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1 Le lundi 6 août 2007
2 [Déclaration liminaire de la Défense de Milutinovic]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Affaire IT-05-87-T, le Procureur
7 contre Milutinovic et consorts.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Je me
9 réjouis de voir que tout le monde est là et prêt à reprendre le travail.
10 Maître O'Sullivan, on nous a fait savoir que c'est vous qui allez entamer
11 les débats s'agissant de la présentation des moyens à décharge. Vous avez
12 l'intention de prononcer une déclaration liminaire, ceci en vertu de
13 l'article 84 au nom de M. Milutinovic. Je vous donne la parole.
14 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,
15 Mesdames, Monsieur les Juges. Bonjour aux représentants du bureau du
16 Procureur. Monsieur le Président, il y a trois mois, l'Accusation a
17 prononcé une déclaration en vertu de l'article 98 bis à la fin de la
18 présentation de ses moyens à charge. L'intervention de l'Accusation
19 reposait, selon nous, sur une sélection, une interprétation de certains des
20 éléments présentés en l'espèce. Avant que M. Milutinovic n'appelle à la
21 barre son premier témoin, nous demandons à la Chambre de première instance
22 de garder à l'esprit les éléments suivants lorsqu'elle entendra les témoins
23 de M. Milutinovic.
24 L'essence même de la position de l'Accusation, c'est que M. Milutinovic a
25 contribué à cette soi-disant entreprise criminelle commune en exerçant
26 certains de ses pouvoirs, tels qu'ils sont compris, tels qu'ils sont
27 interprétés par le bureau du Procureur, et ceci, en tant que président de
28 Serbie, et que, d'autre part, il n'a pas rempli ses obligations en tant que
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1 président de la Serbie; il s'agirait donc là d'une commission par omission.
2 Il faut être tout de suite extrêmement clairs. M. Milutinovic affirme quant
3 à lui qu'il n'existait pas d'entreprise criminelle commune telle qu'elle
4 figure dans l'acte d'accusation, ou telle qu'on en a parlé autrement.
5 D'autre part, il affirme que les éléments de preuve qui ont été présentés
6 jusqu'à présent en l'espèce, et les éléments de preuve qu'il va présenter
7 pendant la présentation de ses moyens, vont démontrer que M. Milutinovic
8 n'a jamais été impliqué dans des agissements criminels, que ce soit
9 personnellement ou de concert avec des tiers, ou dans le cadre d'une
10 entente quelle qu'elle soit. Il a rempli, comme il le devait, ses
11 obligations en tant que président de la Serbie, et il n'a commis aucun acte
12 illégal, soit par commission, soit par omission. L'autorité et la
13 compétence du président de la Serbie n'incluaient aucun des pouvoirs
14 présentés par l'Accusation, et les éléments de preuve présentés en l'espèce
15 vont montrer que l'Accusation se trompe.
16 M. Milutinovic en réalité n'a jamais exercé les pouvoirs que lui attribue
17 l'Accusation. Ses actes et son comportement au sujet du Kosovo-Metohija
18 sont les actes et le comportement d'un homme politique qui travaillait et
19 qui déployait tous ses efforts pour trouver une solution véritablement
20 politique, une solution pacifique aux problèmes qui existaient sur place,
21 et ceci, afin d'éviter tout préjudice à tous les citoyens de la Serbie.
22 En résumé, nous affirmons, les éléments de preuve vont le montrer, que M.
23 Milutinovic n'a jamais abusé des pouvoirs ou de l'autorité qui était la
24 sienne en tant que président de la Serbie. Il n'a jamais dérogé à ses
25 responsabilités. Il n'a jamais refusé d'agir de manière positive et de
26 manière constructive en tant que président de la Serbie.
27 Il y a quelques instants, nous avons fait référence à la position de
28 l'Accusation selon laquelle M. Milutinovic avait contribué à l'entreprise
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1 criminelle commune en n'exerçant pas les compétences qui lui sont conférées
2 par la constitution de la Serbie. Au cours de son exposé présenté en vertu
3 de l'article 98 bis du Règlement, l'Accusation a déclaré qu'elle estimait
4 que la source de l'obligation du président de la Serbie d'agir, c'est le
5 serment qu'il a prononcé en prenant ses fonctions, ainsi que sa
6 responsabilité par rapport aux citoyens de la République de la Serbie.
7 L'Accusation s'est appuyée sur deux dispositions de la constitution de
8 Serbie que je vais citer parce qu'elles sont brèves.
9 Article 86, c'est le serment du président, je cite : "Je fais le serment
10 que je consacrerai toutes mes forces à la préservation de la souveraineté
11 et de l'intégrité du territoire de la République de Serbie, au respect des
12 libertés et des droits humains et civils, au respect et à la défense de la
13 constitution et des lois; à la préservation de la paix et du bien-être de
14 tous les habitants de la République de Serbie, et qu'en toute conscience et
15 en toute responsabilité, je remplirai mes fonctions."
16 La deuxième disposition, l'article 88, une seule phrase, qui est la
17 suivante : "Le président de la République est responsable face aux citoyens
18 de la République de Serbie."
19 L'Accusation a déclaré explicitement qu'elle s'appuyait sur ces deux
20 dispositions-là de la constitution de la Serbie pour affirmer que M.
21 Milutinovic avait obligation d'agir, d'agir afin de mettre des bâtons dans
22 les roues aux autres membres de cette entreprise criminelle commune
23 alléguée dans leur tentative de réaliser les objectifs de cette entreprise.
24 M. Milutinovic conteste cette interprétation incomplète et infondée
25 de la constitution, il se porte enfin contre l'évaluation par l'Accusation
26 des éléments de preuve présentés en l'espèce jusqu'à présent. C'est pour
27 cette raison, afin d'évoquer les questions d'ordre constitutionnel, que le
28 premier témoin de M. Milutinovic sera le Pr Ratko Markovic, qui va déposer
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1 en tant qu'expert ici au sujet de la constitution. Le Pr Markovic va
2 fournir à la Chambre le contexte approprié, l'interprétation appropriée, et
3 la lecture appropriée de la constitution de la République de Serbie. Je
4 disais que le Pr Markovic va fournir à la Chambre de première instance le
5 contexte, l'interprétation et la lecture appropriés de la constitution de
6 la République de Serbie et de la constitution de la RFY, ainsi que de la
7 législation relative à l'autorité et à la compétence du président de la
8 République de Serbie.
9 Ces éléments de preuve vont permettre d'établir que l'autorité et la
10 compétence dont était investi le président de la Serbie sont limitées, sont
11 restreintes. Son autorité et sa compétence sont limitées, en particulier en
12 ce qui concerne la relation qui existe entre le président de la Serbie et
13 le gouvernement de la Serbie, et le président de la Serbie et l'assemblée
14 nationale de Serbie, ainsi que les autres institutions et organes de la
15 république. Le président n'avait aucun moyen de commettre les infractions
16 qui lui sont reprochées par l'Accusation, soit par acte ou par omission.
17 De surcroît, la déposition de M. Markovic va montrer qu'en tant que membre
18 du conseil suprême de la Défense, le président de la Serbie n'exerçait
19 aucun commandement ou contrôle, et n'a aucune autorité sur la VJ, le MUP ou
20 les forces serbes au sens où l'Accusation utilise l'expression de "forces
21 serbes" dans l'acte d'accusation.
22 Seul le président fédéral, c'est-à-dire le président de la RFY, avait le
23 pouvoir juridique et disposait des mécanismes appropriés pour exercer ce
24 commandement et ce contrôle. Le président de la Serbie, tout comme le
25 président du Monténégro, est un des membres du conseil suprême de la
26 Défense. Le conseil suprême de la Défense, comme le Pr Markovic va nous
27 l'expliquer, est un organe consultatif dont l'existence est prévue par la
28 constitution de la RFY. Le Pr Markovic va également nous montrer que les
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1 amendements constitutionnels de 1989, 1990, et 1992 n'avaient aucun
2 caractère discriminatoire envers les Albanais du Kosovo. Sa déposition sur
3 ce point va nous fournir le contexte juridique, historique et social
4 approprié pour comprendre les changements qui ont eu lieu au sein de ce
5 système juridique à la fin des années 1980 et au début des années 1990.
6 L'Accusation affirme que la responsabilité de M. Milutinovic, aux termes de
7 la constitution, c'est le fait qu'il n'ait pas sonné l'alarme dans les
8 corridors du pouvoir.
9 Or, les éléments de preuve présentés en l'espèce, les éléments que nous-
10 mêmes nous allons présenter, vont vous montrer que les corridors du pouvoir
11 résonnaient, résonnaient de toutes les difficultés rencontrées au Kosovo-
12 Metohija en 1998 et 1999; l'insurrection armée de l'UCK et ses activités
13 terroristes, ainsi que les mesures concrètes qui ont été prises pour
14 améliorer la situation au Kosovo-Metohija afin de trouver une solution
15 politique durable pour conserver le Kosovo-Metohija au sein de la Serbie en
16 tant que province autonome en assurant le respect plein et entier pour
17 toutes les minorités et tous les groupes vivant au Kosovo. Permettez-moi
18 d'ajouter que les difficultés rencontrées à l'époque étaient aussi
19 importantes qu'elles le sont aujourd'hui comme on peut le constater
20 puisqu'on est toujours, au sein des Nations Unies et au sein du Groupe de
21 contact, en train d'essayer de trouver une solution à la situation du
22 Kosovo.
23 Pendant la présentation des moyens à décharge, nous allons vous
24 parler de la politique du gouvernement de l'assemblée nationale au Kosovo-
25 Metohija, vous allez entendre parler des efforts qui ont été entrepris pour
26 améliorer la situation dans la province même, dans le domaine de
27 l'enseignement, de l'aide humanitaire, de la sécurité pour ses habitants.
28 La Chambre de première instance va se voir présentée des éléments de preuve
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1 au sujet des tentatives entreprises tout au long de 1998 et au début 1999
2 pour arriver à un accord global afin d'assurer un gouvernement autonome au
3 Kosovo-Metohija. Ce sont les personnes qui étaient impliquées dans ce
4 processus qui vont vous parler de cela.
5 De plus, vous allez entendre parler du rôle que M. Milutinovic a joué
6 dans ce processus, vous allez entendre parler des efforts qu'il a déployés
7 pour trouver une solution à cette question. Vous allez entendre parler de
8 son attitude tout au long de ce processus.
9 M. Milutinovic pose la question de savoir comment, sur la base des éléments
10 de preuves présentés, on peut sérieusement affirmer qu'il n'a pas rempli
11 les obligations qui étaient les siennes aux termes de la constitution et de
12 la législation de son pays et aux termes du droit humanitaire
13 international. Ses actes et son comportement ne sont pas les actes et le
14 comportement de quelqu'un qui voulait porter préjudice aux autres. Non, ce
15 sont les actes et le comportement d'un homme politique responsable qui a
16 fait tout ce qui était en son pouvoir pour trouver une solution viable et
17 pacifique à la situation du Kosovo, et ceci, dans l'intérêt de la totalité
18 de ses citoyens. A partir des éléments de preuve présentés jusqu'à présent,
19 nous savons les éléments suivants au sujet des activités de M. Milutinovic
20 et de son état d'esprit.
21 Je vous rappelle que suite à la décision prise pour le gouvernement
22 de la Serbie, le 11 mars 1998, de mettre en place une délégation chargée de
23 négocier avec les dirigeants albanais au Kosovo-Metohija, délégation menée
24 par le Pr Markovic, M. Milutinovic a fait une déclaration le 18 mars 1998,
25 il disait, je cite : "Toutes mesures dilatoires, tout retard dans le début
26 du dialogue politique direct est injustifié et dommageable.
27 "En tant que président de la République, je suis prêt à me porter
28 garant que, du fait que ces discussions basées sur le principe de la
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1 conservation de l'autorité territoriale et sur le fait que nous allons
2 inclure à l'ordre du jour la question de l'autonomie du Kosovo et de la
3 Metohija au sein de la Serbie."
4 M. Milutinovic appelle à une "solution politique, pacifique et grâce
5 au dialogue."
6 Il demande que l'on trouve immédiatement un accord dans le domaine de la
7 normalisation du système de l'enseignement. Il déclare : "Je suis convaincu
8 que l'avenir des citoyens du Kosovo-Metohija et de tous les citoyens de la
9 Serbie et de notre pays, cet avenir ne repose pas sur les divisions
10 ethniques, religieuses, culturelles, sur l'enfermement mais repose plutôt
11 sur la paix, l'égalité, l'intégration et la cohabitation."
12 Vous vous souviendrez, Messieurs les Juges, que le 31 mars 1998 dans sa
13 résolution 1160, le Conseil de sécurité des Nations Unies fait référence
14 expressément à la déclaration de M. Milutinovic le 18 mars. Le Conseil de
15 sécurité demande aux parties de faire exactement ce que prône M.
16 Milutinovic. Vous constaterez que les éléments de cette affaire démontrent
17 que tout au long de l'année 1998, M. Milutinovic a fait des interventions
18 publiques semblables et tout aussi sincères et convaincantes en faveur du
19 processus de dialogue en faveur d'un accord. Il appelait tous les citoyens
20 de la Serbie, y compris ceux qui habitaient au Kosovo-Metohija, de
21 cohabiter en paix. Il a personnellement invité des dirigeants politiques
22 albanais à rencontrer les membres de la délégation Markovic. Il a
23 accompagné la délégation Markovic jusqu'à Pristina à plusieurs reprises. Il
24 a soutenu personnellement la mise en œuvre de l'accord sur l'éducation. Il
25 a rencontré et il a collaboré avec l'ambassadeur Hill pour soutenir les
26 efforts de médiation internationale au sujet du Kosovo. Il a rencontré les
27 dirigeants des minorités du Kosovo-Metohija, et ceci, pour soutenir un
28 accord sur un gouvernement autonome. Il a dénoncé l'extrémisme et la
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1 violence en tant que moyens d'arriver à un objectif politique.
2 La Chambre se souviendra de la résolution 1199 du Conseil de sécurité
3 des Nations Unies du 23 septembre 1998 et des observations faites par le
4 président Milutinovic lors d'une session du conseil suprême de la Défense
5 le 4 octobre 1998. En parlant à ce moment-là de la résolution du Conseil de
6 sécurité et de la menace des frappes aériennes de l'OTAN, il a déclaré, je
7 cite : "On étudie attentivement la résolution des Nations Unies point après
8 point. On se rend compte que nous avons pratiquement tout réalisé. S'il y a
9 quelque chose que nous devons faire, à ce moment-là, nous ne devons pas
10 permettre que ces frappes aient lieu."
11 Selon nous, les événements de novembre 1998 sont particulièrement
12 importants puisqu'à ce moment-là M. Milutinovic s'est rendu à Pristina à
13 deux reprises en quelques jours seulement. Il a rencontré les dirigeants
14 des parties politiques minoritaires, des minorités à Belgrade notamment des
15 Albanais. Il s'agit des événements qui se sont déroulés dans le cadre du
16 document intitulé proposition conjointe d'accord sur un cadre politique du
17 gouvernement autonome du Kosovo-Metohija. Les éléments de preuve présentés
18 au cours de la présentation des moyens à décharge vont permettre à la
19 Chambre de savoir ce qui s'est passé au moment de l'élaboration de cet
20 accord et ce qui a amené à la déclaration faite par M. Milutinovic à
21 Pristina le 18 novembre 1998. Je vous en rappelle quelques extraits. M.
22 Milutinovic a déclaré, je cite : "La Serbie est fermement déterminée à
23 trouver une solution politique aux difficultés du Kosovo-Metohija. La
24 Serbie est un Etat civil et ne divise pas ses habitants en fonction de leur
25 origine nationale, religieuse ou autre. Mais parallèlement, la Serbie est
26 un Etat multiethnique, multiconfessionnel, multiculturel qui garantit à
27 toutes ses communautés des droits supplémentaires afin qu'elles puissent
28 conserver et exprimer leur identité nationale, leur écriture, leur langue,
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1 leur religion, leurs coutumes, leur culture et leur tradition."
2 M. Milutinovic a déclaré : "Je souhaite insister sur le fait qu'il
3 est possible de vivre en paix et ensemble au Kosmet, mais cela uniquement
4 s'il y a une véritable égalité et pas non seulement une égalité sur le
5 papier entre toutes les communautés nationales. Ceci est confirmé par le
6 fait que nous avons respecté toutes les obligations, toutes les dates
7 butoir qui ont été fixées dans les accords conclus avec la communauté
8 internationale. Les structures civiles fonctionnent et se renforcent au
9 jour le jour au Kosmet. La situation dans tous les domaines, en particulier
10 dans les domaines économiques, sociaux et humanitaires, se normalise chaque
11 jour davantage au Kosovo-Metohija."
12 Il a déclaré, je cite : "S'agissant du cadre politique, du cadre juridique,
13 c'est-à-dire le cadre constitutionnel; ce cadre, dans notre pays, est
14 suffisamment large pour garantir le respect des normes internationales dans
15 le domaine de la protection et des droits des communautés nationales en
16 respectant pleinement la pratique existante." Il a déclaré que le
17 gouvernement autonome dans la République de Serbie en est un exemple au
18 sein de la République fédérale de Yougoslavie. A ce sujet, tous doivent
19 comprendre que toute solution du Kosovo-Metohija doit se faire dans le
20 respect de l'intégrité territoriale et de la souveraineté des frontières
21 reconnues de la République fédérale de Yougoslavie, conformément aux
22 principes fondateurs de la charte des Nations Unies de l'acte final
23 d'Helsinki et de la charte de l'OSCE de Paris.
24 Il a déclaré ensuite : En prenant toutes ces mesures nous souhaitons
25 encourager la mise en place d'un climat de confiance, et accélérer le
26 processus politique. C'est seulement de cette manière que seront mises en
27 place les conditions permettant de résoudre les problèmes du Kosovo-
28 Metohija qui permettront aux communautés nationales de garantir l'intégrité
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1 et la souveraineté nationale de notre Etat, de garantir la paix et le
2 développement au Kosovo-Metohija, mais également la stabilité dans la
3 région des Balkans et du sud-est de l'Europe, avec l'intégration des
4 peuples et des Etats de ce secteur dans le cadre d'intégration de
5 processus, d'organisations plus vastes au niveau politique, économique et
6 culturel.
7 Au cours de la présentation de nos moyens, vous allez prendre connaissance
8 de témoignages essentiels au sujet des efforts déployés pour améliorer la
9 situation au Kosovo et pour trouver un accord global. Nous demandons à la
10 Chambre de première instance de se rappeler l'importance de ce processus en
11 1998 et 1999, vu ce qu'a déclaré le général Naumann, qui a affirmé que
12 l'OTAN ne pouvait pas s'engager aux côtés de l'UCK, parce que certains pays
13 de l'OTAN avaient dénoncé l'UCK en tant qu'organisation terroriste en 1998.
14 Nous savons qu'il n'est pas rare que certains Etats refusent de
15 reconnaître, et encore moins de négocier avec des groupes ou des
16 organisations qui sont considérés comme des groupes ou des organisations
17 terroristes. On le voit actuellement lorsque des groupes ou des
18 organisations organisent des attentats contre des tours à New York, ou dans
19 des gares à Madrid ou à Londres, ou encore lorsqu'une mosquée est prise
20 d'assaut à Islamabad. Ce que je veux dire ici, c'est que les institutions
21 du gouvernement de la RFY et de la Serbie n'ont pas refusé de s'engager
22 dans un dialogue avec les dirigeants albanais du Kosovo-Metohija, y compris
23 avec des membres importants de l'UCK. Au contraire, les gouvernements et
24 les assemblées, aussi bien au niveau république que fédéral, ont pris des
25 mesures concrètes en 1998 et 1999 pour améliorer la situation et trouver
26 une solution pacifique à la situation du Kosovo-Metohija. La Chambre sait
27 que ces efforts ont déjà commencé au cours du printemps 1998. C'est à ce
28 moment-là qu'a été constituée une délégation avec le Pr Markovic pour
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1 entamer un dialogue avec les Albanais. Des envoyés spéciaux, des émissaires
2 spéciaux, ont été nommés pour renforcer ce processus. On a trouvé un accord
3 sur la mise en œuvre de l'accord sur le système éducatif. On a mis en place
4 des accords d'aide humanitaire. Des accords ont été conclus avec le
5 président Yeltsin de la Fédération russe, avec l'ambassadeur Holbrooke et
6 l'OSCE, respectivement en juin et en octobre, afin de garantir une présence
7 internationale sur le territoire de la Serbie, pendant que l'on cherchait
8 une solution politique.
9 Une multitude d'invitations ont été envoyées aux représentants politiques
10 albanais par la Serbie, mais c'est à une seule reprise que les
11 représentants albanais se sont assis à la même table que la délégation de
12 l'Etat. Ces invitations ont été envoyées à certains dirigeants de l'UCK,
13 notamment M. Adem Demaqi. A Rambouillet et à Paris, une délégation d'Etat a
14 été envoyée par l'assemblée nationale de la République de Serbie, a
15 participé à des réunions et a demandé à plusieurs reprises à participer à
16 des négociations en tête-à-tête avec la délégation albanaise, où on
17 trouvait des membres de l'UCK de haut rang, et son président Hashim Thaqi.
18 On pourrait dire pour des raisons compréhensibles qu'il ne convient pas de
19 reconnaître des groupes ou des organisations qui ont recours à la violence
20 pour obtenir des changements politiques, et on ne devrait pas les
21 reconnaître en tant qu'interlocuteurs légitimes. Or, cela n'a pas été le
22 cas au cours de 1998 et 1999. La contribution faite par M. Milutinovic à la
23 recherche d'une solution pacifique au Kosovo-Metohija est très importante.
24 En plus des exemples que j'ai déjà mentionnés, je vous rappelle et je vous
25 signale que vous entendrez des éléments de preuve au sujet de M.
26 Milutinovic nous montrant qu'il a participé à une réunion du gouvernement
27 de la Serbie en octobre 1998, peu après l'accord Holbrooke-Milosevic. M.
28 Milutinovic a informé le gouvernement au sujet des détails de cet accord.
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1 M. Milutinovic est allé à Pristina en septembre et novembre 1998, il a
2 rencontré brièvement les dirigeants locaux officiels pour leur fournir des
3 informations sur la situation politique, économique, et sur la situation en
4 matière de sécurité au Kosovo.
5 L'Accusation affirme également que la délégation de la RFY et de la Serbie,
6 M. Milutinovic en particulier, ont fait entrave intentionnellement aux
7 négociations de Rambouillet et à Paris en février et en mars 1999, et que
8 leur intention c'était de provoquer une guerre avec l'OTAN afin de mettre
9 en œuvre l'entreprise criminelle commune. Oublions un instant les faits,
10 nous affirmons que cette théorie ne tient pas debout. Quand on examine
11 maintenant les faits, nous savons maintenant qu'il est cynique et faux
12 d'accuser les Serbes d'être responsables de l'échec des négociations de
13 Rambouillet et de Paris. Nous savons, les éléments de preuve nous l'on
14 montré, que la délégation serbe et de la RFY était d'accord avec les
15 éléments politiques des accords de Rambouillet. Nous savons que du côté
16 serbe, y compris du côté de M. Milutinovic, on travaillait depuis 1998 sur
17 un accord qui a été finalisé en novembre 1998 à Pristina. On travaillait
18 sur cet accord, et on y a travaillé pendant de longs mois.
19 Nous savons que du côté albanais, on n'était pas prêts à accepter les
20 dispositions politiques des accords de Rambouillet tels qu'ils figuraient
21 dans cet accord. Nous savons qu'au tout dernier moment, certains accords
22 connexes qui n'ont pas été rendus publics ont été signés entre le ministre
23 des Affaires étrangères des Etats-Unis et les Albanais. Ceci a été reconnu
24 par M. Surroi, un des membres de la délégation albanaise. Ceci a été
25 reconnu par l'ambassadeur Petritsch, l'un de négociateurs du Groupe de
26 contact qui a cependant ajouté la réserve suivante, à savoir que les actes
27 des Etats individuels lors des conférences internationales ne peuvent pas
28 être mis sur le compte du Groupe de contact. Nous estimons qu'il est tout à
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1 fait malhonnête d'affirmer que la lettre du secrétaire du ministère des
2 Affaires étrangères des Etats-Unis et de la délégation albanaise sur le
3 référendum au Kosovo-Metohija sur l'indépendance est un résultat marginal
4 de ces négociations internationales. En fait, c'était le cœur même du
5 problème, l'intégrité territoriale et la souveraineté de la RFY et de la
6 Serbie.
7 La délégation de la Serbie n'a jamais refusé de s'engager dans de
8 véritables discussions à Rambouillet et à Paris. Au contraire, ils ont
9 demandé à plusieurs reprises d'avoir des réunions avec la délégation
10 albanaise. J'ajouterais même que la délégation albanaise a refusé de signer
11 les principes non négociables présentés par le Groupe de contact alors que
12 la Serbie, elle l'a signé immédiatement. Au cours de la présentation des
13 moyens, vous allez apprendre que M. Milutinovic est arrivé à Rambouillet à
14 la fin de la première semaine de réunions. Ces réunions devaient durer
15 toute une semaine. Vous allez apprendre qu'il est venu là pour encourager
16 les efforts entrepris pour trouver une solution au conflit. Il est resté
17 là, il a travaillé d'arrache-pied pour que ces réunions soient fructueuses.
18 Vous apprendrez qu'au cours des négociations de Paris en mars 1999,
19 la délégation serbe était prête à finaliser les éléments politiques de
20 l'accord et à discuter de la portée et du caractère d'une présence
21 internationale au Kosovo-Metohija comme cela a été indiqué au "Contact
22 Group" lors des négociations à Rambouillet en février.
23 M. Milutinovic a soutenu cette position à Paris et lors d'autres réunions.
24 La Chambre entendra dire qu'à Paris, M. Milutinovic a déclaré ceci : La
25 délégation d'Etat a remis diverses propositions concernant les éléments
26 politiques de l'accord… sans en changer le texte pour l'essentiel et il
27 était disposé à ajouter ces éléments. Avant la finalisation de cet accord,
28 il était disposé à parler de la mise en œuvre et de la portée de cet
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1 accord. Vous entendrez que la position de M. Milutinovic est toujours
2 restée la même. Si l'accord sur l'autonomie et la gouvernance indépendante
3 du Kosovo-Metohija était stable et bonne, alors le déploiement des troupes
4 étrangères ne serait pas nécessaire, et ce n'était qu'une mauvaise solution
5 qui nécessiterait l'intervention de forces étrangères, troupes venant du
6 territoire de Serbie.
7 Vous entendrez dire qu'au cours de sa longue carrière de diplomate,
8 M. Milutinovic était également ancien premier ministre de la RFY pendant
9 les pourparlers de Rambouillet. Lorsque vous entendrez ces éléments de
10 preuve, je vous demande de bien porter attention aux faits suivants : M.
11 Milutinovic était ambassadeur de la RSFY chargé des affaires étrangères à
12 la tête de l'Etat, chargé de la presse, de la culture et de l'information
13 de 1987 à 1989. Il était l'ambassadeur de la RSFY et de la FRY en Grèce
14 entre 1989 et 1995. Il était ministre des Affaires Etrangères de la FRY
15 entre 1995 et 1997.
16 Vous entendrez dire que M. Milutinovic a été en contact avec tous les
17 membres du Groupe de contact, les ministres des Affaires étrangères à Paris
18 et à Rambouillet pendant son mandant. De surcroît, il a travaillé
19 étroitement avec l'ambassadeur Hill pendant les accords de Dayton qui ont
20 mis un terme à la guerre en Bosnie-Herzégovine.
21 La Chambre de première instance entendra des éléments de preuve de M.
22 Zivota Cosic et sa déposition, il était ministre chargé de l'énergie et des
23 mines en Serbie en 1999. Son ministère était responsable des questions
24 d'énergie et de toute l'industrie pétrolière en République de Serbie
25 lorsque la guerre a commencé. A la fin du mois de mars 1999, M. Cosic était
26 membre des forces spéciales qui avaient été mises en œuvre pour faire
27 enlever les produits chimiques dangereux qui auraient pu produire des
28 effets nocifs lors du bombardement de l'OTAN. Ces produits ont été déplacés
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1 et se trouvaient dans les régions très populaires en Serbie et ont été
2 déplacés afin d'éviter des effets délétères lors des frappes de l'OTAN à
3 ces endroits.
4 Vous entendrez dire que M. Cosic était en contact avec M. Milutinovic
5 tous les deux ou trois jours concernant ces questions, qu'il envoyait des
6 rapports d'avancement au quotidien sur cette opération. Les éléments
7 montreront que les autorités n'avaient pas planifié, préparé la guerre,
8 elles n'étaient pas prêtes à cela. M. Milutinovic a travaillé sur ces
9 questions, il a travaillé pour éviter qu'il y ait un désastre et pour
10 alléger la souffrance humaine. Vous entendrez également la déposition de M.
11 Jovan Kojic qui, entre 1998 et 1999, était membre du bureau du président de
12 la République de Serbie. M. Kojic était l'assistant du premier secrétaire
13 de M. Milutinovic et responsable de la gestion aux affaires courantes au
14 niveau de la présidence. Il va témoigner au niveau de différentes réunions
15 qui ont lieu dans le bureau de M. Milutinovic, des documents reçus et du
16 travail au quotidien de M. Milutinovic.
17 La Chambre entendra des dépositions sur des réunions qui se sont
18 déroulées entre M. Milutinovic et le feu Dr Ibrahim Rugova en avril 1999,
19 et particulièrement la réunion qui s'est déroulée le 28 avril 1999 à
20 Pristina où les deux hommes ont signé une déclaration commune, qu'ils se
21 sont adressés aux médias, qu'ils ont demandé à ce que cessent immédiatement
22 les hostilités au Kosovo-Metohija et ont demandé à ce que les pourparlers
23 reprennent dans le but d'obtenir un accord sur l'autonomie substantielle et
24 l'autogouvernance du Kosovo-Metohija. Il s'agit encore d'un exemple qui
25 permet d'indiquer que M. Milutinovic recherchait le bien de tous les
26 citoyens de Serbie, qu'il recherchait une solution politique pacifique à
27 travers le dialogue.
28 Pendant la guerre qui s'est déroulée aux mois de mai et juin 1999, M.
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1 Milutinovic n'a exercé aucune sorte de pouvoir, commandement ou contrôle,
2 n'a donné aucun ordre à aucun membre de l'armée ni de la police ni des
3 forces de sécurité. M. Milutinovic n'a jamais, jamais fait montre d'aucune
4 intention ou conduite criminelle ni état d'esprit. C'est tout à fait le
5 contraire de ce qui est avancé par l'Accusation. La Chambre de première
6 instance entendra des éléments de preuve sur les événements qui se sont
7 déroulés après l'élection de M. Kostunica à la tête de la République
8 fédérale de Yougoslavie et la crise qui a éclaté pendant le mois d'octobre
9 de l'année 2000. Vous allez entendre parler des mesures conséquentes prises
10 par M. Milutinovic à l'époque, mettant en danger sa propre personne ainsi
11 que sa famille afin d'éviter une violence très importante en Serbie et
12 assurer une transition en douceur dans la démocratie. Nous disons ceci pour
13 indiquer quels étaient le caractère et la personnalité de cet homme.
14 Pour finir, Monsieur le Président, nous déclarons que M. Milutinovic
15 n'est pas une personne qui aurait pu commettre les crimes dont on l'accuse.
16 C'est un homme qui n'a jamais, pendant sa vie, jamais fait montre
17 d'intolérance, d'extrémisme, de haine. C'est un homme qui n'a jamais été
18 attiré par la violence et qui n'a jamais fait preuve de violence. Ceci vous
19 pourrez le constater par son comportement et par ses propos. C'est un homme
20 qui a toujours recherché les solutions politiques à travers le dialogue et
21 le compromis. La conscience de M. Milutinovic est claire, il a toujours
22 rejeté les allégations qui ont été faites contre lui par l'Accusation. Il
23 indique que les éléments contre lui sont sans fondement et très peu
24 appropriés. M. Milutinovic pense que les éléments présentés devant cette
25 Chambre fourniront la réponse à ces allégations contre lui et que vous
26 allez l'acquitter.
27 M. Milutinovic, nous allons appeler le premier témoin : le professeur
28 Ratko Markovic.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci pour votre déclaration
2 liminaire, Maître O'Sullivan. Il s'agit d'une ou deux questions que nous
3 souhaitons traiter avant que vous n'appeliez le premier témoin.
4 Tout d'abord, c'est une requête que nous avons reçue tout à fait
5 récemment afin de modifier les déclarations en vertu de l'article 65.
6 Monsieur Hannis, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet ?
7 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, il est vrai que cette
8 requête est arrivée assez tardivement. Je crois que cela pourrait poser
9 problème dans la mesure où ce témoin va déposer pendant quelques jours.
10 Mais en tout cas, ces arguments présentés sont utiles et permettent de
11 savoir quelles pièces seront utilisées et quelles parties de la déposition
12 seront entendues. Je m'oppose simplement au fait que cette requête ait été
13 présentée tardivement, sinon je n'ai pas d'autres commentaires.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, sur la liste 65 te; cette liste
17 pourra être modifiée.
18 Le deuxième point, la Chambre de première instance a reçu aujourd'hui une
19 déclaration conformément à l'article 92 ter, déclaration de M. Markovic. Je
20 crois M. Zecevic que c'est vous qui allez entendre ce témoin.
21 M. ZECEVIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc ce serait peut-être à vous de
23 régler cette question-là.
24 Nous exigeons que ces déclarations soient présentées 48 heures avant la
25 déposition du témoin en question, lorsque c'est un week-end, sans pour
26 autant essayer de couper les cheveux en quatre, techniquement parlant, il
27 est tout de même très important pour les Juges de recevoir ces déclarations
28 avant la dernière audience de vendredi. Je ne peux pas en faire grand-chose
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1 si je reçois cette déclaration ce matin, peut-être que vous allez me dire
2 que nous n'allons pas parvenir à cette partie de la déclaration
3 aujourd'hui, que j'aurai le temps de la lire ce soir. Mais, je crois que ce
4 n'est pas la meilleure façon de procéder. Je souhaite attirer votre
5 attention sur ce point-ci ainsi qu'à tous les avocats de la Défense à ce
6 stade de la procédure, car je pense que, en tout cas en ce qui me concerne,
7 vous devriez nous remettre ces déclarations pour nous permettre de les lire
8 avant la déposition du témoin.
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Je comprends fort bien, Monsieur le
10 Président, mais nous n'avions simplement pas le temps. Nous avons averti
11 nos confrères et consoeurs de l'Accusation vendredi, nous leur avons dit
12 que nous avions demandé le versement au dossier de cette déclaration
13 conformément au 92 ter, en somme il s'agit d'une liste de documents que
14 nous avons l'intention d'utiliser en présence du Pr Markovic et de
15 différents commentaires que le professeur a fait à propos de ces document.
16 Cette déclaration 92 ter a été présentée afin de gagner le plus de temps
17 possible car nous avançons huit documents au total qui formeront
18 l'essentiel de la déposition.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'entends ce que vous dites, Maître
20 Zecevic, néanmoins ce que je viens de dire doit être respecté.
21 M. ZECEVIC : [interprétation] J'entends bien, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons terminé avec les
23 formalités. Vous souhaitez citer à la barre le professeur Markovic.
24 M. ZECEVIC : [interprétation] Pardonnez, Monsieur le Président, une ou deux
25 formalités. Il faudrait faire une demande orale afin de modifier la
26 notification concernant ce témoin. Ceci porte sur la pièce P461, c'est une
27 déclaration conjointe faite par M. Milutinovic et le feu Dr Rugova, le 28
28 avril 1999 ainsi que la pièce 1D60 qui est une séquence vidéo de cette même
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1 réunion. Pr Markovic a assisté à cette réunion comme vous le savez car ces
2 deux pièces ont déjà été présentées dans le cadre de ce procès. Nous avons
3 omis d'inclure ces deux pièces dans la liste que nous avons présentée la
4 semaine dernière, mais nous avons signalé ceci à l'Accusation par message
5 électronique vendredi dernier, nous avons indiqué que nous allions utiliser
6 ces deux pièces à la fois la pièce et la retranscription vidéo.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce tout ce que vous avez à dire ou
8 est-ce qu'il y a d'autres questions que vous souhaitez traiter ?
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, l'autre question concerne celle de la
10 traduction. Nous avons un problème de traduction.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous en prie.
12 M. ZECEVIC : [interprétation] En réalité, Monsieur le Président, la pièce
13 P856 qui est la constitution de la RFY, la loi constitutionnelle de 1999.
14 Ce document, nous avons l'intention de l'utiliser, bien entendu, avec notre
15 expert témoin. La traduction en anglais de ce document ne porte que sur le
16 premier point, il s'agit simplement de la déclaration ou la première partie
17 de la constitution de 1992. Nous allons ici citer la pièce 1D139 qui est la
18 traduction en anglais de la pièce P856, 1D139 est la traduction du même
19 document et existe dans le système électronique. Nous pouvons fournir les
20 copies papier, si vous le souhaitez, pour les Juges de la Chambre ainsi que
21 pour nos confrères et consoeurs du bureau du Procureur, de tous les
22 documents qui figurent dans ces deux classeurs et le témoin va utiliser ces
23 derniers.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un autre point que vous souhaitez
25 soulever ?
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Non, merci, il n'y a rien d'autre.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Fort bien, merci.
28 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, avez-vous des
2 commentaires à faire à cet égard ?
3 M. HANNIS : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Cela ne me
4 surprend pas beaucoup que la Défense veuille utiliser la pièce P461 et 1D60
5 concernant la réunion avec Rugova, mais cela ne me pose aucun problème.
6 C'est une solution pratique d'utiliser la pièce 1D139 et la traduction
7 complète de ce document. En revanche, j'ai un autre point que je
8 souhaiterais parler concernant une question de traduction des articles dans
9 Politika qu'ils entendent montrer au témoin. Je comprends qu'il s'agit
10 d'articles qu'il a déjà lus et qu'ils sont simplement utilisés pour lui
11 rafraîchir la mémoire pour des événements dont il a une connaissance
12 personnelle. S'il va en parler et s'il a une quelconque connaissance à ce
13 sujet, si ces pièces sont présentées, je demande une traduction parce que
14 nous ne seront pas en mesure de les lire et je n'ai rien en anglais. Je ne
15 sais pas quoi vous dire.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous n'avons pas l'intention de verser au
18 dossier les articles du journal Politika hormis ceux qui disposent d'une
19 traduction, celles-ci ont déjà été fournies.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
21 Si ceci est quelque chose dont vous souhaitez vous servir, et si ceci
22 représente un quelconque élément important, ce sera à vous de les faire
23 traduire, Monsieur Hannis.
24 Je remarque la pièce P461 et 1D60, pardonnez-moi, vous auriez dû les citer
25 déjà lorsque vous fournissiez les différents éléments concernant ce témoin.
26 Je ne m'oppose pas à ce que vous en parliez.
27 En tout cas, pour ce qui est de la constitution, encore une fois, il
28 serait logique ici d'utiliser la pièce 1D139. Cela me surprend encore, mais
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1 les documents portant sur la constitution sont tellement confus. Les choses
2 deviennent de plus en plus claires, mais ne sont pas encore complètement
3 claires en ce qui me concerne. Pour ce qui est des articles du journal
4 Politika, nous remarquons que vous ne pouvez les verser au dossier que si
5 ces derniers ont été traduits.
6 Donc nous pouvons peut-être maintenant entendre le Pr Markovic.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, tout à fait.
8 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Professeur Markovic.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour à vous.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pouvez prêter serment
12 et lire le texte du document que l'on va maintenant vous montrer ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
15 LE TÉMOIN: RATKO MARKOVIC [Assermenté]
16 [Le témoin répond par l'interprète]
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous
18 asseoir.
19 Maître Zecevic.
20 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Interrogatoire principal par M. Zecevic :
22 Q. [interprétation] Bonjour, Professeur Markovic.
23 R. Bonjour à vous.
24 Q. Bien. Monsieur le Professeur, pourriez-vous nous donner des éléments
25 d'information générale vous concernant, votre nom complet ainsi que vos
26 titres ?
27 R. Je m'appelle Ratko Markovic. Je suis professeur à temps plein à la
28 faculté de droit à l'Université de Belgrade.
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1 Q. Vous parlez l'anglais, n'est-ce pas ?
2 R. Oui, je comprends l'anglais.
3 Q. Avant d'entrer dans le vif du sujet, si vous vous sentez mal, si vous
4 avez un malaise et si vous souhaitez interrompre l'audience, n'hésitez pas
5 à nous le souligner de façon à ce que nous puissions prendre les mesures
6 nécessaires.
7 R. Je vous remercie.
8 Q. Monsieur le Professeur, pourriez-vous me dire ceci, s'il vous plaît,
9 cela fait combien d'années que vous enseignez le droit à la faculté de
10 droit de Belgrade ?
11 R. Je suis devenu professeur à plein temps de droit constitutionnel en
12 1984, et j'ai également enseigné le droit administratif depuis 1985.
13 Q. Vous avez écrit quelque 250 articles dans le domaine juridique ?
14 R. C'est exact. Après l'obtention de mon diplôme, j'ai entamé une carrière
15 dans le monde universitaire. J'étais professeur assistant entre 1984 et
16 1985, ensuite j'ai été nommé professeur à plein temps. Il est vrai que je
17 m'occupe beaucoup de questions universitaires. J'ai écrit deux manuels de
18 droit pour les étudiants en droit. Un manuel sur le droit constitutionnel a
19 été imprimé en 11 éditions, et l'autre manuel portant sur le droit
20 administratif a été publié à deux reprises. C'était deux éditions
21 différentes.
22 Q. Monsieur le Professeur, je vous demande de bien vouloir ralentir, pour
23 que les interprètes puissent vous traduire. Merci.
24 Monsieur le Professeur, vous avez rédigé une opinion d'expert dans le cadre
25 de ce procès qui porte sur les pouvoirs et la position du président de la
26 République de Serbie. Dans ce document, vous nous avez présenté vos points
27 de vue sur ces questions-là, et je pense que ces points de vue se fondaient
28 sur vos travaux universitaires et académiques, et sont le reflet de votre
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1 avis plus ou moins indépendant mais universitaire.
2 R. C'est exact. J'ai écrit ce rapport à l'intention de ce procès. J'ai
3 fait de mon mieux pour présenter de façon précise, sans parler trop dans le
4 détail, j'ai essayé de présenter de façon claire les institutions relevant
5 de la constitution depuis 1974, et j'ai essayé de présenter certains points
6 de vue qui étaient des opinions présentées par le milieu universitaire
7 plutôt qu'une façon tout à fait indépendante de traiter de ces questions en
8 ce qui me concernait personnellement.
9 Q. Merci. Professeur, vous avez dans votre classeur des documents sous les
10 yeux. Le premier document est votre propre opinion d'expert. Je vous
11 demande de bien vouloir prendre ce document, s'il vous plaît.
12 R. Oui. Ça y est. Je le vois. Je l'ai sous les yeux. Merci.
13 Q. Je vais vous inviter à examiner l'intercalaire numéro 1.
14 R. Oui.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur l'Huissier.
16 Q. Professeur, vous êtes auteur de ce document et vous l'avez revu à
17 plusieurs reprises depuis quelques jours. Est-ce bien ce document que vous
18 avez sous les yeux ?
19 R. Oui, c'est tout à fait ce document.
20 Q. Pour commencer, 1D682, c'est le numéro de ce document, c'est votre
21 opinion d'expert, intitulé "Opinion d'expert sur les pouvoirs et la
22 position du président de la République de Serbie" ?
23 R. Oui, c'est tout à fait ça. Le contenu de cette opinion correspond à
24 l'intitulé. Il s'agit des pouvoirs, des attributions et de la position du
25 président de la République de Serbie.
26 Q. Monsieur, vous vous fondez sur une étude scientifique d'un certain
27 nombre de lois et de règlements qui figurent à l'annexe premier dans votre
28 déclaration du 30 juillet. Nous retrouvons ceci à l'intercalaire 2. Est-ce
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1 que vous pouvez examiner cela, s'il vous plaît ?
2 R. Oui. La plupart de ces publications sont citées dans mon opinion
3 d'expert.
4 Q. C'est le 30 juillet que vous avez signé ce rapport, 1D745 est le numéro
5 du document. Est-ce que vous acceptez maintenant de dire que cette
6 déclaration est exacte et véridique au mieux de vos connaissances et que
7 tous les documents qui vous ont servi dans la rédaction de votre opinion
8 d'expert y figurent ?
9 R. Oui, j'accepte ceci comme étant vrai.
10 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames et Monsieur
11 les Juges, 1D684 c'est le numéro du CV de M. Markovic, et 1D683 est la cote
12 de sa bibliographie. Nous demandons le versement de ces quatre documents au
13 dossier. --
14 M. HANNIS : [interprétation] Pas d'objection.
15 M. ZECEVIC : [interprétation]
16 Q. Revenons maintenant à l'intercalaire 1 dans ce classeur que vous avez
17 sous les yeux. Dites-nous, s'il vous plaît, Monsieur le Professeur, sur
18 quoi vous vous êtes focalisé dans votre travail ? Vous avez étudié la
19 constitution de la Serbie de 1990 dans toutes ses dispositions. P855 est le
20 numéro de ce document; 1D139, la traduction anglaise de ce document.
21 Alors, vous avez examiné avant tout les article 83 à 89 dans le chapitre
22 intitulé le "Président de la République" ainsi que l'article 132, n'est-ce
23 pas ?
24 R. Oui, c'est vrai. Sauf que j'ai pris en considération également les lois
25 qui apportent des détails sur ces articles lorsque c'est nécessaire et dans
26 les situations où il y avait une pratique constitutionnelle, je l'ai citée
27 dans les notes de bas de page.
28 Q. Je vous remercie. Professeur, dans votre travail d'expert, au
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1 paragraphe 2.2, vous affirmez que les compétences du président de la Serbie
2 ne constituent qu'une catégorie exclusivement constitutionnelle. Est-ce que
3 vous pourriez nous expliquer ce que vous entendez par là ?
4 R. Cette affirmation s'appuie sur l'article 83 de la constitution en son
5 dernier alinéa. Cela signifie que les attributions du président de la
6 République ne peuvent être présentées que dans des articles
7 constitutionnels et ne peuvent pas être reprises dans des lois. A savoir,
8 dans cet article de la constitution qui énumère les attributions du
9 président, rien ne peut trouver de modification, rien ne peut être ajouté
10 ni enlevé par une loi. C'est ainsi que la cour constitutionnelle de la
11 Serbie entend les choses lorsqu'elle a jugé de la constitutionnalité de la
12 loi sur les grades des membres du ministère de l'Intérieur. C'est ainsi
13 qu'elle a interprété cet article de manière explicite, la cour
14 constitutionnelle a affirmé que ces attributions du président de la
15 République ne sauraient être élargies par une loi; c'est la raison pour
16 laquelle lorsque ceci a été fait, cela été déclaré anticonstitutionnel ou
17 non constitutionnel.
18 Q. Vous dites la "cour constitutionnelle", vous entendez par là la cour
19 constitutionnelle de la Serbie ?
20 R. Oui, la cour constitutionnelle de la Serbie.
21 Q. Nous reviendrons à cette question, à la question de cette décision
22 prise par la cour constitutionnelle de la Serbie. Professeur, pourriez-vous
23 expliquer aux Juges de la Chambre l'importance de la constitution de la
24 Serbie de 1990 à l'intercalaire 5, P855 et 1D139. Quelle est l'importance
25 de cette constitution ?
26 R. Très brièvement, l'importance de la constitution de la Serbie de
27 1990 est double. D'une part, il s'agit d'une expression du contexte
28 politique momentané dans lequel s'est trouvée la RSFY, où il y avait un
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1 danger de cessation opéré par certaines républiques et ce danger était tout
2 à fait présent et imminent. Pour que la République de Serbie ne se retrouve
3 pas dans une situation de vide constitutionnel, en 1990, une constitution a
4 été adoptée, constitution de la République de Serbie, même si elle était
5 encore une entité fédérale faisant partie de la fédération, mais cette
6 constitution lui apportait des attributs d'un Etat autonome.
7 Cela c'est la première caractéristique. La deuxième caractéristique de la
8 constitution de 1990 est la suivante : cette constitution apporte une
9 réforme radicale du système constitutionnel qui par son importance
10 constitue une véritable révolution constitutionnelle. En d'autres termes,
11 on adoptait de nouveaux principes, de nouvelles institutions qui marquaient
12 une rupture nette avec le système préalable. On a adopté la propriété
13 privée, le marché des biens, on a apporté un système politique plus
14 réparti. On a déterminé des mécanismes de république parlementaire
15 constitutionnelle, donc un système parlementaire de pouvoir. On a élargi
16 les attributions de la cour constitutionnelle et on a également élargi la
17 liste des droits de l'homme et des citoyens. A la place du système des
18 communes, on a adopté un système d'autonomie locale. En bref, telles
19 seraient les caractéristiques principales de la réforme apportée par la
20 constitution de 1990. Encore une fois, il s'agit d'une rupture radicale
21 avec le système constitutionnel précédent. De là, cette constitution ne
22 comporte nulle part le terme "socialiste".
23 Q. Je vous remercie, Professeur. Suite à la constitution de la Serbie de
24 1990, Professeur, le 27 avril 1992, la République fédérale de Yougoslavie a
25 été créée, et c'est à cette date-là qu'elle s'est dotée de sa constitution
26 de 1992. Dans votre classeur c'est l'intercalaire 6, P856.
27 Je vais vous demander, Professeur, de nous préciser les conséquences
28 juridiques de l'adoption de cette constitution de la République fédérale de
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1 Yougoslavie de 1992.
2 R. La constitution de la République fédérale de Yougoslavie de 1992 a été
3 adoptée afin de formaliser sur le plan constitutionnel les deux
4 républiques, entités fédérales qui n'avaient pas fait sécession de la
5 fédération précédente, à savoir la République de Serbie et la République de
6 Monténégro. La constitution fédérale préalable de 1974 avait été conçue
7 pour une fédération constituée de six unités fédérales. Vu qu'il y a eu
8 sécession opérée par quatre d'entre elles, les deux restantes ont formalisé
9 leurs liens fédéraux par cette constitution de la République fédérale de
10 Yougoslavie de 1992. La fédération constitue une prolongation et cherche à
11 préserver le rôle de la Yougoslavie sur le plan juridique et de préserver
12 la personnalité juridique de ces Républiques de Serbie et de Monténégro.
13 C'est ce qui figure dans le préambule de la constitution de 1992.
14 Q. Je vous remercie, Monsieur le Professeur. Avec l'adoption par cette
15 constitution de la RFY, nous aurons l'occasion d'y revenir, nous
16 appellerons cette position, la constitution fédérale. Les deux républiques
17 membres de la fédération sont dotées de leurs constitutions qui doivent
18 s'être harmonisées avec la constitution ainsi que toutes leurs lois. Je
19 pense que c'est ce qui figure à l'article 115, n'est-ce pas ?
20 R. Oui, toute fédération exige que la constitution, les lois de la
21 fédération et le droit interne de la fédération aient la primauté par
22 rapport aux constitutions et aux droits internes de ces entités fédérales.
23 C'est une pratique générale qui caractérise toutes les fédérations et il
24 est énoncé à l'article 115 de la nouvelle constitution qui dit que les
25 constitutions des Etats membres, des républiques membres, ainsi que tout le
26 reste des lois et des règlements doivent être conformes à la constitution
27 de la République fédérale de Yougoslavie. Donc, c'est un ancien principe,
28 une ancienne maxime qui date du droit constitutionnel suisse, à savoir que
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1 le droit fédéral a la primauté sur le droit des entités fédérales. Les
2 républiques qui sont membres de la fédération ont un statut qui correspond
3 à celui des républiques dans l'ex-fédération yougoslave.
4 Q. Par rapport aux dispositions de l'article 115 de cette constitution, je
5 souhaiterais que vous apportiez une explication aux Juges de la Chambre et
6 à toutes les personnes présentes. La loi constitutionnelle pour mettre en
7 application la constitution était nécessaire. Il était nécessaire
8 d'harmoniser le reste des lois et des règlements avec la nouvelle
9 constitution, et on a abrogé un certain nombre de lois. Est-ce que vous
10 voulez que je scinde ceci en trois questions distinctes ?
11 R. L'objectif de la loi constitutionnelle dans tous les systèmes
12 constitutionnels est le même. La loi constitutionnelle a pour objectif de
13 gérer la période transitoire, donc la période où l'on passe de l'ancienne
14 constitution à la nouvelle constitution. Tel est également le sens de cette
15 loi constitutionnelle adoptée afin de mettre en application la constitution
16 de 1992. Bien entendu, vu ce que l'on vient de mentionner, à savoir qu'il
17 est nécessaire qu'il y ait conformité de l'ensemble des lois et des
18 règlements avec la constitution fédérale et avec les lois fédérales, l'on
19 précise ici de manière graduée comment se fera la transition entre l'ancien
20 système constitutionnel et le nouveau système.
21 On précise les dates butoir, les dates jusqu'auxquelles l'harmonisation
22 doit se faire entre les anciennes lois et la nouvelle constitution. Ces
23 lois de même cessent d'être en vigueur et sont abrogées. C'est l'objectif
24 de la loi constitutionnelle, permettant l'application de la nouvelle
25 constitution qui assure la transition entre l'ancien système
26 constitutionnel et le nouveau système, nouveau système précisé par la
27 nouvelle constitution qui entre en application grâce et d'après les
28 modalités de la loi constitutionnelle.
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1 Q. Je vous invite maintenant, Professeur, à vous reporter à l'intercalaire
2 7, 1D358. Il s'agit de la loi constitutionnelle des modifications de la loi
3 constitutionnelle sur la mise en application de la constitution de la
4 République de Serbie cette fois-ci. Est-ce que vous pourriez nous commenter
5 l'article 1 et l'article 4 ?
6 R. En l'article 1 de cette loi constitutionnelle, il est précisé que les
7 termes : "Dans un délai de deux ans depuis la promulgation de la
8 constitution sont remplacés par jusqu'au 31 décembre 1992, comme étant la
9 date butoir pour harmoniser les lois avec la nouvelle constitution." On a
10 prorogé le délai prévu pour l'harmonisation. La même chose est prévue à
11 l'article 4. Il est dit que : "C'est jusqu'au 31 décembre 1992 qu'on
12 harmonisera avec la constitution le reste des lois de la République qui ne
13 sont pas conformes à cette constitution et qui régissent les relations qui
14 ne relèvent pas des compétences de la République fédérale de Yougoslavie."
15 Encore une fois, nous avons ici une prorogation du délai prévu pour
16 l'harmonisation.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant, Maître Zecevic, s'il
18 vous plaît.
19 S'agissant de l'article 4 de la constitution -- excusez-moi, l'article 4
20 que l'on voit au milieu de la page, le mot "jusqu'à" n'est pas une
21 traduction exacte, correcte ?
22 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, on se réfère à
23 l'article 4 de la loi constitutionnelle. "Jusqu'au 31 décembre" constitue
24 une traduction exacte de l'original.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce qui a été traduit dans la réponse
26 du témoin, c'est "ayant pour date butoir le 31 décembre." Le terme
27 "jusqu'au" n'aurait pas de sens dans ce contexte-là. Est-ce que le terme
28 que vous utilisez peut être traduit par "by" en anglais ?
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui. M. le professeur peut nous confirmer
2 cela.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien, nous avons réglé cela.
4 Revenons un petit peu en arrière, l'article 3. Vous vous êtes référé
5 à l'article 3. Je me trompe ?
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Je me suis référé au premier article et
7 à l'article 4 de la constitution.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais j'ai un exemplaire qui
9 commence par l'article 3. Les réponses du témoin ne correspondaient pas aux
10 dispositions de l'article 3. Mais je comprendrais où est le problème s'il
11 nous parlait de l'article 1.
12 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, je viens de m'apercevoir du fait
13 que l'article 1, pour une raison qui m'échappe, n'a pas été traduit.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, très bien. Nous comprenons
15 maintenant que le témoin a parlé des articles 1 à l'article 4. Nous pouvons
16 aller de l'avant. Mais il pourrait être important -- ou plutôt, la pièce
17 qui figure à l'intercalaire 7 comporte le premier article. Il faudrait
18 faire en sorte que cet article y figure, ou qu'il soit correctement
19 traduit.
20 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous ferons le nécessaire. Je vous remercie,
21 Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Je présente mes excuses.
24 Q. Professeur, je pense que nous avons expliqué maintenant la situation;
25 mais juste une précision pour que ce soit tout à fait clair. L'adoption de
26 la constitution fait que certaines lois sont modifiées, harmonisées avec
27 les nouvelles dispositions constitutionnelles pour être conformes à celles-
28 ci. D'autre part, il y a des lois qui sont abrogées dans ces situations-là;
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1 est-ce exact ?
2 R. Oui, c'est tout à fait exact. On le voit très bien dans la première loi
3 constitutionnelle, la loi qui a été adoptée pour la mise en application de
4 la constitution de la République de Serbie de 1990, publiée dans le journal
5 officiel, comme nous pouvons le voir, numéro 1, en 1990. Plus tard, toutes
6 les lois constitutionnelles modifient ce délai et le prolongent, car il
7 s'est avéré que c'était trop ambitieux d'exiger cette harmonisation en très
8 peu de temps. Il était difficile de respecter ce délai très bref pour
9 harmoniser la législation avec la nouvelle constitution.
10 Q. Très bien. Professeur, à titre d'exemple, lorsque certains règlements
11 ou certaines dispositions ne sont plus en vigueur ou sont abrogées.
12 Examinons 1D370 à l'intercalaire 8. Je vais vous inviter à nous apporter un
13 commentaire au sujet de l'article 1 --
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous avons fourni la traduction de la
15 totalité de ce jeu de documents. C'est l'intercalaire 8.
16 Q. Je vous demande juste d'apporter un commentaire au sujet de l'article
17 1, le début du texte, puisque dans la suite du texte nous avons une liste
18 de lois et de règlements qui sont abrogés.
19 R. Très simplement, il s'agit ici de lois qui ne peuvent pas être
20 harmonisées avec la nouvelle constitution par voie de modification de ces
21 lois et règlements. Donc, il faut remplacer ces lois par l'adoption de
22 nouvelles. Vous avez ici une énumération qui comporte 25 lois qui relèvent
23 de cette catégorie-là et qui cessent d'être en vigueur, et ce, par une loi
24 qui dispose de leur abrogation. Ce qui est peut-être intéressant c'est ce
25 qu'on trouve au point 7, le fait que la loi sur la conduite des organes de
26 la république en situation extraordinaire, elle aussi est abrogée.
27 Q. On y reviendra plus tard. Très bien. Revenons maintenant, si vous
28 voulez bien, puisque nous avons expliqué en grandes lignes la situation qui
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1 concerne l'adoption de la constitution de la Serbie de 1990 et de la
2 République fédérale de Yougoslavie de 1992, ainsi que les conséquences
3 juridiques, le fait qu'il y ait eu adoption de la loi constitutionnelle sur
4 la mise en application de la constitution, la modification et abrogation
5 des lois existantes. Je vous invite maintenant à examiner la constitution
6 de la République de Serbie. C'est l'intercalaire 5, P855, les articles 83 à
7 89, ainsi que l'article 132.
8 Mais pour commencer, pourriez-vous dire quel est votre avis de la pratique
9 présidant l'élection du président de la Serbie ? Quelles sont les
10 complications que ceci comporte en 1997 jusqu'à aujourd'hui ?
11 R. La procédure et les modalités de l'élection du président de la
12 république sont très complexes. Il s'agit d'une procédure très complexe,
13 telle que la loi sur l'élection du président la formule initialement. Ces
14 élections au poste du président étaient valables uniquement si la majorité
15 des électeurs se rendaient aux urnes; la majorité des électeurs inscrits
16 sur les listes électorales de la République de Serbie. On exigeait que
17 cette condition très difficile à remplir soit remplie, que 50 % plus un se
18 rendent aux urnes. Puis, les élections ont été remportées par le candidat
19 qui a remporté la majorité des électeurs qui ont voté. S'il n'y avait pas
20 eu de majorité dégagée, alors deux candidats ayant remporté un maximum de
21 voix participaient au deuxième tour. C'est à partir de ce moment-là, donc
22 au deuxième tour, que se faisait élire celui qui remportait le plus de
23 voix.
24 Q. Mais dites-moi, Professeur, en 1997 on a tenu des élections à deux
25 reprises, n'est-ce pas ?
26 R. Oui. En 1997, les élections présidentielles ont été organisées par deux
27 fois. Une première fois, je pense que ce sont MM. Lilic et Seselj qui se
28 sont retrouvés comme deux candidats ayant atteint le deuxième tour, mais
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1 cette condition générale n'a pas été remplie. C'est la raison pour laquelle
2 il a fallu refaire les élections. A ce moment-là, lorsqu'on a refait les
3 élections, M. Milan Milutinovic a été élu président de la république au
4 deuxième tour.
5 Q. En 2002, Milutinovic a cessé d'être président et il y a eu, n'est-ce
6 pas, trois autres élections, trois autres suffrages en Serbie ?
7 R. Oui. Deux d'entre eux ont été annulés, pour la raison que j'ai
8 expliquée. A ce moment-là, on a modifié la loi électorale. La loi relative
9 à l'élection du président de la république a été modifiée et la condition
10 dont j'ai parlé a été abrogée, condition selon laquelle il fallait que la
11 majorité des électeurs figurant sur les listes électorales se prononce pour
12 que l'élection soit valable. C'est seulement à ce moment-là que le nouveau
13 président a été élu, Boris Tadic.
14 M. ZECEVIC : [interprétation] J'aimerais qu'on examine la pièce 855, qu'on
15 nous la présente avec le système de prétoire électronique.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est une déclaration relative à la
17 promulgation de la constitution, et la constitution est placée en annexe,
18 n'est-ce pas ?
19 M. ZECEVIC : [interprétation] La déclaration relative à la promulgation de
20 la constitution, c'est un document qui accompagne systématiquement toute
21 nouvelle constitution. Toute nouvelle constitution s'accompagne d'une
22 lettre promulguant ledit document. Quant au texte à proprement parler de la
23 constitution, il figure aussi à la pièce P855.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que s'agissant de la
25 constitution de la RFY, nous avons également un document qui porte la cote
26 986.
27 M. ZECEVIC : [interprétation] La constitution de la RFY figure au dossier
28 sous la cote P856, la traduction étant 1D139. C'est le document dont j'ai
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1 parlé au début de mon intervention. C'est celui pour lequel nous ne
2 disposons pas encore de traduction en bonne et due forme.
3 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il est possible que nous ayons trouvé
5 la raison de la difficulté qui est la vôtre s'agissant des traductions.
6 Dans la pièce P856, il n'y qu'une page qui est traduite, c'est celle dont
7 vous nous avez parlé tout à l'heure avec en annexe la constitution de la
8 Serbie, mais c'est certainement parce que nous disposons déjà d'une pièce
9 où figure cette constitution, P986. Inutile de s'appesantir sur ce point,
10 mais peut-être pourriez-vous vérifier la chose pendant la pause. Pour
11 l'instant, on travaille à partir de la pièce 1D139. Enfin, c'est le genre
12 de chose qui peut créer la confusion.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, mais la pièce P986 n'est pas le document
14 tiré du journal officiel, voilà où je veux en venir. Lorsque précédemment
15 nous avons reconnu, avec nos collègues de l'Accusation, un certain nombre
16 de choses, nous nous sommes mis d'accord sur un certain nombre de points,
17 nous nous sommes mis d'accord exclusivement sur le texte qui figure dans le
18 journal officiel. Il y a eu un problème que nous n'avons pas remarqué,
19 c'était celui de l'autre traduction, la traduction de la pièce P856 que
20 nous avons ensuite fournie, et en l'occurrence c'est la pièce 1D139.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Continuez, Maître Zecevic.
22 [Le conseil de la Défense se concerte]
23 M. ZECEVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on présente la pièce
24 P855 et l'article 83 à l'écran. Au dossier qui vous a été remis ceci figure
25 à l'intercalaire 5.
26 Q. Monsieur le Témoin, nous avons sous les yeux votre rapport d'expert et
27 je suis en train d'examiner le paragraphe 2.3. Vous dites que tous les
28 pouvoirs dont était investi le président de la République sont divisés en
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1 trois catégories. Il y a trois types d'attribution qui sont les siennes.
2 Premièrement, il s'agit de la représentation de l'Etat de la Serbie;
3 deuxièmement, il s'agit des prérogatives relatives à l'office du président
4 de la République en tant qu'organe non exécutif; et troisièmement, il y a
5 des attributions qui se rapportent à des situations un peu exceptionnelles.
6 Pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par là, que signifie le
7 terme de "représentation" ?
8 R. En fait, j'ai séparé ces différents pouvoirs, ces différentes
9 attributions en trois groupes. Je n'ai pas énuméré tout ce qui découle des
10 articles 83, 84, 85, 89 et 132 de la constitution.
11 M. ZECEVIC : [interprétation] J'aimerais qu'on ait les deux pages à l'écran
12 parce qu'on ne nous montre pas la totalité de l'article 83. Il faudrait
13 également présenter la suite qui se trouve à la page 15 afin qu'on puisse
14 avoir la totalité de cet article 83 dont nous parle notre témoin.
15 Q. Toutes mes excuses, Monsieur le Témoin, je vous ai interrompu.
16 R. Ce n'est pas grave.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] On me dit que ce n'est pas possible.
18 Q. Veuillez poursuivre, Monsieur le Témoin. Toutes mes excuses.
19 R. Afin de mieux présenter les points essentiels, on peut dire que toutes
20 les attributions et tous les pouvoirs du président de la République sont
21 répartis en trois groupes. Il ne s'agit nullement de diminuer en quoi que
22 ce soit les pouvoirs du président. S'agissant de la première catégorie
23 d'attributions, il s'agit de tout ce qui a trait à la représentation de
24 l'Etat de Serbie. C'est là une description générale des pouvoirs qui sont
25 ceux de tout chef d'Etat. Prenez n'importe quel chef d'Etat, que ce soit un
26 monarque ou le président d'une République, quelle est sa fonction
27 essentielle ? C'est de représenter un Etat. Donc en tant que représentant
28 de l'Etat, il exprime l'unité de cet Etat, et le président de la République
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1 a à ce titre les attributions et les pouvoirs que j'ai énumérés.
2 Q. Merci beaucoup. Dans ce qui concerne le deuxième groupe de pouvoir, il
3 s'agit des pouvoirs du président de la République en tant qu'organe de
4 l'Etat représentant les organes exécutifs non opérationnels. Que voulez-
5 vous dire par là ?
6 R. Bien que selon l'article 9, paragraphe 2 de la constitution de la
7 République de Serbie, le président de la République n'ait pas de pouvoirs
8 exécutifs vu les attributions qui sont les siennes, on peut dire que ses
9 fonctions sont très proches de celles d'un organe exécutif, il n'a pas de
10 pouvoirs opérationnels, c'est ça que je voulais dire.
11 L'organe qui dispose de ces pouvoirs-là, c'est le gouvernement. C'est la
12 raison pour laquelle le président de la République, aux termes de ce type
13 de constitution, de dispositif constitutionnel, c'est l'organe de l'Etat
14 que l'on peut qualifier d'exécutif non opérationnel. En d'autres termes, il
15 n'a pas de compétences exécutives opérationnelles puisque cela incombe au
16 gouvernement.
17 Son deuxième attribut résulte de la constitution de 1990 qui prévoit
18 un système de gouvernement mixte où l'on retrouve les caractéristiques d'un
19 système présidentiel et les caractéristiques d'un système qui se trouve
20 entre les mains du parlement. En fait, c'est un système parlementaire
21 amendé auquel on a conféré certaines caractéristiques d'un système
22 présidentiel. Je pense en particulier à l'élection du président et non pas
23 aux pouvoirs, aux compétences qui sont les siennes.
24 Q. Vous êtes en train de parler de la Serbie ?
25 R. Oui, je parle uniquement de la Serbie parce que vous me posez des
26 questions au sujet de la constitution de la République de Serbie.
27 Q. Merci. Pourriez-vous nous expliquer maintenant ce qu'il en est de ces
28 compétences qui sont mises en application lors de situations
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1 extraordinaires. Qu'est-ce que vous entendez par là ?
2 R. Il s'agit de situations qui sortent de l'ordinaire, d'une définition
3 donc négative. Je pense à des situations où il y a perturbation des
4 relations entre le pouvoir exécutif et le pouvoir parlementaire. Il y a
5 perturbation du fonctionnement de l'Etat et aux termes de la constitution
6 de 1990, il y a trois états d'urgence différents qui sont prévus avec
7 différents degrés : il y a le premier degré; le degré de l'état de guerre
8 imminent; et enfin, l'état de guerre. Aux termes de l'article 83 de la
9 constitution, il y a, dans ce type de situation exceptionnelle, un certain
10 nombre de compétences qui reviennent au président de la république.
11 M. ZECEVIC : [interprétation] Le moment est venu de faire la pause.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le moment est venu de faire la pause.
13 Oui, mais le moment est peut-être aussi venu de poser une question avant
14 cette pause.
15 Nous avons pris connaissance de votre rapport, Monsieur le Professeur, les
16 bases théoriques -- la théorie apparaît clairement dans ce rapport. C'est
17 peut-être ma faute, mais il y a quelque chose que je ne comprends pas ou
18 qui manque peut-être dans votre rapport. Je pense au premier ministre et
19 aux ministres du gouvernement. Qui, aux termes de cette constitution, nomme
20 les ministres ? En dehors du premier ministre, qui nomme les ministres du
21 gouvernement ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Les candidats aux postes de ministre sont
23 proposés par le premier ministre désigné --
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela suffit, merci. C'est la seule
25 chose qui ne me paraissait pas claire parce qu'il me semble que cela ne
26 ressort pas clairement de la constitution.
27 Autre chose, vous parlez, je sais, des contrôles qui existent au sein du
28 pouvoir entre l'assemblée nationale, le président, la manière dont les
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1 pouvoirs se contrôlent mutuellement. Mais si on part du principe qu'à
2 l'assemblée nationale on trouve en majorité des députés qui appartiennent
3 au même parti que le président, est-ce qu'il n'est pas fort probable que
4 celui qui va être désigné par le président et qui va ensuite nommer les
5 ministres, est-ce qu'il n'est pas très probable, fort probable même, que
6 cet homme ou cette femme reçoive le doublement [phon] de l'assemblée
7 nationale ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, cela c'est le cas de figure le plus
9 simple que l'on puisse envisager. Si, au sein de l'assemblée nationale,
10 vous avez une majorité qui appartient au même parti que le président de la
11 république qui a été élu, si c'est le cas, s'ils appartiennent au même
12 parti politique, à ce moment-là, il est pratiquement sûr et certain que le
13 premier ministre qui sera nommé ou qui sera proposé par le président de la
14 république, ainsi que les ministres proposés par le premier ministre, lui-
15 même proposé par le président de la république, il est fort probable, quand
16 il y a homogénéité de la majorité à l'assemblée nationale, l'accepte. Mais
17 il faut savoir que nous fonctionnons avec un système proportionnel, de ce
18 fait, on n'a jamais eu de majorité homogène au sein de l'assemblée
19 nationale, depuis le début. Généralement, il y a coalition.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je comprends bien qu'il faut
21 regarder les faits, mais on va y venir tout à l'heure. Je voudrais savoir à
22 quel moment ont eu lieu les deuxième élections parlementaires en République
23 de Serbie.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Les deuxième élections de ce type ont eu lieu
25 en 1992. Les premières ont eu lieu tout de suite après la promulgation de
26 la constitution en 1990. En 1990, c'était le système majoritaire qui
27 prévalait lors des élections parlementaires, à ce moment-là, le SPS avait
28 la majorité, la majorité absolue, une majorité homogène. Mais ce n'était
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1 plus le cas après 1992.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais les faits c'est une chose.
3 Pour l'instant, nous nous intéressons à la théorie. Nous examinons le texte
4 de la constitution. C'est dans ce contexte que je vous posais ma question.
5 Nous en viendrons aux faits plus tard.
6 Nous devons maintenant, pour diverses raisons administratives notamment,
7 faire une pause, et nous allons reprendre à 11 heures 20. L'huissier va
8 s'occuper de vous. Veuillez le suivre.
9 [Le témoin quitte la barre]
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous reprendrons à 11 heures 20.
11 --- L'audience est suspendue à 10 heures 49.
12 --- L'audience est reprise à 11 heures 22.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] Avant de recommencer, Monsieur le Président,
14 j'ai oublié quelque chose ce matin.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Faites entrer le témoin.
16 M. ZECEVIC : [interprétation] Lorsque j'ai parlé des modifications des
17 pièces 65 ter, nous voulions une modification s'agissant de l'article 56 de
18 la loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne, pièce 1D752,
19 article 56 de la constitution allemande. Il s'agit du serment de l'entrée
20 en fonction. Excusez-moi de cet oubli.
21 [Le témoin vient à la barre]
22 M. ZECEVIC : [interprétation] L'Accusation a été informée de ceci par
23 courriel vendredi. Nous allons utiliser ce serment pendant la déposition du
24 témoin, car le témoin souhaite se servir de ce serment pour expliciter la
25 nature juridique du serment qui est prévu par la constitution de Serbie. M.
26 Hannis m'a dit qu'il n'avait aucune objection, mais peut-être peut-il vous
27 le dire lui-même ?
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Pas d'objection.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez donc procéder ainsi.
3 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci beaucoup, et toutes nous excuses.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez poursuivre.
5 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous avons préparé une présentation
6 Powerpoint afin de présenter de la manière la plus claire possible les
7 questions que nous voulons aborder ici. Il s'agit de l'article 83 de la
8 constitution, des attributions et des compétences du président de la
9 République de Serbie. Nous avons d'ores et déjà remis un exemplaire de
10 cette présentation au greffe. Il y a trois présentations de ce type que
11 nous avons préparées, et on nous a proposé ou suggéré d'utiliser des
12 numéros IC, un numéro IC pour chacune de ces présentations, et en donnant
13 ensuite à chaque page de la présentation le même numéro.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, ça me semble frappé au coin du
15 bon sens.
16 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait nous présenter la
17 première présentation ?
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce IC131.
19 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci beaucoup.
20 Q. Monsieur le Témoin, nous avons préparé une présentation avec le
21 logiciel Powerpoint qui va s'afficher à l'écran que vous avez sous les
22 yeux. J'aimerais qu'au fur et à mesure que les diapositifs s'affichent vous
23 nous fassiez part de vos observations.
24 R. Très bien.
25 Q. Merci.
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Page 2, s'il vous plaît.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ça, on l'a déjà vu, n'est-ce pas
28 ?
Page 12899
1 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il s'agit de
2 l'intégralité de l'article 83 de la constitution de la Serbie.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le témoin a regroupé ces attributions
4 en trois catégories.
5 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, trois catégories de pouvoirs, de
6 compétences du président.
7 Page 3, s'il vous plaît.
8 Q. Bien, Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous expliquer ce que l'on voit
9 ici ? De quoi s'agit-il ?
10 R. On voit ici une explication du statut juridique des attributions du
11 président aux termes de l'article 83 de la constitution. C'est-à-dire que
12 dans certains cas, il n'a strictement aucun pouvoir, j'expliquerai ensuite
13 pourquoi; dans certains cas de figure, il a le pouvoir d'agir; il a des
14 attributions qu'il ne peut exercer que s'il a précédemment obtenu l'accord
15 de la majorité des députés; et enfin il y a des pouvoirs qu'il ne peut
16 exercer parce que la législation d'application y afférant n'a pas encore
17 été adoptée.
18 Q. Donc, la couleur rouge indique les attributions qu'il ne peut pas
19 exercer.
20 R. Oui. Il s'agit de pouvoirs qui, au sein de n'importe quel Etat fédéral
21 dans le monde, sont les pouvoirs qui incombent à l'Etat fédéral. Ce sont
22 les compétences, par exemple, relatives à la politique étrangère, à la
23 défense de l'Etat. Etant donné que la constitution de la Serbie a été
24 adoptée, comme je l'ai expliqué, pour éviter qu'il n'y ait un vide
25 constitutionnel au cas où la République fédérale de Yougoslavie
26 s'effondrerait, cette constitution, elle a été rédigée comme si la Serbie
27 était un Etat indépendant. C'est la raison pour laquelle ces pouvoirs ont
28 été conférés au président de la République. Mais aux termes de l'article
Page 12900
1 135 --
2 Q. Non, un instant. Nous y reviendrons plus tard. Excusez-moi de vous
3 interrompre. Je voulais simplement donner une explication au sujet de cette
4 légende, de ces couleurs que l'on voit ici à l'écran. En vert seront
5 indiqués les pouvoirs qui peuvent être exercés par le président --
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic, mais quel est
7 l'intérêt de préparer une présentation Powerpoint, de demander au témoin de
8 passer en revue les quatre codes couleur, ensuite de recommencer vous-même
9 ? Je croyais qu'il s'agissait d'accélérer un peu les débats.
10 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, mais en fait on n'avait pas donné
11 d'explication pour chaque couleur. C'était ça que je voulais dire en fait.
12 Est-ce qu'on pourrait nous montrer la page numéro 4 de la présentation ?
13 Q. Monsieur le Témoin, veuillez, s'il vous plaît, nous expliquer ce que
14 l'on voit ici ? On voit ici les différentes catégories d'attribution, les
15 trois catégories comme vous nous les avez présentées et explicitées. En
16 jaune, il y a les pouvoirs qui sont ceux du président lorsqu'il représente
17 la République de Serbie.
18 R. Oui. En jaune, nous avons les pouvoirs qui ont trait au président de la
19 république puisqu'il est le chef de l'Etat représentant l'Etat serbe. En
20 gris, nous avons les pouvoirs du président en tant que chef de l'exécutif,
21 mais pouvoirs non opérationnels. Et la troisième couleur, je ne sais pas
22 comment l'appeler. Nous avons ici représentés les pouvoirs du président
23 dans les situations exceptionnelles.
24 Q. Vous voulez parler de la couleur qui se trouve sur la droite ?
25 R. Oui, la couleur sur la droite. Je ne sais pas comment l'expliquer.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien évidemment, je ne vais pas me
27 concentrer sur les couleurs supplémentaires. Je suppose simplement pour
28 l'instant qu'il y a la couleur rouge, qui doit signifier quelque chose que
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1 le président n'a pas le droit de faire. Mais il y a des chiffres qui sont
2 en rouge également. Est-ce que ces chiffres de couleur ont une quelconque
3 signification ?
4 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'y viens à
5 l'instant.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Les chiffres que nous voyons dans le
8 rectangle représentent les dispositions de l'article 83, n'est-ce pas ?
9 R. Oui. En réalité, il s'agit des pouvoirs en vertu de la constitution qui
10 sont conférés au président de la république en différentes catégories
11 d'après leur statut juridique. Il y a les pouvoirs que le président n'a pas
12 le droit d'exercer, certains pouvoirs qu'il peut exercer seulement avec
13 l'accord du parlement, et d'autres pouvoirs qu'il peut exercer à lui seul,
14 mais lorsqu'un autre organe de l'Etat lui en soumet la proposition.
15 Q. Maintenant, je vais parler des différents pouvoirs énumérés à l'article
16 83 au paragraphe 1. Je vous demande de bien vouloir commenter ceci --
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez retourner à la diapositive
18 précédente pour quelques instants, s'il vous plaît. Et celle qui précède
19 celle-là.
20 Bien. Avançons d'une diapositive, s'il vous plaît.
21 Donc, nous devons estimer que lorsque le chiffre est indiqué en rouge, il
22 s'agit de quelque chose que le président n'a pas le droit de faire ?
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Précisément, Monsieur le Président. C'est
24 tout à fait cela.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Merci.
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant avoir à
27 l'écran la diapositive numéro 5, s'il vous plaît.
28 Q. Monsieur le Professeur, pourriez-vous nous expliquer cette diapositive,
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1 s'il vous plaît. Il s'agit de l'article 83 au paragraphe 1, indiqué en
2 bleu. Pourriez-vous nous expliquer ceci à nouveau, s'il vous plaît.
3 R. Il s'agit ici de la liste des différents pouvoirs dont est investi le
4 président de la république. Il s'agit de premiers pouvoirs; à savoir, il a
5 le droit de proposer le nom d'un candidat à l'assemblée nationale, un
6 candidat au poste de premier ministre, après avoir entendu les avis des
7 différents représentants de la majorité à l'assemblée nationale. Le
8 président ne peut pas exercer ce pouvoir à lui seul parce que le candidat -
9 - l'identité du candidat, s'il s'agit d'un candidat de l'opposition suite
10 aux élections, il doit en réalité proposer le nom de quelqu'un qui est
11 proposé par la majorité à l'assemblée.
12 Q. Merci. Monsieur le Professeur, il s'agit de l'article 83 et du
13 paragraphe 2. Ceci est indiqué en bleu également. Pourriez-vous nous
14 commenter ceci brièvement.
15 R. Il s'agit du pouvoir du président, pouvoir lui permettant de proposer
16 des noms des candidats à la présidence ou au poste de juge de la Cour
17 constitutionnelle. Encore une fois, il n'est pas en droit d'exercer ce
18 pouvoir sans recueillir l'opinion de la majorité à l'assemblée. Il a
19 besoin, au préalable, de parvenir à un accord avec les membres de son
20 cabinet, à savoir la majorité parlementaire, pour voir si le candidat
21 pressenti recueillira la majorité de voix à l'assemblée.
22 Nous avons eu un cas récemment où le président actuel de la république a
23 donné le nom d'un candidat, candidat qui devait se présenter au poste de
24 président de la Cour constitutionnelle sans obtenir l'aval préalable de la
25 majorité parlementaire, et ce candidat n'a pas été confirmé par les membres
26 de l'assemblée. Donc, dans ce cas, le président doit tenir compte de
27 l'opinion de la majorité parlementaire. Il n'a pas le loisir de proposer le
28 candidat qu'il souhaite proposer si la majorité au parlement ne le soutient
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1 pas.
2 Q. Merci.
3 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir maintenant la
4 diapositive numéro 7, s'il vous plaît.
5 Q. Il s'agit de l'article 83 au paragraphe 3 --
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Encore une fois, avant que vous ne
7 poursuiviez, cet exemple que vous venez de nous donner, Monsieur le
8 Professeur, vous ne dites pas que le président a agi de façon
9 inconstitutionnelle, n'est-ce pas ? Bêtement peut-être, mais pas de façon
10 inconstitutionnellement ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien, le président, lorsqu'il s'embarque
12 dans ce genre d'aventure, propose un nom d'un candidat sans consulter les
13 membres de son cabinet au préalable. S'il souhaite voir son candidat nommé
14 au poste en question, il a besoin de consulter son premier ministre
15 simplement pour recueillir son aval et celui de la majorité à l'assemblée,
16 ce qu'il peut obtenir par l'intermédiaire de son cabinet si son candidat
17 est nommé. S'il agi seul, sans consulter au préalable les membres de son
18 cabinet, il court le risque de ne pas voir nommé son candidat.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, j'entends bien. Je disais cela
20 simplement parce que c'est ce qu'on peut lire ici. Pourquoi avons-nous
21 besoin d'insister tant là-dessus ?
22 M. ZECEVIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je souhaitais,
23 par cette présentation, vous montrer les limites des pouvoirs du président.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et vous ne pensez pas que le rapport
25 en parle de façon tout à fait exhaustive ?
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Pardonnez-moi ?
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutez, vous ne pensez pas que le
28 rapport, l'avis de l'expert, le fait comme il se doit ?
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Je suis tout à fait sûr que le rapport est un
2 excellent rapport. Je voulais simplement préciser les choses. Je voulais
3 que les choses soient vraiment très claires pour les parties présentes dans
4 le prétoire.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois qu'il y a des limites. On ne
6 peut pas être ainsi traité comme les enfants de classe.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Très bien. Cela n'était pas du tout notre
8 intention, Madame, Messieurs les Juges. Je veux dire, si la Chambre de
9 première instance souhaite que nous ne poursuivions pas la présentation,
10 nous pouvons passer à autre chose.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous allez nous citer des
12 exemples plus intéressants, et par conséquent je ne vais pas interrompre.
13 Donc, veuillez passer à la suite, s'il vous plaît, et à la diapositive
14 suivante. Evitez, comme nous avons l'habitude de dire dans notre langue,
15 évitez d'enfoncer les portes ouvertes.
16 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voulais simplement
17 vous montrer ceci de façon exhaustive. Merci.
18 Alors, pourrions-nous avoir la diapositive numéro 7.
19 Q. Il s'agit de l'article 83 au paragraphe 3. Pourriez-vous nous expliquer
20 ceci brièvement et nous dire pourquoi cette diapositive est en bleu.
21 R. Parce que, lorsqu'il s'agit de promulguer des textes de loi, ceci est
22 fait à l'assemblée. Les textes sont adoptés à l'assemblée, et le président
23 ne peut les promulguer que lorsque ces derniers ont été adoptés à
24 l'association. C'est la procédure communément adoptée. Donc, il ne s'agit
25 pas d'un acte indépendant de la part du président. Il s'agit d'un acte
26 constitutif, l'adoption de textes de loi. Alors que la promulgation des
27 textes en tant que telle est en quelque sorte un acte décoratif. Le
28 président déclare simplement que ce qui a force de loi a effectivement a
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1 effectivement force de loi.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons passer à la
3 diapositive numéro 5, s'il vous plaît.
4 Q. Il s'agit de l'article 83 au paragraphe 4 de la constitution de Serbie.
5 Ceci est indiqué en rouge. D'après vous, il s'agit d'un pouvoir que le
6 président ne peut pas exercer ?
7 R. Il ne s'agit pas d'un point de vue personnel ici. Ceci est inscrit dans
8 la constitution. Ceci est un principe communément appliquer, celui des
9 rapports qui régissent la fédération et la Serbie. Ceci se fonde sur
10 l'article 77 de la constitution de la République fédérale de Yougoslavie,
11 et ceci relève de la compétence de la fédération.
12 Q. Merci.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur le Professeur, ceci a abouti
14 à une loi sur les ministères, loi en vertu de laquelle différents
15 ministères ont été créés. Je crois qu'il en avait trois au total. Un
16 ministère chargé de relations étrangères, un ministère chargé de l'aide
17 internationale, je crois, et je ne me souviens pas du troisième. En
18 réalité, je vous demande si ces ministères ont été créés ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces ministères ont été créés, et il s'agissait
20 du ministère de la Défense, du ministère des Affaires étrangères, du
21 ministère des Relations économiques, chargé des relations avec des pays
22 étrangers. Néanmoins, lorsque le premier examen du texte de loi sur les
23 ministères a été examiné --
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela, je le sais d'après votre
25 rapport. Donc, ce qui a été fait à ce moment-là a été de créer de façon
26 formelle une situation qui permettait à la Yougoslavie d'être davantage
27 morcelée. Pourquoi ces ministères avaient-ils besoin d'être créés ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils avaient besoin d'être créés pour permettre
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1 à la Serbie "volens nolens" dans le cas où la Serbie deviendrait un Etat
2 indépendant s'il y avait un démembrement total de la Yougoslavie, étant
3 donné que tous les instruments de l'Etat devaient être repris, il y aurait
4 un ministère de la Défense et un ministère des Affaires étrangères. Parce
5 qu'en tant que membre de la fédération, la Serbie n'avait pas le droit
6 d'avoir de tels ministères; parce que ces derniers relevaient de la
7 compétence de la fédération. Il s'agissait à ce moment-là d'une période de
8 transition. Ces ministères ont existé pendant un bref laps de temps pour
9 permettre simplement au premier gouvernement de la République de Serbie de
10 créer ces ministères, conformément à la constitution de 1990, d'être
11 établi. Peut-être plus tard, conformément à la constitution à la fin de
12 1990 ou peut-être au début de 1991.
13 L'INTERPRÈTE : Correction : Ont permis à la République de Serbie de créer
14 ces ministères conformément à la constitution, à la fin de 1990, ou peut-
15 être au début de 1991.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que ceci n'explique pas tout,
17 Maître Zecevic, mais veuillez poursuivre. Peut-être que les choses seront
18 plus claires par la suite.
19 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
20 Pourrions-nous avoir la diapositive numéro 9, s'il vous plaît.
21 Q. Monsieur le Professeur, il s'agit de l'article 83 au paragraphe 5.
22 Encore une fois, ceci est en rouge, donc il doit s'agir des pouvoirs que le
23 président n'est pas en droit d'exercer. Une brève explication, je vous
24 prie.
25 R. Comme dans le cas précédent, nous fournissons la même explication ici.
26 La Serbie ne disposait pas de forces armées, ne disposait pas d'armée, et
27 la défense ne relevait pas de la compétence de la Serbie. Les questions de
28 la défense relevaient de la compétence de la fédération, et la fédération
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1 avait en charge l'armée de yougoslave. Donc, il s'agissait d'un pouvoir que
2 le président de la république n'était pas en droit d'exercer.
3 Q. Merci. A l'article 83 au paragraphe 6. Est-ce que vous allez nous
4 fournir une explication identique dans ce cas, Monsieur le Professeur ?
5 R. Oui. Toutes ces situations exceptionnelles - j'entends par là
6 déclaration d'un état de guerre, déclaration d'une menace imminente de
7 guerre. Tout ceci relevait de la compétence de la fédération, à savoir
8 l'assemblée fédérale et le cabinet fédéral. C'est la raison pour laquelle
9 le président de la République de Serbie ne pouvait pas exercer ce pouvoir.
10 Q. Merci. Maintenant, diapositive numéro 11, article 83, au paragraphe 7.
11 Ceci est en rouge, ce qui indique que c'est un pouvoir que le président
12 n'est pas en droit d'exercer. Est-ce que vous pourriez expliquer ceci ?
13 R. Il s'agit d'un pouvoir du président de la république qui lui permet
14 d'adopter différents instruments et de promulguer certains textes de loi
15 afin de gérer les affaires courantes qui relèvent de la compétence de
16 l'assemblée nationale, et ce uniquement lorsqu'il y a état de guerre ou
17 état imminent de guerre a été déclaré, donc conformément à ces deux
18 circonstances exceptionnelles. Dès que ces conditions cessent d'exister, le
19 président a le devoir de représenter, de soumettre ces textes de loi à
20 l'assemblée pour confirmation.
21 Q. Monsieur le Professeur, je souhaite que nous nous penchions un petit
22 peu sur cette question-là. Je suis sûr que le Président -- la Chambre de
23 première instance y verra un certain intérêt. En réalité, le président
24 Milutinovic, lorsque l'état de guerre avait été déclaré, ce qui a duré du
25 23 mars 1999 au 10 juin 1999, a adopté un certain nombre de décrets, un
26 nombre de 16 en réalité, qui se fondent sur cet article. Dans cette
27 présentation, les différentes catégories que je vous ai montrées indiquent
28 que c'est un pouvoir qui est représenté en rouge. Pourriez-vous nous
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1 expliquer ceci, s'il vous plaît.
2 R. C'est parce que ce n'est pas un organe de l'Etat qui déclare qu'il y a
3 un état de guerre ou une menace de guerre. A l'origine, c'est l'assemblée
4 nationale qui décrète cela, et dans certains cas, lorsque l'assemblée
5 nationale ne peut pas, c'est le cabinet fédéral qui s'en charge. Le
6 président, dans ces circonstances-là, adopte ces textes sur proposition de
7 son cabinet, parce qu'il relève de la compétence de l'assemblée nationale.
8 Le cabinet fédéral et le président fédéral ne peuvent pas promulguer des
9 textes qui relèvent des compétences fédérales. C'est la raison pour
10 laquelle le président de Serbie a adopté ces textes dans ces circonstances-
11 là, parce qu'il s'agit de promulgation de textes qui sont conformes à la
12 constitution de Serbie. Ces questions relèvent de la compétence de la
13 République de Serbie, et dans le cas présent relèvent de l'assemblée
14 nationale.
15 Q. Merci --
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il se peut qu'il y ait quelque chose
17 qui m'échappe ou que je ne comprenne pas très bien. Je croyais qu'il
18 s'agissait d'un pouvoir qui était entre les mains de la fédération. Est-ce
19 que j'ai mal compris cela ?
20 M. ZECEVIC : [interprétation] En réalité, peut-être que le professeur
21 pourrait répondre.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, j'aimerais bien qu'il le fasse.
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous en prie, Monsieur le Professeur.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'on déclare qu'il y a l'état de guerre
25 ou un état imminent de guerre, c'est quelque chose qui relève de la
26 compétence de la fédération. Dans ces circonstances-là, c'est le cabinet
27 fédéral qui adopte les textes de loi qui relèvent de la compétence de
28 l'assemblée fédérale. Mais dans le cas qui nous concerne, nous parlons des
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1 responsabilités de la république, les compétences de la république
2 conformément à l'article 72 de la constitution de la Serbie. Il s'agit là
3 d'un pouvoir qui est celui de l'assemblée nationale de Serbie. On précise
4 ici que le président adopte ces textes de loi dans le cas seulement où ces
5 derniers relèvent de la compétence de l'assemblée nationale. Ce qui est
6 précisé dans l'article 73 de la constitution. Donc il ne s'agit pas de
7 quelque chose qui relève de la compétence fédérale ou de la constitution de
8 la fédération, non. C'est une question qui relève de la compétence d'un
9 organe de la fédération, autrement dit de la Serbie. Nous retrouvons le
10 même article dans la constitution du Monténégro.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'entends bien, mais je ne sais pas
12 pourquoi l'intitulé ici est en rouge.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Professeur l'a expliqué.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le rouge indique que le président n'a
15 pas de pouvoir d'après votre tableau initial. Mais ici nous avons une
16 disposition en vertu de la constitution qui lui permet de traiter de
17 questions qui relèvent de la compétence de la République de Serbie
18 lorsqu'il y a un état de guerre. Ceci ne devrait pas figurer en rouge,
19 n'est-ce pas ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est sans doute parce que le président n'a
21 pas déclaré l'état de guerre ou l'état imminent de guerre. Ceci a été fait
22 par un organe de la fédération.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais, l'article 83, 7 ne dépend pas du
24 président et du fait que ce dernier fasse une déclaration.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que tout dépend de la façon dont vous
26 qualifiez ceci, mais pour l'essentiel, ceci est clair. Ces circonstances
27 exceptionnelles sont des circonstances qui sont décrétées par la
28 fédération. Une fois que c'est chose faite alors qu'il s'agit de traiter de
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1 toutes les questions qui relèvent de l'assemblée nationale, ceci est un
2 organe assez important qui comporte quelque 250 membres, dans ce cas, la
3 promulgation de textes de loi qui relèvent de l'assemblée sont adoptés par
4 le président sur proposition du cabinet.
5 M. ZECEVIC : [interprétation]
6 Q. Peut-être que je vais essayer de vous aider et d'aider les Juges
7 de la Chambre.
8 Monsieur le Professeur, si nous regardons maintenant l'article 83, au
9 paragraphe 7 de la constitution, il s'agit là d'un pouvoir qui ne peut être
10 exercé que dans des circonstances exceptionnelles, dites exceptionnelles ?
11 R. Oui, ceci est tout à fait exact.
12 R. Vous nous dites que ces circonstances exceptionnelles doivent être
13 dites exceptionnelles et que ce sont les organes de la fédération qui font
14 cela. Il ne s'agit pas des organes de la république; est-ce exact ?
15 R. Oui, c'est précisément ce que dit la constitution.
16 Q. Donc l'article 83, au paragraphe 7, est ici en rouge précisément parce
17 que les organes de la fédération doivent décréter que ces circonstances
18 existent ?
19 R. Oui, c'est exact. Il n'y a pas d'application spontanée si vous voulez,
20 sans que ceci ne soit avalisé au préalable par un organe de la fédération.
21 Q. Monsieur le Professeur, s'il vous plaît, une question que j'aimerais
22 vous poser. Avant que vous ne répondiez, marquez une pause, s'il vous
23 plaît, pour que les interprètes puissent nous suivre.
24 M. ZECEVIC : [interprétation] Au point 8, s'il vous plaît -- 12 pardonnez-
25 moi, article 83, paragraphe 8 de la constitution qui est également en
26 rouge.
27 Q. Pourriez-vous nous expliquer ceci, s'il vous plaît, brièvement.
28 R. C'est la même explication que je fournirais ici, que celle fournie pour
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1 les paragraphes précédents. Lorsque nous parlons de la compétence de la
2 République de Serbie dans le cas où ce serait un Etat indépendant. Mais,
3 lorsque ceci fait partie de la fédération, à ce moment-là, cet Etat doit
4 respecter les lois de la fédération.
5 Q. La question en vert, s'il vous plaît, Monsieur le Professeur. Pouvez-
6 vous nous expliquer ceci, article 83, au paragraphe 9 ?
7 R. Il s'agit ici d'un pouvoir dont a été investi le président puisqu'il
8 est le chef de l'Etat. Il s'agit ici d'accorder son pardon, ce n'est pas
9 quelque chose qu'il fait seul. Tout d'abord, il doit donner son avis sur le
10 pardon qu'il souhaite accorder et remettre cet avis à un tribunal de
11 première instance. Ensuite, ceci est envoyé au ministère de la Justice. Ce
12 n'est pas avec ces différentes mesures qui ont été adoptées que l'on peut
13 accorder le pardon et gracier quelqu'un. On doit en faire la demande ou
14 ceci peut être accordé d'office. Ce qui signifierait que le ministre de la
15 Justice puisse procéder à cela.
16 M. ZECEVIC : [interprétation] La diapositive numéro 14, s'il vous plaît.
17 Q. Cette diapositive a trait à l'article 83, au paragraphe 10.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de poursuivre, pour ce qui est
19 du paragraphe 9, s'il vous plaît, en Serbie, est-ce que le pardon que l'on
20 accorde ou lorsqu'on gracie quelqu'un, est-ce que c'est un événement tout à
21 fait inhabituel ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne siège pas à ce conseil moi-même; par
23 conséquent, je ne sais pas. Je sais que lorsque l'on graciait quelqu'un,
24 c'était assez exceptionnel. C'est une compétence quasi-judiciaire dans la
25 pratique, et la demande en est faite par un tiers. Je n'en suis pas tout à
26 fait sûr. Je ne sais pas très bien comment ceci fonctionne dans la
27 pratique. Je ne dispose pas de tous les éléments à cet égard en tout cas.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous allons passer à l'article 83, au
2 paragraphe 10, qui est ici en violet.
3 Q. Pour pouvoir exercer ce pouvoir, nous avons besoin d'une loi qui n'a
4 jamais été adoptée, n'est-ce pas ?
5 R. Oui. Le président ne peut jamais exercer ce pouvoir-là, tout simplement
6 parce que la loi sur les décorations, les honneurs et les titres
7 honorifiques, n'a jamais été adoptée en Serbie pendant toute la période où
8 s'appliquait la constitution de 1990. Par conséquent, le président de la
9 fédération, le président de la république fédérale, était en mesure
10 d'exercer ce pouvoir. Même à l'heure où nous parlons, la Serbie n'a pas
11 adopté cette loi. Le président actuel de la Serbie ne peut pas exercer ce
12 droit qui relève de la constitution de 2006 pour la bonne et simple raison
13 qu'aucune loi n'a été adoptée à cet égard.
14 Q. Merci beaucoup.
15 M. ZECEVIC : [interprétation]
16 Q. L'article 83, paragraphe 11, le président est en droit d'exercer ce
17 pouvoir, j'entends. Brièvement, s'il vous plaît, pouvez-vous nous commenter
18 cela ?
19 R. Ce pouvoir, je crois, est suffisamment clair. Le président est le
20 seul à la tête de l'exécutif ici, mais il a besoin de l'aide et du soutien
21 d'un certain nombre de services techniques. Néanmoins, c'est à lui de gérer
22 le budget, budget discrétionnaire. Il y a certaines limites qui sont
23 imposées lorsqu'il s'agit de mettre en place ces équipes techniques. Il
24 n'est pas en droit de créer trop de services techniques si le budget est
25 limité.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne sais pas si vous aviez
27 l'intention de dire cela, mais lorsque vous avez posé votre question, vous
28 avez dit que : "Ceci s'explique de lui-même," et vous avez dit que : "Le
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1 président est le seul à la tête de l'exécutif."
2 Est-ce que vous entendiez dire cela ? C'est cela que vous vouliez
3 dire ?
4 M. ZECEVIC : [interprétation] Le terme utilisé par le professeur était
5 "inokosan". Il s'agit d'un organe indépendant.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] "Ijodilatsi" [phon], le seul, la seule
7 personne. C'est l'article 9 de la constitution. Il n'est pas chef de
8 l'exécutif. Conformément à l'article 9 de la constitution, c'est le
9 gouvernement qui l'est. Mais en tant que président de la république, c'est
10 une personne physique. Cela n'est pas un collège de membres. Il ne s'agit
11 pas d'un comité, d'un organe. C'est pour cela qu'on utilise le terme de
12 "seul".
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la diapositive
15 numéro 16, s'il vous plaît.
16 Q. Monsieur le Professeur, vous avez l'article 83 ici sous les yeux,
17 paragraphe 12, ceci est en vert. Pourriez-vous nous commenter ceci
18 brièvement, s'il vous plaît ?
19 R. C'est quelque chose que nous avons déjà évoqué, les pouvoirs du
20 président en vertu de la constitution, il ne peut exercer que les pouvoirs
21 qui sont énumérés dans cet article ou d'autres articles de la constitution.
22 Ces pouvoirs ne peuvent pas découler de la législation et ces pouvoirs
23 constitutionnels ne peuvent absolument pas être modifiés par ces derniers.
24 Q. Merci. Monsieur le professeur, ayant suivi cette présentation, je suis
25 sûr, grâce à la Chambre de première instance --
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons maintenant montrer la
27 diapositive numéro 4 sur le rétroprojecteur, s'il vous plaît.
28 Merci, Monsieur l'Huissier.
Page 12914
1 Q. Monsieur le Professeur, comme je vous l'ai dit, je pense que nous
2 devons fournir aux Juges de la Chambre une explication ici. Qu'est-ce que
3 vous entendez lorsque vous parlez des "compétences annexes" ? Autrement
4 dit, les pouvoirs qui ont été indiqués en rouge ici, dans le cadre de notre
5 présentation ? Qu'en est-il du rôle de l'article 135 de la constitution de
6 la Serbie et de l'explication que vous pouvez nous donner à cet égard ?
7 R. Il s'agit là en fait d'une spécificité de la constitution de la
8 République de Serbie. Pour l'interpréter correctement, il faut tenir compte
9 du contexte historique à l'époque, au moment où cette constitution a été
10 adoptée. J'en ai déjà parlé lorsque j'ai répondu à votre première question,
11 donc inutile de répéter ceci maintenant. Ici, nous parlons de pouvoirs qui
12 relèvent de la compétence de la fédération, pouvoirs qui doivent être
13 exercés par les membres de la fédération en vertu de sa constitution. Mais
14 étant donné que la fédération était en train de se désintégrer, la
15 constitution de 1990 a été adoptée afin d'éviter un vide juridique.
16 En sachant que la constitution de 1990 accordait ces pouvoirs à la
17 République de Serbie, pouvoirs qui sont en général des pouvoirs dont est
18 investie une fédération. Depuis la création de la République fédérale de
19 Yougoslavie et depuis que la république fédérale est devenue la République
20 socialiste fédérale de Yougoslavie, à ce moment-là les pouvoirs, ce sont
21 les pouvoirs dont a été investie cette république fédérale. C'est la raison
22 pour laquelle la constitution de la Serbie devait être le reflet ou
23 reprendre la constitution de la fédération. C'est la raison pour laquelle
24 les organes de l'Etat serbe n'étaient absolument pas en mesure d'exercer
25 les pouvoirs qui, d'après la constitution de la fédération, étaient
26 l'apanage des organes de la fédération.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'article 135, où est-ce qu'on
28 peut le retrouver, Maître Zecevic, dans l'opinion d'expert dans le rapport
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1 d'expert ?
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. C'est au
3 paragraphe 230, paragraphe 2-3-0.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
5 Mais ceci ne prend en considération qu'une partie de la question. Monsieur
6 le Professeur, dans la mesure où l'article 135 concerne les dispositions
7 des autres constitutions qui pourraient entraver l'égalité de la Serbie ou
8 menacer ses intérêts, est-ce que cet article constitue une disposition
9 habituelle des constitutions ou des entités constitutives de la fédération
10 ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas une habitude d'avoir dans la
12 constitution d'une entité fédérale les mêmes compétences que dans la
13 constitution fédérale. Cela étant dit, la situation n'est pas habituelle
14 non plus, à savoir qu'on connaisse une décomposition de la fédération. Ce
15 processus a été amorcé au moment où on a adopté la constitution de 1990.
16 Donc, la constitution 1990 répond à une situation exceptionnelle. Cette
17 disposition ne caractérise pas les constitutions des entités fédérales de
18 par le monde, mais comme je viens de le dire, il s'agit d'une fédération
19 qui venait d'entamer sa décomposition. Elle allait se désagréger en entités
20 fédérales.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En 1990, cette constitution exige
22 l'aval de la fédération; est-ce vrai ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'était pas indispensable, puisque d'après
24 la constitution en vigueur, celle de 1974, les entités fédérales, autrement
25 dit les républiques, avaient droit à l'auto-organisation. Autrement dit,
26 elles avaient droit de se doter de leurs propres constitutions pour décider
27 de leur organisation propre. Mais cette constitution devait s'harmoniser ou
28 devait être conforme, ou comme la constitution de 1974 dispose
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1 explicitement, ceci ne pouvait pas être contraire aux dispositions de la
2 constitution fédérale.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et vous, vous nous dites que ce
4 deuxième alinéa est conforme à la constitution fédérale ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Aucun des alinéas, ni le premier, ni le
6 deuxième, ne sont conformes. Mais il s'agit d'une situation exceptionnelle,
7 et tout de suite après cette constitution, la République de Croatie s'est
8 dotée de sa propre constitution, qui elle non plus n'était pas conforme à
9 la constitution de la République socialiste fédérative de Yougoslavie. Par
10 conséquent, il s'agissait d'une situation qui n'était pas une situation
11 ordinaire, normale, pas typique pour un Etat fédératif. Il s'agissait d'une
12 fédération qui venait de commencer de se décomposer.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
14 Maître Zecevic.
15 M. ZECEVIC : [interprétation]
16 Q. Donc, dans cette situation, ces moments historiques, la Serbie se dote
17 de cette constitution ? Elle se dote de dispositions que nous venons
18 d'examiner et, par ce fait, elle cherche à protéger ses intérêts critiques,
19 décisifs ?
20 R. Oui, tout à fait. L'article 135 a cette finalité de protection.
21 M. ZECEVIC : [interprétation] Pourriez-vous nous afficher l'article 135 ?
22 Il figure à l'intercalaire 5, pièce P855, page 26. Si on pouvait l'afficher
23 dans le prétoire électronique, s'il vous plaît.
24 Q. Professeur, au paragraphe 2.6 de votre document, et en particulier dans
25 la note de bas de page numéro 6, vous expliquez la teneur de l'article 135
26 de la constitution de Serbie, n'est-ce pas ?
27 R. Oui, on explique le sens et la raison d'être de l'article 135 de la
28 constitution d'une entité fédérale.
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1 Q. Pour simplifier, dans toute la mesure du possible, l'explication de la
2 situation. En 1990 la Serbie se dote d'une constitution afin de protéger
3 ses intérêts vitaux, mais la Serbie ne souhaitait pas sortir de la
4 fédération dont elle faisait partie. C'est la raison pour laquelle on
5 adopte l'article 135 qui précise quelles seront les compétences de la
6 Serbie si la fédération venait à se décomposer et, en même temps, ceci
7 permet à la Serbie de rester partie intégrante de la fédération, entité
8 fédérale, république membre de cette fédération composée de républiques.
9 R. Oui, mais c'est ce que je viens d'expliquer à l'instant. J'en ai parlé
10 précisément de cela. La Serbie se protège par un certain nombre
11 d'instruments étatiques si la décomposition devait se produire, si la
12 fédération allait se décomposer en six entités indépendantes, en six états
13 indépendants.
14 Q. Je vous remercie, Professeur. Ces dispositions de la constitution de la
15 Serbie de 1990, c'est précisément ces dispositions qui permettent, comme
16 vous venez de le dire, la primauté de la constitution fédérale de 1974,
17 j'entends par là la constitution de la RSFY à l'intercalaire 9 ici, P1623
18 et, par la suite, à partir du 27 avril 1992, nous avons la primauté de la
19 constitution fédérale de la République fédérale de Yougoslavie à
20 l'intercalaire 6, P856, et à partir de 2003 c'est la charte
21 constitutionnelle de la Serbie et du Monténégro à l'intercalaire 10, 1D74
22 qui jouit de cette primauté. Est-ce que c'est bien exact, Monsieur le
23 Professeur ?
24 R. Oui, tout à fait. C'est précisément l'article 135 qui doit exprimer
25 cette loyauté de la Serbie à l'égard de l'Etat fédéral, à l'égard de la
26 fédération. La Serbie, par sa constitution, n'empiète en aucun moyen sur
27 les compétences de l'Etat fédéral; c'est tout au contraire, à l'article
28 135, elle dit, tout ce qui relève des compétences de l'Etat fédéral qui
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1 fait en même temps partie des compétences de la République de Serbie,
2 conformément à sa constitution de 1990, il sera exercé par l'Etat fédéral
3 conformément à la constitution fédérale.
4 Q. Puisque la Serbie a conféré un certain nombre de compétences à ses
5 organes par sa constitution de 1990, ces compétences n'étaient que des
6 compétences prévues en cas des compétences annexes ou de réserve, comme
7 ceci est appelé ? Et c'est comme cela que vous les appelez, compétences de
8 réserve ?
9 R. Oui. Ces compétences, elles devaient commencer à s'exercer à partir du
10 moment où la Serbie deviendrait l'Etat indépendant.
11 Q. Ce qu'elle n'est devenue qu'en 2006.
12 R. Oui, elle l'est devenue en 2006, et à partir de ce moment-là cette
13 constitution-ci a été remplacée par une nouvelle constitution.
14 Q. Merci, Professeur. Pour être tout à fait exhaustifs s'agissant de cette
15 question, il me semble qu'à titre exemple, il faudrait peut-être préciser
16 certaines choses en regard de cette situation. Dans votre rapport, aux
17 paragraphes 2.5 jusqu'à 2.10, vous en parlez, mais maintenant je vais vous
18 inviter plutôt à nous formuler des commentaires au sujet de la manière dont
19 les lois s'appliquaient, de vous reporter au paragraphe 19, 1D750, c'est la
20 loi les Affaires étrangères. Il s'agit d'une loi qui régit la conduite des
21 organisations fédérales et de l'administration fédérale.
22 M. ZECEVIC : [interprétation] Le 1D750.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons reçu un exemplaire qui n'a
24 pas de traduction.
25 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, c'est un des rares documents pour
26 lesquels la traduction n'a pas encore été faite. Peut-être que M. le
27 Professeur pourrait nous donner lecture de l'article et nos traducteurs
28 pourraient le traduire pour le compte rendu d'audience.
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1 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons la version en B/C/S dans le
3 prétoire électronique. Allez-y comme vous venez de le proposer.
4 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 Q. Professeur, est-ce que vous avez pu le retrouver ?
6 R. Oui.
7 Q. Il s'agit de la loi sur les Affaires étrangères qui s'applique à
8 l'administration fédérale et de l'organisation fédérale, le 16 octobre 1981
9 est la date que porte cette loi. C'est la date de l'époque de l'ex-RSFY ?
10 R. Oui, et on voit qu'il s'agit des affaires qui sont de la compétence de
11 la fédération.
12 Q. Je vais nous contenter de donner lecture des articles 3 et 5. Je pense
13 qu'ils nous montrent très bien qu'elle était la situation.
14 L'article 3 : "L'organe fédéral de l'administration et les
15 organisations fédérales exercent des Affaires étrangères dans le cadre de
16 leur ressort à titre indépendant sur la base de la constitution de la RSFY
17 des lois fédérales."
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic, on vous demande de
19 ralentir.
20 M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi, j'ai compris que c'était affiché
21 par le moyen du prétoire électronique. Donc je pensais que les traducteurs
22 pouvaient lire ce qu'ils voyaient s'afficher.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, s'il vous
24 plaît, revenir en arrière et nous donner lecture de ces compétences ?
25 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
26 "Exercent leurs tâches à titre autonome et conformément à la
27 constitution, les lois fédérales et d'autres règlements et actes généraux
28 de l'assemblée de la RSFY, ainsi que dans le cadre de la politique
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1 étrangère telle qu'établie de la République socialiste fédérative de
2 Yougoslavie et des contrats internationaux et on répond devant la
3 constitution de la RSFY et le Conseil exécutif fédéral pour ce qui est de
4 l'exécution des missions pour lesquelles ils sont créés"
5 L'article 5 : "Le Conseil exécutif fédéral oriente et détermine les
6 modalités de coopération et surveille les organes fédéraux de
7 l'administration dans le cadre de leur travail, ainsi que les organisations
8 fédérales dans le domaine des Affaires étrangères relevant de la compétence
9 de ces organes et de ces organisations. Dans la conduite des Affaires
10 étrangères relevant de leur compétence, les organes fédéraux de
11 l'organisation et les organisations fédérales coopèrent mutuellement."
12 Professeur, très brièvement, pourriez-vous commenter cela ? La loi régit
13 les Affaires étrangères, est-ce cette loi et ces dispositions qu'on vient
14 de lire ?
15 R. Oui. C'était une loi fédérale qui, par ailleurs, est restée en vigueur
16 pendant longtemps, jusqu'en 1998. Il ressort de ces articles qu'il s'agit
17 des attributions de la fédération, donc les Affaires étrangères relèvent de
18 la fédération et l'on précise quels sont les organes de la fédération dont
19 cela relève. Ce sont les organes fédéraux de l'administration, les
20 organisations fédérales ainsi que l'exécutif fédéral. C'était le
21 gouvernement fédéral de l'époque.
22 Q. Très bien. A partir du moment où la RSFY n'existait plus, où la
23 République fédérale de la Yougoslavie a été créée, on a adopté une nouvelle
24 loi sur les Affaires étrangères de la République fédérales de Yougoslavie.
25 C'est à l'intercalaire 20, pièce 1D246.
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous avons une traduction pour cette pièce,
27 Monsieur le Président, Mesdames, Monsieur les Juges.
28 Q. Professeur, vous l'avez retrouvé ?
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1 R. Mais je l'ai trouvée. C'était la loi qui est venue remplacer la loi
2 précédente et qui lui succède donc. Cette loi régit le domaine des Affaires
3 étrangères, et on voit que ça reste dans les attributions de l'Etat
4 fédéral. Et l'Etat fédéral exerce ces attributions par l'entremise des
5 organes fédéraux. C'est ce qui est précisé ici.
6 Q. Puisqu'il s'agit des compétences de l'Etat fédéral, que ce soit à
7 l'époque de la RSFY ou par la suite en République fédérale de Yougoslavie,
8 cette compétence dans l'article 83.4 de la constitution de la Serbie figure
9 en rouge dans nos documents conformément à l'article 135 de la
10 constitution, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Je vous remercie, Professeur. Il me semble que vous avez un problème
13 technique avec votre classeur, Monsieur le Professeur.
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur l'Huissier, est-ce que vous pourriez
15 vous en occuper ?
16 Il est peut-être nécessaire de remplacer le classeur. Nous pourrions
17 tout à fait le faire.
18 Excusez-moi, Monsieur le Président.
19 [hors micro]
20 Pour ne pas perdre de temps, je propose que l'on aille de l'avant.
21 Q. Monsieur le Professeur, vous verrez ceci s'afficher à l'écran. Je
22 voudrais qu'on parle de ce document maintenant.
23 Intercalaire 17, 1D456. Il s'agit de la loi sur les ministères, article 5.
24 M. le Juge Bonomy vous a posé des questions là-dessus au tout début. Il
25 s'agit de la loi régissant le fonctionnement des ministères, la loi de la
26 République de Serbie de 1991, en son article 5. Le voyez-vous, Professeur ?
27 R. Oui, je vois. A l'article 5, on précise quels sont les domaines que
28 régissent différents ministères.
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1 Q. Oui, on voit le ministère de la Défense au point 1; ministère des
2 Affaires étrangères au point 3; au 5, ministère des Relations avec
3 l'étranger, Relations économiques et le Développement économique ?
4 R. Oui.
5 Q. C'est la loi qui date de 1991. M. le Juge Bonomy vous a posé une
6 question à laquelle vous avez répondu que lors des premières modifications
7 apportées à la loi sur les ministères, qui figure à l'intercalaire 18 de
8 notre classeur, 1D142, article 5, on voit la loi portant modification de la
9 loi sur les ministères de 1991, du 30 août 1993 est la loi que nous
10 examinons maintenant. Le voyez-vous, Professeur ?
11 R. Oui.
12 Q. L'article 5 dit : "Le jour de l'entrée en vigueur de la présente loi
13 cessent de fonctionner : le ministère de la Défense, le ministère des
14 Affaires étrangères et le ministère chargé des Relations économiques avec
15 l'étranger, chargé également du Développement économique;" est-ce exact ?
16 R. Oui. Précisément, pour des raisons que j'ai déjà citées, ces ministères
17 ont été supprimés. Entre-temps, la Serbie et le Monténégro se sont
18 constitués République fédérale de Yougoslavie, et conformément à la
19 constitution de celle-ci, il s'agit de quelque chose qui est du ressort de
20 la fédération. C'est la raison pour laquelle ces trois ministères cessent
21 d'exister, puisqu'ils avaient compétence dans les domaines qui relèvent de
22 la fédération : la défense, les relations étrangères et les relations
23 économiques avec l'étranger.
24 Q. Donc, la raison pour laquelle on a adoptée cette loi, cette loi portant
25 modification de la loi précédente, c'est parce que, entre le moment où on a
26 adopté la loi sur les ministères et ce moment-là, il y a eu création de la
27 République fédérale de Yougoslavie le 27 avril 1992, donc ces compétences
28 restent dans le cadre de l'exercice des organes fédéraux, c'est la raison
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1 pour laquelle, au niveau de la République de Serbie, ces ministères n'ont
2 plus raison d'être et cessent de fonctionner ?
3 R. C'est exact.
4 Q. Merci. Professeur, revenons maintenant aux compétences du président
5 lors de circonstances exceptionnelles. Dans notre présentation Powerpoint,
6 on les avait représentées en rouge, à droite de la page 4 de la pièce
7 IC131. Il s'agit des attributions qui sont énumérées aux paragraphes 5, 6,
8 7 et 8 de l'article 83. Commençons, je vous prie, par l'article 83, en son
9 paragraphe 6, qui traite de pouvoirs du président, notamment de celui qui
10 l'autorise à prononcer l'état d'urgence ou une autre situation à caractère
11 exceptionnel. La constitution de la Serbie, qui porte la cote 1D139 en son
12 article 78, paragraphe 3, nous dit quoi ?
13 R. Un instant, je le cherche. En l'article 78 de la constitution de la
14 République de Yougoslavie, on voit que sont indiquées les compétences de
15 l'assemblée fédérale. Notamment, elle peut décider de modifier les
16 frontières de la Yougoslavie, elle peut prononcer l'état de guerre, l'état
17 de guerre imminent, et cetera, et l'état d'urgence.
18 Q. Donc toutes ces situations exceptionnelles entrent dans le domaine des
19 compétences de l'assemblée ?
20 R. Oui, ces circonstances exceptionnelles relèvent de la compétence de la
21 fédération, qui exerce ses compétences par le truchement de l'assemblée
22 fédérale.
23 Q. Dans cette constitution, constitution de la République fédérale de
24 Yougoslavie, j'aimerais que vous regardiez l'article 99, paragraphe 10.
25 R. Il s'agit de la proclamation de ces situations exceptionnelles si
26 l'assemblée fédérale était dans l'impossibilité de siéger. Puisqu'un
27 parlement, dans n'importe quel pays, c'est un organe qui compte de nombreux
28 membres, il n'est pas toujours possible d'avoir un quorum, de se réunir. A
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1 ce moment-là, c'est le gouvernement fédéral qui peut proclamer un état
2 exceptionnel. Si l'assemblée fédérale ne peut siéger, à ce moment-là, c'est
3 le gouvernement fédéral qui, après avoir entendu le président de la
4 république, c'est-à-dire le président de la république fédérale, ainsi que
5 le président du parlement, peut prononcer qu'il y a une situation
6 d'exception. Ceci au cas où l'assemblée ne puisse siéger.
7 Q. Examinons ce qui figure à l'intercalaire 11, P1664. Est-ce que vous
8 avez trouvé le document concerné, Professeur ? Pièce P1664. Décision
9 portant sur la proclamation d'un état de guerre imminent, point 186 du
10 journal officiel de la République fédérale de Yougoslavie en date du 23
11 mars 1999 ?
12 R. Il s'agit de l'application de la disposition de la constitution que je
13 viens de vous expliquer. L'assemblée générale en l'occurrence était en
14 mesure de siéger, le parlement fédéral n'a pu siéger, si bien que la
15 décision de proclamation de l'état de guerre imminent a été prononcée par
16 le gouvernement fédéral.
17 Q. Je vais maintenant vous demander de vous reporter à la pièce P1311,
18 intercalaire 13. Il s'agit d'une décision portant fin de l'état de guerre,
19 en date de 1999, 25 juin. Intercalaire 13, décision portant fin de l'état
20 de guerre, 25 juin 1999.
21 R. La décision a été adoptée par l'assemblée fédérale qui était en mesure
22 de siéger. Elle a adoptée cette décision portant fin de l'état de guerre,
23 l'état de guerre, bien entendu, c'est la situation la plus exceptionnelle
24 qui puisse s'imaginer. Cette décision a été adoptée aux fins de mettre fin
25 à l'état de guerre.
26 Q. Nous venons de présenter deux décisions, l'une portant proclamation de
27 l'état de guerre imminente qui a été adoptée dans un des cas de figure
28 prévu, à savoir par le gouvernement fédéral en vertu de l'article 99,
Page 12925
1 paragraphe 10 de la constitution de la RFY, voilà, cela c'était un cas de
2 figure prévu; le deuxième cas de figure prévu, c'était celui où l'assemblée
3 fédérale était en mesure de siéger et a pu adopter la décision relevant du
4 point 3 de l'article 78 de la constitution de la RFY ?
5 R. Oui.
6 Q. Ces dispositions de l'article 83, paragraphe 6 de la constitution de la
7 République de Serbie, sont des pouvoirs de réserve du président en vertu de
8 l'article 135 de la constitution ?
9 R. Oui, on peut voir que ce pouvoir, il n'en disposait que sur le papier.
10 Il lui était conféré en vertu de la constitution de la Serbie, mais il
11 fallait que cette constitution elle soit conforme à la constitution
12 fédérale et la constitution fédérale conférait ce pouvoir à l'Etat fédéral.
13 C'était l'assemblée fédérale, le gouvernement fédéral qui devait exercer ce
14 type de pouvoir. C'était donc ces instances qui devaient exercer ces
15 pouvoirs et pas le président de la Serbie.
16 Q. Fort bien. Passons maintenant à un autre point.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de vous laisser continuer. Je
18 crois qu'il en est de même pour le point 8, si l'on voit la liste de
19 pouvoirs, mais pas le 7 ?
20 M. ZECEVIC : [interprétation] Justement, Monsieur le Président, je
21 m'apprêtais à aborder le numéro 7.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le point 7, c'est un pouvoir qui a été
23 appliqué. On peut le comprendre d'après ce qu'a dit le professeur, puis
24 d'après les éléments présentés par la présentation des moyens à charge.
25 M. ZECEVIC : [interprétation] Certes, mais nous souhaiterions malgré tout
26 expliquer le mécanisme qui a permis l'adoption de ces décrets au cours des
27 78 jours du bombardement en 1999.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Bien.
2 Q. Professeur, nous avons déjà évoqué les pouvoirs qui sont conférés au
3 président en terme du paragraphe 7 de l'article 83. Le président est en
4 mesure d'adopter des décrets lorsque l'assemblée fédérale ne peut siéger.
5 C'est là une des circonstances exceptionnelles que nous avons déjà
6 évoquées, n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Nous avons dit que ces circonstances exceptionnelles, elles ne
9 pouvaient être contrôlées par le président de la Serbie ni par l'assemblée
10 de la Serbie parce que cela relevait de la compétence de l'assemblée
11 fédérale et du gouvernement fédéral ?
12 R. Oui.
13 Q. Ce sont donc ces organes-là qui proclament un état exceptionnel, c'est
14 uniquement après cela que le pouvoir conféré au président aux termes du
15 paragraphe 7 de l'article 83 pouvait être exercé par ce dernier, n'est-ce
16 pas ?
17 R. Oui. Oui, mais cette constitution, elle a été établie de telle manière
18 que l'on pensait que c'était soit l'assemblée nationale, soit le président,
19 comme c'est prévu au paragraphe 6 de l'article 83 qui proclamait ce type de
20 situations irrégulières ou exceptionnelles. Cependant aux termes de
21 l'assemblée constitutionnelle, c'était de la compétence de la fédération,
22 c'est-à-dire de l'assemblée fédérale ou du gouvernement fédéral, on a
23 maintenu ceci à l'article 83, paragraphe 7, selon lequel sur proposition du
24 gouvernement, le président de la République pouvait adopter des décrets
25 relevant de la compétence de l'assemblée nationale. La fédération ne peut
26 se substituer à un des organes fédéraux parce que la situation était
27 toujours exceptionnelle. Cependant, ce type de situations exceptionnelles
28 était proclamé par l'intermédiaire d'un des organes de la fédération.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On se répète, Maître Zecevic. On se
2 répète beaucoup. Nous allons nous interrompre maintenant. La raison pour
3 laquelle on demande qu'un rapport d'expert soit préparé, c'est pour que les
4 parties et les Juges puissent en prendre connaissance et qu'une fois qu'ils
5 connaissent la teneur de ce rapport, ils posent des questions au témoin. Il
6 est vraiment inutile de répéter ce qui est déjà dit dans le rapport. Je
7 pense qu'il faudrait en venir le plus rapidement possible au contre-
8 interrogatoire pour voir vraiment ce qui pose problème, ce qui est contesté
9 par les uns et les autres. Essayez de savoir si vous avez vraiment besoin
10 de poser des questions supplémentaires au sujet de la constitution. D'autre
11 part, nous vous serions reconnaissants de nous transmettre une copie papier
12 de votre présentation Powerpoint.
13 Monsieur le Témoin, nous allons nous interrompre pendant une heure, nous
14 reprendrons à 2 heures moins le quart. Une fois encore je vais vous
15 demander de suivre M. l'Huissier qui va vous montrer où vous allez rester
16 pendant la pause.
17 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
18 [Le témoin quitte la barre]
19 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
20 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 43.
21 --- L'audience est reprise à 13 heures 46.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic, merci beaucoup. Ce que
23 vous nous avez donné, c'est vraiment très utile.
24 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, je souhaite remercier les représentants
25 du greffe, dont Riaz notamment, qui nous ont aidés à vous fournir ces
26 copies papier.
27 [Le témoin vient à la barre]
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Poursuivez, Maître Zecevic.
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
2 Q. Monsieur le Témoin, vous avez pu reposer un petit peu ?
3 R. Oui, un petit peu.
4 Q. Je vais essayer d'aller un peu plus lentement que précédemment.
5 R. Je vous en remercie.
6 Q. Je vous en prie. Nous allons essayer d'éviter les redites. Pour ce
7 faire, j'ai décidé de vous présenter un certain nombre de cas de figure
8 d'exemples bien précis qui ont rapport avec le pouvoir conféré au président
9 en vertu du paragraphe 7 de l'article 83. Ça concerne les décrets adoptés
10 en 1999. Vous pouvez nous faire quelques observations brèves ? Si la
11 Chambre a des questions, elle pourra vous les poser.
12 Pendant l'état de guerre en 1999, le président Milutinovic a adopté en tout
13 16 décrets, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, ils ont tous été publiés au journal officiel de la République de
15 Serbie.
16 Q. Ils ont tous été adoptés sur proposition du gouvernement de la Serbie ?
17 R. Oui. Ils ont tous été adoptés suite à une proposition du gouvernement,
18 des ministres qui ont établi le texte de loi.
19 Q. Ensuite, le texte a été envoyé au président afin qu'il y appose sa
20 signature ?
21 R. Oui. Le texte en question a été envoyé au président afin qu'il le
22 signe. C'est lui qui, à ce moment-là, a adopté ces textes, les a
23 promulgués. C'est le gouvernement, c'est le premier ministre et ses
24 ministres qui ont fourni la substance de ce texte.
25 M. ZECEVIC : [interprétation] J'aimerais que nous examinions la pièce P993,
26 intercalaire 27. Deuxième page. Il s'agit d'un décret relatif aux documents
27 d'identité pendant l'état de guerre ou en temps de guerre.
28 Q. C'est l'intercalaire 27, Professeur, page 2.
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Page 6 dans la version en anglais, décret
2 relatif aux cartes d'identité pendant la guerre, ou en temps de guerre.
3 Q. Monsieur le Témoin, nous avons ici un exemplaire du journal officiel
4 numéro 17, en date du 7 avril 1999, et on y voit figurer quatre décrets
5 adoptés par le président pendant la guerre.
6 R. Oui, effectivement.
7 Q. L'un de ces décrets porte sur les cartes d'identité ?
8 R. En temps de guerre.
9 Q. Oui, c'est exact. La loi relative aux cartes d'identité, c'est une loi
10 qui est valable au niveau de la république ?
11 R. Oui.
12 M. ZECEVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant qu'on regarde le
13 document qui figure à l'intercalaire 28. P1832, loi sur les cartes
14 d'identité en date du 13 avril 1974.
15 Q. Vous avez trouvé le document ?
16 R. Oui.
17 Q. Etant donné qu'il s'agissait d'un texte législatif de la république,
18 c'est le gouvernement de la république qui a présenté une proposition au
19 président aux fins d'adoption d'un décret relatif aux cartes d'identité en
20 temps de guerre pour des raisons qui ont été présentées ?
21 R. Oui.
22 Q. Et ceci parce qu'il s'agissait d'une législation qui a été adoptée au
23 niveau de la république ?
24 R. Oui, il s'agit d'une loi adoptée par la république au sujet des cartes
25 d'identité par l'assemblée nationale, mais étant donné qu'on était en
26 guerre, ce décret relatif aux cartes d'identité précisait deux éléments,
27 c'est-à-dire qu'on a fait passer l'âge requis pour avoir une carte
28 d'identité de 18 ans à 14 ans, alors qu'auparavant il fallait avoir une
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1 carte d'identité. Puis, il était précisé également ce qu'il fallait faire
2 en cas de perte de la carte d'identité. Ce décret portait uniquement sur
3 ces deux situations. On voit que ce décret est différent de la loi sur des
4 cartes d'identité, mais ici le droit spécial, la lex specialis s'est
5 appliquée, lex specialis qui déroge aux droits qui s'appliquent
6 habituellement.
7 Q. En dehors de ce décret, il y en avait 15 autres qui ont été adoptés par
8 le président, au niveau de la république, n'est-ce pas ?
9 R. Tous ces décrets ont été adoptés au sujet de questions qui relèvent de
10 l'assemblée nationale, de ses compétences législatives.
11 Q. L'assemblée nationale, l'assemblée populaire de la République de
12 Serbie, n'est-ce pas ?
13 R. Effectivement.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Là, il faut que vous m'aidiez. Ce
15 document qui figure à l'intercalaire 28 --
16 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agit d'un document de 1974 ?
18 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les modifications qui viennent d'être
20 mentionnées par le témoin, on les voit au document qui figure à
21 l'intercalaire précédent --
22 M. ZECEVIC : [interprétation] Effectivement. C'est un décret portant sur
23 les cartes d'identité en temps de guerre.
24 Q. Tous ces autres décrets, on les trouve dans le classeur aux
25 intercalaires 29 à 41. Etant donné qu'ils ont déjà été versés au dossier,
26 inutile de les passer en revue un par un.
27 Conformément aux dispositions de l'article 83 en son paragraphe 7, le
28 président a pour obligation, une fois que la guerre est terminée, de
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1 présenter ces décrets à l'assemblée nationale pour qu'ils soient ratifiés ?
2 R. C'est exact.
3 Q. Il y a quelques instants, nous avons vu la décision de l'assemblée
4 fédérale par laquelle elle a déclaré que l'état de guerre était abrogé.
5 Est-ce que vous pourriez vous reporter à l'intercalaire 42, pièce 1D190 --
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Auparavant, au sujet des cartes
7 d'identité, pouvez-vous nous dire, Monsieur le Témoin, pourquoi la règle
8 qui s'appliquait en matière de cartes d'identité a été modifiée ? Quel
9 était le but recherché ? Je fais référence à ce qui concerne la perte d'une
10 carte d'identité. Le reste, je peux facilement le comprendre.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] En cas de guerre, il est important de
12 connaître l'identité des gens. A l'article 1, on peut lire qu'une carte
13 d'identité c'est un document qui permet de prouver l'identité d'une
14 personne. C'est l'objectif recherché. Il s'agit de savoir qui est qui.
15 C'est la raison pour laquelle cette procédure a été accélérée. Je parle de
16 la procédure d'obtention d'une nouvelle carte d'identité en cas de perte de
17 ce document.
18 En cas de guerre - je ne suis pas un expert en la matière bien entendu -
19 mais il y a forcément très important de savoir qui est qui. Si bien qu'on a
20 mis en place une procédure accélérée pour obtenir de nouvelles cartes
21 d'identité par rapport à la procédure s'appliquant en temps normal. Parce
22 que le simple fait de perdre sa carte d'identité ne signifie pas qu'on ait
23 perdu cette identité. Il s'agit simplement d'obtenir une nouvelle carte
24 d'identité.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelles étaient les conséquences de
26 cette démarche ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] On ne peut pas vraiment dire à partir de
28 l'examen de cette loi. Il y a sans doute, à ce moment-là, un dossier au
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1 pénal qui est déposé. Je pense qu'on trouvera plus de détails dans toutes
2 les dispositions juridiques relatives à la délivrance d'une carte
3 d'identité et qui s'appliquent toujours. Parce que si on vous demande de
4 présenter vos papiers, et si vous ne les avez pas sur vous, à ce moment-là,
5 il y a toujours une plainte. On fait un rapport officiel qui est établi.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Si nous nous reportons à l'article 18, et je
8 suis en train de le regarder --
9 M. ZECEVIC : [interprétation]
10 Q. Un instant, Monsieur le Témoin, les Juges se consultent.
11 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, le professeur
12 souhaitait fournir une explication complémentaire, mais je crois que vous
13 vous consultiez.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Certainement, Monsieur le Professeur.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] L'article 18 dispose que, dans des situations
16 semblables, une amende sera imposée à toute personne qui n'aura pas déposé
17 sa demande en vue de l'obtention d'une nouvelle carte d'identité à une date
18 donnée. Ceux qui ne déclarent pas la perte d'une carte d'identité dans un
19 délai fixé doivent faire la demande d'une nouvelle carte d'identité.
20 L'article 12 évoque ce qui arrive lorsque les personnes perdent leur carte
21 d'identité. L'article 18 contient des éléments détaillés sur la question
22 des cartes d'identité.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
24 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci beaucoup. Une correction, s'il vous
25 plaît, à la page 7 815. Le professeur a indiqué qu'un dossier, à ce moment-
26 là, est préparé, mais c'est un rapport portant sur la mauvaise conduite de
27 quelqu'un. Il ne s'agit pas d'un rapport au pénal. Il ne s'agit pas de
28 quelque chose qui a trait à une affaire pénale.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
2 M. ZECEVIC : [interprétation]
3 Q. Comme le précise l'article 83, au paragraphe 7, une fois que l'état de
4 guerre a été déclaré, le président doit soumettre ces textes de lois pour
5 qu'ils soient ratifiés.
6 R. C'est exact.
7 Q. Maintenant, je vous demande de bien vouloir vous pencher sur
8 l'intercalaire numéro 42, ID190. Intercalaire numéro 42, Monsieur, c'est
9 une lettre rédigée par M. Milutinovic à l'intention du président de
10 l'assemblée du peuple de la République de Serbie, M. Dragan Topic.
11 R. Ce qu'il fait ici est tout à fait conforme à la constitution et à
12 l'article 83 de ce dernier au paragraphe 7 dont nous avons déjà fourni une
13 explication.
14 Q. La date de cette lettre est celle du 25 juin, alors qu'il y a quelques
15 instants, nous avons dit - et c'est quelque chose que nous pouvons voir en
16 bas de cette lettre - que le 24 juin a été prise la décision de déclarer
17 l'état de guerre.
18 R. Cela signifie que le président de la république, le lendemain, a envoyé
19 la lettre d'accompagnement au président de l'assemblée du peuple.
20 M. ZECEVIC : [interprétation] Pardonnez-moi, Mesdames, Messieurs les Juges,
21 mais à la cinquième ligne page 80, le 24 juin, la décision a été prise de
22 décréter qu'il n'y avait plus d'état de guerre.
23 Q. Pouvons-nous passer à l'intercalaire numéro 43, s'il vous plaît ? Pièce
24 ID192, c'est la loi qui confirme le décret adopté par le président lorsque
25 avait été déclaré l'état de guerre.
26 R. Oui, et l'assemblée parlementaire prend certaines mesures conformément
27 à l'article 83. Si nous regardons l'article 8, on voit précisément à quel
28 moment certains de ces décrets ont cessé d'exister, ont été abrogés, et
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1 indique que d'autres décrets ont cessé d'exister à certaines dates, par
2 exemple, que nous avons la liste ici des différents décrets adoptés et
3 abolis. Trois différents régimes ont été envisagés ici par rapport aux
4 dates décrites, dates se rapportant à ces décrets qui cessaient d'être en
5 vigueur.
6 Q. Monsieur le Professeur, encore une fois je souhaite parler d'un autre
7 pouvoir, c'est très important ici pour cet interrogatoire, paragraphe 5 de
8 l'article 83 de la constitution. Il s'agit encore une fois d'une question
9 de compétence, la compétence annexe. Cela relève ici de la compétence de
10 l'Etat fédéral, sans aucun doute. C'est la raison pour laquelle je souhaite
11 que vous commentiez le paragraphe 99.9 et le paragraphe 135 de la
12 constitution de la RFY à l'intercalaire numéro 586, et la pièce du document
13 traduit est le document D139. L'article 135 à propos du président de la
14 République fédérale de Yougoslavie, et l'article 99.9 évoque le
15 gouvernement fédéral.
16 R. L'article 135 déclare que la République de Serbie ne dispose pas de
17 forces armées, donc pas d'armée. L'armée se trouve placée sous le
18 commandement de la fédération. C'est le sens même de l'article 135. Hormis
19 cela, il y a trois choses qui font l'objet de la tension de ces différents
20 organes : qui commande l'armée, la composition des organes étant l'élément
21 suivant; le conseil de Défense suprême; et troisièmement, qui surveille les
22 travaux de cet organe. Article 89, je ne sais pas très bien --
23 Q. Paragraphe 9.
24 R. On précise que c'est le gouvernement fédéral qui ordonne la
25 mobilisation générale et qui organise les préparatifs de défense, ce qui
26 signifie que ceci ne relève en rien des compétences du président de la
27 République de Serbie, en tout cas d'après l'article 83, au paragraphe 5.
28 Q. Merci. Monsieur le Professeur, nous allons maintenant rapidement voir
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1 ensemble l'article 83, au paragraphe 1, qui évoque la constitution de la
2 Serbie, question à laquelle vous avez déjà répondu dans le détail, je
3 crois, surtout lorsque vous avez évoqué l'incapacité du président à prendre
4 de telles décisions sans consulter au préalable la majorité parlementaire.
5 Je souhaite que vous commentiez ceci, que vous commentiez un point que nous
6 avons abordé ce matin. Théoriquement, dans le cas où le président serait
7 amené à nommer quelqu'un à la tête du cabinet qui ne serait pas soutenu par
8 la majorité à l'assemblée, d'après vous quelle serait la situation dans ce
9 cas-là ? Je veux dire le premier ministre pressenti.
10 R. Le président devrait savoir qu'un premier ministre pressenti de la
11 sorte ne pourrait pas recueillir la majorité au parlement. Donc, une des
12 interprétations possibles serait de dire qu'il entrave la création du
13 cabinet, enfreignant ainsi la constitution. Si l'on enfreint la
14 constitution, cela suffit à révoquer le président de la république. La
15 personne, à ce moment-là, si elle n'a pas la majorité au parlement, le
16 président à ce moment-là, s'il décide d'emprunter cette voie-là, doit
17 former un cabinet, à ce moment-là, il influence de façon importante son
18 futur cabinet.
19 Q. Nous avons rencontré une situation comme celle-ci en Serbie tout à fait
20 récemment. Cela était une situation assez semblable. Est-ce que vous
21 pourriez peut-être nous éclairer un petit peu ?
22 R. Oui. C'était semblable dans la mesure où ils avaient beaucoup de mal à
23 mettre en place un gouvernement de coalition au sein de l'assemblée, une
24 majorité si vous voulez dire. Dès qu'il y avait une majorité à proprement
25 parler, c'était la veille de l'expiration du délai de l'application de la
26 constitution. Le président a finalement nommé un premier ministre, c'est
27 ainsi qu'il a obtenu de la sorte la majorité nécessaire.
28 Q. Ce que j'avais à l'esprit, Monsieur, c'est que le président de la
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1 Serbie, Tadic, qui était président du Parti démocratique, malgré que le
2 fait que le Parti démocratique avait nommé M. Djeric, n'a pas pu proposer
3 ce poste à un candidat venant du même parti. Mais plutôt, il l'a proposé à
4 un candidat qui avait recueilli le soutien de la majorité, la majorité
5 parlementaire. C'était simplement pour vous donner un exemple, telle était
6 mon intention.
7 R. Oui, c'est exactement la position lorsqu'un candidat est présenté, mais
8 qu'il n'a pas la majorité, il en a besoin au parlement. Les élections des
9 membres au parlement sont importantes. Il est tenu de respecter la
10 coalition gouvernementale et les partis qui font partie de cette coalition.
11 Il a l'obligation de tenir compte de leurs opinions. Il n'a pas le loisir
12 de nommer un candidat à son cabinet comme bon lui semble.
13 Q. Merci beaucoup.
14 Simplement pour éviter des redites, nous allons maintenant parler de
15 l'article 83, paragraphe 2, lorsqu'il s'agit de nommer des candidats à la
16 position de juge de la cour constitutionnelle.
17 R. Oui, je viens de vous donner un exemple de cela.
18 Q. Oui, merci. Mais nous avons besoin d'expliquer quelque chose aux Juges
19 de la Chambre, un point important concernant les pouvoirs du président en
20 vertu de l'article 83, au paragraphe 3, lorsqu'on procède à la promulgation
21 des lois par voie de décret. "Ukaz" et "uredba," c'est la distinction que
22 nous faisons dans notre système judiciaire, par ordonnance ou par décret.
23 En anglais, au plan juridique, ceci a un autre sens.
24 Ce que nous avons ici, les services de traduction du Tribunal ont
25 décidé de traduire ces deux termes par un seul et même terme, qui est le
26 terme de "décret" en anglais. Pourriez-vous nous expliquer quelle est la
27 différence entre ukaz, u-k-a-z d'une part, et uredba d'autre part, s'il
28 vous plaît, u-r-e-d-b-a ? C'est à cette fin que nous avons préparé notre
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1 deuxième présentation Powerpoint.
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons réafficher la
3 deuxième présentation Powerpoint, s'il vous plaît ? Est-ce que nous
4 pourrions avoir un numéro IC ?
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce IC132, Mesdames,
6 Messieurs les Juges.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Je crois que M. l'Huissier peut retirer la
8 présentation précédente, s'il vous plaît, la retirer du rétroprojecteur.
9 Merci beaucoup. Est-ce que nous pouvons avoir la première page, s'il vous
10 plaît ?
11 Q. Monsieur le Professeur, vous voyez cette présentation Powerpoint sur
12 votre écran, n'est-ce pas ?
13 R. Oui, oui.
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Diapositive numéro 2, s'il vous plaît ?
15 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Pardonnez-moi si j'interromps. J'ai
16 quelques confusions à mon esprit. Peut-être que M. le Professeur pourrait
17 m'aider quelque peu ?
18 J'ai regardé l'article 83.5 de la constitution serbe, ainsi que l'article
19 99 de la constitution de la République fédérale de la Yougoslavie. D'après
20 l'interprétation qui en a été faite par M. le Professeur, ainsi qu'au vu du
21 rapport qu'il a rédigé, il a indiqué que les pouvoirs dont était investi le
22 président en vertu de l'article 83.5 de la constitution de Serbie, ces
23 pouvoirs sont remplacés ou l'article 83.5 est remplacé par l'article 99 de
24 la RFY. D'où vient cela ? Si nous comparons le texte des constitutions, en
25 général, on énumère la liste des pouvoirs, la fédération a une liste,
26 ensuite il y a une liste concomitante.
27 D'après ma manière de comprendre l'article 83.5 et 99, il s'agissait
28 de juridiction concomitante. J'apprécierais beaucoup que le professeur
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1 s'étende sur la question. D'après lui, comment peut-il nous dire que
2 l'article 99 remplace l'article 83.5 de la constitution serbe ? Ensuite,
3 j'ai une autre question, une question annexe que je souhaite poser au
4 professeur. Je vous remercie beaucoup de bien vouloir répondre à cette
5 question.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je ? Merci.
7 Pour ce qui est de la défense et des pouvoirs dont est revêtu le
8 président en la matière, l'article 77 de la constitution de la République
9 fédérale de Yougoslavie énumère les pouvoirs de l'Etat fédéral de la
10 fédération. Au paragraphe 7, on peut lire : "Défense et sécurité de la
11 République fédérale de la Yougoslavie." Donc, la question de la Défense
12 relève de la compétence de l'Etat fédéral et non pas de la République. Pour
13 ce qui est du contrôle des forces armées en temps de paix et en temps de
14 guerre, ceci est régi par l'article 135 de la constitution de la RFY au
15 paragraphe 1. On peut lire que le conseil de Défense suprême du président
16 de la République dispose de ce pouvoir. Mais pour ce qui est d'ordonner une
17 mobilisation partielle ou générale en vertu de l'article 99 au paragraphe
18 9, ceci relève de la compétence du gouvernement fédéral. Pourquoi les
19 dispositions de la constitution fédérale s'appliquent-elles ici plutôt que
20 les dispositions de la constitution serbe ?
21 Bien, c'est en raison de l'article 115 de la République fédérale
22 Yougoslavie qui précise que les constitutions des Républiques membres
23 doivent être conformes à la constitution de la République fédérale
24 yougoslave. Donc lex superior derogat inferoiori, la constitution fédérale
25 supplante et remplace la constitution serbe en tant qu'unité ou entité
26 fédérale faisant partie de la fédération yougoslave.
27 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Ma deuxième question serait celle-ci.
28 Bien évidemment, il s'agit de deux constitutions, celle étant la
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1 constitution de la fédération, l'autre de la Serbie. Cette constitution de
2 la RFY a-t-elle été adoptée par la Serbie ou acceptée dans certaines
3 conditions ? Si oui, quelles étaient ces conditions ? Est-ce que ces
4 conditions ont précisé quels rapports ou liens il y avait ? Autrement dit,
5 s'il y avait des pouvoirs concomitants entre les deux.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] La République de Serbie et la République du
7 Monténégro ont décidé de s'associer à la République fédérale de Yougoslavie
8 par le biais de la constitution de 1992. On précise que la République de
9 Serbie et la République du Monténégro, ceci se retrouve à l'article 2, où
10 les républiques membres de la fédération, en s'associant à la République
11 fédérale de Yougoslavie, la Serbie et le Monténégro reconnaissent la
12 primauté du droit fédéral, autrement dit de la constitution fédérale, du
13 droit fédéral, ainsi que d'autres textes législatifs de la fédération. Par
14 rapport au droit appliqué dans chaque république.
15 Toutes les fédérations du monde fonctionnent de la même façon, c'est
16 la primauté du droit fédéral par rapport au droit républicain, c'est la
17 primauté du droit fédéral par rapport aux entités relevant de la
18 fédération. Ceci s'appliquait également à la Fédération yougoslave jusqu'en
19 2003, date à laquelle cette dernière est devenue une union et en mai 2006,
20 le 21 mai 2006, cette union a cessé d'exister. Au lieu de cela, nous avons
21 maintenant deux Etats indépendants : la Serbie et le Monténégro, deux Etats
22 indépendants et souverains à partir du 21 mai 2006.
23 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le
24 Président. Mais encore une précision, s'il vous plaît, de vous, Monsieur le
25 Professeur. Le 99 de la RFY et le 83.5, pensez-vous qu'il y a ici
26 contradiction ? Parce qu'il semblerait qu'il s'agisse de juridictions
27 concomitantes. Comment pouvez-vous nous extraire de cette difficulté
28 d'après vous ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Les pouvoirs sont les mêmes lorsqu'il s'agit
2 d'ordonner la mobilisation partielle ou générale, mais l'article 99 prévaut
3 sur l'article 83 qui fait partie de la constitution fédérale. La
4 constitution fédérale prévaut sur les constitutions des différentes
5 républiques membres de la fédération. Donc les textes de lois ayant une
6 procédure juridique plus importante annulent la législation, le texte de
7 loi de pays ou de républiques qui ont moins force de loi. La constitution
8 de la République de Serbie déclare que le président de la république décide
9 de la mobilisation. La constitution fédérale déclare que c'est le
10 gouvernement fédéral qui prononce les décisions. La règle veut que la
11 constitution fédérale prévale sur la constitution républicaine. Il en
12 découle que c'est le gouvernement ou la fédération qui décide de lancer un
13 appel à la mobilisation générale.
14 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Bien. Est-ce que vous avez un exemple
15 dans le cas du droit constitutionnel à nous donner sur ce point ou est-ce
16 votre propre interprétation ? Une décision qui aurait été prise par la cour
17 constitutionnelle par rapport à ce que vous venez de dire ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, par exemple, lorsque l'état de guerre a
19 été déclaré, nous avons constaté que ceci a été fait par le gouvernement
20 fédéral et non pas par le président de la république. La même chose
21 s'applique à la mobilisation qu'elle soit partielle ou générale. Donc, il
22 ne s'agit pas là de mon interprétation personnelle, c'est une règle qui
23 régit le fonctionnement de la fédération. La constitution de la fédération
24 déclare qu'elle prévaut sur les constitutions des républiques membres de la
25 fédération, c'est une situation qui s'est présentée lorsque c'est le
26 gouvernement fédéral qui a réagi conformément à la constitution de la
27 fédération. Ce n'est pas le président de la république qui a pris la
28 décision et qui a déclaré qu'un état de guerre imminent ou un état de
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1 guerre avait été déclaré. Ce n'est pas le président non plus qui a déclaré
2 la mobilisation générale ou partielle. C'est le gouvernement fédéral qui
3 s'est occupé de tout cela. Donc, il ne s'agit pas de ma propre
4 interprétation. Il s'agit simplement ici des rapports entre deux textes
5 législatifs qui ne sont pas sur un pied d'égalité en termes de pouvoir ou
6 de primauté. Nous n'avons jamais rencontré d'exemples de ce type dont
7 aurait été saisie la cour constitutionnelle, à ma connaissance en tout cas.
8 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic.
10 M. ZECEVIC : [interprétation]
11 Q. Bien. Simplement précisons un point, Monsieur le Président. Dans votre
12 réponse précédente, vous avez parlé du président de la république, vous
13 vouliez parler de la République de Serbie, je suppose ?
14 R. Oui.
15 Q. Parce qu'il y a également un président de la fédération. Donc, je vous
16 demande de bien vouloir le préciser lorsque vous prendrez la parole.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que nous avons répondu à vos questions
18 ?
19 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je souhaite simplement dépoussiérer
20 tout ceci, mais peut-être qu'il y aura d'autres questions lorsque nous
21 aurons examiné d'autres parties du texte, mais je remercie le témoin
22 d'avoir répondu.
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Bien sûr.
24 Q. Monsieur le Professeur, veuillez regarder l'écran que vous avez devant
25 vous.
26 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous avons à nouveau la présentation
27 Powerpoint numéro 2, IC132. Ce que nous avons à l'écran, c'est la deuxième
28 diapositive que nous avons sous les yeux.
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1 Q. Monsieur le Professeur, pourriez-vous brièvement commenter cette
2 diapositive, s'il vous plaît. Que représente-elle ?
3 R. Bien, je me souviens de votre question. Vous m'avez demandé quelle
4 était la différence sur le plan juridique de ces deux termes : "ukaz" et
5 "uredba" et la différence est multiple. Tout d'abord, qui délivre le
6 document, "ukaz" cela ne devait être délivré que par le président de la
7 République de la Serbie; et "uredba" est un texte de loi qui est adopté par
8 le gouvernement. Voici déjà une différence. La deuxième différence se situe
9 au niveau du contenu. "Ukaz" est une proclamation, "ukaz" confirme une loi
10 qui est prévue par la constitution et confirme qu'au regard de certains
11 actes, ces actes auront certaines conséquences sur le plan juridique. Par
12 exemple, lorsqu'on met un terme au mandat de l'assemblée, ceci a force de
13 loi, ou le président peut peut-être rendre un "ukaz" en déclarant que le
14 gouvernement fédéral dissout l'assemblée fédérale. Ceci est conforme à la
15 constitution de 1992. Mais à l'inverse, "uredba" est une promulgation, au
16 sens général du terme, de textes par le gouvernement qui a le pouvoir
17 législatif, et se rapportent au gouvernement.
18 Q. Monsieur le Professeur, vous avez dit qu'un "ukaz" est rendu
19 exclusivement par le président ?
20 R. Oui. Dans notre système judicaire, aucun autre organe de l'Etat ne peut
21 rendre un "ukaz."
22 Q. Comme nous pouvons le constater dans la deuxième diapositive, il y a
23 deux sortes "d'ukaz". Il y a un "ukaz" déclaratif et un "ukaz" constitutif.
24 Pouvez-vous nous expliquer très brièvement la différence entre les deux,
25 entre ce qui est à caractère déclaratif et ce qui est à caractère
26 constitutif ?
27 R. Lorsqu'un "ukaz" n'est qu'un acte déclaratif, il se contente de
28 constater certains faits. Par exemple, il constate que l'assemblée
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1 populaire, dans le cadre d'une procédure législative, a adopté une loi en
2 agissant par la voie de la majorité prévue. Donc, un "ukaz" sert à
3 proclamer une loi qui désormais entrera en vigueur. Ce sera un exemple d'un
4 "ukaz" déclaratif. En revanche, un "ukaz" en tant qu'acte constitutif est
5 un acte individuel qui crée quelque chose.
6 Q. Pourriez-vous ralentir, s'il vous plaît.
7 R. Au niveau fédéral, ce serait, par exemple, l'acte de nomination
8 d'ambassadeurs ou d'autre personnel diplomatique ou par exemple, un "ukaz"
9 de promotion, lorsque quelqu'un accède au grade de général. Ce sont des
10 "ukaz" en tant qu'actes constitutifs, actes individuels. Il s'agit de deux
11 catégories distinctes, juridiquement parlant, "d'ukaz" dans le système
12 judiciaire de notre pays.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] La diapositive numéro 3, s'il vous plaît, à
14 présent.
15 Q. Nous voyons ici trois couleurs. En rouge, le président de la République
16 fédérale de Yougoslavie, en vert le président de la Serbie, et en jaune
17 s'affiche les mots gouvernement ou cabinet; est-ce bien cela ?
18 R. Oui.
19 M. ZECEVIC : [interprétation] La diapositive numéro 4, s'il vous plaît
20 Q. Professeur, nous voyons ici les "ukaz" ou certains "ukaz" qui sont de
21 la compétence du président de la République de Serbie en vert.
22 R. Oui. "Ukaz" sur la promulgation d'une loi, "ukaz" sur la grâce
23 présidentielle et "ukaz" sur les promotions. Oui, on voit ici l'intitulé :
24 "Ukaz proclamation or ordinance", en anglais dans l'original.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Que signifie "ukaz" en tant qu'acte de
26 promotion ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Un "ukaz" de promotion, c'est quelque chose
28 qui est issu en vertu de la loi sur les grades des membres des employés du
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1 ministère de l'Intérieur. Le président de la république, en vertu de cette
2 loi, pouvait, lorsque les conditions étaient réunies, promouvoir au grade
3 de général de police.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Où est-ce qu'on trouve être énoncé cet
5 attribut, dans quelle loi ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la loi sur les grades des employés du
7 ministère des Affaires intérieures. Puisque cette loi précise une
8 attribution ou une compétence qui ne figure pas à l'article 83 de la
9 constitution de la République de Serbie, on voit là une situation que j'ai
10 déjà évoquée, à savoir qu'il y a une extension des compétences
11 constitutionnelles du président de la république. Donc, la cour
12 constitutionnelle a jugé que ces dispositions étaient non
13 constitutionnelles et qu'elles devaient être abrogées. Bien entendu, je
14 parle là de la cour constitutionnelle de la Serbie.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais à un certain moment, on a fait
16 l'exercice de cette attribution, de ce pouvoir qui était non
17 constitutionnel.
18 M. ZECEVIC : [interprétation] Mais on l'a déclaré non constitutionnel ?
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. ZECEVIC : [interprétation] La diapositive numéro 5 à présent, s'il vous
21 plaît.
22 Q. Professeur, nous voyons ici les "ukaz" qui sont de la compétence du
23 président fédéral yougoslave. C'est la raison pour laquelle la couleur dans
24 laquelle il s'affiche est le rouge.
25 R. C'est le président de l'Etat fédéral de Yougoslavie qui est compétent
26 pour un éventail bien plus large de "ukaz", puisque nous avons un sujet de
27 droit international lorsque nous parlons de fédération, à la différence de
28 la République de Serbie. Donc, c'est par voie de "ukaz" qu'il nomme les
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1 représentants diplomatiques jusqu'aux ambassadeurs.
2 Q. Il les poste à des fonctions précises, à des missions précises ?
3 R. Oui, en fonction de l'article 135 de la constitution de la République
4 fédérale de Yougoslavie -- excusez-moi, plutôt c'est 136, l'article 136. Le
5 président de la république a la possibilité de promouvoir, de démettre de
6 leurs fonctions des officiers de l'armée, des juges et des procureurs
7 militaires, et il agit dans tous ces cas de figure par voie de "ukaz."
8 Q. Attendez un instant, s'il vous plaît, Professeur. Je voudrais qu'on
9 précise quelque chose. Quelle est la différence fondamentale entre les
10 attributions du président de la RFY sur le plan des "ukaz" par rapport aux
11 compétences qui sont celles du président de la République de Serbie sur le
12 plan des "ukaz" ? Cette différence est la suivante : le Président de la
13 République fédérale de Yougoslavie, en vertu de l'article que vous venez de
14 citer, l'article 136 de la constitution yougoslave, peut nommer et démettre
15 de leurs fonctions des individus pour un certain nombre de postes. Or, le
16 président de la Serbie ne bénéficie pas de ces attributions, de ces
17 pouvoirs-là.
18 R. La seule compétence qu'il a, le président de la Serbie, c'est celle que
19 j'ai mentionnée.
20 Q. Vous voulez dire sur les promotions ?
21 R. Oui, les promotions. Pas les nominations, pas la possibilité de
22 démettre les gens de leurs fonctions. Il peut agir par voie de "ukaz" pour
23 des décorations et d'autres distinctions, puisque nous avons une loi
24 fédérale sur les décorations qui régit ce domaine.
25 Q. Professeur, le moment s'y prête bien, peut-être. Je souhaite commenter
26 quelque chose. D'après vous, lorsqu'on parle de "promotion" de quoi parle-
27 t-on précisément ? Un acte de promotion, à quoi est-ce que cela correspond
28 ?
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1 R. Un acte de promotion, c'est un acte individuel constitutionnel pour ce
2 qui est de sa nature juridique. Pour ce qui est de sa teneur, il signifie
3 la même chose que -- les profanes utilisent le terme de "promotion." Cela
4 veut dire aller de l'avant.
5 Q. L'individu qui est concerné par un tel acte, est-ce qu'il peut être
6 nommé à un certain poste ? Est-ce qu'il peut se voir conférer certaines
7 compétences par ce type d'acte ?
8 R. Non. Le président de la République de Serbie n'avait pas ces
9 compétences-là, que ce soit en vertu de la constitution ou en vertu de la
10 loi sur les grades des employés du ministère de l'Intérieur. La cour
11 constitutionnelle, dans ces dispositions où elle envisage les différentes
12 compétences du président de la République de Serbie, déclare que ces
13 dispositions sont non constitutionnelles. Il ne peut que confirmer un
14 grade, mais il ne peut pas nommer et enlever quelqu'un de ses fonctions. En
15 vertu de la constitution de la République de Serbie, il me semble que c'est
16 l'article 90 de celle-ci, cela relève du ressort du gouvernement serbe, de
17 la République de Serbie. Par conséquent, c'est donc le gouvernement de la
18 République de Serbie qui nomme et qui démet de leurs fonctions les employés
19 dans les organes administratifs. Le président de la République de Serbie
20 n'a pas cette compétence-là.
21 C'est exact, l'article 90, en son alinéa 5, dit que le gouvernement nomme
22 et démet de leurs fonctions les employés dans les ministères. Conformément
23 à la loi sur les grades, le président de la république ne peut que
24 promouvoir. Mais quant à une nomination d'un employé au sein du ministère
25 de l'Intérieur, il ne pouvait pas faire cela. C'est quelque chose qui
26 relève du ressort du gouvernement de la République de Serbie.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je trouve que ceci prête à confusion,
28 Maître Zecevic. Est-ce qu'on est en train de nous dire qu'en réalité, le
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1 président pouvait accorder un grade, mais non pas un poste ?
2 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Où est-ce qu'on trouve cette
4 attribution accordée au président d'accorder un grade ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la loi sur les grades des employés du
6 ministère de l'Intérieur qui le prévoit en ses articles 6 et 10, me semble-
7 t-il. Mais la cour constitutionnelle --
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je vois. Excusez-moi. Allez-y.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] La cour constitutionnelle a proclamé ces
10 articles non constitutionnels et les a abrogés. L'assemblée a adopté une
11 loi qui comportait des dispositions non constitutionnelles ou
12 anticonstitutionnelles. C'est quelque chose qui peut arriver dans n'importe
13 quel pays, et c'est ce qui s'est produit en République de Serbie.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En fin de compte, vous êtes en train
15 de nous dire que le président de la Serbie ne pouvait ni nommer ni démettre
16 de ses fonctions un employé du ministère, et qu'il ne pouvait pas non plus
17 nommer des gens à différents postes, et qu'il ne pouvait pas non plus leur
18 donner un poste ?
19 M. ZECEVIC : [interprétation] Le président de la Serbie n'a jamais reçu ce
20 pouvoir de nommer ou de démettre de leurs fonctions des gens, il ne pouvait
21 pas leur accorder de grades.
22 Pour ce qui est de la loi sur les grades, il avait le pouvoir de
23 promouvoir les gens conformément à la loi que nous allons examiner plus
24 tard. Mais cette loi a été déclarée non constitutionnelle dans ces
25 articles-là, comme vient de le dire le professeur. Les pouvoirs du
26 président de la Serbie découlent uniquement de la constitution. Il ne peut
27 pas se voir conférer des compétences autres par la loi, c'est la raison
28 pour laquelle à un moment ultérieur la cour constitutionnelle a déclaré non
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1 constitutionnelle la loi en question. Mais au moment qui nous intéresse,
2 moment pertinent pour l'acte d'accusation, cette loi était toujours en
3 vigueur. Ce n'est que par la suite qu'elle a été déclarée non
4 constitutionnelle.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Page 92, si vous voulez bien, ligne 23
6 de la transcription des débats.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Lignes 24 et 25: "Le Président de la
9 Serbie n'avait que le pouvoir que j'ai mentionné." Par la suite, vous
10 ajoutez : "Vous voulez dire le pouvoir de promouvoir ?" La réponse apportée
11 à cela est : "Oui."
12 Or, d'après ce que j'ai compris, il n'avait pas le pouvoir de
13 promouvoir parce que la loi qui lui conférait ce pouvoir n'était pas
14 constitutionnelle.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] Il l'avait au moment qui est pertinent pour
16 notre affaire. Ce n'est que par la suite que cette loi a été déclarée non
17 constitutionnelle.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vois.
19 M. ZECEVIC : [interprétation] A l'époque, il pensait qu'il avait ce
20 pouvoir.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc le général Lukic est-il général
22 ou pas ?
23 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, il est général.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et il a été promu général pendant
25 cette période-là ?
26 M. ZECEVIC : [interprétation] A un poste plus important de général.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cet acte a été déclaré non
28 constitutionnel ou constitutionnel par la suite ?
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Non, la promotion elle-même, le fait est
2 resté. C'est le pouvoir du président qui a été déclaré non constitutionnel.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, il a l'a eu au moment où le
4 président n'a pas bien compris ses pouvoirs.
5 Passons à autre chose.
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Si vous voulez bien, je peux poser des
7 questions au professeur là-dessus. Je ne suis qu'un profane pour ce qui est
8 de ces choses-là.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, ceci correspond maintenant par
10 rapport à tout ce que nous avons entendu là-dessus.
11 M. ZECEVIC : [interprétation]
12 Q. Professeur, est-ce que vous pouvez nous l'expliquer ?
13 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi, j'ai interrompu.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer d'expliquer.
15 M. ZECEVIC : [interprétation]
16 Q. Je vous en prie.
17 R. La décision de la cour constitutionnelle qui décide qu'une loi dans sa
18 totalité ou dans certaines de ses parties est non constitutionnelle n'est
19 pas rétroactive. Ce n'est pas exclu que cette loi s'applique, donc
20 uniquement pour l'avenir. Lorsqu'une loi a été non constitutionnelle ou une
21 disposition de loi a été non constitutionnelle, ce n'est pas à titre
22 rétroactif qu'on annule ses conséquences, c'est uniquement à l'avenir qu'on
23 ne pourra plus appliquer cette loi. C'est à la fois sur le plan fédéral
24 qu'au niveau de la République de Serbie que s'applique la législation.
25 Vous avez le même régime depuis 2006. Donc ce n'est pas à titre
26 rétroactif que l'on agit, on n'efface pas les conséquences juridiques
27 produites par des dispositions non constitutionnelles d'une loi ou
28 l'application dans sa totalité d'une loi. Mais à l'avenir, on ne les
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1 applique plus.
2 En vertu d'une loi, le président de la République a pu agir, et ce
3 qu'il a fait est valable indépendamment du fait que la cour
4 constitutionnelle a jugé par la suite qu'il s'agissait de dispositions non
5 constitutionnelles.
6 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Ce à quoi nous sommes habitués est la
7 chose suivante : si quelque chose n'est pas valable d'emblée, cela reste
8 non valable à l'avenir. Mais, il y a des remèdes juridiques.
9 J'aimerais savoir, dites-nous, s'il vous plaît, si la cour
10 constitutionnelle a protégé ces dispositions ou ces actes ou non, pour
11 qu'ils restent valables ou non ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] La cour constitutionnelle prend des décisions
13 et ne prononce pas d'arrêts ou de jugements. Les décisions de la cour
14 constitutionnelle sont finales et ne peuvent pas être invalidées lors d'un
15 recours. Il n'y a pas de recours, même si d'un autre point de vue, un point
16 de vue non juridique, ceci puisse sembler non logique, et bien, c'est tout
17 à fait cohérent et je précise que c'est depuis 1963 que notre pays a une
18 cour constitutionnelle, depuis la période où nous étions un pays
19 socialiste. Nous étions d'ailleurs le seul pays socialiste du monde qui
20 avait une cour constitutionnelle.
21 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Mais qui apporte un remède ? Si des
22 tribunaux dé, comment est-ce qu'on protège les actes qui ont été exécutés
23 conformément à ces dispositions-là ? Qu'est-ce qui protège juridiquement
24 ces actes-là ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais cette position n'existe pas puisque les
26 décisions de la cour constitutionnelle, comme je viens de le dire, sont
27 finales et concernent uniquement l'avenir. Elles invalident l'acte commis,
28 mais n'annulent pas ses conséquences. La cour constitutionnelle de la
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1 République de Serbie et la cour constitutionnelle yougoslave ont été créées
2 à l'image des cours constitutionnelles de l'Italie, de l'Autriche et de
3 l'Allemagne. Il s'agit du droit européen constitutionnel qui a servi
4 d'exemple pour créer et pour articuler nos cours constitutionnelles chez
5 nous. Pour quelqu'un qui vient d'un autre système, cela peut sembler peut-
6 être difficile à comprendre, mais dans le système européen de droit
7 constitutionnel c'est ainsi que les choses se présentent.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic.
9 M. ZECEVIC : [interprétation]
10 Q. Si je vous ai bien compris, Professeur, notre concept de droit
11 constitutionnel n'est pas quelque chose particulier à la Serbie mais
12 s'appuie sur le droit constitutionnel européen ?
13 R. Oui, tout à fait. Nous avons adopté ces solutions à l'image de ces
14 pays. Nous les avons empruntées à ces pays-là. En 2006, dans la dernière
15 constitution serbe, vous avez une majorité de solutions empruntées à la
16 constitution italienne, par exemple. C'est à l'image de la cour
17 constitutionnelle italienne que nous avons créé notre cour
18 constitutionnelle. Nous avons 15 Juges, l'autre en avait neuf. Mais rien de
19 cela n'a été inventé ex nihilo; c'est quelque chose qui a été emprunté aux
20 autres pays européens de droit civil, ceux qui ont des cours
21 constitutionnelles.
22 Q. Puisque nous venons d'aborder ce sujet, nous pourrions peut-être
23 apporter quelques précisions supplémentaires aux Juges s'ils ont d'autres
24 questions sur cette décision de la cour constitutionnelle. Intercalaire
25 26, s'il vous plaît, 1D639
26 Il s'agit là de la décision en question, décision de la cour
27 constitutionnelle de Serbie à l'intercalaire 26. C'est cette décision que
28 vous venez de commenter, si je ne m'abuse. C'est à l'intercalaire 26,
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1 1D639.
2 R. Oui, tout à fait, c'est précisément cette décision-là.
3 Q. Nous avons l'intégralité du texte traduit, vous pourriez peut-être
4 apporter quelques commentaires en parcourant la décision si la Chambre
5 estime que ça pourrait lui être utile.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le texte semble clair et, d'après ce
7 qui est dit dans le texte, ces dispositions contestées ne seront plus en
8 vigueur à l'avenir, ce qui laisse entendre qu'elles avaient été en vigueur
9 ou valables précédemment. Ce que je pense que cherchait à entendre le Juge
10 Chowhan c'était que la base pour décider quelque chose constitue une
11 infraction à la constitution. Peut-être que vous pourriez échanger ce soir
12 et nous apporter la réponse demain, nous pourrions peut-être aborder autre
13 chose à présent.
14 M. ZECEVIC : [interprétation] Très bien.
15 Q. Revenons à notre présentation Powerpoint, 1C132, la diapositive numéro
16 6, s'il vous plaît. Nous avons maintenant les "uredba". Vous avez dit qu'il
17 s'agit là uniquement d'actes qui relèvent de la compétence du gouvernement
18 ?
19 R. Tout à fait. C'est un gouvernement qui agit par voie de "uredba";
20 "ukaz" c'est quelque chose qui est propre au président de la république, et
21 une loi est quelque chose qui est propre à l'assemblée, au parlement.
22 Q. Merci. Comme nous pouvons le voir dans cette diapositive, une "uredba"
23 est un acte constitutif ?
24 R. Oui. Dans le système de la République de Serbie, et il en va de même au
25 niveau de la fédération, c'est un acte qui est exclusivement exécutif. L'on
26 ne peut pas par voie autonome, sans que ceci ait été régi préalablement par
27 la loi, gérer des relations sociales par voie de "uredba." Une "uredba"
28 doit toujours s'appuyer sur une loi ou sur les dispositions d'une loi.
Page 12953
1 Q. Sauf dans le cas d'une exception ?
2 R. Oui, comme nous avons vu, en situation de danger imminent de guerre.
3 Q. Est-ce que vous pouvez ralentir un peu, Professeur, s'il vous plaît,
4 pour l'interprétation. Excusez-moi, je vous ai interrompu.
5 R. Sauf dans une situation de danger de guerre imminent. Nous avons vu il
6 y a des "uredba" provisoires qui ne s'appliquent que tant que cette
7 situation dure. De la compétence de l'assemblée, c'est le président qui les
8 donne. C'est un acte qui relève de la compétence du gouvernement
9 conformément à l'article 90 en son alinéa premier. Une "uredba" doit être
10 conforme à la constitution. Des "uredba" de décisions et d'autres actes
11 permettant d'appliquer la loi sont pris par le gouvernement.
12 Mais ce ne sont pas des actes autonomes comme lorsque le législateur agit
13 par voie de loi. Une "uredba" s'adosse sur une loi. Il n'existe qu'une
14 seule situation où une "uredba" a une valeur autonome. On l'appelle "uredba
15 autonome" lorsqu'il s'agit de résoudre de manière autonome des relations
16 sociales, et c'est l'article 90, en son alinéa 5 qui contient ces principes
17 qui concernent l'organisation interne des ministères et d'autres organes de
18 l'administration. Si vous examinez cette "uredba" dans le journal officiel
19 de la République de Serbie où on publie l'ensemble des lois, des règlements
20 et autres actes, vous verrez qu'elle cite l'article 90, alinéa 5 de cette
21 loi. Et c'est pour assurer son application qu'elle a été prise. Vous avez
22 des milliers "d'uredba" qui peuvent être prononcées, mais elles s'appuient
23 toujours sur une loi et elles doivent garantir l'application de la loi en
24 question.
25 Q. Merci.
26 Justement, le professeur vient d'aborder une question que l'on voit
27 présentée et développée aux pages 7 et 8 de notre présentation. Pour éviter
28 de se répéter, nous allons passer à autre chose.
Page 12954
1 Professeur, je pense que nous avons suffisamment fait l'exégèse de
2 l'article 83 de la constitution de Serbie. Intercalaire 5, pièce P0855. Ce
3 chapitre de la constitution qui s'intitule "Président de la république,"
4 aux articles 83 à 89, porte sur la constitution, n'est-ce pas -- porte
5 plutôt sur le président, n'est-ce pas ? Pourriez-vous parler maintenant de
6 cet article, de l'article 84, qui donne au président de la république la
7 possibilité d'utiliser son veto. Précisons d'abord qu'il s'agit de quelque
8 chose qui est en rapport avec le paragraphe 3 de l'article 83 où il peut
9 proclamer des décrets de loi. Alors qu'ici on voit qu'il a le droit de
10 veto, un droit de veto suspensif.
11 R. Le veto suspensif c'est un droit qui est conféré au président et qui
12 lui permet de renvoyer une loi à l'assemblée nationale afin que l'assemblée
13 nationale se prononce à nouveau au sujet du texte, et ceci, il peut le
14 faire pour deux motifs. Il se peut qu'il estime que le texte de loi est
15 incomplet, et cela c'est la nature même du droit de veto, ou il peut le
16 faire s'il estime que la loi est anticonstitutionnelle; même si cela
17 n'entre pas dans le cadre du droit de veto. Parce que ce n'est pas au
18 président de la république de se prononcer sur le caractère constitutionnel
19 d'un texte; c'est la cour constitutionnelle qui le fait.
20 Cependant, si vous examinez les dispositions de l'article 84, vous pouvez
21 constater que ce droit de veto suspensif n'est pas un droit très fort, un
22 droit de primauté. Les délais prévus sont extrêmement courts, ce qui pose
23 des problèmes. Le délai est de sept jours à partir de la date à laquelle
24 l'assemblée adopte une loi. Voilà, sept jours, c'est le délai dont dispose
25 le président pour étudier la loi et se convaincre qu'il convient peut-être
26 de la renvoyer à l'assemblée pour que celle-ci se prononce à nouveau sur le
27 texte.
28 Il faut aussi savoir que cela n'est pas un instrument très puissant entre
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1 les mains du président. Lorsqu'il y a droit veto, si le président utilise
2 son droit de veto, l'assemblée peut de nouveau voter la loi avec la même
3 majorité, et à ce moment-là le président sera contraint de la promulguer.
4 Si une loi fait l'objet du veto du président, elle ne fait pas l'objet
5 d'une nouvelle lecture à l'assemblée. Donc, on ne peut pas dire qu'il
6 s'agit là d'un instrument extrêmement puissant entre les mains du
7 président, sauf si une loi a fait l'objet d'un veto au départ et si la
8 majorité ensuite devait être supérieure à celle qui existait initialement.
9 Par exemple, aux Etats-Unis, une fois qu'une loi a fait l'objet d'un
10 veto, il faut pour qu'elle soit de nouveau adoptée par l'assemblée, que
11 l'assemblée vote en faveur de cette loi à la majorité de deux tiers. On
12 voit qu'ici, ce n'est pas le cas, c'est le même niveau de majorité qui
13 s'applique la deuxième fois, lors de la deuxième lecture du texte. Le
14 président ne se voit pas conféré un outil extrêmement puissant, une arme
15 extrêmement puissante. Je n'ai jamais vu de date butoir aussi courte. Sept
16 jours seulement, c'est très court comme délai. On voit d'ailleurs que ce
17 délai on l'a fait passé de sept jours à 15 jours.
18 Q. Vous en parlez d'ailleurs au point 2.22 et 3.10 de votre rapport.
19 M. ZECEVIC : [interprétation] Quelques secondes de patience, s'il
20 vous plaît.
21 [Le conseil de la Défense se concerte]
22 M. ZECEVIC : [interprétation]
23 Q. On me fait savoir que la traduction de l'article 84 n'est pas
24 très visible, c'est-à-dire qu'on ne peut pas voir très clairement quel est
25 le nombre de jours qui sont accordés au président. C'est-à-dire quel délai
26 il doit respecter pour renvoyer un texte de loi devant l'assemblée. C'est
27 bien sept jours, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Le président a sept jours pour renvoyer un texte de loi à l'assemblée.
2 Oui, c'est le même délai qui est prévu pour la promulgation du texte ?
3 R. Oui, aussi bien pour la promulgation du texte que pour son renvoi pour
4 une deuxième lecture par les députés.
5 Q. J'aimerais maintenant qu'on examine ensemble, Monsieur le Témoin,
6 l'article 85. Vous en parlez aux paragraphes 2.18 et 2.20 de votre rapport.
7 Veuillez nous faire part de vos observations, quelques mots au sujet de
8 l'article 85 de la constitution où il est prévu que le président de la
9 république peut demander au gouvernement de présenter sa position au sujet
10 de certaines questions qui relèvent de sa compétence, brèves observations,
11 s'il vous plaît, ensuite, on passera à autre chose. On passera aux
12 relations entre le président et les autres organes de l'Etat. Non, non. Ne
13 regardez pas votre montre. Je peux vous garantir qu'on ne commencera à
14 aborder ce thème que demain.
15 R. Aux termes de cet article, le président de la république peut demander
16 au gouvernement de formuler sa position au sujet de certaines questions qui
17 relèvent de sa compétence. Il ne peut pas demander que le gouvernement lui
18 présente un rapport au sujet de son travail. Le gouvernement, c'est-à-dire
19 le premier ministre et les ministres, n'a pas à rendre de compte au
20 président de la république. Il est responsable devant la majorité
21 parlementaire. Le président de la république ne préside pas le conseil des
22 ministres. C'est le premier ministre qui s'en occupe.
23 Le président de la république n'est pas celui qui signe les textes
24 promulgués par le gouvernement; il ne peut pas abroger les textes
25 promulgués par les ministères. Il n'a pas non plus le pouvoir de désigner
26 le premier ministre ou les ministres, il n'a pas le pouvoir non plus de les
27 révoquer. Ce sont là des compétences qui sont celles du parlement; et les
28 relations entre le gouvernement et le parlement reposent sur le principe
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1 d'un système parlementaire et sur la majorité. Cependant, en tant que
2 président de la république, le président peut demander, pour pouvoir faire
3 son travail, il peut demander au cabinet, c'est-à-dire au gouvernement, de
4 lui faire rapport au sujet de questions qui relèvent de ses compétences.
5 Mais de toute façon, il ne se passe rien quoi que réponde le gouvernement.
6 Le gouvernement a toute liberté de faire connaître sa position de la
7 manière la plus directe qu'il soit. C'est une sorte de rapport dans lequel
8 le gouvernement informe le président de la république. C'est très important
9 pour le travail du président et dans le cadre de ses activités, il ne
10 s'agit pas d'une relation verticale, celle qui existe qui entre le
11 président et le gouvernement. Il s'agit de la coordination des organes de
12 l'Etat dans le cadre de leurs activités respectives.
13 Q. Bien. On va y revenir demain, je ne vais pas insister. J'aimerais
14 maintenant vous parler de l'article 86, s'il vous plaît, surtout en son
15 paragraphe 5. C'est le libellé du serment prononcé par le président. Quelle
16 est la nature juridique de ce serment ?
17 R. Si vous regardez l'article 86, la prestation de serment n'est pas
18 inscrite dans la constitution. Le terme n'existe pas en tant que tel dans
19 la constitution. Je crois que ceci s'applique à toutes les constitutions du
20 monde. Si c'est entre guillemets, ceci rapporte les propos de quelqu'un
21 d'autre.
22 Le président nouvellement élu de la république lorsqu'il prend ses
23 fonctions en tant que président de la république, le serment en tant que
24 tel n'est pas une obligation juridique, n'est pas une norme. Ceci n'est pas
25 sanctionné. Ceci a une portée juridique. La même chose s'applique au droit
26 constitutionnel.
27 Q. Un instant, s'il vous plaît. Je crois que nous avons besoin d'afficher
28 ce document dans le système électronique du prétoire.
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1 M. ZECEVIC : [interprétation] Pièce ID712, l'article 56 du code allemand
2 sur la prestation de serment du président de la République d'Allemagne.
3 Cette loi date de 1949 et a été amendée en 1990.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quel est le numéro d'intercalaire de
5 cette pièce ?
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Je ne sais pas -- 44, Mesdames, Messieurs les
7 Juges. Intercalaire numéro 44. Pardonnez-moi.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous pouvons parcourir ceci
9 rapidement.
10 Monsieur le Professeur, que se passerait-il dans le cas où le président ne
11 prêterait pas serment ou refuserait de prêter serment ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il doit prêter serment.
13 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
14 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une condition sine qua non.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites que ceci n'est pas une
16 norme constitutionnelle. Que se passerait-il s'il ne prêtait pas serment ?
17 Il ne pourrait pas devenir président de la république ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit là d'un cas hypothétique. Vous
19 pourriez poser la même question dans le sens inverse. C'est la constitution
20 qui l'oblige à prêter serment, mais je ne pense pas qu'une personne puisse
21 devenir président sans prêter serment avant cela, mais ceci n'a pas force
22 de loi. En d'autres termes, rien n'oblige le président à le faire. Il n'y a
23 aucune règle ou aucune prescription à cet égard. Il prête serment
24 conformément à certaines valeurs qui sont souvent des valeurs morales et
25 juridiques, en vertu de quoi il se conformera au texte de la constitution
26 et du droit.
27 Si vous regardez les textes allemands, lorsque le président prête serment,
28 il invoque Dieu pour lui venir en aide lorsqu'il travaille pour le bien-
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1 être du peuple allemand, et qu'il respectera la constitution et la
2 protégera, et il termine en disant: "Que Dieu m'aide." Que se passerait-il
3 s'il ne respectait pas ces principes-là ? Est-ce que ce sera Dieu qui le
4 punira ? Est-ce qu'il sera torturé en enfer le jour où il rencontrera
5 l'Eternel. Donc ceci indique clairement que cette prestation de serment a
6 une connotation morale.
7 Si nous traduisons en langue juridique à proprement parler, on ne peut pas
8 faire reposer la responsabilité de quelqu'un sur une simple prestation de
9 serment. Un juge prête serment également, j'ai moi-même été juge de la cour
10 constitutionnelle avant de quitter mes fonctions au sein de la cour
11 constitutionnelle et j'ai prêté serment en invoquant les valeurs
12 similaires, celles qui sont décrites devant nous.
13 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] J'ai entendu votre explication fort
14 intéressante, il y a quelque chose qui m'intrigue par rapport à ce que vous
15 avez dit. Nous les Juges, nous avons un code de conduite, un code de
16 déontologie que s'ils trahissent le serment, à ce moment-là, il y a une
17 pénalité, une sanction qu'ils encourent conformément au code de déontologie
18 parce que ceci est contraire au serment. Le président également est tenu de
19 se conformer à un code déontologique et peut être récusé s'il trahi son
20 serment. La question qui pourrait être posée ici, on parle du fait que ce
21 serment n'a aucune valeur juridique. S'il vous plaît, permettez-moi de
22 mieux comprendre ce que fait le président lorsqu'il choisit les termes
23 qu'il utilise et qu'il prononce lorsqu'il prête serment. Est-ce qu'il peut
24 s'exprimer en son nom, en utilisant ses propres termes lorsqu'il prête
25 serment ?
26 Est-il exact de dire qu'on peut estimer que son serment n'est pas
27 sincère, c'est différent, mais est-ce qu'il y a des conséquences ou est-ce
28 qu'il y a des voies de recours s'il utilise d'autres termes ? Parce que la
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1 constitution utilise certains termes lorsqu'il s'agit de prêter serment et
2 ce sont des termes qui sont aussi valables que les termes utilisés par la
3 constitution. D'après votre discours fort instruit, je me demande si ces
4 termes sont redondants ? Est-ce que ces termes sont redondants ou est-ce
5 que ce sont des termes inutiles lorsqu'on doit occuper une fonction aussi
6 importante que celle du président de la République ? Je vous remercie
7 beaucoup, Monsieur, si vous pouviez un petit peu m'éclairer sur la question
8 pour que je puisse mieux comprendre ce que signifie cette prestation de
9 serment.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après moi, le président doit lire le texte
11 de la prestation de serment. Il fait référence à certaines valeurs qui sont
12 le reflet de l'esprit même de la constitution et de l'ordre démocratique
13 d'une société. Si le président n'est pas régi par un respect de ces valeurs
14 dans son travail, il perdra sa crédibilité au plan politique, il ne sera
15 pas sûr de pouvoir être réélu car le peuple constatera qu'il n'a pas été
16 fidèle à son serment, qu'il n'a pas respecté son serment. Il s'agit plutôt
17 ici d'une sanction morale et politique plutôt qu'une sanction juridique.
18 Mais, loin s'en faut pour moi, un serment n'est pas quelque chose
19 d'inutile. A mon sens, c'est quelque chose de très important. C'est un
20 geste digne, mais il est très difficile de définir la responsabilité d'un
21 président de la république par rapport au texte de cette prestation de
22 serment.
23 Pardonnez-moi, je m'emporte un petit peu. Le texte d'une prestation
24 de serment n'est pas une norme juridique. Il y a dans une prestation de
25 serment des éléments qui relèvent de l'affectif et qui n'est pas à
26 proprement parler juridique. On peut considérer qu'il y a même certains
27 éléments assez pathétiques dans ce genre de serment. On peut estimer que
28 cela devient une question très émotive. Ce que l'on peut constater au
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1 regard de l'article 36 du droit allemand, de la constitution actuelle de
2 l'Allemagne après la réunification de l'Allemagne.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur le Professeur, j'étais
4 un jeune avocat, beaucoup plus jeune que maintenant, lorsque j'ai dû prêter
5 serment devant une cour pénale en Ecosse, j'ai dû dire les mots qui suivent
6 : "Je jure devant Dieu tout puissant que je répondrai devant Dieu et le
7 jour du jugement dernier que je dirai la vérité, toute la vérité et rien
8 que la vérité."
9 Ceci est un texte d'une très grande charge émotive et religieuse
10 d'aucuns diraient même irrationnel. Si le témoin ne se conforme pas, il
11 pourra être poursuivi et condamné pour parjure. Il s'agit là d'un des
12 crimes les plus graves. Maintenant vous dites que la prestation de serment
13 d'un président qui remplit ses fonctions n'a pas cet effet-là, que ceci n'a
14 aucune incidence juridique et normative. C'est ce que vous dites en somme,
15 ce serait bien différent d'un serment prononcé par un témoin devant une
16 chambre ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Le président de la république peut être
18 tenu pour responsable s'il enfreint la constitution de la république
19 conformément à l'article 88. La violation de la constitution est considérée
20 comme une violation de la norme juridique qui est inscrite dans la
21 constitution. Le fait que ceci soit mis entre guillemets, le serment est la
22 seule partie du texte qui est entre guillemets, ce qui illustre encore
23 davantage.
24 Je n'ai pas l'intention ici de minimiser l'importance d'un serment,
25 quelqu'un qui postule au poste de président de la république doit
26 évidemment être quelqu'un capable de respecter les plus grandes valeurs
27 morales lorsqu'une telle personne prononce de tels mots, ces mots ont un
28 poids. Il en souffrira les conséquences au plan moral et non pas juridique
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1 s'il ne respecte pas ce texte. On peut imaginer une situation où la cour
2 constitutionnelle ou quelque soit l'organe doit juger de la responsabilité
3 du président de la république et qui constaterait qu'il n'aurait pas
4 respecté les termes de sa prestation de serment. Ce serait un crime, il est
5 vrai, mais le crime en tant que tel n'existerait pas. Quelqu'un qui ne
6 respecterait pas son serment lorsqu'il prend ses fonctions. Pour nous, le
7 parjure est un crime et il existe une sanction appropriée pour ce type de
8 crime.
9 M. ZECEVIC : [interprétation] Avant de poursuivre, un point. On
10 m'avertit de la page 107 [comme interprété], ligne 12, dans la
11 transcription. Il faudrait remplacer 1D712 par 1D752. C'est l'article 56 de
12 la loi fondamentale de l'Allemagne.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
14 M. ZECEVIC : [interprétation]
15 Q. Très brièvement, Monsieur le Professeur, le serment énumère un certain
16 nombre d'éléments, l'intégrité territoriale, la souveraineté, les droits
17 humanitaires, droits civiques, la défense et la protection de la
18 constitution et des lois, le fait de préserver la paix et d'assurer la
19 prospérité. Il s'agit là de valeurs sur lesquelles repose une constitution,
20 n'est-ce pas ?
21 R. Oui. Nous avons plusieurs exemples des serments prêtés par le
22 président, par exemple, en vertu de la constitution de 2006, le président
23 prête serment en disant qu'il fera en sorte que le Kosovo-Metohija reste
24 partie intégrante de la république. Mais questionnant cette sanction-ci,
25 indépendamment de sa volonté par une décision du Conseil de sécurité, par
26 exemple, le Kosovo-Metohija ne figure plus dans la composition de la
27 république; est-ce que le président sera punissable pour avoir violé la
28 constitution, alors que d'aucune manière il n'a pu agir sur l'intégralité
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1 territoriale de la république ? C'est le Conseil de sécurité qui l'aura
2 fait, par exemple.
3 Je ne pense pas que vous ayez fait figurer ici le serment que prête
4 le président de la république en vertu de la constitution de 2006, mais
5 dans ce texte, il s'engage à protéger l'intégrité territoriale, en
6 particulier de faire en sorte que le Kosovo- Metohija fasse partie de la
7 République de Serbie ou reste partie intégrante de la Serbie.
8 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Compte tenu du fait qu'un président
9 ne peut pas entrer en fonction sans avoir prêté serment, est-ce que ceci ne
10 confère pas un caractère juridique au serment ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je dirais plutôt que c'est
12 quelque chose qui confère la dignité à la fonction présidentielle. Ce
13 serait plutôt cela qu'autre chose.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Zecevic, allez-y.
15 M. ZECEVIC : [interprétation] Il ne me reste plus qu'un point avant la fin
16 de l'audience.
17 Q. Monsieur le Professeur, si l'on se penche sur le serment prêté par le
18 président conformément à la loi fondamentale allemande. Nous pouvons
19 consulter ce texte à l'écran. Vous voyez le président allemand prête
20 serment en disant qu'il fera en sorte que tout un chacun soit égal devant
21 la loi. Mais, il n'est pas du ressort du président, n'est-ce pas, de
22 conférer cette égalité devant la loi; il appartient aux tribunaux allemands
23 de faire cela, n'est-ce pas ?
24 R. Oui. D'après le texte de ce serment que nous voyons, le président de la
25 république prête serment en disant qu'il préservera la paix et le bien-être
26 de tous ses citoyens. Puisqu'en Serbie plus de la moitié des citoyens --
27 Q. Ralentissez, s'il vous plaît.
28 R. -- il prête serment en disant qu'il préservera la paix et le bien-être
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1 de tous ses citoyens. En République de Serbie, plus de la moitié des
2 citoyens ne vivent pas dans la prospérité. Est-ce que cela signifie que
3 tous ceux qui ne bénéficient pas de la prospérité seraient en droit de
4 demander la révocation du président de la république en citant la promesse
5 qu'il a fournie en prêtant serment ?
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Il
7 me semble que le moment se prête à terminer l'audience pour aujourd'hui.
8 Q. Je vous remercie, Monsieur le Professeur.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On arrive à la fin de la journée. Vous
10 savez qu'il va falloir revenir ici demain pour continuer. Ce sera à 9
11 heures demain matin. Entre-temps, il est très important que vous ne parliez
12 à personne de votre déposition ici, qu'il s'agisse de ce que vous avez déjà
13 dit dans le cadre de votre déposition ou de ce que vous allez dire à
14 l'avenir.
15 Vous pouvez avoir toute autre conversation, mais ne parlez avec
16 personne de votre déposition. J'espère que vous passerez une soirée
17 agréable. Mme l'Huissière vous raccompagnera, et nous vous reverrons ici
18 demain matin à 9 heures.
19 [Le témoin quitte la barre]
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'audience est levée.
21 --- L'audience est levée à 15 heures 30 et reprendra le mardi 7 août 2007,
22 à 9 heures 00.
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