Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 17 mars 2014

  2   [Audience de Règle 98 bis]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 31.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans ce

  7   prétoire.

  8   Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Il s'agit

 10   de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

 12   Aujourd'hui nous allons entendre les arguments en vertu de l'article 98

 13   bis. L'article 98 bis prévoit que :

 14   "A la fin de la présentation des moyens à charge, la Chambre de première

 15   instance doit, par décision orale et après avoir entendu les arguments

 16   oraux des parties, prononcer l'acquittement de tout chef d'accusation pour

 17   lequel il n'y a pas d'éléments de preuve susceptibles de justifier une

 18   condamnation."

 19   La Défense a annoncé qu'elle souhaitait présenter des arguments, arguments

 20   oraux, en vertu de l'article 98 bis et a l'occasion de le faire maintenant.

 21   Monsieur Ivetic, c'est vous qui allez présenter ces arguments; c'est exact

 22   ?

 23   M. IVETIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez commencer, et je fais noter

 25   au compte rendu d'audience que Me Stojanovic en tant que co-conseil est

 26   présent dans le prétoire. Veuillez commencer, je vous prie.

 27   M. IVETIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Il me revient de

 28   présenter les arguments dans le cadre de l'article 98 bis au nom de la


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  1   Défense du général Ratko Mladic.

  2   D'emblée, je souhaite préciser que rien dans notre présentation

  3   d'aujourd'hui ou rien dans nos choix de sujets qui vont être abordés ne

  4   doit être interprété comme une quelconque concession ou aveu sur quelconque

  5   partie de la thèse de l'Accusation contre le général Mladic. Ce n'est pas -

  6   - parce que je ne vais pas aborder chaque élément de la thèse de

  7   l'Accusation aujourd'hui ne signifie pas qu'il faut sous-entendre que nous

  8   pensons que les éléments de preuve qu'ils ont présenté en l'espèce. En

  9   réalité, nous nous opposons à et nous rejetons les allégations de

 10   l'Accusation et la thèse qu'ils ont présentée dans leur totalité.

 11   Le général Mladic et son équipe de Défense se réjouissent de la

 12   présentation de leurs témoins et d'éléments de preuve lors de la

 13   présentation des moyens à décharge afin de réfuter chaque contrevérité et

 14   interprétation erronée qui ont été présentées par l'Accusation lors de la

 15   présentation de sa thèse. Le général Mladic croit en la vérité et que nous

 16   allons pouvoir vous présenter cette vérité, et une fois que cette vérité

 17   aura été présentée, nous pourrons démontrer son innocence. Lui et la

 18   Défense sont particulièrement attentifs et respectent le fait qu'il y ait

 19   eu des événements tout à fait regrettables qui ont été commis lors de la

 20   guerre de part et d'autre, qui ont fait subir des pertes aux personnes qui

 21   ont été touchées par tous ces événements lors des conflits, et nous avons

 22   une pensée pour toutes ces personnes qui ont été touchées par cela. Le

 23   général Mladic n'a jamais eu l'intention de faire commettre ces crimes, n'a

 24   pas non plus donné d'ordres à cet effet, et a agi à tout moment de façon

 25   honorable pour défendre son pays et son peuple.

 26   Messieurs les Juges, votre tâche à ce stade de l'article 98 bis

 27   consiste à purger l'acte d'accusation d'allégations qui ne sont étayées par

 28   aucun élément de preuve sur la base duquel vous pourriez condamner le


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  1   général Mladic. Les arguments de la Défense, en conséquence, portent sur

  2   des éléments précis et vont être divisés en quatre parties bien distinctes

  3   : tout d'abord, je vais aborder la question de l'interprétation et de

  4   l'application de l'article 98 bis et prôner une approche qui se fonde sur

  5   les accusations et qui a pour but d'infirmer l'objectif et le but de la

  6   disposition en question; deuxièmement, je vais apprécier les éléments de

  7   preuve présentés par l'Accusation pour ce qui est de la rivière Jadar,

  8   Sirokaca et l'annexe D de l'acte d'accusation, la destruction d'édifices

  9   religieux, et je vais démontrer que l'Accusation n'a pas fourni d'éléments

 10   de preuve susceptibles de justifier une condamnation eu égard à ces

 11   accusations; je vais ensuite parler des acteurs tiers; et je parlerai, pour

 12   finir, du génocide.

 13   Ainsi, la Défense vous invite, Messieurs les Juges, d'acquitter le général

 14   Mladic de ces allégations et permettre ainsi à la Défense de consacrer ses

 15   ressources à autre chose.

 16   L'article 98 bis déclare :

 17   "A la fin de la présentation des moyens à charge, la Chambre de première

 18   instance doit, par décision orale et après avoir entendu les arguments

 19   oraux des parties, prononcer l'acquittement de tout chef d'accusation pour

 20   lequel il n'y a pas d'éléments de preuve susceptibles de justifier une

 21   condamnation."

 22   C'est l'utilisation du terme "chef" qui a été associée par les Juges de la

 23   Chambre qui ont déterminé que des acquittements ne peuvent être prononcés

 24   que s'il s'agit de chefs entiers et non pas d'accusations individuelles.

 25   Une interprétation textuelle de l'article a été utilisée par les Juges de

 26   la Chambre et lesdites Chambres s'en sont tenues à ceci lorsqu'elles ont

 27   répondu aux arguments de la Défense qui demandait des acquittements sur des

 28   accusations individuelles qui faisaient partie des chefs. L'application de


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  1   l'article porte sur la question de l'interprétation, et pas seulement du

  2   libellé de l'article, mais également sur l'objectif et le but de l'article

  3   98 bis dans le cadre du procès dans sa totalité.

  4   Dans l'affaire Tadic, la Chambre a estimé que même si le Statut n'est pas

  5   un traité, les règles d'interprétation du traité s'agissant de la

  6   convention de Genève [comme interprété] sont pertinentes lorsqu'il s'agit

  7   de déterminer son interprétation et son application. Il s'agit de la

  8   décision rendue dans l'affaire Tadic concernant la décision sur la requête

  9   de la Défense sur la question de la juridiction, 10 août 1995. Même si les

 10   Juges du Tribunal ne citent pas toujours la convention de Genève [comme

 11   interprété] de façon explicite, néanmoins l'interprétation de la convention

 12   est utilisée.

 13   La Chambre de première instance dans l'affaire Delalic a confirmé qu'en

 14   ayant recours à cette approche prônée dans cette interprétation, "les

 15   véritables objectifs et intentions du Statut et du Règlement de procédure

 16   et de preuve sont exprimés." La Chambre a noté que "il a été établi qu'une

 17   interprétation des articles du Statut et dispositions du Règlement doit

 18   tout d'abord porter sur les principes généraux d'interprétation qui sont

 19   codifiés à l'article 31 de la convention de Genève [comme interprété] sur

 20   la Loi des traités," et a cité toute une série d'affaires qui ont confirmé

 21   cela. Confer le jugement dans l'affaire Delalic, paragraphe 1 161.

 22   L'article 31(1) déclare que :

 23   "Un traité est interprété en bonne foi conformément au sens normal que l'on

 24   donne aux termes du traité compte tenu de son objectif et de son but."

 25   La règle d'interprétation restrictive, à savoir très restrictive, contraint

 26   la Chambre à déterminer si, oui ou non, une interprétation se situe dans

 27   les limites posées par le Statut, à savoir l'intention du Statut et du

 28   Règlement au vu simplement du libellé de ce texte. A moins que la Défense


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  1   ne soit capable de montrer que l'Accusation n'a pas fourni d'éléments de

  2   preuve susceptibles de justifier une condamnation s'agissant du chef

  3   d'accusation dans son intégralité, dans ce cas, la Chambre ne va pas

  4   acquitter l'accusé.

  5   Cependant, comme l'a dit la Chambre de première instance dans l'affaire

  6   Delalic, "la règle d'interprétation restrictive n'est pas violée si cette

  7   expression prend tout son sens ou un sens différent qui correspond

  8   davantage à l'intention législative et qui permet de mieux l'exprimer."

  9   Ceci englobe cette approche interprétative double prônée par la convention

 10   de Genève [comme interprété].

 11   L'Article 31(1) insiste sur le fait que l'objectif et le libellé de ces

 12   articles ne sont pas deux méthodes qui s'excluent mutuellement, elles sont

 13   plutôt interdépendantes. Cette approche fondée sur l'objectif et le libellé

 14   repose sur l'interprétation de l'un et de l'autre. Par conséquent, dans la

 15   disposition 98 bis, le terme de "chef" peut et doit être utilisé en tenant

 16   compte de l'intention des rédacteurs et de l'objectif de cette disposition

 17   dans le contexte du procès dans son ensemble sans violer l'interprétation

 18   textuelle auquel est associée la jurisprudence actuelle.

 19   Avant les amendements de l'article en 2004, la disposition prévoyait de

 20   façon expresse qu'une Chambre de première instance prononce un acquittement

 21   lorsque la Chambre constatait qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments

 22   de preuve pour étayer une condamnation concernant les accusations

 23   contestées. Un point qui a été confirmé lors du procès Hadzic le mois

 24   dernier. Le texte se lit comme suit :

 25   "Un accusé peut déposer une requête pour demander un acquittement

 26   s'agissant de un ou de plusieurs délits reprochés dans l'acte

 27   d'accusation."

 28   Le terme de "chef" ou "d'accusation" ni l'un ni l'autre de ces termes ont


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  1   été utilisés, plutôt le terme de "délit". Il a été accepté que lors de

  2   l'amendement de 2004, le terme de "chef" a été inclus dans le Statut, ce

  3   qui semble indiquer que les rédacteurs pensaient limiter l'application de

  4   l'article 98 bis, à savoir ceci devait s'appliquer aux chefs dans leur

  5   ensemble. Cependant, la Chambre dans l'affaire Milosevic a indiqué que

  6   cette interprétation pouvait potentiellement rendre ce processus quasiment

  7   dénué "de toute implication pratique au Tribunal", étant donné que dans ce

  8   cas on ne peut apprécier le caractère à plusieurs niveaux ou de l'acte

  9   d'accusation et s'en tient, dans ce cas, uniquement à une implication

 10   nationale de cet article. Procès de Dragomir Milosevic, page du compte

 11   rendu d'audience du 3 mai 2007, 5641 à 5643.

 12   L'objectif de cet article est double : tout d'abord, de retirer toute

 13   allégation qui ne peut être justifiée dès que possible pour s'assurer que

 14   le procès se déroule rapidement et que les ressources de la Défense ne sont

 15   pas gaspillées; et deuxièmement, il s'agit d'adhérer au principe du respect

 16   du procès équitable et acquitter l'accusé d'allégations qui ne sont pas

 17   étayées par l'un quelconque d'élément de preuve. Cet objectif ne change pas

 18   parce que cet article a été traduit ou est sorti du contexte national pour

 19   être appliqué au domaine international, plutôt c'est une manière de

 20   comprendre le caractère complexe de l'acte d'accusation, tout en respectant

 21   la manière dont ceci fonctionne à ce stade de la procédure. Tout ce qui

 22   reste et figure dans l'acte d'accusation exige que la Défense cite des

 23   éléments de preuve pour pouvoir répondre à ces allégations, et la Chambre

 24   doit consacrer du temps à cela, et se prononcer sur les éléments de preuve.

 25   Il s'agit tout simplement d'un gaspillage de ressources valables, étant

 26   donné qu'il ne peut pas y avoir d'issue couronnée de succès par le simple

 27   fait qu'il ne doit pas encore exister d'éléments de preuve susceptibles

 28   d'étayer une condamnation dans l'acte d'accusation à ce stade. De plus, les


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  1   intérêts de la justice ne s'en tiennent pas seulement à la justice pour les

  2   victimes, mais également aux droits de l'accusé. Le slogan du TPIY est le

  3   suivant : "faire en sorte que les criminels de guerre soient traduits en

  4   justice et apporter la justice aux victimes", mais l'accusé est innocent

  5   jusqu'à ce qu'il soit déclaré coupable. Et, ceci constitue le fond même de

  6   l'article 98 bis. En fait, il s'agit d'un système de sécurité qui permet de

  7   protéger l'accusé et la Défense contre des allégations non fondées

  8   puisqu'ils constituent l'objet du jugement définitif.

  9   Et, si la Chambre adopte cette approche qui se fonde uniquement sur les

 10   chefs et s'en tient à l'application de l'article 98 bis, dans ce cas, ce

 11   système de sécurité n'existe plus et l'accusé n'est plus protégé non plus,

 12   puisque ceci a été à dessein intégré dans les lois nationales et inscrit

 13   dans le Règlement.

 14   La Défense admet que dans de nombreuses affaires, cette approche fondée sur

 15   les chefs a été appliquée suite à l'amendement de cette interprétation

 16   textuelle de l'article 98 bis. Mais ce n'est pas parce que la jurisprudence

 17   est dirigée dans un sens, cela ne signifie pas pour autant que c'est la

 18   jurisprudence qui adhère à l'objectif et à l'intention de l'article selon

 19   l'intention des rédacteurs de cet article. Il s'agit de l'interprétation de

 20   l'article, et non pas de l'article lui-même qui signifie que l'approche

 21   adoptée maintenant se fonde uniquement sur les chefs d'accusation. Il est

 22   clair que la fonction même de cet article est de retirer les allégations de

 23   l'acte d'accusation qui, à la fin de la présentation des moyens à charge de

 24   la Défense, ne peuvent absolument pas étayer une condamnation.

 25   Le terme de "délit" dans la disposition 98 qui, avant 2004, a été

 26   interprétée dans la jurisprudence comme étant un élément qui englobe à la

 27   fois les chefs et les accusations, précisément pour cette raison.

 28   L'objectif et le but de l'article n'ont pas été modifiés même lorsque le


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  1   libellé a été modifié. Si les rédacteurs avaient utilisé le terme

  2   "d'accusation" plutôt que "chef", dans ce cas, les Chambres de première

  3   instance auraient sans doute adopté une interprétation davantage fondée sur

  4   le but pour s'assurer que l'on puisse prononcer des acquittements sur

  5   l'ensemble des chefs d'accusation, étant donné que ceci serait conforme à

  6   l'objectif et au but de l'article, nonobstant une interprétation textuelle

  7   littérale du même article.

  8   Le fait que la jurisprudence a été considérée comme établie par la Chambre

  9   de première instance Hadzic ne parle pas de redéfinir l'objectif et le but

 10   de cette disposition. Que des Chambres de première instance aient adopté

 11   cette interprétation textuelle ne signifie pas pour autant qu'il faut

 12   appliquer une interprétation fondée sur le but du terme "chef". On peut

 13   donc envisager la possibilité d'acquitter sur des accusations individuelles

 14   plutôt qu'en tenant compte d'un chef. Il ne s'agit pas ici de changer la

 15   loi. Cette approche, il ne s'agit pas de combler un fossé ni de dépasser

 16   les compétences qui reviennent à un Juge de la Chambre non plus. Il s'agit

 17   de l'objectif et du but qui sont définis conformément aux règles

 18   d'interprétation fixées par la convention de Genève [comme interprété].

 19   Même si ces paramètres demeurent ambigus et si l'objectif et le but de la

 20   disposition demeurent ambigus, la Défense fait valoir qu'il faut à ce

 21   moment-là adopter l'interprétation qui est la plus  favorable envers

 22   l'accusé. On vous enjoint donc, Messieurs les Juges, de tenir compte de ce

 23   principe in dubio pro reo. La Chambre d'appel dans l'affaire Tadic s'est

 24   tournée vers cet élément lorsqu'elle a analysé les dispositions du Statut

 25   et du Règlement et a insisté que dans le cas "d'un quelconque doute il faut

 26   déterminer l'affaire conformément au principe in dubio pro reo." Confer

 27   l'Accusation contre Tadic, IT-91-1-A, décision sur la requête de l'appelant

 28   pour une prorogation des délais et le versement au dossier d'éléments de


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  1   preuve complémentaires.

  2   Par conséquent, si on adopte une simple interprétation textuelle il s'agit

  3   à ce moment-là d'un bastion juridique qui s'instaure contre les

  4   acquittements sur les accusations individuelles, ce qui paraît tout à fait

  5   évident à la lumière de la jurisprudence. Ceci est contraire à l'objectif

  6   et au but de l'article 98 bis, mais également au principe in dubio pro reo,

  7   et donc la Défense fait valoir qu'une interprétation qui favorise l'accusé

  8   est une interprétation qui permet au champ d'application de cette règle

  9   d'être utilisée de la manière suivante, à savoir pour acquitter au niveau

 10   d'accusations individuelles et ce qui est différent que d'acquitter sur la

 11   base d'un chef dans sa totalité.

 12   Et cette approche, qui se fonde sur les chefs, créé un flou autour de ces

 13   accusations individuelles, un voile juridique en quelque sorte, qui empêche

 14   tout un chacun d'établir ces distinctions entre le chef dans sa totalité et

 15   empêche la Défense de contester les accusations.

 16   Le fait d'imposer ce voile juridique ressemble en quelque sorte au droit

 17   des sociétés lorsque les sociétés sont traitées comme des entités

 18   juridiques distinctes, ce qui empêche les avocats de se cacher derrière

 19   pour essayer de favoriser les individus qui se trouvent à l'intérieur. Et

 20   donc cette approche qui se fonde sur les faits empêche les Juges de la

 21   Chambre d'aborder la question des accusations individuelles pris isolément,

 22   et ce, dans le cadre de l'article 98 bis.

 23   Alors, lorsque la Défense fait valoir qu'il faut soulever ce voile, mais la

 24   Chambre doit tenir compte de chaque affaire individuellement, déterminer si

 25   oui ou non il y a des circonstances qui permettent que ce voile soit levé

 26   conformément à l'objectif et au but de cette disposition. Et d'adopter une

 27   approche générale et de rejeter chaque constatation faite par la Défense à

 28   l'égard de ces accusations individuelles n'est pas seulement contraire à


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  1   l'objectif et au but de l'article 98 bis, mais permet à l'Accusation de se

  2   cacher derrière ces accusations individuelles et rend toutes ces

  3   accusations infaillibles à l'intérieur de ces chefs d'accusation même s'il

  4   n'y a pas d'éléments de preuve qui permettent de justifier une

  5   condamnation. Il faut également avancer qu'il peut y avoir des exceptions à

  6   la présomption d'inviolabilité de ce voile, pour empêcher à certains

  7   individus de l'exploiter et qu'il puisse échapper à la loi.

  8   La Défense implore la Chambre à reconnaître qu'il existe des exceptions à

  9   cette approche qui est fondée uniquement sur les chefs d'accusation et que

 10   ceci est essentiel pour étayer l'objectif et le but de l'article 98 bis.

 11   Avoir une présomption contre le fait de prononcer un accusé sur les

 12   accusations individuelles est une chose, mais d'empêcher que ceci ne puisse

 13   se produire va au-delà de ce que l'on doit empêcher, c'est-à-dire une

 14   application parcellaire de l'article 98 bis ou qui est fondé uniquement sur

 15   les événements de l'acte d'accusation.

 16   Une approche générale ou globale de ce type de la part de la Chambre

 17   s'oppose fondamentalement à l'objectif même de cet article : Il doit

 18   garantir à l'accusé un procès rapide et doit également retenir les

 19   conditions d'un procès équitable et permettre à l'Accusation d'exploiter

 20   cette approche qui se fonde sur les chefs d'accusation pour masquer les

 21   défauts concernant les éléments de preuve dans leurs accusations

 22   individuelles. De prononcer un jugement et de déclarer que cette approche

 23   qui se fonde sur les chefs, ceci doit être appliquer en l'espèce

 24   conformément à la jurisprudence, et si cela est effectivement le cas, il

 25   s'agit dans ce cas de confirmer que l'article 98 bis n'est pas plus qu'un

 26   tigre en papier, dénué de toute application pratique aux yeux de la Défense

 27   par le simple fait que les Chambres d'appel ont appliqué une interprétation

 28   beaucoup trop stricte de la Règle.


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  1   En outre, nous avons vu sur la base des rapports médicaux, qui ont été

  2   fournis en application de l'ordonnance rendue par la présente Chambre de

  3   première instance au titre de l'article 74 bis, que le fait de s'assurer

  4   que ce procès n'est pas excessivement prolongé est de toute première

  5   importance, compte tenu l'état de santé du général Mladic. Le dernier

  6   rapport consolidé des médecins Hollander et Cras constate que "le fait de

  7   reporter ou de prolonger ce procès porterait préjudice au général Mladic

  8   compte tenu de son âge". Monsieur le Président, Monsieur les Juges, le fait

  9   de maintenir des chefs d'accusation pour lesquels il n'est pas permis de

 10   penser qu'ils seront prouvés remet à plus tard la fin de ce procès et

 11   augmente inutilement l'effort qui est appelé à supporter le général Mladic.

 12   S'il n'y a pas d'éléments de preuve susceptibles de justifier une

 13   déclaration de culpabilité à ce stade, il s'ensuit que la Chambre a la

 14   responsabilité vis-à-vis de l'accusé de lui garantir un procès rapide, en

 15   particulier compte tenu de la situation présente, des circonstances où la

 16   santé du général Mladic est de toute première importance et constitue une

 17   préoccupation du tout premier ordre.

 18   J'aborde maintenant les arguments de la Défense par rapport aux chefs

 19   d'accusation plus précisément, je rappelle au nom de la Défense que vous

 20   êtes à la fois les Juges du droit et du fait et que les questions qui

 21   portent sur la fiabilité et la crédibilité des témoins, normalement, ne

 22   font pas partie des considérations au titre de l'article 98 bis. Toutefois,

 23   la Chambre de première instance dans l'affaire Kordic et Cerkez a souligné

 24   que :

 25   "Il existe une situation dans laquelle la Chambre est obligée de se pencher

 26   sur ces questions-là, à savoir lorsque la thèse de l'Accusation s'est

 27   complètement effondrée, que ce soit pendant sa propre présentation des

 28   éléments de preuve dans le cadre de l'interrogatoire principal ou en tant


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  1   que résultat de questions de fond qui ont été soulevées pendant le contre-

  2   interrogatoire portant sur la fiabilité et la crédibilité des témoins, au

  3   point que l'Accusation se retrouve avec une thèse qui s'est complètement

  4   effondrée." Il s'agit de la décision suite aux requêtes de la Défense aux

  5   fins du jugement d'acquittement le 6 avril de l'an 2000, paragraphe 28.

  6   Cela constitue une exception qui précise une distinction entre des éléments

  7   de preuve qui sont simplement faibles, et ce, qui rendait une déclaration

  8   de culpabilité viciée si la Chambre se reposait sur ces éléments de preuve

  9   pour affirmer et déclarer la culpabilité. En l'espèce, la Défense affirme

 10   que la thèse de l'Accusation par rapport aux événements de la rivière Jadar

 11   et par rapport à Sirokaca, questions qui portent sur la fiabilité et la

 12   crédibilité des témoins, ont eu pour résultat que la thèse de l'Accusation

 13   s'est complètement effondrée. Par rapport à l'annexe D de l'acte

 14   d'accusation, à savoir destruction des lieux de culte, la Défense fait

 15   valoir que les éléments de preuve qui ont été présentés sont à ce point

 16   déniés de la possibilité d'être considérés comme étant dignes de foi que

 17   l'Accusation, encore une fois, se retrouve avec une thèse qui s'est

 18   complètement effondrée.

 19   Prenons pour commencer la rivière Jadar.

 20   Suite à la thèse qui fait partie du chef d'accusation numéro 2, les

 21   éléments de preuve qui ont été versés par rapport à l'acte d'accusation et

 22   ce qui figure à la rivière Jadar, à savoir à l'annexe E 1.1 [comme

 23   interprété] de l'acte d'accusation, eh bien, si on leur accordait la valeur

 24   maximale, ces éléments ne permettraient pas de justifier la conclusion que

 25   ces morts étaient le départ d'exécutions organisées et sommaires de

 26   prisonniers entre les mains de la VRS, et encore moins agissant sous les

 27   ordres du général Mladic. L'Accusation affirme dans l'acte d'accusation que

 28   15 hommes bosniaques ont été exécutés sur les berges de la rivière Jadar en


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  1   tant qu'élément constitutif d'un meurtre organisé dans le cadre de

  2   Srebrenica.

  3   La Défense démontrera, à savoir que les éléments de preuve de

  4   l'Accusation ne permettent pas d'étayer la responsabilité pénale du général

  5   Mladic, puisque le seul témoignage qui confirmerait la thèse de

  6   l'Accusation s'est effondré au cours du contre-interrogatoire.

  7   L'Accusation s'est reposée sur le témoignage d'un témoin protégé,

  8   RM314 - l'Accusation affirme qu'il s'agit là d'un survivant du massacre -

  9   et elle a cherché à démontrer par son truchement non seulement que les

 10   exécutions se sont produites, mais que la VRS a été responsable de ces

 11   exécutions. Tandis que l'Accusation a cité six témoins dans son mémoire

 12   préalable au procès pour étayer cet événement, seul le Témoin RM314 fournit

 13   un témoignage relatif à ces événements qui se sont produits à la rivière

 14   Jadar et est venu déposer oralement les 8 et 9 mai 2013.

 15   La thèse de l'Accusation repose uniquement sur l'idée que RM314 est

 16   un survivant de cet événement et, en conséquence, témoin oculaire qui peut

 17   prouver l'appartenance ethnique des autres prisonniers, l'identité des

 18   auteurs, et également la manière de laquelle les prisonniers ont été

 19   exécutés. Toutefois, au cours du contre-interrogatoire mené par la Défense,

 20   il est devenu évident que le récit de ce témoin manquait de cohérence,

 21   qu'il était contredit par les éléments de preuve documentaires et que,

 22   compte tenu de cela, son témoignage n'était pas digne de foi.

 23   Le témoignage du Témoin RM314 s'est effondré pendant le contre-

 24   interrogatoire sur des questions-clés et est si peu fiable que l'Accusation

 25   a manqué de fournir tout élément de preuve qui pourrait étayer une

 26   déclaration de culpabilité. RM314 a déposé oralement : premièrement, son

 27   témoignage soulève un doute quant à ses blessures, est-ce qu'elles ont

 28   résulté d'une tentative d'exécution à la rivière Jadar, et, en conséquence,


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  1   on est en droit de se demander s'il était effectivement présent sur les

  2   lieux à ce moment-là; deuxièmement, son témoignage remet en question la

  3   fiabilité de son identification de quelqu'un pour qui on allègue qu'il a

  4   tiré et qu'il était dans les rangs de la VRS pendant cet événement; et

  5   enfin, s'est montré comme n'étant pas cohérent et ne cadrant pas avec son

  6   statut de civil à des moments pertinents.

  7   Ce témoin a affirmé dans sa déclaration écrite remise au bureau du

  8   Procureur et sous serment qu'il a été blessé par balle à la rivière Jadar

  9   et que cela était le résultat d'une tentative d'exécution qui a échoué,

 10   tentative menée par des membres de la VRS. Il a affirmé qu'une balle est

 11   entrée dans sa hanche et que ça a été le résultat d'une blessure par balle,

 12   balle qui s'est introduite de droite vers la gauche avec la partie gauche

 13   de son corps comme étant la partie où il a subi cette blessure. Je vous

 14   renvoie au compte rendu d'audience, pages 10 861 à 10 862. Et il décrit

 15   dans sa déclaration qu'il s'est laissé porter par la rivière pour s'évader.

 16   En dépit du récit fourni par le Témoin RM314 où il affirme la gravité

 17   de ses blessures, il admet dans sa déclaration que le personnel médical à

 18   Tuzla n'a pas estimé que ses blessures étaient graves. Je vous renvoie à la

 19   pièce P1435, page 7. Qui plus est, l'examen médical qui a été effectué sur

 20   le territoire libre entre les mains des Musulmans de Bosnie le 16 juillet

 21   1995 arrive à la conclusion que ses blessures sont le résultat d'une

 22   blessure par explosion; à savoir page 10 899 du compte rendu d'audience et

 23   également pièce à conviction D282, et qu'il ne s'agit pas d'une blessure

 24   par balle comme il affirme dans sa déclaration et également pendant sa

 25   déposition sous serment. Ce diagnostic a été fourni par le personnel

 26   médical qui a soigné ses blessures et ces documents comportent l'opinion de

 27   l'expertise médicale sur son cas, à savoir les experts médicaux qui ont

 28   examiné et qui ont proféré des soins à RM314. Et le fait qu'ils soient


Page 20730

  1   arrivés à cette conclusion remet en question son récit d'après lequel il

  2   aurait été touché par une balle et remet en question la thèse de

  3   l'Accusation que RM314 a été blessé en tant que résultat d'une tentative

  4   d'exécution sommaire à la rivière Jadar.

  5   Compte tenu du fait que les éléments médicaux ne cadrent pas avec le

  6   récit fourni par RM314, son récit d'après lequel il serait un survivant des

  7   exécutions, eh bien, un doute substantiel est soulevé quant à la question

  8   qui est de savoir s'il a été présent sur les lieux au moment où l'événement

  9   s'est produit. RM314 a révélé qu'il avait fourni sa déclaration écrite sur

 10   la manière de laquelle il a été blessé à un homme qui lui a dit qu'il

 11   travaillait avec des journalistes et qu'il portait un T-shirt noir avec des

 12   insignes de l'ABiH, et je cite ici la page 10 879 du compte rendu

 13   d'audience. Et, après une question posée par le Juge Fluegge, le Témoin

 14   RM314 a déclaré que c'était parce qu'on l'a forcé à le faire, que c'est le

 15   garde chargé de la sécurité à l'infirmerie qui portait l'insigne de l'ABiH.

 16   Toutefois, aucun élément de preuve de toute contrainte physique n'a été

 17   fourni pour confirmer ce récit, et le RM314 n'a pas non plus fourni de

 18   déclaration écrite à l'Accusation sur cette allégation avant sa déposition.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que je peux vous interrompre,

 20   Maître Ivetic ?

 21   M. IVETIC : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites qu'on l'a forcé à le faire,

 23   forcer à faire quoi ?

 24   M. IVETIC : [interprétation] A fournir un récit différent de la manière

 25   dont il a été blessé par balle.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous vous êtes référé à la pièce D282

 27   pour confirmer que ces blessures étaient le résultat d'une blessure par

 28   explosion.


Page 20731

  1   M. IVETIC : [interprétation] C'est exact.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me demande exactement où cela se

  3   trouve dans ce document.

  4   M. IVETIC : [interprétation] C'est normalement le rapport médical, le

  5   diagnostic en latin sur la blessure, et je pense que le terme qui est

  6   utilisé c'est "explosivus" en latin.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais voir, jeter un coup d'œil en

  8   anglais, puisqu'à plusieurs reprises on retrouve le terme "illisible".

  9   M. IVETIC : [interprétation] Je pense que c'est l'original qui est en

 10   latin. Je peux le vérifier pendant la pause.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement, faites-le.

 12   M. IVETIC : [interprétation] Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Une autre précision, s'il vous plaît.

 14   On l'aurait forcé à fournir un récit différent de la manière dont il a été

 15   blessé par balle, de la manière dont il a été blessé.

 16   M. IVETIC : [interprétation] Oui, c'est exact. Blessé, c'est le terme qu'il

 17   faudrait utiliser.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous dire

 19   exactement verbatim ce que le témoin a déclaré ?

 20   M. IVETIC : [interprétation] Je ne peux pas à ce stade.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez vérifier cela, et nous le

 22   dire plus tard ?

 23   M. IVETIC : [interprétation] Oui.

 24   Pages du compte rendu d'audience 10 880 à 10 882, après avoir reçu une

 25   question de la part du Juge Fluegge, il s'est avéré que dans la déclaration

 26   manuscrite qu'il a donnée aux journalistes et signée pour confirmer la

 27   véracité de ses propos, eh bien, que ça été en fait une déclaration fausse,

 28   et ça été reconnu par RM314.


Page 20732

  1   Lorsqu'on a insisté pour lui demander pourquoi il a écrit qu'il a été

  2   blessé par balle à Karakaj, RM314 a déclaré que c'était parce qu'on l'avait

  3   forcé à le faire, et que c'est le garde de l'infirmerie qui portait

  4   l'insigne de l'ABiH qui l'a forcé à le faire. Et, qui plus est, RM314 a

  5   également déclaré, page du compte rendu d'audience 10 887, que sa

  6   déclaration écrite fournie dans l'affaire Popovic, avec un récit détaillé

  7   par RM314 de l'événement à la rivière Jadar, comporte de nombreuses

  8   erreurs, malgré le fait qu'il l'a signée pour confirmer sa véracité et son

  9   exactitude. Encore une fois, la Défense fait valoir que le Témoin RM314 est

 10   le seul témoin qui peut témoigner des événements qui se sont produits et

 11   qu'il a montré qu'il avait tendance à fournir des témoignages qui ne sont

 12   pas véridiques et qui sont inexacts, ce qui est pris de concert avec le

 13   manque de cohérence entre son souvenir des événements qui se sont produits

 14   et les éléments de preuve médicaux contradictoires remet en doute la thèse

 15   de l'Accusation et fait en sorte que ces éléments de preuve ne sont pas

 16   susceptibles de justifier une déclaration de culpabilité.

 17   Ce qui est important, c'est que le doute soulevé quant à sa présence à la

 18   rivière Jadar a une incidence également sur son identification d'un auteur

 19   dont l'identité a été fournie à huis clos, et également dans une

 20   déclaration écrite modifiée en 1999 après avoir été déclenché par une

 21   description vague fournie par une partie tierce en 1995. Je vous renvois à

 22   la page 10 901 du compte rendu d'audience. Quant à la description donnée

 23   par RM314 des auteurs, compte tenu du fait que cette description s'est

 24   initialement limitée au fait qu'ils étaient en uniforme de camouflage, mais

 25   qu'ils ne portaient pas d'insigne qui aurait été identifié, eh bien, cette

 26   identification est le seul lien que possède le Procureur lui permettant de

 27   relier les membres de la VRS à la perpétration de ces exécutions. J'invite

 28   MM. les Juges à se pencher sur la page du compte rendu d'audience 10 889,


Page 20733

  1   lignes 1 à 11.

  2   L'Accusation a fait valoir pendant le récolement du Témoin RM314,

  3   qu'on a demandé au témoin pourquoi il avait omis de mentionner cet individu

  4   dans ses entretiens et ses déclarations précédentes. Et, le témoin a

  5   répondu qu'il n'était pas tout à fait certain de son identité sur le site

  6   d'exécution jusqu'à bien après les événements, et ce, sur la base des

  7   éléments d'information qu'il a reçus tant au moment où il était en

  8   captivité et par la suite. Je vous renvois à la page 10 914 du compte rendu

  9   d'audience. Le témoin a confirmé sa déposition précédente donnée dans

 10   l'affaire Popovic qui révèle de nombreux éléments qui ne cadrent pas, qui

 11   portent sur le souvenir du témoin de la taille de cette personne et de ses

 12   cheveux. Pages 10 915 et 10 916 du compte rendu d'audience.

 13   Il est important de relever que dans sa déposition, le témoin a

 14   affirmé qu'il connaissait cet individu, donc l'auteur allégué, qu'il le

 15   connaissait bien. Mais en dépit de cela, le témoin RM314 n'était pas

 16   capable de l'identifier au moment pertinent, il n'était même pas en mesure

 17   de fournir une description exacte ou cohérente de cette personne. En

 18   l'absence de ces éléments de preuve portant sur l'identification, il ne

 19   reste rien qui permettrait de penser que la VRS était responsable des tirs,

 20   comme l'affirme le Témoin RM314, seuls les hommes responsables étaient en

 21   uniforme de camouflage.

 22   Prise à sa valeur maximale, l'identification par RM314 ne constitue

 23   pas une preuve, est non seulement à ce point dénué de foi qu'il ne se

 24   serait pas rappelé quelqu'un pour qu'il sait qu'il était sur place, mais

 25   aussi il faut savoir que ce témoignage lui est revenu à l'esprit quatre ans

 26   après l'événement, après des éléments par ouï-dire déclenchés par la

 27   mémoire de RM314.

 28   Tant l'Accusation que le Témoin RM314 s'appuient sur son statut de


Page 20734

  1   civil à des moments pertinents pour confirmer le caractère illicite des

  2   actes qui se sont produits à la rivière Jadar. Le statut de RM314 est

  3   pertinent de deux manières : premièrement, la thèse de l'Accusation comme

  4   quoi les civils musulmans de Bosnie ont été tués contrairement à la loi; et

  5   deuxièmement, qu'ils ont été ciblés à cause de leur appartenance ethnique,

  6   par opposition au fait qu'ils aient constitué une menace militaire en tant

  7   que soldats.

  8   Donc, le document médical qui porte la date du 16 juillet 1995, à

  9   savoir la pièce D282, suite à un des examens médicaux de RM314, précise

 10   qu'il était soldat, sous la case profession, et qu'il a travaillé comme

 11   estafette à l'école primaire de Srebrenica. L'abréviation OS Srebrenica a

 12   été utilisée dans ce document et on estime que cela signifie forces armées

 13   de Srebrenica, et le Témoin RM314 a accepté cela; à savoir, je vous renvoie

 14   à la page 10 896, lignes 12 à 22 du compte rendu d'audience. Après avoir

 15   été soigné, un document officiel signé par le personnel médical a été

 16   délivré qui constate qu'il faisait partie d'une unité militaire et qu'après

 17   sa sortie de l'hôpital, le patient devait se présenter immédiatement au

 18   médecin qui est rattaché à son unité militaire, en permettant de penser que

 19   l'infirmerie a estimé que c'était un soldat. Je vous renvoie aux pages du

 20   compte rendu d'audience 10 900 à 10 901.

 21   Malgré des éléments de preuve contraires, RM314 a insisté sur le fait qu'il

 22   était estafette dans le cadre de la protection civile, page 10 896 du

 23   compte rendu d'audience; cependant, il a admis qu'il avait omis de corriger

 24   cela à l'infirmerie. Même s'il affirme qu'il était simplement une

 25   estafette, lorsque RM314 s'est rendu, on lui a trouvé une grenade à main

 26   standard sur sa personne, la même utilisée par l'arsenal de l'ex-JNA où il

 27   avait fait son service, page 10 905 du compte rendu d'audience, lignes 16 à

 28   20. Il a expliqué que cela lui avait été donné par une connaissance, sans


Page 20735

  1   consigne, et qu'il n'avait pas d'expérience et ne savait pas comment

  2   l'utiliser. Eh bien, cette explication est douteuse, en particulier à la

  3   lumière du fait qu'il concède qu'il avait fait son service au sein de la

  4   JNA et à la lumière des éléments de preuve médicaux permettant de penser

  5   qu'en fait il était soldat à des moments pertinents. Ce qui fournit une

  6   explication plus vraisemblable quant à la raison pour laquelle il était

  7   armé d'une arme de la JNA et qu'il n'avait de consigne sur lui. Le fait que

  8   le témoignage de RM314 manque de cohérence à ce point sur cette question

  9   compromet non seulement sa fiabilité et sa crédibilité par rapport à cela,

 10   mais également par rapport à l'ensemble de sa déclaration.

 11   Le Témoin RM314 est l'unique témoin qui étaye la thèse de

 12   l'Accusation par rapport à l'événement de la rivière Jadar et son

 13   témoignage ne constitue pas un élément de preuve. Pris dans son ensemble,

 14   la tendance de ce témoin à fournir de faux témoignages, son manquement à

 15   corriger des déclarations inexactes jusqu'au moment où on insiste là-dessus

 16   pendant le contre-interrogatoire et l'existence des éléments de preuve

 17   officiels médicaux qui contredisent sa thèse qu'il a été blessé par balle

 18   sur la rivière Jadar montrent que la fiabilité de son élément de preuve

 19   n'est pas digne de foi. Et le fait qu'il n'y a pas eu d'éléments médico-

 20   légaux prélevés sur le site de tir allégué qui étayeraient le récit de

 21   RM314 en dépit des efforts de l'Accusation. En conséquence, l'Accusation se

 22   retrouve avec une thèse qui s'est effondrée et il faudrait prononcer un

 23   acquittement. La Défense demande que l'événement de la rivière Jadar soit

 24   enlevé de l'acte d'accusation afin de préserver l'économie judiciaire et

 25   les ressources de la Défense.

 26   Passons maintenant à Sirokaca --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je regarde l'heure.

 28   M. IVETIC : [aucune interprétation]


Page 20736

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et avant la pause, j'ai constaté qu'il

  2   existe quelques questions qui se posent au sujet de la pièce D282 et

  3   quelques questions très importantes ont été posées au témoin.

  4   Indépendamment de cela, la traduction anglaise sur des questions-clés

  5   mentionne que le texte est illisible. Alors, est-ce que les parties

  6   pourraient chercher à se mettre d'accord sur ce qui est lisible, et en

  7   particulier lorsqu'il est question de blessures par explosion, parce que je

  8   vois le terme "explosiva" dans l'original, alors qu'il ne revient pas dans

  9   la traduction anglaise.

 10   Alors, nous allons maintenant faire une pause, et nous allons

 11   reprendre à 11 heures moins dix.

 12   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 13   --- L'audience est reprise à 10 heures 54.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous avez la parole.

 15   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 16   Juges. Avant de reprendre mes arguments, je voudrais répondre à la question

 17   posée par M. le Juge Moloto pour vous donner la citation exacte du

 18   témoignage qui a été donné dans le prétoire. Il s'agit du compte rendu

 19   d'audience page 10 880, lignes 15 à 23 :

 20   "Juge Fluegge : Et cette personne vous a interrogé sur un événement qui

 21   s'est produit à Karakaj; est-ce que cela est exact ?

 22   "Le témoin : Oui, il m'a demandé où cela s'était passé. Et je voulais

 23   l'éviter, donc j'ai dit à Karakaj.

 24   "Juge Fluegge : Vous avez dit 'à Karakaj'. Mais qu'avez-vous dit pour

 25   Karakaj ?

 26   "Le témoin : Il m'a demandé où on m'avait tiré dessus, où j'ai été touché

 27   par balle, et j'ai dit 'à Karakaj', et c'était le 31 juillet. J'étais déjà

 28   dans un tel état psychologique que certaines choses ne sont peut-être pas


Page 20737

  1   exactes."

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Karakaj, c'est une localité, s'il vous

  3   plaît ?

  4   M. IVETIC : [interprétation] Oui, c'est une localité. C'est un toponyme.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais cela n'explique pas pourquoi on

  6   lui a tiré dessus ou pourquoi il se serait agi d'une explosion. Donc, la

  7   question que j'allais vous poser est de savoir si vous affirmez qu'il a été

  8   touché par balle ?

  9   M. IVETIC : [interprétation] Exact.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et vous avez dit que vous alliez

 11   retrouver les propos exacts que ce témoin a utilisés pour s'exprimer de ses

 12   blessures.

 13   M. IVETIC : [interprétation] Et il a dit : "Il m'avait demandé où j'avais

 14   été touché par balle et j'ai répondu 'à Karakaj'."

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est ça.

 16   M. IVETIC : [interprétation] Par rapport à cet événement, c'est ce que le

 17   témoin a dit en l'espèce.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc, il affirme qu'on lui a tiré

 19   dessus, qu'il a été touché par balle. Et dans les rapports médicaux, il

 20   s'agit d'une explosion ?

 21   M. IVETIC : [interprétation] C'est la position de la Défense.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 23   M. IVETIC : [interprétation] Alors, passons maintenant à Sirokaca.

 24   L'Accusation affirme que la ville de Sarajevo a été lourdement bombardée,

 25   que des cibles civiles ont été endommagées et détruites, que cela a causé

 26   la mort de plusieurs civils et en a blessé d'autres à la date du 28 mai

 27   1992 ou à peu près à cette date-là, à savoir l'annexe G(1) de l'acte

 28   d'accusation. L'Accusation cite à l'appui les témoignages de trois témoins


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  1   qui parlent du bombardement de différents quartiers de Sarajevo, y compris

  2   du quartier de Sirokaca; annexe B, numéro XX en chiffres romains en

  3   majuscules [comme interprété], avec l'affirmation que ce sont les forces

  4   serbes qui en ont été responsables.

  5   Les éléments de preuve présentés par l'Accusation ne sont pas susceptibles

  6   de justifier une déclaration de culpabilité, parce qu'ils manquent à

  7   prouver que la stratégie militaire serbe était responsable de et avait

  8   l'intention de répandre la terreur parmi la population civile. Il

  9   appartient à l'Accusation de démontrer comme suit : (A), quelle est la

 10   partie qui a autorisé cette action militaire contre des cibles illicites;

 11   (B), que dans le cadre de ces actions illicites il y a eu l'intention de

 12   cibler une population civile afin de répandre la terreur; (C), que

 13   l'intention de tuer les civils a existé; et (D), que l'intention d'infliger

 14   des blessures autres que meurtre a existé. Et je cite ici les critères de

 15   l'affaire Galic suite à la requête aux fins du jugement d'acquittement au

 16   titre de l'article 98 bis au nom de l'accusé, le général Stanislav Galic,

 17   en date du 2 septembre 2002, chapitre 7.

 18   Dans son mémoire préalable au procès, annexe publique B, page XX en

 19   chiffres romains en majuscules [comme interprété], l'Accusation affirmait

 20   que trois témoignages de témoin viennent étayer la culpabilité du général

 21   Mladic par rapport à l'annexe G(1) de l'acte d'accusation. Ces témoins sont

 22   RM115, RM1120 et RM168. Tant le Témoin RM115 et le RM120 sont des témoins

 23   protégés qui ont témoigné devant la Chambre en date du 27 août 2012 ainsi

 24   que les 29 et 30 janvier 2013, respectivement.

 25   Cependant, le seul témoin oculaire qui est présenté à l'appui de la cause

 26   du Procureur par rapport à Sirokaca est le Témoin Fadila Tarcin. Alors que

 27   les deux autres témoins ont déposé au sujet d'autres zones à Sarajevo,

 28   Tarcin a déposé au sujet de l'incident de Sirokaca le 28 et le 29 mai 1992


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  1   par le biais d'une déclaration en vertu de l'article 92 ter et son addendum

  2   ainsi que lors de sa déposition orale le 2 octobre 2012. Le Procureur n'a

  3   pas cité d'autres survivants qui pourraient nous donner un récit de

  4   première main des événements, des hommes militaires qui pourraient parler

  5   de la stratégie militaire et des intentions de l'armée, ou bien des experts

  6   ou des rapports d'expert qui pourraient appuyer l'affirmation du Procureur

  7   que ce sont les forces serbes qui étaient responsables des attaques à

  8   Sirokaca. Le fait que l'on ait fait appel à la déposition de Tarcin

  9   démontre que la cause du Procureur s'est complètement effondrée et qu'il

 10   faudrait prononcer l'acquittement.

 11   La déposition du témoin en vertu de l'article 92 ter n'attribue pas de

 12   façon explicite ce pilonnage à une force particulière. Sa déposition écrite

 13   fait état d'une conversation interceptée qui a été diffusée par la suite

 14   dans laquelle on entend prétendument le général Mladic, mais elle a dit que

 15   "ceci n'a jamais été lié à ce que lui est arrivé." C'est quelque chose qui

 16   figure à la page 3, le paragraphe 12 de sa déclaration de témoin; c'est la

 17   pièce P00281. Dans l'addendum à sa déclaration 92 ter, à savoir la pièce

 18   P00282, elle dit à la page 2, paragraphe 3, qu'elle a entendu dire des gens

 19   du cru que l'obus qui l'a blessée était tiré de Borije, à savoir à l'est de

 20   Sirokaca, et qu'elle était en mesure de voir où est tombé cet obus, et il

 21   est tombé sur la maison de son voisin.

 22   Au moment du contre-interrogatoire, Mme Tarcin a expliqué que l'impact de

 23   cet obus sur la maison de son voisin "était face à la vallée, autrement

 24   dit, face à la ville." Cela, on peut le trouver au niveau 3 347, lignes 20

 25   à 21. Quand les Juges de la Chambre lui ont demandé si cela voulait dire

 26   que l'impact venait de la direction de la rivière, de la vallée, plutôt que

 27   du haut de la colline, le témoin a répondu par l'affirmative, et c'est

 28   quelque chose qui se trouve au niveau du compte rendu d'audience 3 347,


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  1   lignes 22 à 25. La déposition de ce témoin contredit directement la cause

  2   du Procureur, à savoir que ce sont les forces serbes qui étaient

  3   responsables du pilonnage, vu qu'elle a indiqué la direction du pilonnage

  4   comme le pilonnage venu de l'intérieur de la ville. Autrement dit, elle a

  5   attribué ce tir de façon indirecte aux forces musulmanes. Sur la base de

  6   cela, la thèse du Procureur par rapport à Sirokaca s'est effondrée, car il

  7   n'y a pas de preuve tout simplement à l'appui de leur cause, de leur thèse,

  8   et qui pourrait justifier une déclaration de culpabilité par rapport au

  9   général Mladic pour avoir causé et autorisé le pilonnage qui a blessé le

 10   Témoin Tarcin.

 11   En ce qui concerne l'intention, si le Procureur, sur la base de la

 12   déposition de Tarcin, n'est pas en mesure de prouver que ce sont les forces

 13   serbes qui étaient responsables du pilonnage de Sirokaca, dans ce cas le

 14   Procureur ne peut pas démontrer que l'action militaire à cette fin était

 15   autorisée par les Serbes avec l'intention de cibler la population civile.

 16   Donc, sur la base de la déposition de Tarcin, la cause du Procureur s'est

 17   effondrée par rapport au pilonnage de Sirokaca et il faudrait prononcer

 18   l'acquittement.

 19   Monsieur le Président, à présent, je vais parler des arguments de la

 20   Défense qui contestent la véracité des chefs individuels du Procureur quant

 21   aux lieux du culte, et ceci, en vertu de l'article 98 bis. Dans les chefs

 22   d'accusation numéro 7 et 8 de l'acte d'accusation, le Procureur allègue

 23   qu'il y a eu destruction de monuments culturels et de lieux du culte et que

 24   ceci fait part des allégations contre le général Mladic --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ivetic, pour qu'il n'y ait pas

 26   de confusion, vous étiez en train de citer la page du compte rendu 3 347,

 27   et donc c'est le passage où on parle donc du bas de la colline, et à moins

 28   qu'il n'y ait une erreur dans mon système, ceci correspond à la page 3 447.


Page 20741

  1   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je suis sûr que

  2   vous avez raison et que vos documents sont plus fiables que les miens.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On dispose exactement des mêmes

  4   documents.

  5   M. IVETIC : [interprétation] Dans l'annexe D de l'acte d'accusation, nous

  6   avons plusieurs municipalités qui sont énumérées pour appuyer, donc,

  7   l'allégation du Procureur quant à la destruction des lieux du culte.

  8   Nous affirmons, avec tout le respect que nous vous devons, que la

  9   thèse du Procureur qui a été présentée lors du procès n'a pas été

 10   suffisamment étayée et qu'elle n'a pas réussi à remplir les critères, mêmes

 11   réduits, de la charge de la preuve pour dépasser le stade de l'article 98

 12   bis. Pour cette raison, la Défense invite la Chambre à rejeter ce segment

 13   de la thèse du Procureur à ce stade de la procédure, car sa thèse s'est

 14   complètement effondrée dans la mesure où le Procureur est resté sans moyens

 15   à charge. Maintenir ces moyens à charge correspondrait à forcer la Défense

 16   à dédier ses ressources, des ressources qui lui sont précieuses, pour

 17   contester les moyens qui n'ont pas été suffisamment définis sur la base des

 18   moyens proposés.

 19   A nouveau, la Défense répète que l'objectif de la procédure en vertu

 20   de l'article 98 bis est de rejeter les charges du Procureur que le

 21   Procureur n'a pas été en mesure de présenter et qui justifieraient une

 22   déclaration de culpabilité, et ceci, pour assurer un procès rapide et

 23   équitable. Et vous devriez, Messieurs les Juges, avoir ceci à l'esprit

 24   quand je vais parler de la suite de nos arguments. Ceci est pertinent par

 25   rapport surtout au jugement -- à l'arrêt, donc, dans l'affaire

 26   Hadzihasanovic et Kubura au paragraphe 51, où il a été dit que le droit de

 27   l'accusé à un jugement équitable pourrait être entravé si on lui demandait

 28   à tort de répondre aux charges du Procureur.


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  1   Je vous demande, Monsieur le Président, d'avoir à l'esprit le fait

  2   que si l'objectif de cette procédure est de trouver la vérité, dans ce cas

  3   les moyens de preuve présentés par le Procureur doivent être évalués par

  4   rapport à la vérité qu'ils ont réussi à élucider. Et si ceci est

  5   complètement incohérent par rapport aux allégations de culpabilité qui se

  6   trouvent dans l'acte d'accusation et par rapport au mémoire préalable au

  7   procès du Procureur, dans ce cas-là ces charges précises contre le général

  8   Mladic doivent être rejetées à ce stade de la procédure. Nous considérons

  9   que le droit du général Mladic à un procès équitable serait bafoué s'il

 10   serait forcé à se défendre par rapport aux charges qui concernent la

 11   destruction des monuments culturels et des lieux du culte.

 12   Dès le départ, je note qu'il n'a pas été prouvé que le général Mladic

 13   a donné l'ordre ou bien qu'il est pénalement responsable des crimes des

 14   autres quand il s'agit de la destruction des sites culturels ou bien des

 15   lieux du culte, et ceci, par rapport à aucun mode de responsabilité pénale

 16   éventuellement retenu. Il y a 11 municipalités qui font partie de ces

 17   moyens de preuve, et je vais vous en citer trois, trois exemples les plus

 18   frappants qui démontrent comment le Procureur n'a pas réussi à prouver les

 19   charges par rapport à cela. Je vais parler de Bijeljina, Kalinovik et de la

 20   municipalité de Pale.

 21   Dans l'annexe D(1), on parle de trois localités dans la municipalité

 22   de Bijeljina, qui contient trois mosquées. Dans les mémoires préalables au

 23   procès du Procureur, dans l'annexe B, tableau D, chiffres romains xi, on

 24   dit que le Procureur, par rapport à ces trois mosquées, n'a pas du tout

 25   réussi à déterminer qui étaient les auteurs de ces destructions. Nous avons

 26   deux témoins qui sont cités dans le mémoire préalable au procès, RM618 et

 27   RM513, et nous avons aussi deux documents, 65 ter 03431 et 65 ter 13410,

 28   qui sont là pour étayer et corroborer les allégations par rapport à ces


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  1   trois lieux du culte à Bijeljina.

  2   Monsieur le Président, aucun de ces deux documents n'a été versé et,

  3   donc, ne peut pas être retenu pour étayer cette charge à ce stade de la

  4   procédure.

  5   RM618, eh bien, c'est le témoin expert d'Andras Riedlmayer. Au cours de sa

  6   déposition dans le prétoire, M. Riedlmayer n'a pas fourni des dépositions

  7   par rapport à ces trois mosquées-là à Bijeljina. P2513 est le rapport

  8   d'expert de M. Riedlmayer. Nous avons en annexe ce rapport qui,

  9   prétendument, donne des informations au sujet des auteurs de la destruction

 10   de ces lieux du culte. Il y a quatre autres éléments d'information

 11   concernant Bijeljina. Mais dans aucun de ces paragraphes on a identifié ces

 12   endroits comme étant les trois sites énumérés dans l'acte d'accusation.

 13   Pour les quatre sites qui sont bel et bien référencés, la seule source sur

 14   laquelle s'appuie M. Riedlmayer sont des déclarations des informateurs et

 15   des articles de journaux, et il n'y en a qu'un informateur qui a été

 16   identifié pour chacun de ces sites.

 17   P2503, encore un rapport d'expert du Pr Riedlmayer. Là encore, on ne

 18   mentionne pas les trois localités à Bijeljina. P2511 est une base de donnée

 19   qui a été proposée par M. Riedlmayer et versée au dossier. Au niveau du

 20   numéro 13 de ce document, la mosquée Atmacici à Bijeljina, eh bien, à ce

 21   sujet, il n'y a pas d'information concernant les auteurs supposés de la

 22   destruction ou bien concernant des informations au sujet de la date ou de

 23   la façon dont cette mosquée aurait été détruite. La seule source est une

 24   information de ouï-dire, complètement anonyme, qui vient de la "madresa" de

 25   la communauté islamiste.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que la mosquée d'Atmacici

 27   figure parmi ces trois mosquées ?

 28   M. IVETIC : [interprétation] Oui, effectivement. Les trois mosquées


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  1   énumérées dans l'acte d'accusation sont les mosquées d'Atmacici, Srednja

  2   Trnova et Janjari.

  3   En ce qui concerne la mosquée de Janjari, eh bien, c'est quelque chose qui

  4   se trouve au numéro 14 du document 2511. Et là, à nouveau, nous n'avons pas

  5   reçu d'information concernant les auteurs éventuels, la façon dont les

  6   dégâts ont été infligés, ou bien la date. Eh bien, à nouveau, nous avons

  7   deux sources anonymes ouï-dire sur lesquelles s'est appuyé l'expert. Une

  8   source dit que la mosquée a été endommagée alors que l'autre dit que la

  9   mosquée n'avait pas été construite, en fait, que sa construction n'était

 10   pas achevée au moment où la guerre a commencé et que sa construction ne

 11   s'est jamais terminée.

 12   En ce qui concerne la troisième localité dans l'acte d'accusation, la

 13   mosquée de Srednja Trnova, c'est quelque chose qui se trouve au numéro 15

 14   du document P2511, eh bien, là, à nouveau, nous avons pas d'information

 15   suffisante quant aux auteurs ou la façon dont la destruction a eu lieu. En

 16   réalité, les résidents ont dit que cette mosquée était intacte au moment où

 17   ils sont partis et qui l'ont trouvée détruite quand ils sont revenus. A

 18   nouveau, la source de cette information est une source inconnue, il s'agit

 19   d'une déclaration par ouï-dire et qui est ouï-dire de deuxième main.

 20   Dans chacun de ces cas, les moyens de preuve fournis, au mieux, ne donnent

 21   aucun récit de première main qui serait en mesure d'identifier soit les

 22   auteurs, soit la façon dont ces mosquées ont été détruites pour étayer les

 23   allégations qui figurent dans l'acte d'accusation.

 24   Les autres éléments d'information ou de preuve concernant Bijeljina dans le

 25   rapport de Riedlmayer ne peuvent pas être retenus par la Chambre vu qu'ils

 26   n'ont pas été spécifiés dans l'acte d'accusation ou bien dans le mémoire

 27   préalable au procès.

 28   En ce qui concerne le Témoin RM513, eh bien, c'est un témoin protégé, un


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  1   témoin qui a déposé au sujet d'un autre sujet complètement différent, et au

  2   cours de sa déposition, il n'a pas du tout mentionné ces lieux du culte ou

  3   bien leur sort. P1054, c'est une pièce sous pli scellé. C'est la

  4   déclaration de ce témoin. Et suite à ce que vous nous avez demandé,

  5   Messieurs les Juges, je pense que c'est quelque chose qui est important

  6   pour le public. Et je vais parler de cette déclaration, mais sans pour

  7   autant identifier ce témoin, de sorte que le public puisse voir quels sont

  8   les moyens de preuve présentés par le Procureur.

  9   Dans le paragraphe 77 de cette déclaration, on ne mentionne pas de façon

 10   spécifique ces lieux du culte, les lieux du culte qui figurent dans l'acte

 11   d'accusation, mais on y dit plutôt que des sites sans nom ont été détruits.

 12   Et en ce qui concerne la source, voici ce que l'on dit :

 13   "Cette information a été relatée à Bijeljina."

 14   Donc, il s'agit là de rumeurs, il s'agit là des ouï-dire de sources

 15   inconnues. C'est le lieu que le Procureur a pu offrir par rapport à ces

 16   trois sites qui figurent dans le tableau D(1), soutenu par des récits non

 17   corroborés concernant d'autres sites qui ne figurent même pas dans l'acte

 18   d'accusation. Est-il juste de forcer l'accusé à répondre à de telles

 19   allégations ?

 20   Dans la décision 98 bis dans l'affaire Mrksic au niveau du compte rendu

 21   11311, 11312, les Juges de la Chambre, s'appuyant sur l'arrêt Jelesic, ont

 22   dit que la Chambre doit, à ce stade de la procédure, supposer que les

 23   moyens de preuve proposés par le Procureur "sont dignes de foi à moins

 24   qu'ils ne soient invraisemblables."

 25   "Autrement dit, dans le cadre de l'article 98, une Chambre de

 26   première instance doit accepter qu'il n'y ait pas de preuve qui va étayer

 27   un chef d'accusation précis en cause et qu'il ne peut pas justifier une

 28   détention de culpabilité, même si on considère les éléments de preuve de


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  1   l'Accusation à leur meilleur."

  2   Le Tribunal pénal international a émis un jugement dans l'affaire --

  3   un arrêt dans l'affaire Bosko Ntaganda, et je vais vous citer l'opinion

  4   dissidente de la Juge Van den Wyngaert qui, avant, siégeait au Tribunal.

  5   Voici ce qu'elle a dit :

  6   "Moi aussi, je considère que la Chambre de la mise en état II a commis une

  7   erreur quand elle s'est appuyée uniquement sur les ouï-dire anonymes qui

  8   sont contenus dans les communiqués de presse, les articles, des blogs et

  9   dans deux groupes d'experts de l'ONU. De tels moyens de preuve doivent être

 10   considérés avec beaucoup de précaution dans le contexte d'un procès au

 11   pénal et sans disposer de davantage d'informations, vérifiées de façon

 12   indépendante, on ne peut pas, de mon point de vue, retenir de tels éléments

 13   pour justifier la prolongation de la détention de M. Bosko Ntaganda.

 14   "Le Tribunal pénal international et les tribunaux ad hoc ont employé une

 15   approche flexible quand il s'agit de juger de l'admissibilité des moyens de

 16   preuve, car il s'agissait là d'une influence des droits civils sur un

 17   système accusatoire. Plutôt que de rejeter de façon systématique

 18   l'admissibilité de certaines catégories de moyens de preuve, les Juges ont

 19   disposé d'une discrétion très large quand il s'agissait de mettre en

 20   équilibre la valeur probante contre un éventuel effet préjudiciel. Donc, le

 21   fait que l'on n'exclue pas de façon automatique les ouï-dire anonymes ne

 22   veut pas dire que ces preuves deviennent des preuves fiables. On ne peut en

 23   juger qu'au cas par cas, et dans les cas de ouï-dire de source anonyme

 24   c'est une tâche difficile vu que l'on ne connaît pas la source de

 25   l'information … au Tribunal pénal international aussi, les Juges de mise en

 26   état et les Juges des Chambres de première instance relèguent de plus en

 27   plus les ouï-dire comme une source qui pourrait, au mieux, éventuellement

 28   corroborer d'autres éléments de preuve, plutôt que de les accepter comme


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  1   une source d'information fiable qui a une valeur probante significative en

  2   soi."

  3   Ensuite, elle conclut :

  4   "Ce qu'il faut souligner, cependant, est que cette approche plus

  5   prudente par rapport aux éléments de preuve de source anonyme et par ouï-

  6   dire, que ce n'est pas quelque chose qui doit dépendre du caprice des

  7   Juges. Au contraire, avec ceci on se rapproche encore davantage de ce

  8   critère qui aurait toujours dû être utilisé quand il s'agit d'évaluer de

  9   tels éléments de preuve car, en vérité, je ne connais aucun autre système

 10   pénal, qu'il s'agisse d'un système national ou international, où on accorde

 11   une valeur probante importante aux éléments de preuve par ouï-dire et de

 12   source anonyme. Et je ne vois pas pourquoi ce Tribunal adopterait une

 13   approche différente et comment nous pourrions baser des décisions où il

 14   s'agit de déterminer de la liberté des individus sur des moyens de preuve

 15   qui sont fragiles par nature et qui ne sont pas d'une nature pour permettre

 16   à l'accusé de se défendre par rapport à de tels moyens présentés."

 17   Monsieur le Président, nous considérons que la logique de la Juge Van

 18   den Wyngaert s'applique aussi ici dans ce Tribunal, et surtout à ce stade

 19   de la procédure, quand il s'agit des allégations qui figurent dans l'acte

 20   d'accusation et qui n'ont pas été étayées par d'autres preuves mis à part

 21   par des ouï-dire de source anonyme.

 22   A présent, je voudrais parler de Kalinovik. C'est quelque chose que

 23   nous retrouvons au tableau D(6), il s'agit des quatre mosquées de Kalinovik

 24   et on soulève la responsabilité pénale individuelle du général Mladic par

 25   rapport à ces sites.

 26   Le Procureur, à nouveau, n'a pas été en mesure d'identifier des

 27   auteurs ou bien des personnes qui prouveraient que le général Mladic était

 28   responsable de cela. Il n'y a pas eu de documents à l'appui de cette


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  1   allégation, mais nous avons eu trois témoins - seulement trois témoins : M.

  2   Riedlmayer, RM035 et RM034. A nouveau, le Pr Riedlmayer n'a pas proposé

  3   d'éléments de preuve par rapport à ces quatre localités à Kalinovik dans sa

  4   déposition. Dans son rapport d'expert, P2513, quand il s'agit de Kalinovik,

  5   eh bien, on ne mentionne que la mosquée d'Ulog, on ne mentionne pas les

  6   trois autres mosquées. En ce qui concerne la mosquée d'Ulog, il n'est pas

  7   clairement dit qui a fait exploser cette mosquée, quand et pourquoi. Tout

  8   ce que l'on a dit c'est ce que ce sont des Serbes qui l'ont fait, et on l'a

  9   dit sur la base des informations qui viennent du Centre des études

 10   islamiques. A nouveau, nous avons là affaire à un ouï-dire de source

 11   anonyme.

 12   Quand on examine la pièce P2511, paragraphe 168, c'est là qu'on parle

 13   de la mosquée d'Ulog, et là nous n'avons pas d'élément d'information

 14   concernant l'auteur de cette destruction. Dans le paragraphe 169, on parle

 15   de la mosquée Hotovlje à Kalinovik. Là, à nouveau, il n'y a pas

 16   d'information quant aux auteurs ou la façon dont la destruction a eu lieu

 17   qui entraînerait une responsabilité au pénal. Les seules sources que l'on a

 18   énumérées pour ces informations éparses viennent du centre communautaire

 19   musulman, les archives, et puis d'un informateur anonyme qui a fait l'objet

 20   d'un entretien par le bureau du Procureur et qui a voulu rester anonyme

 21   pour des raisons de sécurité.

 22   Ce qui est important, c'est que ce même rapport d'expert de M.

 23   Riedlmayer conclut pour l'entrée 169, sur la base de sources indépendantes

 24   inconnues et multiples, qu'il n'y a jamais eu, jamais, de mosquée dans le

 25   village de Kutina. Et cela est important parce que la quatrième mosquée

 26   citée dans l'acte d'accusation pour Kalinovik est précisément cette mosquée

 27   inexistante à Kutina. Peut-être que l'on va m'accuser de trop anticiper,

 28   mais la troisième est la mosquée de Jesalica, qui ne se retrouve même pas


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  1   dans la base des données de M. Riedlmayer.

  2   Donc, après plusieurs années d'enquête, la meilleure thèse que

  3   l'Accusation puisse avancer s'agissant de Kalinovik repose sur des éléments

  4   de preuve provenant d'experts qui confirment qu'il n'y a pas de mosquée du

  5   tout à Kutina, et les dommages provoqués à ces mosquées ne portent que sur

  6   deux d'entre elles sur un total de quatre et sur le résultat d'auteurs

  7   inconnus, pour des raisons inconnues, et cetera.

  8   Passons à présent aux témoins. Le RM034 a déposé dans le prétoire sur un

  9   sujet totalement différent, mais on lui a posé quelques questions en

 10   passant sur des mosquées, et là encore ces questions étaient très

 11   imprécises. Mme Bibles, aux pages du compte rendu 1 838 et 1 839, a posé la

 12   question suivante :

 13   "Question : Pourriez-vous nous dire si vous étiez au courant des auteurs

 14   qui ont détruit les quatre mosquées à Kalinovik ?

 15   "Réponse : Les quatre mosquées de Kalinovik avaient été utilisées avant la

 16   guerre à l'exception de l'une d'entre elles, celle de Velisi [phon]. De

 17   1991 à 1995, les trois mosquées sur le territoire de la municipalité de

 18   Kalinovik ont été incendiées. Le minaret a été plastiqué, et celle du

 19   village" --

 20   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le nom du village.

 21   "Le témoin : -- et celle dans le village avoisinant a également été

 22   détruite."

 23   Le Juge Orie est intervenu à ce moment-là :

 24   "Juge Orie : Un instant, Monsieur Hadzic. La question sur laquelle

 25   j'aimerais que vous vous concentriez est la suivante : qui a détruit les

 26   quatre mosquées ? On ne vous a pas demandé comment elles ont été détruites,

 27   mais qui l'a fait. Est-ce que vous avez connaissance de cela ?

 28   "Pourriez-vous répondre à la question ?


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  1   "Le témoin : J'ai une réponse. C'est l'armée serbe qui l'a fait."

  2   Tout d'abord, on n'a absolument pas identifié les mosquées qui les

  3   lieraient aux quatre mosquées reprises dans l'acte d'accusation. L'expert

  4   Riedlmayer nous a dit que l'une d'entre elles, l'une des quatre, n'avait

  5   jamais existé et que deux sur quatre ont été endommagées. La déposition de

  6   RM034, donc, ne peut pas être digne de foi. Nous n'avons rien qui pourrait

  7   nous permettre d'établir un crime. Là encore, ce sont des rumeurs, des ouï-

  8   dire anonymes, des éléments de preuve qui ne sont pas dignes de foi.

  9   Le Témoin RM035 n'a pas déposé en l'espèce, mais une déclaration écrite a

 10   été déposée au titre de l'article 92 bis du Règlement. Cette déclaration ne

 11   parle absolument pas de mosquées et a été expurgée en application du fait

 12   jugé numéro 746.

 13   Ce fait jugé repris du jugement Krajisnik dit à peine que "les

 14   mosquées de Kalinovik, à savoir Ulog, Hotovlje, Kutina et Jesalica, ont été

 15   détruites pendant la guerre." Ce fait jugé est contesté par le rapport

 16   d'expert de Riedlmayer parce que la mosquée de Kutina n'a même pas existé.

 17   Il est certain que nous ne sommes pas arrivés à un point où la Défense

 18   puisse monter une défense contre la thèse de l'Accusation, qui, pour la

 19   plupart, se base sur un fait jugé, et ce fait jugé ne nous donne rien sur

 20   la façon dont les auteurs auraient endommagé ou détruit les mosquées, et

 21   cela a été renversé par le seul expert qui ait déposé jusqu'à présent. Est-

 22   ce que cela entre dans l'esprit et l'intention de l'article 98 bis du

 23   Règlement que de retirer ces accusations ? Eh bien, je dirais que les Juges

 24   de la Chambre devraient annuler cette accusation conformément à l'objectif

 25   et à la fonction de cette disposition.

 26   Regardons à présent Pale, qui se retrouve à l'annexe D(10) de l'acte

 27   d'accusation, dans laquelle trois mosquées sont reprises, Praca, Podvitez

 28   et Bogovici. Le mémoire préalable au procès de l'Accusation, page 12 de


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  1   l'annexe B, tableau 10, n'identifie absolument pas les auteurs présumés. Un

  2   document, le document 13410 de la liste 65 ter, et trois témoins sont

  3   identifiés pour étayer les éléments de preuve repris dans ce chef

  4   d'accusation. Et, Messieurs les Juges, vous ne serez pas surpris de savoir

  5   que le document en question n'a pas été admis au dossier l'espèce. L'un des

  6   témoins repris est le Pr Riedlmayer. Le Pr Riedlmayer n'a pas pu donner,

  7   lors de sa déposition dans le prétoire, des éléments de preuve substantiels

  8   sur ces localités de Pale.

  9   La pièce P2513, son rapport d'expert, ne fait non plus aucune

 10   référence à ces trois emplacements. La pièce P2511, quant à elle, la base

 11   de données du Pr Riedlmayer, au numéro 172, concerne la mosquée de Praca.

 12   Là encore, la seule source est "fondée sur les dossiers du centre

 13   communautaire islamique…" et il n'y a aucune information quant aux auteurs

 14   des dommages ni à l'objectif de ces dommages.

 15   La mosquée de Podvitez est reprise au point 173 de la pièce P2511. Et, là

 16   encore, la seule source se fonde sur les dossiers du centre communautaire

 17   islamique, et il n'y a pas d'information quant aux auteurs des dommages ni

 18   à l'objectif de ces derniers.

 19   La mosquée de Bogovici est reprise au numéro 174 de la pièce P2511. Là

 20   encore, la seule source provient des dossiers du centre communautaire

 21   islamique, et il n'y a pas d'information quant aux auteurs des dommages ni

 22   à l'objectif de ces derniers. Il s'agit donc là d'informations anonymes

 23   recueillies par ouï-dire qui ne répondent même pas aux critères minimums

 24   permettant d'apprécier la responsabilité pénale.

 25   Penchons-nous sur les témoins à présent. Le Témoin RM111 a déposé en

 26   l'espèce, et lors de l'interrogatoire principal, aux pages 3 148 et 3 149,

 27   on lui a posé la question suivante :

 28   "Question : Et dans votre déclaration, vous dites, Monsieur, que vous avez


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  1   entendu dire après votre départ que les mosquées de Pale avaient été

  2   détruites. Vous avez fait référence à la période couvrant juillet à

  3   septembre 1992. Qui contrôlait Pale à ce moment-là ?"

  4   La réponse : "A ce moment-là, Pale était sous le contrôle du Parti

  5   démocratique serbe."

  6   Là encore, des informations anonymes, des ouï-dire. Et cela est confirmé

  7   dans le contre-interrogatoire, page du compte rendu 3 155, le témoin

  8   déclare qu'il a appris tout cela après la guerre de personnes inconnues. Là

  9   encore, rien ne précise qui étaient les auteurs, mis à part le fait qu'il

 10   les ait appelés les forces serbes.

 11   La déclaration en vertu de l'article 92 ter du Règlement du témoin, dans la

 12   pièce P260, au paragraphe 79, affirme que ces mosquées ont été détruites

 13   après le départ du témoin de Pale et que ces informations sont "connues de

 14   tous" à Pale. Là encore, ce sont des rumeurs et des ouï-dire anonymes et

 15   inconnus.

 16   L'autre témoin qui est repris dans le mémoire préalable au procès de

 17   l'Accusation pour Pale est le Témoin RM619. Messieurs les Juges, le Témoin

 18   RM619 était Mme Ewa Tabeau, l'experte démographe, qui n'a apporté aucun

 19   élément de preuve sur les mosquées. Donc, il nous reste les éléments de

 20   preuve que j'ai déjà abordés, on peut à peine les étiqueter d'éléments de

 21   preuve, et il est certain que ces éléments de preuve ne sont pas dignes de

 22   foi. Il ne s'agit pas du type de thèse qui pousserait les Juges de la

 23   Chambre à demander à la Défense de dépenser ses ressources pour répondre à

 24   cela.

 25   Messieurs les Juges, comme notre temps est limité, je vous ai parlé de

 26   trois des 11 municipalités reprises dans l'annexe D et je démontrerai que

 27   la thèse de l'Accusation est déficiente pour chacun de ces points. Alors,

 28   je vous demanderais d'étudier minutieusement les éléments de preuve


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  1   s'agissant des chefs d'accusation qui restent et de les rejeter.

  2   La Défense n'a pas adopté d'approche globale s'agissant des chefs

  3   d'accusation pour lesquels elle demande un acquittement juste pour la

  4   gloire, elle conteste tout cela car elle estime qu'il n'y a pas d'éléments

  5   de preuve capable de justifier une déclaration de culpabilité telle que

  6   l'Accusation l'avance. Et pour ce genre de cas isolés, l'approche examinant

  7   les accusations sous-tendant les chefs est l'approche qui convient, et le

  8   voile juridique devrait être levé comme étant une exception à la règle vu

  9   que cette approche correspond à l'objectif et à l'intention de l'article.

 10   En gardant cela à l'esprit, comme la Défense a montré que l'Accusation n'a

 11   pas pu présenter d'éléments de preuve capable de justifier une déclaration

 12   d'admission de culpabilité s'agissant des incidents du fleuve Jadar et

 13   Sirokaca et de l'annexe D, la Défense demande instamment aux Juges de la

 14   Chambre de prononcer un acquittement pour ces chefs d'accusation et de dire

 15   clairement que les allégations qui sont incapables de justifier une

 16   déclaration de culpabilité à ce stade du procès seront éliminés de l'acte

 17   d'accusation pour garantir que les ressources de la Défense ne sont pas

 18   gaspillées, qu'un procès équitable ait lieu, et que l'Accusation ne puisse

 19   se cacher derrière ce voile juridique pour faire passer subrepticement des

 20   allégations pour lesquelles elle ne dispose d'aucun élément de preuve

 21   capable de justifier une déclaration de culpabilité.

 22   Conformément à la jurisprudence et adhérant à l'approche fondée sur des

 23   chefs d'accusation, la disposition n'a plus aucune valeur et le droit de

 24   l'accusé à un acquittement à ce stade-ci de la procédure pour les chefs

 25   d'accusation que l'Accusation n'a pas pu étayer ne peut pas être acceptée.

 26   Aujourd'hui, Messieurs les Juges, vous avez l'occasion de déclarer

 27   clairement que la disposition va au-delà d'une disposition qui adhère et

 28   qui répond à la rhétorique d'un procès équitable. Pour pouvoir poursuivre


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  1   véritablement des criminels devant la justice, le procès équitable doit

  2   être menée d'une façon qui protège les droits de l'accusé. Vous avez

  3   l'occasion de montrer qu'une lutte contre l'impunité ne sera pas exploitée

  4   comme slogan pour justifier l'interprétation de dispositions qui

  5   limiteraient les droits de l'accusé et qui permettraient à l'Accusation

  6   d'entrer dans une croisade et de se cacher derrière des arguments pour

  7   lesquels il n'y a absolument aucun élément de preuve.

  8   L'acte d'accusation, au paragraphe 34, cite les articles 7(1) et 7(3) du

  9   Statut portant sur l'entreprise criminelle commune et la responsabilité en

 10   tant que supérieur hiérarchique du général Mladic, car il n'a pas pris les

 11   mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher et punir les crimes

 12   reprochés qui auraient été commis par les forces de la VRS et les forces

 13   serbes sous son contrôle effectif. L'acte d'accusation, au paragraphe 12,

 14   identifie les forces serbes comme étant les membres des organes

 15   gouvernementaux et politiques des Serbes de Bosnie, les membres du MUP, de

 16   la VRS, de la JNA, de la VJ, de la TO, du MUP serbe, des forces

 17   paramilitaires serbes et serbes de Bosnie et unités de volontaires, ainsi

 18   que des Serbes de Bosnie du cru. En l'essence, cet acte d'accusation ne

 19   porte pas sur le général Mladic uniquement, mais sur chaque Serbe, une

 20   objection que la Défense a soulevée dès le début du procès car il n'y avait

 21   pas suffisamment de détails ni de respect de la notification en vertu de la

 22   jurisprudence découlant de la thèse de l'Accusation.

 23   Et nous aimerions rappeler aux Juges de la Chambre la jurisprudence du

 24   TPIR, l'affaire Bagambiki de 2004, qui a fixé un critère très élevé de

 25   spécificité pour l'entreprise criminelle commune visée dans les actes

 26   d'accusation. La Chambre de première instance, dans cette affaire-là, a

 27   établi clairement que l'Accusation devait détailler dans l'acte

 28   d'accusation quelle forme de l'entreprise criminelle commune elle avançait,


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  1   ainsi que l'objectif de l'entreprise, l'identité des co-auteurs, et la

  2   façon dont l'accusé avait participé à l'entreprise; il s'agit là du

  3   paragraphe 34 du jugement.

  4   Cependant, nous avons encore cette définition large. Il faudrait à

  5   présent se pencher sur les éléments de preuve qui ont été présentés pour

  6   essayer de réduire cette allégation large qui permettrait de correspondre

  7   aux éléments de preuve qui ont été présentés et pour lesquels un procès

  8   pourrait continuer.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je vais vous interrompre.

 10   Vous avez fait référence au paragraphe 34 de l'acte d'accusation --

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Du jugement.

 12   M. IVETIC : [interprétation] Oui. Il s'agit du jugement Bagambiki, Monsieur

 13   le Président, 2004, affaire ICTR-99-46-T, 25 février 2004.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, le paragraphe avant cela, vous avez

 15   parlé de l'acte d'accusation, paragraphe 34, qui fait référence aux

 16   articles 7(1) et 7(3) portant respectivement sur l'entreprise criminelle

 17   commune et la responsabilité au titre de supérieur hiérarchique contre le

 18   général Mladic.

 19   M. IVETIC : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, c'est de cet article-là que je

 21   parle. Je me demande comment il conviendrait de lire le paragraphe 34

 22   disant qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires et raisonnables pour

 23   empêcher que les crimes soient commis, ce qui veut dire que d'autres

 24   personnes auraient commis les crimes et que ces autres personnes seraient

 25   responsables au titre des articles 7(1) ou 7(3); ou est-ce que vous

 26   entendez par là que le paragraphe 34 inclut également une accusation portée

 27   contre le général Mladic, car il aurait commis les crimes au titre de

 28   l'article 7(1), au titre de n'importe quel mode de responsabilité de


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  1   l'article 7(1) ?

  2   Et je me tourne également vers M. Groome pour voir s'il a une explication à

  3   cet égard.

  4   M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que la

  5   réponse se retrouve dans le titre de ce passage. On limite clairement cela

  6   à l'article 7(3) du Statut. La responsabilité au titre de l'article 7(1) du

  7   Statut est discutée dans l'intégralité de l'acte d'accusation.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc, au paragraphe 34, la

  9   référence à l'article 7(1) du Statut porte principalement sur la

 10   responsabilité au titre de l'article 7(1) pour ceux qui étaient sous le

 11   commandement du général Mladic, ou s'agit-il de tous les aspects de cet

 12   article qui ne sont pas repris dans l'article 7(3), mais qui sont repris

 13   dans l'article 7(1) du Statut ?

 14   M. GROOME : [interprétation] Je pense que c'est l'interprétation la plus

 15   exacte, Monsieur le Président. Donc, pour que les choses soient claires et

 16   consignées au compte rendu, la responsabilité au titre de l'article 7(1) du

 17   Statut s'applique également à toutes les parties. Je pense que c'était le

 18   paragraphe 12 auquel Me Ivetic avait fait référence, là où nous avons

 19   défini les membres de l'entreprise criminelle commune et les personnes qui

 20   avaient mis en œuvre leurs intentions criminelles.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, cela éclaircit la question.

 22   M. IVETIC : [interprétation] C'est également comme cela que j'ai compris

 23   cela.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Veuillez continuer.

 25   M. IVETIC : [interprétation] Je crois qu'il est temps de faire une pause.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons faire une pause.

 27   Maître Ivetic, pourriez-vous nous donner l'indication du temps dont vous

 28   aurez besoin ? Je pense que des quatre points que vous vouliez soulevé,


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  1   vous avez déjà commencé le troisième ou pas ?

  2   M. IVETIC : [interprétation] Oui. Nous allons entamer le troisième point.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous êtes sur le point 3.

  4   Très bien. Est-ce que vous pensez que nous pourrions terminer aujourd'hui ?

  5   M. IVETIC : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, nous l'apprécions.

  7   Nous allons faire une pause, et nous reprendrons à midi 10.

  8   --- L'audience est suspendue à 11 heures 53.

  9   --- L'audience est reprise à 12 heures 11.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, veuillez continuer.

 11   M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Le bureau du Procureur n'a pas pu démontrer dans l'acte d'accusation, ni

 13   pendant le procès, qu'il avait identifié particulièrement les subordonnés

 14   sur lesquels le général Mladic aurait exercé un contrôle effectif de jure

 15   ou de facto et pour lesquels il est allégué qu'ils ont commis des actes

 16   criminels pour lesquels il aurait été responsable.

 17   De plus, s'agissant de Srebrenica, plus particulièrement s'agissant du

 18   génocide et des autres accusations, les paragraphes 21 et 22 de l'acte

 19   d'accusation nous disent que l'unité des Skorpions est reprise dans cette

 20   longue liste d'auteurs présumés sur lesquels le général Mladic aurait

 21   exercé un contrôle effectif et pour les actes desquels sa responsabilité

 22   serait engagée au titre des articles 7(1) et 7(3) du Statut, mais limité

 23   pour leur participation à Trnovo.

 24   Le paragraphe 34(A) de l'acte d'accusation fait valoir que le général

 25   Mladic n'a pas entamé d'enquêtes sur les allégations crédibles de crimes

 26   perpétrés par les forces serbes sous son contrôle effectif.

 27   Mais une position d'autorité d'un accusé ne peut pas mener à présumer

 28   automatiquement qu'il ou elle savait ou avait des raisons de savoir les


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  1   crimes pour lesquels une déclaration de culpabilité est demandée. Je cite

  2   là l'arrêt Delalic, paragraphe 313. L'élément mental "avait des raisons de

  3   savoir", tel que repris dans le Statut, n'implique pas automatiquement une

  4   obligation d'obtenir des informations, la responsabilité peut être imposée

  5   pour ne pas avoir délibérément essayé d'en trouver les raisons, mais pas

  6   pour ne pas avoir trouvé ces raisons de façon négligente. Et je cite là

  7   l'arrêt Blaskic, paragraphe 406. En fait, le bureau du Procureur n'a pas

  8   avancé une thèse valable pour l'élément de supérieur hiérarchique et le

  9   fait que "Mladic avait des raisons de savoir", et il n'a pas non plus

 10   obtenu d'élément de preuve pour cet élément-là, particulièrement s'agissant

 11   des auteurs qui n'appartenaient pas à la VRS et des autres auteurs. Dans

 12   cette partie, je demande à ce stade-ci de la procédure et au titre de

 13   l'article 98 bis du Règlement de retirer le mode de responsabilité en vertu

 14   des articles 7(1) et 7(3) du Statut comme des accusations car les éléments

 15   de preuve ne peuvent pas étayer ce mode de responsabilité.

 16   A titre liminaire, nous aimerions souligner qu'il ne semble pas y

 17   avoir d'élément de preuve crédible que l'Accusation ait présenté sur la

 18   participation de personnel de la VJ particulier pour les crimes allégués,

 19   encore moins des éléments de preuve sur la façon dont le personnel de la VJ

 20   aurait pu être subordonné au général Mladic. En conséquence, nous demandons

 21   que la responsabilité du général Mladic au titre des articles 7(1) et 7(3)

 22   du Statut soit retirée à ce stade-ci de la procédure pour les allégations

 23   portant sur l'activité de la VJ. S'agissant des autres auteurs allégués,

 24   nous pensons que la Chambre devrait se pencher sur les éléments de preuve

 25   réels qui ont été présentés par l'Accusation pendant la présentation de ses

 26   moyens à charge et apprécier s'il y a des éléments de preuve qui étayent la

 27   charge de la preuve requise au titre de l'article 98 bis du Règlement,

 28   démontrant que les unités de la VRS ou sous le commandement effectif du


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  1   général Mladic auraient commis les crimes pour lesquels il est accusé.

  2   L'Accusation n'a présenté aucun élément de preuve adéquat indiquant

  3   que le général Mladic aurait donné des ordres criminels à des individus qui

  4   sont prétendument les auteurs des crimes énoncés dans l'acte d'accusation.

  5   Effectivement, pour ce qui est de Srebrenica, le témoin expert de

  6   l'Accusation Richard Butler a confirmé que s'agissant du mois de juillet

  7   1995, ses recherches ne lui ont pas permis de trouver des documents ou

  8   ordres émanant du général Mladic donnant un ordre précis concernant

  9   l'exécution des prisonniers; pages du compte rendu d'audience 16 573 à 16

 10   574.

 11   Il faut rappeler qu'il n'y avait qu'un seul témoin qui a affirmé que

 12   le général Mladic avait participé personnellement à un des sites à

 13   Srebrenica, fournissant le tissu qui permettait de lier les mains des

 14   prisonniers; RM255, pages du compte rendu d'audience 1 177 à 1 178. Il

 15   s'agirait de, comme cela a été dit, le 16 juillet, et il s'agissait

 16   d'éléments de preuve qui n'ont pas été précédemment présentés par les

 17   autres témoins dans leur déclaration préalable.

 18   Il y a des éléments de preuve qui montrent que le général Mladic

 19   n'était pas en Bosnie entre le 14 et le 16 lorsqu'il participait, entre

 20   autres, à des réunions, par exemple, avec les négociateurs internationaux,

 21   et qu'il ait participé à un mariage à Belgrade. Effectivement, l'Accusation

 22   a stipulé que pendant cette période-là de temps, le général Mladic était

 23   loin de Srebrenica et, donc, n'était pas quelque part près de Pilica ou de

 24   ce témoin. Effectivement, lors de la déposition de RM255, l'Accusation, ou

 25   M. McCloskey, a dit :

 26   "Il y a peut-être une chose qui pourrait être utile. Je souhaitais

 27   simplement dire aux Juges de la Chambre que l'Accusation n'a pas

 28   l'intention de se reposer sur ces éléments de preuve les plus récents liés


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  1   au général Mladic ou Karadzic. Je souhaitais signaler cela de façon à ce

  2   que vous puissiez le voir. Je crois que nous lui avons posé la question --

  3   peut-être trop de questions posées à ce témoin, et nous n'allons pas nous

  4   fonder là-dessus."

  5   Pages du compte rendu d'audience 1 179 à 1 180, tout de suite après la

  6   déposition de ce témoin sur la présumé participation personnelle du général

  7   Mladic. Donc, il est clair, Messieurs les Juges, que ce type d'éléments de

  8   preuve est invraisemblable en vertu du critère retenu dans le cadre de

  9   l'article 98 bis.

 10   Il n'y a pas d'élément capable d'indiquer que le général Mladic a

 11   ordonné les crimes qui ont été commis.

 12   Je souhaite également me concentrer sur les crimes commis par les

 13   paramilitaires et autres qui n'étaient pas membres de la VRS. Je souhaite

 14   démontrer que le général Mladic n'avait pas de contrôle effectif,

 15   s'agissant particulièrement des Tigres d'Arkan et les forces du MUP.

 16   Lors de plusieurs événements, soit les auteurs n'ont jamais été identifiés,

 17   soit ils ont été identifiés en tant que paramilitaires ou membres de la

 18   police. Le dossier montre que le général Mladic, dès le 28 juillet 1992, a

 19   donné un ordre, P501 versé au dossier, appelant au désarmement des

 20   paramilitaires.

 21   L'ordre est particulièrement important et permet de démontrer que le

 22   général Mladic n'avait pas de mobile criminel et qu'il avait entrepris des

 23   efforts pour essayer de contenir et de punir les crimes commis par les

 24   paramilitaires. Cet ordre indique que si les intentions des paramilitaire

 25   étaient véritablement honorables, ces paramilitaires doivent se présenter à

 26   eux et devenir des soldats de la VRS soumis au contrôle et discipline de

 27   ces derniers. Pour ceux qui ont commis des crimes, il a été dit qu'ils ne

 28   peuvent pas être intégrés à l'armée, mais doivent être désarmés, arrêtés,


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  1   et des poursuites pénales doivent être lancées contre ces personnes. Ceux

  2   qui refusent de se soumettre à la discipline et au commandement de l'armée

  3   mais qui n'ont pas commis de crimes peuvent être arrêtés et escortés à la

  4   frontière. Il est clair que le général Mladic n'a pas participé à ces

  5   actions précédentes commises par ces différents paramilitaires. Des

  6   problèmes liés à la mise en œuvre de cet ordre sont manifestes au vu du

  7   document P5116 daté du 17 août 1992, où le général Mladic, encore une fois,

  8   demande aux unités subordonnées pourquoi elles n'ont pas informé ce dernier

  9   du désarmement des paramilitaires conformément au dit ordre.

 10   Ces groupes ont continué à sévir sur le territoire de la Republika Srpska

 11   au-delà du commandement et du contrôle du général Mladic, comme cela est

 12   étayé par la pièce P3095, datée du 23 septembre 1995, dans laquelle le

 13   général Mladic se plaint auprès du président de la Republika Srpska et de

 14   la police de la Republika Srpska des Tigres d'Arkan, qui étaient un groupe

 15   paramilitaire qui intervenait en dehors du commandement de l'armée et qui

 16   commettait des crimes, notamment contre des Musulmans loyaux, et a demandé

 17   que le président et que la police prennent les mesures nécessaires contre

 18   ce groupe étant donné que ce groupe intervient apparemment en tant que

 19   membre de la police du MUP et conformément à une directive du président

 20   Karadzic.

 21   Nous avons également au dossier la pièce P5133, datée du 26 septembre 1995,

 22   dans laquelle le MUP, Kovac, le ministre adjoint de la police du MUP, et un

 23   autre haut représentant de la police ont cherché à rencontrer le général

 24   Mladic pour résoudre "certains problèmes eu égard au commandement des

 25   troupes actuellement placées sous le MUP." Encore une fois, au vu de la

 26   date de ce document, il est clair quel est le sujet de ce dernier.

 27   Par la suite, nous avons le P5065, daté du 19 octobre 1995, un autre ordre

 28   émanant directement du général Mladic et concernant le fait de déplacer ou


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  1   de chasser les paramilitaires, qui se lit comme suit :

  2   "Toutes les formations paramilitaires et les individus qui refusent

  3   d'être subordonnés à la VRS doivent quitter le territoire de la RS à la

  4   date du 20 octobre 1995 à midi au plus tard.

  5   "Tous les dispositifs techniques militaires obtenus illégalement,

  6   équipement de combat, matériel militaire et autres, doivent être saisis et

  7   il faut leur remettre les récépissés correspondants.

  8   "Des enquêtes doivent être diligentées et des procédures adéquates

  9   lancées contre tous les délits illégaux qui sont commis, ainsi que tout

 10   manquement à la discipline et crimes commis."

 11   Encore une fois, il est clair, ne s'agissant pas seulement des Tigres

 12   d'Arkan mais de tous les paramilitaires, que ceux-ci n'intervenaient pas

 13   avec la bénédiction du général Mladic et qu'ils n'étaient pas placés sous

 14   son commandement et son contrôle et n'agissaient pas comme selon les

 15   intentions du général Mladic.

 16   L'expert militaire de l'Accusation, Theunens, a dit dans sa déposition sous

 17   serment que l'unité d'Arkan était resubordonnée au service de Sûreté de

 18   l'Etat, la DB, de la République de Serbie. Confer la page du compte rendu

 19   d'audience T20683 à T20684. Ce qui est corroboré par la pièce P3095 dont

 20   nous venons de parler. Aucun élément de preuve ne permet d'indiquer ou

 21   d'établir que par des moyens requis, le général Mladic est le commandant

 22   supérieur des services de Sûreté de l'Etat du MUP de Serbie. En

 23   conséquence, toutes les accusations qui avancent la responsabilité, celle

 24   des Tigres d'Arkan, doivent être rejetées, étant donné qu'à ce stade cette

 25   accusation ne peut être retenue.

 26   Comme les autres acteurs qui n'appartenaient pas à la VRS, il faut rappeler

 27   que nous avons au dossier la pièce P5052, qui est un ordre émanant du

 28   général Mladic daté du 2 juillet 1992 qui exprime son inquiétude quant au


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  1   fait qu'il y a des personnes armées non autorisées, qui portent un uniforme

  2   et qui agissent comme s'il s'agissait de représentants officiels de l'armée

  3   et de la police alors qu'ils commettaient des crimes, comme s'il s'agissait

  4   d'une mascarade. Et cet ordre est tout à fait clair, l'état-major ne donne

  5   que des ordres écrits et non pas des ordres oraux, que toutes les unités,

  6   les unités suspectes, doivent faire l'objection de vérification, et toutes

  7   les unités régulières doivent porter les uniformes qui conviennent, et que

  8   les unités doivent empêcher de tels imitateurs de combattre à moins qu'ils

  9   n'aient fait objet de vérification sur le plan de la sécurité et qu'ils

 10   aient un laissez-passer adéquat et puissent être intégrés à l'armée en tant

 11   que recrues régulières.

 12   Alors, parlons maintenant un petit peu des forces du MUP en tant que

 13   telles. S'agissant des événements de Srebrenica et effectivement des

 14   municipalités, quelques éléments de preuve ont été présentés par

 15   l'Accusation indiquant que les membres du MUP étaient responsables de

 16   crimes allégués contre le général Mladic. Quelques exemples qui viennent à

 17   l'esprit sont les meurtres dans l'entrepôt de Kravica et à Trnovo.

 18   Au vu des documents susmentionnés concernant les paramilitaires, nous

 19   constatons que le général Mladic n'exerçait un commandement et un contrôle

 20   effectif sur ces unités lorsque ces derniers intervenaient sous l'égide du

 21   MUP. La même chose vaut pour la police civile du MUP, une fois qu'ils aient

 22   terminé leurs opérations de combat.

 23   Alors, je vais maintenant aborder l'expertise du Témoin Theunens. Cet

 24   expert de l'Accusation explique le concept dans le cadre du règlement

 25   militaire de la RSFY de "Sadejestvo", ou action "coordonnée" lors des

 26   opérations, lorsque deux forces interviennent en parallèle sans qu'il y ait

 27   de véritable subordination. Pages du compte rendu d'audience 20 616 et 20

 28   617.


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  1   M. Theunens, de surcroît, explique le concept de la resubordination ou du

  2   rattachement du MUP aux unités de l'armée de la VRS, et ce, à des fins

  3   limitées; page du compte rendu d'audience 20 621. M. Theunens précise

  4   qu'une fois terminées les opérations de combat, la police reprend ses

  5   fonctions policières ainsi que les supérieurs, membres de la police. Et

  6   donc, les commandants de l'armée de la VRS dans la région ne peuvent, après

  7   cela, faire rapport sur les méfaits au MUP qu'en passant par les autorités

  8   policières, et les supérieurs hiérarchiques du MUP ont la responsabilité

  9   d'engager des actions disciplinaires ou autres actions contre les auteurs.

 10   Pages du compte rendu d'audience T20622 à 20625.

 11   Messieurs les Juges, nous avons constaté que le général Mladic a agi

 12   exactement de la sorte à l'égard des unités d'Arkan, tout ce qu'un

 13   dirigeant militaire peut faire à l'égard du personnel de la police qui

 14   n'est pas placé sous son autorité.

 15   Nous pensons que dans ces circonstances-là, les crimes qui sont allégués

 16   avoir été commis par les seuls membres du MUP, tels qu'à l'entrepôt de

 17   Kravica, doivent être rejetés dans le cadre de Mladic. Effectivement,

 18   l'enquêteur du bureau du Procureur Blaszczyk a confirmé la vidéo Petrovic

 19   qui suit les actions comme des unités de la police autour de Srebrenica, et

 20   une partie de la scène filme Kravica. M. Blaszczyk a confirmé qu'on ne peut

 21   voir nullement le général Mladic sur cette vidéo concernant ces éléments-

 22   là. Page du compte rendu d'audience T12373.

 23   Un autre point que je souhaite signaler, le soi-disant groupe des Skorpions

 24   à Trnovo, la vidéo tristement célèbre du meurtre de six individus. P2581

 25   correspond à la vidéo, qui a été montrée à plusieurs reprises par

 26   l'Accusation.

 27   Même si cette vidéo est épouvantable et répréhensible, les actions de ces

 28   Skorpions qui sont représentées dans ce film n'ont rien à voir avec le


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  1   général Mladic.

  2   L'enquêteur du bureau du Procureur Janc a déposé et a dit que Mladic

  3   n'était pas présent, qu'on ne l'a pas vu dans cette vidéo des Skorpions, et

  4   son nom n'est pas mentionné non plus par les auteurs filmés comme étant

  5   quelqu'un qui aurait ordonné ces meurtres. Page du compte rendu d'audience

  6   15 373 [comme interprété].

  7   La meilleure preuve présentée à cette Chambre qui permet de jeter la

  8   lumière sur les événements de Trnovo était très claire et permettait de

  9   disculper le général Mladic d'une quelconque participation à ce crime. Les

 10   éléments de preuve sont clairs que les auteurs, les Skorpions, n'ont jamais

 11   mentionné le nom du général Mladic, mais ont été très clairs et ont indiqué

 12   que leurs supérieurs hiérarchiques étaient la DB serbe et le ministre

 13   adjoint du MUP pour la Krajina serbe. Pages du compte rendu d'audience 18

 14   710 et 18 711. Les éléments de preuve portant sur Trnovo sont également

 15   clairs, à savoir que l'unité des Skorpions intervenait dans le cadre d'une

 16   action concertée, comme décrit par M. Theunens, plutôt que d'être

 17   resubordonnée à la VRS. Pages du compte rendu d'audience 18 715 à 18 717.

 18   Les auteurs, les Skorpions eux-mêmes, n'étaient pas engagés de façon

 19   conjointe avec la RS à l'époque, mais étaient plutôt décrits comme étant

 20   des gardes du corps, un chauffeur, un mécanicien, un membre du personnel en

 21   cuisine, et il s'agissait d'actes individuels ou personnels. Pages du

 22   compte rendu d'audience 18 729 à 18 730. Les éléments de preuve montrent

 23   clairement que ces auteurs ont été jugés et que ces derniers purgent leur

 24   peine en Serbie.

 25   Le général Mladic n'a exercé aucun rôle s'agissant de donner des ordres de

 26   participer à ces meurtres. Les auteurs ne lui étaient pas subordonnés, et

 27   donc, il ne pouvait pas leur imposer des mesures disciplinaires. Aucun

 28   élément de preuve n'a été présenté permettant d'indiquer que le général


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  1   Mladic était au courant de ces crimes. En conséquence, cette accusation

  2   doit être rejetée.

  3   Un autre sujet que je souhaite aborder est Tomasica, nous avons entendu

  4   l'Accusation affirmer qu'il s'agissait d'une fosse commune qui, d'après les

  5   carnets de Mladic, avoue sa culpabilité. Sauf votre respect, P358, page 154

  6   du e-court, le carnet en question cité par l'acte d'accusation n'étaye pas

  7   la thèse de l'Accusation. Dans ce carnet, on parle à Mladic d'un

  8   représentant de la police et de ses commentaires concernant Tomasica. Le

  9   général Mladic est tout à fait clair que la VRS ne sait rien au sujet de

 10   ces corps et que la police essaie de leur faire porter la responsabilité de

 11   ces méfaits. Le général Mladic enjoint qu'une enquête soit diligentée

 12   concernant ces corps. Encore une fois, il s'agit de crimes commis par la

 13   police, qui ne relève pas de son contrôle effectif et, donc, ces éléments

 14   de preuve ne peuvent pas conduire à la responsabilité pénale de Mladic en

 15   tant que commandant et chef d'état-major de la VRS.

 16   Je vais maintenant aborder l'événement qui se trouve à l'annexe A(7.5) de

 17   l'acte d'accusation, Skrljevita - S-k-r-l-j-e-v-i-t-a - un témoin a été

 18   cité à la barre concernant cet événement : Grgo Stojic. Vous vous

 19   souviendrez, Messieurs les Juges, que lors de la déposition de ce témoin,

 20   on a découvert que les auteurs de ce crime n'a jamais une seule fois

 21   mentionné le nom du général Mladic; page du compte rendu d'audience 4 125 à

 22   4 126. En outre, il a été démontré par le témoin lui-même que les

 23   principaux auteurs en question étaient âgés de 15 à 17 ans respectivement à

 24   l'époque de la commission des crimes, ce qui nous permet de conclure qu'il

 25   ne s'agissait pas de soldats de la VRS. Et que l'autre auteur allégué,

 26   arrêté et poursuivi par les autorités de la Republika Srpska, ne pouvait

 27   pas en réalité être identifié par ce témoin. Page du compte rendu

 28   d'audience 4 112 à 4 120.


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  1   Effectivement, à la page du compte rendu d'audience 4 109 à 4 110, le

  2   témoin a confirmé que le tribunal militaire de Banja Luka, déjà au mois de

  3   novembre 1992, avait ordonné que tous les auteurs allégués soient placés

  4   sous la garde du tribunal pour des enquêtes diligentées pour le meurtre peu

  5   après la commission du crime.

  6   A la page du compte rendu d'audience 4 110 à 4 111, le témoin a confirmé

  7   que la police militaire de la VRS a identifié les auteurs, notamment les

  8   mineurs qui ne faisaient pas partie de l'armée, et a diligenté une enquête

  9   sur site. La pièce P369 correspond à l'acte d'accusation qui a été dressé

 10   contre les auteurs, condamnant ce crime par ce tribunal militaire.

 11   Messieurs les Juges, il n'y a pas de preuve vraisemblable qui permet

 12   d'indiquer que des personnes subordonnées à et placées sous le commandement

 13   et contrôle effectif du général Mladic aurait pu avoir commis ce crime ou

 14   que les organes militaires placés sous son contrôle ont omis de diligenter

 15   une enquête et de poursuivre les auteurs. En conséquence, cette accusation

 16   doit être rejetée.

 17   J'ai mis en exergue des exemples concrets et clairs. Aux fins du

 18   compte rendu d'audience, la thèse de l'Accusation telle qu'elle a été

 19   présentée parle de paramilitaires et de personnel du MUP en tant

 20   qu'auteurs, d'après les événements qui sont décrits à l'annexe A de l'acte

 21   d'accusation : 3.3, Kljuc; 6.7 et 6.8, Prijedor; 9.1, Vlasenica.

 22   Les éléments de preuve présentés par l'Accusation ne permettent pas

 23   d'identifier les auteurs ou d'établir une distinction entre les auteurs

 24   s'agissant des événements suivants repris dans l'annexe 1 : 6.1 à Prijedor;

 25   6.5 à 6.6, Prijedor; 6.9, Prijedor; 7.3, Sanski Most.

 26   La thèse de l'Accusation telle qu'elle a été avancée parle de

 27   paramilitaires ou de MUP du personnel comme étant les auteurs desdits

 28   crimes d'après l'annexe B suivants de l'acte d'accusation : 1.1, Sanski


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  1   Most; 1.2, Sanski Most; 10.1 et 10.2, Novi Grad; 13.1 à 13.4, Prijedor;

  2   16.2, Vlasenica.

  3   Les éléments de preuve ne permettent pas d'identifier les auteurs en

  4   particulier ou d'établir une distinction entre eux, s'agissant de l'annexe

  5   B, 2.1, Bijeljina.

  6   Pour ce qui est des centres de détention, la Défense a fait valoir

  7   qu'Omarska et Keraterm étaient des installations de la police.

  8   Et compte tenu des éléments de preuve présentés, la thèse de

  9   l'Accusation ne peut être retenue s'agissant de ces accusations.

 10   Il est allégué que le général Mladic a été membre-clé ou auteur

 11   principal dans le cadre d'une entreprise criminelle commune principale qui

 12   aurait duré depuis octobre 1991 jusqu'au 30 novembre 1995, et que

 13   l'objectif de cette entreprise criminelle commune était de chasser à jamais

 14   les Musulmans de Bosnie et les Croates de Bosnie du territoire revendiqué

 15   par les Serbes de Bosnie. Je me réfère au paragraphe 5 de l'acte

 16   d'accusation. L'acte d'accusation allègue de manière additionnelle, mais

 17   reliée à la première, l'existence d'une entreprise criminelle commune qui

 18   aurait pour objectif d'éliminer les Musulmans de Bosnie de Srebrenica et de

 19   répandre la terreur parmi les civils de Sarajevo; il s'agit du paragraphe 6

 20   dans l'acte d'accusation. Il est allégué que le général Mladic a partagé

 21   l'intention de commettre le génocide, la persécution, l'extermination, le

 22   meurtre, l'expulsion, et le transfert forcé avec les autres membres de

 23   cette entreprise criminelle commune; il s'agit là du paragraphe 8 de l'acte

 24   d'accusation. A titre subsidiaire, il est allégué que le général Mladic

 25   était en mesure de prévoir que le crime de génocide risquait d'être

 26   perpétré par un ou par plusieurs membres de cette entreprise criminelle

 27   commune et qu'il a délibérément pris ce risque; paragraphe 9 de l'acte

 28   d'accusation.


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  1   La Défense conteste les éléments de preuve qui ont été utilisés comme

  2   base par l'Accusation par rapport au mode de responsabilité, à savoir la

  3   troisième catégorie de l'entreprise criminelle commune dans le cadre de ses

  4   arguments au titre de l'article 98 bis pour affirmer que la thèse de

  5   l'Accusation ne peut pas être retenue. Notre position est que l'Accusation

  6   n'a pas présenté des éléments suffisants pour une déclaration de

  7   culpabilité étayant le chef d'accusation selon lequel le général Mladic

  8   aurait partagé ou aurait eu pour intention de réaliser l'objectif commun de

  9   l'entreprise criminelle commune.

 10   La Défense tient à rappeler les opinions séparées et dissidentes des

 11   Juges Hunt et Bennouna dans l'affaire Celebici :

 12   "La fonction fondamentale du droit pénal est de sanctionner l'accusé pour

 13   son comportement criminel, et seulement pour ce comportement. Nous estimons

 14   que la prise en compte d'éléments si abstraits crée un risque, celui que

 15   l'accusé soit également reconnu coupable d'autres crimes alors qu'ils ne

 16   doivent leur existence purement juridique et abstraite qu'aux accidents de

 17   l'histoire et au développement par vagues du droit international

 18   humanitaire dans des conditions contextuelles distinctes. C'est avant tout

 19   l'évolution du droit international humanitaire qui explique les articles du

 20   Statut, englobe des crimes distincts, quoique se recoupant fréquemment, et

 21   non pas le fait que les articles en question sont censés exposer des corps

 22   de règles de droit pénal réellement distincts en droit international

 23   humanitaire contemporain."

 24   Devant ce Tribunal, la Chambre d'appel dans l'affaire Tadic a affirmé qu'il

 25   était approprié d'appliquer la notion d'objectif commun uniquement par

 26   rapport à l'entreprise criminelle commune lorsque les critères suivants

 27   s'appliquent : premièrement, l'intention de prendre part à l'entreprise

 28   criminelle commune et de contribuer, individuellement et collectivement, à


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  1   l'objectif délictueux de cette entreprise; et deux, le caractère prévisible

  2   de la perpétration éventuelle par un autre membre du groupe de crimes qui

  3   ne constituaient pas l'objet du but criminel commun. Paragraphe 220 de

  4   l'arrêt de la Chambre d'appel dans l'affaire Tadic.

  5   Avec votre autorisation, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  6   je me pencherai sur les éléments de preuve qui portent sur le critère

  7   d'après lequel le général Mladic a délibérément rejoint l'entreprise

  8   criminelle commune et aurait partagé et réalisé l'objectif commun de celle-

  9   là. Par la suite, je me pencherai sur les éléments de preuve qui portent

 10   sur le critère selon lequel le général Mladic aurait prévu la commission du

 11   crime de génocide.

 12   Nous affirmons que l'Accusation n'a pas démontré que l'accusé a

 13   rejoint de manière délibérée l'entreprise criminelle commune. Le simple

 14   fait que le général Mladic ait eu des fonctions au sein de la VRS ne peut

 15   pas être utilisé en tant qu'élément de preuve principal pour en déduire sa

 16   responsabilité pénale. Faisant cela signifierait qu'on s'inscrirait en

 17   contradiction par rapport au principe de responsabilité personnelle. Plutôt

 18   que d'opérer une distinction entre l'accusé et les crimes spécifiques pour

 19   lesquels il est jugé, ce concept dégénère pour devenir un leurre qui, en

 20   fait, dissimule -- ou, plutôt, qui obscurcit ce lien très ténu entre le

 21   général Mladic et les actes pour lesquels il est jugé. Une position

 22   d'autorité d'un accusé ne peut pas permettre d'en déduire de manière

 23   automatique ce qu'il ou elle savait ou avait raison de connaître les crimes

 24   pour lesquels on demande une déclaration de culpabilité. L'élément moral

 25   "avait raison de savoir" ne suppose pas nécessairement qu'un supérieur a

 26   l'obligation de s'informer. Il souligne qu'un supérieur peut être tenu

 27   responsable pour s'être délibérément abstenu de se renseigner, mais pas

 28   pour avoir négligé de le faire. Affaire Blaskic, paragraphe 406.


Page 20773

  1   Nous affirmons que l'Accusation n'a pas démontré que le général

  2   Mladic était d'accord ou qu'il a apporté son soutien à l'objectif commun de

  3   la troisième catégorie de l'entreprise criminelle commune pour ce qui est

  4   du crime de génocide. La Défense reconnaît que le cadre de l'entreprise

  5   criminelle commune de catégorie III n'est pas entièrement réglé dans le

  6   droit pénal international. A l'appui, je cite la conclusion du Juge

  7   Shahabuddeen dans le cadre de son opinion séparée dans l'arrêt Brdjanin, à

  8   savoir :

  9   "…l'auteur matériel doit être membre de l'entreprise criminelle

 10   commune pour qu'un membre de celle-ci soit pénalement responsable du crime

 11   commis par le premier pour réaliser l'objectif criminel commun. En

 12   affirmant la nécessité d'un accord exprimant l'intention des parties, cette

 13   approche respecte pour l'essentiel le principe qui veut que l'on ne soit

 14   responsable que de son propre fait…"

 15   Un accord qui serait une expression de l'intention des parties, tel

 16   qu'évoqué par le Juge Shahabuddeen, exige que l'Accusation prouve au-delà

 17   de tout doute raisonnable que l'accusé, par ses actes ou par son

 18   approbation, constitue partie d'un tel accord de l'entreprise criminelle

 19   commune. Opinion dissidente du Juge Shahabuddeen, dans son paragraphe 4. La

 20   Chambre de première instance dans l'affaire Krajisnik a estimé que les

 21   membres de l'entreprise criminelle commune devaient agir dans le cadre

 22   d'une action concertée, et je cite ici le jugement de première instance

 23   dans l'affaire Krajisnik, paragraphe 884, ainsi que l'arrêt dans l'affaire

 24   Krajisnik, paragraphes 192 à 194.

 25   La Défense reconnaît que cela constitue une jurisprudence établie

 26   devant ce Tribunal de déclarer coupable au titre de la troisième catégorie

 27   de l'entreprise criminelle commune pour des crimes exigeant l'existence de

 28   l'intention spécifique telle que génocide. Néanmoins, nous souhaiterions


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  1   nous attacher à l'opinion partiellement dissidente récemment rendue par le

  2   Juge Liu et la déclaration qu'il a faite dans le cadre de l'arrêt récent

  3   dans l'affaire Sainovic. Le Juge Liu reconnaît que l'intention de l'auteur

  4   requise dans le cadre du génocide va au-delà de ce qui est prohibé et qu'en

  5   tant qu'une conséquence de cela, l'élément moral requis pour les crimes

  6   exigeant l'existence de l'intention spécifique est incompatible avec le

  7   critère de dol éventuel, ou "advertent recklessness", appliqué à la

  8   troisième catégorie de l'entreprise criminelle commune. En l'absence de

  9   l'intention génocidaire spécifique prouvée, aucune déclaration de

 10   culpabilité pour génocide ne saurait être retenue. En outre, le Juge Liu

 11   considère que le Juge Antonio Cassese a raison lorsqu'il dit :

 12   "Tout un chacun qui est responsable au titre de la troisième

 13   catégorie de l'entreprise criminelle commune a un élément moral distinct de

 14   'l'auteur premier'. Il n'empêche que 'l'auteur secondaire' assume la

 15   responsabilité pour le même crime que l'auteur principal, la 'distance'

 16   entre l'élément subjectif des deux auteurs ne peut pas être aussi radicale

 17   que dans le cas des crimes qui exigent l'intention spécifique. Autrement,

 18   les notions cruciales de 'responsabilité personnelle' et de 'cause' ne

 19   seraient plus valables."

 20   La Défense affirme qu'à la lumière de la décision dissidente du Juge

 21   Liu, l'Accusation n'a pas fourni suffisamment d'éléments pour démontrer

 22   l'intention spécifique de la part du général Mladic, et, par conséquent, il

 23   a droit à ce que ce chef d'accusation soit rejeté.

 24   Les éléments de preuve démontrent que le général Mladic n'a pas partagé

 25   l'intention relative à l'existence d'un objectif commun. Le témoin de

 26   l'Accusation Manojlo Milovanovic, dans sa déposition du 19 septembre 2013,

 27   en a témoigné. Il a témoigné au sujet de la directive numéro 7, directive

 28   donnée et signée par le commandant suprême, M. Karadzic. Le général


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  1   Milovanovic explique que les commandants d'unité ne devraient pas prendre

  2   de mesures qui seraient fondées sur les directives émanant de Karadzic qui

  3   auraient dû être envoyées au général Mladic. Et, en l'occurrence, la

  4   directive numéro 7 a été envoyée à tous les commandants de corps d'armée.

  5   Nous avons ici un exemple de voies doubles dans le cadre de la chaîne de

  6   commandement. Les commandants de corps d'armée n'auraient pas dû réagir à

  7   la directive de Karadzic avant d'avoir reçu des ordres de Mladic qui

  8   auraient résulté de cette directive.

  9   La mission qui a été confiée au Corps de la Drina par le général Mladic

 10   dans la directive 7.1 n'est pas reprise de la directive numéro 7. Le

 11   général a en fait laissé tomber deux éléments qui figuraient dans la

 12   directive 7 : la première est la phrase controversée selon laquelle des

 13   conditions insupportables devaient être créées pour la population civile de

 14   Zepa et de Srebrenica; et le deuxième élément abandonné est la phrase qui

 15   porte sur la séparation de Srebrenica et de Zepa par la force. Le général

 16   Milovanovic affirme que l'accusé a exercé sa responsabilité personnelle

 17   lorsqu'il a pris la décision de ne pas exercer de pressions sur la

 18   population civile et, par conséquent, n'adopte pas tous les éléments de la

 19   directive 7 de Karadzic. Ce qui nous montre de manière manifeste que Mladic

 20   n'a pas partagé l'intention de détruire qui pourrait être attribuée à

 21   Karadzic comme émanant de la directive numéro 7.

 22   Qui plus est, la pièce à conviction P3095 qui porte sur l'exigence du

 23   général Mladic que l'autorisation de Karadzic soit retirée à la formation

 24   paramilitaire des Tigres d'Arkan nous montre que l'accusé n'a pas partagé

 25   l'intention de détruire, quelle qu'elle soit, qui aurait pu être attribuée

 26   à Karadzic ou à tout autre membre allégué de l'entreprise criminelle

 27   commune. L'exigence montre en particulier l'arrestation et les violences

 28   infligées aux non-Serbes et exige que le MUP prenne des mesures par rapport


Page 20776

  1   aux crimes qu'ils ont commis et qu'ils désarment cette formation qui agit

  2   en application de l'autorisation qui lui a été donnée par le commandant

  3   suprême Karadzic.

  4   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, les éléments de preuve nous

  5   montrent que l'accusé n'a pas partagé l'intention ni l'objectif commun de

  6   l'entreprise criminelle commune afin de chasser définitivement les

  7   Musulmans de Bosnie et les Croates de Bosnie du territoire revendiqué par

  8   les Serbes de Bosnie. Notre position est que l'Accusation n'a pas présenté

  9   suffisamment d'éléments démontrant le contraire.

 10   En outre, la Défense tient à rappeler la différence qui existe entre la

 11   responsabilité pénale d'un commandant et la responsabilité au titre de la

 12   troisième catégorie de l'entreprise criminelle commune, comme cela a été

 13   précisé par la Chambre d'arrêt dans l'affaire Brdjanin.

 14   Comme cela a déjà été affirmé, la Défense se penchera à présent sur le

 15   critère que le général Mladic aurait pu prévoir la commission du crime de

 16   génocide par d'autres membres allégués de l'entreprise criminelle commune.

 17   La Chambre d'arrêt dans l'affaire Tadic a affirmé que tous les membres de

 18   l'entreprise criminelle commune devaient avoir été en mesure de prévoir ce

 19   résultat. Et cette Chambre a constaté que plus qu'un acte de négligence est

 20   requis. Le critère qui s'applique à la troisième catégorie d'entreprise

 21   criminelle commune est le critère de dol éventuel. En l'absence d'accord

 22   entre les membre de l'entreprise criminelle commune, il existe le risque

 23   l'un ou plusieurs participants sortiront du cadre de l'objectif commun de

 24   l'entreprise. Une entreprise criminelle commune exige qu'il y ait une

 25   entente entre les participants et une attribution mutuelle de conduite

 26   parmi ceux-là. Notre position est que la doctrine de l'entreprise

 27   criminelle commune ne constitue pas un instrument approprié afin de

 28   supporter une déclaration de culpabilité de l'intention génocidaire


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  1   alléguée du général Mladic, et nous estimons que l'Accusation n'a pas

  2   présenté des éléments de preuve suffisants sur cette question. Nous pensons

  3   que cela correspond au raisonnement de la Chambre d'arrêt dans l'affaire

  4   Kvocka, aux paragraphes 91 à 92.

  5   L'acte d'accusation en l'espèce allègue que le général Mladic était au

  6   courant ou pouvait prévoir qu'un génocide allait se produire. La Chambre

  7   d'arrêt dans l'affaire Tadic s'est penchée sur cette même question et a

  8   déclaré que "l'incertitude dans l'esprit porte sur la question qui est de

  9   savoir si le génocide aurait en fait été commis et ne porte pas sur

 10   l'acceptation par l'accusé de celui-là même (si et à partir du moment où il

 11   a été commis) en tant que quelque chose qui aurait pu être 'prévu' par lui

 12   en tant que 'conséquence naturelle et prévisible' des activités de

 13   l'entreprise criminelle commune à laquelle il a participé."

 14   Il est important dans ce cadre de 98 bis, par rapport au caractère

 15   prévisible, de savoir que l'intention du général Mladic de commettre le

 16   crime de génocide doit comprendre l'intention spécifique de commettre un

 17   génocide même lorsqu'il ne savait pas si, oui ou non, un génocide serait

 18   commis. Et je tiens à rappeler que Tadic n'a pas été déclaré coupable du

 19   crime de génocide. Qui plus est, dans l'affaire Tadic en appel, il a été

 20   déclaré qu'il était nécessaire de démontrer l'intention et cela a été

 21   montré par les circonstances particulières de l'entreprise criminelle

 22   commune.

 23   Le Juge Cassese a partagé ce point de vue sur la prévisibilité. Il estime

 24   que le critère de prévisibilité n'est ni précis, ni fiable, et qu'il

 25   introduit pratiquement une forme de responsabilité stricte, comme si

 26   l'Accusation devait démontrer que le participant avait connaissance et a

 27   délibérément pris le risque d'un fait ou d'une circonstance spécifique, en

 28   éliminant la possibilité qu'un autre participant aurait pu commettre un


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  1   crime non concerté. Qui plus est, il a déclaré que :

  2   "Evidemment, si l'Accusation omet de le démontrer, ce chef d'accusation

  3   doit être rejeté. Il serait contraire aux principes d'un procès équitable

  4   d'inverser la charge de la preuve et d'exiger que la Défense démontre que

  5   l'accusé ne savait pas les faits pertinents et qu'il n'a pas non plus prévu

  6   le crime et a délibérément pris le risque qu'il soit commis." Là encore,

  7   page 117 dans le texte "Proper Limits of Individual Criminal Liability

  8   Under the Doctrine of JCE," par feu Juge Cassese.

  9   Dans son opinion dissidente en l'arrêt interlocutoire dans l'affaire

 10   Brdjanin, la décision se lit comme suit :

 11   "…la troisième catégorie de l'entreprise criminelle commune ne nous exempte

 12   pas de la nécessité de démontrer l'intention : cela fournit une modalité

 13   pour démontrer l'intention dans des circonstances particulières, à savoir

 14   par la preuve de ce qui pouvait être prévu dans ces circonstances."

 15   A la lumière de cette entente et de l'attribution mutuelle de la conduite

 16   des participants et des circonstances particulières qui entourent

 17   l'entreprise criminelle commune, la Défense voudrait attirer l'attention

 18   des Juges à la pièce P4283, à savoir à une décision qui a été rendue par le

 19   commandant suprême, Karadzic. Cette décision porte sur la tentative de

 20   Karadzic de réaffecter Mladic à une position à l'extérieur de l'état-major

 21   principal. Et cette tentative est corroborée par le témoin de l'Accusation,

 22   le général Milovanovic. Je souhaite citer la page 17 106 du compte rendu

 23   d'audience, où Milovanovic déclaration :

 24   "Karadzic s'est mis à parler, et il a parlé de rebaptiser l'état-major

 25   principal pour qu'il devienne l'état-major général. Je lui ai demandé, en

 26   fait, je lui ai demandé si toutes les personnes présentes devraient écouter

 27   cela, et il a dit que tous les autres devraient partir, sauf Krajisnik, et

 28   puis il m'a dit : Général, nous allons rebaptiser l'état-major principal


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  1   pour en faire l'état-major général. Le général Mladic sera remplacé et il

  2   deviendra le conseiller spécial en matière de défense pour la Republika

  3   Srpska et pour la République serbe de Krajina. Et j'ai répliqué en disant

  4   que je ne serai pas, moi, à la tête de l'état-major général. Et Krajisnik a

  5   ajouté : Radovan, laisse tomber. C'est une première action sur le coup. Et

  6   en tant que soldat, il lui faut bien accepter ses ordres. L'ordre est

  7   arrivé le lendemain, à savoir je l'ai refusé. Là encore, même par écrit,

  8   tous les généraux de la Republika Srpska l'ont refusé, ont signé une

  9   pétition à l'adresse de l'assemblée de la Republika Srpska. Et, c'est

 10   l'assemblée qui a nommé Ratko Mladic à la tête de l'état-major principal.

 11   Donc, seule l'assemblée peut le relever de ses fonctions, et pas le

 12   président."

 13   Sur la base de ce que je viens de dire, la conclusion la plus raisonnable

 14   au vu des éléments de preuve est que cette entente commune n'a pas existé,

 15   celle qui est alléguée par l'Accusation, et que la tentative du président

 16   de Karadzic de réaffecter Mladic montre dans ces circonstances qu'il essaie

 17   d'exclure l'accusé. Notre position est que l'Accusation n'a pas démontré

 18   par des éléments de preuve suffisants autrement.

 19   Je pense que le moment est venu de faire une pause. Nous pourrions peut-

 20   être faire une pause avant que je ne termine mon exposé.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si cela vous convient, nous allons faire

 22   une autre pause, et nous allons revenir à 13 heures 25.

 23   --- L'audience est suspendue à 13 heures 07.

 24   --- L'audience est reprise à 13 heures 26.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ivetic, si vous êtes prêt, vous

 26   pouvez poursuivre.

 27   M. IVETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Merci.

 28   Je voudrais, Monsieur le Président, attirer votre attention sur d'autres


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  1   éléments de preuve qui vont à l'encontre de l'existence de l'intention

  2   spécifique génocidaire du général Mladic. Je voudrais attirer votre

  3   attention sur le compte rendu de la 16e Session d'assemblée du 12 mai 1992

  4   dans lequel le président Karadzic a formulé six objectifs stratégiques du

  5   peuple serbe. Le Procureur a considéré que le président Karadzic avait

  6   formulé et promu le développement et la mise en œuvre du SDS et des

  7   politiques des Serbes de Bosnie qui avaient l'intention de mettre en œuvre

  8   l'objectif de l'entreprise criminelle commune, et que les six objectifs

  9   stratégiques sont la preuve de cette action concertée dans le cadre de

 10   l'entreprise criminelle commune.

 11   Nous considérons la même chose que ce qu'a considéré la Chambre dans

 12   l'affaire Sikirica. La Chambre de première instance dans l'affaire Sikirica

 13   a considéré que la doctrine générale des dirigeants serbes, y compris les

 14   six objectifs stratégiques, qui propageait la persécution à Prijedor était

 15   dirigée contre la communauté non-serbe, elle existait bel et bien, mais

 16   elle n'a pas trouvé qu'il y avait là-dedans l'intention génocidaire. Dans

 17   les Chambres Stakic et Krajisnik, les conclusions étaient les mêmes. Nous

 18   considérons que le Procureur n'a pas présenté de moyens de preuve pour

 19   rejeter cette conclusion et conclure autrement.

 20   De plus, le général Mladic était opposé à l'adoption des six

 21   objectifs stratégiques. Voici ce qu'il a dit :

 22   "Nous devons appeler chaque homme qui s'est penché pour toucher du

 23   front la terre, pour embrasser ce territoire, le territoire de cet Etat que

 24   nous souhaitons faire…"

 25   Et ensuite, il dit :

 26   "…mais cela ne veut pas dire que les Musulmans doivent être expulsés

 27   ou noyés…"

 28   Ce qu'il a dit là montre clairement qu'il n'avait pas l'intention et


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  1   qu'il ne participait pas à l'intention de la troisième catégorie supposée

  2   de l'entreprise criminelle commune.

  3   Lors de la session de travail de l'assemblée le 12 mai 1992 à Banja

  4   Luka, Mladic a dit clairement qu'il avait l'intention de vivre côte à côte

  5   avec les Musulmans de Bosnie et qu'il était contre le concept qu'il fallait

  6   expulser ou bien noyer les Musulmans. L'absence de cette intention, et elle

  7   est différente des autres membres impliqués dans l'entreprise criminelle

  8   commune, est corroborée par la déposition du Témoin Donia qui a dit dans sa

  9   déposition que Mladic a émis des mises en garde sévères contre les

 10   activités proposées par les dirigeants politiques serbes lors de la 16e

 11   Session de l'assemblée.

 12   De plus, il a bien dit que Mladic a fait toute une série de déclarations

 13   exprimant ses préoccupations quant aux objectifs formulés par les

 14   dirigeants politiques qui impliquaient l'administration serbe dans les

 15   zones où n'habitent pas les Serbes.

 16   La pièce P2141, en date du 25 octobre 1995, dans laquelle l'état-major

 17   principal de la VRS, le département chargé de la sécurité, a autorisé les

 18   unités subordonnées de participer à l'échange des prisonniers musulmans

 19   contre des prisonniers serbes, nie clairement toute possibilité de

 20   l'existence de l'intention de Mladic de détruire un groupe protégé des

 21   Musulmans de Bosnie et des Croates de Bosnie. De façon similaire, la pièce

 22   P2142, en date du 16 juin 1994, et P2543 [comme interprété], en date du 21

 23   janvier 1995, démontrent aussi que le département chargé de la sécurité de

 24   l'état-major principal de la VRS avait autorisé les négociations visant à

 25   procéder à l'échange des prisonniers musulmans contre des prisonniers

 26   serbes.

 27   De plus, nous avons aussi la pièce P8167, en date du 20 juillet 1995,

 28   il s'agit du procès-verbal de la réunion entre l'ONU et le général Mladic


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  1   qui dit clairement son intention d'échanger tous les prisonniers détenus

  2   par la VRS contre tous les prisonniers détenus par les Musulmans.

  3   Monsieur le Président, nous avons plusieurs pièces à conviction qui

  4   démontrent que le général Mladic était favorable à une cessation complète

  5   des hostilités et en faveur d'un accord de paix. Nous avons la pièce P2198,

  6   en date du 17 juin 1995, qui documente la réunion entre le général Mladic

  7   et le général Janvier dans laquelle Mladic dit qu'il était favorable pour

  8   que l'on finalise l'accord et qu'il était d'accord pour établir le cessez-

  9   le-feu sur tout le territoire. De façon semblable, la pièce P2050, en date

 10   du 14 mars 1995, où on fait état de la réunion entre Akashi, Mladic, et de

 11   l'autre côté, à savoir les violations de cessez-le-feu du côté de l'ABiH.

 12   De plus, la pièce P332, en date du 30 mai 1992, où on fait état de la

 13   réunion entre le général Mladic et le colonel Wilson ayant pour objectif

 14   l'organisation d'une réunion avec l'ABiH pour discuter le cessez-le-feu à

 15   Sarajevo alors même que Sarajevo refusait de telles tentatives. Et puis,

 16   pour terminer, P18, en date du 12 janvier 1995, où Mladic était d'accord de

 17   façon très précise pour compléter l'accord sur la cessation des hostilités

 18   avec les deux côtés au conflit.

 19   Je voudrais continuer à décrire le crime du génocide par rapport aux

 20   chefs 1 et 2 plus tard. Nous contestons la base du Procureur quand il

 21   s'agit de ces chefs --

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous

 23   donner la source de cette citation pour la session de travail de Banja

 24   Luka. Vous pouvez le faire plus tard.

 25   M. IVETIC : [interprétation] Le génocide est un crime qui est punissable en

 26   vertu de l'article 4 du Statut du Tribunal pénal international et est ancré

 27   dans le droit coutumier international. Comme il a été nommé, le génocide

 28   diffère des autres crimes dans la mesure où il demande l'intention


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  1   spéciale, ou bien le dolus specialis.

  2   Pour retenir le chef du génocide, l'auteur doit posséder le mens rea

  3   requis. L'intention génocidaire exige un élément supplémentaire, mis à part

  4   l'élément mental, qui va refléter les actes génocidaires que l'on allègue

  5   dans l'acte d'accusation contre l'accusé. Cette intention génocidaire

  6   spécifique consiste de trois éléments, à savoir : l'intention de détruire

  7   le groupe protégé; l'intention de détruire un groupe en partie ou en

  8   totalité; et puis, ce groupe protégé doit être défini soit par son

  9   appartenance ethnique, nationalité, par la religion ou race. Les Chambres

 10   de première instance précédentes avaient déjà dans le passé mis l'accent

 11   sur le fait que l'intention est un facteur mental qu'il est difficile,

 12   voire impossible, à déterminer. Ces présomptions sont formées sur la base

 13   d'une détermination au cas par cas et sur la base des moyens de preuve

 14   présentés pendant le procès. Le jugement Akayesu, paragraphes 523 et 524.

 15   Quand l'on n'a pas pu prouver ou déterminer l'intention génocidaire,

 16   eh bien, les actes ne peuvent plus être déterminés et catégorisés comme

 17   étant actes de génocide, mais deviennent des actes appartenant à une autre

 18   catégorie, par exemple, le crime contre l'humanité.

 19   Quand il n'y a pas eu d'aveu ou bien de preuve directe qui témoigne

 20   de l'intention de l'accusé, on formule des présomptions, et ceci, au cas

 21   par cas et sur la base des moyens de preuve présentés aux Juges. Et c'est

 22   quelque chose que nous retrouvons dans le jugement Musema, paragraphe 167.

 23   La Défense considère que, par rapport aux arguments concernant l'actus

 24   reus, le Procureur n'a pas présenté suffisamment de preuves pour conclure à

 25   l'intention de l'accusé par rapport aux critères de l'article 98 bis.

 26   Avec votre permission, je vais tout d'abord parler de l'élément actus

 27   reus du général Mladic par rapport au chef 1. Dans le chef 1, M. Mladic est

 28   accusé de génocide dans les municipalités de Foca, Kljuc, Kotor Varos,


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  1   Prijedor, Sanski Most et Vlasenica; et c'est quelque chose qui figure dans

  2   le paragraphe 37 de l'acte d'accusation. D'après l'acte d'accusation, la

  3   campagne de persécution ou l'escalade qu'elle a provoquée ont donné lieu à

  4   des actes motivés par l'intention de détruire en partie les groupes

  5   nationaux ethniques et/ou religieux musulmans et/ou croates de Bosnie comme

  6   tels. Dans ces sept municipalités, une partie importante des groupes a été

  7   démantelée, à savoir leurs dirigeants ainsi qu'un nombre de leurs membres

  8   ont été la cible d'actes visant à les éliminer.

  9   Les actes génocidaires que l'on énumère, eh bien, c'est :

 10   (A), les meurtres; ensuite (B), l'atteinte grave à l'intégrité

 11   physique ou mentale des Musulmans et des Croates de Bosnie pendant leur

 12   détention, notamment dans les centres de détention; et puis (C), détention

 13   des Musulmans et des Croates de Bosnie dans des conditions d'existence

 14   devant entraîner leur destruction physique par des traitements infligés.

 15   Monsieur le Président, l'on n'a pas présenté suffisamment de preuve

 16   pour prouver l'acte du génocide dans ces municipalités. L'expert en

 17   démographie du Procureur, l'expert Ewa Tabeau, a déposé et elle a dit que

 18   2,6 % des Musulmans ont été tués en Bosnie. Le 18 novembre, elle a dit que

 19   les Serbes de Bosnie ont perdu le plus grand pourcentage de leur population

 20   dans la guerre, comparé à la population des Musulmans de Bosnie ou des

 21   Croates de Bosnie, et elle a dit que finalement il n'y a eu que très peu de

 22   différence en ce qui concerne les pertes au sein des différents groupes

 23   ethniques.

 24   La Défense est consciente du fait que la détermination du génocide ne

 25   tient pas seulement des évaluations chiffrées, mais cela peut en constituer

 26   un élément. Je voudrais attirer votre attention sur le jugement de la Cour

 27   internationale de justice concernant l'application de la convention et la

 28   prévention du crime de génocide, Bosnie-Herzégovine contre Serbie-et-


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  1   Monténégro le 26 février 2007, qui n'a pas prouvé au-delà de tout doute

  2   raisonnable que le meurtre des membres du groupe protégé en 1992 dans les

  3   municipalités avait en soi une intention génocidaire.

  4   Monsieur le Président, plusieurs affaires ont été jugées devant ce

  5   Tribunal invoquant la commission du crime de génocide dans les

  6   municipalités, mais ce crime n'a jamais été retenu. Dans la Chambre de

  7   première instance dans l'affaire Stakic, on n'a pas trouvé d'intention

  8   spéciale génocidaire pour détruire le groupe protégé des Musulmans de

  9   Bosnie ou des Croates de Bosnie. La Chambre de première instance dans

 10   l'affaire Stakic n'a pas trouvé qu'il y a eu des personnes qui avaient

 11   cette intention spéciale de détruire les Musulmans et les Croates en tant

 12   que groupe, et ils ont parlé spécifiquement des objectifs stratégiques. La

 13   Chambre d'appel dans l'affaire Stakic a retenu l'acquittement en ce qui

 14   concerne le chef de génocide en concluant qu'il n'y a pas eu suffisamment

 15   de preuve à l'appui de cette charge. La Chambre de première instance dans

 16   l'affaire Sikirica a trouvé que la doctrine politique générale des

 17   dirigeants des Serbes a bel et bien persécuté la population non-serbe à

 18   Prijedor, mais ils n'ont pas trouvé que cette doctrine politique avait en

 19   soi l'intention génocidaire. Nous considérons à nouveau que le Procureur

 20   ici non plus n'a pas réussi à prouver le contraire.

 21   De plus, le Tribunal a reconnu dans l'affaire Stakic que les Serbes

 22   avaient des structures pour commettre le génocide s'ils avaient l'intention

 23   de le faire. Dans l'affaire Stakic, on a conclu que 23 000 personnes

 24   étaient enregistrées comme des personnes étant passées par le camp de

 25   Trnopolje, alors que le nombre total des personnes tuées n'a pas dépassé 3

 26   000.

 27   De façon similaire, le Tribunal avait jugé aussi l'affaire Krajisnik,

 28   où l'accusé avait été -- commis du génocide. Cependant, la Chambre n'a pas


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  1   établi qu'il y a eu génocide. De plus, la Chambre d'appel dans l'affaire

  2   Brdjanin a retenu l'acquittement du chef de génocide vu que la Chambre n'a

  3   pas trouvé de preuve à l'appui de l'intention de détruire un groupe

  4   protégé. De plus, dans l'affaire Brdjanin, on a mentionné de façon

  5   spécifique l'absence d'élément du génocide dans la RAK après avoir examiné

  6   les meurtres à Koricanske Stijene; le meurtre et le traitement des

  7   prisonniers à Keraterm, Omarska, Trnopolje; les incidents à Prijedor, Kljuc

  8   et Sanski Most.

  9   Et puis, je voudrais aussi, avant de continuer, vous dire que la 16e

 10   Session de travail de l'assemblée est le document P431, et la citation du

 11   général Mladic se trouve à la page 39.

 12   Et je vais vous demander de me permettre de faire une référence au

 13   génocide au Rwanda, où après avoir enquêté de façon répétée par rapport à

 14   l'existence éventuelle du génocide au Rwanda, les événements auxquels on a

 15   fait référence, c'étaient les éléments qui relevaient des connaissances

 16   communes. Dans l'affaire Karemera, on a confirmé que le contexte de la

 17   société dans laquelle l'accusé opérait avait des conséquences directes sur

 18   les chefs d'accusation. Paragraphe 36 de la décision du Procureur

 19   concernant l'appel interlocutoire et la décision du 16 juin 2006.

 20   Nonobstant ce fait que la possibilité que la Chambre accepte

 21   uniquement le génocide serait contraire au principe de responsabilité

 22   pénale individuelle et que ceci ne pourrait pas être retenu. Donc, il

 23   faudrait examiner les preuves à la lumière du contexte général des faits.

 24   En l'absence des moyens directs que les auteurs physiques des crimes ont

 25   commis les crimes dans les municipalités avaient l'intention génocidaire au

 26   moment où ils les ont commis, la Chambre ne peut pas conclure à l'existence

 27   de l'intention spécifique d'un certain nombre de facteurs ou des

 28   circonstances. Nous considérons que les moyens de preuve présentés dans les


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  1   sept municipalités pour lesquelles on a introduit le chef du génocide ne

  2   sont pas du niveau pour qu'un Juge de fait raisonnable puisse conclure à la

  3   commission et à l'existence de l'intention génocidaire.

  4   La Chambre d'appel Karadzic a noté que le transfert forcé ne constitue pas

  5   un acte de génocide en soi, mais qu'il faut que les circonstances mènent à

  6   la disparition ou la mort d'une partie de la population déplacée, et ceci

  7   peut être considéré comme un crime sous-jacent.

  8   La Chambre de première instance dans l'affaire Kayishema a conclu qu'un

  9   accusé ne peut pas être tenu responsable d'avoir porté atteinte à

 10   l'intégrité mentale de victimes si cette atteinte a été infligée alors que

 11   l'on nourrissait une intention génocidaire spécifique de détruire le groupe

 12   protégé. Je cite là le paragraphe 112 du jugement Kayishema.

 13   Dans sa conclusion, la Chambre de première instance du TPIR a créé un

 14   précédent qui restreint le crime de génocide et qui, en conséquence,

 15   augmente la charge de la preuve que l'Accusation doit montrer. Et nous

 16   faisons valoir que l'Accusation n'a pas présenté suffisamment d'éléments de

 17   preuve pour prouver que le général Mladic n'aurait fait une intention

 18   génocidaire spécifique et, qu'en conséquence, il a droit à ce que

 19   l'accusation portée en son encontre s'agissant des atteintes graves à

 20   l'intégrité mentale soit rejetée.

 21   L'Accusation affirme que l'objectif commun de l'entreprise criminelle

 22   commune a été mis en œuvre via les directives de la VRS. Là encore, nous

 23   aimerions mettre l'accent sur la déposition du général Milovanovic portant

 24   sur la directive 7, dans laquelle le général Mladic a retiré deux éléments

 25   qui avaient été autorisés par le président Karadzic dans sa propre

 26   directive 7.1 Premier élément, et ce, pour rafraîchir la mémoire des Juges

 27   de la Chambre, il s'agit d'une phrase controversée disant qu'il fallait

 28   créer des conditions insupportables pour la population civile de Zepa et


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  1   Srebrenica. Deuxième élément qui a été retiré, c'est la phrase portant sur

  2   la séparation de Srebrenica et Zepa ou de Zepa de force. Le général

  3   Milovanovic déclare que l'accusé a assumé une responsabilité personnelle

  4   lorsqu'il a décidé de ne pas exercer de pressions sur la population civile

  5   et partant de ne pas adopter chaque élément de la directive 7 de Karadzic.

  6   En conséquence, on ne peut affirmer que Mladic a partagé le même objectif

  7   commun, encore moins l'objectif de commettre le génocide.

  8   L'acte d'accusation reproche au général Mladic d'avoir commis des

  9   crimes contre les Musulmans de Bosnie à Srebrenica qui ont commencé les

 10   jours précédents le 11 juillet 1985, et ce, jusqu'au 1er novembre 1995. Le

 11   général Mladic a participé à une entreprise criminelle commune visant à

 12   éliminer les Musulmans de Bosnie à Srebrenica en tuant des hommes, des

 13   jeunes garçons de Srebrenica et en chassant de force les femmes, des jeunes

 14   enfants, et des hommes âgés de Srebrenica, ce qui revient à commettre le

 15   crime de génocide et de persécution et d'extermination, de meurtre,

 16   d'assassinat et d'expulsion et d'actes inhumains. La preuve essentielle sur

 17   laquelle se fonde l'Accusation est celle concernant l'intention du général

 18   Mladic qui porte sur les événements de Srebrenica dans la déposition du

 19   Témoin Kingori. Mais le Témoin Kingori nous donne son propre récit des

 20   événements à Potocari et une discussion avec Mladic. Mais ces éléments de

 21   preuve ne sont pas dignes de foi. Kingori a déposé qu'il avait attesté de

 22   l'évacuation de civils et que cette évacuation avait été montée de toutes

 23   pièces par la VRS, le général Nicolai a confirmé que les Nations Unies et

 24   que le ministère de la Défense néerlandais avait convenu de l'évacuation

 25   comme étant une nécessité humanitaire et avait instruit au colonel

 26   Karremans de demander au général Mladic de permettre cela pendant la

 27   première réunion. Je cite là, les pages 10 653 à 10 654 du compte rendu. En

 28   conséquence, les actions portant sur l'expulsion ne peuvent pas être


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  1   attribuées au général Mladic, à moins que les Nations Unies et le ministère

  2   de la Défense néerlandais eux-mêmes aient été coauteurs de ces actes. De

  3   plus, il faut rappeler qu'alors que Kingori a affirmé que les Musulmans de

  4   Bosnie et de Srebrenica étaient complètement démilitarisés, cette version

  5   ne cadre pas du tout avec les témoins du Bataillon néerlandais qui sont

  6   venus déposés, notamment Eelco Koster, pages du compte rendu 1 266 à 1 267

  7   et 1 278 à 1 279, ainsi que la déposition du Témoin van Duijn, page du

  8   compte rendu 6 281, et du Témoin Koster, page du compte rendu --

  9   L'INTERPRÈTE : Inaudible pour l'interprète.

 10   M. IVETIC : [interprétation] Les éléments de preuve montrent que les

 11   Musulmans de Bosnie et de Srebrenica n'étaient pas démilitarisés et avaient

 12   même menacé le Bataillon néerlandais. Donc, la déposition de Kingori n'est

 13   pas digne de foi.

 14   En outre, les recherches de M. Butler de 1995 n'ont retrouvé aucun ordre du

 15   général Mladic qui ordonnait particulièrement d'exécuter les prisonniers;

 16   il s'agit des pages 16 573 et 16 574 du compte rendu. Messieurs les Juges,

 17   la Défense aimerait rappeler à la Chambre que l'Accusation, dans sa

 18   déclaration liminaire, a confirmé et a concédé que l'action militaire de la

 19   VRS contre Srebrenica pour arrêter les raids de l'ABiH constituait une

 20   action militaire légitime. Et le témoin expert à charge, Richard Butler, a

 21   confirmé cette évaluation de l'Accusation. De même, Butler a confirmé que

 22   les opérations de combat de la VRS contre la colonne musulmane de Bosnie

 23   qui partait de Susnjari étaient également une action de combat légitime.

 24   Cela se retrouve à la page 16 653 du compte rendu. Butler déclare :

 25   "Je ne vois aucun conflit particulier s'agissant de la colonne qui a battu

 26   en retraite de Srebrenica et qui a percé les lignes vers les lignes amies."

 27   Et il ajoute :

 28   "Comme je l'ai déjà dit à plusieurs reprises lors des dépositions, la


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  1   colonne telle qu'elle a été constituée, malgré le fait qu'il y avait une

  2   nature mixte dans cette colonne, cette colonne constituait à nos yeux une

  3   cible militaire légitime, et voilà pourquoi elle a été soumise à une

  4   embuscade."

  5   En outre, nous aimerions avancer qu'il n'y a pas d'éléments de preuve

  6   montrant la présence du général Mladic sur l'un des sites d'exécution

  7   présumés, à l'exception de la déposition du Témoin RM255, nous avons déjà

  8   abordé cette déposition, et l'Accusation elle-même a dit qu'elle n'allait

  9   pas se fonder sur cet élément de preuve. Je cite là la page du compte rendu

 10   1 179. 1 179, effectivement.

 11   En outre, les éléments de preuve sont clairs, et l'Accusation a

 12   concédé que le général Mladic avait quitté Srebrenica et la zone

 13   d'opération de la VRS à partir du 14 juillet 1995. Même si le moment précis

 14   de son retour est encore contesté entre les parties, les éléments de preuve

 15   montrent clairement que les meurtres qui ont eu lieu ont eu lieu en

 16   l'absence du général Mladic. L'Accusation n'a pas présenté d'éléments de

 17   preuve montrant que le général Mladic disposait de moyens de communication

 18   sûrs pendant cette période, soit avec les unités de la VRS ou avec d'autres

 19   membres présumés de l'entreprise criminelle commune, tels que le président

 20   Karadzic, pendant cette période pour permettre qu'il ait eu connaissance ou

 21   qu'il ait participé aux meurtres.

 22   La Chambre d'appel dans l'affaire Karadzic dans sa décision relevant de

 23   l'article 98 bis du Règlement, lorsqu'elle a réintégré le chef de génocide

 24   pour les municipalités, se concentrant sur les centres de détention qui

 25   avaient été utilisés pour arriver à une destruction civile, s'est

 26   prononcée. Mais dans le contexte de Srebrenica, nous n'avons pas d'éléments

 27   de preuve de la sorte. Au contraire, nous avons montré des éléments de

 28   preuve selon lesquels les échanges de prisonniers avaient été planifiés.


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  1   Dans la pièce P2141, datée du 25 octobre 1995, nous voyons que le

  2   département de la sécurité de l'état-major principal de la VRS autorise les

  3   unités subordonnées à procéder à un échange de prisonniers musulmans avec

  4   le camp musulman contre des prisonniers serbes. De même, la pièce P2141,

  5   datée du 16 juin 1994, et la pièce P2143, datée du 21 janvier 1995, qui

  6   montrent également que ce département de la VRS autorise les unités

  7   subordonnées à entamer des négociations pour échanger des Musulmans

  8   prisonniers contre des prisonniers serbes. Même chose pour la pièce P816,

  9   datée du 20 juillet 1995, qui consigne une réunion entre les Nations Unies

 10   et le général Mladic, et le général Mladic donne clairement son intention

 11   d'échanger tous les prisonniers qui sont sous la garde de la VRS avec le

 12   camp musulman contre tous les prisonniers serbes.

 13   Alors, j'aimerais rappeler aux Juges de la Chambre que l'atteinte à

 14   l'intégrité physique ou mentale imposée pour qu'elle entre dans le champ

 15   d'application du crime de génocide doit avoir été commise dans l'intention

 16   de détruire le groupe protégé en tant que tel. Et le 14 juillet 1995, le

 17   général Mladic a rencontré le général Smith de la FORPRONU, et ils

 18   conviennent de permettre au CICR d'examiner des prisonniers de Srebrenica

 19   pour s'assurer que leurs conditions respectent les conventions de Genève.

 20   Je cite là la pièce D410. Cet élément de preuve bat en brèche la

 21   présomption selon laquelle le général Mladic avait l'intention de porter

 22   atteinte à l'intégrité physique ou mentale des détenus.

 23   De plus, dès le mois d'avril 1994, nous avons des éléments de preuve

 24   montrant que le général Mladic a rencontré le général Wahlgren des Nations

 25   Unies et a fait trois propositions s'agissant de Srebrenica; pièce 2469 :

 26   "(A), les Nations Unies pourront envoyer des camions vides pour

 27   emporter les Musulmans de Srebrenica, ou;

 28   "(B), si le commandant musulman à Srebrenica (Naser Oric) ne permet


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  1   pas à son peuple de partir de la sorte, le camp serbe pourrait ouvrir un

  2   couloir permettant aux civils de passer en territoire tenu par les Serbes

  3   (à pied) vers un endroit où des autocars les entendraient, ou;

  4   "(C), étant donné que les civils n'étaient pas la cible de l'armée

  5   des Serbes de Bosnie-Herzégovine, les Musulmans pourraient rendre leurs

  6   armes et laisser la population rester à Srebrenica. Les Musulmans à

  7   Srebrenica, a-t-il dit, devraient 'se rendre à mes forces ou aux vôtres.

  8   Cependant, d'après le droit international, il faudrait que la reddition se

  9   fasse à nous.'

 10   "Il a demandé que cette proposition soit transmise à l'autre camp."

 11   La Défense aimerait également attirer l'attention des Juges de la Chambre

 12   sur les déclarations faites par le général Mladic à l'hôtel Fontana qui

 13   doivent être reprises dans le contexte des déclarations faites l'année

 14   précédente lors de la réunion avec le général Wahlgren. Pièce P2469.

 15   Lorsqu'on prend dans leur contexte ces déclarations préalables, il est

 16   clair que le général Mladic se concentre sur les 5 000 combattants armés de

 17   Naser Oric, il pense qu'ils sont toujours avec les civils, et que s'ils

 18   sont désarmés, personne ne doit quitter Srebrenica. Une telle

 19   interprétation restreinte de ses mots concorde avec ses déclarations faites

 20   au public à Potocari; pièce P1147, il s'agit des pages 55 et 56 :

 21   "J'ai reçu les représentants de cette population ici, aujourd'hui, et ils

 22   m'ont demandé de permettre aux civils qui veulent quitter le territoire de

 23   passer sur le territoire contrôlé par les Musulmans et les Croates. Notre

 24   armée ne voulait pas combattre les civils ni les forces de la FORPRONU.

 25   Nous avons organisé un transport pour ces civils, les vivres, l'eau, les

 26   médicaments. Dans un premier temps aujourd'hui, nous ferons évacuer les

 27   femmes, les enfants et les personnes âgées, ainsi que d'autres personnes

 28   qui désirent quitter cette zone de combat de leur propre gré, sans aucune


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  1   force que ce soit.

  2   "Oui, Srebrenica est libre, mais comme je l'ai dit à d'autres

  3   représentants, il existe encore des groupes qui combattent, il y a encore

  4   de la résistance. J'ai également ordonné que leurs soldats nous rejoignent

  5   librement et rendent leurs armes et ils l'ont accepté. J'espère que cette

  6   partie du problème peut être résolu sans blesser des civils, et ces femmes,

  7   ces enfants et ces personnes âgées, ce n'est pas leur faute si Alija et sa

  8   politique les a attirés."

  9   De plus, nous aimerions attirer l'attention des Juges de la Chambre sur la

 10   déposition du Témoin RM253 portant sur un autre discours attribué au

 11   général Mladic à Sandici. Ce discours montre clairement l'intention du

 12   général Mladic qui n'est pas dirigée vers la destruction du groupe protégé

 13   de Musulmans de Bosnie et de Croates de Bosnie, mais qui est plutôt dirigée

 14   vers les échanges de prisonniers, car il dit que tous seraient échangés; il

 15   s'agit là de la pièce P1547, sous pli scellé, paragraphe 20.

 16   De plus, un témoin-clé à charge, Erdemovic, dans sa déposition en page 13

 17   779 du compte rendu, a déclaré qu'il n'avait jamais entendu quelle que

 18   conversation que ce soit indiquant que l'objectif de la VRS était de

 19   détruire le groupe protégé de la population bosnienne. Nous faisons valoir

 20   que l'Accusation n'a pas présenté suffisamment d'éléments de preuve

 21   montrant le contraire.

 22   Sur la question de l'intention génocidaire et dans le cadre de cette

 23   audience relevant de l'article 98 bis du Règlement, la Défense aimerait

 24   conclure par ces mots : elle est consciente que les tribunaux sont libres

 25   dans leur appréciation des éléments de preuve. Mais nous aimerions

 26   également rappeler aux Juges de la Chambre l'affaire Jelisic dans laquelle

 27   l'accusé a montré publiquement son intention de détruire le groupe musulman

 28   en tout ou en partie en proférant des mots tels que les suivants : Vingt ou


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  1   30 personnes devaient être tuées avant de pouvant boire mon café tous les

  2   matins. Cependant, il a également amnistié des détenus musulmans. Nous

  3   avons un exemple bien connu, celui d'un Musulman qui a été forcé de jouer à

  4   la roulette russe avec M. Jelisic et qui a été libéré par la suite. En

  5   appréciant les éléments de preuve, la Chambre a mis l'accent sur les

  6   éléments de preuve exculpatoires qui l'ont menée à conclure qu'il y avait

  7   certaines incertitudes autour de l'intention de détruire le groupe en tout

  8   ou en partie et que les meurtres de M. Jelisic étaient arbitraires. Dans

  9   cette affaire, les Juges de la Chambre ont appliqué le principe in dubio

 10   pro reo.

 11   Et, en l'espèce, il y a à peine des éléments de preuve dans la même veine.

 12   De plus, la Chambre d'appel dans l'affaire Perisic, dans son arrêt, a

 13   apporté quelques conclusions et l'on peut déduire que lorsque les éléments

 14   de preuve contiennent un témoignage ou plus qui sont contradictoires ou

 15   d'autres formes d'éléments de preuve incohérents, il ne suffit pas à la

 16   Chambre de simplement reconnaître son existence. Une analyse des éléments

 17   de preuve avec une justification du fondement doit également être apporté.

 18   A la lumière de tous les arguments présentés, la Défense fait valoir que le

 19   général Mladic a droit à ce que l'accusation sur son intention génocidaire

 20   soit rejetée et le motif pris de ce que l'Accusation n'a pas présenté

 21   suffisamment d'éléments de preuve pour étayer ces accusations.

 22   Messieurs les Juges, ceci conclut mes arguments. Et au nom du général

 23   Mladic et du reste de mon équipe, je tiens à vous remercier de votre

 24   attention.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.

 26   Monsieur Groome, vous deviez commencer demain. Je pense qu'il serait plus

 27   sage d'attendre demain pour que vous ayez l'occasion de vous préparer.

 28   M. GROOME : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Juge.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de lever l'audience, Maître

  2   Ivetic, j'ai demandé de nous donner la source de la citation que vous

  3   m'avez donnée, la page 39 de la séance de l'assemblée de Banja Luka. Vous

  4   avez dit la chose suivante lorsque vous avez repris la citation et vous

  5   parliez de l'opposition bien claire du général Mladic à l'adoption des six

  6   objectifs stratégiques lors de l'assemblée. Vous l'avez cité, ayant dit :

  7   "Nous devons en appeler à tout homme qui a placé son front sur le sol pour

  8   louer ces régions et le territoire de l'Etat que nous voulons créer. Lui

  9   aussi, il a sa place avec nous à nos côtés."

 10   J'ai retrouvé à la page 39 une citation, et je me concentre sur le mont

 11   "front", "forehead" en anglais. Et je vous cite ce que j'ai retrouvé :

 12   "Nous invitons toute personne dont le front a touché notre sol, mais en

 13   premier lieu les Serbes, à commander. Mais je nommerai quelqu'un quel que

 14   soit son origine."

 15   Voilà la citation que j'ai retrouvée à la page 39, pour la version

 16   anglaise, en tout cas.

 17   Vous avez ensuite poursuivi en disant :

 18   "'Mais cela ne veut pas dire que les Musulmans doivent être expulsés ou

 19   noyés.'"

 20   Alors, je tiens à dire que j'ai quelques difficultés à lier les premières

 21   lignes de votre citation avec ce qui a suivi, parce que je ne vois pas en

 22   quoi cela est cohérent, donc, ça, c'est une première chose. Je n'ai rien

 23   trouvé à la page 39 qui soit lié à votre première citation disant que cela

 24   ne veut pas dire que les Musulmans doivent être expulsés ou noyés. Et je me

 25   demandais si vous aviez utilisé une autre traduction anglaise que la

 26   mienne. Donc, je voulais vous demander de vérifier ce passage et de voir

 27   s'il y a eu un petit problème avec la version anglaise lors de la

 28   traduction de la séance de l'assemblée de Banja Luka.


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  1   M. IVETIC : [interprétation] Je vais le faire. Moi, je travaillais sur une

  2   capture d'écran d'une partie de la traduction PDF. Je vais voir cela et je

  3   vais comparer cette version avec la version disponible dans le prétoire

  4   électronique. Je reviendrai vers M. Groome avant le début de l'audience de

  5   demain et je lui donnerai la référence exacte.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, c'est une page où le mot "front",

  7   "forehead" en anglais, apparaît. C'est ce que j'ai vu. Mais je crois que M.

  8   Mladic voudrait vous consulter.

  9   [Le conseil la Défense et l'accusé se concertent]

 10   M. IVETIC : [interprétation] Mon client se souvient également des termes en

 11   relation avec la RSFY. Je vais vérifier la pièce à conviction officielle et

 12   revenir vers vous et regarder comme cela a été consigné au compte rendu

 13   d'audience. Et je reviendrai vers vous de façon informelle et vérifier cet

 14   e-mail si nous avons le temps de le préparer. Nous allons le préparer

 15   demain pour que ça puisse être consigné, et nous vous communiquerons les

 16   résultats de notre enquête. Merci.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il y a une question de traduction, il

 18   est préférable peut-être de le faire maintenant.

 19   M. IVETIC : [interprétation] Absolument.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, il n'y a pas d'autre question à

 21   l'ordre du jour. Donc, nous allons lever l'audience et reprendre demain

 22   matin pour entendre les arguments de l'Accusation, le 18 mars, à 9 heures

 23   30 dans le même prétoire.

 24   --- L'audience est levée à 14 heures 12 et reprendra le mardi, 18 mars

 25   2014, à 9 heures 30.

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