Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le vendredi 17 novembre 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

5 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La Chambre de première instance a

7 décidé de tenir audience aujourd'hui en l'absence du Juge Kamenova. Nous

8 espérons qu'il y va de l'intérêt de la justice et que nous allons

9 poursuivre en dépit de son absence, et ce, pour des raisons personnelles.

10 Nous allons passer en audience à huis clos de manière à permettre au

11 témoin de pénétrer dans le prétoire.

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur

13 les Juges, nous sommes en audience à huis clos.

14 [Audience à huis clos]

15 (expurgé)

16 (expurgé)

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 (expurgé)

22 (expurgé)

23 [Audience publique]

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

25 Bonjour, Monsieur Tanic. Vous m'entendez bien ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, vous souhaitez régler

2 cette question de savoir s'il faudra inviter le témoin une fois de plus à

3 communiquer l'identité des personnes avec lesquelles il a travaillé ou est-

4 ce que vous souhaitez au contraire poursuivre avec vos questions

5 supplémentaires ?

6 M. HANNIS : [interprétation] J'étais prêt pour les deux cas de figure.

7 Peut-être sera-t-il utile effectivement que je lui pose quelques questions

8 qui me permettront de mieux développer les arguments que je souhaitais vous

9 présenter sur au moins un de ces points.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que lorsque nous discuterons

11 de cette question, il serait utile que nous le fassions en l'absence du

12 témoin.

13 M. HANNIS : [interprétation] Très bien.

14 Monsieur Tanic, votre déposition va se poursuivre. M. Hannis va se charger

15 de vous poser des questions supplémentaires. Je vous prierais de garder

16 présent à l'esprit le fait que vous avez fait une déclaration sous serment

17 et que cette déclaration sous serment continue de s'appliquer aujourd'hui.

18 Monsieur Hannis, vous avez la parle.

19 LE TÉMOIN: RATOMIR TANIC [Reprise]

20 [Le témoin répond par l'interprète]

21 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 Nouvel interrogatoire par M. Hannis :

23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Tanis. Je souhaiterais commencer par

24 vous poser quelques questions ayant trait à un sujet qui est celui de

25 l'information portant sur les cibles de l'OTAN. Au paragraphe 117 de votre

26 déclaration écrite, vous indiquez que vous avez personnellement transmis à

27 Milosevic des informations. Vous indiquez également, et je vous cite :

28 "Cette information était également incluse dans un mémo officiel portant

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1 sur les cibles de l'OTAN envoyées par le SDB à Milosevic."

2 Ma question est la suivante : lorsque vous dites "cette information",

3 est-ce que vous entendez par là l'information dont vous disposiez ou est-ce

4 que vous entendez par là des informations d'ordre général que le SDB avait

5 puisées auprès de sources autres que vous-même ?

6 R. J'entends par là mes sources, mais je ne serais pas étonné si d'autres

7 informations émanant d'autres sources avaient été ajoutées à ces

8 informations-là. Mais j'entendais essentiellement mes propres sources.

9 Q. Si je vous ai bien compris, ce mémo officiel contenait des informations

10 que vous aviez fournies et qui provenaient de vos sources occidentales ?

11 R. Oui.

12 Q. Au paragraphe 118, vous indiquez -- enfin, vous dites, et je vous cite

13 : "Mes contacts au SDB m'ont appris," vous nous l'avez déjà dit

14 précédemment en réponse à des questions par Me Ackerman, que ces contacts

15 étaient les personnes que nous avons identifiées comme étant les numéro 1

16 et numéro 2 et dont vous avez communiqué les noms en audience à huis clos.

17 Je reprends la citation : "Mes contacts au SDB m'ont appris que le SDB

18 avait fourni à Milosevic un maximum d'informations portant sur les cibles à

19 venir, informations qu'ils ont reçues pour la part d'amis occidentaux de

20 bonne volonté souhaitant éviter des victimes civiles."

21 Sachant qu'il y a ces informations, ce "maximum d'informations", est-ce que

22 vous êtes la source de ces informations ou est-ce que vous indiquiez que

23 numéro 1 et numéro 2 avaient d'autres informations à propos des cibles, des

24 cibles occidentales ?

25 R. Il y avait d'autres informations outre celles que j'ai fournies moi-

26 même, notamment lorsqu'il y avait risque d'avoir des victimes civiles à

27 proximité des cibles militaires ou d'équipement civil utilisé à ce moment-

28 là à des fins militaires. Pour autant que j'aie bien compris les choses, il

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1 me semble qu'à l'OTAN, il était convenu au sein de l'alliance de laisser

2 fuir certaines informations ayant trait aux éventuelles victimes civiles,

3 mais ce n'était pas de l'espionnage.

4 Q. Les informations fournies à propos de la radiotélévision serbe, est-ce

5 qu'il s'agissait là des seules informations que vous aviez transmises, ou y

6 en a-t-il d'autres ?

7 R. Il y avait d'autres informations également.

8 Q. Vous souvenez-vous d'informations spécifiques, s'agissant de ces

9 informations justement sur les cibles, que vous auriez transmises ? Il

10 s'agit de deux, de 20, de 200 cibles ?

11 R. Non. Vous n'êtes pas sans savoir que l'OTAN avait organisé sa campagne

12 de bombardements en trois phases; phase 1, phase 2 et phase 3, et certaines

13 cibles m'ont été révélées pour chacune de ces phases, notamment ayant trait

14 à d'éventuelles victimes civiles, mais aussi des informations qui avaient

15 trait à des cibles militaires. Bien entendu, c'était là un secret militaire

16 gardé de nettement plus près.

17 Q. Est-ce que vous pourriez estimer éventuellement à peu près le

18 nombre total ? Vous avez reçu des informations s'agissant de chacune des

19 phases de la campagne, mais est-ce que vous avez une idée du nombre total

20 de cibles dont nous sommes en train de parler, dont il s'agissait ?

21 R. Il m'est difficile de me souvenir maintenant.

22 Q. Merci. Je souhaiterais aborder à présent la question de

23 l'enregistrement audio dont vous avez dit que vous avez eu l'occasion

24 d'entendre et dont vous pensez qu'il s'agissait d'un enregistrement d'un

25 entretien entre M. Sainovic et le général Lukic. Je pense que vous avez,

26 dans votre déposition d'hier à la page 85, ligne 21, dit la chose suivante,

27 que vous n'avez pas reconnu les voix en question. Dans la teneur des

28 extraits de conversation que vous avez eu l'occasion d'entendre, y a-t-il

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1 eu quoi que ce soit qui vous permette de dire que ce ne serait pas en

2 conformité avec la possibilité selon laquelle cela aurait été un entretien

3 entre M. Lukic et M. Sainovic ? Est-ce que vous comprenez ma question ?

4 M. LUKIC : [interprétation] Il s'agit là de spéculations, Monsieur le

5 Président.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, je ne pense pas. Je pense qu'il

7 est tout à fait raisonnable de poser de telles questions compte tenu des

8 circonstances. Je rejette donc votre objection.

9 M. HANNIS : [interprétation]

10 Q. Avez-vous compris la question que je vous ai posée ?

11 R. Oui. Je ne pouvais pas les reconnaître parce que je ne connaissais pas

12 leur voix. En revanche, rien dans cet enregistrement ne serait pas quelque

13 chose qui dirait que ce n'était pas eux qui parlaient. J'ai dit quelque

14 chose hier, mais je ne peux pas confirmer l'existence de cet enregistrement

15 audio.

16 Q. A un moment donné, vous-même ou peut-être M. Lukic a indiqué qu'il y

17 avait une erreur au compte rendu et qu'au départ, il avait été dit Vracar,

18 V-r-a-c-a-r, alors qu'en fait il s'agissait de Racak. C'est de cela que

19 vous parliez, vous. La dernière fois que j'ai examiné la page 78, ligne 5

20 et ligne 17, la mention de Vracar était restée là. Dans tous ces cas-là,

21 est-ce que vous parliez de Racak ?

22 R. Ce que j'ai pu entendre et à la façon dont je m'en souviens, il

23 s'agissait effectivement de Racak, parce que cela est mentionné. Tout cela

24 est assez nébuleux dans ma mémoire à présent, assez flou.

25 Q. Merci. Je souhaiterais passer à présent à une question qui vous a été

26 posée par Me Ackerman hier en page 55, ligne 11, où il est dit que lorsque

27 vous avez déposé dans l'affaire Milosevic, vous avez indiqué que vous

28 n'aviez pas demandé à changer d'identité ou à être réinstallé. Mais depuis

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1 votre témoignage dans l'affaire Milosevic, vous avez été bénéficiaire du

2 programme de protection des témoins.

3 Vous êtes allé dans un nouveau pays, vous avez eu une nouvelle

4 identité. S'est-il passé quelque chose après votre déposition qui vous ait

5 amené à changer d'avis s'agissant de votre volonté d'avoir une nouvelle

6 identité, de la nécessité d'avoir une nouvelle identité ?

7 M. ACKERMAN : [interprétation] Monsieur le Président, il a dit hier que ce

8 qui s'est passé, c'est qu'il avait été enlevé et que c'était pour cette

9 raison qu'il avait changé d'avis, donc je crois que M. Hannis est en train

10 de demander quelque chose alors qu'il sait très bien ce qu'il veut.

11 M. HANNIS : [interprétation] Non, ce n'est pas du tout ce que j'essaie de

12 faire. Je voudrais savoir ce qui s'est passé après sa déposition dans

13 l'affaire, qui l'a amené à changer d'avis, parce qu'il a dit qu'en 2002 il

14 n'en voulait pas et que depuis, il a changé d'avis.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je rejette l'objection.

16 Je vous en prie, poursuivez, Monsieur Hannis.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] La décision que j'ai prise, à savoir

18 d'accepter une nouvelle identité et de permettre à mon épouse d'assumer une

19 nouvelle identité de manière à pouvoir reprendre nos vies à zéro, elle

20 s'inspire d'un entretien que j'ai eu avec Dusan Mihajlovic à Paris. Je me

21 suis aperçu qu'il était tout simplement impossible pour moi de récupérer ma

22 propriété, qu'il me serait impossible d'avoir une façon raisonnable de

23 mener ma vie au pays. Jusque-là, j'avais espéré que cela allait pouvoir se

24 résoudre d'une manière ou d'une autre, mais ensuite, je me suis aperçu que

25 cela ne risquait pas d'arriver. Le niveau de la menace était tel qu'il

26 était identique à celui dont j'avais fait l'expérience au cours du régime

27 Milosevic.

28 Voilà les éléments clés. Avant cela, j'avais envoyé un certain nombre

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1 de fax lui demandant de bien vouloir résoudre ces problèmes avec l'unité

2 des opérations spéciales et s'agissant de ma propriété, mais il ne s'est

3 rien passé. Je ne pouvais même pas récupérer mes livres, les livres qui

4 m'appartenaient et qui appartenaient à mon épouse et qui avaient été volés,

5 donc c'est là ce qui m'a amené à prendre ma décision. Lorsque j'ai déposé

6 dans l'affaire Milosevic, je bénéficiais déjà du programme de protection

7 des témoins. J'ai simplement fait remarquer que je n'avais pas demandé cela

8 avant de déposer. Lorsque j'ai rencontré les enquêteurs du bureau du

9 Procureur, j'avais espéré encore que j'allais pouvoir continuer de mener

10 une existence normale avec l'identité que j'ai.

11 L'INTERPRÈTE : Le début de la question de M. Hannis est inaudible.

12 Q. -- à Paris ?

13 R. Je crois que c'était en 2001 ou au début de 2002, environ six mois

14 avant que je ne dépose dans l'affaire Milosevic.

15 Q. -- dans le livre de M. Mijatovic, n'est-ce pas, il en fait état dans ce

16 livre, M. Mijatovic ?

17 R. Oui. Cette rencontre est décrite dans le livre.

18 Q. En page 50, ligne 7 de votre déposition d'hier, Me Ackerman vous posait

19 des questions à propos de Nouvelle démocratie et des élections qui se sont

20 tenues en septembre 1997. Vous souvenez-vous précisément du moment où

21 Nouvelle démocratie a quitté la coalition ? C'était avant l'élection, au

22 moment des élections, après les élections ?

23 R. Avant les élections. La situation n'était pas la même que celle qui

24 avait prévalu avant. Notre liste, c'était SPS, JUL et Nouvelle démocratie,

25 et nous n'avons pas accepté l'invitation de Milosevic visant à les

26 rejoindre à nouveau. Nous avons préparé notre propre plateforme. M.

27 Mihajlovic et moi-même l'avons rédigée. Nous avons présenté les principaux

28 arguments expliquant nos différends, donc nous avons accepté cette

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1 plateforme et ensuite nous avons pris des voies différentes.

2 Q. Comment vous y êtes-vous pris pour quitter la coalition ? Je ne

3 comprends pas très bien comment cela s'est fait. Est-ce que votre parti a

4 fait une déclaration au cours d'une conférence de presse ou est-ce que vous

5 avez simplement quitté physiquement le bâtiment ? Comment les choses se

6 sont-elles déroulées ?

7 R. Simplement, nous n'étions pas sur la liste pour les nouvelles

8 élections, et notre organe directeur a décidé qu'il fallait non pas que

9 nous proposions d'être en coalition avec Milosevic, mais que nous fassions

10 campagne séparément, et seules les raisons étant celles que j'ai évoquées

11 précédemment, à savoir notre désaccord sur ces politiques au Kosovo.

12 Q. Oui, mais ma question est de savoir si c'est votre parti qui a fourni

13 ces informations à Milosevic, à savoir que vous ne souhaitiez plus faire

14 partie de la coalition.

15 R. Oui.

16 Q. Pouvez-vous nous dire comment les choses se sont faites ?

17 R. Je pense que cela a été fait dans une rencontre en face à face entre

18 Mihajlovic et Milosevic, mais je ne me souviens pas de la date précise.

19 Q. Très bien. Merci. Une question de plus, à propos des cibles, que j'ai

20 oublié de vous poser tout à l'heure. Vous nous avez dit que le SDB obtenait

21 également des informations provenant de sources occidentales autres que

22 celles passant par vous. Savez-vous maintenant ou est-ce que quelqu'un vous

23 a dit que M. Milosevic recevait ces informations ?

24 R. Je suis absolument certain qu'il a reçu ces informations parce que

25 d'abord, je vois difficilement comment il pourrait ne pas les recevoir.

26 Puis, en deuxième lieu, il se trouve que le SDB, indépendamment du niveau

27 des agents, le SDB fournissait toujours les informations en haut de la

28 hiérarchie. Ensuite, Rade Markovic relayait cette information auprès de

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1 Milosevic. Il est donc certain que Milosevic avait à sa disposition toutes

2 les informations pertinentes, informations qui pourraient réduire la durée

3 de la guerre, réduire le nombre de victimes.

4 Pour autant que je sache, il y avait plusieurs sources crédibles,

5 donc je ne vais pas prétendre que tout le mérite me revient. Mais il se

6 trouve que je parle de moi, et c'est la raison pour laquelle je dis "moi,

7 je", "moi, je", mais il y a évidemment d'autres sources parfaitement

8 crédibles qui ont fourni ce type d'information au service de Sûreté d'Etat.

9 Q. Si j'ai bien compris votre réponse, vous nous dites qu'il ne fait aucun

10 doute selon vous qu'il a reçu cette information parce qu'en principe, c'est

11 ainsi que les choses devraient fonctionner. Mais quelqu'un vous a-t-il dit

12 qu'il avait reçu cette information ? Un responsable du SDB vous aurait-il

13 dit "oui, oui, il le sait, il le sait", ou est-ce que vous supposez

14 simplement en vous basant sur le mode de fonctionnement du SDB ?

15 R. A plusieurs reprises, numéro 2, qui a été mentionné en audience à huis

16 clos, m'a dit que cela passerait vers Radonjic et Rade et qu'ensuite cela

17 passerait directement à Milosevic.

18 Q. Des événements sont-ils intervenus dont vous auriez eu connaissance et

19 qui vous indiqueraient que Milosevic avait reçu ces informations et qu'il

20 avait pris des mesures en se fondant sur ces informations ?

21 R. Pour ce qui est des locaux à Belgrade pour lesquels il pourrait y avoir

22 des victimes civiles, certaines mesures ont été prises, notamment

23 s'agissant du bâtiment dans lequel sa fille avait une station de radio. Le

24 MUP républicain a été évacué, mais ils l'ont fait de leur propre

25 initiative. Ils n'ont pas attendu qu'on le lui dise.

26 Certaines des cibles qui auraient dû être évacuées à Belgrade, cibles

27 civiles, ne l'ont pas été. Pour ce qui est des cibles militaires, je

28 n'étais pas sur place et je n'avais rien à voir avec ces cibles militaires.

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1 Par conséquent, je ne pourrais pas vous livrer quelque analyse que ce soit

2 de ma part.

3 Q. Merci. Je souhaiterais à présent passer au mercredi 15 novembre. Me

4 Ackerman vous posait des questions à propos de vos sources au sein du SDB.

5 Page 69, ligne 1, si je ne m'abuse - désolé, mais je n'ai pas le nombre à

6 quatre chiffres - le Président Bonomy vous posait des questions à propos de

7 vos sources auprès du SDB.

8 Vous indiquez, je cite : "Un grand nombre d'autres individus au cours

9 d'un certain nombre d'années au SDB étaient des personnes avec lesquelles

10 vous étiez en contact." Mais vous nous dites que les quatre sources dont

11 vous disposiez étaient Zoran Mijatovic, Jovica Stanisic, sources numéro 1

12 et numéro 2 dont vous avez cité les noms en audience à huis clos. Ces

13 personnes ou les informations que vous nous avez transmises dans votre

14 rapport et par le truchement de votre déposition, quel est le pourcentage

15 de ces informations qui provenaient de ces sources-là par opposition à ce

16 que vous décrivez comme étant, je vous cite, "un grand nombre d'autres

17 individus sur un certain nombre d'années" ? Est-ce que vous comprenez ma

18 question ?

19 R. Le plus gros pourcentage d'informations provenaient de ces quatre

20 sources. Maintenant, pour ce qui est des informations stratégiques, Zoran

21 Mijatovic en fournissait la plus grosse partie, grande majorité, et numéro

22 1 relayait ces informations ou les informations provenant de M. Stanisic,

23 lorsque l'on parle donc d'informations stratégiques, l'attitude à l'égard

24 de la gauche yougoslave unie, la JUL, les problèmes liés à la situation au

25 plan national, ce qu'on appelait les ennemis internes, les problèmes liés

26 aux relations extérieures, les échanges d'information entre les services de

27 Renseignements serbes d'une part et britanniques de l'autre qui avaient eu

28 lieu à trois reprises.

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1 D'abord, en 1994, puis en 1997, puis une troisième fois, mais je ne

2 me souviens pas de la date. A chaque fois, cela se faisait par mon

3 truchement ainsi que par l'entremise de l'homme dont le nom n'est pas cité

4 ici, c'est-à-dire que ces deux services savaient qui j'étais, et parce que

5 je n'étais pas un responsable des services d'espionnage, je pouvais

6 fonctionner dans ces canaux; bien entendu, avant tout le Kosovo, comment

7 éviter la guerre au Kosovo.

8 M. ACKERMAN : [interprétation] Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur --

10 M. ACKERMAN : [interprétation] Peut-être M. Hannis pourrait-il nous

11 apporter son concours. Au compte rendu, page 69, ligne 1, la question posée

12 n'a rien à voir avec ce qu'il évoque. En fait, c'était Me Lukic qui

13 procédait à son contre-interrogatoire à la page 69, ligne 1, alors je ne

14 sais pas, est-ce qu'il sait peut-être à quel endroit du compte rendu cela

15 figurerait ?

16 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je sais, mais je citais

17 un passage basé sur une question que vous aviez posée, question à laquelle

18 le témoin a répondu : un grand nombre d'autres individus.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Parce que vous avez attribué cette

20 question à Me Ackerman, il souhaiterait savoir à quel endroit du compte

21 rendu on peut trouver ce passage, puisqu'il est mis en cause. Puisque

22 manifestement, la page 69, à la page 69, c'est le contre-interrogatoire de

23 Me Lukic qu'on peut trouver.

24 M. HANNIS : [interprétation] Il s'agit de la page 6682. Toutes mes excuses,

25 vous avez raison, c'est Me Lukic qui s'exprime à ce moment-là. Je présente

26 aux deux conseils mes excuses.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

28 M. HANNIS : [interprétation]

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1 Q. Je crois que dans votre réponse, vous indiquez que la grande majorité

2 des informations stratégiques dont vous disposiez provenait de M.

3 Mijatovic. Maintenant, s'agissant des informations provenant de vos sources

4 auprès du SDB, vous nous avez dit que vous aviez eu l'occasion de voir les

5 règles de procédure ou les règles opérationnelles pour la police. Vous nous

6 avez parlé d'un enregistrement qui est censé être un entretien entre M.

7 Sainovic et M. Lukic.

8 Le SDB vous a-t-il également fourni des informations sous forme de

9 quelque autre document que ce soit ou est-ce que tout cela a été communiqué

10 exclusivement par voie orale par le truchement de vos sources ?

11 R. Pour l'essentiel, il s'agissait de communication orale. Le SDB n'a pas

12 pour habitude de fournir des documents. Parfois et très rarement, il vous

13 laisse consulter des documents, mais vous ne pouvez pas les prendre avec

14 vous chez vous, mais il vous laisse consulter ces documents si vous voulez

15 vérifier quelque chose ou comparer quelque chose.

16 Q. Merci.

17 M. HANNIS : [interprétation] J'aimerais que nous affichions la pièce à

18 conviction 2481.

19 Q. Je pense qu'il s'agissait de Me Ackerman qui vous parlait, me semble-t-

20 il, ou plutôt, vous aviez en quelque sorte, à propos du discours de

21 Milosevic de juin 1997, conclu qu'il laminait en quelque sorte cet accord

22 que vous et d'autres, qu'il sabotait cet accord que vous et d'autres aviez

23 essayé de négocier avec les Albanais du Kosovo. Cette pièce à conviction

24 2481 est un document de position commune. Je pense que vous avez déjà

25 indiqué un peu plus tôt qu'il s'agissait du résultat d'une réunion de New

26 York; est-ce exact ?

27 R. Oui.

28 Q. Dans votre déclaration, au paragraphe 32, vous indiquez que vous ainsi

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1 que Fehmi Agani, vous vous étiez dans un premier temps mis d'accord sur ces

2 conditions, et ce, dès l'année 1995.

3 R. Oui. En règle générale, oui, en principe oui, parce que les Albanais

4 étaient un peu battus en brèche. Ils devaient adopter une position un peu

5 plus souple après la paix de Dayton. La politique albanaise au Kosovo

6 n'était pas particulièrement animée de bonnes intentions à notre égard,

7 mais ils étaient quand même disposés à faire certaines concessions dans une

8 certaine mesure, donc nous nous sommes assurés que ces négociations

9 puissent commencer sans qu'il n'y ait de conditions préalables imposées.

10 Q. Au paragraphe 2 de ce document qui est intitulé "Points de vue faisant

11 l'objet d'un accord commun", vous essayez de régler la question fort

12 épineuse du statut du Kosovo, à savoir indépendance, sécession et

13 autonomie. Les deux camps se sont mis d'accord pour indiquer qu'il n'y

14 aurait pas de conditions préalablement imposées.

15 R. Oui, cela est indiqué très clairement au paragraphe 2. Il est indiqué

16 que le problème ne pourrait être réglé que par le dialogue et par un accord

17 commun sans qu'il n'y ait de conditions préalables imposées ou sans que

18 l'on ne préjuge le résultat éventuel. Puis, au troisième paragraphe, vous

19 avez en quelque sorte un complément d'information à ce sujet. Mais ce n'est

20 pas nous qui avons mis au point cet accord. En fait, nous y sommes arrivés,

21 à cet accord, en procédant par étapes, et chaque mois nous nous rapprochons

22 un peu plus du but.

23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, parce

24 qu'il s'agit de moyens de preuve directs, et à ce sujet, il est dit au

25 paragraphe 2 que -- il est dit que l'accord des Albanais du Kosovo est une

26 façon de rétrograder par rapport à l'indépendance qu'ils souhaitaient

27 avoir. Voilà ce qui a été dit lors des moyens de preuve directs. Là, nous

28 sommes en questions supplémentaires, donc je ne pense pas qu'il soit

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1 adéquat ou approprié de demander au témoin de changer sa réponse.

2 M. HANNIS : [interprétation] Je ne suis pas sûr que les deux ne peuvent pas

3 être réconciliés, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il se peut, Monsieur Hannis, que le

5 problème vienne du fait que vous ayez posé une question orientée, ce qui

6 fait que la réponse au vu de la question n'aura pas beaucoup de poids.

7 D'après ce dont je me souviens des moyens de preuve avancés, le paragraphe

8 2 avait été interprété par le témoin de façon différente, lorsque l'on voit

9 la teneur et le sens de ce paragraphe 2.

10 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, et il a fait une

11 déclaration à propos du paragraphe 2.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On ne peut pas défaire ce qui a été

13 déjà fait, Maître O'Sullivan, mais nous prenons bonne note de ce que vous

14 avez dit.

15 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

16 Q. J'aimerais que nous abordions un autre sujet, Monsieur Tanic. Il s'agit

17 de ce qui a été dit mardi le 14. Des questions vous ont été posées à propos

18 du moment où vous avez été capturé et enlevé en pleine rue. Vous avez

19 décrit cet enlèvement. Dans la mesure où vous le savez, bien entendu,

20 pourquoi est-ce que les personnes qui vous ont capturé vous ont finalement

21 laissé partir ? Pourquoi est-ce qu'elles vous ont redonné votre liberté ?

22 R. Ecoutez, je pense qu'il y a trois raisons que l'on peut évoquer.

23 D'abord, la chance, tout simplement, parce qu'ils nous ont libérés deux ou

24 trois heures seulement après la tentative d'assassinat de Vuk Draskovic sur

25 la route principale Ibar. Ma femme et moi-même avions été enlevés pendant

26 cette journée, et cela a été appris à Belgrade. Parce que de toute façon,

27 ils avaient complètement fermé tout le périmètre de l'endroit, puis ils

28 nous ont capturés. Ensuite, ils ont essayé d'assassiner Vuk Draskovic sur

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1 la route principale. Je pense qu'il n'était pas véritablement commode pour

2 eux de traiter notre sort ainsi que le sort de Vuk Draskovic, donc ils nous

3 ont laissé repartir.

4 Puis, je dois dire qu'il y a une deuxième raison, parce que je leur

5 ai dit qu'il y avait quelque chose qui devait être terminé, que cela avait

6 à voir avec les services britanniques, les services secrets britanniques.

7 Puis, je dois dire qu'ils étaient en pleine confusion parce qu'ils avaient

8 reçu des ordres absolument contradictoires. Ils semblaient, d'ailleurs,

9 enfin, la confusion semblait régner dans leur esprit. D'aucuns disaient :

10 "C'est un espion britannique, tuez-le. Rouez-le de coups."

11 Puis, pendant leur enquête -- je ne dirais pas que nous nous sommes

12 rendu compte que nous étions camarades, mais nous nous sommes rendu compte

13 que nous faisons partie du même camp. Lorsque l'on examine les trois

14 facteurs, je pense que tout cela a contribué à notre libération. Mais le

15 premier élément, la première raison est la tentative d'assassinat, parce

16 qu'ils sont tous arrivés pantelants et ils étaient très pressés. Ils

17 voulaient se débarrasser de nous.

18 Q. Pour ce qui est du deuxième facteur que vous avez évoqué, est-ce qu'ils

19 vous ont demandé d'essayer de faire quelque chose à propos des services

20 secrets britanniques, et, le cas échéant, qu'est-ce qu'ils vous ont

21 demandé ?

22 R. Oui. Ils ont essayé de faire comme si tous ces passages à tabac

23 n'étaient qu'une épreuve pour voir quelle était ma force psychologique et

24 physique, puis ils voulaient essayer de prendre contact avec les services

25 secrets britanniques par mon truchement, cela afin de s'opposer au régime

26 de Milosevic. On avait l'impression d'être un peu en pleine science-

27 fiction.

28 C'est une possibilité qui a été évoquée pour voir s'ils étaient

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1 sincères. En fait, ils essayaient tout simplement de piéger les services

2 secrets britanniques pour faire en sorte que leurs représentants viennent

3 en Serbie ou en Macédoine et pour pouvoir ainsi tous nous arrêter en un

4 seul coup de filet et nous mettre en prison. Je pense que c'est une espèce

5 de jeu auquel ils jouaient.

6 Lorsqu'ils ont vu qu'après les tortures et les passages à tabac ou

7 après m'avoir roué de coups, ils n'ont rien obtenu de ma part, ils ont

8 essayé, bien entendu, de me piéger. C'est ainsi que je comprends cet

9 événement, bien que, bien entendu, je ne sache pas ce à quoi ils pensaient

10 véritablement.

11 Q. Merci. Me Fila vous a posé des questions mardi et il vous a posé des

12 questions à propos d'enregistrements de cassettes. A la

13 page 6 527, ligne 13, vous dites : "Tout était enregistré pendant la

14 guerre."

15 A ce sujet, est-ce que vous pouvez nous dire quelle agence ou quelles

16 agences enregistraient les gens, notamment quelle agence ou quelles agences

17 auraient placé sur écoute, donc enregistré M. Lukic et M. Sainovic ? Je

18 devrais dire, en fait, je parle bien entendu du général Lukic lorsque je

19 fais référence à M. Lukic, je ne fais pas référence au conseil.

20 R. Le placement sur écoute, la mise sur écoute, l'interception de

21 conversations téléphoniques font partie de l'arsenal de mesures qui est

22 utilisé en temps de guerre. Ils essayaient de voir ce qu'ils pouvaient

23 obtenir pour moi. Le SDB faisait la même chose, d'ailleurs les étrangers

24 également. Je ne peux pas véritablement vous dire qu'il y avait des cibles

25 spéciales. Il y avait des gens qui intéressaient les services de Sûreté.

26 Ils étaient supervisés, mais en règle générale, ils enregistraient un peu

27 tout et n'importe quoi pour voir ce qu'ils pouvaient trouver.

28 Q. Pour ce qui est de l'endroit où ces cassettes sont archivées ou

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1 stockées, où se trouvent encore toutes les archives relatives à ce genre de

2 documents ? Vous savez cela ?

3 R. Non, non.

4 Q. J'aimerais maintenant que l'on évoque le 14 novembre, donc ce qui s'est

5 passé mardi. Il me semble que c'était Me O'Sullivan qui vous posait des

6 questions. Il vous a posé des questions à propos du paragraphe 108 de votre

7 déclaration de témoin. Vous avez indiqué que vous avez eu une discussion

8 houleuse avec Milosevic pendant les bombardements de l'OTAN. Il a dit qu'il

9 faudrait qu'il y ait suffisamment de victimes civiles pour influencer

10 l'opinion publique, l'opinion du public à propos des bombardements de

11 l'OTAN.

12 J'aimerais revenir là-dessus pour voir si j'ai bien compris ce dont il

13 était question. Est-ce que vous, vous avez eu une conversation personnelle

14 en tête-à-tête avec M. Milosevic à ce sujet ?

15 R. Oui, brièvement.

16 Q. L'avez-vous également entendu parler avec Vuk Draskovic de cela, et ce,

17 sur haut-parleur du téléphone ?

18 R. Oui. Je dois vous dire que M. Draskovic a nié par la suite le fait

19 qu'il avait eu cette conversation.

20 Q. Justement à propos de cette conversation, je pense que vous m'avez dit

21 ou vous avez indiqué qu'il y avait d'autres personnes présentes lors de

22 cette conversation que vous avez entendue grâce au haut-parleur du

23 téléphone. Est-ce qu'il y avait d'autres personnes qui ont écouté cette

24 conversation hormis vous-même, M. Draskovic et M. Milosevic ?

25 R. Non. Les autres se trouvaient dans la pièce voisine pendant que nous

26 prenions une légère collation.

27 Q. Dans quel immeuble ou bâtiment que cela s'est passé ?

28 R. C'était au siège de notre parti, dans une villa. Maintenant, je

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1 commence à oublier le nom des rues. C'était une maison qui se trouvait en

2 plein centre. C'était le siège du Parti Nouvelle démocratie.

3 Q. Merci. Vous avez indiqué au début de votre témoignage, toujours le même

4 jour, vous avez parlé d'un livre écrit par Predrag Simic. Est-ce que vous

5 pourriez nous dire qui est ou était M. Simic ?

6 R. M. Simic était le directeur général de l'Institut des études

7 stratégiques qui avait été établi ou créé par le ministère des Affaires

8 étrangères. C'était le directeur de cet institut. Par la suite, à la suite

9 d'un désaccord, il est devenu associé. Puis, après la chute du régime de

10 Milosevic, il est devenu l'un des conseillers du nouveau président, M.

11 Kostunica.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant que vous ne poursuiviez,

13 Monsieur Hannis, permettez-moi de poser une question au témoin.

14 Cette discussion brève que vous avez eue en tête-à-tête à propos du

15 fait qu'il fallait qu'il y ait suffisamment de victimes civiles et la

16 conversation téléphonique que vous avez entendue sur haut-parleur, est-ce

17 que ces deux conversations se sont produites le même jour ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Oui, oui, pardon. Non, non, cela

19 s'est passé pendant des jours différents.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous vous souvenez du laps

21 de temps qui s'est écoulé entre les deux ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être deux ou trois jours.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

24 Monsieur Hannis, je vous en prie.

25 M. HANNIS : [interprétation]

26 Q. Pour enchaîner à la suite de cette question, est-ce que vous vous

27 souvenez laquelle des conversations a eu lieu en premier ?

28 R. Non, non. Cela m'est très difficile de me souvenir de ce genre de

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1 chose.

2 Q. Revenons à M. Simic. Est-ce que vous connaissez le nom du livre qu'il a

3 écrit où il est question des négociations et où il parle de vous ?

4 R. Il fait référence aux négociations, j'y suis mentionné. Le titre du

5 livre est : "La Route vers Rambouillet."

6 Q. Merci.

7 M. HANNIS : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser au témoin,

8 mais j'ai un extrait de ce livre que je souhaiterais présenter. Lorsqu'il

9 sera placé ou entré dans le système électronique, j'aimerais que cela soit

10 versé au dossier. Il s'agit de l'extrait où il est fait référence au témoin

11 ainsi qu'aux négociations dont il a parlé. J'aimerais en parler avec la

12 Chambre.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il faudrait peut-être

14 présenter cet extrait au témoin et lui demander si cela correspondait à ce

15 dont il se souvenait.

16 M. HANNIS : [interprétation] Oui, j'avais pensé faire cela justement,

17 Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Combien de pages avez-vous pour cet

19 extrait ?

20 M. HANNIS : [interprétation] Il y a trois extraits différents sur deux

21 pages, peut-être.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il a déjà évoqué toutes ces

23 références ou est-ce qu'il a déjà présenté des moyens de preuve ? Je ne

24 parle pas de l'ensemble du livre. Je voudrais savoir si les références que

25 vous allez évoquer ont trait à ce dont il a parlé ici.

26 M. HANNIS : [interprétation] Oui, oui. Il y a 11 pages en B/C/S. C'est le

27 numéro ERN K053-6040 jusqu'à 6051. Nous avons fourni cela à la Défense.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il y a eu des objections à

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1 ce que cela soit présenté comme pièce à conviction ? Non. Très bien. Je

2 pense que nous allons tout simplement faire ce que j'avais suggéré, étant

3 donné que le témoin a eu la possibilité d'étudier ces questions. Il va

4 falloir que vous le fassiez par courrier électronique pour obtenir la

5 confirmation du numéro en temps voulu.

6 M. HANNIS : [interprétation] C'est ce que je ferai, Monsieur le Président.

7 Je ne sais pas si la Chambre a des questions à poser au témoin ou si nous

8 nous contentons de le faire sortir du prétoire pour régler cette question

9 en son absence, puisqu'il s'agit des trois sources non identifiées.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Accordez-moi un petit moment, je vous

11 prie, Monsieur Hannis.

12 Nous allons passer à huis clos pour que le témoin puisse sortir du

13 prétoire.

14 Monsieur Tanic, nous allons aborder une question de droit, et pendant que

15 nous le faisons, il faudra que vous restiez hors du prétoire en attendant

16 que nous ayons pris une décision.

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos, Monsieur le

18 Président.

19 [Audience à huis clos]

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14 [Audience publique]

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Merci.

16 Monsieur Ackerman, je vous écoute.

17 M. ACKERMAN : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'il

18 faudrait attendre que les stores soient levés. Les interprètes nous ont

19 indiqué qu'il y avait beaucoup trop de bruit.

20 Monsieur le Président, Monsieur le Juge, j'ai peu de choses à dire, en

21 réalité. Je crois que ma position a été très claire hier. A plusieurs

22 reprises, j'ai exprimé mon point de vue. La seule question qui a été

23 soulevée ce matin, c'était que M. Hannis nous a dit qu'il n'était pas

24 certain quant à la contumace.

25 Je ne sais pas, si on donne un ordre à un témoin de dire quelque

26 chose et que le témoin nous dit "non", il s'agit de contumace. Si, par

27 exemple, on dit "auriez-vous la gentillesse de répondre à cette question",

28 et si le témoin dit "je ne souhaite pas répondre à cette question", il

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1 s'agit d'un outrage au Tribunal. Si vous lui ordonnez de faire la même

2 chose et qu'il refuse, c'est autre chose.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que c'est la jurisprudence de

4 ce Tribunal. Effectivement, vous avez tout à fait raison, je crois que la

5 jurisprudence établit que peut-être -- à plus d'une reprise ou tout du

6 moins d'une affaire que j'ai déjà occupée.

7 Il y a toujours cette question qui se pose, à savoir si l'ordre que

8 l'on donne à quelqu'un de répondre à une question devrait être fait ou non.

9 C'est en réalité ce que nous a dit M. Hannis. Son argument est applicable,

10 à savoir si dans l'intérêt de la sécurité nationale, est-ce qu'il est

11 justifié de ne pas demander au témoin de lui ordonner de ne pas lui

12 ordonner de répondre.

13 M. ACKERMAN : [interprétation] Je croyais, Monsieur le Président, comme je

14 l'ai cru hier, il s'agissait d'un membre du service secret britannique ou

15 un membre de la CIA ou une telle agence qui pourrait identifier l'identité

16 d'un agent. Il s'agirait plutôt de quelqu'un qui est une personne publique.

17 Je crois que le fait de dévoiler le nom de cette personne ne met pas

18 en péril la sécurité nationale et je crois que cette information devrait

19 être gardée en audience à huis clos partiel pour que le nom de ce diplomate

20 ne soit pas connu du grand public, mais je crois qu'outre ceci, je crois

21 qu'il est tout à fait clair que la réponse devrait être donnée. Il faudrait

22 demander au témoin ou lui donner l'ordre de répondre à la question.

23 Monsieur le Président.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne croyez-vous qu'il serait peut-être

25 mieux de ne pas lui donner l'ordre de répondre ?

26 M. ACKERMAN : [interprétation] Si le Tribunal adopte la position que cet

27 élément de preuve ne sera pris en compte s'il ne répond pas à la question,

28 à ce moment-là, je préférerais cette version-là, bien sûr, Monsieur le

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1 Président.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila, je crois que les deux

3 questions suivantes sont des questions qui avaient été abordées par vous.

4 Est-ce que vous pourriez d'abord aborder la question de l'identité de la

5 personne qui lui a demandé d'aller à l'étranger. Est-ce que vous êtes

6 satisfait maintenant, après avoir entendu les arguments, que ce témoin ne

7 pouvait peut-être pas connaître l'identité de cette personne ?

8 M. FILA : [interprétation] Certainement. Monsieur le Président, j'ai

9 simplement dit que je pourrais aller jusqu'à un certain point, et que par

10 la suite, c'était pour le reprendre. Je me suis arrêté lorsque le témoin a

11 dit qu'il ne voulait pas dévoiler l'identité. A partir de ce moment-là,

12 c'est à vous de prendre la décision.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il semblerait, de par ce que nous

14 dit M. Hannis, que le témoin lui avait donné l'information que son contact

15 direct était la personne qui porte le numéro 2. Ensuite, il a mentionné

16 quatre noms de personne qui auraient pu être les sources de la personne qui

17 porte le numéro en question, le numéro 2. Est-ce que vous acceptez qu'il

18 s'agit d'une position factuelle ?

19 M. FILA : [interprétation] Non, pas du tout, Monsieur le Président, car il

20 nous a dit que le numéro 2 nous a dit d'où son information provenait, son

21 ordre provenait. C'est un ordre très important que Milosevic a donné par un

22 homme, le numéro 2. Il envoie Tanic pour négocier au nom du gouvernement

23 fédéral. Je crois qu'il faut qu'on s'entende sur quelque chose. Le numéro 1

24 et le numéro 2, Tanic les définit comme étant des hommes d'opérations,

25 c'est-à-dire que ce sont des gens aux rangs les plus inférieurs. C'est la

26 raison pour laquelle M. Hannis a posé la question à

27 M. Tanic, est-ce que le numéro 1 et le numéro 2 détenaient des informations

28 provenant de la partie de l'autre côté, non pas seulement de M. Tanic.

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1 Le numéro 1 et le numéro 2 ne pouvaient pas obtenir ces informations,

2 car ils se trouvaient à un échelon inférieur. C'est ce que je voulais vous

3 dire, donc il est impossible que le numéro 2 puisse l'envoyer. Il doit lui

4 dire : une telle et telle personne vous envoie. Il aurait certainement dû

5 l'informer qui lui donne l'argent. Il lui donne de l'argent physiquement et

6 il le transfère là-bas, il le ramène. Tanic a dit qu'il savait d'où venait

7 l'ordre, donc il lui faut nous dévoiler le nom de la personne. Je ne vous

8 demande pas qu'il soit nommé pour outrage au Tribunal, mais je crois qu'il

9 faudrait renoncer à ceci.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donnez-moi le numéro de la page. Si

11 vous dites que Tanic avait dit qu'il savait --

12 M. FILA : [interprétation] Il m'a dit qu'il ne voulait pas donner le nom de

13 la personne, car il serait mis dans une situation assez difficile. C'est ce

14 qu'il a répondu et c'est ce qu'il a dit à tout le monde, y compris à la

15 personne qui l'avait enlevé.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

17 M. FILA : [interprétation] Je ne crois pas qu'il faudrait sanctionner le

18 témoin, mais qu'il faudrait simplement passer à autre chose et ne pas

19 considérer cette partie-là de son témoignage, simplement expurger

20 l'ensemble de cette question-là.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agit de deux questions tout à

22 fait distinctes. Nous pourrons certainement refuser d'ordonner au témoin de

23 répondre, et par la suite nous pouvons analyser son élément de preuve qui

24 peut ou ne peut contribuer ou non. Vous allez devoir décider si vous nous

25 demandez de lui donner l'ordre, donc de l'intimer à répondre à la question

26 et à nous dire qui était la personne, d'identifier la personne. Nous allons

27 ensuite devoir vérifier le transcript pour nous assurer qu'il y avait

28 effectivement un refus de répondre à la question, car je ne suis pas tout à

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1 fait sûr qu'effectivement il ait refusé de répondre à la question.

2 Est-ce que vous êtes en train de nous dire que la Chambre devrait

3 intimer un ordre au témoin concernant ceci ? Si oui, qu'est-ce que vous

4 estimez ? Que croyez-vous ? Quel ordre nous devrions lui donner ?

5 M. FILA : [interprétation] Je peux répondre à ce que

6 Me Ackerman demande. Je demande la même chose, de reprendre ce qu'a avancé

7 Me Ackerman, si vous ne voulez pas lui intimer de répondre à votre

8 question, c'est-à-dire on peut écarter cette partie-là de son témoignage.

9 Je demande que conformément à l'article 70, les Juges de la Chambre ou la

10 Chambre de première instance devrait l'intimer à répondre à la question, et

11 sinon, à ce moment-là - car il s'agirait là d'outrage au Tribunal - sinon

12 d'écarter cette partie de son témoignage.

13 Ce sont deux propositions; d'abord, de lui donner l'ordre de

14 répondre, sinon, si vous ne souhaitez pas prendre cette mesure-là, à ce

15 moment-là simplement écarter cette partie-là de son témoignage. Je crois

16 que j'ai été clair.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Fila.

18 Maintenant, quant à la deuxième question, la question de l'enregistrement

19 de la cassette, qui a eu accès à l'enregistrement, qu'est-ce que vous avez

20 à dire sur ceci ?

21 M. FILA : [interprétation] Je peux vous dire la même chose pour cette

22 cassette-là, la même chose que j'ai déjà dite pour la première. Son

23 témoignage sur cette cassette audio a tellement été différent et a

24 tellement changé, son témoignage depuis le début, que même aujourd'hui, il

25 me dit qu'il ne sait pas quelles sont les voix qu'il a entendues.

26 Cela pourrait être une telle personne, peut-être pas. Je crois qu'il

27 serait peut-être élégant d'écarter ce sujet, mais je maintiens ce que j'ai

28 dit pour la première cassette, c'est-à-dire qu'il serait mieux que M.

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1 Hannis n'aborde plus le sujet des cassettes audio. Merci. C'est tout ce que

2 j'avais à dire à cette étape-ci.

3 Je voudrais ajouter seulement une petite chose. A la question de M.

4 Hannis posée concernant le numéro 1 et le numéro 2, je crois que M. Tanic

5 n'a pas répondu à la question que lui avait posée

6 M. Hannis. Je me trompe peut-être à cause de l'interprétation. Ce n'était

7 pas tout à fait clair. Aujourd'hui, quand il lui a demandé cette question

8 quant à l'information, je crois que M. Hannis s'en souviendra, c'était

9 parmi les premières questions qu'il lui a posées, le témoin ne lui a pas

10 répondu à sa question. C'est ce que je voulais dire.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous voulez dire lorsqu'il lui a

12 demandé quoi ? Je n'ai pas très bien compris.

13 M. FILA : [interprétation] M. Hannis lui a demandé si le numéro 1 et le

14 numéro 2 recevaient des informations de d'autres sources. Je crois qu'il

15 n'a pas répondu clairement à cette question. Le témoin n'a pas répondu

16 clairement à cette question. Je le crois, tout de moins. Je ne suis pas

17 tout à fait certain. Il s'agirait de la page 3. On m'apprend donc, page 3,

18 ligne 11. Vous devriez peut-être revoir sa réponse. Je crois que sa réponse

19 n'était pas tout à fait claire.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

21 Monsieur O'Sullivan, vous voulez dire quelque chose ?

22 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Monsieur le Président, si la Chambre

23 souhaite exclure le témoignage de ce témoin ou cette partie-là du

24 témoignage, je proposerais que l'on agisse conformément à l'article 95.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

26 Maître Lukic.

27 M. LUKIC : [interprétation] Je suis vraiment désolé. Je crois que les deux

28 personnes dont l'identité n'a pas été identifiée, c'est d'abord le

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1 diplomate occidental qui, en réalité, était la seule source avant le mois

2 de novembre de cette année. Il nous avait dit que la seule source, c'était

3 une source occidentale concernant cette cassette, un diplomate occidental.

4 L'autre version, c'est qu'il y avait un officiel du MUP qui lui avait

5 donné l'accès au règlement du MUP qui, à l'époque, était un secret d'Etat.

6 Je crois qu'il nous faudrait examiner ou tenir compte de ces deux

7 personnes-là également.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'avez pas insisté sur la

9 question au moment où vous aviez mené votre interrogatoire. Vous auriez dû

10 insister là-dessus.

11 M. LUKIC : [interprétation] Je voulais certainement le faire hier, mais

12 nous devions terminer, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas une bonne réponse. Ce

14 n'est pas acceptable. Nous faisons de notre mieux pour vous donner

15 l'occasion de travailler. Nous nous plions à vos exigences. Lors du contre-

16 interrogatoire, il y avait suffisamment de temps. Vous auriez pu insister.

17 Vous auriez pu dire que vous insistiez qu'il obtienne une réponse, ensuite

18 vous auriez pu vous adresser à nous, nous demandant d'insister pour ce qui

19 est de cette question, mais c'est ce que vous n'avez pas fait.

20 M. LUKIC : [interprétation] J'ai peut-être insisté pour ce qui le concerne

21 lui, mais je ne vous ai pas demandé votre assistance, effectivement.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas l'impression que vous

23 m'aviez donnée et que j'ai eue de la déposition d'hier.

24 M. LUKIC : [interprétation] Dans tous les cas, il n'a pas mentionné la

25 source.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si c'est simplement quelque chose qui

27 a été abordé et que par la suite vous n'avez pas insisté, la Chambre n'a

28 nul besoin d'intervenir. La Chambre intervient seulement lorsqu'un conseil

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1 insiste obtenir une réponse qu'il ne peut pas obtenir. C'est à ce moment-là

2 que la Chambre intervient. Vous devez nous donner une indication si vous

3 voulez absolument que l'on vous vienne en aide. Il est tout à fait clair

4 que dans ce genre de position, cela pourrait être à votre avantage

5 d'entendre le témoin dire : je ne peux pas répondre à cette question.

6 A ce moment-là, vous passez à autre chose et les Juges de la Chambre

7 comprendront que vous n'aviez pas voulu insister sur la question, mais la

8 Chambre aurait à ce moment-là entendu ce que le témoin avait dit. Mais si

9 vous ne nous demandez pas de vous aider à insister à obtenir une réponse, à

10 ce moment-là, nous n'insistons pas. Lorsqu'un témoin refuse de répondre une

11 question, nous n'allons pas spontanément insister. Cela fait peut-être

12 partie de votre stratégie.

13 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous nous mettez dans une situation

15 assez difficile. Vous nous dites qu'il y avait une personne du MUP qui lui

16 avait donné accès au règlement qui était secret, ensuite l'autre personne ?

17 M. LUKIC : [interprétation] Un diplomate occidental, et ce n'est qu'au mois

18 de novembre de cette année qu'il a mentionné qu'il y avait quelqu'un au

19 sein du MUP qui lui a permis d'écouter ces cassettes, alors que dans les

20 déclarations préalables, il nous a mentionné qu'il s'agissait d'une source

21 occidentale.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le moment est venu de faire une pause.

23 Nous reprendrons l'audience à moins 10 à huis clos et nous ferons entrer le

24 témoin dans le prétoire, parce qu'il y a au moins une question que je veux

25 lui poser. S'il y en a d'autres que l'on peut identifier, nous les

26 règlerons cela à ce moment-là.

27 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Monsieur le Président.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] M. O'Sullivan.

Page 6800

1 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Juste avant la pause, Monsieur le

2 Président, je souhaitais simplement vous dire qu'il y a encore une question

3 en suspens à propos de ce témoin. Il s'agit de l'utilisation de sa

4 déclaration écrite.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, oui, absolument, j'en ai

6 parfaitement conscience. On en parlera à la fin de sa déposition.

7 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

8 --- L'audience est reprise à 10 heures 51.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis clos,

10 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.

11 [Audience à huis clos]

12 (expurgé)

13 (expurgé)

14 (expurgé)

15 (expurgé)

16 (expurgé)

17 [Audience publique]

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, avez-vous la

19 référence au compte rendu pour le contre-interrogatoire de Me Fila,

20 s'agissant de la personne qui a dit au témoin d'aller à l'étranger au cours

21 de la guerre, le passage au cours duquel vous dites que la déposition est

22 achevée ?

23 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'ai cette

24 référence. Si vous me permettez de consulter mes notes, je pense que cela

25 commence à la page 6 511.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle date ?

27 M. HANNIS : [interprétation] Page 6 511.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, quelle date ?

Page 6801

1 M. HANNIS : [interprétation] Le 14.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le 14.

3 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je procède à une double

4 vérification. Il se peut que je me sois trompé de chiffre.

5 M. ACKERMAN : [interprétation] Page 6 529, ligne 18, Monsieur le Président.

6 C'est à cet endroit-là que la question est posée, celle de savoir qui vous

7 a dit d'aller à l'étranger. C'est peut-être à cela que vous faites

8 référence.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voilà qui règle cette question. Merci.

10 M. HANNIS : [interprétation] A 6 611, Monsieur le Président, qui commence à

11 la ligne 14, Me Ackerman dit : "Qui, au SDB, vous a autorisé ? Quelqu'un

12 dont vous avez déjà le nom ? Si oui, dites oui."

13 Il répond : "Non, il est supérieur à quelqu'un dont j'ai cité le nom à huis

14 clos." Ensuite, cela continue, on voit l'endroit où il a dit que c'était un

15 de ces trois ou quatre, mais qu'il ne voulait pas se livrer à des

16 conjectures.

17 A la ligne 23 il dit : "Les personnes citées plus haut a huis clos

18 pourraient vous dire qui était dans la chaîne de commandement."

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

20 M. HANNIS : [interprétation] A 6 612, Me Ackerman : "L'essence de tout ce

21 long discours consiste à dire que vous ne savez pas est-ce que c'est vrai

22 ou pas ?"

23 "Réponse : Non, ce n'est pas cela. Je ne peux pas vous donner de réponse

24 dont je ne puis être certain." Ensuite, il poursuit en disant les numéros,

25 les trois ou quatre personnes les plus haut placées dans la hiérarchie.

26 Puis, ensuite, il dit : "On ne pouvait pas quitter le pays, pas de

27 moyens de communication pour quitter le pays." Enfin, cela continue comme

28 cela pendant pas mal de temps.

Page 6802

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Hannis.

2 Excusez-moi, Maître Fila, vous souhaitez intervenir ?

3 M. FILA : [interprétation] Tout d'abord, nous discutions de ce que m'a dit

4 le témoin à moi, non pas à Me Ackerman. J'ai vérifié le compte rendu. Vous

5 avez le 6 509, ligne 23 -- pardon, je veux dire ligne 6. Page 6 509, ligne

6 6, c'est à cet endroit-là que cela commence, c'est là que vous trouverez la

7 réponse du témoin à ma question.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 Questions de la Cour :

10 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Vous permettez ? Je dois vous poser

11 la question. A vrai dire, je souhaitais qu'on m'explique un petit peu

12 quelle est votre ligne de réflexion politique, parce qu'il y a beaucoup

13 d'informations, des informations dont nous avons discuté. Nous n'avons pas

14 parlé des aspects métaphysiques de nos débats. Vous avez parlé beaucoup des

15 événements tumultueux qui se sont déroulés. Vous avez également indiqué

16 dans vos commentaires qu'il y avait beaucoup d'événements malencontreux

17 dans votre destin qui sont intervenus, que vous avez été accusé d'avoir

18 bénéficié d'un point de vue matériel de ces événements. Vous l'avez nié,

19 vous avez dit que vous étiez un penseur politique.

20 Ce que je souhaiterais savoir : qui ont été vos maîtres de pensée

21 lorsque vous étiez adolescent, à mesure que vous grandissiez, maîtres

22 penseurs, en quelque sorte ? Je souhaiterais le savoir. Est-ce qu'il

23 s'agissait de Machiavelli ? Est-ce qu'il s'agissait de gens comme Chanakya

24 qui ont guidé votre évolution ? Est-ce qu'il s'agissait du grand leader

25 serbe Arseniji, ou qui que ce soit d'autre ? Je souhaiterais simplement

26 comprendre. Je souhaiterais également que vous nous donniez quelques

27 indications dans ce même contexte à l'oligarchie avec laquelle vous

28 travailliez dans ce même contexte. Voilà la question principale que je

Page 6803

1 souhaitais vous poser. J'en aurai peut-être une autre plus tard. Pour

2 l'instant, je vous remercie. Je souhaiterais que vous répondiez brièvement,

3 s'il vous plaît.

4 R. Au départ, c'est mon père qui a été la plus grande source d'influence.

5 Il avait été officier avant la guerre. Pendant la guerre, il avait été

6 interné dans un camp de concentration. La politique l'intéressait. Pour ce

7 qui est de ma réflexion, il faut savoir que mon enseignement, je le fonde

8 essentiellement dans Kant et dans Heideger, qui sont mes deux penseurs

9 préférés. Puis, Huntington, évidemment, également en politique. Dans ma vie

10 politique, mon mentor, c'était Nebojsa Popov, un intellectuel que l'on

11 connaît très bien, un sociologue de renom en Serbie, et M. Vesna Pesic

12 également. C'est là que j'ai acquis ma pensée en matière de démocratie

13 libérale, et cetera. C'étaient là les influences au plan spirituel, tant

14 directes que plus éloignées, qui m'ont influencé. J'ai essayé d'être aussi

15 bref que possible.

16 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] "Le Choc des cultures", est-ce que

17 vous l'avez lu, l'ouvrage de Huntington ?

18 R. Je suis d'accord. Je crois que le temps a montré qu'ils avaient raison.

19 Peut-être étaient-ils un peu sévères. Ces conflits, ils interviennent déjà

20 en raison de différences culturelles, pas simplement avec comme objectif la

21 conquête de territoire. Je crois qu'il a raison dans une large mesure, même

22 s'il n'est pas très populaire parmi les politiques de l'ouest qui estiment

23 qu'il est trop sévère. Ceci dit, cela me paraît être un diagnostic qui

24 montre comment on peut éviter ce choc des cultures, ce qui ne veut pas dire

25 que l'on y arrivera, à cette situation.

26 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Pourriez-vous nous faire part de vos

27 commentaires en bref à propos de la réflexion politique de l'oligarchie ?

28 Pourriez-vous nous dire si la personne principale que vous citez vous a

Page 6804

1 inspiré comme Arseniji ?

2 R. M. Nebojsa Popov, c'est lui qui m'a le plus influencé. Je suis heureux

3 de pouvoir rappeler sa thèse principale selon laquelle le conflit sur le

4 territoire de la Yougoslavie constituait une rébellion contre la modernité.

5 Nous avions un bon Etat, celui de l'ancienne Yougoslavie. Bien entendu, il

6 y avait des tensions entre les différentes républiques au sein de cet Etat.

7 Soudainement, on a vu intervenir des gens et des politiques qui ne

8 souhaitaient pas que la Yougoslavie ne se développe pas davantage, parce

9 que sinon, eux, ils n'y trouveraient pas leur place.

10 D'un point de vue sociologique et philosophique, c'était là une rébellion

11 d'envergure contre la modernité. J'ai vu cela dans l'ensemble des

12 républiques de l'ancienne Yougoslavie, y compris la Serbie, des gens qui se

13 sont retrouvés sur le devant de la scène et qui ont inventé des raisons

14 visant à retirer et à retenir vers l'arrière, à renvoyer en arrière les

15 républiques loin de la modernité, même si cela devait avoir pour

16 conséquence des crises politiques, ce qui est peut-être une façon de dire

17 les choses de façon un petit peu directe. Il se trouve que ce sont les

18 arguments qu'il avance.

19 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci beaucoup.

20 Ma dernière question est la suivante. La partie adverse ne marquerait son

21 accord avec rien d'autre qu'une sécession. Est-ce qu'il se serait agi alors

22 d'une sorte de confédération ?

23 R. Oui. La première possibilité de sauver la Yougoslavie, c'était de

24 transformer la fédération en une alliance d'Etats souverains. C'était

25 l'idée maintenue par mon parti. Je n'ai pas beaucoup participé à sa

26 formulation, parce que je n'avais pas beaucoup d'ancienneté au parti.

27 Effectivement, il s'agissait de transformer en une alliance de républiques

28 souveraines. La Russie en a fait la tentative, cela n'a pas vraiment

Page 6805

1 abouti.

2 Chez nous, cela aurait pu aboutir, chaque république ayant une autonomie.

3 Cela aurait été un Etat dans l'Etat, qui fonctionnerait en vertu du système

4 américain, avec des politiques en matière monétaire, en matière de

5 frontières communes. Une telle entité aurait pu rejoindre l'Union

6 européenne.

7 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Au cours de la pause, j'ai eu

10 l'occasion de lire cette partie du compte rendu qu'il fallait lire pour

11 revenir sur la question qui était en suspens dans mon esprit, donc je n'ai

12 pas d'autres questions.

13 Monsieur Tanic, nous en sommes arrivés à la fin de votre déposition.

14 Merci d'être venu au Tribunal pour déposer. Vous êtes libre de quitter le

15 prétoire. Nous allons passer en audience à huis clos pour vous permettre de

16 quitter le prétoire.

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience à huis

18 clos, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.

19 [Audience à huis clos]

20 (expurgé)

21 (expurgé)

22 (expurgé)

23 (expurgé)

24 (expurgé)

25 [Audience publique]

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous sommes à nouveau en audience

27 publique. La Chambre de première instance a décidé de ne pas contraindre le

28 témoin à répondre par le truchement d'une ordonnance.

Page 6806

1 La première question était celle de l'identité du diplomate de l'OTAN. Pour

2 la Chambre de première instance, il s'agit du fait que le bureau du

3 Procureur a signalé que cela pourrait présenter un risque pour les intérêts

4 en matière de sécurité nationale des membres de l'alliance de l'OTAN. Le

5 Procureur n'a pas souhaité que nous délivrions une telle ordonnance,

6 sachant pleinement que ceci peut avoir pour conséquence que la Chambre de

7 première instance exclue ce témoignage ou lui donne un poids minime.

8 Nous ne pouvons prendre une décision finale quant à la façon de considérer

9 ces moyens de preuve tant que nous n'aurons pas entendu tous les moyens de

10 preuve de l'affaire, mais la préoccupation du Procureur est parfaitement

11 justifiée. La Chambre de première instance fera preuve de beaucoup de

12 circonspection dans sa façon d'examiner les moyens de preuve, sachant que

13 pour autant que la Chambre de première instance puisse le savoir, elle

14 n'est pas prête à délivrer une ordonnance qui pourrait compromettre la

15 sécurité intérieure d'un Etat et ses intérêts.

16 Deuxième point, celui de l'identité de la personne qui a mis à disposition

17 l'enregistrement audio. Le témoin lui-même a fait part de ses

18 préoccupations quant à la sécurité d'un membre de services de

19 Renseignements et de Sûreté de la République de Serbie. Le Procureur ne

20 s'est pas rallié à la demande de la Défense, même s'il y avait une

21 ambiguïté évidente en la matière à un moment donné.

22 Mais compte tenu des circonstances, la Chambre de première instance

23 estime qu'il n'est pas à même de conclure que ces préoccupations n'étaient

24 pas légitimes. Dans ce cas-ci, le risque de voir les moyens de preuve

25 exclus pleinement le moment venu est plus grand encore que le risque qui se

26 présentait pour la première question. Une fois de plus, la Chambre de

27 première instance n'est pas à même d'arrêter une décision finale à propos

28 de ce moyen de preuve tant qu'elle n'aura pas entendu tous les moyens de

Page 6807

1 preuve de l'affaire, à moins que quelque chose puisse intervenir qui risque

2 de modifier la position.

3 Pour ce qui est de la troisième question, l'instruction de se rendre

4 à l'étranger, nous estimons là qu'il n'y a pas non réponse à la question de

5 la part du témoin. La réponse en conclusion était relativement claire.

6 Maintenant, est-ce qu'il a dit la vérité, est-ce qu'il est fiable ? Tout

7 cela est une question tout à fait différente. En tout cas, il a relaté les

8 faits de façon complète. Nous ne pouvons donc émettre une ordonnance pour

9 non réponse à une question posée.

10 Pour ce qui est des deux questions évoquées par Me Lukic, nous

11 estimons que son intervention est intervenue trop tard pour les raisons

12 dont nous avons déjà discuté. Ceci dit, nous sommes conscients de la

13 difficulté importante liée à ces deux questions. Ce sont des questions qui

14 pourront être réglées dans la présentation des arguments, et ce, à un

15 moment ultérieur.

16 Pour ce qui est de la présentation de la déclaration écrite du

17 témoin, la règle qui s'applique d'une manière générale et que nous suivons

18 a inévitablement pour conséquence que cette pièce à conviction dans son

19 intégralité constitue une pièce à conviction dans l'affaire. Un certain

20 nombre de conseils suivant Me O'Sullivan ont fait référence à un grand

21 nombre de paragraphes de cette déclaration écrite sans pour autant, comme

22 il l'a fait, lire les paragraphes au compte rendu à proprement parler. Les

23 questions se fondaient sur un postulat selon lequel la position du témoin

24 figure clairement dans sa déclaration écrite. Pour bien comprendre la

25 question posée et la réponse apportée, il y a lieu ou il y aura lieu pour

26 la Chambre de première instance de se pencher sur la déclaration écrite, ce

27 qui n'a pas forcément pour conséquence, ceci dit, que nous serons amenés à

28 lire des extraits du compte rendu auxquels il n'est pas fait référence de

Page 6808

1 façon positive par l'Accusation et de les prendre comme étant des moyens de

2 preuve à charge. Nous les replacerons dans le contexte. Il s'agit des

3 parties qui ne sont pas recevables dans la présentation des arguments par

4 le Procureur. Nous verrons les questions, les réponses apportées et les

5 passages auxquels il est fait référence.

6 Pour cette raison, Maître O'Sullivan, il y a lieu pour la Défense de

7 présenter une version dûment expurgée de cette déclaration qui sera la

8 version publique dans l'affaire. Dans l'intervalle, toutes les parties qui

9 suivent le paragraphe - et il faudra qu'on me rappelle exactement quel est

10 le paragraphe final versé au dossier --

11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Quarante-cinq.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tous les paragraphes suivant le

13 paragraphe 45 seront versés au dossier sous pli scellé jusqu'à ce que ce

14 soit fait.

15 Il se peut, Me O'Sullivan, que vous refiliez le bébé à quelqu'un

16 d'autre dans d'autres circonstances, mais quelqu'un doit bien assumer cette

17 responsabilité. La question ne doit certainement pas demeurer en suspens.

18 Je souhaiterais que tout cela soit réglé, s'il vous plaît, d'ici à mardi au

19 plus tard.

20 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Entendu.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

22 Voilà pour ce qui est des questions en suspens liées à la déposition

23 de ce témoin.

24 Le témoin suivant, Monsieur Hannis.

25 M. HANNIS : [interprétation] Le témoin suivant sera Richard

26 Ciaglinski. Il y a une autre question. L'extrait du livre "La route vers

27 Rambouillet" portant la cote P2511 est disponible.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

Page 6809

1 M. ACKERMAN : [interprétation] Autre question à propos du témoin qui

2 vient de déposer et que j'ai oublié de signaler tout à l'heure. Au cours de

3 mon contre-interrogatoire, j'ai évoqué la déclaration du général Perisic de

4 huit jours par le bureau du Procureur et l'opinion selon laquelle on lui

5 aurait demandé s'il avait été mis au courant de l'opération Fer à cheval.

6 J'ai cherché par le moyen d'un moteur de recherche pour voir s'il apparaît,

7 ce terme "Fer à cheval", et cela n'apparaît nulle part.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais cela ne constitue pas

9 une réponse. Je ne vous mets pas du tout en doute, mais il se peut que la

10 question soit posée différemment. Ce qui m'inquiétait un petit peu, c'était

11 que je souhaitais savoir quelle était la valeur d'une référence à la

12 déclaration de Perisic, et est-ce que c'était vraiment, à moins que nous ne

13 sachions que cette question d'une manière ou d'une autre a été explorée ou

14 à moins que nous sachions que des questions aient été posées dont vous

15 estimeriez qu'une réponse apportée était évitée, c'est-à-dire une référence

16 à cette opération.

17 M. ACKERMAN : [interprétation] Mes collègues vont peut-être me corriger,

18 mais pour autant je m'en souvienne, ces entretiens ont eu lieu après la

19 déposition dans l'affaire Milosevic à laquelle nous avons fait référence.

20 M. Nice, qui était le Procureur dans l'affaire Milosevic, avait présenté un

21 questionnaire sur base duquel l'entretien avait été fait. En principe, on

22 poserait la question à M. Perisic, si on peut ajouter quelquefois quoi que

23 ce soit à l'existence de cette opération Fer à cheval. Mais tout cela est

24 un peu nébuleux, je sais bien.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Me Ackerman.

26 Nous allons maintenant faire entrer le témoin.

27 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Ciaglinski.

Page 6810

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous prierais de prononcer une

3 déclaration solennelle, qui vous sera donnée sous peu.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

5 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

6 LE TÉMOIN: RICHARD CIAGLINSKI [Assermenté]

7 [Le témoin répond par l'interprète]

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous

9 asseoir, je vous prie.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, c'est à vous. Je vous

12 écoute.

13 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

14 Interrogatoire principal par M. Hannis :

15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Tout d'abord, permettez-moi de vous

16 demander de ménager des pauses entre mes questions et vos réponses, car les

17 interprètes et les sténotypistes nous ont demandé de ce faire, car nous

18 parlons la même langue.

19 Est-ce que vous pourriez, je vous prie, décliner votre identité, pour le

20 compte rendu d'audience ?

21 R. Je m'appelle Richard Ciaglinski. Mon non est épelé

22 C-i-a-g-l-i-n-s-k-i.

23 Q. Puis-je vous appeler Colonel Ciaglinski ou Monsieur Ciaglinski ? Est-ce

24 que vous avez une préférence ?

25 R. Comme vous voulez.

26 Q. Colonel, vous étiez, si je comprends bien, soldat de carrière, n'est-ce

27 pas ?

28 R. Oui.

Page 6811

1 Q. Quand avez-vous pris votre retraite ?

2 R. Il y a deux ans et demi.

3 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de donner une déclaration auprès des

4 enquêteurs du bureau du Tribunal au mois de mars de l'an 2000 ?

5 R. Oui, tout à fait.

6 Q. Est-ce que vous avez donné une déclaration supplémentaire à un autre

7 représentant du Tribunal du Procureur en date du

8 1er novembre de cette année ?

9 R. Oui.

10 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge, ces

11 deux déclarations ont été annexées ensemble, et la cote qui a été donnée à

12 ces deux documents est la cote P2488. Ce témoin est entendu conformément à

13 l'article 92 ter pour ce qui est de la déclaration et du compte rendu

14 d'audience. Je vais d'abord poser un certain nombre de questions quant aux

15 corrections mineures qu'il faudrait apporter à la déclaration du témoin.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Hannis.

17 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

18 Q. Monsieur le Colonel, est-ce que vous avez eu l'occasion de me

19 rencontrer moi-même ainsi que Mme Carter et est-ce que nous avons passé en

20 revue ensemble votre déclaration ?

21 R. Oui.

22 Q. Dans le cadre de cet exercice, est-ce que vous avez remarqué un certain

23 nombre de choses que vous vouliez changer ?

24 R. Oui, tout à fait.

25 Q. Bien.

26 M. HANNIS : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, Monsieur le

27 Président, Monsieur le Juge, à la page 2 de la déclaration que le témoin a

28 donnée en 2000, vers le milieu de la page, on fait une référence au mois

Page 6812

1 d'octobre 1988.

2 Q. Vous nous avez dit que vous travailliez au siège du commandement de

3 soutien du Royaume-Uni. Est-ce que c'était en 1988 ou 1998 ?

4 R. C'était en 1998.

5 Q. Je vous remercie. Si je vous invite à la page 8, à l'avant-dernier

6 paragraphe, vous aviez remarqué que le nom du général Lazarevic a été mal

7 épelé, donc il y a une erreur de frappe; est-ce que c'est exact ?

8 R. Oui, tout à fait.

9 Q. Fort bien. A la page 10 de la déclaration de l'an 2000, vous pourrez en

10 parler un petit peu plus en détail sous peu, dans ce paragraphe vous nous

11 avez dit que vous aviez un certain nombre de photographies qui seraient

12 disponibles, à l'exception d'une photographie qui porte la cote P2504.

13 Est-ce que vous avez été en mesure de prendre les photos ou de

14 trouver, de mettre la main sur les photos qui avaient été brûlées ? Vous

15 nous avez parlé d'une pile de documents qui brûlaient. Est-ce que vous

16 aviez pu vous les procurer ?

17 R. Ce qui est arrivé, c'est que lors du procès de

18 M. Milosevic, nous avons déménagé à plusieurs reprises. Ma femme, étant

19 donné qu'elle est une excellente ménagère, elle a jeté un très grand nombre

20 de papiers et également un très grand nombre de photographies, donc la

21 seule photographie que j'avais, c'est celle que je vous ai remise.

22 Q. La photographie que vous nous avez remise, est-ce que c'est la meilleure

23 des photographies que vous auriez voulu nous donner, telle que décrite dans

24 votre déclaration ?

25 R. Non. Malheureusement, c'est un angle qui ne montre pas très bien la

26 personne en question, donc ce n'est pas la photographie idéale que j'aurais

27 présentée.

28 Q. Conformément à votre déclaration et après avoir apporté les corrections

Page 6813

1 que vous avez apportées, est-ce que vous pourriez confirmer que la

2 déclaration du mois de mars 2000 et celle qui a été faite au mois de

3 novembre 2006, que ces deux déclarations sont précises, du meilleur de

4 votre connaissance, et que si l'on vous posait les mêmes questions

5 aujourd'hui, que vous donneriez les mêmes réponses que dans les deux

6 déclarations que je viens d'énumérer ?

7 R. Oui, tout à fait. J'aurais répondu de la même façon à toutes les

8 questions posées.

9 Q. Merci.

10 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge, la

11 pièce P2489 est un transcript du témoignage du colonel Ciaglinski dans

12 l'affaire Milosevic au mois d'avril 2002.

13 Q. Mon Colonel, est-ce que vous avez eu l'occasion de repasser en revue le

14 compte rendu d'audience de votre témoignage de l'époque ?

15 R. Oui.

16 Q. Est-ce qu'après avoir relu ce compte rendu, vous êtes d'accord pour

17 dire que de façon générale, tout ce qui a été dit reflète bien vos propos ?

18 R. Oui, de façon générale.

19 Q. Est-ce que vous voulez dire que ce n'est pas tout à fait précis ?

20 R. Vous savez, la mémoire est une faculté assez sensible, donc je crois

21 qu'il peut y avoir peut-être quelques erreurs.

22 Q. Est-ce que c'est une déclaration qui reflète vos souvenirs de

23 l'époque ?

24 R. Oui, je suis seulement surpris de voir tous les détails après avoir

25 relu cette déclaration. Je suis étonné d'avoir pu fournir autant de

26 détails.

27 Q. Est-ce que si l'on vous posait les mêmes questions aujourd'hui, est-ce

28 que vous croyez que vous auriez donné le même genre de réponses ?

Page 6814

1 R. Oui.

2 Q. Sinon, j'imagine qu'on attirera votre attention sur ce fait.

3 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais que

4 soit versé au dossier le transcript du témoignage de ce témoin, qui porte

5 la pièce 2489.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

7 M. HANNIS : [interprétation]

8 Q. Mon Colonel, vous avez témoigné, donc les Juges liront votre

9 déposition. Je ne vais pas donner lecture de l'ensemble de la déposition

10 que vous avez déjà donnée dans l'affaire Milosevic, mais je souhaiterais

11 que l'on passe en revue certains éléments. Dites-nous, d'abord, est-ce que

12 vous avez commencé votre carrière auprès de l'armée en 1974 ?

13 R. Oui.

14 Q. En 1998, vous vous êtes porté volontaire et vous avez accepté la

15 mission de l'OSCE en tant que membre de la Mission de vérification du

16 Kosovo ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce que vous vous rappelez à quel moment vous avez commencé de

19 travailler dans ce domaine-là ?

20 R. Oui. Je me suis rendu en Macédoine par avion. Je crois que je suis

21 arrivé au Kosovo vers la première semaine du mois de décembre, autour du 5,

22 6 ou 7 décembre. Par la suite, j'ai commencé mes tâches, j'ai commencé à

23 travailler à Pristina autour du 9 ou 10 décembre.

24 Q. Est-ce que vous étiez à Pristina ?

25 R. Oui.

26 Q. Qu'est-ce que l'on vous a demandé de faire ? Quelles étaient vos tâches

27 et responsabilités ?

28 R. La mission m'a demandé de me charger du centre de formation de

Page 6815

1 Brezovica, mais on m'a plutôt emmené à Pristina, car on estimait que mon

2 expérience était plutôt nécessaire ou importante pour là-bas. J'étais

3 chargé de vérifier les armes et l'armement.

4 Q. Quelles étaient vos fonctions principales au cours de votre séjour au

5 Kosovo ?

6 R. Lorsque Donna Phelan est partie pour s'occuper du centre de fusion,

7 j'ai pris ses tâches. C'est moi qui ai pris la tâche de vérifier, d'agir en

8 tant que vérificateur pour les armes et l'armement, et je suis également

9 devenu l'agent de liaison entre le côté serbe et l'UCK. Mais l'UCK, ou

10 plutôt, les deux tâches étaient tout à fait incompatibles. Etant donné que

11 les deux étaient incompatibles, je me suis plutôt concentré sur le côté

12 serbe et la commission serbe.

13 Q. Vous avez d'abord parlé d'un centre de fusion. Est-ce que vous pourriez

14 nous expliquer de quoi il s'agit exactement ?

15 R. Oui. Effectivement, nous avions un très grand nombre de personnes qui

16 travaillaient sur le terrain et qui envoyaient l'information quant à ce

17 qu'ils pouvaient apercevoir et aussi d'après les gens avec qui ils

18 s'étaient entretenus. Ils nous envoyaient des rapports, donc ils envoyaient

19 l'information à Pristina, et on faisait une fusion, on compilait leurs

20 rapports.

21 Q. Vous avez dit qu'initialement, vous aviez pris la fonction d'agir en

22 tant qu'agent de liaison pour ce qui est du côté serbe et du côté de l'UCK.

23 Est-ce que vous pourriez nous dire pourquoi ces deux étaient

24 incompatibles ?

25 R. Oui, tout à fait. Mon impression à moi et l'impression des personnes

26 qui étaient autour de moi estimaient, et j'estimais également qu'il était

27 difficile de travailler pour les deux parties en présence, car les deux

28 parties ne me faisaient pas confiance, car chaque partie estimait que je

Page 6816

1 pouvais donner des renseignements à la partie adverse. Moi-même, j'estimais

2 que c'était beaucoup plus sage de se concentrer sur un côté pour pouvoir

3 avoir plus de crédibilité, bien sûr.

4 Q. Vous nous avez dit qu'en réalité, vous étiez passé plutôt en tant

5 qu'agent de liaison pour le côté serbe ?

6 R. Oui.

7 Q. Qui était votre supérieur immédiat ?

8 R. Mon supérieur immédiat, c'était le général Drewienkiewcz. On l'appelait

9 DZ.

10 Q. Lorsque vous dites que vous l'appeliez DZ, est-ce que cela veut dire

11 que son nom était difficile à prononcer ?

12 R. Oui. Au cours de sa carrière, les Britanniques se référaient à lui

13 comme le général DZ - c'étaient les premières lettres de l'alphabet - parce

14 que son nom était difficile à prononcer.

15 Q. Vous avez mentionné au dernier paragraphe de la déclaration en anglais,

16 à la page 2, concernant les visites sur le terrain de la VJ, qu'il y avait

17 deux sites de l'armée yougoslave qui vous intéressaient. Est-ce que vous

18 vous rappelez de qui il s'agissait ?

19 R. Oui. Il y avait trois groupes, trois compagnies, trois endroits qu'il

20 nous avait été permis de visiter, l'une à cette reprise.

21 Q. Vous souvenez-vous de l'endroit géographique, de l'endroit où cela se

22 trouvait ?

23 R. Oui. Une au sud qui donnait sur la route principale qui mène vers

24 Prizren, et il y avait également un autre vers le nord et une autre au

25 centre que l'on appelait le district occidental.

26 Q. Vous avez parlé d'une commission de coopération. Est-ce que vous

27 pourriez nous parler un peu plus en détail, nous dire plus en détail de

28 quoi il s'agissait ?

Page 6817

1 R. C'était une organisation basée à Pristina qui se trouvait dans les

2 bâtiments administratifs du Kosovo, c'est-à-dire du gouvernement du Kosovo,

3 et il y avait un point de contact de très haut niveau de Belgrade. Le

4 général Bo Pelmas y travaillait. Il y avait également un autre à Pristina

5 composé du général Loncar qui était en charge, le colonel Mijatovic et

6 plusieurs autres personnes au fil du temps, des gens du ministère de

7 l'Intérieur et du ministère des Affaires étrangères.

8 Q. Le général Loncar et le colonel Kotur étaient membres de quelle entité,

9 de quelle agence ?

10 R. De la commission de coopération.

11 Q. Outre la commission de coopération, est-ce qu'ils faisaient partie de

12 la police ou de l'armée ?

13 R. Le colonel Kotur était un officier militaire au sein du service de

14 Renseignements. Le général Loncar était à la retraite. C'était un général

15 qui avait eu une carrière très longue et il était respecté dans son

16 domaine.

17 Q. Qu'en est-il du colonel Mijatovic ?

18 R. C'était un député du général Lukic qui travaillait pour le MUP de

19 Pristina.

20 Q. S'agissant des représentants de votre côté à vous, la MVK, est-ce qu'il

21 n'y avait que vous ?

22 R. En théorie, la représentation aurait dû se faire à un niveau très haut,

23 et les réunions devaient être organisées de sorte à ce que les ambassadeurs

24 et le directeur Walker puissent être présents. Le général DZ a été présent

25 à plusieurs réunions. Chaque fois que le général DZ ne pouvait pas assister

26 aux réunions, j'ai été mandaté à le remplacer.

27 Q. Au fil du temps, est-ce que c'était vous qui étiez la personne qui

28 représentait la MVK ?

Page 6818

1 R. J'ai sûrement dû être là pour ce qui est de 90 % du temps.

2 Q. Les réunions se faisaient à quelle fréquence ?

3 R. Chaque jour.

4 Q. Combien de fois par jour ?

5 R. Trois ou quatre fois par jour.

6 Q. Lorsque vous n'assistiez pas aux réunions de la commission de

7 coopération, que faisiez-vous dans le cadre de vos tâches ?

8 R. Normalement, j'étais sur le terrain. Le général DZ me demandait de me

9 déplacer sur le terrain, de résoudre les problèmes au Kosovo.

10 Q. Je vais maintenant sauter, devancer un peu la chronologie. Je voudrais

11 vous demander : est-ce que vous pourriez nous donner de quelle façon la MVK

12 a été créée et quelles étaient ses fonctions principales ?

13 R. Oui, tout à fait. La MVK a été créée à la suite des résolutions des

14 Nations Unies suivant un document qui a été créé et qui donnait les thèmes

15 de référence pour ce qui est de la MVK, et le document avait été signé par

16 le général Geremek, je crois, le 16 octobre 1988. Dans ce document, on peut

17 voir très spécifiquement quelle était la composition de l'équipe, quelles

18 étaient nos fonctions, nos droits, nos tâches et obligations.

19 M. HANNIS : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au témoin la

20 pièce P658, je vous prie.

21 Q. Dites-nous, Monsieur, est-ce que vous étiez au courant ou est-ce que

22 vous connaissiez des détails de cet accord ? Est-ce que vous aviez une

23 copie sur vous dans le cadre de vos fonctions ?

24 R. J'avais une copie sur moi en tout temps. En fait, il y avait trois

25 documents. En réalité, j'avais toujours ces trois documents dans mes poches

26 au cas où on me posait une question où est-ce qu'on ne me permettait pas de

27 passer ou d'avoir accès à des personnes ou des documents.

28 Q. Est-ce qu'il ne vous est jamais arrivé que dans le cadre de vos

Page 6819

1 fonctions, on contestait votre présence ou on vous demandait ce que vous

2 faisiez là et pourquoi vous étiez sur place ?

3 R. Oui, très souvent.

4 Q. Je voudrais savoir si l'on pourrait montrer ces documents. Je crois que

5 vous avez fait référence à l'accord Geremek. C'est l'un des trois

6 documents. Est-ce que vous vous rappelez quels étaient les autres

7 documents ?

8 R. Oui. Il y avait un document qui a été signé par Nauman et un autre

9 document signé Shaun Burns. Je crois qu'il y avait également, c'était l'un

10 des trois documents dont la signature était de M. Sainovic. Il y avait un

11 autre document sur lequel on pouvait lire la signature de M. Milosevic.

12 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que nous avons

13 des difficultés à voir ce texte apparaître sur l'écran.

14 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur, le document

15 qui se trouve à l'écran devant vous ?

16 R. Oui.

17 Q. Lequel des trois documents est-ce ?

18 R. C'est l'accord Geremek. Il était le président du bureau de l'OSCE à

19 l'époque.

20 Q. Est-ce que vous vous basiez, est-ce que vous compreniez cet accord

21 comme un accord qui vous permettait de vous déplacer à Kosovo ?

22 R. Oui, absolument. Selon cet accord, selon les termes de ce rapport, il

23 nous était possible ne nous déplacer partout au Kosovo.

24 M. HANNIS : [interprétation] Pourrait-on, je vous prie, passer à la page

25 suivante ? C'est la page suivante dans les deux langues, en anglais et en

26 B/C/S. Je souhaiterais que l'on défile jusqu'en haut de la page, le haut de

27 la page, je vous prie. Excusez-moi, Monsieur le Président, j'ai besoin de

28 consulter mon assistante.

Page 6820

1 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

2 M. HANNIS : [interprétation] Je crois qu'il faudrait passer à la page

3 suivante. Je suis désolé. Au bas de la page, ce qui m'intéresse, c'est la

4 première phrase et ensuite ce qui suit.

5 Q. Pourriez-vous, je vous prie, donner lecture du point 1 ? Nous passerons

6 à la page 2.

7 R. "La mission se déplacera dans Kosovo pour procéder aux vérifications

8 nécessaires --"

9 M. HANNIS : [interprétation] Pourrait-on passer à la page suivante, en haut

10 de la page ?

11 Q. Veuillez poursuivre, je vous prie, si vous l'avez à votre gauche.

12 R. "Le maintien du cessez-le-feu par les éléments. Mener une enquête et

13 écrire des rapports quant aux violations du cessez-le-feu. Le personnel de

14 la mission aura un accès libre pour ce qui est du mouvement, et ce, pour ce

15 qui est de l'ensemble du Kosovo."

16 Q. Est-ce que la situation était telle, effectivement ?

17 R. Non, en fait.

18 Q. [aucune interprétation]

19 R. Au début oui, mais on nous empêchait d'entrer dans plusieurs zones. Il

20 y avait deux choses principales qui nous intéressaient. D'abord, ce qui

21 nous intéressait, c'est de vérifier ce qui se passait sur le terrain, mais

22 ce qui nous intéressait aussi, c'était de savoir ce qui se passait à

23 l'intérieur des casernes militaires et dans les garnisons militaires, donc

24 savoir ce qui s'y trouvait comme arme et armement. Pour ce qui est des

25 casernes, nous avons essayé de mener à bien des inspections, des

26 inspections inopinées.

27 Mais il ne nous était pas possible de mener à bien ce travail

28 d'inspection. D'ailleurs, on nous avait dit que si l'on ne déplaçait pas

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1 nos véhicules nous-mêmes, que cela causerait un incident assez sérieux,

2 donc on nous empêchait carrément de faire notre travail.

3 Q. Lorsque l'accès ne vous était pas permis, est-ce que vous abordiez ce

4 sujet auprès d'eux ?

5 R. Oui, c'était la commission de coopération et le chargé du projet, bien

6 sûr, à qui l'on se plaignait. Bien sûr, il y avait aussi des personnes sur

7 le terrain qui ne nous permettaient pas d'accéder, de passer. Ils nous

8 disaient de nous rendre, de parler plutôt au général Loncar et de lui

9 adresser nos griefs.

10 Q. Outre ceci, s'agissant des inspections sur le site, est-ce que vous

11 étiez en mesure de vérifier les rapports quant au conflit et les violations

12 du cessez-le-feu des deux côtés ?

13 R. Oui, c'était ce que nous devions faire. Nous devions essayer d'établir

14 qui étaient les parties coupables et qui étaient les parties qui avaient

15 violé le cessez-le-feu, et d'établir aussi les dommages causés. Mais bien

16 sûr que si on n'avait pas accès, si l'on ne pouvait pas de déplacer, il ne

17 nous était pas possible de faire notre travail.

18 Q. Dans votre déclaration qui a été donnée le 23 mars 2000, au bas de la

19 page 3, vous avez dit que selon vous, Loncar et les subordonnés ont perçu

20 la commission sur la coopération et la MVK en tant que moyens pour prouver

21 au monde qu'ils étaient la partie innocente, que c'étaient eux les

22 innocents, mais ils nous demandaient de vérifier des choses particulières.

23 "Chaque fois que des choses arrivaient aux forces serbes, ils nous

24 demandaient de venir et de confirmer ce qui s'était passé, mais ils ne nous

25 permettaient pas de vérifier ou de confirmer ou de mener une enquête sur ce

26 qui s'était passé au cours des événements qu'eux ils avaient causés."

27 D'abord, ma question, pourquoi est-ce que vous saviez et pourquoi

28 est-ce que vous dites qu'ils ne vous permettaient pas de vérifier ce qu'eux

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1 ils avaient fait ?

2 R. J'étais sur le terrain moi-même avec d'autres personnes. Par exemple,

3 si un incident avait lieu, nous envoyions nos personnels du centre régional

4 de Pristina pour essayer de mener une enquête, pour essayer d'établir ce

5 qui s'était passé. Ces personnes par la suite essayaient de faire leur

6 travail. Qu'ils aient pu ou non faire le travail, ils devaient envoyer un

7 rapport pour nous dire ce qui s'était passé. S'il y avait des difficultés,

8 ils le notaient dans le rapport.

9 Q. Est-ce que vous pouvez donner aux Juges de la Chambre un exemple selon

10 lequel vous et votre équipe de vérificateurs n'aviez pas accès ou ne

11 pouviez pas arriver à vérifier ce qui s'était passé dans, par exemple un

12 incident impliquant une violation quelconque ?

13 R. Il y en avait plusieurs.

14 Q. Est-ce que c'était dans les rapports quotidiens que cela était

15 indiqué ?

16 R. Nous avions un système de rapports quotidiens et nous gardions

17 également tous les documents dans un livre bleu, donc tous les rapports

18 quotidiens étaient placés dans ce livre bleu.

19 Q. Combien de bureaux est-ce que vous aviez, de bureaux régionaux ?

20 R. Nous avions cinq centres régionaux qui se trouvaient dans le Kosovo,

21 dans la région du Kosovo, et ensuite nous avions des bureaux placés dans

22 des maisons dans plusieurs villages, donc nous étions bien représentés sur

23 le terrain.

24 Q. Combien de vérificateurs est-ce que vous aviez au Kosovo, au total ?

25 R. Je crois que vers la fin, nous avions 1 400 vérificateurs environ.

26 Q. Concernant la commission de coopération, vous dites dans votre

27 déclaration à la page 4, au début de la page, que le général Loncar

28 semblait être le représentant du gouvernement fédéral au début, mais il

Page 6823

1 semblerait qu'avec le passage du temps, son autorité avait quelque peu

2 diminué.

3 R. Hm-hm.

4 Q. Maintenant, dites-nous, de quelle façon est-ce que vous avez remarqué

5 que son autorité avait diminué au fil du temps ?

6 R. Au début, nous avions des contacts avec le général Loncar pour ce qui

7 est de la commission et nous obtenions des réponses très rapides aux

8 questions posées. Le général Loncar était toujours présent au début. Il

9 était présent à toutes les réunions, mais au fil du temps, le général

10 Loncar se présentait de moins en moins fréquemment.

11 Q. Au cours de cette période, vous dites qu'il se rendait régulièrement à

12 Belgrade ? A quelle fréquence se rendait-il à Belgrade ?

13 R. Vers le mois de février, mars, ou plus particulièrement au mois de

14 mars, je crois qu'il y était régulièrement une fois par semaine.

15 Q. Dans votre déclaration, page 4, paragraphe 2, vous décrivez un incident

16 qui s'est déroulé autour de Noël 1998. Je crois que vous parlez du 27

17 décembre 1998. Vous dites qu'une réunion avait eu lieu avec le général

18 Loncar, et il vous a parlé d'Albanais. Il vous a dit que les Albanais

19 avaient capturé un Serbe.

20 R. Hm-hm.

21 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire pourquoi cet incident est important

22 et où est-ce que l'incident a eu lieu ?

23 R. La façon dont nous avions appris l'existence de cet incident était la

24 façon suivante. Vers la fin de notre réunion qui avait duré presque trois

25 heures, le général Loncar nous a informés en nous disant : vous devriez

26 savoir que les autorités serbes ont décidé de lancer une action, de mener

27 une action au sud-ouest de Podujevo, la région qui est considérée comme une

28 région plutôt vallonnée, plutôt près du village de Gornja Lapastica et

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1 d'Obrandza. Nous étions assez surpris de ceci. Nous savions que l'armée

2 serbe, la VJ, avait été déployée au sud-est de Podujevo, mais encore une

3 fois, je dois vous dire que nous étions étonnés, car les unités n'étaient

4 pas censées être déployées depuis les casernes, depuis les baraques,

5 plutôt, car on nous avait assurés que c'était une zone de formation.

6 Selon un accord, l'armée yougoslave avait le droit de mener des opérations

7 de formation. Mais ce que nous avions appris, c'est qu'il y avait des chars

8 T-55 et aussi de l'artillerie qui étaient situés sur un vieil aéroport.

9 Cela ne nous semblait pas être du tout bizarre, mais le général Loncar nous

10 a dit que c'était l'une des unités qui avait mené une action pour libérer

11 un fermier que l'UCK avait capturé. Sachant cela, ceux qui attendaient de

12 l'autre côté de la montagne autour d'Obrandza, je savais que cela pouvait

13 s'enflammer, qu'une bataille assez sérieuse pouvait s'ensuivre.

14 Q. Comment vous saviez qu'il y a quelque chose qui les attendait de

15 l'autre côté de la montagne ?

16 R. Nous nous étions rendus à Podujevo, c'était un endroit assez sensible.

17 Il y avait énormément de problèmes dans cette région, et l'UCK avait

18 souvent utilisé les services de tireurs embusqués pour tirer sur des

19 convois militaires qui venaient apporter l'approvisionnement aux garnisons.

20 Très souvent, lorsqu'on regardait la colline qui avait une vue sur la

21 région, nous pouvions voir l'un des commandements de l'UCK qui était très

22 actif dans cette région. J'ai passé presque chaque jour dans cette région-

23 là. Je savais que l'UCK avait préparé la défense en apportant du renfort

24 pour ce qui est de l'équipement et des effectifs, pour la mission

25 également. Je crois que ce n'était pas un secret, la partie adverse le

26 savait, l'autre coté, plutôt, le savait aussi.

27 Q. Podujevo se trouve où ?

28 R. Au nord de Pristina.

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1 Q. C'est une route principale nord-sud ?

2 R. Je dirais que la route qui passe au nord-est, Podujevo était la route

3 principale de l'approvisionnement. C'était également une route principale

4 pour ce qui est de la communication entre Belgrade et le reste de la

5 Serbie.

6 Q. Il semblerait que beaucoup de forces avaient été déployées des deux

7 cotés pour un seul civil serbe, n'est-ce pas ?

8 R. Ce qui s'était passé avant, c'est qu'une unité du MUP avait essayé de

9 libérer ce fermier. Ils avaient subi des tirs nourris en leur direction et

10 plusieurs personnes avaient été blessées. J'imagine qu'ils avaient estimé

11 qu'une force plus organisée, plus forte eut été nécessaire pour libérer ce

12 fermier.

13 Q. Y compris les chars ?

14 R. Oui. C'est un peu inhabituel en fait de déployer deux artilleries, deux

15 régiments, l'artillerie, d'une telle artillerie.

16 Q. Sachant ce que vous saviez quant aux forces de l'UCK de l'autre côté,

17 le contingent pour ce qui est du coté serbe, vous nous avez dit que vous

18 étiez quelque peu préoccupé par ce qui s'était passé. Est-ce que vous avez

19 essayé de faire quelque chose pour essayer d'empêcher que cela ne

20 s'enflamme encore plus ?

21 R. Vous savez, on nous accusait toujours que l'OSCE n'avait rien fait, que

22 nous ne faisions qu'envoyer des rapports de façon plutôt partiale, que nous

23 ne voulions pas nous salir les mains en faisant quelque chose. J'ai vu une

24 occasion, j'ai voulu saisir l'occasion ici pour montrer que nous pouvions

25 essayer d'apaiser la situation. Je me suis porté volontaire pour aller

26 parler aux représentants de l'UCK et de demander à l'UCK de libérer le

27 fermier, ainsi empêcher que la situation ne soit plus encore difficile.

28 Voilà ce que nous avons fait.

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1 Q. Vous vous êtes porté volontaire vous-même ?

2 R. Oui. Moi-même, David Wilson et aussi mon collègue qui avait des

3 rapports avec l'UCK, il a pensé également qu'un membre de la Croix-Rouge

4 devait se déplacer dans l'équipe.

5 Q. Vous décrivez cela dans votre déclaration, le général Loncar a entendu

6 votre proposition de votre bouche, d'ailleurs, a pensé qu'il s'agissait

7 d'une bonne idée.

8 R. Je pense qu'il a été assez surpris. Je dois dire que j'ai d'ailleurs

9 été surpris moi-même par le fait que j'avais fait cette offre. Oui,

10 effectivement, il a dit qu'il s'agissait là d'une proposition intéressante,

11 qu'il n'était pas en mesure de prendre une décision pour ce qui était de

12 passer à l'action.

13 Q. Alors qu'a-t-il fait ?

14 R. Il est sorti, il a passé un appel téléphonique.

15 Q. Savez-vous qui il a appelé ?

16 R. Oui. D'abord, je me suis dit qu'il allait appeler M. Sainovic, parce

17 que nous savions que M. Sainovic jouait un rôle prépondérant pour ce qui

18 est du Kosovo. C'était le vice-premier ministre. Nous pensions qu'il

19 voulait peut-être essayer d'obtenir l'aval de quelqu'un. Puis, par la

20 suite, en parlant à d'autres membres de la commission, lorsque j'ai suggéré

21 qu'il avait appelé M. Sainovic, il a dit : "Non, il a dû appeler quelqu'un

22 qui était encore plus haut placé que M. Sainovic."

23 Q. Du fait de ce que vous saviez, vous connaissiez la hiérarchie, qui

24 était placé au-dessus de M. Sainovic, pour ce qui est du Kosovo ?

25 R. Lorsqu'on m'a dit cela, on ne peut pas imaginer quelle est la position

26 importante de cette personne. A l'époque, je me suis dit : c'est M.

27 Milosevic.

28 Q. Vous avez obtenu cette autorisation et ainsi vous êtes allé là-bas et

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1 vous avez essayé de régler le problème en faisant en sorte que le fermier

2 puisse être libéré ?

3 R. Oui, il y avait cet appel téléphonique qui était passé. J'ai téléphoné

4 à mon QG, je leur ai présenté cette proposition pour obtenir leur aval,

5 parce qu'il se pouvait également qu'eux refusent. Pendant que je faisais

6 cela, l'autorisation est arrivée. Il avait été décidé de ne pas poursuivre

7 l'opération pour nous donner la possibilité de sauver le fermier en

8 question.

9 Q. Vous avez réussi ?

10 R. Oui, cela nous a pris le plus clair de la journée, nous avons réussi à

11 faire sortir le fermier et à le remettre ou à le confier à la police de

12 Podujevo. Il n'y a pas eu d'autres opérations ultérieures de la part de ces

13 forces à la suite de notre action.

14 Q. Bien.

15 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer au témoin la

16 pièce à conviction 615 ? Il s'agit de l'atlas du Kosovo, page 19.

17 Q. Lorsque la carte sera affichée, Colonel, j'aimerais vous demander de

18 bien vouloir nous indiquer l'emplacement où tout cela s'est déroulé. A part

19 ce fermier, est-ce que vous avez pu faire sortir quelqu'un d'autre ?

20 R. Il y avait une tractation, nous avons pu faire sortir également un

21 Albanais qui était blessé. Vous savez, rien n'est simple dans ce bas monde.

22 C'est toujours une histoire de concessions.

23 Q. Les Albanais du Kosovo ne vous ont pas autorisé à faire sortir ce

24 fermier si vous ne faisiez pas sortir également leur camarade blessé ?

25 R. Tout à fait.

26 Q. Où l'avez-vous amené ?

27 R. A l'hôpital, une clinique de Pristina où il est décédé, d'ailleurs.

28 Q. Est-ce que vous reconnaissez la carte et ce qui est décrit par la

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1 carte ?

2 R. Oui.

3 Q. Nous voyons Pristina qui se trouve dans le coin inférieur gauche.

4 M. HANNIS : [interprétation] J'aimerais vous demander d'agrandir la partie

5 gauche de cette page. Voilà, je vous remercie.

6 Q. Est-ce que vous savez où se trouve Podujevo sur cette carte ?

7 R. Podujevo se trouve au niveau, en haut à gauche, tout en haut.

8 Q. Là où on voit l'orange, là où il y a une voie ferrée ?

9 R. Oui, là où il y a la voie ferrée, exactement; voilà le secteur de

10 Podujevo.

11 Q. Est-ce que vous pouvez nous indiquer où cela s'est passé ?

12 R. Oui, les forces de la VJ serbes étaient cantonnées au niveau de ce

13 terrain d'aérodrome, en jaune.

14 Q. Bien.

15 R. J'ai passé plusieurs jours à attendre à l'extérieur, à la suite de cet

16 incident.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ciaglinski, depuis que vous

18 êtes venu la dernière fois, la technologie a évolué, ici. Ce que vous avez

19 maintenant, le marqueur en question ne marche pas, ne fonctionne pas avec

20 la nouvelle technologie.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est merveilleux, voilà un marqueur.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il va falloir que vous inscriviez sur

23 l'écran. Je pense que M. Hannis va vous demander de le faire.

24 M. HANNIS : [interprétation]

25 Q. Oui, avec ce stylet, vous pouvez dessiner sur l'écran.

26 R. Oui.

27 Q. J'aimerais vous demander de faire un cercle autour de la base aérienne.

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Voilà, les forces étaient retranchées sur cette base aérienne qui

2 n'était plus utilisée. J'ai passé plusieurs jours à attendre sur la route

3 dans ce secteur.

4 Q. C'est là que vous avez fait un X ?

5 R. Oui, tout à fait.

6 Q. Est-ce que vous pouvez nous indiquer où se trouvaient les positions de

7 l'UCK ?

8 R. J'avais mentionné Obradza, il s'agit de ce secteur.

9 L'INTERPRÈTE : Le témoin dessine un cercle sur la carte.

10 M. HANNIS : [interprétation]

11 Q. Vous avez fait un grand cercle à l'ouest de Podujevo; c'est cela ?

12 R. Oui.

13 Q. Où se trouvait le contingent serbe avec les chars qu'ils se proposaient

14 d'utiliser pour sauver cette personne ?

15 R. Est-ce que l'on pourrait déplacer la carte pour que nous

16 puissions voir Podujevo?

17 Q. Non, parce que là, je pense qu'on est haut de la carte de cette page-

18 là.

19 R. Voilà. Je ne m'en souviens pas vraiment. Si on prend la route

20 principale, voilà, cela se trouve à peu près dans ce secteur. Voilà où se

21 trouvaient les chars. Le village où était retenu ce Serbe se trouve là.

22 L'INTERPRÈTE : Le témoin a dessiné deux cercles sur la page de l'atlas.

23 M. HANNIS : [interprétation]

24 Q. Merci.

25 M. HANNIS : [interprétation] Voilà, c'était au niveau de la page titre.

26 Est-ce que nous pourrions prendre un cliché de cette page ?

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce IC109.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

Page 6831

1 M. HANNIS : [interprétation] Très bien.

2 Q. Je n'ai plus besoin de faire usage de cette carte. J'aimerais vous

3 poser d'autres questions à propos d'autres réunions que vous avez eues.

4 Vous avez mentionné une réunion qui a eu lieu le 6 janvier 1999 dans le

5 bâtiment du gouvernement à Pristina. Cela se trouve à la page 5 de votre

6 déclaration, troisième ou quatrième paragraphe à partir du haut. Vous vous

7 trouviez dans la salle de conférence de M. Andjelkovic, qui était

8 administrateur serbe ?

9 R. Oui.

10 Q. Est-ce qu'il s'agissait d'une réunion ordinaire ou d'une réunion

11 extraordinaire ?

12 R. Je sais qu'il s'agissait d'une réunion extraordinaire.

13 Q. Pourquoi ? Pourquoi il ne s'agissait pas d'une séance ordinaire ?

14 R. Parce qu'il y avait plusieurs problèmes qui n'avaient pas été réglés

15 pour nous, qui nous compliquaient véritablement la vie. La MVK ne pouvait

16 tout simplement pas s'acquitter de ses obligations et de ses fonctions.

17 Q. Par exemple ?

18 R. Il y avait toute une série de questions qui ont été abordées. Cette

19 réunion fut présidée par M. Sainovic. Par exemple, l'hélicoptère qui avait

20 été sauvé et qui se trouvait à l'extérieur du Kosovo, et nous avions pris

21 des dispositions pour que l'on puisse faire sortir et faire entrer ou faire

22 sortir les victimes, toutes victimes qui se trouvaient près de la frontière

23 du Kosovo. Cela avait été couvert par l'accord de Geremek. En fait, nous

24 n'avons jamais obtenu la permission de faire entrer l'hélicoptère.

25 Nous avions des problèmes parce qu'il y avait un manque de carburant.

26 Il était extrêmement difficile d'obtenir également du carburant pour nos

27 Land Rovers. La plupart des postes de carburant refusaient de nous en

28 vendre. Il y avait également le problème des prisonniers. Les 10

Page 6832

1 prisonniers se trouvaient dans une prison à Nis, et il y avait le problème

2 de l'accès à ces prisonniers. Bien sûr, il y avait toujours le problème de

3 la vérification juste ou injuste. M. Sainovic ne nous a pas rendu la tâche

4 facile, car il nous a accusés de vérifier de façon tout à fait inéquitable

5 et injuste, de ne parler que des délits commis par les Serbes et de ne

6 jamais mentionner l'UCK et le camp des Albanais.

7 Q. Dans le paragraphe suivant, vous mentionnez certaines des personnes qui

8 ont participé à cette réunion. Il y avait l'ambassadeur Keller. De qui

9 s'agissait-il ?

10 R. L'ambassadeur Keller était l'adjoint ou l'un des adjoints de

11 l'ambassadeur Walker. C'était l'un des contacts principaux avec le général

12 Sainovic.

13 Q. Qu'en est-il du général de division Maisonneuve ?

14 R. Oui. Ce général de division Maisonneuve représentait le général DZ et

15 il s'occupait de l'un des centres régionaux. Lorsque le général DZ était

16 absent, c'est lui qui le remplaçait.

17 Q. Qui a présidé la réunion ?

18 R. La réunion a été présidée dans son intégralité par M. Sainovic.

19 Q. J'aimerais maintenant que nous consultions la page 6 de votre

20 déclaration. Page 6, paragraphe 4, vous faites référence au colonel Kotur.

21 Quel était son rôle au sein de la commission ? Est-ce qu'il était

22 subordonné au général Loncar ?

23 R. Oui, tout à fait. Il était subordonné au général Loncar. C'est lui qui

24 était le point de contact de la commission avec l'unité de la VJ qui se

25 trouvait au Kosovo. Si jamais nous avions des problèmes, si nous avions des

26 questions à poser ou si nous voulions nous rendre dans un endroit, c'est le

27 colonel Kotur qui prenait des dispositions pour que cela nous soit

28 possible.

Page 6833

1 Q. Quelle était la nature de votre relation avec lui, vu le rôle que vous

2 jouiez au sein de la commission en tant que représentant de la MVK et de

3 l'OSCE ?

4 R. Au niveau personnel, nous nous entendions bien. Je dirais que nous

5 avons passé beaucoup de temps ensemble à nous rendre dans des unités, à

6 inspecter la frontière. Je passais que trois ou quatre heures par jour dans

7 le cadre de ces réunions, pour ce qui est des réunions de la commission de

8 la coopération. Je ne dirais pas que nous étions intimes ou proches l'un de

9 l'autre. Nous nous connaissions quand même très bien, je pense.

10 Q. Dans votre déclaration, à la page 7, paragraphe premier de cette page

11 7, vous indiquez que parfois, lors des dernières semaines, le colonel Kotur

12 était présent. Il vous a parlé d'un projet, d'un plan de manœuvres ou d'un

13 plan de manœuvres qui était en projet et dont le but était d'éliminer

14 l'UCK. Est-ce que vous pourriez nous dire comment cela s'est passé ?

15 R. Tout à fait. C'était vraiment quasiment à la fin. Nous avions déjà

16 décidé, me semble-t-il, de partir.

17 Q. Quand est-ce que cela s'est passé, plus ou moins ?

18 R. Vous voulez dire la décision de partir, quand est-ce que nous l'avons

19 prise ?

20 Q. Quand est-ce que vous êtes parti ?

21 R. Pour ce qui est de la décision et des plans qui ont été faits pour que

22 nous partions, je pense que cela s'est passé jusque après Noël.

23 L'ambassadeur Walker nous a demandé d'envisager une évacuation possible, à

24 un moment donné.

25 Q. Quand est-ce que vous êtes parti ?

26 R. Pas avant le 23 mars.

27 Q. Pendant cette période entre Noël et votre départ à la fin du mois de

28 mars, cela s'est passé à ce moment-là ?

Page 6834

1 R. Non. Cette discussion avec le colonel Kotur qui m'a véritablement

2 beaucoup surpris s'est passée quelques jours avant notre départ.

3 Q. Qui a assisté à cette discussion ?

4 R. C'était à la suite de l'une des toutes dernières réunions où était

5 présente la commission. Lorsque tout le monde est parti, j'étais là avec

6 mon interprète, et le colonel Kotur allait nous accompagner jusqu'à la

7 sortie de l'immeuble. Avant cela, il m'a montré une carte qui se trouvait

8 sur la table. Il m'a dit quelque chose qui n'était pas tout à fait usuel.

9 Q. Il y avait d'autres personnes ?

10 R. Il y avait juste le colonel Kotur, moi-même et l'interprète.

11 Q. En quelle langue s'est déroulée cette conversation ?

12 R. Le colonel Kotur s'exprimait en serbe. Je ne pense pas, je suis

13 absolument sûr qu'il ne parlait pas l'anglais. Il avait peut-être quelques

14 notions.

15 Q. Est-ce que vous, vous compreniez le serbe ? Est-ce que vous le parlez ?

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce que l'interprète interprétait juste pour lui ou pour vous deux ?

18 R. Non, pour nous deux.

19 Q. Que s'est-il passé ? Qu'est-ce qui était si peu habituel au cours de

20 cette conversation ?

21 R. Pendant toute notre mission là-bas, je le connaissais, le colonel

22 Kotur. Nous avons passé beaucoup de temps sur le terrain dans des

23 situations dangereuses, périlleuses. Bon, il faut appeler un chat un chat.

24 Si je considérais qu'il y avait un incident terroriste mené à bien,

25 effectué par des terroristes, c'est ainsi que je décrirais la situation. Je

26 pense que nous avions su instaurer une relation de respect entre collègues,

27 entre professionnels. Soudainement, il s'est tourné vers moi et m'a dit :

28 je vais vous montrer comment nous allons régler le problème de l'UCK et de

Page 6835

1 la population.

2 Q. Est-ce qu'il vous a dit quand est-ce que cela allait se passer ?

3 R. Après notre départ, cela allait se passer. Il a dit que c'était quelque

4 chose qu'il devait faire parce que cela éviterait à l'OTAN de devoir à

5 l'avenir faire un certain travail.

6 Q. Est-ce qu'il a précisé ce qu'il entendait par cela ?

7 R. Non. J'ai interprété cela comme suit, il y avait un problème, un

8 problème musulman au Kosovo, et il voulait essayer de régler le problème

9 pour que nous n'ayons pas à le régler à l'avenir.

10 Q. Qu'est-ce qu'il vous a dit ensuite ? Est-ce qu'il vous a donné des

11 détails ?

12 R. Avec son doigt, il a montré sur la carte ce qui, d'après lui, allait se

13 passer, comment allaient se dérouler les opérations militaires pour

14 véritablement déplacer l'UCK.

15 Q. Si je vous montre une carte qui a déjà été utilisée à ce sujet, est-ce

16 que cela vous rafraîchirait la mémoire et vous permettrait de nous dire

17 comment c'était prévu ?

18 R. [aucune interprétation]

19 M. HANNIS : [interprétation] Il s'agit de la pièce 2484, je vous prie.

20 Q. Il avait mentionné, d'après ce dont vous vous souvenez, à la fois l'UCK

21 et la population. Il entendait la population civile ?

22 R. Je ne vais pas paraphraser exactement, mais l'essentiel ou l'essence de

23 ce qu'ils disaient, c'était qu'ils allaient se débarrasser de l'UCK, qu'ils

24 allaient pour toujours faire sortir ou déplacer ou expulser les Albanais du

25 Kosovo.

26 Q. Bien. Est-ce que cette carte est trop petite ?

27 R. Non, cela va.

28 Q. Il s'agit d'une carte du Kosovo. Il y a une ligne verte. Est-ce que

Page 6836

1 vous pourriez expliquer aux Juges à quoi elle correspond ?

2 R. C'est une ligne verte que j'ai dessinée sur cette carte lors du procès

3 de M. Milosevic. Si j'avais un stylet, je pourrais peut-être vous indiquer.

4 Q. Vous voulez utiliser le stylet pour inscrire des choses sur l'écran, ou

5 vous voulez décrire --

6 R. Non, non, je peux décrire. Les activités des opérations étaient censées

7 commencer dans le coin supérieur droit, là où il est écrit "Serbie", mais

8 l'opération allait se dérouler dans le secteur Vucitrn et Glogovac. Il m'a

9 montré la direction qui, d'après lui, serait prise par les militaires pour

10 acculer un groupe de l'UCK. Il y avait, dans un premier temps, dans le

11 secteur de Vucitrn, vers Glogovac et Mitrovica; puis, il y avait également

12 des forces qui, à partir de Podujevo en passant par les montagnes par Remi,

13 acculeraient à nouveau l'UCK où ils leur régleraient leur compte.

14 Donc, c'était beaucoup plus complexe. Voilà, il y avait des plans,

15 des préparatifs, une logistique. Les opérations se dérouleraient là,

16 ensuite vers le bas de la carte, vers le sud, vers Prizren jusqu'à

17 Djakovica, Decani, puis se termineraient à Pec. Puis, en chemin, ils se

18 débarrasseraient, ils nettoieraient les poches de résistance tenue par

19 l'UCK.

20 Q. Il vous a décrit le plan pour ce qui est de l'UCK ?

21 R. Oui.

22 Q. Il vous a dit ce qu'il allait advenir de la population civile ?

23 R. Non. Ils allaient tout simplement être éliminés.

24 Q. Vous avez mentionné le secteur de Remi. Où cela se trouve-t-il ?

25 R. C'est à l'ouest de Podujevo, mais pas aussi loin que Mitrovica ou que

26 Vucitrn. Parce que là, vous passez dans une autre région où des personnes

27 telles que Rahman opéraient.

28 Q. Qui était Remi et qui était Rahman ?

Page 6837

1 R. Remi, c'était un commandant de l'UCK dans la région de Podujevo. C'est

2 un homme très dangereux. Il était plutôt du type silencieux. Je pense que

3 ses actions se passaient de mots. Rahman, c'était un autre commandant, un

4 commandant du cru. Il était peut-être encore plus dangereux. J'ai participé

5 à plusieurs réunions au QG de Remi en tant qu'observateur, au tout début.

6 Puis, avec Rahman, plus tard, j'ai essayé d'obtenir la libération de

7 soldats capturés de la VJ qui, de façon accidentelle, avaient conduit dans

8 son secteur et y avaient été capturés.

9 Q. Est-ce que le colonel Kotur vous a dit pourquoi il vous narrait tout

10 cela ? Parce que cela semble quand même assez surprenant de sa part.

11 R. Il m'a dit qu'il en avait assez de la situation et de tout ce qui se

12 tramait au niveau politique et que le moment était venu de passer à

13 l'action.

14 Q. Est-ce qu'il faisait toujours partie de la commission de coopération, à

15 ce moment-là ?

16 R. C'est assez étrange, d'ailleurs, parce qu'on m'avait dit lors d'une

17 réunion précédente à laquelle nous avions assisté - et le général Loncar

18 avait dit qu'il allait y avoir une nouvelle commission dirigée par le

19 général Brankovic - on m'avait dit que le colonel Kotur serait remplacé par

20 le colonel Petrovic.

21 Q. Vous vous souvenez de quand est-ce que cela s'est passé ? De façon

22 approximative, combien de temps avant votre départ ?

23 R. Plusieurs semaines avant mon départ, mais pas si longtemps que cela

24 avant mon départ.

25 Q. Est-ce que vous avez eu d'autres conversations avec le colonel Kotur

26 après ce jour-là, après le jour où il vous a montré la carte ?

27 R. Oui --

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant que vous ne posiez votre

Page 6838

1 question, Monsieur Hannis, si je peux me permettre.

2 Je dirais que dans votre déclaration, il ne me semble pas qu'il soit

3 question de population civile ou de civils, à moins que quelque chose ne

4 m'échappe --

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'il est question d'"Albanais" ? Je ne

6 m'en souviens pas. Mais je suis sûr que j'ai mentionné les deux dans ma

7 déclaration.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez un exemplaire --

9 M. HANNIS : [interprétation] Il n'est pas fait référence à cela dans cette

10 déclaration écrite, mais cela avait été indiqué dans une déclaration

11 préalable.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans Milosevic. Bien.

13 Alors dans votre déclaration, vous dites : "Il me semblait que Kotur avait

14 perdu toutes ses illusions, qu'il y avait le départ imminent de l'OSCE et

15 qu'il n'avait plus qu'une seule option, à savoir éliminer l'UCK."

16 Est-ce qu'il s'agit d'un objectif militaire légitime, d'après vous ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, l'UCK était devenue une force

18 militaire assez importante composée de plusieurs dizaines ou composée de 10

19 000 effectifs armés. Je suppose que s'ils faisaient la guerre à la VJ et à

20 la force de la police, dans le pays, je pense qu'il s'agissait d'une cible

21 légitime, oui.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

23 M. HANNIS : [interprétation]

24 Q. Vous avez témoigné à ce sujet dans l'affaire Milosevic ?

25 R. Oui.

26 Q. A ce moment-là, vous avez mentionné cette conversation avec le colonel

27 Kotur. Vous l'avez mentionnée à huis clos, me semble-t-il.

28 R. Oui.

Page 6839

1 Q. Parce qu'à ce moment-là, vous étiez préoccupé pour votre sécurité ?

2 R. Oui. Je connaissais le colonel Kotur, je le connaissais bien. J'avais

3 également rencontré son épouse, qui était interprète et qui était

4 l'assistante personnelle de M. Andjelkovic.

5 Q. Est-ce que vous vous considériez comme un ami ou comme des collègues ?

6 R. Nous avions passé plusieurs soirées au Kosovo dans des unités

7 militaires où nous avions pris notre dîner ensemble, nous avions bu

8 ensemble, nous avions parlé longuement ensemble et nous avons inspecté le

9 Kosovo ensemble, donc je dirais que nous n'étions pas amis, mais que nous

10 étions collègues.

11 Q. Vous savez que le colonel Kotur a témoigné dans l'affaire Milosevic ?

12 R. Oui. J'ai d'ailleurs lu son compte rendu d'audience.

13 Q. Est-ce que vous savez ce qu'il a dit à propos de cette conversation

14 dont vous venez de nous parler ?

15 R. Oui. Il l'a niée, il a tout nié.

16 Q. Dans votre déclaration du mois de novembre 2006, vous parlez de cela.

17 Est-ce que vous avez eu des contacts avec le colonel Kotur ou avec son

18 épouse, d'ailleurs, après votre déposition ?

19 R. J'ai eu deux contacts avec la famille Kotur. Premièrement, peu de temps

20 après que je quitte cette zone en juin 1999.

21 Q. De quoi s'agissait-il ?

22 R. J'étais à Rhinedahalen, au QG, et Mme Kotur m'a téléphoné pour me

23 demander si je pourrais l'aider à réobtenir son appartement à Pristina, qui

24 avait été confisqué et qui avait été donné à une famille albanaise.

25 D'ailleurs, j'ai essayé. J'ai essayé d'utiliser mes contacts pour faire en

26 sorte que cela soit fait; en vain, d'ailleurs.

27 Q. Ce fut le seul sujet de conversation en juin 1999 ?

28 R. Oui, oui. Elle m'a faxé des documents avec des titres de propriété,

Page 6840

1 documents que j'ai transmis au QG des Nations Unies à Pristina. Ce fut donc

2 le sujet principal de conversation. Il y a eu plusieurs envois de fax,

3 plusieurs appels téléphoniques.

4 Q. Ils portaient tous sur ce même sujet ?

5 R. Oui, tout à fait.

6 Q. La fois d'après, quand vous avez eu un contact soit avec Mme Kotur ou

7 avec M. Kotur, quand est-ce que cela s'est passé ?

8 R. Cela s'est passé après que j'aie déposé dans l'affaire Milosevic. Je

9 travaillais à l'ambassade britannique à Sopija. J'étais l'attaché

10 militaire. J'ai reçu un appel téléphonique; c'était la centrale

11 téléphonique qui me faisait savoir qu'il y avait une femme du Kosovo qui

12 voulait me parler au téléphone. Donc, je lui ai parlé. Je ne me suis pas

13 rendu compte, je ne savais pas que c'était

14 Mme Kotur.

15 Q. Elle était interprète. Elle parle donc l'anglais ?

16 R. Oui, elle a une maîtrise parfaite de l'anglais.

17 Q. Vous vous êtes exprimé en anglais avec elle ?

18 R. Oui, tout à fait.

19 Q. Sur quoi portait cette conversation ?

20 R. Je dirais que c'était un appel plutôt saugrenu, parce qu'au départ,

21 elle s'est lancée dans une véritable tirade à mon encontre, parce que

22 j'avais sali la réputation de son mari, que j'avais détruit sa carrière,

23 toute perspective d'avenir, toute perspective de service militaire, que

24 j'avais détruit leurs relations avec leurs amis à la suite de ma déposition

25 ici.

26 Q. A ce moment-là, est-ce que votre déposition était publique ou est-ce

27 qu'elle était encore sous pli scellé, d'après ce que vous savez ?

28 R. Je savais, enfin, j'espère en tout cas que le colonel Kotur ne se

Page 6841

1 trouvait pas dans les comptes rendus d'audience qui avaient été publiés sur

2 le site Web du TPIY.

3 Q. Est-ce que vous lui avez demandé comment elle avait appris cela de

4 votre déposition ?

5 R. Vous pouvez imaginer dans quel état je me trouvais. J'étais accusé

6 d'avoir détruit tout ce qui était le plus cher pour la famille Kotur.

7 Q. Comment avez-vous réagi ?

8 R. J'ai répondu par le silence. A un moment donné, elle m'a dit: "Je vous

9 pardonne. Venez déjeuner chez nous, à Nis."

10 Q. Est-ce que vous l'avez fait ?

11 R. Non.

12 Q. Pourquoi pas ?

13 R. C'est une information que j'ai transmise à mon ambassadeur ainsi qu'à

14 d'autres personnes de l'ambassade, d'ailleurs. Toutes ces personnes m'ont

15 donné le même conseil. Ils m'ont dit qu'il n'était absolument pas judicieux

16 de me rendre en Serbie pour aller déjeuner avec les Kotur. Il ne faut pas

17 oublier qu'à la suite de ma déposition, il y a eu des réactions assez

18 négatives vis-à-vis de ce que j'avais dit, vis-à-vis de ma déposition. Mon

19 collègue, l'attaché militaire à Belgrade, m'avait mis en garde. Il m'avait

20 dit qu'il ne fallait pas que je me rende à Belgrade, pour ma sécurité.

21 Q. Lorsque vous dites qu'il y a eu des réactions négatives vis-à-vis de

22 vous et de votre déposition, qui a réagi ?

23 R. Je pense qu'ils étaient menacés. Il s'agissait de personnes qui

24 pensaient que j'avais menti et que j'avais en quelque sorte trahi ou

25 souillé le nom de la VJ ou des autorités.

26 Q. Vous avez eu d'autres conversations avec Mme Kotur ?

27 R. Non, pas du tout. J'ai dit que je la rappellerais; ce que je n'ai pas

28 fait, d'ailleurs. J'ai également transmis cette information à un de mes

Page 6842

1 collègues qui travaillait à l'ambassade serbe. J'ai également soulevé cette

2 question auprès de son ambassadeur, auprès de l'ambassadeur de la Serbie.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pensez que nous

4 pourrions avoir une pause, maintenant ?

5 M. HANNIS : [interprétation] Oui, tout à fait.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons avoir une pause, Monsieur

7 Ciaglinski, une pause d'une demi-heure. Je vous demanderais de bien vouloir

8 quitter le prétoire avec M. l'Huissier, qui va vous montrer où vous pourrez

9 attendre.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

11 [Le témoin se retire]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, dans l'affaire

13 Milosevic, dans l'interrogatoire principal, est-ce que vous pouvez nous

14 donner la référence ? Quand est-ce que cela a été évoqué ?

15 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai quelques

16 problèmes à lire les petits caractères. J'ai l'impression qu'il s'agit de

17 la page 3 224, lignes 5 à 7. Il s'agissait du

18 14 avril 2002.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

20 Nous allons reprendre à 12 heures 50.

21 --- L'audience est suspendue à 12 heures 20.

22 --- L'audience est reprise à 12 heures 53.

23 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

25 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

26 Q. Mon Colonel, nous avons parlé, il y a quelques instants, des contacts

27 avec Mme Kotur. Il y a un autre élément dans votre déclaration de 2006 à

28 propos duquel je souhaiterais vous poser des questions. Il a fallu que je

Page 6843

1 revienne à l'incident de Podujevo. Vous dites, en page 2 de votre

2 déclaration de 2006, que dans votre réunion avec Loncar et d'autres ou

3 votre rencontre avec Loncar et d'autres, on vous a dit que le déploiement

4 des forces serbes était autorisé au titre de l'accord du mois d'octobre

5 parce qu'il s'agissait d'un terrain d'entraînement.

6 Est-ce que vous avez effectivement eu des entretiens quant à

7 l'endroit où devaient se situer les terrains d'entraînement ?

8 R. Oui, c'est devenu un problème à mesure que le nombre d'unités se

9 multipliaient et se déployaient en dehors de leurs garnisons et de leurs

10 casernes. Nous avons soulevé cette question, qu'est-ce qui constitue un

11 terrain d'entraînement ou une zone d'entraînement. Certaines zones telles

12 que l'aérodrome au sud-est de Podujevo avaient été utilisées pendant un

13 certain nombre d'années comme une zone de déploiement au cours des

14 campagnes d'exercice. La réponse m'a un peu surpris, parce qu'on nous a dit

15 que l'ensemble du Kosovo était un terrain d'entraînement, une zone

16 d'entraînement, et qu'on pouvait l'utiliser --

17 Q. Jusqu'au moindre mètre carré ?

18 R. Oui, c'est ce qu'on nous a dit, que le Kosovo avait toujours

19 historiquement été utilisé et continuerait d'être utilisé comme une zone

20 d'entraînement.

21 Q. Est-ce que ceci a eu un impact sur la possibilité que vous aviez de

22 procéder à vos exercices de vérification ?

23 R. Le problème était qu'avec les vérificateurs que nous avions, il était

24 difficile de suivre toutes les activités qui étaient en cours. Une fois que

25 les unités étaient déployées sur le terrain, cela rendait notre travail

26 pratiquement impossible, je dirais, notamment parce qu'une fois qu'une

27 unité est déployée dans un terrain, elle bloque l'accès de toutes les

28 pistes, toutes les routes, toutes les voies, et tout cela est scellé. Des

Page 6844

1 zones de 10 sur 20 kilomètres ou 10 sur 10 kilomètres étaient exclues

2 complètement. Il n'y avait pas d'activité. Nous n'avions aucun moyen d'y

3 pénétrer et de procéder à quelque vérification que ce soit.

4 Q. Ces zones d'entraînement qui avaient été établies à un moment donné ou

5 un autre, est-ce qu'elles incluaient des villages dans lesquels pourraient

6 vivre des civils ?

7 R. Comme je vous le disais, ces zones d'entraînement dont on nous a parlé

8 et que nous avons observées incluaient des villages, parce qu'il était

9 difficile d'en exclure les villages.

10 Q. Je vous propose de revenir à ce que vous nous avez dit tout à l'heure à

11 propos du moment où le général Loncar et le colonel Kotur ont été remplacés

12 au sein de la commission pour la coopération. Vous avez indiqué dans votre

13 déclaration écrite qu'ils ont été remplacés par le général Ilija Brankovic

14 qui a remplacé Loncar, et le colonel Petrovic qui, lui, remplaçait le

15 colonel Kotur. Est-ce que la relation entre vous-même, l'OSCE, la MVK d'une

16 part et les Serbes de l'autre, a été modifiée du fait de ce remplacement ?

17 R. Oui, elle a changé. On est passés d'une relation de travail qui pouvait

18 fonctionner et dans le cadre de laquelle il était possible de faire passer

19 des messages un petit peu délicats, où il était possible d'obtenir des

20 réactions rapides à certaines activités, on est passé de cela à une

21 situation dans laquelle le tout avait été ralenti.

22 Le général Brankovic a annoncé qu'à l'avenir, les réunions devaient

23 être annoncées avec préavis. Les points à l'ordre du jour devaient être

24 présentés 24 heures avant les rencontres ou réunions, ce qui avait pour

25 signification qu'évidemment, on ne pouvait régler aucune question en cours.

26 Au Kosovo, vous savez, les choses changeaient d'une minute à l'autre. Il

27 était impossible de deviner ce qui allait pouvoir se passer 24 heures à

28 l'avance.

Page 6845

1 Q. Est-ce qu'il a insisté pour que soit maintenue cette condition pendant

2 toute la durée de votre présence sur place?

3 R. Il a essayé d'insister. Nous avons réagi en disant que nous ne

4 respecterions pas ces nouvelles conditions. Je crois que nous avons essayé

5 une fois ou deux fois, puis finalement, il nous a été possible de revenir à

6 nos rencontres de 10 heures, telles qu'elles l'étaient par le passé. Cela a

7 été difficile. C'était loin d'être aussi utile ou dans un climat de

8 coopération aussi sain que cela avait été le cas par le passé, avec la

9 mission.

10 Q. Je vous propose maintenant de changer de sujet et d'aller de l'avant.

11 Enfin, peut-être pas de l'avant, cela dépend des dates auxquelles sont

12 intervenus les événements. Au paragraphe 8, à la

13 page 4 de votre déclaration écrite, vous faites état des événements qui se

14 sont déroulés à Racak le 15 janvier 1999. Vous dites que par la suite vous

15 avez appris que l'OTAN avait mis sur écoute des communications radio

16 indiquant que les Serbes étaient beaucoup plus associés à ce massacre

17 qu'ils ne prétendaient l'être et qu'ils avaient reçu des ordres pour

18 commettre ces actes.

19 M. SEPENUK : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Sepenuk.

21 M. SEPENUK : [interprétation] A propos de Racak, Monsieur le Président,

22 nous avons une ordonnance émanant de vous, Madame, Monsieur les Juges,

23 concernant Racak. Je ne suis pas sûr que l'on soit en train de respecter du

24 côté de M. Hannis l'esprit de cette ordonnance, puisqu'il essaie de voir

25 quelle est la responsabilité de ce qui s'est passé et à qui il incombe

26 cette responsabilité. Je trouve que ceci n'est en conformité ni avec la

27 lettre ni avec l'esprit de l'ordonnance délivrée par vous, Monsieur le

28 Président, Madame, Monsieur les Juges.

Page 6846

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais la question qu'il pose vise à

2 identifier la source de l'information. Par conséquent, il n'y a pas

3 d'infraction à quelque ordonnance préalable que ce soit.

4 M. SEPENUK : [interprétation] Oui, mais ce qui me préoccupe, Monsieur le

5 Président, c'est qu'il ait dit : cela montre que les Serbes étaient

6 beaucoup plus associés à ce massacre qu'ils ne prétendaient l'être. Je

7 trouve que l'on est en train de s'intéresser au bien-fondé de l'affaire,

8 ici. Il est très difficile de rejeter cela au titre de la lettre et de

9 l'esprit de votre ordonnance.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais le témoin n'a pas apporté de

11 réponse qui pourrait apporter, contribuer à une difficulté. On lui pose une

12 question beaucoup plus spécifique, Maître Sepenuk. Si le problème survient,

13 nous le réglerons, mais dans l'intervalle, on peut demander au témoin de

14 bien vouloir répondre à la question.

15 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ciaglinski, on vous

17 demanderait de répondre à cette question.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Les deux parties avaient sur écoute les

19 communications radio de l'une et de l'autre. Lorsque j'ai quitté le Kosovo,

20 j'étais l'agent de liaison entre l'OSCE et le quartier général de l'OTAN,

21 le général Jackson. Il m'est arrivé d'être dans la cellule de renseignement

22 de ce quartier général. Cela a certainement fait l'objet de discussion, les

23 communications radio et téléphoniques et leur mise sur écoute.

24 M. HANNIS : [interprétation]

25 Q. Vous venez de dire mises sur écoute des communications radio et

26 téléphoniques, mais dans votre déclaration écrite, vous ne parlez que de

27 communications radio. Est-ce que vous vous souvenez de ce que vous saviez à

28 l'époque ou de ce que vous avez dit à l'époque à propos de ces

Page 6847

1 informations ? Est-ce qu'elles provenaient d'écoute des conversations

2 radiophoniques ou des communications radiophoniques ou des conversations

3 téléphoniques, ou les deux ?

4 R. Je n'étais pas à même de m'assurer s'il s'agissait de communications

5 téléphoniques ou radiophoniques, mais il s'agissait de communications. Nous

6 avions des centres de communication qui couvraient les deux.

7 Q. Merci. Je vous propose de passer à la page 9 de votre déclaration

8 écrite. Au quatrième paragraphe de cette page 9, vous décrivez --

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, vous dites -- je

10 crois que ce n'est pas juste par rapport à ce que j'ai dit à Me Sepenuk il

11 y a quelques instants, parce que je n'ai pas pris compte du fait qu'il y a

12 une déclaration écrite ici, sous les yeux. Il ne s'agit pas simplement d'un

13 exercice de question et réponse.

14 La question de l'ordonnance peut avoir quelque pertinence à partir du

15 moment où il pourrait y avoir quelque implication des accusés. La Chambre

16 de première instance souhaite être intéressée par des moyens de preuve qui

17 indiquent quelle est la nature de la relation entre l'activité qui peut

18 être caractérisée comme étant un crime et la conduite ou l'exercice de

19 responsabilité des accusés de l'autre.

20 Ce qui nous intéresse, ce n'est pas, comme le savez, les détails des

21 événements de Racak au cours de ce procès. Puis-je partir du principe que

22 cette réponse, ou plutôt, cette déclaration écrite doit rester aussi peu

23 spécifique qu'elle l'est à l'heure actuelle ?

24 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

26 M. HANNIS : [interprétation] Nous avons parlé des difficultés liées au fait

27 de ne jamais évoquer le nom de Racak parce que c'est pratiquement

28 humainement impossible, mais il y a un certain nombre d'objectifs, d'autres

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1 objectifs. Est-ce qu'il y a eu des massacres ou pas --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, je ne vous empêche pas de poser

3 ces questions. Je souhaite simplement savoir si vous entendiez explorer

4 d'autres avenues de questionnement quant aux personnes qui seraient

5 associées aux ordres éventuellement intimés. Parce que là, il y a

6 pertinence dans le cadre de cette affaire contre les accusés.

7 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons un

8 témoignage provenant de témoins précédents qui ont parlé des communications

9 téléphoniques et qui concernent les accusés, s'agissant de ces événements.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, absolument.

11 M. HANNIS : [interprétation] Oui, mais il y a également un article de

12 journal qui porte sur cela et qui essaie de montrer - enfin, c'est un des

13 témoins qui nous l'a dit - qu'il y avait des sources qui fournissaient des

14 informations provenant des sources occidentales.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

16 M. HANNIS : [interprétation] J'essaie simplement d'établir le lien entre

17 les choses.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais la Chambre de première

19 instance ne vous empêchera pas d'explorer ces voies de questionnement.

20 Simplement, je peux assurer, Me Sepenuk, une fois de plus, que nous

21 n'accorderons aucun poids aux allégations spécifiques ayant trait aux

22 événements qui seraient survenus à Racak. C'est simplement là une volonté

23 d'établir un contexte dans lequel les informations pertinentes sont

24 présentées, et la chaîne de responsabilité l'est également, dont il s'agit.

25 M. HANNIS : [interprétation]

26 Q. En page 9 de votre déclaration écrite, au quatrième paragraphe, vous

27 décrivez des incidents qui sont survenus le long de la route menant de

28 Podujevo à Pristina et au cours desquels un colonel de la VJ a été abattu.

Page 6849

1 Les opérations sont également décrites, la VJ essayant de régler la

2 question de ce tireur embusqué. Vous avez décrit qu'il y avait eu des

3 tentatives professionnelles visant à pilonner le village, mais qu'il n'y

4 avait pas eu de destruction, que personne n'a été tué, qu'il n'y a

5 certainement pas eu de représailles. Est-ce que vous étiez présent ? Est-ce

6 que vous avez observé cela ?

7 R. J'avais été à Podujevo, j'étais sur le chemin du retour lorsque je suis

8 arrivé à ce barrage routier. Je ne me souviens pas très bien. Le village

9 s'appelle Lebane, Lebana, quelque chose comme cela. Il n'y avait pas de

10 police.

11 C'était une opération menée exclusivement par la VJ, par l'armée.

12 J'ai pu parcourir la route, examiner certaines des unités militaires qui

13 étaient associées à ceci. J'ai pu observer cette opération depuis le côté

14 ouest de la route avec mes jumelles. J'étais près d'un tank T-55 de la VJ

15 et je n'ai rien vu d'illégal, en quelque sorte. C'était une opération menée

16 telle qu'elle devrait l'être.

17 Q. Vous étiez dans votre véhicule MVK ?

18 R. Oui.

19 Q. Qu'est-ce qui le distinguait des autres ?

20 R. C'était un véhicule d'un orange éclatant. Nous avions décidé de partir

21 en mission, parce que les véhicules des Nations Unies étaient généralement

22 blancs et cela risquait de poser problème et confusion avec les véhicules

23 de la police serbe. Pour éviter toute confusion, on avait opté pour cette

24 couleur, et cela a semblé marcher, cette couleur un petit peu éclatante.

25 Q. Est-ce que vous avez pu voir que vous étiez en train d'examiner

26 l'opération qu'ils étaient en train de mener ?

27 R. Oui.

28 Q. Page 10 de votre déclaration écrite, vous décrivez votre retour au

Page 6850

1 Kosovo après les luttes avec l'OTAN et vous dites que le 13 juin, vous vous

2 êtes rendu à Pristina et avez pris un bureau dans lequel se trouvait le

3 MUP. Vous décrivez des documents calcinés que vous avez déterminés. Après

4 les avoir inspectés, vous vous êtes aperçu qu'il s'agissait des documents

5 d'identité, de passeports, de demandes de passeport. Est-ce que tous les

6 noms qui figuraient dans les échantillons étaient des noms albanais ?

7 R. Oui. Tous les documents que nous avons examinés, nous en avons pris

8 quelques poignées, nous avons demandé à notre interprète de nous dire de

9 quoi il s'agissait. C'était là le deuxième jour de notre présence au

10 Kosovo. Parce que le premier jour, nous étions ailleurs. Le deuxième jour,

11 nous avons décidé de reprendre un bureau de manière à mener nos opérations.

12 Il s'agissait d'un local du ministère de l'Intérieur MUP.

13 Q. Vous avez pris des photos de ces documents, n'est-ce pas ? Est-ce que

14 vous avez pris également des échantillons des documents que vous aviez pu

15 retirer de ces piles de documents calcinés ?

16 R. Lorsque nous sommes arrivés, le bâtiment était entièrement dans la

17 fumée. Cela rendait d'ailleurs la respiration difficile, mais nous avons

18 poursuivi notre travail. Pour les identifier -- ce n'était pas difficile

19 d'identifier la source de cette fumée, parce qu'il y avait toute une pile

20 de papiers dans une sorte d'alcôve dans le bâtiment. Cela faisait

21 probablement un jour ou deux jours même que ce papier brûlait. Nous l'avons

22 examiné, j'ai pris quelques photos, trois ou quatre photos de ce feu.

23 M. HANNIS : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la pièce à

24 conviction P2504 ?

25 Q. Ce tas, il était grand comment ?

26 R. Il me semble avoir dit dans ma déclaration préalable qu'il avait

27 la taille d'un camion. Evidemment, à mesure que cela brûlait, la zone était

28 entre trois murs, donc les trois côtés d'une alcôve. La pile était de 1

Page 6851

1 mètre et demi de haut et aussi large qu'un camion.

2 Q. Voyez-vous la photo qui apparaît à l'écran devant vous ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire quoi il s'agit ?

5 R. Ce n'est pas une photo du véhicule, que je souhaitais faire. En fait,

6 j'avais pris un certain nombre de photos depuis la fenêtre supérieure, je

7 crois, à partir de laquelle on avait jeté les documents. C'est ce que je

8 croyais. J'ai essayé de prendre la photo également depuis la route vers la

9 pile de papiers. Il y avait un véhicule qui était garé à cet endroit-là,

10 donc c'était difficile, mais nous avons une photo où on peut voir cette

11 pile en feu. Ce que vous voyez, c'est un petit peu la fumée qui sort

12 derrière le véhicule et un peu sur le côté.

13 Q. Pourriez-vous prendre le stylo - l'huissier vous assistera - et marquer

14 la zone que vous venez d'évoquer ?

15 R. Ici, sur le côté, la fenêtre dont je vous parlais, elle se trouverait

16 là, quelque part derrière l'arbre.

17 Q. Le témoin est en train de tracer un rectangle en haut à droite du

18 cliché.

19 R. J'étais sur le côté de la route, c'est la route principale qui mène à

20 Pristina. Le quartier général serait situé là, quelque part à droite, et

21 voilà le véhicule. Derrière, vous voyez un peu de fumée qui se dégage. Je

22 peux vous assurer que ce n'était pas les gaz d'échappement du moteur de la

23 voiture parce que le moteur n'était pas allumé.

24 Q. Où étaient les documents ?

25 R. Les documents étaient derrière, là, dans cette zone derrière le

26 véhicule.

27 Q. Très bien. Vous avez indiqué un document avec deux demi-lunes en bas.

28 Est-ce que vous voulez -- dans la partie en bas du véhicule.

Page 6852

1 R. Oui.

2 Q. Quand cette photo a-t-elle été prise ?

3 R. Le deuxième jour ou troisième de notre présence au Kosovo.

4 Q. Quand avez-vous vu brûler les documents au départ ?

5 R. La première fois que nous sommes allés dans le bâtiment.

6 Q. Est-ce que la pile brûlait encore deux jours plus tard ?

7 R. Oui, cela continuait de brûler, mais cela ne brûle pas très bien, cela

8 ne fait que couver un petit peu le feu.

9 Q. Merci.

10 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce que l'on peut voir deux autres

11 photographies ?

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction IC110,

13 Monsieur le Président, Monsieur le Juge.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

15 M. HANNIS : [interprétation]

16 Q. Je voudrais vous montrer deux photos supplémentaires.

17 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce qu'on peut montrer au témoin la pièce à

18 conviction 2506 ?

19 Q. Pourriez-vous nous dire qui apparaît sur ce cliché, de la droite vers

20 la gauche ?

21 R. Colonel Kotur, l'homme grand à gauche; puis, la femme, c'est Mme Babic,

22 mon interprète; je suis moi-même sur le cliché; ensuite, on voit un

23 Albanais du coin qui nous a donné accès à cette propriété.

24 Q. Vous, où étiez-vous ?

25 R. Je suis le troisième à partir de la gauche.

26 Q. Non, je veux dire, cette photo, où a-t-elle été prise ?

27 R. Excusez-moi, c'est une maison qui trouve à l'ouest du Kosovo, pas très

28 loin des villages de Djakovica, dans cette région-là.

Page 6853

1 Q. Quand cette photo a-t-elle été prise ?

2 R. Elle a probablement été prise, cette photo, au mois de janvier.

3 Q. Pourquoi étiez-vous à cet endroit-là ?

4 R. C'était un de mes déplacements avec le colonel Kotur qui me montrait un

5 certain nombre de choses. Nous avions une bonne relation, je vous l'avais

6 dit. J'étais probablement le seul vérificateur, outre le général DZ, qui

7 avait accès à la plupart des unités, à la plupart des zones tant que

8 j'étais accompagné du colonel Kotur. Il me montrait certaines des tâches

9 qu'il avait accomplies. Il était chef de brigade dans cette zone à un

10 moment donné, je pense. Il la connaissait bien. La raison pour laquelle il

11 m'a emmené dans cette maison, c'était pour me montrer ce qui se passait aux

12 maisons et propriétés d'Albanais qui coopéraient avec les Américains.

13 Q. Cette maison était une de ces maisons ?

14 R. Oui, c'est effectivement une des maisons dans lesquelles il y a des

15 photos, des enregistrements - je ne sais pas - où on voit Chris Hill. Je ne

16 suis pas sûr, mais certainement Holbrooke assis, les jambes croisées, en

17 train de fumer une pipe avec des représentants de l'UCK.

18 Q. Ce se serait passé quand ?

19 R. Je ne sais pas, à peu près au mois d'octobre, sans doute, ou avant le

20 mois d'octobre.

21 Q. 1998 ?

22 R. Oui.

23 M. HANNIS : [interprétation] Peut-on montrer, Monsieur le Président, au

24 témoin la pièce à conviction 2506 -- non, pardon, 2505 ?

25 Q. Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

26 R. Je crois que c'est une maison vue de l'extérieur.

27 Q. Que vous a dit le colonel Kotur, s'il vous a dit quelque chose, à

28 propos de la raison pour laquelle cette maison est dans un tel état ?

Page 6854

1 R. Il m'a dit que cette maison, suite à la rencontre, avait été identifiée

2 sur base de photographies et de connaissance du terrain. Ils étaient

3 revenus sur place et ils avaient mis le feu à la maison et l'avaient fait

4 exposer.

5 Q. Vous a-t-il dit à quel moment cela fut fait ?

6 R. Non, pas exactement, mais j'imagine que cela s'est fait peu après.

7 Q. Merci. Voilà qui conclut ceci.

8 M. HANNIS : [interprétation] Peut-on montrer à présent au témoin la pièce à

9 conviction 1966 ?

10 Q. Mon Colonel, au cours de la séance de récolement avec

11 Mme Carter et moi-même, est-ce que vous avez eu l'occasion de voir des

12 documents du type ordres militaires remontant à mars 1999 ?

13 M. HANNIS : [interprétation] M. Petrovic souhaite intervenir.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Monsieur Petrovic.

15 M. PETROVIC : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, si vous me le

16 permettez, la Défense formule une objection quant au versement au dossier

17 de ce moyen de preuve par le témoin pour une raison très simple, à savoir

18 que nous avons entendu de la bouche de M. Hannis que le témoin avait vu ce

19 document pour la première fois au cours de la séance de récolement et pour

20 son témoignage ici, et ces documents ont trait à l'époque, en tout cas

21 c'est une série de documents que, je crois, mon éminent collègue

22 souhaiterait montrer au témoin.

23 Mais ces documents remontent à une date ultérieure à son recrutement,

24 enfin, ils ont été rédigés ou créés après sa visite du Kosovo en tant que

25 membre de la MVK. Ces documents sont également le type de documents dont il

26 n'aurait pas pu avoir connaissance à l'époque où il était présent sur

27 place. Je crois que nous ne pouvons pas établir un niveau minimum de

28 fiabilité du moyen de preuve et je crois qu'il serait nécessaire que la

Page 6855

1 Chambre de première instance les verse au dossier comme moyens de preuve.

2 C'est la raison pour laquelle nous souhaiterions formuler une objection à

3 leur versement au dossier, donc de ce moyen de preuve, et de cette façon-

4 là.

5 Puis, nous estimons également que le document n'a pas été signé, n'a

6 pas été mis sous pli scellé, mais c'est là l'objet d'un tout autre débat.

7 Merci beaucoup.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

9 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame et

10 Monsieur les Juges. Ces documents, à commencer par la pièce à conviction

11 1966 et en allant jusqu'au 1969 plus 2015, sont apparemment des documents

12 provenant du commandement conjoint et qui ont trait à des opérations

13 militaires proposées à la fin du mois de mars 1999. Monsieur le Président,

14 Madame et Monsieur les Juges, ce document, pièce à conviction 2015, est un

15 document, pièce à conviction à décharge dans l'affaire Milosevic présentée

16 par M. Milosevic, 1966 à 1969, sont des documents que nous avons reçus au

17 titre du RFA. Les autorités serbes ne les ont remis. Puis, autre document,

18 1990, qui est une rencontre du personnel du MUP en février 1999, le 17

19 février, a également été obtenu par le truchement d'une RFA.

20 L'objectif, la raison pour laquelle nous souhaitons montrer au

21 témoin, c'est justement pour pouvoir examiner -- j'ai du mal à poursuivre

22 cette conversation en présence du témoin, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ciaglinski, je vous

24 demanderais de bien vouloir quitter le prétoire le temps que nous

25 discutions de ce point, et ensuite nous vous inviterons à venir nous

26 rejoindre.

27 [Le témoin se retire]

28 M. HANNIS : [interprétation] Voyez que le témoin est maintenant sorti du

Page 6856

1 prétoire. Dans sa déclaration, au début de la page 3 222 dans l'affaire

2 Milosevic, le témoin a fait une description et indique ce que le colonel

3 Kotur lui avait dit, ce qu'allait être le plan opérationnel pour expulser

4 l'UCK et quels sont les secteurs où ils allaient être opérationnels, et

5 cetera, et cetera. Je dirais que ce sont des documents que nous avons

6 reçus, il s'agit d'une pièce à conviction présentée par M. Milosevic qui

7 montre des ordres qui sont destinés à des opérations du MUP, opérations

8 conjointes MUP et militaires.

9 Le témoin, M. Ciaglinski, n'est pas ici un expert militaire. C'est le

10 genre de chose que j'aimerais présenter tout simplement pour indiquer qu'il

11 a vu ces choses. C'est le genre de conclusion que j'aimerais tirer.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donnez-moi un petit moment, je vous

13 prie.

14 [La Chambre de première instance se concerte]

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, il n'y a aucune

16 objection soulevée ou opposée à ce que vous demandiez au témoin, en lui

17 présentant donc les termes de l'ordre, en lui demandant si cela était

18 conforme au plan qu'il a décrit, mais il vous ne pouvez pas par son

19 truchement, à notre avis, présenter ces documents. Nous ne pensons pas que

20 vous puissiez lui donner ces documents, parce que si vous le faisiez, vous

21 le mettriez dans une situation où vous donneriez à ce procès un statut qui

22 n'est pas mérité pour le moment. Comme vous l'avez indiqué vous-même, il y

23 a d'autres façons pour procéder.

24 M. HANNIS : [interprétation] Oui. Je me proposais tout simplement d'offrir

25 cela de la part des Juges et de ne pas lui demander de faire de remarque.

26 Il me semble que lorsque l'on pense à la chronologie du procès, il faudrait

27 savoir quand est-ce qu'il a parlé au colonel Kotur. C'est le lien que je

28 voulais établir. Mais je comprends ce que vous me dites.

Page 6857

1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous voulez établir la logique

2 entre cela, ce que l'on trouve dans le document et la façon dont il a

3 décrit l'opération, il faudra que vous lui posiez des questions orales et

4 attendre ses réponses. Mais si vous ne pensez pas que cela soit nécessaire,

5 nous pouvons le présenter d'une autre façon.

6 M. HANNIS : [interprétation] Oui, mais il a témoigné dans l'affaire

7 Milosevic. Il a décrit ce que le colonel Kotur lui avait dit à propos de

8 ces opérations qui étaient sur le point d'avoir lieu, donc je peux, en

9 fonction de ce qu'il a dit auparavant à propos de ces documents. Ce n'est

10 pas la peine de revenir là-dessus avec lui, parce que je pourrais peut-être

11 utiliser à meilleur escient le temps qui m'est imparti.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Petrovic.

13 M. PETROVIC : [interprétation] Si vous m'y autorisez, très brièvement,

14 j'aimerais faire quelques remarques qui me semblent utiles. Contrairement à

15 ce qu'indique mon estimé confrère, lors de sa déposition dans l'affaire

16 Milosevic, le témoin avait dit que Kotur ne lui avait pas révélé de plan

17 précis. Il ne lui a pas révélé quoi que ce soit qui aurait pu se produire

18 après le départ de la mission du Kosovo, et cela se trouve à la page 3 262

19 de la déposition de ce témoin dans l'affaire Milosevic.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Petrovic, la façon dont l'on

21 interprète une déposition, c'est quelque chose sur lequel on pourra revenir

22 après la présentation des éléments à charge et à décharge. Si M. Hannis a

23 surestimé en quelque sorte cela pour le moment, je suppose qu'il saura lui-

24 même accepter les conséquences de ce genre d'action, et ce, en temps voulu.

25 J'aimerais que le témoin puisse revenir dans le prétoire, maintenant.

26 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'allons donc pas nous pencher

28 sur ces documents, Monsieur Ciaglinski.

Page 6858

1 Monsieur Hannis.

2 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, voilà ce que je me

3 proposais de faire avec ce témoin. Il y a un certain nombre de pièces à

4 conviction qui lui ont été montrées. Il en a parlé dans l'affaire Milosevic

5 lors de sa déposition, et il ce document se trouve sur notre liste de

6 pièces à conviction. Je n'ai pas l'intention de revenir là-dessus, parce

7 que vous pouvez lire vous-même le compte rendu d'audience. Je voulais tout

8 simplement indiquer aux Juges le nombre de documents et les références qui

9 sont faites, les références de pages que l'on trouve dans le compte rendu

10 d'audience, qui sont faites à ces documents.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit d'une longue

12 liste ?

13 M. HANNIS : [interprétation] Quelque 15, 16 documents pour lesquels nous

14 avons les comptes rendus.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense qu'il serait opportun de nous

16 en donner la liste maintenant.

17 M. HANNIS : [interprétation] Nous avons notre pièce à conviction P44, il

18 s'agit d'une carte du Kosovo, cela a été cité à la page 3 220 dans

19 l'affaire Milosevic, compte rendu de l'affaire Milosevic; nous avons la

20 pièce à conviction 61, pièce à conviction de Milosevic.

21 Pièce à conviction 395 sur notre liste, il s'agit de la pièce à

22 conviction de M. Milosevic 4, intercalaire 3, page 3 141, ligne 6.

23 Nous avons notre pièce à conviction 394 qui correspond à la pièce à

24 conviction 94, intercalaire 4 de M. Milosevic, là aussi à la page 3 141.

25 Puis, nous avons, pour notre pièce à conviction 677, la pièce à

26 conviction Milosevic 94, intercalaire 52, à la page 3 148.

27 Notre pièce à conviction 623 correspond à la pièce à conviction 96 de

28 Milosevic, page 3 156.

Page 6859

1 La pièce à conviction 634 correspond à la pièce 94 de M. Milosevic,

2 intercalaire 63, page 3 181.

3 Notre pièce à conviction 1325 correspond à la pièce à conviction 17

4 de Milosevic, page 3 184.

5 Notre pièce à conviction 1326 correspond à la pièce à conviction 18

6 de Milosevic, toujours à la page 3 184.

7 Notre pièce à conviction P1324 correspond à la pièce à conviction 21A

8 et 21B pour M. Milosevic, toujours à la page 3 184.

9 Nous avons notre pièce à conviction P655 qui correspond à la pièce à

10 conviction 97 pour Milosevic, page 3 217.

11 Notre pièce à conviction 2184 correspond à la pièce à conviction

12 Milosevic 61A, à la page 2 235.

13 Notre pièce à conviction P2238 correspond à la pièce à conviction 98

14 de Milosevic, page 3 252.

15 Notre pièce à conviction 641 correspond à la pièce à conviction 94 de

16 Milosevic, intercalaire 53 à la page 3 341.

17 Notre pièce P396, qui correspond à la pièce 99 pour Milosevic, page 3

18 346.

19 Notre pièce à conviction 506, qui correspond à la pièce 100 pour

20 Milosevic, page 3 348.

21 Nous souhaitons verser tous ces documents au dossier.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

23 Maître O'Sullivan.

24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Voilà quel sera l'ordre, Monsieur le

25 Président : M. Sainovic, le général Lazarevic, le général Lukic, le général

26 Pavkovic, le général Ojdanic et M. Milutinovic.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Petrovic.

28 M. PETROVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

Page 6860

1 Contre-interrogatoire par M. Petrovic :

2 Q. [interprétation] Monsieur Ciaglinski, j'aimerais vous poser quelques

3 questions. Dans un premier temps, j'aimerais vous poser une question à

4 propos du travail de la commission dont vous avez parlé hier et que vous

5 avez décrit dans vos déclarations préalables. Vous avez dit que vous avez

6 coopéré avec la commission yougoslave pour la coopération avec l'OSCE, que

7 vous avez eu des réunions fréquentes et que cette commission était l'organe

8 officiel qui permettait à la commission de l'OSCE de coopérer avec le

9 gouvernement yougoslave ou les autorités yougoslaves, si je vous ai bien

10 compris.

11 Est-ce que vous pourriez nous dire combien de réunions ont eu lieu

12 entre votre commission et la commission yougoslave, et ce, pendant la

13 période comprise entre le mois de décembre et le mois de mars, la période à

14 propos de laquelle, d'ailleurs, vous venez témoigner ?

15 R. J'aimerais juste préciser quelque chose. Bien entendu, il y avait un

16 niveau supérieur de la commission à Belgrade, le niveau de la direction. A

17 notre niveau, nous avions au moins une réunion quotidiennement pendant

18 cette période.

19 Q. Pour cette période comprise entre les mois de décembre et de mars,

20 combien de réunions ont eu lieu ? Si ces réunions étaient des réunions

21 quotidiennes, cela nous donne un total de combien ?

22 R. Vous multipliez par le nombre de jours.

23 Q. A combien de réunions avez-vous participé, vous-même ? Disons qu'il y a

24 eu une centaine de réunions, sur cette centaine de réunions, à combien de

25 réunions avez-vous vous-même personnellement assisté ?

26 R. Certainement à toutes les réunions. J'en ai peut-être raté une ou deux,

27 mais j'étais présent à la majorité de ces réunions.

28 Q. Comment est-ce que vous pourriez décrire l'objectif de ces réunions ?

Page 6861

1 Il s'agissait de réunions où vous établissiez le lien entre votre

2 commission et les autorités yougoslaves; est-ce que c'est ainsi que l'on

3 peut décrire l'objectif de ces réunions, l'ordre du jour de ces réunions ?

4 R. L'objectif consistait à transmettre des préoccupations et à présenter

5 un rapport d'activités aux commissions et à entendre également les

6 réactions, les doléances, les griefs, les rapports du côté yougoslave.

7 Q. Le but de la réunion était de procéder à un échange d'information. Vous

8 leur donniez vos renseignements, vous posiez des questions, et la partie

9 yougoslave faisait la même chose, si je vous ai bien compris ?

10 R. Oui, c'est cela, en général, oui.

11 Q. Dans la pratique, comment cela se passait-il ? Si vous aviez une

12 question, un problème à soulever, une demande, une requête, une demande

13 d'information qui était du ressort de la police, par exemple, vous posiez

14 cette question à l'officier de liaison de la police qui participait à la

15 réunion ? C'est ainsi que les choses se passaient lorsque vous aviez un

16 problème par exemple qui portait sur le travail de la police ? Parce que

17 c'est ce qui m'intéresse essentiellement.

18 R. C'est tout à fait exact. La police n'était pas toujours représentée à

19 ces réunions. Le colonel Mijatovic ne venait pas tous les jours.

20 D'ailleurs, il ne venait pas très souvent, ce qui fait que les informations

21 étaient consignées par les autres membres de la commission qui passaient

22 cette information au MUP, aux autres membres du MUP.

23 Q. Merci. J'aimerais maintenant parler de la méthodologie que vous

24 utilisiez dans le cadre de votre travail. Je ne parle pas d'événements

25 précis. Je voulais tout simplement savoir comment cela fonctionnait, et

26 cela est valable également pour les questions qui avaient trait à l'armée.

27 Si vous voulez savoir quelque chose à propos de la branche militaire, je

28 suppose que vous preniez contact avec l'officier de liaison de l'armée

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1 yougoslave; c'est exact ?

2 R. Oui, tout à fait.

3 Q. Merci. Lors de ces réunions, vous présentiez également plusieurs

4 demandes pour ce qui est du soutien logistique, par exemple, ou du

5 logement, ou encore du carburant. Vous présentiez vos demandes à la

6 personne ou aux personnes qui représentaient les différents organes publics

7 qui s'occupaient de ce genre de questions ?

8 R. Il n'y avait personne qui pouvait répondre à la question. Je suppose

9 que la commission transmettait et relayait ces informations à qui de droit.

10 Q. Je vous demanderais de bien écouter mes questions. Si vous aviez un

11 problème d'ordre logistique, vous en parliez à la personne qui était

12 présente là et qui représentait l'organe d'Etat qui s'occupait de ce genre

13 de questions afin que le problème puisse être réglé ? Bien sûr, en cas

14 d'absence de ladite personne, cela était transmis aux autres personnes à

15 qui de droit. Mais si cette personne était présente, c'est à cette personne

16 que vous vous adressiez. Si vous aviez un problème de visa, vous vous

17 adressiez au représentant de l'organe d'Etat qui s'occupait de visas; c'est

18 bien cela ?

19 R. Oui.

20 Q. Pour ce qui est de l'entrée dans le pays des membres de la commission,

21 est-ce que c'est vous qui avez réglé ce problème ? Est-ce que vous avez

22 évoqué cela lors des réunions de la commission ?

23 R. Si nous avions des problèmes à la frontière comme nous en avons eu

24 plusieurs fois, alors nous soulevions ce problème lors de la réunion. M.

25 l'ambassadeur Keller, par exemple, pouvait régler ce problème parce qu'on

26 pouvait même lui écrire. Il en parlait directement à M. Sainovic.

27 Q. J'aimerais maintenant vous poser une question à propos d'une impression

28 que vous avez retenue, pour ce qui est du pouvoir de cette commission, de

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1 ce qu'elle faisait, de ce qu'elle pouvait faire. Vous avez déposé à

2 l'affaire Milosevic, nous savons ce que vous avez dit là, à ce moment-là.

3 Est-ce que vous confirmez ce que vous avez dit, à savoir, à votre

4 connaissance, les gens qui étaient présents là, les membres de la

5 commission ainsi que d'autres personnes qui participaient ou qui

6 assistaient à ces réunions, ces personnes ne faisaient pas partie de la

7 chaîne de commandement militaire et policière, d'après ce que vous saviez ?

8 Lorsque M. le Juge Kwon vous a posé une question bien précise lors de

9 l'affaire Milosevic, vous avez dit qu'il était tout à fait exact de dire

10 que ces personnes ne faisaient pas partie de la chaîne de commandement. Il

11 s'agit du compte rendu d'audience, à la page 3 271 dans l'affaire

12 Milosevic.

13 R. Le général Loncar était un général à la retraite. Il faisait

14 partie, d'après moi, de la chaîne de commandement. Le colonel Kotur était

15 un soldat d'active, enfin, un colonel d'active. A ma connaissance, il ne

16 commandait rien, mais il connaissait extrêmement le pays et l'UCK.

17 Toutefois, le colonel Mijatovic --

18 Q. Je m'excuse de vous interrompre. Ce que je voulais savoir, c'est si ce

19 que vous avez dit dans le cadre du procès Milosevic a été établi et si vous

20 vous en tenez à ce que vous avez déjà dit lors de cette affaire, puisqu'il

21 n'y avait pas de dilemmes à l'époque.

22 Il faut savoir qu'à un moment donné, votre réponse a été imprécise, n'a pas

23 été très claire. Puis, lorsque les Juges vous ont posé des questions

24 précises, votre réponse était vague comme maintenant. Lorsque les Juges

25 vous ont posé une question précise, vous avez dit ce que j'ai cité, à

26 savoir les membres de la commission ne faisait pas partie de la chaîne de

27 commandement. Est-ce que vous pouvez confirmer cela ? Je peux vous en

28 donner lecture, si vous le souhaitez. Je peux vous donner lecture de ce que

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1 vous avez dit, si vous voulez vous rafraîchir la mémoire.

2 M. PETROVIC : [interprétation] Si les Juges le souhaitent.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense, Monsieur Ciaglinski, que

4 vous devriez terminer la réponse que vous aviez commencée.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

6 Exception faite, à l'époque, je dirais que le colonel Mijatovic - et je

7 vous l'ai déjà dit qu'il ne participait pas à toutes les réunions - le

8 colonel Mijatovic faisait partie, lui, de la chaîne de commandement. Par

9 conséquent, à l'exception du colonel Mijatovic, lui, il faisait partie de

10 la chaîne de commandement. Lorsque les autres membres de la commission sont

11 arrivés, lorsque le général Brankovic est arrivé, ils ont été là tellement

12 si peu de temps que je ne suis pas en mesure de dire s'ils faisaient partie

13 de la chaîne de commandement ou non.

14 M. PETROVIC : [interprétation]

15 Q. Je ne sais pas alors quel est votre point de vue sur la question.

16 Lorsque le Juge Kwon vous a posé cette question, et je cite : "Non pas

17 s'ils étaient. Le général Loncar et d'autres personnalités officielles

18 étaient conscients du fait de ce qui se passait. La question était : est-ce

19 qu'ils faisaient partie de la chaîne de commandement ou non ? Vous pouvez

20 répondre très facilement."

21 Vous avez répondu : "Manifestement, ils faisaient pas partie de la chaîne

22 de commandement."

23 Est-ce que vous continuez toujours à maintenir ce que vous avez dit ?

24 R. Je m'en tiens à ce que j'ai dit à propos des autres membres de la

25 commission. Réflexion faite, je dis maintenant que le colonel Mijatovic

26 faisait partie de la chaîne de commandement.

27 Q. Bien. Nous allons passer à autre chose. Est-ce que vous savez qui

28 faisait partie de la commission du gouvernement yougoslave pour la

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1 coopération avec l'OSCE ? Qui étaient les membres de cette commission ?

2 Est-ce que vous pourriez me donner autant de noms que faire se peut, ou en

3 tout cas, autant de noms dans la mesure où vous vous en souvenez ?

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est la commission à Pristina qui

5 vous intéresse ?

6 M. PETROVIC : [interprétation] Je parle de ce que le témoin appelle la

7 commission pour la coopération avec l'OSCE dans son témoignage. Je

8 considère ses comptes rendus d'audience précédents. Il a un peu modifié,

9 d'ailleurs, ce qu'il avait dit.

10 Il faut savoir que lors de son témoignage dans l'affaire Milosevic,

11 il est assez clair. Il dit qu'il n'y a qu'une commission du gouvernement

12 yougoslave pour ce qui est de la coopération avec l'OSCE. Je voudrais lui

13 poser des questions à propos de cette commission. J'aimerais savoir s'il

14 pourrait nous fournir des renseignements à ce sujet.

15 Q. Je parle de la commission yougoslave à laquelle vous faites référence

16 dans votre déclaration de l'an 2001 et dont vous avez parlé lors de vos

17 dépositions dans l'affaire Milosevic. Je réitère ma question : qui étaient

18 les membres de cette commission ?

19 R. Comme je l'ai déjà dit, je pense qu'il y avait un niveau supérieur pour

20 la commission qui avait été établi à Belgrade. Mais je n'avais rien à faire

21 avec eux. Je ne traitais pas avec eux régulièrement ni quotidiennement. Je

22 ne peux pas vous dire quels étaient les membres de cette commission. Je

23 dirais que le représentant à Belgrade était le général Bo Pelmas. Je pense

24 qu'il y avait un certain nombre de personnes de haut niveau pour les

25 Serbes.

26 Je vous ai déjà dit qui faisait partie de cette commission au Kosovo

27 : le général Loncar, le général Mijatovic, le colonel Kotur. Il y avait un

28 certain nombre de personnes des ministères qui allaient et venaient, dont

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1 je ne suis pas en mesure de me souvenir des noms. Il y en avait un, c'était

2 un civil, il s'appelait Petric, je pense, ou Petrovic.

3 Q. Ce que j'aimerais savoir, c'est d'après ce que j'ai cru comprendre

4 lorsque j'ai analysé votre déposition, c'est, disais-je, pourquoi vous

5 n'avez jamais mentionné l'existence de ces deux niveaux, le niveau

6 supérieur et le niveau inférieur de la commission. Est-il vrai que vous

7 n'avez jamais mentionné cela ? C'est la première fois que nous en entendons

8 parler au sein de ce prétoire.

9 R. Ecoutez, je suis un tant soit peu intrigué, parce que moi, je parle de

10 ce que je sais et je pense que d'autres ont parlé de ce qu'ils savaient. Je

11 sais que cela a été abordé au début de leurs dépositions.

12 Q. Monsieur Ciaglinski, je ne vous pose pas de questions à propos de ce

13 que d'aucuns ont dit, je vous pose des questions à propos de ce que vous

14 avez dit. Vous n'avez jamais mentionné de niveaux différents, de

15 compositions différentes pour la commission yougoslave chargée de la

16 coopération avec l'OSCE. Est-il exact de dire que c'est la première fois

17 que vous en parlez aujourd'hui, alors que vous avez eu très souvent la

18 possibilité d'en parler ? Oui ou non ?

19 R. A mon niveau, la commission était la commission de Pristina. Pour

20 répondre à l'autre partie de votre question, personne ne m'a posé cette

21 question, donc ce n'est plus une réponse que j'ai apportée.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Petrovic, il va falloir que

23 nous interrompions l'audience, si cela ne vous pose pas trop de problèmes.

24 M. PETROVIC : [interprétation] Je vous remercie.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous sommes arrivés au terme de votre

26 déposition pour aujourd'hui, Monsieur Ciaglinski. Il faudra que vous

27 repreniez lundi. Lundi, nous allons siéger l'après-midi à 14 heures 15,

28 donc il faudra que vous reveniez pour commencer à 14 heures 15. Il est

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1 absolument essentiel que d'ici à lundi après-midi, vous ne parliez

2 absolument pas de votre déposition, de ce que vous avez déjà dit ou de ce

3 que vous allez dire. Vous pouvez parler de toute autre chose, bien entendu,

4 mais pas de votre déposition. Je vous demanderais de bien vouloir suivre M.

5 l'Huissier. Nous nous retrouverons lundi après-midi.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

7 [Le témoin se retire]

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

9 M. HANNIS : [interprétation] Je voudrais vous mettre en garde. Il va

10 y avoir peut-être un changement de programme. A la suite d'une conversation

11 que j'ai eue avec les conseils de la Défense, ils ont estimé le temps de

12 parole dont ils auront besoin pour contre-interroger ce témoin. Il se peut

13 que nous soyons obligés de modifier l'ordre de comparution des témoins.

14 Nous vous informerons, nous informerons le Greffier d'audience, et cela,

15 pour que vous ne prépariez pas trop à l'avance des documents que nous

16 étudierons beaucoup plus tard.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

18 Nous nous retrouverons lundi.

19 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le

20 lundi 20 novembre 2006, à 14 heures 15.

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