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1 Le mardi, 26 avril 2016
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 31.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le prétoire
6 et à l'extérieur.
7 Madame la Greffière, s'il vous plaît, citer le numéro de l'affaire.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
9 Monsieur le Juge. C'est l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko
10 Mladic.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.
12 Il n'y a pas de question préliminaire. Dans ce cas-là, nous allons attendre
13 que le témoin entre dans le prétoire.
14 Oui, Monsieur File.
15 M. FILE : [interprétation] Juste une petite question, Monsieur le
16 Président. Hier, la pièce D1464 a été versée au dossier, et je crois qu'il
17 faut que cela soit sous pli scellé puisqu'il y a dans ce document des
18 informations qui sont liées à l'identité de la personne qui est mentionnée.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'on peut procéder ainsi avec
20 beaucoup de précaution.
21 M. IVETIC : [interprétation] Oui.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, le document D1464 est
23 versé au dossier sous pli scellé et ce n'est pas une pièce publique.
24 [Le témoin vient à la barre]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Madame Radovanovic.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, j'aimerais vous
28 rappeler que vous êtes toujours tenue par la déclaration solennelle que
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1 vous avez prononcée au début de votre témoignage quand vous avez dit que
2 vous allez dire la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité. Me
3 Ivetic va maintenant continuer son interrogatoire principal.
4 LE TÉMOIN : SVETLANA RADOVANOVIC [Reprise]
5 [Le témoin répond par l'interprète]
6 Interrogatoire principal par M. Ivetic : [Suite]
7 Q. [interprétation] Bonjour, Madame le Professeur.
8 R. Bonjour.
9 Q. Hier nous sommes arrêtés au moment où on a examiné le document qui est
10 maintenant une pièce à conviction, D1464 versée au dossier, sous pli
11 scellé. Et je pense qu'il y a une copie papier que M. l'Huissier peut vous
12 remettre, si cela est nécessaire. Nous avons la version en anglais sur nos
13 écrans.
14 Hier, nous avons parlé de la colonne où on peut voir sous le chiffre 5
15 nouvelle nationalité ou nouvelle appartenance ethnique, et vous avez dit
16 qu'il s'agit des Musulmans de Bosnie. Quelle appartenance ethnique est
17 indiquée dans cette colonne ? Est-ce qu'il s'agit de l'appartenance
18 ethnique de la personne, de la liste du Comité international de la Croix-
19 Rouge, ou du recensement de la population; est-ce que cela est le cas ?
20 R. Puisque dans le recensement de la population on a l'indication de
21 l'appartenance ethnique et pour ce qui est des listes du Comité
22 international de la Croix-Rouge avec lesquelles ce document est comparé, il
23 n'y a pas d'indication de nationalité ou d'appartenance ethnique, alors
24 cette appartenance ethnique a été reprise dans le recensement de la
25 population. Je ne crois pas que le Dr Tabeau aurait indiqué d'autres
26 informations concernant l'appartenance ethnique et, en particulier, parce
27 qu'elle dit par rapport à sa méthodologie qu'elle s'appuyait sur les
28 indications de l'appartenance ethnique dans le recensement de la
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1 population.
2 Q. Et --
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, est-ce que je peux poser
4 une brève question.
5 Qu'est-ce qu'il y a comme des éléments nouveaux pour ce qui est de
6 l'appartenance ethnique ? Pourquoi on y voit nouvelle appartenance ethnique
7 ou nouvelle nationalité ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Le Dr Tabeau pourrait vous expliquer cela plus
9 en détail. Je peux supposer qu'elle a indiqué nouvelle appartenance
10 ethnique puisque sur la liste de la Croix-Rouge il n'y a pas d'indication
11 de l'appartenance ethnique, elle s'est appuyée également sur les
12 informations de la Croix-Rouge pour développer ces informations à elle
13 concernant l'appartenance ethnique.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.
15 M. IVETIC : [interprétation]
16 Q. Et dans la colonne où on peut voir "appariement", hier vous avez dit
17 que c'est sous le chiffre 1 que cela est indiqué. D'après vous, qu'est-ce
18 qui a été apparié ici ?
19 R. Expression "match" en anglais veut dire apparié. Et lorsque vous
20 appliquez la méthode qui s'appelle appariement ou concordance ou
21 correspondance, cela dépendra des critères que vous utilisez pour ce qui
22 est de ces appariements. Si vous voulez être certain par rapport au degré
23 de probabilité, à savoir qu'il s'agisse de la même personne, alors vous
24 choisissez plusieurs éléments sur la base desquels ces personnes sont
25 identifiées et, alors avec un degré élevé de probabilité, vous pouvez
26 affirmer que dans une source et dans les deux sources comparées, vous avez
27 pu trouver la même personne.
28 En d'autres termes, la personne qui s'occupe de ces appariements décide de
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1 la clé ou du critère à appliquer pour ces appariements, ce critère doit
2 comprendre certain nombre d'éléments. S'il y a plus d'éléments, alors le
3 degré de probabilité, il sera plus élevé pour avoir des appariements pour
4 ce qui est des sources différentes qui sont comparées, et c'est de 0 à 1,
5 on peut parler de degré de 0 à 1 pour ce qui est des degrés de probabilité.
6 Donc, si on applique plusieurs éléments de comparaison, on pourra être en
7 mesure de dire que le degré de probabilité est plus élevé pour dire qu'il
8 s'agissait de la même personne.
9 Et s'il y a moins d'éléments de comparaison, alors il faut tirer d'autres
10 conclusions selon lesquelles on peut dire, oui, il s'agit de la même
11 personne, mais on peut dire également que cela pourra être la même
12 personne, que cela n'est pas tout à fait sûr.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je poser une question
14 complémentaire.
15 D'après vous, sous le chiffre 1, on a des appariements positifs, est-ce que
16 sur la base de cela il s'agit des informations contenues dans les listes de
17 la Croix-Rouge de 2009 et du recensement de la population, ou est-ce qu'il
18 s'agit d'autres éléments que Mme Tabeau a considéré pour arriver à cette
19 conclusion pour ce qui est des appariements positifs ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce cas-là, j'ai utilisé les informations
21 indiquées par le Dr Tabeau comme "matches" ou appariements. Mais il n'y a
22 pas de note de bas de page où elle aurait dit, je me suis appuyée sur cette
23 source ou sur cette autre source. Mais dans la base de données interne, il
24 y a une colonne qui indique des combinaisons, mais sans explication ce que
25 cela veut dire, ces combinaisons. Donc le Dr Tabeau pourrait peut-être vous
26 donner plus de précisions là-dessus.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, on a parlé de cela hier. Est-ce ce
28 dont on a parlé hier souligne le fait que des gens qui ont le même nom de
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1 famille et le même prénom et le même prénom de père pourraient être des
2 personnes différentes, et c'est ce que nous voyons à ce moment, et si on a
3 la date de naissance qui est différente, dans ce cas-là, nous ne savons
4 toujours pas ce qui a poussé le Dr Tabeau à conclure qu'il y a des
5 appariements positifs dans ce tableau. Cela n'est pas indiqué.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci.
8 Vous pouvez poursuivre.
9 M. IVETIC : [interprétation]
10 Q. Hier, vous avez dit que vous n'aviez pas obtenu la liste des personnes
11 portées disparues du Comité international de la Croix-Rouge de 2005. Vous
12 avez dit que vous n'avez pas reçu cela.
13 M. IVETIC : [interprétation] Et j'aimerais maintenant qu'on affiche P7449
14 dans le prétoire électronique. C'est le rapport de Dr Tabeau portant sur
15 Tomasica. Il faut afficher la page numéro 2 dans les deux versions
16 linguistiques.
17 Q. En serbe, il s'agit de la partie qui se trouve en bas de la page et, en
18 anglais, peut-être vers les deux tiers de la page où on voit la liste des
19 sources utilisées par le Dr Tabeau pour son rapport. Et au premier point,
20 elle a indiqué le rapport du Comité international de la Croix-Rouge de
21 2009. Si le Dr Tabeau dit qu'elle avait utilisé cette liste de 2009 comme
22 étant la source des informations, pourquoi vous êtes-vous intéressée à la
23 liste de 2005 et non pas la liste de 2009 ?
24 R. C'est parce que dans le même rapport à la page suivante, elle dit
25 qu'elle s'appuyait sur la liste de 2005 pour ce qui est de son rapport.
26 Donc, elle indique ici la source de 2009 du Comité international de la
27 Croix-Rouge et, à la page suivante, elle explique qu'il ne s'agit pas de la
28 liste de 2009 mais de la liste de 2005.
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1 Q. Il faut qu'on tire un point au clair. Il s'agit peut-être d'une
2 question liée à la traduction, voire l'interprétation. Vous avez dit ici :
3 "Parce que sur les pages suivantes du même rapport, elle dit qu'elle a
4 préparé son rapport sur la base du recensement de la population de 2005."
5 Est-ce que vous avez dit cela ?
6 R. Non. Il n'existe pas de recensement de population de 2005. Il s'agit de
7 la liste du Comité international de la Croix-Rouge de 2005.
8 Q. Est-ce qu'on peut passer à la page suivante dans les deux versions
9 linguistiques du rapport du Dr Tabeau, et est-ce qu'on peut regarder le
10 deuxième paragraphe sous le titre "2.1 concernant les informations
11 relatives aux personnes portées disparues du Comité international de Croix-
12 Rouge" où le docteur Tabeau dit :
13 "La liste du Comité international de la Croix-Rouge de 2005 portant sur les
14 personnes portées disparues pour toute la Bosnie-Herzégovine utilisée pour
15 préparer ce rapport a été fournie directement du bureau du Comité
16 international de la Croix-Rouge de Genève à la date du 17 août 2005. Ces
17 informations, ces données étaient comprises dans cinq groupes, il y avait
18 22 212 entrées, dont 486 ne sont plus pertinentes."
19 Qu'est-ce que vous pourriez dire là-dessus pour ce qui est de cette
20 sélection ?
21 R. Le Dr Tabeau a dit clairement qu'il s'agit de la liste du Comité
22 international de la Croix-Rouge de 2005 qui a été utilisée pour préparer le
23 rapport sur Tomasica. Elle a dit cela clairement dans ce rapport.
24 Q. Hier et aujourd'hui, nous avons parlé un peu de la base de données
25 intégrée portant sur le taux de mortalité. J'aimerais vous poser une
26 question là-dessus. Est-ce que vous avez vu les sources identifiées dans
27 cette base de données, les sources qui sont utilisées régulièrement dans le
28 domaine de la démographie lorsqu'il s'agit des enquêtes portant sur la
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1 mortalité ?
2 R. J'ai examiné la base de données que j'avais obtenue et j'ai constaté
3 qu'il y a dix sources. Par rapport à ces dix sources et par rapport aux
4 recherches statistiques et démographiques officielles, on n'utilise qu'une
5 source, à savoir les registres d'état civil. Je répète que pour ce qui est
6 de la base de données concernant les personnes exhumées qui a plus de 10
7 000 entrées, je ne l'ai pas examinée en détail, mais je n'ai pas vue non
8 plus dans les sources que j'ai examinées aucun rapport provenant des
9 registres d'état civil.
10 Q. Quelles sont les sources qui sont utilisées régulièrement dans le
11 domaine de la démographie scientifique et au niveau académique pour ce qui
12 est des recherches concernant la mortalité ?
13 R. Les sources pour ces recherches sont les registres d'état civil. Mais
14 il faut dire que pour que quelqu'un soit enregistré dans le registre des
15 personnes décédées, il faudrait qu'on ait deux documents. Le premier
16 document s'appelle le certificat de décès signé par le médecin légiste et,
17 dans ce certificat, le médecin légiste indique la cause de décès. Et dans
18 la plupart des cas, il s'agit des cas où la mort était la mort naturelle.
19 Et également, dans les cas où la mort a été la mort violente, mais
20 lorsqu'on sait où et quand une personne est décédée.
21 Dans des situations qui sont les nôtres ou dans des situations où ces
22 informations ne sont pas connues, c'est le tribunal qui rend une décision
23 pour déclarer une personne comme étant une personne décédée. L'officier
24 d'état civil peut, dans le registre d'état civil -- ou plutôt, de personnes
25 décédées, enregistrer seulement les informations concernant une personne
26 par rapport à laquelle il y avait une décision du tribunal pour déclarer
27 cette personne, la personne décédée ou le certificat qui confirme la cause
28 du décès. Dans ce cas-là, on peut avoir des extraits du registre de décès.
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1 Et il s'agit des documents officiels et des sources officielles des
2 informations utilisées dans le domaine de la statistique portant sur la
3 mortalité et le taux de mortalité.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que je pourrais poser une
5 question aux fins de clarifications, Madame Radovanovic.
6 Dans votre réponse précédente, vous avez fait référence à une autre base de
7 données qui avait 10 000 entrées que vous n'avez pas examinées en détail.
8 Pouvez-vous nous fournir plus d'informations concernant cette base de
9 données ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de la base de données concernant les
11 personnes exhumées. Et, dans cette base de données, on peut trouver
12 exactement le nombre de personnes exhumées, indications des sites où se
13 trouvaient des fosses communes où ces personnes étaient exhumées, et
14 cetera.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et qui a compilé cette base de
16 données ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas reçu l'interprétation.
18 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vais répéter ma question, alors.
19 Qui a compilé cette base de données qui contient 10 000 entrées ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose que c'est le Dr Tabeau qui a
21 compilé cette base de données sur la base de certaines informations qu'elle
22 avait obtenues des institutions qui étaient en charge des exhumations. Je
23 suppose également qu'il s'agit des informations provenant de la Commission
24 internationale pour les personnes portées disparues.
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Cela veut dire que vous ne savez en
26 fait pas ce que vous n'avez pas examiné.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je sais exactement pourquoi je ne l'ai pas
28 examiné, mais là, on peut lire uniquement "base de données des personnes
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1 exhumées fournie par la Commission internationale pour les personnes
2 portées disparues". Dans aucune des bases de données, il n'y a pas de notes
3 de bas de page où il aurait été indiqué les sources de ces informations.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Moi aussi, j'ai une question à vous
6 poser.
7 Madame le Témoin, lorsque vous avez répondu à la question portant sur les
8 recherches concernant la mortalité, à la page 7, ligne 3, du compte rendu,
9 vous avez dit :
10 "Pour que quelqu'un soit enregistré dans le registre de décès, il faut
11 qu'il existe deux documents. Le premier s'appelle le certificat de décès…"
12 Et l'autre ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être l'interprétation n'a pas été bonne.
14 Personne ne peut entrer dans le registre de décès. Selon la législation en
15 vigueur, il faut qu'il existe un registre de décès, qui est un registre
16 d'Etat et qui est un registre où on peut entrer les informations concernant
17 toute personne qui est décédée.
18 Et ce registre de décès existe pour toutes les années, de façon
19 séparée, du 1er janvier au 31 décembre.
20 Dans ce registre, l'officier d'état civil peut entrer uniquement les
21 informations concernant les personnes pour lesquelles il y a le document
22 qui s'appelle le certificat de décès signé par le médecin légiste, ou la
23 décision du tribunal disant que le tribunal a déclaré une personne comme
24 étant une personne décédée ou morte.
25 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc, il ne faut pas qu'il existe deux
26 documents, seulement l'un des deux. Merci.
27 M. IVETIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut revenir à la page 2 dans le
28 rapport du Dr Tabeau.
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1 Q. Et j'aimerais regarder ce que le Dr Tabeau a écrit vers le milieu du
2 troisième paragraphe en partant du milieu de la page. Je cite :
3 "Le destin des victimes peut être suivi en appliquant les règles de la
4 logique et en appliquant la chronologie des événements : d'abord, on
5 regarde les informations concernant la disparition des victimes, on les
6 étudie, et ensuite on étudie les informations concernant leur mort.
7 Malheureusement, parmi les cas où les personnes décédées étaient connues,
8 les victimes de Tomasica ne sont pas énumérées. Par conséquent, il fallait
9 étudier les informations concernant les exhumations, y compris les rapports
10 d'autopsie des victimes et d'autres informations concernant l'examen post-
11 mortem des restes humains ainsi que de l'identification des personnes
12 décédées par l'analyse d'ADN. Les sources, pour ce qui est des personnes
13 portées disparues et pour ce qui est des exhumations, étaient comparées et
14 analysées pour essayer d'obtenir la preuve fiable concernant la mort des
15 victimes de Tomasica. Une telle liste des victimes de Tomasica, qui
16 comprend les informations personnelles des victimes, les informations
17 portant sur la disparition, exhumation et identification de ces victimes,
18 sont fournies dans l'annexe 1 jointe à ce rapport. La liste comprenant les
19 causes de décès constitue la partie centrale du rapport, ainsi que la
20 référence pour ce qui est des conclusions concernant le nombre de victimes,
21 la cause du décès de ces victimes, les caractéristiques démographiques de
22 base, le temps et l'endroit de leur disparition."
23 Madame le Professeur, quelle est la valeur des résultats de ces
24 comparaisons pour ce qui est des recherches portant sur la mortalité dans
25 le cadre d'un travail dans le domaine de la démographie scientifique ?
26 Quelles sont les sources utilisées ?
27 R. Non. J'ai déjà dit que la seule source est le registre de décès et de
28 naissances, qui sont les registres officiels, à savoir le certificat de
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1 décès ou la décision du tribunal déclarant une personne comme étant une
2 personne morte.
3 Q. Peut-on maintenant passer à la page 7 en anglais dans le même rapport,
4 et à la page 9 en serbe. En bas de la page en anglais, et c'est en haut de
5 la page en serbe, le Dr Tabeau énumère des documents concernant
6 l'identification ou les autopsies pour ce qui est du bureau du procureur de
7 la Bosnie-Herzégovine.
8 Et les entrées qui figurent ici, ainsi qu'à la page suivante en anglais et
9 à la même page en serbe, sont les entrées provenant des sources compatibles
10 avec les sources qui auraient pu être utilisées dans une recherche
11 scientifique de la mortalité dans le domaine de la démographie ?
12 R. Non, aucune de ces sources n'est utilisée dans la recherche
13 scientifique puisqu'il ne s'agit pas de sources officielles.
14 Q. Est-ce que le Dr Tabeau, en tant qu'experte en démographie, est
15 compétente pour analyser des preuves et des causes de décès en conformité
16 avec des principes généralement acceptés dans le domaine de la démographie
17 ?
18 R. Pour ce qui est de la démographie, on sait quelle est la source
19 concernant la mortalité, et le spécialiste en démographie ne s'occupe pas
20 de prouver la mort ou le décès d'une personne. Le spécialiste en
21 démographie se penche sur les documents qui fournissent les preuves de
22 décès de personnes. Pour ce qui est des études scientifiques officielles,
23 jusqu'ici je n'ai pas vu cela. Je ne dis pas que cela n'existe pas peut-
24 être ailleurs, mais le fait est que le spécialiste en démographie ne
25 s'occupe pas du fait de prouver le décès d'une personne, même s'il y a des
26 documents qui sont disponibles par rapport à cela, il ne s'occupe pas de
27 prouver la mort de quelqu'un, puisque la mort est prouvée à partir du
28 moment où le décès a été enregistré dans le registre de décès.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous poser une question de
2 suivi. Est-ce que les registres de décès étaient mis à jour ? En d'autres
3 termes, est-ce que dans ces registres de décès, il y avait les informations
4 concernant toutes les personnes ou la plupart des personnes qui avaient
5 disparu à l'époque ? A savoir, est-ce qu'il était possible de travailler en
6 s'appuyant sur les sources que vous avez appelées comme étant des sources
7 officielles pour ce qui est de la démographie ?
8 M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, c'était faisable, mais le Dr Tabeau a
9 déjà utilisé le livre des morts de Mostar, à savoir le registre de décès de
10 Mostar. Pour savoir s'il s'agit des informations concernant le décès des
11 personnes pour lesquelles on peut supposer qu'elles sont décédées, mais le
12 fait est qu'il s'agit de personnes par rapport auxquelles vous pouvez
13 affirmer à 100 % qu'elles sont décédées et qu'elles ont été identifiées,
14 puisque vous connaissez exactement leur date de naissance, et cetera, leur
15 lieux de naissance, et cetera.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Essayons d'être un peu plus pratique.
17 Pour ce qui est des personnes portées disparues dans la région de Prijedor,
18 pouvez-vous nous dire quel est le nombre de ces personnes qui ont été de
19 façon officielle décédées et dont le décès a été enregistré dans le
20 registre de décès après la guerre, disons en 2010.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Si toutes les personnes décédées en 2010 sont
22 enregistrées dans les registres de décès, il n'est pas possible de ne pas
23 déclarer une personne qui était décédée, à moins que quelqu'un n'ait pas
24 été tué et enterré quelque part. Donc, pour toutes les personnes décédées,
25 il n'y a pas de raison pour qu'elles ne soient pas enregistrées dans ces
26 registres de décès en 2010.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez peut-être pas bien compris
28 ma question. J'ai parlé des personnes portées disparues. Je suppose qu'en
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1 2010 il n'y avait pas beaucoup de personnes portées disparues. Je parle de
2 personnes qui ont été portées disparues pendant les années de la guerre. Et
3 quel est le nombre de ces personnes, le pourcentage de ces personnes
4 portées disparues qui ont été enregistrées de façon officielle plus tard
5 dans les registres de décès ? Quel est le pourcentage de ces personnes ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, je ne peux pas vous donner ce
7 pourcentage. Mais chaque personne identifiée au moment où l'individu était
8 identifié, pour chaque personne de ce type, on fournissait un acte de décès
9 ou le tribunal déclarait que la personne était décédée. La personne serait
10 automatiquement enregistrée dans le registre des décès. Si quelqu'un était
11 porté disparu en 1992 et était identifié en 2010, et si la procédure
12 d'identification est terminée, la personne portée disparue serait
13 enregistrée dans le registre des décès pour l'année 2010. Et ce serait
14 clairement indiqué sur le document. Autrement dit, comment cet individu
15 avait été enregistré, soit qu'un acte de décès avait été fourni, soit une
16 déclaration avait été fournie par le tribunal.
17 Et ensuite, vous aviez l'heure du décès qui était enregistrée, et il
18 y avait différentes options également. La date du décès en 1992, si vous
19 aviez disposé de la date exacte du jour, du mois, de l'année du décès, en
20 se fondant sur des déclarations fournies par d'autres personnes lors de
21 l'identification. Ça, également, c'est un cas différent. Un tribunal
22 pouvait déclarer une personne décédée en se fondant sur les dires des
23 témoins ou d'autres documents et, encore, être enregistré le jour du décès.
24 Si quelqu'un décédait en 1999 -- pardonnez-moi, en 1992 et qu'un document
25 existait à ce sujet, il serait enregistré en 2010. Mais la date du décès
26 serait donnée telle qu'elle correspondait à la date effective.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, ceux qui n'avaient pas encore été
28 identifiés, les cadavres qui n'étaient pas identifiés, par exemple ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, ces cas-là ne peuvent pas être
2 enregistrés dans le registre des décès, et ce n'est qu'au moment où on
3 reçoit un acte de décès d'un représentant officiel précisant que la
4 personne est décédée, et ce, en vertu des lois et règlements qui
5 s'appliquent à l'identification.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que si vous êtes
7 officiellement enregistré comme étant décédé, c'est ce que l'on peut
8 considérer -- bon, si cela n'est pas le cas, si l'Etat ne vous a pas
9 déclaré mort, dans ce cas, cela est simplement ignoré ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Juge Orie, moi, je
11 parle de la procédure légale, qu'est-ce que l'on fait en terme de
12 recherches scientifiques. Alors, quant à la question de savoir si un
13 démographe --
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je vais vous interrompre
15 maintenant. J'ai parfaitement compris ce que vous avez dit. La réalité va
16 parfois au-delà d'une procédure légale.
17 Poursuivons. Je crois que j'ai compris votre explication.
18 Veuillez poursuivre.
19 M. IVETIC : [interprétation] Je souhaite que nous regardions la page 7 à
20 nouveau du Pr Tabeau en anglais, s'il vous plaît, et la page 8 en serbe.
21 Q. Et à cet endroit, le Pr Tabeau parle du Pr Clark. Et dans le deuxième
22 paragraphe à partir du haut, elle parle des listes contenant les
23 conclusions post-mortem du Pr Clark et déclare que cette liste est utile.
24 Et un peu plus loin, trois paragraphes plus loin, elle dit que :
25 "…les informations fournies sur les causes du décès par le Pr Clark étaient
26 très précieuses et permettaient de fournir les preuves du décès pour les
27 victimes de Tomasica."
28 Avez-vous un commentaire à faire en votre qualité de démographe ?
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1 R. D'après ce que j'ai lu dans le rapport du Pr Clark, il déclare que la
2 cause du décès la plus fréquente est celle indiquée par ses collègues, le
3 Pr Durmisevic et Sarajlic, je crois. Il ne parle pas des cas qui ne
4 correspondent pas, car la plupart du temps, ces cas correspondent.
5 Le Pr Clark avait sa propre définition de la cause de décès sans pour
6 autant fournir une explication. Alors que le Pr Tabeau, lorsqu'elle a
7 comparé différents résultats ou conclusions, elle a apporté quelques
8 corrections au niveau de ces décès.
9 Q. Dans ce procès, le Pr Tabeau a témoigné en qualité de témoin à charge
10 et a dit ce qui suit, je souhaite vous lire un extrait de sa déposition, et
11 ensuite j'aurai des questions à vous poser. Page du compte rendu d'audience
12 36 798, ligne 16, à 36 799, ligne 7. Alors, je cite :
13 "Question : Bien. Si nous pouvons poursuivre et regarder à la page 7 de
14 l'anglais et la page 8 en B/C/S. En B/C/S, il s'agit du deuxième paragraphe
15 à partir du bas, et dans la version anglaise, il s'agit du deuxième
16 paragraphe au-dessus du point 2.6. Et vous dites ici, Madame le Professeur
17 :
18 "'Information sur les causes du décès, ce sont les informations fournies
19 par le Pr Clark, ont été très précieuses et ont permis de fournir les
20 preuves du décès concernant les victimes de Tomasica.'
21 "Madame le Professeur, faut-il vous référer au Pr Clark pour expliquer les
22 causes du décès ou estimez-vous qu'il y a une autre source davantage fiable
23 que le Pr Clark pour expliquer les causes du décès de ces victimes trouvées
24 à Tomasica ?"
25 Voici la réponse du Pr Tabeau :
26 "Je crois que ce que j'ai dit dans le rapport, à savoir que les
27 informations fournies par le Pr Clark sur les causes du décès sont fort
28 précieuses. Je maintiens toujours cela. J'ai également utilisé d'autres
Page 43670
1 sources pour expliquer les causes du décès, comme vous le savez, parce que
2 c'est quelque chose dont j'ai parlé aujourd'hui. Les autopsies de Jakarina
3 Kosa. J'ai également utilisé des autopsies effectuées en 2004 et 2006 lors
4 des fouilles d'excavation à Tomasica. Mais en tant que démographe et
5 statisticienne, personnellement je ne suis pas la personne qui est à même
6 de déterminer la cause du décès, donc il faut s'en remettre à d'autres
7 spécialistes dans ce cas, des pathologistes en l'espèce, dans le cas qui
8 nous intéresse, le Pr Clark lui-même."
9 Voici la question que j'ai à vous poser : êtes-vous d'accord avec ce qu'a
10 dit le Pr Tabeau, autrement dit, en tant que démographe et statisticienne,
11 ce n'est pas elle qui est capable de déterminer la cause du décès.
12 R. Oui, tout à fait. Je suis entièrement d'accord.
13 Q. Lorsque vous avez examiné les travaux du Pr Tabeau concernant les
14 preuves à Tomasica, le Pr Tabeau a-t-elle adhéré à cette règle avec
15 laquelle vous êtes d'accord ?
16 R. Non. Dans une partie de son rapport, elle précise qu'elle a modifié
17 certaines causes de décès lorsqu'elle a comparé ces éléments sur son
18 ordinateur. Si elle était en présence de deux résultats, ou que les
19 résultats ne correspondaient pas quelquefois, et cela a été établi. Je
20 pense qu'elle a duré comparer avec le Pr Clark ou avec d'autres éléments,
21 et à ce moment-là elle a corrigé ces éléments.
22 Q. Alors page 24 du rapport du Pr Tabeau, que nous avons sous les yeux, et
23 je crois que c'est à la page 29 en serbe. Le deuxième paragraphe à partir
24 du bas en serbe, et le premier paragraphe en haut de la page de la version
25 anglaise :
26 "Le dernier mais non des moindres points, je dois expliquer comment j'ai
27 traité les multiples causes du décès disponibles pour les victimes de
28 Jakarina Kosa et les rapports ADN associés à ceci. Pour les besoins de ma
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1 présentation sommaire sur les causes du décès des victimes de Tomasica,
2 notamment ceux qui ont été exhumés à Jakarina Kosa (confer paragraphe 3.6,
3 causes du décès d'après toutes les sources conjointes), j'ai sélectionné
4 une condition de chaque jeu de causes associées. A l'origine, j'ai laissé
5 l'ordinateur choisir une condition de façon aléatoire. Ensuite, j'ai
6 examiné ces choix et j'ai procédé à la sélection définitive.
7 "J'ai constaté au cours de l'examen que j'ai effectué que dans certains
8 cas, la plupart des causes associées demeuraient indéterminées et il n'y a
9 eu qu'une seule cause associée qui était bien définie. Par 'bien définie',
10 j'entends que dans le rapport on avait cité 'blessures par balle sur une
11 partie de corps'. Dans de tels cas, j'ai corrigé le choix effectué par
12 l'ordinateur concernant les causes du décès 'indéterminées' et je les ai
13 remplacées par une cause bien définie. Dans certains cas seulement, j'ai dû
14 effectuer un choix entre des blessures infligées à deux parties différentes
15 du corps.
16 "La logique de cette approche était fondée dans cette analyse. Et ma tâche
17 consistait à fournir des éléments permettant d'expliquer les facteurs
18 externes qui ont conduit à ces décès ou blessures au niveau des victimes de
19 Tomasica. Donc, toutes les fois que ce type de preuve est parvenu à mon
20 attention, je l'ai inclus comme étant un de ces facteurs représentatifs
21 plutôt que de laisser la réponse en blanc ('indéterminée')."
22 Madame le Professeur, ce que le Pr Tabeau décrit ici, est-ce quelque chose
23 qui coïncide avec la pratique communément adoptée par les démographes dans
24 l'univers scientifique ou par les statisticiens, d'après vous ?
25 R. Tout d'abord, un démographe n'évoque pas ou n'est pas compétent pour
26 établir la cause du décès indépendamment du nombre de rapports d'autopsie
27 qu'on leur soumet. Si deux experts médico-légaux ne sont pas d'accord, soit
28 ils se mettent d'accord ou non, et s'ils ne se mettent pas d'accord, ils
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1 appellent un troisième collègue. Donc, un démographe ne traite pas de la
2 cause de décès. S'il y a plusieurs rapports qui précisent que la cause est
3 indéterminée et que quelqu'un d'autre parle des blessures, il serait
4 absurde de ce comporter de la sorte.
5 Quel est le but de l'analyse du Pr Tabeau ? Si j'ai bien compris, il
6 s'agissait de prouver quels étaient les facteurs externes liés au décès.
7 Les démographes peuvent traiter ce genre de chose, mais dans ce cas il faut
8 connaître les circonstances dans lesquelles quelque chose est arrivé. Et
9 pour ce qui est du médecin, si on parle de blessure au niveau de la tête,
10 il s'agit de savoir si cela a été provoqué par la guerre, s'il s'agit de
11 circonstances externes ou non qui pourraient avoir une incidence sur
12 l'issue.
13 Donc, il faut connaître l'objectif de l'analyse et le type de logique que
14 l'on applique, en ce qui me concerne il s'agit d'une analyse partielle. Et
15 sans aborder ceci de façon trop détaillée, j'estime que c'est absurde.
16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai une question, s'il vous plaît, à
17 vous poser.
18 A la page 15, ligne 14, Me Ivetic vous a posé une question, et voici la
19 question qui vous a posé : "Etes-vous d'accord avec ce qu'a dit le Pr
20 Tabeau, autrement dit, qu'en sa qualité de démographe et de statisticienne,
21 elle n'est pas en mesure de déterminer la cause du décès ?"
22 Est-ce que vous êtes d'accord. Bon, vous avez dit que vous étiez d'accord
23 avec cela.
24 Ensuite, de savoir si le Pr Tabeau a adhéré à ce principe, et ensuite
25 l'intégralité de ce paragraphe vous a été lue.
26 Donc, la question que j'ai à vous poser, est-ce que vous comprenez ce
27 paragraphe de la façon suivante : autrement dit, que le Pr Tabeau a
28 déterminé la cause du décès, ou que le Pr Tabeau a été confrontée à
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1 différentes causes du décès et a demandé à l'ordinateur de sélectionner la
2 cause du décès qu'elle jugeait certaine sans qu'elle ne soit impliquée dans
3 la détermination de la cause du décès ?
4 Qu'en pensez-vous ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] A mon sens, le Pr Tabeau établit la cause du
6 décès dans ce cas. S'il y avait différentes causes du décès et à partir du
7 moment où elle a modifié le document, elle a établi la cause du décès.
8 Donc, elle a établi que la cause du décès n'était plus indéterminée mais
9 que le décès avait été provoqué par une blessure par balle à la tête, donc
10 c'est elle qui a établi cela. Et lorsqu'elle a présenté cela dans ses
11 tableaux, elle a estimé que telle était la cause du décès, qui était dans
12 ce cas bien définie ou déterminée.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors, lorsqu'elle reprend une cause
14 du décès déjà déterminée par quelqu'un d'autre, elle détermine ce cas elle-
15 même. Autrement dit, elle n'établit aucun diagnostic. Elle choisit
16 différents diagnostics. Quelqu'un a dit "indéterminé", quelqu'un a dit "mal
17 défini" ou "non déterminé", donc est-ce que c'est elle qui établit la cause
18 du décès ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle vous présente à vous, les Juges de la
20 Chambre, ce qu'elle a sélectionné, et non pas ce qui existe. Moi, je
21 n'affirme pas qu'elle a modifié le document, mais elle présente aux Juges
22 ce qu'elle a modifié et ce qu'elle a pu établir. Elle dit, par exemple, que
23 ce qui était indéterminé est maintenant déterminé. Elle ne présente pas un
24 nouveau document, mais elle modifie dans les tableaux ce qui n'existait pas
25 dans le document d'origine.
26 Si le Pr Tabeau a travaillé de façon professionnelle, elle peut l'exclure,
27 elle peut noter quelque chose, elle peut dire, par exemple : Si j'ai deux
28 options, si nous parlons du même individu, par exemple, ou du même cas,
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1 dans combien de cas a-t-on retrouvé cette situation. Elle ne devrait pas
2 dire que la logique sous-tendait l'analyse. L'analyse doit vous être
3 présentée avec le plus grand nombre de décès déterminés. Je ne sais pas.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Après cette explication, je suppose
5 que vous n'affirmez plus qu'elle a fourni ses conclusions concernant les
6 causes du décès. Elle a simplement fourni un document qui portait sur
7 l'enquête menée sur un certain nombre de victimes, où il s'agissait
8 d'établir la cause du décès; c'est exact ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] A aucun moment n'ai-je dit qu'elle a fourni de
10 nouvelles conclusions. Elle a déjà ces conclusions : il y a une conclusion
11 qui précise que c'est bien défini, et l'autre conclusion précise que c'est
12 indéterminé. Elle a modifié cela. En présentant ses résultats, plutôt que
13 de dire que les conclusions consistaient à dire que c'était indéterminé et
14 plutôt que de calculer cela, elle le modifie et elle décide de présenter
15 aux Juges de la Chambre ce qui a été modifié.
16 Je ne peux pas imaginer qu'elle ait modifié les conclusions qui se
17 trouvaient dans le document d'origine, mais elle modifie les éléments au
18 niveau du tableau qu'elle vous présente en disant que les causes du décès
19 étaient indéterminées alors que cela n'était pas le cas; dans des cas, par
20 exemple, où il fallait répondre par oui ou par non, elle répondait par
21 "oui". Je n'ai pas eu suffisamment de temps pour analyser tous les
22 documents, pour rechercher tous les éléments : telle et telle personne, tel
23 et tel pathologiste dit telle et telle chose, et l'autre pathologiste dit
24 autre chose.
25 Je ne pense pas que le Pr Tabeau ait modifié les documents rédigés par un
26 pathologiste, mais elle a conclu qu'elle était en présence de deux
27 conclusions. Dans un cas, indéterminé, et cet élément d'information est
28 parvenu plus tard comme étant bien défini, donc dans le tableau, je vais
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1 présenter cela comme étant une cause de décès indéterminée.
2 A mon sens, ceci n'est pas une façon professionnelle de travailler.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci de votre longue explication,
4 encore une fois. Vous avez été tout à fait claire, maintenant, et nous
5 savons ce que vous souhaitez présenter aux Juges de la Chambre. Au début,
6 vous avez dit que le Pr Tabeau a dit que lorsqu'elle a comparé différents
7 résultats, elle a apporté des corrections. Certaines corrections
8 concernaient les décès.
9 Mais ce que vous nous avez dit maintenant, il ne s'agit pas de corriger les
10 décès, mais elle a choisi un document qu'elle juge plus fiable et qui
11 comporte davantage de détails. C'est ce que je comprends maintenant,
12 d'après votre déposition; c'est exact ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Le Pr Tabeau n'a pas dit cela. Elle a dit
14 qu'elle a modifié la cause du décès. Je suppose simplement -- bon, vous
15 pouvez lire.
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je dois vous interrompre. Vous avez
17 dit qu'elle a modifié les causes du décès.
18 Mais nous allons poursuivre.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une autre question à poser.
20 Le Pr Tabeau parle de situations dans lesquelles les causes du décès ne
21 concordent pas. Elle demande à l'ordinateur de procéder à un choix
22 aléatoire et, dans certains cas, elle a corrigé ce choix aléatoire de
23 l'ordinateur, car elle a estimé avoir de bonnes raisons pour pencher dans
24 un sens ou dans un autre.
25 Veuillez nous dire, s'il vous plaît, ceci : dans combien de cas avez-vous
26 vérifié, parce qu'elle juge que c'est une situation assez rare que celle-
27 ci, lorsqu'elle a apporté des corrections. Avez-vous une idée du nombre de
28 cas en question, et comment ceci a une incidence sur les statistiques, et
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1 comment cela peut effectivement modifier l'analyse statistique dans ce cas
2 ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai une idée, mais le Pr Tabeau aurait dû
4 déclarer cela. C'eut été professionnel de sa part. Elle a modifié cela en
5 utilisant l'ordinateur. Elle a parlé de 10, 15, 20.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ma question ne portait pas sur le fait
7 de savoir si elle aurait dû procéder différemment. Vous dites que vous avez
8 une idée sur la question.
9 Veuillez nous dire quelle est cette idée, alors, pour ce qui est des
10 quantités.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, voici mon idée. Si vous dissimulez une
12 donnée comme cela, cela n'est sans doute pas quelque chose de peu
13 important. Je ne dis pas que j'ai raison, mais à savoir si c'était minime
14 ou pas, qu'est-ce que cela veut dire, dans un certain nombre de cas ? Elle
15 aurait pu dire dans 0,2 ou 0,3 % des cas. Moi, je n'ai pas eu suffisamment
16 de temps pour analyser cela. Mais l'idée que j'ai, moi, c'est que si le
17 démographe ou la statisticienne, dans ce cas, ne présente pas cet élément,
18 et lorsqu'on est démographe, on a une raison d'omettre ce type de données.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, si vous souhaitez dissimuler
20 quelque chose, est-ce que vous auriez expliqué ouvertement ce que vous avez
21 fait ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai fait cela dans un certain nombre de
23 cas. Mais si c'est un certain nombre de cas, à ce moment-là, veuillez
24 l'exprimer à la manière d'un professionnel.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, ma question portait sur l'élément
26 suivant : si vous souhaiter dissimuler quelque chose, est-ce que vous allez
27 expliquer ouvertement ce que vous avez fait ou comment vous avez procédé ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous ne sommes pas d'accord, vous et moi. Il
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1 s'agit d'une explication ouverte.
2 Je pense qu'il ne s'agit pas d'une explication ouverte. Nous sommes en
3 présence d'un expert qui ne peut pas nous citer le nombre de cas. Pourquoi
4 n'a-t-elle pas dit qu'il s'agissait du chiffre trois ou autre chose ? Nous
5 devons présenter les éléments de façon très précise, avec des chiffres.
6 C'est ce qu'exige notre profession. Donc, que ce soit plusieurs ou peu, eh
7 bien, cela m'incite à mettre en doute ce qu'elle dit. Je ne sais pas s'il
8 s'agit d'un nombre important ou pas, mais je pars du principe que si vous
9 êtes expert et que vous avancez un chiffre, vous ouvrez la parenthèse et
10 vous dites trois, sept cas, fermer la parenthèse, ou un cas, et c'est ce
11 qui m'incite à mettre en doute ce qu'elle dit. Parce que si vous êtes
12 professionnel, vous savez comment travaille un démographe ou un
13 statisticien et comment ces personnes s'expriment avec des chiffres.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous remettez en cause son intégrité.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que sur un plan professionnel, elle
16 n'est pas correcte.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, ma question n'a pas porté là-
18 dessus. La question que je vous ai posée, c'est est-ce que vous remettez en
19 cause son intégrité. Quand on dit cela, c'est autre chose que de dire
20 qu'elle n'agit pas en tant que professionnel, mais qu'elle dissimule
21 quelque chose intentionnellement. Et, d'après vous, c'est ce qu'a fait le
22 Pr Tabeau.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Si c'est comme cela que vous définissez
24 l'intégrité, dans ce cas-là, oui.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie -- je regarde l'heure.
26 Je crois que je vais vous conseiller de ne pas poursuivre, Maître Ivetic.
27 Madame le Professeur, nous allons avoir une pause. Nous souhaitons vous
28 revoir dans 20 minutes. Vous pouvez suivre l'huissier.
Page 43678
1 [Le témoin quitte la barre]
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons à 11 heures moins 5.
3 --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.
4 --- L'audience est reprise à 10 heures 59.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous attendons que le témoin soit
6 escorté dans le prétoire.
7 [Le témoin vient à la barre]
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous pouvez procéder.
9 M. IVETIC : [interprétation]
10 Q. Professeur, pouvez-vous nous dire, en vous appuyant sur la pratique
11 généralement admise de la démographie scientifique, dans quelle catégorie
12 sont placés les décès violents ?
13 R. Les décès violents dus aux meurtres, aux accidents ou aux suicides sont
14 placés dans la même catégorie.
15 Q. Dans le cadre de l'espèce, le Dr Tabeau a déclaré dans sa déposition,
16 en page 36 855, ligne 21, à la page 36 856, ligne 9, ce qui suit :
17 "Question : D'accord. Eh bien, conviendriez-vous avec moi que dans le
18 domaine de la statistique et de la démographie, les morts violentes sont
19 placées dans trois catégories différentes : mort accidentelle, suicide et
20 homicide ?
21 "Réponse : Oui, de façon générale, en effet, c'est le cas.
22 "Question : Et conviendriez-vous avez moi que l'homicide lui-même est
23 encore sous divisé en deux catégories, c'est-à-dire le meurtre et
24 l'homicide justifiable ?
25 "Réponse : Oui.
26 "Question : Et lorsque dans votre rapport vous concluez au fait que toutes
27 les victimes de Tomasica sont mortes de morts violentes, pourriez-vous
28 distinguer davantage en faisant une différence entre les divers décès
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1 violents que vous avez pris en compte dans vos conclusions ?
2 "Réponse : Bien sûr, je ne pourrais pas distinguer sur la base de mes
3 seules connaissances des circonstances, car celles-ci ne sont pas
4 suffisantes pour me permettre de distinguer plus avant entre les
5 différentes catégories."
6 Alors, Professeur, pourriez-vous commenter le témoignage du Dr Tabeau que
7 je viens de citer ?
8 R. Le Dr Tabeau ne pouvait peut-être pas distinguer plus avant sur la base
9 de ses connaissances personnelles, mais il aurait été correct sur le plan
10 personnel qu'elle annonce que, dans le cadre global de l'ensemble des décès
11 sur lesquels elle s'est penchée, elle pouvait inclure une possibilité que
12 certains de ces décès étaient dus aux combats. Quelle est la possibilité de
13 distinguer précisément entre les décès dus aux combats et les décès dus à
14 d'autres formes de violence, c'est une autre question. Mais elle avait des
15 documents à sa disposition qui confirmaient effectivement que certaines
16 personnes avaient trouvé la mort en raison des combats.
17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aimerais vous poser une question.
18 Comment est-ce que vous définiriez une personne qui est morte au combat,
19 Madame, en tant que démographe ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'une personne qui n'est pas morte
21 des suites d'une exécution, mais qui est morte des suites d'un combat. Et
22 là, il y a une grande différence entre combat et exécution.
23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais lorsque vous êtes face au corps
24 d'une personne décédée et qui présente des balles à l'intérieur de son
25 corps, comment est-ce que vous concluez au fait que cette personne a été
26 tuée au combat et non dans le cadre d'une exécution ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, il y a des documents qui indiquent
28 des dates précises et qui indiquent qu'à ces dates-là se déroulaient des
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1 combats et que certaines personnes ont été tuées au combat. Il y a même un
2 rapport qui existe, un rapport provenant d'un policier français qui affirme
3 que des personnes connues par leurs noms et prénoms étaient membres de la
4 Défense territoriale et ont été excluent de l'analyse parce qu'il s'agit de
5 personnes qui ont trouvé la mort dans le cadre des combats.
6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais en tant que démographe, est-ce
7 que vous pouvez vous appuyer sur d'autres sources pour vous permettre de
8 déclarer en tant que professionnel de la démographie que les personnes en
9 question sont mortes au combat ? C'est cela, la question que je vous pose,
10 en vous appuyant sur des documents qui ne relèvent pas de votre spécialité,
11 de votre discipline, mais sur d'autres sources.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, si elle dispose de documents qui lui
13 permettent d'indiquer que tous les décès qu'elle a examinés n'appartiennent
14 pas à une seule et même catégorie, mais peuvent se diviser entre décès dus
15 aux combats et décès dus à d'autres violences, elle doit le dire. Or, les
16 conclusions du Dr Tabeau sont en fait des insinuations qui tendent à
17 indiquer que tous les décès étaient dus à du nettoyage ethnique ou à des
18 exécutions.
19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais est-ce qu'elle a dit que ces
20 personnes étaient toutes mortes suite à des exécutions, ou est-ce qu'elle a
21 dit que toutes ces personnes étaient mortes de causes violentes ? Soyons
22 clairs sur ce qu'elle a déclaré.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle a dit que tous ces décès sont survenus
24 dans des circonstances identiques en raison de la campagne de nettoyage
25 ethnique qui se menait à ce moment-là. Or, la réalité, soyons clairs, c'est
26 que l'ensemble de ces décès n'a pas été dû à des circonstances identiques,
27 puisqu'il existe des documents qui indiquent que les circonstances
28 n'étaient pas toutes identiques, et donc, il fallait introduire la
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1 distinction entre morts dues aux combats et morts dues aux exécutions.
2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais nous nous éloignons de la
3 question que je vous ai posée. La question que je vous ai posée portait sur
4 la distinction possible entre décès dus à des exécutions et décès dus à des
5 combats ou au fait de rassembler l'ensemble sous le terme de décès dus à
6 des causes violentes. Alors, comment est-ce que en tant que démographe
7 professionnel, vous pouvez faire la distinction entre les deux ?
8 Mais vous avez répondu par anticipation. Je vous remercie.
9 Maître Ivetic, vous pouvez procéder.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aurais une question à poser au témoin,
11 toutefois.
12 Madame Radovanovic, vous déclarez qu'il existe des documents qui évoquent
13 l'existence de combats, et je considère que c'est un point important pour
14 la présente Chambre. Est-ce que cette affirmation permettrait de distinguer
15 entre des personnes mortes au combat et des personnes mortes suite à une
16 exécution ? Je veux dire le fait que des combats se déroulaient sur le
17 terrain, suffit-il à lui seul pour permettre à une personne de déterminer
18 que des êtres humains sont morts au combat, ont été tués par ces combats ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, cela dépend du document que l'on
20 consulte. Si vous consultez, par exemple, la liste de l'armée de Bosnie-
21 Herzégovine et que dans cette liste, il est question de soldats qui ont
22 trouvé la mort, dans ce cas, vous pouvez présenter des données, parce que
23 vous savez, je ne suis pas en train d'affirmer que les seules deux
24 catégories possibles soient la présence de combats ou l'absence de combats.
25 Mais là, dans un tel document, le mot utilisé est le mot soldat. Donc, il
26 indique qu'il ne s'agissait pas de civils, mais qu'il s'agissait de
27 soldats. A Srebrenica, il est indiqué que 70 % des personnes étaient des
28 soldats, en tout cas jusqu'à 2009. Or, ces personnes ont toutes été
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1 traitées comme des civils. Donc, c'est l'un des documents, celui que
2 j'évoque, dans lequel la distinction est établie entre des membres de
3 troupes militaires et des civils.
4 Et puis, il y a d'autres documents ici et là. J'en ai cité quelques-uns.
5 Ces documents indiquent que des combats se déroulaient à une date précise,
6 en un lieu précis, et que ces combats ont fait des victimes. Le Dr Tabeau
7 ne pouvait pas établir avec une entière précision qui avait été tué au
8 combat et qui ne l'avait pas été, mais elle aurait pu évoquer la
9 possibilité que certains de décès examinés par elle aient été dus au
10 combat. Il y a un autre rapport d'une personne dont je prononce mal le nom
11 mais, en tout cas, il a dit qu'il existe une base de données dans laquelle
12 il y a même des déclarations judiciaires qui se prononcent sur les causes
13 du décès de ces personnes.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, la question qui continue à se
15 poser, à mon avis, relève des compétences des démographes, mais il
16 appartient aussi à une chambre d'un tribunal de rassembler toutes ces
17 informations pour aboutir à ces conclusions.
18 Restons-en là pour le moment. J'ai entendu vos explications.
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Encore une fois, j'ai une question de
20 suivi, parce que le dialogue qui vient de s'engager a été provoqué par une
21 phrase, que l'on trouve en page 24, lignes 21 à 23 du compte rendu
22 d'audience, où vous avez dit :
23 "Mais il existe des documents à la disposition de tous qui confirment que
24 certaines personnes ont été tuées au combat."
25 Combien de personnes avez-vous en tête lorsque vous dites cela et sur quels
26 documents vous appuyez-vous pour le dire ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans mon rapport, je note la liste des
28 documents que j'ai à l'esprit, mais le nombre de personnes, je ne le
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1 connais pas. Le Dr Tabeau aurait agi de façon correcte sur le plan
2 professionnel si elle avait pour le moins permis de penser -- maintenu la
3 possibilité que certaines des personnes dont les noms figuraient sur les
4 listes et qui ont été tuées avaient été victimes des combats à Tomasica.
5 Elle aurait pu laisser entendre la même chose pour Srebrenica. Mais
6 jusqu'en 2009, il n'y a pas un mot prononcé par elle à cet effet --
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous interroge au sujet de
8 Tomasica, puisque c'est sur ce sujet que vous êtes interrogée ici, et non
9 sur le sujet de Srebrenica. Je vous demande quel est le nombre des
10 personnes que vous avez à l'esprit ? Si vous indiquez que des documents
11 existent indiquant que des personnes auraient été tuées au combat, je vous
12 demande quel est le nombre de ces personnes, sur la base des documents que
13 vous avez consultés, et quels sont ces documents ? Si vous ne le savez pas,
14 veuillez poursuivre, mais veuillez, je vous prie, répondre à ma question.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Les documents, je les ai énumérés dans mon
16 rapport. Je ne peux pas vous donner leur nature, de mémoire, ici même
17 aujourd'hui, mais ils figurent dans mon rapport et indiquent que tel ou tel
18 jour, dont la date est indiquée, des combats se sont déroulés à tel et tel
19 endroit. Si le Dr Tabeau avait à la fin de son rapport tiré des conclusions
20 sur les incidents survenus jour après jour en rapport avec les charges
21 retenues contre le général Mladic, sur la base de ces incidents, des dates
22 de ces incidents et des lieux où ils étaient survenus, elle aurait pu
23 conclure que certains combats avaient eu lieu et que des victimes auraient
24 pu relever de ces combats. Elle n'aurait peut-être pas pu dire quelle
25 personne exactement avait été tuée au combat ou pour d'autres causes, mais
26 elle aurait pu évoquer l'existence des combats.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous n'avez pas répondu à ma
28 question, mais poursuivons.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je souhaite répondre à votre
2 question, mais je ne l'ai peut-être pas bien comprise. Si votre question
3 porte sur la possibilité de distinguer l'identité exacte d'une personne
4 morte au combat ou en dehors des combats, alors je réponds non.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame Radovanovic, j'ai cité une
6 phrase que vous avez prononcée ce matin, et je souhaitais préciser le
7 contexte de cette phrase, mais vous n'avez pas pu m'indiquer ce contexte.
8 Je vous remercie.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, veuillez procéder.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes mes excuses. Je ne vous ai pas bien
11 compris, dans ce cas.
12 M. IVETIC : [interprétation] Je ne sais pas si le problème vient de la
13 traduction, mais au paragraphe 7, le Pr Radovanovic déclare qu'il existe
14 des documents confirmant que des victimes auraient pu avoir été tuées. En
15 dehors du chapitre que vous évoquez, Monsieur le Juge, il y a une autre
16 réponse qui a été fournie aujourd'hui par le témoin qui a appelé mon
17 attention, où elle évoque la possibilité, et non la réalité. Et
18 malheureusement, je n'ai pas écouté la version originale en B/C/S à ce
19 moment-là, ou j'ai peut-être perdu une partie de ce qui a été dit, mais je
20 souhaitais signaler que le point a été évoqué --
21 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ceci peut être vérifié, comme vous le
22 savez.
23 M. IVETIC : [interprétation] Je sais, je sais.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a la moindre raison de
25 faire vérifier l'interprétation, vous savez que nous essayons d'éviter de
26 le faire, quelles que soient les incompréhensions, Maître Ivetic.
27 Veuillez procéder.
28 M. IVETIC : [interprétation] Si nous pouvons passer maintenant au document
Page 43685
1 1D6184 dans le prétoire électronique, j'en demande l'affichage. Il s'agit
2 du rapport du Pr Radovanovic.
3 Pour le compte rendu, j'indique que c'est le paragraphe 7 qui m'intéresse,
4 en page 6 en anglais, page 6 en serbe. Et c'est la page 11 en anglais et la
5 page 13 en serbe, paragraphe 25 du rapport du Pr Radovanovic, que je
6 voudrais évoquer à présent.
7 Je ne sais pas si vous avez tous un écran noir devant les yeux, mais c'est
8 mon cas.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous n'avons rien encore sur nos
10 écrans non plus.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On est en mode d'économie d'énergie.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, je crois que nous voyons à
14 l'instant apparaître quelque chose sur nos écrans, donc nous pouvons
15 poursuivre.
16 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Alors, j'aimerais l'affichage de la version anglaise, que l'on trouve en
18 page 11, paragraphe 25 du rapport de Mme Tabeau, qui se lit comme suit :
19 "Le fait que des sources contenant des décisions judiciaires concluant à la
20 mort existent dans l'Unité de démographie a été écarté sans aucune
21 explication" --
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je n'arrive pas à suivre. De quel
23 paragraphe vous parlez ?
24 M. IVETIC : [interprétation]
25 Q. Le paragraphe 25.
26 R. D'accord.
27 Q. "Le fait que des sources contenant des décision judiciaires relatives à
28 des décès existent au sein de l'Unité de démographie" --
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1 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, apparemment, de notre
2 côté de la salle, l'anglais se mêle au B/C/S dans les écouteurs.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, recommençons. Mais lisez
4 lentement et je suivrai sur le canal B/C/S pour voir ce qui en sort, donc
5 j'écouterai les interprètes en B/C/S.
6 Veuillez procéder.
7 M. IVETIC : [interprétation]
8 Q. "Le fait que des sources contenant des décisions judiciaires relatives
9 à des décès existent au sein de l'Unité démographique a été laissé de côté
10 sans aucune explication justifiant la raison pour laquelle elles n'ont pas
11 été utilisées dans le rapport du 20 août 2014, ceci peut susciter des
12 soupçons raisonnables par rapport aux décisions de certains tribunaux
13 lorsqu'on lit parfois 'certains individus ont été vus pour la dernière fois
14 alors qu'ils participaient à la défense locale du territoire et faisaient
15 partie de la Défense territoriale. Et étant donné qu'il est possible que
16 ces personnes soient mortes en participant à des activités de combat, elles
17 n'ont pas été prises en compte, sauf lorsque d'autres éléments de preuve
18 indiquaient que celles-ci avaient été capturées et/ou faites prisonnières
19 par les forces ennemies et tuées ensuite.' Donc, il était possible au moins
20 de laisser entendre, sinon de préciser totalement que toutes les victimes
21 n'avaient pas été tuées dans les mêmes circonstances, c'est-à-dire en
22 raison d'une exécution; or, c'est cela que le témoin expert insinue. En
23 dehors de ce fait, il importe également de tenir compte du fait que le
24 témoin expert, annonçant des problèmes dans l'établissement du statut
25 militaire ou du statut civil, fait observer que 'l'on peut voir les choses
26 différemment, en fonction des circonstances ayant abouti au décès. Un
27 soldat tué par balle et qui a décédé alors qu'il ne participait pas au
28 combat, (c'est-à-dire lorsqu'il était en congé) doit être considéré comme
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1 un civil. Et un civil tué par balle dans le cadre des combats au cours
2 desquels il utilisait un fusil et qu'il était donc engagé dans des combats
3 devait être considéré comme un combattant' pourquoi est-ce que le témoin
4 expert 'a ignoré' la possibilité qu'il y avait à la fois des soldats et des
5 combattants parmi les victimes de Tomasica et de Prijedor de façon générale
6 ?"
7 Est-ce que c'est bien le passage dont vous venez de parler il y a un
8 instant lorsque vous avez évoqué les rapports qui se trouvaient au sein de
9 l'Unité démographique et qui évoquaient l'existence de combat, et donc la
10 possibilité que certaines personnes aient été tuées dans le cadre de combat
11 ?
12 R. Oui.
13 Q. Ici, l'un des éléments de référence cité dans la note en bas de page,
14 c'est le rapport de 2002 de l'enquêteur du bureau du Procureur qui donne
15 des indications relatives à Prijedor et évoque les personnes qui ont été
16 vues par la dernière fois au sein de la Défense territoriale et qui donc
17 ont pu avoir été tués dans le cadre de combat. Est-ce qu'un démographe
18 appliquant la pratique et la méthode généralement admise sur le plan
19 scientifique aurait dû prendre en compte ce rapport au moment où il
20 examinait les décès des personnes à Tomasica et à Prijedor dans le but de
21 déterminer les raisons de ces décès ?
22 R. Oui.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, de quelle note en bas de
24 page venez-vous de parler.
25 M. IVETIC : [interprétation] C'est la note en bas de page numéro 16, je
26 crois. Attendez, permettez-moi de vérifier un instant.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Numéro 15.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Cela devrait être numéro 15.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'elle fait partie des éléments
2 de preuve ? Nous aimerions simplement le savoir.
3 M. IVETIC : [interprétation] Non. C'est une note qui figure sur notre
4 liste. Elle a été téléchargée dans le prétoire électronique.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me demandais simplement si nous
6 pourrions l'avoir à notre disposition.
7 M. FILE : [interprétation] Il y a des analyses de ces documents qui sont
8 déjà téléchargés dans la pièce P3282, et le document entier c'est le
9 document 65 ter numéro 26260.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Je ne sais pas quelle est la
11 longueur de ce document, est-ce que nous en avons besoin, est-ce qu'il nous
12 aiderait dans nos évaluations.
13 Veuillez procéder.
14 M. IVETIC : [interprétation] D'accord.
15 Q. Et, Madame, vous énumérez plusieurs autres documents dans la note en
16 bas de page numéro 17 dans laquelle vous dites qu'elle montre qu'il
17 existait un conflit armé dans certaines zones. Est-ce que vous vous seriez
18 attendue à ce que le Dr Tabeau applique la méthode scientifique
19 généralement admise, et se penche donc sur les informations contenues dans
20 des documents de ce genre ?
21 R. Oui. Cela aurait été correct de sa part d'examiner, d'étudier ces
22 documents. Elle aurait pu noter les raisons pour lesquelles elle ne les a
23 pas utilisés, mais elle a agi exactement comme si ces documents
24 n'existaient pas.
25 Q. Passons à la page suivante dans la version en serbe, mais restons sur
26 la même page dans le rapport en anglais --
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant cela, j'ai une question de
28 précision.
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1 Maître Ivetic, lorsque vous avez commencé cette dernière série de
2 questions, vous avez fait référence au paragraphe 7, page 6 de la version
3 anglaise, page 6 de la version en serbe. Où je lis, dans ce paragraphe 7 :
4 "Le témoin expert insinue mais ne prouve pas que l'ensemble des victimes a
5 été exécutée en dépit du fait qu'il existe des documents confirmant que des
6 victimes auraient pu avoir été tuées en raison des combats."
7 Ceci figure au paragraphe 7 du rapport du témoin.
8 J'aimerais savoir de la bouche de Mme Radovanovic, puisque nous venons de
9 vous entendre parler du rapport de M. Nicolas Sibere de 2002, est-ce que ce
10 rapport de Nicolas Sibere est le seul auquel vous faites référence lorsque
11 vous évoquez cette catégorie de documents que vous avez à l'esprit, ou est-
12 ce que vous en avez d'autres en tête ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce paragraphe 7 est un résumé, il est
14 raccourci, donc ce n'est pas le seul document disponible. Mais dans la note
15 en bas de page 17 du paragraphe 25, d'autres documents sont cités. Dans le
16 paragraphe 7, tout est résumé, donc je n'ai pas développé ce que j'ai
17 écrit. Mais je l'ai fait dans le corps du texte complet. Ici, nous avons
18 simplement une conclusion tirée de ce qui précède.
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Mais en note de bas
20 de page 17, nous avons une liste de documents avec des numéros ERN.
21 Pourriez-vous synthétiser et nous dire quelle est la nature de l'ensemble
22 de ces documents ? Il n'y a pas de titres, nous n'avons pas la moindre idée
23 de la nature de ces documents.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, je ne me rappelle pas exactement quel
25 est leur dénomination à chacun, mais il s'agit dans la majorité de
26 documents -- moi, je les ai dans mon bureau, je pourrais vérifier je
27 pourrais même les apporter. Ils sont dans ma chambre à l'hôtel. Il s'agit
28 de rapports soumis par un certain nombre de personnes qui traitent de ce
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1 qui s'est passé un jour déterminé, et un jour où des combats se
2 déroulaient, ce genre de chose. Je ne me rappelle pas à l'instant quels
3 sont les auteurs de l'ensemble de ces documents, mais je les ai dans mon
4 cartable, dans mon sac dans ma chambre. Et il s'agit toujours de documents
5 qui indiquent des jours précis et des activités de combat précises pendant
6 ces journées-là.
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous avez des
8 renseignements quant au fait de savoir si l'une ou plusieurs de ces
9 victimes de combat évoquée dans ces documents a été tué et a été enterrée
10 dans la fosse commune de Tomasica ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ça je n'ai pas examiné ce point. Je
12 voulais citer à titre d'exemple quant à l'existence de combat à des dates
13 précises dans des lieux précis.
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Ivetic.
16 M. IVETIC : [interprétation]
17 Q. Paragraphe 26 à présent, où vous parlez du fait que le Dr Tabeau fait
18 référence à des salves de mitrailleuse. Est-ce qu'un démographe a la
19 capacité de déterminer si une personne a été tuée par un tir de canon, de
20 fusil, de mitrailleuse, ou d'une autre arme; et si oui, de quelle façon ?
21 R. Non, les démographes s'occupent des sources de décès indiquées par des
22 spécialistes de médecine légale. Il peut s'agir de blessures à la tête par
23 arme à feu, mais savoir si l'arme est une mitrailleuse ou un pistolet ou un
24 fusil, ce n'est pas ce qu'un démographe peut déterminer.
25 Q. J'aimerais maintenant vous interroger sur un élément évoqué par le Dr
26 Tabeau dans sa déposition en l'espèce, page 36 800, lignes 8 à 20 du compte
27 rendu d'audience. Je vais lire ce qui suit lorsque je l'ai interrogé au
28 sujet de la déposition du Dr Clark. Je cite :
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1 "Question : J'aimerais vous poser une dernière question sur le sujet à
2 titre de conclusion.
3 "Est-il exact qu'en tant que scientifique, vous ne pouvez pas exclure
4 la possibilité qu'une ou plusieurs personnes ont été tuées au combat ?
5 "Réponse : En effet, je ne peux pas exclure cette possibilité."
6 Et puis, donc, ceci porte sur une citation du Dr Clark. J'ai interrogé le
7 Dr Tabeau au sujet de la déposition du Dr Clark dans les termes suivants :
8 "Est-ce que cette conclusion du Dr Clark correspond entièrement à vos
9 résultats suite au travail que vous avez accompli sur les cadavres
10 retrouvés à Tomasica ?
11 Et voici maintenant la réponse du Dr Tabeau :
12 "Réponse : Non, Monsieur, non. Je n'ai étudié aucune source sur la base de
13 laquelle j'aurais la possibilité de dire que quelqu'un a été tué dans une
14 situation dans laquelle il y avait un combat ou dans une situation dans
15 laquelle il n'y avait pas de combat. En fait, je n'ai tiré aucune
16 conclusion sur ce sujet. Donc, quels que soient les dires du Dr Clark dans
17 sa déposition, il s'agit de son avis personnel mais, pour ma part, je ne
18 peux formuler aucune déclaration sur ce point en ce moment."
19 Et là, c'est donc la fin de la citation.
20 Madame le Professeur, quels seraient vos commentaires par rapport à ce
21 témoignage ?
22 R. Le Dr Tabeau a dit clairement qu'elle n'avait pas examiné d'autres
23 sources qui auraient indiqué cela, et le Dr Clark a indiqué les causes du
24 décès. Je ne me souviens pas d'avoir vu que le Dr Clark, dans son rapport,
25 écrit que quelqu'un a été tué des tirs de mitrailleuse. Je ne pense pas que
26 cela figure dans son rapport. Et cela n'a aucune importance pour un
27 démographe. Même le Dr Clark, si je me souviens bien, n'exclut pas la
28 possibilité que certaines personnes aient trouvé la mort au combat.
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1 Q. Dans la continuation de son témoignage par rapport à ce sujet, le Dr
2 Tabeau dit à la page du compte rendu 36 810, lignes 9 à 14, ce qui suit :
3 "Question : Docteur Tabeau, pensez-vous que faire une différence entre le
4 décès causé survenu en combat et décès du au nettoyage ethnique, il n'est
5 pas pertinent pour votre rapport ?
6 "Réponse : Je n'ai jamais dit que cela ne soit pas pertinent pour mon
7 rapport mais, tout simplement, je n'étais pas en mesure d'étudier les
8 sources qui auraient pu me dire quels incidents se sont produits durant les
9 combats et quels autres incidents n'étaient pas survenus en combat."
10 Madame le Professeur, comment commenteriez-vous cette partie de ce
11 témoignage ?
12 R. J'aurais posé la question pourquoi le Dr Tabeau n'avait pas l'occasion
13 de voir cela, parce qu'elle a des bases de données qu'elle-même avait
14 compilées avec ses assistants. Je suppose qu'elle est au courant du contenu
15 de cette base de données. Mais si elle n'a pas eu l'occasion de voir cela,
16 elle aurait dû indiquer la raison pour laquelle elle ne pouvait pas le
17 faire, peut-être parce qu'elle n'avait pas suffisamment de temps, peut-être
18 parce qu'il n'y avait pas de documents disponibles. Cela veut dire qu'on ne
19 peut pas conclure que si elle n'avait pas l'occasion de voir, que ces
20 documents n'existaient pas.
21 Q. Est-ce que le Dr Tabeau avait accès dans le cadre de l'Unité de
22 démographie, à d'autres sources de documents militaires où des pertes
23 étaient indiquées, mis à part le rapport de Nicolas Sebire que vous avez
24 cité dans votre rapport ?
25 R. Dans l'Unité de démographie, tous les documents qui existent sont les
26 documents que le Dr Tabeau avait utilisés, ainsi que ces assistants,
27 qu'elle avait créé ces bases de données dans le cadre d'un projet spécial à
28 la tête duquel elle se trouvait dans le cadre du bureau du Procureur. Et je
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1 suppose qu'elle savait quelle était la teneur de ces bases de données et
2 quels sont les documents qui sont contenus dans ces bases de données.
3 Si j'ai pu obtenir certains documents de la part de la Défense, je ne
4 pense pas que la Défense les ai trouvés dans la rue. Ces documents ont été
5 enregistrés, les documents qui concernent la population et d'autres choses.
6 Je suppose que le Dr Tabeau dispose des mêmes documents. Je ne sais pas ce
7 qui se trouve dans ces bases de données, dans les bases de données de
8 l'Unité de démographie. C'est parce que je n'ai jamais eu accès à toutes
9 les données qui sont disponibles à l'Unité de démographie. Et je ne sais
10 même pas s'il y a un catalogue dans lequel sont énumérés des documents qui
11 sont disponibles pour que je puisse examiner certains documents qui me sont
12 intéressants.
13 Pour ce qui est de cette base de données, la teneur de cette base de
14 données, c'est le Dr Tabeau qui est au courant de tout cela ou, au moins,
15 elle devrait donc connaître tout cela et elle est en position de pouvoir
16 choisir des documents. Moi, non. Je me suis appuyée sur ce qu'elle a
17 indiqué dans son rapport et je pouvais demander ces documents-là. Et si les
18 avocats m'aident à retrouver un rapport, par exemple le rapport de Nicolas
19 Sebire que j'ai obtenu à La Haye, je ne savais pas auparavant que ce
20 rapport existait.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais qu'on puisse se concentrer
22 sur le commentaire par rapport à la chose suivante.
23 Le Dr Tabeau a dit, et cela a été cité, qu'elle n'était pas en mesure de
24 faire une distinction entre les décès au combat et les décès dus au
25 nettoyage ethnique parce qu'elle ne pouvait pas étudier les sources qui
26 auraient pu lui indiquer quels sont les incidents survenus au combat, quels
27 sont les incidents qui n'étaient pas survenus au combat.
28 Maintenant, vous dites qu'elle aurait dû nous dire cela, que peut-être elle
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1 n'avait pas le temps, et cetera. Est-ce que vous savez - et c'est à quoi je
2 m'intéresse vraiment - est-ce que vous êtes au courant des sources où il y
3 a une distinction claire entre les incidents qui étaient le résultat des
4 combats et les incidents qui étaient le résultat du nettoyage ethnique ?
5 C'est parce que depuis une heure à peu près, nous parlons en détail de
6 cela, de savoir si une personne avait péri en combat ou pas. Et il est très
7 difficile de voir, de déterminer si une personne était victime d'un combat
8 ou du nettoyage ethnique.
9 Vous dites qu'elle aurait dû expliquer ce point, qu'elle n'avait pas
10 le temps, peut-être. Mais, selon moi, c'est comme ça que j'ai compris,
11 qu'elle a dit ici qu'elle n'avait pas à sa disposition de telles sources.
12 Voilà ma question pour vous : est-ce que vous êtes au courant de
13 l'existence des sources où on peut clairement identifier entre les victimes
14 d'incidents et les victimes du nettoyage ethnique ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne dispose pas de telles sources, mais je
16 pense que l'Unité de démographie dispose d'au moins certaines parties sur
17 la base desquelles on pourrait arriver à cette conclusion --
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de vous arrêter ici.
19 Mme Tabeau a dit : Je ne dispose pas de telles sources. Vous venez de dire
20 : Je ne suis pas au courant de l'existence de ces sources, mais elle
21 devrait les avoir. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez tiré la
22 conclusion selon laquelle, lorsqu'elle dit je n'ai pas de telles sources,
23 pour croire qu'elle dispose ou qu'elle disposait de telles sources ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle ne dit pas, je ne dispose pas de telles
25 sources. Elle dit : Je n'ai pas étudié ces sources. C'est au moins ce que
26 j'ai obtenu comme traduction.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, permettez-moi de lire cette
28 partie exactement.
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1 "Je n'étais pas en mesure d'étudier les sources qui m'auraient indiqué si
2 les incidents étaient survenus en combat ou pas."
3 Vous avez compris ce point de la façon suivante : ces sources existent,
4 mais je n'étais pas en position de les examiner, parce qu'il n'y avait pas
5 suffisamment de temps ou, pour une autre raison, et vous n'avez pas
6 considéré la possibilité que la raison pour laquelle cela n'a pas été fait
7 est que ces sources n'existaient pas, tout simplement.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Si elle n'avait pas ces sources, Mme le
9 Docteur Tabeau aurait dit : Je n'ai pas de telles sources. Mais si elle dit
10 : Je n'ai pas étudié ces sources, dans ce cas-là, cela veut dire que ces
11 sources existent ou, au moins, une partie de ces sources.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est votre analyse du point de vue
13 linguistique de cette réponse.
14 Continuons.
15 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant qu'on regarde le
16 paragraphe --
17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai une question à poser par rapport
18 au paragraphe 26.
19 Madame Radovanovic, vous avez dit au paragraphe 26 que :
20 Il est possible que le Dr Tabeau ait dit que des tirs de
21 mitrailleuses, qui avaient provoqué le décès de certaines personnes, que
22 cela ne représente pas la façon appropriée de présenter cette situation.
23 Ma question est la suivante : est-ce que vous estimez qu'il n'est pas
24 permis de dire si une personne avait été tuée par des tirs de mitrailleuses
25 ou d'autres armes à feu ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] On peut dire cela si vous disposez de données
27 disant qu'il y avait des tirs de mitrailleuses. Sur la base des sources
28 indiquées ici par le Dr Tabeau, et lors de son témoignage, elle a dit :
Page 43696
1 J'ai vu cela dans le rapport de John Clark, et dans l'expertise de John
2 Clark. Cela n'existe pas.
3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, puis-je vous interrompre
4 à ce niveau-là, c'est parce que vous n'avez pas répondu à ma question du
5 tout.
6 Ma question était comme suit : est-ce que, selon vous, les combattants ne
7 peuvent pas être tués des tirs de mitrailleuses ou d'autres armes à feu,
8 puisque vous avez dit que dire quelque chose comme cela n'est pas correct
9 du point de vue intellectuel si on ne tient pas compte du fait que parmi
10 les personnes qui avaient péri, il y avait des combattants.
11 M. IVETIC : [interprétation] Si vous posez la question concernant la
12 conclusion de ce témoin, alors il faut lire tout le document, puisqu'ici le
13 témoin expert a dit :
14 "…dans aucun des documents utilisés par l'expert, il n'y a pas
15 d'information concernant des tirs de mitrailleuses."
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je pense que vous avez
17 voulu faire une suggestion pour ce qui est de la question du Juge Moloto.
18 Et, si c'est le cas, vous n'avez pas formulé cette suggestion de
19 façon correcte. Vous lui avez dit ce qu'il devait faire, oui ? Donc,
20 maintenant, nous allons laisser le Juge Moloto continuer.
21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La prochaine fois, vous pouvez suggérer
23 quelque chose au Juge Moloto, mais vous ne devriez pas lui dire ce qu'il
24 devrait faire, donc ce n'est pas la façon à laquelle vous pouvez vous
25 adresser à mes collègues.
26 Continuez.
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vois ce qui figure dans le reste de
28 la phrase, mais le fait qu'il n'y a pas un seul document utilisé par le
Page 43697
1 témoin expert où il y aurait eu des informations concernant des
2 mitrailleuses, alors, dans ce cas-là, il faut mettre en question
3 l'expertise de l'expert qui ne nous a pas indiqué la source des
4 informations concernant les tirs de mitrailleuses.
5 Mais accuser cette personne de ne pas avoir été honnête du point de vue
6 intellectuel uniquement parce que cette personne avait dit qu'on avait tiré
7 sur ces personnes de mitrailleuses ou parfois d'armes à feu. J'aimerais
8 savoir si le point de vue de notre expert aujourd'hui est que les
9 combattants ne faisaient l'objet des tirs de mitrailleuses, ou parfois
10 d'autres armes à feu. C'est ma question. Et cela n'a rien à voir avec le
11 reste de cette phrase.
12 Madame Radovanovic, veuillez répondre à ma question, si vous pouvez le
13 faire.
14 Et je dois dire, pour ce qui est de Me Ivetic, que je prends très au
15 sérieux ses commentaires.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] On peut tirer sur les combattants de n'importe
17 quelle arme. On peut leur lancer des roquettes, des bombes. On peut leur
18 tirer dessus des mitrailleuses, et cetera. Et si c'était votre question, si
19 le Dr Tabeau a conclu que --
20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, c'est sur quoi portait ma
21 question. Vous avez conclu dans ce sens-là parce qu'elle a dit que des
22 mitrailleuses et d'autres armes à feu avaient été utilisées, que cela veut
23 dire qu'elle a exclu des combattants. Et maintenant, vous avez dit qu'on
24 peut tirer sur les combattants en utilisant ces armes, ce qui contredit ce
25 que vous avez dit auparavant.
26 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je soulève une
27 objection à la question posée puisqu'on ne peut pas présenter le texte de
28 cette façon-là. On ne peut pas citer seulement une partie des conclusions
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1 et ne citer qu'une partie du texte, et non pas le texte entier. Cela veut
2 dire qu'on est dans la situation qui n'est pas conforme à la réalité.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que c'est tout à fait
4 clair par rapport à ce que vous avez voulu dire en répondant à la question
5 du Juge Moloto.
6 Continuez.
7 M. IVETIC : [interprétation]
8 Q. Regardons le paragraphe 24 maintenant, à la page 10 en anglais, en bas
9 de la page, et à la page 13 en serbe, pour voir ce que le Dr Tabeau avait
10 dit concernant son accès à d'autres documents. Ici, vous avez cité les
11 propos du Dr Tabeau, et elle a dit :
12 "Seulement quelques sources peuvent être considérées comme des sources
13 fiables, par exemple, des rapports de" --
14 M. IVETIC : [interprétation] Et peut-on maintenant passer à la page
15 suivante en anglais.
16 Q. "…par exemple, des certificats de décès, des registres de décès, des
17 décisions des tribunaux pour déclarer des personnes décédées ou des
18 extraits des archives du ministère de la Défense concernant les forces
19 armées et les certificats de décès des forces armées."
20 Est-ce que le Dr Tabeau a utilisé ces documents dans d'autres rapports que
21 vous avez examinés ?
22 R. Non, nulle part elle n'a utilisé ces documents dans les rapports que
23 j'ai examinés. Exception faite du rapport de 2009, le ministère de la
24 Défense à Srebrenica, seulement en 2009, mais il ne s'agit pas d'un
25 document officiel. Je pourrais me mettre d'accord avec le Dr Tabeau pour ce
26 qui est de l'intégration de ce document en tant que document officiel. Mais
27 pour ce qui est du travail des scientifiques dans ce domaine-là, on ne peut
28 pas considérer ce document comme étant un document officiel. Les documents
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1 officiels ne sont que des certificats de décès et des décisions des
2 tribunaux pour déclarer une personne comme personne décédée.
3 Q. Et si on revient au paragraphe 25 de votre rapport, nous allons voir
4 qu'il y a une autre citation du même article de 2005 du Dr Tabeau. Je l'ai
5 déjà lu, donc je ne vais pas lire à nouveau cette citation, et cela
6 concerne la note de bas de page numéro 18 au paragraphe 25 de votre
7 rapport. Pouvez-vous concilier l'écrit du Dr Tabeau dans le rapport de 2005
8 et ce qu'elle n'a pas fait pour ce qui est de son rapport concernant
9 Tomasica ?
10 R. Si le Dr Tabeau sait ce que sont ces documents qui sont fiables et
11 valides et si elle en informe le public scientifique, je pense qu'il aurait
12 été correct d'en informer la Chambre pour dire : Ce sont les documents
13 utilisés lors des recherches scientifiques, et moi je ne les ai pas
14 utilisés, j'ai utilisé d'autres documents.
15 Q. Maintenant, par rapport au même sujet à la page du compte rendu 36 810,
16 lignes 15 à 20, le Dr Tabeau a dit lors de son témoignage ce qui suit :
17 "Question : Vu que le décès en combat est également un décès violent, ce
18 qui diffère des décès des personnes qui avaient été tuées en tant que non-
19 combattants ou qui n'avaient pas été tués en combat, seriez-vous d'accord
20 pour dire qu'il y a une possibilité sur laquelle tous les cadavres
21 retrouvés à Tomasica auraient pu trouver la mort en combat ou auraient été
22 victimes du nettoyage ethnique ?
23 "Réponse : Je ne peux pas exclure cette possibilité."
24 Quel est votre commentaire eu égard à ce témoignage du Dr Tabeau par
25 rapport à son rapport d'expert concernant Tomasica.
26 R. Elle n'a écrit cela nulle part dans son rapport. Au contraire. Elle a
27 conclu que tout cela était le résultat du nettoyage ethnique, elle a dit
28 d'une campagne généralisée du nettoyage ethnique. Nulle part à aucun
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1 endroit dans le rapport elle ne laisse comprendre que cela aurait pu se
2 passer dans des circonstances différentes.
3 Q. Si nous regardons le rapport du Dr Tabeau, c'est la pièce P7449 dans le
4 prétoire électronique, la page 47 en anglais et la page 60 en B/C/S. Et
5 sous le titre "Conclusions", qui se trouve deux pages avant ce titre, là,
6 c'est le sous-titre en fait de la partie dont on parle maintenant. Et c'est
7 le dernier paragraphe dans le rapport avant la liste des annexes au
8 rapport.
9 M. IVETIC : [interprétation] J'attends toujours que la version en serbe
10 soit affichée à l'écran. Il s'agit de la page 60 en serbe, si cela peut
11 vous aider. Et en bas de la page en serbe.
12 Q. Le Dr Tabeau, et c'est la dernière chose écrite dans son rapport, dit :
13 "Pour résumer, dans ce rapport figurent les preuves importantes qui
14 corroborent les conclusions selon laquelle toutes les victimes de Tomasica
15 avaient décédé de morts violentes dans des circonstances extrêmement
16 dramatiques dans le cadre d'une campagne généralisée du nettoyage ethnique
17 dans la municipalité de Prijedor et dans le cadre de la partie de la
18 campagne du nettoyage ethnique dans la Région autonome de Krajina."
19 D'abord, comment comprenez-vous cela ? Est-ce que c'est la conclusion du Dr
20 Tabeau ou quelque chose d'autre ?
21 R. C'est la conclusion finale du Dr Tabeau, et se trouve sous le titre
22 "Conclusion" et c'est donc le summum de toutes les conclusions présentées
23 dans le rapport.
24 Q. Maintenant, peut-on afficher encore une fois le document 1D6184, c'est
25 votre rapport, et au paragraphe 31, qui se trouve en page 13 en anglais et
26 en page 16 en serbe.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous poser une question.
28 Vous avez dit que c'est la conclusion du Dr Tabeau. Quelle est sa
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1 conclusion, qu'il y a des preuves qui étayent cela; ou que c'est ce qui
2 s'était passé, à savoir que toutes les victimes Tomasica avaient trouvé une
3 morte violente dans les circonstances extrêmement dramatiques, et cetera ?
4 Quelle est sa conclusion, qu'il y a des moyens de preuve importants qui
5 sont à l'appui de cela ou que cela s'est réellement passé ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Sa conclusion est qu'il y a des preuves mais
7 que cela s'était passé lors de la campagne du nettoyage ethnique dans des
8 circonstances extrêmement dramatiques. Le Dr Tabeau dit qu'il s'agit des
9 morts de Tomasica. Mais je ne conteste pas le nombre de victimes. Mais je
10 me demande comment elle aurait pu le savoir qu'il s'agissait du résultat
11 d'une campagne généralisée du nettoyage ethnique si elle n'avait pas dit un
12 seul mot par rapport à cela dans son rapport. Comment --
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Témoin, permettez-moi
14 d'essayer encore une fois de vous expliquer où j'ai mon problème.
15 Le Dr Tabeau indique l'existence de ce qu'elle appelle des preuves
16 importantes disant que quelque chose aurait pu se passer. Elle ne dit pas
17 cela s'est passé, elle dit qu'il y a des preuves importantes à l'appui du
18 fait que cela s'est passé, et j'ai compris - et vous pouvez me corriger si
19 j'ai tort - donc j'ai compris qu'elle n'a pas tiré cette conclusion finale,
20 bien qu'elle indique l'existence des moyens de preuve importants qui
21 auraient étayé cette conclusion. C'est la raison pour laquelle je vous pose
22 cette question. Etant donné que la question de Me Ivetic était de savoir
23 s'il s'agit de sa conclusion. Par conséquent, je vous pose la question
24 suivante : est-ce que sa conclusion est qu'il y a des preuves importantes
25 mais elle ne dit pas que cela s'est réellement passé, ou si sa conclusion
26 est que cela s'était réellement passé.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle dit que cela s'était réellement passé et,
28 pour ce qui est de Tomasica, tout cela étaye le fait qu'une campagne
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1 généralisée était en cours et que cela s'était réellement passé et que cela
2 représente les preuves à l'appui de l'existence d'une campagne généralisée
3 du nettoyage ethnique. C'est comme ça que j'ai compris cette conclusion.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est votre lecture de la conclusion qui
5 vous a été citée. C'est votre analyse linguistique des mots qu'on vous a
6 lus il y a quelques instants.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je viens de lire
8 ce que le Dr Tabeau avait écrit, et ce que l'avocat m'a lu est la citation
9 directe de ce que le Dr Tabeau avait écrit pour ce qui est des dernières
10 lignes de sa conclusion.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est votre interprétation de ce
12 qui vous a été lu.
13 Continuez.
14 M. IVETIC : [interprétation] Je pense qu'il est venu le moment propice pour
15 faire la pause, la deuxième pause.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet.
17 Professeur Radovanovic, nous aimerions vous revoir dans 20 minutes.
18 [Le témoin quitte la barre]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre à 12 heures 20.
20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.
21 --- L'audience est reprise à 12 heures 20.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons brièvement à huis clos partiel,
23 si vous le voulez bien.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
25 Monsieur le Président.
26 [Audience à huis clos partiel]
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22 [Audience publique]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.
24 Maître Lukic, pourriez-vous rappeler à votre client qu'il n'est pas censé
25 parler à haute voix.
26 [Le témoin vient à la barre]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, veuillez procéder, je
28 vous prie.
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1 M. IVETIC : [interprétation]
2 Q. Je souhaiterais vous interroger au sujet du paragraphe 31 de votre
3 rapport, Madame, dans lequel vous déclarez que le Dr Tabeau est sortie des
4 règles de sa profession aux fins de présenter son analyse et qu'elle a
5 manifestement fait preuve d'absence d'objectivité dans le choix des sources
6 à l'origine des données qu'elle utilise.
7 A cet égard, j'aimerais d'abord vous demander si vous maintenez ce que vous
8 dites dans votre paragraphe 31 sans aucune modification ?
9 R. Oui.
10 Q. J'aimerais maintenant traiter de l'utilisation du terme "nettoyage
11 ethnique" par le Dr Tabeau, puisque la Chambre de première instance a eu
12 plusieurs questions à ce sujet juste avant la dernière pause.
13 J'aimerais vous présenter diverses parties de la déposition du Dr Tabeau de
14 façon très précise où l'utilisation de l'expression "nettoyage ethnique"
15 intervient, et j'aimerais que nous nous penchions sur les différentes
16 parties de sa déposition l'une après l'autre, après quoi je vous demanderai
17 des commentaires de votre part. Le chapitre entier du compte rendu
18 d'audience dont je vais parler se situe entre les pages 36 802, ligne 18,
19 et la page 36 804, ligne 12, où on lit ce qui suit :
20 "Question : Mais dans ce cas, est-ce que vous estimez que vos conclusions
21 au sujet du nettoyage ethnique sont complètes puisque vous n'avez pas pris
22 en compte l'incidence potentielle ou le rôle potentiel des combats eu égard
23 aux cadavres récupérés à Tomasica ?"
24 Et la réponse du Dr Tabeau à cette question a été la suivante :
25 "Réponse : Je pense que le rapport que j'ai élaboré ne concerne pas en
26 premier lieu le nettoyage ethnique. Il concerne en premier lieu les
27 victimes de Tomasica --"
28 Et dans la suite du compte rendu d'audience, nous trouvons une deuxième
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1 question qui a été posée au Dr Tabeau, qui se lit comme suit :
2 "Question : Docteur, vous me permettrez d'avoir un avis différent. La
3 conclusion que je viens de lire est l'avant-dernière conclusion que l'on
4 retrouve dans votre rapport. Ce que je vous déclare, c'est que cette
5 conclusion constitue la base de votre rapport et qu'elle constitue la
6 partie la plus importante de votre rapport. Si vous souhaitez que nous nous
7 appuyions sur cette conclusion, je vous en prie, dites-le."
8 Et le Dr Tabeau répond ce qui suit :
9 "Eh bien, à mon avis, ce que je vois, c'est une description très claire de
10 nettoyage ethnique sur la base des documents que j'ai étudiés, sur la base
11 des documents concernant les personnes portées disparues dans la
12 municipalité de Prijedor et, en particulier, dans la municipalité de
13 Prijedor et dans la zone tenue par la RAK. Le fait qu'un nombre si
14 important de victimes soit porté disparu en à peine quelques jours du mois
15 de juillet, c'est-à-dire durant les journées du 20 et du 23, 24 et 25
16 juillet, eh bien, ces nombres sont très importants."
17 Professeur, quel est votre commentaire par rapport à la déposition du Dr
18 Tabeau que je viens de citer ?
19 R. A mon avis, cette déposition est contradictoire. D'abord, elle déclare
20 qu'elle estime que son rapport ne concerne pas avant tout le nettoyage
21 ethnique et, ensuite, elle tire la conclusion que les victimes étaient des
22 victimes d'une campagne de nettoyage ethnique à grande échelle. Elle
23 déclare également qu'elle est face à une description très claire de
24 nettoyage ethnique basée sur les documents de la RAK et de Prijedor, et
25 elle aurait pu introduire une note en bas de page et nous faire savoir,
26 nous apprendre ou permettre à la Chambre d'apprendre où on peut également
27 trouver ce genre de choses.
28 Ce que le Dr Tabeau décrit, tout ce qu'elle évoque dans ses
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1 commentaires, conduit à un certain nombre de conclusions, et c'est la
2 raison pour laquelle je les évoque. Je crois qu'il s'agit de positions
3 personnelles du Dr Tabeau qui n'ont aucune base, aucun fondement
4 scientifique en l'absence d'une documentation solide.
5 Q. Dans la dernière partie de ce chapitre du compte rendu d'audience que
6 j'ai commencé à citer, plus précisément je crois qu'on le trouve en page 36
7 804, lignes 1 à 12, le Dr Tabeau poursuit en parlant toujours du nettoyage
8 ethnique et dit ce qui suit dans sa déposition :
9 "Oui, je discute le nettoyage ethnique dans mon rapport comme étant le
10 contexte dans lequel il convient de situer les victimes de Tomasica. Il est
11 inévitable de prononcer les mots 'nettoyage ethnique' car, à mon avis, les
12 décès, les meurtres qu'ont subis les victimes de Tomasica faisaient partie
13 intégrante d'un nettoyage ethnique.
14 "Et, bien entendu, certains des rapports de ce nettoyage ethnique
15 sont décrits dans mon rapport, certains des éléments que je décris viennent
16 étayer le nettoyage ethnique, et ce, à un niveau considérable. Je parle de
17 nettoyage ethnique en m'appuyant sur mon expérience personnelle. Ce n'est
18 pas la première fois que je travaille sur les victimes de 1992, les
19 victimes de Tomasica, mais aussi les victimes de la RAK et de la
20 municipalité de Prijedor. J'ai étudié d'autres sources d'information et
21 établi d'autres rapports. Et sur la base de mon expérience, sur la base de
22 mon travail réalisé par le passé, j'ai trouvé des raisons d'étayer dans mon
23 rapport l'utilisation de l'expression nettoyage ethnique."
24 Du point de vue de la pratique généralement admise sur le plan
25 scientifique par les démographiques professionnels, considérez-vous que la
26 façon dont le Dr Tabeau discute du nettoyage ethnique est conforme avec le
27 type d'examen normal et courant que l'on effectue sur le terrain ?
28 R. Non. Il n'existe pas de définition de l'expression nettoyage ethnique
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1 dans le domaine de la démographie. Ce que le Dr Tabeau considère comme
2 particulièrement important, ce qu'elle se considère comme ne pouvant éviter
3 d'évoquer, à savoir le nettoyage ethnique qu'elle ne peut pas ne pas
4 évoquer dans ses conclusions et qu'elle affirme avoir prouvé au travers de
5 divers rapports, alors qu'elle travaillait à Prijedor et dans la Région
6 autonome de la Krajina, la RAK, eh bien, elle devait le noter de façon
7 convenable sur le plan professionnel dans une note en bas de page, en
8 disant quels sont les rapports sur la base desquels elle a pu conclure
9 qu'il s'agissait d'exemples types de nettoyage ethnique, parce qu'un
10 démographe ne dispose pas de définitions pures et simples qui peuvent nous
11 dire que sur la base de telles et telles situations examinées, on peut
12 conclure à l'existence d'un nettoyage ethnique, pas davantage d'ailleurs
13 sur la base de l'expérience du Dr Tabeau dont elle dit qu'elle se fonde sur
14 des bases scientifiques.
15 Dans le rapport présenté par le Dr Tabeau où elle parle de campagne de
16 nettoyage ethnique, je n'ai pas trouvé une seule note de bas de page qui
17 indiquerait sur quel fondement elle appuie ses conclusions au sujet des
18 victimes de Tomasica quand elle déclare qu'il s'agit de victimes dues à une
19 campagne de nettoyage ethnique. Et je ne sais pas non plus ce que le Dr
20 Tabeau considère comme du nettoyage ethnique en lisant son rapport.
21 Q. En page 36 854, ligne 20, jusqu'à la page 36 855, ligne 20 également --
22 M. IVETIC : [interprétation] Je crois qu'il s'agit bien de la page 36 855,
23 mais je vous demande un instant pour vérifier. Donc, en fait, ma citation
24 part de la page 36 854 et se poursuit dans les pages suivantes.
25 Q. A cet endroit du compte rendu d'audience, le Dr Tabeau nous dit dans
26 une de ses réponses ce qui suit :
27 "Eh bien, le nettoyage ethnique n'est pas défini dans le domaine de la
28 démographie scientifique. C'est la démographie des guerres ou des conflits
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1 qui est appelée à s'occuper du nettoyage ethnique, entre autres."
2 Alors, quel est votre commentaire sur cette réponse ?
3 R. Eh bien, le Dr Tabeau dit bien, à juste titre, que dans le domaine de
4 la démographie, il n'existe pas de définition du nettoyage ethnique. Et
5 ensuite, elle ajoute qu'il existe une discipline qui s'appelle démographie
6 de guerre et qui s'intéresse au nettoyage ethnique, au cas où il existerait
7 une discipline qui s'appellerait démographie de guerre. Or, pour ma part,
8 je pense que ce n'est pas le cas, parce que le Dr Brunborg, dans un
9 document dont il est l'auteur, annonce que cette branche de la démographie
10 n'est pas encore créée, qu'elle est sur le point d'être créée, et je ne
11 sais pas si elle l'a déjà été, mais quoi qu'il en soit, s'il existe quelque
12 chose qui s'appelle déjà actuellement démographie de guerre, le Dr Tabeau
13 sait bien que la démographie de guerre doit également fournir une
14 définition du nettoyage ethnique lorsqu'elle traite du nettoyage ethnique,
15 et que la démographie de guerre doit dire ce que représente exactement le
16 nettoyage ethnique. C'est seulement alors qu'il est permis de discuter au
17 sein de la matière de la discipline qui s'appelle démographie, du sujet du
18 nettoyage ethnique en se disant en accord ou en désaccord avec la
19 définition de cette expression.
20 Mais, quoi qu'il en soit, il importe de dire quelle est la nature
21 qu'implique la démographie de guerre dans la catégorie nettoyage ethnique.
22 Si le Dr Tabeau est un démographe de guerre et qu'elle s'occupe de
23 démographie de guerre, je pense que je ne suis pas moins démographe de
24 guerre qu'elle, mais je n'ai pas connaissance de l'existence d'une
25 quelconque définition de la démographie de guerre pour le moment. Il serait
26 très utile pour moi que quelqu'un me dise ou m'apprenne quelque chose en me
27 disant : Eh bien, tout va bien, nous avons maintenant une nouvelle
28 définition au sein de la discipline de la démographie, et peut-être
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1 pourrais-je me dire en désaccord avec celle-ci, dans ce cas.
2 Q. Dans les pages qui suivent la page 36 854 du compte rendu d'audience,
3 donc à partir de la ligne 20 de la page 36 854 jusqu'à la page 36 855,
4 ligne 20, le Dr Tabeau est interrogée au sujet de la définition du
5 nettoyage ethnique utilisé par elle. Et voici ce qu'elle dit dans sa
6 déposition :
7 "Question : Pouvez-vous nous dire, Docteur, aux fins de l'établissement de
8 votre rapport relatif à Tomasica, quelle est la définition du nettoyage
9 ethnique que vous avez utilisée et que vous aviez à l'esprit en rédigeant
10 votre rapport ?
11 "Réponse : Je n'ai utilisé aucune définition particulière du nettoyage
12 ethnique. J'ai interprété un certain nombre de distributions démographiques
13 que je considère est capable d'illustrer et d'indiquer la présence de
14 nettoyage ethnique dans la zone examinée, à savoir dans la zone de la RAK
15 et de Prijedor, en particulier…"
16 Alors, avant de vous donner le reste de sa réponse, je vous demande si vous
17 avez un commentaire par rapport à ce que le Dr Tabeau dit jusqu'à ce
18 moment-là ?
19 R. Eh bien, elle formule des propos vraiment contradictoires. Elle
20 commence par dire qu'il n'existe pas de démographie définie comme
21 démographie de guerre, pour ajouter immédiatement dans la foulée, je n'ai
22 utilisé aucune définition particulière mais j'ai interprété des
23 distributions démographiques. Ce que le Dr Tabeau implique par ces termes
24 c'est que des distributions, des répartitions spécifiques ont été établies
25 sur la base de l'appartenance ethnique et non sur la base du nettoyage
26 ethnique. On peut établir des distributions de population sur la base de
27 l'appartenance ethnique et ensuite tirer un certain nombre de conclusions :
28 on commence par un élément, et on poursuit par les autres. Donc, s'agissant
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1 de cette réponse du Dr Tabeau, je ne sais pas comment je dois la
2 comprendre. Il s'avère qu'elle a utilisé une définition de la démographie
3 de guerre, qu'elle ne connaissait pas. Car nous savons qu'il n'existe pas
4 encore à l'heure actuelle de définition exacte de la démographie de guerre.
5 Q. Dans la suite du compte rendu d'audience, nous lisons ce qui suit :
6 "Le Juge Orie : Mais, Madame Tabeau, ceci exige une compréhension de la
7 façon dont vous entendez l'expression nettoyage ethnique, et je pense que
8 c'était la question que vous posait Me Ivetic.
9 "Le Témoin : Est-ce que je peux poursuivre, je vous prie.
10 "Le Juge Orie : Je vous en prie.
11 "Le Témoin : Je n'ai utilisé aucune définition particulière de l'expression
12 nettoyage ethnique. J'ai utilisé ma façon de comprendre le nettoyage
13 ethnique, que je considère comme centré sur un certain nombre d'actions
14 concernant un groupe déterminé de la population et conduisant à éradiquer
15 dans une grande part le groupe en question de la surface d'un certain
16 territoire, et je le considère comme établi à partir des distributions, des
17 répartitions de personnes portées disparues, en fonction de leur
18 appartenance ethnique, de leur âge, de leur sexe que j'ai interprété comme
19 venant appuyer, étayer, indiquer la présence de nettoyage ethnique sur le
20 territoire de la RAK."
21 Alors, Professeur, d'après la position généralement admise dans la pratique
22 des démographes professionnels en tant que collègue d'une autre démographe,
23 pouvez-vous commenter les propos du Dr Tabeau.
24 R. Eh bien, une personne qui travaille sur le plan professionnel dans un
25 certain domaine, on pourrait s'attendre à ce qu'elle fournisse une réponse
26 complète et correcte sur le plan scientifique, ce qui n'est pas le cas en
27 l'espèce. Parce que le Dr Tabeau affirme, je n'ai utilisé aucune définition
28 particulière, je me suis appuyée sur ma façon de comprendre l'expression.
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1 Nous ne savons pas quelle est sa façon d'interpréter, de comprendre
2 l'expression nettoyage ethnique. Elle avait le droit d'aboutir aux
3 conclusions qui sont les siennes mais il aurait fallu qu'elle les explique.
4 A mon avis, le nettoyage ethnique signifie qu'on a tué quelqu'un et,
5 d'ailleurs pas seulement des hommes âgés de 5 à 105 ans, mais y compris
6 d'autres catégories de la population.
7 Donc elle aurait dû définir quelle était sa façon de définir le nettoyage
8 ethnique. On ne peut parler de fondement scientifique que lorsque la
9 définition d'un champ professionnel de la démographie est définie. Mais
10 peut-être aurait-on pu admettre son interprétation si elle avait fourni une
11 définition et des arguments pertinents à l'appui de celle-ci. Mais se
12 contenter de dire que dans une expertise qui prétend être fondée
13 scientifiquement, alors qu'aucune explication, aucun argument n'est fourni
14 et qu'on ne s'appuie que sur la répartition de certaines structures sans
15 disposer de sources pertinentes pour expliquer ces répartitions, ces
16 distributions, lorsqu'on évoque que des distributions fondées sur
17 l'appartenance ethnique de membres de la population, comme le Dr Tabeau l'a
18 fait, sur la base d'une source unique qui est admise dans le monde
19 scientifique, à savoir le recensement de la population, et une source qui
20 n'est pas admise par les mêmes scientifiques, à savoir les listes
21 électorales, cela ne suffit pas.
22 Donc une telle distribution établie sur la base de telles sources n'est pas
23 reconnue en tant qu'élément pertinent où que ce soit dans le monde des
24 scientifiques. Mais elle aurait pu expliquer sa façon d'interpréter le
25 nettoyage ethnique et elle aurait pu dire pour quelles raisons elle était
26 d'accord ou pas d'accord avec d'autres sources relatives à la population
27 des survivants, par exemple, mais ça, ce serait un examen absurde, ou
28 relatives aux listes électorales qui ne sont pas des sources admises par le
Page 43713
1 monde scientifique où que ce soit dans le monde, donc je pense que
2 scientifiquement ses conclusions ne sont pas acceptables.
3 Q. Penchons-nous sur le rapport du Dr Tabeau, la pièce P7449, page 11 en
4 serbe, page 9 en anglais, dernière partie du paragraphe 2.8, où il est
5 question de méthodologie.
6 M. IVETIC : [interprétation] Il nous faudra la page 11 en serbe et 9 en
7 anglais. Je répète. Ah, je me suis peut-être trompé. Non, non, c'est bien
8 ça. La page 11 en serbe alors que c'est la page 7 qui s'affiche
9 actuellement à l'écran.
10 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que cela correspond, Maître
11 Ivetic ?
12 M. IVETIC : [interprétation] Je ne crois pas. J'essaie de voir où nous en
13 sommes pour pouvoir apporter mon concours éventuellement. Ah, --
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qu'on voit en bas de la page en
15 anglais se trouve en haut de la page en serbe.
16 Veuillez procéder.
17 M. IVETIC : [interprétation] Le paragraphe qui m'intéresse, c'est le
18 troisième à partir du haut en B/C/S dans la page affichée en B/C/S.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La même chose en anglais ?
20 M. IVETIC : [interprétation] En anglais, c'est le paragraphe qui commence
21 par "in this report, in the first place." Donc troisième paragraphe à
22 partir du sous-titre 2.8, et troisième paragraphe à partir du haut de la
23 page en B/C/S.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.
25 M. IVETIC : [interprétation]
26 Q. Donc, le paragraphe commence au bas de la page en serbe et se poursuit
27 dans la page suivante en serbe. Donc, ce paragraphe se lit comme suit :
28 "La méthodologie est simple mais puissante. Elle concerne strictement
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1 l'usage de sources fiables permettant de bénéficier d'un mélange de sources
2 diverses au cas par cas. En appariant et en mélangeant les sources, je
3 prête toujours particulièrement attention au risque d'utiliser deux fois la
4 même source."
5 Professeur, quel est votre commentaire par rapport à cette partie du
6 rapport du Dr Tabeau.
7 R. La méthodologie, c'est un élément très simple mais très puissant.
8 Qu'est-ce que signifie une méthodologie puissante ? Eh bien, il existe des
9 méthodologies scientifiques et non scientifiques. Dans le cadre de
10 recherche scientifique, dans le cadre de l'application d'une méthodologie
11 scientifique, il n'y a rien de puissant. On peut parler de méthodologie
12 scientifique, plus ou moins scientifique et non scientifique, mais le terme
13 "puissant" semble un terme global qui n'a guère de signification en
14 l'espèce. Ce n'est pas une explication.
15 Mais en s'appuyant sur l'ensemble des procédures utilisées, il est permis
16 de remarquer que cette méthodologie est particulière et ne concorde pas
17 avec la définition de méthodologie scientifique. Aucune méthodologie
18 puissante n'est appliquée dans le monde des professionnels scientifiques,
19 pour autant que je le sache, puisqu'il s'agit d'adapter un certain nombre
20 d'exclusions méthodologiques pratiquées par le monde scientifique aux
21 besoins de sa propre recherche. Par conséquent, lorsqu'on parle de
22 méthodologie simple, mais puissante, sans apporter d'explication
23 complémentaire quant à ce qu'on entend par là, il s'agit simplement de
24 l'emploi d'une phraséologie, d'une terminologie vide de sens. Je souligne
25 ce point, je dis bien qu'il n'y a aucune signification en l'absence
26 d'explication à l'utilisation d'un tel terme et qu'elle ne mène qu'à une
27 conclusion sélective en montrant qu'il s'agit d'un choix personnel
28 applicable aux objectifs qu'on fixe à sa propre recherche.
Page 43715
1 Q. Passons maintenant au document 1D6187, c'est un article du Dr Tabeau
2 datant de 2005, que l'on trouve en page 20 en serbe, page 22 en anglais, de
3 son rapport. Il se trouve au milieu de la page dans la version anglaise. Je
4 crois que c'est le cinquième paragraphe à partir du bas dans la version
5 serbe.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur File.
7 M. FILE : [interprétation] Un point secondaire. Je crois que le conseil de
8 la Défense a indiqué que cet article était de Mme Tabeau. Je crois que
9 c'est un article qui a été rédigé par Mme Tabeau et quelqu'un d'autre. Je
10 crois qu'il fallait que ceci soit consigné au compte rendu d'audience.
11 M. IVETIC : [interprétation] Cela se trouve au milieu de la page en B/C/S,
12 --
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi, vous voulez parler de quel
14 paragraphe ?
15 M. IVETIC : [interprétation]
16 Q. Le cinquième paragraphe à partir du haut. Cela doit se situer au milieu
17 de la page.
18 R. Ça y est, je le vois.
19 Q. "Les organisations internationales qui intervenaient en Bosnie, telles
20 que, par exemple, le CICR, l'ICMP et le HCR des Nations Unies, ont
21 contribué de façon très importante au processus qui consistait à collecter
22 des éléments d'information sur les personnes portées disparues pendant la
23 guerre, les morts, l'identification des victimes, ainsi que la migration
24 interne et externe. Les mandats de ces organisations, cependant, ont
25 d'autres objectifs majeurs que de fournir des informations statistiques sur
26 les victimes de guerre. Leurs contributions, par conséquent, ne peuvent pas
27 être perçues comme quelque chose qui remplacerait l'issue des études
28 statistiques normalement menées en temps de paix."
Page 43716
1 Le paragraphe suivant :
2 "Les contributions des organisations non gouvernementales (locales et
3 internationales) intervenant en Bosnie sont importantes et ont un sens,
4 mais pour les mêmes raisons que celles avancées ci-dessus, ne peuvent pas
5 être perçues comme des éléments d'information à même de remplacer les
6 statistiques normales."
7 Qu'est-ce que vous pensez de cela ?
8 R. Mme Tabeau sait exactement ce qui peut être considéré comme valable ou
9 non valable en termes de données officielles de démographie ou de taux de
10 mortalité dans les documents officiels. Dans cette étude qu'elle a menée,
11 et qui est un article à l'intention d'un public plus large et
12 professionnel, elle définit précisément ce qui doit être fait, et elle
13 parle de travaux effectués par les organisations internationales. Alors,
14 comment procède-t-on en général dans un cas comme celui-ci ? Dans les
15 analyses que j'ai regardées ou analysées, elle n'en informe pas les Juges
16 de la Chambre, et ces sources ou ces données qu'elle a obtenues auprès
17 d'organisations non gouvernementales ne peuvent pas remplacer les travaux
18 statistiques menés par ailleurs, parce que cela pourrait donner lieu à un
19 problème.
20 Donc, cette approche consiste à remettre en cause la qualité de l'expertise
21 en question. Si on ne peut pas mesurer ces éléments avec les données
22 officielles statistiques, à ce moment-là c'est une observation qui en
23 ressort, autrement dit, observation sur la qualité de l'expertise fournie.
24 Dans de nombreux rapports d'experts, y compris ce rapport, Mme Tabeau
25 précise que l'objectif consiste à fournir des données précises. Cependant,
26 elle ne fournit pas sa source.
27 Q. Page 4, s'il vous plaît, en serbe et en anglais, et je crois que cela
28 se situe au milieu de la page. Le paragraphe qui se trouve au milieu en
Page 43717
1 serbe, "Remarquez que les résultats de nos recherches…"
2 Je vais poursuivre la lecture du texte en anglais :
3 "Notez que les résultats de nos recherches ont été obtenus d'un projet qui
4 était quelque peu différent des travaux statistiques et universitaires
5 habituels. Notre point de vue était conforme à celui des rapports d'experts
6 remis aux Chambres de première instance au Tribunal pénal international
7 pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) dans le cadre de la présentation des éléments
8 de preuve à charge. L'objectif de tels rapports consistait à fournir aux
9 Chambres des statistiques de grande qualité sur la population pendant la
10 guerre, répondant ainsi au critère suivant 'au-delà de tout doute
11 raisonnable' et conforme au cadre du droit international humanitaire."
12 Madame, pour ce qui est de la pratique généralement admise par la
13 profession de démographe, quelle observation avez-vous à faire concernant
14 l'approche qui est citée ici dans cet article qu'elle a rédigé avec un
15 autre auteur ?
16 R. Mme Tabeau, à juste titre, précise que ceci n'est pas conforme aux
17 travaux universitaires habituels et explique ce à quoi ceci répond.
18 A moins que nous n'acceptions l'explication suivante, c'est-à-dire que
19 c'est conforme à ces que les Chambres de première instance du Tribunal
20 pénal international de l'ex-Yougoslavie ou l'Accusation exige, est-ce que
21 ce point de vue serait conforme avec celui de l'Accusation si cela s'écarte
22 des procédures professionnelles habituelles ? Il nous faut l'expliquer.
23 Lorsqu'elle note que les travaux de recherche ne sont pas conformes avec
24 les travaux universitaires habituels, que la source des données ne
25 correspond pas aux sources habituellement utilisées lors des travaux de
26 recherche de ce genre, est-ce que cela est conforme aux travaux
27 universitaires et comment ces sources fournissent des résultats qui ne sont
28 pas du tout en ligne avec les résultats officiels. Je ne sais pas quels
Page 43718
1 sont exactement les termes qu'elle utilise.
2 Comment peut-elle arriver à cette conclusion, à savoir que les
3 résultats soumis à l'Accusation sont de grande qualité et qu'ils répondent
4 aux exigences du Tribunal et sont conformes au droit pénal international ?
5 Je pense moi-même, et c'est une intime conviction, que les critères du
6 Tribunal, je suppose qu'il s'agit également des critères de l'Accusation,
7 ne peuvent être réunis ou ces critères ne peuvent être reconnus en tant que
8 critères et résultats qui sont fondés sur un plan scientifique, la
9 méthodologie qui est appliquée ici est celle d'une méthodologie utilisée
10 par le monde scientifique et le monde des chercheurs et les universitaires.
11 Si Mme Tabeau ne pense pas que ceci est conforme au droit pénal
12 international, alors je crois qu'il serait nécessaire qu'elle l'indique
13 dans une note de bas de page et qu'elle explique ce à quoi correspond le
14 droit le droit pénal international. Est-ce que ce droit reconnaît la
15 méthodologie de ce qui s'écarterait de toutes sortes de choses généralement
16 admises. Mais je crois que dans ce cas, à mon sens, ce serait préférable
17 d'un point de vue professionnel qu'elle réagisse de la sorte.
18 Je ne sais pas. Je n'avance pas cependant tout savoir. Je ne sais pas
19 si le droit international humanitaire insiste sur des rapports qui
20 s'écartent des conditions ou des normes scientifiques et professionnelles
21 et que cela peut être considéré comme acceptable lorsque ces éléments
22 figurent dans un rapport. Je ne sais pas -- au sujet du Tribunal, je ne
23 sais pas. Ce que je veux dire, c'est que je ne sais pas. Et peut-être Mme
24 Tabeau le sait et peut-être qu'elle pourrait nous l'expliquer, nous
25 expliquer quelle méthodologie particulière elle a utilisée et quelle est
26 cette méthodologie scientifique qui est importante aux yeux du Tribunal et
27 aux yeux de l'Accusation, ou sur quelle base elle a utilisé une
28 méthodologie particulière.
Page 43719
1 Et ce qui est très intéressant, en fait, par rapport à cette note de
2 bas de page, comment peut-elle expliquer que cela répond aux critères ou
3 aux conditions du Tribunal ? Alors, quels sont ces critères et qu'est-ce
4 qui répond à ces critères ? Alors, je peux vous fournir une explication
5 partielle concernant Srebrenica. Je vous l'ai déjà dit. On considère qu'un
6 nombre important, même si le Tribunal ne dit jamais où, quels sont les
7 éléments qui répondent aux critères du Tribunal.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je vous poser une question ?
9 Vous avez lu une partie et vous avez commenté en fournissant une réponse
10 fort longue. Quelles sont les conclusions de Mme Tabeau ? Et quelles sont
11 les conclusions qu'elle tire du fait que les travaux universitaires
12 statistiques ne peuvent pas être appliqués ici et, en tout cas, la
13 méthodologie ? Qu'est-ce qui vous fait dire cela par rapport à ce
14 paragraphe ? Veuillez nous le dire.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, elle établit la différence entre ce
16 qu'on applique dans le monde scientifique et ce qu'on applique dans un
17 monde juridique. Alors, elle utilise telle et telle source, c'est ce
18 qu'elle dit. Mais notre rapport d'expert a été rédigé sous l'angle de tel
19 et tel élément.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, qu'est-ce que vous devriez faire,
21 alors, d'après elle, d'après ce qu'elle dit ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Elle ne dit rien du tout dans ce rapport sur
23 ce qui devrait être fait. Cependant, elle présente --
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais parler de l'article.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'article qu'elle a publié dans un
26 journal professionnel, elle n'a pas expliqué ce qui devait être fait.
27 Mais permettez-moi de vous fournir une brève explication. Elle a
28 simplement dit qu'elle allait présenter les victimes en temps de guerre.
Page 43720
1 Elle a dit, voilà, nous devrions procéder ainsi, mais nous avons procédé de
2 façon différente.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, je vais reformuler ma question.
4 Alors, dans ce rapport qui suit le passage qui vous a été lu, elle écrit :
5 "La première condition préalable consiste à poser les questions suivantes,
6 les sources que l'on peut remettre en cause, qui sont lacunaires, qui sont
7 incomplètes, ou les causes de décès individuel de cette nature sont exclus
8 de nos statistiques."
9 J'aurais dû utiliser le terme de "cas", pardonnez-moi.
10 D'après ce que j'ai compris, si vous utilisez une méthode
11 inhabituelle, dans ce cas, il faut faire très attention lorsque vous
12 excluez des sources comme elle l'écrit, des sources qui sont lacunaires,
13 incomplètes.
14 C'est apparemment la conclusion qu'elle tire. Est-ce quelque chose
15 que vous jugez sage de faire en de telles circonstances ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Tout d'abord, il s'agit de sources qui ne
17 sont jamais utilisées dans le cadre de recherches scientifiques; j'entends
18 ce qu'écrit Mme Tabeau. Et ensuite, elle dit qu'elle n'utilise pas ceux qui
19 sont en général habitués, mais ensuite, elle pose des conditions préalables
20 et il s'agit, par exemple, d'exclure les doublons.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous dites que des sources que
22 l'on remet en cause, qui sont lacunaires et incomplètes, est-ce que vous
23 faites référence à des doublons lorsque vous dites cela ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ce que l'on entend par là, ce sont les
25 sources insuffisantes que l'on peut remettre en cause et incomplètes de la
26 Croix-Rouge, de l'ICMP, et cetera, qui contiennent, entre autres choses,
27 des doublons. Et ces sources-là qui sont utilisées par le professeur sont
28 des sources qui sont vérifiées. Et lorsque vous tombez sur des doublons,
Page 43721
1 dans certains cas, effectivement, au niveau de la Croix-Rouge et d'autres
2 sources, vous avez une personne qui réapparaît plusieurs fois, car
3 l'information a été fournie par différents proches de la famille. Alors, si
4 vous prenez le cas d'une personne qui est enregistrée une, deux, trois ou
5 quatre ou cinq fois, à ce moment-là il faut garder cette mention dans un
6 rapport et non pas cinq fois. Les sources incomplètes ne sont généralement
7 pas utilisées dans le domaine démographique.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
9 Veuillez poursuivre.
10 M. IVETIC : [interprétation]
11 Q. Alors, je souhaite que nous revenions à votre rapport, le 1D6184, page
12 14 de l'anglais et page 18 du serbe.
13 Au paragraphe 35, vous posez une question :
14 "Quel est le sens au plan des spécialistes et du monde scientifique et
15 quelle est la valeur réelle des résultats obtenus des travaux de recherche
16 qui sont différents des travaux statistiques et universitaires habituels,
17 qui ne peuvent pas être comparés à une quelconque méthodologie scientifique
18 ou méthodologie de spécialistes reconnus dans le monde des statisticiens et
19 des démographes ?"
20 Qu'est-ce que vous pensez de cela ?
21 R. Ce que j'entendais par là, c'est que Mme Tabeau a dû expliquer cela.
22 Etant donné qu'elle ne l'a pas expliqué, je pose cette question que je
23 soumets aux Juges de la Chambre, même si je ne suis pas en droit de le
24 faire. Mais ma réponse consisterait à dire que toutes ces conclusions sont
25 suspectes, qu'elles ne sont pas fondées sur un plan scientifique, et que
26 Mme Tabeau explique cela très bien dans ses travaux mais ne l'explique pas
27 dans le rapport. Je ne sais pas si c'est seulement Mme Tabeau qui affirme
28 que ses travaux de recherche sont sûrs mais ne sont pas effectués en
Page 43722
1 fonction des règles généralement admises sur un plan scientifique, cela
2 n'est pas fondé. Donc la réponse à cette question est forte importante.
3 Q. Dans le paragraphe suivant, vous posez une autre question :
4 "Dans quelle mesure le projet des experts est-il différent des travaux
5 académiques des statisticiens, pourquoi ceci donne-t-il lieu à une
6 déformation des informations ?"
7 R. Mme Tabeau dit toujours qu'il y a des différences. Cela signifie qu'il
8 peut y avoir des différences très importantes ou moins importantes, que ces
9 différences sont négligeables ou pas. Je ne pense pas qu'il s'agit ici de
10 différences négligeables. A mon sens, il s'agit de différences fort
11 importantes. Et si ces différences existent aux yeux de Mme Tabeau, ou si
12 elle considère qu'il s'agit de différences mineures, eh bien, elle devrait
13 répondre à la question de savoir dans quelle mesure ces différences
14 permettent d'avancer des données correctes ou, au contraire, est-ce que
15 ceci conduit à une déformation des données.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, si je vous ai bien compris,
17 dans votre réponse vous dites que ce projet contribue grandement à avancer
18 des éléments d'information erronés. Est-ce ainsi que je dois comprendre
19 votre réponse ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faudrait que j'analyse tous les projets
21 maintenant.
22 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine anglaise : Le témoin peut-elle répéter la
23 dernière phrase de sa réponse.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez répéter votre réponse, s'il
25 vous plaît.
26 L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine anglaise : Veuillez vous
27 éloigner du microphone, s'il vous plaît.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous éloigner du microphone.
Page 43723
1 C'est ce que nous demandent nos interprètes.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que le projet a contribué à fournir
3 des éléments d'information incorrects, cela concerne non seulement le
4 projet de Tomasica, cela concerne la modification de la structure ethnique,
5 le nombre de décès avancé, et ce, de façon affirmative, alors les éléments
6 trouvés dans les sources données, si ces sources de données avaient été
7 traitées professionnellement et si cela ne portait pas sur un trop grand
8 nombre mais sur des données que l'on aurait pu prouver de façon fiable et
9 définitive, les résultats auraient été beaucoup plus acceptables.
10 Mais, ces projets ou ces rapports montrent clairement que ce qui a été le
11 plus important de tout, c'était de présenter le plus grand nombre. Moi, je
12 ne peux pas affirmer que certains paragraphes de certains rapports ne sont
13 pas acceptables, mais je peux affirmer qu'avec un certain degré de
14 certitude que certaines parties ou des parties plus importantes des
15 rapports d'expert sont tout à fait inacceptables sur un plan purement
16 méthodologique.
17 M. IVETIC : [interprétation]
18 Q. Alors, que souhaitez-vous dire par rapport à cette question, s'il vous
19 plaît ?
20 R. A aucun endroit de ce rapport Mme Tabeau ne donne-t-elle son avis sur
21 le degré de fiabilité des résultats. Dans ce rapport-ci et dans d'autres
22 rapports, il serait logique de parler d'un certain niveau de fiabilité, que
23 l'on peut avancer en se fondant sur les sources qu'on utilise. Si Mme
24 Tabeau avait apprécié à sa juste valeur les données qu'elle a utilisées, si
25 elle avait travaillé de façon professionnelle, elle aurait pu dire qu'il y
26 a de nombreux champs qui sont vides ou des données qui sont manquantes,
27 mais cela, elle ne le dit jamais comme le ferait un statisticien ou un
28 démographe.
Page 43724
1 A certains endroits, elle dit 1 200 éléments d'information par- ci ou par-
2 là ne sont pas corrects, mais l'un dans l'autre à la fin de son rapport,
3 elle accepte tous les éléments.
4 Dans ce rapport, par exemple, elle parle de la Croix-Rouge et elle dit que
5 la Croix-Rouge a omis certaines données, qu'il y a encore des champs
6 vierges. Le registre des décès, effectivement, comporte de nombreuses
7 lacunes, et ensuite elle dit que la moitié des personnes enregistrées dans
8 le registre des décès, je crois que ça correspond à 50 % pour lesquels on
9 n'indique pas le lieu du décès. Mais je peux vérifier cela.
10 Et si vous fusionnez ces deux sources, eh bien, elles deviennent
11 acceptables. Comment peut-on obtenir une bonne source à partir de deux
12 mauvaises sources ? Tout ce que je peux en conclure, c'est que ceci peut
13 arriver car c'est Mme Tabeau qui a procédé à l'appariement. Ce que je n'ai
14 pas trouvé dans le registre des décès de Prijedor, eh bien, je vais le
15 trouver dans le registre de la Croix-Rouge. Donc, encore une fois, nous
16 sommes confrontés au problème de ne pas savoir comment elle a procédé à
17 l'appariement. Dans aucun des rapports elle ne parle des critères qu'elle a
18 utilisés, pour déplacer les données, pour appareiller les données, voici
19 les trois ou cinq critères que je vais utiliser. Dans ce rapport, elle dit
20 simplement : Conformément à la méthodologie déjà utilisée pour Srebrenica,
21 c'est-à-dire que 72 critères ont été utilisés, si vous utilisez 72
22 critères, vous pouvez appareiller ce que vous voulez.
23 Q. Ecoutez, nous allons parler du critère. Je souhaite parler maintenant
24 du "niveau de fiabilité" et, dans le domaine démographique, comment
25 apprécie-t-on le niveau de fiabilité ?
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin peut réfléchir à cela pendant
27 la pause.
28 Madame, je vous demande de bien vouloir vous concentrez sur la question et
Page 43725
1 fournir des réponses en conséquence plutôt que de vous écartez de la
2 véritable question.
3 Vous pouvez suivre l'huissier.
4 [Le témoin quitte la barre]
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, est-ce que vous pouvez
6 faire en sorte que votre témoin réponde à vos questions, parce que la
7 question que vous avez posée maintenant est très semblable à la question
8 que vous avez posée précédemment et aucune réponse n'a apparemment été
9 donnée. Donc la question par rapport à la réponse ne semble pas être en
10 phase.
11 Nous allons faire une pause, et reprendre à 13 heures 40.
12 --- L'audience est suspendue à 13 heures 21.
13 --- L'audience est reprise à 13 heures 42.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, la Chambre a été
15 informée que vous souhaitiez évoquer une question de procédure. Pouvons-
16 nous en traiter en audience publique ?
17 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, veuillez procéder.
19 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 Je voudrais informer la Défense aujourd'hui que je souhaite vraiment parler
21 de cette question en ce moment, car je considère que je n'ai pas eu
22 d'indication sur le reste des horaires de la semaine, et j'ai estimé que
23 c'était une question qu'il importait de traiter le plus rapidement possible
24 dans le cadre des efforts permanents que nous accomplissons pour conclure
25 rapidement l'espèce, et je le fais d'ailleurs à l'invitation de la Chambre
26 de première instance dans le cadre de ses récentes décisions sur le
27 versement au dossier de certains documents de façon automatique, en
28 particulier à la référence de la Chambre, numéro 9, paragraphe 14, où nous
Page 43726
1 sommes invités à présenter nos arguments dans le respect des délais et du
2 versement au dossier des documents dans le contexte des requêtes dont le
3 versement est demandé automatiquement.
4 Alors, je note au préliminaire que mon intervention actuelle traite de la
5 question du temps, et pas du caractère adapté ou même de la nécessité de
6 faire verser un certain nombre de documents au dossier. Je veux parler des
7 documents proposés par la Défense -- ou plutôt, excusez-moi, par
8 l'Accusation, dans le but de contextualiser ou de préciser un certain
9 nombre de documents dont la demande de versement a été présentée par la
10 Défense.
11 Nous considérons qu'étant donné la pratique en l'espèce dans des
12 questions similaires et, en particulier, compte tenu du message reçu de la
13 Chambre dans ses récentes décisions, ces questions concernant le
14 déroulement du temps ne concernent pas le problème de la recevabilité ou de
15 l'admissibilité des documents en soi.
16 Nous considérons que la réponse à cette question repose sur la
17 distinction entre objection à un versement et processus particulier du
18 versement, indépendamment du fait que les deux peuvent être des vecteurs
19 d'admission en tant qu'élément de preuve qui, finalement, jettent une
20 certaine lumière sur la valeur probante qu'il convient d'accorder aux
21 documents dont la demande de versement a été faite par la Défense.
22 Ainsi, la réplique constitue et renvoie à des éléments de preuve
23 présentés par une partie dans le but de contredire ou d'annuler l'élément
24 de preuve présenté par l'autre partie. A présent, il est nécessaire de
25 respecter un processus séquentiel; c'est-à-dire qu'on ne peut pas répliquer
26 à un élément de preuve tant qu'il n'a pas encore été admis. Et, comme nous
27 le savons tous, le processus de versement au dossier ajoute la nécessité
28 d'une base séquentielle, étant donné les aspects définis ou les phases
Page 43727
1 atteintes dans le cadre de l'espèce.
2 Alors, ceci se distingue d'un processus de demande de versement au
3 dossier de documents parce que ce processus, la question impliquant de
4 prendre en compte l'admissibilité d'un document et l'admission possible de
5 documents similaires, implique nécessairement de se pencher sur d'autres
6 documents dont la demande de versement n'a pas encore été faite. La Chambre
7 de première instance elle-même a connaissance de cette différence et l'a
8 évoquée dans ses demandes de versement direct numéro huit et neuf
9 lorsqu'elle a fait référence aux facteurs qu'il convenait de prendre en
10 compte en rapport avec l'admissibilité de ces documents; leur valeur
11 probante, leur fiabilité, et cetera. Je tiens également à faire remarquer
12 que c'est l'approche qui a été adoptée et mise en œuvre par la Chambre
13 Karadzic lorsqu'elle s'est penchée sur les demandes de versement direct
14 présentées par la Défense lorsque a été abordée la question d'autres
15 clarifications concernant des documents apparentés aux documents soumis par
16 la Défense et lorsque, dans de nombreux cas, l'admission de ceux-ci a été
17 refusée s'agissant des demandes de versement de la Défense sur la base que
18 je viens d'indiquer, dans au moins un cas, la Chambre a admis la demande de
19 versement de documents de la Défense après contextualisation par
20 présentation d'un certain nombre d'autres documents venant de l'Accusation.
21 En bref, nous considérons que le processus d'admission des éléments de
22 preuve qui inclut la prise en compte d'autres documents, de documents
23 tiers, qui ne sont pas les documents dont la demande de versement a été
24 faite, et l'admission possible de ces documents apparentés, fait partie
25 d'un processus intégral qui est distinct du processus de réplique, en dépit
26 du fait que les deux processus sont des vecteurs d'admission d'éléments de
27 preuve.
28 Je tiens à dire à cet égard que si la Chambre de première instance devait
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1 conclure au fait que les documents présentés par l'Accusation n'étaient pas
2 liés aux documents dont la demande de versement est présentée par la
3 Défense de la façon que je viens d'indiquer, les documents en question
4 pourraient faire l'objet d'une réplique.
5 Et enfin, je tiens à demander à la Chambre de première instance de faire de
6 son mieux pour compléter ses décisions au sujet des demandes de versement
7 direct le plus tôt possible et, en tout cas, avant la conclusion ou avant
8 le début de la semaine du 30, car nous avons besoin que ce soit le cas en
9 raison des ressources dont nous disposons.
10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le 30 avril, vous voulez dire ?
11 M. TIEGER : [interprétation] Je veux parler de la fin de la présentation
12 des moyens de preuve de la Défense.
13 Je pense qu'il est clair que cela rendrait le processus beaucoup plus
14 efficace pour les parties et éviterait que nous nous trouvions en train de
15 débattre de questions relatives aux éléments de preuve alors que nous
16 serions proches des dernières étapes de l'espèce et, en particulier,
17 proches de la date où il convient de présenter réquisitoires et
18 plaidoiries.
19 Donc, je vous remercie pour votre temps, Monsieur le Président, et
20 j'espère que vous comprenez que l'Accusation a choisi d'évoquer cette
21 question en ce moment même.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic.
23 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que ce ne sera
24 une surprise pour personne de me voir déclarer que j'ai essayé d'élaborer
25 la réponse dans les délais prévus --
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Personne ne vous attend à répondre
27 autrement que vous ne l'avez annoncé précédemment.
28 M. IVETIC : [interprétation] Donc, je vais retarder ma réponse et, vers la
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1 fin de la semaine, je reviendrai peut-être devant vous par écrit, ce qui
2 permettra de gagner du temps pour la Chambre.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cela nous donnera également la
4 possibilité de lire vos écritures, Monsieur Tieger, parce que c'est un
5 sujet un peu délicat, entre documents qui ont des liens les uns avec les
6 autres ou nécessité de clarification, et le rapport avec les délais, est-ce
7 qu'il faut le faire maintenant ou est-ce qu'il faut le faire au moment de
8 la phase de réplique, c'est apparemment la question --
9 M. TIEGER : [interprétation] Compris, Monsieur le Président. J'aimerais
10 peut-être également identifier un aspect plus positif. Dans tout ce que je
11 viens de dire, je suis certainement d'accord sur le fait qu'il y a des
12 documents qui, manifestement, devraient être abordés en dernier, et
13 d'autres qui sont dans une situation un peu plus nuancée, plus difficile.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si la Défense pouvait répondre
15 brièvement jeudi, et non vendredi, cela nous donnerait un temps suffisant
16 pour examiner la question.
17 Peut-on faire entrer le témoin dans la salle.
18 [La Chambre de première instance se concerte]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une question pratique, toutefois, que
20 j'aimerais peut-être aborder maintenant. Je pense que M. Segers devait être
21 entendu jeudi, n'est-ce pas, si je ne me trompe, et cette date avait été
22 fixée en raison de la nécessité d'interprétation particulière.
23 M. IVETIC : [interprétation] C'est exact.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, je pense que nous devrions
25 respecter cette date pour son audition. Il y a une bonne chance que nous ne
26 concluions pas la déposition de Mme Radovanovic cette semaine. Par
27 conséquent, nous devrions poursuivre avec M. Segers et interrompre
28 l'audition de Mme Radovanovic jeudi.
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1 M. IVETIC : [interprétation] C'est exact. Si je comprends bien la
2 situation, les interprètes de langue néerlandaise sont nécessaires pour
3 l'audition de M. Segers, donc il conviendrait de commencer et de terminer
4 son audition jeudi, avant de revenir ensuite à la déposition du Pr
5 Radovanovic.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est clair.
7 [Le témoin vient à la barre]
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et je demanderais aux parties, je
9 m'adresse donc également à l'Accusation, de s'efforcer de maintenir le
10 témoin sur les rails lorsqu'elle répond aux questions qui lui sont posées,
11 plutôt que de l'autoriser à fournir de longues explications sans lui
12 demander de revenir à la question qui lui est posée.
13 Je vous dis cela à vous aussi, Monsieur File, car j'ai vu que votre
14 estimation de temps est assez longue. Donc, je vous prierais de bien
15 vouloir réfléchir une nouvelle fois à d'éventuelles possibilités de réduire
16 cette durée.
17 M. FILE : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges. J'agirai
18 le plus efficacement possible.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, veuillez procéder.
20 M. IVETIC : [interprétation]
21 Q. J'ai été invité à tenter de vous demander de fournir des réponses le
22 plus courtes et le plus concises possible, de façon à ce que nous puissions
23 en terminer des diverses parties qui restent encore à accomplir dans votre
24 déposition.
25 Donc, je vais essayer de raccourcir mes questions et de vous demander
26 simplement ce qui suit : de quelle manière le degré de fiabilité s'exprime-
27 t-il dans un ouvrage de démographe ?
28 R. Eh bien, avant tout, on parle d'un jugement de la qualité des sources
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1 que l'on utilise et des indicateurs démographiques qui reposent sur ce
2 qu'on a découvert et ce qu'on sait avec exactitude, en particulier des
3 indicateurs démographiques concernant la mortalité.
4 Q. Dans quel format le degré de fiabilité est-il présenté dans un ouvrage
5 de démographie ?
6 R. Eh bien, on peut présenter le degré de fiabilité sous forme numérique,
7 pour commencer, c'est-à-dire qu'on cite un taux d'erreur qui se monte à tel
8 ou tel pourcentage. Et puis, bien entendu, j'admets que les erreurs
9 dépendent des caractéristiques et de la source dont la qualité peut être
10 plus ou moins valable. Plus la qualité de la source est bonne, plus le
11 nombre d'erreur, le pourcentage d'erreur est limité.
12 Q. Page 36 819, ligne 22, jusqu'à la page 36 822, ligne 14 du compte rendu
13 d'audience, le Dr Tabeau a témoigné sur ce sujet dont nous parlons
14 maintenant. Nous allons prendre les éléments de sa déposition un par un
15 pour essayer de maintenir notre débat le plus concis possible.
16 La première question posée au Dr Tabeau et les réponses qui s'en sont
17 suivies se lisent comme suit :
18 "Question : Ne serait-ce pas une pratique acceptée dans le domaine de la
19 démographie que d'affecter un degré de fiabilité à une source particulière
20 que l'on utilise et de faire connaître ce degré de fiabilité dans le
21 rapport que l'on rédige ?
22 "Réponse : Oui, Maître Ivetic, absolument."
23 Par rapport à cela, Professeur, est-ce que vous êtes d'accord avec le
24 Dr Tabeau ?
25 R. Oui.
26 Q. Est-ce que le rapport du Dr Tabeau sur Tomasica fournit un quelconque
27 degré de fiabilité eu égard à l'ensemble des sources qu'elle a utilisées
28 pour rédiger son rapport, comme vous vous seriez attendu à le voir faire
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1 par l'un ou l'autre de vos collègues travaillant dans le domaine de la
2 démographie ?
3 R. En partie. Dans la plupart des cas, elle décrit des insuffisances. Par
4 exemple, s'agissant du registre des décès de Prijedor ou de la Croix-Rouge
5 internationale, elle affirme qu'il y a encore de nombreuses insuffisances
6 et quelques erreurs dans ces documents. Mais elle n'apporte pas ce que
7 j'aurais jugé courant d'apporter dans cette situation, c'est-à-dire une
8 appréciation de la qualité de ces documents, notamment du registre des
9 décès de Prijedor. Elle indique simplement de façon globale que la source
10 peut être admise dans son intégralité ou pas alors, qu'en fait, ce qu'elle
11 a fait, c'est combiner deux sources qui seraient au départ jugées
12 acceptables par des scientifiques démographiques pour rédiger un rapport
13 qui fournit une description inacceptable.
14 Q. Avant de poursuivre sur cette déposition du Dr Tabeau, qu'estimez-vous
15 être une étude démographique acceptée ? Quel degré de fiabilité est exigé
16 pour un ouvrage de démographe qui pourrait être considéré comme acceptable
17 dans le cadre d'un travail scientifique ? Pour que le travail du démographe
18 soit considéré comme acceptable, quel est le degré de fiabilité qui est
19 exigé de la source ?
20 R. Le pourcentage d'erreur doit se situer entre 2 et 5 % en général, pour
21 les sources.
22 Q. Alors, dans la suite de la déposition du Dr Tabeau, dans les pages du
23 compte rendu d'audience que j'ai identifiées il y a quelques instants, nous
24 arrivons à la deuxième qui est lui est posée qui se lit comme suit :
25 "Question : Pourriez-vous, je vous prie, m'aider dans ces conditions en me
26 disant pourquoi vous êtes dans l'incapacité de citer un degré de fiabilité
27 associé aux données démographiques de l'ICMP ?
28 "Réponse : Eh bien, oui, et ceci est dû à une raison simple, à savoir que
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1 je ne me suis pas appuyée sur cette source. Lorsque j'ai discuté des
2 renseignements concernant les disparitions des victimes, je me suis surtout
3 appuyée sur les rapports et documents du CICR que j'ai combinés avec les
4 documents tels que le registre des personnes portées disparues à Prijedor,
5 et je ne me suis pas appuyée particulièrement sur les renseignements
6 relatifs aux disparitions de personnes fournies par l'ICMP."
7 Est-ce que vous avez un commentaire par rapport à cela, Professeur ?
8 R. Oui. Elle aurait pu fournir son évaluation des documents du CICR, sans
9 peut-être les décrire dans le détail, mais au moins en disant "tel et tel
10 document, je le considère comme acceptable, comme de bonne qualité". Elle
11 fournit une appréciation descriptive pour 2005 en déclarant qu'entre 2000
12 et 2005, il y a encore un certain nombre de champs qui sont manquants, et
13 je ne fais que paraphraser.
14 Q. J'aimerais m'en tenir à l'évolution des réponses du Dr Tabeau.
15 Dans la question suivante posée par le Dr Tabeau, toujours dans les
16 pages du compte rendu que j'ai citées tout à l'heure, nous trouvons ce qui
17 se lit comme suit :
18 "Question : Etes-vous en mesure de définir un degré de fiabilité par
19 rapport aux autres sources sur lesquelles vous vous êtes appuyée ?
20 "Réponse : Eh bien, cela dépend de ce qu'on veut que je fournisse. Si
21 vous souhaitez un chiffre, un simple numéro, alors, je ne dispose pas d'un
22 tel numéro, d'un tel chiffre. Mais j'ai un avis sur la fiabilité, aussi
23 bien des documents du CICR que du registre des personnes portées disparues
24 de Prijedor. J'ai travaillé avec le CICR, en particulier, depuis plusieurs
25 années, et à plusieurs reprises, j'ai étudié la fiabilité de la liste du
26 CICR et apprécié cette liste comme étant tout à fait fiable. C'est une
27 réalité même si ces listes ne sont pas dépourvues de certains blancs sur
28 certaines données ou de certaines insuffisances comme, par exemple, la
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1 présence de dates de naissance inexactes pour certaines victimes. Ça, ce
2 sont des questions, des problèmes que l'on trouve effectivement dans ces
3 listes."
4 Professeur, qu'est-ce que vous pourriez dire à titre de commentaire par
5 rapport à cette partie de la déposition du Dr Tabeau, en particulier
6 lorsqu'elle évoque le facteur de fiabilité qu'elle est incapable d'exprimer
7 sous forme numérique ?
8 R. Le degré de fiabilité peut toujours s'exprimer sous forme numérique.
9 Mais lorsque le Dr Tabeau déclare je n'ai pas de chiffres à vous donner,
10 mais seulement une opinion, sur quoi appuie-t-elle son opinion pour parler
11 de taux d'erreurs relatif d'une source particulière ? Si elle dit il y a
12 encore quelques insuffisances, mais l'ensemble est acceptable, ou bien est-
13 ce qu'elle dit que l'ensemble est inacceptable ? Si les erreurs se montent
14 à 1 %, qu'est-ce qu'il en est par rapport à la situation où le taux
15 d'erreur est de 30 %, et de quelle source s'agit-il ? Cela signifie qu'on
16 peut fonder son avis, son opinion sur des paramètres de fiabilité qu'on
17 utilise pour évaluer la qualité d'une source particulière, mais il faut
18 dire quels sont ces paramètres.
19 Q. Dans la suite de la déposition du Dr Tabeau, toujours dans les mêmes
20 pages du compte rendu d'audience citées par moi il y a un instant, nous
21 lisons ce qui suit :
22 "Question : D'accord. Vous nous avez parlé de la liste du CICR. Mais qu'en
23 est-il des autres sources que vous avez utilisées ? Pouvez-vous nous citer
24 votre appréciation, en termes de démographe spécialisée, quant à la qualité
25 ou à la fiabilité des autres sources que vous avez utilisées aux fins de la
26 rédaction de votre rapport sur Tomasica ?
27 "Réponse : La source la plus importante est, bien entendu, la liste de
28 l'ICMP où les notes officielles appariées avec renseignements sur l'ADN, et
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1 il ne fait aucun doute que j'évalue hautement les rapports de l'ICMP, la
2 liste en question est fiable, je n'ai aucune raison de la mettre en doute.
3 "L'ICMP a été utilisé à plusieurs reprises. J'ai utilisé la liste ICMP à
4 plusieurs reprises, dans des situations diverses. Malheureusement, je dois
5 encore parler de Srebrenica, Maître Ivetic, car c'est Srebrenica qui a été
6 l'affaire la plus importante ayant donné lieu à l'utilisation de ces
7 listes, mais dans d'autres affaires. J'ai utilisé le registre des personnes
8 portées disparues en tant que source locale dans la municipalité de
9 Prijedor. Cette source est moins fiable que la liste du CICR, mais elle
10 recoupe largement les listes du CICR; toutefois, il y a un grand nombre
11 d'autres défauts dans ce registre des personnes portées disparues de
12 Srebrenica comme, par exemple, un certain nombre d'éléments d'information
13 absents ou des erreurs concernant les dates de naissance.
14 "J'ai également étudié le recensement de 1991, que j'ai à plusieurs
15 reprises apprécié dans le cadre d'autres projets qui sont en rapport avec
16 mon témoignage de novembre 2013. J'ai utilisé également la totalité de la
17 base de données intégrée sur la mortalité, qui est une source permettant de
18 croiser les renseignements relatifs aux personnes portées disparues et de
19 vérifier si les annonces de disparition correspondent d'après plusieurs
20 sources afin d'exclure la possibilité qu'un survivant ou une survivante de
21 Tomasica ait été confirmé comme personne décédée.
22 "Question : Mais qu'en est-il du facteur de fiabilité, du pourcentage de
23 fiabilité ? Vous me dites ce que vous avez utilisé, je crois, dans votre
24 rapport. Je m'interroge sur le pourcentage de fiabilité, par exemple, du
25 recensement de 1991 ou de la base de données intégrée sur la mortalité dont
26 vous venez de parler. Pourriez-vous répondre à cette question."
27 Et la réponse du Dr Tabeau se lit comme suit :
28 "Eh bien, encore une fois, je ne peux pas vous citer un chiffre particulier
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1 entre un et dix, par exemple, parce que je ne possède pas une échelle de ce
2 genre. Mais je déclare que le recensement de 1991, par exemple, même s'il
3 présente un certain nombre de problèmes, est une source très utile si l'on
4 veut vérifier et améliorer la validité des éléments d'information fournis
5 par d'autres sources. Etant donné que l'Unité de démographie a investi
6 beaucoup de temps et beaucoup d'efforts pour éliminer les erreurs du
7 recensement et améliorer la liste des noms que l'on trouve dans le
8 recensement, il a fallu plusieurs années pour élaborer une version qui
9 pourrait être utilisée de façon fiable aux fins de notre travail, et
10 honnêtement, je considère que le recensement de 1991 est aujourd'hui une
11 source d'information très fiable, une source d'information très fiable qui
12 m'a aidée à prendre des décisions relatives à un grand nombre d'éléments
13 comme, par exemple, lorsqu'il a fallu apparier les données, d'abord, et
14 puis également lorsqu'il y avait des contradictions entre différentes
15 listes ou des contradictions concernant les lieux de résidence, les lieux
16 de disparition, l'appartenance ethnique, l'âge et de très nombreux autres
17 aspects que j'ai examinés pour rédiger mes rapports. Vous savez, une base
18 de données intégrée, c'est une base de données très importante, très
19 volumineuse, qui est établie à partir de plusieurs sources différentes --
20 "Question : Mais quelle en est la fiabilité, Madame ?
21 "Réponse : A mon avis, la fiabilité est importante."
22 Alors, Professeur, en tant que praticienne de la démographie, qu'est-ce que
23 vous auriez à dire au sujet des questions et des réponses fournies par le
24 Dr Tabeau à ces questions dans les passages que je viens de citer ?
25 R. Dans la majeure partie de ses explications, le Dr Tabeau vous parle du
26 recensement de la population de 1991 en déclarant que ce recensement est
27 tout à fait fiable, et je suis absolument d'accord avec elle sur ce point.
28 C'est un document extrêmement fiable. Je suis sûre que l'institution s'est
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1 occupée de travailler sur la réduction du pourcentage d'erreurs.
2 Toutefois, les noms, prénoms, prénoms du père, ne sont pas des données
3 statistiques, et le Dr Tabeau affirme avoir perdu du temps pour corriger
4 des données statistiques. Il n'existe pas d'autres sources auxquelles nous
5 pourrions nous référer pour ce faire et pour lesquelles nous pourrions dire
6 les corrections apportées ont été bonnes ou n'ont pas été bonnes dans le
7 recensement, 40 % des noms, des prénoms, des prénoms du père, ont été
8 corrigés, quelque part il y avait des erreurs de frappe, certaines, après
9 correction, ont donné des noms de famille complètement différents de ceux
10 qui étaient cités initialement, et cetera, et cetera. On doit toujours
11 garder à l'esprit que le recensement d'une population se fait en caractères
12 latins et en caractères cyrilliques, donc le passage du cyrillique aux
13 caractères latins peut créer un certain nombre d'erreurs. Sur le plan
14 professionnel, il aurait été correct de dire nous avons apporté des
15 corrections sur 30 %, 50 %, 60 % du recensement, ou bien sur 2 % des noms
16 et des prénoms.
17 Et puis, autre chose encore en dehors des noms pour déclarer que le
18 recensement est une source fiable. Le Dr Tabeau a utilisé le recensement
19 dans le but de comparer les données de celui-ci avec les données de la
20 Croix-Rouge. Par exemple, la personne dont elle voyait le nom apparaître
21 sur les listes de la Croix-Rouge, eh bien, elle retenait ce nom et elle
22 vérifiait si ce nom figurait dans le recensement, et pour Srebrenica, elle
23 a utilisé cette méthode pour établir que des personnes dont on croyait
24 qu'elles étaient victimes à Srebrenica n'étaient pas des personnes
25 fictives, mais qu'elles existaient réellement.
26 Je ne sais pas quel a été le résultat de ces appariements. Je ne vais pas
27 rentrer dans ce genre de détail. J'ai vu le tableau, mais je ne sais pas ce
28 qu'elle a pris en compte pour effectuer les appariements qu'elle a
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1 effectués. Mais, encore une fois, il aurait été correct, sur le plan
2 professionnel, qu'elle dise : Eh bien, d'accord. J'ai établi des
3 appariements entre les deux listes sur la base de tel et tel critère,
4 plusieurs critères. A Srebrenica, nous avons constaté que les éléments
5 d'information fournis par la Croix-Rouge correspondaient assez bien avec
6 les renseignements émanant du recensement de la population, et les critères
7 utilisés étaient le nom de famille, le prénom, le prénom du père, et la
8 date de naissance, il y a eu 16 % d'appariements. Par rapport aux
9 renseignements de la Croix-Rouge, avec 22 000 entrées concernant des
10 personnes portées disparues.
11 Ce que Dr Tabeau a utilisé dans le recensement de la population,
12 l'appartenance ethnique en particulier, parce qu'aucune autre source ne
13 contient des renseignements sur l'appartenance ethnique, eh bien, encore
14 une fois elle l'a fait selon ses propres décisions s'agissant de sa méthode
15 pour apparier les deux types de renseignements. Nous avons vu qu'elle a
16 utilisé un graphique lié à l'appartenance ethnique. Or, dans le recensement
17 de la population, il n'existe pas de tel graphique, il n'existe aucun
18 renseignement sur le lieu de disparition. Ou ce sont des éléments que l'on
19 trouve que dans des registres concernant les vivants.
20 Q. Professeur, j'aimerais vous interroger rapidement sur la façon dont un
21 professionnel de la démographie et un professionnel de la statistique tient
22 un registre et quels sont les critères qu'il ou elle utilise pour présenter
23 un ouvrage de recherche scientifique ou un rapport qui lui est demandé
24 après avoir mené des investigations aux fins d'effectuer des appariements ?
25 R. Dans un travail professionnel, nous savons ce qu'est l'appariement. Et
26 parfois les résultats correspondent. Toutefois, il faut remarquer que des
27 critères sont appliqués. Le Dr Tabeau affirme que dans la base de données
28 relative à la mortalité il n'existe pas de tableau de ce genre. Donc,
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1 comment peut-on effectuer un appariement si on n'a pas les critères et on
2 ne peut pas dire quel critère on utilise, on dit qu'on pense que les
3 critères sont bons sans dire quelle est leur nature, on parle d'un haut
4 degré de probabilité sans évoquer ces critères. Le critère de départ, c'est
5 la nécessité d'obtenir des résultats, il faut donc l'on dise sur quel
6 critère on s'est appuyés pour dire : Oui, tout va bien. Ou citer le
7 pourcentage de 16 %. On ne peut pas --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame le Témoin, la question était
9 simple : comment est-ce qu'on tient un registre quand on est un bon
10 professionnel de la démographie. Vous avez répondu à cette question, elle
11 aurait pu trouver une réponse en deux lignes. Je regarde l'horloge, Maître
12 Ivetic.
13 M. IVETIC : [interprétation] D'accord.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est 13 heures 45.
15 Madame Radovanovic, nous allons suspendre pour aujourd'hui. Nous ne
16 siégions pas demain car dans ce pays c'est l'anniversaire du roi, qui est
17 la fête nationale, et les Nations Unies en ont fait un jour de congé. Donc,
18 vous savez à quoi vous attendre demain dans ce pays. Nous aimerions vous
19 revoir ici jeudi, nous commencerons par une brève audition d'un autre
20 témoin pour lequel nous avons besoin d'interprète particulier, donc vous ne
21 commencerez pas à 9 heures 30 mais environ à 11 heures ou midi.
22 M. IVETIC : [interprétation] Je n'ai qu'une dizaine de questions encore à
23 poser, je crois que l'Accusation aura besoin d'une demi-heure environ
24 ensuite…
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, pour l'ensemble deux heures, nous
26 prévoyons donc de commencer votre audition jeudi aux environs de midi,
27 peut-être un peu avant, et nous aimerions vous revoir à cette heure-là dans
28 la salle.
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1 Je me dois de vous dire que vous ne devriez pas, même en ce jour de fête
2 nationale des Pays-Bas, parler de votre déposition dans les rues. Ne parlez
3 avec personne, ne communiquer à personne sur cette déposition. Vous pouvez
4 maintenant sortir de la salle en suivant l'huissier, Madame, nous reverrons
5 jeudi.
6 [Le témoin quitte la barre]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous suspendons pour la journée, et nous
8 reprendrons nos travaux jeudi, 28 avril, à 9 heures 30 du matin, dans ce
9 même prétoire.
10 --- L'audience est levée à 14 heures 17 et reprendra le jeudi, 28 avril
11 2016, à 9 heures 30.
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