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1 Le mercredi 25 octobre 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Maître Lukic, est-ce que vous
6 êtes prêt ?
7 M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
8 Au début, je parlais des déclarations liminaires. J'ai annoncé cela lors de
9 la Conférence préalable au procès.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il semblerait que les interprètes ne
11 réagissent pas.
12 M. LUKIC : [interprétation] Oui, je m'en rends compte. Je reprends donc.
13 Bonjour, Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges, j'espère que
14 tout le monde m'entend à présent.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Tout est clair, on vous entend bien.
16 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Messieurs les
17 Juges, nous sommes prêts à commencer la présentation de nos moyens et
18 d'emblée, je souhaiterais faire une déclaration liminaire comme je l'ai
19 annoncé lors de la Conférence préalable au procès.
20 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, avant l'ouverture de
21 ce procès, nous nous sommes demandés si nous allions faire une déclaration
22 liminaire au début du procès, ou si nous allions le faire au début de la
23 présentation de nos moyens. Nous étions bien conscients du fait qu'à ce
24 stade, nous serions plus proches de la fin du procès. Nous nous approchons
25 du réquisitoire et des plaidoiries et nous n'allons pas apprécier
26 l'ensemble des moyens de preuve qui ont déjà été présentés.
27 Par ailleurs, nous sommes d'avis que nous sommes mieux placés pour
28 exprimer ce qui nous semble être le but d'une déclaration liminaire, à
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1 savoir informer la Chambre de ce que nous allons présenter lors de la
2 présentation de nos moyens et de nous concentrer sur les allégations les
3 plus importantes. Nous en avons conclu que nous serions mieux placés pour
4 remplir cet objectif une fois que la Chambre aurait déjà pris connaissance
5 des preuves importantes présentées jusqu'ici.
6 Compte tenu du mémoire préalable au procès et de la liste des témoins
7 présentée par l'Accusation, ou plutôt telle que cette liste avait été
8 annoncée, nous ne nous étions pas rendus compte que la présentation des
9 moyens de l'Accusation allaient prendre un tour tout à fait différent, que
10 des témoins importants seraient supprimés, des témoins qui avaient été
11 annoncés dans le mémoire préalable de l'Accusation et lors de la
12 déclaration liminaire de celle-ci.
13 Maintenant presque toutes les cartes sont sur la table et nous sommes
14 d'autant plus convaincus qu'il est important de faire une déclaration
15 liminaire au début de la présentation de nos moyens.
16 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, la plupart des
17 éléments ont été présentés par les parties et vous avez sous les yeux les
18 éléments d'une histoire terrible. Nous sommes toutefois persuadés que le
19 tableau des événements n'est toujours pas très clair et qu'il vous manque
20 encore un certain nombre d'informations très importantes concernant des
21 périodes cruciales concernant les faits.
22 Lorsque j'ai rencontré M. Sljivancanin, lorsque nous nous sommes rencontrés
23 pour la première fois au quartier pénitentiaire, nous avons parcouru
24 ensemble l'acte d'accusation tel qu'il se présentait à l'époque et je l'ai
25 informé du fait que c'est l'Accusation qui devait prouver ces allégations.
26 Je lui ai parlé des critères juridiques appliqués dans le cadre de la
27 présentation des preuves devant ce Tribunal. Il m'a dit qu'il voulait que
28 la vérité soit faite. Il n'avait pas l'intention d'assurer lui-même sa
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1 défense. Tout ce qu'il voulait c'est que la vérité soit faite sur les
2 événements d'Ovcara et c'est sur cela que nous allons nous concentrer dans
3 le cadre de cette déclaration liminaire. C'est ce que nous avons essayé de
4 faire jusqu'à présent.
5 A la fin de la présentation des moyens de l'Accusation, nous nous sommes
6 retrouvés avec une liste de témoins que nous entendions citer à
7 comparaître. Dans le cadre de nos préparatifs, nous nous sommes entretenus
8 avec un grand nombre de personnes. M. Sljivancanin a présenté une autre
9 exigence concernant les témoins que nous avions cités. Il souhaitait que
10 nous n'appelions personne à témoigner contre leur volonté, il voulait
11 simplement que l'on contacte ceux qui étaient disposés à venir témoigner
12 devant le Tribunal. Il a déclaré qu'il voulait qu'aucun des témoins
13 témoignant en sa faveur ne bénéficie de mesures de protection et ne
14 témoigne à huis clos. Il a insisté pour être le premier témoin dans le
15 cadre de la présentation des moyens le concernant.
16 Compte tenu de la position qu'il a exprimée concernant les témoins, toutes
17 les personnes avec qui nous nous sommes entretenus ont convenu de
18 témoigner. Il y a un témoin qui a préféré ne pas venir témoigner pour des
19 raisons familiales, nous l'avons supprimé de la liste. Il y a un autre
20 témoin qui a des problèmes de santé graves et nous nous demandons toujours
21 si son témoignage ne pourrait pas avoir des conséquences sur sa santé. Le
22 reste des témoins à décharge comparaîtront selon un calendrier que nous
23 nous sommes efforcés de fixer.
24 Dans le cadre de la présentation de ces moyens, la Défense de M.
25 Sljivancanin entend citer 16 témoins qui témoigneront de vive voix
26 concernant les faits; deux témoins témoigneront en l'application de
27 l'article 92 bis et leurs déclarations ont déjà été présentées devant la
28 Chambre de première instance. Notre expert, pour ce qui est des questions
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1 militaires et des questions relatives à la sécurité, témoignera également
2 de vive voix, car M. Moore a exprimé son souhait de le contre-interroger.
3 Vous entendrez en premier lieu M. Sljivancanin en qualité de témoin.
4 Nous entendons également présenter un certain nombre de documents écrits.
5 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, je ne
6 m'attarderai pas sur les allégations factuelles dans le cadre de cette
7 présentation liminaire. Je souhaite profiter de cette occasion pour vous
8 indiquer les éléments-clés au sujet desquels les témoins déposeront. Nous
9 souhaiterions attirer votre attention sur les moments-clés de la
10 présentation de nos moyens. Certains événements ont été partiellement
11 élucidés, d'autres pas du tout et d'autres ont été présentés de façon
12 erronée.
13 Je crois que vous avez bien compris la position de la Défense de M.
14 Sljivancanin. Lors de la phase préalable au procès, dans le cadre du
15 contre-interrogatoire des témoins de l'Accusation et lorsque nous avons
16 confronté d'autres témoins à nos allégations, vous allez comprendre notre
17 position.
18 Ce qui est très important à nos yeux, pour ce qui est de la
19 chronologie des événements et des allégations présentées dans l'acte
20 d'accusation, c'est que le 19 novembre 1991, notre client accompagnait M.
21 Vance, se trouvait à l'hôpital de Vukovar cet après-midi-là et le 20
22 novembre dans l'après-midi, il est retourné à l'hôpital. Il ne se trouvait
23 pas à la caserne ce jour-là; il n'était pas non plus à Ovcara. Voici les
24 faits que nous allons faire valoir dans le cadre de la présentation de nos
25 moyens.
26 Ce n'est qu'à un stade tardif de la présentation des moyens que vous
27 avez sans doute compris la raison pour laquelle la Défense de M.
28 Sljivancanin insistait tant pour que la chronologie soit bien établie par
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1 le truchement des différents témoins. Le bureau du Procureur nous a poussé
2 dans nos retranchements. C'est le bureau du Procureur, par le biais de ses
3 témoins, qui ont fait l'objet de longs contre-interrogatoires par la
4 Défense de M. Sljivancanin, qui a voulu dresser un tableau tout à fait
5 différent des événements en essayant de vous faire croire que M.
6 Sljivancanin se trouvait partout en même temps, ou plutôt à différents
7 endroits au même moment, qu'il avait le don d'ubiquité. Son visage étant
8 familier, tout le monde le connaissait. Tout le monde l'avait vu en
9 photographie, à la télévision. Or, personne, aucun témoin n'a pu vous
10 fournir une description précise de M. Sljivancanin.
11 Toutes ces descriptions concernant l'apparence physique de M. Sljivancanin,
12 sur lesquelles l'Accusation pourrait insister, sont devenues des éléments
13 importants dans le cadre de nos contre-interrogatoires. C'est la raison
14 pour laquelle, dès le dépôt de notre mémoire préalable au procès, nous
15 avons expliqué que nous allions nous fonder sur les témoins de l'Accusation
16 pour présenter notre thèse afin de déterminer si M. Sljivancanin était
17 présent ou non sur les lieux.
18 Nous avons présenté des éléments importants pour corroborer notre
19 position. Nous avons également attendu que M. Sljivancanin vienne déposer
20 lui-même.
21 Quels sont les éléments dont vous disposez à ce stade,
22 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges ?
23 Vous allez entendre des témoignages concernant la structure,
24 l'organisation de la Brigade des Gardes et de sa nature particulière. Il
25 s'agissait d'une unité d'élite comme l'a décrite M. Moore, mais nous allons
26 expliquer quelles étaient les circonstances à l'époque et quelle était la
27 situation face à laquelle s'est retrouvée cette unité. Vous allez entendre
28 et comprendre quelles étaient les activités menées en temps de paix par
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1 cette unité et comment elle s'est retrouvée impliquée dans des activités
2 pour lesquelles elle n'était pas préparée. Nous allons également étudier
3 les conséquences de cela.
4 Nous allons également nous intéresser aux organes de sécurité et aux
5 services de sécurité au sein de la JNA de façon générale, notamment au sein
6 de la Brigade des Gardes. Nous allons décortiquer les éléments de preuve
7 pour voir ce que cette unité aurait pu faire, ce qu'elle a fait, ce qu'elle
8 n'aurait jamais pu faire conformément aux règlements en vigueur et
9 conformément à la situation. Pour bien comprendre le rôle joué par les
10 organes de sécurité, il faut comprendre les outils qui ont été utilisés et
11 les mesures juridiques que l'on pouvait prendre.
12 Vous entendrez dans ce prétoire des témoins qui faisaient partie des
13 organes de sécurité de la 1ère Brigade motorisée de la Garde de la 1ère
14 Région militaire et des services de sécurité. Vous comprendrez ce qui s'est
15 passé à Vukovar et vous pourrez obtenir de nombreuses réponses concernant
16 les questions que vous vous posez au sujet du fonctionnement des organes de
17 sécurité.
18 Des preuves précises et concrètes seront présentées concernant le
19 rôle joué par la police militaire au sein de la Brigade des Gardes. Les
20 éléments les plus compétents de la police militaire viendront témoigner,
21 plus particulièrement les commandants des 1er et 2e Bataillons de la police
22 militaire qui étaient membres du commandement du Groupe opérationnel sud;
23 le commandant de la compagnie antiterroriste; ainsi que d'autres officiers
24 de la police militaire.
25 Ils parleront en détail des événements survenus le 19 et 20 novembre
26 qui intéressent tout particulièrement le bureau du Procureur ainsi que la
27 Chambre de première instance. Ils vous parleront des rapports entre la
28 police militaire et les organes de sécurité de jure et de facto.
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1 A ce sujet, notre expert pour ce qui est des questions militaires,
2 des questions liées à la sécurité, viendra témoigner. Nous présenterons
3 également des éléments de preuve concernant l'arrivée de la brigade à
4 Vukovar, les problèmes en matière de sécurité qu'elle a rencontré. Vous
5 entendrez également en détail parler des activités de la Brigade des
6 Gardes; vous entendrez les actes héroïques auxquels se sont livrés ses
7 membres, de la mort de jeunes soldats. Nous ne pouvons pas rester
8 indifférents face à des événements aussi terribles qui ont été évoqués
9 d'ores et déjà par des témoins de l'Accusation.
10 Nous pensons que tous les faits doivent être présentés de façon détaillée
11 afin de bien comprendre les activités menées par les organes de sécurité
12 lors des combats à Vukovar. Il est important, aux yeux de la Défense, de
13 bien comprendre que les événements et les opérations menées à Vukovar
14 n'étaient pas isolés et ne constituaient pas une attaque systématique et
15 généralisée contre la population civile. Un conflit armé existait à
16 l'époque, il s'agissait d'un conflit cruel avec tout ce que cela suppose,
17 notamment dans le cadre de combats urbains, sachant qu'une guerre civile
18 faisait rage, mais cette attaque ne visait pas la population civile.
19 Vous entendrez des témoignages sur les efforts déployés par les membres de
20 la Brigade des Gardes, Veselin Sljivancanin et d'autres officiers pour
21 aider la population civile de Vukovar et pour essayer d'alléger ses
22 souffrances.
23 Nous présenterons également des éléments de preuve concernant les problèmes
24 au sein du Groupe opérationnel sud, des problèmes auxquels ont dû faire
25 face les officiers, le départ des membres des forces de réserve,
26 l'opposition à cette décision exprimée par Sljivancanin, les problèmes que
27 posaient les volontaires et les membres de la Défense territoriale. Nous
28 présenterons également des éléments de preuve sur les raisons et la manière
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1 dont Dusan Jaksic a été remplacé au poste de commandement, Miroljub Vujic
2 lui a succédé à la tête de la Défense territoriale. Vous constaterez que,
3 ni officiellement ni dans les faits, Sljivancanin n'avait les pouvoirs
4 requis pour avoir une influence sur ce qui se passait.
5 Nous nous consacrerons plus particulièrement aux journées des 18, 19
6 et 20 novembre 1991. Aucun témoin de l'Accusation quasiment n'a manqué de
7 faire des commentaires au sujet de M. Sljivancanin. Nous allons maintenant
8 avoir la possibilité de présenter notre position au sujet des déclarations
9 qui ont été faites. Nous confirmerons ou réfuterons leur véracité.
10 Nous n'avons pas l'intention de faire valoir que les témoins de
11 l'Accusation ne sont pas suffisamment convaincants, mais nous souhaitons
12 vous présenter des preuves irréfutables afin d'aider à la manifestation de
13 la vérité.
14 Nous allons vous présenter des preuves concernant la reddition du
15 détachement le 18 novembre 1991, sur les activités menées par M.
16 Sljivancanin, ses contacts avec les observateurs de la Mission européenne.
17 Vous entendrez des preuves sur la façon dont un groupe de prisonniers de
18 Mitnica a été transféré à Ovcara le 18 novembre, comment ils ont été remis
19 à la garde de d'autres personnes. Vous entendrez ce qui s'est passé de la
20 bouche de ceux qui ont directement participé à cet événement. Des preuves
21 importantes seront également présentées concernant les événements survenus
22 à Ovcara, non seulement au hangar mais également en ce qui concerne les
23 civils.
24 Vous entendrez des preuves de première main concernant M. Vance, sa
25 visite à Vukovar sachant que l'Accusation a accordé une attention toute
26 particulière à cela.
27 Vous entendrez le témoignage d'un témoin qui a déclaré : "J'ai décidé
28 que M. Vance ne devrait pas se rendre à l'hôpital." Ce témoin dirigeait la
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1 délégation au nom du Secrétariat fédéral à la Défense nationale. Vous
2 entendrez parler de ce qui s'est passé à l'occasion de cette visite qui a
3 été couverte par les médias.
4 Vous entendrez un autre officier de la JNA qui, cet après-midi là,
5 était membre de la délégation de la JNA dans les pourparlers tenus avec les
6 observateurs de la Mission européenne. Vous saurez qu'elle était la nature
7 de ces pourparlers, qui y a assisté. Vous entendrez le témoignage de
8 témoins oculaires concernant les événements survenus à l'hôpital le 19
9 novembre 1991 à l'arrivée des services de sécurité de la police militaire,
10 l'arrivée de Sljivancanin, sa rencontre avec Vesna Bosanac, le Dr Njavro et
11 d'autres, ce qui a été dit et la manière dont les uns et les autres se sont
12 comportés.
13 Des preuves seront présentées concernant l'arrivée d'un groupe de
14 sécurité de la 1re Région militaire. A Negoslavci, vous entendrez parler des
15 autres activités qui ont été menées. On s'intéressera à l'arrivée du
16 général Vasiljevic, ce qu'il a fait à son arrivée, lui et son adjoint, M.
17 Tuman [phon].
18 Vous entendrez ce qui s'est passé le 20 novembre, à l'hôpital. Vous
19 entendrez ce qui s'est passé à l'occasion de la sélection, des fouilles et
20 lorsqu'on a mis de côté certaines personnes qui ont été témoins directs des
21 événements.
22 Nous souhaitons prouver que les notes de M. Kypr étaient tout à fait
23 précises et exactes, même si l'Accusation a essayé de prouver que le
24 colonel Pavkovic était, en réalité, Sljivancanin.
25 Selon la Défense de M. Sljivancanin, il y a deux événements
26 particulièrement importants qui se sont produits et auxquels nous allons
27 nous intéresser. Deux événements ont été laissés de côté jusqu'ici; ce qui
28 s'est passé à la caserne le 20 novembre, qui était présent sur les lieux et
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1 comment la sécurité des autocars était assurée, le départ de ces autocars
2 est également important; il y a eu, d'autre part, la réunion tenue par les
3 autorités de la SAO de Slavonie occidentale à Velepromet, alors que les
4 autocars étaient toujours dans la caserne. Vous allez voir quels étaient
5 les dialogues aux réunions du gouvernement, quelles ont été les conclusions
6 et les conséquences ?
7 La Défense de M. Sljivancanin affirme et va prouver que c'est un moment
8 décisif, un moment clé de ce drame; que ce moment-là a changé le cours des
9 événements, que c'est ce qui a fait détourner l'évacuation de la direction
10 normale et c'est seulement deux jours après cela que l'évacuation de
11 Mitnica l'a montré par rapport à la tâche qui aurait pu être exécutée de
12 façon précise et exacte.
13 M. Moore, par rapport à la réunion du gouvernement de la SAO de Krajina, a
14 consacré - on peut voir cela au compte rendu - 16 lignes d'une page du
15 compte rendu. Il a fait venir un témoin qui a témoigné de vive voix. Il a
16 renoncé à faire amener encore plusieurs témoins qui ont participé à cette
17 réunion du gouvernement et qu'il avait annoncés d'ailleurs dans son mémoire
18 préalable au procès.
19 Après cela, il s'est opposé à ce que la déclaration de Goran Hadzic
20 soit versée au dossier. Notre Défense va contribuer à ce que les faits par
21 rapport à cette réunion soient établis. On va éclaircir cette réunion d'un
22 autre angle, cela va être éclairci par un participant important qui vous
23 décrire où les autocars auraient dû partir, dans quelle direction à partir
24 de la caserne et comment cette direction a été changée ? Nous allons
25 prouver que Sljivancanin, à aucun moment, tant que les autocars se
26 trouvaient le 20 novembre dans la caserne, n'était dans la caserne même.
27 Je vous invite, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges à
28 donner une attention particulière à la caserne et à la réunion du
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1 gouvernement. Je pense que nous allons vous présenter des preuves qui
2 confirmeront de façon non ambiguë notre conviction qu'Ovcara ne se serait
3 pas passé si la direction du convoi n'avait pas été changée, qui aurait dû
4 partir dans la direction de Sremska Mitrovica et qui est qui parti dans la
5 direction d'Ovcara.
6 Vous allez entendre le témoignage sur les événements survenus à Ovcara le
7 20 novembre. Nous allons présenter les preuves que ce jour-là, Sljivancanin
8 ne se trouvait pas à Ovcara. Comme ont témoigné là-dessus presque tous les
9 témoins de l'Accusation, les victimes qui étaient Croates, ceux qui, comme
10 M. Moore dirait, n'ont aucun intérêt à dissimuler les faits par rapport à
11 la présence de M. Sljivancanin à Ovcara.
12 Les accusations par rapport à tous les trois accusés de cette affaire sont
13 très graves. Sljivancanin, on lui reproche des infractions pénales
14 extrêmement graves. La procédure qui se déroule devant ce Tribunal a donné
15 la possibilité à l'Accusation de parler de toutes les formes de
16 responsabilités pénales prévues par le Statut. Même une forme que la
17 Chambre d'appel dans l'affaire Stakic a contestée. Il s'agit du fait d'être
18 co-auteur de façon indirecte.
19 Vous allez vous souvenir qu'elle a analysé cela dans son mémoire
20 préalable au procès. Ces charges étendues ont fait que la Défense s'est vue
21 obligée de deviner où sont les charges de l'Accusation par rapport à nos
22 clients, par rapport au fait qu'ils ont planifié, qu'ils ont incité, qu'ils
23 ont ordonné, qu'ils ont commis des infractions pénales dans le cadre de
24 l'entreprise criminelle commune, ou ont aidé et encouragé sa réalisation.
25 De la même façon, la Défense s'est vue obligée d'établir les normes
26 nécessaires pour que leur responsabilité de commandement existe
27 conformément à l'article 3. La Défense va présenter des preuves, même si la
28 charge de preuves n'est pas sur la Défense, que Sljivancanin ne savait pas
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1 et ne pouvait pas supposer que le plan contre les non-Serbes allait être
2 établi comme cela a été décrit dans l'acte d'accusation.
3 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, c'est devant
4 vous que, depuis un an, on présente des preuves concernant les faits
5 présentés dans l'acte d'accusation. Les faits concernant les événements qui
6 se sont déroulés il y a 15 ans. Tous ici sont conscients du fait qu'on ne
7 peut pas facilement effacer dans l'esprit de n'importe quel témoin, que les
8 souvenirs de ces événements s'effacent et que ces souvenirs ne peuvent pas
9 être une source fiable par rapport aux conclusions que vous allez tirer sur
10 ces événements.
11 Nous savons à quel point les documents écrits devraient jouer un rôle
12 majeur dans l'analyse des preuves. La Défense, ainsi que l'Accusation, a
13 essayé d'obtenir des documents qu'elle considère comme étant pertinents
14 pour établir la vérité complète sur Ovcara.
15 Nous nous sommes adressés à plusieurs reprises aux institutions
16 officielles qui nous ont répondu que ces documents ont été détruits et
17 qu'ils n'existaient pas. Nous aimerions pouvoir vous offrir beaucoup plus
18 de documents pour le versement au dossier parce que nous considérons
19 qu'après tant d'années, ces documents pourraient être des preuves valides
20 dans cette affaire.
21 Le temps qui a été prévu pour la présentation des moyens de preuve de
22 l'accusé Sljivancanin, nous allons arriver à la date du 20 novembre 2006,
23 le jour où on va parler du quinzième anniversaire des événements à Ovcara.
24 Devant ce Tribunal, nous pouvons invoquer le professionnalisme de tous ceux
25 qui seront dans la salle d'audience ce jour-là et nous allons rappeler la
26 procédure conformément à l'article 11 bis qui a conduit la Chambre à
27 prendre la décision selon laquelle ce procès allait être tenu à La Haye.
28 A la fin des déclarations liminaires, je voudrais dire que dans les
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1 jours qui viennent, vous allez avoir l'occasion d'entendre les moyens de
2 preuve qui concernent avant tout la Défense de M. Sljivancanin par rapport
3 aux incriminations qui lui sont reprochées. Vous allez entendre son
4 histoire et vous allez entendre sa vérité. Il veut vous dire, à vous et au
5 public cette vérité.
6 M. Sljivancanin va s'asseoir sur la chaise réservée au témoin pour
7 vous raconter ce qu'il sait, mais il ne saura pas vous donner des réponses,
8 selon moi, aux questions les plus importantes par rapport aux événements
9 survenus à Ovcara.
10 De ce que vous avez pu entendre jusqu'ici dans cette affaire, et ce
11 de ce que vous allez entendre jusqu'à la fin de ce procès, je pense,
12 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, que vous n'allez pas
13 entendre des témoignages directs portant sur les questions majeures.
14 Certaines personnes qui pourraient peut-être vous donner des réponses
15 ne sont plus en vie. Certaines personnes évitent de venir ici en tant que
16 témoins. Certaines personnes ne tiennent pas du tout à ce que la vérité
17 soit établie. Si cela est important pour vous, par rapport à tout cela,
18 vous allez devoir tirer des conclusions de preuves indirectes. Je crois
19 qu'en analysant sérieusement les moyens de preuve qui vous seront présentés
20 et qui vous ont été présentés, vous allez pouvoir tirer des conclusions non
21 seulement sur l'exclusion de la responsabilité pénale pour ce qui est des
22 faits qui lui sont reprochés dans l'acte d'accusation, mais aussi des
23 conclusions par rapport aux événements survenus à Ovcara et par rapport au
24 pourquoi des événements survenus à Ovcara.
25 Notre premier témoin sera M. Sljivancanin. Mais avant qu'il ne témoigne, je
26 voudrais vous remercier de nous avoir accordé le temps nécessaire à la
27 présentation de nos moyens de preuve conformément à notre proposition. Nous
28 allons faire de notre mieux pour utiliser le temps qui nous a été accordé
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1 de façon rationnelle et efficace, nous pensons également aux dispositions
2 de l'article 21 du Statut. J'espère que les autres participants à ce procès
3 feront des efforts pour que la présentation des moyens de preuve de la
4 Défense soit exécutée en conformité avec votre décision et aux règlements.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
6 M. LUKIC : [interprétation] Maintenant je voudrais inviter M. Sljivancanin
7 à commencer son témoignage.
8 [L'accusé Sljivancanin vient à la barre]
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous lire à voix haute la
10 déclaration solennelle écrite sur ce morceau de papier.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et
12 Monsieur les Juges, je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute
13 la vérité et rien que la vérité.
14 LE TÉMOIN: VESELIN SLJIVANCANIN [Assermenté]
15 [Le témoin répond par l'interprète]
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez vous asseoir, s'il vous
17 plaît.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic, vous avez la parole.
20 Interrogatoire principal par M. Lukic :
21 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Sljivancanin.
22 R. Bonjour à vous.
23 Q. Maintenant, compte tenu du fait que nous connaissons votre parcours
24 général dans le faits déjà admis au dossier, pouvez-vous nous dire ce qui
25 intéresse surtout le Tribunal, c'est-à-dire, quel est votre état civil ?
26 R. Je suis marié. J'ai trois enfants. Une fille a un diplôme en médecine,
27 une autre un diplôme en droit. Mon fils fait des études de droit et il est
28 un sportif de façon active. J'ai une petite-fille et ma femme travaille.
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1 Elle travaille en tant qu'officier d'état civil.
2 Q. Je ne sais pas si vous pouvez suivre le compte rendu devant vous ?
3 R. Oui.
4 Q. Je sais que vous parlez vite et moi aussi. Après ma réponse, s'il vous
5 plaît, et après votre réponse, il faut que vous ménagiez une pause. Vous
6 devriez aussi répondre à mes questions un peu plus lentement, s'il vous
7 plaît.
8 Nous savons que vous êtes né dans un endroit au Monténégro en 1953.
9 Maintenant, je vais parcourir avec vous votre carrière professionnelle.
10 Avant cela, dites-nous en quelques mots, votre éducation pendant que vous
11 étiez jeune, quelle était votre éducation, l'éducation que vous avez reçue
12 au sein de votre famille ?
13 R. Je disais toujours que je suis en Yougoslavie. C'était l'Etat que
14 j'aimais le plus et je pense que pour moi, c'était le pays le plus beau au
15 monde. J'ai été éduqué dans l'esprit d'amour d'autrui et de tous les
16 citoyens de la Yougoslavie.
17 Ma famille maternelle et ma famille paternelle, pendant la Deuxième
18 Guerre mondiale, elles étaient aux côtés des partisans et du mouvement pour
19 la libération populaire. Ils ont participé dans les combats contre tous
20 ceux qui voulaient soumettre mon pays. Le patriotisme et l'amour pour les
21 gens étaient primordiaux dans mon pays et dans l'endroit où j'ai grandi. Il
22 n'y avait pas de haine entre les citoyens. Mon père disait qu'il importait
23 plus d'être un homme.
24 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, maintenant en posant des
25 questions directrices au témoin, pour qu'on parle du parcours professionnel
26 de M. Sljivancanin, j'ai préparé des exemplaires pour vous et pour
27 l'Accusation, je donnerai cela à M. Sljivancanin. Ce sont des documents sur
28 lesquels nous allons nous appuyer pendant la présentation de moyens de
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1 preuve. Le premier document c'est sa biographie et c'est en anglais. Tout
2 le monde va pouvoir suivre cela. Nous avons également cela dans le système
3 de prétoire électronique, comme cela nous pouvons accélérer un peu la
4 présentation de ce moyen de preuve. La Chambre de première instance a déjà
5 dans le dossier le document portant la cote 592.
6 Q. Monsieur Sljivancanin, je vais vous poser une question, répondez-moi
7 par un oui ou par un non et vite pour voir quel était votre parcours
8 professionnel. C'était une longue carrière. L'école secondaire militaire,
9 vous l'avez finie en 1972, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. Ensuite, l'académie militaire en 1976 ?
12 R. C'est exact également.
13 Q. Ensuite, vous avez fini l'école destinée aux officiers d'état-major
14 pour ce qui est de l'armée de terre et de la tactique. C'était quand ?
15 R. C'était en 1987 ou 1988, 1988 plutôt.
16 Q. La note qu'on vous a donnée était excellente. Est-ce que vous avez eu
17 une décoration ou une recommandation ?
18 R. J'étais premier dans ma classe.
19 Q. Après, vous avez fini l'école de la Défense nationale ?
20 R. Oui.
21 Q. La note moyenne qu'on vous a accordée, c'était 9,41 ?
22 R. Oui, j'étais également parmi les trois premiers de ma classe.
23 Q. Il y a eu une petite erreur au compte rendu mais ce n'est pas une
24 erreur qui pourrait nuire aux conclusions. Il faut que je répète.
25 L'académie militaire vous l'avez finie en 1976, n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Vous êtes devenu sous-lieutenant en 1976 ?
28 R. Oui.
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1 Q. En 1977, lieutenant ?
2 R. Oui.
3 Q. Capitaine, en 1980 ?
4 R. Exact.
5 Q. Capitaine de première classe en 1984 ?
6 R. Oui, je pense que c'est exact. C'est ce qui est écrit dans ce document.
7 Q. Le grade de commandant vous l'avez obtenu en 1988 ?
8 R. Si cela est écrit dans le document, oui, c'est probablement exact.
9 Q. Le colonel d'infanterie, ce grade vous l'avez eu le 26 novembre 1991,
10 ce à partir du 18 novembre 1991, c'est ce qui est écrit dans votre fiche
11 personnelle. Quand vous auriez dû, suivant l'évolution normale des
12 événements, vous auriez dû obtenir ce grade ?
13 R. C'était le 22 décembre 1991, qui était le jour de la JNA. Comme vous
14 l'avez lu, c'était le 18 novembre 1991 que j'ai été promu à ce grade, où
15 j'ai obtenu ce grade de lieutenant-colonel.
16 M. LUKIC : [interprétation] A la page 18 à la ligne 15, ma question était :
17 "Quand avez-vous obtenu le grade de commandant."
18 Q. Vous avez eu ce grade de colonel en 1995, n'est-ce pas ?
19 R. Oui. J'étais à Podgorica, à ce moment-là. Oui, c'est exact. C'était le
20 31 décembre 1995.
21 Q. En suivant votre fiche personnelle, on peut voir quel était le parcours
22 de votre carrière professionnelle. Je soulignerai quelques dates
23 importantes, cela sera important aux yeux des Juges pour ce qui est de
24 votre témoignage.
25 Dans votre fiche personnelle, il est écrit que vous êtes venu au sein
26 de la Brigade des Gardes en 1976. Vous vous souvenez de cela ?
27 R. Je me souviendrai de cela toute ma vie parce que c'était un grand
28 événement pour moi de travailler près de Tito. En août 1976, je suis venu à
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1 la Brigade des Gardes parce que j'avais exprimé mon souhait pour être
2 membre de cette brigade.
3 Q. Vous étiez d'abord au sein du Bataillon d'infanterie, mais le 2
4 septembre 1980, vous êtes devenu "komandir" ou chef de compagnie de police
5 militaire. Peu après, vous êtes devenu commandant de la Compagnie de la
6 police militaire aux affectations spéciales. Nous allons parler des
7 spécificités de la Brigade des Gardes plus tard. Est-ce que c'est exact,
8 tout ce que je viens de dire ?
9 R. Pendant que Tito était vivant la Brigade des Gardes avait deux
10 bataillons de la garde, un bataillon d'officiers qui s'occupait
11 exclusivement des questions liées à la sécurité et au protocole. Après la
12 mort de Tito en 1980, j'ai quitté ce Bataillon des Gardes dont j'étais
13 chargé de la sécurité et des cérémonies. A cause de la réorganisation de la
14 Brigade des Gardes, je suis parti et je suis devenu chef de compagnie de la
15 police militaire. En 1982, je suis devenu chef de la Compagnie de la police
16 militaire aux affectations spéciales qui était composée exclusivement de
17 sous-officiers.
18 La spécificité de cette compagnie était la suivante, pour la première
19 fois au sein des unités de la JNA, on commençait à créer des unités
20 antiterroristes. J'étais parmi les premiers qui ont écrit le plan de
21 formation de ces unités, c'était la première unité au sein de la Brigade
22 des Gardes de la JNA. Cette compagnie était chargée de former les officiers
23 pour les activités antiterroristes et de s'occuper de la sécurité du Centre
24 mémorial de Josip Broz Tito et des installations importantes, qui étaient à
25 la disposition des dirigeants les plus hauts placés de l'époque.
26 Q. Ensuite, vous étiez adjoint commandant du bataillon de la police
27 militaire à partir de 1986. En 1988, vous êtes devenu commandant du 1er
28 Bataillon A de la police militaire. Nous allons parler plus tard de la
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1 structure de ces bataillons. Dites-moi d'abord, est-ce que c'est vrai ?
2 R. Oui.
3 Q. Pendant une certaine période, vous étiez commandant adjoint du chef de
4 l'état-major chargé des questions liées à la formation en 1989 ?
5 R. Oui.
6 Q. Le 7 septembre 1990, vous êtes devenu l'adjoint du chef de l'organe de
7 sécurité ?
8 R. A l'état-major, j'étais le chef chargé de la formation et des
9 opérations. Veljko Kadijevic a été nommé ministre fédéral de la Défense,
10 après son arrivée, on m'a proposé ce poste et c'est comme cela que j'ai
11 commencé à travailler au sein de l'organe chargé de la sécurité. J'ai aimé
12 travailler avec lui, même s'il s'agissait d'un poste inférieur par rapport
13 au poste que j'occupais jusqu'alors.
14 Q. Chef de l'organe chargé de la sécurité, c'était le 12 août 1991 que
15 vous avez eu ce poste, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, en août 1991, je suis devenu chef de l'organe chargé de la
17 sécurité au sein de la Brigade des Gardes.
18 Q. Vous avez occupé cette fonction pendant la période couverte par l'acte
19 d'accusation à Vukovar ?
20 R. Oui.
21 Q. Après, vous étiez chef de l'état-major de la Brigade des Gardes à
22 partir de septembre 1992, ensuite vous avez été muté à Podgorica où vous
23 étiez commandant, d'abord de la brigade à partir de septembre 1993, ensuite
24 vous étiez commandant du Corps de Podgorica à partir de l'année 1994,
25 n'est-ce pas ?
26 R. Ce n'est pas exact.
27 Q. Dites-le-nous ?
28 R. En 1992, je suis devenu chef de l'état-major de la Brigade des Gardes,
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1 en 1993, j'ai été muté par le général Perisic. J'ai été muté à Podgorica.
2 Même si je n'ai pas demandé cela, c'est un ordre qu'il fallait exécuter. Je
3 n'ai jamais été membre du Corps d'armée de Podgorica. En 1996, vers la fin
4 du mois de février, j'ai été muté à nouveau à Belgrade au centre des écoles
5 militaires.
6 Q. C'est exact. J'ai fait une erreur. Vous étiez commandant du bataillon
7 motorisé à Podgorica de la brigade au sein du Corps d'armée de Podgorica à
8 partir de 1994 ?
9 R. J'étais commandant de la 5e Brigade motorisée, de la formation à
10 Podgorica de 1993 jusqu'au mois de février 1996.
11 Q. A la suite de quoi vous êtes retourné à Belgrade en 1996. Vous avez
12 travaillé en tant qu'officier au centre de formation spéciale de l'école
13 militaire supérieure ?
14 R. Oui.
15 Q. Puis vous avez été en quelque sorte le chef d'un organe s'occupant des
16 affaires de l'état-major dans le même centre, n'est-ce pas ?
17 R. Oui. Ensuite, j'ai été nommé chef des affaires relatives à l'état-major
18 au centre de formation militaire.
19 Q. Finalement, le 21 avril 2002, vous êtes devenu adjoint chef pour les
20 affaires relatives à l'état-major et aux opérations dans le secteur
21 responsable des écoles et de la formation.
22 R. Voilà. Je vais vous expliquer comment cela s'est passé ? Après
23 que j'aie été chef responsable des affaires générales, il y a eu une
24 transformation, c'est ainsi qu'ils l'ont appelée, une restructuration, une
25 réorganisation de l'armée. Il en a été de même pour l'état-major général et
26 j'ai été nommé adjoint chef pour le secteur de la formation et des écoles
27 pour toutes les affaires juridiques et les affaires relatives au personnel.
28 Q. Votre curriculum vitae indique que vous n'avez plus été affecté à cette
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1 fonction et ce, à la suite d'une décision prise par le président de la
2 Yougoslavie et on vous a octroyé le rang de commandant. Puis, vous avez
3 pris votre retraite le 15 janvier 2002; est-ce que cela est exact ?
4 R. C'est exact.
5 Q. A ce moment-là, votre grade était le grade de colonel, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation]
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui général de division, c'était ce que
9 j'étais à l'époque.
10 M. LUKIC : [interprétation]
11 Q. Vous dites que vous avez fait un travail essentiellement technique
12 lorsque vous avez parlé de la compagnie du contre-terrorisme. Est-ce que
13 vous pourriez nous indiquer quel a été l'aspect technique de votre carrière
14 militaire et quand est-ce que cela s'est passé ?
15 R. Lorsque je suis devenu commandant de la Compagnie de la police
16 militaire, j'ai participé à la rédaction de programmes et de plans destinés
17 à l'entraînement et à la formation d'unités contre-terroristes au sein de
18 la JNA. J'ai d'ailleurs complété la première section. Ce n'est que par la
19 suite que j'ai commencé à travailler avec le colonel Petrovic pour ce qui
20 est de l'administration et de la gestion de la sûreté. Nous avons analysé
21 et rédigé plusieurs choses à propos des instructions relatives à
22 l'entraînement et à l'utilisation de la police militaire, à savoir la
23 formation d'unités de police militaire et d'unités contre-terroristes.
24 Q. Cela s'est passé quand, grosso modo ?
25 R. Cela s'est passé pendant trois ou quatre années. Cela a commencé en
26 1982 et cela s'est poursuivi jusqu'à ce que j'aille à l'école pour l'état-
27 major, école responsable des tactiques et ce, pour pouvoir bénéficier d'une
28 plus ample formation.
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1 Q. Nous allons parler de votre arrivée à la Brigade des Gardes, car vous
2 avez dit que cette Brigade des Gardes avait plusieurs caractéristiques du
3 vivant de Tito, et qu'il y a eu ensuite transformation et réforme. Est-ce
4 que vous pourriez nous parler des liens entre les organes responsables de
5 la sécurité et l'administration de la sécurité, toujours du vivant de
6 Tito ? J'aimerais également que vous nous parliez des liens qui existaient
7 après que vous ayez assumé ces fonctions ?
8 R. Toutes les personnes présentes dans le prétoire ont déjà entendu de
9 nombreux témoins parler de la Brigade des Gardes. Je dirais que parmi tous
10 ces témoins, j'ai le grand privilège et la fierté de pouvoir avancer que
11 j'ai été le seul à avoir, du vivant de Tito, fait partie de la Brigade des
12 Gardes.
13 Il s'agissait d'une unité spéciale de la JNA. On l'appelait une unité
14 d'élite et je suppose qu'il s'agissait effectivement d'une unité d'élite
15 lorsque l'on pense à son dévouement, lorsque l'on pense au respect que
16 cette unité avait pour le travail et pour ce que représentait la
17 Yougoslavie à l'époque. La Brigade des Gardes n'était pas seulement une
18 unité d'élite pour ce qui est de sa méthode lors des opérations de combat,
19 ou pour ce qui était de son niveau de formation visant les opérations de
20 combat. Il s'agissait également d'une unité qui devait assurer la sécurité
21 des personnes importantes, de bâtiments et des archives également dans
22 l'ex-Yougoslavie.
23 Je ne sais pas comment les organes de sécurité fonctionnaient lorsque
24 Tito était encore vivant, mais je sais que la Brigade des Gardes étaient
25 directement subordonnée au chef de cabinet du président de l'ex-
26 Yougoslavie, à savoir Tito.
27 Après son décès, la Brigade des Gardes est devenue subordonnée au
28 chef de cabinet du Secrétariat fédéral de la Défense populaire. Il n'y
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1 avait pas de commandement ou plutôt de chaîne de commandement direct qui
2 liait cet organe aux autres organes de la JNA, tels que, par exemple, les
3 armées, les corps, les districts militaires.
4 Il n'y a pas eu de changement au sein de la Brigade des Gardes, mais
5 elle a commencé à assurer la sécurité des bâtiments où se trouvait la
6 présidence de la RSFY. Cette brigade assurait la sécurité également des
7 différentes personnalités de l'état-major. Je pense notamment au secrétaire
8 fédéral et au chef d'Etat.
9 Toutes les unités, cela est valable également pour la Brigade des
10 Gardes, toutes les unités ne sont jamais établies seulement pour en temps
11 de paix et cela était valable pour la Brigade des Gardes, car parmi ses
12 fonctions il y avait également les fonctions en temps de guerre. Après le
13 décès de Tito, l'objectif de la Brigade des Gardes a continué d'être
14 d'assurer la sécurité, par exemple, des bâtiments et des postes de
15 commandement du commandement Suprême en condition de temps de guerre.
16 Ce qui signifie que la formation et l'entraînement de ces unités de
17 la Brigade des Gardes se faisaient afin justement de pouvoir assurer la
18 sécurité des postes de commandement, des personnalités extrêmement
19 importantes. Il y avait un plan de formation pour ces unités et nous
20 accordions une attention particulière aux actions offensives, aux actions
21 défensives et il faut savoir que toutes les unités de l'armée sont formées
22 en ce sens.
23 Je peux dire que si l'on prend en considération les armes et le
24 matériel de la Brigade des Gardes, la Brigade des Gardes disposait d'armes
25 d'infanterie légère et n'avait pas, au sein de ses unités, une puissance
26 d'armes importantes telles que, par exemple, les unités d'artillerie
27 blindées.
28 Il est vrai de dire qu'avant le départ pour Vukovar un bataillon
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1 blindé est arrivé et a été intégré à la brigade. Il venait de Kraljevo et
2 avait beaucoup plus de puissance d'armes à feu.
3 Q. Nous allons passer à la police militaire. Quelles étaient les
4 caractéristiques précises de la police militaire de la Brigade des Gardes
5 et comment est-ce que cette Brigade des Gardes fonctionnait vis-à-vis
6 d'autres brigades motorisées ?
7 R. En règle générale, il faut savoir que parmi l'armée yougoslave, la
8 structure la plus importante était le bataillon, la police militaire a été
9 organisée afin d'assurer la sécurité des postes de commandement de certains
10 commandements de l'armée populaire yougoslave. Cette unité était le
11 bataillon de la police militaire. Il faut savoir car il y avait la Brigade
12 indépendante et les Brigades de formation A, comme elles étaient appelées,
13 qui avaient un axe tactique important. Nous avions des unités qui avaient
14 la force et la structure d'une compagnie. Il y avait également des
15 escouades.
16 Je pense, par exemple, au plus grand problème qui consistait à former
17 les plus jeunes soldats pour ces unités et il fallait également les
18 regrouper dans des centres bien précis. La Brigade des Gardes a commencé, à
19 partir de l'année 1980, à former des soldats pour ses propres besoins.
20 Parce que jusqu'à ce moment-là, nous avions reçu et accueilli des soldats
21 qui étaient formés par d'autres unités, lorsque nous les demandions.
22 Il faut savoir qu'en temps de paix, la brigade n'avait qu'un
23 bataillon de police militaire, mais il y avait deux bataillons et un
24 deuxième bataillon qui était composé de jeunes soldats qui avaient été
25 formés, cela avait pris cinq mois et 22 jours. Ils avaient été affectés au
26 1er Bataillon qui s'occupait essentiellement d'assurer la sécurité
27 d'installations et de personnes, il s'agissait d'escorter des colonnes, des
28 convois, d'assurer la sécurité de la circulation routière, et cetera.
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1 Toutes les unités de la police militaire de l'armée populaire
2 yougoslave qui faisait partie du district militaire des brigades avaient
3 également leur compétence territoriale en temps de paix. Ce qui signifiait
4 que les membres de la police militaire devaient assurer que règne l'ordre
5 public et devaient faire en sorte que soient mises en vigueur les décisions
6 prises par les services juridiques de l'armée populaire yougoslave et ce,
7 sur le territoire en question.
8 J'aimerais apporter une précision : si un soldat, qui était par
9 exemple en permission, se rendait chez lui et provoquait des problèmes de
10 discipline, la personne qui devait intervenir et appréhender ce soldat
11 devait être un membre de la police militaire qui avait compétence sur le
12 territoire en question.
13 Je pense à la Brigade des Gardes et je pense aux autres unités également de
14 l'armée populaire yougoslave, mais cette Brigade des Gardes n'avait pas de
15 compétence territoriale. Elle s'occupait essentiellement d'assurer la
16 sécurité, comme je l'ai déjà dit, d'installations et de bâtiments où se
17 trouvaient les dirigeants politiques, le secrétaire fédéral ainsi que le
18 chef d'état-major.
19 Q. Est-ce que d'autres brigades motorisées avaient en leur sein un
20 bataillon de la police militaire ? Il faudrait que vous m'apportiez des
21 réponses très précises, car cela est très important.
22 R. La plus grande unité de la police militaire pouvait être une compagnie
23 et ce, afin qu'il n'y ait pas de bataillon dans aucune brigade à
24 l'exception de la Brigade des Gardes.
25 Q. Merci. Je pense au bataillon de la police militaire et je ne parle que
26 de la Brigade des Gardes. Envers qui est-ce qu'elle était redevable ?
27 R. Le bataillon de la police militaire de la Brigade des Gardes était
28 commandé pour le commandant de la police militaire et le règlement
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1 stipulait, de façon très précise, que le commandant du bataillon était
2 subordonné au commandant de l'unité en question, en l'occurrence le
3 commandant de la brigade.
4 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire comment se fait-il que cela a été
5 établi et comment se fait-il que cette compagnie du contre-terrorisme ait
6 été établie de façon précise. Ce qui m'intéresse en fait c'est la chaîne de
7 commandement. A qui étaient-ils subordonnés; et de qui recevaient-ils leurs
8 ordres ?
9 R. Pour ce qui est du contre-terrorisme, comme je l'ai déjà dit, il y a
10 des témoins qui ont répondu ici, il y avait une escouade de contre-
11 terrorisme au sein du bataillon de la police militaire, de ce qui était à
12 l'époque le Secrétariat fédéral de la Défense nationale qui d'abord a été
13 formé et, en 1980, lorsqu'il y a eu restructuration de la Brigade des
14 Gardes, ce bataillon de la police militaire a été intégré à la Brigade des
15 Gardes ainsi qu'au SSNO, le Secrétariat fédéral responsable de la Défense
16 nationale. En 1982, il y a un peloton pour les opérations du contre-
17 terrorisme qui a été créé. C'est la première fois que ce genre d'unité a
18 été créé au sein de l'armée populaire yougoslave et ce, afin de s'acquitter
19 de fonctions et de tâches qui étaient nécessaires au vu de l'époque parce
20 qu'il y avait différentes activités terroristes, il y avait des
21 détournements d'avions dans le monde entier. Nous avons voulu avoir une
22 unité prévue pour ce genre de situations d'urgence, unité qui pouvait
23 intervenir dans ce genre de situations.
24 Il faut savoir que cette unité -- ou plutôt à cette unité étaient
25 affectés les sous-officiers les plus compétents de toute l'armée populaire
26 nationale. Il faut savoir que leur aptitude morale et leur aptitude
27 psychologique n'avaient d'égal que leur aptitude physique. J'ai été
28 extrêmement privilégié d'être en mesure de me rendre dans ces différentes
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1 unités et de pouvoir choisir mes sous-officiers. J'ai pu me rendre compte
2 de leur compétence physique et de leur aptitude, j'ai reçu des données à
3 propos de leur famille, ce qui m'a permis de voir quel était leur état
4 mental et physique et quel était également leur statut familial.
5 Parmi de nombreuses personnes, j'ai choisi un jeune officier qui
6 était particulièrement compétent. C'était un sous-officier. Il est venu ici
7 à la barre des témoins, il avait le matricule P001. J'ai été extrêmement
8 blessé parce que lorsque vous lui avez demandé s'il me connaissait, il a
9 répondu qu'il ne se souvenait pas de moi, qu'il ne savait pas qui j'étais,
10 alors que j'étais son commandant de compagnie entre 1982 et 1987. Toujours
11 est-il que tout le monde a tout à fait le droit de dire ce qu'il veut dire.
12 J'aimerais vous dire que pour ce qui est de la formation et de
13 l'entraînement de ces unités, les journées commençaient par trois heures
14 d'exercices physiques. Je n'ai pas commencé cet entraînement en partant de
15 la case départ parce que ces personnes avaient déjà bénéficié d'un certain
16 entraînement militaire dans les écoles militaires. J'étais le premier à
17 voir que toute personne qui n'était pas en mesure de surmonter un obstacle
18 ne devait pas faire partie de mon unité.
19 Q. Dites-moi, je vous prie : qu'est-ce qu'une escouade spéciale de la
20 police militaire ?
21 R. C'est une unité spéciale à but spécial de la police militaire qui a été
22 créée d'après l'initiative de la l'amiral Mamula ou du secrétaire fédéral,
23 je ne suis pas sûr. Il s'agissait de sous officiers d'élite de cette unité
24 pour les opérations du contre- terrorisme qui s'occupaient essentiellement
25 de questions extrêmement importantes relatives à la sécurité pour le
26 secrétaire fédéral et pour le chef d'état-major. A l'époque, j'étais le
27 chef de la sécurité, ils m'étaient directement subordonnés.
28 Q. C'est ce groupe de sous-officiers et de commandants de la police
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1 militaire qui était directement subordonné au chef de sécurité du fait des
2 caractéristiques bien précises de leurs tâches, n'est-ce pas ?
3 R. C'était le seul groupe qui était ainsi constitué. Cela a été fait à la
4 suite d'un ordre spécial du secrétaire fédéral chargé de la Défense
5 nationale. Il s'agissait de faire en sorte que ces personnes ne perturbent
6 pas le travail et les obligations des autres unités qui devaient s'atteler
7 à leurs tâches de base. Ils étaient censés être choisis parmi les personnes
8 les plus compétentes et les mieux formées.
9 Q. J'aimerais vous poser une question mais la réponse est probablement
10 claire au vu de ce que vous décrivez de façon précise. Est-ce que Vukovar
11 a été considérée comme un théâtre de guerre pour cette unité ?
12 R. Cette escouade ne se trouvait pas sur le front de Vukovar. Une partie
13 du commandement est venue lorsque le général Adzic est venu visiter les
14 unités à Vukovar.
15 Q. J'ai quelques questions à vous poser à propos de la structure de la
16 Brigade des Gardes. Est-ce que vous pourriez me parler des organes de
17 sécurité. Ensuite, nous parlerons du règlement de service et de ses
18 articles. Dans un premier temps, j'aimerais savoir à qui était subordonné
19 l'organe de sécurité de la Brigade des Gardes ? Envers qui était-il
20 responsable, de qui recevait-il ses ordres et ses missions ?
21 R. Tout cela était stipulé par les règlements et je ne dis rien de nouveau
22 par rapport à ce que nous avons déjà dit. Mais comme je l'ai déjà dit, tout
23 un chacun peut dire ce qu'il veut dire. Le chef de sécurité de la brigade,
24 je pense également à la Brigade des Gardes, est subordonné au commandement
25 de la brigade qui fait un travail exclusif pour ce commandement et pour
26 cette unité.
27 Il faut savoir que la Brigade des Gardes pouvait s'acquitter d'autres
28 tâches qui étaient du domaine des organes de sécurité, qui étaient
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1 pertinents pour les membres de l'armée populaire nationale; je pense, par
2 exemple, à toute personne qui venait dans les bâtiments dont la sécurité
3 était assurée par la Brigade des Gardes, tels que les dirigeants
4 militaires, les dirigeants politiques. J'avais deux assistants dans mon
5 escouade, il y avait deux officiers qui assuraient la permanence au niveau
6 des bureaux et ils étaient subordonnés au chef de la sécurité.
7 Q. Ils vous étaient subordonnés ?
8 R. Oui. Je faisais exclusivement ce travail pour la Brigade des Gardes, je
9 ne faisais absolument rien qui ne soit pas de l'apanage de la Brigade des
10 Gardes. Pour ce qui est de l'orientation professionnelle, du commandement
11 professionnel, de l'application des méthodes de travail des organes de
12 sécurité, de l'orientation, pour ce qui est de toutes les tâches assumées
13 par le chef de la sécurité, j'étais la personne qui s'occupait de tout cela
14 ainsi que le chef de sécurité du cabinet du secrétaire fédéral de qui je
15 recevais mes instructions et avec qui j'échangeais mes expériences. Je dois
16 dire que j'envoyais tous mes rapports sur la sécurité au chef de cabinet du
17 secrétaire fédéral.
18 Q. A l'époque qui nous intéresse, à savoir l'automne de l'année 1991, qui
19 était l'adjoint pour la sécurité au sein du cabinet du secrétaire fédéral ?
20 R. Le chef de la sécurité du cabinet du secrétaire fédéral en 1991 était
21 le lieutenant-colonel Dragoljub Djukic.
22 Q. Correction, mais je pense que vous avez d'ailleurs précisé et corrigé
23 votre réponse précédente. A la page 31, ligne 19, vous avez dit qu'au sein
24 du commandement professionnel, vous étiez subordonné au chef de la sécurité
25 du cabinet du secrétaire fédéral, à savoir à l'assistant chargé de la
26 sécurité du chef de cabinet du secrétaire fédéral de la Défense nationale;
27 est-ce que cela est exact ?
28 R. Oui, c'est exact.
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1 Q. Je pense aux liens qui existaient entre la sécurité et le commandement,
2 est-ce que vous n'avez jamais reçu des ordres de la part de
3 l'administration de la sécurité ?
4 R. Tous les ordres émis par l'administration de la sécurité passaient par
5 le chef du cabinet de la sécurité, en ce qui me concerne. Cela passait par
6 l'entremise du chef de cabinet du secrétaire fédéral. Il s'agissait de
7 documents qui exigeaient de notre part que nous fassions quelque chose, que
8 nous aidions l'administration de la sécurité dans le cadre de leurs tâches
9 opérationnelles. Bien sûr, nous respections ce genre de requêtes.
10 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais savoir si
11 nous pouvons prendre une pause maintenant parce que j'aimerais, après cela,
12 aborder un document bien précis.
13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Lukic. Au vu des
14 circonstances, nous allons avoir une pause d'une demi-heure, Maître Lukic.
15 Ce qui signifie que nous reviendrons ici à 10 heures 55.
16 --- L'audience est suspendue à 10 heures 25.
17 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic. Allez-y.
19 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 Q. Monsieur Sljivancanin, pendant la pause, je me suis entretenu avec
21 plusieurs interprètes. Ils m'ont tous signalé que nous allions avoir un
22 problème avec le compte rendu si nous continuions à parler aussi vite. Je
23 vous demande de bien vouloir ménager une pause après mes questions et d'y
24 répondre de façon bien concise. C'est dans votre intérêt que tout soit bien
25 clair. Veuillez garder cela à l'esprit. Nous allons ainsi aider les
26 interprètes et nous avons également, dans l'intervalle, communiqué des
27 exemplaires de documents avec lesquels nous allons travailler. J'espère que
28 cela leur sera utile.
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1 R. Je m'excuse auprès des interprètes. Je vais essayer de ralentir.
2 Q. Je souhaiterais que l'on parle de la théorie et de la pratique pour ce
3 qui est du travail des organes de sécurité. Nous allons analyser certaines
4 dispositions du règlement de service dans les forces armées. Il s'agit de
5 la pièce 107.
6 M. LUKIC : [interprétation] J'ai demandé au greffier d'afficher la version
7 en B/C/S pour les autres participants. La Chambre et les représentants de
8 l'Accusation disposent de la version papier en anglais.
9 R. Avant que nous ne commencions avec le règlement, lorsque j'ai répondu
10 un peu plus tôt à vos questions au sujet des instructions à donner aux
11 services de sécurité, je souhaiterais ajouter quelque chose. On en a parlé
12 en détail ici. Il n'y avait pas deux chaînes de commandement au sein de
13 l'armée populaire yougoslave. Cela n'a jamais existé. Je le répète. Chaque
14 chef de sécurité est subordonné en tout au commandant de l'unité à laquelle
15 il est affecté, pour ce qui est des officiers.
16 En tant que chef de la sécurité de la Brigade motorisée de la Garde,
17 j'étais dans la même situation; de ce point de vue professionnel, ces
18 principes étaient régis exclusivement pour les missions relatives au
19 contre-espionnage en rapport avec la Sûreté de l'Etat et les activités
20 visant à détruire l'ordre constitutionnel de la Yougoslavie. Cela
21 concernait également les affaires et les missions relatives au travail de
22 renseignement au sein de la Brigade des Gardes et tout ce qui diminuait
23 l'état de préparation au combat et posait un problème pour ce qui est de la
24 situation politique.
25 Cela ne constitue pas des missions publiques. Ces missions étaient
26 menées à bien conformément à certains principes prévus par le règlement
27 relatif aux organes de sécurité. Tout le reste se déroulait au niveau de la
28 brigade, comme pour les autres officiers. Tout était clair.
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1 En ma qualité de chef des organes de sécurité, je ne pouvais résoudre
2 aucune question ou mener à bien la moindre mission sans que le commandant
3 de la brigade soit au courant. Aucun officier des organes de sécurité ne
4 pouvait faire cela.
5 Q. Pourriez-vous nous dire en quelques mots, ensuite nous allons parler de
6 l'article pertinent, pourriez-vous nous dire en quoi consiste le travail
7 des organes de sécurité ? Quelles sont les différentes missions dont il
8 s'agit et pourriez-vous nous décrire leur nature, de façon générale ?
9 R. Comme je l'ai déjà dit précédemment, les organes de sécurité sont des
10 organes professionnels des unités, des commandements et des institutions
11 qui mènent à bien les missions relatives à la sûreté de l'Etat. Il s'agit
12 de protéger, d'empêcher les activités visant à saper, à détruire l'ordre
13 constitutionnel de l'Etat, en l'occurrence la Yougoslavie.
14 Les organes chargés de la sécurité avaient certaines missions à
15 accomplir. Il y avait également d'autres missions auxquelles ils
16 participaient de concert avec d'autres unités de la JNA. Les organes de la
17 sécurité devaient, en premier lieu, empêcher les activités de renseignement
18 à l'encontre des unités au sein des unités de la JNA; il fallait découvrir
19 et empêcher toutes activités hostiles au sein des unités de la JNA et à
20 l'encontre de celles-ci.
21 Il fallait également protéger le contre-espionnage, les documents,
22 les installations et toutes les personnalités importantes au sein de la
23 JNA. Il fallait recueillir et vérifier certaines données importantes pour
24 le travail des organes de sécurité en ce qui concerne certaines
25 personnalités de la JNA. Ils avaient également pour devoir de développer un
26 réseau d'informations chargé d'analyser les données au sein des organes de
27 sécurité. Il fallait, entre autres, préparer les organes de sécurité, les
28 former dans l'éventualité d'une guerre générale. Pour autant que je le
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1 sache, voilà quelles étaient les missions confiées aux organes de sécurité.
2 Q. Un instant, s'il vous plaît.
3 M. LUKIC : [interprétation] Pourrait-on afficher à l'écran un
4 document, à savoir la pièce 107, article 6. Dans la version en B/C/S, il
5 s'agit de la page 6; la page 7 de la version anglaise; 00920105.
6 Q. Cela correspond à ce que vous avez dit. Ce que je vois à l'article 6,
7 c'est ce que vous venez de décrire de façon générale.
8 R. Je l'ai sous les yeux et je le vois ici à l'écran. Il s'agit du
9 Règlement de service des organes de sécurité des forces armées de la RSFY.
10 On peut voir au point 6 : "Les organes de sécurité sont responsables de…"
11 Je ne pense pas qu'il soit nécessaire que je lise tout cela.
12 Q. Très bien.
13 R. En plus de ces missions, il y a d'autres missions auxquelles les
14 organes de sécurité prenaient part de concert avec d'autres unités de la
15 JNA.
16 Q. Je vous interromps un instant. Inutile de lire l'intégralité de ce
17 document. Il s'agit de l'article 7. Nous n'avons pas besoin de lire tout
18 cela, Monsieur Sljivancanin. Est-ce que vous pourriez nous dire en quelques
19 mots quelles étaient ces missions, quelles étaient les missions auxquelles
20 participaient généralement les organes de sécurité ?
21 R. Vous voulez que je parle de la participation des organes de sécurité :
22 "A la détection, à la prévention des crimes graves, les recommandations,
23 règlements, organisation, la planification, la formation," et cetera. "Le
24 travail dans les unités de police militaire, les unités de police militaire
25 en tant que telles et les procédures au pénal déjà engagées."
26 Eventuellement, détecter la possibilité d'une agression contre l'Etat.
27 Q. Est-ce que vous pourriez expliquer en vos propres termes quelle est la
28 différence fondamentale entre les termes "acteurs" et "participants." De
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1 quoi sont chargés les organes de sécurité et en quoi consiste leur
2 participation ?
3 R. Parfois, il s'agit des acteurs principaux dans le cadre d'une certaine
4 activité. Pour ce qui est du reste, en tant que de besoin, ils participent
5 aux activités si cela est nécessaire.
6 Q. Merci. A votre avis, ce qui est indiqué aux articles 6 et 7 constitue
7 t-il l'ensemble des activités confiées aux organes de sécurité ?
8 R. Tout est très clair, c'est ainsi que les activités sont régies dans le
9 règlement de service. Je n'ai pas de commentaires à faire, tout est
10 clairement indiqué dans le règlement.
11 Q. Je vous demanderais de bien vouloir regarder l'article 16 à présent. Ce
12 qui m'intéresse, c'est qui commande les organes de sécurité, à qui sont-ils
13 subordonnés ?
14 M. LUKIC : [interprétation] Je signale à l'intention des Juges de la
15 Chambre que cela se trouve à la page 10 de la version anglaise; 00920108.
16 Dans le système e-court, cela se trouve à la page 9 de la version en B/C/S.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déjà expliqué cela. L'organe chargé de la
18 sécurité est subordonné au commandant de l'unité où il se trouve. Pour ce
19 qui est du contre-espionnage, il reçoit des instructions de l'organe chargé
20 de la sécurité au sein du commandement supérieur. Comme vous l'avez dit,
21 tout cela est stipulé à l'article 16 du règlement de service.
22 M. LUKIC : [interprétation]
23 Q. Est-ce que vous pourriez faire un commentaire sur l'article 18, c'est
24 ce que vous venez de dire. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que cela
25 signifie d'après vous, lorsqu'il s'agit de gestion, qu'entend-on par là au
26 niveau des organes de sécurité. Nous n'avons pas parlé de cet aspect.
27 R. Dans ce même article, il est expressément stipulé que les organes de
28 sécurité du commandement supérieur, en ce qui me concerne il s'agissait du
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1 cabinet du secrétaire fédéral à la Défense nationale, du point de vue
2 professionnel, ils sont chargés des organes de sécurité de la Brigade des
3 Gardes. C'est l'unité à laquelle j'appartenais. Comme je l'ai déjà dit, il
4 a donné exclusivement des instructions concernant le travail de contre-
5 espionnage.
6 J'ai déjà mentionné cela. Il s'agissait d'empêcher les activités
7 visant à saper l'ordre constitutionnel de l'Etat et empêcher la tenue
8 d'activités hostiles au sein de la Brigade des Gardes, ce qui aurait
9 entraîné une diminution de l'état de préparation aux combats et une
10 dégradation du moral.
11 Q. Soyons simples, s'il vous plaît. L'organe de sécurité du commandement
12 supérieur, outre ces instructions professionnelles, pouvait-il donner des
13 ordres à l'organe de sécurité de l'unité subordonnée pour ce qui est de la
14 chaîne de commandement ?
15 R. L'organe de sécurité du commandement supérieur ne peut que relayer des
16 informations à l'organe de sécurité qui lui est subordonné. Il faut trouver
17 les meilleures méthodes en matière de sécurité pour résoudre tout problème
18 éventuel relevant du travail de contre-espionnage. Nous ne pouvons pas
19 donner d'instructions pour ce qui est du commandement.
20 S'il y a une mission pour laquelle on estime que l'organe de sécurité
21 du commandement subordonné doit être appliqué, si cela ne relève pas de la
22 compétence de l'unité en question, alors l'organe de sécurité doit
23 s'adresser au commandant de l'unité par écrit et demander que cet organe
24 soit impliqué dans d'autres activités en dehors de l'unité.
25 Q. Est-ce que vous pourriez faire des commentaires concernant le
26 paragraphe 3 de l'article 19, car il est directement lié à l'article 17. La
27 Chambre procèdera à son interprétation, mais qu'en est-il des groupes
28 temporaires et de leur affectation pour ce qui est de certaines missions
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1 effectuées ?
2 R. Au paragraphe 3 de l'article 19, il est clairement indiqué que les
3 commandements et institutions supérieurs peuvent envoyer certaines équipes
4 et organes de sécurité pour mener à bien des missions au sein des unités
5 subordonnées, mais seulement dans le domaine de la sécurité. Cela peut se
6 trouver également dans la garnison et le territoire ou l'institution qui
7 doit se livrer à des activités relatives au contre-espionnage. Ces
8 officiers doivent être autorisés et avoir reçu l'ordre écrit de mener à
9 bien ces activités. Ils doivent, avant tout, se présenter au commandant de
10 l'unité à laquelle ils sont affectés avant de mener à bien leurs tâches.
11 Q. Je vais vous poser une question au sujet d'un exemple dont nous avons
12 entendu parler dans ce procès. Disons qu'un groupe, venant de
13 l'administration de sécurité, arrivait à Vukovar pour accomplir une mission
14 particulière, est-ce qu'il vous est subordonné, est-ce qu'ils reçoivent des
15 ordres de votre part et du commandement de la Brigade des Gardes ?
16 R. Il est superflu que j'interprète cela, mais cela figure dans le
17 règlement. D'après mes souvenirs, nous en parlerons plus tard, un groupe
18 est arrivé. Un groupe d'officiers chargés de la sécurité de
19 l'administration de la sécurité de la 1ère Région militaire. Ils nous
20 avaient été envoyés par les commandements supérieurs. Ils ne pouvaient pas
21 nous être subordonnés. Ils menaient à bien les missions qui leur avaient
22 été confiées par ceux qui les avaient envoyés là. Ils ne pouvaient pas
23 venir dans notre unité ou dans notre zone de responsabilité pour mener à
24 bien des missions s'ils n'avaient pas reçu un ordre par écrit au préalable.
25 Tout au long de cette mission, ils peuvent relayer les instructions
26 de l'organe de sécurité de l'unité dont ils sont originaires. Ils peuvent
27 fournir des lignes directrices sur l'exécution des tâches qui leur ont été
28 assignées.
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1 Q. Merci. Analysons, si vous le voulez bien, l'article 23, qui concerne
2 les rapports entre les organes de sécurité et la police militaire.
3 M. LUKIC : [interprétation] Il s'agit de la page 11, 00920109; page
4 10, en B/C/S.
5 Q. Nous avons entendu des témoignages et nous en entendrons encore
6 davantage concernant la police militaire. Ici, il est dit que les organes
7 de sécurité prennent en charge la gestion technique ou professionnelle
8 d'unités de police militaire. Est-ce que vous pourriez expliquer cela plus
9 concrètement et en des termes plus simples ?
10 R. Cette question est expliquée en détail dans l'instruction relative à
11 l'application du règlement de la police militaire, paragraphe 14, où on
12 définit précisément la manière dont un organe de sécurité doit fournir des
13 instructions spéciales ou techniques à une unité de police militaire.
14 Beaucoup de temps s'est écoulé depuis, mais en résumé, d'après mes
15 souvenirs, il s'agit avant tout de rédiger des programmes en vue de la
16 formation des policiers militaires. Ensuite, il s'agit de surveiller
17 l'exécution de ces programmes et la formation de ces unités; la sélection
18 des hommes qui vont composer ces unités de police militaire. Les organes de
19 sécurité, pour leur part, participent également à l'analyse des missions
20 accomplies par la police militaire. Ils essaient d'en tirer des
21 enseignements pour voir comment régler les différentes questions. Par
22 ailleurs, ils s'occupent du contrôle, de l'évaluation, de l'état de
23 préparation au combat des unités de police militaire en même temps que
24 d'autres organes du commandement dont relève l'unité de police militaire en
25 question. Il faut également faire des propositions sur la meilleure manière
26 d'utiliser certaines unités de police militaire dans une mission
27 particulière, donc comment obtenir les meilleurs résultats ?
28 Vous pouvez vous référer, à ce sujet, au paragraphe 14. Pour autant
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1 que je m'en souvienne, voilà les questions principales.
2 Q. Est-ce qu'un organe de sécurité peut donner des ordres à un commandant
3 de la police militaire conformément aux différentes dispositions que vous
4 avez analysées et rappelées ? Vous étiez membre de la police militaire;
5 vous étiez également un organe de sécurité, donc vous pouvez nous parler de
6 tout cela.
7 R. Pour qu'un organe de sécurité puisse effectuer ses tâches essentielles
8 dont j'ai déjà parlé, il doit toujours garder à l'esprit qu'il doit éviter
9 toute forme de commandement lorsqu'il donne des ordres ou confie des
10 missions. Un organe de sécurité doit être une mère pour tous les membres de
11 l'unité. Son comportement est celui d'une mère. Il ne peut pas s'agir de
12 commandement. Le règlement ne prévoit pas cela.
13 Si un organe de sécurité estime qu'une unité de police militaire doit
14 être utilisée dans le cadre d'une mission particulière, l'organe de
15 sécurité doit tout d'abord élaborer un plan sur les objectifs à accomplir.
16 Les effectifs qui doivent être impliqués, en l'occurrence la police
17 militaire, tout cela est ensuite présenté au commandement pour qu'il donne
18 son autorisation. Si ce dernier donne son aval, le plan est mis en
19 application. Ils peuvent prendre autant d'hommes que nécessaire et s'en
20 servir dans le cadre d'une mission relevant directement de la compétence de
21 l'organe de sécurité.
22 M. LUKIC : [interprétation] Pourrions-nous examiner l'article 48, page 19
23 et 20 en anglais, page 16 en B/C/S. Ce document se trouve dans le système
24 e-court.
25 Q. Inutile d'en donner lecture du moins pas de l'intégralité du
26 paragraphe. Ma question est la suivante : est-ce qu'un organe de sécurité
27 peut mener à bien des tâches qui ne relèvent pas de sa compétence directe ?
28 Est-ce que cela est prévu par le règlement ?
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1 R. J'ai entendu ici de nombreux témoignages où les gens disaient ce qu'ils
2 voulaient. Tout le monde a entendu cela. Mais il y a quelque chose que je
3 souhaiterais signaler à l'intention des Juges de la Chambre et de toutes
4 les personnes présentes dans le prétoire, c'est que la JNA était une
5 institution sérieuse. Les règlements, les dispositions étaient appliqués et
6 jusqu'au démantèlement de notre pays, nous étions une institution sérieuse.
7 N'importe qui ne pouvait pas être commandant au sein de la JNA. Les soldats
8 étaient triés sur le volet, sur la base de leur compétence.
9 Chaque commandant était censé comprendre le travail de ses
10 subordonnés ainsi que le travail mené par les organes de sécurité. D'une
11 certaine manière, il s'agissait d'organes qui effectuaient un travail en
12 partie confidentiel, secret.
13 Tous les commandants et les organes de sécurité savaient qu'un organe
14 de sécurité pouvait mener à bien une mission qui ne relevait pas de sa
15 compétence habituelle mais il s'agissait exclusivement de tâches en rapport
16 avec l'organe de sécurité. Il n'y en avait pas d'autres.
17 Personnellement, en tant que chef d'un organe de sécurité, je n'aurais
18 jamais mené à bien une telle mission si elle ne relevait pas du travail
19 habituel de l'organe de sécurité.
20 Q. Article 57. J'ai quelques questions à vous poser à ce sujet concernant
21 l'administration chargée de la sécurité. Nous en avons parlé. Il y a un
22 chapitre qui traite de ce sujet.
23 M. LUKIC : [interprétation] Article 57; il s'agit de la page 23 en anglais;
24 18 en B/C/S.
25 Q. Deuxième paragraphe de l'article 57, est-ce que vous pourriez nous
26 commenter ce qui est dit là.
27 R. L'administration chargée de la sécurité était une institution au
28 Secrétariat fédéral à la Défense nationale et avait de grandes compétences.
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1 Je n'ai jamais travaillé dans cette administration chargée de la sécurité.
2 Pour ce qui est de ce qui est écrit dans cet article et pour ce qui est de
3 ce que je savais à l'époque, je peux vous dire que leur tâche était
4 d'orienter d'autres organes chargés de la sécurité en dehors de la JNA,
5 comme la Défense territoriale, qui était l'un des éléments des forces
6 armées de la RSFY, concernant les questions importantes liées à la
7 sécurité.
8 Il y a un élément très important dans le fonctionnement de l'organe chargé
9 de la sécurité. S'il travaille avec les collaborateurs et probablement,
10 selon le principe de compétence des unités sur un territoire donné,
11 l'administration chargée de la sécurité s'occupait de ces questions
12 relevant du réseau de collaborateurs. Je ne m'occupais pas de ces
13 questions, excepté au sein de la Brigade des Gardes. Pour ce qui est de la
14 structure de la TO, je ne m'occupais pas de cela et je ne pouvais pas non
15 plus m'occuper de cela.
16 Q. Pour qu'on soit précis, s'il vous plaît, est-ce que quelqu'un de
17 l'administration chargée de la sécurité aurait pu vous donner des ordres
18 par rapport à la chaîne de commandement ?
19 R. Je vous ai dit que toutes les questions liées au commandement, tous les
20 ordres ayant trait à ces questions m'auraient pu être donnés par le biais
21 du commandant de la brigade.
22 Q. Vous avez mentionné le lien entre l'administration chargée de la
23 sécurité et la TO. C'est l'article 58 qui en parle. Il est écrit dans cet
24 article : au cas de danger imminent de guerre dans des circonstances
25 extraordinaires, cet organe oriente, sur le point de vue des
26 professionnels, les organes de la TO. Est-ce qu'au sein du Groupe
27 opérationnel sud, lorsque vous étiez chargé de la sécurité de la Brigade
28 des Gardes, est-ce que vous avez travaillé sur les organes de sécurité de
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1 la TO à Vukovar au point de vue de l'assistance technique et
2 professionnelle ?
3 R. Vous avez mentionné le Groupe opérationnel sud. Par rapport à ce
4 groupe, je peux vous énoncer d'autres opinions par rapport à ce groupe qui
5 diffèrent des opinions qui ont été prononcées dans cette salle d'audience.
6 Pour ce qui est de la Défense territoriale, nous allons en parler
7 probablement plus tard encore, il n'y avait pas de questions pour
8 lesquelles j'étais compétent. Pour ce qui est de l'assistance
9 professionnelle et la collaboration avec ces organes, pour ce qui est de
10 l'exécution immédiate et directe d'une tâche, pour ce qui est de
11 l'engagement des personnes qui participaient à l'exécution de ces tâches,
12 pour ce qui est du moral des unités qui avaient exécuté ces tâches, c'était
13 seulement pour ces questions que je pouvais donner des instructions à ces
14 organes de la Défense territoriale.
15 Q. Monsieur Sljivancanin, encore une fois je vous rappelle de parler plus
16 lentement.
17 R. Je m'excuse.
18 Q. Quelle était la relation entre les organes chargés de la Sécurité, au
19 point de vue professionnel et technique qui existait au sein des formations
20 provisoires ?
21 R. Ce que je sais et ce que j'ai vécu sur le terrain pour ce qui est des
22 formations provisoires, au sein de ces formations il n'y avait pas de
23 gestion professionnelle par rapport aux organes chargés de la sécurité.
24 L'organe technique qui me donnait des instructions, c'est l'organe chargé
25 de la sécurité du commandement supérieur. En l'espèce, il s'agissait de la
26 personne chargée de la sécurité au cabinet du secrétaire fédéral de la
27 Défense nationale. On va voir cela après dans les documents. Les
28 commandants des unités même s'ils ont été engagés pendant un jour ou 15
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1 jours pour exécuter une tâche précise, ces commandants continuent à avoir
2 des liens avec leurs commandements de base. Vous avez vu que les journaux,
3 les rapports de combat journaliers et réguliers, le commandant de Brigade
4 des Gardes les a envoyés à la 1ère Région militaire à laquelle il a été
5 subordonné pour ce qui est de l'exécution de cette tâche, telle que la
6 tâche consistant à débloquer la caserne à Vukovar, il envoyait au cabinet
7 du secrétaire fédéral de la Défense nationale quotidiennement ses rapports
8 de combat. Cela s'appliquait également aux organes chargés de la Sécurité.
9 M. LUKIC : [interprétation] Juste une correction au compte rendu. La
10 réponse est correcte. Mais ma question était la suivante, à la page 45,
11 lignes 4 et 5 : "Quelle était la relation au sein des formations
12 provisoires ?" La réponse s'est ensuivie.
13 Dans le sens de votre réponse, si le groupe opérationnel représente
14 une formation provisoire - tout le monde est d'accord sur ce fait ici dans
15 le prétoire - à qui du point de vue technique, en tant qu'organe chargé de
16 la Sécurité et à qui est subordonné M. Drago Vukosavljevic, à savoir
17 l'organe chargé de la Sécurité dans la 80e Brigade de Kragujevac pendant
18 qu'elle était au sein du Groupe opérationnel sud ? A envoyaient-ils des
19 rapports ?
20 R. Si on analyse de façon précise les questions concernant la gestion
21 technique, selon les règles et les règlements, on peut voir que, pour ce
22 qui est de l'exécution des tâches, il n'y a pas de formation; il n'y a pas
23 de plans, ni de programmes de formation; il n'y pas de la sélection des
24 cadres; il n'y a rien.
25 Le chef chargé de la sécurité de la 80e Brigade aurait dû envoyer des
26 rapports à son supérieur parce qu'il recevait de lui ses rapports
27 techniques. Les questions concernant l'exécution de la tâche en question,
28 il fallait les discuter avec le commandant de la brigade. Il aurait pu,
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1 nous allons en parler certainement plus tard, il aurait pu donner un
2 avertissement aux organes de la sécurité au sein de la Brigade des Gardes
3 concernant les questions liées à nos unités pour que nous puissions
4 procéder plus facilement par la suite.
5 Egalement, nous aurions pu l'avertir également.
6 Je dois dire que cette unité, cet organe chargé de la sécurité, pour
7 autant que je m'en souvienne, pour la première fois est apparu à peu près
8 au moment où la tâche a été exécutée, quand nous sommes arrivés à Vukovar.
9 Il n'y avait plus besoin d'avoir des contacts avec cet organe pour lui
10 donner des instructions parce que la tâche a été exécutée le 18. Vous
11 pourrez voir dans des journaux de guerre et dans d'autres documents quand
12 et quelle partie de cette unité est arrivée à Vukovar.
13 Q. Qui est supérieur au point de vue technique, l'organe de la sécurité de
14 la 80e Brigade de Kragujevac pendant que cette brigade a été à Vukovar,
15 cela n'a pas été consigné au compte rendu.
16 R. La personne qui est supérieure au point de vue technique, selon les
17 règles du service au sein des organes de la sécurité, qui est supérieur au
18 chef de la 80e Brigade de Kragujevac c'était l'organe chargé de la sécurité
19 du 24e Corps, comme il l'appelait, parce qu'ils faisaient partie de ce
20 corps.
21 Q. De Kragujevac ?
22 R. Je ne sais pas d'où il venait, mais j'ai vu et j'ai lu ici qu'il
23 s'agissait du 24e Corps d'armée.
24 Q. Maintenant, nous allons changer complètement de sujet.
25 Ma question suivante, il s'agit des faits. Je pense que la Chambre et tout
26 le monde dans la salle d'audience savent que les tensions politiques et les
27 changements politiques sont survenus vers la fin des années 1980 et au
28 début des années 1990. Monsieur Sljivancanin, pouvez-vous nous dire quels
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1 étaient les événements politiques en particulier en 1990 et 1991 et quelle
2 était l'incidence de ces événements sur vous, sur les membres de la JNA et
3 sur les membres de votre unité ?
4 R. Je pense que pour ce qui est de tout homme honorable et honnête de
5 l'ancienne Yougoslavie en particulier pour ce qui est des membres de la
6 JNA, cela a été quelque chose qui représentait l'humiliation pour toutes
7 ces personnes et il était presque impensable de voir que de tels événements
8 étaient en train de se dérouler en Yougoslavie.
9 J'ai parlé de ces événements en public toujours et je n'ai rien honte
10 de rien. Parce qu'il était honteux de voir que les jeunes hommes qui
11 avaient 18 ans qui étaient au service militaire obligatoire, qu'ils soient
12 assassinés, étranglés, et cetera.
13 Je crois que vous avez tous vu les images sur lesquelles on peut voir
14 un soldat qui assure la sécurité du commandement à Split qui n'avait pas de
15 balles dans son fusil et qui a été tué et les hooligans qui l'ont tué.
16 En tant que chef de la sécurité, j'avais l'occasion de lire des
17 lettres que les officiers et les soldats ont écrit à l'adresse du
18 secrétaire fédéral de la Défense nationale, les autres ne pouvaient pas les
19 lire. C'était pour la plupart, des soldats de Slovénie et de Croatie qui
20 ont écrit ces lettres. Je sais que les jeunes hommes qui ont étudié à
21 l'académie militaire, à l'académie de la marine à Split ont été étranglés
22 et jetés à la mer. Ils n'osaient sortir de la caserne pour téléphoner à
23 leurs parents, pour aller à la poste pour leur téléphoner. Je sais que les
24 entrepôts de la JNA ont été encerclés, il y avait des sections de cinq ou
25 six soldats qui assuraient la sécurité de ces entrepôts, et même il
26 arrivait qu'ils sautaient en l'air ces entrepôts et eux-mêmes ils ont été
27 tués dans ces explosions pour qu'ils ne tombent pas entre les mains de ceux
28 qui voulaient les tuer.
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1 Q. Ma question suivante concerne les événements politiques. Quel était
2 votre point de vue par rapport au nationalisme de n'importe quelle couleur
3 à l'époque ?
4 R. Ce que j'ai énuméré avant par rapport aux lettres écrites par les
5 soldats et les officiers des républiques de l'ancienne Yougoslavie, de
6 Slovénie et de Croatie. Il y avait de tels phénomènes en Serbie où j'étais
7 en service. Ils nous appelaient "komunjare" parce qu'on portait des
8 insignes de la JNA, l'étoile à cinq branches par exemple, il y avait des
9 conflits verbaux. Il y avait du nationalisme dans les endroits où je
10 travaillais, tous les nationalismes, toutes les manifestations de
11 nationalisme pour moi représentaient quelque chose qu'il faut condamner à
12 tout prix, qu'il faut éviter à tout prix. En particulier les manifestations
13 de nationalisme dans l'endroit où j'étais originaire m'étaient le plus
14 répugnantes.
15 Q. Je pense qu'au cours de la Défense de M. Mrksic par rapport à l'affaire
16 Spegelj et par rapport à l'engagement de certains officiers dans cette
17 affaire, par rapport à cela, je n'ai pas besoin de savoir des détails, ce
18 qui m'intéresse c'est d'analyser les règles par rapport à cette affaire.
19 Est-ce que l'administration chargée de la sécurité aurait pu engager
20 directement des membres de la Brigade des Gardes sur n'importe quelle tâche
21 à exécuter ?
22 R. On a déjà entendu des témoignages là-dessus, ici. L'administration
23 chargée de la sécurité, comme je l'ai déjà dit en répondant à certaines
24 questions avant, a engagé un certain nombre d'officiers de la Brigade des
25 Gardes mais exclusivement par le biais d'ordres écrits envoyés par le
26 cabinet du secrétaire fédéral de la Défense nationale. Ce qui est exact
27 c'est la chose suivante : le commandant, par exemple moi-même, je ne savais
28 pas de quelle tâche précise il s'agissait, mais nous savions que ces
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1 officiers partaient pour l'administration de la sécurité pour exécuter ces
2 tâches et personne n'avait le droit de poser des questions par rapport à la
3 tâche à exécuter.
4 L'officier qui s'occupait de l'analyse des opérations s'occupait de
5 la résolution de certaines questions liées à cette tâche, aux questions
6 liées au contre-espionnage pour ce qui est du territoire de l'ancienne JNA,
7 pour éviter que les unités de la JNA soient la cible de certaines
8 activités.
9 Encore une fois, je souligne que les officiers ne pouvaient pas
10 partir pour exécuter une tâche sans avoir un ordre précis portant sur cette
11 tâche.
12 Q. Est-ce qu'il y a eu des déserteurs de la brigade, si oui, quand y
13 avait-il ces déserteurs et dites-nous ce que vous avez fait par rapport à
14 cela ?
15 R. Quand on a parlé du caractère d'élite de la Brigade des Gardes
16 jusqu'aux années 1990, il était impensable de voir dans la Brigade des
17 Gardes qu'un soldat, encore moins un officier, soit en retard d'une demi-
18 heure ou une heure, pour nous c'était un grave problème. Il n'y avait pas
19 de déserteurs non plus. Encore une fois, l'arrivée dans la Brigade des
20 Gardes se déroulait non seulement selon les règles, mais aussi selon le
21 désir des gens qui voulaient être membres de la Brigade des Gardes. Vers la
22 fin des années 1990 ou au début de l'année 1991, je ne peux pas me souvenir
23 exactement de la date, les premiers déserteurs sont apparus. Les soldats
24 qui ont déserté parmi les premiers, c'étaient les Albanais. Pour moi le
25 plus grand choc, ainsi que pour les autres officiers de la Brigade des
26 Gardes, c'était au moment où les soldats qui étaient Slovènes qui ont
27 déserté. Cela s'est déroulé je pense au début de l'année 1991.
28 Les organes chargés de la sécurité ont réussi à éviter que ces
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1 soldats désertent et qu'ils reviennent au sein de l'unité. Mais
2 immédiatement après, le lendemain, notre commandement supérieur nous a
3 envoyé un ordre selon lequel les soldats qui étaient de Slovénie soient
4 envoyés au service militaire obligatoire en Slovénie.
5 Pour moi, cela signifiait que le démantèlement de la Yougoslavie
6 avait déjà commencé et, en particulier, c'était le moral au sein des unités
7 de la JNA qui a souffert parce que les jeunes hommes se sont posés des
8 questions pourquoi les Slovènes pouvaient aller au service militaire en
9 Slovénie et eux non, et cetera.
10 Q. Encore une question concernant ce sujet lié au climat politique. Quand
11 est-ce que les régions militaires ont provoqué des problèmes par rapport
12 aux soldats qui avaient à être affectés à certaines unités et à la Brigade
13 des Gardes ?
14 R. On vérifiait constamment les cadres qui venaient dans la Brigade des
15 Gardes, surtout quand il s'agissait des effectifs parce qu'il fallait faire
16 attention au fait que choisir un soldat qui assurait la sécurité d'un
17 représentant étranger, ou d'une délégation étrangère, ou d'un dirigeant
18 haut placé, il fallait bien choisir les soldats qui assuraient leur
19 sécurité et la sécurité des installations ou des bâtiments militaires où
20 ils se trouvaient.
21 Je me souviens très bien, lorsque j'ai fait l'analyse des cadres militaires
22 en 1991 et lorsque j'en ai parlé au commandant de la brigade, je me
23 souviens bien que les soldats qui n'avaient pas de compétences avaient été
24 envoyés aux services au sein de la Brigade des Gardes. C'étaient des
25 soldats qui étaient, par exemple, enfants de parents divorcés, qui
26 n'étaient pas de bons élèves à l'école, qui étaient délinquants, et qui
27 n'étaient pas stables au sens psychique. Après, j'ai compris que les chefs
28 des régions militaires qui nous envoyaient ces jeunes hommes de certaines
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1 régions militaires ont fait cela exprès, ces années-là.
2 Q. Il serait peut-être intéressant d'entendre ce qui s'est passé pendant
3 les rencontres d'autres délégations en Yougoslavie au moment où la
4 Yougoslavie a commencé à être démantelée.
5 Maintenant, on va parler de Vukovar. Quand la brigade s'était-elle
6 rendue à Vukovar et quelle était sa mission ? Pouvez-vous nous décrire
7 cela, s'il vous plaît ? Monsieur Sljivancanin, parlez un peu plus
8 lentement. Suivez le compte rendu et essayez d'adopter ce rythme pour votre
9 débit.
10 R. Pour ne pas réitérer cela, il est connu que la Brigade des Gardes a été
11 envoyée avec mission de débloquer la caserne de Vukovar et de créer des
12 conditions normales pour la vie de tous les citoyens de la ville de
13 Vukovar, ainsi que de désarmer toutes les formations paramilitaires.
14 C'était le 30 septembre 1991 que la brigade a été envoyée dans la ville de
15 Vukovar.
16 Q. Est-ce que quelque chose s'est passé pendant le trajet de la brigade ?
17 Quelle était votre destination ? Où êtes- vous arrivés ?
18 R. Pour ce qui était de la tâche comme pour toute autre tâche, le
19 commandant supérieur a donné l'ordre et des instructions, le commandant de
20 la brigade a donné des instructions aux officiers subordonnés. La brigade
21 faisait la marche selon les règles qui étaient en vigueur au sein de la
22 JNA. Je ne me suis pas beaucoup occupé de cela. La marche a continué
23 jusqu'à la ville de Sid sans obstacle.
24 A partir de la ligne de Sid via Tovarnik et Oriolik jusqu'à
25 Negoslavci, il y a eu de fréquentes attaques contre la colonne de notre
26 brigade. Personnellement, j'ai vu tout près du village de Djeletovci que
27 les tirs ont été lancés contre le véhicule au bord duquel je me trouvais.
28 Mon chauffeur, Popovic, au moment où le premier obus a été lancé et a
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1 touché la route en dessous des roues de notre véhicule, a commencé à crier
2 : "Commandant, il vaut mieux qu'on s'arrête." J'ai vu une petite colline
3 tout près de la route. Je lui ai dit : "Comment s'arrêter ? Il faut que tu
4 accélères pour qu'on puisse trouver abri derrière cette colline." Deux ou
5 trois obus ont été lancés.
6 Le combat s'est engagé. Je sais qu'il y avait des blessés. Il n'y
7 avait pas de morts. C'est là où j'ai compris pour la première fois que ces
8 formations paramilitaires appliquent quelque chose comme règle de
9 comportement qu'on a pu voir dans le film sur Spegelj, c'est-à-dire d'abord
10 il faut tirer sur les officiers, après l'armée partira et battra en
11 retraite après avoir vu la mort des officiers.
12 Q. Merci.
13 R. Il faut que je dise la chose suivante : lorsqu'on est arrivés dans la
14 région de Negoslavci, les obus ont été lancés, les obus de mortier ont été
15 lancés sur les unités de la brigade, et je me souviens très bien qu'un
16 soldat qui se trouvait au commandement de la Brigade des Gardes - et ce
17 commandement ou ce QG représentait une unité qui sert de façon directe le
18 commandement pour assurer toutes les conditions nécessaires pour le
19 commandant - ils ont commencé à dresser des tentes dans un jardin pour
20 qu'on puisse dormir. Un soldat qui était Croate a été tué par un obus qui
21 est tombé tout près de cet endroit où se trouvaient ces tentes.
22 Q. Je vous remercie. J'ai une question qui est courte et je vous demande
23 une réponse courte. Où se trouvait le siège de la section de l'organe de la
24 sécurité de la Brigade des Gardes au cours de l'opération de Vukovar ?
25 R. Pendant l'exécution de la tâche à Vukovar, le commandement de la
26 Brigade a déployé le poste de commandement principal au village de
27 Negoslavci et le poste de commandement arrière au village de Berak. Les
28 organes chargés de la sécurité ont été logés dans la région de Negoslavci
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1 dans la maison où se trouvait le commandement principal.
2 Q. Pouvez-vous nous dire qui de vos officiers des organes de la sécurité
3 se trouvaient avec vous pour exécuter la tâche ? Qui parmi vos officiers a
4 travaillé sur quelles tâches ? Leurs noms sont mentionnés devant la
5 Chambre.
6 R. A Belgrade, deux officiers chargés de l'organe de la sécurité sont
7 restés pour exécuter la tâche. Pour ce qui est de ma tâche à exécuter à
8 Vukovar, avec moi sont partis quatre officiers de l'organe chargé de la
9 sécurité. Après le 5 octobre, j'ai reçu encore un autre officier de
10 l'administration chargée de la sécurité, qui était mon adjoint pour ce qui
11 est du contre-espionnage.
12 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner leurs noms, leurs grades et les
13 fonctions qui leur avaient été attribuées ?
14 R. Je suis allé à Vukovar pour m'acquitter de cette tâche en tant que chef
15 de la sécurité.
16 La personne qui était mon adjoint à l'époque pour les affaires de la
17 police militaire, le commandant Ljubisa Vukasinovic, il faut savoir qu'en
18 même temps, il s'occupait du 1er et du 2e Bataillon de la police militaire
19 pour ce qui est de la sécurité.
20 Il y avait donc le capitaine première classe --
21 L'INTERPRÈTE : Un capitaine première classe dont l'interprète n'a pas saisi
22 le nom.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] -- qui s'occupait de la 2e Brigade ou du 2e
24 Bataillon motorisé pour ce qui est de la sécurité et du détachement
25 d'assaut à Vukovar.
26 Le capitaine Borce était là également. En temps de paix, il
27 s'occupait de la sécurité du 1er Bataillon motorisé. Etant donné que l'un de
28 mes organes de sécurité ne pouvait pas fonctionner du fait de certains
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1 problèmes, j'ai donné à Karanfilov le poste de commandement arrière et les
2 unités de l'arrière-garde.
3 Il faut également savoir qu'il y avait un officier de permanence,
4 Momcilovic, qui s'occupait également des services de contrôle au poste de
5 commandement.
6 Q. Qu'a fait cet officier ?
7 R. A l'époque, au sein des organes de sécurité de la Brigade des Gardes,
8 il n'y avait qu'un officier formé, le capitaine Karanfilov, qui avait
9 terminé sa formation pour les officiers de sécurité. Moi-même ainsi que le
10 commandant Vukasinovic et Srecko, nous étions aux organes de sécurité, mais
11 à la veille de l'opération Vukovar, nous n'avions pas terminé la formation.
12 J'ai demandé des instructions au cabinet du chef d'état-major du secrétaire
13 fédéral chargé de la Défense nationale. Nous avons eu Mladen Karan qui a
14 été affecté à notre unité. Il était le capitaine de première classe qui
15 nous a été affecté et il a été nommé mon adjoint pour tout ce qui faisait
16 partie du contre-renseignement. Il est venu à Vukovar, si je ne m'abuse, il
17 est venu après le 6 octobre.
18 Q. Est-ce qu'il y avait des officiers qui s'occupaient de la sécurité qui
19 également étaient attachés ou détachés auprès des bataillons motorisés ? De
20 quel type de personnes s'agissait-il et comment est-ce qu'ils étaient
21 subordonnés à votre groupe ?
22 R. Pour ce qui est de formation en temps de guerre et en temps de paix,
23 les différents bataillons motorisés de la Brigade des Gardes avaient un
24 officier de la sécurité qui venait des forces de réserve.
25 Je me souviens avec certitude qu'un officier qui répondait au nom de
26 Stanisic a été mobilisé. Il est venu au bataillon y travailler comme
27 officier de sécurité pour le bataillon et il n'était subordonné qu'au
28 commandant de ce bataillon. Il prenait contact avec moi pour ce qui était
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1 de la protection et du contre-renseignement. Il résolvait tous les
2 problèmes au niveau du bataillon.
3 Pour ce qui est des autres unités, t j'entends les bataillons de la
4 police militaire, il n'y avait pas d'officiers de sécurité pour ce qui est
5 des structures de guerre, alors que pour ce qui est du 2e Bataillon, je
6 pense que cet officier n'est pas venu. Il n'a pas répondu à l'appel.
7 Q. Monsieur Sljivancanin, est-ce que vous pouvez nous dire quelles sont
8 les tâches de base dont s'est acquitté votre groupe pendant l'opération de
9 Vukovar ?
10 R. La mission essentielle de notre groupe pendant l'opération de Vukovar
11 était la mission dont j'ai déjà parlé. Cela se fondait sur le règlement et
12 les règles de service. Toutefois, sur le terrain, il faut savoir que cela a
13 un peu été étoffé et développé. Voilà en quoi cela consistait.
14 A ce moment-là, du fait de la propagande et de tout ce qui se passait
15 vis-à-vis de la JNA, il a fallu créer en quelque sorte les conditions pour
16 que toutes les délégations qui arrivent dans cette zone où il y avait des
17 opérations de combat, pour que toutes ces conditions, disais-je, soient
18 créées, il fallait désarmer les paramilitaires, il fallait faire en sorte
19 que le verrouillage des casernes cesse. Puis, il y avait tous les
20 journalistes accrédités qui venaient. Nous étions censés assurer leur
21 sécurité sans rien leur dissimuler. Il fallait qu'ils puissent voir tout,
22 c'était mon point de vue également; mais il ne fallait pas non plus qu'ils
23 courent des dangers.
24 Ce qui m'a surpris à l'époque et ce qui a eu une incidence pour moi
25 en tant que chef de la sécurité, c'est que le premier jour, nous avons
26 perdu 10 soldats lorsque nous sommes arrivés à Vukovar et nous ne savions
27 pas où ils étaient. Cela s'est passé le 2 octobre 1991, lorsqu'ils sont
28 allés aider leurs camarades dans les casernes, ils ont tout simplement été
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1 portés disparus en tant que chefs de la sécurité et en tant qu'êtres
2 humains également.
3 En tant qu'être humain qui considérait tous les soldats de la Brigade
4 des Gardes et tous les autres soldats comme mes propres enfants, ma tâche
5 consistait à retrouver ces soldats et à leur sauver la vie. C'est la raison
6 pour laquelle depuis le premier moment et constamment, j'ai toujours été
7 sur la ligne de front. Je ne devais pas y être tout le temps, mais j'y
8 étais pour apprendre quels avaient été leur sort et leur destin.
9 Q. Quand êtes-vous arrivé pour la première fois à la caserne de Vukovar ?
10 R. Sur ma propre initiative, si je puis m'exprimer de la sorte, je sais
11 que j'ai présenté mon rapport au commandant et que je me suis présenté à
12 lui, et j'ai essayé d'aller à la caserne de Vukovar soit le 30, lorsque
13 nous sommes arrivés, ou alors le lendemain matin. J'ai souffert de
14 terribles choses, les conséquences pour moi ont été terribles, car j'ai été
15 attaqué par des mortiers. Il m'a été très difficile de poursuivre. J'ai
16 même dû laisser mon véhicule. J'ai dû passer deux ou trois heures assis
17 dans la cave d'une maison. J'ai dû attendre tout simplement une accalmie
18 pendant les combats. Puis, j'ai rencontré le lieutenant-colonel, il
19 s'appelait Rajko Novakovic.
20 D'ailleurs, j'ai vécu quelque chose. Je n'aurais même pas pu imaginer
21 que cela soit possible, car les gens vivaient dans des conditions qui
22 étaient les mêmes que celles dans lesquelles vivaient les soldats dans la
23 caserne. Je me suis également rendu compte que ces jeunes hommes ne
24 voulaient pas quitter la caserne au risque et au péril de leur vie. Ils ne
25 voulaient pas sortir bien que nous leur ayons suggéré de sortir et de venir
26 se rallier à notre brigade.
27 Lorsque je suis revenu, évidemment j'en ai parlé au commandant, et
28 une action a été planifiée pour mettre fin au verrouillage de ces casernes.
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1 Q. Très bien. Peut-être quelqu'un d'autre en parlera, mais j'aimerais
2 savoir combien de jours se sont écoulés jusqu'au moment où ce verrouillage
3 des casernes a cessé.
4 R. Cette action a commencé au petit matin le 2 octobre. Je me souviens que
5 ce jour-là, je suis allé dans la rue Dalmatinska, c'est la première fois
6 que j'ai vu l'un des transmetteurs radio qui étaient utilisés par l'un des
7 membres du ZNG, des forces croates, il y avait en quelque sorte un nid de
8 mitrailleuses dans la rue. Je suppose qu'ils avaient abandonné leurs
9 positions.
10 A partir de ce moment-là, j'ai pu écouter leurs conversations grâce à
11 cet émetteur transmetteur radio et j'ai pu ainsi apprendre qui contrôlait
12 quoi et comment.
13 Q. En tant que responsable d'un organe de sécurité, pourquoi est-ce que
14 vous avez considéré que ce poste radio transmetteur était important, ce
15 poste que vous aviez découvert ?
16 R. Il m'était extrêmement important parce que grâce à leurs noms de code,
17 je pouvais apprendre quelle était la force de leurs effectifs et où leurs
18 effectifs étaient positionnés. D'ailleurs, j'ai même utilisé ce
19 transmetteur radio pour pouvoir parler avec certains de mes anciens
20 camarades qui étaient passés à l'autre camp, des forces paramilitaires de
21 la Croatie, et je me suis rendu compte qu'ils avaient été officiers de
22 l'armée populaire de Yougoslavie. J'ai essayé de les convaincre du fait
23 qu'il ne fallait pas se battre; que jusqu'à hier, nous avions vécu
24 ensemble, nous avions bien vécu; qu'il fallait laisser aux politiciens le
25 soin de voir quel serait le sort à réserver au système sociopolitique de la
26 Yougoslavie; mais que nous n'avions pas le droit de nous tuer les uns et
27 les autres; et que surtout nous n'avions pas le droit de détruire la belle
28 ville que Vukovar était.
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1 Q. Monsieur Sljivancanin, j'aimerais maintenant vous demander de dessiner
2 quelque chose pour nous. J'aimerais vous demander d'indiquer quelque chose
3 sur une carte qui a son importance pour moi ainsi que pour la Chambre de
4 première instance, je suppose.
5 M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais demander à Mme l'Huissière de bien
6 vouloir afficher à l'écran la carte 156. La pièce à conviction 156.
7 Q. Monsieur Sljivancanin, vous connaissez la procédure. Mme l'Huissière va
8 vous aider. Elle va vous donner un stylet. La première chose que j'aimerais
9 que vous nous montriez sur cette carte, si vous le pouvez, d'ailleurs lors
10 de notre préparation avant votre déposition, vous aviez dit que cela vous
11 convenait tout à fait. J'aimerais que vous nous montriez quelle était la
12 zone de responsabilité au sud de Vukovar ?
13 R. La zone de responsabilité du Groupe opérationnel sud était, comme nous
14 l'avons entendu d'ailleurs de la part de l'expert qui en a parlé, avait une
15 certaine limite et une certaine frontière sur chaque côté. Voilà où se
16 trouvait cette zone. Il s'agit de la limite droite de cette zone. Voilà.
17 Le village de Berak ne peut pas être vu. C'est là qu'il y avait le
18 poste de commandement de l'arrière. La limite était le village de Sotin et
19 il y avait ensuite Grabavo. On ne peut pas le voir à cause de la photo. Un
20 peu plus loin vers le village de Berak, vers la gauche, sur la cote 102,
21 pour ce qui est de la route qui rejoint Vukovar qui relie Bogdanovci à
22 Vukovar. Ensuite, vous avez le village de Petrovci, la rivière Vuka et vous
23 avez la rivière qui se jette dans le Danube.
24 Q. Est-ce que vous pourriez nous montrer quelle était la zone de
25 responsabilité du Groupe opérationnel sud ? Quelles étaient les unités qui
26 se trouvaient près de l'unité de la JNA, près de vous ? Quelles sont les
27 unités qui ont participé à cette opération ?
28 R. Le Groupe opérationnel sud a changé de composition constamment car au
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1 départ la brigade motorisée se trouvait là. Elle y était tout le temps.
2 Pendant un certain temps, peut-être cinq à six jours, la 453e Brigade de
3 Sremska Mitrovica était là, je pense qu'ensuite qu'elle s'est retirée de
4 cette zone. Cela s'est fait le 5 ou le 6 octobre. Il y avait la Brigade de
5 Podunavska qui en octobre également est sortie du territoire du Groupe
6 opérationnel sud. Puis, il y avait la 20e Brigade des Partisans de la
7 Défense territoriale qui est arrivée.
8 Le 18 novembre, elle ne faisait plus partie de cela d'après ce que je
9 vois dans le registre. La 80e Brigade motorisée a remplacé la 20e Brigade
10 des Partisans. Le jour où cela s'est passé, à savoir le 18 novembre 1991 le
11 Groupe opérationnel sud, en fait on ne peut pas l'appeler ainsi, parce que
12 d'après les règles, cela n'était pas le cas. La 80e Brigade motorisée est
13 arrivée et un détachement de la Défense territoriale de Vukovar qui
14 agissait de concert avec la Brigade des Gardes est arrivé. Il y avait
15 également le détachement de la Défense territoriale Kragujevac.
16 Il y avait le détachement de la Brigade de la Défense territoriale de
17 Sremska Mitrovica qui a été rattachée à la 80e Brigade motorisée. Puis il y
18 avait ce qu'on appelait le groupe tactique de la 195e Brigade motorisée qui
19 a été rattachée à la 80e Brigade motorisée. Il y avait le 544e Bataillon
20 blindé qui a été rattaché à la 80e Brigade motorisée.
21 M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais intervenir à propos du compte rendu
22 d'audience, page 60, ligne 7. Le témoin a parlé de la rivière Vuka qui se
23 jetait dans le Danube lorsqu'il a dessiné la limite du Groupe opérationnel
24 sud.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Vous avez la rivière Vuka qui se jette
26 dans l'estuaire du Danube.
27 M. LUKIC : [interprétation]
28 Q. A qui appartenait cette zone de responsabilité ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] De l'autre côté de la rivière Vuka, d'après ce
2 que je sais, il y avait les unités du 12e Corps du 1er District militaire.
3 Ils avaient établi un groupe en leur sein mais je n'étais pas là. Je ne
4 sais pas comment ils appelaient ces groupes mais je sais qu'il s'agissait
5 du 12e Corps.
6 Q. Est-ce qu'ils ont été mentionnés comme Groupe opérationnel nord ?
7 R. J'ai entendu lors de dépositions et j'ai vu dans plusieurs documents
8 qui ont été présentés ici que d'aucuns les appelaient Groupe opérationnel
9 nord alors que d'autres les appelaient Groupe tactique nord. Pour ce qui
10 est de leur véritable nom, il m'est difficile de préciser ce qu'il était.
11 Q. Est-ce que vous pouvez mettre le numéro 2, là ?
12 R. Le numéro 2.
13 Q. Là, où se trouvait le Corps de Novi Sad ?
14 R. [Le témoin s'exécute]
15 Q. La limite c'est la rivière Vuka ?
16 R. Je ne sais pas jusqu'où va la limite puisque c'est la rivière Vuka et
17 ce qui suit. Pour ce qui est de notre unité, elle était censée être
18 opérationnelle jusqu'à la rivière Vuka. Vous aviez le Corps de Novi Sad du
19 nord jusqu'à la rivière Vuka.
20 Q. Avant que nous ne le versions au dossier, est-ce que nous pouvons voir
21 la position des gardes sur cette carte ?
22 R. Les unités de la 1ère Division des Gardes étaient à gauche de la 80e
23 Brigade motorisée. Vous aviez le village de Marinci Petrovci, Nustar et
24 puis Vinkovci.
25 Q. Est-ce que vous pouvez mettre le chiffre 3, je vous prie ?
26 R. [Le témoin s'exécute]
27 Q. Merci.
28 M. LUKIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je souhaiterais
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1 que ce document soit versé au dossier ?
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce document sera admis.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction 815,
4 Monsieur le Président.
5 M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais que nous ayons la même carte
6 affichée à nouveau mais sans les indications faites.
7 Q. Monsieur Sljivancanin, si vous le pouvez, je souhaiterais que vous nous
8 indiquiez sur la carte la zone de responsabilité de la Brigade des Gardes
9 et ce qu'on appelait la 80e Brigade Kragujevac pour ce qui correspondait au
10 Groupe opérationnel sud ? Pour ce qui est du 18, 19 et 20, bien sûr.
11 R. Le 18 novembre 1991, la Brigade motorisée de la Garde qui travaillait
12 dans le cadre de cette mission avec, pour autant que je m'en souvienne, le
13 détachement de la Défense territoriale de Vukovar ainsi que le détachement
14 de la Défense territoriale de Kragujevac, cela se situait sur un secteur
15 qui était couvert par le Groupe opérationnel sud. Vous aviez la limite qui
16 était la rivière Vuka pour ce qui est du corps. Vers la gauche, vous aviez
17 la cote 102 à l'exclusion du village de Petrovci. Sur la droite, cela
18 incluait le quartier de Mitnica. Après Negoslavci, il y avait le village de
19 Berak. Voilà quel était le secteur qui était couvert par la Brigade
20 motorisé de la Garde. Pour ce qui est du Groupe opérationnel sud, il
21 travaillait avec les unités qui se trouvaient dans le secteur.
22 Q. Est-ce que vous pourriez mettre un chiffre, je vous prie ?
23 R. Très bien. La 80e Brigade motorisée avec les unités qui lui étaient
24 rattachées sur ordre du commandement du groupe opérationnel, je répète à
25 nouveau qu'il s'agit du Bataillon de Sremska Mitrovica, du 548e Bataillon,
26 vous aviez également le groupe tactique qui venait de la 195e Brigade
27 motorisée. Leurs secteurs à eux étaient ce qui se trouve à gauche de leurs
28 limites, c'était le même secteur que la Brigade des Gardes de Sremska
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1 Mitrovica. Cela n'inclut pas le secteur qui se trouve près de Grabovo et
2 près du village de Berak.
3 Q. Il s'agissait du secteur qui se trouvait à droite de la Brigade
4 motorisée de la Garde, là où il y a le chiffre numéro 2 ?
5 R. [aucune interprétation]
6 Q. Merci.
7 R. Cela, c'était la situation le 18 novembre 1991, dans la mesure où mes
8 souvenirs sont exacts.
9 Q. Très bien.
10 M. LUKIC : [interprétation] Je souhaiterais que cela soit versé au
11 dossier ?
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cela sera versé au dossier.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction 816,
14 Monsieur le Président.
15 M. LUKIC : [interprétation] Pour la troisième fois, nous allons utiliser la
16 même carte. J'aimerais que l'on agrandisse dans la mesure du possible le
17 secteur du village de Negoslavci.
18 Q. Monsieur Sljivancanin, est-ce que cela vous est utile ? Vous savez ce
19 que je veux vous montrer. Est-ce que cette carte vous convient ?
20 R. Oui, tout à fait, si vous voulez que je vous montre les postes de
21 commandement à Negoslavci ?
22 R. C'est exact. C'est notre prochain sujet. Est-ce que vous pourriez, dans
23 un premier temps, nous montrer où se trouvait le commandement de la Brigade
24 des Gardes dans le secteur du Groupe opérationnel sud ? Est-ce que vous
25 pourriez nous montrer et mettre un chiffre ?
26 R. A ce moment-là, nous parlons de la Brigade des Gardes. Il s'agit d'un
27 secteur qui fait 1,5 kilomètres sur 1,5 kilomètres. Dans ce secteur, vous
28 avez tous les autres éléments du commandement. Vous avez la salle
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1 d'opération, l'endroit où se trouvaient les commandants, la salle des
2 transmissions, l'organe de sécurité ? Tout ce qui était du ressort du
3 commandement se trouvait là. Je veux dire que cela avait été déployé à
4 Berak.
5 A Negoslavci, voilà ce qui a été établi suivant l'ordre suivant, dans
6 des bâtiments en dur. Dans l'un de ces bâtiments, je vais faire un cercle
7 autour de ce bâtiment, je vais mettre le numéro 1 à cet endroit. Il
8 s'agissait de la salle des opérations et du poste de commandement.
9 Pour ce qui est de l'organe de sécurité, il se trouvait dans cette
10 maison en face de cette église, juste-là. Je vais mettre le numéro 2.
11 Si vous voulez le savoir, le 9 novembre le commandant a émis un ordre
12 pour que soient établis des commandements dans la ville. En fonction de cet
13 ordre, le commandant Vukasinovic a été nommé commandant de la ville de
14 Negoslavci. Il était situé juste dans cette maison que je viens d'entourer
15 d'un petit cercle. Je vais mettre le chiffre 3.
16 De surcroît, c'est quelque chose que je savais. J'avais des réunions
17 assez fréquentes avec des représentants de la communauté ou des
18 organisations internationales dans une maison où se trouvait le centre de
19 la presse et ce pendant toute la durée des opérations de combat. Voilà,
20 elle se trouvait là. C'est le capitaine Forca qui s'occupait de cela. C'est
21 là que je mets le numéro 4.
22 Q. Bien.
23 R. Ce que je savais à l'époque, il y a quelque chose d'autre que je peux
24 vous dire à propos des autres éléments qui m'aidaient à découvrir les
25 auteurs des crimes. Il y avait l'équipe médico-légale du bataillon de la
26 police militaire, ils se trouvaient tout près avec mon assistant chargé du
27 contre-renseignement. Ils se trouvaient dans un bâtiment qui était juste-
28 là. Je vais mettre le numéro 5.
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1 Pour ce qui est des autres éléments, il y avait l'organe chargé de
2 l'orientation morale ainsi que le juge. Tout le monde était cantonné dans
3 le village de Berak.
4 M. LUKIC : [interprétation] Une petite correction, page 55, ligne 10, le
5 capitaine Zvorcan et non pas le capitaine Forca. Il s'agit du capitaine
6 Zvorcan.
7 Est-ce que nous pourrions verser cela au dossier, je vous prie ?
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce document sera versé au dossier.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 817.
10 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que le moment est opportun pour faire
11 la pause.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Nous allons reprendre à 12
13 heures 45.
14 --- L'audience est suspendue à 12 heures 25.
15 --- L'audience est reprise à 12 heures 48.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic, poursuivez.
17 M. LUKIC : [interprétation] Avant de poursuivre je souhaiterais apporter
18 une correction au compte rendu d'audience. Lorsque l'on a mentionné les
19 officiers faisant partie de l'organe de sécurité en page 55, il y a eu des
20 omissions. Je souhaiterais préciser les choses. Page 55 ligne 6, le témoin
21 a mentionné "le commandant Ljubisa Vukasinovic"; ligne 9, il a parlé du
22 "capitaine de première classe, Srecko Borisavljevic"; en ligne 11, il
23 mentionné le nom du "capitaine Borce Karanfilov"; ligne 16, "Momcilovic";
24 et ligne 25, "Mladen Karan."
25 Q. Monsieur Sljivancanin, s'agissant de ce qui s'est passé pendant les
26 opérations de combat, il y a quelque chose qui, je pense, est tout à fait
27 pertinent par rapport au procès. Est-ce que l'unité de police militaire a
28 participé aux opérations de combat à Vukovar; le cas échéant, quand et
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1 pourquoi ?
2 R. De nombreux éléments de preuve, notamment des documents ont été
3 présentés concernant l'utilisation de ces unités pour lever le blocus de la
4 caserne et en rapport avec les unités paramilitaires. Ce que je souhaite
5 dire, c'est que ces documents ne sont pas des ordres. Il s'agit
6 d'instructions, de décisions prises par le commandant concernant
7 l'utilisation des forces pour mener à bien cette mission. Un ordre
8 militaire est quelque chose de tout à fait différent. Ces décisions sont
9 souvent corrigées par le commandant au fur et à mesure que la mission
10 évolue.
11 Au début, il y a eu la décision initiale du commandant de la Brigade
12 des Gardes. Conformément à cela, une partie des unités de la police
13 militaire ont été rattachées au bataillon motorisé, ce qui, en termes
14 pratiques et conformément aux règlements en vigueur à l'époque, était tout
15 à fait impossible.
16 Comme je l'ai déjà indiqué, la plus petite unité qui comprenait des
17 éléments de la police militaire était la brigade. Toutefois, étant donné
18 qu'il y avait un certain nombre de policiers au sein de la Brigade des
19 Gardes, le commandant avait tout à fait le droit de prendre cette décision.
20 Nous avons analysé la décision en question ici et ce qu'il en ressort c'est
21 qu'au début des opérations de combat, le commandant a donné pour mission à
22 un bataillon, moins une compagnie, d'assurer la sécurité des postes de
23 commandement. Il a décidé de se servir d'un autre bataillon comme d'un
24 bataillon de réserve, par la suite, il s'en est servi pour établir le
25 contrôle sur le territoire. Cependant, comme l'ennemi était bien organisé
26 et que ses effectifs étaient nombreux et qu'ils étaient bien équipés, nous
27 avons été en quelque sorte surpris. Nous n'avions pas reçu de formation
28 pour cela et nous ne pensions pas que nous nous retrouverions dans une
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1 situation où, dans notre propre pays, nous devions combattre nos
2 concitoyens de cette manière.
3 Personnellement, à l'époque, j'étais convaincu qu'il nous suffirait
4 de nous présenter sur les lieux, en notre qualité de soldats et je pensais
5 que toute la population de la ville, quelle que soit son origine ethnique,
6 accepterait notre présence puisque nous étions là pour aider tout le monde
7 et rétablir l'ordre. Mais, ce n'est pas ce qui s'est passé.
8 Dès le premier jour, nous avons subi des pertes importantes dues à la
9 surprise et le commandant a dû réagir par rapport à cela. Il a eu recours à
10 l'unité antiterroriste pour renforcer le 2e Détachement d'assaut et établir
11 le contrôle le long de la rue Sajmiste, au carrefour entre les 1er et 2e
12 Bataillons motorisés.
13 Plus tard, des modifications ont eu lieu et les réservistes ont
14 quitté les rangs de la Brigade des Gardes et nous avons, nous aussi, pris
15 des mesures pour désarmer les volontaires et ceux qui ne respectaient pas
16 la discipline. Le 2e Bataillon de la police militaire a été constitué et
17 déployé le long de la ligne de front où il y avait des combats avec
18 l'ennemi.
19 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire s'il y avait des problèmes en
20 ce qui concerne les officiers. Notamment les officiers de la compagnie
21 antiterroriste, est-ce qu'ils posaient problème ou avec les officiers du 2e
22 Bataillon de la police militaire s'agissant de leur participation active
23 aux combats ?
24 R. Je ne suis pas sûr de pouvoir vous décrire la situation, mais je
25 peux vous en parler. Nous sortions d'une période de paix où nos familles
26 étaient en sécurité et il n'y avait pas de combats. Il n'y a jamais eu
27 d'état de guerre proclamé. Nous avions l'intention de ne faire la guerre à
28 personne. Nous étions sur les lieux, nous avions une mission à accomplir.
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1 Je vous ai expliqué cela. Nous devions préserver la vie de ces jeunes
2 soldats afin qu'ils puissent retourner dans leurs familles. Il était tout à
3 fait inimaginable qu'un Etat, théoriquement en paix, accepte la mort de
4 tous ces soldats. Le comportement d'un officier diffère en temps de paix et
5 en temps de guerre, car il existe un risque, les soldats peuvent être tués.
6 Ce fut le premier problème.
7 Nous avons constaté des signes d'hésitation au sein de cette unité
8 antiterroriste, à ma grande surprise, le problème venait du commandant du
9 1er Bataillon de la police militaire. J'ai noté cela dans mes observations.
10 Je croyais que c'était le fait des activités ennemies.
11 Par la suite, j'ai appris grâce au renseignement que le commandant de
12 cette unité antiterroriste, en plus il s'est confié à moi, avait reçu une
13 lettre de sa femme qui l'a touché de façon négative si je puis m'exprimer
14 ainsi, si bien qu'il se sentait instable. Il commençait à s'inquiéter de la
15 survie de la Yougoslavie.
16 Q. C'était Mladen Maric, n'est-ce pas, le commandant de l'unité
17 antiterroriste ? Je voulais vous poser une question à son sujet. Donc,
18 P0001 ?
19 R. Oui. C'était le commandant P0001, le commandant de la section
20 antiterroriste.
21 Q. Qu'est-il advenu de lui ?
22 R. Mladen Maric, le commandant de la compagnie antiterroriste, a été
23 grièvement blessé en essayant de pénétrer à l'intérieur de la caserne avec
24 son unité afin d'acheminer de la nourriture et de l'eau aux soldats qui se
25 trouvaient là. Il a été le premier à entrer. Il voulait fournir de la
26 nourriture et de l'eau aux soldats qui étaient là depuis quelque temps
27 déjà. Il a été soigné ensuite à Belgrade. C'était vers la fin des
28 opérations de combat, vers la fin de cette mission, il est rentré à
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1 Vukovar, il a rejoint son unité. Je ne me souviens pas à quelle date
2 exactement.
3 Q. Est-ce qu'à un moment donné, il y a eu des changements à la tête du 2e
4 Bataillon motorisé -- ou plutôt concernant le poste du 2e Bataillon de la
5 police militaire ?
6 R. Au bout de la première journée, après l'entrée des unités dans la
7 caserne, le commandant du 2e Bataillon motorisé, c'était un commandant de
8 brigade qui n'était pas apte mentalement à continuer d'exercer ses
9 fonctions de commandement. Il avait besoin d'aide et le commandant a nommé
10 un officier de l'organe chargé des opérations et de la formation, un
11 adjoint devait l'aider.
12 Après l'échec du premier commandant du Bataillon de la police
13 militaire, ce dernier a été muté à l'hôpital militaire pour y être soigné.
14 Jovan Susic, capitaine de première classe a été nommé pour le remplacer.
15 Q. Ceci implique des rapports sur lesquels nous ferons des commentaires
16 plus tard. Est-ce que vous pourriez nous expliquer comment il a été envoyé
17 du 1er Bataillon de la police militaire à Belgrade pour y être soigné ?
18 R. Le commandant du 1er Bataillon de la police militaire était le
19 commandant Branislav Kavalic.
20 Q. Susic l'a remplacé plus tard; c'est bien cela ?
21 R. Oui. Lorsqu'il est parti, Susic l'a remplacé.
22 Q. Est-ce que le chef de l'état-major s'est rendu sur le théâtre des
23 opérations à Vukovar, le cas échéant, à quel moment était-ce et que pouvez-
24 vous nous dire à ce sujet ?
25 R. Le chef de l'état-major de la JNA, le général de Corps d'armée, Blagoje
26 Adzic, a rendu visite aux unités qui se trouvaient dans la zone sud le 1er
27 novembre. Cela figure sans doute dans le registre de la Brigade des Gardes
28 en 1991. Je m'en souviens très bien. Le chef de l'état-major général est
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1 venu et j'ai fait l'objet de critiques à ce moment-là.
2 Si bien que le général Adzic est arrivé au poste de commandement du
3 commandant. Le commandant l'a informé sur la situation dans les zones de
4 combat et sur les principaux problèmes que nous avions. Nos problèmes
5 essentiels venaient de l'ordre émanant du ministère de la Défense de la
6 République de Serbie qui demandait le retour de forces de réserve.
7 Personnellement, tout comme d'autres, je pensais que nous étions une force
8 armée représentant la RSFY et, en tant que telle, nous devions être
9 respectés, mais les choses étaient telles qu'elles étaient. Voilà ce qui
10 s'est passé. Nous avons eu des problèmes avec d'autres unités, des
11 formations qui ne faisaient pas partie de la Brigade des Gardes, et avec la
12 resubordination de certaines unités. J'ai notamment à l'esprit, la Défense
13 territoriale et les volontaires.
14 Après cela, le général Adzic a souhaité rendre visite aux jeunes
15 soldats qui se trouvaient sur la ligne de front afin de voir s'il
16 s'agissait véritablement de combats ou de quelque chose que nous n'avions
17 pas encore connu jusqu'alors. Avant d'aller à Vukovar, j'étais responsable
18 de la sécurité du général Adzic. Avec l'autorisation de Mrksic, j'ai
19 proposé que le général aille rendre visite aux soldats. J'ai veillé à ce
20 que sa sécurité soit garantie et que rien de mal ne lui arrive.
21 J'ai proposé que nous devions réduire le dispositif de sécurité car
22 tous nos déplacements étaient surveillés et on ouvrait le feu sur les
23 véhicules qui se déplaçaient. Le général a accepté ma proposition et nous
24 nous sommes mis en route, moi et les trois personnes qui l'escortaient qui
25 venaient de ce groupe spécial de sous-officiers qui se trouvaient placés
26 sous mon commandement direct.
27 Le général Adzic s'est présenté au chef du cabinet du secrétaire
28 fédéral à la Défense nationale, le colonel Vuk Obradovic. Il m'a accompagné.
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1 J'ai conduit le général à la ligne de front, la caserne, la rue Dalmatinska,
2 le stade Vutek, où se trouvait l'unité antiterroriste. Nous sommes allés au
3 commandement du 1er Détachement d'assaut pour voir le commandant Tesic. Le
4 général a été reçu par le colonel Mrksic.
5 Ensuite, nous avons fait l'inspection d'un certain nombre d'unités
6 relevant du 1er Détachement d'assaut, je me souviens que lorsqu'ils ont
7 appris l'arrivée du général Adzic, de nombreux civils, des femmes et des
8 personnes âgées ont voulu venir afin de l'accueillir et afin de se faire
9 prendre en photo avec lui. Je n'ai jamais demandé s'ils étaient Hongrois,
10 Croates, Serbes. A mes yeux, ils étaient tous sur un pied d'égalité, aux
11 yeux du général Adzic, également. Nous sommes restés dans cette région,
12 dans la zone de responsabilité du 1er Détachement d'assaut, à peu près une
13 demi-heure.
14 Q. Ce qui m'intéresse, c'est la chose suivante - on ne va parler de
15 détails. Vous avez dit que vous avez essuyé des critiques. C'est ce qui
16 m'intéresse le plus.
17 R. Il faut que je vous finisse cette histoire.
18 Le général Adzic est venu aux positions de la compagnie de mortiers 120
19 millimètres du 1er Détachement d'assaut, où il a fini son inspection des
20 unités.
21 J'ai dû écrire un rapport sur cette visite et on m'a adressé des
22 critiques pour la première fois du général Vasiljevic qui est venu pour
23 inspecter les unités plus tard. Il m'a dit que je m'exposais à un grand
24 danger et que je ne devais pas permettre que le général visite les
25 premières lignes de front parce que les conséquences auraient été graves si
26 le général s'était fait tuer, parce que dans de telles conditions, avant
27 d'avoir vérifié toutes les mesures de sécurité, que le chef de l'état-major
28 général se rende sur la première ligne de front. A l'époque, je pensais
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1 qu'il ne s'agissait pas de conflits armés, qu'il s'agissait de la lutte
2 contre les terroristes et contre les formations paramilitaires armées, que
3 le général devait voir les problèmes de nos jeunes soldats.
4 Q. Est-ce que M. Vasiljevic vous a suggéré quoi que ce soit concernant de
5 telles visites à l'avenir surtout les visites des personnes haut placées ?
6 R. En tant que quelqu'un qui connaissait les questions liées à la
7 sécurité, il m'a dit de ne jamais organiser de telles visites, surtout
8 quand il s'agit de très hautes délégations et de très hauts personnages. Il
9 m'a dit qu'il faudrait élaborer un plan auparavant et faire visiter
10 uniquement les endroits qui sont sûrs.
11 Q. Vous avez entendu le témoignage du Témoin P018 qui disait qu'il était
12 dans l'escorte personnelle du général Adzic. Avez-vous des commentaires par
13 rapport au témoignage de ce témoin, parce que vous étiez présent sur
14 place ?
15 R. J'ai entendu différents témoignages ici, mais il s'agit de quelque
16 chose qui n'est pas raisonnable. Le général Adzic avait ses gardes de
17 sécurité qui étaient formés pour être gardes de sécurité. Il y avait un
18 grand nombre de membres de la police militaire dans son escorte, un tel
19 homme n'aurait aucunement pu se trouver dans l'escorte du général Adzic.
20 Q. Il y a quelque chose d'autre qui m'intéresse maintenant, nous allons
21 voir cela dans les documents. Qui était Dusan Jaksic, et ce que vous savez
22 par rapport au fait qu'il a été remplacé par Miroljub Vujevic au poste qui
23 était le sien auparavant ?
24 R. Je sais bien qui était Dusan Jaksic, et j'ai pu entendre son témoignage
25 ici. J'ai été surpris par son témoignage, tout simplement. Mais je sais que
26 les gens peuvent parler de n'importe quoi.
27 Dusan Jaksic, une fois lorsque nous sommes arrivés à Vukovar, il nous
28 a été présenté en tant que commandant du détachement de la Défense
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1 territoriale de Vukovar. Je sais qu'au début, il venait pour assister à
2 toutes les réunions tenues par le commandant du groupe opérationnel,
3 ensemble avec le commandant Borivoje Tesic. Je sais que moi aussi, je
4 recevais les informations du commandant Tesic, et dans l'entretien
5 d'information, l'une des méthodes de travail des organes chargés de la
6 sécurité, c'était cela. Jaksic ne jouissait pas de la confiance au sein de
7 son détachement. Il ne connaissait pas la situation qui prévalait au sein
8 du détachement et il était connu qu'il y avait des cas où les soldats ne se
9 sont pas comportés de façon disciplinée. On savait qu'il était très souvent
10 absent du détachement et qu'il ne connaissait pas du tout le nombre de ses
11 soldats et qu'on ne savait pas du tout où il se rendait parfois.
12 Grâce aux autres employés de l'organe de la sécurité, en collectant
13 des données, nous avons pu apprendre qu'il était en relation avec certaines
14 personnes de ce territoire, avec certaines personnes qui faisaient de la
15 contrebande, il ne s'agissait pas de son implication personnelle dans cette
16 contrebande. J'ai été surpris lorsqu'il a dit que j'ai rédigé un rapport
17 dans lequel son nom -- mais je n'ai pas parlé de lui dans mes rapports.
18 Jaksic venait à plusieurs reprises chez le colonel Mrksic avec Tesic.
19 Ensemble avec Tesic, il lui présentait ses problèmes, et lui-même il a dit
20 l'opinion selon laquelle il n'a pas été prêt à commander les unités se
21 trouvant sur le front. Il a proposé d'être remplacé par quelqu'un de sa
22 formation pendant que les unités exécutaient la tâche de combat.
23 Je me souviens de cela et je sais que cela s'est produit ainsi.
24 Mrksic, en tant que commandant de la brigade, selon les règlements en
25 vigueur, n'avait pas le droit de nommer et d'instituer les commandants de
26 la Défense territoriale, si j'avais consulté son adjoint, à savoir la
27 personne qui était chargée de la mobilisation et du complètement des
28 unités, qui était un homme expérimenté, il lui aurait donné des
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1 instructions dans ce sens-là.
2 J'ai parlé à Mrksic des observations reçues par Borivoje Tesic sur Jaksic,
3 en accord avec Jaksic en personne, avec le commandant Mrksic et le
4 commandant Tesic, il a été décidé - c'est ce que je sais - il a été décidé
5 que Jaksic reste au sein du détachement de la Défense territoriale pour
6 coordonner les activités de la logistique et que les unités se trouvant à
7 la première ligne de front qui exécutait les tâches de combat soient menées
8 par Miroljub Vujevic, son chef de la 1ère Compagnie de la Défense
9 territoriale à l'époque, et c'était ainsi jusqu'à la fin de l'exécution de
10 la tâche.
11 Ce qui s'est passé plus tard, je n'en sais rien, à savoir je ne sais pas si
12 un ordre écrit est apparu sur la nomination ou la destitution de qui que ce
13 soit. Je crois qu'il est clair que ce que Jaksic a dit ici, je ne me
14 défends pas en disant cela, que moi en tant que chef chargé de la sécurité,
15 ne pouvais pas et n'avais pas le droit de les remplacer. Je ne me suis pas
16 occupé de l'analyse des données sur Jaksic et ce qu'il a dit. Ici, il ne
17 s'agit que de ses propres observations à lui-même. Il en connaît peut-être
18 plus sur tout cela.
19 Q. Dites-moi qui est Boro Bugunovic et dites-moi ce que vous savez sur
20 lui.
21 R. Je sais qu'à l'époque, Boro Bugunovic aurait été ministre au sein d'un
22 gouvernement, comme il l'appelait, la Région autonome du Srem oriental. Ils
23 ont proclamé eux-mêmes cette région. Je n'y croyais pas à l'époque et je ne
24 respectais pas cette décision parce qu'à l'époque, il y avait l'Etat de
25 Yougoslavie, et pour moi, c'étaient les lois yougoslaves qui étaient en
26 vigueur et à appliquer. Il y avait des républiques et il y avait des
27 municipalités. Je n'ai jamais entendu parler de tel gouvernement à
28 l'époque, mais lui, il s'est présenté comme étant ministre au sein de ce
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1 gouvernement.
2 Q. Ministre de quoi ?
3 R. De l'Intérieur. J'ai reçu des données, des données selon lesquelles il
4 faisait de la contrebande et le trafic d'armes.
5 M. Bugunovic, je l'ai appelé à un entretien d'information. Comme il
6 habitait le village de Negoslavci, j'ai appris où se trouvait sa maison. Il
7 ne voulait pas répondre à ma convocation. J'ai informé le commandant là-
8 dessus et on m'a permis d'envoyer les membres de la police militaire pour
9 qu'ils l'amènent à cet entretien d'information.
10 Il est venu à cet entretien d'information, on a fouillé sa maison et
11 on a trouvé des armes, les armes qui lui, en tant que civil, ne devait pas
12 posséder. J'ai écrit le rapport lié à la sécurité et je l'ai adressé au
13 chef du cabinet chargé de la sécurité du secrétaire fédéral. J'ai reçu sa
14 réponse avec des instructions à suivre.
15 Lors de cet entretien d'information, j'ai demandé à M. Bugunovic à ce
16 qu'il se présente quotidiennement à mon organe chargé de la sécurité, mais
17 il a quitté ce territoire et je ne l'ai plus jamais revu à Vukovar jusqu'à
18 la fin de l'exécution de la tâche. Après, j'ai appris qu'il était à Novi
19 Sad et à Sid, mais nous avons quitté ce territoire et comme cela, je ne
20 l'ai plus jamais rencontré.
21 Q. Nous allons analyser certains documents, à savoir vos rapports. Avant
22 de commencer à analyser cela, pouvez-vous dire à la Chambre si et comment
23 vous avez envoyé des rapports et à qui également et quelles étaient les
24 correspondances entre vous et d'autres organes chargés de la sécurité ?
25 Est-ce que ces autres organes chargés de la sécurité vous auraient envoyé
26 des documents, et si oui, lesquels ?
27 R. J'ai eu deux façons pour faire mes rapports à ma disposition. D'abord,
28 aux réunions du commandement, de façon régulière, j'ai fait rapport au
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1 commandant pour ce qui est de toutes mes observations liées à la sécurité
2 dans la région contrôlée par la Brigade motorisée de la Garde. C'était
3 toujours lors de ces réunions et également à d'autres occasions, si c'était
4 important et si le commandant m'avait appelé à lui faire rapport.
5 Il s'agissait des informations ayant trait au contre-espionnage. J'ai
6 envoyé des informations concernant l'émission de contre-espionnage au chef
7 chargé de la sécurité du cabinet du secrétaire fédéral de la Défense
8 nationale. Plus tard, au moment où le général Aca Vasiljevic est arrivé à
9 Vukovar, il a demandé à ce que les informations que j'écrivais à l'adresse
10 du chef de la sécurité du cabinet du secrétaire fédéral de la Défense
11 nationale, qu'une copie soit envoyée à l'administration de la sécurité pour
12 gagner du temps, pour ce qui est de ces informations. J'ai envoyé de telles
13 informations également à l'administration de la sécurité.
14 Ces informations, je les ai envoyées parfois tous les jours, parfois une
15 fois en trois jours et une fois en deux jours. Cela dépendait de
16 l'évolution de la situation et des informations qui étaient à ma
17 disposition.
18 Q. Vous receviez des informations et des instructions de qui, par rapport
19 aux organes de la sécurité, par rapport à ces informations techniques, de
20 nature technique ?
21 R. Pour ce qui est des tâches des unités et pour ce qui est des événements
22 survenus dans la Brigade des Gardes, c'est le commandant qui me parlait de
23 cela lors des réunions. Mais pour ce qui est du contre-espionnage, je
24 recevais exclusivement des informations et des tâches du chef chargé de la
25 sécurité au cabinet du secrétaire fédéral de la Défense nationale, ce que
26 nous allons voir ici dans ce document.
27 Q. Est-ce qu'au cours des opérations de combat, vous avez reçu des
28 instructions techniques de l'organe chargé de la sécurité au sein de la 1ère
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1 Armée ?
2 R. Jamais je n'ai reçu de tels documents, et il n'y avait pas de
3 collaboration entre nous par rapport à la sécurité. C'était exclusivement
4 avec les représentants du commandement à Sid que j'ai eu des contacts par
5 rapport à la liste des prisonniers de guerre et des auteurs d'infraction au
6 pénal qui, au cours de l'exécution de la tâche, ont été trouvés jusqu'à la
7 date du 18 novembre. C'est la seule chose sur laquelle j'ai collaboré avec
8 eux.
9 Q. Pourquoi ? Qu'est-ce qui se trouvait à Sid à l'époque ?
10 R. Pour autant que j'en sache, à Sid se trouvait un commandement ou une
11 partie du commandement de la 1ère Région militaire. A Sid, se trouvait
12 l'organe chargé de la sécurité, ou il s'agissait de l'organe chargé de la
13 sécurité de la 1ère Division de la Garde, je ne peux pas vous dire avec
14 exactitude parce que je n'ai pas assisté à ces réunions. A Sid, se trouvait
15 également un centre d'accueil hors la zone des opérations de combat, où les
16 gens qui étaient suspectés d'avoir commis des infractions au pénal se
17 trouvaient ou ils s'étaient rendus armés dans la zone d'opérations de
18 combat jusqu'au 18 novembre.
19 Le 18 novembre, un ordre a été donné que ces gens ne soient pas menés
20 à Sid, mais plutôt à Sremska Mitrovica.
21 Q. Qu'y avait-il à Sremska Mitrovica à l'époque pour que ces personnes
22 soient menées à Sremska Mitrovica ? Pourquoi à Sremska Mitrovica ?
23 R. Selon ce que j'ai vu dans ces documents et selon ce que j'en savais, à
24 Sremska Mitrovica, il a été formé un camp pour accueillir les auteurs
25 d'infractions au pénal dans la zone où il y avait des opérations de combat.
26 Q. Bien. J'aimerais maintenant que nous procédions à cette analyse que
27 nous allons d'ailleurs répéter plusieurs fois pendant votre déposition.
28 Mais nous allons analyser des documents 65 ter que nous voulons verser au
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1 dossier.
2 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, le premier document que
3 vous avez reçu dans cette liste, il s'agit d'une lettre de l'administration
4 de la sécurité qui porte la date du 3 octobre 1991. Le numéro est
5 3D 050001. Il est indiqué comme document 3D 01 comme document 65 ter. Je ne
6 sais pas si nous pouvons le voir dans le système e-court, je ne sais pas
7 s'il sera affiché à l'écran. Si nous pouvions agrandir cela.
8 Q. Monsieur Sljivancanin, dans un premier temps, dites-moi de quoi s'agit-
9 il et quelle est cette lettre que nous pouvons voir sur l'écran ?
10 R. Nous pouvons voir qu'il s'agit d'un document de l'administration de la
11 sécurité, dans ce document, il est demandé que des informations soient
12 collectées à propos de personnes de la JNA qui ont été faites prisonnières.
13 Dans la deuxième partie du document, il est indiqué que des informations
14 devraient être envoyées à propos de membres emprisonnés du MUP et du ZNG de
15 Croatie.
16 Q. A qui est-ce que ce document a été envoyé ?
17 R. Il a été envoyé par l'administration de la sécurité au chef de sécurité
18 du cabinet du secrétaire fédéral, le chef de la sécurité me l'a envoyé avec
19 une lettre d'accompagnement de sa main parce qu'en fait ce qui commençait à
20 se passer était la chose suivante. Il y a de nombreux soldats de la Brigade
21 des Gardes qui étaient portés disparus et nous voulions savoir exactement
22 où se trouvaient ces personnes.
23 M. LUKIC : [interprétation] Est-ce que nous pouvons considérer ce document
24 comme recevable et le verser au dossier, Monsieur le Président ?
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, cela sera fait.
26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction 818,
27 Monsieur le Président.
28 M. LUKIC : [interprétation] Le document suivant est un document 65 ter. Il
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1 s'agit du document 3D 02. Dans le système, il s'agit du document 3D 05-
2 0003. Il s'agit d'un document manuscrit et M. Sljivancanin va nous fournir
3 quelques explications à ce sujet. Il s'agit en fait d'un rapport de
4 l'organe de la sécurité en date du 12 octobre 1991.
5 Q. Monsieur Sljivancanin, de quoi s'agit-il ? Est-ce que vous pouvez nous
6 décrire non pas la teneur du document mais la forme du document ? De quoi
7 s'agit-il ?
8 R. Il s'agit d'un des rapports de l'organe de la sécurité de la Brigade
9 motorisée de la Garde et vous verrez que le groupe opérationnel est
10 mentionné plusieurs fois ici. Je n'ai jamais au grand jamais reçu, de façon
11 orale ou de façon écrite, des ordres suivant lesquels j'ai été chef de
12 sécurité d'un groupe opérationnel. Je savais que j'étais chef de la
13 sécurité de la Brigade des Gardes. Je ne suis pas en train de vous dire
14 qu'il y a des gens qui mentent mais vous avez mes rapports, voilà les
15 documents, rien de tout cela n'a été inventé. Dans ce rapport, je fais état
16 de l'évaluation de la situation du contre-renseignement. J'indique ce que
17 je sais des unités de la Brigade des Gardes. J'indique ce que mes officiers
18 ont appris, ce que j'ai appris et j'adresse ceci au chef de la sécurité de
19 cabinet du secrétaire fédéral. Il s'agit de l'un de mes rapports. Il s'agit
20 du rapport du 12 octobre 1991.
21 Q. Qui a rédigé ce document et à qui appartient cette écriture en quelque
22 sorte ?
23 R. C'est l'écriture de mon assistant, le commandant Mladen Karan. A
24 l'époque, il était capitaine de première classe. Mon assistant pour les
25 services de renseignement et de contre-renseignement.
26 Q. Pour qu'il n'y ait pas de malentendu, il est dit que le rapport est le
27 rapport du 11 octobre alors que vous avez la date du 12 octobre 1991.
28 R. Je peux vous fournir une explication. Nous l'avons envoyé le 12 octobre
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1 à 9 heures car cela dépendait de la poste des différentes estafettes. Il a
2 été établi le 11 octobre 1991 mais nous l'avons envoyé à la date du 12.
3 Q. Quel a été le sort de ce rapport ? Ensuite, où a-t-il été envoyé ?
4 R. Comme vous pouvez le voir ici ce rapport a été envoyé au chef de la
5 sécurité du cabinet du secrétaire fédéral. Il a compilé des informations.
6 Ces informations, il y en avait certainement qu'il compilait auprès
7 d'autres parties. Je ne sais pas quelles étaient ses méthodes de travail.
8 Je ne les connais pas. Sur la base de tous ces renseignements, il a écrit
9 un petit rapport d'informations qu'il a envoyé à l'administration de la
10 sécurité. Sur la base des informations reçues de notre part, il rédigeait
11 son propre rapport destiné à l'administration de la sécurité indiquant
12 quelle était la situation en matière de renseignements et contre-
13 renseignements dans la zone de la Brigade des Gardes.
14 Q. Nous allons voir d'autres documents. Est-ce que ces documents ont
15 jamais été redactylographiés ?
16 R. Nous n'avions pas toutes les ressources nécessaires sur le terrain.
17 Nous envoyions tous nos rapports rédigés à la main, parfois le chef de
18 sécurité les mettait en annexe à son propre document. Ces documents étaient
19 présentés en pièces jointes à son rapport à l'administration de la
20 sécurité. Parfois, nos rapports étaient dactylographiés à nouveau et
21 envoyés ainsi à l'administration de la sécurité.
22 Q. Je ne voudrais pas trop m'attarder sur ce document mais puisqu'il
23 s'agit d'information qui a été à nouveau dactylographiée sur la base de
24 renseignements écrits à la main, je voulais vous poser la question.
25 M. LUKIC : [interprétation] Je souhaiterais que ce document soit versé au
26 dossier et nous analyserons la teneur de ce document plus tard.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce document sera versé au dossier.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction 819,
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1 Monsieur le Président.
2 M. LUKIC : [interprétation] Le document suivant est le document 3D 05-0018.
3 C'est un document qui porte la date du 13 octobre. Je souhaiterais que ce
4 document soit affiché dans le système électronique, donc 3D 05-- ou plutôt
5 03--.
6 Q. Est-ce que je peux vous demander quel est ce document que nous avons
7 sur l'écran maintenant ?
8 R. Sur l'écran ici, nous voyons un formulaire d'information compilée par
9 les organes de la sécurité de la JNA, plus précisément il s'agit du chef de
10 la sécurité du cabinet du secrétaire fédéral et ce document a été compilé
11 le 13 octobre 1991. Trois copies ont été établies, donc en trois
12 exemplaires, deux ont été présentés à l'administration de la sécurité et un
13 exemplaire est resté dans les archives des organes de la sécurité du
14 cabinet du secrétaire fédéral. Le chef de la sécurité a compilé ces
15 renseignements portant sur des renseignements secrets relatifs à l'état de
16 la sécurité au sein des unités qui se trouvaient dans la zone de
17 responsabilité de la Brigade motorisée de la Garde et ce sur la base
18 d'information précédente que j'avais envoyée le 12 octobre 1991.
19 Q. Merci. J'aimerais maintenant vous demandez de prendre la page 3 de la
20 version B/C/S du document.
21 M. MOORE : [interprétation] Je m'excuse d'interrompre mon confrère ce matin
22 mais je souhaiterais qu'il nous donne la référence de la page exacte de son
23 jeu de documents parce que nous ne l'avons pas cette page.
24 M. LUKIC : [interprétation] Malheureusement, j'ai donné ces documents aux
25 interprètes et je n'ai pas la version anglaise.
26 L'INTERPRÈTE : Indiquant qu'eux non plus n'ont pas la version anglaise.
27 M. LUKIC : [interprétation] La première page, c'est la page 23 de la
28 version anglaise. La première page comporte le numéro 23 et il s'agit de la
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1 page 3 donc c'est la page 26. Le paragraphe commence par, ledit rapport à
2 propos de cas de pillage pendant la guerre. Je vais vous en donner lecture
3 très lentement ainsi tout le monde comprendra les questions que je vais
4 poser au témoin.
5 Est-ce que l'on pourrait remonter la page qui se trouve affichée à l'écran
6 parce que je vais vous donner lecture du deuxième paragraphe et je pense
7 qu'ainsi cela sera plus facile pour les interprètes qui vont faire la
8 traduction à vue du document. Merci.
9 "Le travail des organes de sécurité a permis de faire état de
10 plusieurs cas ou activités de pillage de guerre sur le territoire de la
11 zone des actions de combat de la Brigade motorisée de la Garde. Cela a été
12 commis par des volontaires et par des membres de l'état-major de la TO de
13 Negoslavci. Les crimes mentionnés ont pris des proportions spéciales du
14 fait que ces crimes ont été effectués lorsqu'il y avait des opérations de
15 combat. Ce qui fait que des positions de combat ont été abandonnées et que
16 la force de frappe a été, par conséquent, affaiblie. Les informations
17 indiquent que le pillage a été organisé par Milan Bibic, commandant de
18 l'état-major de la TO de Negoslavci, ainsi que par son associé, Jovica
19 Kresovic. Des mesures énergiques ont été prises pour supprimer les
20 événements mentionnés ci-dessus.
21 "D'après les déclarations de personnes locales, notamment les parents de
22 Popovic Banislav, du 1er Bataillon de la police militaire, Boro Bugunovic,
23 ministre de l'Intérieur de la région du Srem occidental, a vendu des armes
24 à des personnes locales à des prix qui sont compris entre 800 et 1 800
25 marks allemands ainsi que des vivres qui étaient arrivés en tant qu'aide à
26 donner à la population menacée. D'après certaines indications, une partie
27 des armes qui appartenaient à la JNA se trouve en ce moment dans la cave de
28 la maison des Bugunovic et est vendue en coopération avec Bibic qui donne
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1 ainsi à des personnes locales des permis spéciaux."
2 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la question.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'en ai beaucoup parlé de cette personne.
4 Maintenant, nous voyons que d'autres personnes en parlent. Je ne me
5 souviens plus de leurs noms mais je me souviens de ce ministre assez bien.
6 Je dirais que pendant toute notre mission dans la zone, nous avons
7 essayé de faire en sorte que l'ordre public soit respecté. Nous avons pris
8 des mesures pour empêcher les activités de pillage et tout autre délit et
9 crime.
10 M. LUKIC : [interprétation]
11 Q. [aucune interprétation]
12 R. Cela peut se voir dans ce rapport.
13 Q. Page suivante, page 4 de la version B/C/S. Paragraphe 2, si nous
14 pouvons le faire remonter, je vous prie ?
15 "D'après nos informations obtenues par l'organe de la sécurité de la
16 Brigade des Gardes, le capitaine première classe, Muharem Besic, chef la
17 sécurité de la 453e Brigade motorisée, alors qu'il se trouvait dans la
18 région de Negoslavci avec des membres des forces de réserve de la police
19 militaire a donné, de façon illicite, à des civils des permis spéciaux,
20 empêchant ainsi toute utilisation frauduleuse. Les membres de la police
21 militaire qui ont autorisé cela ont traité de façon cruelle les citoyens et
22 ont même commis des assassinats sur la base de leurs propres décisions. Ce
23 qui fait qu'il a été absolument impossible de compiler des renseignements
24 importants."
25 Monsieur Sljivancanin, est-ce que vous pouvez nous dire quoi que ce soit à
26 ce sujet et quelle était votre mission à ce sujet ?
27 R. Cela a été consigné à l'époque. Il est vrai que les organes de la
28 sécurité n'ont pas le pouvoir de protéger quiconque même pas quelqu'un qui
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1 fait partie de leur groupe. C'est chacun pour soi. Ce qui se trouve
2 consigner ici correspond à ce que nous avons appris à l'époque. Cette unité
3 dont le chef de la sécurité était l'homme en question a quitté notre
4 secteur dès le 4 ou le 5 octobre. Nous avons transmis les informations que
5 nous avions aux personnes qui devaient continuer à traiter ces
6 renseignements secrets. Il a eu compilation de plus amples renseignements
7 pour pouvoir procéder à une évaluation afin de déterminer s'il s'agissait
8 tout simplement de bruits qui couraient ou si cela était fondé. Notre
9 mission consistait à transmettre ce rapport. Les échelons supérieurs du
10 renseignement étaient censés vérifier ces renseignements et les confier.
11 Parfois vous pouvez avoir des renseignements fiables. Lorsque vous avez ce
12 travail de renseignements qui est exécuté sur cette base, il nous
13 appartient de mettre un terme à ce travail et de faire état de tout rapport
14 forgé.
15 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que nous méritons une pause et un
16 repos.
17 M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation] Monsieur Moore.
18 M. MOORE : [interprétation] J'aimerais obtenir une précision. Il se peut
19 que je sois dans l'erreur. Est-ce que mon estimé confrère, d'après ce que
20 j'ai compris, est en train de nous dire que M. Sljivancanin est en train de
21 dire qu'il pensait qu'il s'agissait là du seul organe de sécurité pour la
22 1ère Brigade motorisée de la Garde par opposition au Groupe opérationnel
23 sud. Si tel est le cas, si j'ai bien compris ce qui se passait, je ne l'ai
24 pas vu dans mes résumés 65 ter. Je ne l'ai pas vu dans les documents
25 supplémentaires qui ont été donnés. Je ne sais pas pour autant que cela ait
26 été posé comme question au témoin ? Il y a eu trois ou quatre témoins qui
27 auraient pu préciser cela. J'aimerais obtenir une petite précision avec
28 l'aval de la Chambre.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je comprends la même chose que vous,
2 Monsieur Moore. Est-ce que cela est exact, Maître Lukic ?
3 M. LUKIC : [interprétation] Je souhaiterais que ce soit la première
4 question que je poserai à M. Sljivancanin demain. Comment est-ce que lui
5 considère le Groupe opérationnel sud ?
6 Deuxièmement, lors du contre-interrogatoire du témoin Vukosavljevic,
7 je lui avais posé la question et je n'avais pas obtenu de réponse à ce
8 sujet. Je parlais du chef de sécurité de la Brigade des Gardes et comme je
9 parlais du "Groupe opérationnel sud" alors que M. Sljivancanin disait que
10 nous devrions parler de la "Brigade des Gardes". Justement demain, je vais
11 lui demander des explications. Je vais lui demander de nous dire qui
12 s'occupait de tout cela ? C'est le genre de questions qui a été posé au
13 témoin Vukosavljevic, les liens entre le Groupe opérationnel sud et
14 l'organe de sécurité. Ce sont des questions que nous avons posées au témoin
15 sans obtenir de réponses.
16 M. Sljivancanin a son point de vue sur le Groupe opérationnel sud,
17 c'est son propre point de vue. J'allais lui poser ma première question
18 demain matin, parce qu'il faudra peut-être une minute ou deux pour que sa
19 réponse soit donnée. Ensuite, vous comprendrez son point de vue. Il était
20 membre du Groupe opérationnel sud. Il va en parler. Toutefois, il croit
21 qu'il n'était pas le chef de sécurité du Groupe opérationnel sud. C'est son
22 point de vue qu'il vous présentera lui-même.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore, apparemment et
24 visiblement, nous devrons attendre patiemment.
25 M. LUKIC : [interprétation] J'aimerais demander une toute dernière chose.
26 Je souhaiterais que ce tout dernier document soit versé au dossier parce
27 que je ne l'avais pas fait.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous pouvez préciser ?
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1 Comment est-ce que vous décrivez ce document ? C'est un document qui porte
2 la date du 13 octobre d'après ce que je crois comprendre ?
3 M. LUKIC : [interprétation] C'est exact.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] De quoi s'agit-il ?
5 M. LUKIC : [interprétation] Le document qui porte la date du 13 octobre
6 contient un rapport qui porte la date du 12 octobre que vous avez vu
7 préalablement. Il s'agit du rapport manuscrit. Si vous prenez la version
8 écrite, vous verrez que les deux documents sont très semblables. Je voulais
9 juste vous permettre de comprendre comment du point de vue technique, ces
10 rapports sont envoyés.
11 Je l'appellerai les renseignements du 13 octobre présentés par le
12 chef de la sécurité du cabinet du secrétaire fédéral pour la Défense
13 nationale.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cela sera admis.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction 820,
16 Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons lever l'audience jusqu'à
18 demain 9 heures.
19 --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le jeudi 26 octobre
20 2006, à 9 heures 00.
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