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1 Le jeudi 21 août 2008
2 [La plaidoirie - Milutinovic]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 [L'accusé Lazarevic n'est pas présent dans le prétoire]
6 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Hier, à
8 l'issue de l'audience, nous entendions la plaidoirie de Me O'Sullivan qui
9 va poursuivre.
10 Maître O'Sullivan, vous avez la parole.
11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, bonjour. Je
12 me rends compte qu'il me reste 45 minutes mais Me Fila m'a donné un peu de
13 son temps; je ferai de mon mieux pour finir dans les délais qui m'ont été
14 impartis.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Jusqu'à présent, nous devons dire que
16 les exposés des parties sont très utiles. Vous ne devriez pas regarder
17 l'heure de trop près si vous avez des arguments intéressants à nous
18 présenter. Il y aura peut-être une réplique et une duplique et s'il y a des
19 points importants à présenter suite à ce qui a été dit dans le prétoire, il
20 nous serait utile d'entendre vos arguments.
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je vous en remercie.
22 Comme je l'ai dit d'emblée, j'entends répondre aux arguments avancés par
23 l'Accusation et c'est ce que je vais continuer à faire ce matin. A l'issue
24 de l'audience d'hier, le Juge Chowhan a soulevé deux points, je
25 souhaiterais y répondre. Si vous m'y autorisez, j'évoquerai l'un de ces
26 points un peu plus tard, à savoir l'allégation présentée au paragraphe 613
27 du mémoire de l'Accusation selon laquelle M. Milutinovic n'a pas restreint
28 la VJ en ne proposant pas de convoquer une séance du Conseil suprême de la
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1 Défense et en ne proposant pas de programme au Conseil suprême de la
2 Défense.
3 Je souhaiterais parler de l'autre point soulevé par le Juge Chowhan. Vous
4 m'avez posé une question au sujet des consultations en rapport avec les
5 nominations au sein de la VJ et les pouvoirs conférés au Conseil suprême de
6 la Défense. Voilà ma réponse : le Conseil suprême de la Défense n'avait pas
7 le pouvoir de nommer qui que ce soit; je vous renvoie à l'article 136 de la
8 constitution de la RSFY. Il s'agit d'un pouvoir exclusivement conféré au
9 président de la République fédérale de Yougoslavie.
10 La question que vous m'avez posée hier a laissé entendre que le Conseil
11 suprême de la Défense était doté de ces pouvoirs. D'après nous, ce n'était
12 pas le cas; que ce soit en vertu de la constitution ou en vertu de la loi
13 sur la VJ. Nous vous renvoyons à notre mémoire en clôture sur ce point,
14 paragraphes 67 et 70 à 77. Voilà notre position : le président de la RSFY
15 n'est pas tenu de placer les questions relatives au personnel à l'ordre du
16 jour du Conseil suprême de la Défense. Il n'est pas tenu de consulter des
17 membres du Conseil suprême de la Défense pour les questions relatives au
18 personnel. Il peut le faire et lorsque le président de la RSFY l'a fait,
19 lorsqu'il a inclus ces questions à l'ordre du jour, ces informations ont
20 été communiquées aux membres du Conseil suprême de la Défense qui ont
21 exprimé leurs points de vue sur la modification; et comme c'est en se sens
22 que l'on peut dire que les membres du Conseil suprême de la Défense étaient
23 consultés.
24 Au dossier, nous trouvons de nombreux exemples indiquant que le président
25 de la RSFY a procédé à des nominations au sein de la VJ durant la période
26 couverte par l'acte d'accusation. Il n'y a eu à ces occasions aucune
27 consultation avec le Conseil suprême de la Défense car il avait le pouvoir
28 de le faire. Je vous donnerai l'exemple du général Obradovic nommé par le
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1 président Milosevic, en qualité du commandant de la 2e Armée au Monténégro,
2 et ce, à la fin du mois de mars 1999. Souvenez-vous de Geza Farkas qui a
3 été nommé par le président Milosevic en tant que chef de l'administration
4 de la sécurité le 24 mars 1999 ? Le Témoin à charge Vasiljevic a lui aussi
5 été nommé par le président Milosevic en tant que l'adjoint de Farkas le 27
6 avril.
7 Je demande à la Chambre d'examiner également la pièce P1018. Il
8 s'agit d'une série de décrets pris par le président Milosevic concernant
9 les nominations et les récompenses au sein de la VJ pour ce qui est des
10 années 1999 et 2000. Il s'agit d'un document assez long qui comporte 350
11 pages. Au cours de cette période, nous savons également que le Conseil
12 suprême de la Défense ne se réunissait pas.
13 En réponse à votre question, Monsieur le Juge, voilà donc notre position
14 sur ce point.
15 M. LE JUGE CHOWHAN : [aucune interprétation]
16 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je souhaiterais maintenant parler d'un
17 autre aspect relatif au Conseil suprême de la Défense. Je vous rappelle
18 l'allégation présentée par l'Accusation concernant le Conseil suprême de la
19 Défense et le commandement Suprême.
20 M. Milutinovic n'était pas membre de l'entité appelée commandement Suprême.
21 La VSO ne faisait pas partie du commandement Suprême et n'en est pas devenu
22 un organe.
23 La Chambre a vu tous les documents pertinents concernant le Conseil suprême
24 de la Défense et le commandement Suprême. Vous avez vu les lois, la
25 constitution, les procès-verbaux de réunions, vous avez entendu les
26 témoignages d'officiers de la VJ qui se souvenaient de l'entité appelée
27 Conseil suprême de la Défense. Ces personnes ont été présentes dans les --
28 le bunker de Belgrade pendant 78 jours. Ils ont assisté aux réunions
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1 quotidiennes de la direction collégiale.
2 Dans notre mémoire aux paragraphes 62 à 116, nous présentons notre thèse
3 sur cette question. Voilà les éléments de preuve : l'entité appelée le
4 Conseil suprême de la Défense comportait le président de la RSFY,
5 commandant suprême, et ce dernier disposait d'un état-major de commandement
6 qui constituais l'état-major du commandement Suprême. En temps de paix, il
7 s'agissait de l'état-major général. Le président de la RSFY était le seul
8 civil au sein du commandement Suprême. Et conformément à la doctrine
9 militaire et au principe de l'unicité du commandement, chaque commandant
10 avait son état-major qui était chargé d'appliquer les ordres qu'il donnait.
11 Qu'en est-il des éléments de preuve ? Parlons de nouveau de la pièce P604,
12 l'audition de M. Milutinovic en 2001. M. Milutinovic a dit aux
13 représentants du bureau du Procureur que -- que lorsque le gouvernement
14 fédéral a proclamé l'état de guerre, tout se déroulait ensuite au niveau de
15 la fédération. Il a raconté que le président de la RSFY commandait l'armée
16 par le biais de l'état-major du commandement Suprême, le président de la
17 RSFY donnait des -- faisait
18 -- donnait ses ordres par le truchement du chef de l'état-major du
19 commandement Suprême. Selon lui, les présidents du Monténégro et de la
20 Serbie n'avaient aucun pouvoir, aucun rôle pour ce qui est de la défense du
21 pays en temps de guerre.
22 Qu'en est-il des participants directs aux faits qui sont venus témoigner
23 dans ce prétoire ? Que vous ont-ils dit ? Souvenons-nous du général
24 Vasiljevic, témoin à charge, et des témoins à décharge, Gajic, Simic,
25 Smiljanic, Krga, Curcin. Souvenons-nous du témoin de la Chambre, M.
26 Dimitrijevic ? Tous ces témoins ont raconté la même chose. Tous ces témoins
27 ont confirmé point par point la position exprimée par M. Milutinovic au
28 bureau du Procureur en 2001, et c'est la Chambre de première instance elle-
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1 même qui s'est penchée sur la question par le biais de ces questions au
2 témoin Gajic. Vous avez demandé au Témoin Gajic quelle est -- qui composait
3 le Conseil suprême de la Défense -- ou plutôt, le commandement Suprême.
4 Vous lui avez demandé à deux reprises quelle était sa composition. Le
5 premier jour de son témoignage et le cinquième jour de son témoignage, vous
6 avez voulu savoir s'il était cohérent et s'il était crédible. Il était
7 cohérent et crédible. Il vous a décrit à quoi ressemblait le commandement
8 Suprême, il vous a relaté que M. Milutinovic n'était pas membre du -- du
9 commandement Suprême. Il n'était pas présent, il n'était pas impliqué. Il
10 vous a dit que le commandant suprême était le seul civil membre de cette
11 entité, le seul membre du commandement Suprême. Il a déclaré que le Conseil
12 suprême de la Défense ne jouait aucun rôle et ne se réunissait pas.
13 Au vu de ces preuves irréfutables, l'Accusation vous a présenté deux
14 témoins. L'un d'entre eux est le colonel Mucibabic, il était membre de
15 l'administration chargée des opérations. Il n'était pas membre de la
16 direction collégiale, il n'a pas assisté aux réunions de celle-ci. Le
17 colonel Paskas et lui étaient -- étaient chargés d'organiser le bureau pour
18 les réunions du soir, ils prenaient des notes. Il a dit ce qu'il pensait
19 personnellement de la situation et, sauf le respect que je dois à M.
20 Mucibabic, il n'était pas en position de connaître la situation, et vous
21 devez faire fi de son témoignage compte tenu du témoignage d'officiers de
22 haut rang qui eux étaient présents.
23 Il en va de même du deuxième témoin, le général Obradovic mentionné par
24 l'Accusation dans son mémoire. Nous en avons parlé au paragraphe 101 de
25 notre mémoire en clôture. L'Accusation a posé des questions au général
26 Simic concernant le témoignage du général Obradovic. Le général Simic a dit
27 qu'à la fin du mois de mars 1999, Obradovic s'était rendu au Monténégro et
28 qu'il était commandant de la 2e Armée. Le général Obradovic n'était pas
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1 membre de l'état-major du commandement Suprême, il n'était pas présent sur
2 les lieux. Simic vous a dit qui étaient les membres de l'état-major du
3 commandement Suprême. Il a dit que le Conseil suprême de la Défense n'était
4 pas devenu le commandement Suprême, et ce, conformément aux principes de
5 l'unicité du commandement. Il a ajouté que le Conseil suprême de la Défense
6 ne se réunissait pas.
7 Alors quels sont les éléments de preuve sur lesquels nous nous appuyons
8 pour dire que ce conseil ne se réunissait pas ? Je vous renvoie à la pièce
9 P604 de nouveau, l'audition de M. Milutinovic. Je vous renvoie aux
10 témoignages des officiers de haut rang de la VJ, au témoignage de M. Kojic
11 qui était membre de l'état-major du cabinet de M. Milutinovic. Tous ces
12 témoignages confirment ce qui a été dit par les autorités de la Serbie et
13 du Monténégro conformément à l'article 54 bis qui ont déclaré qu'il n'y
14 avait pas de réunion du Conseil suprême de la Défense entre le 23 mars 1999
15 et le 5 octobre 2000.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et quel était son statut pendant cette
17 période ?
18 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Le Conseil suprême de la Défense existait
19 bel et bien comme il est indiqué au paragraphe 135 de la constitution.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc l'état de guerre n'avait aucune
21 incidence sur l'entité appelée Conseil suprême de la Défense et qui pouvait
22 fonctionner ?
23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] C'est exact.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
25 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Cependant, nous affirmons que le Conseil
26 suprême de la Défense n'avait aucune raison de se réunir en temps de guerre
27 --
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de passer à autre chose, si un
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1 membre du Conseil suprême de la Défense ne pensait pas que le commandant
2 suprême commandait l'armée conformément aux décisions prises par le Conseil
3 suprême de la Défense. Pourquoi est-ce qu'il n'aurait pas pu demander à
4 convoquer une réunion contenue des nouvelles règles qui ont été adoptées.
5 C'était possible, n'est-ce pas ?
6 [Le conseil de la Défense se concerte]
7 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, effectivement. Merci.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
9 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Nous affirmons, cependant, que le Conseil
10 suprême de la Défense ne s'est pas réunie au cours de cette période et qui
11 n'avait aucune raison de le faire lorsque l'état de guerre est déclaré.
12 Ce sont les autorités fédérales et républicaines compétentes qui
13 fonctionnaient à l'époque et qui étaient chargées de traiter des questions
14 relatives à la guerre, à la paix, à la défense du pays en cas d'attaque.
15 Le Conseil suprême de la Défense, M. Milutinovic en particulier, n'a joué
16 aucun rôle et n'avait aucun pouvoir pour ce qui est des décisions qui
17 devraient être prises en rapport avec la VJ, le MUP ou d'autres formations
18 participant à l'effort de guerre. Le Conseil suprême de la Défense et, en
19 particulier M. Milutinovic, n'a joué aucun rôle dans les délibérations
20 concernant le danger de guerre imminent, l'état de guerre ou la cessation
21 des hostilités.
22 Nous savons que la VJ est une armée fédérale, et qu'en vertu de la
23 constitution en vigueur, la VJ était tenue de défendre la souveraineté du
24 pays, son indépendance et l'ordre constitutionnel. Cette armée est
25 commandée exclusivement par le président de la fédération. Les organes du
26 gouvernement fédéral, notamment le ministère de la Défense, énoncent des –-
27 définissent des stratégies et mettent en œuvre tout ce qui a trait à la
28 défense et à la sécurité. Nous savons que le MUP relève du ministère de
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1 l'Intérieur, lequel rencontre le gouvernement et en dernier lieu, à
2 l'assemblée nationale. Nous vous demandons de prendre en considération la
3 pièce 3D678 [comme interprété] l'ordre de subordination daté du 18 avril
4 1999. Nous l'avons intégré dans son intégralité dans notre mémoire et je
5 reviendrai brièvement sur ce document.
6 Selon nous, cet ordre concernant la subordination est cruciale. Il s'agit
7 du seul ordre écrit donné par le commandant suprême pendant la guerre, à
8 savoir le président Milosevic; nous attirons votre attention sur le
9 préambule de cet ordre. Il y ait dit que l'ordre est donné en application
10 de la loi sur l'armée de la Yougoslavie et de la loi sur la Défense, nous
11 vous renvoyons aux conclusions du Conseil suprême de la Défense en date
12 d'octobre 1998.
13 Alors, que trouve-t-on dans ce texte ? Nous constatons que le président de
14 la RSFY, le commandant suprême, constitue le seul organe fédéral compétent
15 pouvant commander. Ces pouvoirs lui sont conférés par la constitution et
16 par les lois en vigueur. Il peut prendre des décisions, il peut donner des
17 ordres concernant les opérations. Nous affirmons que le Conseil suprême de
18 la Défense n'est pas un organe de commandement, n'est pas chargé de la
19 planification, n'est pas chargé de donner des ordres. Comment le savons-
20 nous ? Examinons les conclusions du Conseil suprême de la Défense datées
21 d'octobre 1998, elles sont mentionnées dans l'ordre du 18 avril 1999.
22 Souvenons-nous de P1575, il s'agit du procès-verbal de la 6e Séance du
23 Conseil suprême de la Défense tenue le 4 octobre. Nous voyons qu'à la fin
24 des longs débats qui se sont tenus à cette occasion, veuillez garder à
25 l'esprit la résolution du Conseil de Sécurité prise le 23 septembre. Les
26 membres débattent de la manière dont ils doivent remplir leurs obligations,
27 vis-à-vis la Yougoslavie, afin de trouver une solution pacifique au
28 problème du Kosovo.
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1 Tout cela figure au dossier, je cite : "A l'issue des débats, le président
2 de la RSFY et du Conseil suprême de la Défense, Slobodan Milosevic, a
3 proposé que la conclusion de cette séance soit résumée ainsi. La
4 Yougoslavie maintient qu'elle souhaite la paix et qu'elle est disposée à
5 régler tous les problèmes actuels de manière pacifique; cependant, en cas
6 d'attaque, la Yougoslavie se défendra par tous les moyens." Cette position
7 a été acceptée par les présidents Milutinovic et Djukanovic.
8 Nous devrions également garder à l'esprit le document P1577, il s'agit du
9 procès-verbal de la 9e Séance du Conseil suprême de la Défense tenue le 23
10 mars 1999, à la veille du conflit, le président Milosevic rappelle au
11 Conseil suprême de la Défense quelle a été la position adoptée lors de la
12 séance que je viens de mentionner s'agissant de la résolution pacifique du
13 problème et de la défense du pays en cas d'attaque. Ceci montre donc quel a
14 été le rôle joué par le Conseil suprême de la Défense de la politique
15 adoptée au niveau de l'état à propos de la situation en matière de sécurité
16 au Kosovo, les menaces contre la souveraineté du pays, la nécessité de
17 défendre le pays en cas d'attaque. Ces positions ont été adoptées de façon
18 unanime après débats entre les membres du Conseil de la Défense.
19 La Chambre se souviendra également qu'en 1998, à l'occasion d'une séance du
20 Conseil suprême de la Défense, au mois de juin, une conclusion semblable a
21 été adoptée par tous les membres du Conseil qui ont déclaré qu'en cas
22 d'intensification des activités terroristes de la part des séparatistes
23 albanais, l'armée de Yougoslavie interviendrait comme il se doit. Et nous
24 savons que cette conclusion a été suivie d'un ordre opérationnel donné par
25 le président de la RSFY le 21 juillet 1998, il a ordonné de combattre le
26 terrorisme au Kosovo vu l'intensification des activités. Nous savons
27 également que le plan de répression du terrorisme a été préparé, proposé et
28 approuvé par le président de la RSFY.
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1 Je vais maintenant passer à un autre sujet. Aux pages 26 863 et 26 864 du
2 compte rendu, le Procureur vous a renvoyé à la pièce 3D728; il s'agit du
3 procès-verbal d'une réunion tenue le soir du 11 avril 1999. Nous en parlons
4 dans notre mémoire aux paragraphes 110 à 113. L'Accusation a soulevé la
5 question de la signification des acronymes. Selon le Procureur, "VK"
6 signifie commandant suprême tandis que "VK-DA" représente le commandement
7 Suprême. Les éléments de preuve présentés sur ce point sont sans équivoque.
8 Souvenons-nous du témoignage du Témoin à décharge Vlajkovic. Lors de son
9 contre-interrogatoire à la page 16 098 du compte rendu d'audience, on lui a
10 posé cette question :
11 "Q. Avant de vous poser ma dernière question, je reviens sur la réponse
12 que vous venez de faire. Vous avez dit que 'VK' voulait dire commandant
13 suprême; si vous parlez du commandement Suprême, vous utilisez l'acronyme
14 'VK-DA,' n'est-ce pas ?"
15 R. Oui."
16 Souvenons-nous du témoignage de Branko Fezer aux pages 16 487 et 16 487
17 et 16 488 ? Le Procureur a également mentionné le témoignage de M. Gajic
18 s'agissant de cette réunion. Gajic a déclaré que Slobodan Milosevic était
19 le seul homme politique membre du commandement Suprême. Le Témoin Vlajkovic
20 a déclaré que M. Milutinovic n'avait jamais assisté aux réunions de l'état-
21 major du commandement Suprême. A cette réunion ont participé également
22 trois personnes qui ont témoigné en l'espèce. Je vous renvoie à la pièce
23 3D728. Le Témoin Curcin qui a déclaré que le général Pavkovic avait
24 présenté des informations à l'état-major du commandement Suprême en
25 présence du commandant suprême; le Procureur, dans son mémoire au
26 paragraphe 737, affirme la même chose, à savoir, que la réunion a eu lieu
27 en présence du commandant suprême.
28 Les deux autres témoins dont le nom apparaît dans ce document sont
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1 Smiljanic et Krga. On ne leur a pas posé de questions au sujet de la pièce
2 3D728, mais nous savons quel est le témoignage s'agissant du commandement
3 Suprême. Smiljanic a dit que le seul civil membre du commandement Suprême
4 était le commandant suprême, M. Milosevic. Krga a déclaré qu'il n'y avait
5 pas d'entité collégiale commandant la VJ. La VJ était commandée par
6 Slobodan Milosevic.
7 Et par ailleurs s'agissant d'une question annexe, l'Accusation renvoie
8 un article du journal Politika, pièce 1010, et nous vous engageons à ne pas
9 en tenir compte.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître O'Sullivan, je suis un petit
11 peu surpris. Vous avez parlé du général Pavkovic qui fait un briefing au
12 commandement Suprême. Je comprends quand on parle à ce moment-là de
13 commandement Suprême, c'est logique d'utiliser ce terme pour désigner le
14 commandant. Mais à l'instant, vous venez de parler : "Du seul civil au sein
15 du commandement Suprême, M. Milosevic," qui en était le commandant suprême.
16 Je ne comprends pas alors. Qu'est-ce que c'est que ce commandement Suprême
17 ? Je vois bien ce que c'est qu'un commandement Suprême. Et je ne comprends
18 pas que ce soit une instance où on trouve un civil.
19 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Voilà. Je vais vous expliquer, c'est-à-
20 dire c'est ce que nous ont dit les officiers qui sont venus déposer ici.
21 Quand vous avez un chef, un commandant, il a un état-major.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends bien. Vous nous l'avez
23 déjà expliqué, mais c'est votre deuxième acception qui me gêne.
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Mais c'est la manière dont ça a été
25 exprimé. C'est dû à l'unicité du commandement au sein de l'armée. Vous avez
26 le commandant, il a un état-major, du personnel qui exécuté ses ordres. Il
27 y a une seule personne, une personne uniquement qui donne les ordres et ça
28 transparaît dans l'ordre de re-subordination.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, normalement ça devrait être le
2 même cas en temps de paix. On connaît la situation où vous avez un
3 président qui commande l'armée en temps de guerre en tant de paix, donc
4 c'est lui qui donne les ordres dans les deux cas, même concept, même au
5 moment où il n'y avait pas de commandement Suprême, il y avait toujours un
6 commandant suprême, en l'occurrence le président de la RSFY agissant
7 conformément aux avis donnés par le Conseil suprême de la Défense.
8 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, nous sommes d'accord. Nous pensons
9 que le président Milosevic c'est le seul qui était à même de donner des
10 ordres.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais en temps de paix vous
12 avez le Conseil suprême de la Défense. On comprend donc de quoi il
13 retourne. On a une instance qui compte parmi ses membres des civils. Mais
14 lorsqu'on commence à parler du commandement Suprême, on nous a aussi parlé
15 de ses membres, mais on voit qu'au bout du compte qu'il y a qu'un seul
16 membre au sein de ce commandement. C'est ce que vous nous dites, et là ça
17 devient un petit peu problématique. Cela ne semble pas être d'une grande
18 logique.
19 M. O'SULLIVAN : [interprétation] A ce moment-là, je devrais peut-être
20 inclure le commandant, le chef et son personnel. La différence c'est que
21 par rapport aux autres commandements dans l'armée, nous avons là le seul
22 cas où c'est un civil qui commande, qui donne des ordres. Et pendant la
23 guerre - d'ailleurs on en a déjà parlé - pendant la guerre, on utilise à ce
24 moment-là le terme de "commandement Suprême" pour des raisons historiques,
25 nous les développons dans notre mémoire. Voilà la logique qui prévaut. La
26 loi sur la VJ n'a pas changé. L'état-major général s'appelle maintenant
27 état-major du commandement Suprême parce qu'ils estimaient que le président
28 Milosevic était leur commandant, leur chef pour des raisons historiques.
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1 Voilà comment se présentent les choses à ce moment-là.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Une dernière chose, toujours sur le
4 même sujet, j'aimerais pouvoir comprendre. Vous souvenez-vous d'un témoin
5 qui a avancé que l'état-major du commandement Suprême ne traduisait pas
6 systématiquement dans les faits les ordres du commandant suprême et qu'ils
7 avaient une certaine marge de manœuvre à ce sujet à l'époque. Ça a paru un
8 peu bizarre, cette réponse, entendre qu'un état-major pouvait agir
9 distinctement des ordres du commandement. Peut-être que je ne me souviens
10 pas très bien de ce qui nous a été dit, ou peut-être que je me trompe.
11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Mais je sais que le général Curcin a
12 expliqué que, chaque matin, le général Ojdanic rencontrait le président
13 Milosevic, et ensuite il transformait les ordres du président Milosevic en
14 ordres militaires au sens strict du terme et les passait à la voie
15 hiérarchique. C'est donc vraiment une situation où vous avez les ordres du
16 commandement Suprême ou du commandant suprême qui sont mises en œuvre par
17 son état-major.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.
19 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je souhaiterais maintenant passer à un
20 autre point de l'acte d'accusation.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, Maître.
22 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. Veuillez poursuivre,
24 Maître O'Sullivan.
25 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Merci.
26 Je souhaiterais maintenant passer à une accusation portée par l'Accusation
27 dans l'acte d'accusation. Il est dit que M. Milutinovic a promu le général
28 Lukic par décret. Or, selon nous, l'instrument qui porte promotion du
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1 général Lukic en mai 1999, c'est une ordonnance - ce n'est pas un décret –
2 signé par M. Milutinovic, et ceci nécessite un certain nombre
3 d'explications pour plusieurs raisons, pour des raisons à la fois d'ordre
4 conceptuel et linguistique. Dressons le contexte. En B/C/S, vous avez deux
5 termes. Le premier, c'est "uredba," U-R-E-D-B-A, et le deuxième terme,
6 c'est "ukaz," U-K-A-Z. Le problème a surgi quand le CLSS au moment de
7 traduire le rapport d'expert du Dr Markovic a décidé de traduire ces deux
8 mots en anglais par le mot "décret." Or, nous estimons que du point de vue
9 linguistique et du point de vue juridique également, et ça c'est peut-être
10 le plus important, il y a là erreur.
11 Nous avons évoqué la question. Nous en avons référé au CLSS. Ils ont
12 maintenu leur position. Nous vous avons soumis pendant la déposition du Pr
13 Markovic la pièce IC132, et on expliquait qu'il y avait vraiment une
14 différence entre "uredba," décret, et "ukaz," ordonnance. Je répète ce que
15 je viens de dire. Quand le général Lukic a été promu en mai, ça c'est fait
16 par le biais d'une ordonnance, un acte déclaratif signé par le président
17 Milutinovic.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors, justement, je me demandais si
19 vous alliez nous expliquer la différence qu'il y a entre un décret et une
20 ordonnance.
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je vais le faire --
22 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] -- mais je souhaiterais en terminer de la
24 question de l'erreur de traduction et de la question linguistique.
25 Au paragraphe 1 de la pièce 1D680, vous avez une phrase où on trouve le mot
26 "ukaz," et ça a été traduit par "délivrer un décret portant promotion du
27 général Lukic." Selon nous, il faut remplacer décret par ordonnance.
28 De même, si on regarde la page de garde de la pièce 1D680, on voit "projet
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1 de décret." Dans la traduction, en fait, il -– la bonne traduction, ce
2 serait "projet d'ordonnance." Deuxième pièce où il y a un problème, c'est
3 la pièce 1D722. Là encore, le terme "décret" a été employé dans la
4 traduction, alors qu'il faudrait dire "ordonnance," puisque quand on
5 regarde l'original en B/C/S, on voit que c'est le mot "ukaz" qui a été
6 utilisé.
7 Et dernière chose avant d'en venir au cœur même du sujet, c'est l'entretien
8 de M. Milutinovic avec le Procureur qui s'est mené en anglais. C'est la
9 pièce P604, et M. Milutinovic a utilisé le terme de "décret." On peut donc
10 dire que pour lui, les choses n'étaient pas non plus très claires.
11 Bien. Maintenant, passons à la différence entre un décret et une
12 ordonnance. Du point de vue conceptuel, ceci a été développé de manière
13 approfondie dans notre mémoire, paragraphes 55 à 61. Le
14 Pr Markovic en a également longuement parlé. Une ordonnance, c'est un acte
15 déclaratif. C'est quelque chose qui est très -- qui est analogue au pouvoir
16 conféré au président de la Serbie quand il promulgue une loi. En fait, on -
17 – il reconnaît qu'un certain fait existait. C'est le concept de
18 l'assentiment royal dans les monarchies constitutionnelles.
19 Le décret, ce n'est pas pareil. Le décret, c'est un acte exécutif, un
20 document exécutif, et on va le voir un peu plus tard, le seul moment où le
21 président de la Serbie est à même de signer un décret, c'est en cas d'état
22 de guerre parce que, sinon, il peut seulement signer des ordonnances. Ce
23 n'est pas des décrets.
24 Je précise, c'est en cas d'état de guerre irrégulier.
25 Maintenant, parlons de la promotion du général Lukic. Il s'agit d'une
26 promotion qui s'est faite de manière tout à fait classique, conformément
27 aux dispositions de la législation en matière de promotion, article 6(1),
28 sur la loi sur les grades et sur les promotions, l'article 6(1). Et
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1 l'article 7 et 8 prévoient que s'il y a un certain nombre de critères qui
2 sont remplis, à ce moment-là, l'intéressé est en droit d'obtenir une
3 promotion, une promotion ordinaire, régulière, et quand on regarde
4 l'ordonnance signée par le président, on voit que c'est confirmé. On voit
5 que l'intéressé donc a rempli les conditions juridiques prévues, est donc
6 en droit d'obtenir une promotion. C'est donc une simple formalité, un acte
7 déclaratif. La promotion est conforme à la législation en vigueur à
8 l'époque, et l'ordonnance, c'est simplement la toute dernière étape dans ce
9 processus.
10 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi, mais j'aimerais en
11 savoir un petit peu plus au sujet de ces deux termes. Moi, auparavant,
12 j'avais cru que les choses étaient bien claires dans mon esprit, mais
13 maintenant ce n'est plus vraiment le cas. L'ordonnance -- une ordonnance,
14 c'est un terme législatif qui doit être présenté à une instance. Ce n'est
15 pas quelque chose de permanent. Les décrets, ce sont des ordres exécutifs
16 qui n'ont peut-être pas de permanence. Mais, moi, je pense normalement que
17 les nominations, ce genre de chose, ça doit se faire par l'intermédiaire
18 d'une ordonnance -- d'un décret, pas d'une ordonnance. Je ne comprends pas
19 bien. C'est très bizarre, ce qui se passe à cet égard ici.
20 [Le conseil de la Défense se concerte]
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je viens de consulter mon confrère Me
22 Zecevic, et l'explication réside en partie dans les éléments suivants. Ce
23 sont les termes. Le terme utilisé en serbe, le terme de "uredba," c'est ça,
24 c'est un acte exécutif dans cette langue-là; "ukaz," c'est une ordonnance,
25 c'est un instrument juridique à caractère déclaratif. Le problème, c'est
26 peut-être qu'en anglais -- dans la traduction en anglais, on n'obtient pas
27 dans la traduction un concept qui recouvre celui qui est désigné par ces
28 mots en serbe ou en B/C/S.
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1 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Mais justement vous, vous êtes de
2 langue maternelle anglais. C'est pour ça que -- mais vous connaissez
3 également le B/C/S, c'est pour ça que je vous pose la question. Vous nous
4 dites que la nomination en question est -- elle s'est faite par
5 l'intermédiaire d'une ordonnance, en utilisant cette –- l'acception de ce
6 terme telle qu'on la comprend en anglais. C'est ça qui entraîne une
7 confusion. Pourquoi est-ce qu'il y aurait nomination d'une personne à un
8 poste quelconque par l'intermédiaire d'une ordonnance, et pas par
9 l'intermédiaire d'un décret ? Parce que c'est quand même un acte exécutif.
10 Voilà où réside la confusion. En tout cas, merci beaucoup. Je ne vais pas
11 insister plus lourdement.
12 [Le conseil de la Défense se concerte]
13 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je souhaiterais vous renvoyer au rapport
14 d'expert de M. Markovic qui nous dit la chose suivante : un décret c'est un
15 instrument qui émane d'un organe doté d'un pouvoir exécutif. C'est un
16 document, un instrument qui émane d'une instance exécutive. Par contre
17 lorsque l'on parle d'un "ukaz," d'une ordonnance, on a affaire à un
18 document, un instrument qui émane d'une instance qui n'est pas investi d'un
19 pouvoir exécutif. En ce qui concerne cette promotion, elle se fait en vertu
20 des dispositions de la loi, et la loi précise qu'il faut qu'une ordonnance
21 soit délivrée pour que la promotion existe.
22 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Excusez-moi, Maître O'Sullivan. Si
23 vous me permettez d'intervenir, Monsieur le Président, vous avez dit que
24 l'ordonnance était un acte à caractère déclaratif.
25 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui.
26 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Vous dites que c'était nécessaire
27 pour que la promotion entre en vigueur mais que c'était une formalité ?
28 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui.
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1 Mme LE JUGE NOSWORTHY : [interprétation] Merci.
2 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Deuxième chose au sujet de cette
3 promotion. Elle a eu lieu le 13 mai 1999, c'est le jour de la sécurité.
4 C'est ainsi qu'on n'appelle cette journée dans la république. Le 13 mai,
5 avant même l'existence de la RSFY et pendant l'existence de la RSFY,
6 c'était la journée de la police. Comme nous l'avons montré dans nos
7 arguments, c'est une journée pendant laquelle on rend hommage à la police,
8 il y a des décorations qui sont distribuées, des allocutions se tiennent,
9 il y a des concours littéraires, et cetera.
10 Et le 13 mai 1999, c'était la guerre, si bien que toutes ces célébrations
11 ont été un peu plus discrètes que d'ordinaire, mais ce jour-là, M.
12 Milutinovic a organisé une réception pour certains officiers représentant
13 différentes branches du ministère de l'Intérieur. Pièce 1D715, c'est le
14 projet de discours et la liste des invités préparée par le ministère de
15 l'Intérieur. Il s'agissait d'une manifestation à caractère purement formel.
16 M. Milutinovic s'est adressé aux officiers ce jour-là à l'occasion de cette
17 journée. Il en a appelé à la fin des bombardements, au retour à la vie
18 normale et à la paix. Voilà les circonstances dans lesquelles cette
19 promotion a lieu, c'est la journée de la police, de la sécurité.
20 Maintenant, je vais parler des décrets pris en temps de guerre parce
21 que la guerre c'est la seule situation pendant laquelle le président de la
22 république peut signer un décret. Avant d'entrer dans le cœur du sujet,
23 j'aimerais répondre à ce qui a été dit par l'Accusation à la page 26 816 du
24 compte rendu d'audience, il est question de la pièce 1D682, rapport du Pr
25 Markovic, paragraphe 2.26. Le Pr Markovic n'a pas dit que le pouvoir
26 d'émettre des décrets était un pouvoir de réserve ou un pouvoir subsidiaire
27 au terme de la constitution de la République de Serbie. Mais il a dit que
28 la possibilité de déclarer l'état de guerre c'était un tel pouvoir au terme
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1 de la constitution serbe. Du fait de la primauté de la constitution
2 fédérale, ce sont les organes fédéraux qui prononcent l'état de guerre.
3 Et une fois que c'est fait par les organes fédéraux, à ce moment-là
4 l'article 837 de la constitution serbe entre en vigueur pendant toute cette
5 période, cette période définie comme étant l'état de guerre. Nous avons
6 parlé de cette question. Nous l'avons développée. Nous avons présenté 16
7 décrets présentés pour signature par le gouvernement à M. Milutinovic. Nous
8 avons expliqué également qu'une fois que l'état de guerre prenait fin, ces
9 décrets devaient être soumis à l'assemblée nationale, c'était prévu par
10 l'article que j'ai mentionné précédemment. Et ceci on le trouve dans notre
11 mémoire, paragraphes 21 à 54.
12 Contrairement à ce qui est affirmé par l'Accusation,
13 M. Milutinovic, selon nous, n'a pas utilisé ce pouvoir, le pouvoir de
14 rendre des décrets pour assurer le succès de l'entreprise criminelle
15 commune. L'Accusation a complètement déformé et mal interprété les faits de
16 l'espèce. Comme je viens de le dire, la possibilité de signer les décrets
17 au terme de l'article 83(7), elle entre en jeu uniquement lorsque l'état de
18 guerre a été déclaré par les organes fédéraux.
19 Il y a quatre décrets qui sont importants, selon nous, qui sont tous
20 datés du 6 avril 1999, et je vais vous expliquer pourquoi ces quatre
21 décrets sont aussi importants. Nous avons le décret portant sur les
22 Affaires intérieures, le décret portant sur l'assemblée des citoyens, le
23 décret portant sur le domicile, la résidence et le décret relatif aux
24 cartes d'identité. Ces quatre décrets ont été présentés à M. Milutinovic
25 afin qu'il y appose sa signature le 6 avril. Ces quatre décrets ainsi que
26 d'autres figuraient déjà dans les textes statutaires de l'ex-Yougoslavie.
27 Il s'agissait de décrets tout à fait classiques en temps de guerre.
28 Le décret relatif aux Affaires intérieures donnait plus de pouvoir
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1 aux officiers supérieurs du MUP, leur permettait d'imposer des sanctions
2 supplémentaires à leurs subordonnés. La liste des infractions concernées
3 était allongée avec, notamment l'interdiction de faire preuve d'intolérance
4 religieuse, nationale ou raciale. Ceci montre, notamment qu'on ne peut pas
5 dire que ces décrets étaient destinés à garantir la réussite de
6 l'entreprise criminelle commune. Nous avons ici un cas où les subordonnés
7 ont des pouvoirs supplémentaires pour punir et sanctionner leurs
8 subordonnés si ceux-ci font preuve d'intolérance raciale, nationale ou
9 religieuse; donc ce n'est pas du tout cette conclusion qu'on peut tirer
10 mais bien la conclusion contraire.
11 Le décret sur l'assemblée impose des limites à toute réunion
12 publique; le décret sur les cartes d'identité fait passer l'âge à laquelle
13 il faut avoir une carte d'identité de 16 ans à 14 ans, et le décret relatif
14 à la résidence indique que toute personne doit s'enregistrer, doit indiquer
15 quel est son domicile officiel.
16 S'agissant de ces quatre décrets, nous avons chaque fois une
17 motivation qui les accompagne et il s'agit chaque fois pour le ministère de
18 pouvoir faire son travail correctement en temps de guerre. Selon nous, il
19 est important qu'un Etat sache exactement où ses citoyens habitent. Il est
20 nécessaire pour l'Etat de pouvoir les identifier en cas de mobilisation,
21 s'il y a des victimes. Faire passer l'âge requis de 16 ans à 14 ans, c'est
22 peut-être quelque chose qui est destiné à faire face à des manifestations
23 de délinquance, criminalité, et cetera. Rien d'inquiétant d'ici, rien de
24 criminel, il s'agit simplement de permettre à la police de faire mieux son
25 travail.
26 Le même jour, nous avons un décret, ou plutôt, une décision du
27 gouvernement de permettre au MUP de travailler plus efficacement. Donc il
28 n'est pas logique de dire que ce même jour, le gouvernement prend ces
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1 décrets pour pouvoir expulser plus facilement les Albanais. Ces décrets
2 n'ont nulle intention malveillante. Il ne s'agit pas là d'encourager
3 quelque comportement criminel que ce soit.
4 Je vais maintenant passer à la dernière partie de mon intervention,
5 et à cette occasion, je répondrai à des questions qui m'ont été posées par
6 les Juges hier. Il s'agit ici de l'intention délictueuse de la mens rea de
7 M. Milutinovic, qu'est-ce qui l'a poussé à agir de la manière dont il a
8 agi. Nous savons que pendant cette période de 1998 et 1999, nous savons ce
9 qu'il en est.
10 M. Milutinovic, en 1998, sait pertinemment qu'il y a une insurrection armée
11 sur une partie du territoire de la République de Serbie. Il sait quelles
12 sont les mesures qui ont été prises au niveau fédéral et au niveau de la
13 république. Et le 4 octobre, lors d'une réunion du Conseil suprême de la
14 Défense, on parle de rechercher la paix et de se défendre uniquement si on
15 est attaqué. Et le 4 octobre donc, M. Milutinovic dit : "Nous devons faire
16 tout ce qui est dans notre pouvoir. Si nous devons prendre des mesures
17 supplémentaires, il faut le faire." Et nous sommes en train là de parler de
18 la période d'octobre-novembre, pendant laquelle M. Milutinovic est le plus
19 actif dans ce processus de négociation ou ce processus de tentative
20 d'obtenir des négociations.
21 Au paragraphe 630, l'Accusation se réfère dans son mémoire à la pièce
22 à conviction 2827, qui est un document qui provient du ministre adjoint
23 chargé de l'information à la date du 1er octobre 1998. Ceci parvient sur le
24 bureau de M. Milutinovic. Il y est fait référence aux rapports des médias
25 occidentaux au sujet de ce qui s'est passé à Gornje Obrinje. Le ministère
26 de l'Information a fait savoir que les médias occidentaux et la presse
27 albanaise indiquent qu'il y aurait eu un prétendu massacre de citoyens
28 albanais, de civils, à Gornje Obrinje, et cela aurait été le fait de la
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1 police serbe. Le ministère de l'Information dit ce qui suit, je cite : "Les
2 représentants officiels du ministère de l'Intérieur nient le fait que des
3 membres de ce ministère aient procédé à des opérations contre des civils,
4 et on dit qu'il y aurait une enquête diligentée pour ce qui est de ce crime
5 allégué dont on a eu vent de la part des médias occidentaux. Le ministère
6 de l'Information a nié les rapports des médias étrangers via internet et
7 courrier à l'intention des bureaux des maisons d'édition étrangères."
8 Alors, ici le président reçoit une information de la part de son
9 ministère d'Information. Il est donc informé du fait que le MUP a nié
10 l'exactitude des allégations faites par les médias étrangers et a affirmé
11 qu'une enquête serait diligentée. Il est apparent le fait que l'état de
12 conscience de M. Milutinovic a -- et celui-ci est informé par les filières
13 qui fonctionnaient encore qu'on allait s'en occuper. Donc personne ne dit
14 que le MUP et la VJ étaient des structures suffisamment sophistiquées avec
15 des gens suffisamment compétents à leurs têtes pendant les années 1998 et
16 1999. Et ici le président de la République est informé précisément de ce
17 qui allait être fait.
18 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi. Peut-être ceci n'est-il
19 pas très pertinent, mais je suis un peu dans la confusion pour ce qui est
20 de l'élément temporel. On dit, dans l'Accusation, qu'il y a un rapport du
21 Procureur envoyé au gouvernement.
22 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Maintenant --
23 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce que cela a procédé à
24 l'activation de quiconque là-bas ? Est-ce que quiconque aurait transmis la
25 chose à votre client parce que rien n'est dit à ce sujet.
26 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Bien, l'Accusation a manqué de l'indiquer
27 que le témoignage de M. Kojic, qui travaillait dans le bureau de M.
28 Milutinovic, a été celui de dire que le bureau n'a jamais reçu cette
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1 lettre. M. Kojic a confirmé que la pièce à conviction 2827, elle, a été
2 reçue.
3 Pour ce qui est des allégations faites par l'Accusation au sujet du fait de
4 savoir pourquoi M. Milutinovic était censé être présent à des réunions
5 internationales, et je me réfère au compte rendu d'audience ligne 26 815.
6 Le Procureur a demandé pourquoi le
7 Pr Markovic aurait dit que M. Milutinovic n'a pas eu de relations avec des
8 organisations étrangères. Bien, la seule raison pour laquelle cela a été
9 mentionné est parce que cela est indiqué au paragraphe 8.1 de l'acte
10 d'accusation. C'est ce qui est allégué. Et ceci démontre une méconnaissance
11 complète de la constitution de la RSFY et de la Serbie puisque les
12 relations internationales tombent sous la coupe exclusive du gouvernement
13 fédéral. C'est pour cela que cela a été établi.
14 Maintenant, est-ce que M. Milutinovic a été présent à certaines réunions ?
15 Oui, il l'a été. L'ambassadeur Vollebaek a dit, enfin M. l'Ambassadeur de
16 l'OSCE, a dit qu'il a rencontré à deux reprises M. Milosevic et qu'à l'un
17 des occasions, M. Milutinovic se trouvait présent aussi. Dans son
18 témoignage, P2634, paragraphe 39,
19 M. Vollebaek dit, au sujet de la présence de Milutinovic, ce qui suit : "Je
20 crois que la finalité était d'indiquer que le Kosovo faisait partie de la
21 Serbie et qu'on ne voulait pas parler du Kosovo sans que le président de la
22 Serbie, lui aussi, soit présent."
23 Alors, nous savons que l'une des dispositions constitutionnelles de la
24 République de Serbie dit que le président est là pour symboliser l'unité de
25 l'Etat. Et lorsque le Procureur a posé la question de savoir où M.
26 Milosevic et M. Milutinovic étaient assis l'un par rapport à l'autre, la
27 réponse était celle de dire que M. Milutinovic était assis à droite de M.
28 Milosevic.
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1 Je crois que c'est ce qu'on appelle le protocole. Nous avons vu des
2 gens assis en rond dans des sièges confortables, le chef de l'Etat était
3 assis au milieu. A sa gauche, il y avait le président de la République.
4 Le général Naumann, dans ces informations complémentaires, feuille
5 P2561, au sujet des négociations techniques qui se sont tenues au mois
6 d'octobre au sujet de la diminution des effectifs de la VJ et du MUP au
7 Kosovo pour stabiliser la situation au Kosovo, ne fait pas état des
8 informations complémentaires données par le général Naumann. Enfin, le
9 Procureur ne le fait pas. Je crois que la question lui aurait été posée
10 pour tirer au clair la position. Il a dit que
11 M. Milutinovic était présent et qu'il n'était pas très actif. Mais pourquoi
12 serait-il actif ? C'était une réunion technique avec les gens du MUP et de
13 la VJ avec toutes les informations techniques et logistiques et ils sont
14 là-bas à négocier avec Clark, Naumann, Byrnes et les autres; cependant, ce
15 que nous sommes en train de dire c'est que cela concerne l'état d'esprit de
16 M. Milutinovic. Il a réalisé qu'on était en train de se conformer à la
17 résolution des Nations Unies pour ce qui est du retrait, et donc, il savait
18 que sa mission principale consistait à rechercher une solution politique.
19 Il est donc contraint d'intervenir au sein d'une délégation de l'Etat et il
20 est présent lorsque l'on élabore les différents points, des accords qui ont
21 été établis au mois d'octobre.
22 L'Accusation fait état d'un homme appelé Phillips qui a témoigné, qui
23 était présent lors des réunions de William Walker et de Milosevic. Au
24 début, Phillips a d'abord affirmé que Milutinovic était présent. Puis on
25 lui a demandé de donner des dates; il a montré un article de journal qui
26 montrait que M. Milutinovic n'était pas présent. Ensuite, à la fin,
27 Phillips a admis qu'il pouvait très bien se tromper; alors, nous avons déjà
28 expliqué la présence de M. Milutinovic lors de la réunion avec Hill et
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1 Petritsch en 1998 et nous savons qu'il a été en France en 1999.
2 Passons au paragraphe 613 du mémoire de l'Accusation. Nous affirmons qu'on
3 a mal présenté les éléments de preuve pour ce qui est de dire qu'en 1998 et
4 début 1999, M. Milutinovic, aux côtés d'autres, était là pour empêcher le
5 Tribunal pénal international de procéder à des investigations en Serbie, en
6 1998 et en 1999, et il convient de garder à l'esprit qu'ici, les éléments
7 cruciaux au sujet de Racak et au sujet de -- du lac Radonjic, c'est que des
8 autorités locales avaient procédé à des enquêtes et il y avait des -- une
9 équipe médico-légale étrangère des Finlandais. C'était une question interne
10 parce que le TPY n'avait juridiction qu'à l'égard du conflit armé. Il n'y a
11 pas eu de conflit armé en 1998 et début 1999. C'était donc des affaires
12 internes et cela était enquêté. Il y a eu une investigation, personne ne
13 peut dire le contraire puisque le Procureur a fait venir le Dr Dunjic et
14 son collègue pour témoigner. Donc, les autorités ont pris une position tout
15 à fait légitime, il a été procédé à une investigation et ils n'ont pas
16 renoncé aux responsabilités qui sont les leurs pour ce qui est donc de la
17 conduite d'une enquête.
18 Le mémoire du bureau du Procureur, paragraphe 565. Il m'est difficile de
19 l'expliquer verbalement, je demande de lire vous-même. L'Accusation fournit
20 une citation émanant d'une interview avec -- de M. Milutinovic avec
21 l'Accusation - P604, pages 150 à 151 - et on y indique que M. Milutinovic
22 avait influencé -- ou avait exercé de l'influence à l'égard de M.
23 Milutinovic. Alors, moi, je vous demande de vous pencher sur le paragraphe
24 565 et ensuite de vous pencher sur cet interview de M. Milutinovic - pages
25 150 et 151 - parce que, dans l'interview, l'enquêteur pose la question à M.
26 Milutinovic : "Est-ce que vous avez été proche de M. Milosevic à quelque
27 moment que ce
28 soit ?"
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1 Il a répondu : "Non, je ne peux pas dire que j'étais l'un de ses proches."
2 Alors, cette phrase n'a pas été intégrée au mémoire par le Procureur. Donc,
3 je vous demande de vous pencher sur le contexte entier de la question et de
4 la réponse, et vous allez voir que les allégations de -- du Procureur ne
5 tiennent pas du tout debout.
6 Le bombardement a -- va conduire à des massacres, c'est la position émise
7 par M. Milutinovic. Il affirme -- ou plutôt, il nie catégoriquement qu'il
8 ait dit cela soit à Petritsch ou à qui ce que ce soit d'autre. Nous avons
9 analysé des éléments de preuve dans cette affaire aux paragraphes 216 à
10 221. Le mémoire du Procureur ne fournit pas d'analyse du tout parce qu'on
11 ne peut pas passer cela sous scrutin de la sorte. M. Milutinovic n'a jamais
12 proféré ces mots-là.
13 L'ambassadeur Petritsch vous a dit --
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Y a-t-il des éléments de preuve pour
15 dire qu'il y a -- il l'a nié afin qu'il n'y ait pas de malentendu ?
16 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Mais c'est ce que nous affirmons.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Fort bien.
18 M. O'SULLIVAN : [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais cela n'est pas dit dans
20 l'interview, par exemple ?
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Non.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
23 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Mais le Procureur -- le Procureur ne lui a
24 pas posé la question du tout.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, oui, je comprends cela.
26 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je comprends.
27 M. LE JUGE BONOMY : [hors micro]
28 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Les éléments de preuve, comme vous le
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1 savez, nous disent que M. Petritsch ne se souvient pas que
2 M. Milutinovic n'ait jamais dit cela. Il reconnaît qu'il est arrivé à cela
3 en réfléchissant huit ans après à la chose en se penchant sur un mémo. Il
4 n'a jamais dit qu'il s'était entretenu avec -- entretenu avec M.
5 Milutinovic à Rambouillet lorsqu'il a été interviewé par les gens du -- du
6 bureau du Procureur en mai et juin 1999, quelques mois après les
7 événements, donc.
8 Le Procureur, dans son argumentation, dit que l'interview a eu lieu
9 dans des circonstances assez -- très tendues. Alors, qu'y a-t-il de tendu
10 pour ce qui est de ces deux sessions entre le 14 mai et le -- et la
11 deuxième qui s'est tenue le 9 juin ? L'ambassadeur Petritsch a témoigné
12 dans l'affaire Milutinovic pour dit qu'il ne s'est jamais entretenu avec M.
13 Milutinovic à Rambouillet. L'Accusation dit que nous n'avons pas contre-
14 interrogé Petritsch sur ce fait puisque -- mais nous n'avons pas eu besoin
15 de le contre-interroger si c'est ce qu'il a témoigné. Il l'a dit dans son
16 témoignage. Et le courrier dont il fait état -- le mémo dont il fait état,
17 à savoir le P562, nous montre qu'il n'y est pas dit que M. Milutinovic
18 aurait affirmé que le bombardement de Serbie conduirait à des massacres.
19 Ça, c'est d'un.
20 De deux, nous savons que M. Petritsch avait attribué ces propos à M.
21 Stambuk dans son interview à -- dans le procès Milosevic. Et alors, il
22 vient ici et il dit que c'était Stambuk et Milutinovic qui avaient fait ces
23 déclarations. Nous, dans notre mémoire, nous indiquons quels sont les
24 parallèles. On a posé la même question aux deux et les deux auraient dit la
25 même chose dans le même contexte. Enfin, il est difficile d'envisager que
26 la chose ait pu se faire ainsi. Donc, nous vous demandons de vous pencher
27 sur les différents éléments de preuve.
28 Dans son mémoire, le Procureur, paragraphe 45, nous dit ce qui suit
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1 s'agissant de Petritsch : "Il est très très peu probable qu'il y ait eu une
2 erreur au moment de cette dépêche."
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avez-vous un argument pour nous dire
4 pourquoi Petritsch témoignerait de façon fausse à ce sujet ? On en a parlé
5 hier.
6 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Parce qu'il s'est trompé.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc, c'est sur cette base-là que vous
8 dites que cela n'est -- cela a été -- ce témoignage est inexact ?
9 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
11 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Penchons-nous maintenant sur le paragraphe
12 216 et sur les circonstances où ce mémo a été rédigé. Nous savons que les
13 mémos ont été rédigés ad hoc partant du témoignage de Petritsch et Kickert.
14 Alors, ce mémo concret a été rédigé à 6 heures du matin à la date du 20
15 février, il a été rédigé par Kickert qui n'affirme pas qu'il aurait été
16 présent à quelque réunion que ce soit entre M. Petritsch, M. Mayorski et
17 M. Milutinovic.
18 Nous savons que, dans la nuit entre le 19 et le 20 à Rambouillet,
19 l'ambassadeur Petritsch a travaillé avec la délégation de l'état entre 7
20 heures du soir jusqu'à 5 heures du matin. C'est ce qu'a dit dans son
21 témoignage le Pr Markovic, et c'est également ce qu'a dit Kickert. Le matin
22 au -- très tôt, le 20, il a rencontré la délégation albanaise. Vous vous
23 souviendrez que le 20 février que c'est la date où les premiers ministres
24 du groupe de contact arrivent au château et les partis présentent leurs
25 points de vue au sujet des positions politiques et des composantes
26 politiques de l'accord de Rambouillet. Donc c'est le 20. Toute la nuit
27 entre 7 heures, vendredi, et 5 heures du matin, samedi, Petritsch était
28 avec la délégation en train de travailler sur l'accord.
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1 Il a travaillé toute la nuit, l'atmosphère était tendue, tout le
2 monde était très occupé et le bon sens nous dit que c'est là une formule
3 parfaite pour commettre des erreurs. Kickert l'a reconnu du reste parce
4 qu'il a souligné que les courriers -- les mémos ont été rédigés dans ces
5 circonstances-là, l'un et l'autre. Et quand on lui a montré une autre
6 dépêche de 1998 et quand on lui a posé la question de savoir s'il y avait
7 là une erreur, il a dit : "Oui, justement, c'est ce type de choses qui se -
8 - surviennent dans ce type de circonstances."
9 Donc, Petritsch rationalise la chose par la suite, il ne s'en
10 souvient pas, il n'en aurait pas parlé par la suite et les circonstances
11 dans lesquelles ce mémo aurait été rédigé ne sont plus tout à fait
12 certaines. Donc, c'est la raison pour laquelle nous estimons que cela n'est
13 pas fiable et c'est -- ça ne s'est jamais produit.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez évoqué ce que
15 vous avez évoqué au sujet de Petritsch hier ? Je pense que votre
16 argumentation va au-delà d'une simple erreur.
17 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, mais pour ce qui est d'autres
18 aspects.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, les négociations elles-mêmes.
20 Merci.
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Nous sommes en train de parler de l'état
22 d'esprit de M. Milutinovic, sur ce qu'il savait, ce qu'il pensait et ce
23 qu'il croyait -- ce à quoi il croyait de façon légitime pendant la guerre.
24 Passons donc à cela à présent. Passons à des informations qui ont été
25 disponibles pendant la guerre en partant des réunions auxquelles il a
26 participé et partant des contacts qu'il a eus avec différentes personnes.
27 C'est ce qu'il nous convient d'analyser.
28 Une personne de son bureau, M. Kojic, nous a dit que
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1 M. Milutinovic avait vaqué à des affaires ou à des questions civiles, à
2 savoir enlèvement de produits dangereux, approvisionnement en denrées
3 alimentaires, en électricité. Nous savons que M. Milutinovic a voyagé en
4 Vojvodine à Novi Sad; c'est là que les bombardements de l'OTAN ont commencé
5 où on avait ciblé une raffinerie et des ponts.
6 M. Milutinovic y a rencontré là-bas le vice-premier ministre de la Serbie,
7 M. Tomic; M. Cosic, le ministre de l'Énergie; M. Babic, le directeur
8 général de l'Industrie ou des industries électriques.
9 Et vous vous souviendrez que M. Milutinovic a dit au Procureur
10 qu'avec la déclaration ou la proclamation d'état de guerre, tout ce qui
11 était afférant à la guerre était confié aux instances fédérales. Il a
12 assisté à certaines réunions plutôt courtes qui ont duré moins d'une demi-
13 heure où on l'a informé de la situation pour ce qui est des conditions de
14 guerre; et quand on parle de cela, on sous-entend la protection de la
15 population, l'économie, les questions diplomatiques et les tentatives d'en
16 aboutir, d'en finir avec la guerre, les efforts de reconstruction du pays.
17 Et nous savons aussi que la deuxième des raisons pour ce qui est de
18 la tenue de ces réunions était celle de fournir des assurances ou
19 d'encourager la population. Parce qu'il y a une partie de l'histoire qui
20 date de la Deuxième Guerre mondiale qui est très pénible pour la Serbie où
21 les Nazis avaient bombardé le pays à la date du 6 avril 1941, alors que le
22 roi et le gouvernement avait quitté le pays pour fuir vers le Caire. Ce
23 sont des souvenirs très pénibles pour le pays. Et une partie de ces
24 réunions avait pour finaliser d'informer l'opinion publique du fait que la
25 direction du pays était restée dans le pays afin que cela soit présenté et
26 publié sur les pages de couverture ou les premières pages des journaux.
27 Aucune des réunions en question ne fait état de crimes commis contre
28 la population civile albanaise ou d'un planning quelconque visant à
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1 expulser cette population.
2 Alors, penchons-nous maintenant sur les informations qu'a obtenues M.
3 Milutinovic. Il a reçu des informations portant sur les destructions lors
4 des bombardements de l'OTAN. Il a vu des rapports concernant sur les
5 produits dangereux, sur les vivres, sur l'approvisionnement en électricité,
6 des télécommunications. Il a reçu des informations de la part du ministère
7 des Affaires étrangères, il a reçu des bulletins du ministère de
8 l'Intérieur, il recevait des informations du domaine du renseignement de la
9 VJ, il recevait des rapports de combat au quotidien de la part de la VJ.
10 Son personnel faisait des résumés d'information obtenus par leurs soins en
11 provenance des médias internationaux et nationaux et ainsi qu'en provenance
12 d'autres sources afin qu'il puisse en disposer au matin dès son arrivée au
13 bureau afin qu'il sache ce qui était en train de se passer. Et nous
14 affirmons que partant de toutes les informations, M. Milutinovic savait
15 considérer que les structures compétentes autorisées à conduire la guerre
16 étaient en train de le faire, que les choses étaient en train de
17 fonctionner et que tout ceci était tout à fait opérationnel et que tout un
18 chacun accomplissait ses fonctions et ses obligations. Donc, il n'y avait
19 aucun élément qui lui laisserait entendre que cela n'était pas le cas.
20 Que savait-il encore ? Le 6 avril, il a su qu'il y a eu une
21 proposition unilatérale de cessez-le-feu de la part des deux niveaux du
22 gouvernement. Il savait que le 8 avril le gouvernement fédéral avait
23 dénoncé le renforcement des frappes aériennes de l'OTAN pendant cette
24 période. C'était justement la période où le gouvernement -- les deux
25 gouvernements avaient demandé un cessez-le-feu pour les fêtes de Pâques. Il
26 savait que le gouvernement fédéral avait lancé un appel vers le monde pour
27 obtenir de l'aide humanitaire. M. Bulatovic a dit que cela incluait l'aide
28 humanitaire à l'intention des Albanais du Kosovo. M. Milutinovic assure
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1 également que début avril, l'état-major du commandement Suprême a fait un
2 communiqué public pour condamner les frappes aériennes afin que les gens
3 puissent rentrer chez eux.
4 On verra dans notre mémoire où nous avons procédé à une petite
5 sélection des documents du renseignement de l'armée et nous vous demandons
6 de vous pencher sur la totalité de ces documents. Le
7 3 avril, le renseignement militaire dit : "Que l'OTAN est en train de
8 diffuser des fausses informations auprès de la diaspora albanaise pour dire
9 que, dans les 24 à 48 heures à venir, il y aurait bombardement aveugle du
10 Kosovo-Metohija sur le terrain." Le
11 25 avril, les renseignements disent que les renseignements albanais du
12 Kosovo sont envoyés par la CIA vers la frontière de la Macédoine et de
13 l'Albanie pour obtenir un appui public du côté de l'OTAN. Et les
14 renseignements disent : "Qu'il a de nouveau des retours de réfugiés chez
15 eux."
16 Le 12 mai, les renseignements rapportent du fait que l'occident était
17 en train de manipuler la question des réfugiés. Et lorsque le général Krga
18 est venu témoigner ici, il a parlé de ce document concret et il a dit qu'on
19 avait recherché toute option, toute initiative possible pour aller à la
20 recherche d'une solution pacifique aux fins de mettre un terme –- faire
21 mettre -- ou permettre un terme à la guerre. On a essayé de créer des
22 conditions pour procéder à un cessez-le-feu et il a dit que l'un des
23 éléments sur lesquels l'armée comptait était précisément le retour des
24 réfugiés. Il savait et il considérait que personne n'avait eu l'intention
25 de les expulser.
26 Le 25 mai, M. Milutinovic apprend que 4 000 réfugiés étaient rentrés
27 en une seule journée depuis la Macédoine; et le jour d'après, avant midi,
28 l'OTAN a procédé à 400 vols ou 400 survols y compris le survol des
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1 bombardiers B-52 et B-18. Et au final, il a été tiré la conclusion disant
2 que ces survols visaient à apporter un soutien à la percée de l'UCK. Donc,
3 en conséquence, ils avaient bombardé pour protéger la panique et
4 démoraliser la population de la région.
5 Alors, si vous vous penchez sur ces documents, documents qui ont
6 atterri sur son bureau, vous verrez que M. Milutinovic s'est vu dire qu'il
7 y avait un système juridique militaire qui fonctionnait, qu'il y a eu des
8 plaintes et qu'il y a eu des investigations de conduite. Donc, c'est ça son
9 état d'esprit, ce sont les informations qui lui ont été communiquées.
10 M. Milutinovic n'a pas eu connaissance d'un plan, et n'a jamais
11 entendu parler d'un plan qui viserait à expulser les Albanais, il n'a
12 jamais voulu porter du mal à quiconque, il n'a jamais eu un comportement
13 qui pourrait être considéré comme étant un comportement criminel, et
14 nonobstant de ce fait l'Accusation affirme qu'il y a eu des omissions de sa
15 part. Alors, penchons-nous sur l'un des décrets. Un des décrets que j'ai
16 mentionné tout à l'heure en parlant en application du 83.7 lorsque le
17 gouvernement avait temporairement repris les fonctions de l'assemblée.
18 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi. Page 33, B, vous
19 avez dit : "VJ," mais je crois que vous vouliez dire autre chose, n'est-ce
20 pas:"Le retour de la VJ" ?
21 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Oui, vous avez raison. La VJ avait compté
22 "sur le retour des réfugiés."
23 M. LE JUGE CHOWHAN : [aucune interprétation]
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je vous remercie de l'avoir relevé.
25 Alors, je vous demande maintenant de vous pencher sur le décret relatif aux
26 Affaires intérieures. Et je demande aux Juges de la Chambre de prendre
27 lecture des paragraphes 1 079 et 1 080 du mémoire de l'Accusation. Le
28 bureau du Procureur y formule une position qui est celle de dire que ce
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1 décret, portant sur les Affaires intérieures, fournit au MUP des pouvoirs
2 plus grands pour ce qui est de la détention des suspects, restreindre les
3 déplacements, procéder à des fouilles et exécuter les ordres. Mis à part
4 les ordres relatifs au comportement relevant du pénal, il a procédé à la
5 prise de mesures disciplinaires d'une ampleur suffisante et j'ai déjà
6 indiqué qu'il y avait également le délit au pénal grave –- le délit grave
7 au pénal pour ce qui est donc d'une manifestation quelconque d'intolérance
8 nationale religieuse ou raciale.
9 Donc, M. Milutinovic est au courant de ce document, il a signé le décret.
10 Il a toutes les raisons de croire que les structures du MUP sont en train
11 de fonctionner avec de grands pouvoirs mais dans le respect et conformément
12 à la loi –- dans le respect de la loi et conformément à la loi. Alors, à
13 cet effet, j'attire l'attention des Juges de la Chambre sur les paragraphes
14 34 et 38 de notre mémoire ainsi que sur les paragraphes 28 à 33 de ce même
15 mémoire.
16 Et peut-être, pour le moment, serait-il bien choisi pour parler de -- des
17 commentaires faits par M. Markovic et son expertise.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur O'Sullivan, nous sommes
19 plutôt souples pour ce qui est de l'utilisation du temps, mais il faut
20 également que nous gardions à l'esprit la nécessité d'avoir une équité. Et
21 la façon dont l'Accusation s'est conformée à notre ordonnance relative au
22 temps nous fait dire que vous ne devriez pas répéter bon nombre des
23 éléments qui figurent déjà noir sur blanc sur votre mémoire.
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Bien, je vais aller de l'avant. Je --
25 juste deux éléments et j'en finis. D'abord, la question évoquée par le Juge
26 Chowhan au sujet du Conseil suprême de la Défense. Ce que j'ai décrit tout
27 à l'heure était l'état d'esprit de M. Milutinovic au sujet de ce qu'il
28 savait et des informations qui lui avaient été communiquées. Il savait que
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1 la VJ elle n'avait établi aucun plan visant à expulser la population. La VJ
2 parle de la manipulation de la question des réfugiés par la CIA. Il savait
3 que les tribunaux de guerre fonctionnaient, il savait que les tribunaux
4 civils fonctionnaient eux aussi. Ces rapports de renseignement indiquent
5 également qu'il y avait manipulation de la part des médias occidentaux qui
6 relataient des mensonges non étayés par les faits. Nous avons -- nous en
7 parlons dans notre mémoire.
8 Il n'y a absolument aucune raison pour que M. Milutinovic ait pensé que
9 quelque chose de néfaste était en train de se passer et c'est la raison
10 pour laquelle il n'a pas convoqué de réunion du Conseil suprême de la
11 Défense. Il s'est appuyé sur la connaissance qu'il avait de la personne qui
12 commandait l'armée, de la manière dont l'armée fonctionnait en temps de
13 guerre, tout était clair. Et vu sa position, vu les informations qu'il
14 avait, vu les activités qu'il a menées pendant la guerre, rien ne lui
15 permettait de penser qu'il y avait lieu de convoquer une réunion. Voilà
16 notre position.
17 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous remercie.
18 M. O'SULLIVAN : [interprétation] J'en terminerai par les éléments de preuve
19 concernant M. Rugova.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant de faire cela, vous pouvez tout
21 à fait formuler vos critiques -- ou plutôt, revenir sur les critiques
22 formulées à l'encontre du rapport de M. Markovic. Je ne voulais pas vous
23 interrompre là-dessus, vous devriez en parler.
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Veuillez d'abord examiner la pièce 1D684,
25 il s'agit de son curriculum vitae. Nous notons que l'Accusation savait
26 pertinemment que M. Markovic était expert dans le domaine du droit
27 constitutionnel et qu'il avait une grande expérience en la matière. Nous
28 l'avons cité à la barre pour traiter des allégations figurant dans l'acte
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1 d'accusation, allégations qui, selon nous, sont erronées du point de vue de
2 la constitution, du point de vue des compétences dévolues au président de
3 la RFY, nous en parlons dans le chapitre 3 de notre mémoire. Nous pensons
4 que l'Accusation a eu tort de ne pas considérer cette personne comme un
5 expert en matière de constitution. L'Accusation a abandonné l'idée de citer
6 à la barre le premier expert prévu et n'a pas communiqué le rapport du
7 deuxième. Nous pouvons dire que la raison pour laquelle l'Accusation n'a
8 pas cité les témoins prévus à la barre c'est parce qu'elle -- ces témoins
9 n'allaient pas dire ce que l'Accusation attendait.
10 Le fait que le Pr Markovic faisait partie du gouvernement également en
11 temps de paix importe peu. Il était là en tant qu'expert dans le domaine de
12 la constitution. Rien dans son rapport, dans la manière dont il
13 interprétait la constitution ne permet de penser qu'il avait un parti pris.
14 En tout cas, cela ne ressort pas du contre-interrogatoire. L'Accusation a
15 mentionné à plusieurs reprises le témoignage du professeur Markovic et l'a
16 écarté de façon vague et sans détails, et c'est inacceptable comme nous
17 l'indiquons à l'annexe 1 de notre mémoire où nous revenons en détail sur le
18 rapport et la déposition de notre -- de cet expert. Nous pensons qu'il a
19 expliqué en présentant des faits concrets quelle était la situation, il a
20 montré quelles étaient les lacunes de la thèse de l'Accusation sur ce
21 point.
22 S'agissant de M. Rugova et de la situation le concernant au printemps 1999,
23 les éléments de preuve indiquent que les médias internationaux ont fait
24 rapport au début de la guerre en disant que M. Rugova avait été tué ou
25 blessé ce qui était tout à fait faux. L'Accusation a dit que les contacts
26 avec M. Rugova faisaient partie d'une campagne de propagande menée par les
27 Serbes. Nous en parlons aux paragraphes 261, 271 à 276 de notre mémoire.
28 L'Accusation insiste sur le fait que M. Rugova était assigné à résidence;
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1 c'est tout à fait faux. M. Rugova rencontre M. Milosevic le 1er avril, il a
2 dit qu'il devait se rendre à l'étranger pour contacter les personnes
3 importantes. Avant cela, les services de Sûreté de l'Etat avaient ordonné
4 qu'on le protège. Le lendemain, il y a eu -- on a installé une connexion
5 avec CNN dans sa maison, la ligne de téléphone dans sa maison a été
6 connectée avec CNN. M. Merovci a appelé Skopje, les collaborateurs de M.
7 Rugova, M. Shala et d'autres personnes qui se trouvaient au Kosovo. M.
8 Rugova s'est vu la possibilité de les rencontrer -- s'est proposé de les
9 rencontrer.
10 M. Merovci a dit qu'il avait exigé que sa famille et ses enfants
11 soient autorisés à se rendre à Skopje début avril. Entre le 17 et le 21
12 avril, M. Merovci lui-même s'est rendu à Skopje, et ce sont les services de
13 la Sûreté de l'Etat qui ont pris les dispositions nécessaires pour son
14 déplacement. Là, il a rencontré Ms Petritsch, Hill et Walker. M. Rugova a
15 fait des déclarations à la presse, il a tenu une conférence de presse en
16 compagnie de l'ambassadeur de la Russie, il a rencontré le patriarche
17 russe,
18 M. Aleksei. Le 16 avril, il a rencontré à Belgrade M. Milutinovic.
19 L'Accusation a présenté des éléments de preuve au sujet de cette rencontre.
20 M. Rugova et M. Merovci sont arrivés à Belgrade escortés par la police. Il
21 s'agissait d'une rencontre tout à fait cordiale.
22 M. Rugova, à cette occasion, ne s'est absolument pas plaint du fait qu'il
23 aurait été assigné à résidence. M. Rugova a dit à
24 M. Milutinovic que la plupart des membres de son parti ou de ses
25 collaborateurs se trouvait à l'ouest. Il devait quitter le territoire de la
26 RSFY, il devait rencontrer les membres de son parti pour travailler avec
27 eux.
28 M. Milutinovic connaissait la situation très pénible qui était la
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1 sienne, le fait qu'il s'est exprimé publiquement pour condamner l'UCK, M.
2 Milutinovic a déclaré que M. Rugova avait été écarté par l'UCK lors des
3 négociations de Rambouillet. M. Milutinovic a dit, très diplomatiquement :
4 "Le Kosovo est à vous, vous êtes le chef -- le leader des citoyens du
5 Kosovo et la responsabilité vous en incombe." M. Milutinovic a tenu ces
6 propos devant M. Rugova à l'occasion de cette rencontre.
7 M. Rugova a indiqué qu'il souhaitait se rendre en Macédoine.
8 M. Milutinovic lui a dit qu'il n'était pas sûr pour lui de se rendre en
9 Macédoine. M. Rugova a dit qu'il voulait aller en Italie.
10 M. Milutinovic a alors appelé le ministre des Affaires étrangères -- M.
11 Dini, ministre des Affaires étrangères italien. Les Italiens ont accepté sa
12 venue, ils ont envoyé un avion. Rugova, Merovci et des membres de leurs
13 familles se sont rendus à Rome. Dans le document P604, l'audition de M.
14 Milutinovic, ce dernier en parle, et je vous renvoie également sur ce point
15 au témoignage d'Adnan Merovci.
16 Dans -- d'après ce qu'on dit ces deux personnes qui ont assisté à la
17 rencontre, M. Rugova n'a pas dit à M. Milutinovic que le Kosovo se vidait
18 de sa population en raison de l'oppression et de la violence. Il n'est dit
19 nulle part que M. Milosevic ait déclaré que ceci était le fait de la
20 communauté internationale. Puis, il y a un point de fait et un point de
21 droit qui est important ici. La déclaration de M. Rugova a été versée au
22 dossier en application de l'article 92 quater du Règlement de procédure et
23 de preuve.
24 M. Rugova, aujourd'hui décédé, manifestement, ne pouvait pas venir
25 témoigner. Nous n'avons pas pu donc le confronter à son témoignage. Nous
26 avançons que vous ne pouvez accorder aucun poids à sa déclaration car elle
27 n'est absolument pas corroborée. Elle a même été contredite par les propos
28 de M. Milutinovic et ceux de M. Merovci.
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1 Il n'est dit nulle part que M. Rugova ait parlé d'oppression, ceci ne
2 figure pas dans la déclaration de M. Merovci. Le Procureur n'a jamais
3 demandé à M. Merovci si c'était exact, mais M. Milutinovic a été interrogé
4 les 12 et 13 novembre 2001. Rugova a été interrogé par le Procureur les 1er
5 et 3 novembre 2001. L'Accusation n'a jamais contesté la déclaration de M.
6 Milutinovic.
7 Venons-en à la réunion tenue à Pristina le 28 –-
8 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Juste un instant. Désolé de vous
9 interrompre. S'agissant de Rugova et de la période au cours de laquelle son
10 domicile a fait l'objet d'une visite de la part de votre client, une
11 journaliste se trouvait avec lui. Elle a dit quelque chose à ce sujet.
12 Lorsqu'on l'a appelé le diplomate du Kosovo et qu'on lui a remis un cadeau
13 à titre symbolique, qu'est-ce que cela veut dire ?
14 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Peut-être que je n'ai pas été assez clair.
15 La réunion -- ou la rencontre du 16 s'est tenue à Belgrade. M. Milutinovic
16 n'est jamais allé au domicile de M. Rugova. Le cadeau symbolique qui a été
17 remis à M. Rugova l'a été par
18 M. Milutinovic à Pristina le 28, nous savons qu'il s'agit d'un –- d'une
19 marque de respect –- ou plutôt, c'est le Dr Rugova qui a donné un cadeau
20 symbolique à M. Milutinovic. Nous savons que le Dr Rugova avait pour
21 habitude de donner des cristaux aux personnes qu'il rencontrait.
22 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Et du point de vue culturel, il
23 s'agit d'une marque de respect, c'est tout ?
24 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Je ne sais pas si c'est inscrit dans la
25 culture, mais cela faisait partie des habitudes de
26 M. Rugova. Il y a beaucoup de minéraux, de cristaux au Kosovo, et pour M.
27 Rugova, cela symbolisait le Kosovo, c'était une marque de respect et
28 d'amitié qu'il témoignait aux personnes – ou à certaines personnes qu'il
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1 rencontrait.
2 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Mais vous avez dit qu'il n'était pas
3 assigné à résidence. Je vous renvois aux propos de cette journaliste sur la
4 question.
5 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Peut-être que c'est ainsi que M. Rugova et
6 M. Merovci se sentaient à l'époque. Je suis certain qu'ils avaient peur.
7 Ils avaient certainement peur. Ils ne savaient pas ce qui allait leur
8 arriver. Mais huit ans plus tard, nous avons le témoignage d'un –- de
9 quelqu'un qui était membre de la Sûreté de l'Etat, nous connaissons tous
10 les événements qui se sont passés, les circonstances. Les médias
11 occidentaux ont dit que M. Rugova était mort; il n'était pas mort. Et
12 c'était le seul interlocuteur possible pour les Serbes, donc, est-ce qu'ils
13 avaient peur ? Oui, j'en suis certain, jusqu'au moment où l'avion a atterri
14 à Rome mais le fait est qu'ils sont partis à Rome.
15 M. Milutinovic leur a suggéré de ne pas aller en Macédoine car c'était
16 dangereux, alors le danger ne pouvait venir que de l'UCK en Macédoine, et
17 c'est la seule manière dont nous pouvons interpréter les propos de M.
18 Milutinovic, qui a dit : "N'allez pas à –- en Macédoine." Donc, s'il y
19 avait eu un plan visant à nettoyer ethniquement la région, est-ce qu'il
20 n'aurait pas fallu d'abord se débarrasser de ses dirigeants ? On ne peut
21 las dire à quelqu'un : "C'est vous le leader légitime," et faire autre
22 chose.
23 Dans le cadre du procès Milosevic, le Dr Rugova a dit que tout cela avait
24 été fait pour le discréditer. Mais question suivante,
25 M. Nice demande à Rugova : "Est-ce que l'on a jeté le discrédit sur vous ?"
26 Il a dit : "Bien sûr que non, il a été élu président en 2000 et 2001 au
27 Kosovo."
28 Alors, cela n'indique pas que M. Milutinovic ou d'autres personnes
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1 cherchaient à mettre fin aux bombardements ainsi – à cette folie. Il
2 n'aurait pas voulu que son peuple soit bombardé.
3 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.
4 Mais pourquoi le rôle de votre client – quel était le rôle de votre client
5 dans les pourparlers ? D'après les éléments de preuve, il n'a pas joué un
6 grand rôle –- le Dr Rugova n'a pas joué un grand rôle.
7 M. O'SULLIVAN : [interprétation] La raison pour laquelle le
8 Dr Rugova n'a pas joué un grand rôle à Rambouillet, c'est que l'UCK
9 contrôlait la situation, M. Thaqi et d'autres personnes. M. Rugova avait
10 été écarté. C'est ce qui ressort du document protégé par l'article 70, des
11 pressions avaient été exercées par l'UCK pour qu'il ne participe pas aux
12 négociations.
13 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Mais est-ce qu'il aurait dû y
14 participer ?
15 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Vous parlez de Rambouillet ?
16 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Oui. Enfin, je parle des négociations
17 en général.
18 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Il a été invité à plusieurs reprises en
19 1998.
20 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Et qu'en est-il de ce qui s'est passé
21 ensuite -- plus tard ?
22 M. O'SULLIVAN : [interprétation] La rencontre qu'il a eue avec M.
23 Milutinovic le 28 avril 1999 portait sur la – les bombardements, la reprise
24 des négociations, et il fallait constituer un Conseil exécutif provisoire
25 en attendant qu'un organe permanent soit établi au Kosovo.
26 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous avez quoi que ce soit
28 à dire au sujet de – des propos de la journaliste?
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1 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Tout ce que la journaliste a déclaré tombe
2 à l'eau si nous voyons tout ce qui a été fait pour arranger M. Merovci et
3 M. Rugova.
4 Dernier point concernant la réunion tenue le 28 à Pristina, je vous renvoie
5 aux pages 8469 à 8471 du compte rendu. M. Merovci est allé deux fois au
6 domicile de M. Rugova après le 31 mars. Il a été escorté par la police à
7 son appartement deux fois – correction, sa voisine albanaise habite
8 toujours là. Elle nous dit qu'un policier est venu à l'appartement avec un
9 chien. L'appartement a été vandalisé, détruit, saccagé. Alors, voilà ce que
10 M. Merovci a dit à M. Milutinovic lors de cette rencontre. Il a déclaré que
11 des personnes avaient été expulsées de chez elles, ce qui n'était pas le
12 cas de son voisin, mais son appartement avait été détruit, tout cela était
13 le fait du MUP. M. Milutinovic a montré sa surprise.
14 Nous affirmons que la voisine en question habite toujours dans son
15 appartement. La maison n'a pas été –- la maison a certes été vandalisée.
16 Nous ne savons pas ce qui a été –- quelles mesures ont été prises par les
17 personnes à Pristina compétentes en la matière pour découvrir ce qui
18 s'était véritablement passé. Nous –- mais il faut examiner le contexte
19 global.
20 Pour terminer, nous n'avons rien à ajouter par rapport à ce qui est dit au
21 chapitre 5 de notre mémoire lorsque nous passons en revue les chefs
22 d'accusation et le droit applicable. L'Accusation doit prouver tous les
23 éléments figurant dans l'acte d'accusation, et nous reprenons à noter
24 compte certains arguments avancés par les coaccusés en l'espèce. Je vous
25 renvoie au mémoire d'Ojdanic, chapitre 4, intitulé : "Questions juridiques
26 et responsabilités," au mémoire de Pavkovic, argument –- et aux arguments
27 juridiques figurant aux paragraphes 11 à 48 et 340 à 358, nous reprenons à
28 notre compte les arguments avancés par les coaccusés pour ce qui est des
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1 crimes et des éléments de preuve indiquant qu'il n'existait pas de plan et
2 qu'il n'y avait pas d'entreprise criminelle commune.
3 Deux points relatifs aux éléments de preuve. P2166, le document qui prétend
4 être le procès-verbal d'une réunion de l'état-major interdépartemental.
5 Nous vous renvoyons à noter mémoire, paragraphes 176 à 178. Il s'agit
6 d'après nous d'un document qui n'est pas fiable. Nous avons soulevé une
7 objection la première fois qu'il a été demandé pour versement au dossier.
8 Puis je vous renvoie au paragraphe 4 du mémoire du Procureur, où il est dit
9 qu'à l'exception de l'entretien de Lazarevic, vous ne devez vous appuyer
10 sur aucune des déclarations des coaccusés pour ce qui est de prouver les
11 actes ou le comportement de l'un quelconque des accusés.
12 Voilà ce que nous avions à dire en réponse aux arguments de
13 l'Accusation. Tout ceci est développé en détail dans notre mémoire en
14 clôture, nous parlons de toutes les allégations concernant
15 M. Milutinovic et nous avançons qu'il n'a jamais eu de comportement
16 criminel et qu'il n'a jamais manifesté d'intention délictueuse.
17 Et pour finir, il s'agit, d'après nous -- dirons-nous, d'un homme qui
18 a toujours cherché des solutions à la situation par le biais du dialogue et
19 du compromis. Nous savons qu'il a passé la plus grande partie de sa
20 carrière en tant qu'homme politique et diplomate. Il n'y a absolument aucun
21 lien à faire entre M. Milutinovic et les hommes politiques radicaux ou les
22 discours extrémistes qui ont pu être tenus. Dans la pièce P604, son
23 audition avec le Procureur, annexe 24, il affirme que -- voilà ce qu'il dit
24 au sujet de
25 M. Seselj, un homme qu'il a battu lors des élections présidentielles en
26 1997. M. Milutinovic dit : "M. Seselj est un homme d'extrême droite qui a
27 une approche fasciste à tout ce qui concerne la Yougoslavie."
28 Donc, tout ceci est complètement opposé à -- aux pratiques et aux
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1 points de vue exprimés par M. Milutinovic. Je vous remercie. Nous demandons
2 l'acquittement de M. Milutinovic sur tous les points.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Nous reprendrons à 11
4 heures 15.
5 --- L'audience est suspendue à 10 heures 49.
6 --- L'audience est reprise à 11 heures 19.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila, nous allons à présent
8 entendre votre plaidoirie présentée pour le compte de
9 M. Sainovic.
10 M. FILA : [interprétation] [hors micro]
11 L'INTERPRÈTE : Maître Fila, hors micro.
12 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames et Monsieur les
13 Juges, chers collègues et amis, j'espère que nous sommes amis car nous
14 avons passé beaucoup de temps ensemble, et étant donné que c'est la
15 dernière possibilité pour moi de m'adresser aux Juges de la Chambre et vous
16 aurez l'occasion de vous adresser à nous en temps voulu, je saisis cette
17 occasion pour vous dire deux choses. Cela fait 12 ans et demie que je
18 plaide devant ce Tribunal, cela fait beaucoup de temps, même à mes yeux. Je
19 suis sur le point de partir maintenant et je me souviens du discours
20 magnifique de Napoléon Bonaparte qui s'adressait à ses soldats qui avaient
21 participé à la bataille d'Alsalitz. Il leur a dit, je cite : "Soyez heureux
22 car tout au long de votre vie, vous pourrez dire j'y ai participé."
23 J'ai été honoré de prendre part au travail qui se fait ici. Je suis
24 particulièrement honoré d'avoir pris part à ce procès car il s'est déroulé
25 de façon très professionnelle que ce soit les Juges de la Chambre, mes
26 confrères ou les conseils de la Défense, tout le monde s'est comporté de
27 façon très professionnelle. Je craignais que les choses se déroulent comme
28 dans le procès Milosevic et je suis heureux que mes craintes n'aient pas
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1 été avérées. Pour toutes ces raisons que je viens de mentionner, je dirais
2 simplement, comme on dit en français : "Partir c'est mourir un peu," et
3 voilà le sentiment que j'ai maintenant alors que je suis maintenant sur le
4 point de vous quitter.
5 Mais, maintenant, venons-en au fait. Je ne ferai pas de commentaires sur
6 mon mémoire en clôture et ce pour deux raisons. Tout d'abord, je vous ai
7 promis de ne pas en parler. Je ne voulais pas vous ennuyer, vous les Juges
8 de la Chambre ou vous chers confrères de l'Accusation. Et puis, par
9 ailleurs, je ne pense pas que cela soit utile car lorsqu'un conseil de la
10 Défense est bien préparé lorsqu'il présente les éléments de preuve qui
11 s'imposent à l'issue du procès, si les Juges n'ont aucune idée de votre
12 thèse, tout le monde a perdu son temps et son argent. J'espère donc que la
13 thèse de notre équipe de la Défense est tout à fait claire au vu des
14 preuves que nous avons présentées. Je ne vois pas ce que je pourrais y
15 ajouter. Je parlerai uniquement du réquisitoire de l'Accusation.
16 Malheureusement, il me faut réitérer ce que j'ai déjà dit à savoir
17 que les éléments de preuve présentés par l'Accusation que ce soit pendant
18 la phase préalable, je l'ai –- pendant la phase préalable au procès pendant
19 le procès, je réitère ce que j'ai dit, les éléments de preuve présentés ne
20 sont pas suffisants. Dans tout autre circonstance, cela m'aurait satisfait,
21 mais nous parlons ici de l'histoire, nous devons rendre compte à
22 l'histoire. Il s'agit d'un Tribunal pénal international et n'importe qui ne
23 peut pas comparaître que ce soit, en tant que membre de l'Accusation, de la
24 Défense ou en tant que Juges, le Conseil de sécurité a établi et créé ce
25 Tribunal et nous faisons l'histoire ici. Tout ce qui se dit dans ce
26 prétoire fera partie de la jurisprudence du droit international.
27 J'ai œuvré, en tant que conseil de la Défense, dans le cadre de
28 plusieurs centaines d'affaires de meurtres. Certains de mes clients ont été
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1 acquittés, d'autres ont été déclarés coupables mais, avec le recul si je me
2 penche sur ma carrière, je ne pense pas avoir fait quoi que ce soit
3 d'important lorsque j'ai apporté mon aide à ces meurtriers. Ici, il faut
4 que les normes de la preuve soient strictes. Il ne s'agit pas d'une affaire
5 concernant un chauffeur en état d'ébriété.
6 J'ai cité à la barre des témoins qui ont participé aux événements.
7 Bulatovic était premier ministre à l'époque. Le ministre des Affaires
8 étrangères a signé un accord avec Geremek; je souhaitais que Geremek
9 comparaisse ici dans l'éventualité où les propos de
10 M. Jovanovic soient erronés. Il ne s'agissait pas d'observateurs de seconde
11 zone des Nations Unies. Ils n'ont sans doute jamais vu l'accord et pourtant
12 ils en ont parlé. Ils ont parlé de sa teneur. Geremek, lui, a trouvé la
13 mort dans un accident de voiture.
14 Lorsque je me suis appuyé sur l'article 92 bis, j'ai présenté
15 plusieurs témoignages. Je suis reconnaissant aux Juges de la Chambre
16 d'avoir sélectionné au moins quatre d'entre eux. Je peux parler de dix
17 autres maintenant, dix autres témoins qui auraient dû être cités à la
18 barre. Deux n'ont pas réussi à venir témoigner, n'ont pas été en mesure de
19 le faire, mais si nous avions pu faire ce que nous souhaitions, tous les
20 participants des pourparlers de Rambouillet non pas uniquement M. Petritsch
21 mais également M. Hill et toutes les autres personnes seraient venues ici
22 et nous aurions su exactement ce qui s'était passé à Rambouillet, que cela
23 nous plaise ou non. Mais il ne s'agit pas ici d'intérêt personnel, il
24 s'agit de l'histoire et de son jugement. Moi, en tant que conseil, je
25 souhaite que mon client soit acquitté mais je sais que lorsque je rentrerai
26 chez moi, mes sentiments personnels seront différents de mon attitude
27 professionnelle.
28 Tous les participants à ces pourparlers auraient dû être cités à la
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1 barre. Tous les témoins pertinents doivent être cités à la barre, donc, ou
2 non, ceci n'est pas prévu par le règlement ici mais, si cela avait pu être
3 le cas, nous aurions pu éviter quelques désaccords entre l'Accusation et
4 nous. Nous aurions pu citer à la barre Hill et les autres personnes si le
5 bureau du Procureur avait souhaité les convoquer.
6 Si l'Amérique l'avait souhaité, nous aurions pu avoir M. Hill. Nous
7 aurions pu avoir l'ambassadeur Keller si la France avait été d'accord. Et
8 j'ai essayé d'obtenir leur comparution mais il s'est marié et sa femme ne
9 l'a pas laissé partir pour venir témoigner ici. Examinons les notes du
10 général Obrad Stevanovic mentionnées ici ou le général Obrad Stevanovic
11 s'il est vrai qu'il commandait les PJP, je ne sais pas si le Procureur --
12 enfin, peu importe. Toujours est-il que je me demande pourquoi le général
13 Stevanovic n'a pas été convoqué ici pour expliquer la situation. Nous en --
14 nous reviendrons là-dessus plus tard. Il y a quelque chose d'étrange qui me
15 frappe dans son carnet de notes.
16 En fait, je n'arrive pas à comprendre pourquoi on n'a pas souhaité citer à
17 la barre certains témoins. Est-ce que c'était par peur ? En fait, ceux qui
18 ont été appelés à la barre, ceux qui ont comparus ici, auraient pu dire des
19 choses différentes de ce qui figure dans l'acte d'accusation. Peut-être
20 qu'on avait peur de cela, de les convoquer ici pour qu'ils disent autre
21 chose que ce qui était dans l'acte d'accusation. Peut-être qu'on en avait
22 peur, mais il aurait fallut les voir et les entendre. A partir de son
23 cahier, on aurait pu établir un certain nombre de choses. Il est question
24 du président, avant et après, et cetera, et il aurait pu nous expliquer ce
25 qu'il entendait par là exactement, comment il avait pris ces notes, qui
26 avait participé aux réunions, qui avait dit quoi, et cetera. Je parle en ce
27 moment de la pièce 1898.
28 Je répète peut-être trop souvent que nous sommes ici dans un procès
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1 historique, mais pensons un peu à l'exemple de la Géorgie. Comme l'a dit de
2 façon si imagée un diplomate américain, les -- la Russie était en train de
3 se servir d'un marteau. Maintenant, on voit que c'est la même chose qui se
4 passe en Géorgie et c'est la Russie, cette fois, qui est aux commandes, pas
5 l'OTAN. Maintenant, on nous dit que Saakashvili avait le droit d'intervenir
6 dans les provinces rebelles, mais mon confrère, Me O'Sullivan, vous a
7 expliqué tout ceci de manière excellente. Mais ne nous lançons pas dans de
8 telles comparaisons.
9 Je vais reprendre ici ce qui nous a été dit par certains témoins, à
10 commencer par Obrad Kesic, un témoin dont n'a pas parlé l'acte d'accusation
11 -- l'Accusation, un témoin membre du Parti démocratique -- Parti démocrate
12 qui nous a parlé de ce qu'avait dit Clinton, qui a dit qu'ils ont fait tout
13 pour que Milosevic ne signe pas. Il voulait attaquer la Serbie. Et si on
14 lit avec attention ce que dit Kesic, on voit que Holbrooke a outrepassé ses
15 compétences en signant l'accord d'Octobre qui a repoussé les frappes
16 aériennes jusqu'au mois de mars. Sa crédibilité de ce témoin n'a pas été
17 contestée par l'Accusation.
18 Et pour finir, je reviens sur la théorie du droit pénal. J'épuise mes
19 arguments. Vous savez qu'un des principes fondateurs en la matière c'est le
20 principe du caractère direct des preuves, il faut que les Juges se voient
21 présenter des preuves directes. A l'époque des Romains, dans les cours de
22 droit, on posait la question suivante : quelle est la différence entre un
23 témoin, un expert et un
24 tribunal ? Alors, le témoin a vu ce qui s'est passé mais il ne sait rien;
25 l'expert sait tout mais il n'a rien vu; le tribunal n'a rien vu et ne sait
26 rien mais il doit, malgré tout, rendre un jugement. Bon, je le répète,
27 c'est une plaisanterie qui date de la Rome antique. Mais il vaut mieux donc
28 que le Tribunal voie ce dont il retourne plutôt que de lire ce que dit un
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1 témoin sur un autre.
2 Je pense que, même si un témoin est décédé depuis, ce qu'il a à dire -- ce
3 qu'il a pu dire est beaucoup plus intéressant que des preuves indirectes.
4 Regardons les autres cas de figure et les autres affaires. Comment est-ce
5 que le Procureur, M. Nice, a contraint les témoins à faire des déclarations
6 ? Il est revenu à la charge à plusieurs reprises, à poser des questions
7 directrices pendant l'interrogatoire principal alors que ce n'était pas
8 normal -- pas autorisé. Mais Slobodan Milosevic ne comprenait pas tout à
9 fait la manière dont cela doit se produire, ne comprenait pas très bien le
10 droit, donc, il n'a rien dit. Il n'avait pas d'avocat pour le défendre.
11 Même chose pour un témoin à qui on a donné des documents à lire qu'il
12 n'avait jamais vus précédemment. Il s'agissait du général Vasiljevic. Qu'en
13 conclure ? On pourrait en conclure qu'on lui a suggéré un certain nombre de
14 choses, on lui a soufflé un certain nombre de choses, on lui a présenté des
15 témoins qu'il ignorait -- des documents qu'il ignorait totalement, de même
16 qu'Obrad Stevanovic qui a dû faire des commentaires sur un cahier qu'il
17 n'avait jamais vu précédemment et parler de réunions auxquelles il n'avait
18 pas assisté.
19 Et je souhaiterais parler d'une décision rendue par la Chambre à la page 26
20 772 du compte rendu d'audience pendant la déposition du général
21 Dimitrijevic. La Chambre a déclaré qu'elle ne voulait pas que les témoins
22 fassent des commentaires au sujet des déclarations d'autres témoins, qu'il
23 appartenait à la Chambre de le faire -- ou aux parties de le faire et à la
24 Chambre d'en tirer les conclusions qui s'imposaient.
25 Autre principe qui n'a pas été respecté ici c'est in dubio pro reo, c'est-
26 à-dire que la -- le doute profite à l'accusé. C'est un principe également
27 fondateur du droit pénal. Mais le bureau du Procureur fait reposer la
28 totalité de son acte d'accusation sur de simples soupçons sans fournir
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1 d'éléments de preuve convaincants, surtout pour ce qui concerne la période
2 de la guerre en 1999.
3 Il y a un autre principe que je souhaiterais évoquer, et à l'appui de notre
4 Défense, un principe anglo-saxon qui est celui de la preuve au-delà de tout
5 doute raisonnable et qui est plus restreint -- restrictif que celui de in
6 dubio pro reo. Si personne ne mentionne le fait qu'en -- Sainovic, en 1999,
7 était membre d'une sorte de commandement -- était commandant, si personne
8 ne nous dit que, dans la hiérarchie militaire, il y avait un Sainovic, si
9 le témoin Djakovic nous a expliqué que "ZK" était un terme interne utilisé
10 entre -- par lui et par Patkovic lorsqu'il s'agissait de -- lorsqu'il y
11 avait des civils et que ça désignait Pavkovic et Lukic en 1998, alors
12 qu'est-ce que c'est que tout cela sauf le doute raisonnable, doute
13 raisonnable montrant que Sainovic n'était pas membre du commandement
14 conjoint ? Et d'ailleurs, il n'a même pas été prouvé que ce commandement
15 conjoint visé à l'acte d'accusation existait véritablement au moment de la
16 guerre, au moment où ces crimes ont été commis. Ça va au-delà de l'absence
17 de doute raisonnable ou de l'existence d'un doute raisonnable. C'est bien
18 pire, il n'y a pas de preuve, tout simplement, preuve écrite ou orale.
19 Nous savons que la justice doit toujours prévaloir quoi qu'il arrive et qui
20 implique que l'on entende des témoins directement dans le prétoire, que
21 l'on ne s'appuie pas simplement sur des preuves indirectes. Qu'avons-nous
22 entendu au cours du réquisitoire de l'Accusation ? On a ajouté des termes
23 qui ne figuraient pas dans le mémoire en clôture au sujet de M. Sainovic.
24 Quand on n'a pas de preuve, à ce moment-là, on peut avoir recours aux
25 adjectifs et ça peut peut-être donner une impression favorable.
26 Pour la première fois, on nous a -- on nous parle du rôle de
27 M. Sainovic d'une manière différente de ce qui figure dans le mémoire
28 préalable au procès dans l'acte d'accusation de manière différente de ce
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1 qui a été évoqué au cours du procès. Par exemple, on a expliqué que le rôle
2 de Sainovic, c'était d'exercer un contrôle politique, page 26 834 du compte
3 rendu d'audience. Jamais on n'avait entendu cela auparavant. Et à la même
4 page, l'Accusation nous dit que Sainovic ne participait pas directement au
5 fonctionnement de la chaîne de commandement de la VJ et du MUP. Et pour
6 nous parler du rôle qui était le sien, on utilise les termes de "contrôle
7 politique." A la page 26 841, on nous dit que le rôle de Sainovic c'était
8 le rôle d'agent politique -- de directeur politique, encore une fois des
9 termes qu'on n'avait pas entendus précédemment.
10 Pour la première fois dans son mémoire en clôture, l'Accusation nous décrit
11 Sainovic comme étant quelqu'un qui exerçait un contrôle politique sur les
12 forces de la SRJ, sur l'armée et sur le MUP au Kosovo-Metohija. Je vous
13 rappellerai qu'au paragraphe 46 de l'acte d'accusation, il est dit que
14 Sainovic était à la tête du commandement conjoint et qu'en tant que tel, il
15 commandait les forces armées. Maintenant, on a l'impression que ce n'était
16 pas véritablement le cas, qu'il exerçait un contrôle politique sur ces –-
17 sur ces forces. Dire que Sainovic exerçait un contrôle politique sur ces
18 forces, caractériser son rôle de cette manière, ça remet en cause de
19 manière très significative l'acte d'accusation établi contre lui.
20 C'est très important, selon moi, parce que cette description, cette
21 qualification, on ne la trouve pas dans l'acte d'accusation, on ne la
22 trouve pas non plus dans le mémoire préalable au procès. On n'a pas entendu
23 ça pendant le procès. Moi, je n'ai pas défendu
24 M. Sainovic à ce titre, je ne l'ai pas défendu contre ces allégations. Et
25 si ça avait été dit précédemment, à ce moment-là, j'aurais peut-être
26 présenté d'autres éléments indiquant qui au Kosovo-Metohija exerçait un
27 contrôle politique sur les forces de sécurité. La Serbie, la SRJ étaient
28 des Etats, et dans des Etats, ce sont les gouvernements qui contrôlent la
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1 situation. Donc, le gouvernement de la RSFY –- ou SRJ –- enfin, RSFY
2 contrôlait l'armée, et le gouvernement de la Serbie, le ministère de
3 l'Intérieur contrôlait le MUP.
4 On nous a montré des éléments au sujet de Sainovic, qui aurait
5 commandé de manière temporaire au Kosovo-Metohija, mais sans donner aucune
6 preuve. On parle beaucoup de Sainovic, mais en fait, c'est de Andjelkovic
7 qu'il aurait fallu parler.
8 L'Accusation a dit que Sainovic était le bras droit de Milosevic au
9 Kosovo. L'Accusation dit que c'était bien connu. Mais, nous, du côté de la
10 Défense, nous ne le comprenons pas. En tout cas, ce n'est pas quelque chose
11 qui était de notoriété publique, contrairement à ce qu'affirme
12 l'Accusation.
13 Alors, comment est-ce que tout ceci peut cadrer avec quelque chose qui est
14 au-delà de tout doute raisonnable que personne ne peut contester ? Tout au
15 long de la guerre, on sait qu'il y a eu au moins une réunion avec Sainovic,
16 il y a eu d'autres réunions avec un certain nombre de personnes, donc, une
17 réunion au moins avec Vasiljevic mais, finalement, l'Accusation a abandonné
18 toutes les charges contre Milosevic et les charges en rapport avec
19 Sainovic, parce qu'elle n'avait pas de preuves, l'Accusation.
20 Que fait l'Accusation en ce moment ? Elle postule un certain nombre de
21 faits dont elle nous affirme que ce sont des faits de notoriété publique.
22 Ensuite, l'Accusation s'empare de ces faits et essaie de les utiliser pour
23 créer des éléments de preuve au lieu de faire ce que l'Accusation devrait
24 faire, comme n'importe quelle Accusation devant n'importe quel Tribunal,
25 c'est utiliser -- quand on utilise des faits de notoriété publique, il faut
26 les prouver, ces faits, avant de les utiliser. C'est uniquement à ce
27 moment-là qu'on peut arriver à des conclusions à partir de ces faits; voilà
28 comment il convient de procéder. Quand quelqu'un exerce un pouvoir
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1 politique, c'est ce que l'Accusation dit au sujet de Sainovic, et il y a
2 des rapports à ce sujet, il y a des éléments qui le confirment, on voit au
3 nom de qui la personne en question exerce ce pouvoir politique. Mais on ne
4 trouve rien dans le dossier. Rien n'a été présenté non plus oralement pour
5 appuyer ces affirmations. Je n'ai vu aucun rapport de Sainovic à Milosevic
6 au sujet de la situation au Kosovo, aucun rapport non plus qu'il aurait
7 envoyé à qui que ce soit d'autre.
8 On sait qu'il était intervenu, Sainovic, le 25 décembre 1998 au Conseil
9 suprême de la Défense, le CSD. Il parle d'une visite qu'il a effectuée en
10 1998 sur un poste frontalier. Voilà le seul élément que j'ai trouvé au
11 sujet de Sainovic, au sujet de toute cette affaire.
12 L'Accusation présente –- a présenté un élément nouveau pendant un
13 réquisitoire, que Sainovic et le commandement conjoint ont été utilisés par
14 Pavkovic comme prétexte et que Milosevic aurait demandé l'aide de Sainovic
15 pour arriver à son objectif. Page 26 892 du compte rendu d'audience. C'est
16 nouveau, tout cela. Nouveau, cette description du rôle de Sainovic. Cela ne
17 découle nullement des éléments invoqués par l'Accusation, les déclarations
18 du général Dimitrijevic, qui n'a jamais rien dit au sujet des relations
19 entre Pavkovic et Milosevic. Encore une fois, l'Accusation se contente
20 d'insinuations, on pourrait même presque parler de provocation. Il n'y a
21 rien au dossier qui y montre que Sainovic, à quelque moment que ce soit,
22 ait soutenu Pavkovic ou ait eu les activités que lui reprochent
23 l'Accusation.
24 J'ai essayé de comprendre où vent en venir l'Accusation, pourquoi elle
25 utilise ces nouvelles qualifications, et la seule réponse que j'arrive à
26 trouver, c'est 608, qui est la différence qui existait entre Sainovic et
27 les autres accusés en ce qui concerne leur rôle politique et leur fonction
28 au sein de la RSFY. Carla del Ponte a déclaré dans son livre qu'il y en
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1 avait un d'entre eux qui ne pouvait pas être mis en accusation par les
2 Américains mais, enfin, le livre n'a jamais été présenté au cours du
3 procès. Il était l'un des cinq vice-présidents mais il n'était pas sur les
4 lieux au moment tout –- où tout ce que l'on sait s'est déroulé.
5 Alors, maintenant, on dit qu'il était directeur politique, directeur de
6 ceci, directeur de cela.
7 La Chambre de première instance, elle doit arriver à sa conclusion sur la
8 base des éléments au dossier, des éléments de preuve au dossier. Tout comme
9 Dieu règne dans les cieux, c'est la Chambre –- à la Chambre de première
10 instance et à elle seule que revient la charge de rendre un verdict mais il
11 faudrait au moins qu'elle ait des preuves qui lui permettent d'arriver à
12 ces conclusions, contrairement à ce que demande l'Accusation. L'Accusation
13 nous dit qu'il n'y aurait même pas dû y avoir de procès.
14 Alors, pourquoi –- qu'est-ce qu'on vient de faire pendant ces deux années ?
15 Qu'est-ce qu'on a fait ? On n'a pas procédé de manière acceptable.
16 L'Accusation vous demande d'examiner un certain nombre de pièces, un
17 certain nombre de PV. Quand les témoins examinent ces documents, ils disent
18 de quoi il retourne mais l'Accusation déforme les choses. Elle présente les
19 choses de manière différente, elle interprète les choses de manière
20 différente, voilà comment ils procèdent.
21 C'est ce qu'ils ont fait pour le général Dimitrijevic et pour le
22 général Djakovic. Pourquoi trouver des milliards d'explications à ce qui
23 est finalement très simple ? On prend l'exemple de Djakovic. On ne donne
24 aucune explication politique au conflit du Kosovo-Metohija. Parlons aussi
25 de Merovci, qui n'est qu'un simple garde du corps. On nous cite les propos
26 de Milosevic, personne ne doit venir vous frapper, et cetera. Mais tout
27 cela –- tout –- tout ce qui en est déduit, ce ne sont pas des faits de
28 notoriété publique. On nous dit qu'il faudrait que –- que l'on reproche à
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1 ce gouvernement d'avoir voulu maintenir le Kosovo au sein de la Serbie,
2 mais c'est ce que fait exactement –- ou c'est ce qu'aurait voulu faire le
3 gouvernement actuel.
4 Modification de la composition ethnique de la population, ça aussi on nous
5 en a parlé. Comment peut-on affirmer que l'on voulait expulser 800 000
6 personnes de manière définitive ? Parce que c'est la seule manière de
7 changer la composition de la population mais, ces gens, ils reviennent
8 systématiquement, c'est l'éternel retour. Alors, qu'est-ce qu'aurait dû
9 faire la Serbie à ce moment-là ? Alors, nous, nous étions là, nous étions
10 soumis aux bombardements de l'OTAN. Il y a trois transformateurs
11 électriques qui fonctionnaient sur tout le territoire de la Serbie,
12 Milanovic nous l'a dit lors de sa déposition, et si un de ces
13 transformateurs avait été touché, beaucoup d'enfants auraient péri.
14 Une approche historique de toute cette affaire nous aurait montré que les
15 Albanais voulaient quitter la Serbie, mais ils ne –-
16 Si on regarde le cas de Rugova, on voit, par exemple, qu'il voulait
17 l'indépendance. C'est pourtant ce que demandait la Serbie depuis cent –- et
18 maintenant, on veut exactement la même chose. Nous avons toujours voulu
19 l'indépendance. On ne peut pas dire cela. Alors, pour l'entraînement –- ou
20 les exercices d'une compagnie à Podujevo; en même temps, l'OTAN amoncelle
21 des forces et utilise ses cadres à titre opérationnel pour recueillir des
22 informations -– pour recevoir des informations, on promet au Kosovo
23 l'indépendance. On entraîne et on finance les membres de l'UCK, on les
24 arme. La brigade –-
25 Oui, il faut que je ralentisse. Je m'excuse aux interprètes.
26 On accuse la Serbie d'avoir procédé à l'entraînement d'une compagnie
27 près de Podujevo. En même temps, l'OTAN amoncelle ses forces, utilise la
28 mission de –- au Kosovo de façon opérationnelle. On promet aux Albanais
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1 l'indépendance, on forme et on –- on entraîne et on finance les membres de
2 l'UCK, on les arme. L'OTAN –- une brigade de l'OTAN arrive à Skopje, à la
3 frontière, des porte-avions entrent dans l'Adriatique. Et on fait venir des
4 petites unités de la taille d'un bataillon pour la défense au mois de mars
5 1999 à la veille de la guerre, et cela est considéré comme étant une
6 violation des accords, et la guerre, par 212 voies de conséquences,
7 commence. Alors, fallait-il laisser l'armée dans les casernes pour que ces
8 soldats soient bombardés par l'OTAN et qu'on –- et pour respecter l'accord
9 que l'OTAN aurait violé ?
10 Alors, la –- la disposition des forces de l'armée yougoslave a été
11 considérée comme étant correctement faite puisque en sus du bombardement
12 systématique et des attaques des nouvelles –- des brigades nouvellement
13 formées de l'UCK, il a été procédé à des –- il a été repoussé toute
14 invasion territoriale sur le Kosovo-Metohija en provenance de l'Albanie et
15 de Macédoine. Alors, laisser de côté ces faits et dire que l'objectif avait
16 été de chasser et d'expulser la population albanaise n'est simplement pas
17 possible. Est-ce que ce –- vous ne trouvez pas une preuve dans les
18 opérations à Drenica, à Mala Krusa [phon] et Malisevo ? Il n'est pas exact
19 de dire que les actions sont planifiées sur ce terrain –- sur ce terrain,
20 parce que c'est précisément là qu'il y a une concentration des plus grandes
21 de la population albanaise.
22 Il n'est pas exact de –- d'affirmer que ces actions sont précisément
23 planifiées parce que –- là, parce qu'il y a une grande concentration de la
24 population albanaise. Il y a moins de 15 % de la population, et donc, ce
25 n'est pas vrai, c'est une manipulation des plus ordinaires. Sur ce
26 territoire, on voit cela dans les documents
27 –- la documentation du KVM, il y a des formations importantes de l'UCK, et
28 sur cette -- sur ce territoire et sur ce –- ces sites que le –- la Mission
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1 d'observation au Kosovo a rendu visite au QG et aux Unités de l'UCK.
2 Partant du témoignage de Zyrapi et des commandants des Brigades de la
3 VJ Delic et Savic, on voit quelle a été la force et l'importance du
4 territoire des conflits, et il n'y a que ces Brigades de la VJ et de l'UCK,
5 et on comprend pourquoi les civils ont fui, et la population –- la moitié
6 de la population serbe a également fui le Kosovo, d'après Sandra Mitchell.
7 Donc, le rapport des forces est resté le même qu'avant le début des
8 bombardements. Donc, qu'est-ce qu'on a obtenu en fin de compte, à la
9 différence près que les Albanais sont revenus et les Serbes ne sont pas
10 revenus ? Il y en a plus de 100 000 qui sont encore à l'extérieur du
11 territoire du Kosovo parce qu'ils n'ont plus où retourner.
12 Alors, on présente les hypothèses au hasard et on les transforme en
13 faits. Alors, on affirme que Sainovic se trouvait à la tête du commandement
14 conjoint, on –- qu'il avait approuvé toutes les décisions, qu'il avait
15 coordonné les activités, que les commandements de la VJ et du MUP le
16 conseillaient. Mais on ne sait pas sur la base de quoi ceci est allégué.
17 Parce que si on –- si on démontre qu'il y a eu une attitude positive de
18 Sainovic sur le retrait des forces, sur le respect de la loi, sur le
19 fonctionnement et l'ordre des choses, sur la nécessité de punir et sur la
20 nécessité d'investiguer les crimes, on transforme tout cela en
21 incriminations. La coordination de la VJ et du MUP dans les activités de
22 guerre, c'est normal, et d'après Naumann et les autres témoins, cela est
23 une coordination des crimes à Suva Reka, Mala Krusa, rue Milosh Giliq à
24 Djakovica, et Izbica.
25 Et on transforme cela en chefs d'accusation. Alors je vais en dire
26 plus que je n'ai noté ici. Quand on a demandé de –- un prononcé de
27 sentence, il a été question de circonstances aggravantes.
28 Se peut-il qu'il n'y ait pas une seule circonstance à
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1 décharge ? Est-ce qu'il est difficile de dire, à la fin de Rambouillet, il
2 s'était –- il s'était battu pour que les choses marchent, il aurait pu
3 démissionner. On aurait pu voir alors ce qui se serait produit, donc, il
4 s'agit de reconnaître les choses telles qu'elles sont. Le fait qu'il ait
5 fait livrer de l'électricité à je ne sais qui, c'est déjà encore un chef
6 d'accusation ou un élément à charge.
7 La coordination de la VJ et du MUP. D'après le Procureur, c'est quelque
8 chose qu'on doit reprocher. M. Naumann a bien dit qu'il fallait forcément
9 que ce soit fait en temps de guerre pour, par exemple, ne pas avoir des
10 tirs ou des victimes de tirs amis. Donc, et on -– tout de suite, on dit que
11 c'est une coordination des crimes, on parle de Suva Reka, de la rue Milosh
12 Giliq à Djakovica, on parle d'Izbica, on parle de Mala Krusa. Si Sainovic,
13 en sa qualité de vice-premier ministre fédéral chargé des relations
14 internationales et président de la Commission chargée de la Coopération au
15 Kosovo sait quelque chose, des choses qui connues de tout haut responsable
16 au niveau de l'Etat et que nous avions tous connaissance –- dont nous
17 avions tous connaissance nous-mêmes, c'est tout de suite des instructions
18 qu'il aurait données à qui que ce soit –- à quelconque. Alors, il y a eu 15
19 opérations de l'armée et du MUP que vous avez de placées sous le
20 commandement conjoint, 15, mais il y a eu plus de
21 500 conflits. Ce n'est donc pas la guerre en entier, comme le prétend
22 l'Accusation, il y a eu 500 conflits individuels de confirmés par le
23 général Lazarevic.
24 Ensuite, on met de côté –- on néglige le fait que les relations internes de
25 la VJ d'une part et du ministère de l'Intérieur de l'autre part, telles
26 que, par exemple, les poursuites disciplinaires, les poursuites au pénal,
27 la politique des cadres. Ça n'a jamais été l'objet d'une coordination. Ce
28 n'est pas ce qu'on coordonne. On coordonne des opérations, et ça revêt une
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1 importance vitale pour la
2 -– l'évaluation de la responsabilité de Sainovic à la lumière du rôle que
3 le Procureur prétend qu'il a joué, pour ce qui est de l'évaluation de ses
4 responsabilités et pour soupeser la peine à prononcer.
5 Alors, dans le mémoire de clôture, tout à coup, ce commandement conjoint en
6 1999, d'après le Procureur, ça se ramène à quatre hommes : Pavkovic, Lukic,
7 Lazarevic et Sainovic. Alors, dans l'exposé verbal, nous avons appris que
8 Sainovic n'a même pas eu à se déplacer vers le Kosovo. Alors, nous n'avons
9 pas indiqué dans nos écritures que Sainovic était tout le temps à Bor,
10 comme on veut bien le laisser entendre. J'ai dit que entre autres, il était
11 à Bor, mais qu'il était aussi à Belgrade et qu'il était à Vinca ainsi qu'à
12 Vares pendant la guerre; mais comment pouvait-il alors, de loin, commander
13 ce commandement conjoint. Ce commandement conjoint était en train de se
14 battre contre l'OTAN. Alors, si on veut se référer à une logique, ça ne
15 peut pas tenir –- ça ne tient pas debout.
16 Dans ses propos, le Procureur a enfin dit que cette entreprise
17 criminelle commune a pris naissance au plus tard en octobre 1998, et cela
18 est placé en corrélation avec une phrase prononcée par Milosevic à
19 l'intention de Naumann. Et il dit : "Au printemps, on réglera leurs comptes
20 aux Albanais comme à Drenica en 1945 et 1946." Par exemple, le témoin n'a
21 aucune idée de ce qui s'est passé à Drenica à l'époque et il vous l'a dit.
22 Veljko Odalovic, un témoin de la Défense, a expliqué qu'il s'agissait d'un
23 règlement de compte avec les membres du Parti Bal [phon] qui étaient des
24 Albanais armés et qui faisaient partie de la coalition hitlérienne.
25 Et ça ne peut rien avoir à -- de commun avec l'expulsion de la
26 population albanaise tel que le Procureur veut bien essayer de le
27 présenter. On a liquidé une bande de membres du Parti Bal mais on n'a pas
28 procédé à une déportation, il n'y a pas eu expulsion.
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1 Le Procureur développe une thèse puis il renonce à cette thèse en --
2 pour dire que Milosevic et les autres avaient souhaité même qu'il y ait
3 bombardement de la Serbie afin que ce plan d'exécution soit mis en œuvre,
4 et c'est la raison pour laquelle il y aurait eu obstruction de leur part à
5 Rambouillet. Alors, comment peut-on croire que quelqu'un exposerait son
6 pays tout entier aux bombes de l'OTAN alors qu'on a bombardé des villes à 1
7 000 kilomètres du Kosovo ? Subotica, par exemple, on a -- il y a eu des
8 frappes là où on a pu frapper. On n'a pas frappé au Kosovo seulement.
9 Alors, quel est l'homme qui entrerait en conflit avec la plus grande
10 des coalitions au monde alors qu'on sait que ce conflit, on ne peut pas
11 l'emporter. Moi, je veux bien accepter ce que M. O'Sullivan, mon collègue
12 et ami, a bien dit pour expliquer la situation à Rambouillet et pour
13 indiquer qui est-ce qui a fait obstruction à Rambouillet, et j'ajoute le
14 témoignage du Témoin Kesic.
15 Et quand on parle maintenant de Rambouillet, je me dois de dire --
16 d'ajouter quelque chose parce que je défends Sainovic et sa personnalité au
17 sujet de ce qui s'est passé à Rambouillet. Je me réfère à tous ceux qui ont
18 été entendus sur ce -- sur ce volet, les étrangers, notamment, Petritsch,
19 Byrnes. Mais leurs propos n'ont-ils pas montré qu'il y a eu coopérativité
20 de la part de Sainovic, qu'il y avait eu souhait d'aboutir à la paix ?
21 Combien de fois est-il sorti de Rambouillet, comme le dit le Procureur ?
22 Pourquoi laisse-t-on entendre qu'il est allé voir Milosevic ? Moi, je n'ai
23 pas vu cela. Les témoins ont parlé d'une sortie de sa part, peut-être deux.
24 Mais quand on a dit qu'il était parti, il était parti pour essayer de
25 sauver les négociations. Est-ce que c'est un reproche qu'on lui fait ? S'il
26 avait refusé d'y aller, ça aurait été donc une qualité ? Donc, il fallait
27 qu'on en finisse au plus vite. Alors, n'est-il pas évident que l'ordre
28 donné de bombarder c'est un ordre exécutif donné en octobre 1998 ? Et la
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1 concertation et l'accord entre Holbrooke et Milosevic a mis -- a fait
2 stopper cela, c'est-à-dire l'a reporté. Il y a des effectifs plus
3 importants là-bas, il aurait été plus facile de procéder à des expulsions à
4 ce moment-là. Si on avait voulu des bombes, il fallait refuser les
5 propositions de Holbrooke dès ce moment-là. Et des effectifs, d'après
6 Kesic, en Amérique l'avaient souhaité et le lui ont reproché. Donc, il
7 aurait été facile de procéder -- ou plus facile de procéder à l'expulsion
8 de tous ces gens-là, à ce moment-là. Je n'ai donc jamais compris comment le
9 Procureur avait interprété ce plan-là et comment, en vertu de ce plan,
10 fallait-il empêcher ces gens de revenir chez eux, mis à part l'éventualité
11 d'une victoire vis-à-vis de l'OTAN, mais personne n'a eu l'idée de pouvoir
12 vaincre l'OTAN.
13 Alors, je veux dire par là quelque chose. Le bombardement a pris fin, la
14 paix a été rétablie à Kumanovo et la guerre elle s'est terminée par la
15 résolution 1244 à Kumanovo. Et cette révolution -- résolution des Nations
16 Unies garantissait que le Kosovo resterait partie intégrante de la
17 Yougoslavie et les Nations Unies sont entrées au Kosovo, et non pas comme
18 on l'avait demandé à Rambouillet, à -- à signer l'occupation de la
19 Yougoslavie toute entière par l'OTAN. Vous avez vu tous les détails, vous
20 avez entendu le Témoin Jovanovic sur ce -- sur ce sujet et il y a eu
21 referendum sur l'indépendance du Kosovo par la suite.
22 Alors, je vais résumer. Comment la guerre a-t-elle commencé ? Holbrooke est
23 venu et il a présenté son ultimatum. Il fallait signer à Rambouillet,
24 c'était l'occupation de l'OTAN et l'indépendance du Kosovo ou alors c'était
25 le bombardement. C'était une -- une raison de bombarder. Le Témoin Kesic a
26 expliqué les positions de l'équipe Clinton, il s'agissait de -- du rôle de
27 l'OTAN. Alors, comment la guerre s'est-elle terminée ? Par une résolution
28 des Nations Unies, 1244, on garantissait la souveraineté de la République
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1 fédérale de Yougoslavie, il n'y avait pas d'occupation de la -- de l'Etat
2 tout entier et les forces des Nations Unies étaient là pour garantir la
3 sécurité. Alors, ce qu'il importe de mentionner ici et que je vous demande
4 de garder à l'esprit, c'est l'entretien entre Sainovic et Rugova dont il
5 est question ici aussi. Alors, qu'ont-ils convenu que nous transmet
6 Sainovic ? Il y a eu, un, cessation des bombardements; et de deux, retour
7 des réfugiés. Les réfugiés serbes, eux, ne sont jamais revenus et on a
8 accepté le cessez-le-feu et c'est ce que nous avons obtenu.
9 Alors, l'accord avec Holbrooke a été respecté, vous l'avez entendu dire ici
10 par le représentant de l'OTAN et les observateurs de la [imperceptible].
11 Alors, pourquoi cela aurait-il été respecté s'il y avait eu plan criminel
12 de notre côté ? Alors, pourquoi les gens n'ont-ils pas fui Belgrade comme
13 les Albanais ont fui le Kosovo ? Mais ça ne se compare pas, vous savez. Si
14 on veut être sérieux, on ne compare pas.
15 A Belgrade, d'après l'OTAN et d'après le général Naumann, il y a eu
16 des erreurs de commises et on a frappé, par exemple, l'ambassade de Chine.
17 Et ils ont sélectivement ciblé des installations et ils ont cherché à
18 éviter les victimes civiles. Alors, il y a eu des gens qui ont fui
19 Belgrade, il n'y a -- on ne peut pas dire qu'il n'y en a pas eu. Les gens
20 ont fait fuir leurs -- partir leurs familles, leurs femmes et leurs
21 enfants. Il y a eu même des hommes politiques qui sont partis. Mais la
22 plupart n'ont pas fui, il n'y avait pas raison. On s'attendait à ce que,
23 chaque jour, on interrompe les bombardements. Si vous avez suivi les
24 choses, on nous disait à la télévision que ce serait une question de
25 quelques jours à peine. Et pour l'essentiel, les choses fonctionnaient, les
26 transports, il y a eu des coupures d'électricité, l'électricité revenait.
27 Mais il n'y a pas eu de combats dans les rues, l'UCK n'est pas entrée dans
28 Belgrade, on n'a pas eu des échanges de tirs entre l'UCK et nos effectifs
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1 au centre-ville à Terazije, donc, il n'y avait pas raison de fuir.
2 Alors, voilà une question hypothétique que je vais évoquer. Je suis
3 d'accord avec mon collègue, Hannis, qu'il -- pour dire qu'il ne faut pas
4 essayer de vouloir entrer avec des [imperceptible] Paris dans une
5 bouteille. Mais si on prend les 800 000 Albanais qui ont fui le Kosovo,
6 pourquoi ont-ils fui ? Pourquoi les gens fuiraient-ils le Kosovo si on
7 avait ciblé Belgrade, Subotica et les autres régions ? C'est ça la preuve,
8 ils ont fui parce qu'il y a eu bombardement de l'OTAN.
9 La chose qui demande une réponse de ma part pour ce qui est des
10 allégations du Procureur c'est la suivante : pourquoi faire la différence,
11 dans les mémoires de clôture, entre 1998 et 1999, alors que c'était la même
12 chose, d'après le Procureur ? La différence est
13 -- est une, il y a eu la guerre. En 1999, nous étions en guerre. En 1998,
14 il y a un temps de paix. Et il y a l'OTAN qui fait la différence.
15 Alors, si on parle de commandement conjoint, qu'est-ce que cela veut
16 dire ? En 1998, vous avez des notes, vous avez des réunions. En 1999, vous
17 n'avez rien du tout parce qu'il n'y a pas eu de ce -- de commandement de ce
18 type et, dans tout état de cause, Sainovic n'en a pas fait partie et c'est
19 ça la différence. Il n'y a aucun élément de preuve disant que des prisons -
20 - des civils étaient présents dans la chaîne de commandement, que ce soit
21 de l'armée ou du MUP, et c'est la raison pour laquelle Sainovic a été
22 déplacé du Kosovo pour être un quatrième membre, le seul civil d'ailleurs,
23 qui serait là à commander par système de télécommande.
24 Le Procureur se réfère à la pièce P1317. Alors, c'est une pièce qu'on a
25 analysée longuement. C'est là qu'on parle du commandement conjoint qui a
26 été mis sur pied ou inventé par Slobodan Milosevic, et on s'arrête à cela.
27 Mais il y a autre chose encore dans ce document. ON parle de rétrocession
28 de documents militaires au secrétaire du cabinet de Slobodan Milosevic, cet
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1 homme s'appelle Goran Milinovic. Il est de nos jours encore en liberté et
2 il se balade dans Belgrade; et jamais personne ne lui a posé de questions à
3 ce sujet du côté de l'Accusation. Moi, je lui ai posé des questions de mon
4 côté.
5 Alors, on lui remet ces documents au cabinet militaire de Slobodan
6 Milosevic et on dit après cessation de ce commandement conjoint octobre
7 1998. Donc, ce document parle de l'existence et parle de la cessation de ce
8 commandement conjoint.
9 Un document est un document. Si vous vous en servez, il faut s'en servir
10 intégralement. Il s'agit du mois d'octobre 1998, je dis bien, car dans ce
11 document à sa fin il est dit que le commandement conjoint a cessé d'exister
12 en octobre 1998, ce qui fait que les documents militaires sont confiés au
13 secrétaire du cabinet de Milosevic, le dénommé Goran Milinovic.
14 La chose suivante que je me dois de dire c'est la chose suivante : c'est la
15 lettre de Perisic est prise en considération d'une façon tout à fait
16 erronée pour ce qui est de Sainovic. Le Procureur garde à la vue le fait
17 qu'il y a le mot de "tentative." A l'époque, d'après les positions
18 défendues par l'Accusation, c'est Minic qui se trouve à la tête du
19 commandement conjoint, penchez-vous sur les dates donc. Les éléments de
20 preuve montrent que, le lendemain après cette lettre, Perisic a donné
21 l'ordre et a établi un poste de commandement avancé de la 3e Armée à
22 Pristina qui a contrôlé et dirigé les activités du Corps de Pristina. Par
23 la suite, Perisic -– ou pas par la suite en sus, Perisic envoie à plusieurs
24 reprises des inspections au Kosovo et il se déplace en personne vers le
25 Kosovo et il n'a rien remarqué d'anormal. Je pense que Sainovic et il
26 serait normal de considérer que Sainovic était là pour commander les
27 troupes. Alors, Perisic reste après cette date pendant plusieurs chefs en
28 chef d'état-major.
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1 Ce n'est pas ce que j'ai dit. Je demande à ce que soit rectifié le compte
2 rendu. Il y a une erreur. Perisic n'a relevé rien d'anormal et il serait
3 anormal de voir Sainovic commander parce que ça il l'aurait remarqué.
4 Alors, on perd de vue qu'après le mois de juillet, Perisic pendant
5 plusieurs mois encore se trouvait à la tête de l'état-major et je n'ai
6 jamais nulle part vu qu'il avait mentionné Sainovic ou une émission de la
7 part de ce dernier dans son travail. La Défense souligne, entre autres, que
8 le bureau du Procureur n'avait pas voulu Perisic comme témoin. La Défense a
9 bien dit qu'elle ne lui faisait pas confiance. Geoffrey Nice a dit même
10 pire : "Alors, pourquoi, moi, je lui ferais confiance? Pourquoi le Tribunal
11 lui ferait-il confiance, pourquoi ferait-on confiance aux bonnes intentions
12 de cet homme ?"
13 Ensuite, le Procureur dit encore que les propos tenus par Sainovic à
14 une réunion du MUP ce sont des instructions et des ordres. Tous les témoins
15 participant à la réunion et on les a tous entendus ici disent tout à fait
16 autre chose, absolument autre chose. On ne voit nulle part chose qui
17 laisserait entendre que Sainovic donnait des ordres. On voit qu'aux deux
18 réunions, il était présent pendant très peu de temps. Il n'a même pas été
19 présent pendant les réunions
20 -- réunions entières et il est mentionné comme vice-président du
21 gouvernement -- ou vice-premier ministre et il n'est pas qualifié de membre
22 du commandement conjoint ou de directeur politique ou aller savoir encore
23 quoi.
24 Alors, on parle d'enregistrement de réfugiés mais il n'a pas donné
25 d'ordre. Si vous vous penchez sur son intervention, vous verrez que les
26 chefs du SUP informent déjà combien de gens ils ont déjà recensés.
27 Quelqu'un a donné l'ordre de le faire déjà avant, alors, ils se sont –- les
28 vice-premiers ministres viennent à une réunion pour faire part des
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1 instructions qu'ils ont reçues et lui était vice-premier ministre fédéral.
2 On parle de l'opération Jezerce. Sainovic en parle mais cette
3 opération est déjà en cours donc les ordres ont déjà été donnés bien avant
4 cela, et d'après le Procureur, c'est lui qui aurait donné l'ordre de lancer
5 cette opération.
6 On cite Vasiljevic mais on le fait de façon souvent erronée -- très
7 erronée. Jamais Vasiljevic devant ce Tribunal n'a dit que Sainovic était
8 membre de ce commandement conjoint. Et pas même lorsqu'il parle de la
9 réunion du 1er juillet [comme interprété]. Si vous avez prêté une oreille
10 attentive à ce qu'il a dit, il a dit : "Je ne sais pas ce que Sainovic
11 faisait là-bas." Alors, vous avez deux déclarations en présence.
12 Ce que j'exprime comme appréhension, je n'affirme pas, j'ai une
13 appréhension celle de dire que les interviews de Pavkovic et Lukic vont
14 être utilisées de cette façon contre les autres accusés parce que c'est
15 mentionné dans le contexte de Sainovic lorsque M. Hannis a pris la parole.
16 J'espère que cela ne va pas échapper à l'attention des Juges de la Chambre,
17 pour ce qui est de la création des réunions du commandement conjoint. Donc,
18 je dis que c'est une appréhension que j'ai, je n'affirme rien.
19 Lorsqu'on se penche sur le mémoire du Procureur, son sujet préféré à
20 savoir les notes relatives aux réunions du commandement conjoint, le
21 Procureur cite une dizaine de phrases, pas plus, peut-être un peu plus mais
22 pas bien plus, alors, Sainovic, d'après Djakovic, aurait fait des
23 déclarations de ce type. Alors, penchez-vous sur un fait, vous avez 69
24 réunions, à chacune des réunions, vous avez cinq ou six intervenants, donc,
25 ça fait plus de 400 interventions; Sainovic n'intervient que dix fois.
26 Comment dire -- comment expliquez ? Si Sainovic était le commandant et si
27 c'était un commandement mais ça aurait dû être truffé d'ordres, de
28 conclusions, de rapports, d'interventions de sa part, or, ce n'est pas le
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1 cas. Il aurait dû donner des ordres, émettre des conclusions. On aurait pu
2 tirer de ces notes que c'est lui la personnalité centrale, c'est lui qui
3 donne des instructions, ce serait lui qui donnerait des ordres; mais lui il
4 ne pouvait même pas obtenir un hélicoptère de la part du général – dont
5 l'interprète n'a pas entendu le nom – et ça c'est indiqué ici.
6 Alors, partant de phrases arrachées du contexte – et je répète que le
7 Témoin Djakovic a expliqué la validité de ses notes, je ne tiens pas donc à
8 vous rappeler la chose davantage – on tire la conclusion qui est celle de
9 dire que Sainovic avait le commandement et exerçait le commandement vis-à-
10 vis de toute l'armée et du MUP tout entier pendant toute la durée du
11 conflit.
12 Alors, autre chose intéressante, Djakovic vous a confirmé que ses
13 notes n'étaient prises que lorsque lui était là; lorsque lui n'était pas
14 là, personne n'avait pris de notes. Alors, qu'est-ce que c'est que ce
15 commandement-là ? En réalité, on explique de la sorte les vides entre les
16 réunions. Djakovic était tout simplement –- effectuait d'autres tâches, il
17 n'était pas à la réunion. Les réunions se sont tenues, personne n'a pris de
18 notes. Est-ce que vous avez l'impression, vous, que c'est le fonctionnement
19 d'un véritable commandement, et c'est ainsi qu'on explique les vides qui
20 existent ?
21 Vous n'avez présenté aucun document où on mentionnerait Sainovic
22 comme étant membre de ce commandement conjoint ou commandant du
23 commandement conjoint. Où est-ce que cela est noté ? A chaque fois qu'on le
24 mentionne, on dit qu'il est vice premier ministre ou président de la
25 Commission chargée de la Coopération avec l'OSCE. On a fait venir Djakovic
26 en dépit de la volonté du Procureur, si je puis m'exprimer ainsi, et il a
27 tout expliqué; bien sûr, ça ne se retrouve pas chez le Procureur. Pour le
28 Procureur, ça ne s'est pas produit du tout.
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1 Alors, si Philip Coo avait pu être placé devant les Juges de cette
2 Chambre comme étant analyste spécial, qui est un analyste ordinaire qui a
3 interviewé tous les -- toutes les personnes, Vasiljevic, Lazarevic, Lukic,
4 et il les a tous poussés -- ou placés dans le -- le commandement conjoint,
5 alors, dans le -- le mémoire de clôture, on n'aurait que Philip Coo et
6 c'est la seule chose à laquelle il pourrait se référer. Or, Dieu merci, ça
7 ne s'est pas produit, ça n'a pas marché parce que, tout simplement, il
8 n'est pas indépendant.
9 Alors, est-ce que vous avez tous omis de noter que tous ont indiqué que ces
10 réunions se sont tenues à chaque fois après que Pavkovic avait obtenu des
11 ordres de la part du général Simic ? Et si vous en -- vous en tenez à ce
12 que Djakovic a dit, c'était là la coordination du MUP et de l'armée.
13 Pourquoi commander alors que tout est déjà accompli ?
14 Donc, Pavkovic, après avoir reçu un ordre de Simic ou Samardzic, a
15 rencontré Lukic. Ensuite, il procédait à la coordination des activités de
16 l'armée et du MUP et c'est seulement ensuite qu'il y a eu la fameuse
17 réunion. Il n'y a pas eu d'ordre donné au cours de cette réunion parce que
18 tous les ordres ils avaient déjà été donnés précédemment, c'est ce que
19 Djakovic vous a dit ici même.
20 Maintenant, j'aimerais évoquer le général Dimitrijevic et sa déposition. Il
21 a dit que c'était ridicule de dire que Sainovic était à la tête de l'armée
22 et, moi, j'ai dit que c'était vraiment triste parce que c'est justement
23 pour cette raison que Sainovic est ici au banc des accusés. Ce que -- ce
24 qui me gêne c'est qu'on affirme que les témoins de la Défense ne disent pas
25 la vérité. J'ai beaucoup de mal à utiliser le terme de "mensonge." Ces
26 gens, pourtant, on ne les a jamais entendus au -- en tant que suspects ou à
27 quelque autre titre parce que, pour la plupart d'entre eux, l'Accusation
28 n'avait aucune envie de les entendre. Examinons maintenant la qualité des
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1 témoins à charge. Qui a dit des choses positives au sujet de Cvetic --
2 Ljubinko Cvetic ? On a entendu ici dire que ce n'était quelqu'un qui
3 n'était pas -- ce n'est pas quelqu'un de bien, c'était quelqu'un qui ne
4 travaillait pas bien. Et qu'en est-il de Tanic ? L'Etat attaquait -- cet
5 Etat attaquait l'Etat dont il était membre.
6 Quant au général Vasiljevic, il a été interrogé en tant que suspect par
7 Coo. Ensuite, on l'a bombardé témoin, sans doute parce que les réponses
8 qu'il avait données convenaient à quelqu'un mais il n'a pas dit ici que
9 Sainovic était membre du commandement conjoint, ou qu'il commandait ce
10 commandement conjoint. Il n'a rien dit de tel. Examinons la déclaration
11 qu'il a faite à la Défense, examinons aussi ce qu'il a déclaré devant ce
12 Tribunal.
13 Et, enfin, il faut que je me pose une question si les témoins de la
14 Défense, véritablement, ne disaient pas la vérité ici, eh bien, je me pose
15 la question suivante : je n'ai rien entendu au sujet des témoins de la
16 Chambre. Est-ce que les mêmes allégations sont portées contre eux ?
17 Mais à ce stade de mon intervention, je souhaiterais passer à une partie un
18 petit peu plus laborieuse de ma plaidoirie. Je voudrais lire les
19 paragraphes où l'Accusation déforme la nature et la teneur des documents.
20 On va commencer par le paragraphe 21, l'Accusation déclare que le
21 nationalisme politique serbe repose sur le -- signifie que les Serbes
22 devaient vivre sur un territoire contrôlé par les Serbes, faute de quoi ils
23 risquaient d'être confrontés à des mesures de discrimination, de
24 persécution ou de génocide. Or, je n'ai rien vu qui permette d'étayer cette
25 affirmation. Paragraphe 22, il est question des événements qui ont eu lieu
26 au printemps 1987 sur la base des déclarations de Merovci et Abrahams.
27 L'Accusation simplifie à outrance les événements historiques et les
28 présente par le truchement et dans la perspective de témoins partiaux qui
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1 n'ont pas suffisamment de connaissances des faits. Faisons plutôt appel à
2 de vrais témoins, de vrais experts, à de vraies pièces à conviction parce
3 que là nous avons des allégations de portrait extrêmement général.
4 Paragraphe 24, l'Accusation dit que Milosevic a été au pouvoir pendant huit
5 ans et qu'il était impératif pour lui de regagner le contrôle du Kosovo.
6 Ici, on cite les déclarations de Merovci. Ici, encore une fois, on voit une
7 simplification à outrance, simplification bien triste des faits
8 historiques. L'Accusation passe sous silence la réalité politique et
9 sociale de l'époque. Le Kosovo faisait partie du territoire souverain de la
10 République de Serbie, et la question du contrôle sur une partie de ce
11 territoire n'était pas la conséquence d'une intention délictueuse, c'était
12 une obligation constitutionnelle. Comment appliquer ce même principe à la
13 Géorgie ? Est-ce que Saakashvili est coupable parce qu'il a souhaité
14 conserver le territoire qui était celui de son pays ? Et est-ce que les
15 Russes ont raison de le combattre, ou bien, est-ce que ce principe-là il ne
16 s'applique qu'à nous -- qu'aux nôtres ?
17 L'Accusation déclare au paragraphe 25 que, lors d'une réunion avec
18 Phillips, Sainovic -- Phillips, Sainovic -- ou plutôt, lors d'une réunion
19 avec Phillips, Sainovic a déclaré que la population albanaise ne voulait
20 pas coexister avec les Serbes, à qui appartenait le Kosovo. L'Accusation ne
21 place pas les propos dans le contexte approprié, Sainovic parlait des
22 activités terroristes auxquelles participait une certaine partie de la
23 population albanaise. Dans son carnet, pièce 2D17, Phillips a noté que,
24 lors d'une réunion du
25 24 novembre 1998, Walker a demandé à Sainovic pourquoi il y avait de moins
26 en mois d'Albanais qui voulaient vivre en Yougoslavie; et Sainovic a
27 répondu que la majorité de la population du Kosovo-Metojiha pensait et
28 croyait qu'il pouvait y avoir une solution politique aux conflits. Phillips
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1 a confirmé la chose quand il est venu déposer devant ce prétoire, page 11
2 879 du compte rendu d'audience. Tout ceci n'a rien à voir avec ce
3 qu'affirme maintenant l'Accusation.
4 Paragraphe 26, l'Accusation affirme que Milosevic a ordonné la mise en
5 place du commandement conjoint. Il est question là d'une lettre non signée
6 envoyée par le ministère de la Justice au bureau du Procureur le 12 juillet
7 2002. C'est le document que j'ai déjà mentionné précédemment, P1317. Tout
8 d'abord, cette lettre n'est pas signée, on n'y trouve aucun -- aucune
9 source de mentionnée, aucune source qui corroborerait les affirmations qui
10 y sont présentées. On se contente d'invoquer les connaissances des organes
11 -- ou les informations des organes militaires mais on ne précise pas de
12 quoi il s'agit -- de quels organes il s'agit. L'Accusation utilise ce
13 document pour nous montrer -- pour prouver, selon lui -- selon elle, le
14 moment où le commandement conjoint a été mis en place, mais l'Accusation ne
15 s'appuie pas sur une autre partie de ce document. Ce ne sont que quelques
16 lignes dans lesquelles il est dit que le ministère fédéral de la Justice
17 informe que le commandement conjoint cesse d'exister en 1998, à la fin
18 1998. Il n'y a aucun autre élément de preuve, donc, on nous présente ce
19 courrier qui date de 2002 et on le présente de manière partielle.
20 Il est question ici du fait que les documents militaires ont été remis au
21 secrétaire -- ou au Greffe, ça prouve donc qu'il n'y avait pas de
22 commandement parce qu'il n'y a pas de documents. Goran Milinovic, qui fait
23 l'objet de poursuites à Belgrade devant le quatrième tribunal municipal,
24 comme ça a été dit par le Témoin Kostic qui est venu ici, mais il me l'a
25 dit après l'audience, en tout cas, c'est quelque chose qui est vérifiable,
26 il m'a quelque chose au sujet de ces documents et au sujet du -- de
27 l'individu que je viens de mentionner. Bon, je ne sais pas quelle est sa
28 ligne de défense, mais peu importe. Ce qui importe en revanche et ce que
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1 l'Accusation laisse de côté c'est que le général -- c'est ce que le général
2 Dimitrijevic a expliqué dans son témoignage. Il a expliqué l'origine de
3 cette lettre. Ça, c'est franchement très intéressant parce que Dimitrijevic
4 rejette la première partie de cette lettre.
5 Dans ce même paragraphe, paragraphe 26, l'Accusation déclare la chose
6 suivante : le commandement conjoint n'avait aucune autre autorité juridique
7 légale que le pouvoir qui lui avait été transféré par Milosevic, et on ne
8 dit pas sur quoi repose cette affirmation. Aucune justification n'est
9 apportée. C'est très peu professionnel, cette manière de procéder. Les
10 preuves sont tout simplement manipulées, inventées de toutes pièces, afin
11 de – d'induire en erreur la Chambre et d'avoir un impact sur l'issu de ce
12 procès.
13 Paragraphe 28, les Serbes constituaient la majorité de la population au
14 Kosovo-Metohija, beaucoup de Serbes estimaient que ça faisait partie
15 intégrante de la Serbie, ce Kosovo-Metohija. Mais, bien sûr que ça faisait
16 partie de la Serbie, et ce ne sont pas simplement les Serbes qui
17 l'estimaient, tous les Serbes considéraient que ça faisait partie de la
18 Serbie.
19 L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : En fait, les Serbes
20 constituaient la minorité de la population au Kosovo.
21 M. FILA : [interprétation] Ici, on se réfèrera à la résolution 1244 du
22 Conseil de sécurité qui n'a pas été respecté par les Etats-Unis.
23 Paragraphe 29, on parle de l'année 1986, du mémorandum de l'académie des
24 sciences, et cetera. On parle de 1986 également. Mais ce mémorandum, il n'a
25 jamais été fini, il n'a pas été versé au dossier par l'Accusation, ce qui
26 vous aurait permis de voir quel en était le contenu. Et on voit qu'Abrahams
27 non plus n'a pas lu le document. Ça, c'est évident. Tout ceci est
28 improvisé, tout ceci est superficiel. Tout ceci découle du chef 63.
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1 Au paragraphe 30, le Procureur affirme que Baton Haxhiu a été utilisé par
2 Milosevic pour –- au Kosovo-Metohija pour atteindre le pouvoir.
3 Ceci découle du paragraphe 63 du mémoire préalable au procès de
4 l'Accusation.
5 Baton Haxhiu a été déclaré coupable d'outrage par ce Tribunal, cela vous en
6 dit long sur la qualité de ce témoin.
7 Au paragraphe 33 de son mémoire, le Procureur dit que les modifications de
8 la constitution de la Serbie ont été adoptées avec le concours des chars.
9 C'est Rugova qui l'affirme mais il n'était pas député à l'assemblée, il
10 n'était pas présent lors de la réunion en question. Mais comment pouvons-
11 nous lui demander d'où il tient ces informations ? Tout ceci montre bien
12 quel poids vous devez accorder aux éléments de preuve et à son témoignage.
13 Au paragraphe 36, il est dit que Milosevic s'est appuyé sur la majorité
14 détenue par le Parti socialiste serbe à l'assemblée pour promulguer des
15 lois et qu'il s'est appuyé sur certains membres fidèles du Parti socialiste
16 tel que Sainovic. Mais, là encore, aucune source n'est mentionnée, alors
17 d'où a-t-on obtenu ces informations ? Je ne sais pas. Ils n'étaient même
18 pas députés à l'assemblée, alors pourquoi s'appuie-t-on sur Sainovic ? Je
19 ne sais pas.
20 Paragraphe 43, on fait référence au paragraphe 73 du mémoire préalable au
21 procès. De nombreux témoins ont parlé de la séance du -– des membres –- la
22 réunion des membres du SPS tenue le 16 juin 1998. C'était au paragraphe 42
23 et non pas au paragraphe 43, excusez-moi.
24 De nombreux témoins ont parlé de la séance tenue le 16 juin 1998, et on
25 retire une phrase du contexte des débats mais Sainovic n'est jamais
26 intervenu.
27 Au paragraphe 43, là encore, on mentionne Drenica, et on passe totalement
28 sous silence le témoignage de Veljko Odalovic. On parle de Naumann, lequel
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1 a reconnu qu'il ne savait pas de quoi il retournait et qui n'avait pas
2 trouvé de documents à ce sujet.
3 Au paragraphe 48, il est question d'ordres donnés par le commandement
4 conjoint en rapport avec la population armée non-albanaise. Le bureau du
5 Procureur affirme que l'on a fourni un soutien aux forces de l'armée du
6 MUP. Nous avons entendu des dizaines de témoignages sur ce point – sur la
7 manière dont on s'est appuyé sur les ordres du commandement conjoint. Le
8 général Lazarevic et beaucoup d'autres ont dit que cela s'était fait de
9 façon automatique, cela n'a pas eu lieu.
10 Au paragraphe 57, le Procureur ne s'est pas appuyé sur des documents très
11 importants sur la base desquels on a mené les opérations antiterroristes,
12 il s'agit des documents émanant du général Perisic, des directives et des
13 ordres. Et si j'ai bien compris, il n'est pas considéré comme un membre
14 d'une quelconque entreprise criminelle commune, et pourtant, c'est sur la
15 base de ses ordres et de ses consignes que tout s'est passé.
16 Au paragraphe 73, on se sert encore du carnet de notes, mais d'un extrait
17 qui n'a pas été rédigé par Djakovic. Je maintiens toutes mes objections sur
18 ce point, sur le fait que nous ne connaissons pas les sources et ainsi de
19 suite, mais voyons ce qui est dit à la page 162 de la version en anglais :
20 "Nous devons nous assurer que personne ne se rende compte que certains des
21 éléments des détachements ne se sont pas retirés. Et il ne doit pas y avoir
22 de divergences dans – par rapport aux informations déjà données."
23 Alors, on interprète cela comme une tentative de dissimuler certaines
24 choses, même s'il n'est fait mention nulle part du fait que l'on aurait
25 dissimulé les éléments de certains détachements, Sainovic ne l'a pas fait.
26 Le Procureur interprète cela comme étant un ordre de Sainovic selon lequel
27 certains éléments de certains détachements devraient se cacher; mais dans
28 cette conversation dans le carnet, on ne parle pas du tout de cela. Et tous
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1 les autres éléments de preuve versés au dossier, y compris les rapports de
2 la KDOM, les communiqués de l'OTAN et le témoignage de Madeleine Albright,
3 tout cela montre qu'il y a bel et bien eu repli. Donc, ce qu'a dit Sainovic
4 est bien différent de ce que cherche à présenter l'Accusation.
5 Au paragraphe 74, le Procureur affirme que Sainovic était le seul habilité
6 à autoriser inspection des casernes car cela ne faisait pas partie de
7 l'accord conclu entre Jovanovic et Geremek. Jovanovic l'a confirmé mais
8 personne n'a demandé –- n'a posé la question à Geremek pour savoir si
9 c'était vrai ou pas. A la manière dont on interprète –- on interprète cet
10 accord de toutes sortes de manière, mais les personnes qui l'ont rédigé
11 n'en ont pas parlé.
12 Loncar a témoigné en disant que le gouvernement fédéral avait parlé de la
13 décision et que le gouvernement fédéral n'avait pas autorisé l'inspection
14 des casernes. Ceci n'était pas conforme à l'accord conclu avec la MVK, page
15 7601.
16 Au paragraphe 81, le Procureur parle des préoccupations de certains
17 officiers de haut rang de la VJ concernant les actions menées par – le
18 commandement conjoint par rapport à la VJ; on mentionne la lettre de
19 Perisic, P717. On dit qu'il s'agissait essentiellement d'une composante
20 civile de l'état-major, or, il n'y avait pas d'état-major interministériel;
21 alors comment le Procureur peut-il conclure qu'il y avait un –- il
22 s'agissait là d'un commandement conjoint ? Tout cela n'est pas clair; on
23 parle d'autres états-majors mais pas du commandement conjoint.
24 Au paragraphe 107, des instructions concernant la défense, on peut voir
25 apparaître la mention commandement conjoint dans l'intitulé. Il est
26 question d'instructions temporaires et du fait que le MUP mène certaines
27 activités en coordination avec certaines d'autres entités. Il n'est pas dit
28 que ces unités étaient subordonnées au MUP comme l'affirme l'Accusation. En
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1 outre, il existe au dossier le témoignage, un témoignage pour –- expliquant
2 l'origine de ce document, P1065, il est intitulé : "Instructions du
3 commandement conjoint portant sur la défense des zones habitées." Djakovic
4 a déclaré que le document provenait d'un organe opérationnel; page 26416 du
5 compte rendu d'audience.
6 Au paragraphe 120, le Procureur affirme que, conformément à l'ordre du
7 commandement conjoint portant sur la défense des zones habitées - et là
8 encore, un exagère - il ne s'agit pas d'un ordre mais seulement d'une
9 instruction ou d'une consigne. Ce n'est pas du tout la même chose, une
10 instruction, une consigne, c'est temporaire. Alors, est-ce qu'on a jamais
11 appliqué cette instruction ? Personne ne le sait. Combien de temps est-ce
12 que cela a été en vigueur ? Nous ne le savons pas non plus. Alors, aucun
13 élément de preuve au dossier ne l'atteste mais on essaie d'étendre cela à
14 l'ensemble de l'acte d'accusation. Bien au contraire, en août 1998, le MUP
15 a constitué des Détachements de la Police de réserve mais il n'y avait pas
16 de commandement, ce n'est mentionné nulle part.
17 Au paragraphe 156, on ne mentionne aucune source étayant ces allégations.
18 Au paragraphe 156, il est dit que le commandement conjoint a été établi en
19 juin 1998. On s'appuie sur la lettre du ministère sur ce point. Djakovic a
20 dit que c'est lui et Pavkovic qui avaient inventé cela. Est-ce que vous le
21 croyez ou pas ?
22 Au paragraphe 157, le Procureur a dit que, conformément à une décision
23 prise par le Conseil suprême de la Défense le 9 juin 1998, la VJ a établi
24 un plan visant à réprimer le terrorisme. Est-ce qu'il y fait référence à un
25 commandement conjoint ici ? Il s'agit en fait d'un plan, tout cela s'est
26 passé à Belgrade, cela n'a rien à voir avec la VJ ou Sainovic,
27 contrairement à ce qui est dit dans l'acte d'accusation.
28 Au paragraphe 160, il est question de la première réunion du commandement
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1 conjoint qui a eu lieu à Pristina le lendemain de la rencontre avec
2 Milosevic. Il s'agit de la première entrée dans le carnet de Djakovic;
3 Djakovic a dit que ce terme a été utilisé avant l'arrivée des civils. Pages
4 26 378 et 26 381 du compte rendu.
5 Djakovic a expliqué à qui s'appliquait le terme commandement conjoint, page
6 26 382. Alors, si vous souhaitez savoir la vérité, souvenez-vous du
7 témoignage de Djakovic. Inutile de prendre en considération d'autres
8 témoignages qui en ont rien à voir avec tout cela.
9 Au paragraphe 158, le Procureur affirme que lors d'une réunion du comité
10 central du SPS, on a nommé un groupe de trois personnes; Milosevic a dit
11 que ce groupe devait être élargi. Et au paragraphe 160, le Procureur
12 affirme que l'on a accédé à la demande de Milosevic. Lors d'une réunion
13 tenue le 22 juillet 1998, il est dit que dorénavant ce groupe incluait
14 Sainovic, Pavkovic, Lukic, Gajic et Djakovic. Je ne sais pas quelle est la
15 source sur quoi s'appuie cette allégation si ce n'est que la liste des
16 personnes ayant assisté à la réunion du 22 juillet 1998 se trouve dans le
17 carnet P1468. Alors, comment se fondant sur cette liste peut-on conclure
18 que c'était là le souhait de Milosevic et qu'il avait –- que l'on a accédé
19 à sa
20 demande ? Je ne comprends pas. Il n'y a aucun élément de preuve permettant
21 de corroborer cela.
22 Il y est indiqué au paragraphe 161 que c'est Djakovic qui prenait les notes
23 lors de ces réunions de commandement conjoint. C'est intéressant pendant
24 deux ans le Procureur n'a cessé d'affirmer que les notes de Djakovic
25 constituaient les PV des réunions du commandement conjoint pour le Kosovo-
26 Metohija. Et, maintenant, on dit que Djakovic prenait simplement des notes.
27 Au paragraphe 161, le Procureur affirme que Djakovic prenait les notes pour
28 le compte de la VJ lors des réunions du commandement conjoint. Pendant deux
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1 ans, le Procureur n'a cessé d'affirmer que les notes de Djakovic étaient
2 les PV des réunions du commandement conjoint pour le Kosovo-Metohija et,
3 tout à coup, le Procureur affirme que Djakovic s'est contenté de prendre
4 des notes pour le compte de la VJ; alors, son rôle évolue.
5 Enfin, le Procureur reconnaît qu'il n'y a pas eu de PV de réunions du
6 commandement conjoint mais c'est nouveau. Le Procureur a dit dans son
7 exposé que Djakovic était soudain devenu membre du commandement conjoint et
8 qu'il était chargé du procès-verbal officiellement et, là encore, on
9 manipule les éléments de preuve.
10 Au paragraphe 162, il est dit qu'à compter du 22 juillet 1998, il y a eu
11 des réunions de la VJ du MUP et le Procureur affirme que des collaborateurs
12 de Milosevic de Belgrade et des fonctionnaires ont été nommés membres des
13 commandements conjoints, ceci est corroboré apparemment par le témoignage
14 de Djakovic à la page 26 378; en réalité, Djakovic n'a jamais dit que ces
15 réunions étaient des réunions du commandement conjoint. Tout ce qu'il a dit
16 c'est que lui et Pavkovic pour des raisons d'organisation interne
17 l'appelait le commandement conjoint alors que les hommes politiques
18 appelaient ça simplement des réunions, des rencontres.
19 Au paragraphe 163, le Procureur affirme que ces réunions ont d'abord été
20 tenues dans le bâtiment du PIV, du conseil exécutif temporaire. Or, en
21 juillet 1998, il n'existait pas encore, il n'a été créé qu'en septembre
22 1998.
23 Je pense que l'heure est venue de faire la pause pour le déjeuner.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
25 Nous reprendrons dans une heure, à 13 heures 45.
26 --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 45.
27 --- L'audience est reprise à 13 heures 48.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Fila.
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1 M. FILA : [interprétation] Paragraphe -- paragraphe 163, le Procureur
2 indique que Momir Stojanovic est devenu conscient de l'existence du
3 commandement conjoint en juin 1998; cependant, aux pages 19 761 et 19 762,
4 où le Procureur indique que cette allégation y figure, elle n'y est pas.
5 Momir Stojanovic parle sur ces pages-là du moment où il a entendu parler du
6 terme de commandement conjoint mais Stojanovic ne parle nulle part de
7 l'endroit ou de l'existence de cet organe appelé "Commandement conjoint."
8 C'était -- c'est particulièrement important parce que Stojanovic explique
9 ce qu'il a entendu.
10 Alors, il explique ce qu'il a entendu et à quoi se rapporte ce qu'il a
11 entendu. Kotur ne parle pas non plus du fait d'avoir été conscient de
12 l'existence d'un commandement quelconque. A la
13 page 20 714, que le Procureur indique, il mentionne la notion de
14 commandement conjoint et il parle de l'explication de cette notion donnée
15 par Djakovic mais -- et il ne parle pas de commandement, il ne fait que
16 relater ce que Djakovic lui a dit au sujet de sa conversation avec Pavkovic
17 pour ce qui est de la façon de qualifier les réunions auxquelles il avait
18 participé.
19 Dans ce paragraphe, le Procureur parle de Ljubinko Cvetic qui aurait
20 prétendument entendu dire ce que personne d'autre au MUP n'a entendu dire,
21 et ce, dès le 10 juillet 1998. Je mentionne -- je souligne 10 juillet 1998,
22 à l'époque où, si l'on ne perd pas de vue, les allégations du paragraphe
23 160 du mémoire en clôture du Procureur, le commandement conjoint n'existait
24 pas du tout parce que c'était
25 12 jours avant. Cvetic sait exactement qu'à la tête de ce commandement
26 conjoint, il y avait Sainovic alors que le Procureur lui-même affirme qu'au
27 commandement conjoint, jusqu'au 14 septembre 1998 au moins, c'était d'abord
28 Minic qui se trouvait à sa tête. Donc, Sainovic ne pouvait être, en aucune
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1 façon, dont celui-ci aurait pu avoir entendu parler.
2 Au paragraphe 164, le Procureur dit que c'est Milosevic qui exerçait un
3 contrôle à l'égard du commandement conjoint, d'abord par le biais de Minic.
4 Mais aucune source pour cette allégation-là n'est mentionnée, c'est tout à
5 fait inventé de toutes pièces. La preuve pour ce qui est de voir Minic
6 présider aux réunions, le Procureur la trouve dans le cahier de notes de
7 Djakovic et il le cite au -- à la note de bas de page 408 pour indiquer que
8 Minic a présidé jusqu'au
9 14 septembre 1998. Dans le même paragraphe, un peu plus loin, il indique
10 que Milosevic, plus tard, a exercé ce même contrôle du commandement
11 conjoint, mais en passant par Sainovic. Et, pour ce -- pour étayer cela, le
12 Procureur cite deux sources : la lettre de Perisic et le témoignage de
13 Cvetic, page 8 078. Mais ça aussi c'est complètement inventé. Le témoignage
14 de Cvetic, disais-je, à la
15 page 8 078. Je n'ai pas dit "lettre de Cvetic," j'ai dit "témoignage de
16 Cvetic."
17 Alors, si c'est Minic qui présidait d'abord et s'il le faisait
18 jusqu'au 14 septembre 1998, comment alors la lettre de Perisic, datée du 23
19 juillet 1998, peut-elle constituer une source pour l'allégation disant --
20 l'allégation au terme de laquelle Milosevic exerçait un contrôle à l'égard
21 du commandement conjoint en passant par le biais de Sainovic ? Alors, étant
22 donné que c'est complètement illogique, il y a un illogisme substantiel et
23 une contre-vérité évidente qui dit que nulle part dans la lettre de Perisic
24 il n'y a mention du fait que Milosevic passe par Sainovic pour exercer son
25 contrôle à l'égard du commandement conjoint. Et il n'est pas fait mention
26 non plus du fait que Milosevic ait d'abord exercé ce contrôle en passant
27 par Minic puis, par la suite, par Sainovic. Dans la lettre du 23 juillet,
28 les réunions du commandement conjoint seraient -- auraient prétendument
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1 commencé le 22 juillet, et ça aussi c'est dénué de sens.
2 L'autre source pour dire que Milosevic passe par Sainovic pour
3 contrôler le commandement conjoint, c'est Cvetic. D'après le Procureur,
4 c'est en page 8 078. Mais ni à cette page-là ni à quelque autre page que ce
5 soit dans le témoignage à Cvetic il n'est fait mention de cette thèse-là.
6 Cvetic aurait prétendument entendu parler des membres et entendu dire qui
7 est-ce qui dirige les réunions du commandement conjoint au QG du MUP le 22
8 juillet 1998. Cvetic indique les membres et il indiquerait que Sainovic se
9 trouverait à la tête du commandement conjoint. Et cela est absurde parce
10 que le Procureur affirme que c'est au moins jusqu'au 14 septembre 1998 que
11 c'était Minic à la tête du commandement conjoint. Donc, les autres
12 participants à la réunion nient les dires de Cvetic, à savoir Mijatovic,
13 Jurisic et Adamovic. Et dans le PV de cette réunion, il n'en est pas
14 question du tout. Je précise qu'il s'agit de la pièce 6D798.
15 Au paragraphe 164, le Procureur indique que c'est en octobre 1998 que
16 Sainovic a présidé aux sessions du commandement conjoint mais il n'y a pas
17 de source pour cette allégation-là non plus. Une fois de plus, dans la même
18 phrase, il est -- il dit que Sainovic, à l'époque, donnait des ordres, le
19 tout probablement partant du cahier de notes de P1468 et en dépit de ce que
20 Djakovic a fait comme témoignage, le tout en dépit des dizaines de témoins
21 qui ont expliqué de quelle façon on a dirigé les actions antiterroristes au
22 Kosovo-Metojiha en 1998.
23 Il est incroyable de voir le Procureur tirer des conclusions de ce cahier
24 de notes à Djakovic pour dire que Sainovic avait dirigé les activités de ce
25 commandement conjoint alors qu'il n'y a pas une seule -- un seul mot en ce
26 sens dans le cahier de notes en question. Le paragraphe 164, dans la
27 dernière phrase, constitue une interprétation choquante du point de vue de
28 l'incorrection des éléments de preuve pour ce qui est du -- du Procureur.
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1 La phrase dit que Sainovic était en position de "head of the Joint
2 Command," c'est-à-dire du commandement conjoint, pendant la période de
3 l'acte d'accusation. Or, la source est -- est seule -- est une seule, à
4 savoir Aleksandar Vasiljevic avec la transcription de l'affaire Milosevic
5 ainsi que les déclarations de Vasiljevic dans cette affaire-là en page 43
6 de la pièce à conviction P2589, PV de l'affaire Milosevic.
7 M. Nice donne à Vasiljevic l'occasion d'interpréter la lettre de Pavkovic
8 du 25 mai 1999. Et Vasiljevic, partant de cette lettre, interprète de façon
9 tout à fait libre la position et le rôle du commandement conjoint. Et il se
10 trouverait que Vasiljevic aurait examiné le document à une période qui est
11 antérieure à celle dont il est capable de témoigner et on lui donne lecture
12 de ce cahier de notes de Djakovic.
13 Alors, la Défense rappelle la position du Tribunal dans cette affaire, à
14 savoir la page 26 722 [comme interprété], que : "Les témoins ne
15 comparaissent pas ici pour donner des analyses et donner lecture des
16 lettres d'autrui, mais pour présenter les connaissances qu'ils ont eues
17 directement au sujet des circonstances pertinentes."
18 Et, ici, Vasiljevic, suite à une -- suite à insistance de la part de Nice,
19 commente la lettre à Pavkovic. La deuxième source, c'est la déclaration de
20 Vasiljevic du 14 janvier 2007, et cela se trouve être en contradiction avec
21 sa propre déclaration datant du mois de juillet 2007 et avec les autres
22 témoignages à Vasiljevic. En outre, Vasiljevic est pensionné -- est
23 retraité jusqu'au 27 avril 1999, et il dit lui-même qu'il avait entendu
24 parler du commandement conjoint en 1998 de la bouche de Stojanovic.
25 Vasiljevic dit également que Stojanovic ne lui a rien dit au sujet du
26 commandement conjoint au fil de l'année 1999, page 8 820. Par conséquent,
27 comment le Procureur peut-il tirer quelque conclusion que ce soit à partir
28 du témoignage à Vasiljevic concernant le -- l'existence de ce commandement
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1 conjoint dans le courant de l'année 1999 ?
2 Au paragraphe 166, le Procureur présente, de façon inexacte, Pesic pour
3 dire que c'est lui la source de l'allégation au terme de laquelle le
4 commandement conjoint avait commandé et contrôlé la VJ et le MUP au Kosovo.
5 Il s'agit de la pièce 2502, paragraphe 32. Tout ce qui Pesic y dit c'est
6 que le commandement conjoint avait coordonné les activités de la VJ et du
7 MUP, ce qui est tout à fait différent de ce que nous affirme le Procureur.
8 En outre, le témoignage à Cvetic, pages 8 051 à 8 052, ne fait pas découler
9 ce que le Procurer affirme. Aux pages 8 194 et 8 195, auxquelles se réfère
10 le Procureur, Cvetic se trouve être plus explicite encore. Le commandement
11 conjoint a coordonné ces activités mais c'est la loi qui préserve les
12 filières de commandement.
13 Vasiljevic est également mentionné dans ce paragraphe et il ne s'est
14 rien dit au sujet du commandement conjoint en sus de ce que Stojanovic lui
15 a dit pour l'année 1998, chose dont il a déjà été question.
16 Paragraphe 167, le Procureur indique que la majeure, la plus
17 importante des parties des activités du commandement conjoint constituait à
18 planifier et coordonner les activités conjointes de la VJ et du MUP au
19 Kosovo-Metohija. Nulle part le Procureur n'indique quelle est la source
20 pour cette allégation. Dans le même paragraphe, le Procureur indique que
21 Djakovic a expliqué que le commandement conjoint a été l'élément de
22 coordination entre la VJ et le MUP. Et le Procureur se réfère ici à
23 Djakovic. Alors, cette phrase de Djakovic se trouve être arrachée de son
24 contexte parce que la substance du témoignage, Djakovic dit que le terme de
25 "commandement conjoint" sous-entend Pavkovic et Lukic et plus personne et
26 plus rien d'autre.
27 Le paragraphe 171, le Procureur y dit que dans la pièce P2166, page
28 3, il est indiqué que le commandement conjoint était chargé de la mise en
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1 œuvre du plan visant à contrecarrer le terrorisme mais cela n'est tout
2 simplement pas écrit dans ce document à la page indiquée. On ne mentionne
3 nulle part le commandement conjoint. Sur cette page, les mots -– les termes
4 de "commandement conjoint" ne sont pas du tout mentionnés. Le Procureur
5 cite le cahier de notes de Djakovic de façon extensive quoi que celle-ci
6 n'est pas claire, n'est pas traduite et se trouve être plutôt illisible.
7 Au paragraphe 171, le Procureur parle de civils armés et le
8 commandement conjoint. En sus des citations inexactes du document, on passe
9 outre un élément qui est plus important encore, à savoir le cadre temporel,
10 ce qui se passe en 1998 et ce qui se passe en 1999.
11 Paragraphes 172 et 173, le Procureur ignore la substance de la
12 documentation de la VJ où on voit que le Corps de Pristina ne fait
13 qu'exécuter les ordres du commandement Supérieur et ces documents excluent
14 ce rôle dans la filière de commandement du côté de la VJ.
15 Au paragraphe 171, le Procureur prend pour preuve de l'existence du
16 commandement conjoint un plan de transmission P1052 où il est dit Pastrik.
17 Mais il dédaigne de la prise de considération du témoignage qui dit que
18 c'est un nom de code pour le Corps de Pristina, ce nom -- ou ce code de
19 Pastrik. Au paragraphe 179, le Procureur dit que le commandement conjoint
20 reçoit cette directive depuis Belgrade de la bouche de Milosevic. Et la
21 source, Vasiljevic - page 139 de la pièce P2589 - ne le dit pas. On
22 mentionne également la pièce P1468, pages 63 à 64, puis la page 75, la page
23 130 mais ça n'y est pas dit. Et pour moins qu'on puisse dire, on ne
24 comprend pas du tout ce qui est écrit.
25 Paragraphe 179, le Procureur dit que le commandement conjoint aurait
26 rédigé un rapport et des conclusions pour ce qui est de la mise en œuvre du
27 planning relatif à la lutte contre le terrorisme, et ce, dès octobre 1998.
28 Et il est indiqué que cela existe au P1011, page 72; mais là non plus, il
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1 n'y a rien, il n'y a pas de document. Il y a un titre qui laisse entendre
2 l'existence d'un rapport. Mais de là, à savoir si ce rapport existe ? Ce
3 qui est dit ? Et qui l'a rédigé ? Là, il n'y a aucun éléments de preuve
4 dans les écrits versés au dossier.
5 Paragraphe 181, réunion du 29 octobre 1998. Le Procureur néglige les
6 évaluations et les opinions de Dimitrijevic et des autres témoins
7 participant à la réunion et concernant ce que constitue ce PV de la
8 réunion. Personne parmi les participants ne parlent d'une première phase
9 des activités du commandement conjoint comme le mentionne le bureau du
10 Procureur. Dans les conclusions de cette réunion, d'après ce document
11 P2166, il n'est pas dit qu'à cette réunion il aurait été décidé qu élément
12 commandement conjoint poursuive ses activités. Le témoignage de
13 Dimitrijevic conteste l'existence de ce PV, P2166, parce que Dimitrijevic a
14 dit dans son témoignage que le général Susic était assis à côté de lui et
15 qu'il n'a pas pris de notes pour un PV car il l'aurait vu dit Mitrijevic a
16 également exprimé des doutes pour ce qui est d'avoir produit ce PV dans des
17 circonstances plutôt douteuses. Nous vous rappelons que Minic dans son
18 témoignage n'a pas utilisé le terme de "commandement conjoint."
19 Paragraphe 193, sur cette grande quantité de plusieurs centaines de
20 documents qui constituent pièce à conviction dans cette affaire, le bureau
21 du Procureur prélève en sus comme ordre du commandement conjoint, comme l'a
22 expliqué les témoins de la Défense dans deux autres documents, à savoir le
23 P2016 et le P2017, où il est dit que ces documents constituent preuve pour
24 ce qui est de l'existence du commandement conjoint pendant la guerre.
25 Alors, la Défense estime que, si le commandement conjoint avait eu le rôle
26 qui lui est attribué pendant ces conflits, il devrait y avoir beaucoup plus
27 de documents qui indiqueraient quelle a été sa composition et quelle a été
28 son rôle dans lesdits événements.
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1 Paragraphe 194, le Procureur affirme que l'on pourrait conclure de
2 l'existence d'un parallélisme entre le commandement du corps en sa qualité
3 d'état-major du commandement conjoint et de l'état-major du commandement
4 Suprême pour exercer le commandement Suprême justement. Les sources ne
5 disent tout simplement rien au sujet de l'existence parallèle de ces deux
6 organes.
7 Paragraphes 203 et 204, une description de la réunion du
8 1er juin où Vasiljevic affirme et dit qu'il n'affirmait pas que ce fût là
9 une réunion du commandement conjoint et ce qui est plus important encore
10 qu'il ne savait pas quelles étaient les fonctions de Sainovic. Dans son
11 carnet de notes, il n'est pas dit : "Réunions du commandement conjoint,"
12 mais il est dit : "Réunions au sein du commandement du Corps de Pristina."
13 Paragraphe 203 –-
14 L'INTERPRÈTE : Les interprètes sauraient gré au conseil de ralentir.
15 M. FILA : [interprétation] Paragraphe 203, le Procureur cite inexactement
16 les mots de Vasiljevic. C'est ce que dit Vasiljevic et il dit : "Faites
17 comme on a dit dans les planning;" et dans la déclaration de Vasiljevic qui
18 porte la cote P2600, paragraphe 81, il est dit : "Faites comme vous avez
19 planifié." Et c'est bien différent. Il n'y a pas de Sainovic dans la
20 planification. Donc, ce sont des affirmations qui sont dangereuses,
21 tendancieuses et inexactes.
22 Au paragraphe 262, le Procureur dit qui sont les membres du commandement
23 conjoint en 1999. Il mentionne quatre noms, mais on ne voit pas partant de
24 quoi le Procureur a tiré ces conclusions là pour ce qui est de savoir qui
25 sont les membres du commandement conjoint en 1999.
26 Paragraphe 281, le Procureur conclut du fait que Stevanovic, dans son
27 carnet de notes, aurait noté qu'au mois de mai 1999, il aurait participé
28 avec Sainovic à une réunion chez Milosevic. La source de cette allégation
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1 est un document où l'on affirme que c'est le carnet de notes de Stevanovic
2 et on passe par Vasiljevic qui aurait vu ce carnet de notes pour la
3 première fois, une fois que cela lui a été montré par le Procureur, M.
4 Nice. Vasiljevic a explicitement dit qu'il ne savait pas si Sainovic était
5 présent à cette réunion et il ne sait pas non plus s'il a pris la parole –-
6 et à cette réunion et ce qu'il a dit. Je me réfère à la page 8 830.
7 Pour ce qui est du témoignage, si Stevanovic avait témoigné dans cette
8 affaire, il aurait expliqué pourquoi dans ces filières particulières, il
9 aurait mis de côté ses notes des réunions chez Milosevic du reste de ses
10 notes où il est question de Sainovic. Alors, je vous prie de vous pencher
11 sur la page 88 de la version serbe de cette pièce P1898, afin que les Juges
12 comprennent de quoi je parle.
13 Alors, si Stevanovic avait témoigné, il aurait expliqué ce que signifiaient
14 les traits – les lignes sur ces pages qui séparent le texte des notes de la
15 réunion chez le président d'un autre texte où l'on mentionne peut-être
16 Sainovic.
17 J'aimerais qu'on nous montre ce document. Le P1898. Il s'agit de la page 88
18 en serbe et il s'agit aussi de la page 106 en version anglaise. Est-ce que
19 c'est un problème que de le montrer ? J'aimerais que vous montriez la page
20 en entier de la version serbe, après on verra la version anglaise pour que
21 vous ayez –- vous compreniez parfaitement bien de quoi je parle.
22 Alors, voilà. Vous voyez au paragraphe 8 : "Remplacement du QG," il y a
23 deux grands traits puis on dit "président," puis il y a ce qui est écrit,
24 puis on ferme par des lignes et on passe au
25 point 9. Donc, après le point 8, il y a là un point 9, c'est ce qui
26 –- c'est ce qui est écrit, on le voit : "Shaya" [phon].
27 Alors, pourquoi ceci se trouve à être séparé ? Il y a des inscriptions
28 plutôt étranges, on voit 306 – enfin, des –- des chiffres. Je ne sais pas
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1 du tout de quoi il s'agit. Donc, ce n'est pas au travers de
2 l'interprétation à Vasiljevic qu'il peut nous être donné de tirer la
3 conclusion de quoi il s'agit. Est-ce que Sainovic était à cette réunion-là
4 ? Est-ce qu'il était présent ? Est-ce que c'est une réunion ? Parce que si
5 le bureau du Procureur était intéressé par la vérité, ils auraient fait
6 venir Stevanovic. Je voulais graphiquement vous montrer de quoi il s'agit.
7 Je n'ai plus besoin de cette pièce.
8 Paragraphe 660, le Procureur dit que Sainovic est le responsable politique
9 de la délégation à Rambouillet. Sainovic est le seul membre de la
10 délégation qui vaque aux questions en matière de politique étrangère; les
11 autres sont dans juristes ou des représentants de communautés ethniques.
12 Partant des éléments de preuve présentés, on voit qu'il n'y a pas de chef
13 politique mais qu'il y a seulement une délégation présidée par M. Markovic.
14 Au paragraphe 661, le Procureur parle de l'influence à Sainovic au sein du
15 Parti socialiste de Serbie, en sa qualité, en premier lieu, de vice-
16 président. Mais on oublie qu'à partir du 24 avril 1997, il n'est plus vice-
17 président du SPS pour des raisons qui se trouvent être expliquées dans le
18 moindre détail au mémoire en clôture de la Défense.
19 Au paragraphe 662, le Procureur indique que le –- l'influence à Sainovic
20 découle de sa –- de ses relations proches avec Milosevic. Alors, quelles
21 sont les sources de cette allégation ? En bas de -– notes de bas de page
22 1683, on parle d'extraits du livre à Bulatovic où Bulatovic ne dit pas un
23 seul mot au sujet de –- du pouvoir à Sainovic qui découlerait de relations
24 proches avec Milosevic. Tout ce que Bulatovic dit est une seule phrase où
25 on indique que Milosevic avait demandé à ce que Sainovic soit chargé des
26 activités politiques relatives au Kosovo-Metohija. Bulatovic explique que
27 c'était parce que Milosevic le voulait le mettre à l'abri, lui, Bulatovic.
28 Donc, Milosevic voulait protéger Bulatovic. Est-ce que ceci illustre une
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1 relation proche avec Milosevic ? Non, au contraire, ça illustre une
2 relation de proche entre Bulatovic et Milosevic.
3 Et le Procureur indique que Gajic, en page 15443, en parle, mais c'est tout
4 à fait inexact. Gajic ne parle pas de la relation proche entre Milosevic et
5 Sainovic. Il n'y a pas de relation proche. Le Procureur cite deux extraits
6 d'une interview à Sainovic au sujet des tâches qui sont celles de Sainovic
7 mais rien de tout cela n'indique qu'il y aurait une relation de proche d'où
8 découlerait son autorité. Le président Milosevic était le président de
9 l'Etat et le président du SPS, et des centaines de gens étaient en contact
10 avec lui, et le contact entre Milosevic et ces gens-là n'a aucune
11 différence à –- il n'y a aucune différence entre le contact à Milosevic et
12 ces gens-là et le contact à Milosevic et Sainovic. Je ne sais pas d'où le
13 Procureur tire ses conclusions.
14 Au paragraphe 662, le Procureur va plus loin. Il indique que Sainovic est –
15 - fait partie du cercle des initiés à Milosevic, alors, ça c'est inventé de
16 toutes pièces. Il n'y a aucun élément de preuve à ce sujet. Le Procureur
17 indique que Naumann aurait indiqué que Sainovic était un conseiller proche
18 de Milosevic. Naumann le dit dans le contexte de la réunion qu'il avait eue
19 à Milosevic en janvier 1999 et que le –- et le sujet de la réunion était un
20 sujet qui était du domaine des attributions à Sainovic en sa qualité de
21 président de la commission. Le Procureur cite également Petritsch mais
22 Petritsch parle de – d'hypothèses dans le cadre de –- émises dans le cadre
23 de la communauté diplomatique à Belgrade. Alors, la description à Petritsch
24 que s'agissant du rôle à Sainovic est tout à fait autre, et la Défense en
25 parle dans le détail dans son mémoire.
26 Paragraphe 663, le Procureur commence à nous dire - je cite - la chose
27 suivante : "En tant que représentant de Milosevic pour le Kosovo,", mais ni
28 dans ce paragraphe ni dans les autres paragraphes on ne nous explique
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1 pourquoi Sainovic aurait été le représentant de Milosevic pour le Kosovo.
2 Toutes les sources qui sont données ici par le Procureur ont trait à la MVK
3 et aux obligations de Sainovic en tant que président de cette commission.
4 L'Accusation parle de ce qu'a dit Crosland de ces suppositions, et cetera,
5 à lui et à d'autres. Mais ils ne pouvaient savoir quelles étaient les
6 responsabilités du président du RSFY et de la Serbie parce qu'ils
7 ignoraient la nature du système politique de la Serbie et de la RSFY et des
8 relations qui existaient. Ciaglinski déclare, par exemple, que Sainovic, il
9 l'a vu en 1999 tous les deux ou trois jours au Kosovo. Alors, qui était à
10 Rambouillet au lieu de Sainovic si Ciaglinski l'a vu aussi souvent que cela
11 au Kosovo ?
12 Au paragraphe 664, le Procureur déclare que, lorsque c'était nécessaire –-
13 lorsqu'il était nécessaire que quelqu'un aille à Belgrade, c'était Sainovic
14 qui y allait, et la conclusion qui est donnée ici, c'est qu'il s'y rendait
15 tous les deux ou trois jours. Or, il y a des éléments qui ont été présentés
16 indiquant qu'il allait à Belgrade, certes, mais pas quotidiennement.
17 Au paragraphe 666, l'Accusation mélange ce qui a trait à la mission de la
18 MVK et les périodes concernées en disant que Pavkovic et Loncar ont informé
19 Sainovic des événements et ont utilisé Djakovic en tant que source. On voit
20 donc qu'on a mélangé les périodes concernées, et cela convient beaucoup –-
21 bien au Procureur, de mélanger les choses. Après le 24 mars 1999, on ne
22 mentionne que très peu le rôle de Sainovic au Kosovo. On ne peut pas
23 procéder par analogie comme tente de le faire l'Accusation pour minimiser
24 la portée des éléments de preuve, on ne peut pas se référer à des éléments
25 qui ont trait à des périodes différentes.
26 Le Procureur cite également Farkas comme s'il savait que Sainovic jouait un
27 rôle concret au Kosovo alors que Farkas lui-même dit que, lors d'une
28 réunion du 17 mai 1999, il en est arrivé à certaines conclusions qui
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1 indiquent qu'il ne sait rien d'autre que cela; cela, on le trouve à la page
2 16368 du compte rendu d'audience.
3 Au paragraphe 667, tous les commentaires, qui sont faits par Sainovic lors
4 de la réunion du 17 mai 1999, indiquent que Sainovic ne jouait pas le rôle
5 que lui attribue l'Accusation. Si Sainovic avait été responsable du Kosovo-
6 Metohija, à ce moment-là, c'est lui qui aurait dû répondre à toutes les
7 questions -- fournir toutes les réponses. Or, ce n'est pas ce qui s'est
8 passé. Sainovic a participé de manière tout à fait marginale à cette
9 réunion. Rien de ce qu'il a dit, rien de ce qu'il a fait n'indique qu'il
10 était investi d'une autorité quelconque, en tout cas, pas de l'autorité que
11 lui attribue l'Accusation.
12 L'Accusation cite des éléments à l'appui de sa thèse, il s'agit de la
13 pièce P2592, le journal de Vasiljevic, mais c'est d'une importance minime
14 par rapport à ce qu'ont dit les autres participants à la réunion lorsqu'ils
15 ont pris la parole.
16 Paragraphe 668, l'Accusation parle de la confiance qu'avait Milosevic
17 en Sainovic. Et l'Accusation déclare qu'il était manifeste que Sainovic
18 avait maintenu des contacts avec Rugova. On cite Rugova, et Merovci qui a
19 dit qu'il avait parlé à Sainovic pour passer le temps. On ne mentionne
20 nullement Milosevic ni la confiance qu'il aurait eue en Sainovic. Le
21 Procureur cite également Bulatovic, Jovanovic, Minic, Matkovic en tant que
22 sources que -- qui permettent de corroborer ces affirmations. Or, tout ceci
23 est inventé de toutes pièces puisque aucun de ces hommes ne mentionne la
24 confiance qu'aurait eue Milosevic en Sainovic. On mentionne simplement le
25 fait que Sainovic a parlé à Rugova et que ces discussions étaient
26 importantes, rien de plus. L'Accusation nous présente les faits de manière
27 inexacte.
28 Paragraphe 668, les discussions entre Sainovic et Rugova en avril
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1 1999, l'Accusation dit qu'il s'agissait d'une manœuvre de propagande. Donc,
2 rien ne l'indique, rien ne le confirme. Jamais Rugova n'a parlé de campagne
3 de propagande.
4 Paragraphe 668, l'Accusation affirme que, dans la déclaration de
5 Merovci, page 64 de la pièce P2588, on peut voir que Sainovic agissait au
6 nom de Milosevic et qu'il consultait Milosevic avant de prendre des
7 décisions. Tout ce qui figure dans ce paragraphe c'est de -- c'est que
8 Merovci a vu Sainovic à la télévision à l'occasion d'une réunion ou d'une
9 autre à laquelle ont participé également des fonctionnaires de premier plan
10 avec Milosevic. C'est la raison pour laquelle il en a conclu que Sainovic
11 avait été nommé par Milosevic mais aucune autre source ne confirme cette
12 allégation. Il a dit également Sainovic a opiné du chef quand Merovci a
13 mentionné Milosevic. Cependant, Merovci ne mentionne aucune décision, il ne
14 dit pas qui Sainovic a consulté, s'il a consulté quelqu'un il aurait été
15 dans l'incapacité de le savoir.
16 Tout ce qu'affirme l'Accusation ici, ça découle d'une interprétation
17 de -- des parties de déclarations de certains témoins mais ça ne permet
18 d'arriver à aucune conclusion au sujet du rôle de Sainovic et de ses
19 relations avec Milosevic.
20 Paragraphe 671, l'Accusation déclare que, le 4 mai 1999, Rugova et
21 Merovci sont allés à Belgrade afin d'avoir des conversations avec Sainovic
22 et Milosevic. On ne donne pas les éléments qui étayent cette affirmation.
23 Ils se sont effectivement rendus à Belgrade pour rencontrer des
24 représentants de l'ambassade italienne, c'est exact, et ensuite ils ont
25 quitté le pays.
26 Paragraphe 673, ce paragraphe commence par une affirmation qui est
27 d'une inexactitude flagrante selon laquelle le commandement conjoint a
28 commencé à exister en juin 1998 et jusqu'en -- et a continué à exister
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1 jusqu'en juin 1999. Aucun élément ne justifie cette affirmation. La phrase
2 suivante est également inexacte. Il y est dit que : "Par l'intermédiaire de
3 Sainovic, Milosevic contrôlait le commandement conjoint," déclaration de
4 Vasiljevic, pièce P2600, paragraphe 80. Et dans ce paragraphe, Vasiljevic
5 dirait, selon eux, que Sainovic avait été nommé par Milosevic. Or, en
6 serbe, cette phrase c'est une affirmation, simplement. Si on regarde la
7 déposition de Vasiljevic, si on accepte et si on reconnaît qu'il avait des
8 informations au sujet de Sainovic, il s'agit simplement d'affirmations de
9 sa part.
10 Mais au paragraphe 673, l'Accusation ne nous dit pas comment
11 Sainovic, au moment où l'acte d'accusation qui porte -- sur lequel porte
12 l'acte d'accusation a pu contribuer aux actions incriminées, à leur
13 préparation et leur planification.
14 Toutes les conclusions en question découlent de ce qu'a dit
15 Vasiljevic au sujet des réunions du 1er juin 1999. Tout ce qu'a dit
16 Vasiljevic c'est qu'il ne savait pas quel était le rôle de Sainovic parce
17 que Sainovic était utilisé par les représentants de la VJ et du MUP. Il n'y
18 a pas eu d'autorisation, d'ordre donné, et cetera, ni de planification, ni
19 rien que ce soit d'autre de ce genre. Voilà, l'Accusation se concentre
20 simplement de lancer des affirmations, des insertions sur d'autres formes
21 de procès. Et ceci n'est pas l'un -- le signe d'un grand professionnalisme.
22 Tout ce qui -- tout ce qu'il a dit, Vasiljevic, c'est qu'il ne savait
23 pas quel était le rôle de Sainovic et que Sainovic était d'accord avec ce
24 que disaient les représentants du MUP et de la VJ. Je répète donc ce que je
25 viens de dire. Pièce 2D383 [comme interprété], il n'y a pas eu d'ordre, pas
26 de planification, et cetera. Tout ceci, ce sont des déductions de
27 l'Accusation.
28 Paragraphe 675 [comme interprété], l'Accusation déclare qu'au début
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1 de l'existence du commandement conjoint et jusqu'à la fin, Sainovic a joué
2 un rôle extrêmement central et actif au sein du commandement conjoint. Il
3 était président lors d'une réunion du comité directeur du SPS, par exemple.
4 Au paragraphe précédent, j'avais donné la cote suivante, 2D387. Ça
5 n'a pas été consigné correctement au compte rendu d'audience.
6 Enfin, je reprends ce que je disais. Il a participé à une réunion du
7 comité exécutif du SPS le 10 juin 1998 et, le 21 juillet 1998, il était
8 présent lors d'une réunion avec Milosevic.
9 Bon, je vais recommencer. Paragraphe 675, l'Accusation déclare ce qui
10 suit : "Depuis la création du commandement conjoint jusqu'à la fin de la
11 guerre, Sainovic a été le personnage central de toutes les activités du
12 commandement conjoint." Et voici les éléments fournis par l'Accusation à
13 l'appui de cette affirmation : il était présent lors d'une réunion du
14 comité exécutif du SPS le 10 juin 1998, il était également présent le 21
15 juillet 1998 lors d'une réunion avec Milosevic au cours de laquelle
16 Pavkovic a présenté un plan d'attaque. Sainovic, donc, a joué un rôle clé
17 parce qu'il était présent lors de la réunion du comité exécutif du SPS,
18 mais en compagnie de plusieurs dizaines d'autres personnes. C'est une
19 réunion au cours de laquelle on a parlé du Kosovo-Metojiha, mais Sainovic
20 n'est intervenu à aucun moment. Personne n'a mentionné sa présence, ne l'a
21 mentionné non plus. Et en ce qui concerne la deuxième réunion mentionnée,
22 il y avait là de nombreux représentants de l'armée, de la police et du
23 monde politique. Et rien n'indique -- aucune preuve n'indique que Sainovic
24 ait fait ou dit quoi que ce soit. Comment, donc, dans ces conditions, peut-
25 il être présenté comme un personnage central s'il s'est simplement contenté
26 de participer à cette réunion -- ces réunions sans faire quoi que ce soit
27 d'autre ?
28 Au paragraphe 676, l'Accusation --
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila, est-ce que vous allez
2 passer en revue la totalité des paragraphes du -- de l'Accusation qui
3 portent sur M. Sainovic et ses responsabilités pénales individuelles ? Est-
4 ce que vous allez continuer à répéter des éléments que vous nous avez déjà
5 présentés en parlant du commandement conjoint au début de votre
6 intervention ?
7 M. FILA : [interprétation] Je vais essayer de ne pas être redondant.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Mais un instant, s'il vous plaît.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous avons pris note de ce que vous
11 aviez dit précédemment au sujet de l'intervention de
12 M. Hannis, qui nous a parlé d'un chauffeur ivre, et nous craignons que vous
13 ne soyez tombé dans le même piège. Nous vous rappelons qu'au début de votre
14 intervention, vous aviez dit que votre position était telle -- était
15 tellement favorable que vous n'auriez pas grand-chose à dire finalement.
16 Donc, veuillez vous en souvenir. Et nous comprenons bien que vous êtes en
17 train d'analyser les affirmations de l'Accusation, c'est très intéressant,
18 très utile de procéder de la sorte, mais essayez d'éviter au maximum les
19 répétitions.
20 Je vous redonne la parole.
21 M. FILA : [interprétation] Paragraphe 677, mais est-ce qu'il faut que je
22 saute aussi celui-là ?
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non, non, non, ne sautez pas de
24 paragraphes. Ah, non, excusez-moi, je croyais que vous adressiez à moi; en
25 fait, c'est à Me Petrovic que vous étiez en train de parler.
26 M. FILA : [interprétation] Paragraphe 678, croyez-moi, je trouve ça encore
27 plus ennuyeux que vous mais il faut faire ce qu'il faut faire. Il faut ce
28 qu'il faut dans la vie mais je reconnais bien le bon sens de votre
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1 intervention, donc, je vais essayer de raccourcir.
2 Paragraphe 678 qui porte sur les preuves que l'on apporte de l'autorité
3 exercée par Sainovic sur le MUP. Tout ce que j'essaie de dire ici c'est
4 qu'il y avait une décision de justice -- ou plutôt, au sujet d'une partie
5 seulement du calepin de Djakovic, pièce IC199. C'est la partie où Djakovic
6 explique ce qui est repris par l'Accusation dans son paragraphe 678. Il
7 n'est pas de liquidation, en fait. Je vous renvoie aux pages 10 et 11 en
8 serbe.
9 Autre élément censé prouver l'autorité exercée par Sainovic sur le MUP,
10 c'est les déclarations de Merovci qui déclare que Sainovic faisait partie
11 de tout cela et que cette partie de la route était dangereuse. La troisième
12 preuve c'est la question de la présence du MUP à Malisevo, Merovci, et
13 cetera, on dit que c'était dangereux. C'est quelque chose qui a été
14 expliqué par Byrnes, Phillips et l'Accusation déforme complètement les
15 faits. Je fais référence ici à Byrnes. Il a dit que tout ceci ne relevait
16 pas de l'autorité du MUP.
17 679 -- maintenant, paragraphe 679, comme si Dimitrijevic n'avait jamais
18 déposé devant ce Tribunal alors que ceci a un impact sur le droit de tout
19 accusé à bénéficier d'un procès équitable en obtenant des preuves directes
20 contre lui.
21 Paragraphe 681, responsabilité de Sainovic pour la situation en matière de
22 sécurité au Kosovo-Metohija. On voit qu'il y a eu au total deux réunions
23 seulement pendant toute la guerre à ce sujet.
24 Paragraphe 684 qui nous montre de manière éclatante à quel point les notes
25 de Djakovic sont dépourvues de toute pertinence. D'après l'interprétation
26 du bureau du Procureur, Sainovic dit ici : le 21 septembre 1998 que
27 l'accord Milosevic-Yeltsin n'est pas mis en œuvre. On voit manifestement
28 que Djakovic n'a pas noté correctement ce qui a été dit parce qu'il y a
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1 d'autres notes – enfin, plutôt -- correction de l'interprète –- les notes
2 que nous avons ici sont totalement dénuées d'intérêt surtout si l'on veut
3 nous faire croire que l'accord d'octobre faisait l'objet de manœuvre pour
4 empêcher qu'ils soient mis en œuvre, or, Sainovic faisait exactement le
5 contraire au début septembre.
6 Paragraphe 686, Sainovic essaie d'empêcher l'inspection des casernes alors
7 que les éléments du dossier montrent que c'est exactement le contraire qui
8 s'est produit. Par exemple, pièce 3D438, Obradovic déclare qu'il a été
9 informé par Sainovic qu'il n'y aurait pas d'inspection, et Loncar dit que
10 c'est une décision du gouvernement fédéral. Il y a la question des
11 hélicoptères de Malisevo, l'électricité, et cetera, on en a parlé à moult
12 reprises, inutile que j'y revienne. Tout ce que je veux dire c'est que
13 Sainovic ne prenait aucune décision à titre indépendant et autonome.
14 Paragraphe 687, l'Accusation déclare que Petritsch affirme que Sainovic a
15 essayé de mettre des bâtons dans les roues aux négociations de Rambouillet.
16 Bon, certes la Chambre pourrait prendre au pied de la lettre ce que dit
17 Petritsch mais c'était si seulement si Petritsch disait cela effectivement
18 au sujet de Sainovic.
19 Puisqu'à la page 10 717, qu'est-ce qu'il dit ? Il dit que Sainovic
20 était quelqu'un de très agréable, très amical, qu'il envoyait à Cook et à
21 Vedrine pour leur parler pour qu'il –-
22 Paragraphe 688, l'Accusation affirme que l'approche tout à fait
23 contreproductive de la délégation serbe résultat des instructions données
24 par Milosevic. C'était peut-être le cas mais peut-être que non aussi.
25 L'Accusation nous dit que ces instructions étaient transmises par Sainovic.
26 Mais il n'y a aucune preuve à l'appui de cette affirmation. L'Accusation
27 dit que Petritsch a parlé de ces instructions mais, en fait, il n'a jamais
28 mentionné Sainovic. Il y a une référence qui est faite quelque part mais
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1 rien n'est moins sûr. Et puis il y a Surroi qui parle des relations au sein
2 de cette délégation mais on sait bien que les délégations albanaises et
3 serbes ne se sont jamais rencontrées concrètement. Ils étaient séparés
4 pendant les négociations.
5 Paragraphe 688, quels sont les éléments qui prouvent le comportement
6 de Sainovic ? On voit que la déposition de Dragan Milanovic est mentionnée
7 mais il ne parle pas de Rambouillet. Il a parlé des bombardements de Bor et
8 c'est tout.
9 Au paragraphe 688, l'Accusation conclut que Sainovic contrôlait la
10 délégation. Et je signale que j'ai parlé de Dragan Milanovic tout à l'heure
11 et pas de Sidran [comme interprété] Milanovic.
12 Paragraphe 688, on dit que Sainovic contrôlait la délégation mais
13 sans apporter d'éléments pour justifier cette affirmation.
14 Paragraphe 692, Tanic écoute une cassette ou un enregistrement au
15 sujet de Racak. Tanic déclare qu'il a pu entendre -– qu'il n'a pu entendre
16 aucune voix, qu'il n'a pas pu déterminer ce qu'il entendait. Il l'a dit
17 lui-même.
18 Autre chose qui a été dite c'est que Sainovic devait normalement
19 punir les auteurs des crimes commis et qu'il avait l'autorité pour le faire
20 mais d'où ça sort tout ça ? L'Accusation elle-même dit qu'au – qu'à la VJ
21 et du MUP, il y avait des chaînes de commandement bien définies qui avaient
22 la responsabilité des sanctions -- sanctions disciplinaires. Quel est le
23 rapport de Sainovic avec tout cela ?
24 Paragraphe 693, il est question de -- des taux de natalité des Albanais, ce
25 sont des propos de Milosevic, puis il y a la conclusion du bureau du
26 Procureur à ce sujet. Mais il faut se souvenir des relations qui existaient
27 entre Milosevic et Sainovic. Donc, je n'ai aucune idée du -- de la manière
28 dont l'Accusation arrive à ces conclusions. L'Accusation nous dit que
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1 Sainovic partageait indéniablement les visés de Milosevic, mais c'est
2 inventé de toutes pièces, tout ça, ça ne veut rien dire.
3 Paragraphe 694, l'Accusation dit qu'il n'y a pratiquement aucun doute que
4 Sainovic le savait. Mais qu'est-ce qui leur permet d'affirmer cela ? Moi,
5 quand j'étais -- je suis -- vous savez, je suis professeur de droit quand
6 j'étais sur les rangs -- sur les bancs d'université il y a une éternité. Un
7 de mes professeurs de droit pénal nous parlait des éléments de preuve, des
8 indices qui étaient probables, peu probables, et cetera.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On n'a pas bien compris. Répétez, s'il
10 vous plaît.
11 M. FILA : [interprétation] Qui -- c'est un de nos profs -- professeurs de
12 droit pénal qui disait que --
13 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
14 M. FILA : [interprétation] -- quand vous avez un indice, il doit
15 s'incliner, si l'on peut dire, devant une preuve à proprement parler. Les
16 indices, ça n'a aucun -- ça n'a aucune valeur.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ça y est, j'ai compris.
18 M. FILA : [interprétation] Page -- paragraphe 696, il est question de
19 crimes commis en 1998. Il y est dit que Sainovic est au courant. Mais
20 comment ça se fait que ces crimes ne sont pas mentionnés dans l'acte
21 d'accusation ? Comment Sainovic serait-il au courant si l'Accusation n'est
22 pas au courant ? D'où viennent ces informations ? Je ne comprends rien.
23 Tout ceci découle sans doute du paragraphe 698 où il est dit qu'il a
24 participé à des réunions, mais rien au cours de ces réunions n'a été dit au
25 sujet des auteurs de ces crimes ni de la manière dont ces crimes ont été
26 commis. Ce dont il est question, à ce moment-là, c'est d'opérations. Mais
27 de là à dire qu'il y a eu des crimes commis, faire le lien entre les
28 opérations et les crimes, c'est aller un peu vite en besogne, me semble-t-
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1 il.
2 Paragraphe 707, il s'agit de la preuve de l'efficacité des méthodes de
3 Sainovic pour obtenir des informations. L'Accusation traite de faits qui ne
4 figurent plus dans l'acte d'accusation. Quelqu'un s'est présenté en disant
5 qu'il s'appelait Sainovic et a parlé à Djordjevic. Est-ce que c'était
6 vraiment Sainovic ? De quoi a-t-il parlé ? On ne le sait pas. Mais
7 pourtant, ça suffit à l'Accusation pour arriver à la conclusion que le
8 sujet de leur conversation se devait être forcément Racak, et voilà sur
9 quoi reposent les arguments de l'Accusation ici.
10 Paragraphe 708, l'Accusation affirme que Sainovic devait forcément savoir
11 ce que Drewienkiewicz avait dit à Loncar mais il s'agit de simples
12 suppositions. L'Accusation déclare que Sainovic devait être au courant de -
13 - du communiqué de presse de Drewienkiewicz du 1er avril 1999 mais il
14 s'agit, là encore une fois, de simples suppositions.
15 Paragraphe 711, tout ce que dit l'Accusation ne représente aucunement des
16 informations au sujet des crimes. A aucun endroit dans la déclaration de
17 Vasiljevic, pièce P2600, paragraphe 62 -- à aucun moment il n'est dit que
18 Pavkovic avait informé Sainovic au sujet d'Izbica. Ça ne figure pas dans ce
19 document, un point c'est tout. Sainovic fournissait soi-disant des
20 informations au sujet d'une commission. Au paragraphe 712, s'agissant des
21 crimes mentionnés le
22 17 mai 1999, la seule chose que Sainovic aurait pu entendre dire c'est
23 qu'il s'agissait d'affaires ou de faits qui avaient été transférés -- ou
24 transmis aux tribunaux. Il ne pouvait rien faire d'autre que cela. S'il a
25 appris l'existence de ces crimes à ce moment-là seulement, comment peut-on
26 lui imputer quelque -- quelque responsabilité pénale que ce soit ?
27 Paragraphe 722, pour la millième fois, le Procureur nous dire que c'est
28 Vasiljevic qui a dit que Sainovic était le chef du commandement conjoint et
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1 qu'il était autorisé à déterminer comment on devait utiliser les unités.
2 Tout ceci découle d'une seule phrase formulée par Vasiljevic lors du procès
3 et qui, pourtant, laisse planer un doute, un doute qui, pourtant, permet
4 d'arriver à toutes les conclusions de l'Accusation au sujet de Sainovic et
5 du commandement conjoint au moment de la guerre.
6 Et puis, il est également question de Dimitrijevic. L'Accusation,
7 cependant, a toujours dit ce que Dimitrijevic -- tout ce que Dimitrijevic
8 avait dit devant le Tribunal, c'était -- ça faisait partie de son dossier.
9 Or, pourtant, tout ceci manque de clarté.
10 Paragraphes 718 à 724, à l'exception du paragraphe 722, aucune source n'est
11 mentionnée. Il s'agit simplement de conclusions de l'Accusation, un point
12 c'est tout. Au paragraphe 724, le Procureur dit que Sainovic s'était
13 abstenu de punir les auteurs de crimes.
14 En fait, une petite correction. Il s'agit des paragraphes 718 à 824, et non
15 pas 718 à 724, à l'exception du paragraphe 722.
16 Au paragraphe 724, disais-je, l'Accusation avance que Sainovic s'est
17 abstenu de punir les auteurs de crimes. Mais on ne voit pas à quel titre
18 Sainovic aurait pu le faire en sa qualité de vice-premier ministre du
19 gouvernement fédéral.
20 J'en ai fini avec ces paragraphes et il me reste seulement à présenter mes
21 conclusions.
22 Je pense que les arguments présentés par la Défense de Sainovic
23 montrent bien que Sainovic était l'un des cinq vice-premiers ministres et
24 que son rôle était bien différent de celui des autres accusés. Il n'était
25 pas policier, il n'était pas soldat, il n'était pas premier ministre, il
26 n'était pas chef de l'Etat. La Défense a démontré que Sainovic a joué le
27 même rôle dans le gouvernement de Bulatovic que celui qu'il avait joué dans
28 le gouvernement précédent, celui de Kontic. Souvenons-nous qu'il était à
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1 Rambouillet, qu'il a travaillé à la mise en œuvre des accords. Bulatovic a
2 constitué son gouvernement en 1998. Après quoi, la situation au Kosovo est
3 devenue plus compliquée.
4 Il ne s'agissait pas en fait de Rambouillet, mais de Dayton. Avant de
5 devenir membre du gouvernement de Bulatovic, Sainovic a œuvré à la mise en
6 œuvre des accords de Dayton, c'est de cela que je voulais parler.
7 Sainovic a joué le même rôle dans le gouvernement de Bulatovic que dans
8 celui de Kontic, le gouvernement précédent; cependant, la situation au
9 Kosovo est devenue plus compliquée après que Bulatovic soit devenu premier
10 ministre.
11 Par ailleurs, j'espère avoir réussi à démontrer que seulement certains
12 documents et certains témoignages vous ont été présentés et qu'ils ont été
13 interprétés par des personnes autres que leurs auteurs, notamment en ce qui
14 concerne le commandement conjoint où Sainovic n'est pas mentionné comme
15 étant membre de ce commandement en 1999. La Chambre n'a pas entendu tous
16 les témoignages sur ce point.
17 L'Accusation a présenté des indices, ni plus ni moins, et ces indices
18 doivent s'incliner face aux éléments de preuve présentés. De nombreux
19 témoins et de nombreux documents présentés par la Défense ne corroborent
20 pas les propos du Procureur s'agissant du rôle joué par Sainovic. Pour ce
21 qui est du commandement conjoint, je dirais que la meilleure manière
22 d'expliquer en quoi il consistait pourrait utiliser une comparaison aussi
23 simpliste que celle du chauffeur ivre. Prenez les propos de Djakovic, les
24 propos de Dimitrijevic et puis vous parviendrez aux conclusions qui
25 s'imposent.
26 D'un côté, vous avez les dires de l'Accusation qui ne sont pas corroborés
27 par les éléments de preuve mais qui sont manipulés, déformés, dénaturés. Et
28 de l'autre, je pense que vous avez des éléments de preuve valides et
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1 fiables qui ont été présentés devant cette Chambre. Parce que, sinon, si
2 ces témoins ne disent pas la vérité, qu'avons-nous fait pendant deux ans ?
3 Etant donné qu'il s'agit d'un tribunal de haut niveau, compte tenu de tout
4 ce que j'ai dit devant ce Tribunal, je vous demande de prononcer un
5 jugement en vous fondant sur les éléments de preuve et les témoignages
6 entendus, et le sort de Sainovic sera celui qu'il mérite. Je demande que
7 vous prononciez l'acquittement. Merci.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Fila.
9 Vous pouvez être certain que nous nous prononcerons sur la base des
10 éléments de preuve présentés.
11 M. FILA : [interprétation] Cela ne fait aucun doute dans mon esprit,
12 Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons maintenant entendre la
14 plaidoirie présentée pour le compte de M. Ojdanic.
15 Maître Sepenuk.
16 M. SEPENUK : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je
17 vous remercie, Mesdames et Monsieur les Juges. Je vous remercie d'avoir
18 fait preuve d'indulgence à mon égard, vu mon état de santé. J'espère que
19 c'est provisoire. J'espère que je ne prendrai pas trop mes aises en étant
20 ainsi installé.
21 J'ai été honoré et ravi de plaider devant cette Chambre, je souhaite –- je
22 sais que Me Visnjic ressent la même chose, le général Ojdanic également, et
23 nous souhaitons remercier les Juges de la Chambre de s'être montrés très
24 équitables et d'avoir attentivement examiné les éléments de preuve
25 présentés pendant les deux années qui viennent de s'écouler.
26 Je commencerai mon propos en revenant sur une déclaration du Juge Bonomy
27 faite en mars de cette année, 20 mois environ après l'ouverture du procès.
28 Le Juge Bonomy, président de cette Chambre, se demandait si l'audition du
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1 général Perisic devait être versée au dossier de l'espèce. Voilà ce qu'il a
2 dit à l'époque, le 20 mars 2008. Je cite : "Aucun des Juges de cette
3 Chambre n'a lu l'audition en question. D'une certaine manière, cette
4 audition, nous en avons eu vent de manière fortuite, mais par curiosité,
5 nous avons cherché à en savoir davantage afin de déterminer si cela avait
6 quoi que ce soit à voir avec le Kosovo car nous savions que Perisic avait
7 été mis en accusation en rapport avec d'autres questions. Donc, nous
8 n'avons pas lu cette audition, et c'est la raison pour laquelle entre
9 autres nous sommes tourmentés."
10 Le Président de la Chambre a dit qu'ils étaient tourmentés : "Nous sommes
11 tourmentés," a-t-il dit. Je suppose donc qu'il s'exprimait au nom de
12 l'ensemble des – de la Chambre. Me Visnjic et moi-même avons eu
13 l'impression que ces termes très forts, l'adjectif "tourmenté" montrait
14 bien que la Chambre de première instance était là pour rendre justice et
15 était en proie aux affres du doute sur la
16 –- pour ce qui est de la recevabilité de l'audition de Perisic car la
17 Chambre souhaitait savoir –- avoir connaissance de tous les faits
18 pertinents. Je pense que cela montrait bien également que, quelque
19 20 mois après l'ouverture du procès, la Chambre de première instance se
20 demandait encore si l'Accusation avait produit suffisamment de preuves
21 tendant à prouver la culpabilité de l'accusé au-delà de tout doute
22 raisonnable.
23 Nous affirmons qu'au bout de deux ans de procès, aucune preuve n'a
24 été présentée concernant la culpabilité du général Ojdanic au-delà de tout
25 doute raisonnable. Le général Ojdanic est ici au banc des accusés car, le
26 24 mai 1999, alors que les bombardements sur Belgrade et au Kosovo se
27 poursuivaient, le Procureur du TPIY, Louise Arbour, a décidé de mettre en
28 accusation certains des hauts fonctionnaires des cercles militaires et
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1 politiques et la RSFY, notamment le général Ojdanic. Nous pouvons seulement
2 supposer que la décision prise par Mme Arbour alors que la guerre faisait
3 encore rage se fondait sur l'idée que, vu l'expulsion massive de milliers
4 d'Albanais du Kosovo dans l'ensemble de la province, il devait y avoir une
5 entreprise criminelle commune. En réalité, il n'existait aucun élément de
6 preuve indiquant que le général Ojdanic devait être tenu pénalement
7 responsable au moment de sa mise en accusation en mai 1999, et quelque neuf
8 années plus tard, il n'existe aucun élément de preuve attestant ce fait.
9 Nous avançons que l'Accusation s'est trompé d'emblée dès le départ, dès le
10 moment où l'acte d'accusation a été dressé, elle se trompe encore à ce
11 jour.
12 Je souhaiterais maintenant examiner les éléments de preuve concernant
13 tout d'abord les déclarations du général Ojdanic et son comportement avant
14 la guerre, à l'époque où il était adjoint au chef de l'état-major général,
15 puis lorsqu'il est devenu chef de l'état-major général. Enfin, nous
16 examinerons les éléments de preuve concernant le comportement du général
17 Ojdanic pendant la guerre. Bien entendu, nous allons évoquer ces éléments
18 de preuve à la lumière du principe bien établi en droit selon lequel pour
19 prononcer une déclaration de culpabilité à l'encontre du général Ojdanic,
20 il faut que les preuves indiquant la culpabilité de l'accusé soient les
21 seules conclusions raisonnables auxquelles la Chambre pourrait parvenir sur
22 la base des éléments de preuve présentés. Nous affirmons que pour tout ce
23 qui est des allégations factuelles importantes en espèce où il existe des
24 conclusions pouvant être tirées par la Chambre qui cadrent avec l'innocence
25 du général Ojdanic.
26 Commençons par les propos de l'Accusation concernant la nomination du
27 général Ojdanic au poste précédemment occupé par le général Perisic en tant
28 que chef de l'état-major général au mois de novembre 1998. L'Accusation a
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1 indiqué dans son mémoire préalable au procès, dans sa déclaration
2 liminaire, dans son mémoire en clôture et dans son réquisitoire que le
3 général Ojdanic ainsi que d'autres personnes nommées à l'époque étaient
4 considérées comme des personnes qui étaient prêtes à suivre la stratégie de
5 M. Milosevic pour ce qui est de régler le problème survenu au Kosovo au
6 printemps 1999, à savoir le déséquilibre ethnique.
7 Cette affirmation de l'Accusation est inique pour le général Ojdanic
8 en tant qu'homme, en tant que soldat et en tant que chef de l'état-major
9 général de l'armée. Le témoignage de plusieurs témoins ayant déposé en
10 l'espèce – et je ne reviendrai pas là-dessus puisque nous en parlons
11 longuement dans notre mémoire – indique clairement que le général Ojdanic,
12 dès le début de sa carrière au sein de l'armée et pendant toute la période
13 de la guerre, ne nourrissait aucun préjugé à l'égard des Albanais de
14 souche; il a encore moins fait partie d'une entreprise criminelle commune
15 visant à modifier l'équilibre ethnique au Kosovo.
16 Avant d'être nommé chef de l'état-major général en novembre 1998, le
17 général Ojdanic était sous-chef d'état-major, c'était le numéro deux, juste
18 en dessous du chef de l'état-major. En outre, le général Ojdanic n'était
19 pas un proche de M. Milosevic. M. Milosevic a expressément déclaré qu'il
20 connaissait moins bien le général Ojdanic lorsque ce dernier a été
21 pressenti pour occuper le poste de chef de l'état-major en remplacement du
22 général Perisic. Les commentaires formulés par M. Milosevic sur cette
23 question se retrouvent dans le PV du Conseil suprême de la Défense en date
24 du 24 novembre 1998, pièce P1576, page 4.
25 Il ne s'agissait donc pas d'une décision de M. – prise par
26 M. Milosevic sur la base de ses contacts personnels ou des connaissances
27 personnelles qu'il avait du général Ojdanic, comme il ressort du PV en
28 question, la décision de nommer M. Ojdanic au poste en question est fondée
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1 exclusivement sur la base de ses compétences. Comme il est dit dans le PV,
2 je cite : "Le général Ojdanic, lorsqu'il était commandant de la 1ère Armée,
3 a sondé de façon anonyme les officiers qui étaient placés sous ses ordres.
4 Dans ce questionnaire, il y a avait 36 points et les résultats ont montré
5 que son autorité était appréciée -– très appréciée auprès de ses
6 subordonnés. Il avait une maîtrise en science militaire et il s'agissait
7 d'un général honorable et très bon."
8 L'Accusation a essayé de vous faire croire que le général Ojdanic était en
9 quelque sorte un dur par rapport à son prédécesseur, le général Perisic. Il
10 s'agit encore d'une méprise du bureau du Procureur et cela n'est pas étayé
11 par les faits ou les éléments de preuve.
12 Examinons le dossier sur ce point. Je vous rappellerai les commentaires du
13 Juge Chowhan il y a un an environ, le 4 mai 2007. Le Juge Chowhan
14 s'adressait à M. Hannis - pages 12 660 et 12 661 - je cite:
15 "Le Juge Chowhan : Monsieur Hannis, j'ai une question. Je souhaite
16 m'écarter un peu de toutes ces choses sérieuses. Vous avez indiqué quel
17 était le rôle de l'armée professionnelle vis-à-vis des soldats échappant à
18 tout contrôle. Et tout de suite j'ai pensé au livre 'Arms and the Man' de
19 Bernard Shaw, et ce livre concerne également les Balkans. Est-ce que cela
20 revêt la moindre pertinence lorsqu'il parle de ceux qu'il a rencontrés et
21 qu'il qualifie de soldats de chocolat ?
22 M. Hannis : Je n'en suis pas certain.
23 Le Juge Chowhan : Merci."
24 M. Hannis : Merci."
25 Eh bien, je -- je vous ferai la même réponse que M. Hannis à l'époque. J'ai
26 lu "Arms and the Man" il y a de nombreuses années, il en est question, et
27 lorsque j'ai entendu l'intervention du Juge Chowhan, j'ai pensé à George
28 Bernard Shaw. La pièce en question se déroule en Bulgarie en 1985 à
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1 l'occasion d'une guerre opposant les Bulgares et les Serbes. Un soldat de
2 métier suisse, le capitaine Bluntschli, combattait du côté des Serbes et il
3 fuyait les Bulgares. Cet officier avait du chocolat dans les poches de son
4 uniforme à la place de balles et pistolets. Il y a une opéra appelé : "Le
5 soldat en chocolat," qui s'est -- s'appuyait sur les événements en question
6 et cela fait l'objet de la pièce de Shaw.
7 Pourquoi parle -- est-ce que je parle de cela ? Parce que, comme nous le
8 démontrerons, le comportement du général Ojdanic n'était pas celui d'un dur
9 comme cherche à le faire croire le bureau du Procureur, mais bien le
10 contraire. Le dossier de l'espère montre de façon répétée que lorsqu'il a
11 fallut choisir entre la guerre et la paix, entre le bellicisme et le
12 compromis, entre la bravade et la modération, le général Ojdanic a toujours
13 choisi ce qui pouvait conduire à une résolution pacifique du problème et
14 non pas à une escalade du conflit. Il y a de nombreux exemples attestant de
15 cela. Je ne répèterai pas toutes les références au document de la direction
16 collégiale que nous mentionnons dans notre mémoire en clôture dès le 26
17 septembre 1997 lorsque le général Ojdanic était sous-chef de l'état-major
18 général.
19 À l'époque, le général Ojdanic, tout comme il l'a fait pendant le reste de
20 son mandat en tant que chef de l'état-major général, a répété que la guerre
21 était une option futile et qu'il fallait rechercher des solutions
22 politiques et diplomatiques. Comme l'a dit le général Ojdanic lors de la
23 réunion du -- de la direction collégiale du 4 mai 1998 : "La manière la
24 plus courte et la plus rapide de perdre le Kosovo c'est de faire la
25 guerre."
26 Et je pense qu'il est opportun de citer les commentaires du général
27 Ojdanic, faits devant ses collègues à l'époque où il a assumé les fonctions
28 de chef de l'état-major général le 27 novembre 1998. Je cite : "Quant à la
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1 question de savoir si je suis un dur, un radical, aveugle, loyal et ainsi
2 de suite, je dirais que, pour ce qui est de la manière dont j'envisage la
3 résolution des problèmes au Kosovo-Metojiha, j'espère que vous le savez,
4 vous êtes témoins de mes interventions lors des réunions de la direction
5 collégiale. Soyez certains que ce collègue que vous avez devant vous qui
6 s'est vu confier la tâche difficile de vous diriger c'est un homme qui
7 pense avant tout avec sa propre tête et qui ne dépend de personne. J'ai
8 toujours été comme ça, je resterai toujours comme ça. Je n'ai aucune
9 intention, je ne peux pas changer ce que je suis à ce stade tardif de ma
10 carrière."
11 Je pense que cet esprit indépendant est particulièrement manifeste si l'on
12 examine les commentaires faits par le général Ojdanic lors de la réunion de
13 la direction collégiale du 15 décembre 1997, pièce 3D1176 [comme
14 interprété], je cite : "Au cours de mon voyage le plus récent au Kosovo,
15 j'ai rencontré de nombreux Serbes qui ne pensent qu'à la guerre. Et des
16 idiots comme ceux-là peuvent nous mener à la guerre, mais je ne les
17 soutiendrai pas."
18 Comme le sait cette Chambre de première instance, il y a de nombreuses
19 attitudes macho qui se manifestent lors des périodes de tensions et de
20 conflits. Et il aurait été très aisé pour le général Ojdanic d'éviter de
21 faire des commentaires sur les bellicistes et les -- le bellicisme de ces
22 idiots serbes, comme il les a appelés. Il a fait ces commentaires devant
23 ses collègues de l'état-major général. Je pense que ces commentaires il les
24 avait à l'esprit quelque 11 mois plus tard lorsqu'il est devenu chef de
25 l'état-major général et lorsqu'il a rappelé à ses collègues le type d'homme
26 qu'il était.
27 Cet esprit indépendant et le fait qu'il a toujours œuvré en vu de la
28 résolution pacifique des problèmes est illustré par la manière dont le
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1 général Ojdanic a proposé que l'on traite les membres de la KVM suite aux
2 accords d'Octobre 1998. Là encore, je ne reviendrai pas sur les très
3 nombreux éléments de preuve mentionnés dans notre mémoire en clôture, mais
4 je vous donnerai lecture de deux brèves citations de réunions de la
5 direction collégiale car elles illustrent bien mon propos.
6 Lors de la réunion du 17 décembre 1998, le général Ojdanic a déclaré
7 ce qui suit, je cite : "Les membres du groupe de vérificateurs ont tous un
8 statut diplomatique, et c'est ainsi qu'il faut le considérer. Il ne faut
9 faire preuve d'aucune grossièreté à leur égard. Il s'agit de la forme la
10 moins douloureuse d'ingérence et nous ne devons leur fournir aucun --
11 aucune raison de se retirer," pièce 3D494, page 2.
12 Une semaine plus tard, le 24 décembre 1998, le général Ojdanic a dit la
13 chose suivante s'agissant de la KVM, je cite : "Tous les niveaux de
14 commandement doivent étudier les résolutions et les accords du Conseil de
15 sécurité et exiger que ces derniers soient strictement respectés. Personne
16 au sein de l'armée n'a le droit de violer ces accords. Tout esprit
17 d'aventure, tout patriotisme déplacé pouvant donner lieu à des
18 comportements volontaires, têtus, va à l'encontre des résolutions ou des
19 accords conclus et doivent être sévèrement sanctionnés, car de tels
20 comportements pourraient avoir des conséquences dramatiques pour ce peuple
21 et pour ce pays," pièce P924, page 27.
22 Je pense qu'il est important de renvoyer les Juges de la Chambre au
23 témoignage du général canadien, Michael Maisonneuve. La Chambre se
24 souviendra que le général Maisonneuve était un officier de haut rang de la
25 KVM déployé à Prizren. A un moment, pendant une période brève, il est
26 devenu le chef opérationnel de la KVM en l'absence du général DZ. Le
27 général Maisonneuve a parlé d'un mémorandum préparé fin décembre 1998 par
28 un officier britannique du nom de David Wilson. David Wilson travaillait
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1 pour le général Maisonneuve en tant qu'officier chargé du renseignement. Le
2 général Maisonneuve l'a qualifié d'esprit vif qui savait bien ce qui se
3 passait sur le terrain. Je pense qu'il est important de revenir sur
4 l'échange que j'ai eu avec ce témoin lors de son contre-interrogatoire. Je
5 m'adressais donc au général Maisonneuve:
6 "Question : Une dernière question pour vous, Général, elle concerne le
7 mémorandum que David Wilson, que vous avez considéré comme un esprit vif, a
8 préparé. Ceci est joint en annexe à votre déclaration et je vous pose une
9 question à ce sujet simplement parce que, dans votre déclaration, vous
10 dites qu'il s'agit d'une évaluation juste de la situation au Kosovo.
11 Réponse du témoin : De façon générale.
12 Question : J'ai hésité à m'en servir parce qu'il s'agit de l'opinion d'un
13 homme et, comme vous le savez, il peut avoir raison, il peut se tromper.
14 Mais je vais vous interroger au sujet d'une petite partie de ce texte, il
15 s'agit du simple soldat et de son point de vue."
16 Et voilà ce qu'il dit. Il dit, en parlant de la VJ, je cite : "Le groupe
17 clé, manifestement, est celui qui est composé des officiers de carrière,"
18 et là, il s'agit de l'armée, de la VJ et des -- des sous-officiers."
19 "Réponse du témoin : Des sous-officiers ayant une certaine
20 ancienneté.
21 Question : Bien."
22 Rapport de David Wilson : "Alors, de leur point de vue, ils sont frustrés,
23 ils méprisent les manœuvres politiques, ils sont en colère à deux titres
24 parce qu'ils font l'objet d'un examen, et le terme 'examen' - et entre
25 guillemets - de la part des observateurs étrangers alors qu'ils sont dans
26 leur propre pays, et parce qu'on leur demande de respecter un cessez-le-feu
27 alors que de l'autre côté il y a des terroristes, ils sont sceptiques sur
28 les possibilités d'un règlement politique de la situation. Alors que les
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1 analogies avec les forces occidentales peuvent être exagérées, il est
2 comparativement parlant plus facile pour un soldat de comprendre leurs
3 émotions."
4 "Question : Alors, David Wilson était un soldat, n'est-ce pas ?
5 Réponse : Oui.
6 Question : Et, manifestement, vous êtes un officier de haut rang et
7 éminent; pensez-vous qu'il y a du vrai dans ce qu'il dit ?
8 Réponse : Tout à fait. Je pense que cela reflète fidèlement les sentiments
9 du colonel Delic et des soldats sur le terrain des forces de la VJ."
10 Pages 11 127 et 11 128 du compte rendu.
11 Et j'irais jusqu'à dire que le général Ojdanic devait avoir – devait
12 comprendre de la même manière les émotions ressenties par les officiers et
13 les sous-officiers de la VJ, et il est d'autant plus admirable de voir
14 qu'il a insisté sur ce qu'il considérait être son devoir sans équivoque de
15 coopération pleine et entière avec la MVK, de crainte qu'une absence de
16 coopération puisse conduire au bombardement de l'OTAN et à la guerre, et
17 ce, alors qu'il savait que sa politique de coopération stricte avec la MVK
18 puisse être mal perçue par les officiers et les sous-officiers ayant une
19 certaine ancienneté.
20 Le fait que le général Ojdanic a toujours préféré le compromis et la
21 conciliation avec la MVK -- plutôt que la confrontation est illustré de
22 diverses manières, la Chambre de première instance se souviendra que le
23 général Ojdanic, alors qu'il était encore sous-chef d'état-major, a exhorté
24 tous les groupes de combat de la VJ, suite à l'accord avec la MVK en
25 octobre 1998, de se retirer dans les casernes. Il a demandé à des
26 restrictions supplémentaires -– des restrictions supplémentaires que celles
27 liées aux trois compagnies. Je vous renvoie au PV des réunions –- de la
28 réunion de la direction collégiale du 23 octobre 1998, pièce 3D645, page 4.
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1 La Chambre de première instance se souviendra également que le général
2 Ojdanic a fait en sorte que des rapports soient envoyés quotidiennement, et
3 non pas de façon hebdomadaire, à la MVK, 3D408, page 2. Il a également
4 continué à augmenter le nombre de soldats de la VJ chargés de la
5 coopération avec la mission de la MVK. Il y a eu un nombre accru
6 d'officiers parlant anglais, pages 7 676 et 7 680 du compte rendu
7 d'audience, pièce 3D407.
8 S'agissant de la bonne volonté manifeste du général Ojdanic pour ce qui est
9 de ses rapports avec la MVK et malgré sa –- son engagement sans faille pour
10 ce qui est de la coopération avec la MVK, le bureau du Procureur formule
11 toutes sortes d'allégations trompeuses sur cette question, paragraphes 776
12 à 782 de son mémoire.
13 Et pour ce qui est des affirmations faites par l'Accusation, nous en
14 parlons aux paragraphes 170 à 185 de notre mémoire où nous évoquons la
15 coopération du général Ojdanic avec la MVK, aux paragraphes 64 à 83 nous
16 évoquons la question de Podujevo pour ce qui est de la MVK. Il y a une
17 question dont nous ne traitons pas dans notre mémoire, et il s'agit de
18 l'affirmation présentée par le bureau du Procureur au paragraphe 780 de son
19 mémoire qui dit qu'en autorisant le MUP à garder des armes lourdes, il y a
20 eu violation de l'accord. Cela a été mentionné de nouveau par M. Hannis
21 lors de son réquisitoire.
22 Je note que cette question portait sur l'accord de Vienne relatif au
23 contrôle des armes, et non pas à l'accord d'octobre.
24 Lors de la réunion du 3 décembre 1998, le général Obradovic a laissé
25 entendre que les –- l'équipement lourd pouvait être qualifié comme étant
26 équipement –- de l'équipement de la VJ ou provisoirement à la disposition
27 du MUP. Il n'a pas été laissé entendre que l'équipement en question devait
28 être dissimulé. Le bureau du Procureur a cité les commentaires du général
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1 Ojdanic selon lequel il n'était "pas pour une solution ou pour l'autre" et
2 ceci n'a rien à voir avec ce qui nous occupe. Avant de façon ce
3 commentaire, le général Ojdanic a dit ce qui suit : "Couchons cela sur le –
4 - couchons cela sur le papier avec quelques informations brèves et une
5 proposition. Pour ce qui est de ces deux questions, je vais d'abord voir ce
6 qu'il en est auprès du ministre, et après ça je demanderai l'avis du
7 président de la RSFY," 3D557, page 20.
8 Juste après le commentaire du général Ojdanic, le général Grahovac a
9 déclaré que ce n'était pas le général Ojdanic mais l'Etat qui avait signé
10 l'accord qui allait en définitive trancher la question. Le Procureur
11 affirme au paragraphe 780 de son mémoire que le général Ojdanic, je cite :
12 "Etait clairement peu préoccupé par la violation de l'accord," c'est faux.
13 Nous notons également le témoignage fait sur ce point par le général
14 Obradovic, aux pages 14 977, 14 978, qui a dit que suite à la réunion du 3
15 décembre 1998, des informations complètes ont été communiquées à la VJ
16 conformément à l'article 4 de l'accord de Vienne.
17 Pour finir, s'agissant de la coopération avec la MVK, le Procureur, au
18 paragraphe 777, prend acte de l'accord initial donné par le général Ojdanic
19 aux inspections des casernes par la MVK. Je signale au passage que cet
20 accord n'était pas approuvé par le général Perisic qui, comme l'a dit le
21 général Obradovic au cours de sa déposition, était opposé à ce que la MVK
22 entre -- ou puisse entrer dans les casernes. Page 15 034 du compte rendu
23 d'audience. Et la raison pour laquelle l'inspection des casernes n'a pas eu
24 lieu comme cela figure au paragraphe 777 du mémoire de l'Accusation, c'est
25 -- et je cite:"Que Sainovic a fermement repoussé les plans de la MVK de
26 procéder à ces inspections, et il était le seul habilité à autoriser ces
27 inspections."
28 Et à partir de cela, le bureau du Procureur arrive à la conclusion dans son
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1 mémoire, conclusion selon laquelle, je cite : "Une fois encore, il est
2 manifeste qu'Ojdanic soutenait un autre participant à l'entreprise
3 criminelle commune, Sainovic, en l'occurrence, en oeuvrant à la réalisation
4 de l'entreprise criminelle commune."
5 Donc, on en est arrivé à un moment où, d'après le bureau du Procureur, un
6 général d'armée est supposé contester une décision de l'autorité civile en
7 matière d'interprétation d'une question tout à fait légitime; et faute de
8 ce faire, le général en question est censé soutenir une entreprise
9 criminelle commune. C'est complètement ridicule, si vous me permettez
10 l'expression.
11 Maintenant, je voulais m'interrompre pour participer –- pour parler de la
12 signification des éléments de preuve relatifs à la période précédant la
13 guerre, et notamment la coopération avec la MVK, on nous en a parlé parce
14 qu'on nous a dit que ça avait des –- un impact sur l'intention délictueuse
15 du général Ojdanic. L'Accusation, dans sa théorie, déclare notamment qu'à
16 partir d'octobre 1998 au moins, l'entreprise criminelle commune destinée à
17 chasser les Albanais du Kosovo a vu le jour. Et ceci étant, l'Accusation va
18 sans doute parler de non coopération avec la MVK comme étant une preuve
19 selon laquelle la VJ et le général Ojdanic avaient violé certaines
20 obligations internationales qui étaient les siennes, et on veut sans doute
21 nous faire croire que cet état d'esprit, il a continué à exister tout au
22 long de la guerre.
23 Je pense qu'il serait utile à cet égard de se rappeler ce que disait le
24 général Dimitrijevic au sujet de la MVK. Page 26 733-26 734 du compte rendu
25 d'audience : "Moi, ce que je sais de cette période," dit-il, "c'est la
26 chose suivante : Je me souviens de certains détails encore aujourd'hui, 90
27 % de la Mission de vérification –- des éléments de la Mission de
28 vérification étaient des officiers d'active des armées participantes, sauf
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1 que ces hommes n'étaient pas en uniforme, ils venaient des services de
2 Renseignements, de la communauté du renseignement; cela veut dire que dans
3 de nombreux cas, quand nous avons compris que –- nous avons compris que les
4 membres de la Mission de vérification étaient en train de procéder au
5 transfert d'armes et de fournir des informations au sujet de l'armée de la
6 Yougoslavie."
7 En fait, ils avaient pris le parti des terroristes albanais. Et,
8 parallèlement, dans de nombreux cas, ils ont dépassé ou ils ont outrepassé
9 les termes de leur mandat, et ils ont demandé des informations qu'ils ne
10 fussent pas habilités à demander.
11 Dans le même esprit, la Chambre de première instance se rappellera le
12 rapport de l'officier britannique, David Wilson, cité dans la déposition du
13 général Maisonneuve selon laquelle les officiers de la VJ étaient :
14 "Ulcérés parce qu'ils ressentaient une double humiliation à l'idée d'être
15 soumis à l'observation et à la surveillance des observateurs étrangers sur
16 leur propre territoire, et parallèlement, ils devaient respecter un cessez-
17 le-feu avec des terroristes qui n'étaient même pas partis à cet accord." Je
18 pense que tout ceci a une certaine pertinence, Madame le Juge Nosworthy, vu
19 ce qui a été dit l'autre jour.
20 Je pense que nous avons montré que le général Ojdanic s'est fermement
21 opposé à cette opposition intrinsèque qui s'était manifestée contre la MVK,
22 une opposition qui venait de certains de ses collaborateurs les plus
23 proches. Il comprenait la possibilité de voir se produire un bombardement,
24 et finalement, il a eu raison, les faits lui ont donné raison, mais je pose
25 la question suivante : et qu'est-ce qui se serait passé si le général
26 Ojdanic n'avait pas fait preuve d'un esprit de coopération avec la MVK
27 comme il l'a fait ? Est-ce que la méfiance que l'on ressentait à l'égard de
28 la MVK telle qu'elle est décrite par le général Dimitrijevic n'aurait pas
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1 été considérée comme l'intention de modifier l'équilibre ethnique au Kosovo
2 en expulsant les Albanais du Kosovo ? Je pense que, quand on a posé la
3 question, on y a déjà répondu.
4 Je pense que c'est une question éminemment pertinente qu'il faut se
5 poser, vu les faits de l'espèce. Par exemple, l'Accusation affirme que
6 comme il a envoyé des troupes au Kosovo en mars 1999, le général Ojdanic a
7 contribué à l'entreprise criminelle commune, mais l'accumulation de ces
8 forces, la préparation de ces forces, selon nous, a une autre –- une autre
9 motivation. On peut y trouver une autre explication : il s'agissait de se
10 préparer à se défendre contre l'UCK et contre une attaque éventuelle de
11 l'OTAN. Et comme nous l'avons déjà indiqué, les –- lorsque l'on conclut à
12 la culpabilité d'un accusé, il faut que cette conclusion soit la seule
13 conclusion raisonnable que l'on puisse déduire des éléments de preuve
14 présentés.
15 Maintenant, je voudrais parler du comportement du général Ojdanic
16 avant la guerre, on nous dit que contre l'avis de Milosevic, le général
17 Perisic était favorable à une utilisation limitée de l'armée et que faute
18 d'état – de déclaration d'état d'urgence, l'armée ne devrait pas être
19 utilisée contre les terroristes.
20 Comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, nous ne sommes pas ici
21 pour nous livrer un débat parlementaire sur la question mais, si on regarde
22 la constitution, si on regarde les règlements de l'armée - et je crois que
23 le Pr Markovic l'a dit lors de sa déposition - il y a beaucoup d'éléments
24 qui permettent d'arriver à la conclusion que l'utilisation de l'armée était
25 justifiée dans la lutte contre les terroristes sans pour autant qu'il soit
26 nécessaire de déclarer l'état d'urgence.
27 Alors, quelle était la position du général Ojdanic à ce sujet ?
28 Contrairement à ce que déclare l'Accusation, le fait est que le général
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1 Ojdanic partageait le point de vue du général Perisic, il avait même une
2 idée plus –- une vision plus restrictive de la situation. Une illustration
3 de ceci grâce à certains éléments que nous mentionnons d'ailleurs dans
4 notre mémoire.
5 Je souhaiterais vous renvoyer à la réunion du 26 octobre 1997, le général
6 était l'adjoint du chef d'état-major. A l'époque, il y avait des
7 manifestations, des meetings organisés par des réunions, et on estimait
8 qu'il s'agissait d'actions radicales dirigées contre le gouvernement. Or,
9 voici ce que dit le général Ojdanic à ce moment-là, je cite : "Au cours des
10 manifs, limiter au minimum l'emploi des véhicules motorisés militaires,
11 interdire –- il faut interdire l'utilisation des véhicules la nuit, sauf
12 lorsque les commandants des brigades l'estiment nécessaire. Pendant cette
13 période, il faut annuler toutes les activités prévues qui nécessitent des
14 mouvements de troupes de grande envergure et l'engagement des forces de la
15 VJ. En plus de ce que je vais –- j'ai dit -- je pense que cet ordre doit
16 également interdire toute action de la part de la –- des commandants de la
17 VJ et des Unités de la VJ qui outrepasserait leur rôle constitutionnel et
18 qui entraînerait une irritation de la population et de la communauté
19 internationale en particulier," 3D1074, page 23. Il parle de la communauté
20 internationale que l'on ne doit pas fâcher -- irriter parce qu'il sait très
21 bien à quoi cela pourrait mener.
22 Alors, tout de suite après l'intervention du général Ojdanic, le général
23 Perisic intervient pour dire la chose suivante, je cite : "Bon, d'accord,
24 est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre qui souhaite dire quoi que ce soit au
25 sujet des groupes organisés sous votre commandement ? Il existe des
26 opinions divergentes quand d'aucuns affirment que la VJ ne doit pas être un
27 facteur d'irritation comme cela a été dit par Ojdanic. Certains pensent que
28 l'armée doit faire la démonstration de sa force et qu'elle doit mener à
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1 bien ses actions et ses opérations au Kosovo avec pour objectif de
2 décourager certaines –- certaines opérations, et ceci en faisant une
3 démonstration de force."
4 On voit donc que Perisic et Ojdanic ne partagent pas le même point de vue,
5 s'agissant de l'emploi de la force. Voilà un exemple qui date d'octobre
6 1997, le général Ojdanic est favorable à une politique de modération, il a
7 dénoncé ceux qui –- les fauteurs de guerre en Serbie, il l'a fait en
8 décembre 1997 puis il le refera en décembre 1998 quand il était chef
9 d'état-major de l'armée. Il était contre tout esprit aventurier, contre
10 tout faux patriotisme de la part de ses collaborateurs dans les relations
11 avec la MVK.
12 Il y a d'autres exemples qui indiquent quel était le point de vue du
13 général Ojdanic, qui était favorable à une utilisation limitée de l'armée.
14 Lors de la réunion du 10 avril 1998, le général Ojdanic déclare :
15 "S'agissant de la – de nos interventions destinées à lutter contre la
16 rébellion armée, ces opérations doivent être menées suite à des décisions
17 prises par les organes compétents," pièce 3D657,
18 page 2. Ceci est traduit dans la politique –- ou la stratégie adoptée par
19 le général Perisic.
20 Lors de la réunion du 10 juillet 1998, au moment où il était adjoint du
21 chef d'état-major, le général Ojdanic déclare, je cite : "Certains estiment
22 qu'il faut engager l'armée de manière plus intense dans le cadre de
23 certaines missions bien particulières, je ne sui spas d'accord, mon
24 Général. En particulier lorsqu'il s'agit de protéger la population, nous ne
25 devons pas nous lancer dans ce type de mission. Pour ce faire, nous
26 disposons des forces du MUP serbe," pièce 3D641, page 2.
27 Plus tard, au cours de cette même réunion, pages 2 et 3, le général
28 Dimitrijevic dit : "Lorsqu'il s'agit de protéger la population de plus de
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1 200 villages, il faut le faire de manière organisée."
2 Le général Ojdanic répond à Dimitrijevic en faisant preuve de plus de
3 modération pour ce qui est de l'emploi des forces de la VJ. Le général
4 Ojdanic déclare : "Je ne sais pas ce qu'Aco" - c'est-à-dire le général
5 Dimitrijevic - "veut dire lorsqu'il parle de protection de la population.
6 Il est tout à fait naturel d'estimer que –- de supposer que, si l'on
7 plaçait un certain nombre d'unités au cœur même du Kosovo-Metohija et que
8 l'objectif c'était d'assurer un soutien psychologique à la population, a ce
9 moment-là, ça aurait un impact très complexe. Je pense que c'est une
10 question extrêmement complexe -– extrêmement sensible."
11 Dans son rapport d'expert militaire, le général Radunovic a conclu lors de
12 –- à partir de la réunion du 10 juillet 1998 que : "le général Ojdanic
13 était opposé à l'emploi direct des forces de la VJ pour défendre la
14 population civile dans les localités où cela aurait forcément entraîné une
15 guerre déclarée et ouverte avec –- au Kosovo-Metohija," paragraphe 25, page
16 78 de la pièce 3D1116.
17 Monsieur le Président, je pense que le moment serait bien choisi pour nous
18 arrêter aujourd'hui.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Sepenuk.
20 Nous allons lever l'audience jusqu'à demain 9 heures, et nous vous
21 donnerons de nouveau à ce moment-là la parole pour la poursuite de votre
22 plaidoirie.
23 --- L'audience est levée à 15 heures 29 et reprendra le vendredi 22 août
24 2008, à 9 heures 00.
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