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1 Le vendredi 26 avril 2013
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 38.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes. Madame la
6 Greffière d'audience, veuillez annoncer la cote de l'affaire.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
8 Monsieur le Juge. Ceci est l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko
9 Mladic.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.
11 Aujourd'hui, nous nous retrouvons encore une fois dans la situation de
12 siéger en l'absence du Juge Fluegge, qui a dû s'absenter pour des raisons
13 personnelles urgentes. Le Juge Moloto et moi-même avons décidé qu'il en
14 allait dans l'intérêt de la justice de poursuivre les débats. Nous sommes
15 toujours tout à fait certains que cette situation n'ira pas au-delà de cinq
16 jours. C'est pourquoi nous poursuivons nos travaux.
17 Est-ce qu'on peut faire entrer le témoin dans la salle d'audience. Si j'ai
18 bien compris, il n'y a pas de questions préliminaires à aborder.
19 Monsieur McCloskey.
20 M. McCLOSKEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
21 Monsieur le Juge. Bonjour à tout le monde. Vous vous souviendrez que vous
22 m'avez demandé à étudier l'exactitude de la citation avancée hier par Me
23 Ivetic, et je peux en effet confirmer qu'il a cité de façon exacte le
24 jugement dans l'affaire Popovic -- ou plutôt, excusez-moi, le compte rendu
25 d'audience dans l'affaire Popovic.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Ceci vient d'être consigné au
27 compte rendu d'audience.
28 Maître Ivetic, si je vous ai bien compris, vous allez terminer votre
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1 contre-interrogatoire dans une demi-heure, disons.
2 M. IVETIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.
3 [Le témoin vient à la barre]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur van Duijn.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous rappelle que la déclaration
7 solennelle que vous avez prononcée au début de votre déposition est
8 toujours en vigueur.
9 LE TÉMOIN : LEENDERT VAN DUIJN [Reprise]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Me Ivetic va reprendre son contre-
12 interrogatoire, et je vous fais savoir qu'il vient d'annoncer qu'il lui
13 faudra encore une demi-heure à peu près.
14 Maître Ivetic, à vous.
15 M. IVETIC : [interprétation] Merci.
16 Contre-interrogatoire par M. Ivetic : [Suite]
17 Q. [interprétation] Monsieur, hier, nous nous sommes arrêtés au moment où
18 nous avons évoqué l'incident qui s'est produit le 12 juillet. Il s'agit,
19 plus précisément, d'une rencontre entre le général Mladic et l'interprète
20 musulman de la Compagnie Bravo qui vous a servi d'interprète au cours de
21 cette journée. J'aimerais vous poser la question suivante : avant ce jour-
22 là, pendant combien de temps avez-vous dû fonctionner dans un état de
23 stress, et est-ce que vous pouviez dormir normalement ?
24 R. A partir du 9 dans la soirée, c'est le moment où je suis allé prendre
25 les positions d'arrêt -- enfin, même avant cela, bien sûr, j'ai travaillé
26 dans des situations qui impliquaient beaucoup de stress, et je pense qu'au
27 cours de ces jours et ces nuits-là j'ai pu faire quelques petites siestes
28 par-ci, par-là, plusieurs heures à la fois.
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1 Q. Et pour passer à cet interprète musulman de l'ONU, est-ce que la même
2 chose valait pour lui à cette époque; le savez-vous ?
3 R. Je ne le sais pas.
4 Q. A la page 42 de la pièce P1154, c'est votre déclaration en vertu de
5 l'article 92 ter, vous décrivez l'état où se trouvait cet interprète
6 musulman après la rencontre, et j'aimerais que nous nous penchions sur ce
7 passage. En fait, il nous faut la page précédente, toutes mes excuses. Aux
8 lignes 12 à 15, vous dites :
9 "Il était terrifié à un point incroyable, il tremblait, littéralement il
10 tremblait de partout. Et il avait tellement peur que j'ai décidé de lui
11 assurer une escorte pour revenir à la base parce qu'il était incapable de
12 rester là où nous nous trouvions à ce moment-là."
13 Pensez-vous que compte tenu des circonstances et compte tenu de l'état où
14 se trouvait cet interprète, il a pu peut-être interpréter les propos du
15 général Mladic d'une façon plus ou moins aléatoire ?
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais en fait, vous demandez au témoin de
17 vous fournir une opinion d'expert, Maître Ivetic. Nous allons demander au
18 témoin de répondre à la question, mais je vous le signale pour que vous le
19 sachiez.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais vraiment, je n'en sais rien. A en juger
21 par la façon dont l'interprète s'adressait à moi au cours de la
22 conversation que nous avons eue, je n'ai pas eu l'impression que son état
23 d'esprit était différent par rapport aux jours précédents, et il a
24 interprété pour moi pendant toute la journée. Donc je n'ai aucune raison de
25 croire que son interprétation des propos du général Mladic était différente
26 par rapport aux autres interprétations qu'il a fournies au cours de la
27 journée.
28 M. IVETIC : [interprétation]
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1 Q. Merci. Et aux fins du compte rendu d'audience, est-ce qu'à ce moment-là
2 ou à quelque moment que ce soit vous avez appris le serbo-croate ou non ?
3 R. Non. J'ai pu apprendre quelques petites phrases, mais je ne peux pas
4 construire des phrases, pas du tout.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, il faut se décider. Soit
6 vous demandez au témoin s'il était capable de juger de l'exactitude de
7 l'interprétation qu'il a reçue dans les circonstances données ou alors il
8 faut insister sur le fait qu'il ne connaissait pas la langue en question.
9 M. IVETIC : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Président, je ne
10 cherchais pas à évaluer ses compétences linguistiques. J'ai tout simplement
11 demandé au témoin si à son avis, compte tenu des circonstances,
12 l'interprète se trouvait dans un état tel qu'on ne pouvait pas se fier à
13 son interprétation. C'était là le sens de la question que je lui ai posée.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, et le témoin vous a répondu qu'il
15 ne lui semblait pas que l'interprétation des propos du général Mladic lui
16 semblait différente par rapport à l'interprétation que cette personne
17 fournissait en général, et ensuite vous insistez sur le fait que le témoin
18 ne maîtrise pas la langue. Mais vous pouvez poursuivre.
19 M. IVETIC : [interprétation] Nous allons passer à la question de savoir de
20 quelle façon cet interprète a interprété pendant le reste de la journée,
21 Monsieur le Président.
22 Q. Alors, Monsieur, vous n'êtes pas sans savoir que ce même jour quelqu'un
23 a tiré sur le général Mladic à Srebrenica dans une tentative de
24 l'assassiner ?
25 R. Non, je n'en ai jamais entendu parler.
26 Q. Au moment où vous avez demandé à l'interprète de s'approcher du général
27 Mladic, cet interprète portait des vêtements civils et il n'y avait pas de
28 soldats de l'ONU qui l'accompagnaient; ai-je raison de l'affirmer ?
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1 R. Oui, en effet.
2 Q. Et le général Mladic était-il entouré de ses gardes de corps ou est-ce
3 qu'il se tenait à l'écart ?
4 R. Je pense que ses gardes de corps n'étaient pas très près de lui à ce
5 moment-là.
6 Q. Je comprends qu'à l'époque vous n'y avez peut-être pas pensé, mais
7 maintenant, quand vous repensez à cette situation, est-ce que vous diriez
8 que c'était une décision risquée que vous avez prise d'envoyer l'interprète
9 habillé en civil sans le faire accompagner par les soldats de l'ONU pour
10 qu'il s'adresse directement au général Mladic alors qu'il pouvait être
11 considéré comme une éventuelle menace à la sécurité du général Mladic, soit
12 par lui-même, soit par ses gardes de corps ?
13 R. Non. Quand je repense à ce qui s'est passé à l'époque, compte tenu
14 aussi de l'apparence de l'interprète et aussi de l'état physique où il se
15 trouvait, je dirais que l'interprète s'est rendu compte qu'en fait, la
16 situation comportait des risques. Et c'est la raison pour laquelle il a
17 hésité. Mais de toute façon, moi aussi, je me suis exposé à des risques.
18 Mais rétrospectivement, non, je ne dirais pas que l'interprète représentait
19 une menace.
20 Q. Et l'interprète vous a-t-il dit mot à mot ce qu'il a dit au général
21 Mladic lorsqu'il s'est approché de lui ?
22 R. Non, je ne m'en souviens pas.
23 Q. Avec l'aide de mes collègues de l'Accusation, j'aimerais maintenant
24 vous montrer un bref extrait vidéo.
25 M. IVETIC : [interprétation] Aux fins du compte rendu d'audience, ce sera
26 un extrait de la pièce P1147. La première séquence va de 00:23:30 à 00:54
27 [comme interprété]. Donc c'est un clip d'une vingtaine de secondes.
28 Q. Et j'aimerais que vous vous concentriez tout particulièrement sur
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1 l'interprète pendant que vous le visionnez et j'aimerais que vous suiviez
2 les sous-titres de façon à ce que nous puissions voir ce qu'il est dit, et
3 puis je vous poserai mes questions.
4 M. IVETIC : [interprétation] Veuillez, s'il vous plaît, faire passer le
5 clip.
6 [Diffusion de la cassette vidéo]
7 M. IVETIC : [interprétation]
8 Q. Alors, Monsieur, je pense qu'il a été possible d'identifier
9 l'interprète que nous voyons ici entre le général Koster et le général
10 Mladic comme l'interprète musulman dont nous venons de
11 parler ?
12 R. Non, ce n'est pas l'interprète musulman qui interprétait pour moi.
13 Q. Très bien.
14 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions maintenant
15 sur la pièce P1114 [comme interprété], il s'agit d'un arrêt sur image tiré
16 de l'enregistrement vidéo relatif à Srebrenica. Nous passons à un autre
17 sujet.
18 Aux fins du compte rendu d'audience, je signale -- et chose évidente à en
19 juger par les sous-titres, il est clair que l'interprète que nous avons pu
20 voir sur l'enregistrement vidéo ne fournissait pas une interprétation
21 fiable des propos échangés entre le lieutenant Koster et le général Mladic.
22 Et maintenant, passons, s'il vous plaît, à cet album d'arrêts sur image.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, j'imagine que vous n'avez
24 pas l'intention de déposer vous-même, mais plutôt vous l'avez indiqué aux
25 fins du compte rendu d'audience.
26 M. IVETIC : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président, vous avez
27 raison.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'était là le point que vous
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1 cherchiez à souligner.
2 M. IVETIC : [interprétation] Oui, et merci de m'avoir repris.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Maintenant, tout est clair dans le
4 compte rendu d'audience.
5 Vous pouvez poursuivre.
6 M. IVETIC : [interprétation]
7 Q. Monsieur, lorsque vous regardez cette page dans l'album d'arrêts sur
8 image, vous voyez vous-même à la droite et un monsieur qui porte le numéro
9 2. Est-ce qu'il s'agit de la personne que vous avez évoquée au cours de
10 votre déposition comme étant l'interprète Miki ?
11 R. Oui, en effet.
12 Q. Et vous pouvez voir les identifications qui ont été faites et qui
13 figurent en bas de la page : Miki et la personne qui se trouve à sa gauche
14 sont identifiés tous les deux comme étant les membres de la police ? Est-ce
15 qu'à l'époque c'est bien ce que vous aviez compris, à savoir que Miki était
16 un policier plutôt qu'un interprète professionnel ?
17 R. Je pense qu'à l'époque on m'a fait savoir qu'il n'était pas un
18 interprète professionnel, mais qu'il pouvait parler anglais. Et c'était
19 vrai, il parlait très bien…
20 Q. Excusez-moi. Est-ce que vous avez terminé votre réponse ? Souhaitez-
21 vous ajouter quelque chose ?
22 R. Il parlait anglais très bien.
23 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant examiner un extrait du
24 compte rendu d'audience dans l'affaire Popovic pour vérifier si un récit de
25 cette rencontre correspond à la vérité. Veuillez afficher, s'il vous plaît,
26 1D897, page 55 au système du prétoire électronique, qui correspond à la
27 page 2 366 du compte rendu d'audience dans l'affaire Popovic. Et nous
28 allons commencer par la ligne 17.
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1 Q. Veuillez suivre ce que je vais vous lire. Je cite :
2 "Question : Commandant, je pense qu'hier nous avons fait un arrêt sur image
3 précisément au niveau de cette séquence. Vous reconnaissez Mane, vous
4 reconnaissez l'interprète Miki, et, par ailleurs, vous figurez vous aussi
5 sur la photo. Est-ce que vous voyez les sous-titres dans cette séquence où
6 il est indiqué : 'Et pour aller voir si quelqu'un souhaite partir. C'est
7 leur travail.'
8 "Alors, puisque sur la base des sous-titres nous ne pouvons pas établir qui
9 dit quoi, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous confirmer ceci : il s'agit
10 de propos qui sont adressés par le capitaine Mane à l'interprète Miki,
11 n'est-ce pas, pour qu'il puisse vous les interpréter ? Ai-je bien compris
12 ce qui se passe sur cette photo ?
13 "Réponse : D'après ce que j'ai pu voir dans l'enregistrement vidéo, oui,
14 c'est ainsi que les choses se sont déroulées.
15 "Question : Merci beaucoup.
16 "Juge Agius : Un instant, s'il vous plaît, je souhaite préciser quelque
17 chose. Parce qu'ici, il y a une voix qui appelle Miki, et c'est à partir de
18 ce moment-là que l'enregistrement reprend. Je pense que c'est clair.
19 "Me Lazarevic : Oui, je le crois.
20 "Juge Agius : Merci.
21 "Me Lazarevic :
22 "Question : Mane dit à Miki de vous dire que vous devriez vérifier si
23 quelqu'un souhaite partir. Est-ce qu'il pense par là aux réfugiés qui se
24 trouvaient sur place ?
25 "Réponse : En lisant les sous-titres, je dirais que cela se réfère à des
26 réfugiés, mais si mes souvenirs sont bons, Miki ne m'avait pas communiqué
27 cette phrase.
28 "Question : Non. Merci. Bon, c'est plus ou moins ce qu'on est en train de
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1 dire ici. Mais ce qui m'intéresse ici, c'est de constater que vous avez eu
2 des problèmes d'interprétation, et notamment lorsque cet homme appelé Miki
3 interprétait ?
4 "Réponse : Eh bien, moi, je n'avais aucune méthode pour vérifier si Miki me
5 répétait exactement ce que Mane disait, puisque moi je ne maîtrise pas le
6 serbo-croate.
7 "Question : Et justement. Vous êtes en train de me dire que vous ne pouvez
8 pas être sûr à 100 % que ce que Miki vous disait vous a été -- pardon. Vous
9 ne pouvez pas être sûr à 100 % que ce que Mane disait était interprété de
10 façon correcte par Miki ?"
11 Réponse qui figure à la page suivante :
12 "Réponse : Non, il n'y avait aucun moyen pour moi d'exercer un contrôle au
13 niveau de l'interprétation, mais je suis sûr que si les choses étaient
14 passées d'une façon autre que prévue par Mane, il se serait plaint ou il
15 aurait dit à Miki qu'il voulait autre chose. Mais oui, il est vrai que je
16 n'avais aucun moyen pour vérifier si l'interprétation était correcte ou si
17 elle rendait d'une façon impeccable les propos de Mane."
18 Alors, Monsieur, est-ce que cet extrait représente un récit précis et
19 véridique de votre déposition dans l'affaire Karadzic [comme interprété] ?
20 R. Oui.
21 Q. Et si je vous ai bien compris, ces propos de Mane ne vous ont jamais
22 été relayés par Miki ou alors Miki a fait une interprétation erronée. Ai-je
23 raison de l'affirmer ?
24 R. Je ne me souviens pas de cette phrase, de cette phrase concrète, et
25 notamment de la partie où Mane dit : "C'est leur travail." Je ne me
26 souviens pas du fait que cette phrase ait été interprétée.
27 Q. Très bien.
28 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant faire appel encore une
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1 fois au bureau du Procureur pour visionner un extrait d'un enregistrement
2 vidéo. Ce sera le troisième extrait que j'ai annoncé. Il est tiré du
3 document V-009267-1-A, et la séquence qui nous intéresse commence à
4 00:05:47 et se termine à 00:06:40. Veuillez, s'il vous plaît, faire jouer
5 le clip en question.
6 Q. Je vous demanderai si vous vous souvenez de cette séquence qui a fait
7 objet de débat dans l'affaire Popovic.
8 [Diffusion de la cassette vidéo]
9 M. IVETIC : [interprétation]
10 Q. Monsieur, vous avez vu l'extrait vidéo. Est-ce que c'est cet extrait
11 vidéo qui a fait l'objet d'un échange lors de votre déposition dans
12 l'affaire Popovic ?
13 R. Oui, comme je peux voir, il s'agit bien de cet extrait.
14 Q. Donc vous vous êtes rendu avec l'interprète vers le camion-citerne où
15 il y avait de l'eau, mais Mane n'est pas allé avec vous; c'est cela ?
16 R. Non, je ne me souviens pas que Mane ait été vu là-bas.
17 Q. Donc, est-ce que vous conviendriez maintenant, lorsque vous
18 réfléchissez à la situation, et maintenant que les mots qui ont été
19 formulés ont été interprétés ou traduits par des interprètes
20 professionnels, conviendriez-vous, disais-je, qu'il y avait quand même un
21 potentiel d'interprétation erronée pour des personnes anglophones qui
22 dépendaient de ce traducteur qui se trouvait là ?
23 R. Lorsque vous parlez de ce traducteur, vous faites référence à Miki ?
24 Q. Oui.
25 R. Oui, je suppose que l'on pourrait envisager une interprétation
26 différente de la part de Miki.
27 Q. Et pour que tout soit bien clair, est-ce que Miki est la personne qui a
28 interprété les propos de Mane à la "maison blanche" par rapport aux
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1 passeports ?
2 R. Oui.
3 Q. J'aimerais vous montrer un autre extrait vidéo avec l'aide du bureau du
4 Procureur.
5 M. IVETIC : [interprétation] C'est en fait le deuxième extrait dont je vous
6 ai parlé qui fait partie de la pièce P1147. Alors, V-000-9266-1-A, et cela
7 commence au point 00:23:54. Nous allons voir cela jusqu'au point 00:24:29.
8 Et j'aimerais vous demander de bien prêter attention aux mots prononcés par
9 le général Mladic à l'intention des réfugiés. Est-ce que nous pouvons voir
10 cet extrait.
11 [Diffusion de la cassette vidéo]
12 M. IVETIC : [interprétation]
13 Q. Monsieur, est-ce que les mots prononcés par le général Mladic à
14 l'intention des réfugiés et leurs réponse, est-ce que ces mots, vous en
15 avez été informé ou vous les avez entendus à Potocari; à savoir, est-ce que
16 le traducteur vous avait fourni cette information sur la façon dont Mladic
17 s'est adressé à cette foule de réfugiés ?
18 R. Non, je n'en avais pas entendu parler.
19 M. IVETIC : [interprétation] Je vous remercie d'avoir répondu à mes
20 questions. J'en ai terminé avec mon contre-interrogatoire.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.
22 Monsieur McCloskey, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?
23 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur van Duijn, les Juges n'ont pas
25 de questions à vous poser non plus. Vous êtes arrivé au terme de votre
26 déposition. Je vous remercie d'être venu, et très souvent je dis d'être
27 venu de si loin pour venir jusqu'ici, mais bon, cela n'est peut-être pas
28 quelque chose qui s'applique dans votre cas, mais il n'empêche que je
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1 souhaite vous remercier d'être venu dans ce prétoire et d'avoir répondu à
2 toutes les questions qui vous ont été posées par les parties et par les
3 Juges également. Et même si le voyage que vous avez dû entreprendre n'est
4 pas si long, je vous souhaite un bon retour chez vous.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez suivre l'huissier.
7 [Le témoin se retire]
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, est-ce que
9 l'Accusation est prête à faire entrer le témoin suivant ?
10 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que
11 nous allons reprendre le contre-interrogatoire de M. Ruez, qui devrait être
12 ici.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Est-ce que nous pourrions donc
14 faire entrer le témoin dans le prétoire.
15 [Le témoin vient à la barre]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Ruez.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que point n'est besoin de le
19 répéter, mais je vous rappelle quand même que vous êtes toujours tenu de
20 respecter la déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de
21 votre déposition en vertu de laquelle vous avez dit que vous direz la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 LE TÉMOIN : JEAN-RENE RUEZ [Reprise]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le contre-interrogatoire peut se
26 poursuivre.
27 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Contre-interrogatoire par M. Lukic : [Suite]
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1 Q. [interprétation] Bonjour.
2 R. Bonjour.
3 M. LUKIC : [interprétation] Je vais demander à ce qu'on nous affiche une
4 pièce à conviction, il s'agit du P1132.
5 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, je regarde les parties, il
7 a été fourni au témoin une liste de noms et de numéros. Je ne sais pas si
8 vous souhaitez l'utiliser, mais le témoin ne dispose pas de cette liste
9 pour le moment. Donc, si vous devez utiliser ces codes, je pense qu'il
10 faudrait les lui fournir. Sinon --
11 M. LUKIC : [interprétation] Non, je ne sais pas. Je ne pense pas,
12 d'ailleurs, que je vais utiliser la liste en question.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je comprends bien, mais c'est juste
14 pour qu'un exemplaire soit fourni au témoin. S'il ne fait pas référence à
15 ces personnes, c'est une chose, mais au moins il sait qu'il peut disposer
16 de cette liste.
17 M. LUKIC : [interprétation] Merci. Nous attendons toujours l'affichage du
18 document P1132. Et c'est la page 77 qui nous intéresse.
19 Q. Page 58 dans votre document papier, si vous souhaitez vous y référer.
20 R. Très bien.
21 Q. Ici, nous voyons une vue aérienne qui se rapporte à Nova Kasaba. Et on
22 voit qu'on y a noté certains secteurs pour ce qui est de la photo suivante.
23 Parce que la date ici est celle du 13 juillet 1995. Et maintenant, si l'on
24 tourne la page pour passer à la page 78 du prétoire électronique.
25 On voit qu'il y a eu des déplacements de terre, on a remué la terre.
26 On voit que la date ici est celle du 27 juillet 1995. La photographie est
27 également une prise de vue aérienne.
28 Alors, il n'y a pas de témoins qui auraient survécus des exécutions
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1 éventuellement effectuées ici, n'est-ce pas ?
2 R. C'est exact. Il n'y a pas de survivants.
3 Q. Est-il exact de dire aussi que l'on ne saurait exclure une éventualité,
4 à savoir que certains de ces individus aient pu périr au combat ?
5 R. Vous voulez mon opinion personnelle ?
6 Q. Non, je ne demande pas votre opinion personnelle. Je voudrais avoir un
7 renseignement qui serait celui que se serait procurée votre équipe
8 d'enquêteurs. Est-ce que cette équipe a pu exclure cette éventualité-là
9 lorsqu'elle a diligenté ses investigations ?
10 R. Donc, de façon brève, je vais vous expliquer ce que l'enquête nous a
11 permis de comprendre à propos de ce site. Il y a eu un témoin qui a essayé
12 de s'échapper du côté où se trouve cette colline et qui voulait traverser
13 jusqu'à la route goudronnée, et il s'est en fait caché au bas près d'un
14 pylône électrique et il pouvait voir entre deux maisons à partir de cet
15 endroit. A partir de là, il a pu voir deux véhicules blindés sur la route.
16 Il a d'abord vu un premier groupe de 30 personnes qui ont marché dans une
17 prairie où on les a faites s'aligner. Ensuite, il y avait des hommes qui
18 avaient des fusils automatiques qui étaient debout à bord des véhicules de
19 transport de troupes et qui ont tiré sur ce groupe. Le témoin en question
20 est resté là où il était. Et puis, peu de temps après, un deuxième groupe
21 est arrivé, et ils ont été alignés près des corps du premier groupe et on
22 leur a tiré dessus. Entre-temps, les soldats vociféraient, tiraient en
23 l'air. Et puis, un troisième groupe est arrivé. Et là, le témoin a quitté
24 cet endroit.
25 Il nous a fallu quatre ans pour retrouver le lieu dont parlait ce témoin,
26 parce que sur ce tronçon de route d'environ 3 kilomètres, il y avait de
27 nombreux lieux qui auraient pu correspondre à la description. Donc nous
28 sommes allés du nord vers le sud, et très heureusement, la dernière
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1 possibilité, elle se trouvait en fait dans le sud.
2 Et la description du lieu est visible sur la photographie car, comme vous
3 voyez en haut du côté gauche supérieur du carré rouge, nous voyons les deux
4 maisons. Malheureusement, le pylône n'est pas visible. En fait, il se
5 trouverait de façon approximative là où se trouve le A du mot "Areas."
6 Et puis, à un moment donné à la fin de l'an 2000, je pense que cela s'est
7 passé pendant l'été de l'an 2000, cette prairie a fait l'objet d'analyse et
8 a été, en quelque sorte, fouillée et analysée avec des détecteurs de métal
9 et là on a trouvé un grand nombre de balles fichées dans le sol. C'est un
10 rapport de mes collègues qui ont effectué cette recherche en mon absence,
11 parce que c'était la dernière phase de la mission et j'avais quitté la
12 zone. Mais eux, entre-temps, ils ont continué cette opération.
13 Donc, à mon avis, du fait de la proximité du lieu de ces fosses, ces fosses
14 pourraient correspondre aux fosses où les corps de ces personnes ont été
15 jetés. Puis, il y a une autre fosse qui se trouve un peu plus au nord de
16 cet endroit que nous ne montrons pas dans le cadre de ce procès, qui est
17 dissimulée de la route par un alignement assez épais d'arbres, et là, dans
18 le rapport d'exhumation, il est indiqué combien de corps ont été trouvés.
19 Je ne me souviens pas du chiffre exact, d'ailleurs. Donc je suppose que ces
20 fosses correspondent aux forces où se trouvaient les corps à la suite de
21 cette exécution -- et peut-être pas de cette exécution seulement, mais au
22 moins de cette exécution.
23 Et puis, pour ce qui est de la possibilité suivant laquelle ces personnes
24 auraient pu être des victimes de combat, d'après les photographies que j'ai
25 prises et d'après les échantillons que nous avons pris dans cette fosse qui
26 se trouvait donc juste au bas à gauche de cette case en rouge, comme je
27 vous l'ai montré, il y avait -- bon, il y a un corps, par exemple, vêtu de
28 vêtements civils avec les bras attachés avec un fil de fer dans le dos en
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1 plus. J'ai quelques difficultés à comprendre comment un homme dont les
2 mains sont liées derrière le dos aurait pu être tué lors d'un combat, mais
3 enfin, c'est mon point de vue.
4 Il y a un rapport d'exhumation absolument complet sur la question que le Pr
5 Wright pourra vous expliquer, d'ailleurs.
6 Q. Ma question était celle de savoir si vous pouviez exclure l'éventualité
7 d'avoir dans ces fosses d'enterrés des gens qui se sont faits tuer au
8 combat. Je voulais savoir si vous pouviez exclure cette éventualité ou pas
9 ? Ainsi, on pourrait aller de l'avant.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin a déjà répondu à cette
11 question. Il a dit qu'il se pouvait qu'il y ait d'autres personnes à part
12 ceux qui ont péri lors de cette exécution, et je crois comprendre qu'il n'a
13 pas exclu le fait que ces autres personnes auraient pu être tuées lors d'un
14 combat. N'est-ce pas, Monsieur
15 Ruez ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, et le Pr Wright pourra vous
17 donner davantage de détails à propos de ces fosses.
18 M. LUKIC : [interprétation] Bon. Merci. Nous irons de l'avant.
19 Il nous faut la page 92 du prétoire électronique à présent, je vous prie.
20 Oui, excusez-moi. Non, c'est la page 84 qu'il nous faut. Il est question de
21 Konjevic Polje. Excusez-moi. Je n'arrive pas à le retrouver.
22 Q. Mais vous allez vous rappelez certainement du fait qu'au sujet de
23 Konjevic Polje, il y a eu pas mal de tombes individuelles ou de fosses avec
24 juste deux ou trois corps dedans; est-ce bien exact ?
25 R. Nous en avons trouvé une où se trouvait un seul corps, oui.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et qu'en est-il des fosses où se
27 trouvaient deux ou trois corps ? Puisque cela fait partie de la question
28 qui vous a été posée.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Nous recherchions des fosses qui
2 n'étaient pas des fosses communes dans cette zone parce qu'il y avait des
3 dépositions de témoins qui avaient indiqué qu'ils avaient vu des personnes
4 se rendre et que les personnes qui portaient des armes avaient dû creuser
5 leur propre tombe et ensuite on leur avait tiré dessus. Donc, ça, c'est des
6 témoins qui avaient indiqué cela. Donc nous avons recherché plusieurs
7 endroits dans ce secteur pour voir si nous pouvions trouver des fosses et
8 nous en avons trouvé une avec un corps à l'intérieur. C'est le Pr Wright
9 qui a fait le rapport à ce sujet, et la conclusion de ce rapport est que le
10 trou où l'on a trouvé ce corps avait été creusé à la main. Donc, voilà,
11 c'est cela que nous avons obtenu à propos de cette observation.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc la réponse succincte, c'est que
13 vous n'avez pas trouvé de fosse où il y avait deux ou trois corps --
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, une tombe avec un corps, mais pas deux ou
15 trois.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'était la réponse succincte.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais je pense que cela valait la peine de
18 mentionner cela.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous l'aviez mentionné déjà
20 lors de votre première réponse.
21 Poursuivez, Maître Lukic.
22 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
23 Q. Nous passons maintenant à l'entrepôt de Kravica. Au sujet de Kravica et
24 d'autres sites encore, serait-il exact de dire que bon nombre d'endroits
25 visités et examinés par vous faisaient partie de ce qui avait été une zone
26 de guerre ?
27 R. Oui, tout à fait.
28 Q. Les dégâts subis au niveau des bâtiments là où il y a cet entrepôt de
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1 Kravica, ça peut aussi être attribué à des opérations de combat, n'est-ce
2 pas ?
3 R. Alors, tous ces types de dégâts dans une zone de guerre peuvent être
4 provoqués par la guerre, certes.
5 Q. Pendant votre enquête, vous vous êtes procuré un renseignement disant
6 qu'à Kravica, à l'occasion des fêtes de Noël orthodoxe en 1993, il y a eu
7 attaque de lancée contre des civils serbes, qui ont été massacrés; est-ce
8 bien exact ?
9 R. Oui, j'ai des informations suivant lesquelles, effectivement, lors de
10 la Noël orthodoxe de l'année 1993, il y a eu une attaque qui a été lancée
11 contre Kravica. Un certain nombre de personnes ont été tuées. Mais je n'ai
12 pas mené l'enquête à ce sujet. Je ne pourrais pas vous dire si ces
13 personnes étaient des civils ou des militaires.
14 Q. Auriez-vous abouti à des renseignements dans votre enquête disant qu'en
15 juillet 1995, il y a eu bon nombre de meurtres par vengeance ?
16 R. Oui, tout à fait.
17 Q. Et vous êtes-vous procuré des informations montrant qu'il y a eu
18 beaucoup de meurtres individuellement commis avec des personnes tuées ou
19 quelqu'un à Konjevic Polje, par exemple ? Excusez-moi, je dois me reprendre
20 : à Kravica. Pas à Konjevic Polje. Kravica.
21 R. Pour ce qui est de ces vengeances, c'est quelque chose que j'ai plus
22 remarqué dans la ville de Bratunac. Pour ce qui est de l'entrepôt de
23 Kravica, là ce n'est pas quelque chose qui a été commis par des individus
24 isolés, faisant cavaliers seuls.
25 Q. Là, vous parlez de l'entrepôt de Kravica. Moi, je vous parle du secteur
26 de Kravica, des environs.
27 R. Pour résumer un grand nombre de dépositions et de témoignages de
28 témoins, et je parle de personnes qui ont conduit le long de cette route,
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1 il y a des corps qui ont été remarqués le long de cette route. Donc ces
2 meurtres isolés se sont passés le long de cette route. Alors que pour
3 l'entrepôt de Kravica, il y avait un grand nombre de victimes, et je pense
4 que la situation à Kravica a déjà fait l'objet d'une analyse détaillée,
5 maintenant et ainsi que lors de procès précédents. Donc je suis sûr que
6 vous connaissez tous les détails de cela.
7 Q. Pour ce qui est de cet entrepôt de Kravica, est-il exact de dire que
8 suite à l'arrivée de ces prisonniers, l'ambiance était plutôt détendue, et
9 à un moment donné ces gardiens serbes armés, qui étaient des membres de la
10 police, il y a eu deux fusils automatiques d'arrachés par les Musulmans qui
11 se trouvaient dans l'entrepôt, et l'un des gardiens a été tué et l'autre a
12 été, quant à lui, blessé ?
13 R. Pour ce qui est de l'ambiance décontractée, bon, ce n'est pas vraiment
14 des termes que j'utiliserais, mais effectivement, j'ai entendu parler de ce
15 fait. L'un des soldats a eu les mains brûlées lorsqu'il a attrapé un fusil.
16 Mais je dois vous dire quelque chose : l'exécution, d'ailleurs, elle ne
17 s'est passée à Kravica à proprement parler. Parce que dans Kravica, il y a
18 un entrepôt qui a été détruit, il s'agit d'un dégât de guerre. Et nous
19 n'utilisons pas, d'ailleurs, cet exemple dans les procès parce qu'il n'a
20 rien à voir avec les exécutions. L'entrepôt dont je parle maintenant se
21 trouve à la sortie de Kravica. Donc il ne s'agit pas de l'entrepôt qui se
22 trouve dans le village de Kravica. C'est un entrepôt qui se trouve à une
23 certaine distance de Kravica.
24 Alors, il faut savoir que les événements de Kravica se sont déroulés en
25 deux phases : il y a d'abord eu l'exécution à l'ouest, puis l'exécution à
26 l'est. Un soldat a été tué près de là et un autre a eu la main brûlée. Je
27 vois ce à quoi vous voulez en venir, il s'agirait d'une réaction des
28 soldats qui ont voulu venger leurs camarades. Moi, je ne peux pas vous dire
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1 quelles en sont les raisons, mais ce n'est pas ainsi que je perçois cette
2 situation.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ruez, pour ce qui est de la
4 deuxième partie de votre réponse, vous avez plus ou moins confirmé ce qui
5 avait été dit à propos du soldat. Alors, est-ce que dans le cadre de
6 l'enquête vous avez obtenu de plus amples renseignements à propos de ce qui
7 s'était passé, du moment où cela s'était passé, où cela s'était passé, à
8 propos de ce soldat blessé et de l'autre soldat tué ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque moi j'ai procédé à l'enquête, tout ce
10 que nous avions pu observer, c'est qu'il y a un petit mémorial qui se
11 trouve tout près de Sandici, et il porte de ce soldat qui a apparemment a
12 été tué le 13, d'après ce que je sais. Parce que cela, je l'ai appris après
13 mon départ du Tribunal, l'événement relatif à ce soldat qui avait été tué.
14 Et puis, il y a également l'autre histoire à propos de la main brûlée.
15 Cela, je ne l'ai pas appris lors des six ans pendant lesquels j'ai mené
16 l'enquête. Je l'ai appris par la suite lors des conversations avec mes
17 anciens collègues.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais la question a été posée de
19 telle façon qu'il y avait une suggestion, à savoir que cela avait un lien
20 avec l'entrepôt de Kravica. Est-ce que l'enquête a confirmé que le soldat
21 tué et que le soldat brûlé et blessé avaient été blessés à l'entrepôt de
22 Kravica ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour la main brûlée, oui, c'était à
24 l'entrepôt; mais pour ce qui est de la mort de l'autre soldat, cela ne
25 s'est pas passé à l'entrepôt, mais assez près.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Assez près, c'est-à-dire ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans les environs de la prairie, donc à moins
28 d'un kilomètre.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
2 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, cela va faire
3 l'objet de la déposition, et je pense qu'il va y avoir un accord de base à
4 propos de ces questions fort intéressantes entre la Défense et
5 l'Accusation. Je voulais juste vous le dire.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Mais puisque Me Lukic a
7 soulevé la question, poursuivez, je vous en prie.
8 M. LUKIC : [interprétation] Merci --
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas entendu ce que vous avez
10 dit.
11 M. LUKIC : [interprétation] C'est le moment de faire la pause.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ah oui. Donc nous allons faire une pause
13 et -- bon, dans un premier temps, nous aimerions inviter M. le Témoin à
14 suivre M. l'Huissier.
15 [Le témoin quitte la barre]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprendrons à 11 heures moins cinq.
17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.
18 --- L'audience est reprise à 11 heures 04.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait faire entrer le
20 témoin dans le prétoire.
21 [Le témoin vient à la barre]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, poursuivez.
23 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
24 Q. Est-ce que nous pouvons continuer, Monsieur ?
25 R. Oui, oui, tout à fait.
26 Q. Pour les besoins du compte rendu d'audience, je tiens à préciser qu'il
27 a été question des soldats dans l'entrepôt de Kravica. Est-ce que votre
28 enquête vous a permis de conclure qu'il s'agissait de policiers, non pas de
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1 soldats de l'armée de la Republika Srpska ?
2 R. D'après ce que je sais, il y avait présence d'une brigade de la police
3 spéciale et du colonel Borovcanin.
4 Q. Merci. Je voudrais passer vers la région de Zvornik maintenant, et je
5 me propose de vous poser quelques questions sur Orahovac, l'école de
6 Grbavci et des questions au sujet de Lazete 1 et Lazete 2, sites
7 d'exécution alléguées. Cette école de Grbavci a été utilisée pour y
8 héberger des effectifs également, n'est-ce pas ?
9 R. Oui. Oui, c'est exact. De temps à autre, les militaires utilisaient
10 cette école.
11 Q. Merci. Les débris que vous avez trouvés devant l'école et que vous avez
12 analysés, ce n'est pas forcément lié aux événements de juillet 1995; est-ce
13 bien exact ?
14 R. Non. Non, non, ce n'est pas exact. Car vous aurez l'explication
15 scientifique qui va vous être donnée par l'un des membres de l'équipe
16 spécialisé dans cette question, mais les bandeaux qui ont été trouvés à
17 l'école correspondent aux bandeaux qui ont également été trouvés dans les
18 fosses et correspondent également aux bandeaux qui ont été trouvés dans le
19 dépotoir. Puis, par la suite, ils correspondaient également aux bandeaux
20 que l'on a trouvés dans les fosses secondaires avec lesquelles on a établi
21 un lien avec ce site.
22 Q. Bon. Serait-il exact de dire que pas un seul des prisonniers de l'école
23 n'a entendu de rafales, de coups de feu tirés à proximité de cette école,
24 c'est-à-dire aux sites de Lazete 1 et Lazete 2 ?
25 R. Oui, c'est exact.
26 Q. De même, est-il exact de dire que les gens qui auraient prétendument
27 survécu aux exécutions n'ont pas été capables de reconnaître les sites de
28 Lazete ?
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1 R. Oui. Pour des raisons que j'ai déjà énoncées et expliquées lors de
2 l'interrogatoire principal, mais c'est exact.
3 Q. Merci. Aux sites de Lazete 1 et 2, on a retrouvé 493 corps au total.
4 Vous souvenez-vous de ce chiffre ?
5 R. Oui, je peux accepter ce chiffre.
6 Q. Je me propose à présent de vous poser des questions au sujet de l'école
7 à Petkovci.
8 M. LUKIC : [interprétation] Et au prétoire électronique, il s'agit de la
9 pièce P1132, page 167.
10 Q. Vous savez forcément de quoi je parle, c'est le tableau de la salle de
11 classes.
12 R. Oui.
13 Q. Vous avez enquêté, mais est-ce que vous savez nous dire et confirmer
14 qu'il s'agit ici bel et bien de dégâts occasionnés par des balles ?
15 R. Nous n'avons pas pris avec nous le tableau. Tout ce que je peux vous
16 dire, c'est que les trous qui figurent sur ce tableau pourraient
17 correspondre très bien à des balles, et cela pourrait correspondre à la
18 déposition de témoin qui indiquait que de temps à autre on leur tirait
19 dessus, on leur tirait dessus depuis l'extérieur vers l'intérieur, si les
20 gens, par exemple, se mettaient debout pour avoir un peu plus d'air.
21 Q. Je fais des pauses afin de patienter et attendre la fin de
22 l'interprétation.
23 Alors, vous n'avez pas retrouvé de balles là, et vous n'en avez pas cherché
24 non plus, n'est-ce pas, je veux dire dans le tableau ?
25 R. C'est à moitié exact. En fait, non, ce n'est pas du tout exact. Nous
26 avons cherché des balles, mais comme je vous l'ai déjà dit, c'est un lieu
27 qui avait été entièrement rénové par une ONG avant notre arrivée, donc
28 trouver des balles sur ce lieu, ce n'était pas possible. Puisque tout avait
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1 été reconstruit, rénové, à l'exception de ce tableau, toutefois.
2 Q. Peut-être ma question n'a-t-elle pas été suffisamment claire. Dans le
3 tableau lui-même, vous n'avez pas trouvé de balles, vous n'en avez pas
4 cherché dedans, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, vous avez raison. Nous n'avons pas ôté le tableau du mur.
6 Q. Est-il exact de dire aussi que ce secteur a été un champ de grande
7 bataille pendant l'année 1992 ? Est-ce que vous avez pu vous procurer ce
8 type de renseignement ?
9 R. Non.
10 Q. Merci. Alors, je me propose à présent de vous poser des questions au
11 sujet de l'école de Rocevic.
12 M. LUKIC : [interprétation] Et nous avons besoin de la photo 187. Ou
13 plutôt, c'est la page du prétoire électronique 187 qu'il convient de nous
14 afficher.
15 Q. Alors, quand il est question de cette école comme lieu de détention,
16 vous n'avez personnellement pas enquêté au sujet de cette école de Rocevic
17 du tout, n'est-ce pas ?
18 R. Oui, c'est exact.
19 Q. Et ça n'a pas été fait non plus par votre équipe d'enquêteurs pendant
20 que vous étiez employé par le Tribunal, n'est-ce pas ?
21 R. Comme je vous l'ai déjà dit, j'ai pris cette photographie en pensant
22 que par la suite nous pourrions établir un lien entre cette école et les
23 événements à propos desquels nous menions l'enquête. Mais je pense aux
24 témoignages portant sur la présence militaire à l'école de la part des
25 personnes qui gardaient les prisonniers à l'école, tout cela s'est passé
26 après mon départ en 2001. Donc, personnellement, moi, je n'étais pas en
27 mesure de mener quelque enquête que ce fût là.
28 Q. Merci.
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1 M. LUKIC : [interprétation] Nous n'allons plus avoir, pour le moment,
2 besoin de cette pièce à conviction, et on pourrait l'enlever de l'écran
3 pour ne pas détourner l'attention du témoin.
4 Q. Est-ce que dans vos enquêtes vous vous seriez procuré des informations
5 disant qu'avant le début de l'opération Krivaja 95, dans ce secteur de
6 Srebrenica, il y a eu constamment des opérations offensives de lancées par
7 la 28e Division de l'ABiH en direction des villages serbes ?
8 R. Oui, absolument.
9 Q. Je sais que vous n'avez pas enquêté à ce sujet, mais en tant
10 qu'information à l'appui de ce que vous avez fait, savez-vous nous dire
11 combien de Serbes il a été tué à l'occasion de ces opérations lancées par
12 la 28e Division ?
13 R. En général, le chiffre qui est donné par les personnes qui parlent de
14 ces événements qui se sont déroulés entre 1992 et 1995 et lorsqu'il est
15 question de victimes serbes, en général, le chiffre s'élève à 2 000.
16 Q. Est-ce que vous avez déterminé -- je ne sais pas si vous avez vaqué à
17 ce type d'activité, mais est-ce que vous avez déterminé combien de
18 personnes il y avait à l'intérieur de Srebrenica avant le lancement de
19 cette opération Krivaja 95 ? Est-ce que vous savez nous donner un chiffre
20 précis ?
21 R. Là, il y a deux questions. Alors, vous m'avez demandé si je m'étais
22 occupé de cet aspect. Et, comme vous le savez, la réponse est négative, car
23 pour moi l'enquête commence le 11 juillet 1995 avec la chute de Srebrenica.
24 Pour ce qui est de votre deuxième question, en règle générale, et là je
25 pense à plusieurs sources des Nations Unies, les ONG telles que Médecins
26 sans frontières, les bataillons des Nations Unies, et cetera, et cetera,
27 donnent le chiffre de 45 000 à l'intérieur de l'enclave, si je ne me
28 trompe. Mais --
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1 Q. Vous ne vous en êtes pas occupé, parce que nous, nous avons un document
2 qui parle de 36 000 habitants. Un document musulman, du reste.
3 R. Oui, oui, je suis d'accord. Pas de problème.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, dois-je comprendre que vous êtes
5 d'accord avec le fait que ce document musulman existe et fait référence à
6 36 000 personnes, ou est-ce que vous nous dites : Oui, ça, c'est le chiffre
7 exact et l'autre chiffre de 45 000 est erroné ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, quelle sera ma réponse à ce sujet -- il
9 se peut que je doive me répéter, mais à mon point de vue, dans le cadre de
10 cette enquête, mon devoir, ma mission consistait à déterminer le nombre de
11 personnes qui avaient été assassinées, le nombre de victimes qui avaient
12 dans un premier temps été capturées, faites prisonnières et tuées, et
13 ensuite pour ce qui est des calculs à propos du nombre de personnes dans
14 l'enclave. J'accepte le chiffre de 36 000 sans aucun problème.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais un peu plus tôt vous avez dit
16 qu'en règle générale, l'estimation qui est donnée tourne autour de 45 000.
17 Alors, si vous nous dites "J'accepte le chiffre de 36 000," est-ce que vous
18 allez l'accepter parce que vous considérez que c'est une estimation plus
19 exacte, ou est-ce que cela correspond à l'un des chiffres qui correspond à
20 la partie basse de la fourchette des chiffres ? Qu'est-ce que vous acceptez
21 exactement ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, il se peut que le chiffre soit
23 compris entre 36 000 et 45 000. Je n'en sais rien. Pour ce qui est de
24 savoir le nombre de personnes qui se trouvaient à l'intérieur de l'enclave
25 avant la chute de l'enclave, ça n'a pas été au cœur de mes préoccupations.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous dites que vous n'avez aucune
27 raison de penser que cela est tout à fait erroné. Cela pourrait être exact,
28 tout comme le chiffre des 45 000 pourrait être exact ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Lukic.
3 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
4 Q. Est-ce que dans le courant de votre enquête, vous vous seriez procuré
5 un renseignement disant combien de gens il y a eu à mourir à Srebrenica ou
6 à avoir été tués pendant la guerre dans Srebrenica même ?
7 R. Ecoutez, je répondrai tout comme j'ai répondu juste précédemment.
8 Certes, il y a des gens qui sont morts entre 1992 et 1995. Certains sont
9 morts au combat. D'autres sont morts de maladies, certes. Mais moi, je n'ai
10 pas mené d'enquête à ce sujet.
11 Q. Est-il exact de dire aussi que vous ne saviez pas combien de gens
12 s'étaient rassemblés exactement à Potocari ?
13 R. Non, je n'ai pas de chiffre précis et exact. En fait, j'ai utilisé les
14 dépositions des membres des bataillons des Nations Unies qui avaient une
15 estimation. Je me souviens qu'il y en avait 5 000 qui avaient trouvé une
16 protection à l'intérieur de la base principale, et puis -- je ne me
17 souviens plus combien de personnes se trouvaient à l'extérieur. Je pense
18 qu'il leur revient à eux de vous fournir des estimations plus précises.
19 Nous avions une estimation. Mais de toute façon, c'est une estimation.
20 Personne ne s'est trouvé là pour compter exactement le nombre de personnes
21 dans la foule.
22 Q. Tous ces chiffres, donc, que nous avons évoqués jusqu'à présent, ce
23 sont des chiffres approximatifs. Et ça n'a jamais été déterminé avec
24 précision, pas du moins par les soins de votre équipe. Est-ce que nous
25 pouvons tomber d'accord sur une affirmation de ce type ?
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, est-ce qu'il s'agit d'une
27 question sérieuse : est-ce qu'il a été déterminé combien de personnes ou si
28 on avait compté le nombre de personnes qui se trouvaient dans la base ?
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1 Nous avons vu les photos. Alors, est-ce qu'il s'agit d'une question
2 sérieuse que vous posez ?
3 M. LUKIC : [interprétation] J'espère en tout cas que ma question ne portait
4 pas seulement sur Potocari, mais sur le nombre d'habitants à Srebrenica, le
5 nombre de personnes tuées, le nombre de personnes qui sont mortes pendant
6 la guerre à Srebrenica.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, posez cette question.
8 M. LUKIC : [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que ce que vous avez dit est "donc
10 tous ces chiffres," voilà comment vous avez commencé, ce qui inclut
11 l'estimation de personnes qui se trouvaient dans la base et à l'extérieur
12 de la base. Donc, si vous voulez savoir s'il y avait eu un recensement de
13 la population, vous pouvez poser la question. Le témoin avait dit : Oui, 36
14 000, il se peut que ce soit exact, 45 000 aussi, il se peut que ce soit
15 exact. Là, nous avons déjà une indication à savoir que les personnes n'ont
16 pas été comptées de la sorte. Donc, si vous voulez obtenir de plus amples
17 renseignements, je vous demanderais de poser des questions précises au
18 témoin.
19 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
20 Q. Je pense qu'à ce sujet, vous n'êtes pas à même de nous fournir des
21 chiffres précis, ni au sujet du nombre de personnes tuées à Srebrenica, ni
22 au sujet du nombre des membres de la 28e Division pendant la guerre, ni au
23 sujet du véritable nombre d'habitants dans Srebrenica, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, c'est tout à fait exact, parce que cela n'avait rien à voir avec
25 les événements à propos desquels je devais mener l'enquête.
26 Q. Merci. Merci. Est-ce que vous avez déterminé le nombre des membres de
27 cette 28e Division à avoir été tués lors des combats contre les forces
28 serbes ou à l'occasion des pilonnages de la colonne qui essayait d'opérer
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1 une percée en direction de Tuzla ?
2 R. Non. Non, je ne l'ai pas fait.
3 Q. A présent, je me propose de vous poser des questions au sujet des
4 contacts au départ que vous avez eus avec la partie musulmane lorsque vous
5 avez entamé votre tâche. Vous avez établi un contact avec les autorités de
6 Sarajevo lorsque vous êtes arrivé en Bosnie-Herzégovine en juillet 1995,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Non, ce n'est pas exact. Je suis arrivé en passant par Split, sur la
9 côte donc, et ensuite j'ai pris un vol direct, un vol d'hélicoptère
10 d'ailleurs, qui m'a emmené à Tuzla. Je ne suis pas passé par Sarajevo.
11 Q. Ma question n'a pas été bien formulée. J'ai parlé des autorités de
12 Sarajevo. Vous n'avez donc pas établi de contact avec les autorités de la
13 Republika Srpska, pas plus qu'avec les autorités militaires de celle-ci,
14 n'est-ce pas ?
15 R. Ça, c'est tout à fait exact.
16 Q. Et le contact a été établi précisément pour enquêter au sujet des
17 événements de Srebrenica, vous avez contacté les autorités de la partie
18 musulmane à cet effet, n'est-ce pas ?
19 R. Au départ, l'objectif initial de la mission consistait à évaluer la
20 crédibilité de -- ce que j'appellerais les bruits circulés par la presse
21 qui indiquaient que quelque 8 000 personnes avaient disparu à la suite de
22 la chute de l'enclave et qu'il y avait au moins un récit d'exécution de
23 masse qui fait que les personnes qui couvraient l'événement ont été d'avis
24 et ont cru que les personnes portées disparues avaient été tuées. Voilà,
25 ça, c'était la situation de départ.
26 Q. C'est par le biais des autorités musulmans que vous avez établi des
27 contacts avec les témoins; c'est bien cela ?
28 R. Oui, oui, c'est exact.
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1 Q. Vous avez contacté des membres du 2e Corps de l'ABiH, qui avait élu
2 pour siège Tuzla, n'est-ce pas ?
3 R. Non, non pas à ce moment-là. Pas en juillet et en août 1995, mais par
4 la suite. Beaucoup plus tard, en fait.
5 M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer, s'il vous
6 plaît, le 1D849.
7 Q. Nous voyons la version B/C/S sur nos écrans. Et nous allons examiner ce
8 document. C'est un document de l'ABiH, du 2e Corps, plus précisément, et
9 c'est un document où se trouvent des instructions relatives à la
10 méthodologie qui devrait être utilisée, et je pense à la méthodologie pour
11 poser des questions aux témoins. Est-ce que vous avez été impliqué dans
12 cette question, de la manière dont il fallait procéder à des
13 interrogatoires afin de recueillir des informations, parce que ce document
14 porte la date du 10 août 1995 ?
15 R. Au cours de l'été 1995, nous avons entendu -- et je dis "nous" parce
16 que nous étions deux à mener à bien ces entretiens. Il y avait moi et M.
17 Sue Castro. Et puis, c'est M. Jos Papean qui nous a rejoints un peu plus
18 tard.
19 Je me souviens d'avoir eu un entretien avec un membre de la 28e Division,
20 et cette personne n'avait rien à dire à part qu'elle avait réussi à
21 s'échapper. Ce membre de la division avait vécu tous les événements qui
22 s'étaient produits sur le plan militaire entre les 13 et 16 juillet, mais
23 notre enquête ne portait pas sur des activités militaires. Nous essayions
24 surtout de découvrir ce qui était arrivé aux, pour ainsi dire, personnes
25 portées disparues. Donc, toute cette question militaire ne nous intéressait
26 pas.
27 Il se peut que quelques autres membres de la 28e Division aient été
28 entendus par Papean ou par notre autre collègue, mais ça n'avait aucun
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1 intérêt pour nous. Ce qui nous préoccupait surtout, c'était de retrouver
2 les témoins qui puissent nous dire trois choses : décrire surtout les
3 événements de Potocari, le premier groupe de personnes que nous avons
4 cherché à identifier appartenait à cette catégorie-là; le deuxième groupe
5 de témoins devait pouvoir nous faire part de ce qui s'est passé au cours de
6 l'évacuation, le 12 et le 13 --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il serait peut-être nécessaire
8 pour la Défense de se consulter avec M. Mladic, qui, par ailleurs, est
9 censé resté assis --
10 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ne parlez pas à voix haute, s'il vous
12 plaît. Chuchotez.
13 Maître Lukic. Maître Lukic, nous pouvons toujours vous entendre. Maître
14 Lukic, c'est la dernière fois que nous acceptons le comportement de M.
15 Mladic qui parle beaucoup trop fort. A l'avenir, il faudra attendre jusqu'à
16 la pause, sinon j'interdirai des consultations sous toutes les formes. Donc
17 c'est à M. Mladic de voir s'il souhaite baisser son volume ou se résigner
18 au nécessaire. Vous pouvez poursuivre.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'avais pas terminé ma phrase.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Où en étions-nous ?
21 M. LUKIC : [interprétation]
22 Q. Ma question - et je suis désolé de vous interrompre - était la suivante
23 : est-ce que vous aviez quelque chose à voir avec cet ordre du 2e Corps
24 d'armée ?
25 R. Eh bien, je viens juste de prendre connaissance de ce document. Je vais
26 le lire. Donnez-moi, s'il vous plaît, quelques instants pour le faire.
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Lukic, j'essaie de comprendre
28 ce que vous cherchez à prouver. Ce que nous avons ici, c'est une lettre de
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1 l'armée de la République de BiH. Je ne sais pas quelle est la date de cette
2 lettre.
3 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le 10 août 1995.
5 Un instant, s'il vous plaît.
6 Etes-vous en train de nous dire que c'est en se servant de cette lettre que
7 ce témoin a procédé à ses activités visant à retrouver des éléments
8 d'information ?
9 M. LUKIC : [interprétation] Oui.
10 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayons de nous exprimer simplement.
12 Avez-vous reçu des instructions de quelque type que ce soit quant à la
13 façon dont il fallait procéder à des auditions de témoins ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais pas du tout.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic.
16 M. LUKIC : [interprétation] Mais ma question allait à l'opposé, justement.
17 J'aimerais que ce monsieur nous donne des orientations quant à l'armée de
18 la BiH --
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais alors, nous n'avons rien compris.
20 Est-ce que vous avez suggéré, à quelque moment que ce soit, de quelle façon
21 les membres de l'ABiH devaient procéder à leurs entretiens et sous quelle
22 forme ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais absolument pas.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre. Vous avez reçu
25 réponse à votre [comme interprété] question.
26 M. LUKIC : [interprétation] Mais à la mienne aussi. Merci.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, si vous aviez formulé
28 votre question de façon plus claire, alors vous auriez immédiatement obtenu
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1 une réponse. Vous pouvez reprendre votre contre-interrogatoire.
2 M. LUKIC : [interprétation]
3 Q. Je souhaite maintenant vous poser quelques questions au sujet des
4 conversations interceptées qui sont tombées entre les mains des forces
5 musulmanes. Dès 1995, vous avez entendu dire que les autorités musulmanes
6 avaient en leur possession des conversations interceptées; ai-je raison de
7 l'affirmer ?
8 R. En effet.
9 Q. Cette documentation, vous l'avez demandée pour la première fois le 13
10 novembre 1996. Vous en souvenez-vous ?
11 R. Non, je n'en ai pas gardé un souvenir précis.
12 Q. Aucune importance. Nous avons toute la documentation requise. Mais à
13 l'époque, on ne vous a pas dit quel était le nombre de ces conversations
14 interceptées, n'est-ce pas ?
15 R. Non, pas du tout.
16 Q. Et personne ne vous a dit quelle était la teneur de ces conversations
17 interceptées; ai-je raison de l'affirmer ?
18 R. Vous avez raison.
19 Q. Vous avez reçu pour la première fois l'une de ces conversations
20 interceptées seulement au mois de mars 1998; cela est-il exact ?
21 R. Cela est vrai, à ceci près que nous ne les avions pas reçues. Nous les
22 avons trouvées.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, ces questions sont-
24 elles litigieuses ? Parce qu'apparemment vous dites que tout ceci est
25 documenté. La documentation a été communiquée à la Défense. Est-ce que vous
26 avez essayé d'avoir des échanges pour voir si ces choses-là font objet d'un
27 contentieux ?
28 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, nous ne l'avons pas fait, et je ne
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1 pense pas que ce soit une question litigieuse au fond, même si ces choses-
2 là se sont passées il y a tellement longtemps qu'on a du mal à se
3 ressouvenir des dates exactes. Mais quant à la procédure qui a été suivie,
4 elle n'a rien de secret, et un accord a été passé là-dessus qui est en
5 vigueur depuis des années. Par contre, quant à la teneur de ces
6 conversations interceptées, elle peut être litigieuse --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ça, c'est une autre question.
8 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, Maître Lukic, pourquoi ne pas vous
10 concentrer sur les choses qui sont litigieuses plutôt que d'approfondir les
11 questions qui ne le sont pas.
12 M. LUKIC : [interprétation] Puisque ce monsieur a des connaissances de
13 première main quant à la remise de ces conversations interceptées, il nous
14 semble approprié de l'interroger à ce sujet. Parce qu'une fois parti le
15 témoin, il nous sera impossible d'établir --
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, si ce n'est pas une
17 question litigieuse et que vous souhaitez présenter vos moyens par des
18 témoins directs ou oculaires des choses qui ne sont même pas litigieuses,
19 alors nous allons rester ici jusqu'à 2030.
20 Je veux dire, si un accord est passé et s'il y a des questions
21 supplémentaires à poser, par exemple, si les conversations étaient gardées
22 dans une boite bleue ou une boite verte, alors vous pouvez poser ces
23 questions supplémentaires. A quel moment est-ce que vous avez demandé qu'on
24 vous remette ces conversations interceptées ? A quel moment les avez-vous
25 reçues ? Est-ce que vous avez reçu une documentation complète ? Mais pour
26 les choses qui sont déjà bien documentées, on peut tout simplement
27 s'appuyer sur la documentation sans poser de questions au témoin. Je ne
28 vois pas à quoi ça sert.
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1 Vous pouvez poursuivre.
2 M. LUKIC : [interprétation] Mais je ne suis pas d'accord sur le fait qu'il
3 y ait un accord sur le sujet. Il n'y a pas eu d'accord dans d'autres
4 affaires. Dans celle-ci, je ne pense pas qu'il existe.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, il faudrait le vérifier avec
6 l'Accusation. Parce que votre tâche consiste à vous pencher sur les
7 questions litigieuses, et c'est sur ces questions-là qu'il faut présenter
8 vos moyens. Et c'est aux Juges de la Chambre de trancher, mais nous
9 n'allons pas trancher sur les choses qui ne font pas objet d'un
10 contentieux.
11 Vous pouvez poursuivre.
12 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
13 Q. Sous quelle forme avez-vous reçu ces conversations interceptées, vous
14 en souvenez-vous ?
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais le témoin a déjà indiqué qu'ils
16 ont trouvé ces conversations interceptées, qu'ils ne les ont pas reçues.
17 Donc : "Sous quelle forme avez-vous trouvé ces conversations interceptées
18 ?"
19 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Sous la forme de petites feuilles volantes,
21 écrites à la main.
22 M. LUKIC : [interprétation]
23 Q. Et les autorités de Bosnie vous ont-elles jamais expliqué pour quelle
24 raison il a fallu que tellement de temps s'écoule avant que vous n'entriez
25 en possession de ces petites feuilles volantes ?
26 R. Mais nous n'avons pas cherché à obtenir ce type d'information. C'est
27 nous qui avons retrouvé les conversations interceptées, et nous n'avons pas
28 posé aux autorités la question de savoir pour quelle raison nous ne les
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1 avons pas obtenues avant. Il était tout simplement superflu de poser ce
2 genre de question.
3 Q. Merci. Nous allons maintenant passer à un autre sujet. Je souhaite vous
4 poser quelques questions supplémentaires au sujet de la méthodologie que
5 vous avez appliquée. Pour commencer, précisons que vous n'avez jamais été
6 engagé par la Défense, vous avez travaillé uniquement pour le compte de
7 l'Accusation, n'est-ce pas ?
8 R. Eh bien, précisons. J'ai été un salarié du bureau du Procureur payé par
9 l'ONU. En France, lorsque nous procédons à une enquête, nous disons que
10 c'est fait "à charge et à décharge". En d'autres mots, nous cherchons des
11 éléments d'information qui peuvent soutenir des charges contre quelqu'un,
12 mais nous cherchons aussi de façon systématique des éléments susceptibles
13 de prouver l'innocence de la personne soupçonnée. Donc, c'est tout
14 simplement notre approche générale. C'est une question de mentalité
15 générale.
16 Alors, comme je l'ai déjà dit, nous pouvions nous servir d'un certain
17 nombre de dépositions faites par les témoins, et dans d'autres cas de
18 figure cela nous était impossible. Donc l'Accusation peut se servir ou ne
19 pas se servir des éléments d'information que nous recueillons. Mais en
20 fait, oui, j'ai travaillé pour le compte de l'Accusation. Mais cela
21 n'implique pas nécessairement que notre approche était une approche
22 partiale, si vous comprenez ce que je veux dire.
23 Q. J'explique la raison pour laquelle je vous ai posé cette question. Il
24 s'agissait de confirmer encore une fois que vous n'avez mené votre enquête
25 qu'au niveau des crimes commis à l'encontre des Musulmans et non pas au
26 niveau des crimes commis à l'encontre des Serbes ?
27 R. Oui, et c'était là la mission qui m'était confiée. Mon mandat, comme je
28 vous l'ai déjà dit, consistait à étudier les rumeurs qui circulaient
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1 concernant la disparition de quelque 8 000 personnes qui se trouvaient être
2 des Musulmans. Si une autre tâche m'avait été confiée, je l'aurais
3 exécutée, mais c'est la seule tâche, la seule mission qui m'ait été
4 confiée.
5 Q. Si vous dites que vous étiez à l'écoute, à la recherche de tous les
6 éléments susceptibles d'inculper ou, au contraire, d'innocenter les
7 suspects, alors est-ce que vous vous êtes posé la question de savoir
8 combien de personnes qui se déplaçaient en colonne ont été tuées par les
9 forces de l'ABiH ?
10 R. Les personnes qui ont trouvé la mort lors des combats n'ont pas été des
11 victimes de crimes. Nous savons qu'un nombre important de soldats a été tué
12 pendant les combats et que leurs corps étaient toujours éparpillés dans la
13 forêt ou sur les collines entre Potocari et Konjevic Polje, et ces corps y
14 étaient toujours en été 1996. Entre-temps, avec mon équipe, je me suis mis
15 à ouvrir les fosses communes qui étaient reliées avec les sites de
16 détention. Un groupe de Norvégiens à la tête duquel se trouvait Mme
17 Elisabeth Rehn a procédé à une enquête concernant ces corps retrouvés sur
18 les collines. Mais ces personnes-là, c'étaient des victimes qui sont
19 tombées au cours des combats. Et l'Accusation ne s'y intéressait pas, parce
20 que les victimes qui sont tombées au cours des combats ne nous
21 intéressaient pas. Le seul élément crucial de l'enquête que nous menions
22 était d'enquêter sur les crimes. Et comme ces personnes ont trouvé la mort
23 sur ces collines sans aucun rapport avec quelque crime que ce soit --
24 enfin, en tout cas, ils n'ont pas été exécutés.
25 Q. Ma question était la suivante : avez-vous entendu les témoins dire que
26 les membres de la 28e Division ont tué un certain nombre de Musulmans qui
27 se déplaçaient en colonne ?
28 R. Je n'ai jamais entendu parler d'une chose pareille.
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1 Q. Merci. C'était à vous de décider quel récit vous souhaitiez vérifier,
2 le récit présenté par quel témoin; ai-je raison de l'affirmer ?
3 R. Oui.
4 Q. Et c'était à vous de définir vos priorités également, n'est-ce pas ?
5 R. Après en avoir parlé avec mes collègues, puisque nous travaillions en
6 équipe, mais de façon générale, ma réponse est oui.
7 Q. Dans le prétoire, seuls les éléments qui étayaient la thèse de
8 l'Accusation ou qui ont étayé la thèse de l'Accusation dans les affaires
9 précédentes, seuls ces éléments-là ont été présentés; ai-je raison de
10 l'affirmer ?
11 R. Non. Enfin, oui, au cours du procès, oui, mais pendant la phase
12 d'enquête, non. Et j'aimerais pouvoir vous citer un exemple, très
13 brièvement, qui vous permettra de vous faire une idée de la façon dont nous
14 procédions.
15 Q. Nous allons y arriver un peu plus tard. Dans le cadre du procès Popovic
16 et consorts, mon collègue, Me Ostojic, vous a demandé si vous connaissiez
17 la notion de la partialité confirmatoire - en anglais, "confirmatory bias".
18 Au cours des travaux que vous avez effectués, étiez-vous capable d'éviter
19 ce genre de piège et ne pas manifester ce type de partialité confirmatoire
20 ?
21 R. Pour vous répondre très sincèrement, je ne me souviens pas de cette
22 notion et je ne sais pas ce qu'elle sous-entend, mais ce que je peux vous
23 dire aussi, c'est que je n'ai jamais reçu de formation sous quelque forme
24 que ce soit relative à la présentation des résultats d'une enquête dans une
25 salle d'audience. Je vous dirais aussi que je n'ai pas relu une seule ligne
26 de mes dépositions précédentes avant de venir ici parce que je sais ce que
27 j'ai fait et je n'ai pas besoin qu'on ravive mes souvenirs du passé. Et
28 j'ai toujours répondu à toutes les questions posées d'une façon honnête
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1 parce qu'en fait, les réponses que je fournissais étaient les seules que
2 j'avais à l'esprit.
3 Q. Très bien. Nous allons passer à autre chose. Mais vous dites que
4 normalement, un enquêteur n'est pas censé entendre plus d'un survivant d'un
5 site d'exécution pour ne pas être affecté par ses connaissances déjà
6 accumulées. Vous en souvenez-vous ?
7 R. Je m'en souviens très bien. Et je pensais justement à une situation qui
8 s'est produite au mois de juillet --
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Il
10 semblerait que M. Mladic est incapable de suivre le procès. Ne parlez pas à
11 haute voix, Monsieur Mladic, s'il vous plaît.
12 Il semblerait que le problème a été réglé.
13 M. LUKIC : [interprétation]
14 Q. Je vais devoir reprendre ma question. Un enquêteur n'est pas censé
15 entendre plusieurs personnes qui ont survécu à des exécutions sur un seul
16 et même site parce que, dans le cas contraire, l'enquêteur risque d'être
17 contaminé par ses connaissances accumulées précédemment ?
18 R. Idéalement, oui. Je vous cite un exemple. Au mois de juillet 1995, nous
19 avions deux enquêteurs, donc deux personnes qui recueillaient des
20 déclarations de témoins. Alors, prenons, par exemple, ce qui s'est produit
21 au barrage. Deux personnes ont survécu aux exécutions. Moi, j'ai entendu un
22 témoin et Sue Castro a entendu l'autre. C'est l'approche la plus logique.
23 Si vous pouvez l'éviter, il faut diviser les tâches, parce que sinon, dans
24 l'avenir, votre compréhension des choses serait contaminée par votre
25 connaissance du passé. Mais dans ce cas de figure particulier, nous
26 pouvions le faire. Dans certains autres cas, cela est impossible. Vous vous
27 débrouillez comme vous le pouvez.
28 Q. Vous avez entendu trois survivants d'Orahovac sur quatre; ai-je raison
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1 de l'affirmer ?
2 R. Malheureusement, oui, vous avez raison. Et je l'ai fait à cause d'un
3 problème de ressources que j'avais à ma disposition.
4 Q. Nous le comprenons et nous l'acceptons. Vous conviendrez que vous avez
5 souvent réinterrogé ces mêmes témoins dans le cas où cela s'avérait
6 nécessaire, n'est-ce pas ?
7 R. Si mes souvenirs sont bons, quand il s'agit de témoins, disons, aussi
8 fiables, nous passions une journée à les interroger, disons quelque huit
9 heures, et c'est pratiquement rien du tout dans le cadre d'une audition. Et
10 dans certains cas de figure, il fallait entendre ces témoins de nouveau. Je
11 pense, par exemple, à la personne qui a survécu le massacre du dépôt à
12 Kravica, parce que quand nous avons procédé à des vérifications pour la
13 première fois, nous n'avons pas réussi à retrouver la pièce des gardiens
14 dont le témoin avait parlé. Donc nous avons été obligés de l'entendre de
15 nouveau, parce que nous n'étions plus si sûrs que nous étions allés dans le
16 bon entrepôt, et l'intérieur de l'entrepôt avait été détruit, donc nous
17 n'avons pas réussi à nous y retrouver. Mais je ne pense pas que les autres
18 témoins aient été entendus de nouveau. Peut-être. Je ne m'en souviens pas.
19 Q. Très bien. J'aimerais maintenant que nous nous concentrions sur l'école
20 Vuk Karadzic. C'est Miroslav Deronjic qui vous a communiqué les
21 informations relatives au nombre de personnes détenues à l'école, n'est-ce
22 pas ?
23 R. Je ne me souviens pas d'avoir entendu parler d'un chiffre concret pour
24 ce qui est des détenus de cette école.
25 Q. Est-ce que vous vous souvenez du fait que Miroslav Deronjic vous ait
26 dit qu'il n'y avait qu'une seule salle de classes à avoir été utilisée pour
27 y mettre des personnes dans le cadre de cette école-là ?
28 R. Voyez-vous, Miroslav Deronjic avait tendance à minimiser toute chose,
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1 en particulier son implication.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ruez, la question n'était pas
3 de croire ou pas croire ce qu'il vous a raconté. Vous a t-il dit, lui,
4 qu'il n'y avait eu qu'une salle de classes à avoir été utilisée pour y
5 mettre des personnes ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je me souviens, c'est cela.
7 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Q. Est-ce que vous lui avez fait confiance ? Est-ce que vous avez cru que
9 Miroslav Deronjic était en train de vous dire la
10 vérité ?
11 R. Ce que je crois, et c'est une conviction personnelle que je ne peux pas
12 étayer en avançant des preuves, étant donné qu'il y a eu une colonne
13 d'autocars et de camions à avoir été alignée en face de l'école, ma
14 supposition c'était de penser que l'école était pleine, et donc je n'ai pas
15 parlé avec les gens qui se trouvaient à l'intérieur, donc je ne peux pas le
16 dire pour sûr. Mais cette école avait déjà été utilisée en 1992, en
17 particulier sa salle de gym, et je ne vois pas pourquoi ça n'aurait pas pu
18 être utilisé en 1995 aussi.
19 Q. Mais vous n'avez jamais entendu des éléments de preuve,
20 personnellement, pour ce qui est d'avoir des éléments contredisant ce que
21 Miroslav Deronjic vous avait affirmé ?
22 R. Je pense que l'Accusation a plus d'éléments de preuve à ce sujet, mais
23 ce sont des choses qui se sont produites après mon départ.
24 Q. Merci.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ruez, lorsque vous parlez de
26 ces autocars, cette colonne d'autocars et de camions alignés devant
27 l'école, c'est ce que vous évoquez au sujet du moment où M. Deronjic vous a
28 dit qu'une seule classe avait été utilisée à cet effet ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'était la nuit du 12 au 13.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Est-ce que j'ai bien compris votre
3 témoignage, c'est-à-dire : est-ce que vous avez bien dit que vous n'avez
4 pas pu tirer quelque conclusion définitive que ce soit sur le sujet, mais
5 si plusieurs autocars et autobus sont là à attendre, alignés, pour emmener
6 des gens de l'école ou pour y acheminer des gens --
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Sur l'une des photos de Bratunac, on peut
8 voir des autocars alignés devant plusieurs endroits. Il y avait plusieurs
9 lignes d'autocars, et il y en avait une série devant l'école Vuk Karadzic.
10 Etant donné que des gens sont restés toute la nuit à bord de ce type
11 d'autocars et des camions, tel que décrit, j'ai supposé que ces gens
12 étaient restés à bord parce que l'école était déjà pleine à craquer.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Veuillez continuer, Monsieur Lukic.
14 M. LUKIC : [interprétation] Oui. N'est-ce pas l'heure de la pause ?
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet, étant donné que nous
16 sommes en train de toucher l'heure de la pause.
17 M. LUKIC : [aucune interprétation]
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous dire de
19 combien de temps vous allez avoir besoin ?
20 M. LUKIC : [interprétation] Je crois que je vais utiliser tout le temps qui
21 m'a été attribué pour le contre-interrogatoire de ce témoin.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Essayez de vous concentrer lors de
23 vos questions pour n'aborder que les questions qui sont contestées. De
24 combien de temps pensez-vous avoir besoin ?
25 M. LUKIC : [interprétation] Cinq heures. J'en avais demandé sept au départ,
26 mais je crois qu'on peut ramener cela à cinq.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, cinq heures. Je vais consulter la
28 greffière pour ce qui est de savoir combien de temps vous avez déjà
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1 utilisé.
2 Entre-temps, le témoin peut suivre l'huissier et quitter le prétoire.
3 [Le témoin quitte la barre]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause et
5 reprendre à midi 25.
6 --- L'audience est suspendue à 12 heures 05.
7 --- L'audience est reprise à 12 heures 30.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pendant qu'on attend que le témoin soit
9 escorté dans le prétoire, je dois m'excuser pour la deuxième fois où nous
10 arrivons en retard ce matin, chose qui est due à des questions urgentes à
11 aborder au niveau du Tribunal, ce qui m'a retenu pendant plus de temps que
12 je ne m'y attendais.
13 Entre-temps, je voudrais mettre à profit le temps.
14 Monsieur Lukic, le temps utilisé au sujet de la lettre en question,
15 vous auriez pu poser une seule et unique question pour demander si, à un
16 moment donné, le témoin aurait présenté des suggestions pour ce qui est
17 d'indiquer la façon dont les autorités de la Bosnie-Herzégovine devraient
18 se servir de tel ou tel autre format pour la conduite de leurs enquêtes.
19 Si le témoin avait dit à cette question "non", on aurait pu passer à
20 autre chose, à moins que vous n'ayez souhaité approfondir la question. Mais
21 d'après ce que j'ai cru comprendre, en montrant la lettre, vous avez
22 accepté la réponse comme étant un non. Et il n'y a pas eu de suggestion
23 d'avancée pour indiquer que le témoin avait été impliqué dans tout ceci, à
24 moins qu'il n'y ait eu des raisons justifiées de le supposer. Et si c'était
25 le cas, vous auriez pu poser des questions pour approfondir. Mais une
26 question simple aurait pu faire l'affaire.
27 M. Mladic est censé faire attention à ne pas parler à voix haute.
28 [Le témoin vient à la barre]
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et c'est ce que j'avais à l'esprit
2 lorsque je vous demandais de vous concentrer sur l'essentiel, Maître Lukic.
3 Vous pouvez continuer. Je vois que M. Ruez est prêt.
4 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
5 Q. Vous avez vos écouteurs et vos lunettes, Monsieur. Bon. Alors,
6 maintenant, je vais vous poser des questions au sujet de ces vues aériennes
7 que vous avez obtenues en provenance de source autre. Dans une pièce à
8 conviction qui est versée au dossier et que vous avez compilée vous-même --
9 parmi les 271 photos, il y en a plus de 30 qui sont des photos aériennes,
10 je crois qu'elles sont 36 au total, et ça a été obtenu par les soins d'une
11 seule et même agence; est-ce bien cela ?
12 R. Elles ont été obtenues par une seule et même agence, oui. Mais pour ce
13 qui est du reste, les chiffres que vous indiquez, je ne peux pas être
14 certain de leur exactitude.
15 Q. Fort bien.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'une question qui n'est pas
17 contestée, me semble-t-il, pour ce qui est de leur obtention de la part
18 d'une seule et même agence ?
19 M. McCLOSKEY : [interprétation] C'est une source gouvernementale qui serait
20 peut-être la meilleure façon de s'exprimer.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Maître Lukic --
22 M. LUKIC : [interprétation] J'ai des questions de suivi à poser ensuite,
23 donc il m'a fallu d'abord déterminer cet élément-là.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va voir si c'était véritablement
25 nécessaire. Mais si vous avez des questions de suivi, et si vous êtes tombé
26 d'accord avec ceci, vous n'avez pas à introduire cet élément-là par le
27 biais du témoin.
28 Veuillez continuer.
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1 M. LUKIC : [interprétation] Je vais demander à M. McCloskey si nous avons à
2 passer à huis clos partiel lorsque nous parlons de la source ?
3 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non.
4 M. LUKIC : [interprétation] Fort bien.
5 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, ce sont des photos aériennes qui
6 émanent des Etats-Unis.
7 M. LUKIC : [interprétation] Bien. Alors, j'aimerais qu'on se penche sur la
8 page 236 de cette pièce qui porte la cote P1132. Il s'agit de la page 236
9 au prétoire électronique.
10 Q. Vous l'avez à présent sur votre écran ?
11 R. C'est cela.
12 Q. C'est la seule photo de cette source que j'ai pu identifier comme
13 portant une annotation indiquant sa source. Est-ce que vous savez nous dire
14 pourquoi s'agissant des autres photos, puisque nous avons déterminé
15 qu'elles venaient toutes de la même source, il n'y a pas d'annotation
16 afférente à son origine ou à sa provenance ?
17 R. Non, je ne sais pas.
18 Q. Est-il exact de dire que sur ces photos aériennes, on a ajouté quelque
19 chose ? Et vous nous avez expliqué qui a ajouté en orange ou en jaune des
20 éléments. Est-il exact de dire aussi que l'on a éliminé des éléments ? Par
21 exemple, certaines dates ont été éliminées, n'est-ce pas ?
22 R. Sur celle-ci, on a une date, et les annotations en jaune sont des
23 annotations que j'ai faites sur l'image originale.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question était celle de savoir si
25 quelque chose a été enlevé ? Est-ce que vous savez nous dire si quiconque
26 d'autre, ou vous-même, aurait enlevé quoi que ce soit des photos ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas. Je ne pense pas que
28 ce soit le cas.
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1 M. LUKIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons afficher le 1D857 du
2 prétoire électronique.
3 Q. Nous allons essayer de vous rafraîchir la mémoire. Il s'agit de votre
4 témoignage dans l'affaire Popovic, 14 septembre 2006. Nous aurons besoin de
5 la page 71 du prétoire électronique.
6 Vous dites ici -- la question se trouve à la ligne 13, et je cite :
7 "Question : Ce qui me préoccupe sur ces photos c'est, par exemple, qu'il
8 n'y ait pas de date, et il y a le carré ou la case qui est encore là. Et ma
9 question est celle de savoir si vous savez nous dire qui a enlevé la date ?
10 "Réponse : Sur certaines photos… que j'ai utilisées, non pas en tant que
11 telles, mais pour parler d'autres événements liés au secteur montré par les
12 images et qui n'était pas initialement conçu pour présenter telle
13 situation, c'était moi qui avais biffé les dates pour ne garder que ce qui
14 était visible sur la photo, sans pour autant que l'on laisse une indication
15 concernant les raisons qui nous ont avancées."
16 R. Oui, bien sûr. Ça a été le cas de la photo de Bratunac. La date n'était
17 pas pertinente, mais ce qui était important, c'était de montrer
18 l'emplacement de certains bâtiments. Donc je peux confirmer que sur
19 certaines de ces photos, j'ai fait enlever la date parce que celle-ci
20 n'était pas pertinente, en effet.
21 Q. Alors, pourquoi pensez-vous que la date n'est pas un élément pertinent
22 ?
23 R. Si l'objectif de la présentation d'une pièce à conviction est de
24 montrer des bâtiments qui se trouvent en permanence sur un terrain, à moins
25 qu'elle n'ait été détruite entre-temps, la date n'est pas un élément
26 pertinent. C'est tout.
27 Q. Mais qui a décidé de biffer la date ? Est-ce que c'est vous qui avez
28 décidé de le faire ?
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1 R. Oui.
2 Q. Merci. Je voudrais vous poser à présent une question pour ce qui est
3 des dépositions ou témoignages recueillis auprès de témoins. Vous n'avez
4 jamais enregistré par une technique audio ou vidéo des propos recueillis
5 auprès d'un témoin; est-ce bien exact ?
6 R. La règle est celle-ci : l'enregistrement audio et/ou vidéo des
7 déclarations d'individus qui avaient un statut de suspects, c'était le cas.
8 Mais il n'était pas nécessaire d'avoir un enregistrement audio et vidéo
9 pour ce qui est des témoins.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question n'était pas celle de savoir
11 si c'était nécessaire mais de nous dire si cela avait été fait de façon
12 factuelle.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ça n'a pas été le cas.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] O.K.
15 M. LUKIC : [interprétation]
16 Q. Mais aucun des témoins que vous avez interrogés n'a parlé l'anglais;
17 est-ce exact ?
18 R. C'est exact.
19 Q. A aucun de ces témoins, vous ne lui avez fait signer une déclaration en
20 langue B/C/S; est-ce exact aussi ?
21 R. C'est exact. Il n'y a pas eu de traduction de la version anglaise de
22 faite pour ce qui est de leur témoignage, mais il a toujours été donné
23 lecture - à nouveau, à chacun d'entre eux - en B/C/S avant qu'ils ne
24 signent.
25 Q. Donc ils signaient la version anglaise seulement, n'est-ce pas, pour
26 les besoins du compte rendu ?
27 R. Il n'y a qu'une version et c'est la version anglaise.
28 Q. Je me propose à présent de vous demander quelle a été la méthodologie
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1 que vous avez utilisée vous-même. Vous n'avez jamais rédigé de rapport au
2 sujet des enquêtes que vous avez diligentées vous-même, n'est-ce pas ?
3 R. J'ai rédigé des rapports internes, mais rien de ce qui a été par la
4 suite consigné dans les dossiers.
5 Q. Dans votre travail, vous vous êtes basé sur des experts dans d'autres
6 domaines, parce que vous n'avez pas personnellement des connaissances en
7 matière d'anthropologie ou d'archéologie ou de pathologie, de balistique
8 non plus; est-ce bien exact ?
9 R. C'est absolument exact.
10 Q. En votre qualité d'équipe, vous avez procédé à des comparaisons au
11 sujet des traces sur les munitions que vous avez récupérées dans les fosses
12 communes et sur les armes que vous avez saisies au niveau des brigades pour
13 ce qui est d'unités que vous aviez suspectées avoir participé à des
14 exécutions; est-ce bien
15 exact ?
16 R. C'est exact.
17 Q. Votre équipe, donc, pendant que vous avez été impliqué dans tout ceci
18 du moins, n'a pas eu la possibilité de confirmer les soupçons que vous
19 aviez formulés, n'est-ce pas ?
20 R. Ça, c'est faux. Vous devriez dissocier le sujet et séparer les deux
21 volets de questions. Il y a un élément qui est inexact, c'est-à-dire le
22 fait que les comparaisons -- il y a eu des comparaisons de faites à titre
23 positif pour ce qui est des douilles qui ont été retrouvées sur les lieux
24 d'exécution au niveau du terrain, et nous avons comparé ceci avec les
25 douilles que nous avons retrouvées dans les fosses primaires. Par la suite,
26 ces douilles qui ont été retrouvées dans des fosses secondaires nous ont
27 permis d'établir un lien entre les sites secondaires et les sites premiers.
28 Et quand vous parlez maintenant de cette opération de saisie au niveau des
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1 brigades où ça n'a pas été couronné de succès, là il y a des raisons à
2 cela.
3 Q. Dans tout ce processus, est-ce que vous avez procédé à des
4 vérifications au niveau des armes utilisées par le côté musulman ?
5 R. Non.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je vérifier quelque chose avec le
7 témoin, si vous le permettez.
8 M. LUKIC : [interprétation] Certes.
9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Ruez, vous venez de nous
10 dire, en page 45 du compte rendu d'audience, aux lignes 21 à 25, que :
11 "Les comparaisons effectuées se sont soldées par un résultat positif
12 s'agissant des douilles retrouvées à la surface des terrains d'exécution
13 lors de la comparaison avec les douilles retrouvées à l'intérieur de la
14 fosse primaire," pour procéder par la suite à des comparaisons avec les
15 douilles que vous avez retrouvées dans des fosses secondaires pour établir
16 le lien avec ces sites secondaires.
17 Alors, est-ce qu'il y a eu des douilles de retrouvées au niveau de ces
18 fosses secondaires ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Et tout doit être dit au pluriel, lieux
20 d'exécution au pluriel, sites d'exécution, donc, avec un S. Dean Manning a
21 été un membre de l'équipe et il a dit que ces douilles --
22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, non, je vous arrête. Ecoutez ma
23 question. Vous nous avez dit que des douilles ont été retrouvées dans des
24 fosses secondaires ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai dit, et je vais le
26 répéter, en effet. Des douilles ont été retrouvées aux sites d'exécution à
27 la surface. Ces douilles ont par la suite été comparées avec celles qu'on a
28 trouvées parmi les corps ensevelis dans des fosses communes primaires. Et
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1 lorsqu'on a retrouvé des fosses communes secondaires, les douilles qui ont
2 été trouvées à l'intérieur de ces fosses secondaires ont été comparées avec
3 les autres, ce qui nous a permis d'établir un lien entre les fosses
4 secondaires et les fosses primaires, et ce, du fait de la façon dont les
5 exécutions ont été effectuées. Ces douilles ont parfois pu être retrouvées
6 dans la bouche de certaines dépouilles.
7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Mais je crois que vous avez
8 quelque peu modifié votre témoignage. Vous êtes en train de nous dire que
9 ces douilles ont par la suite été comparées avec celles qui ont été
10 retrouvées parmi les corps situés dans les fosses primaires.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ma question était celle de savoir :
13 ces douilles que vous avez trouvées dans les fosses secondaires, est-ce
14 qu'elles ont été retrouvées dans les corps ou est-ce que ça a été retrouvé
15 dans les fosses ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Ça a été mélangé avec la terre, les parties de
17 corps, enfin, tout ce qui a été retrouvé dans des sites secondaires.
18 Lorsque des machines lourdes, du matériel, des engins lourds récupèrent ces
19 corps, eh bien, ils prennent tout. Ils prennent les cadavres, la terre et
20 tout ce qui s'y trouve. On a vu un film au niveau de ce site secondaire de
21 Cancari numéro 2 [comme interprété] et une personne qui utilise un
22 détecteur à métal fait entendre le bip, bip, bip. Ça voulait dire qu'il y
23 avait des douilles dedans.
24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Maintenant je comprends.
25 M. McCLOSKEY : [interprétation] Le malentendu vient peut-être du mot
26 douille. C'est une référence qui est faite à titre informel. Je pense qu'il
27 faudrait peut-être demander au témoin d'apporter un éclaircissement.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être le témoin pourrait-il
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1 expliquer, mais je voudrais faire un résumé de ce que je pense que cela
2 pourrait être.
3 Cette douille c'est la partie métallique du reste de la balle qui avait
4 contenu un explosif de propulsion qui fait que la balle, en tant que telle,
5 quitte sa douille et sort de l'arme pour tomber quelque part non loin de
6 l'endroit où se trouvait l'arme qui a tiré ce coup de feu. Donc, c'est la
7 façon dont je comprends la chose.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est la même chose.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Nous sommes tous d'accord. M. Lukic
10 est d'accord aussi. Donc je crois qu'il n'y a plus de contestation à ce
11 sujet. Continuons.
12 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
13 Q. Essayons maintenant de nous déplacer mentalement vers Potocari, et je
14 sais que vous n'avez pas été vous-même là-bas. Il est venu un convoi
15 médical de la FORPRONU à Potocari pour transporter les blessés. Est-ce que
16 vous saviez cela ?
17 R. Oui, cela est tout à fait exact.
18 Q. Est-ce que les renseignements que vous avez recueillis vous permettent
19 de dire que ce sont des gens qui sont présentement vivants?
20 R. Oui.
21 Q. Et est-ce que vous avez appris aussi que certaines personnes blessées
22 ont également été évacuées depuis Bratunac, et ce, par les soins des
23 membres de la Croix-Rouge internationale ?
24 R. Je ne suis pas au courant de cela. Je ne m'en souviens pas.
25 Q. Bien. Je vais à présent vous poser des questions au sujet de civils qui
26 s'étaient trouvés à Potocari avant que d'être arrivés sur un territoire
27 contrôlé par l'ABiH. Il y a un groupe qui va de Srebrenica vers Potocari et
28 un deuxième groupe, où se trouvaient des membres de la 28e Division, en
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1 majeure partie d'ailleurs, qui s'est dirigé vers Tuzla.
2 Ma question -- vous y avez déjà répondu, la première des questions, vous ne
3 saviez pas combien au juste il y avait eu de gens à Potocari. Maintenant,
4 je voudrais à titre complémentaire vous demander si vous saviez combien de
5 ces gens à Potocari se trouvaient être des hommes ?
6 R. Pour ce qui est d'avoir un chiffre précis, une fois de plus, je ne
7 pense pas pouvoir vous le dire. Je me souviens qu'il y avait eu une
8 estimation de formulée, mais je n'arrive pas à m'en souvenir. Nous pouvons
9 voir des chiffres, les quantités, sur les photos ou clips vidéo de
10 Potocari, mais je ne me souviens pas quelles étaient les évaluations.
11 Certaines évaluations ont été faites par les effectifs du Bataillon des
12 Nations Unies, mais je ne m'en souviens pas avec précision.
13 Q. Je l'accepte parfaitement. Je voulais juste savoir si vous aviez la
14 donnée afférente. Maintenant, ce que je vais vous demander, c'est de savoir
15 si vous êtes au courant du nombre d'hommes que l'on a séparés du reste à
16 Potocari ?
17 R. A la ligne de séparation, personne n'a compté, personne n'a su le
18 chiffre exact. Ceux qu'on voit sur les vidéos sont des gens qui sont sur la
19 liste des personnes disparues, et on les a identifiés par leurs noms.
20 Q. Combien de ces personnes qu'on a vues sur la vidéo se trouvent donc
21 être identifiées par leurs noms ? Est-ce que vous êtes à même de nous dire
22 cela ?
23 R. Il va y avoir un aspect spécifique qui sera abordé par l'Accusation. Au
24 niveau de l'enregistrement, le V-550, je sais qu'on y voit une vingtaine de
25 personnes et je sais que ces 20 sont identifiées. Je ne sais pas vous dire
26 s'il y en a eu davantage encore.
27 Q. Merci. Vous nous avez dit que vous pensiez que la seule façon valable
28 de procéder pour ce qui est des personnes disparues, c'est de procéder à
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1 toutes les exhumations et compter les corps. Ma question est celle-ci :
2 est-il exact de dire qu'un grand nombre de ces fosses secondaires, telles
3 que vous les qualifiez, se trouvent à proximité immédiate des lieux par
4 lesquels est passée cette colonne ?
5 R. C'est ce qu'on pourrait dire, oui.
6 Q. Dans la tâche que vous avez effectuée, avez-vous pu déterminer de façon
7 précise combien d'individus l'on a fusillés pour sûr ?
8 R. Je ne dispose pas du chiffre précis à présent. Ce chiffre a évolué
9 suite aux exhumations, qui durent encore. Mais pour ce qui est des
10 exhumations effectuées par le TPIY, d'après l'information dont je dispose,
11 ils sont 6 000 et plus avoir été identifiés où l'on peut établir un lien
12 entre les fosses et des lieux d'exécution.
13 Q. Puisque nous venons d'apprendre que vous n'êtes pas un expert en
14 matière de pathologie, par exemple, qui est-ce qui vous a fourni le
15 renseignement qui exclut la possibilité d'avoir ces 6 000 individus à ne
16 pas pouvoir être considérés comme étant tombés au combat mais comme étant
17 des personnes qui ont été exécutées ?
18 R. Eh bien, c'est grâce au processus que nous avons décrit. Je répète,
19 grâce au processus que nous avons décrit. D'abord, sur la base des
20 dépositions des témoins, nous avons trouvé les sites de détention puis
21 ensuite les sites d'exécution, et puis après, avec l'analyse médico-légale
22 qui a été mise au point par la suite, nous avons établi le lien avec ces
23 fosses communes primaires puis avec les fosses communes secondaires. Donc,
24 là, je peux vous dire en fait qu'il ne s'agissait pas -- il y a un fil
25 d'Ariane en quelque sorte. Je peux vous le dire, en fait, et puis il y a
26 surtout le fait que cela ne peut pas être à la suite de blessures lors des
27 combats. Il y a des liens qui ont été établis. Mais bon, il appartient au
28 responsable ou aux deux responsables chargés des exhumations d'expliquer
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1 pourquoi ces corps ne sont pas des corps de personnes victimes des combats.
2 Q. Fort bien. Alors, je leur poserai cette question. Mais finalement, les
3 civils de Potocari ont dû aller à pied depuis la partie serbe jusqu'à la
4 partie musulmane. Est-ce que dans le cadre de votre enquête vous avez pu
5 vous rendre compte que ce secteur par lequel sont passés les civils
6 correspondait à un "no man's land" ? Personne ne pouvait le franchir,
7 d'ailleurs, quand je dis "personne", qu'il s'agisse des Serbes ou des
8 Musulmans ?
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelle est la question ? Nous, les
10 Juges, essayons de comprendre la pertinence, et parfois je dois dire que
11 cela nous échappe. Qu'est-ce que vous essayez de déterminer, Maître Lukic ?
12 M. LUKIC : [interprétation] Parfois il a été dit qu'il y avait eu un
13 harcèlement, certes, de la population civile, mais que ni les Serbes ni les
14 Musulmans n'avaient eu besoin de faire passer ces personnes par ce secteur.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que vous suggérez qu'une
16 fois qu'ils pouvaient se déplacer, ils pouvaient aller dans n'importe
17 laquelle direction ? Je suis un peu perdu --
18 M. LUKIC : [interprétation] Non, non, non. En fait, est-ce que cela a été
19 fait à dessein pour maltraiter, pour faire subir à la population civile des
20 sévices ? Cela a été fait tout simplement parce qu'il n'y avait pas
21 d'autres moyens de transport pour aller de l'autre côté. Ils ont dû
22 marcher.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais qu'est-ce que cela indique à
24 la Chambre ?
25 M. LUKIC : [interprétation] Que cela n'a pas été fait à dessein pour
26 harceler la population civile, pour lui faire subir des sévices.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, moi, je continue à ne pas
28 comprendre, mais posez votre question. Nous verrons bien ce que seront vos
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1 questions de suivi.
2 M. LUKIC : [interprétation]
3 Q. Dans le cadre de votre enquête, est-ce que vous avez obtenu des
4 informations indiquant qu'il y avait un champ de mines entre les lignes de
5 confrontation ?
6 R. Oui, oui. Comme dans le cas de toutes les lignes de confrontation
7 pendant cette guerre, oui.
8 Q. A votre avis, est-ce que les autocars serbes pouvaient traverser ce
9 tronçon de route que les civils ont dû franchir à pied lorsqu'ils se
10 rendaient à Kladanj ?
11 R. Non. Enfin, ce que je veux dire, c'est que c'était logique qu'on les
12 ait faits sortir avant la ligne de confrontation. Et je peux vous dire que
13 le 12 juillet, il y a eu à nouveau une séparation des hommes qui se sont
14 retrouvés dans une petite école à Luka. Et ceux qui ont eu le droit de
15 franchir, ils l'ont fait à pied, oui. Ça, c'est une situation normale -
16 enfin, normale - normale au vu des circonstances.
17 Q. Le 12 juillet, il y avait des membres du Bataillon néerlandais avec les
18 civils dans la colonne, n'est-ce pas ?
19 R. Au début, d'après ce que je sais, effectivement, les représentants des
20 Nations Unies ont essayé d'accompagner les autocars. Il y en a même
21 quelques-uns qui ont franchi la ligne. Les autres, autant que j'en sache,
22 on leur a saisi leurs véhicules et leur matériel, donc ils n'ont pas pu
23 ensuite superviser cela. Il y avait des barrages routiers qui avaient été
24 érigés ici et là le long de la route, mais il n'y a pas eu véritablement de
25 supervision ou de contrôle de la situation par les forces des Nations
26 Unies.
27 Q. Si je ne me trompe, il me semble qu'aujourd'hui nous avions dit que
28 nous allions parler de la colonne militaire. Alors, est-ce que vous avez
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1 obtenu des informations qui vous auraient permis de comprendre combien de
2 personnes armées faisaient partie de la colonne par opposition aux autres
3 qui se trouvaient dans la colonne ?
4 R. Etant donné qu'il s'agit d'une estimation très approximative, ce que je
5 dis en règle générale, c'est qu'un tiers de cette colonne composée de
6 quelque 50 000 [comme interprété] personnes était armé. Nous voyons sur les
7 extraits vidéo qu'il y a parmi ces hommes armés des civils qui ont
8 également des armes. Donc je dirais que cela correspond à un tiers d'après
9 plusieurs témoignages.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez fait référence à 15 000 ou à
11 50 000 ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] A 15 000.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est bien ce que je pensais.
14 M. LUKIC : [interprétation]
15 Q. Aujourd'hui, nous avons déterminé que la colonne avait essuyé des
16 pertes. Est-ce que vous avez été en mesure de déterminer quelles sont les
17 pertes au sein de la colonne qui ont été essuyées lors des combats ? Est-ce
18 que vous avez des informations à ce sujet, et qu'est-ce que cela indique ?
19 R. Alors -- mais je n'ai jamais essayé de compter les victimes tombées au
20 champ de bataille, parce qu'elles sont considérées comme des victimes
21 tombées pendant une bataille. Alors, à partir du moment où ces personnes ne
22 sont pas considérées comme étant victimes d'un crime, nous ne menons pas à
23 bien l'enquête, indépendamment de ce qui est arrivé à ces personnes dans la
24 forêt. Donc l'aspect militaire de cette opération n'était pas au centre de
25 l'enquête. Et nous considérons toutes ces personnes comme des victimes
26 légitimes tombées pendant une bataille.
27 Q. Donc, est-ce que vous avez essayé d'établir leur nombre ou non ? Si
28 vous ne l'avez pas fait, dites-nous-le ?
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1 R. Oui, je vous l'ai dit. Nous ne l'avons pas fait pour les raisons que je
2 viens d'avancer.
3 Q. Merci. Est-ce que vous avez pu au moins déterminer quelle partie de la
4 colonne a essuyé des pertes importantes ? Dois-je répéter ma question ? Je
5 vais la répéter.
6 Le long de cet itinéraire emprunté, est-ce que vous avez pu déterminer les
7 lieux où la colonne a essuyé des pertes ?
8 R. Alors, dans le cadre de l'enquête, les pertes principales ont été
9 essuyées lors de la première embuscade qui a eu lieu dans la zone qui se
10 trouvait au-dessus de Kravica. Et cela, nous l'avons déterminé dans le
11 cadre de l'enquête, parce que c'est le lendemain matin qu'il y a eu cette
12 reddition importante.
13 Pour ce qui est de la dimension militaire de la colonne, comme vous le
14 savez, il y a eu séparation de cette colonne pour qu'elle puisse aller vers
15 Zvornik. Il y a eu une pseudo-tentative d'attaquer Zvornik, mais cela n'a
16 absolument pas fait l'objet d'enquête parce que cela fait partie du volet
17 militaire de cet événement et cela ne s'inscrivait pas dans le cadre de
18 l'enquête criminelle.
19 Q. Lorsque vous avez interrogé des témoins, est-ce que vous avez obtenu
20 des informations suivant lesquelles la colonne avait déjà essuyé des pertes
21 importantes à Kamenica ?
22 R. Oui. C'est justement le lieu où s'est produite l'embuscade en question.
23 Kamenica se trouve près de Kravica, mais derrière la colline.
24 Q. Est-ce que vous vous souvenez maintenant de ce que vous ont dit les
25 témoins que vous avez interrogés à propos du nombre de victimes ? Est-ce
26 qu'il est vrai que le nombre de victimes se situe entre 1 000 et 2 000 ?
27 R. Je ne pense pas que cela corresponde aux conclusions de l'équipe
28 norvégienne que j'ai évoquée il y a une heure, mais une fois de plus,
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1 toutes ces personnes qui ont été tuées dans ce secteur, y compris --
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ruez, excusez-moi, je vous
3 interromps. Mais la question a été posée comme suit : est-ce que ce que
4 vous ont relaté les témoins contredit -- la question portait sur, en fait,
5 ce que vous ont dit les témoins. Alors, pour ce qui est de savoir si cela
6 contredit les éléments de preuve, ça, c'est une autre histoire. Alors,
7 peut-être que vous pourriez réfléchir à cela, mais vous êtes ici un témoin
8 qui vient déposer sur les faits et on vous pose une question à propos de ce
9 que les témoins vous ont dit à propos d'un chiffre compris entre 1 000 et 2
10 000.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je ne peux ni confirmer ni infirmer ce
12 que le témoin a dit.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.
14 M. LUKIC : [interprétation]
15 Q. Est-ce que les témoins vous ont également relaté ce qui s'était passé,
16 à savoir ces deux embuscades au niveau du mont Udrc ?
17 R. Une fois de plus, ce qui s'est passé entre le 11 à minuit au 16 le long
18 de l'itinéraire emprunté par cette colonne ne s'inscrivait pas dans le
19 cadre de notre enquête. Mais, oui, Udrc a été un carrefour différent.
20 Q. Vous avez mentionné le combat --
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi, mais la question était très
22 simple, est-ce qu'ils vous ont parlé d'embuscades au niveau du mont Udrc,
23 alors qu'il était difficile ou non de passer par là. Est-ce qu'ils vous ont
24 parlé d'embuscades à cet endroit-là ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] D'embuscades, non. Mais ils m'ont dit qu'il
26 était difficile de passer par là, de franchir cela.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
28 M. LUKIC : [interprétation]
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1 Q. Est-ce qu'ils vous ont peut-être dit quelles étaient les pertes qu'ils
2 ont essuyées à cet endroit qui était si difficile de franchir ?
3 R. Non.
4 Q. Merci. Vous nous avez également dit que vous ne saviez pas quelles
5 avaient été les pertes lors de cette attaque importante contre Zvornik,
6 bien qu'il y ait eu de lourds combats qui aient eu lieu à cet endroit. Vous
7 le savez, cela, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur McCloskey.
10 M. McCLOSKEY : [interprétation] Il se peut qu'il s'agisse d'une question de
11 traduction, mais je ne pense pas qu'il ait été question d'une attaque
12 contre Zvornik.
13 M. LUKIC : [aucune interprétation]
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais ça, ce fut un mouvement pour faire
15 diversion, mais cela fait partie de la situation militaire --
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que Me Lukic pourrait répéter ce
17 qu'il a dit après l'intervention de M. McCloskey, car M. McCloskey a dit :
18 "Je ne pense pas que cela fasse partie des faits, en fait, ce pseudo" --
19 M. LUKIC : [interprétation] Moi, j'ai parlé d'une "pseudo-attaque", et le
20 témoin a dit qu'il s'agissait d'une "diversion".
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, c'est tout à fait cela. C'était une
22 diversion.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais en fait, cela est très éloigné de la
25 situation ou n'a rien à voir avec ce dont nous parlons.
26 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
27 M. LUKIC : [aucune interprétation]
28 L'INTERPRÈTE : Les interprètes indiquent qu'ils ont des difficultés à
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1 entendre Me Lukic, et la différence en B/C/S entre les deux mots ne tient
2 qu'à une lettre --
3 M. LUKIC : [interprétation]
4 Q. Donc, il y a également eu des combats au niveau de la ligne de
5 séparation à proprement parler et autour de cette ligne lorsque la colonne
6 est passée sur le territoire qui était sous le contrôle de l'ABiH, n'est-ce
7 pas ? Là, il y a eu des combats ?
8 R. Oui.
9 Q. La Brigade de Zvornik, elle, à cette occasion, a essuyé de lourdes
10 pertes, ou plutôt, des pertes beaucoup plus lourdes que celles qu'elle a
11 essuyées pendant toute la guerre ?
12 R. C'est ce que j'ai entendu, effectivement.
13 Q. Mon confrère m'indique qu'il faut que j'insiste sur le fait qu'il
14 s'agit de la Brigade de Zvornik de l'armée de la Republika Srpska.
15 Vous savez ce que signifie le nettoyage ou l'assainissement du terrain,
16 n'est-ce pas ?
17 R. Oui, oui.
18 Q. Cela signifie que l'on récupère les cadavres après un combat quel qu'il
19 soit, d'ailleurs ?
20 R. Oui.
21 Q. Et dans le cadre de cette démarche, l'armée enterre les morts. Est-ce
22 que l'armée enterrerait seulement ses morts ou est-ce qu'elle enterre
23 également les corps des ennemis ?
24 R. Ecoutez, je n'en sais rien. Je suppose que c'est une décision qui est
25 celle du commandant.
26 Q. Est-il exact que les corps, dans ce cas de figure, sont enterrés dans
27 une seule et même fosse ?
28 R. Oui, d'aucuns pourraient le penser.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, une fois de plus, j'essaie
2 de comprendre où vous voulez en venir. Est-ce que vous voulez tout
3 simplement demander au témoin s'il a mené à bien une enquête et si,
4 lorsqu'il a trouvé les fosses, l'enquête engagée aurait peut-être permis
5 d'en déduire que les corps auraient pu se retrouver là après qu'il y ait eu
6 nettoyage et assainissement du terrain ? Je ne peux pas imaginer, en fait,
7 que vous allez vous lancer dans une discussion très précise sur l'obus
8 [comme interprété] autour de la fosse commune. Il y a certainement beaucoup
9 de choses à dire, mais qu'est-ce que vous voulez déterminer au juste, pour
10 que tout soit bien clair ?
11 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
12 Q. Pouvez-vous répondre, je vous prie, à la question posée par le Juge
13 Orie.
14 R. Ecoutez, je sais que la seule option qui s'offre à vous est celle-ci, à
15 savoir avancer que ces personnes trouvées étaient des personnes mortes au
16 combat. Il appartient aux experts de dire que tel n'était pas le cas de
17 figure. Et je pourrais ajouter que si vous prenez en considération la
18 configuration du terrain, les distances, les dates, cette théorie, pour
19 moi, ne tient pas la route. Ce n'est pas vrai. Toutes ces enquêtes, toutes
20 les enquêtes scientifiques et médicolégales nous montrent de façon très,
21 très claire ce que fut le sort de ces prisonniers. Je pense en fait que
22 tout cela est très bien présenté, peut-être, mais je ne comprends pas
23 comment on peut dire que des personnes dont les yeux étaient bandés et qui
24 avaient les pieds et les poings liés pouvaient être des victimes de
25 bataille.
26 Q. Ce n'est pas ce que nous indiquons, en fait.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, que tout cela reste bref et
28 succinct. Dois-je comprendre de votre réponse, Monsieur Ruez, que sur la
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1 base des enquêtes établies, non seulement par vous mais par des collègues
2 et des experts, il y a de nombreux faits qui ont été déterminés et qui
3 contrediraient une explication de la situation comme étant des personnes
4 trouvées dans des fosses communes dont les cadavres ont été récupérés lors
5 de la procédure d'assainissement hygiénique du terrain ? En bref, est-ce
6 que c'est ce que vous essayez de nous dire ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est absolument exact, mais je parle
8 seulement des fosses dont il a été question pendant ces procès. Si d'autres
9 fosses sont présentées par d'autres sources, des sources bosniennes, par
10 exemple, cela n'a pas fait l'objet d'enquête --
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes.
12 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et je crois comprendre de votre réponse
14 que cela est valable seulement pour les fosses à propos desquelles vous
15 avez mené l'enquête.
16 Maître Lukic, est-ce que cela précise la situation pour vous ?
17 M. LUKIC : [interprétation] Oui, et je n'ai plus qu'une ou deux questions
18 de suivi.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je regarde également l'horloge.
20 Je pense que nous avons commencé avec un certain retard, mais pour nous
21 assurer d'avoir un peu de temps après, je vous serais reconnaissant de
22 poser vos deux questions de suivi, et ensuite nous pourrons prendre une
23 pause.
24 M. LUKIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.
25 Q. Vous mentionniez des bandeaux et des liens, mais qu'est-ce que votre
26 enquête a révélé ? Sur ces 6 000 personnes, qui est le chiffre que vous
27 avez mentionné, combien de personnes avaient leurs mains liées et leurs
28 yeux bandés ?
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1 R. Eh bien, je pense que les témoins experts qui vont venir ici pourront
2 répondre.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ne savez pas en tant que témoin si
4 ces témoins experts vont venir déposer. Mais ce que vous voulez dire, en
5 fait, c'est que vous préféreriez que ces questions soient posées aux
6 personnes qui ont mené à bien une enquête de façon détaillée sur ces
7 questions.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. Ou qui sont peut-être déjà
9 venus déposer. Voilà. Voilà ce que je m'autorise à dire. Parce que je ne
10 suis pas ce procès, hormis ma propre déposition.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous ne savez pas ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Ce que je veux dire --
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous ne connaissez pas le chiffre
14 qui vient de vous être demandé ? Vous ne connaissez pas cela ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous auriez pu tout simplement
17 répondre non depuis le début.
18 Poursuivez, Maître Lukic.
19 M. LUKIC : [interprétation]
20 Q. Est-ce que vous savez ou est-ce que vous avez pu déterminer lors de
21 votre enquête qu'il y avait des corps qui se trouvaient dans différents
22 états de décomposition et qui ont été trouvés dans la même fosse ?
23 R. Ce sont des détails que je ne connais pas, et je laisse aux experts le
24 soin de répondre à cela.
25 M. LUKIC : [interprétation] Voilà quelles étaient mes questions de suivi.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons faire une pause.
27 J'aimerais demander au témoin de bien vouloir sortir du prétoire.
28 [Le témoin quitte la barre]
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et, Maître Lukic, j'ai réfléchi, parce
2 qu'un peu plus tôt je vous avais dit que j'étais un peu perdu, mais je
3 comprends maintenant ce dont il était question. Une question fort simple
4 aurait pu être posée au témoin. Vous auriez pu lui dire : Monsieur, les
5 personnes qui ont dû marcher pour atteindre l'autre territoire, est-ce que
6 vous avez pu vous forger une opinion, est-ce que vous pensez qu'il
7 s'agissait d'un harcèlement ou est-ce que cela était inévitable, étant
8 donné qu'ils ont dû franchir un "no man's land" avec tous les risques que
9 cela comporte et du fait qu'ils n'étaient pas accompagnés par les soldats ?
10 Alors, là, j'aurais compris ce à quoi vous vouliez en venir.
11 Parce qu'en fait, nous devons nous décider sur la base des éléments de
12 preuve qui sont présentés, donc plus ces éléments de preuve sont clairs,
13 plus nous seront à même de les évaluer.
14 Nous allons faire une pause jusqu'à 13 heures 45.
15 --- L'audience est suspendue à 13 heures 26.
16 --- L'audience est reprise à 13 heures 48.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pendant que nous attendons que l'on
18 fasse entrer le témoin dans la salle d'audience, je souhaite soulever la
19 question suivante. Le 23 avril, la Défense a déposé une requête demandant
20 une prorogation du délai pour déposer sa notification en vertu de l'article
21 94 bis (B) en réponse à la notification déposée par l'Accusation le 28 mars
22 2013 relative à la communication du rapport de l'expert, le Dr Helge
23 Brunborg. Dans la requête, il est indiqué que l'expert de la Défense est
24 toujours en train d'analyser la documentation fournie par l'Accusation, et
25 on ajoute, par ailleurs, que la traduction en B/C/S des deux croquis
26 accompagnant le rapport de l'expert n'a pas encore été remise.
27 Est-ce que cela vous pose des problèmes, Monsieur McCloskey, si nous
28 faisons droit à cette requête, et à quel moment pensez-vous que la version
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1 en B/C/S du document sera remise à la Défense ?
2 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, lorsque j'ai posé la
3 question à Me Lukic, il m'a cité le nombre exact de tableaux en question.
4 Nous l'avons envoyé au service de traduction il y a quelques jours et nous
5 nous attendons à ce que la traduction arrive d'un jour à l'autre. Donc cela
6 ne devrait pas poser un problème.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A ce moment-là, je propose que les Juges
8 de la Chambre fassent droit à la requête de la Défense. Nous fixons le
9 délai provisoirement dans l'attente de la documentation traduite vers le
10 B/C/S, donc nous le fixons provisoirement pour le 14 mai. Et s'il arrive
11 quelque chose d'imprévu, bien sûr, vous pouvez de nouveau vous adresser à
12 la Chambre. Mais le 14 mai, vous devez répondre en vertu de l'article 94
13 bis (B).
14 [Le témoin vient à la barre]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez maintenant poursuivre.
16 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
17 Q. Monsieur Ruez, vous avez évoqué tout à l'heure des Norvégiens. Savez-
18 vous combien de corps ils ont retrouvé au total et dans quelle région ?
19 R. Ils ont fait leurs travaux dans la région de Kamenica. Je ne sais pas
20 combien de corps ont été recueillis. Tout ce que je peux vous dire, c'est
21 qu'un grand nombre de corps est resté sur place, puisque deux ans plus
22 tard, j'ai adressé une demande à la SFOR pour survoler la région en
23 hélicoptère et la SFOR a tourné un film où manifestement on répertoriait
24 des restes humains éparpillés dans la région. Donc tous les corps n'avaient
25 pas été ramassés ou recueillis par les Norvégiens.
26 Q. Et vous n'êtes pas capable de nous citer un chiffre approximatif quant
27 au nombre de ces corps récupérés par les Norvégiens ?
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez reprendre la dernière partie de
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1 votre question, Maître Lukic.
2 M. LUKIC : [interprétation]
3 Q. Pouvez-vous, donc, nous citer le nombre total de corps recueillis par
4 les Norvégiens et le nombre total de corps que vous avez vus ou que vous
5 avez découverts en survolant ce terrain par la suite ?
6 R. Je ne peux pas vous citer de chiffres. Nous n'avions pas de contact
7 avec cette autre équipe puisque leur mission était une mission humanitaire.
8 Cette région en général, la région où les combats ont eu lieu, sortait du
9 cadre de notre enquête.
10 Q. Vous n'êtes pas sans savoir que le 16 juillet, les forces musulmanes
11 ont lancé une attaque contre les forces serbes; ai-je raison de l'affirmer
12 ? Et s'agit-il d'un événement distinct par rapport à la percée de la ligne
13 effectuée par la 28e Division ?
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le 16 avril, mais de quelle année,
15 Maître Lukic ?
16 M. LUKIC : [interprétation] 1995.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que nous parlons du mois d'avril ou du
18 mois de juillet ?
19 M. LUKIC : [interprétation]
20 Q. C'est moi qui me suis trompé. Il s'agit du 16 juillet 1995.
21 R. Dans la zone de Nezuk, il y a eu une percée le 16. Enfin, ce n'était
22 pas une véritable percée puisque les lignes de défense serbes se sont
23 ouvertes pour laisser passer la colonne conformément à un accord qui avait
24 été passé entre les deux parties et dont je ne connais pas les détails.
25 Mais pour moi, tout ceci faisait partie de l'historique militaire de ces
26 événements, et non pas partie intégrante de notre enquête pénale, puisque
27 j'ai toutes les raisons de croire que les corps des personnes qui ont tombé
28 dans ces batailles ne se trouvaient pas dans les fosses communes sur
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1 lesquelles nous enquêtions.
2 Q. Et est-ce que vous excluez, là, toute possibilité d'une autre
3 interprétation ou est-ce que vous êtes en train de vous livrer à des
4 conjectures ?
5 R. J'exclus toute autre possibilité, et cela, pour trois raisons
6 différentes : d'abord, à cause de l'emplacement géographique des fosses que
7 nous avons découvertes; deuxièmement, à cause de dates que nous avons pu
8 identifier grâce à la documentation du Bataillon de génie de la Brigade de
9 Zvornik; et finalement, à cause de tous les éléments issus de l'analyse
10 médico-légale. Donc, pour ces trois raisons, je pense que les sites au
11 sujet desquels nous présentons des moyens ici dans la salle d'audience ne
12 sont pas liés aux enterrements des combattants qui sont arrivés à un moment
13 ou à un autre dans cette région.
14 Q. Oui. L'aspect géographique que vous avez évoqué, ce n'est quelque chose
15 d'insurmontable, on peut se servir de moyens de transport pour surmonter la
16 difficulté. N'ai-je pas raison de le
17 dire ? Et de toute façon, cette objection ne tient pas debout quand nous
18 nous penchons sur les fosses secondaires ?
19 R. De toute façon, les fosses secondaires doivent être envisagées
20 séparément. Mais prenons, par exemple, Lazete. Les témoins disent que les
21 exécutions ont eu lieu au cours de la nuit en se servant des engins lourds
22 et qu'une partie de la fosse avait déjà été recouverte de terre. Donc la
23 seule idée que ces corps pouvaient être les mêmes corps qui ont été trouvés
24 à Nezuk, eh bien, pour moi, c'est une idée nébuleuse. Et je ne pense pas
25 qu'elle mérite même une réponse.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, dans sa déposition - et je
27 l'ai rappelé aussi à l'Accusation à plusieurs reprises - ce témoin est
28 censé se concentrer sur les faits et les choses qu'il a trouvées au cours
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1 de son enquête plutôt que sur les conclusions qu'il a pu tirer.
2 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que toutes mes questions sont posées
3 sous cette réserve. Je pose toujours au témoin la question de savoir s'il
4 avance des suppositions, et je lui ai posé cette question au début de mon
5 interrogation précédente. Je lui ai indiqué : Je veux que vous me fassiez
6 part des résultats de votre enquête. Mais je passe à une autre question.
7 Q. Monsieur Ruez, pendant votre enquête, avez-vous découvert que 1 000
8 soldats de Srebrenica ont réussi à se frayer le chemin jusqu'à Zepa pour
9 passer en Serbie, ou est-ce que vous n'êtes pas du tout au courant de ce
10 fait ?
11 R. Ces 1 000 soldats n'ont pas été retrouvés dans les fosses liées à la
12 capture et l'assassinat des prisonniers. La seule chose qui nous
13 intéressait, qui m'intéressait moi et qui intéressait l'Accusation, et qui
14 était liée à ces déplacements de population vers Zepa, c'est le fait que
15 l'un des survivants de l'entrepôt de Kravica a réussi à s'enfuir jusqu'à
16 Zepa. Et c'est la raison pour laquelle il a survécu, parce que quand il a
17 été capturé à Zepa, on n'a pas compris qu'il venait de Srebrenica et plus
18 tard il a été échangé, au mois de mars 1996.
19 Q. En somme, la réponse serait celle de dire : "Nous ne nous sommes pas
20 penchés dessus" ?
21 R. Ça sort complètement du cadre de l'enquête criminelle.
22 Q. Merci. Est-ce que vous vous êtes occupé des conflits qui sont survenus
23 entre une partie de la colonne et l'autre partie de la colonne sans pour
24 autant qu'ils sachent les uns et les autres qu'ils faisaient, tant les uns
25 que les autres, partie d'une seule et même colonne ?
26 R. Non. On les a comptés parmi les victimes des combats.
27 Q. Mais comment ?
28 R. [aucune interprétation]
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1 Q. Comment faites-vous cette distinction ? Comment doit-elle être faite,
2 selon vous ? Mis à part les 400 et quelques qui portent des attaches sur
3 les poignets, comment faites-vous la différence ou la distinction entre
4 ceux qui sont tombés au combat et ceux qui ont été exécutés ?
5 R. Une fois de plus, je dois dire que le cheminement qui commence à partir
6 du moment où une personne a été capturée ou s'est rendue puis va vers un
7 lieu de détention, puis ensuite est conduite vers un site d'exécution, puis
8 il y a enterrement et il y a les constatations médico-légistes [phon] à ce
9 sujet. Donc les dates auxquelles on a envoyé du matériel lourd pour
10 ensevelir ces corps, tout ceci exclut la possibilité de dire que les fosses
11 dont on est en train de parler sont des tombes qui comporteraient les
12 dépouilles de ceux qui sont tombés au combat et dont on aurait récupéré les
13 restes sur le terrain même dans le cadre de l'assainissement du terrain.
14 Q. On a déjà dit que vous avez eu recours à des experts dans des domaines
15 différents lors de vos enquêtes. Est-il exact de dire aussi que ces experts
16 du domaine des analyses médico-légales n'ont pas réussi de façon aussi
17 certaine à affirmer et dissocier ceux qui sont tombés au combat de ceux qui
18 ont été exécutés ?
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, je crois qu'ici il y a un
20 malentendu fondamental. Le témoin dit : Notre enquête s'est centrée sur les
21 gens, en termes simples, qu'on a retrouvés dans des fosses communes. Il
22 s'agit de groupes de gens qui s'étaient rendus ou qui ont été capturés et
23 qui ont été emmenés à tel et tel endroits, et cetera. Maintenant, vous
24 dites que les experts en médecine légale n'ont pas été capables de faire la
25 distinction entre ceux qui ont été tués au combat et ceux qui -- d'après
26 les liens qu'on a retrouvés ou les autres éléments qui constituent des
27 indices, disent autre chose. Alors, vous faites référence à un groupe qui a
28 fait partie de l'enquête. Le témoin, lui, il nous a dit, et c'est ainsi que
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1 les choses ont commencé, que ceux qui sont tombés dans la colonne et qui ne
2 se sont pas rendus, indépendamment de ce qui a pu se passer, indépendamment
3 du fait de savoir si c'était fait à tort ou à raison, que ça a été
4 considéré comme étant des victimes de combat. Alors, en termes pratiques,
5 le fait de savoir si c'est le cas ou pas, c'est ainsi qu'on les a
6 qualifiés.
7 Le témoin a ensuite dit que partant de l'enquête en question, il a
8 déterminé que ceci devait être exclu pour de bonnes ou de mauvaises raisons
9 à investiguer plus en avant, mais que les gens qu'on a retrouvés dans les
10 fosses communes ont été amenés là dans le cadre de mesures
11 d'assainissement. Alors, si vous êtes tué avant que vous ne vous rendiez ou
12 que vous soyez capturé, il faut qu'on vous retrouve quelque part. Et il
13 nous a expliqué pourquoi il considérait comme étant peu probable que
14 c'était là les gens dans les fosses communes au sujet desquelles il a
15 conduit son enquête.
16 Donc le récit fourni donne la réponse à la question, enfin on va voir
17 ce que M. Ruez nous dira, quand bien même, et là vous parlez de
18 pathologistes ou de médecins légistes. Enfin, il y a bien des gens qui
19 s'occupent de médecine légale, et ils ont, semble-t-il, examiné des corps
20 qui ont été retrouvés quelque part, et partant de leur expertise, ils n'ont
21 pas été capables de déterminer qu'il s'agissait là de victimes tombées au
22 combat ou pas. Par conséquent, on ne peut pas se fonder sur eux et leurs
23 conclusions pour tirer nos propres conclusions, et j'ai cru comprendre
24 d'après ce que M. Ruez nous a dit que les conclusions étant tirées à tort
25 ou à juste titre partant d'autres sources, témoignages et autres, sont
26 celles qu'il a tirées indépendamment de ce que les médecins légistes ont pu
27 retrouver dans les fosses communes. Parce que ceci est, d'après les
28 explications apportées par M. Ruez, une chose que l'on ne pourrait être
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1 considéré comme étant des gens ayant fait partie de la colonne. Par
2 conséquent, je ne vois pas comment ces deux choses-là pourraient être
3 mélangées les unes aux autres.
4 M. LUKIC : [interprétation] Je ne sais pas si je suis en train de mélanger
5 les choses --
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais alors, posez une question claire
7 pour bien indiquer qu'il n'y a pas de confusion ou de mélange des choses.
8 Parce que les victimes de la colonne ne sont pas des corps qui, d'après
9 l'opinion de M. Ruez, seraient ceux de personnes qu'on a retrouvées dans
10 les fosses où il a enquêté. Ce sont deux différentes catégories.
11 Monsieur Ruez, est-ce que je vous ai bien compris ou mal compris ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. C'est un résumé tout à fait
13 parfait de ce que j'ai dit.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Enfin, je ne suis pas ici pour
15 faire des résumés de témoignage, mais, Maître Lukic, je vous demande de
16 poser votre question.
17 M. LUKIC : [interprétation] Puis-je expliquer ce que je suis en train de
18 faire ?
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, si vous posez les bonnes
20 questions, je ne serais pas ici à intervenir, mais à vous de choisir vos
21 questions…
22 M. LUKIC : [interprétation]
23 Q. Ma question à moi est celle de dire : comment se peut-il que dans les
24 fosses secondaires - nous ne parlons pas de fosses primaires, je parle de
25 fosses secondaires - comment se peut-il que l'on soit certain que l'on n'y
26 retrouve pas des corps de personnes qui ont été tuées dans des combats ?
27 R. J'insiste une fois de plus sur le fait que l'on aura un expert qui
28 parlera dans le détail de tout ce qui fait partie de la médecine légale
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1 pour confirmer que les corps des fosses secondaires sont venus des fosses
2 primaires qui ont été remuées en septembre et début octobre 1995. Par
3 conséquent, si l'on compare ce qui restait dans la fosse primaire et ce que
4 l'on a retrouvé dans les fosses secondaires, on a une quantité définitive
5 de personnes exécutées dans chaque site d'exécution que nous avons parcouru
6 à l'occasion de mon témoignage au principal.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, faisons les choses courtes. Si
8 j'ai bien compris votre réponse, vous avez appris de la bouche d'experts
9 qu'ils seraient à même d'expliquer pourquoi ce type de conclusion peut être
10 tirée. C'est simple --
11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ainsi qu'on peut le dire.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Lukic.
13 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
14 Q. Nous allons attendre ces experts. Et je vais vous poser, pour ma part,
15 des questions au sujet des documents d'identification. Alors, est-il exact
16 d'affirmer que vous et les membres de votre équipe d'enquête avez conclu
17 que la plupart des soldats, membres de la 28e Division de Srebrenica,
18 avaient rejeté tous les objets qui étaient censés les identifier comme
19 étant des hommes faisant partie des effectifs de combat ?
20 R. Non, non. Cela n'a pas fait l'objet d'enquête. Bon, il y en a, très
21 certainement, certains qui ont fait cela pour une raison ou une autre, mais
22 cela n'a pas fait l'objet de notre enquête. Et une fois de plus, en fait,
23 si les prisonniers sont des militaires ou des civils, le fait est qu'ils
24 sont des prisonniers.
25 Q. Alors, je vais essayer de vous rappeler quelque chose.
26 M. LUKIC : [interprétation] Document 1D858 dans le système e-court. Donc
27 1D858, et nous avons besoin de la page 48. Lignes 19 à 25 -- non, en fait,
28 jusqu'à 23, 19 à 23, et je cite :
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1 "Question : Monsieur, à propos de ces cartes d'identité, n'est-il pas exact
2 que vous, dans le cadre de votre enquête, ou que vous, en tant qu'enquêteur
3 qui dirigez cette équipe, avez conclu, et je cite : 'la plupart des soldats
4 se sont débarrassés de tout élément qui aurait pu les identifier en tant
5 que combattants,' est-ce exact ?
6 "Réponse : Oui, c'est exact."
7 R. Oui, mais ce n'est pas seulement l'œuvre de militaires. Je pense que
8 d'autres l'ont fait également. Je ne vais pas entrer dans les détails à ce
9 sujet, mais dans certains cas il y a plusieurs cartes d'identité qui ont
10 été retrouvées, cachées dans un endroit où personne n'aurait pu les
11 retrouver. Alors, ne pas être identifié était véritablement le souci majeur
12 de ces hommes qui fuyaient. Et s'ils fuyaient, c'est qu'ils avaient des
13 raisons de fuir; parfois parce qu'ils étaient des combattants, parfois
14 parce qu'ils étaient pétrifiés de peur du fait de leur expérience
15 précédente en 1992, et cetera, et cetera. Donc, en fin de compte, c'est
16 l'ADN qui est intéressant pour nous et qui va nous permettre d'identifier
17 les personnes, et ce, compte tenu du livre sur les personnes portées
18 disparues du CICR.
19 Q. Mais l'analyse ADN, je ne sais pas si vos collègues vous en ont parlé,
20 mais cette analyse ADN ne permet pas de déterminer la cause du décès, elle
21 ne permet que d'identifier l'identité de la personne.
22 R. Oui, oui, tout à fait. Et comme vous le savez, la cause du décès est
23 toujours blessures multiples par balle. Ce qui, effectivement, rend la
24 tâche très difficile lorsqu'on essaie de mettre en parallèle ou de
25 déterminer si cette personne a été tuée au combat ou tuée par un peloton
26 d'exécution, par exemple, et une fois de plus, il y a toute la chronologie
27 de ces personnes qui est telle qu'il y a une différence entre quelqu'un qui
28 est assassiné et quelqu'un qui meurt, qui tombe au champ d'honneur.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ruez, lorsque Me Lukic vous a
2 posé la question, il vous a demandé si le type chargé de l'enquête était
3 parvenu à la conclusion suivant laquelle la plupart des soldats, membres de
4 la 28e Division à Srebrenica, s'étaient débarrassés de tous les objets qu
5 auraient pu permettre de les identifier en tant que combattants, vous avez
6 répondu "Non" et vous avez expliqué d'ailleurs pourquoi vous répondiez de
7 la sorte. Alors, maintenant, il y a une partie de votre déposition qui vous
8 a été présentée, c'est exactement les mêmes formules qui sont utilisées,
9 vous avez répondu "Oui, c'est exact", et puis ensuite vous vous êtes lancé
10 dans d'autres explications. Ce qui me semble être contradictoire. Il se
11 peut peut-être que vous auriez souhaité fournir de plus amples
12 renseignements ou étoffer un peu vos explications, mais au moins ce que
13 vous venez de dire aujourd'hui est tout à fait opposé à ce que vous avez
14 dit dans une autre affaire et vous avez répondu par "Oui".
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord. Si vous lisez ma
16 première réponse, j'ai dit "Non", et puis ensuite j'ai dit "Peut-être que
17 certains l'ont fait, et d'autres non," parce que je ne me concentrais pas
18 sur cet élément parce que pour moi --
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Ruez, puis-je vous
20 interrompre. Où se trouve cette première réponse ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. J'ai répondu "Non" --
22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais vous parlez de la déposition
23 d'aujourd'hui; c'est cela ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, la déposition d'aujourd'hui. Alors, si
25 l'on prend en considération la situation, la période, bon, il y a quelque
26 chose que je peux tout à fait comprendre, que d'aucuns peuvent comprendre,
27 une personne qui fuit l'armée serbe de Bosnie n'était pas forcément tout à
28 fait disposée à arborer son identité.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vais voir cela à nouveau. Une
2 petite seconde. Vous avez posé des questions à propos des conclusions de
3 l'enquête de l'équipe chargée de l'enquête.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous avez dit "Oui, c'est exact"
6 aujourd'hui, et ce n'est pas ce que vous aviez dit -- vous ne parlez pas de
7 ce qui s'est passé ou de ce qui ne s'est pas passé. On vous a posé une
8 question à propos des conclusions dégagées par l'équipe à l'époque. Il
9 avait été dit que la plupart des soldats s'étaient débarrassés de tous
10 objets qui auraient pu permettre leur identification en tant que
11 combattants. A l'époque, vous avez dit "Oui".
12 LE TÉMOIN : Hm-hm.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Que ce soit juste ou erroné, le fait est
14 que c'est la conclusion. Aujourd'hui vous avez dit "Non". Et vous avez
15 ajouté que beaucoup l'avait peut-être fait, mais vous avez réfuté que cela
16 était la conclusion de l'enquête. Vous avez expliqué que cela ne faisait
17 pas partie de l'enquête, mais cela contredit ce que vous avez affirmé dans
18 l'affaire précédente.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Parfait. Nous allons considérer cela comme une
20 contradiction. Je suis d'accord.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie. Maître Lukic, je vois
22 qu'il est 14 heures 15 passé.
23 Monsieur McCloskey, vous souhaitez intervenir.
24 M. McCLOSKEY : [interprétation] J'ai un problème logistique, Monsieur le
25 Président. Car je n'ai pas parlé à M. Ruez, je ne lui ai pas demandé s'il
26 pouvait revenir, et d'ailleurs je ne sais pas si vous avez une préférence
27 quant au moment où il devra revenir. Est-ce que Me Lukic a besoin de le
28 faire revenir ?
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1 M. LUKIC : [interprétation] J'ai moins d'une heure, je ne sais pas, une
2 demi-heure, une grosse demi-heure peut-être.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, là, au pied levé, je ne connais
4 pas par cœur le calendrier pour la semaine prochaine. Est-ce que nous
5 pourrions peut-être commencer mercredi par cette dernière demi-heure de
6 contre-interrogatoire ?
7 M. McCLOSKEY : [interprétation] Ecoutez, moi, je ne sais pas quel est le
8 programme prévu pour M. Ruez. Nous avons nos deux derniers soldats du
9 Bataillon néerlandais, un soldat deuxième clase et un général, et pour eux
10 il y a des interprètes néerlandais qui ont été prévus à une date précise.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, bon, il est plus que
12 probable que cela se fera plus tard.
13 M. LUKIC : [interprétation] Oui, lorsque cela convient au témoin et à
14 l'Accusation.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ruez, je sais que, bon, la
16 France ce n'est pas la porte à côté, mais est-ce que vous seriez disposé à
17 revenir et est-ce que vous pourriez communiquer, non pas avec l'Accusation,
18 mais avec la Section des Victimes et des Témoins, pour indiquer quand est-
19 ce que vous seriez disponible à nouveau pour leur indiquer également si
20 vous avez une préférence quant à la date qui sera retenue.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis à la disposition de la Défense dès que
22 nous pourrons prévoir une date avec la Section des Victimes et des Témoins,
23 il n'y aura aucun problème.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous pouvez le faire. Et il est
25 très probable que cela ne se passe pas la semaine prochaine parce que nous
26 n'avons pas d'audience les deux premiers jours, et puis ensuite nous avons
27 les interprètes néerlandais qui sont prévus.
28 Et je dois à nouveau, Monsieur Ruez, vous rappeler que vous ne devez parler
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1 à personne de votre déposition, que vous ne devez communiquer avec
2 personne, et vous pouvez maintenant suivre M. l'huissier. Et nous vous
3 reverrons prochainement.
4 [Le témoin quitte la barre]
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous d'autres questions à soulever
6 avant que nous ne levions l'audience ? Si tel n'est pas le cas, nous allons
7 lever l'audience. Je m'excuse auprès de toutes les personnes qui souffrent
8 de ce retard puisque nous terminons avec un petit retard. Nous nous
9 retrouverons mercredi, 1er mai, dans ce même prétoire à 9 heures 30.
10 --- L'audience est levée à 14 heures 21 et reprendra le mercredi 1er mai
11 2013, à 9 heures 30.
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