Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 10 novembre 2015

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 33.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le prétoire

  6   et à l'extérieur du prétoire.

  7   Madame la Greffière, s'il vous plaît, citer le numéro de l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

  9   Messieurs les Juges. C'est l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko

 10   Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

 12   Il n'y a pas de question préliminaire. Est-ce qu'on peut faire entrer le

 13   témoin dans le prétoire.

 14   Je pense que vous avez dit que vous auriez besoin encore de 15 minutes,

 15   Monsieur Traldi.

 16   M. TRALDI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, et je vais donc

 17   faire tout ce qui est possible pour ne pas dépasser ce temps.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 19   M. TRALDI : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher le

 20   document 65 ter 06682.

 21   [Le témoin vient à la barre]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Marjanovic. Je

 23   voudrais vous rappeler que vous êtes toujours tenu par la déclaration

 24   solennelle que vous avez prononcée au début de votre témoignage.

 25   M. Traldi va maintenant continuer son contre-interrogatoire.

 26   LE TÉMOIN : OSTOJA MARJANOVIC [Reprise]

 27   [Le témoin répond par l'interprète]

 28   Contre-interrogatoire par M. Traldi : [Suite]


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  1   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

  2   R.  Bonjour.

  3   Q.  Ici, nous avons un article de Kozarski Vjesnik du 21 novembre 1993. Et

  4   si on regarde la troisième colonne au milieu de la page dans la version en

  5   B/C/S, on peut y lire qu'il s'agit des attaques contre Prijedor le 30 mai.

  6   Et la phrase se lit comme suit :

  7   "Après plusieurs heures d'attaque, l'attaque a été repoussée, et les

  8   assaillants étaient en partie détruits. Dans ces actions il y avait

  9   plusieurs soldats de l'armée serbe qui se sont fait tuer et également cinq

 10   policiers."

 11   J'ai deux questions pour vous par rapport à cela. D'abord, ici il s'agit du

 12   fait que l'armée n'était pas partie de Slavonie à Gradacac comme vous avez

 13   dit hier, mais elle combattait à Prijedor à la fin de 1992, n'est-ce pas ?

 14   R.  Permettez-moi de dire quelques phrases par rapport à cela.

 15   Pendant tout ce temps-la, à savoir le 30 mai, j'étais dans mon appartement

 16   au moment où l'attaque a été lancée.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, Monsieur le Témoin, s'il vous

 18   plaît, répondez à la question qui vous a été posée. S'il y a quelque chose

 19   qui doit être ajouté, alors à la fin de votre déposition vous pouvez le

 20   faire, vous aurez l'occasion de le faire avec certaines limitations. Mais,

 21   à présent, vous devez vous concentrer à répondre à des questions.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Toute la 43e Brigade ne se trouvait pas à

 23   Prijedor.

 24   M. TRALDI : [interprétation]

 25   Q.  Ici, on peut lire qu'il s'agissait des combats qui ont duré plusieurs

 26   heures. Est-ce que cela peut vous rafraîchir la mémoire par rapport à la

 27   durée du conflit le 30 mai ?

 28   R.  A Prijedor il y avait le groupe d'intervention de Karlica, et c'est ce


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  1   groupe-là qui a mené ces combats.

  2   Q.  Il s'agit du groupe d'intervention de la 43e Brigade de la VRS; est-ce

  3   vrai ?

  4   R.  Oui. Mais à l'époque ce groupe était en permission à Prijedor.

  5   M. TRALDI : [interprétation] Je propose que ce document soit versé au

  6   dossier.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Juste un point. Vous avez dit qu'ils

  8   étaient en permission. Mais ne vous a-t-il pas dit, qu'en fait, il

  9   s'agissait des gens qui à l'époque combattaient à Prijedor ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant l'attaque contre Prijedor, eux, ils

 11   ont commencé à combattre les assaillants sur leur propre initiative.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, donnez-nous une

 14   cote.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 65 ter 06682 reçoit la cote

 16   P7634.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P7634 est versé au dossier.

 18   M. TRALDI : [interprétation]

 19   Q.  L'armée, à savoir la VRS, a attaqué également Hambarine et Kozarac, fin

 20   mai 1992, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce que vous dites dans votre déposition que cela aussi a été fait

 23   par quelques personnes qui se trouvaient en permission à l'époque ?

 24   R.  Non, ça a été fait par l'ancienne JNA. Il y avait des unités qui

 25   étaient formées - mais je ne sais pas quelles unités - c'était après

 26   l'attaque contre les gens qui étaient membres des unités de réserve à

 27   Hambarine, ils ont ouvert le feu en utilisant, je pense, des mortiers.

 28   Q.  Savez-vous de quel type de lance-roquettes il s'agissait ?


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  1   R.  Je ne sais pas.

  2   Q.  Pour ce qui est de l'ultimatum qui était décrété, pour que des gens se

  3   rendent, des gens qui avaient attaqué les membres des unités de réserve,

  4   cet ultimatum a été décrété par le commandant Zeljaja, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je n'étais pas au courant de cet ultimatum. J'étais au courant de

  6   l'ultimatum selon lequel toutes les unités paramilitaires devaient rendre

  7   leurs armes.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, pourriez-vous, s'il

  9   vous plaît, répondre à la question. La question était de savoir si le

 10   commandant Zeljaja a décrété cet ultimatum.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais pas.

 12   M. TRALDI : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document 65 ter

 13   33381, la page 64.

 14   Q.  Il s'agit d'une autre partie de votre déposition dans l'affaire Stakic.

 15   A la ligne 18, on vous a posé la question pour savoir ce que vous avez

 16   entendu par rapport aux tirs là-bas, qui a tiré et sur qui et quelle était

 17   la demande. Pouvez-vous nous fournir plus de détails là-dessus ?

 18   Et votre réponse :

 19   "Je ne peux vous dire que ce que j'ai entendu de mes voisins. Des membres

 20   des unités de réserve étaient tués au point de contrôle à Hambarine. Et je

 21   crois qu'il y avait plusieurs personnes blessées, et pendant un certain

 22   temps, des corps y gisaient et personne ne pouvait y accéder. Plus tard,

 23   l'armée a pris le contrôle et s'est occupée de cela de façon militaire…"

 24   Passons à la page suivante. La question suivante qui vous a été

 25   posée:

 26   "Savez-vous qui a demandé que ceux qui ont commis cela, que les armes

 27   soient rendues ? Est-ce que vous avez appris cela ?"

 28   Et vous avez répondu :


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  1   "J'ai entendu dire que c'est l'armée qui a insisté à ce que ceux qui

  2   ont perpétré cela se rendent et ils ont également dit que rien n'allait se

  3   passer. L'ultimatum a été rejeté. Et je crois qu'à l'époque, le commandant

  4   était Zeljaja, le commandant de la garnison. Son nom, je crois, était

  5   Radmilo Zeljaja."

  6   Est-ce que vous maintenez ce que vous avez dit dans l'affaire Stakic

  7   lors de votre témoignage dans cette affaire ?

  8   R.  Il y a beaucoup de temps qui s'est écoulé depuis. Donc, je ne puis ni

  9   maintenir ce que j'avais dit, ni nier.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous maintenez ce que vous

 11   avez dit à l'époque ou est-ce que vous dites que…

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Le Conseil exécutif de l'assemblée municipale

 13   de Prijedor avec la cellule de Crise a donné l'ordre pour ce qui est des

 14   armes.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela veut dire que vous

 16   confirmez ce que vous avez dit ou pas ? On vient de vous dire ce que vous

 17   avez dit à l'époque dans l'affaire Stakic.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur Traldi.

 20   M. TRALDI : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur, Maintenant, pour ce qui est de l'ordre pour lequel vous avez

 22   dit que c'était l'ordre donné par le Conseil exécutif et la cellule de

 23   Crise, dites-nous à quel ordre vous avez fait référence ?

 24   R.  Pour toutes les communautés locales, l'ordre a été donné de collecter

 25   les armes qui étaient distribuées à l'époque. J'étais présent par hasard

 26   dans les locaux du secrétariat pour les affaires économiques lorsque du

 27   village de Cerik, un village près de Prijedor, les gens étaient venus pour

 28   rendre les armes. Et, à l'époque, ils se sont présentés au secrétaire du


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  1   secrétariat pour les questions économiques et les gens de Kozarac ont dit

  2   qu'ils n'allaient pas rendre leurs armes.

  3   Q.  Pour parler brièvement des charniers, vous savez que Tomasica, Redak et

  4   Jakarina Kosa sont des sites -- où ont été retrouvés sur le territoire qui

  5   était la propriété du RZR de Ljubija ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et vous admettez qu'il soit possible que la VRS aurait été impliquée

  8   aux enterrements à Tomasica.

  9   R.  Je ne peux pas confirmer cela.

 10   M. TRALDI : [interprétation] Peut-on afficher maintenant le 65 ter 33385,

 11   page 212.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je poser une dernière question

 13   avant cela ? La dernière question qui vous a été posée par M. Traldi, mais

 14   j'aimerais la reformuler quelque peu.

 15   Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle vous pouvez exclure la

 16   possibilité que la VRS aurait été impliquée à ces enterrements ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a aucune raison pour le confirmer ni

 18   pour le nier.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 20   Monsieur Traldi, vous pouvez poursuivre.

 21   M. TRALDI : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce qui que ce soit de la 43e Brigade a jamais parlé avec vous à

 23   propos des fosses communes, fosses de masse sur le territoire qui était la

 24   propriété du RZR de Ljubija ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Est-ce qui que ce soit du tribunal militaire a jamais parlé avec vous

 27   au sujet des fosses communes sur le territoire qui était la propriété du

 28   RZR de Ljubija ?


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  1   R.  Il y avait un entretien qui a eu lieu à Prijedor.

  2   Q.  Lorsque vous dites "l'entretien", est-ce que vous faites référence à

  3   l'entretien avec le personnel du bureau du Procureur de ce Tribunal-là qui

  4   s'était tenu l'année dernière ?

  5   R.  Je suppose que ce que vous venez de dire est exact.

  6   Q.  Donc il est vrai, alors, que personne du tribunal militaire de Banja

  7   Luka, pendant la guerre, n'a jamais parlé avec vous au sujet des fosses

  8   communes, fosses de masse sur le territoire qui était la propriété du RZR

  9   de Ljubija ?

 10   R.  Je suis certain que non.

 11   Q.  Monsieur, je vais aborder un dernier sujet. Il y a donc un marteau-

 12   piqueur, donc un outil qui peut faire des trous dans un rocher, n'est-ce

 13   pas, des trous de forme circulaire ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  En 1992, vous saviez que deux de ces outils existaient dans la

 16   municipalité de Prijedor ?

 17   R.  Dans la mine de Ljubija.

 18   Q.  Et les deux outils pour lesquels vous saviez qu'ils existaient

 19   appartenaient au RZR de Ljubija, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, ces deux, mais il y en avait plusieurs. Il s'agit de l'équipement

 21   minier.

 22   M. TRALDI : [interprétation] Peut-on afficher maintenant le document 65 ter

 23   33390.

 24   Q.  Il s'agit d'un trou qui peut être fait par ce type d'outil dans un

 25   rocher, donc c'est un trou de forme circulaire dans un rocher que nous

 26   voyons ici ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Il s'agit de la photographie qui a été prise sur la localité de la


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  1   fosse commune à Jakarina Kosa. Vous savez qu'en 2001, sur ce site, il y a

  2   eu une exhumation, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, j'ai entendu parler de cela.

  4   M. TRALDI : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document 65 ter

  5   33399.

  6   Q.  Et en attendant que ce document soit affiché à l'écran, vous savez

  7   également que pendant cette année il y avait des exhumations sur le site de

  8   Jakarina Kosa ?

  9   R.  Je ne le sais pas.

 10   Q.  Vous n'avez pas donc entendu dire que pendant cette année, et c'est ce

 11   qu'on peut voir dans l'article affiché à l'écran, que des centaines de

 12   restes humains avaient été retrouvés pendant une réexhumation sur le site

 13   de Jakarina Kosa à Prijedor, c'était cette année ?

 14   R.  Je n'ai pas suivi tout cela. Je ne le sais pas. J'étais au courant des

 15   enterrements qui ont eu lieu dans le cimetière qui est à la proximité de

 16   l'immeuble où j'habite.

 17   Q.  La Chambre a vu la pièce P3282, page 49, où il est dit que le site de

 18   Jakarina Kosa se trouvait sous le contrôle de l'armée au moment où cela a

 19   été créé et que des explosifs ainsi que de l'équipement militaire avaient

 20   été trouvés sur le site. En tant que quelqu'un qui était à la tête du RZR

 21   de Ljubija, vous auriez dû savoir que le site de Jakarina Kosa se trouvait

 22   sous le contrôle de l'armée en été 1993 ?

 23   R.  Non, je ne le savais pas.

 24   Q.  La Chambre a reçu les moyens de preuve montrant que des parties de

 25   mêmes corps retrouvées dans le charnier à Tomasica ont été retrouvées

 26   également sur le site de Jakarina Kosa.

 27   Vous avez témoigné que vous n'étiez au courant que de l'existence de

 28   deux outils qui appartenaient à la mine et qui existaient dans la


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  1   municipalité de Prijedor en 1993. Donc des gens qui étaient enterrés sur le

  2   site qui appartenait à la mine étaient enterrés, et probablement avec

  3   l'équipement de votre compagnie, étaient ré-ensevelis sur un autre site qui

  4   appartenait à la mine également. Est-ce que vous voulez dire que vous

  5   n'étiez pas du tout informé de tout ce processus ?

  6   R.  Oui. 

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai une question à poser au témoin.

  8   Monsieur, je sais qu'au début de votre témoignage, vous nous avez dit

  9   quelque chose pour ce qui est de votre carrière et par rapport à la période

 10   de temps pendant laquelle vous travailliez dans la mine. Jusqu'à quand vous

 11   étiez directeur de la mine ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Entre 1991 et 1996, j'étais donc président

 13   directeur général de la mine.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que dans la mine il y avait le

 15   système d'information ou d'envoi de rapports concernant des événements

 16   importants, majeurs, qui se sont passés sous votre autorité et sous votre

 17   responsabilité ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous ne saviez pas si une unité de

 20   l'armée ou une autre unité avait essayé avec succès ou pas de prendre le

 21   contrôle de certaines unités ou entités de votre compagnie ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette entreprise à l'époque n'était pas

 23   active. Il n'y avait pas de production. Et le directeur de l'entité de

 24   l'entreprise à Jakarina Kosa était --

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pouvez-vous répéter son nom, s'il

 26   vous plaît.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Kitonjic Dragoljub, il était directeur de

 28   l'unité de production à Jakarina Kosa.


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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et, s'il vous plaît, continuez votre

  2   phrase. Qu'est-ce que vous avez voulu dire par rapport à cette personne ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai voulu dire qu'il ne m'envoyait pas de

  4   rapport, aucun rapport. Il ne m'informait sur rien.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous étiez content pour ce

  6   qui est du comportement de cet homme ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, puisque lorsqu'il s'agit de temps de

  8   guerre, il vaut mieux ne pas savoir beaucoup de choses.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, en répondant à la

 11   question concernant ces deux outils, vous avez dit qu'il y en avait

 12   plusieurs. Est-ce que ces outils étaient utilisés par le RZR de Ljubija

 13   également ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Pour faire des trous de différents

 15   diamètres et pour miner certains secteurs.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 17   Monsieur Traldi, je n'ai pas voulu intervenir lorsque vous avez dit au

 18   témoin qu'il a dit qu'il y avait seulement deux outils. Le témoin a dit

 19   qu'il y avait plus, mais apparemment ces outils étaient en possession de la

 20   même entreprise.

 21   S'il vous plaît, soyez très précis lorsque vous citez au témoin ce qu'il

 22   avait dit auparavant.

 23   M. TRALDI : [interprétation] Bien --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce qu'il a dit qu'il y avait

 25   plusieurs de ces outils.

 26   Continuez.

 27   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais proposer le versement au dossier

 28   les deux derniers documents, le 65 ter 33390 et 33399.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 65 ter 33390 reçoit la cote

  3   P7635.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 65 ter 33399 reçoit la cote P7636.

  6   M. TRALDI : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je n'ai

  7   pas donc présenté ma demande de façon précise puisque pour ce qui est de la

  8   traduction du premier document que nous n'avons toujours pas, il faut que

  9   la cote soit aux fins d'identification.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le premier document ?

 11   M. TRALDI : [interprétation] Oui, pour ce qui est de ce trou circulaire.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a un titre en dessous ?

 13   M. TRALDI : [interprétation] En haut, on peut lire, "la fosse commune de

 14   Jakarina Kosa", si je me souviens bien, il y a une date.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 16   M. TRALDI : [interprétation] Et nous pouvons traduire quelques mots qui

 17   figurent si la Chambre pense que cela est nécessaire.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, ou Maître Stojanovic, est-

 19   ce que vous pensez que le titre doit être traduit ? Puis le titre sur la

 20   première photographie, cela a été consigné au compte rendu et cela a été

 21   traduit pour l'accusé et pour qui que ce soit qui parle le B/C/S.

 22   M. STOJANOVIC : [interprétation] Cela n'est pas nécessaire.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, le 65 ter 33399 est versé au

 24   dossier avec une cote aux fins d'identification, la cote P7636.

 25   Continuez, Monsieur Traldi.

 26   M. TRALDI : [interprétation]

 27   Q.  Vous avez dit que vous étiez content du comportement du chef de l'Unité

 28   de protection à Jakarina Kosa puisque vous ne pouviez pas être informé de


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  1   tout et parce que vous préfériez en savoir moins, puisque vous n'avez pas

  2   voulu savoir que c'est l'armée et la police qui ont réquisitionné

  3   l'équipement du RZR de Ljubija et vous saviez que c'était réquisitionné

  4   pour commettre des crimes ?

  5   R.  Comment pouvez-vous savoir que j'étais au courant de cela ? Vous ne

  6   pouvez pas dire cela.

  7   M. TRALDI : [interprétation] Je n'ai plus de question pour ce témoin.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Traldi.

  9   Maître Stojanovic, avez-vous d'autres questions à poser au témoin ?

 10   M. STOJANOVIC : [interprétation] Quelques questions, Monsieur le Président.

 11   Est-ce que nous pouvons afficher, s'il vous plaît, le P7385 dans le

 12   prétoire électronique. S'il vous plaît, la page 3 en B/C/S et en anglais.

 13   Il s'agit du dernier paragraphe dans la version en B/C/S.

 14   [Le conseil de la Défense se concerte]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre microphone est ouvert, Maître

 16   Stojanovic. Lorsque vous consultez les membres de votre équipe, je vous

 17   conseille de fermer votre microphone.

 18   Nouvel interrogatoire par M. Stojanovic :

 19   Q.  [interprétation] Aux fins du compte rendu d'audience, je souhaite dire

 20   qu'il s'agit des pages 41 029 et 41 027. C'est là que s'est posé ce dilemme

 21   concernant ce document, Monsieur Marjanovic. Je souhaite encore une fois

 22   attirer votre attention sur le dernier paragraphe et la première phrase en

 23   B/C/S.

 24   Si vous vous en souvenez -- je vais vous demander peut-être de lire la

 25   première phrase encore une fois, comme vous l'avez fait hier.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] A quel endroit du texte anglais, s'il

 27   vous plaît ?

 28   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Juge, cela se trouve au milieu


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  1   de la page, la page que vous avez sous les yeux. Il s'agit du septième

  2   paragraphe.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] "Déjà au début du mois de juin, c'est-à-dire

  5   dix jours après les combats qui se sont déroulés en ville --

  6   L'INTERPRÈTE : La note de l'interprète : c'est ambigu dans l'original. Et

  7   note de la cabine de la cabine française : cela ne correspond pas à ce qui

  8   est écrit en anglais.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] "-- l'armée et la police ont pris le contrôle

 10   et ont assuré la sécurité des installations, biens, et personnes."

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les interprètes nous disent que lorsque

 12   cette même phrase a été lue, que l'original est ambigu, parce qu'au niveau

 13   de la traduction du B/C/S vers l'anglais, page 13, ligne 11, il est précisé

 14   que "la sécurité directe et entière des bâtiments, et des biens et des

 15   personnes était enlevée des mains des militaires et de la police."

 16   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine française : En anglais,

 17   dans le texte, cela correspond à l'inverse.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai entendu, "dix

 19   jours seulement après les combats qui s'étaient déroulés à ce moment-là",

 20   je crois qu'on peut lire "en ville," et non pas "in time".

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ceci n'a pas été lu par le Juge

 22   Moloto mais par le témoin, aux fins du compte rendu d'audience.

 23   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 24   Q.  Alors j'essaie de résoudre cette question une fois pour toute. Alors à

 25   la lecture de ce document, lorsque vous regardez ce document, Monsieur

 26   Marjanovic, dans le cas concret qui nous intéresse, qui a pris le contrôle

 27   de qui par rapport à qui ? Autrement dit, qui a assuré la sécurité des

 28   bâtiments et des biens ?


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  1   R.  La mine de Ljubija.

  2   Q.  Et donc, ils ont pris le contrôle de cela par rapport à qui ?

  3   R.  [inaudible]

  4   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine anglaise : Nous n'avons

  5   pas pu entendre la réponse du témoin.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez répéter votre réponse, s'il

  7   vous plaît.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] La sécurité de la mine de Ljubija a pris le

  9   contrôle de la sécurité.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et donc, vous avez repris cette tâche

 11   qui consistait à assurer la sécurité. Vous avez repris cela de qui ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] De l'armée et de la police.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez nous dire, dans ce cas, quand

 14   l'armée et la police avaient commencé à assurer la sécurité de la mine ?

 15   Car si Ljubija reprend ses tâches, je pense qu'il y a à un moment donné où

 16   l'armée et la police assuraient cette fonction ou qui…

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Après le 30 mai, après l'attaque contre

 18   Prijedor.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et quand exactement ? Une semaine, 15

 20   jours, le même jour ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Le 31 mai, très précisément.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez nous expliquer pourquoi l'armée

 23   et la police ce jour-là ont assuré la sécurité de ce secteur minier ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais pas. Je suppose que cela a été

 25   fait pour des raisons de sécurité.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour la sécurité de qui ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] La sécurité des bâtiments et des personnes qui

 28   travaillaient dans ces usines.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous étiez au courant de cela ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'étais pas au courant de cela. J'ai déjà

  3   dit, Monsieur le Président, que pendant ces cinq ou six jours-là, j'étais à

  4   la maison car il y avait un couvre-feu et nous n'étions pas autorisés à

  5   sortir. Ce que j'ai dit il y a quelques instants, c'est une hypothèse que

  6   j'émets, c'était pour assurer la sécurité des personnes qui s'y trouvaient;

  7   ils souhaitaient assurer la sécurité des biens qui s'y trouvaient, et du

  8   matériel, des engins.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous n'avez pas vu cela de vos

 10   propres yeux, n'est-ce pas ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Non, je ne l'ai pas vu.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous donné des instructions pour

 13   que la sécurité de la société soit à nouveau assurée après dix jours par

 14   vous ? Est-ce vous qui avez donné cet ordre ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Nous avions un service de sécurité dirigé

 16   par Dusan Tubin au sein de l'entreprise qui avait organisé cette partie-là

 17   de cette mission.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous n'étiez pas au courant…

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, non, je ne le savais pas; et,

 20   par la suite, je l'ai découvert 10 à 15 jours plus tard, et c'est lui qui

 21   me l'a rapporté.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je souhaite, en fait, poser une

 24   question, peut-être à l'intention de l'Accusation.

 25   Me Stojanovic a posé une question au témoin et lui a demandé ce qu'on peut

 26   lire dans ce paragraphe, autrement dit que la mine de Ljubija a assumé la

 27   sécurité et a repris cela de la police et de l'armée. En anglais, dans le

 28   paragraphe, on parle de la "mine de Ljubija". C'est ce que les interprètes


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  1   ont dit. Les interprètes ont précisé que c'était ambigu. Mais là, il semble

  2   que cela n'est pas seulement ambigu, mais incomplet, si, effectivement, en

  3   B/C/S, on parle de la mine de Ljubija, car sur la page anglaise, il n'est

  4   fait aucune mention du terme Ljubija.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi.

  7   M. TRALDI : [interprétation] Alors, suite à cet échange, peut-être que ma

  8   réponse est superflue. Mais étant donné que vous m'avez posé la question,

  9   je ne retrouve pas le terme de "Ljubija" dans le paragraphe pertinent en

 10   B/C/S non plus. Et d'après ce que j'ai compris, après avoir lu ce passage

 11   et que les interprètes ont procédé à une traduction à vue, Me Stojanovic a

 12   demandé au témoin de l'expliquer. Et le terme, en fait, a été mentionné à

 13   ce moment-là. Il n'est pas cité dans l'original en B/C/S non plus.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ceci n'est pas superflu en ce qui me

 15   concerne. Merci.

 16   M. TRALDI : [interprétation] Je suis soulagé, Monsieur le Juge.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, c'est à vous.

 18   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Alors, une question encore par rapport à ce document.

 20   Ce rapport émane de qui ? Qui est à l'origine de ce rapport, ce

 21   rapport annuel que nous avons sous les yeux ?

 22   R.  Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas de la personne qui a

 23   écrit cela. Je suppose que c'était Dusan Vlacina, mon directeur technique.

 24   Q.  Est-ce quelqu'un qui était un salarié de la mine de Ljubija ?

 25   R.  C'était autrefois un salarié de la mine, mais je ne sais pas si c'est

 26   lui a rédigé ce rapport. C'était le directeur.

 27   Q.  Merci. Pour pouvoir bien comprendre ce dont je parle, je souhaite me

 28   reporter à la page du compte rendu d'audience d'hier, 41 990, lignes 17 à


Page 41063

  1   20.

  2   Monsieur Marjanovic, lorsque vous avez parlé du nettoyage de Prijedor, vous

  3   avez évoqué le terme d'"expropriation" de la vieille ville. Veuillez nous

  4   expliquer ce dont il s'est agi exactement et de quel type de processus il

  5   s'agit, cette expropriation de ce quartier de Prijedor ?

  6   R.  Alors, ce quartier-là était habité par des Musulmans qui avaient des

  7   maisons en mauvais état. Et le Conseil exécutif de l'assemblée municipale

  8   de Prijedor avait rendu une décision pour que ces personnes quittent le

  9   secteur. Cela se trouve à proximité immédiate de la Sana et à côté de

 10   Berek, et qu'il fallait construire une halle de sport à cet endroit.

 11   Ceci a duré pendant cinq ou six ans, je veux parler de l'expropriation de

 12   ce quartier. Ce qui signifie que dans l'intérêt général, il fallait prendre

 13   une décision dans ce sens et il fallait ensuite trouver un accord avec les

 14   propriétaires de ces biens immobiliers. Et beaucoup d'amis et de nombreuses

 15   personnes ont reçu de l'argent et ont pu construire une maison à proximité.

 16   Mais concrètement, les travaux de construction n'avaient pas encore

 17   commencé correctement.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, vous nous avez

 19   renvoyé à la page du compte rendu d'audience 41 990, mais je crois qu'il

 20   doit s'agir d'une erreur. Veuillez nous donner la page exacte, s'il vous

 21   plaît.

 22   M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges, un instant, s'il

 23   vous plaît. 40 990, lignes 17 à 20.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 25   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 26   Q.  Et je vais terminer par une question qui est liée à une question qui

 27   vous a été posée aujourd'hui.

 28   Monsieur Marjanovic, avez-vous une raison ou une information, une


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  1   connaissance indirecte sur le fait que l'armée de la Republika Srpska était

  2   impliquée d'une manière ou d'une autre dans les inhumations des corps à

  3   Tomasica et Jakarina Kosa ?

  4   R.  Non, absolument pas.

  5   Q.  Monsieur Marjanovic, au nom de la Défense de M. Mladic, je souhaite

  6   vous remercier de l'effort, des efforts que vous avez déployés pour venir

  7   ici compte tenu de votre état de santé, et vous êtes resté aujourd'hui

  8   également.

  9   M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, nous venons donc de

 10   terminer l'interrogatoire de notre témoin, M. Marjanovic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Stojanovic.

 12   Avant de donner la parole à l'Accusation pour qu'elle pose des questions

 13   supplémentaires, lorsque vous avez répondu à la dernière question qui vous

 14   a été posée, vous avez dit que vous n'avez aucune raison, vous ne disposez

 15   d'aucun élément d'information, aucune connaissance indirecte portant sur le

 16   fait que l'armée de la Republika Srpska était impliquée d'une manière ou

 17   d'une autre.

 18   Disposez-vous d'une quelconque connaissance, avez-vous une raison ou

 19   des éléments d'information portant sur le fait que l'armée de la Republika

 20   Srpska n'était pas du tout impliquée, ou est-ce que simplement, vous ne

 21   savez pas ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas ce type de connaissance non

 23   plus.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 25   C'est à vous -- Monsieur Traldi, avez-vous d'autres questions ?

 26   M. TRALDI : [interprétation] J'ai simplement deux questions.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, je vous en prie.

 28   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Traldi :


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  1   Q.  [interprétation] Me Stojanovic, il y a quelques instants, vous a posé

  2   une question sur le nettoyage du quartier de Stari Grad. Et vous avez parlé

  3   d'un plan qui visait à construire un centre à cet endroit que vous appelez

  4   une halle de sport; aujourd'hui, vous avez parlé d'un centre de

  5   construction. Ça n'est pas par hasard et ce n'en est pas une coïncidence

  6   non plus que la démolition de ces maisons dans ce quartier musulman se soit

  7   produite très peu de temps après l'attaque de la VRS de ce quartier, n'est-

  8   ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Oui, c'est tout à fait par hasard ou cela n'est pas par hasard que cela

 11   s'est produit ?

 12   R.  Tout d'abord, je dois apporter une correction. Je n'ai jamais dit qu'il

 13   s'agissait d'un centre de construction. J'ai dit qu'il s'agissait d'une

 14   halle de sport. Et je n'ai pas dit que ces bâtiments ont été détruits par

 15   hasard après l'attaque de Prijedor.

 16   Q.  Et aujourd'hui, aux pages du compte rendu provisoire 15 et 16, vous

 17   avez parlé du chef du centre de service de sécurité, Dusan Tubin, du RZR

 18   Ljubija, et c'est lui qui vous a appris que la mine de Ljubija a assumé la

 19   responsabilité d'assurer la sécurité de l'entreprise en question dans les

 20   locaux de l'entreprise. Vous êtes d'accord pour dire que c'était lui et non

 21   pas vous qui faisait autorité sur ces questions-là, n'est-ce pas ?

 22   R.  Sans doute.

 23   M. TRALDI : [interprétation] J'en ai terminé avec mes questions, celles que

 24   je souhaite poser à ce témoin.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Traldi.

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Marjanovic, ceci conclut votre

 28   témoignage dans ce prétoire. Je souhaite vous remercier vivement d'être


Page 41066

  1   venu de loin pour avoir répondu aux questions qui vous ont été posées par

  2   les parties, par les Juges de la Chambre. Je vous souhaite un bon voyage de

  3   retour.

  4   Et un peu plus tôt, j'ai dit que dans le cas où il y avait quelque chose

  5   que vous souhaitez expliquer davantage, que vous auriez l'occasion de le

  6   faire à la fin de votre témoignage. Y a-t-il encore des points que vous

  7   souhaitez aborder ou des parties de réponses aux questions qui vous ont été

  8   posées dont vous souhaitez parler maintenant ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, je souhaite dire

 10   qu'hier j'ai été interrompu lorsque je soumettais mes observations, j'ai

 11   été interrompu par le Procureur, et j'ai essayé d'expliquer quelque chose à

 12   ce moment-là, ce qui aurait permis de préciser un certain nombre de choses.

 13   La 43e Brigade et la 5e Brigade de Kozarac étaient les unités légales qui

 14   étaient à Prijedor. Il y avait 15 ou 20 unités de paramilitaires qui y

 15   étaient également; je peux vous citer des noms. Et donc quasiment chaque

 16   village avait sa propre unité et qui a surgi, et qui a tenté de se

 17   présenter comme s'il s'agissait d'une véritable unité. Leur but essentiel

 18   était de piller.

 19   Et c'est cela que je souhaitais dire, et j'ai été brutalement interrompu

 20   par le Procureur.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que vous avez été interrompu

 22   lorsque vous vous êtes écarté de la question posée, mais la 43e Brigade

 23   faisait certainement partie de la question qui vous a été posée. Donc ceci

 24   donne-t-il lieu à d'autres questions ?

 25   M. TRALDI : [interprétation] Très rapidement, bon, tout d'abord, par

 26   respect pour Me Stojanovic, puisque vous êtes la partie demanderesse.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, y a-t-il une question

 28   que vous souhaitez poser au témoin par rapport à ce qui vient d'être dit ?


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  1   M. STOJANOVIC : [interprétation] Il y a une question simplement par rapport

  2   à ce qu'il vient de dire. Le témoin peut-il nous dire ceci.

  3   Nouvel interrogatoire supplémentaire par M. Stojanovic :

  4   Q.  [interprétation] Monsieur Marjanovic, je vous ai déjà remercié,

  5   pardonnez-moi encore une fois.

  6   Ces paramilitaires, comme vous les appelez, ces paramilitaires sont

  7   intervenus combien de temps sur le territoire de la municipalité de

  8   Prijedor ?

  9   R.  A ma connaissance, jusqu'à la fin de l'année 1993.

 10   Q.  Merci.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi.

 12   Contre-interrogatoire supplémentaire M. Traldi :

 13   Q.  [interprétation] Monsieur, vous avez dit il y a quelques instants que

 14   chaque village disposait de sa propre unité, c'est ainsi que cela devait se

 15   dérouler d'après la loi sur la Défense populaire généralisée et la Défense

 16   territoriale, n'est-ce pas ?

 17   R.  En ex-Yougoslavie, oui, c'était le principe qui était en vigueur. Mais,

 18   à ce moment-là, nous parlions de la désintégration, du démantèlement de la

 19   Yougoslavie. Il y avait un manque d'autorité pour ce qui est du pouvoir et

 20   du gouvernement en place. Je ne souhaite pas vous fournir d'autres

 21   explications à cet égard.

 22   Q.  Vous ne faisiez pas partie de la 43e Brigade, n'est-ce pas ?

 23   R.  Non. J'ai été affecté à l'armée de l'air de l'armée de la Republika

 24   Srpska.

 25   Q.  Donc, vous n'avez aucune connaissance personnelle de la façon dont la

 26   43e Brigade a exercé son autorité sur les unités de la Défense territoriale

 27   à Prijedor, n'est-ce pas ?

 28   R.  La connaissance dont je dispose et les sources dont je dispose sont les


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  1   sources qui étaient celles des ouvriers des mines de Ljubija qui ont été

  2   affectés à la 43e Brigade, et c'est dans le contact avec eux que j'ai

  3   appris avec certaines choses.

  4   M. TRALDI : [interprétation] J'en ai terminé avec mes questions.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Traldi.

  6   Donc, nous avons eu un interrogatoire un petit peu prolongé. Je répète ce

  7   que j'ai déjà dit, je vous remercie d'être venu, d'avoir répondu à toutes

  8   les questions, et je vous souhaite encore une fois un bon voyage de retour.

  9   Vous pouvez suivre l'huissier.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi de saluer toutes les personnes

 11   présentes dans ce prétoire.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Inutile de le faire, surtout s'il s'agit

 13   d'une tentative indirecte visant à saluer l'accusé.

 14   Vous pouvez suivre l'huissier, et vous pouvez quitter ce prétoire.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais dire que j'étais censé dire au

 16   revoir à toutes les personnes présentes en partant, c'est tout.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez suivre l'huissier.

 18   [Le témoin se retire]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, ne serait-il pas plus

 20   prudent d'avoir la pause maintenant que de commencer avec le prochain

 21   témoin pour cinq minutes.

 22   M. LUKIC : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons avoir une pause maintenant,

 24   et nous reprendrons à 11 heures moins quart.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 25.

 26   --- L'audience est reprise à 10 heures 47.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, le témoin suivant, on peut

 28   le faire entrer dans la salle d'audience. Il ne bénéficie pas de mesures de


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  1   protection. Et si je suis bien informé, il s'agit de M. Strbac.

  2   M. LUKIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président.

  3   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Strbac. Avant

  5   d'entamer votre témoignage, conformément au Règlement de procédure et de

  6   preuve, vous êtes tenu de prononcer une déclaration solennelle. Le texte

  7   vous sera remis dans quelques instants.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  9   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 10   LE TÉMOIN : SAVO STRBAC [Assermenté]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Strbac. Veuillez vous

 13   asseoir.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Strbac, c'est Me Lukic qui va

 16   vous interroger en premier. Il se trouve à votre gauche. M. Lukic est un

 17   conseil de la Défense de M. Mladic.

 18   Vous avez la parole, Maître Lukic.

 19   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Interrogatoire principal par M. Lukic :

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Strbac.

 22   R.  Bonjour.

 23   Q.  Oui, un petit jeu de mots. Moi, je vous dis "bonjour", vous me dites

 24   "bonne matinée". En anglais, on parle de bonne matinée avant midi.

 25   R.  Eh bien, chez nous, on en parle que jusqu'à 9 heures du matin.

 26   Q.  Veuillez décliner votre identité, aux fins du compte rendu d'audience.

 27   R.  Je m'appelle Savo Strbac.

 28   Q.  Où avez-vous habité avant le début du conflit en ex-Yougoslavie ?


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  1   R.  Je suis né en Dalmatie, dans un village qui s'appelle Rastivic et se

  2   trouve sur le territoire de la municipalité de Benkovac. C'est là que j'ai

  3   commencé mes études. Je les ai poursuivies à Benkovac, où je suis allé au

  4   lycée. J'ai étudié le droit à Zagreb. J'ai obtenu mon diplôme à la faculté

  5   de droit en 1972. Une fois mes études terminées, je suis revenu dans ma

  6   région natale, j'ai travaillé à Benkovac dans plusieurs entreprises. En

  7   même temps, j'étais stagiaire, et j'ai passé l'examen du barreau en 1976,

  8   et j'ai travaillé pendant quelques années en tant que juge à la cour

  9   municipale de Benkovac. Puis j'ai été nommé à un poste de la cour

 10   municipale de Zadar.

 11   Q.  En fait, ma question était un peu plus restreinte, donc je vais la

 12   préciser. Il est indiqué dans le compte rendu d'audience que vous avez

 13   travaillé à Zadar à la cour municipale.

 14   R.  Non, il s'agissait de la cour régionale, donc qui fonctionnait à un

 15   niveau supérieur. C'est à Benkovac que je travaillais à la cour municipale.

 16   Q.  Et quel poste avez-vous occupé, plus précisément ?

 17   R.  Eh bien, j'étais un juge, je présidais des procès de première instance

 18   ainsi que des procès en appel. Tout dépendait.

 19   Q.  Très brièvement, avez-vous mis sur pied une ONG ?

 20   R.  Oui. Cette ONG s'appelle Veritas. C'est un centre d'information et de

 21   documentation. Je l'ai constitué avec un groupe de citoyens qui, à

 22   l'époque, habitait dans la République de la Krajina serbe. Cela s'est passé

 23   vers la fin de l'année 1993. L'organisation existe toujours aujourd'hui, et

 24   je me trouve toujours à sa tête. Elle a, désormais, son siège à Belgrade.

 25   Q.  Pourquoi avez-vous décidé de mettre en place cette ONG ?

 26   R.  Eh bien, j'ai expliqué que j'ai travaillé en tant que juge jusqu'à la

 27   fin du mois d'octobre 1990, et immédiatement après, à partir du 1er

 28   novembre 1990, j'ai commencé à travailler en tant qu'avocat. J'avais mon


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  1   bureau d'avocat et je suis devenu un membre de la chambre d'avocats en

  2   Croatie. En fait, c'était moi qui avais donné ma démission à la cour

  3   régionale puisqu'il était clair que des temps incertains venaient. Au lieu

  4   de présider les procès qui concernaient des affaires criminelles, on me

  5   confiait des affaires qui étaient relatives à des Serbes et qui

  6   concernaient des délits insignifiants.

  7   Q.  Est-ce la raison pour laquelle vous avez mis en place Veritas ?

  8   R.  Non. Au départ, je suis devenu avocat, et dans cette même salle

  9   d'audience où j'avais présidé aux procès de grande envergure, j'ai commencé

 10   à défendre des Serbes. Pas seulement des Serbes, mais aussi des Croates qui

 11   n'étaient pas politiquement corrects aux yeux du nouveau régime politique.

 12   J'ai commencé à faire face à toute une série de problèmes. Il devenait

 13   clair que la guerre allait éclater. Tout faisait penser qu'une guerre

 14   civile se préparait, or j'en avais entendu beaucoup parler de la part des

 15   anciennes générations, notamment en ce qui concerne la Deuxième Guerre

 16   mondiale.

 17   Ensuite, j'ai lu un livre rédigé par Franjo Tudjman qui, entre-temps, était

 18   devenu le président de la Croatie et qui portait le titre "Les déserts de

 19   la réalité historique". Au jour d'aujourd'hui, je ne comprends toujours pas

 20   ce que ce titre est censé signifier.

 21   Q.  S'il vous plaît, Monsieur le Témoin, les interprètes vous demandent de

 22   ralentir votre débit, surtout lorsque vous évoquez les noms propres et les

 23   titres.

 24   Donc répétez, s'il vous plaît, le titre de cet ouvrage publié par M.

 25   Tudjman.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] "Les déserts" ou "les chemins perdus de la

 27   réalité historique".

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais aussi que vous répondiez à


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  1   l'une des questions qui vous ont été posées, à savoir pour quelle raison

  2   vous avez mis en place votre ONG. Vous nous expliquez de quelle façon et

  3   pourquoi vous avez cessé d'exercer vos fonctions de juge, ce que vous avez

  4   fait par la suite, mais nous n'avons toujours pas de réponse précise à la

  5   question de savoir pour quelle raison vous avez mis en place cette ONG.

  6   Donc veuillez vous limiter dans vos réponses à des explications directes et

  7   précises relatives aux questions posées.

  8   Vous pouvez à présent continuer, et répondez, s'il vous plaît, directement

  9   à la question posée.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, dans ce livre, je suis tombé sur la

 11   donnée suivante : dans le camp de concentration de Jasenovac, seulement 30

 12   à 35 000 personnes auraient été tuées, alors d'après tout ce que j'avais

 13   appris à tous les niveaux de mon éducation, 700 000 personnes ont été en

 14   réalité tuées. Et lorsqu'on est confrontés à une nouvelle situation de ce

 15   type qui semble annoncer la guerre et même après le début de la guerre,

 16   j'ai décidé de mettre en place mon ONG, je me suis dit qu'il fallait

 17   commencer à réunir des éléments de preuve relatives à la souffrance de mon

 18   peuple.

 19   Voilà, c'était la raison directe pour laquelle j'ai établi cette

 20   organisation non gouvernementale puisqu'à l'époque, j'habitais dans un Etat

 21   qui n'avait pas été reconnu en 1993, il s'agissait de la République de la

 22   Krajina serbe, et mes amis qui étaient éparpillés dans le monde entier, qui

 23   faisaient le tour des théâtres de guerre des trois côtés différents, m'ont

 24   suggéré que puisque personne ne se préoccupe d'un Etat non reconnu, je

 25   devais peut-être mettre en place une organisation non gouvernementale pour

 26   informer le monde des souffrances subies par mon peuple.

 27   M. LUKIC : [interprétation]

 28   Q.  Pouvez-vous nous dire avec qui cette ONG Veritas a eu des rapports de


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  1   coopération ?

  2   R.  Eh bien, nous avons coopéré avec les organisations internationales qui

  3   s'intéressaient aux droits de l'homme et aux crimes de guerre et qui

  4   avaient leurs bureaux sur le territoire de la Krajina serbe ou de l'ex-

  5   Yougoslavie, y compris le TPIY; donc, cela se réfère à la Croix-Rouge; à la

  6   FORPRONU à l'époque où elle se trouvait sur place pendant la guerre, qu'il

  7   s'agisse de la composante militaire ou civile de la FORPRONU; nous avons

  8   coopéré aussi avec l'OSCE, avec la Mission d'observation de la Communauté

  9   européenne; avec la Commission chargée des personnes disparues; et avec

 10   toute une série d'organisations locales, qu'elles proviennent de la Bosnie-

 11   Herzégovine, de la Serbie ou de la Croatie, ainsi qu'avec toute une série

 12   d'organisations qui s'intéressaient aux droits de l'homme, parce que

 13   j'avais assuré un premier échange de prisonniers entre les parties serbes

 14   et croates dès le mois de juillet 1991, et depuis, je me suis consacré à

 15   cette tâche de participer à des échanges, de retrouver les personnes

 16   disparues, de s'occuper des personnes harcelées, et cetera.

 17   Q.  Je ménage une pause pour permettre aux interprètes de souffler.

 18   J'aimerais maintenant revenir à l'année 1990 et à la mise sur pied du HDZ.

 19   Est-ce que vous vous souvenez à quel moment ce parti a été constitué ?

 20   R.  Eh bien, l'opinion publique en a appris l'existence au mois de février

 21   1990, une assemblée très somptueuse a été organisée dans la plus grande

 22   salle de conférence de Zagreb, la salle Lisinski. Bien sûr que je m'en

 23   souviens parfaitement. Tous les Serbes de Croatie s'en souviennent, parce

 24   que lors de cette assemblée constituante, nous avons vu quelque chose que

 25   nous avons espéré ne plus jamais revoir, à savoir tous les symboles des

 26   Oustachi croates de la Deuxième Guerre mondiale, donc les mêmes emblèmes,

 27   les mêmes symboles, les mêmes chansons. Et les Serbes ont eu une peur

 28   mortelle, puisqu'ils avaient peur que les expériences de la Deuxième Guerre


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  1   mondiale seraient renouvelées.

  2   Mais, par la suite, j'ai appris qu'en fait le HDZ avait été constitué

  3   une année plus tôt, en secret, dans une baraque qui se trouvait sur les

  4   rives de la rivière Sava et qui, aujourd'hui, a été transformée en une

  5   sorte de musée. Et je me souviens parfaitement des effets que cela a

  6   produit sur le terrain, puisque moi, je travaillais à Zagreb à l'époque.

  7   Q.  Nous allons passer un peu plus tard à vos expériences personnelles et

  8   aux travaux que vous avez effectués. Savez-vous à quel moment ils ont

  9   entamé les préparatifs pour la guerre ?

 10   R.  Eh bien, nous, qui habitions dans cette région à l'époque, avons tous

 11   eu l'occasion de nous en assurer dès le début de l'année 1990. Dans chaque

 12   village, dans chaque hameau, des comités du HDZ étaient mis sur pied, et

 13   leurs militants arboraient déjà des uniformes et portaient des armes.

 14   Depuis les locaux du tribunal, j'ai pu voir ou suivre la distribution des

 15   armes, parce que nous partagions notre cour avec la police de Zadar, et

 16   tous les juges, tous les procureurs, tous les huissiers sortaient ensemble

 17   pour regarder ce qui se passait.

 18   Le tribunal avait ses locaux dans un ancien bâtiment semblable à celui du

 19   TPIY, et le troisième et le quatrième étages étaient situés à une hauteur

 20   assez importante. Donc, nous sortions du bâtiment pour voir ce qui se

 21   passait et nous voyions ces nouvelles personnalités, ces nouveaux

 22   uniformes, des boîtes d'armes distribuées et, par la suite, j'ai appris que

 23   la même chose se passait sur tout le territoire de la Croatie.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Strbac, je m'adresse à

 25   vous à présent et à vous aussi d'ailleurs, Maître Lukic. Monsieur Strbac,

 26   des questions fort simples vous sont posées; or, vous fournissez des

 27   réponses extrêmement volumineuses où vous fournissez, par ailleurs, tout un

 28   nombre d'éléments d'information qui n'ont aucune pertinence. Quelle


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  1   importante est-ce que cela peut avoir de savoir si vous avez vu quelque

  2   chose se passer du troisième ou du quatrième étage d'un bâtiment ou de

  3   savoir si ce bâtiment était un nouveau bâtiment ou un ancien bâtiment ? Ce

  4   n'est pas ça ce que Me Lukic cherche à obtenir de vous en guise de

  5   déposition.

  6   Donc, je vous invite à ne pas délivrer de longs discours qui peuvent être

  7   fort intéressants, mais Me Lukic ne dispose que d'un temps limité. Il vous

  8   pose des questions et j'imagine qu'il souhaite obtenir des réponses. Si

  9   vous prenez autant de temps, à la fin, Me Lukic n'aura pas suffisamment de

 10   temps pour recevoir, pour entendre vos réponses à toutes les questions

 11   qu'il souhaite poser. Donc, je vous demande de bien vouloir coopérer,

 12   limiter vos réponses à ce qui est nécessaire.

 13   Maître Lukic, vous avez aussi la tâche de contrôler de plus près ce qui se

 14   passe, parce que cela ne sert à rien de poser des questions simples si vous

 15   obtenez réponses qui ont une page de longueur. Et parfois, elles ne

 16   répondent même pas à la question que vous avez posée. Donc, veuillez aider

 17   les Juges de la Chambre à faire leur travail.

 18   Vous pouvez continuer.

 19   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 20   Q.  Nous, les avocats et professeurs d'université, parfois, nous sommes

 21   trop verbeux. Donc, veuillez, s'il vous plaît, couper court à vos réponses

 22   un petit peu.

 23   Les Juges de la Chambre se sont vu présenter des éléments d'information

 24   relative aux élections remportées par le HDZ à Kotor Varos. Donc, je ne

 25   vais pas m'attarder sur le sujet. Je souhaite tout simplement vous poser la

 26   question suivante : après avoir remporté une victoire lors de ces

 27   élections, qu'est-ce que le HDZ a fait ? Quel a été leur premier geste ?

 28   R.  Eh bien, aucune question n'est simple. Je ne peux pas répondre tout


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  1   simplement par oui ou par non à une question de ce type. On en entamé pour

  2   commencer des purges au sein de la police et au sein de toutes les

  3   entreprises. Ils pensaient, en effet, qu'au sein de la police il y avait

  4   beaucoup trop de Serbes et, par conséquent, ils ont été licenciés. Enfin,

  5   moi, j'assurais leur défense, donc je connais leur nombre. La même chose se

  6   passait dans toutes les entreprises. On estimait qu'il y avait beaucoup

  7   trop de Serbes. Par exemple, chez les sapeurs-pompiers de Zadar, tous les

  8   Serbes ont été licenciés, parce que quelqu'un a dit que si jamais il y

  9   avait un incendie, les Serbes refuseront de l'éteindre.

 10   Aussi, les gens étaient licenciés de toutes les villes, de toutes les zones

 11   industrielles. On les renvoyait d'abord chez eux à pied, puis on les

 12   licenciait cinq jours plus tard, puisque c'était là la procédure prévue par

 13   la loi. Si vous ne veniez pas travailler pendant cinq jours, alors vous

 14   pouviez être licencié.

 15   Q.  Un instant, s'il vous plaît.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, juste pour vous aider un petit

 17   peu. Une réponse simple dans ce cas de figure particulier serait de dire

 18   que le HDZ a entamé une purge dans les rangs de la police, des entreprises

 19   et des autres institutions, les Serbes ont été licenciés. Voilà une réponse

 20   courte à la question posée. Si Me Lukic souhaite savoir de quelle façon ça

 21   a été fait, si les gens ont été renvoyés, si on les faisait descendre

 22   d'autocars, si cela se passait après cinq jours ou non, eh bien, il peut

 23   vous le demander.

 24   Donc, simplifier vos réponses dans la mesure du possible, même si vos

 25   réponses ne se résument pas à un oui ou à un non, s'il vous plaît.

 26   Vous pouvez continuer.

 27   M. LUKIC : [interprétation]

 28   Q.  Est-ce que les insignes sur les uniformes ont été changés ainsi que les


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  1   symboles des différentes institutions ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et quel type d'insigne a-t-on commencé à utiliser ?

  4   R.  Eh bien, au lieu de l'étoile qui avait été un emblème militaire et pour

  5   la police aussi, la police a commencé à utiliser d'abord un échiquier et,

  6   en plus, celui qui avait été utilisé au cours de la Deuxième Guerre

  7   mondiale.

  8   Q.  Et à quoi cet échiquier est-il associé ?

  9   R.  Ce symbole est associé au mouvement oustachi de l'Etat indépendant

 10   croate.

 11   Q.  Et quelle a été la réaction des Serbes, par exemple, des agents de

 12   police ?

 13   R.  Eh bien, les agents de police à Zadar, qu'il s'agisse de Croates ou de

 14   Serbes, ont signé une pétition adressée aux autorités fédérales, ils ont

 15   demandé à être protégés, de ne pas utiliser des insignes de ce type, des

 16   symboles de ce type, et ils ont averti les autorités que de nouveaux agents

 17   de police étaient recrutés, des personnes qui avaient eu des antécédents

 18   dans le crime organisé.

 19   Q.  Et qu'est-il arrivé à ces agents de police qui ont lancé ce type

 20   d'avertissement ?

 21   R.  Des procédures disciplinaires ont été entamées à leur encontre, et

 22   souvent ces procédures avaient pour effet leur licenciement.

 23   Q.  Avez-vous participé à ces procédures ?

 24   R.  J'ai assuré la défense de la plupart de ces personnes, plusieurs autres

 25   avocats ont participé à cet effort aussi. Toutefois, j'exerçais un rôle

 26   proéminent parce que j'avais beaucoup d'expérience dans le domaine de la

 27   loi pénale.

 28   Q.  Et dans combien d'affaires de ce type avez-vous défendu les personnes


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  1   incriminées ?

  2   R.  Plus de 1 000, sans aucun doute.

  3   Q.  Et qu'en est-il du statut accordé aux Serbes par la constitution ? Est-

  4   ce que la constitution a été changée ? Dites très brièvement ce que vous

  5   allez dire, s'il vous plaît.

  6   R.  Le 22 décembre 1990, le Parlement croate a adopté la constitution de

  7   Noël, d'après laquelle les Serbes ne représentaient plus un peuple

  8   constitutif. Ils sont devenus tout simplement une minorité.

  9   Q.  Et quelle a été la réaction des Serbes ?

 10   R.  Comme les Croates étaient en train d'adopter toute une série de

 11   décisions visant à les scinder de la RSFY, les Serbes en Croatie ont de

 12   même adopté toute une série de décisions qui avaient l'objectif de les

 13   séparer de Croatie. Pour commencer, ils ont établi la SAO de Krajina, et

 14   ensuite trois différentes SAO ont été établies. Il s'agissait des régions

 15   serbes indépendantes. Puis, au mois de décembre, ces différentes régions

 16   serbes indépendantes ont été réunies au sein d'une république de la Krajina

 17   serbe. Donc, elles se sont unies pour constituer cette république.

 18   Q.  Et dans les cercles officiels de Croatie, est-ce qu'une campagne anti-

 19   Serbe a été menée ?

 20   R.  Mais tout a été transformé en une campagne anti-Serbe. C'est du moins

 21   le sentiment que nous avions. Nous avions l'impression que tout était

 22   dirigé contre les Serbes. Et cela a effectivement été le cas. Vous savez,

 23   lorsque le chef d'Etat, lorsque le président adresse les meilleurs vœux de

 24   Noël aux Croates, et alors il précise qu'il est fort heureux que sa femme

 25   ne soit pas une Juive ou une Serbe, c'est bien évidemment quelque chose qui

 26   ne peut que déplaire à tous les Serbes. En fait, ils sont devenus très

 27   craintifs à cause de ces déclarations de ce type.

 28   Un professeur d'université qui, par la suite, est devenu le ministre de la


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  1   Défense a déclaré que les Serbes avaient des têtes beaucoup plus petites

  2   que les Croates, et d'une forme différente, et cetera. Donc, ce n'était pas

  3   n'importe qui qui se permettait de dire des choses de la sorte; c'est un

  4   professeur d'université qui faisait des déclarations de ce type.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les interprètes vous invitent à

  6   ralentir, s'il vous plaît, et je répète encore une fois qu'il faut vous

  7   concentrer dans vos réponses à répondre à la question.

  8   Vous pouvez continuer.

  9   M. LUKIC : [interprétation]

 10   Q.  Je sais que spontanément vous êtes très éloquent, et vous avez tendance

 11   à fournir des réponses élaborées, mais comme le Président l'a déjà

 12   souligné, nous n'avons pas beaucoup de temps à notre disposition. Donc,

 13   veuillez fournir des réponses succinctes dans la mesure du possible, et

 14   aussi veuillez parler un peu plus lentement, s'il vous plaît.

 15   Donc, d'après vous, à combien de niveaux cette campagne anti-Serbe était-

 16   elle menée ?

 17   R.  Eh bien, je souhaite citer Jovan Raskovic qui la définit en la divisant

 18   en trois niveaux différents : il y avait le niveau quotidien, les

 19   agressions qui se produisaient dans la vie de tous les jours, à la rue, au

 20   travail, toute sorte de pressions est exercée. Puis, il y avait le niveau

 21   administratif, au sein des entreprises, dans les organisations de nature

 22   sociale ou politique, au sein de l'armée et de la police, les gens étaient

 23   licenciés. Et puis, il y avait aussi le niveau politique, donc le fait que

 24   les droits des Serbes étaient réduits à minimum, tous leurs droits

 25   politiques ont été réduits.

 26   Q.  Donc, nous sommes toujours en 1990. Je vais revenir un petit peu en

 27   arrière.

 28   Vous nous avez expliqué de quelle façon vous avez décidé à devenir avocat.


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  1   Vous avez expliqué pour quelle raison vous avez donné votre démission au

  2   poste de juge. Vous avez expliqué pour quelle raison vous avez décidé de

  3   prendre ces mesures. Vous avez dit avoir défendu, avoir assuré la défense

  4   des agents de police. Alors, de quel type de procès s'agissait-il lorsque

  5   ces agents de police étaient licenciés ?

  6   R.  Eh bien, c'étaient des procédures disciplinaires. Au sein de la police,

  7   il existait des tribunaux disciplinaires. Ces tribunaux étaient assez bien

  8   organisés. Par ailleurs, j'assurais la défense aussi des personnes qui

  9   étaient accusées des infractions pénales, de différents délits, et cetera.

 10   Q.  Alors, parlez-nous des entreprises et de ce qui s'y passait. Est-ce

 11   qu'un certain nombre d'entreprises a licencié son personnel ?

 12   R.  Eh bien, 90 % des entreprises l'ont fait immédiatement. Et je peux vous

 13   citer toute une série d'exemples sans m'arrêter. Mais, pour le moment,

 14   permettez-moi de citer, par exemple, l'usine de chaussures à Gradacac, qui

 15   s'appelait Simecki, et qui avait son siège à Zagreb; 550 employés n'ont pas

 16   touché leur salaire pendant des mois, et finalement ils ont été licenciés.

 17   Mon bureau et moi-même avons déposé 550 plaintes en demandant que ces

 18   employés soient compensés. Mais, malheureusement, nous n'avons rien pu

 19   faire.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous vous écartez

 21   encore une fois des questions qui vous ont été posées. La question

 22   concernait les entreprises qui ont licencié le personnel.

 23   Or, maintenant, vous nous dites pratiquement toutes les entreprises l'ont

 24   fait, vous citez un exemple, et puis vous commencez à nous parler d'autres

 25   procès qui n'ont rien à voir avec cette question-là.

 26   Veuillez continuer, Maître Lukic.

 27   M. LUKIC : [interprétation] Très bien. Merci.

 28   Q.  En fait, ma question suivante était censée porter sur ce sujet-là. Mais


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  1   puisque vous y avez déjà répondu, je tiens tout simplement à apporter une

  2   correction au nom de la ville que vous avez cité tout à l'heure.

  3   R.  Quelqu'un a écrit Gradacac au lieu de Gracac, en Lika. Eh bien, le

  4   sténotypiste doit être de Bosnie.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, il n'y a aucune

  6   raison de commenter les erreurs ou les raisons pour lesquelles elles ont

  7   été commises ou de vous livrer à des observations sur les antécédents des

  8   sténotypistes ou des interprètes. Veuillez, s'il vous plaît, vous abstenir

  9   de ce type d'observation.

 10   Vous pouvez continuer.

 11   M. LUKIC : [interprétation]

 12   Q.  Vous nous avez parlé des employés qui étaient licenciés après cinq

 13   jours d'absence. Pour mieux comprendre cela, pouvez-vous nous expliquer

 14   quelle était la composition ethnique de la population en Croatie ?

 15   R.  Eh bien, par exemple, la Lika et la Dalmatie, où j'habitais, c'est de

 16   cela que je vais parler puisque je connais mieux ces régions-là, les zones

 17   industrielles se trouvaient notamment dans les régions qui étaient en

 18   dehors de la République de la Krajina serbe, donc en dehors des zones

 19   habitées par les Serbes.

 20   Q.  Donc, les Serbes étaient obligés de voyager pour pouvoir se rendre à

 21   leur travail ?

 22   R.  Oui, tous les jours. Ils prenaient un autocar pour se rendre à Split, à

 23   Sibenik, à Zadar.

 24   Q.  Et qu'est-ce qui s'est passé à un moment donné ? Qu'est-ce que les

 25   Croates ont fait ?

 26   R.  Mais je l'ai déjà expliqué. Au moment où ces autocars s'approchaient

 27   des villes, des sortes d'armées ou des forces de police qui arboraient ces

 28   nouveaux emblèmes croates avec l'échiquier les faisaient descendre


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  1   d'autocars et les renvoyaient vers leurs villages, à pied. Ils le faisaient

  2   pendant cinq jours, et le cinquième jour, ces employés pouvaient être

  3   licenciés puisque, conformément aux lois en vigueur, toute personne qui ne

  4   se présentait pas au travail pendant cinq jours pouvait être licenciée.

  5   Q.  Et comment avez-vous fait pour vous rendre à votre poste en 1990 et

  6   1991 ?

  7   R.  Eh bien, j'avais des tables d'immatriculation de Zadar et je me servais

  8   de ma propre voiture. Je devais traverser les barrages tous les jours. Et

  9   une fois expirées, mes tables d'immatriculation, j'ai dû prendre des bus;

 10   et à la fin du mois d'août 1991, les autocars, en fait, ne fonctionnaient

 11   plus, et je ne pouvais plus m'y rendre.

 12   Q.  Pourquoi passiez-vous par les barrages ? Est-ce qu'ils vous ont permis

 13   de faire cela ?

 14   R.  J'avais la carte d'adhésion pour ce qui est du barreau croate. Et avant

 15   de voyager, j'ai parlé avec des gens qui en étaient compétents pour qu'ils

 16   donnent des ordres à ces personnes se trouvant aux postes de contrôle et où

 17   se trouvaient aussi les nids de mitrailleuses pour me laisser passer, et

 18   ils me laissaient passer.

 19   Q.  Est-ce que les gens ordinaires acceptaient facilement ces situations où

 20   ils ne pouvaient pas circuler librement ? Ou ils devaient rentrer chez

 21   eux ?

 22   R.  En été 1992, même si les barrages avaient été érigés un an auparavant,

 23   les gens des deux côtés n'acceptaient pas cela. Ils se rendaient au bord de

 24   la mer pour se baigner et en rentrant, des gens étaient arrêtés. Donc, j'ai

 25   aidé ces personnes à sortir de la prison, je les défendais devant les

 26   tribunaux.

 27   Q.  Quelles étaient les réactions des Serbes par rapport aux arrestations

 28   des Serbes ?


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  1   R.  A un moment donné où les Croates ont arrêté cinq personnes qui se

  2   rendaient au bord de la mer pour se baigner, mais les hommes de Benkovac

  3   ont arrêté huit Croates. Et on m'a demandé de négocier leur échange, les

  4   Croates ont accepté cela. Et c'était le premier échange, en juillet 1991,

  5   où j'ai participé.

  6   Q.  Pouvez-vous nous dire brièvement comment vous avez organisé cet

  7   échange ?

  8   R.  Donc les membres de familles des Serbes arrêtés m'ont donc donné le

  9   pouvoir de le faire, et je m'adressais au juge d'instruction qui était mon

 10   collègue, puisqu'on travaillait au même tribunal, pour voir si on pouvait

 11   proposer à la police croate de libérer des Serbes et, dans ce cas-là, je

 12   disais aux hommes de Benkovac de libérer les Croates. Ils ont accepté cela

 13   après avoir consulté les autorités à Zagreb, et c'est comme cela que cet

 14   échange a eu lieu à un endroit qui se trouve entre les territoires de deux

 15   municipalités, la municipalité de Benkovac et la municipalité de Zadar.

 16   Q.  Maintenant, je vais vous poser une question concernant l'importation

 17   illicite des armes.

 18   Est-ce qu'il y avait de l'importation illicite ou illégale des armes en

 19   Croatie; et, si oui, dites-nous ce que vous en savez ?

 20   R.  J'ai déjà dit que j'ai vu dans la cour du tribunal de Zadar et dans la

 21   cour de la police la distribution des armes qui se trouvaient dans des

 22   caisses qui étaient transportées à bord des camions qui entraient dans

 23   cette cour. La cour était distribuée de tous les côtés. Et par la suite, on

 24   a appris d'où provenaient ces armes. Aujourd'hui, on sait tout par rapport

 25   à cela.

 26   D'abord, c'était de la Hongrie que les armes étaient importées. L'armée a

 27   préparé un documentaire là-dessus. Le documentaire, je l'ai vu la première

 28   fois, je pense, en janvier 1991, et ce documentaire a été préparé, a été


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  1   fait en octobre 1990. Dans ce documentaire, on voit les protagonistes de

  2   cette histoire, à l'époque c'était le général Spegelj, qui par la suite est

  3   devenu ministre de la Défense au gouvernement de la Croatie.

  4   Q.  Merci. Lorsqu'il a été découvert qu'il y avait l'importation illégale

  5   des armes, dites-nous ce que les autorités croates ont fait par rapport à

  6   cela ?

  7   R.  Avant cela, les armes étaient distribuées aux membres du HDZ. Et au

  8   moment où la Croatie, lorsqu'elle était toujours la République de

  9   l'ancienne Yougoslavie, les autorités fédérales ont rendu la décision

 10   concernant le désarmement sur tout le territoire de l'ancienne Yougoslavie,

 11   le désarmement des formations paramilitaires. Les Croates, à ce moment-là,

 12   ont demandé d'obtenir un délai de 48 heures. Pendant ce délai de 48 heures,

 13   tous ceux qui étaient armés et qui étaient membres du HDZ étaient mutés au

 14   sein de la police du MUP, et de 18 000 membres enregistrés pendant quelques

 15   jours, ce nombre a augmenté à 71 000.

 16   Q.  Et quel était le nombre de membres du HDZ avant cela ?

 17   R.  18 000.

 18   Q.  Merci. Et qu'est-ce qui s'est passé pour ce qui est des armes qui se

 19   trouvaient au niveau des postes de police serbes, dans les régions où les

 20   Serbes étaient en majorité, donc, en majorité également dans les postes de

 21   police ?

 22   R.  Cela s'est passé le 17 août 1990, c'est à cette date-là que la police

 23   croate s'était rendue dans les municipalités où les Serbes étaient en

 24   majorité, telles qu'Obrovac, Benkovac, Gracac, Korenica, et Knin, pour

 25   désarmer ces postes de police. Puisque la police avait les unités de

 26   réserve, les armes des unités de réserve de la police se trouvaient dans

 27   des entrepôts des postes de police, dans une sorte d'entrepôt de la police.

 28   Ils ont réussi à faire cela à Benkovac. C'était après minuit, et les


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  1   habitants de Benkovac ont averti les autres. En fait, c'est à ce moment-là

  2   que la révolution de rondins a commencé. Comme les médias croates ont

  3   appelé de façon péjorative cette révolution, cette mutinerie des Serbes.

  4   Ils ont posé des rondins sur les routes pour éviter d'être désarmés, pour

  5   que la police ne soit pas désarmée.

  6   Q.  Maintenant, j'aimerais qu'on parle de l'année 1991 pour voir comment

  7   étaient les rapports entre les groupes ethniques en 1992. Par exemple, au

  8   début mai à Zadar, dites-nous ce qui s'était passé ?

  9   R.  "La nuit de cristal", nous savons tous d'où ça provient, c'est ce qui

 10   s'est passé en Allemagne de 1938. C'est ce qui s'est passé, quelque chose

 11   de similaire, en 1991 à Zadar, où des gens à bord d'autocars ont commencé à

 12   affluer dans la ville de façon organisée. Mais tous les locaux dont les

 13   Serbes étaient propriétaires ou dont les entreprises de la Serbie étaient

 14   propriétaires ont été détruits et endommagés. Il y avait beaucoup de verre

 15   et c'est pour cela qu'on appelait cela "La nuit de cristal".

 16   Le même jour, à l'est de la Croatie --

 17   Q.  C'est ce que j'allais vous poser comme ma question suivante. Qu'est-ce

 18   qui s'est passé à l'est de la Croatie ?

 19   R.  A Borovo Selo, où vivaient les Serbes, ce jour-là, une délégation

 20   devait s'y rendre, une délégation croate, pour qu'on parle en paix, et au

 21   lieu de se rendre là-bas en paix, les Croates y sont entrés avec un autocar

 22   plein de membres du MUP et avec quelques autres véhicules privés et ont

 23   commencé à tirer sur toutes les maisons où se trouvaient les Serbes. Les

 24   Serbes ont riposté et il y avait des blessés. Il y avait des morts, il y

 25   avait des personnes capturées, et ceux qui s'occupent de la théorie, de

 26   tout ce qui s'était passé, considèrent ce moment comme un tel moment du

 27   commencement de la guerre en Croatie. Mais moi, je pense que c'était avant

 28   cette date-là, à savoir le 31 mars cette année à Plitvice, donc le cas de


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  1   Plitvice. C'est à ce moment-là que la guerre a commencé, selon moi.

  2   Q.  On va en parler, on va parler de Plitvice plus tard. Mais dites-nous,

  3   en fait, parce que vous avez mentionné Plitvice, ce qui s'était passé à

  4   Plitvice ?

  5   R.  Plitvice, à l'époque, était entre les mains des membres de la Défense

  6   territoriale de la Serbie, et les policiers croates étaient venus en tant

  7   que touristes dans un hôtel, puisque c'était un lieu touristique, et ils

  8   portaient les armes dans leurs valises. Et une fois entrés dans leurs

  9   chambres, ils ont sorti leurs armes et ont commencé à occuper ces hôtels à

 10   Plitvice. Il y avait les premières victimes, un Serbe et un Croate, donc

 11   une personne du côté croate et une personne du côté serbe. Et à ce moment-

 12   là, Goran Hadzic a été capturé, juste pour vous dire que c'était à ce

 13   moment-là.

 14   Q.  Maintenant, je veux revenir sur votre région et sur quelque chose à

 15   quoi vous avez pris part. J'aimerais vous poser des questions concernant un

 16   exemple.

 17   D'abord, est-ce que vous savez qui est Vranjes Dragisa ?

 18   R.  Oui, je le sais.

 19   Q.  Et vous savez quel était le destin de Dragisa Vranjes ?

 20   R.  Dragisa Vranjes est Serbe. Il est né au village de Cetina, municipalité

 21   de Knin, et il travaillait en Suisse à l'époque. En juillet 1991, il se

 22   rendait de Suisse à Belgrade et de Belgrade en Croatie à bord d'un autocar.

 23   On l'a fait descendre de l'autocar sur la route entre Zagreb, et plus

 24   probablement près de Zupanje.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il vous plaît, ralentissez votre débit

 26   un peu.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Et c'est à cet endroit-là qu'il a disparu. Il

 28   est parti de Belgrade et on ne l'a plus revu.


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  1   Environ le 15 août, il y avait un échange des prisonniers entre Knin et

  2   Sibenik, et l'un des prisonniers a dit qu'il était certain que Dragisa se

  3   trouvait dans la prison à Sibenik, puisqu'il est originaire de sa région et

  4   qu'il avait une voix caractéristique, il avait une voix grave, puisqu'il

  5   avait plus de 100 kilos. Donc, il était certain de l'avoir entendu, d'avoir

  6   entendu sa voix, ses cris de la cellule où il se trouvait. Il a dit qu'on

  7   le montrait comme ça, capturé, dans la ville pour le montrer à la

  8   population. La population l'a malmené, lui crachait dessus, et à un moment

  9   donné, il ne l'entendait plus pendant une nuit.

 10   Et puisque je faisais déjà des échanges, l'un de mes collègues qui

 11   s'appelle Kuzet, on lui a demandé et on m'a demandé également de voir s'il

 12   était vraiment à Sibenik. Et certains membres de sa famille ont demandé

 13   cela également.

 14   Q.  Pouvez-vous répéter le nom de votre collègue ?

 15   R.  Kuzet Radomir.

 16   Q.  Dites-nous de quelle façon vous avez pris part à cela ?

 17   R.  A la demande à sa famille, de Martic, de Raskovic, de Babic et de tous

 18   ceux qui étaient des dirigeants de la Krajina importants ont demandé qu'on

 19   essaie de retrouver cet homme puisque, selon les informations reçues, il a

 20   été vu à Sibenik. C'est une longue histoire. Mais, en tout cas, le chef de

 21   la police nous a informés du fait que lui, avant le 24, était décédé d'une

 22   crise cardiaque à l'hôpital et qu'il était enterré dans un cimetière qui

 23   n'était pas le cimetière principal. Nous nous sommes rendus là-bas et en

 24   notre présence, son corps a été exhumé et a été transporté à Knin. Après

 25   l'autopsie, on ne pouvait pas le transporter jusqu'à son village pour qu'il

 26   soit enterré, puisque ce jour-là, la route menant à son village était

 27   bloquée.

 28   Q.  Juste un instant, s'il vous plaît. Où la route a été bloquée, à quel


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  1   niveau ?

  2   R.  Au village de Kijevo. C'est un village croate.

  3   Q.  Qui a bloqué la route ?

  4   R.  Les Croates. La police croate qui, au village de Kijevo, comme dans

  5   beaucoup d'autres villages croates, a formé des postes de police en

  6   arborant des drapeaux à l'échiquier, et des policiers également arboraient

  7   le même emblème. C'est comme cela qu'ils ont bloqué la route. La route

  8   n'était plus accessible pour se rendre dans d'autres villages. Et pour

  9   autant que je sache, et aujourd'hui il s'agit, en fait, des informations

 10   avérées, la JNA est partie dans cette région pour débloquer la route. Il y

 11   avait des tirs des deux côtés, il y avait également des blessés et des

 12   morts à cet endroit-là et des capturés. Je ne sais pas s'il y avait des

 13   morts à ce moment-là. Et cela, dirais-je, était le moment où la JNA s'était

 14   tournée contre les Croates, puisqu'il y avait 18 postes de police de ce

 15   type-là dans les villages croates, mais ces postes de police n'existaient

 16   pas auparavant dans ces endroits.

 17   Q.  Quelle était la réponse des policiers par rapport à la demande

 18   d'enterrer Vranjes Dragisa à Cetina, de passer par Kijevo, d'abord ?

 19   R.  Ils ne pouvaient pas passer à Kijevo. Pour autant que je sache, ils

 20   sont partis pour s'y rendre, mais ce n'était pas accessible. Ils pensaient

 21   passer par Civljane pour arriver à Cetina.

 22   Q.  Est-ce que vous avez pris part à cela, et comment, après avoir

 23   transporté le corps de Dragisa Vranjes jusqu'à Knin ? Est-ce que vous avez

 24   pris part à d'autres négociations par rapport à cela ou pas ?

 25   R.  Par rapport à Dragisa uniquement ?

 26   Q.  Oui.

 27   R.  Nous avons remis son corps à sa famille. Mais peut-être qu'il est

 28   intéressant de dire qu'étant donné qu'il ne serait pas dans un cercueil,


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  1   mais enveloppé seulement dans un drap, ses parents se sont plaints et ont

  2   attaqué nous, les avocats, en disant qu'ils les avaient trompés, puisque

  3   cette personne ne pesait plus de 100 kilos, que ce n'était pas la même

  4   personne. Mais un autre parent a dit que c'était lui. Et comme c'était en

  5   été et qu'il était enterré dans la terre qui était aride, donc, tout le

  6   tissu gras s'était fondu dans la terre, puisqu'il faisait très chaud et il

  7   ne restait que la peau et les os. C'est peut-être un point curieux par

  8   rapport à cela.

  9   Q.  Vous avez dit qu'à ce moment-là la JNA, selon vous, s'était tournée

 10   contre les Croates.

 11   R.  Non seulement cela, mais il y avait aussi des --

 12   Q.  C'est à ce moment-là que les conflits ont commencé ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce qu'à un moment donné, les casernes de la JNA ont été bloquées ?

 15   R.  C'est à ce moment-là que l'appel a été lancé. Déjà au début de --

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec, vous avez la parole.

 17   M. ZEC : [interprétation] Est-ce qu'on peut savoir la date à laquelle cela

 18   s'est passé, à laquelle la JNA s'était tournée contre les Croates à Kijevo.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est une proposition --

 20   M. LUKIC : [interprétation] Je ne sais pas si cela a été consigné au compte

 21   rendu, mais je pense que le témoin a dit cela. Mais je vais lui reposer la

 22   question.

 23   Q.  Pour ce qui est des conflits au village de Kijevo concernant le passage

 24   du cercueil de Dragisa Vranjes, pouvez-vous nous dire quand cela s'est

 25   passé ?

 26   R.  Pour autant que je me souvienne, c'était le 26 août.

 27   Q.  Quelle année ?

 28   R.  En 1991.


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  1   Q.  Parlons de la caserne et du fait que la caserne de la JNA a été

  2   bloquée.

  3   R.  Déjà au début de 1991 --

  4   Q.  Monsieur le Témoin, attendez un peu après ma question, ménagez une

  5   pause entre mes questions et vos réponses. J'aurais dû vous dire cela au

  6   début de votre témoignage. C'est ma faute.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et il faut également que vous attendiez

  8   que la question vous soit posée avant de commencer votre réponse.

  9   M. LUKIC : [interprétation]

 10   Q.  Selon vous et pour autant que vous vous en souvenez, quand les

 11   installations militaires ont commencé à être bloquées ?

 12   R.  En début de 1991 lorsque l'armement a commencé, lorsque les membres du

 13   parti étaient transformés en policiers, en membres du MUP. En fait, il

 14   s'agissait d'une armée, mais la loi au niveau fédéral défendait la

 15   formation de l'armée. Et les Croates, en fait, ont transformé leurs membres

 16   en membres du MUP, de la police. A ce moment-là, il y avait des pressions

 17   effectuées sur les casernes. Les soldats étaient appelés à quitter les

 18   casernes. Donc, les gens se dispersent. Les Croates partent en Croatie, les

 19   Serbes restent dans les casernes et il y avait d'autres membres de la JNA

 20   qui étaient membres d'autres groupes ethniques qui étaient restés pendant

 21   longtemps avec l'armée dans ces casernes.

 22   Et je me souviens, c'était le 5 mai, je pense, quand le président de

 23   la Croatie, Franjo Tudjman, à Trogir, à un rassemblement public, a appelé

 24   publiquement à ce que la JNA soit attaquée. Et après cet appel, le

 25   lendemain déjà, à Split, un soldat de la Macédoine a été étranglé. Il se

 26   trouvait à bord d'un blindé de transport de troupes. Mais les attaques

 27   généralisées contre les casernes, si je me souviens bien, ont commencé à la

 28   mi-septembre, peut-être justement le 15 septembre. C'est à ce moment-là que


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  1   dans toute la Croatie, les casernes étaient bloquées, étaient attaquées.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, je regarde l'heure. Nous

  3   avons commencé ce volet de l'audience un peu plus tôt que d'habitude.

  4   Habituellement, je demande au témoin de suivre l'huissier et de quitter le

  5   prétoire avant de faire des commentaires, mais vous avez déjà utilisé une

  6   heure de votre temps et nous allons être très strict pour ce qui est du

  7   temps imparti, puisque la plupart des questions concerne plutôt le

  8   contexte, ce qui est important pour cette affaire, et ce qui est retenu

  9   contre l'accusé à l'acte d'accusation. Mais même lorsqu'il s'agit du

 10   contexte, vous savez que la Chambre n'a jamais prévenu la Défense de

 11   présenter les informations concernant le contexte. Mais ici, donc, on est

 12   perdus dans trop de détails, ce qui ne sera aucunement utile à la Chambre.

 13   Par conséquent - puisque je dis cela en présence du témoin - le

 14   témoin, vu ses connaissances professionnelles, devrait le savoir - et si

 15   vous voulez que son témoignage soit efficace dans le prétoire, essayez de

 16   vous concentrer sur les questions.

 17   Maître Lukic, s'il y a quoi que ce soit que la Chambre doive savoir

 18   concernant le contexte, donc vous pouvez poser des questions, mais il

 19   faudrait que vous sachiez que les informations pertinentes pour ce qui est

 20   de cette affaire sont plus importantes.

 21   Monsieur le Témoin, vous pouvez suivre l'huissier.

 22   [Le témoin quitte la barre]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire la pause de 20

 24   minutes, et nous allons reprendre à 12 heures 10.

 25   --- L'audience est suspendue à 11 heures 48.

 26   --- L'audience est reprise à 12 heures 10.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, j'ai remarqué votre


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  1   comportement lorsque je suis entré dans le prétoire. Votre comportement est

  2   tout à fait inconvenant, je vous demande de bien vouloir vous abstenir

  3   d'échanger avec l'avocat et le public comme vous l'avez fait. Je souhaite

  4   que ceci soit très clair. C'est le dernier avertissement que je vous lance.

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, c'est à vous. Veuillez

  7   vous rappeler ce que nous avons dit avant la pause.

  8   M. LUKIC : [interprétation]

  9   Q.  Nous avons parlé de personnes que l'on licenciait. Y avait-il des

 10   personnes de Bosnie parmi ces personnes ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Qu'est-il advenu de ces personnes ?

 13   R.  Eh bien, ces personnes n'ont pas été traitées sur la base de leur

 14   appartenance fédérale ou républicaine, mais par rapport à leur appartenance

 15   ethnique. D'après ce que je sais, de nombreuses personnes de Bosnie

 16   travaillaient en Croatie parce qu'il y avait des sites industriels

 17   importants. Par exemple, les aciéries de Sisak, et dans les raffineries, je

 18   sais que les gens travaillaient là, et s'il s'agissait de Serbes de souche,

 19   ces personnes étaient licenciées ou renvoyées.

 20   Q.  D'après ce que vous savez, ces personnes sont-elles restées en Croatie

 21   ou sont-elles parties; et si oui, vers quelle région ?

 22   R.  Si ces personnes partaient, elles se rendaient à leur lieu de

 23   naissance, s'il y avait quelqu'un qui se trouvait là.

 24   Et ces personnes qui sont nées en Bosnie étaient rassemblées et

 25   ensuite emmenées vers le sud dans des îles, et après, ces personnes

 26   revenaient en Bosnie depuis cet endroit. Et malheureusement, certaines

 27   personnes au cours de ces trajets ou en rentrant chez elles ont perdu la

 28   vie.


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  1   Q.  Nous avons parlé de blocus ou de barricades devant la garnison de

  2   la JNA en Croatie, devant des garnisons. Connaissiez-vous le général Mladic

  3   en 1991 ?

  4   R.  Ecoutez, j'essaie de m'en souvenir maintenant. Oui, oui. Je l'ai

  5   vu plusieurs fois. Oui, oui.

  6   Q.  Nous allons revenir sur tout ceci.

  7   Tout d'abord, je souhaite vous poser une question au sujet de la caserne de

  8   Bjelovar. Que savez-vous au sujet du sort réservé à cette caserne ?

  9   R.  Le 29 septembre, d'après ce dont je me souviens, il y a eu un blocus

 10   devant la caserne, ceci a duré un certain temps. La garnison s'est rendue,

 11   l'officier a rassemblé tous ses hommes, et ils se sont rendus. Ils se sont

 12   rendu compte du fait qu'ils ne pouvaient plus opposer de résistance.

 13   Et lorsqu'il est entré dans la caserne, Ure Simic, qui était à la tête de

 14   la cellule de Crise a ordonné que ces trois principaux officiers soient

 15   exécutés. D'après mes informations, il les a exécutés lui-même. Il a tiré

 16   deux balles contre chacun d'entre eux. En réalité, il y a des poursuites

 17   pénales contre lui en Croatie, précisément en raison de ce meurtre.

 18   Q.  Qu'est-il arrivé dans l'entrepôt au début ?

 19   R.  Je crois que cela se trouvait à 15 kilomètres environ de la caserne qui

 20   se trouvait en ville, et c'est là qu'un officier, Tepic, ne souhaitait pas

 21   se rendre, et l'entrepôt qui appartenait à l'armée et à la police croate

 22   non plus. Donc, il l'a miné et cela a explosé. D'aucuns disaient qu'il y

 23   avait 170 tonnes d'explosif à l'intérieur, et lui-même est mort au cours de

 24   l'explosion. Il y avait un de ses soldats qui ne souhaitait pas lui obéir,

 25   qui était avec lui, mais qui ne souhaitait le quitter, les autres victimes

 26   concernaient environ 11 soldats croates.

 27   Q.  Vous dites que deux officiers ont été tués --

 28   R.  Trois, trois officiers ont été tués.


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  1   Q.  Pardon.

  2   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Nous ne pouvons pas suivre parce que

  3   les deux orateurs parlent en même temps.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, vous devriez marquer

  5   une pause entre les questions et les réponses, et entre les réponses et les

  6   questions. Pour ce qui est des autres points que j'ai soulevés auparavant,

  7   ceci s'applique aussi.

  8   Veuillez poursuivre.

  9   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Q.  C'est mon erreur, j'aurais dû marquer une pause.

 11   Veuillez nous dire ce qui est advenu des autres soldats qui se trouvaient

 12   dans la caserne de Bjelovar, à l'exception de ces trois hommes qui ont été

 13   exécutés ?

 14   R.  Six d'entre eux -- en réalité, six personnes de la région qui, à mon

 15   sens, étaient des civils et qui travaillaient pour l'armée ont été emmenées

 16   et emmenées au poste de police en ville, et après quatre ou cinq jours, on

 17   a fait sortir ces personnes et on les a exécutées.

 18   Pour ce qui est des autres personnes, les soldats qui accomplissaient

 19   leur service militaire obligatoire, il y avait des sous-officiers, ils

 20   étaient 250 au total, eh bien, ils ont été emmenés dans une halle de sport,

 21   c'est là qu'il y avait un filtrage. Et de jeunes soldats ont été autorisés

 22   à rentrer chez eux. Et pour ce qui est des autres personnes, tout dépendait

 23   de leur appartenance ethnique, eh bien, ces autres personnes ont été soit

 24   arrêtées et échangées par la suite, ou emmenées et transportées à d'autres

 25   endroits.

 26   Q.  Nous avons parlé de la JNA, mais maintenant nous allons parler des

 27   civils en 1991. Veuillez nous dire ce qui est advenu des Serbes de Gospic ?

 28   Où se trouve Gospic par rapport à l'endroit où vous habitiez ?


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  1   R.  A Lika.

  2   Gospic se trouve à Lika. J'avais un cabinet d'avocat à Korenica, à Lika. Ma

  3   femme est originaire de Lika, donc je connais la région, tout comme je

  4   connais la Dalmatie. Les Serbes de Gospic ont été des victimes en 1991. Et

  5   d'après les données recueillies par mon organisation, autrement dit, il y a

  6   eu 124 victimes. Je parle de civils. Et une enquête a été ouverte par le

  7   bureau du Procureur du Tribunal de La Haye. Mais avant de rédiger l'acte

  8   d'accusation, cette affaire a été renvoyée devant la Croatie. La Croatie a

  9   jugé cinq personnes, et trois personnes ont été déclarées coupables et

 10   condamnées.

 11   Q.  Ces Serbes, donc, ont été tués à Gospic. S'agit-il -- alors que s'est-

 12   il passé au niveau de la population au sens général du terme ? Certaines

 13   personnes sont restées, d'autres sont parties ?

 14   R.  Alors la plupart des gens sont restés. Comment puis-je vous le dire ?

 15   Il y avait des citoyens qui étaient loyaux envers les autorités

 16   nouvellement créées. Certaines personnes portaient même des armes. Il y

 17   avait une protection civile. Ils montaient la garde au niveau des ponts, et

 18   cetera. Malheureusement, ils ont été tués aussi.

 19   Q.  Slavonska Pozega, que savez-vous à ce sujet ? Brièvement.

 20   R.  Slavonska Pozega, eh bien, un ordre a été donné à cet endroit

 21   également, c'était également à la fin du mois d'octobre. Et je crois que

 22   c'était le 29 encore une fois, mais c'était le mois d'octobre et non pas le

 23   mois de septembre. Et c'est la cellule de Crise de Pozega, donc il

 24   s'agissait de Croates, qui ont donné un ordre écrit aux fins d'évacuer 26

 25   villages qui avaient une population qui était majoritairement ou

 26   exclusivement serbe. Ils ont prétendu que la population pouvait revenir,

 27   mais ils souhaitaient simplement nettoyer la région d'ennemis, de Chetniks.

 28   Et les gens ne sont jamais rentrés. Dès leur départ, leurs maisons ont été


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  1   incendiées, leurs biens pillés, et les quelques personnes âgées qui étaient

  2   restées ont été tuées.

  3   Q.  Et ces personnes qui sont parties, qui ont quitté leurs maisons, où ces

  4   personnes se sont-elles rendues ?

  5   R.  Elles ont traversé la Bosnie. Certaines personnes sont restées en

  6   Bosnie, et d'autres, elles, plus tard, se sont rendues en Serbie. Après

  7   quoi, ces personnes se sont rendues dans différents pays dans le monde

  8   entier.

  9   Q.  Alors encore autre chose. Vous avez parlé du 29 octobre. De quelle

 10   année ?

 11   R.  1991. Nous parlons toujours de l'année 1991.

 12   Q.  Qu'est-il arrivé aux Serbes de Bilogora ?

 13   R.  Exactement la même chose. Deux jours plus tard, le 31 octobre, les

 14   Croates ont mené une opération qu'ils ont appelé Otkos-10, et ensuite je

 15   crois qu'ils ont rasé environ 26 villages, d'après le même principe, comme

 16   dans la vallée de Pozega. Des gens étaient chassés. Leurs maisons et biens

 17   étaient pillés, et les gens n'avaient aucun endroit où rentrer. Les

 18   personnes qui restaient étaient tuées. On parle de plus de 60 victimes. Et

 19   pour ce qui est du cas précédent, nous parlons de 70 victimes.

 20   Q.  Avez-vous participé aux échanges de personnes qui ont été faites

 21   prisonnières dans ces secteurs ?

 22   R.  Oui, mais seulement à partir de 1993, donc ce n'était pas à cette

 23   époque-ci, à cette date-ci.

 24   Q.  Que savez-vous au sujet des camps pour les Serbes en Croatie ?

 25   R.  Déjà pendant l'automne de l'année 1991, les camps les plus tristement

 26   célèbres se trouvaient en Slavonie occidentale, Pakracka Poljana et

 27   Ribarska Koliba, ou Marino Selo. Ce sont les noms des camps. Ils sont juste

 28   les uns à côté des autres. D'après les informations rassemblées par


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  1   Veritas, plus de 300 personnes ont traversé ces camps. La plupart de ces

  2   personnes sont toujours portées disparues. A l'heure actuelle, un Croate,

  3   Tomislav Mercep, est jugé pour des crimes qui ont été commis dans ces

  4   camps. Les débats se déroulent devant un tribunal croate.

  5   Outre ce camp-là, il y avait des camps que les Croates appelaient des

  6   endroits où des détenus pouvaient séjourner, et ce qui laisse entendre ou

  7   fait penser à un motel ou à un hôtel, alors qu'en réalité il s'agit de

  8   camps comme Lora et Kerestinec qui se cachaient derrière ces appellations

  9   erronées. Les gens étaient torturés aux Moyen Age lors de l'Inquisition.

 10   Et devant les tribunaux croates, il y a des procès à la fois pour Lora et

 11   Kerestinec. Trois affaires concernant Lora déjà. Une affaire est maintenant

 12   classée, un jugement a été rendu en définitive, il y a eu une condamnation.

 13   Il y a un procès qui est en cours. Et le troisième est toujours dans la

 14   phase d'enquête.

 15   Pour ce qui est de Kerestinec, il y a également eu des condamnations, mais

 16   celles-ci ont été annulées et il y a réouverture de ce procès.

 17   Q.  Parlons maintenant du général Mladic. Quand avez-vous pour la première

 18   fois rencontré le général Mladic ?

 19   R.  Eh bien, écoutez, voilà, ça s'est passé comme cela. A un moment donné

 20   au mois d'octobre, les hommes de Mladic de Knin sont venus, parce qu'il

 21   commandait le Corps de Knin, ils sont venus me voir à Benkovac. Et étant

 22   donné que j'étais un officier et un réserviste, ils m'ont apporté des

 23   papiers correspondant à un appel à la mobilisation et ils m'ont dit qu'ils

 24   m'ont nommé président d'un tribunal, et que le lendemain je devais déjà

 25   organiser le procès de déserteurs.

 26   Q.  Bien.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Puis-je vous poser une question :

 28   vous êtes en train de parler de quelle année ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] 1991. Tout ceci s'est déroulé en 1991.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je souhaite également poser une

  4   question.

  5   Pouvez-vous répondre à la question qui vous a été posée : quand pour la

  6   première fois avez-vous rencontré le général Mladic ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, maintenant. Maintenant. Je vous l'ai

  8   dit, je vous ai expliqué comment je me suis rendu au commandement de Knin,

  9   et c'est là qu'il y avait le poste de commandement, c'est là qu'il y avait

 10   Mladic --

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Telle n'était pas la question qui vous

 12   a été posée. La question qui vous a été posée était quand avez-vous

 13   rencontré le général Mladic. Je vous demande de bien vouloir répondre à

 14   cette question-là. Et le Juge Président de la Chambre vous a demandé depuis

 15   ce matin de bien vouloir vous concentrer sur les questions et de ne pas

 16   nous raconter un récit. La réponse à la question, c'est vous devez nous

 17   donner l'heure ou la date. "J'ai rencontré le général Mladic à telle heure

 18   telle date."

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Dois-je vous répondre maintenant ?

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] S'il vous plaît.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens pas de la date. C'était au mois

 22   d'octobre 1991.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

 24   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 25   Q.  Quel est le nom de cet homme qui est venu vous chercher ?

 26   R.  Hasotic, c'est son nom de famille. Oui. Mesud Hasotic. Il était le

 27   commandant adjoint chargé des questions de moral, donc c'était le

 28   commandant adjoint de Mladic.


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  1   Q.  Et quelle est son appartenance ethnique, le savez-vous ?

  2   R.  Oui. C'est un Musulman. Il était Musulman à l'époque, il est encore

  3   Musulman aujourd'hui.

  4   Q.  Qui était censé être jugé ?

  5   R.  Des Serbes, il y avait des Serbes qui avaient fui les positions de

  6   l'armée.

  7   Q.  Le procès a-t-il eu lieu ?

  8   R.  Fort heureusement, non, parce que je ne savais pas quelle était la

  9   législation ou texte législatif je devais appliquer en l'espèce. Ils sont

 10   retournés à leur position. Cela s'est avéré inutile.

 11   Q.  Et ce tribunal a-t-il été mis en place ?

 12   R.  Jamais. Si vous voulez parler d'un tribunal militaire, eh bien, ce

 13   genre de chose n'a jamais été créé.

 14   Q.  Etant donné que ce procès n'a jamais eu lieu, que vous a-t-on dit au

 15   sujet de vos fonctions ?

 16   R.  Je me suis d'abord rendu à Banja Luka, où il y avait de nombreux

 17   avocats de renom, je suis allé leur parler pour voir s'il était possible

 18   d'adopter des textes législatifs et de créer des tribunaux pour que je

 19   puisse mettre à l'épreuve mes connaissances et mon expérience, et nous

 20   avons conclu ensemble que cela n'était pas possible, d'organiser les

 21   procès, à l'exception de procès qui seraient jugés par les tribunaux

 22   réguliers qui existaient déjà dans le système de la RSFY. Et le lendemain,

 23   Hasotic m'a dit : "Rentrez à la maison. Vous êtes l'homme le plus utile et

 24   le meilleur lorsque vous travaillez seul sur ces échanges, parce que vous

 25   êtes le seul lien que nous ayons entre la Krajina et la Croatie."

 26   Q.  Est-ce que vous êtes jamais rendu à un échange avec le général Mladic ?

 27   R.  Je crois que c'était au mois de décembre 1991, lorsqu'un échange avec

 28   des Croates de Gospic a été bloqué. Nous disposions d'information fiable où


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  1   il était précisé qu'en prison, qu'il y avait un régime spécial, il y avait

  2   des membres de la JNA qui avaient été faits prisonniers et qui se

  3   trouvaient dans la caserne de Gospic. Ils ne voulaient pas nous donner leur

  4   nom, ni à nous ni au CICR.

  5   Et à ce moment-là, Mladic est arrivé en guise de renfort au niveau de notre

  6   équipe et nous avons traité ce problème-là avec succès. Les Croates,

  7   lorsqu'ils ont vu Mladic, parce que c'était un homme fort, avec beaucoup de

  8   tact et sage, je dois dire par rapport à son comportement, ont avoué qu'ils

  9   détenaient certains officiers de la JNA et qu'ils avaient été soumis à un

 10   régime particulier, et dans la période qui a suivi, nous avons organisé cet

 11   échange. Je crois que Dusko Bajic est le nom d'un des officiers.

 12   Q.  Est-ce que quelqu'un d'autre, est-ce qu'il y a un autre officier ou

 13   d'autres officiers qui vous ont accompagné lors de ces échanges lorsque

 14   Mladic n'était pas là ?

 15   R.  Hasotic, qui était le commandant adjoint chargé des questions de moral,

 16   je suppose que cela fait partie de ses descriptions de poste, de ses

 17   fonctions. Et Tolimir s'y rendait quelquefois aussi. C'était un des

 18   assistants de Mladic à Knin, et je crois que c'était un officier chargé de

 19   la sécurité.

 20   Q.  Vous souvenez-vous de qui dirigeait la délégation croate ?

 21   R.  Dans le cas qui nous intéresse, c'étaient les Croates de Gospic qui

 22   étaient représentés par un certain Dr Jerkovic, qui était président de la

 23   cellule de Crise. Jerkovic, oui, c'est cela.

 24   Q.  Comment a-t-il présenté sa délégation ?

 25   R.  Eh bien, nous avions un homme de Gospic qui faisait partie de notre

 26   délégation, Slobodan Pogramilovic, et il a remarqué que le patron,

 27   Jerkovic, appelait les personnes autour de lui par des noms différents.

 28   Donc, nous avons remis une note à Mladic, et c'est grâce à cela que Mladic


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  1   à un moment donné s'est adressé aux hommes en les appelant par leur

  2   véritable nom, et donc il les a désarmés et ils ont avoué des choses qu'ils

  3   n'avaient aucunement l'intention d'avouer.

  4   Q.  Et était-ce à ce moment-là que Dusko Bajic était retenu par eux ? Est-

  5   ce à ce moment-là que cela a été divulgué ?

  6   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine anglaise : encore une

  7   fois, le témoin commence à répondre avant que la question ne soit terminée.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous répondez à la question avant la fin

  9   de l'interprétation.

 10   La question qui était posée était la suivante : était-ce à ce moment-là

 11   qu'il a été révélé que Dusko Bajic était retenu par eux ?

 12   Veuillez répondre à cette question, s'il vous plaît.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est effectivement le cas. C'est à ce

 14   moment-là que cela a été divulgué.

 15   M. LUKIC : [interprétation]

 16   Q.  Des Croates apportaient-ils ou étaient-ils accompagnés de civils serbes

 17   qui avaient été arrêtés lors de ces échanges ?

 18   R.  Très souvent.

 19   Q.  Et est-ce que les Serbes étaient accompagnés de Croates civils pour que

 20   ceux-ci puissent être échangés ?

 21   R.  Les deux parties détenaient les civils. Mais du côté croate, en tout

 22   cas, en 1991, les gens étaient rassemblés dans la rue et arrêtés dans leurs

 23   appartements simplement pour que ces personnes puissent être échangées. Les

 24   personnes n'étaient pas arrêtées pour avoir commis un quelconque délit. Ils

 25   n'avaient tout simplement pas suffisamment de personnes à échanger, donc

 26   ils rassemblaient des gens dans la rue et dans leurs appartements et les

 27   transportaient jusqu'au lieu de l'échange. Ceci s'est produit très souvent

 28   en 1991.


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  1   Q.  Y a-t-il eu des cas où un civil, par exemple, a été échangé plus d'une

  2   fois ?

  3   R.  Oui. A Zadar, par exemple, je me souviens d'un homme qui s'appelait

  4   Pavle de Zenica. C'était un officier de la JNA qui était à la retraite

  5   juste avant que la guerre n'éclate. Il avait une femme croate et des

  6   enfants, et il avait un appartement à Zadar. Ils l'ont fait venir pour

  7   qu'il soit échangé, et ce, à deux reprises. Et ensuite, on le faisait venir

  8   à Knin, et les deux fois, on l'a fait venir à Knin, et les deux fois, il

  9   est rentré dans sa famille. Et la deuxième fois, on est venu le chercher,

 10   mais il n'a pas été emmené sur le lieu de l'échange, mais on l'a emmené en

 11   direction de Zagreb. On savait qu'il était arrivé jusqu'au mont Velebit, et

 12   ensuite plus personne n'a jamais retrouvé ses traces.

 13   Q.  Il y a encore un thème que je souhaite aborder, et nous terminerons

 14   sans doute avant le temps que nous avions annoncé. Alors, en sachant que

 15   vous êtes un homme fort loquace, j'ai prévu un temps un peu plus long.

 16   Nous allons parler de la FORPRONU maintenant. Alors, d'après vous, quel a

 17   été le rôle de la FORPRONU dans la République de la Krajina serbe ?

 18   R.  Alors pour ce qui est du rôle que l'on avait prévu pour eux, ceci est

 19   inscrit dans les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec.

 21   M. ZEC : [interprétation] Ecoutez, j'ai du mal à comprendre la pertinence

 22   de ce sujet en l'espèce.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, alors pour ce qui est de

 24   la pertinence.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Il y a tellement de rapports qui ont été

 26   rédigés par la FORPRONU, en fait, qui nous permettent de comprendre les

 27   actes et les comportements sur le terrain. Il ne s'agit pas simplement de

 28   leur rôle et de ce qui avait été couché sur le papier.


Page 41103

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans la Krajina, à l'époque ?

  2   M. LUKIC : [interprétation] Dans la Krajina à l'époque, et nous avons parlé

  3   du même thème en parlant de la Bosnie. En Bosnie, en tout cas, nous en

  4   avons parlé très longuement.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, je souhaite avoir les dates et

  6   l'endroit, qu'est-ce que cela ajoute et quelle est la pertinence pour nous

  7   ? Bien sûr nous voulons comprendre ce qui s'est passé au cours du XXe

  8   siècle, bien sûr, et tout ce qui s'est passé, mais cela doit nous aider à

  9   accomplir notre travail.

 10   M. LUKIC : [interprétation] Je crois, qu'en fait, nous parlons d'un cadre

 11   temporel qui va de 1992 à 1991 [comme interprété].

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je croyais que vous parliez de 1991.

 13   M. LUKIC : [interprétation] Oui, jusqu'à présent, mais maintenant, j'ai

 14   changé de sujet.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, dans vos questions suivantes,

 16   veuillez vous concentrer, s'il vous plaît. Qu'est-ce que vous chercher à

 17   recueillir comme information, parce que c'est l'avis du témoin que vous

 18   souhaitez recueillir. Restez concentré, s'il vous plaît, et essayez

 19   d'obtenir des connaissances factuelles de ce témoin, parce que le témoin a

 20   déjà présenté un certain nombre de faits et, apparemment, il n'a pas été

 21   lui-même le témoin de ces faits. Donc, je ne vous ai pas arrêté, mais je

 22   n'ai pas arrêté le témoin non plus. Et donc, il est fort probable que ceci

 23   ne soit pas clair si nous regardons la documentation. Veuillez vous

 24   concentrer et considérer que vous avez devant vous un témoin de faits.

 25   C'est ainsi, en tout cas, qu'il s'est présenté s'agissant de parler des

 26   questions pertinentes. Veuillez garder cela à l'esprit.

 27   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Monsieur Strbac, combien de temps dans votre vie avez-vous dédié à


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  1   l'étude des événements qui se sont produits dans la République de la

  2   Krajina serbe ?

  3   R.  Eh bien, tout mon temps. Dès le moment où je suis devenu avocat en

  4   1990, à partir du 1er novembre, je n'ai jamais cessé de m'occuper de ces

  5   questions. Et tout au long de la guerre, j'ai coopéré avec toute une série

  6   d'organisations internationales, et je suis donc au courant de tout ce qui

  7   se passait au niveau de la FORPRONU, du CICR, de la Commission

  8   d'observation envoyée par la Communauté européenne. Tout ceci fait partie

  9   de mes connaissances directes.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, pour commencer, ce n'est plus une

 11   réponse à la question posée, puisque la question était de savoir pendant

 12   combien de temps vous avez travaillé sur les questions. Et deuxièmement,

 13   vous avez déjà fourni cette réponse lors d'une question précédente posée

 14   par Me Lukic. Vous avez déjà parlé de toutes les organisations avec

 15   lesquelles vous aviez coopéré. Il faut vraiment que j'insiste pour que vous

 16   répondiez d'une façon concentrée et factuelle et pertinente.

 17   Veuillez continuer.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Donc, je vous ai posé une question au sujet du rôle de la FORPRONU et

 20   de son incidence sur le statut de la République de la Krajina serbe. Et par

 21   la suite, je vous poserai des questions au sujet de quelques activités très

 22   concrètes.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais cette question a déjà reçu une

 24   réponse.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai intervenu la dernière fois surtout

 27   parce que vous demandiez que le témoin vous présente son point de vue. Et

 28   c'est ce que vous êtes en train de faire maintenant aussi. Allez de


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  1   l'avant, Maître Lukic, s'il vous plaît, des questions pertinentes portant

  2   sur des faits.

  3   M. LUKIC : [interprétation]

  4   Q.  A quel moment l'action Nos Kalik s'est-elle produite; le savez-vous ?

  5   R.  Oui. Cette action a été engagée le 2 mars 1992.

  6   Q.  Et en quoi consistait-elle ?

  7   R.  A l'époque, les forces de la FORPRONU étaient toujours en train d'être

  8   déployées. Les Croates en ont profité pour engager une première action

  9   dirigée contre un village serbe, Nos Kalik. Des membres de la Défense

 10   territoriale aussi bien que de l'armée ont participé à cette action.

 11   Quelque 20 habitants ont été arrêtés pour être échangés par la suite. Mais

 12   ils avaient été férocement roués de coups avant cela, e une femme âgée a

 13   trouvé la mort.

 14   Q.  La FORPRONU était-elle déjà déployée avant le mois de juin 1992 ?

 15   R.  Pour l'essentiel, oui. Leurs forces ont été déployées en vertu d'un

 16   système de taches d'encre, comme nous avons l'habitude de l'appeler, à

 17   travers la Krajina.

 18   Q.  En quoi consistait l'opération qui concernait le plateau de Miljevacki,

 19   et quel a été le rôle joué par la FORPRONU ?

 20   R.  C'était une autre opération croate menée contre une partie de la

 21   Krajina. Cette opération a été menée le 21 juin 1991.

 22   M. ZEC : [interprétation] Messieurs les Juges, il est question du mois de

 23   juin 1992. Le général Mladic se trouvait en Bosnie à cette époque. Or,

 24   nous, nous sommes en train de parler de Croatie. Je ne comprends pas, je ne

 25   comprends toujours pas en quoi ceci est pertinent.

 26   M. LUKIC : [interprétation] Eh bien, il est question ici des actes et des

 27   comportements de la FORPRONU. C'est toujours la même FORPRONU, que son

 28   siège se trouve en Bosnie -- il faut savoir que leurs postes de


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  1   commandement se trouvaient à Zagreb, en Croatie.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, cela ne veut pas dire que

  3   n'importe quel acte ou forme de comportement est pertinent. Si cela ne se

  4   passe pas à la même époque et à peu près dans la même région ou dans la

  5   zone géographique qui nous intéresse. Donc, veuillez vous concentrer dans

  6   vos questions sur les sujets manifestement pertinents.

  7   M. LUKIC : [interprétation] Mais je me concentre sur les questions qui sont

  8   pertinentes pour la Défense.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, eh bien, pour qu'un sujet soit

 10   pertinent, il faut que les personnes dont il est question se trouvent au

 11   même endroit que l'accusé, à la même époque. Or, cela vaut pour toute une

 12   série de personnes ou de groupes, et cetera. Donc, il faut se concentrer

 13   sur ce que ces personnes ont pu faire et sur ce que le témoin peut en

 14   savoir personnellement. Il faut formuler vos questions de façon à les

 15   rendre manifestement pertinentes. Sinon nous allons être obligés de vous

 16   interrompre.

 17   M. LUKIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Strbac, d'après vos connaissances et d'après vos informations,

 19   comment la FORPRONU a agi dans la situation donnée ? Est-ce que la FORPRONU

 20   était censée protéger les Serbes, les habitants serbes qui habitaient dans

 21   la région ? Et qu'est-ce qu'elle a fait en réalité ?

 22   R.  Eh bien, nous, les Serbes, nous nous attendions à ce que la FORPRONU

 23   nous protège, et nous nous sommes détendus un petit peu. Toutefois, la

 24   FORPRONU ne nous a pas protégés. En fait, les représentants nous ont dit

 25   que ce n'était pas le rôle qu'il avait à jouer, que cela ne faisait pas

 26   partie de leur mandat de protéger qui que ce soit en se servant des armes.

 27   Tout ce qu'ils pouvaient faire sur le terrain - et c'est en effet ainsi

 28   qu'ils ont agi - c'était de rédiger des rapports et de les envoyer à leur


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  1   quartier général. Et ensuite, le Conseil de sécurité a adopté une série de

  2   résolutions qui, encore une fois, n'ont pas été appliquées sur le terrain.

  3   Dans ce cas de figure particulier, en ce qui concerne le plateau de

  4   Miljevacki, 43 membres de la Défense territoriale ont été tués. Certains

  5   ont été tués après avoir été pris prisonniers. Et le seul rôle assumé par

  6   la FORPRONU, c'était de nous aider à sortir les corps du trou où ils

  7   avaient été jetés deux mois auparavant. Ces corps avaient été mutilés à un

  8   tel point que 12 personnes n'ont toujours pas été identifiées.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que malheureusement, le témoin

 10   se réfère ici à la documentation qu'il a recueillie et qu'il a en sa

 11   possession. Nous n'en savons rien du tout. Par ailleurs, il semble

 12   présenter son témoignage comme s'il était un expert en histoire ou en

 13   contexte historique. Or, il nous a été présenté comme un témoin de fait.

 14   Alors, maintenant, je comprends ce que vous cherchez à démontrer - mais

 15   corrigez-moi si j'ai tort - apparemment, il s'agit de démontrer que la

 16   FORPRONU à l'époque n'intervenait pas pour protéger les Serbes. Je ne sais

 17   pas si c'est une question litigieuse. Pour commencer, ils n'intervenaient

 18   pas dans des situations de ce type. Et si cela n'est pas contesté, il faut

 19   peut-être arriver à un accord sur ce point --

 20   M. LUKIC : [interprétation] Eh bien, l'Accusation n'a qu'à s'exprimer sur

 21   ce point.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Excusez-moi ? C'est vous qui auriez dû

 23   poser la question à l'Accusation. C'est la tâche qui revient aux parties au

 24   procès de contacter l'autre partie pour voir si untel ou untel fait est

 25   contesté ou non. Je ne m'attends pas à ce que M. Zec puisse fournir une

 26   réponse comme cela, au pied levé, c'est une tâche qui aurait dû être

 27   accomplie par vous avant de faire venir le témoin.

 28   Monsieur Zec, à vous.


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  1   M. LUKIC : [interprétation] Mais on peut toujours demander à l'Accusation

  2   s'ils sont d'accord avec moi ?

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, étudiez le Règlement. Vous

  4   auriez dû le faire avant le début du procès. Les parties au procès doivent

  5   essayer d'arriver à un accord, dans la mesure du possible, pour constater

  6   ce qui est contesté et ce qui ne l'est pas. Ne me dites pas maintenant que

  7   c'est une tâche qu'on ne peut accomplir que dans la salle d'audience. Bien

  8   au contraire, en fait. Vous laissez de côté ce qui est écrit dans le

  9   Règlement et ce que nous vous avons fait savoir à plusieurs reprises.

 10   M. ZEC : [interprétation] Eh bien, tout dépend des situations concrètes. En

 11   général, parfois, nous pouvons nous mettre d'accord pour dire quelles ont

 12   été les activités de l'ONU. Il faut savoir à quel acte dans le cadre de ces

 13   opérations M. Lukic fait référence.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et s'il en avait été question avant

 15   le procès, nous aurions gagné beaucoup de temps.

 16   Maître Lukic, vous pouvez continuer pour le moment.

 17   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous avez encore un peu moins de

 19   temps --

 20   M. LUKIC : [interprétation] Eh bien, il me faudra jusqu'à 1 heures 15.

 21   L'INTERPRÈTE : L'interprète signale que les voix se chevauchent.

 22   M. LUKIC : [interprétation] Mais je finirai avant.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Veuillez continuer.

 24   M. LUKIC : [interprétation] Très bien.

 25   Q.  Et qu'en est-il de l'opération qui a été menée dans la poche de Medak,

 26   à quel moment a-t-elle eu lieu et est-ce que le rôle de la FORPRONU était

 27   censé être changé ?

 28   R.  Je n'ai pas entendu votre question.


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  1   Q.  L'opération qui concerne la poche de Medak, semblait-il que la

  2   situation allait changer en ce qui concerne la FORPRONU et de ses

  3   activités, son comportement dans le cadre du cessez-le-feu, par ailleurs ?

  4   R.  Puis-je répondre ?

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec, je vois que vous vous êtes

  6   levé, puis vous vous êtes rassis, puis vous vous êtes levé. Souhaitez-vous

  7   soulever une objection, oui ou non ?

  8   M. ZEC : [interprétation] Toujours la même objection à soulever, Messieurs

  9   les Juges. Je ne vois pas la pertinence de ces questions.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends. Pourtant, je ne vais

 11   pas interrompre Me Lukic, même si je l'ai invité à plusieurs reprises

 12   d'interroger le témoin de sorte à ce que ses réponses soient utiles aux

 13   Juges de la Chambre. Les Juges de la Chambre n'ont pas l'intention de

 14   passer 15 à 20 minutes à parler de choses qui ne sont pas pertinentes.

 15   Maître Lukic, vous pourriez penser à ce qui peut nous être utile et à ce

 16   qui ne peut pas nous être utile.

 17   Veuillez continuer.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Pouvez-vous nous dire si en 1993 vous aviez un rôle à jouer dans

 20   l'échange des prisonniers ? Parlez-nous de la période qui a suivi

 21   l'opération dans la poche de Medak.

 22   R.  Eh bien, j'ai suivi le débat. Je vous parle maintenant sur la base de

 23   ma propre expérience, puisque j'ai participé à toutes ces activités en tant

 24   que président de la commission chargée de l'échange des personnes décédées

 25   et des prisonniers dans la République de la Krajina serbe. Donc, il s'agit

 26   de mes connaissances très personnelles, et non pas seulement des

 27   connaissances que j'ai acquises en travaillant pour mon organisation,

 28   l'organisation Veritas.


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  1   Alors, l'opération dans la poche de Medak s'est produite --

  2   Q.  Veuillez nous dire l'année, s'il vous plaît.

  3   R.  Il s'agit de l'année 1993, du mois de septembre 1993. J'ai

  4   personnellement reçu en un seul jour 51 corps de personnes tuées. Il

  5   s'agissait de civils tués dans la poche de Medak. Lors de cette opération

  6   dans la poche de Medak, c'était la première fois que la FORPRONU est entrée

  7   en conflit armé avec l'une des parties belligérantes. Il s'agissait plus

  8   précisément de la partie croate. Il y a eu des victimes du côté croate

  9   aussi bien que du côté de la FORPRONU. Du côté de la FORPRONU, il

 10   s'agissait de soldats canadiens.

 11   Mis à part ces 51 corps de personnes tuées que j'ai récupérés, la FORPRONU

 12   a pour sa part retrouvé 18 corps qu'elle a fait sortir des maisons

 13   incendiées, et ces corps m'ont été remis aussi.

 14   Q.  Et pouvez-vous nous dire à quel moment l'opération Bljesak et Oluja,

 15   ces deux opérations-là ont eu lieu ? Juste les dates, s'il vous plaît.

 16   R.  L'opération Bljesak s'est produite le 1er et le 2 mai 1995. Quant à

 17   l'opération Oluja, elle s'est produite le 4 août de cette même année, 1995.

 18   Q.  Et en ce qui concerne ces opérations menées par les forces croates,

 19   qu'en a dit le général Jean Cot, le commandant de la FORPRONU qui avait son

 20   siège à Zagreb ?

 21   R.  Eh bien, il en a fourni une définition en 1992 lorsqu'il a fait une

 22   inspection des lieux dans la poche de Medak. Il a parlé d'une opération du

 23   type terre brûlée. Donc, tout était brûlé au cours de ces opérations. Il

 24   n'y avait rien qui était laissé derrière, il n'y avait plus d'animaux, il

 25   n'y avait plus d'hommes, il n'y avait plus de biens. Tout a été détruit

 26   dans la poche de Medak. C'est ainsi que cette opération a été menée, en

 27   vertu du principe de la terre brûlée.

 28   Et concrètement, en ce qui concerne la poche de Medak, après avoir


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  1   visité les lieux, après avoir fait le tour de trois villages et de

  2   plusieurs hameaux, il a dit ne pas avoir rencontré un seul être humain ou

  3   un seul animal, que la destruction avait été systématique et totale.

  4   Q.  Un autre cas de figure avant de terminer, le cas de Grubori. Quelle a

  5   été l'intervention de la FORPRONU dans ce cas de figure particulier ?

  6   R.  Eh bien, suite à l'opération Oluja, le 25 août, des membres de la

  7   FORPRONU se trouvaient toujours sur le terrain. Il y avait aussi d'autres

  8   équipes de l'ONU qui s'y trouvaient. Mais malgré leur présence, les Croates

  9   sont entrés dans le village de Grubori, non loin de Knin, et ils ont

 10   nettoyé ce village. J'insiste sur ce terme de nettoyage. Et ce que je veux

 11   dire par là, c'est qu'ils ont nettoyé le village de ses habitants. Toutes

 12   les vieilles personnes qui ont été trouvées sur place et qui étaient au

 13   nombre de six ou sept ont été tuées. La FORPRONU les a trouvés au moment où

 14   ils étaient mourants, avec le sang qui s'écoulait toujours de leurs gorges,

 15   leurs maisons étaient toujours en feu. Et les Croates ont dit à la FORPRONU

 16   que ces personnes-là avaient combattu du côté des Chetniks, alors qu'il

 17   s'agissait tout simplement de personnes âgées. Il en a été question devant

 18   ce Tribunal, ainsi que de devant d'autres tribunaux.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec, est-ce que tous ces faits

 20   sont contestés concernant le village de Grubori ?

 21   M. ZEC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, nous avons encore perdu du

 23   temps, puisqu'il ne s'agit pas du tout d'un sujet litigieux.

 24   Veuillez continuer.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Eh bien, je suis content de l'apprendre, que

 26   ces faits ne sont pas contestés…

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, vous auriez pu le savoir

 28   si vous aviez étudié ce qui était reproché à quelques autres accusés dans


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  1   les autres affaires, et vous auriez pu penser, par conséquent, que

  2   l'Accusation ne trouve pas ces sujets litigieux. Au moins ça valait la

  3   peine de l'étudier. Veuillez, s'il vous plaît, prendre mes observations au

  4   sérieux plutôt que de vous livrer à des commentaires de ce type.

  5   Vous pouvez continuez.

  6   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Alors que s'est-il passé à Grubori ? Est-ce que tout a été enregistré;

  8   et si oui, par qui ?

  9   R.  Eh bien, le personnel de la FORPRONU avait des caméras sur le terrain,

 10   le personnel a tout enregistré, et ces enregistrements ont été envoyés

 11   quelque part. J'ai eu l'occasion de les visionner. Par la suite, un certain

 12   Bozidar Knezovic qui habitait en Croatie, je ne sais pas quelle a été son

 13   appartenance ethnique. Certains disent qu'il s'agissait d'un Monténégrin --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, permettez-moi de

 15   vous interrompre. Avez-vous des connaissances personnelles, mis à part ces

 16   enregistrements vidéo, avez-vous des connaissances personnelles au sujet de

 17   ce qui s'est passé à Grubori ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai des connaissances personnelles au sujet

 19   de ce qui s'est produit plus tard au niveau des exhumations et de

 20   l'identification des cadavres recueillis à cet endroit-là. C'est de ces

 21   questions-là que je me suis occupé, j'ai parlé aux familles de victimes,

 22   j'ai eu des entretiens avec eux, je me suis occupé des autopsies, et

 23   cetera.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, donc tout simplement vous

 25   n'avez pas de connaissance directe. Personne ne vous a posé des questions

 26   au sujet des exhumations. On vous a posé des questions au sujet des

 27   événements qui se sont produits à Grubori et vous n'avez pas de

 28   connaissance directe à ce sujet.


Page 41113

  1   Donc, Maître Lukic, veuillez, s'il vous plaît, poursuivre et

  2   concentrez-vous sur les faits, et plus particulièrement sur les faits

  3   contestés. Excusez-moi d'avoir fait un lapsus tout à l'heure lorsque j'ai

  4   parlé des faits non contestés.

  5   M. LUKIC : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Strbac, merci d'avoir répondu à nos questions. La Défense n'a

  7   plus de question à vous poser en ce moment. Merci.

  8   R.  Je vous en prie.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci à vous, Maître Lukic.

 10   Vous avez respecté le temps qui vous a été alloué. Nous vous en sommes

 11   reconnaissants.

 12   Monsieur Zec, qu'est-ce que vous préférez faire ? Est-ce que vous préférez

 13   faire une pause maintenant et commencer le contre-interrogatoire après la

 14   pause, ou préférez-vous commencer maintenant et travailler pendant cinq ou

 15   six minutes ?

 16   M. ZEC : [interprétation] C'est à vous de décider, Messieurs les Juges. Je

 17   peux poser quelques questions, ou alors nous pouvons faire une pause.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, pour ne pas interrompre le

 20   cours de l'interrogatoire, il vaut mieux peut-être faire une pause dès

 21   maintenant.

 22   Monsieur le Témoin, nous vous reverrons dans 20 minutes.

 23   [Le témoin quitte la barre]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause, et nous

 25   continuons nos travaux à partir de 13 heures 25.

 26   --- L'audience est suspendue à 13 heures 04.

 27   --- L'audience est reprise à 13 heures 24.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec, j'aimerais vous donner


Page 41114

  1   quelques instructions pour ce qui est du contre-interrogatoire. Si

  2   l'Accusation considère qu'un sujet n'est pas pertinent, alors il n'est pas

  3   pertinent non plus de passer beaucoup de temps là-dessus lors du contre-

  4   interrogatoire. Bien sûr, peut-être que des questions qui ne sont pas

  5   pertinentes peuvent demander un examen pour ce qui est de la crédibilité et

  6   de la fiabilité du témoin, mais poser des questions pour ce qui est des

  7   domaines qui sont beaucoup plus larges et que vous considérez comme pas

  8   pertinents  pourraient peut-être la meilleure approche pour ce qui est de

  9   votre contre-interrogatoire.

 10   M. ZEC : [interprétation] J'ai compris cela, Monsieur le Président.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   [Le témoin vient à la barre]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Strbac, maintenant, c'est M.

 14   Zec qui va commencer son contre-interrogatoire. Il se trouve à votre

 15   droite.

 16   Et il faut que je vous dise encore une fois que vous devriez vous

 17   concentrer sur les questions qu'il va vous poser. Il ne faut pas que vous

 18   répondiez en fournissant des réponses trop larges. Si M. Zec veut savoir

 19   plus de détails concernant un sujet, il va vous poser des questions.

 20   Continuez, Monsieur Zec.

 21   M. ZEC : [interprétation] Merci. 

 22   Contre-interrogatoire par M. Zec :

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Strbac.

 24   R.  Bonjour.

 25   Q.  Vous avez déjà dit que vous travailliez en tant que juge à Benkovac, et

 26   qu'en 1990 vous êtes devenu avocat. Vers la fin de 1991, vous étiez membre

 27   de la Défense territoriale de Benkovac, n'est-ce pas ?

 28   R.  Je suis devenu membre de la Défense territoriale avant cette année-là,


Page 41115

  1   et j'étais membre de la Défense territoriale en 1991 aussi.

  2   Q.  Merci. J'ai essayé de me concentrer dans ma question sur cette période

  3   de temps, et je vous prie de vous concentrer sur la même période en

  4   répondant à ma question.

  5   M. ZEC : [interprétation] Peut-on afficher le document 65 ter 33422.

  6   Q.  Vous avez déjà vu ce document, Monsieur Strbac. C'est la liste des

  7   membres de la TO de Benkovac pour le mois de septembre 1991.

  8   Nous avons besoin du point 26, qui en anglais est à la deuxième page.

  9   Au point 26, on peut lire : "Savo Strbac, chef du renseignement."

 10   C'est vous-même, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   M. ZEC : [interprétation] Je demande le versement de ce document, Monsieur

 13   le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 33422 reçoit la cote P7637.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier.

 17   M. ZEC : [interprétation]

 18   Q.  Vous étiez membre de la commission chargée des échanges pour la SAO de

 19   Krajina, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  De 1993, vous étiez secrétaire du gouvernement de la République de

 22   Krajina serbe; est-ce vrai ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous étiez membre du gouvernement de la République de Krajina serbe

 25   lorsque le premier ministre était Milan Martic, n'est-ce pas ?

 26   R.  Il faut que je tire ce point au clair. Milan Martic était membre du

 27   gouvernement dont j'étais le secrétaire. Il était ministre de l'Intérieur,

 28   donc il n'était pas premier ministre; il n'était que l'un des ministres de


Page 41116

  1   ce gouvernement. Et fin 1993 et début 1994, il était président de la

  2   République de Krajina serbe.

  3   Q.  Merci.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La question qui vous a été posée était

  5   de savoir si vous travailliez sous son autorité ? Vous le faisiez ou pas ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est trop large comme expression, "travailler

  7   sous l'autorité de lui". Il n'était pas mon supérieur hiérarchique.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Donc, cela veut dire que vous

  9   ne travailliez pas sous son autorité. C'est la réponse à la question que M.

 10   Zec vous a posée.

 11   M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 12   Q.  Maintenant, j'aimerais parler de votre déposition concernant le rôle de

 13   la JNA en Croatie.

 14   Vous étiez au courant, n'est-ce pas, que la JNA avait le rôle de

 15   l'entité qui était dans la zone tampon entre les parties au conflit à un

 16   moment donné. Vous le savez, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et à un moment donné, la JNA a cessé de jouer ce rôle pour être dans la

 19   zone tampon entre les parties belligérantes et a soutenu ouvertement le

 20   côté serbe dans les conflits ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et c'était le moment à peu près où le général Mladic est venu en

 23   Croatie, n'est-ce pas ?

 24   R.  Il faut maintenant qu'on voit quelles étaient les dates de son arrivée

 25   et de ce qui s'était passé. Je ne connais pas la date exacte de son arrivée

 26   en Croatie, mais je sais à peu près quand la JNA s'est rangée d'un côté.

 27   Q.  Excusez-moi de vous avoir interrompu. Peut-être pourrions-nous demander

 28   l'affichage du document 65 ter 6754, puisque ce document pourrait nous


Page 41117

  1   permettre d'être plus efficace, si on l'examine maintenant. Il s'agit de

  2   l'entretien avec Milan Martic de 1994.

  3   M. ZEC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la page 10 dans les

  4   deux versions linguistiques.

  5   Q.  Milan Martic a dit ce qui suit :

  6   "Le général Mladic est arrivé en juin ou en juillet 1991, et il a

  7   réussi à faire revenir l'auto-confiance aux Serbes en disant ouvertement

  8   que les Serbes avaient raison. Jusqu'à ce moment-là, la JNA ainsi que ses

  9   officiers jouaient le rôle de zone tampon entre nous et les Croates …

 10   Mladic, qui était à l'époque toujours colonel, a dit ouvertement … que les

 11   Serbes avaient raison."

 12   Et c'est vrai, n'est-ce pas, la JNA, donc, jouait le rôle de zone tampon

 13   avant l'arrivée du général Mladic, après quoi elle s'est rangée ouvertement

 14   aux côtés des Serbes ?

 15   R.  Cela n'est pas vrai. La zone tampon fonctionnait jusqu'en septembre, et

 16   j'ai coopéré avec les gens qui, mis à part la JNA -- enfin, dans la zone

 17   tampon, il y avait les représentants des SUP, les Secrétariats aux affaires

 18   intérieures au niveau fédéral, et je coopérais avec ces gens

 19   quotidiennement en Dalmatie. C'est ce que Mladic a dit. Et moi, maintenant,

 20   je viens de vous dire ce que j'en savais.

 21   Q.  Bien. Maintenant --

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Zec, pourriez-vous nous dire

 23   à qui cette interview était accordée ?

 24   M. ZEC : [interprétation] Il s'agit de l'entretien, de l'interview que

 25   Milan Martic a fait dans le documentaire : "La Mort de la Yougoslavie".

 26   C'est à ce moment-là où ils ont interviewé Milan Martic, parmi d'autres

 27   personnes, et c'est la transcription de cette interview.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.


Page 41118

  1   M. ZEC : [interprétation] J'aimerais que ce document soit versé au dossier.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière -- toutes les dix

  3   pages ou seulement le passage que vous avez lu au témoin ?

  4   M. ZEC : [interprétation] Seulement ce passage, cet extrait.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Donc, vous devriez télécharger

  6   cet extrait.

  7   M. ZEC : [interprétation] Merci.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] L'extrait du document 65 ter numéro

  9   06754 reçoit la cote P7638.

 10   M. ZEC : [interprétation]

 11   Q.  Maintenant, j'aimerais qu'on parle --

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, cette cote est réservée à présent

 13   pour l'extrait que vous devez télécharger, et vous devez le faire dans deux

 14   jours.

 15   M. ZEC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 17   M. ZEC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Strbac, maintenant, je veux parler plus des unités qui

 19   opéraient sous le commandement du général Mladic. Saviez-vous que vers la

 20   fin de 1991, les unités placées sous le commandement du général Mladic

 21   étaient engagées aux opérations d'offensive dans la région de Krajina et en

 22   direction de la mer ?

 23   R.  Oui, il y avait des opérations, il y avait des opérations dans la

 24   direction de Sibenik. Je me souviens, par exemple, de cela. Oui.

 25   M. ZEC : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la pièce P4909.

 26   Q.  Il s'agit de l'ordre du général Mladic du 16 septembre 1991. L'ordre

 27   est intitulé comme suit : "L'ordre pour l'attaque - ordre opérationnel

 28   numéro 1."


Page 41119

  1   Au point 2, il est dit :

  2   "J'ai décidé ce qui suit : Avec toutes les forces qui sont

  3   disponibles, il faut mener l'action coordonnée sur l'axe Knin-Benkovac-

  4   Obrovac, et avec les forces de la TO, il faut lancer une attaque

  5   généralisée dans la direction de la mer…"

  6   Et nous voyons que la TO de Benkovac est mentionnée. Vous, vous étiez au

  7   courant, probablement, de ces opérations puisque votre unité, la TO de

  8   Benkovac, y a participé.

  9   R.  J'ai dit que je le savais, puisque c'était en septembre et il y avait

 10   des actions menées en septembre, et au point 1 on voit pourquoi ces actions

 11   ont été lancées et pourquoi cet ordre a été donné. C'était, en fait, pour

 12   débloquer les casernes et d'autres installations appartenant à la JNA.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question était de savoir si vous

 14   étiez au courant de cela, puisque cet ordre concernait également votre

 15   unité. C'était la question qui vous a été posée.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous répondre à la question.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, oui, c'est pour la troisième fois que je

 19   réponds à cette même question. Il y avait des opérations en septembre.

 20   Maintenant, je vois la date et --

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, la question n'était

 22   pas pour savoir s'il y avait des opérations, mais si vous étiez au courant

 23   de cette opération-là, puisque votre unité a participé à cette action.

 24   C'était la question qui vous a été posée. Si vous ne voulez pas y répondre,

 25   pas de problème, nous pouvons poursuivre.

 26   Est-ce que vous pouvez nous donner votre réponse ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je maintiens la réponse que j'ai déjà fournie.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce n'était pas une réponse à la


Page 41120

  1   question.

  2   Monsieur Zec, vous pouvez poursuivre.

  3   M. ZEC : [interprétation] Merci.

  4   Q.  Cet ordre a été mis en œuvre, les forces serbes menées par la JNA ont

  5   attaqué les régions dans la Krajina qui s'étendaient vers la mer, y compris

  6   la ville de Drnis, entre autres; est-ce vrai ?

  7   R.  Je ne peux pas répondre à cette question, puisque vous m'avez posé une

  8   question concrète concernant Drnis, et ça, je ne le sais pas. Drnis était

  9   loin de Benkovac. Je ne sais vraiment pas si cela est arrivé ou pas. Peut-

 10   être oui, peut-être que non.

 11   Q.  Mais vous avez déjà dit que vous savez qu'il y avait des opérations

 12   dans la direction de Sibenik, donc pouvez-vous confirmer que Drnis se

 13   trouve à la mi-chemin entre Knin et Sibenik, et s'il s'agissait de

 14   l'opération à laquelle vous avez fait référence ?

 15   R.  Non. Je n'ai pas fait référence à Drnis. Drnis se trouve dans

 16   l'arrière-pays, et ici, il est question des endroits qui se trouvent au

 17   bord de la mer. C'est pour cela que je vous dis que je ne suis pas certain

 18   concernant Drnis, puisque cela dépend par quelle route, quelle route vous

 19   empruntez pour aller de Knin à Sibenik. Il y a plusieurs itinéraires

 20   possibles.

 21   Q.  Vous pouvez, en revanche, nous confirmer que Drnis était une ville où

 22   la plupart des habitants étaient des Croates, à hauteur de 75 %, n'est-ce

 23   pas ?

 24   R.  Je savais que la population de Drnis était mixte. Quant au pourcentage,

 25   vous venez de me les apprendre. Peut-être que les choses en étaient ainsi

 26   et peut-être que non. Je ne sais pas.

 27   Q.  Les Juges de la Chambre se sont vu présenter les éléments de preuve

 28   montrant que les opérations militaires commandées par le général Mladic


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  1   englobaient des déplacements forcés de la population non-serbe depuis les

  2   zones où les opérations étaient menées. Cela figure dans la pièce P4166,

  3   page 42 dans le système du prétoire électronique. Et c'est bien ce qui

  4   s'est passé à Drnis, entre autres : la population croate a dû quitter la

  5   ville de Drnis suite à l'attaque, n'est-ce pas ?

  6   R.  Eh bien, je ne crois pas que toute la population croate de Drnis ait

  7   quitté la ville. Savez-vous combien de personnes ont quitté la ville ?

  8   Après toutes ces opérations, les gens sont partis dans des directions

  9   différentes. Certains se sont dirigés vers Bosnie; d'autres vers la Serbie;

 10   d'autres vers Sibenik. Je ne sais pas combien de personnes ont quitté

 11   Drnis.

 12   Q.  Mais vous savez que Drnis est devenu une partie intégrante de la SAO de

 13   la Krajina, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   M. ZEC : [interprétation] Est-il possible d'afficher la pièce P4193 [comme

 16   interprété], s'il vous plaît. Ceci est une interview accordée par le

 17   général Mladic à la fin du mois d'octobre 1991.

 18   La cote de ce document devrait se lire P4193. Nous avons le bon

 19   document pour la version anglaise, mais cela ne vaut pas pour la version en

 20   B/C/S. Ah, voilà. Passons maintenant, s'il vous plaît, à la page 2 de la

 21   version en B/C/S. Et, si possible, j'aimerais que l'on agrandisse la partie

 22   de l'article qui se trouve en bas de la page à droite, et qui porte

 23   l'intitulé suivant : "Mladic dit : Drnis s'appellera Ratkovo [comme

 24   interprété]."

 25   Voilà ce qu'on peut lire dans cet article :

 26   "Quand on lui a posé la question de savoir à quel moment la

 27   population de Drnis retournera chez elle et quelle est la situation

 28   actuelle dans la ville de Drnis occupée, Mladic a dit : 'Drnis autrefois


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  1   était une ville très sauvage. Maintenant, c'est une ville apprivoisée. Il

  2   en restera ainsi.' Lorsqu'un journaliste a avancé une observation en disant

  3   que Drnis est une ville croate Mladic a riposté que : 'C'était le cas

  4   auparavant, mais que cela ne se reproduira plus jamais et que Drnis fait

  5   partie de la SAO de Krajina.'"

  6   Q.  Donc ceci, en fait, reflète bien la réalité et les objectifs poursuivis

  7   par le général Mladic, à savoir d'intégrer la ville de Drnis à la SAO de

  8   Krajina ?

  9   R.  Mais, vraiment, je ne sais pas. Je ne sais pas comment répondre à cette

 10   question que vous me posez. C'est la première fois que je vois cette

 11   interview. Je n'ai jamais entendu parler de la ville de Drnis qui devait

 12   être rebaptisée en Ratkovo. J'imagine, d'après son nom propre à lui. Mais

 13   le fait est que Drnis fait partie de la République de la Krajina serbe.

 14   Q.  Alors que c'était une ville croate à 92 %, n'est-ce pas ?

 15   R.  C'est possible.

 16   Q.  Dix jours suite à l'ordre donné par le général Mladic, une attaque a

 17   été lancée. Il a rencontré des représentants croates de Sinj, et nous avons

 18   un enregistrement vidéo nous montrant ce qui s'est passé. Je vais vous en

 19   montrer un extrait.

 20   M. ZEC : [interprétation] Veuillez, s'il vous plaît, présenter le document

 21   33408d de la liste 65 ter. Ceci est un extrait de cet enregistrement vidéo

 22   qui date du 26 septembre 1991.

 23   Messieurs les Juges, le CLSS a bien voulu confirmer l'exactitude de la

 24   transcription pour cet enregistrement. Je signale que je vais présenter

 25   deux extraits. Le premier d'une minute et 26 secondes au début de

 26   l'enregistrement, et puis encore 22 secondes. C'est un extrait qui est

 27   présenté un peu plus tard. Les transcriptions ont été fournies aux cabines

 28   d'interprète.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Examinons un petit peu.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Zec, je pense que la

  3   sténotypiste apprécierait si vous pouviez ralentir un petit peu.

  4   M. ZEC : [interprétation] Je ferai de mon mieux, Messieurs les Juges.

  5   [Diffusion de la cassette vidéo]

  6   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]   

  7   "Cependant, tout ce qui bouge, on doit le faire sortir des maisons. Si on

  8   nous pose des problèmes, vous n'êtes pas sans savoir que nous avons déjà

  9   miné toutes nos installations dans toutes les parties qui sont menacées.

 10   Nous n'allons pas essayer de nous replier. Plutôt, nous allons ouvrir la

 11   route de force. Ce n'est pas difficile pour moi. Je n'aimerais pas le

 12   faire. Vous savez comment je m'y prends. Je dois vous dire que les

 13   destructions dont nous avons été témoin jusqu'à présent ne donnent même pas

 14   l'idée de ce qui va suivre si jamais le comportement non réfléchi ou

 15   délibéré de la part de quelqu'un va à l'encontre de ce que je viens de

 16   dire. Et je ne veux pas que vous compreniez cela comme une menace. Je suis

 17   un soldat. J'exécute les tâches qui me sont confiées. Si les gens m'avaient

 18   écouté, il n'y aurait pas eu de Kijevo. Si les gens m'avaient écouté, il

 19   n'y aurait pas eu de Vrlika. Si les gens m'avaient écouté, toutes ces

 20   choses ne se seraient pas passées. Si les gens m'avaient écouté, il n'y

 21   aurait pas eu de Sibenik."

 22   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 23   M. ZEC : [interprétation] Est-il possible de montrer maintenant les

 24   dernières 22 secondes de cet enregistrement vidéo. Sur la transcription

 25   nous avons annoté l'endroit qui doit être interprété.

 26   [Diffusion de la cassette vidéo]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a un problème technique ?

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


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  1   M. ZEC : [interprétation] Je pense que l'enregistrement sera présenté dans

  2   quelques instants.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  5   "Si tel est le cas, vous pouvez compter sur la ville de Sinj. Autrement,

  6   vous pouvez relayer le message suivant aux habitants de Sinj, et à tous

  7   ceux qui décident de leur sort.

  8   Autre homme : Non, nous n'avons pas l'intention de leur relayer ce

  9   message. Nous ferons tout et vous garderez ce message pour vous-même. Nous

 10   ferons tout qui est dans notre pouvoir.

 11   Mladic : Et à ce moment-là, ils peuvent juste attendre que j'arrive dans

 12   une ville détruite."

 13   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 14   M. ZEC : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Strbac, le général Mladic ici menace de détruire la ville de

 16   Sinj si ses demandes ne sont pas remplies, n'est-ce pas ?

 17   R.  Manifestement.

 18   Q.  C'était aussi l'approche qu'il avait adoptée vis-à-vis de Kijevo, de

 19   Vrlika, de Sibenik qui, comme il l'a dit lui-même, n'auraient pas été

 20   détruites si on avait écouté ce qu'il avait à dire, n'est-ce pas ?

 21   R.  Mais tout le monde a pu l'entendre en écoutant cet enregistrement.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On vous a posé une question. On ne

 23   vous a pas posé la question de savoir si tout le monde a pu entendre.

 24   Veuillez, s'il vous plaît, répondre à la question qui vous est posée.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, alors, il faudrait que je demande

 26   qu'on me montre de nouveau l'enregistrement vidéo. Oui, j'ai l'impression

 27   que c'est bien ce que j'ai entendu. La qualité de l'audio n'était pas des

 28   meilleures. Je n'ai pas pu distinguer chaque mot, mais si vous avez entendu


Page 41125

  1   la même chose que moi, alors oui, c'est ce que nous avons entendu.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, d'après vos souvenirs et d'après

  3   le fait que vous avez pu entendre la plupart de ce qui a été dit, vous êtes

  4   d'accord avec M. Zec pour dire que le général Mladic a menacé de détruire

  5   la ville de Sinj si ses demandes n'étaient pas remplies, et son approche

  6   était semblable en ce qui concerne les villes de Kijevo, de Vrlika, de

  7   Sibenik --

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il fallait que ses termes soient

  9   acceptés.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, si nous vous avons

 11   bien compris, vous êtes donc d'accord avec M. Zec au sujet de ce que M.

 12   Mladic a dit.

 13   Vous pouvez continuer.

 14   M. ZEC : [interprétation]

 15   Q.  Et dans ces régions, par ailleurs, on supprimait l'approvisionnement en

 16   eau, l'approvisionnement en électricité et les autres services publics,

 17   n'est-ce pas ? Ou souhaitez-vous que je vous répète ma question ?

 18   R.  Veuillez la répéter, s'il vous plaît.

 19   Q.  Le général Mladic cherchait par ailleurs à remplir ses objectifs dans

 20   ces régions-là en supprimant les services publics tels que

 21   l'approvisionnement en eau, en électricité, dans les villes, comme par

 22   exemple la ville de Sinj, n'est-ce pas ?

 23   R.  Je ne comprends toujours pas. Est-ce que vous me demandez si j'en ai

 24   entendu parler dans cet enregistrement vidéo, ou est-ce que vous me

 25   demandez si c'est quelque chose que je sais de mes connaissances

 26   personnelles ? A quoi vous référez-vous vous dans votre question ?

 27   Q.  Non, je m'adresse à vous personnellement, puisque vous avez rencontré

 28   le général Mladic et vous avez participé à des négociations menées avec


Page 41126

  1   lui. Donc, voilà quelle approche il adoptait. Il cherchait même à supprimer

  2   les services communaux dans des villes pour pouvoir réaliser ses objectifs,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  Eh bien, cela, je ne le sais pas. Je n'en ai pas entendu parler. En

  5   revanche, je sais que le contraire était vrai, que les casernes avaient

  6   leur approvisionnement en eau, leur approvisionnement en vivres, leur

  7   approvisionnement en électricité coupés pendant qu'un blocus était monté

  8   contre les casernes. Mais quant à la question que vous me posez, je ne

  9   saurais vous fournir une réponse. Je ne peux pas le confirmer.

 10   M. ZEC : [interprétation] Penchons-nous sur le document 33408a de la liste

 11   65 ter. C'est un autre extrait qui concerne les mêmes événements. Et,

 12   encore une fois, Messieurs les Juges, grâce au CLSS, nous pouvons ne passer

 13   qu'une seule fois cet enregistrement vidéo.

 14   [Diffusion de la cassette vidéo]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "Il faudrait se mettre d'accord sur ce point dès que possible parce

 17   qu'en ce qui concerne l'eau, en ce qui concerne les ponts, je ne peux rien

 18   faire jusqu'à ce que cela n'ait été fait, parce que nous procédons de même

 19   en Dalmatie. Ce n'est pas à moi d'allumer l'électricité dans votre ville."

 20   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il va falloir recommencer, puisque nous

 22   ne recevons pas d'interprétation vers l'anglais. Les transcriptions ont été

 23   fournies, et donc, nous devrions pouvoir recevoir l'interprétation.

 24   M. ZEC : [interprétation] Je répète la cote 65 ter, si cela peut être utile

 25   aux interprètes. C'est le document 33408a.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous acceptons les excuses présentées

 27   par les interprètes de la cabine anglaise. Reprenons.

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]


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  1   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  2   "Mais il va falloir s'arranger sur ce point et commencer à le faire

  3   dès que possible, parce que c'est dans l'intérêt … moi, je n'allume rien du

  4   tout. Je ne rétablis pas l'approvisionnement en eau ou rien du tout, qu'il

  5   s'agisse du pont ou autre chose, jusqu'à ce que cela n'ait été fait. Je ne

  6   veux pas rouvrir le pont. Nous procédons de même en Dalmatie, par ailleurs.

  7   Je ne vais pas rallumer votre électricité. Tout cela, tout ce que je viens

  8   de vous dire, s'applique aussi à la Dalmatie et ailleurs. Rien n'a été

  9   attaqué."

 10   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 11   M. ZEC : [interprétation]

 12   Q.  Et ceci correspond à la vérité : c'étaient là les objectifs du général

 13   Mladic de couper les services communaux, n'est-ce pas ?

 14   R.  Je ne peux pas confirmer ce que vous dites comme vous le souhaitez. Je

 15   sais que souvent nous restions sans électricité, des deux côtés, cela

 16   arrivait très souvent. Mais qui coupait l'électricité et quand et de qui

 17   cela dépendait, et les lignes d'approvisionnement en électricité par le

 18   territoire de qui elles passaient, par qui elles étaient contrôlées,

 19   vraiment, je ne le sais pas. Je ne sais pas ce qu'il veut dire ici. Je vous

 20   réponds en vertu de mes souvenirs et de mes connaissances.

 21   Q.  Mais je vous ai posé une question très concrète sur le général Mladic,

 22   puisque vous le connaissiez, et vous avez participé à des négociations avec

 23   lui. C'est de cette façon-là qu'il réalisait ses objectifs, n'est-ce pas ?

 24   Et si vous ne le savez pas, très bien.

 25   M. ZEC : [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, il faut vérifier d'abord si le

 27   témoin peut fournir une réponse à la question posée.

 28   Est-ce que vous le savez ? Est-ce que vous ne le savez pas ? Dites-


Page 41128

  1   nous.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, c'est la première fois que j'entends

  3   ce que Mladic a dit lors de cette réunion. Il serait bête de ma part de

  4   commenter une réunion à laquelle je n'ai pas assisté. Si, en revanche, vous

  5   me demandez si c'est cela que nous avons vécu en pratique, je peux vous

  6   confirmer qu'à Benkovac, à Knin et aussi à Zadar, l'électricité était

  7   souvent coupée. Alors, qui coupait l'électricité, est-ce que c'était par la

  8   suite des tirs qui ont été lancés et qui ont pu frapper un poteau,

  9   vraiment, je n'en sais rien. Je sais tout simplement que l'électricité

 10   était souvent coupée.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Apparemment, en fait, vous ne savez

 12   pas. C'est cela votre réponse.

 13   Monsieur Zec, vous avez demandé le versement au dossier de ce document, ce

 14   document en particulier.

 15   Madame la Greffière.

 16   M. ZEC : [interprétation] Et aussi du document précédent.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces documents portent des cotes 65 ter

 18   différentes. Est-ce qu'elles ont été fournies en un seul CD ou plusieurs ?

 19   Ah, deux CD qui doivent être obtenus.

 20   Madame la Greffière.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Excusez-moi si je vous interromps.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 23   M. LUKIC : [interprétation] C'est une cote 65 ter qui est très élevée. Je

 24   ne sais pas si nous avons un enregistrement complet où l'on peut voir

 25   quelles ont été ces exigences du général Mladic. Il faudrait voir

 26   l'enregistrement vidéo dans sa totalité pour pouvoir comprendre les

 27   demandes qu'il a adressées et pour quelles raisons il les a adressées, ce

 28   qui se trouvait à la source de ces demandes. Et cela n'est pas visible à en


Page 41129

  1   juger par ces petits extraits.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, pour commencer, est-ce que

  3   l'enregistrement vidéo a été communiqué à la Défense dans sa totalité ?

  4   M. ZEC : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges, et je pense que Me

  5   Lukic réfère à un extrait du premier enregistrement que j'ai montré, mais

  6   nous avons sauté une petite partie. C'est à cela qu'il fait référence, sans

  7   doute, mais pour nous, cela ne pose pas problème --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, je dois avouer que cela a aussi

  9   attiré mon attention parce que parfois, il prend plus de temps d'arrêter et

 10   de reprendre. Dans ce cas de figure, seulement 15 secondes ont été coupées.

 11   Donc, Maître Lukic, est-ce que vous souhaitez que ces 15 secondes soient

 12   comprises ou est-ce que vous souhaitez que d'autres extraits de cet

 13   enregistrement vidéo soient versés au dossier ?

 14   M. LUKIC : [interprétation] Eh bien, il va falloir que nous étudiions

 15   l'enregistrement vidéo dans sa totalité d'abord.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, je vous suggère d'admettre

 17   au dossier ce dont on vient de demander le versement au dossier et, au

 18   cours de la semaine prochaine, vous aurez l'occasion de suggérer des

 19   éventuelles additions à faire et on pourra alors adopter une décision

 20   finale sur le statut de ces extraits, est-ce que les extraits actuels

 21   seront remplacés par la suite ou non.

 22   Madame la Greffière.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 33408d recevra la cote

 24   P7639.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et le document suivant ?

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 33408a de la liste 65 ter

 27   reçoit la cote P7640.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.


Page 41130

  1   Monsieur Zec, vous allez inclure la partie que vous avez omise dans

  2   l'enregistrement que nous avons vu, et Me Lukic peut faire d'autres

  3   suggestions quant aux autres éléments à inclure pour mieux comprendre le

  4   contexte.

  5   En attendant, les deux documents sont admis au dossier, à savoir les

  6   pièces P7639 et P7614 [comme interprété].

  7   Vous pouvez continuer.

  8   M. ZEC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Strbac, les Juges de cette Chambre ont entendu des éléments de

 10   preuve indiquant que le général Mladic menaçait de se lancer dans la

 11   destruction de Zadar. Il s'agit du P19459 [sic], page 3. Et c'est

 12   précisément ce qu'il a fait. Il s'est lancé dans la destruction de Zadar,

 13   n'est-ce pas ?

 14   R.  Je ne peux pas simplement confirmer les déclarations que vous faites.

 15   Oui, il y a eu des pilonnages à Zadar. Il y a eu des victimes, tout comme

 16   il y avait des pilonnages de l'autre côté de ma ville, à Benkovac, ce qui a

 17   également donné lieu à des victimes.

 18   M. ZEC : [interprétation] Dans ce cas, regardons le numéro 65 ter 31642.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de faire cela, Monsieur Zec, le

 20   19459 reçoit une cote P, mais c'était déjà un numéro 19 000. Etait-ce un

 21   numéro 65 ter ou un numéro de pièce à conviction ?

 22   M. ZEC : [interprétation] Il y a quelques instants, vous avez parlé du

 23   P1959 --

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans ce cas, c'est la cote exacte, le

 25   P1959.

 26   M. ZEC : [interprétation] Merci.

 27   Maintenant, je demande l'affichage du numéro 65 ter 31642. Il s'agit

 28   d'un rapport de combat qui émane du général Mladic et qui est daté du 4


Page 41131

  1   octobre 1991. La page 2 dans les deux langues, s'il vous plaît.

  2   Q.  On peut lire : "…poursuivre les offensives en direction de Zadar."

  3   Au point 3, où il est précisé : "J'ai décidé de poursuivre les offensives

  4   en direction de Zadar. Frappez la ville de Zadar avec des armes

  5   d'artillerie en tir direct…"

  6   Ce qui indique que la ville a été détruite, n'est-ce pas, Monsieur

  7   Strbac ?

  8   R.  Eh bien, je dois dire que je ne suis pas un analphabète, et je lis ce

  9   document, mais tout ceci avait pour objectif d'atteindre les unités qui

 10   étaient bloquées dans la ville de Zadar. Pourquoi ne lisez-vous pas cela ?

 11   Cela se trouve dans le même document.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à M. Zec de décider quel passage

 13   il souhaite vous lire. Si vous dites que dans ce contexte, "je souhaite

 14   ajouter quelque chose" ou que Me Lukic peut vous poser des questions là-

 15   dessus, mais vous ne devez pas commenter ce que vous a lu M. Zec.

 16   Veuillez répondre à la question, s'il vous plaît.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est vrai, ce qui a été lu.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 19   M. ZEC : [interprétation] Je souhaite maintenant que nous affichons une

 20   carte de Zadar. Donc numéro 65 ter 33370, simplement pour que nous ayons

 21   une idée de différents emplacements.

 22   Q.  Monsieur Strbac, cette péninsule que nous distinguons sur la carte,

 23   cela correspond à la partie historique de la ville, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, c'est cela.

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Microphone, s'il vous plaît.

 26   M. ZEC : [interprétation] Je souhaite que nous agrandissions la péninsule,

 27   s'il vous plaît.

 28   Q.  Le musée national se trouve au nord par rapport au centre à peu près,


Page 41132

  1   au nord de la péninsule. Sur cette carte, on voit qu'il est indiqué Narodi

  2   Muzej; est-ce que vous voyez cela ?

  3   R.  Je dois dire que je ne le vois pas.

  4   Q.  Si vous regardez le centre de la carte, et au nord de ce point central,

  5   vous devriez pouvoir le lire sur la carte, "Narodi Muzej". C'est marqué sur

  6   la carte.

  7   R.  Eh bien, si je ne le vois pas, je sais où c'est, puisque j'étais à

  8   Zadar. J'y ai travaillé.

  9   Q.  Est-ce que vous voyez --

 10   R.  Non, je n'arrive pas à le situer parce que je ne vois pas suffisamment

 11   bien.

 12   Q.  "Budska Obala", par exemple, c'est au nord, "Budska Obala". Et sud,

 13   maintenant, on voit "Narodi Muzej".

 14   R.  Oui, oui.

 15   Q.  Le théâtre national se trouve environ au centre de cette péninsule,

 16   n'est-ce pas ? Cela n'est pas indiqué, mais cela, vous pouvez nous le dire,

 17   n'est-ce pas, que le théâtre national se trouve environ au centre de cette

 18   péninsule.

 19   R.  D'accord.

 20   Q.  L'église de St-Sime se trouve à droite, vers l'extrémité de la

 21   péninsule. Ceci est indiqué sur la carte, et on voit "Sveti Sime". Est-ce

 22   que vous voyez cela ? Cela est indiqué au niveau de l'extrémité de la

 23   péninsule.

 24   R.  Oui, je le vois.

 25   Q.  Le palais princier se trouve de l'autre côté par rapport à cette

 26   église.

 27   R.  Je vois St-Sime.

 28   Q.  Et le palais princier se trouve de l'autre côté par rapport à cet


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  1   endroit, l'église St-Sime. Cela n'est pas indiqué, mais vous pouvez nous le

  2   dire, n'est-ce pas, nous le confirmer ?

  3   R.  Oui.

  4   M. ZEC : [interprétation] Numéro 65 ter, est-ce que nous pouvons afficher

  5   le 33421, s'il vous plaît. Il s'agit d'une liste des dégâts provoqués dans

  6   le centre historique de Zadar. La page 2 dans les deux langues, s'il vous

  7   plaît.

  8   Q.  On peut lire : "Inventaire des dégâts, des installations endommagées et

  9   des endroits touchés lors du bombardement du centre historique de Zadar

 10   entre le 30 septembre et le 7 octobre 1991," sont énumérés 79 coups qui ont

 11   touché la vieille ville de Zadar.

 12   Par exemple, la page 4 dans les deux langues, s'il vous plaît. M. LE

 13   JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Zec, veuillez

 14   nous dire à quelle partie de l'acte d'accusation vous nous renvoyez

 15   actuellement ?

 16   M. ZEC : [interprétation] Je parle, en fait, des actes et du

 17   comportement de M. Mladic pendant le moment où il était en Croatie. C'est

 18   ce dont a parlé le témoin. Il a dit ce qu'il faisait en Croatie. Donc je

 19   souhaitais --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, il s'agissait d'élément

 21   de contexte ? D'élément de contexte, n'est-ce pas, par rapport aux

 22   accusations qui sont portées contre l'accusé.

 23   M. ZEC : [interprétation] En fait, la déposition de ce témoin, il a

 24   dit qu'il a rencontré le général Mladic au cours des négociations au sujet

 25   des échanges pour dire que le général Mladic tentait de faire quelque chose

 26   de bien en Croatie, chose que je conteste. Je conteste le fondement même de

 27   ses connaissances par rapport à ce qui s'est passé à l'époque et la réalité

 28   de la situation.


Page 41134

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'entends bien. En même temps,

  2   vous entrez dans énormément de détails que j'ai critiqués lorsque la

  3   Défense a agi de la sorte. Et donc il s'agit d'élément de contexte,

  4   j'entends bien. Mais vous vous perdez au niveau des détails. Et je crois

  5   qu'il faut essayer de trouver un équilibre entre les éléments et le détail

  6   et la personnalité de l'accusé. Je sais que vous vous concentrez là-dessus,

  7   j'entends bien. Mais je vous ai donné en fait quelques conseils au début de

  8   votre contre-interrogatoire. Vous devez éviter de faire des choses qui ont

  9   fait l'objet de critiques de la part des Juges de cette Chambre lorsque la

 10   Défense a agi de la même façon.

 11   Donc, lorsque vous donnez énormément de détails, je crois qu'il est

 12   clair aux yeux des Juges de la Chambre que la Défense souhaite insister sur

 13   ce que l'on a fait aux Serbes en 1991 aux mains des Croates et comment ils

 14   ont réagi, quelle a été l'incidence de cela, et maintenant apparemment

 15   l'Accusation fait plus ou moins l'inverse, autrement dit de dire ce qui a

 16   été fait aux Croates aux mains des Serbes, et cela comprenait des actions

 17   menées par les Serbes placées sous le commandement de l'accusé. Alors ce

 18   que nous devrions tenter de faire c'est de trouver un équilibre entre ce

 19   qui est considéré comme des éléments de contexte et des éléments de premier

 20   plan, et ne pas passer trop de temps, consacrer trop de temps à trop de

 21   détails, et je crois que nous savons ce sur quoi insistent les parties.

 22   Si vous avez encore une question soit, il nous reste deux minutes.

 23   M. ZEC : [interprétation] Si vous me le permettez je souhaite utiliser la

 24   carte pour vous permettre de comprendre là où je veux en venir.

 25   Q.  Alors, la page 4 sur cette liste, où on peut lire -- qui renvoie l'obus

 26   qui a touché l'église de St-Sime et on énumère ici les dégâts qui ont été

 27   provoqués.

 28   M. ZEC : [interprétation] La page 5 en anglais, et la page 4 en B/C/S.


Page 41135

  1   Q.  Aux points 52 et 53, deux coups qui ont touché le théâtre national. Les

  2   détails sont fournis.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez nous donner les paragraphes,

  4   s'il vous plaît. C'est beaucoup plus facile pour nous de le retrouver.

  5   M. ZEC : [interprétation]

  6   Q.  On peut lire ici, les paragraphes 21 à 26, on parle ici de six obus qui

  7   ont touché le palais princier.

  8   M. ZEC : [interprétation] A la page 8 en anglais, et la page suivante en

  9   B/C/S, s'il vous plaît.

 10   Q.  Aux points 52 et 53, paragraphes 52 et 53 --

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ça doit être la page suivante en

 12   anglais dans ce cas, et en B/C/S, nous sommes loin de cela.

 13   M. ZEC : [interprétation] Page 8 en B/C/S, et page 8 en anglais.

 14   Q.  Alors deux obus qui ont touché le théâtre national. Donc, c'était un

 15   fait de notoriété publique, Monsieur Strbac, n'est-ce pas, à savoir que les

 16   forces placées sous le commandement du général Mladic ont pilonné la ville

 17   de Zadar, et c'était un fait de notoriété publique, n'est-ce pas ?

 18   R.  Qu'est-ce que vous voulez dire, que c'était un fait de notoriété

 19   publique ? Moi, je n'étais pas à Zadar. J'étais à Benkovac, et j'ai compté

 20   les obus qui tombaient sur Benkovac. D'un autre côté, nous disposons de

 21   rapports par rapport à ce qui s'est passé à Zadar. Nous avons un rapport

 22   ici. Je peux le croire ou ne pas croire ce que dit ce rapport.

 23   Q.  Vous nous avez parlé des actes et du comportement du général Mladic

 24   lorsque vous l'avez rencontré et, en fait, voici ce qu'il faisait en

 25   Croatie, ça c'est la réalité de la situation. Il attaquait des villes, et

 26   la ville a été attaquée comme je viens de vous montrer dans ce document,

 27   n'est-ce pas ?

 28   R.  Je ne peux pas répondre de cette façon-là et confirmer vos dires, vos


Page 41136

  1   déclarations. Je me répète encore une fois.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec, il est 14 heures 15.

  3   M. ZEC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de l'ordre, de

  4   la carte, et de la liste, s'il vous plaît, Messieurs les Juges.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro 65 ter 31642 reçoit la cote

  7   P7641.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci est versé au dossier.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro 65 ter 33370 reçoit la cote

 10   P7642.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci est versé au dossier.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro 65 ter 33421 reçoit la cote

 13   P7643.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci est versé au dossier.

 15   Monsieur le Témoin, nous souhaitons vous revoir demain matin --

 16   Monsieur Tieger ?

 17   M. TIEGER : [interprétation] Le témoin peut disposer. Je souhaitais

 18   simplement faire un commentaire --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous souhaitons vous revoir demain matin

 20   à -- attendez une seconde, s'il vous plaît. Je dois encore vous donner des

 21   consignes, autrement dit, vous ne devez vous entretenir ni parler ou

 22   communiquer avec qui que ce soit au sujet de votre déposition, qu'il

 23   s'agisse de la déposition que vous avez donnée aujourd'hui et de la

 24   déposition que vous ferez demain. Nous souhaitons vous revoir à 9 heures 30

 25   dans ce prétoire.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.

 27   [Le témoin quitte la barre]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Zec, avant de poursuivre,


Page 41137

  1   j'enjoins la Défense ou je prie instamment la Défense de poser des

  2   questions factuelles au témoin parce que le témoin est tout à fait disposé

  3   à nous dire ce qui s'est passé dans des endroits dans lesquels il ne s'est

  4   jamais rendu lui-même, je suppose en se fondant sur des documents. Le

  5   témoin semble prendre cette question très au sérieux parce que toute

  6   question que vous lui posez sur ce qui s'est passé, dans sa réponse il dit

  7   qu'il y n'était pas, en tout cas, il ne peut pas vous le dire. Donc, à ce

  8   moment-là, si c'est vrai, ou s'il le dit : Bien, M. Mladic à ce moment-là",

  9   si vous dites qu'il a donné des ordres alors que vous n'avez pas pu poser

 10   le fondement de savoir s'il a été au courant ou qu'il avait connaissance

 11   des ordres, de tels ordres qui ont été donnés ou si ces ordres ont été

 12   exécutés, le témoin fait exactement ce que je lui ai conseillé de faire;

 13   autrement dit, de s'en tenir à ses connaissances factuelles. Mais en

 14   insistant avec les questions que vous posez, vous ferez peut-être la même

 15   chose que la Défense, ceci n'est peut-être pas très utile.

 16   Et tout ceci ne constitue pas l'essentiel de cette affaire, qui porte sur

 17   les événements qui se sont déroulés dans le cadre couvert par l'acte

 18   d'accusation, de la période couverte par l'acte d'accusation. Je vous dis

 19   cela parce que si les deux parties se mettent à agir de la même façon, eh

 20   bien, l'Accusation va faire l'objet de nos critiques également, et nous

 21   allons passer beaucoup de temps dans le prétoire sur des questions qui ne

 22   sont pas forcément utiles. Je ne suis pas en train de dire que l'acte et le

 23   comportement de l'accusé correspondant à une période qui précède les

 24   événements en question n'est pas pertinent, mais de demander au témoin

 25   toutes sortes de questions parce qu'à un moment donné il a rencontré M.

 26   Mladic, peut-être que cela ne nous fournit pas les réponses nécessaires et

 27   peut-être que ceci n'est pas forcément très utile pour les Juges de la

 28   Chambre.


Page 41138

  1   Monsieur Tieger.

  2   M. TIEGER : [interprétation] Je souhaite ajouter une précision, Monsieur le

  3   Président, et je ne laisse pas entendre pour autant que l'Accusation ne va

  4   pas tenir compte des commentaires des Juges de la Chambre. Mais s'agissant

  5   de la discussion brève qui vient d'avoir lieu sur des éléments qui portent

  6   sur une période qui n'est pas couverte par l'acte d'accusation, nous avons

  7   parlé d'éventuelles ou de la pertinence en terme d'éléments de contexte ou

  8   pour faire la lumière sur la personnalité de l'accusé, je dois dire que de

  9   façon plus classique, de tels éléments de preuve sont présentés pour jeter

 10   la lumière sur le mobile, l'intention, le modus operandi, mode opératoire,

 11   autrement dit, puisqu'il s'agit à ce moment-là de fondements tout à fait

 12   acceptables qui portent sur la pertinence des éléments de preuve qui ont

 13   été abordés lors du contre-interrogatoire de l'Accusation. Alors, pour

 14   jeter la lumière là-dessus je parle à la fois de sa pertinence, du fait que

 15   cela est applicable, et je parle également du fondement pour lequel ce type

 16   d'éléments sont présentés.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, moi, j'ai parlé de pertinence. Et

 18   j'ai évoqué un certain nombre d'exemples. Et j'ai insisté, comme je l'ai

 19   fait auprès de la Défense, que cela ne vous empêche pas pour autant de

 20   présenter des éléments de preuve mais qu'il faut trouver un équilibre entre

 21   les éléments de contexte, qui, évidemment, peuvent inclure des éléments que

 22   vous avez ajoutés, et que je n'ai pas exclus lorsque j'ai parlé de pertinence.

 23   Mais il est bon que les parties réfléchissent à ces questions-là, et elles

 24   ont le temps pour le faire jusqu'à 9 heures 30 demain matin, car nous

 25   allons lever l'audience jusqu'au mercredi, 11 novembre, à 9 heures 30 dans

 26   ce même prétoire numéro I.

 27   --- L'audience est levée à 14 heures 23 et reprendra le mercredi, 11

 28   novembre 2015, à 9 heures 30.