Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 6 mars 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [L'accusé Milutinovic est absent]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Mme le Juge

7 Kamenova a rencontré le même problème que celui à cause duquel elle était

8 absente vendredi après-midi, mais nous espérons qu'elle va être en mesure

9 de se joindre à nous plus tard au cours de la matinée. En attendant, nous

10 avons décidé qu'il en allait de l'intérêt de la justice de continuer nos

11 travaux en son absence, et nous allons voir qu'elle sera notre position

12 dans le cas où elle devrait être absente plus longtemps que ce que nous

13 avons prévu.

14 Votre prochain témoin, Madame Kravetz.

15 Mme KRAVETZ : [interprétation] Notre prochain témoin, Monsieur le

16 Président, c'est Jose-Pablo Baraybar.

17 M. VISNJIC : [interprétation] Apparemment, il y a une erreur au niveau du

18 compte rendu d'audience. Le général Ojdanic est présent dans ce prétoire.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

20 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Baraybar.

22 Pourriez-vous, s'il vous plaît, prononcer la déclaration solennelle

23 vous engageant de dire la vérité en lisant le document qui vous est

24 présenté.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

27 LE TÉMOIN: JOSE-PABLO BARAYBAR [Assermenté]

28 [Le témoin répond par l'interprète]

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

2 Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

3 Interrogatoire principal par Mme Kravetz :

4 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Pourriez-vous vous présenter, s'il

5 vous plaît ?

6 R. Je m'appelle Jose-Pablo Baraybar, doctorum [phon].

7 Q. Merci. Où travaillez-vous à présent ?

8 R. A présent, je travaille au niveau de la MINUK, à savoir la Mission des

9 Nations Unies au Kosovo, le bureau pour les personnes disparues et la

10 médecine légale, le département de la justice.

11 Q. Depuis quand travaillez-vous à cet endroit ?

12 R. Depuis le mois de juin 2002.

13 Q. Vous êtes un anthropologue spécialisé dans la médecine légale ?

14 R. Oui, c'est exact.

15 Q. Pourriez-vous nous dire ce que vous avez fait comme études ?

16 R. J'ai eu, au Pérou, une licence d'archéologie. Ensuite, j'ai fait une

17 maîtrise des sciences à l'Université de Londres où j'ai étudié aussi bien

18 la bioarchéologie que la physioarchéologie et la médecine légale. Ensuite,

19 j'ai passé une année au niveau d'un programme de doctorat à l'université de

20 Champaigne-Urbana, et depuis peu de temps j'ai commencé à étudier au niveau

21 de doctorat à l'Université de Strasbourg en France.

22 Q. Avant de faire ce que vous faites à présent, qu'est-ce que vous avez

23 fait avant ?

24 R. Pendant un certain nombre d'années, j'ai travaillé pour ce Tribunal en

25 tant qu'anthropologue spécialisé dans la médecine légale. Ensuite, j'ai

26 travaillé aussi pour le Tribunal du Rwanda et j'ai travaillé aussi en Haïti

27 dans le cadre de la Mission des Nations Unies dans le même domaine. J'ai

28 été aussi membre d'un certain nombre de commissions où on a demandé mon

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1 expertise dans d'autres pays, à savoir l'Afrique, l'Amérique du sud, et

2 cetera.

3 Q. Votre curriculum vitae est joint. Il s'agit de la pièce 2794, où l'on

4 trouve encore davantage de détails concernant votre curriculum, votre

5 parcours professionnel, et cetera, et ce document parle pour soi.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

7 Mme KRAVETZ : [interprétation]

8 Q. Vous avez aussi fourni un document au bureau du Procureur au mois

9 d'octobre 2006, c'était votre CV. Mais est-ce que vous devriez ajouter quoi

10 que ce soit par rapport à cela ?

11 R. Je dirais que mon bureau au Kosovo a obtenu une médaille des Nations

12 Unies pour le meilleur projet sur le terrain des Nations Unies. Il y a

13 aussi quelques publications qu'à l'époque je n'avais pas encore publiées,

14 qui ne sont pas dans mon CV de l'époque.

15 Q. Cette médaille, cette récompense des Nations Unies, UN 21, elle est

16 donnée aux membres des Nations Unies pour ce qu'ils ont obtenu exécutant de

17 leurs missions ?

18 R. C'est exact.

19 Q. Monsieur, vous avez fourni une déclaration au bureau du Procureur vers

20 la fin du mois d'octobre, novembre 2006, par rapport à votre mandat et la

21 structure de votre mission.

22 R. C'est exact.

23 Q. Est-ce que vous avez relu votre déclaration ?

24 R. Oui.

25 Q. Après avoir fait cela, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ce

26 qui figure dans votre déclaration correspond à votre meilleure

27 connaissance ?

28 R. Oui.

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1 Mme KRAVETZ : [interprétation] Il s'agit de la pièce 2794, et je souhaite

2 la présenter plus loin.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

4 Mme KRAVETZ : [interprétation]

5 Q. Est-ce que vous avez aussi préparé un rapport pour le bureau du

6 Procureur au mois d'octobre l'année dernière concernant ce que vous avez

7 trouvé au niveau de la médecine légale, au niveau de votre mission par

8 rapport aux restes humains trouvés dans les fosses communes sur les sites

9 en Serbie et après leur transport au Kosovo ?

10 R. Oui.

11 Mme KRAVETZ : [interprétation] Dans l'appendice C de la pièce 2794.

12 Q. Au mois de novembre, est-ce que vous avez préparé un corrigendum, un

13 corrigé de cela ?

14 R. Oui.

15 Q. On me demande de ralentir puisqu'on parle la même langue.

16 Est-ce que vous avez, au mois de novembre 2006, fourni un corrigé, une

17 addition, un addendum de ce rapport, notamment la page 11 de votre

18 rapport ?

19 R. Oui.

20 Mme KRAVETZ : [interprétation] Il s'agit de la pièce P2794, et je demande

21 que cette pièce soit versée au dossier.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agit donc d'un point, à savoir la

23 page 11 ?

24 Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui, effectivement, c'est la page 11.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 Mme KRAVETZ : [interprétation] C'est juste la correction d'un graphe qui

27 est là.

28 Q. Maintenant, je voudrais me concentrer sur votre rapport du mois

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1 d'octobre 2006. Ceci concerne trois sites de fosses communes trouvés en

2 Serbie concernant Batajnica, Petrovo Selo et le lac Perucac.

3 R. C'est exact.

4 Q. D'après le rapport et d'après ce que vous avez écrit dans votre

5 déclaration préalable, avant que votre bureau ne soit créé en 2002, les

6 équipes de la médecine légale en Serbie ont procédé aux exhumations sur les

7 sites d'exhumation où on a trouvé les restes humains dans les fosses

8 communes.

9 R. C'est exact.

10 Q. A quel moment vous avez transféré les restes humains trouvés dans les

11 fosses communes au Kosovo ?

12 R. Entre novembre 2002 et juillet de l'année dernière.

13 Q. Il s'est terminé au mois de juillet, le transfert ?

14 R. C'est exact.

15 Q. D'après ce que j'ai compris, ce transfert a été fait sur la base des

16 analyses ADN des personnes portées disparues ?

17 R. Parlant de façon générale, oui, même si le premier groupe de restes

18 humains qui a été transféré au mois de novembre 2002 à l'époque nous

19 n'avions pas encore de résultats d'ADN. Ces résultats ne sont venus que

20 plus tard.

21 Q. On me rappelle à nouveau que je dois faire une pause entre les

22 questions et les réponses puisque nous parlons la même langue. Donc je vais

23 reprendre la question. Vous avez dit que ce transfert a commencé au mois de

24 novembre 2002. Est-ce que c'est à ce moment-là que l'OMPF a pris en charge

25 le reste ?

26 R. Oui. Mais je voudrais clarifier cela. Le OMPF a été ouvert au

27 mois de juin 2002. Au mois de novembre 2002, nous avons organisé le premier

28 transfert de restes de Serbie. A l'époque, il n'y avait pas de résultats

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1 ADN de disponible pour les restes que nous avons transférés. Après ces

2 transferts, les autres transferts qui ont suivi ont été accompagnés des

3 résultats ADN qui avaient été faits avant le transfert.

4 Q. Très bien.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour que ceci soit plus complet,

6 est-ce que vous dites que pour le transfert qui a eu lieu au mois de

7 novembre 2002, vous avez reçu les résultats ADN par la suite ou est-ce que

8 vous ne les avez jamais reçus ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous les avons reçus par la suite après les

10 transferts des corps.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis si vous me le permettez, Monsieur le

13 Président, je voudrais vous expliquer plus en détail ce que je viens de

14 vous dire, parce qu'après, vous n'allez pas comprendre si je ne le fais

15 pas. Donc le transfert du mois de novembre a été organisé après que l'on a

16 présenté les photographies des vêtements aux familles, qui ont identifié

17 les vêtements comme étant des vêtements appartenant aux membres de leurs

18 familles, sur la base de ces informations on a fait les premières

19 identifications, ensuite le transfert des restes a été organisé.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

21 Mme KRAVETZ : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.

22 Q. Pourriez-vous expliquer dans votre déclaration comment la remise de

23 restes s'est faite en pratique. Je ne veux pas en parler à présent parce

24 que j'ai l'impression que dans votre déclaration c'est bien expliqué. Mais

25 est-ce que vous pourriez nous expliquer quel était vraiment l'objectif, le

26 but des inspections au niveau de la médecine légale faite par l'OMPF qui

27 ont été effectuées sur les restes humains transférés de la Serbie au

28 Kosovo ?

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1 R. Une inspection médico-légale, il s'agit en réalité d'une vérification.

2 Il s'agit de vérifier ce que nous avons reçu. Donc nous avons, par exemple,

3 reçu des sacs, des corps physiquement au niveau de l'entrée numéro 3, et

4 cela étant la frontière administrative entre le Kosovo et la Serbie, donc

5 nous ne pouvions pas faire un inventaire de ce qui se trouvait dans le sac.

6 Nous avons les familles, les médias, les autorités qui sont présentes.

7 C'est très compliqué. Vous ne pouvez pas le faire sur-le-champ, sur place.

8 Donc cet inventaire, si vous voulez, est fait à partir du moment où ces

9 sacs arrivent dans la morgue et à partir du moment où nous devenons

10 responsables de la filière de conservation de ces restes. Nous avons d'une

11 part les rapports des autorités serbes qui nous disent ce qu'ils ont trouvé

12 et ce qui se trouverait d'après eux dans les sacs, et il s'agit de

13 corroborer cette information par notre propre inspection. L'inspection se

14 fait par étapes, et il s'agit d'une inspection médico-légale.

15 Q. Vous dites que cette inspection médico-légale s'est faite dans la

16 morgue. Où se trouve la morgue ?

17 R. La morgue se trouvait dans le village d'Orahovac/Rahovec, c'est dans la

18 partie occidentale du Kosovo. C'est l'endroit où le Tribunal pénal

19 international a mené à bien ses propres opérations au cours de l'an 2000. A

20 présent, ces locaux se trouvent à Pristina dans un bâtiment nouveau.

21 Q. Vous avez dit que c'était divisé de cette sorte-là mais que par la

22 suite c'était devenu autre chose. Est-ce que vous pourriez nous expliquer

23 ce que vous vouliez dire par là ?

24 R. J'ai voulu vous dire que l'objectif de tout cela c'était d'essayer de

25 corroborer -- au fait, de vérifier, si vous voulez, le contenu du sac. Dès

26 le début, il est devenu clair qu'il existait des contradictions entre ce

27 qui se trouvait effectivement dans le sac et ce qui était écrit dans le

28 rapport. Par exemple, il est arrivé que vous trouviez de multiples parties

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1 de corps qui appartenaient à plus d'un individu, d'un seul individu dans le

2 sac, alors même que le rapport disait que les restes se trouvant dans le

3 sac appartenait à une seule personne avec le nom d'une personne. Dans cette

4 situation, vous ne pouviez pas tout simplement remettre les restes à la

5 famille, en sachant que dans le sac se trouvent les restes de plus d'une

6 personne, et vous ne savez, de surcroît, pas qui est la deuxième personne;

7 donc c'était un cas de figure.

8 Le deuxième cas de figure qui s'est présenté c'est que parfois il y avait

9 des blessures qui étaient présentées dans les restes humains se trouvant

10 dans le sac, alors que ces blessures, ces mêmes blessures n'étaient pas du

11 tout répertoriées dans le rapport ou n'étaient même pas mentionnées dans

12 les rapports, et si elles étaient mentionnées, on les attribuait à

13 différents mécanismes. Par exemple, pour vous donner un exemple pratique,

14 une blessure infligée par arme à feu était attribuée à une blessure ou

15 pouvait être attribuée à une blessure attribuée à un objet contendant.

16 Le troisième cas de figure c'est quand vous aviez des blessures

17 répertoriées, mais que ces blessures n'étaient pas utilisées pour essayer

18 d'établir la cause du décès probable. Donc vous aviez cette inspection qui

19 devenait une deuxième autopsie en quelque sorte, une autopsie de

20 vérification et qui était beaucoup plus approfondie. Il s'agissait de

21 vérifier de façon détaillée le contenu de ces sacs.

22 Q. Quand vous dites qu'il y avait des contradictions entre ce qui était

23 dans le sac et le rapport, vous parlez des rapports préparés par les

24 autorités serbes ?

25 R. Oui, c'est exact. C'est la documentation que nous recevions parmi

26 d'autres documents.

27 Q. Pourriez-vous nous dire qui participe souvent à de telles inspections

28 légistes ?

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1 R. Dans notre équipe, il y avait une équipe de médecins pathologistes,

2 puis des anthropologues, des officiers de police. Souvent, on trouvait des

3 balles aussi dans les restes, puis d'autres objets qui auraient pu être

4 laissés par erreur ou oubliés, par exemple, les couteaux qui ont servi à

5 procéder à des autopsies, de l'équipement de chirurgie, et cetera.

6 Q. Est-ce que vous-même vous avez procédé à des inspections ? Est-ce que

7 vous avez participé à cela ?

8 R. Oui, j'ai participé à un grand nombre de telles inspections. J'avais un

9 rôle d'inspection, je supervisais le travail des autres.

10 Q. A la fin de ces inspections, est-ce qu'on fait un rapport sur ce qui a

11 été trouvé ?

12 R. Oui.

13 Q. Une fois qu'on a préparé ce rapport, est-ce que l'OMPF donne un

14 certificat de décès concernant les individus dont les restes ont été

15 inspectés ?

16 R. C'est exact.

17 Q. La cause de la mort qui est mentionnée dans le certificat, est-ce que

18 c'était la cause qui a été trouvée pendant le rapport d'inspection

19 légiste ?

20 R. Oui.

21 Q. Pendant cette inspection ?

22 R. Oui.

23 Q. Les restes que l'on retournait de Serbie de ces fosses communes, est-ce

24 qu'il s'agissait de squelettes, c'est-à-dire avec très peu de tissu autour

25 des os ?

26 R. Pas tous. Je dirais qu'il s'agissait des restes qui ont été transférés

27 de Batajnica, Perucac ou Petrovo Selo. Effectivement, il ne s'agissait

28 pratiquement que de squelettes. Mais à Petrovo Selo, on peut dire que les

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1 corps ressemblaient pas mal à un corps humain, à un corps, à un cadavre,

2 donc effectivement il y avait de grosses différentes entre ces deux sites.

3 Q. Est-ce le rôle normalement de l'anthropologue légiste que d'établir la

4 cause de la mort pendant cette inspection ?

5 R. Oui.

6 Q. Au cas où il y avait surtout des squelettes au niveau des restes, est-

7 ce que cet anthropologue légiste doit jouer un rôle pour établir la cause

8 de la mort sur la base de l'examen de restes ?

9 R. Oui, il a un rôle important dans les deux situations, par exemple, pour

10 reconstruire les os cassés, mais aussi pour établir les mécanismes qui ont

11 fait que ces os ont été cassés, puisqu'il travaille surtout avec les os et

12 les os cassés; c'est son travail. A partir du moment où vous avez un os

13 cassé, il y a une raison pour cela. Ensuite, il discute avec le

14 pathologiste, le médecin pathologiste qui a aussi son mot à dire quant à la

15 cause de la mort.

16 Q. Quelle était la cause de la mort la plus souvent établie lors de telles

17 inspections ?

18 R. Du point de vue de l'OMPF, il était de notre devoir d'utiliser tout

19 indice trouvé, toute pièce à conviction, tout élément qui pouvait nous

20 aider à établir la cause de la mort. Autrement dit, si au cours d'une

21 autopsie faite avec un pathologiste vous avez un squelette qui n'a pas d'os

22 brisés, pas de blessures visibles, dans ce cas-là la cause du décès ne

23 serait pas établie. Autrement dit, on va dire qu'il n'avait pas été

24 possible de l'établir sur ce qui se trouve sur la table d'autopsie. Mais si

25 vous avez le même squelette avec un certain nombre de trous dans la tête

26 qui proviennent de trous de balles, de blessures par balles, là, si vous

27 voulez, on va en arriver à la conclusion que la personne a été tuée par un

28 tir d'une arme à feu. La cause de la mort va être établie par le

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1 pathologiste, et on va dire qu'il s'agit de plusieurs blessures à la tête.

2 Q. Comment vous pouvez faire une différence entre, par exemple, le

3 traumatisme provoqué par des armes à feu et d'autres traumatismes ?

4 R. Je vais être le plus simple possible. Il y a de grosses différences

5 entre les blessures infligées par les armes à feu et par les objets autre

6 qu'armes à feu, parce que les traumatismes infligés par d'autres objets,

7 par une autre force, ont un impact sur une grande surface, une importante

8 surface de l'os, c'est-à-dire que la force agit sur beaucoup de surface ou

9 sur une surface assez importante. Bon, cela peut être différent, par

10 exemple, en cas d'accident de voiture, quand le corps a été accéléré et il

11 y a eu un impact rapide par rapport à la voiture sur une grande --

12 Si vous voulez, la rapidité de tels objets, la force animant ces

13 objets va être moins grande. Par exemple, si vous avez quelqu'un qui est

14 frappé à la tête avec un marteau, la rapidité sera de quelques mètres par

15 seconde, donc il s'agit d'une petite rapidité, la vélocité n'est pas

16 importante, alors qu'une blessure par balle est beaucoup plus rapide. Vous

17 avez plusieurs centaines de mètres par seconde de transfert d'énergie, donc

18 la zone va être toute petite et plus concentrée, la blessure va être plus

19 concentrée. Si quelqu'un a été tué à la tête par une balle ou a été frappé

20 avec un marteau, vous avez des différences de trous provoqués au niveau de

21 la tête en fonction de la dispersion de l'énergie qui va être différente

22 par rapport aux deux cas de figure.

23 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

24 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

25 Mme KRAVETZ : [interprétation]

26 Q. Comment pouvez-vous faire la distinction en examinant ces restes entre

27 les fractures qui ont été causées avant ou après la mort ?

28 R. La première différence, c'est d'abord de faire la différence entre les

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1 fractures causées par une vélocité élevée et une vélocité pas élevée. Cela,

2 dépendant de la localisation de ces fractures, vous pouvez établir si ces

3 fractures ont été causées avant la mort ou après la mort. Par exemple, les

4 fractures des os longs transversales, cela veut dire de plusieurs membres,

5 nous en avons trouvé au cours de notre travail pendant des années pour, par

6 exemple, Srebrenica, où de nombreux corps ont été placés dans les fosses

7 communes et ensuite enlevés de ces fosses pour être placés sur les sites

8 secondaires. Ces corps ont été endommagés grandement par les excavations.

9 C'est un exemple classique d'une blessure post-mortem, quand les os longs

10 ont été fracturés de façon transversale. C'est complètement

11 caractéristique.

12 Ensuite, vous avez une déformation classique quand le corps a été endommagé

13 par des déformations classiques, comme on appelle, puisque les os se

14 déforment aussi, et c'est comme une charge lente, par exemple ceci peut

15 casser plusieurs os à la fois, et ceci, en petits morceaux, et c'est

16 quelque chose que vous voyez avec une blessure par balle avec un trou.

17 Q. Bien. Merci.

18 Mme KRAVETZ : [interprétation] Pourrions-nous voir la pièce 2795 ?

19 Q. C'est la correction que vous avez apportée à la page 11 de votre

20 rapport. Pourriez-vous nous expliquer de quoi il s'agit ?

21 R. Je peux chercher les termes où je dis que ce graphique nous montre les

22 cas qui nous ont été remis par l'OMPF et qui ont été analysés par l'OMPF et

23 qui avaient été précédemment analysés par les autorités serbes. Nous avons

24 indiqué au niveau de ce graphique ou, plutôt, moi-même j'ai indiqué au

25 niveau de ce graphique le nombre de cas pour lesquels la cause du décès a

26 été clairement affirmée et les cas où il était difficile de dire quelle

27 était la cause du décès. Pour ce qui est de la première colonne 744 qui se

28 trouve à gauche, c'est le nombre de cas étudiés par l'OMPF lorsque nous

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1 avons reçu ces données, et nous avons pu déterminer la cause du décès dans

2 508 cas, ensuite dans 238 cas, nous n'avons pas pu déterminer la cause du

3 décès. Le même calcul s'applique aux autres sites.

4 Q. Simplement pour que les choses soient bien claires, nous avons

5 l'abréviation BA, ce qui correspond à Batajnica ?

6 R. C'est exact.

7 Q. Le P, lac Perucac ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Et P pour Petrovo Selo ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Dans votre rapport, à la page 10, vous nous donnez un résumé des

12 conclusions de l'équipe médico-légale serbe des exhumations. Comment les

13 conclusions de l'OMPF peuvent-elles être comparées aux conclusions

14 précédentes des équipes médico-légales serbes ?

15 R. Lorsque nous avons reçu les restes humains de Batajnica, nous avons

16 remarqué que pour les 744 cas dont nous faisons état dans notre rapport à

17 la page 11, dans le corrigendum à la page 11, les raisons du décès n'ont

18 pas pu être déterminées dans ces 744 cas à Batajnica. La même chose

19 s'applique au site D. Néanmoins, à Petrovo Selo, les causes du décès ont pu

20 être déterminées dans 32 cas. Ce que vous voyez dans le corrigendum à la

21 page 11 correspond à la différence entre la détermination des causes du

22 décès après l'enquête médico-légale. Dans 744 cas d'autopsies, nous n'avons

23 pas pu déterminer la cause du décès, mais dans les 506 autres cas, nous

24 avons pu déterminer les causes du décès. Je pourrais dire la même chose

25 pour les autres sites.

26 Mme KRAVETZ : [interprétation] Pourrions-nous nous reporter à la page 34 de

27 la pièce P2794, s'il vous plaît, dans le système électronique.

28 Q. Ceci se trouve à la page 11 de votre rapport. Dans votre rapport, vous

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1 nous donnez trois exemples. Vous comparez les conclusions apportées par

2 l'équipe serbe et les conclusions auxquelles est arrivée l'équipe de

3 l'OMPF. Je souhaite me pencher sur ce premier cas qui se trouve à la page

4 Ba-12, à la page 11 et à la page 34 de cette pièce dans le système

5 électronique. Est-ce que vous y êtes ?

6 R. Oui.

7 Q. Veuillez m'accorder quelques instants. Je ne l'ai pas encore affiché à

8 l'écran.

9 Mme KRAVETZ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions regarder le bas de

10 la page, s'il vous plaît ?

11 Q. Ici, dans le numéro de code Ba-12, il y a un numéro de code qui a été

12 donné par l'équipe médico-légale serbe, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Vous avez gardé le même code lorsque vous avez préparé vos rapports

15 médico-légaux et, plus tard, vous avez apposé les mêmes numéros de code sur

16 les certificats de décès, c'est exact, pour chaque personne ?

17 R. Oui.

18 Q. Pourriez-vous expliquer, à la lumière de ces photographies que nous

19 avons à l'écran, comment l'équipe médico-légale a pu établir les raisons de

20 la mort en ce qui concerne cette personne en question ?

21 R. Certainement. Ce que nous voyons à la page 11, en bas de ces

22 photographies, il y a trois différents angles de vue d'un crâne, c'est un

23 crâne humain. On peut voir une cavité importante en haut du crâne, une

24 certaine érosion de l'os et l'aspect noirci de l'os qui se trouve tout

25 autour. Ceci a été provoqué par le feu, et non pas par la balle d'un fusil.

26 Il s'agit de l'os qui a été calciné, qui a brûlé. Ce sont les restes ici

27 que nous voyons. Veuillez bien passer à la page suivante, à la page 12 de

28 mon rapport.

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1 Sur la droite, il y a un défaut, une élongation, vous voyez un trou,

2 si vous voulez utiliser un terme de vulgarisation. Ici, cela ressemble à

3 une blessure qui correspond à un trou de serrure, autrement dit provoqué

4 par une balle qui touche le crâne sous un angle tangentiel. Ceci comporte

5 deux éléments. Il y a le point d'entrée et le point de sortie. Après avoir

6 examiné cette photographie, je suis légèrement en désaccord ici avec

7 l'anthropologue qui s'est penché sur ce cas pour ce qui est de la

8 provenance du tir. Dans le rapport, il est dit que c'est du haut vers le

9 bas; néanmoins, en regardant la photographie, c'est effectivement le cas,

10 mais ce serait du bas vers le haut si on regarde la personne. Comment puis-

11 je vous l'indiquer ?

12 Q. Vous avez un stylo, ici.

13 Mme KRAVETZ : [interprétation] Si M. l'Huissier veut bien venir aider le

14 témoin.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] La technologie est toujours utile.

16 Si vous regardez cet élément-ci, ce cercle sur la gauche, il y a un

17 pourtour en forme de cercle; ce serait l'entrée du défaut. Dans cette zone-

18 ci, vous constatez que les bords sont quelque peu biseautés; ce serait

19 l'élément indiquant le point de sortie. Cette fracture ici correspondrait

20 au point d'entrée, et cette fracture ici et là, ce qui correspond à un "y"

21 renversé, correspondrait à la fracture de sortie qui correspond à ces bords

22 biseautés. C'est une blessure par balle à la tête sous un angle tangentiel,

23 également connue sous le nom de blessure en forme de trou de serrure, ce

24 qui aurait provoqué la mort de la personne en question, comme cela a été

25 déterminé par le pathologiste en question.

26 Q. Si je vous ai bien compris, ce type de fracture est assez typique d'une

27 blessure par balle ?

28 R. C'est exact.

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1 Mme KRAVETZ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir un numéro IC

2 pour cette page, s'il vous plaît ?

3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le numéro IC127, Mesdames et

4 Messieurs les Juges.

5 Mme KRAVETZ : [interprétation] Veuillez passer à la page précédente, s'il

6 vous plaît.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de poursuivre, je souhaite

8 indiquer ceci. La première annotation faite par le témoin, le premier

9 cercle est celui du haut, ensuite l'annotation en forme de fer à cheval a

10 été faite par la suite. Il a indiqué le haut de la fracture, ensuite il a

11 dessiné une ligne allant vers la gauche et pour finir le trait sur la

12 droite. C'est l'ordre dans lequel le témoin a annoté cette photographie.

13 Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

14 Est-ce que nous pouvons maintenant repasser à la page 34 de cette pièce,

15 s'il vous plaît ?

16 Q. Lorsque vous avez fait référence à cette photographie, vous avez

17 indiqué qu'il y avait des signes indiquant que ces derniers avaient été

18 exposés au feu. Est-ce que c'est ce que vous voulez dire en regardant les

19 crânes qui sont ici ?

20 R. Oui, tout à fait. Je vais dessiner un cercle, ici, ici et là, et celui-

21 ci.

22 Mme KRAVETZ : [interprétation] Pour la précision du compte rendu, j'indique

23 que le témoin a annoté et dessiné un cercle au niveau de la photographie

24 qui se trouve en bas en gauche, ensuite la photographie du milieu et la

25 photographie de droite.

26 Q. Avez-vous vu, hormis ce cas-ci, d'autres restes humains de Batajnica

27 qui semblaient avoir été exposés au feu ?

28 R. Oui, il y en avait un certain nombre. Je ne peux pas vous dire combien.

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1 J'en ai vu un certain nombre. J'ai vu un certain nombre de restes humains

2 en partie brûlés, en partie calcinés et qui en montraient les signes.

3 Q. Merci beaucoup.

4 Mme KRAVETZ : [interprétation] Je pense maintenant passer -- je pense qu'il

5 faut un numéro IC pour ce document.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le numéro IC128, Mesdames et

7 Messieurs les Juges.

8 Mme KRAVETZ : [interprétation] Veuillez passer maintenant à la page 38 de

9 cette pièce, à la page 15 du rapport.

10 Q. Sur cette page, vous nous avez montré un graphique. Vous nous avez

11 indiqué la répartition des blessures par section, région anatomique. Je ne

12 sais pas si c'est déjà à l'écran.

13 Pourriez-vous brièvement nous décrire ce que l'on voit sur ce graphique et

14 quelles conclusions peuvent être tirées, pour autant qu'il y ait des

15 conclusions qui peuvent être tirées de ce type de configuration ?

16 R. Comme vous pouvez le constater ici, nous avons débattu du nombre

17 minimum de blessures par balle, ce qui signifie qu'on n'a pas tiré une

18 seule fois sur une seule et même personne. Les différentes personnes ont

19 reçu les mêmes balles au niveau de la tête, au niveau du tronc et au niveau

20 de la tête. Trois cents personnes ont été touchées à la tête et 323 au

21 niveau du tronc. Parmi ces personnes qui ont été touchées au tronc, ces

22 personnes ont également été touchées à la tête, et cetera, et vice versa.

23 On peut tirer certaines conclusions, ici. La première est que le

24 nombre de personnes qui n'ont pas été blessées par balle mais qui ont été

25 blessées par des éclats, le nombre de ces personnes était extrêmement bas,

26 à savoir quatre pour être plus précis. Trois d'entre eux, si je ne me

27 trompe pas, ont reçu les deux types de blessures. Je regarde mes notes pour

28 vérifier. Il n'y en a qu'un qui a été touché uniquement par des éclats

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1 d'obus. Je regarde mes notes.

2 Q. Très bien. Trois personnes ont été touchées par des éclats et une

3 personne a reçu les deux, a été blessée par balle et par des éclats.

4 R. Ce que je dis ici, il y a quatre personnes qui ont été touchées par des

5 éclats et un seul qui a été touché par les deux, ce qui est assez étrange.

6 Je vais vous dire pourquoi. Compte tenu des éléments d'information que nous

7 avons en matière épidémiologie de guerre, autrement dit combien de

8 personnes sont blessées ou tuées par un certain type de munition dans des

9 situations de combat ou hors combat, que ce soit en Afghanistan, dans les

10 pays du Golfe ou dans les Balkans, ce qui est intéressant, c'est ce qui

11 émerge, c'est la configuration.

12 En situation de combat, la plupart des personnes blessées ou décédées

13 sont blessées par des munitions fragmentaires, autrement dit des éclats,

14 alors qu'un nombre important de personnes blessées, tuées par des armes à

15 feu le sont beaucoup moins. Par exemple, nous avons une étude qui a été

16 faite en 1999 en Afghanistan : 73 % des personnes ont été tuées ou blessées

17 par des munitions fragmentaires, alors que 26 % sont décédées dû à des

18 blessures par balle ou des armes à feu en situation de combat. Si nous

19 analysons une situation qui n'est pas une situation de combat, on peut

20 appliquer la même étude à l'inverse. Le nombre de personnes tuées ou

21 blessées par des munitions fragmentaires correspond à 30 %, alors que les

22 personnes tuées par les armes à feu représentent 65 %. C'est la première

23 situation qui est intéressante, ici. Nous pouvons nous reporter au premier

24 graphique.

25 En situations de combat, en appliquant d'autres études également, si nous

26 regardons les personnes qui sont soit tuées, soit blessées par les armes à

27 feu en situation de combat, des personnes qui portent un équipement

28 militaire complet, ceci indiquera que les personnes seront blessées dans

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1 les endroits où ils ne sont pas protégés par des armures, au niveau du cou,

2 du visage, entre les jambes. Dans une situation qui n'est pas une situation

3 de combat, les gens ne portent pas des gilets pare-balles tous les jours ou

4 des protections tous les jours. La plupart des blessures sont dues à des

5 munitions fragmentaires, et ce serait au niveau des extrémités que ces

6 personnes seraient touchées au niveau des membres. Les données dont nous

7 disposons pour les blessures dues à des armes à feu, ces données sont très

8 variables. Quoi qu'il en soit, et dans ce cas-ci, si nous nous sommes

9 reportés au graphique qui se trouve à la page 15, nous constatons que le

10 nombre le plus important de blessures se situent au niveau du tronc, ce qui

11 est suivi par le plus grand nombre de blessures au niveau de la tête, et en

12 troisième position, vraiment un tiers de cela correspond aux membres du

13 corps.

14 C'est assez étrange que de dire que c'est ainsi que se répartissent les

15 blessures par balle, et c'est surtout compte tenu des études qui ont été

16 faites que les armes à feu, comme les munitions fragmentaires sont ce que

17 nous pouvons appeler des armes qui sont des armes à feu. Lorsque vous

18 lancez un obus, à ce moment-là vous ne prenez pas pour cible une personne,

19 mais une cible. Lorsque vous utilisez une arme à feu, évidemment vous

20 prenez quelqu'un pour cible et vous ne tirez pas en l'air, vous essayez de

21 toucher quelqu'un. Par conséquent, il faut tenir compte de ces chiffres-là

22 placés dans ce contexte-là.

23 Q. Vous avez pu tirer des conclusions sur les circonstances dans

24 lesquelles ces personnes ont trouvé la mort ?

25 R. Le point de vue que j'ai sur la question et que j'ai indiqué dans ce

26 rapport se fondait encore une fois sur les sources dont je disposais et que

27 j'ai citées, à savoir ces blessures représentent la façon dont ces

28 blessures ont été infligées sur une population qui n'était pas en mesure de

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1 se défendre, autrement dit dans une situation qui n'est pas une situation

2 de combat. Ce n'est pas le type de blessures auxquelles on s'attend dans un

3 cas de combat. En d'autres termes, les blessures ne sont pas des blessures

4 qui sont liées à une situation de combat. Les personnes qui ont ce type de

5 blessures ne participent pas à un combat.

6 Q. A quel type de blessures vous attendez-vous lorsqu'il y a une situation

7 de combat ?

8 R. Nous aurions principalement dû trouver des blessures dues à des éclats,

9 et non pas l'inverse, des blessures dues à des armes à feu. C'est ce que

10 nous avons dit, nous avons dit qu'il y a 0,6 % de blessures dues à des

11 éclats sur 889 cas, donc nous avons ici des résultats inverses, nous avons

12 surtout des blessures dues à des armes à feu, et de surcroît, l'endroit où

13 ces armes à feu ont touché le corps est plutôt inhabituel.

14 Q. Ces conclusions que nous constatons ici et que vous avez résumées dans

15 votre graphique, ici, font référence à Batajnica et Perucac et les fosses

16 que vous avez retrouvées à cet endroit-là. La même conclusion s'applique à

17 Petrovo Selo, les mêmes conclusions ?

18 R. A Petrovo Selo, en réalité c'est la même chose, oui. Le même schéma

19 s'applique à tous les sites, quelle que soit la manière dont on l'aborde.

20 Quatre personnes qui ont des signes de blessures par éclats sur les 889 ne

21 représentent que 0,6 % de l'ensemble des personnes étudiées, ce qui

22 représente un pourcentage très petit.

23 Q. Si je comprends bien, à Petrovo Selo aucun reste humain ne comportait

24 des signes de blessures par éclats ?

25 R. C'est exact. Si je puis ajouter ainsi un détail d'importance,

26 maintenant que vous venez d'évoquer le cas de Petrovo Selo, ceci est

27 particulièrement important. On pourrait arguer du fait, et c'est un

28 argument tout à fait valable, que le squelette, parce qu'il n'y a pas

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1 suffisamment de tissu, le squelette ne vous permet de comprendre qu'en

2 partie le type de blessures subies par la personne en question. Par

3 exemple, quelqu'un sur lequel on a tiré dans l'abdomen, la balle traverse

4 le corps, et cela ne touche pas les os. Si vous regardez le squelette, vous

5 ne savez pas si cette personne a été touchée par balle ou non.

6 En revanche, à Petrovo Selo et par opposition aux autres sites,

7 c'étaient des cadavres qui avaient toute la chair sur eux, donc sur un

8 total de --

9 Q. Je crois que cela se trouve sur la page suivante.

10 Mme KRAVETZ : [interprétation] C'est la page 39.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il y a la répartition des blessures à

12 Petrovo Selo, mais j'ai recherché les chiffres absolus. Sur les 61 cas à

13 Petrovo Selo, 7 % environ de tous les cas étudiés avaient encore toute la

14 chair sur le corps, mais dans aucun cas il y a eu des cas de blessures dues

15 à des éclats d'obus, uniquement des blessures dues à des balles.

16 Quand bien même on pourrait arguer du fait que les éclats se sont

17 perdus dans la nature ou qu'on n'a pas pu retrouver les éléments, il y a

18 une part plus importante de gens qui ont subi des blessures dues à des

19 éclats plutôt qu'à des balles. Bon, ceci, nous avons une difficulté avec

20 cette question-là.

21 Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, il y a un certain

22 nombre de rapports médico-légaux et de certificats de décès qui sont cités

23 dans le rapport de ce témoin. Je n'ai pas l'intention de les passer tous en

24 revue. Ils sont en annexe à ce rapport. La déclaration de témoin, il s'agit

25 des pièces P943, 944, 23094 [comme interprété] et 2454. Il y a également la

26 pièce 2798, qui est la liste des personnes portées disparues préparées par

27 l'OMPF, à laquelle il est fait référence dans sa déclaration que je

28 souhaite verser au dossier. Je crois que sa déclaration décrit suffisamment

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1 longuement comment cette liste a été préparée, donc je ne vais pas répéter

2 ceci au cours de la déposition orale du témoin.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La liste des pièces pour ce témoin,

4 est-ce que cette liste se limite aux exemples que vous venez de citer ?

5 Mme KRAVETZ : [interprétation] Il y avait davantage de pièces sur la liste,

6 et je souhaite simplement demander le versement au dossier des pièces que

7 je viens de citer. La pièce 2798 est la liste consolidée de l'OMPF du mois

8 d'octobre et inclut la pièce P2797 que je souhaite verser et qui comporte

9 la liste qui a été mise à jour.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ceci inclut quel numéro ? Nous n'avons

11 pas le numéro.

12 Mme KRAVETZ : [interprétation] Ceci comprend la pièce P2797 qui est la

13 liste qui est datée du mois de décembre 2004. L'origine -- nous avons

14 proposé les deux listes, et maintenant nous demandons le versement de la

15 liste la plus récente, simplement.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour que les choses soient claires, la

17 liste des personnes identifiées ici ?

18 Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les 934 et 944, cela correspond à

20 quoi ?

21 Mme KRAVETZ : [interprétation] Il s'agit de copies des rapports

22 d'inspection de l'équipe médico-légale et des certificats de décès qui ont

23 été établis par l'OMPF en application de ce processus.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. C'est une liste longue, n'est-ce

25 pas ?

26 Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui, oui, très, très longue avec un nombre

27 très important de pièces et de documents. Donc je ne vais pas les passer

28 tous en revue.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et qu'en est-il de 2394 et de 1954

2 [comme interprété] ?

3 Mme KRAVETZ : [interprétation] Il s'agit également de copies des rapports

4 d'autopsie et des certificats de décès. Il s'agit ici de liasses ou de

5 classeurs qui contiennent les rapports d'inspection de l'équipe médico-

6 légale et des certificats de décès qui nous ont été remis par l'OMPF.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc il s'agit en fait d'un jeu

8 complet des trois exemples que nous avons dans le rapport ?

9 Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui, il s'agit du jeu complet que nous avons

10 reçu jusqu'à présent. D'après ce que je comprends, ceci est toujours en

11 cours. Il y a encore des documents complémentaires que nous n'avons pas

12 encore reçus, mais à ce stade, ce qui nous préoccupe en fait c'est surtout

13 les victimes qui sont sur la liste et ce sont ces derniers pour lesquels

14 nous souhaitons demander le versement au dossier.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc rappelez-moi le chiffre total des

16 corps examinés ?

17 Mme KRAVETZ : [interprétation] Ils correspondaient à 868 et 889 [comme

18 interprété].

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Et vous n'avez pas les rapports

20 pour toutes ces personnes; c'est exact ?

21 Mme KRAVETZ : [interprétation] Je crois que nous avons - je vais vous

22 donner en fait un chiffre tout à fait approximatif - nous en avons à peu

23 près 600. La dernière fois que nous avons reçu c'était l'année dernière, au

24 milieu de l'année dernière. Je crois que ceci a été mis à jour maintenant,

25 mais nous avons demandé à voir d'autres éléments parce que ceux-ci ont

26 trait à nos victimes.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc les différentes pièces pour

28 lesquelles vous venez de demander le versement sont des pièces complètes et

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1 nous avons donné des chiffres, donc vous savez ce qu'il y a dedans ?

2 Mme KRAVETZ : [interprétation] C'est exact.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc --

4 Mme KRAVETZ : [interprétation] Comme je souhaite vous l'indiquer, Monsieur

5 le Président, nous avons l'intention dans ces prochaines semaines d'envoyer

6 à la Chambre quelque chose qui correspond avec un tableau, avec tous les

7 documents de l'équipe médico-légale sur ces trois fosses communes et tous

8 les éléments rassemblés, ainsi que les victimes qui sont citées afin de

9 faciliter le travail de référence et d'examen, car nous savons que ces

10 pièces sont assez importantes. Il y a énormément d'éléments qu'ils

11 contiennent.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc dans les semaines à venir -- une

13 ou deux, je crois ?

14 Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui. La semaine prochaine, j'espère. Je ne

15 veux pas vous donner de date, mais j'espère le plus rapidement possible.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez l'intention de boucler tout

17 ceci ?

18 Mme KRAVETZ : [interprétation] Oui.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quoi qu'il en soit, il n'y a pas

20 d'opposition eu égard à ces pièces. Il est clair que ceci devrait faire

21 partie de l'ensemble du processus.

22 Mme KRAVETZ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. A ce stade je

23 n'ai pas d'autres questions à poser au témoin.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

25 Je souhaite simplement que ceci soit clair, Maître Zecevic, avant que

26 nous poursuivions.

27 Monsieur Mrkic, vous êtes ici car l'idée avait été d'entendre un

28 autre témoin aujourd'hui, M. Maisonneuve, est-ce que je me trompe ou pas ?

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1 M. MRKIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, vous avez tout à

2 fait raison.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le fait que ce soit ce témoin, est-ce

4 que cela pose un problème pour vous ? Ceci est un petit peu inattendu pour

5 nous aussi.

6 M. MRKIC : [interprétation] Non, pas du tout.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et vous allez porter ceci à mon

8 attention si cela crée quelconque difficulté pour vous ?

9 M. MRKIC : [interprétation] Oui, tout à fait.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

11 Monsieur Zecevic.

12 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois savoir

13 qu'aucune des équipes de Défense n'a de questions à poser à ce témoin.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est une première, il me semble ?

15 M. ZECEVIC : [interprétation] Il y a toujours une première à tout, Monsieur

16 le Président.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne sais pas comment vous

18 interpréterez cela, Monsieur Baraybar, mais je crois pouvoir vous dire que

19 vous êtes le seul témoin qui n'a subi aucun contre-interrogatoire. Peut-

20 être ne devrions-nous pas surinterpréter cette réalité.

21 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Peut-être peut-on entamer un

22 concours ?

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, en effet. Il pourrait y avoir un

24 concours dont la récompense serait d'être le meilleur témoin du TPIY.

25 Toutefois ceci, bien entendu, n'a aucun rapport avec la valeur que l'on

26 peut accorder à votre déposition, mais c'est simplement que vos écritures,

27 votre rapport écrit a sans doute été si bien présenté et si détaillé qu'il

28 a été parfaitement compris et, par conséquent, ne nécessite aucun

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1 développement oral ou, en tout cas, ne soulève aucune controverse

2 particulière. Votre déposition nous a été très utile. Nous vous en

3 remercions. Nous vous remercions d'être venu témoigner et ceci met un terme

4 à votre témoignage par conséquent.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

6 [Le témoin se retire]

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Stamp, quel est votre témoin

8 suivant ?

9 M. STAMP : [interprétation] Le témoin suivant, Monsieur le Président, est

10 le général de camp d'armé, M. Maisonneuve.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

12 M. STAMP : [interprétation] Il est en route vers le prétoire. C'est M.

13 Marcussen qui l'interrogera au principal.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

15 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Maisonneuve.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez, je vous prie, prononcer la

20 déclaration solennelle disant que vous direz la vérité en lisant à haute

21 voix ce qui est écrit sur le document que M. l'huissier est en train de

22 vous tendre.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

24 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

25 LE TÉMOIN: JOSEPH OMER MICHEL MAISONNEUVE [Assermenté]

26 [Le témoin répond par l'interprète]

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

28 Maître Ivetic.

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1 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous ne pensions pas

2 que cet interrogatoire commencerait avant la pause, mais quoi qu'il en

3 soit, je rappelle l'existence d'une requête commune ou plutôt d'une

4 objection commune portant sur une partie de la déposition de ce témoin et

5 cette requête a été déposée par mon équipe et celle de Me Lazarevic. Nous

6 avons également une autre objection. Je ne sais pas si nous pouvons en

7 parler immédiatement ou s'il convient que nous attendions que soient

8 évoqués les documents concernés ou les sujets concernés, qu'ils soient

9 évoqués par l'Accusation.

10 Je ne sais pas si c'est à ce moment-là que vous souhaiteriez que nous nous

11 exprimions oralement pour décrire nos objections. Les questions dont il est

12 fait état dans cette requête sont tout à fait clairement définies, donc je

13 ne pense pas que nous ayons besoins d'en dire beaucoup sur ce point. Notre

14 requête ainsi que celle de Me Lukic pourra s'accompagner de quelques

15 arguments oraux limités à un document, et c'est peut-être le meilleur

16 moment pour en traiter ou encore peut-être pourrons-nous le faire au moment

17 de la demande du versement au dossier par l'Accusation.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, je n'ai pas vu cette

19 requête. Quelle est sa date ?

20 M. IVETIC : [interprétation] Elle a été rédigée la nuit dernière, mais je

21 crois qu'elle n'a été déposée que ce matin.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Aucuns des Juges n'a eu ce texte sous

23 les yeux, pas davantage d'ailleurs que les juristes de la Chambre, donc

24 nous n'avons pas la moindre idée à ce sujet. Vous en avez un exemplaire ?

25 M. IVETIC : [interprétation] J'en ai un exemplaire. Nous pensions que

26 l'audition du témoin précédent allait durer plus longtemps, compte tenu de

27 l'estimation de 90 minutes qui avait été faite par le bureau du Procureur.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la longueur de ce texte, de

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1 votre requête ?

2 M. IVETIC : [interprétation] Quatre pages, puis j'ajoute que trois pages

3 seulement concernent le fond du sujet.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suppose qu'il est question de

5 Racak.

6 M. IVETIC : [interprétation] C'est exact.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que toute la requête porte sur

8 Racak ?

9 M. IVETIC : [interprétation] Non.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La meilleure idée est sans doute de

11 poursuivre pour le moment. M. Marcussen pourra prendre connaissance de

12 l'objection et voir quelle peut être la façon de traiter du problème. Je

13 pense que nous devrions commencer. Ce qui signifie que vous appellerez

14 notre attention sur les éléments qui le méritent en cours de route. Je ne

15 pense pas que ces questions feront l'objet d'un débat très prolongé, et il

16 importe que les Juges puissent prendre connaissance de la requête pendant

17 la pause.

18 M. IVETIC : [interprétation] Nous le ferons ainsi, Monsieur le Président.

19 Les objections portent sur des passages précis du texte et des déclarations

20 préalables du témoin, donc je puis dire que cette façon de procéder nous

21 convient. Nous soulèverons nos objections au fur et à mesure.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

23 Monsieur Marcussen, puis-je vous proposer de vous procurer une copie de

24 cette requête ? Il ne me surprend pas que des objections soient soulevées

25 par rapport à l'audition de ce témoin pour des raisons tout à fait

26 évidentes compte tenu de l'évolution en l'espèce. Il va vous falloir tenir

27 compte de ces objections au fur et à mesure de leur présentation. Veuillez

28 commencer votre interrogatoire principal.

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1 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais

2 commencer. La seule chose que je tiens à dire au préalable, car je n'ai pas

3 les écritures de la Défense sous les yeux, c'est que comme nous l'avons

4 fait savoir dans notre notification d'audition, nous proposons l'audition

5 de ce témoin en tant que témoin 92 ter avec une partie de témoignage de

6 vive voix pour quelques points complémentaires, et nous demanderons le

7 versement au dossier de la déclaration préalable de 2002 émanant de ce

8 témoin ainsi que du compte rendu de son audition dans l'affaire Milosevic.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voyez-vous, une grande partie des

10 comptes rendus d'audience Milosevic portant sur Racak et sur le détail

11 relatif à Racak, nous avons exclu. Donc il y a des éléments qui sont

12 admissibles et d'autres pas, bien entendu.

13 M. MARCUSSEN : [interprétation] D'accord. Mais je vais commencer

14 l'interrogatoire et je pourrai lire la requête.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je soumettrai le compte rendu.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous aurez terminé votre

18 interrogatoire avant la pause, dans 35 minutes ?

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pas tout à fait, probablement, mais je

20 pourrais avancer considérablement.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

22 Interrogatoire principal par M. Marcussen :

23 Q. [interprétation] Bonjour, Mon Général.

24 R. Bonjour.

25 Q. Pourriez-vous décliner vos nom et prénom pour le compte rendu

26 d'audience, je vous prie.

27 R. Joseph Omer Michel Maisonneuve.

28 Q. Quel est votre grade ?

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1 R. Je suis général de corps d'armée dans les forces canadiennes.

2 Q. Donc vous avez été promu depuis votre déposition dans l'affaire

3 Milosevic ?

4 R. Oui.

5 Q. Quand avez-vous été promu ?

6 R. En mars 2003.

7 Q. Etes-vous toujours membre actif de l'armée ?

8 R. Oui, mais seulement pour quelques mois encore.

9 Q. Après quoi vous prendrez votre retraite ?

10 R. Je prendrai ma retraite.

11 Q. Depuis votre déposition dans l'affaire Milosevic, quelles ont été vos

12 fonctions ?

13 R. Je viens de terminer mon mandat en tant que chef d'état-major du

14 commandement allié de l'OTAN à Norfolk, en Virginie, aux Etats-Unis.

15 Q. Mais vous êtes toujours membre de l'armée canadienne ?

16 R. Je suis officier de l'armée canadienne à son quartier général de

17 Norfolk.

18 Q. Quelles sont vos fonctions dans ce quartier général ?

19 R. J'étais chef d'état-major et numéro trois du commandement du

20 commandement stratégique.

21 Q. Est-ce que c'est un nouveau QG ?

22 R. En fait, c'est un nouveau quartier général qui a été établi au cours de

23 l'été 2003, et qui est un quartier général de transformation pour l'OTAN.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qu'est-ce que cela signifie ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela signifie que toutes les opérations sont

26 soumises à un autre commandement stratégique et que celui-ci est

27 responsable des problèmes d'invasions, d'avenir, d'expérimentation, de

28 développement, de concepts et de doctrine, d'entraînement, d'éducation

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1 également.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup.

3 Monsieur Marcussen.

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Q. Mon Général, est-ce que vous avez fait une déclaration devant le bureau

6 du Procureur en 2002 ?

7 R. Oui.

8 Q. Excusez-moi, en 2000 ?

9 R. En 2000, oui, en effet.

10 Q. Avant de venir ici aujourd'hui, est-ce que vous avez pu relire cette

11 déclaration préalable ?

12 R. Non.

13 Q. Quand vous avez relu la déclaration, est-ce que vous y avez trouvé un

14 certain nombre d'éléments qui méritaient des éclaircissements ou peut-être

15 des corrections ?

16 R. Oui. J'ai relu cette déclaration en 2002 avant mon premier témoignage,

17 et j'y ai apporté des modifications qui peuvent nous être utiles

18 aujourd'hui.

19 Q. Mon Général, est-ce que vous avez un exemplaire de votre déclaration

20 sous les yeux ?

21 R. Non, je ne l'ai pas apporté avec moi.

22 Q. Donc, il convient de vous en remettre un exemplaire.

23 R. Les choses sont allées un peu vite pour moi aussi ce matin.

24 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, la déclaration a été

25 chargée dans le système du prétoire électronique en tant que pièce à

26 conviction P2772. Je tiens à dire que ce qui a été chargé dans le système

27 ce sont les déclarations préalables du témoin ainsi que leurs annexes.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons suspendre toutes décisions

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1 relatives à l'admission de l'ensemble de ces documents tant que nous

2 n'avons pas rendu une décision définitive sur les objections de la Défense.

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Compte tenu de ces objections, j'ai pensé

4 qu'il importait que je décrive en détail le contenu de cette pièce à

5 conviction.

6 Q. Mon Général, au paragraphe 22, après la deuxième phrase, après la

7 référence à un annexe MM/6, suis-je en droit de dire que vous avez

8 également remis une série de procès-verbaux d'une rencontre que vous avez

9 eue avec Delic le 1er février 1999 ?

10 R. Oui.

11 Q. C'est l'annexe dont il est fait état dans les paragraphes suivants de

12 votre déclaration préalable, n'est-ce pas ?

13 R. Je crois, en effet.

14 Q. Ensuite en page suivante de votre déclaration, aux paragraphes 28 et

15 29, il y a deux autres erreurs. Suis-je en droit de dire que la référence à

16 l'annexe M6A doit se lire en fait M6B ?

17 R. C'est exact.

18 Q. Au paragraphe 29, il est fait état d'une annexe MM/8, qu'il convient de

19 lire comme étant en fait l'annexe MM/7, n'est-ce pas ?

20 R. C'est exact.

21 Q. En dehors de ces corrections apportées à votre déclaration préalable,

22 est-ce que cette dernière rend compte de la réalité des faits, et est-ce

23 que vous répondriez de même si les mêmes questions que celles que vous ont

24 été posées à l'époque vous étaient posées aujourd'hui sur ces sujets ?

25 R. Oui.

26 Q. Merci.

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de

28 cette déclaration préalable sans les annexes. Peut-être serait-ce la

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1 meilleure façon de régler la question en traitant des annexes plus tard, à

2 moins que -- enfin je ne voudrais pas apporter la moindre confusion à cette

3 affaire. Serait-il préférable que je propose le versement au dossier de la

4 déclaration maintenant ou que je le fasse plus tard ?

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En effet, plus tard.

6 M. MARCUSSEN : [interprétation]

7 Q. Mon Général, vous avez déjà dit avoir témoigné dans l'affaire

8 Milosevic. Je crois que c'était les 29 et 30 mai 2002, n'est-ce pas ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Est-ce que vous avez eu la possibilité de relire le compte rendu de

11 votre déposition dans cette affaire ?

12 R. Non.

13 Q. Encore une fois, est-ce que cette déposition raconte fidèlement par

14 rapport à la réalité de ce que vous pensiez des événements de l'époque et

15 est-ce que vous répondriez de même si vous étiez interrogé au sujet de ces

16 événements aujourd'hui ?

17 R. Absolument.

18 Q. Merci beaucoup.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] En temps utile, je demanderai le versement

20 au dossier de ces comptes rendus d'audience. Pour le compte rendu

21 d'audience d'aujourd'hui, le numéro de ces documents dans le système du

22 prétoire électronique est P2815.

23 Q. Mon Général, au paragraphe 9 de votre déclaration, vous dites avoir

24 rencontré un jour M. Sainovic. Vous dites n'avoir eu aucun doute quant au

25 fait qu'il s'agissait d'un homme très convenable et très au courant de ce

26 qui se passait au Kosovo. Qu'est-ce qui vous a poussé à affirmer cela ?

27 Qu'est-ce qui vous a permis d'acquérir cette impression ?

28 R. Il est certain que lors de ma rencontre avec M. Sainovic et notamment

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1 en raison du fait qu'elle était présidée par M. l'Ambassadeur Keller, j'ai

2 eu tout le loisir d'observer très tranquillement son comportement, et j'ai

3 pensé que c'était un homme policé, digne de confiance, qui semblait être

4 très au courant de ce qui se passait au Kosovo à l'époque.

5 Q. Vous dites aussi qu'il avait le pouvoir d'agir dans une grande mesure.

6 R. A mon avis et sur la base d'autres occasions où j'ai pu le voir,

7 notamment lors de réunions où un grand nombre de représentants du Kosovo

8 étaient présents, la plupart de ces personnes parlaient de lui comme ayant

9 un pouvoir important, même s'il n'était pas en mesure de prendre

10 immédiatement toute décision requise. D'après le souvenir que j'en ai, je

11 ne me souviens pas d'avoir à quelque moment que ce soit entendu M. Sainovic

12 dire, par exemple : "Je vais en référer à mes autorités" ou "je ne suis pas

13 en mesure de dire si je suis d'accord ou pas d'accord sur telle ou telle

14 question ou décision".

15 Q. Merci. Nous espérons que les Juges auront votre déclaration préalable

16 et le compte rendu de votre déposition dans l'affaire Milosevic sous les

17 yeux. Je vais essayer d'obtenir des éléments de vous qui n'ont pas déjà été

18 décrits dans ces documents.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je demande que l'on affiche la pièce P2772,

20 déclaration préalable, page 20 de cette pièce.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quel paragraphe, Monsieur Marcussen ?

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il s'agit d'une des annexes.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vois.

24 M. MARCUSSEN : [interprétation] L'annexe M/2A.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il y est question de "Demande de conseils

27 pour la conduite des opérations".

28 Q. Mon Général, est-ce que vous avez ce texte sur l'écran ?

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1 R. Oui.

2 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document ?

3 R. Très certainement.

4 Q. Quel est ce document ?

5 R. A mon arrivée à la mi-décembre au centre régional de Prizren, je

6 n'avais aucune consigne à donner à mes subordonnés sur la façon de mener à

7 bien leur mission. Comme vous le savez, cette mission a été mise en place

8 dans des délais très courts, et j'ai ressenti le besoin d'émettre des

9 ordres, en tout cas d'établir des règlements relatifs au comportement des

10 mes hommes dans ce centre régional. Ceci est le document que j'ai rédigé à

11 l'intention du chef du centre régional. Je l'ai rédigé avec l'aide de mes

12 subordonnés en m'appuyant également sur l'expérience de la KDOM

13 britannique, puisque mon centre régional a repris les rênes à la suite de

14 la KDOM britannique. Il s'agit d'ordres et de consignes, de directives

15 émanant de moi et destinées au centre régional et à mes subordonnés, qui

16 régissaient leur comportement et leurs actions dans ce centre régional.

17 Q. Est-ce que ce document a été soumis à des vérificateurs qui

18 travaillaient dans votre centre régional ?

19 R. Il a été remis à toute la chaîne de commandement et très certainement

20 également à chacun des vérificateurs.

21 Q. En dehors de ce document, est-ce que les vérificateurs se voyaient

22 dispenser une formation particulière ? Je parle des hommes qui

23 travaillaient pour la MVK.

24 R. Oui. Chaque vérificateur qui était intégré au sein de la MVK suivait un

25 stage au centre de Brezovica, qui était dirigé par les Italiens à l'époque.

26 Q. J'aimerais vous interroger maintenant au sujet du paragraphe 3 de ce

27 document. Pourriez-vous nous expliquer ce que vous entendez par le terme

28 "autres forces" ?

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1 R. Dans la structure courante de l'OTAN, s'agissant de la façon dont les

2 ordres et les directives sont donnés, il y a un paragraphe qui traite des

3 autres forces susceptibles d'être dans les environs d'une zone

4 d'opérations. En l'espèce, je parle du théâtre des opérations au Kosovo. Je

5 divise les forces en plusieurs catégories avec les forces extérieures. Bien

6 entendu, l'OTAN, qui a pour mission de fournir un appui en cas de nécessité

7 et notamment en cas d'évacuation, les autres forces sont les forces

8 extérieures au Kosovo qui peuvent nous être utiles. Au paragraphe 3B, vous

9 trouvez la description de leur éventuelle utilité, tout cela avec une

10 coordination venant des vérificateurs du Kosovo au centre de Skopije.

11 Q. Pour que les choses soient claires, lorsqu'il est question de certaines

12 circonstances, est-ce que cela signifie évacuation ?

13 R. C'est exact.

14 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous passions au

15 paragraphe 22 de la pièce qui se trouve à la page 29 dans le système du

16 prétoire électronique. Peut-être est-il plus utile que je donne le numéro

17 ERN, le plus long numéro qui commence par un K ?

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour moi, il est plus facile que vous

19 citiez le numéro en MM.

20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Si nos documents sont présentés de la même

21 façon, j'indique qu'il s'agit du document MM/2A.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les paragraphes sont numérotés

23 également, donc vous pouvez également cité le numéro du paragraphe.

24 M. MARCUSSEN : [interprétation] Paragraphe 22.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, ce n'est pas la bonne page qui est à

27 l'écran. Il faudrait remonter d'à peu près six pages en arrière. Le

28 greffier a bien le numéro ERN qui convient. Ce numéro figure en haut de la

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1 page. Maintenant, on est revenu à la page 23. Non, non. Bien voilà la page

2 29. Je vous remercie. Très bien.

3 Q. Mon Général, au paragraphe 22 de cette page, vous parlez des rapports

4 de situation quotidiens qui sont établis par votre centre régional. Qui

5 approuvait ces rapports de situation ?

6 R. Les rapports de situation étaient établis par le chef des opérations,

7 après recueil des informations dont disposaient ses subordonnés au centre

8 de coordination. J'ai pris l'habitude, car je considérais en tant que chef

9 du centre régional qu'il était très important de relire ces rapports de

10 situation quotidiens pour y ajouter mes propres commentaires chaque fois

11 que c'était pertinent. Je pense que le chef d'un centre régional a peut-

12 être une idée plus globale de la situation et une image plus stratégique de

13 l'ensemble de la situation, de tout ce qui se passe dans le secteur. Pour

14 l'essentiel, je mettais mes commentaires par écrit, je relisais les

15 rapports de situation, je vérifiais leur précision, leur exactitude sur la

16 base de ce que je savais de cette situation, car évidemment je n'en

17 connaissais pas tous les détails, mais je m'efforçais d'obtenir une

18 description aussi exacte que possible. Ensuite, c'était mon adjoint qui me

19 remplaçait dans cette tâche en cas d'absence de ma part. En cas d'absence

20 de sa part, c'était le chef des opérations.

21 Q. Merci.

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'aimerais que nous passions maintenant à

23 la page suivante de cette même pièce.

24 Q. Mon Général, j'aimerais vous interroger au sujet du paragraphe 23 où

25 vous décrivez la démarche adoptée par vos vérificateurs quand ils étaient

26 sur le terrain. Vous avez dit que ce document était établi par vous à

27 l'intention de votre centre régional. Quels étaient les principes mis en

28 œuvre par les autres centres régionaux, à votre connaissance ?

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1 R. J'espère qu'ils agissaient un peu dans le même sens. Dans un monde

2 idéal, tout serait fait de la même façon. Dans tous les centres de la MVK,

3 du haut en bas de la hiérarchie jusqu'au plus petit centre régional. Mais,

4 bien entendu, il y en avait qui n'avaient pas la possibilité d'organiser

5 des réunions autour d'une table pour établir ce genre de document, donc je

6 rédigeais le premier texte, j'en donnais un exemplaire aux autres centres

7 régionaux et également au quartier général de la MVK, bien sûr. Je ne crois

8 pas que j'ai eu sous les yeux un quelconque document très détaillé de la

9 MVK, même si les principes appliqués par elle étaient sans doute très

10 comparables à ce que nous avions à l'esprit, en tout cas puisque la MVK et

11 nous-mêmes abordions notre mission d'une manière très semblable. Je veux

12 parler du général Dragan Drewienkiewicz et de l'ambassadeur Walker, qui

13 souhaitaient mettre l'accent sur la nécessité d'impartialité d'unités, des

14 parties, et cetera, et cetera.

15 Q. Merci.

16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Passons maintenant deux pages plus loin,

17 annexe MM/2B.

18 Q. Mon Général, est-ce que vous avez ce texte à l'écran ?

19 R. Oui.

20 Q. Quelle est la nature de ce document ?

21 R. Nous essayons, dans toute opération militaire, de prévoir ce qui va se

22 passer le plus tôt possible. A l'époque des négociations de Rambouillet,

23 nous espérions que celles-ci donneraient lieu à un résultat positif et nous

24 nous préparions à l'éventualité d'avoir à nous réunir pour discuter de la

25 mise en œuvre pratique d'un accord éventuellement conclu à Rambouillet.

26 C'est de cela qu'il est question dans ce texte. En cas de succès des

27 négociations de Rambouillet, nous disions être prêts à mettre en œuvre

28 certaines mesures dans la pratique, des mesures relatives à l'avenir du

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1 Kosovo en tant que tel. Au centre régional, nous nous efforcions de définir

2 quelles pourraient être les personnes qui occuperaient des positions-clés à

3 cet égard, des positions de responsables de liaison, en particulier. Nous

4 voulions également définir les zones qui auraient besoin d'une application

5 particulièrement rapide de l'accord, donc ces responsables de liaison, ces

6 responsables dans l'ombre étaient censés relier entre elles les différentes

7 parties et étaient à la base d'un système d'information destiné à informer

8 la communauté internationale de l'application concrète de l'accord.

9 Q. Pourriez-vous nous expliquer la différence entre un officier de liaison

10 et un responsable de l'ombre ?

11 R. On pourrait dire qu'il s'agit de la même chose, mais un officier de

12 liaison est davantage chargé de l'organisation, et un responsable de

13 l'ombre est davantage un simple individu.

14 Q. Mon Général, ce document date du 23 février, autrement dit,

15 pratiquement de la fin des négociations de Rambouillet, n'est-ce pas ?

16 R. C'est exact.

17 Q. Pour être très clair, nous voyons ici le mot "OP". Est-ce que cela

18 signifie "opération" et est-ce que la phrase se lit "succès des

19 opérations" ?

20 R. Oui, succès des opérations. Pour des raisons tout à fait évidentes,

21 nous espérions que les négociations seraient couronnées de succès.

22 Q. Est-ce que vous avez mené une opération ou est-ce que ceci est une

23 référence au processus de préparation --

24 R. C'est une référence à ce qui se passait, parce que voyez-vous, nous

25 appelons cela succès de l'opération pour signifier que nous désirions le

26 succès des négociations, pas plus que cela.

27 Q. Mon Général, le document suivant que nous allons examiner est à la page

28 47 dans le système du prétoire électronique du même document, annexe MM/4.

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1 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je suppose que c'est un des documents qui

2 va faire l'objet d'une objection de la part de la Défense. Je vois qu'un

3 conseil de la Défense est déjà debout. J'indique, si cela est nécessaire,

4 que nous n'allons pas demander le versement de ce document immédiatement.

5 Il y est fait état des comptes rendus Milosevic, par conséquent je tenais à

6 dire cela clairement d'emblée.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez déjà joué toutes vos cartes

8 à l'avance.

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] C'est la position de l'Accusation, en tout

10 cas.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic.

12 M. IVETIC : [interprétation] En effet, c'est un des documents qui fait

13 l'objet d'une objection de la part de la Défense, mais qui ne figure pas

14 dans la requête. C'est un document que je voulais évoquer oralement. Mais

15 s'il n'est pas demandé de le verser au dossier, alors même s'il est fait

16 état des comptes rendus Milosevic, je ne vais pas l'introduire par la

17 petite porte parce que je crois que ce document est en violation de

18 l'article 92 bis et ter du Règlement puisqu'il n'est pas accompagné d'une

19 déclaration sous serment de qui que ce soit et que c'est un document

20 personnel ou plutôt un document relatif à une entreprise personnelle. C'est

21 peut-être la raison pour laquelle il n'est pas demandé de le verser au

22 dossier.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Votre position, maintenant, Monsieur

24 Marcussen.

25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Si aucun de mes collègues ne tient à

26 l'utiliser, je n'ai aucune question au sujet de ce document. C'est ma

27 position.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous en demandez le

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1 versement ?

2 M. MARCUSSEN : [interprétation] Si j'en ai besoin, je le ferai, mais

3 simplement après avoir répondu à des questions au sujet de la nature de ce

4 document. Nous ne nous appuyons pas sur son contenu.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'objection, c'est qu'il ne respecte

6 pas les critères de l'article 92 ter s'agissant de la production

7 documentaire. Est-ce que vous admettez cet argument ou est-ce que vous le

8 contestez ?

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous pourrions débattre longuement sur le

10 plan juridique de la possibilité pour nous d'en demander le versement au

11 titre d'élément de preuve pour ouï-dire, et cetera. Ma position sur

12 l'utilisation de ce document dans la thèse de l'Accusation, c'est que nous

13 n'allons pas nous appuyer sur le contenu de ce document pour prouver quoi

14 que ce soit dans la thèse de l'Accusation, donc ce n'est pas vraiment un

15 problème.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais pourquoi est-ce que vous en

17 demandez le versement ?

18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Parce qu'il y est question des comptes

19 rendus Milosevic qui ont été admis.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il est utilisé au cours du

21 contre-interrogatoire ou de l'interrogatoire principal ?

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Au cours de l'interrogatoire principal

23 pendant peu de temps, mais comme nous pensions que la Défense tiendrait à

24 utiliser ce document en temps utile, plusieurs accusés, d'ailleurs, j'ai

25 deux questions au sujet de ce document que je pourrais poser au général.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Sepenuk, est-ce que vous avez

27 quelque chose à dire ?

28 M. SEPENUK : [interprétation] Peut-être pouvons-nous attendre les questions

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1 du Procureur, Monsieur le Président, mais j'aimerais répondre à ce qui a

2 déjà été dit.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Me Ivetic a présenté l'objection sur

4 le document en tant que tel, si je comprends bien.

5 M. IVETIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous devons rendre une décision.

7 M. SEPENUK : [interprétation] Je n'utiliserai pas ce document, comme l'a

8 dit M. Marcussen, même si d'autres conseils de la Défense souhaitent

9 l'utiliser. Nous ne pensons pas que ce document apprécie de la bonne

10 manière ce qui se passait au Kosovo à l'époque, et j'ai une ou deux

11 questions rapides que j'avais prévu de poser au sujet de ce document, mais

12 nous ne l'utiliserons pas en tant que pièce à conviction. C'est l'avis

13 d'une personne particulière, mais si le général déclare qu'il est d'accord

14 avec l'appréciation qu'on peut lire dans ce document, j'aurai une ou deux

15 brèves questions à lui poser à ce sujet.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est quelque chose que le témoin a

17 dit dans l'affaire Milosevic, n'est-ce pas ?

18 M. SEPENUK : [interprétation] En effet, c'est quelque chose qu'il a dit

19 dans sa déclaration préalable également, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

21 Vous maintenez votre position, Maître Ivetic ?

22 M. IVETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Compte tenu de la position que nous

24 avons entendue, nous allons autoriser deux questions sous réserve de la

25 décision de la Chambre qui sera rendue ultérieurement.

26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

27 Q. Mon Général, c'est un document divisé en deux parties. La première

28 partie a été actualisée le 27 décembre 1998. Vous avez la première page de

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1 ce document sur l'écran devant vous. Est-ce que ce document a été distribué

2 aux vérificateurs comme les réglementations dont vous avez parlé tout à

3 l'heure ou les consignes ?

4 R. Non. C'était un document qui a été distribué moins largement, mais qui

5 a été mis à la disposition de tous les responsables du commandement. Cela

6 étant, je ne saurais dire que tous les vérificateurs l'ont lu. En tout cas,

7 il a été mis à la disposition des différents niveaux de commandement.

8 Q. Passons maintenant à la page 62 dans le système du prétoire

9 électronique. Nous voyons la deuxième partie de cette annexe à votre

10 déclaration, document distinct établi par M. Wilson et datant du 6 février

11 1999. Quel est ce document ?

12 R. C'est un document de travail. Il importe de ne pas perdre de vue que

13 les deux parties de ce document ont été rédigées par la même personne, donc

14 c'est sa position personnelle qu'on trouve dans ce document. Ce dont il est

15 question ici, les forces d'intervention au Kosovo, c'est une expression qui

16 a été utilisée en référence avec les projets d'accord de Rambouillet qui

17 étaient déjà en cours de rédaction ou en tout cas le début des discussions

18 ou négociations de Rambouillet, où il était question de l'éventualité d'une

19 intervention ou de la mise en place d'une force d'intervention au Kosovo en

20 cas d'obtention d'un accord à l'issue de ces pourparlers de Rambouillet.

21 Q. Suis-je en droit de comprendre que ce document décrit plus ou moins le

22 rôle qui serait celui de la MVK en cas d'accord sur la création d'une force

23 d'intervention au Kosovo ?

24 R. En effet, en effet, exact.

25 Q. Je suppose que finalement ce sont trois questions que j'ai posées, mais

26 je vais maintenant passer à la pièce à conviction.

27 Mon Général, passons à un sujet plus large, l'UCK. Comment décririez-vous

28 la force que représentait à l'UCK à l'époque où vous étiez au Kosovo ?

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1 R. Je la décrirais comme n'étant pas particulièrement bien organisée, mais

2 possédant tout de même quelque chose qui ressemblait à une filière de

3 commandement. C'était un groupe d'hommes qui étaient perçu comme ayant de

4 bonnes intentions. C'était ce qu'il était convenu d'appeler des combattants

5 de la liberté, je suppose qu'on peut les appeler ainsi, et qui souhaitaient

6 être pris au sérieux.

7 Q. Est-ce que vous avez eu la possibilité d'apprécier leur stratégie et

8 leurs tactiques ?

9 R. Il est certain que dans les contacts que j'ai pu avoir avec eux, ils me

10 sont apparus, et d'ailleurs je traitais pratiquement toujours avec le même

11 homme qui ne cessait de me dire que l'UCK avait une stratégie globale et

12 qu'elle préparait des actions, et cetera. D'après ce qu'il disait, il

13 semblait certain que l'UCK avait une stratégie et une certaine

14 coordination, mais cela ne s'est pas avéré exact à de nombreuses reprises

15 sur le terrain.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui était cet homme ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Drini. C'était le nom de l'homme avec qui je

18 négociais la plupart du temps.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation]

20 Q. Pourriez-vous décrire les capacités de l'UCK, d'après ce que vous

21 pensiez ?

22 R. Je dirais qu'ils n'avaient que très peu d'équipement. En général,

23 c'étaient des armes d'infanterie, quelques mitrailleuses, mais pas de

24 véhicules lourds, pas de blindés. Ils circulaient dans des véhicules

25 simples, des camions, des bus, toutes sortes de bus, des minibus, et

26 cetera. Ce n'était certainement pas le type de force militaire, d'unité

27 militaire que vous pouvez trouver au sein d'un pays organisé.

28 Q. On a utilisé beaucoup de termes pour parler de cela, et je vais vous en

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1 parler, vous êtes un officier expérimenté. Pourriez-vous nous dire quelle

2 est la distinction que vous faites entre les terroristes, les guérillas,

3 les militaires, et éventuellement des paramilitaires ?

4 R. D'après moi, les terroristes, c'est pour moi, en tant que militaire de

5 carrière, un territoire ne correspond pas forcément à un groupe de gens

6 organisé. Ce sont des gens qui font la guerre autrement, enfin, en faisant

7 les activités qui vont avoir une répercussion énorme du point de vue

8 médiatique. Ils seraient plutôt orientés à la gauche. D'un côté, vous avez

9 cela, disons, on va appeler cela le côté gauche, ensuite de l'autre côté

10 vous avez la structure militaire avec les uniformes, une hiérarchie de la

11 chaîne de commandement qui va du début à la fin. Cela, c'est l'autre côté.

12 Au milieu, l'approche serait d'observer et de voir les guérillas

13 comme les gens qui s'organisent pour s'insurger, qui souhaitent changer une

14 situation particulière dans le désir de liberté avec des bonnes intentions.

15 Ce n'était pas absolu. Ce n'est pas une explication absolue, mais dans mon

16 esprit militaire simple, c'est comme cela que je vois les choses.

17 Q. Quand on parle de "paramilitaires", qu'est-ce que cela veut dire pour

18 vous ?

19 R. Les paramilitaires, je pense, sont les forces qui ne sont pas

20 complètement militaires, qui ne sont pas parfaitement organisées. Les

21 paramilitaires opposés aux militaires sont les forces qui ont une certaine

22 hiérarchie, une certaine chaîne de commandement, certaines qualités

23 militaires, mais il s'agit plutôt des forces qui sont là pour appuyer les

24 actions civiles, par exemple la gendarmerie, dans certains pays.

25 Q. Ce sont les gendarmes en France ?

26 R. Oui, je pense.

27 Q. Dans le paragraphe 12 --

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quel était l'objectif de cette

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1 question, puisque cette question pourrait créer tout un débat ici, un débat

2 interminable. Est-ce que vous avez une raison spécifique pour poser cette

3 question ?

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui. J'ai un objectif particulier. On a

5 beaucoup parlé de ce que le témoin voulait dire en parlant de

6 paramilitaires. Quand on dit dans une déclaration préalable, par exemple ou

7 quand on dit dans une déclaration qu'il s'agissait de paramilitaires, je

8 pense que la Défense avait suggéré qu'il s'agit là des gens qui se trouvent

9 sur le terrain, donc là je lui demande, à ce témoin qui est un militaire

10 d'envergure, d'expérience, expérimenté --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ceci nous préoccupe peu de savoir ce

12 qu'un militaire de carrière et expérimenté pense de ce terme, le terme de

13 paramilitaires. Ce qui nous importe, c'est de savoir ce que le témoin qui a

14 utilisé le mot en pense, comment il voit cela. Je pense que ceci peut nous

15 amener dans un débat sans fin. Je pense que ceci pourrait accroître les

16 tensions plutôt que de résoudre le problème en l'espèce.

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Mais c'est assez important pour le

18 Procureur de savoir ce que sont les civils, parce que là il s'agit de

19 civils qui ont été armés par les autorités de la République socialiste

20 fédérative de Yougoslavie, et ce sont pour nous les paramilitaires, donc si

21 vous voulez, sans entrer dans un débat juridique, il s'agit d'une question

22 de classifier.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si M. Maisonneuve a une expérience

24 personnelle par rapport à ces groupes ou par rapport à une catégorie pour

25 laquelle il pensait qu'il tombait sous cette définition, dans cette

26 définition, vous pouvez lui poser cette question, donc je parle là des

27 paramilitaires, guérillas, terroristes, et cetera, mais sinon je ne pense

28 pas que ceci soit forcément utile pour nous. Vous pouvez continuer,

Page 11048

1 Monsieur Marcussen.

2 M. MARCUSSEN : [interprétation]

3 Q. Monsieur, au niveau du paragraphe 12 de votre déclaration, vous avez

4 dit que l'équipement militaire était tel qu'il allait au-delà de toute

5 activité terroriste raisonnable, et vous faites des références similaires

6 au niveau des paragraphes 18, 35 et 36. Quel est cet équipement auquel vous

7 pensiez ?

8 R. En tant qu'officier d'infanterie et même d'unité des chars blindés,

9 nous essayions de répondre à la menace par l'équipement approprié. Par

10 exemple, un char et les armes lourdes, enfin, les véhicules blindés vont

11 être utilisés dans le cas d'un conflit ouvert contre d'autres chars sur un

12 territoire, un terrain ouvert ou quand il s'agit d'une guerre de manœuvres,

13 si vous voulez.

14 Si vous vous battez contre les forces d'infanterie, vous allez essayer

15 d'utiliser aussi les forces d'infanterie pour les contrer, pour les

16 combattre.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pourriez trouver un

18 moment utile pour prendre une pause ?

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Aussi simple que cela. Ce moment est

20 opportun. Nous pouvons la prendre à présent.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Maisonneuve, nous allons

22 prendre une pause d'une demi-heure. Je vais vous demander de suivre

23 l'huissier qui va vous montrer l'endroit où vous aller passer cette pause.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

25 [Le témoin quitte la barre]

26 --- L'audience est suspendue à 10 heures 46.

27 --- L'audience est reprise à 11 heures 19.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, est-ce que vous

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1 avez eu la possibilité de réfléchir à cette requête qui est ici, à savoir

2 d'exclure une déposition ?

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En ce qui concerne les compte rendus

5 d'audience, je vais vous dire que l'on a fait référence aux pages 5 855

6 allant jusqu'à 5 892 et 5 903 allant jusqu'à 5 909, au vu du contre-

7 interrogatoire. Est-ce que vous insistez pour que ceci fasse partie du

8 dossier ?

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il y a quelques points qui sont clarifiés

10 dans ces paragraphes, mais c'est vrai que je peux les couvrir aussi dans

11 l'interrogatoire.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous les identifiez, on va

13 évidemment les prendre en considération.

14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que vous voulez que je parle de

15 cela ?

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, effectivement, on peut le faire

17 dès à présent. Si cela est votre position, on va procéder dans l'ordre,

18 donc 5 768, on l'exclut puisqu'elle ne fait référence à rien qui nous

19 intéresse. 5 778 à 5 805, qu'est-ce que vous avez à dire à ce sujet ?

20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Ceci a quelque chose à voir avec la

21 jonction, c'est-à-dire que vous avez deux arguments principaux. Le premier

22 argument, c'est que le Procureur allègue qu'il y avait une campagne

23 générale au Kosovo pendant laquelle il y a eu une utilisation exagérée de

24 la force. C'est donc Racak, par exemple.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons déjà pris une décision là-

26 dessus. On ne va pas faire une enquête au-dessus de Racak. Vous ne nous

27 avez pas demandé de vérifier ce que c'est, et on ne va pas le faire.

28 M. MARCUSSEN : [interprétation] Par le biais des autres témoins, les

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1 éléments étant versés par rapport à cela concernant, par exemple, les types

2 de forces utilisées, la chaîne de commandement --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donnez-moi un exemple des éléments

4 concernant, par exemple, les types de forces utilisées.

5 M. MARCUSSEN : [interprétation] Bien --

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans le passé, quel élément de preuve

7 a été versé, existe en l'espèce concernant justement cette question des

8 forces utilisées ?

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il y a, par exemple, le général

10 Drewienkiewicz qui dit qu'il n'y avait pas seulement les forces de l'armée

11 yougoslave, mais --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le 15 janvier ?

13 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, oui, je pense. Ce témoin a dit que sur

14 le terrain les observateurs de la Mission des observations au Kosovo, sur

15 le terrain, le 15, ont vu des unités, des chars tirer sur une maison dans

16 le village de Racak. Je ne dis pas que c'est un élément de base par rapport

17 à ce crime-là, mais ce témoin nous dit, par exemple, si vous avez la police

18 et l'armée qui opèrent de cette façon-là, d'après lui il devait y avoir

19 normalement un certain besoin de coordination au niveau de la brigade et

20 aussi au niveau du QG du MUP.

21 C'est pour cela que je demande à présenter de tels éléments.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez, on va procéder par étapes.

23 On va examiner le compte rendu d'audience. A quel moment on dit que ces

24 passages parlent du niveau de coordination exigé pour qu'une personne

25 puisse se préparer, se produire ?

26 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'ai deux petits points et j'ai pensé que

27 la Défense allait soulever des objections à ce sujet, c'est pour cela que

28 j'étais d'accord pour les exclure, mais ce sont de toutes petites portions.

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1 Mais il y a aussi un passage concernant la façon dont le MUP s'est conduit

2 de façon générale au Kosovo. Le témoin dit --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est à la page 5 754 [comme

4 interprété], et normalement ce genre de chose aurait pu être admissible. De

5 l'autre côté, vous avez un autre passage, le passage à la page 5 782 où on

6 parle de l'usage d'armes dans des circonstances qui ne le justifient pas.

7 Il nous donne son point de vue là-dessus. Mais nous avons besoin de savoir

8 ce que vous voulez exactement tirer. Nous avons l'impression que vous

9 voulez aller au-delà.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non. Je voudrais vraiment faire référence à

11 des pages précises qui figurent parmi ces centaines de pages. Je ne vous

12 demande pas de faire plus que cela. Je ne vous demande pas de faire une

13 augmentation en bonne et due forme.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelqu'un devrait le faire, pourrait

15 le faire pendant la journée d'aujourd'hui. Comme cela, nous allons pouvoir

16 clore cette question parce qu'on ne va pas construire toute une

17 argumentation --

18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Ecoutez, j'ai l'impression qu'on m'a tendu

19 une embuscade.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était parfaitement prévisible.

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il y a une autre partie de cette objection

22 dont je voudrais parler, par exemple page 5 821, lignes 17 à 23 où se pose

23 la question de savoir si un commandant des équipes de combat coopérait ou

24 non avec l'UCK. On parle des équipes se trouvant au-dessus de Racak.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On n'a pas du tout soulevé une

26 objection à ce sujet.

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Lignes 17 à 23 de la page 5 821.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais où est-ce que vous trouvez ces

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1 informations là-dedans ?

2 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, il s'agit de savoir si l'armée

3 yougoslave coopérait ou non avec l'UCK. Ce témoin a dit que le commandant

4 de la brigade, par exemple Delic, normalement, quand il acceptait de le

5 rencontrer, qu'il pouvait discuter de --

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est peut-être admissible, mais on ne

7 va pas en parler à présent. Ceci n'est pas concerné par l'objection.

8 M. MARCUSSEN : [interprétation] Excusez-moi, je suis passé à un autre

9 sujet.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas cela qui figure dans le

11 transcript.

12 M. MARCUSSEN : [interprétation] Le problème, ce sont les grosses portions

13 que la Défense demande à exclure. Il y a beaucoup de questions qui se

14 posent par rapport à cela.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous savez, on va vous donner

16 l'opportunité d'en parler par la suite, par rapport aux portions précises

17 du compte rendu d'audience que vous souhaitez utiliser au cours de votre

18 interrogatoire. Je pense que vous allez pouvoir tout à fait le faire

19 pendant la pause déjeuner. Quelqu'un pourrait s'en occuper pendant la pause

20 déjeuner.

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] La pièce MM/7 --

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez, juste avant de parler de

23 cela, le paragraphe 36 par exemple est un paragraphe qui me paraît tout à

24 fait acceptable. Là, je vous parle du texte. Ensuite, il y en a d'autres

25 qui sont peut-être concernés par l'objection. Un des premiers documents

26 était le document MM/7. Est-ce que ce document a déjà été versé au

27 dossier ?

28 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, même pas par le biais du le

2 colonel Kotur ?

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Peut-être que je m'abuse, mais je ne pense

4 que ceci soit le cas.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi pensez-vous que c'est un

6 document qui peut être versé ?

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que vous voulez que je parle du

8 paragraphe qui figure dans la déclaration préalable ?

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non, oubliez la déclaration

10 préalable. Parlez de ces pièces et dites-nous de quelle façon ces pièces

11 sont cruciales pour la suite de votre interrogatoire et du contre-

12 interrogatoire.

13 M. MARCUSSEN : [interprétation] Le document MM/7 est extrêmement pertinent

14 pour nous, puisqu'on parle de la participation de l'armée yougoslave à

15 Racak.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien, c'est votre base. Qu'en

17 est-il du numéro 8 ?

18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Le numéro 8, la même question. Là, c'est un

19 autre officier qui confirme que l'armée yougoslave a effectivement

20 participé ou a été présente à Racak.

21 Le numéro 13, à nouveau Jelic dit que son QG a reçu l'ordre par

22 rapport à l'opération, ce qui confirme la participation de l'armée

23 yougoslave à l'opération, ainsi que les pièces 13A et 13B, à savoir on y

24 parle de la participation de l'armée yougoslave. Par la suite, vous avez

25 plusieurs réunions entre eux, les officiers de l'armée yougoslave et du

26 MUP, où ils donnent des réponses différentes par rapport à la question.

27 Ceci est extrêmement pertinent quand on se pose la question de savoir si

28 l'armée yougoslave a participé ou s'il y avait des chars ou non.

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1 D'après nous, tous ces documents démontrent qu'effectivement l'armée

2 yougoslave a participé à l'opération. Je pense qu'il s'agit là de

3 déterminer le niveau de coordination au centre de cette opération par

4 rapport à cette opération qui est ce point, ce lien qui est important pour

5 nous et sur lequel nous essayons de nous concentrer en l'espèce.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

7 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ceci est utile à ce stade d'avoir

9 étudié ces différents domaines. Bien évidemment, il est difficile de

10 dessiner une ligne de démarcation entre ce qui est peut-être admis, parce

11 qu'il s'agit de démontrer la structure de commandement et de coordination

12 entre la VJ et le MUP et également cette journée du 15 juillet [comme

13 interprété], et le détail de l'événement en question.

14 Ce qui est clair, étant donné que nous ne nous penchons pas sur les détails

15 de l'événements en question - inutile que le contre-interrogatoire porte

16 sur ces éléments-là contenus dans le document - nous allons parcourir le

17 document, document à propos duquel des objections ont été soulevées, et

18 nous allons en exclure certains passages, si nous estimons que c'est

19 nécessaire, pour que ce soit tout à fait clair, certains seront pris en

20 compte, d'autres non. Nous voulons nous assurer qu'il y a une cohérence

21 dans notre approche.

22 Nous allons procéder comme nous l'avons fait précédemment.

23 Nous espérons que l'Accusation pourra nous parler de cette question

24 en début d'après-midi. Nous l'espérons de façon à pouvoir terminer tout

25 ceci à ce moment-là, ce qui donnera l'occasion à la Défense de répondre. Il

26 y a certaines parties de cet argument qui sont sujettes à caution et

27 certaines qui ne sont pas sujettes à caution.

28 Maintenant, nous pouvons retourner à la déposition du témoin.

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1 [Le témoin vient à la barre]

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur

3 Maisonneuve. Nous avons essayé de résoudre en partie les questions qui sont

4 en souffrance sur un plan juridique. Nous n'avons pas encore résolu la

5 question et nous serons peut-être obligés d'interrompre votre déposition.

6 Dans l'intervalle, nous allons pouvoir entendre la suite de votre

7 déposition.

8 Monsieur Marcussen.

9 M. MARCUSSEN : [interprétation]

10 Q. Mon Général, nous nous sommes arrêtés au moment où vous décriviez

11 l'équipement militaire, le matériel militaire et l'équipement lourd et

12 comment ceci serait utilisé. On fait référence --

13 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi, veuillez poursuivre.

15 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci.

16 Q. On fait référence à "howitzer". Ceci se trouve dans votre déposition,

17 un "howitzer".

18 R. Oui, un "howitzer", un obusier. Il s'agit de pièces d'artillerie de

19 différents calibres. En général, ils sont utilisés pour les tirs indirects.

20 Autrement dit, quelqu'un sera placé derrière une colline et tirera de

21 derrière cette colline pour servir d'appui aux autres éléments de

22 l'infanterie sur le terrain.

23 Q. Merci. Quels effets ont ce type d'armes ? Si vous tirez sur une maison,

24 bien évidemment une habitation, parce que c'est différent si vous tirez

25 simplement dans la nature ?

26 R. Ces pièces d'artillerie sont équipées de différentes munitions. Il y a

27 certaines munitions qui sont très explosives, et vous avez des rafales, et

28 cetera, donc on peut tirer jusqu'à des armes nucléaires, si vous voulez,

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1 mais évidemment les obusiers ne sont pas ce type d'armes. Cela fera

2 exploser la maison, ne détruira pas toute la maison, mais provoquera

3 énormément de dégâts au niveau de la structure externe de l'édifice.

4 Q. Si vous tirez plusieurs tirs de char sur une maison ?

5 R. Si on tire à partir d'un char, ce dernier est équipé de munitions

6 hautement explosives qui ont cette capacité que je viens de décrire, mais

7 il existe également des munitions antichars qui sont constituées par un

8 projectile extrêmement dur et qui sont en mesure de faire des trous dans

9 les chars, sur la partie blindée en tout cas.

10 Q. Si quelqu'un devait tirer quelque chose comme cela sur une maison, que

11 se passerait-il ?

12 R. Encore une fois, les dispositifs antichars existent et pourraient faire

13 un trou assez conséquent à l'intérieur de la structure, mais ne pas

14 provoquer énormément de dégâts à l'intérieur, bien que la personne le

15 sentirait à travers les murs, alors que des rafales d'éléments très

16 explosifs traverseraient les murs sans doute et exploseraient.

17 Q. Au paragraphe 37 de votre déclaration, vous faites référence à un

18 véhicule qui s'appelle un BMP. Qu'est-ce que c'est ?

19 R. Un BMP est un véhicule de transport de troupes tracté.

20 Q. Quelle différence y a-t-il entre cela et un BRMP auquel vous faites

21 référence au paragraphe 44 de votre déclaration ?

22 R. BRDM, je crois. Attendez, laissez-moi voir que je regarde. BRDM, c'est

23 essentiellement un véhicule de transport de troupes, mais non pas à

24 chenille, mais équipé de roues, et non pas de chenilles.

25 Q. Puisque nous parlons en ce moment de matériel militaire, bien que ceci

26 soit quelque peu différent, à ma connaissance, est-ce que des jumelles de

27 nuit permettent de voir à distance ?

28 R. Oui, comme les jumelles que vous utilisez pendant la journée, à

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1 quelques kilomètres.

2 Q. Vous dites dans votre déclaration, en général, lorsque provoqué ou --

3 je m'écarte du thème du matériel militaire. Vous dites dans votre

4 déclaration qu'en général, la VJ répondait aux provocations lorsque c'était

5 perçu comme tel et répondait de façon disproportionnée. Pourriez-vous

6 expliquer ceci, s'il vous plaît ?

7 R. Je pense qu'au niveau de plusieurs incidents que j'ai vus, ils ne

8 supportaient pas la provocation, et la provocation pouvait être très simple

9 ou cela pouvait être quelque chose de simple ou un acte provenant de l'UCK

10 et des forces albanaises et pourrait aller jusqu'à tuer des soldats. La

11 riposte me semblait toujours beaucoup plus importante que l'acte en

12 question.

13 Q. Pourriez-vous nous donner des exemples précis de cela ?

14 R. Je peux certainement. C'était le 8 janvier lorsqu'un convoi de la

15 police du MUP a été pris en embuscade par l'UCK et deux policiers du MUP

16 ont été tués. La riposte a consisté à faire sortir des chars de la position

17 de Dulje, des chars de la VJ qui ont commencé à tirer sur un village qui,

18 semble-t-il, n'avait pris aucune part à cette embuscade. Ceci semblait

19 quelque peu irrationnel. En tout cas, la riposte semblait très forte par

20 rapport à l'incident en question.

21 Q. Merci. Etant donné les objections, je vais maintenant parler de ce que

22 vous dites dans votre déclaration, que la VJ et le MUP semblaient avoir un

23 niveau de coordination et de collaboration élevé eu égard à certaines

24 opérations. Sur quoi vous fondez-vous pour dire cela ?

25 R. Tout d'abord, l'incident que je viens de décrire à l'instant, le MUP

26 avait été attaqué et pris dans une embuscade organisée par l'UCK. Ils ont

27 perdu des hommes, et la réaction de la VJ était telle, donc la coordination

28 se passait bien, et la VJ réagissait immédiatement. D'après la manière dont

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1 je pouvais comprendre cela, c'est ainsi que cela se passait. Dans d'autres

2 cas, par exemple l'incident de Rogovo, lorsque la VJ filait ou elle se

3 trouvait à la frontière déjà. D'après nous, ils avaient vu les mouvements

4 des troupes de l'UCK passer à la frontière, et la VJ les avait suivies tout

5 au long de leur parcours. Mais ce qui s'est passé dans le village même de

6 Rogovo a été organisé par le MUP. Ceci semblait être une indication claire

7 d'un certain niveau de coordination entre les deux forces.

8 Q. Pour ce qui est de l'incident de Rogova, vous dites que la VJ suivaient

9 les membres de l'UCK et que le MUP reprenait ensuite le reste de

10 l'opération. Est-ce que quelqu'un vous a dit que c'était la même unité, que

11 c'étaient les mêmes hommes de l'UCK qui avaient passé la frontière et que

12 c'est eux qu'on prenait pour cible ?

13 R. Avec ma première réunion avec le colonel Delic, il en parlait, et

14 d'après lui c'était le même groupe d'hommes. En réalité, ces forces avaient

15 en réalité tué trois de ces personnes qui s'étaient introduites à Pastrik

16 également.

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Simplement pour référence, cette réunion

18 est évoquée dans la pièce MM/6. Pardonnez-moi, la pièce MM/6A.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous souhaitez verser ce document au

20 dossier comme étant en annexe de la déclaration plutôt que de lui donner

21 une cote distincte ?

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] J'avais l'intention de demander de verser

23 l'ensemble des documents, car tous les documents, hormis un seul, ont été

24 évoqués de façon très précise dans l'affaire Milosevic.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez bien ma question. Vous ne

26 souhaitez pas demander des cotes distinctes; il s'agit simplement d'un

27 élément qui va être annexé à la déclaration ?

28 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, mais c'est mon --

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est tout ce que j'ai besoin de

2 savoir.

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Une seule et même cote et pièce.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je n'ai pas besoin d'en savoir

5 davantage.

6 M. MARCUSSEN : [interprétation]

7 Q. Comme vous nous l'avez dit, vous sortiez d'une unité de chars, si j'ai

8 bien compris. D'après votre expérience, l'utilisation de munitions par une

9 unité, est-ce qu'un rapport en serait fait, est-ce que ceci serait transmis

10 du long de la chaîne de commandement ?

11 R. Oui, certainement. Pour ce qui est de toute armée dans laquelle j'ai

12 servi, soit l'armée américaine ou l'armée canadienne, un contrôle très

13 strict se fait. Dès que les munitions sont utilisées, dès qu'il y a une

14 action ou une opération, la procédure est lancée lorsque de véritables

15 armes sont utilisées.

16 Q. Pourquoi ce mécanisme existe-t-il ?

17 R. C'est pour s'assurer qu'on puisse contrôler les munitions et leur

18 utilisation, que ce soit lors d'opérations particulières, ceci est contrôlé

19 de façon très stricte, de façon à ce que les munitions ne soient pas

20 perdues et que cela ne tombe pas entre de mauvaises mains. Ceci correspond

21 aux règles d'engagement.

22 Q. Je ne sais pas si vous êtes en mesure de répondre à cette question,

23 mais serait-il possible d'avoir des munitions de chars qui seraient

24 utilisées par des particuliers sans que ceci ne soit retransmis le long de

25 la chaîne de commandement ?

26 R. Non, pas dans une armée bien disciplinée.

27 Q. Pour ce qui est des initiatives privées ou d'éléments ou de renégats et

28 de voyous, un officier, par exemple, comment réagit-il s'il réussit et

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1 qu'il dispose d'éléments incontrôlés parmi ses subordonnés ?

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de répondre, je souhaite poser

3 une question. D'après votre commentaire, le fait d'enregistrer

4 l'utilisation de munitions, est-ce qu'il se limite simplement à des armes

5 lourdes ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, non. Cela se limite à

7 des munitions qui seraient prêtes à être utilisées.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la plupart des armées, c'est très

10 difficile de contrôler ceci pour les raisons que je viens d'évoquer.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

12 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci.

13 Q. Si un officier se rend compte que parmi ses éléments, il y a des

14 éléments incontrôlés parmi les unités, certains individus, que ferait un

15 officier ?

16 R. Un officier, je crois, tout officier professionnel traiterait de la

17 question de façon très sérieuse et rapidement et avec beaucoup de sérieux.

18 Je croix que s'il dispose d'éléments incontrôlés et qu'il y a une unité

19 d'hommes incontrôlés, en général ces personnes seraient soumises à des

20 procédures disciplinaires, et c'est ce qui s'est passé. C'est la première

21 chose sans nul doute, il faudrait sortir ces personnes des rangs.

22 Q. Lorsque vous dites, "retirer" ces personnes des rangs -- R. J'entends

23 les faire sortir et annuler la mission de ces gens-là et les remplacer par

24 d'autres personnes au sein des unités.

25 Q. Est-ce que c'est une pratique communément adoptée ou est-ce que c'est

26 quelque chose qu'on vous apprend à l'académie militaire ?

27 R. En général, on pensait que c'était une pratique communément adoptée,

28 mais on a découvert très rapidement qu'il faut même aller plus loin, c'est-

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1 à-dire que non seulement il faut enseigner cela lors de cours de formation

2 de base pour des soldats et pour des officiers, mais maintenant c'est

3 quelque chose que nous écrivons et qui est inscrit dans les règles

4 d'engagement. Nous donnons à chaque soldat, à chaque marin, à chaque

5 aviateur, une carte sur laquelle ou un carton sur lequel figurent toutes

6 ces règles, ces règles d'engagement. Cette carte porte ce nom-là, c'est la

7 carte d'engagement, et cela indique ou précise comment la personne en

8 question doit se comporter face à une menace de l'ennemi, face à une menace

9 des forces qui sont en face ou de forces adverses. Ceci est contrôlé de

10 façon très stricte. Cela fait partie des opérations militaires.

11 Q. Mon Général, vous avez décrit ceci, vous y faites référence au

12 paragraphe 18 de votre déclaration, vous parlez d'intimidations fréquentes.

13 A quel type d'actes faites-vous référence ? Vous parlez d'intimidations

14 fréquentes de la part du MUP et de la VJ ?

15 R. Nous avons reçu des rapports assez nombreux des Albanais qui ont été

16 battus, que l'on maltraitait, par exemple aux postes de contrôle. On

17 demandait les papiers d'identité, les cartes d'identité ou d'autres formes

18 d'identité comme le permis de conduire, qu'on leur enlevait sans raison

19 véritable et qu'on ne leur redonnait pas, on ne leur restituait pas. Vous

20 savez, les gens, ensuite, on leur demandait pourquoi, on leur demandait des

21 récépissés qu'on n'a jamais remis. C'était une sorte d'intimidation. En

22 réalité, personnellement, j'ai vu quelque chose au poste de police du MUP,

23 les Albanais qui faisaient la queue, et pour des questions administratives,

24 parce qu'ils demandaient des papiers, et cetera, un policier du MUP était à

25 l'extérieur du poste de police et aucun des Albanais ne les regardait. Ils

26 avaient la tête baissée et ils me semblaient être intimidés par les forces

27 qui exerçaient l'autorité.

28 Q. Avez-vous une quelconque expérience par rapport à la VJ et au MUP ?

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1 Comment respectaient-ils les coutumes locales et comment se comportaient-

2 ils dans un cadre social ?

3 R. Je me souviens très bien d'avoir rendu visite à une famille albanaise

4 accompagnée d'un officier de police serbe. Comme vous le savez, la coutume

5 veut, dans une famille albanaise, qu'il faut enlever ses chaussures. Bien

6 sûr, en tant que brigadier général de brigade moi-même, j'enlevais toujours

7 mes chaussures. C'était une question de courtoisie élémentaire, et cet

8 officier serbe, par exemple, n'a pas enlevé ses chaussures lorsqu'il est

9 entré dans cette maison avec ses grosses bottes, effectivement à la

10 consternation de la famille albanaise.

11 Q. Connaissez-vous le nom de cet officier ?

12 R. Le colonel Kotur.

13 Q. Où ceci s'est-il passé ?

14 R. Je ne me souviens pas de l'endroit précisément, mais je me souviens

15 d'avoir rendu visite à cette maison en sa compagnie.

16 Q. Vous souvenez-vous si c'était dans la zone frontalière ?

17 R. Oui, je crois que c'était dans la zone frontalière, et nous étions en

18 train d'observer les mécanismes qui permettaient de contrôler la frontière,

19 et nous insistions pour faire admettre la liberté de circulation sur la

20 zone frontalière et nous étions en train d'en parler avec le colonel Kotur.

21 Q. Merci. Je souhaite maintenant vous montrer quelque chose, mais il

22 s'agit toujours de la même pièce, mais un passage, P2772.

23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je souhaite montrer la page 73 de cette

24 pièce, MM/6. C'est en annexe à la déclaration.

25 Est-ce qu'on peut le mettre dans le bon sens, s'il vous plait ?

26 Est que l'on peut agrandir la partie inférieure de la pièce, s'il

27 vous plait ?

28 Q. Mon Général, je ne sais pas si vous arrivez à lire ce que l'on

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1 voit à l'écran. Il y a une phrase qui commence par : "Ma famille se trouve

2 maintenant à Belgrade" --

3 R. Oui. "J'ai des liens affectifs avec ces territoires. Nous tous (Serbes)

4 allons protéger le Kosovo de nos vies, les monuments historiques, et le

5 patrimoine."

6 Q. C'est Delic qui dit ceci lors d'une réunion que vous avez tenue le 26

7 décembre 1998 ?

8 R. C'est exact.

9 Q. Est-ce que d'autres officiers serbes ou des personnes avec lesquelles

10 vous étiez en liaison avaient le même point de vue ?

11 R. Je crois que ceci exprime le point de vue de la plupart des Serbes au

12 Kosovo avec lesquels j'ai eu à traiter.

13 Q. Dans différentes parties de votre déposition, ainsi que le compte rendu

14 dans l'affaire Milosevic et votre déclaration, vous avez évoqué la question

15 de la zone frontalière qui était longue de 5 kilomètres. Est-ce que des

16 restrictions étaient imposées sur la MVK à ce moment-là dans la région ?

17 R. Oui, c'étaient des restrictions très importantes. Il n'y avait pas de

18 liberté de mouvement ou, en tout cas, d'après l'accord et selon ce que nous

19 avaient dit les Serbes, il fallait un officier de liaison et il fallait que

20 cet homme nous accompagne et il fallait préparer tout ceci à l'avance. Il

21 fallait que cet homme nous accompagne si nous devions nous rendre dans

22 cette région-là, donc l'accès était vraiment contrôlé.

23 Q. A la page 24 de votre déclaration, je crois que vous en parlez. Comment

24 ces restrictions influaient-elles sur la capacité du MVK de mener à bien

25 son mandat ?

26 R. Ceci avait une incidence forte, puisque nous recevions des rapports du

27 côté serbe qui nous précisaient qu'il y avait des infiltrations au niveau

28 de la frontière, et nous n'avions aucun moyen de vérifier cela et nous ne

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1 pouvions pas vérifier ce que faisaient les Serbes non plus pour

2 contrecarrer ces incursions. Autant que c'était difficile pour nous, nous

3 n'étions pas en mesure de faire ce que nous avions à faire au niveau de la

4 frontière.

5 Q. Vous étiez responsable de la région de Prizren ?

6 R. Oui.

7 Q. Etes-vous en mesure de donner des chiffres approximatifs au niveau de

8 cette zone, là où vous aviez la liberté de circuler et l'autre où vous

9 n'aviez pas la liberté de circuler ?

10 R. Dix, 15 % dans ma zone environ, et j'étais responsable de deux régions

11 qui avaient une frontière avec l'Albanie. C'était un peu délicat. Vous

12 savez, c'était une zone un peu sensible du Kosovo à cause, justement, de la

13 frontière avec l'Albanie.

14 Q. Au paragraphe 25 de votre déclaration, une citation de la pièce MM/6A.

15 R. Oui.

16 Q. Vous dites que Loncar n'était pas votre commandant. C'était l'officier

17 de liaison chargé de la coordination à Prizren, je crois. Pourriez-vous me

18 dire qu'est-ce que cela veut dire, "ce n'est pas un commandant". Qu'est-ce

19 que cela veut dire ?

20 R. C'est un échange que j'ai eu avec Delic. J'essayais d'ouvrir un bureau

21 sur le terrain à Planeja, qui se trouvait à 5 kilomètres. J'avais insisté

22 parce que je voulais que ce bureau sur le terrain puisse être ouvert, et il

23 m'avait dit qu'il n'avait pas l'autorité nécessaire lui permettant de

24 m'autoriser à faire cela. C'est ce que je lui disais, et il m'a dit que le

25 général Loncar était à Pristina et il était d'accord, donc ceci avait été

26 négocié avec les gens qui se trouvaient au quartier général du MVK, et il

27 était d'accord. A ce stade, le colonel Delic m'a dit que ce n'était pas son

28 commandant, qu'il était simplement officier de liaison, ce qui m'a quelque

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1 peu surpris, parce que je pensais que le général Loncar avait l'autorité

2 nécessaire et pouvait parler au nom du commandant quand bien même ce

3 n'était pas le commandant, qu'il aurait l'autorité ou le pouvoir de parler

4 en son nom.

5 Q. Ce qui vous a empêché de mener à bien votre mandat ?

6 R. Oui. Nous avons insisté pour que ce bureau sur le terrain soit ouvert à

7 Planeja. Je crois que la MVK était plutôt d'accord, et nous avons pu mener

8 ceci à bien plus que d'autres. Nous avions différents endroits

9 décentralisés qui nous permettaient de protéger la population, qui nous

10 permettaient de s'occuper d'eux. Ce n'était pas seulement la population

11 albanaise, mais la population serbe dans certaines régions où ils étaient

12 peut-être isolés, entourés d'Albanais. J'essayais véritablement de protéger

13 la population. En réalité, j'étais assez inquiet, car je pensais que si

14 l'on concluait un accord, il y aurait des représailles contre la population

15 serbe, donc j'essayais d'ouvrir des bureaux de campagne, surtout dans des

16 zones peuplées par des Serbes. Ceci était diffusé à la télévision serbe.

17 J'essayais donc d'être impartial.

18 Q. Merci.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant passer à

20 la page 85 de la pièce que nous avons à l'écran, s'il vous plaît ?

21 Q. Je ne sais pas si vous pouvez nous aider à décoder une carte, s'il vous

22 plaît.

23 Est-ce que vous voyez cette carte sur votre écran ?

24 R. Oui.

25 Q. Il s'agit ici d'une carte que vous avez remise en même temps que votre

26 déclaration. C'est la pièce MM/9. Ce sont des endroits où la VJ a des

27 casernes. J'aimerais comprendre enfin les différentes cases que l'on trouve

28 sur cette carte. Certaines cases ont trois points. Qu'est-ce que cela

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1 représente ?

2 R. Cela signifie qu'il y a un peloton.

3 Q. Lorsqu'il y a une ligne ou deux lignes ?

4 R. Une ligne, c'est une compagnie, et deux lignes, c'est un bataillon.

5 Q. Lorsqu'il y a un moins ?

6 R. Cela signifie que c'est un peu moins d'un bataillon. Ce n'est pas tout

7 à fait un bataillon.

8 Q. Ensuite, à l'intérieur, est-ce qu'il s'agit de drapeaux ou de cases ?

9 R. Nous appelons cela des symboles.

10 Q. A l'intérieur de ces cases, de ces symboles, il y a quelque chose qui a

11 une forme ovale ?

12 R. C'est une unité de blindés, de chars, et ceux qui ont une croix

13 symbolisent l'infanterie, et ceux qui ont un cercle ou un ovale, ce sont

14 les unités mécanisées ou l'infanterie. Ceux qui ont un point ou un E, c'est

15 une unité de génie. Lorsqu'il n'y a pas de symbole au-dessus de la case,

16 cela signifie que nous ne connaissons pas les effectifs ou la taille.

17 Q. Bien. Si on regarde Djakovica, il y a deux petits points en dessous.

18 R. C'est l'infanterie mécanisée, c'est-à-dire à bord de camions.

19 Q. Merci.

20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je souhaite maintenant passer à la page

21 suivante de cette même pièce, s'il vous plaît.

22 Q. Il s'agit ici de MM/10 de cette pièce qui est en annexe à votre

23 déclaration, et il s'agit des notes qui ont été prises lors d'une réunion

24 qui a eu lieu le 5 février en présence du chef du MUP à Prizren, qui était

25 également le préfet adjoint. Pourriez-vous placer ce document dans son

26 contexte, s'il vous plaît ? Que se passait-il d'autre ? Est-ce que des

27 événements significatifs se déroulaient à ce moment-là, le 5 avril 1999 ?

28 R. Le 5 février.

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1 Q. Oui, pardonnez-moi.

2 R. Oui. Il y avait bien sûr -- nous avions eu déjà l'incident de Rogovo

3 peu de temps avant, et il y avait un poste de contrôle à Rastane qui,

4 d'après nous, avait un caractère oppressant, car ils avaient contrôlé plus

5 de véhicules que nécessaire, donc j'essayais de rencontrer le chef de la

6 police pour essayer de faire en sorte qu'il réduise le nombre de contrôle

7 ou de véhicules contrôlés à cet endroit-là.

8 Q. Sur la scène internationale, ceci marque le début des négociations de

9 Rambouillet, n'est-ce pas ?

10 R. Oui.

11 Q. Au paragraphe 6, en bas de la page, on parle ici d'une patrouille du

12 MUP qui se rend à Orahovac et Studencane. Est-il exact de dire que la MVK

13 avait suivi cette patrouille de façon régulière ?

14 R. Oui. C'est une patrouille qui avait été constituée dans le cadre de

15 l'accord. C'était une patrouille normale, régulière. Nous ne les avons pas

16 escortés, mais nous suivions la patrouille pour nous assurer que rien ne

17 leur arrive. Quand bien même quelque chose devait arriver, nous étions là

18 pour le voir. C'était une patrouille régulière qui utilisait un itinéraire

19 normal, et cet itinéraire avait changé, ce qui avait provoqué une certaine

20 frustration au sein de l'UCK.

21 Q. Pourquoi l'itinéraire avait-il changé ?

22 R. Je ne sais pas.

23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je souhaite maintenant passer à la page 98

24 de la même pièce. C'est la pièce MM/13.

25 Q. Est-ce que vous avez eu, Mon Général, l'occasion, lors des séances de

26 récolement, de réexaminer ce document ?

27 R. Oui, tout à fait.

28 Q. Ce document a différentes versions du même document.

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1 R. C'est exact.

2 Q. Pourquoi ?

3 R. Lorsque nous avons préparé les procès-verbaux de différentes réunions,

4 il y avait quelqu'un qui avait pris des notes, j'avais pris des notes, et

5 s'il y avait d'autres personnes présentes dans la pièce, nous prenions des

6 notes et nous essayions de mettre tout ceci ensemble de façon à avoir

7 quelque chose de précis --

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je vous interrompre un moment.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Cepic.

11 M. CEPIC : [interprétation] Justement, c'est dans notre requête, nous avons

12 soulevé une objection précisément au sujet de ce document même MM/13, alors

13 que le Procureur commence à interroger le témoin justement par rapport à ce

14 document.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je pense que c'est conforme à la

16 décision que nous avons prise, à savoir que nous allons permettre les

17 questions, ensuite nous allons traiter de la question de l'objection

18 soulevée plus tard, une fois que tout le monde a eu la possibilité de

19 donner clairement, de soumettre clairement son point de vue là-dessus.

20 M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

22 M. MARCUSSEN : [interprétation]

23 Q. Mon Général, juste une autre question. Maintenant, nous voyons quelle

24 est la version correcte. Quelle est exactement la version correcte ?

25 R. La version signée.

26 Q. Merci.

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vais vous demander d'examiner la page

28 106 de cette pièce, MM/13A.

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1 Q. On y fait référence -- c'est un rapport que vous avez décrit dans votre

2 déposition couvrant les évènements du 15 et 16 à Racak.

3 R. Oui.

4 Q. J'ai voulu justement tirer au clair un point avec vous. C'est la

5 première ligne -- excusez-moi. En réalité, il s'agit de deux tiers plus

6 loin, où il y a un tiret qui commence par : "Une équipe de CC3 près d'une

7 position de 122-millimètres."

8 De quoi il s'agit ? Quelle est cette position 122-millimètres ?

9 R. Ce sont des obusiers. Il y en avait trois, et apparemment ces obusiers

10 étaient prêts à tirer.

11 Q. Nous sommes le 16. C'est le jour au sujet duquel le juge d'enquête a

12 discuté des modalités de cette enquête qui a eu lieu à Racak.

13 R. Je pense que c'était la veille.

14 Q. Le 16 ? Oui, effectivement. Mais la question que j'ai voulu vous poser,

15 c'était si effectivement on a tiré avec ces obusiers ce jour-là ?

16 R. Je ne saurais pas vous répondre.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'essaie toujours de trouver cette

18 référence. Excusez-moi. Est-ce qu'elle se trouve en première page ?

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] En première page du document dont le numéro

20 est annexe MM/13A.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Numéro 13; c'est bien cela ?

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] 13A.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] 13A. Attendez un instant. Vous dites

24 qu'il existe trois versions de ce texte ?

25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, non, attendez. Excusez-moi. Il existe

26 trois versions de l'annexe MM/13.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

28 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il y en a une version de trois pages, une

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1 autre de deux pages, et une troisième de trois pages également qui sont

2 signées.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est cette dernière que je suis censé

4 retrouver ?

5 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ceci --

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Finalement --

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, excusez-moi.

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Si finalement nous nous appuyons sur la

10 pièce P2772, il s'agit de la troisième version qui commence à la page 103

11 du texte chargé dans le système du prétoire électronique.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'essaie de savoir quelle est la page

13 que j'ai devant moi en ce moment. Tout est si compliqué. Qui a signé ce

14 document, d'après ce que vous dites ?

15 M. MARCUSSEN : [interprétation] CP Weisflogg.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le passage commence par quels mots ?

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous sommes passés à la version 13A, et

18 c'est là que j'ai fait une référence à une arme de calibre 122.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Que représente le document 13A par

20 rapport au document 13 ?

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] Le document 13A, c'est le rapport du témoin

22 qui traite des incidents survenus à Racak les 15 et 16 janvier. C'est un

23 autre document. Peut-être que je suis allé trop vite. J'essayais simplement

24 de dire quel était le document dont nous parlions lorsque nous parlions de

25 l'annexe 13, et c'est à ce sujet que je disais qu'il en existait trois

26 versions différentes, après quoi je suis passé à une autre annexe. C'est

27 dans le cadre de cet autre document que je cherchais à obtenir un

28 éclaircissement quant au type d'arme dont il était question exactement.

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1 Excusez-moi si j'ai créé la confusion en allant un peu trop vite.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bon. D'accord.

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

4 Q. Mon Général, quand avez-vous quitté le Kosovo ?

5 R. J'ai quitté le Kosovo aux environs du 15 mars, si je ne m'abuse,

6 lorsque j'ai eu une permission.

7 Q. Est-ce que vous êtes retourné ensuite au Kosovo ? Est-ce que vous avez

8 été concerné par l'évacuation de la mission de la MVK ?

9 R. Non. La mission a été évacuée avant mon retour.

10 Q. Est-ce que vous êtes retourné au sein de la mission ?

11 R. Je suis retourné au sein de la mission et j'ai retrouvé mes

12 vérificateurs à Ohrid.

13 Q. Où cela se trouve-t-il ?

14 R. En République fédérale de Yougoslavie.

15 Q. Quelles ont été vos fonctions au sein de la MVK par la suite ?

16 R. Après un certain nombre de discussions, le conseil permanent de l'OSCE

17 a décidé de mettre en place une mission qui devait se rendre en Albanie

18 pour traiter de la crise des réfugiés. On m'a demandé d'organiser un organe

19 qui s'est appelé la Force d'information des réfugiés en Albanie de l'OSCE

20 et de la MVK, et c'est ce que j'ai fait. Nous nous sommes déployés en

21 Albanie peu de temps après le 1er avril.

22 Q. Quelles étaient les fonctions exactes que vous aviez dans ce cadre ?

23 R. La mission avait trois fonctions distinctes. D'abord, le mandat était

24 assez large. Il fallait aider le gouvernement albanais à régler la crise

25 des réfugiés. La deuxième fonction était de recueillir des déclarations au

26 sujet du climat dans lequel vivaient les réfugiés et du traitement qu'ils

27 leur étaient réservés avant leur départ du Kosovo, ainsi qu'au sujet des

28 motifs qui les avaient poussés à quitter le Kosovo pour traverser la

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1 frontière. Troisième partie du mandat, elle consistait à mettre en place

2 les éléments nécessaires pour un enregistrement des réfugiés à l'avenir.

3 Q. Est-ce que vous avez rempli ces trois fonctions ?

4 R. Il est certain que dans le temps, cela a été fait. J'ai quitté la

5 région à la mi-mai, mais au moment de mon départ, il est certain, en tout

6 cas c'est ce que je pense, que nous avons apporté une aide importante au

7 gouvernement albanais dans la crise des réfugiés. Nous avons déployé des

8 équipes dans tout le pays, dans toutes les préfectures où ces équipes ont

9 apporté leur aide, leurs conseils et ont aidé à coordonner les

10 communications. Puis, la deuxième fonction qui consistait à recueillir des

11 déclarations, nous avons effectivement recueilli un grand nombre de

12 déclarations de la part de centaines de réfugiés qui traversaient la

13 frontière. Troisième partie du mandat, quand j'ai quitté la région, il est

14 évidemment certain que l'enregistrement n'avait pas encore été réalisé.

15 Q. Est-ce que vous pourriez décrire en quelques mots les modalités de

16 recueil des déclarations que vous appliquiez ? Est-ce que ces personnes --

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vois qu'un conseil de la Défense est

18 debout.

19 M. IVETIC : [interprétation] Non, terminez, terminez votre question.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez vous asseoir, dans ce cas,

21 Maître Ivetic.

22 Mais j'ai une question à vous poser, Monsieur le Témoin. Quelle était votre

23 participation personnelle dans le recueil des déclarations auprès des

24 réfugiés ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Puisque je dirigeais la force d'information au

26 sujet des réfugiés, je circulais dans la région tous les jours et j'ai

27 rencontré des réfugiés en des lieux très différents, dans des camps de

28 réfugiés, dans des lotissements créés à la va-vite, dans une salle de

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1 sports à Tirana, par exemple, qui abritait des réfugiés et sur la route

2 menant à la frontière avec le Kosovo. Tous les jours je rencontrais des

3 réfugiés, et il y en avait pas mal qui venaient me voir dans mon bureau

4 également parce qu'ils reconnaissaient bien sûr les véhicules oranges que

5 nous utilisions comme étant ceux qui se trouvaient également au Kosovo

6 auparavant, et il y a pas mal de nos employés du Kosovo, parce que nous en

7 avions pas mal, qui ont essayé de nous retrouver et de reprendre contact

8 avec nous dans nos bureaux.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ces rencontres quotidiennes avec les

10 réfugiés, vous les avez eues pendant quelle période ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] A partir du moment où nous sommes arrivés sur

12 place, en tout cas moi, personnellement, je crois que c'était du 3 avril

13 jusqu'à mon départ le 12 mai.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic.

15 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que les

16 questions qui viennent d'être abordées par l'Accusation ont déjà été

17 posées. D'après notre interprétation, la Chambre a déjà rendu une décision

18 sur ces questions, déclarant non recevables les éléments de preuve relatifs

19 aux entretiens menés par l'OSCE hors des frontières de la Yougoslavie, et

20 je crois qu'il nous faut revenir sur ce point, parce que ce genre

21 d'éléments de preuve a déjà été exclu, donc nous ne cessons de faire

22 référence à ce même motif. Ce sont des affirmations qui sont faites de

23 façon générale sans possibilité de vérification qui ne sont pas sous

24 serment, les personnes interviewées ne sont pas identifiées, et cetera, et

25 cetera, ce qui réduit considérablement les droits des accusés à confronter

26 ces éléments de preuve avec la réalité, et ce serait une violation de la

27 procédure de les admettre. Je pense qu'il faudrait ne plus avoir à revenir

28 sur ce point et déterminer de façon précise ce qui est recevable et ce qui

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1 ne l'est pas, car nous sommes un peu las de voir l'Accusation revenir

2 constamment sur ces questions qui ont été déclarées non recevables.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, deux points. Le

5 Livre bleu de la MVK, comme on l'appelle, a été versé au dossier, et nous

6 avons précisément discuté de certaines parties de ce Livre bleu qui résume

7 ce qu'ont dit certains réfugiés à la MVK quant à ce qu'ils avaient vécu au

8 Kosovo. Ces extraits ont été admis. Vous vous rappellerez peut-être que

9 dans le contexte de ce débat nous avons parlé de diverses catégories de

10 déclarations, comme celles qui provenaient de services de renseignements

11 avec classement de ces déclarations en catégorie A1, A2, A3, selon leur

12 fiabilité et leur crédibilité. Certaines de ces catégories ont été admises.

13 Donc des éléments de preuve de cette nature sont recevables et ont déjà été

14 admis en l'espèce.

15 Deuxièmement, ce témoin a parlé à de nombreuses personnes qui

16 --

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais avant d'en arriver là.

18 Monsieur Maisonneuve, nous avons ici un débat interne à mener, vous

19 n'avez pas besoin d'être dans le prétoire, donc M. l'Huissier va vous

20 escorter quelques instants hors du prétoire.

21 [Le témoin quitte la barre]

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Monsieur Marcussen.

23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 Le témoin lui-même a parlé d'un certain nombre de témoins qu'il a

25 rencontrés et auxquels il a parlé avec l'aide d'un interprète. Ce témoin

26 peut nous relater des dires, bien sûr, mais il peut de première main nous

27 donner son résumé des conditions dans lesquelles ont eu lieu ces entretiens

28 qu'il a eus avec un certain nombre de personnes qui quittaient le Kosovo.

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1 Ce que j'avais l'intention de vous dire, Monsieur le Président, c'est que

2 je m'apprête à soumettre au témoin deux rapports de la MVK, les rapports

3 MM/15 et MM/16, qui finalement résument les récits faits par les réfugiés à

4 la MVK dans des questionnaires. Je pense que l'expérience personnelle de ce

5 témoin confirmera la fiabilité de ces documents une fois que le témoin les

6 aura eus sous les yeux. Ce qui est dit dans ces documents, c'est que des

7 représentants de la MVK ont parlé à plusieurs centaines de réfugiés venus

8 du Kosovo, qui avaient subi des violences et une brutalité extrême, étant

9 contraint de quitter leurs domiciles et de quitter le Kosovo.

10 Alors, évidemment, la question se résume à savoir si les motifs qui ont

11 poussé des centaines de milliers de réfugiés à quitter le Kosovo sont d'une

12 nature ou d'une autre. C'est donc une question importante dans la thèse de

13 l'Accusation, évidemment. Nous soutenons que si ces éléments sont

14 considérés comme des éléments de ouï-dire, il importe néanmoins aux Juges

15 d'en déterminer le poids, la valeur probante, plutôt que de les déclarer

16 non recevables.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelque chose de plus, Maître

18 Sepenuk ?

19 M. SEPENUK : [interprétation] Monsieur le Président, oui, si vous n'y voyez

20 pas d'inconvénient. Le document MM/15, je ne sais pas si les Juges ont eu

21 la possibilité de lire ce document, mais c'est un document qui se place

22 dans la même situation que "As seen, As told."

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je l'ai sous les yeux.

24 M. SEPENUK : [interprétation] On a la première page, la page K007576 [comme

25 interprété] et la suivante, c'est la dernière.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pas dans mon exemplaire. J'ai le

27 numéro 22 inscrit à la page suivante.

28 M. SEPENUK : [interprétation] Oui, mais nous lisons également, je cite :

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1 "Pendant les quelques premiers jours des bombardements de l'OTAN qui ont

2 commencé le 24 mars," tout en bas de la page 5 721.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

4 M. SEPENUK : [interprétation] Ouis ensuite vous passez à la page suivante

5 et vous vous trouvez face à des tirets. C'est bien cela, Monsieur le

6 Président ?

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

8 M. SEPENUK : [interprétation] C'est là qu'il y a une petite erreur de

9 séquence des pages. Il faudrait ensuite passer à la page K0075726. Le

10 bureau du Procureur a présenté les pages dans un ordre qui n'est pas le

11 bon. Voilà ce que je voulais dire pour faciliter la lecture.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

13 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La différence entre la situation

15 dont nous parlons maintenant et celle qui s'était présentée auparavant,

16 c'est que le témoin que nous avons face à nous aujourd'hui semble avoir

17 personnellement connu et rencontré les réfugiés, et le conseil se

18 souviendra que lorsque M. Abrahams pouvait parler personnellement de

19 certains documents, ils ont été admis. Par ailleurs, s'agissant de la

20 décision que la Chambre a rendue au sujet de "As Seen, As Told" et au sujet

21 de "Under Orders", les Juges ont dit clairement que ces documents ou les

22 éléments de preuve qu'ils contenaient étaient admissibles pour peu qu'ils

23 aient été établis par un organe extérieur. Nous avons choisi de ne pas les

24 admettre parce que nous n'étions pas convaincus de leur fiabilité.

25 Maintenant, à savoir si la situation est différente dans le cas présent,

26 nous avons entendu M. Marcussen qui tient à associer ces éléments de preuve

27 à l'expérience personnelle du témoin. Néanmoins, cela reste une décision

28 qu'il faudra rendre. Nous avons entendu ce que vous avez dit, non seulement

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1 au sujet de l'expérience personnelle du témoin qui a recueilli des

2 entretiens de réfugiés, mais aussi au sujet de la façon dont ces deux

3 documents ont été créés, donc encore une fois nous reportons notre décision

4 à la fin du contre-interrogatoire. Mais la situation sur ce point est un

5 peu différente de celle de Racak. Nous pourrions rendre notre décision

6 après le déjeuner, mais en tout cas après avoir entendu l'ensemble des

7 éléments de preuve.

8 M. IVETIC : [interprétation] J'apprécie, Monsieur le Président. Ce que je

9 voulais souligner --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, Maître Ivetic.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, allez-y.

13 M. IVETIC : [interprétation] Je voulais simplement ajouter que la deuxième

14 page de la pièce en question, celle qui commence par des tirets, le

15 problème principal, c'est que nous n'avons pas entendu nécessairement

16 toutes les observations que le général Maisonneuve pouvait faire au sujet

17 de ces entretiens avec les réfugiés en rapport avec les éléments figurant

18 dans l'acte d'accusation. Nous avons ici une référence à plusieurs crimes

19 présumés commis dans des lieux tels que Vranisht, Gjeshko, Trnje, Lesha, et

20 cetera, qui ne figurent pas dans l'acte d'accusation.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais nous avons entendu des témoins au

22 sujet de certains de ces lieux.

23 M. IVETIC : [interprétation] Certains oui, certains non. Je suis sûr que

24 vous n'aurez rien à redire à tout cela, s'agissant du déroulement de ces

25 dépositions dans le temps.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Monsieur Marcussen.

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je tiens à souligner que les accusations

28 figurant dans l'acte d'accusation indiquent que 800 000 personnes auraient

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1 été expulsées du Kosovo et qu'il ne s'agit pas uniquement d'habitants de la

2 Krajina, donc la déportation --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, c'est peut-être le

4 cas, mais la question est un peu différente en ce moment. Il ne s'agit pas

5 uniquement de savoir si on s'appuiera sur des déclarations générales.

6 [Le témoin vient à la barre]

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons continuer l'audition de ce

8 témoin. Monsieur Maisonneuve, merci de votre patience.

9 Reprenez, Monsieur Marcussen.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation]

11 Q. Mon Général, je pense que j'étais sur le point de vous interroger au

12 sujet des entretiens que vous avez eus -- non, je parlais du choix des

13 réfugiés qui ont été interrogés par la MVK.

14 R. Ce que nous nous sommes efforcés de faire lorsque nous voulions parler

15 aux réfugiés, c'était de trouver au sein d'une foule de réfugiés ceux qui

16 avaient des éléments d'information particulièrement intéressants ou

17 particulièrement précis quant à leur expérience personnelle. Ces personnes,

18 nous les prenions à part et nous leur parlions avec l'aide d'un interprète.

19 Q. De quelle façon ces entretiens étaient-ils enregistrés ?

20 R. Nous avions un formulaire que nous remplissions, enfin, que les

21 vérificateurs remplissaient à l'issue d'une discussion. C'était un

22 formulaire classique avec les questions habituelles, présentant la forme

23 d'une déclaration précise. Le vérificateur signait ensuite en bas de page

24 et en général la personne interrogée signait également, le réfugié.

25 Q. Est-ce que vous avez recueilli vous-même de telles déclarations ?

26 R. Oui. J'ai recueilli une déclaration pour voir ce que vivaient mes

27 vérificateurs.

28 Q. Vous avez dit --

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un éclaircissement, je vous prie.

2 Quand nous avons parlé de "As Seen, As Told", l'une des conclusions, c'est

3 que les éléments d'information fournis étaient anonymes.

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Anonymes, mais pas du point de vue

5 d'absence de nom de la source qui n'était pas enregistré dans le

6 questionnaire. Dans "As Seen, As Told", il n'est pas fait référence du nom

7 des témoins.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tous ces documents sont maintenant

9 divulgués, n'est-ce pas ?

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je le crois. A moins que nous ayons encore

11 à communiquer à la Défense le format expurgé.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que les réfugiés qui ont

13 fait ces déclarations sont identifiés ?

14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, parce que le texte a été expurgé. Ce

15 qui a été communiqué, c'est une version expurgée, en grande partie.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais quel est le sens d'avoir une

17 déclaration signée avec un nom ? Est-ce que c'est simplement pour en

18 assurer la fiabilité ?

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Ce témoin n'a recueilli qu'une seule

20 déclaration personnellement. Nous avons de nombreux autres éléments

21 d'information à notre disposition.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que nous avons cette

23 déclaration ?

24 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pas en tant qu'élément de preuve.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi est-ce que vous ne

26 réfléchissez pas à ces choses tout à fait élémentaires ? Pourquoi ne lui

27 présentez-vous pas la déclaration qu'il a mise lui-même sur le papier et

28 vérifiée lui-même ? Cela nous permettrait d'avancer. Pourquoi avez-vous si

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1 peu de concentration sur les choses que vous voulez prouver dans un

2 prétoire ? C'est vraiment très frustrant.

3 Enfin, poursuivez.

4 M. MARCUSSEN : [interprétation]

5 Q. Mon Général, vous avez dit avoir parlé à d'autres réfugiés. Suis-je en

6 droit de dire que ce n'était pas pour recueillir leurs déclarations ?

7 R. Exact.

8 Q. Vous avez parlé --

9 R. Je leur parlais pour découvrir dans quel état ils étaient, comment ils

10 étaient traités, et comme je l'ai dit, j'avais des contacts quotidiens avec

11 les réfugiés.

12 Q. Est-ce qu'il y avait un choix qui s'opérait dans les personnes avec

13 lesquelles vous aviez eu des contacts ?

14 R. Non. Je circulais parmi eux et je leur parlais, j'en rencontrais

15 certains. Je leur posais des questions générales sur leur situation, sur

16 comment ils avaient été traités et dans quelles conditions ils vivaient.

17 Q. Mais à partir de ces discussions que vous avez eues avec les réfugiés,

18 est-ce qu'un certain schéma a émergé, s'agissant des conditions dans

19 lesquelles les réfugiés avaient quitté le Kosovo ?

20 R. Oui, d'abord ils avaient quitté le Kosovo pour des raisons qui ne leur

21 étaient pas personnelles. Ils avaient été contraints à partir.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Puis-je me permettre de vous

23 interrompre ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être estimerez-vous que c'est un

26 exercice un peu difficile auquel vous n'êtes pas habitué, mais il y a des

27 raisons très valables pour lesquelles je vous pose la question suivante.

28 Est-ce que vous pourriez faire la distinction entre les conclusions qui

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1 vous sont personnelles à la suite de ces entretiens et celles que vous avez

2 pu vous forger en lisant des synthèses de certaines dépositions ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux le faire, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'espère que vous comprenez pourquoi.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est très important pour nous,

7 l'anonymat de ces éléments d'information, on ne connaît pas le nom des

8 réfugiés auxquels vous avez parlé, selon les conditions dans lesquelles ces

9 personnes ont témoigné devant vous, les Juges peuvent accorder un poids

10 différent à ces divers éléments que nous n'avons pas l'intention de

11 contester. Vous pourriez établir cette distinction entre ce que vous avez

12 appris vous-même de leurs bouches --

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] -- et ce que vous avez découvert en

15 lisant les déclarations recueillies par des tiers.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous donner deux exemples. A Tirana,

17 il y a une salle de sport, un gymnase dans lequel j'ai rencontré pas mal de

18 réfugiés auxquels j'ai parlé. Dans ce gymnase, j'ai notamment rencontré un

19 jeune garçon de 15 ans, un Albanais, qui avait perdu contact avec sa

20 famille et qui nous disait avoir marché à partir de sa maison jusqu'à la

21 frontière qu'il a traversée, pour rejoindre un groupe de réfugiés.

22 Dans mon bureau à Tirana, j'ai rencontré deux jeunes gens qui sont venus me

23 voir, des jeunes gens qui étaient Albanais et qui avaient fait partie de

24 ceux qui assuraient ma sécurité au Kosovo, à Prizren. Ils sont arrivés dans

25 mon bureau et m'ont raconté ce qui leur étaient arrivés. Ils avaient été

26 contraints de traverser la frontière. L'un des deux avait une épouse très

27 jeune et un bébé en bas âge. Tous les deux se trouvaient à ce moment-là

28 dans un centre de réfugiés de Tirana. Ces deux jeunes gens étaient venus me

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1 dire leur intention de rejoindre les rangs de l'UCK. Ce sont deux incidents

2 dont j'ai entendu parler personnellement et qui ont eu un certain effet

3 émotionnel sur moi. C'est la raison pour laquelle j'en ai un souvenir très

4 net.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien sûr, nous n'avons rien contre

6 d'entendre ces éléments d'information, Monsieur Marcussen, qui sont plus

7 généraux et qui tout de même reposent sur l'expérience personnelle du

8 témoin.

9 Veuillez poursuivre, Monsieur Marcussen.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci. J'avais l'intention --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais admettez que vous ne devez pas

12 dépasser la limite qui a été fixée par notre décision récente.

13 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je n'avais pas l'intention de revenir sur

14 cette décision. Je voulais simplement remettre dans son contexte ce que le

15 témoin a vécu, sans rien modifier à votre décision.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

17 M. MARCUSSEN : [interprétation]

18 Q. Mon Général, comme vient de le dire M. le Juge Bonomy, pourriez-vous

19 sans ignorer les informations que vous avez reçues et retransmises dans vos

20 rapports, vous concentrez sur les personnes auxquelles vous avez parlé

21 vous-même. A partir des entretiens que vous avez eus avec ces personnes,

22 pourriez-vous décrire de façon générale ce qui vous a été dit au sujet des

23 conditions dans lesquelles ces personnes avaient quitté le Kosovo ?

24 R. Le contexte général était le suivant. Toutes les personnes auxquelles

25 j'ai parlé m'ont dit qu'elles avaient été contraintes à rassembler les

26 quelques effets personnels qu'elles pouvaient embarquer à bord d'un

27 véhicule pour ensuite se diriger vers la frontière sous la contrainte, et

28 traverser cette frontière avec l'Albanie. Chaque fois que j'ai parlé à ces

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1 personnes, je ne parle pas de résumé de rapport, c'est le récit que j'ai

2 entendu. De façon générale, ces personnes arrivaient à la frontière, leur

3 papier d'identité leur était confisqué, y compris parfois leur plaque

4 d'immatriculation retirée de leur véhicule et on leur disait de descendre

5 la route menant à l'Albanie. Bien sûr, Prizren était relié à l'Albanie par

6 une route directe. Je savais exactement qu'elle était la route que ces

7 personnes avaient été contraintes d'emprunter. Voilà les éléments

8 d'informations généraux que j'ai reçus de la bouche des réfugiés auxquels

9 j'ai parlé.

10 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire qui a dit aux réfugiés qu'ils

11 devaient partir ?

12 R. Rien n'était précis à ce sujet, voyez-vous. Les gens les qualifiaient

13 de façon générale comme les autorités serbes.

14 Q. Est-ce qu'on vous a dit d'autres choses au sujet de ces personnes qui

15 auraient dit à la population qu'elle devait partir et quitter le Kosovo ?

16 R. J'ai parfois un peu de mal dans le détail à distinguer entre ce que

17 j'ai entendu moi-même et ce que j'ai pu lire dans des rapports. Je ne

18 m'aventurerai pas à entrer dans les détails, mais ces personnes m'ont parlé

19 d'un traitement très pénible subi par elles.

20 Q. Très bien.

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pourrions-nous maintenant voir la pièce

22 P2772, page 115, annexe MM15. Je remercie Me Sepenuk qui a mis en exergue

23 l'ordre défectueux des pages qui ont été introduites dans le système

24 électronique.

25 Q. Ce document, vous l'avez fourni au bureau du Procureur, je suppose que

26 je suis en droit de dire que vous le connaissez.

27 R. Oui.

28 Q. Pourriez-vous nous dire comment ce document a été établi ?

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1 R. Ce document a été établi par les gens qui travaillaient pour moi au

2 centre d'information des réfugiés et repose sur les déclarations

3 recueillies de la bouche des réfugiés quant à la situation vécue par eux au

4 Kosovo à l'époque où ils ont été contraints de quitter le Kosovo.

5 Q. Est-ce un document que vous avez approuvé à l'époque ? Je vois qu'il a

6 été introduit dans un rapport bihebdomadaire au sujet des droits de

7 l'homme.

8 R. Oui.

9 Q. De votre avis, ce document rend compte de façon réaliste de ce que la

10 MVK a pu voir et entendre de la part des réfugiés en Albanie ?

11 R. Ce document en rend compte de façon précise.

12 Q. Depuis le début de cette période du 2 au 15, c'est la période qui est

13 couvert dans ce document ?

14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, restons sur la même pièce, page 121 à

15 présent, annexe M/16.

16 Q. Quel est ce document ?

17 R. Comme je l'ai déjà dit, j'ai quitté la mission le 12 mai, je voulais au

18 préalable rédiger un rapport d'avancement de la mission, un rapport global

19 quant aux diverses tâches qui avaient été entamées par la force

20 d'information au sujet des réfugiés et à l'avancement de ces tâches. Je

21 voulais remettre ce rapport au siège de l'OSCE à Vienne. C'est un rapport

22 établi par ceux qui travaillaient pour moi et que j'ai approuvé avant son

23 envoi à Vienne.

24 Q. Ce rapport couvre la période allant du début avril jusqu'au 1er --

25 R. C'est exact, c'est exact. Nous avons essayé de diviser la région en

26 plusieurs secteurs et de couvrir toutes les provinces albanaises dans ces

27 annexes.

28 Q. Les éléments d'information que l'on trouve dans ce document c'était les

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1 éléments que nous avions dans le premier document auxquels sont ajoutés

2 d'autres éléments d'information que vous aviez recueillis pendant un mois

3 de plus; c'est bien cela ?

4 R. C'est exact.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] A quelle page du document en êtes-vous

6 maintenant ?

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] La page 8 du document, page 129 de la

8 version électronique.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation]

11 Q. Dans le deuxième chapitre, le grand B, situation au Kosovo du point de

12 vue des droits de l'homme, nous avons ce texte. Je vous demande s'il rend

13 compte de votre point de vue personnel au sujet de la situation au Kosovo

14 compte tenu des informations que vous aviez recueillies de la bouche des

15 réfugiés et de la bouche des vérificateurs de la MVK qui étaient en contact

16 avec eux ?

17 M. IVETIC : [interprétation] Je crois devoir faire objection à cette

18 question, car le Procureur a utilisé le terme "vous". Or je ne vois pas de

19 distinction claire entre ce que le général a entendu lui-même et ce que les

20 membres de son équipe ont entendu. Je crois qu'une différence doit être

21 constamment établie entre les deux choses.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Autrement dit, on vous demande le

23 fondement de votre question, Monsieur Marcussen.

24 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous avons face à nous le chef de la

25 mission d'information qui reçoit des renseignements de la bouche des

26 personnes travaillant pour lui ainsi que de la bouche de témoins interrogés

27 par lui, de réfugiés qu'il rencontre un peu partout en Albanie, dans des

28 camps de réfugiés ou d'autres endroits. La question que je lui pose

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1 consiste à lui demander si ce texte rend compte fidèlement de la façon dont

2 lui-même a vécu les événements liés au départ des réfugiés du Kosovo.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il a déjà répondu à cette

4 question, car il vous a dit qu'il avait rédigé ce rapport à la veille de

5 son départ, je parle du rapport destiné à Vienne, que ce rapport avait été

6 établi par les gens travaillant pour lui, mais rendait compte de sa

7 position, donc vous avez la réponse. Je ne pense pas qu'il soit justifié

8 d'aller plus loin.

9 L'heure est venue de nous séparer, d'ailleurs.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] C'est la fin de mon interrogatoire

11 principal. J'aurais une question administrative à soulever, mais elle peut

12 attendre.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Nous devons suspendre pour une

14 heure pour le déjeuner. Encore une fois, Monsieur Maisonneuve, M.

15 l'Huissier va vous montrer où vous passerez cette pause.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

17 [Le témoin quitte la barre]

18 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, j'avais préparé,

19 avant de venir ici ce matin, une synthèse des déclarations de M.

20 Maisonneuve et du compte rendu de sa déposition dans l'affaire Milosevic.

21 Ce sont des documents que j'ai annexés à sa déclaration préalable, et je

22 crois qu'ils peuvent être utiles en tant que lecture pendant la pause, donc

23 je suis tout à fait prêt à en distribuer des exemplaires aux Juges de la

24 Chambre et au conseil de la Défense, s'ils le souhaitent.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 M. MARCUSSEN : [interprétation] M. l'Huissier a quitté le prétoire, mais il

27 assurera cette distribution dans quelques instants.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Nous reprendrons à 13

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1 heures 45.

2 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 48.

3 --- L'audience est reprise à 13 heures 46.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, est-ce que vous

5 sauriez être plus précis, à présent ?

6 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, je vais m'y efforcer, Monsieur le

7 Président. Je vais faire référence au compte rendu, d'audience dans l'ordre

8 qui sera présenté dans la requête, le paragraphe 3 de la requête. Je pense

9 que vous avez déjà pris votre décision concernant la première objection qui

10 correspond à la page 568 [comme interprété].

11 Ensuite, il y a une portion qui a fait l'objet d'une objection qui

12 figure dans la deuxième colonne du tableau. Il s'agit des pages 5 778

13 jusqu'à 5 805.

14 Je considère que toutes ces pages sont pertinentes. Elles sont toutes

15 pertinentes, et je vous ai parlé quelles sont les portions que je considère

16 pertinentes dans cette section-là du compte rendu d'audience. Par exemple,

17 au niveau de la page 5 779, vous avez la question des chars à Racak qui

18 tiraient sur des maisons où il y avait des maisons, et les vérificateurs

19 l'ont vu. Ceci s'étale sur plusieurs pages.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Là, il s'agit des événements de Racak,

21 précisément. Devant cette Chambre de première instance, on n'a pas encore

22 présenté des éléments indiquant cela.

23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous, ce que nous essayons de démontrer,

24 c'est que les chars de l'armée yougoslave étaient là en train de tirer

25 pendant l'opération. Nous ne voyons pas comment on peut présenter ces

26 éléments sans dire ce qui s'est passé à Racak.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'allons pas examiner l'opération

28 de Racak, point à la ligne.

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1 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, mais nous considérons que c'est

2 pertinent --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, c'est peut-être pertinent, mais

4 cela ne fait pas partie de l'acte d'accusation.

5 M. MARCUSSEN : [interprétation] Mais c'est une autre question qui se pose,

6 c'est la question de savoir qui avait le contrôle des opérations qui se

7 sont déroulées entre le mois de mars 1998 --

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous allez nous demander de prendre en

9 compte des éléments par ouï-dire de cette espèce concernant la présence des

10 chars tirant sur des maisons ?

11 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il ne s'agit pas seulement des éléments par

12 ouï-dire, il s'agit des éléments de déposition de différents officiers qui

13 figurent dans les pièces jointes 13, 13A, 13B, et cetera, dans les éléments

14 tels que MM/8 et MM/7, où l'on parle de la présence des chars à Racak. Nous

15 n'essayons pas de vous demander de vous pencher sur cet incident et

16 d'établir si 40 ou 50 personnes ont été tuées et si l'UCK était là ou non,

17 puisque ce chef ne figure plus dans l'acte d'accusation, mais en revanche

18 il y a d'autres points qui sont pertinents par rapport à ce qui s'est passé

19 à Racak.

20 Tout d'abord, c'est le premier grand événement qui s'est déroulé en 1999,

21 ensuite vous y voyez ce modèle de comportement de l'armée yougoslave et de

22 la coopération du MUP, c'est-à-dire le modèle de coopération entre les deux

23 entités, et il nous montre aussi cette utilisation, ce recours à la force

24 qui est absolument excessif. Le témoin nous a dit que tirer avec un char

25 dans une maison de particulier, habitée par des civils, que cela ne

26 correspond pas à une utilisation de force qui serait proportionnée. Tout

27 cela a été vu par les vérificateurs qui étaient présents à Racak. Ils ont

28 vu les chars tirer sur des maisons où habitaient les civils et ils sont

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1 allés les aider, et les civils étaient au sous-sol.

2 Tout cela nous montre que l'armée yougoslave, la VJ était bel et bien

3 présente et active à Racak. Tout cela aurait été coordonné au niveau de la

4 brigade et peut-être même à un niveau supérieur avec le MUP à Pristina.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous voulez, on continue, mais je

6 ne suis absolument pas convaincu.

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je vais continuer, et on va voir quelle

8 sera votre décision.

9 Le paragraphe 5 782, le témoin a expliqué qu'un char a tiré sur une maison

10 et que ceci correspondait à une utilisation excessive de la force. Le

11 paragraphe 5 786 --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de continuer, ligne 24, à la

13 page 5 781, lignes 8 et 9 de la page 5 783, pour moi il s'agit là d'élément

14 d'ordre général, et cela a un caractère parfaitement général par rapport à

15 la nature du témoin.

16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection à ce que les

17 pages 5 795, ligne 8, et ligne 10, soient enlevées, puisque là on parle des

18 corps qui gisaient, et cetera, et je sais que ceci est beaucoup trop

19 détaillé. Il faudrait peut-être l'enlever. Mais tout le reste est

20 important, puisque ceci va de la question de coordination des forces

21 impliquées, et cetera.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous examinez la page 5 783, ligne

23 19 ou ligne 20, on peut dire : "Pendant le restant de votre séjour au

24 Kosovo, il est arrivé que vous voyiez des forces serbes dirigées les armes

25 lourdes vers les structures civiles."

26 Pourquoi avez-vous besoin de quoi que ce soit de plus ?

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Attendez, je suis en train de vérifier

28 cela. Attendez un instant, s'il vous plaît.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il dit cela plus loin. Il dit : "Il

2 existait un modus operandi de la part des forces serbes où toute

3 provocation, aussi petite soit telle, était suivie d'une utilisation

4 disproportionnée de la force contre l'UCK et autres auteurs, et ceci vous

5 donne un parfait exemple de l'utilisation disproportionnée ou démesurée de

6 la force." Ensuite, il cite un exemple, un exemple qu'il a d'ailleurs donné

7 aujourd'hui à nouveau au cours de sa déposition, donc ceci déjà figure déjà

8 parmi les éléments de preuve.

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je n'étais pas sûr quelle serait votre

10 décision. Vous savez, c'est difficile quand vous présentez un témoin en

11 vertu de l'article 92 ter --

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ensuite, on revient à la date du 15

13 janvier, et là on est encore sur une mauvaise route.

14 M. MARCUSSEN : [interprétation] Vous savez, c'est le contexte de

15 l'opération qui nous intéresse. Je dois répéter cela. Il y a effectivement

16 quelques éléments que nous devons enlever, mais tout le reste est

17 important, puisque ce qui nous intéresse nous, le Procureur, c'est

18 justement tout le contexte de l'opération --

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez continuer.

20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Ensuite, à la page, là, je vais passer

21 quelques pages et j'en arrive à la page 5 786 où nous avons la discussion

22 de la pièce jointe MM/8 où Petrovic confirme la participation de l'armée

23 yougoslave.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle ligne ? Page 5 786, mais quelle

25 ligne ?

26 M. MARCUSSEN : [interprétation] Ligne 15. Cela débute à la ligne 15. Vous

27 savez des problèmes avec le compte rendu; c'est que nous n'avons pas de

28 référence faite aux pièces jointes précises, et c'est pour cela que j'ai

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1 souligné cela dans ce tableau juste avant la pause. C'est pour cela que je

2 vous ai présenté ce tableau. Ligne 15 ou 16, on discute de la pièce MM/8.

3 M. Petrovic confirme la participation de la VJ. A la page 5 789, nous avons

4 la référence au niveau de la ligne 8 --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qui est Petrovic ?

6 M. MARCUSSEN : [interprétation] Petrovic était l'officier de liaison de

7 l'équipe de combat ou des équipes de combat des chars qui se trouvaient à

8 Racak.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Continuez.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Ensuite, page 5 789, ligne 8, Jelesic, qui

11 est le commandant de l'équipe de combat, explique -- dans le document, si

12 vous voulez, à l'appui, on dit qu'ils étaient en train de mener à bien les

13 opérations d'entraînement sur le terrain, le MUP faisait quelque chose dans

14 Racak, et qu'il n'y avait pas de connexion entre les deux opérations.

15 Ensuite, le témoin nous propose une explication à la page 5 790, où il

16 commence à la page 14, où il dit que c'est complètement incroyable qu'il ne

17 serait pas allé aussi loin que cela, que ce sont des conclusions un peu

18 trop tirées et il a dit que les gens tiraient sur leurs propres hommes ou

19 quelque chose comme cela, mais que c'était complètement incroyable ce qu'il

20 disait, la proposition qu'il donnait.

21 Ensuite, à la page suivante, ligne 9, il parle d'une opération à laquelle

22 ont participé une centaine d'officiers du MUP et des chars. Il dit que

23 c'était quelque chose qui était coordonné au niveau de la brigade. Ensuite,

24 au niveau des pages suivantes, il y a eu des discussions sur les origines,

25 les bases de ce qu'affirmait le témoin, à savoir si l'armée yougoslave a

26 effectivement tiré sur des maisons à Racak. A la page 5 793, ligne 4, vous

27 y trouvez une discussion concernant la pièce MM/13, où il a été confirmé

28 que sur un des officiers participants, vous aviez des centaines des

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1 officiers du MUP ou de l'armée yougoslave. Ensuite, ceci s'étale sur

2 plusieurs pages.

3 A la page 5 796, le témoin dit qu'il se rappelle que les hommes et les

4 femmes ont été séparés par les forces qui opéraient à Racak. Ensuite, vous

5 avez des documents à l'appui de cette pièce jointe MM/13A, qui est une

6 évaluation du témoin, le rapport qu'il a écrit sur les événements à Racak

7 qui ont eu lieu les 15 et 16 janvier 1999, où il propose que l'armée

8 yougoslave avait en effet supporté et appuyé l'opération du MUP sur un

9 territoire large. Ensuite, il continue à expliquer cela au niveau de la

10 page 5 798.

11 Au niveau de la page 5 800, il y a la description de ce qui s'est passé le

12 17 mars quand le juge d'instruction Marinkovic est arrivé à Racak avec une

13 équipe du MUP pour mener à bien son enquête. Vous avez déjà entendu

14 d'autres témoins, Drewienkiewicz, et je pense à Richard Ciaglinski. Ceci a

15 été accepté, ceci a été corroboré --

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la signification de cela ?

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Le témoin dit qu'il y avait eu une

18 provocation, un acte de provocation au moment où le MUP rentre dans Racak

19 pour mener à bien son enquête, et que le juge d'instruction n'a pas accepté

20 l'offre que l'UCK facilite le processus d'enquête en étant présent et en

21 offrant une petite équipe de protection. Le témoin a dit que le MUP a

22 envoyé beaucoup d'éléments qui étaient là et que ceci a attiré pas mal de

23 tirs de l'UCK, et effectivement c'était le cas.

24 Si vous voulez, tout ceci va corroborer la thèse que les forces de la RFY

25 et de Serbie agissaient de façon provocatrice, et nous avons déjà entendu

26 Drewienkiewicz à ce sujet. Il a parlé de Podujevo.

27 A la page 5 804, il y a une objection par rapport à la pièce MM/14, où on

28 entend la plainte formulée par le témoin en direction de Drinic, les sites

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1 où se trouvait l'UCK, leur disant de quelle façon ils devaient se conduire

2 à Racak. Ceci va du caractère impartial de l'UCK. Nous ne proposons rien

3 d'autre à part ceci.

4 Je pense que vous avez aussi parlé de l'objection concernant la page 5 821,

5 lignes 17 à 23. Mais je vais répéter notre point de vue là-dessus. Il

6 s'agit de la coordination, de la coopération entre le commandant de cette

7 équipe de combat qui se trouvait à Racak, et cela n'a rien à voir avec

8 l'événement particulier et concret qui s'est produit à Racak.

9 Ensuite, nous avons une objection concernant toute une autre portion de cet

10 élément qui va de la page 5 821 jusqu'à la page 5 853. Nous serions tout à

11 fait d'accord d'exclure la page 5 840, ligne 16, ou 5 844, ligne 7, mais

12 aussi 5 844, lignes 24 jusqu'à la page 5 850, ligne 17. Le restant est

13 quelque chose qui est pertinent en l'espèce pour des raisons que je vais

14 vous énumérer. A la page 5 834, nous avons les détails concernant les

15 vérificateurs sur le terrain parlant de leur capacité d'observer cette

16 unité de chars en train de tirer sur des maisons. Ensuite, vous avez des

17 informations concernant les chars qui tiraient effectivement sur des

18 maisons. A la page 5 844, vous avez la discussion sur les victimes, est-ce

19 que c'était ou non les membres de l'UCK. C'est quelque chose qui nous

20 intéresse, nous, le bureau du Procureur, parce que c'est très proche de

21 l'endroit où le crime a été produit. C'est quelque chose qui est intimement

22 lié à l'endroit.

23 Nous soulevons notre objection quant à l'objection formulée par la Défense

24 parce que nous ne savons pas du tout comment va se présenter

25 l'argumentation de la Défense. Si la Défense souhaite dire que tous les

26 gens qui ont été tués à Racak habitaient -- enfin, tous les gens qui ont

27 été tués dans les maisons à Racak ont été en réalité les combattants de

28 l'UCK, nous aurons besoin de ce témoin pour justement dire le contraire.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi voulez-vous que la Défense

2 argumente que tous ceux qui ont été tués à Racak étaient les combattants de

3 l'UCK ?

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne sais pas encore ce qu'ils vont dire.

5 Je ne peux pas le dire.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais cela a été la grande question qui

7 s'est posée au cours de l'affaire Milosevic. Pourquoi voulez-vous que la

8 Défense présente des éléments allant dans ce sens, de tels arguments ?

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne fais que faire des conjectures. Je me

10 dis qu'ils pourraient tout à fait dire : écoutez, il s'agissait là d'une

11 opération tout à fait légitime, l'UCK a dit qu'il s'agissait d'un massacre

12 alors que ce n'était pas vrai, il y avait un motif politique derrière cela,

13 et cetera.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne vous demande pas de faire votre

15 argumentation, mais de me répondre tout simplement. Nous avons décidé que

16 vous ne pouvez pas parler de la question de Racak. Vous pouvez dire qu'il y

17 avait éventuellement des chars qui tiraient sur des maisons, mais sans pour

18 autant entrer dans tout l'argumentaire au sujet de Racak.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Concernant cette question de la position

20 des chars, je pense qu'un témoin vous dit qu'à partir du moment où on vous

21 tire dessus avec l'infanterie légère, vous ne déployez pas un char pour

22 répondre et pour tirer dans une maison.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous n'avons pas besoin d'entendre

24 parler de Racak pour apprendre cela. Il nous a déjà dit cela. Pourquoi vous

25 nous donnez cet exemple spécifique ? Vous nous parlez de la présence de

26 l'UCK, on sait qu'ils ont été là, et quels étaient les risques pour les

27 forces serbes qui étaient éventuellement là en train de mener à bien leur

28 opération. Ceci devrait vous suffire. J'ai l'impression que vous essayez

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1 d'introduire par la petite porte des éléments concernant Racak. Si vous

2 vouliez que ceci soit acceptable, vous auriez dû demander la permission de

3 présenter de tels moyens.

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Non, non, nous n'essayons pas du tout de

5 revivre les allégations concernant le meurtre qui a été commis à Racak. Ce

6 que j'essaie de vous dire, c'est que ce témoin dit que les victimes qu'il a

7 vues n'étaient pas des membres de l'UCK. Nous anticipons la présentation

8 des moyens de la Défense. Je pense que nous sommes obligés de le faire, et

9 nous essayons de le faire. Si vous pensez que pour l'instant ceci n'est pas

10 utile, nous allons l'accepter, bien évidemment. Nous pourrions dire

11 exactement la même chose pour la partie du transcript qui figure à la page

12 5 850, à la ligne 18, est-ce que c'est une base de bonne foi si on dit tout

13 simplement qu'il y avait un massacre qui a eu lieu à Racak. C'est Walker

14 qui a fait cette déclaration. Nous attirons votre attention là-dessus

15 uniquement dans l'anticipation de la présentation des moyens de la Défense.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais quelle est la base exactement

17 pour poser cette question-là ? Vous dites : j'ai peur de ce que la Défense

18 va dire, alors je vais présenter tout ce que je peux pour me prémunir.

19 Quelle est la base exacte, la base que vous présentez ? Est-ce que vous ne

20 soulèveriez pas une objection s'ils essayaient de faire exactement la même

21 chose, s'ils essayaient d'explorer justement cette question-là ?

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] S'ils sont en mesure de prouver que c'est

23 parfaitement pertinent par rapport à leur présentation des moyens, c'est-à-

24 dire si par exemple l'UCK était partiale ou non, je pense que je le

25 permettrais probablement. Il y a eu le contre-interrogatoire de nombreux

26 officiers de la Mission des observateurs aux Kosovo, des officiers

27 supérieurs ou des personnes qui appuyaient la Mission des observateurs au

28 Kosovo, et vous ne pouvez pas leur dire : vous ne pouvez pas témoigner,

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1 puisque vous êtes partiaux. S'ils ne viennent pas, je pense que la seule

2 présentation pour nous, s'ils ne viennent pas se présenter, s'ils ne

3 viennent pas déposer, je pense que l'autre option serait de le présenter

4 pendant les moyens en réplique.

5 Ensuite, les pages du transcript 5 855 jusqu'à 5 892. Il s'agit des

6 portions du transcript de l'affaire Milosevic. Ceci a été largement

7 couvert. Nous pourrions effectivement exclure ces passages.

8 Ensuite, l'objection par rapport aux pages 5 903 jusqu'à 5 909, à

9 nouveau, c'est quelque chose qui a trait à Walker, page 5 904, ligne 16

10 jusqu'à 5 907, ligne 7. Je pense qu'il faudrait accepter cela pour les

11 raisons que j'ai déjà soulevées. Pour les autres parties de transcript qui

12 ont fait l'objet des objections, ceci ne nous pose pas de problème.

13 Je suis désolé si je suis un peu trop en détail, mais il y avait beaucoup

14 de questions à couvrir.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est tout à fait normal, vous deviez

16 traiter de toutes les questions qui ont été posées et de toutes les

17 questions qui posaient problèmes.

18 M. MARCUSSEN : [interprétation] En ce qui concerne la déclaration, je ne

19 sais pas si vous voulez que j'en parle à nouveau.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] Là, il s'agissait d'une objection formulée

22 par rapport aux paragraphes 30 à 36. Il s'agit finalement du même

23 argumentaire que celui que je viens de vous présenter au compte rendu

24 d'audience. La question qui se pose, et si oui, dans quel cadre, quel était

25 son rôle. Vous avez par exemple le paragraphe 36 qui est plutôt relatif aux

26 gens qui travaillaient pour la Mission des observateurs au Kosovo quand ils

27 aidaient les gens blessés à Racak. Effectivement, nous ne devrions pas nous

28 appuyer là-dessus. Effectivement, nous pourrions enlever ceci de la

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1 déclaration, nous sommes d'accord. Ceci porte sur des questions qui ont

2 déjà été évoquées.

3 Paragraphes 45 à 50, encore une fois il s'agit de la même question. Cela

4 couvre certaines de ces annexes, annexe 13, 13A et 13B en annexe à la

5 déclaration. Encore une fois, la question qui se pose ici est celle de

6 savoir s'il y avait une coopération entre le MUP et la VJ à Racak et s'il y

7 a eu un recours excessif à la force. Je ne sais pas si c'est nécessaire

8 pour moi de répéter cela. J'avance dans mon argument que ceci est pertinent

9 pour la présentation des moyens à charge de l'Accusation, et nous aimerions

10 pouvoir aborder cette question.

11 Je souhaite rassurer les Juges de la Chambre : nous n'essayons pas de

12 faire intervenir Racak et de le faire entrer par la petite porte. Nous

13 essayons d'arguer du fait que l'objet de ces éléments de preuve est

14 différent. Cela porte sur le lien, l'existence d'une entreprise criminelle

15 commune, la participation de l'accusé dans ce que nous avons appelé une

16 campagne coordonnée au Kosovo, en tout cas du mois de mars 1998 jusqu'à la

17 fin de la période citée à l'acte d'accusation. Je souhaite simplement

18 insister sur ce point.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les autres, pour ce qui est des deux

20 derniers points et des pièces qui sont indiquées aux paragraphes 7 et 8 ?

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je crois que je n'ai rien à ajouter par

22 rapport à ce que j'ai dit. Je crois que nous avons parcouru chacune de ces

23 pièces, et j'ai expliqué lesquelles étaient pertinentes.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons peut-être un problème.

25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pardonnez-moi.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous essayez de faire intervenir la

27 connaissance personnelle du témoin sur l'Albanie, je vous recommande de lui

28 poser des questions complémentaires. Ce que nous cherchons à savoir, c'est

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1 ceci. A la fin, sur la base de ces documents qui concordent avec son

2 impression à lui, vous ne pouvez pas poser cette question-là. Ce que vous

3 auriez pu faire, vous auriez pu poursuivre sur cette voie et lui demander

4 quelles étaient ses impressions sur les circonstances de façon générale,

5 selon l'appellation donnée, et vous auriez pu lui demander de clarifier ces

6 questions-là.

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Nous parlons ici des dernières pièces, des

8 toutes dernières pièces ? Peut-être qu'il y a une confusion.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] MM/15 et MM/16.

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Peut-être qu'il y a déjà confusion eu égard

11 à ce que vous venez d'évoquer.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Décrire MM/16 comme quelque chose qui

13 était un condensé de "As Seen, As Told", certainement, enfin, la dernière

14 partie, cela me semble correspondre en tout cas à la dernière partie que

15 l'on retrouve dans le document, la pièce MM/15.

16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Dans mon argument est présenté cela. J'ai

17 dit qu'il y avait une objection eu égard à une série de questions que j'ai

18 posées.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, si vous en avez terminé, je

20 crois que je vous recommande fortement de recueillir les réponses du témoin

21 eu égard à ses connaissances personnelles et à son expérience dans le cas

22 où ceci serait exclu, j'entends par là, --

23 M. MARCUSSEN : [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez y réfléchir.

25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je crois que le témoin a indiqué qu'il

26 était sûr d'après les connaissances dont il disposait que des gens avaient

27 été chassés de chez eux par les forces de la RFY et de Serbie, mais qu'il

28 n'était pas en mesure de dire cela à partir des documents qu'il avait lus

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1 ni de débats personnels ou des discussions qu'il avait eus avec des gens ni

2 de savoir si les actes spécifiques, tels que les meurtres et des choses

3 comme cela, avaient eu lieu. Je ne pense que ceci ne me permet pas ou sont

4 des éléments trop minces pour me permettre de présenter ces documents par

5 l'intermédiaire de ce témoin, et de parler de personnes qui ont été

6 contraintes à quitter le Kosovo.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le MM/16, c'est un rapport qu'il a

8 corrigé et suivi, la compilation sur la situation qui s'est déroulée le 11

9 mai lorsqu'il est parti. Mais c'est à vous évidemment d'en décider, et

10 savoir quelle voie vous entendez suivre.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, avez-vous quelque

13 chose à ajouter ?

14 M. IVETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je crois que tout

15 a été dit. Nous nous en tiendrons à cela.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Tout ce que nous en mesure de faire à

17 ce stade de la procédure, c'est d'orienter ou en tout cas de donner des

18 conseils, comme nous venons de le faire avec M. Marcussen en ce qui

19 concerne les documents qui peuvent être comparés à "As Seen, As Told".

20 Notre décision concordera avec la décision qui sera prise eu égard à "As

21 Seen, As Told". Ceci consistera à exclure les documents qui sont de même

22 nature.

23 Pour ce qui est de Racak, des éléments de preuve qui portent sur la

24 coordination entre les forces et un recours excessif à la force, dans le

25 sens restreint du terme, la manière dont l'Accusation a utilisé ce terme, à

26 savoir l'utilisation d'armes lourdes contre ce qui semble être des biens

27 dans le pays, les éléments de preuve à caractère général seront admis. Mais

28 pour ce qui est des éléments de preuve qui portent sur les faits

Page 11107

1 incriminés, les meurtres de Racak et cetera, ces éléments-là ne seront pas

2 admis. Donc, nous devrons au terme de cet exercice parcourir les différents

3 passages, et rendre une ordonnance qui précisera cela, quelles passages ou

4 quelles pièces peuvent être prises en compte, et quelles pièces ne peuvent

5 pas être prises en compte. Ce sera fait plus tard dans la journée. Donc, ce

6 n'est pas quelque chose que nous pouvons faire dans le contexte de

7 l'audition de ce témoin. Lorsque tout ceci sera terminé, plus personne ne

8 sera dans le noir, et vous connaîtrez notre position définitive. Mais ceci

9 ne peut pas être fait à l'instant.

10 Donc, le témoin revient pour le contre-interrogatoire.

11 [Le témoin vient à la barre]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous serez content de n'avoir eu que

13 des guerres, et que vous n'ayez eu qu'à vous battre pendant des guerres. Je

14 crois que c'est M. Sepenuk qui va commencer.

15 L'équipe de la Défense, vous avez la parole.

16 Contre-interrogatoire par M. Sepenuk :

17 Q. [interprétation] Bonjour, Mon Général. Je m'appelle Norman Sepenuk, et

18 je suis l'avocat du général Ojdanic. J'allais commencer par un contre-

19 interrogatoire assez classique. Il y a quelque chose qui m'a fait réfléchir

20 ce matin lorsque vous vous êtes appelé, et vous avez souri, vous avez dit :

21 "Je ne suis qu'un simple soldat," et je voulais simplement parler de ceci

22 pendant quelques instants, et l'esprit d'un soldat que ce soit un soldat

23 canadien, américain ou un soldat serbe, car je crois que vous pouviez nous

24 faire preuve d'une certaine clairvoyance à propos de quelque chose dont

25 nous ne savons que peu.

26 Vous avez parlé d'une réunion que vous avez eue en présence du général

27 Delic -- colonel Delic, pardonnez-moi. J'ai l'habitude en fait d'utiliser

28 le terme de général. Inutile d'analyser tout ceci. Les Juges de la Chambre

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1 ont entendu parler de cela.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est peut-être parce qu'il est

3 maintenant général, général Delic. C'est cela qui est à l'origine de cette

4 confusion.

5 M. SEPENUK : [interprétation]

6 Q. Je crois que vous avez en quelques années gravi les échelons et je

7 crois que vous avez estimé que le colonel Delic était un soldat

8 professionnel ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Est-il exact de dire que la VJ, l'armée a coopéré et a travaillé avec

11 vous de façon générale, de façon adéquate pendant les trois mois que vous

12 avez passé au Kosovo ?

13 R. Je répondrais de façon générale oui, mais il y a une différence entre

14 Delic et le commandant de la Brigade Urosevac.

15 Q. Vous vous parlez du colonel Jelic ?

16 R. C'est exact.

17 Q. Sans entrer dans un débat --

18 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

19 M. SEPENUK : [interprétation] Sans entrer dans un débat parce que le

20 colonel Jelic a dit qu'il était sur le terrain, mais il vous a rencontré

21 avec le colonel Kotur un peu plus tard. Il y a une confusion à cet égard,

22 mais de façon générale vous étiez satisfait de leur comportement, ils

23 réagissaient de façon professionnelle et faisaient ce qu'ils devaient

24 faire ?

25 R. Oui.

26 Q. La réunion que vous avez eue avec le colonel Delic, ceci se trouve au

27 niveau de la pièce MM/6 à la page 73, M. Marcussen vous a posé des

28 questions à ce sujet. Vous étiez tous les deux, vous et le colonel Delic.

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1 Je crois qu'il y avait le commandant Morwood, commandant de Corps d'armée,

2 membre de --

3 R. Oui.

4 Q. Vous étiez tous les deux, vous appreniez à vous connaître. Dix ou 11

5 jours plus tard, vous étiez sur le terrain. Vous avez commencé d'abord par

6 Vienne, ensuite Pristina, Prizren, et le 15 décembre vous étiez à Prizren

7 et vous avez appris à vous connaître. Vous avez passé trois mois jusqu'au

8 15 juillet [comme interprété].

9 R. C'est exact.

10 Q. Vous avez commencé à parler du terrorisme, le colonel Delic a dit : On

11 ne peut pas tolérer le terrorisme. Vous, vous avez dit : Et nous, au Canada

12 non plus, nous ne tolérons pas la résistance armée non plus. Il a répondu :

13 Nous ne pouvons pas accepter le terrorisme, mais nous n'allons pas

14 provoquer un quelconque incident. Ensuite, on arrive à un moment où M.

15 Marcussen vous pose une question. Encore une fois, vous avez fait un effort

16 pour vous connaître les uns les autres et vous avez dit au colonel : Vous

17 venez d'où, vous ? Il a répondu : Ma famille est maintenant à Belgrade.

18 J'ai des rapports affectifs avec ces territoires, comme nous tous - et

19 c'est souligné dans le compte rendu, "tous" est souligné, "(Serbes) nous

20 allons protéger le Kosovo avec nos vies, les monuments historiques et le

21 patrimoine."

22 Ensuite, M. Marcussen est passé à un autre sujet, donc cela s'est arrêté

23 là. Est-ce que vous pourriez -- quel était le sens de tout ceci, Mon

24 Général ? Bien sûr, il y a une raison pour laquelle M. Marcussen vous a

25 posé la question et vous avez répondu. Est-ce que vous pouvez nous en

26 parler un petit peu ? Quel est le sens de tout cela ? Quel était le sens

27 pour vous ?

28 R. Ceci m'a montré quelles étaient les attaches affectives que le colonel

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1 Delic avait, et cela indiquait quels étaient les rapports des Serbes avec

2 le Kosovo.

3 Q. Bon, c'est quelque chose de naturel. Cela semble important. C'est

4 certainement par rapport à ce contexte dont nous parlons, c'est

5 certainement le cas. Vos impressions initiales, vous en avez parlé dans un

6 document une semaine à peu près après votre arrivée à Prizren.

7 R. Hm-hm.

8 Q. MM/2. Vous avez dit : "Le prochain centre régional doit s'ouvrir demain

9 à Pec, mais je ne peux pas m'empêcher que le Canada n'a pas beaucoup

10 avancé, quand bien même nous avons eu l'occasion de prendre le premier

11 commandement. Nous étions les premiers à Prizren. J'ai eu des interviews,

12 j'en ai eus trois avec des journalistes étrangers. Je n'ai pas vu de

13 communiqués de presse ni de conseils médiatiques. Est-ce que les médias

14 canadiens n'en tiennent pas compte ?"

15 Simplement, c'est une fierté tout assez compréhensible, et les

16 personnes au Canada peuvent savoir que le pays a ouvert le premier centre

17 régional au Kosovo, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Tout à fait compréhensible. Je pense que c'est compréhensible que le

20 colonel Delic exprime ses émotions et ses sentiments par rapport à son

21 pays.

22 R. Tout à fait.

23 Q. Lorsque vous, vous venez de l'étranger, vous simplement, quel est le

24 terme que vous avez utilisé ? Vous ne voulez pas utiliser le terme de

25 terrorisme. Quel était le terme que vous avez utilisé ?

26 R. Guérilleros ou quelque chose comme cela.

27 Q. Quel était le terme ? Combattants pour la liberté; c'est cela ?

28 R. Les combattants pour la liberté.

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1 Q. Vous comprenez fort bien la profondeur affective des Serbes, et pour

2 les Serbes ce sont véritablement des terroristes.

3 R. Ecoutez, j'essayais de comprendre les liens affectifs des différentes

4 parties qui se trouvaient là, à la fois les Serbes et les Albanais. J'ai

5 essayé de ne pas porter de jugement sur qui avait raison sur tout ceci. Je

6 crois en réalité que les deux avaient raison.

7 Q. Nous avions un témoin ici, John Crosland; cela vous dit quelque chose ?

8 R. Je ne crois pas.

9 Q. Vous ne connaissez pas ce nom. Il a dit, d'après lui, que c'était

10 l'attaché militaire à l'ambassade britannique, et il a dit que pour ce qui

11 était du Kosovo et de Serbie, c'est comme extraire le pays de Galles de

12 l'Angleterre. Vous hochez de la tête, donc vous comprenez combien ces liens

13 affectifs étaient forts, n'est-ce pas ?

14 R. Oui, tout à fait.

15 Q. Très bien. Encore une fois, vous étiez au Kosovo à Pristina, à Prizren

16 et dans cette région pendant trois mois. Est-il exact de dire qu'il y avait

17 une forte présence de l'UCK dans votre région ainsi que dans d'autres

18 régions du Kosovo ?

19 R. Oui.

20 Q. Et qu'au mois d'octobre, le 25, 1998, c'est l'accord de Clark-Naumann

21 et avec M. Milosevic, la VJ et les forces du MUP devaient diminuer leurs

22 forces au Kosovo, et les effectifs devaient tomber au niveau qui précédait

23 le début des activités terroristes; est-ce exact ?

24 R. Exact.

25 Q. Pour gagner du temps, ici il y a quelques personnes qui vont après moi

26 vous poser des questions. Je pense que vous serez d'accord avec moi, avec

27 les propos tenus par le général Naumann qui était le président du comité

28 militaire de l'OTAN. Je vais vous lire précisément ce que vous avez dit et

Page 11112

1 ce que vous avez dit dans votre déposition à cet égard au cours de ce

2 procès il y a quelques semaines.

3 Il a dit : "Je crois qu'il est juste de dire que Milosevic a honoré

4 son engagement, l'engagement qu'il avait fait au général Clark et moi-même

5 le 25 octobre 1998. Il a retiré ses forces. Il a retiré la police. Il se

6 peut qu'il y ait une certaine différence sur les 200, 400 policiers, plus

7 ou moins, mais cela n'a pas d'importance, plus ou moins, il a honoré son

8 engagement. Ensuite l'UCK a rempli ce vide, le vide laissé par les forces

9 qui s'étaient retirées, et tout ceci s'est intensifié. J'ai déclaré que le

10 conseil de l'OTAN au mois d'octobre et en novembre a répété ceci. Dans la

11 plupart des cas, cette intensification venait du côté kosovar, et non pas

12 du côté serbe."

13 Etes-vous d'accord avec les propos du général Naumann, ici, général

14 Maisonneuve ?

15 R. Ecoutez, je dirais que pendant le temps où j'étais là, je n'ai pas vu

16 d'accroissement de la présence serbe ou de la présence de l'UCK, ou plutôt

17 à la fin de mon séjour là-bas, avant de partir en permission au mois de

18 mars, où il semblait qu'il y ait un accroissement au niveau des

19 recrutements de la part des Albanais, de personnes, et cetera. Mais je

20 crois que les niveaux jusqu'à ce moment ou les effectifs étaient à peu près

21 les mêmes de part et d'autre.

22 Q. Au cours des 15 ou 20 prochaines minutes, je vais, avec tout le respect

23 que je vous dois, vous prouver le contraire. Je vais vous montrer les

24 rapports de la Mission de vérification au Kosovo pour vous démontrer le

25 contraire.

26 R. [aucune interprétation]

27 Q. A peu près au même moment, vers la fin du mois de décembre 1998, en

28 réalité au mois de novembre 1998, un homme répondant au nom de Bislim

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1 Zyrapi -- est-ce que vous avez entendu parler de ce nom ?

2 R. Non.

3 Q. Vous n'en avez jamais entendu parler. Il est devenu le chef d'état-

4 major du quartier général de l'UCK en novembre 1998. Il a témoigné il y a

5 quelques semaines et il a dit - il s'agit d'une pièce de l'Accusation 2460

6 - il parle au mois de décembre 1998, c'est un rapport qu'il a fait auprès

7 de ses commandants de zones : "Suite à l'offensive ennemie, le

8 repositionnement des forces a été effectué sur toutes les zones

9 opérationnelles, dans toutes les zones opérationnelles, et on peut à juste

10 titre dire des territoires contrôlés par nos unités, et plus important

11 qu'avant, à savoir avant l'offensive ennemie."

12 Est-ce que vous pensez que ceci correspond à la vérité sur ce que vous

13 savez par rapport à cette situation ?

14 R. D'après ce que je sais, c'était transparent. Je ne regardais pas le

15 territoire et qui ou quelle partie détenait quelle partie du territoire,

16 l'UCK. Je souhaitais avoir une liberté de circulation, à la fois sur les

17 territoires de l'UCK ou des territoires serbes au niveau de la frontière.

18 Je ne peux pas vous dire si plus de territoires étaient occupés ou non.

19 Tout d'abord, je suis arrivé à Prizren le 15 décembre, donc le 28 décembre

20 je n'aurais pas pu vous dire si ceci était vrai ou non.

21 Q. Nous allons parler d'autres actes de provocation et d'occupation de

22 territoire, et tout ceci pour permettre aux Juges de la Chambre de

23 comprendre le commentaire que vous avez fait. Vous avez dit que les forces

24 serbes ont trop réagi, de façon exagérée.

25 R. Très bien.

26 Q. Un exemple précis, à Podujevo, à la fin du mois de décembre 1998.

27 C'était une région, si vous vous en souvenez, une région troublée. Vous en

28 souvenez-vous ?

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1 R. Oui. Il faudrait que je regarde la carte.

2 Q. C'est au nord-est du Kosovo, entre la Serbie. C'est un axe important.

3 C'est une route principale, en quelque sorte.

4 R. Oui, très bien, la situation à Podujevo.

5 Q. Il y a un rapport intérimaire, du 21 au 27 décembre 1998, un rapport de

6 la MVK, et il précise : "La VJ s'est retirée des positions dans la région

7 conformément à l'accord, mais ensuite a observé comment ces positions ont

8 par la suite été occupées et fortifiées par l'UCK. Cette région est d'une

9 importance stratégique pour les Serbes, étant donné que l'autoroute nord-

10 sud de Belgrade se trouve à l'intérieur de ces terres. Mais cette même

11 pratique qui consiste de la part de l'UCK, occuper les régions ou les

12 secteurs laissés par les forces chargées de la sécurité a été observée

13 ailleurs au Kosovo."

14 Est-ce que ceci vous remémore la situation maintenant ? Ceci vous

15 semble familier, maintenant, n'est-ce pas ?

16 R. Oui, hormis le fait évidemment que Podujevo était en dehors de la

17 région que je contrôlais personnellement.

18 Q. Très bien. Dans ce cas, est-ce que vous avez essayé de vous tenir en

19 courant de ce qui se passait ?

20 R. Oui, dans une certaine mesure.

21 Q. Est-ce que vous avez remplacé le général DZ pendant une semaine ?

22 R. Oui.

23 Q. Lorsqu'il est parti en vacances, vous preniez sa place ?

24 R. Oui.

25 Q. A la page suivante, le rapport se lit comme suit : "La méfiance de

26 l'UCK devient problématique, étant donné que ce n'est pas une partie aux

27 accords. Néanmoins, la décision retardée de l'UCK de mettre fin à un

28 cessez-le-feu unilatéralement a été déclarée au mois d'octobre. Elle serait

Page 11116

1 mise en œuvre et serait en contradiction avec la Résolution 1199, qui

2 insiste que tous les éléments de la communauté albanaise du Kosovo

3 devraient poursuivre leurs objectifs par des moyens pacifiques uniquement.

4 L'UCK prétend avoir modifié les résultats lorsqu'elle parle des attaques

5 provenant des forces de sécurité serbes. Cependant, l'UCK peut constater

6 que c'est dans son intérêt de provoquer des réactions des Serbes, afin de

7 monter ses chances d'obtenir une intervention militaire de l'OTAN au

8 Kosovo."

9 Ma question que je vous pose, Mon Général, c'est celle-ci : n'est-ce pas

10 plus ou moins ce qui s'est passé au cours des prochains mois au début de la

11 guerre, qu'il y a eu des provocations répétées de la part de l'UCK, des

12 réactions à ces provocations par les forces serbes ? N'est-ce pas

13 effectivement ce qui s'est passé, plus ou moins ?

14 R. Dans certains cas, certainement dans ma région, celle que je

15 contrôlais, nous avons vraiment essayé de garder le couvercle sur ce type

16 de provocations, pour nous assurer le maintien du statu quo, pour permettre

17 à la situation politique d'aboutir et de trouver une solution en

18 particulier. Mais je ne pouvais certainement rien faire pour modifier ce

19 rapport venant de la MVK.

20 Q. Un incident malheureusement sur lequel vous n'avez pas pu garder le

21 couvercle est une embuscade du 8 janvier 1999, lorsqu'un communiqué de

22 presse a été publié par l'OSCE en déclarant : "L'UCK a exécuté de façon

23 méticuleuse un plan visant à poser une embuscade à une colonne de véhicules

24 du MUP, laissant trois morts et plusieurs blessés. Ces actions contredisent

25 directement les promesses solennelles faites par l'UCK, indiquant qu'il y

26 aurait une retenue et un maintien des accords de cessez-le-feu. La MVK

27 souhaite clairement indiquer qu'elle trouve que cette réaction de la part

28 des autorités yougoslave à ces provocations de l'UCK a été très retenue

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1 jusqu'à présent. Les représentants des autorités yougoslaves ont montré

2 leur volonté à coopérer eu égard à la situation présente."

3 Vous vous souviendriez certainement de l'incident assez bien ?

4 R. Ecoutez, je me souviens bien parce qu'il y a eu un communiqué de presse

5 régional qui a été publié. J'avais insisté pour cela. Je souhaitais que ce

6 soit publié de façon à montrer qu'il y avait une certaine retenue et que

7 l'UCK était en train de violer l'accord dans le cas présent.

8 Q. Bien sûr, vous étiez à Prizren, mais d'après votre estimation du 8

9 janvier 1999, c'est P407, pièce de l'Accusation P407, à la page 158,

10 l'évaluation de la MVK : "L'UCK semble tirer profit de la présence de

11 l'OSCE à son avantage et devient de plus en plus provocatrice dans les

12 actions qu'elle entreprend."

13 Encore une fois, venons-en au fait. C'est l'UCK qui devenait de plus en

14 plus provocatrice, non pas les forces serbes, n'est-ce pas ? C'est la

15 question que je vous pose, Monsieur.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous admettez cela ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je pense que oui.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ceci n'est pas censé être un discours

19 de la part de M. Sepenuk. Ce sont vos réponses qui nous intéressent.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que certainement dans le cas de

21 Podujevo et dans le cas de l'embuscade, c'était certainement une

22 provocation.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, je crois que là où il veut en

24 venir, il veut faire une remarque d'ordre général, c'est-à-dire qu'entre

25 votre arrivée et le début de la guerre, ce que l'on pouvait constater,

26 c'était une provocation croissante de la part de l'UCK.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Encore une fois, il serait difficile pour moi

28 d'être trop catégorique ici, étant donné qu'effectivement il y avait un

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1 accroissement ou une intensification au fil des jours. Mais, bien

2 évidemment, si vous regardez ceci, ces différents points qui sont évoqués

3 ici, certains de ces rapports en réalité l'indiquent. Je ne peux pas

4 contester cela, vous savez. C'est la parole écrite.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Nous ne sommes pas là pour vous

6 entendre. Il ne s'agit pas d'une critique de vous. Nous ne sommes pas ici

7 pour entendre votre analyse sur une série de documents. Nous sommes ici

8 pour vous entendre parler de votre expérience vécue, et vous n'avez pas

9 d'expérience vécue. Je souhaite que vous nous en fassiez part, si c'est le

10 cas.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Sur la base -- bon, vous n'allez pas

13 hocher de la tête et dire que vous savez sans savoir de quoi il parle.

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Justement, Monsieur le Président, de mon point

15 de vue nous avons véritablement essayé de maintenir un couvercle sur tout

16 ceci de part et d'autre. Pour ce qui est des provocations, vous savez, on

17 pouvait établir un lien entre cela et les incidents individuels que je

18 devais traiter lorsque j'étais sur le terrain, mais ceci ne m'indiquait pas

19 qu'il y avait une intensification de part et d'autre.

20 M. SEPENUK : [interprétation] Encore une fois, Monsieur le Président, c'est

21 la raison pour laquelle je pose ces questions.

22 Q. Je vais tenter de maintenir ma thèse, mais voyons un petit peu.

23 D'après une évaluation de la MVK du 8 janvier 1999, pièce de

24 l'Accusation 407, page 156, encore une fois on parle ici de l'embuscade que

25 nous devons d'évoquer. On peut lire : "Il semblerait que l'UCK ne reconnaît

26 plus le cessez-le-feu et va frapper à nouveau en utilisant les mêmes

27 tactiques."

28 Le texte se poursuit en disant : "L'attaque qui a suivi, attaque de

Page 11119

1 l'UCK sur le poste de contrôle montre bien le niveau de confiance de l'UCK

2 ainsi que sa volonté à attaquer différents endroits."

3 Encore une fois, je souhaite parler maintenant de la réunion que je

4 crois que vous avez eue, Monsieur. Je crois que vous n'avez pas assisté à

5 cette réunion, mais vous avez en tout cas paraphé le procès-verbal de cette

6 réunion qui est en notre possession. Il s'agit d'une annexe à votre

7 déclaration. Le colonel Morwood était là, Cobb-Smith, un des officiers de

8 liaison, et M. Drini de l'UCK. Il y un procès-verbal très précis de cette

9 réunion qui est daté du 23 janvier 1999, et vos initiales apparaissent sur

10 le bas de la page et nous avons beaucoup de mal à comprendre quel est le

11 numéro de ce document. M. Marcussen peut peut-être nous aider. C'est

12 quasiment illisible, mais tout en haut du document, on peut lire le numéro

13 K0075720. Simplement pour les besoins du compte rendu d'audience, M.

14 Marcussen peut peut-être nous donner le numéro, ce que j'apprécierais. Nous

15 devons peut-être attendre.

16 Je vais le lire tout d'abord, ensuite voir pendant la pause si on peut

17 savoir --

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois qu'il va vous aider, Maître

19 Sepenuk.

20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Cela est une annexe MM/14A.

21 M. SEPENUK : [interprétation] Merci.

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Les trois documents, le dernier.

23 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Maître Marcussen.

24 Merci, Monsieur le Président.

25 Q. Cela est, semble-t-il, Drini qui vous a dit ou ses collaborateurs ou

26 vos collègues.

27 "L'UCK," -- le 23 janvier 1999. "Le plan de l'UCK qui consiste à

28 reprendre les hostilités pendant que l'UCK n'est peut-être pas en train de

Page 11120

1 se battre. Maintenant, quel est le choix qu'ils ont fait ? Ils vont choisir

2 le moment le plus approprié et l'endroit le plus approprié pour les actions

3 futures. Il leur faut suffisamment de latitude ou suffisamment de latitude

4 aux commandants de zone pour lancer ces attaques circonscrites d'après ce

5 qu'ils estiment être nécessaire."

6 Plus tard, dans la déclaration, on peut lire : "Cette campagne était

7 déployée dans la ville. C'étaient des éléments actifs qui s'y rendaient et

8 parlaient des étapes militaires suivantes de l'UCK."

9 Ensuite, un rapport qui a été fourni par vous et vos collègues, y a-t-il eu

10 une réaction particulière de votre part sur ce qui semblait être le plan de

11 Drini, le plan des jours suivants ?

12 R. Oui tout à fait, dans ce contexte-là de cette réunion, j'entends après

13 Racak et Drini, certainement. On observait les préparatifs, on se demandait

14 à quel moment ils allaient choisir, et chacun s'observait les uns les

15 autres. Bien sûr, au milieu de l'hiver, on se demandait si le temps allait

16 avoir une influence sur leurs agissements. Bien sûr, notre but était de

17 dire : N'attaquez pas. Nous essayions de cadrer cela. Pour l'instant, c'est

18 ce que nous voulions faire. Nous souhaitions que la politique l'emporte de

19 l'autre côté. Certainement, à Rambouillet les négociations avaient commencé

20 et nous essayions de garder le couvercle pendant tout ce temps-là là-

21 dessus.

22 M. SEPENUK : [interprétation] Ecoutez, Monsieur le Président, pardonnez-

23 moi. Est-ce que vous pouvez retirer ce que je viens de dire ?

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pardonnez-moi ?

25 M. SEPENUK : [interprétation] Non, oubliez ce que je viens de dire. Je

26 pensais à faire la pause à un autre moment.

27 Q. Vous avez dit que vous vouliez garder le couvercle là-dessus. Ceci ne

28 s'est pas tout à fait passé comme cela, car le document suivant que nous

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1 avons est le document 3D374 qui est une évaluation faite le 14 février

2 1999, autrement dit quelques jours après cette réunion du 23 janvier.

3 "Quand bien même il y a des activités militaires et terroristes à une

4 petite échelle au cours des derniers jours au Kosovo, le Kosovo est resté

5 relativement calme. Les raisons pour ceci sont sans doute dues à la réunion

6 de Rambouillet, chaque partie voulant favoriser la paix dans la région. De

7 la même façon, certains de ces incidents peuvent être considérés comme des

8 actes de provocation." Il est dit ici : "C'est principalement l'UCK qui

9 essaie de provoquer les réactions de la partie adverse, et ceci peut être

10 utilisé ou exploité sur la scène internationale."

11 D'après l'évaluation de la MVK, ces actes de provocation venaient surtout

12 de l'UCK. Vous le saviez puisque vous travailliez avec le général DZ,

13 n'est-ce pas ?

14 R. Oui, tout à fait.

15 Q. Dans la déclaration du bureau du Procureur, pièce P2508, on peut lire,

16 au paragraphe 189 : "Au cours de cette période, je dois dire que pendant

17 les négociations de Rambouillet, je puis dire que le nombre d'incidents

18 provoqués par les Serbes a décru de façon significative alors que ceux qui

19 ont été provoqués par l'UCK a diminué beaucoup moins. De surcroît, l'UCK

20 est en train de devenir de plus en plus opportuniste au fil des jours."

21 C'est bien ce que le général DZ a dit ? Est-ce que ceci concorde avec ce

22 que vous disait le général DZ sur ce qui se passait ?

23 R. Oui, certainement. C'est la raison pour laquelle vers la fin de cette

24 période, c'est ce que j'ai dit. J'ai parlé du recrutement et j'ai dit que

25 nous avons évalué la situation à l'époque et j'ai dit que chacun prenait

26 position. C'est ce que faisait l'UCK par rapport à ce que l'UCK pouvait

27 leur apporter à l'avenir.

28 Q. Autre document de la MVK à présent où nous lisons que le degré de

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1 violence dû à l'UCK s'est accru de façon draconienne pendant la période

2 allant du 23 février au 11 mars 1999. Ce document de la MVK se poursuit en

3 disant, je cite : "Des attaques non provoquées de l'UCK contre la police se

4 sont poursuivies. Le nombre des victimes au sein des forces de sécurité a

5 augmenté."

6 Alors, il y a toute une série de documents de la MVK. Je ne vais pas les

7 passer en revue tous, mais ils évoquent de très nombreuses provocations de

8 l'UCK, et je vais vous en donner simplement quelques exemples, si cela ne

9 vous ennuie pas. Nous lisons d'abord que le 27 février, une patrouille de

10 la police a subi une embuscade à l'ouest de l'aérodrome de Pristina, qu'un

11 officier de la police a été tué et un autre blessé, apparemment par un

12 tireur embusqué de l'UCK.

13 Un peu plus loin, nous lisons, je cite : "Une nouvelle zone

14 d'engagement militaire s'est créée." Il est question plus loin de rapports

15 évoquant des combats non loin de Kacanik au sud-ouest du Kosovo au cours

16 desquels un officier de police, le commandant du poste de police de Kacanik

17 a été tué. Quatre policiers ont été blessés, et le nombre de personnes

18 ayant fui les villages dans le secteur de Kacanik est estimé à 2 000,

19 certaines de ces personnes s'efforçant de franchir la frontière avec la

20 Macédoine.

21 Alors, je vais exprimer une idée à présent et voir si vous êtes

22 d'accord avec cette idée. Cette idée est la suivante, à savoir que l'UCK

23 s'efforçait de créer les conditions sur le terrain pour une invasion

24 éventuelle de l'OTAN dans toute la Macédoine. Pendant ces trois mois, en

25 tant que chef de la région de Prizren, Mon Général, est-ce que ceci est

26 apparu à quelque moment que ce soit sur les écrans de vos radars ?

27 R. Les incidents dont vous parlez, par exemple l'incident de Kacanik

28 et d'autres, j'en ai eu connaissance, bien entendu. Je crois que

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1 l'accroissement des opérations de l'UCK et la réaction de la part des

2 forces serbes ainsi que les combats de plus en plus nombreux dans ce

3 secteur étaient dus à l'évacuation de la mission. Je suis au courant que

4 ceci a bien existé, mais encore une fois, dans mon secteur, je n'ai pas

5 souvenir de quelque action que nous ayons appréciée comme étant une

6 préparation du terrain pour une invasion de l'OTAN.

7 Q. Est-ce que vous connaissez un homme qui répond au nom de

8 Christopher John Clark ? Est-ce que ce nom vous dit quelque chose ?

9 R. Non.

10 Q. C'était un officier qui avait passé 16 ans dans les rangs de l'armée

11 britannique, un parachutiste membre de commando. Son CV est très fourni. Il

12 était officier chargé des opérations au Kosovo. Il dit, et je vais

13 simplement vous demander votre avis, car je suppose que vous n'allez pas

14 être d'accord avec lui, mais il dit, je cite : "Au fil du temps, j'ai de

15 plus en plus participé à des actions de liaison avec l'UCK en raison du

16 fait que l'UCK était responsable dans la plupart des cas." Je suppose que

17 peut-être vous ne serez pas d'accord. Je poursuis, je cite : "Responsable

18 des violations de l'accord Milosevic-Holbrooke." Est-ce que vous n'êtes pas

19 d'accord avec cela ?

20 R. Non, pas dans mon secteur.

21 Q. Dans votre secteur, en dépit de ce que nous venons de d'entendre, vous

22 n'êtes pas d'accord ? C'est votre réponse ?

23 R. C'est exact.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Que voulez-vous dire par cette

25 dernière référence, Maître Sepenuk, "en dépit de ce que nous venons

26 d'entendre" ?

27 Est-ce que Kacanik faisait partie de votre secteur ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais alors vous faites référence à

2 quoi ?

3 M. SEPENUK : [interprétation] A l'ensemble de la situation, Monsieur le

4 Président.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai vraiment l'impression que vous

6 êtes en train de plaider. C'est le sentiment que j'ai de façon de plus en

7 plus net. Vous posez des questions au témoin sur des sujets pour lesquels

8 il a des connaissances personnelles assez limitées. Il serait utile que

9 vous consacriez le temps précieux qui vous a été imparti à traiter des

10 choses que le témoin connaît personnellement.

11 M. SEPENUK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Q. Je vais passer à un des derniers documents que j'ai à vous soumettre.

13 C'est un document dont l'auteur est David Wilson. Je suppose que c'est le

14 même David Wilson que celui dont nous avons parlé, n'est-ce pas ?

15 R. David Wilson était un officier de l'armée britannique qui travaillait

16 avec la KDOM britannique avant mon arrivée au Kosovo. Par conséquent,

17 lorsque je suis arrivé à Prizren, lorsque la MVK a repris l'action de la

18 KDOM britannique ou plutôt absorbé dans ses rangs la KDOM britannique, il

19 est devenu l'un des officiers sous mes ordres, et je l'ai employé au centre

20 d'interprétation des renseignements. Il s'est avéré un officier de qualité

21 qui avait une bonne connaissance du terrain et qui connaissait bien le

22 contexte politique relatif aux diverses parties en présence et qui pouvait

23 avoir une pensée personnelle. Je l'ai beaucoup utilisé pour rédiger des

24 appréciations, des évaluations, et j'ajouterais que certaines de ses idées

25 étaient très précises et très utiles pour une réflexion ultérieure.

26 Q. Vous pensez que c'est une personne relativement d'une intelligence

27 assez affûtée ?

28 R. Je pense que c'est une personne à l'intelligence affûtée.

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1 Q. Dans cette pièce à conviction, la pièce 641 de l'Accusation, si je ne

2 me trompe, nous passons maintenant du mois de février au mois de mars --

3 M. SEPENUK : [interprétation] D'ailleurs, Monsieur le Président,

4 j'ajouterais pour le compte rendu d'audience qu'il y a eu pas mal

5 d'incidents évoqués dans ce dernier rapport, la pièce 3D179, et je dirais à

6 l'intention des Juges que la plupart de ces incidents était dû à des

7 provocations de l'UCK, si je puis me permettre, sauf votre respect.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En effet, Maître Sepenuk, tous ces

9 éléments sont disponibles aux Juges.

10 M. SEPENUK : [interprétation]

11 Q. C'est une appréciation de l'attitude de l'UCK, et nous sommes à une

12 semaine de la guerre qui démarre le 15 mars. C'est le dernier document dont

13 je vais vous parler. Nous y lisons ce qui suit, je cite : "Avant le premier

14 'round' des pourparlers de paix de Rambouillet, l'UCK présentait en

15 apparence un front unifié et discipliné. Sa chaîne de commandement et de

16 contrôle depuis le grand quartier général jusqu'au commandement de zone et

17 au niveau inférieur semblait de façon générale efficace."

18 Voilà son appréciation. Il parle des événements récents, et encore une fois

19 je les résumerai brièvement. Il s'agit d'un certain nombre d'événements

20 dont il parle qui prouvent des provocations de la part de l'UCK, comme ce

21 fut le cas à Kacanik pour lequel il déclare, je cite : "Pendant la montée

22 de l'opération dans le secteur de Kacanik, le commandant de la Brigade de

23 l'UCK dans la zone a refusé l'évacuation des IDP par le HCR, et ceci a été

24 considéré comme une tentative cynique de se servir des civils albanais en

25 tant que boucliers humains."

26 Je suppose que vous ne savez rien de tout cela ?

27 R. Non.

28 Q. Il y a d'autres questions qui sont mentionnées, l'embuscade des

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1 hauteurs de Dulje, des échanges de coups de feu. Je cite : "Le grand

2 quartier général de l'UCK a reconnu qu'un employé de la police albanaise

3 avait été arrêté par les services secrets de l'UCK pour espionnage et qu'il

4 était détenu dans son centre d'information. C'est la première fois que

5 l'UCK reconnaît disposer d'une unité policière régionale qui mène ce genre

6 d'opération. Encore une fois, le grand quartier général n'était pas prêt à

7 reconnaître que le recours aux enlèvements n'était pas à son profit."

8 Alors, toute cette idée d'enlèvements, de meurtres d'Albanais, j'ai un peu

9 été dérangé par votre témoignage dans l'affaire Milosevic, car vous ne

10 sembliez en avoir aucune connaissance. Est-ce que vous en avez

11 aujourd'hui ? Est-ce que vous savez qu'il y a eu de nombreux enlèvements

12 d'Albanais de souche parce qu'ils avaient des tractations commerciales avec

13 les Serbes ?

14 R. Ecoutez, je n'avais guère de connaissance à ce sujet à l'époque, mais

15 depuis, j'ai compris que c'était bien le cas.

16 Q. D'accord. Très bien. Ma dernière question au sujet de ce document, en

17 tout cas presque ma dernière question, sera la suivante. Je cite : "Si le

18 gouvernement serbe refuse de signer l'accord avec les commandants locaux de

19 l'UCK", il parle d'accord de paix, je cite, "ces derniers considéreront les

20 efforts politiques comme un échec et reviendront à une violence déchaînée

21 pour obtenir leur indépendance. La plupart d'entre eux ont le pouvoir de

22 vaincre les forces de sécurité des Serbes, et si cela se produit, des

23 portions de l'UCK, par exemple, Ramush", et là évidemment il parle de

24 Ramush Haradinaj, n'est-ce pas ? C'est bien cela ? Je vous le demande pour

25 le compte rendu d'audience.

26 R. Probablement.

27 Q. Je poursuis la citation : "S'efforceront de porter les combats dans les

28 villes et les villages." Bien entendu, nous savons qu'il n'y a pas eu

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1 d'accord de paix et que la guerre a commencé une semaine plus tard.

2 R. C'est exact.

3 Q. Ma dernière question pour vous, Mon Général, concernera le même David

4 Wilson dont nous parlions tout à l'heure que je considère comme un homme à

5 l'intelligence aiguisée. Je vous interroge à son sujet parce que dans votre

6 déclaration préalable, vous avez dit : je crois qu'il appréciait la

7 situation générale au Kosovo de façon assez exacte.

8 R. Assez exacte, en général, en effet.

9 Q. Je suppose que c'était un homme dont la vie comptait, mais je vais vous

10 poser une petite question. Lorsque ce dernier parle de la VJ, il dit, je

11 cite : "Le groupe principal est, de toute évidence, l'armée

12 professionnelle." Est-ce qu'il parlait de l'armée ? Est-ce qu'il parlait de

13 l'armée yougoslave, de la VJ ? Je poursuis la citation : "Et les sous-

14 officiers."

15 R. Les sous-officiers les plus expérimentés.

16 Q. Suite de la citation : "Ils estiment subir des frustrations par rapport

17 à l'évolution politique. Ils sont enragés par rapport aux humiliations

18 qu'observent les observateurs étrangers sur leur territoire, et lorsqu'on

19 leur demande de respecter un cessez-le-feu contre des terroristes, et ils

20 sont très sceptiques par rapport aux perspectives d'un règlement politique

21 à une époque où les analogies avec les forces occidentales peuvent être

22 écartées, et il est assez facile de comprendre les émotions vécues par ces

23 soldats."

24 David Wilson était bien un soldat, n'est-ce pas ?

25 R. Oui.

26 Q. Manifestement, c'était un soldat gradé qui avait une grande expérience.

27 Est-ce que vous pensez qu'il y a un grain de vérité dans ce qu'il dit ?

28 R. Absolument. Je pense qu'il rend compte de façon très exacte des

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1 sentiments du colonel Delic et des sentiments que partageaient également

2 tous les soldats sur le terrain au sein des forces de la VJ.

3 Q. Merci, Mon Général.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quel est le document dont vous parlez,

5 Maître Sepenuk, MM/15 ?

6 M. SEPENUK : [interprétation] Non. Je ne l'ai pas dit pour le compte rendu

7 d'audience. Excusez-moi, il s'agit du document MM/4.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] MM/4. D'accord.

9 M. SEPENUK : [interprétation] Oui.

10 M. ALEKSIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous n'avons

11 pas de questions pour ce témoin.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Cepic.

13 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai quelques

14 questions pour ce témoin.

15 Contre-interrogatoire par M. Cepic :

16 Q. [interprétation] Monsieur Maisonneuve, je m'appelle Djuro Cepic, je

17 suis l'un des conseils de la Défense de Vladimir Lazarevic et j'ai

18 plusieurs questions à vous poser. Je commencerai par le moment où vous

19 arrivez à Prizren. Dans votre déclaration préalable, au paragraphe 13, vous

20 dites que vous êtes arrivé le 15 décembre 1998 et que vous avez

21 immédiatement participé à des escarmouches à la frontière qui ont causé la

22 mort de 35 hommes censés être membres de l'UCK.

23 R. Oui.

24 Q. Plus tard, vous avez pu confirmer qu'il s'agissait effectivement de

25 membres de l'UCK, n'est-ce pas ?

26 R. Oui, pour la majorité d'entre eux.

27 Q. Conviendrez-vous avec moi que tous ceux qui ont été tués ou blessés ou

28 capturés au combat par la partie adverse étaient effectivement membres de

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1 l'UCK et que les vérificateurs de votre mission, y compris, Iain Henry et

2 d'autres qui dépendaient de votre centre régional ont pu le vérifier par

3 eux-mêmes ?

4 R. Oui, je dirais que la majorité était des membres de l'UCK. Il est

5 possible qu'il y ait eu un ou deux hommes qui les accompagnaient, mais la

6 majorité, c'est certain, était membre de l'UCK.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourriez-vous redire le nom de ce

8 vérificateur ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Iain Henry, si je ne me trompe.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous connaissez ce nom ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Iain Henry.

12 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 Q. Je crois que plus tard vous avez appris que ce groupe qui comptait au

14 total 150 soldats de l'UCK a traversé la frontière à partir de l'Albanie

15 pour entrer sur le territoire de la République fédérale yougoslave et que

16 plusieurs membres de l'UCK ont été arrêtés alors qu'un nombre important

17 d'armes ont été confisquées de même que des sommes d'argent assez

18 importantes, les armes étant des armes très modernes ?

19 R. Je ne me souviens pas avoir entendu parler --

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, Monsieur Maisonneuve.

21 Oui, Monsieur Marcussen.

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je voulais demander quelle était la

23 référence sur laquelle s'appuie ce que vient de dire le conseil de la

24 Défense.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il serait bon, dans une situation

26 comme celle-ci, que vous attendiez pour présenter votre demande que le

27 témoin ait terminé sa réponse au préalable.

28 Vous pouvez nous aider sur ce point, Maître Cepic ?

Page 11131

1 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai plusieurs séquences

2 vidéo qui confirment les déclarations que je viens de soumettre au témoin.

3 Par ailleurs, dans le système du prétoire électronique, nous disposons du

4 document 3470, qui est la déclaration d'Iain Henry. D'ailleurs, avec votre

5 autorisation, j'aimerais demander la diffusion de la première séquence

6 vidéo qui montre la présence des vérificateurs sur place ainsi que --

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant.

8 Que savez-vous de cet incident, Monsieur le Témoin ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme cela vient d'être dit à très juste

10 titre, je suis arrivé sur place le 15 décembre, donc j'étais tout nouveau

11 sur les lieux. J'avais bien entendu parler d'un engagement armé antérieur,

12 mais au moment où je suis arrivé, ma tâche principale, en tout cas c'était

13 ma façon de l'aborder, consistait à assurer une bonne transition entre ceux

14 qui quittaient l'endroit et ceux qui y arrivaient. Voilà ce dont je me

15 souviens s'agissant de cet événement. C'était une arrivée assez mouvementée

16 sur le théâtre des opérations, mais je n'ai pas un souvenir précis du

17 rapport de M. Henry. Je ne me souviens pas avoir entendu parler de grandes

18 quantités d'équipement, et cetera, ou d'armes qui seraient arrivées à ce

19 moment-là.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Cepic, il ne semble pas que le

21 témoin puisse nous aider d'une façon significative sur ce sujet.

22 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, la diffusion de la

23 séquence vidéo où il est question de grandes quantités d'armes qui ont été

24 confisquées pourrait peut-être rafraîchir la mémoire du témoin.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous pensez cela, je ne vais pas

26 contester vos dires. Voyons ce qu'il en est.

27 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

28 Je demande que soit diffusée la pièce à conviction de la Défense

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1 5D116, qui est une séquence vidéo très courte.

2 [Diffusion de la cassette vidéo]

3 M. CEPIC : [interprétation]

4 Q. Monsieur Maisonneuve, est-ce que vous vous êtes rendu à cette

5 exposition d'armes ?

6 R. Non, mais en tout cas, David Wilson, c'est l'homme qu'on voit sur ces

7 images. Si vous vous demandiez quel était son aspect physique, vous l'avez

8 vu.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez eu de la chance, là, Maître

10 Cepic.

11 M. CEPIC : [interprétation] J'ai encore pas mal de documents à ma

12 disposition qui montrent un peu la même chose, Monsieur le Président.

13 Q. Mais revenons quelques instants sur la situation dont nous parlions. Je

14 suppose que vos vérificateurs vous ont dit que l'armée se comportait de

15 façon très professionnelle, très humaine, aussi bien à l'égard des hommes

16 capturés qu'à l'égard des cadavres des membres de l'UCK, n'est-ce pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous savez que ce jour-là ils ont autorisé vos vérificateurs à parler

19 avec les membres de l'UCK qui avaient été capturés, au nombre desquels se

20 trouvaient, y compris, des femmes ?

21 R. Je crois que j'ai souvenir de cela. Il est certain qu'au moment du

22 transfert des cadavres, les autorités serbes ont fourni une coopération

23 totale.

24 Q. Merci, Monsieur Maisonneuve. La conclusion à tirer, c'est que l'unité

25 de l'armée au cours de cet incident comme au cours de tous les autres

26 incidents survenus dans la zone frontalière entre la République fédérale

27 yougoslave et l'Albanie, que l'armée s'est comportée de la façon la plus

28 professionnelle et la plus humaine qui soit, si on peut utiliser ce terme

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1 pour ce genre d'action, n'est-ce pas ?

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je crois pouvoir invoquer la conjecture,

4 Monsieur le Président, et l'impossibilité pour le témoin de répondre à

5 cette question.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne suis pas d'accord. Le témoin

7 peut répondre à la question dans la mesure où il a une expérience du

8 comportement de l'armée.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Selon mon expérience, Monsieur le Président,

10 je dirais oui, l'armée yougoslave se comportait d'une façon

11 professionnelle.

12 M. CEPIC : [interprétation] Merci.

13 Q. La 549e Brigade dirigée par le colonel Delic n'utilisait pas d'armes

14 lourdes, n'est-ce pas ?

15 R. Pour autant que je le sache, elle n'en n'utilisait pas, non.

16 Q. Je vous remercie. Nous allons reparler d'un homme dont nous avons déjà

17 parlé deux fois au cours des 15 dernières minutes, à savoir M. David

18 Wilson, et le document MM/4 qui émane de lui. D'après ce qu'ont pu voir vos

19 vérificateurs, l'armée yougoslave, et je vous soumets maintenant

20 l'appréciation qu'a fait de son comportement M. Wilson, je cite, s'est

21 comportée de façon professionnelle, ne pénétrait pas dans les villages et a

22 vu ses opérations couronnées de succès dans la zone frontalière. Je cite un

23 passage de la pièce 8D qui constitue le document MM/4 dans lequel on peut

24 lire les observations de M. Wilson. Vous êtes d'accord avec cela ?

25 R. C'est une description précise de la situation, je pense, pour cette

26 période.

27 Q. Merci, Monsieur Maisonneuve. Le représentant de l'Accusation a fait

28 référence aujourd'hui au document MM/2B, et je vous demande simplement un

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1 instant pour le retrouver dans mon classeur. Il s'agit du document

2 concernant la mise en œuvre des mesures pour répondre au statut résultant

3 de l'accord futur au sujet du Kosovo en date du 23 février 1999. Ce

4 document a mentionné entre autres que dans votre zone de responsabilité, à

5 savoir le centre régional numéro 1 de la Mission de vérification au Kosovo,

6 les 121e, 122e et 123e Brigades étaient présentes à Orahovac, alors que la

7 123e Brigade était présente à Suva Reka. Le commandant de toute cette

8 région était M. Drini, et vous avez mentionné son nom à plusieurs reprises;

9 est-ce exact ?

10 R. Oui.

11 Q. Tout ce que je viens de dire est parfaitement cohérent avec ce que vous

12 avez dit ?

13 R. Oui.

14 Q. Mis à part ces quatre brigades, est-ce que vous savez si une autre

15 brigade était active dans votre zone de responsabilité pendant que vous

16 étiez au Kosovo ?

17 R. Pas de façon précise. En réalité, je ne m'occupais pas des brigades, je

18 m'occupais uniquement de Drini. Mon centre de coordination était celui qui

19 travaillait au niveau des brigades, à leur niveau, je veux dire.

20 Q. Merci, Monsieur Maisonneuve. Nous allons revenir sur M. David Wilson à

21 nouveau, entre autres dans le paragraphe 4 de ce document. Il a parlé des

22 unités villageoises. C'est ceci qui m'intéresse. Là, il s'agit des unités

23 composées exclusivement des villageois de certains villages qui avaient des

24 armes automatiques, mais en général ne portaient pas d'uniformes.

25 R. C'était peut-être le cas, mais je n'examinais pas les détails de ces

26 reportages, de ce qu'il me racontait. Je lui faisais confiance parce qu'il

27 connaissait très bien la situation. Il a été là pendant la période qui a

28 précédé la Mission des vérificateurs, pendant l'activité de la Mission de

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1 vérification au Kosovo. Je pense que ce qu'il raconte ici est exact.

2 Q. Merci, Monsieur Maisonneuve. Est-ce que vous vous souvenez si, dans le

3 rapport concernant ces unités de village, si vous y trouviez l'information

4 qui faisait partie des brigades ou que c'étaient des unités indépendantes ?

5 Est-ce que vous vous en souvenez ?

6 R. Non.

7 Q. Je pense que là, vous allez vous rappeler de cela. Vous avez dit que

8 vous avez rencontré M. Drini à plusieurs reprises et que ces rencontres se

9 tenaient dans une maison. J'ai voulu savoir si cela se tenait toujours dans

10 une même maison ou dans plusieurs endroits, dans plusieurs villages ?

11 R. Ils bougeaient de village à village. Ces réunions se tenaient dans

12 différents villages dépendant de l'endroit où se trouvait Drini à l'époque,

13 mais souvent ces réunions avaient lieu la nuit.

14 Q. Mais ces maisons où se déroulaient les réunions, en réalité c'étaient

15 des QG de l'UCK, n'est-ce pas ?

16 R. Je pense qu'il y en avait qui l'était, d'autres étaient des maisons où

17 il organisait des réunions. Je ne peux pas dire où se trouvaient leurs

18 quartiers généraux.

19 Q. Est-ce que vous avez remarqué, est-ce que dans les autres maisons

20 étaient placées aussi les membres de l'UCK, c'est-à-dire qu'il n'y avait

21 pas de camp classique, des campements, mais qu'ils utilisaient des maisons

22 de particuliers pour hébergement ?

23 R. Je ne peux pas dire que je me souviens des exemples spécifiques, mais

24 quand je rendais visite à Drini et quand j'allais lui parler, je dirais que

25 telle était l'approche, la méthode utilisée par l'UCK, à savoir qu'ils

26 étaient hébergés dans les villages, dans les maisons villageoises.

27 Q. Ce village au fond était leur base ?

28 R. Apparemment.

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1 Q. Dans votre déclaration préalable, au niveau du paragraphe 53 quand vous

2 avez parlé de l'incident qui s'est produit le 8 janvier, un incident

3 impliquant le meurtre des trois policiers, qu'il existait des tranchées

4 bien fortifiées à partir desquelles on a attaqué la police. A présent, je

5 vais vous montrer une vidéo assez brève, ensuite je vais vous poser

6 quelques questions.

7 M. CEPIC : [interprétation] Il s'agit de la pièce de la Défense 5D117.

8 [Diffusion de la cassette vidéo]

9 M. CEPIC : [interprétation] Le son n'est pas important, c'est l'image qui

10 nous importe.

11 Q. On voit les tranchées dans les villages. Je crois que vous avez souvent

12 vu des tranchées au niveau des villages, qui se trouvaient dans les

13 villages proprement dits ou aux abords de ces villages. Je pense que vous

14 avez vu cela souvent.

15 R. Non.

16 Q. A côté des habitations, est-ce que vous avez vu où étaient hébergés les

17 membres de l'UCK ou est-ce que vous ne les avez vus nulle part d'autre que

18 dans des maisons et des appartements ?

19 R. Je ne peux pas dire que je n'ai jamais vu des tranchées dans les

20 villages. J'essaie de m'en souvenir, de m'en rappeler. En réalité, il me

21 semble avoir vu quelques tranchées à l'occasion de l'incident qui s'est

22 produit dans un petit village tout près de Prizren. Le nom du village

23 m'échappe, mais c'était vers la fin de mon mandat dans la région. A part ce

24 cas précis, je ne dirais pas que c'était la pratique courante dans les

25 villages que j'ai visités, en tout cas.

26 Je voudrais vous poser une question à ce sujet de cette vidéo. De

27 quoi il s'agit ? Est-ce que c'est la vidéo concernant l'incident qui s'est

28 déroulé le 8 janvier ?

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1 Q. Non, non.

2 R. Merci.

3 Q. Il n'y a que les tranchées qui nous intéressent.

4 Les tranchées, est-ce que vous vous souvenez où se trouvaient

5 exactement les tranchées ? Est-ce que ces tranchées étaient dans les

6 villages même ou à l'entrée du village ? Est-ce que vous vous souvenez de

7 cela ?

8 R. Je pense qu'elles étaient à l'entrée, au bord du village. Là, c'était

9 une ou deux tranchées pour une ou deux personnes.

10 Q. Merci. J'ai lu attentivement votre compte rendu. Est-ce que vos

11 collaborateurs vous ont fait part de l'évaluation éventuelle du nombre des

12 soldats de l'UCK qui se trouvaient dans votre zone de responsabilité au

13 niveau du centre régional numéro 1 ?

14 R. Je ne m'en souviens pas, en tout cas.

15 Q. Merci, Monsieur Maisonneuve. A nouveau, nous allons revenir sur M.

16 Wilson et son document. Vous conviendrez que toutes les autres évaluations

17 qu'il a fournies sont exactes, à savoir que l'UCK a remporté un succès

18 énorme entre le mois de mars et le mois de juillet 1998. Est-ce que vous

19 pouvez nous dire, en vous exprimant en pourcentage, quelle est la portion

20 de terrain tenue par l'UCK autour de votre centre ?

21 R. J'aurais du mal à vous donner cette évaluation. Vraiment, à moins que

22 vous me donniez une carte sur laquelle je pourrais vous montrer cela. En

23 tout cas, il n'y avait pas de région absolue, contrôlée de façon absolue.

24 Il y avait des régions où on essayait de se rendre. Ils nous en

25 empêchaient. Il y avait aussi des régions où on n'avait pas la liberté de

26 circuler, c'était évident. J'aurais du mal à vous dire combien, quelle

27 était la longueur, la profondeur de ces territoires, mais je pense que

28 c'était tout à fait possible de retrouver ces informations.

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1 Q. Puisqu'on parle de la liberté de circulation, dites-nous le document

2 MM/14A en date du 4 mars 1999, le quatrième paragraphe il est dit, Drini

3 dit : "J'ai ordonné que l'on introduise le couvre-feu pour les civils dans

4 notre région pour leur propre sécurité."

5 Vous ne pourriez pas nous dire quelle était la région même à peu près

6 concernée par ce couvre-feu ?

7 R. Je pense que si c'est Drini qui parle, c'est forcément qu'il parle de

8 sa zone de responsabilité. Elle correspondait grosso modo à la région de

9 Prizren.

10 Q. Je vous remercie. C'était la zone opérationnelle Pastrik du côté de

11 l'UCK. Savez-vous que l'UCK avait à ce niveau-là ainsi que dans la région

12 de Dukagjin une unité spéciale pour les actions rapides et les liquidations

13 ou prises d'otage ? Est-ce que vous êtes au courant de l'existence de cette

14 unité ?

15 R. Non.

16 Q. Vous maintenez ce que vous avez dit dans l'affaire Milosevic, à savoir

17 que l'UCK est une organisation rebelle qui est formée des forces

18 paramilitaires ? Vous avez vu cela à la page 5 817.

19 R. Oui, j'essayais de vous raconter, de vous dire de quelle façon je le

20 percevais. C'est à peu près cela.

21 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le permettez,

22 je dirais que le moment est opportun pour prendre la pause.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez besoin d'encore combien de

24 temps, Monsieur Cepic ?

25 M. CEPIC : [interprétation] Quarante-cinq minutes ou une demi-heure peut-

26 être.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, toutes les bonnes choses ont

28 leurs fins et ceci de façon quotidienne. J'ai bien peur que nous ayons à

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1 lever la séance aujourd'hui. On va poursuivre votre déposition demain. Il

2 est important de vous rappeler que vous ne devez parler aucunement de votre

3 déposition, ni de la déposition que vous avez faite dans l'affaire

4 Milosevic quelle que soit la personne avec laquelle vous allez être amené à

5 parler, et faites en sorte que vous n'abordiez pas les questions concernant

6 votre déposition. Je vais vous demander de suivre le huissier et je vous

7 revoie demain à 9 heures du matin.

8 [Le témoin quitte la barre]

9 --- L'audience est levée à 15 heures 30 et reprendra le mercredi 7 mars

10 2007, à 9 heures 00.

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