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1 Le jeudi 30 avril 2015
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 32.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le prétoire
6 et à l'extérieur du prétoire.
7 Madame la Greffière, pouvez-vous citer l'affaire, s'il vous plaît.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
9 Messieurs les Juges. C'est l'affaire numéro IT-09-92-T, le Procureur contre
10 Ratko Mladic.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.
12 Je pense que la Défense voulait poser des questions préliminaires.
13 M. STOJANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Dans un
14 délai de 48 heures, on nous a demandé de dire notre position pour ce qui
15 est d'un document. Il s'agit du témoignage du Témoin Grujo Boric, 65 ter
16 32447. J'aimerais à présent informer la Chambre que la Défense n'a pas
17 d'objection concernant le versement de ce document au dossier.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons rendre la décision
19 concernant le versement de ce document en temps utile.
20 Est-ce que la Défense est prête à citer à la barre son témoin suivant, si
21 j'ai bien compris, c'est M. Ratko Nikolic ?
22 M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, on peut faire entrer le témoin
24 dans le prétoire.
25 Mademoiselle Melikian, c'est vous qui allez procéder au contre-
26 interrogatoire du témoin ?
27 Mme MELIKIAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
28 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Nikolic.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de commencer votre déposition,
4 selon notre Règlement de procédure et de preuve, vous devez prononcer la
5 déclaration solennelle dont le texte vous est remis par M. l'Huissier. Je
6 vous invite à donner lecture de cette déclaration solennelle.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
9 LE TÉMOIN : RATKO NIKOLIC [Assermenté]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin. Veuillez vous
12 asseoir.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Nikolic, Me Stojanovic va
15 d'abord vous poser des questions. Me Stojanovic se trouve à votre gauche.
16 Et il est conseil de Défense de M. Mladic.
17 Maître Stojanovic, vous avez la parole.
18 M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 Interrogatoire principal par M. Stojanovic :
20 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
21 R. Bonjour, Monsieur.
22 Q. Je vous prie de décliner votre identité pour que cela soit consigné au
23 compte rendu, et parlez lentement, s'il vous plaît.
24 R. Je m'appelle Ratko Nikolic.
25 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre où et quand vous êtes né ?
26 R. Au village d'Opravdici, le 12 juillet 1945.
27 Q. Je vous prie de dire si vous avez fini des écoles.
28 R. J'ai fini l'école élémentaire, qui a duré huit ans.
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1 Q. Avez-vous fait le service militaire ? Et si oui, quand et où ?
2 R. J'ai fait mon service militaire de 1964 à 1967, 11 mois à Gnjilane et
3 sept mois à Skopje.
4 Q. Est-ce que vous avez travaillé avant l'éclatement de la guerre au
5 printemps 1992 ?
6 R. Oui. J'avais été employé dans l'entreprise 21 mai à Rakovica, près de
7 Belgrade. Dans une organisation de cette entreprise qui se trouvait à Mali
8 Zvornik.
9 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre dans quelle république se trouve la ville
10 de Mali Zvornik ?
11 R. Cette ville se trouve en République de Serbie.
12 Q. Quel était votre travail dans cette entreprise ? Quel était votre
13 travail ?
14 R. J'étais en charge de sécuriser l'entreprise. J'étais réceptionniste.
15 Q. Disposiez-vous d'une arme en tant que réceptionniste ?
16 R. Nous disposions d'une arme et nous la transmettions d'une équipe à
17 l'autre.
18 Q. Au moment où la guerre a éclaté sur le territoire de la Bosnie-
19 Herzégovine et dans le village dans lequel vous habitiez, est-ce que vous
20 avez été mobilisé ?
21 R. Non.
22 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre pourquoi vous n'avez pas été mobilisé à
23 ce moment-là, à savoir en 1992 ? Pourquoi l'armée ne vous a pas mobilisé ?
24 R. On ne m'a pas mobilisé puisque tout ouvrier devait être enregistré
25 auprès de son organisation de travail sur le territoire de la municipalité
26 où cette organisation se trouvait. C'est là-bas où tout ouvrier devait être
27 enregistré auprès du SUP également et auprès de l'entreprise où il
28 travaillait.
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1 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre où vous vous étiez enregistré à ce
2 moment-là ?
3 R. J'étais enregistré dans la municipalité de Mali Zvornik.
4 Q. Au début de la guerre, est-ce que vous habitiez dans votre village ou
5 est-ce que vous habitiez à Mali Zvornik ?
6 R. Jusqu'à l'année 1992, je voyageais au travail. Je pense jusqu'au mois
7 d'août, au moment où des barrages étaient érigés sur la route pour Zvornik.
8 Après quoi, je ne pouvais plus voyager. J'avais un frère, et pendant encore
9 un mois j'ai travaillé. Après quoi, l'entreprise, le directeur de
10 l'entreprise nous a dit de rentrer chez nous, de ne plus travailler, et
11 nous recevions une somme minimale à titre de salaire. C'est parce que
12 c'était la guerre. Non seulement moi-même, mais également la plupart
13 d'autres ouvriers ne pouvaient plus continuer à travailler et ils restaient
14 chez eux.
15 Q. Quand êtes-vous arrivé dans votre village d'Opravdici pour y rester de
16 façon permanente ?
17 R. Je pense que c'était à partir du mois d'août.
18 Q. Aux fins du compte rendu, je vous prie de dire en quelle année c'était.
19 R. C'était en août 1993. C'est en 1993 où il y avait des incendies. Nous
20 avons été brûlés. C'était en août 1992. Excusez-moi.
21 Q. Encore une fois, dites-nous en quelle année c'était ?
22 R. C'était en 1992.
23 Q. Quelle était la composition ethnique de votre village d'Opravdici ?
24 R. C'était un village serbe. Le village d'Opravdici était un village
25 serbe.
26 Q. Est-ce que le village d'Opravdici fait partie d'un plus grand village
27 serbe ?
28 R. Oui, ça fait partie d'un village serbe plus grand. Il y avait à peu
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1 près une centaine de foyers, de maisons.
2 Q. Quel est le village voisin par rapport à votre village où se trouve le
3 centre de ce village plus grand ?
4 R. C'est le village de Kravica.
5 Q. Et quelle était la composition ethnique du village de Kravica ?
6 R. C'était un village serbe.
7 Q. Est-ce que vous avez vu à un moment donné ou est-ce que vous-même, vous
8 avez été engagé à un moment donné concernant les activités de protection et
9 de défense de votre village ?
10 R. Oui. J'étais engagé pour être de permanence, en quelque sorte, dans mon
11 village. Mon village se trouve à moins d'un kilomètre du village de
12 Kravica. Nous devions un peu surveiller la venue des personnes qu'on ne
13 connaissait pas, puisque dans le village il n'y avait que des femmes et des
14 personnes âgées.
15 Q. Est-ce qu'à l'époque vous disposiez d'armes lorsque vous vous rendiez à
16 ces activités ?
17 R. Un homme plus âgé avait un fusil de chasse qu'il portait de temps en
18 temps, et moi je n'avais rien comme arme.
19 Q. A partir du mois d'août 1992 jusqu'au mois de janvier 1993, est-ce qu'à
20 la proximité de votre village et du village de Kravica il y avait des
21 combats ?
22 R. Oui, il y avait des combats étant donné que des forces musulmanes
23 attaquaient de la direction de Srebrenica, et tous les villages avoisinants
24 étaient incendiés par ces forces. Et ils ont tué tous ceux qui s'y
25 trouvaient.
26 Q. Où à l'époque les hommes valides de votre village ont-ils été engagés ?
27 Où ils se trouvaient sur la ligne de front ?
28 R. Ils se trouvaient autour des villages. Etant donné que Kravica se
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1 trouve dans des montagnes et dans une zone forestière, on leur a tendu des
2 embuscades, à ces villageois qui montaient la garde, pour pouvoir entrer
3 dans le village.
4 Q. Monsieur Nikolic, pouvez-vous nous dire où vous vous trouviez à Noël
5 orthodoxe, à la date du 7 janvier 1993 ?
6 R. J'étais chez moi, dans ma maison, au village d'Opravdici. A la veille,
7 je m'occupais de préparer l'eau-de-vie, puisque le 7 janvier c'est notre
8 fête, Noël orthodoxe, donc j'ai préparé l'eau-de-vie. Et le 7 janvier, nous
9 avons célébré cette fête. Ce jour-là, il y avait l'attaque contre le
10 village de Kravica et contre d'autres villages avoisinants. Kravica a été
11 attaqué de quatre directions et tous les autres villages avoisinants.
12 Q. Essayez de répondre à des questions que je vous ai posées.
13 Pouvez-vous dire à la Chambre, pour autant que vous vous en
14 souveniez, quand cette attaque contre votre village de Kravica a commencé
15 le 7 janvier ?
16 R. Cette attaque a commencé au moment où mon épouse s'est levée, vers 5
17 heures et demie, pour préparer du pain, nous l'appelons Cesnica. Moi, je
18 restais à dormir encore un peu. Et je ne savais pas ce qui se passait. Je
19 n'ai rien entendu. Lorsque mon épouse est entrée dans ma chambre pour me
20 dire "Ratko, lève-toi. Nous sommes en train d'être attaqués de tous les
21 sens." "Marija, comment cela ?" Elle m'a dit de sortir devant la maison.
22 Ce que j'ai fait. Le village de Sikovici, un des villages avoisinants,
23 était déjà en feu. Ils criaient : "Egorgez-les vivants, brûlez-les," et
24 cetera.
25 Q. Qu'est-ce que vous avez fait à ce moment-là ?
26 R. Rien. J'avais deux maisons. Nous n'osions sortir. Il y avait des balles
27 qui sifflaient de partout. Entre les deux maisons, il y avait une entrée au
28 rez-de-chaussée. Mon épouse est entrée dans la maison et j'ai été blessé à
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1 ce moment-là. Une balle m'a touché dans la jambe gauche et je suis entré
2 dans la maison par la suite. Mon épouse m'a donné un morceau de chiffon
3 pour bander la plaie. Et à ce moment-là, je lui ai dit : "Marija, sauve-
4 toi, cours. Et moi, je vais rester, je vais périr."
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, pourrais-je vous
6 demander de ralentir votre débit un peu pour que les interprètes soient en
7 mesure d'interpréter vos propos.
8 Et, Maître Stojanovic, je vous prie de ménager une courte pause entre vos
9 questions et les réponses du témoin.
10 M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.
11 Q. Est-ce que votre épouse, Marija, a réussi à quitter la maison ?
12 R. Oui, elle s'est sauvée en courant à travers les bois vers la Drina,
13 vers la Serbie, puisqu'il y avait d'autres réfugiés qui quittaient Kravica,
14 donc elle les a rejoints, ces réfugiés.
15 Q. Et qu'est-il advenu de vous-même ?
16 R. Je suis resté dans mon village. Je ne suis pas parti du village.
17 Puisque je voulais rester où tout ce que je possédais se trouvait. Dans mon
18 hameau, il y avait cinq maisons. Il n'y avait personne d'autre, il n'y
19 avait pas d'hommes. Et je suis resté encore cinq jours après cela dans mon
20 hameau.
21 Q. Il faut que je vous arrête là pour quelques instants. Où étiez-vous
22 pendant ces cinq jours ? Où étiez-vous caché ?
23 R. Il y a des bois près de ma maison. Il y avait un tronc d'un arbre qui
24 était creux, et à côté de cet arbre il n'y a pas de sentier, il n'y a pas
25 de route. Et c'est à l'intérieur de ce tronc que je me cachais pendant
26 toute la journée, j'étais assis là.
27 Q. Comment viviez-vous ? Comment vous débrouillez-vous pour ce qui est des
28 vivres ?
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1 R. Je sortais un peu de ce tronc la nuit tombée, je ramassais quelques
2 pommes de terre que quelqu'un avait laissées. Je faisais le feu en
3 utilisant quelques branches sèches. Et c'est comme cela que je vivais
4 pendant ces cinq jours.
5 Q. Pendant ces cinq jours, est-ce que vous avez vu des soldats ennemis à
6 la proximité de vos maisons ?
7 R. Oui, je les ai vus. D'abord, mon village, dans mon village et à la
8 proximité de mon village, j'ai vu qu'ils pillaient tout. D'abord, c'était
9 ma maison qui avait été pillée. Dans la soirée lorsque je suis arrivé, j'ai
10 vu qu'ils chargeaient des vivres, du blé, sur les tracteurs, puisque moi
11 j'avais beaucoup de blé que je n'avais pas utilisé. Le bétail également,
12 ils ont pillé le bétail. Après quoi, ils ont tout incendié. Sept bâtiments
13 que je possédais dans l'enceinte de ma maison ont été incendiés.
14 Q. Est-ce qu'ils vous ont vu à un moment donné ?
15 R. Le cinquième jour, je suis sorti du tronc de cet arbre et je suis venu
16 près de ma maison pour voir s'il y avait quelqu'un. Je n'ai rien entendu.
17 Je ne faisais pas trop attention, et à un moment donné ils ont dit :
18 "Arrête-toi." Je me suis arrêté et je pensais que c'était la fin. Et
19 lorsque je me suis retourné, j'ai vu sept fusils qui étaient pointés vers
20 moi, vers mon dos.
21 Q. Quel était l'aspect de ces sept hommes qui vous ont arrêté ?
22 R. Ils portaient des uniformes de camouflage de couleur blanche. Ils ne se
23 sont pas présentés par leurs vrais prénoms. Ils s'appelaient entre eux,
24 Mico, Dragan, et cetera. Non pas Omer, Hasim, mais plutôt Mico, Dragan, en
25 utilisant d'autres prénoms. Peut-être parce qu'ils ne voulaient pas que
26 quelqu'un les reconnaisse.
27 Q. Après qu'ils vous aient arrêté, dans quelle direction vous êtes parti ?
28 R. Dans la direction de Kravica, puisque mon village se trouve à une
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1 distance d'un kilomètre de Kravica.
2 Nous sommes arrivés jusqu'au village de Kravica, ils ont commencé à me
3 gifler, en me disant Chetnik. Et ensuite, nous nous sommes dirigés vers
4 Konjevic Polje, et je connaissais cette région puisque je voyageais avec
5 des Musulmans vers Zvornik tous les jours lorsque nous travaillions. Ils me
6 connaissaient, et moi aussi je les connaissais. Pendant 25 ans, je
7 voyageais en empruntant ce chemin pour aller au travail.
8 Et il y avait un autocar qui est arrivé. Ils m'ont reconnu, ils m'ont
9 demandé : "Ratko, comment se fait-il que tu sois ici ?" Et cet autocar
10 s'est arrêté. Il y avait une foule de femmes et d'enfants. Dans cet
11 autocar, un homme, un moustachu, est descendu. Il avait un fusil
12 automatique sur le dos. Par la suite, j'ai appris qu'il s'agissait de Zulfo
13 Tursunovic.
14 Q. Il faut que je vous arrête là, Monsieur le Témoin.
15 Pouvez-vous dire à la Chambre où se trouve cet endroit où vous êtes arrivé
16 sur la route ?
17 R. C'est un village qui s'appelle Lolici, à 3 kilomètres de Kravica, dans
18 la région d'Osmace et dans la direction de Konjevic Polje.
19 Q. Après que cet autocar est arrivé et après que l'homme que vous avez
20 appris qu'il s'appelait Zulfo Tursunovic est descendu de l'autocar, dites-
21 nous ce qui s'est passé par la suite ?
22 R. On m'a fait monter dans l'autocar, où il y avait à peu près une
23 quinzaine de leurs soldats. Naser Oric s'y trouvait également.
24 Q. Est-ce qu'il y avait d'autres prisonniers à bord de cet autocar ?
25 R. Non.
26 Q. Et dans quelle direction vous a-t-on emmené ?
27 R. Dans le village de Jezercica [phon], à 2 kilomètres de Kravica,
28 puisqu'à gauche il y a Bratunac, et nous ne sommes pas partis vers
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1 Bratunac. L'autocar s'est arrêté et nous sommes partis à travers les
2 collines à pied, vers Bjeceva. Et lorsque nous sommes descendus vers
3 Potocari Rijeka, un autre autocar nous attendait. Nous sommes montés à bord
4 de cet autocar; eux aussi. Et nous sommes partis pour Srebrenica.
5 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre où on vous a d'abord emmené ? Dans quel
6 bâtiment dans la ville de Srebrenica ?
7 R. Dans l'ancien bâtiment du poste de police à Srebrenica.
8 Q. Pendant combien de temps êtes-vous resté dans ce bâtiment ?
9 R. Nous sommes restés dans ce bâtiment jusqu'au début de l'attaque contre
10 Skelani.
11 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre, pour autant que vous en souveniez, quand
12 cette attaque s'est produite contre Skelani ?
13 R. Je pense que c'était le 16 janvier. Je me souviens bien de l'attaque
14 contre Skelani puisqu'ils ont emmené cinq hommes arrêtés à Skelani, ils les
15 ont emmenés dans la prison à Srebrenica.
16 Q. Nous ne connaissons pas beaucoup de détails concernant l'attaque contre
17 Skelani, et j'aimerais que vous nous disiez en quelle année cela s'est
18 produit ? Le 16 janvier de quelle année ?
19 R. C'était le 16 janvier 1993.
20 Q. Qui a attaqué Skelani ?
21 R. D'après ce qu'ont dit les hommes qui ont été emmenés - par exemple,
22 Ilija, que je connaissais - c'était Naser Oric. Et pour ce qui est de ses
23 commandants, je ne les connais pas.
24 Q. Pendant ce temps-là, pendant que vous étiez au poste de police à
25 Srebrenica, est-ce qu'on vous a interrogé et est-ce que vous avez fait une
26 déclaration ?
27 R. Oui. Le lendemain, un homme m'a fait sortir. Je ne le connaissais pas.
28 Il m'a demandé ce que je possédais comme bétail, comme vivres, et cetera.
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1 Et sur la table se trouvait du sel, un pistolet et un couteau. D'abord, il
2 m'a posé la question pour savoir à quoi sert un couteau. J'ai haussé les
3 épaules et j'ai dit pour préparer de la nourriture pour des gens, et
4 cetera. Il m'a dit : "Non. Pour vous, les Serbes, cela sert à faire des
5 croix." Et il a dit encore quelque chose, mais je ne me souviens pas quoi
6 exactement, puisque cela s'est passé il y a longtemps.
7 Q. Bien. Je vais vous poser une autre question maintenant. A ce moment-là,
8 au poste de police, pendant ces quelques jours que vous êtes resté au poste
9 de police à Srebrenica, est-ce qu'on vous a posé la question pour savoir si
10 vous étiez soldat ou civil ?
11 R. Non. Puisque j'avais des vêtements civils, je n'avais aucune
12 obligation. Personne ne m'a cherché. Je ne portais pas d'uniforme. Je
13 portais des vêtements comme les vêtements que je porte aujourd'hui. Et le
14 lendemain, au poste de police, on m'a fait déshabiller, on m'a apporté une
15 paire de bottes qui étaient endommagées et une chemise qui n'avait pas de
16 manches.
17 Q. Est-ce qu'il s'agissait de policiers ou de militaires qui vous
18 gardaient dans ce bâtiment ?
19 R. Ils portaient des vêtements civils. Il s'agissait probablement de leur
20 police qui assurait la garde de prisonniers.
21 Q. Suite au 16 janvier 1993, où avez-vous été transféré ?
22 R. Nous étions au nombre de quatre, et puis cinq autres personnes ont été
23 amenées, et c'est alors que nous avons été transférés dans un endroit qui
24 se trouvait entre le tribunal et la mairie et qui avant était utilisé comme
25 entrepôt, et c'est là qu'ils nous ont enfermés à clé.
26 Q. Veuillez dire aux Juges de la Chambre quel était le nombre de
27 prisonniers qui étaient enfermés ?
28 R. Eh bien, nous étions quatre au poste de police, puis cinq autres
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1 personnes ont été amenées, donc au total nous étions neuf.
2 Q. Essayez de vous souvenir, si vous le pouvez, et dites aux Juges de la
3 Chambre si vous vous souvenez des noms ou des prénoms des prisonniers qui
4 étaient avec vous ?
5 R. Je m'en souviens bien. Lorsque j'ai été emmené à Srebrenica, j'ai
6 trouvé Popovic qui avait été capturé avant moi et amené à Srebrenica. Mico
7 Milovanovic était là aussi, du village de Sase. Mico et Popovic ont été tué
8 là à Srebrenica devant mes propres yeux. Et je sais le moment précis où
9 cela s'est passé. Ensuite, il y avait Drago, un homme âgé, qui avait plus
10 de 80 ans. Et un autre homme qui a été emmené à l'hôpital puisqu'il avait
11 subi des blessures aux deux jambes, mais je ne me souviens plus de son nom.
12 Il a été emmené. Ils l'ont emmené à l'hôpital. Puisqu'il ne pouvait pas se
13 lever pour marcher, il se déplaçait sur ses genoux.
14 Q. Et savez-vous ce qui est arrivé à cet homme âgé qui s'appelait Drago ?
15 R. Drago est mort des suites des coups qu'il a reçus le lendemain.
16 Q. Et pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre si vous vous souvenez des
17 personnes qui ont été emmenées après l'attaque lancée par l'ABiH contre le
18 village de Skelani --
19 R. Je me rappelle Ilija, qui a été échangé au même moment que moi. Je me
20 rappelle Stanoje, qui était paralysé. Il ne pouvait pas s'enfuir. Ses deux
21 jambes étaient immobiles, la jambe gauche comme la jambe droite. Il a été
22 échangé. Puis, il y avait un autre homme, je ne me souviens plus de son
23 nom, qui accompagnait Kostadin et qui est mort. Je veux dire, il est mort
24 des suites des coups qu'il a reçus. Et les deux hommes âgés ont été
25 échangés le 14 février -- non, plutôt, le 27 février ou avant le 27
26 février. Les femmes, les enfants et cet homme âgé qui s'appelait Stanoje.
27 Q. Et dans quelles conditions étiez-vous enfermé ?
28 R. Eh bien, par terre c'était du béton. Nous avions deux ou trois petites
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1 fenêtres, 50 centimètres sur 50 centimètres. Il y avait une grille, mais il
2 n'y avait pas de verre pour fermer ces fenêtres. Et nous avions une seule
3 couette. Nous avions l'habitude de nous asseoir par terre et de nous
4 couvrir la tête en se servant de cette couette. Sinon, il n'y avait rien
5 d'autre.
6 Q. A un moment donné, vous avez mentionné des femmes et des enfants. De
7 quoi s'agit-il exactement ?
8 R. Eh bien, lorsque nous sommes arrivés sur place, nous avons constaté
9 qu'il y avait 14 femmes et quatre enfants dans la pièce d'à côté, qui se
10 trouvait à notre gauche. Et je me souviens de ce petit garçon qui
11 s'appelait Branko, qui avait environ huit ans. Je l'ai vu à deux reprises.
12 Maintenant, c'est un homme. Et lui, ils le laissaient sortir de la pièce un
13 petit peu de temps en temps.
14 Q. Et qu'est-ce qui s'est passé avec ce groupe de femmes et d'enfants ?
15 R. Ils ont été échangés au mois de février. Les femmes, les enfants et
16 l'homme paralysé, l'homme âgé, Stanoje. Il avait des problèmes au niveau de
17 ses bras et de ses jambes.
18 Q. Et pendant que vous étiez enfermé dans ce petit espace, est-ce que vous
19 avez été interrogé à quelque moment que ce soit ?
20 R. Non, jamais.
21 Q. Quelqu'un a-t-il vérifié si vous étiez soldat ou civil ?
22 R. Non, jamais. Rien du tout.
23 Q. Avez-vous eu l'occasion de voir qui dirigeait les hommes qui assuraient
24 votre sécurité ? Qui était leur commandant ?
25 R. Eh bien, dans la soirée, lorsqu'ils changeaient d'équipes, ils me
26 faisaient sortir de la pièce puisque nous n'avions rien à manger. Vraiment,
27 au niveau de la nourriture, c'était vraiment une torture que nous avons
28 subie. On nous donnait trois ou quatre bouchées de blé et trois ou quatre
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1 cuillères de quelque chose qui n'était même pas cuit, qui n'était pas salé,
2 qui n'était pas gras. Enfin, il n'y avait rien dans ce repas qu'on nous
3 donnait. Et dans la soirée, au moment où ils changeaient d'équipes, il y
4 avait un homme qui me disait : "Viens, Nikolic, sors de là, parlons un
5 peu." Et il m'a dit : "Ici, tu recevras moins de coups qu'ailleurs."
6 Ensuite, il a allumé le feu, puisqu'il faisait très froid à Srebrenica à ce
7 moment-là; il faisait moins 10 ou moins 15 degrés. Et nous n'avions pas de
8 vêtements. Et alors, il me parlait. Il était du village de Suceska, c'était
9 vraiment un brave homme. Je dois l'avouer, il faut le dire. Il m'a apporté
10 un petit bout de pain de maïs et me disait : "Viens, Nikolic. Mange ceci.
11 Je ne peux pas t'apporter davantage puisque moi-même je n'ai pas
12 suffisamment à manger."
13 Q. Est-ce qu'on vous rouait de coups pendant que vous vous y trouviez ?
14 R. On nous rouait de coups tous les jours. Chaque personne qui entrait
15 dans la pièce nous rouait de coups. Il y avait deux hommes qui nous
16 battaient régulièrement. Ils portaient de grosses lunettes, des barbes, et
17 ils n'arrêtaient pas de nous battre. Nous avions des cicatrices partout.
18 Vous voyez ici, ici et aussi sur ma gauche ?
19 Et quand ils ont voulu échanger les femmes le lendemain, le 7, dans la
20 soirée, à un moment donné au cours de la nuit, trois hommes sont entrés.
21 Les sentinelles les ont laissés passer, et ce sont les sentinelles qui les
22 ont encouragés à nous battre, à nous rouer de coups. Ils ont ouvert la
23 porte, et ils se servaient d'une sorte de dispositif fait de carton, et ils
24 ont commencé à nous battre l'un après l'autre. J'ai tous les documents
25 médicaux qui m'ont été donnés pour le confirmer par des médecins. Mes côtes
26 ont été cassées. Ils nous forçaient d'enlever nos vêtements, et comme nous
27 perdions conscience, ils nous jetaient sur une pile, ils nous amassaient.
28 Ensuite, ils apportaient de l'eau froide qu'ils versaient sur nous. C'est
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1 ainsi que les choses se passaient.
2 Alors, quand je suis redevenu conscient, je ne sais pas à quel moment cela
3 s'est produit, je tremblais et j'ai retrouvé une couette que j'ai mis sur
4 ma tête. Et je me suis assis contre le mur. Lorsque l'aube est venue, j'ai
5 regardé autour de moi et j'ai vu que Kostadin Popovic était mort, ainsi que
6 cet autre homme qui était venu de Skelani. Ils étaient morts tous les deux.
7 Vers 10 heures du matin, je ne sais pas l'heure exacte, Zulfo Tursunovic,
8 le commandant, est venu. Par la suite, j'ai appris que c'était lui le
9 commandant. Il s'est promené un petit peu en portant un fusil automatique
10 sur sa poitrine, il avait cette petite moustache, et il disait : "Mais
11 qu'est-ce qui vous est arrivé ?" Alors, qu'est-ce que je pouvais lui
12 répondre ? Est-ce que je pouvais vraiment lui dire : "On nous a roués de
13 coups l'un après l'autre" ? Je ne connaissais même pas le nom des personnes
14 qui nous avaient battus et je savais que ces personnes me battraient de
15 nouveau dès qu'ils seraient partis.
16 Ensuite, deux autres hommes sont venus par la suite et ils ont fait
17 sortir les deux cadavres.
18 Q. Je vais vous interrompre pour vous demander si vous avez pu demander
19 l'aide des médecins à cause des blessures que vous avez subies ?
20 R. Nous avons demandé qu'un médecin vienne nous voir, mais cela n'a servi
21 à rien. Ma jambe était toute enflée. Mais personne n'a voulu nous examiner.
22 Q. Dites-moi si à un moment donné vous avez appris que vous alliez être
23 échangé ?
24 R. Non, jamais.
25 Q. Et combien de temps êtes-vous resté dans cette pièce ?
26 R. Nous y sommes restés jusqu'au moment où l'échange a eu lieu, à la fin
27 du mois de février.
28 Q. Veuillez dire aux Juges de la Chambre à combien de reprises on a essayé
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1 d'effectuer cet échange ?
2 R. On a essayé de l'effectuer à deux reprises, et la troisième fois j'ai
3 été finalement échangé.
4 Q. Pouvez-vous nous dire à quoi ressemblaient ces tentatives d'échange qui
5 ont essuyé un échec ?
6 R. Ilija a été roué de coups un soir, c'est l'homme qui a été échangé en
7 même temps que moi. Ensuite, on l'a amené à l'hôpital. J'imagine qu'il ne
8 pouvait pas parler, il ne pouvait pas marcher. A l'hôpital, il n'a pas
9 vraiment reçu de traitement, puisqu'ils n'avaient pas de médicaments, ils
10 n'avaient rien du tout. En tout cas, Ilija se trouvait à l'hôpital. Et
11 ensuite, cet homme qui n'avait pas de bras est entré dans la pièce. Par la
12 suite, j'ai appris qu'il était surnommé Mis. Puis, Jakov, de Kalabaca, qui
13 a été amené par Naser, il y a passé sept mois. Naser les a fait venir à
14 Srebrenica pour nous joindre dans notre prison, quatre hommes et une femme,
15 Andja. Et il a dit : "Voyons voir." Il nous a regardés. Tous les hommes
16 étaient couchés par terre, et il a dit : "Bon, voyons qui est capable de se
17 lever." Moi, j'ai réussi à me soulever un petit peu. Et il a dit :
18 "Nikolic, tu vas être échangé."
19 Q. Dans quelle partie de la pièce vous teniez-vous ? Où étiez-vous
20 couché ?
21 R. Eh bien, un peu partout dans la pièce. Nous nous couchions contre le
22 mur. Deux ou trois d'entre nous partagions une seule couette parce qu'il
23 n'y avait pas beaucoup de couettes, et nous essayions tout simplement de
24 nous couvrir la tête un petit peu. Mais sinon, il n'y avait rien. Le
25 plancher était en béton. Il n'y avait rien du tout. La pièce était nue.
26 Q. Est-ce que les sentinelles vous demandaient de vous lever lorsqu'ils
27 entraient dans la pièce ?
28 R. Les gardiens m'ont donné l'ordre de me lever -- enfin, je dis les
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1 gardiens, mais il s'agissait des civils, et ils m'ont donné l'ordre de
2 m'asseoir près de la porte. Chaque fois que quelqu'un entrait, je devais me
3 mettre à côté de la porte puisqu'ils disaient que je m'appelais Ratko et
4 que mon nom de famille était Mladic. Et chaque fois que quelqu'un entrait,
5 j'était obligé de me lever et de les saluer en disant que j'étais Ratko
6 Mladic. Mais j'étais incapable de me lever puisque j'avais tellement
7 souffert à cause des coups que j'avais reçus. Et j'avais trop faim. Mon
8 ventre était noué. Mais si je ne réussissais pas à me lever, alors ils me
9 donnaient des gifles.
10 Q. J'aimerais revenir sur l'une des réponses que vous avez fournies. Vous
11 dites qu'à un moment donné une femme qui s'appelait Andja a été amenée en
12 compagnie de quatre hommes et qu'ils étaient venus du village de Kalabaca.
13 De quel village fait partie Kalabaca ?
14 R. Kalabaca est un hameau qui fait partie du village de Sekovici.
15 Q. Où avaient-ils été prisonniers jusqu'au moment où ils ont été amenés ?
16 R. A Cerska.
17 Q. Merci. Lorsqu'ils vous ont fait savoir qu'un échange aurait lieu, est-
18 ce qu'on a essayé de réaliser cet échange ?
19 R. A deux reprises. La première fois, eh bien, cela n'a pas marché. Nous
20 sommes allés vers Srebrenica, Zeleni Jadar et vers Suceska, où il y avait
21 beaucoup de neige. Il y avait un petit camion, mais ses pneus ne valaient
22 rien. On était censé marcher un kilomètre, alors on nous a fait sortir en
23 disant qu'on ne peut plus avancer. Ilija et moi, nous étions incapables de
24 marcher. Ils nous ont tirés un petit peu à travers la neige, mais nous
25 sommes restés sans pouvoir bouger pendant deux ou trois heures alors qu'il
26 faisait très froid. Et alors, cet homme surnommé Mis, qui n'avait pas de
27 bras, est revenu en disant : "On revient à Srebrenica. Vous allez retourner
28 en prison." J'imagine que les négociations avaient échoué. Je ne sais pas
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1 pour quelle raison ils nous ont fait revenir. Sept jours plus tard, il est
2 revenu -- ou, plutôt, Ilija a été amené de nouveau à l'hôpital, et moi j'ai
3 été amené à la prison.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, veuillez, s'il vous
5 plaît, éteindre votre micro.
6 Vous pouvez poursuivre, Monsieur le Témoin.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
8 Quand il est venu pour la deuxième fois, il m'a dit : "Nikolic, allons-y,
9 un échange aura lieu." J'étais très content de l'apprendre. On nous a
10 placés encore une fois dans le même camion, et encore une fois le camion ne
11 pouvait pas passer. Alors, encore une fois, ils ont essayé de nous tirer un
12 petit peu, nous pousser, pour que nous puissions marcher et traverser cette
13 distance d'un kilomètre. Là, nous avons trouvé leurs soldats, les soldats
14 de l'armée bosniaque, musulmane. Et un peu plus loin, nous avons vu l'armée
15 serbe en direction de Skelani. Nous avons passé deux ou trois heures à
16 attendre. Rien ne s'est passé. On était juste là, plantés dans la neige.
17 Puis, deux hommes sont venus de la direction de Skelani, ils ont levé leurs
18 mains. Les autres n'ont pas réagi. Les négociations ont été entamées. Un
19 capitaine s'est approché de nous, c'était lui qui avait conduit les
20 personnes qui devaient être échangées de l'autre côté, contre nous, dans un
21 camion --
22 Q. Je vais vous interrompre pour vous demander de répéter la dernière
23 partie de votre réponse puisqu'elle n'a pas été consignée dans le compte
24 rendu d'audience. Qui a été ce capitaine et qui a amené leurs hommes pour
25 qu'ils soient échangés ?
26 R. Le capitaine faisait partie de notre armée, de l'armée serbe. Il était
27 venu de Skelani. Et l'autre homme était le chauffeur. C'était lui qui avait
28 conduit le camion à bord duquel se trouvaient leurs hommes qui étaient
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1 censés être échangés. D'après ce que j'en sais.
2 Q. Et est-ce que l'échange entre les deux parties belligérantes a eu lieu
3 à ce moment-là ?
4 R. Oui, l'échange a eu lieu. Ils avaient fait venir des veaux pour pouvoir
5 transporter les prisonniers. D'après mes souvenirs, il y en avait deux qui
6 étaient vivants et un troisième qui était mort. Cet homme mort se trouvait
7 dans un coffre. Mais personne ne voulait l'accompagner. La charrette ne
8 pouvait pas partir. Puis, le chauffeur et le capitaine ont pris les veaux,
9 ils ont descendu la colline, et ils ont mis dans la charrette ces trois
10 personnes - le mort et les deux vivants- et ils les ont amenées jusqu'à la
11 ligne de la séparation. Et ensuite, ils ont pris les veaux. Nous avons été
12 remis entre les mains des Serbes, qui nous ont pris avec eux et fait monter
13 à bord de la voiture.
14 Q. Dites-nous aux Juges de la Chambre, d'après vos souvenirs, quel jour
15 cela s'est passé ? A quelle date ?
16 R. Je ne m'en souviens plus, mais je sais que c'était vers la fin du mois
17 de février puisque pas mal de temps s'était écoulé. Mais je ne sais pas
18 quel jour l'échange a eu lieu.
19 Q. Et qui a été échangé en même temps que vous ?
20 R. Ilija de Skelani.
21 Q. Et dites-nous si vous avez été capable de marcher compte tenu des
22 conditions dans lesquelles vous avez vécu ?
23 R. Eh bien, c'était très difficile. Normalement, je pèse 75 kilos, mais là
24 je n'en avais que 40. Mes intestins étaient noués, et j'avais très soif. A
25 un moment donné, on ne nous a rien donné à boire pendant trois jours.
26 Ensuite, ils ont apporté quelque chose un liquide, un peu pâle. Et puis, il
27 y avait un homme, je ne l'oublierai jamais, et je le remercie de tout mon
28 cœur, qui m'a dit : "Nikolic ne bois pas ça. C'est de l'urine. Tu vas avoir
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1 de la fièvre si tu bois cela." Et on voyait en effet que ce liquide était
2 d'une couleur jaune pâle. Ce n'était pas un liquide transparent.
3 Q. Et suite à l'échange, pouvez-vous dire où vous avez été amené ? Où
4 l'échange a eu lieu, à quel point le long de la ligne de séparation ?
5 R. Cet endroit s'appelle Kragljivoda. Cela se trouve à un croisement de
6 chemins non loin de Skelani.
7 Nous avons été échangés contre ces deux hommes vivants et un mort. En
8 fait, un cousin de Naser a été tué à Skelani pendant l'attaque, et c'est
9 pourquoi ils étaient incapables de le retrouver. Et c'est la raison pour
10 laquelle nous avons été ramenés à la prison à deux reprises.
11 Q. Est-ce que votre famille savait où vous vous trouviez ?
12 R. Non, ils n'en savaient rien. Lorsque finalement je suis arrivé
13 suite à l'échange, j'ai compris qu'ils n'avaient rien su du tout. Ils
14 avaient perdu tout contact avec moi. Ils ne savaient même pas que je me
15 trouvais à Srebrenica.
16 Q. Je n'ai que quelques questions à vous poser. J'ai pratiquement
17 terminé avec mon interrogatoire principal. Encore un petit peu de patience.
18 Pouvez-vous nous dire si vous avez reçu un traitement médical suite à
19 ces événements ?
20 R. Je suis parti à Zvornik pour recouvrer ma santé. Je suis allé voir
21 Vlado Prodanovic et j'ai subi une intervention chirurgicale. Ils étaient
22 obligés de m'installer la hanche. Et j'ai toujours du mal à marcher,
23 puisque l'une de mes jambes est trop courte de 5 centimètres. Ma jambe a
24 été blessée lorsqu'ils nous tiraient vers le canal. Les articulations ont
25 été endommagées.
26 M. STOJANOVIC : [interprétation] Veuillez afficher, s'il vous plaît, le
27 document 1D05386.
28 Et, Messieurs les Juges, permettez-moi de consulter brièvement M. Mladic.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, Maître Stojanovic.
2 [Le conseil de la Défense se concerte]
3 M. STOJANOVIC : [interprétation]
4 Q. Monsieur Nikolic, veuillez regarder le document qui est affiché à
5 l'écran devant vous, si vous pouvez le déchiffrer. Donc il y a un document
6 qui est affiché à l'écran devant vous. Il est indiqué centre médical de
7 Zvornik, feuille de sortie. Est-ce que vous le voyez ?
8 R. Oui.
9 Q. Et je vais brièvement lire le document.
10 R. Ce document a été rédigé après mon échange, lorsque j'ai été traité à
11 Zvornik.
12 Q. Et il est indiqué dans le document que vous avez été traité entre le
13 1er mars 1993 et le 14 mars 1993. Et il y a aussi le diagnostic.
14 Est-ce là la documentation médicale qui vous a été donnée une fois que vous
15 avez quitté l'hôpital ?
16 R. Oui.
17 Q. Et m'avez-vous remis ce document pendant la séance du récolement ?
18 R. Oui.
19 Q. Merci.
20 M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander
21 le versement au dossier du document 1D05386.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, le document
24 recevra la cote D1039.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document est admis au dossier.
26 M. STOJANOVIC : [interprétation] J'aimerais que nous examinions un autre
27 document. Il porte la cote 1D05385.
28 Q. Si vous pouvez déchiffrer le document, Monsieur Nikolic, qui se trouve
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1 à la gauche de votre écran, nous voyons un document médical. C'est une
2 autre feuille de sortie. Est-ce que vous le voyez ?
3 R. Oui.
4 Q. Cette feuille de sortie a été communiquée par le centre médical de
5 Loznica. En 2007, vous avez suivi une physiothérapie après avoir subi
6 l'intervention chirurgicale. Est-ce là un document que vous m'avez remis
7 lors de la séance du récolement ?
8 R. Oui.
9 Q. Et une seule autre question, s'il vous plaît.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, veuillez, s'il vous
11 plaît, répéter votre question.
12 M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui.
13 Q. Une seule question concernant ces documents médicaux. Lorsqu'on vous a
14 posé une prothèse du col du fémur, lorsque vous avez subi cette
15 intervention chirurgicale, est-ce qu'elle a été rendue nécessaire par les
16 blessures que vous avez subies pendant que vous vous trouviez en prison ?
17 R. Oui, en effet.
18 Q. Merci.
19 M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander
20 le versement au dossier de ce document. Il porte la cote 1D05385 de la
21 liste 65 ter.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, le document reçoit
24 la cote D1040.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document est admis au dossier.
26 M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.
27 Monsieur le Président, je vois que le moment est venu de faire une
28 pause. Je crois que j'en viendrai à la fin de mon interrogatoire dans
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1 quelques dix à 15 minutes, donc le moment est, je crois, opportun pour
2 prendre une pause, et ensuite je poserai quelques autres questions au
3 témoin concernant les événements qui se sont produits suite à l'année 1993.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons prendre une pause.
5 Monsieur le Témoin, vous pouvez suivre l'huissier. Nous vous reverrons dans
6 20 minutes.
7 [Le témoin quitte la barre]
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant la pause, Maître Stojanovic, avez-
9 vous discuté avec l'Accusation pour savoir si le récit de ce témoin est
10 litigieux, le témoin a été traité d'une façon violente ? Je n'hésite pas à
11 me servir de ce terme, puisqu'il correspond très bien à sa description. De
12 façon générale, je n'ai jamais constaté -- en fait, d'après ce que j'ai pu
13 constater au cours du procès, le fait que les Musulmans aient traité un
14 certain nombre de Serbes de façon violente n'a pas été une question
15 litigieuse. Cela s'est produit et même très fréquemment.
16 Donc, est-ce que vous avez demandé à l'Accusation s'ils remettent en
17 question ce récit ?
18 M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Lors de
19 l'entretien que nous avons eu avec l'Accusation, nous avons discuté la
20 chose. L'Accusation a présenté son point de vue. Pour l'un des témoins de
21 ce type, il n'y aura pas de questions de posées.
22 Mais en ce qui concerne ce témoin-là, la question litigieuse est de savoir
23 s'il était effectivement un civil ou un soldat, et aussi si la population
24 de Kravica avait des motifs pour se venger. Et c'est pourquoi l'Accusation
25 a demandé de pouvoir poser des questions très concrètes au témoin
26 concernant ces deux sujets-là.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais alors, pourquoi ne vous êtes-vous
28 pas concentré sur les questions qui justement sont litigieuses ? Nous avons
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1 écouté le récit, et le témoin, je ne souhaitais pas l'interrompre puisque
2 je vois dans quel état il se trouve. Mais tous ces détails étaient tout à
3 fait superflus. Pour nous donner une idée des traitements violents qu'il a
4 subis, vous auriez pu nous en donner une idée en dix minutes ou dans
5 l'espace de 15 minutes, surtout compte tenu de la condition physique de ce
6 témoin qui, en plus, est étayée par la documentation.
7 Donc, pourquoi ne pas se concentrez sur les questions qui sont
8 effectivement litigieuses ? Parce que la question litigieuse n'est pas de
9 savoir si le témoin se trouve dans un mauvais état physique et que cela a
10 été provoqué par des traitements violents infligés par les Musulmans.
11 Je demande à l'Accusation son point de vue.
12 Mme MELIKIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Vous avez
13 tout à fait raison. De façon générale, ce point n'est pas contesté.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et s'agissant des mauvais traitements
15 physiques et des violences infligées, ils ne sont pas contestés non plus ?
16 Mme MELIKIAN : [interprétation] Pas non plus, Monsieur le Président, ils ne
17 le sont pas.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je n'ai pas encore parlé de la
19 question de la pertinence. Mais vous dites pouvoir en terminer en 15
20 minutes, Maître Stojanovic.
21 Nous allons donc faire une pause et reprendrons à 11 heures moins cinq.
22 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.
23 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
24 M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant de faire
25 entrer le témoin, est-ce que je peux vous dire une phrase seulement.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, avant de faire
27 pénétrer le témoin dans la salle d'audience, veuillez attendre mon
28 autorisation. Mais vous pouvez le préparer à entrer.
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1 Vous avez besoin de combien de temps, Maître Stojanovic ?
2 M. STOJANOVIC : [interprétation] Une minute seulement, Monsieur le
3 Président.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, Monsieur l'Huissier, veuillez vous
5 assurer que le témoin sera prêt à entrer dans la salle dans une minute.
6 Vous avez la parole, Maître Stojanovic.
7 M. STOJANOVIC : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président.
8 Je voudrais corriger une erreur à la page 25, lignes 11 et 12 du compte
9 rendu d'audience d'aujourd'hui. J'ai commis une erreur. Il est indiqué que
10 j'ai dit que j'avais discuté avec mes confrères de l'Accusation au sujet
11 des questions qui étaient encore contestées dans la déclaration du témoin,
12 et je souhaite ajouter maintenant que je n'ai pas discuté de ce point avec
13 les collègues de l'Accusation jusqu'à présent.
14 Mais la Défense que je représente estime que nous devrions être
15 autorisés, grâce à la déposition de vive voix de ce témoin, à obtenir une
16 réponse à ces questions de sa part.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, vous êtes tenu de
18 vous concentrer sur les questions contestées. Vous avez le droit de poser
19 des questions au témoin. Je n'ai jamais dit que tel n'était pas votre
20 droit.
21 Deuxièmement, vous ne devriez pas dire aux Juges de la Chambre que vous
22 avez discuté de tel ou tel point avec l'Accusation si vous ne l'avez pas
23 fait. Et j'en resterai là.
24 M. STOJANOVIC : [interprétation] C'est exact. Je vous remercie, Monsieur le
25 Président.
26 [Le témoin vient à la barre]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Nikolic, nous allons
28 poursuivre. Me Stojanovic a encore quelques questions à vous poser.
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1 Veuillez procéder, Maître.
2 M. STOJANOVIC : [interprétation]
3 Q. Monsieur Nikolic, nous n'en avons pas pour longtemps. Encore simplement
4 quelques questions. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre si aujourd'hui
5 encore vous subissez des conséquences des blessures que vous avez subies ?
6 R. Oui.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin nous l'a déjà dit, Maître
8 Stojanovic. Et nous pouvons le constater.
9 Veuillez poursuivre.
10 M. STOJANOVIC : [interprétation]
11 Q. Pouvez-vous dire aux Juges, en vous fondant sur ce que vous savez, quel
12 est le nombre d'habitants de votre village qui sont décédés suite à
13 l'attaque de l'ABiH le 7 janvier 1993 ?
14 R. Je pense que 48 personnes à peu près ont été tuées. Il y a encore des
15 maisons incendiées de mon village dans lesquelles habitaient des personnes
16 dont les corps n'ont pas encore été retrouvés à ce jour.
17 Q. La population de votre village de Kravica et des environs ressent-elle
18 un besoin de vengeance en raison du nombre de victimes provoquées par cette
19 attaque de l'ABiH ?
20 R. Oui, toutes sortes de choses ont été faites à l'époque parce que Naser
21 Oric et son armée ont détruit tous les villages de la zone. Il y avait 17
22 villages et tous ces villages ont été incendiés. Tout a été pillé. Rien
23 n'est resté dans ces villages. Après les pillages, après que tous les
24 objets aient été emportés, ils mettaient le feu à toutes les maisons, tous
25 les bâtiments.
26 Q. Quel a été le motif de ce besoin et de ce désir exprimé de vengeance ?
27 Est-ce que les personnes concernées vous l'ont dit ? Est-ce que ce désir a
28 résulté de ce que les gens avaient vécu le 7 janvier ?
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1 R. Eh bien, je vais vous dire : quand vous voyez des gens dont la tête a
2 été coupée, dont les jambes ont été coupées, après tout ce que les gens ont
3 entendu à ce moment-là, il y a eu trois ou quatre personnes qui ont été
4 décapitées et dont les corps ont été emportés à Srebrenica, toutes sortes
5 de choses se sont passées.
6 Q. Monsieur Nikolic, quand avez-vous pu rentrer à votre domicile ?
7 R. J'ai réussi à rentrer chez moi -- parce que j'ai un frère à Mali
8 Zvornik, donc j'ai passé un certain temps là-bas. Tout était incendié,
9 brûlé, détruit, donc je n'avais nulle part à rentrer jusqu'à la signature
10 des accords de Dayton. Après Dayton, j'ai obtenu de l'aide et j'ai pu
11 reconstruire quelque chose, 64 mètres carrés. Donc, voilà, je pense que
12 c'est ce que je peux dire. Ma grand-mère vit toujours là-bas aujourd'hui.
13 Q. Monsieur Nikolic, je vous remercie d'avoir répondu à toutes mes
14 questions et d'avoir eu la volonté de venir témoigner. La Défense que je
15 représente n'a plus de questions à vous poser. Je vous remercie.
16 R. Je vous remercie.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Stojanovic.
18 Madame Melikian, est-ce que vous êtes prête à contre-interroger le témoin ?
19 Mme MELIKIAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Nikolic, vous allez maintenant
21 être contre-interrogé par Mme Melikian, que vous voyez sur votre droite.
22 Mme Melikian est substitut du Procureur représentant l'Accusation devant ce
23 Tribunal.
24 Contre-interrogatoire par Mme Melikian :
25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Nikolic.
26 R. Bonjour.
27 Q. Monsieur Nikolic, dans votre déposition, vous venez de dire, et ceci
28 figure à la page 28 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, que 48
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1 personnes environ ont été tuées, qui étaient des habitants de votre village
2 et qui ont été tuées le 7 janvier 1993.
3 R. Oui. Durant l'attaque de Kravica.
4 Q. Est-ce que, au nombre de ces personnes, on trouve des soldats
5 également ?
6 R. C'étaient des civils. Il n'y avait pas de soldats parmi eux. Pour
7 l'essentiel, c'étaient des civils qui étaient en train d'essayer de fuir.
8 Ils étaient tous civils, pour autant que je sache.
9 Mme MELIKIAN : [interprétation] J'aimerais que nous examinions le document
10 65 ter numéro 4415, dont je demande l'affichage.
11 Q. En première page de ce document -- et j'aimerais donner quelques mots
12 pour situer le contexte de ce document. C'est un rapport qui a été saisi au
13 quartier général de la Brigade de Bratunac par le bureau du Procureur en
14 février 1998. Et nous voyons en première page les mots suivants :
15 "Situation en Bosnie-Herzégovine avant la guerre." Il s'agit donc d'un
16 rapport chronologique détaillé des événements qui ont conduit à la guerre
17 et à la création de la Brigade de Bratunac.
18 Mme MELIKIAN : [interprétation] Je demande maintenant l'affichage de la
19 page 11 en version anglaise, page 10 de la version en B/C/S.
20 Q. Dans le paragraphe qui commence à peu près au milieu de la page et qui
21 s'intitule : "Description, caractéristiques et résultats des combats et
22 d'autres missions de combat exécutées par la brigade pendant son
23 existence." Nous allons donc examiner quelques passages de ce paragraphe.
24 Mme MELIKIAN : [interprétation] Je demande à présent l'affichage de la page
25 15 en anglais et page 14 en B/C/S.
26 Q. A peu près aux deux tiers de la page en version anglaise, correspondant
27 au sommet de la page en B/C/S, nous trouvons les mots suivants :
28 "Les Musulmans connaissaient la situation des Serbes, c'est la raison pour
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1 laquelle ils se sont pressés de lancer une nouvelle attaque pour s'emparer
2 de Kravica le plus rapidement possible. Ils avaient pour projet d'exécuter
3 le plus gros de leur attaque, l'aspect le plus décisif de cette attaque, à
4 Noël, à la date du 7 janvier 1993."
5 Un peu plus bas, nous voyons les mots suivants :
6 "Tôt le matin du 7 janvier 1993, à la veille de Noël, l'attaque sur Kravica
7 a été lancée à partir de plusieurs directions."
8 Mme MELIKIAN : [interprétation] J'aimerais maintenant que nous passions à
9 la page 17 de la version anglaise --
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai toujours pas trouvé le passage
11 dont vous venez de donner lecture dans la page que vous venez d'utiliser.
12 Mme MELIKIAN : [interprétation] Une seconde, je vous prie. Toutes mes
13 excuses, le passage se trouve ici. Dans le dernier tiers de la page en
14 anglais --
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, maintenant je vois. J'ai trouvé le
16 passage, 7 janvier, et cetera.
17 Mme MELIKIAN : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant voir
18 affichée la page 17 de la version anglaise, correspondant à la page 14 de
19 la version B/C/S, dont je demande l'affichage également.
20 Q. Le passage qui m'intéresse est le haut de la page anglaise, qui se
21 situe à peu près au milieu de la page en B/C/S. Nous voyons les mots
22 suivants :
23 "Les résultats désastreux subis par la population de Kravica à Noël 1993
24 ont été la mort de 35 personnes et le fait que 36 soldats et 11 civils ont
25 été blessés."
26 Donc l'Accusation défend la position selon laquelle ce rapport représente
27 de façon précise le nombre de victimes subies ce jour-là et que, donc, 35
28 soldats ont été tués et 11 civils tués. Conviendrez-vous que les chiffres
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1 évoqués dans ce passage du texte sont exacts, Monsieur Nikolic ?
2 R. Pour ma part, je sais qu'il existe un monument à Kravica aujourd'hui et
3 j'ai lu ce qui figurait sur ce document, 48 personnes, d'après ce que je
4 sais. Et il est indiqué, ce chiffre, sur le monument. Quarante-huit civils.
5 Je ne peux pas vous parler des soldats parce que je n'étais pas
6 présent là où ils se trouvaient. Mais aujourd'hui, sur ce monument, il est
7 écrit "victimes civiles, 48." C'est écrit là-bas. Quant aux soldats, je ne
8 sais vraiment pas. Je ne pourrais vous dire quoi que ce soit à ce sujet
9 parce que je n'étais pas sur les lieux. J'étais déjà là où je vous ai dit
10 avoir été, parce que c'était deux mois après. Pendant deux mois, on ne
11 pouvait pas entrer à Kravica parce que Naser tenait Kravica. Même les
12 oiseaux ne volaient plus là-bas. Toutes sortes de choses arrivaient aux
13 gens qui s'y trouvaient. Les têtes des gens étaient coupées. Et un membre
14 de ma famille a été décapité. Si son chien n'avait pas été là pour veiller
15 au grain, les oiseaux auraient mangé ses restes.
16 Je n'ai pas eu le courage de me rendre là-bas. Je ne sais pas combien
17 exactement. Je vois le chiffre inscrit sur le monument aujourd'hui au sujet
18 des victimes civiles.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je vous poser une question,
20 Monsieur le Témoin.
21 Est-ce que ce monument est votre seule source d'information quant au nombre
22 de personnes décédées, qui serait de 48, et quant au fait qu'il s'agirait
23 de civils ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Je vous remercie. Ça
26 suffit.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que --
28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous n'avez pas besoin d'expliquer. Je
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1 vous remercie.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Madame Melikian.
3 Mme MELIKIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Q. Monsieur Nikolic, j'ai encore deux questions à vous poser. Vous
5 rappelez-vous avoir témoigné avant votre témoignage d'aujourd'hui devant le
6 Tribunal en décembre 2004 dans l'affaire le Procureur contre Naser Oric ?
7 R. Oui.
8 Q. Aviez-vous été cité par l'Accusation dans l'affaire Oric ?
9 R. Je crois que oui. Il y a des gens qui sont venus de La Haye qui nous
10 ont préparés. Je crois que c'était ça, d'après mes souvenirs. Personne
11 d'autre ne m'a contacté.
12 Q. Je vous remercie. Je n'ai plus de questions à vous poser, Monsieur.
13 Mme MELIKIAN : [interprétation] Je n'ai plus de questions pour le témoin,
14 Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame Melikian.
16 Des questions supplémentaires ? Non.
17 Eh bien, Monsieur Nikolic, les Juges de la Chambre n'ont pas non plus
18 d'autres questions à vous poser, ce qui signifie que nous sommes parvenus à
19 la fin de votre déposition devant la présente Chambre. La Chambre vous
20 remercie de tout cœur d'avoir couvert une distance aussi importante pour
21 venir jusqu'à La Haye et répondre aux questions qui vous ont été posées par
22 les parties et par les Juges de la Chambre. Je vous souhaite à présent un
23 bon retour à votre domicile. Vous pouvez sortir de la salle en suivant M.
24 l'Huissier.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.
26 [Le témoin se retire]
27 Mme MELIKIAN : [interprétation] Monsieur le Président, Mme Hasan peut-elle
28 être excusée [comme interprété] ?
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes excusées.
2 Vous n'avez pas demandé le versement au dossier du dernier document,
3 Madame Melikian. Vous en êtes consciente ?
4 Mme MELIKIAN : [interprétation] En effet. Je ne l'ai pas fait.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.
6 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, nous essayons de
8 déterminer si le témoin suivant, qui, si je ne m'abuse, est M. Vujic --
9 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- nous essayons de déterminer s'il est
11 déjà arrivé, parce qu'il était attendu à 11 heures et demie, mais il est
12 peut-être arrivé un peu plus tôt.
13 M. LUKIC : [interprétation] Nous avons demandé au service compétent de le
14 faire venir un peu plus tôt car nous avons appris qu'il n'y aurait pas de
15 nombreuses questions de la part de l'Accusation pour le témoin précédent.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons attendre et voir ce qui se
17 passe.
18 M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec, c'est vous qui allez
20 contre-interroger le témoin ?
21 M. ZEC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
23 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Vujic.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous ne commenciez votre
27 déposition, le Règlement de ce Tribunal vous impose de prononcer une
28 déclaration solennelle dont le texte vous est tendu en ce moment. Je vous
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1 invite donc à prononcer cette déclaration solennelle.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
3 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
4 LE TÉMOIN : DRASKO VUJIC [Assermenté]
5 [Le témoin répond par l'interprète]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Vujic. Vous pouvez vous
7 asseoir.
8 Monsieur Vujic, vous allez d'abord être interrogé par Me Lukic, que vous
9 voyez sur votre gauche, et qui va se lever dans un instant. Me Lukic est
10 conseil de la Défense de M. Mladic.
11 Veuillez procéder, Maître Lukic.
12 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Je demanderais à M. l'Huissier de bien vouloir remettre le texte de sa
14 déclaration préalable sur papier à M. Vujic.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une copie vierge, n'est-ce pas, où
16 seul figure le texte, Maître Lukic ?
17 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eprouvez-vous le besoin de le vérifier,
19 Monsieur Zec ?
20 M. ZEC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le texte peut être remis au témoin.
22 Interrogatoire principal par M. Lukic :
23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vujic.
24 R. Bonjour, Maître Lukic.
25 Q. Dans l'intérêt du compte rendu d'audience, veuillez décliner lentement
26 vos nom et prénom.
27 R. Vujic, Drasko.
28 Q. Monsieur Vujic, avez-vous à un certain moment fait une déclaration
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1 devant les représentants de l'équipe de Défense de M. Karadzic ?
2 R. Oui.
3 M. LUKIC : [interprétation] Je demande l'affichage sur nos écrans du
4 document 1D0502516.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, Maître Lukic. Combien,
6 0502516 ?
7 M. LUKIC : [interprétation] J'ai commis une erreur. Excusez-moi. 1D02516.
8 Il faut afficher la dernière page. Puisqu'il s'agit de la déclaration qui a
9 été faite dans l'affaire Karadzic, il n'y a pas de signature sur la
10 première page du document.
11 Q. Monsieur Vujic, à la dernière page de votre déclaration qui est
12 affichée à l'écran devant vous, reconnaissez-vous la signature ?
13 R. Oui, c'est ma signature.
14 Q. Avez-vous eu l'occasion de parcourir votre déclaration ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce que ce qui a été consigné dans cette déclaration a été consigné
17 d'une façon correcte par rapport à ce que vous avez dit à l'époque ?
18 R. Oui.
19 Q. Monsieur Vujic, est-ce que ce qui a été consigné dans cette déclaration
20 est véridique, est-ce que cela est conforme à la vérité ?
21 R. Oui. Tout ce que j'ai dit, tout ce que j'ai déclaré est conforme à la
22 vérité.
23 Q. Si je vous posais aujourd'hui les mêmes questions, est-ce que vous me
24 répondriez de la même façon, comme vous avez répondu à des questions qui
25 vous ont été posées au moment où vous avez fait cette déclaration ?
26 R. Oui, je répondrais essentiellement de la même façon.
27 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous demandons le
28 versement au dossier de la déclaration de M. Vujic.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, la
3 déclaration reçoit la cote D1041.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et est versée au dossier.
5 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais donner
6 lecture maintenant du résumé de la déclaration de ce témoin, de M. Vujic,
7 et je vais lui poser des questions par la suite.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.
9 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
10 Drasko Vujic a été mobilisé à la fin de l'année 1991 et a été envoyé en
11 tant que membre du 5e Bataillon de la 343e Brigade de la JNA en Slavonie,
12 où il est resté 45 jours. Ensuite, il est retourné à Prijedor. Et quand la
13 crise à Prijedor a éclaté, il a commencé à créer une unité composée des
14 gens de la communauté locale de Prijedor 2, de la région d'Urije.
15 Cette unité était composée d'à peu près 900 à 1 200 hommes, dont beaucoup
16 étaient des non-Serbes qui ont rejoint les rangs de cette unité de leur
17 gré.
18 Dans la matinée du 30 mai 1992, des unités musulmanes armées ont attaqué
19 les soldats de M. Vujic d'un parc situé entre deux passages souterrains et
20 également d'une entreprise qui se trouvait à la proximité. L'un des soldats
21 a été tué lors de cette attaque, alors que les autres ont réagi à cette
22 attaque surprise et opposé une résistance. Pendant ce conflit, les
23 Musulmans ont ouvert le feu sur une ambulance qui était en route pour la
24 ville et ont grièvement blessé son chauffeur. Après une heure de combat,
25 les unités musulmanes ont été repoussées et se sont retirées dans la
26 direction de la Sana.
27 Pendant ce combat, un soldat ennemi a été capturé. Il portait un uniforme
28 de camouflage, il avait un bandana de couleur verte, une coupe de cheveux
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1 de style Cherokee et des symboles islamiques. Après qu'il ait dit que
2 Prijedor était attaquée de plusieurs groupes armés de différentes
3 directions, le prisonnier a été escorté jusqu'à la garnison et a été remis
4 aux organes de la sécurité.
5 Après cet épisode, le bataillon n'a pas participé au cours des opérations
6 de combat avant le mois de septembre 1992, où la plupart du bataillon était
7 envoyé sur la ligne de front à Gradacac, et un petit nombre de soldats du
8 bataillon recevaient pour tâche de nettoyer le mont Kurevo, où étaient
9 basées des unités musulmanes. L'un des soldats qui a pris part au combat à
10 Kurevo a été blessé, alors qu'un autre soldat s'est fait tuer.
11 Pendant l'été 1992, les patrouilles du bataillon étaient présentes dans la
12 proximité de la mosquée à Puharska, au moment où la mosquée a été détruite
13 dans une explosion. M. Vujic a en personne aidé des gens qui étaient
14 blessés, et parmi ces gens il y a un homme musulman qu'il a mis dans sa
15 voiture et a emmené à l'hôpital, où il a reçu un traitement médical. Les
16 soldats qui faisaient partie de la patrouille étaient en état de choc et
17 ont subi des dommages au niveau de l'ou?e. M. Vujic a fait tout qui était
18 possible pour réconforter les habitants de Puharska et pour prévenir
19 d'autres tentatives de les importuner.
20 En 1992, les unités paramilitaires serbes diverses déambulaient dans la
21 municipalité de Prijedor, en causant de gros problèmes à des Musulmans et à
22 des Serbes. M. Vujic en personne a arrêté un membre de l'unité Suva Rebra,
23 l'une des formations paramilitaires actives dans la région de Prijedor. Un
24 soldat de cette unité paramilitaire a été désarmé, ligoté et par la suite
25 escorté dans la prison à Gradiska.
26 En 1995, il est devenu membre du SDS, et par la suite il est devenu vice-
27 président du conseil municipal et député à l'assemblée municipale pour un
28 mandat.
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1 C'était le résumé de la déclaration de ce témoin, Monsieur le Président, et
2 maintenant je vais probablement poser quelques questions -- est-ce qu'il
3 est venu le moment propice pour faire la pause déjà ?
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non.
5 M. LUKIC : [interprétation] Bien. Dans ce cas-là, je vais poser mes
6 questions, avec votre autorisation, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y. Puisque nous avons encore 20
8 minutes avant la pause.
9 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
10 Je vais commencer par un document qui a été proposé en tant que pièce
11 connexe qui n'est pas reliée à la déclaration, et il a été téléchargé dans
12 notre système sous le numéro 1D04952.
13 Q. Monsieur Vujic, nous voyons à l'écran un document qui ne dispose pas de
14 traduction. Je vais vous demander de nous lire le titre de ce document.
15 R. "Liste des personnes d'appartenance ethnique non serbe qui étaient
16 membres du 3e Bataillon motorisé."
17 Q. Pouvez-vous nous lire également ce qui figure dans la ligne suivante où
18 sont indiqués les titres des colonnes. Pouvez-vous lire cela, s'il vous
19 plaît.
20 R. Dans la première ligne, on voit le "nombre ordinal"; ensuite, dans la
21 deuxième colonne, "prénom, prénom de père, nom de famille" de chaque membre
22 de l'unité; troisième colonne, "l'année de sa naissance"; quatrième
23 colonne, période pendant laquelle ce membre était dans l'unité à partir du
24 début jusqu'à la fin de sa participation aux activités de l'unité pour ce
25 qui est de chacun de ces individus.
26 Q. Monsieur Vujic, qui a rédigé ce document ?
27 R. Ce document a été rédigé par moi, et je me suis appuyé sur la base de
28 données dont je dispose toujours concernant la participation des
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1 combattants qui faisaient partie du 3e Bataillon motorisé.
2 Q. Il nous est facile de comprendre la teneur de la colonne où il y a le
3 numéro ordinal et également la colonne où on voit le prénom, le prénom de
4 père et le nom de famille du membre. Dans la dernière colonne, où on voit
5 indiqué "la période de l'engagement" de chaque membre du bataillon, pouvez-
6 vous nous dire comment inscriviez-vous les données dans cette colonne ?
7 R. Dans notre registre militaire, tous les membres de l'unité, au moment
8 où il a été enregistré, la date de l'enregistrement est inscrite, et dans
9 la deuxième partie de la même colonne on voit la date de son départ de
10 l'unité.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Puis-je poser une question à ce
12 moment, Maître Lukic.
13 Monsieur Vujic, si vous regardez ce qui figure au numéro 21, vous allez
14 voir qu'il y a un nom, et nous voyons que cette personne a rejoint les
15 rangs de l'armée le 6 juillet 1993 et qu'il est parti de l'armée à la même
16 date. Comment expliquez-vous cela ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce cas-là, il est évident que ce soldat a
18 été envoyé par le ministère au 3e Bataillon. Une fois arrivé à l'unité, il
19 a remis le document qui l'exempte du service dans l'unité. Et sur la base
20 de ce document d'exemption du service militaire, il a pu revenir chez lui
21 le même jour.
22 Donc il a fait respecter la décision du ministère qui l'a envoyé à l'unité.
23 Et moi, en tant que commandant, sur la base du document présenté par ce
24 membre, je l'exempte du service militaire, et il a pu retourner chez lui.
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
26 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
27 Q. Monsieur Vujic, quelles sont les raisons pour lesquelles des membres de
28 votre unité ont cessé d'être engagés au sein de votre unité ?
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1 R. Ici, on voit plusieurs raisons de la cessation de leur engagement. Dans
2 ce document, on voit que ces personnes étaient engagées du premier au
3 dernier jour à l'unité. On voit que certains d'entre ces personnes étaient
4 membres du premier jour. Mais un ou deux ans avant la fin, ils ont quitté
5 l'unité, et cela était possible si un membre de l'unité était réaffecté
6 dans une autre unité à cause d'une autre spécialité. Il est possible que
7 certains membres étaient tombés malades pendant cette période de temps ou
8 étaient blessés. Malheureusement, il y en a eu qui se sont fait tuer. Il y
9 avait également d'autres raisons pour lesquelles certains membres de
10 l'unité ont quitté l'unité avant la fin.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous poser une question
12 concernant les dates que vous avez mentionnés. Est-ce que ce sont les dates
13 inscrites ici sur la base des documents administratifs, ou est-ce que vous
14 avez procédé à la vérification pour savoir si ces personnes se trouvaient
15 en service pendant cette période de temps-là ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai rédigé cela sur la base des
17 documents officiels du bataillon. Le bataillon tenait le registre qui
18 s'appelait VOB-8, où on peut trouver ces dates, et ces dates doivent
19 correspondre aux dates dans le registre VOB-8 qui est remis au ministère.
20 Il ne devrait pas y avoir une discordance entre ces deux registres.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends qu'il ne devrait pas y
22 avoir de différence, mais est-ce que vous avez vérifié s'il y avait des
23 différences ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Etant donné que je dispose d'une copie du VOB-
25 8 concernant l'engagement de tous les membres du bataillon, pas dans le
26 registre original du VOB-8 mais dans une copie, je l'ai recopié, en fait,
27 avant sa remise. Et lorsqu'on procédait à parcourir le statut de tous ces
28 soldats et d'autres membres du bataillon - et il y avait 3 540 membres du
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1 bataillon pendant toute la durée de la guerre - personne d'entre ces
2 soldats n'avait aucune objection concernant ce registre officiel contenu
3 dans le registre VOB-8.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais tout ceci a été inscrit sur la base
5 des documents administratifs ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le seul document, ce VOB-8, qui soit le
7 document valide. Et pour ce qui est des unités subordonnées et des chefs de
8 ces unités subordonnées, ils sont tous d'accord pour dire que tout est
9 correctement inscrit dans ce registre.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Lukic.
11 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Q. Monsieur Vujic, concernant ces personnes, est-ce que vous les
13 connaissiez en personne ? Et pour certains de ces individus, est-ce que
14 vous savez s'ils étaient membres de votre unité ?
15 R. Oui. Je connaissais la plupart d'entre ces personnes. Je les
16 connaissais en personne. Il y avait un petit nombre d'entre ces membres de
17 l'unité que je ne connaissais pas leur prénom ni leur nom de famille, mais
18 j'ai une bonne mémoire et je me souviens d'eux. Mais j'ai oublié les noms
19 et les prénoms de certains d'entre eux. Il y avait un Bataillon des
20 Travailleurs qui a été rattaché à mon unité pendant une courte période de
21 temps, peut-être pendant 30 ou 45 jours, au maximum 60 jours. Pour ce qui
22 est des membres de ce Bataillon des Travailleurs, je peux dire que je ne
23 connais pas tous les membres.
24 Q. Merci. Nous voyons que dans cette colonne, dans la deuxième partie, on
25 voit l'année 1996 pour ce qui est de toutes les personnes concernées. On ne
26 voit pas de date de l'année 1997 ou 1998. Pouvez-vous nous dire pourquoi,
27 pour ce qui est de tous ces membres, la date de cessation de service est
28 l'année 1996 ?
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1 R. Dans cette colonne, on voit que 1996 était l'année où l'unité a cessé
2 de fonctionner. En 1996, il y a eu la démobilisation de la plupart des
3 combattants, presque de tous les combattants. Je peux dire en tant que
4 commandant de l'unité qu'il n'est resté qu'un petit nombre de personnes qui
5 étaient mes assistants pour s'occuper de l'inventaire des moyens techniques
6 et compléter les registres que nous devions remettre au commandant de la
7 brigade. Et tous les autres étaient démobilisés à ce moment-là.
8 Q. D'où provenaient ces membres de votre bataillon ainsi que d'autres
9 membres de votre bataillon ? De quelle région ?
10 R. Il s'agit des membres qui provenaient principalement de la zone d'où
11 provenaient des gens qui complétaient cette unité, à savoir d'Urije, de
12 Puharska, d'Orlavaca, d'Orlovci, de Garevci et de Cirkin Polje, toutes ces
13 communautés locales. Il y avait peu de gens qui provenaient d'autres
14 secteurs de la municipalité qui faisaient partie de cette unité. La plupart
15 des membres de l'unité provenaient des communautés locales que je viens
16 d'énumérer.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, tout cela se trouve dans
18 la déclaration. Poursuivez. Donc tout cela se trouve dans le paragraphe
19 numéro 1 de la déclaration.
20 Continuez, Maître Lukic.
21 M. LUKIC : [interprétation]
22 Q. Monsieur Vujic, où étaient les membres de famille des membres de votre
23 unité qui n'étaient pas d'appartenance ethnique serbe ?
24 R. Etant donné qu'ils provenaient de cette zone que je viens de
25 mentionner, leurs familles vivaient dans leurs maisons. Leurs familles ne
26 partaient nulle part. Ils sont avec nous. Les membres de leurs familles
27 disaient au revoir à l'unité, appuyaient l'unité et partageaient avec nous
28 tous les bons et les mauvais moments de la vie.
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1 Q. Quel était le rapport des membres de votre unité envers les membres de
2 votre unité qui n'étaient pas d'appartenance ethnique serbe ?
3 R. Dans cette unité, il n'y avait aucune différence entre les combattants
4 serbes et les combattants d'autre appartenance ethnique. Nous partions sur
5 le front ensemble, nous retournions ensemble sur le front, nous partagions
6 le même destin. Nous dormions dans les mêmes tranchées, nous mangions la
7 même nourriture, nous buvions les mêmes boissons. Et dans des moments de
8 crise, il y avait des événements qui peuvent faire partie d'une histoire de
9 guerre qui dit que des combattants aidaient d'autres combattants. Il n'y
10 avait donc aucune différence entre les membres du bataillon qui appartenait
11 à divers groupes ethniques.
12 Q. Merci, Monsieur Vujic.
13 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, il est temps de faire la
14 pause. Mais avant cela, je propose que ce document soit versé au dossier
15 avec une cote aux fins d'identification puisque ce document n'a pas été
16 traduit jusqu'ici.
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Peut-on voir la dernière page du
18 document ?
19 M. LUKIC : [interprétation] Oui. C'est la troisième page. Non, c'est la
20 quatrième page. C'est la dernière page du document.
21 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc, sur la liste, c'est le numéro
22 133, n'est-ce pas ?
23 M. LUKIC : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, donnez-nous une
26 cote.
27 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La cote sera D1042.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D1042 est versé -- non, obtient une cote
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1 aux fins d'identification en attendant sa traduction.
2 Monsieur Zec, vous n'avez pas d'objection au versement ?
3 M. ZEC : [interprétation] Non.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.
5 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il est venu
6 le moment propice pour faire la pause.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, nous avons encore cinq minutes
8 avant la pause. Mais si vous trouvez que le moment est opportun pour faire
9 la pause, nous pouvons faire la pause maintenant.
10 M. LUKIC : [interprétation] Oui, puisque je vais aborder un autre sujet.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. C'est une bonne raison pour faire
12 la pause maintenant.
13 Monsieur Vujic, nous allons faire une pause de 20 minutes. Vous pouvez
14 suivre M. l'Huissier pour quitter le prétoire. Et nous aimerions vous
15 revoir dans le prétoire après la pause.
16 [Le témoin quitte la barre]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre à 12 heures 10.
18 --- L'audience est suspendue à 11 heures 50.
19 --- L'audience est reprise à 12 heures 15.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, Monsieur Mladic,
21 s'il vous plaît, concentrez-vous sur ce qui se passe dans la salle
22 d'audience plutôt que dans la galerie publique.
23 M. LUKIC : [interprétation] Messieurs les Juges, avant que l'on ne fasse
24 entrer le témoin, je tiens tout simplement à informer les Juges de la
25 Chambre que nous avons maintenant préparé une traduction pour la pièce
26 D1042.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et il s'agissait de --
28 M. LUKIC : [interprétation] Il s'agit de la liste.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La liste. Oui. Monsieur Zec, vous n'avez
2 pas soulevé d'objection.
3 Par conséquent, Madame la Greffière, veuillez ajouter la traduction
4 anglaise à la pièce D1042, et cette pièce est maintenant admise au dossier.
5 [Le témoin vient à la barre]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'imagine que vous êtes en mesure de
7 nous citer la cote de la traduction anglaise. Sinon, la Défense vous en
8 informera.
9 Vous pouvez poursuivre, Maître Lukic.
10 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Monsieur Vujic, pouvons-nous continuer ?
12 R. Oui.
13 Q. Veuillez vous pencher sur le paragraphe 6 de votre déclaration
14 préalable, s'il vous plaît. Le paragraphe 6 figure à la page 2.
15 Dans ce paragraphe de votre déclaration préalable, vous indiquez qu'avant
16 les combats et avant le ratissage du terrain, vous avez proposé à la
17 Défense territoriale des Musulmans de rendre leurs armes pour éviter des
18 conflits superflus. Le voyez-vous ?
19 R. Oui, je le vois.
20 Q. Où êtes-vous allé ? Et d'abord : êtes-vous allé quelque part pour
21 entamer des négociations sur le sujet ?
22 R. J'ai insisté à plusieurs reprises pour que l'on organise une réunion
23 entre les dirigeants des deux parties. Je souhaitais que nous nous
24 rencontrions d'une façon humaine pour étudier la situation et trouver la
25 meilleure solution possible. Je n'hésitais pas à me rendre sur le
26 territoire contrôlé par eux, si cela s'avérait nécessaire. Et l'une de nos
27 réunions s'est tenue dans le QG de leur Défense territoriale même. C'est là
28 que nous nous sommes rencontrés et c'est là que nous avons entamé une
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1 discussion pour voir de quelle façon nous pouvions arranger la situation de
2 façon à éviter toute perte de civils ou de nouveaux conflits.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous êtes-vous adressé aux Serbes
4 également pour que ceux-ci remettent leurs armes avec ce même but, à savoir
5 celui d'éviter des conflits superflus ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, les Serbes avaient formé une unité de
7 guerre qui, par ailleurs, était ouverte aux représentants des Musulmans
8 avec qui je négociais. Les portes de cette unité étaient ouvertes à tout le
9 monde, et c'est pourquoi je suis allé parler à tous ceux qui ne
10 souhaitaient pas rejoindre les rangs de l'unité officielle et je leur ai
11 demandé de rendre leurs armes pour éviter une guerre avec eux.
12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais dans ce paragraphe, on ne dit pas
13 que vous avez contacté les personnes qui ne souhaitaient pas rendre leurs
14 armes. Il est indiqué que vous avez, en fait, contacté la Défense
15 territoriale musulmane.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, et cela correspond à la vérité. J'ai
17 contacté leurs supérieurs hiérarchiques, leurs officiers qui répondaient
18 d'eux et de ce qu'ils faisaient sur place, puisqu'ils ne faisaient
19 qu'exécuter les ordres des personnes avec qui j'ai négocié.
20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais la TO était une unité qui elle
21 aussi avait pour objectif de protéger la communauté. Or, vous dites que les
22 Serbes faisaient partie de l'armée et c'est pourquoi vous n'êtes pas allé
23 les voir et leur parler.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais compte tenu du fait qu'il s'agissait ici
25 d'un conflit interethnique, la Défense territoriale perd tout son sens, à
26 moins d'avoir deux parties opposées qui alors ont deux Défenses
27 territoriales. Mais s'il s'agit de créer une unité officielle qui
28 rassemblerait tout le monde et qui exécuterait les ordres des commandants
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1 supérieurs et des officiers de l'armée officielle, alors il était superflu
2 d'avoir une Défense territoriale. Mais ce n'est pas ce qui s'est produit.
3 La plupart de ces gens se sont vu attribuer des tâches à l'intérieur des
4 instances officielles, mais ils ont refusé de s'y conformer. Ils ont plutôt
5 choisi de tenir compte de l'appel lancé par le ministre de la Défense à
6 l'époque où il invitait tous les conscrits à ne pas répondre à l'appel à la
7 mobilisation qui leur a été adressé et à ne pas rendre leurs armes.
8 Et puisque ces gens-là existaient et que cela posait problème, c'est
9 pourquoi j'ai essayé d'arriver à une sorte d'accord avec eux pour éviter un
10 conflit.
11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
12 Maître Lukic, vous pouvez poursuivre.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aurais une question de suivi qui
14 concerne elle aussi le paragraphe 6.
15 Vous dites que certains d'entre eux ont rendu des armes qui étaient surtout
16 des armes de type civil. Qu'est-ce que vous entendez par "ces armes de type
17 civil" ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, les gens qui étaient conscients du
19 fait que tout conflit armé aurait des conséquences désastreuses ont accepté
20 de rendre --
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous demande ce
22 que vous entendiez par le terme "les armes de type civil". Donc, qu'est-ce
23 que cela représente ? Pensez-vous aux fusils de chasse ou…
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense aux fusils de chasse ainsi qu'aux
25 pistolets civils, équipés de munitions qui n'étaient pas militaires. Tout
26 ce qui n'appartient pas à l'armée fait partie des armes civiles, des armes
27 possédées par des civils.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et les Serbes avaient-ils aussi
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1 l'obligation de remettre leurs fusils de chasse et leurs pistolets non
2 militaires ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ils n'étaient pas obligés de le faire, et
4 je ne leur ai jamais demandé de le faire.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si tel est le cas, je dois vous demander
6 pour quelle raison les personnes qui possédaient des fusils de chasse et
7 qui étaient d'appartenance ethnique musulmane et croate étaient censées
8 être dépourvues de leurs armes, alors que les Serbes pouvaient toujours
9 continuer à pratiquer la chasse ? Pour quelle raison en était-il ainsi ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je ne leur ai jamais demandé de remettre
11 leurs armes civiles. Je leur ai demandé de remettre des armes de type
12 militaire et toutes les armes qu'ils avaient obtenues par le biais du parti
13 ou par quelque autre moyen clandestin. Il y avait, par exemple, un grand
14 nombre de fusils, puisque j'ai appris par le biais des organes chargés du
15 renseignement le nombre exact de fusils qui étaient arrivés dans la région,
16 et c'est la raison pour laquelle j'exerçais une pression sur ces gens pour
17 qu'ils soient raisonnables et de remettre toutes ces armes, en leur
18 promettant qu'ils ne seraient absolument pas attaqués, qu'ils ne subiraient
19 pas de mauvais traitements et que nous allions continuer à vivre ensemble
20 normalement.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au paragraphe 6 de votre déclaration
22 préalable, vous ne dites pas que vous leur avez demandé de remettre leurs
23 armes militaires. Vous dites tout simplement qu'ils étaient censés rendre
24 leurs armes. Et dans la phrase suivante, vous dites qu'un certain nombre
25 d'entre eux ont écouté votre appel en rendant des armes, et surtout des
26 armes civiles. Alors, si je vous ai bien compris, en fait, ce ne sont pas
27 ces armes civiles qui vous intéressaient, mais seulement des armes
28 militaires. Vous ai-je bien compris ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez très bien compris. Je n'ai pas
2 insisté pour qu'on remette des armes de type civil. Moi, je croyais qu'ils
3 allaient remettre leurs armes militaires, les armes qui provenaient de la
4 TO et de la police de réserve. Mais voilà --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends. Mais en même temps, vous
6 dites qu'ils ont remis surtout des armes civiles. Donc, apparemment, vous
7 ne leur avez pas indiqué explicitement que ces armes-là ne vous
8 intéressaient pas. Vous les avez tout simplement acceptées. Vous ai-je bien
9 compris ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez bien compris. Nous avons reçu tout
11 ce qu'ils ont amené, puisqu'ils nous avaient remis ces armes à titre
12 volontaire. Les gens qui ont remis les armes les ont remises parce que
13 n'importe quel type d'arme aurait pu leur causer des problèmes. Ces gens-là
14 souhaitaient préserver la paix et c'est pourquoi ils rendaient même leurs
15 armes civiles, alors que les autres qui souhaitaient s'engager dans un
16 conflit n'ont pas rendu même leurs armes militaires.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais les Juges de la Chambre se
18 sont vu présenter un nombre important d'éléments de preuve concernant les
19 Musulmans et les Croates, concernant en tout cas des civils non serbes, et
20 les demandes qui leur ont été adressées pour rendre leurs armes. Et d'après
21 ces éléments de preuve, on leur demandait de rendre leurs armes, quelles
22 qu'elles soient, alors que vous dites autre chose. Avez-vous une
23 explication à fournir pourquoi des approches aussi différentes ont-elles
24 été adoptées ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais personnellement, je ne pensais pas que
26 les gens qui possédaient des fusils de chasse représentaient un danger. Je
27 ne pensais pas que ceux qui possédaient des pistolets civils représentaient
28 une menace. Je pensais que le danger venait des unités organisées qui
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1 étaient issues de l'ancienne TO et de la police de réserve --
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, mis à part votre point de vue
3 personnel sur la chose, je vous pose maintenant une question factuelle très
4 claire : avez-vous demandé que toutes les armes soient rendues ou avez-vous
5 précisé qu'il ne s'agissait que de rendre des armes militaires ? Donc, en
6 laissant de côté votre point de vue sur la dangerosité de ces armes,
7 lorsque vous leur avez demandé de rendre les armes, avez-vous demandé
8 qu'ils rendent toutes les armes ou seulement des armes militaires ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, nous nous servions du termes
10 "armes" ou "armement", "naroujang" [phon]. Alors, certains ont cru que cela
11 se rapportait à toutes les armes possibles, mais j'ai essayé de vous
12 expliquer tout à l'heure que ce qui représentait un danger potentiel,
13 c'était surtout les armes militaires, les armes que des gens avaient reçues
14 par le biais de leur parti politique et de façon clandestine.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur, je vais vous interrompre. Donc
16 vous leur avez demandé de rendre leurs armes sans préciser qu'il ne fallait
17 rendre que des armes de type militaire. Vous ai-je bien compris ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous m'avez bien compris.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Une question de suivi, s'il vous
21 plaît.
22 Pouvez-vous nous préciser les dates ? Au paragraphe 6, je ne vois pas
23 de date qui serait indiquée. A quel moment tout cela s'est-il passé ? A
24 quel moment vous avez demandé à la Défense territoriale musulmane de rendre
25 les armes et à quel moment avez-vous entamé les négociations avec le
26 représentant ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, je n'ai pas mon carnet de
28 notes ici. Si je l'avais sous les yeux, j'aurais pu vous donner les noms et
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1 les dates d'une façon très exacte. Mais sans mes notes, tout ce que je peux
2 vous dire, c'est que cela s'est passé un mois ou un mois et demi avant le
3 30 mai, donc avant l'attaque contre Prijedor.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Cela me suffit.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, mais j'ai une autre
6 question de suivi.
7 Compte tenu du fait que vous souhaitiez éviter un conflit et rassurer les
8 Musulmans que vous aviez invités à rendre les armes et leur montriez que
9 vous aviez des intentions pacifiques, avez-vous demandé aux Serbes de
10 rendre eux aussi leurs armes - et là, je parle des armes militaires -
11 puisque vous souhaitiez que les Musulmans vous rendent leurs armes
12 militaires ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas demandé aux Serbes de rendre
14 leurs armes militaires.
15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, vous pouvez poursuivre.
17 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Q. Nous allons revenir sur la phrase que nous avons sous les yeux en ce
19 moment, Monsieur Vujic. Vous dites :
20 "Sur une proposition de ma part adressée à la TO, c'est-à-dire à la Défense
21 territoriale musulmane, celle-ci s'est vu offrir l'occasion de rendre ses
22 armes."
23 Est-ce que la TO disposait des armes civiles ou militaires ?
24 R. La Défense territoriale musulmane disposait exclusivement des armes de
25 type militaire.
26 Q. Par conséquent, lorsqu'on demande à la Défense territoriale de rendre
27 les armes, est-il vraiment nécessaire, d'après vous, de préciser que cela
28 se réfère uniquement à des armes de type militaire ? Ne suffit-il pas de
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1 dire que la TO doit rendre ses armes ?
2 R. A l'époque, il me semblait, et même aujourd'hui je le crois toujours,
3 qu'il suffisait de dire tout simplement à la Défense territoriale qu'elle
4 devait rendre ses armes.
5 Q. Merci. Nous avons vu il y a quelques instants un document, pour lequel
6 maintenant nous avons une traduction, et qui concernait les non-Serbes qui
7 ont rejoint les rangs des unités officielles. Ces non-Serbes - c'est-à-
8 dire, ces Musulmans, ces Ukrainiens, ces Rom, ces Croates - est-ce qu'ils
9 se sont vu accorder des armes, et si oui, de quel type ?
10 R. Tous ceux qui ont répondu à l'appel à la mobilisation et qui se sont
11 présentés dans leur unité de guerre ont reçu des armes prévues par les
12 règlements ainsi que tout l'équipement nécessaire. Donc ils avaient leur
13 complet militaire et leurs armes, tels que prévus par les règlements pour
14 le temps de guerre et pour le fonctionnement des unités en temps de guerre.
15 Q. A cette époque, Monsieur Vujic, c'est-à-dire un mois ou un mois et demi
16 avant l'attaque lancée contre Prijedor, la Défense territoriale avait-elle
17 l'obligation de rendre les armes en sa possession aux unités militaires
18 compétentes ? Vous en souvenez-vous ?
19 R. Eh bien, je ne sais pas si un document officiel à cet effet existait ou
20 un ordre des supérieurs hiérarchiques. Mais ce que je sais, c'est que la
21 Défense territoriale n'était plus censée pouvoir fonctionner. Ce qui s'est
22 produit, c'est que tout simplement la Défense territoriale a éclaté en deux
23 et ce, en fonction des principes ethniques. Et il aurait été souhaitable de
24 désarmer les uns et les autres et de les placer sous un commandement
25 unique. C'était l'objectif que nous visions. Ceux qui ne souhaitaient pas
26 réaliser les ordres donnés par le commandement devaient rendre leurs armes.
27 Ceux qui souhaitaient obéir au commandement supérieur se voyaient octroyer
28 des armes et se voyaient confier des missions en même temps que nous et
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1 dans les mêmes conditions.
2 Q. A un moment donné, avez-vous intégré la TO serbe dans les rangs de
3 l'armée; autrement dit, avez-vous traité les membres de la TO de la même
4 façon, en leur disant qu'ils ne pouvaient pas continuer à fonctionner en
5 dehors des unités militaires ?
6 R. Mais oui, bien évidemment. La Défense territoriale serbe a assez
7 rapidement été assimilée et intégrée à l'unité militaire qui devait
8 fonctionner en temps de guerre. Il y avait un petit nombre d'individus qui
9 ont refusé de rejoindre les rangs de l'unité de guerre, mais à ce moment-là
10 ils ont rendu leurs armes et ne faisaient plus partie d'aucune unité quelle
11 qu'elle soit. Ces personnes n'étaient plus enregistrées. Mais tous ceux qui
12 ont été mobilisés dans les rangs de l'unité de guerre et qui souhaitaient
13 participer aux opérations de l'unité se sont vu octroyer des armes, et ces
14 armes différaient d'une mission à l'autre qui leur était confiée. Et tout
15 cela avait été fait conformément aux règlements en vigueur.
16 Q. Merci.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de poser une question pour
18 préciser.
19 Est-ce que les unités de la TO étaient subordonnées aux unités prévues pour
20 le temps de guerre ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas ce qui se passait de façon
22 générale, mais dans ma zone, à cette époque-là, j'ai demandé aux Musulmans
23 de soit rejoindre les rangs de notre unité, soit de remettre les armes,
24 alors que la Défense territoriale serbe avait déjà été dissimulée à hauteur
25 de 90 %, disons. Donc elle a été intégrée à l'unité de guerre et, de fait,
26 n'existait plus.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et, par conséquent, l'ancienne TO
28 s'est vue subordonnée au commandement de l'unité de guerre, si je vous ai
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1 bien compris.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous m'avez très bien compris.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et sur la base de quoi avez-vous reçu
4 l'ordre de subordonner les unités de la TO et pour quelle raison avez-vous
5 décidé que les unités de la TO ne pouvaient pas continuer à fonctionner
6 indépendamment et qu'elles devaient être subordonnées ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Après être revenu du théâtre de guerre en
8 Slavonie occidentale sur un ordre du commandant, j'ai reçu l'ordre
9 d'organiser une unité et de placer sous mon contrôle tous les effectifs et
10 toutes les armes disponibles. C'était notre objectif de base et notre seul
11 objectif, quel que soit l'âge des personnes concernées.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous n'écoutez pas
13 attentivement la question que je vous pose. Ma question était la suivante :
14 sur la base de quoi avez-vous décidé -- ou, plutôt, non, terminez d'abord
15 votre réponse, puis j'aurais peut-être une autre question de suivi.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur un ordre du commandant de la brigade,
17 j'étais censé, comme la situation était chaotique - que les Serbes aussi
18 bien que les Musulmans qui étaient venus en contact avec les armes de la
19 Défense territoriale avaient gardé ces armes - nous avions l'objectif de
20 placer ces armes sous contrôle d'une unité militaire. Et j'ai vraiment
21 travaillé jour et nuit pour réaliser cet objectif. Et je dois dire que
22 j'avais un taux de réussite important.
23 Les négociations que nous avons menées étaient une autre façon d'essayer de
24 persuader ceux qui ont refusé de rendre les armes de rejoindre les rangs de
25 notre unité ou alors de rendre leurs armes.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous sortez du cadre de la question que
27 je vous ai posée. Donc c'est sur un ordre du commandement de la brigade que
28 vous avez subordonné à vous la Défense territoriale et ses armes, que vous
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1 avez subordonné la Défense territoriale à votre unité de guerre ?
2 Monsieur Mladic, vous ne devez pas vous exprimer à haute voix, s'il vous
3 plaît.
4 Monsieur le Témoin, veuillez répondre à ma question, s'il vous plaît.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas compris votre question. Vous avez
6 émis un commentaire. Vous avez constaté quelque chose tout simplement.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous ai présenté un peu le
8 contexte.
9 Ma question était la suivante : faut-il conclure que c'est sur un ordre du
10 commandement de la brigade que vous avez placé sous votre commandement la
11 TO et ses armes et que vous les avez subordonnées à votre unité de guerre ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aurais une autre question pour que
15 vous nous apportiez des précisions, s'il vous plaît.
16 Si j'ai bien compris votre déposition, vous aviez l'intention d'éviter des
17 conflits, de maintenir la paix, c'est pourquoi vous avez dépourvu les
18 Musulmans de leurs armes. Mais vous n'avez pas fait la même chose pour les
19 Serbes. Au contraire, au même moment où vous preniez les armes des
20 Musulmans, vous mettiez sur pied une unité de guerre en débandant la
21 Défense territoriale serbe et en la subordonnant à l'unité de guerre.
22 Donc, si je vous ai bien compris : d'un côté, les Musulmans devaient être
23 désarmés; mais d'autre part, les Serbes s'organisaient en unités de guerre,
24 et tout cela dans l'idée de maintenir la paix ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Et lorsque vous dites que nous avons débandé
26 la Défense territoriale, cela s'était déjà produit au préalable. Elle
27 n'avait plus de commandement. Et cela, du seul fait que certains avaient
28 répondu à l'appel à la mobilisation alors que d'autres ne l'avaient pas
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1 fait --
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre. Je
3 ne dis pas que vous avez débandé la Défense territoriale. J'ai tout
4 simplement cité vos mots. Vous avez dit que la Défense territoriale serbe a
5 été subordonnée à l'unité de guerre, parce qu'il était superflu pour elle
6 de continuer à exister telle quelle. Mais maintenant, je vous dis que vous
7 avez incorporé la Défense territoriale serbe dans l'armée serbe, en créant
8 une unité de guerre, et manifestement pour vous préparer pour la guerre
9 puisque vous n'avez pas désarmé ces gens-là, ces Serbes-là. Mais en même
10 temps, vous avez procédé à désarmer les Musulmans. Etes-vous en train de
11 nous dire que c'était là la façon dont vous comptiez assurer la paix ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais la paix.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que le Juge Moloto et moi-même
15 ne sommes pas absolument certains d'avoir bien saisi votre réponse.
16 Pourriez-vous répéter votre réponse, je vous prie.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai commencé à répondre, et le Juge a dit :
18 "Oui."
19 Mais voilà ce que je voulais dire : pour ma part, j'imaginais la paix d'une
20 façon tout à fait différente compte tenu des circonstances de l'époque. Il
21 est impossible de dire que nous avons tout simplement transformé la Défense
22 territoriale en unité de guerre. Son rôle était le même que celui des
23 Musulmans. Il a été dit la même chose aux Serbes : Soit vous vous ralliez,
24 soit vous êtes désarmés, vous rendez vos armes. Les conditions étaient les
25 mêmes pour les uns et pour les autres. Il se trouve que les Serbes se sont
26 ralliés, ont incorporé l'unité, et que les Musulmans n'ont pas remis leurs
27 armes et ne se sont pas incorporés à l'unité. Les Musulmans ont refusé de
28 le faire, c'est la raison pour laquelle nous avons dû négocier sur ce point
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1 en leur disant : Soit vous rendez les armes, soit vous rejoignez l'unité et
2 vous conserverez vos armes.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord. Mais alors, j'ai une autre
4 question. Au paragraphe 6, les Musulmans ne sont pas invités à rejoindre
5 qui que ce soit. Si vous demandez aux Serbes de remettre leurs armes et de
6 rejoindre une unité de guerre, eh bien, cette même proposition n'a pas été
7 faite aux Musulmans. Pour quelle raison ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Durant toutes les réunions qui ont eu lieu,
9 l'offre de rejoindre l'unité a été faite aux Musulmans --
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Le fait que les autres n'aient pas voulu
12 rejoindre --
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne vous demande pas ce qui s'est
14 dit au cours des réunions. Je vous interroge au sujet du paragraphe 6. Vous
15 n'avez pas mentionné dans votre paragraphe 6 avoir demandé aux Musulmans de
16 rejoindre l'unité.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Dans ma déclaration écrite, il
18 est fait référence à ceux qui ont accepté de rejoindre l'unité.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais il n'y est même pas question du
20 fait que certains auraient refusé de rejoindre l'unité. Il est question de
21 Musulmans.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Et le fait qu'ils existent indique qu'ils
23 étaient armés, qu'ils se trouvaient là et qu'ils n'étaient pas membres
24 d'une unité de guerre.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic. J'en
26 ai terminé de mes questions.
27 M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.
28 Q. Monsieur Vujic, est-ce que les mobilisations de 1992 et de 1991 ont
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1 bien eu lieu; vous vous souvenez ?
2 R. Oui.
3 Q. A ces deux dates où des mobilisations ont eu lieu, est-ce que la
4 mobilisation appelait les Serbes uniquement ou est-ce qu'elle appelait les
5 Serbes, les Croates, les Musulmans et les autres ?
6 R. Tout le monde a été appelé à répondre à la mobilisation selon les
7 règles de déploiement des unités en temps de guerre, quelle que soit
8 l'appartenance ethnique.
9 Q. Et cette mobilisation, c'est-à-dire un appel à mobilisation qui
10 concerne tout le monde, est-ce qu'elle concernait également les Musulmans
11 avec lesquels vous étiez en train de négocier ?
12 R. Oui, bien entendu.
13 Q. Est-ce que vous savez si les Musulmans ont été conscients de cet aspect
14 de la mobilisation, à savoir que l'appel à mobiliser concernait également
15 les Musulmans qui étaient appelés à rejoindre une force armée commune ?
16 R. Oui, ils savaient ce que signifiait une mobilisation conjointe. Et
17 comme je l'ai déjà dit, ils ont décidé de respecter les convocations qui
18 leur étaient envoyées sans rejoindre les unités armées, mais en le faisant
19 de leur côté. Ils ont répondu à leur manière en faisant autre chose que ce
20 qui leur était demandé. Donc ils se sont saisis des armes, ils ont détruit
21 des ponts, et ils ont pris les armes qu'ils avaient déjà pour mener des
22 attaques contre l'armée populaire yougoslave. Voilà ce qui s'est passé à
23 l'époque.
24 Q. Monsieur Vujic, pourriez-vous nous dire à présent, et nous parlons
25 toujours du paragraphe 6 de votre déclaration préalable et de cette demande
26 de reddition des armes, vous rappelez-vous aujourd'hui les noms des
27 Musulmans qui ont organisé la remise des armes ? Et estimez-vous nécessaire
28 pour en parler que nous passions à huis clos partiel, si vous souhaitez que
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1 votre identité soit gardée secrète ?
2 R. Eh bien, j'espère sincèrement que ma déclaration ne fera pas de mal à
3 ces personnes compte tenu du fait que leur rôle n'a pas été fondamental à
4 l'époque et que ces personnes savaient ce qu'elles faisaient. J'espère donc
5 que cela ne leur fera pas de mal, que cela ne leur causera aucun
6 désagrément -- excusez-moi.
7 A cette époque-là, je me rappelle seulement quelques noms, comme celui
8 d'Ismet Kapetanovic, de Zekerija Kusuran, d'Esko Sehic. Et puis, Dzevad
9 Dzafic aussi, qui a eu une participation active à tout cela. Il était à
10 l'époque l'officier qui commandait la Défense territoriale de Puharska.
11 Donc ce qu'ils ont fait a été le résultat de nos pourparlers.
12 Et il y en a eu d'autres, une dizaine de personnes environ qui ont
13 activement participé à tout cela, mais à leur propre demande, les armes qui
14 ont été rassemblées ont été remises à la garnison militaire en leur
15 présence. C'était une bonne chose, comme ils le considéraient et d'autres
16 également, de voir qu'ils ont agi ainsi pour aller dans le sens de la paix
17 et qu'ils ne voulaient pas que démarre quelque forme de combat que ce soit.
18 Ils voulaient remettre les armes à la garnison. Et tout cela a été
19 enregistré.
20 Bien entendu, je les ai autorisés à le faire en m'en félicitant, et je me
21 suis trouvé à la caserne avec eux. Ils ont remis les armes et ensuite sont
22 retournés à leurs domiciles. Ils ont même obtenu des récépissés pour les
23 armes remises à la caserne.
24 Q. [hors micro]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, une seconde. Nous n'avons
26 pas entendu votre question par la voie des interprètes.
27 M. LUKIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
28 Q. Y a-t-il eu des personnes qui se sont opposées à cette remise des armes
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1 de la part des Musulmans, et vous rappelez-vous peut-être aujourd'hui
2 quelques-uns des noms de ces personnes au sein des Musulmans qui ont refusé
3 la reddition des armes ?
4 R. Oui, ce sont des personnes qui ont fait obstruction à cette action et
5 ce, de façon très insolente et très vile, en faisant du porte-à-porte d'une
6 maison à l'autre pour présenter leur vision de l'objectif de remise des
7 armes qui était proposé. Et ils ont même infligé des sévices physiques à
8 certaines de ces personnes qu'ils visitaient. L'un de leurs dirigeants
9 était Jusuf Ramic et les frères Ordagic [phon]. Hare [phon] Ordagic était
10 celui qui interdisait, injuriait, hurlait d'une façon très brutale et
11 violente; et son frère aîné, surnommé Baig [phon], a participé activement
12 pour sa part au rassemblement des armes en expliquant aux gens qu'au
13 contraire, c'était une bonne solution.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Etiez-vous présent lorsque cela s'est
15 passé ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] En une ou deux occasions, j'étais présent,
17 oui, car un homme venait de dire qu'il fallait soit les protéger, ces
18 personnes, soit les empêcher d'agir comme elles le faisaient. Donc je me
19 suis rendu sur place et j'ai essayé de faire quelque chose par rapport à ce
20 qui était en train de se passer.
21 Maintenant, pourquoi Jusuf Ramic --
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde, une seconde.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Pourquoi Jusuf Ramic s'est-il comporté comme
24 il l'a fait ? C'est ce que j'essayais de dire.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais ce n'était pas l'objet de la
26 question qui vous était posée.
27 Maître Lukic, question suivante, je vous prie.
28 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Q. Monsieur Vujic, bien que cela n'ait pas été dit explicitement dans la
2 question, mais je sais ce que vous êtes en train d'essayer de dire. Donc je
3 vous demande si vous pourriez nous expliquer le rôle de Jusuf Ramic à cette
4 époque-là de façon à ce que chacun comprenne mieux ?
5 R. Jusuf Ramic était à cette époque-là un homme qui avait été nommé par le
6 SDA au poste de commandant de la Défense territoriale régionale de
7 Puharska. Il travaillait donc pour l'autre partie. Il se livrait à
8 l'armement des Musulmans, il faisait creuser des tranchées et il organisait
9 des unités. Et lorsqu'il s'est avéré que ceux qui voulaient remettre leurs
10 armes ont exprimé le souhait de le faire, bien sûr, il s'est opposé à cela
11 et a continué à le faire pendant longtemps. Vous connaissez ici le nom d'un
12 homme qui répond au nom de Rasim Dzafic, il a fait une déclaration
13 préalable ici, c'est l'une des victimes d'un incident concernant la mosquée
14 de Puharska, d'un fait ou d'un crime. Il m'a appelé un jour et a dit que
15 Mirsad Kugic et ce Ramic l'avaient giflé. Et puisque Rasim Dzafic, quelques
16 mois auparavant, m'avait rappelé cela, il m'a remercié d'avoir dit que son
17 pistolet personnel, que je savais qu'il possédait, ne devait pas être remis
18 parce qu'il fallait se défendre contre des personnes de ce genre. Donc,
19 pour assurer sa propre sécurité, il a pu le garder et il m'a été
20 reconnaissant de mon intervention ce jour-là.
21 Q. Je vous remercie. Vous nous avez dit que ce pistolet n'a pas été remis.
22 Est-ce que des armes de la Défense territoriale ont été remises à ce
23 moment-là, si vous vous en souvenez ?
24 R. Un nombre très restreint de fusils automatiques, simplement quelques
25 rares fusils automatiques, et pour le reste il s'agissait de M48. Je sais
26 cela avec certitude. Je sais que la Défense territoriale possédait toutes
27 sortes d'armes d'infanterie à cette époque-là. Mais elle ne possédait pas
28 de mitrailleuses ni de lance-roquettes multiples, Tout ce dont elle
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1 disposait, c'était des M48, des PAP et deux fusils automatiques militaires
2 qui ont été remis.
3 Q. Je vous remercie. Donc, qu'est-il arrivé à ces personnes qui ont remis
4 leurs armes ? Est-ce que leur coopération s'est poursuivie ensuite ?
5 Qu'est-il arrivé ?
6 R. J'ai continué à travailler à Puharska, et étant donné ce qui s'était
7 passé, ils étaient pour moi la base de mon travail futur. Ils n'ont pas
8 cessé d'être à mon service. Ils ont même fourni des informations sur un
9 certain nombre de choses qui se passaient autour d'eux par la suite. Donc
10 il est devenu possible pour moi de prévoir un certain nombre de choses et
11 d'avoir la possibilité d'empêcher un certain nombre de choses avant
12 qu'elles ne surviennent. Je pourrais citer un certain nombre d'exemples qui
13 illustreraient très bien le genre de chose dont je parle et qui est survenu
14 à cette époque-là.
15 Q. C'est l'objet de ma question à présent. Est-ce que vous pourriez nous
16 donner des exemples de ce dont vous êtes en train de parler à Puharska, qui
17 est une zone très vaste ?
18 R. En ce moment, je ne parle que de Puharska et de mes actions à cet
19 endroit. Cinq mille habitants habitaient dans cette zone à cette époque-là,
20 donc ce n'est pas un petit nombre. Nous parlons d'une population importante
21 et d'une zone qui était habitée avec une forte densité de population.
22 Compte tenu que j'avais donné mon numéro de téléphone à pas mal de gens,
23 ils pouvaient m'appeler au cas où ils vivaient des désagréments de façon à
24 ce que nous puissions intervenir, même si ce n'était pas ma mission
25 principale de maintenir la loi et l'ordre. J'étais un soldat. Ce travail
26 aurait davantage été celui de la police.
27 Mais la coopération que nous avons développée m'a fait devoir
28 d'apporter du secours à ces personnes. Un jour, quelqu'un m'a appelé au
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1 téléphone pour me dire que la population d'une longue rue de Puharska avait
2 déjà abandonné ses domiciles. Je me suis rendu rapidement sur place avec
3 mon garde du corps. Et ce que j'ai vu c'est, disons, un grand nombre de
4 femmes et d'enfants. Il y avait très peu d'hommes dans ce groupe qui était
5 en train d'aller quelque part. J'ai dit : "Mais où allez-vous ?" On m'a
6 répondu que ces gens souhaitaient se rendre vers Cejreci, et ils ont dit
7 que tout le monde avait été tué. En ma qualité de commandant à ce moment-
8 là, je n'avais aucune information au sujet de combats qui se seraient menés
9 --
10 Q. Pourriez-vous vous interrompre une seconde. Pour les interprètes, est-
11 ce que vous pouvez nous dire ce qu'ils vous ont dit par rapport à la
12 destination à laquelle ils souhaitaient se rendre ? Qui a quitté Cejreci ?
13 R. Ils ont simplement dit qu'ils allaient de Cejreci dans une autre
14 destination, mais sans dire exactement où ils avaient l'intention d'aller.
15 Ils ont dit que beaucoup de gens avaient été tués, que c'est la raison pour
16 laquelle ils souhaitaient partir. Et ils se rendaient à partir de ce
17 village vers ailleurs parce qu'on leur tirait dessus. Donc, je leur ai dit
18 que j'allais chercher à découvrir exactement ce qui s'était passé. Je leur
19 ai dit : "Rentrez chez vous. Personne ne touchera à un cheveu de votre
20 tête." Et le résultat de mon enquête, si je puis l'appeler ainsi, c'est que
21 Jusuf Ramic avait lancé une fausse alerte à partir d'une zone frontalière
22 de Cejreci et qu'il avait dit aux gens : "Prenez vos jambes à votre cou et
23 fuyez, sinon vous serez tués." Il voulait créer une atmosphère de terreur.
24 Heureusement, en raison de mon intervention rapide, les gens ont pu cesser
25 de partir et sont rentrés chez eux. J'avais avec moi quelques collègues de
26 travail qui habitaient là, ils faisaient partie de cette colonne. Ils m'ont
27 remercié plus tard en me disant qu'ils avaient été bien naïfs en croyant ce
28 que Jusuf Ramic avait dit.
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1 Donc vous voyez le genre de chose qui était fait de leur côté dans la
2 poursuite de leurs objectifs qui étaient de nuire à toutes les actions
3 susceptibles de conduire à une quelconque reconnaissance des buts
4 poursuivis par les Nations Unies à la communauté internationale, c'est-à-
5 dire de vivre côte à côte, ensemble, en évitant des affrontements.
6 Q. Vous nous avez parlé de la mosquée de Puharska. Est-ce que des maisons
7 ont été détruites dans cette explosion, et si vous le savez, combien ?
8 R. Oui, malheureusement. L'explosion a été très puissante, parce que la
9 maison qui se trouvait à côté de la mosquée a également été soulevée du sol
10 par l'explosion. Cette maison appartenait à l'imam et était habitée par lui
11 et son fils, un ami à moi, Ziko Kusuran, que je connaissais très bien. La
12 maison de Rasim Dzafic a aussi été détruite. Elle se trouvait de l'autre
13 côté de la caserne. Et une autre maison, je ne sais pas à qui elle
14 appartenait, a été détruite également. Et puis, il y a eu beaucoup de bris
15 de vitre, de glace, dans l'environ immédiat. Et même s'il y a un certain
16 nombre de maisons où les toits étaient intacts, les vitres avaient explosé.
17 Q. Dans quel état étaient les autres maisons pendant la guerre de Donja et
18 de Gornja Puharska ?
19 R. Dans 90 % des cas, les maisons sont demeurées entières. Elles n'ont été
20 ni endommagées, ni pillées, ni détruites. Je répète qu'à cet endroit, il
21 n'y a pas eu de combat au propre sens du terme. Il y a eu des espèces
22 d'accrochage et une partie de la population musulmane qui a quitté les
23 lieux pour se rendre dans des pays étrangers. Leurs maisons ont alors été
24 occupées par d'autres habitants. Donc un problème s'est posé, un problème
25 de maintien de la loi et de l'ordre pour empêcher des pillages et, bien
26 entendu, empêcher la démolition de ces maisons. Ce qui s'est passé en
27 général, c'est que lorsque le propriétaire était absent, il y avait des
28 gens qui démantelaient le toit de la maison et ensuite démantelaient tout
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1 ce qu'ils souhaitaient démanteler, même s'ils n'en avaient pas la
2 nécessité. Mais nous sommes parvenus à empêcher ce genre de chose, et
3 Puharska est demeurée intacte. Quatre-vingt pourcent des bâtiments et plus
4 encore sont demeurés intacts.
5 Q. D'après le compte rendu d'audience, vous avez dit 90 %. Mais est-ce
6 que, en fait, vous n'avez pas dit 90 % et davantage encore ?
7 R. J'ai dit 90 % et davantage encore, puisque seules quelques rares
8 maisons n'ont pas pu être placées sous notre contrôle et ont subi ce que je
9 viens de décrire. Mais pour les autres, elles sont restées dans un état
10 inchangé.
11 Q. Ces maisons, lorsqu'elles étaient vides, est-ce que des réfugiés y ont
12 été installés ?
13 R. Dans certaines d'entre elles, oui. Donc, pour une partie de ces
14 maisons, oui.
15 Q. Les habitants de Puharska, est-ce que vous leur avez apporté d'autres
16 formes d'assistance, une assistance alimentaire, par exemple, ou une
17 distribution de médicaments ?
18 R. Après l'attaque de Prijedor et de Puharska, j'ai commencé à communiquer
19 avec eux de façon tout à fait différente. Je suis entré dans Puharska pour
20 voir tout ce qui s'était passé et ce qu'il fallait placer sous mon
21 contrôle, et c'est de cette façon que j'ai établi des contacts avec toute
22 la population. Ces gens qui habitaient là, on leur a dit qu'il fallait
23 qu'ils contribuent à la coopération, que c'étaient des intermédiaires, et
24 il y avait des gens qui avaient besoin de médicaments de façon urgente. Il
25 y en avait qui disaient qu'ils étaient très pauvres, et à ce moment-là nous
26 essayions de parler avec eux et de régler leur approvisionnement en
27 électricité, en eau, en nourriture, ou même de leur trouver un emploi. Nous
28 avons aidé là où nous pouvions aussi en distribuant des vivres et des
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1 vêtements.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Un éclaircissement, je vous prie.
3 Quelle était l'appartenance ethnique des habitants de Puharska ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Quatre-vingt-dix-huit pourcent de Musulmans.
5 Et les autres étaient des Croates et des Serbes.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.
7 M. LUKIC : [interprétation] Lorsque vous apportiez ce genre d'aide à
8 Puharska et à sa population, quelle était l'attitude de votre commandement
9 supérieur ?
10 R. Moi, en ma qualité de commandant, je rendais compte au commandant de la
11 brigade régulièrement. Je participais aux réunions d'information et de
12 rapport et je parlais de mes activités de façon détaillée durant ces
13 réunions en disant jusqu'où j'étais allé. Et, bien entendu, mon commandant
14 connaissait parfaitement mes activités. J'ai dû apporter de l'aide autant
15 que faire se peut. Je bénéficiais d'un soutien dans mon activité et j'avais
16 la possibilité de persévérer dans cette tâche dans le but d'empêcher un
17 conflit armé d'éclater, si cela était possible.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, nous approchons de la fin
19 de l'heure que vous aviez demandée. Je ne sais pas de combien de temps vous
20 avez encore besoin. Est-ce qu'il serait sage de faire la pause maintenant
21 ou de la faire dans cinq ou huit minutes, au moment où vous aurez
22 totalement consommé l'heure qui vous a été impartie ?
23 M. LUKIC : [interprétation] Je pensais que j'avais encore un peu de temps.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce que j'ai dit, mais pas
25 beaucoup.
26 M. LUKIC : [interprétation] Oui.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez utiliser le
28 temps qui vous reste avant la pause ou après ?
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1 M. LUKIC : [interprétation] Peut-être après une pause. Je pourrais dans ce
2 cas me réorganiser et peut-être réduire un peu mes questions.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, parce que le temps qui vous reste
4 est inférieur à dix minutes. Soyons clairs sur ce point.
5 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que cela devrait suffire.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, Monsieur Vujic, nous allons
7 refaire une pause et nous aimerions vous revoir dans cette salle d'audience
8 dans 20 minutes.
9 [Le témoin quitte la barre]
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprendrons nos travaux à 13 heures
11 30.
12 --- L'audience est suspendue à 13 heures 11.
13 --- L'audience est reprise à 13 heures 33.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, je comprends que
15 vous voudriez avoir plus de temps.
16 M. LUKIC : [interprétation] J'ai réduit le nombre de mes questions. Je sais
17 que cela ne fait peut-être pas suffisamment de sens de voir que j'ai besoin
18 de plus de temps. Je vais essayer d'en terminer avec mes questions le plus
19 tôt possible. Je vais donc essayer cela.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous avez d'abord dit que vous
21 aviez besoin de 15 minutes, ensuite 30 minutes, et par la suite cela est
22 devenu une heure, et maintenant une heure et quelques minutes de plus.
23 [Le témoin vient à la barre]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, puis-je vous
25 demander d'écouter attentivement les questions et de fournir des réponses
26 précises à ces questions et de ne pas développer vos réponses, puisque Me
27 Lukic a à sa disposition une période de temps limitée.
28 Maître Lukic, vous pouvez poursuivre.
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1 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
2 Q. Monsieur Vujic, nous avons quelque 15 minutes et j'ai pas mal de sujets
3 à aborder, donc essayons d'être le plus précis possible.
4 Dites-nous combien de temps a duré votre coopération avec les gens à
5 Puharska ?
6 R. Cela a duré longtemps, très longtemps. Dans certains cas, jusqu'à la
7 fin de la guerre.
8 Q. Jusqu'à quand les gens de Puharska sont-ils restés dans leurs maisons ?
9 Et combien d'entre eux ?
10 R. Etant donné que j'ai quitté Prijedor avec mon unité pour me rendre sur
11 le front, je ne peux pas vous dire précisément combien de temps ils y sont
12 restés. Mais lorsque je venais à Prijedor avec mon unité en congé régulier,
13 un grand nombre de Musulmans se trouvaient dans leur maison. Mais à
14 l'époque, j'ai appris également qu'un certain nombre de Musulmans étaient
15 partis de Prijedor de leur propre gré.
16 Q. Aujourd'hui, est-ce que vous avez des amis parmi les Musulmans à
17 Puharska ?
18 R. Oui. J'ai beaucoup d'amis musulmans, justement de cette région-là. Je
19 les fréquente souvent. Je bois un verre avec eux, et nous parlons parfois
20 de cela.
21 Q. Merci. Pour ce qui est du paragraphe 14 de votre déclaration, et je
22 vais indiquer une référence --
23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir le paragraphe
24 14.
25 M. LUKIC : [interprétation] J'ai voulu vous montrer un document, mais avant
26 cela, nous pouvons faire afficher le paragraphe numéro 14.
27 Q. C'est une référence aux formations paramilitaires.
28 J'aimerais vous montrer, Monsieur Vujic, un document. C'est P3095.
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1 M. LUKIC : [interprétation] Peut-on afficher la page suivante dans les deux
2 versions. Il faut afficher le premier paragraphe ainsi que l'en-tête.
3 Q. Monsieur Vujic, il s'agit du document émanant de l'état-major principal
4 de la VRS du 23 septembre 1995, où il est question des membres de la Garde
5 des Volontaires serbe, qui s'appelait Tigres et commandée par Zeljko
6 Raznjatovic, Arkan. Il est dit qu'étant donné que ces formations, à ce
7 moment, n'avaient pas participé aux activités de combat et qu'elles ne
8 faisaient pas partie d'unités et qu'elles ne se présentaient à aucun des
9 commandements de bataillon à l'état-major principal de la VRS, il est
10 évident qu'il s'agit de formations paramilitaires qui opèrent de façon
11 indépendante et qui sont en dehors du système de l'armée de la Republika
12 Srpska.
13 Est-ce qu'en automne 1995, dans la région de Prijedor, vous avez vu les
14 membres de la Garde des Volontaires serbe, c'est-à-dire des Tigres
15 d'Arkan ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce qu'ils se sont présentés à vous ? Est-ce qu'ils sont venus vers
18 vous pour que vous leur confiiez des tâches de combat ?
19 R. Non. Je ne sais pas qui leur avait confié des tâches, mais j'ai compris
20 qu'ils ne savaient pas qui était le commandant de la brigade ou le
21 commandant du groupe opérationnel, à l'époque c'était le colonel Zeljaja,
22 et j'ai compris qu'ils ne recevaient pas des tâches de combat de l'armée.
23 Q. Merci. Maintenant, j'aimerais brièvement aborder la période de
24 l'automne 1995. A savoir, du mois d'octobre. Le 12 et le 13 octobre 1995.
25 J'aimerais parler de l'attaque contre Prijedor. Où votre unité se trouvait-
26 elle à la date du 10 octobre 1995 ?
27 R. Moi-même et le 3e Bataillon, nous nous trouvions dans le secteur autour
28 de Gradacac, et notre tâche était de garder le corridor.
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1 Q. Quand êtes-vous arrivé à Prijedor et pourquoi ?
2 R. Du 12 au 13, j'ai été envoyé de Gradacac à Prijedor pour y passer une
3 nuit et pour obtenir des informations concernant la situation dans le
4 secteur de Sanski Most, de Kljuc et d'autres municipalités qui se
5 trouvaient autour de notre territoire --
6 Q. Dites-nous ce qui se passait à Kljuc et à Sanski Most à l'époque.
7 R. A l'époque, le 5e Corps, renforcé par d'autres unités et aidé par les
8 forces de l'OTAN, prenait une municipalité après l'autre. Je crois qu'il
9 s'agissait de 13 municipalités qui avaient été prises en même temps. La
10 population civile a fui, l'armée s'est retirée, et eux, ils ont avancé vers
11 Prijedor.
12 Q. Une fois arrivé à Prijedor, est-ce que vous êtes arrivé à Prijedor avec
13 votre armée ou indépendamment de votre armée ?
14 R. Etant donné que je suis arrivé la veille et que j'ai pris contact avec
15 mon commandant, j'ai donc obtenu des informations concernant la situation
16 dans le secteur et j'ai appris que le commandant du corps avait donné le
17 feu vert pour que mon unité soit remplacée sur les positions tenues
18 auparavant et acheminée vers Prijedor. J'attendais l'arrivée de mon
19 bataillon, et mes assistants ont organisé les mouvements du bataillon.
20 Q. Donc, le lendemain de votre arrivée, votre unité est venue également.
21 Vous avez dit cela à la page 69, ligne 24 du compte rendu provisoire. Où
22 votre unité s'est-elle arrêtée ? Où vous trouviez-vous avec votre unité ?
23 R. Je les attendais à l'entrée de Prijedor. J'ai arrêté la colonne, mais
24 une partie de la colonne est entrée dans l'agglomération habitée. Et étant
25 donné que la population civile avait très peur puisque la population civile
26 savait ce qui était en train de se passer autour de Prijedor, un grand
27 nombre de civils s'étaient rassemblés. Mais moi, j'ai ordonné que mes chefs
28 de compagnie et de section descendent des autocars pour que des tâches leur
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1 soient confiées. Il s'agissait de l'ordre qui ne concernait que des
2 activités de combat de notre unité.
3 Je leur ai dit que 13 municipalités étaient tombées. Ils étaient au
4 courant pour ce qui est de certaines de ces municipalités, mais ils ne
5 savaient pas que parmi ces municipalités il y avait la municipalité de
6 Sanski Most. Ce qui les a beaucoup surpris. Moi-même, j'en étais surpris.
7 Et j'ai décidé d'organiser la défense de Prijedor, et je voulais voir entre
8 les mains de mes soldats un fusil RAP, pas d'autres fusils. Pas d'autres
9 armes et équipement. Et j'ai dit que nous n'allions pas obtenir d'appui
10 d'artillerie et que nous allions combattre des forces musulmanes en combat
11 direct qui probablement étaient encouragées par le fait qu'elles avaient
12 pris tout ce territoire et qu'elles se trouvaient devant les portes de
13 Prijedor, et que probablement elles allaient avancer.
14 J'ai demandé à mes soldats de passer par Prijedor en chantant. Nous
15 étions des combattants chevronnés. Nous savions ce que cela allait vouloir
16 dire. Et nous avons montré que nous étions déterminés à défendre Prijedor
17 fermement, ce qui s'est finalement passé.
18 Q. Quand votre bataillon est entré en combat ?
19 R. Le bataillon est entré en combat après cet ordre, peut-être une heure
20 ou une heure et demie après cela. Pratiquement, ils sont descendus des
21 autocars et ont commencé à combattre immédiatement. Au village d'Aliskovici
22 [phon], près d'Ostra Luka, nous avons eu déjà un conflit avec leurs groupes
23 d'assaut et de reconnaissance du terrain. Nous avons réussi à faire
24 disperser leurs premiers groupes d'éclaireurs. Et sur ce territoire, j'ai
25 trouvé des soldats d'Arkan. C'était un groupe de la taille d'une section.
26 Q. Pouvez-vous répéter la dernière partie de votre réponse.
27 R. J'ai dit que sur ce secteur, j'ai trouvé quelques soldats d'Arkan qui
28 n'avaient toujours pas commencé à combattre, et c'était un groupe de la
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1 taille d'une section.
2 Q. Est-ce que vous leur avez donné des ordres ?
3 R. Non, je ne leur ai pas donné d'ordres. Ils ne savaient même pas quelle
4 unité allait arriver sur ce territoire. A un moment donné, un de leurs
5 officiers, il nous a dit qu'il était leur officier de la garde, il a dit :
6 "Lorsque Vujic arrive, la situation sera résolue." Et j'ai compris qu'il ne
7 savait pas à qui il s'adressait. Je lui ai dit : "Je suis Vujic. J'ai pour
8 tâche d'avancer." Et après cela, on n'avait plus eu de contact.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, je dois vous
10 interrompre là pour dire à Me Lukic qu'il lui reste deux minutes.
11 Maître Lukic, vous posez la question, la réponse est fournie dans la
12 première phrase et le témoin continue à parler. Cela est consigné sur toute
13 une page du compte rendu, et vous le laissez continuer à parler.
14 Vous avez encore deux minutes.
15 M. LUKIC : [interprétation] Merci.
16 Q. Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé pour ce qui est du système de
17 transmission de votre unité, de votre brigade ?
18 R. C'était coupé à ce moment-là, et nous savions que c'est l'OTAN qui a
19 fait cela puisque les Musulmans ne pouvaient pas neutraliser notre système
20 de communication. Des drones nous survolaient et survolaient également leur
21 artillerie. Et nous entrions en combat au moment où l'artillerie musulmane
22 nous pilonnait violemment.
23 Q. Est-ce que les forces de l'ABiH avaient des drones et est-ce que vous
24 avez pu savoir à qui appartenaient ces drones ?
25 R. Bien sûr qu'ils avaient ces drones. En tant que soldats chevronnés,
26 nous savions qu'il s'agissait des drones de l'OTAN.
27 Q. Monsieur Vujic, merci. Nous n'avons pas de questions pour vous pour le
28 moment. Merci.
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1 R. Merci.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Lukic.
3 Monsieur Vujic, vous allez maintenant être contre-interrogé par M. Zec, qui
4 se trouve à votre droite. M. Zec représente l'Accusation.
5 Vous avez la parole, Monsieur Zec.
6 M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Contre-interrogatoire par M. Zec :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vujic.
9 R. Bonjour, Monsieur Zec.
10 Q. J'ai relevé que vous avez évoqué l'attaque contre Prijedor à plusieurs
11 reprises. En fait, vous pensiez à une opération qui s'est déroulée le 30
12 mai 1992, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Vous ne l'indiquez pas dans votre déclaration préalable, mais vous
15 saviez que les Serbes s'étaient emparés du pouvoir à Prijedor le 30 avril
16 1992, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, je savais que les Serbes avaient assumé le pouvoir le 29 avril.
18 Q. Au cours de la semaine précédant le 30 mai 1992, la 43e Brigade, votre
19 brigade donc, a effectué des opérations dans la zone de Hambarine et de
20 Kozarac. Vous le saviez, n'est-ce pas ?
21 R. Oui, je le savais.
22 Q. Un grand nombre de biens civils ont été détruits au cours de ces
23 opérations. Vous le saviez, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, je le savais.
25 Q. De nombreux non-Serbes ont été capturés. Vous le saviez aussi, n'est-ce
26 pas ?
27 R. Oui, je le savais.
28 Q. Un grand nombre de non-Serbes ont été tués lors de ces opérations. Vous
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1 le saviez aussi, n'est-ce pas ?
2 R. Je ne connaissais pas le nombre exact de personnes tuées. Mais je
3 savais qu'il y a dû avoir de victimes compte tenu du caractère féroce de
4 combats qui ont été menés.
5 Q. Je vais maintenant examiner la liste des soldats qui, d'après vous,
6 étaient des membres non serbes de votre unité --
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de le faire, permettez-moi de
8 poser une question de suivi. Vous dites que :
9 "Compte tenu du caractère féroce des combats, on pourrait déduire
10 qu'il y a dû avoir un grand nombre de personnes tuées."
11 Lorsque vous déclarez ceci, parlez-vous des membres de forces armées,
12 parce que c'est ce que j'ai cru comprendre ? Mais est-ce qu'il y a eu des
13 civils qui ont été tués ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que j'imagine qu'il y a dû y avoir
15 des personnes tuées compte tenu du caractère féroce des combats. Mais comme
16 je ne me trouvais pas sur place, je ne savais pas qui a été tué.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais, par conséquent, vous ne savez pas
18 non plus si les victimes sont tombées à cause de ces combats féroces ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Bien au contraire, puisque
20 c'est seulement au cours des combats que ces personnes tuées ont pu trouver
21 la mort.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais c'est une conclusion que vous
23 tirez. Cela ne fait pas partie de vos connaissances factuelles.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je vous ai dit que je ne savais pas
25 exactement quel était le nombre de personnes tuées puisque je ne me
26 trouvais pas sur place.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur Zec.
28 M. ZEC : [interprétation]
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1 Q. Et vous avez dit que vous saviez que des non-Serbes ont été capturés.
2 Vous saviez, par ailleurs, que ces personnes capturées ont été transférées
3 dans des camps par les membres de la VRS. Vous le saviez, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, je le savais.
5 Q. Alors, pour que tout soit très clair, lorsque j'évoque les camps, je
6 parle en fait de Keraterm, Omarska, Trnopolje.
7 R. Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Trnopolje n'était pas un camp.
8 C'était un centre de rassemblement.
9 Quant à Keraterm, on peut le désigner comme on le veut. Mais au
10 départ, lorsque les premières personnes capturées y ont été placées, il
11 s'agissait tout simplement d'y détenir les personnes capturées, ou plutôt,
12 arrêtées. Je parle de Keraterm parce qu'il se trouvait dans ma zone, dans
13 la zone où je devais mobiliser les effectifs pour remplir les rangs de mon
14 unité, et c'est pourquoi je savais ce qui s'y passait. Et c'est pourquoi
15 j'ai dit que j'étais au courant du fait que des gens ont été emmenés dans
16 des camps.
17 Q. Mais pour que tout soit parfaitement clair, en laissant de côté la
18 question de savoir de quelle nature ces localités étaient, le fait est que
19 la VRS a emmené les personnes capturées dans ces installations. C'est bien
20 ce qui s'est passé ?
21 R. Oui, pour ce qui est de Keraterm. Mais non, en ce qui concerne
22 Trnopolje. Les gens sont allés à Trnopolje de leur propre volonté pour y
23 trouver un refuge, pour s'y sentir protégés.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et qu'en est-il d'Omarska ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, d'après mes connaissances, Omarska a
26 été organisé un peu plus tard. Et personne ne pouvait y aller de son gré.
27 Les seules personnes qui s'y trouvaient avaient déjà fait l'objet d'une
28 enquête ou d'une procédure de vérification, et c'est la raison pour
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1 laquelle ces personnes y ont été emmenées.
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Par la VRS, n'est-ce pas ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne Omarska, je pense que c'est
4 surtout la police qui s'en est occupée. Je ne sais pas si, en partie, les
5 soldats ont participé à ce processus. Mais je sais que la police a
6 certainement transféré les gens vers Omarska après les avoir interrogés à
7 Keraterm.
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une question de suivi. Etes-vous allé
10 personnellement à Trnopolje ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis trouvé sur place par hasard un ou
12 deux jours après les opérations de combat à Kozarac et j'ai pu voir les
13 colonnes arrivant à Trnopolje depuis Kozarac, Kevljani et les autres
14 villages environnants. Ce jour-là, j'avais reçu la tâche de ratisser le
15 terrain autour de la gare de Kozarac parce que quelqu'un avait tiré sur ces
16 civils. Et c'est pourquoi mon commandement m'a envoyé sur place, pour
17 découvrir ce qui s'y passait.
18 Et nous avons constaté --
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et avez-vous eu des discussions avec le
20 personnel ou les détenus de Trnopolje, ou y êtes-vous allé tout simplement
21 pour vous acquitter de la mission qui vous a été confiée et que vous venez
22 de décrire ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Une fois terminé le ratissage du terrain, nous
24 avons nettoyé la zone d'où les tirs étaient venus et nous avons constaté
25 que le fait avait été perpétré par des groupes musulmans qui avaient été
26 percés à Kozarac. Donc je suis arrivé sur place, mais quand j'y suis arrivé
27 quelques heures plus tard, ils n'y étaient plus --
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, très bien. Mais vous ne répondez
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1 pas à ma question. Je vous ai demandé si vous avez eu des discussions avec
2 le personnel de Trnopolje ou les détenus à Trnopolje ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai parlé avec un seul homme. Je peux, si
4 vous le souhaitez, vous relayer ma conversation avec lui.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais pour commencer, de qui s'agissait-
6 il ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas citer son nom. C'était le
8 chauffeur d'un camion. Un long camion. Il avait amené à bord de son camion
9 des femmes et des enfants. Le camion était plein à craquer. Ils avaient mis
10 de la paille dans le camion. Et lorsque les personnes qu'ils transportaient
11 sont sorties du camion, il m'a expliqué qu'il devait aller chercher un
12 nouveau groupe de personnes qui venaient de Kamicani, des civils qui
13 fuyaient les combats.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez répondu à ma question.
15 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Zec.
16 M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Comme je l'ai déjà indiqué, nous allons maintenant nous pencher sur la
18 liste de vos soldats, et puis je vous poserais quelques questions très
19 succinctes.
20 M. ZEC : [interprétation] Veuillez afficher, s'il vous plaît, à l'écran la
21 pièce D1042.
22 Q. Alors, si nous examinons cette liste, notamment le point numéro 5, nous
23 y voyons un nom, celui de Nenad Babic, et il y a une note à côté de son nom
24 indiquant que son ancien nom était Nedzad Sikiric. Donc ceci constitue un
25 exemple d'un Musulman qui a changé son nom et son prénom, n'est-ce pas ?
26 R. Oui, c'est exact.
27 Q. Le point numéro 33, Enver Dracic. D'après cette liste, il faisait
28 partie de votre unité en 1996. C'est la période d'après-guerre, n'est-ce
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1 pas ?
2 R. Non, il n'est pas resté dans mon unité après la guerre. J'imagine qu'il
3 a pu y être juste avant la fin de la guerre. Vous voyez d'ailleurs qu'il
4 n'a passé qu'un seul mois dans mon unité.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la guerre était-elle toujours en
6 cours en 1996, Monsieur Vujic ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être qu'il n'y a pas eu d'activité de
8 combat, mais l'unité était toujours mobilisée, en état de mobilisation.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais la question est de savoir si
10 la guerre était toujours en cours. Or, d'après ce que la Chambre a pu
11 apprendre, la guerre s'est terminée au moment de l'accord de Dayton. Cet
12 accord n'a pas été signé en 1996.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est pourquoi je vous dis qu'il n'y avait pas
14 d'activité de combat, mais l'unité n'avait pas été démobilisée.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à un autre sujet.
16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais juste avant, vous avez dit,
17 Monsieur, à la page 76 [comme interprété], ligne 23 :
18 "Mais non, il n'a pas pu faire partie de l'unité après la guerre.
19 Mais juste avant la fin de la guerre."
20 Voilà ce que vous avez dit. Vous avez dit qu'il a rejoint l'unité à
21 la veille de la fin de la guerre.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Et quelle est votre question ?
23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ma question est que vous ne pouvez pas
24 dire qu'il n'y avait pas de combat, puisque vous dites qu'il a rejoint les
25 rangs de votre unité en 1996 alors que la guerre s'est terminée en 1995.
26 Donc il n'a pas pu intégrer les rangs de votre unité avant la fin de la
27 guerre s'il vous a rejoint en 1996.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] L'unité de guerre était toujours en état de
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1 mobilisation. La mobilisation et la démobilisation étaient toujours en
2 cours. Cette personne, voilà, a été mobilisée au moment où l'unité était
3 toujours active. Et voilà, il s'est présenté et il a effectué un certain
4 nombre de tâches et de devoirs militaires.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.
6 Monsieur Zec, à vous.
7 M. ZEC : [interprétation]
8 Q. Page numéro 2, le point numéro 54, Ibrahim Keric. On peut lire une note
9 indiquant : "Changé en Goran Knezevic." Donc son nom et prénom musulmans
10 ont été changés et il a assumé un nom et un prénom serbes, n'est-ce pas ?
11 R. Oui, manifestement.
12 Q. Page 4 dans la version anglaise, page 3 de la version en B/C/S, le
13 point numéro 123, un autre exemple d'un Musulman qui a changé son nom et
14 son prénom pour adopter un nom et un prénom serbes, n'est-ce pas ?
15 R. Veuillez, s'il vous plaît, répéter de quelle personne vous parlez
16 exactement ? Quel est le numéro que vous avez cité ?
17 Q. Numéro 123, Esad Husic, son nom a été changé en Zoran Zoric.
18 R. Oui, il a changé son nom et son prénom, mais il a gardé le prénom de
19 son père, Hilmija.
20 M. ZEC : [interprétation] Et examinons maintenant la page 1 dans les deux
21 versions linguistiques.
22 Q. Points 38 et 39, Jasmin et Sulejman Zahidic. Si nous examinons leurs
23 prénoms et leurs noms, il s'agit de Musulmans, n'est-ce pas ?
24 R. Zahidic, Jasmin et Zahidic, Sulejman, de père Sulejman, ce sont des
25 personnes d'appartenance ethnique Rom et de confession musulmane. Deux
26 frères.
27 Q. Le point 38, Jasmin Zahidic.
28 M. ZEC : [interprétation] Qui devrait figurer à la page 1 de la version
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1 anglaise.
2 Q. Il se trouvait au centre de votre unité lorsque cette unité a été
3 déployée non loin du corridor à Brcko, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, il s'y trouvait.
5 Q. Et, en fait, il s'est vu attribuer des missions au sein de votre unité
6 pour s'acquitter des obligations de travail, n'est-ce pas ?
7 R. Non, il était un membre de l'unité de guerre. Donc ce n'était pas parce
8 qu'il avait l'obligation de travailler qu'il s'y trouvait. Parce que
9 lorsqu'on a l'obligation de travailler, généralement on est envoyé dans une
10 entreprise pour le faire.
11 Q. Il bâtissait des tranchées à la ligne du front et il a été blessé,
12 n'est-ce pas ?
13 R. Non, cela est faux. Jasmin et Sulejman Zahidic étaient des combattants
14 réguliers au sein du 3e Bataillon. Je pense qu'ils appartenaient à la 3e ou
15 à la 4e Compagnie. Ils étaient des combattants tous les deux. Il a été
16 blessé lors des opérations de combat, il a été grièvement blessé.
17 Et lorsque j'ai évoqué tout à l'heure nos relations mutuelles, et la
18 façon dont nous nous protégions mutuellement sur la ligne du front, lorsque
19 Jasmin a été grièvement blessé, deux autres combattants ont été blessés
20 pour le récupérer, dont l'un infirmier, qui étaient tous les deux
21 d'appartenance ethnique serbe. Mais nous avons réussi à le tirer de
22 l'endroit où il se trouvait.
23 Q. La déclaration locale, qui comporte la cote 32526 de la liste 65 ter,
24 j'aimerais qu'elle soit affichée. Il nous faut la page 2 de la version
25 B/C/S, qui correspond à la page 4 dans la version anglaise. Au milieu de la
26 page, vous devriez voir les mots suivants : "Le 3 [sic] février 1993,
27 lorsque Rade Crnogorac m'a réaffecté à l'unité de Drasko Vujic, commandant
28 du 5e Bataillon de la 43e Brigade de la VRS."
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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est le 13 février, pas le 3 février.
2 M. ZEC : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Juge.
3 Q. "Au sein duquel j'étais censé remplir mon obligation de travail. Je
4 suis allé à Pelagicevo, non loin de Brcko, le 13 février 1993 pour répondre
5 à mon obligation de travail. J'étais accompagné d'un certain nombre de
6 Musulmans de Bosnie."
7 Quelques lignes plus bas, nous lisons :
8 "A Pelagicevo, j'ai réussi avec d'autres à creuser des tranchées et
9 étayer ces tranchées avec des troncs d'arbres pour les recouvrir ensuite de
10 terre. J'ai fait ce travail pendant cinq jours," et il a dit qu'il a été
11 blessé par un éclat d'obus.
12 Donc c'est bien ce qui s'est passé à Jasmin, n'est-ce pas ?
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, j'entends quelque chose en
14 arrière-plan -- je crois que c'est du B/C/S ou du français. Ce n'était pas
15 assez fort pour que je puisse définir la langue.
16 Est-ce qu'on pourrait s'occuper de ce problème -- je l'entends
17 encore, mais je ne sais pas ce qui se passe.
18 Je pense que nous pouvons poursuivre. Mais si quelqu'un pouvait s'occuper
19 de ce problème, ce serait bien.
20 Veuillez procéder.
21 Monsieur, pourriez-vous répondre à la question ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai bien compris la question, je ne sais
23 pas qui a fait cette déclaration, mais je déclare pour ma part en toute
24 responsabilité que Jasmin Zahidic ne faisait pas partie de mon détachement
25 de travail. Il était membre, en revanche, de sa propre unité. Il n'a jamais
26 fait partie du peloton de travail. Je suppose que Zahidic a fait cette
27 déclaration sous une espèce de contrainte, parce que ce n'est pas la façon
28 habituelle dont il s'exprime. Quelqu'un a écrit ceci à sa place. Et
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1 deuxièmement, il n'a jamais fait partie du peloton de travail.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, Monsieur le Témoin,
3 je vous arrête ici. Je vous demande de vous abstenir de toute spéculation.
4 Il vous est permis de dire : Les choses ne se sont passées de cette façon.
5 Mais aller plus loin en émettant des conjectures sur qui a été à l'origine
6 de cette déclaration n'est pas de votre ressort, à moins que vous n'ayez
7 des informations ou des connaissances particulières sur ce point.
8 Veuillez procéder.
9 Donc vous dites que les choses ne se sont pas passées ainsi.
10 Veuillez poursuivre, Monsieur Zec.
11 M. ZEC : [interprétation]
12 Q. Passons maintenant à un autre sujet. Vous dites dans votre déclaration
13 --
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Zec --
15 M. ZEC : [interprétation] Oui.
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] -- vous avez dit ceci lors d'un
17 entretien au niveau local. Pourriez-vous être un peu plus précis. De quel
18 document parlez-vous ?
19 M. ZEC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
20 Q. Et, Monsieur Vujic, pour éviter tout problème, vous avez évoqué
21 l'auteur de cette déclaration. Cette déclaration vient d'une personne dont
22 vous dites qu'elle faisait partie de votre unité. Son nom est Jasmin
23 Zahidic. Et cette déclaration a été recueillie à Zenica au moment où cet
24 homme a été expulsé de Prijedor en 1995. Donc c'est ce qu'il a dit
25 s'agissant de décrire ce qui lui est arrivé au moment où il accomplissait
26 son obligation de travail au sein de votre unité. Est-ce que vous le
27 contestez ?
28 R. Oui, bien sûr, je conteste ce qu'il dit, ce que vous venez de répéter à
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1 l'instant. Pour une raison très simple : les Zahidic n'ont pas été expulsés
2 de Prijedor. Ils étaient très appréciés, tout le monde les aimait à
3 Prijedor. Nos voisins d'appartenance ethnique Rom, et le nom de la mère
4 était Alija, tous les voisins l'aimaient beaucoup.
5 Q. Pas de raison de rentrer dans les détails. Nous reviendrons plus tard
6 sur ces événements de 1995. Mais le fait est que cette personne est arrivée
7 finalement à Zenica en 1995 parce qu'elle avait été expulsée par le VRS de
8 Prijedor. Est-ce que vous contestez cela ?
9 R. Bien sûr, je le conteste. Je le conteste. Je suis sûr qu'aucun de mes
10 soldats n'a été expulsé.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas d'interprétation une
12 nouvelle fois.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux répéter ce que j'ai dit.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non. L'interprétation a été faite
15 entre-temps.
16 Monsieur Zec, je regarde l'horloge. Il est temps de lever l'audience.
17 M. ZEC : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Vujic, nous allons suspendre
19 l'audience pour aujourd'hui. Nous aimerions vous revoir ici lundi, 4 mai, à
20 9 heures 30. Mais avant toute chose, je vous donne instruction --
21 Monsieur Mladic, vous n'êtes pas autorisé à parler à haute voix.
22 Donc, Monsieur Vujic, je tiens à commencer d'abord par vous donner
23 instruction du fait que vous ne devez parler à personne ou ne communiquer
24 de quelque façon que ce soit avec personne au sujet de votre déposition,
25 qu'il s'agisse de ce que vous avez déjà dit dans votre déposition jusqu'à
26 maintenant ou de ce que vous vous apprêtez à dire lundi.
27 Est-ce clair pour vous ? Si oui, vous pouvez sortir de la salle en
28 suivant M. l'Huissier.
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1 [Le témoin quitte la barre]
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, les propos que vous
3 souhaitez tenir au sujet du calendrier et que vous avez remis à plus tard,
4 est-ce que cela s'applique toujours ? Il s'agissait de quelque chose qui
5 devait se passer la semaine prochaine. Si c'est urgent, nous pourrions vous
6 entendre maintenant. Sinon, nous pouvons attendre lundi --
7 M. LUKIC : [interprétation] Nous pouvons --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- ou même, vous pouvez informer la
9 Chambre --
10 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que nous avons un accord avec
11 l'Accusation quant au moment où le témoin devrait venir pour terminer son
12 interrogatoire principal et le contre-interrogatoire, et l'un de nos
13 témoins a annulé sa déposition. Il avait des obligations qu'il ne pouvait
14 remettre. Nous l'avons donc déplacé à la dernière semaine du mois de mai.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord.
16 M. LUKIC : [interprétation] Mais étant donné le témoin qui doit être
17 entendu la semaine prochaine, je pense que nous sommes presque d'accord.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Par conséquent, il n'y a rien dont
19 nous ayons à nous inquiéter immédiatement. Il est possible que vous ayez
20 encore des inquiétudes --
21 M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous remercie.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous suspendons pour aujourd'hui.
23 Reprise lundi, 9 heures 30.
24 --- L'audience est levée à 14 heures 19 et reprendra le lundi 4 mai 2015, à
25 9 heures 30.
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