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1 Le mardi 26 août 2008
2 [Plaidoiries de la Défense Lukic]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 [Les accusés Pavkovic et Lazarevic sont absents]
6 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Nous
8 allons maintenant entendre les plaidoiries de Me Lukic.
9 Maître Lukic, c'est à vous.
10 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. D'emblée, je
11 voudrais dire que moi-même et Me Ivetic nous nous sommes divisé le travail,
12 donc c'est moi qui vais parler en premier, et ensuite Me Ivetic va
13 reprendre la parole. Ce sera lui qui sera chargé de l'essentiel de nos
14 arguments.
15 M. LUKIC : [interprétation] Et moi, je parle en serbe et lui, Me Ivetic,
16 parlera en anglais.
17 Une fois de plus, bonjour à tous et à toutes, Mesdames et Messieurs les
18 Juges. La Défense de M. Lukic se propose d'essayer de présenter en bref les
19 arguments de la cause qu'elle défend. Et pour commencer, je vais me référer
20 à ce à quoi ont fait référence mes autres collègues lorsqu'ils ont parlé
21 d'un plan relatif à l'expulsion des Albanais. Je pense que mes collègues
22 des autres équipes de la Défense ont avancé pas mal de documents et
23 d'éléments. Je me propose, à ce sujet, d'en fournir un peu moins.
24 Mais j'ajouterais qu'il n'est pas contesté le fait qu'avant tous ces
25 événements, la Serbie se trouvait être signataire des accords de Dayton
26 pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine. Ces accords ont été signés en
27 1995, suite à quoi il y a eu cessation des hostilités dans cette ex-
28 république yougoslave.
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1 L'avenant numéro 7 de ces accords parle du retour des réfugiés et des
2 personnes déplacées. Alors peut-on envisager que quelqu'un qui aurait déjà
3 eu une expérience immédiate avec une situation de guerre, avec le départ
4 des réfugiés qui se trouvent dans cet environnement immédiat, pourrait
5 s'imaginer que ces règles-là n'allaient pas s'appliquer à elles-mêmes ? Et
6 peut-on s'imaginer que Slobodan Milosevic ne savait pas lui-même que les
7 réfugiés, au cas où il y en aurait, finiraient par rentrer chez eux lorsque
8 les hostilités cesseraient ? Pour moi, cela ne semble pas être quelque
9 chose de sensé.
10 Les participants à ces accords étaient, entre autres, Slobodan
11 Milosevic et Wesley Clark. Par conséquent, il n'y avait pas d'inconnu en
12 matière des choses sur le terrain, tout à fait l'objet de négociations,
13 d'accords, de conventions, et de réalisation de tout ceci. Et jusqu'au
14 moment où la guerre a éclaté en Serbie en 1999, pour ce qui est de la
15 Bosnie-Herzégovine, la plupart des réfugiés qui avaient souhaité le faire
16 étaient rentrés à la maison. Les organisations internationales ont aidé à
17 reconstruire les maisons et à assurer un séjour constant ou durable. Il
18 faut savoir que pour ce qui est des accords de Dayton de 1999, ça a été un
19 sujet au quotidien dans les médias serbes, cela a été le sujet de ceux qui
20 avaient fui la Bosnie-Herzégovine pour se rendre en Serbie et ceux qui
21 avaient eu l'intention de retourner là-bas. Ces accords ont été et ont
22 constitué un sujet politique au quotidien en Serbie.
23 Le problème de la Serbie consistait à faire revenir les réfugiés chez
24 eux en Bosnie-Herzégovine. C'était donc la réalité des choses en 1998 et en
25 1999. Entre autres, ça a été ce qu'on avait au quotidien dans la Serbie
26 même.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Lukic, est-ce que nous avons
28 des éléments de preuve à ce sujet ?
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1 M. LUKIC : [interprétation] Je ne pense pas que -- Je viens de vérifier,
2 les accords de Dayton ne font pas partie de nos pièces à conviction, mais
3 je pense que cela est communément un fait connu, notoirement connu.
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est certainement pas quelque chose
5 de notoirement connu par moi, et s'il y a des éléments de pièces à
6 conviction ou de preuves que vous pourriez nous présenter, cela serait
7 utile.
8 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je vais essayer
9 de le fournir pendant que M. Ivetic continuera ou reprendra son volet.
10 Merci.
11 Alors quelqu'un a eu l'idée remarquable qui s'était dit donc "Chassons les
12 Albanais, mais essayons de provoquer l'OTAN pour être bombardés, ensuite
13 nous pourrions passer à la tâche." Alors, d'après notre Défense, ce n'est
14 pas une théorie qui, dans les circonstances telles qu'elles se présentent,
15 pourrait être quelque peu que ce soit crédible. Je me propose à présent de
16 paraphraser et de vaquer brièvement à ce à quoi on aurait abouti en
17 application de ce prétendu plan d'expulsion des Albanais si l'on se réfère
18 aux dires du Procureur.
19 Alors les expulsions, d'après lui, étaient grandement terminées fin avril
20 1999, on aurait chassé un tiers des Albanais et maintenant ils n'étaient
21 que cinq fois plus nombreux que les Serbes, alors qu'auparavant ils avaient
22 été huit fois plus nombreux que les Serbes. Alors est-ce que c'est une
23 allégation qui a du sérieux ? Qu'est-ce que ça constitue comme modification
24 de l'équilibre en faveur des Serbes et qu'est-ce que c'est comme équilibre
25 du tout ? Alors le témoin Haxhibeqiri dit qu'à Djakovica il y a 2 à 3 % de
26 Serbes, alors combien fallait-il expulser d'Albanais de Djakovica pour
27 rétablir l'équilibre ? Le Procureur n'a pas démontré que cela a été bel et
28 bien fait.
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1 Le point suivant que j'aimerais mettre en exergue pour les Juges de
2 la Chambre, c'est le suivant : ne serait-il pas logique de dire que les
3 Serbes ou de penser que les Serbes expulseraient les Albanais des parties
4 du Kosovo là où il n'y a pas d'UCK, les expulser de parties où ils ne
5 seraient prétendument pas protégés ? Pourquoi les Serbes expulseraient-ils
6 les Albanais là où il y a la concentration la plus grande des membres de
7 l'UCK ? Quelle est cette logique ? Qui est-ce qui serait normal ou qui
8 considèrerait-on normal s'il s'efforcerait de pousser sa propre population
9 à aller se faire tuer quelque part si on avait voulu faire quelque chose où
10 ailleurs la chose aurait pu être faite sans problème du tout ?
11 Alors je vais passer maintenant à une thèse qui est celle du QG du
12 MUP et qui se résume à la pièce à conviction de l'Accusation P1505 qui se
13 rapporte à l'état-major du MUP, décision de la création de cet état-major,
14 16 juin 1998. Alors, par ce document, l'Accusation montre qui est-ce qui
15 fait partie de ce QG et quelles sont les missions confiées à ce QG. Notre
16 Défense affirme que ce document n'a pas été mis en vigueur ni du point de
17 vue des cadres et ni du point de vue de sa fonctionnalité.
18 Bon nombre de témoins sont venus parler de ces circonstances et on a
19 présenté également des éléments de preuve par écrit qui montrent de façon
20 claire que cette solution n'a pas été mise en œuvre en pratique. Nous avons
21 parlé de la chose dans notre mémoire à partir du paragraphe 690 jusqu'au
22 paragraphe 785, et le bureau du Procureur en parle dans ses paragraphes 208
23 à 211. Dans le courant de ce procès, nous avons entendu M. Mijatovic, M.
24 Adamovic, nous avons vu des documents, des documents pour ce qui est de la
25 nomination et de la cessation de l'exercice de fonction pour certaines
26 personnes. Il s'agit des documents 6D1044 à 6D1052.
27 Nous allons prouver, et je pense que nous avons prouvé - nous allons
28 le démontrer aujourd'hui aussi - le fait que des membres de ce QG n'étaient
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1 pas n'étaient pas David Gajic; Radoslav Djinovic; Milorad Lukovic; Legija,
2 et Zivko Trajkovic. On peut le voir partant du témoignage de Miroslav
3 Mijatovic. On a pu voir aussi que du temps de l'existence de ce QG, il y a
4 eu des modifications au niveau de la composition en matière de cadres dans
5 ce QG, et ce, à plusieurs reprises. Par conséquent, il n'y a pas eu de
6 solution d'adoptée concernant la création de ce QG. Nous avons donc eu sur
7 le plan juridique une situation imparfaite, mais la situation se présentait
8 telle qu'elle était.
9 Nous avons pu voir au début, après l'adoption de cette décision,
10 qu'il y a eu l'arrivée de Miroslav Mijatovic. Ensuite après la prise de
11 cette décision en été 1998, il y a eu l'arrivée de Dusko Adamovic, puis il
12 y a eu l'arrivée de Desimir Slovic. A eux trois, ils étaient membres de ce
13 QG d'après Miroslav Mijatovic, d'après Dusko Adamovic et Radovan Vucurevic.
14 On peut le voir partant des décisions afférentes au personnel. On voit, par
15 exemple, que pour Radoslav Djinovic il y a cessation de son séjour au
16 Kosovo le 19 juin 1998. On voit que Dusko Adamovic s'en va du Kosovo parce
17 qu'il est blessé lors du bombardement du QG, et bien qu'il n'existe pas
18 dans cette décision, il arrive suivant la décision du 1er avril, mais on
19 voit qu'ils sont déjà partis le 29 mars, le jour même où ils ont été
20 blessés.
21 Le 29 mars, Desimir Slovic s'en va aussi du Kosovo, il ne figure pas
22 dans la décision prise, il était membre du QG et il a également été blessé
23 lors du bombardement de ce QG.
24 Le 15 février, avant ce bombardement, il y a départ de Novica Zdravkovic.
25 Donc à partir du 15 février, il n'est plus membre de ce QG et à sa place il
26 y a Tomislav Blagojevic qui vient.
27 Après le départ d'Adamovic, de Slovic et de Vucurevic, le 29 mars, à leur
28 place il y a l'arrivée de Milenko Arsenijevic, Petar Bogdanovic et Voja
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1 Gucic. Dans le témoignage de Mijatovic et dans notre mémoire en clôture, il
2 y a citation des documents qui illustrent tout ceci. Nous sommes convaincus
3 d'avoir prouvé que cette décision relative à la création de ce QG du MUP du
4 16 juin 1998 n'a pas été mise en vigueur du point de vue de la
5 réunification des secteurs de la Sûreté de l'Etat et du secteur de la
6 sécurité publique au sein de ce QG. Nous avons prouvé que David Gajic et
7 Milorad Lukovic, Legija, n'étaient pas membres de ce QG. Cela a été
8 confirmé par la totalité des membres du QG qui sont venus témoigner ici. On
9 le voit également dans les documents, lorsqu'il est question d'énumérer les
10 membres du QG, et notamment citant les membres du service de la Sûreté de
11 l'Etat. On le voit dans le P1990 et le P2805.
12 Nous avons prouvé que Zivko Trajkovic, le commandant de la SAJ, n'était pas
13 membre de ce QG. Tous les membres du QG l'ont confirmé. Le témoin Joksic,
14 en page 22 026 du compte rendu d'audience, l'a confirmé, et Radovan
15 Vucurevic l'a confirmé également à la page 23 056. Puis Milos Vojnovic, en
16 page de compte rendu 24 148. On peut le voir également dans la déclaration
17 de Dusko Adamovic, qui porte la cote 6D1613, paragraphe 7; Bozidar Filic
18 l'a dit aussi, page du compte rendu d'audience 23 949 et page de compte
19 rendu d'audience également 23 965.
20 Pour ce qu'il y a d'autre à ajouter au sujet de cette composition en
21 matière de cadres de ce QG, c'est qu'il y avait les chefs des SUP et les
22 chefs des centres et départements de la Sûreté de l'Etat. Nous pensons
23 avoir prouvé au fil de ce procès que les chefs des SUP et les chefs des
24 département de la Sûreté de l'Etat au Kosovo-Metojiha n'ont pas été membres
25 du QG, bien que cela ait été prévu dans l'acte portant création de ce QG.
26 Parce que la décision en question dit que les membres de ce QG au sens
27 large du terme englobent ces personnalités, mais le fait qu'ils n'aient pas
28 été membres du QG pour de bon a été confirmé par un témoin de l'Accusation,
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1 Ljubinko Cvetic, page du compte rendu d'audience 8 146, on le voit
2 également dans les pièces à conviction P1990 et P2805.
3 Donc il apparaît de façon claire que la décision portant création de ce QG
4 n'a pas été mise en œuvre du point de vue des effectifs. Et la Défense de
5 M. Lukic l'a englobé dans ces paragraphes 731 à 755 du mémoire en clôture.
6 Au paragraphe 2 de cette même décision, il est fait énumération des
7 missions de ce QG, et lorsque le Procureur a décrit les missions de ce QG,
8 elle s'est fondée sur cette décision sans présenter quelque autre élément
9 de preuve que ce soit. Nous en avons parlé pour notre part aux paragraphes
10 756 à 766 de nos écritures.
11 Dans le courant de la présentation des éléments de preuve au cours du
12 procès, nous avons prouvé que cette situation où il n'y a pas mise en œuvre
13 du fonctionnement du QG conformément à la forme prescrite telle que prévue
14 par la décision portant création du QG est due au fait que le terrorisme au
15 Kosovo-Metojiha a crû à une échelle telle qu'au niveau de l'Etat il y a eu
16 adoption d'un plan en cinq phases de lutte contre le terrorisme. Et au
17 niveau du MUP on a dérogé tout ce qui était relatif à la planification des
18 actions pour intégrer à la conception desdites actions l'armée de
19 Yougoslavie.
20 Une fois que l'on a adopté ce planning en cinq phases pour lutter contre le
21 terrorisme, plan établi par le Corps de Pristina, tout comme nous l'a dit
22 Djakovic lors de ce procès, la planification des actions conjointes a été
23 faite par le Corps de Pristina. Comme l'affirme du reste le témoin Djakovic
24 une fois de plus, et les extraits de cartes ont été communiqués au QG du
25 MUP, voire directement aux détachements des PJP, partant de quoi ces
26 détachements ont conduit à bien leurs propres activités. Le QG du MUP
27 n'avait pas à compléter ou à modifier ces plans. Il n'a fait que les
28 transmettre aux détachements des PJP, comme nous l'a d'ailleurs confirmé le
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1 témoin Dusko Adamovic.
2 Nous avons prouvé que pas un seul plan relatif à la conduite d'opérations
3 conjointes entre l'armée et la police n'a été établi au sein du QG. Le
4 moins qu'on puisse dire, le Procureur et les équipes de Défense des
5 généraux en matière militaire n'ont réussi à prouver chose pareille en
6 dépit de toutes les tentatives de le faire. Personne n'a jamais vu ce type
7 de document, jamais personne parce que ce document n'existe tout simplement
8 pas.
9 On a essayé au cours de ce procès de dire que le 6D716 a été établi au QG
10 du MUP, puisqu'on y a marqué "commandement du MUP". Mais Mile Djakovic a
11 confirmé que c'est lui qui avait rédigé ce document et que c'était un
12 document de démonstration plutôt qu'un ordre véritable. Ce type de rôle du
13 QG du point de vue de la planification des opérations antiterroristes nous
14 semblait incroyable au début du procès. Et le Juge Bonomy a posé la
15 question de savoir si le QG du MUP était juste une boîte à lettres. Les
16 allégations de Mijatovic pour ce qui est d'un nombre plus grand
17 d'informations une fois que Dusko Adamovic viendrait témoigner n'ont été
18 que confirmées par ce Dusko Adamovic lui-même.
19 Et nous pensons que les témoins n'ont pas eu la possibilité d'en dire plus.
20 La raison c'est que nous avons entendu bon nombre de témoignages à ce sujet
21 et ils ont tous expliqué ce que Djakovic a dit, ils ont tous affirmé que
22 c'est le MUP qui avait rédigé ces ordres. Mais personne n'a confirmé cela
23 mis à part Stefanovic, et il a dit qu'il était possible que certains
24 extraits des cartes aient été envoyés au QG du MUP.
25 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent que le micro soit déplacé. Il y a
26 un bruit.
27 M. LUKIC : [interprétation] Milan Djakovic a confirmé que tous les extraits
28 sur ces cartes pour ce qui est des opérations conjointes ont été l'œuvre du
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1 Corps de Pristina et que cela n'a été que communiqué au QG du MUP. Et on a
2 montré des cartes pour le niveau des détachements et des compagnies des
3 PJP, tant pour l'année 1998 que pour l'année 1999. Il a confirmé que cela a
4 été l'œuvre du QG de l'état-major du Corps de Pristina où il a travaillé
5 lui-même avec d'autres gens. Et les extraits ont été faits pour les SAJ et
6 les JSO, chose qui peut être vue dans les pièces à conviction 4D495,
7 6D1619, 6D1620, 6D1621; et pour les SAJ, on le voit au 5D1329.
8 Zivaljevic a expliqué en témoignant devant les Juges de la Chambre que les
9 commandants des détachements ne pouvaient pas planifier leurs actions, et
10 si ce n'est pour une autre raison, c'est pour des raisons purement
11 techniques. Non seulement ils n'avaient pas les connaissances nécessaires,
12 parce que Zivaljevic n'avait pas fait l'Académie militaire, mais aussi
13 faut-il dire que les détachements du MUP n'avaient pas leur QG. Donc en
14 termes simples il n'y avait personne pour le faire, et Zivaljevic en a
15 témoigné à la page T24 820, lignes 12 à 19.
16 Le témoin Ilic, en répondant à une question de mon confrère M. Bakrac, a
17 expliqué que personne dans la police n'avait non plus les connaissances
18 nécessaires pour ce qui est de la planification de quelque opération que ce
19 soit au-delà du niveau d'une compagnie, compte rendu 24 359, ligne 21 et ça
20 va jusqu'au compte rendu page 24 360, ligne 4.
21 Nous avons prouvé que ni Sreten Lukic ni le QG n'ont commandé les unités de
22 la PJP sur le terrain, pas plus qu'ils n'ont dirigé les ATA. Le PJP avait
23 une structure dissociée du QG. Tous les commandants des PJP, du plus haut
24 niveau jusqu'au plus bas, y compris le commandement des PJP, pendant toute
25 la durée de la conduite des opérations se trouvaient sur le terrain au
26 Kosovo-Metohija, et ce, tant en 1998 qu'en 1999. Il y a un grand nombre de
27 paragraphes et de témoignages qui l'illustrent, et ça se trouve à être
28 englobé par les paragraphes 767 à 773 de notre mémoire en clôture.
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1 Lorsque le commandant des PJP est sur le terrain, il est clair qu'il n'y a
2 pas de commandement parallèle. Qui voulez-vous qu'il y ait d'ailleurs à
3 venir s'ingérer dans ce qu'il fait ?
4 Les moyens de communication nécessaires et indispensables pour commander
5 des unités n'étaient pas à la disposition du QG, en a témoigné notamment un
6 témoin de la Défense, M. Deretic, pour ce qui est des transmissions. Et
7 cela se rapporte notamment à l'année 1999, année dans laquelle le QG
8 n'avait aucun moyen de transmission au Kosovo-Metohija, si ce n'est les
9 estafettes. Il n'était pas possible de commander les unités par estafette.
10 Il fallait qu'il y ait des moyens de transmission pour maintenir la
11 communication avec les gens sur le terrain. Donc quand bien même
12 l'auraient-ils voulu - et ils n'ont pas voulu - et quand bien même ils en
13 avaient eu les attributions - or, ce n'était pas le cas - les membres du QG
14 n'auraient pas pu commander les unités de combat du MUP.
15 Nous avons communiqué au Tribunal et au Procureur tous les aperçus
16 journaliers des événements rédigés par le QG du MUP, le tout à partir de
17 juillet 1998 jusqu'au 20 juin 1999. Je m'excuse, jusqu'au 10 juin 1999. Ce
18 ne sont pas toutes les pièces à conviction dans l'affaire, mais il est aisé
19 de les vérifier, ça se trouve entre les mains du Procureur autant qu'entre
20 les mains des Juges de la Chambre. Nous affirmons, la Défense de M. Lukic
21 affirme que dans aucune de ces pièces il n'y a des rapports de la part des
22 PJP concernant les opérations de combat, pas un seul. Bien sûr, tout ceci
23 est valable pour les rapports au quotidien qui font partie du dossier de
24 l'affaire.
25 La décision portant création de ce QG n'a été mise en œuvre ni dans la
26 partie planification, orientation et réunification des activités des unités
27 organisationnelles du MUP au Kosovo-Metohija. Par unités
28 organisationnelles, on parle des SUP et des postes de police frontaliers.
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1 Dans la présentation de nos éléments de preuve, nous avons montré comment
2 la planification se faisait, comment le commandement se faisait et comment
3 les rapports étaient présentés au sein du MUP, et de ce fait, nous l'avons
4 fait pour le niveau des SUP au Kosovo-Metohija et il est clair que ce QG
5 n'intervient dans aucun élément du commandement ou du contrôle dans les
6 activités du MUP ou des SUP et des unités organisationnelles.
7 Le seul champ où il intervient est le domaine des informations. Vous
8 n'allez nulle part le retrouver, si ce n'est dans le cadre des
9 informations. On voit que ça vient du haut vers le bas, du siège du
10 ministère vers le bas. Et en parallèle, les SUP font remonter l'information
11 du bas vers le bas, c'est-à-dire en provenance des secrétariats aux
12 affaires intérieures, pour aller vers le siège du ministère. On le voit
13 dans la pièce à conviction P1044.
14 A ce sujet, le bureau du Procureur nous a présenté dans son mémoire
15 en clôture un organigramme du MUP établi par Philip Coo avant que ne soient
16 présentés les éléments de preuve dans cette affaire. Cet organigramme n'a
17 rien à voir avec la réalité et ne traduit pas la réalité des faits et ne
18 saurait être utilisé à quelque point de vue que ce soit.
19 En affirmant que le QG et, par voie de conséquence, Sreten Lukic
20 était le supérieur hiérarchique de tous les policiers, ça a été une chose
21 affirmée par le Procureur, et ce QG était censé être une espèce de
22 ministère en plus petit. Ça devait être, par exemple, l'équivalent du
23 secrétariat provincial à l'inférieur, et nous avions appris que le
24 secrétariat en question avait quelque 1 000 employés, or, nous avons vu que
25 le QG n'avait compté que dix membres, et moins même. Et le nombre des
26 policiers au Kosovo-Metohija, du temps de l'existence du secrétariat à la
27 province, était à peu près le même que le nombre des policiers en 1998 et
28 1999; c'est Filic Bozidar qui nous l'a dit.
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1 Donc la création de ce QG n'a pas interrompu les filières de
2 planification de commandement ni de présentation de rapports dans le cadre
3 du MUP. Le QG, et par voie de conséquence Sreten Lukic non plus, n'avaient
4 aucun contrôle effectif vis-à-vis de la police au Kosovo-Metohija dans la
5 période incriminée.
6 Je tiens à souligner que le ni QG ni Sreten Lukic ne pouvaient
7 entamer ni conduire de procédures disciplinaires à l'encontre de membres du
8 MUP. Ils n'avaient aucune espèce de rôle à jouer en la matière, ils ne
9 pouvaient en aucune façon participer, ni Sreten Lukic ni le QG, à ces
10 activités, ni en matière disciplinaire, ni en matière d'infraction de
11 simples polices au Kosovo-Metohija. Il y a beaucoup de documents qui
12 l'illustrent : le 6D464, le 6D1339, le 6D1340, le 6D1343, le 6D1344, le
13 6D1345, le 6D1346, et cetera. Il y a bon nombre de documents qui parlent
14 des aspects disciplinaires de simples polices et en matière pénale.
15 Alors ce domaine se trouve être réglementé dans le détail par la
16 réglementation en vigueur. On ne saurait accepter les allégations du bureau
17 du Procureur qui indiquent que Sreten Lukic était un général et il a
18 certainement dû avoir de l'influence. En matière de police, il n'y a pas
19 certainement dû y avoir. On sait qui fait quoi. On ne peut pas avoir
20 certainement de l'influence ou certainement ne pas exercer de l'influence.
21 Même le témoin de l'Accusation, Cvetic, a confirmé que le QG du MUP n'avait
22 rien à voir avec ces agissements et il n'avait même pas à en être informé.
23 Ça, c'est dit en page du compte rendu d'audience, 8 152. Ce document,
24 relatif au QG et de Sreten Lukic, montre qu'il n'y a pas de contrôle
25 effectif d'exercer par le QG. Quand bien même, tout le reste serait bon
26 quand il pouvait tout avoir en main, s'il n'avait pas la possibilité de
27 punir, s'il n'avait pas la possibilité d'entamer une procédure en matière
28 de sanctions, ils n'ont pas pu avoir de contrôle effectif.
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1 Pour continuer, le QG ni Sreten Lukic ne pouvaient ni nommer ni révoquer
2 quelque policier que ce soit au Kosovo-Metohija, pas un seul de ces
3 policiers. Nous l'avons déjà indiqué dans notre mémoire en clôture aux
4 paragraphes 675 à 685. Qui plus est, le QG n'est pas une unité
5 organisationnelle du MUP. Il n'a pas les attributions et les droits qui
6 sont ceux d'une unité organisationnelle. OUP, c'est une cellule de base du
7 MUP, et le QG n'avait pas même les attributions de cette OUP.
8 Au cours de la présentation des éléments dans ce procès, on a vu
9 quelques PV de réunions qui se sont tenues au QG du MUP. C'est bien ce qui
10 est dit. Ce ne sont pas des réunions du QG. Le seul PV qui provient d'une
11 réunion du QG est la pièce P3120, datée du 23 juillet 1998. Ces PV-ci, qui
12 sont des PV de réunions qui se sont tenues au siège du QG, sont des
13 réunions qui se sont tenues une fois par mois, comme d'ailleurs nous le
14 fait remarquer le bureau du Procureur lui-même. Alors est-ce qu'on peut
15 commander des opérations de cette façon-là, en tenant des réunions une fois
16 par mois ? Est-ce que c'est là une modalité qui permet de commander des
17 opérations ? Et c'est ce que nous dit le bureau du Procureur au paragraphe
18 214 de leur mémoire en clôture.
19 A l'occasion de toutes ces réunions de 1999 pendant la guerre, il y a
20 la présence d'Obrad Stevanovic. Se trouvant au Kosovo-Metohija, il avait
21 tous les pleins pouvoirs du ministre en sa qualité de ministre adjoint.
22 C'est comme si le ministre était personnellement présent. Pour ce qui est
23 des questions liées aux affaires de la police, cela a été présenté par des
24 éléments de preuve. Le Procureur n'a présenté aucun témoin pour confirmer
25 ce qu'ils ont allégué, pas même Babovic. Ils ont contesté la crédibilité de
26 notre expert parce qu'il n'a pas dans son étude vaqué à l'étude des
27 activités de la police du Kosovo.
28 Mais personne ne l'a fait. Il n'existait pas une police du Kosovo, il
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1 n'existait pas une République du Kosovo. Il y avait la police de la
2 République de Serbie. En 1998 et 1999, il n'y avait pas une République du
3 Kosovo, et personne ne s'en est occupé parce que ça n'existait tout
4 simplement pas.
5 Je voudrais maintenant parler de l'importance du rôle de Sreten
6 Lukic. Bon nombre de gens sont venus témoigner sur ce sujet-là lors de ce
7 procès. S'il y avait des gens qui venaient d'ailleurs pour observer ce que
8 faisait Sreten Lukic, tout dépendait du domaine observé. Si on observait
9 dans le domaine des échanges d'informations et de l'envoi des informations,
10 il avait de l'importance. C'était son travail que de connaître la situation
11 sécuritaire au Kosovo. En 1998, il envoyait des informations en retour à
12 l'intention des secrétariats à l'Intérieur, des SUP, et il envoyait des
13 informations au siège à Belgrade aussi bien. Une fois que la guerre a
14 éclaté, ça n'a pu être fait, donc on n'a plus envoyé que des informations
15 vers le siège de Belgrade.
16 Alors si les observateurs intéressés l'avaient rencontré à un moment
17 où il fallait prendre des décisions, là, l'impression c'était que ses
18 fonctions n'avaient aucun poids. Aleksandar Vasiljevic, un témoin de
19 l'Accusation, vous a dit ici que c'était le neuvième trou d'une flûte, le
20 dernier des trous d'une flûte, et c'était son rôle à lui pendant la guerre.
21 Pendant la même période, le bureau du Procureur dit que c'était le plus
22 haut gradé des policiers au Kosovo-Metohija. Vasiljevic est venu témoigner
23 au sujet du 1er juin 1999. Par la suite, l'Accusation a affirmé que c'était
24 le plus haut gradé au Kosovo-Metohija.
25 Obrad Stevanovic, lorsqu'il s'est déplacé au Kosovo-Metohija ou
26 quelque autre haut responsable du siège du ministère, par exemple, Dragan
27 Ilic, un général, le chef de la police criminelle, par exemple, c'était lui
28 le bon Dieu en personne. C'était eux qui décidaient de ce qu'on devait
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1 faire. On n'allait pas demander à Sreten Lukic ce qu'il fallait faire. On
2 demandait à Sreten Lukic de présenter ses rapports, mais eux ne
3 présentaient pas de rapport. Eux -- lui n'avait pas le droit de demander ou
4 d'exiger des rapports de leur part. Le général Ojdanic, en sa qualité de
5 chef d'état-major du commandement Suprême, le décrit comme étant un
6 adjudant en plein milieu de la guerre, à savoir le 11 avril 1999. Il s'agit
7 de la pièce à conviction 3D1125, page 75.
8 Sakic affirme que Protic lui aurait dit que Lukic ne lui avait pas
9 attribué d'appartement lorsqu'il était chef du département de la sécurité
10 publique et qu'avant cela il était un dixième violon, compte rendu
11 d'audience T22 156. Après la guerre, Sreten Lukic se trouve être affecté à
12 un poste où l'on avait prévu un grade de colonel, et lui, à l'époque, il se
13 trouvait être général lieutenant-colonel. Alors le général Lukic n'était
14 pas présent aux réunions. On le voit à la page du compte rendu, 8 378.
15 Le Juge Bonomy a demandé : "Est-ce qu'il était présent à l'une
16 quelconque de ces réunions ?"
17 Le témoin : "Je ne m'en souviens pas. Au meilleur de mes
18 connaissances, je ne m'en souviens pas."
19 L'accord et les avenants sont signés par Djordjevic et Byrnes, au sujet de
20 ce qui se rapportait uniquement au Kosovo-Metohija. Cet avenant ne se
21 rapportait qu'au Kosovo-Metohija, pas à la Serbie entière. On verra qu'aux
22 réunions on informe Gajic séparément. Si c'était un subordonné, pourquoi
23 Gajic présenterait-il des rapports en sautant Lukic ? Il serait normal de
24 voir Lukic présenter des rapports pour les deux. Abrahams n'écrit pas à
25 Lukic au sujet des crimes prétendument commis au Kosovo-Metohija en 1998.
26 Donc si on se penche sur la filière des décisions et du commandement, il
27 n'y a ni QG, ni Lukic qui intervienne.
28 On en vient maintenant au fait de savoir pourquoi ce nouveau
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1 gouvernement a décidé de placer dans ses rangs en sa qualité de chef du
2 secteur de la sûreté publique, le dénommé Sreten Lukic, et c'est Zivkovic,
3 ex-premier ministre qui en a témoigné. Il a expliqué quels étaient les
4 renseignements qui avaient été exigés tant de la part des agences de
5 renseignements nationales que étrangères.
6 Le bureau du Procureur tente d'établir des références valables pour
7 l'année 1998 et 1999, pour prouver ce qui s'était passé en 1998 devait
8 forcément se passer en 1999. Nous, nous disons ou nous établissons que ceci
9 n'est pas vrai et les éléments de preuve qui étaient les nôtres l'ont
10 prouvé amplement.
11 Certains des éléments qui, certes, ne peuvent pas considérer les deux
12 périodes, à savoir le 24 mars 1999 commencent les bombardements de l'OTAN,
13 chose que nous n'avons pas connue en 1998. Il n'y avait pas de guerre.
14 L'état de guerre a été proclamé, ce qui présente des spécificités telles la
15 mobilisation et le reste, et ce n'est pas la même chose. Il ne s'agit pas
16 de parler de la même situation. Entrent en vigueur des lois et des arrêtés
17 qui n'existaient pas en temps de paix et qui ont été tout à fait chose
18 normale en état de guerre. Pour ce qui est des effectifs de l'UCK, ça
19 accroît de 18 000 et au-delà, et commence la mobilisation forcée. En 1999,
20 l'UCK était mieux organisée, chose M. Byrnes a très bien travaillé. C'est
21 lui qui a travaillé en faveur de l'organisation de l'UCK, pour mieux la
22 doter en armes, chose faite pendant que justement se trouvait la Mission de
23 vérification de Kosovo. L'UCK a pris des territoires et se préparait à
24 lancer des offensives au printemps et pour coopérer avec l'OTAN. Nous en
25 avons entendu amplement parler au cours de cette affaire. Nous avons
26 entendu dire qu'ils avaient coopéré, qu'ils ont servis de localisateurs à
27 l'OTAN. Nous avons pu voir de quelle façon, en Règlement 70 des documents
28 qui ont été présentés, ils les ont informés à l'OTAN, notamment sur la
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1 précision des tirs des bombardements.
2 En 1999, le terrorisme urbain a été intensifié. Faudrait-il remarquer
3 que l'OTAN n'était pas sans bombarder des convois et des colonnes de civils
4 qui rentraient chez eux, il s'agit de Korisa et de Bistrazin. Aucune
5 colonne n'a été bombardée lorsqu'il y avait des civils qui quittent le
6 pays. Aucun pont, aucune route, aucun chemin de fer n'a été bombardé
7 lorsqu'il s'agit évidemment de parler d'en direction de Macédoine ou de
8 l'Albanie en direction de Kosovo-Metojiha.
9 Maintenant, très brièvement, pour ce qui est de l'engagement du MUP,
10 de son affectation au cours de l'année 1998, d'abord. Etant donné que l'UCK
11 en 1998 s'était lancée à des exactions des plus brutales, meurtres, rapts,
12 et cetera, le MUP de la Serbie avait pour tâche d'après la loi pour prendre
13 des mesures pour réprimer ces crimes. Le MUP s'y est vu obliger par la Loi
14 sur la procédure criminelle, par la Loi sur les ministères et par la Loi
15 sur les affaires intérieures, de même que de nombreux autres et actes
16 accompagnants. Pour ce qui est de l'engagement, l'affectation du MUP, il ne
17 fallait pas avoir une décision à part, spéciale, surtout pas de la part du
18 président de la République fédérale de Yougoslavie, Slobodan Milosevic.
19 Suivant la loi que le MUP s'active, en tant que dans son ensemble, chaque
20 individu sait ce qui lui convient de faire. Chaque individu n'a besoin
21 d'ordre ni de décision de qui que ce soit.
22 Lorsqu'il s'agit de parler de l'engagement des terroristes et lorsque
23 dans leur ensemble les terroristes ont dépassé l'engagement du MUP pour
24 protéger les citoyens, la direction d'Etat de la République fédérale de
25 Yougoslavie a décidé pour faire entrer dans les actions l'armée de
26 Yougoslavie. Cela a été fait en 1998. Avant cela, la direction de l'Etat a
27 pris une décision concernant la mise en application d'un plan. Le plan
28 concernant l'armée, sa réalisation, la réalisation du plan a été entamée
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1 par des actions particulières. Répétons une fois de plus, jamais ni en 1998
2 ni en 1999 l'état-major du MUP au Kosovo-Metojiha n'a été à la base de tel
3 plan, encore qu'on en parle lorsqu'on parle de la fondation de tel plan, de
4 l'établissement de tel plan en date du 16 juin 1998.
5 Maintenant, au sujet de la crédibilité des témoins. Nous avons pu
6 voir que le bureau du Procureur reproche au conseil de la Défense quant à
7 la crédibilité des témoins cités à la barre, surtout parce que ces derniers
8 ont été participants, partie prenante, et les conseils de la Défense ont
9 voulu notamment citer à la barre les gens qui ont pris part à des
10 événements, qui ont d'une première main tout ce qu'il convient de dire en
11 déposition. S'agit-il de dire que sont crédibles uniquement des témoins qui
12 n'auraient de connaissance que d'une seconde main ? C'est ainsi qu'on
13 devrait conclure d'après le bureau du Procureur. Le Procureur a eu
14 l'occasion d'interroger chacun de nos témoins pour contester la crédibilité
15 et la véracité de leur déposition. Nous avons pu savoir et nous avons vu
16 que le bureau du Procureur a eu moins de mal pour aboutir à des documents
17 nécessaires que le conseil de la Défense. En exemple, Cedomir Sakic, sa
18 déclaration, le conseil de la Défense voulait avoir sa déclaration, n'a pas
19 pu l'avoir. Vous savez très bien qu'à cette époque-là, s'agissait-il de
20 parler de la République fédérale de Yougoslavie, ensuite Serbie-et-
21 Monténégro. Nous avons eu énormément de problèmes auprès du MUP de Serbie.
22 Nous avons dû combattre pour nous assurer des documents. A la fin, lorsque
23 nous avons pu y parvenir, quelqu'un qui s'était chargé en notre nom a été
24 puni et l'affaire a été menée par le ministre de l'Intérieur. Ces derniers
25 temps, la situation a été améliorée, nous devons le reconnaître. Mais ceci
26 n'a pas été sans nous faire prendre de court par l'ensemble des travaux
27 lorsqu'il a fallu avoir des éléments de preuve dont nous avions besoin.
28 Je voudrais dire brièvement qu'Adamovic a été mal cité, cité avec
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1 erreur d'ailleurs dans le mémoire en clôture, dans le paragraphe 215 du
2 mémoire en clôture du Procureur. Lui ne parle pas de l'état-major, mais il
3 parle d'une réunion où on devait coopérer selon un plan à cinq étapes avec
4 des membres de l'armée. D'ailleurs, ce n'est pas au siège du MUP que la
5 réunion a eu lieu, ce qu'on peut voir dans la déposition d'Adamovic.
6 Maintenant, essayons de parler brièvement de certains témoins cités à
7 la barre et qui étaient des Albanais. Souvent on a eu l'impression que les
8 témoins albanais cités à la barre, prétendues victimes de crimes, ont été
9 des êtres, des gens instruits. A titre d'exemple, lorsque eux, ils
10 voulaient voir des brassards portés par des membres du MUP, des forces
11 armées, déjà au début du bombardement, à savoir du 24 mars jusqu'à la mi-
12 avril. Les témoins présentaient on peut voir que les membres du MUP ne
13 portaient pas de brassards avant le 15 avril 1999, pour parler de l'année
14 1999 dans son ensemble. Des témoins albanais ont fait la description des
15 brassards qu'on leur montrait sur les photos de la police de 1998, la chose
16 que l'on peut voir le mieux, le fait est que les policiers, quant à eux,
17 affichaient des brassards blancs, évidemment pour se faire remarquer, tout
18 simplement. En 1999, la police ne portait pas de brassards blancs. Avant le
19 15 avril 1999, la police ne portait aucun brassard pour marquage, et en
20 1999, surtout pas de brassards blancs. Par conséquent, chaque témoin qui,
21 lui, trouve avoir vu un policier portant un brassard blanc ne dit pas la
22 vérité, ne disait pas la vérité. Il a été instrumentalisé, instruit. C'est
23 sur la base des photos datant de 1998.
24 De même, nous avons pu nous rendre compte du fait que tous les
25 témoins d'origine albanaise étaient prêts à nier et ont nié la présence de
26 l'UCK dans des villages, dans leur campagne, ce qui est contraire à tous
27 les éléments de preuve que nous avons produits, rapports de combat,
28 déposition de Zyrapi, et cetera. Nous pouvons voir que des actions ont été
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1 menées uniquement dans les villages où l'UCK était présente, dans les
2 territoires où l'UCK était présente. Bien entendu, comme le général
3 Lazarevic nous l'a bien expliqué, il s'agissait de la mise en oeuvre de la
4 tactique des deux villages, mais on n'engageait pas d'action avant que,
5 pour autant, l'UCK ne lance une campagne. Nous avons entendu parler du
6 territoire de Gnjilane, c'est le témoin Gavranic qui a déposé. Il y avait
7 l'UCK qui n'avait attaqué ni la police, ni l'armée, ni des civils, et je
8 dirais que seulement en territoires du bord et des crêtes il y a eu des
9 attaques dans deux municipalités, même si on en savait long parce que nous
10 avons eu la possibilité de voir qu'il y avait des renseignements parce que,
11 tout simplement, la police présente sur les lieux suffisait pour qu'on ne
12 lance pas des campagnes quelconques de la part de l'UCK. Bien sûr, il y a
13 eu une grande peur qui régnait auprès des témoins. Tous, ils n'étaient pas
14 dans une situation de ne pas dire la vérité parce que quelqu'un, tout
15 simplement, le leur avait demandé ou qu'ils étaient peut-être recrutés par
16 quelqu'un. Nous savons très bien qu'ils ont eu peur pour leur propre
17 existence. Nous avons très bien vu comment se présentait la situation
18 décrite par Shaban Fazliu qui c'était qui a régné dans le Kosovo. L'UCK
19 aujourd'hui règne dans le Kosovo et bien sûr le témoin qui est venu ici ne
20 devrait pouvoir dire ce qu'il devait savoir et ce qu'il savait.
21 Très brièvement au sujet de la crédibilité des témoins, permettez-moi de
22 faire quelques commentaires au sujet de la déposition de Protic et de
23 Sakic. Protic est venu, d'après le conseil de la Défense qui est le nôtre,
24 pour mentir de façon effrontée et éhontée. Le Procureur dit que ce qu'il
25 avançait était pour la plupart de la vérité. Le conseil de la Défense ne
26 conteste pas le fait qu'il s'occupait du transport des corps, mais ceci
27 n'est pas d'ordre crucial pour cette affaire. Ce qui est d'importance
28 cruciale pour cette affaire est de savoir quels étaient les contacts qu'il
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1 avait avec Sreten Lukic. Il a été cité à la barre pour incriminer Sreten
2 Lukic et non pas pour nous raconter la façon dont les corps ont été
3 transférés. D'autres témoins nous en ont parlé, d'autres qui ont déterrés
4 ces corps, il n'y a rien à contester. Mais ce qui est contestable, c'est de
5 savoir quels étaient ses contacts avec Sreten Lukic.
6 Y a-t-il quelqu'un qui dans ce prétoire sait à combien de reprises il a pu
7 appeler Sreten Lukic d'après lui ou est-ce qu'il a pu entendre la voix de
8 Sreten Lukic ? L'a-t-il appelé une fois, deux fois ou trois fois ? Non,
9 personne ne le sait parce que tout dépend de la déposition qui est la
10 sienne et dont nous faisons lecture.
11 Mon confrère Stamp, à la page du compte rendu d'audience 11 310, dit à
12 Protic : "A trois reprises vous avez pu déposer à Belgrade, on vous a remis
13 toutes vos dépositions, vous avez eu l'occasion de les relire et de vous
14 refamiliariser avec, n'est-ce pas ?
15 "Réponse : Oui, après chaque déposition, on m'avait remis le texte de ma
16 déposition," Protic a-t-il dit.
17 Le Procureur lui a demandé si toutes les fois il avait toujours dit la
18 vérité au mieux de ses souvenirs.
19 Protic avait dit : "Oui, au mieux de mes souvenirs je le disais."
20 Ensuite voilà une toute première catastrophe ouverte par Protic. Mon
21 confrère Stamp lui pose la question de savoir : "Comment Sreten Lukic vous
22 a-t-il adressé la parole d'après la voix dont vous vous souvenez ?" Et
23 c'est là où il y a le quiproquo qui s'établit parce que Protic disait que
24 Sreten Lukic l'abordait en l'appelant par son prénom, Bozidar, ici en
25 réponse à une question de mon confrère Stamp à trois ou quatre reprises,
26 et, lui, prétendait que Sreten Lukic lui adressait la parole en l'appelant
27 par son nom de famille, Protic. Chose que nous constatons à la page de
28 compte rendu d'audience 11 311, 11 312 et 11 313.
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1 Le Président Juge Bonomy insiste que mon confrère Stamp lui repose la
2 question, celui-ci le fait, et une fois de plus veut obtenir le fait comme
3 quoi Sreten Lukic a dû adresser la parole en l'appelant par son prénom.
4 Mais l'autre persiste comme quoi Sreten lui adressait toujours la parole en
5 l'appelant par son nom de famille.
6 D'après Protic lui-même, il se dirige vers l'état-major pour justement
7 contacter l'état-major, d'après sa déposition à lui. Trois fois de suite,
8 par hasard, il obtient le numéro de téléphone qui est en ligne directe avec
9 Belgrade. Dans une masse de numéros de téléphone connecté au local à partir
10 duquel il faut pouvoir contacter Belgrade, trois fois de suite sans qu'il y
11 ait qui que ce soit qui lui prête main-forte, il a accès au téléphone qu'il
12 est capable de lui adresser un ligne directe avec Belgrade. Or, le témoin
13 Deretic nous a expliqué combien de lignes de téléphone existaient en temps
14 de guerre avec Belgrade, notamment. Pour analyser les éléments de preuve,
15 Protic pouvait tout simplement entrer dans un bureau, pouvait composer le
16 numéro qu'il voulait et justement sur le téléphone dans le bureau où se
17 trouvait Sreten Lukic.
18 Ensuite notre confrère Stamp, il s'agit de la page du compte rendu
19 d'audience 11 309, lui fait savoir qu'il devait appeler Sreten Lukic à
20 trois reprises lors de ses trois venues au Kosovo, donc toutes les fois il
21 appelle Sreten Lukic. Une première fois, pour expliquer parce que contre-
22 interrogé, il disait qu'il ne savait très exactement si c'était le numéro
23 de Belgrade qu'il composait. Une seconde fois, il expliquait les
24 circonstances dans lesquelles il pouvait composer le numéro, comment
25 entendre son interlocuteur et comment se présentait la voix qu'il pouvait
26 entendre. Et ensuite, contre-interrogé, il ne savait pas comment se nommait
27 la ville dans laquelle il voulait établir une liaison par téléphone.
28 Et maintenant en prenant un autre exemple pour illustrer, il explique pour
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1 dire que telle ou telle personne m'a dit de me rendre vers le parking
2 derrière Rilindija, que là il y avait des camions en stationnement et que
3 je devais rencontrer là-bas quelqu'un. Celui-là que je devais rencontrer
4 devait me mander quel devait être le camion dont je devais me charger. Or,
5 là-bas il y a de quatre à cinq camions stationnés sur le parking et que je
6 ne devais prendre qu'un seul camion. Il s'agit de la page du compte rendu
7 d'audience 11 327.
8 A la page 11 328 du compte rendu d'audience, mon confrère Stamp lui pose la
9 question : "A cette occasion-là, vous vous êtes saisi de ces corps pour les
10 emmener au 13 Mai, centre de police de Batajnica. Pourquoi avez-vous pris
11 ces corps ?"
12 La réponse a été donné : "Parce qu'on m'a dit de le faire."
13 Mon collègue Stamp insiste : "Par qui ?"
14 Protic qui répond : "C'était la voix de la personne avec laquelle j'ai
15 parlé au téléphone."
16 Contre-interrogé, Protic dit qu'une troisième fois il n'avait appelé
17 personne. Donc toutes ces explications données par lui n'étaient que
18 fallacieuses, construites de toutes pièces. Il ne disait pas la vérité.
19 Dans ses déclarations, Protic établit, pour parler de l'officier de
20 liaison, que c'était un homme qui a été dans un véhicule couleur cramoisi.
21 Ici, il a réfuté dans ce prétoire pour dire qu'il n'a jamais vu cet homme-
22 là, qu'il n'a jamais vu son visage et que c'était à une occasion seulement,
23 lorsqu'il se rendait à Janjevo qu'il a été attendu par cette personne en
24 question. Ce que Protic avance ensuite c'est que pendant six mois il a été
25 le chauffeur personnel de Sreten Lukic, donc son chauffeur à lui pendant
26 six mois, et c'est ce qu'il tient à dire ici. A la page du compte rendu
27 d'audience 11 329.
28 Il dit : "J'étais capable de reconnaître sa voix parce que pendant six mois
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1 j'ai été son chauffeur."
2 Plus tard, page du compte rendu d'audience 11 330, une fois de plus il dit
3 qu'il était le chauffeur de Lukic. Contre-interrogé, page du compte rendu
4 d'audience 11 377, il reconnaît n'avoir pas été le chauffeur de Sreten mais
5 celui d'Obrad Stevanovic et que de temps en temps, sporadiquement, prenait-
6 il à bord de son véhicule Sreten Lukic également, chose qu'il va reprendre,
7 dans le compte rendu d'audience nous le lisons dans les pages 11 378 et 11
8 379, disant que Sreten Lukic avait son chauffeur à lui, c'est une autre
9 personne qu'il s'agissait, et une fois de plus il confirme n'avoir jamais
10 été le chauffeur de Sreten Lukic après le mois de juillet 1999, page du
11 compte rendu d'audience 11 380. Par conséquent, il ne pouvait pas parler
12 avec Sreten après le moment lorsqu'il a quitté le Kosovo en 1990.
13 Donc neuf ans se sont déroulés depuis le moment où il a pu parler une
14 dernière fois à Sreten Lukic alors qu'avant disait-on s'agissait-il encore
15 de quelques reprises seulement.
16 Il faudrait dire que Protic était quelqu'un qui a emménagé de façon
17 illicite dans un appartement, de façon illicite il a fait le braquage d'un
18 appartement pour y emménager et il demande à Sreten Lukic d'avaliser ce
19 braquage, ce dernier, bien sûr, a refusé de le faire. Sreten Lukic refuse
20 tout contact avec lui lorsque celui-ci voulait avoir des instructions ou
21 des conseils sur ce qu'il lui fallait dire en déposition, notamment selon
22 les allégations de l'acte d'accusation. Et après il reproche à Sreten de
23 l'avoir affecté vers le sud de la Serbie et de l'avoir mis à la retraite.
24 Probablement, Sreten a dû être coupable et s'il devait cacher quoi que ce
25 soit, Sreten devait surtout faire quelque chose en sa faveur et surtout pas
26 faire quelque chose en sa défaveur ou contre sa volonté. Il y avait ensuite
27 tout un débat qui s'était levé pour savoir s'il disait la vérité à
28 Belgrade. Répondant aux questions du Président Bonomy, il a dit : "Oui, je
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1 disais la vérité à Belgrade," pour changer ensuite pour dire : "Non, ce
2 n'est pas à Belgrade que je disais la vérité, c'est ici que je l'ai fait."
3 Pour ce qui est des circonstances dans lesquelles s'est déroulée la
4 déposition pour ce qui est de la véracité de la déposition de Protic,
5 plusieurs témoins ont été cités à la barre, un dénommé Sakic, Aleksandar
6 Kostic, quelqu'un qui coopère régulièrement presque avec le bureau du
7 Procureur de ce Tribunal, et nous avons cité à la barre également Dragan
8 Furdulovic. Il est clair que tous ont exprimé leur doute quant à la
9 véracité de la déposition de Protic.
10 Le Témoin Sakic qui a pris part aux événements a présenté un tableau tout à
11 fait différent par rapport à ce que Protic disait, notamment lors de la
12 période critique, je dirais fatidique, lorsqu'il s'agit de savoir qui et
13 comment Protic a appelé par téléphone, pour dire qu'il ne pouvait jamais se
14 servir d'un téléphone fixe, qu'il ne pouvait se servir que d'un portable,
15 qu'il n'était pas sûr qu'il ne se séparait pas de lui et qu'ils se
16 rencontraient à Pristina au centre-ville, et cetera.
17 Pour dire ensuite que le bureau du Procureur avait la possession de la
18 déclaration de Sakic faite aux organes de Serbie, cette déclaration n'a
19 jamais été possédée ni par le général Lukic ni par le conseil de la
20 Défense, cela témoigne de la façon dont il traite M. Lukic. A une de mes
21 questions, Sakic le prouvera, il s'agit de la pièce du compte rendu
22 d'audience 22 161, parce que le témoin Protic s'est rendu compte du fait
23 qu'il a déposé ici comme il a déposé bien avant à Belgrade.
24 Pour ce qui est du transfert des corps du Kosovo-Metohija, il n'a pas été
25 prouvé par le Procureur que l'état-major ou Sreten Lukic avait quoi que ce
26 soit à faire avec. Bien entendu, nous faudra-t-il exclure Protic. Et je
27 crois que nous avons suffisamment d'éléments pour ne pas demander à cette
28 Chambre de première instance de le croire et plutôt de ne pas le croire.
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1 Nous avons ensuite au sujet des corps entendu la déposition de Gvozden
2 Gagic et nous avons entendu et vu pas mal de documents là-dessus. Nous
3 avons pu voir que le général Ilic à cette époque-là s'était rendu au
4 Kosovo-Metohija du 23 mai jusqu'au 1er juin 1999, même (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 Pour ce qui est de la fin même de la partie de la parole qui m'est
9 impartie, je devais dire que nous avons fait une omission, nous avons
10 oublié de traiter du point 72(C), c'est-à-dire il s'agit de la déportation
11 de Srbica et des villages environnants, si nous avons le temps je pourrai
12 vous en parler plus en détail lorsque mon confrère Ivetic aura terminé la
13 partie qui lui incombe dans la partie de notre plaidoirie. Sinon, je vous
14 remercie, et je remercie de m'avoir écouté.
15 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les
16 Juges --
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, je voudrais m'assurer de
18 bien comprendre ce à quoi fait référence Me Lukic à la fin de son
19 intervention.
20 Maître Lukic, vous dites que vous n'avez rien dit au sujet de Srbica dans
21 votre mémoire en clôture; est-ce bien exact ?
22 M. LUKIC : [interprétation] Effectivement, nous n'en avons pas parlé. Nous
23 n'avons pas évoqué cette question.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Qu'est-ce que vous essayez de nous
25 dire à ce sujet en ce moment ?
26 M. LUKIC : [interprétation] Ce que j'essaie de vous dire, je profite de
27 l'occasion qui m'est donnée pour dire que nous ne sommes pas d'accord avec
28 ce qui est affirmé au sujet de ces faits dans l'acte d'accusation.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
2 M. LUKIC : [interprétation] Et je crois cependant que la Défense de Me
3 Lazarevic a réfuté ces éléments --
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Que souhaitez-vous donc ajouter à ce
5 sujet maintenant ?
6 M. IVETIC : [interprétation] Si vous le permettez, je répondrai. Notre
7 position est la suivante. Il n'y a pas eu dans notre mémoire en clôture
8 quoi que ce soit au sujet du paragraphe 72(C), mais cela ne peut pas être
9 interprété comme une reconnaissance de notre part de la véracité de ces
10 allégations, nous les contestons, nous les réfutons à partir des éléments
11 présentés au procès.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quels arguments avez-vous présentés à
13 ce sujet ?
14 M. IVETIC : [interprétation] Si on a le temps, Me Lukic interviendra
15 brièvement à ce sujet. J'essaierai de lui laisser un peu de temps à la fin,
16 parce que moi, je vais évoquer le reste de l'affaire.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous donne donc la parole, Maître
18 Ivetic.
19 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,
20 Messieurs les Juges.
21 Je souhaite vous rappeler que ce procès est d'une grande gravité, non
22 seulement à cause des crimes qui sont d'une grande gravité, des crimes qui
23 sont allégués en l'espèce, mais également à cause du préjudice que pourrait
24 subir un accusé innocent, M. Lukic, si l'on devait ajouter foi aux
25 arguments de l'Accusation. Vu la gravité de ces éléments, je suis
26 complètement stupéfait de voir la manière dont l'Accusation a présenté sa
27 thèse en l'espèce, sans prêter attention aux détails, sans essayer de
28 présenter des choses conformément à la réalité depuis deux ans que ce
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1 procès dure.
2 Or, apparemment ce sont les meilleurs arguments que l'Accusation ait
3 pu trouver, qu'elle nous a présentés au bout de deux ans de procès.
4 D'emblée, je souhaiterais, Madame et Messieurs les Juges, vous rappeler que
5 vous avez le devoir, la responsabilité, de même que vous avez le devoir de
6 rendre la justice aux victimes, vous avez également l'obligation, le devoir
7 de protéger les droits des accusés en vous assurant que vos conclusions
8 reposeront sur des faits et non pas sur des interprétations erronées de
9 l'Accusation, non pas sur le principe de la culpabilité due aux relations
10 de l'accusé. Vous avez l'obligation de garantir le droit à la liberté et
11 d'acquitter un accusé innocent.
12 Et ceci, il faut s'en souvenir parce que de très nombreux témoins à
13 charge ont changé leur version des faits par rapport à ce qu'ils figuraient
14 dans leur déclaration écrite. Je vous demande de vous rappeler ce qu'a dit
15 le Juge Bonomy le 31 août 2006. Il a dit que ce serait une erreur
16 judiciaire considérable si les déclarations écrites des témoins à charge
17 étaient présentées sans qu'ils soient contre-interrogés ou confrontés à
18 leur déclaration. Vous avez dit que vous frémissiez à l'idée de ce qui
19 pourrait se passer s'il n'y avait pas contre-interrogatoire.
20 Moi, j'avance que la thèse présentée par l'Accusation en l'espèce,
21 aussi bien par écrit que oralement, c'est exactement pareil que ce que l'on
22 trouve dans la version préalable au procès des déclarations de ces témoins.
23 Donc il faut faire preuve de beaucoup de prudence en examinant ces faits.
24 Des présentations PowerPoint impressionnantes nous ont été présentées pour
25 sortir les éléments de leur contexte et embellir les allégations et les
26 interprétations erronées des faits.
27 La Chambre se souviendra du début de cette affaire. L'Accusation a
28 essayé d'introduire au dossier des éléments tout à fait douteux de
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1 l'affaire Milosevic, y compris des images d'échauffourées en Amérique
2 latine qu'on nous a présentées comme étant des images des réfugiés albanais
3 du Kosovo. Ensuite on nous a présenté des images de charniers qui
4 précédaient la période visée à l'acte d'accusation. On peut dire que le
5 Procureur a essayé d'obtenir la victoire à tout prix, même aux dépens de la
6 justice et de l'intégrité de la procédure et même si des accusés innocents
7 sont sacrifiés en chemin. Je suis convaincu que les Juges de cette Chambre
8 ne vont pas se laisser séduire par les arguments de l'Accusation et ne vont
9 pas permettre que l'intégrité du procès soit remise en cause simplement
10 pour récompenser l'Accusation.
11 Je vais commencer par évoquer quelque chose qui m'a complètement
12 choqué quand j'ai écouté le réquisitoire de l'Accusation. M. Stamp a
13 affirmé que les crimes ou les meurtres de Podujevo, par des réservistes de
14 la SAJ, c'était un des seuls exemples qu'il avait à montrer pour prouver la
15 responsabilité de Lukic en tant que supérieur hiérarchique.
16 Etant donné que nous avons un acte d'accusation en l'espèce, un acte
17 d'accusation très vaste, le seul crime dont pouvait nous parler M. Stamp
18 c'est un crime figurant dans l'acte d'accusation. Podujevo, ça ne figure
19 pas dans l'acte d'accusation, ça n'y a jamais figuré. Pourquoi est-ce qu'au
20 bout de deux ans de procès et plus longtemps encore de période de
21 préparation, pourquoi l'Accusation soulève-t-elle, utilise-t-elle contre
22 Sreten Lukic les meurtres de Podujevo qui ne peuvent être présentés en
23 l'espèce.
24 Ça ne veut rien dire tout ça, mais ça montre à quel point les
25 arguments de l'Accusation sont de mauvaise foi. L'Accusation nous cite
26 Goran Stoparic, qu'elle présente comme un initié de la police, mais
27 l'Accusation ne cite que certains extraits de ses déclarations. Elle passe
28 sous silence l'essentiel de sa déposition, ce qu'il a dit même. Pourquoi
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1 est-ce que l'Accusation ne veut pas que ceux qui nous regardent aient
2 connaissance de la totalité des faits ? Pourquoi est-ce que l'Accusation a
3 peur d'attirer l'attention de la Chambre sur ce qu'a dit Stoparic au sujet
4 de ce qui s'est passé véritablement à Podujevo, de la suite de la tragédie
5 de Podujevo ? Bien, c'est parce que la vérité les gêne et ils ne pourraient
6 pas obtenir une condamnation s'ils s'appuyaient sur ces éléments. Mais
7 nous, nous, nous devons d'évoquer la totalité de sa déposition pour révéler
8 que la thèse de l'Accusation, ce n'est pas qu'un château de cartes.
9 Stoparic, loin d'avoir reçu l'ordre de commettre des crimes contre
10 les civils, nous a expliqué que les réservistes de la SAJ à Podujevo
11 attendaient, après être descendus de leur camion, attendaient des
12 instructions, et c'est de leur propre chef qu'ils ont ouvert le feu.
13 Stoparic a confirmé que pendant tout le temps qu'il a passé au Kosovo, en
14 tant que réserviste de la SAJ, ses supérieurs ne lui ont jamais donné
15 l'ordre de tuer des civils. Page 727 du compte rendu d'audience. Stoparic a
16 ajouté que l'intervention des policiers de Podujevo a sans doute et peut-
17 être a permis d'éviter d'autres meurtres. Page 725 du compte rendu
18 d'audience.
19 Ce qui est encore plus révélateur c'est ce qu'il dit à la page 744,
20 ligne 25, à la page 745, ligne 7. Ce qui est intéressant, c'est ce que dit
21 Stoparic. On lui pose la question suivante :
22 "Question : On peut en conclure que le meurtre de ces personnes
23 n'avait rien d'intentionnel ou de planifié de la part de la SAJ ou de la
24 police d'ailleurs ?
25 "Réponse : J'ai déjà déposé à plusieurs reprises au sujet de ces
26 événements et je continue à répéter que personne n'a donné d'ordre dans ce
27 sens. Moi, je ne l'ai jamais ordonné, personne ne l'a fait. Je suis tout à
28 fait catégorique à ce sujet."
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1 Stoparic n'aurait pas pu être plus explicite quand il réfute le mythe
2 créé de toutes pièces par l'Accusation. Ces mots sont un coup fatal porté
3 aux arguments de M. Stamp contre M. Lukic au sujet de Podujevo qui ne
4 figure pas dans l'acte d'accusation et qui ne saurait véritablement être
5 présenté ici. Nous avons de nombreux éléments de preuve montrant que le MUP
6 de Podujevo a réagi très rapidement en sauvant des survivants, à soigner
7 les gens, à procéder à une enquête sur place, mais le MUP a également
8 rassemblé tous les réservistes des SAJ, pas seulement les réservistes, pour
9 les renvoyer du Kosovo. Aux paragraphes 316 à 323 de notre mémoire, nous
10 présentons certains éléments qui appuient mes dires. Je ne vais pas répéter
11 ce qui figurait là-dedans, mais je pense qu'il est utile que je mette en
12 évidence une partie de la déposition de M. Stoparic, pages 748 à 750 du
13 compte rendu d'audience.
14 Il explique comment le chef de la SAJ a commencé à les invectiver,
15 ces réservistes. Il était furieux, je cite : "Je me souviens précisément
16 des mots qu'il a dits et je peux vous les citer.
17 "Question : Je ne pense pas que ce soit nécessaire, mais vous pouvez
18 le faire si vous souhaitez que la Chambre soit informée.
19 "Réponse : Il se comportait de telle manière qu'on pouvait en
20 conclure qu'il était très préoccupé par ce qui s'était passé, et dans les
21 brèves paroles qu'il a prononcées, il a dit : On ne peut pas compter sur
22 vous, on ne peut pas travailler avec vous. Moi, j'avais l'impression qu'il
23 n'était vraiment pas très content de ce qui s'était passé.
24 "Question : Est-ce que vous aviez l'impression que cet incident constituait
25 un choc pour les autres policiers également ?
26 "Réponse : Oui, il y en avait un qui était surnommé Vuk, le loup. C'était
27 un excellent professionnel, un officier de la SAJ, et lui, il a utilisé des
28 termes encore plus durs. Il a fait sortir un des enfants pour l'amener vers
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1 l'ambulance. Aucun des membres de la SAJ, d'après ce que j'ai vu, n'était
2 content. Je pense que la plupart d'entre eux étaient horrifiés de ce qui
3 s'était passé."
4 Comment est-ce qu'on peut, en raisonnant avec un peu de logique, en déduire
5 que les meurtres de Podujevo ont été planifiés, ordonnés, planifiés donc
6 par le MUP ? Seul M. Stamp peut le faire, selon moi.
7 Stoparic lui-même a déposé que dans le bus qui revenait de Kosovo, les
8 réservistes de la SAJ ont été critiqués et que les auteurs, au bout du
9 compte, ont été arrêtés et condamnés et qu'ils n'ont pas été redéployés au
10 Kosovo. Tous les éléments présentés par l'Accusation par l'intermédiaire
11 Stoparic et Vasiljevic montrent que les réservistes de la SAJ n'ont commis
12 aucun autre crime pendant leur séjour au Kosovo.
13 Absence de pouvoir de Lukic sur les SAJ et sur leur commandant Trajkovic,
14 ça j'en parle dans mon mémoire, paragraphes 410 à 415. Je ne vais pas y
15 revenir. Mais M. Stamp, il insiste sur le fait que le jugement rendu contre
16 le principal auteur de ces crimes est arrivé beaucoup trop tard en 2003. Il
17 oublie, et ça l'arrange, les éléments fournis par de nombreux témoins au
18 sujet du fonctionnement du MUP et du système judiciaire en Serbie. Le fait
19 que le travail de la police et les responsabilités de cette police, ils
20 prenaient fin au moment où l'affaire avait été transférée au Procureur, et
21 le Procureur étant indépendant de la police, c'est lui qui ensuite était
22 responsable de l'affaire. C'est ce que nous a déclaré le Juge Danica
23 Marinkovic, page 23 469, 23 471 et 23 472 de sa déposition. C'est également
24 quelque chose qui a été conformé par Dragan Furdulovic, pages 24 744 et 24
25 749 du compte rendu d'audience.
26 Il y a quelque chose d'autre que l'Accusation passe sous silence, c'est la
27 déposition ou le témoignage selon lequel Sreten Lukic, après être devenu
28 chef du secteur de la sécurité publique et adjoint au ministre, après
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1 l'élection au pouvoir du gouvernement démocratique, il a autorisé des
2 mesures permettant aux victimes survivantes de Podujevo de venir déposer en
3 toute sécurité contre les auteurs de ces crimes, et ceci a entraîné une
4 condamnation à la peine maximale. M. Furdolovic, page 24 708 du compte
5 rendu d'audience, nous l'a dit lorsqu'il est venu déposer ici. Mais je suis
6 outré de voir que M. Stamp estime que quelqu'un qui, dans le cadre de ses
7 fonctions, aide les témoins à bénéficier de protection et à déposer devant
8 un tribunal pour obtenir la justice, que cette personne puisse être
9 considérée comme un criminel.
10 Je vais maintenant passer à une question connexe. Il y a deux tableaux --
11 enfin, il y en a plus, mais il y a deux tableaux qui m'intéressent plus
12 particulièrement et que je tire du mémoire en clôture de l'Accusation et du
13 réquisitoire. Dans l'annexe E, nous avons l'organigramme des forces du MUP
14 au Kosovo à l'époque de la période couverte par l'acte d'accusation. Rien
15 ne nous indique la source de ces informations, mais on sait que c'est
16 exactement les informations dont disposait l'Accusation avant le procès, et
17 ceci vient du capitaine Philip Coo, un ancien officier de l'armée
18 canadienne, l'expert maison du bureau du Procureur, qui a été déchu de sa
19 qualité d'expert par le Tribunal et qui n'a jamais été présenté comme un
20 expert sur le MUP. C'est absolument stupéfiant de voir comment le Procureur
21 essaie de recycler des éléments qui n'ont jamais été acceptés ou même
22 présentés pendant le procès.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous faites référence à quelle annexe
24 ?
25 M. IVETIC : [interprétation] Annexe du bureau du Procureur, annexe E, Qui
26 nous présente la structure du MUP au Kosovo. Je crois qu'ils ont présenté
27 la chose pendant le réquisitoire.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais c'est pas une pièce à
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1 conviction ?
2 M. IVETIC : [aucune interprétation]
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc c'est simplement un élément
4 destiné à guider la Chambre de première instance ?
5 M. IVETIC : [interprétation] Oui, enfin, plutôt à l'induire en erreur.
6 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
7 M. IVETIC : [aucune interprétation]
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, un instant, un instant. Peut-être
9 devriez-vous réfléchir à deux fois à ce que vous venez de dire. Non pas
10 l'impact, mais j'espère que vous n'avancez pas que c'est un impact
11 délibéré.
12 M. IVETIC : [interprétation] Non, c'est une possibilité.
13 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
14 M. IVETIC : [interprétation] D'autre part, on a l'annexe C, l'annexe C dont
15 le Procureur nous parle au paragraphe 7 de son mémoire. C'est censé être un
16 tableau des personnes décédées et de la preuve de ces personnes décédées.
17 Moi j'estime que ce titre induit en erreur celui qui lit le document. Parce
18 que si on regarde le dossier, on voit qu'il n'y a aucune preuve dans le
19 dossier montrant que ces personnes sont décédées, il n'y a aucune preuve
20 relative au mode de décès de ces personnes.
21 Mme Kravetz, dans son réquisitoire, a parlé de Mala Krusa. M. Stamp, lui,
22 n'a pas parlé -- ou plutôt, non, il n'a pas parlé de Mala Krusa, pas plus
23 que M. Stamp. L'annexe C démontre qu'aucune des victimes figurant dans
24 l'acte d'accusation et venant de Mala Krusa n'ait finalement décédé. Il y
25 en a même une dont on sait qu'elle est vivante. Donc on ne peut rien
26 déduire de ce tableau.
27 De même, ce tableau nous montre que l'on essaie d'invoquer la
28 responsabilité des accusés pour des victimes qui ne figurent pas à l'acte
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1 d'accusation. Il y en a 15 pour ce qui est de Mala Krusa qui ne figurent
2 pas à l'acte d'accusation et même chose pour d'autres lieux de crimes.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que le moment serait
4 bienvenu pour nous interrompre ?
5 M. IVETIC : [interprétation] Oui, tout à fait.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faut que vous compreniez bien
7 une chose : nous sommes tout à fait conscients de la difficulté qui résulte
8 de l'exercice consistant à déterminer la mort et la cause du décès d'un
9 grand nombre de personnes. Il y a peut-être donc des aspects, des éléments
10 du tableau que vous mentionnez qui ne fournissent pas tous les détails
11 qu'on pourrait souhaiter dans l'idéal. La Chambre de première instance est
12 très consciente des détails dont elle aura besoin pour établir que des
13 personnes ont été tuées et que c'est au-delà de tout doute raisonnable.
14 Mais d'autre part, Maître Ivetic, le fait que des personnes aient été tuées
15 sans que soit établi forcément qui elles sont, ça peut constituer un des
16 éléments d'une insertion de portée générale indiquant que le meurtre, ça a
17 été un des instruments permettant la réalisation de l'entreprise criminelle
18 commune. Donc quand dans ce tableau on trouve des victimes ne figurant pas
19 dans l'acte d'accusation, ce tableau, malgré tout, peut nous aider, peut
20 nous aider pour voir si oui ou non il y a des gens qui ont été tués, des
21 gens qui n'étaient forcément pas nommés dans une des listes de victimes
22 individuelles.
23 Enfin, tout dépend de vous, ça dépend du temps que vous souhaitez
24 passer sur ce sujet, mais j'imagine que pour vous c'est très difficile
25 d'aller plus loin que des déclarations de portée générale qui ont une
26 certaine valeur, c'est indéniable.
27 Nous allons reprendre à 16 heures 10.
28 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.
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1 --- L'audience est reprise à 16 heures 11.
2 M. LUKIC : [interprétation] Je vous suis redevable d'un certain nombre de
3 références au sujet de l'accord. L'accord qui ne fait pas partie de nos
4 preuves mais qui est mentionné dans un certain nombre de documents. Par
5 exemple, 3D559, 1D32, il s'agit de notes sténographiques d'une réunion du
6 parlement de la République de Serbie du 23 mars 1999, la veille du
7 bombardement. Il y a également la pièce 2D16, la pièce 2D241, au sujet de
8 négociations entre le ministre fédéral Jovanovic et le ministre des
9 Affaires étrangères allemand, M. Fischer, pièce P403, P605, l'audition de
10 M. Sainovic, et P560. Voilà ce que j'ai pu trouver pendant le bref temps
11 que j'ai eu à ma disposition.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
13 Maître Ivetic, je suis le dernier à souhaiter vous mettre des bâtons dans
14 les roues, mais on me fait savoir que quand vous lisez vous allez très
15 vite. Je sais que vous avez essayé de ralentir, mais je vais vous demander
16 de continuer à faire cet effort.
17 M. IVETIC : [interprétation] Oui. Je vais faire de mon mieux. Nous
18 souhaitons tous en arriver à la fin de ce procès.
19 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Ce que vous demande le Juge Bonomy,
20 c'est de vous relaxer, de vous détendre.
21 M. IVETIC : [interprétation] Je souhaiterais en terminer de mon analyse de
22 l'annexe relative aux tableaux des personnes décédées et je pense ici aux
23 propos tenus par le Juge Bonomy avant la pause qui rappelait que ces
24 tableaux sont présentés pour montrer qu'il y a des personnes qui ont été
25 tuées. Je répondrais que oui, c'est vrai, mais il y a également des
26 personnes dont les preuves montrent qu'elles n'ont pas été assassinées et
27 qu'elles sont mortes de cause naturelle. Comme Agim Hyseni de Vuctirn. Il y
28 a des personnes qui souffraient de troubles respiratoires et d'autres
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1 personnes pour qui on n'a pas pu déterminer la cause du décès. Je vous
2 demande d'examiner avec beaucoup d'attention ce tableau pour montrer
3 exactement ce que ça prouve.
4 Pour ce qui concerne Vucitrn, les témoins à charge n'ont pas parlé du
5 massacre de civils dont l'Accusation ne cesse de nous parler. Ils ont parlé
6 d'une ou deux personnes, nous avons, par exemple, Sabrit Kadriu, page 2
7 377, le témoin ne donne pas de nom qui pourrait être utilisé comme une
8 preuve en l'espèce. Il se contente de donner une liste que lui-même et
9 d'autres ont établi après les faits et il n'est pas question de la cause du
10 décès, de la modalité du décès ni du lieu du décès. Voilà peut-être
11 pourquoi pour Vucitrn on a des personnes qui n'ont pas été assassinées,
12 mais qui sont mortes de mort naturelle.
13 Je vous demande donc de vous pencher avec beaucoup d'attention sur ce
14 tableau.
15 Je passe maintenant à autre chose. Me Kravetz pour le bureau du Procureur a
16 parlé brièvement de la rue Milosh Giliq à Djakovica et de l'incident qui
17 s'y est produit, et elle affirme, c'est surprenant, qu'il n'y avait pas de
18 membres de l'UCK à Djakovica en avril. Or, c'est tout simplement faux. Nous
19 avons les dépêches envoyées par le "State Department" américain qui
20 s'appuie sur des renseignements venant du terrain, c'était des documents
21 confidentiels mais auxquels on a pu avoir accès grâce à l'article 70 du
22 Règlement. Or, on ne peut pas dire que ces sources d'information ne sont
23 pas véridiques ou qu'elles aient été préparées ou influencées par l'accusé.
24 Ce sont des sources contemporaines et des documents contemporains.
25 J'aimerais vous demander de vous pencher sur certains d'entre eux, pièce
26 6D1637, 6D1638, et 6D1639, nous les analysons au paragraphe 166 de notre
27 mémoire. On voit que non seulement l'UCK se trouvait bien à Djakovica, mais
28 que l'UCK contrôlait un quart de la ville et qu'elle s'efforçait de prendre
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1 le contrôle du centre-ville. L'UCK contrôlait les environs de Djakovica, et
2 tout cela d'après les informations fournies par le département d'Etat
3 américain. Et dans ces circonstances, étant donné que le SUP de Djakovica
4 ne contrôlait même pas la ville de Djakovica et encore moins la zone
5 environnante, comment est-ce qu'ils pouvaient savoir ce qui s'est passé à
6 l'intérieur de la ville ? On a la déposition de M. Zlatkovic qui nous a
7 parlé du chaos à Djakovica à cause des bombardements de l'OTAN, à cause des
8 attaques quotidiennes de l'UCK, et à cause des incendies, des coupures de
9 courant qui en résultait. Il a confirmé que le SUP de Djakovica ignorait
10 tout des événements tragiques de la rue Milosh Giliq et que donc rien n'a
11 pu être fait à ce sujet.
12 Comment est-ce que Sreten Lukic qui essayait d'éviter les bombes de l'OTAN
13 à Pristina bien loin de là alors qu'il n'y avait pas de lignes
14 téléphoniques le reliant à Djakovica, comment est-ce qu'il était censé être
15 au courant de tout cela ? Les rapports de situation quotidiens ou bulletins
16 dont nous a parlé Me Lukic, mon confrère, préparés par l'état-major du MUP
17 et basés sur les rapports envoyés par estafette des différents SUP, voilà
18 les méthodes de communication qui étaient disponibles. Et ces pièces nous
19 montrent, comme elle le reconnaît au paragraphe 1091 de son mémoire, que ça
20 ne couvrait pas Milosh Giliq ni les meurtres de Suva Reka, même si on y
21 trouve des rapports concernant un certain nombre de crimes qui ont fait
22 l'objet d'enquête.
23 Le problème c'est que l'Accusation dit qu'il y a la preuve là que les
24 crimes ont été dissimulés par M. Lukic et par l'état-major du MUP. Nous
25 avançons que c'est exactement le contraire, qu'ils n'étaient absolument pas
26 au courant de ces crimes et qu'ils n'en étaient pas informés donc.
27 Nous avons parler de l'incident Milosh Giliq dans notre mémoire, je ne vais
28 pas entrer dans les détails, mais j'insisterai cependant sur le fait que
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1 les éléments de preuve du dossier montre que ce sont des voisins qui sont
2 responsables, nous avons des éléments indiquant que ces personnes se
3 droguaient et buvaient. Or rien n'indique que ces individus avaient des
4 relations avec la police, on nous dit simplement qu'il y en a un qui était
5 pompier au SUP. En bref, les faits n'étayent absolument pas la thèse de
6 l'Accusation.
7 Maintenant je voudrais vous parler de Suva Reka. Mme Kravetz en a parlé
8 très brièvement, elle a parlé également des meurtres des Berisha. Elle vous
9 a répété qu'il n'y avait pas de membres de l'UCK sur place et qu'il n'y
10 avait pas de combat. Et je dois insister encore sur le fait que c'est faux,
11 même si ça ne joue pas un très grand rôle s'agissant de ces événements,
12 puisque nous disposons du témoignage d'un des participants, cependant, nous
13 avons des éléments indiquant qu'il y avait la moitié de Suva Reka qui était
14 contrôlé par l'UCK, page 25 443 du compte rendu d'audience.
15 Mais ce n'est pas très important pour les Juges pour les raisons suivantes.
16 M. Stamp, lorsqu'il parle de Suva Reka, affirme que Goran Stoparic a déposé
17 que le colonel Mitrovic et son unité avaient mené l'opération à Suva Reka
18 au cours de laquelle la famille Berisha a été tuée. Or, Stoparic n'a pas
19 parlé de Suva Reka et rien n'indique que le meurtre de la famille Berisha
20 ait eu lieu dans le cadre d'un opération quelle qu'elle soit. On nous dit
21 que tous les auteurs de ces crimes étaient membres de l'OUP simplement,
22 mais ni Mme Kravetz ni M. Stamp ne s'arrêtent sur ce fait très important si
23 on examine ce crime et cette tragédie. Or, c'est très important que vous en
24 teniez compte, vous, si vous voulez rendre la justice.
25 Le meilleur témoin que nous ayons de tout cela, c'est le Témoin K-83, un
26 témoin à charge, encore une fois un initié de la police. Il a participé à
27 ces événements, il est témoin oculaire des crimes. Et à aucun moment ce
28 témoin n'a dit avoir reçu des consignes ou des ordres de tuer qui que ce
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1 soit, et encore moins la famille Berisha qui s'était cachée dans la
2 pizzeria ce jour-là. Il a décrit les événements, leur évolution, il a
3 expliqué comment et pourquoi ceux qui l'accompagnaient ont commencé à
4 tirer, à lancer des grenades dans la pizzeria, et le témoin nous a montré à
5 quel point la théorie de l'Accusation est bancale. En effet, ces hommes ont
6 commencé de leur propre chef à tirer sur des gens qui se trouvaient à
7 l'extérieur de la maison Berisha, et ensuite ces individus ont bu chacun,
8 et c'est incroyable, deux litres d'alcool fort qu'ils buvaient, si on
9 reprend les dires du témoin, comme on avale de l'eau. Page 3 390 du compte
10 rendu d'audience. Ensuite, sous l'influence de l'alcool, ils se sont
11 proposé les uns aux autres de lancer des grenades dans la pizzeria, et
12 voilà comment ça s'est passé. Il n'y a pas d'opération, il n'y a pas de
13 plans, il n'y a pas d'ordres de supérieurs.
14 Regardez ce qui figure aux pages 3 988 et 3 989 du compte rendu d'audience.
15 Voilà un crime qui est éminemment tragique, mais au bout du compte, à quoi
16 ça se résume, au comportement d'ivrognes qui n'ont absolument pas respecté
17 les obligations qui étaient les leurs en vertu de leurs fonctions au sein
18 de la police de Suva Reka.
19 L'Accusation nous dit que les auteurs de ces crimes ont essayé de les
20 dissimuler en enlevant les corps. Or, il n'y a aucun élément indiquant que
21 Sreten Lukic ait eu un rôle quelconque dans l'enfouissement des corps au
22 niveau du champ de tir et ensuite le fait qu'on les ait enlevés de ce champ
23 de tir. Il est clair que les gens de Suva Reka, les auteurs de ces crimes,
24 ont essayé de dissimuler le crime. Nous avons des éléments qui indiquent
25 que le SUP de Prizren a envoyé une équipe sur place pour enquêter sur les
26 personnes qui avaient été tuées à l'extérieur de la maison Berisha, mais
27 personne ne leur a parlé de l'incident de la pizzeria. Et l'un des auteurs
28 de ce crime a assuré la sécurité de l'équipe des enquêteurs et, bien
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1 entendu, il n'a pas parlé de ce qui s'était produit sur place.
2 Nous avons des éléments au dossier indiquant, comme ça a été établi à
3 Belgrade où ces faits ont fait l'objet d'une procédure au pénal, que le
4 chef de l'OUP de Suva Reka lui-même n'était au courant de rien, paragraphe
5 64 de la pièce 6D1631. Or, s'il n'y a pas de rapport établi sur un
6 incident, il ne peut pas y avoir d'obligation d'enquêter, de prendre des
7 mesures disciplinaires, et cetera, et les éléments du dossier nous montrent
8 que ni le chef de l'OUP, ni le chef du SUP, ni la police criminelle de
9 Prizren n'a eu d'information à ce sujet. Et les informations transmises à
10 l'état-major du MUP ne disaient rien à ce sujet.
11 En conséquence, on ne peut pas dire qu'il y a eu manquement aux obligations
12 qui étaient celles de M. Lukic et qu'il voit sa responsabilité pénale
13 engagée.
14 J'insiste sur le fait que Sreten Lukic a tout fait pour que la lumière soit
15 faite sur ce crime, pour qu'il y ait enquête et que les autorités du
16 parquet soient saisies de l'affaire alors qu'il était adjoint du ministre
17 et chef du RJB. Furdulovic nous en a parlé, je renvoie à la pièce 6D1068 au
18 compte rendu d'audience 24 699 à 24 701. Il est question là du fait que
19 Lukic a fait ce qu'il devait faire, il a autorisé l'audition de témoins et
20 de suspects qui étaient des employés du ministère conformément aux
21 règlements, conformément aux obligations qui étaient les siennes au poste
22 où il était. Et il faut rappeler également le soutien qu'il a apporté à ces
23 enquêtes et qui ont débouché sur un procès à Belgrade contre les auteurs
24 des meurtres des Berisha. Jamais il n'a rien fait pour empêcher que l'on
25 interroge qui que ce soit dans le cadre de l'enquête. Il a fait preuve
26 d'ouverture, de professionnalisme, il n'avait rien à cacher.
27 Je vais maintenant passer à Kotlina, Mme Kravetz a mis cet élément en
28 exergue dans son réquisitoire la semaine dernière. Il est curieux de voir
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1 que c'est une des rares fois où l'Accusation, pendant son intervention, n'a
2 pas affirmé qu'il n'y avait pas de membres de l'UCK dans le village, sans
3 doute parce qu'on avait des photos qui montraient leur présence dans le
4 village. Il y avait trop de preuves pour que l'Accusation puisse les
5 réfuter. Cependant, ils disent qu'ils ont de nombreuses preuves à l'appui
6 de leur thèse alors qu'en fait ça se résume à la déclaration d'un seul
7 témoin, M. Loku, alors qu'il y a d'autres éléments du dossiers qui
8 contredisent ce qu'il dit, notamment les éléments de preuve médico-légale.
9 L'Accusation n'en a pas parlé, mais on voit pourtant que ça aurait été très
10 instructif parce que ces éléments de preuve médico-légale ne confortent pas
11 la thèse de l'Accusation au sujet de ces événements et de la manière dont
12 ils se sont produits. Je vous renverrai aux conclusions de l'expert médico-
13 légal, le Dr Stankovic. Il a une très grande expérience dans ce domaine et
14 je crois qu'au bout du compte, en examinant ces éléments, si on regarde où
15 ont été trouvés les corps, les débris de corps, ça nous amène à une
16 déduction bien différente de celle de l'Accusation. Vu les éléments de
17 preuve médico-légale à notre disposition, il n'est pas possible de dire que
18 la seule conclusion à laquelle on puisse parvenir c'est celle présentée par
19 l'Accusation, surtout lorsque le témoin numéro 1 de l'Accusation nous donne
20 des éléments concernant des personnes qu'il est censé connaître, dont il
21 est censé avoir assisté à la mort, et qui ne concordent pas avec les
22 éléments de preuve médico-légale du dossier. Et je pense que ceci compromet
23 l'intégrité de la procédure.
24 Je pense que nous avons suffisamment analysé tous les problèmes posés par
25 les éléments médico-légaux de l'Accusation et les autres déclarations des
26 témoins. Cependant, je souhaiterais insister sur un certain nombre de
27 points parce que c'est important.
28 Vous avez Liri Loshi et l'enregistrement. On a la déposition du Dr
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1 Stankovic et il nous dit que les corps n'ont pas été filmés dans leurs
2 positions naturelles sur le lieu du décès. Les témoins à charge nous disent
3 que dans certaines de ces fosses il y a jamais eu de restes humains. Les
4 témoins à charge expliquent que certains corps ont été enterrés plusieurs
5 mois après les faits, et certains témoins de l'Accusation donnent des
6 chiffres contradictoires entre le nombre de personnes mortes et le nombre
7 de personnes enterrées. Si on regarde les éléments de preuve neutres en
8 l'espèce, on voit qu'il y avait de nombreux membres de l'UCK à Izbica et
9 des environs, des gens qui ont continué à combattre alors qu'il y avait des
10 civils tout le temps sur les lieux.
11 Personne ne les a contraints à partir, et ce qui est important ici
12 c'est de savoir que l'Accusation soit ne savait pas un certain nombre de
13 choses, soit ne les a pas signalées à l'attention de la Chambre, et Liri
14 Loshi devait savoir quelque chose, qui a été révélé par les documents de
15 l'UCK et la déposition de Zyrapi, un chef d'état-major de l'UCK, alors que
16 Liri Loshi était commandant de l'UCK à Padaslista. Voilà des témoins qui
17 sont loin d'être dignes de foi. Tout ceci nous montre qu'on a trafiqué, on
18 a mis en scène les événements et les preuves d'Izbica et que c'est l'UCK
19 qui l'a fait.
20 Penchons-nous maintenant sur les commentaires de M. Cepic, à savoir que le
21 bureau du procureur militaire a transféré l'affaire aux procureurs civils,
22 commissaires publics. Quand cela s'est-il passé ? Où sont ces documents ?
23 Est-ce que c'est quand les tribunaux militaires ont été fermés après
24 l'affaire parce que toutes les affaires en souffrance ont été transférées.
25 Alors Madame et Messieurs les Juges, ici, M. Cepic nous a présenté un écran
26 de fumée. Nous vous demandons de vous pencher sur les éléments de preuve et
27 non pas sur ce que Me Cepic a affirmé. Nous estimons que l'Accusation n'a
28 rien prouvé au sujet d'Izbica qui pourrait fournir un élément ou une base
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1 pour la condamnation de qui que ce soit dans ce prétoire.
2 Alors Mesdames et Messieurs les Juges, je vais maintenant passer au sujet
3 des attaques sexuelles, et ce, pour deux raisons. Je pense pouvoir en
4 parler à huis clos partiel parce que le sujet a été traité dans ces parties
5 pertinentes dans notre mémoire en clôture. Mais il y a une autre raison :
6 étant donné que les allégations de délit sexuel dans le mémoire préalable
7 au procès, et nous avons souligné cela dans notre mémoire en clôture, il
8 convient de garder à l'esprit le peu d'éléments de preuve présenté par
9 l'Accusation concernant les violences sexuelles. Ici, il n'est pas question
10 de personnes qui auraient été accusées de participation directe dans des
11 activités ou des violences sexuelles. Les personnes en question étaient
12 forcément au courant et cela devait faire l'objet d'un plan systématique
13 pour la finalité qui est celle de ce procès.
14 Parce que les prétendues violences sexuelles de la part d'une poignée
15 de personnes qui n'ont pas été identifiées n'est pas une chose qui pourrait
16 constituer une cause dont devrait s'occuper ce Tribunal à l'encontre des
17 prétendus coupables et de ses accusés. On nous a fait venir K-63, l'époux
18 d'une victime, et partant de son témoignage il a été procédé à des
19 conclusions au sujet des auteurs, partant des couleurs d'uniforme et on a
20 associé cela à des membres de la police. Mais on n'a pas fait venir la
21 véritable victime pour procéder à une identification des auteurs. Lorsque
22 j'ai posé des questions à la victime en question, il a été question de
23 problèmes au niveau de la différence à faire entre les couleurs et d'autres
24 problèmes pour ce qui est d'identifier les auteurs. Ceci porte atteinte à
25 la crédibilité des témoins. Il n'a pas été carrément assuré ou dit qu'il
26 s'agissait de membres de la police. Mis à part ce fait, il faut garder à
27 l'esprit le fait que K-63 est un témoin qui, à plusieurs reprises, a
28 refusé de s'entretenir avec le bureau du Procureur avant son propre
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1 témoignage, et la question se pose de savoir s'il convient de croire à ce
2 témoignage ? Alors je pense que cela ne devrait pas être le cas.
3 Il y a une autre chose qui m'a étonné dans les allégations faites par
4 le bureau du Procureur. Ils ont laissé entendre qu'en dépit du fait que les
5 régions frontalières aient été bombardées, ils avaient trouvé illogique que
6 des civils, des Albanais ou quiconque d'autre aient à fuir de leur propre
7 gré dans cette direction. Alors il semblerait que les cartes d'identité ont
8 été confisquées dans une entreprise systématique de grande envergure à la
9 frontière pour biffer toutes données au sujet de leur existence et de leur
10 citoyenneté. Alors l'Accusation a affirmé que la même tactique a été
11 utilisée à Pristina et ailleurs au Kosovo.
12 Tout d'abord, il serait logique de penser qu'une invasion de l'OTAN
13 était une chose redoutée par tout un chacun et les frappes aériennes ont eu
14 lieu sur le territoire entier de la Yougoslavie, mais surtout au Kosovo.
15 Par conséquent, il aurait été logique de penser qu'une personne se trouvant
16 dans une zone affectée par les combats s'efforce de fuir cette zone de
17 combat, et cela ne pouvait se faire que si on allait là où il n'y avait pas
18 de bombes qui tombaient. L'OTAN ne bombardait pas les pays qui étaient
19 autour de la Yougoslavie, aussi est-ce la raison pour laquelle les
20 habitants fuyaient vers la Macédoine et l'Albanie. Je n'arrive pas à croire
21 que le bureau du Procureur puisse affirmer que cela est contraire à la
22 logique. C'est plutôt incroyable.
23 Nous avons des éléments de preuve disant qu'il y a des routes et des
24 ponts qui ont été ménagés par l'OTAN, peut-être dans l'intention de
25 procéder à une invasion terrestre ou alors sachant qu'il allait y avoir un
26 flux de réfugiés par là. Mais cela, de toute façon, remet en question la
27 présentation faite par l'Accusation à ce sujet.
28 Nous avons également le témoignage de M. Zlatkovic disant que des
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1 convois entiers de civils albanais qui revenaient vers Suva Reka depuis la
2 frontière et qui ont été bombardés par l'OTAN, Meja, Bistrazin, non loin de
3 Djakovica. Nous avons même vu des enregistrements vidéo et des efforts
4 déployés par la police pour venir en aide à ces victimes de l'OTAN. Donc
5 cela n'étaye en aucun cas les allégations faites par l'Accusation.
6 Alors maintenant, pour ce qui est du nettoyage de l'identité
7 ethnique, nous avons entendu bon nombre de témoignages, et quand bien même
8 on affirmerait que des pièces d'identité avaient été confisquées, cela ne
9 voulait pas dire que l'on effacerait l'identité ethnique de quiconque et
10 que cela empêcherait à qui que ce soit de revenir au pays pour demander des
11 documents de remplacement. Nous avons entendu des témoignages à ce sujet de
12 la part de M. Vucurevic et de M. Dujkovic, donc il ne s'agissait de filtrer
13 ou de détruire rien que les fichiers albanais ou les registres de
14 citoyenneté puisque les registres étaient tenus en double. Il n'y avait
15 aucune différenciation de fait partant de l'appartenance ethnique.
16 Il n'y a pas eu d'éléments de preuve disant que cela a été fait de la
17 sorte. M. Ognjenovic a témoigné au sujet d'Albanais qui traversaient la
18 frontière. Il a trouvé des documents, des pièces d'identité qui se
19 trouvaient sur le no man's land, il a ramassé cela, il a rendu cela au SUP.
20 Une fois le retrait effectué, cela était confié à la frontière à des
21 officiers internationaux qui surveillaient le retrait. Personne n'a essayé
22 de détruire ces pièces d'identité.
23 Les pièces à conviction présentées par Mme Kravetz ont voulu laisser
24 entendre que c'était un modèle d'utiliser pour le Kosovo-Metohija tout
25 entier. Mais il y a un problème avec cette image, parce que les témoins que
26 l'Accusation a fait venir de Pristina n'ont à aucun moment indiqué qu'on
27 leur avait saisi leurs documents ou leurs pièces d'identité au passage
28 frontière Djeneral Jankovic. Qui plus est, M. [comme interprété] Bala, M.
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1 Kabashi, et K-62 et autres, K-63 n'ont indiqué qu'on leur avait saisi leurs
2 pièces d'identité au passage frontière de Djeneral Jankovic. Qu'est-ce que
3 cela signifie ? Nous avons trois témoins d'Urosevac que le Procureur a fait
4 venir --
5 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi les noms des intéressés.
6 M. IVETIC : [interprétation] -- et les trois sont passés par le
7 passage frontière Djeneral Jankovic, et eux non plus n'ont témoigné pour
8 indiquer qu'on leur avait détruit leurs pièces d'identité puisque ça n'a
9 pas été le cas.
10 Nous avons également entendu deux témoins, MM. --
11 L'INTERPRÈTE : [inaudible]
12 M. IVETIC : [interprétation] -- de Gnjilane, qui sont passés par Globocica
13 et qui n'ont pas été dépossédés de leurs pièces d'identité non plus. Aucune
14 des déclarations de ces témoins ne vient étayer les affirmations de
15 l'Accusation. Alors à Pristina et le passage frontière devraient justement
16 servir de pièce qui étayerait le planning allégué de suppression de
17 l'identité ethnique et des pièces d'identité détruites.
18 Alors nous affirmons qu'il y a eu des gens qui ont fui le Kosovo pour
19 aller au Monténégro et à la Serbie et n'ont pas été dépossédés de leurs
20 pièces d'identité.
21 Alors qu'est-ce que cela veut dire de la part de l'Accusation ?
22 Personne de ces témoins n'a affirmé qu'il y ait eu un nettoyage ethnique
23 identitaire, comme l'a dit Mme Sadije. Il convient d'indiquer qu'elle a
24 changé son témoignage à 180 degrés et elle a parlé de tir.
25 L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à ce que le conseil de la Défense
26 ralentisse.
27 M. IVETIC : [interprétation] L'Accusation ne peut changer le témoignage de
28 ce témoin parce que celle-ci n'a pas possédé de pièces d'identité. Toujours
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1 est-il qu'elle a réussi à se procurer des éléments de preuve parlant de sa
2 citoyenneté. Les témoins de l'Accusation ont pu se rendre sur place
3 ultérieurement pour recevoir des pièces d'identité attestant de leur
4 citoyenneté.
5 Donc il n'y a aucune vérité dans cette allégation disant qu'on avait
6 voulu procéder à un nettoyage ethnique identitaire. Une Chambre
7 expérimentée, une Chambre de première instance aussi expérimentée ne
8 devrait pas tomber dans ce type de piège.
9 Alors l'affirmation de l'Accusation se fonde sur une hypothèse, à
10 savoir que les gens n'ont pas quitté le Kosovo-Metohija pour des raisons
11 autres que des raisons criminelles, à savoir l'existence de plans criminels
12 et d'activités criminelles de la part des forces yougoslaves et serbes.
13 C'est le résultat du rapport de Patrick Ball et c'est le slogan que le
14 Procureur a répété constamment. Mais dans le mémoire en clôture, ou plutôt
15 dans le réquisitoire, on n'a pas affirmé que c'était des crimes qui les
16 avaient incitées à partir, mais on a dit que les "actions" des différents
17 effectifs étaient la raison principale du départ de ces personnes. Je me
18 réfère à la page du compte rendu 26 778, lignes 3 à 7, et je pense que
19 c'était Mme Kravetz qui avait donné lecture de cela.
20 C'est assez intéressant, mais il s'agit d'une concession plutôt
21 importante de la part de l'Accusation, parce qu'ils sont en train de
22 reconnaître que les allégations et les arguments présentés par M. Ball
23 n'étaient pas exacts, n'étaient pas précis. Or, il y a toute une série
24 d'activités des forces armées qui sont tout à fait légitimes et qui ne
25 peuvent pas servir de base pour une responsabilité criminelle de la part
26 des accusés, parce qu'il y a eu une peur légitime de ces gens qui avaient
27 pris peur du fait des activités de guerre, mais qui ont fui leurs domiciles
28 et leurs maisons, et ça n'a rien à voir avec des crimes perpétrés.
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1 On a avancé des éléments de preuve qui ont été repris dans le
2 mémoire. Par exemple, les Juges de la Chambre vont se souvenir du
3 témoignage d'un responsable du SUP de Gnjilane, M. Gavranic. Tout d'abord,
4 souvenons-nous du fait que cet homme avait convaincu un convoi de citoyens
5 albanais de la nécessité de retourner chez eux, et il a procédé à
6 l'arrestation de personnes qui avaient commis des crimes à l'égard
7 d'Albanais, et l'un des témoins albanais qui a comparu ici lui a demandé de
8 lui fournir une escorte pour le convoi, et c'est ce qu'il a précisément
9 fait, afin que ces gens puissent aller là où ils voulaient aller. En bref,
10 pas même l'Accusation n'a pu contester la crédibilité et le bon caractère
11 de ce témoin.
12 M. Gavranic a témoigné de ce qu'il savait du départ des personnes et
13 il a dit qu'il s'agissait des frappes aériennes de l'OTAN il y avait eu
14 ciblage d'installations militaires non loin des habitations à Gnjilane, et
15 lorsque les troupes se sont redéployées de façon tout à fait légitime, les
16 citoyens voulaient s'en aller parce que les citoyens avaient peur de la
17 proximité de ces effectifs qui allaient attirer vers eux les frappes
18 aériennes de l'OTAN, ce qui augmenterait la possibilité d'avoir des dégâts
19 collatéraux. Gavranic a essayé d'expliquer que lui et le gouvernement
20 souhaitaient faire rester ces gens-là, et malheureusement ça n'a pu être
21 fait. Compte rendu d'audience 22 700 à 701.
22 Compte tenu du fait de la petitesse du Kosovo-Metohija, imaginez la
23 situation où au quotidien des frappes aériennes, l'armée yougoslave, le MUP
24 serbe sont constamment obligés de déplacer leurs effectifs afin de ne pas
25 être touchés, de ne pas être ciblés. Ils ont dû changer de site plusieurs
26 fois par jour, même. Or, ce type d'activités de la part des troupes qui ne
27 sont pas des troupes ennemies, qui ne sont pas des troupes de combat et qui
28 n'ont pas d'intentions hostiles du tout ou malintentionnées, mais cela peut
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1 générer une peur auprès de la population civile pour ce qui est du risque
2 encouru du fait des bombardements de l'OTAN et non pas des risques encourus
3 par ces forces elles-mêmes.
4 Donc il convient d'avoir à l'esprit la quantité d'effectifs qui se
5 déplaçaient légitimement sur ce terrain pour éviter les bombes de l'OTAN.
6 Nous avons des éléments de preuve montrant que les membres du MUP étaient à
7 peu près 10 021 avant la guerre, et pendant la guerre ils étaient 15 000.
8 Pour ce qui est de l'armée de Yougoslavie, pièces à conviction 6D1 [comme
9 interprété] et 6D4 [comme interprété], page 2. A la date du 18 avril, il y
10 avait 71 668 membres du Corps de Pristina. Imaginez maintenant toutes ces
11 unités de la VJ et du MUP se déplacées au travers du Kosovo, allées ça et
12 là, il est raisonnable d'imaginer que les civils s'en sont allés parce
13 qu'ils avaient peur que l'OTAN allait frapper ses effectifs et qu'ils
14 allaient peut-être également toucher leurs villages.
15 Mais cela ne peut être décrit comme étant une conduite criminelle de
16 la part de l'armée de Yougoslavie, voire du MUP de Serbie. Si l'Accusation
17 se fonde sur ce type d'activité en parlant d'actions des forces et non pas
18 de crimes, l'acte d'accusation en tant que tel tombe à l'eau.
19 Si nous parlons maintenant des raisons pour lesquelles les personnes
20 ont quitté leurs domiciles, il convient de ne pas omettre de mentionner le
21 fait que Patrick Ball non seulement a créé ou mis sur pied toute une
22 science à lui, comme on l'a dit dans le témoignage d'expert du Dr Fruits,
23 mais qui plus est, il a, de façon extraordinaire, procédé à la création
24 d'un champ d'étude psychologique tout à fait nouveau. Bien que le
25 Procureur n'ait fourni aucune pièce à l'appui des critères utilisés par M.
26 Ball, ou des sources crédibles qui étayeraient ces allégations en matière
27 de psychologie, on nous demande d'accepter comme une vérité toute faite
28 fournie par M. Ball pour dire que les bombardements ont dissipé la peur des
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1 civils deux jours après. Donc c'est assez pratique que de dire que cela est
2 convenable comme raison et pour réaffirmer les résultats de l'étude. Alors,
3 félicitations, M. Ball, mais cela n'est pas une façon appropriée de
4 présenter des éléments de preuve dans un procès.
5 Or, l'Accusation a pris Pristina pour modèle pour illustrer la façon
6 dont les choses se sont produites ailleurs au Kosovo pendant la période
7 pertinente à l'acte d'accusation. Alors penchons-nous maintenant sur les
8 éléments de preuve qu'on nous a fournis. Qu'y a-t-il ? Je pense que la
9 façon la plus instructive ou la plus illustrative est celle de nous pencher
10 sur les éléments de preuve qui nous ont été fournis heureusement par les
11 Etats-Unis d'Amérique en application de l'article 70. Il s'agit de la pièce
12 6D1637. Ils avaient leurs propres contacts sur le terrain à Pristina
13 pendant la guerre. Il est dit dans cette pièce à conviction que les Serbes,
14 autant que les Albanais à Pristina, avaient de plus en plus eu peur de ces
15 bombardements. Ils allaient de plus en plus vers les abris souterrains,
16 parce que l'OTAN avait même commencé à bombarder durant le jour. Il y a eu
17 beaucoup d'usines de fermées, et beaucoup de gens, y compris les Serbes,
18 ont commencé à quitter la ville parce qu'il n'y avait pas de travail, ils
19 n'étaient pas payés et ils ne savaient plus comment continuer à assurer
20 leur quotidien à Pristina. Ce sont des éléments de preuve tout à fait
21 cruciaux. Or cela ne s'intègre pas à la théorie de M. Ball, ni dans l'image
22 qu'essaie de nous brosser le bureau du Procureur, mais ce sont des éléments
23 de preuve qui sont incontestables et il s'agit donc de se pencher très
24 attentivement sur les allégations faites par le bureau du Procureur, de mon
25 avis.
26 Les détachements de la police de réserve, les RPO. Je pense que je
27 n'aurais pas beaucoup à parler des RPO, mais pour ce qui est des
28 insinuations faites par l'Accusation et par M. Cepic dans leur mémoire en
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1 clôture, ou plutôt dans leur réquisitoire, je pense qu'il faut dire les
2 choses clairement. Du point de vue du mémoire de l'Accusation et des dires
3 de M. Cepic, on crée une confusion entre policiers de réserve et RPO, comme
4 si c'était la même chose, or ce n'est pas la même chose. A titre
5 préliminaire, je me dois de dire que nous sommes d'avis, et je pense que
6 c'est un avis qui est conforté par les éléments de preuve disant que les
7 RPO ont été démantelés dès le début de la mobilisation et de la
8 proclamation de l'état de guerre, étant donné que les conscrits militaires
9 devaient rejoindre les unités de guerre et les policiers de réserve
10 devaient aller prendre leurs postes de police de réserve. Il y a des
11 entretiens qui le confirment lors de réunions qui se sont tenues au sein du
12 QG du MUP. Je pense que la pièce P1996 en fournit un bon exemple.
13 La genèse des RPO commence avec la pièce à conviction P1415. Nous pouvons
14 voir que ce document ne mentionne ni le QG du MUP ni le MUP en tant que tel
15 et on ne dit pas qu'ils ont des responsabilités à assumer de ce point de
16 vue-là. La pièce P2166 nous montre que ni Lukic, ni quiconque d'autre au
17 sein du MUP ne parle du RPO, et qui plus est le RPO et la défense des
18 villages faisaient partie du plan global de lutte contre le terrorisme.
19 Mais M. Djakovic nous a dit qui a rédigé ce plan et il a dit que les
20 membres du MUP n'y avaient pas participé. A la pièce P1114, document qui
21 parle du secteur de Kosovska Mitrovica, nous pouvons voir que les RPO dans
22 la ville de Vucitrn sont constitués par 32 réservistes militaires, il n'y a
23 pas un seul policier de la réserve parmi eux, et ils sont commandés par un
24 membre des effectifs de réserve de l'armée. A un autre endroit, nous avons
25 un policier de réserve et 110 réservistes militaires. La documentation, par
26 conséquent, nous montre que les RPO étaient constitués en majeure partie
27 par des conscrits militaires et quand il y a eu mobilisation et
28 proclamation de l'état de guerre, ces formations ont tout simplement cessé
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1 d'exister parce qu'il aurait été impossible de mobiliser 70 000 personnes
2 sans pour autant démanteler les RPO.
3 Même M. Cepic a présenté des éléments de preuve disant que la police
4 n'avait jamais pu commander les militaires, mis à part les policiers, il y
5 avait aussi des insignes de policiers de réserve, mais les RPO n'avaient
6 aucun rôle au sein de la structure de commandement du ministère de
7 l'Intérieur.
8 Le MUP avait des listes parce que la loi disait qu'il fallait avoir
9 des listes de toute personne possédant légalement des armes. Et à ce titre,
10 je cite les pièces P1063, P1060 et P1065 qui sont des pièces échangées au
11 sein du ministère de la Défense, et il n'y a pas un seul de ces documents
12 qui ait été envoyé au ministère de l'Intérieur. Je crois que ceci répond
13 aux questions évoquées par M. Cepic. Et qui plus est, je voudrais dire que
14 M. Cepic n'a fourni aucun élément de preuve pour ce qui est de ses
15 allégations figurant au paragraphe 757 de ses écritures présentées hier
16 disant que des RPO ont continué d'exister après la mobilisation et après la
17 proclamation de l'état de guerre. Les PV des réunions du QG du SUP disent
18 autre chose.
19 Le paragraphe 754 des écritures de Lazarevic nous disent qu'il y
20 avait beaucoup de gens qui avaient des uniformes militaires parce qu'il n'y
21 avait pas suffisamment d'uniformes de la police, mais ce n'est pas exact
22 puisque les réservistes de l'armée ont reçu des uniformes de l'armée. Le
23 755 du mémoire dit de la part de Lazarevic que Mitic avait eu un problème
24 avec l'enregistrement illégal de personnes qui étaient des conscrits
25 militaires au sein du MUP, et j'évoque le 5D1014 et je pense que vous
26 devrez également vous pencher sur la pièce P1415 parce que vous allez y
27 voir que l'enregistrement a été fait par le district militaire de Pristina,
28 et non pas par le MUP. Une fois de plus, le 5D1014 est un document qui
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1 parle de la police de réserve, et non pas des RPO. Qui plus est, ici la
2 Défense de la part des accusés militaires présente de façon erronée la
3 façon dont la police a fonctionné.
4 Et nous voulons dire que ceci n'est pas une pièce à conviction pour
5 indiquer qu'il y a eu implication de l'une quelconque de ces personnes dans
6 la commission des crimes.
7 Je reviens maintenant à la pièce P2166 au sujet de laquelle M. Hannis
8 a dit que c'était sa pièce à conviction préférée pour ce qui est des
9 crimes. Je crois qu'il faut mieux en prendre lecture parce qu'il me semble
10 qu'on n'a pas bien pris lecture de ce qui y est dit. Tout d'abord, il
11 convient de tenir compte du témoignage d'un témoin qui a été cité à
12 comparaître ici par les Juges de la Chambre de première instance, à savoir
13 le général Dimitrijevic, qui lui se trouvait à la tête de ce service du
14 renseignement et de la sécurité de l'état-major de la VJ et qui a dit qu'à
15 l'occasion de ces réunions-là, il n'y a pas eu de notes sténographiées,
16 pour autant qu'il se souvienne. La pièce P2166 ne correspond pas du tout à
17 ses souvenirs. J'évoque ici la page du compte rendu d'audience 26 597
18 jusqu'à 26 599. Dimitrijevic a également dit que la pièce P2166 a été
19 rédigée ultérieurement et que cela ne reflète pas de façon précise ce qui a
20 été dit. Je tiens à préciser qu'il s'agit de page du compte rendu
21 d'audience [inaudible]. Je crois qu'il convient de prendre en considération
22 ce que M. Hannis a allégué à la lumière de ce que M. Dimitrijevic a dit
23 dans son témoignage.
24 Prenons maintenant ce qui est reproché à M. Lukic et ce que l'auteur
25 Susic a placé dans son document. Il convient de garder à l'esprit que des
26 allégations ont été faites disant que ce document a été compilé partant de
27 plusieurs réunions qui se sont tenues entre-temps. Nulle part dans le
28 document il n'est dit que Lukic ait parlé des termes de "commandement
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1 conjoint", ultérieurement il parle d'affaires de police routinières.
2 D'autres parlent d'actions qui seraient placées en corrélation avec le plan
3 général de suppression ou de lutte contre le terrorisme.
4 Et quand il est fait référence au commandement conjoint dans ce
5 document, il convient de prendre en considération le fait que le général
6 Dimitrijevic a témoigné pour dire que cette notion de commandement conjoint
7 n'a pas été utilisée à l'occasion de ces réunions et qu'en fait il n'y en a
8 pas eu du tout. En réalité, quelle est la nature du document préféré de M.
9 Hannis ? Il nous montre que la direction de la Yougoslavia et de la Serbie
10 a convoqué des réunions, mais n'est-ce pas là le rôle de tels organes dans
11 tout pays ? Par exemple, le discours du "state union" tenu aux Etats-Unis
12 d'Amérique, est-ce une entreprise criminelle commune ? Est-ce un crime si
13 le Président de la Serbie tient une réunion avec les représentants
14 officiels des instances de la Yougoslavie pour les tenir au courant de ce
15 qui se passe ? Je ne pense pas que cela soit une preuve de crime, parce que
16 si cela était une preuve de crime, les prisons dans le monde entier
17 seraient pleines de gens et les Etats seraient plus en sécurité. Les
18 accusations faites par l'Accusation non seulement ne sont pas la plus
19 raisonnable des conclusions à tirer des éléments de preuve, mais ce n'est
20 pas du tout une conclusion à tirer quand bien même M. Hannis souhaiterait
21 en faire des pièces à conviction.
22 Un autre sujet que je voudrais évoquer : les trains. Il est important
23 de dire que l'Accusation n'a pas du tout étudié le témoignage de M.
24 Bucaliu, qui a été discrédité dès le procès, je me réfère au procès-verbal
25 26 781 à 82. Mme Kravetz a dit qu'il y a eu augmentation de la fréquence
26 des trains. Mais le problème avec cette logique c'est comme le problème
27 qu'on a évoqué au procès. La logique et les mathématiques combinés avec les
28 éléments de preuve de l'Accusation, parce que les documents apportés par M.
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1 Bucaliu contestent les allégations de l'Accusation.
2 Penchons-nous maintenant sur le P1331, c'est le registre des trains
3 qui ont circulé et on a vu que pendant 78 jours de bombardements de l'OTAN
4 il y a eu 228 trains d'enregistrés. Bucaliu a témoigné pour dire que le
5 trafic régulier avait eu une dizaine de trains par jour, alors cela aurait
6 donné 780 trains pendant la période de temps des bombardements de l'OTAN.
7 Or, Bucaliu a dit que la pièce P1331 était authentique et que tous les
8 trains qui circulaient étaient censés être recensés. Or, si le trafic
9 normal prévoyait dix trains par jour, il devrait y avoir plus de 780 trains
10 à avoir été enregistrés. Mais il n'y en a pas eu. Non seulement donc il n'y
11 a pas eu augmentation, mais il y a eu une diminution dramatique de la
12 circulation des trains. Il faut relever que cette contradiction a été
13 remarquée par le Juge Bonomy lui-même, page du compte rendu d'audience 3
14 044, et le Procureur se sert d'un matériel aussi mauvais pour étayer ses
15 dires, nous indique que ses thèses ou que ses allégations sont plutôt
16 faibles.
17 Nous avons présenté des éléments de preuve déterminant que toutes ces
18 actions antiterroristes conjointes qui ont été conduites en 1998 ont été
19 conduites conformément à ce plan en cinq phases et que toutes les actions
20 ont été planifiées par le Corps de Pristina et qu'en 1999 les actions
21 conjointes ont été conduites de la même façon. Et comme mon collègue l'a
22 dit, la personne qui a le plus été impliquée dans les contacts entre la VJ
23 et le MUP, M. Milan Djakovic, est une personne qui a témoigné ici et qui
24 nous a dit que lui et le Corps avaient déterminé ces plans et tracé la
25 totalité des cartes.
26 Nous devons encore traiter de quelques questions concernant l'interaction
27 entre la VJ et le MUP. Etant donné que je dois tout de même faire droit à
28 l'Accusation, Stamp et Kravertz et Cepic, et cetera pour essayer
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1 d'expliquer certaines choses. Tout se réduit en fait qu'ils ne comprennent
2 pas comment la police procède pour analyser des documents. La loi sur la
3 Défense est importante pour comprendre les activités de la police en temps
4 de guerre de même que sont importantes les instructions reçues par
5 Belgrade. La pièce à conviction 6D269 datant de février 1999 est un
6 document important, issu de secteur de la direction du général Djordjevic,
7 et démontre la genèse de toutes les interactions qui ont eu lieu entre la
8 VJ et le MUP et démontre leurs interactions.
9 Le point 16 de cette dépêche est importante également. On dit que toutes
10 les instances du MUP doivent rentrer en contact avec les autres instances
11 et organes du pays, y compris la VJ. Cette dépêche ne se limite pas
12 seulement au Kosovo, plutôt on réclame à tous les SUP tout le long de la
13 Serbie d'entrer en contact avec l'armée dans tous les secteurs, dans toutes
14 les régions pour procéder à l'échange d'informations portant sur l'aspect
15 de la défense du pays, instruction tout à fait légitime et logique. De même
16 en est-il pour parler de l'état-major de Pristina, la raison pour laquelle
17 Lukic devait avoir des réunions avec des généraux militaires. Voilà sur
18 quoi insiste l'Accusation. Or, il s'agissait de réunions tout à fait
19 légitimes, il ne s'agit pas d'une institution parallèle par laquelle le MUP
20 pouvait se trouver contourner non plus que pouvait être contourné la chaîne
21 de commandement légitime pour y établir à une autre chaîne de commandement.
22 Ensuite, concernant l'interview de Lukic. Monsieur le Président, Mesdames,
23 Monsieur les Juges, la traduction était horrible. On fait toute une mixture
24 là de thèmes, et cetera. Nous avons déjà soulevé force suggestions à ce
25 sujet et nous nous y en tenons. Vous devez comprendre que l'Accusation
26 commence à traiter du commandement conjoint. Lukic, lui, dit le soi-disant
27 commandement conjoint, et puis après, il a recours à cet intitulé parce que
28 cela est plus simple plus et plus aisé. D'ailleurs, les traducteurs
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1 n'emploient pas la même nomenclature, quelquefois il s'agit des
2 "zajdnicka", quelque fois "unie" ou "conjointe". Mais Lukic, lui, tire au
3 clair pour dire qu'il s'agit d'échange d'informations et que ceci servait
4 de voir comment se présentait le respect des chefs de secteur. Il s'agit de
5 la pièce à conviction 6D269. Il faut comprendre que moyennant cette
6 dépêche, moyennant d'autres dépêches envoyées par Djordjevic, jamais
7 personne au Kosovo n'a reçu une telle affectation ou tâche. Djordjevic,
8 chef du RJB, ou quelqu'un d'autre pour qui Djakovic a pu voir qu'il était
9 présent à la réunion, ont commencé à traiter tout cela comme avoir été un
10 commandement conjoint. S'agit-il de dire qu'il y a eu d'autres
11 commandements conjoints ailleurs dans le Kosovo ? Ceci n'a aucun sens.
12 Une autre matière à laquelle l'Accusation et M. Cepic devraient réfléchir.
13 Le fait que ces dépêches de PJP et des unités du Kosovo devaient être
14 traitées permet de voir des informations spécifiques, par exemple, la pièce
15 à conviction 6D291, le PJP en tant que détachement devait être déployé dans
16 le Kosovo. Il faut dire que ces unités PJP devaient aider les SUP
17 directement. Si les unités PJP se trouvaient sous le commandement du MUP,
18 il aurait été logique de les voir déployés selon ce que disait l'état-major
19 du MUP. Voilà ce qui parle largement du MUP. L'Accusation insiste sur les
20 pièces à conviction présentées par elle et souvent ignorées d'ailleurs.
21 Je suis désolé, je n'ai pas pu entendre ce que me réclamait les
22 interprètes, à savoir je devrais ralentir.
23 Pourtant l'Accusation n'est pas sans ignorer les éléments de preuve
24 présentés. Je n'ai pas le temps de présenter ici toutes les erreurs
25 commises dans le mémoire en clôture de l'Accusation. Plus tard, je vais
26 mettre en exergue certaines des erreurs faites par l'Accusation qui
27 concernent mon client; mais, voyons maintenant certaines erreurs concernant
28 Lukic et l'interview avec Lukic.
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1 Il s'agit du paragraphe 228 du mémoire en clôture de l'Accusation, il a été
2 dit que le commandement commun donnait des ordres conjoints pour des
3 actions communes et comme quoi Lukic a pris connaissance de la nécessité de
4 voir le MUP traduire ça dans la pratique. On n'a pas fait la preuve
5 d'assertion à savoir quel était le rôle de Lukic. Tout simplement, c'est
6 une fabrication faite par l'Accusation. Cette fois-ci, l'Accusation traite
7 de l'interview avec Lukic, faites lecture, s'il vous plaît, et lisez la
8 page 49 de l'interview de Lukic, là on ne parle pas pour dire que le
9 commandement conjoint insistait sur telle ou telle tâche. Le général Lukic
10 a dit que les tâches, les missions devaient être définies par le Corps de
11 Pristina, à savoir à l'adresse de la VJ et du MUP lorsqu'il s'agit du plan
12 global de 1998. D'autres éléments de preuve vont à l'appui de cela, la
13 seule chose qui ne cadre pas avec, c'est la façon dont l'Accusation lit et
14 présente tout cela, étant donné que les formulations n'ont pas été bonnes.
15 Et sur cette base-là, il a été requis une peine de prison à vie et cela
16 n'est pas sans me choquer, Monsieur le Président, Mesdames, Monsieur les
17 Juges.
18 Une autre chose qu'il convient de traiter, ce sont les allusions données
19 dans le mémoire en clôture, au paragraphe 229, de l'Accusation, comme quoi
20 Lukic avait admis qu'il y avait eu un prédécesseur qui était le sien et qui
21 commandait des unités spéciales. Regardez cette page, à lire cette page, je
22 comprends que Lukic était en train de traiter de la période où il est
23 devenu chef du RJB, en 2001, et non pas en 1998 et 1999.
24 Le dernier point à ce sujet, à plusieurs reprises l'interview de Lukic a
25 été citée dans le mémoire en clôture, paragraphe 1004, de même que
26 certaines remarques qui ont été présentées oralement par M. Stamp, à savoir
27 lorsqu'il y a eu une information double à son égard et à l'égard d'Obrad
28 Stevanovic, lieutenant général. Monsieur le Président, c'est vraiment
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1 dommage et c'est une honte de voir que l'Accusation n'a pas très bien lu
2 cette interview, peut-être y a-t-il lieu de voir tout cela dans une
3 mauvaise traduction, peut-être qu'il n'a pas eu de transcript jusqu'en
4 février de cette année, encore que l'interview a été faite, je crois, en
5 2003.
6 Dans la section où la citation a été faite, Lukic traite de l'année 1998
7 uniquement. A cette époque-là, le commandant du PJP, Obrad Stevanovic, pour
8 la plupart des cas, se trouve à Belgrade, l'état-major et Lukic à Pristina
9 étaient redevables à l'égard du KVO pour traiter des manœuvres, de la
10 présence de la police, et cetera. Vous vous rappelez que Mijatovic, son
11 adjoint, était le principal point de contact. En outre, l'état-major
12 agissait en tant qu'une instance de logistique qui recevait des
13 instructions de Belgrade et devait communiquer à Belgrade. Voilà cette
14 responsabilité double dont on parle. Mais avec l'année 1999, la logique et
15 le bon sens dictent à ce que le PJP, le ministre adjoint, le général-
16 lieutenant Obrad Stevanovic qui, lorsqu'il arrive au Kosovo, lorsque
17 l'ensemble de la guerre il passe dans l'état-major et d'ailleurs utilise
18 l'état-major du MUP comme étant son bureau, lorsqu'il reçoit du courrier,
19 il dit qu'il n'a pas besoin de parler d'une responsabilité double.
20 Stevanovic est là. Il est toujours chef, commandant du PJP, il est la
21 dernière personne d'ailleurs du MUP qui s'est retirée du Kosovo-Metohija.
22 Par conséquent, le rôle de l'état-major n'existe plus depuis que le MVK
23 n'était plus sur le terrain. Monsieur le Président, Mesdames et Monsieur
24 les Juges, il faut voir le contexte des éléments de preuve et non pas
25 procéder à des rafistolages comme l'a fait l'Accusation.
26 Ljubinko Cvetic, quant à lui, on en a parlé dans des éléments oraux de même
27 que dans le mémoire en clôture. Ce témoin, ce policier que Chester Stamp a
28 mentionné ici, on en a parlé dans une série de citations comme quoi
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1 Ljubinko Cvetic devait être la seule source. Mais M. Stamp n'a pas été
2 conscient du fait que ce que disait M. Cvetic ne pouvait pas cadrer avec ce
3 qui était présenté par les instances de commandement du MUP préparé par
4 Philip Coo. Nous en avons déjà traité, Monsieur le Président, et il nous
5 est dit que ce tableau a été inscrit et versé au dossier, à savoir pièce à
6 conviction P255.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.
8 M. IVETIC : [interprétation] Mais il me semble que ceci ne cadre bien avec
9 -- S'agit-il là pour chercher une victoire au lieu de défendre la justice
10 et la vérité ? Je ne sais pas. Mais une chose est sûre, ce qui est le cœur
11 même des assertions à l'encontre de M. Lukic c'est la pièce à conviction
12 P1505. Ljubinko Cvetic est d'ailleurs un élément-clé en tant que témoin
13 contre la police. Mais qu'est-ce qu'il a dit dans le cadre de cette pièce à
14 conviction, P1505 ? Rien. Pourquoi un tel élément de preuve n'aurait-il pas
15 été porté à la connaissance de cet homme témoin-clé pour essayer de faire
16 quelque chose parce que tout simplement l'Accusation n'est-elle pas sûre
17 que cette thèse devait être corroborée ? Aucun témoin, aucun expert n'a été
18 présenté lorsqu'il s'agit de parler de la pièce à conviction P1505 pour
19 parler évidemment de la portée de cet élément de preuve. D'autres témoins
20 présentés par l'Accusation ont permis de voir que la pièce P1505 n'a pas
21 été entrée en force et en vigueur. Certains de mes collègues non plus, on
22 ne se relayait que sur ce qui se fondait sur le document. Quelque chose de
23 tout à fait impossible, infaisable et incroyable.
24 Nous essayons évidemment d'embrasser le plus de documents possible
25 pour présenter cela. Les sujets dans le cadre desquels M. Cvetic a été
26 mentionné permettent de voir que Cvetic a reconnu qu'il n'a pas été membre
27 de l'état-major du MUP pour le Kosovo. Prenez par exemple la page 8 146 du
28 transcript. C'est tout à fait contraire à ce que disait l'Accusation qui
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1 fondait sa thèse sur la pièce à conviction 1505, lorsque l'Accusation
2 disait que tous étaient sous les ordres de Sreten Lukic. Comment se fait-il
3 que cet élément-clé tel ce témoin pourrait d'ailleurs être la négation ?
4 Pourquoi l'Accusation ne s'était-elle pas servie de ce témoin pour
5 corroborer cette thèse.
6 Parce que tout simplement M. Cvetic n'était pas un membre de l'état-
7 major du MUP, par conséquent il n'a pas été viable.
8 Sous serment, Cvetic a dit clairement qu'il n'a jamais été présent,
9 il n'a jamais pris part à des échanges d'information lorsqu'il s'agissait
10 du général Djakovic par exemple; c'est-à-dire de la VJ, et que le général
11 Djakovic a considéré comme étant le commandement conjoint. Chose que nous
12 pouvons constater à la page 8 080 du compte rendu d'audience, lignes 16 et
13 17. Il a dit au contraire qu'il avait le pli de s'occuper de certains
14 acronymes militaires ou d'une logique qui était la sienne. Il faut dire que
15 lorsqu'il traite de cela, M. Djakovic s'est servi du thème de commandement
16 concernant l'état-major du MUP et les réunions qui ont eu lieu.
17 A ce sujet, il faut noter que lorsqu'une question lui a été posée
18 comme quoi de savoir où officiait pour ainsi dire l'état-major du MUP, il a
19 dit que chaque office pouvait être considéré comme un poste de
20 commandement. Page 26 456, 26 521 du compte rendu d'audience. Djakovic
21 utilise le terme de commandement, ceci devrait être considéré avec
22 certaines réserves, sinon ceci pourrait induire en erreur d'interprétation
23 lorsqu'il faut savoir quels sont les critères qui étaient les siens pour
24 traiter et nommer quelque chose comme étant le commandement.
25 Revenons maintenant à Cvetic. La simple logique qui devait être à la
26 base de ces allégations et portant sur ces événements ne devrait pas avoir
27 une force probante, importante, sa crédibilité étant moindre. Ce que nous
28 avons pu apprendre de Cvetic pour ce qui est de ses actions en tant que
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1 chef du SUP à Kosovska Mitrovica, faut-il avoir en vue que cette personne a
2 été démise de ses fonctions en temps de guerre, parce que son SUP n'a pu
3 élucider aucun crime dans le territoire qui était le sien. Pièce à
4 conviction P1989. Il a dit qu'aucun policier n'a été jugé pour meurtre
5 commis contre des Albanais du Kosovo. Ceci évidemment n'a pas été corroboré
6 par des éléments de preuve sur la liste. Lorsqu'il a été démis de ses
7 fonctions, le SUP de Kosovska Mitrovica devait reprendre ses affaires pour
8 s'occuper de rapports de dénonciations pour qu'il y ait des actions menées.
9 C'est dans ce sens-là que servent les déclarations de M. Bogunovic ou bien
10 peut-être des réservistes JSO, des réservistes Goran Vasilinovic [phon] et
11 d'autres.
12 Il s'agissait évidement d'investigations, de procès contre des
13 auteurs de crimes, y compris des membres de police et des membres de VJ, y
14 compris certains éléments tels que nous les trouvons dans la pièce à
15 conviction 6D614. Tout simplement, Cvetic n'est pas crédible comparaison
16 faite avec une si grande quantité d'éléments de preuve qui disent le
17 contraire, surtout lorsqu'il s'agit de dire que lui, ce réfugié, se cachait
18 dans les caves du SUP, il ne s'est pas occupé des tâches qui étaient les
19 siennes.
20 Au paragraphe 276, l'Accusation, lorsqu'elle traite de Cvetic, ses
21 assertions, celles de l'Accusation devraient être rejetées. Il y a lieu de
22 dire qu'il n'y avait pas d'investigations faites alors que nous avons pu
23 prouver le contraire. Il y avait évidemment des investigations faites par
24 le MUP, notamment lorsqu'il s'agit de parler de crimes commis dont
25 témoignent M. Kostic, Furdulovic et même K-84 qui en témoigne. Il y a plus
26 de 20 000 documents d'ailleurs de ce dossier où il y a lieu de signaler
27 qu'il y avait aussi contre des civils des meurtres commis par la VJ et
28 surtout lorsqu'il s'agit de traiter des civils et des actions de la VJ. Il
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1 n'y a pas la possibilité de voir ce que disait M. Cvetic dans ces éléments
2 de preuve, par conséquent la déposition de M. Cvetic ne peut pas être
3 admise.
4 Le général Drewienkiewicz ou DZ, quelques commentaires que je dois
5 faire pour attirer l'attention de la Chambre sur quelques autres témoins
6 cités à la barre par l'Accusation. D'abord, l'Accusation ne peut pas
7 évidemment remédier au fait qu'ils n'ont pas cité à la barre un expert en
8 matière de police. Ensuite, citant à la barre évidemment des profanes qui
9 ne pouvaient pas savoir ce que faisait le MUP de Serbie. Le général
10 Drewienkiewicz se rappelle des choses dont il a pu avoir écho grâce à ces
11 interprètes lorsqu'il s'agit évidemment des MVK, cette commission de
12 vérification, du personnel militaire, il y a évidemment pas mal de choses
13 dites par Sreten Lukic, choses tout à fait inexactes. Fallait-il avoir des
14 éléments de preuve qui concernaient le rôle et l'autorité de Sreten Lukic.
15 Mais revenons au général Drewienkiewicz, rappelez-vous, s'il vous
16 plaît, que cet homme a été envoyé au titre d'adjoint, chef de la commission
17 de vérification, l'OSCE, c'était sa tâche principale, à savoir il a fallu
18 obtenir le retrait de certains effectifs du MUP de cette province.
19 Nous avons pu entendre des dépositions comme le KDOM qui fonctionnait
20 à la place de la commission des vérifications, qui procédait à des
21 négociations en son nom. Il y a là un arrangement de base qui concernait 10
22 021 policiers qui pouvaient rester. Il s'agit de l'accord au titre de
23 l'article 70, d'autres spécifiant une certaine diminution de force.
24 Shaun Byrnes, qui était venu à la tête du KDOM, qui lui, a assuré des
25 négociations, lui-même a remis en personne la documentation demandée. Le
26 général Maisonneuve, chef de la section de la commission de vérification du
27 secteur de Prizren subordonné au général Drewienkiewicz, en avait également
28 écho pour ce qui est de cet accord de base. Mais disons que le général
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1 Drewienkiewicz a passé le temps d'octobre à mars au cours de l'année à
2 venir dans le Kosovo-Metohija. Supposément, il n'y avait pas évidemment de
3 chiffres et de données. La commission n'avait aucune base sur laquelle elle
4 pouvait se fonder. Mais que faisait-il, Drewienkiewicz, pendant que tout le
5 monde en savait long sur cet accord, lui l'ignorait. Comment croire cela ?
6 Quelle est la vraie raison crédible de la présence ou du travail de
7 Drewienkiewicz dans le Kosovo-Metohija.
8 Faudra-t-il se rappeler que le général Drewienkiewicz a présenté
9 d'autres éléments de preuve. Drewienkiewicz n'a pas pu le prouver. Comment
10 pouvait-il se rappeler comment tout ceci s'était produit, parce que ceci ne
11 s'est pas produit du tout.
12 Ciaglinski, quant à lui, a pu constater à ce sujet ce qui prouve
13 d'ailleurs ce qui a été réfuté, Drewienkiewicz, peut-être avançant les
14 mêmes arguments à son égard, le colonel Kotur, de même. D'autres éléments
15 de preuve que nous avons, à savoir les déclarations de Pesic, de Loncar et
16 d'Abrahams qui démontrent que la présence de ce plan n'était qu'un mythe,
17 une façon dont il fallait procéder pour obtenir le soutien d'une guerre,
18 qu'il n'y avait pas autre chose qu'une chose concoctée par les services de
19 Renseignements allemands. Le tout à prendre avec précaution, notamment ce
20 que disait Drewienkiewicz. Ceci ne suffisait pas pour que quelqu'un soit
21 évidemment condamné à une peine de prison à vie.
22 Ensuite, pour parler de Shaun Byrnes. K-25 n'était pas en contact direct
23 avec l'état-major, il n'était pas en position de produire quelque
24 conclusion que ce soit lorsqu'il s'agit de parler du fonctionnement de
25 l'état-major, étant donné que c'était un subalterne. En août 1998, la VJ,
26 disait-il, n'a pas participé à des actions terroristes alors que nous avons
27 une foule d'éléments de preuve selon lesquels toutes les opérations étaient
28 légitimes, des actions légitimes de la VJ et du MUP. La crédibilité qui
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1 était la sienne est donc mise en cause.
2 Nous avons entendu également pas mal au sujet du rôle de Lukic au titre de
3 l'article 70 pour parler des documents produits par les Etats-Unis
4 d'Amérique. Chose incroyable, pourquoi qu'on dit une chose à l'opinion
5 publique alors que lorsqu'on parle à ses supérieurs on dit le contraire.
6 Quels étaient ensuite ses contacts avec l'UCK par exemple. Fallait-il
7 maintenir pour une période ultérieure des effectifs, des forces en vue
8 d'une offensive lancée par l'UCK au temps du printemps.
9 Le tout pourrait être retrouvé sur la base des documents de la RDB
10 pour ce qui est évidemment des contacts douteux de Byrnes et des membres de
11 l'UCK. Tout cela était considéré comme une pile de documents pour dire,
12 rien ne se passait de la sorte, tout cela est dû à mon traducteur. Je
13 n'étais pas là sur place, et cetera. Une dernière fois où j'ai pu entendre
14 une réfutation du genre sans explication quelconque, c'était lorsque le
15 président Clinton voulait expliquer la situation dans laquelle il se
16 trouvait avec Monica Lewinsky. Il me semble que la situation dont je viens
17 de parler me semblait similaire.
18 Ce qui est davantage révélateur ce sont les négociations de
19 Rambouillet. Nous avons entendu dire que Shaun Byrnes avait obtenu un
20 arrangement pour permettre à la direction de l'UCK de transporter par avion
21 des armes. Est-ce que vous avez entendu parler de ça ? Figurez-vous, de
22 quelle information il s'agit. A-t-on parlé d'une telle négociation de paix
23 en France ? Byrnes, qu'a-t-il dû dissimuler pour que le tout soit fait dans
24 deux aéroports, à savoir des criminels qui portent des armes. Voilà ce qui
25 traite de sa crédibilité. A mon sens, cela me paraît fort douteux.
26 Maintenant, parlons de Vasiljevic, Aleksandar Vasiljevic. On devrait
27 s'en occuper, ne serait-ce que pendant quelques secondes. Cette étoile du
28 témoin, évidemment de l'Accusation qui appartient au système de
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1 renseignement de la VJ. Il est vrai qu'il y a eu pas mal de changements
2 dans la déclaration de Vasiljevic depuis ce qu'il a fait sous serment et
3 depuis ce qu'il a fait dans l'affaire Milosevic pour traiter de la qualité
4 de sa déposition faite ici. Dans le cadre de l'affaire Milosevic, pour
5 traiter de Gnjilane, Milosevic a tout voulu reprocher à la SAJ qu'il
6 considérait comme des Skorpions. Ici, dans le cadre de la présente affaire,
7 il a dit que le groupe responsable était celui des forces armées de la VJ,
8 il n'a jamais dit que c'étaient des réservistes SAJ qui étaient la cause.
9 Mon collègue a indiqué que Vasiljevic était la cinquième roue de la
10 charrette, par conséquent, quelqu'un des plus subalterne à ces réunions-là.
11 Or, pourtant nous voyons qu'il a menti lorsqu'il a été confronté à des
12 comptes rendus d'audience. Fallait-il le croire, alors toutes les fois où
13 on constate qu'il avait menti, évidemment il changeait de déclaration et de
14 déposition pour devenir évidemment le témoin favori de l'Accusation. Alors
15 qu'on lui avait fait comprendre qu'il devait dire la vérité, prêt à dire la
16 non-vérité, on se pose la question si à un moment donné il allait tout
17 inverser.
18 Quelque chose de très fallacieux à quoi il n'a pas été remédié c'est
19 qu'il a dit qu'il y avait encore une personne qui, combinaison faite,
20 devait évidemment être condamnée à 150 années de prison. Un témoin de la
21 Chambre de première instance qui lui aussi a été chef des services de
22 Renseignements de la VJ a dit que la VJ ne disposait pas de telles
23 informations. Il s'agit du transcript 26 755, 26 756. Donc nous ne devons
24 pas admettre évidemment ce que disait Vasiljevic alors que nous n'avons pas
25 d'autres éléments de preuve pour dire que c'était la vérité.
26 Lors de la formation des unités JSO, Vasiljevic était déjà à la
27 retraite alors que Dimitrijevic était à la tête des services de
28 Renseignements. Qui faut-il croire ? Qui avait de bonnes informations et
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1 les meilleures informations, Vasiljevic ou Dimitrijevic ?
2 Une autre chose, c'est qu'il a été dit évidemment sous le coup de
3 serment par Vasiljevic, lui a traité de deux personnes, c'était le général
4 Stojanovic et Sergej Perovic. Les deux sous serment étaient cités à la
5 barre par le conseil de la Défense de Lazarevic pour dire que leur service
6 ne pouvait prouver aucune des allégations de crimes alors que Perovic
7 disait qu'il ne s'agissait pas de corps qui ont été transportés depuis la
8 gare de Kosovska Mitrovica. C'est ainsi que la déposition de Vasiljevic a
9 été diminuée.
10 A la fin, pour traiter des corps de Djakovica, pas Kosovska
11 Mitrovica, je m'excuse. Il s'agit de traiter encore une fois de la valeur
12 de la déposition de Vasiljevic diminuée du fait que Perovic se trouvait à
13 Djakovica même.
14 Vasiljevic a eu des raisons pour lesquelles il devait tenter de
15 modifier la vérité face à M. Lukic et concernant M. Lukic. Car faudra-t-il
16 se rappeler qu'il a été arrêté par le MUP, la RDB l'a mis en détention
17 parce qu'il était en conflit avec la RDB lors du conflit du Kosovo. Il y a
18 une autre raison, pendant qu'on devait réprimer et combattre la corruption,
19 laquelle lutte a été engagée par M. le général Lukic, après le meurtre du
20 président Djindjic il y avait l'opération Sabre, Vasiljevic avait quelqu'un
21 qui se trouvait impliqué dans cela. Ensuite, le général Tolic a été mis aux
22 arrêts dans le cadre de cette opération, la lutte à mener contre la
23 corruption.
24 L'Accusation présente une version incomplète et déformée du dossier
25 dans son mémoire en clôture. Je ne peux pas indiquer toutes ces absurdités
26 parce que je n'ai pas le temps, mais il faut que je mette en évidence
27 celles qui sont les plus flagrantes.
28 Mon confrère me dit que l'heure de la pause est venue. Je pensais que
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1 j'avais 15 minutes.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Normalement, on a une pause dans cinq
3 minutes, mais j'avais l'impression que vous en arriviez au terme de votre
4 plaidoirie. Si c'est le cas, on pourrait vous permettre d'en terminer et
5 qu'ensuite seulement on fera la pause.
6 M. IVETIC : [interprétation] Je pense que je peux effectivement y arriver.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.
8 M. IVETIC : [interprétation] S'agissant de l'état-major du MUP, la Chambre
9 trouvera dans le mémoire de l'Accusation l'affirmation selon laquelle David
10 Gajic, chef du RDB au Kosovo, était membre de l'état-major et que le chef
11 de la JSO, Legija, en était également un membre. Je voudrais vous demander
12 de prendre note du fait que les références qui sont données à l'appui de
13 ces affirmations qui semblent les conforter vont, en fait, complètement à
14 l'encontre de cela. On cite Joksic, qui nie le fait, et ceci prouve que
15 Gajic et Legija n'étaient pas membres de l'état-major. Or, le bureau du
16 Procureur s'appuie sur ces faits. Tout ce que dit la référence donnée,
17 c'est que Gajic était à la tête RDB au Kosovo et que Legija était à la tête
18 de la JSO. Mais il n'y a aucune des références qui est donnée qui soutient
19 l'assertion du bureau du Procureur qui est pourtant la pierre angulaire de
20 leur thèse. C'est totalement incroyable. Vous trouverez également dans le
21 mémoire quelque chose qui a trait à Gornje Obrinje. Vous verrez les
22 déclarations de Paunovic et d'autres témoins qui disent que les meurtres
23 qui ont eu lieu à Gornje Obrinje étaient des représailles de la VJ et du
24 MUP. Or, aucune des références données ne le confortent pas plus d'ailleurs
25 qu'aucun témoin ne l'a fait. On ne peut pas croire un seul mot de ce qui
26 figure dans le mémoire du bureau du Procureur, ça tourne en ridicule la
27 bonne foi et l'honnêteté.
28 Maintenant, examinons le paragraphe 197 plus attentivement, je précise que
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1 le précédent paragraphe était le paragraphe 62, le paragraphe ayant trait à
2 Gornje Obrinje.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, je refuse de ne pas
4 réagir aux allégations que vous lancez au sujet du manque de bonne foi de
5 l'Accusation. A plusieurs reprises au cours de ce procès, il est arrivé
6 qu'il y ait des inexactitudes dans le mémoire de M. Lukic sans pour autant
7 que vous vous voyiez en butte à des critiques de malhonnêteté. Est-ce que
8 vous pensez que c'est une façon appropriée de s'adresser à la Chambre que
9 d'utiliser de tels termes alors qu'a priori, cela n'est pas justifié ?
10 M. IVETIC : [interprétation] Bon, peut-être que le terme de bonne foi,
11 c'est allé un peu loin, mais je dis que quand on a présenté ces documents,
12 quand on a fait ces allégations et qu'on demande une peine de 20 ans de
13 prison, c'est-à-dire qu'on veut qu'une personne passe le reste de sa vie en
14 prison, c'est grave, et quand après deux ans de procès ces affirmations,
15 ces citations vont complètement à l'encontre du dossier, c'est vraiment
16 grave, surtout si c'est systématique, surtout si ça vient du Procureur. Je
17 demande donc à la Chambre de prendre note de ce qui est affirmé par
18 l'Accusation et des citations et des références qui sont données parce que
19 j'estime que l'Accusation est dans l'obligation de présenter une version
20 exacte des preuves. Et si les preuves nous disent une chose et vont dans le
21 sens de l'innocence de l'accusé et si, eux, ils déforment la chose pour que
22 ça indique la culpabilité de l'accusé, c'est véritablement préoccupant.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, nous allons nous
24 interrompre maintenant, parce que je veux réécouter ce que vous avez dit.
25 Ça n'a pas été consigné au compte rendu d'audience, et nous allons donc
26 faire une pause qui nous amènera jusqu'à 18 heures 05.
27 --- L'audience est suspendue à 17 heures 34.
28 --- L'audience est reprise à 18 heures 12.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, vous avez dit que
2 l'Accusation, dans ses interventions, tourne en ridicule l'honnêteté et la
3 bonne foi. Et cela, ce n'est qu'un exemple parmi tous les propos que vous
4 avez tenus qui peuvent être interprétés comme signifiant que le Procureur
5 entreprend délibérément d'induire en erreur les Juges de la Chambre. Nous
6 savons qu'à ce stade de la procédure, l'atmosphère est forcément très
7 tendue. Nous le comprenons, mais nous regrettons que vous n'ayez pas eu la
8 courtoisie de vous rendre compte que les propos que vous avez tenus ne sont
9 pas acceptables de la part d'un avocat comparaissant devant n'importe quel
10 tribunal. A ce stade tardif de la procédure, nous choisissons d'acter au
11 compte rendu d'audience que nous ne reconnaissons pas l'existence
12 d'éléments impliquant que, délibérément, l'Accusation a entrepris d'induire
13 en erreur les Juges de la Chambre.
14 Je vous demande de poursuivre.
15 M. IVETIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, j'ai dit que
16 j'avais simplement demandé aux Juges de la Chambre de prendre bonne note
17 des références données par l'Accusation pour vérifier si elles étayent ses
18 assertions, et tout ceci dans un seul objectif, c'est que la justice soit
19 rendue.
20 S'agissant des édifices à caractère religieux, je me contenterai de dire
21 que nous avons entendu Vojinovic, le chef du SUP de Prizren, qui nous a
22 expliqué que sur la quinzaine de mosquées qui se trouvaient dans sa
23 municipalité, il n'y en a pas une seule qui a été endommagée, page 24 918
24 du compte rendu d'audience, pièce 6D1532. Maintenant, je vais passer à la
25 dernière partie de mon intervention, Sreten Lukic.
26 Je ne vais pas m'appesantir sur l'état de santé de mon client. Ceci a
27 été élaboré dans toutes les écritures que nous avons présentées en vertu
28 d'obtenir sa mise en liberté provisoire, et ce, au début de l'affaire. La
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1 Chambre connaît ces éléments, d'autre part, nous vous engageons à demander
2 des informations supplémentaires au sujet de son état de santé. Sreten
3 Lukic a joué un rôle-clé dans les enquêtes menées par les autorités serbes
4 au sujet des crimes de guerre et pas seulement au Kosovo, mais partout
5 ailleurs en ex-Yougoslavie. Il a déployé le maximum d'efforts pour
6 renforcer l'état de droit et pour établir une véritable coopération avec,
7 notamment, le TPIY. Vous avez entendu Kostic, Furdulovic, l'ancien premier
8 ministre Zivkovic et même le Témoin initié K-84 à charge, tous ces gens-là,
9 quand ils sont venus déposer, ont dit que Sreten Lukic, c'était grâce à lui
10 que le MUP avait décidé de faire la lumière sur des crimes et de les
11 poursuivre, même si ça concernait des gens qui travaillaient pour le MUP.
12 Il y a actuellement des poursuites qui sont en cours en Serbie et qui
13 concernent parfois des policiers au sujet de crimes commis au Kosovo,
14 notamment à Suva Reka ainsi que dans d'autres lieux cités à l'acte
15 d'accusation, et tout cela grâce au courage de Sreten Lukic, grâce à son
16 éthique, à son professionnalisme, le fait qu'il ait encouragé, qu'il ait
17 donné la possibilité à la police de mener des enquêtes sur tout le monde, y
18 compris les membres du MUP.
19 Vous avez entendu parler des efforts entrepris sous la houlette de
20 Lukic pour établir le dossier Kosovo-Metohija, vous savez que le MUP a mis
21 en place une coopération pleine et entière avec le TPIY avant même que le
22 gouvernement de la Serbie n'ait voté une loi dans ce sens qui oblige à la
23 coopération avec le TPIY. Lukic, comme tout policier digne de ce nom en
24 Serbie, s'est sacrifié pour le bien commun et pour faire respecter la loi.
25 Ce qu'il a fait, ce n'était pas très populaire au sein du MUP quand il en
26 est devenu le chef. Il a entrepris de le réformer, d'arrêter des individus
27 et de réprimer la corruption dans le cadre de l'opération Sabre, et ça
28 concernait, notamment des hommes politiques, des gens ayant des liens avec
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1 le gouvernement. Je souhaiterais vous rappeler les éléments fournis par un
2 témoin protégé en l'espèce selon lesquels Lukic a fait l'objet de menaces
3 de mort par des Serbes du fait de la position qu'il avait prise au sujet
4 des enquêtes à mener sur les crimes du passé. Les changements démocratiques
5 qui ont eu lieu en Serbie ont été salués et soutenus par l'Occident, y
6 compris par le TPIY. Et dans cette atmosphère, c'est Sreten Lukic qui était
7 le mieux à même de réformer le MUP à la tête duquel il a été nommé. Je
8 pense que si vous le condamnez, il faut penser au signal que vous envoyez
9 au monde extérieur ce faisant au sujet de ceux qui préfèrent choisir
10 l'option la plus difficile en faveur du droit, encourager les enquêtes et
11 les poursuites après les crimes. Je pense que si vous le condamnez, cela
12 risque de remettre en question ce type de volonté.
13 Ceci reviendrait à récompenser l'Accusation, mais cela reviendrait
14 également à décourager ceux qui choisissent la voie de la vérité si au bout
15 du compte on est mis en accusation, on est déclaré coupable uniquement
16 parce qu'on porte le même uniforme que certains ou parce qu'on s'est
17 associé à certaines personnes.
18 Ce serait la première fois qu'un subordonné comme Lukic serait mis en
19 accusation pour des crimes dont on dit qu'ils ont été commis par des
20 officiers supérieurs tels que Vlajko Stojiljkovic, qui est décédé
21 aujourd'hui; l'adjoint du ministre et chef du RJB, le général Djordjevic;
22 le ministre adjoint et chef de la police et de l'administration et chef du
23 PJP, le général Obrad Stevanovic; l'adjoint du ministre et le chef de
24 l'UKP, le général Dragan Ilic.
25 Lukic, on ne peut pas le mettre à la place de ces personnes juste parce que
26 l'un d'entre eux est décédé et parce que le bureau du Procureur a décidé de
27 faire de Lukic la figure emblématique de cette affaire. L'Accusation a fait
28 une erreur parce que, Lukic, il n'a pas commis de crime. Tout ce que nous
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1 montrent les éléments du dossier c'est que c'est une victime, et nous
2 demandons à la Chambre de prononcer l'acquittement de M. Lukic au titre de
3 tous les chefs de l'acte d'accusation. Et je voudrais dire que, pour moi,
4 ça a été un privilège, privilège partagé par Me Branko Lukic, que
5 d'intervenir dans l'intérêt de M. Sreten Lukic dans cette affaire, un homme
6 dont nous estimons qu'il est d'une grande justice.
7 Je souhaiterais porter deux corrections au compte rendu d'audience.
8 Je peux vous les donner tout de suite si la Chambre estime qu'il y a lieu
9 de faire une correction, page 73, ligne 6, je parlais du général Tomic, T-
10 o-m-i-c. Ce n'est pas le même nom de famille que l'on voit apparaître au
11 compte rendu d'audience, et puis à la page 71, ligne 22, j'ai fait
12 référence à la JSO, alors qu'on voit au compte rendu la mention JAS. Voilà.
13 J'en ai terminé pour ce qui est de la Défense de M. Lukic.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.
15 Me Lukic avait dit qu'il souhaitait éventuellement rajouter quelque
16 chose, préciser ou corriger l'omission qui a été faite puisque vous n'avez
17 pas fait référence au paragraphe 72(C).
18 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.
20 M. LUKIC : [interprétation] J'aurai besoin d'une dizaine de minutes.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.
22 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
23 Voilà de quoi il s'agit. Il s'agit de déportation à partir de Srbica,
24 article 72(C), village Vocnjak, Kladernica, Turicevac, Izbica, Tusilje et
25 Cirez. Au début des bombardements de l'OTAN, ça se trouvait dans le secteur
26 du déploiement de l'UCK, chose qui a été confirmée et expliquée par le
27 témoin du bureau du Procureur, Byslim Zyrapi. Dans certains de ces villages
28 il y avait des QG de l'UCK comme par exemple le village de Turicevac où
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1 l'UCK avait son QG dans le bâtiment de l'école, et des gens venaient
2 constamment rejoindre leur rang. Nous avons cela au P2241, déclaration de
3 Hadije Fazliu. Le témoin Hadije Fazliu a dit que le 26 mars les forces
4 serbes ont pilonné le village de Turicevac mais qu'il n'y a pas eu de
5 blessés et qu'ils sont allés au village de Tusilje, ce qui constituait un
6 retrait en profondeur des territoires tenus par l'UCK. Mais pour ce qui est
7 des civils capturés, c'est M. Zyrapi qui en a témoigné au IC105, et il a
8 dessiné et expliqué le retrait de l'UCK et des civils vers le secteur F.
9 C'est l'UCK qui a retiré les civils et qui s'en servait en guise de
10 bouclier humain. Le témoin Fazliu, dans sa déclaration, dit que le 29 mars
11 dans le village de Tusilje il y a eu des forces de la police et des
12 militaires, et au sujet des policiers ils portaient, dit-il, des uniformes
13 bleu foncé de camouflage. Les témoins K-25 et K-79 ont dit cela, puis le
14 témoin de la Défense, Vladimir Ilic, Zivaljevic et Nikcevic Radojica et
15 autres ont dit que les unités de la police qui ont participé à ces actions
16 antiterroristes, à savoir les PJP, en 1999 portaient des uniformes de
17 camouflage vert avec des gilets pare-balles où l'on avait une inscription à
18 l'avant et à l'arrière disant "police".
19 Les villages de Tusilje et Turicevac se trouvaient dans la zone des combats
20 à l'époque lors de la conduite des opérations antiterroristes dans le
21 secteur de Drenica. Il s'agit de l'ordre numéro 455/73, il s'agit de la
22 pièce 1968. Le témoin a dit qu'on leur avait dit d'aller à Klina, ce qui
23 constituait un retrait des civils de la zone des activités de combat. Le
24 témoin a affirmé qu'elle et les autres, en passant par le village de
25 Turicevac, sont restés au village et qu'il n'est venu aucune espèce de
26 force mais qu'ils n'avaient pas de vivres. Une fois de plus, il s'agit de
27 la pièce P2241. Lorsque Hadije Fazliu indique que le 1er avril il est venu
28 des policiers dans des véhicules civils et qu'ils portaient des uniformes
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1 et qu'ils avaient demandé que les citoyens se rendre à Glina [phon], la
2 femme témoin ne décrit pas les uniformes et qualifie ces gens de policiers,
3 ces gens qui étaient venus à bord de véhicules civils. Donc il n'y a aucun
4 élément fiable disant qu'il s'agissait de policiers membres du ministère de
5 l'Intérieur de la République de Serbie.
6 Une fois arrivé à Jasenica, le jour d'après ils sont arrivés à Brocna. Elle
7 dit qu'au passage-frontière on ne leur avait pas demandé leurs papiers, pas
8 plus qu'on ne leur avait demandé de l'argent. Dans toute la déclaration
9 qu'elle a faite, le témoin n'a indiqué que quiconque ne lui a donné l'ordre
10 à elle ou à d'autres civils qu'il fallait aller en Albanie. Si on se penche
11 sur les dates des déplacements et si on compare cela avec les déclarations
12 de Milazim Thaqi dont il découle que dans la même période depuis Djakovica
13 et Izbica il y avait sa famille qui se déplaçait et que les Serbes les ont
14 fait revenir vers le village de Tusica, à savoir Kladernica et Izbica. Je
15 me réfère à la pièce P2246, déclaration de Milazim Thaqi, page 6,
16 paragraphe 5. Le témoin n'a nulle part été arrêtée par la police. Elle n'a
17 pas été suivie non plus, donc elle a pu revenir et personne ne l'a forcée à
18 aller vers l'Albanie. Rrahmani Xhevahier, témoin du bureau du Procureur, a
19 dit que deux jours après le bombardement de son village de Bukos avec sa
20 famille, au sens large du terme, est allé vers Kozica. De son propre gré,
21 elle a quitté son village à elle. Pièce à conviction P2239, page 2,
22 paragraphe 6.
23 On voit partant de là que la seule raison du départ du village est le début
24 des bombardements de l'OTAN. Trois jours après, ils ont quitté Kozica pour
25 aller vers Srbica et la police les a fait revenir, et ils ont décidé
26 d'aller à Glodjane chez l'oncle de son époux. Ils sont restés là-bas dix
27 jours. Donc ils ont décidé eux-mêmes où est-ce qu'il fallait aller. Par la
28 suite, ils décident de rentrer chez eux à Kozica.
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1 Le témoin de la Défense Bogunovic Nenad est venu témoigner et dire qu'à
2 Cirez et Kozica vers le 29 mars 1999, il n'y avait aucune unité de la
3 police. Il s'agit de la pièce 6D1614, paragraphe 97. Le témoin Rrahmani,
4 dans sa déclaration, dit qu'à la mi-avril pendant qu'ils étaient à Kozica,
5 qui se trouve très haut dans les montagnes, ils auraient vu des unités à
6 Cirez, à savoir trois ou quatre camions et plusieurs chars. Dans le secteur
7 de Kozica et Cirez, il n'y avait pas de membres du MUP et on le voit dans
8 l'ordre de la 27e Brigade motorisée, article 5, point 11, où l'on dit qu'il
9 y a une activité de reconnaissance autonome des militaires sans le MUP. Il
10 s'agit du P2239. Je m'excuse. Mis à part le P2239, on le voit également
11 dans la pièce 5D1029. Dans le rapport de combat de la 37e Brigade
12 motorisée, au paragraphe 4 daté du 19 avril, il est constaté que le 18
13 avril dans la soirée, l'OTAN a ciblé des unités de la brigade situées dans
14 le village de Cirez, et c'est au 5D1023. Dans un autre rapport de la 27e
15 Brigade motorisée daté du 21 avril 1999, article 2, il est dit que la 3e
16 Brigade motorisée était déployée dans le secteur du village de Cirez. Il
17 s'agit du 5D1087.
18 On dit que dans le secteur de Kozica et de Cirez, ni début avril non plus
19 il n'y avait des unités du MUP, et c'est confirmé par un ordre émanant de
20 la 37e Brigade motorisée daté du 4 avril 1999. Il s'agit du P2813,
21 paragraphe 4, alinéa 1.3. (expurgé)
22
23
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce sera fait. Continuez.
25 M. LUKIC : [interprétation] Le témoin K-24 du bureau du Procureur, dans sa
26 déclaration au sujet des événements de Cirez de novembre 1999, a dit qu'il
27 y avait un policier portant un uniforme de camouflage bleu foncé. Il s'agit
28 du P2584. On a montré des vêtements noirs et on a dit que c'étaient des
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1 vêtements portés par ce policier. Compte rendu d'audience 4 792, lignes 7 à
2 22. Dans sa déclaration, elle n'a pas parlé de quiconque portant des
3 couvre-chefs, ce n'est que sept ans après dans la déclaration de 2006 que
4 cette précision a été faite et elle a dit qu'ils avaient sur leur uniforme
5 un aigle de tête ainsi qu'un tigre. Le témoin a indiqué qu'il n'avait aucun
6 élément de preuve montrant que les membres du MUP de Serbie avaient des
7 insignes avec un aigle de bicéphale et une tête de tigre.
8 Le témoin du bureau du Procureur Salihu Abdullah en expliquant qu'il a été
9 fait prisonnier avec un autre groupe le 29 mars 1999, a dit que des membres
10 des forces serbes portaient des rubans bleus, jaunes ou rouges. Il s'agit
11 de la pièce P2255. Pour ce qui est des membres du MUP, les rubans ont
12 commencé à être portés le 19 avril 1999, comme on l'a déjà dit aujourd'hui,
13 et n'a jamais été porté trois couleurs en même temps, on peut le voir dans
14 la pièce 6D237.
15 Le même témoin, dans sa déclaration, indique que lorsqu'ils ont été amenés
16 à Glogovac, ils auraient été battus et que le policier qui les a escortés,
17 a autorisé un paramilitaire à mettre de côté Rahman Topilla pour le tuer.
18 Il a également dit qu'ils ont été interrogés par l'inspecteur Momo Peljevic
19 et qu'il aurait donné instruction à un autre policier de les tabasser. Le
20 témoin Petar Damjanac, qui était un témoin de la Défense et qui était à la
21 tête de ce MUP à l'époque et qui est venu à Glogovac quelques jours après
22 le 1er mai, n'a jamais eu vent d'un tel événement.
23 Pour ce qui est de l'inspecteur Momo Peljevic, le témoin Damjanac
24 affirme qu'il n'y avait aucun inspecteur répondant à ce nom au OUP de
25 Glogovac pas plus qu'au SUP de Pristina, compte rendu d'audience 23 769,
26 lignes 7 à 15.
27 Le témoin Salihu à la fin de sa déclaration, dit qu'à la fin de la
28 guerre et lorsque les Serbes se sont retirés, il est retourné à son village
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1 de Baks et sa famille se trouvait, a-t-il dit, encore à Vucitrn. Sa famille
2 était tout le temps à Vucitrn. Le témoin Salihu explique dans sa
3 déclaration qu'il a été capturé le 29 avril 1999 dans une opération des
4 forces serbes qui avait duré trois jours, il s'agit de la pièce P2255, et
5 lui et les autres se seraient trouvés dans un triangle entre Baks, Vrboc et
6 Cirez. À l'époque sur ce territoire, il avait la 37e Brigade motorisée qui
7 réalisait et conduisait des opérations antiterroristes sans la
8 participation des unités du MUP, chose qu'on peut voir dans un rapport de
9 la 37e Brigade motorisée, pièce à conviction 5D1036 et 5D1058.
10 Ces allégations sont étayées par un rapport de combat du Corps de Pristina
11 daté du 2 mai 1999, il s'agit du 6D1470, paragraphe 1, dernier alinéa. Ce
12 témoin explique le type d'uniforme des gens qui avaient tué des
13 prisonniers, et bien qu'il ait été à proximité immédiate, il n'a vu aucun
14 insigne sur les uniformes qui pourrait placer cela en corrélation avec les
15 membres de la police. Il explique dans sa déclaration que tous ces membres
16 des paramilitaires avaient un emblème à Seselj sur leur manche et des
17 insignes métalliques carrés avec une espèce d'insigne bleue, aucun uniforme
18 policier n'avait des insignes à Seselj, ni un carré métallique avec une
19 couleur bleue dessus. Voilà, merci, ce sera tout, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suppose que vous avez dit quelque
21 chose après le terme "insigne" vous ne vous êtes pas tout simplement
22 effondré, je crois, donc merci, Maître Lukic pour la présentation de vos
23 arguments.
24 Vous avez déjà entendu dire qu'il y aura des arguments en réplique de la
25 part de l'Accusation. Je souhaite demander à l'équipe de la Défense si un
26 de ses membres souhaite réfuter les arguments de l'Accusation
27 susmentionnés.
28 Maître Bakrac.
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1 M. BAKRAC : [interprétation] Monsieur le Président, comme vous pouvez
2 l'imaginer, je ne sais pas ce que mon éminent confrère, M. Hannis, va dire,
3 beaucoup a été dit aux dépens de mon collègue Me Cepic qui est maintenant
4 de l'autre côté du prétoire. Je crois qu'il y a beaucoup d'éléments qui ne
5 requièrent pas de commentaires particuliers. Dix à 15 minutes, c'est tout.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce qui m'intéresse, c'est si vous
7 souhaitez réfuter quelque chose qui a été avancé par un autre conseil de la
8 Défense.
9 M. BAKRAC : [interprétation] Tout à fait. Pour ce qui est de la sixième
10 équipe de la Défense, nous allons prendre la parole pendant dix à 15
11 minutes.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Fila.
13 M. FILA : [interprétation] Pour ce qui est de mon collègue, Me Ackerman,
14 deux à trois minutes; j'espère que je n'aurai pas à décevoir M. Hannis.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Aleksic.
16 M. ALEKSIC : [interprétation] Monsieur le Président, en rapport avec la
17 Défense de Lukis, j'ai deux ou trois références au compte rendu que je
18 souhaite citer par rapport à ce qu'a dit mon collègue, Me Lukic.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce que nous avons décidé de faire
22 c'est comme suit : entendre la duplique de la Défense à ce stade parce qu'à
23 ce moment-là quelque chose sera peut-être dit qui pourrait avoir une
24 incidence sur les éléments à charge de l'Accusation au moment où ce sera
25 trop tard, donc souhaiter traiter dans la confidentialité ce que vous
26 souhaitez dire sur tout autre membre de la Défense. Je crois que le premier
27 qui souhaite parler c'est Me Fila. Donc nous allons vous entendre sur ce
28 que vous voulez dire en réfutation aux propos de Me Ackerman.
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1 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, comme je l'ai dit, je
2 serai très bref. Me Ackerman a dit que lors de la réunion à Nis Pavkovic a
3 évoqué le fait qu'il ait demandé de cesser son travail -- j'essaie
4 d'accélérer les choses. C'est la pièce P1468, il s'agit d'un procès-verbal
5 du commandement conjoint du 26 octobre 1998. Mon confrère, Me Ackerman, a
6 dit que Pavkovic avait demandé au commandement conjoint : "Cessez le
7 travail," et Pavkovic a fait une demande auprès du commandant de la 3e
8 Armée pour que le commandement conjoint cesse ce qu'il était en train de
9 faire. C'est peut-être une erreur, mais Me Ackerman a indiqué que Pavkovic
10 était en réalité le commandant à Nis, mais à ce moment-là cela n'était pas
11 le cas, il ne faisait pas partie de la 3e Armée. Il n'a été nommé que par
12 la suite, il occupait un autre poste à ce moment-là, et il faudrait
13 regarder le document de près, il s'agit d'un document de l'Accusation, il
14 s'agit d'une lettre du gouvernement fédéral d'où il découle que suite à cet
15 échange ces documents militaires et ce soi-disant travail du commandement
16 conjoint ont été envoyés au secrétaire de Slobodan Milosevic, P1317, et que
17 le commandant conjoint a cessé de fonctionner à ce moment-là.
18 Je crois qu'il faudrait également noter que Minic a présidé cette réunion
19 qui était l'avant-dernière réunion, qui prouve que ce que l'Accusation a
20 dit est inexact étant donné qu'ils ont indiqué que Minic a présidé le
21 commandement conjoint jusqu'au 14 septembre 1998, alors que c'était plutôt
22 jusqu'au 28 octobre 1998. Donc Minic était le président du commandement
23 conjoint pendant toute la durée de son existence. Ceci est clair compte
24 tenu du fait qu'il présidait les réunions, il les ouvrait et les concluait.
25 Le troisième point qui doit être soulevé en guise de conclusion par rapport
26 aux propos tenus par mon confrère Me Ackerman, c'est que le commandant
27 conjoint pouvait être comparé à l'état-major général des Etats-Unis. Je
28 dois préciser que l'état-major américain ne comporte aucune unité de la
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1 police, mais je concède qu'il puisse y avoir une coordination entre l'armée
2 et le MUP en temps de guerre.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Maître Fila.
4 Maître Aleksic.
5 M. ALEKSIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Très
6 brièvement. Aujourd'hui, mon confrère Me Lukic, à la page 7 à partir des
7 lignes 21 et jusqu'à la page 8, ligne 4, a évoqué la déposition de Milorad
8 Djakovic à propos de planification, et mon confrère Me Lukic a dit que les
9 extraits de ces décisions et de ces cartes ont été remis à l'état-major du
10 MUP ou plutôt directement aux unités de la PJP, et c'est sur cette base-là
11 qu'il a dit que les unités de la PJP et les commandants ont agi. J'ai
12 demandé à la Chambre de regarder les dépositions de Milorad Djakovic, pages
13 26 396 à 26 398, et plus particulièrement la page du compte rendu 26 298,
14 lignes 2 à 13, où le général Djakovic a répondu aux questions du Président
15 de la Chambre et a dit quelque chose quelque peu différent. Il a dit que
16 ces documents qui ont été envoyés par le Corps de Pristina constituaient
17 les éléments essentiels pour le commandant de l'unité. Il fallait qu'il y
18 travaille pendant cinq ou six heures avant de pouvoir prendre sa décision
19 lui-même, et c'est là-dessus qu'il fondait son action. Donc c'est le
20 commandant de l'unité de la PJP qui a donné l'ordre et c'est après cela que
21 la PJP agissait.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suppose que vous n'avez rien à dire
23 en réplique aux arguments présentés par Me Fila; c'est exact ?
24 M. ALEKSIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Cepic.
26 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je serai très
27 bref et je vais évoquer les propos de mes confrères Ivetic et Lukic. Je
28 vais commencer par la décision qui porte sur la création de l'état-major du
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1 MUP, pièce P1505. Mon confrère, Me Lukic, a indiqué que ceci n'a jamais été
2 mis en œuvre et nous n'avons pas trouvé de preuve à cet égard, en tout cas,
3 dans ce procès. Je souhaite évoquer la déposition d'un des témoins à
4 décharge ainsi que la déposition de Philip Coo, à la page 12 071 à 12 073
5 et plus tard 12 074 à 12 075, qui précise ce qu'il a trouvé dans les
6 archives du MUP. Il y avait quelques rapports, il n'y avait pas tous les
7 rapports qui auraient dû y être, que les étagères étaient vides, alors que
8 dans les archives militaires il y avait énormément de documents qui avaient
9 été bien classés. Un des témoins à décharge du général Lukic dans sa
10 déclaration qui est sous pli scellé, 6D1631, au paragraphe 120, a expliqué
11 très clairement que les rapports du PJP ont été demandés mais n'ont pas été
12 trouvés, et des efforts ont été déployés pour les trouver.
13 Nous avons constaté qu'ils existent parce que nous avons trouvé la pièce
14 5D1418, qui est une dépêche envoyée par une des brigades de la police et
15 envoyée au commandement supérieur --
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Maître
17 Lukic, puisqu'on ne peut pas entendre la traduction à cause de vos propos.
18 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]
19 M. LUKIC : [interprétation] Je ne vois pas en quoi ceci ait un quelconque
20 lien avec nos arguments en clôture. S'il s'agit d'une analyse de notre
21 mémoire en fin de procès, soit, mais ça ne doit pas être présenté ici comme
22 élément en réplique.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, il ne s'agit pas d'une réplique à
24 votre argument à propos de la pièce P1105 [comme interprété] -- je crois
25 que Me Cepic ne s'est pas départi de ce qu'il était en droit de faire. Il
26 sait qu'il y a des restrictions imposées à ce stade des débats, et ce qui a
27 été dit jusqu'à présent cadre tout à fait avec le Règlement.
28 Veuillez poursuivre, Maître Cepic.
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1 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il s'agit de
2 planification, d'organisation et de contrôle, c'est la raison pour laquelle
3 je me suis levé. Nous avons un exemple au 5D1418, il s'agit d'un rapport de
4 combat du 25 mai 1999. Je souhaite attirer votre attention dessus pour
5 éviter de perdre du temps. Je souhaite également évoquer les allégations
6 faites par Me Ivetic, à savoir que les organes militaires judiciaires
7 n'existaient ou n'ont pas commencé à fonctionner avant la fin de l'état de
8 guerre, ce qui ne correspond pas à la vérité. Non seulement nous avons des
9 documents qui l'attestent, mais nous savons, et c'est un fait qui ne peut
10 pas être remis en cause, que les organes judiciaires de l'armée ont
11 continué à fonctionner jusqu'en 2004, voire 2005. Une analyse en profondeur
12 sur tout ceci se trouve dans le document 4D171, qui était un rapport du
13 procureur militaire, Stanimir Radosavljevic, où dans l'avant-dernier
14 paragraphe il parle des enquêtes qui ont été menées par rapport au site
15 d'Izbica qui est évoqué ici.
16 Pour conclure, je dois dire que Gordana Tomasevic, un témoin à charge, a
17 également évoqué ce point et a évoqué les organes civils qui ont commencé à
18 instruire une enquête dans ce sens. Merci, je n'ai rien à ajouter.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Cepic.
20 Maître Ivetic et Maître Lukic, avez-vous des éléments en duplique que vous
21 souhaitez faire valoir par rapport à ce qui vient d'être dit ?
22 M. LUKIC : [interprétation] Simplement ce document 5D1418, je crois, est
23 suffisamment clair et ne nécessite pas d'explication particulière, ceci n'a
24 rien à voir avec la planification ou les actions menées.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, c'est un moment
26 opportun pour lever l'audience, me semble-t-il.
27 M. HANNIS : [interprétation] Je suis d'accord, mais ceci enlèverait sept
28 minutes à mon temps de parole demain.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est inutile de vous enlever ce
2 temps. Comme nous vous l'avons déjà précisé, vous devez prendre le temps
3 que vous jugez nécessaire. Vous avez déjà précisé que des restrictions ont
4 été placées sur votre temps de parole, mais ceci ne nous est pas très utile
5 lorsque nous devons traiter de questions -- s'il s'agit de points
6 importants et significatifs, à ce moment-là oui. Si cela a trait à
7 l'affaire en question, il faut que vous nous en fassiez part, mais ce, dans
8 un cadre raisonnable.
9 Nous avons changé les horaires de demain. Nous sommes désolés parce
10 que nous ne pouvons pas siéger plus tôt, nous sommes tenus par l'heure de
11 10 heures 45. Par les voix officieuses, on nous a indiqué que nous
12 pourrions peut-être terminer la présentation des arguments demain dans la
13 matinée, mais il y aura encore du temps dans l'après-midi si cela s'avère
14 nécessaire.
15 Nous allons lever l'audience jusqu'à 10 heures 45 demain matin.
16 --- L'audience est levée à 18 heures 55 et reprendra le mercredi 27
17 août 2008, à 10 heures 45.
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