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1 Le lundi 9 mars 2015
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 33.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans ce prétoire
6 et à l'extérieur du prétoire.
7 Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il
9 s'agit de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.
11 J'ai quelques questions préliminaires à aborder.
12 Maître Lukic, je pense que vous nous devez toujours une réponse.
13 M. LUKIC : [interprétation] Oui, en effet, Monsieur le Président. Je vous
14 souhaite bonjour.
15 En ce qui concerne D899, les Juges de la Chambre nous ont demandé de nous
16 enquérir de la date et de l'endroit où cette vidéo a été tournée. Cette
17 vidéo qui est la nôtre, eh bien, c'est un extrait du document 65 ter 22615,
18 téléchargé en tant que pièce en vertu de l'article 65 ter par le Procureur.
19 Cet extrait comporte la cote 1D03160. Il ne s'agit que d'un extrait qui va
20 de la 14e minute, 35 secondes, jusqu'à la 16e minute et 9 secondes de la
21 même vidéo.
22 Je me suis entretenu avec M. Traldi, et nous en sommes arrivés à la
23 conclusion que cette partie-là de la vidéo a été enregistrée le 5 août
24 1992, parce qu'on voit Mme Marshall sur l'enregistrement. C'est sur la base
25 de son apparition dans la vidéo qu'on en est arrivés à la conclusion que la
26 vidéo a dû être tournée le 5 août 1992.
27 C'est tout ce que nous pouvons vous dire à ce sujet, Monsieur le Président.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Lukic.
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1 Il y avait aussi quelques questions préliminaires que le Procureur
2 voulait soulever.
3 M. TIEGER : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président.
4 Eh bien, je vous dois une réponse quant au calendrier concernant la
5 présentation des moyens de preuve au mois de mai et au mois de juin. Donc,
6 nous allons vérifier cela, ceci nous pose aucun problème. Bon, à
7 l'exception faite que les Juges souhaitent commencer au mois de mai et
8 continuer jusqu'au bout, eh bien, si vous voulez le faire comme cela, donc,
9 aller jusqu'au bout de la nouvelle présentation de moyens de l'Accusation,
10 nous allons peut-être avoir un problème avec un témoin qui ne va pas être
11 disponible. Donc, je pense que, de toute façon, on pourrait résoudre le
12 problème en commençant un peu plus tard, parce qu'il est donc disponible au
13 mois de juin.
14 Donc, si vous voulez, on peut commencer au mois de mai et ensuite
15 reprendre ce témoin au mois de juin. Voilà, c'est la situation. Donc, de
16 toute façon, de façon générale, je peux vous dire que le mois de mai ou le
17 mois de juin nous convient.
18 Ensuite, j'ai voulu répondre par rapport à la demande de la Défense
19 d'avoir donc une pause à Pâques. Eh bien, nous n'avons pas vraiment de
20 positions à ce sujet, mais il y a quand même une question concernant le
21 calendrier qui n'a pas tenu compte de cette pause éventuelle que l'on
22 prendrait à Pâques. Il s'agit des visioconférences qui nous restent à faire
23 par rapport à la région de Banja Luka.
24 Et donc, par exemple, si ces témoins doivent voyager à peu près au moment
25 de Pâques et c'est cela qui apparemment inquiétait M. Lukic, eh bien, ils
26 pourraient rester sur les lieux et la visioconférence pourrait avoir lieu
27 vendredi, par exemple. Et de toute façon, ce sont les seuls témoins qui
28 posent problème éventuellement.
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1 Mais, de toute façon, je ne veux pas me prononcer là-dessus. Je pense
2 que d'une façon ou d'une autre, même si l'on doit avoir cela à l'esprit
3 quand on pense au calendrier, je pense que tout cela est faisable.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, est-ce que vous avez une
5 réponse par rapport à ce dernier point soulevé par M. Tieger ?
6 M. LUKIC : [interprétation] Je me suis entretenu avec M. Tieger ce matin et
7 j'ai dit que j'allais faire tout ce que je peux pour arranger cela.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Eh bien, de toute façon, on
9 réfléchit toujours à votre demande.
10 M. LUKIC : [interprétation] Et en ce qui concerne le premier point soulevé
11 par le Procureur, je pense qu'il est clair pour tout le monde que la
12 Défense n'a absolument pas eu le temps de s'occuper de cette nouvelle
13 partie des éléments de preuve du Procureur qu'il lui reste à présenter,
14 donc, la réouverture de la présentation du Procureur, et donc nous allons
15 demander que même si ce n'est pas un problème pour M. Tieger de faire sa
16 nouvelle présentation de moyens de preuve au mois de mai ou au mois de
17 juin, eh bien, nous allons demander que le procès soit interrompu pour
18 avoir du temps pour nous préparer pour ce segment-là de notre travail.
19 Parce que nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour nous préparer. Et
20 puis, d'un point de vue technique, pour commencer, il faudrait que l'on
21 demande au Greffe de nous permettre de présenter des témoins experts pour
22 répondre aux dires du Procureur déjà. Mais, tout d'abord, nous devons voir
23 aussi de quoi il s'agit.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, cela fait si longtemps que l'on
25 parle de cela, donc si vous allez présenter des arguments, je voudrais
26 quand même savoir -- les Juges voudront savoir ce que vous avez fait
27 jusqu'à présent, parce que ces experts, on connaît leurs noms depuis des
28 années, il y a des experts qui sont très bien connus, surtout en ce qui
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1 concerne leur domaine d'expertise, et cetera. Donc, les Juges se demandent
2 qu'est-ce que vous avez fait jusqu'à présent, parce que vous auriez pu vous
3 attendre à ce que cette nouvelle présentation des moyens de preuve de
4 l'Accusation se fasse à peu près au mois de mai ou au mois de juin cette
5 année.
6 Donc, faites vos arguments, Maître Lukic, mais dites-nous clairement
7 ce que vous avez fait jusqu'à présent. Parce que demander un ajournement
8 juste parce qu'il vous reste encore des choses à faire, parce que vous
9 n'avez peut-être pas fait tout ce que vous auriez dû faire, il faudrait
10 qu'on réfléchisse à cela aussi. Voilà.
11 Je ne veux pas insister là-dessus pour l'instant, et je ne me lance
12 pas dans des conclusions d'ores et déjà, mais je vous dis ce que je
13 m'attends à entendre de votre part si vous entendez encore faire des
14 arguments à ce sujet, surtout au sujet du calendrier.
15 M. LUKIC : [interprétation] Eh bien, nous n'avons pas eu la possibilité de
16 faire quoi que ce soit d'autre que de nous occuper de la présentation de
17 moyens de preuve de la Défense. C'est tout ce que nous avons fait. Nous
18 n'avons pas de ressources pour faire quoi que ce soit de plus que cela. Ce
19 que nous faisons et tout ce que nous faisons, c'est de préparer notre
20 Défense.
21 Et toutes nos ressources, toutes les personnes qui travaillent dans
22 l'équipe de la Défense sont chargées de travail à outrance et vous avez pu
23 remarquer vous-même que nous étions à peine en mesure de présenter nos
24 moyens de preuve. Ne parlons pas de parler de la nouvelle présentation de
25 preuves de la part du Procureur.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, cela fait un moment que
27 l'on parle de ces nouveaux éléments de preuve qui vont être présentés par
28 le Procureur. Vous auriez dû tenir compte de cela. Donc, de toute façon, il
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1 va y avoir un retard dans tout cela. Cela concerne aussi la charge de
2 travail qui vous incombe.
3 Mais bon, on ne va pas parler en détail de tout cela maintenant. J'ai voulu
4 tout simplement attirer votre attention sur le fait que les Juges vont
5 peut-être réfléchir à certains points, et je vous en ai informé. Donc,
6 j'attends maintenant d'entendre des arguments à l'avenir, donc, des deux
7 parties.
8 S'il n'y a pas d'autres questions préliminaires, je vais demander que l'on
9 fasse entrer le témoin dans le prétoire.
10 Bon, je voudrais soulever quand même un point brièvement. Si j'ai bien
11 compris, la Défense doit encore soumettre six [comme interprété] rapports
12 d'experts : deux des experts en balistique; un d'un historien; et un d'un
13 médecin légiste expert; et puis un rapport d'un expert en communications
14 radio.
15 Est-ce que la Défense peut informer la Chambre qu'en est-il de ces
16 rapports, est-ce qu'ils sont prêts, est-ce qu'ils sont écrits ?
17 [Le témoin vient à la barre]
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On peut aussi entendre la réponse plus
19 tard aujourd'hui, Maître Lukic.
20 Bonjour, Monsieur Solaja.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Solaja, je voudrais vous
23 rappeler que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous
24 avez prononcée au début de votre déposition, à savoir que vous allez dire
25 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Et M. Traldi va continuer
26 avec son contre-interrogatoire.
27 Allez-y, Monsieur Traldi.
28 M. TRALDI : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
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1 LE TÉMOIN : MILOS SOLAJA [Reprise]
2 [Le témoin répond par l'interprète]
3 Contre-interrogatoire par M. Traldi : [Suite]
4 Q. [interprétation] Je vous souhaite bonjour, Monsieur.
5 R. Bonjour, Monsieur le Procureur.
6 M. TRALDI : [interprétation] Est-il possible d'avoir le document 65 ter
7 32144.
8 Q. Donc, ce que l'on voit ici, c'est l'entretien ou l'interview du général
9 Talic, et c'est vous qui l'avez interrogé.
10 M. TRALDI : [interprétation] Et je vais vous demander d'examiner la
11 deuxième page en anglais et la première colonne de la première page en
12 B/C/S, la première question en caractère gras. Et je vais demander aussi
13 que l'on agrandisse cette partie-là du texte.
14 Q. Et on voit que vous posez la question au général au sujet de
15 l'opération Corridor, et j'ai quelques questions très brèves à vous poser à
16 ce sujet.
17 Tout d'abord, dans votre question, vous avez fait référence à quelque
18 chose que vous avez appelé l'intention monstrueuse de couper une grande
19 majorité des Serbes de leur patrie. Quand vous parlez de "la mère patrie",
20 vous parlez de la Serbie, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Dans sa réponse, et c'est au niveau de la cinquième ligne en anglais,
23 le général Talic dit :
24 "Notre peuple a réussi à faire quelque chose que n'ont pas réussi à faire
25 de nombreuses générations depuis la bataille du Kosovo jusqu'au jour
26 d'aujourd'hui, à savoir de créer un espace de vie unique pour le peuple
27 serbe."
28 Et donc, quand il parle de cet espace de vie unique pour le peuple serbe,
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1 il fait référence au territoire contrôlé par la VRS ?
2 R. Oui.
3 Q. Et dans la phrase suivante, il dit qu'il s'agissait là d'une opération
4 décisive pour le peuple serbe de Krajina qui avait été séparé de leur mère
5 patrie et menacés d'une disparition complète. Tout d'abord, quand il parle
6 des "Krajinas", au pluriel, il parle aussi bien de la Krajina de Knin que
7 de la Krajina de Bosnie ?
8 R. Oui, exact, il n'y en a pas d'autre.
9 Q. Et puis, dans l'article de Krajiski Vojnik, on dit que le peuple serbe
10 dans la RAK et dans la Krajina de Knin était menacé d'une disparition
11 totale, qu'ils se battaient pour leur survie pure et simple ?
12 R. Oui, c'est exact.
13 M. TRALDI : [interprétation] Je vais demander le versement au dossier du
14 document 65 ter 32144.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 65 ter 32144 va être versé au dossier
17 en tant que pièce P7000 --
18 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la suite.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est versé au dossier.
20 M. TRALDI : [interprétation]
21 Q. Maintenant, je voudrais vous demander de parler des événements de Banja
22 Luka. Tout d'abord, vous avez parlé du départ des Croates et des Musulmans
23 de Banja Luka dans votre déclaration, et vous dites qu'il s'agissait là de
24 départ organisé par les autorités civiles et que la VRS n'a pas pris part à
25 ce processus. En réalité, le 1er Corps de la Krajina considère que les
26 autorités civiles doivent s'appliquer davantage pour organiser le départ de
27 la population musulmane et croate de Banja Luka; est-ce exact ?
28 R. Non. Non, nous n'avons jamais reçu de telles instructions.
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1 M. TRALDI : [interprétation] Est-il possible d'avoir le document P3714. Là,
2 nous avons un rapport du combat du 1er Corps de la Krajina en date du 28
3 juillet 1992. Et je vais demander de voir la deuxième page en B/C/S et la
4 première page en anglais. La page suivante en B/C/S, excusez-moi.
5 Q. Au point 3, on peut lire :
6 "Dans la ville de Banja Luka et dans les autres grandes villes, il y a une
7 demande accrue, et l'organisation, du départ des Croates et des Musulmans.
8 Nous considérons que les autorités municipales et régionales devraient
9 s'appliquer davantage à cette tâche."
10 Donc, c'était bien la position du 1er Corps de la Krajina, à savoir que les
11 autorités municipales devraient fournir encore davantage d'efforts pour
12 organiser le départ des Musulmans et des Croates ?
13 R. Ecoutez, je n'ai pas eu accès à ce document. Je ne suis pas au courant
14 de ce document. C'est un document confidentiel, et moi je n'ai jamais eu
15 affaire avec de tels documents et je n'ai jamais reçu de telles
16 instructions.
17 Q. Les Juges de la Chambre ont entendu dire qu'au cours de la guerre, des
18 dizaines de milliers de Musulmans et de Croates ont quitté la municipalité
19 de Banja Luka. Vous avez entendu parler de cela, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Maintenant, je voudrais parler de votre discussion --
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez. Attendez. Avant de faire cela.
23 Monsieur Soloja, peut-être que le problème tient du fait, en partie, qu'on
24 vous ait demandé quelle a été la position du 1er Corps de la Krajina, et
25 vous avez répondu : "Ecoutez, nous n'avons jamais reçu de telles
26 instructions." On ne vous a pas demandé si vous aviez reçu de telles
27 instructions, on vous a demandé quelle a été la position adoptée par le 1er
28 Corps de la Krajina.
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1 Si vous ne le savez pas ou bien si vous ne disposez pas d'information
2 complète à ce sujet, vous pouvez nous le dire tout simplement, parce que
3 vous n'avez pas répondu clairement et précisément à la question posée.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, ce qu'on voit dans ce document, c'est
5 une information quotidienne régulière qui faisait partie de la chaîne du
6 commandement. De telles informations ne nous parvenaient pas. Donc la seule
7 chose qui était importante pour nous, c'était de connaître la position
8 officielle, et officiellement on ne nous a jamais dit qu'il fallait
9 transférer la population. Donc nous n'avons jamais reçu de telles
10 instructions, nous n'avons pas écrit à ce sujet, et d'ailleurs vous le
11 voyez quand vous lisez le contenu de cette publication.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Autrement dit, vous n'avez peut-être pas
13 eu accès à toutes les informations pour être en mesure de répondre à cette
14 question en toute connaissance de cause, n'est-ce pas ? Bon.
15 Vous pouvez continuer, Monsieur Traldi.
16 M. TRALDI : [interprétation]
17 Q. Maintenant, je voudrais parler de votre déposition au sujet des
18 autorités civiles dans la zone de Banja Luka. Donc les Juges de la Chambre
19 ont entendu des moyens de preuve concernant la rhétorique utilisée par
20 certaines autorités de la RAK, surtout M. Brdjanin. Notamment, il aurait
21 dit en public que seulement un millier de Musulmans âgés pourront rester à
22 Banja Luka pour balayer les rues de la ville. Est-ce que vous avez entendu
23 dire cela ?
24 R. Ecoutez, je n'ai pas été présent pendant cette période la plus
25 critique. Mais je ne l'ai pas entendu personnellement. Et je n'ai pas pu
26 vraiment suivre les médias parce que je n'ai pas eu de contact avec les
27 médias. Vous savez, je n'ai pas été présent. Je n'étais pas sur les lieux
28 jusqu'au 28 juillet 1992.
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1 Q. Vous êtes resté à Banja Luka. C'est là que vous avez été basé ensuite
2 jusqu'à la fin de la guerre, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, et je suis né à Banja Luka.
4 Q. Bon, les Juges ont entendu dire qu'en 1994 - et là je fais référence à
5 la pièce P6976 - au niveau d'un rassemblement, M. Brdjanin a dit que les
6 non-Serbes étaient une insulte au territoire serbe, à la terre serbe. Vous
7 avez dû entendre cette déclaration, n'est-ce pas ?
8 R. Ecoutez, c'était un rassemblement du parti. Je n'en faisais pas partie.
9 Les gens qui habitaient dans la Republika Srpska, ils ne pouvaient
10 pratiquement pas aller vivre ailleurs.
11 Q. Mais vous n'avez pas mentionné M. Brdjanin ou les termes qu'il a
12 employés dans votre déclaration ?
13 R. Non. Je n'ai pas eu de contact avec lui, parce qu'il a représenté
14 toujours des structures civiles.
15 Q. Mais vous avez tout de même mentionné M. Predrag Radic. Dans le
16 paragraphe 34 de votre déclaration, vous avez dit que Radic voulait
17 empêcher les Musulmans de quitter Banja Luka. Donc j'ai quelques questions
18 à vous poser. Tout d'abord, il est exact, n'est-ce pas, que vous avez dit
19 qu'il y avait quelques dirigeants politiques qui voulaient empêcher les
20 Musulmans de partir, et dans votre déclaration vous n'avez pas inclus les
21 points de vue exprimés par les leaders politiques qui demandaient que les
22 Musulmans partent ?
23 R. Oui, c'est exact. C'est tout simplement parce que j'ai eu de très bons
24 contacts avec M. Radic, je connaissais très bien ses positions, et j'en ai
25 parlé dans ma déclaration concernant le départ non seulement des Musulmans
26 mais aussi des Croates. Je savais ce qu'il disait, il disait qu'après la
27 guerre, le territoire de l'ex-Yougoslavie allait être reconstruit à nouveau
28 de toutes les façons possibles et imaginables, y compris économiquement, et
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1 d'ailleurs cela s'est avéré très vrai. Et je n'ai pas eu d'autres contacts
2 avec les autres représentants des autorités civiles.
3 Q. Donc vous avez parlé des opinions de M. Radic. Vous tirez vos
4 conclusions sur la base de ces contacts et vous arrivez à la conclusion que
5 c'était un homme honorable, n'est-ce pas ?
6 R. Oui, absolument.
7 Q. Donc, un homme honnête aussi, n'est-ce pas, d'après vous ?
8 R. Oui.
9 Q. Les Juges ont entendu dire M. Radic, car il a déposé dans l'affaire
10 Krajisnik, et il a dit, par exemple, que le président Karadzic et que
11 Momcilo Krajisnik l'ont accusé de ne pas avoir expulsé les non-Serbes de
12 Banja Luka et qu'à cause de cela, beaucoup trop de non-Serbes sont restés
13 sur le territoire de la municipalité et il fallait les soigner et les
14 nourrir. Etiez-vous au courant de ces positions adoptées par les dirigeants
15 de la Republika Srpska, les positions adoptées concernant le comportement
16 de M. Radic envers les non-Serbes ?
17 R. Il a été exposé à des pressions sans cesse, des pressions des
18 autorités. C'était quelqu'un de très raisonnable, il a toujours essayé
19 d'adoucir les coins, et je sais qu'il a eu des problèmes.
20 Q. Quand vous parlez des gens au sommet de la politique, vous faites
21 référence à qui exactement ?
22 R. A des gens qui faisaient partie des autorités au sommet de la région ou
23 de la république qui n'étaient pas contents avec son travail.
24 Q. Mais citez-moi un exemple, surtout les gens au niveau de la république,
25 au sommet de la république ?
26 R. Mais écoutez, je ne me suis pas vraiment penché sur cette question-là,
27 mais je sais qu'il y a eu des tensions.
28 Q. M. Radic a dit qu'à cause de ces pressions, il n'a pas pu ouvertement
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1 aider les non-Serbes, même s'il voulait le faire. Est-ce que vous étiez au
2 courant de cela ?
3 R. C'est ce qu'il disait. Il le disait, mais il les aidait. Et il a aidé
4 un grand nombre de personnes. Il pouvait les aider de cette façon-là, parce
5 qu'il y a eu de grandes pressions d'exercées, donc il ne pouvait pas en
6 parler ouvertement. Parce que c'était la période de la guerre, les méthodes
7 démocratiques n'avaient pas une grande valeur à l'époque.
8 Q. Vous faites référence à la destruction de mosquées dans votre
9 déclaration écrite. Dans sa déposition, lui a déclaré que des membres de la
10 direction des Serbes de Bosnie ainsi que leurs émissaires l'avaient
11 critiqué en raison du fait que les mosquées de Banja Luka étaient toujours
12 debout. Etiez-vous au courant de cela ?
13 R. Oui.
14 Q. Dans ce contexte, Monsieur --
15 M. TRALDI : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de
16 questions sur ce sujet, à moins que les Juges de la Chambre aient d'autres
17 questions à poser.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, mais il y a un point que j'aimerais
19 traiter rapidement avec le témoin.
20 Monsieur le Témoin, vous avez dit avoir été très proche de M. Radic. M.
21 Radic a déclaré avoir été critiqué par M. Krajisnik et par M. Karadzic. Il
22 ne vous a jamais parlé des critiques qui lui étaient adressées de la part
23 de ces deux hommes ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il était préférable que ce genre de chose
25 ne soit pas rendu public. Et, de façon générale, il était préférable de ne
26 pas être informé de ce genre de chose.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si vous étiez proche de lui, il est
28 possible qu'il vous ait dit : Voilà ce qui est arrivé, mais ne le publiez
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1 pas. Ce qui n'est pas rare dans le monde du journalisme, n'est-ce pas ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, non, nous n'agissions pas ainsi pour des
3 raisons professionnelles, puisque les contacts que j'avais avec lui étaient
4 purement privés. Il était impossible à l'époque de publier ce genre de
5 chose.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui --
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le magazine "Le Soldat de Krajina", nous
8 avons publié des critiques, y compris concernant la plus haute direction de
9 la Republika Srpska. Je pourrais évoquer l'interview du ministre chargé des
10 anciens combattants, Predrag Djokanovic, qui a ouvertement critiqué Radovan
11 Karadzic au sujet d'un certain nombre de questions. Mais pour des raisons
12 de sécurité personnelle, ce genre d'article était très rare.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est exactement cette raison qui
14 m'intéresse - vous avez déclaré avoir été très proche de lui, vous avez
15 déclaré que ces conversations étaient privées - vous n'avez jamais cherché
16 à vérifier ou M. Radic ne vous a jamais dit que ces reproches lui étaient
17 adressés par M. Karadzic et/ou par M. Krajisnik ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Il souhaitait probablement protéger autrui,
19 pas seulement moi, d'ailleurs. C'est la raison sans doute pour laquelle il
20 ne m'a jamais parlé de cela ouvertement.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela signifie également, n'est-ce pas,
22 que vous n'avez aucune raison de mettre en doute ce que M. Radic nous a
23 déclaré plus tard, ce qu'il a pu nous déclarer dans des déclarations ou des
24 témoignages, à savoir qu'il était au même niveau que M. Karadzic et M.
25 Krajisnik ? Vous n'avez aucune raison de douter de l'exactitude de ces
26 renseignements, n'est-ce pas ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai aucune raison de mettre en doute
28 ses déclarations. C'était un homme particulièrement honorable.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Monsieur Traldi.
2 M. TRALDI : [interprétation]
3 Q. Nous en restons au sujet des autorités civiles de Banja Luka. A ce
4 sujet, vous décrivez le démantèlement de la cellule de Crise de la RAK aux
5 paragraphes 26 à 28 de votre déclaration écrite. Alors, une fois que cette
6 cellule de Crise de la RAK a été démantelée, ses membres qui occupaient des
7 positions élevées au sein du gouvernement et de l'armée ont tous conservé
8 leurs postes, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Et, paragraphe 27, vous dites que Miro Mladjenovic, le rédacteur en
11 chef de "Glas", vous a demandé de publier un article. Mladjenovic était
12 rédacteur en chef de "Glas", n'est-ce pas ?
13 R. Oui. Mais tout cela était dû à des motifs tout à fait différents.
14 Q. Eh bien --
15 R. Les cellules de Crise n'avaient aucune incidence sur ce genre de
16 décision.
17 Q. La décision a été prise par la présidence de Guerre de la RAK et
18 confirmée par l'assemblée municipale de Banja Luka, n'est-ce pas ?
19 R. Oui, en tant que fondateur officiel du magazine.
20 Q. Et le président de la présidence de Guerre de la RAK, vous rappelez-
21 vous qui c'était ?
22 R. Je crois que la RAK avait un gouvernement, pas une présidence de
23 Guerre. Une assemblée et un gouvernement.
24 Q. Le président de l'assemblée c'était bien Vojo Kupresanin,
25 n'est-ce pas?
26 R. Oui, oui.
27 Q. Et qui était vice-président ?
28 R. Je ne me rappelle pas.
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1 M. TRALDI : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter
2 32201, je vous prie.
3 M. LUKIC : [interprétation] Une question, je vous prie, est-ce que ce
4 document figure sur la liste ?
5 M. TRALDI : [interprétation] Nous avons envoyé une liste mise à jour
6 vendredi en appelant particulièrement l'attention de tout lecteur sur notre
7 courriel concernant ce document.
8 Q. Sur la droite de la page en B/C/S, nous voyons un article intitulé :
9 "Comment supprimer les traces ?" Et nous voyons que cet article a comme
10 sous-titre : "Banja Luka, 10 juillet." Il commence par les mots suivants :
11 "Deux autonomes de haut rang ont tenu hier une conférence de presse
12 sélective à laquelle n'étaient indiqués que les médias de publication, la
13 Radio de Banja Luka et la Télévision de Banja Luka."
14 Alors, est-ce que ceci vous rafraîchit la mémoire quant à l'identité du
15 vice-président de l'assemblée ?
16 R. Oui, maintenant, effectivement. Mais je n'ai pas le sentiment que
17 c'était Brdjanin, parce que c'est surtout M. Kupresanin qui exerçait le
18 pouvoir.
19 Q. Eh bien, nous voyons s'agissant du rôle exercé par M. Kupresanin, nous
20 voyons que M. Brdjanin parle de ce que l'on peut lire au bas de la colonne
21 en B/C/S, en employant les mots suivants :
22 "Un ministre de l'Information du gouvernement de la RAK sera nommé bientôt,
23 et dans l'intervalle ses fonctions seront exercées par Vojo Kupresanin, qui
24 accomplira, j'en suis sûr, un magnifique travail."
25 Est-ce que Mladjenovic avait déjà servi en tant que ministre de
26 l'Information de la RAK par le passé ?
27 R. Si je me souviens bien, oui. Mais j'aurais un détail à rajouter. Le
28 gouvernement de la RAK n'a jamais été nommé au complet. Ce gouvernement ne
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1 possédait que quatre ministres officiellement mis en place. Je ne sais pas
2 exactement quels étaient leurs portefeuilles, mais je sais que le
3 gouvernement n'a jamais été complet.
4 Q. M. Kupresanin et M. Brdjanin étaient tous deux membres de la cellule de
5 Crise de la RAK, n'est-ce pas ?
6 R. Pour Brdjanin, je réponds par l'affirmative; pour Kupresanin, je ne
7 sais pas.
8 Q. Donc, ce que je vous propose, c'est que les membres de la cellule de
9 Crise de la RAK, selon ce que vous avez dit dans votre déposition, ont
10 conservé leurs postes au sein du gouvernement et de l'armée, alors que
11 Mladjenovic a été licencié, limogé, et qu'il y a des éléments importants
12 permettant de se forger l'opinion que le démantèlement de la cellule de
13 Crise a eu lieu alors que vous n'en avez pas informé la Chambre dans votre
14 déclaration écrite. Vous n'avez pas, donc, décrit les événements dans leur
15 intégralité. Ceci est la vérité, n'est-ce pas ?
16 R. Eh bien, je n'étais pas concerné. Je n'ai pas suivi de très près
17 l'ensemble de ces événements qui avaient un lien direct avec la RAK de la
18 Krajina et qui, d'ailleurs, ont eu lieu après la suppression de la cellule
19 de Crise. La cellule de Crise a été créée simplement par certaines
20 personnes en raison de leurs positions officielles, mais il y avait un
21 grand danger que cette cellule de Crise risque de devenir un pouvoir
22 extérieur au système. C'est la raison pour laquelle personnellement j'ai
23 participé en tant que journaliste à laisser de côté les éléments qui
24 n'étaient pas intégralement partie du système, c'est-à-dire du processus de
25 prise de décision. Je pense que nous avons réussi dans ce sens et que ceci
26 a été très utile dans la période en question.
27 Je vous rappellerais simplement que la Republika Srpska a vu le jour après
28 la décision, ou plutôt, après qu'il ait été démontré que les trois groupes
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1 ethniques ne pouvaient pas s'accorder sur l'avenir de la Bosnie-
2 Herzégovine.
3 Q. Monsieur --
4 R. Ce n'était que le début de la création des institutions.
5 Q. Monsieur, je me dois de vous interrompre. Vous sortez largement du
6 champ de la question que je vous ai posée. Je veux simplement vous poser
7 une question de suivi. Dites-vous dans votre déposition que d'une certaine
8 façon la cellule de Crise de la RAK, dont faisaient partie des dirigeants
9 importants de l'assemblée de la RAK, le commandant du 1er Corps d'armée et
10 le chef du centre de Sécurité de Banja Luka, que d'une certaine façon
11 c'était une institution extérieure au système, qui n'en faisait pas partie
12 ? Est-ce que c'est ce que vous dites dans votre déposition ?
13 R. Oui.
14 M. TRALDI : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement
15 au dossier de ce document.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 32201 devient la pièce
18 P7192.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Admise au dossier.
20 M. TRALDI : [interprétation]
21 Q. Monsieur, pour poursuivre, vous déclarez qu'il n'y avait pas de camps
22 dans lesquels des Musulmans et des Croates étaient enfermés à Banja Luka,
23 et vous parlez ensuite de Manjaca. Les personnes détenues à Manjaca étaient
24 manifestement musulmanes et croates, n'est-ce pas ?
25 R. C'est exact. Mais lorsque je dis Banja Luka, je parle de camps qui
26 auraient été créés par les instructions officielles de la municipalité de
27 Banja Luka. Or, Manjaca était une institution dont l'organisation relevait
28 de la Republika Srpska. Donc, juridiquement, le lieu où Manjaca se trouvait
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1 n'avait pas d'importance.
2 Q. J'ai encore des questions de suivi sur Manjaca très précisément. Vous
3 déclarez dans votre déclaration écrite que ce camp a été fermé en novembre
4 1992. C'est peut-être un détail, mais en fait, le camp a été fermé en
5 décembre 1992, n'est-ce pas ?
6 R. Je pense que c'était peut-être en décembre, mais peut-être aussi fin
7 novembre. Je me rappelle qu'il ne faisait pas très froid à ce moment-là,
8 donc peut-être.
9 M. TRALDI : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter
10 numéro 32032.
11 Q. Il s'agit d'une lettre de Radovan Karadzic adressée à Daniel Schiffer,
12 dont vous parlez dans votre déclaration écrite. Au premier paragraphe de
13 cette lettre, le président Karadzic évoque la visite d'Elie Wiesel, dont
14 vous parlez également dans votre déclaration écrite. Et dans l'extrait
15 pertinent au milieu du troisième paragraphe, nous lisons ce qui suit :
16 "En l'honneur de la visite de M. Wiesel et de ses collaborateurs en
17 Yougoslavie et en Republika Srpska et à l'occasion de notre Noël orthodoxe,
18 nous avons la volonté de libérer tous les prisonniers de Manjaca si la
19 communauté internationale et le CICR sont prêts à les accepter et à les
20 transporter dans des pays tiers."
21 Les dirigeants des Serbes de Bosnie ont conditionné la fermeture de Manjaca
22 au transport des détenus qui seraient libérés vers des pays tiers, n'est-ce
23 pas ?
24 R. Oui.
25 M. TRALDI : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement
26 au dossier du document 65 ter numéro 32032.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
28 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le document
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1 32032 devient la pièce P7913.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Admise au dossier.
3 M. TRALDI : [interprétation]
4 Q. Parlons maintenant de Prijedor --
5 M. TRALDI : [interprétation] Je crains qu'il y ait eu une erreur dans la
6 numérotation du dernier document versé au dossier.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro correct est P7193 pour le
8 dernier document versé au dossier.
9 M. TRALDI : [interprétation]
10 Q. Alors, parlons maintenant de Prijedor. Est-ce que vous avez été en
11 poste à Prijedor ?
12 R. Non.
13 Q. Vous n'avez jamais --
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Une précision. Le document 65 ter
15 était bon. Nous n'avons pas plusieurs versions, si je ne m'abuse.
16 M. TRALDI : [interprétation] Je dis pour la deuxième fois qu'en page 19,
17 ligne 7, j'ai été consigné au compte rendu d'audience comme ayant parlé du
18 document 65 ter numéro 30232 et, en tout cas, j'avais l'intention de parler
19 du document 32032, numéro que j'ai déjà utilisé lorsque j'ai demandé
20 l'affichage du document. Toutes mes excuses pour une quelconque ambiguïté
21 dont j'aurais pu être l'auteur.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, désormais il est confirmé que le
23 document 65 ter numéro 32032 est devenu la pièce P7193.
24 M. TRALDI : [interprétation]
25 Q. Vous venez de dire, Monsieur, que vous n'avez jamais été en poste à
26 Prijedor. Vous n'avez pas participé à quel que combat que ce soit à cet
27 endroit, n'est-ce pas ?
28 R. C'est exact. Je ne m'y suis jamais trouvé.
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1 Q. Vous n'avez pas non plus servi dans les rangs de la 5e ou de la 43e
2 Brigade de la VRS, n'est-ce pas ?
3 R. Non.
4 Q. Donc, lorsque vous déclarez au paragraphe 46 de votre déclaration
5 écrite : "Il y a eu aucun déploiement organisé de soldats à Prijedor", vous
6 n'aviez aucune idée du fait que ceci était conforme ou non conforme à la
7 vérité, n'est-ce pas ?
8 R. J'aimerais pouvoir relire le paragraphe 46 de ma déclaration.
9 Q. Il s'agit du dernier paragraphe de la déclaration écrite du témoin.
10 R. En tant que chef de la section des transmissions, je faisais partie
11 d'une unité d'artillerie qui avait une dimension plus importante.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La déclaration du témoin est la pièce
13 D924.
14 M. TRALDI : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Au sein de cette unité se trouvaient des
16 soldats qui venaient de toutes les régions de la Krajina de Bosnie et, en
17 particulier, de Prijedor. Nous étions stationnés au sud de Banja Luka au
18 moment où le soulèvement de Prijedor a eu lieu avec les combats qui l'ont
19 accompagné. La majorité des soldats originaires de Prijedor s'est emparée
20 de ses armes et a pris la route de Prijedor de sa propre initiative sans
21 demander la moindre autorisation, l'excuse pour eux étant que leurs
22 familles se trouvaient à Prijedor. Cette action n'était pas autorisée. Mais
23 le motif qui les a poussés était si fort que personne n'a pu les empêcher
24 d'agir ainsi.
25 M. TRALDI : [interprétation]
26 Q. Monsieur, essayons d'être bien précis. Compte tenu du fait que vous
27 avez déclaré qu'il n'y avait aucun déploiement organisé de soldats à
28 Prijedor, aucun ordre militaire relatif à un tel déploiement, dans une
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1 tentative de déterminer ce que vous saviez exactement, vous saviez quel a
2 été le comportement d'un certain nombre de soldats de la brigade
3 d'artillerie. Vous n'avez aucune connaissance personnelle quant au fait que
4 des brigades avaient été basées à Prijedor ou, en tout cas, quant au fait
5 que des événements militaires ont eu lieu à Prijedor en dehors de
6 l'événement que vous venez d'évoquer qui s'est déroulé à la fin du mois de
7 mai, n'est-ce pas ?
8 R. Non, je n'ai aucune autre information que celle concernant le départ
9 des soldats sur leur propre initiative.
10 Q. Alors, vendredi -- ou, plutôt, jeudi dernier, nous nous sommes arrêtés
11 alors que nous parlions d'une visite à Prijedor. J'aimerais que nous nous
12 concentrions sur les visites effectuées à Prijedor pendant le reste de
13 votre déposition. D'abord, vous dites être allé à Omarska. Vous saviez,
14 parce que le centre de presse --
15 R. Oui, en tant que membre d'un groupe de journalistes.
16 Q. Ceci, en raison du fait que le centre de presse suivait les
17 publications des médias internationaux, comme vous l'avez dit dans votre
18 déposition jeudi dernier, vous saviez que des articles avaient été écrits
19 au sujet des terribles conditions de vie à Omarska et dans d'autres camps
20 avant la visite effectuée par vous, n'est-ce pas ?
21 R. Ces articles étaient très superficiels. Ils reprenaient dans leur
22 grande majorité des rumeurs et ce genre de chose. En fait, nous avons
23 entendu parler de la plupart de ces événements après que Radovan Karadzic a
24 participé à la Conférence de Londres, où il y en a beaucoup été question.
25 Q. Monsieur, je comprends que dans votre réponse, vous dites : Oui, vous
26 saviez qu'il y avait des articles concernant les terribles conditions
27 d'existence dans les camps avant la visite effectuée par vous,
28 n'est-ce pas?
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1 R. Nous avions très peu d'information et aucun élément de preuve valable.
2 Q. La Chambre de première instance a entendu des témoignages selon
3 lesquels le commandant du 1er Corps d'armée savait, à l'époque de votre
4 visite, qu'avant votre visite, plus d'un millier de visiteurs avaient été
5 transportés d'Omarska à Manjaca et que certains d'entre eux avaient trouvé
6 la mort devant le camp de Manjaca. Je viens d'évoquer le commandant du 1er
7 Corps de Krajina, donc vous étiez au courant de ces événements ?
8 R. Je n'étais pas au courant de cela à l'époque des faits. J'en ai entendu
9 parler un peu plus tard.
10 Q. Vous êtes assis aujourd'hui sur cette chaise de témoin. Vous savez,
11 n'est-ce pas, que dans ce contexte, pratiquement tous les prisonniers
12 d'Omarska ont été transportés d'Omarska à Manjaca avant votre visite,
13 n'est-ce pas ?
14 R. D'après ce que je sais, oui.
15 Q. Quel était le nombre approximatif de prisonniers que vous avez vus à
16 Omarska lorsque vous vous y êtes trouvé ?
17 R. Je ne peux pas le dire précisément parce que nous les avons simplement
18 vus passer alors qu'ils sortaient du réfectoire après le déjeuner. Il était
19 impossible de les dénombrer.
20 Q. Et vous saviez que lors de la visite précédente de journalistes à
21 Omarska, ces journalistes avaient été empêchés d'enregistrer un certain
22 nombre de choses, n'est-ce pas ?
23 R. Je ne le savais pas à l'époque, car la visite a duré très, très peu de
24 temps, deux jours à peine.
25 Q. Avez-vous vu des prisonniers d'un âge avancé lors de votre visite ?
26 R. Non.
27 Q. Avez-vous vu des prisonniers malades ?
28 R. Non. Mais notre visite a été très courte, si bien que je n'ai pas eu la
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1 possibilité de prêter attention aux détails. Nous sommes allés participer à
2 une conférence de presse organisée par M. Drljaca.
3 Q. Vous avez également parlé d'un certain nombre de visites à Manjaca.
4 Vous savez qu'une visite de journalistes a eu lieu à Manjaca à peu près le
5 même jour, et que le transfert des prisonniers d'Omarska n'a pas pu être vu
6 par les journalistes qui n'avaient pas reçu l'autorisation de le voir,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Non. Je n'ai pas été informé de cela, parce que tout cela s'est passé à
9 Manjaca où je n'étais pas présent. Donc, je n'ai pas pu en avoir
10 connaissance.
11 Q. La Chambre a entendu des témoins selon lesquels votre supérieur
12 immédiat, le lieutenant-colonel Milutinovic, faisait partie de cette
13 visite. Il ne vous a pas dit que des journalistes s'étaient vus interdire
14 de voir les prisonniers transférés d'Omarska ?
15 R. Il ne me l'a pas dit personnellement. Je ne me rappelle même pas si
16 nous avons discuté de cela, parce que nous n'étions pas présents sur les
17 lieux à l'époque. Donc, j'ai peut-être raté quelque chose, à moins qu'il y
18 ait d'autres raisons pour mon absence d'informations, le fait que je n'en
19 ai pas entendu parler.
20 Q. Vous avez déclaré jeudi dernier que vous êtes allé en personne à
21 Keraterm. Quelles parties du camp avez-vous visitées ?
22 R. Si je me souviens bien, uniquement la partie avant du camp, c'est là
23 que nous a emmené le colonel Arsic et il ne s'y trouvait pratiquement rien.
24 Certains journalistes ont même déplacé des caisses pour regarder dans les
25 environs, mais n'ont rien trouvé.
26 Q. Les Juges de la Chambre ont entendu des témoins selon lesquels le
27 commandant du 1er Corps de Krajina a été informé du fait que deux semaines
28 plus tôt, à peu près, un massacre de prisonniers avait eu lieu au camp de
Page 32764
1 Keraterm. En avez-vous été informé personnellement ?
2 R. Non.
3 Q. Et les journalistes n'ont pas été amenés dans les salles où les
4 prisonniers avaient été détenus avant ce massacre, n'est-ce pas ?
5 R. Je ne sais pas dans quelles salles les prisonniers étaient détenus.
6 C'est la seule fois où je suis allé à Keraterm, et nous y sommes allés en
7 groupe.
8 Q. Donc, les journalistes n'ont pas été amenés dans des salles où on
9 aurait pu voir, par exemple, des impacts de balles sur les portes ou sur
10 les murs ou les plafonds au-dessus de leurs têtes ?
11 R. Nous n'avons pas vu cela.
12 M. TRALDI : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
13 suis sur le point de me pencher sur un document qui m'occupera encore
14 pendant 10 à 15 minutes, mais je regarde l'horloge, et je pense qu'il
15 serait préférable de faire la pause maintenant.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Commençons par faire la pause.
17 Monsieur Solaja, nous allons faire une pause de 20 minutes, et nous
18 souhaitons que vous reveniez dans cette salle d'audience après la pause.
19 Vous pouvez maintenant suivre M. l'Huissier.
20 [Le témoin quitte la barre]
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger.
22 M. TIEGER : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président.
23 C'est le problème du lundi matin, je le crains. J'aimerais apporter
24 quelques précisions au sujet de ce que j'ai déjà dit en rapport avec la
25 visioconférence de Banja Luka.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
27 M. TIEGER : [interprétation] Simplement que ce sont des témoins de la
28 Défense qui avaient l'intention de demander une visioconférence et j'ai
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1 peut-être suggéré par inadvertance que le problème de cette visioconférence
2 avait déjà été résolu. Donc, tout ce que j'ai dit n'était, en fait, que des
3 hypothèses, la requête a été déposée et il y avait des fondements
4 suffisants pour y faire droit.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous êtes en train de dire que le
6 calendrier, c'est-à-dire le fait de placer cette visioconférence un
7 vendredi ou en tout cas la semaine dont vous avez parlé de façon à répondre
8 à certaines préoccupations de la Défense concernait les préoccupations des
9 témoins qui devaient témoigner, n'est-ce pas ?
10 M. TIEGER : [interprétation] Oui, cette partie était exacte. Mais, encore
11 une fois, tout cela partait du principe que les fondements nécessaires
12 existaient.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est consigné au compte rendu
14 d'audience. Je vous remercie. Nous reprenons à 11 heures moins 10.
15 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
16 --- L'audience est reprise à 10 heures 52.
17 [Le témoin vient à la barre]
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, veuillez poursuivre.
19 M. TRALDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 Je demanderais à ce que l'on affiche 03327 de la liste 65 ter, s'il vous
21 plaît.
22 Q. On voit ici un communiqué de presse intitulé : "La République serbe de
23 Bosnie-Herzégovine et son gouvernement." Ce document porte la date du 7
24 août 1992. Au début, on voit qu'il s'agit d'une réponse à une diffusion de
25 CNN du 6 août sur la situation des prisonniers d'Omarska.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cela étant, il s'agit du 6 août 1882,
27 en tout cas dans la version anglaise de ce document.
28 M. TRALDI : [interprétation] Effectivement, dans la version anglaise, on
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1 voit "1882" et "1992" dans la version en B/C/S. Nous veillerons à ce que
2 cette erreur soit rectifiée. Je vous remercie, Monsieur le Juge.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous en prie.
4 M. TRALDI : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on affiche la page 4
5 de la version en anglais, et 3 de la version en B/C/S.
6 Q. On voit le nom du premier ministre, M. Djeric, au bas du document. Dans
7 le deuxième paragraphe de cette page en anglais, on lit ceci :
8 "Il est indéniable que les salles d'Omarska ne sont pas équipées pour le
9 séjour d'un nombre important d'individus et qu'il n'existe pas suffisamment
10 d'installations sanitaires et autres."
11 Vous saviez, n'est-ce pas, que le jour de votre visite le gouvernement de
12 la Republika Srpska avait reconnu préalablement qu'il y avait eu trop de
13 prisonniers à Omarska compte tenu de l'espace et des installations
14 sanitaires disponibles ?
15 R. Le gouvernement a fait part de son point de vue sur la question, mais
16 ce que je vois dans ce document c'est que c'est plutôt un projet plutôt
17 qu'un document final. Je ne l'ai jamais vu. J'ai vu que l'on a supprimé un
18 certain nombre de lignes, de paragraphes, je ne peux donc pas affirmer
19 qu'il s'agit bel et bien d'un document.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais c'est bien un document, vous pouvez
21 entretenir des doutes quant à son statut, s'il s'agit d'un projet ou d'une
22 version finale, Monsieur le Témoin. Cela étant, la question était de savoir
23 si vous saviez que le jour de votre visite, le gouvernement de la Republika
24 Srpska avait reconnu préalablement qu'il y avait trop de prisonniers à
25 Omarska. Avez-vous eu connaissance de ce fait, indépendamment des remarques
26 que vous avez à faire sur le document ?
27 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent avoir du mal à entendre le témoin.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter
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1 votre réponse à la question de savoir si vous étiez informé du fait que le
2 gouvernement de la Republika Srpska avait admis au préalable cette
3 situation ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai appris dans les médias.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Traldi.
6 M. TRALDI : [interprétation]
7 Q. Nous voyons plus bas dans le même document ce que continue à dire le
8 communiqué de presse, à savoir que le ministère de l'Intérieur de la
9 République serbe de Bosnie-Herzégovine avait délivré un ordre consistant à
10 "libérer sans délai les personnes détenues à Omarska âgées de plus de 60
11 ans, les blessés graves et les personnes malades, à l'exception des
12 personnes faisant l'objet de procédures pénales urgentes…"
13 Saviez-vous également donc, l'aviez-vous appris dans les médias avant votre
14 visite que des personnes âgées, des blessés graves et des personnes
15 malades, entre autres, étaient détenues à Omarska, par exemple ?
16 R. Non, cela ne figurait pas dans la presse.
17 Q. Et le fait que des personnes âgées, des blessés graves ou encore des
18 personnes malades figuraient parmi ceux qui avaient été transférés
19 d'Omarska à Manjaca avant votre visite, figurait parmi les raisons qui ont
20 fait que les journalistes n'ont pas été autorisés à rencontrer les
21 prisonniers d'Omarska lors de la première visite à Manjaca, n'est-ce pas ?
22 R. Cela n'est pas apparu dans la presse non plus.
23 M. TRALDI : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
24 document.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président --
27 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent ne pas non plus entendre la
28 Greffière d'audience.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P7194, versée
2 audience dossier.
3 Monsieur le Témoin, je reviens à votre dernière réponse, et ce n'est pas la
4 première fois que vous faites réponse d'ailleurs. Vous dites : "Ce n'est
5 pas non plus dans la presse". Les questions qui vous sont adressées visent
6 à obtenir de votre part des informations quant à la connaissance
7 personnelle que vous aviez des choses. Elles visent éventuellement à
8 révéler un certain ouï-dire, des informations indirectes que vous auriez
9 obtenues, mais elles ne visent pas à savoir si oui ou non vous avez lu ces
10 informations ou obtenu ces informations de la presse. La réponse était de
11 savoir si le fait que les personnes âgées, les blessés graves et des
12 personnes malades figuraient parmi les personnes transférées d'Omarska à
13 Manjaca avant votre visite, figurait parmi les raisons ayant poussé à
14 interdire l'accès des journalistes aux prisonniers d'Omarska lors de leur
15 première visite à Manjaca. Pourriez-vous répondre à cette question ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en ai pas eu connaissance.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
18 Question suivante, s'il vous plaît.
19 M. TRALDI : [interprétation] Merci.
20 Q. J'en viens maintenant à Trnopolje. Je demanderais à Mme Stewart de bien
21 vouloir passer une vidéo qui correspond au numéro 22393c de la liste 65
22 ter.
23 M. TRALDI : [interprétation] Nous allons la montrer deux fois afin que l'on
24 nous confirme l'exactitude de la traduction. Je le précise aux fins du
25 compte rendu.
26 [Diffusion de la cassette vidéo]
27 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
28 "Trnopolje a changé. Il y a maintenant des aliments et de la nourriture,
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1 même si les queues sont longues, et les autorités serbes fournissent
2 également un abri et des vêtements. Et la barrière en fil de fer barbelé
3 qui a choqué le monde a été supprimée. Et tout ceci s'est fait juste avant
4 l'arrivée simultanée de la Croix-Rouge et de nos caméras. Pour certains,
5 les conditions ici se sont améliorées. Ces réfugiés se trouvent dans des
6 conditions plus sûres, mais la Croix-Rouge n'a pas encore été autorisée à
7 entrer dans les autres camps et nos visites sont surveillées de près."
8 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
9 M. TRALDI : [interprétation]
10 Q. Dans votre déclaration, vous dites qu'il n'y avait pas de fil de fer
11 barbelé à Trnopolje. Vous savez, après avoir suivi ce que disait la presse
12 étrangère à propos des événements dans la RAK, que ce fil de fer barbelé
13 avait été retiré avant la visite des journalistes ?
14 R. Je n'ai pas vu de fil de fer, je n'ai pas eu connaissance de son
15 existence. Et je ne le vois pas non plus dans cette vidéo, et j'aimerais
16 savoir d'ailleurs quand cette vidéo a été réalisée.
17 Q. Ce que je vous dis, Monsieur, c'est ceci, vous saviez que lors de la
18 visite précédente il y avait un fil de fer barbelé. Vous dites dans votre
19 déclaration que vous n'en avez pas vu lorsque vous vous êtes rendu sur
20 place. En fait, vous dites de manière implicite qu'il y avait eu
21 préparation pour donner une image plus acceptable du camp avant cette
22 nouvelle visite ?
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic.
24 M. LUKIC : [interprétation] La question a été posée et a reçu réponse. Le
25 témoin a dit ce qu'il savait. Par ailleurs, le témoin a demandé quand cette
26 vidéo avait été tournée, je pense que c'est une question légitime, et je
27 pense que cette information devrait lui être communiquée.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question a été posée en partie, mais
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1 -- oui, la question a été posée, et dans une certaine mesure, elle a reçu
2 réponse en partie, donc, seulement. Mais M. Traldi a ajouté un élément à sa
3 question, à savoir la teneur de la déclaration du témoin, et M. Traldi,
4 lui, fait, par ailleurs, part de sa thèse sur la question. Il me paraît
5 donc que cette question est tout à fait recevable.
6 M. LUKIC : [interprétation] Oui, mais --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, Maître Lukic, s'il vous
8 plaît.
9 Monsieur Traldi, si vous dites au témoin qu'en réalité il décrivait les
10 préparatifs effectués pour projeter une image plus acceptable du camp, je
11 vous inviterais de bien vouloir indiquer à quel moment ceci est intervenu
12 de façon à ce que le témoin puisse s'y retrouver plus facilement.
13 M. TRALDI : [interprétation] Je vais reformuler ma question, Monsieur le
14 Président.
15 Q. Vous avez suivi ce que disait la presse internationale, vous saviez que
16 les journalistes ont filmé le fil de fer barbelé lors de leur visite
17 antérieure à Trnopolje. Ce que je vous dis, c'est ceci : le fait qu'il n'y
18 en ait pas eu au moment où la vidéo que nous venons d'examiner a été
19 filmée, le fait que vous-même n'ayez pas vu de fil de fer barbelé lors de
20 votre visite, n'est en fait que le résultat des préparatifs effectués après
21 la première visite le 5 et avant celle du 7 afin de polir l'image du camp
22 de Trnopolje à l'intention de la communauté internationale. C'est bien
23 exact, n'est-ce pas ?
24 R. Je n'ai pas eu connaissance de l'existence de fil de fer barbelé à
25 Trnopolje avant le 5 ou le 5. Je sais simplement qu'il y avait un vieux
26 grillage qui aurait pu être vu comme du fil de fer barbelé. Mais, à ma
27 connaissance, il n'y avait pas d'enclos véritable. Même dans les médias
28 internationaux, d'ailleurs nous avons suivi ce que ces médias ont rapporté
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1 par la suite, il n'est pas mentionné de fil de fer barbelé. Il aurait été
2 bon que l'on puisse voir l'intégralité de cette vidéo, si c'est
3 effectivement la position défendue par le Procureur.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre a vu l'essentiel de ces
5 images, nous n'allons donc pas les repasser. Nous connaissons l'état de la
6 discussion concernant l'existence de fil de fer que l'on voit, d'ailleurs,
7 dans d'autres parties de cette vidéo.
8 Veuillez poursuivre, Monsieur Traldi.
9 M. TRALDI : [interprétation] Je vais demander le versement au dossier de
10 cet extrait.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que pour la deuxième fois M.
12 Mladic essaie d'attirer l'attention de son conseil afin de se concerter
13 avec lui et à haute voix. Je lui demanderais de bien vouloir faire la
14 chose, s'il souhaite le faire, en silence à partir de maintenant.
15 Madame la Greffière, pouvez-vous nous donner une cote, s'il vous plaît ?
16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le document
17 22393c devient la pièce P7195.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P7195 est versée au dossier.
19 M. TRALDI : [interprétation]
20 Q. Monsieur, voici ce que j'avance : à Keraterm, ces journalistes n'ont
21 pas pu pénétrer dans une salle où un massacre avait été commis peu de temps
22 auparavant; à Omarska, la plupart des prisonniers avaient été évacués; à
23 Trnopolje, le fil de fer barbelé avait disparu. J'avance donc que cette
24 visite était un exercice de propagande qui visait à dissimuler la vérité
25 qui s'était faite jour peu de temps auparavant dans les médias à propos des
26 conditions terribles qui régnaient dans ces camps. C'était bien là la
27 véritable nature de cette visite, n'est-ce pas ?
28 R. A ma connaissance, c'est le président Karadzic qui avait donné son
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1 accord à la tenue de cette visite, à Londres, je crois, lors de discussions
2 avec des représentants étrangers. Je ne sais pas s'ils avaient accepté
3 puisqu'ils considéraient qu'il s'agissait là d'un outil de propagande. J'ai
4 fait le même travail avec ces journalistes que celui que j'avais fait
5 auparavant. Il y avait beaucoup de médias étrangers qui étaient présents.
6 M. TRALDI : [interprétation] Je n'ai plus de question à poser à ce témoin.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Traldi.
8 Avant -- Maître Lukic, si vous avez d'autres questions à poser à ce témoin.
9 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Allez-y.
11 Nouvel interrogatoire par M. Lukic :
12 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Solaja. Rebonjour.
13 R. Bonjour.
14 Q. J'aimerais revenir avec vous sur un certain nombre de questions qui ont
15 été abordées avec M. Traldi de la partie adverse.
16 M. LUKIC : [interprétation] Nous allons commencer par la pièce P7191.
17 Q. Dans ce texte, le général Talic parle de la création du corridor, de
18 l'opération Corridor, de son importance. Cette Chambre a entendu parler de
19 ces 12 bébés qui sont morts du fait d'un manque d'oxygène. Avez-vous une
20 connaissance personnelle de cet événement, du décès de ces bébés ? Répondez
21 par oui ou par non. Et si vous répondez par l'affirmative, je vous poserai
22 d'autres questions.
23 R. Oui.
24 Q. A-t-on cherché à obtenir de l'oxygène vers Banja Luka ?
25 R. On a demandé à ce que de l'oxygène soit envoyé par voie aérienne de
26 Belgrade à Banja Luka. Toutefois, à l'époque, une résolution des Nations
27 Unies était en vigueur, résolution instaurant une zone d'exclusion
28 aérienne, et l'avion en question n'a pas été autorisé de se rendre de
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1 Belgrade à Banja Luka. Le Dr Ilic était directeur de l'hôpital à l'époque,
2 et il a personnellement demandé au président de la présidence de Bosnie-
3 Herzégovine, Alija Izetbegovic, d'autoriser ce transport et il a également
4 essayé de parler à Franjo Tudjman, le président de la Croatie. Toutefois,
5 l'oxygène n'est jamais arrivé à Banja Luka, parce qu'à l'époque Banja Luka
6 - Bosanski Brod, Modrica, Doboj, Knin, et cetera - était isolée
7 physiquement du reste du monde.
8 Q. Je ne sais pas si tout figure bien au compte rendu, tout ce que vous
9 venez de dire. Quelle a été la réponse d'Alija Izetbegovic ?
10 R. Il n'a pas donné de réponse. C'est ce que le Dr Ilic a affirmé dans le
11 film qui a été réalisé sur cet événement, car le treizième bébé a survécu,
12 bien qu'il se soit trouvé dans un état critique.
13 Q. Et qu'a-t-on demandé à Alija Izetbegovic ?
14 R. Eh bien, on lui a demandé de prendre cette décision, à savoir que de
15 l'oxygène soit envoyé à Banja Luka. Et pas seulement de l'oxygène,
16 d'ailleurs, d'autre matériel médical. Du matériel de dialyse, notamment.
17 Q. Merci.
18 M. LUKIC : [interprétation] Examinons maintenant la pièce P3714.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En attendant, Monsieur le Témoin,
20 comment avez-vous obtenu ces informations ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette partie de la Bosanski Krajina et de la
22 Krajina serbe était physiquement coupée du reste. J'y habitais à l'époque,
23 j'avais été blessé, et ils ont dû m'emmener en vélo chez le médecin. Il n'y
24 avait plus de carburant. Il n'y avait plus d'aliments et il y avait de
25 nombreuses autres nécessités qui n'étaient pas satisfaites.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma question était de savoir comment vous
27 aviez obtenu ces informations concernant le problème de fourniture
28 d'oxygène. Comment l'avez-vous su ? Qui vous l'a dit ?
Page 32774
1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai appris il y a deux ans dans ce film
2 "Un souffle de vie" qui a été réalisé et qui portait justement sur cet
3 incident, et le Dr Ilic témoigne à ce sujet. Et le secrétaire général de
4 l'époque, Boutros Boutros-Ghali, a également participé, et j'ai apporté la
5 dernière évaluation.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant. Maître Lukic, en effet, nous
7 avons entendu des éléments à propos de cet incident. Mais demander au
8 témoin de bien vouloir résumer ce qu'il aurait appris dans un reportage de
9 la télévision il y a deux ans n'aide pas beaucoup la Chambre.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'en avais entendu
11 parler déjà avant.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous ai demandé comment vous l'aviez
13 appris et vous m'avez dit : Je l'ai appris il y a deux ans. Mais vous
14 n'avez pas eu de connaissances directes de l'événement, n'est-ce pas ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'information fiable. Si, le Dr Ilic
16 m'en a parlé directement.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, pourquoi ne pas me l'avoir dit
18 lorsque je vous ai posé la question de savoir d'où vous tiriez
19 l'information ? Quand avez-vous rencontré le Dr Ilic ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons travaillé ensemble à l'époque, dans
21 les années 1990. Je travaillais au sein du système sanitaire, j'y étais
22 conseiller. Toutefois, je pensais que les informations publiques étaient
23 plus fiables.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas à vous de juger de la
25 fiabilité des informations dont vous disposez. Votre rôle consiste à nous
26 informer sur les connaissances directes et l'expérience qui sont les
27 vôtres. Ceci jette une lumière supplémentaire --
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie de votre conseil, Monsieur le
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1 Président. Je n'ai aucune expérience devant un tribunal.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien compris.
3 Maître Lukic, poursuivez.
4 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 Q. Monsieur le Témoin, à l'époque, les médias en ont-ils parlé ?
6 R. Bien entendu. Cela a fait les gros titres. Toutefois, la presse n'est
7 pas allée bien loin. A l'époque, il n'y avait pas d'électricité. Les gens
8 écoutaient les nouvelles à l'aide de petits transistors…
9 Q. Merci.
10 M. LUKIC : [interprétation] P3714, je demanderais à ce qu'on l'affiche à
11 l'écran, s'il vous plaît.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après le compte rendu, vous aviez
13 demandé 3174.
14 M. LUKIC : [interprétation] Excusez-moi, 3714.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] "14". Eh bien, peut-être qu'il y a une
16 erreur au compte rendu, page 33, ligne 23.
17 Veuillez poursuive.
18 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
19 Q. Ce document vous a également été présenté.
20 M. LUKIC : [interprétation] Nous avons besoin de la page 2 dans la version
21 en anglais et de la page 3 dans la version en B/C/S. C'est un document du
22 commandant du 1er Corps de la Krajina qui date du 28 juillet 1992. Excusez-
23 moi, c'est la page précédente qui m'intéresse dans la version en anglais.
24 Il nous faut le numéro 3.
25 Q. Vous voyez ici ce numéro 3, le paragraphe 3. On vous a posé des
26 questions à ce sujet. Voici ce que dit ce paragraphe :
27 "Dans la ville de Banja Luka et autres villes de taille importante, la
28 demande devient de plus en plus pressante en faveur d'un départ de la
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1 population croate et musulmane, et la chose s'organise."
2 Savez-vous d'où venaient ces demandes appelant au départ de cette
3 population ?
4 R. Je crois que cela venait de citoyens appartenant aux groupes ethniques
5 croate et musulman. Beaucoup avaient peur de ne plus pouvoir vivre
6 convenablement.
7 Q. Et avez-vous quelle que information que ce soit sur la manière dont ce
8 départ a été organisé ? Ou était-il désorganisé ? Comment quittait-on la
9 Krajina ?
10 R. C'était tout à fait désorganisé, les choses étaient absolument
11 impossibles parce que tant que le couloir n'a pas été percé, nous étions
12 enfermés de toutes parts. Et la peur de la mort était aussi forte car on
13 craignait qu'il n'y ait plus rien à manger, parce que l'on se fichait bien
14 des Serbes, des Croates ou des Musulmans ou de qui que ce soit d'autre. La
15 seule possibilité de se déplacer, c'était le long du couloir vers la Serbie
16 ou par Gradiska et enfin pour arriver en Croatie. C'était le seul moyen.
17 Q. Merci.
18 M. LUKIC : [interprétation] Examinons maintenant le document P6976.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une question avant de laisser de côté ce
20 sujet.
21 Avez-vous une explication qui nous ferait comprendre pourquoi ce document
22 ne parle que des Croates et des Musulmans et de leur départ ? Cela signifie
23 que les Serbes ne craignaient pas pour leur vie à l'époque à Banja Luka ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Les Serbes n'avaient pas le droit de partir.
25 Ils ne pouvaient partir que de façon illégale, ou par la petite porte
26 pouvaient-ils obtenir les papiers nécessaires au départ, car c'est la
27 Republika Srpska qui s'est autoproclamée compétente pour ce territoire. En
28 revanche, la Republika Srpska n'a jamais forcé les Croates et les Musulmans
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1 de rester ou bien de rejoindre l'armée. Parfois, ils l'ont rejointe tout de
2 même de façon volontaire.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc les Serbes n'avaient pas le droit
4 de partir pourquoi, sur la base de quoi ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, ils ne pouvaient pas voyager
6 librement et ils étaient tous obligés de participer au travail des
7 institutions ou bien de faire partie de l'armée qui a mobilisé les Serbes
8 dans l'armée à l'époque. Parce que c'était la guerre, la mobilisation était
9 obligatoire, même si on n'avait pas encore proclamé à l'époque un état de
10 guerre proprement dit.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci concerne peut-être les gens qui
12 tombaient sous le coup de la mobilisation, mais ici on parle des Croates,
13 des Musulmans, de la population au sens large du terme, et je vous ai posé
14 la question au sujet des Serbes, pas au sujet des Serbes aptes à combattre.
15 Ils n'avaient pas le droit de voyager ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Autrement dit, les femmes, les personnes
18 âgées, n'avaient pas le droit de voyager ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Les seuls qui avaient le droit de voyager
20 étaient ceux qui devaient voyager pour leur travail ou bien s'ils avaient
21 besoin de soins médicaux.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les Croates et les Musulmans, est-ce
23 qu'ils avaient le droit de voyager, eux ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Librement ? Non. Mais ils voulaient partir
25 vers des pays tiers. Mais ils n'étaient pas obligés de le demander.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout ceci n'explique pas pourquoi ce
27 rapport de combat quotidien parle exclusivement des Croates et des
28 Musulmans, alors que vous dites que les Serbes ne pouvaient pas voyager non
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1 plus. J'essaie de comprendre pourquoi ce document ne parle pas de toute la
2 population qui souhaite partir, mais parle uniquement de la population
3 croate et musulmane.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, vous savez, les Serbes ne demandaient
5 pas souvent de partir, ou, plutôt, ils ne le demandaient pas du tout.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comment le savez-vous ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vivais là-bas à l'époque, enfin je vis
8 depuis toujours là-bas. J'ai toujours vécu là-bas.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Lukic.
10 M. LUKIC : [interprétation]
11 Q. Je vais essayer de vous poser encore quelques questions à ce sujet.
12 Pourriez-vous me dire de quelle façon un Serbe pouvait partir ? Que devait-
13 il obtenir pour partir vers la Serbie ?
14 R. Il fallait qu'il ait une bonne raison pour partir, parce que la Serbie
15 aussi a une politique d'immigration qui ne permettait pas facilement aux
16 gens de s'y installer, qu'il fallait qu'il y ait une raison bien forte. Ils
17 pouvaient peut-être partir pour une raison médicale, il fallait qu'ils
18 prouvent que ce besoin dépassait les moyens de la Republika Srpska.
19 Q. Fallait-il avoir des documents pour cela, des permis ?
20 R. Oui, il fallait avoir des permis spéciaux pour cela. On n'avait pas de
21 passeports, on ne pouvait pas faire de passeports, vu que la Republika
22 Srpska n'était pas un pays reconnu par la communauté internationale. Et
23 c'était un facteur qui limitait nos moyens, donc les Serbes ne pouvaient
24 partir que s'ils disposaient de documents spécifiques répondant à un besoin
25 spécifique.
26 Q. Autrement dit -- ou plutôt, je vais vous demander d'examiner avec moi
27 le document P6976.
28 Dans ce document, M. Brdjanin parle aussi. Vous allez voir qu'il parle un
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1 peu plus loin dans le texte. Mon collègue vous a déjà montré ce document. A
2 la première page, vous pouvez voir que M. Radic parle. Et vous avez dit à
3 son sujet que c'était un homme intègre et honnête. Voici ce qu'il dit ici.
4 La septième ligne à peu près. On voit donc qu'il fait un discours. Voici ce
5 qu'il dit :
6 "Les victimes de cette guerre sont nos enfants. Les victimes de l'autre
7 guerre étaient nos frères, nos sœurs, nos pères et nos mères. Les victimes
8 de la guerre d'avant cela étaient nos grands-pères et nos pères, et de la
9 guerre d'avant encore, nos arrière-grands-pères. Mais l'objectif de tous
10 était de vivre avec son peuple avec l'aide du Dieu, rien d'autre, en
11 harmonie, en reconnaissant aux autres peuples exactement les mêmes droits."
12 Vous étiez un journaliste et au cours de votre travail, ne vous est-il
13 jamais arrivé que l'on vous demande de dire que les autres peuples ne
14 devaient pas vivre avec les Serbes dans la Republika Srpska ?
15 R. Non, on ne nous a jamais donné cette instruction. Je dirais même que la
16 Republika Srpska avait proclamé que c'était un pays des citoyens. Et je
17 pense que dans la constitution, on dit que cette concession a été adoptée
18 par le peuple serbe et les autres peuples vivant sur le territoire de
19 l'Etat.
20 Q. Ici, on voit la date du 21 août 1994. Et on dit que le rassemblement de
21 Srpska Sloga [phon] a été diffusé sur les ondes. Ce rassemblement a eu lieu
22 à Banja Luka. Au bout de deux années de guerre, M. Radic dit que les autres
23 peuples jouissent des mêmes droits que le peuple serbe. Est-ce que vous
24 savez s'il a changé d'avis avant la fin de la guerre ?
25 R. Non. Et c'est pour cela, entre autres, que le 2 janvier 1996, il a été
26 reçu par le président Bill Clinton comme l'un des hommes politiques les
27 plus raisonnables, les plus modérés de la Republika Srpska.
28 M. LUKIC : [interprétation] Maintenant, on va voir un document 65 ter
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1 11306. Je ne sais pas si ceci figure déjà parmi les pièces à conviction.
2 Ici, on a parlé des cellules de Crise qui n'existent plus. Il nous faut la
3 page 3, deuxième paragraphe en anglais. Et en B/C/S, la troisième colonne,
4 le deuxième paragraphe.
5 Q. Il s'agit de la conférence de presse du ministre de la Défense, Bogdan
6 Subotic, publiée dans la publication "Glas" le 17 juillet 1992, donc au
7 début de la guerre.
8 Ici, on début du deuxième paragraphe, la troisième colonne, on peut
9 lire :
10 "A l'intérieur des frontières de la République serbe de Bosnie-
11 Herzégovine vont rester tous les citoyens qui acceptent ce pays, cet Etat
12 comme leur Etat et qui vont tous jouir des mêmes droits de citoyens."
13 L'auteur de cette conférence de presse est M. Solaja.
14 R. C'est moi-même.
15 Q. Pourriez-vous nous dire qui lisait cette publication, "Glas" ?
16 R. C'est une publication qui existait depuis 50 ans à l'époque, on pouvait
17 l'acheter dans des kiosques. Tout le monde lisait "Glas" à l'époque.
18 Q. Et en ce qui concerne "Krajiski Vojnik" ?
19 R. "Krajiski Vojnik" c'était la publication du 1er Corps de la Krajina. Il
20 était distribué dans les unités, mais on pouvait aussi l'acheter dans des
21 kiosques parce qu'il était présent dans les points de vente.
22 Q. Et qui était le lecteur de base de "Krajiski Vojnik" ?
23 R. Tout le monde. Bon, j'ai dit que c'était tout d'abord une publication
24 destinée aux soldats du 1er Corps de la Krajina, mais ce n'était pas de la
25 propagande. C'était un moyen d'information, un moyen d'informer les soldats
26 des informations importantes. C'était notre approche, parce qu'on s'était
27 dit qu'il n'était pas besoin de propager la propagande auprès de ces
28 soldats, qu'il fallait leur dire la vérité. Nous voulions dépeindre les
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1 faits tels qu'ils se sont produits. On n'était pas là comme un instrument
2 de la propagande politique, on était là pour informer des faits.
3 Q. Merci.
4 M. LUKIC : [interprétation] Maintenant, je vais demander à voir P7192.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous voulez verser le
6 dernier document ?
7 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Parce qu'il était sur la
8 liste.
9 M. TRALDI : [interprétation] Pas d'objection.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document va recevoir la cote D925.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D925 est versé au dossier.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Lukic, peut-on vérifier le
14 numéro ? Parce que vous avez dit 79…
15 M. LUKIC : [interprétation] Je demande à voir le document 7192.
16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
17 M. LUKIC : [interprétation] Voilà.
18 Q. Je suis en train de vous montrer ce document vraiment pour vous
19 rafraîchir la mémoire. Il s'agit là du remplacement du rédacteur en chef de
20 "Glas". A la page 17 du compte rendu d'aujourd'hui, ligne 12, vous avez dit
21 que la Republika Srpska venait d'être créée à la suite d'un processus au
22 cours duquel les trois groupes ethniques n'ont pas réussi à se mettre
23 d'accord sur l'avenir de Bosnie-Herzégovine. Moi, je l'ai entendu dire, ce
24 n'est pas quelque chose qui se trouve dans le compte rendu d'audience. Est-
25 ce que vous vous souvenez de ce que vous avez dit par la suite au sujet de
26 la création des institutions ?
27 R. Le système fédéral des institutions yougoslaves s'est dissolu, et le
28 système du fonctionnement des institutions de la République socialiste de
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1 Bosnie-Herzégovine ne fonctionnait plus non plus. Sur une partie du
2 territoire, où il y avait donc une administration territoriale auto-
3 organisée, les unités locales ont commencé à fonctionner, et c'est comme
4 cela que la Republika Srpska a été créée avec une constitution, et ceci, à
5 partir de 1992. Donc les cellules de Crise et la RAK, c'étaient des phases
6 intermédiaires en attendant que les institutions se mettent en place.
7 Q. Et est-ce que vous pouvez nous dire quelle est la raison du
8 remplacement du rédacteur en chef de "Glas" ?
9 R. Je ne sais pas. Je pense que cela n'avait rien à voir avec cela. Il est
10 arrivé souvent qu'on remplace des gens à leurs postes, surtout quand il
11 s'agit de ce genre de postes.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.
13 Pourriez-vous nous dire, alors, quelle a été la raison de son
14 remplacement ? Quels étaient les problèmes internes éventuels ? De quoi
15 s'agissait-il ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient les problèmes qui prévalaient à
17 l'intérieur du Parti démocratique serbe. Il s'agissait d'une question de
18 lutte pour le pouvoir à l'intérieur du parti. Et c'étaient vraiment des
19 luttes internes qui n'avaient rien à voir avec les événements externes,
20 avec la situation. Il s'agissait de problèmes personnels, je dirais, et un
21 des problèmes les plus graves était d'établir qui était la personne grâce à
22 laquelle l'on a réussi à percer le corridor, et des gens se sont auto-
23 appropriés cette qualité.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit "Je pense". Maintenant, je
25 vous ai posé une question très précise au sujet justement de ce rédacteur
26 en chef. Est-ce qu'il a fait quelque chose qui n'est pas bien ? Est-ce que
27 les autres ont dit qu'il a fait quelque chose qui n'est pas bien ? Est-ce
28 que vous savez quelle a été la situation le concernant, lui ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il disait que c'est grâce à lui
2 qu'on a pu percer le corridor. Mais que je sache, c'était une opération de
3 l'armée de la Republika Srpska, et il y a eu des divergences politiques au
4 niveau du SDK, justement, qui était au pouvoir. Mais vous savez, je n'ai
5 jamais été membre du parti, donc je n'ai jamais été versé dans ces choses-
6 là.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous dites que vous pensiez qu'il
8 s'est vanté que c'était grâce à lui et d'autres cercles que l'on a pu
9 percer le corridor. Mais pourquoi vous dites cela ? Le saviez-vous ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je l'ai dit sur la base de ce que
11 l'on écrivait ces jours-là dans "Glas", où l'on disait que ce sont les
12 paramilitaires qui ont percé le corridor. Je pense que c'est justement lui
13 qui disait cela. Alors que de l'autre côté, il était clair qu'il s'agissait
14 là d'une grande opération militaire. Mais vous savez, moi, je n'ai eu accès
15 qu'à des rumeurs parce que ces cercles politiques, les cercles du parti,
16 étaient assez fermés.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous ne savez pas du tout si cela
18 avait quoi que ce soit à voir avec la dissolution de la cellule de Crise,
19 parce que vous n'aviez pas vraiment d'information directe à ce sujet ? Ce
20 que vous savez, cela relève de rumeurs ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Exact.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître Lukic.
23 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
24 Q. Je vais vous donner lecture de quelque chose qui figure au compte
25 rendu d'audience et vous me dites si c'est bien écrit. A la page 44, ligne
26 21, on peut lire :
27 "…je pense que c'est lui qui disait cela, qui disait que c'étaient grâce
28 aux paramilitaires."
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1 Est-ce que c'est lui qu'il disait ou bien ce n'est pas lui qui le
2 disait ?
3 R. Non, ce n'est pas lui qui le disait. C'était une conviction reliée
4 auprès d'un certain nombre d'hommes politiques du SDS.
5 Q. Merci. Maintenant, nous allons examiner le document P7193. C'est
6 une lettre qui a été envoyée à Daniel Salvatore Schiffer par M. Radovan
7 Karadzic. On y dit que les Serbes sont prêts à libérer tous les prisonniers
8 de Manjaca si la Croix-Rouge internationale est prête à les accueillir et
9 les envoyer vers des pays tiers. Est-ce que vous savez ce que les
10 prisonniers à Manjaca voulaient obtenir ?
11 R. Ils ont demandé à partir vers des pays tiers. Je pense qu'un grand
12 nombre d'entre eux sont partis à Londres par avion, en partant de Banja
13 Luka. Je pense que c'étaient des blessés, des gens qui n'étaient pas en
14 bonne santé, parce que Daniel Schiffer est venu à l'époque et c'est en sa
15 présence que le camp a été fermé.
16 Q. D'où tenez-vous cette information, à savoir que ce sont les gens
17 enfermés à Manjaca qui avaient demandé cela ?
18 R. Je le dis sans doute parce qu'ils sont partis à Londres par avion.
19 C'était un gros avion russe.
20 Q. Mais vous, personnellement, vous avez parlé avec les gens de Manjaca de
21 cela ou non ?
22 R. Non, je n'ai pas eu la possibilité de leur parler de cela. A l'époque,
23 ce n'était pas vraiment quelque chose qui m'intéressait. Vous savez,
24 c'était une époque très chargée d'avènements, et on avait beaucoup d'autres
25 choses à faire.
26 Q. Merci.
27 M. LUKIC : [interprétation] Il y a encore deux documents qui m'intéressent.
28 Il y en a un que nous allons pouvoir terminer avant la pause. P7194. Dans
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1 ce document, c'est la quatrième page en anglais qui nous intéresse et la
2 troisième page en B/C/S.
3 Q. Donc c'est le document où il y a des choses biffées. On parle des
4 conditions qui prévalaient dans Omarska et qui n'étaient pas adéquates,
5 qu'il n'y avait pas des conditions sanitaires, d'hygiène, et cetera, et
6 qu'il y avait pas mal de gens là-dedans. Et dans la suite du paragraphe, on
7 peut lire :
8 "Cependant, nous sommes obligés de les utiliser, entre autres parce que
9 l'autre partie n'est absolument pas intéressée à procéder à un échange de
10 prisonniers."
11 Vous avez travaillé dans le journal du 1er Corps de la Krajina, est-ce que
12 c'est grâce à cela que vous avez pu avoir des informations indiquant que la
13 partie adverse n'était pas intéressée par un échange éventuel ?
14 R. Bon, à l'époque, le journal n'était même pas publié. Le premier numéro,
15 qui avait le numéro 11, n'est sorti qu'au mois de novembre.
16 Q. Merci.
17 M. LUKIC : [interprétation] Maintenant, je vais demander à avoir le
18 document P7195.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de faire cela. Bien sûr que nous
20 voyons qu'il y a pas mal de choses écrites à la main ici, et le témoin a
21 parlé de cela. Mais les Juges de la Chambre voudraient savoir quel est
22 vraiment le statut de ce document ? Qu'est-ce qu'en pensent les parties ?
23 M. TRALDI : [interprétation] Ce que je peux vous dire, c'est que nous
24 l'avons reçu d'une source média plutôt du gouvernement de la Republika
25 Srpska. Il a été envoyé tel quel. Et il s'agit de l'agence SRNA.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que l'on sait qui a écrit cela ?
27 Est-ce que le document est arrivé tel quel ou bien est-ce qu'ils ont ajouté
28 ces choses ajoutées à la main ?
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1 M. TRALDI : [interprétation] Je ne connais pas la réponse. Je peux poser la
2 question et vous répondre le plus rapidement possible.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai bien remarqué que vous n'avez cité
4 que les parties qui n'ont pas été biffées dans l'original.
5 Maître Lukic, est-ce que vous avez quoi que ce soit à ajouter à ce sujet ?
6 Parce que tout à l'heure je pense que vous n'avez pas soulevé d'objection
7 quant au versement éventuel de ce document, et il nous manque encore des
8 informations pour évaluer la valeur probante de ce document.
9 M. LUKIC : [interprétation] Je ne l'ai pas fait parce que j'ai bien vu qu'à
10 la première page il y avait un sceau.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais quelle est votre position par
12 rapport à ce document, alors ? Est-ce que ce texte a été donné à l'agence
13 de presse avec ces annotations ou sans les annotations ?
14 M. LUKIC : [interprétation] Nous n'avons pas de connaissances à ce sujet.
15 Nous ne savons pas si cela a été fait en amont ou après.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etant donné que vous interrogez le
17 témoin en ce moment en rapport avec ce document, vous admettez qu'il s'agit
18 d'un article de presse qui a été émis, avec ou sans les annotations, à un
19 certain moment ?
20 M. LUKIC : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. La situation est claire. Je vous
22 remercie.
23 Veuillez procéder.
24 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que nous sommes
25 arrivés à l'heure de la pause, mais nous pouvons en terminer en quelques
26 minutes…
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, terminez en quelques minutes,
28 je vous prie.
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1 M. LUKIC : [interprétation] Nous avons besoin de l'affichage de la pièce
2 P7195. Il s'agit d'une transcription de vidéo.
3 Q. On vous dit qu'entre le 5 et le 7, les fils de fer barbelé ont été
4 retirés. La journaliste Penny Marshall avait déjà dit qu'au moment où elle
5 filmait ces images à la date du 7 août 1992, la visite était strictement
6 supervisée. Vous voyez ce passage ? Je vous demande, par conséquent, si les
7 journalistes pouvaient parler en toute liberté aux personnes qui se
8 trouvaient à Trnopolje ou si les journalistes étaient toujours escortés par
9 quelqu'un, par une ou plusieurs personnes en armes ? Quelle a été votre
10 impression ? Cette visite était-elle strictement supervisée ?
11 R. Tous les journalistes s'exprimaient librement. Il y avait 40
12 journalistes à Trnopolje. Ils remplissaient un autobus entier. Il y avait
13 aussi une escorte, mais cette escorte était là uniquement afin de les
14 escorter pour garantir la sécurité des journalistes. Et pourrais-je ajouter
15 encore quelques mots ?
16 La Serbie et la Republika Srpska étaient soumises à des sanctions des
17 Nations Unies et à un embargo à ce moment-là, et l'attitude de la
18 population vis-à-vis de tout ce qui pouvait être qualifié "d'étranger"
19 était particulièrement négative. Je l'ai indiqué dans ma déclaration
20 écrite. Notre intention principale était de sauvegarder les journalistes de
21 façon à ce que rien de négatif ne leur arrive. Je puis dire avec fierté,
22 d'ailleurs, qu'aucune menace à la sécurité physique des journalistes ne
23 s'est produite dans notre secteur. Il y avait des voitures civiles qui
24 circulaient devant et derrière l'autobus.
25 Q. Encore un point. S'agissant de ce que vous savez de ces zones de
26 sécurité encerclées par des fils de fer barbelé, quelle est la zone que
27 vous avez pu voir de vos yeux à la date du 7 ?
28 R. Je ne me rappelle pas de fil de fer barbelé. Je me rappelle d'une
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1 clôture en fil de fer. N'importe qui pouvait voir dans certains coins un
2 peu de fil de fer barbelé au-dessus d'une clôture. Tout ça était ancien et
3 rouillé. Je sais que la zone entière, en tout cas, n'était pas clôturée à
4 l'aide de fil de fer barbelé. Il y avait une clôture qui était déjà très
5 ancienne, qui datait d'avant. Il y avait là une école ou un centre de
6 jeunesse et, en général, ce genre d'installations était encerclé par des
7 fils de fer.
8 Q. Quelle était la hauteur de cette clôture ?
9 R. Cela dépendait. La plupart du temps, la hauteur était faible et, dans
10 certains coins, elle était un peu plus élevée, probablement dans les coins
11 qui faisaient face à la forêt. Mais je veux dire, je ne sais pas. Tout cela
12 s'était fait beaucoup de temps auparavant. Je n'y ai pas vraiment réfléchi
13 de façon détaillée.
14 Q. Lorsque vous dites "plus faible" pour la hauteur, de combien plus
15 faible ?
16 R. Nos clôtures mesurent en général un mètre, un mètre 20 de haut. C'est
17 classique chez nous dans nos régions, c'est à peu près ce que faisait tout
18 le monde.
19 Q. Et quelles étaient les parties qui n'étaient pas encerclées du tout par
20 la clôture ?
21 R. Il y en avait plus de la moitié, à mon avis.
22 Q. Je vous remercie, Monsieur Solaja. C'étaient toutes les questions que
23 j'avais à vous poser.
24 R. Je vous remercie également.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est possible que j'aie quelques
26 brèves questions à ajouter.
27 Tout d'abord, voici ma première question : finalement, lorsque vous vous
28 êtes trouvé sur place le 7 août, si je vous ai bien compris, est-ce que
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1 vous avez vu quelque part du fil de fer barbelé ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me suis trouvé sur place qu'une fois.
3 Et, pour autant que je le sache, je n'en ai pas vu. Je n'ai pas vu de
4 clôtures en fil de fer barbelé. Je n'ai pas vu cela. Chez nous, c'est assez
5 classique de faire des clôtures surplombées par une rangée de fil de fer
6 barbelé. Mais moi, je n'en ai pas vu, si vous comprenez ce que je veux
7 dire.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, Monsieur le Témoin, je ne vous
9 demande pas d'évoquer des faits. Je vous demande simplement si vous avez
10 vu, pas dans votre jardin personnel, mais si là-bas vous avez vu du fil de
11 fer barbelé lorsque vous étiez à Trnopolje le 7 août ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Non.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et pourtant, vous avez fait des
14 commentaires sur le fait que le fil de fer barbelé était rouillé. Alors,
15 sur quoi fondez-vous votre connaissance quant au caractère rouillé du fil
16 de fer barbelé ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parlais d'une clôture métallique, du fil de
18 fer --
19 M. LUKIC : [interprétation] Eh bien, il a parlé de fil de fer. Si on a dit
20 fil de fer barbelé, c'est une erreur qu'il convient de corriger.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends qu'il y a peut-être eu
22 malentendu sur ce point. Bien. Tout est clair.
23 Encore un point. Je cherche un éclaircissement au sujet du paragraphe 31 de
24 votre déclaration.
25 Paragraphes 30 et 31 de votre déclaration écrite.
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Qui est devenu la pièce D924.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai déjà introduit ma question. Vous
28 nous avez dit qu'il n'y avait pas de camps à Banja Luka en expliquant que,
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1 quel que soit l'endroit où ces camps aient pu se situer, ils n'étaient pas
2 organisés par les autorités de Banja Luka. Puis, au paragraphe 30, vous
3 dites qu'il y avait un fait terrible, à savoir que plusieurs cas de
4 meurtres ont eu lieu qui n'ont été discutés ouvertement que plus tard. Et
5 puis, un peu plus loin dans le texte, vous dites que vous êtes au courant
6 d'un certain nombre de meurtres.
7 Au paragraphe 31, ensuite, vous déclarez :
8 "Même à l'époque, tout cela a été résolu et il a été prouvé que la
9 motivation était la cupidité."
10 Alors j'essaie de comprendre de quels meurtres exactement vous
11 parlez. Les deux meurtres auxquels vous faites référence, je crois, ne sont
12 pas des meurtres qui sont évoqués dans l'acte d'accusation. Dans l'acte
13 d'accusation, nous trouvons un certain nombre d'incidents dans lesquels,
14 parfois, un certain nombre de personnes ont été tuées, et ce nombre varie
15 d'un incident à l'autre.
16 Alors, puisque vous parlez de meurtres ici, est-ce que vous parlez
17 d'une zone bien circonscrite ou est-ce que vous parlez de meurtres qui
18 intégreraient les meurtres incluent par le Tribunal dans les actes
19 d'accusation et dans les charges retenues contre l'accusé ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je connais deux cas. J'ai connu
21 personnellement ces personnes et la police chargée d'empêcher le crime a
22 déclaré que ces meurtres étaient liés à des vols.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ceci concerne deux cas de meurtres,
24 mais pas de façon générale les meurtres qui aient été commis dans cette
25 période dans l'ensemble de la zone élargie ou proche de Banja Luka,
26 Prijedor et Sanski Most. Vous n'expliquez aucun autre meurtre que les deux
27 que vous venez d'évoquez précisément ici. Vous ai-je bien compris ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez compris correctement. Ce sont les
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1 cas dont j'ai eu connaissance.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
3 Monsieur Traldi, quelques questions supplémentaires ?
4 M. TRALDI : [interprétation] Très rapidement, Monsieur le Président. Cinq
5 minutes ou moins.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, continuez pendant cinq minutes.
7 Veuillez procéder.
8 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Traldi :
9 Q. [interprétation] D'abord, Monsieur, vous avez évoqué des prisonniers de
10 Manjaca dont vous avez déclaré qu'ils avaient été emmenés à bord d'un avion
11 jusqu'au Royaume-Uni. Les prisonniers, au moment de la fermeture de
12 Manjaca, étaient un millier qui ont été envoyés en Croatie par bus et
13 plusieurs centaines qui ont été transférés à Batkovic et à Kula dans le
14 cadre du système créé par les Serbes de Bosnie et dissimulés à la Croix-
15 Rouge, n'est-ce pas ?
16 R. Je suis au courant du convoi qui a pris la direction de la Croatie,
17 mais je ne suis pas au courant de ce que vous avez dit pour les autres
18 camps. Et je crois que ce n'est pas réaliste, car la Croix-Rouge a tenu des
19 dossiers très précis. Et Schweizer est quelqu'un que j'ai connu, un
20 représentant de la Croix-Rouge.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, on ne vous a pas
22 interrogé pour connaître votre avis sur le caractère réaliste de quoi que
23 ce soit. Nous vous avons compris comme ayant déclaré que vous étiez au
24 courant du transport vers la Croatie et que vous ne saviez rien des autres
25 transports. Vous avons-nous bien compris ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez très bien compris.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Monsieur Traldi.
28 M. TRALDI : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage en tant que
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1 dernier élément du document 65 ter numéro 02362.
2 Q. Il s'agit du procès-verbal de la 22e Séance de l'assemblée des Serbes
3 de Bosnie qui a rapport avec le commentaire que vous avez fait dans les
4 questions supplémentaires concernant la nature civile de l'Etat bosno-serbe
5 et avec la référence que vous avez faite à des Serbes et d'autres
6 populations désignées dans la constitution.
7 M. TRALDI : [interprétation] Page 77 sur les écrans, je vous prie. Bas de
8 la page pour la version anglais. Et page 75, bas de la page, pour la
9 version B/C/S.
10 Q. Nous voyons en bas de page et à la fin de ce qui est défini comme étant
11 les remarques faites par le président de l'assemblée, que nous sommes
12 arrivés au point 10 de l'ordre du jour, il s'agit d'un projet de loi
13 relevant d'un citoyen et de quelqu'un qui porte le nom de Milojevic, qui
14 s'exprime. Il décrit ici dans la version anglaise la grande importance de
15 ce projet de loi pour l'Etat. Et si nous passons à la page suivante pour la
16 version anglaise, nous lisons ce que dit Milojevic qui décrit son souci par
17 rapport à ce projet de loi dans les mots suivants :
18 "D'abord, il y a contravention avec la constitution. L'article premier de
19 la constitution stipulant : 'La Republika Srpska est l'état du peuple
20 serbe.' Point final."
21 Alors, est-ce que vous étiez au courant de cette position, que la Republika
22 Srpska était l'Etat du peuple serbe ?
23 R. Il s'agit là d'un député qui s'exprime et je ne saurais m'identifier à
24 ses propos. C'est sa position personnelle, et il y a là une assemblée qui
25 formule une position générale.
26 Q. Et votre position consiste-t-elle à dire que la constitution de la
27 Republika Srpska ne parle pas uniquement de l'Etat d'un peuple serbe ?
28 R. Est-ce que vous pourriez être plus clair dans votre question ? Je ne
Page 32794
1 l'ai pas comprise ?
2 Q. Absolument. Ce que je vous dis, c'est que cet homme n'est pas en train
3 de présenter une position personnelle. Il déclare que l'article premier de
4 la constitution stipule que la Republika Srpska est l'Etat du peuple serbe.
5 Donc, il est censé citer la constitution. Vous êtes au courant de
6 l'existence de cette disposition dans la constitution également, n'est-ce
7 pas ?
8 R. Compte tenu de ce que j'ai dit précédemment, j'ai parlé de ce peuple et
9 d'autres citoyens également.
10 Q. Ensuite, il ajoute :
11 "Les citoyens de la Republika Srpska obtiendront la citoyenneté de la
12 Republika Srpska, ce qui implique que ce sera le cas de tout le monde, et
13 il ajoute ensuite : 'Je pense qu'il faudrait parler des Serbes.'"
14 M. TRALDI : [interprétation] Excusez-moi. Sur l'écran, il serait bon de
15 revenir à la page précédente en anglais et passer à la page suivante en
16 B/C/S. Je n'ai pas été assez précis dans mes demandes de pages, et je vous
17 prie de m'en excuser.
18 Donc, au paragraphe 3 en B/C/S, nous voyons que cet homme évoque le fait
19 que les Serbes ne pourraient pas immédiatement obtenir la citoyenneté de
20 Slovénie ou de Croatie, et qu'en Croatie, c'est le Parlement qui décide
21 quels Musulmans sont en droit d'accéder à la citoyenneté. Ensuite, il
22 demande que la loi soit modifiée et que les projets soient annulés. Et si
23 nous regardons un peu plus bas, nous voyons les remarques de M. Krajisnik
24 dans la partie qui nous intéresse, qui se trouve au milieu, et il déclare :
25 "C'est la raison pour laquelle nous avons décidé que la citoyenneté devait
26 revenir aux Serbes, puisque notre république est une république civile."
27 Un peu plus bas, nous voyons les propos de M. Milijanovic, qui déclare :
28 "Je pense que nous avons besoin de faire un effort pour que le texte de
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1 cette loi soit aussi court et clair que possible."
2 Si nous passons à la page suivante en anglais, dont je demande l'affichage.
3 Et nous voyons au bas de la page en B/C/S' que le président déclare :
4 "L'objection de M. Milijanovic et sa proposition sont valables."
5 Page suivante en B/C/S, je vous prie. Donc, la loi est renvoyée au
6 ministère en charge de son amélioration.
7 Q. Et la vérité, c'est que la constitution évoque la Republika Srpska
8 comme étant l'Etat du peuple serbe dans son article premier et que la
9 politique de citoyenneté a été conçue pour promouvoir la citoyenneté serbe
10 et que, selon les propos de M. Krajisnik, la citoyenneté doit être serbe
11 parce que la république est serbe, n'est-ce pas ?
12 R. Eh bien, je peux vous présenter ici ma position personnelle, le cas
13 échéant, à savoir que je ne suis pas au courant de ce débat au Parlement à
14 l'époque, qui a eu lieu très trop le 23 ou le 24 avril 1992. Donc, d'après
15 ce que je vois dans cet article concernant les Serbes et les autres
16 citoyens, ces autres citoyens existaient et faisaient l'objet du débat.
17 Donc, je maintiens ma position selon laquelle la constitution rend compte
18 de la position selon laquelle le pays était le pays de Serbes et d'autres
19 citoyens. Et, après tout, c'est ce qui figure également dans la
20 constitution moderne. Je pense que le Parlement est en train de discuter et
21 que cette discussion ne peut pas aboutir à une conclusion. Et je
22 demanderais simplement qu'on me montre ce que j'aurais dû voir à l'époque.
23 Il s'agit simplement d'un débat parlementaire et, finalement, il est censé
24 mener à certaines décisions.
25 Q. Eh bien, ici, nous avons vu que cette discussion a conduit à un renvoi
26 du projet de loi. Je vais maintenant vous poser une dernière question, qui
27 est la suivante : parler des Serbes et des autres, en ne désignant que les
28 Serbes par leurs noms, donne bien une priorité aux Serbes, n'est-ce pas ?
Page 32796
1 R. Je ne serais pas d'accord avec vous sur ce point.
2 M. TRALDI : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
3 demanderais que ce procès-verbal de la séance de l'assemblée soit
4 enregistré aux fins d'identification. Nous chercherons un accord sur ce
5 point avec la Défense. De même, parce que cela a été discuté dans cette
6 séance de l'assemblée et en raison également des réponses fournies par le
7 témoin aux questions supplémentaires, j'admets que je n'ai pas vérifié le
8 statut de la constitution, mais nous vérifierons si l'article premier
9 comporte bien le libellé évoqué avant de revenir devant la Chambre.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Compte tenu des derniers commentaires,
11 j'invite le témoin à s'expliquer brièvement sur les raisons qui font qu'il
12 n'est pas d'accord avec M. Traldi pour dire que les Serbes ont une primauté
13 dans le texte tel que cité.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est la façon classique dont un
15 préambule de constitution est rédigé, à savoir que selon la constitution,
16 en tout cas, tous les citoyens jouissent de droits égaux.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, j'aimerais qu'un
18 numéro soit donné à cette partie du procès-verbal de la séance de
19 l'assemblée.
20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document devient, Monsieur le
21 Président, Messieurs les Juges, la pièce P7196.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Enregistré aux fins d'identification.
23 Monsieur Solaja, ceci met un point final à votre déposition. La Chambre
24 tient à vous remercier vivement d'avoir couvert une si longue distance pour
25 venir jusqu'à La Haye répondre à toutes les questions qui vous ont été
26 posées par les deux parties, ainsi que par les Juges de la Chambre, et la
27 Chambre vous souhaite un bon retour à votre domicile. Vous pouvez sortir de
28 la salle en suivant M. l'Huissier.
Page 32797
1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi.
3 M. TRALDI : [interprétation] Quelques mots pour garantir qu'il n'y ait
4 aucune question évoquée au compte rendu d'audience qui n'ait pas trouvé
5 réponse. J'ai rapidement vérifié le texte de la constitution, à savoir la
6 pièce P3007 et donc, nous de demanderons pas à procéder davantage sur ce
7 point à l'avenir.
8 [Le témoin se retire]
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, nous allons faire une pause. Nous
10 reprendrons nos débats à midi 35.
11 --- L'audience est suspendue à 12 heures 13.
12 --- L'audience est reprise à 12 heures 36.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, j'aimerais évoquer
14 brièvement une partie des questions de calendrier soulevées récemment. La
15 question la plus urgente concerne la semaine suivant la Pâque orthodoxe,
16 c'est-à-dire la semaine, Maître Lukic, du lundi 13 avril.
17 La Chambre a réfléchi à la possibilité d'utiliser le jeudi et le
18 vendredi. Des suggestions assez semblables ont été faites par l'Accusation.
19 Nous avons décidé que nous n'allions siéger ni le jeudi ni le vendredi. En
20 d'autres termes, nous ne siégerons aucune journée de cette semaine. Cela ne
21 veut pas dire qu'il s'agira d'une semaine chômée, car vous aviez demandé
22 une semaine -- en tout cas, du temps supplémentaire afin de vous préparer à
23 la réouverture de la présentation des moyens à charge.
24 Nous n'avons pas encore vu vos écrites à ce sujet, mais nous
25 envisagions de libérer la semaine en question de toutes les manières. Cela
26 signifie donc que vous disposerez d'un délai supplémentaire pour vous
27 préparer à ce qui nous attendra après la semaine en question. Nous verrons
28 par la suite -- si nous prolongerons cette période, nous statuerons sur la
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1 question en fonction des arguments des parties.
2 Autre question de calendrier, elle concerne la semaine qui débutera
3 le 26 mai. Il me semble que nous avons déjà traité de cette question. Il
4 n'aura pas d'audience au cours de cette semaine-là, même si l'on siégera un
5 vendredi supplémentaire lors de la première semaine du mois de juin. Pas de
6 modification par rapport à la décision que nous avions prise à cet égard.
7 La Défense est-elle prête à poursuivre ?
8 M. IVETIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. La
9 Défense appelle à la barre M. Bojan Subotic. Pas de mesure de protection
10 pour ce témoin, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on fasse
12 entrer le témoin dans le prétoire.
13 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Subotic.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant d'entamer votre déposition, le
17 Règlement exige de votre part que vous prononciez la déclaration solennelle
18 qui vous est tendue par M. l'Huissier.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. Je déclare solennellement que je dirai
20 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
21 LE TÉMOIN : BOJAN SUBOTIC [Assermenté]
22 [Le témoin répond par l'interprète]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous asseoir, Monsieur Subotic.
24 Monsieur Subotic, en général, les écouteurs bougent moins si vous les
25 placez bien sur le dessus de votre tête. Monsieur Subotic, c'est Me Ivetic,
26 que vous voyez à votre gauche, qui va vous poser les premières questions.
27 Me Ivetic est un des représentants de la Défense de M. Mladic.
28 Maître Ivetic, allez-y.
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1 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
2 Interrogatoire principal par M. Ivetic :
3 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je demanderais à ce que vous
4 décliniez votre identité afin qu'elle figure au compte rendu d'audience.
5 R. Je m'appelle Bojan Subotic.
6 Q. Avez-vous eu la possibilité de faire une déclaration écrite aux membres
7 du conseil de la Défense de M. Mladic ?
8 R. Oui.
9 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche à l'écran le
10 document 1D01645 dans le système du prétoire électronique.
11 Q. Monsieur, je vous demanderais de bien vouloir examiner la version
12 originale en serbe de ce document et nous dire à qui appartient la
13 signature qui figure à la première page de ce document.
14 R. C'est la mienne.
15 Q. Je remarque qu'il y a une différence dans l'année de naissance entre la
16 version en B/C/S et la version en anglais. Pourriez-vous nous préciser
17 quelle est exactement votre date et votre année de naissance ?
18 R. Ma date de naissance exacte est le 12 décembre 1972. C'est la version
19 serbe qui est correcte, l'autre est fausse.
20 M. IVETIC : [interprétation] Je demanderais maintenant à ce que l'on
21 affiche la dernière page de ces deux versions.
22 Q. On y voit une signature. Pourriez-vous me dire à qui elle appartient ?
23 R. C'est également la mienne.
24 Q. Et la date qui est inscrite ici correspond-elle au souvenir que vous
25 avez de la date à laquelle vous avez signé cette déclaration ?
26 R. Oui, je crois que c'est la bonne, oui. Oui, c'était en juin,
27 effectivement.
28 Q. Après avoir signé cette déclaration, avez-vous eu la possibilité de la
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1 relire afin de vérifier que les propos qui étaient repris étaient
2 effectivement ce que vous aviez tenus ?
3 R. J'ai eu la possibilité de l'examiner en diagonale. J'y ai constaté
4 quelques coquilles ou que la chronologie des événements n'était pas
5 nécessairement respectée, mais globalement tout y était.
6 Q. Bien. Examinons certaines de ces coquilles avec vous brièvement.
7 Deuxième page, dans les deux langues au paragraphe numéro 1, je constate
8 que la traduction en anglais comporte une erreur dans la date de naissance.
9 Il faut remplacer 1965 par 1972 conformément à la version serbe de cette
10 déclaration, comme nous l'avons fait précédemment ?
11 R. En effet, vous avez raison.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La version chargée est 1972, si je ne
13 m'abuse. Ah oui, autant pour moi, pardon, excusez-moi, autant pour moi.
14 Veuillez poursuivre.
15 M. IVETIC : [interprétation] Examinons maintenant la troisième page dans
16 les deux langues.
17 Q. Paragraphes 11 et 12, dans quel ordre ces deux paragraphes devraient-
18 ils se trouver pour refléter de manière exacte la chronologie des
19 événements qui sont décrits ?
20 R. Il me semble que les paragraphes 11 et 12 devraient être inversés. Le
21 paragraphe 11 devrait devenir le 12, et inversement. D'après ce dont je me
22 souviens et d'après ce que j'ai dit au moment de la prise de ma
23 déclaration, c'est dans cet ordre-là que ces deux paragraphes devrait se
24 trouver. Peut-être qu'il y a eu inversement des deux paragraphes au moment
25 où ma déclaration a été dactylographiée, je ne sais pas, mais j'ai parlé de
26 la rencontre avec mon commandant, donc il faut remplacer le paragraphe 11
27 par le 12, et le 12 par le 11.
28 Q. Bien. A l'exception de ces corrections, êtes-vous prêt à confirmer le
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1 reste de la déclaration tel que rédigé ?
2 R. Oui, pour ce que je vois à l'écran, oui.
3 Q. Bien. Si je devais vous reposer les mêmes questions aujourd'hui dans le
4 prétoire sur les mêmes sujets que ceux abordés dans votre déclaration
5 écrite, vos réponses seraient-elles essentiellement les mêmes que celles
6 que l'on peut lire dans votre déclaration écrite ?
7 R. Oui.
8 Q. Vous avez prononcé une déclaration solennelle qui vous contraint à dire
9 la vérité aujourd'hui. Cela signifie-t-il que ce qui figure dans votre
10 déclaration est également le reflet de la vérité ?
11 R. Oui.
12 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
13 nous aimerions demander le versement au dossier du document 1D01645, il
14 s'agit de la pièce suivante de la Défense. Aucun document n'est rattaché à
15 cette déclaration.
16 Mme HASAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pas
17 d'objection.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, cote, s'il vous
19 plaît ?
20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] D926.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D926 est versée au dossier.
22 Maître Ivetic, j'aimerais toutefois revenir sur la chronologie des
23 paragraphes 11 et 12.
24 Vous dites que 12 doit passer avant le 11, mais au paragraphe 11, on
25 vous donne pour instruction de procéder à une patrouille dans le secteur
26 situé le long, et cetera, et au paragraphe 12, eh bien, la première phrase
27 c'est : "Pendant la patrouille, j'ai essuyé des tirs constants…". Si nous
28 modifions l'ordre de ces paragraphes et que nous commençons par le 12, eh
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1 bien, on va trouver l'ordre de patrouiller après la conduite de la
2 patrouille, ce qui n'est pas tout à fait clair dans mon esprit. Alors,
3 pouvez-vous essayer de préciser les choses, comment pouvez-vous procéder à
4 une patrouille dont l'ordre n'est donné que plus tard ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne parlais que des consignes que m'a
6 données mon commandant. Le paragraphe 11 dit qu'il était déjà là. Or, ce
7 n'est pas le cas, à l'époque un soldat m'a dit qu'il avait téléphoné et
8 qu'il m'avait demandé de rester sur place, de reconstituer mon stock de
9 munition, et de continuer à patrouiller. J'étais donc déjà en train de
10 patrouiller, et je faisais l'objet de tirs nourris. Donc avant de
11 rencontrer mon commandant, j'ai obtenu ce message par l'intermédiaire d'un
12 autre soldat, et c'est ce que j'ai dit ici.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le soldat en question vous a dit
14 qu'il avait téléphoné pour vous dire de rester sur place et de reconstituer
15 votre stock de munitions, mais le voit-on quelque part aux paragraphes 11
16 et 12 ? Pourriez-vous, s'il vous plaît, relire tout cela ? Vous avez le
17 texte à l'écran, je suppose comme nous.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Les paragraphes 11 et 12 ne mentionnent
19 pas le soldat. Le soldat dont je parle, c'est un soldat qui se trouvait
20 occuper la réception du bâtiment dans lequel je me suis replié lorsque j'ai
21 pu fuir face à l'embuscade dans laquelle je me suis retrouvé avec mes
22 hommes. L'intention était de récupérer le soldat en question, et de nous
23 replier vers Milici, parce que j'étais confronté à une force, à un
24 adversaire d'une taille considérable. Toutefois, ce soldat m'a fait savoir
25 que le commandant, mon commandant, le commandant Malinic, lui avait dit que
26 je ne devais pas bouger et qu'il arriverait sur place rapidement.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais au paragraphe 12, je lis que
28 vous avez pris un groupe de 10 à 15 soldats musulmans, et qu'avec eux, vous
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1 êtes parti vers le commandement du bataillon. Alors, qu'avez-vous fait ?
2 Vous êtes-vous replié ou avez-vous escorté des soldats prisonniers ou, en
3 tout cas, des soldats qui s'étaient rendus et qui étaient désarmés au
4 commandement du bataillon ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Au paragraphe 11, lorsque ce soldat me
6 communiquait l'information dont il disposait, j'ai reconstitué mon stock de
7 munitions et j'ai entendu que vers le stade, vers Konjevic Polje, des tirs
8 importants avaient lieu. Je m'y suis rendu avec cinq soldats dans un
9 véhicule de combat blindé, et je me suis retrouvé pris en embuscade. J'ai
10 été touché, je ne sais plus trop avec quoi, mais mon véhicule de combat a
11 été mis hors d'action. Et pendant cette embuscade, au cours de cette
12 confrontation entre moi et les soldats musulmans, ces 13 ou 14 soldats, eh
13 bien, au final donc, ils se sont rendus. Je ne sais pas combien ils étaient
14 exactement, je ne les ai pas emmenés à la caserne ou à l'école, mais j'ai
15 appelé un soldat de première classe, je ne sais plus quel était son nom
16 pour venir les chercher, et j'avais aussi un homme blessé, et j'ai demandé
17 à ce que l'on envoie chercher une ambulance.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Il ne s'agit donc pas seulement de
19 modifier la chronologie mais d'ajouter une quantité assez considérable
20 d'informations à ces paragraphes. Alors, voyons où se trouve l'ambulance --
21 aux paragraphes 11 et 12, dites-vous, en quel que endroit que ce soit que
22 vous avez été blessé et que l'on a appelé une ambulance ? Je ne vois aucune
23 référence à tout cela dans les paragraphes 11 et 12.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas moi qui ai été blessé; l'un
25 de mes hommes. Et j'ai appelé ce sergent première classe qui était sur
26 place je lui ai dit de venir et de s'occuper des prisonniers et, dans le
27 même temps, je lui ai demandé d'entrer en contact avec le service médical
28 de Milici, et c'est vrai que je n'en parle pas dans ma déclaration, mais
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1 c'est vrai que j'avais un soldat blessé sur les bras et j'ai sollicité une
2 aide médicale pour lui. Toutefois, cette aide médicale n'est jamais
3 arrivée. Et c'est moi qui ai transporté ce soldat blessé jusqu'à ce
4 sergent.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et quand avez-vous alors parlé aux
6 soldats qui s'étaient rendus ? Vous ne les avez pas accompagnés jusqu'au
7 commandement du bataillon. Quand leur avez-vous parlé ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur place là où ils s'étaient rendus.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. J'essaie simplement de comprendre
10 le changement dans l'ordre des paragraphes que vous recommandez.
11 Veuillez poursuivre, Maître Ivetic.
12 M. IVETIC : [interprétation] Je vais donner lecture du résumé de la
13 déclaration.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.
15 M. IVETIC : [interprétation] Bojan Subotic est devenu membre de du 65e
16 Régiment de Protection motorisée de la VRS en décembre 1992 et a occupé
17 divers postes, y compris celui de commandant de la section antiterroriste
18 et de la police militaire.
19 Il se souvient qu'au cours de la première moitié du mois de juillet 1995,
20 alors qu'il se trouvait de permanence au commandement du Bataillon de la
21 Police militaire à Nova Kasaba, une femme s'est présentée à eux pour dire
22 que sa maison et les environs de chez elle était plein de soldats
23 musulmans. Il s'est rendu sur place avec un autre soldat, et s'est retrouvé
24 pris en embuscade, a essuyé des tirs musulmans, et a dû appeler un véhicule
25 blindé pour se replier. A son avis, il se trouvait là environ 1 000 soldats
26 ennemis équipés de dizaines de mitrailleuses.
27 Ayant entendu des tirs de mitrailleuse et de mortiers provenant de la
28 direction de Konjevic Polje, il est parti vers ce secteur dans le véhicule
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1 blindé car s'y trouvaient de nombreux civils. Son véhicule a essuyé des
2 tirs et il a tiré des gaz lacrymogènes vers les bois. Les soldats musulmans
3 se sont rendus à lui et lui ont parlé de conflit interne entre ceux qui
4 avaient voulu se rendre et les commandants musulmans qui ne les avaient pas
5 laissés faire et qui tuaient ceux qui faisaient part de leur souhait de se
6 rendre. Il a utilisé le haut-parleur du véhicule pour appeler les Musulmans
7 à se rendre et d'autres Musulmans ont suivi ce conseil.
8 Trois des Musulmans en question ont été blessés et leurs plaies ont été
9 pansées. Subotic, par radio, est entré en communication avec le
10 commandement afin de demander une ambulance et une aide de façon à sauver
11 leur vie puisqu'il restait encore des mouvements et des tirs d'hommes
12 musulmans dans les bois. Même les soldats de la FORPRONU tiraient vers la
13 forêt pour repousser l'attaque.
14 Le témoin a finalement pénétré les bois avec les Musulmans et a été le
15 témoin d'une vision horrible; plus de 500 personnes étaient mortes. Il a
16 évacué certains des blessés qu'il a pu trouver. Toutes les personnes
17 blessées et toutes celles qui s'étaient rendues se sont retrouvées au stade
18 de football de Nova Kasaba. Il est allé leur apporter 100 à 150 miches de
19 pain et toute la nourriture qui se trouvait sur la base.
20 A un moment donné le général Mladic a parlé aux hommes, s'est fait
21 applaudir des Musulmans. Il leur a dit que tout le monde serait logé et
22 nourri et échangé contre les prisonniers serbes. Il a ordonné qu'ils soient
23 transportés en toute sécurité dans des autocars vers Bratunac où les
24 autorités civiles se chargeraient d'eux.
25 Le témoin a escorté une colonne d'autocars transportant ces Musulmans vers
26 l'école Vuk Karadzic de Bratunac où il les a remis aux représentants de la
27 police civile.
28 Voilà qui conclut la lecture de ce résumé de la déclaration du témoin.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous des questions supplémentaires
2 à poser au témoin, Maître Ivetic ?
3 M. IVETIC : [interprétation] Oui.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.
5 M. IVETIC : [interprétation] Bien. Examinons la page 2 dans les deux
6 versions.
7 Q. Et plus particulièrement le paragraphe 6. Monsieur Subotic, j'aimerais
8 tout d'abord que vous nous parliez de cette femme qui s'est présentée à
9 vous en disant que sa maison était pleine de Musulmans. La connaissiez-vous
10 déjà ?
11 R. Oui, je la connaissais.
12 Q. A quel groupe ethnique appartenait-elle ?
13 R. Je pense qu'elle était Serbe. Oui, effectivement, elle était Serbe.
14 Q. Et où se trouvait sa maison ?
15 R. Elle était à l'ouest de notre commandement, à 200 à 300 mètres du
16 bâtiment du commandement, c'est-à-dire l'école.
17 Q. Et que vous a-t-elle dit comment a-t-elle remarqué la présence de ces
18 soldats musulmans chez elle et aux environs de sa maison ?
19 R. A l'époque, je me trouvais à la réception du commandement. Il devait
20 être 7 heures, 7 heures et demie du matin, juste après le petit déjeuner.
21 Elle est arrivée en courant, pieds nus et en état de panique. Et nous nous
22 sommes dits que quelque chose avait dû lui arriver à elle ou à ses enfants,
23 car il y avait eu plusieurs incidents au cours desquels, eh bien, les
24 voisins étaient venus. Parfois il nous arrivait de nous occuper d'enfants
25 pendant la nuit s'ils avaient de la température ou ce genre de chose, et
26 c'est ce que je me suis dit lorsqu'elle est arrivée. Et lorsqu'elle a
27 commencé à nous parler, elle nous a dit qu'ils étaient en train -- enfin
28 ils étaient chez eux et soudain sa maison s'est retrouvée pleine de Turcs,
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1 et par cela elle entendait Musulmans. C'est comme cela que j'ai compris ce
2 qui se passait. Elle a ajouté que ses enfants étaient restés dans la
3 maison. Et elle ne me l'a pas dit à moi tout seul, elle l'a dit à d'autres
4 également.
5 Q. Au paragraphe 7, vous dites que vous avez été pris en embuscade alors
6 que vous vous rendiez chez elle. Pourriez-vous nous parler de cette
7 embuscade et nous dire précisément ce qui s'est passé ?
8 R. Je n'ai pas reçu l'interprétation.
9 Q. Eh bien, je recommence. Au paragraphe 7, vous dites que vous avez été
10 pris en embuscade alors que vous vous rendiez chez elle. Pouvez-vous nous
11 dire exactement comment les choses se sont passées ?
12 R. Lorsqu'elle est arrivée pour dire que sa maison était pleine de
13 Musulmans, j'étais donc dans la zone de réception. J'ai pris un soldat avec
14 moi et nous sommes partis en patrouille de reconnaissance afin de voir si
15 ce qu'elle disait était vrai, et j'ai ordonné à deux autres soldats de
16 s'installer dans le véhicule de combat blindé et de se tenir prêts, contact
17 mis, puisque c'est l'une des règles de travail de la police militaire.
18 Je suis donc partir vers chez elle, c'est à environ 200 mètres, il y a une
19 rivière qui s'appelle Jadar, et il y a un coude dans cette rivière. Et en
20 traversant, j'ai vu qu'effectivement il y avait de nombreux soldats. Je ne
21 savais pas qui ils étaient, je ne voyais pas leurs insignes, mais ces
22 soldats m'ont tiré dessus. Il s'agissait de mitrailleuses. Même d'un
23 mortier de 60 millimètres, un petit mortier d'infanterie.
24 Q. Au paragraphe 8, vous dites que vous avez vu environ 1 000 soldats
25 musulmans, et vous avez estimé qu'ils étaient équipés de dizaines de
26 mitrailleuses. Comment se fait-il que vous ayez pu voir tout cela ?
27 R. Eh bien, évidemment, j'ai moi aussi ouvert le feu lorsqu'ils ont
28 commencé à me tirer dessus et mon soldat, celui qui m'accompagnait
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1 également, mais nous n'avions pas beaucoup de munitions. Entre la rivière
2 et la maison, il y a environ 150 mètres. Il se trouve que j'avais des
3 jumelles, je les avais toujours avec moi. Elle nous avait dit qu'il y avait
4 des hommes dans les bois, j'ai pris mes jumelles, et pendant un bref
5 interlude j'ai commencé à rétorquer. Ils n'ont pas cessé les tirs; cela
6 étant, ils ont commencé à se replier vers les bois. Ils n'avançaient pas
7 donc vers moi. Ils sortaient de chez elle, puisqu'ils étaient à
8 l'intérieur, comme elle l'avait dit, et ils ont commencé à se replier vers
9 les bois.
10 J'ai observé la situation pendant 15 à 20 secondes avec mes jumelles et il
11 m'a semblé qu'il y avait environ 1 000 hommes. Je ne pourrais pas vous
12 donner le chiffre exact. Bon, je suis allé assister à des matchs de foot,
13 j'ai fréquenté les stades, mais je ne suis pas en mesure de vous donner une
14 estimation précise de ce genre de foule. Je dirais 1 000 environ. Et j'ai
15 compté 30 à 40 mitrailleuses. Et je peux faire la différence entre un fusil
16 mitrailleur normal et une mitrailleuse. Et, à mon avis, il y avait environ
17 50 mitrailleuses parmi ces 1 000 hommes. Ce groupe -- enfin, ce n'est pas
18 vraiment un groupe, c'est une brigade.
19 Q. Et, à part cela, ils avaient d'autres types d'armement ?
20 R. Oui. Ils avaient des fusils, automatiques, semi-automatiques, armes
21 caractéristiques des troupes d'infanterie. Ils avaient des grenades à main
22 en poche, comme nous d'ailleurs. Donc ils avaient ces grenades dans leurs
23 poches dans leurs gilets. Nous aussi, nous étions prêts à intervenir. Je
24 pense que c'étaient des grenades de ce type. Il ne s'agissait pas
25 d'armement plus lourd, à mon avis.
26 Q. Bien.
27 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant passer à la page 3 dans
28 les deux langues, paragraphes 10 et 11.
Page 32810
1 Q. Pourriez-vous nous dire comment et à quel moment vous avez pu entrer en
2 contact avec le commandant Malinic et à quel moment il est arrivé à cet
3 endroit ?
4 R. Mon commandant de bataillon, le commandant Malinic, il a été présent
5 tout le temps. Cependant, au moment où cette femme est venue nous voir,
6 quand je suis tombé dans l'embuscade, il n'était pas là. Je pense qu'il
7 était à ce moment-là à Milici - une ville pas loin de Nova Kasaba - donc, à
8 ce moment-là, avec deux autres officiers, ils sont allés prendre leur petit
9 déjeuner. Quand j'ai appelé un blindé de transport de troupes pour nous
10 faire sortir de l'embuscade, eh bien, il est arrivé en tirant sur le
11 bosquet, sur les soldats de l'ennemi. Moi et ce soldat qui était avec moi,
12 nous nous sommes retirés. Et je me suis dit qu'il fallait peut-être que je
13 prenne le soldat qui était à l'entrée, les deux soldats hollandais qui
14 avaient été à l'école, quelques cuisiniers et un autre soldat qui était en
15 train de se retirer vers Milici, parce que j'ai vu que j'étais attaqué par
16 une force assez importante.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez ralentir.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] En arrivant à l'accueil pour faire ce que je
19 voulais faire, le soldat qui était à l'accueil m'a dit que le commandant
20 Malinic était appelé au téléphone, et il m'a dit qu'il fallait que je
21 trouve des munitions et que je l'attende là-bas. Je l'ai fait. Mais en
22 essayant de me procurer des munitions, même ainsi que ce blindé de
23 transport de troupes, on avait à peu près deux parures de combat, pas plus,
24 parce qu'on était là pour assurer la sécurité de l'école. Donc j'ai entendu
25 des tirs de mitrailleuse -- enfin, des combats très importants au niveau de
26 Konjevic Polje et du stade de Nova Kasaba.
27 Je me suis dit qu'il avait la population civile qui vivait dans la région,
28 qu'il y avait des enfants et des vieillards là-bas. En ayant cela à
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1 l'esprit, moi et mes quatre soldats et ce blindé de transport de troupes,
2 je me suis dirigé en direction de ce village. J'ai dit au soldat à
3 l'accueil où j'allais. Je lui ai dit qu'il fallait d'abord un contact radio
4 et qu'il fallait qu'il m'informe de l'arrivée de l'aide, donc, du
5 commandant Malinic.
6 M. IVETIC : [interprétation]
7 Q. Que s'est-il passé quand vous êtes parti vers la région de Konjevic
8 Polje et du stade Nova Kasaba, à l'intérieur de ce blindé de transport de
9 troupes ?
10 R. Après avoir traversé le point à Nova Kasaba, j'ai été touché. Le tir
11 est venu du bosquet. Donc, c'étaient des tirs de mitrailleuse. Mais moi,
12 j'ai été touché par une balle d'une arme antiblindée. Donc mon blindé était
13 endommagé, mais légèrement, de sorte que je pouvais continuer à avancer. Ce
14 sont les pneus qui ont été endommagés.
15 Q. Par rapport aux événements dans le paragraphe 12, où vous dites que
16 l'on a tiré vers les bois six bidons de gaz lacrymogène, est-ce que vous
17 pouvez nous dire à quel moment cela est-il arrivé, parce que vous avez dit
18 que l'on vous a tiré dans le pneu de votre blindé de transport de troupes ?
19 A quel moment ces événements se sont produits ?
20 R. Eh bien, justement à ce moment-là, parce que j'ai dit à mes soldats de
21 sortir du blindé de transport de troupes pour éviter d'essuyer d'autres
22 tirs. Mais j'ai aussi ordonné de tirer six grenades de gaz lacrymogène de
23 ce véhicule en direction du bosquet, parce qu'on nous a tiré dessus à
24 partir de cet endroit-là. Et vous savez, ce gaz lacrymogène, en fait, il
25 fait partie intégrante de l'équipement de tout blindé de transport de
26 troupes.
27 Q. Pourriez-vous parler plus lentement.
28 Donc vous avez commencé à nous raconter comment on vous a tiré
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1 dessus, pourquoi vous disposiez de ce gaz lacrymogène, et vous avez dit que
2 ces bidons de gaz faisaient partie, en fait, de l'équipement.
3 R. Mais non, ce ne sont pas vraiment des "bidons". Ce sont des paquets de
4 40 millimètres, des récipients de 40 millimètres de ce gaz que vous trouvez
5 dans tout blindé de transport de troupes, et leur utilisation est pour
6 disperser les manifestations, et c'est utilisé par la police militaire.
7 Bon, ils peuvent mettre hors combat, hors état d'action les gens, sans pour
8 autant être mortel.
9 Q. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez décidé d'utiliser ces gaz
10 lacrymogène ? Quel était votre motif ?
11 R. Eh bien, j'ai décidé de faire cela pour deux raisons. Tout d'abord, je
12 n'avais pas vraiment d'armes lourdes pour me défendre mis à part la
13 mitrailleuse montée sur le blindé de transport de troupes, et nous avions
14 aussi nos fusils. Et puis, aussi, le gaz lacrymogène, vous savez,
15 immobilise l'ennemi. Et puis, j'ai voulu me couvrir aussi, j'ai voulu créer
16 de la fumée, parce que j'ai bien compris qu'il fallait vraiment sortir de
17 là, et j'ai voulu gagner du temps.
18 Q. Et tout cela a duré combien de temps avant que vous ne puissiez
19 rejoindre votre base à l'école ?
20 R. Donc je suis parti de l'école, mon soldat a été blessé, il y a eu cette
21 embuscade, et ensuite on a tiré le gaz lacrymogène. Mais tout cela n'a pas
22 duré plus qu'une heure et demie, deux heures. Je ne me souviens pas
23 exactement de cela.
24 Q. En ce qui concerne les événements que vous avez décrits dans le
25 paragraphe 11, pourriez-vous nous dire ces événements dont on vient de
26 parler - à savoir, le tir de grenade du gaz lacrymogène et tous ces
27 événements qui ont duré à peu près une heure et demie ou deux heures - où
28 est-ce qu'on les situe dans le temps par rapport aux événements décrits
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1 dans le paragraphe 11, à savoir le contact avec Malinic ?
2 R. Cette femme est venue à l'entrée à 7 heures et demie à peu près. Moi,
3 je suis entré en contact pour la première fois avec le commandant Malinic
4 après la capture de ces 15 soldats musulmans. Donc, tout cela a eu lieu à
5 10 heures, 10 heures 30.
6 Q. Et si l'on examine à présent -- mais tout d'abord, pouvez-vous nous
7 dire comment se fait-il que ces dix à 15 premiers soldats musulmans se sont
8 rendus à vous ?
9 R. Après avoir tiré les grenades du gaz lacrymogène en direction du
10 bosquet, le tir de l'ennemi s'est pratiquement arrêté. Bon, ils ont été
11 anéantis par le gaz. Sans doute qu'ils n'avaient pas de masques. Quand je
12 suis sorti pour voir dans quelle mesure mon véhicule était endommagé, et
13 puis j'ai voulu aussi secourir le soldat touché par une balle, ce groupe
14 s'est rendu en sortant de sous le pont de la rivière Jadar. Ils sont sortis
15 avec leurs bras en l'air de sous le pont.
16 Q. Vous avez pris, donc, le haut-parleur et vous avez appelé les autres
17 Musulmans à se rendre. A quel moment cela s'est-il produit, surtout quand
18 on situe cela par rapport au moment où l'on endommagé le blindé de
19 transport de troupes et au moment où vous avez utilisé le gaz lacrymogène ?
20 A quel moment vous avez appelé pour la première fois les Musulmans à se
21 rendre ?
22 R. Eh bien, ils ont commencé à se rendre avant même que j'en donne
23 l'ordre. Ils sont sortis sur la route à côté du blindé de transport de
24 troupes, et ce n'est qu'à ce moment-là que j'ai compris qu'il s'agissait de
25 soldats musulmans, parce que j'ai bien vu ce qui était écrit sur leurs
26 brassières. Parce que je ne savais même pas qui nous tirait dessus.
27 Car au cours des combats du matin, les forces de la FORPRONU ont tiré
28 en direction du bosquet. On ne savait vraiment pas qui nous a attaqués. En
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1 parlant avec eux après qu'ils se sont rendus, après un quart d'heure à peu
2 près, ils m'ont expliqué qu'en réalité, nous avons été attaqués par toute
3 la 28e Division, donc la division de Srebrenica.
4 Q. Et vous avez utilisé à quel moment ce haut-parleur ? A ce moment-
5 là ou un peu plus tard ? Avant ou après avoir eu des contacts avec le
6 commandant Malinic, vous-même personnellement ?
7 R. J'ai utilisé ce haut-parleur immédiatement. Ce sont les soldats
8 musulmans qui m'ont demandé de le faire, parce qu'ils m'ont dit qu'il y
9 avait encore des gens dans les collines qui voulaient se rendre. Ils
10 m'avaient même donné leurs noms, leurs prénoms. Moi, je me suis rappelé que
11 je pouvais les appeler à venir se rendre parce que j'avais ce haut-parleur.
12 Tout d'abord, je leur ai dit de ne pas nous tirer dessus puisqu'il y avait
13 aussi leurs hommes qui étaient chez nous, et donc j'ai commencé à appeler
14 les noms qu'ils m'ont donnés. Bon, est-ce qu'ils nous ont donné les noms
15 des membres de leurs familles ou de leurs camarades ? Je ne sais pas. Donc
16 je commençais à utiliser le haut-parleur déjà à ce moment-là.
17 Q. Si on examine le paragraphe 16 de la déclaration - et c'est la
18 page 4 en serbe qui m'intéresse - donc, ces soldats, est-ce qu'ils vous ont
19 parlé de leurs commandants qui étaient en train de tuer les gens qui
20 voulaient se rendre ? Est-ce qu'ils vous ont donné des détails, des
21 informations, au sujet de l'identité de leurs commandants ?
22 R. Ce premier groupe, non. En revanche, le deuxième groupe qui s'est
23 rendu, ils m'ont parlé de leurs commandants. Ils ont parlé d'un certain
24 Tursunovic. C'était leur chef, leur commandant, je ne sais pas. Ils se sont
25 plaints de ce type.
26 Q. Bien.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, est-ce que je peux vous
28 poser une question.
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1 Tout à l'heure, vous avez parlé des forces de la FORPRONU, et vous avez dit
2 :
3 "…deux de ces soldats, il y en a un qui a tiré en direction du bois car
4 nous ne savions pas qui était en train de nous attaquer."
5 Mais ils se trouvaient où exactement, ces soldats de la FORPRONU ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient chez nous dans le commandement du
7 bataillon, là où j'étais, au même endroit.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ils sont restés au sein du
9 commandement ou sont-ils partis à un moment donné ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont passé toute la journée au
11 commandement. Ils ont ouvert le feu au moment où j'étais en train de me
12 réapprovisionner en munitions. Au cours de la première attaque, ce matin-
13 là, nous étions tous en train de boire du café au niveau de la réception.
14 Et quand on a commencé à nous tirer dessus à partir du bois, moi je suis
15 allé auprès de la rivière, ensuite j'ai réussi à sortir de là, et quand je
16 suis revenu, tout le bâtiment était sous le tir.
17 Un de ces soldats nous a demandé une arme. Je lui ai donné mon fusil. Il
18 était dans les tranchées au niveau de la réception avec mon soldat, et ils
19 tiraient ensemble, tous les deux, parce que nous ne savions pas qui nous
20 tirait dessus. Tout ce que l'on savait, c'est que l'on nous tirait dessus
21 depuis ce bosquet.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ils sont restés au niveau du
23 commandement. Ils ne se sont jamais mis dans un véhicule avec vous et vos
24 hommes ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Ils sont restés dans le
26 commandement.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pourquoi étaient-ils dans le
28 commandement ? Pourquoi les soldats de la FORPRONU se trouvent au milieu de
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1 votre commandement ? Pourquoi, que faisaient-ils là-bas ? Prendre le petit
2 déjeuner avec vous ? Boire du café avec vous ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils sont venus nous voir la veille et nous ont
4 demandé de l'aide. Ils avaient des problèmes avec nos soldats -- ou des
5 paramilitaires. Bon, ils disaient que c'étaient des paramilitaires. Ils ont
6 dû leur prendre leurs armes, leurs véhicules. Donc, la veille de cet
7 incident, ils sont venus nous voir, on les a reçus et ils nous ont demandé
8 de l'aide. Ils nous ont demandé de les aider, de les protéger ainsi que
9 leur équipement.
10 Deux véhicules sont arrivés. Cependant, pendant la nuit, un véhicule
11 est parti avec deux ou trois membres de la FORPRONU, alors que ce véhicule
12 avec deux autres membres sont restés dans la base. On a joué aux cartes
13 ensemble, on a mangé. Je ne sais pas pourquoi ils étaient venus exactement,
14 mais je sais qu'ils avaient demandé de l'aide à la police militaire.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sont-ils venus avec un véhicule de
16 l'ONU ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ont-ils utilisé ce véhicule ? Est-ce
19 que vous avez utilisé ce véhicule un moment donné ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais oui. Ce véhicule était garé avec nos
21 armes, et leurs armes étaient dans le véhicule. Le véhicule était fermé à
22 clé. Ils avaient la clé du véhicule. Je sais qu'il y en avait un qui
23 voulait aller chercher son arme dans le véhicule, mais le tir était si
24 intense qu'il est sûr qu'il n'aurait pas survécu à cette traversée. C'est
25 pour cela qu'il m'a demandé de lui donner mon arme.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand j'ai demandé "si l'on a utilisé ce
27 véhicule", j'ai voulu vous demander si qui que ce soit l'a utilisé ou l'a
28 conduit quelque part ?
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1 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et il est resté là, que vous le sachiez,
3 pendant toute la période ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, le véhicule est resté là-bas même après
5 leur départ. Ils ne se sentaient pas en sécurité dans ce véhicule, parce
6 que ce n'était pas un véhicule blindé. Donc ils voulaient être transportés
7 à bord de notre véhicule blindé, c'est pour cela que je les ai accompagnés,
8 alors qu'ils nous ont laissé leur véhicule.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ils vous ont laissé leur véhicule. Ils
10 vous ont fait cadeau de ce véhicule…
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais non, non, ce n'était pas un cadeau. Ils
12 ont reçu un certificat de mon commandant, et munis de ce certificat, de ce
13 reçu, ils ont laissé le véhicule dans notre commandement. Ils ont peut-être
14 reçu, je ne sais pas ce que c'était, une espèce de certificat parce qu'ils
15 ne voulaient pas voyager à bord de ce véhicule parce que cet axe de
16 communication, Nova Kasaba-Konjevic Polje-Potocari, faisait l'objet de
17 combat et ils ne se sentaient pas en sécurité dans ce véhicule, si j'ai
18 bien compris, donc ils voulaient voyager à bord d'un véhicule blindé
19 jusqu'à Potocari. Et ils voulaient être escortés.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je posais ces questions parce que
21 soudain la FORPRONU est apparue dans votre déposition et je ne savais pas
22 très bien comment comprendre cette apparition soudaine.
23 Maître Ivetic, je vous prie.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Une précision que j'aimerais demander
25 au témoin, je vous prie.
26 Monsieur le Témoin, vous avez évoqué le deuxième groupe de soldats
27 musulmans qui s'est rendu à vous et à votre unité, en déclarant que ces
28 hommes avaient prononcé un nom ou quelque chose qui ressemblait à leur chef
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1 ou leur commandant. Pouvez-vous répéter le nom de ce commandant ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je les ai bien compris à ce
3 moment-là, et j'en ai bien gardé le souvenir, ils ont prononcé le nom d'un
4 certain Tursunovic, ils l'appelaient souvent Tursun, Tursunovic, qui
5 semblait être un commandant important. Maintenant, son prénom, je ne sais
6 vraiment pas. Mais pour l'essentiel, ils ont prononcé Tursunovic.
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Maître Ivetic.
9 M. IVETIC : [interprétation]
10 Q. Eh bien, pour en terminer sur la FORPRONU, puisque nous avons commencé
11 à en parler, page 7 de la déclaration écrite du témoin dans les deux
12 langues, paragraphe 39 de cette déclaration, vous y dites avoir escorté ces
13 hommes jusqu'à votre base à Potocari. Alors, ma première question est la
14 suivante : qui vous a demandé d'escorter ces hommes jusqu'à Potocari ?
15 R. L'ordre que j'ai reçu est venu de mon commandant, le commandant
16 Malinic. Il m'a demandé de préparer ce matin-là un blindé pour accomplir ma
17 mission, et ce blindé c'était un transport de troupes, ma mission
18 consistant à escorter deux membres de la FORPRONU qui retournaient à leur
19 base à Potocari. Qui lui a donné cet ordre et lui a demandé d'agir ainsi,
20 je ne le sais vraiment pas.
21 Q. A qui est-ce que vous avez remis les représentants du personnel de la
22 FORPRONU à votre arrivée à Potocari ?
23 R. Eh bien, moi, je ne les ai remis à personne. Nous sommes arrivés à leur
24 base où un officier nous attendait. Et je me rappelle qu'il avait des
25 moustaches. Est-ce que c'était un soldat ou pas ? Il avait un uniforme de
26 camouflage et il portait des moustaches. Il faisait quelque chose, je ne
27 sais pas quoi exactement. Ils nous ont dit au revoir, et je me souviens
28 même qu'il a prononcé le mot "au revoir" en serbe. Ils nous ont remercié et
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1 ils sont restés à leur base de Potocari. Quant à nous, nous sommes
2 retournés à notre base.
3 Q. J'aimerais que nous passions à la page 4 dans les deux langues,
4 paragraphe 22 de votre déclaration écrite. Vous dites dans ce paragraphe
5 avoir donné aux Musulmans qui se trouvaient dans le stade des vivres que
6 vous aviez à la caserne et vous être fourni du pain dans les magasins, 100
7 à 150 miches de pain. Est-ce que le fait d'avoir commandé ce pain dans ces
8 magasins a eu quelque conséquence ?
9 R. Oui. Plusieurs groupes se sont rendus à moi ce jour-là. Et le plus gros
10 problème, c'était un problème d'eau, parce que ce jour-là il faisait
11 vraiment une chaleur insupportable. Je ne me rappelle pas avoir jamais vécu
12 une chaleur pareille de toute ma vie. Et le deuxième problème, c'étaient
13 les vivres. Nous avions du pain et quelques rations pour 48 heures, donc je
14 me souviens très bien que nous les avons partagés avec eux. Et le
15 commandant Malinic m'a donné l'ordre de me rendre à Pilica. En utilisant
16 mon laissez-passer officiel de policier militaire, j'ai pu donc ainsi
17 obtenir du pain dans les boulangeries. Ce jour-là, je suis donc allé à
18 Milici, je suis rentré 15 à 20 minutes plus tard, il était déjà entre midi
19 et 13 heures, et il n'y avait pas beaucoup de pain parce qu'en général le
20 pain se vend plutôt le matin.
21 J'ai obtenu 150 à 200 miches de pain, je les ai données aux prisonniers de
22 guerre, qui les ont partagées entre eux. Maintenant, je ne sais pas
23 exactement, mais deux ou trois ans plus tard, le bureau du procureur de la
24 ville de Vlasenica m'a demandé à venir parce qu'une plainte au pénal avait
25 été déposée contre moi. J'étais accusé de m'être emparé de pain chez les
26 propriétaires de ces boulangeries parce qu'il est fort probable que mon
27 armée n'avait jamais remboursé les boulangeries pour les pains que j'avais
28 reçus, et j'ai été incapable de produire des récépissés de paiement. Ce
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1 jour-là, le jour où je me suis procuré les pains, la seule chose que
2 j'avais, c'était mon laissez-passer officiel avec un numéro, donc c'était
3 mon numéro personnel. Je suis allé au bureau du procureur de Vlasenica,
4 j'ai raconté toute cette histoire, et à partir de là plus personne ne m'a
5 convoqué.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais que l'huissier aide le
7 témoin à ajuster ses écouteurs. Ils ne sont pas en place correctement.
8 M. IVETIC : [interprétation] Passons maintenant au paragraphe 23, page
9 suivante de l'original serbe de la déclaration du témoin.
10 Q. A ce niveau de votre déclaration, Monsieur, vous dites que le seul
11 problème que vous aviez par rapport aux Musulmans qui se trouvaient dans le
12 stade de Nova Kasaba, c'était que certains civils d'appartenance ethnique
13 serbe venaient dans le stade et protestaient. Pouvez-vous nous dire ce que
14 faisaient exactement ces civils serbes ?
15 R. Eh bien, ils étaient des habitants de la région, disons de la région
16 élargie de Nova Kasaba. Ils étaient une cinquantaine. Oui, c'est ça, à peu
17 près 50. Et parmi eux, il y avait à peu près dix ou 15 hommes en âge de
18 porter les armes, et puis il y avait aussi des enfants, des vieillards et
19 des femmes. Donc nous avions un problème. Lorsque nous transférions des
20 soldats musulmans qui avaient été faits prisonniers, ces personnes nous
21 posaient un problème. D'abord, elles commençaient à jeter des pierres ou
22 des briques sur les prisonniers, tout ce qu'elles pouvaient trouver sur la
23 route aussi. Et ensuite, il nous fallait les aligner, et j'ai trouvé du gaz
24 lacrymogène pendant que ces personnes étaient en train de jeter ces objets.
25 Ces personnes menaçaient aussi, elles juraient, et cetera, mais nous avons
26 réussi à les arrêter. En tout cas, nous avons réussi à leur faire cesser
27 leurs activités et ils n'ont plus touché aux prisonniers et ont cessé de
28 leur jeter des objets sur le corps.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous comprenons que vous avez besoin de
2 50 à 60 minutes. Soixante minutes, disons, que vous aviez besoin au départ,
3 donc 20 minutes à partir de maintenant. Bien entendu, il conviendrait de
4 poursuivre jusqu'à 13 heures 55, après quoi nous avons 20 minutes de pause,
5 mais cela nous amènerait à la fin de la journée d'aujourd'hui. Quoi qu'il
6 en soit, j'aimerais que, lorsque vous reprendrez votre contre-
7 interrogatoire, vous sachiez qu'il vous reste dix minutes.
8 Je ne suis pas tout à fait certain du temps dont vous aurez encore
9 besoin.
10 M. IVETIC : [interprétation] Puis-je avoir 18 minutes, Monsieur le
11 Président ?
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dix-huit ?
13 M. TRALDI : [interprétation] Dix-huit, oui, 1-8.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ah, j'avais lu 38 minutes au compte
15 rendu.
16 M. IVETIC : [interprétation] Dix-huit à 20 minutes. Cela dépendra des
17 questions qu'il me reste à poser.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Dix-huit minutes. Eh bien,
19 veuillez vous consulter avec M. Mladic. Nous poursuivrons éventuellement
20 pendant 18 minutes avant de lever l'audience d'aujourd'hui. Nous pouvons
21 aussi faire la pause et travailler 20 minutes après. C'est à vous
22 qu'appartient la décision.
23 M. IVETIC : [interprétation] J'ai été autorisé à poursuive, donc c'est ce
24 que nous allons faire.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Nous conclurons donc
26 l'interrogatoire principal aujourd'hui et lèverons l'audience un peu plus
27 tôt que d'habitude.
28 Veuillez procéder.
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1 M. IVETIC : [interprétation]
2 Q. J'aimerais maintenant que nous passions aux paragraphes 18 et 19 de
3 votre déclaration.
4 M. IVETIC : [interprétation] Page 1 de la version serbe, je crois. Oui.
5 Q. A ce niveau du texte, vous parlez du moment où vous êtes allé dans ce
6 bosquet et où vous avez vu l'horrible spectacle de 500 soldats morts. Tout
7 d'abord, pouvez-vous nous décrire la disposition géographique du terrain à
8 l'endroit où se trouvaient ces cadavres ?
9 R. Eh bien, cela se trouvait à 3- ou 400 mètres de la route principale qui
10 relie Nova Kasaba à Konjevic Polje. Et je crois, sur la base de mes
11 souvenirs d'aujourd'hui, que le village s'appelait Jela, mais je n'en suis
12 pas tout à fait sûr. C'était sur la droite de la route. Là, il y a des
13 cours d'eau, des ruisseaux. Le terrain est très irrégulier, très compliqué.
14 Donc il y a ces ruisseaux, il y a des bosquets, des bois, des ronces. Et en
15 grimpant sur 200 mètres à peu près, on arrive jusqu'à un bois très touffu.
16 Au bout de 200 mètres, on trouve une clairière. Quand vous traversez la
17 clairière, sur la droite, vous voyez un cours d'eau assez important, et
18 c'est là que j'ai mis le pied sur les premiers cadavres.
19 Q. Par rapport à ce que vous avez dit un peu plus tôt dans votre
20 déclaration lorsque vous parliez des tirs intenses que vous avez entendus
21 venir de plusieurs directions, est-ce que l'une de ces directions est celle
22 où vous vous trouviez ? Un de ces endroits d'où vous avez entendu
23 auparavant des échanges de tirs fournis ?
24 R. Oui, c'est de cette direction que j'avais entendu des tirs très nourris
25 dans la matinée, et je ne comprenais pas très bien ce qui était en train de
26 se passer. J'étais chef de patrouille ce jour-là, je patrouillais sur cette
27 bande de terrain, et je savais qu'il n'y avait pas d'unité militaire
28 suffisamment fournie de notre côté qui se trouvait là. Donc je ne
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1 comprenais pas très bien d'où provenaient ces tirs. Et plus tard, mes
2 doutes ont été confirmés par tout ce qui s'est passé.
3 Q. Pourriez-vous décrire la façon dont les cadavres étaient disposés; est-
4 ce qu'ils étaient tous au même endroit ? Et si ce n'était pas le cas, sur
5 quelle étendue de terrain étaient-ils dispersés, ces 500 corps que vous
6 avez vus ?
7 R. Eh bien, ils n'étaient pas tous au même endroit. Ils couvraient un
8 rayon de 3-, 4-, voire 500 mètres. Je ne sais pas exactement. Je ne me
9 rappelle pas parfaitement. Ils étaient dispersés en plusieurs endroits.
10 Quelquefois il y avait deux corps l'un à côté de l'autre, quelquefois dix,
11 quelquefois 50. Mais j'ai vu aussi des blessures très irrégulières sur
12 leurs corps, comme si ces blessures avaient été causées par des obus ou des
13 obus à fragmentation qui les auraient touchés comme si quelqu'un avait jeté
14 des grenades dans leur direction. Et il y avait peu de ces cadavres qui
15 avaient été touchés par des armes d'infanterie. Donc, quoi qu'il en soit,
16 ils étaient dispersés en plusieurs lieux dans un rayon de 3-, 400 mètres.
17 Lorsque je me suis rendu à cet endroit, j'étais accompagné de deux
18 prisonniers musulmans parce que je ne connaissais pas ce lieu auparavant.
19 Donc ce sont eux qui m'ont emmenés à cet endroit. Et en agissant ainsi, en
20 me rendant là, je violais le code de police militaire parce que je n'aurais
21 pas dû laisser le véhicule blindé et la patrouille là où je les ai laissés.
22 Et si quelqu'un vous parle de la présence de 200 personnes, il n'est pas
23 absolument nécessaire de les croire sur parole.
24 Q. Est-ce que vous avez des indications quant à la longueur du secteur
25 couvert par ces cadavres ?
26 R. C'était un jour très chaud et on sentait déjà une odeur très
27 désagréable. Donc ces cadavres devaient dater de la nuit précédente ou de
28 la matinée. A certains endroits, j'ai vu du sang qui était déjà coagulé; à
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1 d'autres endroits, j'ai vu du sang qui n'était pas encore coagulé. Donc ils
2 devaient être là depuis six, sept, huit, voire dix heures. Je ne suis pas
3 spécialiste, je ne suis pas un expert, je ne suis pas anthropologue. Mais
4 cela avait dû se passer pendant la nuit ou au début de la journée, les
5 blessures infligées à ces hommes.
6 Q. A votre retour, est-ce que quelque chose vous est arrivé ?
7 R. Nous avons découvert cinq ou six survivants, des soldats à eux qui
8 avaient été blessés mais étaient toujours vivants. Nous avons pansé leurs
9 plaies. J'ai dit aux deux prisonniers qui m'avaient emmené sur place qu'ils
10 n'étaient pas trop lourds et donc qu'ils pourraient peut-être les porter,
11 et j'en ai porté un autre avec l'aide d'un autre soldat. Nous en avons
12 laissé deux derrière nous. Plus tard, nous avons envoyé des gens les
13 chercher. Mon blindé m'a appelé par radio pour me dire qu'un groupe de 200
14 hommes s'étaient rendus à eux, et j'ai ordonné à mes hommes de les escorter
15 jusqu'au stade en décidant de prendre un raccourci pour atteindre moi-même
16 le stade, mais alors que nous transportions ces hommes, les soldats
17 musulmans m'ont fait prisonnier. Ils étaient moins de dix derrière eux, il
18 y en avait 200 de plus, et ils étaient venus de la clairière dont j'ai
19 parlé il y a un instant. Ils m'ont dit de laisser tomber mon fusil, ce que
20 j'ai fait, bien entendu.
21 A ce moment-là, l'un des prisonniers que j'avais envoyé transporter
22 les blessés est revenu et il leur a dit que je les avais aidés. J'ai
23 déclaré que qu'un grand nombre d'hommes s'était rendu et s'ils souhaitaient
24 en faire autant ils pouvaient me suivre. J'ai demandé si je pouvais
25 reprendre mon arme en leur disant qu'ils pouvaient me suivre s'ils le
26 souhaitaient, ce qu'ils ont fait. A ce jour, il n'est pas clair à mes yeux,
27 j'ai beaucoup de mal encore aujourd'hui à comprendre exactement ce qui
28 s'est passé, mais ces hommes m'ont suivi et sont arrivés au stade de Nova
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1 Kasaba. Ils ont jeté leurs armes, ici et là. A ce moment-là, nous n'avons
2 pas de force suffisante pour les désarmer par la force et les sécuriser, et
3 tout cela était contraire aux règlements de la police militaire, mais nous
4 avons eu de leur part une bonne coopération sur ce point.
5 Q. J'aimerais maintenant vous interroger au sujet du moment où le général
6 Mladic est arrivé au stade de Nova Kasaba. Cela commence à la page 5 de la
7 version anglaise de votre déclaration, page 6 en serbe, à partir du
8 paragraphe 29.
9 D'abord, Monsieur, étiez-vous présent pendant toute la visite du général
10 Mladic pendant tout le temps où il est resté sur place ce jour-là ?
11 R. Oui. Au moment où le général Mladic est arrivé au stade, j'étais en
12 train de descendre vers le stade avec les prisonniers qui s'étaient rendus.
13 Et pendant toute sa visite, je ne suis pas allé ailleurs. Donc, pendant
14 tout ce temps, j'étais à 3 ou 4 mètres de lui, à peu près.
15 Q. Pendant le temps où le général Mladic a été présent dans le stade de
16 Nova Kasaba, alors que vous vous trouviez à 3 à 4 mètres de lui, vous est-
17 il arrivé de voir ou d'entendre dire que quelqu'un avait été tué à cet
18 endroit-là, c'est-à-dire dans le stade de Nova Kasaba pendant que le
19 général Mladic était présent ?
20 R. Non, ça, non. Pendant que le général Mladic était présent, je réponds,
21 non, et de toute façon, je n'ai pas entendu dire que quelqu'un avait été
22 tué à cet endroit-là. Oui, c'est vrai il y a eu un décès, mais c'était
23 celui d'une femme qui a tué un prisonnier avec un fusil de chasse. Ça, j'ai
24 oublié de le dire, ça s'était passé le matin, au moment où j'ai subi cette
25 embuscade sur le pont, une femme est arrivée, elle portait un fusil de
26 chasse et a déclaré qu'elle avait tué un Musulman qui avait pénétré dans sa
27 maison. Mais je ne suis pas au courant que qui que ce soit se soit mêlé des
28 affaires des prisonniers, dont la sécurité était assurée par la police
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1 militaire. Nous n'autorisions même pas nos civils à s'approcher de nos
2 prisonniers. Nous agissions de la façon la plus professionnelle qui soit.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, une précision dont
4 j'aurais besoin de la part du témoin.
5 Vous avez déclaré, Monsieur, qu'au moment où vous avez subi l'embuscade,
6 une femme s'est approchée avec un fusil de chasse. Ce n'était pas la même
7 femme que celle dont vous avez déjà parlé qui était venue rendre compte du
8 fait que des Musulmans encerclaient sa maison ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ce n'est pas la même femme. Je
10 connaissais aussi cette autre femme. Je pense qu'elle s'appelait Pogaca ou
11 quelque chose comme cela, c'était son nom de famille. Elle vivait aussi
12 tout près de l'école, mais ce n'était pas la même femme.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
14 M. IVETIC : [interprétation]
15 Q. Maintenant, au paragraphe 30 de votre déclaration écrite, vous dites
16 que le général Mladic a donné l'ordre d'assurer la sécurité du transfert
17 des prisonniers aux autorités civiles, et que ces prisonniers devaient être
18 transportés par autobus. Est-ce que le général Mladic a donné d'autres
19 ordres quant à la manière de traiter les prisonniers ?
20 R. Eh bien, à l'arrivée du général Mladic, pour vous dire la vérité, moi-
21 même et mon commandant pensions que quelque chose n'allait pas parce que
22 nous n'avions pas la possibilité d'assurer la sécurité nécessaire à sa
23 personne. Est-ce qu'il les connaissait ou est-ce qu'il leur a demandé de se
24 présenter, je ne sais pas, mais il leur a parlé d'Alija et de la guerre, et
25 ils se sont levés, et ont applaudi. Il leur a dit qu'ils seraient échangés,
26 qu'ils devaient nous obéir, nous, les policiers militaires, et il leur a
27 dit aussi et nous a dit qu'il fallait que nous assurions strictement la
28 sécurité des prisonniers, que certains autobus allaient arriver dans une
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1 heure à peu près et qu'ils devaient signer un document de leurs noms, et
2 qu'ensuite ils seraient remis entre les mains de la police civile de
3 Bratunac. C'est ce que j'ai entendu, et à ce moment-là, j'ai vu cela
4 lorsque le général Mladic était présent dans le stade.
5 Q. Pendant toutes les activités dont nous venons de parler, les diverses
6 attaques et embuscades, donc pendant cette journée, est-ce qu'à quel que
7 moment que ce soit vous avez été informé de l'existence d'une opération
8 menée par la VRS contre la ville de Srebrenica, et éventuellement de ses
9 résultats ?
10 R. Non, je n'avais aucune information de ce genre. Je ne pense pas que mon
11 commandant, le commandant Malinic, ait eu des informations davantage que
12 moi parce qu'il ne m'aurait sans doute pas laissé seul avec cinq hommes
13 pour assurer seul la sécurité d'une école. J'étais jeune officier à cette
14 époque-là, sergent, j'étais tacticien, et pas spécialiste de la stratégie.
15 Donc, je n'avais pas d'information sur ce qui était en train de se passer.
16 La première chose que j'ai apprise personnellement, c'est lorsque nous
17 emmenions ces cinq hommes prisonniers, eux m'ont dit que toute la division
18 était venue contre moi.
19 Q. Monsieur, il est inscrit au compte rendu d'audience que vous avez parlé
20 de "ces cinq hommes", est-ce que c'est bien ce que vous avez dit, cinq
21 prisonniers ?
22 R. Quinze prisonniers.
23 Q. Je vous remercie de répondre à mes questions, au nom de moi-même et de
24 mon client, le général Mladic, vous avez nos remerciements.
25 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis arrivé au terme
26 de mon interrogatoire principal.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Ivetic.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai une question brève concernant le
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1 paragraphe 31 de votre déclaration écrite. Je demande l'affichage de la
2 page suivante de la version anglaise sur les écrans.
3 Vous dites :
4 "J'ai dit et utilisé les haut-parleurs pour dire aux Musulmans sur le
5 terrain qu'ils devaient se placer en ordre, en rang, avant d'entrer dans
6 les autobus."
7 Et plus loin dans votre déclaration, vous dites qu'ils ont obéi à cet
8 ordre, qu'ils ont pénétré dans les autobus de façon ordonnée en trouvant
9 eux-mêmes où s'asseoir, et qu'il leur avait été dit de boire un peu d'eau
10 avant de monter à bord des autobus. Où était l'eau qu'ils pouvaient boire ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous étions à ce moment-là dans le stade de
12 football de Nova Kasaba. Après que le général Mladic ait dit qu'il fallait
13 prendre soin des prisonniers, il s'est retourné vers moi personnellement et
14 a dit : "Jeune homme, veuillez à ce que chaque prisonnier arrive à
15 Bratunac", et c'est ce dont je me suis assuré plus tard. Ils ont bu de
16 l'eau. Il y avait là la rivière qui s'appelle Jadar, à 50 ou 60 mètres de
17 distance. Nous les avons laissés boire de l'eau et se rafraîchir parce que
18 la journée allait être très pénible en raison de la chaleur.
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons suspendre l'audience pour
21 aujourd'hui, Monsieur Subotic. Nous aimerions vous revoir demain, dans
22 cette même salle à 9 heures 30 du matin. Mais avant que vous ne quittiez la
23 salle, j'aimerais vous donner instruction de ne parler à personne --
24 M. IVETIC : [interprétation] Nous avons des visioconférences --
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ah, oui, oui, des visioconférences.
26 J'étais sur le point d'en parler en fait.
27 Donc, nous ne continuerons pas l'audition de votre déposition demain en
28 raison de ces visioconférences qui ont été programmées auparavant. Mais je
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1 vous donne instruction, quoi qu'il arrive et quel que ce soit le temps de
2 la reprise de votre audition dont vous seriez informé par la Section
3 chargée des Victimes et des Témoins, donc je vous donne instruction de ne
4 parler avec personne, de ne communiquer d'aucune façon avec qui que ce soit
5 au sujet de votre déposition, qu'il s'agisse du témoignage que vous avez
6 fait aujourd'hui ou du témoignage que vous vous apprêtez à faire dans un
7 avenir proche.
8 Si vous m'avez bien compris, vous pouvez sortir de la salle en
9 suivant M. l'Huissier.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous ai compris. Je vous remercie.
11 [Le témoin quitte la barre]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Ivetic, vous avez raison, c'est
13 sans doute parce qu'on est lundi matin, mais il y a encore ce point assez
14 court dont il faut que nous parlions. Est-ce que c'est vous qui avez
15 planifié un certain nombre de témoins de la Défense qui devraient témoigner
16 par visioconférence cette semaine ? Tout le monde est au courant que pour
17 ce faire il faut un certain nombre de préparatifs et pas mal de temps et
18 d'efforts ainsi que des moyens matériels qui rendent possible ces
19 visioconférences.
20 Nous aimerions entendre les deux parties pour savoir si elles
21 estiment que le calendrier prévu pour l'audition des témoins cette semaine
22 peut être respecté. Si le calendrier actuellement en place n'est pas
23 réalisable, la Chambre aimerait entendre des propositions alternatives de
24 la part des parties afin que les dépositions par visioconférence puissent
25 s'achever à la fin de cette semaine, y compris, si cela est nécessaire, de
26 travailler vendredi. Mais je vous prie de bien vouloir trouver un moyen de
27 façon à ce que les efforts qui ont été consentis pour organiser ces
28 témoignages par visioconférence ne soient pas gaspillés.
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1 Et puis, je n'insiste pas sur l'obtention d'une réponse immédiatement. Mais
2 s'il y a quoi que ce soit que les parties considèrent que les Juges
3 devraient savoir et que nous pourrions souhaiter savoir, quelque chose qui
4 perturberait le calendrier, n'hésitez pas dans ce cas à approcher les Juges
5 de la Chambre, y compris cet après-midi.
6 Bien. Nous allons suspendre pour la journée et reprendrons demain, 10 mars,
7 à 9 heures 30, dans cette même salle d'audience, mais nous entendrons des
8 auditions de témoin par visioconférence.
9 Suspension de l'audience pour la journée.
10 --- L'audience est levée à 13 heures 57 et reprendra le mardi, 10 mars
11 2015, à 9 heures 30.
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