Page 5978
1 Le mardi 7 novembre 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En attendant que le témoin arrive dans
6 le prétoire, nous allons parler de la requête déposée par le bureau du
7 Procureur pour modifier la date à laquelle il y aura une conférence de
8 déposition, cette semaine. On avait prévu que ce soit la semaine du 27
9 novembre. Pas d'objection du côté de la Défense, je suppose. Nous faisons
10 droit à cette requête, et dans l'ordonnance que nous allons rendre nous
11 dirons que les parties doivent se mettre d'accord sur la modification de
12 date s'agissant à l'avenir d'autres dépositions par vidéoconférence, ce qui
13 veut dire que la Chambre n'aura pas à être saisie de la question sauf
14 litige entre les parties. Cela veut dire que chaque fois que nous
15 accorderons ce genre de disposition, cette partie-là sera reprise dans
16 l'ordonnance pour éviter toute répétition.
17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
18 LE TÉMOIN: BISLIM ZYRAPI [Reprise]
19 [Le témoin répond par l'interprète]
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin, Monsieur
21 Zyrapi.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons poursuivre votre
24 déposition. Rappelez-vous que vous êtes toujours sous le coup de la
25 déclaration solennelle que vous avez faite au début de votre déposition.
26 Monsieur Marcussen, vous avez la parole.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Interrogatoire principal par M. Marcussen : [Suite]
Page 5979
1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Zyrapi. Hier, nous en étions restés
2 au moment où nous discutions des uniformes utilisés par l'UCK. J'aimerais
3 maintenant passer à un sujet connexe, celui du matériel qu'utilisait l'UCK.
4 Parlons tout d'abord des armes utilisées par l'UCK. Pourriez-vous nous les
5 décrire, à commencer par les armes personnelles, individuelles, puis nous
6 passerons aux armes plus lourdes.
7 R. Oui. L'UCK utilisait les armes individuelles telles que les pistolets,
8 les kalashnikovs, AK-47, de fabrications diverses, chinoises, albanaises,
9 de l'ex-Yougoslavie, des fusils semi-automatiques, à peu près 70 ou 90 %
10 des armes utilisées étaient des fusils automatiques, puis des mitrailleuses
11 légères. Je ne sais pas quel était le calibre exact, 7,9 ou 7,62. Je ne
12 sais pas combien il y en avait. Puis, des mitrailleuses lourdes de 12,7-
13 millimètres. Je ne sais pas exactement combien il y en avait. Il y avait
14 des armes antichars. Des lance-roquettes multiples, portée de 150 à
15 500 mètres. Des Zolja. Il n'y en avait que peu, parce qu'elles étaient
16 difficiles à trouver ces armes-là. Certains utilisaient des mortiers de 82-
17 millimètres. Je ne pourrais pas vous donner le nombre approximatif de
18 mortiers utilisés, mais je sais qu'il n'y en avait pas beaucoup. Il n'y
19 avait que peu de munitions, peu d'obus de mortiers. Peut-être qu'il y avait
20 cinq à dix abus par mortier. Il n'y avait que deux mortiers de 120-
21 millimètres. L'un a été utilisé dans les montagnes de Berisha et l'autre
22 dans la zone de Llap.
23 En outre, il y avait d'autres armes de calibres divers. Je ne sais pas
24 exactement combien il y en avait. Il y avait quelques canons sans recul,
25 mais peu. Je le répète, je ne sais pas exactement combien il y en avait. A
26 ma connaissance, c'était là de façon générale des armes utilisées par
27 l'UCK.
28 Q. Est-ce que chaque soldat avait aussi, par exemple, des grenades à
Page 5980
1 main ?
2 R. Oui, des grenades à main. En moyenne, il y en avait de deux à cinq par
3 soldat.
4 Q. Est-ce que l'UCK avait aussi des mines; dans l'affirmatif, quel genre
5 de mines avait-elle ?
6 R. Il était difficile de transporter les mines. Il y avait que très, très
7 peu de mines antipersonnel, antichars. Je vous l'ai dit, elles étaient
8 difficiles à transporter. On avait le choix entre les transporter à dos de
9 cheval ou soi-même, à l'époque, c'était difficile. Ces mines étaient très
10 lourdes. Il y en avait que très peu.
11 Q. Une précision, quand vous dites "Solja" ou "Zolja ?" Qu'est-ce que
12 c'est comme arme ?
13 R. Il s'agit d'un mortier portable. C'est une espèce de lance-roquettes
14 d'un diamètre de 64-millimètres. C'est une arme à tir unique.
15 Q. Où est-ce que l'UCK obtenait ces armes; pourriez-vous nous le dire ?
16 R. Les armes et surtout les munitions venaient surtout d'Albanie. La
17 majorité des armes venaient d'Albanie.
18 Q. Est-ce que l'UCK les importait d'Albanie ou est-ce que simplement l'UCK
19 achetait ces armes en Albanie ?
20 R. Oui, mais il y avait des armes importées en provenance d'autres pays.
21 Cependant, la majorité des armes ont été achetées en Albanie parce qu'il
22 s'y trouvait des fabriques d'armes. Par exemple, les armes de calibre 7,62
23 venaient d'Albanie.
24 Q. Parlons des transmissions et plus exactement du matériel de
25 transmission. En règle générale, de quel matériel vous êtes-vous servi
26 pendant que vous étiez chef d'état-major de l'UCK afin d'assurer, d'établir
27 la communication avec des unités sur le terrain au Kosovo ?
28 R. En règle générale, pour ce qui est des transmissions au sein de l'UCK,
Page 5981
1 elles se faisaient à l'aide de radio, de Motorola et de téléphones
2 satellites, mais on utilisait aussi des estafettes.
3 Q. Quand vous parlez de transport, puisque vous avez évoqué le transport
4 de mines à dos de cheval ou à dos d'hommes, je veux dire à part vos jambes,
5 est-ce que vous aviez d'autres moyens de transport ?
6 R. Je vous l'ai déjà dit, il était très difficile de transporter des
7 marchandises. Les soldats transportaient eux-mêmes les armes ou utilisaient
8 des chevaux pour le faire. Quand nous étions au Kosovo, nous nous servions
9 de voitures particulières mais aussi de camions, d'autocars, de bus. C'est
10 surtout jusqu'en mars, dans les zones où il n'y a pas de contrôle serbe que
11 nous le faisions. Mais après mars, il était difficile d'utiliser ces
12 moyens. Donc, l'essentiel s'est fait à pied ou à dos de cheval.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand vous parlez de Motorola,
14 Monsieur le Témoin, à quoi faites-vous allusion ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont des radios manuelles, portables qu'on
16 appelait Motorola ou portatives plus exactement. C'était la marque de
17 fabrique, Motorola. On les appelait comme cela. Mais il y avait des radios
18 d'autres marques.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand vous parlez de téléphones
20 satellites, qu'est-ce que vous voulez dire ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Quand je dis téléphones par satellite, cela
22 veut dire que ce sont des téléphones qui utilisent les satellites pour
23 communiquer; ce ne sont pas des portables ordinaires. C'était une façon
24 très sûre d'assurer la communication entre l'état-major et les diverses
25 zones.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
27 Poursuivez, Monsieur Marcussen.
28 M. MARCUSSEN : [interprétation]
Page 5982
1 Q. Peut-être que j'aurais dû davantage parler de ces Motorola ou de ces
2 radios. En général, quelle est la portée de transmission de ce genre
3 d'appareil, le rayon ?
4 R. C'était surtout les commandants de zone ou les chefs de brigade qui
5 avaient ce genre de radio. Quand à leur portée, elle n'était pas très
6 grande. Cela faisait tout au plus quelques kilomètres. Il arrivait qu'il ne
7 soit pas possible d'établir des transmissions à l'aide de ces radios si les
8 gens étaient très éloignés les uns des autres. Mais parfois, vous pouviez
9 avoir une portée allant jusqu'à 50 kilomètres.
10 Q. Est-ce que l'UCK avait des transmetteurs, des relais, des postes-relais
11 permettant d'accroître la portée ?
12 R. Non. Il n'y avait qu'un répéteur dans la zone de Pastrik. Grâce à ce
13 répéteur il était possible d'accroître la portée. C'était le seul que l'UCK
14 avait.
15 Q. Nous avons auparavant effleuré la question des activités de formation,
16 puisque vous étiez à un moment donné chargé de la formation. Je souhaite
17 vous montrer quelques éléments de preuve. Pourriez-vous dire aux Juges
18 quels étaient les principaux éléments de formation qui étaient assurés
19 pendant que vous avez été au poste d'état-major ?
20 R. A partir du mois de janvier jusqu'au mois de mars, il y a eu formation
21 qui se concentrait sur le maniement des armes, sur la formation des chefs,
22 des commandants et des officiers, depuis l'échelon le plus bas jusqu'à
23 l'échelon du bataillon, et la préparation aux actions, aux activités de
24 combat à ces différents échelons.
25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Peut-on montrer la pièce P2459 au témoin.
26 Q. Monsieur Zyrapi, est-ce que vous reconnaissez ce document ?
27 R. Oui.
28 Q. Est-ce à l'instar d'autres documents montrés hier, ici, un document que
Page 5983
1 vous avez vous-même fourni au bureau du Procureur ?
2 R. Oui.
3 Q. Qu'est-ce que ces documents représentent ?
4 R. Ce document a servi d'exemple pour ce qui est de la formation des
5 commandants, compagnies, bataillons - et nous avons utilisé ces exemples
6 pour la formation.
7 Q. Nous voyons une première page.
8 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons une
9 traduction de ce document.
10 Q. Nous avons ici la page de garde, qu'est-ce qu'elle dit ?
11 R. Je vous l'ai dit, ce document a été utilisé dans le cadre de la
12 formation des officiers. Il est intitulé "Activités de combat".
13 Q. Je regarde la traduction en anglais, je vois qu'il y a plusieurs cases
14 qui ne sont pas remplies. Est-ce que ceci sert de modèle, modèle qui peut
15 être utilisé plus tard par les officiers ?
16 R. Oui. Effectivement, c'est simplement un formulaire utilisé par les
17 officiers de différents grades.
18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Voyons la page suivante, s'il vous plaît.
19 Q. Monsieur Zyrapi, pourriez-vous nous dire en quelques mots ce qu'est ce
20 document - je pense qu'on faire un zoom arrière; nous n'allons pas
21 l'examiner de façon détaillée. Qu'est-ce que ceci nous dit à propos de la
22 formation ?
23 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'ils ne disposent pas de la
24 traduction en anglais des documents.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un formulaire aussi utilisé dans le
26 cadre de la formation des chefs de bataillon. Il s'agit d'un plan reprenant
27 les observations faites par le commandant à telle ou telle date. Notes que
28 l'on peut insérer dans ce formulaire et on a une description de la façon
Page 5984
1 d'observer le terrain avant de lancer l'opération.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, lorsqu'un document
3 est affiché à l'écran, est-ce que les interprètes ne peuvent pas consulter
4 le système de prétoire électronique ?
5 M. MARCUSSEN : [interprétation] Le problème c'est que quand on voit
6 l'albanais, les cabines ne voient pas la version en anglais.
7 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent à la Chambre qu'il n'y a pas la
8 possibilité d'utiliser le prétoire électronique.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ceci n'est pas du tout dans le
10 sens de ce qu'il nous avait été donné comme indication au début du procès.
11 Les interprètes étaient censés pouvoir consulter le système.
12 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Partons de cette prémisse,
14 effectivement les interprètes n'ont pas accès au prétoire électronique, il
15 faudra donc leur fournir une copie papier.
16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous allons le faire, Monsieur, on va faire
17 un effort dans ce sens. Mais de toute façon, nous n'allons pas examiner
18 tous ces documents.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Continuez.
20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous allons prendre ce document mais
21 seulement une page plus loin. Je me corrige, je voudrais que l'on affiche
22 la page 3.
23 Q. Monsieur Zyrapi, est-ce qu'on ne voit pas quelque part dans l'en-tête à
24 destination du commandant ou à "l'intention du commandant." Ayez
25 l'obligeance de lire cette partie-là du texte.
26 R. D'accord. "Au commandant." Puis on voit : "Ordre de combat ou
27 d'offensive." On a le numéro de référence de l'ordre, puis, il y a un
28 blanc. Puis, on voit l'échelle de la carte, on voit si c'est
Page 5985
1 1/2 000 ou 1/50 000. Puis, il y a une description du terrain de la
2 municipalité de Malisevo, route allant de Malisevo à Orllat. "L'ennemi
3 occupe les positions suivantes," qui sont énumérées dans l'ordre, on
4 mentionne leur emplacement. Le deuxième paragraphe est consacré à nos
5 unités, à nous.
6 Q. Est-ce que c'est un modèle qui est le modèle type d'un ordre de combat
7 utilisé par l'UCK ?
8 R. Oui. C'était utilisé au cours de la formation, cependant, ce genre
9 d'ordre a été délivré plus tard dans le cadre d'actions. C'étaient des
10 modèles types, des formulaires que l'on pouvait remplir dans le cadre
11 d'opérations. Vous en avez ici un exemple.
12 Q. Merci.
13 M. LE JUGE BONOMY : [Interprétation] Monsieur Marcussen, apparemment ce qui
14 manque ici, c'est la référence à la carte ou les coordonnées ou l'échelle.
15 M. MARCUSSEN : [interprétation]
16 Q. Vous avez indiqué, Monsieur Zyrapi, l'échelle de la carte, on voit
17 "Buqimit [phon] …" Pourquoi est-ce qu'il y a une mention qui manque ici.
18 R. Je n'ai pas véritablement compris la question posée.
19 Q. On a l'impression que la carte utilisée n'est pas mentionnée dans ce
20 document. Pourquoi ?
21 R. Le numéro de la carte n'est pas mentionné car ici vous n'avez qu'un
22 exemple. Vous avez un blanc effectivement indiqué par les trois petits
23 points, c'est le genre de choses qu'on indique plus tard, s'il y a
24 effectivement une opération militaire qui est lancée.
25 Q. Ce, là encore, parce qu'il s'agit d'un modèle susceptible d'être
26 utilisé par la suite, c'est cela ?
27 R. Oui, c'est cela.
28 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'aimerais que l'on passe à la page 5 de la
Page 5986
1 même pièce, s'il vous plaît ? Excusez-moi, c'est la page 6. Il y a une
2 erreur dans mes notes. Merci.
3 Q. Monsieur Zyrapi, pouvez-vous nous décrire brièvement ce qu'est ce
4 document ?
5 R. Ce document était également un échantillon, un document type utilisé au
6 cours de la formation des officiers. C'est un plan qui prévoit le
7 déploiement du commandant des zones opérationnelles. Ici, dans cet exemple,
8 c'est la zone opérationnelle de Pastrik le jour du début des combats. Comme
9 je l'ai dit, ce n'est qu'un exemple, un échantillon. Dans ce document, on
10 décrit les tâches à accomplir par chaque secteur de la zone opérationnelle,
11 quand ces différents secteurs doivent être mobilités et comment.
12 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous allons passer maintenant à la dernière
13 page de cette pièce. Voici la dernière page.
14 Q. Monsieur Zyrapi, que voit-on, de quoi s'agit-il ?
15 R. Là aussi, c'est un document type, un exemple utilisé au cours des
16 formations. C'est un document qui parle de l'engagement des unités dans des
17 opérations dans différents endroits. On voit qu'il s'agit de la
18 municipalité de Prizren. Ce document précise qui donne les ordres. Ensuite,
19 on voit qu'il est écrit "Ordre". Au numéro 1, il est question de l'unité à
20 qui l'ordre était adressé. Il est question également du déploiement des
21 soldats, du but poursuivi dans le cadre de ce déploiement, ensuite des
22 explications complémentaires sur l'ordre de déploiement des soldats, des
23 forces.
24 Q. Merci. Merci beaucoup. J'aimerais revenir maintenant à la situation qui
25 régnait au Kosovo. Pourriez-vous nous donner une description de la
26 situation militaire au Kosovo à l'hiver 1998/1999 ?
27 R. Au cours de l'hiver 1998/1999, la situation militaire des forces de
28 l'UCK au Kosovo était une situation en pleine évolution, en plein
Page 5987
1 développement. Les préparatifs se déroulaient, la formation également, du
2 niveau le plus bas au niveau le plus élevé. L'UCK a suivi l'exemple que
3 nous avons vu et s'est ainsi préparé à des opérations ultérieures.
4 Q. Qu'en est-il des combats ? Y a-t-il eu des combats au cours de cette
5 période ?
6 R. Je me souviens qu'il y a eu des opérations de combat dans la zone
7 opérationnelle de Nerodimlje en janvier. Il n'y a pas eu d'affrontement de
8 grande ampleur à ce moment-là dans d'autres endroits. Après le mois de
9 mars, lorsque les frappes aériennes de l'OTAN ont commencé, les activités
10 de combat se sont accrues.
11 Q. Avant d'en arriver à la situation qui a prévalu après le début des
12 bombardements de l'OTAN, vous avez dit, je crois, qu'il n'y avait pas eu
13 d'affrontement de grande envergure, de grande ampleur à ce moment-là. Est-
14 ce que cela veut dire que les activités de combat étaient plus
15 circonscrites, plus localisées avant le début des frappes de l'OTAN ?
16 R. J'ai évoqué certains affrontements en janvier, même dans la région de
17 Pastrik, des activités dans le village de Recak, mais là encore il
18 s'agissait d'activités limitées. Même chose pour la région de Prizren dans
19 la vallée de la Drini, mais je le répète, pas d'activités de grande
20 envergure, activités de combat et d'affrontements au cours de cette
21 période.
22 Q. Y a-t-il eu des activités offensives menées par l'UCK parmi ces petits
23 incidents que vous avez évoqués ?
24 R. Il n'y a pas eu de grande offensive de la part de l'UCK à ce moment-là.
25 Il s'agissait pour l'UCK de se défendre dans ces secteurs où ces combats
26 relativement limités avaient eu lieu.
27 Q. Au cours de cette période, y a-t-il eu des attaques menées contre des
28 barrages routiers, ou des embuscades, ou ce genre d'opérations de petite
Page 5988
1 ampleur au cours de cette période ?
2 R. Oui. Il y a eu effectivement des attaques qui visaient des postes de
3 contrôle qui constituaient des obstacles pour nos forces.
4 Q. Je crois que vous avez répondu assez longuement à la question. Or, dans
5 le compte rendu, on lit : "Effectivement, ce genre d'opérations ont eu
6 lieu, des attaques contre des postes de contrôle qui constituaient des
7 obstacles pour nos forces." Je me demandais si votre explication à vous
8 avait été plus longue que cela, sans quoi j'ajouterais quelques questions à
9 celles que je viens de poser, mais je voudrais que les choses soient tout à
10 fait claires.
11 R. Ce que j'ai dit, c'est que des attaques avaient été menées contre des
12 postes de contrôle, des postes de contrôle qui constituaient des obstacles
13 contre nos forces au cours du mouvement, que c'est la raison pour laquelle
14 ils avaient été la cible d'attaques. Mais ces attaques n'étaient pas de
15 forte intensité.
16 Q. Lorsque vous dites que ces attaques constituaient des obstacles,
17 qu'entendez-vous par là ? Des obstacles par rapport à quoi ?
18 R. J'entends par là qu'ils constituaient des obstacles lorsque les
19 brigades voulaient se déplacer d'une zone à l'autre, par exemple. C'est
20 pour cela que dans les zones concernées, les postes de contrôle ont été la
21 cible d'attaques.
22 Q. Vous avez parlé également d'activités de moindre ampleur ou de nature
23 défensive. Qu'est-ce qui a fait que ces opérations ont été menées ?
24 R. Par exemple, dans la zone opérationnelle de Nerodimlje, il y a eu
25 l'attaque des forces serbes sur le village de Recak. Nos forces ont mené à
26 bien une action défensive. En outre, dans la région de Prizren, dans la
27 vallée de la Drina, l'UCK a également été attaquée. Là encore, les forces
28 de l'UCK ont dû se défendre.
Page 5989
1 Q. Bien. J'aimerais maintenant que l'on en arrive à la période qui a suivi
2 le début des bombardements de l'OTAN. Peut-être que nous pourrions
3 commencer par évoquer les journées qui ont précédé les bombardements de
4 l'OTAN. Pourriez-vous nous parler de la situation militaire qui régnait à
5 l'époque, d'après vous ?
6 R. A mes yeux et sur la base des rapports issus de ceux qui se trouvaient
7 sur le terrain, il y avait de nombreux mouvements des forces serbes qui se
8 déplaçaient en différentes directions et qui avaient pris des positions
9 dans différents secteurs du Kosovo. Elles étaient déployées avant même les
10 attaques de l'OTAN, mais là je fais référence à la période au cours de
11 laquelle les frappes aériennes de l'OTAN ont commencé.
12 Les forces de l'UCK ne se déplaçaient pas beaucoup. Elles étaient prêtes à
13 intervenir, suivaient les mouvements des forces serbes et observaient leurs
14 prises de positions. Donc, ils suivaient et observaient leurs mouvements.
15 Ils étaient préparés, ils étaient prêts à intervenir, les forces de l'UCK
16 ont pris des positions défensives.
17 Q. Une fois que les bombardements de l'OTAN ont commencé, qu'est-il
18 arrivé ?
19 R. Une fois qu'ont commencé les bombardements de l'OTAN le 24 mars, vers 9
20 heures du soir, puisque c'est à ce moment-là que les frappes de l'OTAN ont
21 commencé, juste après, une heure ou une heure et demie après le début des
22 bombardements, les forces serbes ont lancé une attaque à l'artillerie
23 contre les positions de l'UCK dans les premières heures de la matinée du
24 25. Les forces serbes ont également mené d'autres offensives contre des
25 secteurs du territoire contrôlé par l'UCK.
26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pourrait-on faire apparaître à l'écran la
27 pièce P2447, puis nous demanderons également à
28 M. l'huissier de bien vouloir remettre aux parties un extrait de ce
Page 5990
1 document.
2 Qu'avons-nous fait, c'est une carte qui porte des allégations portées par
3 le témoin. Malheureusement, elles ne ressortent pas très bien dans la
4 version électronique du document. Nous avons fait imprimer cette partie de
5 la pièce. Nous l'avons agrandie et nous y avons porté certaines lettres qui
6 avaient été placées par le témoin sur la carte, mais ce, de manière plus
7 claire sur la version papier que sur la version électronique.
8 Oui. Monsieur l'Huissier, voici un autre exemplaire de cette carte à placer
9 sur le rétroprojecteur. Peut-être que le témoin pourra l'utiliser au cas où
10 il souhaite indiquer certaines choses sur la carte. Peut-être que nous
11 avons trop agrandi la partie de la carte qui nous intéressait. Est-ce que
12 l'on pourrait s'en éloigner un tout petit peu pour avoir une image plus
13 globale. Je crois que cela ira, puisque tout le monde dispose d'un
14 exemplaire de cette carte de toute façon.
15 Q. Monsieur Zyrapi, sur cette carte il y a deux zones que l'on a fait
16 ressortir particulièrement. Il y en a une qui figure sur la partie
17 supérieure de la carte, où l'on voit les lettres, E, F, G, et une autre
18 partie en bas où l'on voit les lettres, A, B, C. Puis, il y a un autre
19 secteur indiqué par la lettre D. De quoi s'agit-il ? A quoi correspondent
20 ces différentes zones ?
21 R. Même si l'échelle est extrêmement réduite, ce qui ne m'a pas permis de
22 tracer des lignes très précises, ces zones représentent les secteurs qui
23 étaient aux mains de l'UCK jusqu'au 24 mars.
24 Q. Avant le début des frappes aériennes de l'OTAN le 24 mars, l'UCK tenait
25 plus ou moins les secteurs que vous avez indiqués sur la carte; c'est
26 cela ?
27 R. Oui.
28 Q. L'UCK contrôlait-elle également d'autres secteurs du Kosovo mais que
Page 5991
1 vous n'avez pas indiqués sur la carte ?
2 R. Oui, oui.
3 Q. Bien. J'aimerais d'abord que vous nous donniez une idée de la
4 chronologie des événements du 24 mars qui a marqué le début des
5 bombardements de l'OTAN jusqu'aux jours qui ont suivi, et j'aimerais que
6 nous nous concentrions d'abord sur le secteur où se trouvent les lettres A,
7 B et C. Donc, avant le début des bombardements de l'OTAN, étiez-vous
8 présent dans cette zone A, B, C ?
9 R. Oui. Avant le début des bombardements de l'OTAN, je me suis rendu aux
10 positions indiquées ici dans ce secteur, dans les zones contrôlées par
11 l'UCK jusqu'au 24 mars.
12 Comme je l'ai dit plus tôt, après le début des bombardements, une
13 heure ou deux plus tard, les forces serbes ont lancé une offensive à
14 l'artillerie contre les positions qui se trouvaient dans le secteur
15 correspondant à la lettre A, contre les "positions de l'UCK." Par la suite,
16 le lendemain matin très tôt, le lendemain donc, le 25 mars, ils ont lancé
17 d'autres offensives de Rahovec contre les villages de Nagavc et Hoce et
18 Nishor. Compte tenu de la présence très importante des forces serbes dans
19 ce secteur, forces qui étaient déjà là depuis un certain temps dans la
20 région allant de Pirane jusqu'au carrefour de Gjakova et Bellacerkva, les
21 attaques ont été lancées très tôt le matin du 25 mars. Des activités de
22 combat ont eu lieu.
23 Je tiens à préciser la chose suivante : après le début de l'attaque à
24 l'artillerie, nous avons demandé à la population du secteur de quitter ce
25 dernier pour des raisons de sécurité. Les forces de l'UCK et la population
26 ont commencé à se retirer. La population à Randubrava est partie et s'est
27 trouvée refuge dans le village de Mamusa. Il n'y avait aucune présence de
28 l'UCK dans ce village auparavant ni même de positions de l'UCK. C'est un
Page 5992
1 village peuplé par des gens d'origine turque.
2 Le village de Reti Ulat a également été déserté par sa population. La
3 population s'est retirée en direction de Mamusa. Je parle jusqu'aujourd'hui
4 25 mars. L'UCK s'est également repliée au cours de l'après-midi du 25 à
5 Kolobar, a quitté Kolobar plus précisément et s'est repliée en direction de
6 Samadraxhe, Neprebishte et est allée vers Doberdolan.
7 Pourquoi nos forces se sont-elles repliées dans cette direction, parce que
8 les attaques venaient de Rahovec, Suhareke. C'est pour cela que l'UCK s'est
9 repliée vers les zones de relief.
10 Q. Je me permets de vous interrompre. Le secteur correspondant à la lettre
11 B, quand les forces de l'UCK s'y sont-elles établies ?
12 R. A partir du 25 et au cours du 26, toutes les forces qui se trouvaient
13 sur le secteur correspondant à la lettre A, lorsque l'attaque a été lancée,
14 les deux brigades qui menaient des actions défensives, la 124e et la 125e
15 Brigade. Comme je l'ai dit, ces forces-là se sont repliées dans l'après-
16 midi, accompagnées de la population vers le village de Doberdolan.
17 Toutefois, les combats se poursuivaient de la direction de Rahovec et de
18 Suhareke vers le village de Samadraxhe.
19 Q. La ligne de front vers Orahovac et celle vers Suva Reka - je vois l'un
20 de mes collègues de la partie qui s'est levé.
21 M. CEPIC : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur le
22 Président, j'ai eu une remarque à faire. Nous suivons de près ce
23 témoignage, mais nous ne suivons pas les directions qu'il indique. Je ne
24 sais pas si nous disposons des moyens techniques qui nous permettraient de
25 suivre.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être que l'on pourrait mettre le
27 nord vers le haut, peut-être que cela pourrait aider.
28 M. CEPIC : [interprétation] Effectivement - ou Cepic puisque ce n'est pas
Page 5993
1 Me Petrovic mais Me Cepic.
2 M. CEPIC : [interprétation] Oui, effectivement je vous en remercie.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voilà une innovation technique mise en
4 pratique.
5 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne sais pas si cela vraiment résoudra le
6 problème, parce que je ne crois que les secteurs qu'évoque le témoin
7 figurent sur la carte. On peut essayer pour voir. Il faudra remonter la
8 carte encore plus. Merci.
9 Je vois M. Fila s'ajouter. Voulez-vous que l'on agrandisse encore l'image ?
10 Non, je crois que cela suffira. Bien. Voilà. Très bien.
11 Q. Quelles étaient les unités de l'UCK qui se trouvaient sur le front vers
12 Orahovac ?
13 R. En direction de Rahovec on voit le village d'Opterush ici, et ici, dans
14 ce secteur-là, c'est là que se trouvait la brigade de la 124e Brigade de la
15 zone opérationnelle de Pastrik. De cette partie-ci jusque-là se trouvait la
16 125e Brigade de la zone opérationnelle de Pastrik. Ici, à Neprebishte, il y
17 avait quelques unités de la
18 123e Brigade. Donc, voilà les unités qui étaient présentes dans cette zone.
19 Les unités de la 123e Brigade ont poursuivi leur route le long de cette
20 ligne de front ici, qui traverse Studencan, Pecan, Sllapuzhan, et on voit
21 où prend fin la ligne entre Blace et Temeqin. Ici commence la zone de
22 responsabilité de la 121e Brigade qui était déployée sur les positions
23 défensives ici dans ce secteur au-dessus de Blace.
24 Q. Vous avez dit que la population civile et les deux brigades s'étaient
25 repliées conjointement. Comment le retrait de la population civile s'est
26 fait dans la pratique ? Est-ce que tout le monde est parti dans un seul
27 groupe ou comment a-t-on fait ?
28 R. Non. Dans les faits, les choses se sont passées de la manière suivante
Page 5994
1 : d'abord de Randubrava, ils sont partis en direction du village de Mamusa
2 en passant par d'autres villages. Les unités attendaient que la population
3 quitte les lieux, et une fois que la population a été partie, les unités se
4 sont rendues à Reti. La population qui a quitté Reti, Opterush,
5 Neprebishte, Studencan, et cetera, est partie en direction de Doberdolan.
6 Certains de Neprebishte et Studencan sont partis vers Mamusa, mais la
7 majorité est partie vers Pagarusa. C'est là que la population s'est
8 repliée.
9 Q. Il y a une ligne entre les zones A et B. A quoi correspond-elle ?
10 R. La ligne reliant les points A et B indique les endroits où on a retiré
11 les 123e, 124e et 125e Brigade.
12 Q. Quand se sont-elles trouvées sur cette ligne ?
13 R. Comme on le voit sur la carte, cette ligne part d'un endroit situé au-
14 dessus du village de Doberdolan, englobe les collines entre Doberdolan et
15 d'autres villages. Donc, cette ligne correspond à la situation des 25 et 26
16 mars. Les attaques étaient ininterrompues dans cette période; les attaques
17 dont j'ai déjà parlé. L'une partait de la direction de Suhareke et l'autre
18 de la direction de Rahovec et visaient les villages d'Opterusa, Samadraxhe,
19 Studencan notamment.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai du mal à localiser le village de
21 Doberdolan. Je vois l'inscription Doberdol.
22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous avons également ce genre de problèmes
23 avec les cartes en plusieurs langues.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Enfin, je lis Doberdol et j'ai pensé
25 qu'il s'agissait du même village.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation]
28 Q. Monsieur Zyrapi, il y a également une ligne reliant les points B et C.
Page 5995
1 Pour nous faire une idée générale je vous demande que représentait cette
2 ligne ? Réglons d'abord cette question.
3 R. C'est une ligne qui passe par les lieux d'où ont été retirées les 123e,
4 124e et 125e Brigade. Donc, la population qui s'est retirée des villages
5 situés dans le secteur A s'est dirigée vers le secteur B.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a des indications, des
7 annotations en deux couleurs sur la carte, et je ne comprends pas très bien
8 ce qui correspond à quoi. Est-ce que les annotations en orange indique
9 simplement les limites des secteurs ou est-ce qu'elles ont une autre
10 signification ?
11 M. MARCUSSEN : [interprétation]
12 Q. Monsieur Zyrapi, parlons d'abord si vous voulez bien des indications en
13 rouge. Qu'indiquent-elles ?
14 R. Les annotations en orange indiquent les lignes de front, c'est-à-dire
15 les positions des forces de l'UCK. Quant aux annotations en rouge, les
16 lignes rouges, elle représente les positions serbes et la direction
17 générale de leurs attaques.
18 Q. D'accord, merci. La ligne que l'on voit entre les points B et C, à quel
19 moment les forces de l'UCK ont-elles atteint cette ligne ?
20 R. Entre les zones B et C, on voit sur cette carte un tracé qui indique
21 une ligne de front et les unités que je viens d'évoquer, les trois brigades
22 que je viens d'évoquer ainsi qu'une partie de la 122e Brigade se sont
23 retirées là aux environs du 31 mars parce que le front avait été pénétré à
24 ce moment-là à Gajrak. Je ne sais pourquoi ces unités ont commencé à battre
25 en retraite à ce moment-là car leur position était tombée, ce qui mettait
26 en danger aussi bien nos forces, c'est-à-dire les soldats, que la
27 population.
28 Donc, la population et les soldats qui se trouvaient auparavant dans
Page 5996
1 le secteur B se sont dirigés vers les monts Berisha que l'on voit ici dans
2 le secteur C. Tout cela s'est passé dans les premières heures de la matinée
3 du 1er avril, à savoir que les forces armées de l'UCK et la population sont
4 arrivées à l'endroit qui est annoté ici.
5 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous nous
6 penchions sur une pièce à conviction, la pièce P2457 pour laquelle nous
7 avons une traduction anglaise.
8 Q. Monsieur Zyrapi, avez-vous actuellement un document affiché sur l'écran
9 situé devant vous ?
10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous en possédons une version en anglais et
11 en albanais, si je ne me trompe, en tout cas c'est ce que je vois sur mon
12 écran.
13 Q. Monsieur Zyrapi, voyez-vous le document sur votre écran ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce un document que vous avez remis au bureau du Procureur ? C'est
16 une question que je me dois de vous poser au sujet de ce document
17 également.
18 R. Oui, oui.
19 Q. De qui avez-vous obtenu ce document ?
20 R. Je l'ai obtenu dans les archives du Grand quartier général.
21 Q. Quel est ce document, je vous prie ?
22 R. Ce document est un ordre relatif à des opérations de combat, il est
23 adressé au commandant de la zone opérationnelle de Pastrik. Il y est
24 question du retrait des forces de l'UCK avec indication des lieux vers
25 lesquels ces forces doivent se diriger, où elles doivent établir un nouveau
26 front dans le cadre de l'organisation de leur action de défensive.
27 Au paragraphe 2, il est indiqué qu'il convient de créer un groupe de combat
28 tactique ainsi qu'un commandement de ce groupe, car trois brigades sont
Page 5997
1 censées se trouver à cet endroit. Il importe d'indiquer qui va diriger
2 l'ensemble de ces brigades.
3 Puis au paragraphe 3, il est stipulé que la population doit se
4 retirer de Bellanice vers Ngucat et dans la suite du texte, il est question
5 de la création d'un hôpital militaire. Dans le secteur B que nous venons de
6 voir sur la carte, c'est là que se trouvait l'hôpital militaire jusqu'à ce
7 moment-là, à Pagarusa, et dans le texte, il est indiqué à quel endroit doit
8 être transféré l'hôpital militaire.
9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pourrions-nous descendre un peu dans cette
10 page de façon à voir la signature.
11 Q. C'est un ordre dont vous êtes l'auteur, n'est-ce pas ?
12 R. Oui, c'est un ordre que j'ai émis, que j'ai également signé et qui
13 porte le sceau me concernant.
14 Q. J'aimerais maintenant que nous revenions quelques instants à la carte
15 géographique. La ligne décrite dans cet ordre correspond-elle à la ligne
16 qui relie les points B et C sur la carte ou s'agit-il d'une ligne
17 différente dont vous ordonnez la création ?
18 R. Non. L'ordre écrit concerne la ligne que l'on voit ici sur la carte.
19 Q. Cette ligne que l'on voit sur la carte correspond à peu près à la ligne
20 reliant les points B et C; c'est bien cela ? En partie en tout cas ?
21 R. Oui, oui.
22 Q. Au moment où cette ligne est établie, si j'interprète bien ce que je
23 vois sur la carte, c'est l'objet de la question, est-ce que cette ligne
24 traversait le village Bellanice ou est-ce qu'elle passait à l'extérieur du
25 village ?
26 R. Non, elle passait au-dessus du village, on le voit sur la carte, elle
27 ne traverse pas Bellanice, elle passe au-dessus. Vous voyez ici le village
28 de Ngucat, ensuite la direction de Temeqin.
Page 5998
1 Q. Dans l'ordre écrit, vous dites que la population civile doit se
2 déplacer. Cette population civile, est-ce qu'elle s'est effectivement
3 déplacée ?
4 R. En réalité, la population civile de Bellanice n'a pas obtempéré à
5 l'ordre, elle n'a pas quitté le village.
6 Q. Pourquoi avez-vous donné l'ordre à la population de Bellanice de se
7 déplacer ?
8 R. L'ordre exigeant le retrait de la population de Bellanice, mais
9 également d'autres villages, a été émis pour des raisons de sécurité, pour
10 garantir la sécurité de la population, de façon à ce que celle-ci ne
11 subisse aucun problème en raison d'éventuels combats.
12 Q. Merci.
13 M. MARCUSSEN : [interprétation] Voyons maintenant si nous pouvons --
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Des combats à cause de quoi, quel
15 était l'objectif espéré de tels combats ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous espérions assurer la défense de la
17 population qui, à ce moment-là, était sous le contrôle de l'UCK, et nous
18 souhaitions que l'UCK se défende contre les attaques menées à ce moment-là.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crains que, pour moi en tout cas,
20 il y a un élément de la situation qui manque. Je sais que nous avons
21 d'autres témoignages sur ce même sujet, mais s'agissant de la présentation
22 de ces dires par le témoin qui se trouve ici, j'ai du mal à établir un
23 rapport avec la réalité. Tel n'est peut-être pas votre but, mais j'ai un
24 peu de mal à comprendre comment on défend une population en lui disant de
25 partir si elle souhaite rester.
26 M. MARCUSSEN : [interprétation]
27 Q. Monsieur Zyrapi --
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman.
Page 5999
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 6000
1 M. ACKERMAN : [interprétation] Monsieur le Président, un problème
2 technique au compte rendu d'audience ligne 5, paragraphe 21, le mot "aux
3 environs de" figure dans le compte rendu. Or, il s'agit d'un "ordre," vous
4 dites que vous avez ordonné quelque chose, c'est peut-être un mot important
5 par rapport à l'interprétation à venir de ce passage du compte rendu.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Ackerman.
7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci.
8 Q. Monsieur Zyrapi, la période dont vous avez parlé, celle qui débute le
9 24, c'est-à-dire le jour du bombardement de l'OTAN et qui s'étend jusqu'au
10 1er avril, est-il permis de décrire les événements survenus dans cette
11 période comme se résumant à un retrait de l'UCK des positions qu'elle
12 tenait le 24 ?
13 R. Oui, c'est exact. C'est une période où l'UCK a battu en retraite en
14 raison des attaques dues aux forces serbes.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends que vous affirmez avoir
16 eu jusqu'à cette date le contrôle de certains territoires d'où vous vous
17 retirez ? Mais l'impression que j'ai pour le moment, c'est que la
18 population était peut-être déjà en train de se déplacer. Que se passait-il
19 pour la population lorsque vous lui ordonniez de se déplacer ?
20 Je ne veux pas vous guider dans votre réponse. Nous avons entendu
21 d'autres témoignages, mais je tiens beaucoup à entendre votre témoignage
22 sur les événements survenus à Bellanice et dans ce secteur qui auraient
23 donné lieu à la rédaction de cet ordre dans lequel vous dites à la
24 population de partir.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] L'ordre a été émis avant que tout ce qui s'est
26 passé dans les zones B et C ne survienne. L'ordre exigeait de la population
27 qu'elle quitte le secteur de Bellanice car d'autres villages avaient déjà
28 été évacués pour des raisons de sécurité. Des villages qui auparavant
Page 6001
1 étaient sous le contrôle de l'UCK, et ce, en raison de combats qui se
2 déroulaient en ces lieux entre les forces serbes et l'UCK. La question de
3 la sécurité de la population se posait.
4 La population de Bellanice n'a pas accepté de partir. Elle est restée
5 dans le village, en tout cas dans sa grande majorité.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Zecevic.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Je remarquais simplement que le témoin
8 indiquait un certain nombre de localités sur l'écran grâce à son pointeur,
9 mais le document n'est pas sur le rétroprojecteur.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
11 M. ZECEVIC : [interprétation] Donc pas à l'écran. C'est la raison pour
12 laquelle je me suis levé, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être, n'ai-je pas bien saisi la
14 date à laquelle l'ordre a été émis. Je pensais que cette date était aux
15 environs du 31 mars ou du 1er avril. Est-ce que l'ordre a été émis à une
16 autre date ?
17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. L'ordre porte
18 la date du 1er avril.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela crée une confusion encore plus
20 grande dans mon esprit. Je suis désolé de devoir le dire.
21 M. MARCUSSEN : [interprétation]
22 Q. Le jour de l'émission de cet ordre, le 1er avril, ordre émis par vous,
23 la ligne défensive de l'UCK se situait-elle au nord ou au sud de
24 Bellanice ?
25 R. Le jour où l'ordre a été émis, comme je l'ai dit, le 31, les forces
26 armées ont entamé leur retrait de la zone B avec la population. Quand j'ai
27 émis l'ordre, la ligne se trouvait ici et pas là. Je l'ai rédigé à minuit.
28 L'ordre concernait les 123e, 124e et 125e Brigades auxquelles il était
Page 6002
1 ordonné de se retirer pour se rendre sur cette nouvelle ligne.
2 Q. Quand vous avez émis cet ordre, la population civile se trouvait-elle
3 derrière la ligne de l'UCK ? Autrement dit, était-elle toujours dans une
4 zone contrôlée par l'UCK ?
5 R. Oui. Elle se trouvait dans une zone contrôlée par l'UCK. Il est bien
6 dit d'ailleurs dans l'ordre que les choses doivent commencer à partir de
7 minuit. C'est un ordre qui porte sur le retrait des 123e, 124e et 125e
8 Brigades ainsi que de la population civile hors de ce secteur.
9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je sais que l'heure de la pause est
10 arrivée.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non. La pause se fera à 15 heures
12 50.
13 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, oui, d'accord.
14 Q. Monsieur Zyrapi, dans le cadre de l'exécution de votre ordre, les
15 forces dont vous parlez dans cet ordre devaient-elles passer par le secteur
16 de Bellanice pour se diriger vers le nord afin d'établir une nouvelle ligne
17 entre les points B et C ? Est-ce une bonne façon d'interpréter la
18 situation ?
19 R. Oui. C'est une bonne façon de l'interpréter. Les unités dont je viens
20 de donner les numéros devaient se retirer de la zone B en passant par le
21 territoire de Bellanice, car les Serbes attaquaient à partir de Gajrak et
22 de Banja et également à partir de Blace. Donc, le territoire que pouvait
23 utiliser l'UCK pour se retirer devenait de plus en plus étroit. C'est la
24 raison pour laquelle ces forces de l'UCK ont dû passer par le territoire de
25 Bellanice et établir leurs nouvelles positions au niveau de la ligne que
26 j'ai déjà décrite tout à l'heure.
27 Q. Lorsque vous avez dit il y a quelques instants que vous aviez ordonné
28 le retrait de la population afin de garantir sa sécurité -- je ne sais pas
Page 6003
1 très bien comment je peux poser cette question sans qu'il s'agisse d'une
2 question directrice. Quand vous avez ordonné la population de se retirer
3 pour des raisons de sécurité, ceci avait-il un rapport avec le déplacement
4 des forces de l'UCK et avec le déplacement de la ligne de front ?
5 R. L'ordre exigeait de la population qu'elle suive le retrait ou le
6 déplacement de la ligne de front de l'UCK. La population était censée se
7 déplacer en parallèle de façon à ne pas se trouver sur la ligne de front,
8 c'est-à-dire à l'endroit où se trouvaient à ce moment-là les unités dont
9 j'ai parlé.
10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que la situation est toujours
11 difficile à déterminer ou est-ce qu'elle est devenue plus claire ? Je peux
12 m'efforcer de poser encore d'autres questions.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce qui a été ordonné et ce que le
14 témoin souhaitait est devenu clair, mais ce qui demeure assez peu clair,
15 c'est le reste. Mais enfin, on pourra peut-être s'appuyer sur d'autres
16 témoignages.
17 M. MARCUSSEN : [interprétation]
18 Q. Monsieur Zyrapi, pourquoi --
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En ce moment, j'ai la plus grande
20 peine à comprendre comment le fait de maintenir une population aussi
21 nombreuse derrière la ligne de l'UCK était censé protéger cette population.
22 C'est là que réside la difficulté que j'éprouve si je dois vraiment vous la
23 décrire en détail. Autre chose qui n'est pas claire à mes yeux, c'est ce
24 qui, aux yeux du témoin, constituait une raison valable pour exiger de la
25 population qu'elle se déplace, pas plus que ce qu'il pensait qu'il risquait
26 d'arriver à cette population.
27 M. MARCUSSEN : [interprétation]
28 Q. Monsieur Zyrapi, puisque vous êtes un officier et un militaire
Page 6004
1 expérimenté, lorsqu'une ligne de front de déplace, est-il normal d'ordonner
2 à la population civile de se retirer loin de la ligne de front ?
3 R. Notamment, lorsqu'il s'agit du genre de combats qui ont eu lieu au
4 Kosovo. Il était normal pour nous d'ordonner le déplacement de la
5 population au moment où l'UCK de déplaçait parce que les forces serbes
6 attaquaient.
7 Q. Est-il normal d'ordonner à la population de quitter un endroit où des
8 combats se déroulent ?
9 R. Ce n'est peut-être pas une procédure régulière, courante, mais compte
10 tenu de ce qui se passait à ce moment-là, de l'évolution de la situation,
11 nous avons émis cet ordre exigeant de la population qu'elle se déplace car
12 il y avait un risque pour la population.
13 Q. Quel était le risque pour la population ? En quoi résidait ce danger ?
14 R. Il risquait d'y avoir des combats entre les forces en présence
15 impliquant éventuellement le recours à des armes lourdes et pas seulement à
16 des armes légères, ce qui aurait pu provoquer des morts dans la population
17 civile à ce moment-là, en particulier dans les territoires contrôlés par
18 l'UCK.
19 Q. D'accord, merci. Peut-on enlever la carte du rétroprojecteur ?
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] N'hésitez pas à poursuivre, mais si
21 l'interprétation correspond à ce qu'a dit le témoin, la réponse de ce
22 dernier permettrait de penser que vous avez augmenté le risque couru par la
23 population en la maintenant dans le secteur contrôlé par l'UCK, à moins que
24 je n'aie pas bien compris ce qu'a dit le témoin.
25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous aurons encore besoin de la partie
26 supérieure de la carte.
27 Q. Monsieur Zyrapi, où avez-vous ordonné à la population de se rendre ? Où
28 était-elle censée aller ? La carte vient d'être replacée sur le
Page 6005
1 rétroprojecteur pour que vous puissiez nous l'indiquer.
2 R. Selon ce que stipulait cet ordre, la population devait se retirer vers
3 le village de Ngucat. Donc vers le village de Ngucat et vers les monts
4 Berisha, car dans ces deux endroits elle pouvait trouver refuge en toute
5 sécurité. Mais la carte que nous avons ici est très petite, on ne voit pas
6 tous les détails, néanmoins, les monts Berisha se situent là.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous replacer quelques
8 instants le pointeur sur les monts Berisha, je vous prie ?
9 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
11 M. MARCUSSEN : [interprétation]
12 Q. Quelle pouvait être la distance entre l'emplacement de la nouvelle
13 ligne de front et l'endroit où se trouvait la population civile ?
14 M. ACKERMAN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Ackerman.
16 M. ACKERMAN : [interprétation] Je pense qu'il est important de dire en mots
17 que l'endroit sur la carte où le témoin a placé le pointeur lorsque vous
18 lui avez demandé de montrer les monts Berisha se situent tout près du point
19 C, qui figure sur la carte.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'enregistrement officiel valable
21 officiellement, c'est la vidéo. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas
22 demandé au témoin une description verbale, comme je le fais normalement
23 dans d'autres affaires dans mon pays.
24 M. ACKERMAN : [interprétation] Hm-hm.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais vous avez sans doute raison, il
26 peut y avoir parfois des raisons importantes qui justifient que nous le
27 fassions. Je pense toutefois que l'interrogatoire de ce témoin durera
28 éternellement si nous lui demandons de s'exprimer en mots sur tous les
Page 6006
1 endroits qu'il pointe sur la carte. C'est dans des cas de ce genre que la
2 vidéo pourra être utilisée.
3 M. ACKERMAN : [interprétation] Je comprends. Mais en cas de recours en
4 appel, nous travaillons rarement sur base de vidéos, plus sur la base de
5 procès-verbaux et de comptes rendus d'audience. Je ne me souviens pas
6 qu'une séquence vidéo ait jamais été utilisée par une Chambre d'appel.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donnez-moi un instant, je vous prie.
8 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Zyrapi, pour qu'il n'y ait
10 pas le moindre doute, je vous demanderais encore une fois si vous voulez
11 bien de placer le pointeur sur les monts Berisha.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Les monts Berisha commencent ici.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez placé le pointeur à peu près
14 au niveau du secteur situé juste sous le point C, qui s'étend sur la droite
15 de la carte en passant par Ngucat et -- est-ce que c'est bien Temeqin ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Temeqin se trouve ici, à droite. Voilà. J'ai
17 placé le pointeur sur le village de Temeqin et ici vous avez le village de
18 Ngucat. Les monts Berisha recouvrent tout ce secteur que je vous montre
19 maintenant.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez déplacé le pointeur vers le
21 haut, jusqu'à Kerzharek. Merci.
22 M. MARCUSSEN : [interprétation]
23 Q. Monsieur Zyrapi, y a-t-il eu tout de même certains civils qui se
24 trouvaient auparavant dans le secteur B et qui se sont rendus dans le
25 secteur C ?
26 R. Oui.
27 Q. Pourriez-vous indiquer à l'aide du pointeur à quel endroit cette
28 population civile a trouvé refuge dans le secteur C ?
Page 6007
1 R. Comme je l'ai déjà dit, cette carte est à très grande échelle, donc
2 elle n'est pas trop précise. Mais la population civile s'est installée
3 entre les villages de Ngucat et de Javor, dans la direction des cols qui se
4 trouvent par ici, dans la direction de Divjaka. Elle s'est installée sur
5 tout ce territoire ici.
6 Q. Ce secteur que vous venez d'indiquer se trouve juste en dessous de la
7 lettre C et plutôt à droite du C.
8 R. Oui, mais aussi vers l'est, cet endroit que je viens d'indiquer, que
9 j'ai déjà mentionné. Je pense qu'ici c'est un plateau, mais il y a une
10 espèce de cuvette entre Divjaka et Kroimire. Là il y a des cols.
11 Q. Merci. Quelle distance y avait-il entre la ligne tenue par l'UCK et
12 l'endroit où se trouvaient les civils ?
13 R. C'est ici que se trouvaient la ligne de front, alors que la population,
14 elle, se trouvait derrière la ligne de front à quelque 500 mètres de cette
15 ligne et même plus.
16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que M. l'Huissier veut bien déplacer
17 la carte afin que nous voyions les secteurs E, F et G ? Merci bien.
18 Q. Monsieur Zyrapi, vous avez déjà signalé qu'au début des bombardements
19 de l'OTAN, l'UCK tenait les secteurs E, F et G dans cette partie du Kosovo.
20 A quel moment les forces de l'UCK sont-elles parvenues à ce secteur indiqué
21 comme étant le secteur F ?
22 R. Lorsque les attaques ont commencé, il y a une partie de la population -
23 je ne sais plus exactement quand cela s'est passé, était-ce le 25 ou le 26;
24 Je ne sais plus. Mais une partie de la population de cette zone s'est
25 retirée pour aller dans la zone indiquée par la lettre F.
26 Si je me souviens bien, cela s'est passé un ou deux jours après le
27 début des attaques.
28 Q. Est-ce que vous étiez, vous-même, présent dans cette zone ?
Page 6008
1 R. Non. Je n'étais pas là personnellement dans ce secteur.
2 Q. Comment savez-vous dès lors que c'étaient bien les positions tenues par
3 les forces de l'UCK dans ce secteur ?
4 R. C'est à partir du rapport qui m'a été fait par le commandant de la zone
5 à l'époque.
6 Q. Quand est-ce que les forces de l'UCK se sont déplacées et sont sorties
7 de ce secteur pour établir la ligne de front se trouvant entre le F et le
8 G ?
9 R. A partir des rapports fournis par les commandants de zone, selon ces
10 rapports il y a eu pénétration très rapide en l'espace de trois ou quatre
11 heures des forces serbes dans ce secteur. Je n'étais pas personnellement
12 sur les lieux, mais j'ai vu les rapports, et je sais que ce jour-là une
13 partie de la population ou une partie des forces se sont retirées et se
14 sont repliées dans les secteurs E, F et G. Une partie de la population et
15 une partie des forces sont également repliées dans cette direction-ci que
16 j'indique sur la carte, là dans ce secteur indiqué par la lettre C.
17 Q. Ce repli, quand s'est-il achevé ? Je parle du repli qui s'est
18 effectué vers le secteur G.
19 R. Je ne sais pas exactement, puisque je n'étais pas personnellement
20 à cet endroit. Mais d'après les rapports que j'ai reçus, ce fut jusqu'à la
21 fin du mois de mars. Les forces de l'UCK et la population civile se sont
22 retrouvées dans cette région, dans ce secteur à la fin du mois de mars.
23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vais demander à M. l'huissier de
24 déplacer la carte afin que nous voyions le secteur D.
25 Q. S'agissant de ce secteur D, est-ce que l'UCK y est restée ou est-
26 ce qu'elle en est partie après les bombardements de l'OTAN ?
27 R. Quand ont commencé les bombardements de l'OTAN, les forces de l'UCK
28 sont restées ici, jusqu'au moment où il y a eu des combats moins intenses,
Page 6009
1 moins forts. Dans le secteur C, je pense que c'étaient deux ou trois jours
2 plus tôt - je ne me souviens plus exactement - et sont parties vers le
3 secteur D. Je suis allé dans cette zone pour faire le point de la
4 situation. Je sais que la population et l'UCK sont restées dans ce secteur
5 un certain temps, même après mon départ, mais je ne sais pas combien de
6 temps la population et l'UCK sont restées dans ce secteur.
7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je voudrais que nous examinions une pièce,
8 Monsieur le Président. Peut-être pourrons-nous le faire après la pause ?
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons devoir faire une pause de
10 20 minutes.
11 Monsieur le Témoin, l'huissier va vous accompagner et vous indiquer
12 l'endroit où vous pourrez attendre la reprise des travaux.
13 [Le témoin se retire]
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous reprendrons à 4 heures et quart.
15 --- L'audience est suspendue à 15 heures 54.
16 --- L'audience est reprise à 16 heures 17.
17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, vous avez la
19 parole.
20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Peut-on
21 montrer au témoin la pièce 2462.
22 Q. Monsieur Zyrapi, est-ce que vous reconnaissez le document que vous
23 voyez à l'écran ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce vous qui avez fourni ce document au bureau du Procureur ?
26 R. Oui.
27 Q. Où avez-vous obtenu ce document ?
28 R. Je l'ai obtenu dans les archives de la 125e Brigade.
Page 6010
1 Q. Est-ce vous-même qui avez été chercher ce document dans les archives ?
2 R. Oui.
3 Q. Ayez l'obligeance de nous donner lecture du titre de ce document.
4 R. L'en-tête dit : "Armée de libération du Kosovo, zone opérationnelle de
5 Pastrik, 125e Brigade." En dessous de l'en-tête, il est écrit : "Rapport
6 sur la tragédie cruelle des offensives serbes dans le village de Medevce,
7 municipalité de Prizren," puis il est dit
8 ceci : --
9 M. SEPENUK : [interprétation] Objection. Je ne pense pas que vous serez
10 capables de comprendre mon objection si vous n'avez pas la version en
11 anglais.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais nous l'avons à l'écran. Vous
13 pouvez la voir sur notre écran.
14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Le témoin n'a pas besoin de lire le
15 document. Je ne voulais pas vous interrompre, Maître Sepenuk.
16 M. SEPENUK : [interprétation] Mon objection revient à dire ceci. Ici, ce
17 n'est pas un récit de première main. Enfin, c'est un texte tout à fait
18 tendancieux. Ce n'est qu'un rapport de seconde main. Medevce n'est pas
19 repris dans l'acte d'accusation. Apparemment, il y aurait un premier
20 rapport qui n'a pas été versé au dossier et qui serait plus exact pour
21 autant que les circonstances reprises ici soient exactes, la date étant
22 celle du 12 avril 1999. Elle figure à la dernière page du document.
23 Il y a plusieurs raisons qui militent contre le versement de ce
24 document au dossier.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.
26 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'allais demander au témoin qui avait signé
27 ce rapport, lui demander s'il connaissait ce rapport, puis j'allais
28 effectivement demander le versement. C'est un rapport de synthèse, si je
Page 6011
1 comprends bien, qui fait le point des événements survenus dans la zone de
2 responsabilité de ce commandant à partir du début des bombardements de
3 l'OTAN jusqu'en juin 1999.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Demandons au témoin qui a établi ce
5 rapport et d'où il tient ses connaissances, s'il en a.
6 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que nous pouvons prendre la dernière
7 page de ce document. Est-ce que nous pouvons faire un plan rapproché de
8 l'endroit où se trouve la signature.
9 Q. Monsieur Zyrapi, voyez-vous les signataires de ce document ?
10 R. Oui.
11 Q. Qui a signé ce document ?
12 R. C'est un officier de la 125e Brigade. Il s'appelle Hasan Morina.
13 Q. Avant votre audition d'aujourd'hui, avez-vous lu ce rapport ?
14 R. Oui, je l'ai lu.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi voulez-vous utiliser ce
16 document ? Quel est l'objectif recherché ?
17 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'aimerais demander au témoin ce qu'il sait
18 à propos des circonstances dans lesquelles ce rapport a été établi, et ce
19 qu'il contient.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vais vous autoriser à poser ces
21 questions pour voir si ce document est authentique.
22 M. MARCUSSEN : [interprétation]
23 Q. Monsieur Zyrapi, est-ce que vous savez dans quelles circonstances ce
24 document a été établi maintenant que vous avez lu ce rapport ?
25 R. Vous le voyez, il s'agit ici d'un rapport portant sur la période qui
26 débute au moment des bombardements de l'OTAN et se termine en avril et mai.
27 L'officier qui se trouvait dans cette zone, qui a écrit ce rapport,
28 concerne les événements survenus dans cette zone.
Page 6012
1 Q. Est-ce que je suis en droit de penser que ce rapport concerne la zone
2 de responsabilité de cet officier ?
3 R. Oui. C'est le rapport écrit par un officier qui opérait dans sa zone de
4 responsabilité.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous repose la question que je vous
6 ai posée il y a quelques instants. Quel est l'objectif que vous recherchez
7 en vous servant de ce document ?
8 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je crois que ceci dresse le contexte dans
9 lequel plusieurs des infractions présumées sont censées avoir été commises.
10 Effectivement, ceci nous donnerait un contexte pour ce qui est des
11 infractions présumées dans l'acte d'accusation, notamment à Mala Krusa,
12 dans ce secteur-là.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvons-nous revenir à la première
14 page du document.
15 Maître Sepenuk, il y a bien dans ce document des références à la zone qui
16 nous a intéressés jusqu'à présent. Je vois qu'on parle ici d'une tragédie
17 qui n'est pas mentionnée dans l'acte d'accusation. Donc là, c'est sans
18 intérêt, mais il y a des parties du document qui font référence à ces
19 régions, à d'autres régions de l'acte d'accusation, et le témoin nous a dit
20 que c'est en rapport avec la zone de responsabilité.
21 M. SEPENUK : [interprétation] Mais il est fait référence à Medevce, où l'on
22 dit qu'il y a eu trois infractions, mais je pense que ceci n'est pas dans
23 l'acte d'accusation.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je comprends. Mais on parle bien
25 de déplacement de population. On parle de Mamusa, et c'est en rapport avec
26 les infractions dont a parlé le témoin.
27 M. SEPENUK : [interprétation] Je retire mon objection, si vous estimez que
28 c'est préférable.
Page 6013
1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Effectivement, nous sommes
2 conscients de la nécessité de faire une distinction entre les parties qui
3 concernent l'acte d'accusation et les parties du document qui ne concernent
4 pas l'acte d'accusation.
5 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-on revoir la deuxième page. Y a-
7 t-il des difficultés à montrer la deuxième page ? Peut-on voir maintenant
8 la dernière page pour autant que ce soit bien la dernière page.
9 Poursuivez, Monsieur Marcussen.
10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Si ce document est versé au dossier, ceci
11 met fin à l'interrogatoire principal du témoin. Je relève que nous avons
12 reçu très tardivement une communication de la Défense s'agissant des
13 documents qui vont être utilisés au cours du contre-interrogatoire de ce
14 témoin. Je les ai reçus une heure avant le début de l'audience. Nous avons
15 été avisés de plusieurs documents.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que je m'abstiendrais de
17 faire ce genre de commentaire, si j'étais vous.
18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je voulais tout simplement vous dire que
19 nous ne faisons pas objection de l'utilisation de ces documents.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les documents dont a parlé le témoin,
21 quand ont-ils été communiqués à la Défense ?
22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Certains de ces documents ont été
23 communiqués dans le cadre habituel, et d'autres de façon supplémentaire.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous voulez dire que dans le "cadre
25 habituel," c'était dans le cadre de la communication des pièces de la liste
26 visée par l'article 65 ter ?
27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui. Mais je pense qu'il y a un avis
28 hebdomadaire indiquant les pièces qui vont être utilisées au cours de la
Page 6014
1 déposition d'un témoin. Il s'agissant des pièces P2447 jusqu'à la pièce
2 P2453. Puis, il y a eu un feuillet d'information supplémentaire dans lequel
3 nous avons indiqué que nous allions également utiliser la pièce P2457 et
4 cela va jusqu'à la pièce P2468.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'après ce que j'ai, je vois P2469, et
6 ceci était indiqué le 31 octobre.
7 M. MARCUSSEN : [interprétation] C'est exact.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
9 Maître O'Sullivan.
10 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Nous aurons d'abord le
11 contre-interrogatoire du général Ojdanic, puis nous allons suivre les noms
12 tels qu'indiqués dans l'acte d'accusation.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour ce qui est de la requête
14 demandant des instructions, est-ce que c'est maintenant redondant ?
15 J'espérais que cela allait être ?
16 Maître Ackerman.
17 M. ACKERMAN : [interprétation] Je pense qu'il y a un consensus sur la façon
18 d'agir. Même si j'ai demandé des instructions à la Chambre, je vais me
19 permettre de vous formuler une suggestion.
20 Il y a plusieurs documents qui sont en albanais et qui n'ont pas été
21 traduits. Ils sont en phase de traduction. C'est le service CLSS qui s'en
22 charge. Je pense qu'en général, cela dure deux semaines avant que la
23 traduction nous soit remise. J'essaie de trouver quelqu'un qui pourrait me
24 donner une idée du contenu de ce document, parce que l'Accusation n'a pas
25 réussi à nous donner un résumé, et puisque nous attendons la traduction du
26 service de traduction.
27 Il y a aussi un document de 84 pages qui nous a été fourni en
28 application de l'article 68. Il est en B/C/S, il n'a pas été traduit, il a
Page 6015
1 été envoyé au service de traduction, il est en train d'être traduit. Ce que
2 l'on me dit s'agissant de la teneur de ce document, c'est qu'apparemment
3 c'est peut-être un document très important dans le cadre des contre-
4 interrogatoires de ce témoin. Il est important que vous, Mesdames et
5 Messieurs les Juges, vous voyiez la traduction pour comprendre la
6 signification de ce document.
7 Troisième élément, il y a un document assez court, de six pages. C'est une
8 déclaration en albanais d'un témoin, qui a été fournie dans le cadre de
9 l'article 68, toujours dans le cadre de la déposition de ce témoin.
10 Je vous propose ceci : nous pouvons commencer les contre-
11 interrogatoires dès maintenant. Nous essaierons de terminer cette phase des
12 contre-interrogatoires, et quand nous recevrons la traduction, si nous
13 pouvons vous convaincre de la nécessité de faire revenir ce témoin parce
14 que se trouvent dans la traduction des éléments importants, effectivement,
15 je pense que c'est la façon la plus logique d'agir.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup de cette démarche très
17 positive et très constructive.
18 M. ACKERMAN : [interprétation] Merci.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, vous allez commencer.
20 M. SEPENUK : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste avant de commencer, le Juge
22 Chowhan aimerait poser une question.
23 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi de vous faire asseoir,
24 Maître Sepenuk. Merci de me donner l'occasion de poser ma question.
25 Monsieur le Témoin, vous nous avez fourni quelques détails sur la
26 structure administrative de cette organisation dont vous parliez, dont vous
27 avez parlé longuement. Vous avez parlé de la manière dont elle opérait, de
28 la structure de commandement, des ordres, et cetera. Mais cette structure
Page 6016
1 n'aurait fonctionné que si elle avait le financement nécessaire pour le
2 faire. Vous n'avez rien dit s'agissant de cette partie-là du financement.
3 Comment procédait-on en ce qui concerne le versement des rémunérations, des
4 salaires, qui bénéficiaient de ces rémunérations, que touchiez-vous, vous.
5 Parce que pour une organisation telle que celle que vous avez décrite, il
6 faudrait beaucoup d'argent. C'est la raison pour laquelle je vous invite à
7 nous communiquer des informations en la matière. Je vous en remercie.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. A ma connaissance, le financement de
9 l'UCK provenait du fonds pour la patrie, fonds alimenté par la diaspora. Le
10 financement provenait également de fonds issus de dons volontaires au sein
11 du territoire du Kosovo. Ces fonds étaient destinés au développement et au
12 fonctionnement de l'UCK. Voilà les deux sources de financement dans
13 lesquelles puisait l'UCK.
14 S'agissant des traitements, salaires, s'agissant de moi et des
15 soldats de rang hiérarchique inférieur, personne n'était rémunéré, personne
16 n'était payé. Les membres de l'UCK étaient des combattants volontaires.
17 Jusqu'à la fin, nous avons combattu à titre gracieux.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, c'est à vous.
19 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 Contre-interrogatoire par M. Sepenuk :
21 Q. Je m'appelle Norman Sepenuk, Monsieur Zyrapi, et je représente le
22 général Ojdanic. Bonjour, Monsieur.
23 R. Bonjour.
24 Q. J'aimerais revenir sur votre témoignage d'hier pour commencer.
25 J'aimerais que l'on parle du début mars de l'année 1998. Vous avez parlé de
26 l'attaque dont a été victime la famille Jashari, ce qui a marqué le début
27 du conflit entre les forces serbes et l'UCK. Il s'agit d'un échange de
28 coups de feu le 2 mars entre Adem Jashari, qui était un héros, disons-le,
Page 6017
1 de l'UCK, et les forces serbes. Cet affrontement a abouti au décès de M.
2 Jashari et d'un certain nombre de membres de sa famille. Je pense que vous
3 avez jugé que c'était là l'événement qui avait marqué le début du conflit
4 entre l'UCK et les forces serbes.
5 R. Oui. Pour moi cet événement a marqué le début du conflit, et c'est ce
6 que j'ai indiqué dans ma déclaration.
7 Q. Merci. Quelques mois plus tard, en mai 1998, le 28 mai 1998
8 précisément, vous êtes arrivé au Kosovo en tant que membre de l'UCK, n'est-
9 ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. A cette époque, comme vous l'avez dit également hier, du point de vue
12 de l'UCK, l'UCK n'avait pas atteint son niveau requis de développement et
13 d'organisation au niveau local, au niveau de l'état-major et au niveau
14 général. L'organisation n'était pas bien organisée. C'était davantage une
15 entité menant des activités de guérilla plutôt qu'une armée dans le sens
16 classique du terme. C'est bien ce que vous estimez, n'est-ce pas ?
17 R. Oui. Comme je l'ai déjà dit dans ma déclaration, à ce moment-là,
18 l'armée de l'UCK était une force de guérilla composée de soldats
19 volontaires.
20 Q. Bien. Même s'il s'agissait d'un groupe de guérilla, et je vous demande
21 si vous êtes d'accord avec moi, il me semble qu'il est exact de dire - nous
22 avons entendu des témoignages à cet effet lors de ce procès - à la mi-
23 juillet de l'année 1998, l'UCK tenait entre ses mains 50 % du territoire du
24 Kosovo, y compris trois des quatre principaux accès routiers, n'est-ce pas
25 ?
26 R. Je ne connais pas le pourcentage exact, mais c'est plus ou moins cela.
27 Q. Très bien, merci. Mais vous, Monsieur Zyrapi, vous-même et certains de
28 vos collègues reconnaissaient que pour atteindre l'objectif ultime, à
Page 6018
1 savoir la prise de contrôle du Kosovo ou, pour reprendre vos termes à vous,
2 pour libérer le Kosovo, il vous fallait autre chose qu'une armée populaire
3 menant des activités de guérilla, n'est-ce pas ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Il vous fallait une armée plus forte.
6 R. Oui, exactement, une armée plus forte et mieux organisée.
7 Q. Ramush Haradinaj, votre collègue, était d'accord avec vous là-dessus,
8 puisque hier -- je vous renvoie à la pièce de l'Accusation P2453, qui fait
9 état de la réunion de travail de l'état-major de Dukagjin consacrée à
10 l'organisation de cette zone. Je rappellerais que Dukagjin était l'une des
11 sept zones de l'UCK à l'époque, n'est-ce pas ? Vous avez parlé de cette
12 pièce hier avec nous, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Dans ce document, dans cette pièce de l'Accusation 2453, on y lit - et
15 là je répète, c'est une réunion à laquelle ont assisté M. Haradinaj et
16 d'autres assistants occupant des postes de haut rang - M. Haradinaj
17 s'appelait Smajli, dans ce document, on lit à la première page que : "Les
18 activités menées clandestinement avaient donné leurs résultats." Je suppose
19 qu'ici il est fait référence au succès obtenu par l'UCK à ce moment-là.
20 C'est une question que je vous pose.
21 R. Les succès remportés par ce dernier au cours d'activités de combat
22 étaient tels qu'il méritait bien le poste, le niveau qu'il occupait à ce
23 moment-là.
24 Q. Très bien. Il dit, en tout cas, c'est ce que l'on voit dans le document
25 :
26 "Cette guerre appartient aujourd'hui à toute la population, et pas à
27 un groupe seulement. Il s'agit de libérer le pays au travers d'une
28 insurrection générale. Sans oublier les exigences de la guerre menées dans
Page 6019
1 une zone d'une telle importance géostratégique, la guerre doit être
2 élargie. Il nous faut une armée régulière."
3 Je pense que vous étiez du même avis, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, effectivement, nous avons œuvré dans ce sens.
5 Q. Bien. Comme vous l'avez dit hier, ce document évoque la notion d'unité
6 de commandement dans la zone opérationnelle de Dukagjin. Dans le même
7 document, en page 6, on lit : "La formation de l'état-major opérationnel de
8 la zone de Dukagjin a été adoptée et proclamée à l'unanimité," et dans la
9 suite du document, on voit que : "Le commandant de la zone opérationnelle
10 de Dukagjin devrait être Ramush lui-même," Haradinaj, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Dans ce document à la page 7, M. Haradinaj dit : "L'état-major central
13 ne nous a pas donné les instructions nécessaires. Il a été absent."
14 Mustafa, qui semble être l'un de ses assistants si je comprends bien, dit :
15 "Sans une armée régulière, nous ne serons pas victorieux. Je suis pour
16 Smajli."
17 Je crois qu'il y avait là un consensus global, à savoir que la zone devait
18 être organisée, M. Haradinaj devait prendre la tête des opérations dans
19 cette zone et qu'il fallait s'organiser davantage de manière à ce que
20 l'armée et la zone de responsabilité de l'armée soient renforcées.
21 R. Oui. C'est une manière d'interpréter les choses. S'agissant maintenant
22 de ce que vous avez dit sur l'état-major, de son niveau d'implication, je
23 ne saurais le dire pour cette période-là en particulier.
24 Q. Merci. Maintenant, nous poursuivons la séquence des événements. Nous en
25 sommes au mois de juillet. L'offensive serbe a commencé contre l'ensemble
26 des territoires aux mains de l'UCK, comme vous l'avez dit hier, c'est là
27 d'ailleurs le départ de l'offensive d'été menée par les Serbes pour
28 reprendre le contrôle des territoires perdus, n'est-ce pas ?
Page 6020
1 R. Oui.
2 Q. Hier, vous avez également dit que la situation générale en août et en
3 septembre était une situation de combat dans les secteurs tenus par l'UCK.
4 R. Oui.
5 Q. En septembre et en octobre, les combats qui ont débutés en août, voire
6 même plus tôt, se sont poursuivis.
7 R. Oui. D'après les informations que j'ai reçues, parce qu'en septembre et
8 en octobre, je n'étais pas au Kosovo.
9 Q. Je comprends. Est-il exact de dire que d'ici à la fin du mois d'octobre
10 à peu près, à la fin du mois d'octobre 1998, les forces serbes avaient
11 repris la plupart des territoires précédemment aux mains de l'UCK ?
12 R. Oui, oui. C'est exact.
13 Q. A la fin du mois d'octobre 1998, vous vous en souviendrez bien j'en
14 suis sûr, il y a eu le cessez-le-feu Holbrooke-Milosevic. C'est aussi le
15 cessez-le-feu Clark-Naumann-Milosevic, conclu conformément à la Résolution
16 numéro 1199 du Conseil de sécurité. En bref, il y a eu un cessez-le-feu.
17 Les forces serbes ont rappelé leurs forces, à la fois armée et police, pour
18 les placer aux niveaux qui étaient les niveaux précédents. Vous vous en
19 souvenez ?
20 R. Oui.
21 Q. Au cours de la période qui a suivi cette dernière partie du mois
22 d'octobre, puis en novembre et en décembre, l'UCK a fait fruit de cette
23 période pour se rassembler et consolider ses forces ?
24 R. Oui, effectivement.
25 Q. Vous êtes devenu chef du Grand état-major en novembre 1998, n'est-ce
26 pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Merci. J'attends une date exacte. Savez-vous très exactement à quelle
Page 6021
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 6022
1 date vous êtes devenu chef du Grand état-major de l'UCK ?
2 R. Je ne me souviens plus de la date exacte. Au cours de la deuxième
3 moitié du mois de novembre, mais comme je l'ai dit, je ne peux pas préciser
4 davantage les choses.
5 Q. Merci. A la fin du mois de décembre 1998, vous avez décrit en quelques
6 mots la situation de l'UCK à la fin de cette année-là, dans un document
7 présenté par l'Accusation, la pièce 2460. Il s'agit d'un document qui se
8 base sur des déclarations écrites, déclarations écrites des commandants des
9 zones opérationnelles de Pastrik, Dukagjin, Nerodimlje, Sala et Llap,
10 n'est-ce pas ?
11 R. Oui. C'était un rapport.
12 Q. Merci. Vous avez dit au cours de votre témoignage avoir reçu ce
13 document des archives du Grand état-major; c'est exact ?
14 R. Oui.
15 Q. Où se trouvent ces archives ?
16 R. Les archives du Grand état-major de l'UCK, pour part ont été
17 recueillies par le TMK, avant d'être envoyées aux archives centrales du
18 Kosovo.
19 Q. Bien, merci. J'aimerais savoir où se trouvent physiquement ces
20 archives ? Dans quelle ville, dans quel village, où se trouvent-elles ?
21 R. Les archives du Grand état-major se trouvent à Prishtina, là où se
22 trouve l'état-major du Corps de protection du Kosovo ou TMK ?
23 Q. Depuis combien de temps s'y trouvent-elles ces archives ?
24 R. Les documents y ont été envoyés juste après la guerre. Certains
25 documents ont été envoyés plus tard vers les archives centrales du Kosovo
26 qui se trouvent toujours à Prishtina.
27 Q. Cette pièce de l'Accusation, 2460, on y voit sur cette pièce qu'un
28 exemplaire de ce document a été envoyé aux archives. Une fois ce document
Page 6023
1 produit, un exemple de ce dernier a-t-il été immédiatement envoyé aux
2 archives ?
3 R. Chaque document écrit était archivé auprès de l'état-major et au niveau
4 de la zone également.
5 Q. On voit également un sceau. Le Grand état-major avait-il son propre
6 sceau ?
7 R. Oui.
8 Q. Quand le Grand état-major s'est-il doté de ce sceau ? Vous en souvenez-
9 vous ?
10 R. Le sceau a été obtenu plus tard, vers novembre ou décembre.
11 Q. Vous avez dit, s'agissant de ce document-ci, par exemple, que le
12 document était archivé. J'aimerais savoir où il l'était ? Où ce document a-
13 t-il été archivé à l'époque le 28 décembre 1998 ?
14 R. Auprès de l'état-major, là où nous nous trouvions.
15 Q. Mais c'était où exactement ?
16 R. A l'époque, à Divjake.
17 Q. Cela se trouve où ? Veuillez éclairer ma lanterne.
18 R. C'est le village de Divjake qui se trouve dans les monts Berisha.
19 Q. Pourquoi avoir choisi ce document ? Pourquoi avoir choisi de montrer ce
20 document-là à ce Tribunal ?
21 R. C'est un document que j'ai amené afin de donner un exemple de mesures
22 disciplinaires prises par l'UCK contre des soldats ou des officiers.
23 Q. Mais nous parlons, je crois, de documents différents, Monsieur, que les
24 choses soient tout à fait claires. Je vous parle de la pièce de
25 l'Accusation 2460 qui est un rapport sur la situation de fin d'année, sur
26 la situation générale prévalant au sein de l'Armée de libération du Kosovo.
27 Vous vous en souviendrez peut-être, vous en avez parlé hier après-midi.
28 R. Le document préparé à la fin de l'année a été rédigé le 28 décembre.
Page 6024
1 C'était un rapport, un rapport établi sur la base des rapports des zones,
2 des rapports écrits provenant des zones.
3 Q. Je comprends. Je vais vous poser quelques questions sur ce document
4 dans un instant, mais ce que je vous demande, c'est comment vous avez
5 choisi et pourquoi vous avez choisi d'amener ce document-ci au Tribunal ?
6 R. C'est le premier document qui a été présenté sous forme écrite. Le
7 premier.
8 Q. Aviez-vous eu un entretien avec M. Marcussen, ou tout autre membre du
9 bureau du Procureur, ou éventuellement un enquêteur du bureau du Procureur
10 sur l'existence des archives ? En d'autres termes, avant votre venue ici,
11 avez-vous informé le Procureur de l'existence d'archives de l'UCK ?
12 R. Lorsque j'ai fait ma déclaration, j'ai également précisé que l'UCK
13 avait des archives.
14 Q. Bien. Avez-vous eu une discussion sur ce point-ci avec le bureau du
15 Procureur avant de venir ici ?
16 R. Lorsque j'ai fait ma déclaration.
17 Q. Vous leur en avez parlé lorsque vous avez fait votre déclaration. Il y
18 a eu deux des déclarations; une en octobre 2005, et l'autre en janvier
19 2006. Etes-vous en train de nous dire qu'à ce moment-là vous avez informé
20 les représentants du bureau du Procureur de l'existence des archives de
21 l'UCK ?
22 R. Au moment où j'ai fait la déclaration du mois de juillet, je crois
23 avoir évoqué l'existence d'archives de l'UCK.
24 Q. Bien. A ce moment-là, le bureau du Procureur a-t-il demandé à voir ce
25 qui se trouvait dans ces archives afin d'en examiner le contenu ?
26 R. Lorsque j'ai fait cette déclaration en juillet dans laquelle j'ai dit
27 que ces archives existaient, j'étais ici à La Haye, pas à Prishtina.
28 Q. D'accord. Lorsque vous avez dit -- d'ailleurs vous souvenez-vous de la
Page 6025
1 personne à qui vous avez dit cela lorsque vous avez fait cette déclaration
2 en janvier 2006 ? A qui en avez-vous parlé en juillet 2006 ?
3 R. Je n'ai pas fait de déclarations en janvier 2006, c'était en juillet
4 2006. J'ai dit ce que j'ai dit à propos des archives.
5 Q. Très bien. La personne devant laquelle vous avez fait cette déclaration
6 ou tout autre membre du bureau du Procureur a-t-il rebondi sur cette
7 information et demandé à voir les archives ? Vous a-t-on dit : "Nous
8 aimerions les visiter, nous aimerions voir ce qu'elles contiennent" ? Vous
9 a-t-on jamais dit des choses de ce genre ?
10 R. J'ai présenté les documents que j'ai extraits des archives au bureau du
11 procureur à Prishtina, et ils ont envoyé les documents ici. Personne n'est
12 entré en contact avec moi directement me disant qu'il souhaitait examiner
13 le contenu des archives.
14 Q. Est-ce le document 2460 ? Il s'agit du document du 28 décembre 1998. Ce
15 document fait-il partie des documents que vous avez remis au bureau du
16 procureur de Prishtina afin qu'ils soient envoyés ici ?
17 R. Oui. Ce document leur a été remis avant d'être envoyé ici.
18 Q. Quand leur avez-vous remis ce document ? Vous vous en souvenez ?
19 R. Non. Je ne m'en souviens pas, mais avant ma venue ici.
20 Q. Au cours des dernières semaines ?
21 R. Oui, oui, au cours des dernières semaines.
22 Q. Ces archives, peut-on y accéder sans difficulté, par exemple, si l'un
23 des membres des conseils de la Défense souhaitaient y faire des recherches,
24 pouvait-il avoir accès à ces archives, à votre connaissance ?
25 R. Je n'en sais rien. Je ne sais pas qui peut avoir accès aux archives.
26 C'est un problème interne, administratif.
27 Q. D'après les connaissances que vous avez de ces archives, étant donné
28 que vous avez occupé les fonctions de chef du Grand état-major de l'UCK, si
Page 6026
1 l'un des avocats de la Défense ou l'un des accusés souhaitaient avoir accès
2 aux archives, à qui devra-t-il s'adresser ?
3 R. Il faudrait qu'il se rende au bureau des archives au niveau de l'état-
4 major, mais également au niveau des archives du Kosovo.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.
6 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait sûr que ceci
7 soit véritablement un contre-interrogatoire. Il me semble, quant à moi,
8 d'une recherche d'information quant à la manière pour la Défense d'accéder
9 aux archives. Nous pourrions peut-être en parler, mais hors prétoire.
10 M. SEPENUK : [interprétation] Absolument pas, Monsieur le Président. Vous
11 permettez que j'intervienne.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.
13 M. SEPENUK : [interprétation] Nous n'avons vu que très récemment les
14 documents soumis au titre de l'article 68 du
15 Règlement. Si la position de M. Marcussen est que le bureau du Procureur
16 n'a jamais essayé de chercher quoi que ce soit dans les archives, cela me
17 paraît étonnant. Il y a énormément de documents dans ces archives. Or, ces
18 documents pourraient être tout à fait utiles. Ici, il me semble comprendre
19 que l'Accusation n'a jamais creusé la question jusqu'à ce que M. Zyrapi, le
20 témoin lui-même, fournisse à titre volontaire un certain nombre de ces
21 documents il y a quelques semaines à peine.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Il me semble qu'il est tout à
23 fait approprié que vous poursuiviez dans ce sens. Nous allons donc rejeter
24 l'objection qui a été soulevée.
25 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
26 Q. Une ou deux questions supplémentaires là-dessus, Monsieur Zyrapi. Dans
27 la mesure du possible, le plus précisément possible, pouvez-vous nous dire
28 qui nous devrions contacter afin d'obtenir des documents présents dans les
Page 6027
1 archives de l'UCK, quelles personnes ?
2 R. Les archives du Kosovo ont un directeur dont je ne connais pas le nom.
3 S'agissant des archives de l'état-major, vous pouvez entrer en contact avec
4 le commandant.
5 Q. Qui est-ce ? Qui est-il ?
6 R. L'état-major du KPC ?
7 Q. Oui.
8 R. C'est Sulejman Selimi, le commandant de l'état-major du KPC.
9 Q. Merci. Merci, Monsieur Zyrapi. J'aimerais maintenant que nous parlions
10 du document du 28 décembre 1998. C'est un document qui fait la synthèse de
11 la situation telle qu'elle prévalait en fin d'année. Au sein de l'UCK, ce
12 document, bien entendu, est signé de votre main, en votre qualité de chef
13 du Grand état-major, et il a été établi, ce document, sur la base des
14 rapports d'au moins cinq zones, commandant de cinq zones.
15 Qu'en est-il des deux autres zones ? Est-ce que cela veut dire que les
16 commandants n'ont pas présenté de rapports ?
17 R. Oui. Il manque deux zones parce qu'aucun rapport écrit n'avait été
18 soumis. Ils avaient fait un rapport oral, et par la suite seulement le
19 rapport écrit a été communiqué.
20 Q. Bien. Nous allons commencer à la première page "Direction et
21 commandement." On y lit : "On peut dire que dans toutes les zones
22 opérationnelles, ils en sont à un niveau suffisant." Ensuite, dans le
23 rapport vous poursuivez en disant : "Il y a un manque considérable
24 d'effectif professionnel dans la zone de Dukagjin et dans une autre zone."
25 Vous souvenez-vous si des mesures ont été prises afin d'améliorer la
26 situation, situation que vous décrivez ici ?
27 R. Oui. Je me souviens qu'une demande a été faite afin que du personnel
28 soit envoyé dans ces zones-là. Nous y avons envoyé des officiers afin de
Page 6028
1 compléter l'état-major de ces zones opérationnelles. En tout cas, c'est ce
2 dont je me souviens.
3 Q. L'objectif de tout cela, c'était de faire de l'UCK, de l'Armée de
4 libération du Kosovo une armée plus forte et plus efficace, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, on peut le décrire ainsi, pour renforcer la direction et le
6 commandement de l'UCK.
7 Q. D'accord. Dans le même paragraphe où il est question de "Commandement
8 et contrôle", il est stipulé que :
9 "Dans la plupart des positions de commandement dans les zones
10 mentionnées, donc à tous les niveaux d'un commandement, que ce soit au
11 niveau de l'escadrille jusqu'au niveau supérieure des opérations, des gens
12 qui avaient fait leur preuve au combat et qui s'étaient montrés
13 particulièrement courageux et aptes à l'organisation et au commandement,
14 avaient été nommés à des postes de direction."
15 Je suppose que c'était un sujet de fierté pour vous ?
16 R. Oui. Ces hommes avaient une certaine expérience, et notre désir à ce
17 moment-là était d'augmenter le niveau de compétence pour les commandants et
18 les dirigeants.
19 Q. D'accord. Passons maintenant au chapitre B intitulé "Moral au combat,"
20 je cite :
21 "Avec la réorganisation et les nominations à divers postes, avec les
22 restructurations de postes qui ont eu lieu dans toutes les zones
23 opérationnelles, le moral au combat et le nombre de représentants de la
24 population qui se joignent à l'UCK grandit de jour en jour. Dans toutes les
25 zones opérationnelles, un intérêt plus important se manifeste, notamment au
26 vu du nombre de gens prêts à rejoindre l'UCK."
27 Est-ce qu'à ce moment-là et dans les mois précédant cette date, vous avez
28 constaté, notamment parmi les jeunes, un enthousiasme plus important
Page 6029
1 s'agissant de rejoindre les rangs de l'UCK ? Avez-vous essayé de tirer
2 profit de cette situation ?
3 R. Oui.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic.
5 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vois le mot "junk" au compte rendu
6 d'audience en anglais alors qu'il s'agit de "jeunes".
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pensais que c'était une erreur qui
8 serait corrigée par la suite.
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il est très important d'appeler à
11 l'attention de la Chambre sur des erreurs importantes lorsqu'elles le sont.
12 Car il importe de réinterroger le témoin et sa réponse peut-être
13 significative. Mais lorsqu'il apparaît que l'erreur peu importante va sans
14 doute être corrigée après vérification, il n'est pas nécessaire
15 d'intervenir. Mais n'hésitez pas à le faire si vous avez un doute en tout
16 état de cause.
17 Maître Sepenuk.
18 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 Q. Vous poursuivez en disant que :
20 "Le moral au combat s'est manifesté lors d'affrontements entre les unités
21 de l'UCK et la police militaire en diverses régions du Kosovo, notamment en
22 Dukagjin, Pastrik et dans d'autres zones opérationnelles où l'ennemi a subi
23 des pertes humaines considérables en termes de morts et en termes de perte
24 de matériel avec des conséquences négatives minimales pour les unités de
25 l'UCK."
26 Encore une fois, ceci a dû être une source de satisfaction pour vous.
27 R. C'est un rapport qui a été envoyé par les zones opérationnelles, après
28 quoi un sommaire de tous les rapports a été établi et adressé au commandant
Page 6030
1 adjoint du Grand quartier général. Donc, ce dont il est fait état ici,
2 c'est l'expérience vécue par les soldats de l'UCK.
3 Q. Page suivante, il est question d'entraînement. Encore une fois, je
4 rappelle cette situation du 28 décembre 1998. Nous lisons :
5 "Un travail plus important doit être accompli auprès des jeunes recrues
6 pour qu'elles rejoignent l'UCK dans toutes les zones opérationnelles dans
7 les secteurs suivants," et nous trouvons là "mention de la nécessité pour
8 eux d'être au courant de l'existence des armes partagées collectivement,
9 qu'il est nécessaire que ces jeunes gens soient au courant des actions
10 tactiques et des règles militaires en général."
11 Vous rappelez-vous si ce travail a eu lieu finalement dans ces différents
12 secteurs, en janvier, février, mars ? Est-ce que vous avez effectué un
13 travail particulier dans ces régions ?
14 R. Oui, nous avons travaillé dans tous les domaines, au niveau de la
15 formation, de l'entraînement, sur les questions de personnel, et ce, depuis
16 le simple soldat jusqu'au niveau de commandement, donc depuis l'escadron
17 jusqu'au niveau supérieur.
18 Q. La raison pour laquelle je suppose que vous avez agi ainsi est très
19 simple, à savoir que vous souhaitiez améliorer le niveau de l'Armée de
20 libération du Kosovo et que vous ne vous contentiez pas d'un statu quo.
21 Vous souhaitiez vous améliorer et vous renforcer. Est-il permis de
22 s'exprimer ainsi ?
23 R. Nous avions également un statut, un règlement. Donc nous nous occupions
24 de l'entraînement de nos hommes. Nous souhaitions être prêts. Nous ne
25 savions pas ce qui allait se passer après le statu quo.
26 Q. D'accord. Donc, vous souhaitiez être prêts et avez continué à vous
27 préparer au cas où.
28 R. Oui.
Page 6031
1 Q. Merci. Puis au point D intitulé, "Mobilisation et questions relatives
2 aux hommes, aux effectifs," vous stipulez ou plutôt le rapport stipule que
3 la mobilisation a eu lieu dans toutes les zones opérationnelles avec
4 engagement de volontaires, et que celle-ci se poursuivra à l'avenir. Je
5 cite : "Jusqu'à présent, le niveau de mobilisation est élevé."
6 Est-ce que vous voyez ce passage ?
7 R. Oui. Je me souviens que la mobilisation a eu lieu avec recrutement de
8 volontaires et qu'elle s'est poursuivie plus tard également.
9 Q. Très bien. Un peu plus bas dans ce paragraphe, nous lisons quelque
10 chose qui me frappe un peu. Je ne sais pas si nous devrions parler de cet
11 incident en détail, mais apparemment, quelques jeunes membres de l'UCK ont
12 été tués dans un combat impliquant l'usage d'armes à feu. Pour résumer, ils
13 ont été tués, parce qu'ils n'avaient pas l'entraînement nécessaire et
14 qu'ils n'étaient pas suffisamment disciplinés pour maîtriser la situation.
15 Est-ce résumer en bref ce qui s'est finalement passé ?
16 R. Oui, c'est un résumé de ce qui s'est passé durant l'offensive de l'été.
17 Il y a eu des soldats insuffisamment entraînés et sans expérience militaire
18 suffisante, qui se sont fait tuer au combat parce qu'ils n'étaient pas bien
19 préparés.
20 Q. Je suis sûr qu'il est permis de dire, qu'en tant que chef d'état-major,
21 vous teniez beaucoup à vous assurer qu'aucun incident de ce genre ne se
22 reproduise à l'avenir.
23 R. En effet. C'est la raison pour laquelle nous avons pris des mesures
24 pour organiser des entraînements.
25 Q. De façon à ce que les hommes qui faisaient partie de l'Armée de
26 libération du Kosovo, même s'ils étaient très jeunes, puissent être
27 entraînés et formés à la discipline en vue de devenir des combattants très
28 performants. C'est bien ainsi qu'on peut dire les choses ?
Page 6032
1 R. Oui.
2 Q. Maintenant, nous passons au point E intitulé, "Logistiques."
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, je comprends bien
4 l'orientation de votre contre-interrogatoire, mais je dois dire que je suis
5 plus habitué à un contre-interrogatoire de ce genre devant un jury, à
6 savoir renforcer sa propre position en obtenant de la bouche des témoins
7 des éléments tirés d'un document écrit. Souvenez-vous, je vous prie, qu'un
8 équilibre doit être maintenu. Je suis sûr que vous ne l'avez pas oublié.
9 Souvenez-vous également, je vous prie, que nous avons déjà lu ce document
10 et vous pouvez être certain que nous l'avons lu attentivement.
11 M. SEPENUK : [interprétation] Oui. Je ne voudrais pas m'étendre exagérément
12 sur le sujet, mais je vous remercie de vos commentaires en tout état de
13 cause.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Au cas où vous auriez le moindre
15 doute, je vous dis que vous êtes en train d'enfoncer des portes ouvertes
16 avec ce témoin.
17 M. SEPENUK : [interprétation] Je ne comprends pas très bien.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, vous allez simplement obtenir de
19 lui confirmation de tout ce qui figure dans le rapport. C'est ce que vous
20 obtiendrez dans toutes ces réponses à vos questions. C'est la nature de
21 l'exercice lorsqu'on soumet un document à un témoin; nous en sommes bien
22 conscients.
23 M. SEPENUK : [interprétation] D'accord. Je pourrais dire, Monsieur le
24 Président, que nous nous efforçons de démontrer que des efforts importants
25 ont été déployés pour renforcer et rendre plus efficace cette armée afin
26 que les six hommes assis derrière moi dans ce prétoire aient des raisons
27 d'en avoir peur.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que le message est déjà passé
Page 6033
1 assez clairement dans ce que le témoin a déjà dit jusqu'à présent.
2 M. SEPENUK : [interprétation] D'accord. Merci, Monsieur le Président. Je
3 vais maintenant parler de la situation au combat, car je pense que nous
4 pourrions ajouter quelques mots sur ce point.
5 Q. Dans le texte, là où il est question des "Situations de combat et des
6 forces ennemies," au paragraphe G, nous voyons qu'il est stipulé que :
7 "Suite à la Résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, numéro
8 1199, les forces ennemies se sont repliées d'un certain nombre de points
9 situés en altitude, par exemple, dans la zone opérationnelle de Dukagjin.
10 Certains éléments se sont repliés et n'ont pas été placés sous le contrôle
11 de nos forces."
12 Je ne sais pas si c'est une erreur de frappe. Est-ce que c'est une faute de
13 frappe peut-être dans la traduction anglaise, là où nous lisons que
14 "certains éléments n'ont pas été placés sous le contrôle de nos forces."
15 Donc, je vous demande, Monsieur Zyrapi, si vous pouvez nous aider sur ce
16 point.
17 Vous vous rappelez, n'est-ce pas, qu'il est dit dans le texte que : "Les
18 forces ennemies se sont repliées d'un certain nombre de points situés en
19 altitude." C'est bien cela, n'est-ce pas ?
20 R. Oui, c'est exact, et ce que dit le rapport est exact.
21 Q. Peut-être que la phrase au sujet de "nos forces" sera rendue plus
22 claire si nous comprenons ce passage comme signifiant :
23 "Un accroissement du nombre de soldats, notamment dans la zone
24 opérationnelle de Dukagjin. Suite à l'offensive ennemie, repositionnement
25 des forces mené à bien dans toutes les zones opérationnelles, et nous
26 disons librement que le territoire contrôlé par nos unités est maintenant
27 plus important en pourcentage qu'il ne l'était avant l'offensive ennemie."
28 Est-ce que c'est bien cela qui s'est passé, autrement dit, en résumé
Page 6034
1 les forces serbes se sont repliées et les forces de l'UCK ont progressé ?
2 R. Suite aux rapports envoyés par les commandants de zone, il
3 ressort à l'évidence que les forces serbes se sont repliées après
4 l'adoption de la résolution évoquée tout à l'heure. Toutefois, l'UCK ne
5 s'est pas installée dans des portions particulièrement importantes du
6 territoire puisque le territoire sous son contrôle a été réduit en taille.
7 Q. Vous avez occupé un certain nombre de positions, n'est-ce pas, Monsieur
8 Zyrapi ? Quand je dis "vous," je veux dire l'UCK.
9 R. Oui, un certain nombre de positions ont été occupés, mais pas toutes
10 puisqu'il y avait eu un accord. Nous étions censés ne pas nous positionner
11 près des routes, donc nous maintenir à 2 ou
12 3 kilomètres de distance des routes. Par conséquent, nous ne pouvions pas
13 couvrir toutes les positions, tous les points qui, par le passé, étaient
14 sous le contrôle de l'UCK.
15 Q. Je vais maintenant vous poser une dernière question au sujet de ce
16 document où nous lisons que : "Des propositions relatives à l'emploi
17 d'unités tactiques et opérationnelles dans divers combats à l'avenir" est
18 évoqué, et vous citez un certain nombre de points, notamment : "des groupes
19 de commandos dans les villes et dans les zones où l'ennemi est actif, une
20 réduction des voies d'approvisionnement pour l'ennemi par diverses actions
21 de diversion et la nécessité de frapper dans tous les lieux où résident les
22 forces ennemies afin de créer une insécurité à tout moment et en tout
23 lieu."
24 Ce sont bien des tactiques de guérilla classiques, n'est-ce
25 pas ?
26 R. Oui, ce sont des tactiques de guérilla classiques, qui sont également
27 appliquées par certaines armées régulières.
28 Q. D'accord. En d'autres termes, vous étiez en train d'essayer de prendre
Page 6035
1 l'avantage sur une armée régulière plus forte, en associant, le cas
2 échéant, le recours à des tactiques de guérilla du genre de tactiques de
3 harcèlement, à des tactiques plus classiques chaque fois que c'était
4 nécessaire. Est-il permis de s'exprimer ainsi ?
5 R. Oui, chaque fois que c'était nécessaire.
6 Q. Bien. Merci. Ensuite, le récit continue dans ce rapport qui démontre
7 que durant les mois de janvier, février et mars, et malgré le cessez-le-
8 feu, l'UCK a continué à combattre les forces serbes principalement en ayant
9 recours à des embuscades. Est-il permis de s'exprimer ainsi ?
10 R. Je ne vois pas ce passage dans le rapport, mais il existe des rapports
11 qui démontrent ceci de façon très claire.
12 Q. Quand vous dites : "Je ne le vois pas dans le rapport," je ne vous ai
13 pas soumis un passage particulier du texte. Nous examinons en ce moment
14 votre rapport de septembre 1998. Nous allons passer à un autre sujet. Je
15 dis que pendant les mois de janvier, février et mars 1999, il y a eu des
16 accrochages d'un côté et de l'autre, et que malgré l'existence d'un cessez-
17 le-feu, ces accrochages se sont poursuivis, et que la plupart d'entre eux
18 se déroulaient sur base d'embuscades. Ceci est-il exact ?
19 R. Non. Ceci n'est pas exact s'agissant des mois de janvier et février. Ce
20 que j'ai dit hier portait sur des attaques défensives, c'est-à-dire des
21 attaques dont la nature était défensive et non agressive.
22 Q. Bien. Nous allons maintenant prendre un certain nombre d'exemples pour
23 illustrer l'un ou l'autre de ces points que nous venons de passer en revue.
24 Je dispose ici d'un document de la Mission de vérification au Kosovo qui
25 date du 2 janvier 1999, quelques jours à peine après le 28 décembre 1998 et
26 votre rapport de cette date. Il s'agit de la pièce à conviction 3D0359 de
27 la Défense. C'est la dernière page de cette pièce qui m'intéresse.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.
Page 6036
1 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne sais pas si le numéro de la pièce est
2 exacte. Mais je ne crois qu'il existe une pièce correspondant à ce numéro
3 dans le système e-court. Or, nous avons reçu notification de la
4 présentation de la pièce 3D350 suivie par la pièce 3D352. Peut-être, est-ce
5 simplement une erreur dans la citation du numéro de la pièce.
6 M. SEPENUK : [interprétation] Voilà qui me remplace dans mon rôle, Monsieur
7 le Président. Le numéro que j'ai sous les yeux est 359. Je parle - cela
8 pourra peut-être vous aider à localiser ce document - du Livre bleu du 2
9 janvier 1999 de la MVK. C'est un texte qui en tout état de cause se
10 présente dans une version anglaise. Sans offenser personne, Monsieur le
11 Président, je pourrais peut-être en donner lecture.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Faites-le, je vous prie, et espérons
13 que le texte apparaîtra plus tard à l'écran.
14 M. SEPENUK : [interprétation] D'accord.
15 Q. Voilà ce que dit ce texte, Monsieur Zyrapi. C'est une appréciation
16 faite par la Mission de vérification au Kosovo, à savoir l'organisme de
17 vérification au Kosovo mis en place par l'OSCE. J'aimerais savoir si vous
18 êtes d'accord qu'on y trouve :
19 "Des indications selon lesquelles l'UCK pourrait vouloir unifier,
20 uniformiser et centraliser ses structures de commandement et qu'elle donne
21 à ses diverses unités et patrouilles notamment, une dénomination
22 particulière et une zone de responsabilité particulière afin que ces
23 groupes qui, par le passé, étaient peu liés sur le plan hiérarchique
24 puissent se retrouver sous un commandement centralisé et un contrôle
25 centralisé."
26 Je pense que vous serez d'accord avec cette façon de dire les choses ?
27 R. J'ai entendu ce genre de déclarations. L'organisation a continué à se
28 mettre en place tant que n'était pas concernée chaque unité opérant sur le
Page 6037
1 territoire du Kosovo.
2 Q. D'accord. Dans la suite du rapport, on trouve :
3 "Un élément intéressant, à savoir une tendance de la part de la VJ,
4 donc l'armée yougoslave à coopérer davantage avec l'OSCE et ses
5 responsables, alors que l'UCK devenait de plus en plus belliciste et
6 refusait de plus en plus de coopérer avec l'OSCE eu égard à la sécurité de
7 ses positions."
8 Est-ce que vous êtes d'accord avec cette façon de dire les choses ?
9 R. D'après ce dont je me souviens dans toute cette période, janvier et
10 février 1999 et même décembre 1998, je sais qu'il y a eu coopération dans
11 cette période. L'OSCE a procédé à des vérifications, a eu des contacts avec
12 l'UCK. Je ne pense qu'il y a eu défaut de coopération dans cette période.
13 Q. Vous n'êtes certainement pas d'accord avec ce que dit le document,
14 n'est-ce pas ?
15 R. C'est exact.
16 Q. D'accord.
17 M. SEPENUK : [interprétation] Je vais maintenant essayer de parler d'une
18 autre pièce, Monsieur le Président, la pièce 3D363, qui est un extrait de
19 ce qu'il est convenu d'appeler le Livre bleu datant du 9 janvier, donc
20 Livre bleu de la Mission de vérification au Kosovo. L'incident qui
21 m'intéresse, c'est l'incident numéro 2. J'aimerais qu'on affiche cette page
22 à l'écran.
23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je crois que c'est la page 4 de la pièce à
24 conviction.
25 M. SEPENUK : [interprétation] Oui, en effet. Je vous remercie, Monsieur
26 Marcussen.
27 Q. Voici ce que dit ce rapport de la MVK. Il y est dit que :
28 "RC 1 a rendu compte qu'avant 10 heures 40, une patrouille du
Page 6038
1 MUP, équipée d'une Lada Niva et deux Pinzgauer, a subi une embuscade à 4
2 kilomètres de Suva Reka, non loin de DM 893930. On a tiré sur la patrouille
3 à partir de tranchées bien construites et bien camouflées, qui semblaient
4 être occupées déjà depuis plusieurs jours. Les pertes suivantes ont été
5 enregistrées, trois hommes morts au combat au sein du MUP, trois hommes
6 blessés au combat au sein du MUP et trois civils albanais ont été blessés
7 pour s'être trouvés pris apparemment par hasard dans cette embuscade. L'UCK
8 a quitté le secteur immédiatement après l'embuscade et l'examen des
9 tranchées a révélé la présence de douilles de 7,62 millimètres de calibre
10 et de 12,7 millimètres de calibre. Des rafales de lance-roquettes multiples
11 ont également été tirées. Les membres du MUP ont apparemment trouvé la mort
12 alors qu'ils étaient à l'intérieur des Pinzgauer."
13 Est-ce que vous vous rappelez de cet incident ?
14 R. Je ne me rappelle pas de cet incident. Je ne me rappelle de ni la date
15 ni le lieu.
16 Q. Mais si nous partons du principe que cet incident a effectivement eu
17 lieu dans les conditions décrites dans le document, pouvez-nous dire selon
18 le règlement en vigueur au sein de l'UCK, qui aurait été la personne qui
19 aurait ordonné cette embuscade ?
20 R. Bien sûr, des opérations de ce genre devaient être approuvées par le
21 Grand quartier général. Eu égard à cet incident particulier, je ne me
22 rappelle ni la date ni l'endroit.
23 Q. Mais encore une fois, si nous partons du principe que cet incident a
24 effectivement eu lieu dans les conditions décrites dans le document,
25 auriez-vous été la personne qui aurait dû autoriser cette attaque ?
26 R. Le commandant de zone avait également compétence pour mener des
27 opérations de ce genre, mais il fallait qu'elle soit approuvée par le Grand
28 quartier général.
Page 6039
1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la date de cet incident,
2 Maître Sepenuk ?
3 M. SEPENUK : [interprétation] Le 8 janvier 1999, Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce rapport porte-t-il sur la période
5 allant d'une minute après minuit à une minute après minuit le lendemain ?
6 J'essaie de comprendre le passage que l'on trouve en haut de la page afin
7 de mieux comprendre la suite qui a été citée par vous. Mais j'ai
8 l'impression qu'on lit ici de 801 à 824.
9 M. SEPENUK : [interprétation] Je crois que c'est exact.
10 Q. Dans la dernière partie du document, je crois que c'est en page 11,
11 nous lisons que la Mission de vérification au Kosovo déclare ce qui est
12 écrit ici au sujet de cette attaque, Monsieur Zyrapi. Elle déclare :
13 "Qu'une embuscade bien exécutée a été tendue à une patrouille du MUP non
14 loin de Suva Reka suite à un entraînement et une planification de qualité,
15 et que ceci confirme les menaces proférées par l'UCK s'agissant de
16 représailles contre les patrouilles du MUP et de l'armée yougoslave et les
17 postes de contrôle. Il semblerait que l'UCK ne respecte pas le cessez-le-
18 feu et, qu'en fait, elle frappe au contraire en ayant recours aux mêmes
19 tactiques par le passé."
20 Est-il permis de s'exprimer ainsi ? Est-ce que l'UCK avait la moindre
21 intention de respecter le cessez-le-feu décrété à la fin d'octobre 1998 ?
22 R. Oui. Elle avait l'intention de respecter le cessez-le-feu conclu en
23 1998.
24 Q. Qu'en est-il alors de l'embuscade dont il est question dans ce
25 document ? Pourquoi avoir autorisé cette embuscade ? Est-ce que ce n'était
26 pas une violation du cessez-le-feu ?
27 R. J'ai dit hier et aujourd'hui encore, lorsque nous avons parlé
28 d'attaques de faible envergure de la part de l'UCK, qu'elle attaquait les
Page 6040
1 postes de contrôle des forces serbes qui faisaient obstacle aux mouvements
2 de l'UCK, aux mouvements des unités qui souhaitaient passer d'un secteur à
3 un autre.
4 Q. C'est en ces termes que vous voyez les choses, n'est-ce
5 pas ?
6 R. Je n'ai pas de connaissances particulières au sujet de cet incident
7 particulier. Je lis la date dans le rapport, mais le lieu n'est pas
8 désigné. Je ne sais pas exactement ce qui s'est passé.
9 Q. D'accord. Passons à un autre document, pièce 3D374.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. J'avais un peu perdu le
11 fil de l'heure, Maître Sepenuk, je pense que nous devons faire la pause.
12 Nous reprendrons ce document après la pause.
13 M. SEPENUK : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous aurons encore une pause
15 maintenant, Monsieur Zyrapi. M. l'huissier va vous escorter hors du
16 prétoire.
17 [Le témoin se retire]
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous reprenons nos travaux à 18 heures
19 et siégerons jusqu'à 19 heures 10 à peu près.
20 --- L'audience est suspendue à 17 heures 32.
21 --- L'audience est reprise à 18 heures 01.
22 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, il se peut que la
24 pièce n'ait pas la bonne cote ou encore que vous soyez déçu de la voir à
25 l'écran. Nous en sommes toujours à la dernière pièce, je pense. Vous
26 vouliez la pièce 3D374 me semble-t-il ?
27 M. SEPENUK : [interprétation] Oui. Monsieur le Président. Je pense que
28 j'avais posé une question au témoin à propos de ce document. Je peux
Page 6041
1 maintenant examiner un autre document.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, je pensais que c'était celui-ci
3 que vous vouliez voir lorsque nous avons fait la pause.
4 M. SEPENUK : [interprétation] Non, mais je pense que le moment se prête
5 bien à ce sujet. Nous sommes un peu préoccupé par la question du temps. Je
6 n'ai pas beaucoup de questions supplémentaires à poser à ce témoin, mais
7 nous voulons être sûrs que nous n'allons pas dépasser les limites. Est-ce
8 que nous aurons le temps habituel prévu par votre décision ?
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai vu où vous alliez, c'est pour
10 cela que je suis intervenu auparavant. L'Accusation a eu besoin de 4 heures
11 et demie pour l'interrogatoire principal, et je pensais que ceci allait
12 vous guider pour ce qui est du temps consacré au contre-interrogatoire.
13 M. SEPENUK : [interprétation] Je n'ai pas besoin de beaucoup de temps de
14 plus. Je vais garder vos instructions à l'esprit.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Continuez.
16 M. SEPENUK : [interprétation]
17 Q. Monsieur Zyrapi, maintenant nous sommes entrés dans une période qui est
18 celle de janvier, février, mars 1999, celle qui va déboucher sur la guerre,
19 quelques questions supplémentaires à propos d'incidents survenus au cours
20 de cette période. Je vais demander à M. l'Huissier d'afficher la pièce
21 3D362. Autres documents de la MVK qui concerne la période du 5 mars 1999,
22 je crois qu'il s'agit de la page 9, de l'incident numéro 8. Oui, c'est le
23 bon document.
24 D'après ce rapport, à 10 heures, ceci concerne une embuscade tendue par
25 l'UCK sur un convoi de MUP. Il est dit ceci : "A 10 heures un convoi du MUP
26 est tombé dans une embuscade tendue par quelque 10 ou 15 membres de l'UCK."
27 On a les coordonnées. "L'attaque est intervenue alors qu'il y avait une
28 relève du personnel du MUP et qu'il y avait livraison de nourriture. L'UCK
Page 6042
1 a tiré deux obus du RPG 7 et c'était suivi de tirs de mitrailleuses, ceci a
2 causé des blessures chez onze membres du MUP et six blessés étaient
3 grièvement blessés."
4 Je vous pose la question suivante : est-ce que vous avez ordonné ou
5 approuvé personnellement cette attaque ?
6 R. Oui, parce que s'il fallait pour lancer cette attaque l'approbation
7 venant de nous, effectivement, nous donnions cette approbation, mais je ne
8 me rappelle pas de cet incident-ci, ni du lieu où il s'est produit.
9 Q. Est-ce que vous déclarez que, à supposer bien sûr que la MVK dise la
10 vérité ici, est-il vrai de dire que le MUP est en train d'effectuer une
11 relève du personnel et de livrer de la nourriture ? Estimez-vous qu'est-ce
12 qui s'est passé n'était pas une violation de cessez-le-feu ?
13 R. Oui, en fait, c'en était une.
14 Q. Pourquoi y a-t-il eu violation du cessez-le-feu ?
15 R. Je l'ai déjà dit, hier et aujourd'hui, on a attaqué des postes de
16 contrôle. Ici, je ne me souviens pas de cet incident de façon précise. On
17 indique sur quel territoire l'attaque a eu lieu, mais on n'indique pas le
18 lieu précis. Cela doit figurer dans le rapport en ce qui concerne cette
19 journée.
20 Q. Merci.
21 M. SEPENUK : [interprétation] Peut-on maintenant voir la pièce 3D179 ?
22 Q. Monsieur Zyrapi, il s'agit ici d'un document de l'OSCE, MVK, rapport de
23 contexte sur le respect par les parties au Kosovo de l'accord à la suite
24 des pourparlers de Rambouillet et par rapport au début des autres
25 pourparlers de Paris. Du 23 février au 11 mars 1999.
26 Le premier paragraphe dit ceci : "Des attaques qui n'avaient pas été
27 provoquées ont été lancées par l'UCK contre la police. Ces attaques se sont
28 poursuivies et il y a eu de plus en plus de blessés du côté des forces de
Page 6043
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 6044
1 sécurité."
2 Est-ce que ceci vous rappelle que vous avez approuvé
3 l'intensification des attaques lancées contre le MUP ?
4 R. Si je me souviens bien, au cours de cette période, il y a eu des
5 attaques, mais il n'y a pas eu intensification des attaques.
6 Q. Ce rapport se poursuit. Il mentionne le nombre des attaques. Je ne vais
7 pas toutes les reprendre.
8 Mais voici à la page 2 : "Le 27 février, une patrouille de la police
9 est tombée dans une embuscade à l'ouest de Pristina, à l'aérodrome. Un
10 policier a été tué et il y a eu un blessé, apparemment à cause de tirs de
11 tireurs d'élite de l'UCK."
12 Vous vous souvenez de cet incident ?
13 R. Non, je ne m'en souviens pas.
14 Q. Ailleurs dans le rapport, on dit : "Trois policiers ont été blessés.
15 L'un a succombé à ses blessures à l'hôpital de Pristina après qu'une
16 patrouille de police en poste à un pont a été attaquée dans le centre de
17 Podujevo le 3 mars."
18 Est-ce que vous vous souvenez de cet incident-là ?
19 R. Non, je ne m'en souviens pas.
20 Q. A supposer que ce que je viens de vous lire corresponde bien à la
21 vérité, pouvez-vous imaginer pourquoi il y a de bonnes raisons d'attaquer
22 une patrouille de police en poste au centre de Podujevo; est-ce qu'on peut
23 qualifier cela d'action de défensive ?
24 R. Je vous l'ai déjà dit, il y a eu des attaques de poste de contrôle. Je
25 le répète, c'est uniquement lorsque nos unités se sont déplacées d'une zone
26 à l'autre et uniquement si ce déplacement a été entravé, c'est à ce moment-
27 là qu'il y a eu ces attaques.
28 Q. Je pourrais tenter de mentionner une autre partie du rapport.
Page 6045
1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant que vous ne le fassiez, je
2 voudrais demander ceci au témoin.
3 Monsieur Zyrapi, vous parliez là du déplacement de vos unités et de ce
4 déplacement qui aurait été entravé. Dans l'accord de cessez-le-feu, y
5 avait-il de bonnes raisons pour empêcher que le MUP n'ait des postes de
6 contrôle ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] En règle générale là où il ne devait pas y
8 avoir de postes de contrôle, mais c'était vrai aussi dans les territoires
9 où il y avait des postes de contrôle mais qui constituaient des obstacles
10 au déplacement de nos unités d'un territoire à l'autre.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que le cessez-le-feu
12 envisageait de vous donner la possibilité de déplacer des unités d'un
13 secteur à l'autre ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne le cessez-le-feu il y avait
15 eu auparavant une attaque à Rance, dans le territoire de la zone
16 opérationnelle de Nerodimlje, qui avait été effectuée par les forces
17 serbes.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais là, c'est quelque chose de tout à
19 fait différent. Il se peut bien que les forces serbes aient régulièrement
20 violé l'accord de cessez-le-feu. Mais ce n'est pas l'objet de ma question.
21 Je vous demande ceci : vous avez décrit une situation qui est celle
22 où il y a des attaques lancées sur des postes de contrôle du MUP afin de
23 permettre le déplacement de vos forces d'un secteur à l'autre. Est-ce que
24 c'est là quelque chose qui se justifie quand on pense aux conditions posées
25 par l'accord de cessez-le-feu ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est dans le cadre de l'accord de
27 cessez-le-feu que je parle. J'ai fait référence à des mouvements de l'UCK
28 dans les territoires contrôlés par l'UCK.
Page 6046
1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Poursuivez, Maître Sepenuk.
2 M. SEPENUK : [interprétation]
3 Q. Je n'ai plus qu'à mentionner un incident pour terminer cette série de
4 questions.
5 "Le 5 mars, de 15 à 20 membres de l'UCK ont tendu une embuscade, dans
6 laquelle est tombée une patrouille de police au sud-ouest de l'aéroport de
7 Pristina. D'après la police, 11 policiers ont été blessés, six d'entre eux
8 ont été blessés grièvement, et deux voitures de police ont été détruites
9 par des grenades lancées par des lance-roquettes."
10 Est-ce que vous vous souvenez de ceci ? Vous souvenez-vous avoir
11 approuvé ceci ou ordonné ceci ?
12 R. Je vous le répète, je ne me souviens pas de chacun des incidents qui se
13 sont produits au cours de cette période. Il y a bien des rapports, mais
14 pour l'heure, je ne me souviens pas d'incident précis.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il s'agit d'un incident
16 dont nous avons déjà parlé.
17 M. SEPENUK : [interprétation] Non. Non, c'était un autre incident au cours
18 duquel des policiers ont été tués.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non. Il y en a eu un survenu le 5
20 mars. Embuscade tendue pour ce convoi qui devait assurer la relève du
21 personnel et la livraison de vivres. Est-ce que ce n'est pas le même ?
22 M. SEPENUK : [interprétation] Oui, vous avez raison, Monsieur le Président.
23 Je m'excuse.
24 Q. Monsieur Zyrapi, dans le rapport, il est dit ceci :
25 "Il y a une zone dans laquelle il y a de plus en plus d'activités
26 depuis la fin de février. Apparemment, l'UCK est partie de certaines
27 régions pour aller vers les villages se trouvant au sud-ouest de Kacanik,
28 près de la frontière méridionale avec la République de Macédoine. Il y a eu
Page 6047
1 à la suite de cela une augmentation de la concentration des forces de la VJ
2 et de la police. Des rapports faisant état de combats dans cette zone ont
3 été reçus le 28 février. Les forces de sécurité ont été attaquées par l'UCK
4 et au sud-ouest de Kacanik. Un policier, le commandant du poste de police
5 de Kacanik a été tué et quatre policiers blessés. On estime que 2 000
6 personnes se sont enfuies des villages se trouvant dans la zone de Kacanik,
7 et que certains des villageois ont essayé de franchir la frontière pour
8 aller en Macédoine."
9 Est-ce que l'UCK essayait de prévoir ou de permettre l'arrivée d'une
10 invasion terrestre des forces de l'OTAN au Kosovo en passant par la zone de
11 Kacanik ? Etait-ce là l'objectif que vous planifiiez à l'époque ?
12 R. Non. Ce n'est pas ce qu'on voulait obtenir. Je ne savais pas à l'époque
13 qu'il allait y avoir des forces d'infanterie de l'OTAN.
14 Q. Est-ce que vous vous souvenez avoir rencontré un certain Christopher
15 John Clark ? Connaissez-vous cet homme ?
16 R. Cela ne me dit rien. Vous parlez de quelle période ?
17 Q. De cette période sur laquelle portaient mes questions, là où on parle
18 plus exactement du 28 février 1999. M. Clark, c'est un adjudant de l'armée
19 britannique. Il faisait partie de la MVK. Il est officier chargé des
20 opérations au Kosovo. Il a fourni une déclaration. C'est la pièce 3D386,
21 déclaration qu'il a fournie au bureau du Procureur en mars et en juillet
22 2001. Il y dit ceci :
23 "Fin février début mars 1999, il y a eu infiltration des forces de l'UCK
24 dans la région de Kotlina, au sud du Kosovo. On n'avait jamais vu
25 auparavant cette brigade au Kosovo, et on pense qu'elle s'est infiltrée en
26 passant par la frontière avec la Macédoine. Après être entrée au Kosovo,
27 elle a été identifiée par nous, accompagnée d'une équipe de la MVK. Elle
28 avait à sa tête un homme répondant au nom de Bardi, qu'on avait vu
Page 6048
1 auparavant dans la région de Dukagjin. La brigade se composait uniquement
2 d'Albanais de Macédoine. Ces hommes ont ordonné à la population locale du
3 Kosovo de sortir de la région et de traverser la frontière avec la
4 Macédoine. C'était un ordre que ces hommes ont donné afin que commence une
5 offensive contre les forces serbes de la région. Cette information nous a
6 été donnée par un membre de la brigade. A l'époque, la MVK a estimé que
7 l'UCK essayait de créer un couloir permettant une invasion de forces
8 terrestres de l'OTAN dans cette région."
9 Est-ce que ceci vous rafraîchit la mémoire ?
10 R. Non. Vous parlez d'un territoire, c'était lequel par lequel est entré
11 la brigade ?
12 Q. Kotlina, Kacanik, près de la frontière avec la Macédoine ?
13 R. Kotlina, Kacanik, c'était le territoire de la 162e Brigade. Je n'ai pas
14 connaissance d'une autre brigade qui serait venue de Macédoine. Tout ce que
15 je sais, c'est que c'était le territoire de la 162e. Mais je n'ai pas
16 connaissance des préparatifs qui auraient été effectués en vue d'une
17 offensive quelle qu'elle soit.
18 Q. Merci.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous venez de parler de la 162e
20 Brigade. Est-ce qu'elle se composait d'Albanais de Macédoine ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Elle se composait d'Albanais du Kosovo,
22 ressortissants du territoire de Kacanik.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce nom de "Bardi," est-ce que cela
24 vous dit quelque chose ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] "Bardi," c'est le surnom du commandant de la
26 162e Brigade.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle était son origine ethnique ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Il était Albanais.
Page 6049
1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
2 Maître Sepenuk.
3 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Q. Dans ce rapport dont je viens de donner lecture en partie, la pièce
5 3D179, il y est question à plusieurs reprises d'incidents au cours desquels
6 auraient eu lieu des enlèvements. Je ne vais pas vous poser de questions
7 là-dessus parce que je crois connaître votre avis sur la question des
8 enlèvements, ce sur quoi je vais vous poser une question. J'aimerais savoir
9 s'il est exact à l'été -- non, attendez. Avant d'en arriver là, je vais en
10 terminer de la période de janvier, février et mars 1999. J'aimerais très
11 brièvement aborder la période de guerre, mais très brièvement. D'abord,
12 s'agissant de la coopération entre l'UCK et l'OTAN, M. Haradinaj, l'un de
13 vos commandants de zone, dans son ouvrage, "Histoire de la guerre et de la
14 liberté," pièce 3D375, mais avant de vous poser la question, j'aimerais
15 savoir si vous connaissez ce livre.
16 R. J'ai entendu parler de ce livre écrit par M. Haradinaj.
17 Q. Deux extraits de cet ouvrage ont été placés en annexe de votre
18 déclaration de 2005, n'est-ce pas ?
19 R. Oui.
20 Q. Dans ce livre, voilà ce que dit M. Haradinaj sur la coopération avec
21 l'OTAN. La question est : "Comment l'UCK et l'OTAN ont-ils coopéré au cours
22 de la campagne de bombardement ?
23 M. Haradinaj y répond : "Ceci doit faire l'objet d'une évaluation réaliste.
24 D'un point de vue militaire, le Kosovo était le terrain d'action à la fois
25 de l'OTAN et de l'UCK. Ces deux forces étaient alliées, mais elles
26 n'étaient pas égales. Elles avaient des intérêts communs et étroitement
27 liés, des intérêts mutuels." Voilà, on n'en dit pas plus. On dit simplement
28 "mutuels." "J'ai tiré partie ou profit des frappes aériennes." - là, la
Page 6050
1 citation se poursuit - "les pilotes de l'OTAN, de leurs côtés, ont profité
2 de la présence de nos lignes de tir qui ont forcé les forces serbes à
3 sortir de leurs couverts ou du terrain couvert. C'est comme cela que nous
4 coopérions."
5 Seriez-vous d'accord avec cette évaluation, Monsieur Zyrapi ?
6 R. Je ne sais pas parce que c'est lui qui a écrit cela. Je n'étais pas sur
7 place à l'époque. Je ne sais pas ce qu'il faisait à ce moment-là.
8 Q. Mais vous y étiez là-bas jusqu'au mois d'avril, n'est-ce pas ? Vous
9 étiez, si j'ai bien compris, chef du Grand état-major jusqu'en avril. Vous
10 ai-je bien compris ?
11 R. Non. Je n'ai pas occupé ces fonctions jusqu'en avril. J'ai quitté ce
12 poste pour devenir ministre adjoint à la Défense. C'était au cours de la
13 première partie du mois d'avril.
14 Q. En tout cas, vous avez été sur place au moins pendant une partie de la
15 période des bombardements par l'OTAN, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, du 24 jusqu'à la deuxième moitié du mois d'avril.
17 Q. Bien. Peut-on également affirmer qu'une partie importante des cibles
18 des bombardements de l'OTAN au Kosovo leur était indiquée par des
19 commandants de l'UCK par communication téléphonique satellite ?
20 R. Je ne sais pas ce qui s'est passé après le mois d'avril, mais avant le
21 mois d'avril, non, ce n'était pas le cas. Parce que les rapports portant
22 sur nos forces étaient communiqués à notre ministère créé à la suite des
23 pourparlers de Rambouillet. Par la suite, je ne sais pas à qui ont été
24 adressés ces rapports.
25 Q. Baton Haxhiu, c'était un éditeur du journal du Kosovo ?
26 Le connaissiez-vous ?
27 R. Oui.
28 Q. On l'a cité dans un article. Le 24 juin 1999, dans le "New York Review
Page 6051
1 of Books," dans un article intitulé "Le Kosovo et au-delà du Kosovo," un
2 article rédigé par un journaliste prénommé Tim, et ce qui y est dit, c'est,
3 "une majorité des cibles prises par l'OTAN lors de ces bombardements au
4 Kosovo" - et je le dis au passage, c'est la pièce 3D382 - "lui avaient été
5 indiquées par les commandants de l'UCK par téléphone satellite." Or, vous
6 dites aujourd'hui que ce n'est pas vrai ?
7 R. Je vous parle de la période au cours de laquelle j'étais en poste.
8 J'occupais cette fonction. Nous envoyions les rapports au ministère de la
9 Défense qui était basé en Albanie; les rapports concernant nos forces et
10 les forces serbes.
11 Q. Bien. Au début de la guerre, en tout cas, au cours de la période au
12 cours de laquelle vous aviez quoi que ce soit à voir avec la guerre, est-il
13 exact de dire que vous aviez une armée régulière beaucoup plus forte, sans
14 fausse modestie, et ce, notamment grâce aux efforts que vous aviez déployés
15 en vue d'utiliser des tactiques de guérilla lorsque cela s'avérait
16 nécessaire, avec l'aide de la population civile qui vous aidait en vous
17 fournissant des vivres, un logement ou tout autre aide qui pouvait être
18 apportée ? Ceci résume-t-il fidèlement la situation qui prévalait au cours
19 de la guerre ?
20 R. Oui.
21 Q. Bien. J'aimerais maintenant passer à autre chose, et vous poser la
22 question que j'ai omis de vous poser il y a quelques instants sachant que
23 je crois que vous avez déjà exprimé l'avis qui est le vôtre sur la
24 question. Il s'agit des meurtres et des enlèvements de civils serbes et de
25 soi-disant collaborateurs albanais. Est-il exact de dire qu'à l'été 1998,
26 il était de notoriété publique que des Albanais se faisaient tuer, parce
27 qu'on les considérait, on les jugeait comme collaborateurs des Serbes.
28 R. Oui. A ce moment-là, j'ai entendu parler de tels cas.
Page 6052
1 Q. Il en est également question dans des communiqués délivrés par le Grand
2 état-major, il en a également été question dans la presse du Kosovo, Koha
3 Ditore et beaucoup d'autres, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, dans de nombreux communiqués issus du Grand état-major, il était
5 question de ces événements, ainsi que dans la presse.
6 Q. Bien. Hier, vous avez dit que des commandants de zone, des soldats et
7 des membres de la population civile avaient parlé de mauvais traitements de
8 civils serbes et de supposés collaborateurs albanais.
9 R. J'ai dit hier avoir entendu de la bouche de civils et de commandants de
10 zone que certains soldats et certains officiers avaient abusé de leurs
11 pouvoirs.
12 Q. Vous vouliez intervenir pour remédier à ce problème, n'est-ce pas ?
13 R. A cette époque-là, je ne pouvais rien faire, parce que je n'occupais
14 aucune fonction à ce moment-là. Par la suite, lorsque je suis devenu chef
15 d'état-major - nous en avons parlé hier - j'ai pris des mesures afin de
16 rétablir la discipline au sein de l'armée.
17 Q. Oui. Effectivement, après votre nomination en tant que chef d'état-
18 major, vous avez donné un ordre - c'est la pièce de l'accusation 2448 - un
19 ordre interdisant tout comportement inapproprié vis-à-vis de la population
20 civile, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Il y avait également un certain nombre de règles. Vous avez témoigné
23 hier sur le règlement de l'UCK. On le voit dans la pièce de l'Accusation
24 2499, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
26 Q. Vous avez donné un ordre - c'est la pièce de l'accusation 20 - non,
27 pardon, vous n'avez pas donné cet ordre, mais c'est la pièce de
28 l'Accusation 2463, vous avez dit que c'était un ordre émanant du juge
Page 6053
1 chargé de l'enquête, enquête portant sur une violation grave. Je crois que
2 c'est cela que vous avez dit hier, n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Lorsque vous avez déposé, vous n'êtes pas parvenu à vous souvenir de la
5 nature de cette violation grave, n'est-ce pas ?
6 R. C'est exact. Je ne m'en souvenais pas.
7 Q. La mémoire vous serait-elle revenue par hasard ?
8 R. Non. Il y a eu d'autres cas de meurtres qui ont fait l'objet d'enquête.
9 Q. Vous êtes au courant d'autres cas de meurtres de qui, de civils serbes
10 et de personnes qualifiées de collaborateurs, des Albanais ? Avez-vous
11 connaissance d'autre cas qui ont fait l'objet d'enquête ?
12 R. Je n'ai pas d'information personnellement sur ces cas de meurtres
13 d'Albanais ou de Serbes, mais il y a eu des enquêtes en janvier et février
14 sur une période de temps très limité. Il y avait peu de temps pour faire
15 quoi que ce soit, mais je sais qu'il y a eu des enquêtes qui ont été
16 menées.
17 Q. Vous en avez pris connaissance au travers des communiqués, n'est-ce pas
18 ? Vous avez entendu vos commandants, vos soldats et des civils en parler ?
19 R. Oui, j'ai eu vent de ce genre de choses, mais je n'ai pas de cas précis
20 et concrets à évoquer avec vous.
21 Q. Bien. Vous avez évoqué cet ordre hier et vous avez dit avoir reçu cet
22 ordre qui se trouvait dans les archives de la zone opérationnelle de
23 Pastrik, n'est-ce pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Où se trouvent les archives de la zone opérationnelle de Pastrik ?
26 R. Pour la plupart, elles se trouvent au Grand état-major du KPC.
27 Q. Vous pouvez me rappeler ce que c'est, le KPC ?
28 R. Et d'autres documents se trouvent au niveau des zones.
Page 6054
1 Q. Le KPC, qu'est-ce que c'est ? Je sais que vous nous l'avez déjà dit,
2 mais je voudrais que vous nous le rappeliez.
3 R. Le Corps de protection du Kosovo.
4 Q. Vous êtes-vous rendu physiquement au bureau des archives de la zone
5 opérationnelle de Pastrik pour y récupérer ce document ?
6 R. Oui.
7 Q. Précisément où se trouvent ces archives ? Dans quelle village, dans
8 quelle ville ?
9 R. Le commandement de la zone se trouve à Prizren.
10 Q. Le bureau du Procureur vous a-t-il demandé d'obtenir ce document-ci,
11 ainsi que d'autres documents de même ordre ?
12 R. Ils ne me l'ont pas demandé directement, mais ils m'ont dit ce sur quoi
13 pourrait porter mon témoignage lorsque je déposerais devant le Tribunal.
14 Q. C'est-à-dire ? Quelle a été la teneur de cette conversation ? Vous,
15 vous dites qu'ils ont indiqué ce sur quoi votre témoignage pourrait porter,
16 quand cette conversation a eu lieu ? Quand vous ont-ils dit cela ? Quand
17 vous ont-ils dit que vous pourriez témoigner sur telle ou telle chose ?
18 R. Je l'ai dit déjà. C'était avant que je vienne ici, lorsque j'ai fait ma
19 déclaration en juillet.
20 Q. Si je ne m'abuse, vous avez dit que l'Accusation vous avait dit sur
21 quoi pourrait porter votre témoignage. J'aimerais que vous soyez un peu
22 plus précis par rapport à cela. Quelle a été la teneur de la conversation
23 que vous avez eue avec l'Accusation ?
24 R. L'Accusation a parlé avec moi de choses que je savais et qui pourraient
25 faire l'objet de ma déposition. Ils ne m'ont pas dit ce que je devais dire
26 ici, ils m'ont demandé ce que je savais et ils m'ont dit de venir ici
27 déposer en disant la vérité.
28 Q. Vous ont-ils demandé de récupérer des documents faisant état de
Page 6055
1 sanctions disciplinaires imposées soit par un commandant local soit par un
2 tribunal militaire contre des soldats de l'UCK qui avaient soit assassiné
3 soit enlevé des civils serbes ou de supposés collaborateurs albanais ?
4 R. Ils ont dit de manière tout à fait générale que s'il y avait des
5 documents sur lesquels je pourrais mettre la main, des documents qui
6 pourraient être utiles, que je les amène. Mais ils n'ont pas précisé le
7 type de documents que je devais rechercher.
8 Q. Ils vous ont parlé de cette question précisément, de la recherche de
9 documents sur des mesures disciplinaires ou des procédures engagées devant
10 les tribunaux contre des membres de l'UCK que l'on suspectait d'avoir tué
11 ou enlevé des civils serbes ou des collaborateurs albanais, c'est ce que
12 vous dites ?
13 R. Non, pas seulement sur cela, mais en général, pas seulement des
14 documents portant sur des mesures disciplinaires, mais sur d'autres choses
15 également.
16 Q. Dans la conversation, il a été question des mesures disciplinaires,
17 n'est-ce pas ?
18 R. Oui. C'est l'une des choses dont nous avons parlé, les mesures
19 disciplinaires.
20 Q. Suite à cette discussion, vous avez présenté ici, hier si j'ai bien
21 compris, deux documents. L'un de ces documents, c'est l'ordre donné par le
22 juge chargé de l'enquête, ordre qui précise que c'est au commandant de la
23 police militaire d'assurer l'exécution de l'ordre. Puis un autre document,
24 qui est un autre ordre, si je me souviens bien ce que nous avons dit hier,
25 sur la mise en détention pour une période de 48 heures du soldat appelé
26 Hasan Obej. Ce sont bien les deux documents que vous avez apportés sur la
27 prise de mesures disciplinaires ?
28 R. Oui. Ce sont deux documents que j'ai obtenus et qui portent
Page 6056
1 effectivement sur des mesures disciplinaires.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Il faudrait signaler que c'est
3 l'ordre du juge chargé de l'enquête qui devait être exécuté et non pas le
4 juge chargé de l'enquête lui-même. Cela ressort de manière un peu ambiguë
5 du compte rendu anglais.
6 M. SEPENUK : [interprétation] Oui. Merci de la correction, Monsieur le
7 Président.
8 Q. Monsieur Zyrapi, j'aimerais vous poser une question de nature générale.
9 A votre connaissance, au cours de toute la période de votre présence au
10 cours de laquelle vous avez été présent au Kosovo, du 28 mai 1998 jusqu'à
11 la date de votre départ de vos fonctions à la mi-avril 1998, avez-vous eu
12 une connaissance directe du moindre cas -- pardon, je parlais de 1999, la
13 mi-avril 1999, donc avez-vous personnellement eu connaissance du moindre
14 cas pour lequel l'UCK a imposé des mesures disciplinaires ou sanctionné ses
15 propres soldats pour avoir tué ou enlevé des civils serbes ou de soi-disant
16 collaborateurs albanais ?
17 R. Pas personnellement, mais je sais que de nombreuses mesures ont été
18 prises en janvier et en février. Comme je l'ai dit, la période a été
19 extrêmement brève, insuffisante peut-être pour faire quoi que ce soit.
20 Q. Dans le procès Limaj, vous vous en souviendrez sans doute, puisque vous
21 avez témoigné pour M. Limaj, n'est-ce pas ? Il faut répondre par oui ou par
22 non.
23 R. Oui.
24 Q. Un témoin du nom de Peter Bouckhert, B-o-u-c-k-h-e-r-t, qui était
25 membre de "Human Rights Watch", a déclaré qu'après une enquête extrêmement
26 minutieuse : "Ils n'avaient pas été en mesure de mettre le doigt sur le
27 moindre cas" ici, il s'agit de la période allant de février à novembre 1998
28 - "Ils n'ont pas été en mesure de rassembler des informations indiquant le
Page 6057
1 moindre cas de mesures disciplinaires ou de sanctions prises par l'UCK
2 contre leurs soldats, malgré leurs demandes répétées afin d'obtenir ces
3 informations."
4 Je vous repose la question, Monsieur, avez-vous eu connaissance
5 personnellement du moindre cas de mesures disciplinaires ou de sanctions
6 disciplinaires contre un soldat de l'UCK pour le meurtre de civils serbes
7 ou d'enlèvement de civils serbes, ou pour le meurtre ou l'enlèvement de
8 soi-disant collaborateurs albanais ? Avez-vous eu une connaissance, vous-
9 même personnellement, du moindre cas indiquant que de telles mesures aient
10 été prises ?
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, je crois que le témoin
12 a répondu. Il vous a dit que non, il n'avait pas lui-même eu connaissance
13 personnellement du moindre cas de ce genre. Je m'interroge sur la
14 pertinence de cette question répétée. Je me pose la question dans le
15 contexte global de cette affaire.
16 M. SEPENUK : [interprétation] Très bien. Je vais poursuivre.
17 Q. Je vais poser une dernière question, Monsieur Zyrapi. Connaissez-vous
18 l'existence d'un fossé situé près du village de Decani où l'UCK aurait
19 entreposé des corps de Serbes, d'informateurs et de collaborateurs ? Etes-
20 vous au courant de l'existence de ce lieu ? C'est ce même homme dont j'ai
21 parlé tout à l'heure qui nous en a parlé.
22 R. Non. Je n'ai pas connaissance de l'existence d'un tel endroit.
23 Q. Vous ne savez pas. Très bien. Merci.
24 M. SEPENUK : [interprétation] Merci. Je n'ai plus de questions.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître O'Sullivan.M. O'SULLIVAN :
26 [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
27 Contre-interrogatoire par M. O'Sullivan :
28 Q. [interprétation] Monsieur, vous avez dit dans votre déposition qu'à la
Page 6058
1 mi-avril, vous étiez devenu ministre adjoint de la Défense, n'est-ce pas ?
2 R. Oui.
3 Q. Pouvez-vous nous rappeler qui était le ministre de la Défense ?
4 R. A ce moment-là, c'était Azim Syla qui était ministre de la Défense.
5 Q. Pouvez-vous nous dire quand le ministère de la Défense a été créé ?
6 R. Il a été créé après les pourparlers de Rambouillet lors de la mise en
7 place du gouvernement provisoire. Voilà. C'est à ce moment-là que le
8 ministère de la Défense a été créé.
9 Q. Quel était le siège du ministère de la Défense ?
10 R. Comme je l'ai déjà dit, il avait son siège à Tirana, en Albanie.
11 Q. Vous avez déclaré il y a un instant, d'ailleurs vous l'aviez déjà dit,
12 que votre ministère avait été créé suite aux pourparlers de Rambouillet. La
13 décision a été prise au cours des pourparlers de Rambouillet de créer ce
14 ministère. Pouvez-vous nous éclairer en nous disant en quoi les pourparlers
15 de Rambouillet ont affecté la création de ce ministère ?
16 R. Je ne sais pas quel en a été l'effet, mais ce que je sais, c'est que
17 juste après les pourparlers de Rambouillet, le gouvernement provisoire a
18 été mis en place et que le ministère de la Défense a été créé au sein de ce
19 gouvernement.
20 Q. Est-ce que, d'après vous, la création du ministère de la Défense a été
21 pendant les pourparlers de Rambouillet et est-ce que, d'après vous, sa
22 création résulte directement de ces pourparlers de Rambouillet ?
23 R. Non.
24 Q. Mais puisque vous avez établi un lien dans votre propos entre les
25 pourparlers de Rambouillet et la création du ministère de la Défense,
26 d'après vous, quel est ce lien ?
27 R. Ce que j'ai dit, c'est qu'ultérieurement, aux pourparlers de
28 Rambouillet, le gouvernement provisoire a été créé et notamment le
Page 6059
1 ministère de la Défense en faisait partie.
2 Q. Cela nous ramène à début mars 1999, n'est-ce pas ?
3 R. Non. Un peu plus tard, les ministères ont vu le jour un peu plus tard.
4 Je ne sais pas exactement la date à laquelle le ministère de la Défense a
5 été créé. Est-ce que c'était début mars ou un peu plus tard en mars. En
6 tout cas, c'était à peu près à cette époque.
7 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai plus
8 de questions.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Maître Petrovic, à vous.
10 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Contre-interrogatoire par M. Petrovic :
12 Q. [interprétation] Monsieur Zyrapi, je m'appelle Vladimir Petrovic et
13 j'ai quelques questions à vous poser.
14 J'aimerais que nous revenions au début de votre déposition d'hier.
15 Vous avez dit à ce moment-là qu'en 1985, vous avez œuvré à la création de
16 l'armée albanaise du Kosovo, et que 30 officiers et sous-officiers ont
17 contribué à cet effort à vos côtés. Vous avez ajouté que vous aviez été
18 condamné à un an et demi de prison avec sursis. Pouvez-vous me dire si ces
19 30 officiers et sous-officiers étaient tous Albanais de souche ?
20 R. S'agissant de la période que vous venez d'évoquer, ce que je peux dire
21 en tout cas en mon nom personnel, c'est que nous n'avons pas travaillé à la
22 création d'une armée albanaise. Mais ces 30 officiers et sous-officiers
23 étaient tous Albanais de souche.
24 Q. Je souhaitais simplement vous rappeler ce que vous avez dit hier. Peut-
25 être, ne nous sommes-nous pas bien compris ? Mais hier, répondant à une
26 question de l'Accusation, vous avez dit en page 33 du compte rendu
27 d'audience d'hier, je cite :
28 "A ce moment-là, nous travaillions à la création d'une armée de
Page 6060
1 libération du Kosovo, et le tribunal nous a jugé coupable et nous a
2 condamnés."
3 Plus tard, suite à une question du Président de la Chambre, il a été dit,
4 pour clarifier les choses qu'il s'agissait, en fait, de l'armée albanaise
5 du Kosovo. Est-ce que ce que vous dites aujourd'hui dans votre déposition
6 diffère de ce que vous avez dit hier ?
7 R. Tout est écrit dans ma déclaration écrite que vous possédez. Je n'ai
8 pas dit que nous avons travaillé à la création d'une armée, mais que nous
9 avons été accusés de travailler à la création d'une armée. Il s'agissait
10 d'accusations retenues par le tribunal. Je n'ai pas dit que nous avions
11 travaillé à la création d'une armée. Ceci figure très clairement dans ma
12 déclaration écrite.
13 Q. Oui. Dans votre déclaration écrite, il est dit que vous "auriez
14 travaillé à la création d'une armée", mais hier dans vos propos oraux, vous
15 avez dit la même chose sans conditionnel. Enfin, je n'insiste pas. Si vous
16 tenez à maintenir ce que vous venez de dire à l'instant, admettons.
17 Passons à autre chose. Hier, vous avez parlé de la création d'un
18 tribunal relevant du Grand quartier général de l'UCK. Puis, vous avez
19 évoqué M. Sokol Dobruna, entre autres, qui a été nommé aux fonctions de
20 juge militaire de ce tribunal en décembre 1998. Alors, ce que je vous
21 demande, c'est si avant cette date il y avait quelqu'un au sein de l'UCK
22 qui remplissait des fonctions comparables à celles de ce juge, autrement
23 dit, des fonctions judiciaires ? Est-ce qu'un poste impliquant l'exercice
24 de fonctions judiciaires existait auparavant au sein de l'UCK, donc un
25 poste de juge militaire ou d'autres représentants judiciaires au sein du
26 Grand quartier général de l'UCK ?
27 R. A ma connaissance, il n'en a pas existé jusqu'à ce moment-là.
28 Q. Dites-nous, qui a nommé M. Dobruna à ce poste ?
Page 6061
1 R. Il a été demandé de créer un tribunal militaire et
2 M. Dobruna a été nommé à ce poste sur proposition du commandant suprême.
3 Q. Donc, ce juge a été nommé par le commandant en chef de l'UCK, si j'ai
4 compris. Dites-moi, qui était le juge d'instruction dont vous avez parlé
5 dont le nom figure dans le document qui vous a été soumis il y a quelques
6 instants par Me Sepenuk ? Qui est cet homme ? Si vous le souhaitez, je peux
7 vous présenter une nouvelle fois le document pour vous rappeler le nom en
8 question, mais je pense que vous l'avez en mémoire.
9 R. Je me souviens du document dont nous avons parlé. Nous en avons parlé
10 hier également, mais je ne me souviens pas de ce nom.
11 Q. N'était-ce pas un certain Dobruna ?
12 R. Comme je l'ai dit hier, il y avait deux ou trois hommes qui
13 travaillaient au tribunal militaire aux côtés de M. Dobruna.
14 Q. Bien. Vous nous dites donc qu'il existait un tribunal militaire et un
15 juge de ce tribunal militaire. Dites-nous maintenant, quelle était la
16 réglementation qu'appliquait ou qu'était censé appliquer ce M. Dobruna ou
17 les autres juges du tribunal militaire dans les affaires que vous avez
18 évoquées ? Vous nous dites qu'il y a eu des procès, mais que vous ne vous
19 rappelez d'aucun procès en particulier.
20 R. Dans mon souvenir, le tribunal militaire appliquait les conventions
21 internationales ainsi que le règlement de l'UCK. Ces questions ne
22 relevaient pas de ma compétence. Je n'étais pas chargé de vérifier dans
23 quelles mesures les diverses réglementations étaient appliquées ou pas par
24 le tribunal militaire.
25 Q. Etes-vous au courant, ne serait-ce que d'une affaire, d'un procès, qui
26 aurait eu lieu et qui aurait donné lieu à condamnation en application des
27 conventions internationales ou du règlement de l'UCK ? Savez-vous s'il n'y
28 a eu, ne serait-ce qu'un seul procès qui aurait été mené ? Peut-être ne
Page 6062
1 vous rappelez-vous pas les noms des personnes, mais vous rappelez-vous si
2 au moins il y aurait eu un procès au moins ?
3 R. Il y a eu des procès, mais en cet instant, je ne me rappelle pas. Comme
4 je l'ai dit, il ne relevait pas de ma responsabilité de vérifier le travail
5 du tribunal militaire ou les personnes qui auront été poursuivies par ce
6 tribunal.
7 Q. J'ai encore une question sur ce sujet. Selon ce que vous avez dit dans
8 votre déposition, une personne a été condamnée. Devant qui cette personne
9 pouvait-elle interjeter appel éventuellement ? Car il y avait sans doute
10 une deuxième instance possible ? Ou est-ce que c'est également ce Dobruna
11 qui s'occupait des pourvois en appel ? Y avait-il un procureur militaire ?
12 De quelle nature était ce système ?
13 R. Je ne connais pas ce système. Je ne cesse de le dire et je le répète
14 qu'il ne relevait pas de ma compétence de vérifier l'organisation du
15 tribunal militaire, et que je ne me rappelais pas de procès en particulier.
16 Q. D'accord, d'accord. Passons à autre chose. En tant que chef de l'état-
17 major depuis novembre 1998 et jusqu'à avril 1999, avez-vous vous-même été à
18 l'origine d'une quelconque enquête ou d'une quelconque poursuite dans les
19 cas où vous avez été informé du fait que des personnes ont été enlevées,
20 que des personnes ont été tuées, car c'est bien ce que vous avez dit
21 lorsque vous avez répondu aux collègues de l'Accusation tout à l'heure ?
22 Avez-vous engagé la moindre procédure contre des membres de l'UCK au moment
23 où vous occupiez ce poste le plus haut placé et le plus responsable au sein
24 de l'Armée de libération du Kosovo ?
25 Q. A cette époque-là les infractions les plus graves étaient renvoyées
26 devant le tribunal militaire. Personnellement, je ne pouvais être à
27 l'origine de procédures de cette nature dans des cas de ce genre qui
28 relevaient de la responsabilité du tribunal militaire.
Page 6063
1 Q. Même si vous avez entendu parler d'enlèvements, de meurtres, vous
2 n'avez personnellement rien entrepris car vous considériez que cela ne
3 relevait pas de vos responsabilités.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne répondez pas tout de suite à cette
5 question. Maître Petrovic, j'ai déjà posé la même question à Me Sepenuk.
6 Quelle est la pertinence de toutes ces questions ?
7 M. PETROVIC : [interprétation] Me Sepenuk vous a répondu en indiquant
8 quelles étaient pour partie ces motifs.
9 Mais il y en a d'autres, à savoir que le Procureur a l'intention de
10 présenter l'Armée de libération du Kosovo comme une armée bien structurée,
11 bien organisée, comme une entité militaire régulière qui aurait pu être
12 comparée aux forces yougoslaves et aux forces serbes du Kosovo.
13 L'Accusation a l'intention d'utiliser ce témoin pour ce faire. J'ai
14 l'intention de contester cette thèse. Si vous considérez que ce n'est pas
15 pertinent, je peux passer à autre chose, car en fait c'était ma dernière
16 question sur ce sujet.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous me surprenez en pensant que
18 l'Accusation pourrait être servie par le fait de présenter l'Armée de la
19 libération du Kosovo comme particulièrement bien entraînée et comme
20 particulièrement bien structurée. Je pensais que ce serait davantage un
21 argument de la Défense qu'un argument de l'Accusation. J'aurais, pour ma
22 part, le sentiment que ceci n'aurait pu que nuire à la thèse de
23 l'Accusation tout en soutenant votre thèse. Mais enfin, laissons cela de
24 côté, je ne comprends vraiment pas quelle est la pertinence.
25 M. PETROVIC : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Je passe à
26 autre chose.
27 Q. Monsieur, s'agissant du Grand quartier général, pouvez-vous nous dire,
28 je vous prie, à quel moment il a été créé - je parle du Grand quartier
Page 6064
1 général de l'Armée de la libération du Kosovo, si vous le savez, bien sûr ?
2 R. Je ne me souviens plus de la date exacte de sa création, mais il
3 existait déjà depuis pas mal de temps. Je peux parler simplement du moment
4 où j'ai été nommé à la tête de ce Grand quartier général.
5 Q. Savez-vous qui a créé ce Grand quartier général ?
6 R. Il avait été créé antérieurement au moment de la création de l'Armée de
7 la libération du Kosovo. Parmi ceux qui ont participé à cette création, on
8 peut citer Azim Syla, qui dirigeait ce Grand quartier général.
9 Q. D'accord. A votre connaissance, y a-t-il une décision en vue de créer
10 un Grand quartier général et les divers organes qui sont censés constituer
11 l'état-major ? Est-ce que vous savez s'il existe un document officiel ?
12 R. Non, je ne sais pas.
13 Q. Y avait-il une instance civile qui supervisait les actions du Grand
14 quartier général de l'Armée de la libération du Kosovo ?
15 R. Je ne sais pas ce qu'il en était dans la période antérieure à ma
16 nomination, mais plus tard, une direction politique a été créée, ou plutôt
17 en janvier et février.
18 Q. Vous parlez d'une direction politique de l'UCK. Je vous demande s'il
19 existait une autorité extérieure de l'UCK qui aurait pu vérifier les
20 actions de l'UCK.
21 R. Cette armée a vu le jour en tant que successeur du Mouvement populaire
22 du Kosovo, le LPK. L'état-major a été formé à partir de membres de ce
23 parti. Donc, il était sous le contrôle de ce parti, d'après les
24 renseignements dont je disposais à l'époque.
25 Q. Dites-moi, je vous prie, savez-vous qu'au Kosovo, à plusieurs reprises,
26 des élections non reconnues par le gouvernement de Serbie ont été
27 organisées car le gouvernement de Serbie les a tolérées ? Il existait un
28 président de l'assemblée, il existait un président de la municipalité. Est-
Page 6065
1 ce que ces hommes avaient la moindre influence sur les actions de l'UCK ?
2 Etes-vous au courant de cela ?
3 R. J'ai entendu parler de cela, mais je ne sais pas quelles ont été les
4 actions de l'UCK dans la période que vous invoquez. Et il n'existait pas
5 d'instances supervisant ou contrôlant les actions de l'UCK à cette époque-
6 là.
7 Q. Bien. J'aimerais maintenant vous interroger au sujet des objectifs
8 politiques que poursuivait l'UCK. Est-il exact que l'UCK considérait le
9 Kosovo-Metohija exclusivement comme un territoire occupé qui appartenait à
10 la République de l'Albanie ? Etait-ce bien la thèse politique de l'UCK à
11 cette époque-là ?
12 R. Je ne sais pas quelles étaient les positions qui avaient cours avant
13 mon arrivée au poste que j'ai occupé, mais pendant ma période d'activités,
14 le Kosovo était considéré comme un territoire occupé intégralement et pas
15 comme un territoire faisant partie de l'Albanie.
16 Q. A ce sujet, j'aimerais vous citer un passage qui fait partie de la
17 pièce P2449. Ce sont des dispositions provisoires relatives à la
18 restructuration interne de l'armée. Ce sont même les premières dispositions
19 de cette nature. Nous voyons en particulier le texte du serment prononcé
20 par les militaires. C'est le document que nous avons déjà examiné hier.
21 Vous en avez confirmé l'authenticité. Au chapitre 2, paragraphe 1, je cite
22 : "En tant que membre de l'Armée de la libération du Kosovo, je jure de
23 combattre pour la libération des territoires occupés de l'Albanie et pour
24 leur unification."
25 C'est ce qui est écrit dans le texte du serment militaire prononcé par les
26 soldats de l'Armée de la libération du Kosovo.
27 R. J'ai déjà dit hier que le texte de ce serment a fait l'objet de
28 remaniement par la suite ainsi que le texte du salut. Je ne dis pas que
Page 6066
1 dans une période antérieure le texte que vous venez de lire n'était pas
2 valable, mais dans la période où j'ai occupé le poste de chef du Grand
3 quartier général, ce texte n'était pas utilisé.
4 Q. Il n'était pas utilisé. J'ai encore deux questions à vous poser. Dans
5 la période dont nous sommes en train de parler, c'est-à-dire la période où
6 vous étiez chef du Grand état-major, aviez-vous, à l'UCK, des conseillers
7 étrangers ? Y avait-il des gens qui vous aidaient à vous entraîner ou à
8 développer vos moyens de transmission ou à vous préparer au sein de l'Armée
9 de la libération du Kosovo, des gens qui vous auraient aidé à équiper cette
10 armée, également ?
11 R. Pendant le temps que j'ai occupé mon poste, je n'ai pas eu de
12 conseillers étrangers, c'est-à-dire pas de représentants d'Etats étrangers.
13 Q. Aviez-vous, ne serait-ce que des communications avec une autre armée ou
14 un autre service dans la période dont vous avez dirigé le Grand quartier
15 général ?
16 R. Dans cette période-là, non.
17 M. PETROVIC : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions. Je vous
18 remercie, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est moi qui vous remercie, Maître
20 Petrovic.
21 Monsieur Marcussen, faut-il interrompre l'audition de ce témoin afin
22 de peut-être écouter un autre témoin demain.
23 M. HANNIS : [interprétation] Oui, nous aimerions entamer l'audition de M.
24 Baton Haxhiu demain.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle devrait être la durée ?
26 M. HANNIS : [interprétation] Les estimations que j'ai eues de ma consoeur,
27 Mme Moeller, ce serait 45 minutes.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourtant la déclaration est assez
Page 6067
1 longue.
2 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] M. Zyrapi, quand devrait-il revenir ?
4 M. HANNIS : [interprétation] Je ne sais pas quelles sont les estimations de
5 la Défense. J'avais cru comprendre qu'on terminerait l'audition de ce
6 témoin en l'espace de deux volets d'audience.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez m'aider, Maître
8 O'Sullivan ? Ou devrais-je me tourner vers Me Lukic ?
9 M. LUKIC : [interprétation] Je crois plutôt que c'est Me Ivetic qui devait
10 répondre. Non, non, ceci concerne M. Zyrapi.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non, je parle de la durée
12 probable du contre-interrogatoire de M. Haxhiu.
13 M. IVETIC : [interprétation] Pour le moment, je pense à 30 ou 40 minutes.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
15 Monsieur Zyrapi, il faudra que nous interrompions votre audition. Demain
16 matin, nous devrions avoir un autre témoin, sans doute pour la plus grande
17 partie de la journée. Il vous faudrait quand même être présent ici. Nous
18 espérons qu'au cours du troisième volet de l'audience vous pourrez
19 reprendre, voire terminer votre audition. Mais je n'en suis pas sûr. Je ne
20 peux pas vous le garantir. Veuillez être de retour ici à 17 heures.
21 Dans l'intervalle, il est absolument essentiel, je vous l'ai déjà dit hier,
22 que vous ne discutiez avec personne de votre déposition. Ceci dit, reposez-
23 vous bien et veuillez à être prêt à reprendre votre déposition demain, 17
24 heures. L'huissier d'audience va vous accompagner.
25 [Le témoin se retire]
26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Une toute petite chose. J'aurais dû le
27 faire plus tôt, mais je vois ce qui va être sans doute devenir une pièce
28 célèbre de ce dossier, la pièce A, B, C. Je pense que je n'ai pas demandé
Page 6068
1 le versement de cette pièce.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.
3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Aussi, une correction. Page 74, ligne 9. Me
4 Sepenuk a dit qu'il s'agissait d'une pièce à charge, P2499. Il faut lire
5 P2449.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce IC105.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Fort bien.
9 L'audience est suspendue. Elle reprendra demain à 14 heures 15.
10 --- L'audience est levée à 19 heures 12 et reprendra le mercredi 8 novembre
11 2006 à 14 heures 15.
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28