modalités pour apaiser les préoccupations de ce pays.

8 En conclusion, pour les raisons qui viennent d'être données, les Pays-Bas

9 soutiennent que l'ordonnance ne devrait pas être rendue, ce n'est pas

10 nécessaire, ni pertinent et les Pays-Bas, en tant qu'Etat observateur, des

11 crimes allégués, qui ont toujours coopéré de bonne foi avec le Tribunal,

12 ont des préoccupations de sécurité par rapport à ce que leur montrait

13 l'ordonnance.

14 Subsidiairement, si la Chambre de la première instance doit décider de

15 rendre une ordonnance, elle devrait limiter sa portée pour qu'elle ne

16 contienne que des avis sur l'information concernant la participation, des

17 connaissances que le demandeur pourrait avoir, par rapport au crime

18 reproché; également exclus, devraient être tous les renseignements que la

19 demandeur pourrait acquérir, d'autres sources et la publication qui

20 risquerait de compromettre les intérêts de la sécurité nationale dont

21 l'Etat fait l'objet, à qui la demande est présentée.

22 Finalement, une telle ordonnance devrait prévoir les avantages pour

23 protéger les intérêts de sécurité nationale, surtout tout ce qui concerne

24 tout renseignement qui ne saurait ordonné de produire y compris la

25 possibilité d'offrir une protection analogue à celle prévue à l'Article 70

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1 du Règlement.

2 Monsieur le Président, je vous remercie de votre attention.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Lammers.

4 Je voulais simplement évoquer une question, là encore. Je reviens à cette

5 notion d'observateur concerné comme étant distant d'un Etat non directement

6 impliqué sur le territoire de l'ex-Yougoslavie parce qu'il ne serait pas

7 exact de dire qu'il faut tirer les conséquences juridiques de cette

8 distinction.

9 La Chambre d'appel, dans l'affaire Blaskic, a dit clairement que cette

10 distinction n'avait que les conséquences pratiques dans la mesure où les

11 états de l'ex-Yougoslavie ont pu probablement être à même, ils seront, ils

12 se verront plus vraisemblablement devant les coopérés de la façon prévue

13 par l'Article 29. J'évoque cette question parce qu'il ne ressort pas

14 clairement, d'après les exposés qui ont été fait par le Canada et par vous-

15 même que ce point a été bien compris. J'ai, d'une certaine façon,

16 l'impression que vous voulez qu'il y a un régime juridique différent qui

17 s'applique en ce qui concerne un observateur concerné que ceux pour qui ce

18 serait le cas, mais ce n'est pas le cas.

19 M. LAMMERS [interprétation] : Monsieur le Président, avec votre permission,

20 l'idée d'observateur est à observateur, telle que nous la comprenons, nous

21 étions un Etat et partie belligérante au Kosovo, donc nous ne le nions pas

22 ce fait. En ce sens, nous n'étions pas un Etat observateur, ce que nous

23 voulons dire par Etat observateur, c'est que nous n'étions pas actifs sur

24 le terrain, nous ne participions pas aux événements qui se sont produits

25 sur le terrain. Nous n'étions pas un Etat observateur des choses qui se

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1 sont passées sur le terrain, les crimes allégués dont il est question

2 maintenant et, dans ce sens, nous pensons que nous n'étions pas un Etat

3 observateur. Je vous remercie.

4 Nous n'étions pas directement non plus un Etat concerné.

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En d'autres termes, Monsieur

6 Lammers, même si vous êtes un Etat observateur et vous avez des

7 renseignements pertinents par rapport aux autres positions posées à

8 l'Article 54 qui seraient réunies, à ce moment-là, on pourrait vous

9 demander de ne pas le produire. Voilà comment je comprends la décision

10 Blaskic. Cette distinction n'a que des conséquences pratiques.

11 M. LAMMERS : Monsieur le Président, certainement nous allons examiner la

12 possibilité de voir si nous avons des renseignements que nous serions en

13 mesure de produire mais, comme on l'a déjà dit, dans cette position d'Etat

14 d'observateur. Il est vraisemblable que nous ne serons pas vraiment en

15 mesure de fournir l'information.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je voulais simplement demander aux

17 autres intervenants de donner leur opinion sur ce point.

18 LE JUGE BONOMY [interprétation] : Est-ce que je pourrais dire, sur un autre

19 point, que jusqu'à maintenant, nous n'avons pas été particulièrement

20 éclairés par les exposés en ce qui concerne les intérêts de sécurité

21 nationale ? On sait, partout dans le monde, que les communications sont

22 interceptées, enregistrées, il y a des débats très répandus dans le public,

23 quant à l'utilisation des communications enregistrées et de quelle façon on

24 arriverait à en être traitée. Si c'est le seul argument que les partis vont

25 présenter sur la question, il n'est guère utile de présenter un tel

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1 argument.

2 Toutefois, s'il y a quelque chose de plus substantiel, de plus fondamental

3 sur ce point, alors je serais intéressé à entendre ce que vous avez à dire

4 à ce sujet.

5 M. LAMMERS [interprétation] : Avec votre permission, j'ai été informé du

6 fait que le système d'enregistrement des renseignements certainement

7 utilisés que nous avons vue, en l'occurrence, en 1999, pour les Pays-Bas

8 est quelque chose de complexe, la situation est complexe. Nous ne disposons

9 pas de moyens technologiques de pointe, d'enregistrements que d'autres

10 états peuvent avoir. Certainement pas à l'époque, en tous les cas, que nous

11 avons à l'esprit pour le moment.

12 De plus, ce n'est pas seulement une question de trouver les renseignements,

13 c'est aussi une question du pouvoir les passer au crible, les trier et

14 comme nous l'avons déjà indiqué dans notre exposé, il n'y a qu'un petit

15 nombre d'individus qui serait disponible au Pays-Bas à qui on puisse

16 confier une demande visant à répondre à cette demande.

17 JUGE BONOMY [interprétation] : J'ai compris cela, Monsieur Lammers, j'ai

18 compris cela, mais, comme Mme Swords l'a fait remarquer, cela n'est pas la

19 méthode qui compte ici, c'est le résultat, le produit. En fait, comment

20 cette documentation -- ce matériel est obtenu n'est pas une préoccupation,

21 il n'y a même pas une préoccupation à ce sujet ici si jamais, il simplement

22 trait aux résultats.

23 M. LAMMERS [Interprétation] : Je comprends cela, je vous remercie.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

25 Président. Je vous remercie, Monsieur Lammers.

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1 Nous devons maintenant entendre le Pr Greenwood pour le Royaume-Uni, si

2 vous êtes prêt à commencer, vous pouvez, mais enfin, si non vous êtes prévu

3 pour intervenir demain.

4 M. GREENWOOD [interprétation] : Monsieur le Président, Monsieur le Juge de

5 la Chambre, j'ai le plaisir et le privilège de comparaître pour le Royaume-

6 Uni devant vous aujourd'hui. Le Royaume-Uni a toujours tenu à coopérer avec

7 le Tribunal et, effectivement, s'est donné tout le mal possible pour le

8 faire. Mais nous nous opposons fortement aux thèses présentées par le

9 conseil de la Défense dans la procédure actuelle.

10 Monsieur le Président, avant que je parle du fond de mes propres

11 exposés, je voudrais répondre brièvement à la question que Lord Bonomy a

12 posé en ce qui concerne la position de l'OTAN, à l'opposé de Mme Swords.

13 Evidemment, je ne suis pas ici -- je n'ai pas d'instruction de l'OTAN, j'ai

14 pris mes instructions du Royaume-Uni. Je suis sûr que des tentatives seront

15 faites quand la séance sera suspendue pour contacter le conseil de l'OTAN

16 et ceux qui ont le droit de s'exprimer sur la question.

17 L'OTAN elle-même n'a pas de méthode propre pour obtenir des

18 renseignements. Elle n'a pas de services de Renseignements. Elle n'a pas

19 d'installation, d'interception des communications, donc tout renseignement

20 demandé par la présente demande, qui pourrait être en la possession de

21 l'OTAN. Je dis que qui pourrait être en possession de l'OTAN peut, par

22 conséquent, avoir été obtenu par l'un des Etats membres.

23 La Défense a présenté des requêtes contre tous les membres de l'OTAN

24 et elle a retiré, ensuite, ses requêtes en ce qui concerne certains des

25 états membres de l'OTAN. Pour appliquer l'Article 54 bis, ce même principe

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1 doit être le bon pour ce qui est de l'OTAN. C'est auprès des Etats que ces

2 renseignements doivent être demandés, si on doit les demander du tout. Je

3 voudrais simplement exposer ceci aujourd'hui, mais je ne voudrais pas qu'on

4 pense qu'en n'étant pas là, l'OTAN, en quelque sorte, aurait manqué de

5 respect à la Chambre -- au Tribunal, ou qu'il y ait eu une renonciation

6 quelconque aux objections qui étaient enlevées.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne suis pas surpris du tout par

8 l'explication que vous donnée, Professeur Greenwood, et j'ai beaucoup de

9 sympathies pour les thèses que vous présentez en ce qui concerne le fait de

10 commencer par essayer d'obtenir des renseignements de la source. Mais y a-

11 t-il une base en droit pour ce qui est d'essayer d'obtenir des

12 renseignements de la source d'origine plutôt que d'une source secondaire ?

13 M. GREENWOOD : [interprétation] Monsieur le Juge, pour autant que je sache,

14 il n'y a pas de texte ou de droit particulier qui s'applique au Tribunal

15 sur cette question, mais ceci découle de la logique.

16 Je voudrais évoquer un point, par la suite, dans mon exposé, mais,

17 pour l'essentiel, la Défense essaie de faire -- cela n'est pas d'obtenir un

18 élément d'information particulier. Ce que le conseil essaie de faire -- on

19 ne peut pas dire, par exemple, qu'il y a le pistolet fumant. Ce qu'ils

20 essaient de démontrer c'est que quelque chose n'a pas été -- quelque chose

21 de négative. Ils essaient de prouver, à partir de toute une série très

22 importante, je le montrerai, de conversations que le général Ojdanic

23 n'avait pas le mens rea voulu pour les crimes ou les infractions dont il

24 est accusé. Il n'avait pas la connaissance nécessaire. Alors, si c'est le

25 but pour lequel ces renseignements sont demandés, à ce moment-là, deux

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1 choses deviennent très importantes immédiatement. C'est premièrement la

2 méthode par laquelle les renseignements sont obtenus parce que ceci touche

3 à la question de la fiabilité de l'information et, bien entendu, il s'agit

4 de renseignements qui ne pourraient se trouver qu'auprès de l'Etat qui est

5 la source de l'information.

6 Deuxièmement, si vous essayez de prouver quelque chose -- que quelque

7 chose n'a pas eu lieu, cela n'est vraiment pas très utile de montrer que

8 telle ou telle question n'a pas été mentionnée dans les 5, 10 ou 15 ou 50

9 conversations enregistrées, dont vous avez les enregistrements. Il faut que

10 vous démontriez qu'ils sont suffisamment complets, et qu'il est

11 vraisemblable qu'il n'y a pas eu d'autres conversations dans lesquelles le

12 sujet en question aurait pu être mentionné ou les phrases susceptibles

13 d'incriminer auraient été dites. Donc, la question de savoir si la

14 documentation de renseignements serait complète, là encore, seul l'Etat qui

15 a obtenu les renseignements en question pourrait en répondre.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, ce que je disais, c'est

17 qu'on pourrait préciser les occasions. Ceci pourrait, à ce moment-là, à la

18 Chambre de voir la pertinence, par exemple, de la possibilité d'obtenir les

19 renseignements en question de la source envisagée.

20 M. GREENWOOD : [interprétation] C'est possible, Monsieur le Juge, mais ce

21 dialogue peut avoir lieu. Il doit avoir lieu, mais, avec l'Etat qui est

22 censé être la source des enregistrements, on ne peut pas répondre à un

23 critère de nécessité pour s'adresser à une position qui serait une source

24 secondaire ou tierce lorsqu'il est possible de s'adresser à la source qui

25 est à l'origine de l'information et obtenir les renseignements d'une façon

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1 qui n'aurait pas été altéré. Ce serait, à ce moment-là, un meilleur type de

2 preuve. On s'adresse, à ce moment-là, à l'Etat qui est le plus en mesure de

3 donner les renseignements aux questions. En l'espèce, et précisément, ce

4 que la Défense a fait, elle a présenté des requêtes contre tous les Etats

5 membres de l'OTAN, donc, il ne va pas avoir, dans ces circonstances, la

6 nécessité qu'il y ait une ordonnance adressée à l'OTAN.

7 Messieurs les Juges, à moins que je ne puisse vous aider encore davantage

8 sur cet aspect, je voudrais maintenant passer au caractère fondamental de

9 mon exposé. Le Royaume-Uni a présenté des écritures pour répondre à la

10 requête, il y a une vingtaine de mois, en février 2003. Il y a eu, bien

11 entendu, un certain nombre d'événements depuis lors. Il y a des

12 communications au titre de l'Article 66 du Règlement faites par

13 l'Accusation. Il y a eu également des arguments présentés par les conseils

14 de la Défense en juin 2003, donc, avoir une audience, pour le moment, est

15 nécessaire. Il est nécessaire de revoir les arguments qui ont été présentés

16 par écrit il y a près de deux ans.

17 Nous disons qu'en regardant de plus près, rien n'a changé du tout. La

18 Défense n'a rien fait au cours de près de deux ans qui étaient à sa

19 disposition, pour attirer sa demande, en aucune manière, et toutes les

20 objections que le Royaume-Uni a élevé dans nos écritures, s'appliquent

21 toujours -- sont toujours valables aujourd'hui. Je ne propose pas de les

22 répéter dans votre Chambre - cela serait évidemment inutile - mais

23 j'aimerais qu'il soit bien clair que le fait que je ne me répète pas ne

24 veut pas dire qu'en aucune manière, nous nous en écartions.

25 Ce que je souhaite faire, c'est de me centrer sur la réponse faite aux

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1 thèses présentées par la Défense, à la fois dans ces écritures de juin 2003

2 et, verbalement, cet après-midi. Le premier élément et le plus important

3 est le suivant : la Défense n'a pas suivi la procédure prévue par l'Article

4 54 bis pour présenter une requête de ce type. L'Article 54 bis a été

5 introduit dans le règlement afin de donner effet aux principes exposés par

6 la Chambre d'appel dans sa décision dans l'affaire Blaskic. L'un de ces

7 principes est résumé ainsi dans la décision Blaskic :

8 "Au final, le Tribunal ne peut remplir ses fonctions que s'il peut

9 s'appuyer sur la coopération et l'assistance de bonne foi des Etats

10 souverains. Il est donc de bonnes politiques aussi bien du Procureur que de

11 la Défense d'essayer d'abord, par le biais d'un esprit -- de la

12 coopération, d'obtenir l'assistance des Etats concernés, et de ne demander

13 à une Chambre ou à un juge d'intervenir que si cela ne fonctionne pas, en

14 vertu de l'Article 29 du statut."

15 L'INTERPRÈTE : L'interprète signale qu'il ne dispose pas du texte.

16 M. GREENWOOD : [interprétation] C'est pour cette raison que l'Article

17 54 bis prévoit que la Défense doit prendre des mesures raisonnables pour

18 obtenir la coopération. Il y a toute une série de démarches à entreprendre

19 avant de demander l'ordonnance de production forcée. Mais la Défense nous

20 dit que le général Ojdanic : "est allé très loin -- a fait beaucoup dans ce

21 sens."

22 Il est intéressant de voir qu'il s'est, effectivement, parlé et, tout

23 en gardant à l'esprit la phrase que je viens de vous lire, tout d'abord, le

24 17 mai 2002, la Défense a écrit au Royaume-Uni, et d'après ce que nous

25 comprenons, à d'autres pays, dans des termes semblables, même s'ils ne sont

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1 pas complètement identiques, à ceux de la requête. Le 20 juin 2002, cette

2 lettre a été communiquée au bureau du Commonwealth et des Affaires

3 étrangères. Le 26 juin, ce bureau a reçu la lettre. Le 26 juin 2002, le

4 Royaume-Uni a répondu à la Défense dans les termes suivants, je cite :

5 "Vous donnez des catégories très vastes de documents dans votre requête. Il

6 serait utile que vous soyez en mesure de préciser, autant que faire se

7 peut, les documents ou les éléments auxquels est fait allusion votre

8 requête."

9 Or, Monsieur le Président, nous estimons que, là, on ne peut pas dire

10 que nous avons répondu de manière négative. Nous n'avons nullement renoncé

11 ou décliné la demande. La réponse de la Défense semble être un e-mail qui

12 aurait été envoyé au ministère des Affaires étrangères le 5 septembre 2002.

13 Mais nous ne l'avons jamais reçu. Nous avons écrit à la Défense en janvier

14 2003 pour dire que nous n'avions jamais reçu le courrier électronique dont

15 ils parlaient dans leur requête.

16 Mais cet e-mail est quand même très intéressant parce que cela nous en dit

17 beaucoup sur la requête actuelle et sur la façon dont la Défense a rempli

18 ses obligations de coopération prévues par l'Article 54 du règlement.

19 Permettez-moi de citer les passages pertinents, à votre intention,

20 Messieurs les Juges. Il s'agit d'un courrier électronique qui vient de Me

21 Peter Robinson a l'intention de

22 M. McDuff [phon], celui qui était signataire de la lettre du 26 juillet

23 2002:

24 "En 1999 --

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On vous demande de ralentir.

Page 774

1 M. GREENWOOD : [interprétation] Merci, excusez-moi, je suis en train de

2 lire. C'est pour cela que j'ai accéléré.

3 "En 1999, avant la guerre du Kosovo et pendant cette guerre, les services

4 de renseignements de plusieurs gouvernements ont intercepté des

5 communications de personnes appartenant aux structures de commandement

6 militaire et civil, du gouvernement de la République de Yougoslavie. Nous

7 demandons à votre gouvernement de faire une recherche dans ses dossiers, et

8 de fournir les communications interceptées auxquelles a participé,--

9 premièrement auxquelles a participé le général Ojdanic, deuxièmement dans

10 lesquelles le général Ojdanic est mentionné. Ceci uniquement pour la

11 période allant de janvier à juin 1999." Me Robinson déclare ensuite que

12 ceci est précis. Il est possible de contacter tous les services de

13 Renseignements pour leur demander d'utiliser par exemple le terme "Ojdanic"

14 pour entamer ces recherches.

15 "Notre troisième demande a trait à ce que l'on a dit au sein de votre

16 gouvernement au sujet des propos tenus par M. Ojdanic sur ce que l'on a dit

17 du général Ojdanic. Nous vous demandons de prendre contact avec tous les

18 organes de votre gouvernement, dans le domaine des renseignements, des

19 affaires diplomatiques et autres pour chercher tout rapport, mémo et

20 cetera. (On se demande ce à quoi fait référence le terme et cetera, de tout

21 ce qui a déjà été évoqué) dans lesquels le général Ojdanic est mentionné

22 pendant cette période limitée de six premiers mois de 1999."

23 J'espère que cette réponse vous est utile, et nous espérons que vous

24 coopèrerez." (Fin de citation de la lettre dont ne disposent pas les

25 interprètes à la cabine)

Page 775

1 Dans le dossier, nous n'avons aucune mention de la date à laquelle ce

2 courrier électronique a été envoyé. Au moyen de quel ordinateur et cetera,

3 ou qui était le courrier électronique du destinataire, alors que le

4 courrier électronique, l'adresse électronique de M. McDuff figure sur la

5 lettre du 26 juillet, ainsi que d'ailleurs que son numéro de téléphone.

6 Ensuite c'est le silence quasi-total. Plus de manifestation de la Défense.

7 Ils ne reprennent plus contact avec M. McDuff suite à cet e-mail. Ils ne

8 lui écrivent pas, ils n'envoient pas de nouveau message électronique. Il ne

9 se passe plus rien, et même après le 13 janvier 2003, au moment où la

10 Défense a forcément reçu la lettre du gouvernement britannique dans

11 laquelle on lui apprend que le courrier électronique en question n'a pas

12 été reçu. Dans les quelques années qui suivrent rien, pas de réaction. Mais

13 au cours de son intervention, cet après-midi, Me Robinson a dit que le

14 gouvernement concerné n'avait fait aucun effort pour contacter la Défense

15 pendant les deux ans qui se sont écoulés depuis.

16 Moi je voulais renverser cette logique. Qu'a fait la Défense ? Parce que

17 c'est à la Défense de remplir les obligations prévues par l'Article 54 bis

18 du règlement. Quelles ont été les démarches entreprises par la Défense ? La

19 réponse est très simple. La Défense n'a pris aucune mesure. Ceci est très

20 significatif, parce que d'après ce que nous savons au cours de ces deux

21 ans, bien que je ne puisse pas vous dire exactement à quel moment, mais

22 pendant cette période, il y a eu communication de pièces par l'Accusation

23 en vertu de l'Article 66 du règlement. Or ceci aurait pu donner une idée à

24 la Défense de la thèse de l'Accusation. Deuxièmement, quels seraient les

25 éléments que produirait l'Accusation contre leur client, et troisièmement,

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1 quels éléments relatifs aux réunions, correspondances, coups de téléphone,

2 qui figuraient dans les éléments produits par la Défense.

3 Si l'on regarde au paragraphe 10 de cette requête, note de bas de

4 page 9, on trouve la phrase suivante je cite :

5 "Pour le général Ojdanic, ce sera probablement la première de

6 deuxième requête d'information et de document. La deuxième aura lieu une

7 fois que le Procureur aura fini de communiquer les pièces prévues par le

8 règlement à la Défense. A ce moment-là le général Ojdanic sera en mesure

9 d'être aussi précis que possible, s'agissant de ce document."

10 Monsieur le Président, oublions le fait qu'ici on fait référence à

11 une demande encore plus vaste, encore plus général, et non pas une demande

12 plus précise. Il y a quelque chose qui ressort de cette note de bas de

13 page. En premier, on y reconnaît l'importance des pièces communiquées par

14 l'Accusation, pour le travail de la Défense. Mais la Défense ne n'est pas

15 manifestée une seule fois, depuis que l'Accusation lui a communiqué les

16 pièces qu'elle devait lui communiquer. En deuxième lieu, cette note de bas

17 de page nous indique si c'était nécessaire que la Défense a complètement

18 abandonné une idée de coopération avec les Etats ici. On ne parle d'une

19 autre lettre, d'une nouvelle demande de coopération. Non tout de suite, on

20 parle d'une nouvelle demande faite auprès de la Chambre aux fins de

21 délivrance d'une ordonnance de production forcée. Or ceci ce n'est pas ce

22 qui est prévu par l'Article 54 bis.

23 Je pense qu'il est bon de rappeler que la charge de la preuve ici, repose

24 sur la Défense, étant donné que c'est la Défense qui fait cette requête,

25 elle doit montrer qu'elle remplit toutes les conditions prévues par

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1 l'Article du règlement concerné. L'affaire Blaskic, et la décision qui a

2 été rendue dans cette affaire, elle a été avant l'adoption de l'Article 54

3 bis, cependant on y voit clairement quelle est l'idée force de l'Article 54

4 bis.

5 Il s'agit de faire preuve d'un esprit de coopération, or ici la

6 Défense n'a nullement cherché la coopération. Elle s'est contentée

7 simplement de dire qu'on pourrait procéder à une recherche dans les

8 dossiers en utilisant le mot clé, "Ojdanic," or cela ne serait absolument

9 d'aucune utilité, cette juridiction n'était d'aucune utilité.

10 Monsieur le Président, nous reconnaissons comme la Défense que le

11 Tribunal n'a pas à légiférer, n'a inventé la loi ici. Il s'agit d'appliquer

12 les règles de droit qui existent, de les appliquer équitablement. Si on

13 regarde la jurisprudence du Tribunal, et l'Article 54 bis, on voit bien

14 quels sont les principes en action ici. Premièrement, il ne s'agit pas ici

15 de se lancer dans une pêche aux informations, ceci n'est pas autorisé. La

16 Défense doit demander des informations spécifiques, des documents précis,

17 détaillés autant que possible, limiter en nombre. Ceci est bien dit par la

18 Chambre d'appel dans sa décision Blaskic. Si on regarde la requête qui nous

19 est présentée, on voit qu'elle est complètement à l'opposé de ces principes

20 : "Toutes les écoutes, toutes les communications, auxquelles le général

21 Ojdanic a participé pendant une période de six mois." Voilà ce qu'on nous

22 demande. Bien que Me Robinson cet après-midi se soit concentré sur le terme

23 d'écoute, on voit que dans sa requête il y va plus loin, il est plus

24 général, il ne veut pas simplement avoir des écoutes, les écoutes de

25 première main, il veut également les notes, les résumés qui auraient trait

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1 à ces conversations. Les analyses de ces conversations, de ces écoutes,

2 donc si on analyse cette requête puisque la requête met en avant le fait

3 qu'à l'époque il y avait beaucoup d'activités des services de

4 renseignements, donc on voit que l'on est en train de parler de milliers de

5 documents et d'information.

6 Avec tout le respect que je dois à Me Robinson, je crois qu'il n'a pas cité

7 comme il se devait la décision Kordic à l'intention des Juges de la

8 Chambre, puisqu'il a semblé dire que cette décision concernait ou

9 envisageait la production de centaine de documents. Parce qu'à ma

10 connaissance, cette décision fait exactement le contraire. Au paragraphe

11 34, sous paragraphe 3 de la décision Kordic, on résume le droit applicable,

12 ainsi que la décision Blaskic, en disant : "Qu'une ordonnance de

13 production des documents ne doit pas être d'une exécution excessivement

14 difficile, et qu'une partie ne saurait demander la production de centaines

15 de documents, en particulier lorsqu'il apparaît que l'identification, la

16 localisation et l'examen de ces documents par les autorités compétentes,

17 seraient d'une difficulté excessive et ne seraient pas justifiés par les

18 nécessités du procès."

19 Monsieur le Président, j'en ai pour encore environ 10 minutes pour mon

20 exposé ne sait pas si vous souhaitez que j'essaie de finir ce soir, ou si

21 vous préférez que je reprenne demain matin.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, veuillez essayer de finir

23 maintenant.

24 M. GREENWOOD : [interprétation] Je vais m'y efforcer.

25 Il n'y a eu aucune tentative faite par la Défense pour être plus précise en

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1 demandant simplement sur cette très grande quantité d'enregistrements lors

2 d'aucune réunion où le général Ojdanic a participé, toute conversation dans

3 laquelle il a pris part. Or, le général Ojdanic sait parfaitement quelles

4 ont été les réunions essentielles auxquelles il a participé au cours de

5 cette période. Il ne suffit pas que le conseil de la Défense dise qu'il ne

6 se souvient pas de tous les coups de téléphone qu'il a pu avoir. On ne

7 s'attend pas à cela. Mais j'imagine qu'il doit se souvenir de toute réunion

8 importante à laquelle il y est allé ou a participé pendant la période en

9 question, toutes les conversations importantes qu'il a pu avoir avec le

10 président ou avec l'hiérarchie du gouvernement. Rien ne permet de

11 restreindre ce domaine, rien ne permet de préciser ce qui est recherché.

12 Le deuxième élément de la demande vise tous les enregistrements résumés,

13 notes dans lesquelles le général Ojdanic est mentionné, même s'il n'a pas

14 participé à la conversation et même s'il n'était pas présent. Troisième

15 élément visse toute correspondance, mémorandum, rapports, enregistrements,

16 ou résumés de déclarations faites par le général Ojdanic au cours de cette

17 période : "Tout représentant de notre organisation, y compris des sources

18 de renseignements travailleurs pour votre compte."

19 Ceci, évidemment ne correspond absolument pas à ce qui est exigé dans la

20 décision Kordic rendue par la Chambre d'arrêt ni les points précis qui

21 exigent l'Article 54 bis du règlement. C'est un classique de pêche aux

22 informations. Ce que la Défense souhaite faire c'est ils veulent avoir la

23 possibilité de chaluter à travers l'ensemble des dossiers du service de

24 renseignements, ministères des Affaires étrangères, les ambassades, et

25 autres organes de ce qui était à l'origine 25 Etats, qui est maintenant

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1 ramené à 12 états.

2 En l'occurrence, dans l'affaire Delalic, le Juge Hunt, a défini la partie

3 de pêche aux renseignements : "Lorsqu'une partie n'avait pas d'élément de

4 renseignements et n'avait aucun renseignement pour savoir s'il y avait oui

5 ou non des poissons dans l'étang, mais voulait pouvoir crailler ensemble de

6 l'étang pour savoir s'il y avait des poissons."

7 C'est toujours un élément, bien entendu, d'une demande en ce sens. Ce qui

8 caractérisait sa demande, c'est qu'il fallait évidemment un permis de

9 pêche. Une fois qu'il aurait son permis, il pourrait à ce moment-là

10 commencer à pêcher, et utiliser sa canne à pêche. Ce n'est pas ce qu'il

11 essaie de faire. Ce qu'il essaie de faire c'est de pouvoir aller en mer

12 avec un chalut et de se mettre à draguer le fond des océans jusqu'à ce

13 qu'il trouve quelque chose d'intéressant. Il n'est pas le capitaine Ahab

14 cherchant à voir un poisson particulier. Il veut trouver n'importe quel

15 poisson.

16 Gardons cette note au bas de page à l'esprit, pour ce qui est de la

17 communication. La note de bas de page envisage une deuxième demande qui

18 peut être présentée plus tard. Il n'est pas difficile de voir ce que cela

19 va être. Cela va être le fait, que la Défense ayant déjà demandé des

20 enregistrements de conversations ou de réunions auxquelles le général

21 Ojdanic a participé où il était mentionné, la demande suivante sera de voir

22 où il n'est pas mentionné ou il n'a pas participé. C'est la démarche

23 suivante dans cette voie. Ceci ne répond pas aux critères de spécificité de

24 l'article.

25 Il faut également que la demande ne soit pas exagérément lourde. Bien, la

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1 Défense n'a pas montré cela. Au paragraphe 26 à 30 des écritures du

2 Royaume-Uni, effectivement, nous avons exposé pourquoi cette demande serait

3 beaucoup trop lourde. Brièvement, répondu, c'est en plus du volume énorme

4 de la documentation qui serait couvert par une demande aussi large que

5 celle-là. Les documents qui devraient être inspectés de façon à trouver ces

6 renseignements -- qui seraient entre les mains du Royaume-Uni par

7 différents organes ou départements. Cela ne se trouve pas réuni à un seul

8 endroit. On ne peut y trouver sous forme électronique. Il est trop facile

9 de demander cela. Il est clair qu'on ne devrait pas pouvoir fournir les

10 réponses que la Défense souhaite. La Défense voudrait des renseignements

11 qui généralement n'existent que sous forme écrite et non pas sous forme

12 électronique. Je suppose que ceci est reconnu d'ailleurs dans le e-mail du

13 2 septembre 2002 lorsqu'il est dit qu'une recherche pourrait être utile à

14 partir d'un mot clé.

15 Le fait de ne pas être précis constitue l'essentiel du problème en

16 l'occurrence. Même lorsque le défendeur aurait pu se montrer beaucoup plus

17 précis, par exemple, en donnant une liste des réunions auxquelles le

18 général Ojdanic a participé, ils ne l'ont pas fait. Il est très clair que

19 la charge de la preuve en l'espèce va, à ce moment-là, incomber uniquement

20 aux Etats. La Défense ne veut pas participer à faciliter cette tâche du

21 tout.

22 Il y a deux points.

23 Il y a premièrement la question de la pertinence et de la

24 nécessité à savoir que les renseignements demandés doivent être pertinents,

25 et que sa communication doit être utile, et indispensable, et nécessaire

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1 pour le procès, c'est ceci qui est posé dans les dispositions de l'Article

2 54 bis. Respectueusement, nous souscrivons au test présenté par le conseil

3 du Canada, à savoir que Kordic n'empêche pas les Etats d'élever cet

4 argument. La question, bien entendu, est de savoir si les renseignements

5 sont pertinents ou nécessaires, et ceci appartient à la Chambre. C'est à la

6 Chambre qu'il incombe d'en décider. Il n'a jamais été dit que ce sont les

7 états qui peuvent avoir le dernier mot. Certainement le Royaume-Uni ne

8 suggère pas cela.

9 Mais le problème ici est de savoir à partir du moment où un cordon lui

10 aurait été jeté, il est à peu près impossible de dire ce qui sera pertinent

11 et ce qui ne l'est pas. Les thèses de la Défense à la fois dans leurs

12 écritures de juillet et dans leur exposé de cet après-midi et que tout

13 pourrait être pertinent s'il connaît suffisamment l'affaire pour essayer de

14 démontrer que le général Ojdanic n'avait pas la connaissance nécessaire, ou

15 ni n'avait l'état d'esprit voulu. C'est une thèse qui, en fait, va

16 démontrer beaucoup trop. Loin de montrer que la documentation recherchée

17 est effectivement nécessaire, ceci démontre que la Défense veut passer au

18 tout ce qu'elle pourra trouver pour essayer d'identifier quelque chose qui

19 serait pertinent et qui serait nécessaire au milieu de toutes ces

20 informations.

21 Bien entendu, la Défense n'a pas besoin de prouver dans un procès au pénal

22 quelque chose de négatif. C'est à l'Accusation de prouver que le général

23 Ojdanic a bien commis les infractions dont il est accusé avec l'intention

24 délictueuse en question à l'élément mental. La Défense n'a pas requise à

25 prouver son innocence. Par conséquent, demandez un volume aussi important

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1 de documentation ne peut pas répondre au critère de pertinence et

2 nécessité.

3 Enfin, pour finir, Monsieur le Président, quelques mots, en ce qui concerne

4 les intérêts de sécurité nationale. Il est clair que le Royaume-Uni

5 n'essaie pas d'obtenir une exception pour la protection de ses intérêts

6 nationaux de sécurité, mais Blaskic dit bien clairement que les

7 préoccupations des Etats, en matière de sécurité, sont des considérations

8 pertinentes qu'il essaient de prendre en considération, et que la procédure

9 prévue à l'Article 54 bis a précisément été conçue pour permettre que les

10 préoccupations de sécurité puissent être évoquées en ce qui concerne

11 certains renseignements précis. Tandis que, dans l'affaire qui nous occupe,

12 il est à peu près impossible de le faire. On ne peut pas procéder à cet

13 exercice avec une requête -- une demande aussi vaste que celle qui nous est

14 présentée.

15 Nous disions qu'il est parfaitement évidemment en ce qui concerne -- que

16 ceci va toucher aux intérêts de sécurité. Tout le monde sait, bien sûr,

17 qu'il y a des interceptions, et des enregistrements. Mais là, ce n'est pas

18 la question. La question c'est l'importance au point de vue sécurité de

19 telle conversation particulière qui a été interceptée -- enregistrée à un

20 moment et à une date particulière, la méthode par laquelle elle a été

21 enregistrée qui peut être très pertinente pour ce qui est de sa fiabilité,

22 et par conséquent, au poids que la Défense essaie de lui attribuer.

23 Vous voyez également la question du renseignement…

24 La troisième partie de la demande est rédigée de façon assez prudente. La

25 référence qui est faite à ces "sources qui ont agi pour votre cote". Il

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1 s'agit d'inclure évidemment tous les informateurs et tous les

2 renseignements recueillis parmi des personnes. Ceci soulève évidemment des

3 préoccupations très étendues en matière de la sécurité, en ce qui concerne

4 l'identification d'une personne dont la vie pourrait être mis en danger,

5 l'identification des méthodes de collecte du renseignement, qui pourra

6 mettre en danger à l'avenir la vie de certaines personnes.

7 Je comprends ce que dit Lord Bonomy lorsqu'il dit que cela n'aide pas que

8 nous n'ayons pas été en mesure de savoir les détails. Le problème, c'est la

9 largeur -- l'étendue de la demande, et le fait qu'il est difficile pour les

10 Etats de trouver très exactement quel type d'information, de

11 renseignements, pouvaient soulever des préoccupations de cet ordre. C'est

12 pourquoi l'ensemble, le but même de l'Article 54 bis est dans quelque sorte

13 contourné par cette demande. Il y est a fait échec. L'Article 54 bis permet

14 d'équilibrer les préoccupations de sécurité par rapport aux demandes

15 d'information. C'est pour cela qu'à notre avis cette requête devait être

16 rejeté. Nous ne passons pas qu'une ordonnance pourrait être reformulée dans

17 un sens qui pouvait apaiser nos préoccupations.

18 Nous demanderions donc à -- on demande à la Défense de faire ce qu'elle

19 aura dû faire en premier, c'est-à-dire, d'examiner exactement les

20 dispositions de l'Article 54 bis du Règlement initialement, et d'entrer

21 dans un dialogue avec les états concernés. C'est la seule façon dont la

22 question peut être envisagée.

23 Je vous prie de m'excuser d'avoir dépassé l'horaire, d'avoir continué au-

24 delà de 6 heures. Je vous remercie, ceci conclut mon exposé.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Professeur

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1 Greenwood.

2 Nous allons maintenant lever la séance, jusqu'à demain après-midi, 15

3 heures.

4 --- L'audience sur requêtes est levée à 18 heures 11, et reprendra le

5 jeudi 2 décembre 2004, à 15 heures.

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