Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 14 novembre 2007

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Lazarevic. Votre

6 contre-interrogatoire par Me Ivetic va se poursuivre.

7 Maître Ivetic, à vous.

8 LE TÉMOIN: VLADIMIR LAZAREVIC [Reprise]

9 [Le témoin répond par l'interprète]

10 M. IVETIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, bonjour,

11 Mesdames, Monsieur les Juges. Bonjour, tout le monde.

12 Contre-interrogatoire par M. Ivetic : [Suite]

13 Q. [interprétation] Bonjour, Général Lazarevic.

14 R. Bonjour.

15 Q. J'aimerais en terminer sur un des sujets que nous avons abordés hier

16 avant la suspension. Nous parlions de Rugovska Klisura.

17 J'appelle la pièce 4D39. L'affichage va peut-être prendre quelques temps,

18 donc je vais présenter cette pièce avant qu'elle n'apparaisse sur les

19 écrans. C'est un document qui est un rapport de combat de la 3e Armée daté

20 23 avril 1999, strictement confidentiel, numéro 26-111. Et dès que ce

21 document sera affiché sur les écrans, j'aimerais appeler votre attention

22 sur le paragraphe 2.1 qui se trouve au bas de la première page dans

23 l'original en B/C/S, et au bas de la première page et sommet de la deuxième

24 page en traduction anglaise.

25 La cote devrait être 4D439.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La traduction anglaise -- en tout cas,

27 tout à l'heure vous avez dit 4D39.

28 M. IVETIC : [interprétation] Excusez-moi, 4D439.

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1 Voici la pièce qui s'affiche. Et l'anglais, très bien.

2 Q. Mon Général, j'appelle votre attention, je le répète, sur le paragraphe

3 2.1 au bas de la première page en B/C/S, et selon ce qu'on lit dans ce

4 texte, vous constaterez, je pense, que les unités du Corps de Pristina se

5 sont concentrées sur l'exécution de leurs missions liées à la décision du

6 commandant du Corps de Pristina eu égard à la défense, et une partie des

7 forces ont participé avec le MUP. Vous voyez la mention NK, je suppose que

8 c'est le Corps de Nis. Donc vous voyez qu'il est indiqué que des unités du

9 Corps de Nis ont également participé à ces actions.

10 Cela vous permet-il de conclure que la décision relative à une action

11 conjointe devait bénéficier de l'approbation du niveau supérieur de la

12 hiérarchie, étant donné que le Corps de Pristina et que le Corps de Nis

13 sont engagés dans cette action ?

14 R. Avec le respect que je vous dois, en qualité de conseil de la Défense,

15 je prie la Chambre de m'autoriser à vous dire que vous n'avez pas raison.

16 Car cette phrase, "les unités du Corps du Nis et du MUP ont procédé à

17 l'assainissement du terrain dans un secteur qui se trouve hors du Kosovo-

18 Metohija, dans le secteur de Presevo et de Bojanovac." Donc il s'agit de

19 quelque chose de tout à fait, d'absolument différent, puisque ce secteur se

20 trouve à 150 kilomètres et même davantage de Rugovo Gornje.

21 Q. Très bien. Mais qu'en est-il de la première phrase où nous lisons :

22 "Les unités du Corps de Pristina se sont concentrées" --

23 R. Permettez-moi de revenir à la première partie de votre question en

24 disant, qu'effectivement, le gros des unités du Corps de Pristina

25 oeuvraient à la défense du pays selon ma décision. Quant à une partie des

26 forces, à savoir quelques centaines d'hommes d'un bataillon d'infanterie,

27 200, 300 hommes, ont agi pour encercler le secteur en vue de procéder à un

28 assainissement du terrain. C'est ce qu'on voit dans la première phrase du

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1 texte, et ceci se passait dans le secteur de Rugovska Klisura.

2 Q. Et la deuxième phrase en haut de la deuxième page en anglais.

3 C'est toujours en première page de la version B/C/S; deuxième tiret

4 du 2.1. Vous verrez qu'il est question d'une action conjointe montée par le

5 Corps de Pristina et le MUP, destinée à assainir le terrain et à

6 neutraliser le STS dans la région de Rugovska Klisura. Est-ce que ceci vous

7 rafraîchit la mémoire ? Cette opération était en fait planifiée par le MUP,

8 c'est ce que je vous demande, ou était-ce une opération dans laquelle

9 l'armée yougoslave et le MUP étaient impliqués, et qui faisait l'objet d'un

10 plan préparé par les officiers compétents de l'armée yougoslave ?

11 R. Je tiens vraiment à être tout à fait précis en m'exprimant devant la

12 Chambre. Cette phrase indique que plusieurs actions sont en cours qui se

13 déroulent dans trois ou quatre directions différentes, des actions tout à

14 fait distinctes, entre autres, l'action qui se mène à Rugovska Klisura.

15 Ces actions s'expliquent dans la première partie de la phrase, à

16 savoir qu'une partie des unités procède à un encerclement pendant des

17 opérations d'assainissement du terrain qui sont menées par le MUP. Et je

18 vous assure, si vous examinez les documents de l'Accusation, vous verrez

19 que l'engagement du MUP y est indiqué. Vous constaterez qu'à partir du 4

20 avril, le MUP avait planifié cette action à Rugovska Klisura. L'armée

21 agissait selon ses propres plans, et le MUP avait, lui, ses propres plans

22 également.

23 Une autre action tout à fait légitime est évoquée dans ce passage, à savoir

24 ces deux forces, légitimes toutes les deux, et les unités de l'armée du

25 Monténégro les ont rejointes. Donc voilà l'action que j'ai en mémoire.

26 Je ne peux confirmer ce que vous essayez d'affirmer ici, depuis hier

27 d'ailleurs, à savoir que quelqu'un avait planifié ces actions pour le MUP.

28 Je vous assure, je n'ai pas dans ma serviette les documents de l'Accusation

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1 auxquels je fais référence, mais je suis certain de ce que je suis en train

2 de dire, à savoir qu'en février et en avril le MUP avait planifié

3 l'engagement de ses forces à Rugovska Klisura, c'est-à-dire dans les gorges

4 de Rugovska.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous parlez des documents

6 de l'Accusation qui ont déjà été versés au dossier en l'espèce ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, ce sont ces

8 documents que j'évoque à l'instant.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

10 Maître Ivetic.

11 M. IVETIC : [interprétation] Je vous remercie.

12 Q. Terminons-en avec Rugovska Klisura.

13 Hier, nous avons évoqué le processus de planification réalisé notamment en

14 1998. Nous avons eu sous les yeux un certain nombre de rapports et de

15 décisions, ainsi que les cartes jointes à ces décisions. Nous avons vu les

16 cartes relatives à Drenica-1, et Me Ackerman vous a soumis une carte

17 relative aux actions menées à Ratis. Vous avez indiqué que les commandants

18 recevaient des extraits des cartes applicables aux opérations que devaient

19 mener leurs unités. Je vous demande si je suis en droit de penser que les

20 commandants de brigade ou des niveaux inférieurs de la hiérarchie

21 préparaient certains éléments de ces cartes concernant leurs propres

22 missions, les missions des unités placées sous leurs ordres dans leur zone

23 de responsabilité pour approbation par le commandant supérieur qui devait

24 donner son agrément à ces cartes jointes au texte des décisions ?

25 R. Au niveau tactique, au niveau des brigades et des bataillons, le

26 système de décision impliquait que les commandants de bataillon et les

27 commandants de brigade prenaient leurs propres décisions qui ensuite

28 étaient vérifiées par les commandants de brigade, tout comme la décision du

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1 commandant de brigade était vérifiée par le commandant du corps.

2 Q. Je vous remercie. Un instant, je vous prie.

3 [Le conseil de la Défense se concerte]

4 M. IVETIC : [interprétation]

5 Q. J'aimerais passer maintenant à un autre sujet, à savoir la période

6 concernant 1999. La lettre que vous avez écrite le 24 mai 1999, qui

7 concerne non seulement les protestations dues à la resubordination du MUP

8 mais également à des actions criminelles présumées de membres du MUP contre

9 la population civile siptar, meurtre, viol, pillage, et cetera, à des

10 postes de contrôle tenus aussi bien par l'armée que la police. Ceci

11 concerne la pièce P1723, que nous allons voir affichée dans quelques

12 instants sur les écrans, mais nous n'en aurons pas besoin immédiatement.

13 Mon Général, vendredi dernier on vous a interrogé rapidement au sujet de

14 cette lettre pendant l'interrogatoire principal. C'est votre conseil qui

15 vous interrogeait, et à la page du compte rendu 18 045, ligne 3, à la page

16 18 047, ligne 12, vous parlez de ce sujet. Très franchement, en dehors du

17 fait qu'on vous a soumis le document 5D376, qui était un document de

18 l'état-major du MUP, vous avez nié qu'il y ait le moindre fondement pour

19 les allégations graves contenues dans cette lettre. Je cite :

20 "Je ne sais toujours pas sur quoi se fondent ces graves accusations, et si

21 les fondements pour ces allégations sont en fait des renseignements

22 vérifiés et crédibles."

23 Pourriez-vous m'éclairer sur les sources des allégations contenues dans

24 cette lettre selon lesquelles le MUP tolérait des activités criminelles de

25 la part de ces membres, y compris le meurtre, le viol, et cetera ?

26 R. Je tiens à dire que cette lettre n'est pas une lettre émanant de moi,

27 mais un rapport adressé au commandant de la 3e Armée. La raison immédiate

28 pour laquelle je devais informer le commandant de la 3e Armée par écrit

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1 résidait dans l'existence du rapport de la 37e Brigade mécanisée qui

2 m'indiquait par écrit que des problèmes existaient eu égard à l'absence de

3 resubordination des unités du MUP dans le secteur sous sa responsabilité.

4 C'est le sujet principal de ce rapport. Il évoquait des problèmes également

5 au niveau de l'assainissement du terrain et des problèmes liés au non-

6 respect de certaines normes régissant le comportement d'un soldat en temps

7 de guerre. Lorsque j'ai reçu ce rapport qui avait un contenu relativement

8 grave, je ne pouvais pas ne pas en informer mon supérieur.

9 Je tiens à informer la Chambre de première instance du fait que j'ai

10 également pris des mesures très précises au préalable pour vérifier si les

11 renseignements reçus par moi par écrit et verbalement étaient exacts. J'ai

12 envoyé un groupe de responsables opérationnels dont faisait partie le

13 colonel Stefanovic et le colonel Paprica pour voir sur place s'il y avait

14 une possibilité de mener à bien la resubordination.

15 Deuxièmement, j'ai envoyé un groupe vérifier sur place quel en était

16 de l'assainissement du terrain pour vérifier si les accusations en question

17 étaient fondées.

18 En troisième lieu, j'ai envoyé mon assistant chargé de la sécurité

19 auprès de la brigade pour vérifier sur place avec les organes chargés de la

20 sécurité au niveau de la brigade ce qu'il en était. Faisait également

21 partie de ce groupe le chef de l'OUP de Glogovac pour vérifier si les

22 comportements en question étaient effectivement vérifiés sur le terrain par

23 la police.

24 Je suis en mesure de dire que quelques jours plus tard, le commandant

25 de la brigade m'a rendu compte en me disant qu'une meilleure coopération

26 avec l'OUP avait été établie. Je n'ai plus reçu de rapports impliquant les

27 mêmes accusations. Le chef de la sécurité a continué à travailler à sa

28 mission, mais il ne m'a confirmé aucune des accusations contenues dans ce

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1 rapport jusqu'à la fin de la guerre.

2 Quant à l'assainissement du terrain, le Dr Tomasevic a été envoyé --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je n'aime pas beaucoup

4 interrompre une déposition, mais vraiment vous ne répondez pas à la

5 question. La question est très précise. Est-ce que vous pourriez indiquer

6 quelles sont les sources des informations contenues dans cette lettre qui

7 évoquent une tolérance vis-à-vis d'actions criminelles, telles que le

8 meurtre, le viol, et cetera. Ce sont des accusations graves, meurtre et

9 viol. Que dites-vous dans votre déposition à ce sujet, telle est la

10 question.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais répéter. Sur la base d'un rapport

12 écrit et oral du commandant de la 37e Brigade mécanisée, j'ai pris en

13 compte ces renseignements.

14 Mais j'ai demandé l'autorisation d'indiquer que ces accusations

15 avaient été vérifiées et que j'ai déployé des efforts à cette fin. C'est ce

16 que j'ai dit dans la suite de ma réponse.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais est-ce que ceci signifie vous

18 n'avez connaissance d'aucune preuve démontrant l'existence et la véracité

19 des ces accusations ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas reçu jusqu'à la fin de la guerre

21 d'arguments vérifiables liés à ces accusations selon lesquelles des crimes

22 auraient été commis.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, à vous.

24 M. IVETIC : [interprétation] Une précision, je vous prie, Monsieur le

25 Président.

26 Q. Vous dites que jusqu'à la fin de la guerre vous n'avez reçu aucun

27 argument vérifiable lié à ces accusations. Est-ce que vous voulez dire par

28 là que vous n'avez reçu aucune vérification de ces allégations jusqu'à la

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1 fin de la guerre ?

2 R. Je voulais dire que les vérifications ne se sont pas terminées ce jour-

3 là sur place. Ce qu'il était habituel de faire dans des situations de ce

4 genre, c'est que les organes chargés de la sécurité et les organes

5 compétents du MUP oeuvrent ensemble pour effectuer ces vérifications. C'est

6 cela que je voulais dire.

7 Ce que je dis maintenant concrètement dans ma réponse, c'est que je

8 n'ai reçu aucune nouvelle information susceptible de prouver ce qui était

9 écrit dans ce document à l'époque.

10 Q. Merci, Mon Général.

11 J'aimerais maintenant que nous consacrions quelques instants à passer en

12 revue d'autres documents que votre conseil vous a soumis et qui concernent

13 cette période. Le document relatif à l'inspection à laquelle a procédé le

14 général Velickovic. Voici un document que j'aimerais discuter avec vous

15 rapidement.

16 Pièce 3D692. Je vous prierais de me dire d'abord si vous êtes en mesure de

17 convenir avec moi que ce document traite de plusieurs sujets de

18 préoccupation distincts dans les nombreux paragraphes de ce texte, sujets

19 de préoccupation déterminés à l'issue de cette inspection de contrôle due à

20 un groupe composé de membres de l'état-major du commandement Suprême et que

21 ces préoccupations avaient trait au MUP de Serbie et sont exposées dans le

22 paragraphe 11 que l'on trouve en page 4 des versions anglaises et B/C/S.

23 L'original est en B/C/S.

24 Convenez-vous que la description générale faite dans ce document est exacte

25 ?

26 R. Je n'ai aucune raison de ne pas faire foi à ce que vous me dites, mais

27 je ne vois pas ce que vous évoquez dans le texte. Tout ce que je vois c'est

28 le paragraphe 11.

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1 Q. Pouvez-vous convenir avec moi d'abord, que les protestations qui

2 figurent dans le troisième paragraphe de la version anglaise - qui est

3 également le troisième paragraphe de la version B/C/S, donc troisième sous-

4 paragraphe du paragraphe 11 - conviendrez-vous que les protestations

5 relatives à la situation privilégiée du MUP, meilleures soldes, meilleurs

6 uniformes, et cetera, n'a rien à avoir avec une quelconque action

7 criminelle, mais est plutôt liée à un mécontentement des conscrits de

8 l'armée yougoslave et l'animosité de ces hommes vis-à-vis des membres du

9 MUP qui sont mieux payés et mieux équipés pour le même travail ?

10 R. Je ne suis pas en mesure d'admettre ce que vous venez de dire. En tout

11 cas, je ne peux pas accepter votre formulation, mécontentement des membres

12 de l'armée vis-à-vis de membres de la police mieux payés. Car ce qui se

13 passe c'est que les réservistes de l'armée en particulier faisaient état,

14 dans leurs discussions avec les membres du commandement Suprême et avec

15 nous plus particulièrement, d'un certain mécontentement eu égard au fait

16 qu'ils n'avaient pas certaines attributions que d'autres forces qui

17 assurent la défense de leur pays ont. Mais cela n'avait rien à voir avec

18 une quelconque animosité vis-à-vis de la police.

19 Q. Je vous remercie, Mon Général. Excusez-moi, d'avoir utilisé des mots

20 trop crus.

21 Conviendrez-vous avec moi que le mécontentement de certains conscrits de

22 l'armée yougoslave vis-à-vis de la situation du MUP, qui touchaient une

23 solde pour leur travail selon les dispositions légales, a débouché sur de

24 graves problèmes de désertion étant donné que la moitié des effectifs de la

25 brigade en question a déserté au milieu de la guerre ? Disons, dans la

26 période précédent l'inspection.

27 R. Je ne puis me dire d'accord avec vous, d'abord, sur le fait que la

28 moitié de la brigade aurait déserté et surtout pas être d'accord avec vous

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1 quand vous dites que ceci était lié au fait que l'armée ne touchait pas les

2 mêmes soldes que la police. C'est un problème très complexe, et

3 personnellement, j'ai participé à sa solution. Le groupe du Grand quartier

4 général a essayé d'apporter son aide très rapidement, mais c'est un

5 problème qui n'appartient pas à ce Tribunal de résoudre. C'était à l'armée

6 de s'occuper de ce qui se passait en temps de guerre.

7 Tout ce que je peux dire, c'est que la raison que vous avez évoquée

8 n'est pas la raison qui a justifié la désertion de la moitié de la brigade,

9 donc il n'était pas question de mécontentements vis-à-vis des soldes.

10 Q. Conviendrez-vous avec moi qu'une partie importante de la brigade a

11 effectivement déserté dans cette période ?

12 R. Je sais exactement quel est le nombre d'hommes qui a quitté ses

13 positions. Je sais aussi ce que ces hommes m'ont dit. J'ai discuté avec des

14 centaines d'entre eux. Mais si vous-même et la Chambre insistez pour que je

15 vous donne les détails de tout cela et que je vous apporte toutes les

16 explications liées à ce phénomène, je suis tout à fait prêt à le faire.

17 Simplement, c'est un problème d'une nature tout à fait différente. Je crois

18 d'ailleurs que je parle de toute façon trop.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dites-nous simplement combien d'hommes

20 ont quitté leurs positions, car c'était cela la question. C'est une

21 question à laquelle il est très facile de répondre si vous avez tous les

22 détails. Vous n'avez pas besoin de gloser autant pour nous dire qu'en fait

23 ce problème n'en était pas un.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] 802 membres de cette brigade ont quitté leurs

25 positions à une certaine période, avant de revenir sur leurs positions plus

26 tard.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'exercice est très facile. Vous

28 écoutez la question et vous vous contentez d'y répondre.

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1 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Q. Merci, Mon Général.

3 Suis-je en droit de dire que les protestations évoquées au paragraphe 11

4 s'agissant de cette inspection menée par le général Velickovic concernent

5 une unité particulière, à savoir une brigade d'infanterie, et que c'est

6 bien l'unité dans laquelle un certain nombre de soldats ont quitté leurs

7 positions ?

8 R. Ce rapport concerne l'inspection menée par des membres de l'état-major

9 du commandement Suprême qui a rendu visite à au moins quatre unités. Je

10 tiens à souligner que ce qui figure dans ce texte n'a rien à voir avec ce

11 que vous laissez entendre dans votre question s'agissant de l'unité que

12 vous avez évoquée.

13 Si vous examinez les différents rapports qui accompagnent ce rapport

14 principal, vous le constaterez, mais je ne suis donc pas en mesure de

15 répondre par l'affirmative à votre question.

16 Q. Mon Général, le rapport du général Velickovic est tout à fait clair, il

17 évoque la 125e et la 22e [comme interprété] Brigade. Pendant le procès, vous

18 avez certainement eu le temps de passer en revue ces documents, et à

19 l'époque de l'inspection en question, vous étiez certainement au courant

20 des protestations très claires qui ont été soumises.

21 [Le conseil de la Défense se concerte]

22 M. IVETIC : [interprétation] Je dois revenir en arrière sur instructions de

23 la Chambre.

24 Q. Général Lazarevic, le rapport du général Velickovic indique clairement

25 que dans les annexes on trouve des rapports relatifs à quatre brigades,

26 parmi lesquelles on trouve la 324e [comme interprété] Brigade d'infanterie.

27 Je suis sûr qu'en examinant les documents et les renseignements qui vous

28 ont été fournis par le groupe chargé de l'inspection à Pristina à l'époque,

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1 vous vous rendez bien compte que ce qui figure au paragraphe 11 reprend mot

2 pour mot les mots utilisés dans le rapport de la 354e Brigade d'infanterie

3 par le général Terzic. Ce rapport se trouve dans la pièce 5D436, dont je

4 demande l'affichage sur les écrans, et qui vous a été montré par votre

5 conseil.

6 Précisément, je demanderais que l'on affiche la page 4 de la version serbe,

7 dernier paragraphe, paragraphe 9, qui correspond à la page 5 de la version

8 anglaise, où on voit le paragraphe 9 entre parenthèses.

9 C'est là que l'on voit pour la première fois une description plus détaillée

10 des protestations en question, et on constate que les préoccupations

11 évoquées dans ce paragraphe 9 portent sur le mécontentement vis-à-vis de la

12 situation privilégiée du MUP, notamment eu égard aux soldes perçues. Nous

13 lisons également dans ce paragraphe que certains membres du MUP se sont

14 rendus coupables de vol.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais c'est une question qui est tout à

16 fait différente de votre question de départ. Les choses deviennent très

17 désordonnées, étant donné l'ordre dans lequel les questions sont posées et

18 les réponses que ces questions reçoivent.

19 Il faut que nous recevions des réponses précises, le plus précis possible

20 en tout cas. Cela n'est possible que si les questions sont précises.

21 Vous avez commencé par demander au témoin s'il était au courant que les

22 protestations provenaient d'une seule brigade, ensuite vous êtes allé plus

23 loin, sans obtenir de réponse, à part un "non", mais vous n'avez pas

24 continué à interroger le témoin dans ce sens. Je suppose que vous avez

25 abandonné votre objectif ou est-ce que vous traitez du même sujet en ce

26 moment ?

27 M. IVETIC : [interprétation] Je vais retourner un peu en arrière. Je

28 suppose que nous devons procéder pas à pas.

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1 Q. Mon Général, est-ce que vous avez connaissance du fait que le gros des

2 éléments figurant dans le paragraphe 11 s'appuie sur le rapport de la 354e

3 Brigade d'infanterie ?

4 R. Je ne saurais confirmer cela, parce que je n'ai pas participé à la

5 rédaction de ce rapport. Je dois répondre à une partie de votre question.

6 En tout cas, personne ne m'a soumis ce rapport à la fin de l'inspection,

7 contrairement à ce que vous venez de laisser entendre. Ce qu'on lit ici

8 c'est la conclusion tirée par les membres de l'équipe d'inspection de

9 l'état-major du commandement Suprême. Je conviens que ce qu'on lit au

10 paragraphe 9 se retrouve au paragraphe 11 de l'autre texte, mais je ne suis

11 pas en mesure de confirmer si une unité particulière avait les mêmes griefs

12 ou faisait les mêmes protestations à l'époque.

13 Q. Excusez-moi pour ma mauvaise interprétation de la situation. Je croyais

14 que vous receviez une copie des rapports de l'équipe d'inspection.

15 J'aimerais, par conséquent, appeler maintenant votre attention sur le

16 document 5D436, paragraphe 9, qui je crois est actuellement encore sur les

17 écrans.

18 [Le conseil de la Défense se concerte]

19 M. IVETIC : [interprétation]

20 Q. Si on regarde maintenant le paragraphe 9, est-ce que vous conviendrez

21 que le texte de ce paragraphe semble suivre le texte et les préoccupations

22 qui apparaissaient au paragraphe 11 quasiment à l'identique, à part qu'il y

23 a un peu plus de détails.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le témoin a déjà dit cela. Et même

25 s'il doit répondre à nouveau, cela ne rajoute absolument rien à

26 l'information qui va nous aider à déterminer cette affaire. C'est évident,

27 c'est écrit noir sur blanc.

28 Merci de passer à quelque chose qui pose davantage problème.

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1 M. IVETIC : [interprétation] J'ai une autre question concernant ceci.

2 Q. Je ne sais pas si vous avez en votre possession ces informations,

3 je vais vous le demander : avez-vous des renseignements basés sur des

4 rapports dans les nouvelles dernièrement pour savoir si oui ou non il y a

5 des membres de la 354e Brigade d'infanterie qui voudraient encore

6 aujourd'hui percevoir la solde qu'ils estiment qui leur est due pour le

7 temps qu'ils ont passé au Kosovo pendant la guerre ?

8 R. Oui, j'ai un certain nombre d'informations qui proviennent de la

9 télévision. Je ne sais pas quels sont les réservistes en question qui

10 demandent qu'on respecte leurs droits, je ne peux pas vous répondre en

11 détail.

12 Q. Merci, Mon Général. Vous avez dit que vous avez été impliqué

13 personnellement à la résolution de ce problème. Est-ce qu'on peut dire que

14 le commandant de cette unité, et en particulier l'un de ses subordonnés,

15 subissait des pressions très fortes de l'intérieur de la VJ, et qu'il y a

16 eu d'ailleurs des appels provenant de la 3e Armée pour qu'ils soient

17 remplacés, qu'on mette en place des nouveaux commandants à cause des

18 problèmes qu'ils avaient et la façon dont on traitait de ces problèmes de

19 désertion de certains membres ?

20 R. Je dois vous corriger. Mon implication personnelle a été dans la 7e

21 Brigade d'infanterie, et non pas dans la 354e Brigade d'infanterie, ce à

22 quoi vous faites allusion est un rapport provenant soit de l'équipe de

23 commandement de l'armée ou de l'état-major du commandement Suprême, mais

24 moi-même, je n'ai pas été personnellement impliqué dans cette affaire. Si

25 vous voulez me poser des questions à ce propos, merci d'être précis. En

26 tout cas, il ne s'agit pas de mon implication.

27 Q. Je suis désolé. Y a-t-il eu une action envisagée afin de remplacer le

28 commandant et le chef de l'état-major au niveau de la brigade par rapport

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1 aux problèmes qu'ils avaient rencontrés chez leurs hommes ?

2 R. Si ce à quoi vous faites allusion, c'est la 354e Brigade, vous ne

3 l'avez pas précisé, donc je dois le prendre comme hypothèse. En effet,

4 certains officiers ont été remplacés, pas simplement pour cette raison-là,

5 mais également pour des raisons de mise en œuvre de missions relatives au

6 combat.

7 Q. Bien. Je vais maintenant vous montrer encore un document que je

8 voudrais que vous voyiez brièvement, 5D506. Ce sont des rapports de combat

9 normaux provenant du commandant de la 354e Brigade d'infanterie. C'est un

10 document que nous avons déjà pu visionner dans notre affaire : au point 3,

11 sous paragraphe (b), deuxième partie de ce sous-paragraphe, on voit que

12 "les unités redéployées du PJP qui sont dans notre zone de responsabilité

13 ne respectent pas les ordres et décisions de la cellule de Crise de

14 Podujevo."

15 Ma question est la suivante : le 25 avril 1999, votre ordre sur la

16 resubordination mentionnait ou envisageait les cellules de Crise des états-

17 majors comme ayant le contrôle sur les unités du MUP, n'est-ce pas ?

18 R. Dans aucun ordre du commandement du corps ni mes propres ordres n'a-t-

19 on jamais mentionné la possibilité qu'il y ait une quelconque cellule de

20 Crise qui prenne le commandement de l'armée. Moi, en tout cas, je ne

21 pouvais en aucun cas ordonner que quelqu'un ait le commandement sur le MUP.

22 Il faut lire cette phrase jusqu'au bout. On dit qu'ici il s'agit du 27

23 avril, c'est le 25 avril que le MUP aurait dû être resubordonné, et à ce

24 moment-là, le commandant m'a demandé des informations pour savoir vis-à-vis

25 de qui ces unités se rapportaient parce qu'elles n'étaient pas subordonnées

26 à lui, et ce qu'il dit concernant la non-mise en œuvre des décisions de la

27 cellule de Crise n'est pas simplement absurde, parce qu'il n'y a aucune

28 raison que des unités du MUP en soient responsables. L'état-major de

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1 Podujevo a donné des décisions concernant l'assistance des populations, et

2 il y avait eu beaucoup de personnes qui revenaient. Je ne sais pas si c'est

3 à cela que cela se réfère, je n'en suis pas sûr. Mais le MUP ne devait pas

4 mettre en œuvre des décisions qui étaient données par une cellule de Crise.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Comment expliquez-vous ce document ?

6 Est-ce qu'il y a un commandant ici qui ne sait pas ce qu'il devrait faire ?

7 Est-ce que c'est cela l'explication ? Peut-être qu'il ne connaît pas la

8 relation entre les cellules de Crise et le MUP. Qu'en pensez-vous ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Si je puis me permettre, je voudrais donner

10 une réponse un peu différente. Le commandant de la brigade me fait un

11 rapport disant que les unités du MUP ne sont pas sous son contrôle alors

12 qu'elles devraient l'être. Il demande des informations parce qu'il voudrait

13 savoir vis-à-vis de qui le MUP est resubordonné afin que certaines

14 objections qui ne paraissent pas dans ce document pourraient être

15 canalisées. Et nous n'avons pas d'éléments suffisants ici pour pouvoir

16 tirer d'autres conclusions.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et vous pensez qu'il était raisonnable

18 pour lui d'imaginer que le MUP devrait répondre vis-à-vis de la cellule de

19 Crise ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce qu'on voit dans cette phrase,

21 Monsieur le Président, je ne peux pas tirer la conclusion définitive que le

22 commandant pense véritablement ici que le MUP devrait mettre en œuvre des

23 missions qui leur seraient affectées par une quelconque cellule de Crise.

24 Par contre, dans cette zone, il y a eu d'immenses efforts par le Conseil

25 exécutif provincial, l'armée et la police, pour s'occuper de la population

26 civile et d'impliquer tout le monde à cette tâche.

27 J'ai d'autres rapports à ce propos concernant le fait de prendre soin

28 de la population civile, de les aider, et je suis prêt évidemment à

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1 répondre à des questions à ce propos.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic.

3 M. IVETIC : [interprétation]

4 Q. Merci, Général, je n'ai plus d'autres questions pour vous, merci pour

5 votre assistance.

6 Questions de la Cour :

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour compléter cela, avez-vous répondu

8 à la question qui vous a été adressée par le commandant de la brigade ?

9 R. Monsieur le Président, une équipe, avec moi-même, nous nous sommes

10 rendus vers cette brigade. C'est pour cela que j'ai attiré votre attention

11 sur les évolutions qui ont suivi. Là où il y a eu davantage de

12 coordination, en ce qui concerne la prise en charge de la population, nous

13 avons montré d'ailleurs cinq documents à ce propos l'autre jour, montrant

14 ce qu'a fait cette brigade, ainsi que le bataillon médical, et en même

15 temps le MUP. C'est ça le problème. Ces unités n'étaient pas suffisamment

16 impliquées en temps et en heures pour s'occuper de ce très grand nombre de

17 réfugiés. C'est ça le point crucial du rapport.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais je ne comprends toujours pas si

19 oui ou non vous lui avez dit qu'il ne pouvait en aucun cas être question de

20 ce que le MUP soit responsable vis-à-vis de la cellule de Crise. Est-ce que

21 cela a été élucidé ?

22 R. Je ne sais pas ce qu'il y a dans la traduction, Monsieur le Président,

23 mais il ne me semble pas que ce soit peu clair pour le commandant qu'il n'y

24 a pas de responsabilités du MUP vis-à-vis de la cellule de crise. Mais si

25 une décision a été prise par la municipalité, par exemple à Metohija, selon

26 laquelle on aurait reçu les réfugiés, la municipalité demande à l'armée et

27 à la police une assistance et pour se protéger contre d'autres attaques.

28 Ils demandent des équipements médicaux --

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lazarevic, la question est

2 parfaitement claire. Vous devez envoyer un signe nous disant qui est

3 responsable de qui. Il est marqué dans le document : "Il faut envoyer une

4 notice disant qui est responsable de qui à leur commandement." Est-ce que

5 vous avez répondu à cette question et envoyé cette notice ?

6 R. Je comprends maintenant ce que vous me demandez pour ce qui est de la

7 première partie, la cellule de Crise, en premier, et maintenant, vous me

8 posez des questions sur la dernière partie de cette phrase.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La première partie dit :

10 "Les PJP ne respectaient pas les ordres, et cetera, de la cellule de

11 Crise. Et la deuxième partie dit : "Il vous faut nous envoyer une notice

12 concernant qui est responsable de ces unités, qui en a le commandement." Il

13 me semble, au moins en anglais, que les deux choses sont directement liées.

14 R. Monsieur le Président, je vous parle de la situation sur le terrain.

15 Vous avez raison de dire ce que vous dites, mais je vous parle d'un

16 problème qui existait jusqu'au 25, les unités de la police devaient être

17 resubordonnées à certaines brigades. Je ne les connaissais pas non plus.

18 Personne ne me l'a dit. Je n'ai jamais eu connaissance de cela jusqu'à la

19 fin de la guerre. C'est ça le problème. Tout d'un coup, on voit apparaître

20 ces unités dans cette zone, qui sont remplacées à un moment donné, et le

21 commandant dit : "Qui sont ces personnes, vis-à-vis de qui sont-elles

22 responsables ?" Je n'arrive pas à lui donner une réponse. Une fois, c'est

23 les unités de Subotica. Ensuite, c'est Ljeskovac. Et c'est ça tout le

24 problème, le manque de resubordination.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc à ce moment-là, vous ne saviez

26 pas qui aurait dû avoir le commandement sur les PJP. C'est ça votre point

27 de vue ?

28 R. Ma position était que, conformément aux ordres du commandement de

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1 l'armée et de l'état-major du commandement Suprême, ces unités auraient dû

2 être resubordonnées dans les zones des brigades vis-à-vis des commandants

3 des brigades. C'était la procédure normale. Mais cela ne s'est pas produit

4 de cette manière-là.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc quelle réponse avez-vous donnée

6 au commandement de cette brigade ? Ou est-ce que vous n'avez pas donné de

7 réponse à celui-ci ?

8 R. De ce point de vue, les équipes du commandement du corps se sont

9 rendues à des réunions de coordination, et s'il n'y avait pas de

10 resubordination parce que la police n'avait reçu d'ordre, on devait mettre

11 en place des relations de corrélation pour qu'on puisse survivre à la

12 guerre, chacun dans sa propre juridiction.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. C'est maintenant M. Hannis qui

14 va faire son contre-interrogatoire.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolé. Monsieur le Président, je vous

16 dois une réponse à une question qui a été soulevée hier. Il y avait eu des

17 initiales sur le document P2809. Je ne me souvenais plus qui était la

18 personne qui avait apposé ces initiales NP. Vous vous souvenez qu'hier je

19 ne m'en suis pas souvenu. Est-ce que je pourrais le dire maintenant ?

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait du colonel Novak Paprica.

22 C'était lui qui était l'auteur de ce document P2809, en date du 25 avril.

23 Novak Paprica, qui faisait partie du commandement du corps pendant quelques

24 mois. A titre transitoire, il s'occupait de l'organe des opérations.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

26 Monsieur Visnjic.

27 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai simplement besoin

28 d'instructions. J'ai un certain nombre de questions concernant certains

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1 thèmes qui ont été soulevés par M. Ackerman, et qui n'étaient pas présents

2 pendant l'interrogatoire principal du général Lazarevic. Est-ce que je dois

3 intervenir maintenant ou plutôt après le contre-interrogatoire de M. Hannis

4 ?

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, qu'est-ce que vous en

6 pensez ?

7 M. HANNIS : [interprétation] En fait, M. Ackerman a posé certaines

8 questions, pendant la pause. Donc, en fait, je n'ai pas d'objection à ce

9 que M. Visnjic procède de la sorte. Il peut prendre la parole avant moi, si

10 vous êtes d'accord.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ackerman.

13 M. ACKERMAN : [interprétation] J'ai un petit souci. Il y a une procédure

14 que nous avons mise en place ici selon laquelle nous devons chacun prendre

15 notre tour. M. Visnjic avait annoncé qu'il n'avait aucune question.

16 Si je pouvais en terminer avec tous les contre-interrogatoires en

17 disant : "Je n'ai pas de questions", j'aimerais mieux être après lui

18 qu'avant lui. Donc je pense que M. Visnjic, on doit lui permettre de poser

19 des questions s'il peut démontrer que j'ai soulevé des questions dont il

20 n'avait pas idée que je pouvais les soulever.

21 J'avais fourni une liste de documents, il était clair que ces

22 documents contenaient des questions, des questions concernant ces

23 documents, ça serait indu de le faire, mais s'il y a quelque chose en

24 dehors des documents - je ne me souviens pas avoir soulevé des questions en

25 dehors des documents - mais en tout cas ça serait vous qui en décideriez à

26 ce moment-là. Autrement, il faut s'en tenir aux règlements qui ont été

27 institués ici.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends bien que l'arrangement

2 proposé pourrait être pratique pour M. Visnjic et M. Hannis, mais il nous

3 semble quant à nous qu'un contre-interrogatoire supplémentaire devrait être

4 l'exception plutôt que la règle, et c'est d'ailleurs ce qui se passe en

5 général. Et savoir si, oui ou non, M. Visnjic pourrait avoir le droit à un

6 deuxième tour, nous ne pourrons le faire qu'une fois que nous aurons

7 entendu tous les contre-interrogatoires.

8 M. HANNIS : [interprétation] Je voudrais être clair.

9 J'ai adopté cette position parce qu'il s'agit ici d'un témoin qui est

10 un accusé. Donc c'est un peu différent vis-à-vis de d'autres témoins. Ce

11 n'est pas quelqu'un qu'on ne pourrait plus rappeler à la barre.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais de le faire dans un ordre

13 différent va avoir un effet sur ce que vous proposez.

14 M. HANNIS : [interprétation] Effectivement, je comprends ce qu'a dit M.

15 Ackerman.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La question de savoir quand est le bon

17 moment, je pense que c'est plus tard.

18 M. HANNIS : [interprétation] Il y a une question de procédure que je

19 voudrais soulever concernant la pièce P950, qui a été versée pendant la

20 déposition de M. Lazarevic.

21 On le voit sur le prétoire électronique, mais la numérotation ne nous

22 sert pas beaucoup. Il y a six ou sept copies de l'entretien, chacune

23 d'entre elles ont été traduites séparément.

24 Alors, nous avons mis en place une nouvelle copie afin de faciliter

25 les choses avec des numérotations de pages de 1 à 264, en bas à droite pour

26 que ce soit plus clair.

27 J'ai les copies papier pour chacun des conseils de la Défense, je

28 leur ai données lundi dernier et j'en ai pour les Juges et pour le juriste

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1 de la Chambre et le Greffier. Et je voudrais faire une demande verbale pour

2 que ce document remplace celui qui est sur le prétoire électronique.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection, nous

4 allons vous permettre de procéder de la sorte dès que vous le pourrez.

5 M. HANNIS : [interprétation] Bien. Nous avons également des CD des films

6 que nous voudrions joindre.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas déjà fait ?

8 M. HANNIS : [interprétation] Non. Il me semble que ce n'était que le

9 transcript.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez dit CD ou DVD ?

11 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

12 M. HANNIS : [interprétation] En fait, ce sont sur des DVD, mais c'est des

13 fichiers ordinateurs.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ça veut dire que vous pouvez voir

15 l'entretien, pas simplement l'entendre.

16 Cela pose une question. Y a-t-il une objection vis-à-vis de cela ?

17 Dans ce cas, vous pouvez les joindre.

18 M. HANNIS : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

19 Contre-interrogatoire par M. Hannis :

20 Q. [interprétation] Bonjour, Mon Général.

21 R. Bonjour.

22 Q. Pendant la période où vous étiez commandant du Corps de Pristina et en

23 particulier pendant la guerre, est-ce qu'il y avait un journal de guerre

24 tenu au niveau du commandement du Corps de Pristina ?

25 R. Pendant le déroulement de la guerre, effectivement il y a eu un journal

26 de guerre.

27 Q. Qui étaient les personnes responsables de le tenir à jour ?

28 R. Le journal de guerre est tenu par l'organe opérationnel du Corps de

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1 Pristina. Ce sont des personnes qui sont de garde qui le tiennent, ceux qui

2 sont de garde 24 heures sur 24.

3 Q. Pouvez-vous nous donner les noms de ces personnes ?

4 R. Je peux vous donner certains de ces noms, à savoir Tesovic Ratko,

5 Aleksandar Simonovski, Jovic. Je ne me souviens pas de son prénom. Puis

6 d'autres officiers, il n'y en avait pas mal qui montaient la garde au

7 niveau du centre opérationnel du Corps de Pristina.

8 Q. Au cours de l'enquête en l'espèce pendant nos préparatifs, le bureau du

9 Procureur a essayé d'obtenir du gouvernement de Serbie un exemplaire de ce

10 journal de guerre. Je ne sais pas quelle était vraiment la réponse

11 officielle, mais on nous a dit quelque chose comme quoi ce journal

12 n'existait pas puisqu'il n'existait pas dans les archives de l'armée. Est-

13 ce que vous le savez ?

14 R. Oui. Je le sais puisque mes propres avocats ont essayé d'obtenir ces

15 documents des archives centrales de l'armée yougoslave.

16 Q. Vous a-t-on donné une explication quelconque ? Est-ce que vos avocats

17 ont reçu une explication au sujet de ce journal de guerre qui ne se trouve

18 pas dans les archives alors qu'il devrait y être ?

19 R. Oui, il devrait y être. Mais je ne sais pas s'il existe une explication

20 écrite quant au fait que ce journal de guerre ne se trouve pas dans les

21 archives centrales de l'armée yougoslave. Si vous souhaitez que je vous

22 fournisse d'autres explications ou mon propre point de vue, je suis tout à

23 fait prêt à vous le donner.

24 Q. Et qu'en est-il du journal de guerre du Corps de Pristina, puisque eux

25 aussi ils avaient un journal de guerre, n'est-ce pas ?

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous parlez de qui là ?

27 M. HANNIS : [interprétation] Je parle du poste de commandement avancé du

28 Corps de Pristina. Apparemment cela n'a pas été repris. Donc, j'ai demandé

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1 s'ils avaient eux aussi leur journal de guerre.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien que je sache, le poste de commandement

3 avancé du corps d'armée n'avait pas un journal de guerre pendant la

4 guerre. En revanche, ce qu'ils faisaient, ils faisaient des rapports

5 réguliers de combat. Parfois, il s'agissait de rapports écrits à la main et

6 parfois il s'agissait de rapports tapés à la machine.

7 Q. Vous conviendrez qu'il serait fort utile d'avoir de tels documents

8 surtout en l'espèce, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, tout à fait. Mais si vous me permettez, je voudrais ajouter que

10 vous pouvez reconstruire l'intégralité des événements de la guerre en

11 étudiant les rapports de combat du Corps de Pristina et vous arriverez à

12 une image plus complète, plus détaillée, à une bonne réflexion de la

13 situation.

14 Q. Savez-vous si dans le journal de guerre du Corps de Pristina, si dans

15 ce document on trouverait les informations vous concernant au cours de ces

16 jours-là, à savoir quand vous n'étiez pas au poste de commandement du corps

17 d'armée ? Est-ce que c'est le type d'informations que l'on inscrirait ici ?

18 R. Pendant la guerre, je n'ai pas étudié la façon dont on tenait ce

19 journal, c'est un document auxiliaire que l'on écrivait à la main. Je

20 dirais que "oui". C'est une possibilité. Cela étant dit, je ne sais pas si

21 l'on consignait cela dans le journal de guerre. En revanche, on trouve ces

22 informations dans certains rapports de combat.

23 Q. Par rapport à l'explication sur le fait que l'on ne trouve pas ce

24 document dans les archives, est-ce qu'on a trouvé et est-ce qu'on vous a

25 donné des informations sur ce document, c'est-à-dire si ce document est

26 arrivé aux archives, ensuite est disparu par la suite ?

27 R. On a suggéré à mes avocats de voir pour essayer de retrouver ces

28 documents. D'un côté, de s'adresser à la direction opérationnelle de

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1 l'état-major principal de l'armée yougoslave puisqu'une partie des

2 documents de la 3e Armée du Corps de Pristina est passée par l'état-major

3 principal et est arrivée aux archives centrales.

4 Ensuite, la deuxième possibilité à explorer c'était de demander à

5 explorer de façon détaillée les archives centrales. Que je sache, mes

6 avocats ont exploré les deux possibilités sans avoir pour autant trouvé le

7 journal de guerre.

8 Q. Savez-vous si vous avez trouvé une trace indiquant que ce journal de

9 guerre est jamais arrivé dans les archives à aucun moment ?

10 R. Moi, personnellement, je n'avais pas d'accès aux archives centrales,

11 mais je pense qu'ils auraient informé mes avocats, dû à un numéro éventuel

12 d'enregistrement de ces documents. Là, je ne fais qu'une supposition et je

13 me dis que ce document n'est jamais arrivé aux archives centrales. Mais je

14 n'ai aucun indice fiable pour affirmer cela.

15 Q. Je pense que nous avons un journal de guerre du poste de commandement

16 avancé de la 3e Armée. Pourquoi alors pensez-vous que le poste de

17 commandement avancé du Corps de Pristina ne tenait pas ce journal de guerre

18 ?

19 R. Là, c'est une question technique, mais pas seulement technique. Quand

20 il s'agit d'un poste de commandement avancé, celui de la 3e Armée

21 notamment, le commandant de l'armée y était en personne. Alors qu'au niveau

22 du poste de commandement avancé du corps de Pristina, vous n'aviez pas le

23 commandant de l'armée, mais vous y aviez le chef de l'état-major avec un

24 groupe d'officiers. Donc, si vous voulez les décisions, les choses

25 cruciales se sont passées justement au poste du Corps de Pristina.

26 Q. Est-ce que qui que ce soit des archives de l'armée yougoslave vous a

27 contacté au sujet du fait que le journal de guerre n'existait pas, était

28 porté disparu ? Est-ce que qui que ce soit a essayé de voir avec vous où il

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1 pourrait se trouver ou de vous demander de l'aide pour le retrouver ?

2 R. Si par le biais de cette question vous voulez me demander si l'on m'a

3 posé à la question à moi personnellement, non. En revanche, je dispose

4 d'informations indiquant que l'état-major principal et les archives

5 centrales, en passant par le commandement de l'armée de terre qui est le

6 porteur pour ainsi dire tactique et stratégique de ces archives, donc c'est

7 eux qui ont repris ces archives après qu'on a démantelé la 3e Armée. Donc

8 celui-ci a repris les documents et les archives du 3e Corps d'armée. On les

9 a consultés, oui, j'ai des informations indiquant cela.

10 Q. Mais vous, vous n'avez pas reçu d'exemplaire personnel de ce journal ?

11 R. Même mon carnet de notes je ne l'ai pas gardé. Comment voulez-vous

12 imaginer que j'aie gardé le journal de guerre.

13 M. HANNIS : [interprétation] Je vois que la première partie de ma question

14 n'a pas été reprise dans le compte rendu d'audience, mais nous pouvons

15 écouter l'enregistrement. La question portait sur un exemplaire personnel

16 que le général aurait pu éventuellement garder.

17 Q. Je vais passer à un autre sujet. C'est quelque chose qui a transpercé

18 hier tard dans la journée. Je voudrais vous poser une question au sujet de

19 cela, même si je saute un peu les étapes.

20 C'est au sujet de la subordination du MUP à un moment donné, fin

21 avril. Je n'ai pas très bien compris si c'était le 20 ou le 22. Il y a eu

22 une réunion à laquelle le général Pavkovic a assisté, mais aussi le général

23 Stevanovic du MUP. Est-ce que vous vous souvenez qu'on a parlé de cela hier

24 ?

25 R. Hier, j'ai dit que je me souvenais d'une réunion qui a eu lieu

26 soit le 18, soit le 19. Je dirais que c'était plutôt le 19 avril 1999.

27 Q. Pourriez-vous nous dire d'après votre meilleur souvenir qui a assisté à

28 cette réunion ?

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1 R. D'après mon meilleur souvenir, et je fais vraiment un effort, le

2 commandant de l'armée m'a demandé de l'accompagner. Je ne sais pas si le

3 général Djakovic était présent. Vraiment, je ne le sais pas, même si

4 j'essaie de rafraîchir ma mémoire. Pendant la nuit, dans un immeuble à

5 Pristina, je me souviens, le général Obrad Stevanovic était là ainsi qu'un

6 adjoint au ministre, ainsi que le général Djordjevic qui lui aussi est

7 l'adjoint du ministre de la police chargée de la sécurité publique. D'après

8 ce que je savais de leurs fonctions à l'époque et au jour d'aujourd'hui

9 d'ailleurs.

10 Q. Du côté de l'armée on a le général Pavkovic, vous-même et peut-être un

11 général. Est-ce qu'il était général d'ailleurs à l'époque, Djakovic ?

12 R. Je pense que oui. Je pense qu'il l'était déjà.

13 Q. Vous êtes trois représentants de l'armée, c'est tout ?

14 R. Je suis sûr pour moi et pour le commandant de l'armée. Pour Djakovic,

15 je ne suis pas sûr, mais bon --

16 Q. Finalement, du côté de l'armée vous avez deux personnes, le général

17 Djordjevic et le général Stevanovic, c'est tout. Vous ne souvenez de

18 personne d'autre ?

19 R. Non.

20 M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président, dans le transcript, et

21 je pense que M. Hannis a fait une erreur en posant la question, du côté de

22 l'armée le général Djordjevic et le général Stevanovic. Ce n'est pas du

23 "côté de l'armée". Je pense qu'il voulait dire du "côté du MUP", n'est-ce

24 pas ?

25 M. HANNIS : [interprétation] Effectivement. J'ai voulu dire du côté du MUP

26 ou du côté de la police, quand je parlais du général Djordjevic et

27 Stevanovic.

28 Q. [aucune interprétation]

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais nous n'avons pas eu de réponse.

2 M. HANNIS : [aucune interprétation]

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Enfin, la réponse était que le témoin

4 ne s'en rappelait pas.

5 M. HANNIS : [interprétation]

6 Q. Est-ce que vous vous souvenez dans quel immeuble cette réunion a eu

7 lieu ?

8 R. Non, je ne connais bien Pristina. Cela s'est passé pendant la nuit.

9 Vous aviez les bombardements. Je sais que nous étions dans un immeuble

10 quelque part en étage supérieur, pas plus que cela.

11 Q. Cela ne devait pas se trouver bien loin de votre poste de commandement,

12 n'est-ce pas ?

13 R. Ce n'était pas tout près. Entre Pristina et les postes de commandement

14 du corps d'armée à l'époque c'était une quinzaine de kilomètres. Vous avez

15 vu les circonstances, il était très difficile de circuler.

16 Q. Savez-vous qui a organisé cette réunion pour commencer ?

17 R. Je ne sais pas qui a organisé la réunion. Tout ce que je sais, c'est

18 que le commandant de l'armée m'a ordonné de m'y rendre pour voir ce qu'on

19 va faire avec la resubordination, puisqu'il avait ce document en date du 18

20 émanant du commandement Suprême, alors qu'il n'avait pas encore écrit son

21 propre ordre.

22 Q. La réunion a duré combien de temps à peu près ?

23 R. J'ai vraiment du mal à vous donner une réponse précise, je dirais à peu

24 près une heure. Mais là, je me livre à des spéculations. On s'est

25 rencontré, on a commencé à discuter à peu près une heure, je dirais, quand

26 même.

27 Q. Est-ce que qui que ce soit a pris des notes pendant cette réunion ?

28 R. Moi personnellement, non. Je n'ai pas vu le commandant de l'armée le

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1 faire. En ce qui concerne les membres du MUP, je ne sais pas.

2 Q. Si le général Djakovic avait été présent, c'est lui qui aurait pris les

3 notes normalement, puisque c'est lui qui prenait les notes pour le

4 commandement conjoint en 1998, n'est-ce pas ?

5 R. Je ne l'ai pas vu, pas personnellement. Même à l'époque, je ne l'ai pas

6 vu prendre de notes. Je suis d'accord avec vous, si c'était un

7 opérationnel, il lui appartient de prendre des notes. Je n'en sais rien

8 franchement.

9 Q. Est-ce que vous du côté de l'armée yougoslave, est-ce que vous, vous

10 avez écrit des rapports suite à cette réunion pour en référer vers le haut

11 ou vers le bas de la chaîne de commandement ?

12 R. Moi personnellement, je n'ai rien fait, ni vers mes supérieurs, ni mes

13 subordonnés. Je n'avais pas encore fait mon ordre. Si mes souvenirs sont

14 exacts, le matin, ceci devait être le 20, le commandant de l'armée a appelé

15 par téléphone l'état-major principal du commandement Suprême. Je n'ai pas

16 vraiment tout écouté, mais je sais qu'il leur avait dit que les unités de

17 la police à Kosovo-Metohija n'avaient pas encore reçu un document venu du

18 ministère des Affaires intérieures. Je sais qu'il a parlé avec l'état-major

19 principal du commandement Suprême. Je ne sais pas avec qui exactement. Je

20 sais qu'il m'a fait part de cette conversation.

21 Q. Cette question de la subordination du MUP ou de la non-existence de

22 cette subordination on en a parlé avec vous vendredi dernier, longuement

23 d'ailleurs.

24 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila.

26 M. FILA : [interprétation] J'aurais voulu attendre que M. Hannis termine le

27 thème abordé. Je voudrais attirer votre attention sur une affirmation qu'il

28 a fait, à savoir que Djakovic était celui qui prenait les notes au cours

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1 des réunions.

2 C'est quelque chose qui n'est absolument pas basé sur quoi que ce soit.

3 S'il s'agit du document contentieux, là vous avez au moins deux écritures.

4 Je ne sais pas sur quelle base le Procureur affirme que c'est Djakovic qui

5 prenait les notes au cours de différentes réunions.

6 Je ne suis vraiment pas d'accord avec cette procédure, puisque la

7 prochaine fois je vais me lever plus rapidement.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Les questions, ce n'est pas une

9 déposition. C'est dans les réponses.

10 M. FILA : [interprétation] Vous savez, vous nous demandiez de poser la base

11 quand on pose les questions. Je devais même lire l'acte d'accusation, et

12 cetera. Dans notre système, on va dire que c'est une question tactique et

13 stratégique où on essaie d'induire le témoin en erreur.

14 S'il avait répondu par l'affirmative à la question posée, que se

15 serait-il passé ? Parce que là, il y avait deux questions dans la question

16 qu'il a posée.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous en avez fini ?

18 M. FILA : [interprétation] --

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Justement, j'ai voulu vous dire

20 que si une partie a des informations sur lesquelles elle peut fonder sa

21 question, la question peut être posée puisque la question pourrait se poser

22 par la suite. On pourrait apporter des informations par la suite à cet

23 effet. C'est très bien uniquement si on a exploré tout ce point au moment

24 opportun.

25 Peut-être que je me trompe, mais je me souviens que le Procureur

26 disposait des documents indiquant que Djakovic a écrit ce type

27 d'information.

28 Est-ce que je me trompe, Monsieur Hannis ?

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1 M. HANNIS : [interprétation] Je ne sais pas ce qui est exactement parmi les

2 documents. Je pense que nous avons quelques informations dans 65 ter, parce

3 que c'était un témoin potentiel. Je peux vous dire que nous avons des bases

4 de bonne foi pour poser cette question.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Savoir que ces informations existent

6 dans les documents fournis par le biais du 65 ter et par la liste de M.

7 Ackerman, ceci représenterait une base suffisante.

8 On est très clair quant à la différence qui existe entre les bases

9 nécessaires pour poser des questions et pour les réponses. Dans la

10 question, on n'a pas vraiment besoin d'établir que M. Djakovic a en effet

11 écrit cela ou a pris des notes. Le témoin nous a ajouté quelques

12 informations parce qu'il a dit qu'effectivement ce serait logique d'en

13 arriver à la conclusion que c'est bien lui qui avait pris des notes, s'il

14 avait été président à la réunion.

15 Dans ce cas, je réfute l'objection soulevée par M. Fila.

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Le Juge Chowhan se pose une question,

18 à savoir à la ligne 24 de la page 32 ou 35, vous avez posé deux questions.

19 C'est pour cela que la réponse n'est pas claire. Quelles sont les réunions

20 auxquelles le témoin a fait référence dans la réponse ? Vous devriez

21 éclaircir cela.

22 M. HANNIS : [interprétation]

23 Q. Effectivement, je vous ai posé deux questions. Vous avez répondu par

24 une seule réponse. Je ne sais pas à quoi se réfère votre réponse.

25 Est-ce que vous savez d'après votre participation aux différentes

26 réunions du commandement conjoint au mois d'août et au mois de septembre

27 1998 qui prenait les notes pendant ces réunions-là ? Etait-ce le général

28 Djakovic ?

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1 R. Je dis que je ne sais pas. Je n'ai pas vu personne prendre des notes,

2 même pas Djakovic. Je n'ai pas vu qui que ce soit prendre des notes pendant

3 ces réunions. C'est la réponse que je vous ai donnée.

4 Ensuite, vous m'avez posé une question au sujet d'une autre réunion

5 qui a eu lieu entre le commandant de l'armée, moi-même et deux membres du

6 MUP, qui a eu lieu le 19 avril. Ceci portait sur la resubordination. Vous

7 m'avez demandé : "Si Djakovic avait été présent, est-ce que c'est lui qui

8 aurait pris des notes ?" J'ai dit que je n'ai pas pris des notes, le

9 commandant non plus, peut-être que lui en tant qu'un opérationnel aurait pu

10 prendre des notes. C'était la réponse que j'ai donnée.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vais poser deux questions

12 supplémentaires. Vous souvenez-vous si Djakovic a été présent à une

13 quelconque réunion du commandement conjoint auquel vous avez participé ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque où j'y étais, mis à part quelques

15 personnes, je ne m'en souviens pas. Je sais que j'étais en compagnie du

16 commandant de l'armée. Je ne suis absolument pas capable de vous dire qui

17 était présent au niveau de la police et de la sûreté de l'Etat, et cetera.

18 D'ailleurs c'est ce que je vous ai déjà dit. J'étais là ad hoc. Cela a été

19 complètement improvisé. J'étais là presque par hasard.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que Djakovic était là, parce

21 qu'il n'est pas de la police et il n'est pas de la sûreté de l'Etat ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais non, Monsieur le Président, je vous dis

23 que je ne m'en souviens pas.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Une autre question : s'il avait

25 été là à un moment donné, est-ce que vous penseriez la même chose, à savoir

26 que si qui que ce soit avait été là pour prendre des notes, cela aurait été

27 lui ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] La question est un peu différente. Permettez-

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1 moi de vous dire qu'il s'agit de réunions pas du tout formelles, on prend

2 un café, on échange les informations. Lors de telles réunions que je sache,

3 vous n'avez pas de prise de notes. Il n'y a pas de procès-verbal. Ce n'est

4 pas vraiment une réunion officielle. Alors que la réunion à laquelle je

5 suis parti avec mon commandant suite à un ordre venu du commandement

6 Suprême pour parler de la resubordination, j'admets dans ce cas-là, cette

7 possibilité-là. En tout cas, je n'ai pas pris de notes et le commandant de

8 l'armée n'a pris de notes. Cela, j'en suis sûr.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je prends note de votre réponse.

10 Monsieur Hannis, est-ce que vous allez explorer la nature de réunions que

11 le témoin a décrit comme étant des "réunions informelles," à savoir les

12 "réunions du commandement conjoint", au cours de sa déposition ?

13 M. HANNIS : [interprétation] Effectivement, immédiatement après la pause,

14 peut-être.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Nous allons prendre une

16 pause à présent. Je n'ai pas besoin de poser d'autres questions à ce sujet

17 dans ce cas-là.

18 Nous allons reprendre à 11 heures moins dix.

19 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

20 --- L'audience est reprise à 10 heures 51.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

22 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

23 Je voudrais avertir le Tribunal que je vais aborder des documents

24 concernant les réunions du commandement conjoint et la participation de

25 l'accusé à ces réunions, mais un peu plus tard.

26 En ce qui concerne la base de ma question, je voudrais dire que j'ai

27 vérifié la liste 65 ter. Le fichier d'origine 65 ter concernant le témoin

28 Djakovic, relatif à la date du 15 juin 2007, dit simplement qu'il va

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1 décrire sa participation aux réunions du commandement conjoint en 1998. Il

2 va donner son impression sur certains documents concernant le commandement

3 conjoint en 1998. Et ma base pour proposer ces notes au compte rendu est

4 basée sur une déclaration non signée par lui, prise au cours d'un entretien

5 avec Mme Grogan, et qui a été communiquée à la Défense en préparation à son

6 témoignage.

7 Q. Général, je vais vous poser des questions concernant des questions qui

8 vous ont déjà été posées vendredi dernier par votre conseil, ensuite par le

9 Juge Bonomy concernant la question de la subordination du MUP.

10 Pendant la discussion, le Juge Bonomy, à la page 18035 [comme interprété]

11 vous a demandé :

12 "Monsieur Lazarevic, qui était votre interlocuteur au MUP au Kosovo ?"

13 Et dans votre réponse, vous dites :

14 "J'aimerais bien le savoir après toutes ces années. Je suis ici devant vous

15 en tant qu'accusé et cependant je ne le sais pas."

16 Donc, vous ne savez toujours pas aujourd'hui quel était votre interlocuteur

17 auprès du MUP au Kosovo en 1998 ? C'est bien ce que vous maintenez ?

18 R. Ce que je maintiens c'est qu'il ne s'agit pas d'une question

19 d'interlocuteurs. Les militaires et la police sont des institutions qui

20 sont bien trop différentes. Pour autant que je me souvienne de ma réponse,

21 j'ai également rajouté que je ne suis pas celui qui devait rechercher un

22 interlocuteur ou des subordonnés. Moi, ce que je devais obtenir de mes

23 supérieurs c'est qui devait être resubordonné vis-à-vis de moi. Et je ne

24 l'ai pas obtenu de mon commandant d'armée, parce que lui-même n'a pas

25 obtenu en termes pratiques ces informations depuis son état-major du

26 commandement Suprême.

27 Q. Avez-vous pris des mesures à l'époque pour essayer d'imaginer ou

28 d'identifier à qui vous devriez parler de cette question de subordination ?

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1 Est-ce que vous avez fait au moins cette recherche minime ?

2 R. L'une de ces mesures minimes a été prise le 19 par le commandant de

3 l'armée. J'étais présent avec deux ministres de l'Intérieur adjoints. Ça

4 c'était la première mesure.

5 Ensuite, j'ai envoyé mes propres équipes au niveau du secrétariat de

6 l'Intérieur et au niveau des détachements de police sur le terrain afin de

7 voir s'il pouvait y avoir une sorte de coopération, s'il n'y avait pas

8 possibilité de resubordination.

9 Je peux vous assurer encore une fois que je ne puis, avec les ministres

10 adjoints de l'Intérieur, parler de ce thème, en discuter. Je recevais mes

11 ordres du commandant de l'armée.

12 Q. Quand cette question a été soulevée et qu'il y a eu des discussions à

13 ce propos, pourquoi vous n'avez pas parlé à ce moment-là de cette réunion

14 avec M. Pavkovic, M. Djordjevic et Stevanovic ? Vous ne pensez pas que cela

15 relevait de cette question ?

16 R. Si vous faites allusion à la réunion du 19, oui, j'ai participé avec le

17 commandant de l'armée. Nous avons parlé pendant une heure, et je vous ai

18 dit comment cette réunion s'est terminée. Les deux représentants du MUP ont

19 expliqué qu'ils n'étaient pas en mesure de mettre en œuvre des ordres du

20 chef de l'état-major du commandement Suprême, parce qu'eux-mêmes n'avaient

21 pas d'ordre provenant de leur ministre.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que je peux m'assurer de ce que

23 vous dites exactement ? Est-ce que j'ai raison de me souvenir qu'une fois

24 que vous aviez reçu l'instruction, un certain temps après le 20 avril, donc

25 une fois que vous avez reçu instruction pour essayer en pratique de

26 resubordonner le MUP, il me semble que vous avez décrit cela comme étant

27 une "mission impossible".

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ce à quoi vous faites

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1 allusion est effectivement ce que je voulais dire, à savoir que le

2 commandant de l'armée, en plus de son ordre daté du 20 avril, a également

3 délivré un autre ordre ou plusieurs, où il me demande après toutes ces

4 dates limites d'effectuer cette mission, comme cela ne pouvait se faire

5 même à ce stade, et il a arrêté de se préoccuper de cela et m'a demandé de

6 le faire.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il est exact que vous l'avez

8 décrite comme étant une "mission impossible" ?

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est ainsi que je l'ai décrite, et je

10 vous ai expliqué pourquoi.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous nous avez dit, à la fois en

12 répondant à M. Ivetic et en répondant à M. Hannis, vous avez parlé de cette

13 réunion. Donc, il y a eu un effort au niveau de Pavkovic pour essayer de

14 résoudre la question et voir comment cela pouvait se faire, mais après

15 cette réunion vous venez de nous dire, vous avez envoyé --

16 M. IVETIC : [interprétation] Il n'y a pas d'interprétation, Monsieur le

17 Président.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Y a-t-il désormais interprétation ?

19 Bien.

20 Donc vous nous avez dit aujourd'hui, et je pense à deux autres

21 occasions aussi, qu'il y avait eu une réunion où vous avez accompagné le

22 général Pavkovic. Le but de la réunion a été d'examiner la question de la

23 resubordination. Vous nous avez dit qu'après cette réunion, vous, vous avez

24 dit à vos propres subordonnés qu'il fallait établir des contacts avec des

25 interlocuteurs au MUP pour essayer d'y parvenir.

26 Pourquoi vous étiez exonéré d'essayer aussi vous à votre niveau de

27 contacter un interlocuteur pour essayer de faire en sorte que tout cela

28 marche ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas dit à

2 mes unités subordonnées qu'il fallait qu'elles trouvent leurs propres

3 interlocuteurs ou équivalents. Mais comme il n'y avait pas d'ordre

4 provenant du commandement Suprême, j'ai écrit mon propre ordre dans la

5 mesure où je savais où se trouvaient certaines unités du MUP à cette

6 époque-là.

7 Faire en sorte que les commandants des brigades trouvent les unités du MUP

8 sur le terrain et essayer de les contacter --

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne jouons pas avec les mots. Vous avez

10 utilisé les mots en anglais : "Ensuite, j'ai envoyé mes propres équipes au

11 niveau du secrétariat de l'Intérieur et au niveau des détachements de

12 police sur le terrain pour voir s'il y avait possibilité pour une sorte de

13 coopération, s'il n'était pas possible d'obtenir une resubordination."

14 Cela m'indique en tout cas que vous disiez à ceux qui étaient sous vos

15 ordres d'essayer d'établir des liaisons avec la police afin de faire en

16 sorte que l'ordre que vous aviez reçu fonctionne d'une manière ou d'une

17 autre. Nous avons entendu parler de la réunion à laquelle vous avez

18 participé avec le général Pavkovic.

19 Moi, ma question est simple : pourquoi vous, au milieu de tout cela, vous

20 n'aviez pas besoin quant à vous de rechercher un interlocuteur afin

21 d'examiner comment faire en sorte que cela fonctionne ? Qu'est-ce qui est

22 différent pour ce qui concerne votre niveau de commandement par rapport aux

23 autres ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ce que vous êtes en

25 train de dire actuellement, c'est la deuxième mesure que j'ai prise en tant

26 que commandant après l'ordre, à savoir envoyer sur le terrain des

27 effectifs.

28 Maintenant, pour revenir à votre question à proprement parler. A Pristina,

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1 au Kosovo, il y avait un état-major du MUP pour le Kosovo-Metohija. Je ne

2 connaissais pas la composition de cet état-major. Deux ministres adjoints

3 faisaient partie de cet état-major. Je leur ai parlé, et le commandant de

4 l'armée leur a parlé.

5 Dans l'ordre du commandant de l'armée, on parle "d'unités et organes du

6 MUP," à savoir que la sécurité publique et la Sûreté de l'Etat doivent être

7 resubordonnées. Il n'est pas marqué qui. Et qui doit le faire, ce n'est pas

8 marqué non plus.

9 J'ai essayé de vous expliquer ce que j'ai essayé de faire en tant que

10 commandant à ce niveau opérationnel, ce que j'ai essayé de faire sur le

11 terrain, là où les gens meurent et où on défend le pays, afin d'éviter

12 qu'il n'y ait pas de plus graves conséquences.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

14 M. HANNIS : [interprétation]

15 Q. Il faut que je revienne en arrière, parce que je ne pense pas que vous

16 ayez répondu à ma question, page 40, ligne 13. Je vous ai posé la question

17 de savoir pourquoi, quand ce thème a été abordé vendredi avec votre Défense

18 et avec le Juge Bonomy, je crois que le Juge Bonomy vous a posé une

19 question selon laquelle vous essayiez avec persistance de faire quelque

20 chose, quelles étaient les mesures que vous aviez prises. Pourquoi,

21 vendredi dernier, vous n'avez pas parlé de cette réunion avec le ministre

22 adjoint et avec le général Stevanovic ? Je parle de l'adjoint Djordjevic.

23 Il me semble que c'était une réunion très importante que vous avez eue

24 concernant la police et la surbordination. Pourquoi vous n'en avez pas

25 parlé à ce moment-là ?

26 R. Pour autant que je me souvienne, je répondais aux questions de mon

27 conseil de la Défense à propos de ce que j'avais fait après le 20 avril

28 lorsque j'avais émis l'ordre sur la resubordination. C'est sur cela que je

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1 donnais des explications.

2 Deuxièmement, cette réunion était une réunion que mon commandant d'armée

3 m'avait ordonné d'organiser. C'est lui qui en était à l'origine. Je ne l'ai

4 pas fait de ma propre initiative. Ce dont j'avais parlé, c'était mes

5 propres initiatives et mes propres mesures.

6 Lorsque Me Ivetic m'a posé une question à ce propos, j'ai donné une réponse

7 en termes concrets.

8 Q. Le Juge Bonomy, à la ligne 13 de la page 18 039, a dit : "Il semblerait

9 que vous n'ayez fait aucun effort pour contacter des personnes de votre

10 niveau au sein du MUP pour y parvenir."

11 Et dans votre réponse que vous venez de donner, vous avez dit que l'une des

12 raisons, il me semble, pour lesquelles vous n'avez pas parlé de cette

13 réunion avec Djordjevic et Stevanovic, c'est qu'il s'agissait d'une réunion

14 qui vous avait été commandée par le commandant de l'armée. "C'est lui qui

15 m'a demandé de le faire. Je ne l'ai pas fait à propre initiative. Je vous

16 parlais de mes propres mesures et de mes propres activités."

17 Donc vous êtes en train de nous dire que, comme c'est le général Pavkovic

18 qui vous a commandé de participer à la réunion, à ce moment-là, c'était pas

19 la peine d'en parler lorsqu'on a abordé cette question des efforts visant à

20 établir des contacts avec le MUP à propos de la subordination. Est-ce que

21 c'est cela que vous dites ?

22 R. Ce que j'essaie de dire, c'est que pour ce qui concerne les ministres

23 de l'Intérieur adjoints, je ne pouvais pas parler d'une mission qui avait

24 été commandée, ordonnée par le président de l'Etat. Pour la énième fois,

25 j'essaie de dire qu'avec le commandant de l'armée, j'ai participé à une

26 telle réunion. Et troisièmement, après le 20, dans mon propre domaine de

27 compétence, j'ai fait un certain nombre de choses - et je pense que vous le

28 verrez à travers les documents et les futurs témoins - j'ai pris des

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1 décisions au niveau tactique afin de faire en sorte que cela soit fait, ce

2 à quoi j'ai fait allusion, à savoir la "mission impossible".

3 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je voudrais élucider quelque chose.

4 Bien sûr, vous étiez sur le terrain. Vous travailliez dans une zone

5 géographique déterminée. Je me pose la question de savoir : comment peut-on

6 travailler dans le vide ? Si quelqu'un face à une situation telle que la

7 vôtre aurait été au courant des autres facteurs, connaissant

8 l'interlocuteur du MUP, par exemple, semblerait être même basique, c'était

9 quelque chose, une information dont vous aviez besoin pour agir avec les

10 parties en présence. C'est très bizarre que vous ne puissiez pas nous

11 donner une réponse quant au nom d'une telle personne.

12 C'est quelque chose qui me semble vraiment surprenant. Peut-être

13 pourriez-vous nous aider. Car, après tout, chaque commandant qui œuvre sur

14 le terrain doit connaître le nom des personnes, son positionnement, même

15 s'il n'en fait pas partie.

16 Je suis désolé, Mon Général, de devoir insister un petit peu.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, vous avez raison de poser la

18 question ainsi. A l'époque, j'aurais voulu savoir qui ils étaient, et

19 quelles étaient leurs positions.

20 Une fois de plus, je dois demander aux Juges d'essayer de comprendre cette

21 phrase selon laquelle : "Les organes et les unités du MUP doivent être

22 resurbordonnés."

23 Même aujourd'hui, à partir de là où je me trouve actuellement, je ne

24 sais toujours pas ce que cela veut dire. Toutes les institutions sont

25 mentionnées, les centres de la Sûreté de l'Etat -- ce n'est pas une

26 procédure normale pour donner des ordres. Et maintenant, vous me demandez

27 qui je recherchais.

28 Sur le terrain, à travers les commandants de brigade, ceux qui

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1 étaient sur le terrain, qui connaissent les chefs du SUP, le ministre de

2 l'Intérieur, c'est à eux que je demandais d'essayer de trouver l'identité

3 des personnes et d'établir des contacts. J'envoyais mes propres commandants

4 adjoints pour essayer d'établir ce lien au niveau tactique.

5 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.

6 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

7 Q. Mon Général, à la fin d'avril, peut-être au milieu jusqu'à la fin

8 d'avril, vos unités subordonnées avaient déjà effectué des dizaines, voire

9 plus, d'actions contre les terroristes de l'UCK. Et ce que vous dites,

10 c'est qu'en dépit de ces opérations conjointes avec le MUP, vous ne

11 connaissiez pas la personne qui était à la tête du MUP au Kosovo ? Vous

12 étiez à Pristina. Vous étiez de l'autre côté de la route, n'est-ce pas ?

13 R. Avec tous mes respects, je ne me trouvais pas de l'autre côté de la rue

14 par rapport à une quelconque structure du MUP. Peut-être que ça a pu être

15 le cas le premier jour, mais ensuite, ni eux ne savaient où je me trouvais,

16 ni le contraire. Ça, c'est une chose.

17 Deuxième chose, je sais que dans la période initiale de la guerre, ces

18 actions anti-insurrectionnelles et le soutien à cet égard qui était donné

19 aux unités du MUP, se plaçaient dans des chaînes de commandement tout à

20 fait précises. Les unités du Corps de Pristina étaient sous le commandement

21 par les commandements des brigades et des corps et les unités du MUP

22 avaient leur propre chaîne de commandement intacte dans le cadre de la

23 coordination. Je le sais.

24 Q. Vous n'êtes pas en train de nous dire que si vous aviez souhaité savoir

25 où ils se trouvaient, vous ne l'auriez pas pu ? Je parle du MUP et de leurs

26 commandants ou de leurs officiers supérieurs au Kosovo ?

27 R. Je ne suis pas sûr, Monsieur, d'avoir dit que j'avais demandé que des

28 membres en particulier du MUP soient trouvés ou le contraire. Ce que j'ai

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1 compris de votre question, c'est que ça se référait au début de la guerre,

2 aux alentours du 20 avril, au moment où des actions antiinsurrectionnelles

3 ont été menées sans qu'il y ait d'ordre formel sur la resubordination qui

4 n'était pas encore arrivée. C'était dans ce contexte que je vous ai répondu

5 et que j'ai dit que les unités avaient comme mission de coordonner ces

6 activités sur le terrain.

7 Si les Juges me le permettent, nous avons un document qui porte la date du

8 9 avril où je donne pour ordre que les commandants contactent les cinq

9 secrétariats de l'Intérieur qui prévoyaient un certain nombre d'actions

10 afin que les activités soient coordonnées, voir ce qui pouvait se faire, et

11 faire à nouveau des rapports destinés à moi pour que je puisse en tant que

12 commandant vérifier quelles étaient les possibilités de participer à ces

13 actions. C'était ça le sens.

14 Q. Vous saviez qui était le général Sreten Lukic pendant cette période,

15 n'est-ce pas ?

16 R. Oui, je sais qui était ce général.

17 Q. L'avez-vous contacté concernant la question de la subordination pour

18 voir si c'était lui votre interlocuteur ou, si pas, est-ce qu'il

19 connaissait l'identité de la personne appropriée ?

20 R. Je n'ai pas tenté de résoudre cette question avec le général Lukic

21 parce que, et je me répète, deux membres de la police d'un grade plus élevé

22 que lui ont dit au commandement de l'armée et à moi-même qu'ils ne

23 pouvaient pas mettre en œuvre cette tâche. Je parle du 19 avril.

24 Q. Vous souvenez-vous s'ils ont dit quelque chose quant au pourquoi ils ne

25 pouvaient pas mettre en œuvre cette mission ? Quelles étaient les raisons ?

26 R. Il y avait des discussions pour autant que je me souvienne concernant

27 la possibilité pratique ou les impossibilités de la resubordination des

28 unités du MUP vis-à-vis de l'armée au sens d'un combat établi par les

Page 18276

1 règles de combat de l'armée, et non pas comme indiqué par le législateur de

2 la loi de la Défense qui utilise une seule phrase et qui peut être

3 interprétée de diverses façons.

4 Nous avons parlé des unités qui auraient pu peut-être être incluses dans

5 l'exécution de missions de combat et ceux qui ne le pouvaient pas.

6 En plus, ils avaient un système de changement d'effectifs, de rotation à

7 l'armée. Ça, c'est absolument pas possible.

8 Enfin, d'après ce que j'ai compris de ce qui avait été dit, c'était la

9 conclusion qui avait été tirée par l'un des ministres adjoints qui dit :

10 "Nous ne pouvons pas le faire, car nous n'avons pas eu d'ordre de notre

11 ministère."

12 Q. De ce fait, vous avez quitté la réunion en ayant l'impression qu'il

13 s'agissait, pour utiliser votre propre terme, d'une "mission impossible",

14 n'est-ce pas ?

15 R. Oui, c'est exact.

16 Q. Savez-vous -- tout d'abord, est-ce que vous-même, vous en avez fait

17 état vis-à-vis de l'état-major du commandement Suprême ? Est-ce que vous

18 avez fait un rapport sur la réunion, les résultats de la réunion, la

19 position du MUP ?

20 R. Non. Je vous prie de bien vouloir comprendre que je n'avais ni le

21 devoir ni l'obligation de faire rapport à l'état-major du commandement

22 Suprême quant à l'exécution des missions données par l'état-major du

23 commandement Suprême. C'est quelque chose qui est fait par le commandement

24 de l'armée. J'ai déjà témoigné que le commandant de l'armée m'a dit le jour

25 suivant, le 20, qu'il avait appelé l'état-major du commandement Suprême et

26 les a informés. C'était sa responsabilité.

27 Q. Le général Pavkovic a fait rapport à l'état-major du commandement

28 Suprême concernant cette réunion ?

Page 18277

1 M. BAKRAC : [interprétation] Déjà posée, déjà répondue, Monsieur le

2 Président.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Effectivement, il y a déjà eu une

4 réponse, Monsieur Hannis, à cette question.

5 M. HANNIS : [interprétation]

6 Q. Vous n'avez pris aucune autre mesure pour établir des contacts à votre

7 niveau, car vous avez pensé que c'était impossible et que vous aviez des

8 choses beaucoup plus importantes à faire ?

9 M. ACKERMAN : [interprétation] On répète constamment les mêmes questions.

10 Cela fait au moins la quatrième fois qu'on pose cette question.

11 M. HANNIS : [interprétation] Je ne suis pas d'accord.

12 M. ACKERMAN : [interprétation] Et il a déjà répondu quatre fois.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il y a deux questions en fait,

14 Monsieur Hannis. Je ne sais pas si l'une ou l'autre va ajouter quoi que ce

15 soit à nos connaissances de l'affaire.

16 M. HANNIS : [interprétation] Alors, je vais passer à autre chose.

17 L'INTERPRÈTE : Micro, s'il vous plaît.

18 M. HANNIS : [interprétation]

19 Q. Vous avez parlé au début de votre déposition pourquoi vous faisiez

20 partie du Corps de Pristina. On vous a montré un ordre du général Perisic

21 concernant ce transfert. Vous avez dit que vous n'aviez vu cet ordre qu'il

22 y a quelques mois, et qu'à l'époque vous agissiez sur la base d'ordres

23 verbaux. Est-ce que c'était l'une des façons qu'on utilisait au sein de

24 l'armée, à savoir l'utilisation d'ordres verbaux en même temps qu'écrits ?

25 R. Les ordres verbaux donnés par le commandant est une procédure tout à

26 fait légitime en ce qui concerne des missions de combat, des ordres, des

27 décisions.

28 Q. Vous-même, vous avez utilisé une telle méthode en tant que commandant ?

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1 R. Dans certaines circonstances, à certaines occasions, surtout lorsqu'il

2 n'y avait pas de système de télécommunication qui pouvait traiter les

3 ordres écrits, la réponse est oui.

4 Q. Vous avez également parlé de vos recommandations. Quand est-ce que vous

5 avez été recommandé ?

6 R. Je n'ai jamais parlé de recommandations. J'ai dit que je n'avais pas

7 été recommandé au mois de mai 1999, comme l'avait affirmé un témoin. Cela

8 peut être constaté à la colonne 15 de mon fichier personnel.

9 Q. Quand est-ce que cela a été fait ? Je n'ai pas votre fichier devant

10 moi.

11 R. Dans mon fichier, pour autant que je m'en souvienne, parce que moi même

12 non plus, je n'ai pas ce fichier. Je n'ai pas reçu d'honneur. On m'a plutôt

13 donné une récompense, un prix. C'était un pistolet officiel après la guerre

14 et cela était fait par le chef de l'état-major de l'armée de Yougoslavie.

15 Q. A quel moment ?

16 R. En 2000, pour autant que je me souvienne, et cela d'ailleurs figure à

17 mon fichier personnel.

18 Q. Qui était le chef de l'état-major à l'époque ?

19 R. Non, c'était le général Ojdanic. J'étais le commandant du corps. Le

20 général Pavkovic était le commandant de l'armée. Donc en 1999 et 2000, oui,

21 c'est possible. En tout cas, après la guerre.

22 Q. J'ai dit qu'au début de votre témoignage vous avez parlé à plusieurs

23 reprises de ce qui se passait au Kosovo en 1998. Vous avez parlé de "la

24 rébellion armée," "l'insurrection armée." La page 17 749, vous avez dit :

25 "Au mois de juin, l'insurrection armée au Kosovo s'était étendue jusqu'à

26 Djakovica et Decani." Est-ce que c'est exact ? Est-ce que cela traduit

27 votre opinion, à savoir que ce qui se passe à l'époque, c'était plutôt une

28 insurrection armée, et pas simplement du terrorisme, n'est-ce pas ?

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1 R. D'après mes connaissances en matières militaires, et évidemment celles-

2 ci sont assez modestes lorsqu'il s'agit de ce thème, qu'une tentative de

3 renverser l'ordre constitutionnel par la force, cela s'appelle "une

4 insurrection armée." Cette tentative est quelque chose à laquelle je fais

5 allusion en tant qu'officier comme "une insurrection armée." Dans les

6 documents de l'état-major de l'armée de Yougoslavie, à l'époque du général

7 Perisic, dans la directive c'est effectivement le terme qu'on utilise.

8 Q. Est-ce que vous saviez que les autorités de l'Etat n'aimeraient pas

9 beaucoup utiliser ce terme pour décrire ce qui se passait au Kosovo, car

10 cela pourrait avoir des implications eu égard le droit international ?

11 R. Je ne sais pas ce que faisaient les autorités de l'Etat par rapport à

12 la définition des problèmes de sécurité de l'Etat ou du sûreté de l'Etat.

13 Je n'ai pas eu l'occasion de voir les documents concernant le Kosovo-

14 Metohija, ni entendre ce qu'en disaient les hommes politiques. Mais j'ai

15 travaillé à la frontière de l'Albanie pendant plus d'une année, et ce que

16 j'ai pu y constater m'a fait croire qu'il s'agissait d'une insurrection

17 armée terroriste classique, quelle que soit l'origine de la science

18 militaire.

19 Q. Mais vous savez au mois de juillet 1998 que le chef de l'état-major, le

20 général Perisic, exprimait sa préoccupation quant à la façon dont on

21 faisait usage de l'armée et a suggéré que, selon lui, un état d'urgence

22 pourrait être déclaré de façon à ce que l'armée pourrait être engagée

23 contre ces terroristes dans les zones au-delà de la ceinture frontalière.

24 Vous étiez au courant de cela ?

25 R. Ce dont vous parlez, c'est quelque chose que je connais à partir de

26 documents que j'ai pu voir au cours de cette affaire. En 1998 et pendant

27 toute l'année 1999, jusqu'à très récemment, je n'avais quasiment aucune

28 information concernant les dires du général Perisic. Je l'ai rencontré à

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1 plusieurs reprises au Kosovo-Metohija, mais je n'avais aucune connaissance

2 de ces faits à l'époque.

3 Q. Ce n'était pas quelque chose dont on a parlé en votre présence ? Vous

4 n'avez jamais entendu le général Pavkovic mentionner cela au cours de

5 l'année 1998 ?

6 R. Non, absolument non.

7 Q. A la page 17 749, vous nous avez dit que vous aviez des informations

8 portant sur le fait que les terroristes de l'UCK sont en train d'armer des

9 enfants de 16 ans. Comment pouviez-vous savoir cela ? Est-ce que vous avez

10 des documents à l'appui ?

11 M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons examiné un

12 document du Procureur. Il ne s'agit pas d'une information venue de

13 renseignements. Il s'agit d'une réunion qui a eu lieue dans la région de

14 Dukagjini. J'essaie de ne pas interrompre Me Hannis, mais il faudrait

15 vraiment qu'il fasse un effort pour présenter correctement les pièces à

16 conviction, pour ne pas induire le témoin, l'accusé, en erreur. Je suis sûr

17 qu'il ne fait pas cela exprès.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Bakrac, nous pensons que M.

20 Hannis a tout à fait le droit de poser la question de la façon dont il la

21 pose. Puisque c'est un contre-interrogatoire, il a tout à fait le droit de

22 vérifier quelles sont les vraies connaissances du témoin.

23 Vous avez présenté sa déposition par le biais de toute une série de

24 questions directrices, mais c'est complètement compréhensible puisque vous

25 avez basé vos arguments sur les documents qu'il connaît très bien. Donc, ce

26 n'est pas quelque chose qui est inacceptable, mais peut-être que l'on peut

27 -- et c'est utile certes de vérifier quelles sont vraiment ses

28 connaissances personnelles. Donc, il y a rien de bizarre ou quoi que ce

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1 soit qui dérange dans la façon dont le Procureur a posé la question. La

2 source apparemment de ces documents est l'armée yougoslave.

3 Donc, on préfère que vous n'interrompriez pas le témoin quand il

4 fournit ses réponses, à moins qu'il y ait quelque chose de vraiment injuste

5 dans la façon dont la question est posée. Cette fois-ci ce n'était vraiment

6 pas le cas.

7 Monsieur Hannis, vous pouvez poursuivre.

8 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

9 Q. A la page 17 549, ligne 14, vous avez dit : "Ils ont mobilisé les

10 enfants de 16 ans. Et si vous voulez, je peux tout à fait vous expliquer

11 pourquoi je sais cela." Vous avez dit que vous saviez cela parce que "ces

12 villages étaient, pour la plupart, des villages catholiques, et ils

13 dépendaient du ministère de l'Intérieur, et ils voulaient qu'on les

14 protège. Ils ne voulaient pas prendre ces armes, ils ne voulaient pas se

15 ranger du côté des rebelles."

16 C'est un document qui vient de l'UCK, que M. Bakrac vous a montré

17 prétendument. C'est un document qui émane de l'UCK. Est-ce que vous avez

18 des documents, vous, qui reflètent ces mêmes informations ?

19 R. Je n'ai pas compris la question que vous m'avez posée. Les postes de

20 commandement - et là on parle vraiment du poste de commandement avancé - je

21 parle de mes connaissances personnelles. Nous disposions aussi bien des

22 informations portant ou indiquant qu'on était en train d'armer les mineurs,

23 mais nous avons aussi discuté avec les villageois qui ont indiqué aux

24 représentants de la sécurité militaire que l'on fournit les armes aux

25 enfants et il nous est arrivé aussi d'attraper, pour ainsi dire, d'arrêter

26 des groupes de terroristes qui essayaient de passer la frontière. Il y

27 avait parmi eux des mineurs en uniforme et armés.

28 Je vous prie de bien vouloir être précis. Puisque ce document, le document

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1 que nous avons utilisé, ce n'est pas un document de l'armée yougoslave.

2 C'est un document qui vient de l'état-major principal de l'UCK, et nous

3 l'avons présenté comme pièce à conviction.

4 Q. Oui, je suis tout à fait d'accord, il faudrait effectivement essayer

5 d'être aussi précis que possible. Je dis que c'était un document qui venait

6 soi-disant de l'UCK. Vous venez de dire que vous avez des connaissances

7 personnelles, que vous avez parlé avec des gens, des villageois. Quand vous

8 avez dit : "Nous avons parlé avec des villageois," est-ce que vous,

9 personnellement, vous avez parlé avec ces gens ?

10 R. Je me souviens d'une occasion très bien. Une fois, en tant que chef

11 d'état-major du corps d'armée - je pense que les commandants du corps

12 d'armée étaient là aussi - nous avons visité un village frontalier en

13 direction de Kosare. Je pense qu'il s'agissait du village de Batusa. Je me

14 souviens que nous avons discuté avec des villageois, puisque l'armée passe

15 par là, ils se rendent à la frontière pour garder la frontière et pour y

16 garder aussi. On leur a dit de ne pas accepter des armes. On leur avait

17 apporté, distribué des vivres. Ils avaient accepté ce que nous leur avons

18 proposé, nos demandes, pour ainsi dire. Ils ont dit qu'ils allaient tout

19 faire pour ne pas accepter les forces terroristes dans le village de

20 Batusa. D'ailleurs, ce sont exécutées en bonne partie, mais par la suite il

21 y a eu pas mal de soldats qui se sont faits tués justement dans cette zone-

22 là.

23 Effectivement, je me souviens très bien d'une occasion qui concernait

24 justement le village de Batusa. Cela s'est produit à peu près au mois de

25 juin 1998. C'est de cela qu'on parle.

26 Q. Cela a eu lieu quand ?

27 R. Au mois de juin 1998. Il y a aussi à l'appui un enregistrement vidéo

28 d'autres pièces, mais c'est un exemple que je vous cite là.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lazarevic, vous nous avez

2 donné une réponse, mais dans cette réponse vous ne nous avez rien dit de

3 précis par rapport à la question posée par M. Hannis, à savoir ce que vous

4 avez appris ou non à cette occasion-là. Essayez d'entendre la question,

5 d'écouter la question et de répondre de façon précise à la question.

6 Je ne sais pas si M. Hannis souhaite poursuivre pour voir si le témoin a

7 vraiment une réponse à cette question-là.

8 M. HANNIS : [interprétation] Je vais faire suite à une question posée

9 auparavant.

10 Q. Parce que vous avez dit que vous avez arrêté, capturé un groupe qui

11 essayait de franchir la frontière et qu'il y avait des mineurs parmi eux.

12 Cela a eu lieu quand exactement ? Est-ce que ceci se trouve dans un rapport

13 que vous avez fait ?

14 R. Cela est arrivé à de maintes reprises à partir du mois d'avril déjà.

15 Vous pouvez trouver de telles informations dans les rapports de combat de

16 la 3e Armée. Mais je me souviens aussi d'un ordre du commandant qui a été

17 écrit demandant que l'on prenne des mesures supplémentaires suite à cela

18 justement pour empêcher que des forces terroristes soient introduites

19 d'Albanie, parce que justement ils mettent en première ligne les enfants et

20 c'était pour assurer la sécurité de ces mineurs et aussi pour assurer la

21 sécurité des frontières.

22 Q. Un mineur, pour vous, a quel âge ?

23 R. Pour moi, un mineur c'est l'âge qui peut être définit par la loi. Toute

24 personne apte à combattre, d'après nos lois, doit avoir au moins 18 ans.

25 Tous ceux qui ont moins de 18 ans, ce sont des "mineurs" pour moi.

26 Q. Bien. Vous avez dit que ces villageois, c'étaient des villages

27 catholiques, mais on parle de quelle partie du Kosovo ? La partie ouest ?

28 Autour de Djakovica ? Entre Djakovica et Pec; c'est cela?

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1 R. Du point de vue géographique, je dirais que c'est la partie au sud-

2 ouest. Plus précisément, les villages autour de Djakovica, à savoir

3 Doblibare, Korenica et autres amonts et villages dans la zone au sens large

4 du terme de Djakovica.

5 Q. Qu'en est-il de Guska ? C'est un petit village à proximité de Korenica.

6 Vous vous en souvenez ? C'était un village catholique, n'est-ce pas ?

7 R. Le village de Guska, oui, cela me dit quelque chose. Si mes souvenirs

8 sont exacts, cela se trouve dans cette zone-là, mais je ne suis pas

9 vraiment sûr de l'emplacement précis.

10 Q. Si ces villageois vous demandaient à vous et aux policiers du MUP de

11 les protéger, pourquoi au mois d'avril 1999 les soldats de l'armée

12 yougoslave et les membres du MUP sont en train de nettoyer justement ces

13 villages-là, Korenica et Guska, parce que nous avons entendu des

14 dépositions dans ce sens ? Vous vous en souvenez, nous avons entendu cela

15 de Merita Deda et de Lizane Malaj ?

16 R. Oui, je me souviens de la déposition de Merita Deda et d'autres. Vous

17 me demandez pourquoi la police et l'armée ont nettoyé ces villages. Je peux

18 vous dire ce que je sais, à savoir que dans cette zone-là à cette époque-

19 là, il y a eu plusieurs centaines des membres des troupes terroristes,

20 toute une brigade, des rebelles qui participaient à cette rébellion armée.

21 Ils étaient en conflit avec les forces de sécurité.

22 Ces témoins nous ont raconté la suite des événements. Je ne connais pas

23 tous les détails, mais des témoins vont venir, des témoins qui ont

24 participé à tout cela, et je demande aux Juges de prendre connaissance de

25 cela et de permettre à ces témoins qui ont participé à ces événements de

26 venir déposer à ces sujets.

27 Q. Pendant le nettoyage de ce village et pendant le conflit avec les

28 terroristes, on a demandé aux villageois de partir en Albanie; est-ce

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1 exact?

2 R. Je n'ai aucune information dans ce sens, à savoir qu'un quelconque

3 membre des unités du corps d'armée aurait donné l'ordre à un quelconque

4 civil de ce territoire-là où d'une autre zone de se rendre en Albanie.

5 Q. Est-ce que vous savez si les membres du MUP avaient dit cela aux civils

6 ?

7 R. Non, je n'ai pas ces informations là non plus.

8 D'autant plus, et je dis "d'autant plus", parce que les rapports me

9 parvenaient surtout des unités de l'armée, donc encore moins je dirais des

10 unités de l'armée.

11 Q. Est-ce que vous avez des informations au sujet de la protection civile

12 ou la défense civile ou de la population non-siptar armée ? Est-ce que vous

13 savez si ceux-là ont dit aux villageois de Korenica et de Guska de partir

14 en Albanie ?

15 R. Aujourd'hui, je vous parle des informations qui me sont parvenues des

16 unités déployées dans cette zone-là. Evidemment, les témoins du Procureur

17 ont dit ce qu'ils ont dit. Mais je répète que je n'ai aucune information

18 indiquant qu'un quelconque membre des unités faisant partie du système de

19 la défense au niveau de l'Etat aurait chassé qui que ce soit de ces

20 villageois vers une autre région.

21 Q. Est-ce que vous vous souvenez du Témoin K-73 qui a déposé en l'espèce

22 au sujet des événements qui se sont produits dans cette zone-là, justement

23 vers la fin du mois d'avril 1999 ? Est-ce que vous vous souvenez de ce

24 témoin-là et de sa déposition ?

25 R. Il y en a eu un certain nombre avec un pseudonyme commençant par la

26 lettre "K". Auriez-vous la gentillesse -- je n'ai pas besoin d'avoir le

27 nom, je ne sais pas comment -- aidez-moi à répondre à la question que vous

28 venez de me poser, parce que je ne vois pas de qui il s'agit.

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1 Q. Peut-être que vous allez vous en rappeler parce qu'avant de quitter ce

2 prétoire, il a claqué les talons et vous a fait un signe de la tête avant

3 de quitter le prétoire.

4 Est-ce que vous voyez de qui je parle ?

5 R. Oui, maintenant je vois qui c'est.

6 Q. Est-ce que vous vous souvenez de ce qu'il a dit, est-ce que vous vous

7 souvenez ce qu'il faisait avec son unité quand il a vu les déplacements de

8 la population dans cette zone-là ?

9 R. Oui, je me souviens grosso modo de ce qu'il a dit au sujet de ces

10 événements qui se sont produits le 27 et le 28 avril.

11 Q. Est-ce que vous avez une raison de penser qu'il n'a pas dit la vérité

12 quand il a décrit ce qu'il a vécu au cours de cette opération ?

13 R. La déposition du Témoin K-73 par rapport à la fonction qui était la

14 sienne dans le cadre de cette opération ou de cette action que l'on appelle

15 opération ici, si vous voulez, il a son point de vue, mais à partir de la

16 place qu'il avait dans toute l'organisation. Je ne veux pas contester ce

17 qu'il a dit, c'est son point de vue.

18 Mais je voudrais vous dire qu'un autre témoin, je l'espère tout au

19 moins, va venir déposer, un contemporain qui a participé à cette mission et

20 qui était le supérieur hiérarchique justement de cette personne, de ce

21 témoin, et c'est là que nous allons voir quelle est la vérité, s'il

22 disposait de suffisamment d'informations pour dire ce qu'il a dit et pour

23 faire l'évaluation qu'il a faite.

24 Q. Si mes souvenirs sont exacts, le Témoin K-73 a dit qu'il a vu qu'on

25 recevait les civils au bout de la route au fur et à mesure qu'ils

26 arrivaient, et que le Témoin K-73 a vu des unités qui étaient déployées

27 près de la sienne, les soldats de ces unités en train de conduire les gens

28 dans cette direction. Il a même dit, vous vous en souviendrez, que l'on

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1 avait séparé les hommes des femmes et qu'on avait envoyé les femmes et les

2 enfants le long de la route plus loin. Est-ce que vous vous souvenez de

3 cela ?

4 R. Non, je ne me souviens pas vraiment de cela. Mais j'aimerais bien que

5 l'on regarde le compte rendu d'audience parce que je ne me souviens

6 vraiment pas qu'il a dit que son unité, qui avait une taille de peloton à

7 l'époque, qu'elle avait participé à la séparation des hommes et des femmes.

8 Q. On va passer à un autre sujet. Vous avez parlé des différentes

9 tactiques classiques terroristes. Vous avez parlé de la "tactique des 1 000

10 feux". Ensuite, vous avez parlé de la "tactique des deux villages". Donc,

11 d'un côté on évacue les civils d'un village, ensuite on en fait un chef-

12 lieu militaire justement de cette zone-là; alors que dans le deuxième

13 village, on concentre la population civile, et dans ce village-là, on

14 trouve la base logistique.

15 Je ne suis pas vraiment sûr de la façon dont ça marche. D'un côté,

16 vous avez une forteresse dans un village, et de l'autre côté, vous avez un

17 village avec des civils. Alors que se passe-t-il ? Pourquoi vous n'attaquez

18 pas tout simplement le village forteresse ?

19 Parce que si j'ai bien compris, on utilise l'autre village comme un

20 bouclier. Est-ce que je vous ai bien compris, pourriez-vous m'expliquer

21 cela ?

22 R. Je vais essayer de vous expliquer cette tactique terroriste. On a parlé

23 souvent du village de Smonica, c'était un bastion paramilitaire terroriste

24 bien connu. Le village se trouvait sur la route principale entre Djakovica

25 et Decani et différents postes-frontières, y compris Karolica [phon]. Tous

26 les villages ont été fortifiés et tous les alentours étaient minés. Les

27 civils de ces villages ont été envoyés en direction des villages de

28 Nivokaz, Nec, et cetera, et pour arriver à ce village, le village Smonica,

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1 qui est un bastion de terroristes, il fallait passer par les villages

2 habités exclusivement par les civils.

3 Donc la question que vous me posez, à savoir pourquoi n'a-t-on pas

4 attaqué ce bastion de terroristes à partir du moment où le 2 août le

5 commandant de l'état-major de l'armée à demandé qu'on neutralise ce bastion

6 de terroriste, il a fallu que les unités fassent preuve de beaucoup de

7 retenue pour mener à bien cette mission extrêmement difficile. On a

8 effectivement neutralisé ce bastion, mais les terroristes sont partis dans

9 ces villages habités par des civils et se sont mêlés aux civils, et on n'a

10 pas pu mener à bien l'action. On ne pouvait pas continuer, c'en était fini

11 de l'opération.

12 C'est comme cela --

13 Q. Mon Général, ceci me semble-t-il nous donne une bonne explication

14 pour une bonne raison pour déplacer tous les civils, parce que les

15 terroristes, les gens de l'UCK, changeaient de vêtements, tout simplement,

16 et se mêlaient à la population civile.

17 C'était une situation très frustrante, très difficile pour l'armée et

18 pour le MUP, n'est-ce pas ?

19 R. Avec tout le respect que je vous dois, je ne saurais être

20 d'accord avec ce que vous affirmez, qu'il s'agit de frustration ou non, et

21 surtout quand il s'agit du comportement. Parce que je vous ai donné une

22 date, la date du 2 août 1998. Sans doute - et là je ne fais que des

23 suppositions - vous parlez de la période de la guerre, à savoir la période

24 qui est intervenue huit mois plus tard, donc cela n'a rien à voir, d'autant

25 que l'on ne peut aucunement parler d'une campagne systématique et

26 généralisée, où il s'agissait d'attaquer des villages albanais pour

27 éliminer tout cela, pour les chasser tous de ces terres, une attaque qui

28 aurait été, d'après vous, menée par l'armée et par la police.

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1 Donc je vous réponds non, ce n'était pas le cas, les choses ne se

2 sont pas passées ainsi.

3 Q. Moi aussi, avec tous mes respects, Mon Général, je dirais que

4 tous les membres de votre armée ou du MUP ne sauraient être d'accord avec

5 vous quand vous dites que ceci n'était pas une source de frustration quand

6 il s'agissait de combattre un ennemi qui se cachait, et qui attaquait à

7 partir d'embuscades, qui tirait quand c'était à leur avantage, ensuite se

8 cachait en mettant des vêtements civils et en se mêlant à la population des

9 villages, de sorte que vous ne puissiez pas les poursuivre. Et surtout

10 quand il y a eu des pertes du côté de l'armée yougoslave ou du MUP, quand

11 vous voyiez que votre collègue s'est fait tirer dessus ou a été tué, et

12 vous me dites que ceci n'était pas une source de frustration pour les

13 soldats de l'armée yougoslave ou pour le MUP. J'ai du mal à vous croire.

14 R. J'essaie de vous dire que de toute façon, je ne peux pas parler

15 du MUP, je ne suis pas compétent pour cela. Je ne suis pas autorisé, je

16 n'ai pas de telles informations. Mais quand j'ai dit que les soldats de

17 l'armée n'étaient pas frustrés à cause de cette stratégie-là, je dois vous

18 dire qu'un soldat répond à la tactique de l'ennemi par sa propre tactique.

19 Il existe des règles, des ordres dans l'armée qu'il s'agit de respecter. Et

20 c'est comme cela qu'on répond. Et quand il s'agit de réponses

21 émotionnelles, elles peuvent arriver au cas par cas, mais ce n'est pas une

22 règle.

23 Q. Mon Général, je dois dire que j'ai du mal à vous croire. Vous

24 êtes compétent, vous avez une certaine autorité, mais vous ne pouvez pas me

25 dire qu'il existe vraiment une différence entre l'armée yougoslave et le

26 MUP. Il s'agit là d'une situation qui concerne l'homme en tant qu'être

27 humain. Vous avez été un soldat. Vous savez quelles sont les situations de

28 combat, ce qui se passe. Vous ne pouvez pas me dire qu'une telle situation

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1 n'aurait pas été une source de frustration ?

2 Vous voyez votre co-combattant, vos amis, copains qui se font blesser

3 ou tuer, et vous venez me dire ici que ceci ne les dérangerait pas ?

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Bakrac.

5 M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si M.

6 Hannis tient à transformer le témoin en expert psychiatrique ou

7 psychologique, il lui parle de frustration. Mais je crois que ce concept ne

8 relève pas du domaine qui fait l'objet de la déposition de ce témoin.

9 J'invite la Chambre à demander à M. Hannis de cesser d'interrompre le

10 témoin. C'est la deuxième fois que je me lève pour interrompre les débats,

11 mais vraiment, je crois qu'il importe de demander que l'accusé ne soit pas

12 transformé en expert psychiatrique.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Bakrac, vous devez élever une

14 objection lorsque vous le jugez utile. Ce qui nous préoccupe, ce sont les

15 objections qui deviennent un discours, et qui risquent d'être équivalentes

16 à une réponse du témoin dans le cadre des débats liés à cette déposition,

17 alors que cela peut être évité. Par conséquent, il importe manifestement

18 que les objections se limitent au fond du débat, et aux situations dans

19 lesquelles il risque d'y avoir préjudice pour le témoin.

20 Les juges vont sur ce point précis se consulter.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Bakrac, la question qui vient

23 d'être posée exige du témoin qu'il donne un avis qui peut être donné par

24 toute personne connaissant un peu le comportement humain et les réactions

25 humaines. Dans la mesure où un tel avis peut être utile aux Juges de la

26 Chambre pour se prononcer sur les problèmes sur lesquels ils ont à se

27 prononcer, mais en tout cas ce n'est pas un sujet qui exige des

28 connaissances d'expert. Donc nous rejetons votre objection qui,

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1 manifestement, a un fondement. Mais il est permis de se demander quelle est

2 la valeur, compte tenu du fait que le témoin s'est déjà exprimé à deux

3 reprises sur ce même sujet.

4 M. BAKRAC : [interprétation] Précisément, Monsieur le Président. Je ne

5 voudrais pas donner trop de détails devant le témoin, mais le problème est

6 simple. Une question comporte toujours un aspect masqué, qui en fait

7 équivaut à un piège, et lorsque le piège est tout à fait évident, il est

8 possible de l'éviter. Nous nous sommes trouvés dans une situation répondant

9 exactement à cette définition.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Bakrac, j'ai rendu la décision

11 de la Chambre.

12 Dans ce genre de situation, vous devez faire montre d'une grande

13 attention, contrairement à la situation relative à l'audition d'autres

14 témoins. On ne peut pas demander à ce que le témoin sorte du prétoire

15 pendant les débats pour discuter entre nous des mérites ou des

16 inconvénients d'une question. C'est la raison pour laquelle vous devez être

17 beaucoup plus prudent dans la formulation de vos questions lorsque c'est un

18 accusé qui témoigne.

19 Vous comprenez ? C'est cela qui m'inquiète un peu au sujet du

20 problème dont nous discutons.

21 Lorsqu'une décision est rendue par la Chambre, elle doit être

22 appliquée.

23 Veuillez poursuivre, Monsieur Hannis.

24 M. HANNIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

25 Je vais, compte tenu des remarques de la Chambre, passer à un autre

26 sujet.

27 Q. Mon Général, j'aimerais vous soumettre la pièce P1428. J'ai une copie

28 papier que je peux vous transmettre avec l'aide de l'huissier.

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1 C'est une décision émanant du commandement du Corps de Pristina en date du

2 14 août 1998. Vous l'avez déjà eue sous les yeux par le passé, n'est-ce pas

3 ? C'est un document signé par vous ?

4 R. C'est exact.

5 Q. Le moment est venu pour moi de vous poser la question suivante : est-ce

6 que vous pourriez m'expliquer quelle est la différence à votre avis entre

7 une opération et une action s'agissant des activités menées par l'armée

8 yougoslave dans l'une ou dans l'autre ?

9 R. Une action c'est un aspect des combats qui se situe à un niveau

10 tactique, c'est-à-dire assez peu élevé dans la hiérarchie, qui peut être

11 confiée à des unités ou à des groupes tactiques, à savoir à des effectifs

12 impliquant une centaine d'hommes ou moins au minimum et quelques centaines

13 au maximum, ou peut-être éventuellement quelques milliers d'hommes.

14 Prenons l'exemple du Groupe de combat 15-3, qui comptait 170 hommes, et

15 j'ai parlé de l'action menée par ces hommes. Quant à une opération, c'est

16 une forme beaucoup plus complexe des combats qui sont menés à un niveau

17 plus important, dans un secteur plus important, et qui ont pour objectif un

18 objectif stratégique opérationnel. Donc, une opération vise à une fin, à un

19 objectif qui est le plus haut placé dans la hiérarchie.

20 Par exemple, l'engagement global du Corps de Pristina dans la défense de

21 cette ville porte le nom d'opération de défense menée par le Corps de

22 Pristina. Cette opération a été unique, et elle a duré trois mois pendant

23 la guerre. Tout le reste dans le cadre de cette opération unique visait à

24 des fins stratégiques ou opérationnelles qui consistaient à défendre

25 l'intégrité du pays, et des centaines de combats, d'embuscades,

26 d'incursions, et cetera, et cetera, ont eu lieu dans le cadre de cette

27 opération.

28 Q. Donc tout ce qui est inférieur à l'engagement complet du Corps de

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1 Pristina dans la défense du pays pendant les 78 journées de la guerre, ou

2 plutôt, je reformule -- y a-t-il quelque chose d'autre que cette opération

3 que je peux appeler "opération" ou est-ce que tout le reste, je dois

4 l'appeler "action" et non "opération" ?

5 R. Effectivement. Une action, une bataille, un combat sont synonymes selon

6 les règles régissant les combats. Il n'y a eu qu'une seule opération, et

7 dans le cadre de cette opération il y a eu des actions, des combats et des

8 batailles ainsi que certaines actions tactiques.

9 Q. D'accord. Je m'en tiendrai là, mais je crains qu'il n'y ait eu peut-

10 être un problème de traduction. Il me semble me rappeler certains documents

11 qui évoquaient des actions spécifiques menées dans une zone géographique

12 assez restreinte, qui ont duré plusieurs jours, et qu'on mentionnait comme

13 étant des "opérations".

14 Je remarque au paragraphe 1 du texte que nous avons actuellement sous

15 les yeux, à la dernière ligne les mots suivants : "Etre prêt pour les

16 opérations à 7 heures le 15 août."

17 R. Ce que je lis en serbe dans ce document signé par moi, c'est : "Etre

18 prêt à agir le 15 août."

19 M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que ce n'était

20 pas la question posée par M. Hannis. Pour éviter toute confusion, j'indique

21 que dans la version anglaise du texte, nous lisons : "Opération menée par

22 les forces de diversion." Mais je pense qu'il serait préférable pour bien

23 établir la réalité des choses que l'on demande au général de lire ce qui

24 figure dans la version originale serbe du texte.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est une bonne idée me semble-t-il,

26 Monsieur Hannis, en l'occurrence.

27 M. HANNIS : [interprétation] Oui.

28 Q. Mon Général, pourriez-vous lire la dernière ligne du paragraphe 1,

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1 dernière phrase.

2 R. "Etre prêt à agir le 15 août 1998, à 7 heures."

3 Q. Dans ma traduction anglaise, je vois le mot "opérations". Il faudra

4 vérifier.

5 Mon Général, ces activités ou cette action consistait à neutraliser les

6 forces terroristes et de sabotage dans les zones dont faisaient partie les

7 villages de Slup et de Voksa, n'est-ce pas ?

8 R. Je n'ai pas entendu l'interprétation.

9 Q. L'action en question visait à neutraliser les forces terroristes et les

10 forces de sabotage dans les secteurs où se situaient les villages de Slup

11 et de Voksa, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Et durant cette action précise, c'est vous qui étiez aux commandes,

14 n'est-ce pas, c'est vous qui étiez le responsable ?

15 R. Non, pas moi.

16 Q. Qui alors ?

17 R. La 15e Brigade de blindés était la responsable des actions avec son

18 Groupe de combat 15-3. Pour ma part, je me trouvais au poste de

19 commandement avancé de Djakovica à cette époque-là. J'avais avec moi une

20 dizaine de généraux qui venaient de l'état-major principal. Cela faisait

21 plusieurs jours qu'ils inspectaient les unités. En faisait partie le

22 général Perisic, entre autres. Bien entendu, j'ai suivi les événements,

23 j'ai suivi ce qui se passait de près. Mais si vous dites ce que vous dites

24 parce que c'est moi qui ai signé le document que nous avons sous les yeux,

25 le fait que je l'ai signé ne signifie pas que c'est moi qui ai commandé

26 durant cette action.

27 Q. Qui exerçait le commandement durant cette action alors ? Vous dites que

28 c'est le commandant de la 15e Brigade de blindés ou serait-ce peut-être le

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1 général Perisic ? Qui exactement ?

2 R. Le commandement de la 15e Brigade de blindés.

3 Si vous me le permettez, nous avons eu sous les yeux l'ordre donné par le

4 commandant de cette brigade concernant cette action.

5 Q. Dans ces conditions, j'aimerais que nous nous penchions sur les

6 documents issus des réunions du commandement conjoint en 1998, pièce à

7 conviction P1468.

8 M. HANNIS : [interprétation] Je demande l'affichage de la page 54 en

9 anglais qui, ici, si je ne me trompe, correspond à la page 45 de la version

10 B/C/S. En tout cas j'ai une copie papier de ce document que je vais vous

11 faire remettre avec l'aide de M. l'Huissier.

12 Q. J'ai surligné le passage qui reprend les propos du général Pavkovic. Il

13 semble y être question -- le passage qui m'intéresse se trouve au cinquième

14 tiret ou sixième tiret.

15 Dans la traduction anglaise, ce texte se lit comme suit : "Le chef d'état-

16 major exercera le commandement de l'action menée dans les environs de Vonca

17 [phon] et Stanpul [phon]." A mon avis, après avoir entendu ce que vous avez

18 dit dans votre déposition, y compris au sujet du document 1428, cette

19 traduction constitue une erreur de lecture du texte manuscrit en B/C/S, car

20 je pense qu'il faudrait lire "Voksa" et "Slup" au lieu de "Vonca" et

21 "Stanpul," n'est-ce pas ?

22 Etant donné qu'il est question ici d'une réunion tenue le 13 août 1998.

23 C'est bien de cela que parlait le général Pavkovic, n'est-ce pas ?

24 R. Est-ce que je suis autorisé à lire la version serbe ?

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y --

26 M. HANNIS : [interprétation] Allez-y.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] -- les mots qui concernent ces

28 villages.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] "L'action menée dans les environs de Voksa et

2 Slup pourrait être commandée par le chef du Grand état-major." Donc, il

3 n'est pas écrit "sera commandée", mais "pourrait être commandée" au

4 conditionnel. Donc c'est quelqu'un qui écrit cela et qui pense qu'elle

5 pourrait être commandée par cet homme.

6 M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président. Il y a une différence

7 en Serbe entre le fait de "commander" et le fait de "diriger". Je vais

8 essayer de respecter les consignes données par vous, Monsieur le Président.

9 Mais je prierais les interprètes de s'efforcer de respecter cette

10 différence, car dans ce texte c'est le mot "rukovodio" donc diriger qui est

11 utilisé et pas le terme "komandijo" [phon] qui signifie "commander."

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En anglais, l'interprète a utilisé les

13 mots "would be led by" ce qui semble encore une troisième façon de dire les

14 choses, "serait menée par", mais je me demande si cela a le moindre intérêt

15 dans le cadre de l'interrogatoire de ce témoin. J'en doute.

16 M. HANNIS : [interprétation] Pas beaucoup d'intérêt effectivement, Monsieur

17 le Président.

18 Mais j'ai une question à poser suite à la réponse faite par le témoin.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Poursuivons. S'il faut officiellement

20 demander une nouvelle traduction, la page en question peut être présentée

21 une nouvelle fois au CLSS et déposée ensuite par l'une ou l'autre des

22 parties si elle tient à mettre en cause la clarté de ce qui a été dit au

23 cours de la présente audition.

24 M. HANNIS : [interprétation]

25 Q. Mon Général, pourriez-vous m'expliquer quelle est la différence

26 effective existant entre le fait qu'une opération pourrait être commandée

27 par vous ou qu'une opération pourrait être menée sous votre responsabilité.

28 R. Il y a une différence de fond si le chef du Grand état-major est

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1 l'homme qui exerce le commandement. Cela signifie qu'il définit les

2 missions assignées à toutes les forces engagées, qu'il peut modifier et

3 compléter la décision initiale, qu'il reçoit des rapports et qu'il

4 surveille l'application de la décision initiale. Si c'est quelqu'un d'autre

5 qui exerce le commandement, alors cet homme, le commandant de brigade ou du

6 groupe de combat est responsable de la mission en question. Je dis cela en

7 pensant à qui exerce le commandement.

8 Vous m'avez demandé, en tout cas c'est ce que j'ai entendu de la bouche de

9 l'interprète, quelle était la différence entre le terme de "commandement"

10 et de "direction." Alors, la direction "rukovodjenje" c'est une notion

11 beaucoup plus large qui implique le fait de diriger, d'organiser, de

12 coordonner un certain nombre d'activités différentes. Mais cela ne signifie

13 pas un commandement direct. Le commandement direct est exercé par quelqu'un

14 d'autre.

15 Q. Dans votre réponse, vous venez de dire : "Il y a une différence entre

16 les deux termes parce que le chef d'état-major, si c'est lui qui exerce le

17 commandement, est l'homme qui détermine les missions assignées à toutes les

18 forces engagées et qui prend les décisions."

19 Dans le document P1428, signé par vous, et qui s'intitule "décision", nous

20 voyons un paragraphe intitulé "mission des unités". Est-ce que ce n'est

21 pas cela que vous faites d'après ce qu'on peut lire dans le texte ?

22 R. Sauf votre respect, pas du tout. Mon conseil de la Défense a présenté

23 au moins quatre documents il y a quelques jours qui portent sur cette

24 action.

25 Premièrement, le commandant de la 3e Armée est celui qui a pris la décision

26 relative à cette action.

27 Deuxièmement, le commandant du corps a pris une décision relative à cette

28 action, ensuite c'est lui qui a approuvé la carte établie par le commandant

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1 de la 3e Armée sur la base de cette décision.

2 Troisièmement, le commandant de la 3e Armée -- ou plutôt le commandant du

3 corps a rendu compte au commandant d'armée au sujet de cette action.

4 En tant que chef d'état-major, j'ai signé cette partie du texte parce que

5 le commandant n'était pas présent ce jour-là. Il accompagnait le chef du

6 Grand quartier général qui se rendait sur place pour veiller à la

7 préparation des unités à l'action à entreprendre.

8 Pour que je commande les unités, j'aurais dû être autorisé par mon

9 commandant d'exercer le commandement sur les unités.

10 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que l'heure de

11 la pause est arrivée.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

13 M. FILA : [interprétation] Non. Pour le compte rendu d'audience, je tiens à

14 appeler l'attention de la Chambre sur un point. A savoir un problème

15 d'interprétation, car M. Hannis ne cesse d'utiliser le mot "opération".

16 Regardez page 12 - 71. Il demande au général Lazarevic quelle est la

17 différence entre une opération et une action et il parle qui commande une

18 opération et à quel niveau de la hiérarchie.

19 Je ne veux pas créer de problème, mais aucune opération n'est en cause dans

20 le débat qui nous occupe en ce moment. C'est pourquoi dans le document on

21 trouve le mot "action". Donc, nous ne pouvons parler que d'action et pas

22 d'opérations.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle est la ligne qui vous intéresse

24 à laquelle vous avez fait référence au compte rendu d'audience.

25 M. FILA : [interprétation] 12.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Page 12.

27 M. FILA : [interprétation] Page 71, ligne 12. La question de M. Hannis où

28 il parle d'opération.

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1 Or le mot ne figure nulle part par écrit.

2 Je vais revenir sur la question posée à M. Lazarevic : où réside la

3 différence entre une opération commandée par vous ou par un subordonné ?

4 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète française : Ce n'était pas du tout la

5 question posée.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi, je ne trouve pas ce

7 passage. Quelle ligne ?

8 M. FILA : [interprétation] 6/7.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bon --

10 M. FILA : [interprétation] Page 71, ligne 7. Je le vois maintenant.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis sûr que M. Hannis va tenir

12 compte de la définition faite par vous et qu'il a déjà utilisé les deux

13 mots. Je vous remercie.

14 Suspension jusqu'à 12 heures 55.

15 --- L'audience est suspendue à 12 heures 24.

16 --- L'audience est reprise à 12 heures 56.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

18 M. HANNIS : [interprétation] Merci.

19 Q. Général, je ne sais pas si vous avez encore le document devant vous ?

20 R. Oui.

21 Q. En fait, je me préoccupe de la décision du 14 août qui porte la cote

22 P1428. Est-ce que vous l'avez ?

23 R. Oui, je l'ai en main.

24 Q. Juste avant la pause, vous avez donné dans une de vos réponses, que

25 pour que vous puissiez commander les unités, il aurait fallu que vous ayez

26 l'autorisation de votre commandant.

27 Vous aviez cette autorisation pour ce qui concerne cette action en

28 particulier, n'est-ce pas ? Je veux dire, nous avons vu que le général

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1 Pavkovic, le 13 août, dit à la réunion du commandement conjoint, que cette

2 action dans les zones de Slup et Voksa serait sous votre responsabilité,

3 n'est-ce pas ?

4 R. Sauf votre respect, je vais répéter que ce n'est pas ce qui apparaît

5 dans ce document. Ce qui apparaît dans ce document, c'est les termes :

6 "serait sous le contrôle." Il n'y est pas marqué : "sera" sous le contrôle

7 de. Donc, ce qu'a écrit la personne qui participait à la réunion, ce n'est

8 pas qu'un ordre m'a été délivré selon lequel je devais commander cette

9 action.

10 Q. A part ce qu'a fait la personne qui a participé à la réunion, est-ce

11 que le général Pavkovic lui-même vous a-t-il dit que vous étiez chargé de

12 cette action ? Oui ou non ?

13 R. Non.

14 Q. Alors pourquoi vous délivrez une décision qui affecte certaines tâches

15 à certains groupes ? Vous l'avez fait sans avoir son autorisation ?

16 R. L'organe opérationnel du commandement du corps qui a planifié cette

17 mission, puisque cet organe ne pouvait pas à l'époque trouver le commandant

18 du corps pour qu'il puisse signer la décision, me l'a rapportée à moi, le

19 chef d'état-major, qui a, dans ses facultés, la possibilité de signer un

20 tel document. J'ai rappelé que le commandement du corps avait déjà signé la

21 décision sur la carte décisionnelle, et celle-ci avait été approuvée par le

22 commandant de l'armée.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lazarevic, vous avez dit que

24 la personne qui avait rédigé ce qui se passait au cours de la réunion

25 informelle avait utilisé le conditionnel, avec le terme "serait." Quelle

26 était la condition qu'il fallait satisfaire ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela dépendait sans doute du lieu où se

28 trouverait, au moment concerné, le commandant du corps. Car il était en

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1 inspection auprès des unités, cela dépendait s'il pouvait atteindre le

2 poste de commandement avancé de Djakovica.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

4 Monsieur Hannis.

5 M. HANNIS : [interprétation]

6 Q. Le général Pavkovic savait à l'avance qu'il allait faire ces

7 inspections avec le général Perisic, et c'est pour cela qu'il a fait en

8 sorte que vous, vous ayez le contrôle de cette action, n'est-ce pas ?

9 R. J'ai déjà répondu à cette question deux fois. Si la Chambre me le

10 demande, je peux le faire une troisième fois. Ce n'est pas ce qui est

11 marqué ici et ce n'est pas l'ordre que j'ai reçu. Ce n'était exécuté comme

12 le devait être les ordres dans les armées.

13 Q. Est-ce que vous avez reçu un ordre à ce propos et quel était votre

14 ordre ?

15 R. J'ai expliqué il y a quelques instants que je n'avais pas reçu d'ordre,

16 lorsqu'à l'époque je devais rendre compte à un groupe composé de plusieurs

17 hommes du Grand quartier général au sujet de ce qui se faisait pour assurer

18 la sécurité dans la zone frontalière. Ces activités étaient centrées sur

19 Djakovica, les unités qui se trouvaient dans ce secteur. Je suis allé voir

20 les unités avec les hommes du Grand quartier général, et cette inspection,

21 ce contrôle a duré trois jours à Djakovica. C'est ce dont a parlé le

22 général Obradovic dans sa déposition.

23 Q. Général, nous avons vu d'autres documents, ordres, décisions, rapports,

24 et cetera, qui ont été dactylographiés et qui contiennent le nom du

25 commandant supérieur, mais qui est signé en fait par une personne qui lui

26 est subordonnée. Pourquoi celui-ci n'a-t-il pas été signé "za" au nom de

27 Pavkovic ?

28 R. S'il s'agissait de signer en lieu et place de Pavkovic, à l'endroit où

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1 on lit le mot "commandant," j'étais le seul qui pouvait signer, mais ici ce

2 n'est pas "commandant" qui est écrit, mais "chef d'état-major." Donc, ce

3 n'est pas moi qui pouvait signer "za," c'est-à-dire, au nom du chef d'état-

4 major. Si on avait pu lire le mot "komandant," qui veut dire commandant,

5 c'est-à-dire le général Pavkovic, j'aurais été habilité à signer "za,"

6 c'est-à-dire, au nom de Pavkovic, c'est-à-dire, du commandant.

7 Q. D'après ce que vous aviez déjà répondu, il m'a semblé comprendre que

8 vous n'aviez pas signé ceci parce que le commandant n'était pas disponible.

9 Pourquoi cela a-t-il été préparé en votre nom, qui apparaît dactylographié

10 alors ?

11 R. J'ai dit que c'était dû au fait que le commandant n'était pas à ce

12 moment-là au poste de commandement. Donc les opérationnels ont écrit ce

13 texte et me l'ont soumis pour signature, car la décision du commandant du

14 corps d'armée existait déjà, et cette décision avait été vérifiée par le

15 commandant de l'armée. Donc cette mission avait déjà été déterminée,

16 définie et décrite par le commandant de l'armée et adressée au commandant

17 du corps d'armée.

18 Q. Ce que vous dites, c'est qu'entre le 13 août, au moment où le général

19 Pavkovic a fait son commentaire lors de la réunion du commandement

20 conjoint, jusqu'au 14 août, au moment où vous avez signé l'ordre, vous

21 n'avez pas eu de communication avec lui quant à votre responsabilité vis-à-

22 vis de cette action ? La question que je vous pose : pourquoi il dirait à

23 M. Stanisic, à M. Lukic, M. Andjelkovic, M. Minic, toutes ces personnes qui

24 étaient à la réunion du 13 août, pourquoi s'est-il donné la peine de dire

25 que son chef d'état-major allait avoir sous sa responsabilité cette action

26 ? Il l'a dit à toutes ces personnes-là, mais il ne l'a pas dit à vous ?

27 R. Si ce qui est écrit dans ce texte a bel et bien été dit par le général

28 Pavkovic, parce qu'en cet instant, vous exigez que je procède à une analyse

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1 du texte, que je ne vous fasse pas de supposition. Si c'est lui qui a donné

2 l'ordre à ces hommes en leur indiquant qu'une action allait se mener dans

3 la zone frontalière, et s'il a ordonné que son chef d'état-major du corps

4 d'armée se trouve à Djakovica, il est probable qu'il ait voulu leur

5 annoncer que des préparations devraient avoir lieu en temps utile par le

6 truchement d'un exercice de direction, je répète, de direction effectué par

7 moi.

8 Là, je ne fais que supposer, car je ne sais pas si les mots qui sont

9 écrits ici sont bien ceux du général Pavkovic ou pas, mais je m'efforce de

10 trouver une explication logique à la lecture de ce texte.

11 Q. Moi aussi. Qu'est-ce qui s'est passé avec cette action ? Etes-vous au

12 courant ? Celle-ci s'est-elle déroulée le 15 août comme envisagé par ce

13 document ?

14 R. Cette action a eu lieu. Cinq officiers de la police et un officier de

15 l'armée ainsi qu'un soldat ont été tués. Et ce bastion de terroristes dans

16 la zone frontalière a été neutralisé.

17 Q. Merci d'examiner le point 6 de cette décision.

18 Sous "Commandement et transmissions" en anglais, on voit qu'il est

19 écrit que :

20 "Les opérations de combat seront commandées par le commandement

21 conjoint du Kosovo-Metohija avec le poste de commandement avancé du Corps

22 de Pristina à Djakovica."

23 C'est un petit peu différent de ce que nous avons vu dans les autres

24 instructions de commandement et de transmissions. Il semblerait qu'ici on

25 voit le commandement conjoint en même temps que le poste de commandement

26 avancé où vous vous trouviez, et que vous, vous êtes désigné comme étant la

27 personne qui a donné la signature de cette décision.

28 M. ZECEVIC : [interprétation] Il peut y avoir une erreur de

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1 traduction, car d'après mon --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites qu'il y a une erreur

3 dans la traduction du paragraphe 6 ?

4 M. ZECEVIC : [interprétation] Exactement.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On va poser la question au témoin.

6 C'est lui qui va lire le paragraphe 6.

7 Merci de lire à voix haute ce paragraphe-là.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] "Le commandement des actions de combat sera

9 réalisé par le commandement conjoint du Kosovo-Metohija à partir du poste

10 de commandement avancé du Corps de Pristina à Djakovica."

11 M. HANNIS : [interprétation]

12 Q. Vous avez signé ce document. A l'époque, vous avez parlé du

13 "commandement conjoint du Kosovo-Metohija" en majuscules, en caractères

14 gras, à quelques centimètres au-dessus de votre signature.

15 R. Oui. D'ailleurs, ces derniers jours, j'ai vu cette même mention dans

16 d'autres documents également.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si on passe à ce nouveau thème, je

18 voudrais élucider une chose.

19 N'importe qui qui lirait ce document et qui entendrait que l'opération a

20 été commandée à partir du poste avancé de commandement à Djakovica - et

21 quand je dis "n'importe qui", je parle d'officiers subordonnés, de

22 personnes de rang inférieur - cette personne qui pourrait-il imaginer

23 effectivement et charger du commandement de cette opération. Je me

24 reprends, il s'agit d'action, non d'opération.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce texte, l'individu en question n'est

26 pas défini. Mais le responsable du commandement est indiqué comme étant le

27 poste de commandement avancé de Pristina à Djakovica.

28 Avec votre autorisation, Monsieur le Président, l'action précédente,

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1 l'action de Ratis, de Glodjane, était définie dans les mêmes termes avec

2 signature du commandant du corps d'armée, ce qui n'a rien à voir avec la

3 signature qu'on lit au bas du document.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends très bien ce que

5 vous entendez par là, mais je veux être sûr quant à sa véritable

6 signification. Je suis un de vos subordonnés, je reçois un document qui

7 contient le paragraphe 6 concernant le fait que le commandement se trouve

8 au poste avancé de commandement, et je vois votre signature, et je veux

9 revenir vers quelqu'un pour demander des instructions. A qui dois-je

10 imaginer que je dois me référer, étant donné le contenu de ce document,

11 globalement.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] L'inférieur hiérarchique va appeler le

13 poste de commandement avancé de Djakovica, plus précisément son centre des

14 opérations, pour avoir à l'appareil un individu qui exerce le commandement

15 ou le contrôle de l'action, et recevoir des informations. Donc il veut

16 parler au commandant qui se trouve-là, au chef d'état-major, qui doit lui

17 donner des instructions. Il va appeler le poste de commandement avancé et

18 son centre opérationnel à Djakovica.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et qui normalement doit-il s'attendre

20 être le commandant du poste de commandement avancé ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela peut être le commandant du corps d'armée,

22 cela peut être le chef d'état-major, cela peut être temporairement un

23 dirigeant qui a reçu du chef d'état-major instruction de procéder à la

24 direction des actions au poste de commandement avancé.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc ce document ne dit pas qui est

26 chargé, qui a le commandement de l'action. On ne peut le savoir que si on

27 fait des recherches supplémentaires à ce moment-là ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Le document que nous avons sous les yeux ne

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1 dit rien de cela. Ce qu'il dit, c'est que le commandement s'exerce à partir

2 du poste de commandement avancé. C'est seulement en appelant le poste de

3 commandement avancé, durant les préparatifs précédant l'action que la

4 personne qui est à l'origine de l'appel va savoir qui exerce le

5 commandement.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Etes-vous au courant de qui avait le

7 commandement de cette opération ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai expliqué, Monsieur le Président, que le

9 commandant de la 15e Brigade de Blindés dont le groupe de combat était à

10 l'initiative des combats actifs a commandé aux unités en question. A cette

11 époque, c'est le poste de commandement avancé de Djakovica qui était en

12 fonction sous le contrôle d'un groupe nombreux d'hommes du Grand quartier

13 général, qui suivait de très près, d'aussi près que possible ce qui se

14 passait pratiquement sur le terrain.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que cela veut dire que le

16 commandant de la 15e Brigade de Blindés se trouvait au poste de

17 commandement avancé ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Il se trouvait dans la zone élargie où se

19 déroulaient les combats, et le poste de commandement avancé se trouve à une

20 dizaine de kilomètres éventuellement de cette zone.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

22 M. HANNIS : [interprétation]

23 Q. Pouvez-vous nous dire à quel moment il a été placé au commandement de

24 cette action ? Cela a été fait par le truchement d'un ordre écrit ou verbal

25 ?

26 R. Nous avons présenté en tant qu'élément de preuve un ordre du

27 commandement de cette brigade. Je ne sais pas de quand date ce document,

28 mais nous avons versé au dossier l'ordre émanant du commandant de la 15e

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1 Brigade de Blindés. Je ne me souviens pas de la cote de ce document, cela

2 dit, à l'instant même.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous nous aider, Monsieur

4 Bakrac ?

5 M. BAKRAC : [interprétation] Je vous demande un instant, Monsieur le

6 Président.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur

8 Hannis, en attendant --

9 M. IVETIC : [interprétation] Il s'agit de la pièce 6D731.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

11 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur Ivetic.

12 On aimerait bien afficher ce document à l'écran, si vous le

13 permettez.

14 Q. En attendant, je vais vous poser une autre question, Général : si le

15 commandant de la 15e Brigade avait le commandement de cette opération, ces

16 autres éléments, comment ils seraient au courant ? Le Groupe de combat 125-

17 2, comment le sauraient-ils si tout ce qu'ils ont en main c'est cette même

18 décision ?

19 R. Les unités du groupe du corps d'armée, autrement dit les groupes de

20 combat qui participaient à l'encerclement, avaient reçu sur une carte

21 l'expression illustrée de la décision du commandant du corps que nous avons

22 également versé au dossier. Ça c'est le premier point.

23 Deuxième point, il est probable, je dis probable aujourd'hui, parce

24 que c'est un processus qui dépend directement des préparatifs effectués par

25 le commandant qui participe à l'action.

26 Q. A l'écran on peut voir le 6D731. Pouvez-vous nous dire là où il

27 est marqué que le commandant de la 15e Brigade est responsable ou a le

28 poste de commandement vis-à-vis de cette action ? D'après ce que je vois

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1 sur l'écran, il semblerait qu'il opère un commandement vis-à-vis de son

2 groupe subordonné BG-15-3, mais je ne vois pas qu'il est à la tête de la BG

3 125-2 ou les autres groupes qui apparaissent dans cette pièce.

4 R. Je peux expliquer ce qui se passe sans me prononcer sur le fait

5 que vous ayez raison ou tort. Un groupe de combat a mené des combats actifs

6 durant cette action définie par la décision du commandant du corps. On le

7 voit à la lecture du document précédent paragraphe 2, intitulé "Mission

8 confiée aux unités".

9 C'est le commandant de la 15e Brigade de Blindés qui a émis des

10 ordres déterminés destinés à ce groupe de combat. Les autres unités,

11 autrement dit les autres groupes de combat, ont continué à maintenir leurs

12 positions antérieures qu'ils tenaient depuis plus d'une dizaine de jours

13 durant l'encerclement de toute cette zone.

14 Vous m'avez interrogé au sujet du Groupe de combat 125-2. Cela

15 faisait dix à 15 jours que ces unités se trouvaient sur leurs positions

16 tactiques sans en bouger. Or maintenant, il est question d'un nouveau

17 groupe de combat qui est arrivé pour combattre activement dans le secteur

18 auquel il a été affecté avec le MUP. Donc il s'agit d'une action tout à

19 fait différente.

20 Q. [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant d'aller plus loin, pouvons-nous

22 voir la fin du document ?

23 C'est là qu'il y a confusion. La question pour laquelle M. Hannis

24 recherchait une réponse, c'est : Où se trouve le document qui attribut au

25 commandement de la 15e Brigade de Blindés à la tête de cette action ?

26 C'est bien ça votre question ?

27 M. HANNIS : [interprétation] Oui, c'est bien ça.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc on cherche quelque chose qui

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1 viendrait d'un niveau plus élevé.

2 Je vous pose la question, Monsieur Lazarevic : existe-t-il un tel

3 document ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis efforcé d'expliquer qu'il est

5 possible que durant les préparatifs de cette mission, le commandant de la

6 15e Brigade de Blindés ait reçu - parce qu'en général c'est le protocole

7 habituel, on détermine qui est responsable de la planification de l'action

8 - mais dans le document que j'ai sous les yeux en ce moment, j'estime qu'il

9 n'était pas nécessaire de définir les choses de cette façon, car il n'y

10 avait qu'un seul groupe qui était chargé de mener activement les combats,

11 c'était le seul qui venait d'arriver sur ces positions. Toutes les autres

12 formations tenaient déjà leurs positions depuis plus d'une dizaine de

13 jours, et même 15 jours. Donc c'est la nouvelle unité, l'unité nouvellement

14 arrivée qui a reçu cette affectation, cet ordre d'action.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

16 M. HANNIS : [interprétation]

17 Q. J'ai une question concernant le 1428. Mais avant, je voudrais vous

18 poser une question sur le document que nous avons devant nous, sur la ligne

19 juste avant la signature, on voit que : "Toutes les forces pendant b/d",

20 est-ce que cela concerne les opérations de combat ? Que représente ce sigle

21 ?

22 R. "Avec toutes les forces durant les actions de combat, le commandant du

23 Corps de Pristina sera au commandement à partir du poste de commandement

24 avancé." Donc le commandant de la brigade recopie une phrase qu'il tire de

25 la décision émanant du commandant du corps d'armée. Il la traduit autrement

26 dit dans des mots à lui, parce qu'à ses yeux, le commandement conjoint

27 n'est pas un commandement conjoint official, c'est le commandement du Corps

28 de Pristina qui se trouve au poste de commandement avancé.

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1 Q. S'il avait reçu un ordre qui le mettait dans le poste de commandant de

2 cette opération, pourquoi faut-il se préoccuper du fait qu'il y ait oui ou

3 non un commandement conjoint ? Et pourquoi dit-il : "toutes les forces qui

4 sont sous le commandement et le contrôle du poste de commandement avancé du

5 Corps de Pristina" ?

6 R. Parce que les autres unités sont voisines de l'unité en question et au

7 cas où il faut intervenir, elles devront intervenir dans les combats, et si

8 un problème se pose qui ne peut pas être réglé directement, alors on

9 s'adresse au commandement du corps d'armée par le biais du commandant du

10 corps d'armée pour régler les problèmes qui se posent au niveau des

11 combats.

12 Q. Général, d'après vos précédentes réponses, j'en déduis que vous, qui

13 supposez pour le colonel Cirkovic -- la croyance que le commandement

14 conjoint n'est pas un commandement conjoint. Alors pourquoi avoir émis cet

15 ordre que vous avez signé, 1428, où il est écrit "Le commandement conjoint

16 du Kosovo-Metohija" en lettres grasses juste au-dessus de votre nom ?

17 Pourquoi vous ne l'avez pas laissé de côté, comme vous essayez de le

18 prétendre en ce qui le concerne, lui ?

19 R. Je m'efforce, et je vous demande encore un peu de patience, je

20 m'efforce d'expliquer qu'au moment où ont été menées les actions en

21 question avec l'appui du MUP et de l'armée yougoslave, l'expression

22 "commandement conjoint" était utilisée dans le sens --

23 Q. Mais pourquoi vous ne l'avez pas laissé de côté si vous ne pensiez pas

24 qu'il s'agissait effectivement d'un commandement conjoint, pourquoi vous

25 l'avez signé de cette manière-là au mois d'août ?

26 R. Sauf votre respect, je voudrais vous répondre, si vous me laissez le

27 temps. Pourquoi ? Parce que c'était un document nécessaire aux unités

28 subordonnées auxquelles il fallait montrer que les combats devaient se

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1 mener dans le cadre de la réalisation de la mission, et ce, de concert avec

2 la police. Ça, c'est le point fondamental, il s'agit d'actions menées par

3 des instances qui ont chacune sa chaîne de commandement, mais qui doivent

4 agir ensemble.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi cela ne s'applique pas au

6 document que nous voyons sur le prétoire électronique qui concerne des

7 actions coordonnées.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, effectivement. Mais

9 cette coopération entre l'armée et le MUP est régie au niveau du

10 commandement du corps d'armée, au niveau de l'état-major du MUP également,

11 et cette expression est partie de là à la destination des subordonnées.

12 Lorsque le document arrive auprès des subordonnés, le subordonné le traduit

13 pour lui et, lui, la seule chose qu'il connaît, c'est le commandement du

14 corps d'armée, et c'est au commandement du corps d'armée qu'il doit faire

15 rapport.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

17 M. HANNIS : [interprétation]

18 Q. Si c'est le cas, pourquoi à ce moment-là vous n'avez utilisé ce que

19 vous avez dit considérer plus tôt comme étant le bon terme, à savoir "le

20 commandement des opérations combinées" plutôt que "conjoint" ?

21 R. Monsieur le Procureur, et je demande à la Chambre l'autorisation de

22 m'adresser directement au Procureur. J'aurais beaucoup aimé que les choses

23 se passent ainsi, car vous auriez eu moins de difficultés avec nous. Mais

24 en réalité l'expression a été utilisée effectivement, et c'est une

25 expression erronée du point de vue du règlement militaire. C'est une

26 nouvelle dénomination qui a été créée par un certain nombre de responsables

27 ensemble. Donc quelqu'un au lieu de parler d'opération combinée, a parlé de

28 conjoint, c'est une nouvelle dénomination. J'essaie d'expliquer qu'est-ce

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1 que cela signifie, comment elle a été créée, cette expression, d'où elle

2 vient et ce qu'elle signifiait dans la pratique.

3 Q. Vous nous avez dit à plusieurs reprises "quelqu'un l'aurait baptisé le

4 'commandement conjoint'," à savoir un organe qui n'existait pas. Qui a fait

5 cela, qui l'a baptisé ainsi ?

6 R. Je crains que la Chambre de première instance me charge du fardeau que

7 constitue l'obligation de savoir ce qu'il en est. Qui a baptisé cette

8 instance de ce nom, qui a créé cette expression, je crains, Monsieur le

9 Président, Mesdames, Monsieur les Juges, de ne pas le savoir.

10 Au poste de commandement avancé, j'ai eu sous les yeux et j'ai reçu des

11 documents venant du commandement du corps d'armée, mais dans la meilleure

12 intention du monde je ne saurais vous dire qui est à l'origine de la

13 naissance de cette expression et qui a utilisé cette expression pour la

14 première fois.

15 J'ai eu sous les yeux des documents - pas à l'époque, mais aujourd'hui -

16 montrant que le commandant de l'armée et le chef du Grand quartier général

17 ont utilisé cette expression, y compris Perisic au Grand quartier général.

18 En même temps, je n'ai pas vraiment réfléchi à cette question. J'aurais

19 voulu le faire à l'époque, j'aurais préféré. Cela m'aurait permis au moins

20 de répondre à votre question aujourd'hui.

21 Q. S'agit-il du premier document que vous auriez signé qui contienne une

22 référence faisant allusion au "commandement conjoint" ? Je sais qu'il y en

23 a au mois de mars ?

24 R. Si vous faites référence à l'année 1998, je ne sais vraiment pas. Il

25 est possible qu'il existe un autre document, mais je ne sais pas, vraiment

26 je ne le sais pas. Je n'affirme pas que c'est bien le cas, je ne dis pas

27 que ce n'est pas le cas, non plus. J'admets toutes les possibilités.

28 Q. Vous m'avez entendu poser cette question à d'autres soldats de

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1 carrière, des généraux à la retraite, colonels, et cetera, qui sont venus

2 déposer ici, et c'est pour cela que je vous pose la question à vous aussi.

3 Est-ce que le mot "commandement" a une signification toute particulière

4 pour vous, autre que ce mot aurait pour un civil ?

5 R. Je ne sais pas ce que pense un civil quand on lui dit "commandement."

6 Vraiment je ne le sais pas. Sans doute, qu'est-ce qui lui vient à l'esprit

7 -- puisqu'il a moins de connaissance au sujet du "commandement". Sans doute

8 qu'il en sait moins, mais je ne sais pas ce qu'il pense, un civil, quand il

9 entend ce mot. Mais s'il faut que je vous réponde quant à la terminologie

10 militaire, qu'est-ce que cela signifie -- qu'est-ce que vous voulez, vous

11 voulez que je poursuive ?

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites que vous, en tant que

13 citoyen, vous ne savez pas à quoi on pense quand on dit "commandement" ?

14 Parce qu'on peut l'utiliser dans toutes sortes de situations. Est-ce que

15 vous dites que vous ne savez pas comment un citoyen ordinaire comprend ce

16 mot dans votre langue, dans le langage de tous les jours ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne réfléchis pas comme cela, Monsieur le

18 Président. Je pense au "commandement" au sens militaire du terme.

19 Qu'est-ce que c'est un "commandement militaire" ? De quel niveau parle-t-on

20 ? Et si vous voulez que j'essaie de vous donner une réponse là-dessus, je

21 suis tout à fait prêt à le faire.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On va voir ce que M. Hannis veut

23 savoir. Ce qu'il veut savoir, si j'ai bien compris, c'est comment on

24 définit le terme "commandement" dans le cercle militaire. Il veut savoir si

25 ce terme a une connotation particulière auprès des militaires.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est sûr que là, la signification est tout à

27 fait précise. Le "commandement", ça fait partie de l'organisation de

28 l'armée yougoslave qui a sa formation, son organisation, sa composition, sa

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1 structure, sa mission, ses tâches, ses compétences; un lieu où il se

2 trouve, ainsi que des locaux, des transmissions et des rapports internes.

3 M. HANNIS : [interprétation]

4 Q. Mon Général, ce qui m'intéressait, c'est de savoir si au sein de

5 l'armée, auprès des militaires, quand on utilise les termes "commandement"

6 ou "chaîne de commandement", ce sont des termes extrêmement importants. Je

7 n'ai fait qu'un bref séjour dans mon armée, et d'après cette expérience, il

8 existe une grande différence entre les termes "commandement" ou "chaîne de

9 commandement" quand j'étais dans l'armée, et de la connotation que je

10 pouvais donner à ces termes dans le bureau du Procureur, par exemple, en

11 dehors de l'armée.

12 Donc quand je vois des documents intitulés "Commandement conjoint", je suis

13 curieux. Je veux savoir ce que cela veut dire. Qu'est-ce que c'est que ce

14 "commandement conjoint" ? Qu'est-ce qu'ils souhaitent dire par là ? Et je

15 me dis que j'aimerais savoir, si j'étais membre de l'armée, ce que cela

16 signifie. Qu'est-ce qu'ils veulent dire par là. Est-ce qu'il y a une

17 subordination ? Quelle est la place de cela ?

18 La première fois que vous avez entendu ces termes : "le commandement

19 conjoint pour le Kosovo-Metohija", est-ce que vous avez essayé de savoir de

20 quoi il s'agit ?

21 R. J'ai vu pour la première fois ce terme dans un document, et vu le

22 contenu de ce document - je ne sais pas quel était le premier document -

23 là-dedans, on définissait le rapport et la coopération entre l'armée et la

24 police dans l'exécution d'une mission de combat précise. Et j'ai compris

25 que cela se référait à un plan de coordination entre ces deux structures et

26 à la possibilité de réunir ces deux commandements pour certains aspects de

27 cette mission, de sorte que dans un lieu le représentant de l'armée et de

28 la police peuvent observer, suivre la situation, et que chacun, de son

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1 point de vue, peut suivre et commander les agissements de leurs unités

2 respectives.

3 Pour moi, il s'agissait d'un synonyme pour les termes "commandements

4 combinés" ou un "poste de commandement combiné".

5 Q. Mais j'avais l'impression que vous avez dit qu'il existait des

6 différences entre un poste de commandement combiné et un poste de

7 commandement conjoint. Parce que je pense que vous avez essayé de dire que,

8 quand on dit un poste de commandement conjoint, cela veut dire qu'il existe

9 une seule chaîne de commandement pour deux structures différentes, pour

10 deux unités différentes -- venues de deux structures différentes --

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila.

12 M. FILA : [interprétation] Mais où cela a été dit ? S'il vous plaît,

13 donnez-moi la référence exacte.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis.

15 M. HANNIS : [interprétation] Je peux donner la référence si le général en a

16 besoin. Je n'ai pas besoin qu'il ait besoin d'une référence pour nous

17 donner la différence qui existe entre ces deux termes. S'il pense que je me

18 trompe, qu'il le dise, et il ne l'a pas dit. Et s'il ne l'a pas dit, il

19 peut aussi dire qu'il ne se souvient pas avoir dit cela.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, j'ai l'impression

22 qu'on dit que vous avez tort, que votre souvenir n'est pas exact.

23 M. ACKERMAN : [interprétation] Je lui ai posé la question précise à la fin

24 de mon contre-interrogatoire hier, et je lui ai demandé ce que c'était que

25 ce commandement conjoint. Je lui ai posé la question de façon très précise.

26 Il a donné une réponse très précise, mot pour mot. Il a dit que c'était

27 différent. Et il a dit que c'était un endroit où on pouvait commander

28 ensemble, que chacun commandait ses propres forces, soit MUP, soit l'armée

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1 yougoslave. C'est ce qu'il a dit hier. Il a dit exactement la même chose

2 hier.

3 M. HANNIS : [interprétation] Je vais retirer la question alors.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous pourrez parler de cela demain --

5 -- entre-temps vérifier cela, voir s'il s'agit de deux concepts

6 différents.

7 M. ACKERMAN : [interprétation] Je regarde le document que j'avais sur

8 l'écran - peut-être qu'il est toujours là - c'est le dernier paragraphe --

9 Vous pouvez voir en haut, on voit la description d'un poste de

10 commandement qui se trouve à Cesta. C'est le poste de commandement d'où le

11 commandant va commander ses troupes, et c'est différent que le poste de

12 commandement au niveau du poste de commandement avancé du Corps de

13 Pristina. Et c'est important que l'on comprenne qu'il existe une différence

14 entre ces deux termes.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] De toute façon, la question a été

16 retirée, et on peut y réfléchir à nouveau si M. Hannis trouve la base

17 adéquate pour poser la question.

18 M. HANNIS : [interprétation] Ce que M. Ackerman vient de dire, je fais

19 suite à cela. On est en train de regarder ce document 6D731. C'est le

20 colonel Cirkovic qui dit que le poste de commandement dans cette zone est

21 le poste de commandement de cette zone, la zone de Cesta.

22 Q. Cela veut dire que son poste de commandement pour les éléments de la

23 15e Brigade blindée dans la région, c'est justement le poste de

24 commandement pour cette zone-là, la zone de Cesta. Mais le poste de

25 commandement général, pour toutes les forces participant à l'opération --

26 ou à l'action, c'est le poste de commandement avancé du Corps de Pristina.

27 Ai-je raison de dire ça ?

28 R. Oui. Vous avez bien lu ce qui est écrit là, aussi bien la première que

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1 la deuxième partie du document, et j'ai donné la réponse que j'ai donnée.

2 Je n'ai jamais dit que le poste de commandement conjoint représente une

3 chaîne de commandement unique. Je n'ai jamais dit cela.

4 Q. Mais dans une autre réponse que vous avez donnée précédemment, quand

5 vous avez expliqué pourquoi vous dites que le colonel Cirkovic était le

6 commandant pour cette opération, c'est tout simplement parce qu'il n'y

7 avait que les éléments de la 15e qui participaient à quoi que ce soit. Et

8 tous les autres étaient là juste pour tenir les positions.

9 Alors qu'au niveau du document 1428, point 2.2, il est dit : "Le Groupe de

10 combat BG 125-2 doit procéder à une attaque de diversion." Donc, cela veut

11 dire que la 125e participe à quelque chose, elle fait quelque chose aussi,

12 n'est-ce pas ?

13 R. Ce groupe de combat fait une démonstration, une attaque de

14 démonstration. Ce n'est pas une vraie attaque. On parle de la composition

15 de la 125e Brigade. Ce n'est pas un bataillon, et que je sache à l'époque,

16 ils étaient dans la région depuis 15 jours déjà. Le commandement de la

17 brigade n'a jamais donné une mission particulière, précise, par écrit à ce

18 groupe de combat. Ils se rendaient à un endroit à peu près 500 mètres en

19 profondeur dans le terrain, ensuite ils revenaient, parce qu'ils étaient

20 sous le blocus depuis 15 jours déjà, et les autres groupes faisaient comme

21 ça aussi.

22 Q. Vous voulez dire que le commandement de la 15e n'a jamais donné des

23 ordres à la 125e ?

24 R. Non. Veuillez examiner avec moi l'ordre du commandant de la brigade. On

25 va ensemble regarder cela, si vous voulez. On va examiner ensemble l'ordre.

26 Mettez-le sur l'écran.

27 M. HANNIS : [interprétation] Je pense qu'il faudrait -- nous allons lever

28 la séance à présent.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je suis vraiment désolé. Ce n'est

2 pas vraiment le meilleur moment pour s'arrêter, mais vous devez le faire.

3 Apparemment pour le procès suivant, pour la cabine technique, il leur faut

4 au moins une demi-heure.

5 Donc, nous sommes vraiment obligés de reprendre nos travaux demain à 9

6 heures et de lever la séance à présent.

7 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le jeudi 15

8 novembre 2007, à 9 heures 00.

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