Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 16 novembre 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 30.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le prétoire

  6   et autour du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, pouvez-vous citer le numéro de l'affaire, s'il vous

  8   plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 10   les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko

 11   Mladic.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 13   La Chambre a été informée que la Défense voulait soulever une question

 14   préliminaire.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, vu le programme

 16   aujourd'hui, qui est assez chargé, j'ai parlé avec le bureau du Procureur,

 17   et nous nous sommes mis d'accord pour ce qui est des pièces connexes

 18   concernant ce témoin pour que ces pièces soient déposées par écrit.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Il n'y a pas de problème pour faire

 20   cela par écrit. Est-ce qu'il y a d'autres questions préliminaires ? Non.

 21   Dans ce cas-là, est-ce qu'on peut faire entrer le témoin dans le prétoire,

 22   s'il vous plaît.

 23   [Le témoin vient à la barre]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Thomas.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 26   Juges.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de continuer, j'aimerais vous

 28   rappeler que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous


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  1   avez prononcée au début de votre déposition, et je voudrais vous inviter

  2   encore une fois à ralentir votre débit lorsque vous répondez à des

  3   questions et de ménager une pause entre les questions et les réponses. Me

  4   Ivetic va se comporter de la même façon pour vous donner un exemple.

  5   LE TÉMOIN : FRANCIS ROY THOMAS [Reprise]

  6   [Le témoin répond par l'interprète]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, continuez.

  8   M. IVETIC : [interprétation] Merci.

  9   Contre-interrogatoire par M. Ivetic : [Suite]

 10   Q.  [interprétation] Monsieur Thomas, j'aimerais vous poser maintenant des

 11   questions concernant certaines des tactiques que vous avez pu voir, les

 12   tactiques utilisées par les forces de la présidence de Bosnie. Ai-je raison

 13   de dire qu'à plusieurs occasions, la Mission des observateurs militaires

 14   des Nations Unies devait se plaindre à la présidence puisque les mortiers

 15   de ces forces de la présidence étaient placés trop près des bâtiments des

 16   Nations Unies ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Maintenant, pour ce qui est du paragraphe 20 de votre déclaration,

 19   c'est P503, et c'est à la page 15, vous parlez des cas où les forces de la

 20   présidence de Bosnie auraient tiré sur les Serbes en essayant de provoquer

 21   des ripostes par les Serbes. Dans des cas comme cela, est-ce que vous avez

 22   estimé qu'il était plausible ou raisonnable qu'un commandant de

 23   l'artillerie locale du côté des Serbes de Bosnie aurait pu avoir une sorte

 24   d'autonomie pour ce qui est de la prise de décisions concernant les

 25   ripostes sans demander l'autorisation de ses supérieurs pour ce qui est

 26   d'une telle attaque ?

 27   R.  Je ne peux pas répondre à cette question avec certitude.

 28   Q.  Merci. Est-ce qu'on peut brièvement passer au document 1D424, Monsieur.


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  1   Il s'agit du compte rendu de votre témoignage dans l'affaire Karadzic, et

  2   il nous faut la page 5 de ce document de la liste 65 ter.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour faciliter les choses aux

  4   générations à l'avenir, c'est à la page 2, la ligne 12, paragraphe 20, la

  5   page 5. Poursuivez.

  6   M. IVETIC : [interprétation] Peut-on afficher les lignes 16 à 18.

  7   Q.  Monsieur, vous parlez de l'artillerie des Serbes de Bosnie, et vous

  8   dites, je cite :

  9   "Non seulement ils tiraient sur une cible pour laquelle nous ne pouvions

 10   pas déterminer qu'il s'agissait d'une cible militaire, mais ils ne

 11   pouvaient pas non plus analyser ce qu'ils avaient fait."

 12   Pour ce qui est de ce que vous avez dit dans cette partie du document, est-

 13   ce que je peux comprendre que les Serbes ne pouvaient pas voir où leur obus

 14   était tombé et ce qui étaient les conséquences de cela ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Hier, pendant l'interrogatoire principal, le Procureur vous a posé les

 17   questions concernant la période de temps précédant le pilonnage de Markale.

 18   J'aimerais vous poser des questions concernant le pilonnage de Markale I du

 19   5 février 1994. Ai-je raison de dire que, selon vous, l'enquête n'a pas

 20   donné de conclusion définitive pour ce qui est de savoir de quel côté cet

 21   obus fatal a été tiré ?

 22   R.  Pour ce qui est des documents que j'avais vus, et je ne sais pas si

 23   j'avais vu tous les documents, je maintiens toujours cette conclusion.

 24   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Ai-je également raison de dire que vous

 25   étiez au courant d'un autre incident, et c'est important, un incident où un

 26   civil aurait été tué sur la route pour l'aéroport au croisement avec la

 27   route de Dobrinja, qu'un tir de tireur embusqué l'a touché et qu'à la

 28   proximité se trouvait une équipe de la CNN ?


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  1   R.  Oui. Cet incident est l'incident par rapport auquel on a eu seulement

  2   cette conclusion, mais il n'y avait eu jamais de preuve. Le convoi de la

  3   CNN passait par là dans le laps de quelques minutes.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que la question est toujours

  5   très factuelle. Ce n'était pas la question de savoir s'il y avait un

  6   incident où se trouvait l'équipe de la CNN.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Je n'ai pas répondu à cette

  8   question de façon correcte.

  9   L'équipe de la CNN a passé par ce croisement après quelques minutes.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.

 11   M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche à présent le document

 12   -- excusez-moi. J'attends que l'interprétation en B/C/S se termine.

 13   J'aimerais qu'on affiche le document 1D0043 [comme interprété] dans le

 14   système du prétoire électronique, et il nous faut afficher la page numéro

 15   21 dans la version en anglais, et la page 26 dans la version en B/C/S.

 16   Q.  En attendant que ces deux pages soient affichées, Monsieur, je vais

 17   vous dire qu'il s'agit d'un exemplaire de la déclaration non expurgée que

 18   vous avez, j'espère, toujours devant vous, mais vous n'allez pas voir cette

 19   partie du texte parce que cette partie a été expurgée dans cette version.

 20   C'est le paragraphe numéro 92.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble que M. le Greffier a eu des

 22   difficultés pour ce qui est de ce numéro du document. Pouvez-vous le

 23   vérifier, Maître Ivetic.

 24   M. IVETIC : [interprétation] C'est 1D00433. Peut-on afficher la page numéro

 25   21 dans la version en anglais, et la page 26 dans la version en B/C/S.

 26   Q.  Il faut afficher le paragraphe numéro 92. Et aux fins du compte rendu,

 27   je vais lire le paragraphe dans son intégralité avant de vous poser la

 28   question concernant ce paragraphe. Je cite :


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  1   "A la mi-décembre 1993, j'ai participé à l'enquête concernant l'attaque des

  2   soldats bosniens sur plusieurs villages serbes à la proximité de Han

  3   Pijesak. J'ai vu des maisons incendiées, et des déclarations des témoins,

  4   on a pu conclure que tous les gens capturés ont été tués (0055-2665-0055-

  5   2665, c'est le numéro du rapport concernant cet incident). Je pense que les

  6   Bosniens l'ont fait pour montrer aux Serbes de Bosnie qu'ils avaient les

  7   effectifs limités et qu'ils ne pouvaient pas protéger tout le monde. D'une

  8   source des informations, j'ai appris que les vues aériennes ont montré qu'à

  9   partir du mois d'octobre 1993, il y avait un modèle de destruction des

 10   villages de la même façon."

 11   Monsieur Thomas, d'abord, pourriez-vous confirmer qu'il s'agit du

 12   paragraphe de votre déclaration qui est exact et véridique.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et si on vous posait aujourd'hui les mêmes questions, est-ce que vos

 15   réponses seraient les mêmes pour ce qui est de ce sujet ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Maintenant, j'aimerais qu'on tire un point au clair. Pour ce qui est du

 18   modèle de destruction des villages en procédant de la même façon, est-ce

 19   qu'il s'agissait des villages serbes, où il n'y avait que des Serbes, qui

 20   auraient été détruits par les forces de la présidence de Bosnie ?

 21   R.  C'est quelque chose que je ne peux pas vous dire pour ce qui est de ces

 22   informations dans ce rapport.

 23   M. IVETIC : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document 65 ter

 24   28527 dans le prétoire électronique. Je pense qu'il s'agit du rapport du 19

 25   décembre 1993.

 26   Q.  Monsieur le Témoin, regardez, s'il vous plaît, la version anglaise. Je

 27   vais vous poser la question suivante : reconnaissez-vous ce document ?

 28   C'est le rapport qui était le résultat de votre enquête concernant le


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  1   village détruit mentionné au paragraphe 92 de votre déclaration non

  2   expurgée ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Maintenant, j'aimerais attirer votre attention sur le milieu de la

  5   page, où nous pouvons voir un certain nombre d'autres villages énumérés où

  6   des choses similaires se seraient produites. Savez-vous si ce sont les

  7   villages auxquels il a été fait référence dans cette surveillance, qui se

  8   trouvaient sur le territoire en question ?

  9   R.  Je ne peux pas confirmer cela.

 10   Q.  Savez-vous s'il y a eu des enquêtes ou des plaintes officielles de la

 11   part de la FORPRONU ou de la part de la Mission des observateurs militaires

 12   des Nations Unies eu égard aux actions menées par les forces de la

 13   présidence dans l'un quelconque de ces villages ?

 14   R.  Il n'y avait pas d'action puisque nous n'avons pas reçu de plaintes des

 15   Serbes de Bosnie concernant ces villages.

 16   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que ce

 17   document soit versé au dossier, le document 28527, en tant que pièce à

 18   conviction de la Défense.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce portant la cote

 21   D102, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D102 est versée au dossier.

 23   Maître Ivetic, j'aimerais vous dire aussi que je pense que je suis

 24   intervenu relativement tôt lors de l'interrogatoire principal pour ce qui

 25   est des observations de ce témoin et la base pour certaines des

 26   observations de ce témoin. Bien sûr, si le témoin croit que c'était le cas,

 27   nous devrions avoir besoin de certains faits ou bases factuelles. Pouvez-

 28   vous aider la Chambre dans ce sens-là.


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  1   M. IVETIC : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous expliquer plus en détail comment

  3   vous avez été amené à croire que ces villages, en fait, ont été détruits

  4   par les forces de la présidence de Bosnie, et que vous croyez qu'ils

  5   voulaient montrer aux Serbes de Bosnie qu'ils ne pouvaient pas protéger

  6   tout le monde ?

  7   R.  La première enquête a été faite après une seule et unique demande faite

  8   par les Serbes de mener une enquête, et je n'ai pas été convaincu qu'il

  9   s'agissait d'une seule occasion. Je m'attendais à ce que les Serbes fassent

 10   d'autres complaintes, mais rien n'a été fait. On n'a pas reçu d'autres

 11   plaintes. J'ai vérifié cela avec les sources du renseignement de l'OTAN. On

 12   m'a dit oralement qu'il y avait suffisamment de raisons pour croire qu'il y

 13   avait d'autres villages dans cette zone sensible, et c'est ce qu'ils ont

 14   voulu me dire. C'était tout. Certains observateurs militaires qui parlaient

 15   le serbo-croate se sont occupés de cela par rapport à Pale. Il y avait donc

 16   de telles tentatives dans cette région de Pale pour voir s'il était

 17   possible d'obtenir les autorisations pour mener des enquêtes. Vous avez

 18   tout cela dans mon rapport. Mais il n'y avait pas d'autres plaintes. Nous

 19   n'avons pas reçu d'autres demandes pour mener des enquêtes. J'ai soumis ce

 20   rapport à mes supérieurs à Zagreb, et ils n'ont jamais demandé de mener

 21   d'autres enquêtes là-dessus. En fait, ils ont estimé que le fait de

 22   déployer les gens dans cette région ou déployer une équipe spéciale aurait

 23   représenté une dépense inutile.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que je peux comprendre ce que

 25   vous venez de dire par rapport à ces attaques qui ont été faites par les

 26   Bosniens, il y avait un certain modèle des attaques. Et j'imagine qu'il y

 27   avait des informations qui corroboreraient cela, mais je ne comprends

 28   toujours pas comment ce que vous venez de nous dire pouvait représenter la


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  1   base factuelle pour ce que vous estimiez à l'époque, à savoir que cela

  2   était fait pour montrer aux Serbes de Bosnie qu'ils avaient un nombre

  3   limité d'effectifs et qu'ils ne pouvaient pas protéger tout le monde, que

  4   c'était, en fait, l'objectif de ces attaques.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais assez surpris de voir, pour ce qui est

  6   de ma compétence professionnelle, que les forces bosniennes ont réussi à

  7   passer ces 200 kilomètres et de s'introduire en profondeur de ce territoire

  8   pour arriver jusqu'à 20 kilomètres d'un QG des Serbes de Bosnie et de

  9   détruire complètement un village où se trouvaient pas mal de gens, de faire

 10   fuir beaucoup de bétail dans la direction de Bijelvo Selo [phon].

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble qu'il s'agit de votre logique

 12   --

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- et c'est comme cela que vous êtes

 15   arrivé jusqu'à cette conclusion.

 16   Maître Ivetic, continuez.

 17   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Q.  Regardons votre déclaration consolidée, P503, le paragraphe 99 de cette

 19   déclaration, la page 33 [comme interprété] dans la version en anglais, à la

 20   page 38 dans la version en B/C/S. Entre-temps, je vais dire que vous parlez

 21   dans ce paragraphe d'une grande quantité d'équipement qui est à la

 22   disposition des forces de la présidence de Bosnie près du tunnel de Kosevo,

 23   et ce tunnel a été transformé par la suite en point de regroupement et de

 24   rassemblement des armes.

 25   Pouvez-vous nous dire de quel type d'équipement vous avez parlé ici ?

 26   R.  Dans un document qui a déjà été versé au dossier, vous pouvez voir un

 27   rapport de situation détaillé. C'était une analyse de renseignement que

 28   j'ai reçu lorsque j'ai commencé à faire ce travail et à occuper ce poste.


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  1   Nous n'avons pas vu cet équipement dans le tunnel, mais vous pouvez voir la

  2   liste de l'équipement dans un autre document. Je suppose que la plupart de

  3   cet équipement a été trouvé dans le tunnel.

  4   Q.  Pouvez-vous nous dire où se trouve exactement ce tunnel concret et s'il

  5   s'agit d'un autre tunnel mis à part deux tunnels qu'on a mentionnés hier ?

  6   Ou est-ce que c'est le même ?

  7   R.  Le tunnel qui se trouve au centre de Sarajevo sur une route.

  8   Q.  Mais ce n'est pas le tunnel qui est compris par ces deux tunnels dont

  9   on a discuté hier ?

 10   R.  Oui. Ces deux tunnels, c'étaient les tunnels sur la ligne de front. Ou

 11   plutôt, l'un de ces deux tunnels était en dessous du tarmac de l'aéroport.

 12   Q.  Est-ce que votre mission disposait des informations concernant

 13   l'utilisation de l'aéroport de Tuzla par les forces de la présidence de

 14   Bosnie pour transporter des armes, des munitions et du personnel dans les

 15   enclaves des Musulmans de Bosnie de Gorazde, et Zepa et de Srebrenica ?

 16   R.  J'en ai aucune idée. Ce n'était pas dans ma zone de responsabilité.

 17   J'avais suffisamment de travail à Sarajevo.

 18   Q.  J'ai une dernière question à vous poser par rapport à ce sujet,

 19   Monsieur, pour que tout soit clair. Pendant que vous étiez à Sarajevo en

 20   tant qu'observateur militaire principal ou supérieur, vous n'avez jamais vu

 21   de vos propres yeux le général Mladic donner des ordres pour des activités

 22   de combat à des unités de l'armée des Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Merci pour votre temps.

 25   M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

 26   questions pour ce témoin.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.

 28   Est-ce que vous avez des questions supplémentaires à poser à ce témoin,


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  1   Madame Bolton ?

  2   Mme BOLTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Contre-interrogatoire par Mme Bolton :

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Le tunnel que vous venez

  5   de mentionner, ce tunnel sur une route qui s'appelait le tunnel de Kosevo,

  6   par rapport à ce tunnel, pouvez-vous me dire si ce tunnel a jamais été

  7   sujet au pilonnage de l'artillerie de l'armée des Serbes de Bosnie pendant

  8   que vous étiez à Sarajevo ?

  9   R.  Je ne peux pas répondre à votre question avec certitude. Il y avait des

 10   tirs, mais le tunnel n'était pas la cible directe de ces tirs.

 11   Q.  Est-ce qu'il y avait des tirs dont le tunnel était la cible qui ont

 12   complètement détruit le tunnel ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Est-ce qu'il y avait des tirs concentrés pour ce qui est de cette

 15   région ?

 16   R.  Non. Il n'y avait jamais de tirs concentrés sur aucune de ces régions.

 17   Q.  On vous a posé la question il y a quelques minutes pour ce qui est du

 18   rapport que vous avez préparé eu égard à une enquête qui a été menée dans

 19   la zone du village qui s'appelait Pocolovaka [phon], et j'aimerais savoir

 20   quel était le nombre de villages que vous avez visités physiquement pour

 21   enquêter après avoir reçu des allégations des Serbes de Bosnie ?

 22   R.  Je me suis rendu que dans une seule région, et nous recevions des

 23   informations sur les autres régions.

 24   Q.  Pour ce qui est des informations s'appuyant sur les vues aériennes que

 25   vous receviez, est-ce que ces informations pouvaient vous aider pour

 26   déterminer qui étaient les responsables des dommages provoqués et que vous

 27   avez pu voir sur les vues aériennes ?

 28   R.  Je n'ai pas vu de telles vues aériennes. Je n'avais pas accès à ce type


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  1   d'information. La personne qui m'a donné cela voulait m'aider en me disant

  2   qu'il y avait des activités dans ces régions, mais il n'était pas

  3   nécessaire de mener une enquête sur le terrain, et nous ne disposions pas

  4   de preuves dont nous avions besoin pour le faire.

  5   Q.  Par exemple, parlant des survivants de ces présumées attaques, est-ce

  6   que vous avez eu l'occasion de les rencontrer ?

  7   R.  En fait, pour ce qui est du village que nous avons visité, il n'y avait

  8   pas de survivants du tout dans ce village.

  9   Q.  Est-ce que les incidents par rapport à d'autres villages ont été jamais

 10   confirmés par les observateurs militaires des Nations Unies ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Pour ce qui est de l'incident par rapport auquel mon éminent collègue

 13   de la Défense vous a posé des questions concernant le cas où quelqu'un a

 14   été tué par un tir de tireur embusqué et qu'une équipe de la CNN passait

 15   par là quelques minutes après, est-ce qu'on a jamais su qui était

 16   responsable pour ce qui est de la mort de ce civil ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Vous nous avez également dit aujourd'hui pour ce qui est de Markale I,

 19   de l'incident Markale I du 5 février 1994, que vous vous êtes forgé une

 20   opinion en se basant sur les documents que vous avez vus, et que vous ne

 21   savez pas si vous avez vu tous les documents. Avez-vous jamais vu des

 22   rapports d'experts concernant cet incident ?

 23   R.  Oui, je pense. Et cela dépend de ce que vous entendez par le mot

 24   "expert".

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bolton.

 26   Je pense que nous avons des faits déjà jugés pour ce qui est de la source

 27   des tirs à la date du 5 février 1994. J'étais déjà quelque peu surpris, si

 28   je peux m'exprimer ainsi, de voir que Me Ivetic a posé au témoin des


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  1   questions concernant le rapport qui a été rédigé à l'époque pour savoir si

  2   le témoin s'est forgé une certaine opinion là-dessus. J'ai deux questions.

  3   D'abord, quelle est la base pour ce qui est de l'opinion du témoin

  4   concernant ce que le témoin a dit concernant cette année; et la deuxième

  5   question, j'aimerais savoir si le témoin est suffisamment qualifié pour

  6   évaluer de tels rapports. Et avant de continuer, j'aimerais savoir ce qu'on

  7   a pu conclure sur la base de ces documents, quels documents étaient

  8   disponibles à l'époque et est-ce que cela peut aider la Chambre. C'est peu

  9   probable.

 10   Je veux dire que si Me Ivetic avait élaboré ça de cette façon, je penserais

 11   que vous voudriez poser d'autres questions, mais Me Ivetic a seulement

 12   demandé au témoin de regarder les rapports qui existaient à l'époque et de

 13   savoir si le témoin maintenait toujours cette conclusion. Et je peux vous

 14   dire qu'une chose est certaine, la Chambre ne cessera pas d'évaluer les

 15   informations qui étaient disponibles à l'époque de l'incident. Continuez.

 16   Et lorsque le témoin a vu des rapports --

 17   Mme BOLTON : [interprétation] Merci. J'ai compris vos lignes directrices

 18   pour ce qui est de cela.

 19   Q.  J'aimerais maintenant vous poser quelques questions concernant votre

 20   témoignage d'hier, Monsieur. Permettez-moi de mettre mes lunettes. Un

 21   instant, s'il vous plaît.

 22   Hier, au cours de l'interrogatoire, on vous a donné lecture d'un extrait

 23   dans lequel vous parliez du modèle suisse et de la question des unités de

 24   la Défense territoriale yougoslave. Vous souvenez-vous que l'on vous ait

 25   posé ces questions ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  On vous a également posé une question quant à la Défense territoriale

 28   et à leurs dépôts de munition, où ils gardaient cette munition.


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que vous savez ce qui est arrivé à tout ce qui se trouvait

  3   entreposé dans ces dépôts lorsque la guerre a éclaté en Yougoslavie en 1992

  4   ?

  5   R.  Non, je ne le sais pas, parce que cette munition aurait été remise

  6   avant que je n'arrive sur place.

  7   Q.  Est-ce que vous avez des connaissances personnelles selon lesquelles

  8   des dépôts de munition se trouvaient dans la ville de Sarajevo et étaient

  9   tenus par les forces bosniennes ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  La question suivante vous a été posée, et vous avez répondu ceci.

 12   Mme BOLTON : [interprétation] Je n'ai que le compte rendu d'audience

 13   provisoire, je n'ai pas l'ensemble du compte rendu d'audience, mais je vais

 14   vous donner lecture de la page 51 du compte rendu d'audience provisoire

 15   d'hier.

 16   Q.  Voici ce que vous avez répondu à la ligne 5. La question qui vous a été

 17   posée était la suivante :

 18   "Avez-vous eu l'occasion à Gorazde d'avoir Kopaca" et ensuite illisible,

 19   illisible, un endroit qui avait été identifié pour vous, "pour lequel le

 20   commandement supérieur de la RSFY avait identifié comme étant un bunker et

 21   une structure.

 22   "Réponse : Non.

 23   "Question : Et on vous a demandé si une telle structure avait existé, est-

 24   ce que c'était une cible militaire légitime, pour le camp opposé ?"

 25   Et par la suite, Monsieur le Président, vous avez donné un avertissement,

 26   et par la suite on vous a posé : Si la RSFY était une partie au conflit en

 27   Bosnie alors que vous étiez là en 1993 ?

 28   R.  Je vous demanderais de bien vouloir m'expliquer cet acronyme.


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  1   Q.  C'est la République socialiste fédérale de Yougoslavie, Monsieur.

  2   R.  Le gouvernement serbe n'avait pas pris part, n'était pas impliqué

  3   pendant mon mandat.

  4   Q.  A la page 56 du compte rendu d'audience d'hier, un certain nombre de

  5   questions vous ont été posées concernant un tunnel que vous avez décrit

  6   comme ayant été creusé depuis les lignes de front se trouvant sur le

  7   territoire de la présidence bosnienne, et ce, en direction vers les lignes

  8   de front serbes. Et vous avez dit dans votre réponse, qui avait été posée à

  9   la question de Me Ivetic, en bas de la page 55, il vous a demandé :

 10   "D'abord, il faudrait demander au témoin de confirmer qu'il s'agit

 11   bel et bien d'un autre tunnel. Il ne s'agit pas du tunnel qui se trouvait

 12   sous l'aéroport ?"

 13   Vous avez répondu :

 14   "Oui, absolument, c'est le cas. Comme je l'ai dit dans ma déposition

 15   antérieure, les Serbes avaient accusé les Bosniens d'avoir creusé des

 16   tunnels en direction de leurs lignes de front, et c'était l'une des excuses

 17   qu'ils avaient pour utiliser des tirs embusqués."

 18   Ils tiraient sur qui, et c'était une excuse pour quoi ?

 19   R. C'étaient des tirs de tireurs embusqués sur la ligne de front.

 20   Q.  Est-ce qu'on a jamais utilisé ceci comme excuse pour tirer sur des

 21   cibles civiles d'après votre souvenir ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  A la page 58 et 59 -- ou plutôt 59 du compte rendu d'audience d'hier,

 24   on vous a demandé de nous parler des mouvements des troupes des forces

 25   serbes de Bosnie s'agissant de la rotation des troupes, et on vous a

 26   demandé si vous étiez d'accord pour dire que les forces de la présidence

 27   bosnienne à Sarajevo devaient être déplacées vers des positions qui étaient

 28   plus vers l'intérieur, en direction des lignes de front.


Page 5264

  1   Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si la présidence ou les forces de

  2   la présidence avaient à leur disposition suffisamment de véhicules

  3   motorisés pour déplacer des effectifs vers la ligne de front ?

  4   R.  Non. Ils ne disposaient pas de véhicules motorisés. D'ailleurs, ils ne

  5   se sont jamais servis de véhicules motorisés pour déplacer leurs effectifs

  6   vers les lignes de front.

  7   Q.  Et alors de quelle façon les troupes se déplaçaient-elles vers les

  8   lignes de front ?

  9   R.  En marchant, et ceci voulait dire aussi qu'elles étaient plus près de

 10   la ligne de front.

 11   Q.  Avez-vous jamais eu l'occasion d'avoir un groupe plus important de

 12   soldats se déplaçant vers la ligne de front, par exemple, en partant depuis

 13   le centre de Sarajevo ?

 14   R.  Non, mais j'avais été pris dans une colonne de soldats, enfin de

 15   personnes qui portaient des vêtements civils qui se déplaçaient vers les

 16   lignes de front, ne disposant pas d'équipement, n'ayant pas d'équipement,

 17   et qui, présumément [phon], allaient acquérir tout ceci une fois arrivés

 18   sur la ligne de front. Et de toute façon, j'étais réellement étonné que

 19   l'on n'ait pas fait l'objet de pilonnage.

 20   Q.  Il s'agissait de soldats non armés; est-ce bien exact?

 21   R.  C'étaient des hommes non armés. Je pourrais seulement présumer qu'ils

 22   se déplaçaient vers la ligne de front pour remplacer des personnes qui s'y

 23   trouvaient déjà.

 24   Q.  Des questions vous ont été posées concernant une trousse française. On

 25   a décrit cette trousse comme étant un uniforme et de l'équipement. A quel

 26   type d'équipement faisiez-vous référence ?

 27   R.  A un casque et un gilet pare-balles. Les gilets pare-balles, je ne

 28   pouvais les identifier que lorsque je me suis rapproché de ce groupe


Page 5265

  1   d'hommes.

  2   Q.  Hier, on vous a également posé une question en vous demandant si vous

  3   seriez d'accord avec l'affirmation qu'il y avait environ 25 000 soldats de

  4   la présidence bosnienne armés qui se trouvaient à Sarajevo qui faisant

  5   partie du 1er Corps d'armée.

  6   D'abord, dites-nous est-ce que vous savez quel était le pourcentage du

  7   chiffre de 25 000 personnes qui se trouvaient sur la ligne de front ?

  8   R.  Je ne le sais pas.

  9   Q.  Est-ce que vous avez reçu -- je crois que j'accélère.

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine française sont d'accord avec

 11   Mme Bolton. Effectivement, le débit est très rapide.

 12   Mme BOLTON : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous vous souvenez si vous avez reçu des renseignements sur

 14   ceci ?

 15   R.  Nous n'avions pas reçu pour mission de recevoir des informations du

 16   renseignement de ce type. Je fonde cette connaissance, je me base sur des

 17   informations que j'avais reçues de mon commandement lorsque j'ai pris le

 18   commandement à Sarajevo, donc ce chiffre de 25 000 personnes.

 19   Mme BOLTON : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche le document

 20   65 ter 28558, s'il vous plaît, page 1.

 21   Q.  Je voudrais faire référence à votre rapport. Vers le milieu de ce

 22   document-ci, on y retrouve une indication selon laquelle il était évalué

 23   que les Bosniens disposaient d'environ 25 000 hommes participant aux

 24   opérations de combat à Sarajevo, dont le tiers se trouvait de façon

 25   permanente sur la ligne de front.

 26   J'aimerais que l'on affiche la partie du haut qui est intitulée

 27   "Description des parties belligérantes". Avez-vous jamais eu l'occasion de

 28   voir ce document auparavant ?


Page 5266

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Etait-ce l'un des documents que vous aviez reçu au moment où vous avez

  3   été briefé ?

  4   R.  Oui. Et je remarque que mes initiales se trouvent en haut du document,

  5   et mes initiales étaient là avant que l'on appose tous ces tampons sur le

  6   document.

  7   Q.  Vous avez dit : Il est difficile, concernant les armes bosniennes,

  8   d'établir une évaluation exacte des armes dont disposait l'armée bosnienne.

  9   Mais selon une évaluation, ils avaient environ cinq chars, dix à 15

 10   véhicules blindés et jusqu'à 50 mortiers, donc des armes d'artillerie, pour

 11   lesquels ils n'avaient pas de munition.

 12   Vous faisiez référence un peu plus tôt aujourd'hui à des informations que

 13   vous aviez reçues des armes qui se trouvaient dans le tunnel après le

 14   cessez-le-feu.

 15   R.  [aucune interprétation]

 16   Mme BOLTON : [interprétation] J'en ai terminé avec ce document, je vous

 17   remercie.

 18   Q.  Hier, vous avez parlé de civils, et vous avez également mentionné des

 19   femmes et des personnes âgées, ainsi que des enfants qui portaient des

 20   parties d'uniformes. Qu'est-ce que vous vouliez dire par là ?

 21   R.  Eh bien, il y avait des uniformes qui avaient été reçus par d'autres

 22   pays européens sous forme d'aide, et donc ils avaient reçu ces uniformes

 23   comme vêtements. Il y avait également des uniformes allemands. Donc, ils

 24   portaient des parties d'uniformes. Et c'étaient des uniformes qui

 25   appartenaient aux membres de leur famille qui avaient été tués.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bolton, attendez, je vous prie,

 27   la fin de l'interprétation.

 28   Mme BOLTON : [interprétation]


Page 5267

  1   Q.  Ensuite, on vous a posé la question, Monsieur, à savoir si vous étiez

  2   d'accord pour dire qu'une telle situation pouvait causer un certain degré

  3   de confusion pour identifier les combattants, et vous avez répondu par la

  4   négative. Pourquoi aviez-vous répondu par la négative ?

  5   R.  C'est parce que de façon générale, les femmes et les enfants, il était

  6   facile de les identifier comme étant des femmes et des enfants.

  7   Q.  On vous a posé des questions hier à la page 62 et à la page 63 du

  8   compte rendu d'audience provisoire d'hier, et ces questions portaient sur

  9   les bombardements effectués, lancés par des forces croates à Kiseljak et

 10   dont les obus sont atterris du côté Papa à Sarajevo, et vous avez répondu,

 11   en haut de la page 63, en disant ceci, je cite :

 12   "Non. Ce n'était pas quelque chose qui avait été confirmé par les

 13   observateurs militaires des Nations Unies. La seule raison pour laquelle

 14   nous pensions qu'il s'agissait de ceci, c'est parce que le calibre était

 15   différent, et également parce qu'il y avait des rapports selon lesquels des

 16   Croates à Kilsejak disposaient d'armes françaises, et c'est la raison pour

 17   laquelle nous avions fait une corrélation entre les deux, et c'est pour

 18   cela que nous les soupçonnions."

 19   Et un peu plus tard, à la page 64, toujours sur le même sujet, vous

 20   avez fait référence à ceci en disant cet incident en particulier.

 21   Est-il arrivé plus qu'une fois ou seulement une fois où vous aviez eu

 22   des raisons de suspecter que les obus provenaient éventuellement de la

 23   Croatie ?

 24   R.  Il y avait seulement une fois où l'on a attiré mon attention sur ceci,

 25   mais lorsque nous avons posé la question au QG de la FORPRONU, ils nous ont

 26   répondu que ce n'était pas la seule fois où ce genre de chose s'est

 27   produit.

 28   Q.  Et quel était le calibre ?


Page 5268

  1   R.  C'était un obus d'artillerie moyenne, et de nouveau nous ne pouvons pas

  2   le confirmer car nous n'avions personne sur place, mais il y avait des

  3   pièces d'artillerie moyenne et nous avions un intérêt professionnel sur

  4   ceci et nous pensions qu'il s'agissait d'une arme d'origine française qui

  5   avait été certainement vendue aux Croates de Kiseljak par des Français.

  6   Q.  Existe-t-il des différences entre les calibres de munition utilisées

  7   par les forces françaises ou par les forces de l'ex-JNA ?

  8   R.  La norme de l'OTAN est 155. La norme russe est 152 pour des canons

  9   moyens. Je pourrais me tromper, mais tous les canons de taille moyenne que

 10   j'ai vus, appartenant à la JNA et qui avaient été fournis aux Serbes de

 11   Bosnie, étaient de calibre de 152 millimètres.

 12   Q.  Aux pages 79 et 80 du compte rendu d'audience temporaire d'hier, on

 13   vous a posé une question sur un désaccord que vous avez eu avec le général

 14   Soubirou, et c'était lorsqu'il avait tendance à accepter l'information qui

 15   lui avait été fournie par le gouvernement bosnien concernant une

 16   information qui lui avait été fournie par l'un de vos observateurs

 17   militaires. Et par la suite, vous avez dit, en répondant aux questions sur

 18   la fréquence de ce type de chose, vous avez dit : "Je ne peux pas me

 19   souvenir d'autres incidents. La seule fois où j'ai souvenir de quelque

 20   chose de semblable, c'est exactement à l'opposé de ce que vous dites."

 21   Lorsque vous parlez de l'opposé, est-ce que vous voulez dire qu'il est

 22   arrivé que le général Soubirou avait plutôt tendance à accepter

 23   l'information qui lui avait été fournie par le côté serbe de Bosnie plutôt

 24   que l'information qu'il avait reçue de vos observateurs militaires ?

 25   R.  Non, ceci concerne le général Rose, et non pas le général Soubirou. Mes

 26   observateurs estimaient que la batterie de l'armée serbe se trouvait à

 27   l'intérieur d'une zone de 20 kilomètres. Le général Rose n'était pas

 28   d'accord avec ceci, mais j'ai insisté pour dire que mon homme à moi avait


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  1   raison et que j'accepterais sa déclaration, son information.

  2   Q.  S'agissant justement du général Rose, puisque nous sommes sur le même

  3   sujet --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous poser une question

  5   alors, Monsieur : quel est l'opposé ? Est-ce que le général Rose s'est plié

  6   ou a suivi votre conseil ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ils ont découvert que nous n'avions pas

  8   un accord à savoir où le centre se trouvait concernant un rayon de 20

  9   kilomètres.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai du mal à comprendre de quelle façon

 11   est-ce que c'est l'opposé, justement.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, ceci impliquait, en fait, une plainte

 13   formulée par les Serbes selon laquelle cette position de tir ne se trouvait

 14   pas à l'intérieur de la zone d'inclusion -- exclusion --

 15   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'est pas très sûre de ce que vient de dire le

 16   témoin.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et donc, je dois comprendre que vous

 18   vouliez dire que l'opposé portait sur le camp opposé ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre.

 21   Mme BOLTON : [interprétation]

 22   Q.  On vous a donné lecture hier, on vous a donné lecture de plusieurs

 23   paragraphes d'une déclaration qui avait été fournie par le général Rose, et

 24   dans l'une de ces déclarations, on pouvait lire que le général Rose disait

 25   qu'il croyait que Ganic avait organisé que sa police secrète tire aux

 26   moyens de tireurs embusqués sur les trams. Et vous avez dit que vous

 27   n'aviez aucune connaissance de cela. Et par la  suite, on vous a demandé

 28   d'aller vous rendre sur une position de la présidence bosnienne qui était


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  1   placée sous le contrôle de la police plutôt que de l'armée. Vous avez dit

  2   que vous vous étiez rendu sur place, effectivement. Donc, je voulais

  3   seulement m'assurer de quelque chose. Lorsque vous avez parlé de la police,

  4   et lorsque mon éminent confrère a parlé de la police secrète de Ganic, est-

  5   ce que nous parlions de la même chose ?

  6   R.  Non, en fait, ce n'est pas le cas. Ces personnes portaient des

  7   uniformes, et je peux vous dire qu'ils n'étaient pas près des tramways du

  8   tout, ils n'étaient pas dans les parages.

  9   Q.  Est-ce qu'ils portaient des uniformes de police ou des uniformes

 10   militaires ?

 11   R.  Ils portaient des uniformes de police.

 12   Q.  On vous a également donné lecture d'un passage de la déclaration du

 13   général Rose dans lequel il critiquait les observateurs militaires des

 14   Nations Unies, et je voudrais continuer de vous donner lecture du passage

 15   que vous a lu mon éminent confrère. Donc, je vais lire la dernière phrase

 16   dans laquelle on peut y lire, les observateurs militaires :

 17   "Beaucoup d'entre eux n'étaient pas compétents au niveau technique,

 18   et certains d'entre eux étaient des vendus. Ils avaient été capturés par

 19   les personnes avec lesquelles ils étaient." Et par la suite, il poursuit

 20   pour dire :

 21   "Il y avait des observateurs militaires à Pale et à Belgrade. Je ne

 22   sais pas s'il y avait des observateurs militaires basés à Lukavica. Je

 23   crois qu'il y avait également des UNMO à Belgrade et qui surveillaient

 24   l'aéroport, mais ils n'étaient pas placés sous mon commandement."

 25   Vous avez dit un peu plus tôt concernant les observateurs militaires

 26   qui étaient les vôtres, que ces derniers avaient été pris en otage

 27   techniquement, entre guillemets, à la caserne de Lukavica en avril 1994. Le

 28   général Rose occupait-il le poste de commandement en 1994 ?


Page 5271

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que vous lui avez parlé de cet incident ?

  3   R.  Oui, il était au courant de cet incident. Il savait également que

  4   j'avais 50 personnes du côté serbe, y compris mon QG avec l'équipe de Lima

  5   à Lukavica.

  6   Q.  A la page 87 du compte rendu d'audience d'hier, à la ligne 12, Me

  7   Ivetic vous a demandé ceci :

  8   "Seriez-vous d'accord avec moi, Monsieur, qu'eu égard à la manière dont les

  9   postes d'observation avaient été établis du côté serbe de la ligne de

 10   confrontation, les victimes n'avaient pas été couvertes de façon adéquate

 11   par les rapports."

 12   Vous avez répondu ceci :

 13   "Je suis d'accord."

 14   Pour que les Nations Unies puissent confirmer qu'il y ait eu des victimes

 15   des deux côtés de la ligne de confrontation, donc qu'il s'agisse de morts

 16   ou de blessés, j'aimerais savoir quel était votre protocole ?

 17   R.  Notre protocole exigeait que l'on aille sur place pour voir soit les

 18   corps dans les morgues, ou que l'on constate les blessures sur des

 19   victimes, et que l'on aille les voir à l'hôpital, et nous nous rendions à

 20   la morgue à Sarajevo chaque nuit.

 21   Q.  Est-ce que vous aviez eu un accès libre aux hôpitaux et aux morgues du

 22   côté serbe de Bosnie de la ligne de confrontation, donc du côté serbe de la

 23   ligne de confrontation ?

 24   R.  La seule fois où je me souviens que nous avions eu accès pour aller à

 25   l'hôpital, c'est lorsque nous avons emmené un soldat serbe blessé à

 26   l'hôpital.

 27   Q.  Je voudrais vous parler maintenant et vous poser une question sur

 28   l'escorte de l'aide humanitaire et de votre implication.


Page 5272

  1   On vous a demandé à quelle fréquence est-ce que les observateurs militaires

  2   étaient appelés à venir en aide dans le cadre de ce processus, et je

  3   voudrais seulement essayer de comprendre si je comprends bien, m'assurer

  4   que j'ai bien compris votre déposition. Vous avez dit que les agences

  5   d'aide humanitaire se présentaient au QG et demandaient de l'information. A

  6   quelle fréquence est-ce que ceci survenait ?

  7   R.  Tous les jours.

  8   Q.  Est-ce que ceci avait une incidence sur votre capacité d'occuper votre

  9   poste d'observation ?

 10   R.  Non. Ils étaient les bienvenus dans nos salles des opérations, et ils

 11   recevaient le même briefing que nous avions donné au général Soubirou

 12   lorsque les visiteurs venaient.

 13   Q.  Et s'agissant maintenant de la fréquence des observateurs et à laquelle

 14   ils escortaient les convois --

 15   R.  Nous l'avons fait dans le cas de Gorazde lorsque nous étions obligés de

 16   le faire. Et je dois vous dire qu'il y avait également un autre champ

 17   d'aide humanitaire pour lequel nous étions impliqués presque de façon

 18   quotidienne. C'était dans la poche de Zepa et l'observateur militaire

 19   principal à Zepa devait assumer les responsabilités de représenter les

 20   Nations Unies et toutes les activités humanitaires, y compris la

 21   distribution de carburant et d'argent.

 22   Q.  Est-ce que ceci a eu une incidence sur votre capacité d'avoir

 23   suffisamment d'hommes ou de femmes pour tenir votre poste d'observation à

 24   Sarajevo et de mener à bien votre mission de surveillance qui consistait à

 25   surveiller les tirs sortants et entrants lorsque vous deviez escorter les

 26   convois d'aide humanitaire ?

 27   R.  Je ne suis pas très heureux avec l'emploi du mot "escorté". En fait,

 28   oui, ils voulaient de l'information, et, oui, il fallait que je prenne un


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  1   observateur militaire et que je lui assigne le titre d'agent de liaison

  2   pour une agence non-gouvernementale et pour ce qui est également du HCR et

  3   des agences d'aide 24 heures sur 24. Donc, j'ai perdu, d'une certaine

  4   façon, un observateur militaire, car il devait s'occuper de ce travail.

  5   Donc, il devait fournir une information et agir en tant qu'officier de

  6   liaison. Et n'oubliez pas que nous étions le seul élément de la FORPRONU en

  7   présence du côté serbe de Bosnie.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bolton, la Chambre se demande où

  9   vous en êtes en ce moment.

 10   Mme BOLTON : [interprétation] En fait, je voudrais poser ma dernière

 11   question au témoin.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Posez votre dernière

 13   question.

 14   Mme BOLTON : [interprétation]

 15   Q.  Lorsqu'on vous a posé une question concernant un document hier

 16   concernant l'acheminement d'aide humanitaire, on vous a demandé s'il y a eu

 17   des incidents lors desquels, nonobstant le fait que les Serbes étaient

 18   d'accord avec la livraison et l'acheminent de l'aide humanitaire, si cette

 19   aide humanitaire n'avait pas pu être acheminée en raison d'autres questions

 20   comme, par exemple, les chauffeurs, l'absence d'une ambulance d'un certain

 21   type.

 22   Donc, ma question est la suivante : est-il arrivé que les Serbes ne soient

 23   pas d'accord avec l'acheminent et la livraison d'aide humanitaire ?

 24   R.  Oui.

 25   Mme BOLTON : [interprétation] Monsieur le Président, cela met fin à mes

 26   questions supplémentaires.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame Bolton.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai quelques questions pour vous,

  2   Monsieur, mais je voudrais que l'on termine avant la pause, en fait.

  3   Pourriez-vous, Maître Ivetic, nous donner une idée du temps dont vous avez

  4   encore besoin pour les questions supplémentaires ?

  5   M. IVETIC : [interprétation] Non, je n'aurais pas de questions

  6   supplémentaires, Monsieur le Président, Monsieur les Juges.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  8   Questions de la Cour :

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous avez parlé du tunnel ou d'un

 10   système de tunnels qui se trouvait dans la région de Nedzarici. Mais je

 11   n'ai pas très bien saisi, malheureusement, ce que vous avez dit. Vous avez

 12   dit que les Serbes accusaient les Bosniens d'avoir creusé des tunnels en

 13   direction de leurs lignes de front, et c'était l'une des excuses qu'ils

 14   utilisaient pour tirer au moyen de tireurs embusqués.

 15   Maintenant, si moi, par exemple, je voulais utiliser des tireurs embusqués

 16   pour toucher des soldats qui se trouvaient dans des tunnels et qui se

 17   déplacent vers les lignes de front, pourquoi ai-je besoin d'une excuse ?

 18   N'est-ce pas quelque chose de pleinement légitime ?

 19   R.  Ils ne voyaient pas ces soldats qui creusaient les tunnels et qui se

 20   trouvaient, donc, sous terre. En fait, ils avançaient en direction des

 21   lignes serbes et les Serbes ne pouvaient pas les voir. Ils ne pouvaient que

 22   les entendre. Et donc, ce qu'ils ont fait pour essayer de décourager ces

 23   activités c'était, en fait, d'ouvrir le feu contre des personnes qui se

 24   trouvaient au-dessus des zones qui faisaient l'objet de ces tunnels.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais s'ils ouvraient le feu contre les

 26   civils ou pas, vous ne le saviez pas parce que vous ne saviez pas qui se

 27   trouvait au-dessus du tunnel ?

 28   R.  C'était la ligne de confrontation et nous ne considérions pas que les


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  1   personnes qui se trouvaient là-bas étaient des civils.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si ces personnes se trouvaient à la

  3   surface et pas dans les tunnels, mais qui étaient considérées comme des

  4   combattants militaires, pourquoi utiliser un prétexte ou une excuse ? Parce

  5   que c'était totalement légitime ?

  6   R.  Mais il y avait un cessez-le-feu qui était en place.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais essayons d'analyser ceci

  8   clairement. Lorsque l'on cherche un prétexte pour ouvrir le feu dans le

  9   cadre d'un cessez-le-feu, parce que ceci n'a rien à voir avec des tunnels

 10   ou quoi que ce soit d'autre -- ou alors est-ce qu'ils essayaient de trouver

 11   un prétexte pour ouvrir le feu contre des personnes qui se trouvaient en

 12   sous-sols où l'on pensait que des tunnels étaient creusés ?

 13   R.  Ils violaient les conditions du cessez-le-feu. En vertu du cessez-le-

 14   feu -- en fait, les Bosno-Musulmans étaient en violation du cessez-le-feu

 15   parce qu'ils essayaient d'asseoir leurs positions et de se préparer à des

 16   attaques. Nous essayions en fait de décourager les tireurs embusqués au

 17   niveau de la ligne de front, ceux qui tuaient des gens et qui étaient en

 18   violation dans le cadre du cessez-le-feu. Il y avait des personnes, des

 19   militaires qui mourraient, mais pas en violation du cessez-le-feu.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends mieux maintenant la

 21   situation et je n'ai pas d'autres questions à vous poser.

 22   C'est toujours le cas pour vous également, Maître Ivetic ?

 23   Dans ce cas-là, Monsieur Thomas, ceci conclut votre déposition devant

 24   ce Tribunal. Je vous remercie d'être venu et d'avoir répondu rapidement à

 25   toutes les questions qui vous ont été posées par les parties et par les

 26   Juges de cette Chambre, et je vous souhaite un bon retour chez vous.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 28   Juges, je suis désolé d'avoir fait preuve d'un manque de respect vis-à-vis


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  1   des Juges de cette Chambre. Je m'excuse auprès des interprètes et du reste

  2   du personnel pour avoir parlé un peu trop rapidement.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il reste en fait un aspect que

  4   j'ai mentionné hier, à savoir que je vous avais dit hier si vous aviez

  5   d'autres éléments à rajouter, que vous pouviez le faire. Je ne vous

  6   encourage pas à reprendre la parole, mais si vous avez un fait précis à

  7   mentionner --

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. En fait, il y avait quelque chose

  9   qui est apparu comme liberté de quelque chose, mais pas liberté de

 10   mouvement. J'espère que ceci aura été corrigé dans le compte rendu

 11   d'audience. Je voudrais également remercier les personnes qui ont participé

 12   à ce processus.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous me le permettez, je vous

 14   décourage d'exprimer vos opinions sur les activités de ce Tribunal et de

 15   savoir si c'est bon pour certains et bon pour d'autres. Vous pouvez

 16   disposer.

 17   [Le témoin se retire]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais savoir si le témoin suivant

 19   est prêt pour déposer après la pause ?

 20   M. GROOME : [interprétation] Oui. Le témoin sera interrogé par M. Jeremy.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et il aura également l'interprétation

 22   dans sa langue maternelle ?

 23   M. JEREMY : [interprétation] Oui. Des interprètes pour le danois.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous allons faire une pause,

 25   et nous reviendrons à 11 heures moins cinq.

 26   --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.

 27   --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que l'on peut faire entrer le


Page 5278

  1   témoin dans le prétoire, et en attendant, je vais saisir cette occasion

  2   pour informer l'Accusation du fait que les conséquences pratiques de la

  3   décision de la Chambre que nous allons lire concernant la requête 92 ter

  4   pour le Témoin 046, donc je disais que les conséquences pratiques

  5   signifient que ce témoin ne pourra pas comparaître la semaine prochaine.

  6   Monsieur Groome, nous pensons qu'il était bon de vous informer

  7   immédiatement.

  8   M. GROOME : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   M. JEREMY : [interprétation] En attendant que le témoin rentre dans le

 10   prétoire, je souhaiterais mentionner trois faits jugés.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 12   M. JEREMY : [interprétation] Il s'agit des faits jugés 767, 768 et 769.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 14   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Témoin, puis-je vous demander

 16   de vous lever, s'il vous plaît. Est-ce que quelqu'un pourrait aller

 17   chercher les lunettes du témoin.

 18   Bonjour, Madame le Témoin. Tout d'abord, est-ce que vous m'entendez dans

 19   une langue que vous comprenez ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous ne déposiez, le Règlement

 22   de procédure et de preuve exige que vous prononciez cette déclaration

 23   solennelle. On m'a informé que vous étiez disposée à faire cette

 24   déclaration solennelle en langue anglaise. Je vous demande de vous lever et

 25   à lire cette déclaration solennelle.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 27   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 28   LE TÉMOIN : BIRTE WEISS [Assermentée]


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  1   [Le témoin répond par l'interprète]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup. Merci, Madame ou

  3   Mademoiselle Weiss.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est Madame.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Weiss, c'est M. Jeremy qui va

  6   commencer par vous poser des questions dans le cadre de l'interrogatoire

  7   principal de l'Accusation. Monsieur Jeremy, c'est à vous.

  8   M. JEREMY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Interrogatoire principal par M. Jeremy :

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Weiss.

 11   R.  Bonjour.

 12   Q.  En quelques phrases, pourriez-vous nous expliquer votre parcours

 13   professionnel.

 14   R.  Volontiers. Je suis journaliste de profession, et j'ai également fait

 15   des études de littérature à l'Université de Copenhague. J'ai été également

 16   députée au parlement danois pendant 25 ans, et j'ai été également ministre

 17   pendant huit ans. J'ai occupé différents postes. J'ai été vice-présidente

 18   du Parti démocratique socialiste pendant 12 ans, et en 2001 j'ai décidé de

 19   quitter la politique et de revenir à ma profession de départ, c'est-à-dire

 20   journaliste.

 21   Q.  Et que faites-vous à l'heure actuelle ?

 22   R.  Je suis critique littéraire pour un journal danois qui s'appelle

 23   "Weekendavisen", et de plus, je suis pigiste pour ce même journal, cette

 24   même publication, de par le monde.

 25   Q.  Et vous avez mentionné que vous aviez occupé différents postes

 26   ministériels. Est-ce que, entre autres, vous avez occupé le poste de

 27   ministre de l'Intérieur ?

 28   R.  Oui. J'ai occupé ce poste de ministre de l'Intérieur de février 1993 à


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  1   octobre 1997. De plus, j'ai été ministre de la Santé, ministre de la

  2   Recherche, et ministre des questions ecclésiastiques.

  3   Q.  Je voudrais revenir à votre poste en tant que ministre de l'Intérieur.

  4   Est-ce que dans ce cadre-là vous avez eu affaire à la Bosnie-Herzégovine ?

  5   R.  Oui, et dans une large mesure. Nous avons reçu plus de 

  6   20 000 réfugiés de Bosnie au Danemark, et cela présentait une gageure tant

  7   en termes de logistique qu'en termes de politique.

  8   Q.  Et vous avez mentionné que vous avez quitté votre poste de ministre de

  9   l'Intérieur en 1997. Pourquoi avez-vous quitté ce poste à ce moment-là ?

 10   R.  Cela n'avait rien à voir avec la question des réfugiés de Bosnie ni

 11   avec les politiques y afférent. La raison pour laquelle j'ai quitté ce

 12   poste était en fait un désaccord plus fondamental au sujet des politiques

 13   de l'immigration sur le long terme, un désaccord, donc, entre le première

 14   ministre et moi-même. Et, par conséquent, j'ai décidé de quitter mon poste.

 15   Q.  Et très rapidement, quelle était votre position en ce qui concernait

 16   les réfugiés à l'époque ?

 17   R.  J'étais responsable d'une politique qui se devait de ne pas être trop

 18   stricte en ce qui concerne la prise en charge de ces réfugiés. De plus, je

 19   devais m'efforcer d'avoir une politique encourageant l'inclusion pour tous

 20   les réfugiés qui recevaient un permis de séjour au Danemark.

 21   Q.  Est-ce que vous avez écrit des livres qui parlent de la Bosnie-

 22   Herzégovine et de la région ?

 23   R.  Oui. J'ai écrit deux livres. Un de ces deux livres est tout

 24   particulièrement intéressant pour ce procès. Il s'agit d'un livre intitulé

 25   "Témoin de la folie", et cela parle de la situation dans la partie nord-

 26   ouest de la Bosnie, entre autres. J'ai coécrit ce livre avec l'aide d'un

 27   maître de conférence de l'Université de Copenhague, Karsten Fledelius.

 28   C'est un historien. Il parle la langue locale, et il a fait des études à


Page 5281

  1   l'Université de Belgrade dans sa jeunesse.

  2   Q.  Est-ce que vous êtes allée dans la partie nord-ouest de la Bosnie en

  3   novembre 1996 ?

  4   R.  Oui. Et je m'y suis rendue d'ailleurs même avant cette période-là. Je

  5   m'y suis rendue en juin 1996, et j'y suis retournée quelques mois plus

  6   tard.

  7   Q.  Et où vous trouviez-vous à cette époque, en novembre 1996, pour être

  8   plus précis ?

  9   R.  Je suis allée à Kljuc ainsi que dans les zones environnantes de Kljuc.

 10   M. JEREMY : [interprétation] Kljuc est mentionnée aux pages 17 et 18 dans

 11   le recueil de cartes de la municipalité de l'Accusation.

 12   Q.  Madame Weiss, vous avez mentionné votre voyage à Kljuc en novembre

 13   1996. Quel était l'objectif de ce voyage ?

 14   R.  L'objectif de ce voyage était qu'en tant que ministre de l'Intérieur,

 15   mon rôle était d'inaugurer un certain nombre de bâtiments qui avaient fait

 16   l'objet de donations du Danemark dans la municipalité de Kljuc. Ces

 17   bâtiments avaient été conçus pour des réfugiés de la région, des réfugiés

 18   qui se trouvaient au Danemark, mais qui voulaient revenir chez eux.

 19   C'étaient donc des bâtiments d'hébergement pour ces réfugiés, parce que la

 20   grande majorité des bâtiments dans les villages environnants de la ville de

 21   Kljuc avaient été complètement détruits, et c'est la raison pour laquelle

 22   ils avaient besoin d'hébergement en attendant qu'ils puissent reconstruire

 23   leurs maisons.

 24   Q.  Très rapidement, qu'avez-vous observé à Kljuc en novembre 1996 ?

 25   R.  La ville de Kljuc était, pour ainsi dire, une ville fantôme avec très

 26   peu de personnes sur place. Il n'y avait quasiment pas de voitures dans les

 27   rues et les magasins étaient fermés. Ceci était dû au fait que la totalité

 28   de la population musulmane avait été chassée en 1992 et 1993. Et à la fin


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  1   1995, la partie serbe de la population -- désolée.

  2   Q.  Désolé, veuillez continuer.

  3   L'INTERPRÈTE : L'interprète de cabine danoise : J'ai demandé au témoin de

  4   répéter parce qu'une personne dans la cabine a créé des interférences.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux répéter ma réponse. La raison pour

  6   laquelle l'atmosphère ressemblait à une ville fantôme, c'est que la

  7   majorité de la population s'était enfuie de cette ville, avait quitté la

  8   ville en 1992 et en 1993. La partie musulmane de la population a été

  9   chassée. Et ensuite, lorsque la région a été re-capturée, une grande partie

 10   de la population serbe s'est enfuie de la région.

 11   M. JEREMY : [interprétation]

 12   Q.  Sur quelle base fondez-vous vos observations concernant Kljuc ?

 13   R.  Durant mes séjours sur place, j'ai visité la région avec le commandant

 14   Hadic et l'on m'a montré plusieurs villages dans lesquels il n'y avait

 15   pratiquement pas une seule maison qui restait debout. On m'a également

 16   montré un certain nombre de mosquées, je crois qu'au total il y en avait 12

 17   ou 13, et ces édifices avaient été détruits. Si je m'en souviens bien, on

 18   avait avancé un chiffre quant au nombre de bâtiments détruits dans la zone,

 19   à savoir 6 387.

 20   Q.  Et j'aimerais savoir combien de fois vous vous êtes rendue à Kljuc

 21   depuis votre premier séjour en novembre 1996 ?

 22   R.  Je ne peux pas vous donner le chiffre exact, mais je dirais que j'y

 23   suis allée entre 12 et 15 fois.

 24   Q.  Où vous trouviez-vous le 8 novembre 1996 ?

 25   R.  Je me trouvais à Kljuc -- pourriez-vous répéter votre question, s'il

 26   vous plaît ?

 27   Q.  Je voulais savoir où vous vous trouviez le 8 novembre 1996.

 28   R.  Je me trouvais à Kljuc, et comme je vous l'ai dit, j'étais présente


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  1   pour inaugurer les bâtiments qui avaient reçu des fonds du Danemark pour

  2   leur construction. Et il s'est trouvé que j'ai été présente lors de

  3   l'exhumation d'un des charniers, et j'ai participé à l'identification des

  4   dépouilles d'une partie de la population homme d'une petite localité

  5   appelée Biljani, qui se trouve à l'extérieur de Kljuc.

  6   Q.  Et pourquoi avez-vous participé à cette exhumation ?

  7   R.  Je venais du Danemark, et je me suis tout d'abord arrêtée à Bihac et

  8   j'ai eu des réunions avec le HCR des Nations Unies. Et ensuite, de manière

  9   indirecte, on m'a invitée à être un témoin fiable venant d'un autre pays

 10   qui ensuite pourrait expliquer ce qui s'était passé à cette période-là. Le

 11   maire, Hadic, m'a invitée à participer à cette exhumation, et, bien sûr,

 12   c'est ce que j'ai fait.

 13   M. JEREMY : [interprétation] J'aimerais que Mme Stewart nous fasse

 14   visionner une vidéo dans le système Sanction, qui porte la référence 65 ter

 15   28085A. Il n'y a pas de transcription, donc il suffit de la visionner une

 16   fois.

 17   [Diffusion de la cassette vidéo]

 18   M. JEREMY : [interprétation]

 19   Q.  Madame Weiss, la femme que nous venons de voir sur cette vidéo avec sa

 20   main devant sa bouche, c'était qui ?

 21   R.  C'était moi.

 22   Q.  Et où vous trouviez-vous ?

 23   R.  C'était au niveau de la ferme de Laniste, qui est à quelques kilomètres

 24   à l'extérieur de la ville de Kljuc. C'est à cet endroit-là que plusieurs

 25   charniers ont été découverts, et celui-là s'appelle Laniste 1, et c'est

 26   dans ce charnier que l'on a trouvé plusieurs dépouilles d'habitants de

 27   Biljani.

 28   Q.  Est-ce que vous avez participé également à l'excavation d'autres corps


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  1   dans d'autres sites ?

  2   R.  Oui. Ensuite, j'ai participé le même jour à l'identification qui a eu

  3   lieu à l'établissement scolaire. Les corps avaient été alignés, et les

  4   parents de ces victimes, les proches, sont entrés pour essayer de

  5   reconnaître les membres de leurs familles et, en même temps, de reconnaître

  6   ou d'identifier des objets qui avaient été trouvés à proximité des corps

  7   dans le charnier. Et je dois rajouter que cela se passait avant que la

  8   technologie de reconnaissance par ADN soit utilisée pour permettre

  9   d'identifier des restes humains.

 10   M. JEREMY : [interprétation] Mme Stewart va maintenant faire visionner une

 11   autre vidéo dans Sanction, qui porte la référence 65 ter 28085B. Il y a

 12   quelques mots dans les dernières secondes de la vidéo, donc on va peut-être

 13   la visionner deux fois.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous avez besoin de ces propos, dans

 15   ce cas-là c'est une chose.

 16   Mais sinon, vous n'avons pas besoin de la faire visionner deux fois.

 17   [Diffusion de la cassette vidéo]

 18   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 19   "Je n'étais pas prêt à cette possibilité."

 20   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aurais dû expliquer à nos interprètes

 22   de cabine danoise ce qu'il en était. Etant donné que nous n'avons pas

 23   besoin des propos qui sont échangés dans cette vidéo, par conséquent, il

 24   n'est pas nécessaire de les interpréter.

 25   Veuillez continuer.

 26   M. JEREMY : [interprétation]

 27   Q.  Madame Weiss, vous avez mentionné que vous vous trouviez dans cet

 28   établissement scolaire pour l'identification de certains corps. Est-ce que


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  1   c'est ce que nous venons de voir dans cette vidéo ?

  2   R.  Oui, effectivement.

  3   Q.  J'aimerais savoir si les deux extraits vidéo que nous venons de

  4   visionner reflètent fidèlement votre participation à l'excavation à Laniste

  5   1 et ensuite à l'identification dans l'établissement scolaire de Biljani ?

  6   R.  Oui. Ces extraits vidéo vous donnent un aperçu qui est fidèle à ce qui

  7   se déroulait là-bas, mais mon séjour a duré plusieurs jours et, par

  8   conséquent, j'ai vécu beaucoup plus que ce que l'on voit sur ces extraits

  9   vidéo.

 10   Q.  Et vous avez mentionné que cela reflétait ce qui s'était produit.

 11   Pourriez-vous nous décrire exactement ce qui s'est produit et quelles sont

 12   les opinions que vous vous êtes forgées ?

 13   R.  Eh bien, ceci était clair, un massacre s'était déroulé, et les corps de

 14   qui avaient été les victimes de ce massacre avaient été jetés dans ce dont

 15   je me souviens être une déclivité de 20 mètres, et que maintenant on avait

 16   récupéré ces corps.

 17   Q.  Vous avez mentionné le mot massacre. Est-ce qu'on vous a dit où ce

 18   massacre avait eu lieu ?

 19   R.  Oui, à Biljani.

 20   M. JEREMY : [interprétation] J'aimerais verser ces deux extraits vidéo

 21   comme pièces à conviction.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection. Monsieur le

 23   Greffier d'audience, pouvez-vous nous donner les cotes, s'il vous plaît.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] La vidéo 65 ter 28085A devient la pièce

 25   P515, et la vidéo 65 ter 28085B devient la pièce P516.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces deux pièces sont versées au dossier.

 27   M. JEREMY : [interprétation]

 28   Q.  Madame Weiss, est-ce que vous vous êtes rendue à nouveau à Kljuc en


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  1   juillet 1999 ?

  2   R.  Oui, effectivement. Je me suis rendue à Kljuc en juillet 1999 pendant

  3   trois semaines, donc je suis arrivée en juillet et j'en suis repartie en

  4   août.

  5   Q.  Et pourquoi avez-vous visité Kljuc à l'époque ?

  6   R.  Je me suis rendue à Kljuc parce que j'ai décidé que je voulais en fait

  7   glaner certaines impressions et les coucher sur papier en vue d'un livre,

  8   et je me suis rendue là-bas pour obtenir plus d'information et pour

  9   confirmer ou infirmer des déclarations tant écrites qu'orales sur ce qui

 10   s'était passé à Biljani au cours des trois années qui s'étaient écoulées,

 11   donc à partir de 1996. C'était en vue de ce livre que j'avais décidé

 12   d'écrire que je suis allée là-bas pour obtenir d'autres informations.

 13   Q.  Et pour être plus précis, votre livre allait parler de quoi exactement

 14   ?

 15   R.  En fait, il y aurait deux trames principales : tout d'abord, la

 16   description des conditions des réfugiés au Danemark, et j'ai choisi un

 17   groupe de réfugiés très précis, à savoir des personnes qui venaient de

 18   Krajina de Bosnie et, par conséquent, des personnes qui étaient originaires

 19   de Kljuc, et cetera. Ça, c'était le premier objectif.

 20   Le deuxième thème central de mon livre était de décrire pourquoi ils

 21   s'étaient enfuis, quels étaient les événements qui les avaient forcés à

 22   arriver dans un pays étranger, pourquoi n'avaient-ils pu rester dans leur

 23   pays d'origine.

 24   Q.  Et comment avez-vous glané les différents éléments pour ce livre ?

 25   R.  De plusieurs manières. Comme je l'ai mentionné précédemment, il y avait

 26   un certain nombre de réfugiés de cette région de Bosnie au Danemark, et je

 27   suis entrée en contact avec ces personnes. Il y en avait un certain nombre,

 28   un nombre assez important. Et avec Karsten Fledelius, que j'ai mentionné


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  1   précédemment, nous avons également glané plus d'éléments lorsque nous nous

  2   y sommes rendus en 1999. Mais c'est un processus qui s'est en fait étendu

  3   sur trois ans.

  4   M. JEREMY : [interprétation] Mme Stewart va nous faire visionner la vidéo

  5   65 ter 28058C dans le système Sanction. Et là, j'aurais besoin des propos

  6   qui sont échangés.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour informer les interprètes de la

  8   cabine danoise, nous allons tout d'abord faire visionner la vidéo sans

  9   exiger d'interprétation. Nous invitons donc ces interprètes à écouter

 10   attentivement cette vidéo et à vérifier que le compte rendu ou la

 11   transcription que vous avez reçue corresponde au texte, aux propos. Et

 12   ensuite, nous allons faire un deuxième visionnage.

 13   Je ne sais pas si les interprètes danois interprètent à partir de l'anglais

 14   ou si on se base sur des propos qui sont échangés en anglais.

 15   M. JEREMY : [interprétation] Nous avons déjà des sous-titres en anglais

 16   pour cette vidéo.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, nous invitons les

 18   interprètes de la cabine danoise à interpréter vers l'anglais lors du

 19   deuxième visionnage de cette vidéo. Mais commençons par le premier

 20   visionnage.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons maintenant visionner la

 23   vidéo une deuxième fois, et nous demandons l'interprétation.

 24   [Diffusion de la cassette vidéo]

 25   L'INTERPRÈTE : Interprétation qui n'arrive pas de cabine danois-anglais,

 26   précise l'interprète de cabine française.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semble y avoir un problème, peut-être

 28   que je n'ai pas été suffisamment clair. En général, on ne se fie pas aux


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  1   sous-titres, mais on s'attend à ce que les interprètes interprètent les

  2   propos tenus en danois. Est-ce que l'on peut visionner cette vidéo encore

  3   une fois et demander aux interprètes de cabine danoise de faire une

  4   interprétation du danois vers l'anglais.

  5   [Diffusion de la cassette vidéo]

  6   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] 

  7   "Birte Weiss : La police à Kljuc nous a beaucoup aidés puisque -- en fait,

  8   ils nous ont aidés dans notre stratégie pour retrouver Marko Samardzija. Je

  9   vous ai dit qu'on avait retrouvé des documents dans l'établissement

 10   scolaire, quelque chose qu'il avait écrit. Nous pouvons vous montrer cela

 11   et vous pourrez le lire.

 12   Chef de police : Nous sommes intéressés pour savoir ce qu'il a écrit, peut-

 13   être qu'il pourrait nous montrer cela.

 14   Il s'agit d'un document, vous voyez la signature de Marko Samardzija."

 15   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 16   M. JEREMY : [interprétation]

 17   Q.  Madame Weiss, pourquoi cette vidéo a été filmée ?

 18   R.  Durant notre séjour à Kljuc, une équipe de journalistes de la

 19   télévision danoise filmant un documentaire nous a suivis. Et c'est la

 20   raison pour laquelle il y a donc cette vidéo qui montre des textes, des

 21   documents.

 22   Q.  Et l'homme dans la vidéo à côté de vous, assis à côté de vous, avec une

 23   barbe, il s'agit de qui ?

 24   R.  Il s'agit de M. Karsten Fledelius de l'Université de Copenhague. Il

 25   faisait office d'interprète et il est également co-auteur de ce livre.

 26   Q.  Et les deux autres hommes qui se trouvaient dans cette salle, qui

 27   étaient-ils ?

 28   R.  Deux autres personnes. D'abord, au bout de la table se trouve le chef


Page 5289

  1   de la police, Dafic, et le policier en uniforme à droite, sur la

  2   photographie, est Smail Safaracic. Si je me souviens bien, Smail était son

  3   prénom. Ces deux policiers nous étaient extrêmement utiles concernant notre

  4   travail par rapport à la recherche de Samardzija.

  5   Q.  Qui était Samardzija; Marko Samardzija ? C'est le nom qui est mentionné

  6   dans cet extrait vidéo.

  7   R.  Marko Samardzija était un enseignant à l'école à Sanica, et Sanica se

  8   trouve pas très loin de Biljani. Il était très bien connu dans cette

  9   région, il est Serbe et il faisait partie de la structure ou plutôt d'un

 10   scénario monté, c'est ce qu'on a appris par la suite.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Jeremy, la Chambre a

 12   quelques préoccupations pour ce qui est de la façon de laquelle se déroule

 13   ce témoignage et à la façon de laquelle les questions sont posées. Nous

 14   avons compris qu'il y a le résumé 65 ter. Le témoin a témoigné sur

 15   l'exhumation, mais vous demandez au témoin de témoigner des choses par

 16   rapport auxquelles elle a eu des informations de deuxième, troisième,

 17   quatrième main. C'est ce qu'elle a appris dans le contexte par rapport

 18   auquel nous ne savons pas si toutes les parties pouvaient être entendues,

 19   et cetera. Présenter tout cela alors que nous avons des moyens de preuve

 20   directs, c'est ce qui provoque nos préoccupations et nous demandons comment

 21   cela nous peut être utile. Par exemple, le fait que le policier était très

 22   utile en aidant le témoin à obtenir des informations, je vois que c'est la

 23   seule valeur probante de cela. C'est très limité. C'est pour cela que je

 24   vous invite à poser des questions au témoin auquel le témoin peut répondre

 25   en utilisant les informations de première main, à savoir les informations

 26   concernant l'exhumation, l'identification des cadavres, concernant les

 27   objets qui appartenaient à ces personnes qui étaient identifiées. Ne posez

 28   pas de questions concernant ce qu'elle a appris sur les autres personnes


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  1   pour ce qui est de la période pendant laquelle elle n'était pas dans cette

  2   région.

  3   Madame Weiss, j'espère que vous allez comprendre cela parce qu'écrire un

  4   livre est quelque chose qui est différent par rapport à ce que nous faisons

  5   dans ce prétoire, puisqu'il s'agit ici d'un système, d'un procédé où on

  6   doit entendre le témoignage des témoins sur ce qu'ils ont observé, vu.

  7   Procédez, Monsieur Jeremy.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai tout simplement répondu à des questions

  9   qu'on m'a posées, et je suis prête à en dire plus sur l'exhumation et la

 10   procédure d'identification.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'espère que vous ne m'avez pas mal

 12   compris. Ce n'était pas une sorte de critique à votre égard, pour ce qui

 13   est de votre façon à répondre à des questions. J'ai plutôt voulu rappeler à

 14   M. Jeremy la façon de laquelle il faut procéder dans le prétoire pour que

 15   la Chambre bénéficie de cela. J'apprécie non seulement votre travail, mais

 16   également vos réponses à des questions parce que vous y avez répondu de

 17   votre mieux.

 18   Monsieur Jeremy, poursuivez.

 19   M. JEREMY : [interprétation] Monsieur le Président, comme on a pu noter,

 20   Marko Samardzija, dans l'entretien qui a suivi la vidéo, a parlé de

 21   certains documents. En fait, ces documents ont fait référence à Marko

 22   Samardzija. Ces documents que nous allons voir sont les documents qui ont

 23   été fournis au témoin par la police.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, il ne s'agit pas de la recherche

 25   de M. Samardzija, mais vous devez montrer les documents au témoin et poser

 26   des questions concernant ce qu'elle a appris elle-même de M. Samardzija

 27   durant cet entretien.

 28   M. JEREMY : [interprétation] Merci.


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  1   Q.  Madame Weiss, dans l'extrait vidéo, nous avons vu les policiers dire

  2   qu'il y avait des documents qui ont été rédigés par Marko Samardzija, et

  3   nous allons maintenant voir certains de ces documents.

  4   M. JEREMY : [interprétation] Mme Stewart va maintenant montrer à nos écrans

  5   le document 65 ter 28087. Monsieur le Président, Mme Stewart vient de me

  6   rappeler que je n'ai pas demandé le versement au dossier des extraits

  7   vidéo. C'est 28085C.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est le troisième extrait vidéo

  9   aujourd'hui.

 10   Monsieur le Greffier -- Maître Lukic.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Je soulève une objection pour ce qui est de cet

 12   extrait vidéo puisque ce n'est pas pertinent pour cette affaire.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas de pertinence, alors cet

 14   extrait vidéo obtiendra une cote aux fins d'identification.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] P517.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cet extrait vidéo a obtenu une cote aux

 17   fins d'identification.

 18   Continuez, Monsieur Jeremy. Plus tard, vous allez avoir l'occasion

 19   d'expliquer où se trouve la pertinence de cette vidéo.

 20   M. JEREMY : [interprétation]

 21   Q.  Madame Weiss, reconnaissez-vous le document qui est à l'écran devant

 22   vous ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Quand avez-vous vu ce document auparavant ?

 25   R.  Ce document m'a été montré au poste de police à Kljuc.

 26   Q.  Savez-vous qui est l'auteur de ce document ?

 27   R.  Oui. Si on regarde le bas de cette page du document, vous allez voir

 28   que ce document est écrit par Marko Samardzija.


Page 5292

  1   M. JEREMY : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais maintenant

  2   passer à un autre document.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir cette partie du

  4   document où figure le nom de la personne qui l'a rédigé ?

  5   Maintenant nous voyons cette partie. Nous voyons la signature qui figure.

  6   Continuez, Monsieur Jeremy.

  7   M. JEREMY : [interprétation] Je passerais à un autre document maintenant,

  8   le document 28088. Est-ce qu'on peut l'afficher dans le prétoire

  9   électronique ?

 10   Q.  Madame Weiss, reconnaissez-vous le document qui est affiché à l'écran

 11   devant vous ?

 12   R.  Oui, je le reconnais, et je l'ai vu à cette même occasion-là.

 13   Q.  Dites-nous brièvement si vous savez de quoi il s'agit dans ces

 14   documents.

 15   R.  Oui. Je ne comprends pas la langue qui est dans le document original,

 16   mais cela m'a été traduit, et je serai brève pour ce qui est du contenu du

 17   document. Si vous êtes Serbe dans cette région, et si vous vous préparez à

 18   combattre les Musulmans dans cette région --

 19   Q.  Savez-vous à qui ces documents ont été distribués ?

 20   R.  D'abord, cela était envoyé à Marko Samardzija, aux soldats de Marko

 21   Samardzija. Il était capitaine de première classe et c'était un message

 22   adressé à ses unités, mais on m'a également dit que ces documents ont été

 23   distribués à un groupe quelque peu plus large au niveau local.

 24   Q.  Comment le savez-vous ?

 25   R.  Marko Samardzija lui-même me l'a dit.

 26   M. JEREMY : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais verser ces

 27   deux documents au dossier en tant que pièces à conviction publiques de

 28   l'Accusation.


Page 5293

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'abord pour ce qui est du premier

  2   document, Monsieur le Greffier.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 28087 65 ter obtiendra la

  4   cote P518.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ce document est versé au dossier --

  6   ah, pas encore. D'abord, il faut entendre Me Lukic.

  7   M. LUKIC : [interprétation] Le deuxième document par rapport auquel le

  8   témoin nous a donné certains détails --

  9   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 10   M. LUKIC : [interprétation] Il n'est pas suffisant de seulement reconnaître

 11   la signature. Si la teneur du document n'a pas été discutée, alors il n'y a

 12   pas de base suffisante pour pouvoir le verser au dossier par le biais de ce

 13   témoin.

 14   Peut-être que ce document pourrait être versé au dossier directement dans

 15   le prétoire, mais pas par le biais de ce témoin.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous objecteriez peut-être au

 17   moment où --

 18   M. LUKIC : [interprétation] -- ce versement direct, oui, nous pouvons nous

 19   occuper de cela à ce moment-là, mais pour ce qui est du versement au

 20   dossier de ce document par le biais de ce témoin, nous considérons que la

 21   base n'est pas suffisante.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Demandons au témoin. On vous a demandé

 23   si vous avez déjà vu ce document. Vous nous avez donné la réponse en nous

 24   disant quand vous l'avez vu. Ensuite, on vous a demandé de savoir quel est

 25   l'auteur du document et vous avez dit que vous avez vu que c'était Marko

 26   Samardzija. Est-ce que vous aviez pu voir la signature sur ce document ?

 27   Est-ce que cela a été confirmé par qui que ce soit pour dire que ce

 28   document a été rédigé et signé par lui-même ? Est-ce que quelqu'un d'autre


Page 5294

  1   l'a confirmé ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, confirmé par qui ?

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par qui que ce soit. Par lui-même, par

  4   quelqu'un d'autre, par les experts ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, la police à Kljuc a présenté les

  6   documents comme faisant partie du matériel qu'ils avaient rassemblé,

  7   compilé, pour les envoyer au tribunal de Bosnie-Herzégovine. Il n'y avait

  8   aucun doute pour ce qui est de l'authenticité de ce document. Pourquoi ?

  9   Parce que ces documents ont été trouvés peu de temps après la fin de la

 10   guerre et cela a été retrouvé sur le bureau de Marko Samardzija à l'école.

 11   Il n'a pas pris ces documents au moment où il a fui ces locaux de l'école.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document --

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cela sera la

 16   pièce P518.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et c'est la cote aux fins

 18   d'identification.

 19   Le deuxième document, Monsieur Jeremy, je pense que vous n'avez pas montré

 20   la deuxième page où figure le nom de M. Samardzija et où nous voyons la

 21   signature.

 22   Maître Lukic, vous avez dit que vous aviez des objections.

 23   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous soulevons la même

 24   objection que tout à l'heure.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les mêmes objections.

 26   Monsieur le Greffier, pourriez-vous octroyer une cote aux fins

 27   d'identification à ce document.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 28088 65 ter aura la cote


Page 5295

  1   P519.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Madame Weiss, ce qu'on vous a dit

  3   concernant l'origine du deuxième document, est-ce la même chose qu'on vous

  4   a dit par rapport au premier document ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et concernant la distribution de ce

  7   document, je pense que vous avez dit que vous étiez au courant de cette

  8   distribution puisque M. Samardzija vous a dit cela.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je ne sais pas si le mot "distribution"

 10   est le mot juste, je ne peux pas en juger, mais le document a été d'abord

 11   distribué à ses soldats. On l'a également distribué à la population serbe,

 12   et non seulement qu'ils étaient au courant du document, mais qu'il a

 13   confirmé cela.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, il vous a expliqué quel était le

 15   destinataire de ce document et, en sa présence, vous avez vu ces documents

 16   ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Nous n'avons pas vu ces documents au

 18   moment où nous nous sommes rendus en visite de Marko Samardzija, mais nous

 19   avons demandé s'il avait rédigé certains documents avant le massacre.

 20   D'abord, il a hésité à dire qu'il avait écrit quoi que ce soit. Il a

 21   mentionné la population. Mais pendant cet entretien qui a duré deux heures

 22   et demie, il s'est rappelé le fait qu'il avait peut-être écrit quelque

 23   chose, quelque chose qui était resté à l'école, dans son bureau, et qu'il

 24   n'avait pas pris avec lui lorsqu'il avait fui cet endroit.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci pour ces réponses.

 26   Monsieur Jeremy, continuez.

 27   M. JEREMY : [interprétation]

 28   Q.  Madame Weiss, vous avez dit qu'à plusieurs occasions vous avez parlé


Page 5296

  1   avec Marko Samardzija. J'aimerais vous montrer maintenant un extrait vidéo.

  2   M. JEREMY : [interprétation] J'aimerais que Mme Stewart nous montre dans le

  3   programme Sanction, 28085D 65 ter. Pour ce qui est de cet extrait vidéo, il

  4   y a quelques mots, donc il faut qu'on le visionne à deux reprises. Moi,

  5   j'ai réduit la durée de cela, de cet extrait vidéo, et je vais dire à Mme

  6   Stewart quel est le moment où nous devons nous arrêter.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons voir cela la première fois

  8   pour vérifier les propos tenus, et la deuxième fois nous allons recevoir

  9   l'interprétation.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons maintenant visionner le même

 12   extrait vidéo pour la deuxième fois pour recevoir l'interprétation. Cela

 13   s'est arrêté à 48:50. Commençons du début, de 47:25.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "Pourtant, nous étions au bon endroit. Soudainement --

 17   Les gens disent beaucoup de choses.

 18   C'est justement pour cela que nous sommes venus. Parce que les gens

 19   disent beaucoup de choses, nous souhaitons vous entendre dire ce qui s'est

 20   passé comme vous l'avez vu.

 21   Pour vous dire, il y avait l'ordre selon lequel il fallait amener à

 22   Manjaca les fascistes les plus extrêmes parmi les Musulmans. A l'époque,

 23   j'ai dit que je pensais qu'il y avait 14 de ces extrémistes dans notre

 24   région. A mon avis, il y avait 14 extrémistes et il ne faut pas toucher aux

 25   autres.

 26   Il y a à peu près 14 extrémistes. Ne touchez pas aux autres, a-t-il

 27   dit. Qui a donné cet ordre ?

 28   Il a donné l'ordre, oui.


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  1   Avant l'action, avant que les Musulmans devaient être amenés à

  2   l'école dans la soirée du 9 juillet.

  3   Ce n'était pas le 9 juillet dans la soirée lorsqu'il m'a ordonné

  4   d'exécuter ce devoir d'honneur et de ne pas faire d'erreur."

  5   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

  6   M. JEREMY : [interprétation]

  7   Q.  Madame Weiss, dans l'extrait vidéo qu'on vient de visionner, on a vu

  8   votre entretien avec Marko Samardzija, et il y a eu la référence à la

  9   réunion du 9 juillet, la référence pour ce qui est des ordres qui ont été

 10   donnés à la même date. Vous vous souvenez que Marko Samardzija a parlé de

 11   ces choses ?

 12   R.  Oui. Je me souviens de cela très clairement.

 13   M. JEREMY : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais qu'on

 14   affiche le document 65 ter 03063. C'est l'ordre donné par le lieutenant-

 15   colonel Drago Samardzija, qui porte la date du 9 juillet 1992.

 16   Q.  Madame Weiss, est-ce que vous reconnaissez l'ordre qui est à l'écran

 17   devant vous ?

 18   R.  Oui, je le reconnais. Cet ordre m'a été montré au poste de police à

 19   Kljuc.

 20   Q.  Savez-vous qui était lieutenant-colonel Drago Samardzija ?

 21   R.  Oui, c'est ce qu'on m'a dit, mais je ne sais pas, je ne connais pas

 22   vraiment des grades militaires. Par conséquent, je ne veux pas vous parler

 23   en détail de cela du fait de savoir qui avait le droit de donner des ordres

 24   à leurs collègues.

 25   Q.  Qui vous a dit qui était cette personne ?

 26   R.  C'est ce que j'ai appris de deux chefs de la police du poste de police

 27   à Kljuc, et Marko Samardzija a aussi mentionné le nom de Drago Samardzija

 28   pendant l'entretien que j'avais avec lui.


Page 5298

  1   Q.  Qu'est-ce que Marko Samardzija a dit par rapport au nom de Drago

  2   Samardzija ?

  3   R.  Je ne me souviens pas des mots exacts qui ont été dits, mais cela a été

  4   dit par rapport à ce qu'on a vu à l'écran, à savoir il a mentionné le 9

  5   juillet, les ordres qui ont été donnés, c'étaient par rapport à la réunion

  6   qui a eu lieu avant le massacre, donc la veille du massacre. La réunion a

  7   eu lieu à Sanica, et à cette réunion étaient présents un certain nombre

  8   d'officiers de différents grades, et c'est dans ce contexte qu'il a

  9   également mentionné Drago Samardzija. Marko Samardzija était également

 10   présent à cette réunion.

 11   M. JEREMY : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que ce

 12   document de la liste 65 ter, qui porte le numéro 03063, soit versé au

 13   dossier comme une pièce à conviction publique de l'Accusation.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, puisque ce

 16   témoin ne peut pas confirmer qui a écrit le document et elle ne peut pas

 17   confirmer la teneur du document.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour ce qui est de l'origine, elle a dit

 19   que le document lui a été montré au poste de police.

 20   M. LUKIC : [interprétation] Nous pensons que les policiers ne peuvent pas

 21   confirmer l'origine du document.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Le document sera versé sous une

 23   cote aux fins d'identification.

 24   Monsieur le Greffier, quelle sera la cote ?

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 65 ter 03063 sera la pièce

 26   ayant la cote P520.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier avec

 28   une cote aux fins d'identification.


Page 5299

  1   Vous pouvez poursuivre, Monsieur Jeremy. Monsieur Jeremy, également, je

  2   regarde l'heure, et j'aimerais savoir où vous en êtes pour ce qui est du

  3   temps qui vous a été alloué.

  4   M. JEREMY : [interprétation] J'aurais besoin probablement de 15 minutes.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui est plus par rapport à votre

  6   évaluation du temps qui vous est nécessaire pour votre interrogatoire

  7   principal.

  8   Vous avez demandé une heure et demie, je pense, Maître Lukic.

  9   M. LUKIC : [interprétation] Oui, mais puisque nous avons reçu quelques

 10   documents de plus, je pense que nous allons devoir garder le témoin lundi

 11   la semaine prochaine.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Regardons. Si nous faisons la pause

 13   maintenant, ensuite nous allons commencer à 12 heures 15, et travailler

 14   jusqu'à 13 heures 15. Donc, vous allez avoir un peu plus d'une heure et

 15   demie.

 16   Monsieur Jeremy, vous pouvez en finir avec votre interrogatoire ?

 17   M. JEREMY : [interprétation] Je vais faire de mon mieux --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, si M. Jeremy obtient

 19   quelques minutes de plus, vous allez avoir une heure et quelques minutes à

 20   peu près pour vous aussi.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Nous allons faire de notre mieux également,

 22   Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire la pause après que le

 24   témoin est accompagné hors du prétoire.

 25   [Le témoin quitte la barre]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pause finira à 12 heures 18 précises.

 27   --- L'audience est suspendue à 11 heures 57.

 28   --- L'audience est reprise à 12 heures 17.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on faire entrer le témoin dans le

  2   prétoire, s'il vous plaît.

  3   Monsieur Jeremy, la Chambre a suivi de très près l'interrogatoire principal

  4   et vous accorde sept minutes de plus.

  5   M. JEREMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  6   [Le témoin vient à la barre]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Jeremy, vous avez la parole. Et

  8   je vais être très strict pour ce qui est du temps.

  9   M. JEREMY : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 10   demande le versement de la vidéo que nous avons visionnée à la fin du

 11   dernier volet d'audience, à savoir du document 65 ter 28085D.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois qu'il n'y a pas d'objection.

 13   Monsieur le Greffier.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document devient la pièce P52,

 15   Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P521 est versée au dossier.

 17   M. JEREMY : [interprétation]

 18   Q.  Madame Weiss, dans l'enregistrement vidéo que nous avons regardé juste

 19   avant l'interruption d'audience, nous avons vu Marko Samardzija parler de

 20   14 extrémistes, et ceci en relation avec les événements qui se produits le

 21   10 juillet 1992. Très précisément, qu'a-t-il dit au sujet de ces

 22   extrémistes ?

 23   R.  J'ai essayé de donner une définition précise de ce qu'il entendait par

 24   "extrémistes". Il y avait plusieurs couches dans son explication. Et il y

 25   en avait une qui était plus générale. C'étaient des gens qui constituaient

 26   un danger pour la partie serbe de la population, en premier lieu. Et

 27   deuxièmement, il y avait des jeunes hommes, là, qui provenaient de familles

 28   qui avaient les mains propres en 1941 lorsqu'un massacre a eu lieu dans


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  1   cette même région, mais à ce moment-là les Serbes étaient des victimes.

  2   Q.  Est-ce que des extrémistes ont été identifiés de quelque manière que ce

  3   soit précédant les événements du 10 juillet ?

  4   R.  Dans l'entretien, on a dit qu'il savait exactement qui ils étaient, car

  5   en tant que professeur enseignant à l'école dans la région, c'était une

  6   personne très importante, et donc il avait une connaissance détaillée des

  7   personnes de la région. Donc il savait exactement qui ils étaient.

  8   Q.  Est-ce que ces autres personnes avaient une idée pour ce qui est de ces

  9   personnes la veille du 9 juillet 1992 ?

 10   R.  Je n'étais pas présente, donc je n'ai absolument aucune possibilité de

 11   répondre à cette question de façon précise. Marko Samardzija a dit qu'il y

 12   avait des listes de citoyens -- qui devaient emmenés à l'école à Biljani où

 13   ils devaient être enregistrés, et il y avait plus de personne sur cette

 14   liste que les 14 personnes qu'il estimait être extrémistes. Je ne peux pas

 15   vous donner de réponse plus précise car, comme je vous l'ai dit, je n'étais

 16   pas sur place à l'époque.

 17   M. JEREMY : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais que l'on

 18   affiche la pièce 65 ter 2797B. Il s'agit d'un extrait du livre de Mme Weiss

 19   intitulé "Witness to Madness", "Témoin de la folie" en français. Et, en

 20   particulier, j'aimerais attirer votre attention sur la page 3 en e-court en

 21   anglais. Et en B/C/S, il s'agit du document dans l'e-court, page 4, vers le

 22   milieu de la page.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De combien de pages parlez-vous

 24   exactement ? Combien de pages y a-t-il dans cet extrait, Monsieur Jeremy ?

 25   M. JEREMY : [interprétation] Six pages, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Six pages. Merci.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 28   Juges, pour être bien clair et pour le compte rendu d'audience, il s'agit


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  1   de 27976B.

  2   M. JEREMY : [interprétation] Page 3 en e-court en anglais, vers le milieu

  3   du troisième paragraphe, et page 4 en B/C/S. Excusez-moi, en anglais, nous

  4   parlons de la page 3, et c'est le troisième paragraphe qui nous intéresse,

  5   qui se trouve dans la deuxième partie du document, la partie du bas. En

  6   fait, je précise qu'il s'agit de la page 3 en anglais.

  7   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le greffier nous dit qu'il n'y a qu'une

  9   page en e-court, ce qui m'étonne, car lorsque moi-même j'examine la version

 10   qui se trouve dans le prétoire électronique, je compte six pages.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons six

 12   pages en B/C/S et une page en anglais.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais j'ai six pages en anglais, Monsieur

 14   le Greffier, pour ce qui me concerne. Vous trouverez les pages plus tard.

 15   Monsieur Jeremy, posez les questions au témoin car vous ne disposez pas

 16   d'encore beaucoup de temps.

 17   M. JEREMY : [interprétation]

 18   Q.  Dans votre livre "Witness to Madness", "Témoin de la folie", vous citez

 19   Marko Samardzija, et vous dites que concernant les événements du 10 juillet

 20   1992, il vous a dit ceci :

 21   "Ceci n'a pas aidé lorsque j'ai appelé le commandant en chef et lorsque je

 22   lui ai dit ce qui s'est passé à Biljani. Il a dit : 'Allez, partez.

 23   Retournez chez vous.' C'était à 9 heures, et à ce moment-là il n'y avait

 24   pas encore de morts sur la route. J'ai entendu parler de toutes ces choses

 25   horribles plus tard."

 26   Madame Weiss, j'aimerais savoir si Marko Samardzija vous a dit qui était la

 27   personne avec qui il avait parlé au téléphone. Vous a-t-il donné le nom de

 28   la personne qu'il avait appelée ?


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  1   R.  Il a mentionné qu'il était entré en contact avec les personnes qu'il

  2   pouvait contacter, qu'il pouvait trouver. Et il a dit qu'il s'était

  3   immédiatement opposé, qu'il a élevé des objections tout de suite, et il a

  4   mentionné le nom de Jovo Kevac. Et par la suite, il a parlé avec eux au

  5   téléphone. Il a parlé avec plusieurs personnes au téléphone, et il voulait

  6   dire à ces personnes de ce qui se passait à Biljani.

  7   Q.  Est-ce qu'il vous a dit qui étaient ces plusieurs personnes ou quel

  8   était le bureau qu'elles occupaient ?

  9   R.  Il a dit que c'étaient des personnes qui occupaient des postes de

 10   commandement.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Jeremy, je suis vraiment désolé

 12   de vous interrompre. J'ai déjà fait quelques commentaires. Et je vous ai

 13   déjà demandé de faire bien attention s'agissant de votre interrogatoire

 14   principal.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demanderais de bien vouloir

 17   terminer dans la minute qui suit.

 18   M. JEREMY : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président. Je

 19   demanderais que l'on affiche dans le prétoire électronique le document 65

 20   ter 19966A. Il s'agit d'une personne quittant Kljuc, et ce document porte

 21   sur les biens qu'il a laissés derrière lui. Le document porte la date du 10

 22   août 1992.

 23   Q.  Madame Weiss, reconnaissez-vous ou bien est-ce que vous avez eu

 24   l'occasion de voir des documents similaires à celui-ci qui se trouve à

 25   l'écran devant vous auparavant ?

 26   R.  Oui, je reconnais ce document, et j'ai vu plusieurs documents de ce

 27   genre. Il était habituel qu'afin de pouvoir faire partie d'un convoi

 28   sortant de Kljuc, les gens n'avaient pas le choix, ils devaient quitter la


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  1   ville et ils devaient signer une telle déclaration.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, vous invitez le témoin

  3   à nous dire ce qui s'est passé à l'époque. Le témoin peut parler du

  4   document. Elle n'a pas nécessairement de connaissances personnelles. Elle a

  5   fait des recherches, oui, mais elle n'était pas témoin oculaire des

  6   événements.

  7   Alors j'aimerais poser la question à Mme Weiss : où avez-vous vu des

  8   documents analogues ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu ce document au poste de police de

 10   Kljuc, et plus tard, dans les mois et au cours des années qui ont suivi,

 11   j'ai vu des documents similaires auprès des autorités locales. Par exemple,

 12   l'hôtel de ville de Kljuc.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. La Chambre estime que ce

 14   document pourrait être marqué aux fins d'identification si vous voulez

 15   qu'il soit versé au dossier, mais j'attends la réaction de Me Lukic.

 16   M. LUKIC : [interprétation] Nous aimerions élever une objection pour que ce

 17   document soit versé au dossier par ce témoin.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous voulez que ce document soit

 19   versé au dossier, nous allons lui accorder une cote.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est P522.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P522 est marqué aux fins

 22   d'identification. Maître Jeremy, vous n'avez plus de temps. Votre temps est

 23   écoulé.

 24   M. JEREMY : [interprétation] Encore une dernière question.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pardon ?

 26   M. JEREMY : [interprétation] J'ai encore une dernière question.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Mais j'ai dit que j'allais être

 28   très strict. Vous avez déjà employé tout le temps qui vous était imparti.


Page 5306

  1   M. JEREMY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Weiss, ce n'est pas la façon

  3   habituelle de terminer un interrogatoire principal, mais vous serez

  4   maintenant contre-interrogée par Me Lukic. Me Lukic est l'un des conseils

  5   de M. Mladic.

  6   Veuillez commencer, Maître Lukic.

  7   M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie.

  8   Contre-interrogatoire par M. Lukic :

  9   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Weiss.

 10   R.  Bonjour.

 11   Q.  Aujourd'hui, nous allons avoir une combinaison linguistique assez

 12   inhabituelle, mais je dois dire que je suis heureux que la langue danoise

 13   fasse partie de nos langues de travail aujourd'hui dans le cadre de ce

 14   procès.

 15   Je vois que vous avez eu une carrière impressionnante, bien sûr, et c'est

 16   un honneur d'avoir parmi nous une personne aussi proéminente que vous dans

 17   le prétoire aujourd'hui. Toutefois, votre expertise pour la plupart

 18   concerne le Danemark et la société danoise. Donc dans ma question, ce que

 19   je voudrais savoir, c'est ceci : est-il exact de dire que vous n'êtes pas

 20   une experte en matière de relations en Yougoslavie et en Bosnie,

 21   particulièrement concernant l'aspect historique et politique de cette

 22   partie du monde ?

 23   R.  Eh bien, j'étais ministre de l'Intérieur pendant la majeure partie de

 24   la période pendant laquelle la guerre faisait rage en Bosnie. En cette

 25   qualité, je peux vous dire que j'ai pu savoir ce qui se passe, j'ai eu une

 26   bonne connaissance des événements en Bosnie, et je peux vous dire que ce

 27   qui s'est passé -- et mes connaissances étaient importantes pour déterminer

 28   le nombre de réfugiés qui était venu au Danemark après les événements. Et


Page 5307

  1   c'est la raison pour laquelle j'ai pu me saisir de rapports émanant du

  2   ministre des Affaires étrangères du Danemark. J'ai également lu les

  3   documents des Nations Unies, j'ai également suivi les médias

  4   internationaux. Donc il est vrai, si vous voulez, que je n'ai pas une

  5   éducation précise pour ce qui est de l'histoire de ce pays. Je ne connais

  6   pas la langue non plus de façon très approfondie. Je parle la langue de

  7   façon superficielle. Mais pour des raisons de nécessité, je dois vous dire

  8   que pour ce qui est de mes connaissances professionnelles, j'ai acquis des

  9   connaissances pour pouvoir me pencher sur la question des réfugiés au

 10   Danemark.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, vous avez sans doute

 12   remarqué que la Chambre a essayé de cibler la déposition de ce témoin sur

 13   des faits, les faits dont elle a connaissance. La Chambre est intervenue à

 14   plusieurs reprises dans le cadre de l'interrogatoire principal. Mis à part

 15   le contenu de la déposition du témoin, qui n'est pas un contenu de témoin

 16   expert, pourquoi alors vous pencher sur le fait qu'elle n'est pas un témoin

 17   expert alors que nous avons essayé de faire de notre mieux pour nous en

 18   tenir à ce témoin comme étant un témoin de fait et pour limiter les

 19   questions posées par l'Accusation à ce témoin, comme des questions posées à

 20   un témoin de fait.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Q.  Madame Weiss, vous avez déposé aujourd'hui sur le rôle de Marko

 23   Samardzija entourant ces événements. Est-il exact de dire que vous avez

 24   reçu des informations selon lesquelles ce dernier avait reçu cette tâche de

 25   Vinko Kondic ?

 26   R.  Vinko Kondic était, d'après ce que j'en sais, le dirigeant militaire de

 27   la police de Kljuc. Je ne me souviens pas exactement de ce qu'il a dit

 28   concernant les diverses unités militaires et les diverses compétences des


Page 5308

  1   unités de police par rapport aux unités militaires. J'ai répondu à une

  2   question posée par le Procureur que je n'ai pas de connaissances précises

  3   quant aux grades militaires, et je ne peux pas parler des grades et des

  4   postes qu'occupaient les officiers et quelle était l'interaction entre eux.

  5   Je ne peux pas répondre à votre question de façon différente que je n'ai

  6   répondu à l'Accusation.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Weiss, les choses sont beaucoup

  8   plus simples qu'elles ne semblent apparaître. La question est de savoir si

  9   vous avez jamais reçu l'information selon laquelle Marko Samardzija avait

 10   reçu sa tâche de Vinko Kondic indépendamment de qui il était ou de son

 11   grade ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas confirmer ceci.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voilà, c'était la question qui vous a

 14   été posée. C'est aussi simple que cela. Me Lukic vous posera maintenant

 15   d'autres questions.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous me permettez de vous donner

 17   les raisons pour lesquelles je ne suis pas en mesure de vous le confirmer ?

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous savez quelque chose, vous le

 19   confirmez. Si vous ne savez pas quelque chose, il n'est pas nécessaire de

 20   nous donner des raisons. Nous recevons votre réponse telle quelle, cela

 21   nous satisfait. Merci.

 22   Veuillez, je vous prie, procéder, Maître Lukic.

 23   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Q.  Je vais maintenant vous poser une question sur la façon dont les

 25   personnes se sont comportées dans cette région. Et nous allons également

 26   passer en revue certains passages de votre livre pour voir si vous avez eu

 27   des informations sur ce crime commis, sur cet incident qui s'était déroulé

 28   pour des raisons de vengeance.


Page 5309

  1   Je vous demanderais, Monsieur l'Huissier, de bien vouloir afficher le

  2   document 65 ter 27976 dans le prétoire électronique. La page qui nous

  3   intéresse est la page 18. Version anglaise, quatrième paragraphe à partir

  4   du haut de la page.

  5   Je crois que les pages que j'ai dans le prétoire électronique ne sont

  6   pas les mêmes. Un instant, s'il vous plaît.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Page 18 dans le prétoire

  8   électronique. Et j'ai le document en copie papier à la page 18. Page 18

  9   dans le prétoire électronique et page 17 sur support papier.

 10   M. LUKIC : [interprétation]

 11   Q.  Je vais juste voir si l'on retrouve ceci dans le document concernant

 12   Marko Samardzija. C'est un passage qui se trouve au quatrième paragraphe.

 13   En fait, il est maintenant en haut de l'écran. Premier paragraphe, qui se

 14   lit comme suit :

 15   "…il a mentionné le nom d'un voisin qui a tué son père il y a 58 ans de

 16   cela. Il a commencé à trembler lorsqu'il a parlé de ceci et lorsqu'il a

 17   mentionné que tous les hommes et les jeunes hommes âgés de plus de 12 ans à

 18   l'époque avaient été fait prisonniers et tués, exécutés."

 19   Pourrait-on maintenant afficher la page 27. Premier paragraphe de ce même

 20   document, s'il vous plaît.

 21   Pourrait-on afficher la page 25, s'il vous plaît. Excusez-moi. Page

 22   25 en version anglaise.

 23   Vous dites ceci :

 24   "Pour ce qui le concerne, il s'agissait d'une vengeance. Son père avait été

 25   tué en 1941 par un groupe de Croates et de Bosniens. A la suite de la mort

 26   de sa mère, il disait qu'il était très triste parce qu'elle n'a pas été --"

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes en train de lire et les

 28   interprètes ont du mal à vous suivre. Pour commencer, nous allons peut-être


Page 5310

  1   trouver votre passage. Dans le prétoire électronique, nous avons la page 26

  2   pour ce qui est de l'anglais et quant à la version en B/C/S, nous ne voyons

  3   pas le numéro de la page. C'est la page suivante qu'il nous faut.

  4   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, en anglais c'est la page

  5   26 qu'il faudrait afficher. Il y a une différence d'une page. Pourriez-

  6   vous, je vous prie, afficher la page 26, premier paragraphe.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce bien la page qui vous intéresse ?

  8   M. LUKIC : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Page 27 dans le prétoire électronique;

 10   page 26 sur la version sur papier en anglais.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Oui, justement, mais j'avais demandé ce numéro

 12   de page.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, poursuivez, je vous prie.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Je vais en redonner lecture.

 15   Q.  Vous voyez dans la deuxième ligne la phrase qui commence comme suit :

 16   "Pour ce qui le concerne, il s'agissait d'une question de vengeance. Son

 17   père a été tué en 1941 par un groupe de Croates et de Bosniens. Et à la

 18   mort de sa mère, il y a quelques années de cela, il s'est plaint lors de

 19   ses funérailles qu'elle n'était pas en mesure d'être présente pour voir la

 20   vengeance qui était la sienne de ce meurtre abject."

 21   J'aimerais savoir si vous avez appris de la bouche de personnes avec

 22   lesquelles vous vous êtes entretenues que Marko Samardzija et un groupe de

 23   Serbes du cru armé, que ces derniers ont agi de la sorte pour se venger ?

 24   R.  Je crois qu'il faut être bien prudent et il ne faut pas généraliser. Je

 25   veux certainement m'en tenir à ce qu'a dit Marko Samardzija. Il a expliqué

 26   ceci pour étoffer ses raisons et il nous a expliqué qu'il avait appris,

 27   lorsqu'il avait cinq ans, que son père avait été une victime du massacre

 28   mentionné - massacre qui s'est déroulé en 1941 - et qu'il appuie ceci en se


Page 5311

  1   référant au fait que les extrémistes, parmi d'autres, étaient ceux qui

  2   n'avaient pas les mains propres en 1941. Donc, il y a un lien logique dans

  3   cette déclaration qui est la sienne, mais je ne veux pas non plus me livrer

  4   à des généralisations pour ce qui est des autres personnes qui avaient pris

  5   part dans ce massacre.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que la question a été mal

  7   comprise bien qu'elle soit bien interprétée. Si vous regardez l'anglais,

  8   vous avez demandé au témoin s'il avait appris de la part d'autres, c'est-à-

  9   dire d'autres sources, et si j'ai bien compris votre question, vous voulez

 10   savoir si elle avait obtenu confirmation que Marko Samardzija avait agi

 11   animé par la vengeance.

 12   Madame le Témoin, pourriez-vous nous dire si ce que vous nous dites a été

 13   confirmé par d'autres sources ?

 14   Vous regardez Me Lukic. Vous avez peut-être du mal à savoir qui pose

 15   la question. C'est moi, le Président, qui vous pose cette question. Est-ce

 16   que vous avez pu, donc, obtenir confirmation auprès d'autres sources ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, il y avait deux volets dans cette

 18   question, la question posée par la Défense. Tout d'abord, il y avait un

 19   volet qui portait sur Marko Samardzija et un autre volet consistait à me

 20   demander si d'autres personnes dans la région avaient également agi animés

 21   par la vengeance. Et ma réponse était que je ne pouvais que m'en tenir à ce

 22   que Marko Samardzija et à ce que d'autres avaient dit à ce sujet, à savoir

 23   qu'il y avait un motif de vengeance. Donc, je ne peux pas vraiment vous

 24   dire ce que d'autres personnes avaient à l'esprit.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Weiss, tout d'abord, si je vous

 26   demande de vous arrêter, je vous demande de le faire.

 27   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de cabine française : Le témoin n'était

 28   pas en mesure d'entendre l'injonction du président étant donné qu'elle


Page 5312

  1   écoute la version danoise et non la version anglaise, qui n'était pas au

  2   micro. Reprise des débats.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deuxièmement, vous continuez à nous

  4   donner des réponses en ayant en fait mal compris la question que l'on vous

  5   a posée. La question n'était pas de savoir si d'autres avaient agi animés

  6   par la vengeance. La question était de savoir si vous avez entendu de la

  7   bouche de M. Samardzija qu'il avait agi suite à ce qui s'était passé, ce

  8   qui était advenu de sa famille durant la Seconde Guerre mondiale, et de

  9   savoir si d'autres personnes vous avaient également relaté un témoignage

 10   similaire concernant M. Samardzija.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Maintenant, je pense que je

 12   comprends ce que vous me demandez.

 13   Alors tout d'abord, je savais de la part de Marko Samardzija et d'un

 14   certain nombre d'autres personnes également avec lesquelles nous étions en

 15   contact à l'époque, qu'ils partageaient la même opinion, à savoir qu'ils

 16   avaient dit que pour ce qui était de Marko Samardzija, il s'agissait d'une

 17   vengeance.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 19   Veuillez continuer, Maître Lukic.

 20   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 21   Q.  Est-ce que vous avez entendu de la part d'autres personnes, des

 22   Musulmans avec qui vous avez parlé, que d'autres Serbes avaient agi animés

 23   par la vengeance ?

 24   R.  C'est ce que j'ai dit il y a quelques instants. J'ai du mal à répondre

 25   à cette question.

 26   Q.  Désolé. Je vous demande si des personnes, telles que par exemple

 27   Nasiha, des voisins donc ou d'autres personnes avec qui vous avez parlé,

 28   est-ce qu'ils vous ont dit quelque chose à ce sujet, oui ou non ? Et si tel


Page 5313

  1   est le cas, pourriez-vous nous dire quels ont été les échanges entre vous

  2   et ces autres personnes ?

  3   R.  Est-ce que vous pourriez préciser, s'il vous plaît, le contexte ?

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais essayer de reformuler.

  5   J'aimerais savoir si après avoir parlé à d'autres personnes, vous

  6   avez appris que d'autres Serbes, mis à part Marko Samardzija, avaient agi

  7   animés par la vengeance. Nous ne vous demandons pas votre opinion pour

  8   savoir si c'est effectivement ce qu'ils ont fait ou pas. Nous voulons

  9   savoir si d'autres Musulmans vous ont dit que, mis à part Marko Samardzija,

 10   d'autres Serbes ont également agi par vengeance. Nous voudrions savoir si

 11   c'est ce qu'on vous a dit.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Nos sources n'étaient pas seulement des

 13   Musulmans. Il y avait également un certain nombre de Serbes qui ont été

 14   interrogés dans le cadre d'entretiens que nous avons eus pour le livre.

 15    Et nous avons eu l'impression que c'était très caractéristique pour ce qui

 16   était de Marko Samardzija, mais que ce sentiment pouvait être plus répandu,

 17   c'est-à-dire ce motif de vengeance. Mais je ne peux pas vous donner de noms

 18   ou de références très claires concernant des personnes qui ont réagi

 19   animées par la vengeance mis à part ce que je vous ai dit concernant Marko

 20   Samardzija.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez des noms précis de

 22   personnes que vous avez interrogées ou de ceux qui vous ont donné cette

 23   impression ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons parlé à, je pense, près de cent

 25   personnes différentes concernant la préparation de notre livre. Et puis,

 26   cela s'est passé il y a 13 ans. Je peux vous donner certains noms,

 27   effectivement, mais je ne pense pas qu'il serait approprié d'être plus

 28   précis sur des opinions de tierces personnes quant à des motifs de


Page 5314

  1   vengeance. Mais je peux vous dire que durant nos entretiens dans le cadre

  2   de la préparation de ce livre, il y a Skrago Savancic, qui était un membre

  3   du conseil municipal de Kljuc, qui nous a parlé. Mais il ne nous a pas

  4   donné plus d'éléments quant aux motifs de vengeance et à la manière dont on

  5   devrait les comprendre.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'en remets à vous, Maître Lukic.

  7   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Q.  J'aimerais savoir si, parmi les gens que vous avez interrogés, certains

  9   vous ont dit que les gens qui étaient les auteurs de ces faits de

 10   maltraitance étaient souvent en état d'ébriété ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Est-ce que vous avez également entendu parler du fait que les unités

 13   serbes rencontraient des problèmes au niveau de la discipline, et je parle

 14   de soldats qui étaient constitués en unités de manière très rapide et sans

 15   avoir bénéficié de suffisamment d'entraînement ?

 16   R.  Eh bien, il semble que, d'après les déclarations provenant de Marko

 17   Samardzija, il devait s'exprimer par écrit pour discipliner ses soldats. La

 18   réponse à votre question est donc la suivante : c'est que ces soldats

 19   avaient été constitués en unités en un laps de temps très court et qu'il

 20   est possible qu'il y ait eu des problèmes disciplinaires; mais, cependant,

 21   ils étaient en mesure de prendre en charge les missions qui leur avaient

 22   été confiées.

 23   M. LUKIC : [interprétation] Peut-on maintenant passer à la page 36, s'il

 24   vous plaît, paragraphe 4.

 25   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 26   M. LUKIC : [interprétation]

 27   Q.  Madame Weiss, au paragraphe 9, ligne 2, il est mentionné : "Il y a de

 28   nombreux exemples de gardes dans le camp qui ont commis des actes cruels de


Page 5315

  1   vengeance et qui revenaient peut-être à des querelles de cour d'école ou à

  2   des désaccords liés à des questions d'affaires. Cette lutte ethnique qui a

  3   vu soudainement le jour a été utilisée --"

  4   L'INTERPRÈTE : Me Lukic demande l'affichage de la page 36 sur le système de

  5   prétoire électronique.

  6   M. LUKIC : [interprétation]

  7   Q.  " …et soudain ceci a été utilisé pour justifier les actes de brutalité,

  8   de mesquinerie et pour couvrir l'envie."

  9   Est-ce exact que vous aviez entendu de la bouche de ces personnes que vous

 10   aviez interrogées qu'il y avait beaucoup d'exemples de vengeance sous

 11   couvert d'activités combat et qu'il y avait également un appât du gain qui

 12   était couvert par des objectifs de combat ?

 13   R.  La page 36 ne parle pas du massacre de Biljani. Cela parle en fait d'un

 14   entretien avec un réfugié au Danemark qui s'appelle Mihanovic, Sulejman

 15   Mihanovic [phon], et il nous a accordé un long entretien. Il nous a

 16   expliqué que c'est ainsi que les choses avaient été perçues dans sa région

 17   natale. Il vient de Kocevac [phon], à proximité de Prijedor. C'est ainsi

 18   que j'ai compris ce qu'il disait.

 19   Q.  Je suis désolé que ceci n'ait rien à voir avec Biljani. Nous allons

 20   passer à autre chose. Je vais maintenant vous poser une question concernant

 21   le procès Samardzija devant un tribunal à Sarajevo. J'ai vu dans des

 22   documents que vous aviez suivi le procès de Marko Samardzija, qui se tenait

 23   dans un tribunal de Sarajevo; est-ce exact ?

 24   R.  Oui. J'ai vécu pendant un an à Sarajevo, et c'est durant cette période

 25   que ce procès s'est tenu là-bas.

 26   Q.  En ayant suivi ce procès et ce qu'il est advenu, c'est-à-dire le

 27   jugement et l'arrêt en appel, vous savez que Marko Samardzija n'a pas été

 28   condamné pour ces meurtres, n'est-ce pas ?


Page 5316

  1   R.  C'est exact. Seulement une partie de l'acte d'accusation a été

  2   mentionnée.

  3   Q.  Devant un tribunal de Bosnie-Herzégovine à Sarajevo, il a été condamné

  4   pour emprisonnement illicite de civils; est-ce exact ?

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Q.  Durant le procès, est-ce que vous avez découvert ou appris que les

  7   civils que l'on avait été cherché à Biljani ont été remis à la police ?

  8   R.  Je pensais qu'ils avaient été remis à des représentants de l'armée ou

  9   de la police. Les deux parties en présence étaient sur place à l'école de

 10   Biljani où les hommes ont été transférés, mais il est vrai que la police a

 11   joué un rôle important.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, nous parlons maintenant

 13   d'un autre procès.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Mais je n'ai qu'une autre question à poser.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une autre question. Alors, d'accord.

 16   M. LUKIC : [interprétation]

 17   Q.  Madame Weiss, les autocars qui ont été utilisés pour acheminer les gens

 18   de Biljani à Kljuc ou les autocars qui sont partis en direction de Kljuc,

 19   j'aimerais savoir si la seule escorte dont ils ont bénéficié était celle de

 20   la police ?

 21   R.  Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question.

 22   M. LUKIC : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous informe que nous ferons notre

 24   pause dans environ 15 minutes.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Q.  Je vais maintenant vous poser une question concernant les Serbes de

 27   Kljuc après la guerre. Vous avez rencontré Zdravko Stevandic. De qui

 28   s'agissait-il ?


Page 5317

  1   R.  C'était un homme du cru. C'était un membre de la municipalité du Kljuc.

  2   Et il y a également la période où il se trouvait à Banja Luka parce qu'il

  3   ne pensait pas qu'il avait une raison de revenir, ce qu'il a fait plus

  4   tard.

  5   Q.  Vous avez travaillé dans le cadre du projet de réconciliation, n'est-ce

  6   pas ?

  7   R.  Pas personnellement -- pas à Kljuc, mais j'ai été à l'origine de

  8   certains concepts de projets de réconciliation, et je me suis assurée

  9   également qu'un financement d'amorçage soit débloqué pour ces projets.

 10   Q.  Après 1996, vous êtes allée à Kljuc à 12, voire 16 reprises, d'après ce

 11   que vous nous avez dit. Qu'avez-vous appris ? Combien de Serbes sont

 12   retournés à Kljuc ?

 13   R.  Durant la période qui a immédiatement suivi la guerre, peu de personnes

 14   sont rentrées. Certaines familles ont commencé à repartir en direction du

 15   village, mais ont eu du mal à se réadapter, et elles sont donc reparties.

 16   Et aujourd'hui, la population de Kljuc est principalement composée de

 17   Bosno-Musulmans. Il n'y a qu'un faible pourcentage de Serbes et un

 18   pourcentage encore plus faible de Croates.

 19   Pour me faire encore mieux comprendre, je dirais que durant les accords de

 20   Dayton, la municipalité de Kljuc a été divisée en deux. Cela signifie que

 21   Kljuc à proprement parler et les villages dont nous avons parlé jusqu'à

 22   présent sont tombés dans la partie bosno-musulmane, et de l'autre côté de

 23   la ligne de Dayton, une nouvelle municipalité de Riplek a été créée, qui

 24   rassemblait la population serbe vivant là-bas. Donc, lorsque je parle de la

 25   municipalité de Kljuc après la guerre, je parle de la partie qui est

 26   devenue la partie bosno-musulmane. L'autre partie est de l'autre côté du

 27   secteur, de l'autre côté de la frontière, en d'autres termes.

 28   Q.  De l'autre côté de la ligne de séparation, il n'y a que peu de villages


Page 5318

  1   de la municipalité de Kljuc qui existent encore, n'est-ce pas ?

  2   R.  Ce n'est pas un territoire aussi important que celui qui se trouve du

  3   côté bosno-musulman, c'est exact.

  4   Q.  Est-ce que vous savez aujourd'hui qui a commis les meurtres à Biljani ?

  5   R.  Est-ce que je suis personnellement au courant de cela ? Non, ce n'est

  6   pas mon rôle de déterminer cela. C'est le rôle du tribunal.

  7   Q.  Merci. Aujourd'hui, vous vous êtes penchée sur un certain nombre de

  8   documents militaires. Nous n'allons pas les passer tous en revue un par un.

  9   Mais j'aimerais savoir si vous n'étiez effectivement pas en mesure de faire

 10   des commentaires sur le contenu de ces documents ni sur les raisonnements

 11   militaires associés aux ordres figurant dans ces documents ?

 12   R.  Avez-vous terminé votre question ?

 13   Q.  [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, ce que Me Lukic vous demandait,

 15   c'était si vous n'étiez pas en mesure de faire des commentaires sur le

 16   contenu ou les justifications militaires des ordres figurant dans ces

 17   documents. Est-ce que vous êtes en mesure de faire des commentaires à ce

 18   sujet ou pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, je n'ai pas de

 20   connaissances approfondies de l'organigramme militaire, mais bien sûr, je

 21   peux formuler des commentaires sur ces documents si le Tribunal souhaite

 22   que je le fasse. Je serais tout à fait disposée à faire des commentaires

 23   sur les différents éléments des ordres.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais nous vous encourageons à le faire

 25   que si vous avez des connaissances personnelles de cet ordre ou sur le

 26   contenu de cet ordre. Des commentaires de type journalistiques ne sont pas

 27   le type de commentaires que nous souhaitons entendre ici.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Mais j'ai lu l'ordre en question, et


Page 5319

  1   d'après ce que je comprends, c'est ainsi que les unités avaient reçu les

  2   missions dont elles devaient s'acquitter le 10 juillet à 5 heures du matin.

  3   Ceci est indubitable.

  4   M. LUKIC : [interprétation]

  5   Q.  Madame Weiss, concernant la vidéo, j'ai remarqué sur les stèles

  6   musulmanes qui figurent sur ce film qu'il y a une inscription que l'on peut

  7   lire est qui s'appelle donc "Sahid". Et cela signifie, "Sahid", S-a-h-i-d,

  8   combattant tombé au combat ?

  9   R.  Ma connaissance de la langue bosnienne n'est pas suffisante pour que je

 10   puisse vous donner une définition détaillée de ce concept.

 11   Q.  Merci. Dans le cadre de vos recherches et des entretiens que vous avez

 12   menés, j'aimerais savoir si vous avez découvert quoi que ce soit sur les

 13   combats qui faisaient rage entre les Musulmans et les Serbes et les forces

 14   qui y étaient associées à partir de la fin du mois de mai 1992 ?

 15   R.  Autant que je me souvienne, le 28 mai, une attaque serbe a été menée

 16   contre une localité avoisinante de Biljani, à savoir Vecici. La population

 17   locale a essayé, à l'aide d'armes de chasse courantes, de résister, mais

 18   ils n'avaient aucune chance contre la puissance militaire imposante qui a

 19   rasé la ville. Et pour cette raison, la situation est devenue très

 20   similaire à ce qui s'est passé à Biljani, c'est-à-dire que les hommes ont

 21   été acheminés en direction de l'établissement scolaire, dans ce cas-là à

 22   Vecici, et ils ont été tués, tous. Cependant, il s'est avéré qu'un certain

 23   nombre de témoins avaient survécu. Et j'ai parlé à l'un de ces survivants,

 24   et il m'a en fait décrit de manière très détaillée ce qui s'était produit,

 25   et c'est ce qui est mentionné dans mon livre.

 26   Q.  Savez-vous combien de temps Vecici a résisté aux attaques serbes ?

 27   R.  Non. Je n'ai pas de connaissance de cela. Je sais qu'un massacre a eu

 28   lieu dans l'établissement scolaire de Vecici et que cela a duré très peu de


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  1   temps, mais je n'ai pas entendu parler de campagne prononcée qui se serait

  2   déroulée par la suite.

  3   Q.  Nous avons entendu des dépositions dans ce Tribunal, mais je ne vais

  4   pas vous importuner avec cela.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, je regarde l'horloge.

  6   C'est le moment de faire la pause. Mais en même temps, je vous demande de

  7   ne pas remettre en question ce qui ne constitue pas des éléments de preuve.

  8   Par exemple, il est évident que le témoin n'était pas présent sur place.

  9   Par conséquent, ça ne rime à rien de poser des questions à ce sujet.

 10   M. LUKIC : [interprétation] Il est évident que c'est moi qui me suis

 11   trompé, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande pardon ?

 13   M. LUKIC : [interprétation] Cette question était une erreur de ma part.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous avez également des éléments qui

 15   émanent du livre et qui ont été versés au dossier qui n'ont pas besoin

 16   d'être remis en question, à moins que vous considériez que quelque chose

 17   dans le livre aille dans le sens de votre thèse; et dans ce cas-là, vous

 18   avez la possibilité de le faire dans le cadre d'un contre-interrogatoire.

 19   Est-ce que je pourrais vous demander de combien de temps vous aurez besoin

 20   après la pause.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Je ne pense pas que j'aurai besoin de beaucoup

 22   de temps supplémentaire.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Madame Weiss, nous allons

 24   faire une pause de 20 minutes. Et on va vous faire sortir de ce prétoire.

 25   [Le témoin quitte la barre]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons à 13 heures 40.

 27   --- L'audience est suspendue à 13 heures 19.

 28   --- L'audience est reprise à 13 heures 43.


Page 5321

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on faire entre le témoin dans le

  2   prétoire.

  3   Entre-temps, Monsieur Groome, la Chambre a reçu un message électronique

  4   concernant un témoin qui ne peut pas être à la disposition, et je ne sais

  5   pas comment il est devenu comme cela, mais vous pouvez peut-être l'appeler

  6   pendant la première semaine du mois de février pour que la Chambre soit en

  7   mesure d'entendre son témoignage.

  8   M. GROOME : [interprétation] Je pense que nous allons pouvoir faire le

  9   programme pour ce qui est de ce témoin la première semaine ou la deuxième

 10   semaine du mois de février --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons toujours pas décidé là-

 12   dessus, mais nous ne savons pas à quel moment le témoin peut témoigner. Et

 13   c'est pour ça que j'ai dit cela, donc, pour que la Chambre puisse entendre

 14   son témoignage dans cette semaine du mois de février.

 15   M. GROOME : [interprétation] Ah, j'ai pensé que la Chambre n'a pas bien

 16   compris le message électronique. C'était juste la question de la

 17   planification du programme de comparution des témoins.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai pensé qu'il s'agissait d'une raison

 19   particulière pour cela.

 20   M. GROOME : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'allons plus parler de cela à

 22   présent.

 23   [Le témoin vient à la barre]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, continuez si vous êtes

 25   prêt.

 26   M. LUKIC : [interprétation] Merci. J'ai encore quelques questions à poser

 27   pour ce qui est d'un autre sujet.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.


Page 5322

  1   M. LUKIC : [interprétation] Peut-on afficher le document 27976 65 ter.

  2   C'est le livre. En anglais, la page 4, paragraphe 3. En version B/C/S, page

  3   2, paragraphe 8. En fait, en anglais, c'est la page 3. Dans la version en

  4   anglais, il faut afficher le paragraphe numéro 8. Cela commence par

  5   "Personne".

  6   Q.  Madame Weiss, vous avez dit dans votre livre que :

  7   "Aucune des parties qui participaient à la guerre en Bosnie n'étaient

  8   seulement ni ceux qui étaient vilains ni ceux qui étaient victimes. Il y

  9   avait des prisons, des camps, des expulsions et des incendies de maisons

 10   dans toutes les parties du pays. Pourtant, les Bosniens étaient ceux qui

 11   principalement étaient venus en Danemark et c'étaient eux qui avaient le

 12   plus de pertes pour ce qui est des vies humaines, des biens et pour ce qui

 13   est de leur futur, de leur avenir. Pour ce qui est de ce livre, il n'y a

 14   pas de prétention dans ce livre pour être un narratif historique."

 15   Diriez-vous aujourd'hui que votre intention n'était pas d'être impartiale ?

 16   R.  Ce que j'ai dit dans mon livre de cette façon-là, j'avais pour objectif

 17   d'attirer l'attention du public sur le fait que la plupart des sources

 18   utilisées dans cet ouvrage étaient les Bosniens. C'est en partie parce que

 19   la plupart des réfugiés qui étaient venus au Danemark étaient Bosniens,

 20   bien qu'il y ait eu des Serbes et des Croates. Mais la plupart d'entre eux

 21   étaient des Bosniens. Mais c'est quelque chose que vous n'avez pas tiré

 22   comme conclusion en s'appuyant sur cette expression dans le livre. Le livre

 23   ne peut pas être placé sur un côté ou l'autre. Je décrirais le livre comme

 24   ceci : il s'agissait du rassemblement des connaissances qui étaient

 25   disponibles en 1999, des sources qui étaient à notre disposition de tous

 26   les trois groupes de la population.

 27   Plus tard, évidemment, il y avait beaucoup d'autres détails et de

 28   rapports qui ont vu le jour et qui concernaient la région de Kljuc, surtout


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  1   devant certains tribunaux. Par exemple, dans l'affaire Stakic et dans

  2   d'autres affaires. Vous devriez lire cela pour pouvoir conclure que dans le

  3   livre, je présente des connaissances disponibles à l'époque où le livre a

  4   été écrit.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, le témoin nous a

  6   clairement expliqué pourquoi votre question n'était pas une bonne question.

  7   Votre question était :

  8   "Voudriez-vous dire aujourd'hui que votre intention était de ne pas

  9   être partial ?"

 10   Pour ce qui est de votre question, le contenu du livre a été mal

 11   interprété. Continuez, Maître Lukic.

 12   M. LUKIC : [interprétation]

 13   Q.  A l'époque où vous avez écrit le livre, n'est-il pas vrai de dire que

 14   vous avez utilisé le point de vue des Bosniens, à savoir que vous n'avez

 15   pas eu l'intention de présenter votre livre comme étant des écrits

 16   historiques impartiaux ? Nous pouvons trouver cette partie dans votre

 17   livre.

 18   R.  C'est vrai, mais seulement dans la mesure dans laquelle il est dit que

 19   la plupart des sources utilisées dans les livres sont les Bosniens, mais il

 20   apparaît très clairement que l'autre personne importante dans le livre est

 21   Marko Samardzija, qui est Serbe et qui a été grandement impliqué à des

 22   événements à Biljani. Donc, dire que --ou appeler cela le point de vue

 23   partial dans le sens négatif de ce terme, je ne crois pas que cela soit

 24   vrai.

 25   Q.  Comment appelleriez-vous cela, être partial dans le sens positif du

 26   terme ?

 27   R.  Je ne sais pas ce que cela veut dire.

 28   Q.  L'interprétation était comme ceci, je cite :


Page 5324

  1   "Dire cela," ensuite il y a une partie qui manque, "appeler cela partial

  2   dans le sens négatif."

  3   Il y a quelque chose qui manque dans le compte rendu de cette partie.

  4   Est-ce que vous avez dit que vous n'alliez pas permettre d'être

  5   téflon, qui va vous empêcher d'être objective ?

  6   R.  C'est vrai. Pour ce qui est du film documentaire, j'ai utilisé

  7   cette expression, j'ai mentionné téflon, mais c'était dans un contexte

  8   différent. C'était par rapport à l'impression générale qu'un ministre

  9   naturellement a lorsque soudainement il se voit responsable pour les 20 000

 10   réfugiés étant arrivés de la région où les pires choses imaginables se sont

 11   passées. J'ai utilisé cette expression à titre d'explication du fait que

 12   hormis mes tâches professionnelles, j'étais également impliquée dans

 13   d'autres engagements en Bosnie. J'étais impliquée à ce qu'on appelait le

 14   processus de rétablissement de la paix entre les différents groupes

 15   ethniques, qui est caractérisé par le fait que les Bosniens, les Croates et

 16   les Serbes ont pris part à ce processus à Kljuc. C'est un commentaire

 17   général.

 18   Q.  Cela sera ma dernière question : est-il vrai que vous avez fait

 19   du lobbying en Danemark en faveur des Musulmans ?

 20   R.  Non, ce n'est pas vrai.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Madame Weiss, merci. Je n'ai plus de questions

 22   pour vous, et je vous remercie d'avoir répondu à mes questions.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Jeremy, avez-vous des questions

 24   supplémentaires à poser ? Je ne veux pas dire que vous avez fini votre

 25   interrogatoire principal, mais questions supplémentaires.

 26   M. JEREMY : [interprétation] J'ai compris cela. Non, je n'ai pas de

 27   questions supplémentaires. Merci.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


Page 5325

  1   Questions de la Cour : 

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une question à votre endroit,

  3   Madame. Me Lukic vous a posé une question à la page 27 dans le prétoire

  4   électronique, pièce 65 ter 27976. Il s'agit d'un extrait de votre livre, et

  5   vous avez expliqué qu'en haut de la page, le texte qui figurait expliquait

  6   que le père de M. Samardzija avait été tué et que la vengeance a dû jouer

  7   un certain rôle dans ce qui était arrivé par la suite.

  8   Si j'ai bien compris, c'est un fait qui vous a été dit par M. Samardzija

  9   lui-même. Vous l'avez appris de sa bouche, mais que vous avez également

 10   obtenu des informations similaires d'autres personnes. Maintenant, la page

 11   qui précède immédiatement les dernières lignes, et je vais vous lire ce qui

 12   est indiqué, page 26, document sur papier 25, alors "Pour lui," vous faites

 13   référence à Samardzija après avoir expliqué sa position en tant que

 14   commandant de compagnie, vous avez dit :

 15   "Pour lui, cette guerre était une guerre inévitable pour créer une 'Grande-

 16   Serbie'. Son objectif consistait à effectuer une extermination complète."

 17   Alors, lorsque vous avez écrit ceci, était-ce également sur la base de ses

 18   propres propos, c'est quelque chose qu'il vous a dit, ou était-ce des

 19   informations que vous avez pu recevoir d'autres personnes ? Et si je

 20   comprends bien, c'était simplement une impression que vous vous étiez

 21   forgée sur la base des sources que vous avez obtenues, et c'est donc la

 22   question que je vous pose.

 23   R.  Cette page n'a pas été montrée à l'écran, mais, effectivement, je crois

 24   pouvoir répondre à votre question, même si je ne l'ai pas vue.

 25   J'ai bien compris que vous avez fait référence au comportement de

 26   Samardzija par rapport au motif de vengeance, et ce qu'il a décrit par

 27   rapport à l'incident de 1941 était que tous les jeunes hommes âgés de plus

 28   de 12 ans et les hommes devaient être exterminés parce qu'ils étaient


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  1   Serbe. Je ne sais pas si c'est à ceci que vous avez fait référence, mais je

  2   n'ai pas vu le texte à l'écran.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je demanderais tout d'abord que l'on

  4   affiche la page, à l'écran, 27976, page 26 dans le prétoire électronique.

  5   Donc, ma question n'est pas de savoir quelle était son attitude. Je voulais

  6   vous poser la question suivante : j'aimerais savoir qu'est-ce qui vous a

  7   permis de vous forger cette impression ?

  8   R.  Pourrais-je avoir la bonne page, s'il vous plaît ? Page 26 en anglais ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Copie papier page 25, prétoire

 10   électronique page 26. C'est le même texte, et vous retrouverez ce texte au

 11   dernier paragraphe de la page 26 -- plutôt, 25 [comme interprété] dans le

 12   prétoire électronique, qui se lit comme suit : "Nous ne savons pas si Marko

 13   Samardzija a lui-même tiré sur quelqu'un." Et par la suite, vous faites

 14   référence au poste qu'il occupait en tant que commandant de compagnie. Et

 15   ensuite, je vous ai donné lecture des dernières lignes de ce paragraphe,

 16   qui se lisaient comme suit :

 17   "En ce qui le concerne, il s'agissait d'une guerre qui était inévitable

 18   pour créer une 'Grande-Serbie'. Sa tâche consistait à effectuer une

 19   extermination complète."

 20   Donc, j'aimerais simplement savoir si vous vous êtes forgée cette

 21   impression sur la base de vos entretiens avec lui, ou est-ce que c'est

 22   quelque chose que vous avez appris d'autres sources ? Voilà, donc, ma

 23   question.

 24   R.  Je vous comprends. J'ai maintenant vu le texte, ce qui me permet de

 25   répondre à votre question. C'était l'impression que nous nous étions forgés

 26   en partie de par des entretiens que nous avions eus avec lui qui ont duré

 27   deux heures et demie. Et également, par des informations que nous avions

 28   obtenues d'un grand nombre d'autres sources avec lesquelles nous nous


Page 5327

  1   étions entretenues plus tôt, en juillet, août, mais nous avons mené un

  2   certain nombre d'entretiens également au Danemark.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etes-vous en mesure d'identifier ces

  4   sources, ou bien -- non. Si vous pouvez le faire, dites-le-nous. Sinon, je

  5   vous prie de bien vouloir nous le dire également.

  6   R.  C'est une impression générale. Je pourrais dire qu'il s'agirait de la

  7   somme de toutes les informations obtenues, et de plus, certaines personnes,

  8   qui j'imagine ont dû comparaître en tant que témoins protégés ici, nous

  9   nous sommes également entretenus avec eux, mais il serait plus pertinent

 10   d'obtenir leurs propres déclarations que d'obtenir la mienne.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mes questions ont-elles suscité le

 12   besoin de poser des questions supplémentaires ? Si ce n'est pas le cas, je

 13   voudrais vous remercier, Madame Weiss, d'être venue. Ceci met fin à votre

 14   témoignage. Encore une fois, merci beaucoup d'être venue à La Haye. Je vous

 15   remercie d'avoir répondu aux questions qui vous ont été posées par les

 16   parties et par les Juges de la Chambre. Je vous souhaite bon retour à la

 17   maison et bon voyage.

 18   [Le témoin se retire]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de lever l'audience, Monsieur

 20   Groome, lorsque j'ai parlé de manque de souplesse, j'ai voulu dire que ce

 21   témoin manquait de souplesse, car dans le courriel, on lisait ceci :

 22   "Une fois que le témoin est réservé, il ne pourra plus changer ses dates."

 23   Alors c'est seulement à ceci que j'ai fait référence lorsque j'ai fait

 24   allusion au fait que cette personne faisait preuve d'un manque de

 25   souplesse.

 26   M. GROOME: [aucune interprétation] 

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, je vais maintenant, pour le reste

 28   du temps que nous avons encore, rendre une décision sur l'admissibilité du


Page 5328

  1   rapport Philipps.

  2   La Chambre va maintenant aborder l'admissibilité du rapport de M. Philipps

  3   dont les passages doivent encore recevoir une cote permanente. Il s'agit

  4   d'une cote MFI pour l'instant, P451; il s'agit de deux organigrammes, P452;

  5   ainsi que P453, là, il s'agit de notes explicatives; P454, liste

  6   alphabétique des unités et des formations ainsi que P455, liste

  7   alphabétique des effectifs.

  8   La Chambre fait remarquer que l'Accusation avait demandé que ce rapport

  9   reçoive une cote provisoire aux fins d'identification en attendant l'issue

 10   de la déposition du Témoin Philipps, et la Défense avait mentionné le 9

 11   novembre 2012 qu'elle continuait à avoir des objections quant à l'admission

 12   du rapport, objection qui avait déjà été mentionnée dans ses écritures du

 13   20 février 2012, du 6 mars 2012, ainsi que du 26 mars 2012; écritures qui

 14   avaient été déposées suite à un avis de communication du rapport en vertu

 15   de l'article 94 bis.

 16   La Chambre rappelle que dans le cadre de sa décision du 1er novembre 2012

 17   concernant une décision suite à la requête de la Défense d'exclure Richard

 18   Philipps comme expert et d'interdire à l'Accusation de présenter ce

 19   rapport, la Chambre a examiné les objections de la Défense quant à

 20   l'admission du rapport Philipps. La Chambre a néanmoins décidé de reporter

 21   sa décision concernant l'admissibilité afin de donner la possibilité à la

 22   Défense d'étudier toutes les raisons pour lesquelles on conteste la

 23   fiabilité du rapport dans le cadre du contre-interrogatoire, notamment en

 24   ce qui concerne la méthodologie et les sources du Témoin Philipps.

 25   Après avoir entendu la déposition du Témoin Philipps, et notamment en

 26   ce qui concerne les sources utilisées et les méthodes appliquées, la

 27   Chambre considère que les objections quant à la fiabilité du rapport

 28   Philipps ne sont pas fondées, qu'elles sont importantes et ont une valeur


Page 5329

  1   probante qui nécessite son versement au dossier au titre de l'article 89(C)

  2   du Règlement de procédure et de preuve.

  3   Par conséquent, les pièces P451, P452, P453, P454 et P455 sont

  4   versées par la présente décision au dossier. Ceci conclut la décision de la

  5   Chambre en la matière.

  6   S'il y a d'autres questions de procédure à ce stade, c'est le moment

  7   de le faire.

  8   M. GROOME : [interprétation] Oui, mais j'aimerais que nous passions à huis

  9   clos partiel.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous y sommes.

 12   [Audience à huis clos partiel]

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 15   [Audience publique]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 17   Nous allons lever l'audience, et nous reprendrons l'audience lundi, 19

 18   novembre, 14 heures 15, dans cette même salle d'audience, salle d'audience

 19   numéro III.

 20   --- L'audience est levée à 14 heures 10 et reprendra le lundi, 19 novembre

 21   2012 à 14 heures 15.

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