Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 7 décembre 2016

  2   [Réquisitoires]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 33.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  7   Veuillez citer l'affaire, Monsieur le Greffier, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. IT-09-92-T,

  9   le Procureur contre Ratko Mladic.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 11   Pas de questions préliminaires, donc nous pouvons poursuivre avec le

 12   réquisitoire. Merci.

 13   Monsieur Weber, c'est à vous.

 14   M. WEBER : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

 15   Hier lorsque nous nous sommes arrêtés, nous avons abordé l'impact de la

 16   campagne et les effets que cette campagne a eu sur les enfants. C'est là où

 17   je vais reprendre aujourd'hui.

 18   En 1994, l'UNICEF a rapporté qu'au moins 40 % des enfants de la ville

 19   avaient été touchés directement par des tireurs embusqués; 39 % avaient vu

 20   devant leurs yeux un ou plusieurs membres de leur famille tués; et 73 % ont

 21   vu leurs foyers attaqués ou pilonnés. Confer pièce P7171, page 9.

 22   Outre les tirs embusqués, la SRK a attaqué des civils dans une campagne de

 23   pilonnage qui a pris certaines formes, notamment des bombardements en masse

 24   qui ont tapissé la ville; la prise pour cible sporadique et intentionnelle

 25   de zones civiles avec simplement quelques obus; et le déploiement de bombes

 26   aériennes modifiées. Les obus de la SRK n'ont épargné quasiment aucun

 27   quartier de la ville. L'Accusation a fourni des exemples représentatifs de

 28   chacune de ces formes de pilonnage aux paragraphes 922 à 1 002 de son


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  1   mémoire en clôture. Les obus de la SRK prenaient pour cible très souvent

  2   des quartiers résidentiels ou commerciaux. Les obus ont touché des hôpitaux

  3   alors que les personnes assistaient à des enterrements, les mortiers de la

  4   SRK ont touché des civils lors des activités quotidiennes de la population,

  5   en allant chercher de l'eau, ou faisant la queue pour de l'eau, faisant

  6   leurs courses dans les marchés, ou étant dans des longues files d'attente

  7   pour de la nourriture ou d'autre aide humanitaire.

  8   Les quartiers résidentiels, les mosquées, et les sites culturels n'ont pas

  9   été épargnés non plus; au lieu et place de cela, ils ont été fortement

 10   endommagés par les bombardements de la VRS. Confer les exemples P1888,

 11   P6682, et P7683.

 12   Après des années de pilonnage avec des mortiers, des tirs d'artillerie, et

 13   des roquettes, le général Mladic a accru la capacité destructrice de la SRK

 14   entre 1994 et 1995 en déployant des bombes aériennes modifiées qui ont été

 15   lancées de façon indiscriminée sur les quartiers résidentiels de la ville.

 16   Mladic et Perisic ont conçu ces dispositifs, et c'est Mladic

 17   personnellement qui a approuvé le lancement de ces derniers. L'Accusation

 18   souhaite renvoyer la Chambre à ces éléments-là aux paragraphes 749 à 753 de

 19   son mémoire en clôture.

 20   Même certains des témoins à décharge ont reconnu l'impact terrible qu'ont

 21   eu le pilonnage et les tirs embusqués de la VRS dirigés contre la

 22   population de la ville. Kecmanovic, à la page 23 881, a confirmé ce que

 23   c'était de vivre avec ce sentiment que votre ville faisait l'objet de tirs

 24   d'obus de façon aléatoire, qui semait la terreur. GRM097, à la page 40 160,

 25   était d'accord pour dire que le général Mladic faisait usage de la terreur

 26   et l'utilisait comme arme en prenant pour cible des civils. Même l'expert

 27   de la Défense Kovic a reconnu devant la Chambre à la page 41 986 que

 28   l'effet de la campagne de Sarajevo était de terroriser la population.


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  1   Je vais maintenant passer au mémoire en clôture de la Défense s'agissant de

  2   la campagne.

  3   Dans son mémoire, et plus particulièrement aux paragraphes 1 327, 1 741, et

  4   1 800, 1 848, la Défense nie que la SRK ait commis l'une quelconque de ces

  5   actions et fournit un récit de la participation de l'accusé aux événements

  6   de Sarajevo, dans un cas c'est celui d'un héros qui a sauvé la ville et qui

  7   a maintes reprises tenté d'assurer la sécurité des personnes se trouvant à

  8   Sarajevo, et il s'est assuré "du bien-être des civils de Sarajevo".

  9   Ces déclarations sont très éloignées de la vérité.

 10   A l'appui de cela, la Défense cite quelques exemples de la gentillesse de

 11   Mladic au cours de cette campagne. Alors, dans l'ordre :

 12   La Défense avance aux paragraphes 1 803 à 1 804 que le général Mladic a

 13   proposé l'ouverture de l'aéroport comme un "geste de bonne volonté" pour

 14   garantir le passage des convois d'aide humanitaire pour que ceux-ci

 15   puissent parvenir aux civils et a ordonné qu'aucune balle, pas une seule

 16   balle ne devait être tirée sur l'aéroport. Ces arguments ne cadrent pas du

 17   tout avec les éléments de preuve en l'espèce qui montrent que Mladic et

 18   Karadzic n'ont cessé d'utiliser l'aide humanitaire comme instrument. Même

 19   après avoir remis le contrôle de l'aéroport à la FORPRONU, Karadzic a

 20   menacé des représentants officiels des Nations Unies au mois de septembre

 21   1994 et a dit que :

 22   "Dans le cas où l'embargo sur les armes serait levé, les Serbes prendraient

 23   en otage les Casques bleus des Nations Unies, abattraient de nombreux

 24   avions" --

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous dites dans le cas où

 26   l'embargo sur les armes serait levé ?

 27   M. WEBER : [interprétation] Tout à fait.

 28   "Abattraient de nombreux avions et arrêteraient tous les étrangers."


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  1   Pièce P840.

  2   Plus tard au cours du même mois, alors que Mladic se trouvait à Lukavica,

  3   la FORPRONU a rapporté que la VRS avait reçu des ordres aux fins d'ouvrir

  4   le feu sur tous les aéronefs parce que Mladic souhaitait "montrer sa

  5   détermination car il souhaitait fermer l'aéroport et restreindre la liberté

  6   de circulation." P629.

  7   Et ensuite, nous disposons d'éléments de preuve indiquant que la SRK

  8   actuellement tirait sur des avions, au mois de mars 1995 lorsque l'avion

  9   d'Akashi a été tiré par une mitrailleuse lourde après avoir atterri à

 10   l'aéroport. P872, paragraphe 99, et pièce à conviction P880.

 11   Cette description ne peut pas correspondre à la réponse du commandant de la

 12   SRK de Mladic eu égard aux protestations contre les tirs embusqués

 13   délibérés contre les civils qui traversaient l'aéroport. Dans une telle

 14   réponse, Galic a clairement indiqué à Abdel-Razek que si les civils

 15   continuaient à traverser l'aéroport de la sorte, de son côté il

 16   continuerait à leur tirer dessus. P293, paragraphes 91 et 104.

 17   C'est précisément ce qui s'est passé. Lorsque les conditions étaient

 18   devenues désespérées pour les civils ces derniers tentaient de passer la

 19   nuit et de traverser l'aéroport au début de l'année 1993, et lorsque cinq à

 20   30 civils ont été tués pendant la nuit par les forces de Galic, ceci a duré

 21   pendant deux ou trois mois. Le tir des civils traversant l'aéroport est

 22   abordé en détail aux paragraphes 689 du mémoire en clôture de l'Accusation.

 23   Ces éléments de preuve sont contraires également à ce qu'avance

 24   l'Accusation [comme interprété] au paragraphe 1 836 s'agissant de la

 25   liberté de circulation des civils lorsque la Défense dit que les civils de

 26   Sarajevo étaient "toujours autorisés" à circuler librement dans le

 27   territoire détenu par la SRK et en sortir et il n'y a "jamais eu de blocus"

 28   de la part de la SRK. La réalité sur le terrain était, bien entendu,


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  1   différente. Le général Mladic en était fier, comme l'indique la

  2   conversation téléphonique interceptée que nous avons évoquée plus tôt

  3   lorsqu'il a dit qu'il avait bloqué Sarajevo de chaque côté, la ville était

  4   piégée, il n'y avait aucun moyen de sortir.

  5   La réalité des faits c'est que la SRK avait bloqué toutes les routes

  6   entrant ou sortant de Sarajevo. Comme je l'ai déjà dit, les civils étaient

  7   nombreux à traverser l'aéroport, ils tentaient désespérément d'avoir accès

  8   à la liberté, et la SRK leur a tiré dessus avec des mitrailleuses. Ils

  9   devaient accéder par l'intermédiaire d'un tunnel étroit qui a été

 10   finalement construit sous l'aéroport et dont l'accès était restreint, et

 11   donc il était difficile de passer par ce tunnel, comme l'a dit le témoin à

 12   décharge Radojcic lui-même à la page 23 112.

 13   Le manque de liberté de circulation des civils de Sarajevo est également

 14   contredit par nombre d'ordres de la VRS, notamment les propres directives

 15   de Mladic, qui à maintes reprises a ordonné à la SRK d'empêcher que la

 16   ville ne soit débloquée et qu'il s'agissait de resserrer le cercle. Il y a

 17   d'autres exemples, comme celles qui apparaissent maintenant sur cette

 18   diapositive.

 19   Il s'agit de la pièce P6523, un ordre de la SRK portant mission daté du

 20   mois d'avril 1994, où Galic donne des instructions aux unités de la SRK,

 21   "de fortifier les positions autour de Sarajevo en érigeant des barrières en

 22   béton et en barbelé, ce qui permet de renforcer l'idée qu'ils sont vraiment

 23   bloqués (dans un camp)."

 24   Cette mission s'appliquait visiblement à la fois aux militaires et aux

 25   civils qui se trouvaient au sein du cercle créé par la SRK. Comme l'a dit

 26   le colonel Dragicevic, il était impossible d'encercler les forces de l'ABiH

 27   sans pour autant encercler les civils si tant est que le SRK tentait de le

 28   faire, ce qui a provoqué ce sentiment pour les civils de se trouver à


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  1   l'intérieur d'un camp compte tenu de ces barrières en béton et en fil de

  2   fer barbelé. Page 23 776 à 78.

  3   La Défense affirme de façon tout à fait incroyable au paragraphe 1 817 que

  4   Mladic "n'appuyait pas cela" ou ne donnait pas des ordres pour entraver le

  5   passage des convois humanitaires. Cette Chambre a entendu de nombreux

  6   éléments de preuve indiquant le contraire. Mladic contrôlait et a

  7   délibérément manipulé l'approvisionnement d'aide humanitaire et des

  8   services publics pendant toute la durée de la campagne, afin de restreindre

  9   l'approvisionnement d'aide humanitaire au sein de la ville de Sarajevo.

 10   D'après Banbury, la VRS a exercé un contrôle total sur les convois des

 11   Nations Unies, et le général Mladic a fortement entravé l'approvisionnement

 12   de cette aide humanitaire. Fraser a indiqué que Mladic a régulièrement

 13   limité l'entrée de ces convois humanitaires et a décrit Mladic qui disait

 14   que ces convois devaient être utilisés comme des pions, "et lorsque ces

 15   personnes à l'intérieur de la ville n'auraient plus de nourriture, d'eau,

 16   de carburant, cela me permettra de leur montrer qui contrôle les choses ici

 17   et à ce moment-là il laissait passer un convoi." P576, paragraphe 137.

 18   Un autre exemple qu'a fourni Fraser lorsque Mladic a menacé de limiter

 19   l'entrée des convois à Sarajevo si aucune excuse n'était fournie par l'OTAN

 20   pour ses frappes aériennes. Lorsqu'il n'y a pas eu d'excuse, Mladic a fermé

 21   tous les postes de contrôle menant à Sarajevo. Page du compte rendu

 22   d'audience 5 774.

 23   La Défense avance ensuite aux paragraphes 1 827 à 1 829 de son mémoire en

 24   clôture que le général Mladic a entrepris "toutes les actions nécessaires"

 25   pour s'assurer que la ville de Sarajevo était approvisionnée en eau, en

 26   gaz, et en électricité; et que "aucun ordre n'a été donné" pour que soient

 27   coupés ces services dans les zones détenues par l'ABiH -- les quartiers

 28   détenus par l'ABiH à Sarajevo. Ces affirmations de la Défense sont


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  1   contredites par les nombreux éléments de preuve en l'espèce.

  2   Mladic lui-même a donné ces ordres. Et vous avez à l'écran un ordre de ce

  3   type. Il s'agit de la pièce P7406, le général Mladic a sans équivoque

  4   ordonné "stopper immédiatement l'approvisionnement en eau, électricité, et

  5   gaz aux quartiers musulmans de Sarajevo." Donc des ordres ont effectivement

  6   été donnés et ces ordres émanaient de l'accusé.

  7   Egalement, tout un chacun comprenait comment la VRS utilisait les services

  8   publics de Sarajevo, même des représentants officiels qui se trouvaient sur

  9   place, des Bosno-Serbes. Par exemple, à la pièce P6714, l'assemblée serbe

 10   de la ville de Sarajevo s'est plainte auprès de représentants officiels de

 11   la RS sur les dégâts provoqués au niveau des foyers serbes et comment ceci

 12   avait un effet négatif sur les foyers serbes, c'est-à-dire qu'il s'agissait

 13   de "faire baisser la tension et ensuite de faire remonter la tension dans

 14   toute l'ex-Bosnie-Herzégovine (le fait de couper l'eau, l'électricité, et

 15   le gaz)."

 16   De même, Mladic a, à maintes reprises, proposé de démilitariser Sarajevo et

 17   de placer des armes lourdes sous le contrôle de la FORPRONU, ceci n'est pas

 18   exact. Paragraphe 1 809 du mémoire de la Défense. Cette affirmation est

 19   invalidée par les circonstances en l'espèce, que des ordres ont été donnés

 20   qui ne correspondaient pas -- parce que des armes ont été réinstallées et

 21   montrent que ces propositions n'avaient pas été faites de bonne foi.

 22   Les éléments montrent que l'état-major principal était d'accord sur lez

 23   zones d'exclusion totale, car il s'agissait de concessions nombreuses au

 24   plan humanitaire et militaire pour éviter que l'OTAN n'attaque suite à

 25   l'événement de Markale I. Les moyens de preuve montrent également que le

 26   Corps Sarajevo-Romanija n'avait pas l'intention de mettre en œuvre cette

 27   zone d'exclusion totale. Comme c'est montré par des ordres internes,

 28   puisqu'ils planifiaient de retirer des armes lourdes qui n'étaient pas


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  1   opérationnelles alors qu'ils avaient en même temps l'intention de cacher

  2   les autres armes lourdes qui étaient opérationnelles. Les ordres émanant de

  3   l'état-major principal et du SRK ont dit expressément qu'il s'agissait

  4   d'une "tactique de diversion" et c'était en 1994. La référence pour cela

  5   est P730 et P4428 également. Un autre exemple P2249. Où il est montré qu'il

  6   "fallait donner l'impression aux observateurs militaires qu'ils étaient en

  7   train de retirer leurs armes lourdes."

  8   De plus, la diminution du pilonnage après le pilonnage à Markale I était

  9   accompagnée par le fait que les tirs isolés ont été intensifiés. Et le 19

 10   mars 1994, les tirs isolés se sont intensifiés dans la ville. Thomas et le

 11   Témoin RM163 [comme interprété] ont tous les deux témoigné qu'après la

 12   création de la zone d'exclusion totale, les tirs isolés se sont intensifiés

 13   et sont devenus une composante importante de la campagne. La SRK a eu

 14   recours à des tirs isolés contre la population civile, puisqu'ils ne

 15   pouvaient pas, provisionnement, avoir l'avantage d'utiliser leurs armes

 16   lourdes.

 17   La Défense cite les ordres du VRS à différentes parties de leur mémoire en

 18   clôture et affirme que ces ordres étaient en quelque sorte des ordres à

 19   disculper l'accusé. Par exemple, au paragraphe 2 437 dans leur mémoire en

 20   clôture, la Défense dit que Mladic "a strictement interdit toutes les

 21   offensives et a fait mettre en œuvre l'interdiction totale de prendre pour

 22   cible des civils."

 23   Et dans la pièce P812. C'est un ordre sur lequel la Défense se fonde

 24   dans son mémoire en clôture pour dire que Mladic a instauré l'interdiction

 25   absolue des offensives et de prendre pour cible des civils. Regardez le

 26   texte de l'ordre, sous point 2, il est dit que toutes les actions

 27   offensives doivent être entreprises avec l'approbation de l'état-major

 28   principal. Et au point 3, Mladic dit qu'il faut interdire de tirer sur des


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  1   civils "sans mon approbation".

  2   Le général Smith à la page 7 462 a dit de façon succincte que lorsque

  3   tout était fondé sur l'approbation du commandement supérieur "ce n'est pas

  4   la même chose lorsqu'on dit que quelque chose est interdit".

  5   Il ne s'agit pas des interdictions complètes et il ne s'agit pas

  6   d'ordres de nature à disculper l'accusé. Cela montre que l'approbation

  7   Mladic était nécessaire pour tirer sur des civils à Sarajevo, et la VRS

  8   fonctionnait de cette façon-là.

  9   Et ce type d'ordres sont traités plus en détail dans les paragraphes

 10   637 à 644 et 646 à 650 de notre mémoire en clôture. Comme on peut voir dans

 11   ces parties de notre mémoire en clôture, les documents sur lesquels la

 12   Défense se fonde sont les documents qui montrent que Mladic modifiait la

 13   campagne ou tentait de nier ou de rejeter les critiques de la communauté

 14   internationale. Bien que la Défense essaie de décrire l'accusé en tant

 15   qu'un homme gentil qui se soucie des civils, l'Accusation a montré que les

 16   moyens de preuve démontrent quelque chose qui est tout à fait contraire.

 17   Comme Mladic, par exemple, s'est vanté pendant un entretien enregistré en

 18   disant :

 19   "A chaque fois que je viens à Sarajevo, je tue quelqu'un au passage. C'est

 20   pour ça que la circulation de Sarajevo était perturbée … des tirs isolés.

 21   Je vais là-bas, mais pour abattre les Turcs, mais on s'en fiche."

 22   C'est P1974.

 23   Comme Mladic ne se souciait pas du bien-être des Musulmans à Sarajevo, il

 24   l'a dit lui-même. Harland a expliqué aux pages 724 et 725, qu'il y avait un

 25   lien direct entre les déclarations du général Mladic et de ce qui se

 26   passait sur le terrain. Donc d'après ce que Mladic lui-même a dit et

 27   d'après ce qu'il a fait lorsqu'il dirigeait les attaques sur les quartiers

 28   civils de Sarajevo, il n'est pas étonnant de voir que la vie des civils à


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  1   Sarajevo, selon Banbury, était presque insupportable.

  2   En décrivant l'accusé en tant que commandant bienveillant qui contrôlait

  3   parfaitement les tirs du SRK en les limitant et qui s'assurait que tout le

  4   monde puisse se déplacer en liberté, la Défense met l'accent sur la

  5   description du SRK en le démontrant en tant qu'une force réactionnaire qui

  6   n'avait pas beaucoup de moyens à sa disposition. Et ces arguments nous

  7   amènent à la conclusion ou ils veulent que vous arriviez à la conclusion

  8   que Mladic procédait en bon samaritain en utilisant peu de moyens qui

  9   étaient à la disposition du SRK. Mais il s'agit de la description qui ne

 10   tient pas la route.

 11   En fait, au paragraphe 1 714, lorsque la Défense a essayé de dire que le

 12   SRK se trouvait en position désavantageuse par rapport à l'ABiH, donc il se

 13   trompe lorsqu'il dit que la création du SRK était la réponse à

 14   l'établissement de l'ABiH à Sarajevo. Ils se fondent sur l'expertise de

 15   l'expert Kovac, pourtant Kovac - expert militaire - ne pouvait même pas

 16   obtenir des informations de base pour ce qui est de la création des forces

 17   opposées, à la page 41 650 [comme interprété] on lui a montré la pièce

 18   P7676, c'est un ordre montrant que l'ABiH a été en fait créée après la

 19   création du SRK, et non pas l'inverse.

 20   Contrairement aux affirmations de la Défense aux paragraphes 1 711 et 1

 21   712, ainsi qu'aux paragraphes 1 717 et jusqu'à 1 725, le SRK n'était pas le

 22   corps qui était en sous-effectif, ou qui n'était pas suffisamment instruit,

 23   suffisamment équipé par rapport aux forces de l'ABiH. C'est à la page du

 24   compte rendu 4 008 et 4 011, le général Wilson a dit que le SRK était très

 25   bien équipé, très bien organisé, et combattait de façon professionnelle.

 26   C'est également le point de vue du SRK, c'est la pièce P6543, en janvier

 27   1995, le général Milosevic a félicité la 1ère Brigade d'infanterie de

 28   Romanija parce que pendant les activités de combat, cette brigade a eu


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  1   beaucoup de succès en montrant qu'elle était très bien organisée et

  2   efficace.

  3   En comparaison avec l'ABiH, le 1er Corps de l'ABiH à Sarajevo, ces forces

  4   étaient mal équipées et désorganisées. Le général Wilson a décrit les

  5   forces de l'ABiH à la page 3 922 et 3 926 comme des éléments incontrôlés au

  6   début de la guerre et qu'il ne s'agissait pas d'une force militaire

  7   compétente. Bien que la situation dans l'ABiH s'était améliorée pendant la

  8   guerre, Konings a dit, que même en 1995, l'ABiH n'était toujours pas une

  9   armée professionnelle. C'est la pièce P1741, paragraphe 28.

 10   Et contrairement à ce que la Défense a soutenu, le SRK et le MUP de la RS

 11   pendant le conflit étaient très bien conscients du fait que l'ABiH était

 12   une force inférieure par rapport à leur propre --. Par exemple, en 1993,

 13  Desimir Sarenac membre de la 1ère Brigade motorisée, c'est la pièce P6790, a

 14   rapporté que la discipline dans les rangs de l'ABiH n'existe pas. Que des

 15   hommes n'obéissent pas et ne disposent d'uniforme. La pièce P6769, le MUP

 16   de la RS a rapporté cette même année que les forces de l'ABiH sont

 17   "désorganisées, qu'ils n'ont pas suffisamment de matériel, et qu'ils n'ont

 18   rien pour offrir une résistance aux unités de la VRS beaucoup mieux

 19   armées."

 20   Et en 1995, le colonel Marko Lugonja du SRK a rapporté, et c'est la pièce

 21   D1273, que l'ABiH n'est pas fiable en combat et très faible en combat.

 22   Egalement, contrairement aux affirmations de la Défense, le SRK possédait

 23   des armes supérieures par rapport aux armes disposées par l'ABiH, et c'est

 24   un fait qui a été confirmé par les témoins de la Défense. Aussi,

 25   Kecmanovic, dans sa déclaration, pages du compte rendu 23 868 et 72, a dit

 26   que l'artillerie serbe était supérieure par rapport à l'artillerie de

 27   l'ABiH. Le général Milovanovic, qui était le subordonné immédiat de

 28   l'accusé, a dit, pages 17 101 et 17 102, que le SRK avait un avantage pour


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  1   ce qui est des armes lourdes. Et l'expert de la Défense Kovic a déclaré

  2   dans son rapport, page 62 de la pièce D1369, que les Serbes avaient cet

  3   avantage en armes lourdes à Sarajevo jusqu'à la fin de la guerre.

  4   Finalement, Desimir Sarenac, qu'on a déjà mentionné, a dit à la page 26 179

  5   qu'"il était bien connu" que l'ABiH manquait de munitions et d'armes.

  6   Cette différence qui existait entre la quantité limitée d'armes dans

  7   la ville même et la quantité des armes lourdes disposées par le SRK sur les

  8   collines environnantes est très bien décrite par un pompier volontaire,

  9   John Jordan, qui a dit que :

 10   "La situation à Sarajevo était telle que la violence était tombée sur la

 11   ville en pelle et provenait de la ville en cuillère."

 12   Compte rendu 1 824.

 13   Le SRK, ce que la Défense a dit, "à aucun moment du conflit", n'a utilisé

 14   des tireurs embusqués. Ce qui n'est pas exact du tout, puisqu'il y a des

 15   preuves qui démontrent que des activités de tireurs embusqués faisaient

 16   partie des efforts centralisés et organisés pour prendre pour cible la

 17   population civile. Par exemple, la VRS a discuté de ses tireurs embusqués

 18   dans un rapport d'aptitude au combat de la VRS de 1992, pièce P338. A la

 19   page 10, dans la section portant sur le commandement et le contrôle, la

 20   formation organisée des éclaireurs et des tireurs embusqués est décrite

 21   comme l'un des éléments importants pour l'aptitude au combat de l'armée.

 22   Pièce P677, et cela va apparaître à l'écran.

 23   Il s'agit du programme de l'état-major principal de la VRS de 1995

 24   concernant les tireurs embusqués, qui montre quel était le rôle de l'état-

 25   major principal - c'était un rôle central - pour ce qui est de la formation

 26   des tireurs embusqués. Au début du document, l'état-major principal dit

 27   qu'au niveau du corps, il y a des cours organisés pour former les tireurs

 28   embusqués à plusieurs reprises par an. Cette formation régulière pour les


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  1   tireurs embusqués assure "un niveau professionnel élevé". Et il y avait la

  2   formation pour ce qui est de sept domaines, y compris l'effet des tirs

  3   embusqués sur la zone peuplée. Donc, c'est ce que montrent ces documents,

  4   mais il y est montré également que l'état-major principal surveillait et

  5   s'assurait que les tireurs embusqués du SRK maintiennent cette capacité

  6   meurtrière.

  7   Le fait que les brigades du SRK possédaient des tireurs embusqués formés et

  8   continuaient à les former pendant la campagne est parfois quelque chose que

  9   vous pouvez voir dans des documents provenant des brigades du SRK. Par

 10   exemple, la 1ère Brigade de Romanija avait et formait des tireurs embusqués

 11   depuis le début de la guerre, P6543. La même brigade a rapporté le 29

 12   octobre 1993 que "pendant le printemps, tous les tireurs embusqués ont été

 13   formés au sein des unités inférieures." Pièce P676.

 14   Le Témoin de la Défense Vlade Lucic, un ancien membre de la 1ère Brigade de

 15   Romanija, a même admis que sa brigade avait des tireurs embusqués "pour

 16   chacune des formations". C'est la pièce D658, paragraphe 25.

 17   La Défense a également dit au paragraphe 2 100 de son mémoire en clôture

 18   qu'"il n'y avait jamais eu d'ordre" pour tirer sur les civils par les

 19   tireurs embusqués et qu'aucun membre du SRK n'a jamais reçu d'ordre à cet

 20   effet.

 21   Ces arguments n'ont aucun sens dans le contexte que Mladic, en mars 1995, a

 22   dit au général Smith que les activités de tireurs embusqués du SRK sur les

 23   civils étaient augmentées en réponse aux pertes essuyées par le SRK lors

 24   d'une attaque lancée par l'armée de BiH. P876, page 4, et page du compte

 25   rendu 8 222.

 26   En mars 1995, pièce P7809, une patrouille des observateurs militaires des

 27   Nations Unies était présente au moment où le commandant d'un bataillon de

 28   la Brigade de Romanija a ordonné à ses subordonnés d'ouvrir le feu sur tout


Page 12510

  1   ce qui bouge. Dans la pièce P7810, on peut voir que la même patrouille des

  2   observateurs militaires des Nations Unies a confirmé que les soldats sur le

  3   front ont agi en conformité avec l'ordre de ce commandant de bataillon. Ils

  4   ont dit aux observateurs militaires qu'ils ouvriraient le feu sur tout ce

  5   qui bouge. Cela voulait dire sur les femmes et sur les enfants aussi.

  6   La Défense doit essayer d'éviter d'accepter le fait que le SRK possédait

  7   des tireurs embusqués pendant la campagne, puisque la Défense ne dispose

  8   pas de justification de la façon à laquelle cela a été utilisé par le SRK.

  9   Comme Banbury a dit, "il n'y avait aucune raison pour que les Serbes tirent

 10   de tireurs embusqués sur Sarajevo. Il n'y avait pas de cibles militaires

 11   là-bas."

 12   En soulignant le fait que les civils, à savoir les femmes, les enfants et

 13   les personnes âgées, étaient les victimes régulières de ces tirs embusqués.

 14   Van der Weijden a expliqué que :

 15   "L'effet des tirs embusqués était l'effet direct sur les victimes et

 16   sur les gens qui étaient dans leur proximité, mais il faut savoir également

 17   que cela avait une incidence sur tout le monde. Puisque mis à part

 18   l'angoisse de ne pas savoir -- parce qu'il s'agissait de l'angoisse de ne

 19   pas savoir quand exactement et où les tireurs embusqués vont tirer."

 20   En d'autres termes, la seule explication pour les tirs embusqués du

 21   SRK sur les civils était qu'ils essayaient de semer la terreur parmi la

 22   population civile.

 23   L'Accusation va maintenant aborder la question concernant un

 24   pilonnage qui n'est pas un fait répertorié et que la Défense a soulevé à

 25   plusieurs reprises dans son mémoire en clôture. Il s'agit du pilonnage dans

 26   la rue Vase Miskina le 27 mai 1992.

 27   Comme dans d'autres exemples, la théorie de la Défense pour ce qui est de

 28   ce pilonnage n'est pas claire. Ils hésitent entre la théorie du complot,


Page 12511

  1   qui n'est pas corroborée, ensuite du fait que l'explosion ait été montée et

  2   que l'engin explosif ait été posé. Et contrairement aux affirmations de la

  3   Défense aux paragraphes 1 885 à 1 905 du mémoire en clôture, le pilonnage

  4   des gens qui faisaient la queue pour le pain dans la rue Vase Miskina ne

  5   fait pas partie du fait répertorié G1. Et c'est admis par la Défense à la

  6   page du compte rendu 39 134.

  7   Pour ce qui est de ce pilonnage, la Défense s'est fondée sur le témoignage

  8   d'un ancien membre du SRK, Bukva, au paragraphe 1 869, qui a dit que le

  9   pilonnage dans la rue Vase Miskina, les informations là-dessus étaient

 10   fondées sur les renseignements d'une source inconnue selon laquelle les

 11   autorités de BiH ont mis en scène cet événement en posant cet engin

 12   explosif, et cela n'est pas corroboré. Cela a été contredit à un endroit

 13   cinq pages plus loin dans le mémoire de la Défense, où la Défense, en fait,

 14   a dit et s'est contredit en disant que cette explosion "ne pouvait être

 15   causée que" par un projectile entrant. Dans cette discussion, la Défense a

 16   quitté sa théorie précédente concernant la pose de l'engin explosif. Ils

 17   essayent de dire que tous les points de tir se trouvaient sur le territoire

 18   de l'ABiH sur la base de la thèse qu'il s'agissait de l'angle de chute de

 19   83 ou 84 degrés.

 20   Dans cette discussion, il est fait abstraction de ce qui s'est passé lors

 21   du témoignage de Mme Subotic en prétoire. A cet égard, l'avis de Subotic a

 22   été mis au jour aux pages 39 587 [comme interprété] à 39 602 du fait de son

 23   aveu que le coauteur a délibérément modifié une photo du dossier d'enquête

 24   pour faire en sorte que le cratère apparaisse comme parfaitement sphérique,

 25   ce qui est compatible avec un angle élevé.

 26   Selon elle, il n'y a pas eu d'enquêteur sur site à l'époque, ce qui est

 27   répété au paragraphe 1 899 du mémoire de la Défense, et c'est erroné. Le

 28   rapport indique sans ambiguïté qu'il y a eu une enquête sur les lieux peu


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  1   après le pilonnage. Ce même rapport, qui n'est pas cité dans Subotic,

  2   dément sa théorie de tir vertical et montre que le projectile a été tiré

  3   d'une grande distance. Finalement, Subotic, à la page 39 609, a reconnu que

  4   l'angle de chute était bien plus bas que les 83 degrés qu'elle avait

  5   cherché initialement à vendre à cette Chambre.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ralentissez pour les interprètes.

  7   M. WEBER : [interprétation] Le mémoire de la Défense se fonde sur le

  8   rapport de Subotic comme si rien de tout cela ne s'était produit --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que vous avez donné votre texte

 10   à la sténodactylo à l'avance, et il faudrait que vous repreniez à partir de

 11   "Subotic a déclaré qu'elle était au courant mais n'a fait aucune référence

 12   à cela dans son avis." Si vous reprenez là-bas, il se peut que rien ne

 13   manque ou que rien ne soit ajouté aux propos que vous avez effectivement

 14   tenus en audience.

 15   M. WEBER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   S'agissant de D1243, ce même rapport d'enquête, dont Subotic a dit avoir

 17   connaissance mais auquel elle n'a pas fait référence dans son avis, dans

 18   D2117, remettait en question sa théorie du projectile à chute verticale et

 19   a démontré que le projectile avait été tiré d'une distance bien plus

 20   grande. Finalement, la page 39 609, Subotic a reconnu que l'angle de chute

 21   était bien inférieur aux 83 degrés qu'elle avait dans un premier temps

 22   cherché à présenter à cette Chambre. Le mémoire de la Défense se fonde sur

 23   le rapport de Subotic comme si tout cela ne s'était pas produit.

 24   La théorie du tir vertical de Subotic, qui aurait exigé que le tir

 25   ait été effectué près du point d'impact, est également démentie par le fait

 26   que les témoins survivants qui attendaient et faisaient la queue n'ont pas

 27   entendu un tir sortant avant l'arrivée de l'obus. Cela peut également être

 28   trouvé au D1243.


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  1   Au paragraphe 1 897 de son mémoire, la Défense analyse les écoutes

  2   téléphoniques dans le contexte du pilonnage de Vase Miskina et indique que

  3   cela allait à l'encontre des ordres de Mladic. Mais la Défense ne parle pas

  4   du passage où Gagovic est informé du pilonnage qui vient de ses propres

  5   forces de la SRK sur Trebevic, et en réponse il dit : "Mais qui diable est

  6   en train de tirer de là-bas ?"

  7   Elle ne parle pas non plus de la pièce P4359, l'ordre du 27 mai de

  8   Mladic invitant toutes les unités à être prêtes à ouvrir le feu, mais ne

  9   donnant pas d'ordre de tirer lors des négociations portant sur l'évacuation

 10   des casernes ce jour-là. Comme indiqué aux paragraphes 925 à 932 du mémoire

 11   de l'Accusation, Mladic a ordonné au SRK de procéder au pilonnage de toute

 12   la ville de Sarajevo le lendemain. Cette écoute téléphonique montre combien

 13   Mladic jouait un rôle central pour tous les aspects de l'approbation de

 14   l'utilisation des mortiers de la SRK, y compris le fait de tirer avec des

 15   mortiers de 82-millimètres.

 16   En tout état de cause, l'obus qui est arrivé rue Vase Miskina le 27

 17   venait de la SRK, et pas d'une grande théorie du complot, et pas d'un tir

 18   de l'ABiH qui aurait tiré verticalement en l'air pour que l'obus retombe

 19   sur elle.

 20   Enfin, au paragraphe 1 699 [comme interprété], le mémoire de la

 21   Défense se fonde sur le démenti par Mladic du pilonnage de Vase Miskina et

 22   de sa tentative de s'exonérer de toute responsabilité en parlant d'une

 23   enquête qu'il aurait prétendument ouverte. Il n'y a pas, dans les dossiers

 24   de la SRK, d'enquête au sujet du pilonnage à la fin du mois de mai et début

 25   juin; et s'il y avait eu des enquêtes à l'époque, le général Mladic

 26   n'aurait pas dû regarder très loin pour trouver le responsable des

 27   bombardements de la ville à l'époque puisque c'était lui.

 28   Ceci nous amène à notre point suivant. Il y a en toile de fond de


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  1   toutes les affirmations de la Défense une tentative de reprocher à l'ABiH

  2   tout ce qui s'est produit à Sarajevo. Ce ne sont pas des tentatives qui

  3   sont nouvelles.

  4   Par exemple, paragraphes 1 827 à 1 835 de son mémoire, la Défense

  5   essaie de faire endosser aux Musulmans la responsabilité d'avoir coupé tous

  6   les services publics aux collectivités. Cela, en fait, est un reflet de la

  7   stratégie de Mladic qui cherche à dissimuler la responsabilité de ses

  8   forces, comme c'est indiqué dans le discours qu'il a prononcé lors de la

  9   16e Assemblée. Lors de ce discours, il a déclaré que ses forces couperaient

 10   l'électricité, le gaz et l'eau à Sarajevo, comme il l'avait fait en

 11   Croatie, tout en disant au monde que c'étaient les Musulmans qui l'avaient

 12   fait et que les Serbes de Bosnie faisaient de leur mieux pour les réparer.

 13   P431, pages 38 à 39.

 14   Comme nous le voyons, les faits étaient différents, et Mladic

 15   décidait de si et de quand Sarajevo recevrait son approvisionnement en gaz

 16   et électricité. La Défense ne s'arrête pas là. Au paragraphe 1 853 de son

 17   mémoire, elle va jusqu'à dire que les dirigeants bosniaques et l'ABiH

 18   étaient les véritables auteurs de la campagne de pilonnage et de tirs

 19   contre les civils de Sarajevo, comme si trois ans et demi de pilonnage et

 20   de tirs par le SRK pouvaient être justifiés ou expliqués entièrement par

 21   des tirs de Bosniens qui auraient pris pour cible leur propre population.

 22   Même les preuves de la Défense ne vous donnent pas cette indication.

 23   Par exemple, D1425, un article de "Independent" invoqué par la Défense au

 24   paragraphe 1 856. Cet article évoque les avis de certains fonctionnaires

 25   des Nations Unies anonymes qui ont souligné que des soupçons d'attaques

 26   perpétrées par la BiH "n'étaient qu'une petite minorité de tous les

 27   bombardements des forces serbes."

 28   Comme le montre également cet article, la Défense se fonde sur des


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  1   conjectures qui soit sont générales, comme nous l'avons prouvé, soit non

  2   fondées, soit basées sur la lecture de la presse par un témoin. En fin de

  3   compte, ces conjectures sont non fondées et ne résistent pas à l'examen.

  4   Dans de nombreux cas, des pans centraux essentiels des arguments de

  5   la Défense sont basés sur des preuves non existantes. Par exemple, les

  6   preuves du propagandiste de la VRS, Milovan Milutinovic. Au paragraphe

  7   1 862 du mémoire de la Défense, elle se fonde sur une citation de

  8   Milutinovic de Marin Bell qui a essentiellement dit :

  9   "J'avais l'impression d'être un simple soldat dans une armée dont les

 10   commandants musulmans avaient totalement perdu la tête et terrorisaient

 11   leur propre population."

 12   Le problème, c'est que cette citation est fausse; Bell n'a jamais dit

 13   cela.

 14   Vous avez d'ailleurs devant vous la citation de Bell donnée par

 15   Milutinovic et ensuite vous avez la vraie citation de Bell. Et Bell a dit

 16   la chose suivante :

 17   "Je me sentais comme un simple soldat dans une armée dont les commandants

 18   avaient collectivement perdu la tête - et je le leur ai dit."

 19   Aux pages 30 056 à 30 058, Milutinovic a été confronté avec la vraie

 20   citation de Bell, ce qui montre que Bell parlait des actions de son propre

 21   gouvernement, et pas des commandants musulmans, et qu'il n'a pas parlé du

 22   fait que l'ABiH aurait terrorisé sa propre population. Alors, quand on lui

 23   a demandé comment il se faisait qu'il avait cité Bell erronément, il a dit

 24   qu'il ne parlait pas l'anglais et a finalement essayé de faire endosser la

 25   responsabilité de cela à un journal local qu'il avait lu en serbe, ignorant

 26   le fait que cette déclaration qu'il avait attribuée à Bell venait d'un

 27   journal anglais et n'avait pas d'autre source.

 28   La Défense essaie également de parler de deux cas où l'ABiH tirait sur ses


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  1   propres troupes. Le premier de ces faits supposés peut être trouvés au

  2   paragraphe 1 855, où il est indiqué que le capitaine Hansen a demandé aux

  3   Bosniens de cesser de tirer sur leur propre population après le pilonnage

  4   du bâtiment de la RTV le 28 juin 1995. Cette affirmation est basée sur le

  5   seul témoignage d'Oien. Lorsqu'il a été interrogé directement sur cet

  6   événement, à la page 43 196, Oien a déclaré ne rien pouvoir nous dire à ce

  7   sujet :

  8   "Je ne m'en souviens pas. Je n'étais pas là et je ne peux pas confirmer."

  9   En outre, il y a énormément de preuves que la Défense passe sous silence.

 10   C'était, en fait, la SRK qui a lâché la bombe aérienne modifiée qui a

 11   touché le bâtiment de la RTV le 28 juin 1995. Cela est démontré par les

 12   preuves du Témoin Brennskag, qui a vu le projectile lancé par la partie

 13   serbe, ainsi que par Harland, Banbury et RM10 [comme interprété]. Et les

 14   pièces à conviction P966, P991, P752, P6711, le dossier d'enquête complet

 15   versé dans le dossier sous P7572, D203 et D165 le montrent également.

 16   Enfin, le rapport de la SRK admis par la Défense met en lumière la nature

 17   fallacieuse de ces arguments. La SRK, dans son rapport, versé au dossier

 18   sous D147, a reconnu que c'était la SRK qui avait tiré et touché le

 19   bâtiment de la RTV le 28 juin. La Défense fait abstraction de cela dans son

 20   analyse du pilonnage.

 21   Lorsqu'elle parle des tirs sur les trams, la Défense cherche à se foncer

 22   sur D1810. C'est un document qui a été soigneusement sélectionné et qui

 23   provient de tout un dossier d'enquête du MUP de la BiH d'octobre 1994. Et

 24   pour répondre à cela, l'Accusation a déposé la totalité du dossier sous

 25   P7852. Le dossier montre que l'information utilisée par la Défense était

 26   erronée et que les tirs venaient des positions de SRK à Grbavica. En outre

 27   des preuves balistiques, les documents montrent que les témoins ont entendu

 28   plusieurs explosions, plusieurs tirs provenant des positions de la SRK ce


Page 12517

  1   jour-là.

  2   Ensuite, il y a le fait répertorié en annexe G4, le pilonnage du match de

  3   football le 1er juin 1993 à Dobrinja. Dans ce cas, la Défense prétend même

  4   que c'est l'ABiH qui a tiré l'obus. Et au paragraphe 1 946, elle déclare

  5   que :

  6   "Un nombre de positions d'artillerie de l'ABiH étaient situées à une

  7   distance plausible du projectile, notamment dans la zone de Toplik, et il

  8   est possible que le projectile provienne d'une de ces positions."

  9   Pour soutenir cette affirmation, le seul témoin cité est John Hamill. Le

 10   problème, c'est que John Hamill était un observateur des Nations Unies du

 11   côté Lima, et pas Papa, et les positions d'artillerie à Toplik qu'il décrit

 12   dans sa partie du témoignage appartiennent à la SRK, pas à l'ABiH. Le fait

 13   qu'il s'agissait de positions de mortier de la SRK dans la zone de Toplik a

 14   été confirmé par le commandant d'artillerie de la SRK, Savo Simic, qui a

 15   même déclaré que ses mortiers dans cette zone étaient pointés vers

 16   Dobrinja. La seule preuve dans le dossier montre que c'est la SRK qui

 17   possédait des mortiers dans la zone de Toplik.

 18   En plus de ces affirmations fausses sur Toplik, la Défense évoque dans les

 19   paragraphes suivants la possibilité qu'un mortier mobile ait été utilisé

 20   pour lancer un projectile provenant de la même direction. Cette fois-ci,

 21   ils se fondent sur une partie du témoignage de Hamill qui n'a absolument

 22   rien à voir avec G4. Cette théorie dans son ensemble est absurde, et nous

 23   pouvons regarder sur la carte l'itinéraire qu'aurait dû emprunter les

 24   hommes de l'ABiH prétendument chargés d'actionner le mortier.

 25   Il s'agit d'une carte annotée par John Hamill versée au dossier sous P539.

 26   Sur cette carte, la route entre Dobrinja et Toplik est indiquée et annotée

 27   en rouge. Sur la base de cet itinéraire, l'équipage du mortier aurait dû

 28   quitter Dobrinja, passer par le territoire de la SRK, ensuite passer à


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  1   travers Lukavica où se situait le commandement de la SRK et continuer pour

  2   se rendre dans les alentours de Toplik. La zone entière est jalonnée

  3   d'artillerie et de mortier de la SRK, selon les preuves de Savo Simic. Est-

  4   ce que vous pensez qu'un mortier mobile de l'ABiH aurait pu passer par les

  5   positions de la SRK et tirer à deux reprises sans être repéré ? On en

  6   aurait tout au moins parler dans le rapport de la SRK pour le 1er juin, qui

  7   est versé au dossier sous D1778. Mais non, ce rapport ne fait état d'aucun

  8   incident anormal ce jour-là. Et donc, il n'y a aucune preuve que cela ait

  9   pu avoir lieu.

 10   Pour G4, les preuves démontrent que la distance de feu minimum de mortier

 11   place l'origine du tir au milieu du territoire de la SRK, et il s'agit

 12   simplement d'une tentative désespérée de montrer le contraire.

 13   Je vois l'heure qu'il est. Il est peut-être temps de faire la pause.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, il est temps de faire la pause.

 15   Nous reprendrons à 11 heures moins cinq.

 16   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 17   --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Weber, je vous invite à

 19   procéder. Mais cela aiderait les Juges de la Chambre - et je sais bien que

 20   l'erreur est due à la Chambre en raison des vielles oreilles des Juges -

 21   cela aiderait à la Chambre que vous prononciez plus clairement les mots que

 22   vous proférez, car nous n'aurions pas à vérifier encore et encore le compte

 23   rendu d'audience pour voir si nous avons bien entendu ce que nous avons

 24   entendu.

 25   M. WEBER : [interprétation] C'est très aimable de votre part, Monsieur le

 26   Président, mais je pense que la responsabilité m'incombe.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Veuillez procéder.

 28   M. WEBER : [interprétation] Je vais maintenant parler des incidents


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  1   répertoriés.

  2   La Chambre a reçu des éléments très détaillés au sujet des pilonnages qui

  3   représentent les incidents répertoriés F et G et la façon dont ces

  4   événements sont représentatifs de ce qui s'est passé pendant toute la durée

  5   de la campagne. Dans son mémoire, la Défense s'appuie de façon importante

  6   sur les rapports de ses deux experts balistiques lorsqu'il est question des

  7   incidents répertoriés. L'Accusation s'est occupée des témoignages de ces

  8   deux témoins aux paragraphes 1 049 à 1 057 de son mémoire. En ce moment,

  9   l'Accusation s'apprête à fournir quelques arguments complémentaires

 10   relatifs à l'absence de fiabilité de ces témoins par rapport au mémoire de

 11   la Défense.

 12   Zorica Subotic et Mile Poparic ont fait des dépositions qui n'ont aucune

 13   crédibilité en l'espèce. Ce qui est particulièrement éloquent, c'est que le

 14   mémoire de la Défense propose de nombreuses citations, plusieurs centaines

 15   de citations, extraites des rapports écrits de ces experts mais ne propose

 16   aucune citation des témoignages de ces témoins dans le prétoire. Et ce,

 17   pour une raison très simple : de l'avis de la Défense, les experts et leurs

 18   avis ne tiennent pas face à un examen attentif de ce que les témoins ont

 19   dit dans le prétoire. Le contre-interrogatoire de ces experts a démontré de

 20   façon répétée que les théories avancées par Subotic et Poparic sont sans

 21   fondement. Les défauts de la déposition de l'expert en pilonnage de la

 22   Défense, autrement dit, les défauts de la déposition de Subotic, émanent en

 23   partie de son absence d'expérience. Comme elle l'a admis elle-même, elle

 24   n'a jamais analysé un cratère fraîchement formé en personne. Elle ne s'est

 25   jamais trouvée sur la scène d'une explosion due à un mortier immédiatement

 26   après la détonation. En fait, sa seule expérience en matière d'analyse de

 27   cratère date de 2010, date à laquelle elle a élaboré son rapport d'expert

 28   dans l'affaire Karadzic. Et c'est cette même visite sur les lieux dont elle


Page 12520

  1   s'est servie comme fondement pour exprimer les avis qu'elle a exprimés en

  2   l'espèce.

  3   Compte tenu de son expérience limitée en analyse de cratère, Subotic a

  4   décidé de recourir à des méthodes fourmillant d'erreurs. Elle analyse les

  5   cratères qu'elle décrit comme des cratères érodés ou endommagés par les

  6   années qui se sont écoulées depuis les pilonnages. Lorsque les cratères

  7   sont recouverts par des pavés, elle s'appuie sur des vidéos ou des

  8   photographies, même si une telle pratique ne peut conduire qu'à des

  9   résultats différents, ce qu'elle admet en page 39 630.

 10   Même lorsqu'elle parvient à mener à bien une analyse de cratère fiable

 11   immédiatement après l'impact, elle rejette l'analyse faite par la

 12   balistique de ces tirs de mortier alors que ces analyses étaient faites

 13   immédiatement après les événements de pilonnage, négligeant au passage

 14   leurs conclusions en faveur de ses conclusions datant de visite

 15   extraordinairement tardive sur site puisqu'elle date de 2010, soit 15 ans

 16   après la fin du conflit.

 17   Subotic, pour défendre ses positions, en arrive même à manipuler parfois

 18   les éléments de preuve afin d'exonérer le SRK. Par exemple, lorsqu'elle

 19   évalue l'incident répertorié G4, c'est-à-dire le pilonnage par le SRK d'un

 20   match de football à Dobrinja dont il a déjà été question ici, elle utilise

 21   des coordonnées topographiques fournies par les enquêtes de la FORPRONU

 22   qu'elle replace sur d'autres courbes pour constituer une carte à une

 23   échelle différente de celle utilisée par la FORPRONU. Les conséquences

 24   d'une telle manipulation sont immédiatement apparentes, à savoir que le

 25   fait de placer les mêmes coordonnées sur une carte à une échelle différente

 26   conduit à tracer une courbe correspondant à un événement survenu dans un

 27   autre lieu.

 28   Au lieu de reconnaître que le fait d'utiliser les mêmes coordonnées sur des


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  1   cartes différentes à une échelle différente pourrait conduite à des

  2   résultats différents, Subotic affirme que les nouvelles courbes tracées par

  3   elle discréditent l'enquête initiale de la FORPRONU. En fait, le résultat

  4   est le contraire de ce qu'elle déclare. Tout ceci montre simplement qu'elle

  5   aboutit de cette façon aux conclusions qu'elle cherchait à obtenir. La

  6   Défense s'appuie sur cette manipulation dans son mémoire en clôture,

  7   affirmant les mêmes arguments erronés au paragraphe 1 938 de ce mémoire.

  8   Subotic a également proposé un certain nombre de théories de la

  9   conspiration que rien ne vient étayer dans le but d'expliquer les

 10   pilonnages de Markale. Par exemple, dans le cadre de l'incident répertorié

 11   G8, concernant Markale I, Subotic affirme qu'un dispositif stationnaire a

 12   été placé au marché. Le mémoire en clôture de la Défense s'appuie sur les

 13   déclarations de Subotic dans ses écritures, mais la théorie de l'explosion

 14   statique défendue par Subotic aurait exigé une vaste conspiration. Sa

 15   théorie aurait exigé l'existence d'une équipe de sabotage professionnelle

 16   qui aurait creusé un trou dont les mesures auraient dû être précises afin

 17   qu'un tir de mortier puisse passer pour un tir venu du territoire du SRK.

 18   Il aurait fallu des conspirateurs qui auraient placé un dispositif sur les

 19   lieux avant l'explosion statique. La grande théorie de Subotic aurait

 20   également exigé que ces conspirateurs aient amené sur place des cadavres

 21   sur le marché après l'explosion pour les faire passer pour des victimes.

 22   Lorsqu'elle a été interrogée sur cette théorie d'une vaste conspiration,

 23   Subotic n'a pas réussi à donner le nom ne serait-ce que d'une seule

 24   personne. Elle a tout simplement tout inventé.

 25   Il n'existe pas non plus le moindre élément de preuve physique à l'appui de

 26   sa théorie d'une explosion statique; même Subotic le reconnaît. Comme

 27   Gauthier - un témoin de la Défense, chef de l'enquête menée par les Nations

 28   Unies au sujet du témoignage [comme interprété] - l'a dit dans sa


Page 12522

  1   déposition, le pilonnage de Markale I n'a pas été dû à la pose d'un

  2   dispositif stationnaire, mais a bien été le résultat d'un tir de mortier de

  3   120-millimètres. De même, GRM065 convient dans la pièce D1442 que cet

  4   incident n'a pas été le résultat d'une explosion statique. La théorie de

  5   l'explosion statique est également exclue dans le rapport d'enquête des

  6   Nations Unies en page 21, pièce P538.

  7   A un autre moment, Subotic continue à défendre ses propres opinions, même

  8   face à la masse d'éléments de preuve prouvant que son opinion est erronée.

  9   Un exemple de ceci, c'est ce qu'elle dit dans sa déposition par rapport à

 10   l'incident répertorié G10, à savoir l'attaque par bombe aérienne modifiée

 11   par le SRK contre Hrasnica le 5 [comme interprété] avril 1995. Subotic

 12   refuse de reconnaître le fait qu'une bombe aérienne modifiée de 250

 13   kilogrammes a été utilisée au cours de cette attaque. Prétendant avoir

 14   qualité d'expert, elle refuse de reconnaître ce fait même en dépit du

 15   rapport des enquêteurs qui indique qu'un détonateur provenant d'une bombe

 16   aérienne modifiée a été trouvé sur les lieux. Elle refuse encore d'admettre

 17   qu'il s'agissait d'une bombe aérienne modifiée de 250 kilogrammes même

 18   lorsqu'elle est informée qu'il existe des documents de la VRS confirmant

 19   qu'il s'agissait bien d'une bombe aérienne modifiée de 250 kilogrammes.

 20   Comme si les informations des balisticiens et les documents de l'époque ne

 21   suffisaient pas, elle continue à nier qu'il s'agissait d'une bombe aérienne

 22   modifiée de 250 kilogrammes même après avoir été informée par la déposition

 23   du commandant de la Brigade d'Ilidza Radojcic qu'une bombe aérienne

 24   modifiée de 250 kilogrammes a été utilisée à Hrasnica. Cette arme est

 25   évoquée dans la déposition Radojcic, mais Subotic laisse entendre qu'il ne

 26   disait pas la vérité, qu'il savait bien qui avait tiré en tant que

 27   commandant de brigade.

 28   Subotic tient bon dans sa théorie même face à cette montagne d'éléments de


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  1   preuve pour une raison très précise : elle souhaite minimiser la capacité

  2   destructrice de cette bombe aérienne modifiée de 250 kilogrammes pour la

  3   faire passer pour une bombe de 100 kilogrammes. Sa déposition a un seul but

  4   : démontrer que le SRK aurait utilisé une force plus proportionnée contre

  5   une prétendue cible. Etant donné sa partialité extraordinaire et sa totale

  6   absence de crédibilité, elle s'en tient à un avis qui est absolument non

  7   étayé. Sa déposition doit être rejetée.

  8   Des conclusions et des manipulations d'éléments de preuve similaires se

  9   retrouvent dans la déposition de Poparic, qui a témoigné en tant qu'expert

 10   de tirs embusqués de la Défense au sujet des incidents répertoriés de tirs

 11   embusqués. Commençons par le fait que Poparic a admis qu'il avait construit

 12   sa théorie de la ligne de vision en négligeant totalement les coordonnées

 13   GPS utilisées par le bureau du Procureur sur les lieux où les victimes ont

 14   été visées par des tirs embusqués parce qu'il estimait que ces informations

 15   n'étaient pas nécessaires.

 16   Dans le même genre d'efforts que ceux de Subotic, Poparic s'engage

 17   également dans des déformations de la réalité et des raisonnements

 18   tarabiscotés en tentant d'exculper [phon] l'accusé. Par exemple, pour faire

 19   porter la responsabilité sur l'ABiH, Poparic place intentionnellement les

 20   coordonnées du lieu correspondant à l'incident répertorié F16 ailleurs que

 21   là où Tarik Zunic dit avoir subi un tir. Au lieu de s'appuyer sur la

 22   déposition de Zunic quant au lieu de l'incident, Poparic place le tir

 23   embusqué ailleurs, dans un lieu qui était moins visible à partir de

 24   Spicaste Stijena.

 25   Le mémoire de la Défense s'appuie sur cette manipulation de Poparic, même

 26   si Poparic admet que la déposition de Zunic correspond à d'autres éléments

 27   de preuve. Poparic choisit de faire confiance à un couple dont il ne donne

 28   pas le nom, qu'il aurait rencontré lors d'une visite en 2010 et qui lui


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  1   aurait dit que le tir embusqué venait d'un lieu différent. Rien dans les

  2   éléments de preuve ne vient étayer l'avis de Poparic, et les éléments de

  3   preuve dans leur grande majorité indiquent que le tir provenait des

  4   positions du SRK.

  5   Poparic nie également des faits bien connus. Je vais vous en donner un

  6   exemple : au paragraphe 2 170 du mémoire de la Défense, concernant

  7   l'incident répertorié F9, la Défense s'appuie uniquement sur des

  8   affirmations non étayées dans le but d'affirmer que "l'Accusation n'a pas

  9   réussi à prouver qu'il existait une position de tir de la VRS sur les lieux

 10   de l'institut pour les aveugles."

 11   L'affirmation de la Défense est contredite par ses propres témoins. Le

 12   commandant du 1er Bataillon de la Brigade d'Ilidza, Guzina, admet que le

 13   SRK tenait une position au niveau de l'école pour les aveugles. Ceci se

 14   trouve au transcript, page 22 548, et dans la pièce D514, paragraphe 37.

 15   La Défense critique les enquêteurs de Bosnie-Herzégovine aux paragraphes

 16   1 876 à 1 883 de son mémoire; toutefois, contredisant les dépositions de

 17   Subotic et de Poparic, les enquêteurs de la BiH - tels que Sabljica,

 18   Suljevic, Turkusic, Sokolar, Besic et Miokovic - étaient des enquêteurs

 19   expérimentés qui ont procédé à des centaines d'enquêtes pendant le conflit.

 20   Encore plus important, pour l'ensemble des affirmations de la Défense

 21   relatives à la partialité, les conclusions des enquêteurs de la BiH au

 22   sujet des incidents répertoriés étaient souvent corroborées par les

 23   enquêtes des Nations Unies. Par exemple, le pilonnage des personnes qui

 24   faisaient la queue pour obtenir de l'aide humanitaire à Dobrinja. L'enquête

 25   de la BiH a déterminé que les obus provenaient de l'est, c'est-à-dire de la

 26   direction de Lukavica; l'enquête de la FORPRONU, de même, corrobore les

 27   conclusions de la BiH et déclare que les obus provenaient de la direction

 28   de Lukavica.


Page 12525

  1   Les enquêtes de la BiH représentent simplement une petite partie de très

  2   nombreux éléments de preuve présentés par l'Accusation concernant la

  3   campagne de terreur menée à Sarajevo. Le témoignage des témoins entendus

  4   par la Chambre pendant toute la présente affaire ainsi que les pièces à

  5   conviction versées au dossier ne mènent qu'à une seule conclusion : pendant

  6   trois ans, le général Mladic et les autres membres de la campagne de

  7   terreur de Sarajevo et de l'entreprise criminelle commune ont mené une

  8   campagne de terreur contre les civils de Sarajevo. Suite à cette campagne,

  9   le général Mladic est responsable des crimes retenus contre lui, à savoir

 10   il est responsable de la terreur, des attaques illégales et de meurtre.

 11   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ceci met un point final à mes

 12   observations, et je rends la parole à M. McCloskey.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Weber.

 14   Monsieur McCloskey, avant de procéder, au sujet des analyses que vous allez

 15   présenter, je vous invite à réfléchir à votre débit de parole. Je pense que

 16   vous pourriez penser à éprouver quelque compassion vis-à-vis des

 17   sténotypistes et de nos oreilles.

 18   Veuillez procéder.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci de me le rappeler, Monsieur le

 20   Président. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, bonjour.

 21   Srebrenica. Srebrenica, c'est une catastrophe pour la communauté musulmane

 22   de Bosnie orientale, une tragédie de telle proportion que les paroles que

 23   je pourrai prononcer ici aujourd'hui ne pourront pas réussir à vous

 24   l'exprimer dans toute l'importance des souffrances qu'a vécues la

 25   population de Srebrenica.

 26   Mais la plus grande tragédie n'est pas à rechercher uniquement dans le

 27   nombre de morts ou dans les souffrances vécues par cette communauté. Nous

 28   devons également nous rappeler les familles qui sont restées vivantes, ces


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  1   personnes qui ont été condamnées à vivre toute leur existence sans la

  2   compagnie de leurs pères, sans la compagnie de leurs époux, de leurs

  3   frères, de leurs fils, de leurs voisins et de l'ensemble de leur

  4   communauté. Ceci est une souffrance trop importante. Il y a eu trop de

  5   pertes humaines pour que qui que ce soit parmi nous puisse comprendre

  6   véritablement la nature et l'ampleur de cette terrible souffrance vécue par

  7   les femmes et les survivants de la communauté de Srebrenica.

  8   Nous pouvons, toutefois, frapper en retour. Grâce au mandat qui nous a été

  9   décerné par le Conseil de sécurité et grâce à la création de ce Tribunal,

 10   nous pouvons exposer ces crimes terrifiants et tenter de découvrir qui est

 11   responsable de ces crimes. Grâce aux très nombreux éléments de preuve

 12   présentés en l'espèce, nous avons pu révéler la nature et l'ampleur de ce

 13   crime terrifiant, de ce génocide. Nous avons identifié les principaux

 14   responsables de ce crime. Nous avons fait comparaître Mladic au banc des

 15   accusés pour qu'il réponde de ses crimes.

 16   Les éléments de preuve concernant le génocide qui ont été présentés dans ce

 17   prétoire depuis quatre ans et demi - comme je m'y étais engagé dans mon

 18   propos liminaire - sont clairs, globaux et inattaquables. A partir des très

 19   nombreux éléments de preuve présentés, nous voyons Mladic sur le terrain à

 20   Srebrenica au commandement de ses forces, en train d'organiser

 21   systématiquement la capture, la détention, le transport, l'exécution et

 22   l'enterrement de plus de 7 000 hommes en âge de porter les armes ainsi que

 23   de jeunes hommes de Srebrenica, et l'expulsion de femmes, d'enfants et de

 24   vieillards.

 25   Pendant les deux parties d'audience suivantes, je vais nous ramener tous à

 26   l'année 1995 et mettre l'accent à votre intention sur les éléments de

 27   preuve les plus importants qui apportent la preuve de la responsabilité

 28   pénale individuelle de Ratko Mladic et montrent que ces éléments de preuve


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  1   permettent de démolir totalement les efforts de la Défense qui souhaite les

  2   nier.

  3   En l'espèce, l'acte d'accusation évoque deux entreprises criminelles

  4   communes liées l'une à l'autre et qui concernent toutes deux la Bosnie

  5   orientale : l'entreprise criminelle commune destinée à éliminer la

  6   population musulmane de Srebrenica et l'entreprise criminelle commune

  7   principale destinée à nettoyer sur le plan ethnique la population non-serbe

  8   dans les zones contrôlées par les Serbes de Bosnie. Je vais maintenant

  9   centrer ma présentation sur l'entreprise criminelle commune destinée à

 10   éliminer, dont vous savez qu'elle est définie comme constituant le

 11   transfert sous la force de femmes, d'enfants et de quelques personnes âgées

 12   hors de Srebrenica à partir des 11, 13 juillet, ainsi que le meurtre des

 13   hommes en âge de porter les armes et des jeunes hommes de Srebrenica.

 14   Dans les mois qui ont conduit à la chute de l'enclave, la population de

 15   Srebrenica avait systématiquement souffert de privation de nourriture et

 16   des autres nécessités élémentaires de l'existence, c'est-à-dire qu'elle

 17   avait souffert de restrictions délibérées de l'aide apportée à la

 18   population et des approvisionnements de la FORPRONU. Elle avait souffert

 19   d'attaques planifiées contre la population civile. Et tout cela a eu pour

 20   résultat le 11 juillet 1995, je cite, "la création d'une situation

 21   insupportable d'insécurité totale sans aucun espoir de future survie ou de

 22   vie pour les habitants de Srebrenica."

 23   Ces derniers mots, comme vous le savez, ne sont pas les mots que j'ai

 24   prononcés. Ce sont les mots de Karadzic et de Mladic que l'on trouve dans

 25   les ordres de la directive numéro 7 du 8 mars 1995, qui constitue la pièce

 26   P1469.

 27   Je ne peux pas penser à une meilleure description des conditions de vie de

 28   la population de Srebrenica le 11 juillet 1995. La directive numéro 7,


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  1   lorsqu'elle a été avec succès mise en action, mise en œuvre, a eu pour

  2   résultat précisément ce que recherchaient Mladic et Karadzic, à savoir la

  3   création d'une situation dans laquelle la population musulmane ne pouvait

  4   pas espérer survivre et était contrainte de quitter Srebrenica. Cette

  5   condition sans espoir de la population et le fait d'empêcher la FORPRONU

  6   étaient le résultat de la directive numéro 7 suite aux attaques qui avaient

  7   été menées, aux actions et privations qui avaient été conçues par Mladic et

  8   Karadzic pour créer cette situation inhumaine de 45 000 personnes à

  9   Srebrenica. Les conditions de la population musulmane à la date du 11

 10   juillet étaient le résultat direct de la politique de la VRS et des

 11   dirigeants bosno-serbes depuis le début de la guerre pour chasser les non-

 12   Serbes, une politique qui avait déjà été mise en œuvre et dont avaient

 13   parlé de façon répétée les dirigeants bosno-serbes, les représentants

 14   officiels et non officiels, comme indiqué dans les documents, à propos de

 15   réunions et de réunions qui se sont tenues de façon confidentielle.

 16   M. Tieger et M. Traldi vous ont rappelé l'objectif stratégique numéro 1 à

 17   partir du mois de mai 1992, qui visait la séparation des communautés

 18   nationales; et la directive numéro 4 de Mladic en novembre 1992, où il

 19   avait été ordonné que l'on chasse la population musulmane de la région de

 20   Srebrenica.

 21   Vous vous souviendrez certainement que M. Traldi a exposé ses arguments sur

 22   les éléments de preuve sur ce qui s'est passé exactement au début de

 23   l'année 1993, lorsque la VRS a réussi avec succès à chasser la population

 24   de Bosnie orientale. Cependant, les Nations Unies sont finalement

 25   intervenues au mois d'avril 1993 avec la création de la zone protégée par

 26   l'intermédiaire de la Résolution du Conseil de sécurité 819, qui a empêché

 27   d'autres actions de la VRS. L'intention était de chasser les Musulmans de

 28   Srebrenica. Cependant, il était clair qu'au mois de juillet 1995 [comme


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  1   interprété], d'après le rapport du commandant de la Brigade de Bratunac, le

  2   colonel Ognjenovic, peu après cette réunion qu'il a eue avec le général

  3   Mladic et le général Zivanovic, qui a été abordée précédemment par M.

  4   Tieger. Les propos avancés consistaient à dire que la vie devait être

  5   insupportable, que leur séjour devait être provisoire dans l'enclave et

  6   impossible et que ces personnes devaient quitter l'enclave en masse.

  7   L'ordre criminel a été donné en fonction de la directive numéro 7. Et, bien

  8   évidemment, ça n'est pas Ognjenovic qui en était à l'origine, mais il

  9   traduit simplement ce qu'il a appris suite à la réunion qu'il a eue entre

 10   Mladic et Zivanovic quelques jours auparavant. Ceci, nous le savons parce

 11   que, d'après ses propres termes, ceci a été noté dans le carnet du général

 12   Zivanovic. Comme M. Tieger l'a signalé, les éléments de preuve montrent

 13   qu'Ognjenovic a fondé son rapport sur ce qu'il connaissait de ses troupes.

 14   La pièce P5273.

 15   Cette enclave ne devait pas survivre mais disparaître.

 16   Ensuite, au mois d'août 1994, les commentaires de Mladic sur un

 17   enregistrement vidéo que nous avons entendu lorsque nous avons entendu les

 18   arguments de M. Tieger :

 19   "Et les Américains, les Anglais, les Ukrainiens et les Canadiens à

 20   Srebrenica - dans l'intervalle, les Néerlandais - qui étaient censés les

 21   protéger, sinon ils auraient disparu de cette région depuis longtemps."

 22   Encore une fois, le terme qui est utilisé et repris c'est

 23   "disparition". Nous avons pu le constater dans les notes de Zivanovic. Il

 24   l'utilise encore une fois et il parle encore de ses intentions en direction

 25   de la communauté musulmane.

 26   Les déclarations de Mladic ici traduisent sa frustration au niveau

 27   des enclaves de l'ONU et de la force internationale qui l'empêche de

 28   chasser les Musulmans complètement de la zone à l'époque, et il n'était pas


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  1   disposé à attaquer les forces des Nations Unies. Au printemps de l'année

  2   1995, nous avons la directive numéro 7 au cours de laquelle Zivanovic a eu

  3   une réunion avec Mladic. Et encore une fois, nous avons les notes

  4   concernant Srebrenica, P5274.

  5   "Rendre la vie insupportable." Ces propos se font l'écho du thème

  6   repris dans la directive numéro 7, tels qu'exprimés par Mladic ainsi que

  7   par Miletic dans la directive numéro 7.

  8   Outre l'ordre qui visait à créer des conditions insupportables pour

  9   la survie des habitants, la directive numéro 7 énonce, comme je l'ai dit,

 10   un ordre insidieux aux fins de limiter l'aide qui devait parvenir aux

 11   enclaves, bien évidemment, dans le but d'exécuter l'ordre visant à créer

 12   des conditions insupportables.

 13   "L'Etat et les organes militaires pertinents responsables des travaux

 14   avec la FORPRONU et les organisations humanitaires, par l'intermédiaire

 15   d'un plan et d'une restriction imposée à l'obtention de permis, ceci a été

 16   fait discrètement aux fins de limiter l'appui logistique apporté à la

 17   FORPRONU et aux enclaves et l'approvisionnement en matériel et ressources à

 18   la population musulmane la rendant ainsi dépendante de notre bonne volonté,

 19   tout en évitant une condamnation de la part de la communauté internationale

 20   et de l'opinion publique internationale."

 21   Et, bien évidemment, cet ordre qui est donné par l'intermédiaire de

 22   la directive 7 a été suivi et mis en œuvre dans de nombreux cas par Mladic

 23   lui-même qui personnellement a surveillé ces demandes d'envoi de convoi et

 24   paraphé cette décision qui visait à refuser l'approvisionnement de ces

 25   produits de première nécessité.

 26   Dans un exemple à la pièce P1788, page 16, Mladic a refusé à la

 27   FORPRONU une demande de carburant le 30 mars. Il a paraphé cette demande en

 28   inscrivant un "non" en haut du document. Obradovic a identifié les


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  1   initiales de Mladic ici. Pages du compte rendu d'audience 40 537 et 40 538.

  2   En se penchant sur le reste de la pièce P1788, nous constatons -

  3   ainsi que les pièces à conviction P2145, P2159 et P2146 - que toutes les

  4   demandes qu'on voit, comme vous le constatez, ont été restreintes

  5   personnellement par Mladic s'agissant d'équipement ou de troupes qui

  6   devaient être envoyés à la FORPRONU dans 29 cas environ.

  7   Les efforts de l'état-major principal visant à limiter

  8   l'approvisionnement en équipement aux enclaves, c'est quelque chose qui est

  9   manifeste d'après la correspondance du général Mladic avec les corps et les

 10   brigades, donnant des instructions pour que différentes restrictions soient

 11   imposées. Voir les paragraphes 435 à 447 de notre mémoire en clôture.

 12   Le prochain document qui est important consigne le fait que

 13   l'objectif devait être mis en œuvre aux fins de chasser les Musulmans de

 14   Srebrenica. Il s'agit d'un ordre de Mladic qui est daté du 12 mai 1995 et

 15   qui donne des instructions au Corps de la Drina aux fins de préparer des

 16   plans de bataille contre les enclaves de Zepa et de Srebrenica. Pièce

 17   P2097.

 18   Cependant, le 16 mai, le général Krstic informe l'état-major

 19   principal dans la pièce P298 que même s'il est en train d'effectuer des

 20   préparations pour mettre en œuvre l'ordre de Mladic, il déclare, et je

 21   cite:

 22   "Nous sommes pour le moment incapables d'exécuter cet ordre et de

 23   fermer complètement les enclaves ou de mener des attaques contre ces

 24   enclaves, parce que nous ne disposons pas de suffisamment de forces…"

 25   Donc, il est incapable à ce moment-là de recruter suffisamment de

 26   troupes au mois de mai, d'exécuter les plans du Corps de la Drina et de

 27   mener une action de sabotage au mois de juin qui a été couronnée de succès.

 28   Ceci était censé faire naître la peur et la panique au sein de la


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  1   population de Srebrenica.

  2   Vous vous souviendrez certainement d'une petite unité, le 10e

  3   Détachement de Sabotage, et de la Brigade de Bratunac dont les soldats sont

  4   secrètement entrés à Srebrenica par l'intermédiaire d'un tunnel et ont tiré

  5   plusieurs roquettes à main dans le brouillard en direction de la ville. Ils

  6   ont tué une femme qui tentait de traverser ce tunnel. Voir notre mémoire en

  7   clôture au paragraphe 449.

  8   Milorad Pelemis, le commandant de l'unité, a dit dans sa déposition

  9   qu'ils avaient pris pour cible le poste de police avec leurs grenades à

 10   tube, page du compte rendu d'audience 38 812 [comme interprété]. Vous vous

 11   souviendrez certainement de sa déposition à ce sujet et vous vous

 12   souviendrez des terribles crimes qui ont été commis contre les femmes

 13   musulmanes à Pelemisi en 1992. Inutile de dire que sa déposition n'était

 14   pas crédible et que l'objectif a été couronné de succès, c'est-à-dire

 15   l'attaque qui avait été mise en œuvre, comme l'attestent les notes qu'il a

 16   prises à propos de cette opération. P7272. Les notes de Pelemis de 1995

 17   précisent : entrer dans la ville et provoquer la panique et le désarroi.

 18   Cette opération avait été prévue pour faire naître la peur et la panique,

 19   et ceci concorde parfaitement avec l'objective de la directive numéro 7,

 20   c'est-à-dire de rendre la vie insupportable.

 21   Un peu plus loin dans le courant de ce mois, le Corps de la Drina

 22   avait planifié et exécuté des opérations de combat contre le poste

 23   d'observation du Bataillon néerlandais à Zeleni Jadar, en déplaçant ce

 24   poste opérationnel et en ouvrant la voie pour une attaque future contre

 25   Srebrenica depuis ce secteur. Cet élément de preuve figure clairement à

 26   notre mémoire en appel au paragraphe 1 107 et se fonde essentiellement sur

 27   des documents de la VRS et du Bataillon néerlandais qui ont fait état de

 28   l'attaque en question.


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  1   Donc, le 2 juillet, le Corps de la Drina se prépare à mettre en œuvre

  2   son plan d'attaque dans l'enclave en tant que telle. Je souhaite vous

  3   montrer ceci brièvement, vous montrer la pièce P1465.

  4   Nous constatons d'abord que le plan d'attaque se fonde sur les

  5   directives numéro 7 et numéro 7/1, ce qui sape complètement l'argument de

  6   la Défense qui indique que Mladic avait retiré son ordre criminel fondé sur

  7   la directive numéro 7 pour le remplacer par la directive 7/1. Sa défense a

  8   été complètement mise à mal par M. Tieger lundi aux pages du compte rendu

  9   d'audience 44 335 et 44 336 et dans notre mémoire en clôture au paragraphe

 10   432. En outre, je vous renvoie à l'interrogatoire de M. Groome du général

 11   Milovanovic sur ce point, qui a exposé les mensonges en soulignant,

 12   document après document, question après question, quels étaient justement

 13   ces mensonges. En particulier, confer les pages du compte rendu d'audience

 14   17 123 à 17 132. Nous constatons que le plan d'attaque visait à diviser

 15   Srebrenica et Zepa. Comme je vous l'ai indiqué auparavant, il s'agissait

 16   d'un objectif légitime contre les efforts de l'ABiH qui souhaitait unifier

 17   les enclaves sur un plan militaire et ordonner que soient circonscrites les

 18   enclaves à leurs simples zones urbaines. Comme nous l'avons montré, ceci

 19   avait été conçu pour chasser la population civile des zones rurales de

 20   l'enclave et que ces personnes soient concentrées dans un tout petit

 21   secteur urbain de Srebrenica, créant ainsi un désastre humanitaire comme en

 22   1993. Créant ainsi, je cite, "des conditions visant à l'élimination des

 23   enclaves," ce qui dans ce document signifiait créer une situation qui

 24   permettrait à l'attaque d'avoir lieu et qui devait signifier la prise de

 25   toute l'enclave et le déplacement de toute la population. Ce renvoi à une

 26   élimination au niveau du plan d'attaque ne doit pas être confondu avec

 27   notre emploi du terme "éliminer", c'est-à-dire l'entreprise criminelle

 28   commune aux fins d'éliminer. Dans l'entreprise criminelle commune aux fins


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  1   d'éliminer, nous parlons des deux à la fois, le déplacement de la

  2   population et le meurtre des hommes en âge de porter les armes, comme cela

  3   a été le cas quelques jours plus tard.

  4   Avec l'ordre d'attaque de Krivaja 95, il y a eu la carte à l'appui de

  5   l'attaque qui montre que la signature de Mladic se trouvait en bas du

  6   document, approuvant ainsi cet ordre. P1087, page 25.

  7   La Défense laisse entendre que Mladic a approuvé cette opération après les

  8   faits; cependant, aucun élément de preuve ne permet d'étayer cela, et cela

  9   n'a aucun sens au plan militaire que Mladic soit d'accord avec une

 10   opération aussi importante après les faits. Le plan d'attaque, comme vous

 11   l'avez constaté, a été envoyé à l'état-major principal et a été établi le 2

 12   juillet, comme nous l'avons indiqué dans ce document à la page 10.

 13   Le document-clé suivant porte sur la mise en œuvre d'un éventuel

 14   déplacement de la population dans le communiqué du 9 juillet qui émane de

 15   Tolimir et envoyé à Gvero et Krstic à Pribicevac, au poste de commandement

 16   avancé, en transmettant ainsi l'approbation de Karadzic qui visait à

 17   changer la stratégie sur les conditions de l'élimination de Srebrenica qui

 18   devait avoir lieu dans l'ensemble de l'enclave et pour chasser tous les

 19   Musulmans. P1466.

 20   Le président de la Republika Srpska est satisfait des résultats obtenus par

 21   les opérations de combat autour de Srebrenica et est d'accord pour

 22   poursuivre ces opérations pour la prise de contrôle de Srebrenica. Ce

 23   document illustre sa satisfaction au niveau de la chaîne de commandement.

 24   Mladic n'est pas mentionné dans ce document. Personne d'autre n'était

 25   habilité à faire une proposition aussi importante à Karadzic, une

 26   proposition de changement de cette politique qui avait été mise en œuvre

 27   sur deux ans créant ainsi les conditions de la chute de l'enclave. Il

 28   s'agissait en fait de conquérir l'enclave.


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  1   Le lendemain, le 10 juillet, Mladic a donné un ordre en se fondant sur les

  2   succès réalisés à Srebrenica le 9 juillet, ordre portant sur les

  3   préparatifs pour une attaque contre Zepa, P2106. Ce document montre que

  4   Mladic était parfaitement informé des événements du 9 juillet. Il s'agit

  5   d'une décision cruciale qui a été prise à ce moment-là. Il s'agit de

  6   quelques documents tout à fait surprenants qui constituent le dossier

  7   historique et qui permettent d'identifier l'objectif et l'intention sous-

  8   jacente des crimes qui visaient à chasser la population musulmane de

  9   Srebrenica et à planter le décor du meurtre des garçons et des hommes de

 10   Srebrenica. Avec ces documents, bien évidemment, les actions sur le terrain

 11   pour la mise en œuvre et la réalisation de l'objectif criminel - aux fins

 12   de chasser la population civile - ont effectivement été réalisées.

 13   Après la directive numéro 7 qui a été envoyée au Corps de la Drina, nous

 14   constatons des éléments de preuve directs qu'il y a eu des restrictions

 15   très importantes imposées sur les convois du Bataillon néerlandais et de la

 16   population; en bref, le Bataillon néerlandais était quasiment incapable de

 17   fonctionner correctement. Ceci est décrit en détail par différents témoins

 18   du Bataillon néerlandais et exposé dans notre mémoire en clôture aux

 19   paragraphes 435 à 447.

 20   Les privations imposées à la population musulmane étaient tellement

 21   importantes que les personnes mouraient de faim et étaient sans espoir.

 22   Voir paragraphes 445 et 446.

 23   La création des conditions insupportables a également été réalisée par les

 24   attaques de la VRS contre la population civile, avec une attaque qui a

 25   commencé le 6 juillet, comme expliqué en détail dans notre mémoire en

 26   clôture. Ces attaques qui avaient été planifiées par la VRS avaient pour

 27   résultat le déplacement de la population des zones rurales de la ville, y

 28   compris le projet d'abri suédois d'environ 3 000 habitants. Et ceci a


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  1   atteint une masse critique le 10 juillet et le 11 juillet, lorsque la

  2   population a encerclé la base du Bataillon néerlandais à Srebrenica, connue

  3   sous le nom d'enceinte Bravo.

  4   Vous vous souviendrez de la déposition des témoins du Bataillon néerlandais

  5   Rave et Boering, qui ont décrit comment dans la matinée du 11 juillet, à

  6   Srebrenica, la VRS a lâché un obus au milieu de la foule et autour de la

  7   population sur la base du Bataillon néerlandais. On ne peut qu'imaginer le

  8   carnage.

  9   Je souhaite vous montrer une courte séquence vidéo pour que vous puissiez

 10   vous remémorer cette situation épouvantable, insoutenable, créée par

 11   Karadzic et Mladic le 11 juillet dans la ville de Srebrenica. Où les

 12   Musulmans se rassemblent dans un état de panique totale à l'endroit où se

 13   trouve la base de la FORPRONU, la compagnie Bravo, certaines personnes

 14   tentent de monter à bord de véhicules de la FORPRONU pour assurer la

 15   sécurité et être emmenées à Potocari.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Ces images parlent d'elles-mêmes. Pendant

 18   que la foule terrifiée fuyait et se dirigeait vers Potocari, Rave a décrit

 19   que des obus tombaient des deux côtés de la route autour des gens qui

 20   fuyaient, et il a donc pensé que c'étaient des efforts pour que les peuples

 21   se regroupent vers le nord. Page du compte rendu 10 171.

 22   Et dans la soirée du 11 juillet, la population a été complètement déplacée,

 23   éloignée de leurs domiciles, dans des conditions terribles. Il y en avait

 24   beaucoup avec des nouveau-nés, avec des enfants en bas âge, sans leurs

 25   hommes et sans moyens pour survivre pour pendant plus de quelques jours. La

 26   fuite était leur seule option puisque le Bataillon néerlandais n'avait plus

 27   d'effectifs, ni d'installations, ni d'approvisionnements pour les garder en

 28   vie. Paragraphes 441 jusqu'à 444. Et la force aérienne de l'OTAN n'était


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  1   pas utile. La VRS tenait déjà quelques otages du Bataillon néerlandais.

  2   Pendant cette même soirée, lors de la première réunion avec Mladic, le

  3   commandant Karremans du Bataillon néerlandais a reconnu que l'enclave était

  4   perdue et a demandé à Mladic l'autorisation de permettre au Bataillon

  5   néerlandais de quitter l'enclave avec la population musulmane. Cette nuit-

  6   là, Mladic a personnellement ordonné que les autocars soient prêts pour ce

  7   déplacement. Nous savons que le général Skrbic en a témoigné, pages du

  8   compte rendu 13 984 jusqu'à 85.

  9   Mladic était présent à Potocari le 12 et le 13 juillet, il commandait à ses

 10   troupes de séparer des hommes et des garçons de leurs familles, déplacer

 11   des femmes et des enfants vers Kladanj et placer des hommes en détention

 12   avant de les exécuter sommairement. Le témoignage et les vidéos qui

 13   montrent ces deux jours terribles de l'expulsion, on peut y voir que sur

 14   les visages des Musulmans la peur et la terreur étaient perceptibles.

 15   Maintenant, nous allons vous montrer une séquence vidéo de notre

 16   recueil de vidéos, P1147, où on peut voir un nombre massif des gens de

 17   Potocari à la date du 12 juillet. Et si vous regardez attentivement cette

 18   séquence vidéo, vous allez voir des hommes en âge de combattre qui étaient

 19   dispersés dans cette foule, que les Serbes de Bosnie pouvaient voir

 20   également.

 21   [Diffusion de la cassette vidéo]

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] J'aimerais pouvoir vous faire imaginer

 23   cette chaleur, ces odeurs terribles et cette horreur pour avoir une idée

 24   comment c'était. L'idée selon laquelle ces gens avaient quitté cet endroit

 25   de leur plein gré est insultante.

 26   Du même recueil de vidéos, nous avons une séquence où vous pouvez voir

 27   comment les femmes, les enfants et les personnes âgées étaient expulsés et

 28   forcés de franchir la ligne de front. Ils ont dû marcher 5 kilomètres, mais


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  1   la température à l'époque était de 35 degrés, et ils devaient se diriger

  2   vers Kladanj.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Parfois les sous-titres n'étaient pas

  5   faciles à lire. La dernière femme a dit :

  6   "Qu'est-ce que je vais faire maintenant ? J'ai quatre enfants. Ils

  7   m'ont laissée ici pour souffrir avec eux."

  8   Et après, elle dit :

  9   "Comment pouvons-nous… comment sommes-nous censés vivre maintenant ?"

 10   Nous avons vu des documents qui sont à la base de ce crime du

 11   transfert forcé et nous avons rappelé le comportement des forces de Mladic

 12   qui mettaient en œuvre la police et les ordres concernant l'expulsion. Mais

 13   cela n'est pas tout, ce n'est pas tout ce que nous avons vu dans ce

 14   prétoire. Je suis sûr que vous allez vous rappeler ce que Mladic a dit

 15   lorsqu'il a ordonné l'expulsion de la population. Le 12 juillet, Mladic a

 16   pris le poste radio et a dit dans cette conversation interceptée - ce que

 17   vous allez voir à l'écran, la transcription de cette conversation

 18   interceptée - il dit :

 19   "Mladic : Est-ce que ces autocars et ces camions étaient partis ?

 20   "Mladic : Excellent, très bien. Continuez à superviser la situation.

 21   Il ne faut pas que leurs petits groupes s'y faufilent. Ils ont capitulé

 22   tous et ils se sont rendus, et nous allons les évacuer tous. Ceux qui

 23   veulent être évacués et ceux qui ne veulent pas être évacués."

 24   C'est la pièce P1235.

 25   Finalement, vous allez entendre l'enregistrement audio d'une séquence

 26   vidéo où quelque temps après la guerre Mladic s'est vanté de la façon à

 27   laquelle il a remporté la victoire sur le peuple de Srebrenica. Nous

 28   n'allons pas regarder cela maintenant, mais je peux vous lire ce qu'il


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  1   avait dit à cette occasion-là :

  2   "Je n'aurais pu prendre Srebrenica et Zepa si je ne les avais pas

  3   affamées pendant ce dernier hiver. Depuis le mois de février, je n'ai fait

  4   passer qu'un ou deux convois."

  5   Vous allez vous rappeler que lorsque j'ai montré cette vidéo au

  6   général Obradovic, il a été suffisamment honnête pour identifier la voix de

  7   Mladic, et c'est comme cela qu'il a authentifié la séquence vidéo. Les

  8   moyens de preuve sont sans équivoque et sont irréfutables. La population

  9   musulmane de Srebrenica a été expulsée pendant la période allant du 11 au

 10   13 juillet par Mladic et par ses forces qui opéraient en conformité avec la

 11   politique de long terme et les ordres visant à les chasser. Mladic n'a

 12   laissé à la population aucun choix, la population devait quitter Srebrenica

 13   pour survivre.

 14   Je pense que c'est maintenant le moment propice pour faire la pause.

 15   Et, plus tard, je vais parler des opérations de meurtre.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à vous de voir. Vous avez

 17   encore cinq minutes avant la pause habituelle, mais si vous pensez que

 18   c'est le moment propice pour faire la pause, vous pouvez le faire.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Bien.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va faire la pause, et nous allons

 21   continuer à 12 heures 10.

 22   --- L'audience est suspendue à 11 heures 50.

 23   --- L'audience est reprise à 12 heures 12.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, veuillez

 26   poursuivre.

 27   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci.

 28   Opération de meurtre. L'exécution sommaire de plus de 7 000 hommes et


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  1   garçons musulmans et l'opération consistant à expulser les femmes et les

  2   enfants aux dates du 12 [comme interprété] et du 13 juillet étaient en fait

  3   une action majeure qui consistait en deux opérations interconnectées, et je

  4   fais référence à ces opérations comme étant opérations de transfert forcé

  5   et de meurtre, toutes les deux destinées à se débarrasser de la population

  6   entière de Srebrenica, ce que nous avons défini dans l'acte d'accusation

  7   comme étant l'entreprise criminelle commune pour éliminer. Nous parlons de

  8   ces deux opérations de façon séparée, mais comme vous le savez - vu les

  9   moyens de preuve - ces opérations sont interconnectées, en particulier pour

 10   ce qui est des opérations aux 12 et 13 juillet, il faut les considérer

 11   comme deux opérations qui sont très reliées entre elles et qui font la base

 12   de l'entreprise criminelle commune pour éliminer.

 13   Pour ce qui est des arguments que je vais présenter aujourd'hui, j'ai

 14   divisé les arguments de l'Accusation concernant l'opération de meurtre en

 15   quatre chapitres : d'abord, l'exécution en masse du 13 au 23 juillet et au-

 16   delà de ces dates-là de plus de 7 000 hommes et garçons de Srebrenica; le

 17   deuxième, les moyens de preuve identifiant les auteurs de ces crimes, il

 18   s'agit exclusivement des officiers de la VRS et du MUP et qui étaient

 19   placés sous le commandement de Ratko Mladic; le troisième, la présence, le

 20   comportement et les actions du général Mladic du 11 juillet jusqu'au 17

 21   juillet, il a commandé les unités qui se trouvaient sur le terrain et

 22   également de Belgrade. Ces trois chapitres sont la base et les fondements

 23   pour ce qui est de prouver la responsabilité criminelle de Mladic. Mais il

 24   y a également autre chose dans le cadre du chapitre 3, et je l'appelle

 25   chapitre 4, il s'agit des preuves accablantes montrant l'implication de

 26   Mladic à la planification, aux ordres et à la supervision des meurtres en

 27   masse.

 28   La Défense, semble-t-il, accepte dans une certaine mesure qu'il y


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  1   avait des meurtres qui se sont passés dans cette période de temps

  2   pertinente. Mais ils avancent que le nombre de victimes de ces meurtres est

  3   gonflé et qu'il s'agissait pour la plupart de gens qui étaient victimes de

  4   ces meurtres en masse. La Défense est d'accord pour dire que, ainsi que

  5   l'Accusation dans une certaine mesure, que Beara et Popovic et d'autres

  6   officiers de sécurité aient été, de façon significative, impliqués à ces

  7   meurtres. Krstic a joué important dans ces crimes.

  8   Et je comprends que la Défense est d'accord avec l'Accusation

  9   concernant l'endroit où se trouvaient Mladic du 11 juillet au 16 juillet --

 10   dans la soirée du 16 juillet. Et je crois que --

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit du 6 juillet ?

 12   M. McCLOSKEY : [interprétation] C'est la soirée du 16 juillet. Je pense

 13   qu'ils sont d'accord pour dire que Mladic se trouvait en Bosnie, en

 14   service, à la date du 11 juillet jusqu'en après-midi du 14 juillet, au

 15   moment où il a franchi la frontière avec la Serbie. Pourtant, la Défense,

 16   d'une façon impossible, omet Mladic ainsi que ses unités de ces crimes en

 17   affirmant qu'il n'était pas au courant de cela et qu'il n'a pas été

 18   impliqué à des meurtres en masse, que lui et la VRS ou les forces de la

 19   police n'étaient pas au courant de cela, à l'exception faite de quelques

 20   officiers chargés de la sécurité.

 21   Donc, pour ce qui est des points de désaccord entre la Défense et

 22   l'Accusation, ce sont les identités des auteurs de ces opérations de

 23   meurtre, le commandement de Mladic et les liens qu'il avait avec ces

 24   opérations.

 25   Selon l'expert militaire de la Défense, ils ont conclu que ces

 26   meurtres ont été commis par, je cite :

 27   "Des groupes paramilitaires auto-organisés de Podrinje et des

 28   criminels qui étaient connus en tant que criminels de la période avant la


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  1   guerre ou qui se sont vengés… qui ont probablement commis en coopération

  2   avec certains officiers chargés de la sécurité ces crimes."

  3   Et qu'il n'y avait pas d'autre implication des forces de la VRS ou du

  4   MUP placées sous le commandement de Mladic. C'est D1661, page 232. Nous

  5   avons posé la question de savoir qui étaient les auteurs de ces crimes, qui

  6   avait fait cela. Et malgré cela, ils n'ont pas dit qui c'était. Ils

  7   affirment que, malgré le fait que Mladic se trouvait en fonction aux

  8   endroits qui se trouvaient à la proximité des sites du crime, il n'était

  9   pas courant du fait que ses forces avaient commis des crimes.

 10   D'abord, l'exécution en masse. Les preuves concernant les crimes sont

 11   accablantes. Vous avez reçu ces moyens de preuve, premièrement, dans

 12   beaucoup de cas des survivants, dans beaucoup de cas des bourreaux

 13   également qui étaient originaires de la même région que ceux qui avaient

 14   été assassinés. Cela est étayé par les moyens de preuve fournis par

 15   l'enquête de médecine légale sur place, par les vues aériennes, par les

 16   moyens de preuve concernant le mouvement des véhicules, par les témoignages

 17   de témoins des exhumations des charniers sur le territoire de Srebrenica.

 18   Jusqu'ici, à peu près 6 000 victimes de meurtre de ces fosses communes ont

 19   été identifiées. Et vu qu'il y a beaucoup de personnes qui sont toujours

 20   portées disparues, nous nous attendons à ce que le chiffre total dépasse le

 21   nombre de 7 000 personnes tuées.

 22   Donc, la Défense a mis en question seulement les exécutions près de

 23   la rivière Jadar et à Cerska, ensuite le meurtre des patients à Milici, et

 24   ils ont dit que les meurtres en masse à Kravica étaient commis en

 25   représailles puisque un soldat du MUP a été tué par un prisonnier musulman.

 26   Donc, ils se sont vengés du meurtre de ce soldat du MUP. Et je vais donc me

 27   fonder sur notre mémoire en clôture pour ce qui est de l'analyse détaillée

 28   de ces cas.


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  1   Mais vous allez vous rappeler les preuves concernant les meurtres

  2   près de la rivière Jadar, ce que nous avons dit dans nos arguments

  3   conformément à l'article 98 bis. Et dans notre mémoire en clôture, ce sont

  4   les paragraphes 1 426 à 1 435. Vous allez vous souvenir du témoignage du

  5   survivant RM314, de sa gestuelle, de toutes les preuves qui étayaient son

  6   témoignage disant qu'il avait été capturé, emmené jusqu'à la rivière, on

  7   lui a tiré dessus, il est tombé dans la rivière, mais il a réussi à se

  8   sauver. La Défense présente de façon erronée la signification du terme

  9   latin "vulna explosiva". Dans son dossier médical, ils ont dit qu'il

 10   s'agissait d'une blessure par éclat d'obus, mais les preuves présentées ici

 11   ont démontré le contraire; que ce terme décrit la blessure de cette victime

 12   et ne fait pas référence à la cause de la blessure de cette victime. C'est

 13   ce qu'on peut voir dans le dossier médical.

 14   S'agissant de Cerska, le meurtre de 150 hommes de Srebrenica, même

 15   s'il n'y a pas de survivants à cette exécution, les témoins, les preuves

 16   médicolégales et les preuves de l'opération de nettoyage du 17 juillet

 17   ordonnée par Mladic à Keserovic prouvent que les 150 Musulmans capturés

 18   lors de l'opération de balayage du 17 juillet ont été exécutés à Cerska le

 19   17 ou le 18 juillet. Reportez-vous à notre mémoire aux paragraphes 1 341 à

 20   1 347 et 1 540 à 1 545.

 21   Le nœud de l'affaire pour Cerska consiste à déterminer la date à

 22   laquelle Keserovic a reçu l'ordre de Mladic de mener l'opération de

 23   balayage. Nous avons prouvé que Mladic a donné cet ordre oral à Keserovic

 24   la nuit du 16 juillet, après le retour de Mladic de Belgrade. Dès lors, le

 25   meurtre des 150 victimes de Cerska est le résultat direct de l'ordre de

 26   Mladic.

 27   Si Keserovic a refusé de confirmer son témoignage selon lequel il

 28   avait reçu l'ordre le 16 juillet, il n'a pas dévié de son récit selon


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  1   lequel il a reçu l'ordre personnellement de Mladic la veille de son départ

  2   à Bratunac. Nous avons prouvé que Keserovic s'est rendu à Bratunac le 17

  3   juillet, prouvant ainsi qu'il avait reçu l'ordre de Mladic à Crna Rijeka la

  4   nuit du 16. Ce qui relit directement Mladic aux meurtres de Cerska.

  5   Rappelez-vous le jeune homme qui avait été pris dans l'opération de

  6   balayage du 17. Il a identifié des gens qu'il connaît et qui ont été

  7   trouvés parmi les 150 de Cerska, et ces personnes ont été tuées du fait de

  8   l'opération de nettoyage qui avait été ordonnée et qui s'est produite au

  9   milieu de la période de l'opération de meurtre.

 10   Pour Kravica, la situation est complexe avec plusieurs formes de

 11   preuve qui s'enchevêtrent. Vous vous souviendrez du meurtre de masse de 800

 12   à 1 000 personnes à l'entrepôt de Kravica peu après le départ de Mladic de

 13   la prairie de Sandici, une heure plus tôt sans doute. Nous avons des

 14   preuves qui proviennent de survivants, de témoins du MUP, de vidéos, de

 15   transcriptions de vidéo, de M. Blaszczyk, et cetera. Nous avons analysé de

 16   près cette preuve dans notre mémoire, et je ne vais pas passer cela en

 17   revue parce que c'est trop complexe. Pour le moment, il faut savoir que la

 18   Défense et l'Accusation semblent être d'accord pour dire qu'un prisonnier

 19   musulman a pris le fusil d'un garde du MUP et l'a tué. Ensuite, un autre

 20   soldat du MUP a pris le fusil des mains du Musulman, se brûlant avec le

 21   canon. La différence est que la Défense estime que c'est la mort de ce

 22   soldat qui a donné à cette folie meurtrière, alors que pour l'Accusation

 23   cet incident était organisé et l'exécution répondait à des ordres, et le

 24   soldat s'est brûlé la main bien après le début des exécutions. Il

 25   s'agissait d'un geste désespéré d'un Musulman qui voyait des exécutions qui

 26   se faisaient autour de lui.

 27   Pour comprendre Kravica, il faut comprendre la preuve qui montre que la

 28   brûlure des mains n'aurait pu survenir qu'à l'est de l'entrepôt, bien


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  1   longtemps après les tueries à l'ouest de l'entrepôt. On peut le voir en

  2   écoutant les deux témoins survivants : RM256, qui était à l'ouest; et

  3   RM274, qui était à l'est. Et il faut également bien regarder la vidéo de

  4   l'arrivée de Borovcanin sur place.

  5   Alors, ces survivants et ce récit présentent des différences mais

  6   également des similitudes, et si on connecte cela avec toutes les preuves,

  7   il est évident que ce n'est pas le fait que le soldat se soit brûlé les

  8   mains qui a été le point de départ des exécutions. Pour notre analyse du

  9   meurtre des patients de Milici, veuillez vous reporter à notre mémoire aux

 10   paragraphes 1 375 à 1 368 [comme interprété], où nous expliquons les

 11   preuves qui démontrent que Popovic a éloigné dix Musulmans gravement

 12   blessés de la Brigade de Zvornik le 23 juillet et les a fait tuer. Et les

 13   documents médicaux identifient qui sont ces personnes. Il ne fait aucun

 14   doute que Popovic les tenait le 23, qu'il a ordonné l'exécution ce jour-là

 15   et qu'ils ont été emmenés et tués.

 16   Mais revenons-en à notre thèse principale. Comme je l'ai dit, en plus

 17   des crimes dont j'ai parlé, la Défense et leurs experts n'ont pas remis en

 18   cause les grands sites d'exécution. Elle s'est bornée à dire que certaines

 19   des personnes exhumées des fosses communes étaient des victimes de guerre.

 20   Mais il n'y a aucune preuve qui montre qu'il y ait des victimes autres que

 21   des victimes de meurtre dans les fosses communes de Branjevo, Kozluk, au

 22   barrage de Petkovci, Orahovac et dans les sites secondaires qui viennent de

 23   ces fosses communes énormes. Seule la fosse de Glogova contenait des

 24   victimes qui sont décédées dans des circonstances inconnues - combat,

 25   meurtre ou autre. Glogova était utilisée, vous savez qu'elle se trouvait le

 26   long de la route, et il est impossible de savoir combien de corps se

 27   trouvaient le long de la route et combien de personnes sont mortes dans des

 28   circonstances que nous ignorons.


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  1   Ce que nous savons, c'est que Glogova contenait toutes les 800 à 1

  2   000 victimes de l'entrepôt de Kravica et ainsi que les corps des victimes

  3   des écoles de Bratunac - bien plus de 50, même si compte tenu des

  4   circonstances du carnage nous n'avons pas pu donner des numéros précis.

  5   Donc, non seulement il n'y a pas de preuve qui soutient les

  6   affirmations de la Défense en ce qui concerne les victimes de guerre, mais

  7   il n'y a aucune raison pour laquelle la VRS se serait lancée dans un tel

  8   projet. Les zones de conflit étaient éloignées, boisées, inaccessibles, ce

  9   qui reflète l'itinéraire emprunté par la colonne pour éviter les forces

 10   serbes. Des corps dans ces zones éloignées ne représentaient pas un danger

 11   sanitaire tel qu'il fallait engager des hommes et des ressources.

 12   Les bois étaient denses, inaccessibles, et contenaient des Musulmans

 13   désespérés qui étaient piégés après la chute de Srebrenica. Certains

 14   d'entre eux étaient armés. Il y avait également des mines. Il y avait une

 15   menace pour quiconque s'aventurait dans la zone.

 16   Enfin, les fosses communes étaient très, très éloignées de la zone de

 17   conflit. Orahovac était la plus proche, 5 kilomètres, mais le terrain était

 18   accidenté. Il n'y avait aucune raison pour laquelle il fallait aller

 19   extraire des corps qui ne posaient aucun danger à l'aide de camions et de

 20   ressources. C'est absurde. Donc, cette ligne de défense n'est pas étayée,

 21   dénuée de tout bon sens et doit donc être rejetée.

 22   Chapitre 2 à présent, les forces qui ont commis ces crimes. Dans le

 23   chapitre de leur mémoire relatif à Srebrenica, la Défense affirme que le

 24   colonel Beara, Popovic, Nikolic et Nikolic ont joué des rôles importants

 25   pour organiser et exécuter l'opération de meurtre. Nous sommes tout à fait

 26   d'accord. Toutefois, après avoir quelque peu reconnu l'implication de Beara

 27   et de Popovic, la Défense déraille et prétend que les meurtres n'ont pas

 28   été exécutés par les forces de Mladic, mais par des groupes paramilitaires


Page 12548

  1   auto-organisés et des groupes de justiciers dont les familles avaient été

  2   tuées. Ces paroles de l'expert Kovac sont davantage les paroles d'une

  3   partie qui était en désespoir et se sent prise au dépourvu, davantage qu'un

  4   argument ou une évidence tenant la route. Il n'y aucune preuve montrant que

  5   des personnes répondant à cette description auraient joué un quelconque

  6   rôle dans l'opération ou étaient présentes dans la zone.

  7   Lorsqu'on lui a demandé de citer un tel groupe en contre-

  8   interrogatoire, Kovac n'a pu nommer que les Skorpions. Compte rendu

  9   d'audience page 41 855. Mais rappelez-vous le temps que nous avons consacré

 10   à examiner les documents. Vous avez vu des documents de la VRS, des

 11   graphiques et d'autres preuves qui montrent que les Skorpions étaient une

 12   unité du MUP serbe engagée dans des combats dans la zone de responsabilité

 13   du SRK, resubordonnée à la VRS et placée sous le commandement du Corps

 14   Sarajevo-Romanija. Il y a un document dont je ne parle pas dans mon

 15   mémoire, mais je me souviens que Dragomir Milosevic dans ce document disait

 16   "nos forces sont ici" et il parlait des Skorpions. Cela figure dans notre

 17   mémoire.

 18   Je ne vais pas vous montrer cette vidéo aujourd'hui, mais cette vidéo

 19   est extrêmement claire. Les Musulmans viennent de manière si évidente de

 20   Srebrenica. Nous n'avons pas exposé les faits, les détails de ce crime

 21   autant que nous aurions dû le faire. Nous l'avons fait maintenant. Mais

 22   cela doit être fait pour montrer que cela faisait partie de l'opération de

 23   meurtre de l'entreprise criminelle commune visant à éliminer.

 24   Les preuves relatives aux officiers, unités et troupes qui ont pris

 25   part aux opérations de meurtre du 13 juillet sont exposées clairement dans

 26   notre mémoire en clôture, mais je vais vous présenter un résumé.

 27   Autour de Potocari se trouvaient au commandement Mladic, Krstic et

 28   Borovcanin, avec Popovic, Nikolic, Salapura, Jankovic et Kosoric qui


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  1   exécutaient l'opération, en utilisant des soldats et des officiers de la

  2   Brigade de Bratunac, notamment la police militaire, la police spéciale du

  3   MUP de la RS, des membres du 65e Régiment de Protection, des membres du 10e

  4   Détachement de Sabotage et d'autres.

  5   A Bratunac, du 11 au 13 juillet, Mladic était présent avec Krstic,

  6   Zivanovic, Popovic, Borovcanin, Radislav Jankovic et tous les commandants

  7   de brigade du Corps de la Drina qui ont participé à l'attaque de

  8   Srebrenica, Pandurevic, Blagojevic, Furtula, Trivic, et d'autres.

  9   Dans la zone de Zvornik, le commandant adjoint de la Brigade de Zvornik,

 10   Obrenovic, a joué un rôle-clé, ainsi que Pandurevic lorsqu'il est rentré de

 11   la bataille de Zepa le 15 juillet. Les officiers de brigade en service du

 12   14 au 17 juillet ont pleinement participé à l'organisation des exécutions

 13   avec les commandants du 4e Bataillon à Orahovac, du 6e Bataillon de

 14   Petkovci, du 2e Bataillon de Rocevic et du 1er Bataillon de Pilica. Les

 15   officiers, soldats et unités impliqués dans les meurtres de Zvornik sont

 16   trop nombreux pour être nommés.

 17   Le fait que la Défense fasse abstraction de cette preuve volumineuse qui

 18   démontre l'implication directe de la VRS et du MUP souligne combien sa

 19   thèse est formulée en désespoir de cause et en dépit du bon sens. Peut-être

 20   que la semaine prochaine nous entendrons quelque chose de nouveau.

 21   Chapitre 3. La présence de Mladic à Srebrenica, Bratunac et Zvornik à

 22   plusieurs moments entre le 11 juillet et l'après-midi du 14 juillet n'est

 23   pas contesté par la Défense. Les preuves sont accablantes, bien entendu.

 24   Elles proviennent de témoins, de documents, d'écoutes téléphoniques, et en

 25   particulier de vidéos de Mladic à Srebrenica le 11 juillet, à l'hôtel

 26   Fontana les 11 et 12 juillet et à Potocari le 12 juillet, pour ne

 27   mentionner quelques-unes des sources. Toutes ces preuves montrent

 28   clairement Mladic en uniforme, en service, au commandement, exerçant sa


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  1   fonction de commandant. L'idée que Krstic était aux manettes a été

  2   clairement réfutée par M. Tieger, et je ne reviendrai plus là-dessus dans

  3   les détails.

  4   La Défense affirme dans son mémoire au paragraphe 643 que lorsqu'il se

  5   trouvait à un poste de commandement de corps, Mladic ne pouvait que

  6   conseiller le commandant de corps et ne pouvait se substituer à son

  7   autorité. C'est de cela que parlait M. Tieger lorsqu'il l'a précisément

  8   réfuté. Il a expliqué comment la chaîne hiérarchique de commandement

  9   fonctionnait. Donc, je ne vais pas détailler cela.

 10   Je vais à présent aborder les preuves qui lient Mladic à la création et la

 11   mise en œuvre de l'opération de meurtre, ainsi que les ordres qui ont été

 12   donnés.

 13   Nous allons commencer par les paroles fameuses qu'il a prononcées vers 17

 14   heures 30 le 11 juillet lors de son passage par la ville de Srebrenica. Il

 15   s'agit de la pièce à conviction P1147.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   "L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Nous voici ici le 11 juillet 1995 dans

 18   Srebrenica la Serbe à la veille d'une nouvelle fête, grande fête serbe.

 19   Nous donnons cette ville au peuple serbe comme cadeau. Enfin, après la

 20   rébellion contre les Dahi, le moment est venu de se venger des Turcs dans

 21   cette région."

 22   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] "Le moment est venu de se venger des Turcs

 24   dans cette région." Ces paroles doivent être prises au sérieux, car six

 25   jours après qu'il les ait prononcées, les officiers et les hommes de Mladic

 26   ont tué plus de 7 000 hommes musulmans à Srebrenica.

 27   Revenons-en au soir du 11 juillet et de la réunion à l'hôtel Fontana.

 28   J'aimerais appeler votre attention sur les moments les plus importants de


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  1   cette réunion à l'hôtel Fontana qui contribuent à révéler les intentions et

  2   les stratégies de Mladic, ainsi que sa décision de massacrer les hommes en

  3   âge de porter les armes à Srebrenica dans la soirée du 11 juillet ou au

  4   début de la matinée du 12 juillet.

  5   Pendant la première réunion de l'hôtel Fontana le 11 juillet, Mladic

  6   intimide Karremans et ses officiers qu'il menace en utilisant les mots de

  7   mort et en leur lançant diverses phrases vulgaires. Auparavant, nous vous

  8   avions demandé de prendre en compte cet élément de preuve pour montrer

  9   qu'il n'y avait pas eu de négociations à l'hôtel Fontana et que Mladic

 10   exerçait complètement son contrôle. C'est toujours le cas à ce moment-là,

 11   mais j'aimerais qu'en cet instant vous vous concentriez sur les mots

 12   prononcés par le colonel Karremans en réponse à Mladic. Après des cris et

 13   des menaces adressés aux officiers du Bataillon néerlandais, Mladic

 14   finalement se calme et pose une question à Karremans, je cite :

 15   "Que voulez-vous ? C'est vous qui avez demandé une réunion. Alors, parlez."

 16   Et je vous indique au compte rendu d'audience ce qu'a répondu le colonel

 17   Karremans.

 18   Karremans parle, je cite : "J'ai eu une discussion avec le général

 19   Nikolai il y a deux heures…" Un peu plus loin, il déclare, je cite : "… et

 20   aussi avec les autorités nationales concernant la demande faite au nom de

 21   la population. C'est une demande parce que je ne suis pas en mesure

 22   d'exiger quoi que ce soit. Nous… le commandement de Sarajevo a déclaré que

 23   l'enclave était perdue."

 24   Nouvelle citation de Karremans :

 25   "Et la demande du commandant de la Bosnie-Herzégovine porte… disons,

 26   sur une négociation ou une requête en vue du retrait du bataillon et du

 27   retrait de ces réfugiés et s'il y a des possibilités en vue d'une aide à ce

 28   retrait."


Page 12552

  1   C'est ce que l'on voit dans la vidéo présentée durant le procès, qui

  2   constitue la pièce P1147, page 17 du compte rendu d'audience.

  3   Comme vous pouvez le constater, Karremans dit à Mladic que le

  4   commandement des Nations Unies a conclu que l'enclave avait été perdue et

  5   il demande que Mladic approuve le retrait du Bataillon néerlandais et de

  6   plusieurs milliers de réfugiés de Potocari. C'est un moment béni pour

  7   Mladic et Karadzic après des années d'efforts visant à déplacer les

  8   Musulmans hors de la Bosnie orientale, qui en ont été uniquement empêchés

  9   en 1993 par la FORPRONU le 11 juillet. Mais à présent la FORPRONU a cédé et

 10   elle demande à Mladic de les autoriser ainsi que d'autoriser la population

 11   musulmane à quitter Srebrenica.

 12   Mladic n'a pas, en fait, donné à la FORPRONU un choix réel. Il avait

 13   plusieurs milliers d'otages musulmans à sa disposition qui se battaient

 14   pour survivre et il avait plus de 50 otages du Bataillon néerlandais qui

 15   n'avaient plus la moindre option militaire outre que celle des Nations

 16   Unies ou de l'OTAN. Mais ce que je souhaite dire ici à votre intention,

 17   c'est qu'avec cette reddition complète, Mladic est désormais capable de se

 18   concentrer sur sa décision de déplacer la population par tous les moyens

 19   matériels possibles ou autres moyens possibles et de s'occuper des hommes

 20   en âge de porter les armes à Potocari et ailleurs dans l'enclave. Nous

 21   savons grâce au commandant adjoint de l'état-major principal de Mladic

 22   chargé du personnel et des affaires relatives à la mobilisation, c'est-à-

 23   dire grâce à la déposition de Petar Skrbic, que Mladic en personne a

 24   ordonné des autobus tard dans la nuit du 11 juillet. Skrbic a témoigné à ce

 25   sujet dans les pages 13 984 et 13 985 du compte rendu d'audience.

 26   Ce même soir, Mladic ordonne à Borovcanin de se livrer à l'assaut final sur

 27   Potocari dès les premières heures du matin du 12 juillet. Voyez le rapport

 28   de Borovcanin, pièce P724.


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  1   Comme vous vous en souviendrez, Borovcanin et des éléments de la Brigade de

  2   Bratunac ont procédé à cet assaut sans la moindre opposition sur Potocari

  3   le matin du 12 et ont rapidement pris le contrôle de la population

  4   musulmane et du Bataillon néerlandais. Donc, sans aucun obstacle émanant

  5   des Nations Unies ou de l'OTAN dans la soirée du 11 juillet, Mladic peut

  6   désormais regarder en face les hommes en âge de porter les armes qui vont

  7   bientôt se trouver sous son contrôle. La VRS a vu ces hommes dans la nuit

  8   du 11 juillet et en a rendu compte à Mladic. Voir paragraphe 1 159 de notre

  9   mémoire en clôture.

 10   Lors de la deuxième réunion tenue à l'hôtel Fontana avec un instituteur

 11   musulman, Nesib Mandzic, nous voyons que Mladic se concentre sur l'armée

 12   musulmane de Bosnie en insistant à de nombreuses reprises pour qu'une

 13   réunion se tienne le lendemain avec un représentant de l'armée musulmane.

 14   Suite à cette réunion, Mladic et Krstic dînent ensemble à l'hôtel Fontana,

 15   où ils passent tous les deux leur nuit. Voir paragraphes 1 174 et 1 219 de

 16   notre mémoire en clôture. Les officiers du renseignement de Mladic,

 17   Radoslav Jankovic et Kosoric, ont été vus sur les images vidéo de l'hôtel

 18   également.

 19   Vous vous rappellerez la déposition de Momir Nikolic qui explique ces faits

 20   en indiquant qu'ils avaient besoin de son aide. Voir paragraphe 1 176 de

 21   notre mémoire, ainsi que la déposition de Momir Nikolic en pages 11 820 et

 22   11 827 du compte rendu d'audience.

 23   Ainsi, la décision prise par Mladic de trier les hommes de Potocari était

 24   en fait une décision de séparation visant au meurtre de ces hommes. Ceci

 25   est devenu manifeste très rapidement à partir du moment où cette séparation

 26   a commencé. Il n'y a plus été question de tri concernant ces hommes. Il

 27   s'est agi d'une division par la violence la plus brute des hommes par

 28   rapport au reste de la population. Et cette séparation a concerné à de


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  1   nombreuses reprises de jeunes garçons de 13 à 15 ans, et même plus jeunes,

  2   ainsi que des hommes qui avaient largement dépassé l'âge de 60 ans. Tous

  3   ces hommes ont été regroupés dans des conditions inhumaines, dans une

  4   chaleur extrême, privés de nourriture ou de médicaments, et ne disposant

  5   d'une quantité d'eau à peine suffisante pour les maintenir en vie. Les

  6   documents d'identification ont été jetés et incendiés dans le cadre de ce

  7   processus, ce qui montre que Mladic n'avait pas la moindre préoccupation

  8   pour ces personnes, qu'il ne les considérait pas comme des prisonniers de

  9   guerre et qu'il ne souhaitait conserver aucun document les concernant. Vous

 10   vous rappellerez peut-être ces photographies montrant une pile énorme de

 11   biens personnels appartenant aux Musulmans, y compris des cartes d'identité

 12   et documents d'identité, qui ont été brûlés à Potocari. On le voit dans la

 13   pièce P1423.

 14   Dans leur détention aux environs de Bratunac, les hommes séparés du reste

 15   de la population étaient frappés et nombre d'entre eux ont été tués par les

 16   soldats qui les gardaient.

 17   Ces processus de séparation et de détention à Potocari et à Bratunac

 18   confirment la décision de Mladic de séparer les hommes du reste de la

 19   population et montrent son intention de les tuer.

 20   Avant d'aller plus loin, je souhaite que soient diffusés les propos de

 21   Mladic à la deuxième réunion de l'hôtel Fontana, mots qui indiquent bien

 22   son intention. C'est Nesib Mandzic qui parle.

 23   [Diffusion de la cassette vidéo]

 24   "L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Il n'est pas nécessaire que votre

 25   population se fasse tuer… vos maris, vos frères ou vos voisins… comme je

 26   l'ai dit à ce monsieur la nuit dernière, vous pouvez survivre ou

 27   disparaître. Pour que vous surviviez, j'exige que tous les hommes portant

 28   les armes, même ceux qui ont commis des crimes - et ils sont nombreux à


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  1   avoir commis des crimes - contre notre peuple, rendent leurs armes à la

  2   VRS."

  3   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Ceci apparaît dans la pièce P1147 et aux

  5   pages 49 à 50 du compte rendu d'audience.

  6   Destruction, salut, crainte. M. Tieger a déjà diffusé à votre intention des

  7   images de la réunion du 12 juillet où nous entendons des mots assez

  8   similaires. Je ne vais pas rediffuser cette vidéo, mais je vais vous

  9   rappeler…

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous entendez l'interprétation du côté

 11   de la Défense ?

 12   M. LUKIC : [interprétation] Nous avons un problème d'interprétation. Nous

 13   ne l'entendons pas.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, vérifions. Il n'y a pas encore

 15   d'interprétation à partir de la cabine B/C/S. Je vois que certaines

 16   tentatives ont été faites. Je ne sais pas si le problème est résolu. Il est

 17   résolu.

 18   Veuillez procéder, Monsieur McCloskey.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Ce que vous devriez voir sur vos écrans,

 20   c'est la transcription correspondant à la vidéo que M. Tieger vous a

 21   montrée lundi.

 22   "Aucune nécessité pour votre population de se faire tuer. Aucune nécessité

 23   que vos maris, vos frères ou vos voisins soient tués… comme je l'ai dit à

 24   ce monsieur la nuit dernière, vous pouvez soit survivre, soit disparaître.

 25   Pour que vous surviviez, j'exige que tous les hommes en armes, même ceux

 26   qui ont commis des crimes - et ils sont nombreux - contre notre peuple

 27   rendent leurs armes à la VRS."

 28   Là encore, les mots "survivre" et "disparaître" sont prononcés. Et étant


Page 12556

  1   donné ce que Mladic et ses hommes ont fait pendant les jours qui ont suivi,

  2   ces mots doivent être pris terriblement au sérieux. L'homme musulman dont

  3   Mladic parle dans cette vidéo, c'est Ibro Nuhanovic. Suite à cette réunion,

  4   il est resté aux côtés de son fils adulte, Muhamed, et de son épouse,

  5   Nasiha, et tous les deux ont été tués. Leurs restes ont été retrouvés.

  6   Confer pièce P1982 et paragraphe 1 197 de notre mémoire en clôture.

  7   N'oubliez pas non plus que le commandant de la Brigade de Zepa, Avdo Palic,

  8   a été assassiné alors qu'il était sous la garde de la VRS.

  9   Pendant toute la journée du 12 juillet, Mladic a supervisé ce processus

 10   abominable de séparation qui s'est produit à Potocari en tournant des films

 11   de propagande destinés à ses partisans et en faisant semblant de rassurer

 12   la population par des promesses creuses, voire des mensonges flagrants.

 13   Dans la soirée du 12 juillet, Mladic tient une réunion et participe à un

 14   dîner au QG de la Brigade de Bratunac pour célébrer la prise de l'enclave.

 15   Durant cette réunion, Mladic annonce qu'il a regroupé ses troupes et

 16   qu'elles vont faire mouvement dans la direction de Zepa le lendemain matin,

 17   13 juillet, contre l'avis des commandants Pandurevic et Trivic, et il

 18   ordonne à Krstic de préparer un plan d'attaque pour le lendemain matin.

 19   Vous avez là un exemple classique qui montre comment Mladic exerçait son

 20   commandement et sa direction sur ses commandants subordonnés, puisque

 21   Krstic a effectivement rédigé le plan d'attaque que l'on trouve dans la

 22   pièce D290 et a effectivement rassemblé les hommes du Corps de la Drina qui

 23   ont fait mouvement dans la direction de Zepa le lendemain conformément à

 24   l'ordre reçu.

 25   La Défense argue du fait que cette réunion se serait déroulée le 11

 26   juillet, mais ceci est absolument faux. Les éléments de preuve établissent

 27   clairement que cette réunion et ce dîner ont eu lieu dans la soirée du 12

 28   juillet. Nous évoquons cet élément de preuve dans tous ses détails dans


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  1   notre mémoire en clôture aux paragraphes 1 215 à 1 226. Et ces éléments

  2   prouvent, si nécessité existait de le prouver, que cette rencontre s'est

  3   bien produite dans la soirée du 12 juillet. Cette rencontre était une

  4   réunion importante. C'est la clé pour comprendre la série d'événements qui

  5   ont eu lieu dans la soirée du 11 juillet, lorsque Mladic et Krstic étaient

  6   ensemble à l'hôtel Fontana pour dîner après avoir rencontré le Bataillon

  7   néerlandais, comme nous l'avons déjà dit, réunion au cours de laquelle le

  8   sort des hommes musulmans a été décidé. Le 12 juillet, Mladic participe à

  9   cette rencontre avec les commandants de brigade pour célébrer la décision

 10   et décide de faire mouvement vers Zepa.

 11   Le 13 juillet. Les événements du 13 juillet, plus que ceux d'aucun

 12   autre jour, mettent en lumière la profonde et importante implication de

 13   Mladic dans l'opération de meurtre. Le 13 juillet, c'est le point culminant

 14   des expulsions. C'est le moment où les derniers coups sont portés pour

 15   assurer le transport de plusieurs milliers de femmes et d'hommes [comme

 16   interprété] toujours sur place vers Zepa [sic], tout en continuant à

 17   séparer des centaines et des centaines d'hommes en âge de porter les armes

 18   à Potocari.

 19   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Excusez-moi, je viens de dire "Zepa";

 21   j'aurais dû dire "Kladanj".

 22   C'est une entreprise gigantesque, et donc Mladic est sur place dans

 23   le secteur la majeure partie de la journée pour superviser ce travail. Il

 24   est au milieu de tout cela. Il est à Bratunac dans la matinée, il est là

 25   pour exhorter ses troupes et il est de nouveau à Potocari ensuite où se

 26   poursuivent les séparations et les expulsions.

 27   Ce matin-là également, et pendant le reste de la journée, Mladic et

 28   ses hommes sont totalement pris par la reddition et la capture d'environ


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  1   6 000 Musulmans qui se trouvaient dans la colonne fuyant Srebrenica. Et

  2   c'est à ce moment-là et à cet endroit, alors qu'ils devaient s'occuper de

  3   plusieurs milliers de personnes, que Mladic et ses hommes font quelques

  4   erreurs et commencent à révéler la nature meurtrière de l'opération. Les

  5   meurtres organisés commencent le matin, à la première heure, avec les

  6   exécutions au bord de la rivière Jadar aux environs de 11 heures du matin

  7   et les meurtres dont a parlé le Témoin RM314 qui a vu des gens fuir par

  8   la rivière vers des lieux plus sûrs.

  9   Beara, également, est quelqu'un qui a son importance, et nous le

 10   voyons à partir d'une conversation interceptée où il est question d'ouvrir

 11   une ligne et d'émettre des ordres pour organiser le sort de plusieurs

 12   centaines de Musulmans capturés dans les environs de Konjevic Polje. Donc,

 13   Beara a manifestement été amené sur place pour s'occuper de ces

 14   prisonniers. A ce moment-là, Mladic est tout près, il est un peu plus bas

 15   sur la route de Srebrenica ou de Bratunac. Et rappelez-vous, le seul

 16   travail de Beara à partir du 13 et jusqu'au 16 juillet a consisté à mettre

 17   en œuvre l'opération meurtrière.

 18   Je vais maintenant vous soumettre des commentaires faits par Beara ce

 19   matin-là qui parle avec le lieutenant Lucic, membre du 65e Régiment de

 20   Protection, et Zoran Malinic, son adjoint. C'est la pièce P1415, une

 21   conversation interceptée.

 22   "Beara : "Est-ce que tu sais que 400 balija ont fait leur apparition

 23   à Konjevic Polje ?

 24   "X : Et puis, ils ont été regroupés et désarmés, tous.

 25   "Beara : Excellent, excellent, magnifique.

 26   "X : Il y a quelqu'un pour les garder.

 27   "Beara : Balance-les tous sur le terrain de jeu.

 28   "X : Qui est-ce qui s'occupe d'eux ? Qui est-ce qui en a quelque


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  1   chose à faire ?

  2   "Beara : Eh bien, dans ce cas, aligne-les en quatre ou cinq rangées."

  3   Et puis, Zoka dit à Beara - Zoka c'est le surnom de Malinic - que

  4   quelques-uns de ces Musulmans se sont regroupés, et sa réponse à cela est

  5   la suivante :

  6   "Eh bien, excellent. Continuez à les tuer."

  7   La Défense convient que Beara est impliqué dans l'opération

  8   meurtrière. Mladic se trouve également dans le secteur en compagnie de

  9   Krstic, Salapura, Popovic, Nikolic et d'autres, tous capables de fournir

 10   des informations à ce sujet. Laisser entendre que Mladic n'est pas au

 11   courant que Beara est informé ou qu'il a participé à cela est absolument

 12   absurde.

 13   L'exemple suivant que j'aimerais vous soumettre, c'est la

 14   communication provenant de Tolimir qui émet une proposition en date de

 15   septembre adressée à Mladic concernant l'après-midi du 13 juillet et

 16   l'implication du commandant du 65e Régiment de Protection. Le nombre de

 17   prisonniers capturés s'est accru spectaculairement ce jour-là. Tolimir a

 18   été impliqué à ce moment-là, alors qu'il se trouvait à Rogatica et qu'il a

 19   été appelé en raison de l'attaque imminente sur l'enclave de Zepa. Mais des

 20   erreurs apparaissent, et c'est ce qui est écrit dans la proposition

 21   élaborée par Tolimir.

 22   Ce document révèle que les commandants les plus gradés de la VRS et

 23   de l'état-major ont tous participé à la capture de ces plusieurs centaines

 24   de Musulmans sur la route. Comme nous le voyons dans le document contenant

 25   la proposition de Tolimir, c'est Mladic qui la reçoit, ainsi que Gvero, et

 26   dans ce document est évoquée l'implication de Miletic et de Malinic. C'est

 27   un document rédigé par Savcic. Mais Savcic fait une erreur au paragraphe 3,

 28   où il fait référence aux prisonniers musulmans de Nova Kasaba. Il a proposé


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  1   dans ce texte de les emmener hors de vue, loin du terrain et de cet

  2   endroit. A ce moment-là, les forces internationales étaient les seules qui

  3   accédaient librement à l'espace aérien, donc cette proposition a pour but

  4   de dissimuler les prisonniers hors de la vue de l'OTAN ou de la FORPRONU.

  5   C'est une indication très claire que l'intention à l'époque consistait à

  6   tuer les prisonniers. Le moindre doute concernant cette intention

  7   meurtrière est écarté par la lecture de ce document et par Savcic lui-même

  8   qui est l'auteur du document.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, vous parlez de

 10   "terre et d'air". Où est-ce que cela est indiqué dans ce le document ?

 11   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci de cette correction.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder.

 13   M. McCLOSKEY : [interprétation] Savcic a témoigné ici en déclarant qu'il

 14   avait connaissance de la proposition et du fait qu'elle signifiait la

 15   nécessité de cacher les prisonniers par rapport à l'OTAN. Et lorsqu'on lui

 16   a demandé pourquoi, il a fourni la raison en disant que la VRS était

 17   inquiète quant au fait que l'OTAN pourrait prendre les Musulmans pour des

 18   Serbes et les bombarder. Voir pages 33 680 à 33 682 du compte rendu

 19   d'audience. Ceci est une absurdité au-delà des absurdités car la lecture de

 20   ce document ne peut conduire qu'à une conclusion, à savoir qu'il était au

 21   courant de la vérité et qu'il a menti devant la Chambre.

 22   Alors, voyons les choses d'un peu plus près. Je tiens à vous faire part de

 23   la réponse de Mladic à la proposition de Tolimir contenue dans l'ordre de

 24   Mladic qui adopte la proposition de Tolimir, ordre rédigé dans la plus

 25   grande discrétion et qui ordonne à ses hommes de cacher les prisonniers des

 26   yeux de l'OTAN. Mais vous vous rappellerez qu'à la date du 13, tous les

 27   prisonniers avaient été emmenés soit à bord de véhicules, soit placés

 28   derrière des portes fermées, où personne ne pouvait les voir depuis


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  1   l'espace aérien.

  2   Dans la soirée du 13, environ 6 000 prisonniers capturés sur la route

  3   sont concernés par cette décision, il est donc décidé de les déplacer vers

  4   Zvornik, loin des organisations internationales présentes à Bratunac et à

  5   Potocari. Vous vous rappellerez que Karadzic, à une de ses conversations

  6   qui est interceptée, conversation à 8 heures 10 de la soirée, dans laquelle

  7   il dit à Deronjic de veiller à ce que les "produits" se trouvent dans

  8   l'entrepôt le lendemain matin. C'est une référence aux prisonniers de

  9   Bratunac qui devaient être envoyés dans les écoles environnant Zvornik.

 10   Pièce P1290.

 11   Cette même nuit, Drago Nikolic informe le commandant Obrenovic - commandant

 12   adjoint de la Brigade de Zvornik - du fait que Mladic et ses commandants

 13   supérieurs ont ordonné le meurtre des prisonniers de Srebrenica et que

 14   Popovic a besoin de Drago pour l'assister dans cette opération. Paragraphe

 15   1 271 de notre mémoire en clôture.

 16   Dans une autre proposition plus tardive ce soir-là, Tolimir propose à Gvero

 17   et à l'état-major principal dans un document écrit que 800 prisonniers

 18   soient déménagés en secret vers le secteur de Rogatica pour y faire du

 19   travail agricole, c'est-à-dire s'occuper de chevaux, de cochons ou de

 20   moutons. Pas un mot n'est écrit qui concerne l'officier de la logistique,

 21   Djoko Razdoljac, de la Brigade de Rogatica dont le témoignage fait partie

 22   des éléments de preuve de l'espèce. Pièce P3491 [comme interprété].

 23   En même temps, Tolimir, Karadzic et nombre d'autres responsables s'occupent

 24   des questions liées à la détention, au transport et au meurtre des

 25   prisonniers. Beara est à Bratunac, il s'occupe des prisonniers qu'il faut

 26   déplacer vers les écoles. Il est en compagnie d'un responsable de la police

 27   militaire de la Brigade de Bratunac et de Celanovic. Il s'occupe du

 28   transport vers Zvornik avec l'aide de Nikolic. Et celle des autorités


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  1   civiles, il s'occupe de l'enterrement de plusieurs centaines et centaines

  2   de victimes de l'entrepôt de Kravica. Et enfin, dans l'après-midi, Mladic

  3   circule sur la route où désormais plusieurs milliers de prisonniers sont

  4   regroupés sans possibilité de se déplacer et il leur adresse un discours

  5   dans le pré de Sandici et à Nova Kasaba. Pendant qu'il est sur place,

  6   Mladic ordonne personnellement à son commandant Malinic, commandant du

  7   Bataillon de Police militaire sur place, d'arrêter d'enregistrer par écrit

  8   les noms des prisonniers et d'escorter ces prisonniers vers Bratunac.

  9   Mladic, encore une fois, s'efforce de cacher le fait que les prisonniers

 10   sont promis à un sort connu de lui, et nous savons quels ont été les

 11   détails caractérisant leur sort. Il dit à Malinic que des autobus vont

 12   bientôt arriver et qu'il faut obéir aux ordres de les envoyer à Bratunac,

 13   ces prisonniers. Voir notre mémoire en clôture aux paragraphes 1 260 et 1

 14   261.

 15   A partir de là, Mladic se rend à Vlasenica auprès du commandement du Corps

 16   de la Drina où il tient une cérémonie de promotion destinée à Krstic, qui

 17   est promu au grade de commandant du Corps de la Drina. Et rappelez-vous,

 18   Beara est en train, à ce moment-là, de circuler sur la route de Bratunac

 19   avec les prisonniers et d'organiser les enterrements, les déplacements de

 20   prisonniers, le transport de prisonniers toute cette nuit-là vers Zvornik.

 21   Je vous montre ce document, le document concernant le personnel, qui montre

 22   la nomination de Krstic au grade de commandant du corps, parce que nous

 23   voyons que ceci se fait suite à un décret du président de la Republika

 24   Srpska. Donc, nous voyons que Karadzic et Mladic agissent de concert au

 25   sujet de cette nomination particulièrement importante. Bien sûr, c'est le

 26   cas. Ils sont en constante communication et c'est une décision majeure.

 27   Encore une fois, nous voyons là la chaîne de commandement en action. Pièce

 28   à conviction P7056.


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  1   Après cela, Mladic se rend à son poste de commandement de Crna Rijeka, où

  2   il passe la nuit. C'est encore un lieu où un certain nombre d'informations

  3   l'attendent, donc il obtient tout ce dont il a besoin de savoir. Donc,

  4   pendant toutes ces actions que je viens d'évoquer et qui entourent

  5   l'opération meurtre, Mladic est présent au cœur de l'action avec les masses

  6   de prisonniers condamnés, avec ses principaux officiers au poste de

  7   commandement, qui communiquent les uns avec les autres et avec diverses

  8   sources de renseignements venant du service de Renseignements. La Défense

  9   argue du fait qu'il ne savait rien et qu'il n'était pas impliqué. C'est

 10   absolument impensable. Mladic est un criminel, mais ce n'est pas un idiot.

 11   Je pense que c'est le moment de la pause.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. De combien de temps pensez-vous

 13   avoir encore besoin ? Deux parties d'audience, je pense ? Et M. Tieger, il

 14   aura besoin de combien de temps ?

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je n'ai pas encore utilisé deux parties

 16   d'audience.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cinq minutes de moins.

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation] J'espère que je peux en terminer en 30

 19   minutes.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Dix minutes, je pense.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, si les estimations sont

 23   respectées, nous aurons le temps d'en terminer à 14 heures 15.

 24   L'audience est levée.

 25   --- L'audience est suspendue à 13 heures 10.

 26   --- L'audience est reprise à 13 heures 32.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, si vous allez

 28   jusqu'à 2 heures, à ce moment-là M. Tieger aura un petit peu de temps au-


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  1   delà de l'estimation qu'il nous a fournie.

  2   M. McCLOSKEY : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Le 14 juillet. Maintenant, nous sommes à la

  5   date du 14 juillet.

  6   Mladic se trouve au commandement de l'état-major principal dans la matinée

  7   du 14, au moment où des travaux d'Hercule en vertu de cette opération

  8   meurtrière se poursuivent. Bien évidemment, le convoi très important

  9   d'autocars et de camions provenant de Bratunac pour se rendre dans les

 10   écoles autour de Zvornik, dirigé par Popovic, des hommes qui seront tués à

 11   Orahovac ce jour-là, à Petkovci le soir, et les jours suivants.

 12   Mladic emprunte la même route que le convoi en début d'après-midi du 14. Il

 13   passe par Zvornik, et donc c'est à peu près à ce moment-là que les

 14   personnes sont tuées à Orahovac. Il est inconcevable que les forces de

 15   Mladic soient engagées dans cette opération meurtrière massive dans le

 16   secteur et qu'il n'ait pas été complètement informé et qu'il contrôle cette

 17   opération. Mladic restait au commandement et au contrôle de la VRS alors

 18   qu'il était à Belgrade, et aucun autre officier ne l'a remplacé, pages du

 19   compte rendu d'audience 14 543 [comme interprété] à 14 544 [comme

 20   interprété]. Je vous rappelle la déposition du colonel Obradovic, qui était

 21   le chef des opérations. Me Lukic lui a posé une question au sujet de

 22   l'absence de Mladic et du fait qu'il n'y avait personne pour le remplacer,

 23   14 543 à 14 444 [comme interprété].

 24   "Est-ce que le fait de se rendre en Serbie signifie que l'on est absent ?"

 25   Le colonel Obradovic répond, et je cite :

 26   "Cela ne dépend pas de l'endroit où se trouve le commandement, mais

 27   cela dépend de la durée de l'absence."

 28   La Chambre de première instance a ensuite questionné le témoin sur


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  1   l'époque à laquelle ceci a correspondu. Obradovic a répondu :

  2   "Une semaine à peu près, à mon sens."

  3   Comme vous le savez, même ou d'après les affirmations de la Défense,

  4   Mladic était à Belgrade pendant plus de trois jours.

  5   Quoi qu'il en soit, Mladic aurait pu être dans un coma à la fin de

  6   l'après-midi du 14 juillet, il aurait, malgré cela, été pénalement

  7   responsable pour sa participation à la mise en œuvre de l'entreprise

  8   criminelle commune aux fins d'éliminer la population entre le 11 et le 14

  9   juillet. Aucun autre alibi n'aurait pu être présenté à cet égard.

 10   Pour finir, je souhaite conclure mon réquisitoire en parlant de trois

 11   conversations téléphoniques interceptées. Je souhaite en premier lieu vous

 12   raconter le récit de ces conversations téléphoniques interceptées.

 13   Le 13 juillet, un nombre très important de Musulmans avaient été fait

 14   prisonniers le long de la route et Beara était très impliqué dans cette

 15   opération, mais il avait besoin d'aide pour exécuter ces personnes. Il a

 16   reçu un ordre de Mladic envoyé au commandant de la Brigade de Visegrad,

 17   Furtula. Il a demandé à Furtula de lui envoyer en renfort 30 hommes pour

 18   apporter du renfort à Beara. Ces hommes ont été transportés à bord

 19   d'autocars, se sont rendus à Visegrad, et leur autocar est tombé en panne.

 20   Et dans la soirée du 13 juillet, personne n'était venu les chercher,

 21   personne n'a su ce qui s'était passé après cela. Et donc, à la date du 15

 22   juillet, après que les hommes ont été tués à Orahovac et Petkovci, il

 23   restait encore 800 hommes environ qu'il fallait tuer. Donc, ils étaient à

 24   Kozluk, à l'école Rocevic, 700 [comme interprété] personnes se trouvaient à

 25   l'école de Pilica et au Dom de Pilica. Et comme vous vous en souvenez tous

 26   certainement, la colonne musulmane s'approche de Zvornik et constitue une

 27   menace. Vinko Pandurevic est rappelé pour défendre Zvornik et d'autres

 28   troupes entrent pour combattre la colonne. Et, en même temps, l'opération


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  1   meurtrière se déroule et nécessite énormément de ressources. Et Beara est

  2   très frustré, car il a plus de 2 000 personnes qu'il doit tuer et il

  3   s'arrache les cheveux. Donc, il prend son téléphone et il cherche

  4   Zivanovic, parce qu'il pense que cet homme est toujours le commandant du

  5   corps. Et il appelle depuis le bureau de Dragan Nikolic qui est le QG de la

  6   Brigade de Zvornik. Et Zivanovic lui dit qu'il ne peut plus faire cela et

  7   il le renvoie à Krstic et son numéro de poste 385, et il dit la même chose

  8   que Zivanovic. Furtula n'a pas suivi l'ordre du chef, le chef étant Mladic,

  9   cité par Zivanovic auparavant. Donc, il y a un va-et-vient entre les deux

 10   hommes. Krstic lui dit de vérifier avec les commandants des brigades, de la

 11   Brigade de Zvornik, de Milici, de Bratunac, et Beara dit : Non, eux ne le

 12   feront pas. Ils ne peuvent pas le faire, aller parler à ces hommes du MUP.

 13   Il est très frustré. Et pour finir, Beara dit : Eh bien, j'ai 3 500 colis à

 14   délivrer et je n'ai aucune solution. Ce sont les hommes de Kozluk à Pilica.

 15   Et Krstic répond en disant : "Eh bien, bon, c'est moi qui vais devoir

 16   endosser la responsabilité pour cela. C'est Mladic qui va me faire porter

 17   la responsabilité. Je vais voir ce que je vais faire."

 18   Le lendemain, le 16 juillet, l'état-major principal, son unité de

 19   sabotage vient prêter main-forte. Ce sont les informations qui ont été

 20   fournies essentiellement par M. Butler et d'autres éléments de preuve, mais

 21   nous n'allons pas regarder les conversations téléphoniques interceptées.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Page 65, ligne 16, s'il vous plaît, au

 23   point 17, c'est bien le chiffre 17 que vous avez avancé ou pas ?

 24   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Lorsque j'ai prédit qu'il fallait tuer

 25   plus de 800 hommes, c'était dans le contexte de Beara, Beara devait en tuer

 26   800.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Regardez encore une fois.

 28   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, il doit s'agir de 1 700.


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  1   Vous vous souvenez de ce chiffre, il s'agit du nombre de corps exhumés de

  2   la fosse commune et de la ferme de Branjevo.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivons.

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Donc, passons maintenant à la première

  5   diapositive. Il s'agit d'un renvoi qui montre qu'à 19 heures 19 [comme

  6   interprété], Beara cherche à joindre Zivanovic et souhaite qu'il l'appelle

  7   au poste 139, qui est le poste de Drago Nikolic à la Brigade de Zvornik. Et

  8   d'autres éléments indiquent que Beara était là à ce moment-là. Alors,

  9   passons à la diapositive suivante maintenant, s'il vous plaît. Je ne vais

 10   pas aborder l'ensemble de ce document.

 11   "Tu sais, ce jour-là, j'ai informé le commandant à ce sujet. Furtula

 12   n'a pas envoyé la section d'intervention de Lukic."

 13   Furtula, c'est le commandant de la Brigade de Visegrad. Lukic, Milan

 14   Lukic, une personne de Visegrad qui a une triste réputation, et Lukic

 15   attend Blagojevic. Blagojevic de la Brigade de Bratunac.

 16   Et Beara dit :

 17   "Lukic est ici avec moi et avec son chauffeur et nous insistons là-

 18   dessus."

 19   Il se plaint de Furtula et Beara dit ensuite :

 20   "Il n'en a rien à faire de ce que le commandant lui a ordonné de

 21   faire. Ce groupe comprend maintenant 60 hommes."

 22   Il renvoie ici à l'ordre de Mladic envoyé à Furtula pour qu'il donne

 23   60 hommes à Beara.

 24   "Faites en sorte qu'il m'envoie au moins la moitié," dit-il.

 25   Et pour finir, Zivanovic dit :

 26   "Je ne peux plus faire cette décision."

 27   Rappelez-vous qu'il s'agit du 15 juillet. Zivanovic a été renvoyé du

 28   commandement dans la nuit du 13 juillet, donc lui ne peut pas prendre de


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  1   décision à la place de Beara, cela n'est plus possible. Et, encore une

  2   fois, cela expose de manière très claire la chaîne de commandement, comme

  3   aucun autre exemple. Il s'agit d'un officier de l'état-major principal qui

  4   doit se rendre au commandement du corps pour faire en sorte que le

  5   commandant du corps donne des ordres à ses brigades. Beara, lui, ne peut

  6   pas. Et c'est le commandant qui doit le faire. Cette idée que Mladic n'est

  7   plus dans le cercle et que c'est la section chargée de la sécurité et du

  8   renseignement qui est en charge de cela, c'est absurde.

  9   Et Zivanovic, à la fin, le renvoie à 395 [comme interprété], à

 10   Zlatar, c'est le numéro de poste du Corps de la Drina, et demande à 385 en

 11   sachant que c'est à ce numéro-là que Krstic peut être joint.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez fait en sorte qu'il envoie.

 13   Lorsque vous citez, s'il vous plaît, je souhaite que vous le fassiez de

 14   manière très précise. En tout cas, c'est ce que je vous ai entendu dire,

 15   qu'il ne m'a pas envoyé à moi, alors que dans le texte on peut lire "lui a

 16   envoyé".

 17   Peut-être qu'il s'agit de la même chose --

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je n'ai pas l'intention de vous induire en

 19   erreur --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas de problème.

 21   Veuillez reprendre.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Donc, tout à fait naturellement, Beara

 23   réussit à joindre Krstic. Donc, la pièce suivante, 2126. A 10 heures le 15.

 24   Et Beara dit à Krstic :

 25   "General Furtula n'a pas exécuté l'ordre du chef."

 26   Encore une fois, il fait référence à l'ordre de Mladic à l'intention

 27   de Furtula.

 28   Et Krstic dit :


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  1   "Ecoute, il lui a donné l'ordre de sortir à bord d'un char, pas d'un

  2   train."

  3   Et donc, Krstic est tout à fait au courant de l'ordre donné à Furtula par

  4   Mladic. Furtula [comme interprété] fait une référence voilée au nombre et à

  5   l'ampleur de ce qui a été demandé.

  6   Et Beara -- je dis qu'il est frustré et il s'arrache les cheveux parce qu'à

  7   ce moment-là il dit de façon téméraire qu'il a besoin de 30 hommes, comme

  8   l'a indiqué l'ordre.

  9   Et Krstic dit :

 10   "Prends-les de Nastic ou Blagojevic."

 11   Et Nastic, souvenez-vous, est le commandant de la Brigade de Milici et

 12   Blagojevic est le commandant de la Brigade de Bratunac.

 13   Et Krstic dit :

 14   "Je ne peux rien faire sortir de là pour vous."

 15   C'est le deuxième jour de l'attaque contre Zepa où Krstic devait envoyer

 16   ses meilleures unités, Pandurevic devrait rentrer à Zvornik, donc Krstic

 17   n'est pas très généreux et il n'est pas prêt à lâcher ses troupes.

 18   Et Beara répond en disant :

 19   "Mais je n'en ai pas ici. J'ai besoin de les avoir aujourd'hui et je

 20   vous les rendrai ce soir, Krle."

 21   C'est le surnom de Krstic. Ces deux hommes se connaissent.

 22   "Il faut comprendre. Je ne peux pas vous l'expliquer comme cela."

 23   Krstic :

 24   "Je vais tout bousculer sur son axe si je fais sortir ces hommes et

 25   beaucoup dépend de lui."

 26   C'est l'axe d'attaque sur Zepa.

 27   Et Beara dit très ouvertement :

 28   "Je ne peux rien résoudre sans 15 à 30 hommes et Boban Indzic."


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  1   Nous avons appris du Témoin Butler et d'autres témoignages qu'Indzic est un

  2   officier de Visegrad. Et Krstic dit ensuite :

  3   "Ljubo, ceci n'est pas protégé."

  4   Bien évidemment, ils savent tous deux qu'il s'agit d'une ligne non

  5   sécurisée et que des officiers américains [comme interprété], ils ne

  6   peuvent pas s'empêcher. Je ne sais pas pourquoi ils agissent ainsi, mais en

  7   tout cas c'est un fait.

  8   Beara dit :

  9   "Je sais, je sais."

 10   Et ensuite, Krstic poursuit en disant -- il parle de Nastic et de

 11   Blagojevic. Et ensuite, ce qui est intéressant, Beara dit :

 12   "Mais je n'en ai pas. Si j'en avais, je ne serais pas encore en train d'en

 13   demander le troisième jour."

 14   Bon, c'est vrai que je ne suis pas très bon en math, mais il pose la

 15   question le 15 et c'est le troisième jour, donc le 13 serait donc le jour

 16   où il avait demandé à l'origine à avoir ce renfort de troupes, et nous

 17   savons que c'est ce jour-là que des milliers de prisonniers musulmans

 18   doivent être traités. Et ensuite, Krstic reprend, parle de Blagojevic et

 19   des Bérets rouges, se rend au MUP, au ministère de l'Intérieur. La réponse

 20   est :

 21   "Non, eux ne feront rien. Je leur ai parlé. Il n'y a pas d'autre solution,

 22   il faut que 15 à 30 hommes soient apportés en renfort."

 23   Donc, il est parti de 60, et maintenant il parle de 15 à 30. Et ensuite, il

 24   dit :

 25   "Ce qui était censé arriver le 13 n'est pas arrivé."

 26   Et c'est à ce moment-là qu'il a posé la question, c'est à ce moment-là

 27   qu'il a reçu l'ordre et c'est à ce moment-là qu'ils auraient dû arriver.

 28   Et ensuite, Krstic :


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  1   "Ljubo, il faut me comprendre. Vous m'avez fait toutes sortes de choses,

  2   merde."

  3   Et Beara :

  4   "Je comprends, mais il faut me comprendre aussi. Si cela avait été fait,

  5   nous ne serions pas -- si cela avait été fait à ce moment-là, nous ne

  6   serions pas en train d'en parler maintenant."

  7   Et Beara ne peut rien dire à Krstic non plus.

  8   Krstic :

  9   "Eh merde, c'est moi maintenant qui vais endosser la responsabilité pour

 10   ça."

 11   Ils craignent Mladic, ils pensent que c'est lui -- que Mladic va leur faire

 12   porter la faute parce qu'ils n'ont pas participé au meurtre.

 13   Beara : "Je ne sais pas quoi faire. Vraiment, Krle. Il y a encore 3 500

 14   colis que je dois distribuer et je n'ai pas de solution.

 15   "Eh merde, je vais voir ce que je peux faire."

 16   Après quoi, plus de 800 hommes ont été tués cet après-midi-là à Kozluk par

 17   des éléments du Bataillon de Rocevic. Et ensuite, le 16, les éléments du

 18   Bataillon de Rocevic ont tué des hommes et des hommes ont été tués par le

 19   10e Détachement de Sabotage.

 20   Pour finir, aucune préoccupation, Furtula n'a pas exécuté les ordres de

 21   Mladic, c'est ce que nous constatons. Dernière conversation interceptée,

 22   P1285. Il est 19 heures 19. Nous ne savons pas qui sont ces hommes, mais

 23   vous pouvez voir qu'ils cherchent un autocar. Ils vont envoyer ces autocars

 24   à Rogatica, à Visegrad, à Podraminja et qui -- c'est loin de Visegrad

 25   [comme interprété], si vous regardez une carte. Et lorsqu'il tombe sur un

 26   autocar dans lequel il y a un groupe de soldats, ce sont les soldats de

 27   Visegrad. Boban est leur commandant :

 28   "Répète ?


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  1   "Les voici à nouveau.

  2   "Boban Indzic, et faites-les venir au commandement de Bratunac." Et donc,

  3   ces hommes-là, ils sont à côté d'un autocar en panne, la nuit tombe, on ne

  4   sait pas où ils sont allés, mais ils n'ont pas vu Beara.

  5   Il s'agit de conversations téléphoniques irréfutables dans lesquelles

  6   Mladic donne des ordres suite à l'opération meurtrière qu'il a menée.

  7   Et pour finir, je voulais finir mon intervention en m'adressant aux femmes

  8   de Srebrenica et à ceux et celles qui ont aussi souffert et souffrent

  9   encore des crimes de Mladic.

 10   C'est à Srebrenica et à Zepa que pendant plus de 20 ans, mon équipe vous a

 11   parlé, vous a écouté, a appris de vous, et nous avons eu l'honneur de faire

 12   venir certaines d'entre vous ici à La Haye pour partager avec le Tribunal

 13   votre expérience, votre douleur et votre courage incroyable lorsque vous

 14   avez été confrontés à ceux qui ont commis ce génocide.

 15   Nous avons aussi parlé à vos hommes et garçons qui sont quelques-uns à

 16   avoir survécu aux exécutions de Kravica et de Branjevo. Nous avons appris

 17   énormément de vous. L'une des choses que nous avons apprises au sujet de

 18   vos maris et de vos fils, c'est qu'ils avaient peur de ne pas pouvoir vous

 19   dire adieu, et nous savons que vous avez ressenti et ressentez toujours une

 20   douleur atroce. J'ai donc cherché sans relâche un mot que quelqu'un aurait

 21   pu coucher par écrit sur un bout de papier, quelque chose pour vous; mais,

 22   bien entendu, personne n'a été autorisé à tenir ne fut-ce qu'un simple

 23   crayon.

 24   J'ai trouvé quelque chose. J'ai dû me rendre ailleurs, dans un autre temps,

 25   lors d'une autre guerre affreuse, mais j'ai trouvé la lettre d'un mari, un

 26   soldat qui a pu, lui, dire adieu à sa femme, et je pense que ses mots et

 27   ses sentiments sont ceux de vos maris, fils et frères, ceux qu'ils auraient

 28   pu vous envoyer s'ils en avaient eu la possibilité.


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  1   Je vais vous lire un extrait de cette lettre écrite le 14 juillet 1861.

  2   "Ma très chère Sarah,

  3   "Tout porte à croire que nous avancerons dans quelques jours, peut-être

  4   demain. De peur de ne plus pouvoir t'écrire, je ressens le besoin

  5   irrépressible d'écrire ces lignes que tu liras peut-être lorsque je ne

  6   serai plus.

  7   …

  8   "S'il faut que je tombe sur le champ de bataille, je suis prêt. Je n'ai

  9   aucun doute au sujet de la cause que je défends. Je suis confiant et le

 10   courage ne me fait pas défaut.

 11   …

 12   "Mais, ma chère épouse, je sais qu'avec mes propres joies, j'abandonne

 13   presque toutes les tiennes et les remplace par le chagrin et la tristesse.

 14   Nos petits garçons, quant à eux, grandiront comme moi et ne connaîtront

 15   jamais l'amour d'un père. Que Dieu les bénisse.

 16   "Sarah, mon amour pour toi ne connaît pas la mort, il m'attache à toi

 17   avec des liens si solides que seule la toute puissance pourrait les rompre.

 18   Les souvenirs des moments heureux passés en ta compagnie viennent me

 19   hanter, et je suis reconnaissant à Dieu et à toi d'avoir pu les vivre aussi

 20   longtemps. Il est douloureux pour moi de m'en séparer et de réduire en

 21   cendres les espoirs des années à venir au cours desquels, si Dieu l'avait

 22   voulu, nous aurions pu vivre ensemble, nous aimer et voir nos fils grandir

 23   et devenir des hommes honorables… Ma chère Sarah, n'oublie jamais combien

 24   je t'aime, et lorsque je rendrai mon dernier soupir sur le champ de

 25   bataille, je murmurerai ton nom.

 26   "Pardonne mes nombreuses fautes et les nombreux chagrins que je t'ai

 27   causés. Combien j'étais irréfléchi et insensé parfois. Je voudrais laver de

 28   mes larmes toutes les petites taches qui ont maculé ton bonheur et livrer


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  1   combat à tous les malheurs du monde pour vous en préserver toi et mes

  2   enfants. Mais je ne le peux. Je devrai t'observer depuis l'au-delà et te

  3   donner ma présence lorsque tu affronteras les tempêtes en protégeant tes

  4   enfants chéris, et attendre triste et patient le moment où nous nous

  5   reverrons pour ne plus jamais nous séparer.

  6   "Oh, Sarah, si les morts pouvaient revenir sur cette terre et flotter

  7   invisibles autour de leurs êtres chers, je serai toujours à tes côtés;

  8   pendant la journée éclatante et la nuit sombre, lors de tes moments de joie

  9   et de peine - toujours, toujours; et si tu sens une légère brise sur ta

 10   joue, ce sera mon souffle, si l'air frais caresse ta tempe, ce sera mon

 11   esprit qui te frôle. Sarah, ne porte pas le deuil pour moi; pense que je

 12   suis parti et attends-moi, car nous serons à nouveau réunis."

 13   Sullivan Ballou a trouvé la mort une semaine plus tard à Bull Run.

 14   Je vous remercie.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur McCloskey.

 16   Monsieur Tieger.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Personne ne peut saisir l'ampleur des

 18   tragédies individuelles des victimes en l'espèce. Les tragédies des enfants

 19   arrachés des bras de leur mère pour être tués; des prisonniers affamés qui

 20   pendant des jours étaient battus jusqu'à ce que la mort s'ensuive, battus

 21   avec des crosses de fusil, avec des battes, avec des bottes; des femmes qui

 22   faisaient l'objet de violences sexuelles encore et encore; la terreur

 23   quotidienne de ceux qui attendaient qu'une balle ou qu'un obus les touche;

 24   ceux qui ont survécu indemnes physiquement mais qui sont tourmentés par les

 25   souvenirs de ceux qui leur étaient chers et qui les ont perdus, des foyers

 26   perdus, des communautés perdues. Et donc, ces tragédies continuent.

 27   Personne ne peut saisir l'ampleur de ces souffrances dont Ratko Mladic est

 28   responsable.


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  1   A la lumière de tout cela, que pourrait-on dire et que devrait-on laisser

  2   de côté ou passer sous silence pour prétendre que Mladic ne mérite que la

  3   peine maximale ? Vous pouvez voir qu'au paragraphe 3 394 de notre mémoire

  4   en clôture, il est dit que la peine doit être réduite à cause de "la

  5   bienveillance" envers les victimes; par exemple, parce qu'il a "facilité la

  6   conclusion de l'accord sur la démilitarisation des zonez de Srebrenica et

  7   de Zepa, en réaffirmant ainsi sa volonté d'établir la paix et de faire

  8   appliquer les dispositions des conventions de Genève."

  9   Et on passe sous silence que cela lui a été imposé, puisque dans le

 10   document P1973 [comme interprété], il a dit, il s'est plaint en disant que

 11   : "Si la communauté internationale ne s'était pas mêlée, eux," et là il

 12   pense aux Musulmans, "auraient payé le prix."

 13   Vous passez sous silence qu'il n'était pas satisfait puisque cette

 14   contrainte [inaudible] c'est ce qu'il a dit à son compagnon lorsqu'il

 15   faisait l'inspection des villages musulmans déjà détruits et c'est ce qu'on

 16   a vu cette semaine, lundi matin, en disant, S'il n'y avait pas eu de forces

 17   internationales, et aujourd'hui ce sont les forces néerlandaises, "ils

 18   auraient déjà disparu de ces régions."

 19   Et on passe sous silence le fait qu'il était satisfait de voir que

 20   lorsqu'il n'y avait plus de cette contrainte lorsqu'il est entré à

 21   Srebrenica, en disant : "Maintenant il est venu le temps pour se venger des

 22   Turcs."

 23   Ou bien vous affirmez qu'il faut réduire la peine qui lui va être prononcée

 24   puisqu'il distribuait des bonbons aux enfants à Potocari. La Défense passe

 25   sous silence que ces bonbons auraient été achetés pour les enfants dont les

 26   pères, les oncles et les frères étaient en train d'être tués par lui.

 27   Ou bien, comme la Défense dit, que la peine qui lui doit être prononcée

 28   doit être réduite vu les habitudes pénitentiaires en ex-Yougoslavie, ou


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  1   bien vous passez sous silence le fait que les peines d'emprisonnement à vie

  2   ont été prononcées à quatre de ses subordonnés - Popovic, Beara, Tolimir et

  3   Galic - pour avoir exécuté ses ordres, les ordres de Mladic pour un petit

  4   nombre de crimes qui ont été imputés; il s'agit des peines qui ont été

  5   confirmées en appel.

  6   La Défense essaie de décrire Mladic en tant qu'homme qui "n'a jamais eu

  7   l'intention de causer des souffrances à qui que ce soit" mais qui "a pris

  8   des mesures concrètes pour éviter des souffrances lorsque cela était

  9   possible" et que son comportement a fait sauver beaucoup de vies, et c'est

 10   pour cela qu'il mérite que la peine qui va être prononcée soit réduite.

 11   Paragraphes 3 395 et 98.

 12   La Défense passe sous silence également que ce n'est pas la première fois

 13   que Mladic était décrit lui-même en tant que quelqu'un qui a sauvé des

 14   vies. Il faut que vous vous rappeliez la séquence vidéo de Zepa en 1995, il

 15   s'agit de V000-9268, à partir de 7 minutes 41 secondes jusqu'à 8 minutes 42

 16   secondes, où le général Mladic monte à bord des autocars pour informer les

 17   passagers pétrifiés de la peur qui étaient en train d'être expulsés en leur

 18   disant : "Maintenant je vous fais le cadeau de votre vie. Je vous pardonne

 19   tout et je vous fais cadeau de votre vie."

 20   Ratko Mladic, maître de la vie et de la mort, s'est vanté et a pris

 21   beaucoup de plaisir à se vanter et a demandé la gratitude de la part des --

 22   exigé de la gratitude de la part des gens pour lesquels il décidait de ne

 23   pas les tuer.

 24   Et en niant la responsabilité pour ce qui est de ceux qu'il avait tués, il

 25   rejette la responsabilité pour cela à ses subordonnés qui exécutaient ses

 26   ordres et qui se sont vu prononcer les peines les plus sévères pour avoir

 27   fait cela. Vu l'ampleur de ces crimes, la peine maximale est demandée, tout

 28   ce qu'on peut dire pour demander une peine moins sévère est le fait qu'il


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  1   n'avait pas commis ces crimes. Et c'est ce que la Défense a fait aux

  2   paragraphes 3 401 en disant que "… tous les crimes qui auraient pu être

  3   commis étaient le résultat de la désobéissance des individus qui

  4   n'exécutaient pas les ordres ou qui opéraient en dehors du cadre de leurs

  5   missions."

  6   Ou que le général Mladic était professionnel, "un professionnel qui

  7   connaissait le droit de la guerre et qu'il, toujours, cherchait à les faire

  8   appliquer d'une façon éthique."

  9   Mais les crimes se sont passés. Pour ce qui est de tous les individus

 10   concernés, à tous les pères, toutes les filles, toutes les épouses, les

 11   grand-mères, commerçants, étudiants, médecins, encore un autre à un autre.

 12   Dans notre mémoire en clôture au paragraphe 1 743, nous faisons figurer un

 13   nombre petit pour illustrer les souffrances de ces victimes et leur

 14   vulnérabilité aujourd'hui.

 15   Le moment est venu pour que le général Mladic soit déclaré coupable

 16   des crimes commis contre toutes ces victimes et ces communautés qu'il avait

 17   détruites. Il serait incompatible avec la pratique adoptée par ce Tribunal

 18   pour ce qui est de la fixation des peines et il serait insultant pour les

 19   victimes en vie et mortes et il serait également un affront pour la justice

 20   de prononcer une peine qui ne serait pas la peine maximale, la peine

 21   d'emprisonnement à vie.

 22   Merci, Monsieur le Président. Nous avons conclu la présentation de

 23   nos arguments.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

 25   Dans quelques instants, nous allons lever l'audience. Est-ce qu'on

 26   peut modifier la réponse concernant -- est-ce que votre réponse à la

 27   dernière requête de la Défense concernant la fixation de la peine peut être

 28   communiquée avant vendredi ?


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Oui, certainement, c'est notre objectif.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'il est important d'obtenir

  3   votre réponse puisque, alors, dans ce cas-là, nous pourrons l'examiner. Je

  4   ne sais pas quelle sera votre réponse, mais votre réponse aurait une

  5   incidence sur les arguments que la Défense voudraient présenter dans leur

  6   plaidoirie.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Comme je l'ai dit, s'il est possible, nous

  8   allons faire cela donc aujourd'hui; sinon, demain matin.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lever l'audience, et nous

 10   allons reprendre vendredi, 9 décembre, à 9 heures 30 dans cette même salle

 11   d'audience.

 12   L'audience est levée.

 13   --- L'audience est levée à 14 heures 08 et reprendra le vendredi 9 décembre

 14   2016, à 9 heures 30.

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