Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 12 mai 2015

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 33.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le prétoire

  6   et à l'extérieur du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, s'il vous plaît, citez le numéro de l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

  9   Monsieur le Juge. C'est l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko

 10   Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation]  Merci, Monsieur le Greffier.

 12   De façon inattendue, pour des raisons personnelles urgentes -- ne

 13   sera pas avec nous aujourd'hui. Nous nous attendons à ce que cela ne dure

 14   pas plus longtemps que cinq jours. Mais nous pensons qu'il sera parmi nous

 15   au début de la semaine prochaine. Le Juge Moloto et moi-même, nous pensons

 16   qu'il est dans l'intérêt de la justice de poursuivre et siéger dans cette

 17   affaire. Et nous allons travailler conformément à l'article 15 bis pour ce

 18   qui est du reste de la semaine.

 19   Est-ce que le témoin est prêt ? Et est-ce que M. l'Huissier est prêt

 20   également pour faire entrer le témoin dans le prétoire ?

 21   [Le conseil de la Défense se concerte]

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Monsieur le

 23   Juge. J'ai pensé au temps dont j'ai encore besoin. J'ai encore besoin de

 24   quelques minutes ce matin.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] "Quelques minutes", c'est un peu

 26   relatif. Pouvez-vous être plus précis.

 27   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pas plus de dix minutes.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.


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  1   M. McCLOSKEY : [interprétation] J'ai déjà utilisé 50 minutes par rapport à

  2   une heure et demie.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objection, pour ce qui est de la

  4   Chambre. Et je vois que Me Lukic hoche de la tête, donc il n'y a pas

  5   d'objection de la part de la Défense non plus.

  6   Monsieur Mladic, ne parlez pas à voix haute. Si vous voulez attirer

  7   l'attention de la Chambre sur un point, Me Lukic va certainement vous aider

  8   pour le faire.

  9   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 10   [Le témoin vient à la barre]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Todorovic.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, j'aimerais vous

 14   rappeler que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que vous

 15   avez prononcée au début de votre témoignage.

 16   M. McCloskey a quelques questions à vous poser.

 17   Monsieur McCloskey.

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   LE TÉMOIN : DRAGAN TODOROVIC [Reprise]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   Contre-interrogatoire par M. McCloskey : [Suite]

 22   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Todorovic.

 23   R.  Bonjour.

 24   Q.  Ce matin, j'aimerais vous montrer une séquence vidéo qui est courte et

 25   vous poser quelques questions par rapport à cette séquence vidéo.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] C'est la pièce P1147.

 27   Q.  Il s'agit de la séquence vidéo qui fait partie du recueil de séquences

 28   vidéo versé au dossier dans cette affaire. Je crois que c'est la séquence


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  1   du 13 juin 1996 de la région de Zepa. Nous voyons le général Mladic à table

  2   avec d'autres personnes. Je vais vous poser quelques questions là-dessus.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cette séquence a été déjà

  4   visionnée ?

  5   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous avons déjà

  6   vu cette séquence vidéo. Nous avons les sous-titres.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si c'est avec des sous-titres, il n'est

  8   pas nécessaire qu'on regarde cela deux fois.

  9   M. McCLOSKEY : [aucune interprétation]

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 12   "Mladic : Pour ce qui est de l'opération de capture d'Avdo Palic, le

 13   commandant Pecanac, je le sacrifie. Je lui ai dit : 'Mon Petit, tu vas là-

 14   bas.' Et il m'a dit : 'Chef, on va se revoir ?' 'Oui, Mon Petit, on va se

 15   revoir. Si on ne se voit pas, tu dois aller là-bas pour faire ton travail.'

 16   Doucement, doucement. Je le sais. Je vais tout dire, après quoi…"

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant regarder

 18   encore une fois cette séquence sans traduction en anglais pour qu'on puisse

 19   entre le général Mladic encore une fois, et nous allons commencer à 28:00.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez entendre le général Mladic

 21   sur le canal anglais, puisque je suppose que le témoin l'a déjà entendu.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, je veux que tout le monde puisse

 23   entendre le général Mladic.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous avons arrêté à 28:56.5

 27   Q.  Est-ce que vous reconnaissez l'homme qui a des armes et qui se trouve

 28   au centre de cet arrêt sur image ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et qui est-ce ?

  3   R.  C'est le commandant Pecanac.

  4   Q.  Vous avez entendu le général Mladic parler et vous avez entendu ce

  5   qu'il avait à dire. Il a mentionné le commandant Pecanac. Le général a dit

  6   cela d'une façon qui n'était pas tout à fait officielle, plutôt

  7   personnelle, n'est-ce pas ?

  8   R.  C'est une partie de leur conversation privée. Il s'agissait de quelque

  9   chose de privé. On voit que l'ambiance était décontractée. Il ne s'agissait

 10   pas de la distribution des tâches militaires. Ils célébraient quelque chose

 11   et ils se parlaient entre eux.

 12   Q.  Mais je vais vous poser une question similaire --

 13   R.  C'était en 1996.

 14   Q.  Mais cela nous montre qu'il y a un lien personnel entre Mladic et

 15   Pecanac, n'est-ce pas ?

 16   R.  Ce sont des officiers qui se fréquentaient au sein de l'état-major

 17   principal. Ils faisaient partie de l'état-major principal. Cela se passe

 18   dans une sorte de pré, de prairie. C'est en 1996. Ils se parlaient dans une

 19   ambiance relax. Il n'y a rien de spécial ici pour ce qui est de cette

 20   conversation.

 21   Q.  Bien. Nous avons entendu Mladic dire :

 22   "Quand nous avons fini avec cela, nous avons commencé l'opération pour

 23   capturer Avdo Palic, et le commandant Pecanac qui était sacrifié et

 24   infiltré…"

 25   Dites-nous ce qui est arrivé à Avdo Palic ?

 26   R.  Pour autant que je sache, il a participé aux négociations pour que

 27   l'armée puisse sortir en sécurité, l'armée de BiH de Zepa, pour éviter des

 28   victimes. Ils ont pris contact avec lui et ils ont parlé de la sortie des


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  1   blessés et de la population civile.

  2   Q.  Savez-vous qu'il était détenu par la VRS et il a été tué ?

  3   R.  Tout est possible. Je ne le sais pas. Je ne connais pas de détails pour

  4   ce qui est de son destin, mais je sais qu'il y avait des négociations avec

  5   lui.

  6   Q.  Peut-on maintenant regarder une autre séquence vidéo par rapport à ce

  7   sujet, par rapport au rapport entre le général Mladic et M. Pecanac.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] C'est 01299a. Il s'agit de la séquence

  9   vidéo qui a été retrouvée lors de la saisie exécutée dans la maison du

 10   général Mladic à Belgrade. Nous croyons qu'il s'agit de la séquence vidéo

 11   de juin 1997 pour ce qui est de la célébration du mariage du fils du

 12   général Mladic, Darko Mladic.

 13   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 14   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il n'y a pas de son. Il n'y a pas grand-

 15   chose, en fait, à entendre comme parole, donc il n'y a pas de sous-titre,

 16   ni de traduction.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, s'il n'y a pas de sous-

 18   titres, nous pouvons peut-être baisser le volume.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'on peut augmenter le volume un

 21   tout petit peu pour pouvoir entendre cela. Merci.

 22   [Diffusion de la cassette vidéo]

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 24   Q.  Avez-vous reconnu une chanson yougoslave connue de Tomo Draskovic,

 25   "J'ai touché le fond de la vie" ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  C'est une chanson qui parle de l'amour, qui parle également de la peine

 28   et de la tristesse ?


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  1   R.  Cela dépend de l'interprétation. Pour moi, c'est une chanson qu'on

  2   chante dans des cafés pour se détendre. C'est qu'on chante habituellement

  3   dans les cafés.

  4   Q.  Et qui est l'homme qui chante avec le général Mladic et qui le tient

  5   par l'épaule ?

  6   R.  C'est le commandant Pecanac.

  7   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que cette

  8   séquence vidéo soit versée au dossier. Je n'ai plus de questions à ce

  9   témoin.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, est-ce qu'on peut

 11   avoir une cote pour cette vidéo.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela sera P7382.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier. Je

 14   vois qu'un CD est remis.

 15   Maître Lukic, vous nous avez dit hier que vous alliez avoir besoin de dix à

 16   15 minutes.

 17   M. LUKIC : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez commencer.

 19   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 20   Nouvel interrogatoire par M. Lukic :

 21   Q.  [interprétation] Monsieur Todorovic, encore une fois, bonjour.

 22   R.  Bonjour.

 23   Q.  Je ne vais pas maintenant parler de ces séquences vidéo, puisque nous

 24   devrions nous concentrer à ce qu'il a été mentionné hier. Vous avez parlé

 25   de Slovène, de "Slovenac". M. McCloskey vous a posé des questions pour

 26   tirer ce point au clair. En fait, vous avez fait référence à Franc Kos

 27   lorsque vous avez parlé de "Slovenac" ou de Slovène ?

 28   R.  [aucune interprétation]


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  1   Q.  A la page de compte rendu 35 404, le Président de la Chambre, M. le

  2   Juge Orie, vous a posé la question pour savoir s'il était votre supérieur

  3   hiérarchique au moment où Pecanac est arrivé, et vous avez dit, à la ligne

  4   15 : A ce moment-là, oui, oui, il l'était. Maintenant, c'est ma question

  5   que je vous pose : est-ce que vous pouviez donner des ordres à "Slovenac",

  6   à Slovène ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Donc, pour ce qui est de la hiérarchie qui était établie au sein du 10e

  9   Détachement de Sabotage, est-ce que Franc Kos était à l'échelon supérieur

 10   par rapport à l'échelon où vous vous trouviez ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  A la page du compte rendu 35 406, à partir de la ligne 16, jusqu'à la

 13   page 35 408, la première ligne, il était également question de Pecanac et

 14   du fait de savoir s'il était adjudant du général Ratko Mladic, pour savoir

 15   s'il était près de lui, s'il exécutait des ordres du général Mladic. Avez-

 16   vous jamais été présent au moment où le général Ratko Mladic donnait des

 17   ordres au commandant Pecanac ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  A l'époque, est-ce que vous avez vu Pecanac avec le général Ratko

 20   Mladic ?

 21   R.  Cela dépendait. Où, à Dragasevac ?

 22   Q.  Oui.

 23   R.  Non.

 24   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais clarifier

 25   certains points pour ce qui est de la traduction. A la page 35 402, ligne

 26   25 du compte rendu d'hier, il a été mentionné la fonction de garde ou de

 27   sentinelle. Et ensuite, cela a été traduit à la page 35 408, ligne 15,

 28   comme étant officier qui se trouvait au portail.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je ne sais pas si nous devrions

  2   demander au témoin de retirer ses écouteurs --

  3   Monsieur Todorovic, est-ce que vous comprenez la langue anglaise ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, retirer

  6   vos écouteurs.

  7   M. LUKIC : [interprétation] Etant donné que le témoin a retiré ses

  8   écouteurs, il utilisait toujours le même terme, et ce terme a été

  9   enregistré dans son témoignage précédent à la page 35 410 comme étant

 10   "gatekeeper" en anglais, "le garde au portail". Ce qui peut créer une

 11   certaine confusion, mais je pense qu'à chaque fois ce monsieur a dit qu'il

 12   s'agissait de "gatekeeper", ou en serbe "portir", ou "portier".

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.

 14   Vous avez dit qu'il avait toujours utilisé le même terme et que ce terme a

 15   été enregistré dans son témoignage précédent comme étant "gatekeeper" en

 16   anglais, ou le portier. C'est au moins ce qui a été traduit à la Chambre.

 17   En fait, il a dit "portier", ou "gatekeeper" en anglais.

 18   M. LUKIC : [aucune interprétation] 

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que si vous êtes préoccupé

 20   concernant une éventuelle confusion créée par rapport à ce terme, je pense

 21   que le mieux est d'utiliser le terme que le témoin avait utilisé en sa

 22   langue maternelle et ensuite lui demander ce que ce terme veut dire pour

 23   lui, qu'il nous décrive quelle était la tâche de ce "gatekeeper" ou

 24   "portier" et comment il s'acquittait de cette tâche.

 25   Je pense que c'est la façon la plus appropriée pour tirer ce point au

 26   clair.

 27   Monsieur le Témoin, vous --

 28   Maître Lukic, vous pouvez poursuivre.


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  1   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

  2   Q.  Hier, vous avez parlé du portail, de la guérite de réception.

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Qui se tenait à ce portail, à l'entrée de votre base ?

  5   R.  Il s'agissait des portiers, de quatre hommes âgés qui contrôlaient

  6   l'entrée dans la caserne, enregistraient les noms et les prénoms des

  7   personnes qui y entraient, les plaques d'immatriculation des véhicules qui

  8   entraient dans l'enceinte de la caserne, annonçaient la venue des personnes

  9   dans le bureau du commandant du détachement, puisque personne ne pouvait y

 10   entrer sans s'être présenté au préalable à ces portiers, qui étaient de

 11   simples soldats, mais des personnes qui étaient un peu plus âgées par

 12   rapport à d'autres soldats. S'il le faut, je peux vous citer leurs noms.

 13   Q.  Oui, allez-y.

 14   R.  Obrenovic Vojislav, il était l'un d'entre ces quatre portiers. Tomic

 15   Ratko, Vasiljevic Slobo, Simanic Milan. Et parfois, il y avait un autre

 16   soldat pour remplacer l'un d'entre eux, également un autre soldat de notre

 17   détachement.

 18   Q.  Merci. Je pense que cela nous suffit comme explication pour les besoins

 19   de cette affaire.

 20   R.  Je suis content de voir que, bon, il ne s'agissait pas d'officiers mais

 21   de portiers.

 22   Q.  Merci.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, pour éviter toute

 24   confusion, lorsque vous dites que l'un de ces portiers, comme vous les avez

 25   appelés, était Vojislav Obrenovic, ce Vojislav Obrenovic n'est pas la même

 26   personne que Zoran Obrenovic. Est-ce que je vous ai bien compris ? 

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ce n'est pas la même personne.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Pour être tout à fait certain


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  1   qu'il n'y ait pas de confusion.

  2   Continuez, Maître Lukic.

  3   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] O.K.

  5   M. LUKIC : [interprétation]

  6   Q.  Je vais aborder un autre sujet maintenant. Il était question à la page

  7   du compte rendu 35 415 et 416 des femmes qui se trouvaient à Pelemis

  8   d'appartenance ethnique musulmane.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Ces femmes, est-ce qu'elles étaient relâchées à un moment donné ?

 11   R.  Ces femmes devaient être échangées contre Stanimir Pelemis, qui était à

 12   la tête de cette action. Je ne sais pas s'il a posé la question à Pelemis

 13   pour que cela soit fait. Je ne sais pas s'il lui a donné le feu vert pour

 14   cela, puisque moi je n'avais pas accès au commandement.

 15   Q.  Peut-être que je n'étais pas suffisamment clair. Dites-nous, si vous le

 16   savez, si ces femmes, à un moment donné, étaient parties de l'autre côté

 17   contrôlé par l'armée musulmane ?

 18   R.  Les uns retournaient à Batkovic, les autres à Vlasenica. Puisqu'il y

 19   avait des groupes qui passaient tout le temps. On ne savait pas comment on

 20   pouvait défendre la ligne, on ne savait pas ce qui allait se passer, et

 21   tout cela s'est passé en vitesse.

 22   Q.  Très bien.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela n'est toujours pas une réponse

 24   claire.

 25   D'abord, est-ce que vous avez des connaissances personnelles concernant le

 26   destin de ces femmes et ce qui leur a été arrivé ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais qu'il y avait un groupe qui est

 28   arrivé. Je ne sais pas de quel endroit ce groupe est arrivé. Je suis allé


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  1   avec ce groupe jusqu'à l'école à Hambarine pour que ce groupe puisse passer

  2   sur le territoire contrôlé par l'ABiH. Et tout le monde est passé de

  3   l'autre côté. Personne n'a été arrêté ni interrogé. Donc ces gens vivent et

  4   travaillent normalement aujourd'hui. J'ai eu même des contacts avec

  5   certains d'entre eux. Il y avait --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, est-ce qu'il y a eu

  7   un échange ? Est-ce qu'une personne a été échangée contre ces femmes qui

  8   partaient sur le territoire contrôlé par l'ABiH ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il n'y a pas eu d'échange.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Puisque nous ne savions pas quoi faire avec

 12   elles. Puisque nous n'avions pas quoi à manger, je les ai emmenées près de

 13   leur ligne. Et au retour, je suis tombé dans l'embuscade tendue par l'ABiH.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cependant, hier, je pense que vous nous

 15   avez dit à plusieurs reprises qu'ils étaient prêts pour être échangés, mais

 16   si j'ai bien compris vos propos; finalement ils n'ont pas été échangés,

 17   puisque vous n'avez rien reçu en échange.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était le premier groupe qui a été emmené.

 19   Six femmes et sept, huit, dix hommes peut-être. Ils ont été renvoyés

 20   quelque part, mais je ne sais pas où. Je n'ai pas participé à cela, et je

 21   suis sûr à 100 % du groupe que j'ai fait passé moi-même, je suis sûr qu'ils

 22   sont tous partis. Mais ce groupe qui était allé à Vlasenica et Sekovici, je

 23   ne suis pas sûr. Moi, je suis allé préparer la caserne dans les dortoirs à

 24   Vlasenica. J'ai préparé le détachement d'assaut. Et donc, je ne sais pas ce

 25   qui se passait là-bas. Je faisais les allers-retours.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis perplexe car maintenant vous

 27   parlez de deux groupes, alors qu'hier vous parliez d'un seul groupe.

 28   Vous nous avez dit hier que c'étaient des femmes qui s'occupaient de laver


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  1   les affaires, et puis on vous a posé des questions quant à la question de

  2   savoir si elles fréquentaient de jeunes soldats serbes. Est-ce que c'était

  3   le groupe qui était prêt à être échangé ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant, je parle du premier groupe de six

  5   femmes et de ces hommes, celles qui lavaient. Et je ne sais pas s'ils ont

  6   été renvoyés et, si tel est le cas, à qui. Il n'y a pas eu d'échange.

  7   S'agissant de l'autre groupe que moi j'ai emmené, je les ai relâchés devant

  8   nos lignes, entre les deux lignes de front. Et à la ligne de séparation, je

  9   peux vous dire que personne n'a été blessé ni touché. Ils ont passé, et

 10   encore aujourd'hui ils se portent bien, tous.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites, parlant du premier groupe :

 12   Je ne sais pas s'ils ont été renvoyés, et si oui, à qui. Il n'y a pas eu

 13   d'échange. Si vous ne savez pas où ils sont allés, comment est-ce que vous

 14   savez qu'il n'y a pas eu d'échange ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'étais pas là -- ils n'étaient pas là

 16   lorsque je suis revenu, ni la deuxième fois, ni la troisième fois. Je n'ai

 17   vu personne là-bas. C'est un petit village. On peut voir toutes les

 18   maisons.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'est votre conclusion, puisque

 20   vous ne les avez pas vus lorsque vous traitiez de ce deuxième groupe, vous

 21   avez conclu qu'ils n'ont pas été échangés, même si vous n'avez pas de

 22   connaissance précise quant à la question de savoir où ils sont allés ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic.

 25   M. LUKIC : [interprétation]

 26   Q.  S'il vous plaît -- peut-on passer d'abord au huis clos partiel, je

 27   pense que c'est nécessaire. Est-ce que vous pouvez nous dire les noms des

 28   personnes du groupe.


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  1   R.  Ce sont des gens de Vlasenica que je ne connaissais pas. Mais une femme

  2   vivait à Kladanj, dans l'agglomération appelée Sigonsko Naselj,

  3   agglomération des gitans. Ensuite, une femme, je la connaissais bien, elle

  4   a laissé une petite fille derrière elle. Elle s'appelle Jasmina. Et cette

  5   petite fille qui s'appelle Irma, on l'a gardée et on l'a échangée après.

  6   Son nom est Irma. Elle a à peu près le même âge que mon fils.

  7   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : Retirer "elle a été échangée".

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si je dis que ces personnes étaient de

  9   Vlasenica, comme vous le dites, est-ce que vous êtes sûr que vous êtes en

 10   train de parler du premier groupe, ou bien est-ce que vous parlez du

 11   deuxième groupe ? Le groupe avec lequel vous aviez des contacts personnels.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Le deuxième groupe. Et heureusement, ils sont

 13   tous vivants. Ils ont tous passé. Pour la plupart, ils ont été relogés à

 14   travers l'Europe. Certains d'entre eux sont arrivés jusqu'aux Etats-Unis.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout à l'heure, vous avez dit que vous

 16   connaissiez ces personnes dans le groupe avec lequel vous étiez en contact

 17   personnellement, et maintenant vous dites que mis à part Irma -- pourtant,

 18   je vois que le compte rendu d'audience n'est pas complet. J'ai du mal à…

 19   M. LUKIC : [interprétation] Je vais continuer à poser des questions de ce

 20   genre. Peut-être cela clarifiera les choses, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, car si je me souviens bien, j'ai

 22   entendu en anglais, mais en anglais ceci n'apparaît pas dans le compte

 23   rendu d'audience, le mot "échangée".

 24   Et je ne suis pas sûr -- mais continuez pour l'instant, Maître Lukic.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 26   Q.  Monsieur Todorovic, est-ce que ce groupe a été échangé contre

 27   quelqu'un, ou bien est-ce qu'ils ont été relâchés pour aller de l'autre

 28   côté ?


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24  

25  

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27  

28  


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  1   R.  Le groupe que j'ai amené ?

  2   Q.  Oui.

  3   R.  Eh bien, il faut comprendre ici.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez ralentir, Monsieur le Témoin.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Chez nous, l'expression c'est les personnes

  6   ont été relâchées pour être échangées. Mais en vérité, ces personnes ont

  7   été relâchées sans aucun échange. Et je suis fier de l'avoir fait. Je suis

  8   content de savoir que toutes ces personnes sont vivantes. Aujourd'hui, je

  9   n'ai pas d'autres commentaires de cela, et si j'ai dit que c'était un

 10   échange, c'était tout simplement peut-être une libération. Vous savez, je

 11   ne suis pas un juriste, donc je parle de façon ordinaire. Mais toutes ces

 12   personnes ont été relâchées en tout sécurité. Tous les enfants n'ont subi

 13   aucune conséquence. Et du côté serbe, personne ne les a malmenés pendant

 14   que je les faisais passer à travers le village. Tout s'est passé de manière

 15   très régulière.

 16   M. LUKIC : [interprétation]

 17   Q.  Combien de personnes se trouvaient dans le groupe que vous avez fait

 18   traverser le village ?

 19   R.  Eh bien, je suis venu avec le groupe. On a traversé le village, on est

 20   allé jusqu'à la ligne, et on souhaitait relâcher les personnes. Ensuite, il

 21   s'est constaté qu'il y a eu des contacts, et puis on a organisé les

 22   camions, on les a directement fait traverser la ligne et on les a

 23   relâchées. Ces personnes sont vivantes encore aujourd'hui. Certaines

 24   d'entre elles sont de Kladanj. J'étais à Kladanj. Je ne les connais pas

 25   individuellement, je ne connais pas leurs noms, mais je sais où ces

 26   personnes sont et qui elles sont.

 27   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire la chose suivante : vous avez

 28   dit qu'il y avait combien de personnes ? Vous avez qu'il y avait beaucoup


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  1   d'enfants. Mais dix, 50, 100 ?

  2   R.  Eh bien, il y a un bus, il y avait beaucoup de personnes. Vous savez,

  3   beaucoup de personnes peuvent entrer dans un car. Il y avait des enfants,

  4   des femmes, des personnes âgées, et je les ai fait passer en les traitant

  5   gentiment. Je les ai laissés partir.

  6   Q.  Irma, c'est une jeune fille, où est-ce qu'elle était logée ?

  7   R.  Elle a été placée auprès d'une famille, la famille de Jerko Vucinovic.

  8   Q.  Et combien de temps est-ce qu'Irma est restée dans cette maison ?

  9   R.  Eh bien, elle y est restée pendant que mon fils y était. Moi, je suis

 10   parti pour Vlasenica, et j'y suis allé. J'allais là-bas afin de rendre

 11   visite à ma femme et à mon enfant de temps en temps. Ils étaient ensemble.

 12   Q.  Jerko Vucinovic, qu'est-ce qui lui est arrivé ?

 13   R.  Jerko était quelqu'un de bien. Il était sur la ligne, il avait son

 14   propre foyer, et il a été capturé lors d'une des attaques.

 15   Q.  Puisque ceci ne faisait pas partie des questions posées par le

 16   Procureur, qu'est-ce que Jerko vous a dit brièvement ? Est-ce qu'il a été

 17   relâché ? Qu'est-ce qu'il vous a dit ?

 18   R.  Jerko, lorsqu'il a été relâché, il a dit que la petite fille, qui est

 19   maintenant déjà une fille, l'avait sauvé lorsqu'elle est arrivée à Tuzla

 20   pour le visiter en prison. Elle lui a dit, Mon oncle, et elle s'est assise

 21   sur ses genoux.

 22   Q.  Une seule question : lorsque vous avez vu ces femmes près de l'eau,

 23   c'était le premier groupe --

 24   R.  Oui.

 25   Q.  -- dans le centre du village, est-ce qu'elles étaient gardées ? Est-ce

 26   qu'il y avait des personnes armées qui les gardaient près de l'eau ? Est-ce

 27   que vous avez vu ça ?

 28   R.  Non.


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  1   Q.  Vous n'avez pas vu d'autres gardes ?

  2   R.  Il n'y avait personne là-bas. C'était au centre du village. Il n'y

  3   avait pas suffisamment de soldats pour les mettre proprement sur la ligne,

  4   mais peu importe.

  5   Q.  Monsieur Todorovic, merci. Je n'ai plus de questions pour vous.

  6   R.  Merci.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

  8   Questions de la Cour : 

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce groupe de femmes n'a jamais été

 10   gardé, Monsieur le Témoin ?

 11   R.  Un vieillard - oncle Momir, on l'appelait - était avec eux. Si on peut

 12   dire que c'est lui qui les gardait, je ne sais pas.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y avait une seule personne ou bien

 14   est-ce qu'on peut considérer qu'il était dans une telle situation qu'on

 15   peut considérer qu'il gardait les femmes ?

 16   R.  Je l'ai vu là-bas avec elles. Mais je n'étais pas sur place tout le

 17   temps, donc je ne peux pas vraiment vous dire beaucoup plus.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Hier, vous nous avez dit qu'il y avait

 19   quelques vieillards qui les gardaient. Donc vous avez parlé de plusieurs

 20   personnes, puisque vous avez parlé au pluriel. Même si vous avez précisé

 21   une seule personne, vous avez parlé de plusieurs personnes.

 22   R.  Eh bien, il ne pouvait pas être sur place tout le temps. Il y avait

 23   plusieurs vieillards sur place. Il y avait toujours 20 à 30 personnes sur

 24   place, des hommes, des femmes et des enfants, lors des périodes pendant

 25   lesquelles il n'y a pas eu de pilonnage.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et vous nous dites en ce moment que

 27   lorsque vous avez dit qu'il y avait quelques vieillards là-bas, puis vous

 28   dites qu'il y avait toujours 20 ou 30 personnes là-bas - des hommes, des


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  1   femmes et des enfants - mais les femmes et les enfants n'étaient pas les

  2   gardes, mais c'étaient plutôt les personnes gardées, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, je suppose qu'il devait toujours y avoir un homme qui les gardait

  4   à tout moment. Mais il n'était pas nécessaire d'avoir dix soldats ou dix

  5   hommes, dix personnes à les garder puisque ces personnes n'étaient pas en

  6   danger. Elles étaient nécessaires pour que l'échange puisse être organisé.

  7   Le seul danger était le danger du pilonnage. Mais vous savez, je ne savais

  8   rien à ce sujet. Je ne pouvais rien faire. Ceci se décidait à un niveau

  9   plus élevé. Vous savez, j'étais un simple soldat et je faisais ce que l'on

 10   me disait de faire. Donc je ne pouvais pas tout d'un coup passer mon temps

 11   avec ces hommes et ces femmes du village. Je devais travailler.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, lors de votre

 13   réponse, vous avez suggéré - et là, je vous donne l'occasion de faire un

 14   commentaire - que ces femmes étaient gardées afin d'être protégées contre

 15   le pilonnage. Je ne sais pas comment les choses ont fonctionné, mais je

 16   vous fournis là l'occasion de nous donner une explication, ou peut-être

 17   vous n'avez pas suggéré cela, mais c'est la manière dont j'ai compris les

 18   choses.

 19   R.  J'ai dit qu'à tout moment il y avait 20 ou 30 hommes, femmes, personnes

 20   âgées, et qu'il n'y a pas eu d'autre danger là-bas que celui provenant du

 21   pilonnage. Et puis, j'ai dit qu'il y avait un homme qui les surveillait

 22   afin de pouvoir les faire entrer dans la maison où ces personnes étaient

 23   hébergées. Je veux dire, personne ne pouvait vous sauver d'un obus. Et je

 24   sais très bien ce que j'ai dit.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et puis, hier, vous avez utilisé

 26   spontanément le mot "garder", n'est-ce pas ? Alors qu'on ne vous a pas

 27   demandé si les personnes ont été gardées ou pas. Maintenant, la question

 28   est de savoir si ces personnes fréquentaient les autres, et ensuite vous


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  1   avez dit qu'elles étaient gardées.

  2   R.  Je devais dire cela, il y avait un homme avec eux, ce Momir. Je ne peux

  3   pas dire que c'était un pasteur. J'ai dû l'appeler un garde de sécurité.

  4   Puisqu'à l'époque il n'y avait pas de moutons, ni de pasteur qui les

  5   gardait. Il s'agissait des personnes. Il s'agissait des femmes qu'il

  6   surveillait. C'est comme cela que j'en ai parlé, il les surveillait.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, vous avez d'autres

  8   questions ?

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je souhaite brièvement clarifier certaines

 10   questions concernant Pelemisi qui ont été soulevées.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 12   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. McCloskey :

 13   Q.  [interprétation] Monsieur, qu'est-il arrivé à la jeune fille musulmane

 14   âgée de 16 ans qui a été retenue à Pelemisi ? Elle s'appelait Ferida

 15   Osmanovic.

 16   R.  J'ai été sur le terrain avec d'autres soldats. Et lorsque je suis

 17   revenu avec d'autres soldats, quelqu'un avait informé le chef qu'elle avait

 18   soumis un traitement.

 19   Q.  Et de quelle manière ? Est-ce qu'elle a été maltraitée ?

 20   R.  Oui, de la part d'un soldat.

 21   Q.  Elle a été violée, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Elle a été violée à plusieurs reprises pendant qu'elle y était, n'est-

 24   ce pas ?

 25   R.  Je ne sais pas. Je n'ai rien appris au sujet de la question de savoir

 26   qui l'a violée et combien de fois.

 27   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas entendu la fin de la réponse.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter votre


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  1   dernière phrase. Vous avez dit :

  2   "Je n'ai rien appris au sujet de cela, quant à la question de savoir qui

  3   l'a violée et combien de fois."

  4   Qu'avez-vous dit ensuite ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pouvais pas être chargé de cette affaire

  6   puisque je n'avais pas accès là-bas. Donc je ne pouvais pas vérifier ni

  7   mener une enquête quant à la question de savoir ce qui s'est passé.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  9   Q.  Et le commandant Miso Pelemis en a été informé, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, et il a sanctionné ce soldat. Je ne sais pas exactement ce qu'il

 11   lui a été fait. Je sais qu'il a été passé à tabac. Je sais qu'un rapport a

 12   été rédigé et soumis à la brigade. C'est tout ce que je sais au sujet de

 13   cette affaire.

 14   Q.  Et Svetozar Andric, alors, aurait été informé de cela lui aussi en tant

 15   que commandant de la brigade ?

 16   R.  Je ne le sais vraiment pas. Je ne suis pas sûr.

 17   Q.  Qui est donc cette personne qui a été sanctionnée, la personne qui a

 18   commis le viol ?

 19   R.  Je ne sais pas. C'était un jeune homme de la brigade ou du bataillon,

 20   de ce groupe d'hommes qui étaient sur la ligne du front. Je n'ai pas la

 21   liste, les noms de ces personnes. Il y avait des personnes parmi eux qui

 22   étaient venues de l'extérieur, des personnes déplacées. Mais je n'ai pas

 23   approfondi le sujet. Vous savez, en ce qui me concernait…

 24   Q.  Monsieur, nous avons entendu Miso Pelemis. Nous savons que c'était un

 25   petit groupe d'individus, une petite unité. Vous avez décrit la façon dont

 26   vous avez entendu parler du viol. Vous avez décrit comment vous avez

 27   entendu parler de la sanction, du passage à tabac du soldat. Nous savons

 28   que vous avez un nom dans votre tête. Veuillez nous dire le nom de ce


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  1   soldat qui a commis le viol.

  2   R.  Vous savez, j'ai beaucoup de noms d'officiers et de soldats dans ma

  3   tête. La guerre a duré pendant quatre ans, et je ne souhaite pas commettre

  4   une injustice vis-à-vis de l'une quelconque de ces personnes et regretter

  5   cela le lendemain. Je n'ai pas mené une enquête au sujet de cette affaire.

  6   Vous savez, il y a des traces de tout cela.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous arrêter là. Personne ne

  8   vous a demandé si vous aviez mené une enquête. Avez-vous entendu quel était

  9   le nom de la personne qui avait commis le viol ? Et si oui, dites-nous quel

 10   était le nom que vous avez entendu.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 12   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 13   Q.  La fille, une petite fille de six [comme interprété] ans, a été

 14   retrouvée près d'une fosse commune qui se trouvait à 5 kilomètres de

 15   Pelemisi avec 59 autres personnes. Comment est-ce qu'elle s'est retrouvée

 16   là-bas ?

 17   R.  S'il vous plaît, lorsque vous me posez ces questions-là, je peux vous

 18   dire que je ne sais pas si elle a été renvoyée à Vlasenica encore une fois

 19   ou prise de Vlasenica. Je ne peux pas faire de commentaires. Je n'étais pas

 20   sur place. J'étais membre du détachement d'assaut à Vlasenica. Je suis allé

 21   à Pelemisi de temps en temps pour voir ma famille, là où se trouvaient ma

 22   femme et mon fils. Je ne suis pas allé à la ligne de front jusqu'en 1993

 23   lorsque la ligne est tombée pour la première fois.

 24   Q.  Est-ce que vous savez ce qui s'est passé aux autres trois femmes qui

 25   ont été retrouvées dans cette fosse commune, qui avaient autour de 20 ans ?

 26   Aida Karac et Velida Karac, sa femme [comme interprété].

 27   R.  Non.

 28   Q.  Et Minka Mehanovic. Vous vous souvenez de Minka ? Comment est-ce


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  1   qu'elle a fini dans cette fosse commune ?

  2   R.  Je ne me souviens pas. Je ne sais pas.

  3   Q.  Trop de fosses communes, trop de viols. C'est pour cela que vous ne

  4   pouvez pas vous rappeler ?

  5   R.  Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est que je n'ai fait du mal à

  6   qui que ce soit et que je peux confronter chacun. Tous ceux qui étaient sur

  7   place, qui me rencontraient, qui appartenaient au groupe ethnique musulman,

  8   je suis à leur disposition. Je ne peux pas faire de commentaires quant à la

  9   question de savoir qui a fait cela. Je n'ai pas d'information là-dessus.

 10   Nous devons tous vivre.

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres

 12   questions.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une ou quelques questions encore à

 14   vous poser.

 15   Questions supplémentaires de la Cour : 

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. McCloskey vous a parlé maintenant des

 17   femmes qui ont été retrouvées dans des fosses communes, même de très jeunes

 18   femmes. Est-ce que vous avez entendu parler de cela ou bien est-ce que vous

 19   n'étiez pas du tout au courant de cela ? Ou bien, est-ce que vous

 20   l'entendez aujourd'hui pour la première fois et vous dites : Eh bien, je

 21   n'ai pas d'explication. Je n'étais pas sur place. Mais est-ce que vous avez

 22   entendu parler de cela avant ?

 23   R.  Eh bien, au moment où les fosses communes ont commencé à être excavées,

 24   oui, bien sûr, j'ai entendu parler de cela. Dans l'ensemble de la

 25   municipalité et du pays, on était au courant, on en parlait. C'est ce qui

 26   s'est passé derrière nos lignes. Je ne suis pas allé là-bas. La ligne du

 27   front était à Pelemisi, et ceci s'est passé derrière les lignes. Il y avait

 28   la route Vlasenica-Sekovici-Zvornik. N'importe qui pouvait tuer n'importe


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  1   qui pendant la nuit et transférer sa victime, et personne ne pouvait être

  2   au courant. Je n'ai rien fait de tout cela. Je ne peux pas faire de

  3   commentaires. J'étais là-bas. Je peux parler seulement des choses au sujet

  4   desquelles je suis au courant. Je ne peux pas parler au sujet de choses que

  5   j'ignore. Et je ne suis pas un participant direct ou un auteur de ce genre

  6   de crimes. J'envoyais ces gens à Kladanj et, je le redis, ces personnes

  7   sont encore vivantes.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et lorsque vous parlez des personnes,

  9   vous parlez des personnes avec lesquelles vous étiez en contact

 10   directement ?

 11   R.  Oui.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et s'agissant de ceux avec qui vous

 13   n'étiez pas en contact directement, est-ce que vous pouvez nous dire cette

 14   fosse commune était dans le territoire contrôlé par les forces serbes ou

 15   par les forces musulmanes ?

 16   R.  Non, c'était le territoire contrôlé par l'armée serbe mais derrière la

 17   ligne des soldats serbes. Donc je ne sais pas ce qu'il se passait derrière

 18   la ligne, ce qui a été fait et quand ceci a été fait, au cours de quelle

 19   période. J'ai vécu ma vie près de Vlasenica et auprès du détachement

 20   d'assaut. C'est là que j'étais.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous pose ces questions, car

 22   lors de votre déposition vous avez décrit une situation de respect où les

 23   civils n'ont pas été affectés ni blessés. Et si j'ai bien compris vos

 24   propos, vous au moins, vous avez appris que tous les civils n'ont pas été

 25   traités de cette manière, de la manière dont vous avez décrit les choses,

 26   et que certains d'entre eux ont été retrouvés dans des fosses communes.

 27   J'ai bien compris vos propos ?

 28   R.  Tous les civils avec lesquels j'étais en contact, que j'ai rencontrés


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  1   au cours de la guerre, sont vivants. Je peux même vous dire leurs prénoms.

  2   Il y avait Muras de Srebrenica et d'autres. S'agissant du groupe que j'ai

  3   amené --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous arrêter là, Monsieur le

  5   Témoin. Je ne vous pose pas de questions au sujet des personnes avec qui

  6   vous étiez en contact personnellement. Mais vous nous avez dit aussi que

  7   s'agissant des autres -- vous avez parlé des autres et de ce qu'il leur est

  8   arrivé sans entrer dans les détails. Et vous ne nous avez pas dit à ce

  9   moment-la que vous étiez au courant, même si c'étaient des personnes que

 10   vous n'aviez pas contactées directement, que certaines de ces personnes ont

 11   été retrouvées dans des fosses communes; alors que j'avais l'impression, si

 12   j'ai bien compris, que vous avez appris cela par la suite.

 13   R.  Eh bien, une fois les excavations commencées, oui, j'ai dû être au

 14   courant. J'ai lu au sujet de cela dans la presse. Une fosse commune a été

 15   trouvée à Pelemis. J'ai vu ça à la télévision. Je n'étais pas sur place.

 16   J'en ai entendu parler dans les médias.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur, comment avez-vous appris que

 20   le soldat qui avait violé Ferida Osmanovic avait été tabassé ?

 21   R.  Mais vous savez, on a entendu parler de cela immédiatement. Dès qu'on

 22   apporte la nourriture, on sait ce qui se passe au village. C'était ainsi.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne suis pas sûr que vous avez bien

 24   compris ma question. Je vous pose la question au sujet du soldat dont vous

 25   nous avez dit qu'il avait été passé à tabac comme punition pour le viol de

 26   Ferida Osmanovic. Comment avez-vous appris cela ?

 27   R.  Eh bien, tout le monde sur la ligne parlait de cela, et on savait qu'il

 28   avait été passé à tabac en raison du viol. Tous ceux qui étaient sur la


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  1   ligne du front serbe à Pelemisi savaient pourquoi il avait été passé à

  2   tabac et pourquoi il a été expulsé de la ligne.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et on savait qui il était ?

  4   R.  Probablement.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et vous aussi, vous connaissez son

  6   nom ?

  7   R.  Il y avait beaucoup de choses que l'on savait et beaucoup de choses que

  8   l'on ne savait pas. Personnellement, je ne connaissais pas cette personne.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous arrêter là. Je ne vous

 10   pose pas de questions concernant le nombre de choses qui étaient connues.

 11   Je souhaite savoir si vous connaissiez cet homme. Il était soldat de la

 12   même unité que vous. Est-ce que vous le connaissiez ?

 13   R.  Il n'était pas membre de mon unité. Aucun soldat de mon unité n'a

 14   jamais rien fait de mal devant moi au sein de mon unité ou quoi que ce

 15   soit, pour autant que je le sache. Il était membre du bataillon --

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous arrêter là. Oui. J'ai

 17   compris. Donc, excusez-moi d'avoir dit qu'il faisait partie de la même

 18   unité que vous. Mais vous avez dit --

 19   R.  Il n'était pas mon soldat.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je comprends cela, il n'était pas dans

 21   la même unité que vous. Il était dans la même base que là où Ferida était

 22   détenue, et il y avait d'autres femmes qui étaient détenues. Et c'est là

 23   que vous avez travaillé vous aussi, n'est-ce pas ?

 24   R.  Je n'y étais pas avec lui.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne suis pas en train de dire que

 26   vous étiez avec lui. Je dis simplement qu'il était basé au même endroit que

 27   vous, où était basé le camp et où les personnes étaient détenues. Vous avez

 28   fait venir un autre groupe à cet endroit.


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  1   R.  Tout d'abord, je dois vous dire que cela n'était pas un camp. C'était

  2   un magasin. C'était une maison particulière.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bon, quels que soient les détails,

  4   vous, vous étiez là, lui était là. Cette femme a été violée. Je ne suis pas

  5   en train de dire --

  6   R.  A ce moment-là, lorsque cette fille a été violée, je n'étais pas là, je

  7   vous l'ai dit. Je vous l'ai dit très clairement, j'étais en mission, et

  8   lorsque je suis rentré de ma mission --

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous demande simplement d'écouter

 10   ma question. Je ne suis pas en train de vous demander si vous étiez le

 11   témoin d'un viol. Je souhaite savoir comment vous savez que cette personne

 12   a été battue. Vous dites que tout le monde était au courant. Je souhaite

 13   savoir de vous qui vous a dit que cette personne avait été battue.

 14   R.  Je ne me souviens pas du nom. Il y avait de nombreux soldats. Je ne

 15   souhaite pas dire du mal de qui que ce soit.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'autres questions.

 18   Monsieur Todorovic, ceci met un terme à votre déposition. Je souhaite vous

 19   remercier vivement pour être venu jusqu'à La Haye et pour avoir répondu aux

 20   questions qui vous ont été posées, qui vous ont été posées par les parties

 21   et par les Juges de la Chambre, et je vous souhaite un bon retour.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez suivre l'huissier.

 24   [Le témoin se retire]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes sur le point d'avoir une

 26   pause. La Défense est-elle prête et peut-elle citer son prochain témoin à

 27   la barre après la pause ?

 28   M. LUKIC : [aucune interprétation]


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons avoir une pause -- Monsieur

  2   McCloskey, il y avait un point en suspens par rapport à hier et il y avait

  3   une objection.

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Précisément. Le numéro 65 ter 31647, auquel

  5   a été attribué la cote P07381. Si l'objection subsiste, je vais le retirer.

  6   Si Me Lukic ne s'y oppose pas, à ce moment-là nous allons pouvoir attribuer

  7   une cote.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic.

  9   M. LUKIC : [interprétation] Nous allons maintenir notre objection, nous

 10   devons voir de quel document il s'agit.

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Pas de problème. Cote provisoire dans ce

 12   cas, et nous reviendrons dessus et nous reviendrons vers vous.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Est-ce

 14   qu'un numéro a été mis de côté ou est-ce que c'est une cote provisoire ?

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] En fait, une cote a été attribuée, mais

 16   il y a eu une objection entre-temps --

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, nous n'avons pas encore de…

 18   Le numéro 65 ter 31647 a reçu quel numéro, Monsieur le Greffier ?

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] P7381, Messieurs les Juges.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le P7381 reçoit une cote provisoire

 21   marquée aux fins d'identification.

 22   Quand est-ce que vous allez revenir vers nous ? Parce que nous ne

 23   souhaitons pas que ceci reste sur notre liste des éléments en attente.

 24   Cette semaine, Maître Lukic ?

 25   C'est au compte rendu.

 26   Nous allons avoir une pause et reprendre à 11 heures moins cinq.

 27   --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.

 28   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous attendons l'arrivée du prochain

  2   témoin dans le prétoire.

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, une digression en

  4   attendant l'arrivée du témoin. Elle a du mal à lire, donc au lieu de lui

  5   demander de lire la déclaration solennelle, il serait peut-être préférable

  6   de prononcer les mots pour elle et lui demander de répéter.

  7   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, est-ce que c'est un

  9   problème de vue ou est-ce que c'est parce qu'elle est analphabète ?

 10   M. STOJANOVIC : [interprétation] Les deux à la fois, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Madame.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous ne déposiez, le Règlement

 14   de procédure et de preuve requiert que vous prononciez une déclaration

 15   solennelle. Par conséquent, je vais prononcer les termes de cette

 16   déclaration et je vais vous demander de répéter. Je vais diviser la phrase

 17   en plusieurs parties.

 18   Veuillez répéter après moi : Je déclaration solennellement.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Que je dirai la vérité.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Que je dirai la vérité.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Toute la vérité.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Toute la vérité.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et rien que la vérité.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Et rien que la vérité.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

 27   LE TÉMOIN : SLAVKA MATIC [Assermentée]

 28   [Le témoin répond par l'interprète]


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame, vous allez en premier lieu être

  2   interrogée par Me Stojanovic. Me Stojanovic se trouve à votre gauche. Me

  3   Stojanovic est le conseil de M. Mladic. Ecoutez ses questions attentivement

  4   et veuillez y répondre, s'il vous plaît.

  5   Maître Stojanovic, c'est à vous.

  6   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

  7   Interrogatoire principal par M. Stojanovic :

  8   Q.  [interprétation] Bonjour à vous.

  9   R.  Bonjour à vous également.

 10   Q.  Veuillez, je vous prie, nous décliner votre nom lentement, s'il vous

 11   plaît.

 12   R.  Je m'appelle Slavka Matic.

 13   Q.  Veuillez dire aux Juges de la Chambre où vous êtes née et quelle est

 14   votre date de naissance ?

 15   R.  Je suis née en 1944, dans la municipalité de Srebrenica, le village

 16   d'Opati. C'est cela que vous souhaitiez que je vous dise ?

 17   Q.  Madame, où habitiez-vous avant 1992 ?

 18   R.  J'habitais à Bjelovac, dans le village de Bjelovac, la commune locale

 19   de Bjelovac.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Témoin, vous souvenez-vous de

 21   la date, du mois, de votre naissance en 1944 ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 10 -- le 13 octobre.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 24   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci. 

 25   Q.  Madame, avec qui habitiez-vous en 1992 dans le village de Bjelovac ?

 26   R.  Je vivais avec ma famille : mon mari, Radivoje; mon aînée, Snezana, ma

 27   fille; et ma plus jeune fille, ma cadette, Gordana.

 28   Q.  Alors, vous souvenez-vous de l'année de naissance de votre mari,


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  1   Radivoje ? Veuillez le dire aux Juges de la Chambre si vous vous en

  2   souvenez.

  3   R.  Il est né en 1937. Je crois qu'il est né au mois de janvier, mais c'est

  4   tout ce que je sais. Je ne me souviens pas de sa date de naissance.

  5   Q.  Merci. Quand votre fille Snezana est-elle née ?

  6   R.  En 1965, le 15 juin.

  7   Q.  Et votre cadette, Gordona, quand est-elle née ?

  8   R.  En 1967. Au mois de juin également. Elle est née le 9 juin.

  9   Q.  Merci. Veuillez dire aux Juges de la Chambre où vous étiez lorsque la

 10   guerre a éclaté à Srebrenica et à Bratunac.

 11   R.  Je vivais dans ma maison familiale. J'avais toujours vécu dans cette

 12   maison.

 13   Q.  Travailliez-vous à l'époque ?

 14   R.  Non. Et ensuite, pendant la guerre, je me suis portée volontaire pour

 15   travailler dans les cuisines. Je distribuais de la nourriture aux gardiens

 16   et à la population locale.

 17   Q.  Et votre mari, Radivoje, travaillait-il avant la guerre ?

 18   R.  Oui, il travaillait dans la mine de Sase, qui se trouve dans la

 19   municipalité de Srebrenica.

 20   Q.  Dans votre village, avant le mois de décembre 1992, y a-t-il eu des

 21   combats, des fusillades et des actions militaires ?

 22   R.  Non. Il y avait des gardiens dans le village. Il y avait des tirs

 23   sporadiques contre nous. Nos hommes ripostaient. Et cela s'est poursuivi

 24   jusqu'au 14 décembre 1992.

 25   Q.  Veuillez nous dire ceci : avant le mois de décembre 1992, votre mari et

 26   vos filles vivaient-ils avec vous à Bjelovac ? Est-ce que vous viviez tous

 27   ensemble ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Votre mari était-il, au plan militaire, engagé quelque part ?

  2   R.  Je suppose que oui, parce qu'il montait la garde aussi pendant la nuit.

  3   Je ne lui ai jamais posé la question de savoir ce qu'il faisait à cet

  4   endroit, mais je sais qu'il montait la garde.

  5   Q.  A quelle distance de votre village et de vos maisons se trouvaient les

  6   positions de l'ennemi d'où provenaient des tirs ?

  7   R.  Je ne sais pas exactement à quelle distance ces positions se trouvaient

  8   en termes de kilomètres. A vol d'oiseau, cela devrait correspond à un

  9   kilomètre et demi, voire 2 kilomètres peut-être.

 10   Q.  Veuillez en quelques mots expliquer aux Juges de la Chambre ce que vous

 11   avez fait concernant la distribution de nourriture lors des premiers mois

 12   de la guerre. Comment ceci était-il organisé ?

 13   R.  Nous recevions, par exemple, de la nourriture lyophilisée que nous

 14   distribuions aux gardiens, et cela s'est poursuivi pendant un ou deux mois,

 15   pendant les mois de mai et juin. Et ensuite - je ne sais pas exactement, je

 16   ne connais pas la date - nous avons fait installer une cuisine dans

 17   l'école. Parce que les autres villages, Loznica, Sikiric, qui étaient un

 18   peu plus loin, les gens avaient chassé et les gens mouraient là. Donc ces

 19   personnes sont descendues dans les champs où se trouvait notre village le

 20   long de la Drina. Notre village se situe dans une vallée à côté de la

 21   route. 

 22   Q.  Vous personnellement, avez-vous préparé de la nourriture dans cette

 23   école ou l'avez-vous simplement distribuée ?

 24   R.  Oui, avec une de mes voisines qui étaient là avec moi. Nous avions

 25   l'habitude de préparer du chou, des pommes de terre, des haricots, des

 26   choses comme ça, et ensuite nous distribuions cela.

 27   Q.  Merci. Votre interrogatoire sera court. Par conséquent, je vais vous

 28   demander de nous dire où vous étiez dans la matinée du 14 décembre 1992.


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  1   R.  J'étais à la maison. Je me suis levée à 6 heures 15 parce que je

  2   travaillais dans la première équipe. Je devais me rendre à cet endroit et

  3   distribuer les petits-déjeuners avec ma voisine. Donc il était 6 heures 15

  4   du matin.

  5   C'est l'heure à laquelle j'ai quitté la maison, et ensuite je me suis

  6   dirigée à pied vers l'école. Et j'étais à mi-chemin. J'avais une montre au

  7   poignet. La fusillade a commencé. Je ne savais pas ce qui se passait.

  8   Q.  Je vais vous arrêter là pendant quelques instants. Où étiez-vous

  9   physiquement lorsque cette fusillade a éclaté ?

 10   R.  J'étais à environ 200 ou 300 mètres de ma maison. Je me dirigeais vers

 11   l'école. Car ma maison était à 700 mètres de l'école. En d'autres termes,

 12   moins d'un kilomètre.

 13   Q.  Les tirs venaient d'où ? De quelle direction ?

 14   R.  Je ne peux pas vraiment vous l'expliquer. Les tirs venaient de toutes

 15   parts. Sur la gauche de ma maison, sur les hauteurs, du côté de la forêt,

 16   et du côté droit il y a la Drina. Donc la fusillade couvrait l'ensemble de

 17   ce secteur.

 18   Q.  Qu'avez-vous fait et où êtes-vous allée après cela ?

 19   R.  J'ai continué à me diriger vers l'école. Au moment où je m'approchais

 20   de l'école, des balles ont commencé à fuser et ont touché l'école. Je

 21   pouvais entendre les tuiles du toit se casser. Je me suis précipitée dans

 22   l'école. Ma voisine était déjà là. Elle était arrivée avant moi. Je lui ai

 23   dit qu'il fallait éteindre la lumière, parce que quelqu'un tirait. Je ne

 24   savais pas pourquoi. Je ne savais pas qui c'était. Je ne savais vraiment

 25   pas.

 26   Q.  Et c'est ce qu'elle a fait ?

 27   R.  Oui, oui, tout à fait. En réalité, c'est moi qui ai éteint la lumière,

 28   même si je lui ai dit de le faire. Au moment où je suis entrée, au moment


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  1   de franchir le seuil de la porte, j'ai tout de suite éteint la lumière.

  2   Q.  Et combien de temps y êtes-vous restée alors que la fusillade durait ?

  3   R.  Je suis restée dix minutes environ. Je ne pouvais pas quitter l'école.

  4   Des balles fusaient au-dessus du toit de l'école. Et donc, j'ai quitté

  5   l'école. Mon cousin habitait à 20 ou 30 mètres de l'école. Je suis allé le

  6   voir pour lui dire qu'il se passait quelque chose et qu'il y avait des tirs

  7   de toutes parts. Il était très surpris. Il a quitté sa maison. Il est

  8   sorti, et je ne sais pas où il est allé. Et ensuite, je suis retournée à

  9   l'école d'une manière ou d'une autre. Nous n'osions pas allumer la lumière.

 10   Mais nous n'avions pas besoin de lumière parce qu'il faisait jour déjà.

 11   Q.  Comment s'appelle votre cousin ?

 12   R.  Milisav Ilic. Il a été tué ce jour-là. Il s'est rendu à un endroit qui

 13   n'était pas très loin de l'école pour sauver Cvetjko Lukic, qui avait été

 14   grièvement blessé. Il souhaitait le transporter jusqu'à la Drina, jusqu'à

 15   Ljubovija, où il aurait pu être en sécurité, mais il a été tué sur le

 16   bateau.

 17   Q.  Y avait-il des troupes ou la population locale ou la police serbe dans

 18   le village ce matin-là ?

 19   R.  Non. Il y avait simplement les locaux. Et lorsque les habitants du

 20   village ont commencé à comprendre ce qui se passait, avant même qu'ils

 21   puissent se réveiller, ils ont été tués.

 22   Q.  Est-ce que vous êtes rentrée chez vous ?

 23   R.  Oui. Je me suis dirigée vers ma maison pour voir ce qui s'y passait

 24   parce que personne ne pouvait me dire quoi que ce soit. J'ai vu des maisons

 25   en flammes. J'ai vu de la fumée. J'ai suivi le canal. A gauche de l'école,

 26   il y avait une clairière, et je pouvais donc traverser cette clairière et

 27   emprunter la route goudronnée qui se trouve un petit peu en hauteur. Donc

 28   j'ai rampé jusque-là et je suis arrivée jusqu'à un groupe de maisons. Et


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  1   ensuite, du côté gauche, j'ai vu que la maison de Nikola Petrovic était en

  2   flammes.

  3   Q.  Avez-vous vu les attaquants à un moment donné ou à un autre ?

  4   R.  Oui, derrière ce groupe de maisons, j'ai regardé par-dessus, et ensuite

  5   je me suis retirée. Je n'osais plus regarder. J'ai vu trois hommes qui se

  6   trouvaient à l'angle de la maison de Nikola Petrovic. Il en avait un à

  7   droite et deux à gauche. Je ne sais pas s'ils m'ont vue, parce que sa

  8   maison se trouvait à environ 200 mètres de l'endroit où j'étais. Il y avait

  9   un amas de pierres ou quelque chose, et je n'ai rien pu reconnaître. Je ne

 10   sais pas s'il s'agissait de mes voisins musulmans. Si c'était le cas, je ne

 11   pouvais pas les reconnaître. Mais je voyais qu'ils portaient des sacs à dos

 12   et quelque chose qui ressemblait à un ruban jaune, et tel était leur

 13   vêtement. Mais il faisait tellement sombre ce jour-là, il y avait beaucoup

 14   de brouillard, et s'ils s'étaient trouvés à 30 mètres de moi, j'aurais pu à

 15   ce moment-là les distinguer mieux et voir s'il s'agissait de quelqu'un que

 16   je connaissais.

 17   Q.  Est-ce qu'à un moment donné vous avez réussi à traverser cette région

 18   ou ce secteur et à rentrer chez vous ?

 19   R.  Non. J'ai vu, en fait, du côté droit un homme qui criait. Je l'ai

 20   reconnu. Pendant de nombreuses années, nous habitions la même commune

 21   locale. Moi, je le connaissais depuis 15 ans. Et moi, j'avais été élue

 22   fonctionnaire ou membre de l'association des femmes, la AFZ. Il m'a

 23   reconnue, Hajrudin Afric. Il m'a dit : "Chetniks. Nous allons tous vous

 24   faire prisonniers et nous allons vous capturer en vie." J'ai reconnu sa

 25   voix, mais il était dans les bois, du côté droit derrière l'école.

 26   Q.  Et lorsque vous avez quitté votre maison et que vous vous dirigiez vers

 27   l'école pour pouvoir distribuer la nourriture, qui y avait-il encore dans

 28   votre maison ?


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  1   R.  Il y avait mon mari, Radivoje. Ma fille Snezana. Et mes filles

  2   dormaient lorsque je suis partie.

  3   Q.  Quand avez-vous réussi à rentrer chez vous, alors ?

  4   R.  Je n'ai pas réussi à rentrer à la maison ce jour-là, mais j'étais tout

  5   près, parce qu'à deux ou trois maisons de là, devant moi, eh bien, les

  6   maisons brûlaient. Je voyais que la maison de Radovan Vucetic brûlait, la

  7   maison de Dragoljub Filipovic brûlait. Dragoljub a été tué ce jour-là

  8   également. Son fils, Dragan, a également été tué ce jour-là. Radovan

  9   Vucetic. Son fils, Milenko, qui avait 16 ou 17 ans, a également été tué ce

 10   jour-là. De toute façon, c'était un mineur. Et leurs maisons brûlaient.

 11   C'était à une trentaine de mètres de ma maison. Moi, j'étais derrière la

 12   cuisine d'été de Samo [phon] Todorovic. Je l'ai vu étendu mort sur sa

 13   terrasse. C'était une cuisine d'été. C'est là où je me cachais, mais je ne

 14   pouvais pas parvenir jusqu'à ma maison. Et depuis cet endroit, j'ai vu un

 15   homme mort à l'angle de ma propre maison. Je ne savais pas qui c'était. Je

 16   ne pouvais pas le reconnaître. Et ensuite, j'ai vu autre chose. J'avais un

 17   pommier devant ma maison. Il y avait un homme qui gisait là. J'ai reconnu

 18   mon mari. Et je savais que c'était mon mari parce que j'ai reconnu ses

 19   vêtements. Il portait une veste jaunâtre. En réalité, c'était la couleur

 20   SNB, vert olive. Je l'ai reconnu. J'ai vu qu'il a été tué. Je ne savais

 21   rien au sujet des enfants.

 22   Q.  Veuillez nous dire, s'il vous plaît, quand pour la première fois vous

 23   avez réussi à entrer dans la cour de votre maison et votre maison ?

 24   R.  Seulement le lendemain, puisqu'ils ne me permettaient pas de le faire.

 25   On m'a dit : "Ne va pas là-bas. Là-bas se trouvent les Musulmans, les

 26   Musulmans qui attaquaient. Il ne faut pas que tu te rendes là-bas." Etant

 27   donné que j'étais seule, je suis retournée à une vingtaine de mètres par

 28   rapport à la maison, il y avait Srecko Mihajlovic qui était assis dans le


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  1   canal au pied d'un arbre poirier. Je lui ai posé la question pour savoir

  2   s'il savait quelque chose des miens, et il m'a dit que tous les trois

  3   membres de ma famille se sont fait tuer. J'ai reconnu le corps de mon mari,

  4   mais je n'ai pas vu mes enfants.

  5   Et ensuite, deux ou trois autres hommes étaient arrivés. Je ne me souviens

  6   pas qui ils étaient. On m'a fait retourner, en me disant : "Il ne faut pas

  7   que tu ailles là-bas puisque ce n'est pas sûr." On m'a fait ramener dans

  8   une maison où j'ai passé toute la nuit, et le lendemain l'aide est arrivée.

  9   On m'a emmenée vers 9 heures 30 vers ma maison. C'était le lendemain, à

 10   savoir le 15 décembre.

 11   Q.  Il faut que je vous pose d'autres questions, mais je serai bref. Dites-

 12   nous ce que vous avez vu dans votre maison, et soyez brève.

 13   R.  J'ai vu dans ma maison ma fille, Snezana, qui était devant la porte

 14   d'entrée sur l'escalier, elle était morte. Quand je suis entrée dans la

 15   maison, j'ai vu une grande marque de sang. Et je ne savais pas où se

 16   trouvait Gordana, ma cadette. Je suis entrée dans la maison. Vous savez

 17   probablement ce qui s'était passé et comment je m'étais comportée. Je l'ai

 18   trouvée dans la salle de bain. Elle est décédée parce qu'elle a perdu du

 19   sang et on ne pouvait pas l'aider.

 20   Q.  Est-ce que l'un des bâtiments dans votre cour a été endommagé ou

 21   incendié ?

 22   R.  Ce jour-là, ma maison a été incendiée, mais la femme qui est arrivée

 23   pour aider mes enfants ne pouvait pas y entrer puisque ma maison était

 24   encerclée. Cette femme a réussi à éteindre l'incendie pour que mes enfants

 25   ne soient brûlés. Mais le lendemain, lorsqu'on a ramassé les cadavres pour

 26   les enterrer le 16 à Bratunac, encore une fois, ils sont retournés pour

 27   incendier tout. Le 16, tout le reste a été incendié. Pour ce qui est des

 28   bâtiments dans la cour de ma maison.


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  1   Q.  Dites-nous où vous avez enterré votre époux et vos deux filles.

  2   R.  Au cimetière municipal de Bratunac. Nous avons dû transporter les

  3   cadavres dans une petite barque et contourner Ljubovija, arriver à

  4   Bratunac. Puisqu'il y avait des embuscades partout, nous ne pouvions pas

  5   emprunter la rue. Nous devions les transporter dans une barque.

  6   Q.  Et je vais vous poser ma dernière question. Pouvez-vous dire à la

  7   Chambre quel est le nombre de villageois de votre village qui se sont fait

  8   tuer à cette occasion-là ?

  9   R.  Ce jour-là, 68. Parmi ces 68 villageois, il y avait neuf femmes -- à

 10   savoir, dix, puisqu'on n'a pas retrouvé le cadavre d'une femme. C'était

 11   Ostojic Bozana. Elle avait à l'époque peut-être 70 ans. Elle n'avait pas

 12   d'enfants. L'un de ses deux frères s'est fait tuer. L'autre est décédé. Son

 13   cousin s'est fait tuer. Un autre est décédé. Et tout cela, ce sont les

 14   conséquences de la guerre. Son corps n'a jamais été retrouvé. Et c'était la

 15   première cousine de mon époux, ma belle-sœur.

 16   Q.  Dites-nous où vous viviez les mois qui ont suivi et les années qui ont

 17   suivi, vu l'état dans lequel se trouvaient les bâtiments dans la cour de

 18   votre maison et votre maison.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais réfugiée et je vivais --

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, vous avez dit que

 22   cela serait votre dernière question, et à ce moment-là Mme MacGregor était

 23   debout. Je ne sais pas ce qu'elle voulait dire, mais lorsqu'elle vous a

 24   entendu dire que vous alliez poser votre dernière question, je pense

 25   qu'elle s'est rassise.

 26   J'aimerais savoir de combien de questions vous avez encore besoin de poser.

 27   Nous avons entendu beaucoup de détails, et nous savons quel incidence cela

 28   avait sur votre vie, mais nous devrions savoir quelles sont les choses qui


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  1   sont pertinentes pour cette affaire, et parfois certains événements ont une

  2   influence considérable sur la vie personnelle --

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation] J'ai encore quatre questions à poser.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame MacGregor.

  5   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Peut-être que Me Stojanovic a posé la question concernant son fils, mais je

  7   pense qu'il a voulu faire référence à son époux, son mari, à la page 37. Je

  8   ne sais pas s'il s'agit d'une erreur d'interprétation ou d'une erreur faite

  9   par Me Stojanovic.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A la page 37…

 11   Mme MacGREGOR : [interprétation] Ligne 8.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, votre question a été

 13   interprétée : "Dites-nous où vous avez enterré votre fils et vos deux

 14   filles."

 15   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non. Si j'ai dit "fils", j'ai commis une

 16   erreur. Mais je pense que j'ai dit quelque chose d'autre. On peut clarifier

 17   cela avec Mme le Témoin.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire cela tout de suite.

 19   Madame le Témoin, lorsque vous nous avez dit que des membres de votre

 20   famille où été enterrés au cimetière de la ville de Bratunac, est-ce que

 21   vous avez fait référence à vos deux filles et à votre mari ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez, Maître Stojanovic.

 24   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 25   Q.  Ma question que je vous ai posée avant l'intervention de la Chambre,

 26   Madame le Témoin, était de savoir où vous avez passé les mois et les années

 27   qui ont suivi étant donné que votre maison et les bâtiments dans votre cour

 28   n'étaient pas dans un bon état ?


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  1   R.  Je vivais à Bratunac dans un appartement - je ne sais pas à qui

  2   appartenait cet appartement - et j'y vivais jusqu'à l'année 1997, étant

  3   donné que je ne pouvais pas retourner chez moi puisque tout était incendié.

  4   Et j'attendais que tout cela soit reconstruit pour que je puisse y vivre à

  5   nouveau.

  6   Q.  Dites à la Chambre avec qui vous vivez aujourd'hui et comment vous

  7   vivez aujourd'hui.

  8   R.  Je vis seule. Je vis seule. Comme ce qu'on dit chez nous, comme un

  9   arbre sans feuillage. C'est à quoi ressemble ma vie aujourd'hui.

 10   Q.  Dites-nous comment votre famille la plus proche, vos cousins, ont

 11   commenté l'attaque de l'ABiH -- donc vos cousins qui se sont fait tuer ce

 12   jour-là ?

 13   R.  J'ai entendu dire mes voisins qui ont perdu un fils, une sœur, un frère

 14   ou un père qu'ils étaient révoltés puisqu'ils se demandaient pourquoi notre

 15   village a été attaqué, puisque aucun membre de ma famille et aucun de mes

 16   voisins ne s'est jamais rendu dans d'autres villages.

 17   En 1992, si je me souviens bien, j'ai entendu des gens dire que des 40

 18   villages de la municipalité de Srebrenica et de la municipalité de

 19   Bratunac, les gens étaient partis de ces villages. Ils étaient réfugiés

 20   chez nous, dans notre village. Il y avait des femmes, des jeunes hommes qui

 21   étaient arrivés. J'avais des cousins à Brezani, à Zaluzje. Ma famille était

 22   très grande, la famille de ma mère, et ils étaient venus chez nous

 23   puisqu'en 1992 tous ces villages ont disparu.

 24   Q.  Je vais vous poser ma dernière question. Aujourd'hui, dites-nous ce que

 25   vous pensez de vos voisins. Quel est votre regard que vous portez sur vos

 26   voisins musulmans ?

 27   R.  Voilà ce que j'en pense. Ce que eux m'ont fait, je ne m'attendais

 28   jamais à pouvoir vivre cela. Ils savaient que je n'avais pas de soldats,


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  1   que j'avais des filles. Et je ne sais pas pourquoi cela s'est passé. Je ne

  2   le sais pas. Je n'oublierai jamais cela. Et pour ce qui est du pardon, je

  3   ne sais pas si je dois ou pas pardonner ce qu'ils ont fait. Je ne sais

  4   toujours pas.

  5   Q.  Madame Slavka, je vous remercie de vos efforts et d'être venue pour

  6   répondre à mes questions.

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie de

  8   m'avoir accordé de ce temps.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Stojanovic.

 10   Une dernière question, Maître Stojanovic, Slavka est le prénom de Mme le

 11   Témoin ou est-ce que c'est un surnom ?

 12   Madame le Témoin, dites-le-nous.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est mon prénom, mon vrai prénom, Slavka.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 15   Madame MacGregor, êtes-vous prête à commencer votre contre-interrogatoire ?

 16   Mme MacGREGOR : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Matic, maintenant Mme MacGregor,

 18   qui se trouve à votre droite, va vous poser des questions dans le cadre du

 19   contre-interrogatoire. Elle représente le bureau du Procureur dans cette

 20   affaire.

 21   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci.

 22   Contre-interrogatoire par Mme MacGregor :

 23   Q.  [interprétation] Bonjour.

 24   R.  Bonjour.

 25   Q.  J'ai quelques questions générales pour ce qui est de la municipalité de

 26   Bratunac.

 27   Savez-vous si avant le début de la guerre la majorité de la population de

 28   la municipalité de Bratunac était la population musulmane ?


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  1   R.  Je ne saurais vous répondre, puisque je ne m'intéressais jamais à la

  2   politique. Je ne connaissais pas le nombre d'habitants de Bratunac. Je ne

  3   saurais vous répondre à la question posée. Peut-être que c'était le cas,

  4   mais je ne le sais pas.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame MacGregor, à moins que cela ne

  6   représente une introduction utile pour ce qui est des questions que vous

  7   allez poser, il s'agit d'une question par rapport à laquelle les parties se

  8   sont mises d'accord concernant le recensement de 1991.

  9   Continuez.

 10   Mme MacGREGOR : [interprétation] J'ai encore une question pour ce qui est

 11   de cela et cela ne figure pas dans les résultats du recensement de la

 12   population.

 13   Q.  Madame Matic, ce sont les hameaux autour de Bjelovac. Perici et Skela

 14   [phon] étaient majoritairement peuplés par les Musulmans; c'est vrai ?

 15   R.  Perici, Poloznik et Grahorista [phon]. C'étaient les villages peuplés

 16   exclusivement par les Musulmans. C'est plus loin de mon village, avant mon

 17   village.

 18   Q.  Maintenant, je vais passer aux événements qui se sont passés en

 19   décembre 1992, et vous avez déjà parlé de ces événements. Vous avez décrit

 20   dans votre témoignage aujourd'hui comment la garde a été montée dans votre

 21   village. Est-ce que les membres de cette garde portaient des vêtements

 22   civils ou des uniformes ?

 23   R.  Pour vous dire, peut-être en juillet, il y en avait qui portaient des

 24   uniformes, mais la plupart d'entre eux portaient des vêtements civils. Il y

 25   avait des gens qui portaient des uniformes de camouflage, certains de ces

 26   gens, puisque nous n'avions pas d'uniformes de camouflage, nous, dans notre

 27   village. Et notre garde villageoise ne disposait pas de beaucoup

 28   d'uniformes de camouflage. Nous n'étions pas membres d'une armée. Il y


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  1   avait peut-être des hommes plus jeunes qui portaient des uniformes de

  2   camouflage. Mais les personnes âgées, mon mari et les autres, portaient des

  3   vêtements civils.

  4   Q.  Est-ce qu'il est vrai que si ces personnes avaient disposé de leurs

  5   propres fusils de chasse, elles auraient utilisé ces armes lorsqu'elles

  6   montaient la garde dans le village ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que vos filles participaient à la garde villageoise ?

  9   R.  Non, jamais.

 10   Q.  Savez-vous si le jour de l'attaque, le 15 [comme interprété] décembre

 11   1992, la garde villageoise a opposé une résistance aux Musulmans lorsqu'ils

 12   ont attaqué le village ?

 13   R.  Oui, puisque le village a été attaqué, ce village-là. Si une résistance

 14   n'avait pas été opposée, eux, ils seraient probablement partis pour tuer

 15   tout le monde. Puisque jusqu'à ce moment-là, ils avaient déjà tué beaucoup

 16   de mineurs, beaucoup de femmes. Ils ont tué, par exemple --

 17   Q.  Madame --

 18   R.  -- dans mon village, une personne s'est fait tuer. Et à Loznica, le 28

 19   juin, Stojanovic Jela s'est fait tuer. Et Filipovic Verica, qui était

 20   également mineure. Et il y avait d'autres personnes, je pense qu'elles

 21   étaient au nombre de neuf, qui se sont fait tuer.

 22   Q.  Madame le Témoin, j'aimerais vous demander d'écouter attentive mes

 23   questions et de répondre à mes questions de façon succincte, et je pense

 24   qu'on pourra comme cela en finir avec les questions plus rapidement.

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que le 15 [comme interprété] décembre 1992, à un moment donné

 27   durant la journée, vous avez trouvé abri dans un véhicule blindé de

 28   transport de troupes ?


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  1   R.  Non.

  2   Q.  Lorsque je dis "véhicule blindé de transport de troupes," je fais

  3   référence à un véhicule. Est-ce que ce jour-là vous êtes montée à bord de

  4   ce véhicule ?

  5   R.  Non, je ne me souviens pas. Il n'y avait pas de véhicule.

  6   Q.  Aujourd'hui, vous avez déclaré lors de votre déposition que durant les

  7   combats à Bjelovac en décembre 1995, 68 personnes se sont fait tuer. Savez-

  8   vous quel est le nombre de civils et quel est le nombre de soldats parmi

  9   ces 68 personnes qui se sont fait tuer, des victimes serbes ?

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic.

 11   M. STOJANOVIC : [interprétation] A la page 43, ligne 24, pour ce qui est de

 12   la date, j'ai des doutes. Puisque dans le compte rendu cela a été consigné

 13   comme cela a été consigné, ce qui peut donc provoquer une confusion.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a peut-être un problème, mais

 15   pensez à la chose suivante : 68 est le chiffre qu'on peut trouver à la page

 16   37, ligne 17, et ce n'est pas exactement ce que vous avez lu au témoin.

 17   Donc, pensez-y si vous voulez encore une fois poser la question au témoin

 18   concernant le nombre 68, et en particulier concernant ce qui se passe

 19   pendant et après --

 20   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Q.  Madame le Témoin, d'après ce que vous avez dit dans votre témoignage,

 22   68 personnes ont été tuées à Bjelovac le 14 décembre 1994 -- excusez-moi,

 23   1992. Savez-vous, par rapport à ces 68 personnes, quel était le nombre de

 24   soldats et quel était le nombre de civils ?

 25   R.  Il y avait plus de civils. C'étaient des jeunes gens locaux; par

 26   exemple, Petrovic Mirko et Damjanovic. S'ils avaient été mobilisés.

 27   Ensuite, un autre dont j'ai oublié le nom. Ils se sont faits tuer.

 28   Filipovic Dragan aussi. Ils étaient plus jeunes et probablement ils étaient


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  1   soldats. Ou mobilisés probablement. Et ensuite d'autres dont je ne m'en

  2   souviens pas les noms, mais ils étaient des civils. Il y avait des femmes,

  3   des personnes âgées. Nedeljkovic Ljubisav avait plus de 60 ans, par

  4   exemple. Matovic Desimir, le frère de mon époux, il avait à peu près 60

  5   ans. Prodanovic --

  6   Q.  Merci.

  7   Mme MacGREGOR : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher à présent le

  8   document 65 ter 4415.

  9   Q.  Madame le Témoin, peut-être que vous n'êtes pas en mesure de voir cela

 10   à l'écran devant vous, mais cela va être affiché sur les écrans des Juges.

 11   Il s'agit du rapport pour ce qui est de la Brigade de Bratunac.

 12   R.  Je ne vois pas cela.

 13   Q.  Je comprends cela, mais d'abord je vais dire de quoi il s'agit. Il

 14   s'agit du rapport préparé par l'armée, plus précisément par la Brigade de

 15   Bratunac, où on peut suivre l'historique de la création de la brigade, des

 16   combats auxquels la brigade a pris part.

 17   Maintenant, je vais vous lire brièvement une partie du rapport

 18   puisqu'il est fait mention concrètement des combats du 14 décembre 1992

 19   dans votre village.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame MacGregor, dans le document on

 21   voit que ça commence par D-10. Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit

 22   exactement ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois rien. Je ne sais pas de quoi il

 24   s'agit.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va tout vous expliquer, Madame le

 26   Témoin. Soyez patiente encore quelques instants parce que j'ai une question

 27   à poser à Mme MacGregor, et nous allons d'abord régler cela. Donc, soyez

 28   patiente un peu.


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  1   Mme MacGREGOR : [interprétation] Je ne suis pas certaine d'avoir compris

  2   votre question. Vous voulez entendre quelque chose de plus par rapport à ce

  3   document pour savoir s'il s'agit d'un document qui fait partie d'un autre

  4   document plus volumineux ?

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas. Mais je vois ici le

  6   texte en cyrillique et ensuite, en haut de la page, on voit D-10

  7   dactylographié. Je ne vois pas de page de couverture avec la date. Je me

  8   demande ce qui est affiché à l'écran.

  9   Mme MacGREGOR : [interprétation] Je peux vous dire que comment le document

 10   semble. C'est au moment où le bureau du Procureur a saisi le document qu'il

 11   était comme cela. Ce document a déjà été présenté devant la Chambre, bien

 12   que le document n'ait toujours pas été versé au dossier. Mais si vous

 13   voulez, je peux vous fournir plus de détails plus tard. Pour le moment, je

 14   ne demande pas le versement de ce document.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.

 16   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Q.  Madame Matic, je vais maintenant -- mais d'abord, je demande

 18   l'affichage de la page 11 en anglais, et il s'agit de la page 10 pour ce

 19   qui est du texte en cyrillique. Vers le milieu de la page, je vais

 20   commencer à lire le paragraphe qui commence comme ceci :

 21   "Le 14 décembre 1992, les Musulmans ont attaqué les villages de Sikiric,

 22   Biljaca, Bjelovac, Loznica et Voljavica du côté gauche. Ces villages ont

 23   subi de considérables dommages matériels," et je suppose maintenant qu'un

 24   mot manque ici, "des pertes des effectifs. Cinquante-cinq soldats et sept

 25   civils ont été lors des combats avec les unités de Naser Oric. Tous les

 26   villages ont été incendiés. Les biens ont été détruits."

 27   Madame le Témoin, est-ce que vous avez entendu ce que je viens de vous

 28   lire ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Maintenant, pour ce qui est de ce document. D'après ce document,

  3   pendant les combats, 55 soldats et sept civils ont été tués, ce qui fait 63

  4   personnes tuées. D'après ce document qui a été rédigé par l'armée --

  5   R.  [aucune interprétation]

  6   Q.  -- 55 des Serbes tués étaient des soldats. Pensez-vous que cela est

  7   vrai ?

  8   R.  Oui, il y avait des soldats. C'est normal. Mais il y avait plus de

  9   civils parmi les victimes. Je ne sais pas comment ils ont pu écrire cela.

 10   Je ne sais pas. Pour ce qui est de mon village, je vous dis quelles étaient

 11   les personnes qui se sont fait tuer ce jour-là : beaucoup de personnes

 12   âgées, beaucoup de femmes. Il y avait des femmes blessées également qui,

 13   peut-être un an ou deux ans après les blessures, sont décédées. Je ne sais

 14   pas comment ils ont rédigé ce rapport. Je ne le sais pas.

 15   Q.  Merci.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites "l'armée" ou "les

 17   militaires". Pouvez-vous nous dire de quelle armée nous parlons ici ? De

 18   l'armée britannique ou…

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux qui ont été mobilisés là-bas. Les jeunes

 20   qui étaient majeurs. Mais nous n'avions pas de membres d'armée qui seraient

 21   venus d'ailleurs.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Témoin, la dernière question

 23   que j'ai posée était adressée à Mme MacGregor, parce que j'attends toujours

 24   d'obtenir la réponse pour ce qui est de certaines informations concernant

 25   ce document.

 26   Mme MacGREGOR : [interprétation] Monsieur le Président, ma question

 27   concernait les membres de l'armée serbe. Dans la question que j'ai posée au

 28   témoin --


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Ma question à vous était de savoir,

  2   puisque vous avez parlé du rapport militaire, de quelle armée cela

  3   provenait, pour autant que vous le sachiez.

  4   Mme MacGREGOR : [interprétation] Pour autant que je le sache, c'est de la

  5   Brigade de Bratunac de la VRS. Ce document a été déjà utilisé par Mme

  6   Milikian et elle a également fourni certaines informations à la Chambre

  7   concernant le contexte de ce document.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je dois dire que je ne me souviens pas

  9   clairement de cela.

 10   Mme MacGREGOR : [interprétation] C'était le 30 avril de cette année, 2015,

 11   avec le témoin Ratko Nikolic. Ceci a été saisi lors d'une perquisition

 12   effectuée par le Tribunal en février 1995 auprès de la Brigade de Bratunac.

 13   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un document de 22 pages ?

 15   Mme MacGREGOR : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, est-ce

 16   que vous pourriez répéter votre question ?

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit d'un seul document ou bien de

 18   plusieurs documents ? Est-ce que l'ensemble de ces 200 pages constitue un

 19   seul document ?

 20   Mme MacGREGOR : [interprétation] Il me faudrait plus de temps pour vérifier

 21   cela, mais si j'ai bien compris, nous avons téléchargé une partie du

 22   document et non pas l'ensemble des documents qui ont été saisis. Mais

 23   encore une fois, je peux vous en informer ultérieurement. Pas à présent.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et est-ce que vous pourriez aussi

 25   nous expliquer à quel endroit nous voyons qu'il est indiqué que ce document

 26   émane de la Brigade de Bratunac, nous apprécierions cela.

 27   Poursuiviez, s'il vous plaît.

 28   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


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  1   Peut-on afficher à l'écran le document dont le numéro 65 ter est 04254.

  2   Q.  Madame, je demande à l'huissier de montrer à la Chambre un autre

  3   document. Je sais que vous aurez du mal à le voir. Il s'agit là, en fait,

  4   d'un document qui vous a été présenté lors de votre déposition devant ce

  5   Tribunal dans l'affaire Naser Oric. Nous attendons que le document soit

  6   affiché à l'écran. Mais en attendant, je vais vous dire qu'il s'agit là

  7   d'une liste intitulée : "Liste des soldats de la 1ère Brigade légère

  8   d'infanterie de Bratunac tués entre le 18 avril 1992 et le 25 septembre

  9   1995."

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame McGregor, avant que vous posiez

 11   votre question au témoin, pourriez-vous nous dire combien de temps il vous

 12   faut encore, car j'examine l'heure et le moment de la pause est

 13   approximativement arrivé.

 14   Mme MacGREGOR : [interprétation] C'est mon dernier document avant --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si c'est le dernier document, je suggère

 16   que l'on attende la fin de cette partie avant de faire notre pause.

 17   Poursuivez, s'il vous plaît.

 18   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Peut-on passer à la page 3 en B/C/S et 4 en anglais. Et je vous invite

 20   à examiner le numéro 260 sur cette liste. Madame, je crois que vous aviez

 21   du mal à voir cela, mais je pense que ceci vous a été montré dans l'affaire

 22   Oric déjà --

 23   R.  Je ne peux pas lire.

 24   Q.  Bien.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'est pas nécessaire que vous lisiez.

 26   Mme MacGregor vous expliquera exactement ce qui se trouve sous vos yeux.

 27   Mme MacGregor vous lira ce qu'il y a à lire littéralement et ensuite elle

 28   vous invitera à faire vos commentaires.


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  1   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Je vais lire le numéro 260. Le nom qui figure sur la liste est Matic,

  3   fils d'Ilija, Radivoje. Et l'unité --

  4   R.  Oui.

  5   Q.  -- est le 3e Bataillon d'infanterie. La date de naissance, 1937.

  6   L'adresse indiquée est Bjelovac. Lieu du décès, Bjelovac. La date du décès,

  7   le 14 décembre 1992. Et dans la partie "remarques", il est indiqué : "En

  8   action (défense)."

  9   Ces informations portent-elles sur votre mari, les informations que je

 10   viens de vous lire ?

 11   R.  Oui.

 12   Mme MacGREGOR : [interprétation] Peut-on passer maintenant à la page 6 du

 13   prétoire électronique dans les deux versions.

 14   Q.  Je vais vous lire maintenant les entrées 415 et 416.

 15   Mme MacGREGOR : [interprétation] Peut-être il ne s'agissait pas là de la

 16   bonne page en anglais. Cela devrait être la page 7.

 17   Q.  Donc nous allons commencer par la ligne 415, le nom est Matic,

 18   Radivoje, Gordana. L'unité, ce sont les lettres OT. Et la date de

 19   naissance, 1967. L'adresse est Bjelovac. Le lieu du décès est Bjelovac. Et

 20   la date du décès est le 14 décembre 1992. Et dans la section "remarques",

 21   il est indiqué : "En action (défense)."

 22   S'agit-il là de votre fille Gordana ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Et l'entrée numéro 416 est identique à celle concernant Gordana, avec

 25   trois différences : le nom est Matic, fille de Radivoje, Snezana, et la

 26   date de naissance indiquée pour elle est 1965.

 27   S'agit-il là de votre fille Snezana ?

 28   R.  Oui, oui.


Page 35473

  1   Q.  Dans ce document, il est indiqué que votre mari et vos filles ont été

  2   tués lors de l'action, et il est indiqué qu'ils faisaient parties des

  3   membres de la Brigade d'infanterie légère de Bratunac. Est-ce que vous

  4   saviez que votre mari et vos filles étaient membres de cette brigade au

  5   moment de leur mort ?

  6   R.  Non.

  7   Mme MacGREGOR : [interprétation] Monsieur le Président, je propose le

  8   versement au dossier de cette pièce.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] S'agissant de mon mari, je ne lui ai jamais

 10   posé la question, je suppose que tel était le cas. Pour mes filles, je ne

 11   savais pas qu'elles aient été mobilisées ou quelque chose comme cela. Je

 12   n'étais vraiment pas au courant de cela jusqu'en 2014 lorsqu'on m'a montré

 13   ce document. Car j'étais contre cela, je voulais les mettre à l'abri. Qui

 14   les a mobilisées et comment, je ne sais pas. Mais quand on dit qu'elles

 15   sont mortes en action lors des luttes, elles sont mortes sur le seuil de

 16   leur maison. Elles n'avaient même pas un bâton ou une branche dans leurs

 17   mains, sans parler de quelque chose d'autre avec quoi elles auraient pu se

 18   défendre. Elles auraient pu se défendre avec quoi ? Ça, je ne le sais pas.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel sera le numéro de la pièce à

 20   conviction, Monsieur le Greffier.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce à conviction P7383, Monsieur le

 22   Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce est versée au dossier.

 24   Mme MacGREGOR : [interprétation] L'Accusation n'a plus de questions. Je

 25   vous fournirai plus d'information au sujet des documents de la Brigade de

 26   Bratunac.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez. Ma première question, Maître

 28   Stojanovic, est de savoir si vous avez des questions supplémentaires pour


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  1   ce témoin ? Si tel est le cas, nous allons attendre jusqu'après la pause.

  2   Sinon…

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

  4   d'autres questions. Mais je souhaite clarifier avec le bureau du Procureur

  5   la signification de l'abréviation OT. Quelle est la position de

  6   l'Accusation à cet égard, sur la base du document qu'ils viennent de verser

  7   au dossier ? Je souhaite savoir comment ils comprennent la nature de cette

  8   unité.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 10   M. STOJANOVIC : [interprétation] Et si nous ne pouvons pas trouver un

 11   accord là-dessus, j'aurai quelques questions de clarification pour le

 12   témoin après la pause.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. En même temps, je me demande si le

 14   témoin qui nous dit qu'elle ne savait pas que les membres de sa famille

 15   étaient membres des forces armées, je me demande si le témoin peut nous

 16   aider. Mais tout d'abord, entendons Mme MacGregor, quelle est sa façon de

 17   comprendre l'abréviation OT qui figure dans le document qui vient d'être

 18   versé au dossier.

 19   Mme MacGREGOR : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   J'ai eu quelques discussions avec les membres du CLSS et j'ai quelques

 21   idées à ce sujet, mais je ne peux pas dire à ce stade quelle est la

 22   position définitive de l'Accusation. Mais je parlerai volontiers à la

 23   Défense après la pause de cela.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais, bien sûr, si le témoin est

 25   libéré entre-temps, nous ne pouvons pas lui poser la question.

 26   Maître Stojanovic, est-ce que vous pensez que le témoin peut nous aider

 27   compte tenu de ses réponses précédentes au sujet des membres de sa

 28   famille ?


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  1   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai parlé avec le

  2   témoin à ce sujet, et très sincèrement je ne pense pas qu'elle puisse nous

  3   être utile à cet égard. Elle nous a raconté ce qu'elle savait et elle nous

  4   a dit tout ce qu'elle savait là-dessus, donc je ne pense pas qu'il serait

  5   nécessaire de la garder après la pause.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça veut dire que si vous dites que vous

  7   avez encore quelques questions, ce sont plutôt des questions pour Mme

  8   MacGregor que le témoin.

  9   Compte tenu de cela, vous n'avez pas de questions supplémentaires, Maître

 10   Stojanovic ?

 11   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Autrement dit, la question liée à OT

 13   reste non résolue pour l'instant.

 14   Madame Matic, c'est la fin de votre déposition. Je vous remercie d'être

 15   venue jusqu'à La Haye pour déposer. Ce n'était peut-être pas facile de

 16   revenir dans votre esprit aux événements qui ont été certainement très,

 17   très difficiles dans votre vie. Je vous souhaite un bon voyage de retour

 18   chez vous. Encore une fois, merci d'avoir répondu à toutes les questions

 19   qui vous ont été posées.

 20   Vous pouvez suivre l'huissier.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 22   [Le témoin se retire]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons prendre une pause et nous

 24   reprendrons notre travail à midi 30.

 25   --- L'audience est suspendue à 12 heures 07.

 26   --- L'audience est reprise à 12 heures 32.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être nous pouvons attendre un

 28   instant, Monsieur l'Huissier.


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  1   Madame MacGregor, vous vouliez nous donner des informations concernant le

  2   contexte qui entoure le document que vous n'avez pas versé au dossier.

  3   Mme MacGREGOR : [interprétation] Oui. Et puis, j'ai aussi une information

  4   concernant le débat sur l'OT. Je vais commencer avec la partie la plus

  5   simple.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  7   Mme MacGREGOR : [interprétation] Le numéro du document est P7383 et le

  8   document est 65 ter 04415. Donc c'est le document de la Brigade de Bratunac

  9   dont nous avons traité. P7383, c'est la liste des décès qui a été versée au

 10   dossier. Les deux documents ont été saisis par le bureau du Procureur lors

 11   de la perquisition effectuée en février 1998 auprès de la Brigade de

 12   Bratunac. Donc c'est l'information concernant les deux documents.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et OT, à votre avis, indique quoi ?

 14   Mme MacGREGOR : [interprétation] Ceci est un peu plus compliqué. Afin

 15   d'aider la Chambre, je souhaite demander que l'on affiche à l'écran le

 16   document 65 ter 32581. C'est un document qui a été sur liste des pièces à

 17   conviction, mais l'Accusation a décidé de ne pas l'utiliser avec ce témoin.

 18   J'attends que le document soit affiché. C'est le document en date d'octobre

 19   1992, liste des personnes du poste militaire 2465/5 payées pour un voyage

 20   de troupe officiel, puis il y a la solde pour octobre 1992. C'est la liste

 21   des personnes auxquelles des paiements ont été versés.

 22   Et si l'on examine la page 7, nous pouvons le voir en B/C/S, car c'est une

 23   liste et en raison du fait que l'on parle des initiales, paraphes, en

 24   B/C/S. Et en haut de la liste, nous pouvons voir "Oklopno Mehaniz

 25   Jedinica". D'après notre traduction, il s'agit de "l'unité mécanisée

 26   blindée". Donc, visiblement, nous avons l'abréviation pour le deuxième mot.

 27   Et donc, ici, si l'on examine les numéros 233 et 234, nous pouvons voir les

 28   noms des filles de Mme Matic dont nous avons parlé au cours de sa


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  1   déposition. Et puis, nous avons cinq autres individus sur la liste que l'on

  2   examine et ces personnes, leurs noms figurent également sur la liste des

  3   individus décédés au sein de la pièce à conviction P7383, et les lettres OT

  4   sont affichées à côté de leurs noms également.

  5   Donc la conclusion de l'Accusation est que O indique "Oklopno", donc

  6   "blindé". Je ne sais pas quelle est la signification de la lettre T, mais

  7   nous pensons que ceci fait référence à l'unité mécanisée blindée à laquelle

  8   les deux sœurs et les cinq autres individus appartenaient.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic -- tout d'abord, ceci

 10   n'a pas été versé au dossier ?

 11   Mme MacGREGOR : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous d'autres commentaires sur la

 13   question de OT ?

 14   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, moi aussi, j'ai

 15   analysé cette abréviation pendant mes préparatifs pour la déposition du

 16   témoin, compte tenu aussi des questions qui ont été posées au témoin au

 17   cours du contre-interrogatoire dans l'affaire Oric. Le témoin n'a pas pu

 18   m'aider à identifier et expliquer cette abréviation OT. C'est pour cela que

 19   j'ai dit que le témoin ne pouvait pas nous être utile dans ce sens.

 20   Notre position est que l'abréviation pour "Oklopno Mehaniz Jedinica",

 21   dans le sens militaire du terme, n'est absolument pas OT. Or, quant à la

 22   question de savoir ce que l'abréviation OT indique, en ce moment, nous ne

 23   sommes pas en position nous permettant de répondre à cette question. Nous

 24   allons essayer de clarifier cela avec l'un des témoins qui viendront encore

 25   déposer, et ensuite nous traiterons de cela avec le bureau du Procureur

 26   pour voir si l'on peut trouver un accord à l'égard de cette abréviation.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 28   Est-ce que les parties sont d'accord pour dire que l'OT fait référence à


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  1   une unité au sein de cette brigade ou bien est-ce qu'il n'y a pas d'accord

  2   à ce sujet ?

  3   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons

  4   continuer à examiner cette question afin d'essayer de trouver une réponse.

  5   L'Accusation n'est pas vraiment en train d'essayer de prouver les données

  6   quant à la question de savoir si ces femmes faisaient partie ou pas de

  7   cette unité, mais nous avons souhaité présenter à la Chambre les éléments

  8   de preuve qui peuvent être examinés dans ce contexte. Mais l'Accusation

  9   n'éprouve pas le besoin de prouver cela, nous avons simplement souhaité

 10   vous fournir le contexte. Et nous pouvons répondre à vos questions par la

 11   suite, et nous allons à continuer à examiner cette question.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons entendre les parties se

 13   prononcer là-dessus de manière supplémentaire à l'avenir.

 14   Peut-on faire venir le témoin suivant, à moins que vous souhaitiez soulever

 15   d'autres questions, Madame MacGregor ?

 16   Mme MacGREGOR : [interprétation] Je souhaite simplement demander votre

 17   permission de quitter le prétoire.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, l'huissier va vous ouvrir de toute

 19   façon la porte, donc vous pouvez profiter de l'occasion pour sortir.

 20   Vous êtes excusée, Madame MacGregor.

 21   Le témoin suivant qui passera à la barre, ce serait M. Radulj ?

 22   M. STOJANOVIC : [interprétation] Exactement, Monsieur le Président.

 23   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Radulj.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de déposer, d'après notre

 27   Règlement, vous devez lire la déclaration solennelle dont le texte vous est

 28   présenté.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  2   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  3   LE TÉMOIN : SLOBODAN RADULJ [Assermenté]

  4   [Le témoin répond par l'interprète]

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir, Monsieur

  6   Radulj.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, c'est Me Stojanovic qui va

  9   vous interroger. Me Stojanovic est sur votre gauche et il est le conseil de

 10   la Défense de M. Mladic.

 11   Maître Stojanovic, poursuivez, s'il vous plaît.

 12   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 13   Interrogatoire principal par M. Stojanovic :

 14   Q.  [interprétation] Monsieur Radulj, bonjour.

 15   R.  Bonjour.

 16   Q.  Conformément à la procédure habituelle dans ce prétoire, je vais vous

 17   inviter à prononcer lentement votre nom de famille et votre prénom.

 18   R.  Radulj, Slobodan.

 19   Q.  Monsieur Radulj, veuillez nous dire quelle est la date et le lieu de

 20   votre naissance.

 21   R.  C'est le 17 juillet 1956 à Verici, dans la ville de Banja Luka.

 22   Q.  Et où vivez-vous aujourd'hui, Monsieur Radulj ?

 23   R.  Aujourd'hui, je vis à Banja Luka.

 24   Q.  Quelles sont les fonctions que vous exercez aujourd'hui ?

 25   R.  Aujourd'hui, je suis l'ombudsman de la Republika Srpska.

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez dire à la Chambre de première instance quelque

 27   chose au sujet de votre éducation.

 28   R.  J'ai terminé l'école primaire à l'endroit où je suis né. Le lycée, je


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  1   l'ai terminé à Banja Luka. Ensuite, j'ai eu mon diplôme de la faculté de

  2   droit à Banja Luka en 1978. Ensuite, à Novi Sad, en 1991, j'ai passé

  3   l'examen pour devenir avocat. En 2004, à Belgrade, j'ai fait mes études

  4   postuniversitaires spécialisées et ma thèse portait sur la criminalité

  5   organisée et le terrorisme.

  6   Q.  Merci.

  7   R.  Et en 2007, j'ai eu mon diplôme de maîtrise à Belgrade.

  8   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire quelque chose au sujet de votre

  9   carrière professionnelle depuis le moment où vous avez obtenu votre diplôme

 10   pour la première fois jusqu'à aujourd'hui.

 11   R.  J'ai eu mon premier emploi en 1978 à la mine de minerai de fer de

 12   Ljubija-Prijedor parce que j'avais une bourse de cette société pour

 13   étudier.

 14   Q.  Alors, d'après vos souvenirs, vous êtes resté combien de temps dans

 15   cette entreprise ?

 16   R.  J'ai travaillé en tant qu'avocat entre 1978 à septembre 1991. J'ai

 17   travaillé pour cette société. J'étais l'avocat de la société.

 18   Q.  Et après cela, au mois de septembre 1991, qu'avez-vous fait ?

 19   R.  En septembre 1991, j'ai reçu un appel à la mobilisation et j'ai été

 20   mobilisé au sein de l'unité des roquettes qui appartenait alors à la JNA.

 21   Q.  Où était basée cette unité ?

 22   R.  Cette unité est arrivée de Banja Luka sur le territoire de ce qui

 23   correspond maintenant à la Croatie. Cette unité était stationnée sur le

 24   territoire couvert par Glina, Petrinja. Le nom de la région c'est Banija.

 25   Q.  A ce moment-là, en septembre 1991, avez-vous fait des études militaires

 26   ? Aviez-vous un grade militaire ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Arrêtons-nous là. Nous n'allons plus parler de votre parcours


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  1   professionnel. Je vais vous demander de bien vouloir parler de votre

  2   formation sur un plan militaire. Où avez-vous servi dans l'armée ?

  3   R.  J'ai servi à Bileca, à l'école des réservistes qui se trouvait à cet

  4   endroit. Je suis devenu sous-lieutenant après cette formation. Lorsque j'ai

  5   été mobilisé, j'étais un capitaine de réserve, un capitaine d'infanterie.

  6   Q.  Merci. Combien de temps a duré votre service au sein de cette

  7   unité-là ?

  8   R.  J'étais en Croatie jusqu'au 11 avril 1992. Après quoi, après le 15 mai

  9   1992, j'étais en Bosnie-Herzégovine; à savoir, en Republika Srpska.

 10   Q.  Veuillez dire aux Juges de la Chambre à quelle unité vous apparteniez

 11   jusqu'au 15 mai 1992 dans la Republika Srpska.

 12   R.  C'était la même brigade de roquettes, qui était rentrée de Croatie dans

 13   le secteur de Celinac-Prnjavor.

 14   Q.  Je vais vous demander de bien vouloir répéter, s'il vous plaît -- bon,

 15   d'accord. C'est inutile. Cela a été consigné. Ce que je souhaitais vous

 16   demander, c'est ceci : combien de temps avez-vous servi dans cette unité ?

 17   R.  Cela, je l'ai déjà dit. J'y étais jusqu'au 15 mai 1992.

 18   Q.  Et après cela, quelles fonctions avez-vous occupées ?

 19   R.  Alors, lorsque je faisais partie de l'unité, on m'a convoqué à Prijedor

 20   pour reprendre le poste de procureur général dans cette municipalité-là.

 21   Q.  Et quand avez-vous assumé ces fonctions ?

 22   R.  J'ai assumé ces fonctions le 20 mai 1992.

 23   Q.  Et combien de temps êtes-vous resté à ce poste ?

 24   R.  Je suis resté à ce poste jusqu'au 20 octobre 1993.

 25   Q.  Veuillez dire aux Juges de la Chambre, s'il vous plaît, à quel endroit

 26   vous vous êtes rendu après la date du 20 octobre 1993.

 27   R.  A partir du 20 octobre 1993 -- ou le 20 octobre 1993, j'ai été nommé

 28   procureur militaire adjoint dans la zone de responsabilité du 1er et du 2e


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  1   Corps de la Krajina à Banja Luka.

  2   Q.  Et combien de temps êtes-vous resté à ce poste ?

  3   R.  Je suis resté à ce poste de procureur général adjoint jusqu'au 1er août

  4   1997, et après cela j'ai été nommé procureur du 1er Corps de Krajina.

  5   Q.  Combien de temps êtes-vous resté à ce poste-là ?

  6   R.  Je suis resté à ce poste jusqu'au 1er juillet de l'an 2000, qui était

  7   le jour où le système judiciaire militaire a été aboli sur l'ensemble du

  8   territoire de la Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Alors, veuillez nous dire où vous vous êtes rendu après cela. Quel

 10   emploi avez-vous exercé et ce, jusqu'à aujourd'hui ?

 11   R.  Après l'an 2000, j'ai commencé à travailler en tant que conseiller à la

 12   présidence de Bosnie-Herzégovine. Cela, c'était jusqu'en 2006. Et après

 13   cela, en 2007 jusqu'à aujourd'hui, je suis le procureur général de la

 14   Republika Srpska.

 15   Q.  Merci. Je souhaite maintenant attirer votre attention sur une période

 16   de temps précise dont vous avez parlé, parce que vous avez dit que c'était

 17   l'époque où vous avez travaillé en tant que juriste à la mine de minerai de

 18   fer à Ljubija. Pour ceux qui ne connaissent pas bien la région, veuillez

 19   nous dire où se trouve cette ville de Ljubija.

 20   R.  La société d'extraction du minerai de fer à l'époque comportait trois

 21   mines. Il y en avait une à Ljubija. C'était la zone minière la plus

 22   importante. Ensuite, il y a une autre mine à un kilomètre au sud de

 23   Prijedor. La deuxième mine s'appelle Istocna, à Tomasica, et cela se trouve

 24   au sud-est de Prijedor, à une vingtaine de kilomètres. Et la troisième mine

 25   se trouve à Omarska, et cela se trouve à 20 kilomètres à l'ouest.

 26   Q.  Merci. Veuillez nous dire quelle était la composition ethnique du

 27   personnel de cette société où vous travailliez jusqu'au début de la guerre,

 28   la société pour laquelle vous travailliez en tant que juriste ?


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  1   R.  La société comprenait 5 000 salariés, et ces salariés venaient de tous

  2   horizons et appartenaient à différents groupes ethniques. Aux postes-clés,

  3   les différents groupes ethniques étaient représentés de façon égale. Je

  4   veux parler des postes de direction. Et la situation était excellente. La

  5   société marchait très bien et les salaires étaient des salaires importants.

  6   Et nous avions plaisir à y travailler.

  7   Q.  Lorsque vous dites que la situation était bonne, je vais vous poser des

  8   questions maintenant sur les relations interethniques au sein de la société

  9   dans laquelle vous travailliez.

 10   R.  Avant les élections pluripartites, les relations étaient bonnes.

 11   Q.  Et qu'est-il arrivé après les élections pluripartites en Bosnie-

 12   Herzégovine ?

 13   R.  Après les élections, le SDA -- dans la municipalité de Prijedor, à

 14   savoir là où il y avait une alternative musulmane, il y a eu un changement.

 15   Il y a eu une dégradation de la situation politique et des rapports

 16   interethniques. Il y avait de plus en plus de méfiance des habitants les

 17   uns à l'égard des autres. Et plus précisément, les citoyens serbes, on les

 18   a plus ennuyés. En ce qui me concerne, il y avait des choses désagréables

 19   qui me sont arrivées, mais la différence portait surtout sur les

 20   différences entre ceux qui étaient en faveur du maintien au sein de la

 21   Yougoslavie et ceux qui souhaitaient le démantèlement de la Yougoslavie.

 22   Q.  Je vais vous poser des questions un peu plus tard à ce sujet. Nous

 23   devons procéder pas à pas. C'est comme ça que cela marche ici.

 24   Lorsque vous dites qu'il y avait des gens qui avaient une attitude

 25   différente à l'égard de la République fédérative socialiste de Yougoslavie,

 26   pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que vous, vous avez remarqué

 27   personnellement ?

 28   R.  Alors, moi, je vais vous donner deux ou trois exemples. L'un de ces


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  1   exemples est le cas de mon collègue, un économiste, Zoran Pusac, qui a

  2   présenté un rapport à notre instance collégiale. Ibro Paunovic était le

  3   directeur. Ce rapport avait été rédigé en cyrillique. Et lorsque le

  4   directeur a vu ce rapport en cyrillique, il a déchiré le rapport, et par ce

  5   geste il signifiait qu'il ne souhaitait plus que l'on écrive en cyrillique

  6   dans la société.

  7   Et deuxième exemple que je peux vous citer, c'était au moment où j'ai reçu

  8   un avertissement de collègues. J'apportais les journaux du matin, on m'a

  9   dit que je devais cacher ces journaux, et j'ai demandé pourquoi. On m'a

 10   rétorqué que les portiers avaient reçu la consigne de noter qui avait quel

 11   type de journal. Si les journaux étaient en cyrillique et les journaux

 12   Belgradois étaient considérés comme indésirables. Il se trouve que je

 13   lisais la presse belgradoise.

 14   J'ai encore de nombreux amis musulmans aujourd'hui, et une fois alors que

 15   nous prenions un verre ensemble, il y avait une personne qui était un ami

 16   proche, et il a dit : "La Yougoslavie n'existe plus. Les Serbes doivent

 17   aller en Serbie, les Croates en Croatie, et la Bosnie nous appartient."

 18   Si vous me permettez d'ajouter autre chose. Lorsque j'ai parlé des moments

 19   agréables à Prijedor ou en Bosnie-Herzégovine, la formule usitée à l'époque

 20   consistait à dire que la Bosnie-Herzégovine était musulmane, serbe et

 21   croate; à savoir, la Bosnie-Herzégovine n'était ni serbe, ni musulmane, ni

 22   croate. Cette formule pouvait s'appliquer pour autant que la Yougoslavie

 23   existait encore. Mais le jour où la Yougoslavie a disparu, cette formule

 24   n'était plus applicable, et c'est à ce moment-là que ces conflits ont

 25   éclaté.

 26   Q.  Je souhaite que vous nous donniez des dates, s'il vous plaît. Vous nous

 27   avez donc cité ces trois ou quatre exemples. Pourriez-vous nous dire à quel

 28   moment ceci s'est passé ?


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  1   R.  Ceci avait déjà commencé à la fin des années '90, dans le courant de

  2   l'année 1991 et au début de l'année 1992. Au fil du temps, cette

  3   intolérance à l'égard d'autrui se faisait de plus en plus sentir. Et je

  4   peux même dire que le peuple serbe était bouleversé pour des raisons

  5   historiques.

  6   Q.  Qu'est-ce que vous entendez par là lorsque vous dites "pour des raisons

  7   historiques" ?

  8   R.  Eh bien, la mémoire des faits historiques. Le mont Kozara se trouve

  9   dans le secteur de Kozara [phon], et il y a le camp de Jasenovac dans ce

 10   secteur-là. Cela signifie que 40 ans auparavant, des crimes odieux avaient

 11   été commis contre le peuple serbe. Aux mois de mai et juin 1942, 70 000

 12   hommes, femmes et enfants sont morts dans ce secteur, dont 40 000 étaient

 13   des enfants qui avaient moins de 14 ans. Lorsque j'étais petit, 520 civils

 14   ont été tués.

 15   Q.  Veuillez ralentir un petit peu, s'il vous plaît. Pardonnez-moi, vous

 16   pouvez poursuivre.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Maître Stojanovic,

 18   vous savez, n'est-ce pas, que ce type de déposition est répété à l'envi ?

 19   Nous vous demandons de bien vouloir éviter de répéter les éléments d'une

 20   déposition. Et lorsque le témoin dit que de nombreux Serbes ont beaucoup

 21   souffert pendant la Deuxième Guerre mondiale, eh bien, ce n'est pas quelque

 22   chose qui est contesté.

 23   M. TRALDI : [interprétation] Non, effectivement, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic.

 25   M. STOJANOVIC : [interprétation] Très bien. Merci pour ce que vous me

 26   suggérez.

 27   Q.  Je crois que c'est la première fois que cette information a été

 28   concrètement consignée. Je vais vous demander de terminer votre phrase et


Page 35487

  1   ensuite nous allons poursuivre.

  2   Nous vous avons interrompu lorsque vous avez cité des chiffres qui

  3   concernaient votre propre village.

  4   R.  Ce que j'ai dit, c'est parce que les gens avaient peur que l'histoire

  5   se répète, et c'est en raison de ces crimes que les gens étaient inquiets.

  6   Q.  Très bien. Et vous personnellement, avez-vous vécu certaines choses

  7   dans votre société avant que la guerre n'éclate qui étaient le signe

  8   d'attitude et d'approche différentes à l'égard de la JNA, ce qui était à

  9   l'époque l'armée yougoslave ?

 10   R.  Eh bien, les approches étaient différentes. Etant donné que je dois

 11   m'en tenir aux faits, je me souviens qu'une brigade de chars de Serbie est

 12   arrivée à Prijedor et que le maire de Prijedor s'est mis debout devant le

 13   char. C'était un Musulman. Je ne me souviens pas de son nom. Et d'un autre

 14   côté, les gens ont permis à l'armée serbe de venir à Prijedor parce que

 15   l'armée distribuait de l'eau et de la nourriture. Ce qui signifie qu'à

 16   cette époque-là déjà, la JNA n'était pas autorisée à traverser Prijedor.

 17   Q.  Merci. Je souhaite vous demander de reporter votre attention au moment

 18   où vous avez assumé vos fonctions en tant que procureur général dans la

 19   municipalité de Prijedor. Je souhaite que vous résumiez vos fonctions, ce

 20   que cela impliquait que d'être procureur général de la municipalité.

 21   R.  Alors la fonction de procureur général existe dans tous les pays du

 22   monde, me semble-t-il. En quelques mots, on peut dire qu'il s'agit d'un

 23   procureur général rattaché aux institutions de l'Etat. Il s'agissait

 24   d'institutions qui étaient financées à partir du budget et de la

 25   municipalité, et nous devions nous assurer du respect des lois et des

 26   règlements. Cet organe avait pour rôle d'attirer l'attention sur certains

 27   points et s'assurer que les autorités n'enfreignaient pas les lois, et cet

 28   organe s'occupait des droits des citoyens également.


Page 35488

  1   Q.  Pouvez-vous nous dire, lorsque vous occupiez ces tâches de

  2   gestionnaire, aviez-vous des assistants ?

  3   R.  Je travaillais seul. J'étais seul à ce poste, et j'avais juste un

  4   secrétaire technique. Avant moi, mon prédécesseur travaillait seul.

  5   Q.  Aviez-vous pour obligation d'assister à des séances de l'assemblée ou

  6   du conseil exécutif de la municipalité de Prijedor ?

  7   R.  Non, ce n'était pas mon obligation, mais je devais répondre à la

  8   convocation du président pour assister à des réunions où étaient discutés

  9   des points concernant mon travail.

 10   Q.  Est-ce que vous étiez au courant du travail de la cellule de Crise de

 11   la municipalité de Prijedor à un moment donné pendant que vous étiez

 12   procureur général ?

 13   R.  Je sais qu'il y avait la cellule de Crise qui était formée pendant que

 14   j'étais toujours à l'unité. Je n'étais pas membre de la cellule de Crise,

 15   donc je n'influençais pas leur travail, je n'avais pas à m'ingérer dans des

 16   tâches de la cellule de Crise, puisque le pouvoir judiciaire était séparé

 17   d'autres pouvoirs et d'autres organes.

 18   Q.  Quels étaient les problèmes les plus fréquents que vous avez rencontrés

 19   en tant que procureur général, jusqu'à ce que vous soyez devenu procureur

 20   militaire adjoint ?

 21   R.  Le plus grand problème était d'établir les organes de pouvoir. Puisque

 22   voilà ce qui s'est passé : il n'y avait plus d'autorités d'Etat. Cela a

 23   disparu. L'Etat de Yougoslavie a disparu et il fallait établir des nouveaux

 24   systèmes de pouvoir puisque les organes de pouvoir de la République de

 25   Bosnie-Herzégovine avaient disparu également. Donc il y avait une sorte de

 26   lacune et il fallait donc s'occuper de tout. Pendant cette période de

 27   temps-là, il y avait des criminels, des escrocs, qui, pendant cette période

 28   où il n'y avait pas d'état de droit, pouvaient faire ce qu'ils voulaient.


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  1   Donc tous les crimes étaient commis pendant cette période de temps-là.

  2   Q.  Pendant que vous travailliez en tant que procureur général dans la

  3   municipalité de Prijedor, est-ce que des pressions étaient exercées sur

  4   vous pour ce qui est de vos tâches et de vos décisions ?

  5   R.  Non. J'étais à la tête de l'organe indépendant, j'envoyais des demandes

  6   concernant les appartements abandonnés, concernant le fait de préserver les

  7   biens abandonnés. Je disais qu'il s'agissait du droit sur la propriété

  8   privée, qui était quelque chose qu'il fallait protéger à tout prix. Et même

  9   si quelqu'un a dû quitter Prijedor à cause de la guerre, personne n'avait

 10   le droit d'enfreindre leurs propriétés. Même s'il s'agissait des Bosniens,

 11   des Serbes, des Croates ou des Yougoslaves, leurs propriétés devaient être

 12   protégées. Et j'ai voulu que cela soit protégé.

 13   Q.  Vous avez mentionné des "biens abandonnés". Pouvez-vous dire à la

 14   Chambre ce que cela voulait dire, "biens abandonnés", dans la municipalité

 15   de Prijedor ?

 16   R.  Il s'agissait en premier lieu des appartements qui appartenaient à la

 17   société, des maisons. Des petites entreprises, des petites compagnies, des

 18   petits magasins qui commençaient à fonctionner à Prijedor. Donc tout cela

 19   appartenait aux citoyens de la ville qui étaient forcés de quitter la ville

 20   à cause de la guerre.

 21   Q.  Est-ce que vous informiez les compagnies, les entreprises, les organes

 22   d'Etat lorsqu'il y avait des problèmes objectifs concernant ces biens

 23   abandonnés ?

 24   R.  Oui. Et j'ai envoyé quelques documents que j'ai rédigés à la

 25   municipalité. J'ai même demandé que cela soit publié à "Kozarski Vjesnik",

 26   le journal local. Et lors des réunions auxquelles j'ai assisté, j'ai

 27   demandé que la loi et l'ordre soient respectés ainsi que les biens

 28   d'autrui.


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  1   M. STOJANOVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher le

  2   document de la liste 65 ter qui porte le numéro 1D05383.

  3   Q.  Nous allons revenir à la première page. Avant cela, j'aimerais qu'on

  4   regarde la dernière page en B/C/S et en anglais pour quelques instants.

  5   En bas du document, nous pouvons lire VD, procureur général municipal,

  6   Slobodan Radulj, et sa signature. Est-ce que vous reconnaissez cette

  7   signature ?

  8   R.  Oui. J'étais donc à l'époque procureur général municipal par intérim,

  9   et c'est pour cela que ma signature y figure.

 10   Q.  Revenons à la première page du document. Je vais vous poser quelques

 11   questions par rapport à cela.

 12   Ce document qui porte votre signature et la date du 21 septembre 1992 dans

 13   l'en-tête, au-dessous de la date, on voit les mots "entreprise -

 14   institution".

 15   Pouvez-vous me dire ce que cela signifie pour ce qui est de cette forme de

 16   document ?

 17   R.  C'est une lettre circulaire. L'un de mes employés aurait inscrit

 18   l'adresse de l'entreprise et la formule à l'intention du directeur ou à

 19   l'intention des organes de la municipalité pour ne pas devoir

 20   dactylographier tout cela à chaque fois, puisqu'il s'agissait d'une machine

 21   à écrire mécanique et non pas électrique. Il n'y avait pas d'électricité.

 22   Et cela devait être publié dans le journal "Kozarski Vjesnik", donc tous

 23   les citoyens pouvaient lire cela, toutes les institutions également qui

 24   étaient concernées par ce document. Donc ce type de document concernait

 25   tous ceux qui avaient le pouvoir, en quelque sorte, dans la municipalité de

 26   Prijedor.

 27   Q.  Pouvez-vous nous dire aujourd'hui si votre document que vous avez

 28   rédigé a été envoyé aux entreprises et aux institutions sur le territoire


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  1   de la municipalité de Prijedor ?

  2   R.  Oui, bien sûr, et ce document a été publié aussi. C'est ce que j'ai

  3   déjà dit. Donc tous les destinataires ont reçu ce document. Il y avait des

  4   centaines de destinataires pour ce qui est de ce document.

  5   Q.  Merci. Maintenant, j'attire votre attention sur le deuxième paragraphe

  6   de ce document, où vous dites :

  7   "Dans de telles occasions, des individus ont trouvé le moyen pour s'emparer

  8   facilement de certains biens, en particulier des appartements qui

  9   appartenaient à la société… et nous sommes témoins de cambriolages par

 10   effraction quotidiennement et d'emménagements illicites dans des

 11   appartements qui appartiennent à la société… et tout cela commence à

 12   arriver de façon généralisée et à grande échelle."

 13   Pouvez-vous nous dire de quelle catégorie d'appartements il s'agit ici,

 14   "des appartements de la société" ?

 15   R.  Les appartements de la société n'étaient pas à l'époque propriété

 16   privée de locataires qui y habitaient. Les entreprises, les institutions

 17   accordaient des appartements à leurs ouvriers pour que les ouvriers les

 18   utilisent pendant une période de temps déterminée ou indéterminée, pour les

 19   occuper de façon permanente.

 20   D'après la loi qui s'appliquait à l'époque pour ce qui est de ces

 21   appartements, l'ouvrier pouvait perdre son droit d'être locataire dans cet

 22   appartement s'il n'occupait pas l'appartement pendant une période de six

 23   mois. Mais là, il faut que je vous dise que ce délai de six mois ne pouvait

 24   pas être appliqué lorsqu'il s'agissait de la guerre puisque les citoyens

 25   étaient forcés de partir. Ils n'étaient pas partis de leur propre gré et

 26   ils allaient revenir un jour pour récupérer leurs appartements.

 27   Le document dont il s'agit a, en fait, anticipé ce qui allait se passer

 28   après les Accords de Dayton, selon lequel tout le monde avait le droit de


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  1   revenir et de récupérer leurs propriétés.

  2   Q.  Est-ce que ce document fait état de la discrimination concernant les

  3   locataires de ces appartements de la société, concernant l'appartenance

  4   ethnique des locataires ?

  5   R.  Je crois que le texte même montre que cela s'applique à tous les

  6   citoyens indépendamment de leur appartenance ethnique.

  7   Q.  J'aimerais savoir quelle était la position officielle des autorités à

  8   l'époque - et vous, vous faisiez partie de ces autorités - concernant qui

  9   devait disposer de l'appartement dont le propriétaire a quitté

 10   l'appartement à cause de la guerre ? Qui avait le droit d'occuper cet

 11   appartement et l'utiliser ?

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Traldi.

 13   M. TRALDI : [interprétation] Le terme d'autorité officielle devrait être

 14   compris à la façon suivante : cela comprenait différentes institutions.

 15   Certaines d'entre elles étaient les institutions dont le témoin était

 16   membre, et donc il a témoigné qu'il ne pouvait pas être au courant de tout

 17   cela. Est-ce que la question pourrait être plus précise.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, allez-y.

 19   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 20   Q.  Je m'excuse, Monsieur Radulj, quelle était la position des autorités

 21   officielles concernant ces appartements de la société et qui, d'après la

 22   position des autorités, avait le droit de disposer de ces appartements ?

 23   R.  Pour pouvoir répondre, je devrais faire une sorte d'introduction. Comme

 24   j'ai déjà dit, les entreprises avaient leurs propres appartements. Ainsi

 25   que la municipalité. Et pour ce qui est de ces appartements, la

 26   municipalité et les entreprises devaient respecter le droit des précédents

 27   locataires parce que des individus entraient par effraction dans ces

 28   appartements. Il y en avait même qui chassaient leurs locataires légaux.


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  1   Puisqu'il allait venir le temps où les appartements de la société devaient

  2   être rendus à leurs locataires légaux.

  3   Q.  Merci. Regardons à la page 3 le paragraphe numéro 1 du même document.

  4   Je crois qu'en anglais il s'agit également de la page 3.

  5   Juste un instant, s'il vous plaît, Monsieur Radulj. Il faut que la

  6   version en anglais soit affichée également.

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut regarder la page

  8   précédente dans la version en anglais. Merci.

  9   Q.  Dans ce document, vous dites :

 10   "Jusqu'à ce moment-là, il faut que toutes les entités que ces problèmes

 11   concernent aient à l'esprit la chose suivante :

 12   "1. Toutes les personnes qui ont emménagé dans des appartements sans avoir

 13   disposé de la décision rendue par l'organe compétent sont des locataires

 14   illicites des appartements et doivent partir de ces appartements d'après la

 15   décision de la municipalité du 27 août 1992."

 16   Est-ce que c'est votre position en tant que procureur général; ou est-ce

 17   que, lorsque vous faites référence à la décision de l'assemblée municipale,

 18   vous faites état de la position de l'institution suprême de pouvoir à

 19   Prijedor ?

 20   R.  Je ne me souviens pas de détails. Tout cela s'est passé il y a

 21   longtemps. Je pense que c'est la décision de l'assemblée municipale selon

 22   laquelle tous les locataires illicites de ces appartements devaient partir.

 23   Cela n'a pas été mis en place. Mais dans ce document, j'ai voulu que cette

 24   décision soit appliquée. Puisque cette décision n'était pas exécutée comme

 25   il le fallait.

 26   Q.  Merci. Regardons maintenant le point 4.

 27   M. STOJANOVIC : [interprétation] En B/C/S, il faut passer à la page

 28   suivante.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, avant de passer au

  2   point suivant, l'heure est venue de la pause. Sinon, la dernière session

  3   sera très, très courte. Avant de passer au point suivant, je souhaite, par

  4   conséquent, que l'on passe à la pause.

  5   Monsieur Radulj, nous allons faire une pause d'environ 20 minutes.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

  7   [Le témoin quitte la barre]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre à 2 heures moins

  9   le quart.

 10   --- L'audience est suspendue à 13 heures 26.

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 46.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, veuillez poursuivre.

 15   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 16   Q.  Monsieur Radulj, la pause est arrivée au moment où nous avons souhaité

 17   vous soumettre le point 4 de ce document. Donc je vous invite de nous

 18   montrer la page suivante en B/C/S, et ensuite en anglais aussi, lorsque

 19   l'on aura examiné les deux premières lignes. Dans ce document, vous dites

 20   dans la dernière partie que :

 21   "La guerre n'est pas encore terminée. Les gens se font encore tuer et

 22   blesser. Il faut être conscient du fait que malheureusement il y aura

 23   encore des familles dans le besoin, des soldats tués et des invalides de

 24   guerre, et il va falloir s'acquitter de ces obligations vis-à-vis de ces

 25   familles." Et puis, vous indiquez que ce sont justement les institutions

 26   qui ont le droit de disposer des appartements en propriété sociale qui

 27   devront s'acquitter de ce type d'obligation. C'est ce que vous mentionnez

 28   donc dans la décision de l'assemblée municipale.


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  1   Quel était l'objectif que vous avez souhaité atteindre par le biais

  2   de ce document ?

  3   R.  Mon premier objectif c'était de m'assurer que la loi est respectée,

  4   qu'il y avait de l'ordre, que les individus n'étaient pas attitrés à

  5   bénéficier de certains droits qui ne leur incombaient pas réellement en

  6   vertu de la loi. Donc ce travail devait être fait par des institutions et

  7   des autorités légales.

  8   Q.  Oui, terminez votre phrase.

  9   R.  Je vais vous donner un exemple afin d'illustrer l'ensemble de la

 10   situation.

 11   En tant que procureur général, j'ai eu à examiner un accord d'achat

 12   d'une petite entreprise. La personne qui vendait c'était une femme croate -

 13   -

 14   L'INTERPRÈTE : Nom que l'interprète n'a pas saisi.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] -- et puis, il y avait le nom de sa

 16   société, c'était Hidroflex. Et pour autant que je le savais, elle avait

 17   quitté Prijedor. L'acheteur, d'autre part, m'apportait l'accord d'achat que

 18   j'étais censé certifier afin de pouvoir enregistrer le contrat. J'ai refusé

 19   de le certifier car j'avais des doutes au sujet de l'ensemble de

 20   l'arrangement. Ensuite, j'ai vérifié la signature du vendeur, je l'ai

 21   comparée à la signature qui était sur les documents de la société, puis

 22   j'ai vérifié le contrat lui-même et j'ai constaté qu'il s'agissait d'un

 23   faux. D'autre part, ces biens étaient abandonnés temporairement, étaient à

 24   la disposition de la municipalité provisoirement en attendant le moment où

 25   l'on pourra résoudre la situation de façon permanente. Et non seulement que

 26   je n'ai pas apposé ma signature sur ce contrat, mais j'ai déposé une

 27   plainte auprès de la cour afin d'annuler le contrat. Et en raison de cela,

 28   j'ai subi des menaces de la part des individus qui souhaitaient abuser des


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  1   institutions d'Etat afin d'obtenir des biens précieux de manière illégale.

  2   Je vous le dis afin d'illustrer la manière dont je souhaitais

  3   protéger les biens de tout le monde, quelle que soit l'appartenance

  4   ethnique de la personne.

  5   M. STOJANOVIC : [interprétation]

  6   Q.  Cette personne qui vous s'est présentée en tant qu'acheteur des biens

  7   appartenant à cette Croate de Prijedor, quelle était son appartenance

  8   ethnique ?

  9   R.  Il était Serbe. En fait, il y avait deux frères et ils étaient Serbes.

 10   Q.  Est-ce qu'au cours de cette année pendant laquelle vous avez travaillé

 11   au sein du bureau du procureur général, est-ce que vous avez eu des

 12   expériences liées aux discriminations sur base ethnique au nom des

 13   autorités et des cours de Prijedor s'agissant de la mise en œuvre de la

 14   loi ?

 15   R.  Mon bureau se trouvait dans le bâtiment de la cour et du bureau du

 16   procureur. En tant que professionnel, je me guidais seulement par la loi.

 17   Et tout au long de mon mandat, je n'ai pas permis quelque discrimination

 18   que ce soit. Et souvent, les Bosniaques se tournaient vers moi en demandant

 19   des conseils ou des instructions pour que je les aide, et j'ai toujours

 20   fait de mon mieux afin de répondre à leurs besoins, leurs demandes, dans

 21   les limites de mes devoirs et de mes possibilités. Je pense que la cour de

 22   Prijedor ne discriminait personne non plus. De toute façon, je n'ai pas eu

 23   de telles expériences.

 24   Q.  Nous reviendrons au point 4, qui est devant vous.

 25   Dites-nous, est-ce que personnellement vous savez si des unités du

 26   MUP ou de l'armée de la Republika Srpska comportaient également des membres

 27   d'origine non serbe ?

 28   R.  Oui. Par exemple, mon unité c'était une compagnie motorisée. Lorsque je


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  1   suis parti, en réalité, c'était une unité de la JNA. Il y avait au sein de

  2   ces unités environ dix Musulmans, huit Croates et d'autres membres d'autres

  3   groupes ethniques, y compris des Albanais et des Yougoslaves. Et je sais

  4   aussi qu'au sein des brigades de Prijedor il y en avait deux et qu'il y

  5   avait aussi des membres d'autres peuples. Et je sais qu'il y avait même une

  6   compagnie de Croates provenant d'un village près de Ljubija. Je ne me

  7   souviens plus du nom du village, mais je me souviens que c'est ce qu'on

  8   disait. Je ne sais plus si le nom du village c'était Ravsko ou si c'était

  9   un autre village, mais je sais que c'était un village croate. Mais peut-

 10   être qu'il vaut mieux ne pas trop tenir compte de ce que je viens de dire

 11   car je ne suis pas sûr. Je me souviens simplement du fait que c'était une

 12   compagnie purement croate, mais le nom du village m'échappe.

 13   Q.  Compte tenu de vos informations, par exemple, de cette lettre

 14   circulaire que vous avez envoyée aux institutions différentes, est-ce que

 15   vous savez s'il y a eu des familles de telles personnes qui n'étaient pas

 16   d'origine serbe et qui étaient membres du MUP ou de l'armée de la Republika

 17   Srpska qui ont été blessées ou tuées, et est-ce que dans ce cas-là ces

 18   familles faisaient partie de ces catégories de familles qu'il fallait aider

 19   compte tenu du fait que leurs membres avaient été blessés ou tués au

 20   combat ?

 21   R.  Oui, bien sûr. Il ne pouvait pas y avoir une quelconque discrimination.

 22   Q.  Merci.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, j'ai quelques

 24   questions de clarification.

 25   Vous avez parlé de votre compagnie motorisée. Vous avez dit qu'il y avait

 26   environ dix Musulmans et huit Croates. Quelle a été la capacité totale de

 27   cette compagnie ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Ma compagnie comptait environ 150 hommes.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit lorsque vous êtes entré

  2   dans cette unité. Est-ce que la composition a changé après que vous aviez

  3   rejoint ses rangs ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai rejoint les rangs de cette unité en fin

  5   du mois de septembre 1991. Cependant, dès le début de l'année 1992, la

  6   composition de l'unité a changé. Un grand nombre de Musulmans et de Croates

  7   ont quitté cette unité. A l'époque, on considérait que ceci était normal

  8   que chacun aille vers son propre peuple.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Que ce soit normal ou pas, je

 10   souhaite simplement examiner les faits. Donc, ai-je bien compris si je dis

 11   que -- je vais juste vérifier. Les dix Musulmans et les huit Croates

 12   étaient au sein de cette unité en septembre 1991 ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et disons en juin 1992, combien de non-

 15   Serbes restaient-ils au sein de l'unité ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai quitté l'unité le 15 mai 1992, mais ce

 17   chiffre, d'après moi, a été divisé en deux.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'agit-il de votre opinion sur la

 19   question ou est-ce quelque chose que vous savez ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en suis pas tout à fait sûr. C'est en

 21   tout cas une estimation que je peux faire.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors je vais vous poser une autre

 23   question.

 24   Vous nous avez parlé de Musulmans et de Croates. Combien de non-Serbes y

 25   avaient-ils à cet endroit ? Vous avez parlé de personnes appartenant à

 26   d'autres groupes ethniques. Ils étaient au nombre de combien ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens du fait qu'il y avait un

 28   Albanais, il y avait des membres d'active, et des Monténégrins, des


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  1   Slovènes et des Macédoniens qui étaient des officiers d'active et des sous-

  2   officiers.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ils étaient au nombre de combien ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas exactement. Je ne me

  5   souviens pas du chiffre exact car la brigade était beaucoup plus

  6   importante. Et mes notes ne couvraient que la compagnie motorisée.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi, je vous posais la question au sujet

  8   de la compagnie, qui d'après vous comportait 150 hommes. Dois-je comprendre

  9   que ces dix Musulmans et huit Croates faisaient partie de votre compagnie ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Combien de Monténégrins et d'Albanais se

 12   trouvaient dans votre compagnie, ou, disons, plutôt, combien d'autres non-

 13   Serbes y avait-il dans votre compagnie ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'il y avait deux Monténégrins. Un

 15   Albanais a été ajouté. C'était un officier d'active. Il a été détaché

 16   auprès de l'unité, mais ce, pendant un court laps de temps.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il y avait 85 % de Serges et 15 %

 18   de non-Serbes environ au mois de septembre 1991, et ce chiffre est descendu

 19   à la moitié de ce nombre, à savoir moins de 10 %, lorsque vous avez quitté

 20   la compagnie.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 23   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Radulj, en tant que procureur général, entre mai 1992 et

 25   octobre 1993, avez-vous été impliqué dans des actions militaires à

 26   Prijedor ?

 27   R.  Non. Car j'ai quitté la brigade le 15 mai, je vivais à Prijedor avec ma

 28   famille et j'étais heureux d'avoir un emploi qui n'impliquait pas d'être


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  1   sur le front. J'avais pour seule tâche d'être de garde devant le bâtiment

  2   du tribunal pendant la nuit. Nous avions des fusils militaires et nous

  3   devions monter la garde devant le tribunal. Nous devions tous faire cela.

  4   Et pendant la journée, on remplissait nos tâches ou nos missions

  5   régulières.

  6   Q.  Le 30 mai - nous avons entendu beaucoup de choses sur ce qui s'est

  7   déroulé à Prijedor ce jour-là - je souhaite que vous nous disiez où vous

  8   étiez ce jour-là.

  9   R.  Je me souviens de ce matin-là très bien. C'était le 30 mai. J'étais

 10   avec ma femme dans notre appartement. Les enfants étaient à la campagne

 11   avec leur grand-père et leur grand-mère déjà. Le matin, j'ai été réveillé

 12   par des coups de feu assez forts. Je me suis levé. Ma femme m'a dit : Eh

 13   bien, c'est normal, car on entend des coups de feu tous les soirs. Je

 14   n'avais pas été à Prijedor depuis un moment. Et ensuite, j'ai dit : "Je

 15   crois qu'il s'agit ici de quelque chose de plus sérieux." Et lorsque le

 16   jour s'est levé, je pouvais voir au niveau du bâtiment d'en face ce que les

 17   voisins sortaient de l'immeuble. Il y avait des soldats qui avaient des

 18   fusils. On tirait de l'autre côté de la ville. Il y avait de la fumée. Et

 19   je comprenais que l'on tirait des tirs d'artillerie. L'électricité avait

 20   été coupée. Et même si c'était une journée ensoleillée, on ne pouvait rien

 21   voir en ville en raison de la fumée. Je me trouvais dans le quartier de

 22   Pecani. C'est là que je vivais.

 23   Q.  Et ce jour-là, avez-vous personnellement fait quelque chose ? Est-ce

 24   que vous avez reçu des demandes ou quelque chose comme ça ?

 25   R.  Lorsque j'ai vu ce qui s'y passait, je me suis habillé. Il n'y a qu'une

 26   école dans ce quartier. Et le quartier est proche de la route Prijedor-Novi

 27   Grad, ou plutôt, la ligne de chemin de fer. Egalement Prijedor-Novi Grad,

 28   en fait. Puharska se trouve de l'autre côté. Ce sont des voies parallèles.


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  1   Et c'est dans un quartier qui est majoritairement musulman. J'ai remarqué

  2   qu'il y avait un certain nombre d'entre nous qui portaient un uniforme et

  3   qui avaient ou qui n'avaient pas d'armes. J'ai vu que l'on tirait de

  4   l'autre côté sur ce quartier-là. Il y avait également des groupes de

  5   personnes à cet endroit. Il n'y avait aucun commandement et personne ne

  6   dirigeait ce qui se passait, mais ils ripostaient par rapport aux tirs qui

  7   provenaient de l'autre côté.

  8   Q.  Avez-vous participé à cela ?

  9   R.  Alors je suis sorti pour voir ce qu'il se passait. Il ne s'agissait pas

 10   d'une ligne de front en tant que telle. On tirait, et il fallait faire

 11   attention de ne pas traverser le chemin de fer et la route, car dans ce cas

 12   cette localité aurait été attaquée. Alors j'ai remarqué à un moment donné

 13   qu'il y avait un canon anti-recul. Là, il s'agissait d'arme plus lourde.

 14   Les autres armes étaient des pièces d'artillerie. Et un des soldats a

 15   dirigé le canon sur une maison, ce qui était, en réalité, la maison d'un de

 16   mes amis qui était Musulman. Et j'ai dit : "Ne tirez pas. Ne tirez pas. Car

 17   c'est la maison d'un de mes amis." Je lui ai dit que c'était un Serbe. Et

 18   donc, il n'a pas tiré dessus.

 19   Permettez-moi de dire cela -- peut-être ceci n'a pas un lien direct, mais

 20   ceci me concerne personnellement, car ce jour-là j'ai fait un geste.

 21   Quelqu'un répondant au nom de Salko s'est adressé à moi. C'était un

 22   Musulman qui travaillait dans mon ancienne entreprise. Il m'a demandé de

 23   l'aide car sa femme était sur le point de donner naissance à leur enfant.

 24   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Correction, il s'agit de sa fille.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais l'hôpital se trouvait à l'autre extrémité

 26   de la ville. Les choses étaient incertaines. Il y avait de nombreux tirs.

 27   Et j'ai dit à Salko : "Où est le mari de votre fille ?" Et Salko m'a dit

 28   d'une voix faible : "Je ne sais pas. Il a quitté la maison il y a deux


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  1   mois." Je lui ai demandé s'il avait rejoint les Bérets verts peut-être. Et

  2   il a répondu : "C'est possible." Et j'ai dit : "Est-ce qu'il nous tire

  3   dessus en ce moment de l'autre côté ?" Il a répondu : "Ah oui, cela est

  4   possible aussi." Un soldat est venu jusqu'à moi et m'a dit : "Pourquoi vous

  5   lui adressez la parole à cette personne." Et j'ai répondu que c'était mon

  6   ami.

  7   Et ensuite, j'ai réfléchi un petit peu. J'avais une vieille voiture dans

  8   laquelle j'avais 5 litres d'essence, et j'ai dit : "Partons." La voiture

  9   était dans le garage. Sa fille est venue. Elle se tenait littéralement le

 10   ventre. Les contractions étaient déjà bien avancées. Et donc, j'ai emprunté

 11   une autre route pour éviter les coups de feu, et je suis finalement parvenu

 12   à l'hôpital.

 13   Q.  Veuillez me dire, s'il vous plaît, si à l'hôpital, étant donné qu'il

 14   s'agissait d'une femme qui avait des contractions et qui allait donner

 15   naissance à son enfant, puisqu'elle était Musulmane,  est-ce que le

 16   l'hôpital a fait des difficultés s'agissant de son admission à l'hôpital ?

 17   R.  Alors, je vais vous dire --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je vais vous arrêter.

 19   Est-ce que l'Accusation dit dans sa thèse que les femmes musulmanes ne

 20   seraient pas admises à l'hôpital lorsqu'elles donnaient naissance à leur

 21   enfant ? Que c'était toujours le cas ? Cela s'est peut-être produit ici et

 22   là, mais…

 23   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 24   M. TRALDI : [interprétation] Nous n'avons pas de point de vue précis sur la

 25   question. Nous ne mettons pas en doute le fait que ceci s'est passé assez

 26   souvent. Mais dans le cas particulier que nous décrit le témoin, c'est

 27   quelque chose que nous connaissons parce que nous en avons parlé lors de

 28   notre entretien.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre ne connaît pas ce type de

  2   situation. Elle n'a pas assisté à l'entretien parce qu'il s'agit d'un

  3   témoin entendu de vive voix.

  4   Je souhaite savoir si -- bon, écoutez, le type de détail pour savoir si

  5   cette femme a donné naissance à un petit garçon ou à une petite fille ne

  6   semble pas avoir un lien avec la thèse de l'Accusation et n'est, par

  7   conséquent, pas très utile. La Chambre s'attend à ce que la Défense prépare

  8   ses moyens et sa thèse plutôt que de contrecarrer ce qu'a dit l'Accusation.

  9   Nous ne souhaitons entendre de vous que ce témoin s'est bien comporté et a

 10   aidé ses amis et aidé un enfant à naître. Mais, bon, il est difficile d'en

 11   faire une déclaration générale, et tous ces détails sont peut-être

 12   pertinents. Mais si vous voulez poser des questions, faites-le rapidement

 13   et abordez des questions concrètes. Ne permettez pas au témoin de parler

 14   pendant des pages et des pages sur des sujets qui ne semblent pas porter

 15   sur l'essentiel de l'affaire.

 16   Veuillez poursuivre.

 17   M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agissait d'une

 18   digression, et je souhaite vous demander de bien vouloir m'écouter.

 19   Prijedor, dans l'acte d'accusation, reste la ville où a été commis un

 20   génocide avec une intention particulière, avec des exemples de ce type.

 21   Alors, si vous jugez que ceci n'est pas pertinent, et j'entends la

 22   déposition de ce témoin sur les événements qui se sont produits, en plein

 23   milieu des événements très importants de Prijedor, dans ce cas je vais

 24   passer à autre chose et poser une autre question au témoin.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, dans votre travail en qualité de procureur général,

 26   étiez-vous directement en contact avec Omarska et Keraterm ?

 27   R.  Non. Parce que j'avais mes propres missions. Cela n'était pas utile. Et

 28   j'ai essayé d'accomplir mes missions le plus professionnellement possible.


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  1   Je n'ai jamais eu de contact avec eux et je n'y suis jamais allé.

  2   Q.  Je vous remercie. Et je vais en terminer aujourd'hui avec la question

  3   suivante. Comment se fait-il que vous étiez recruté en tant que procureur

  4   militaire et que vous avez été transféré à Banja Luka ? En quelques mots,

  5   s'il vous plaît.

  6   R.  Alors un de mes collègues, un avocat, a suggéré -- ou, en tout cas, il

  7   a dit que le bureau du procureur militaire recherchait des avocats qui

  8   étaient également des officiers de réserve, donc je leur ai envoyé ma

  9   demande par écrit, et c'est ainsi que j'ai été muté à Banja Luka.

 10   Q.  Merci, Monsieur Radulj. Peut-être que le moment est opportun de nous

 11   arrêter maintenant aujourd'hui, mais nous allons poursuivre demain et vous

 12   poser des questions sur le moment où vous avez travaillé au bureau du

 13   procureur militaire.

 14   M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, nous pensons que le

 15   moment est opportun pour terminer la déposition de ce témoin pour

 16   aujourd'hui.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une question à poser au témoin.

 18   Vous avez décrit vos fonctions qui étaient celles du procureur général, et

 19   vous deviez vous assurer que les lois et les règlements étaient respectés,

 20   surtout compte tenu du fait que les institutions étaient financées à partir

 21   du budget municipal.

 22   Ceci comprend-il le respect de lois et des règlements s'appliquant au MUP,

 23   par exemple…

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Me permettez-vous de répondre ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Le rôle du procureur général est de protéger

 27   les lois --

 28   L'INTERPRÈTE : Le témoin peut-il ralentir, s'il vous plaît.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez ralentir, s'il vous plaît. Les

  2   interprètes ont du mal à vous suivre.

  3   Veuillez reprendre votre réponse. Vous avez dit que le rôle du procureur

  4   général est de protéger. Veuillez reprendre à cet endroit-là.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Et de protéger les biens et les intérêts de

  6   ces institutions. Si nous parlons dans un sens plus large, si l'on évoque

  7   la question de la responsabilité pénale et d'autres violations de la loi,

  8   cela relève de la compétence du bureau du procureur. Telle est la

  9   différence entre le procureur militaire et le bureau du procureur.

 10   Donc nous parlons de maisons, d'appartements, de droits à la propriété.

 11   Cela concerne ce domaine-là.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il s'agit essentiellement

 13   d'éléments matériels. Non pas de violation de la loi à l'encontre de

 14   personnes ou d'autres droits des citoyens, uniquement les biens.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à vous, Maître Stojanovic.

 17   M. STOJANOVIC : [interprétation] Etant donné que je ne vais plus utiliser

 18   ce document et que nous allons aborder un autre sujet demain, je souhaite

 19   demander le versement au dossier du 1D05383. Ça, c'était le numéro 65 ter.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, s'il vous plaît.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le D1048, Messieurs les Juges.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le D1048 est versé au dossier.

 23   Monsieur le Témoin, je dois vous donner des consignes très strictes et vous

 24   dire que vous n'êtes absolument pas en droit d'aborder la question de votre

 25   déposition, qu'il s'agisse de la déposition que vous avez donnée

 26   aujourd'hui ou de celle que vous allez donner demain. Nous souhaitons vous

 27   revoir demain matin dans ce même prétoire.

 28   Vous pouvez maintenant suivre l'huissier.


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  1   [Le témoin quitte la barre]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lever l'audience pour

  3   aujourd'hui. Nous reprendrons demain, le mercredi 13 mai, à 9 heures 30,

  4   dans ce même prétoire, numéro I.

  5   --- L'audience est levée à 14 heures 18 et reprendra le mercredi 13 mai

  6   2015, à 9 heures 30.

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